BULLETIN
DE LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE.
Deuxi^me S^rie.
TOME PREMIER.
La prcuiiere sei ic dii bullktin sc compose dc viiigt vo-
lumes, et comprend douze annees de 1821 a i833 , inclus, fi-
nissant an 11° 128.
Lcs volumes I, 11, iii dii Rf.cueh, de Voyages et de Me-
sioiRES ont pani ; les tomes iv et v soiit sous presse.
BUREAU DE LA SOCIETE.
[Election die 29 mars i833.)
rresideiit, M. Ic duo Dfcazes, pair Ae France.
,-. , .. \ M. JoMARD , membrc dc rinstitiit.
' ( M. Warden, coirespond.Mit iIc 1 liistitiit.
Si-cn'lairt'. M. de Larenaudi^re.
„ . . \ M. Beautemps BEAi'PRi , membi-e dc I'instiliJt.
I M. llUERNE DE irOMMEUSE.
LISTE DES PR^SIDENS DE LA SOCIETE ,
depuis son niii^iiw, daiia i'vrdr:- de teiir noiumalion.
MM Ic marquis DE I.aplace- MM. IcroniteCnABiiiiLDECRousuL.
le niai c|uis DE Pastoret. le baron (^uvjeh.
le viconite de Chateau- le baron Hyde de Neuville.
BlilAKD le due DE DoUDEAUVlLLE.
leconiteCHABiioL de Voi.vic. J.-B Eyries.
Becquky. Ip comte de RrcNY.
Jcbar'n Alexandre de Hum- Dumont d'Urville.
BOLDT.
CORRESPONDANS ETRANGERS,
dans I'ordre de leiir nojuinalion.
MM. ledoctenr Mease, iPbila- MM. F.-Ant T.okzalez, a Madrid.
delphie. leD'. REl^GANUM, .i Berlin.
Tanner , a Pbiladelpbin. le cap. Franklin , a Londres.
W. WooDBRiDGE , a Boston. le D'. HiciiARnsoN, .aid.
lecapitaine Edward Sabine, le prof. Rafn, a Copeuhagne.
a Londres. _ Ic cap. GRAAH,a Copenba-
le col. Poinsett, aux Flats- gue.
Unis. AlNswORril , a Edimbourg.
le col. d'Abrahamson , a Co- Adr.ien Balbi , a Vcnise.
pe'niiague. Graberg de Hemso , a Li-
le professeur Schumacher , a vouinc.
Altona. Ic in.ijor Long, aux Etals-
de Navarette, a Madrid Unis.
M. CuAPELLiER, notairc lionoraire , tr<<sorier de la sotit'te, rue dc
Seine , n" 6.
M. NoiROT , agent gt'nA'al et bibliolliecaire de la soci(?td, rue de I'U-
iiiTersite , n" 23.
BULLETIN
DE LA S0CI£T]6
DE GEOGRAPHIE.
Deuxidme Serie.
%omc jpifmirr.
^-f < '-^ •' ■' V,o 1
PARIS,
^ 5 I---'
CHEZ ARTHUS-BERTRAND,
LIBRAIRE DE LA SOCIETY DE GEOGRAPHIE,
RUE HAUTEFEUILLF , n" 23.
1834.
COMMISSION CENTRALE.
t:OMPOSITION DH BUREAU.
{ Election dti 27 decembre i833. )
f resident. M. Jomard, membrc de I'lnstitut.
!M. Daussy, ing^nieur hydrogiaphe en chef
de la Marme.
M. le haron Koger , ancien commandant du
S<?iiegal.
Secretaire-ginirol. M. D'Avezac
SECTIOK DE COBKESFOVDAMCE.
MM. Bajot. MM. Jaubeit.
Gulll Barbid du Bocage. Jouannin.
Alex. Barbie du Bocage. C^sar Moreaii.
Bottin. Ambv. Tardieu.
Cadet de Metz. Baron Walckeiiaer.
Coulier. Warden.
Isambert.
SECTION DE PUBLICATION.
MM. Albert Monteraoiit. MM. [luerne de Pommcuse.
Ansart. baron de Ladoiicettc.
Bianchi. de Larenaudiire.
Coraboeuf. Poulain.
Baron Coitai. Roux de Roclielle.
dUrville. .......
Eyries.
SECTION DE COMrTABILITE.
MM Boucher. MM. Chanut.
g^ndral Haxo. Rt'aunie.
Peyticr. ■ . . , .
Tresurier. — M. Chapellier, notaire honoraire.
COMITE CHARGE DE L\ PUBLICATION DU BULLETIN.
MM. Albert-Montemont. MM d'Urville.
Ansait. Isambert.
Guill. Barbit- du Bocage. de Lannaudi^re.
Alex. Barbit? du Bocage. Poulain.
Daussy- Roux de Roclielle.
d'Avczac. Warden.
BULLETIN
WE LA
SOCfETE DE GEOGRAPHIE.
JANVIER l834.
PREMIERE SECTION.
M^MOIRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPPORTS.
Voyages aiitour dti monde, avec des extraits choisis de
voyages dans les mers da Srid et les Oceans Pacijique ,
Septentrional et Meridional, en Chine, etc; entrepris
sous les ordres de rauteur, on sous sa direction, et
des renseignemens siir d' importantes decouvertes faites
deVannee 1792 a Vanme x^Zi , etc.; par Edmund
Fanxing. (i)
Lu a la seance du 8 novembre i833, par M Warden.
Le voyage autour du monde j entrepris par M. Fan-
ning en 1798-99, a hord du navire the Betsey, fut le
(r) Voyages round the world; with selected sketches of Voyage
to the South-Seas, North and South-Pacific Oceans, China, etc.,
performed under the command and agency of the author. Also , in-
(6)
premier de ce genre tente par un navire americain,
sorti du port de New- York. Dans cette longue naviga-
tion , il visita la cote de Patagonie et les lies Falkland,
passa a travers I'Ocean Pacifique aux lies Marquises et a
celles de Washington et decoiivrildeux iles, dontl'une
elevee au-dessus de la mer et d'une grande etendue, I'au-
tre basse et moins considerable; la premiere fut appelee
lie de New- York ^ la seconde He Nexsen^ en I'honneur
du proprietairedu navire qui portait cenom. Par latitude
sud 8° i3', et longitude ouestde Greenwich i4i°3i' (i),
le milieu de I'ile de New- York etait en vue,k 8 lieuesde
distance; la fumee qu'on en voyait sortir dans differen-
tes directions prouvait qu'elle etait habitee.
Le 1 1 juin (1798) on decouvrit les lies de Fanning^
par 3° 5i' 3o" de latitude sud, et iSg" 12' 3o'' de longi-
tude ouest. Celles au nord et au midi avaient chacune 9
milles de long, la troisieme n'avait que 6 milles. Elles
occupaient un plan triangulaire et formaient ime baie
spacieuse avec de bons ancrages. L'abondance de bois,
d'eau potable, de fruits des tropiques, de tortues et de
poisson excellent qu'on y trouve , rendent ce groupe tres
favorable comme point de relache. On n'y apercut
alors aucune trace d'habitation ; cependant lorsque quel-
ques annees apres, le capitaine Donald Mackay toucha
aux iles Fanning, il trouva queiques amas de pierres
disposes dune maniere reguliere et converts dune es-
pece de mousse. En ayant fait deplacer plusieurs et
fouiller au-dessous, on rencontra a deux pieds en con-
formation relating to important late discoveries ; between the years
1792 and i832, etc.; hy Edmund Fannlni-. i vol in-8°, pages ^gg.
New-York, i833.
(i)Toutes les longitudes suivantes sont ^galement rapportees au
meridien de Greenwicli.
{ 7 )
trebas ilii sol, iiii tonibeau en pieire, reiiterniant des
ossemens ainsi que des javelots et pointes de fleches en
OS ou en pierre et des coquillages,
Le lendeniain 12, a 27 lieues nord-ouestpar ouestde
ces lies, on en apercut line autre sous le 4" 4^' de la-
titude; et le 160° 8' de longitude ouest, qui fut appelee
Washington^ en Ihonneur du premier president des
Etats-Unis, n'offrant aucun vestige de poputalioii.
Le i4 juin, M. Fanning decouvrit par 6' i5 de lati-
tude et 162" 18' de longitude, lecueil situe pres de 1 ile
indiquee quelques aniiees apres par le nieme capitaine
Mackay, commandant la goelette hs Freres, sous le noni
de Palmyre. Cette ile, d'environ 3 lieues d'etendue, est
situee sous 5" 49' de latitude et 162° 23' de longitude.
Du cote de I'ouest, les roches de corail s'avancent jus-
qu'a 3 lieues de hi cote ; au nord-ouest il y a un ancrage
a trois quarts de mille du recif, qui tournit 18 brasses.
11 s'y trouve aussi deux, lagunes, dont la plus occiden-
tale offre 20 brasses d'eau suf un fond de sable et de
corail.
Le 4 juillet, on toucha al'iledeTinian , ou sejournait
depnis i3 moisl'equipage dun batiment anglais, appar-
tenant a la Compagnie des Indes, et qui avait charge a
Canton pour Sidney dans la nouvelle Galles; ce navire,
en assez mauvais etat, ayant voulu s'arreter dans cette
Me, avait eehoue sur ses recifs. L'equipage consistaiten
24 individus, dont 21 Iiommes et 3 femmes, savoir : la
veuve du capitaine, son enfant et sa domestique, 6 ma-
telots anglais, 9 Lascars el 1 1 Malais. Le capitaine etait
mort de la fievre. M. Fanning prit h son bord les fem-
mes et les Anglais, laissant los Mal.iis pour veiller a la
siirete de la cargaison , que Swaui de Nantucket, pre--
(?)
mier lieutenant du batiment naufrage, vinl rechereher
einq mois apres.
En quittnnt I'lle de Tinian , Fanning navigua dans la
JHcrde Chine, jusqua Macao, ou il jetal'ancre le i3aout
1798. Le 3o octobre suivant, il remit a la voile etarriva
a New- York le 26 avril 1799 , apres une longue traversee
de 178 jours; retard quil attribue a ce que le brick
qu'il montait n'etait point double en cuivre. Le profit
de I'armateur, dans cette course, fut de 52,3oo iloUars.
En 1800, le capitaine Fanning entreprit de nouveau
le voyage autour du globe, a bord de \ Aspasie ^ navire
construiten forme de corvette et frete a Nevir-\ork,par
une compagnie, pour faire des decouvertes et chercher
des phoques dansles mers du Sud. Dans cette traversee,
il toucha a Fernambouc sur la cote du Bresi! , et se di-
rigeant ensuite au sud , il ne trouva point I'ile de Saoccm-
burg a I'endroit ou elie est sur les cartes et la chercha
vainement pendant trois jours, preuvede sa non-existen-
ce. II fit voile ensuite pour Hie de la Georgienicridionale
et jeLa I'ancre dans la baie de Sparrow, on un bailment
appele le Regnlateur et appartenant au proprietaire de
VJspasie avail fait naufrage depuis quelques mois. En
debarquant, le capitaine irouva les buttes descries et
il apprit pen apres que 1 equipage avail passe a bord
d'un navire anglais, qui leur avail achete la cargaison
consislanl en i 4,ooo peaux de phoques et en ce qu'on
avail pu sauver de 1 equipement et du greemenl du ba-
timent naufrage.
De la baie de Sparrow, Fanning passa a celledes lies
et entra dans le bavre de Woodward, ou il rencontra
un brick anglais, qui a\'ait a son bord un des matclots
du Regulateur. La au moycn des debris de ce dernier
(9 )
navire qu'il avait pu recueillir et dii bois de consti uetion
dont il s'etait pourvu,iI construisit, en cinquante jours,
un bateau de la contenance de 5o tonneaux, a I'aide du-
quel et aussi de I'activite de son equipage, il parvint a
ramasser 57,000 peaux de phoques , c'est-a-dire plus de
la moitie de la cargaison reunie de 17 batiniens venus
dans ces parages , pendant le meme temps et pour le me-
nie objet. Cette chaloupe, excellente voiliere, fut aclietee
pour 120 guinees, par un capitaine anglais, qui remar-
qua a ce sujet , que rien n'egalait i'esprit d^ent reprise et
de perseverance du Yankee. Faisant voile de la Georgie
meridionale , le 8 fe'vrier 1801, r^.9pfl^/e doubla le cap
Horn, toucha aValparaiso pour se refaire, traversa I'ocean
Pacifique, entra dans la rade de Macao, le 2 septembre
suivant, et rentra a New-York, le 4 niars 1802, a vec une
riche cargaison.
Le brick Union , capitaine Pendleton , fut equipe a
New-York, sous la direction de M. Fanning, pour faire
un nouveau voyage de commerce et de decouvertes dans
les mers du Sud, passer dans laNouvelle-HoUande , en
doublant le capde Bonne-Esperance et particulierement
examiner avec soin les iles Crozett.
Arrive au point fixe sur les cartes pour la situation
de ces iles, le capitaine Pendleton n'en trouvant au-
cune trace , se dirlgea vers les cotes de la Nouvelle-Hol-
lande et trouva un bavre commode, avec du bois et de
I'eau , dans I'entree du roi Georges III. De la, il savaiica
jusqu'a I'lle des phoques de Vancouver, ou les veaux
marins etaient devenus si rares, qu il n'en put recueillir
plus de trente. En longeant la cote a lest, le navire fut
pris par une tempete, qui le repoussa au large de quel-
que degresdans une direction S. S. E., eten se dirigeant
ensuite vers le N.E. il se trouva en vue de I'lle de Border
( 'o )
{Borders hland) par 35° 47' delatS. et i36'4i' cVe lotf-
gitude E. de Paris. Cetre ile a deux havres : celui au N.
E. sous 35" 40' de latitude, bien boise et bien npprovi-
sionne d'eau douce, de gibier, de polsson et d'huitres.
La, il construisit avec les materiaux dont il s'etait muni
a boi d, une petite goelette du port de 40 tonneauxavec
laquelle il se rendit dans la baie du roi Georges III, pour
s'assurer si les phoques etaient arrives. N'en ayant pas
rencontre, le capitaine Pendleton resolut de faire voile
pour port Jackson , d;ins laNouvelle-Galles nieridionale,
afin d'aller a la rechercbe des lies qu'on dit avoir ete de-
couvertes par Tasman et d'autres anciens navigateurs,
en attendant la saison favorable a la peche.
Quittant riledeBorder,r6';//(3« entra parl'entbonchure
occidentale du detroit de Bass , quelle traversa sans
carte, ni indication et arriva h Sytlney. Elleexplora en-
suite la cote niv'ridionale de la terre de Van Dieinen et
decouvrit dans ce trajet Tile des antipodes du Sud, 011
se trouvaient beaucoup de phoques. On y laissa un offi-
cier et 11 bommes , pour faire la pecbe, et faute dun
ancrage siu\ VVnion revint a Sydney. Le capitaine con-
clut, dans cet endroit, un niarche avec un negociant
nomnie Lord ^ d'apres lequel il devait consigner a ce
dernier , la cargaison de peaux qui se trouvait a bord el
se rendre aux lies Fejee pour y prendre un cbarge-
ment de bois de sandal destine au niarcbe de Canton.
En execution de cet enirairenicnt V Union mit.i la voile
de Sydney etse rendit a lile de!a Nouvelle-Auislerdani,
ou de Tongataboo , afin de se procurer un de ces insu-
lajres, pailant la langue Fejee et qui put servir d'inter-
prete. Le capitaine descendit a terre a cet effet, avec un
agent de Lord et I'equipage de la cbaioupe; inais ils
furent enloures et massacres (le 1"^ ocl. i8o4) par -les
( '• )
naturels, qui s'avancerent en grand uombre, clans leurs
canots, pour attaquer le navire. Pendant le combat une
femmedecouleurqul se trouvaitdansuncanot, fut re^ue
a herd de \ Union. Cette femme nommee Eliza Mozey
raconta qu'elle etait arrivee dans cette ile sur lebatiment
\eDuc de Portland^ capitaine L. Mellruon, dont I'equi-
page avail ete mis a mort paries insulaires , excepte elle ,
un vieillard, et 4 jeunes garcons. Les naturels avaient ete
pousses a cet acte de barbarie par un blanc nomme
Doyle et un Malais, laisses quelque temps an milieu
d'eux. Mais tandis qu'on croyait le vieillard et les enfans
epargnes occupesa decharger la rargaison, ceux-ci reus-
sirent a se debarrasser de Doyle , firent sauter pardes-
sus le pont les naturels qui se trouvaient sur levaisseau,
couperent les cables et gagnerent la pleine mer, sans
quedepuison en aitentenduparler. Le capilaineWiight
qui prit le commandement de V Union, revint a Sydney,
pour remplacer I'equipage detruit et remit encore a la
voile pour les lies Fejee, ou il vint se briser contre un
rocber. Tout ce qui etait a bord fut noye, ou massacre
par les cannibales.
En apprenant ces Iristes nouvelles, M. Loi'd loua un
batiment et se rendit a I'lle des Antipodes, ou I'ofticier
et les marins laisses par le capitaine Pendleton avaient
ramasse 60,000 peaux de veaux marins. II se les fit i-e-
mettre, se rendit a Canton, ou il e'changea ces peaux
contre des marchandises chinoises, qui! rever.dit aux
Etats-Unis, el dont ii eraporta le prodiiit en Europe,
sans faire aucune part de ses benefices aux propiietaires
de r Union. La partie de I'equipage qui etait restee a 1 ile
des Antipodes fut egalemenl perdue; car apres la re-
mise des peaux entre les mains de M. Lord, ces marins
s'embarquerent dans la petite goelette pour Sydney, ot
depuis en n'en eut plus aucune nouvelie.
( 12 )
Voyage (lit navire la Catherine dans les mers da Slid
et (t la Chine, par le capital ne Henri Fanning , frere de
Vniileiir.
Ce capitaine fit voile de New- York I'annee suivantc,
muni d'instructions pour trouver les lies Croiett. Par-
venu a I'entree du roi Georges III, il se rendit dans les
parages supposes de ces iles, mais sans les decouvrir,
quoique Vapparition de photjues et de divers oiseaux,
ainsi que dautres indices aiinoncassent le voisinage de
la torre. Ayant iaisse quelques homines sous la coiiduite
d'un officier , pour faire la chasse du phoque dans I'ile
du Prince Edouard, le capitaine continua ses recher-
ches , raais toujours aussi infructiieusement; ce qui le
decida a se rendreau cap de Bonne-Esperance, pour y
passer quelques semaines de Ihiver. Apres ce temps de
repos, il reprit la route de I'lle du Prince Edouard , afin
de tenter une derniere fois d'acconiplir I'objet de sa mis-
sion ; et an bout de plusieurs semaines d'une exploration
penible, il parvinta reconnaitre les lies Crozett, a plus
de cent niilles au sud de la latitude ou elles sont
indiquees sur les anciennes carles. Le capitaine donna
a la plus meridionale le nom de New-York; celle a
I'ouest, lie basse et e'tendue en longueur, fut appelee
Fanning; et la plus orientale, elevee et montagneuse ,
recut le nom He Grand Crozett. Ce groupe presente un
Havre traverse , a son entree , par un banc qui pent etre
facilement franchi par les balimens ne tirant pas plus
de dix pieds d'eau. Sur le bord dune baie , on trouve
des phoques par milliers ; le capitaine Fanning en prit
une cargaison , et apres avoir descendu a terre pour
faire se'clier et pr«^parer les peaux, il appareilla pour
Canton.
( i3 )
L'auteur fit, en i8i5, un autre voyage dans les mers
du Sud. Parti de New-York, le 5 juin, sur le navire le
Volontaire ^ il toucha a Port-Louis des Jles Falkland , ou
il construisit una chaloupe du port de trente lonneaux,
qu'il laissasous la garde dun officier et de huit hommes,
charges de prendre les phoques dans ces parages, pen-
dant que le batiment irait faire un chargement de bois
de sandal dans quelque He de I'ocean Pacifique. Pendant
I'espace de trois mois, la partie de I'equipage laissee aux
lies Falkland, se procura, en outre des veaux niarins,
292 cochons sauvages, 98^ oies aussi sauvages, y3 ba-
rils d'oeufs de pingouins ou d'albatros, et 5 barils de
poisson millet.
Apres avoir nian(jue de faire naufrage non loin de
I'endroit ou s'est perdue la corvette francaise VUranie,
le Volontaire entra dans I'ocean Pacifique, en tournant
le cap Horn ] il toucha a I'ile de Masafuero 5 de la , a
Valparaiso pour se ravitailler, et fut oblige de rester
quelque temps a Coquinibo, par I'ordre des autorites
du pays. Des qu'il lui i*jt perniis de lever I'ancre , le
capitaine Fanning continua sa route vers le nord, visita
les lies Lobos, et ensuite celles des Gallapagos. Dans ces
dernieres, on lui fournit 10,000 peaux de veaux inarins
et une grande quantite de tortues. Le navire appareilla
de ces iles, et, retournant vers le sud, toucha a I'lle de
Sainte - Marie , sur la cote du Chili, ou il jeta I'ancre,
et prit a bord plus de i4,ooo peaux. Enfin , apres etre
repasse par les lies Falkland, il I'entra dans le port de
New -York, le i3 avril 1817, apres une absence de vingt-
deux mois. La detention que subit le capitaine Fanning
a Coquimbo lui fit sentir I'opportunite dune force na-
vale dans I'ocean Pacifique , et ses vues , a ce sujet ,
furent adoptees par le gouvernenient des Etats-Unis.
( a)
Voyage du brick Horsilie dans les mcrs du Sud , sous
le comniandemeiit de James P. Slieffield ^ dans le ineme
but ([lie les prece dens.
L'autour de Touvrage que nous analysons posse'dait
une copie exacte du journal du voyage la corvette espa-
gnole AlrevUlas ; il connaissalt la position des lies de
I'Aurore, ainsl que le manuscrit du capitaine Dirck
Ghe?retz^ qui , commandant le navire holiandais Bonnes
Noiwelles .) decouvrit, en 1599, la terre au sud du cap
Horn ; enfin M. Fanning se rappelait aussi que, lors de
son expedition dans la Georgie meridionale, les glares
que Ion avait brisees s'etaient ecoulees vers Test; d'ou
il etait convaincu de I'existence de quelque terra situee
entre les 60" et 65° de latitude S. et 50" et 60" de lonsi-
tude ouest.
Le capitaine et le subrecargue de \Hersdie etaient
charges de faire des observations nautiques : ils devaient
d'abord toucher aux lies Falkland pour refaire I'equipage,
ensuite aller a la recherche des iles de I'Aurore , et es'
sayer d'y faire une cargaison de peaux de veaux marins ;
si ce dernier dessein ne rcussissait pas, ils devaient re-
trograder a I'ouest jusqu'a I'lle de Staten (Staten Island):,
ensuite se dlriger au sud, aussi pres que possible de la
latitude du cap Horn , jusqu'au 63°; de la gagner a lest
pour decouvrir quelque terre; el enfin , s'ils echouaient,
entrer dans I'ocean Pacifique, ouretourner aux iles Fal-
kland ou autres , aux environs du cap Horn.
En conforniite de ces instructions, le brick VHersilie
aborda aux lies Falkland , alia ensuite a la decouverte
de celles de I'Aurore , qu'on reconnut etre au nombre
de liois, elevees en forme de pain de Sucre, niais n'of-
( ^5)
frant aucun point de debarquement, iii meme accessible
a des animaux aniphibies. Des pigeons blancs et quel-
qiies aiitres oiseaux furent les seuls etres aninies qu'on
y apercut. Le brick navigiia autoiir et au milieu de ces
lies, sans lencontrer de recif, exceple un senl, a un
petit millede lilela plus occidentale; celle du milieu est
situee sous le Sa" 58' de latitude S. et le 47° 5i' de lon-
gitude O.
Laissant ce groupe, VHersilie fit voile pour 1 ile de
Staten , afin de laire du bois et de I'eau, et, apres s etre
approvisionnee , se dirigea au sud jusqu'au 60" de latit.
S. ; de la, cinglant a Test, on decouvrit une lie de forme
circulaire et ties elevee , couverte de neige en fevrier,
le dernier mois d'ete de cette region. Cette slngularite
lui fit donner le noin de Bloimt Pisgah Island (lie du
mont Pisgab). Plus loin, on se trouva en vue d'un autre
groupe, qui fut appele lies Fanning ; &n naviguant entre
les deux premieres, le navire entra dans un bavre , ou il
jeta I'ancre, et la crique, dont il formait Temboucbure,
fut uommee Crique Hersilie. Place sur une position ele-
vee, on apercevait une grande etendue de terre a Test,
mais la sason etait tiop avancee pour en permettre
I'exploration. Le brick prit a bord une cargaison de
peaux de pboques de grande valeur, et gagna le port de
Stoninglon , aux Etats-Unis.
I! paralt que ces lies ont ete vues par le capitaine
Smith du brick anglais Guillaume , quinze mois avant
I'expedition de VHersilie^ et appelees par lui les Shetlands
meridionales ; le capitaine americain proposa le nom de
Ghervilz New-Island , en I'bonneur du premier auteuv
de la decouverte J mais la denomination anglaise a pre-
valu sur les cartes.
Tout ce groupe consiste en une cinquantaine d'lleset
( '6 )
ilots, sVtendant (In S.O. an N.-R., cnlre les 6i 6163*^ 1/2
(k> l:ttitucle S. et les 54 el 63° de longitude O. La naviga-
tion y est difficile, la terre rare et n'offrant que de la
mousse pour toute vegetation. Le climat ressemble a ce-
lui de la Georgie meriilionale. Lile de Deception, la plus
au sud, est evidemment d'origine volcanique. Au N.-E.,
dans I'iHterieur de la bale, est le havre appele Port
Yankee, pres lequel est une source d'eau chaude; et le
sable, a quelques verges de distance, est si brulant,
qu'on ne pourrait y laissei' quelque temps la main. Dans
la cavite d'une montagne peu eloignee , on decouvrit
des monceaux de ghice de plusieurs centaines de pieds
de hauteur.
L'annee qui siTn ii le retour de VHersilie , une escadre
de cinq vaisseaux iut rassemblee a Stonington, sous les
ordres du capit:iine Pendleton , de I'etat de Connecticut,
pour un voyage a*x Shetlands meridionales. La flotte
arriva en vue de I'lle de Deception , et jeta I'ancre dans
le havre Yankee (1821). D'une position elevee de cette
lie, et par un temps serein, on apercut directement, au
sud, une montagne ( presentant I'aspect d'uu volcan en
travail), et qui, ayant ete examinee par le capitaine
Palmer, monlant le sloop Hero, de 4o tonneaux, fut re-
connue etre une region montagneuse tres etendue , et
encore plus convene de neige et de glace que les Shet-
lands meridionales. En revenant au port Yankee , le
Hero se trouva enveloppe dans un epais brouillard, entre
ces dernieres lies et laTerre-Ferme ; et quand la brume
se fut dissipee, il e ait au milieu d'une fregate et d'un
sloop de guerre riisse , faisant un voyage de decouvertes
autour du monde. Le capitaine Palmer iiiforma Ic com-
modore de I'existence dun grand continent au sud de
( ^7)
Ja latitude ou ils se trouvaient. Ce dernier officier Im
donna le nom de Terre tie Palmer, (i)
Dans la s iison nautique suivante (1821 — 22), le capi-
taine Pendleton etant retourne au havre Yankee, deta-
cha M. Palmer sur le sloop James Monroe^ de 80 ton-
neaux, afin d'examiner la nouvelie terre. En naviguant au
sud, cet officier trouva I'acces des cotes defendu par les
glaces; il prit alors a lest, el approcha dans quelques
endroits jusqu'a un miile, tandis que dans d'autres, il
fut oblige de se tenir a plusieurs milles de distance. Pen-
dant les mois de decembre et Janvier, qui forment le
plein ete dans cet hemisphere, le capitaine Palmer par-
courut 1 5 degres de cotes, depuis le 64° jusqu'au 49" de
de long. O. — par 61" ^i' de latitude S. II decouvrit un
tletroit, qu'il appela Detroit de Washington^ et dans
lequel il penetra. Apres uiie lieue de navigation, il arriva
A une baie magnifique, qu'il nomma Baie Monroe^ et au
bout de laquelle etait un havre commode , qui recut le
nom de Havre de Palmer. Le capitaine y jeta I'ancre, et
s'aventura a terre avec une partie de son equipage; mais,
apres avoir visite la cote, et meme Tinterieur du pays a
quelque distance, on n'apercut aucune trace de vegeta-
tion, si ce n'est de la mousse; toutes les montagnes
etaient couvertes de neige, a I'exception de quelques
pics noiratres.
Voyage de la goeiette Pacifique dans les mers du Sud ,
sous le commandement du capitaine James Brown.
Parti de Portsmouth (New Hampshire) le i*^"^ octobre
1829, il relacha , le i4 novembre, aux iles du cap Vert
(l) Dans le Voyage du capitaine Jf/orel/ {pa^e Cy ) , il est dit par
erreur que cette terre fut nominee Noiiveau Groenland miridional par
le cipitiiine Tolmson.
( i8 )
pour prendre tlos provisions, rl fit voile pour la Geor-
gic ineridionale , ou il arriva le 29 decenihre suivaiit.
Lc Pacifique quilta cette ile le 5 mars (i83o) charyo de
256 lourrures de loutre de mer et de 1800 "alloiis
d'huile. Se trouvant, le Sdecenibre suivant, par latitude
S. 56 lb', et longit. O. 28" 35', on decouvrit une ile
non nu'ntionnee sur aiicuiic carte , de deux luillcs de
eircouference , tort eievee an dessus du niveau de la
mer, et qui, par un temps clair, peut etre vue a trente
niillcs de distance. Le capitaine Brown la nonima lie dc
Potter. Qua tre jours apres (le 12 decembre) une autre
ile tut apercue,du centre de laquclle il s'elevait conti-
nuellenieut une colonne de fumee a une hauteur de
huit cents pieds environ. Elle etait couverte de neigc et
de glace. Les parties interieures presentaient une couche
profonde de lave , dont plusieurs masses epaisses se de-
tachaieiit et flotlaient aux environs. Cette ile, qui fut
appelee lie des Princes , offre deux points de debarque-
nient abordablcs; elle a cinq milles de long du N. O.
an S. E., et est situee sous le 5^° 55' de lat. S. et le
27" 53' do long. O.
Le 22 decendjre, on se trouva encore en vue dune
nouveile i!e, sous le 57° 49 t'e lat. S. et 27° 38' de long.
O;, ayant six milles en longueur du N. O. au S. K. , et
presentant le meme aspect que la precedente, mais n'of-
frant aui un ancragc. On peut I'apereevoir a cinquante
milles au large par un ciel serein; elle recut le nom de
lie de II illey. Etilin une qiiatrieme He fut decouverte
le jour de Noel i83o; d'ou elle fut appelee lie de Noel
(Christmas Island); elle est a egale distance des iles de
la Chaiideleur et de Montague, mais plus a louest que
I'nne et lautrt-. Au reste , toulcs ces lies n'oiliMieiit pas
la moindre espece de vegetaux. i*-'
( '9 )
Les plus grandes inontagnes de glace apercues pai
le Pacijiqiie furent sous le 58° 18' de lat. S. Quelques-
unes avaient trois a qiiatre milles de long, deux milles
de large, et deux a trois cents pieds de haut, aplatles
au sonimet. I/equipage qui se trouvait dans la chaloupe
avait souvent a so defendre centre les tigres de nier
(probablenient une espece de walrus); on tua un de ces
animaux, qui avait dix huit pieds de long.
Tableau de di verses iles recemment decoiivertes , et qui ne
so/It pns generalement indi'quees sur les cartes.
lie de Pike (^Pilce's island). Lat S. , 26'' 19' ; long. O.
(de Greenwich), 10 5° 16'. Decouverte en iSog.
lie de Ducie ( Ducie's island). Lat. S. , 24'' 26' ; long.
0., i24» 37'.
Groupe de Mitchill lyMitchilVs group). Lat. S. ,9° 18' ;
long. E. , 179" 45'. Decouvert par le capitaine Barrett,
commandant le navire V Indcpendance , de Nantucket.
Ce groupe est habite.
lie Rocheuse ( Rocky island). Lat. S., 10° 4^'; long. E.,
179° 28'. Decouverte par le meme.
• He de Swain [Swain's island). Lat. S. , 59° 3o'; long.
O., 100" (par approximation). Decouverte par le capi-
taine Swain, de Nantucket, en 1800 j frequentee par
une grande quantite de veaux marins.
lie de Tuck [Tuck's is/and). Lat. N. , 17°; long. E. ,
iSS". Tres basse et peuplee.
lies de fVorth [Worth's islands). Lat. N. , 8" 45'; long.
E. , i5i" 3o'. Au nombre de cinq.
Recifs de Tuck vi bancs de rochers, au nombre de
neuf, par 6" 20' de lat. S. et 139'' 3o' de lon^f. E.
Recifs de Rand'lei [Pmiid)ler's reefs). 1" par lat. N.,
2.
( '-^o )
2 1" 45'; long. E. , lyS^ 12' 2" par lat. N. , 23° 29', et
long. E., 178° i3'.— 3° par lat. N , 23" 3o', et long. E.,
i38"3i'. Ces ecueils ont ele signales par le capitaine
William Worth, second du Rambler, deNanlucket,dans
I'annee 1829.
lie fie Jcjferson [Jefferson s island). Lat. N. , 18" 27';
long. O. , 1 1 5° 3o'. Decouverte par un batinient parti de
Salem, le 8 avi'il 1826.
lie de Gardner {^Gardner's island). Lat. S. , 4° 3o ;
long. O. , 1^4° 22'.
He dcCnJJin {Coffin s island).L,at. S., 3^1° i3 ; long. O.,
178'' 54'.
Grande lie de Gange {^Great-Gange's island). Lat. S. ,
ID" 25' ; long. O. , 160° 45'. He habitee.
Petite lie de Gange {^Little Ganges island) Lat. S.jio";
long. O. , i6i". Egalement peuplee et a])on(lant en co-
cotiers.
Ces quatre dernieres iles ont ele decouvertes par le
capitaine J. Coffin, du navire /e Gange, sortit de Nan-
tucket. Les habitans se montrerent bienveillans et em-
presses a fournir des noix de cocos, etc.
I/e Inconnne [Unknown island). Lat. S, , 5° ; long. O. ,
i55° 10' ; d'euviron 10 niilles en longueur sur 2 de lar-
geur. Cote herissee de rochers.
lie Reaper [Reaper's island). Lat. S. , 9" 55'; long. O.,
152° 4o. He basse, boisee et peuplee ; decouverte par le
capitaine Coffin, en 1828.
Groupe d' Iles [Group islands). Lat. S., 3i°25'; long.
O. , entre 129° 27' et i3o° i5'. Decouverte par le capi-
taine J. JVlitchel, en i823.
Recifde Lancaster [Lancaster's reej). Lat. S., 27" 2';
long. O. , 146" 27'. Sf'teridant I'espace de 6 milles du
( a. )
N.-E. au S.-O. ; signale par le capitaine Weeks, de New-
Beclt'ord, en i83o.
J/e Oeno (Oeno island). Lat. S., 23" 5y' ; long. O. ,
1 31° 5'. A environ 8o milles N.-O. par N. tie celle de
Pitcairn. Un brisan dangereux saillit de son extremite
nieridionale. Decouverte par le capitaine G.-B. Worth,
du navire I'Oeno, de Nantucket.
Ecueil inconnu (^Unknown reef). Lat. N. , 2-7° /\(i' \
long. O. , 174" 56'. Rochers a lleur d'eau et bancs de
sable, ou firent naufrage, le 26 avril 1822, le vaisseau
la Perle , capitaine Clarke, et r Hermes, capitaine Phil-
lips. Les equipages se sauverent et resterent deux mois
sur ce recif, en attendant qu'on vint les rechercher.
Smitt-Face-lsland. Lat. S., 6" 16' ; long. E. , 177° 19'.
lie Parker. Lat. S. , 1° 19' ; long. O. , 174" 3o'.
lie de Brown {Brown s island). Lat. S., 18° 1 1'; long. E.,
175° 48'- Ces trois dernieres decouvertes appartiennent
au capitaine Flasket, montant VIndependance, de Nan-
tucket, qui les fit en 1828.
Ilede Chase {Chase's island). Lat. S., 2° 28' j long. E.,
176".
He de Lincoln {^Lincoln's island). Lat. S., i" 5o' j long.
E., 175".
lie de Brind {^Brind's island). Lat. N. , o" 20' ; long, E..
174°.
lie Dundas {Dundas island). Lat. N., o" 10'; long. E.,
174° 12'.
Les quatre lies qui precedent ont ete decouvertes par
le capitaine Chase, du vaisseau Japan^ de Nantucket,
en 1827 et 1828.
Rocherde Nixon [Nixon s rock ). Lat. S., 40" , long. O. ,
57° 36'. Selevant a 6 pieds au-dessus de i'eau, ets'eten-
( '^2 )
daiit au N.-E. de la loiij^ut;iir dun cable. Signale par le
capitaine Dixon, de V Ariel.
lie de In Nonvelle-Deconverte {New-Disco{>eTy island).
Lat. S., 15" 3i ; long. E. , 1 j6 ii'. Habitee, et decou-
verte par le capitaine Hunter, du navire le Carmelite.
He Falelte {^Faletta island). Lat. S. , 2i" 2' ; lonjr. E. ,
long. E., 1 33' 1 3'. Det'ouverte par le capitaine Philips,
le 10 juillet 1825.
Rocher de la Baleine (Whale rock). Lat. S. , 5i° 5i'.
long. O., 64" 3 2'. Juste a fleur d'eau, el couvert dune
grande quantite de sel niarin.
Rocher de I He de Gardner ( Gardner s island rock ).
Lat. N. , 25° 3'; long. 0., 167^40'. D'environ un mil!<; de
eirconterence et i5o pieds de haut.
ReciJdAllen{Allens reef). Lat. N., 25° 28' ; long. O.,
O I
170 20.
Ces divers ecuei's turent decouverts par le capitaine
J. Allen, sur le navire Mara, de Nantucket, en 1821.
Groupe de Stcirhiick ( Siarhuck's group). Lat. , sous Te-
quateur; long. E. , 173" 3o'.
lie de Loper (^Lopers island). Lat. S. , 6° 7' ; long. E.,
177° 40'.
Brisan dangereux [^Dangerous reej). Lat. S. , 5° 3o';
long. O. , 175°.
lie de Tracy ( Tracy's island ). Liit. S. , 7° 3o' ; long. E.
178° 45'.
Noiiveau-Nantiicket [Neiv-Nantucket). Lat. N., o"i i' ;
long. O. , 176° 20'.
He de Granger {^Granger's island). Lat. N., 18" 58' ;
long. E., 146" 14'.
^ Ces six dernieres iles ont ete decouvertes par des ba-
tiniens baleiniers de Nantucket, de 1820 a 1826.
He et Groupe de Fisher. Lai. N. , 26" 3o'; long. E. ,
( ^3 )
141° i'- Decoiiverl p;ir le navin; anglais le Transit , ca-
pitaine J.-J. Coffin, ie 12 septenibre 1824. Le capitaine
Coffin a donne des details siir ces lies, ({nil (lit etre au
nombre de six, outre un grand nonibre de bancs et de
recifs. Entre file Fisher, la plus grande de ce groupe
(ayant 4 lieues de long du S, S. E. au N. N. O. et lile
de Kidd, qui en est la plus occidentale, il y a une baie
vaste et linipide de 2 milles en largeur sur 5 niilles on
longueur. En y naviguant,on decouvrit une autre pe;itc
anse commode et a I'abri de tons les vents, excepte de
10. S. O. , et ou le navire jeta I'ancre sur i5 brasses
d'eau. EUe recut le nom de Havre, de Coffin. Cette baie
fournit de lean en abondance et de la meilleur qualile ,
ainsi que du poisson excellent. Les tortues et les pigeons
y sont en quantite innombrable.Ces lies sont couvertes
d'arbres niagnifiques, sur lesquels on ne decouvrit au-
cune marque ou entaille qui put faire croire a la pre-
sence de riiomme sur ces rivages; enfin on n'y apercut
ni quadrupede, ni reptile, ni insecte -d'aucune espece.
Ce groupe offre un point de relache tres favorable pour
les baleiniers, ainsi que pour les navires allant de Canton
a Port-Jackson ou sur la cote N. O.
Groupe de Covell, compose de i4 iles, et situe sous
4" 3o' de lat. N. et 168" 4^' d« ''^"g- E. Decouvert par le
capitaine H. Covell, montant la barque I' Alliance , le
7 mai i83i. Ce groupe est peuple.
W.
( 24 )
Memoires sur Cancienne Geographic historiijue des pays
voisins de la Meditet ranee.
Lu» .i la Societe de Gtiographie, dans ses S('ances du 4.
du i8 octobre et du 8 novembre i833.
PAR M. ROUX DE ROCtlELLE.
Jtalie.
L'ltalie , ou se renferma long-temps la republique ro-
niaiiie, est separee du reste de I'Europepar les cimes des
Alpes, qui embrassent les provinces du nord cornine une
large ceinlure. Une autre cliaine de montagnes nioins
elevees parcourt cettePeninsuledans toute sa longueur:
ce sont les Apennins. La longue plaine qui las' separe
des Alpes et ou viennent s'ouvrir les nombreuses vallees
du nord de 1 Italic, est baignee par les eaux de I'Eridau
qui recoil le Tesiu , I' Adda, le Mincio, le Tanaro et la
Trebie, illustree par la victoire d Annibal : I'Adige
situee au nord de I'Eridan , se jette conime lui dans
I'Adriatique. Ce sont les plus grands fleuves de Tltalie ;
inais le Tibre en est le plus fameux ; et Ion est lente en
etudiant la geograpbie d'un grand peuple, de fixer les
rangs des lieux par leur celebrite.
Les vallees et les plaines qui s'etendent au pied des
Apennins, soit vers la Mediterranee, soit vers I'Adria-
tique, ii'ont pas assez d'etendue pour que cette partie
de l'ltalie puisse avoir de grands lleuves. L'Arno, le Ga-
rigliano, le Vulturne sont, apres le Tibre, les principa-
les rivieres qui se rendent dans la Mediterranee : L'A-
( 25 )
tlriatiquen'en recoit aucune d'aussi considerable j le Me-
taure, le Tiferne , TAufule ne doivent leur celebritequ'i
I'histoire; et le Rubicon neserait rien , si Jules Cesar ne
I'avait pas franchi pour changer le sort de Rome et de
la terre.
Considerons sous d'autres rapports les differentes par-
ties de cette contree, et voyons ce quelle tut a diverses
epoques, afin d'y suivre avec plus de fruit la niarche des
peuples et le cours des evenemens.
On peut partager I'ltalie ancienne en trois grandes
divisions : au midi est la Grande-Gr^ce , ainsr noaimee
des colonies grecques qui vinrent s'y fixer; au centre
sont les regions dont se composa d'abord la republlque
Roniaine; nous trouvons au nord les nations Aborige-
nes et les etablissemens des Gaulois Cisalpins.
Quelques geographes ne coniprennent sous le noin
de Grande-Grece que la Lucanie et le Brutiuni, mais on
peut y joindre la Campanie et I'Apulie.
Les principaux peuples du Brutium elaient les Ld-
criens et les Crotoniates ; ceux de la Lucanie etaientles
Sybarites : Grotone leur fit la guerre; et Sybaris etait
deja detruite, long-temps avant la conquete d.i Brutium
par les Romains. Ceux-ci fonderent plusieurs colonies
dans cette contree ; la plus reniarquable etait celle de
Regium, situee sur le detroit de Messine, et destine'e
a maintenir les cominunic;itions de I'ltalie avec la Sicile.
Naples, Capoue, Salerne, etaient les premieres villes
de la Campanie. Cette region. Tune des plus tertiles de
I'ltalie, fut aussi I'une des plus peuplees : on I'habite
jusqu'au pied du Vesuve , et sur la cendre meme des
villes qu'il a detruites : Virgile y a place ses enfers et
ses champs Elysiens.
L'Apulie etait occupee par les Dauniens, les Pence-
( 26 )
tiens, les Calabiais, Itjs Mossapiciis , les Saleiitiiis et les
petip'es df Tarciite. Ces clerniers fiirent les plus puissans,
les plus ri(;hes, les plus leniarquaLtles pai' leur resistance
aux Roniaius. Cetait au port tie Brutulusiuni,siiue vers
renlree de 1 Adriatique, qu'on s'embarquait ordinaire-
nient pour la Grece : Jules Cesar en partit pour aller
vaincre a Pliarsale; Vlrgile y debarqua a son retour
d'Atlienes, pour aller niourir a Naples.
Les champs de Dioniede, situes pres de I'AuIide, rap-
pellent que Ion faisait remontercetle colonie jusqu'aux
temps de la prise de Troie : la bataille de Cannes se
livra dans les memes plaines, et 1 on trouve,en s'elevant
vers les montagnes, le territoire de Venusinm, ou se tor-
mina la guerre contre Spartacus.
L'ltalie cenlrale comprend ces pcuples nombreux,
contre lesquels Rome eut a lulter pendant plusieurs
siecles. Si Ion se borne a les classer par regions, on
Irouve le Latium, le pays des Samnites, i'Etrurie , I'Om-
brie et le Picenum : chacun de ces teriiloiresreiifermait
plusieurs peuples que I'histoire des premiers siecles de
Rome a rendus celebres.
Dans le Latium, les Rutules s'etaient opposes les
premiers a I'etablissementd'Albe, d'oii les fondateurs de
Rome devaient sortir ; et les Latins, les Herniques, les
Volsques, lui firent long-temps la guerre.
Les.Sabins, lesy^ques, les Marses, voisins des Sam-
nites, avaient avec eux une commune origine , et ils
occupaient ensemble la chaine des Apennins; nations
tortes et belliqueuses, qui,apres avoir resiste a Rome
avec energie, devinreut les premiers appuis desa gran-
deur. Les Vestins, lesPelignes, les Marucins, les Fren-
taniens, etablis entre les Apennins et I'Adriatitjue, des-
eendaient egalement des Samnites.
( ^7 )
L'Etruiie forrtiait, vers les premiers temps de la re-
publique roniaiiie, une confederadon de douzt; cites ^
dont chacune avait des magistrats ou des rois. Les cites
les plus remarquables etaicnt celles de Florence, d'Are-
tium, de Ciusium, de Yidsinii, de Tarqiiinii , de Falis-
que et de Yeies. La desunion de cette ligue rendil 1 E-
Irurie plus facile a vai'icre; niais les moyens de siege
etaient alors si foibles, que, pour s'emparer de Veies ,
il fallut dix annees,
L'Ombrie, le P.cenuin , ne renfermaient aiicune cite
remSrquable ; les colonies de Spolete et d'AiKone y ki-
rent etablies depuis.
Les plus importantes nations du nord de I'ltalie etaient
les Liguriens, les Insxibriens, les Veneles etles Gaidois.
Les Liguriens, places entre les Alpes Cottiennes, le i^o
et la Mediterranee, se partageaient en plusieurs Iribus.
Les plus nombreuses occupaient, sous le nom gene-
rique deVagienni, la Ligurie occidentale : elles etaient
separees par le cours de la Macia des Liguriens Apuani
qui s'etendaient entre I'Arno et la chaine des Apennins.
Genes, Albenga, Portus Veneris etaient les principaux
lieux de la Ligurie.
LesSegusiens , les Tauriniens ^ les Lisubriens avaient
pour limitesTEridan, le lac Majeur et les Alpes : Turin ,
Milan , Pavie , destines a acquerir un jour plus desplen-
deur etaient au noinbre de leurs cites.
Entre le lac Majeur, le P6, les Alnes et I'Adiiatique
s'etendait !a Venetie. Les Euganeens , les Cenonianes ,
les Carniens, leslstriens faisaient partie de cette nation.
Altinuui, Aquilee, Padoue, exislaient : Venise ne s'ele-
vait pas encore du milieu des eaux.
Differens peuples, dont les iionis rappellent leur ori-
gine gauloise, etaient repandus entre le P6 , les Apen
liins el Ic* lionlieri'.s de lOiubrie el du Piceniiiii : cV-
taient les Lingones , les Boiens , les Senonais, veiius des
regions de Langres, de Botirges et de Sens. Leurs tribus
formaienl les postes avances de la Gaule Cisalpine, i[u'i
fut long-temps pour les llomains une ennemie d'aiitant
plus redoutable, qu'elle pouvait aisenient recevoir des
secours de la Gaule Celtique.
Tous ces peuples d Italia perdirent successivement
leur independarice; c't,a mesure qu'ils f'urent eriges en
provinces roniaines, leur existence changea : ils recurent
la langue et les lois du conquerant, et leurs anciens
nonis s'effacerent.
Cherchons a recueillir encore ces antiques souvenirs,
et en parcourant les annales de cette contnie, dont
tous les anciens niaitres ne disparurent que pour faire
place a leur vainqueur, rappelons d'abord la lutte qui
s'engage entre Rome naissante et les pays qui I'environ-
nent. L'ltalie etait alors morcelee en un grand nombre
d'etats; mais chacun deux etait une puissance redou-
table pour une vilie qui s'elevait a peine. Rome a re-
cours a la violence pour se peupler , aux arnies pour
conserver les feinmes qu'elle a ravies, et sa premiere
alliance est conclue avec les Sabins qu'elle avail outra-
ges.
Des nations belliqueuses , mais souvent divisees, lui
font la guerre pendant trois cents ans : elle attaque on
resiste sans relache , montre une male Constance dans
les revers,et attend toujours la victoire pour conclnre
la paix. Sa politique liabituelle est de ne pas avoir
plusieurs ennemis a-!a-f'ois: elle combat tour-a tour les
yEques, les Herniques, les Veiens , les Volsques, les
Samnites; chaque guerre lui vaut des conquetes , et
lout le centre de l'ltalie est soumis a ses armes. Sa pru-
( ^9 )
dence lui conseillait de ne point trailer en siijets les
peuples vaincus : ils deviennenf. menibres de la cite :
les droits des nouveaux Romainssont les niemes;et ces
nombreuses acquisitions de citoyens donnent a lEtat
iinaccroissenient de forces, a I'aide duquel il tentera de
noiivel'es entreprises.
Au nord des possessions romaines etaient les Etrus-
ques, et au-dela de TEtrurie, les Gaulois , dont les
armes avaient conquis les belles regions qui forment le
bassin de I'Eridan : ces deux ennemis etaient les plus
redoutables. Porsenna vint porter la guerre jusqu'aux
rives du Tibre, et Brennus s'enipara de Rome long-temps
apres : mais les desastres niemes de ce peuple lui inspi-
raient d'heroiques vertus. Le courage de Codes, la
Constance de Scevola contre la douleur, decident le roi
d'Etrurie a conclure la paix : Maniius et Camille , deja
vainqueur de Veies , deviennent les defenseurs de
Rome contre les Gaulois : les Romains, humilies aux
fourches Caudines par les Samnites, sont releves par
Quintus Fabius : bientot ils attaquent les peuples de
Campanie, d'Apulie, de Tarente : Curius Dentatus ar-
rache an roi d'Epire le fruit dedeux victoires, et le force
a regagner ses etats : toute I'ltalie inferieure est sou-
mise, et la premiere guerre punique est engage'e.
Ici , le tbeatre des bostilites va s'etendre , et Rome
porte ses forces hors de I'ltalie. Duillius se signale par
une premiere victoire navale : Regulus, vaincu pres de
Carthage, devient plus grand dans les fers : Lutatius
dicte enfin la paix a ses ennemis, et les Romains s'eta-
blissent en Sicile. Bientot ils sont maitres de la Sardai-
gne et de la Haule-Italie ; mais la seconde guerre pu-
nique doit changer le sort des armes , et la gloire de
Rome palit devant Anni])al.
. ( 3o )
La posterite a retenu les nonis clu Tesin, de la Tre-
ble , de Tiasiinene, ou Annibal Cut vainqueur, el celiii
de Cannes, d'oii !»;consulTerentius Varron nes'echappa
qu'avec queltpies debris de larmec roniaine; inais elle
garde aussi la niemoire de Fabius, qui sauva la patrie
en teniporisant, et de Marcellus, qui, apres la jouinee
de Cannes, arreta devant jNola l<^s vainqueurs, les af-
faiblit en llalie, en Sicile, et leur enleva Syracuse: elle
a surtout consacre la gloire dii premier Scipion 1 Afri-
cain. Ce heros forca les Carthaginois a rappeler x^nnibal
aleur secoftrs, el tennina la soconde guerre punique
par la victoire de Zama.
Des ce moment, les iorces de Home deviennent for-
midables a toutes les nations etrangeres. Philippe, de
Macedoine est vaincu par Flaminius : un autre Scipion
abaisse et detruit la puissance d'Antioclnis, roi de
Syrie : lEtolie, I'Epire, la Macedoine , dont le dernier
joi e.et enchaine au char triomphal de Paul Emile,
deviennent des provinces romaines : Carthage va toiu-
ber sous les coups dun troisieme Scipion; et, le jour
meme de sa ruine, Mummius detruit Corinthe , dernier
boulevard du Peloponese.
La guerre parcourait tons les rivages de la Mediler-
ranee, et Rome etaitpartout victorieuse. Elle ramenait
sous sa domination la Lusitanie , on yiriate s'etait
soutenu pendant cincf ans contie les legions, et ou il
peril assassine ; Scipion Emilien semparait de Nu-
mance , depeuplee par la guerre, par la iamiiie, et sur-
tout par le desespoir des habitans, dont la plupart s'e^
taientdpnne la mort; \es Romains penetraient dans la
Gaule, comme allies des Marseillais conlre les Salyens,
ou des Eduens, contre les Arvernes et .1,^ Allobroges;
ilss'etablissaient en Provence , remo;ntaient les rives du
Rhone, et penetraiciit clans la Gaule NarJjonnaisej Ma-
rius attaquait en Afriquo Jugurtlia , avant tie venir coni-
battre vers les Alpes les Teutons el les Cinibres ; et la
guerre oii coninienca la fortune cle Sylla eclatait contre
Mithridate.
Que n'est-il possible d'etemlre iin voile sur les san-
elanles annales decesiecle! Les chefs des armees roiiiai-
nes ne cherchent plus leurs erinemis vers les froiilieres
de la republique : la guerre civile est allumee; les pro-
scriptions commencent, et les plus illustres letes toni-
bent sous la hache des licteurs ou des assassins. Bientot
la revoke s'etend : Sertorius prend les armes en Espa-
gne : la mer est infestee par des pirates : Spartacus, a la
tete des gladialeursetdesesclaves, attaque la puissance
romaine; et Ponipee, qui consomme partout la ruine
des ennernis, deja vaincus par d'autres generaux, Pom-
pee, qui termine la guerre de Milhrida'.e , et que la fa-
veur popnlaire a porte aux plus grands honneurs, voit
un competiteur plus habile heriter de son credit et de sa
gloire.
Arretons-nousa cette epoque. La republique romaine
est expirante et va s'aneantir dans les plaines de Phar-
sale. Cesar est nomme dictateurj la mort I'arrete quand
il a'lait regner; mais Octave, Antoine et Lepide succe-
dent a son autorite : le triunivirat , d'oii Octave est sorti
vainqueur, fait placea renipire d'Auguste; ellerechre-
tienne qui commence sous le regne de ce prince, nous
offre un nouveau point de depart, d'ou nous pourrons
nous avancer, a travers les siecles de la grandeur et de
la decadence de I'empire , jusqu'a I'epoque de son de-
membremenl. .
( 3a )
lies du bassin occidental de la Meditcrranec.
La forme triangulaire de la Sioile, dont les cotes se
terminent aux trois proniontoires de Pelorum, de Pa-
chynum et de Lilybee, lui fit donner autrefois le nom
de Trinacria. Cetle lie fut peuplee par une colonie de
Sicules, qui arrivalent d'llalie : les Grecs y fonderent
Syracuse, Messine et d'autres villes; lesCarihaginois y
fonderent Lilybee.
De frequentesguerres eclaterent entre les Syracusains
et les Carthaginois, qui partageaient entre eux la Sicile,
Elles comniencereiit sous Gelon, prince de Syracuse,
qui lionora ses victoires en contraignant Carthage a re-
noncer aux sacrifices humains : elles attirerent quelque-
fois dans cette ile des armees alheniennes qui venaient
y soutenir la cause des colonies alliees. Denys-le-Tyran,
eut avec Carthage des guerres malheureuses ; mais Ti-
inolcon affaiblit par ses victoires cette puissance rivale :
il fit jouir sa patrie d'un long repos; et quand la guerre
vint a se ranimer, Agathocles en porta le theatre en
Afrique , et dicta aux Carthaginois les conditions de la
paix.
L'ambition qui avait conduit en Italic Pyrrhus, roi
d'Epire, lui fit tenter une invasion en Sicile : il y fut
tour a-tour vainqueur et vaincu , et il ne laissa aucunc
trace de son passage.
Mais la revoke d uneannee d'avenluriers quis'etaient
enipares de Messine, et que I'histoire a designes sous le
nom de Mamertins, attira bientot en Sicile un peuple
plusredoutable. Hieron, roi de Syracuse, s'etait uni aux
Carthaginois contre les Mamertins; mais ceuxci avaient
les Romains pour alli«»s; etAppi us Claudius, venant a lour
( 3;^ ) •
secours, l)altit successivement les troupes de Syracuse
et de Carthnge, qui les assiegeaient dans Messine. 11 al-
lait attaquer Syracuse, lorsqiie Hieron , pour sauver
cette ville, rompit subitenient avec les Carthaginois :
tous les efforts de la guerre purent alors etre diriges
contre eux.
Les Romainss'emparerent d'Agrigente, premiere place
(1'armes des Carthaginois. lis prirent Hippana, Mittis-
trate, Caniarina, Enna; Asdrubal fut vaincu pres de
Panornie par L. Cecilius Metellus; et C. Lutatius bat-
tit pres de Lilybee une flotte carthaginoise , cornmandee
par Hannon.
La guerre durait depuis viiigl-deux ans : elle avaitetc
melee de succes et de revers 5 niais cette vicloire decisive
la termina. Les Cartliaginois dont les ressources etaient
. epuisees demanderent la paix; ils abandonnerent aux
Romains tmites leurs possessions de Sicile, et I'Archipel
silue entre cette i!e et I'ltalie.
Les dangers dont Syracuse etait alors menacee par le
voisinage des Romains fujenl detournes par Hieron ,
qui eut la sagesse de maintenir la paix; niais son succes-
seur selant declare pour Annibal pendant la seconde
guerre punique, Marcellus debarqua en Sicile avec une
armee romaine , et s'illustra par le siege et la prise de
Syracuse , ou peril Archimede. La conquete de cette
place entraina celle du royaume entier, et la Sicile de-
yint une province romaine.
Les principales iles , situees dans le vaste bassin qu'en-
vironnent la Sicile , I'ltalie, la Gaule, I'Espagne et I'Ar
frique sont la Sardaigne, la Corse et les lies Baleares.
La Sardaigne s'etail d'abord partagee entre trois peu-
plades, lesCorsi, les Balari, les Valenlini. Ces noms in-
diquaient une communaute d'origino avec les habitans
■5
• (34)
de la Corse , et avec ceux des lies Baleares , et de la
cote de Valence; la navigation et la guerre avaient niele
quelqiietois les differens peuples dn continent et des
lies; et leurs relations nuitnelles n'avaient commence
que par des hostilites. Olbia j Luquido, Caralis etaient
les principales villes He la Sardaigne : la trace des deux
premieres nexiste plus; Cagliari s'est elevee sur les rui-
nes de la troisieme.
Les Carthaginois , pen de temps apres la perte de la
Sicile, durent egalement renoncer a la Sardaigne. lis
avaient termine la premiere guerre punique; mais la
guerre des mercenairesavait eclate contre eux; elle s'e-
tait pronagee d Afrique en Sardaigne, oil toutes les trou-
pes a la solde de Carthage, s'elaient revollees; et lors-
que Amilcar , pere d Annibal , cut lieureusement acheve
en Atiique cetle guerre qui avail ete si desastrcuse, le
soulevement des troupes ne lut point apaise en Sardai-
gne : les revokes y oblinrent I'appui des Romains, qui
ne leur donnerent des secours que pour les asservir; et
Carthage, trop aifaiblie pour recommencer la guerre,
aima mieux renoncer a celte possession.
Les Romains, devenus maitres de l;i Sardaigtie, s'oc-
cuperent peu de sa prosperile. La cidture y etait negli-
gee; des niarais nombreux en rendaient le sejour insa-
lubre ; on fit de cetle ile un lieu d exil pour les condam-
nes, que leur litre de citoyens romains avait sauves de
la peine de mort.
La Corse, situee au nord de la Sardaigne, dont elle
n'est separee que par un detroit de quelques lienes , a
successiveraent recn des colonies de diverses nations.
Aleria fnt tondee par les Phoceens : elle fut successive-
ment occupee, comme les autres parlies de celieile,
paries Elrusqnes, les Carthaginois, les Romains ; et
( 35 )
Sylla y fit passer une nouvelle colonie : Mariana fut batie
par son rival, sur les debris de Nicea , qui remontait an
temps des Etrusques : Ptoleniee a fait mention dAlista,
d Urciniiim , de Cannelata. Une route militaire traver-
sait I'lle, du nord au midi , depuis Mariana jusqu'a Por-
tus Syracusanus oil s'estensuiteeleve Bonifacio; elcette
voie romaine , dorit une station militaire occupait le
centre , sous le nom de Prsesidium , etait deslinee a en-
tretenir les communications de toutes les parties de la
Corse avec la Sardaigne.
Les Cartliaginois, qui avaient occupe la Corse, pen-
dant deux siecles et demi , en furent chasses par Lucius
Cornelius Scipion ; mais I'esprit d'independance des ha-
bitans prolongea leur resistance ; I'ile ne fut complete-
men t soumise que sous les consulats de Marius et de
Sylla.
Apres avoir perdu la Sicile, la Sardaigne et la Corse,
Carthage chercha vers I'occident le dedommagement de
ses sacrifices. Elle etendit ses acquisitions en Espagne,
ou elle avait deja plusieurs colonies, et elle forma dans
les lies Biilearesd'autres etabiissemens; mais les Romains
devaient bientot en heriter, et le traite de paix qui ter-
mina la seconde guerre punique les fit succi'der en Es-
pagne el dans les lies voisines a toutes les possessions
des- Ciirth'dginois.
Majorque et Minorque etaient les seules iles Baieares
qui fussent habitees. Le nom de Portus Magonis y rap-
pelle celui de son fondateur : les villes de Palma et Pol-
len lia y furent baties par les Romains.
D autres iles, dispersees le long des cotes de laMediter-
ranee suivirent egalement le sort des pays voisins. Les
Stechades avaient dependu de laG.'iiile , avant de passer
comme elle sous la domination des Romains : Gor-
( 36 }
gone , Capraria, Igilium , llva , connue par ses mines de
fer, avaient. appartenii a 1 Elruiie : Pontia, Pithecusa ,
Capree etaient voisines de la Cainpajiie ; et la derniere
lie vit terminer le triste regne de Tihere : les iles Eo-
liennes, Lipara , Vulcania , Strongile , et quelques autres
craleres qui lancaieiil leurs teux du milieu des eaux ,
elaient disperses au nord de la Sicile : an midi de celte
lie, lerocherde Ivlelita s'elevaitsur lamer. II etait alors
inhabite, sterile et sans illustration.
Les lies Pithyuses, celles de Dragonera, de Colul)ra-
ria, vers les coles d'Espagne, etaient egalemenl deser-
les; et nous pouvons juger,- par leurs denominations
memes , quelles etaient infestees par des reptiles.
Nouscivons vu passer quelques autres noms, tels que
ceux de Gorgone , Capree, Capraria, qui turent origi-
naiiement imposes a des lies encore sauvages; el nous
pouvons remarquer ici que la terre, dans son etat pri-
mitif , nest point un paisihle domaine pour 1 liomme.
II a besoin den disputer I empire a celte foule d'etres
animes qu'enfante autourde lui une nature inepuisable.
Ici il entre en guerre avec les animaux feroces, et il doit
purger la terre de ses reptiles malf'alsans : ailleurs des
especes plus timides et plus faibles prennent la fuite
devant lu'i; il lesatteint, lesdompte, les apprivoise. La
terre elait une republique immense; Ihomme en a fait
une nionarchie.
Mais, quand ses innombrables ennemis se retirent a
son approche, il lui en resle un pJus redoulable : c'est
lui meme. La nature est soumise; mais la guerre entre
les peuple"-. dure encore.
( 37 )
Espag,
ne.
L'Espagne , dont les Romains commencerent la con-
qiiete pendant la seconde guerre puniqiie, est liee aii
reste de I'Europe par la chaine des Pyrenees : les eaux
de Ih Meiliterranee et de I'Ocean en endjrassent toutes
les autres f'rontieres : eile est separee.de I'Afrique par le
detroit de Cadiv, on la table a snppose qu'Hercule ou-
vrit une communication enlre les deux mers, en cou-
paiit par une prot'onde vallee les barrieies de Galpe et
d'Abyla.
De hantes hiontagnes, dont la cbaine s'etend du nord
vers le niidi, en serpentant eritre les sources des prin-
cipaux fleuveii , partagent I'Espagne en deux grands bas-
sins , qui s'ii;clinent vers 1 orient et vers I'occident.
L'Ebre et seS affluens, le Xucar, la Segura arrosent le
bassin oriental, celui d'orcident est traverse par le
Minho, le Duero, leTage, la Guadiana, le Guadalquivir.
Les trois grandes divisions de I'Espagne ancienne
etaienl la Tarraconaise, qui en occupait au nord et a
I'orient la plus grande partie, la Lusitanie a I'occident
et la Betique au inidi. IJn grand nombre de peuples se
partageaient enlre eux ces territoires ; et cette circon-
stance facilita les succes des Romains. Les principales
reunions portaient le noin dc Conventus : on en con-
naissait huit dans la Tarraconaise, trois en Lusitanie,
trois dans la i?elique; et chaoune de ces confederations
renferniait differentes trii)us,dont les denominations
et les places geograpbiques soiit indiquees dans un tar
bleau que nous donnerons ensuite.
On reconnail dans cette nomenclature plusieurs villes
qui subsistent encore, celles de Girone, de Barcelone,
( 3S )
((e Tortose, de (jarthageno clans les ^)rovinces cle la Me-
diterraneej celles de Cadix , de Lisbonne sur TOcean 5
de Sarragosse sur les rives de I'Ebre, dont le nom avail
fait donner celui d'Iberie a lEspagne enliere; de To-
lede sur leTage; de Cordoue ou naquirent Seiieque et
Lucain. D'autresnoms se sorit denatures : Vergilia a fait
place a Murcie, Hispalis a Seville, Carteja a Gibraltar;
d'autres enfin , cojiime Numance, nappartiennenl phis
(|u'a des ruines.
II est utile, lorsqu'on etudie la geographie ancienne,
de comparer, quand les niemes lieux subsistent encore,
les differens nonis qu'ils ont successivement portes : ce
rapprochement seul eclaircit les fails, et permel de lier
entreeiles les diversesepoques derhisloire. Nous voyons
ainsi que le Belis a pris le nom de Guadalquivir; que les
monts Carpetani sont aujourd bni la Guadarama, et que
la chaine de lOrospeda est devenue la Sierra-Nevada.
On reconnait davantage le niont Marianus des anciens
dans la designation actuelle de Sierra-Morena, et les
flpuves Anas, Durius, Sucronis, dans les noms de Gua-
diana, de Duero, de Xucar qu'ils ont recus depuis.
Les peuples qui donnerent prinitivement leurs noms
a toutes ces contrees n'en occuperent ensuite qu'une
faible partie. Les Iberes etaient etablis au nord-est , et les
Hispalenses dans les ptaines de I'Andalousie : ailleurs les
noms dun grand nombre de lieux rappelient une origine
etrangere : on peut ainsi distinguer les colonies qu'avait
fondees Carthage; et Ion retrouve dans la Celtiberie et
la Galice les traces d'anciens etablissemens celtiques o\\
gaulois.
Quand les Remains penetrerent dans cette conlreie ,
Carthage en possedait les provinces orientales. Annibal
y avait puise ses priticipales forces pour penetrer en
( 39)
Iialie, et Rome reconiiut la necessite d'y envoyer une
partie tie ses legions et il'y affaiblir les Carthaglnois.
Sagonte, qui s'etait declaree pour Rome , venait de
tomber sous les coups d'Annibal : les ruines en etaient
encore fumaiites, et il ne restait de cette ville qu'un noni
imuiortel. Le vainqueur poursuivait sa niarche; et telle
etait la rapidite de ses succes qu'au moment ou Rome
envoyait une armee pour I'attaquer en Espagne, Anni-
bal avail deja francbi les Pyrenees et la Gaule narbo-
naise. Les troupes romaines, conimandees par Cneus
Scipion , debarquerent en Espagne, et s'emparerent des
provinces situees entre I'Ebre et les Pyrenees. L'arrivee
de Publius, son frere , qui le rejoignit avec vingl vais-
seaux, permit aux Romains d etendre leurs conqnetes
vers le midi : ils passerent I'Ebre pour la premiere fois;
et leurs troupes reup.ies defirent celles de Carthage j
mais les deux freres ayant ensuite divise ieurs forces fu-
rent vaineus et tues en combattant. Un chevalier ro-
main, le jeune Publius Marcius, sauva les debris de
I'armee, qui I'adopta pour son general, et il oblint sur
Asdrubal quelques avantages (jui , cependant, atfaibli-
rent pen les Carthaginois. Ceux-ci pouvaient aisement
reparer leurs perles dans un pays si tecond et si peuple.
La guerre devenait , chaque annee, plus difficile pour
les Romains : les troupes que Claudius Neron conduisit
dans la Taraconaise, avaient peine a tenir la campague;
et les provinces espagnoles qui s'etaient declarees pour
Rome, abandonnaient son alliance.
La gloire de reunir aux possessions romaines cette
belle contree , etait reservee a Publius Cornelius Sci-
pion, fils decelui qu'Annibal avait vaincu pres duTesin
et de la Trebie, et qui avait ensuite peri en Espagne, a
la tete des armees romaines. Publius, anime du desir
( 4o )
(Je veiiger son pere, et pleiii de cet enthousiasnie coni-
niunicatil, qui entiaitie toutes les volontes, n'avait que
viugt-qualie ans , lorscpi il uffrit -lux Romniiis de con-
duire cetle guerre et den reparer les desastres. On lui
donne dixniillelioinnies de troupes : il les reunit a celles
que la valeur de JMarcius avail sauvees : sa premiere ope-
ration est le siege de Carlliagene, que lennenii regar-
dait comuie son arsenal le plus important, et oil se trou-
vaient reunis les otages des peuples que Carthage clier-
chait a retenir dans son alliance. Scipion s'enipare de
celte place; les otages sont delivres et renvoyes a leurs
families; et la generosite, la continence du jeune heros
lui gagnent lescceurs des Espagnols. II poursuit lecours
de ses conquetes; et la fortune lui est favorable partout.
Deux Asdrubal , lun His de Giscon, I'autre frere d An-
nibal, commandaient lesprincipalesanneescarlhaginoi-
ses : le premier fut defait par Scipion , I'nutre qui seren-
dait enlta!ie,a la tete decinquante niille honmies, pour
y secourir son frere, fut tailleen pieces pres du Metaure.
Son depart avait tellement affaibli en Espagne les Car-
thaginois qu'ils y perdirent successivemenl leurs posses-
sions, et chercherent a Cadix un dernier refuge. lis
comptaient encore sur lalliance de Mussinissa et de
Syphax, rois de Numidie; mais cette ressouice leurayant
manque, Cadix ouvrit ses portes aux vainqneurs, et sa
soumission ent; aina celle de 1 Espagne enliere.
Scipion revint alorsen Italie, et il y fut bientot charge
de conduire en Afrique, les armees romaines : la gloire
de terminer la seconde guerre punique lui etait reservee.
( 4« )
Afrique septentriofidle.
Les contrees seplentrionales de lAfrique, bornees ati
nord par la Mediterranee, au midi par la chaine du nioiit
Atlas et par les deserts du Saara, son t les seulesqiiiaient
eii des relations avec lEnrope ancienne, et qui aiont
subi la tlomination des Remains. Leurs principales divi-
sions, sans y coniprendre I'Egypte, etaient le territoire
de Carthage au centre de ce littoral immense, la Nu-
niidie et la Mauritanie a loccident, la Lybie el la Cyre-
naique a I'orient.
Carthage, qui fut eonquise la premiere, n'avait ete,
dans lorigine, qu'une colonic phenicienne, jetee sur les
rivages d'Afrique, et long-temps reduite a un faible ter-
ritoire : sa situation la rendit commercante, et le com-
merce devint la source de sa riches«e et de sa puissance.
Vers le milieu du neuvieme siecle avant I'ere chre-
lienne, la monarchie y fit place a la republique : Car-
thage sortit de ses anciennes limites, et conquit tout le
centre des rivages dAfrique; elle y joignil, dans la
suite, la Numidie, la Mauritanie, et ses possessions s'e-
teiidirent d Occident en orient jusqu'aux limites de la
Cyrenaique. On voyait sur celte ligiie de demarcation les
autels des Philenes, places comme des bornes sacrees
entre les deux territoires.
La domination de Carlhase s'etendit aussi sur une
grande partie de 1 Espagne, de la Sicile,de laSardaigne;
niais les deux oremieres guerres pnnic|uos liii avaient
fait perdre ces contiees; et la Numidie, la Mauritanie ,
avaient recouvre leur indepeudance , et s'etaient erigees
en monarchies. Les flottes de Carlhage dominerent seules
sur la Mediterranee, avant que lys Remains eussent per-
142 ) .
lectiomie, a son oxemple, la construction de lours vais-
seaux, et que Diiillius cut reniporte sur cet eiineini utie
victoire navale.
La premiere guerre punique e'puisa tellenieiU Gaf-
thage, quail moment de licencier les troupes que cette
republique avait prises a sa solde, elle neiait plus en
elat de les payer. Les mercenaires se revolterentj quel-
ques villes d'Afrique leur donnerent des secours : ils
tinrent pendant trois aiis la canipagne, et oserent memo
assieger la capitale. Amilcar releva enfin lautorite de Car-
thage, et les villes qui s'etaient declarees centre elle
renlrerent dans sa dependance.
Les relations des Romains avec Massinissa, roi deNtr-
niidie, et avec Syphax, roi d iine partie de la Maurita-
nie, comniencerent pendant la seconde guerre punique.
L'un et I'autre monarque devinrent allies des Romains,
et Massinissa leur fut toujours fidele; niais Syphax chan-
gea promp'.ement de parti, et lorsque Scipion porta la
guerre en Africjue, ce monarque leva contre lui luie ar-
mee de ciuquante mille Numides. Ayant ete vaincu et
fait prisontiiei' , il fut depouille de ses etats, et Massi-
nissa en recut la plus grande parlie.
Les Romains conserverent leur amitie a ce dernier
prince, qu'ils favoriserent dans toutes ses contestations
avec Cartilage. Leur intention etait d alfaiblir de plus en
plus cette puissance rivale , et Massinissa, soutenu par
leur appui, eleva les pretentions les plus ambitieuses :
son inimitie contre Carthage etait inveteree : a 1 age de
quatre-vingthuit ans, il liii declara la guerre; Rome fit
elle-nieme d'immenses preparatifs pour ecraser ses en-
nemis ; et la troisieme guerre punique finit par la des-
truction de leur capitale et de leur empire.
L'amitie que les Romains avaient eue pour Massinissa,
( 43 ) ■ ■
fut CQiiservee a son fils Micipsa , et il jouit de trente-
cinq aiinees tie paix ; niais, apres le regne de ce prince,
les discordes de sa famille firent eclater une guerre qui
devait entrainer la conquete de la Nuniidie. Micipsa,
qui avail pour fils Adherhal et Hiempsal , crut leur don-
ner un protecteur, en adoptant Jugurtha, fils naturel
de spn frere, et en p;irtageant son heritage entre les
trois princes. Jugurtha , moins louche de ce bienfail que
devore d'ambilion, fit assassiner Adljerbal ; il declara
ensui te la guerre a Hiempsal, qui iuiplora ['assistance des
Romains, et I'ayant fait prisonnier, il le fit perir dans
les supplices.
Ce fut alors que les Remains atlaquerent Jugurtha.
Les premiers generaux qu'ils envoyerent contre lui fu-
rent seduits par ses largesses, et ce prince, niande a
Rome, parvint par les niemes moyens de corruption a
&e justifier. Copendant la guerre se ralluma ])ient6l con-
tre lui : vaincu par Metellus, i! chercha enfin un asile
pres de Bocchus, son beau-pere, roi de Mauritanie ;
mais Bocchus fut a son tour defait par Marias; et les
sollicitations de Sylla , qui servait dans I'armee romaine,
determinerent ce prince a livrer son gendre. Jugurtha
fill conduit a Rome; on le fit perir de faim dans un ca-
chot : la Numidie fut conquise, et reduile en province
romaine.
Le menie sort devint commun a la Mauritanie, lors-
que , apres la bataille de Pharsale , 1' Afrique eut recueilli
les derniers soutiens du parti de Pompee. La defaite de
Scipion a Thapsus, et la mort volontaire de Caton d U-
tique, acheverent la ruine de la cause qu'ils avaient de-
fendue : Juba , roi de Mauritanie, etait leur auxiliaire;
il fut vaincu a son tour, et ce prince craignit de tomber
vivant entre les mains de Cesar : il se tua, pour ne pas
( 44 ^
etrc reserve au lrioin[)lie clii vuinqiieiir : le^ Roinains
occupeieul ses etats; et Salluste tut iiotniue gouverneur
(le Mauritanie.
A cette epoque la Cyrenaique etait deja reunie aux
possessions romaines. Elle avail ancienneinent fait partie
des conquetes d'Alexaiidre : souniise ensuite aux rois
d'Egypte, elle etait parvcnue a recouvrer son indepen-
dance; et ce pays formait un royaunie separe , lorsqiie
les Ixomains sen emparereiit.
Toules les regions eiitre I'Egypte et I'Ocean se irou-
verent alors parlagees en trois gouverneniens, la Lybie,
I'Afrique et la Mauritanie. La Lybie comprenait la re-
gion des Oasis, la Marniarique, la Cyrenaique ou les
villes de la Pentapole s'elevaient encore. Les provinces
du gouvernement d'Afrique etaientla contreedu meme
noni, ou se trouvaient Carthage, Utique, Clypea , le
promontoire de Mercure, et la Numidie ou la bataille
de Zama s'etait livree. Ce gouvernement central renfer-
mait aussi la Byzacene, dont Adrunietuni etait le port
principal, I'Arziigitaine et la Tripolitaine, plus barbare
que les autres provinces : c'etait dans cette derniere re-
gion qu'liabitaient les Lotophages, les Troglodites, les
Nasaniones , nations a demi sauvages, vivant des fruits
de la terre , y creusant leurs habitations, ou errant dans
les paturages avec leurs troupeaux. Le lerritoire de la
Mauritanie se parlageait en trois provinces : la Sitlfensis,
plus rapprochee de Carthage , la Cesariensis, bornee par
les contrees sauvages de la Getulie, et la Tingitana, voi-
sine des colonnes d'Hercule, baignee par la Mediterra-
nee , par I'Ocean, et touchant le moiit Atlas.
Les vastes deserts situes au midi des possessions ro-
maines etendaient une longue barriere entre elles et le
centre de I'Afrique. Des regions steriles et devorees par
( 45 )
le soleil ne tentaient plus I'anibition des conquerans j
il eut fallii traverser une immense plaine de sables mou-
vans, pour retrouver les bassins des fleuves et les traces
de la vegetation; et aucune armee r'>maine n'avait en-
core lente cette entreprise, a I'epoque a iaquellese rap-
portent les observations de cette parlie de nos Memoires.
( 46 )
Note sur In communication mntiiel/e de la Gambie et de
la Cazamnnse ,
Lue dans I.1 seance du Ct s<>ptembre i833.
Le (lenu-volume deMeinoires puhlieen juillet dernier
par la Societe royale geographique de Londres, conlient
des observations relatives a la jonrtion presumee de la
Gambie et de la Cazanianse par linterniediaire de quel-
ques marigots navigables.
Les etablissemens que nous formions en Cazamanse
avaient attire la jalouse attention du gouvernement an-
glais, el le commandant Boteler, qui tut envoye sur la
cote d'Afriqueavec la corvette de S. M. B. I'Hecla, recut
la mission speciale de verifier si la Cazamanse ne serait
point un bras de la Gambie.
M. Boteler fit un relevementde la Cazamanse jusqu'a
Zinghinchor; et dans la Gambie, il reconnut une partie
du marigot de Bintam, bifurqxie' en deux branches prin-
cipales portant les noms de Badgeconda ei de Gyngy-
nocotto; mais il ne poussa pas plus loin son explor.ilion
efteclive. Les renseignemens qu'il recueillit de la boucbe
des traitans indigenes, lui parurent constaler suffisam
ment qu'il n'cxistait ent're les deux fleuves aucune com-
munication navigable, a moins que pour de legers ca-
nots, (jui, dans les grandes eaux, pouvaient peut-etre
accomplir la traversee de Tun a I'autre en proiilant des
moindres ruisselets. Dans tons les cas, 'a question lui
paraissait avoir perdu beaucoup de son interet , par la
circonstance que la Cazamanse, fiit-elle un bras de la
Gambie , les etablissemens que les Portugais y posse-
daient de temps immemoriAl coupaient court a tons les
( 47 )
projets queradmitiistration britannique avait pu former
a I'egard de cette riviere.
M. Botelerenumere,comine seals argumens en faveur
de la jonction presumee, les cinq cartes suivantes :
1° celle de la cote occidentale d Afrique, qui accom-
pagne I'histoire d'At'riqne d'Ogilhy, imprimee en 1670 :
la Cazamanse n'y est point fignree, mais une communi-
cation y est marquee entre la Gamble et la riviere de
Cacheo , ce qui presente, comme on voit, un argument
a fortiori , mais que I'hydrographe anglais a raison de
trouver trop vague pour etre pris en consideration;
2" la carte de Belin , pub! ee en i^53 et corrigee en 1765,
ou Ion remarque une communication continue par I'in-
termediaire du marigot de Bintam; 3o celle de Buache,
de 1756, offrant la meme comn;unication ; 40 celle de
Jelferys, de 11768, laquelle , outre la jonction par la
crique de Bintam, fait connaitre, par annotation, qu'une
autre communication est indiquee, sur quelques cartes,
vis a-vis de I'lle aux Elephans ; 5" enfin la carte deWood-
ville, de \ African Pilot, edilee en 1797, et marquant
comme egalement certaines Tune et I'autre communica-
tions.
Voi^a tout ce que I'erudition cartographique de M. Bo-
teler avait pu recueiilir de documens pour laffirmative.
Pour la negative, il exposait les temoignages des in-
digenes. M. Joiner, liomme de couleur, I'un des princi-
paux traitans de Bathurst, natif du pays voisin du mari-
got de Domasensa , dont I'entree est vis-a-vis de 1 ile aux
Elephans, avait remonte en goelette jusqu'a Domasen-
sa , seulement a 7 milles de I'embouchure , puis en canot,
a i5 milles plus loin , jusque par le travers d'Eropiria.
Au-dela, il avait trouve le lit a sec; mais il dit que dans
la saison pluvieuse on pouvait remonter un grand noiti-
(-48 )
l)re de milles {^iimiiy tnilcs^j autlessus, jus(juon un lieu
app«'le Cahhou , doiil hi position \\\'sl point indiquee.
Le meme traitant, tort dcsireux de irouver un passage
interieur pour se rendre par cau a Zingliinchor, ainsi
que la carte deVVoodville luien dcnnait respoir, et per-
suade que le marigot de Domasensa ne pouvait remplir
son but, tenta, en 1810, de remonter celui de Bintam,
mafgre les assurances des indigenes qui lui predisaient
ie non-succes. II equipa un grand canot monte de qua-
torye hoinnies, et les envoya reoounaitre le rnnrigot de
Badgeconda, I'une des branches de celui de Bintam;
maisapres exploration, le canot revint sans avoir trouve
la communication cherchee, et dont I existence etait
niee par tous les iiaturels qu'on renconlra en cheniin :
d'ou Ion conclut que la carte deWoodville etait erronee.
Au-dela de Jereja , le marigot de Badgeconda re-
monte jusqua uneville de ce nom, situee vis-a vis et a
quatre heuresde marcheseulementdeTenderbar. A cette
hauteur, elie est navigable; les canots peuvent meme
aller plus loin, jusqua Sangahdou, et au-dela encore
jusqu a Pahcow^; mais le courant est alors si peu consi-
derable, et s' tortueux; que les indigenes preferent voya-
ger par terre.
Cette tendance dii marigot de Badgeconda vers Ten-
derbar ne s'accorde point, suivant M. Botelor, avec les
anciennes cartes, et devient des-lo^rs pour lui im irrefra-
gable argument contre leur exactitude.
L'opinion de M. Boteler n'a point ete partagee par le
lieutenant-gouverneur Rendall , qui a voulu tenter le pas-
sage de la (iambie dans la Cazamanse par le marigot de
Bintam, et s'est en consequence, au mois de juin i33i,
avanoe en personne sur cette voie. Apres avoir depasse
Bintam , il prit par le marigot do Jataban , qui lui parut
( % )
•^tre la brAnclte la plus considerable , et deux jours apres
il arriva a Gifarang,a une distance d'environ 4o milles:
il remonta 20 milles plus loin , jusqu'a la hauteur de
Badgeconda , et meme 5 milles de plus encore, entre des
rives qui se resserraient graduellement, mais sans que le
ehenal cessat d'etre profond, en sorte que M. Kendall,
force de retourner a Bathurst par I'approche des tour-
nades et des pluies, declarait qu'il etait plus que jamais
persuade de I'existence de la communication dont il s'agit,
A mon tour, je dirai quelques mots sur la question
qui fait I'objet des documens que je viens d'analyser.
Je comraencerai par faire remarquer qu'aucune des
carles citees par le capitaine Boleier ne peut etre consi"
deree comme construite, en cette partie , sur d«s elemens
originaux. Woodville a copie Belin^ Jefferys a simple-
ment donne une edition angbise de la carte de d'Anville
de 1761, laquelle avait pareillement servi a Belin eta
Buache. M. Boteler, au contraire, ne cite ni Delisle ni
d'Anville, tandis que c'etaient la les veritables autorites
a consul ter.
On sail combien Guillaume Delisle nieUait de soin a
recueillir des lumieres nouvelies pour la redaction deses
cartes geographiques. Celle du Senegal , qu'il avait dres-
see sur un grand noinbre de cartes manuscrites et dUtine-
raires , et qui fut publiee par sa veuve en avril 1726,
montre la Gambie et la Cazamanse conimuniquant en-
semble au moyen de deux marigots sortis d'un meme lac
et coulant a I'ouest : celui de ces marigots qui va a la
Gambie nest autre que la riviere de Gueregue , c'est-a-
dire la Badgeconda-Creek de M. Boteler , qui n eut poiat
affirme, comme il I'a fait, que la tendance de son cours
versTenderbara ete me'connue sur lesanciennes cartes,
s'il eut vu celle de Delisle. Le nom de Saint- Grigou est
4
( 5o)
inscrit au voisiuage du lac. Sur le niarigot qui rejoint la
Cazamanse, on trouve d'abord Buhugne, puis Bintani :
ce dernier point est , comma on volt, singulierement
transpose, Rien n'indique la continuation des commu-
nications par eau jusqu'a Cacheo.
Au niois de Janvier suivant parut une carte (fort pcu
connue aujourd'hui, puree quelle hit supprimee plus
tard par I'auteur) oftrant la partie occidental e de I'AJri-
qiie , comprise entre Arguin et Serrelionne , et dediee a
la compagnie des Indes de France, par d'Anville. Les
communications entre la Gainbieet laCazamanse ysont
fort nombreuses ; elles ont lieu , d'abord pres de Tile des
Eiephans , puis, par un marigot voisin de Tenderbar,
plus baspar celuide Bintam, ensiiitepar un autre canal,
qui s'ouvre dune part vis-a-vis de Jamesfort et d'autre
part tout pres de Zinghinchor, enfin par un autre en-
core qui s'embranche a la Gambie vers son embouchure,
et va rejoindre la riviere aux fluitres. Les deux bras du
marigot de Bintam, qui se separent au-dela de Gereges,
sont nomnies , Tun simplement Sangedcgou , I'autre
Sangedegou de Riba (c'est-a-dire Sangedegou d'en haul) ,
etcette derniere appellation trahit un document portu-
gais. Les deux marigots de Sangedegou , anssi bien que
celui de Tenderbar, et meme celui qui vient de I'ile aux
Eiephans, conduisent tous a un nieine lac. Sur la rive
meridionale du Sangedegou de Riba , est place Pascua^
ce bras communique a la Cazanianse par trois rameaux,
aupres de Tun desquels est inscrit le nom de James.
Trois autres marigots traversenl de la Cazamanse a la
riviere de Cacheo.
Cette carte de 1727 fut remplacee en 1751 par la
grande carte en deux feuilles qu'a reproduite Jefferys
a une echelle un peu moindre, et qui a, du rcste , ete
( 50
suivie presque invariablement dans toutes les cartes de
la Senegambie qui ont paru depuis , tant en France qua
I'etranger.
La redaction de la nouvelle carte de d'Anville (et
peut-etre aussi de celle de 1727) eut lieu sous I'in-
fluence des renseignemens que le pere Labat publia en
1728, d'apres les memoires de Brue, pour lesquels le
celebre geograplie dressa lui-meme plusieurs cartes spe-
ciales.
Brue, gouverneur du Senegal, avail fait un voyage
d'Albreda a Cacheo, par I'interieur des terres : j'en vais
donner ici le resume jusqu'a la Gazamanse seulement ,
en conservant les propres termes du pere Labat.
« M. Brue s'embarqua dans une cbaloupe qui devait
le porter a Gereges , qui est situe a sept lieues au-dessus
de Bintam. La riviere de Bintam se nomme quelquefois
de Saint-Grigou ; ily a des gens qui I'appellent encore la
riviere de Gereges. M. Brue partit de Gereges le sixieme
jour apres y etre arrive ; il avait seize personnes avec
lui, tant blancs que negres , tous bien arraes, cinq che-
vaux charges de bagages , avec deux chevaux de relais ,
outre ceux qui portaient les biancs de sa conipagnie,
car pour ses negres ils etaient tous a pied : ils firent dix
lieues ou environ ce premier jour, et arriverent sur le
soir a Pasqua , gros village de Bagnons, situe sur le
bord d'une petite riviere, que Ton nomme Saint-Grigou,
aussi bien que celle qui passe a Gereges ; et la raison
qu'on en donna a M. Brue, iut quesortant toutes deux
d'un memelac, qui est a quinze ou vingt lieues plus haul
vers Test , elles devaient avoir le meme noni. M. Brue
passa un jour entier a Pasqua, et y coucha deux nuits;
il fut prendre Fair sur le bord de la riviere : elle n'est pas
large, mais en echange elle est tres profonde. On trouva
4.
(5. )
des chevaux pour M. Brue et sesblancs, et dewxeanots
avec des negres pour conduire les bagages et les mar>
chandi es; mais tout cela ne fut pret que le troisienie
JDur , encore ne put-on se mettre en marche que sur les
trois heures de I'apres-niidi; de maniere qu'on n'alla cou-
cber qu'a une bonne lieue de Pasqua, chez un Espagnol,
dontlaniaison Taste et commode etait aussi sur le bord
de la riviere. M. Brue parlit de cet agreable endroit, el
marcha pendant deux jours dans un pays qui est pres-
que tout babite par des Floupes; il ne fit que treize a qua-
torze lieue^ pendant ce temps-la , parce qu'il ne voulait
pas quitter les canots qui portaient son bagage et que
le retour de la niaree empechait d'aller plus vite. II passa
h gue deux petites rivieres qui sejettent dans celle de
Saint-Grigou , et coucha deux nuits dans des cases de
nesres Bagnons. II arriva le troisieme jour a James :
M. Brue quilta la les cbevaux et les canots qii'il avail
pris a Pascua , et ne pensa qu'a achever son voyage par
eau. On lui prepara des canots sur un petit marigot ,
ruisseau, ou riviere, qui passaita deux cents pas de I'en-
droit ou il avail loge. II s'y embarqua, et apres avoir fail
une lieue, il entra dans la riviere de Casanianca, envi-
ron a deux lieues au-dessus d'un fort que les Portugais
onl a la droile de celte riviere, c'est a-dire en la remon-
tant et du cote du sud. La riviere de Casamanca ou Ga-
semanceest unbras de celle de Gambie. Acent cinquante
lieues ou environ, en la remontant, on trouve un en-
droit qui fait un coude, et qui donne le nom a un
royaume considerable : les Portugais I'ont appele le
royaume de Caho ou de Gap. ><
II resulte evidemment de ce recit , que depuis Pascua ,
la route par eau est continue jusqu'a la Gazamanse; et
d'aulre part, que la riviere sur laquelle est Pascua, com-
( 53)
muniqiie avec celle de Gereges, puisqu'elles sortent
toiites deux d'un menie lac; niais il y a mieux : leSaint-
Grigou de Labat , ou le Sangedegou de d'Anville , est
evidemment la nieme chose que le Sangahdou de Bote-
ler; et le Pahcow de celui-ci est le Pascua de ses prede-
cesseurs : or luiinSme a consigne dans son rapport que
le marigot de Bintani est navigable jusqu'a Pahcow. La
communication est done etablie de toutos pieces.
Autre rapprochement : d'apres M. Joiner, le marigot
de Domasensa peut etre remonte dans les hautes eaux
jusqu'a Cabbou; et d'apres Labat, le royaume de Cabo
est sur laCazamanse meme; c'est un argument en faveur
de la justesse de son autre assertion , que la Cazamanse
est un bras de la Gamble ; et une justification de I'opi-
nion d'apres laquelle d'Anville, sur sa carte de 1727, et
Woodville soixante-dix ans apres, ont marque la reu-
nion des deux fleuves vis-a-vis de lile aux Elephans.
( 54 )
Dbs colonies ag-ricoles, par M. Hubrne de Pommeuse ,
ancien depute , membre de la Societe d' agriculture , etc.
I gros vol. in-8°j i832.
Lii a la Societe de Geographic, le 8 novembre i833.
La Societe a desire qu'il lui fut rendu compte de cet
ouvrage, qui appartient a un des membres de sa com-
mission centrale. Si cette qualite nous interdit des elo-
ges, elle ne nous defend pas de faire connaitre les im-
portans documens qu'il renferme.
L'ouvrage est divise en deux parties; la premiere se
compose d'un memoire lu a la Societe d'agriculture, et
contient les resultats du voyage que I'auteur a fait en
Hollande et en Belgique, en 1829.
La seconde se compose de recherches statistiques sur
les instituts analogues , principalement dans les etablis-
semens Britanniques et aux Etats-Unis.
L'auteur, ayant pendant dix ans , siege dans la cham-
bre des deputes de France, a rempli son ouvrage de
considerations detouteespece, sous les rapports tantde
I'economie politique, que de Tamelioration du systeme
repressif ou penal.
Tout le monde sait que le principal obstacle a la re-
fonte de nos lois penales , consiste dans les difficultes
qu'on rencontre a operer la rehabilitation morale des
condamnes, et a les faire rentrer dans la societe, dont
ils ont viole les lois, surtout s'il y a recidive.
L'etat de choses actuel presente d'immenses incon-
veniens; deux systemes sent en presence pour y reme-
( 55 )
dier: celui de l;i reclusion isolee, ou penitentiaire, et
celui des colonies agricoles j chacun deux u ses partisans.
L'ouvrage de M. Huerne, est peutetiele pius important
de ceux qui out ete ecrits a I'appui du second de ces
systemes, et sans doute, il n'a pa» peu conlribue a de-
terminer le gouvernement a former une commission
chargee de lui presenter des resultats realisablcs a I'aide
de mesures legi&latives.
II n'entre pas dans les travaux de la Societe, de s'oc-
euper de l'ouvrage qui lui est soumis sous ce rapport ^
nous devons nous bornera I'analysedes documens qu'il
nous apporte sur les elablissemens que I'auteiir a visites
dans les pays etrangers.
Ges pays sont la Hollande et la Belgique, auparavant
reunies sous le litre de royaume des Pays-Bas.
Hollande. — La premiere colonic fondee en 1818,
est celle des Champs de Frederic (Fredericks-Oord) ; elle
est situee dans les landes immenses el desertes de la
province de Drenthe , la plus pauvre du royaume, dent
la population n'est evaluee qua 5o,ooo habitans pour
une superficie de 223,852 hectares. Elle se composait ,
en 1829, de six colonies, sur une elendue d environ
trois lieues, divisees en 4 16 petites fermes , et nourris-
sant 2,3oo tetes.
On compte encore dans ce royaume
La colonic entiere d'Ommerschans . . . i,25o
Les trois elablissemens sis a Veenhuisen. 45ii5
Et I'inslitut de Wateren i5o
Tolal .... 7,81 5
Elles foimentce qu'on appelle les colonies du nord.
Leur situation tiiianciere est florissante, et permet d'a-
morlir le capital empruute pour seize ans.
(56)
Les colonies dii Sud oil de la Belgique, datenl de i8a5.
La principale a ete fondt'e dans la Cainpine, a VVortel ,
noil loin de I'anrien chateau dHogstraet , ou il exisiait
un depot de niendicite provincial , an milieu de vastes
landes. Elle est dirigee par M. Van den Bosch, depuis
sa fondation. LUe a ete visitee en detail par M. de
Pommeuse; a ceite epoque (1829), elle comptait laS
habitations, ou petites fermes, ayantchacune trois hec-
tares et demi de terra en exploitation ; elle se divise en
colonie libre, qui n'est pas tres prospere, et en colonic
forcee, dont la prosperite s'accroit rapidement.
Les colonies du niidi entretiennent seulenient i,55o
individus, qui ont defriche environ 5oo hectares.
Notre collegue a visite egalement un etahlissement
d alienes a Gheel, bourg d'environ 6,5oo habitans a cinq
lieues de Turnhout. Ces alienes sont places chez les cul-
tivateurs qui les emploient a des travaux chanipetres , et
contribuent ainsi a leur prompte guerisoii.
M. de Pommeuse a joint a son ouvrage d'imnienses
developpemens et des calculscomparatils, avec I'etat de
la France, soit quant aux terres incultes que Ion pour-
rait coloniser de la meme maniere, soit quant a la des-
truction successive de la mendidte, et a ranieiidement
des condamnes. Comme ces recherches ont moins de
rapport avec les sciences geographiques , nous nous
bornons a indiquer le contenu du reste de louvrage.
II donne un etat de la population des prisons et mai-
sons de detention de la Hollande et de la Belgique, en
1827, un tableau des institutions charitables de ce pays ,
une description du bagne d Anvers, de la maison de
force de Gand , des renseignemens sur les mesures
prises a Hambourg et a Munich , pour I'extinction de la
mendicite; un grand travail sur le paupeiisnie en An-
( '57 )
gleteire, et sur ses colonies penak'S <le rancieiine Ame-
rique du nord el des lies de la nier du Sud , a la nouvelle
Galles eta la terre de Vandienien. Nous avons distingue
un exanien critique des etal)liss>emens peniteniiers de
Glocester et de Milbaiik. II presente I'analyse du nou-
veau systeme de colonisation par emigration volontairo
dans le Canada et la Nouvelle-Ecosse , celle des penit. n-
tiers des Etats-Unis d'Anierique du nord, notamment
de celui d'Auburn, et de Sinsing, de la niaison de Ge-
neve, et de Lausanne, et de Brauwilliers en Alleiuagne.
Enfin, il a extrait des meilleurs documens, un ta-
bleau des colonies niiiitaires et agricoles de la Suede,
de la Prusse, de la Russie, de I'Espagne, de I'Aulriche,
et des etats d'Allemagne. .
Get ouvrage, rempli de fails est enricbi de tableaux,
statistiques ; il est digne d'occuper les meditations des
hommes d'etat, et par son universalile, il est de nature
a porter un grand jour sur les essais de colonisation
tentes dans les diverses parties du monde civilise.
En faisant hommage de son travail a la Societe de
geographie, I'auceur a senti que loutes les sciences se
touchent el s'eclairent mutuellement , et que celle qui
fait ici I'objet de nos etudes , ne pouvait que profiler de
tanl de recherches, ajoutees aux renseignemens qu'il a
recueillis sur les lieux, dans des pays peu connus de
nous, quoique voisins de nos frontieres.
IsAMBEHT.
( 58 )
Rapport sur un ouvrage intitule : De la Sendee militnire.
M. Isambert fait un rapport verbal sur un ouvrage
qui a ete adresse a la Commission centrale,et qui a pour
titre : De la Vendee militaire, comprenant les deparle-
mens de la Vendee, des Deux-Sevres, et una partie de
Maine-et Loire et de la Loire-lnferieure.
L'ouvrage est divise en deux livres , I'un statistique et
historique , et I'autre intitule: Etat politique.
Dans le premier livre, il a signale particulierement le
chapitre v, divise en 5 paragraphes, relatif aux diver*
niarais du departenient de la Vendee. 11 a paru au rap-
porteur qu'apres la statistique de M. Cavoleau, qui tou-
tefois n'embrasse que le tiers de la con tree decrite par
I'auteur, ce dernier a compose l'ouvrage le plus com-
plet sur cette partie du territoire francais, et meme que
ce chapitre renferme beaucoup de dociimens qu'on cher-
cherait vainement dans cette statistique; il est d'ailleurs
accompagne de plusieurs planches : Tune est consacree
aux marais du nord-ouest, qui sont coupes par un
nombre immense de canaux, notamment a la commune
de Saint-Jean-de-Mont : ce qui explique la ditficulte qu'on
eprouve a pacifier cette partie du deparlement encore
troublee par des bandes armees.
L'autre, au marais desseche du midi, ou marais de
Lucon,avec une seconde planchedes profils des canaux.
Cette publication est d'autant plus iniportante, que le
gouvernement vient de publier une ordonnance pour
le dessechement des marais mouilles de la Sevre Nior-
taise.
( 59)
Dans le livre II, I'auteur a don tie des renseigneniens
assez precieux sur I'etat moral de la population de la
Vendee. C'est une etude qui a ete trop negligee, et qui,
tant qu'elle ne sera pas plus avancee, laissera subsisler
beaucoup de projets plus ou moins divergens pour la
pacification de cette contree.
Dans le Bocage, c'est I'isolement des habitans et hi
difficulte ou I'absence de communications avec les cen-
tres de civilisation, par la multiplicite des baies, des
ravins, et le defaut de chemins praticables.
Dans le marais du nord , qui a ete la patrie de Char-
rette , on est plus embarrasse d'expliquer les motifs qui
rendent une population en communication avec la mer
et avec la plaine, en hostilite avec les institutions.
Quant aux marais de la SevreNiort.iise, ils sont habi-
tes par une population sauvage et malheuieusequi vit
presque sans lois.
Du reste, I'ouvrage, qui parait devoir etre complete
par un troisieme livre, est principalement destine aux
etudes militaires, auxquelles I'auteur anonyme, officier
superieur, se livre avec beaucoup de succes.
C ^o )
DEUXIEME SECTION.
UOCUMENS, COMMUNICATIONS, NOUVELLKS
GEOGRAPHIQUES, ETC.
ExTHAiT des Annates de Bergfuius (raai i833,p. 224).
ILES RALIK.
Le capitaine Chromtschenko, commandant le trans-
port russe V America, ayant ete charge, dune expedition,
partit de Kronstadt le 27 aoi\l i83i avecun chargement
pour Petropaulowskoi et la Nouvelle-Archangel. Pen-
dant ce voyage, M. Chromtschenko chercha a determi-
ner la position des lies situees dans le Grand-Ocean ,
entre 5 et 12 degres de latitude N. , et qui, depuis le
premier voyage du capitaine Kolzebue sur le Rurik, sont
connues sous le nom de Chaine de Ralik. II executa le
plan detaille de deux groupes de cette chaine, nommes
Namu et Ouadelen, qui n'avaient encore ete decrits par
personne. Voici le resultat de ces recherches:
i" Les groupes Odia et Namu, ainsi nommes par les
navigateurs anglais Lambert et Ross, sont beaucoup
plus eloignes I'un de I'autre qu'on ne le trouve marque
sur les cartes , d'apres la notice qui a ete donnee par ces
navigateurs, et ils s'etendenl environ ao milles plus au
nord.
( 6i )
a" Lc groiipe Nainii setend dans une direction N.
3o" O. et S. So" E. Sa longueur dans cette direction est
de 29 milles 1/2 geogr., et sa plus grande largeur, qui
est dans la partie S. est de 1 1 milles 1/2. Cegroupe con-
tient'5 grandes iles et 20 petiles qui sont toutes unies
entre elles par un recif de corail. Dans ce groupe,
Chromlschenko determina par des observations astrono-
miques la position geographique des iles suivantes:
a. La pointe orientaie de la plus grande ile du S. est
par 7° 45' de lat. N. el 168° 23' 46' de long, orientaie de
Greenwich (166° 3' 22'' de Paris).
b. La latitude du milieu de I'lle du centre est de
7° 59' N., et sa longitude 168° i3' 36" E. de Green-
wich (ib'S" 53' 12" de Paris).
c. La latitude de la grande tie, qui est la plus nord de
tout le groupe, est 8° 9' 45", et sa longitude 167" Sp'
de Greenwich (i65° 38' 36" de Paris).
3° Le groupe Ouadeleu s'etend dans une direction N.,
61° O., et S. 61° E. II a dans cette direction 63 milles 3/4
delongueur,etadanssa plus grande largeur 10 milles 1/2.
II consiste en 44'l6s grandes ou petites, qui sont toutes
jointes ensemble par un recif de corail. C'est \\x\ des
groupes les plus dangereux pour la navigation.
M. Chronischenko a determine la position geogra-
phique des lies suivantes :
a. lie la plus sud du groupe. Lat., 8" 45' i5''N. j
long., 167^45' 32" E. deGr. (i65»25'8" de Paris).
b. Ile centrale. Lat., 9" 6' ^6" N. ,• long., i67''i6' 4' E.
deGr. (i64»55'4o" de P.).
c. Ile du N.O. Lat., 9" 19' 7"; long., 166^ 55' 56" E.
deGr. (i64« 35' 32 de P.).
( 62 )
M. Chromtschenko ayant surtout a coeur le succesde
I'expedition qui lui avait ete confiee, ne put pasachever
le recherche des deux autres groupes de la chaine de
Ralik, princlpalement parce que rarriere-saison arrivait.
Parmi les tiois chronometres qui lui avaieiit ete"delL-
vres pour cette expedition , il y en avait un qui a\ait ete
construit parllauthjhorloger a Saint-Petersbourg, dont
il fait le plus grand elo^e ; car, dans tout le voyage de
Kronsladt au Kamtschatka, qui dura onze mois et onze
jours, la marche de ce chronometre ne varia que de
+ o" ap a + o" 7 1 .
[Extrait de la Gazette de Saint-Petersbourg.)
Annales de Berghaus (juillet i833 , page 4»6).
Reapparition de Vile Ferdinandea {ou Julia) dans la
Mediterranee.
Le volcan qui setait eleve dans la mer il y a deux ans,
qui avait produit la petite ile Ferdinandea, et avait en-
suite disparu, ne laissant au-dessus du niveau de la mer
aucune trace, s'est montre de nouveau dernierementau
meme point. Dans la soiree du 22 inai dernier, on aper-
cut dans la direction du banc de corail un nuage de fu-
mee ires epais, qui selevait du meme point d'ou etait
sorti le volcan, et dans la nuit du 23 , on vit de plus des
etincelles au milieu de cctte fumee.
( La Cerere , gazette de Palerme. )
(63 )
Nonvelles du voyage de Lander.
M. Laird , associe a Lander dans son expedition au
Niger, et qui vient d'arriver en Angleterresur/aCo/o/w-
hine, apporte des nouvelles de Lander, qui est actuelle-
ment a Alia. Elles vont jusqu'au 21 juillet dernier. Son
voyage sur la riviere, depuis I'embouchure du Nun
(dans un canot) la occupe trente-deux jours. II a ren-
contre M. Laird et le lieutenant Allen, qui le croyait
raort ou de retour en Angleterre, au moment ou ces
derniers descendaient le fleuve pour regagner la cote
sur le batiment a vapeur. C'etait le 21 juillet. Lander
convint sur-le-champ que M. Laird retournerait a la cote
sur la Quorrah, et prendrait avec lui une partiedu ohar-
gement de la Colombine, tandis que lui (Lander), avec
le batiment a vapeur en fer, pousserait jusqu'a Rabba et
a Boussa. II semblait avoir pris la ferme resolution de se
distinguer par une decouverte et par Tetablissement de
relations de commerce avec It's naturels, ce a quoi il es-
perait beaucoup reussir. M. Laird, pendant son sejour
en Afrique , a beaucoup souffert de la fievre. II est reste
pendant plusieurs mois dans une miserable hutte ou il
n'avait plus que la peau sur les os.
(Moniteur du 24 Janvier. — Debats du 28.)
( 64 )
TROISII^ME SECTION.
ACTES I)E LA SOCIETE.
PRESENTATION DE I.A SOCIETK AU ROI,
A I'occasion da nouvel an.
La Societe de Geographic ayaiit etc ad;iiise a presen-
ter au roi ses honimagcs a I'occasion du noyvel an, iinc
nombreuse deputation s'est rendiie, le i"' Janvier i834)
»u palais des Tuileries , ayant a sa tete M. le due Decazes>
president de la Societe, et elle a ete introduite, a une
heure et demie , a I'midience deS. M. Le Roi avait a ses
rotes le Prince Royal et les autres princes ses fils, puis
la Reine, les jeunes princesses, et niadame Adelaide. Une
cour brillante environnait leurs niajesteset leur auguste
famille.
M. le due Decazes a adresse au Roi le discours sui-
vant ;
n Sire,
« La Societe de Geographic s'etait placee sous votre
« protection avant que la France vous eiit confie ses
<t destinees.
« Fiere du patronage du due d'Orleans , elle na pas
« reclame en vain les hontes du Roi. Que Votre Majeste
« daigrie en agreer notre profonde reconnaissance.
<> Qu'ElIc nous permelte aussi de reporter jusqua
n Elle nos respeclueux renierciniens pour les encourage-
« mens que votre noble Fils a bien voulu accorder a nos
« travaux. Heritier de voire bienveillince pour nous,
« conime de votre sollicitude pour la prosperite et le
« l>onheur de la France, sa munificence provoque et
. ( 65 )
« eclaire le zele de nos voyageurs, en dirigeant leurs
« efforts vers une voie nouvelle d'utilite pratique que
« leur genereuse emulation s'empressera de suivre.
« C'est nous acquitter envers lui,selonson coeur, que
«« de ne pas separer notre gratitude pour ses bienfaits
« de notre devoument a votre personne et k votre
n auguste famille, et de lesconfondre dans nos homma-
« gesavec notre respectueuse confiance dans cette haute
« sagesse que la Providence elle-nieme seinble s'appli-
« quer chaque jour de plus en plus a signaler a la re-
connaissance publique. »
Le Roiadaigne temoigner, dans sa reponsc, !oul I'in-
teret qu'il continue d'accorder a la Societe de Geogra-
phic, dont il se plait a conserverle patronage; ilvoitavec
plaisir que son fils partage ses sentimens envers elle et
qu'il lui ait confie le soin de decerner les encourage-
mens qu'il destine aux voyageurs dont les efforts au-
ront procure a la France les plus utiles resultats ; c'est
en s'attachant a diriger les recherches de la science vers
un but profitable a I'humanite et aux interets de la pa-
trie , qu'on lui donne sa plus importante et sa plus
noble destination. Le Roi a rappele I'attrait que I'etude
de la Geographic a eu constamment pour lui : il aimera
toujours a proteger une science qu'il a cultivee des sa
jeunesse et qu'il a professee pendant I'exil ; il eprouve
une sympathie reelle pour les travaux de la Societe , elle
peut compter sur sa constante bienveillance.
M. le due Decazes s'adressant ensuite a la Reine, a dit:
« Madame ,
« Je prie Votre Majeste d'accueillir avec bonte les res-
« pects et le devoument de la Societe de Geographic,
« fiere de se presenter a vous sous le douiile patronage
« de son roi et de votre auguste fils.
( ^ti)
« Voyageurs sur cette terre, nous n'en connnisson:»
'> pas de si luintalnes ou les peuples ne vous benissent et
« ne vous portent en vie. II nest pas de haines si injustes
« et si onveniniees, pas de passions si ennemies qui ne
« se taisent a votre nom,oii plutot qui ne repetent avec
« nous que si vous etes la plus heureuse des epouses et
« des meres, vous etes aussi la plus heureuse des reines ,
« car jamais reine ne fut 1 objet de plus de veneration et
« de plus d'amour. »
La Reine a bien voulu repondre a cat hommage par
les plus gracieuses paroles de bienveillance et d'interet.
PROCES-VERBAUX DES SEANCES.
Seance dii lo jatwier i834.
Le proces-verbal de la derniere seance est lu et adopte.
M. le professeur Moll, membre de la Societe, ecrit
d Utrecht a la Commission centrale que les redacteurs
de I'Almanach de la marine hoUandaise recevraient avec
plaisir en echange de ce recueil uii oxemplairedu Bulle-
tin de la Societe. M. Moll appelle aussi lattention sur
un nouveau journal de marine public en HoUande,
et il signale les articles qui interessent plus speciale-
ment la geographic j il espere pouvoir procurer a la
Societe, si elle le desire , un exemplaire de ce recueil.
La Commission accepte avecempressement I'offre de M.
le professeur Moll , ainsi que les deux cchanges qu'il
propose.
Apres la lecture de la correspondance , M. Jomard
annonce qu'une deputation de la Societe, presidee par
M. le due Decazes , a cu Thonneur de presenter au roi
ses felicitations, a I'occasion de la nouvelle annee. Sa
Majeste a accueilli avec bienveillance ia deputation, et
lui a temoigne tout I'interet quelle porte aux travaux
de la Societe et aux progres de la geographic.
( 6-7 )
M, Jumai'cl depose siirle bureau letliscours proiioiice
par M. le due Decazes el remet en ineme temps celui
qu il avail prepare lui-menie sur I'avis que M. Decades
ne pourrait presenter la deputation.
Le meme nieinhre communique a la Societe, de la
part de M. Henri Ternaux, la relation du voyage a I'lle
d'Amat(Taiti)et aux ties adjacentes, fait en 17745 P'T' '"^
capitaine du paquebot le Jupiter de conserve avec la fre-
gate f Jguila {V A\g\c), conimandee par le capitaine de la
marine royale espagnole Don Domingo de Bonechea.
L'examen de ce nianuscritesl renvoye a la section de pu-
blication, el M.d'Urville veut bien se charger d'en pre-
senter I'analyse a la prochaine seance.
M. Warden oftre aussi , de la part de M. Henri Ter-
naux, une lettie ecrite par le cure de Santiago de Tepe-
huacan a son eveque , sur les moeurs el les coutumes
des Indiens soumis a ses soins; cette lettre a ete tra-
duite sur lemanuscrit original par M.Ternaux. Remerci-
mens el renvoi de la lettre au comite du Bulletin.
Le meme membre communique suCcessivement a
I'assemblee trois notes: I'une sur un nouvel etablisse-
nient pour les noirs libres des Etals-Unis, au cap des
Palmes sur la cote d'Alrique ; une autre sur le traiie
de commerce entre les Etals-Unis et Siam, et la derniere
sur les canaux de Chesapeake, de Delaware et d'Oliio.
M. Daussy donne lecture de deux notes relatives a la
position des lies Ralik dans le Grand-Ocean el a la re-
apparition monientanee de Tile Ferdinandea (on Julia)
dans la Mediterranee. Renvoi au comite du Bulletin.
Un membre communique de la pari de M. Desaugiers
membre de la Societe, une note sur la population de la
Crete en i832 , et un itineraire de la Canee a Candie en
passant par Relhimo et de Candie a la Canee, en reve-
( 68 }
nant par Gorlyne, les monasteres d'Assoinato» et d'Ar-
cadie. Renvoi au comite du Bulletin.
M. d'Ave/ac lit quelques fragmens d'une esquisse ge-
nerale de TAfrique , sous les divers rapports de geogra-
phic naturelle , ethnologiqne et historique.
La Section de comptabilite presenie le budget des
recettes et des depenses de la Societe pendant I'exercice
1 833- 1 834 • il 6st depose sur le bureau pour etre dis-
cute a la prochaine seance.
La Commission centrale procede a la nomination de
deux commissions speciales pour juger les concours. Lii
premiere, chargee de rechercher quelle a ete la decou-
verte la plus importante en geographic, faite dans le
cours de I'annee i83i , est composee de MM. d'Avezac,
d'Urville, Eyries, Jomard et Roux de Rochelle. La se-
conde, chargee d'examinerun memoire destine au con-
cours pour le prix relatif au nivellement des rivieres de
France, se compose de MM. Coraboeuf, Daussy et
d'Urville.
Cette nomination donne lieu a une discussion dont
le but est de savoir si les membres du bureau ont voix
deliberative ou seulement consultative dans toutes les
commissions. La question, presentee sous ce point de
vue general , sera renvoyee a I'examen dune commis-
sion speciale. Quant a la commission de cinq membres
chargee de decerner le prix annuel, il est decide, sur
la proposition de M. d'Urville, que les membres du bu-
reau qui s'y adjoindraient a ce seul titre , n y auront que
voix consultative.
( 69 )
Seance du 'i.\jan\>iei:
Le proces-verbal de la derniere seance est lu et acJopte.
M. le comte de Montalivet, pair de France, et M.
Hersant, consul de France a Rotterdam , qui vi<»nnent
d'etre adniis au nombre des membres de la Societe, lui
adressent des remercimens et promettent de ia secon-
der dans ses utiles travaux.
M. Francis Lavallee ecrit de la Trinidad de Cuba, pour
renouveier ses offres de service a la Societe et lui an-
noncer I'envoi d'un memoire sur I'histoire, la geogra-
phic et la statistique de I'ile de Cuba.
M. Adam deBauve, dans une lettre datee deBelcm de
Gram Para, le 29 aoiit i833, adresse denouveaux de-
tails sur son voyage et celui de M. Leprieur dans la
Guiane, et sur les obstacles qu'ils om rencontres dans
I'execution de leur entreprise. Par suite du naufrage de
ses embarcations sur I'Amazone, M. Adam de Bauve
aura a regretter la perte de ses observations et de ses
collections de botanique et d'entomologie. Quatre
de ses compagnons de voyage ont peri dans le fleuve.
Ce voyageur se propose de renionter I'Amazone jus-
qu'au Watuma, et si, par cette riviere, il ne pent ga-
gner I'Essequebo, il se rendra sur le Rio Branco, ou il
croit avoir plus de chances de succes. A son arrivee a
Demerary, M. Adam de Bauve adrcssera a la Societe
une relation et des esquisses sur les diverses peuplades
des Guianes, ainsi que des vocabulaires des races intlien-
nes, et il f'era connaitre la suite de son itineraire. II an -
nonce que depuis le 4 avril, quil est separe de M. Le-
prieur, il na recu aucune nouvelle de lui.
M. Alvarez Guerra ecrit a la Societe quil arrive d'Es-
pagne avec une invention utile a Tagriculture, et quil se
(7'>)
propose de concourir au prix offert par S. A. R. Ms"" le
duo d'Orleans.
II serarepondu quecette invention ne rentre pas dans
les attributions de !a Societe.
M. le colonel Coraboeuf lit une note sur les travaux
de la nouvelle carte de Suisse qui se poursuivent avec
activite sous la direction deM. le general Dufour.
M. Daussy communique egalement une note sur les
travaux hydrographiques que le capitaine Vidal vient
d'executersur les cotes occidentales des lies Britanniques;
il donne ensuite, d'apres M. Laird, quelques renseigne-
mens sur le voyage de Richard Lander en Afrique.
M. le president annonce que Ton a lieu d'esperer
I'impression prochaine a liniprimerii^ royale, de la grani-
maire et du vocahulaire Berbers de Venture, que la
Commission cenlrale avait deja manifeste ledesir devoir
publier.
M. Jomard depose ensuite sur le Bureau, 1° Une se-
rie de nunieros du Moniteur Egyptien, dont plusieurs
renfernient des nouvelles geographiques ; 2" de la part
de M. de La Pilaye, plusieurs dessins representant des
antiquites celtiques de Reginea en Bretagne; 3° une
lettre de M. le baron de Hammer, qui en transmettant
un ouvrage de M. le comte Serristori, intitule Essai sta-
tistique delltalie^ temoigne le desir qu'aurait ce savant
d'etre nomme correspondant.
M. d'Avezac lit une notice sur les Berbers.
Le meme membre soumet a la Commission centrale
la proposition douvrir une nouvelle serie de nunieros
pour les volumes du Bulletin dont la publication est
arrivee au tome xx. Cette proposition est renvoyee a,
I'exaincn prealable du Comite du Bulletin.
C 70
OUVRAGUS OFFERTS A LA SOCIETE.
Seance du lo jarwier i834.
Par M. Alhert-Moiitemont : Bibliotheque universelle
ties voyages y iS" livr. , in-S", renfermant la suite du
voyage de Laperouse et les voyages de Maurelle, Ort-
lock et Dixon , Bligh, Meares, Wilson, Edwards, etc.
Par la Societe asiatique : Cahier de decemhre de son
Journal.
Par la Societe de geologic : Feuilles i a 5 du tome iv
de son Bulletin.
Par M. Bajot : Annates maritimes et coloniales,cai\neTS
de novembre et decenibre.
Par M. le directeiir : Bibliotheque de Geneve, cahier
d'octobre i833.
Par MM. les auleurs et editeurs : Neuf liuraisons de
la France pittoresque.
Par MM. les directeurs : Cabiers de decembre du
Recueil industrial , du Memorial encyclopedique et du
journal Vlnstitut.
Seance du i^ Janvier.
Par le bureau des Longitudes : Connaissance des temps
jwur iSi6. — Annuaire pour i834.
ParM.Daussy : Ta^/e desPositions gcographiques, in-S".
Par MM. Vander Maelen et Meisser : Dictionnaire
geographique de la province de Hainant, i vol. in-S".
Par M. le comte do Serristori : Saggio statislico dell'
Italia, I vol. in-S*^. Vienne, i834.
Par la Societe royale de Londres : Adress delivered at
the anniversary meeting., in -4°.
Par M. le capitaine d'Urville : i4* et i5'' livraisons
du Voyage pittoresque autoiir du monde.
Par la Societe d'Eniulation du departement du Jura :
Seance publique de cette Societe pour i832, in-S".
( 72 )
Bibliographie g^ographique.
OUVnAGES CENKRAIIX.
Journal of the royal Geographi-
cal Socictr of London. — Jotirnnl
de la Socicte roy.ile geoi;raplii-
qiie de 1 oiidres, vol. iti , i'' par-
tie . in-S".
FOBoPr..
Tour through Be/giam to Paris. —
Tournee dans la Belgique et jus-
qu'a Paris, par T. Barlow. In-i8.
Travelling memoirs {luring a
^ Tourthroiigh Belgium, Uheniih Prus-
sia, Germany), Switzei land , and
France. — IMetnoires H \ii: voya-
geur pendant iine toni iice duns
la Belgique, la Pi iism IDiinane,
TAIIemagne, la Suisse i-t l.i Fran-
ce, pendant I'et^ et rautonine de
i832, Y compris une excursion
sur leRliin eii le remontant, par
T. Djke Junior. i vol. in-8o.
La monarchie prussienne, cousi-
deree .sous las rapports topogra-
phique, statistique, administra-
tifet et'ononiitjne , par Leopold
Krug. Berlin, 1 833, in-4°.
Coup^'ccil general sur les divers
arrondissemens dans lesquels
Tempire de Russie est actuelle-
ment partage, sous le rapport
des communications par terre et
par eau, avec des details stir le
commerce et les cchanges qui
ont lieu par les routes d'eau , uu
avant propos hi.slorique sur cette
branche de Tadministration , et
un apjiendicecontejiant une des-
cription dctailh'C du canal de
Windau.Riga,i833. i vol. in 8'.
Dictionnaire geographique et
historique de I'empire de Russie,
contenant le tableau politique et
statistique de ce vaste pays; les
denominations , les divisions an- j
ciennes et novivelles des contrees, '
villes, bourgs; leur position geo-
graphique, leur bistoire, leurs
produclions uaturelles et indus-
trielies , leur commerce , leur cli-
mat, la population, les mwurs,
coutumes, religions iles babitans
de cet empire ,. par N.-S. Wsevo-
lojsky ; troisieme edition, aiig-
inentee d'un supplement par
Maurice Allart. Petersbourg ,
1833. 1 vol. in-8°.
J-EVAJIT.
Excursions in the Holj--land,
Egypt, JVuBia, Syria. — Excur-
sions dans la Terre Sainte, I'E-
gypte , la Nubie , la Syrie . etc. ,
par J. Madox; avec beaucoupde
gravures. a vol. in-8°.
AFBIQUE.
Travels and researches in Caf-
fraria, describing the character,
customs ani moral condition of the
tribes inhabiting that portion of Sou-
thern Africa. — Voyage dans la
Cafrerie et recberches concer-
naut ce pays, ou Ton decrit le
caractere , les coutumes, la con-
dition morale des peuplades qui
babitent cette partie de I'Afrique
meridionale, avec des observa-
tions bistoriqups et topograpbi-
c|ues sur les elablissemensbritau-
niques cjui s'y trouvent, I'intro-
duction du cbristianisme et les
progr^s de la civilisation; par
;>. Kay, In-i2.
AMF.nlQUE.
Tour of the American lakes, and
among the Indians of the North
West territory, etc. — Voyage sur
les lacs Americaius et jiarmi les
Indieiis du rerritoire du N.-O.,
en i83o, avec des observations
sur le caractere et la condition
future de ccite wvce. i vol. inii.
BULLETIN
DE LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE.
FEVRIEIl I 834.
PREMIERE SECTION.
t
MEMOIRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPPORTS.
ExAMEN et rectification des positions cleterminees astro-
nomiquenient en Afrique par Mungo-Park.
Ce memoire a ete redige a la fin de 1829, et les resultals
quant aux longitudes , en out ete mentionnes explicitement dans uu
autre ecrit ( Reponse aux objections elevees en Anglelerre conire Fan-
tftenlitile dii voyage de Caille a Ten-Boitoue ) , public en avril 1 83o. Un
an aprfes (i3 Janvier i83i), M. Oltmanns a lu a Tacademie des
Sciences de Berlin un travail sur le meme sujet, imprime en 18 32
parmi les Memoires de ladite academte , sous ce titre : De la nullite
de quelques corrections qui ont ^te proposees a Vegard des dernieres obser-
vations de latitude faites en Afrique par Mungo-Park.
Sans contredit, des observations astronomiques bien
faites sont le meilleur de tons les docuniens que \» geo-
graphie positive puisse recueillir et mettre en oeuvre.
Mais par malheur les observations de cette nature ne
sont trop souvent connues que par les resultats qui en
sont public's; et le geograplie, inceriaiii s'il doit admet-
Ire ou rejeter les determinations ainsi oblenues , se fait
6
( 74 )
;t l)Oii droit ceile cJoubh; queslioii : \es observations sonl-
elles bonnes? ont-elles ete ealcnlees exacten)ent? car la
reunion de ces deux conditions est indispensable pouf
meriter nne entiere confiance.
Or il arrive trequeniment que les observations sont
douteuses; et il nest guere plus rare que le calcul en
soit errone par negligence, ou entaclie de corrections
arbitraires. Lors done que les positions goononiiques
qui en resultent ne concordent point avec celles que
procurent les documens itineraires , il y aurait grande
imprudence a sacrifier aveuglement ceux-ri a la trom-
peuse precision des premieres.
Ces considerations sonl en grande partie applicables
aux latitudes et longitudes consignees dans les voyages
de MungoPark en Afrique. Muni d'instrumens propres
a foire des observations, ce voyagcur celebre a essaye
de determiner astronomiquement la position de divers
lieux places sur les routes qu'il a parcourucs.
Quant a son premier itineraire , il n'offre que les liuit
latitudes que voici :
Pisania i3"35
Kolor. . ■ ' • 4'j
Kourkouranyi i3.6.'J
Jong. . .,.'...,,.. ii'i . i5
Jonibo . . . i\ ^.^v:'i'V ; J t'-. . -iK . 1 4 ■ 3 4
Kanji . . 14. to
Fissora i 4 • 5
J ana i5. 5
Comme les observations d'ou ces latitudes ont ete
conclues , n'ont jamais ete publiees, il est impossible de
verifier si dies sont calculees avec justesse; niais il y a
lieu de le presumer, si Ton reflechit que les eleraens du
calcul ont dii passer sous les yeux du savant Rennel ,
qui nous cu a fait connaitre les resultats.
(75)
Dans son beau travail hyfJrographique sur la Gamble,
le lieutenant Richard Owen a fixe la position absolue de
Pisania par i3° 33' N.; la determination de Mungo-Park
en diftere de 2' seuleinent.
Quant aux autres latitudes, nous ne possedons point
d'eleniens de verification.
Quoi qu'il en soit, on admettra volontiers que les
observations astronomiques du voyageur, faites a I'aide
d'un sextant de tres petite dimension , ne peuvent , il est
vrai , etre acceptees que comme des eleniens imparfaits ,
mais qu'on en pent du moins conclure des positions
approximatives , toiijours precieuses dans le dennnient
absolu ou la geogniphie de ces contrees se trouvait a
cet egartl.
Je passe au second itineraire , jalonne d'un grand
nombre de positions observees, et qui offrirait par con-
sequent un document geograpbique bien precieux , si
Ton pouvait avoir confiance aux observations consignees
dans le journal de route du celebre Ecossais. Malheu-
reusement il n'en est point ainsi : le plus sin)ple examen
suffit pour faire reconnaitre la necessite d'apporter une
grande defiance dans I'eniploi des observations dont il
s'agitj elles ont toutes besoin d'etre soumises a une
discussion serieuse, a une severe e'pnration , apres la-
quelle il restera bien peu de chose de I'apparente ri-
chesse que presente au premier abord une masse de
vingt-cinq latitudes et cinq longitudes determinees as-
tronomiquement.
Surce nombre, le journal de route dePark a conserve
vingt-deux observations origiiiales pour la hititude et
quatre pour la longitude; elles sont, a doux latitudes
et une longitude pres, accompagnees du calcul employe
par le voyageur pour obtenir les positions resultantes;
6.
/
(76 )
son jouriia) coiiticnt en outre trois latitudes et une lon-
gitude observees, sans faire connaltre les observations
orii^inales dou elles sent deduites.
Je m'occuperai d'abord des latitudes. Voici le releve
complet des observations et des resultatsconsignes dans
le journal tin voyageur.
AFaraba, le i5 mai i8o5,haut.mericl. ^ •. I.at. i4°38' 46"N,
Nerico, i8mai (?) i68°35' 14. 4.5t
Tambico, 21 niai 0 166. 5f) i3.53
Soutitabba, 25 mai 0 164.46 i3. 33.33
Bee-Creek , 26 mai 0 164.31 1 3. 3a. 45
Badou, 28 mai 0 163.17 i3.32
Mambari, 3tni;ii 0 162.43 i3.22.Jo
Julifunda, 2 juin , 0 162. ri i3.33
Baniserile, Gjuin 0 161. 8 i3.35
c J • • ^© 'Go. 6
batadou, 9 J"'h j^^
(% 116. 36
Fankia, i4juin.,... 0 139.39 i3.22.3o
Fajemniia, 18 juin 0 159.49 i3.35
Secoba, 24 juin ')p 115.28 13.27. 26
Moiaharra , 9 juillet 0 (incert.) 1 3 . n
Sabousira, 10 juillet ^ » i3.5o
Keminoun, 12 juillet 0 i63.24 14. o
Ba Oulima , 20 juillet 0 166. 4 14. i
Bangassi, 26 juillet 0 168.26 14. o
Koulihori, 5 aout 0 172 45 i3.4i
Koumikoumi , 14 aout 0 177. 7 ia.57
Marrabou, 2 septembre 0 169.54 12.48
KoulikoiTo,i3 septerabre 0 80.45 ia.52
Yamina, i5septembre 0 79.36 i3.i5
Sanii, lyseptembre 0 78.47 13.17
[ 77 )
L'editeur anglais a releve, dans le calrul de la latitude
de Kouniikoumi, une erreur portant siir la declinaison
solaire employee : le voyageur, en effet, a fait usage
tie celle du i5 aout, au lieu de celle du 14, jour precis
de I'observation ; operant la correction, l'editeur a re-
tabli la latitude de ce lieu par i3° 16' 39'.
On ne remarquera point sans surprise que les dieiix
observations de Saladou, destinees a fixer le point fort
important du passage de la Faleme, et qui n'ont point
ete calculees par le voyageur, ne I'aient ete non plus
depuis par personne, et soient reslees comnie absolu-
ment ignorees, meme par Bowdich., qui cependant a
fait un travail special sur les calculs d'observation de
Mungo-Park (i); mais ce n'est pas la seule preuve que
je pourrais alleguer de I'inconcevable legerete avec la-
quelle le critique anglais a execute ses corrections : j ai
reconnu en effet qu'apres avoir note, d'apres l'editeur
du journal de Park, I'emploi fait, le i4 aout, par le
voyageur, de la declinaison solaire du i5; apres avoir,
de son cote, decouvert I'emploi , au 28 mai, de la de-
clinaison du 29, et se trouvanl ainsi dnmcnt averti de
se tenir sur ses gardes, le pretcndu correcteur ne s'est
point apercu neannioins que Paik avail encore em-
ploye, le 3i mai, la declinaison du 3o , et le 6 juin celle
du 7. Et cependant le theme special du critique etait
precisement de corriger les declinaisons. (2)
11 est, je crois, a propos que je donne ici, avec
quelque developpement, un resume du sysleme de cor-
rection imagine par Bowdich, de son motif, et tie ses re-
sultats.
(i) M. Oltmanns est dans le meme cas.
(2) Ces inadvertaiices de I'observateur ont paieilleiueivt euhappe
a M. Oltmanns-
( 78 )
On trouve, des !e coniinencement du journal de Park,
deux articles consecutifs donl voici la version litterale :
« 3o avril : la goeiette de M. Ainsley est arrivee , et
« nous avons aussilot commence a decharcer le bagaae
« et le riz.
n ii avril : donne les bats a renibourrer de mousse,
« etfait peser les paquets. Trouve, lout calcul fait, que
« nos anes ne pourraient porter notre bagage. Achele
« cinq anes de plus avec I'aide de M. Ainsley. »
M. Walckenaer , dans ses Recherc/ies sur VJfrique,
a fait la-dessus I'observation suivante : « Je remarque
« dans ce journal une inadvertance qui a ecbappe a I'au-
« teur et aux editeurs : il y a iin recit de ce que Mungo-
n Park a fait le 3i avril : le niois d'avril n'a que trente
« jours.
Cela est vrai; mais je pense qu'au lieu du 3i avril,
I'auteur a du ecrire le 3o (mal lu 3i par le copiste ou
Timprimeur), et que les deux articles se rapportent a la
menie journee. La suite de la relation presente, sous les
dates des i8 mai, 17 et 18 juin, et i3 aoiit, d'autres
exemplesde la separation en deux articles des notes ap-
partenant a un seul et nieme jour. Telle est , selon moi^
I'explication naturelle de 1 inadvertance relevee par
M. Walckenaer , et cette explication est d'autant mieux
fondee que les phenomenes arrivant a jour fixe, tels que
les eclipses des satellites de Jupiter, sont exactem nt
rapportes a leur veritable date.
Mais Bowdich a juge la chose beaucoup plus grave:
il a cm y trouver un juste motif d'admettre qua partir
du i'''^ mai, les dates du journal de Park sonttoutes er-
ronees d'un jour en moins; et qu'il y a deslors neces-
site, dans chaque calcul de latitude, de substituer a la
declinaison du quanlieme ecrit, la declinaison du jour
( 79 )
suivant. li a developpe ce systeme dans un nieinoiie,
publie par la voie i\e la lithographie, assezrare, et dont
je dois la communication a 1 aimable obligeance de
M. Walckenaer.
Voici le releve complet des latitudes corrigees par le
critique anglais, d'apres le tableau recapitulalif qu il ea
a lui-meme dresse.
Faraba
Nerico ......
Tambico . . . .
Soutitabba . .
Bee-Creek , .
Badou
Manibari.. 'i '. ,
Julifonda. . . .
Baiiiseiile. . . .
Fankia
Fajemmia . . ,
Secoba
Moiaharra. . .
Kemiuoun . . .
Ba Oulima. . .
Bangassi . . . .
Koulihori. . . .
Koumikoumi.
Marrabou.. . .
Koulikorro . .
Yamina
Sami
' ? f; f >^ ' ff *
I r> 0",
i3"'43
46'
14.18
i3,()5
13.44
13.42
i3.3.
i3.3o
i3.4i
i3,4i
3.>
13.25.
3o
i3.36
13.26.
afi
i3.3
i3.5i
i3.6 I .
3o
13.46
3o
13.25
3o
12.58
12. a5.
40
II. ag
12 .52
12.54.
20
.f,iiLin'i
Sabousira, que Park a place par i3° 5o' N. , d apres
une bauteur meridienne lunaire, n'a point ete souniis
a la correction systematique de Bowdich : cette correc-
tion eut ete, dans I'espece, tellement forte (elle eiit de-
passe 2°), que le critique a pense sans doute que Park
avail ici, comme a Badou et a Koumikoumi, employe
( 8o )
par meprise la declinaison convenable a I'hypothese da
correcteur. II faut noter, d'autre part, qu'une applica-
tion plus attentive dii sysleme de rectification de notre
Anglais, doit produire, sur quelques latitudes, des
resultats differens de ceux qu'il a adoptes; ainsi il eut
dA conclure
Manibari. par i3' Sg' 56"
Baniserile 1 3 . 35 . o
A mon tour, je vais placer ici le releve des latitudes
qui resultent des observations de Park d'apres nies pro-
pres calculs, c"est-a-dire en operant avec inoins de ne-
gligence, en retablissant quand il y a lieu, a la place
dune declinaison anticipee ou tardive , celle qui con-
▼ient precisement au quuntieme marque, et enfin sans^
omeltre les observations non encore calculees. J'aid\\ na-
turellement, au contraire, laisser de cote les resultats
dont le voyageur ne nous a point transniis les elemens^
Nerico 14° 4' 44"
Tambico i3.53.28
Soutitabba i3.34. 8
Bee-Creek i3.33.45
Badou 1 3. 31. o
Mambari i3.3i.22
Julifouda i3.3a. o
Baniserile 13.28.48
^i3.i4.43
batadou '
I i3.3i.35
Fankia 1 3 . 2 1 . 45
Fajemmia 1 3. 35. 42
Secoba 13.27.36
Keminoun i3. 58.56
Ba-Oulima i4- 2.23
Bangassi t3.59.3i
Koulihori i3.4<>44
Koumikoumi 1 3. 16.39
(8, )
Marrabou i2.4;'.25
Koulikorro i a . 5 1 . 55
Yamina r3.i5. 7
Sami 13.17.33
Plusieurs de ces latitudes soiit incontestablement
mauvaises, comme il est facile de sen convaincre par
quelques verifications.
Ainsi le passage du Nerico, par 14° 4 44" ^st d'en-
viron tout un degre plus nord que Rennel ne I'avait
etabli d'apres les gisemens releves par Mungo-Park au
retour de son premier voyage. Park se serait-il trompe
alors ail point de supposer vers le siid cequi serait vers
le nord.f* la chose est pen probable : et lorsqu'il a note
le point ou il a traverse le Nerico, vers !e S. E. de Me-
dina, en passant par Koiissay, il n'y a certci pas lieu
d'imaginer qu'il faille y substituer le N. E. ; on trouve
en divers endroits , etnotaniment dans le voyage de(iray
et Dochard , la preuve que Koussay est bien en effet
dans le S. E. de Medina; or cette derniere ville, com-
prise dans I'itineraire de Pisania a Joag, tombant vers
13" 43' de latitude, il serait absurde d'adniettre le pas-
sage du Nerico par 14° 4'> ^t moins encore par i4" 18'
comme le veut Bowdich.
Badou, par i3° 21', est de pres de 45' au N. du point
qui lui correspond dans le premier voyage construit par
Rennel; or il resulle des renseignemens recueillis par
Mungo-Park, dans son second voyage, tant a Badou
meme qua Beniserayl , que la distance de Badx)u a Laby
dans le Fouta-Ghialon, est de trois fortes journees ou
de cinq moyennes , ce qui ne peut eire evalue, au maxi ■
mum, qu'a t,o milles geographiques; or Laby se trou-
vant, d'apres des calouls que j'ai exposes ailleurs, par
11" 26' N. , il en resulterait, dans les conditions les plus
( 8^ )
favorables, une distance de ii5 milles geographinuos ,
ail niininium, eritre ces tieux points ; ce qui est ahsulu-
inenl inadmissible.
II en faut dire autant de Beniserayl, qui, place ega-
leiuent a irois lories jouineesde Laby, ne saurait se
trouver par ime latitude de i3^ 22 , d'ou resulterait une
distance de 116 milles au minimum.
Mais une preuve, plus trappante que toules ies au-
tres, du pen de conllance que I on doit avoir aux obser-
vations qui nous occupent,c'est la cboquante difleience
de deux latitudes qui devraieni etre identiques : je veux
pailer de celles de Satadou sur la Falenie, I'une de i3"
i4' 43", et I'autre de 12° 3x' 35". Cette derniere s'ac-
corde tresbjenavec la construction , faite parRennel, du
premier voyage de Park , tandis quelle presente une
anomalie remarquable dans la serie generale des autres
latitudes. La premiere, au contraire, est en parfaite har-
monic aveccelles-ci , et, commeelles, se mainlientii une
grandodistanceaunordde la iigne construitepar llennel.
II nest point douleux que la latitude donnee par la
deuxieme observation ne soit preferable a la premiere,
qui apparticnt a un systeme de positions ou j'aiindique
tout-a-l'heure plnsieurs points evidemment fautifs.
Or il est a remarquer que la seconde observation est
que hauteur meridienne de Jupiter, tandis que loutes
Ies precedentes sont des hauteurs solairesj et que le dou-
ble angle de hauteur incsure en dernier lieu a Satadou
n'excede point la porlee ordinaire dun sextant, tandis
que tous Ies autres depassent de beaucoup cette portee;
et cependant Mungo Park a du employer pour tous le
meme instrument (un petit sextant de poche).
Ne serait-ce point dans cette distinction ties impor-
tante des angles au-dessous et des angles au-dessus de
( 83 )
I20° que gk la demarcation generale a etablir entre les
observations adniissibles et celles qui ne meritent point
de confiance? II y a tout lieu de le penser. Etd'abord,
en effet , on doit natuiellenient regarder sinon coninie
bonnes, au moins connue peu susceptibles d eiieurs
graves, des hauteurs prises directement, soit al horizon
artificiel , soit a ! horizon visuel , avec un instrument
specialement destine ad hoc. Les cinq observations de
Satadou , Secoba, Koulikorio, Yamina et Sami appar-
tiennent seules a cette categorie.
Dans I'autre classe d'observations , au contraire, I'er-
reur a dii etre d autant plus facile, que i'angle a mesu-
rer n'a pu etre obtenu qu'au nioyen de quelque procede
insolite, et sans doule coniplexe, puisque la portee de
I'instrument ne s'etend point au-dela de 120^.
II ne sera point sans interetde rechercher comment
s'y est pris notre observateur pour mesurer ces doubles
hauteurs solaires de ibg" a 177°.
Voici ce qu'il en dit lui-meme dans son journal, sous
la date du 17 mai : « J'ai essaye d'obtenir la hauteur
« meridienne du soieil , au moyen de 1 observation
« par derriere [back observation) avec mon sextant de
« poche de Troughton; et apres avoir soigneusement
n examine la niarche de I'astre tant en montant qu'eu
n descendant, ainsi que les intervalles entre chaque ob-
« servation , je suis demeure convaincu qu'on peut arri-
« ver a une grande precision , et qu'il ne laut pour cela
« qu'une main ferme et une attention soutenue. Cela a
« ete pour moi dun grand secours; car, apres avoir
« guette peniblement la passage des etoiles fixes, il m'ar-
n rivait souvent d'etre surpris par le sommeil au nio-
« ment ou elles etaient au meridien. «
Ce n'est point tout d'un coup qu'il m'a etepos,sible de
(84)
coniprendre ce passage , et j'ai vu un habile astronoine
que je consultais a ce sujet, rester court coninie nioi ;
car couimenl concilier lidee dune observation por
cletriere, avec celle do I'eniploi d'un horizon artificiel ,
enipioi constate par la double grandeur de Tangle? un
tel concours est en efiet rigoureusement impossible.
Mais une meditation attentive ni'a fait trouver la solu-
tion de cette enigme, qui ne signifie autre chose sinon
que I'observateur a fait usage du petit niiroir de sup-
plement habituellement consacrea prendre hauteur par-
derriere, et que c'est a travers la partie non etamee de
ce petit miroir qa'il a vise par devant I'image du soleil
reflechie dans I'horizon artificiel, pour la mettre en con-
tact avec I'image semblable refl^chie par le grand miroir
sur la partie etamee du petit.
Pour la complete intelligence de la solution que je
viens d'indiquer, et des consequences qu'ilyalieu d'en
deduire, quelqties explications succinctes sont ici ne-
eessaires.
Tout le monde sait qu'en visant I'horizon a travers la
partie non etamee du second miroir dun octant , et ra-
menant sur la partie etamee, au nioyen dune double
reflexion , I'image de I'astre a observer, on obtient di-
rectement la hauteur de cet astre au-desstrs de I'horizon,
jusqu'a un maximum de 90°. Que si, faisant usage du
troisieme miroir ordinairement adapte a I'instrument,
on vise le cote oppose de I'horizon, toutes circonstan-
res demeurant d'ailleurs les memes, on mesure alors en
realite le supplement a 180° de Tangle de hauteur donne
par Tobservation directe, bien que Tusage soit de comp-
ter, non ce supplement lui-meme, mais Tangle de hau-
teur qu'il y a lieu d'en conclure, et que marque en eff'et
la numeration unique du limbe. II est bien entendu que
( 85 )
si, au lieu de viser rhorizon , on vise 1 'image tie lastie
rellecliie dans un horizon artificiel , Tangle de hauteur
effective ne sera que la moitie de Tangle indique par
Tinstrunient.
Tout le nionde sait egalement que la position nor-
male du second miroir est d'etre exactement parallele
au plan tlu miroir principal lorsque Talidade est fixee
sur le point du zero du limbe, el que la position nor-
male du troisieme miroir ou petit miroir de supplement
est d'etre exactement perpendiculaire sur le plaTi du
miroir principal, Talidade etant pareillement sur zero.
Les sextans sont, le plus ordinairement, depourvus
du troisien^e miroir. Dans ceux ou le miroir supplemen-
taire existe, sa position est generalement la meme que
dans Voctaiit, en sorte que Tobservalion directe don-
nant les angles de hauteur depuis zero jusqu'a 120°,
Tobservalion parderriere donne, en faisant retrograder
Talidade, les angles supplementaires depuis 60° jusqu'a
180°.
Mais il est des sextans dune construction particu-
liere, ou le petit miroir de supplement affecte une po-
sition telle, que, formant angle droit avecle grand mi-
roir, lorsque Talidade est sur 60° du limbe , il donne
Tangle de I'io" en meme temps que le second miroir, et
Tangle de 240" sur le point zero de Tobservalion directe.
Une seconde numeration, placee sur le limbe a rebuurs
de la premiere, sert a compter les angles ainsi mesures.
J'ai trouve dans un memoire inedit du general Badia (le
fameux Aly Bey) la description dun sextant de poche
anglais dune semblable construction (1). II y a lout lieu
(i) « Je fais mes observations avec un sextant de|)ocLe de vingt
« lignes de rayon depuis le centre de I'alidade jusqu'au point de col-
(86 )
(le pciiser que 1 instrument de MuiigoJ^ark etait pareil
a ceini de Badia.
Or, on conrnittont d'ahord coml)ien, dans une telle
disposition des niiroirs, il doit etre epineux de verifier
et retablir I'exacte situation norniale du petit miroir
de siipplenient , comhien par consequent I'erreur est
aisee acomniettreet difficile a relever. Et cette reniarqiie
acquiert nne nouvelle force si Ion considere que I'in-
strunient elait de diniensions tellemerit exi^^ues, que la
longueur de I'alidade offrait probablenient un rayon
inoindre de deux pouces.
i^' Et cependaiit Mtingo Park reclame pourles oi)serva-
tioiis ainsi obtenues, la meme confiaiice que pour les
observations directes : « Dans le cas, dit-il a la fin d«?
« son journal, dans le cas ou Ton serait porte a douter
« de I'exactitude des latitudes obtenues au moyin de
« robservatioii par derriere faite avecle sextant de poclie
« de Trcjughton, je crois oonvenable de declarer qu'a
" Sansanding j al allcrnalivement employe I'obscrvalion
« direcle a I'horizon de la riviere, et I'observation par
« derriere soit dans I'eau , soit a I'hori/on artificiol ; et
" que je n'ai jamais trouve plus de 4' ^*^ difference,
« mais generalement beaucoup moins. »
Peutetre, en effet, les dernieres observations ainsi
Hmation du nonius on vernier avec rochelle, ct un horizon en verre
" colore de vingt-quatre lignes de diainetre. J'acliutai ces instrumens
■ a Londres en I'annee i8o3. — L'eclielle du sextant arrive a lao de-
« gres, et de l<i , par une seconde numeration retrograde , la meme
. echelle continue a niarquer jusqu'a 220 degres. II est cntendu que
• pour observer ces angles superieurs de leclielle retrograde , il faut
.• tourner I'instrument et se servir du troisi^me miroir, reunissant
« les deux images ou objets , regardant entre deux et 11011 directe-
« ment aucun. »
( 87 )
faites,et pour lesquelles, au surplus, nous n'avons aucun
element de verification , offrent-elles le tlegiv de preci-
sion que leur attribue le voyageur : une conniiissance
plus intinie de son instrument, plus d habilete a le ma-
nier, plus de justesse dans le coup-d'oeil , et peut-etre
aussi le hasard, auront contribue a lui faire obtenir cles^
observations nieilleures. rp gnofifi-'fiaclo
Qiioi qu'il en soit, il est certain que les latitudes obv
tenues par des observations solaires a lest de Secoba et
a I'ouest de Koulikorro , se lient sans effort a ces deux
points; mais toules celles qui precedent I'observation rie
Secol)a offrent une serie de latitudes a rejeter en masse
de la geographie africaiue.
Ce rojet doit-il etre teliement abtiolu que ies obsei-
vations eliminees ne puissent etre en aucune maniere
utilisees an moyen d'un systeme de corrections soit
constantes, soitproportionnetles? G'est une question qui
ne pent manquer d etre soulevee, mais doiit la solution
demeure subordonnee en definitive a une comparaison
de detail entre les resnltats que produiraient les correc-
tions et ceux qu'offrent les documens itineraires ; toute-
fois, indepentlamuient de ce recolienient , pierre de
toucbe de tout systeme de correction que 1 on serait
tente d'adopter, ii n'estpas sans interet.de seconvaincre
que nulle bypothese plausible ne poiirrait servir de base
a un tel systeme. f
Et d abord : etablir, pour une serie d observations J
une loi commune de rectifications, c est admettre lexis -
tence dune cause uniforme derreur; c'est absoudre
I'observateur , et tout rejeter sur un vice fondamental
ou accidentel de 1 instrument.
Orici Ion ne pent suppuser aucun vice fondamental
de I'instrument, tel qu'une fausse graduation d^ iimbe,
( 88)
Texcentricite tlu mouvement de I'alidade, ou le defaut
de parallelisme des deux surfaces du pelit niiroir de sup-
pleuteiu. Les veriGcations faites a Sansanding ne lais-
sent a cet egard aucun doute j et Ion peut surabondain-
nient remarquer que coninie il n'y a erreur reconnue
ou presumee que dans la categorie toute speciale des
observations que j'appellerai inverses (hack observations),
el nieme dans une portion seulementde cette categorie,
il ne saurait y avoir lieu d admettre I'existence d une de-
fectuosite radicale, qui aurait vicie soil la serie entiere
soil au moins toutes les observations inverses sans ex-
ception. II faut done renoncer a un systeme de correc-
tions proportionnelles.
L'hypothesed'un derangement accidentel de I'instru-
ment obeirail plus aiseinent aux conditions que jc
viens de rappeler tout-a-l'henre si les observations de-
fectueuses se presentaient les dernieres; borne au petit
miroir de supplement, il n'aurait affecte d erreur q e
des observations inverses, et celles-la seulement qui au-
raient suivi I'epoque a laquelle il serait survenu. Mais
peut-on supposer, au contraire, que defectueux au com-
mencement du voyage, 1 instrument ait spontanement
recouvre ensuite la justesse qu'une cause quelronque
aurait alteree? L'bypothese nest point admissible, et
Tonne saurait raisonnablement etablir sur pareillc base
un systeme de corrections constantes concentrees sur
les observations inverses anterieures a celles de Secoba.
Les verifications ilineraires viennent confirmer ces
conclusions.
Je place ailleurs le developpement de ces verifications.
Mon unique objet, dans le present memoire, est d'exa-
miner intrinsequement les observations astronomiques
et les calculs de Mungo-Park; et je borne aux quelques
( 89)
pages qui precedent, nies investioations sur les latitu-
des. II en resulte que les seules qui puissent faire auto-
rite parmi celles que Park a observees a son second
voyage, sont les cinq suivantes :
Satadou 12" 3 1' 35" N.
Secoba . . .
Koulikorro.
Yamina . . .
Sanii. . . .
. . . i3 . •J7. 36
. . . 12 . 01 .55
. . . i3. i5. 7
. . . i3. 17.33
J'arriveaux longitudes. Elles sont, commejeTai deja
dit, au nonibre de cinq pour la route entiere; elles re-
sukent loutes d'imniersions ou emersions des trois pre-
miers satellites de Jupiter.
II est essentiel, pour la discussion a laquelle je me
propose de soumettre ces longitudes, queje transcrive
en enlier ici les passages du journal de Park ou il rend
compte de ses observations et de ses calculs.
1° A Manjalli Tabba Cotta ^ le 16 mai i8o5.
« Dans la nuit je pris mon telescope afin d'observer
1" une immersion du premier satellite de Jupiter ;
- Immersion , a la montre 14'' lo"" B.l'
'• Temps en plus depuis Londres. ( rate
-|- from London ) o . . 5.48
« Retard, d'aprfes une eclipse a Kayi o.. o.. 5
<• Temps moyen, a la montre.. .. 14. .16. .28
« Temps, d'apr^s le Nautical
almanah I4..i6..5i
« Equation . . . , — o . . 3 . . 58
« Temps moyen a Greenwich . 1 4 . . 1 2 . . 5 3
i4>.i2..53
« Avance de la montre o.. 3. .35
( ff« )
n Longitude d'apres trois series d'observations fiiiles
" le matin suivanl afin de trotiver le lempsvrai dii lieu,
« 13" Q 45" O.
« II est difficile de se rendre conipte dune telle diffe-
'< rence dans la marche de la montre pendant le couis
" dun mois; niais 1 excessive chaleur et le mouvenient
« du cheval y ont peut-etre contribiie; car je regarde
« mon observation d'immersion comnie exacte. »
a° Pr'es du Marigot des Aheilles {Bee-creek^ ^ le 26 niai.
« Pendant la nuit, je pris le telescope pour reglcr \\\\\
" montre sur le temps de Greenwich, au nioyen dune
« observation d'eniersion du second satellite de Jupiter.
" M. Anderson tint la montre, et je restai an telescope
« une demi-heure dans I'attente, afin de ne pas man-
« quer ['observation :
•■ Emersion du satellite, a la montre 1 1 '' 49 "■ if!'
<• Emersion , d'ajiri^s le Nauti-
cal almanak lT..49-*5l
« Equation — o.. 3. .at
Temps moyen a Greenwich . 1 1 . . 4f> • . 3o
1 1 . .46. . 3o
■■ Avance de la montre
a. .46
« Hauteurs du soleil, a 1 horizon artificiel et a la mon-
« tre , prises le meme soir pour determiner le temps
« vrai :
< 5 h 5 7 <" 1 '> •
. 5. .58.. o
.. 5. .58. .4a
3o"
l!^
3o
14
29
43
6h 4'" i5»
6. .5.. o
6.. 5.. 35
27 II
2'>.5l
26.36
fit. fill 54» [25'' 56'
6. .7. .34 a5.38
6. .8. .i3 25.20
« Longitude 43'" 56' en temps, ou 10° Sp' ouest. >>
'S° j4 Fajemnu'a , le \'j juin.
n Ob.serve une emersion du premier satellite de Jupi
« ter;
(9' )
"Temps, a la inontie, i3'' 6'" iS".
« Le i8 juin , hauteur a Ihorizon aitificiel, pour le
« temps vrai :
.. 6^ 25 "> 35 s
« 6. . 26. . i3
« 6. . 26 . . 5 (
t9°36' i' 6I1 27"' 4i«
19.28 ' fi .28. . 19
19. 5 , 6.28. . 5o
i8"43'
6^ 29™ 39'
17049'
18.24
6.30..23
17. 3o
18. 12
6.30..48
17.19
« Loiiojitude non encore calculee. »
4° -^ Konhomo , Ic "xG juin.
« Presumant que nous aurions une occasion favorable
« d'observer une eclipse du premier satellite de Jupiter,
« je pris les hauteurs suiyantes pour le temps vrai :
. S"" a5'" 55 •
• 5 . . 26. . 53
« 5 . .27, . 37
45° 36' 1] .'.'■3o«n 2«
45.13
43^47'
43.28
43. 10
I 5h 36m 22*
5.37.. 3
4o''55'
40.35
5.37. .44 140.17
5. 3o. .42
44.55 ij 5.3i..25
" Observe I'emersion du premier satellite de Jupiter:
•■ A la montre g"" 26 ■" ao"
• Temps , d'apres le Nautical
alinanak. g..24..53
« Equation -)- c 2..i5
Temps moyen a Greenwich . 9.. 27.. 8
9. .27.
Retard de la montre .
.48
« Longitude Sa" 24" ou 8° 6' O. «
« Le 27 juin , la nuit etant ciaire, observe I'emersion
« du second satellite deJupiter(sur lariveest du Ba-Fing):
« Emersion a la montre 1 1 'i a5 "' 55 •
« Temps , d'apres le Nautical
almanak i i . . 24. . 4o
- Equation -f- o. . i . . 53
Temps moyen a Greenwich . 1 1 . . 26 . . 33
II. .20. .33
Retard de la montre
o. .38
(9^ )
5" All passage (In PalFoulimn , le igjuillet.
" Observe les emersions suivantes des satellites de Ju-
'< piter :
« Emersion dn troisi^me satellite, a la montre.
i8«
« Retard de la montre. . . i"' b5'
Emersion du premier satellite , a la montre.
« Retard de la montre. . . 2. .34
9'' 25
g. .36. . 10
« Le 20 jiiillet, hauteurs pour le temps vrai
I - b gm42'
7« IO»26
7-ii« 3
•■ 7h6"4.')»
« 7.7«25
.. -.8. o
21 21
21 -40
2i«55
22"42'
7l>l3mio'
24"i8'|
^hi6inj^»
25»49'
23« 2
:-i3.4',
24.33
-.17. 0
26. 3
a3.i8
7t4-i'i
2 4- '.6
7.17.30
26.16
n Longitude 5° o' i3"0..>
Avant de reprendre un a un ces divers points pour
les soumetlre a un examen special, il convient de re-
chercher, dans I'ensemble desdonnees, quelque lumiere
sur la marche de la montre du vojageur.
II resulte des quantites ecrites dans I'observation de
Manjalli TabbaCotta que 5"' 48' exprimeraient la somme
des retards diurnes depuis Londres, c'est-a-dire depuis
les derniers jours de Janvier jusqu'au 16 mai, ce qui
peut etre evalue de no a 1 15 jours, et suppose des-lors
un retard diurne dVnviron 3' d'apres la marche ob-
servee a Londres.
A Kayi , le retard total avait augmente de 5'; et a
Manjalli Tabba Cotta , I'heure de la montre , corrigee
de la somme des retards diurnes depuis Londres, et de
Taccroissement de retard reconnu a Kayi, offrait en-
core, sur I'heure de Greenwich donnee par le Nautical
almanak , un retard de 23' en sus pour les 20 jours
ecoules depuis Kayi; en sorle que le retard diurne se
trouvait porte, pour ce dernier intervalle , a un pen
plus de 4 .
( p^n
Une telle inarche eut sans doute ete satisfaisante ,
si elle se fut reguliereinent condnueej mais la suite Cut
loin de repondre a ces premiers resultats.
La comparaison du temps des tables pour linstantde
chaque eclipse , avec I'heure que marquait la montre
au moment de I'observation du nieme phenomene, four-
nit une serie de differences d'ou se peuvent deduire les
re ml tats successifs de la niarche de la montre pendant
le temps ecouie dune observation a I'autre. En voici le
tableau resume.
1
DATES
DlFPEfiEPCSS
UURBE
MARCHE
de la Diontre
TOT ALE
MARCUB
d-l
5ur ie temps
drs
de i.t montre
pourchuque
OIUBSB.
observalioiis.
des ublef.
ialerTallea.
interTalle.
1 6 mai i8o5.
+ 6-" i6'
9 ir»2 2 '■
At: &-°4i^
Av: 34S43
16 id. id.
+ 0..35
i7Juin id.
2 2.. I
Av : 5.38
Av: i5, 33
— 5 . . 3
8. .20
Rel:3.36
Ret: 24, 44
■id id. id.
— I. .27
I . . 2
Ret : 0. 12
Ret: 11,08
2 7 id. id.
— i..i5
rgjuil. id. j
+ ...55
- -i I . .11. <
Ret: 3.10
Ret: 8,67
+ I. .34
i
(
Ret -.3. 49
Ret: 10, 44
On voit que depuis Manjalli Tabba Cotta, la marche
de la montre devint tres forte et tres irreguliere, et
qu'en rapportantau moment de lobservation de chaque
eclipse, le retard ou I'avance deduite des angles horaires
du matin ou du soir, il est indispensable detenircompte
de la inarche pendant I'intervalle, qui est quelquefois
assez considerable, puisqu'il depasse 17 heures dans
I'observation du lyjuin, el 29 heures dans celle du 27.
Je vais porter successivement mes investigations sur
chacune des longitudes observees.
{ 94 )
Munjalli- Tahha-Cotta.
Oil voit que I'observaiion de longitude faite en ce
lieu nest consignee qu'ea partie dans le journal de
Mungo-Paik, et qu'apres avoir note I'heure de rimmer-
sion a la. montre, le voyagenr n'a point ecrit les hau-
teurs prises pour determiner I'heure du lieu, se conten-
tant d'enoncer son resultat. Ici done nul nioyen de con-
troler directcment ce resultat , ni de determiner la
rectification precise dont le calcul de I'observaleur peut
etre susceptible; mais les donnees incompletes qui se
trouvent consignees en cet endroit de sa relation suf-
fisent du moins pour demonlrer que ce calcul est enta-
che de plus d'une erreur.
II est en effeta observer, en premier lieu, que les i4 ''
16"' 5i* transcrites du Nautical almanak ^ sont \e temps
inoyen de Greenwich, et non le temps vrai, comme
se Test, par megarde , imagine le voyageur, qui y a
des-lors applique a tort )a correction soustractive de
Vequation du temps. Si cette erreur etait la seule que
Park eut conuiiise dans son calcul, il suftirait, pour la
rectifier, de fnire subir au resultat une correction addi-
tive egaie a I'equation du temps qui a ete soustraite,
c"est-a-dire de 3" 58* de temps ou Sp' 3o" de degre; ce
qui reporterait la longitude de Manjalli-Tabba-Cotta ,
de i3''9' 45 a i4' 9' i5 O. de Greenwich, ou 16° 29'
1 5" O. de Paris. Mais il est evident qu'un tcl resultat est
inadmissilile , puisque le point auquel il s'applique , et
que les dociunens itineraires doivent faire conclure a 4o
milles environ dans le S. E, de Medynah de Oully, che-
vaucherait dans 10. de cette ville, placee elle-nieme
avec assez de precision a 16" 19' O. de Paris, ainsi que
jel'ai expose ailleurs.
( 95 )
L'erreur relative a leqiialion du temps n est done
point ici la seule; il en existe aussi necessairement
dans la determination de I'avance de la montre sur le
temps du lieu.
Quelle que soil cette quantite, dont le voyageur n'a
point consigne le chiffre dans son journal, elle a ete ob-
tenue en coniparant 1 heure que marquaii effectivement
la montre a I instant dune observation de hauteur so-
laire, avec I'heure conclue de cette menie hauteur au
nioyen d un calcul dangle horaire dans lequel intervien-
nent comme elemens la deelinaison soiaire et la latitude
du lieu. Je suppose volontiers que le calcul a ete fait
avec justesse. que la hauteur observee (directenient)
etait bonne, et que la deelinaison convenablea ete em-
ployee; mais quant a la latitude estiniee , elle a ete na-
turellement deduite de la latitude observee a Faraba ,
d'o'i il suit qu'elles'est trouvee necessairement entachee
de la nieme erreur que ceMe-ci, c'est-a-dire d'un degre
environ en exces vers le nord.
II s'agit maintenant d'apprecier I'influence que cette
erreur de latitude a du exercer sur Tangle horaire; et ce
probleme est d'autant plus difficile a resoudre d'une
nianiere satisfaisante , que Tangle horaire est absolum nt
inconnu; mais du moins ne somnies-nous pas sans au-
cun moyen de Testimer approximalivement; car dun
cote le lever du soleil , et dun autre cote le depart de
Manjalli-Tabba-Cotta , posentles limites extremes entre
lesquelles il doit se trouver : or le soleil ne s'est leve en
ce lieu , le ly mai, qu'apres cinq heures et demie; et
d'autre part le voyageur, arrive avant niidi a Bray, apres
une marche faligante de 12 milles, avail du partir de
Manjalli-Tabba-Cotta avant sept heures du matin. Cest
done, selon toute apparence, vers six heures qu'il prit
(9^)
hauteur. Dans ces conditions un abaissement de latitude
d un degre doit augmenter d environ 20' iangle ho-
raire, et par suite diniinuer de pareille quantile 1 avance
de la montre, ainsi que la longitude.
Cette nouvelle correction placerait Manjalli-Tabba-
Cotta vers 16° 9' O. de Paris, a environ 2'-> niilles dans
le S. 1/4 S. E. de Medynah, c'est-a-dire foit loin encore
de la position que lui assignent les conditions itinerai-
res.
II en laut conclure que, outre les deux erreurs que
j'ai pu signaler, il en existe encore quelque autre dans
les calculs de I'observateur, et que I'absence des donnees
que I
dont il a fait emploi oblige de renoncer a la rectification
du resultat par lui indique.
Passage du Marigot des Aheilles fBee-creek).
lei du moins le journal du voyageur a heureusenienl
conserve toutes les donnees essentiellespour la fixation
de la longitude. On voit reproduite en cet endroit I'er-
reur que j'ai deja relevee quant a Li nature du temps des
tables du Nautical Ahnanak. Du reste Park ne donne
point son calcul dangle horaire, ni meme 1 henre du
lieu qu'il en a deduilej mais il est aise d'y suppleer au
moyen des memes elemens qu'il a employes. La hauteur
nioyenne resnitante des trois series d'observations etant
de i3° 4^' 17'' a 6'' '^"' 3o* de la montre, le 26 mai
au soir, et la latitude observee etant de i3^ 32* 45' N. ,
MuMgo-Park a dn en conclure un demi-angle horaire
de 4o° 1', ce qui lui a donne, pour I'heure vraie du
lieu, 5'' 20" 8'.
Essayons maintenant, a I'aidede cette determination
et des autres donnees recueillies par le voyageur, de re-
(w )
construire la serie d'operations auxquelles il se sera llvre
pour arriver a la longitude de 43™ 56' de temps a 10.
de Greenwich, que porte son journal. Voici incontesta-
bleoient quelle a du etre sa maniere d'operer :
Heure viaie du lieu de I'observation Si'ao" 8«
Equation du. temps — 3 . . 20
Heure moyenne du lieu 5. .16. .48
Heure de 'a moiitre 6 . . 3 . . 3o
Avance de la montre sur le temps du lieu. . . 4(j. .42
Avance sur le temps de Greenwich 2 . . 46
Longitude a I'ouest de Greenwich 43. .5(i
Sans relever en detail les diff'erentes rectifications
dont le calcul de notre voyageur est passible dans ses
diverses parties, je vais simplenieiit resunier ici mon
propre calcul.
Les nioyennes des trois series de hauteurs prises le
26 niai au soir, par une latitude que j'eslinie a 12" 48'
N. , me donnent,pourravance dela montresurle temps
nioyen du lieu ,
4711. 55 s 47 '"48' 47"'43»
Ces trois quantites sont un peu divergentes j je choisis
la seconde, qui est a-peu-pres moyenne entre les deux
autres ; il y a lieu de lui appliquer, pour .5 1^ 45"'d'in-
tervalle jusqu'au moment de I'eclipse, une correction
additive d'environ 4% a raison d'une avance diurne de
i5' 1/3.
Avance de la montre sur le temps moyen du lieu, o •' 47 ■" 5a •
Heure de remersion d'apres la montre i f . . 49. . 16
Heure du lieu a I'instant de I'emersion i r . . i . . 24
Heure de Paris d'apres la Connaissance des temps
(temps moyen) 11. .59. . n
Difference des meridiens, en temps 57. .47
Longitude a I'ouest de Paris 14° 26' 45'
( 9« )
Mungo-Park a trouve la longitude tie ce point par
lo" 59' O. (le Greenwich, soit iLI" ly'O. tie Paris; la
rectification dont ce resultat est passible s'eleve done,
en definitive, a plus d'un degie vers 10.
Dans le calcu! qui precede, j'ai employe I'heure de
liniinersion a Paris, telle quelle est donnee par las ta-
bles de la Connaissance rles temps ; elle offre un assez
haul degre de precision pour qu il soil raisonnable de
s'en contenter. Desireux toutefois de parvenir, sil etait
possible, a une exactitude plus rigoureuse, je n'ai point
neglige la recherche des observations du nieme pht^no-
mene qui auraient ete faites dans !es grands observatoi-
res connus; mais j'ai consulte sans fruit a cet egard les
additions de la Connaissance des temps , et le recueil de
Maskelyne; les Ephenierides de Coinibre ni'ont seules
offert une observation isolee, f'aite a Lisbonne par
M. Ciera, directeurde I'observatoire royal de la marine,
et presentee comine douteuse : elle donne I emersion a
1 ih lym 24', temps vrai de Lisbonne, soit 11'' 59'"53*,
temps moyen de Paris, ce qui porterait la longitude
du Marigot des Abeilles a i^' 3y' i5" O. Incertain sur
le degre de precision de 1 observation sur laquelle s ap-
puie ce resultat, je n'ose le preferera celuique procure
(0
I'heure des tables, (i)
(1) Une autre obseryation correspondante , faite a Prague par
I'astronoine David , et rappor ee dans le Recueil d'observations as-
tronomi(jues de Triesueker, mais qui ne in'a ete conuue que parle
memoire de M. (Jltmanus, donue rcmersion a ia''5i"' 2y' temps
vrai de Prague, soit 1 1^ 59°' 48' temps moyen de Paris, ce qui re-
porierait la longitude de Bee-Creek a f4° 3j 35" O.
( 99 )
Fajeininia.
la longitude de c;e lieu n'a poinl ete calculee par I'ob-
seivateur, ni par personne autre, que je sache, l)ien
que tous les elemens necessaires soient consignes dans
le journal. Voici le resume de mon operation.
Les nioyennes des Irois series de hauteurs prises le
i8 juin au soir, par une latitude que jeslime a 12° 48'
N. , medonnent, pour lavancede ia montresur ie temps
nioyen de Fajemmia, ■■••^"■
47"" o^ 46"' 57" 4()U> 42".
Laissant de cote la troisieme, qui s'eloigne beaucoup des
deux autres, je conclus de celles-ci une nioyenne de
46'" 58% qu'il y a lieu d'augrnenter de i8^ pour ij ''
22"" dintervalle depuis I'instant de leclipse, a raison
dun retard diurne de 24' 1/2.
Avaiice de la montre sur le temps moyen du lieu, o'' 47 "' iii»
Heure de reniersion suivant la montre i3. . (i. . i5
Heure dc Fajemmia a I'instant de I'emers'on ... 1 2 . . 1 8 . . 5g
Heure de Paris d'apr6s la Connaissance des Cemps . 1 3 . . i o . . 3a
Difference des meridiens , en temps 5 1 . . 3 ',
Ijongitude a I'ouest de Paris 12" 53' i5"
Dans le but de substituer a I heure calculee des tables ,
1 heure donnee par des observations correspondantes,
j ai releve celles que j ai trouve consignees dans les re-
cuoils les plus accredites, et choisissant celles qui m'ont
paru presenter le plus de garant es , je me suis borne
aux trois suivantes, savoir :
1° Vneexcellente observation faite a I'observatoire de
Viviers, par M. Flaugergiies , correspondant de I'lnsti-
tut, et donnant I'heure de I'emersion a i3'' 19"' 4^%
(' lOO )
temps inoyeri de Viviers, soil i'5^ lo'" 19* temps moyen
de Paris;
2" Une bonne observalion faite a Lisbonne par
M. Ciera, et dormant I'lieure de lemeisioii a 12I1 23™46*
temps vrai de Lisbonne, ce qui revient a iZ^ 10° 16*
temps moyen de Paris;
3" Une observation faite a Coimbre par le reli<^ieux
Fray Luiz do Coracao de Maria, I'un des astronomes at-
taches a I'observatoire de celte universite celebre , et
doniiant I'heure de Temersion a 12'' 2^™ 17' temps
rtioyen de Coimbre, correspondant a i3'' 10'" 16' temps
moyen de Paris.
De ces trois observations concordantes, j'ai conclu
une heure moyenne de i3'' 10'" 18'. La longitude de
Fajenmiia, rectifiee a I'aide de cette nouvelle base, est
de 12" 49'45''0.
Konkromo.
Dans ce lieu, Miin go-Park a observe deux emersions,
I'une du premier, I'autre du second satellite de Jupiter,
et pour cliacune il a renouvele I'erreur que j'ai deja ite-
rativement signalee dans ses premiers calculs, sur la na-
ture du temps donne par les tables du Nautical J Ima-
nak. Quant aux operations par lesquelles ii a j)u airiver
a une longitude de 8" 6' O. de Greenwich (10'' 26' O.
de Paris), j'avoue que mon intelligence ne pent parve-
nir a s'en rendre compte. Au surplus, voici mes propres
resul^ats:
Emersion du premier satellite, le afi juiu, ;> la
montre 9 '' aO " ao •
Suivant la Connaissance des temps 9..34..13
Retard de la montre sur le temps moyen de Paris. 7 . . 53
( loi )
Cette obsei'vation ayant ete faite 3 h. 55 m. apres celle
des hauteurs pour Tangle horaire, se trouve entachee
du retard proportionnel afferent a cet intervalle dans le
retard diurne de 24* 1/2 ; il y a done lieu d'ajouter 4*
a Iheure de la montre, ce qui reduit le retard de celle-
ci sur le temps de Paris, a 7"" 49*-
Emersion du deuxieme satellite, le 27 juin, a la
montre ii'> 25™55»
Suivant la Connaissance des temps 1 1 . . 34 . . o
Retard de la montre sur le temps moyen de Paris. 8 . . 5
Cette deuxieme observation ayant eu lieu ^cj^ 46""
apres celle des hauteurs pour I'angie horaire, doit etre
corrigee du retard proportionnel afferent a cet inter-
valle, a raison dun retard diurne de ii^j il faut done
ajouter i4'«^ Iheure de la montre, ce qui reduit le re-
tard de celleci sur le temps de Paris, ay" 5i'.
Les moyennej des trois series de hauteurs prises le
26 juin au soir, par une latitude de i?>° I'j' 26" N.
(observee a Secoba sur le meme parallele), donnent
pour I'avance de la montre sur le temps nioyen deKon-
kromo ,
4 am ^« ^i m 58 » ^2 "• o».
1 =
Avance moyenne o'" 42
Retard moyen sur le temps de Paris 7 , . 5o
Difference totale des meridians 49"" 5i •
Longitude a I'ouest de Paris 12° 27' 45"
Je n'ai trouve d'observations correspondantes que
celles notees ci-apres, savoir:
Pour I'emersion du premier satellite , le 26 juin, une
bonne observation, faite a Paris par M.Bouvard, membre
du bureau des longitudes, el donnant 9^ 33.11 3^*^ ^^
( ^l^1
une observation cle M. Cii'ia, cle Lisboniie, donnant
8'' 4^"' i^' temp* vrai de Lisbonne, ce qui revient a
q'' 33'" 3 1' icinps moyen de Paris; dou i'ai coiicbi I'bcure
nioyeiine de y'' 33" 33' ;
Pour lenjersion du deuxieiiie satellite, le 2.y juin, line
excellente observation de M. Flaiigergues, de Viviers ,
donnant ii''42'" 54' temps moyen de Viviers, soit
III* 33" 3i' temps moyen de Paris.
En faisant usage de ces donnees au lieu de celles que
m'ont fournies les tables de la Connaissance des temps ,
la longitude reclifiee de Konkromo se trouvera par
12° 19' I 5".
La correction applicable a la longitude calculee par
Mungo-Park s'eleve done ici a pres de 2 degres vers
louest.
Passage du Ba-WouUma.
En cet endroit encore, deux emersions ont ete ob-
servees, et cette fois du moins le voyagetir n'a point
commis sa meprise ordinaire sur le temps du Nautical
almnnak. Mais,du reste, ici coinme a Konkromo , j'ai
fait des efforts superflus pour deviner comment, aver
les donnees qu'il enonce, Mungo-Park est arrive a une
longitude de 5^ o' x3" O. de Greenwich (7" 20' i3" O.
de Paris).
Ainsi que je I'ai fait pour les observations precedentes,
je place ici le resume de mon propre calcul :
Emersion du troisifeme satellite do »
Jupiter, .i la montre g^ ,5 m ig • v i i ■" i5«
Suivant la Connaissance des temps. . 9. .3fi. .33 )
Emersion du premier satellite, a la
montre 9 . . 36 . . i o ) it 5.i
SuivSint la Connaissance des temps . 9..4S.. 4 )
Retard mojen de la montre sur le temps de Paris, 11. .34
( lo.) )
Ces deux observalions out etc failes 9'' 47'" t^t 9 ''
36"" avant celle des hauteurs pour I'angle horaire ; la
inarche de la montre offrant un retard diurne uioyen
de 9' 1/2, c'est a-peupres 4^ qui' f^"t retrancher de
I'heure de la montre, ou ajouter a son retard moyen
sur le temps de Paris, ce qui porte ce retard a 1 1™ 38*.
Les moyen nes des quatre series de hauteurs prises le
20 juillet au matin, par une latitude observee de i4" 2'
23" N., donnent pour I'avance de la montre sur le temps
moyen du lieu,
35m 23,3. 35" i3». -35™ i',7 34"'59».
On voit que la seconde de ces quantites est a rejeter ; les
trois autres produisent une moyenne de 35'" i\
Avance de la montre sur le temps rlu lieu .... o '> 35 "• i'
Retard moyen sur le temps de P.nris 1 1 . 38
Difference totale des meridiens 46n'39'
Longitude a I'ouest de Paris 11° 39'45"
Les observations correspondantes a celle du troi
sieme satellite, que m'ont offertes les Ephcmerides de
Coimbre, et les Additions de la Connaissance des temps ^
presentent entre elles des divergences qui vontjusqu'au-
dela d'une minute; les unes donnent I heure de I'emer-
sion moindre que celle des tables, les autres la donnent
plus forte; aucune, au surplus, nest recommandee a la
confiance par quelque annotation de I'observateur : je
n'hesile done pas a maintenir I'heure des tables comme
offrant plus de chances d'exactitude.
Quant a Fetnersion du premier satellite, les observa-
tions correspondantes que j'ai recueillies aux memes
sources, concordent mutuellement a quelques secondes
pres, et donnent sans exception I'heure moindre que
ceile des tables : une correction en ce sens sera done
( »«>4 )
ici pleinenient justifiee. Je choisis , conime offrant la
nioyenne a-peu-pres exacte de toutes ces observations,
I'heure de 9'' 4"° 26' ohtenue a I'observatoire de Paris
par M. Arago.
En reprenant nion calcul pour y taire eniploi de cette
nouvelle donnee, j'arrive a line longitude rectifiee de
11° 35' i5" O. , pour le passage du Ba-VVoulinia.
Ici la correction vers I'ouest a taire subir a la deter-
mination de Mungo-Park, est enorme : on voit qu'elle
atteint qiintre degres et nn quart I....
En resume les corrections que j'ai fait subir aux lon-
gitudes observees par Mungo-Park, produisent les re-
sultats suivans :
Marigot des Abeilles 14° 26' 45"0. de Paris.
Fajemniia 12.49-45
Konkromo la.ig.iS
Ba-Oulima ii.35.i5
Ces chiffres, loin d'etre dementis par les documens iti-
neraires, s'accordent au contraire sans embarras avec
leur construction raisonnee telle que je I'ai exposee
dans un autre travail.
Je m'arrete. J ai accompli la tache que je m'etais pro-
posee dans ce memoire particulier : j'y ai reforme tous
les calculs vicieux qui abondent dans la portion astro-
riomique du dernier voyage de Mungo-Park en Afrique;
j'ai opere 1 indispensable triage des observations admis-
sibles et de celles qui doivent etre reprouvees.
J'ai ainsi restitue a la science un document precieux,
qui demeurait perdu pour elle sous la croute d'erreurs
dont I'ignorance et la routine le raaintenaient enveloppe.
*A
( io5 )
Voyage dans Vinteriew de la Guyane , par MM. Adam
DE Bauve et P. Ferre.
Suite, (i)
Les carbets ou cases ne manquent pas d'elegance :
ils sont eleves de i5 a ?,o pieds, et quelquefois plus,
au-dessus du sol. Lacouverture est bombee, et presque
toujours en feuilles de ouaille ( espece de palmiste ) ;
elle est reniarquable par sa legerete. D'autres carbets
peu eleves entourent la case principale. II y en a ordi-
nairement un qui sert a recevoir les etrangers ; dautres
a grager le manioc, a loger les chiens, etc. Une quan-
tite de ravets et de petites mouches desolent la plupart
des etablisseniens : elles entrent dans les yeux, et redou-
blent d'iinporlunite a I'heure des repa.s. Les Oyampis,
quoique frequemment dans I'eau , n'en sont pas nioins
en proie a la vermine. Rien nest plus degoutant que de
les voir assis par rang de taille, s'epluchant mutuelle-
ment. Les poules sont tres nombreuses ; nous n'avons
pu savoir d'ou elles proviennent. Toujours estil que,
dans leurs habitudes, elles different essentiellement des
especes domesliques, n'ayant qu'une saison pour pon-
dre. II est rare de ne point trouver chez chaque Indien
beaucoup d'animaux prives, tels que hocos, agamis ,
marailles, coullouirs , perroquets de diverses especes,
haras , etc. On y voit aussi des patiras et des maij pou-
ris, mais plus rarement.
Outre les soins du menage, I'entretien des abatis, les
femmes font aussi les hamacs, les calimbes de coton de
(i) Voir les numeros 126 et 127 de la premiere s^rie.
8
V ( io(> )
leurs maris : elles filent le cototi avec une espece de
quenouille. Elles soiit aiissi chaigees d'aller chercher
le glbier que leur mari a tue , souvent a de grandes dis-
tances. Lear condition est un esclavage dont rien n'a-
doucit la rigueur.
Les Oyampiscultivent aussi une variete de ma'is dont
les grains sont jtimeles et de couleur ^iolette.
An fond, le caractere de ces Indiens n'est point me-
diant. Dans I'ivresse, ils deviennent lurieux et sont
capahies de se porter aux plus grands exces ; mais, ce
moment passe, ils sont tres doux. Us ne sont nullement
enclins au vol. Ils n'ont point de portes. Leurs cases
sont toujours ouvertes. Nous avons souvent laisse a la
disposition deceux chez lesquels nous passions des ob-
jets a leur convenance, jamais rien ne nous a ete derobe,
nieme apres avoir refuse I'objet qu'on nous demandait.
Le seul individu dont I'importunite serait a charge, s'il
avait quelque puissance , est ce Wananicka, dont j'ai
pirle. Tier d'avoir ete nomme capitaine par le baron
Milius, il sut pendant quelque temps se rendre redou-
lable a ses voisins. Ayant recu en present des armes et
de la poudre, il s'etait porte a des exces qui eloignerent
les Indiens de lui. La crainte qu'il leur avait inspiree fut
telle, qu'ils prefererent le fuir, n'osant Ic punir, le
croyant appuye par les blancs. Ce miserable assassina,
entreautres, un Portugais blanc , refugie dans linte-
rieur, ou il etait marie et avait des enfans, d'apres des
ordres qu'il avait, disait-il , recus. Peu de temps avant
notre arrivee, il avait chez lui deux negres qu'il avait
arretesj il s'en faisait servir. Craignant qu'on n'cn fiit
informe a Oyapock, il leur procura le moyen dt^ se reti-
rer dans les terres. On n'a pu me dire positivement ce
qu'ils etaient devenus^ peut-etre font-ils partie d'une
( »07 )
bande dont nous avons eu connaissance , et dont je
parlerai plus tard.
De la langue Oyampis.
Cette langue est pauvre, conime toutes celles des
peuples qui ont peu d'objets a exprimer. Les voyellesy
sont tres frequentes. Les substantifs et les adjectifs y
sont indeclinables , sans difference de sin^ulier ou de
pluriel. Les verbes sont invariables dans tous les temps.
La prononciation est rude et gutturale.
Les noms de nombre ne s'elevent pas au-dessus de
cinq , qui sont :
Pessou
Un.
Moncongue
Deux.
Mapour
Trois.
Moypente
Quatre
Jateute
Cinq.
Pour exprimer des nombres plus forts qui cependant
ne passent jamais dix, ils montrent leurs doigts.
Voici un vocabulaire de quelques-uns des principaux
mots de cette langue qui pourra en donner une idee ;
Teco
Homme.
Acantara
Plumages, tours
Waimi , erare-
de t^te.
couara ,
Femme.
Massacara
Poules.
Massi, erayeure
Enfant.
Paira
Arc.
Couarai
Soleil.
F. Ourapara
Flfeches.
Jari
Lune.
Petemma
Tabac.
Caritata
Etoile.
Cassourous,
Occa,capouia,
Case, carbet,
moura ,
Collier deverre.
Caabe
Bois.
Wiwi
Hache.
Meiou
Cassave.
Maria
Couteau.
Mandioca
Manioc.
Pira
Poisson.
Anianiou
Colon.
Harara
Hara.
Enimopoii
Coton file.
Coiire
Perroquet.
8.
( 'o8)
Periti
Perrache.
Erendonra
Mentoh.
Ivara
Canot.
Erendou
Barhe.
lawar
Chien.
Eratoup^
Joues.
Ku
Eau.
P. Epirere
Peau.
I'^poimiai-ievai
Paieineiit.
Eracope
Ventre.
Icatoii
Bon.
Epossi-a
Poitrine.
Nicatou
Mi'chani.
Tou^
Sang.
Franclii
Uu blanc
Erahvere
Veines.
Oussirao
Liane.
Taccourourou
Os.
laippe
Haziers.
Janeppo
Main.
E'iboura
Grand bois.
Epp6 amp^
Pouce.
Thor
Oi.i.
Eppo
Doigts.
Nani
Non.
Eioupaou.i
Bras.
Mol
Serpent.
Siribinna
Coudes.
Eoii
Biche.
Eoubacouan
Jambes.
Copei
Bonjour.
Diribinnii
Genoux.
Ocket
Bonsoir.
Eppo cape
Pieds.
Hang
Ceci , cela.
Assoussous
Seins.
Coromoii
Plustard,tant6t.
Tappe
Dos.
Tilla
Hamac
Erdmo-eparassi
Parties naturel-
Camisa
Toute espece de
les de rhomme
vetement.
et de la femme.
Caspar
Sabre.
Er^mii
Manger.
Toupan
Tonnerre.
riwoye
Avoir soif.
Ai^gan
Hyver, grandes
Occa6
Boire.
pluies.
CAvi .i a
Allerj
Eacan
T6te.
16 javerao
Chasser.
OEreJi
OEil.
Opotare
Vouloir.
Erapopiraoua
Paiipi^res.
I carave
Etre malade.
Eiapouacan
Tempes.
Erendou a
Cracher.
Yanissi
Nez.
NaetJ
Pecher.
Eccouroii
Bouche.
lae iapi naeti
A Her a la p^che.
Eremb6
Levres.
Aye toupi e
Comment appe-
Eraimbire
Gencives.
lez-Tous cela ?
Erraim
Dents,
Mama e hang
Quel est cet hom-
Nambi
Oreilles.
teco
me ?
Eccou
Langue.
I apotare ayem^
Eracout^
MSchoire.
hang
Donne ce fruit.
Euouroucaouar
Gorge.
Je pense qu'il serait inutile de donner ici des exeni-
( »o9 )
pies qui ne seiviraient qua prouver riinniulabilite des
temps des verbes , des adjectifs et des substantifs.
Les noms propies sont toujours des noms darbies
ou d animaux.
Suite de Vltineraire.
Decembre. Le 3o, M. Ferre se trouva assez bien re-
tabli pour que nous pussions reprendre notre explora-
tion. Jose Antonio ne se ressentait plus de sa nialadie.
Notre intention etait de reconnaitre d'abord les sources
de rOyapock. Nous fumes obliges d abandonner nos ca-
nots un pen au-dessus de la Crique-Acao.
Nous primes notre direction ouest-quart-nord , et
cotoyames ainsi la riviere, que nous longlons a-peu-
pres, pendant six journees. Le chemin est afTreux,entie-
coupe de marecages profonds et de hautes montagnes ,
que nous gravissions avec peine. Nos Indiens porteurs,
quoique peu charges , fatiguaient beaucoup.
Janvier i83i. Le ^, nous tombames sur un etablisse-
ment assez considerable , vers niidi. Nous nous y re-
posames le restede la journee.
8. Nous reniarquames plusieurs traces d'etablisse-
mens abandonnes depuis quelques annees. On ne dis-
tingue, en traversant ces immenses torets, que quelques
especes de bois qui y sont rassembles par families; ce
sont le bois bagot, qui est tres commun et un des plus
beaux bois de couleur de la colonie, les wapas, des ce-
dres, quelques mahots, le reste bois mous; ce qui n'est
pas surprenant, car le sol ne se compose que de gros
graviers, et meme en des endroits sans aucune appa-
rcnce d'humus(les marecages exceptes), surtout au som-
met des montagnes, la le bois est tres clair , et meme
( »'o)
rare. A la base des montagiies , avant d'entrer dans les
marecages, on rencontre ca etia quelques pieds desalse-
pareille(i), niaisdeniauvaise venue, car ellene se trouve
en abondance que dans les terres noires et grasses;
ceiles que nous parcourions etaient graTeleuses ou
argileuses et tres fortes. Nous finies balte a 4 heures.
g. Nous partinies a six heures du matin. Memc sol ,
meine route, de tres hautes montagnes escarpees a Test,
pente douce a I'ouest; le sol s'eleve prodigieusenient,
I'escarpement d'un cole a Test, et la pente douce de I'au-
tre a I'ouest le prouventsuffisamnient.Nous entendions
souvent le bruit des barreset cascades de la riviere, qui
n'etait qu'a une petite distance. Nous la vimes memo
plusieurs fois roulant dans un lit resserre avec la rapi-
dite et le fracas dun torrent.
Nous fimes halte a trois heures et demie au has d'une
montagne, au pied de laquelle coiile une crique,appe-
lee par les Indiens Tuatou, ce qui signifie courte. Elle
ne parcourt, en effet, qu'un tres petit espace, et se jette
dans rOyapock. Nous y primes quelques carpes et quel-
ques aymaras.
lo. Nous traversames des marecages profonds , et
notre route, qui n'avait pas depasse I'ouest-quart-nord,
changea sur les onze heures et tomba jusqu'au nord-
ouest, et meme nord-quart-ouest. Dans quelques en-
(i) La salsepareille presente une ronce triangulaire qui serpente
au loin ou quelquefois grimpe sur les arbres. Ses racines ou clieve-
lues s'etendent lateralement a une distance de sept a huit pieds. Ce
sont ellcs qu'on arraclie, et qui sent livrees au commerce. Un pied
peut donner quatre a cinq livres. Cette plante a en outre un pivot
qui s'enfonce a une grande profondeur, et qui sert a la reproduction
des racines laterales.
( !«' )
droits de ces marecages, le chemin etait plus eleve et
ressemhiait assez a uiie digue. Vers deux heures , nous
nous trouvames sur lesbords de la riviere, et nous vinies
non loin de la un saut assez considerable dont nous eti-
tendions le bruit depuis environ une lieure. Nous la
cotoyames sans la perdre de vue pendant une heure et
demie, et remarquames la encore I'elevation du sol a la
grande quantite de barres et de roches que nous recon-
niimes durant cet espace de temps. Nous rentrames
dans le bois, marchant nord ouest et meme ouest-quart-
nord. Apres deux heures de raarche , nous rencontra-
mes une riviere sur les bords de laquelle les Indiens
entretiennentdes carbets,car ils yviennent souventeni-
vrer le poisson. Cette riviere s appelle Tacuande. Elle
est assez considerable, et a son embouchure beaucoup
plus large que ne lest I'Oyapock a cet endroit; elle
parcourt, dit-on un assez grand espace. La nous passa-
mes la nuit.
II. Nous explorames la riviere Tacuande jusqu'a onze
heures. Elle est tres encaissee. Apres un dejeuner ou
du poisson sec nous tint lieu de pain, car nous ne pou-
vions jamais avoir avec nous une forte provision de
cassave, nous reprimes notre route ouest-quart-nord,
et sur les deux heures nous traversAmes a gue le Ta-
cuande, qui fait des detours considerables. Nous gra
vimes deux des plus hautes montagnes que nous eus-
sions encore rencontrees. Du sommet de la plus elevee,
nous apercumesau sud le Tacuande , qui serpentait au
loin et paraissait former de temps en temps de grands
bassins entoures de montagnes que nous estimames a
environ quatre lieues de nous , et qui s'etendaient en
demi-circulaire, depuis le sud-est jusqu'a I'ouest de no-
tre position. Nous crumes d'abord que le Tacuande'
( "O
prenait sa source an sud , dans ces montagnes ; niais i\
en etait autrement, ce dont nous nous sonirnes assures,
car cette riviere revient un peu avant ces montagnes,
jusqu'au nord-ouest , a une journee environ du lieu ou
nous etions , retourne a Test et prend sa source sur le
revers meme de ces niontasnes. Nous aurons occasion
d'en reparler. Le soir meme, nous traversamcs encore
deux fois le Tacuande, et nous nous arrelamos a cincj
heures, dans un endroit ou i! y avail beaucoup de ca-
caos.
12. Apres une matinee penible, nous decouvrimes
vers onze heures un etablissement. Nous avions be-
soin de nous reposer et nos Indiens aussi. Nos botes
n'avaient jamais vu de blancs chez eux; ils ne pouvaient
revenir de leur etonnement et s'enquerraient avec in-
quietude du sujet de notre voyage. Eux-memes coni-
muniquaient rarement avec les Indiens de I'Oyapock el
etaient fort mal pourvus d outils. Aussi parvinmes-nous
a les apprivoiser promptement, en leur donnant quel-
ques couleaux et quelques siibres, en echange desquels
jls nous apporterent de la cassave et du poisson bou-
cane dont ils avaient une assez grande quantite. Leurs
cases etaient aussi garnies d'immenses jarres remplies
de cachiri.
1 3. Nous laissames une partie de nos gens sur I'eta-
blissement oii nous devious revenir prendre des vivres,
et nous partimi;s a sept heures du matin avec deux des
Indiens du village, pour continuer notre exploration de
I'Oyapock. Nous marchames exactement nord. An bout
de trois heures de marche, nous arrivanies sur les bords
de la riviere, qui en eel endroit n'est qu'un ruis-
seau. Nous la lungeames par le bois. Les bords en sont
impraticables. De temps en temps , elle forme des has-
( 1^3 )
sins assez consideiables , mais pen profonds. Les banes
et cascades sont plus eloignties, mais aussi plus elevees.
Nous traversames 1 Oyapock deux fois sur les roches.
Enfin , a quatre heurcs, nous nous arretames el assi-
nies nos piquets sur un Immense plateau forme d une
seule roche. Le matin, nous fiimes surpris de voir beau-
coup de poissons que nos Indiens avaient fleches pen-
dant la nuit.
i4- Nous remontames encore jusqu'a huit heures
le long de la riviere; la nous reconni^mes qu'il etait
inutile d aller plus loin; en effet, 1 Oyapock se partage
en une multitude de branches ou criques. II faudrait le
temps des grandes eaux pour reconnaitre son cours
principal. La fin dejuin ou le commencement de juillet
serait 1 epoque favorable pour cette expedition , on
pourrait menie alors se servir de petites embarcations.
Nous revinmes sur nos pas , et le i5 au soir, nous ral-
liames I'etablissement ou nous avions laisse nos gens.
i6. Nous sejournames pour prendre nos vivres et
des guides qui nous etaient necessaires pour les che-
mins que nous devions parcourir, qui etaient, nous di-
sait-on , diffioiles et meme dangereux. Une plus longue
exploiation des bords de I'Oyapock en cette saison de-
venant inutile , je voulais gagner I'Ynipocko , dont j'a-
vais entendu parler lors demon excursion a Agamiware.
17. Nous nous mimes en route a huit heures, passa-
mes le Tacuande a onze. En traversant des montagnes,
Jose Antonio me fit remarquer le bois Coumarou. C'est
un arbre fort grand, son ecorce, grisatre et ral)oteuse,
a le gout de Famande amere. Les Bresiliens en retirent
une essence fort estimee. A trois heures , nous tomba-
mes sur une habitation ou il yavait environ cinquante
individiis. La nous apprimes qu'a peu de distance se
( "4 )
trouvait urie etablissement de iiiulalres et dc negres
niarons. Les Indietis n'en parlaient qu'avec terreur. lis
vivaient de rapines, souvent nieiiie ils enlevaieiil des
fenimes. Nous ne primes savoir d'oii ils provenaient , ni
eire fixes sur 'eur nombre; mais d apres les donnees
que nousa.vons recueillies , nous presunions qu'ilspeu-
vent elre douze a quinze.
iS.JNoiis primes a six heures le cliemin des monta-
gnes, niarchant toujours nord-ouest. Jusqu'a onze heu-
res, nous ne fimes que monter et descendre. Dans les
marecages, nous avions souvent de I'eau jusqu'a I'esto-
mac et presque toujours aux genoux. Nous nous arre-
tames a niidi au pied d'une monlagne pour prendre
quelque nourriture et nous reposer ; nos gens etaient
excedes. Les Indiens sont bons marclieurs et font de
longues traites, mais pour pen qu'ils soient charges, ils
se fatiguent promptenient, ce qui vient du defaut d'ha-
bitude. Nous nous remimes en niarche a deux heures,
traversames encore une montagne , et a peu de dis-
tance nous passames le Tacuande pour la derniere fois.
Nous couchames sur ses bords sud-ouest-quart-ouest.
19. Nous primes notre direction au sud-est et peu
apres a Test. Nos guides nous firent remarquer une cas-
cade qui sortait des flancs de la montagne, et formait
un bassin dont les eaux s'ecoulaient dans un lit etroit
borde de roches elevees. lis nous assurerent que c'etait
le Tacuande; en effet , nous ne le vimes plus. Nous
nous arretanies pour dejeuner a dix heures , et reprimes
notre route sud-est a tiavers des niontagnes tres escar-
pees. La , nous trouvames des cavernes fonnees d'enor-
mes blocs de roches superposes les uns sur les autrcs.
Nous vimes frequemment des coqs de roches qui volti-
geaient dans les environs ; mais leur vol est si rapide
( ii5 )
qu'il passe toute idee qu'on pourrait s en faire. Jamais
ils ne se poseiit , et nous ne pumes en tirer. Dans le
temps do raccouplemcnt , ils sont moins farouches ; ils
cherchent leurs femelles et s'arretent aupres d'elles. Les
Indiens nous assiirerent qua cette epoque , ils se ras-
semblent a Tentree des cavernes, et la, apres avoir
nettoye un certain espace , ils combattent quelquefois
plusieurs heures en presence des femelles, qui sont
spectatrices passives de ces combats. L'apres-midi fut
signalee par un tres gros patira que Ion nous tua pres
dun bassin situe sur le sonmietd une de ces montagnes.
La, nous nous etablimes pour passer la nuit.
Nos Indiens prirent dans ce bassin quelques poissons
dont ils ignoraient le nom. Ils ressemblent a ces pois-
sons rouges que Ion prend en France dans les sources
d'eaux vives; ils sont nuances des couleurs les plus
brillantes. Ge sont des especes de carpes tres petites ,
mais dun gout exquis. La ntiit que nous passiimes sur
les bords de ce bassin , nous entendimes presque conti-
nuellement de fortes detonnations, qui ne cesserent point
menie dans le jour, jusqu'a ce que nous ayons entiere-
ment traverse ces montagnes, et encore a une distance
assez considerable.
20. Notre route fut continuellement sud-est toujours
a travers les montagnes, nous nous arretions assez sou-
vent pourexaminer le sol. La terre s'amelioiait a mesure
que nous nous eloignions d'Oyapock, et a la base,
nous rencontrions de la salsepareille. Elle devenait plus
commune a mesure que nous nous enfoncions dans le
sud-est. Jose Antonio nous fit remarquer un arbre qu'il
appelle sapucaia. II est d'une grande elevation ; il porta
un coco spherique qui renferme une vingtaine ou plus
d'amandes qui sont fort delicates. Nous trouvames aussi
( "6)
beaucoup de lianes d'eau ou lianes du voyageur. Effec-
tivenient, en prenant environ deux brasses de cette
liane et lamarrant bien par les deux bouts, on a de
I'eau en assez grande quantite, et qui demeure long-
temps fraiche.
21. Nos guides nous previnrent que vers midi nous
passerions la plus haute de ces nionlagnes, du sonimet
de iaquelle nous pourrions voir cellos que nous avions
traversees le 4- Nous y arrivames en effet a une heure,
niais ce fut en vain que nous cherchames a reconnaitre
le point d'ou nous avions apercu la chaine sur Ia-
quelle nousetionsj seulement nous distinguames deux
chaines qui ne sont , la premiere que celle sui' Iaquelle
nous nous etions trouves , I'autre est plus loin et borde
rOyapock.
Nous nous arretames a trois heures sur les bords
de la crique t-u plutot bassin Aganiiware. Agamiware
signifie bassin ou lac des Agamis. II y en a eftecti-
vement beaucoup; car des le soir, nous en tuanies
une douzaine. Nous avions depuis la base des monta-
gnes trouve beaucoup de pieds de caoutchouc , et ils
devenaient plus nombreux a mesure que nous mar-
chions sud-est.
22. Nous commencames a visiter le cote sud-ouest du
bassin. Plusieurs criques sen echappent. Nos guides
nous dirent que plusieurs d'entie elles allaient non loin
de la se jeter dans les rivieres, une entre autres qu'ils
appelaient Hieuwar (grande eau) que nous pourrions
voir le lendeuiain. Le terrain surlequel nous etions etail
couvert de fougere fort haute et de cacaos. Get endroit
est un des plus giboyeux que nous ayons encore vu, car
nous etant arretes pour dejeuner, nos Indiens nous ap-
porterent une si grande quantite de gibier et de poisson,
( i'7 )
que nous fumes obliges de deineurer la pour le faire
boucaner dans lecourant de la journee. Nos provisions
furent encore augmentees d'un cabiaille et d'un patira.
Aussi nos gens, qui depuis quelque temps etaient a-peu-
pres raiionnes, se jeterent-ils sur ces victuailles avec
toute la gloutonnerie qui caracterise llndien qui se
trouve dans I'abondance, sans aucun souoi ni pre-
voyance pour Vavenir. La, Jose Antonio me fit voir un
arbre qu'il nomma coucheri. Ses feuilles ont la meme
odeur que oelles du giroflier.
(^La suite au numero prochain. )
( Il« )
DEUXIEME SECTION.
DOCUMENS, COMMUINICATIONS, NOUVELLES
GEOGRAPHIQUES, ETC.
Sitr la situation et la distance des 'villes c/'Almali<rh ,
Fischbalig, Karakoroum, Kantrheou et Peking, ^/'«-
pres rhistoire persane de Wassaf.
II y a dans I'histoire de Wassaf, lequel raconte en
partie comnie tenioin oculaire les eveneniens des regnes
des successeurs de Djengiskhan , plusieurs renseigne-
mens geographiques. L'un des plus interessans est tout
au conimencenieiit le passage traduit ci-apres , qui
donne les distances entre les capitales de la Chine
{Pcking\^ du Tangout [KantclieoiC]^ du Mogolistan (Ka-
rakoroum) et d'Almaligh. Si ces donnees sont justes,
et Ton ne saurait presque en douter , puisqu'elles ont
ete prises par lVassaf\ dans 1 hisloire deDjOssini, rni-
nistre de Holakoukhan , les deux villes de Kantcheou
et Fichbaligh , et par consequent aussi celle (X Alma-
ligh doivent occuper un site tout-atait different de celui
qui leur est assigne dans la petite carte publiee par
M. Klaporth dans ses memoires, et dans sa refutation
alleinande deM. Schmidt, (i)
(i) Bebuclitiing iind Wuderlegung der Torschiinpa des Berrn Schmidt.
Paris, 1824.
( 119 )
Void le passage en question :
« D'Almaligh a Fiscbbaligh il y a deux semaines de
« cheniin : de Fichbaligh a Khanbaligh (Peking). Le
« cheniin conduit dans la direction du sud par le desert
« que les Mongols appellent le desert des Oighours.Q'eiii
« la distance de quarante journees. De cet endroit ( de
« Fichbaligh) (i) jusqu'a Kantcheou^ qui est du pays de
« Tangout , est la frontiere du Khatai (de la Chine sep-
« tentrionale) du cote de I'orient, et ( de Fichbalig )
« jusqu'a Karakorouni. II y a dans la direction du nord
» egalement quarante journees de chemin, et derechef
« de Kara koroum jusqu'a Khanhaligli ^ et de la jusqu'a
« Kanlcheou la meme distance (de quarante journees).
D'apres la carle de M. K. , la distance de Fichbaligh
a Peking est presque la double de celle de Fichbaligh
a Karakorouni, tandis que ces deux distances devraient
etre ei;ales ; Karikoroum, Kantcheou et Peking sont ef-
fectivement places, dans la carte de M. K. , dans un
triangle dont deux cotes ( les distances de Peking a Ka-
rakorouni et a Kantcheou) sont egaux; mais il s'en faut
beaucoup que le troisieme (la distance de Kantcheou a
Karakoroum) soit aussi la meme mesure. La distance
donnee par la carte de M. K. des deux villes de Fichba-
ligh et Ahnaligh repond a-peu-pres a I'eloignement de
quinze jours de marche de caravane; mais elles doivent
etre portees toutes les deux plus vers lest, pour re-
pondre aux directions et aux distances de I'historien
persan , qui s'appuie de I'autorite du savant historien
(i) Ez Andja de la ne saurait se rapporter qu'a Fichbaligh, car
si Ton voulait la rapporter a Khanbaligh , qui est .i Test du Tangout,
la frontiere dont il est tantot question devrait 6tre roccidentale et
non pas I'orientale .
( I20 )
Djoivaiiis ; car d'apres lui, les quatre capitales dii Mo-
golistdn, du Khatai, du Tar/gout et du pays des Oi-
ghours, sont situees de sorte , que la distance delader-
niere (Fichbaligh) aux Irois autivs est partout de qua-
rantri journees.
Si, dans mon dernier travail, je n'ai pas eu I'avantage
deconsulter un manuscritaussi correct de Rechid-eddin
que Test celui de Paris, j'ai cette tois-ci devant nioi trois
manuscrils deWassaf don t deux tres corrects,et I'un deces
deux, qui a ete ecrit pour le conquerant de Constanti-
nopleen 866(1461), est en menie temps un chef-d'ceuvre
de calligraphie et d'elegance ; de sorte que , cette fois-
ci, les nianuscrits que j ai eus a ma disposition ne sau-
raient etre invalides par celui de JVassaf, qui se trouve
a la bibliotheque royale de Paris, ou les orientalistes
pourront comparer le texte avec ma traduction. Prive
du double avantage dun manuscrit aussi correct de
Rechideddin et de I'erudition chinoise de M. K., je n'ai
voulu que faire preuve a la Societe de mon zele en lui
signalant la riche mine de renseigneniens geographiques
et statistiques qui se trouve dans Rechid-eddin, et qui
pourra etre exploitee dorenavant, avec plus de moyens
et plus de profit, par des orientalistes francais.
J. DE Hammer.
Travaux du capitaine Vidal stir les cotes occidentales
des lies Britanniques.
Dans I'ete de i83i , le capitaine Vidal recut le com-
mandement temporaire du Pike, et fut charge de de-
terminer la profondeur d'eau que Ion trouve au large
des cotes occidentales d'lrlande ct d'Ecosse. Le paral-
lele des rochers Skelligs avail ete la limite septentrio-
nale du travail du capitaine White dans Je Shamrock;
au-dela de cette limite, la sonde ne pouvait plus servir
an navigateur pour estimer sa distance a la terre, lors-
qu'il n'avait pu obtenir d'observations astronomiques
pour fixer sa position : et peut-etre dans aucune partie
du monde , ce genre de connaissance n'etait plus neces-
saire que sur la cote dangereuse de I'ouest de I'lrlande.
Heureusement pour les navigateurs , I'importance de
connaitre les approches de cette cote ful sentie par I'hv-
drographe de I'amiraute , M. le capitaine Beaufort , et
on ne pouvait pas mieux faire que de charger le capi-
taine Vidal de ce travail.
Apres avoir prepare son hatiment pour ce service et
obtenu les instrumens necessaires , le capitaine Vidal se
rendit immediatement au Lough-Swilly, en determinant
le banc de sondes qui entoure la cote ouest dans toute
cette partie de aa route. L'eglise de Buncrana, formant
une des stations de la grande triangulation sur laquelle
s'appuie la levee des iles britanniques , fut adoptee par
le capitaine Vidal pour point de depart des mesures
chronometriques qu il aurait a faire. Nous nous reser-
vons de donner plus tard les resultats de ses observa-
tions.
Apres avoir obtenu des observations a Buncrana, le
capitaine Vidal mit en mer le 20 juin , pour reprendre
I'examen du banc de sondes. Le mauvais temps mit
beaucoup d'obstacles a ce travail , et le Pike arrivn a la
petite lie de Saint-Kilda , apres avoir obtenu pliisieurs
lignes de sondes tres importantes. Ayant quitte File le 29
juin , le capitaine Vidal passa a Suliska ei a Rona , et se
dirigea sur Balta , ou il arriva le 12 juillet. C'etait afin
d'obtenirla difference des meridiens en tre ci' point etles
9
( '^2 )
lies Feroe, que le Pike tnouilla a Balta-Sound , d'oi'i i\
partit le i5 juillet. Le capitaine Vitlal remarque que le
commerce des lies Feroe etaiu iin monopole du roi de
Danemark, il nest permis a auciin hatiment etranger
d'v laire le commerce. Un petit brick est expeclit' par le
gouvernemeiit , et fait trois voyages de Copenliague a
ces lies dans la saison favorable ; ce petit batiment suffit
pour le commerce tres borne de ces lies. Les voyageurs
qui veulent les visiter n'ont d'autre moyen que de pro-
fiter des voyages de ce brick, ou de freter un batiment
expres pour eux.
Le mouillage a Thorshavn est tres expose , et le Pike
fiit force de mettre k la mer pour eviter un coup de
vent le 20 juillet. De ce point il fit une ligne de sondes
vers le rocher Monk, au large de la pointe sud de I'lle
Suderoe.
La position de ce rocher fut trouvee differer de celle
qui lui est assignee sur la carte du capitaine Born. Le
temps etant mauvais, on iie put pas descendre sur le
rocher, mais le Pike passa entre le rocher et 1 iie ou il
ne trouva que i3 fathoms ( i4 brasses 1/2) d'eau. Ce
passage nest pas recommande par le capitaine Vidal et
doit etreevite autant que possible. Lorsque le Pike tra-
versa ce passage, le vent etait frais de I'ouest portant
contre la niaree qui courait a raison de plus de six milles
a I'heure. La grosse mer que produisait cetle opposition
du vent et du courant rendait ires difficile de gouverner
le batiment, et il etait necessaire de porter beaucoup de
voiles pour ne pas etre repousse.
En allant de Suderoe a Balta, la plus grande profon-
deur d'eau que Ion trouva sur le banc de sondes fut de
683 fathoms (jGH brasses francaist-s ou i,'?4,9 "o4). Le afi,
le capitaine V idal arriva a Balta ; apres avoir fait des ob-
( 123 )
servalions dansce point, le Pike mit a la voile le 3o juil-
let pour Sulisca et Rona , et mouilla le i4 aout sur la
cote est de Rona.
On trouva que ces iles etaient mal placees sur les car-
tes, et on en determina la position avec exactitude. On
trouva aussi au iiord deRona un plateau de roches sur
lequel il n'y a que 3o fathoms ou 33 brasses 1/2 d'eau
(54"\8), et qui n'est pas marque sur les cartes.
De ces lies , le Pike retourna au Lougli-Swilly , et
mouilla devant Buncrana le 26 aout.
NouvEAu TRAiTE de Htnites entre les Etats -Unis de
VAtnerique du Nordet le Mexiqiie.
Les liuiites entre les Etats-Unis de I'Amerique sep-
tentrionale et le Mexique ont etc fixees par uti traite
solenuel , signe a Washington le 22 fevrier 18x9, a I'e-
poque oil le Mexique faisait partie integrante de la mo-
narchie espagnole; niais depuis les changemens poli-
tiques survenus dans ce dernier pays, il a ete juge in-
dispensable de confirmer la validite dudit traite, qui
reste en vigueur dans tout son contenu entre les Etats-
Unis de I'Amerique duNord et les Etats-Unis mexicains.
Dans cette vue, les plenipotentiaires respectifs des
deuxgouvernemens ont arrete les dispositions suivantes:
Art. i*'^. La delimitation des frontieres des deux pays
restanl la meme que celle fixee par le traite de Washings
ton, du 22 fevrier 1819, les deux parties contractantes
decident de niettre sans delai a execution les 3" et 4*
articles dudit traite, ainsi concus :
2. La ligne de demarcation entre les deux pays, a
Vouest du Mississipi, commence dans le goKe du Mcxi-
9-
( i''4 )
que, a leniboiicliure de la riviere Sabine, et renionte
vers le nord , le long du bord occidental de celte riviere,
jusqu'au 32° degre de latitude ; de la, prend une direc-
tion tout-a-fait septentrionale jusqu'au degre de lati-
tude qui se rencontre avec le Rio-Roxo de Natcbito-
clies, ou Riviere-Rouge, suit le Rio-Roxo jusqu'au loo*
degre de longitude O. de Londres, ou aS* de Washing-
ton ; puis, traversant ladite Riviere-Rouge etsedirigeant
au nord, la ligne aboutira a la riviere Arkansas, dont
elle longera le bord meridional jusqu'a sa source , sous
le 42* degre de latitude nord, et enfin suivra ce meme
parallele de latitude jusqu'a la mer du Sud; le tout
conforniement au plan tr.ice sur la carte des Etats-Unis,
de Melish, publiee a Philadelpbie le i^r Janvier i8i8.
Cependant si! etait reconnu que la source de la riviere
Arkansas se trouve soit au nord, soit au sud dudit 42"
parallele de latitude, la limite suivra, a partir de ladite
source, une direction septentrionale ou meridionale
(selon que le cas se presenterait) jusqu'a la rencontre
du 42* degre de latitude, qu'elle prolongera de meme
jusqu'a la nier du Sud. Toutes les iles situees dans la
Sabine, la Riviere-Rouge et celle d' Arkansas, appartien-
nent aux Etats-Unis, mais la navigation sur lesdites ri-
vieres est commune aux deux nations.
Les deux parties contractantes renoncent a tons droits,
pretentions et reclamations sur les territoires renfermes
dans lesdites limites, c'est-adire, les Etats-Unis, sur ceux
silues a I'ouest et au sud de la ligne de demarcation ci-
dessus fixee, et S. M. catbolique, sur ceux a Test et au
nord aussi de la meme ligne.
3. Afin de lixer avec plus de precision, et de Meter-
miner d une maniere definitive les frontieres des deux
j.ays, cbacune des parties contractantcs nommera un
( 125 )
commissaire et uii ingenieur qui procecleront a toutes
les operations iiecessaires pour arriver a ce resultat,
entre autres a celle de fixer la latitude positive de la
source de la riviere Arkansas, ainsi que la ligne depuis
le 42* parallele jusqu'a la mer du Sud.
4. Les ratifications des presentes, seront echangees a
Washington dans le delai de quatre mois, et plus tot,
s'il est possible.
Fait a Mexico, le 12 Janvier 1828.
Signe : Pour les Etats-Unis, J.-R. Poinsett.
Pour le Mexique, S. Camacho.
J.-Y. ESTEVAIV.
Ratifie a Washington , le 5 avril i%?>i.
w.
Societe americaine des missions.
L'anniversaire de la tondation de cette Societe a ete
celebre avec solennite a Philadelphie, dans le courant
de septenibre dernier. Nous donnons ci-apres un court
extraitdu rapport, dont la lecture, faite par Irois secre-
taires , a occupe plusieurs heures , dans deux seances
differentes.
La Societe americaine entreilent en ce moment vingt-
deux missions , savoir : en Grece , a Constantinople, en
Syrie , chez les Juifs; a Bombay, Ceylan , Siam, a la
Chine; dans TArchipel Indien , les lies Sandwich; laPa-
tagonie; parmi les Cherokees , a I'ouest du Mississipi ,
chez les Chactaws, Creeks, Osages, Stockbridges , Ma-
ckinaws, Ojybeways , Maumees et les Indiens de I'etat
de New -York. Ces missions comptent 60 etablisseniens,
83 missionnaires dans les ordres , 6 medecins non gra-
( '2f>- )
dues; 6 impriniedis, 26 inissiunnaires assistans, 126
feiniiies; p!u? 4 piedicateurs iiatifs et 4^ assislans aussi
iiatifs. Ce qui fait 247 personnes travaillant a la propa-
gation de la vraie foi , envoyees par la Sociote et 5o pre-
dicateiirs el assislans nalifs, en lout 296 individus.
De ce nonibre, 48 sont partis I'aniiee derniere, savoir:
19 niissionnaircs dans les ordrcs , 2 medecins, 2 inipri-
nieurs et 2 5aulres assislans. Les eglises lornieesetdes-
servies par ces niissfons sont an nombre de 3^, et comp-
tenl 1704 calhccumenes convertis. Les ecoles qui en
dependent sont frequentees par environ 5u,ooo iHeves.
Les presses de la Sociele onl iniprime, 1 annee derniere,
pres de 7,600,000 pages traitant de matieres religieuscs.
On calcule que depuis retabiissement de ces presses, it
en est sorti 68,000,000 de pages, ayant toules rapport
aux travaux des missions.
La Societe est sur le point d'envoyer de nouveaux
ogens dans I'Afrique orientale et occidentale, dans les
lies de Crete el de Cliypre , a Broussa , dans I'Asie-Mi-
neure et en Perse. Plusieurs autressont en observation
sur le continent oriental el parmi les Indiens de I'Ame-
rique du nord.
Le cliamp explore sous la direction de la Societe
s'agrandit de jour en joui-. Ses inessagers ont penetre
chez les trihus indiennes qui bordenl la frontiere S. O.
des Etais-Unis , jusqu'au pied des monlagnes Roclieu-
sesj d'autres ont ete envoyes aux grands lacs et vers le
Haul-Mississipi. Un deux a parcouru la plus grande
partie de la coleN.O. tandis qu un autre visilait leMexi-
que et la plupart des nouveaux Etals de TAnierique
duSud. Des missionnaires ont aborde aux lies Washing-
ton, plusieurs se sont etablis sur la frontiere nieridio-
nale de la Chine, et a Siani dans la partie septentrionale
( 127 )
de Ceylaii et dans I'Incle occidentale. La Societe est ega-
lenienl representee dans la Syrie et dans la capitate de
Tempire ottoman, a Athenes, cet ancien flambeau de la
Grece, et clans 1 ile de Make; elle a porte la parole di-
vine a travers les provinces de I'Asie-Mineure , dans les
plaines du Caucase et sur les confins de la Perse; une
mission s'avance dans rAfrique occidentale , et les cotes
orientales de cette partie du monde vont etre aussi ex-
ploreeSjdesqu'on aura trouve les interpretes necessaires;
dans qnelques niois, une station sera etablie dans I'an-
cienne Crete, et une autre dans I'importante ile de
Chypre. Enfin, on attend des nouvelles de missionnaires
qui doivent porter la lumiere de I'Evangile au pied du
mont Olympe et jusque par-dela les plaines de la Meso-
potamie et les montagnes du Kurdistan.
Les recettes de la Societe pendant I'annee qui vient
de secouler ont excede celles de I'annee antecedente
de 1 5,270^011. 6'5, et se sont elevees a 145,844 77, ce
qui, ajoute a la balance en caisse au commencement de
I'annee, a donne un fonds de i52,522 4r a la disposi-
tion du comite. Sur cette somme,il a ete depense celle
de i4g,Qo6 27.
Reliquat a la cloture de I'annee financiere(au i^aoiit
dernier), 2,616 74.
En outre, la Societe a encore recu diverses sommes
pour aider a la propagation des sainlesEcritures, savoir:
De la Societe Biblique americaine :
Pour aider la mission de Bombay a traduire I'Evangile
en langue mahrate 5,ooo''""
Pour la meme traduction en laneue
^ reporter. . . . 5,ooo
( 128 )
Report 5,000 'lo"-
hawaihienne, a la mission des iles
Sandwich 5oo
Pour la meme traduction en laneue
Cherokee 3oo
De la Societe Biblique de Philadel-
phia :
Pour aider a traduire les Ecritures
en langue hawaienne i,5oo
De la Societe americaine des Tra-
ductions :
Pour le meme objet, aux missions
de Bombay, Ceylan , de la Chine , des
lies Sandwich et dans la Mediterranee. 6,000
Enfin , de diverses autres sources ,
pour impressions et traductions . . . 6,5 20
Le tout montant a 17,920
A quoi joignant le montant de la
depense ci-dessus 149,906 27
Les depenses de la Societe des Mis-
sions se sont elevees , pour I'annee
i832-33 a la somme de 167,826 27
( 129 )
Population du Canada. — Relei'e dii inouvement des tiais-
sauces, manages et deces pendant les quatre dernieres
annees, tel que Vont ctahli les rapports des protonotaires
de chaque district a la legislature.
DISTRICTS.
ANNEgS.
NAISSANCES.
MARIAGES.
DECKS.
Quebec <
Montreal •
Les Trois-Rivi^res . I
Gaspe -^
Saint-Francis <
1S29
i83o
i83i
i832
1829
i83o
i83i
i832
1829
l83o
i83i
l832
I8a9
i83o
i83i
^ i832
- 1829
i83o
i83i
i83a
7,211
7,600
8,i33
8,591
i,i5o
1,432
1,629
1,67 +
3,5oo
4,843
5,028
6,946
3i,535
5,885
20,1 12
12,208
i3,o43
i4,2i7
13,195
2,012
2,553
2,592
2,5o6
5,36i
5,767
6,5 14
13,718
52,663
9,663
3i,36o
2,409
2,492
2,738
1,754
419
5io
519
548
8o3
1,292
1,195
i,3i9
io,3o3
1,996
4,609
0
52
0
42
62
67
0
4
a5
28
102
»94
i63
aor
3o6
330
189
43
42
58
5i
45
47
48
23
926
194
i63
L'accroissement de population pendant les quatre
( 'So )
clernieres annees , obteiiu par I'excedaiit des naissance:*
sur les deces, est done de 39,3 16 , savoir :
District de Quebec 11,421]
Montreal 2i,3oaf
Les 1 rois-nivieres . 5,7041
Saint-Francis. . . . 763)
En coinparant le mouvenient de la population pen-
dant I'annee derniere, on verra qne dans le district de
Quebec, les naissances ont ej^cede les deces de i,645,
et que dans celui de Montreal les deces ont siirpasse les
naissances de 623; niais it faut observer que le grand
nonibre des morts a frappe sur les emigrans nouveau-
venus, et a ete cause pai' les ravages du cholefra.
En prenant en consideration la grande niortaiite qui
a regne en i83i, ainsi que I'accroissement de population
qui n est pas connu dans diverses parties du territoire,
telies que le comte de Gaspe et d'autres etablissemens
protestans, on peut porter, en toute assurance, I'aug-
mentation de la population du Canada pendant les quatre
dernieres annees, a 40j00C) individus, ce qui donne
10,000 par annee moyenne, non compris les accroisse-
niens resultant du fait des emigrations.
(i) On remarquera dans ce resultat, comme dans le tableau qui
precede , des erreurs de chiffres qu'on ne peut rectifier parce qu'elles
sont egaiement dans le texte, mais qui ne doivent point influer sur
le chiffre total.
i3i )
Population de la Crete en i832.
NOMS
DES CANTONS.
Setia
Yera-Peira ou Gira-
Petra
Mirabelle
Lassiti
Malevisi . . „
Temenos
Arcadie ou Riso-Cas-
tro
Cliersonesp ou Pedia .
Bonifacio ou Mono-
facio
Kenourio
Piriotissa
Milopotamos
Amari
Retliimo
Aivassili ou Lambis. .
Apocorona ouAmpri-
corna
La Canee
Saelino
Kissamos
Sphakia
CONSEILS
doni
i!s dopendeiitJ
POPULATION.
Candie.
Id.
Id.
Id.
Id.
Id.
Id.
Id.
Id.
Id.
Id.
Rliethimo.
Id.
Id.
La Canee.
Id.
Id.
Id.
Id.
Id.
3,000
8,000
2,5oo
19,000
2,000
2,5oo
6,000
000
5oo
000
000
000
000
000
5,000
10,000
3,000
3,5oo
4,000
98,000
OBSERVATIONS.
D'oii depend Spina-
longa.
Le chef-lieu de ce can-
ton esi Candie.
(Ces tr
formes
3 trots cantons eonl
p.nr i'ancienne
; province de Messara, oCi
I etait siluee Gorljne.
Qui comprend I'Acro-
lyrie, oil est i'ancienne
grotte de saint Jean.
D'oii depend Cara-
Imse.
( i32 )
Note sur les travaux de la nouvelle Carte de Suisse.
Les travaux de la Carte de Suisse, commences depuis
long-temps, et qui etaient nioUement conduits par le
general Fiiixlcr, ont pris, sous la direction du general
Diifour, une grande activite.
En i834 5 la triangulation sera, sinon terminee, du
moins fort avancee, et le travail topographique sera
presque arrive au meme point. Les minutes se font
au 77777. La Carte sera gravee a Techelle du .„g'^„^, et
comprendra aS feuilles de la meme dimension que celles
de la nouvelle Carte de France, savoir, 5 decimetres sur
8 decimetres.
Geneve, 27 decembre 18 33.
Voyage de MM. Ad.vji de Bauve et Levrieur datis
rinterieur de la Guyane.
Belem de Gram Para, 29 aout i833.
Monsieur,
Dans la derniere lettre que j'ai eu I'honneur de vous
ecrire, en vous adressant la relation de mon excursion
a I'Amazone , je vous ai donne une idee de ma position,
et je vous ai fait part du plan que Leprieur et moi nous
nous etions trace. N'ayant pu executer notre projet
comnie nous Tavions concu , nous nous determinames
a descendre le Jary, comptant de trouver cliez les Ta-
niocomos les guides necessaires pour me rendre aux
sources du Rio de Gurupatouba, a I'embouchure du-
( '33 )
quel est situe Montealegre, et de la penetrer, comme
nous nous I'etions propose. Le 4 avril, je quittai notre
etablissement de Rouapira, Leprieur devait me suivre
au bout de irois a quatre jours. J'eus , avant d'arriver
chez le chef des Tanioconios, donr, ainsi que vous I'a-
vez vu par ma relation , le village est situe a i'embou-
chure de Carapanatouba , a lutter contie les perils du
fleuve et contre ceux que me susciterent des individus
du dehors, venuspour tirer de la salsepareille, qui enga-
geaient les Indiens a me faire un mauvais parti. Arrive chez
Joaquim Manoel , je trouvai un assez grand nombre de
colporteurs qui, ayant anime les Tamocomos, voulaient
s'opposer a nion debarquement. Ce ne tut cpi'a force de
patience et de ferniele, que je parvins a faire entendre
raison a ces individus, qui se figuraient toujours que
des Francais ne pouvaient se presenter en ces pai-ages
que pourse frayer un cherain pour s'emparer dela pro-
vince. Le commandarit de Gouroupa, que j'avais connu,
avait ete change , me disait-on , et le nouveau avait
donne les ordres les plus severes a I'egard des Francais
qui pourraient se presenter de nouveau. J obtins po\ir-
tant qu'un petit canot lui fut expedie avec une lettre
dans laquelle je I'informais de ma presence, en le priant
de vouloir bien donner des ordres pour qu'on ne nut
aucun obstacle a mon expedition. Le capitaine Joaquim
Manoel, un peu revenu desmauvaises impressions qu'on
lui avait fait prendre contre moi , me dotma au bout
de quelques jours des guides pour me conduire sur une
riviere peu t^Ioignee des nionts Sororoca, qui , disait-il,
se jetait dans Gouroupatouba. Des lacs, des marecages
pleins d'eau decouragerent mes gens, qui me declare-
rent que , dans cette saison, il etait impossible de gagner
le point sur lequel je voulais me rendre. Un naturaliste,
( i34 ;
Ml Brarhet , qui iiravait acconipagne, ne put resister
aux fatigues que nous enmes a essuyer, et tomhaiit
inalacle , niourut a notre relour chez le capitaine Joa-
quim JManot'i. 31. Brachet etait excellent preparateur,
avail tJes connaissances en entomologie , et me tut sou-
vent utile par sa peiseveranie et son courage; je le re-
grette vivenient. Une derniere tentative pour gagner
Gouroupatouba fut encore intructueuse. Enfin , je recus
le aS juin une reponse de Gouroupa du lieutenant-co-
lonel Mougo, qui avail reniplace M. Gaye. II donnait
ordre au capilaine Joaquini Manoel de nie donner des
guides pour me rendre oil bon me seniblerait, ayant
recu du president de la province des instructions a cet
egard. En eltet, I'annee derniere, j'avais ecrit au vice-
consul fiancais du Para qu'oblige de relourner sur nies
pas , je reviendrais dans un bret delai a-peu-pres daus
les memes parages. Le vice-consul fit des demarches
aupres du president, qui expedia aussitotdes ordres a
Gouroupa pour qu'on ne suscilat aucun obstacle, si moi
ou quelqiies Francais se presentaient sur un afiluentde
I'Atnazone. IMalheureusement , un miserable juge de
paix de Villa -JNova, qui paraissait m'en vonloir particu-
liereiuent , eut assez dinHuence sur Joaqiiim Manoel,
dont il etait le parrain, pour IVmpeclier de me donner
des guides capables.Voyantquejene pouvais gagnerGou-
roupatouba avec les gens que j'avais avec moi, j enga-
geai quelques Indiens de bonne volonte, mais peu ex'
periraentes, pour me conduire a Gouroupa. Mon inten-
tion etait deremonler lAmazone jusqu'au RioVVatuma ,
dont les sources sont voisines de la Serra do Acavava,
et traversant celte chaine, cliercher un affluent de
I'Essequebo. Mais mes gens , pen accoutumes aux dan-
gers de la riviere, precipiterent mes emharcations dans
( >35)
line cascade. Je perdis quatre personnes qui se noyerent
et tout ce que j'avais. Moi meriie, saisi par une jambe
qu'avait attr.'xpee un de mes neg^res , je ne dus nion sa-
int qua un canot qui se trouvait au bas du rapide. Des
objets precieux de botanique el d'entomoiogie , mes
observations, tout enfin tut englouti. Quanta Leprieur,
depuis le 4 avril, je n'ai eu aucune nouvelle de lui, et
tout me porte a croire que ce sera une nouvelle victime
de ces parages. Son intrepidite, son amour de la science
le feront regretter des honimes inslruits sur les traces
desquels il niarchait , et dont beaucoup etaient ses
amis.
Je suis enfin arrive le 22 juillet a Gouroupa. J y tus
accueilli avec I'hospitalite la plus genereuse. Prenant de
la passage dans une goelette, je debarquai au Para le
1 5 aout, apres dixsept jours de traversee. Je ne saurais
trop me loner des bontes du president, M. Machado
d'Oliveira, que je ne connaissais cependant que dune
maniere indirecte, ayant ete tres lie avec un de ses amis,
president de la province de Mara^non en 1823. M. Ma-
chado mit a ma disposition toutes les cartes et documens
des archives, et me fit I'oftre des instrumens qui pour-
raient nieconvenir; mais je ne trouvai que quelques
sextants et cercles en mauvais etat, dont la pesanteur
en rend le transport dans le bois impossible. Je vais
maintenant remonter I'Amazone jusqu'au Watuma, et
si par rette riviere je ne puis gagner I'Essequebo, je
me rendrai sur le Rio Branco , par lequel je crois que
je reussirai. De Demerary, ou j'espere que j'arriverai
dans six niois, j aurai I honneur, monsieur, de vous en-
voyer une relation et des esquisses zoologiques sur les
diverses peuplades des Guyanes , ainsi que des vocabu-
laires. Parlant plusieurs langues des nations indiennes,
( i36)
je me trouve avoir plus de facilite que n'en ont eues d'au-
tres voyageurs, pour saisir les traits et lescoutumes qui
les differencient. De Demerary, men intention estde re-
nionter lOrenoque, si je suis approuve par le gfoiiver-
nement francais, de rentrer par le canal de Cassiquiari
dans lAmazone, d'ou prenant le Rio-Ucayala , Apopo-
Paro ou le Rio Beni, que je remonterai jusqu'a ses
sources, je trouve rai une grande quantite de nations
iiidiennes tout-a-fait inconnues, et je visiterai le lac
Titicaca , sur les bords duquel on trouve des antiquite's
americaines. De Demerai'y , j'aurai I'honneur de vous
soumettre , en vous rendant compte de mon voyage, un
plan circonstancie de mon projet.
J'ai Thonneur d'etre, etc.
E. Adam de Bauve.
Extrnit dune lettre de M. J. Graberg de Hemso a M.
JoMARD , membre de Vlnstitut.
Florence, le 2 avril i833.
L'atlas de Zuccagni Orlandini est termine depuis le
mois de novenibre ; il contlent en tout vingt tableaux
ou cartes, dont la derniere represente I'arcbipcl toscan.
Mon rapport sur cet excellent ouvrage fut lu a I'Aca-
deniie des Georgopbiles le 3 de mars , et donna lieu a
quelques pourparlers dans le sciti de I'academie, et a
des eclaircissemens et notes supplementaires, qui seront
lus dans la seance du mois courant. Je ne sais si on les
imprimera, car 1 oxcellente execution de I'ouvrage, sur-
tout dans sa parlie descriptive et pour la nomenclature
geographique , a excite quelque jalousie. Le fait est
( i37 )
pourtant que Zuccagni a reconnu et rectiiie plus de trois
cent soixante-dix erreurs de nonis topographiques dans
les cartes de ses deux predecesseurs , dont quarante-et-
une dans hi seule lie dElbe, La carle du pere Inghirami
excelle par la precision niathemalique, et celle de Se-
gato par la beaute de I'execution caleographique; niais
pour I'exactitude de la nomenclature, de I'orthographe
desnomsde localite, celle de Zuccagni laisse I'uneet I'au-
tre bien loin en arriere.C'est qu'il a personnellenient vi-
site et examine presque tous les lieux mentionnes dans
son ouvrage; et, ou il n'a pas ete en personne, conune
dans le duche de Lucques et dans la Garlagana, i! a
obtenu des autoiites memes et des notables du pays les
renseignemens et les corrections qui lui etaient neces-
saires. Ses tableaux geo-ethnographiques et statistiques
sont, d'ailleurs, ce que Ton pent voir de mieux fait dans
ce genre, et surtout ce qu'il y a de plus exact et de plus
instructif a I'egard de la geographic et de la statislique
•de la Toscane.
lO
( i38 )
TROISIEME SEC/IION.
ACTES DE LA SOCIETE.
PROCES-VERBAUX DES SEANCES.
Seance du 'j fevrier i834.
Leproces-verbal de la derniere seance est hi etadopte.
M. Felix Let'el ecrit a la Societe pour iui souinettre
cjiielques observations relativement a la publication de
son Histoire philosopliique et politique de I Afrique oc-
cidentale, flans le cas on la decision de la Commission
speciale Iui serait favorable.
■ M. Rafinesque ecrit de Pbiladelpbie, a la date du i5
novembre i833, pour envoyer a la Societe une notice
sur les monts Cotocton de la A'irginie et du JMaryland,
accompagnee dune petite carte. 11 annoncequ'il enverra
incessatnnient a la Societe 1 analyse des principaux voya-
ges, et de quclquesautres travaux publics auxEtats-Unis.
II se propose de joindie a cet envoi un precis de ses
voyages en Europe et en Amerique , et une histoire des
peuples de toutes les Ameriques. La Commission cen-
trale remercie M. Rafinesque de ses comiaunications ,
et renvoie sa notice sur les munts Cotocton au comite
du Bulletin.
M. Guerra ecrit de nouveau, de Bordeaux, pour an-
Tioncer qu'il se propose de concourir au prix foride par
S. A. R. le due d'Orleans , pour etre distribue par la
Societe de Geographic : il a deja ete ecrit a IM. Guerra
que I'irivention agricole dorit i! a entrelenu la Societe ne
pouvait renlrer dans le programme des matieres dont
<;llc s'occupe.
( '^9 )
M. lebaron d'Homhres Fiiinas, menibre de la Sociele,
adresse un niemoire sur iin gyrometre ou roue d'arpeti-
tage, et sur son application a un instrument de geodesie
dont un long usage lui aprouve la commodite et ['exac-
titude.
M. le redacteur de la Revue des voyages deinnnde I'e-
change de ce nouveau recueil contre le Bulletin de la
Societe. La Commission centrale accepte cet ecliange.
II est rendu compte que le comite du Bulletin s'est
reuni pour s'occuper de la proposition faite par M. d'A-
vezac d'ouvrir uiie nouvelle serie de numeros pour le
Bulletin, et que la majorite du comite a ete d'avis que
cette nouvelle serie fut ouverte a partir du i*^'' Janvier.
Cet avis a ele adopte par la Commission centrale.
M. le commandant d Urville fait un rapport sur la
relation espagnole du voyage de Bonechea a 1 lie d'Aniat
(Tahiti^, et il propose que cette relation soit piibliee
dans les memoires de la Societe. Cette jiroposition est
prise en consideration par la Commission centrale, et
renvoyee a la section de publication. Le rapport de
M. d'Urville sera insere au Bulletin.
M. Warden communique I'extrait du journal dun
voyage sur la cote de la Chine, depuis la province de
Canton jusqu'a la Tartaric Mantchoue , en i839. et i833>
par le Rev. Ch. Gutxlalf. Renvoi au comite du Bulletin.
M. Coulier depose sur le bureau une note par laquelle
il fait connaitre lexistence de deux feux qui ne sont pas
portes dans la notice des phares des cotes de France,
publiee par ladminislratioii des pontj-et-cliaussees ; il
demande que cette note soit inseree au Bulletin de la
Societe.
( '4o )
Seance da 1 1 fevrier.
Le pioces-verbal de la derniere seance est lu el adopie.
M. Joiiannin depose sur le bureau, pour elre lu a
la prochaine seance, iin niemoire sur le choix des
diametres des globes terrestres artificiels, et sur la divi-
sion des carles geographiques et des menies globes quil
conviendrail d'adopter dans linteret du systeme legal
des poids et niesures , de I'instruction publique et des
sciences.
M. Benoit, ingenieur niecanicien a Troyes, e'crit a la
Societe pour lui ofirir un globe geographiquo porlatif
en papier pnrvhemin ,ajA\\\. onze pieds de circonference,
Ce globe , qui se remplit d'air en deux minutes environ,
est nionte sur un support renfermant un soufflet. L'au-
teur soumet ce globe a I'approbalion de la Societe , et
lemoigne le desir quil soil fait un rapport sur son in-
vention. — La Commission cenlrale remercie M. Benoit
de son hommage , et elle renvoie I'examen du globe a
une commission speciale, coniposee do MM. Corabocuf,
Daussy, Eyries et Reaume.
M. le colonel Jackson , membre de la Societe, a Saint-
Petersbourg, adresse un exemplaire de I'AideMemoire
du voyageur, qu'il vientdepublier, el il acconipagne cet
envoi de quelques details sur la redaction de son tra-
vail. M. le colonel Goraboeuf est prie den rendre
compte.
M. Alexandre Burnes e'crit de Londres pour faire
bonnuage a la Societe d'un nouveau niemoire quil a
public sur le cours de 1 Indus, et qui complete son
premier travail sur la description de ce lleuve.
M. Townsend, membre de la Societe, lui ecrit pour
lui faire hommage de deux grandes cartes americaines ,
( i4i }
I'une des Etats-Uiiis, et I'autre de I'Etat de New-York;
et il entre dans quelques details sur ces deux publica-
tions. M. Townsend annonce qu'il vient de se former,
an depot de la marine, a New-York, une societe sous
le noni de United states naval Lyceum , dont les travaux
ont pour but de hater la marche des connaissances geo-
graphitjues. II tenioigne le desir de voir des relations
s'ouvrir entre les deux societes, et il se feliciterait de
pouvoir servir d intermediaire dans leurs ra]>ports scien-
tifiques. La Commission cenlrale remercie M. Townsend
de ses inleressantes communications , et elle accepte
avec empressement la proposition qui lui est faile d en-
tretenir des relations avec la nouvelle societe de New-
York. La Societe fera volon tiers I echange de son re-
cueil periodiqiie avec les publications de cet etablisse-
ment.
M. Arthus Bertrand ecrit a la Societe pour lui t'aire
homniage du voyage en Sr.ede de M. Alexandre Dau-
mont, qu'il vient de pul)lier. M. Dubuc veut Lien se
charger de rendre conipte de cet ouvrage,
M. Grand-Pierre, directeur de la Societe des Missions
evangeliques de Paris, adresse les deux premieres livrai-
sons deson recueil pour i834, et appelle I'attention de
la Societe de Geographic sur le voyage de MM. Arbous-
set et Casalis dans le pays encore inexplore des Bas-
soutos. Dapres son desir, le Comite du Bulletin est in-
vite a presenter une analyse de cette relation, ainsi que
des cartes qui I'accompagnent.
M. Adrien Gochelet rappelle a la Societe qu'il a eu
I'honneur de rini'ormer, par une Icttre datee de Mexico,
le 3o juin i83o, qu'une caravane, composee de 62
individus, etait partie le 7 novembre 1829 d'Albiquisi ,
dans I'Etat du Nouveau-Mexique, et s'etaitdirigee vers
( 142 )
lu haute Californie, a travers des pays qui n'avaient jjio-
bablement ele parcounis que par les auciens inission-
naites espagnols. Cette caravaue etait heuicusenicut
arrivee le ii Janvier suivaiit a la mission de Saint-Ga-
briel, dans la Hiiute-Calilornie , apres avoir rencontre
quelques tribus sauvages qui ne connnirent a son egard
»ucunes hoslilites. M. Cocheliet adresse le nuniero du
journal officiel mexicain qui fait coniiaitre avec exacti-
tude et jour par jour la route suivie par cette caravaue,
et il exprinie le desir que cet itineraire soit insere au
liulletin. — Adopte.
M. Warden aiinonce que la societe de colonisation
ameriraine s'est diHerniinee a former un nouvel etablis-
sement qui sera appele New-York, au cap Mount, ou
sur tout autre point de la cote d'Atrique qui sera juge
convenal)le. Lacoloniedu cap Palinasva prendre le noni
de Maryland. II est aremarquer qu'une chained'etablis-
semens ainsi places le long de la cote est le seul moyen
efficare pour arriver a I'entiere abolition de la traile.
La Commission centrale , a laquelle M. le professeur
Rafinesque s'est adresse pour obtenir la remise de son
niemoire surles races negres asiatiques , dans les cas ou
il ne serait pas insere dans le recueil de la Societe, de-
cide , sur I'avis de la section de publication , que ce tra-
vail ne sera pas publie , et que lauteur, dapres les con-
ditions du concours , sera autorise a f'aire lirer une
copie de son manuscril.
M. le president informe I'assemblee que M. Leprieur,
de r tour depuis quchjues jours d'un voyage dans I'in-
terienr de la Guyane, est present a la seance. Sur lin-
vitation de M. le president, il annonce qu'il se I'era un
plaisir de communiquer, a la prochaiue assemblee, une
notice sur ses voyages.
La seance generale est iixee au 4 avril prochain.
( '43 )
aCVRAGKS OFFEKTS A LA SOCIETE.
Seance dii 'j feviier i834.
Par M. le directeur tin Deput de la guerre : Vlan
iF Alger et des environs, drcsse au Depot de la guerre
sous la direction de M. le general Pelet. i832. i feuille.
Par M. Albert-Monteinont : Bibliotlieque universelle
des voyages, 14*" livr. , in-8°.
Par M.le capita'ne d'Ui-ville : 16'', i7'' et 18' livraisons
du Voyage pittoresque aiitour du monde.
Par M. Jaubert: Meiaoii e sur V ancien cours de V Oxus.
Droch. in-8°.
Par M. Ramon de la Sagra : Tahlas necrologicas del
colera morbus en la ciitdad de la Habana y sits arraba-
les, etc. I vol. in 4°-
Par M. Gide : Nouvelles Annates des voyages, cahier
de Janvier i834.
Par MM. les redactenrs •.Revue des voyages, 2' livr.
Par M. de Moleon : Bceiieil de la Societe Poly tech-
nique, 2^serie,n'^ i, Janvier.
Par M. Virlet : Notes geologiques sur les ties du nord
de la Grece , in-8\
Par M.*** : Sur T emplacement de robelisque du Louqsor.
Par la Societe d'agriculture de la Charente : Jnnales de
cette Societe , cahiersde novembre et decembre.
Par M. le directeur : Plusieurs numeros du journal
TInstitul.
Seance du 2 1 fevrier.
Par M. Townsend : Carte des Etats-Unis , par Amos
Lay. New-York, i83i. — Carte de Vetat de New-York ,
avec une partie des etats de Pensylvanie et de New-
Jersey. 2"" edit., 1829.
Par M. Benoit : Globe terrestre, dresse par A. Des-
madry] , geograplie, et public par M. Benoit (3™,575
( M4 )
c!e circonfererice, i"',i37,5 de dianietre). Imprirae sur
papier parchemin. Troyes, i833.
Par M. All)ert Monteinoiu : Dibliotheque universelle
lies voyages, i 5*^ livr.
Par M. le tapitaine d'Urville : Deux livraisons du
Voyage pittoiesque aiitour du inonde.
Par M. Arlhus Bertrand : Voyage en Suede , contenant
des notions elendues sur le commerce, I'industrie, I'a-
griculture, les mines, les sciences, les arts et la littera-
turedece royaume, etc. , par Alexandre Danniont. avol.
in-8'^ avec un atlas in-4 '.
Par M. le colonel Jackson : Aide-memoire du voya-
geur, I vol. in-i2 avec atlas.
Par M. Al. Burnes : J memoir of a map oj the eas-
tern branch of the Indus ^ giving an account of the alte-
rations produced in it bjthe enrtliquake of i%ig and the
bunsting oJ the dums in 1826, etc. 1 vol. in-4" Htliogra-
phie , avec une carte.
Par la Societe royale Asiatique de Londres : Procee-
dings of the Society, diicembrc. In-S".
Par M. Bajot : Annates maritimeset co/onia/es, valners
de Janvier et fevrier i834.
Par la Societe des Missions evangeliques : Carte du
sud-est deVAfrique, pour lintelligence des travaux des
missionnaires francais, i834- — Carte du pays des Bas-
sonios, au sud de C Afrique , dressee par le missionnaire
Casalis , i834- — Cahiers de Janvier et fevrier du Journal
ftes Missions.
Par la Societe asiatique : Cahicr de Janvier de son
Journal.
ParM. le directeur: Memorial cncrclopeditpie , caliier
de fevrier.
Par M. le directeur : Plusieurs n"" du journal Vlnstitut.
BULLETIN
UE LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE.
malRs i834.
PREMIERE SECTION.
MEMOIRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPPORTS.
JR APPORT sur iin manuscrit espagnol presente a la Societe
de Geographie par M. H. Ternatix.
11 est a-peii-pres reconnu auj6urd hui que la premiere
deoouverte de Taiti est due a Quiros. Apres avoir ren-
contre piusieursiles de I'archipel Pomotou, dont I'iden-
tite n'est pas encore bien constatee, !e 9 fevrier 1608, il
apercut de loin la haute ile de Ma'itia, qu il nonima De-
zenn. Le 10, on eutconnaissance dune grande et haute
lerre bien peuplee,qu'on nomma Sagittaria. Dans cette
journee et dans les deux suivantes, on eat des commu-
nications avec ses habitans. Tous les renseignemens que
nous a laisses Quiros sur leurs traits moi aux et physiques,
et sur la nature de 1 ile, ne permettent pas de douter
que ce ne fiit celle de Taiii. Une autre raisoii, plus pe-
remptoire encore pour trancher la difficulte, c'est que,
dans toute I'etendiie de 1 Ocean Pacifique, il n existe pas
1 1
( i46)
sur !e parallele de ij" 4o' tie lat. S. , assigne par Quiros
a la parlleN. de \n Sagittan'a, une seule terre qui puisse
repondre en aiicune maniere aux details consignes dans
la relation de Quiros.
Touiefois, coinme loutes celles (jui avaicnt lieu a cette
epoque, cette importanle decouverteresta pen ronniie.
11 taliut que I'Anglais Wallis fit, pour ainsi dire, une
seconde fois la decouverte deTaiti. II y sejourna du 19
juin an 27 juillet 1767, et lui imposa le nom de He de
Georges III, qui ne fut pas meme adopte par les Anglais.
Notre compatriote Boug.\inville suivit depres Wallis
dans cette lie, qu'ii voulut notnmer Nom>eUe-Cythere ,
designation qui neut pas plus de succes que celle de ses
predecesseurs. Sa relache fut courte, puisqu'elle ne dura
que du 6 au i5 avril i j68. Cependant le spirituel navi-
gateur nous laissa sur cette He des details reniplis de
charnie et de fraicheur.
Enfin, dans ses trois voyages, le celebre Cook, de-
puis 1769 jusqu'a la fin de 1777, visila frequeniment
Taiti et y fit souvent de longues stations. C'etait son He
favorite, cetait ia qu'il venait se reposer de ses longues
explorations, quil venait renouveler son eau, son bois
et sesvivres. Sa liberalite,jointea son inflexible severite,
I'avait rendu aussi cher que redoutable aux naturels,et
its Ihonoraient a legal d un de leurs dieux. Ses descrip-
tions, et surtout celles du savant Forster, firent con-
nailre a I'Europe entiere cette delicieuse He mieux qu'au-
cune province de France ou d'Angleterre. Cook eut le
bon sens de lui conserver le nom indigene, niais il fut
etrangement defigure en celui de Otalieilc , par leffet
de rorlhograplie anglaise.
II nenlre pas dans notre plan de parler des nonibreux
navigateurs qui visilerent Taiti depuis Cook jusqu'a nos
( i47 )
jours. Ce que nous avons dit menie des voyages de Wal-
lis , Bougainville et Cook, n'avait d'autre objet que
de rappeler que, suivant 1 opinion commune, les An-
glais et les Francais seuls avaient eu part aux travaux
qui nous firent connaitre, il y a soixante ans environ ,
Taiti et les iles voisines. Cependant les Espagnols aussi
prirent part a celte impulsion. Deux expeditions, parlies
de CuUao , eurent lieu de 1772 a 1775; elles se dirige-
rent vers Taiti ; Jans la seconde meme , una mission fut
etablie, et deux pretres furent laisses sur cette ile ; mais
le tristc esprit de mystere et de reticence qui presidait
aux operations du cabinet de Madrid, jetaun voile epais
sur ces expeditions, et la geographic resta privee des
renseignemens quelle ex\\, pu en retirer.
Seulement Cook, dans un second voyage en lyy'i,
fait mention en pen de mots de la premiere expedition
espagnole, disant que le vaisseau, qui elait de la gran-
deur de la Resolution , avail passe trois semaines dans
le liavre de PFai-Ouroua , et qu'il avait emmene quatre
naturels du pays. Lors deson troisieme voyage en 1777,
il parle aussi dune maniere tres succincte de la se-
conde expedition des Espagnols, de I'etablissemeiit des
dteux pretres, et de leur depart sur deux navires de leur
nation apres un sejour de fiix mois.
II parait neanmoins qu'une relation du voyage fait par
les Espagnols en 1774 est parvenue a la connaissance
de M. de Rrusenstern, puisqu'ii en fait mention dansle
premier volume de ses Memoires hydrographiques sur
rOcean Pacifique, a I'endroit ou il parle des decouvertes
du capitaine Boenechea; cependant il designe la fregate
sous le nom de Santa-MariaMagclalena, tandis quelle
sappelait Vjguila.
Tel etait 1 etatde nos connaissances sur les expeditions
11.
( i48 )
des Espagiiols a Taiti de 1772 a iyy5, lorsquun ina-
nuscrit espagnol presente a la Societe de Geographic
par M. H.Ternaux, est venu jeter une vive lumiere sur
ces fails. Ce manuscrit, compose de 162 pages dune ecri-
ture tres correcte et tres piopre, est le journal nienre du
capitaine du navire qui servait de conserve a la fregale,
lors du second voyage. Par un singulier hasard, le noni
de ce capitaine, qui parait avoir ete un niarin eclaire ,
judicieux , et surtout Ires exact dans ses observations,
nest mentionnenullepart.il nous donnedans lecoursde
son re'cit, les noms desprincipaux officiers de la fregate,
des -pilotes des deux batimens, et meme d'autres per-
sonnes,et le sien n'existe en aucun endroit. Cependant,
comme il lui arrive de parler de son fils sous le nom de
Josef Gregono, il est naturel de penser qu'il se nommait
aussi Gregono. A tout hasard, pour la commodite de
notre recit, nous empioierons cette designation, per-
suade que I'erreur, s'il y en a, ne sera pas importante.
Maintenant nous allons donner une courte analvse du
journal en question, nous bornant aux faits qui sont
dun interet direct pour la geographie.
En 1772, le capitaine de fregate don Domingo de Bo-
nechea avai*, decouvert I'lle de Taiti , et I'avait nommee
Amat, en honneur du vice-roi gouverneur, et capitaine-
geueral des royaumes du Perou et du Chili. Le vice-roi
don Manuel Amat, en 1774? "'it la fregate rjguila sous
les ordres du capitaine Bonechea , pour conduire a Taiti
les deux missionnaires Fra Geronimo Clota et Fra Nar-
cisso Gonzales, qui devaient y travailler a la conversion
(les infideles. Ces ecclesiasliques etaient accompagnes
dun interprete et dedeux nalurels amenes dans le voyage
precedent, et qui avaient recu le bapteme a Lima. Le
paqiiebol ht Jupiter int frete pour servir de conserve a
i ^49)
la fregate et transporter l:i niaison de bois preparee pour
les niissionnaires, et divers animaux domestiques cju'on
voulait introduire dans 1 ile. L'auteur de cette relation
fut, dit-il, designe pour capitaine et premier pilote du
paquebot.
L'expedition niit a la voile du port de Callao , le 20
septenibre 1774? et Gregorio prit son point de depart
de la pointe de I'lle San-Lorenzo, qu'il place , d'apres une
carte francaise de 1756, par 298° aS' de longitude,
comptes du meridien de Tenerif. Cette remarqueest im-
portante, car c'est de la que derivent toutes les longi-
tudes du voyage.
Des le 5 octobre, dans une nuit obscure ou le vent
soufflait avec violence et soulevait une grosse mer, le
Jupiter perdit de vue le fanal de la fregate. Le 6, au jour,
il ne put la rallier; leur separation fut consonimee, et
ils ne se reunirent que devant Taiti.
Le 3o octobre, a cinq heures et demie du matin, on
apercut une ile basse , au sud de laquelle on avait passe
dans la nuit, et a moins de 4 on 5 milies dans le sud.
Gregorio crut d'abord que c'etait I'ile San-Simon el San-
Judes , decouverte dans le voyage precedent; niaisil re-
connut a Amat que e'en etait une autre, et la fregate ,
qui en avait eu aussi connaissance, I'avait nommee San-
Narcisso. Cette lieresta ensuite inconnue jusqu'en 1822,
ou.elle fut revue par le capitaine Clarke; en 1828, elle
fut aussi reconnue par M. Duperrey, qui la nomma d'a-
bord ile Daugier, la croyant nouvelle. Gregorio la placa
par 17020' Lat. S, et 238" 58'.
Le i^' novembre, au point du jour, on decouvrit une
lie basse dans le sud. Ou la prit d'abord pour lile Sau-
Quintin; mais a midi on observa la latitude a 5 milies
environ de la pointe septentrionale, qui se trouva
( »5o)
placee par ly" 44' ''»*• '^^ ct '2i6> 49' '""g- ^t^'** <'c-
niuntra que cette ile etait differente de San-Quintin, et
on lui donna le noin de las Animas, parce quelle avail
ete apercue la veille du jour des niorts.
Gette lie a plus de 'j licues de lon<^ du N. E. au S. O.
Ses rives offrent des plages d un sable tres blanc, etl'on
ne put (louter qu elle ne fut liabitec, attendu qu'on re-
marqua plusieurs cases. Le milieu de sa cote septentrio-
nale etait eloigne del ileSan-Narcisso de ^i lieues a 10.
1 1° S. corrige ( varia. S" 3o' N. E. ).
Tons ces renseignemens demontrent jusqu'a Tevi-
dence que cette lie de las Animas est identique avec
rile Moller, reconnue en 1820 par le capitaine Bellings-
hausen et 1 lie Freycinet, revue en iSaS par le capitaine
Duperrey. Sur notre carte, nous lui avons assigne le
noni de Maiiou, que Beechey donne coinme celui des
naturels ; niais Gregorio indique dans son tableau celui
de Noaroa. Le navigateur qui aura des communications
sures avec ses habitans, decidera lequel de ces deux
noms, Manou ou Noaroa, doit rester.
Une troisieuie ile basse fut apercue le jour suivant a
six heuresdu matin; on courutdessuspour savoirsic'e-
tait celle de Todos-Santos ^ mais on sut plus tard que
c'etait rjle San -Simon et Judes, que le capitaine Bone-
chea avail decouverte dans le voyage precedent. On
s'approcha jusqu'a un demi-mille de sa bande occiden-
lale, et Ton vit une troupe nonibreuse de naturels qui
paraissaient se preparer a repousser par la force des
amies toute espece de tentative de debarquement. Le
ciel, convert, ne permit point d'observer la latitude de
cette lie, dont le milieu fut place, d'apres I'estime,
a 17" i5' lat. et 236'' 2' de long., a 17 lieues a I'O. N.
(). , 5° 3o' N. corrige, de lile de las Animas. Cette ile de
( i5i )
Saii-Sinion et Jiides esl ceitainenieiit la nieine que celle
de la Resolution, reconniie par Cook en 1773. Si Boiie-
chea la viteii 1772,1a decouverte lui en appartient sans
con tr edit.
Des le 3 au point du jour, une autre ile basse, con-
verte d'arbres et entouree de plages d un sable bianc, se
montra a 5 niilles dans le nord ; elle recut le noni Aelos
Martires , et sa pointe sud tut placee par 17" 21' lat, et
235" 2' long. , a 18 lieues et demie a 10., 7° S. corrige
du milieu de San-Simon et Judes. Nul doute que cette
lie ne soil la meme que 1 ile Douhtful, decouverte I'an-
nee precedente par Cook.
Le meme jour, a trois lieures du soir, on apercut en-
core une ile basse, que Ton rangea a une lieue de dis-
tance a quatre heures du soir, Elle avait de 2 et demie
a 3 lieues de longueur de lest a rouest,sur un mille dans
sa plus grande largeur, ce qui en rend I'approche fort
dangereuse. Cette ile, qui fut reconnue pour etre celie
de San-Quinlin, decouverte par le capitaine Bonechea
dans le voyage precedent, fut placee par Gregorio par
17" 3o' lat. et 334" 45' long., a la distance de 17 lieues
et demie de la pointe S. de Los Martires, a 10. i/4 S.O.,
2" 21' O. corrige. La latitude de cette lie, sa distance a
I'lle Todos-Santos ou Anaa, et a la piecedente, nous
portent a croire quelle n'avait plus ete revue jusqu'a
Beechey en 1826, qui I'a nornxnce Crokei: En conse-
quence, MM. Krusenstern , Duperrey, et nous-meme
sur notre carte de I'Oceanie , avons tons place 1 ile San-
Quintin trop a lest.
Le 4 novembre, a trois beures et demie du soir, on
apercut Tile basse de Todos-Santos, reconnue par le
capitaine Bonechea dans le voyage precedent. I! etait deja
nuit lorsqii'on la doubla au sud, de sorte qu'on ne put
( l52 )
la bien reconnaitre ni conslater son etendiie. On sonp-
conna quelle etait peuplee, d'apres une case que Ton
apercut. La position cle sa pointe su(f fut etablie par
Gregorio par ly" 3i' lat. S. et 232" 8' long., a 32 lieues
et deinie de SanQuintin, dans 10, , 4^ io' S. coriige.
Gitte He de Todos-Santos est evidemment Tile Chain on
Anaa, decouverle par Cook en 17696! revue par lui
en 1772.
On apercui dans la soiree du 5, a I'ouest, une apparence
de terredans les nuages, qui ne tarda pas a se cacher. La
nuit lut passee a la cape. Le jour suivantau matin, on
revit la terre de la veille a 10. S. O. , et ;i huit heures,
une autre qui semblait plus proche au N. N. O. 5" O. du
Gompas. On gouverna sur relle-ci, pour s'assurer si ce
n'etait point I'lle de Amat; mais a midi, la latitude ob-
servee etant 17" a3' , et I'lle en vue restant encore a quel-
ques lioues plus au nord, il lut reconnu quece nepou-
vait etre Amat on Taiti. Gregorio ajoiitequ'a Taiti Ion
apprit, par I'un des piloles les plus habiles du pays, que
celte lie etait Matea ; il etablit sa position environ par
16" 5o' lat. S. et 23o'6' long. , a la distance de 4 1 Ueues
fJe Todos- Santos, et a 10. N, O. 3" O. , el la nomine dans
son tableau San-Diego.
Ici nous devons faire une remarque : dapres les ob-
servations de Turnbull en i8o3 , et surlout de Belling-
hausen en 1820, lile Matea est situee par i5o52' lat. S.j
ainsi ce n'est point elle dont il est question ci-dessus.
Kxiste-l-il une lie encore inconnue sur nos cartes qui
doive se rapporter a la position que vient d'assigner
Gregorio, c est-a-dire a 21 lieues environ au N. N. E. de
Maitia? Les routes de Cook et de Wilson, iracees sui
la carte que M. Duperrey adressee des lies Pomolou por-
tent a penser le contraire. Cepcndant, couime I'une et
■ ( »53 )
I'autre de ces routes passent encore a i8 ou 20 nnlles de
cette position, et que Gregorio est dune grande exac-
titude sur tous \es auties points qu'il a signales , il est
possible qu'une nouvelle ile soit a retrouver dans ces pa-
rages. La question nierite d'etre resolue par le premier
capitaine qui sera appele a les visiter.
Quoi qu'il en soit, Gregorio , quittant sa pretendue \\e
de Matea , se dirigea desorniais sur la haute terre qui!
voyait au S. O. Contrarie par les vents faibles et va-
riables, le 7 a midi il n'en etait encore qu'a 2 ou 3 lieues
auN. E. ; niais la latitude observee lui fit reconnaitre
que c'etait San-Christoval , ou Maitia des naturels. II la
place par 17° 44' lat. S. et 229° 34' long. , a 49 lieues i/3
a rO., 5° S. corrige de Todos-Santos, et a 21 lieues au
S. S. O., 7° 1 5' O. de son ile San-Diego.
Le 8 novembre , au coucher du soleil , on apercut les
sommets de I'lle Amat ou Taiti, et le 9 au matin on se
trouva sur sa cote,- niais il se passa plusieurs jours sans
qu'on put atteindre le mouillage. Le i5, le Jupiter se
reunit a la Iregate. Durant dix jours, ils furent encore
ballottes par les grains, les rafales et les courans , et le
5.7, les deux navires affourcherent dans le portdeFatou-
Tira, sur la presqu ile du S. E. , qu'ils noinnierent port
de la Santissinia Cruz. Ce port de Fatou-Tira repond,
sur la carte des voyages de Cook, a Owkatou-Tera ,
qu'on doit ecrire regulierement fFatou-Tera. Gregorio
place ce point par 17° 45' lat. S. et 228° 56' long.
Notre navigateur consacre plus de soixante pages de
sa relation a donner des details sur les productions de
Taiti, sur le caractere, les nioeurs, les coutumeset les
occupations de ses habitans. Tous ces details sont pleins
d exactitude ct de bonne foi ; mais coinnie , apres tout,
ils n'apprenuent rien aujourd hui qui nail ete raconle
( ,54 )
bien ties fois , nous les snpprimerons dans cette analyse.
Dans les noms des naturels ciles par Gregorio , on re-
troiive bientot cen\ qui Hgurent aussi dans les recits de
Cook, en tenant compte des differences notables qui
existent entre la prononciation anglaise et celle des Es-
pagnols pour traduire les iioms polynesiens en carac-
teres europeens.
Cook, dans son recit, parle d'une maniere assez de-
daigneuse des tentatives des Espagnols pour s'etablir a
Taiti. Cenx-ci avaient connaissance des voyages des An-
glais, et on sera sans doutecurieux de savoir comment,
a leur tour, ils s'exprimaient sur le compte de leurs
rivaux :
« La douceur et la complaisance que nous temoigna-
mes a ces peuples, comparees a la rigueur et a la bru-
talite avec lesquelles ils furent traites par les Anglais qui
se trouvaient ici I'annee derniere, leur donnerent lieu de
croire que ceux-ci sonl plus courageux que les Espa-
gnols. Pour ce n>otif, et parce que les Anglais furent
plus gene'eux envers les Taitiens, malgre leur cruaute,
ils leur inspirerent a-la-fois plus de respect et d'attache-
ment. Pour preuve , je raconterai le trait suivant.Un de
nies mateiots, nomme Joseph Navarro , alia a lerre pour
laver le linge des offlciers. Differens Indiens I'ayant en-
toure, sous pretexte de voir comment il lavait, luienle-
verent quelques chemises. Le matelot mit en siirete le
reste de son linge, et poursuivit I'lndien qu'il supposait
etre le voleur; mais celui-ci, au milieu de sa course, ra-
massa une pierre avec une promptitude inconcevable,
et, revenant sur Navarro, la lui lanca avec tant de force
et d'adresse , qu'elle lui fracassa le crane. II serait infail-
liblement mort de cette blessure, si I'excellent cliirur-
( '55 )
gien-niajor de la fregate iie lui eut fait I'operation ne-
cessaire.
'■ Les Indiens craignirent que nous ne vouiussions les
tuer pour nous venger, attendu que, pour des motifs
bien nioins graves, les Anglais en tuerent plusieurs et
en blesserent un plus grand nonihre : aussi les deux
eris prirent la fuite, et, a leur exemple, leurs snjetS,
emportant avec eux tout ce qu'ils possedaient. Aussitot
le commandant expedia linterprete pour les rassurer,
et leur nffirmer de sa part qu'on ne les poursuivrait en
aucune maniere. Cette promesse les determina a revenir
occuper leurs habitations. Notre conduite leur fit com-
prendre que les Anglais etaient plus portes a la colere
et a la vengeance que les Espagnols, et ils contaient a
iios gens que s'il arrivait quelque navire de cette nation,
ces honinies nous tueraient tons.
« L'un des Indiens que je conduisis a Raiatea, nonime
Oro-Metoua m'informa qu apres que le commandant
Bonechea eut passe a Taiti dans son premier voyage, il
y etait arrive un grand navire qui devait etre un vaisseau
de ligne, d'apres les gestes qu'il fit, et une fregate un
peu plus grande que VAguila, dont le commandant,
disait-il, se nommait Otoute, et etait Bretane de nation.
Comme ces Indiens ne peuvent prononcer exactement
les mots des langues europeennes, je ne fus point fixe
sur le nom du commandant; mais je ne pus douter qu'il
ne flit Anglais, tant a cause du nom de Bretane qu'O-
ro-Meloua donnait a sa nation , que parce qu'il iniitait
avec une grande perfection une chanson et une contre-
danse anglaise, non-seulement avec lair, le ton et la
mesure, mais encore avec leur maniere de la fredonner
avec les dents serrees. En outre , je vis entre les mains
des naturels differens objets que les Europeens leur
( '56)
avaient donnes, et ils m'assurerenl que !e roi Otou pos-
sedait uii pavilion et deux enseignes anglaises qui lui
avaient ete donnees par le conunandant et les officiers
de ces deux navires.
« Oro-Metoua me dit qu'ils etaient restes iiiouilles dans
le port de Fatou-Tira deux niois ou lunes,et que la fre-
gate parlit avant le vaisseau. Gelui-ci ayant ensuile mis
a la voile, alia seul a Raiatea. Apres I'avoir reconnu et
avoir mouille dans un de ses ports, il parlit, emmenant
avec lui trois Indiens de cette ile. A.pres une navigation
d'une lune, ils trouverent une grande terre oil il faisait
tres froid, et, ayant navigue sui sa cote une autre lune,
ils n'en purent trouver I'extremile. Les habitansen sont
paisibles et genereux; ils ont de meilleurs vetemens et
d'autres ohjets que ceux de Taiti. Enfin le vaisseau re-
vint pour laisser dans leur patrie deux des trois Indiens
qu'il en avait tires, emmenant avec lui le troisieme.
« Quant au nom de cette terre , il y a incertitude ,
puisque les uns la nomniaient Gouytajo , et I'lndien
Oro-Metoua, avec d'autres, Tonetapou.
" Parini les differentes choses que ces Indiens appoi-
terent a Raiatea, et qui passerent cnsuite a Taiti, il
m'arriva par hasard de voir une espece de coutelas a
deux tranchans den teles en scie dune pierre fine, noire
el pesante, orne dune sorte de ciselure execuiee laite
avec quelque gout. Comme cette arme nest usitee par les
iiaturejs d'aucune des iles que nous avons vues dans ce
voyage, son apparition donne quelque poids a la rela-
tion que font les naturels de la decouverte operee par
les Anglais.
" Je suis porle a croire que cette terre serait une par-
tie de la Nouvelle-Zelande, parcc que les naturels dirent
qu'il y faisait fioid; or, Ij parlie la plus septentrionale
( iSy )
de ia Nouvelle Zelande se trouve par les 34° environ
dans cet heniisphe»e meridional. En outre , coninie je le
vis dans les journaux des officiers du navire francais le
Saint-Jean-Baptiste, sous le conimandement de M. de
Surville, qui vint de I'lnde orientale a Callao en traver-
Sant la mer du Sud , il est constant qua partir de son
extremite septentrionale les Francais decouvrirent une
grande parlie de la cote de la Nouvelle-Zelande , qui
courait au S. E. et a I'E. S. E. a-peu-pres, partie qui n'a-
vait pas encore ete decouverte jusqu'alors. Ainsi il n y a
pas de doiite que la distance de tlaiatea jusqu'a la Nou-
velle-Zelande n'a pu etre le cheniin fait par le navire
anglais durant le premier mois , et que la Nouvelle-Ze-
lande ne puisse etre un continent qui , apres avoir couru
a Test, se dirige ensuiie vers le pole Sud, en formant
un canal avec le cap Horn.
« Revenant a la fre'gate , je demande niaintenant au
lecteur ou elle alia seule,avant que le commandant quit-
tat Taiti pour Raiatea , et cette ile pour la decouverte
de cette derniere terre? Quels motifs I'obligerent a cette
separation? II est certain que s'il devait revenir en Eu-
rope par le cap de Bonne-Esperance ou par celui de
Horn, il n'auraitpas permis cette separation sans encou-
rir de graves reproclies.
« Comment put-il embarquer assez de vivres, et cl'assez
bonne qtialite , pour qu'ils n'eussent point ete exposes a
souffrir la corruption dans un voyage aussi long que
celui d'Angleterre a Taiti , dans le sejour de deux mois
(|u'il fit dans cette ile, dans le temps qu'il consuma a
aller reconnaitre Raiatea, enfin dans celui qu'il employa
a retourner a cette ile apres la reconnaissance de la
grande cote qu il decouvrit? S il expedia la fregatepour
lAnglelerre parce quelle n'avait point assez de vivres
( i58 )
pour son equipage, pourqnoi ne lenonca-t-il pas aux
tiecouvertes qu'il tit ensuite, ou pourquoi ue la pour-
vut-il pas ties vivres qu'il consiiniait dans le temps memo
qui! devait consacrer a ces travauxPLe retour du com-
mandant de llaiatea en Angleterre exigeait un voyage
ties long : comment parcourut-il un si grand espace
ilans la mer du sud, sans considerer que les vivres pou-
vaient lui manquer, ou par suite de corruption, ou par
insuftisaiice? Ou allait-il en reprendre? On pourra me
dire quec'est au Bresil ou aux ties Malouines; maiscela
ne le sauverait pas du reproche d'imperitie, parce quil
ne devait point congedier la fregate, quand il projetait
tant de decouvertes dans la mer du sud ; au risque de
faire naufrage sur quelque ecueil inconnu, sans avoir
de navire pour saiiver les malheureux naufrages. Nean-
moins, je ne puis croire qu'il y eut de la faute du com-
mandant, attendu que, pour desend)lables expeditions,
nous Savons que les Anglais et les autres nations civi-
lisees envoient des hommes habiles. Qui engagea les
Anglais a expedier deux navires nommes le Dolfin ,
vaisseau de ligne , et la t'regate Tatnes ( erreur pour Ta-
mar), sous les ordres du commandant Wiron (Byron),
pour explorer cette mer du sud , expedition qui appa-
reilla du port de Plymouth, Ian ry64? H n'y a pas de
doute que celui ci n ait ete a Taili , puisque I'lndien
Oro-Metoua , quej'ai dejucite, ayant entendu uouuner
Wiron, dit qu'il le connaissait et qu'il y avail long-
temps qu'il avait passe a Taiti. Lui ayant demande quel-
ques indices, pour savoir a quoi men tenirsur sa ve-
racite, il me repondit qu'il y avait un vaisseau de ligne et
une fregate dont le capitaine se nommait Mount; alors
il ne me resta pas de doute, puisque cela meme est con-
state par la relation dfce voy;ige. Quels motifs eut alors
('59)
Wiron pour cacher les latitudes el les longitudes des
lies qu'il decouvrit? Le temps le dim 61 publiera ce qui
en etait. »
II est assez curieux devoir Gregorin se livrer aux con-
jectures les plus bizarres sur la mission et les vues du
capitaine Cook , et cela sur les renseignemens vagues
et naturellement inexacts qu'il avail pu rerevoir des na-
turels de Taiti. La verile est que Cook, apres unecourte
station a Taiti, en 1773, quitta cetle He avec ses deux
navires le i" septembre de cette annee, visita succes-
sivementWahine^Raiaiea, Hervey, les lies Tonga, et ar-
riva sur les cotes de la Nouvelle-Zelande, ou il se separa
de sa conserve dans un coup de vent suivenu le 3 no-
vembre. Cook se rendit ensuite a Isle de Paques, aux
ilesNouka-Hiva, el reparut enfin, apres huit mois d'ab-
sence, aux lies Taiti et Raiatea, oil il sejourna cette fois
pres d'un mois et demi. II n'emmena qu'un seul naturel
de Raiatea , Didi , que Cook nonime OEdidee, et qu'il
deposa, a son retour, dans son ile. Quant ;i Tone-Tapou,
c'est evidemment Tonga-Tabou , et Gaajte/oWai-Tahou,
I'une des lies Nouka Hiva. Ces deux noms sont pionon-
ces a la taitienne et ecrits a I'espagnole. Quant au pre-
tendu sejour de Byron a Taiti, il est evident que noire
Espagnol confond ensemble les expeditions de Byron
el de Waliis, qui conimandait le Dolphin, et qui seul
visita Taiti.
Enfin, nous ajoulerons que le vceu du brave Gre-
gorio s'esl accompli ; le temps parla, les travaux immor-
tels de Cook furent connus de i'univers entier, et ceux
(les Espagnols, grace au caraclere oudjrageux et egoisle
de leur gou\ernement, t(uit ostimables qu'ils etaient,
furent completement ignores.
Duranl leur sejour a Taili, les Espagnols sOccupeient
( '6o )
a ravitailler leuis navires , et surtoiit a inonter la mai-
son (le hois apportee de Lima pour les niissionnaires
et a I'entourer do palissades. Get ouvrage dans lequel
ils fiirent aides par les naturels fut termine a la fin de
- 1774' l^ I*' Janvier 1775, la croix apportee de Lima
fut debarquee en grande pompe, et plantee devant la
niaison des niissionnaires; une messe soiennelle et des
salves de niousqueterie et d artillerie celebrerent cette
imposante cerenionie. Le tout, ditGregorio, en temoi-
gnage de la possession que Ton prenait de I'ile an nom
de notre souverain don Carlos IH. II ignorait, le brave
Homme, que huit ans auparavant I'Angl.iis Wallis avait
fait conceder I'lle entiere asonroi par la fameuse reine
Oberea.
Ce qui etait beaucoup plus honorable de leur part ,
les Espagnols deposerent sur le sol de Tile des bestiaux
de diverses sortes, tels que vaches, anes,coclions,brel)is
et chevrespour en propager I'espece. Les dernieres seules
prospererent; mais les naturels en firent peu de cas; et
tous ceux qui ont goiite de la chair savoureuse de leurs
cofhons en concevront facilement le motif.
Cela fait, on remit a la voile le 7 Janvier pour aller a
la recherche de I'lle Raiatea dont les naturels de Taiti
avaientannonce I'existence aux Espagnols. On reconnut
en partant I'lle deMorea ou Santo Domingo, plus con-
nue sous le nom d'Eimeo ; le 9 on decouvrit I'lle
Wahine, qui fut nomniee lie Herinosa, et placee par
16'" 45' lat. et 226" .59' long. On se trouva le lo pres
de I'lle Raiatea, que Ton nomma la Princesa , et dont la
pointe sud fut placee par 16° 69' lat. S., et 226'' 36' long.,
a 45 lieues au N. 34° 3o' O., corrige du port de Fatou-
Tira.
Le conunandant Bonechea envoya rcconnaitre les
( i6i )
mouillages cle llaiatea ; iiiais, ne les ayant pas trouves a
son gre , il se decida a retourner a Taiti pour voir
coniment se troiiVaient les peres; ce qui contraria
beaiicoup Gregorio, qui aurait desire explorer avec
plus de soin toutes ces iles.
Comme on se trouvait pres de Raiatea on vit une lie
haute et petite que Gregorio placa par 16" 3o' lat. et
226" 1 5' long. Elle fut nomniee San-Pedro par les Es-
pagnolsj c'est lile de Boabora.
En revenant de Raiatea a Taiti,. Gregorio vit de loin
deux lies petites mais hautes. La premiere Toubouai-
Manou, qu'il nomma I'lle Pelada par i^"3i' lat. S. et
ii'j° i4' long., et la seconde nommee Manou par les
naturels par 17° 53' lal. S. et 226° 5p' long. La premiere
existe bien certainement, mais la seconde ne fiufure
point sur les cartes, et il est difficile d'admettre qu'une
lie haute soit restee inconnue aussi pres de Taiti.
II est done a presumer que cette fois Gregorio prit un
nuage pour une ile, ou qu'il y eat double emploi pour
Toubouai-Manou.
En outre, a bord de la fregate, on vit de loin deux
autres iles, Tune nommee Tauroua par les indigenes,
et Tres Hermaiios par les Espagnols, et que Gregorio
place par 17" lat. S. et 228° 18' long.; I'autre appelee
Moroua par les naturels et Santo-Antonio par les Espa-
gnols, situee par 16° 3o' lat. S. el 2260 3' long. Ces deux
lies sont evidemment Tetouroa Gi Maupiti ou Mauroua
decouvertes I'une et I'autre par Cook en 1769.
Le 20 Janvier on fut de retour au mouillage de Fatou-
Tira sur Taiti. Aucun accident facheux n'etait arrive
aux missionnaires ; les naturels leur avaienl montre les
dispositions les plus bienveillantes, et s'etaient active-
12
i irta )
nienl e^l[)l<)y«^s a lenniner les palissades ot l«'s fravaux
de leiir etablir.seinenl.
Le c'oinmaiidant Bonecliea, malade depuis qu»'lqiie
temps, succondja a ses souffiances le 26 jaiivim-, et
flit eiiterre le jour suivaiit au pied de la croix avec
les hoiineurs diis a son rariir.
Don ToniasGayangos piit le comniandeinent de I'ex-
pedition,et remit a la voile des le 28 jaiivier pour Lima.
On prit la bordee du sud pour alter gagner la handedes
vents generauxduS.D.Le 5 a dixheures etdemiedii ma-
tin on apcrcut une ile de moyenne hauteur, et le 6 un
canot de la hegate envoyea lacote, conununiqua avecles
liabitans. Ceux-ci appartenaient a la meme race que les
Taitiens, et comprenaient quelques mots isoles du Ian-
gage de ces derniers; niais ils ne pouvaient soutenir
avec eux une conversation suivie. Cette ile nommee
par les naturelsOraibabae, dit Gregorio, recut des Es-
pagnols le nom de San la Rosa, et sa position, d'apres
lui, est 23° 48' lat. S. ct aS'' long. II est evident que
cette lie est celle qui porte le noni de Ravavai ou Vavi-
tou sur les carles niodernes, et qui f'ut vue, a ce que
nous croyons, en 1791 par Broughion. Mais il est con-
stant que la premiere decouverte en est due a I'expedi-
tion espagnole.
Apres avoir eprouve diverses conlrarietes, el entre
autres un epais brouillard, ou les deux navires sesepa-
rerent, Gregorio renconlra enfin les vents variables par
44°; le 27 mars il eut connaissance de I'lle Mas-aFuero,
et le i3 avril il niouilla dans le port de Callao , pres de
la fregate, qui etait arriveecinq jours auparavant.
Dans le tableau de positions geographiques placees a
la suite de son recit, outre les lies dont nous avons
parle, Gregorio mentionne encore trois lies basses,
( i63 )
apercues par V Aguila avant d'arriver a Taiti. Ces lies
sont : I" Eroiia ou San-Ju.tn, par ij''39' S. et 235° 21';
2° Taboa ou San-Julian , par 1^° c)' S, et 233o 17' long.;
3''Houarava ou San-Blas, par 16° 53'S- et 232° 5 1 long.
11 suftit de Jeter un coup-dVeil sur les dernieres cartes
pour se convainc.e que ces trois lies se rappor-
tent, savoir : San-Juan a lile Melville de Beechey en
1826, maisque Bougainville a certainenient vue le pre-
mier en 1768 ; San-Julian a i'lle Adventure, decouverte
par Cook en 1773; enfiii, San-Bl.is a I'lleTchitsliagoff,
fignalee par Bellinghauseii en i82o,ii;iis dont la de-
couverte doit rester a Bouechea.
Le manuscrit est termine par un tableau des decli-
naisons de raiguille aiuKiiitee, ohservees duraiit tout
le cours du voyage, assure Giegorio, avec toute I'at-
tenlion possible, an moyen d une excellente i)oussole
marine anglaise.
Ainsi que vous avezpu en juger, niessieuiSjd'apres I'a-
nalyse que je viens de vous en soumettre, le manuscrit
olt'ert a la societe de geographic par M. H. Ternaux est
dun veritable interet. II iixe tous nos doutes sur I'expe-
dition espagnole qui tenta le premier etablisseinent sur
liie de Taiti , el il nous donne le nioyen du restituer a
teux quil'ontvraiment operee la decouverte deplusieurs
lies delArcliipel dePomotou et notaninient Raivavai.
Enfin, il nous donne tout lieu de croire (ju'une nou-
velle lie, celle de San-Diego existe peu loin de Taiti,
sans avoir ete signalee sur les cartes. Dapres toutes
ces considerations, je serais dispose a penser que le
manuscrit deGregorio seraitun de ceux dontla traduc-
tion inlegrale pourrait figurcr convenablemenl dans les
memoires de la Soci«?te, si les fonds dont on pent dis-
poser le permettaient un jour.
12.
( .64 )
Nota. II est reniarquable qua I'epoque des deux ex-
peditions en 1772 et i774) '^s Espagnols n'aient point
senti ni meme soupconne queTaiti et Maitia pouvaient
se rapporter aux ties Sagittaria et Dezena, decouvertes
au commencement du xvir siecle par leur compatriote
Quiros.
38 Janvier 1834.
J. d'Urviixe.
( i65 )
Voyage dans Vinterieur de la Guyane , par MM. Adam
DE Bauve et P. Ferre.
Suite.
Janvier I'i. Nous reprimes notre exploration, et vers
neuf heures nous rencontrames uiie grosse crique que
nos guides nous assurerent etre une riviere considera-
ble qui sejetait dans I'Amazone, et qui etait Hieuware,
dont ils nous avaient parle la veille. Nous descendimes
cette riviere environ une heure et nous trouvames une
chute considerable. Ces environs sont abondans en ca-
caos, et sur quelquesmornets on voit des copahus et des
caoutchoucs. La salsepareille aussi est tres commune.
Nous revinmes coucher sur les bords d'Agamiware , ou
nous mimes des hamecons.
24. Le niatin nous trouvames nos hamecons garnis
d'aymaras et de rouies, excellent poisson nuance de
rouge et de noir, qui pese ordinairement quinze a dix-
huit livres. Ayant marche toute la matinee, nous ren-
contrames a midi une autre riviere sud appelee Mapari ,
qui se jette aussi dans I'Amazone. Elle est tres large et
recoit plusieurs criques assez fortes. Un de nos Indiens
tua un animal qu'ils nommaient euyawar poper, chien
ou tigre d'eau. II ressemble assez a un chien, son poil
est court, dun noir lustre et dune finesse extraordi-
naire. 11 a aux pattes des membranes comme le cabiaille,
demeure tres long-temps sous I'eau. II altaque les cai-
mans et meme les tigres,quand ils traverser t les rivieres.
Ils se nourrissent de poissons; aussi les lieux ou ils se
trouvent en sont-ils depeuples. Les Indiens nous assure-
rent qu'il etait tres rare.
( i66 )
Nous contiiuirttDos tie desrendiv le Maparl, et a six
licuresiioiis arrivaines a un etablisseinent que nos guides
connaissalent.Les Indians die/ lesquelsnous nous irou-
vions n'etaient plus Oyaninis, niais Coussaris. Nous ne
vimes cette soiree aucun des Iiabitans de lAldee qui ne
descendirenl point pour nous recevoir. Nous tendimes
nos hamacs dans un rarbet has, situe au centre de I'e-
t.iblissement, et apres avoir sonpe, nous nous endormi-
nies tranquillenieijt , s;ms redoufer aucune trahison de
la part d iiidividus chez lesquels nous nous trouvions
ainsi a 1 iniproviste.
25. Quand nous nous lOTeiilanies, nos bamacs etaient
entoures dune quarantaine d'Indiens. C'etaient tons de
beaux hommes plus noiis que Ics Oyanipis. Leurs che-
veux etaient courts, sans i-ouoon el presque crepus. lis
etiiient assis pres de nos guides, auxquels ils avaient
apporie des coins de caobiri , d'ignames , et senlreie-
naient aveccbaieur avec eiix en nous examinant et nous
designart sonvcnt. Nos guides nc leur repondaient que
par monosyllabeset ne paraissaient pas tres rassures;eux,
aU t»»ntraire, ne temoignaient aucune crainte. lis s'ap-
procherent de nous avec des demonstrations d ainitie ,
et furent bientot familiers justpi a toucber les niousta-
cbes et la barbe de Ferre ; nuiis ce qui semblait les
surpiendre beaucoup, c'elait le poil doiit sa poitiine
est garnie, lar il nest pas rare de voir cbez les Oyanipis
des bomines qui aient de la barbe, mais je n'en ai ja-
mais vu de veins siir d antres parties du corps. Sur les
clivtTS efablisseniens oil nous avions passe, les Indiens
.ivaient temoigne de la surprise, mais principalemeiit de
la crainte , eux n'en eprouvaient pas; ils etaient entiere-
ment nnis par I'etonnenient et la curiosite que cause
uii objet inconnu. Jamais ils n'avaient vu de i)lancs; tout
( '«7 )
chez nous etait notiveau poui' mix : apres les pi>'iiiiers
elans tie curiosite, iis dfineurerent long-teinps en si-
lence en examinant tons nos niouveniens. Quelques tem-
nies vinrent nous apporter du rachiri d'ignanies, niais
sans lever les yeux siir nous , et elles disparurent aussi-
tot. lis furent enchantes de me voir boire cette li(jueur
sans aucune defiance, je dis nioi, car Fene n'avait ja-
mais pu se resoudre a goutor de cacliiri , tant sa prepa-
ration le degoiitait ; leurs yeux fixes sur nous seniiilaient
scruter nos pensees. Nous achevames de nous niettre
tout-a-fait bien avec eux en leur distribuant quelques
verroteries. Unepartie dentreeux se leverentet furent a
lachasse, voulant, disaient-ils que, pnisque les blanrs
etaient venus les voir, ils ne pussent conserver qii'un
souvenir agreable de leur reception.
Du resteils paraissaienl croire que nous venions d'un
pays ou les vivres manquaient, et la maniere de s'ex-
pliquer de nos guides ne les dissuaderent pas. Les chas-
seurs ne tardrrent pas a revenir avec une biche et nn
gacque que des femmes portaient. De meine que les
hommes, elles ne nousparurent pas faire usage de ro-
cou. Leurs cheveux etaient d'un beau noir et tresloriirs,
leurs corps etaient peints dejenipa, mais avecbeaucoup
plus de soins et de regularite que ne le sont les Oyani-
pis. Ces femmes etaient jolies et bien faites, mais leurs
traits avaient quelque chose de dur et de male. II parait
qu'elles sont pen sedentaires, et qu'elles ont I'habitude
d'accompagner leurs maris dans leurs excursions qui
sont longues.
Ces Indiens, en effet, paraissent moins mous que les
Oyampis , moins craintifs et moins dissimules; leur Ian-
gage est apeu-pres le meme, mais plus franc; les Oyam-
pis ont la prononciation un pen nazillarde. Fls sont
( ^f''« )
niieux armes; outre Tare et le taumaho, ils onl un ja-
velot et line sorte de sarbacane avec laquelle ils lancenl
de petites fleches a una grande distance, lis ont de plus
una espece de cuirasse ou plastron tissu an pataoua, at
assez epais pour garantir la poitrina d'une fleche. Nous
avons vu dans leurs cases beaucoup de fruits et de grai-
nes de bois qu'ils mangent, at dont las Oyanipis font peu
ou point d'usage , car nous leur avons vu refuser caux
qui leur etaient offerts. Je citerai entre autres le bacoury,
de la grosseur d'une orange, d'une couleur rosee, d'un
goi'it aigre et assez agreable. Le crioary, pour la gros-
seur et la forme , absolument semblable a la cerise, mais
sans aucune saveur. La jussara , pareille a una grappa
de raisin , vient sur un arbrisseau peu eleve et a un goi'it
delicat. Enfin le maracouja, du volume dun melon
vient sur un arbrisseau peu elave et est loin d'an avoir
la saveur.
Las abatis sont vastes , plantes de manioc, d'ignames
et de patates. Le manioc violet est la seule variete qu'ils
cultivent. Le gingembre, dont ils ne font aucun usage
a moins que ca ne soit pour quelque remede , s'y irouve
en abondance. Las Coussaris paraissent avoir plus da
connaissancas et de soins des maladies qua las Oyampis.
Nous vimes una femme attaquee de fievre depuis plu-
sieurs moisj ils ne paraissaient point la redoutar at ne
I'avaient point releguee seule dans un carbat, comma
I'eussent fait les Oyampis; aucontraire, ils s'empres-
saient aupres d'elle at sur la demande que nous leur fi-
mes, ils nous assurerent qu'ils etaient certains da la
guerir. Chez les Oyampis, dans letat ou etait I'individu,
il cut eteabandonne depuis long-temps.
aS. Le aS, nous quittames ces Indiens hospitaliers,
et ipres une forte journec, nous vinmes coucber sur
( '69 )
les bords de rAganiiware. Nous ne f'imes aucune reinar-
que interessarite, nous vimes seulement beaucoup de
salsepareille et d'arbres a gomme.
26. Nous nous mimes en marche a la pointe du jour ;
nous voulions reconnaitre I'lnipocko. Nous arrivames a
trois heures sur ses rives. Cette riviere est large. Les
Indiens nous assurerent qu'elle acquerait une dimen-
sion considerable a pen de distance de I'endroit 011 nous
nous trouvions; son cours, d'apres les renseignemens
que j'ai recueillis, est nioins prolongs , mais aussi moins
embarrasse que 1 Oyapock. Elle va se jeter dans I'Ama-
zone, et a son embouchure se trouve an poste bresilien
nomme Almeyrime. Jose Antonio y avail ete peu d'an-
nees auparavant. Ayant appris qu'il y avait une habita-
tion peu eloignee, nous longeames la rive qui est peu
obstruee, et qui forme menie des anses de sable blanc
tres fin. A six heures, nous apercumes une barre for-
mee d'une seule nappe d'eau, qui se precipite d'une
hauteur de pres de soixante pieds sur une largeur d'en-
viron quatre-vingts toises. A huit heures et demie nous
arrivames a I'habitation que nos guides nous avaient
designee. C etaient des Coussaris.
27. Ces Coussaris nous parurent melanges avec les
Oyampis qui habitent I'Arouari, qui est a peu de dis-
tance d'Inipocko, car ils sont moins noirs que ceux qui
habitent les bords du Mapari. Comme ils avaient des
embarcations, nous resolumes de descendre un peu
cette riviere. Le terrain est eleve, la terre, grasse et
noire, est melee d'un sable blanc tres fin; la salsepa-
reille, les copahus se rencontrent en quantite. Nous
reconniimes beaucoup de bons bois, des cedres de
toute espece, des ouapas, balatas , acajous; en ge-
neral, peu d'especes inferieures. Nous etant arretes a
( '7" )
troisheures, nos guides nous assurerent que, de I'eiiilroit
ou nous etions, il n y avail qu'uri trajet peu consideraMe
pour gagner I'Arouari par terre. Nous nous decidames
aussitot a faire celle route, ne pensant pas qu'il nous
tut daucune utilite de descendre plus has rimpocko,
qui devait nous conduire a un poste bresillen, n'etant
point munis de passeports a cet effet , nianqiiant des
objets de premiere necessite, menie de vetemens con-
venahles, n'ayant que ceux qui nous etaient absolunient
necessaires pour un voyage dans les hois, sans argent ,
nous n'eussionspu quetre Ires mal recus des Bresiliens,
ne pouvant nous reclamer de personne, le Para oii re-
side le consul francais, elaiit encore tres eloigne de cet
etablissenieiit.
Nous reyinmes done a ['habitation pour y prendre
nos bagages et ceux de nos gens qui y etaient restes.
Nous ny arrivames que le 28 a trois heures, quoique
nous fussions descendus assez lentement, le courant
etait cependant ties rude a retouler.
29 Nous descendimes en canot jusqu'a I'endroit 011
nous nous etions arretes le 27, et nous y couchanies.
3o. Nous nous separames des Coussaris apres leur
avoir fait quelques presens , et nous primes notre route
par terre. Le terrain que nous parcourumes etait convert
de cacaos, ce netait qu'une langue de terre qui nvait
peu de largeur. A sept heures, nous arrivames a una
habitation oyampie peu eloignee de I'Arouari. La, en
remettant le pied chez les Oyampis , nous retrouvames
ce caractere de timidile qui les distingue. Nous en fft-
nies cependant bien recus, niais ce n'etait plus cette
franchise et celle cordialite que nous avions tnnivees
chez les Coussaris. Notre intention etait de descendre
I'Arouari jusqn a une certaine distance pour reprendre
( '7» )
le cheniin que j'avais fait en octobre et novemhre.
3i. Nous iiousembaiquanies a huit heiires. L'Arouari
eil cet eiidroit a vitigt-ciiiq a trente toises cle large, el
est enibarrasse de roches. Nous descendimes plusieurs
fois pour visiter les environs. Nous vinies beaucotip de
salsepareiUe ; le terrain etait entrecoupe de mornets
et dans les endroits les plus bas doniinaient les baches
et les pinots. Getie riviere conn parallelenient a I'Oya-
pock pendant un assez long espace, et tourne louta-
coup dans I'est-sud-est, ou Ion apercoit des montagnes
elevees dans lesqnelles on nous dit qu'elle prend sa
source. Pour sen assurer, il faudrait le temps des gran-
des eaux.
ler /ei'rier. Nous continuames a descendre la riviere.
Souvent elle est barree par des troncs d'arbres rasseni-
bles en nionceau. Les deux bords sont tres peuples , ce
qui ne parait pas avoir diininue le poisson dont les bas-
sins sont remplis. Nous n'en avons pas vu autant a
beaucoup pres dnns I'Oyapock , qui est moins habite.
Jose Antonio m'avait assure que lesOyampisniangeaient
des crapeaux. Nous eiinies occasion de nous en convain-
cre, car nialgre I'abondance dans laquelle nous etions.
ayant pris plusieurs de ces animaux dune grosseur re-
marquable, nos Indiens les firent rotiret se delecterent
de ce niets degoiitant. Nous finies halre a six heures sur
une habitation ou nous devions ahandonner nos em-
barca lions.
ti. Nous \innies , apres une journee de niarche Ires
faligante, concher sur une habitation. La pluie, qui
depuis plusieurs jours tombait f'requemment , rendait
les cheniins encore plus impraticables.
3. La journee du i tut encore plus penible. La pluie
avail f';)it gonfler les criques , et nous etions obliges de
( *72 )
quitter les marecages oii nous avions continuelleinenl
de I'eau jusqu a la ceinture, pour prendre a travers des
montagnes difficiles a gravir. La nuit nienie ne fut point
un temps de repos pour nous. Mai ahrites par un niauvais
ajoupa, nous fumes obliges de nous tenir presquecon-
tinuellenient debout pour pouvoir nous garanlir un pen
de la pluie qui tombait par torrens.
4. Le 4j apres une journee semblable a la precedente,
nous arrivames, excedes, a cinq heures, sur I'etablisse-
nient ou j'etais demeure malade en novembre, aban-
donne de nies Indiens. Les individus qui s'y trouvaient
avaient encore diminue. II en restait a peine quarante,
plus de fcmmes que d'hommes. Mais quoique pales et
encore abattus, ils paraissaient cependant nioins souf-
frans. L'«jpidemie avait cesse ses ravages : depuis pres
dun niois personne n'elait niort, et ceux qui restaient
reprenaient coujage et semblaient etre rassures sur leur
avenir. y^ussi nous recurent-iis mieux qua mon pre-
mier voyage. lis nous engagerent a revenir et a leur ap-
porterprincipalement des baches dont ils avaient le plus
grand besoin , nous promettant de la salsepareille qui ,
comme je I'ai dit, est tres commune en cet endroit. Ces
Indiens nous regardaient avec adniiration. Ils m'avaient
vu tres mal, avaient entendu dire que Ferre etait mort,
et ils ne pensaienl pas que Jose Antonio piit en rechap-
per.lls attribuerentsaguerison ames soins, opinion dans
laquelle il les confirma. Nos maladies seules qu'ils re-
doutaient les avaient porles a s'interdire toute com-
munication avec nous, craignant que nous n'aggravas-
sions encore leurs maux.
5. Nous rencontrames plusieurs etablisseniens , dans
quelques -wns desquels les Indiens etaient parfailement
retablis. Ils nous presserent de revenir promptement ,
( »73 )
s'offrant de nous tlonner de la salsepareille et dii co-
pah u.
6. Nous comptions trouverla crique Acao, mais les
marecages qui etaient inondes nous contraignirent a
faire notre route sud-est pour reprendre les montagnes.
Nous reconnunies sur la pente est la crique Acao qui
y prend sa source. Nous avions jusque-la pense cju'elle
s'echappail du bassin Agamiware. Nos Indiens fleche-
rent un animal qui nous etait inconnu , c'etait une es-
pece de chien dont la gueule est tres allongee, sa robe
etait blanche et de couleur fauve. Nos Indiens I'appe-
laient guarachini. Pris jeune, il s'apprivoise facilement.
On sen empare dans les terriers qu'il se creuse et ou il
porte le gibier qu'il prend a la chasse. Nos guides nous
previnrent que la journee du lendemain serait penible.
La nuit que nous passames n'etait guere propre a repa-
rer nos forces.
7. Nous marchanies continuellemCnt dans les mare-
cages pour gagner une habit^uion situ^e sur la crique
Acao, oil Jose Antonio savait qu'il y avait des canots
dont nous pourrions nous servir, vu la crue des eaux,
ce qui devait abreger notre route de pres des deux tiers.
Quand , malgre des guetres tres serrees , nos souliers
n'etaient point pleins de vase, ils I'etaient de sable. Enfin
nous arrivames tres tarti sur I'etablissement que Jose
Antonio voulait rallier. Nous reconnunies avec joie que
les Indiens avaient des canots , et que les eaux etaient
assez hautes pour nous permettre de descendre la cri-
que. L'etat de nos pieds iie nous eut pas permis de con-
linuer la route par terre, nous eussions ete obliges de
(lenieurer plusieurs jours avant de nous remettre en
niarche.
8. Nous nous erabarquames le 8 de bonne heure, et
( 174 )
favoiises par la rapiclile du courant, nous arrivames en
quatre jours a notre etablissement. Nous fumes acconi-
pagnesti'une pluie presque continuelle.
Je n'ai point cherche , dans celte relation, a relever
lous les desagreiifens et luenie les dangers auxquels nous
avons ete exposes. Une perte qui fut tres sensible pour
nous, fut celle dun des doinestiques de Ferre, garcon
eprouve par cinq annees de service. Je perdis aussi mon
chasseur, qui m'etait tres attache et de la plus grande
utiliie. On peut se faire une idee de ce qu'on a a soul-
frir dans ces vastes solitudes, ou souvent on peut etre
abandonne par les sauvages qui Thabitent. Je regrette
beaucoup que la sante de Ferre ne m'ait pas permis de
denieurer le tjemps que j'aurais desire .sur les bords de
rAgamiware. J'aurais aussi voula faire un sejour plus
prolonge d.ms les montagnes; ii ni'eiit sans iioute mis a
nieme de reconnailre la cause des detonations souter-
raines que nous avons entendues. Sont-ce les derniers
efforts dun volcan eteint.!* sont-ce des indices de mines?
Je serais plutot pour cette derniere presomption. Habi-
tant quelque temps chez les Coussaris, une etude plus
approfondie tie leurs nioeurs , de leilrs usages aurait
peut-etre presente un contraste piquant avec celles des
Oyampis, au lieu que, dans un passage rapide, je n'ai
pu .saisir que quelques-uns des traits geneniux les plus
appareiis. Fern; , quoique assez bien retabli, ne pouvait
se pemiettre de passer Ihiver en cet endroit. II etait
presse de revenir a Cayenne pour se traiter. Jose Anto-
nio meme eprouvait des douleurs. Nul doute que mes
recherches ne ni'eussent conduit a la de(;ouverte du
quinquina, et que je n eusse obtenu les resuhats les
plus avantageux, pendant que les contrarietes (jue
( '7^ )
wous avons eprouvees ont rendu nutre expedition tres
onerense pour nous.
J'otf'rirai e|i forme de nomenclature la liste des diver-
ses productions de I'interieur. En indiquant les bois , je
me bornerai a les presenter dans I ordre ou on les range
ordinairement dans la colonic, d'apres les divers usages
auxquels on les emploie.
Je neferaiaussi que donner le nom des animaux, beau-
coup ayant deja ete decrits. Cependant une description
detaillee de quelques oiseaux et de plusieurs poissons
presenterait des details encore neufs; niais ce serai t sor-
tirdes bornes queje me suis prescrites dans une courte
narration. Ce travail serait I'objet dun onvrage consi-
derable et ires interessant.
Bois de coiileur febenisterie ).
Satixe (deux especes). Ruhane,
rouge et jauiie.
Moutouchi. Violet et noir.
Bagot. Uii ties plus eslimes et des
plus rares. Se troupe pr^s de
la crique Acao, par families.
Ferfolle. Rouge feu.
Laittre. Rouge fonce raye de
noir, grain tr^s fin.
Boco. Noir.
Panacoco Noiret jaune; /rf. mou-
chete.
Courhari. Rouge.
Bagasse. Jaune,seml)Ial)le an bois
<le Bresil.
Gavac. Propres aiix ronleties et
poulies.
Construction navale , poiiliage , charpente.
Bois de premiere qitalite.
Ebene vert. Gris tr^s conimun.
Ouacapou.
R6se male.
Parcouri. Deux especes.
Couratari.
Canari.
l]alata. Deux especes.
Bois — r.anelle.
Saint Martin. Rouge et blanc.
Id. Jaune.
Taeub.
Bois (le fer.
Deuxieine (jiuilite
Coupi. Rouge et bhinc.
Coeur de kors.
Angelique.
Courille,
( '76
Maiiil.
Ouapas. Trois esp6ces.
Pagelet.
Maho. Trois especes.
Bois grage.
Bois amer.
Encens.
Panalio.
Simarouba.
Bois agouti.
Bois macaque. Rouge et noir.
Bois rouge.
Carapa. Rouge et blanc. Sa graine
donne de fort bonne huile i
bruler, et qui est en mdme
temps un dessiccatif tr^s
prompt.
Griguon.
CiORES.
Cfedre noir, premiere qualite.
Sassafra montagne.
Bois cauelle.
Rose mile.
Deuxiime qiialili.
Acajou.
Grignon. Rouge et blanc.
Jaune.
Gris.
Cadres. Rouge.
Blanc.
Bagasse.
R6se femelle.
TJnequantited'autres bois qui n'ont pas de noms,sont
ou paraissent bohs a la construction, et une plus grande
quantite encore ne peuvent etre d'aucune utilite. On re-
marquera dans cette liste qu'il manque beaucoup d'es-
peces connues dans la colonic ; c'est que nous ne les
avons pas vues, ou que nous n'en avons trouve que
quelques individus dissemines. Ceux que nous presen-
tons,au contraire, se niontrent par families, etcouvrent
de grandes etendues de terrain.
Je ne parle pas ici non plus de plusieurs arbres dont
il est fait mention dans le cours du voyage, et dont les
fruits ou les gralnes sont employes par les Indiens.
Palmistes.
Paripous. Dont le fruit est fori
bon a manger.
Biches.
Pataouas. Sa graine fournit une
excellente huile.
Coumous.
Faux .lagou.
Maricoupis.
Bourlouri.
Maripas.
Mouroumourou.
Aouaras.
Moucayas.
Counanas.
Ouaille.
'77 )
TJanes.
La connaissance et I'etude des lianes seraienttres ini-
portantes. EUes ont presque toutes leurs usages el leur
utilile en hygiene, teinture, vannerie, etc. Les Indiens
en connaissent beaucoup qui servent a enivrer le pois-
son. EUes leur servent aussi de liens et de cordes.
Quadntpedes.
Maipouri ou Tapir.
Cabiaille.
On a.
Tigre rouge de Cayenne, appele
par les ladieus Sussuarana.
Pacque.
Biche.
Cariacou.
Agoutis.
Acouchi.
Couachi.
Porc-ej)ic.
Fourmiliers. Plusieurs especes.
Ecureuil.
Chat tigre.
Chat sauvage.
Unau.
Tatou ou Armadille.
Patira.
Ayra.
Sarigue.
Une infinite de macaques de diverses especes. Les
plus communs sont les couatas, singes rouges, tinas.
Beaucoup de tortues de terre. La meilleure a manger
est le taouarou , qui ne vit guere que dans I'eau.
Oiseaux,
L'aigle blanc.
Hocos.
Agamis.
Marailles.
Coullouvis.
Haras.
Perroquets.La varieteen est con-
siderable.
Perruches.
Toucans.
Perdrix.
Aigrettes.
Corbeaux et vautours.
Paons.
Pelicans.
Canards.
Sarcelles.
Flamands noirs.
Cotingas.
Pacacas.
Ouettes. Deux especes , la com-
mune et la huppee.
Cordons bleus.
Coqs de roche.
i3
( •?« )
Tyran. (,ardinn(i\.
Camiclii. Caciques.
Charpeiiiiers. Famieis.
Griinj eraiids. Colibiis.
Nous avoiis reconnu ilix-liuit especes de colibiis.
line etude et une recherche specialeferaieut decouvrir
unc iiiullitude d'especes qui n'ont pas ete decrites.
Poissons.
Avmaras. Piracoucoii. Rares.
I'acous. Carpes. Soles.
Coumarous. Atipas. Caweirous.
Colimatas. Macainbes. Pirailles.
Pucoussigne. Mandubi.
Pacoui. Pitingas.
Dans les pinotieres on trouve des anguilles d'un tres-
bon gout.
Anguille electrique, torpiles, dans les eaux mortes.
Une niullitude de caimans; beaucoup de loutres.
Reptiles.
Harasserine. Les Oyampis ne
connaissent aucua remede a la
morsure de ce serpent. Elle
prcduit des convulsions qui
enli'vent I'individii pique en
peu d'instans.
Souccouroujou. Couleuvre de
plus de quarante pieds de long
sur trois de cii conference ;
couverte d'ecailles roussdtres.
Jaracara. Cural.
(Ces deux especes sont veni-
raeuses).
Je ne citerai point d'aulres reptiles; lenonibreen est
infmi.
Celui qui s'occuperait de la recherche des insectes
serait amplement recompense de ses peines par des de-
couvertes nombreuses.
Je ne parlerai que des abeilles. II y en a deux especes :
Tune appelee Ilaumaa noire, et dun aspect rebutanl;
ravitre Queroquo , plus degagee, de couleur fauve, et
(lont It' mid, tire avec soin , est tres bon.
( 179 )
ExTRAiT dujoicrnnl dun vojage siir la. cote de la Chine^
depuis la province de Canton jusqiia Lenou-Tu?ig ,
dans la Tartnrie-31antchou , en 1 832-33, par le rev
Charles Gutzlaff. (i)
Le i4 Janvier iSSa, nous jeianies I'ancre
sous une ile oii, nioins genes que nous ne I'avions ete
precedemnient par la presence des mandarins, nous
pumes comnuiniquer davantage avec les habitans. Cette
ile, dun aspect trespittoresque,. contient un temple spa-
cieux ; les pretres et le peuple manifestaient un grand
desir d'avoir des livres cliretiens. Nous remarquamcs un
edit affiche et qui defend la possession d'aucnne arme ,
sous peine de decapitation. Dun temple, qn'a sa fleche
doree on reconnaissait pour un temple imperial, on
decouvrait tout le paysau sud-ouest, dont la vue etait
riante et variee.
Le 17 Janvier, nous times route pour Kin-Tang, He
que nous avions visitee deja a bord du Lord Amherst.
A cette date, la saison etait tres rigoureuse et le froid
devint si intense, que plusieurs liommes de I'equipage
y succomberent. Pendant Ihiver, la condition des pau-
vres dans ces pays est des plus deplorables; leur unique
moyen decliauffage est d'avoir suspendu a leurs mains
un pot a feu oii sont quelques charbons allumes. Pour
se preserver du froid, its portent cinq a six epaisses
jaquettes ouatees avec du coton j mais ia chaleur pro-
duite par cet cxces de vetemens ct la malproprete eu-
gendrent des maladies cutanees, qui deviennent invete-
rees. L'ophthalmie y est plus commune qu'en aucune
(i) Till' (\n Rcpertniie chinois jiour ^uhx i833, public a Canton, et
insere dans la Gazette nationale de Philmleli'liie du 7 Janvier i83l.
( i8o)
nulie parlie <lu inoiulc ; celte circoiislancc est nttiihuec
a la conformation particulieredc I'oeil , qui est genera-
lement tres petit et souvent enflamine par le renverse-
nient des paupieres. Nous parcourunies , clans la partie
nieridionale de cette Jle, beaucoup de montagnes et de
vallees , et partout on nous fit un accueil aniical.
De la nous cingliVmcs vers Ketow-Point, partie avan-
cee du continent, dont les plaines apparaissaient cou-
vertes de plantations de the; les montagnes abondaient
en paturages; mais les Chinois n elevent pas plus de
betail cju'il n en taut pour les besoins de I'agriculture.
Apres etre restes sept jours sur cetle cole , nous al-
lamcs visiter diverses autres parties du groupe de Chu-
san. Le temps etail alors lourd et orageux. Le 4 fevrier,
on toucha a I'lle de Poo-To , latitude 3o° 3', longitude
iai°. Un temple construit surun rochersaillant, contre
lequel les vagues de la mer venaient se briser, nous
donna quelque idee du genie des habitans. Plusieurs
pretres de Budlia se promenaient sur la rive, attires par
I'aspect , nouveau pour eux , de notre vaisseau ; dautres,
vetus d'liabillemens sates et communs, se hataient de
venir a notre rencontre, en chantant des hymnes; lous
acceptaientavecempressement les livres qui leur etaient
offerts , en criant : « Gloire a Budlia! » Nous montames
a un temple considerable, environne d'arbres et de
bambous. Un elegant portique et une porte magnifique
donnaient entree tlans une vaste cour enlouree de bati-
mens , servant a la demeure des pretres. En penetrant
dans cette enceinte, les colossales images de Budha et
de ses disciples, les representations de Kwanyin, deesse
de misericorde, el autres idoles difformes ; enfin les mu-
railles spacieuses et bien ornees offrent un spectacle
curieux et imposant. Les pretres lisaient nos livres
( i8i )
aveo avidite : le traite qui leur plaisait le plus etait un
dialogue entre Chang et Yuen^ le premier, chretieii ,
I'autre paien.
De ce lieu nous suivinies une route pavee, d'ou nous
apercevions beaucoup d'auires edifices sacres , inais plus
petits, el qui nous conduisit a d'enorines rochers do
granit, sur lesquels etaient des inscriptions en gros ca-
racteres; I'une d'elles signifiait que <• la Cliine possede
des sages ». Les excavations de ces roches etaient reai-
plies de petites idoles dorees et surchargees d'inscrip-
tions. En continuant notre marche, nous nous trouva-
mes tout-a-coup en vuc dun temple imperial, avec ses
tuiles jaunes, le plus grand qui se fut encore otfert a
nos yeux. Un pout jete sur un etang arlificie! conduisait
a une vaste cour pavee en dalles carrees , et donl les
murailles presentaient de nombreux attribuls de I'art
rhinois. Les images, de proportions colossales, etaient
taites en terre et assez bien dorees. Dans le temple, on
avait place des clocbes et de grands tambours , qui ser-
vaient a accompagner le cbant des pretres; le son d'une
petite clochette servait a regulariser la mesure, et a de
certains intervalles , les grosses clocbes et les tambours
resonnaient ensemble, dans la vue de rendre le dieu
Boudha attentit aux prieres qui lui etaient adressees;
les memes mots, dans ce recitatif, revenaient souvent
jusqu'a cent fois. Le temple qu'on vient de decrire tut
bati sous le regne de la dynastie de Leang, environ 55o
ans avant I'ere chrelienne; il fut erige enl'honneur dela
deesse de misericorde, qu'on pretend etre descendue en
ce lieu. Quoique I'lle de Poo-To n'ait pas plus de 12
fiiilles carres de surface, on j compte deux grands edi
bees consacres au culte, et soixante petits desservis par
2,000 pretres. II n'est permis a aucune femme d'y habi-
( »8a )
ter, ni ineiiie a cles litiqiies , exceptti les g^'ns cie seivite.
Pour soutenir ce nomhreux clerge , on a atfecte les
terres situees vis-a vis I'llc, et qui sont affennees j mais le
produit en etant encore insuftisant, on y supplee par des
quetes au loin et qui s'etendent nienie jusqu'a Siain.
Lile etant un lieu de pelerina<][e, est Irequentee par
beaucoup de personnages riches, principalenient par des
capitaines dont les expeditions ont ete iieureuses ; leurs
dons contribuent egalenient a I'entretien des pretres.
Poo-To semble au premier aspect une terra de feerie;
on est f'rappe d'admiration par ces grandes inscriptions
gravees dans le granit, ces temples majestueux et ele-
gans, le pittoresque des sites, et surtout par un inau-
solee gigantesque, qui renfernie les ossemens et les
cendres de plusieurs milliers de pietres.
Nous visitarnes ensuite d autres lies du groupe Cliu-
san,qtii etaient lertiles et bien peuplees; la propaga-
tion de la loi y rencontre moins d'obstacles que dans
la plupart des lies de I'Ocean Pacifique, et les habitans
comprennent assez facilement. Ces lies ont ete visilees
par hasard par des navires anglais, pendant le dernier
siecle; mais eiles n'ont point ete explorees avec soin par
aucun navigateur europeen. Nous avons tache de les
reconnaitre aussi bien que les circonstances I'ont per-
mis ; nous avons apercu , dans le grand Chusan des
monts sourcilieux et des vallees fertiles, dont quelques-
unes sont formees dun sol d'alluvion. Tout le groupe
peut reniermer un million d habitans.
Apres avoir fait quelque sejour sur la cote deSeang-
Shan , qui appartientau continent, nous nous rendimes
a Shih-Poo, par latitude 29" 2', et on y jeta I'ancre le
icr avril. Ce lieu , situe au centre dun bassin , offre le
liavre le plus sur qu'il y ait au nionde. Jusqu'alors la
( i83 )
saisoii avait ete froide et surchargee d epaisbroiiillards;
oil avalt ete des seinaines entieres sans voir le soleil ,
meme en mars ; niais a cette epoque, le printemps appa-
rut dans toute sa beaute; les champs se couvraient de
verdure et les parfuins dii pecher embaumaient lair.
Nous arriv^mes en vue de la cote de Fuhkeen, dans
un moment de grande disetle. La plupart des liabitans
n'avaient pour toute nourriture que des palates douces
sechees. La revoke qui avait lieu a Formose avait empe-
che le depart des jonqiies qui exponent ordinairement
des provisions et des cereales de cette lie; on se nour-
rissait d'epis de ble encore verts , grilles ou bouillis
comme du riz. Les hommes de Fuhkeen ont encore ,
conirne autrefois , le monopole du commerce de toute
cette cote.
Dans le cours de nos excursions, nous reconnumes
Kin-Mun , grande ile au nord du havre d'Amoy, ou
d'immenses rochers, entasses les uns sur les autres,
semblent avoir ete ainsi disposes par la main des hom-
mes. Quoique sterile , elle renferme 5o,ooo habilans ,
qui sont de hardis navigateurs et marchands.
Apres un voyage de six mois et neuf jours, nous tou-
thames a Lintin, pres Macao, le ap avril.
w.
( i84 )
DEUXIEME SECTION.
DOCUMENS, COMMUJ^ICATIONS, NOUVELLES
GEOGRAPHIQUES, ETC.
Notice sur les inoiits Cutocton de la Virginie el da
Maryland, par C. S. Rafxnesque.
Tout ce que I'on a ecrit sur les monls Alleghany, et
les cartes qui en ont ete publiees, sent vagues et sans
details exacts, nieme dans les lieux et passages les plus
connus et frequentes, tels que celui-ci; car il y a long-
temps que Jefferson a rendu fameux le passage du fleuve
Potomak dans ces montagnes. Maintenant il y a des
routes tres frequentees, un canal longeant le fleuve, et
une route de fer dans le voisinage ; cependant toutes les
cartes sont fautives a I'egard de ce passage et des monts
voisins.
Le nom meme de ce defile de montagnes est presque
ignore, hormis dans le voisinage, et ne se trouve pas
porte sur les cartes : ce nom est Cotocton, beau nom
aborigene tres sonore, etque je vais introduire en geo-
grapliie. Sa largeur est de i4 milles.
Le fleuve Potomak separe les monts Alleghany du
nord des monts Apalaches du sud. Ce passage ou defile
se nomme Cotocton, ainsi que les coUines qui le for-
ment, et les deux rivieres qui y affluent du nord et du
( ^85 )
sud. 11 en est de menie plus au noid, ou le passage du
fleuve Hudson se nomnie Mattawan conime les collines
attenantes, ce passage divisant les mnnts Alleghany des
monts Taconick.
L'esquisse ci-jointe, quoique tres imparfaite, donnera
line idee de la structure de ces monts et de leur defile.
EUe comprend environ 48 milles anglais du nord au sud,
depuis les bornes de la Pensylvanie jusqu'au Sp' degre
de latitude nord. J'ai passe cinq fois»ces montagnes en
plusieurs iieux, en 1819, iBaS, i832 et i833, et ce
n'est que cette annee que j'en ai pu saisir toute la confi-
guration physique , toutes les cartes me trompant en ne
mettant qu'une rangee etroite de montagnes ou il y en
a troisou quatre, etles appelant simplement Blue-Ridge
ou Crete-Bleue.
II y a d'abord la montagne isolee deMonocasy, formant
un avant-poste en Maryland, sous le nom de SiigarloaJ'
ou Pain -de Sucre, quoiqu'elle ne soit pas conique; mais
sa forme est Irilobe ou a irois eminences arrondies.Elle
a i5 milles de tour et 600 pieds de haul. Sa structure
geoiogique est primitive; c'est en quelquesorte un cris-
tal de quarz blanc. Elle est deboisee, le bois en ayant
ete coupe pour les forges ; mais les arbres poussent de
nouveau. Elle a plusde 5o sources d'eau. A I'ouestsont
les montagnes, qui, vers les bornes de la Pensylvanie ,
ou elles forment un plateau de 8 a 10 milles de large, se
divisent en trois branches de longueurs tres inegales,
et qui sont toules trois coupees par !e Potoniak. La
branche ouest est la seule qui soit continue, quoique
coupee par une foule de cols et s'appuyaiit sur un pic
nommemont Misery, justement sous la borne du Mary-
land et Pensylvanie, qui a plus de 1,200 pieds au-dessus
de la vallee qu'il surmonte.
( i86 ) •
La deuxieme branclif clu milieu esi la plus couite,
n'.iyant que 20 inillesde long, dout la moitie dansthaque
etat. La vallee en Maryland se nomme Pleasant-Valley^
et en Virginie, Hollers 4^^ alley CVallees agreahles et
crcuses). Sa largeur est de a milles au plus. Elles sont
bien airosees.
Entre cette branclie et la troisienie ou orientale, git
la grande vallee dc Cotocton , ou plutot les deux vallees
du nord et du sud , portant toutes deux ce noni , ainsi
que leurs rivieres; chacune a environ 20 milles de long
et 4 ii 5 de large. A lest, gisent les monts Cotocton du
nord et du sud, qui deviennent graduellement des col-
lines dans la Virginie, par felevation du terrain qui les
porte,et se nomnient Hicccr)-Hills et Bull-hills [coWine
des Noyers et des Taureaux), s'etcndant a plus de 100
milles.
Les monts Cotocton s'elevent d'environ 1,000 pieds
au-dessus du fleuve et 1,200 au-dessus de la mer. lis
sont primitifsj les roches sont de granit et quai-z blanc
et colore en masses, avec d'autres mineraux. Elles sont
boisees, quoique steriles generalement; les vallees entre
les branches sont fertiles et cultivees, avec des schistes
primitifs. A I'ouest, vient la grande vallee calcaire, qui
les separe des Alleghany propres, ayant 600 milles de
long et i5 de large.
Etablissement d'une nouvelle colonic pour les uoirs
libres , au cap Palnias.
La Societe de colonisation de lEtat de Maryland
(auxiliaire de la Socie»;«; de colonisation ainericaine des
( iB7 )
uoirs libres ), forui^e en Janvier i83i, fit partir en octo-
bre de la menie anne'e, le navire V Orion pour Monrovia,
avec Irente-et-un emigrans sous la direction tlu docteur
James Hall. Dans le niois de decenibre suivant, la legis-
lature du Maryland accorda une somnie de 200,000
dollars, pour le transport et la colonisation d'emigrans
en Afriqiie, et le cap Palmas fut clioisi pour y former
un nouvel etablissement.
Le docteur Hall decrit ainsi les avantages de cette po-
sition.
« La cote d'Afrique, lorsqu'on a suivi ur.e direction
sud-est, en partant du Rio-Grande et passant par Sierra-
Leone, le cap Mount, Monravia , Grand-Bassa et la ri-
viere Cestos, tourne ici ( au cap Palmas) a Vest-nord-
est vers le cap Trois-Pointes , lembouchure du Niger
et Fernando Po , dans la baie de Biafra {^(he Bight of
BiaJ'ra). Le voyage de retonr du cap Palmas aux Elats-
Unis ou en Europe est toujours facile, les venis alises
du nord-ouest legnant constamment; tandis que plus
a Test, vers rembouchure du Niger, on se trouve hors
de 1 influence de ces vents, au milieu de calmes et de
courans qui rendent la navigation longue et penible. La
position du calme Palmas doit en faire un jour un point
important, comme entrepot commercial, et comme
lieu de relaclie pour les navii-es americains ou euro-
peens destines pour le Niger.
« La temperature de ce cap est a-peu-pres la meme
que celle de Monrovia, quoique cependant elle soil
reconnue plus saine. Un Anglais, le capitaine Spencei,
quia conduit pendant quatorze ans un etablissement a
1 embouchure de la riviere Cestos, entre Bassa et le cap
Palmas, a souvent employe sur la cote des mailiesde
( i88 )
iiavires et leuis etjuipages peniiant des semaiiies et
meine ties mois eiilieis, sans qii ils en aient lessenli
aucun inal , tandisque, dans les etablissemens actuals,
un etranger ne pent passer une nuit a terre sans etre
incommode. Get effel est attribue aux marecages de
mangiiers ( Rldzophora) formes par les enormes quanti-
tes de depots d'alluvion, apportes par les rivieres Gam-
bie , Domingo, Rio-Grande, Nunez, Pongas, Kabba ,
Sierra-Leone, Karanianka et Piscou. Au contraire, de-
puis la riviere Saint-Paul, autour du cap Palmas, jusqu'a
I'Assinee, pres le cap Trois-Pointes, on ne rencontre
point de grands fleuves qui forment de semblables cou-
cbes alluvionnaires.
« Un autre avantage du cap Palmas est de fournir du
riz, dont les balimens ont toujours besoin , pour faire
leiir voyage de retour.
•iLaville, situee a la pointe meridionale, ou le pro-
montoire se lieau continent, regarde la rade an sud ;
de ce point, le cap se dirige au nord-ouest, et se ler-
minant par des rochers inaccessibles et presque perpen-
diculaires, forme entre cette extremite et la terra une
baie sure et commode. Le point culminant de ce pro-
monloire est a too pieds au-dessus du niveau de la mar,
et une batlerie de quelques pieces qui y serait placee
suffirait pour commander la ville, la baie, la rade, el le
pays qui se trouvcrait a portee de canon. »
Le docteur Hall, nomme agent de la Societe, devail
mettre a la voile, eel automne, pour la nouvelle colonie,
sur un baliment capable de contenir soixante-dix aceiil
emigrans, dont vingt-cinq du Maryland, et le surplus
pris parmi ceux des habitans de Liberia ([ui voiidraient
quitter ieur residence. Ce navire, outre les marchandises
necessaires pour payer la territoire , portera des arnies,
( '8.9 )
munitions et provisions pour six niois, Ics charpentes
du magasin general et de la niaison d'agence,les outils,
instruniens aratoires, etc. II restera en vue du cap Pal-
mas, jusqu'a ce qu'une batterie ait ete elevee et garnie
de canon et que I'etablissement soit en activite. Les ex-
peditions se succederont ensuite, et on etablira toutes
les fortifications necessaires a la defense de la colonic.
Etat (le Venseignement dans la colonie de Liberia
[Afrique^ an "iojuiii i832.
II y a une ecole publique de garcons et une de filles
dans chacun des districts de la colonie, savoir :
1 a Monrovia, comptant. 36 garcons, 5^ filles.
2 a Caldwell 34 4^
2 h. Millsburg 21 11
91 no
Cequidonne pour les eleves des deux sexes. 201
Auxquels ajoutant le nombre des adultes
qui suivent une classe du soir ouverte a Cald-
well aS
Le nombre des individus qui recoivent les
bienfaits de I'instruction s'eleve a 226
On leur enseigne la lecture, I'ecriture, le calcul , la
granimaire et la geographie.
Les instituteurs recoivent cbacun uu salaire annuel
de 400 dollars, et les maitresses , 200 dollars.
( '9" )
Traite entre les Etals Unis ct Sinm.
"Vers la fin de fevrier dernier, le sloop do guerre
Peacock aborda a Siam, ayant a bord M. Edmund Ro-
berts, envoye du president des Etats-Lmis a la cour do
Cochincbine et de Siam, pour contracler un traite com-
mercial que M. Roberts a reussi a faire signer. D'apres
les renseignemens qu'il a fournis sur I'otat agricultural
de ce royaume , il parait qu'en Octobre 1 83 1 , unc grande
inondation a eu lieu, et a convert generalement la sur-
face du pays , pendant trois mois , a une profondeur de
trois ou quatre pieds. Les plantations ont ete detruites,
ainsi que les arbres fruitiers; un grand nombre d'indi-
vidus ont perdu la vie, et la plupart desbestiaux ont
peri. II n'y avail plus de niaree sensible dans la riviere
Meinam, et le flux courait a raison de 5 a 6 niilles par
beure. Le pays commencait a se reniplacer, autant que
possible, en riz, Sucre et cafe.
Les jonrnaux de Boston annoncent le retour de Na-
thaniel Jarrys Wythe, chef de la compagnie d'aventu-
riers qui ont fait recemnient le voyage jusqu'a I'Ocean
Paeifique par terre. II a ramene avec lui deux jeunes lu-
diens de la tribu des Tetes- Plates.
Canal de Chesapeake et de Dehnvare. — Durant la se-
maine qui a fini le i5 novembre i833, i65 batiniens
ont traverse ce canal, dont 69 venant de la Delaware et
26 de la Chesapeake : total des batiniens pendant la sai-
son, 5,340.
Canal de Chesapeake et de VOhio. Ce grand ouvrage
est complelenient acheve depuis le district de Columbia
jusqu'aux premieres chutes a Harper s- Ferry. II a deja
Iransporle nne grande quantite de niarcbandiscs.
( '91 )
Lett re de M. Town send a M. le president de la Sociele
de Geographic.
Paris, leSjjinvier i834.
Monsieur,
J'ai rhonneur d'offrira la Societe de Geographic deux
tartes aniericaines, I'une represetitant les Etats-Unis ,
I'autre I'etat de New-York. La premiere, oeuvre dun
Mcosraphe estime , apparlient plutot a la politique qu'a
!a geogriiphie : elle n'embrasse, outre les vingt-quatre
etats, que cette partie de limmense territoire de la con-
federation qui envoie des deputes au congres national.
Cependant, pour la position et la grandeur relatives des
etats, pour le cours des fleuves et des rivieres les plus
considerables, et pour les traces des lignes de commu-
nications entre les diverses parties du pays, soil par des
canaux , soil par de grands chemins, cette carte est aussi
parfaite qu'il etait possible de la laire avec les rensei-
gnemens qu'on possedait en i83i. II est pourtant a re-
gretter qu'on ait mis si pen de soin a representer quel-
ques chaines importantes de montagnes , dont les posi-
tions et les hauteurs ont ete assez exactement determi-
nees, et qu'en colorant la carte on en ait tant sacrifie la
clarle et la nettete a Teclat et a I'etendue des couleurs.
La carte de I'etat de New-York pourrait etre deja cow-
sideree comme ancienne; mais, par cela meme, elle pos-
sede quelques avanlages sur celles qui ont ete publie'es
plus tard; contenant a peine I'indication de quelquef.
villes et chefs-lieux de comtes, il n en est que plus fa-
cile d'y distingucr les divisions legislatives et judiciaires
(counties) et administratives {towns)., et snrtout d'y re-
marquer les traces des grandes acquisitions de territoire
failes ou par des particuliers ou par des conipagnies.
Celui qui voudrait etndier I'ordre politique et admini-
( ip^^ )
slralit (ie cet (-tat, le plus important de I'Uiiion Ameri-
caine par sa position, sa population, ses riclicsses,et les
avantages naturels du pays, ou qui desirerait se former
line ideenette du systeme qui a prevalu dans le partage
de son territoire en proprietes particulieres, pourra pur-
ser dans cette carte d'utiles renseignemens.
C'est avec un veritable plaisir, monsieur, que je vous
annonce la formation d'une societe dont les travaux
serviront bientot, je I'espere, a hater la marche des
connaissances geographiques. Je parle du lycee qui vient
d'etre organise au depot de la marine a New-York , sous
le nom de United-States naval Lyceum. Les resultats les
plus importans de cette nouvelle association seront de
reunir les efforts des officiers de la marine niarchande
et de celle de I'etat ; de leur donner des instructions pour
les recherches scientifiques que leurs frequens voyages
pourront les mettre a meme de fairej de leur fournir un
depot pour les objets interessans ou curieux qu'ils au-
ront rapportes, et enfin de leur offrir les nioyens de pu-
blier les observations et decouvertes qu'ils auront faites.
Je me plais a croire, monsieur, que la Societe de Geo-
grapbie se felicitera de la formation de ce nouvel auxi-
liaire dans une ville dont les valsseaux, soit du gouver-
iicment, soit du commerce, penetrent dans toutes les
mers; et s'il paraissait utile a la Societe d'etablir avec
cette association deces rapports qui naissent del'identite
du but et de la communaute des travaux , je m'estimerais
beureux den devenir I'intermediaire.
Pilote de la cote des Deux-Ameriques , donnant les in-
dications des principaux havres, anses et promontoires
existant sur cette cote, les directions des vents , les lati-
tude et longitude, et une table des marees,par ^e/wf/zir/
( ^93 )
M. Blunt; ii" edit. (607 p. gr, in-8- ). NcAv-Yorlc, i833.
Le merite de cet ouvrage, auquel lauteur a consacre
quarante annees de sa vie , est constate par le fait de la
vente de onze editions successives qui ont epuise 37,000
exemplaires.
L'auteur a puise aux sources les plus authentiques, en
s'appuyant des explorations faites par ordre du gouver-
nement aniericain , de renseignemens certains fournis
par les pilotes-cotiers, caboteurs , et des travaux et com-
munications des navigateurs les plus distingues de tons
les pays, et enfin de ses propres observations. Dans un
travail aussi etendu, puisqu'il s'agit de donner des indi-
cations sur une cote de plus de 6,000 miiles en longueur,
l'auteur ne se flatte pas d'etre a I'abri de loute erreur j
mais il a la conscience d'avoir apporte a cette grande
tache un zele infatigable et scrupuleux que 1 appat du
gain n'a point stimule , puisque , nialgre le grand nombre
des editions, les profits de cet ouvrage ont ete entiere-
ment absorbes par les depenses qu'il a exiges.
M. Blunt fait remarquer que depuis la premiere edi-
tion du Pilote, le taux ordinaire de I'assurance a dimi-
nue de moitie pour les biitiniens cotiers, et des quatre
cinquiemespour les navires allanta la Nouvelle-Orleans,
et qu'il est hors de doute que les progres de la science
hydrographique n'aient contribue a cette reduction.
II lermine sa preface en declarant que les infirmites
causees par I'age et les fatigues ne lui permeltent pins
de continuer a piesider a cette publication, qui sera
confiee a son fds, M. G.-W. Blunt. W.
14
( '94)
TROISIEME SECTION.
ACTES DE LA SOCIETE.
PROCES-VEnBAtlX DES SEANCES.
Seance du j mars i834.
Le proces-verbal tie la derniere seance est lu etadopte.
La Societe royale de Londres adresse le deuxienie
volume de ses Transactions pour lannro i833.
M. Leprieur ecrit a la Societe pour lui adresser une
notice succinctc de son voyage dans la Guyane centrale.
La lecture de ce document est reservee pour la pro-
chaine asseniblee gf^nerale.
M. Jouannin ecrit a la Societe pour lui offrir, au nom
de I'auteur, un exemplaire de I'ouvrageque M. de Falbe
vient de publier sous le litre de Recherches sur Vempla-
ceinent de Carthage. M. d'Avezac est invite a en rendre
compte.
M. Bianchi depose sur le bureau plusieurs numeros
du Journal de Smyrne et dos Moniteurs Ottoman et
Egrptien, el il signale divers fragmens geograpbicjues
qu'il lui paraitrait utile d'extraire pour le Bulletin.
La section de publication, qui avail ete cbargee d'exa-
miner Ic manuscrit de M. Lefel sur I'bistoire pbiloso-
pbique de TAfrique occidentale, presente son rapport
sur ret nuvrage. D'apres ses roiuliisions , la Commissu)ii
( 19^ )
centrale decide qui! ii'y a pas lieu de publier ce travail
dans le recueil des Meiuoires de la Societe.
La menie section avait aussi a examiner la proposition
de M. d'Urville relative a la publication du voyage de
Bonechea a I'lle d'Amat (Taiti). Cette relation en espa-
gnol lui parait interessante pour I'histoire de la geogra-
phic, et elle conclut a ce qu'elle soil publiee dans le
Recueil de la Societe, ainsi que la traduction francaise.
Lacommissionspecialechargeed'examiner leconcours
reiatif au nivellement des rivieres de France, presente
son rapport par I'organe de M. le colonel Coraboeut,
et propose qu'il soit decerne une des niedailles dor de
loo francs a M. Jodot, auteur dun meinoire sur le ni-
vellement d'une partie du coursdela riviere delaVesle.
— Adopte.
M. Jouannin lit, pour son frcre , un memoire qu'il a
communique dans la derniere seance, sur le choix de la
mesure qu'il conviendrait d'adopter, dune part , pom- Ic
diametre des globes terrestres artificiels, et d'autre part,
pour les meridiens descartes geograpliiques et des niemes
globes. Dapres le desir de I'auteur, M. le president de-
signe une commission composee de MM. Coraboeuf ,
Qostaz et d'Urville pour faire un rapport sur ce menioire.
M. le commandant d'Urville lit un recit dune excur-
sion qu'il a faite a I'lle de Celebes dans le cours de son
voyage autour du monde.
Seance dti 21 mats.
Le proces-verbal dela derniere seance est lu et adopte.
MM. Galindo et Lavallee adressenl de Trugillo et de
Trinidad de Cuba, un duplicata des lettres qu'ils onl
ecrites a la Societe les 9 fevrieret i^' octobre i83:5,el qui
( ^96 )
se trouvent deja iiientionnees dans les proces-verbaux
des seances du 21 septenibre et da 9,2 novenibre i833.
M. I'amiral de Krusenslcrn ecrit a la Societe pour lui
oftrir lelome 11 des inemoiies hydrographiques qui ac-
coinpagnent son Atlas de la mer du Sud. Un exemplaire
dace volume, adresse precedeniQient a la Societe, ne lui
etait point parvenu.
M. Gross-Hoffinger ecrit a la Societe pour lui offrir
plusieurs ouvrages qu'il a publics, et il exprime le desir
de voir des relations s'ouvrir enlre la Societe dont il est
niemi)re et I'institut geographique qu'il dirigc a Leipzig.
MM. le baron de Ladoucetle et Fontanier ecrivent a
la Societe pour lui faire hommage, le premier, de son
Histoire des Hautes-Alpes, et le second, de son Voyage
en Orient.
M.Jomard entrelientlassembleedu voyage deM.d'Or-
l)igny, execute dans I Amerique meridionale pendant les
huit derniercs annees; il annonce que ce voyageur a
rapporte en France de riches collections ethnographi-
ques, denombreux vocabulaires et des cartes itineraires
de toutes ses excursions dans la Patagonie, dans le liaut
Perou, dans les Cordillieres, et dans les provinces des
Moxos,desChiquitos,etc. II regardece voyage comme un
des plus imporlans qu'on ait f:iits depuis long-tenips
dans linterieur des terres.
La commission speciale chargee de juger le concours
rolatif an prix annuel pour la decouverte la plus inipor-
tante en geographic correspondant a I'annee i83i, de-
clare quelle est d'avis qu'il soitdccerne a M. le capitaine
Ross la grandemedaille d'orde 5oo francs, pour son der-
nier voyage dont le principal objet etait la question Avi.
passage nord-ouest entre les deux Oceans. Une mention
( ^97 )
tres honorable est de'cernee aM. le capitaine Biscoe,[)our
ses decouvertes dans I Ocean antarctique. Enfin , la com-
mission a decide que les voyages de nos compatrioles,
MM. Victor Jacquemont dans I'lndoslan et d'Orbigny
en Amerique, seraient cites avec distinction.
La meme commission communique le programme du
prix offert par S. A. R. le due d'Orleans. La redaction
en est adoptee.
Apres deliberation , la Commission centrale remet au
concours deux sujets de prix echus au 3i decembre i833,
et pour lesquels il nest point arrive de memoires. Le
premier de ces prix, relatif a Xhistoire matJiematique et
critique des mesures de degres , est proroge pour etre
decerne a la seance generate de mars 1 835, et le second,
relatif aux antii^uites americaines, est proroge pour etre
decerne en mars i836.
M. Roux de Rochelle lit une notice sur les principales
navigations entreprisesle long des cotes occidentales de
I'Amerique du Nord.
M. Jomard donne des explications sur une grande
carte manuscrite de FAmerique , de i6o4, citee dans
cette notice , et qui est depuis peu exposee a la section
geographique de la Bibliotheque royale.
M. d'Avezac donne lecture de la suite de ses Fdudes
geographiques et ethnographiqnes sur Alger.
( '98 )
MCMBRE AOMIS DANS LA SOCIETE.
M. George Robinson, voyageur.
OOVRAGES OFFEKTS A I,A SOCIETE.
Seance du ^ mars i834.
Par la Sociele royale de Londres : Transactions du
cette Societe, 2° part. i833. i vol. in-4°.
Par M. le capitaine Falbe : Recherches sur Veniplace-
ment de Carthage, suivies de renseignemens sur plusieurs
inscriptions pnniques inedites , de notices historiques , geo-
graphiques , etc.^ avec le plan topograpliique du terrain
et des ruines de la ville dans leur etat actuel, etc. i vol.
in-8 ' et atlas in-folio.
Par la Societe de geologic : Feuilles 6" a 9 du tome iv
de son Bulletin.
Par M. le Airecieiir : Revue des voyages , 3= livraison.
Par M. de Molcfon : Recucil de la Societe Polytech-
nique , 1" serie, n" 2, cahier de fevrier.
Par M. le directeur: Memorial cncj clopcdique , cahier
de fevrier.
Par MM. les dirccteurs : 24 nunieros da Joiinidl de
Smjrne, 5 numeros du Moniteur ottoman , et i numero
du Moniteur cgypticn.
( «9P )
Seance dii 1 1 mars.
Par M. I'amiral de Krusenstern : Recueil de meinoires
hydrographiqiies, 2" vol., in-4°. Saint-Petersbourg, 1827.
Par M. Albert-Mo titeniont : Bibtiotheque nnwersellc
des voyages, 16" livr. , in-8". — Voyage de Vancouver.
Par M. Fontanier • Voyages en Orient., entrepris par
ordre dii goiwernenientjrancais (second voyage en Ana-
tolic ). I vol. in-8.
Par M. le baron de Ladoucette : Hisiolrc , topographic ,
antiquites, usages, dialecles des Hantes-Alpes , avec un
atlas, 2*^ edition, i vol. in-8\
Par M. le baron de Chaudoir : Description de quelqiics
medailles grecques du musee de M. le baron de Chaudoir,
par Dominique Sestini. Florence, i83i. i vol. in-4"'.
Par M. le docteur Gross-Hoffinger : Handbuch fiir
Reisende durch das Erzherzogthum Oesterreich, Steier-
mart, Salzburg, Krain, Karnten, Tirol, Illy Hen, Dal-
matien und das Lombardisch-Fenetianische Kwniereich^
etc., I vol. in-8''. — Oesterrich wie es ist Gemalde von
Normann. 2 vol. in-8°. — Der Kahlenherg und Seine Um-
gebung, oderdie nordlichen gehirgs-umgebungen wiens,
etc., I vol. in- 1 2. Austria,-Zeitschi ift filr Oesterreich und
Deutschland. i*^"^ cahier, in-8°.
Par M. le capitaine d'Urville : 4 livraisons du Voyage
pittoresque autour du rnonde.
Par la Societe d'agriculture , des sciences et des arts
de Valenciennes : Memoires de cette Societe, i^r vol.j
in-8°, :i\ec planclios.
( 200 )
Par M. Morin : Inst ruction snrla mnnierc de faire des
ohservations meteorologiques , in-S". Paris , i834-
Par la Societe libre d'agriculture d'Evreux : Recueil de
cette Societe^ n° ij, Janvier i834.
Par la Sotiele polonaise des Etudes : Premier compte
rendu de cette Societe, in-8".
ParM. ledirecteur : Plusieurs n°* du journal VInstitut.
BULLETIN
1)E LA
SOCIETE DE GEOGRAPJIIE.
AVRIL l834.
PREMIERE SECTION.
MEMOIRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPPORTS.
Par M. Leprieur. (i)
Le desir de voir moi-nieme ce que tant de Francais
avaient vu, d'etudier la vegetation et les autres bran-
ches de I'histoire naturelle, si riches sous les tropiques,
in'avait de bonne heure et nialgre ma famille, fait tour-
ner mes etudes vers les parties qui, sous tous les rap-
ports, pouvaient rendre mes voyages profitables a la
science, si j'etais jamais assez heureux pour etre mis a
menie de suivre les traces de mes nonibreux devanciersj
j'etais prepare, mais je n'osais plus concevoir d'espoir
(i) M. Leprieur a reniis a la Societe , a I'appui de cette relation ,
quatre feuilles renfermant les elemens d'une carte du cours de I'Oya-
pock et d'une partie de celui du Jari , ainsi qu'une serie d'observa-
tions astronoiniques faites pendant le cours de son voyage.
( 202 )
i'unde, quand j eus le bonheui inespere d etie attache
au service de sarite de la marine et eiivoye an Senegal
dans les premiers mois de 1824. MM. le baron Hugon,
baron Roger , Gerhidon , Jiibelin , gouverneurs de cette
colonie, voulurent bien mettre a ma disposition tous
les moyens necessaires pour me mettre a meme de re-
cueilllr tous les materiaux possibles pmirfaire connaitre
ce pays, sur lequel jusqu'alors on n'avait eu que fort pen
de renseignemens; dont on ignoraitl'entoniologie, la ve-
getation , la constitution geologique, et surtout la topo-
graphic. Je rasseniblai dans les nombreuses courses que
je fis pendant mon long sejour tous les croquis ne-
cessaires, toutes les notes et observations que me per-
niettaient mes moyens pour pouvoir taire connaitre ce
pays, et fus enfin rappele au port de Brest en 1829.
Mes courses m'avaient habitue aux fatigues, et ma
sante n'avait que fori peu soufJert des nombreuses at-
teintes du cliniat dangereux aux influences duquel
je venais d'etre soumis.
Je profitai toutefois a Paris dun conge qu'on ve-
nait de m'accorder, quand M.Jubelin , qui, du Senegal,
avail ete envoye pour gouverner la Guyane franchise,
voulut bien se souvenir de moi, et me mettre a meme
de rendre quelques services a la geographic. Un prix
venait d'etre propose pour la reconnaissance de la
Guyane-Centrale; on desirait dechirer enfin le voile
qui couvrail encore ces contrees, et les foire connaitre
a I'Europe savante.
M. Jubelin jnappela pres de lui pour me charger de
cette exploration, ({ue j'acceptai avec le plus vif em-
pressement, et pour laquelle je fis tous les preparatifs
necessaires.
Je partis de Nantes dans les premiers jours de juillet
( ^o3 )
i83o , parfaitemeiit retabli, et ne songeant plus aux fa-
tigues quejav;iis tleja oprouvees sur la cote d"A.frique;
je connaissais la vegetation et les plantes des parties
que j'avaisparcourues; niaisun noiiveau champ s'ouvrait
devani moi. Vierges encore des pas eiiropeens, j'allais
voir , j'allais parcourir ces belles forets vieilles coinme
le monde, et dans lesquelles n'avait jamais resonne la
cognee du bucheron. L'entornologie , la botaniqiie et
les autres parties de Ihistoire naturelle allaient sue-
cessivement devenir le but de mes recherches; de plus
j'avais a m'occuper dune science vaste, a laquelle les
travaux des savans niodernes a fait faire des pas de
geans. Faible eleve encore de cette belle science, a la-
quelle je n ai pu fournir que peu de materiaux, j'etais
charge de faire connaitre la geographic de ce pays nou-
veau , den reconnaitre les rivieres et les montagnes
qui leur servent de berceau, ainsi que d'en tracer la
topographic; c'est avec ces douces illusions que je de-
barquai aCayeimedans les premiers jours de septembre.
Toutes n'ontpasete realisees completement, et malgre
mes efforts , je n'ai pu atteindre le but du voyage; mais
je m'estimerai encore assez heureux si les observations
que j'ai faites et que je soumets a voire jugement peu-
vent meriter votre approbation et vos encouragemens.
Apres quelques jours consacres au repos,je deman-
dai a aller visiter ie pays, afin d'en etudier la nature
et de connaitre les difficuUes quejaurais a vaincre par
la suite.
- Je partis done dans les premiers jours de novembre
pour rOyapok, que je remoiitai jusqu'a sa jonction
avec le Camopi ; ce fut dans ce vojage que, pour la
premiere fois , j'eus occasion de voir les Indiens
peu nombreux qui en habitent les bords, faiblcs de-
i5.
( 204 )
bris des nations plus populeuses qui leshabitnient autre-
luis.
Je pus dans ce voyage nie faire une idee nelte des
obstacles , sans cesse lenalssans, qui en rendent I'exe-
cution si difficile; et les rapides noinbreux qu'il faut
conliiiuellenient renionter n'en sont pas le moindre :
jusqu'a rembouchure du Caniopi, qui nest que 4^ ou
5o lieues de lendjoucbure d Oyapok , on en conipte
pres de trentc, dont quelques-uns do plus dune lieue;
le seul nioyen a employer est de bisser les enibarcations
dans les petites passes lalerales, dont lescourans inoins
rapides sont plus faciles a vaincre.
Je fis connaissance dans ce premier voyage avec les
Pjrions, que leur vieux chef Alexis s'empressa de faire
partir pour la pecbe et la cbasse, afin de pouvoir m'of-
frir quelques pieces de gibier ou depoisson frais; ce qui
effectivement ne tarda pas a arriver. Je visitai aussi les
ruines des etablissemens des jesuites a Saint Paul et a
Sainte-Foi, a I'emboucliure de Camopi ; le poteau en-
core debout des habitations, les debris dun four, sont
au milieu dune foret de citronniers et de cacaoyers, les
seuls vestiges des grandes missions que ces hommes
I remarquables par I'etendue de leurs vues ) avaient
formees pour y attirer les Indiens.
De retour a Cayenne de ce premier voyage, pendant
lequel j'avaistrouve une enorme quantite de materiaux
nouveaux pour I'histoire naturelle, je fis les preparatifs
d'une nouvelle excursion; et cette fois, je fus visiter
Ouessa et ses deux affiuens Couripiel Rokatya, dont les
cours lents, a travers les plaines basses qui les entourent,
conlrastent dune maniere bicn etrange avec lOyapok,
dont le cours esf si rapide : c'est sur les Hots qui exis-
tent epars au nulieu des vasles plaines noyees de Ro-
( 205 )
kawa , que quelques Palicours , debris de la nation de
cenoni, ont etabli leur demeure; parmi eux aussijai
trouve deux Toutanes, les seuls individus dune peu-
plade autrefois nombreuse : la terre est fertile et leur
fournit en abondance les diverses sortes de racines ali-
menlaires et les fruits qui font la base de leur nourri-
ture; mais leurs deraeures sont, au commencement de
la belie saison, si infestees de maringouins, que tous
les soirs, pour pouvoir dormir, ils sont forces de se re-
fugier dans leurs canots , qui des-lors se trouvent trans-
formes en rhambres a coucher j encore faut-il , pour
pouvoir reposer, quils aillent a une assez grande dis-
tance des terres seches pour eviter les atteintes des
enneniis de leur sommeil.
Ce fut au retour de ce second voyage que me furent
remis les derniers instrumens qui avaient ete de-
mandes pour 1 expedition jje fisdes lors tous les prepa-
ratifs, et rien de ce qui fut juge necessaire ne fut oublie
dans cette occasion; malheureusement, mefiantau dire
de personnes que je croyais instruites, je partis de
fausses donnees, je me chargeai de divers objets totale-
ment inutiles,et qui m'embarrasserent plus quils ne me
servirent.
Des les premiers jours de juin 1882 j'avais quitte
Cayenne pour me rendre sur I'Oyapok; sur un ordre
dont j'etais porteur, des embarcations me furent re-
mises pour I'expedition dont j'apportais toutes les
marchandises; il ne me resta plus qua former les equi-
pages dont j'avais besoin , et quelque peine que j'aie
prise , il me fut impossible de les completer sur le bas
Oyapok; ce ne fut que sur la Crique Romontabo que le
vieux Alexis me les completa au moyen d'un certain
nombre de ses Pyrions; aussi apres une journee que je
( 206 )
leuraccordai pour taire leiirs preparatits, on se remit en
route; et, nialgre le temps que, pour nourrir un aussi
grand nombre dindividus, on etait force de consacrer
a la chasseeta la peche, nous atteignimes bientot I'em-
l)Ouchure du Camojn et pen upres les premiers et;iblis-
semens Oyampis , sur lesquels je niarretai quelques
jours pour donner a mes gens le temps de se reposer,
el aussi pour reparer lescanots qui deja etaient endom-
niages : de ce point jusqu'a I'endroit ou VOyapok cesse
d'etre navigable, je ne fis plus que de petites journees ,
autant a cause desdiflicultes du chemin (le lit du fleuve
etant presqueasec), que pour examiner a mon aise les
moeurs de ces peuples si nouveaux pour moi; et je n'ar-
rivai chez Jose Antonio que dans les premiers jours de
septembre. Parfaitement recu par ce chef, il mit a ma
ilisposition tout ce dont je pouvais avoir besoin ; je me
preparais deja a le quitter pour visiter le forets vierges
quand desobjets que j attendais de Cayenne , et des con-
Irarietes me forcerent de rcvenir subilement sur le bas
0)apok ; je profuai alors de ce contre-tcmps pour reiever
plusfacilementtoute lapartiedu coursde cette rivierequi
est au-dessus du Camopi et dontje ne connaissais pas de
trace: quoiquelcdncteur Leblond I'aitautrefois parcou-
rue, y ail sejourne plusieurs mois, et I'ait relevee, toute
cette partie, que les difficultes du trajet a f;ut estimer a yo
lieues environ, n'en comporte au plus que 5o; cequi
avec les 5o de la partie inferieure a cet affluent, n'en
porte toiit le cours navigable qu'a cent lieues.
Peu de jours me suffirent pour ce voyage, qui me
niit a nienie de uiieux etudier les nombreux rapidesque
je desceiidais; mon canot, que Jose Antonio (qui m'ac-
compagnait), faisait gouverner, glissait rapideau milieu
des flots bouillonnans de ces raontagnes russes dun
I 207 ; -
nouveau genre; combien j'adniirais I'adresse de ces
homines a gouverner un canot au milieu des brisans !
I'ojil exerce de llndieri apercevait la roche sous les flots
mobiles , et un coup de pagaie !a lui faisait eviter ; mais
c'est surtout lorsqu'il arrive siir le bord du rapide que
brille toute son adresse : dresse sur le banc on le bord
du canot, il trace et suit a travers I'e'cume et les rochers
le chemin de celui qu'il dirige, explique a ses compa-
gnons les manoeuvres a faire pour eviter les dangers
qu'il leur designe de la main ; il n'y a point la moindre
crainte a avoir, quoique pourtant le plus petit choc
soil capable de taire briser, sinon couler les embarca-
tions.
Je ne sejournai sur le has Ojapok que le temps sti'ic-
lement necessairvi pour terminer les affaires qui m'y
avaient appele, prendre les objets qui etaient arrives de
Cayennepour rexpedition,et repartir aussi vite avec des
vivres en assez grande quantite pour n etre pas force de
chasser ou pecher; en remontant, ma marche fut si
promptequejen'eusbesoin que de i3jours demarcheau
lieu deSoquel'on metordinairemcnt pourremonlercette
riviere jusqu'ou ellecesse d'etre navigable; la j'eprouvai
de nouvelles difficu'tes : le chef Jose Antonio , a \\\ suite
des fatigues du voyage, etant tombe malade , et hors
d'etat de m'aider, il fallut m armer de patience; je ne
pus plus que fort lentement faire les preparatifs du
portage , par lequel je me proposais de reconnaitre les
sources delt^/fl/'oX; jeperdis,non sans en etre tres con-
trarie, plusieurs jours a aitendreet a decider des Indiens
a me servir de guide; enfin, le 8 novembre, accompa-
gne de 14 individus, je parlis pour me reudre aux
sources de I'Oyapok ; avec moi se trouvait un excellent
Indien , dont retablissemcnt en etait voisin,et chozle-
( 208 )
quel je merendis; tout le pays est extieniement boise,
et quoiquesuivant un chemin ties fiequente par les In-
diens, nous eprouvions beaucoup de difficultes, tant
a cause de lactivite de la vegetation , qui repioduit
presque instantanenient les parties relranches, ou I'en-
trelacement des planles grinipantes, qua cause des
nombreux circuits du chemin et de la fugacite des
traces, remarquables seulemcnt pour Ihabitant de ces
vastes forets.
Le plus petit sentier de nos forets d'Europe est mieux
marque que ces grandes routes indiennes, dontsouvent
la direction n'est indiquee que par quelques branches
troissees ou au plus cassees de distance en distance.
Noussuivionssousdesvoutesdeverdureimpenetrables
aux rayons du soleil, une route extremement variee, mais
dont malheureusement il etait impossible de voir le de-
veloppement; a travers I'epaisseur des bois, nous pas-
sions alternativenient dune foret marecageuse de pal-
miers, entrelaces de balisiers, d'orchidees, de pteris et
dedicsonias, sur une colllne couverte de nieliacees ou
de lecitis, sous Tombrage desquels des poivres, des geo-
noma, des psicliotria, des fougeres et autres plantes
vivaientabritees des rayons perpendiculaires du soleil de
ces contrees ; la boussole et quelques rayons du soleil
echappes a travers le feuillage , indiquaient seuls la di-
rection de la route que nous suivions, et qui etait
N. E.,S. O.J souvent, malgre la secheresse , nous trou-
vions un joli ruisseau d'eau limpide, faible tributaire
de rOyapok, coulant sur uu lit de sable blanc , au pied
dune colline , sur le cote oppose do laquclle on ne trou-
vaitque les lits desseches d'une autre plus t'aible encore;
en fin , apres quatic jours de marche sous cette vegeta-
tion giganles(jue, nous arrivames a letablisscment desi-
( 2"9 )
gne sous le noni Coqs de Rochei, , a deux lieues au
Nord des sources de I't^a/JoX, apres avoir, pendant ce
portage , traverse quatre fois celte riviere ou ses
branches.
Pres decet etablissementles montagnes sont en grand
nonibre, et la direction des lignes qu'elles forment est
presque Est ou Quest, peuelevees en general (du moins
celles que j'ai mesurees) , quoique donnant naissance
a {'Oyapok, a \ Arawari , a. Mapaii ou /a/V, et autres
rivieres, tributairesde I'Amazone ou de I'Ocean ; elles ne
doivent etre considerees que comme la partie la plus
basse des contreforts les plus Est de la ligne de partage
des eaux des Guyanes francaise et bresiliennej les
rochers que Ion apercoit sur leurs flancs, sont ou
feldspathiques ou syeniiiques, nieles de quelques gra-
nitSjUiais en petite quantitej toutes, quelles que soient
leurs dimensions, portent des marques irrefragables
de Taction du feu , soit quelles I'aient eprouve, au
moment de leur formation, soit poslerieurement : des
fentesdans quelques endroits ont ete remplies par une
substance racheuse (basaltique ou de feldspath pur),
qui ne ressenible nullement a la masse; dans d'autres
cas (sur I'Oyapok et le Jari), des fragmens ou nodules
syeniiiques ou granitiques a cassure concentrique ont
ete empales par un ciment de meme nature, ou de
nature differente; quant aux roclies calcaires, quelles
qu'aient ele les recherches que j'aie faites , il ma ete
impossible d'en trouver, sans doute par la raison toute
simple que le pays que j'ai parcouru avait deja pris
son relief, toutfaible qu'il est, avant I'epoque du depot
des calcaires.
Apres quelques jours consacre's au repos et a I'exa-
men de ce pays que je parcourais pour la premiere
( ^lo )
fois, je fis mes dispositions pour aller sur iin etablisse-
iiient que j'avals appris exister an confluent de Coiii>e
et de liouapira, afHuens superieurs du Jnrc, afin de
recounaltre par moi nienie si ce point etait l'avor;d)le-
ment situe pour en faire un point central, d'ou il fut
facile de faire des reconnaissances dans les pays envi-
ronnans; la loute, apres avoir traverseN. et S., le point
culminant des niontagnes reprend la direction N. E.,
S. O, qn'elle avait deja suivie pour venir aux souices
de YOjapo/c; le terrain est entierement seniblable:
meme succession de monticules, de marais couverls
de [)almiers on de ruisseauxj mais cette fois, longeant
beaucoup plus le cours de Rounpfra, nous fumes
forces de traverser cette petite riviere six ou sept fois
avant d'atteindre I'etablissement situe pres de sa jonc-
tion avec Couve, etablissement sur lequel j'arrivai le
cinquienie jour, premier decembre, de bonne heure.
La , comnie sur les etablissemens que j'avais visiles
precedemment , je ins parfaiteitienl recu ; la plus tran-
che bospitalite me fut offerte, aiiisi quaux honmies
quej'avais avec moi; du macouraj, de la craynve, quel-
ques morceaux de poisson et de la cassave nous furent
aussitot apporles,el le chef de la famille nous cngagea
par signes a nous asseoir et a suivre rexemple (ju'il
nous donna de manger; le repas fini, sur son ordre,
ses Hlles apporlerent des grands couis pleins de cnchiri^
que nous faisions circuler a la ronde apres y avoir bu;
car, cliez les Indiens, il est de bon ton de ne jamais
refuser de boiredans la coupedeson voisin, etceserait
meme luifaire insulte quede lui refuser cette preuye de
fraternile.
J'eus en peu de temps reconnu les lieux; les habilans
de cet etablissement, possesseurs de grandes cultures dc
( 211 )
manioc, ayanl consenti a nie vendr*? une partie des vi-
vres sur pied, et m'ayant aussi cede une case poury de-
nieurei', je nie decidai a sejourner sur ce point, en
atleiidaiit que le cXmi Jose jintonio , entieremeiil reta-
bli de la maladie qui! avail contractee dans le voyage
qu'il avail fait avec nioi , pal me donner les lenseigne-
mens el les guides dont j'avais besoin pour parcourir
surement les forels vierges qui mentouraient. Ce point
convenablemenl silue pres du confluent de Coui>e el de
Rouapira, me donnail la facilite de reconnaitre sans
peine les cours de ces affluens du hant Jari^ je fis en
consequence (en attendant que je pusse f'aire construire
une embarcation nouvelle), reparer la moins mau-
vaise de celles dont je pouvais disposer; des le lo
decembre je nie mettais en route avec buit jours de vi-
vres , deux negres et un Indieu , pour nj'assurer par moi-
nienie des ressources en poisson et gibicr sur lesquelles
je pouvais compter dans ce pays que j'aliais babiter
pendant quelque lenips; au moment <lii depart j etais
epcore indtfcissur la direction que je suivraisdans cetle
eicursion ; mais arrive a I'enibouchure de Coin>e ^ Xoule:
incertltiule disparur ; la largeur de cci aKIutiit, la be.iule
de la vegetalion qui en couvrait les bords, m'eurent
bienlot delermirie; j'avais provision de bons liamecons;
aussi, apres I'avoir remonte pendant quelques hcures,
je fis mettre pied a terre , et pre|)arer tout pour passer
la nuit; aussi beurenx cbasseurs que pecbeurs, nous
nous remettions en route le lendemain avec bonne pro-
vision de poisson et de gibier ; lapparence de la rivier€^
etait des plus favorables; son lit etait large et ses eaux
etendues en belie nape, y coulaient tranquilleuient et
sans obstacles; depuis trois jours je la remontais que
rien encore ne me faisait craindre d'etre arrete dans ma
( 2 1?- )
marche, elle clait loujours large et |)roroiKle;jecioyais
avoir de la peine (avec le peu de vivres que j'avais eni-
porte) a la remonter jusqu'a ses derniercs eaux , et
deja je songeais a revenir, avec des vivres en plus graiidc
quantite pour n'etre plus arrete dans ma course, quand
je vis tout-a-coup s'evanouir mes illusions: la belle ri-
viere de Coiivc n'etait plus qu'un fort ruisseau cnibar-
rasse par des arbres tond)es qui en barraient le passage.
Elleavoit subitement disparu, a un detour que je n'avais
pas apercu, en se divisant en trois branches. Le sep-
lienie jour au soir je rentrais a letahlissenient avec des
provisions pour un temps assez long et la certitude de
ne jamais manquer de gibier ou de poisson , dont la
riviere fourmillait.
Le /a/Y, qui se jette dans I'Amazone, en face de la ville
de Gouroupa , est la route la plus frequentee par les
Oyampis des deux versans snd et nord de cette partie
de la Guyane-Centrale, qui ont des relations avec cgvw
des leurs qui se sont joints a la Iribu des Tamocornes ,
qui est etablie sur les rivieres de Moucotiron et Cnrapa-
natoube ; ceux des sources el des divers aftluens de
VOyfipok sortis, comme leurs consanguins, depuis fort
peu de temps des monlagnes dans lesquelles ces rivieres
prennent leurs sources, sont unis a ceux du /flrr/ par
des liens de parente que I'eloignement actuel n'a pas
encore relaches; au commencement de la saison des
pluies, lorsque tousles travaux deculture sont termines,
ils vont voir leurs parens ou leurs amis d outre uionts.
Par suite de ces relations et de ces habitudes de voyage,
il est tres facile de trouver des guides pour se rendre
de XOyapoksuT le Jari^ elmeme c'est par suite de cette
facilite de communication que je m'etais determine a
reconnaitre le chemiu qui conduit de XOjnpok sur 1 //-
(.i3)
-fnazone par cette riviere, esperant que plus tarcl il me
deviendrait beaucoup plus facile d olttenir de hons
renseigneineiispournie diriger siiremeiil surle Maroni,
que les peuplades du centre designent sous ie nom A'A-
rawa.
Le 20 Janvier, au moment 011 je revenais d'une pre-
miere course sur le Jari , je vis arriver deux Indiens
^xpedies par Jose Antonio avec des lettres qui avaient
ete envoyc'es chez lui, ainsi que divers objets que M. le
gouverneur mefaisait parvenir : Jose Antonio etait par-
faitement retabli; aussi a cette nouvelle me decidai-
je aussitot a prendre le chemin qui me separait de son
elablissenient, afin de pouvoir m'entendre avec lui, et
den tirer et guides et renseigneniens; en peu de jours la
distance qui me separait de lui fut franchie; et je fus a
menie de m'assurer que tout ce que je venais de recevoir
de Cayenne etait fort convenable j je regardai deslors
comnie assuree la reussite de mon voyage; et quoique
par suite des rapports faits a cet Indien , il ne voulutpas
me donner des guides pour me rendre sur le Maroni,
il me procura autant d'individus qu'il m'en fallait pour
foire transporter a I'etablissement que je venais de
quitter toutes les marchandises d'echange que je venais
de recevoir; il consentit lui-memea me servir de guide
et d interprete pour visiter et reconnaitre tout le bassin
du Jari.
Des que je fus de retour sur I'etablissement , il se
chargea de faire faire un canotsuffisant pour nous con-
tenir, ainsi que toutes les marchandises : trois negres
travaillaient avec lui; et, un mois apres notre arrivee, le
cmotavait ete mis a I'eau. Pendant ce temps les Indiens
nos voisins ni'avaient prepare une paftie de couac, telle
que de long- temps je n'avais besoin de m'en occuper.
( 2i4 )
Dans les prciiiitMS jours d'aviil, lows les preparatifs
termines, nous nous reniinies en route pour redescen-
drele /oriavecl'intention de reprendre pourle romonter
Topipako , Tin de ses afduens ouest, esp<'rant que par la
j'aUeindrais par un portage beauooup plus court le
Maroni nu un de ses affluens, et que de cette nianiere
ilmeserait possible, en remplissant lesdesirsdela Societe
de geograpliie, d'y ajouter la reconnaissance du Jari et
d'un de ses principaux Iributaires; niais je fus bien
cruellenienl decu de celte esperance que je croyais
fondee : javais fait partir devant inoi toutes, ou du
moins presque toutes, les niarchandises de I'expedition,
une personne qui m'avait ete adjointe avec ordre de
m'attendre sur Tetablissement du nomme Jose Oiiroii^
situe a 35 ou /\o lieues de nous sur le Jari, devant
moi meme my rendre trois jours apresj mais lorsque
j'arrivai sur cet etabiissement, an lieu de trouver les
personnes qne j'avais e\pediees qnclcpies jours avant
moi, je trouvai une leltre par laquelle on m'annoncait
qu avant la fin du niois, on mexpedierait un canot et
des guides pour nie conduire sur Carapanatoubey ou on
allait m'attendre.
Je n'avais pas besoin de lire la lettre, car des que
j'avais vu qu'on ne nfavait pasattendu, j'avais ete con-
vaincu que j'etais abandon ne et que mon trop de con-
fiance m'avait perdu, que des-lors il etait impossible
de reniplir le butde I'expedition. J'attendistoutefois sur
cet etabiissement la lettre et les guides qu'on me pro-
mettait, malgre mon i time conviction que cette pro-
messe ne se realiserait pas.
Je fis tout preparer pour retourner sur I'etablisse-
ment du confluent de Coiive et Rouapira, je fis pre-
parer des vivres, j'acbelai trois nouveaux cbiens de
( ^'5 )
chasse, autanl dansrcspcrance qiiils me faciliteraienl les
nioyens de me procurer du gibier, dontlepays abonde,
que comme excellens gardiens pour la nuii; decide que
j'etais a faire une tentative pour atteindre avec les trois
negres qui me restaient le Maroni ou quelqu'un de ses
affluens, je prenaistoiites les precautions possibles pour
assurer la reussite de ma tentative.
Le i^i mai de grand matin je quittai i'etablissement
de Jose Outou, nun sans avoir observe des hauteurs
circum-meridiennes du soleil. Le 6' au soir je revenais
forcement sur un etablissement donl je con naissais fort
bien les environs , et que je ne croyais plus revoir;
apres nous etre reposes un jour, je fis faire touslespre-
paralifs du portage, aiguiser sabres et baches, nettoyer
les fusils , prendre et emballer les objets dont je croyais
avoir besoin. Le 8 au soir tout etait fini , rien ne man-
quait a nos preparatifs; nos hamacs seuls n'etaient pas
empaquetes : de nouvelles obseivations circum-meri-
diennes furent aussi faites dans la journee du 8.
Enfin, le 7 ati matin , charge presqne autant que les
negres qui m'etaient restes fideles , muni de tout f e qui
pouvait assurer la reussite de mon entreprise, tant en
instrumens et amies qu'en outilsj niais charge de fort
peu de vivres, je me mis en marche accompagne en
outre par les trois chiens de chasse qui me restaient (un
d'eux avait ete pris par un jaguar en remontant le
Jari) ; je fis continuellement route au N. O de la bous-
sole , appuyant autant que possible la route au Nord;
j etais force, pour ne pas devier de la direction que je
voulais suivre, de marcher le premier, et, dans beau-
coup d'endroits embarrasses par des broussailles ou
des plantes valubiles , de m oiivrir un chemin a coups
de sabre; souvent meme elle devenait si difficile que
( 2i6 )
nous n'avancions qu'avec peine et en faisant les plus
grands efforts. Quoique la marche fut conihinee tie
niaiiiere a nous fatiguer le inoins possible, ce n'etait
pas sans un hien vif plaisir que nous voyions arriver
Theure du repos.
Le 12 au matin, deja au milieu de la quatrieme mar-
che , apres avoir traverse un bas-fond dans lequel j'a-
vais remarque beaucoup de pas de pecan's, (f agoutis et
de chei>reuils , j'entends lout a coup mes trois cliiens
donner de la voix : la joie et I'esperance me font tre-
saillirj Ueja je vois en perspective la nourriture de la
jouruee et du lendemain largenient assuree; car jo savais
etre possesseur de bons chiens, et je comptais sur un
pecari au moins ; je fais aussitot mettre les paquets u
terre, j'y laisse deux negres tandis quaccompagne du
chasseur Domingo^ et armes Tun et I'autre d'excellens
fusils doubles, je meprecipite a travers les fourrees pour
arriver le plus tot possible pres de mes chiens qui don-
naient au ferme. J'arrive et Domingo a mes cotes, mais
quel n'est pas notre desappointement. Mes chiens avaient
attaque un jaguar a qui la maladie avait ote la force de
fuir. Sa maigreur etail extreme et sa taille enornie; il s'e-
tait defendu , et le plus hardi , le meilleur de mes chiens,
a qui dun coup de dents il venait de briser la tete , se
debattait enlre ses griffes; furieux de I'attaque dont il
venait d'etre I'objet, ses yeux roulaient de rage dans
leurs orbites et il etait pret de s'elancer sur les deux
chiens qui le harcelaient encore lorsque je I'apercus.
Je glisse aussi vite dcs balles rlans les fusils, je change
les amorces afin d'etre plus siir de nion coup, j'ordonne
a Domin"o de faire attention et de no lirer sur la bete
que dans le cas ou je laurais manquee ; mon coup de
fusil futdes plus justes,je mis deux balles a-la-fois dans
( 217 )
la tete du jaguar qui tomba raide mort sur le corps de
mon chien. De ce jour jusqu'a mon retour sur I'Oyapok ,
il ne m'arriva plus rien qui meiite d'etre cite. Je nerencon-
trai plus un seal animal dangereux , la vie errante que
nous menions etait devenue monotone de tranquillite,
rien ne troublait la paix des solitudes que nous traver-
sions ; a peine si nous en effrayions les habitans, igno-
rans du danger qu'il y avait a nous approcher de trop
pres.
Le i4, il y avait a peine aS minutes que nous avions
repris notre route, que nous atteignions nne belle
riviere coulant a pleins bords dans «n lit large et pro-
fond. Sa direction generale est N. E., S. O. ; et la trou-
vant pendant long-temps trop large pour la traverser,
je suis force de la remonter. Enfin, parvenu a un en-
droit ou sa largeur apparente a beaucoup diminue, je
fais abatlre un grand arbre au moyen duquel je par-
viens a la traverser 5 mais au lieu d'arriver sur la terre
ferme, je n'arrive que dans un labyrinthe de criques la-
terales que je suis force de traverser, dans I'eau jusqu'a
la poitrine pendant plus dune deinibeure, apres ia-
quelle nous finissons enfin par atteindre unejolie colline
sechesur laquelle nous prenons un peu de repos j presie
d'atteindre le but vers lequel tendaient tous mes voeux ,
je ne m'aiTetai pas sur le bord de cette belle riviere
(Jenipoko), que nous venions de traverser, nialgre la
certitude dune peclie abondante. Tout le reste de la
journee, tout le lendemain et une partie de la journe'e
du 16, nous traversames un grand nombre de niarais et
de cours d'eau. Les niontagnes s'elevaient de plus en
plus et les pentes en etaient beaucoup plus raides;
tous les ruisseaux coulaient paralleles au Jenipoko au
S. O., ot deja je me bercais de I'espoir de reussir. La
16
( ^'8 )
iiiaiche, quoique peu rapide , etait pourtaiit leguliere el
lie nous eloignail pas <le la ligne N.O. de la boussole. A
itiidi,ie i6, nous inontons pendant pres dune heuie line
montagne rapide, au has de laquelle un immense nia-
rais donl les abords sont impraticabies, me fait craindre
d'etre oblige de faire un long contour. Toutefois, a
force de peine, dans I'eau jusqu'au-dessus de la ceinture,
et a tout moment accroches par des aiguillons, des ti-
ges de plantes volubiles, on piques par des epines des
deux palmiers conana et mourou-mourou qui y crois-
sent, nous parvenons en fin , avec des peiries inlinies, a
nous frayer un chemin assez direct. Le terrain, moins
embarrasse, nous laissait un passage plus libre; mais
une nouvelle riviere, plus grande que la precedente,
grossie de plus par les pluies des derniers jours ( Topi-
poko ), sur les bords de laquelle nous arrivions, nous
arrete de nnuveau ; en meme temps , une pluie diluviale
nous mettant dans Timpossibiiite d'abattre un arbrepour
traverser la riviere, nous nous trouvons pendant pres
de trois heures exposes, sans abri , a une pluie bat-
tante qui fort heurcusement n'etait pas froide; ce nefut
que fort tard qu'il nous fut possible de francliir ce nou-
vel obstacle, de I'autre cote duquel je trouve les restes
d anciens etablissemens indiens : des cotonniers, des rou-
couyers, des cacaoyers et quelques autres arbres fruitiers
mindiquaient positivement la place quavait occupee la
case des habitans. Je passe toutefois rapidemont sur cet
emplacement autrefois habite, et ne m'arrete que sur
le bord d iin joli cours d'eau qui arrosait le pied dune
belle colline siluce a peu de distance. Pendant notre tra-
jet, un de mes chiens avait decouvert une ties grosse
tortue de terre qui vint fort a propos pour nous aider
a faire notre lepas.
( 219 )
Jusqu'au 24 , la route ni le terrain ne changent, les
montagnes seulement sont plus abruptes, les cours d'eau
suivent toujours a-peu-pres la meme direction. Ce jour-
la, vers midi, nous gravissons une monlagne comme
nous n'en avions pas encore rencontre; sa bauteur est
beaucoup plus considerable que toutce que nous avions
vu jusque-la; nialheureusement nion dernier baronietre
avait ete casse, et il m'est impossible de la niesurer. Je
fais monter un negre sur un des arbres les plus eleves
du sommet afin de savoir si on ne pent pas apercevoir
dans le lointain quelques cours d'eau ; mais en vain. Je
monte nioi-meme, et de toutes parts je ne vois a perte
de vne que les ondulations des collines couvertes d'ar-
bres, dont les fleurs nuancees de diverses couleurs pa-
raissent ca et la au milieu de ces enormes masses de
verdure.
Le aS apres avoir marche presque toute la journee dans
un pays toujours tres coupe, nous atteignons le soir un
joli cours d'eau, peuprofond, qui coule au nord, et a pen
de distance reprend la direction S. S. O. Je le considere
comme un tributaire de W4mazone , et me repose sur
ses bords. Ici , ainsi que cela nous etait deja arrive , nous
n'avions ni gibier ni poissons. Nous abattons des pal-
miers coumous dont les fruits echaudes et pelris dans
I'eau nous fournissent une emulsion nourrissante qui,
accompagnee de quelques choux palmistes, forment
notre frugal repas.
La marche se ralentissait beaucoup , mes hommes
commencaient a se fatiguer, deja nous etions tons
blesses, la nourriture n'etait plus assezsuhstantielle, et
les forces dlminuaient peu-a-peu. Deja j'avais aussi ete
force de jeter baches, linge, munitions et fusils , pour
diminuer les charges et rendre la marche plus rapide,
1 6".
( 220 )
rij« voyais avec peine que hientot il fiiiulrait recom-
Hiencer el jeter les objets divers dont je pouvais a la
rigueur me passer; c'etait en vain que je niVtais jete
dans les hois. La bonne volonte et le courage des trois
negres qui m'avaient accompagnes ne repondait pas
it leurs forces, Tun d'eux tomba gravement malade
}e 28, et le second le i*^' juin; le seul chasseur Domingo
resista, et comme moi , ne fut pas malade. II n"y avail
plus que lui et moi qui puissions faire quelque course
et aller chercher de quoi manger; encore n'elaitce le
plus souvent que des choux palmiers, qu'assaisonnait
un aganii; car dans le centre des iorets on ne trouve
ni hacos ni aucune des especes de penelopes qu'on
trouve sur le bord des rivieres. Je ne pus plus, dans
cette penihle position , songer a atteindre le Maroni ou
quelqu'un de ses Iributaires, il ne me restait qu'un
seul homme qui pouvait metre utile et c'etait trop peu :
en me raidissant davantage il etait possible que nous
perissions tous et moi le dernier. Cette facheuse per-
spective me determinaa revenir sur mes pas. Pourtant,
ne voulantpas avec des hommes malades , foire un trop
long trajet, je me dirigeai plus a Test, sur quejetais
que je ne pouvais pas manquer de retomber dans le che-
min indien qui conduit AeX Oyapok sur \e Jari. Des que
mes deux malades furenten etat de seremettre en route,
nous repartimesa petites journees, ne nous arretant sur
le bord des rivieres que pour y faire des provisions de
poisson qui , seche , etait dans la route une ires grande
ressource, divers fruits d'rtrto//flr<'V,«arboresceines furont
aussi plus dune fois pour nous une utile trouvaille.
Le 19 et le 20, revenant toujours sur nos pas, nous
traversons heaucoup de montagnes et un ires grand
iiomhre de cours d'eau qui vonl se jeter dans Roimpira^
f 221 )
au-ilessus ile letablissenient sur leqiiel nous avioiis se-
journe long-temps. Enfin le 21 vers niidi, nous tombons
dans les anciennes cultures que traverse le cheniin du
Jarl, el peu apres nous arrivons sur ce cheniin que
nous n'avions pas vu depuis six niois. II n'y avail plus
rien a craindre, nous etions de nouveau pres d'etablis-
seniens habites, nous etions siirs de trouver des vivres
et una franche hospitable.
Le 22 je continual a marcher avec tout mon monde,
mais le 23 au matin je les quittai dans le bon cbemin.
Prenant le devant, j'eus bientot franchi les cinq lieues
que j'avaisa faire,el fus on nepeut pas mieux recu paries
bons habitans de retablissement, qui s'empresserent dt;
m'apporler tout ce dont je pouvais avoir besoin. Connue
j'avais encore suffisamment de quoi reconnaitre I'hos-
pitalite qui ni'etait otierte, je sejournai sur ce point jus-
qu'a ce que nres deux nialades fussenl bien relablis, et
ne me reniis en marcbe pour regagner I'etablissement
de Jose Antonio , qu'a la fin de juillet.
Les canots que j'y avais laisses etaient entierement
pourris, il fallut en faire un neuf. Enfin, le 27 aout je
quittai Jose , dont je n'avais eu qu'a me louer, je redes-
cendis rapidement XOfapok^ sur le has duquel je fus
assez heureux pour trouver une goelette qui partail de
suite pour Cayenne; le y septenibre i833 au soir je
perdais de vue cetle riviere, et le lendemain 8je debar-
quais apres une absence de i5 mois et 8 jours.
Tout le pays que, pendant ce temps, j'ai visite, est
assez accidente, mais fort peueleve; les suites des col-
lines que Ion y rencontre, ne depassent pas, dans la
partie que j'ai parcourue, 600 metres d'elevation.
Touies les roches qui les constituent dans le centre de
la Guyane sont loules a nu et appartiennent aux difte-
( 222 )
rentes especes de roches feldspatliiques; les tentestjue
Ion y reinarque en grand noinLn; sont toutes contem-
poraines de la premiere coulee ou du premier souieve-
meiit qui a donne le relief au pays, et out ete remplies
posterieurenieiit par des roulees de basalte noir, ou de
teldspatli rose ou autres, niais toujours de nature dit-
terente de la masse dans laquelle elles se trouvent ;
dans quelques endroits ces fdons, plus niodernes et
seulenient de quelques pouces, ferment un veritable
roseau par leur croisement j dans d'autres, au con-
traire, ils ont jusqua deux metres de largeur, et fer-
ment des lignes continues d'uneassez grande longueur,
mais sans direction fixe; je n'ai pas apercu, nialgre
toutes les recherches que j'ai failes a cet egard , la
moindre trace de depot calcaire, soit ancien , soit mo-
derne; on ne rencontre que sur la cote des terrains de
depots et d'alluvions, et encore sont-ils modernes : les
plus anciens sont des roches ferrugineuses , connues
dans la colonic sous le nom de raches a ravets , qui re-
posent sur les gneiss ou les cyenites, etc.
Ne pouvant, nialgre le plus vif desiret tous mes ef-
forts, atteindre, dans ce premier voyage , les sources
du Maruni , je me suis attache a faire bien connaitre la
partie que je parcourais, eta faire des observations et
des relevemensau nioyen desquels il fiit possible de de-
terminer les latitudes, les longitudes, etde faire un bon
trace graphique des cours du Haut-Oyapok, du Haut-
Jari, ainsique du pays intermediaire entre les portions
navigables de leui's cours; convaincu que quelques
points bien determines sont plus convenables qu'un
grand nombre qui seraient inexacts, j'ai profile sur
quatre points differensdes courts embellis que me lais-
sait la saison des pluies pour faire des observations de
( ^33 )
hauteurs du soleil. Toutes ont ete prises apres iiiidi ,
car, nialgre le cercle dont j'etais muni, les hauteurs du
soleii etaient toujours a cette heure de la journee trop
grandes pour me permettre de les mesurer.
Les nations indiennes avec lesquelles j'ai eu des re-
lations pendant mon voyage, sont peu nomhreuses en
individus, et presque toutes, les debris de nations au-
trefois considerables; leur caractere est generalement
doux; leur taille moyenne ne depasse pas quatre pieds
huit a dix pouces; et siparfois j'ai vu quelques individus
dune taille dEuropeens, ils sont fort rares.
Des Pyrioas , des Marawanes et q\\e\(\uesylronatgnes,
tous, au nonibre de quelques centaines, habitent toute
la partie de r6^r«/.'0^'^inferieure a sa jonclion avec le
Camopi; parrai eux existent quelques families Noragues^
Roucoiiyemes , G alibis el Garipons , tandis que les bas-
sins de la riviere de Oilessa et.de ses deux aflluens Cou-
ripi et Rokmva sont habites par les restes des nations
Palicours et Toutanes ; tous ces Indiens qui avoisinent
les etablissemens europeens, ont fail ce que font tou-
jours les peuplades qui viennent effleurer la civilisation:
ils ont pris nos vices, sans s'etre appropries une seule
de nos qualites, et ils ont perdu une partie des leurs:
ils ont pris Ihabitude de s'enivrer et de mentir; pour
du tafia on leur fail faire ce que Ion vent; sans cette
liqueur il n'y a plus de parti a en tirer; ils sont tres
paresseux, et n'ont souvent pas assez de manioc pour
vivre ; souvent, par suite de leur paresse, ils sont forces
de manger celui qui nest pas encore en nialurite.
La partie de lOyapok superieure au Camopi est en-
tierement habitee par des Oyampis ^ dont I apparition
sur ce cours d'eau ne date que de 1816 ou 18 17. Ante-
rieurement a cette epoque ils en habitaient les sources,
( "4 )
ainsique celles du/rt/v. Les Coiissaris et \es Tamocoines,
qui lie soiit aiitres quedestribusde cette nation , dont le
langage, a quelques locutions pres, est le nienie, ha-
bitenl aujonrd'hui, les premiers, les bassins superieurs de
XArmvati et de 31apan';\es seconds, le cours de Cava-
panntouhe et de l\loucourou, aflluens du Jari; et ce
n'est qu'en suivant ce dernier cours d'eau qu'une petite
portion des Oyampis s'est reunie aux Tamoconies : leur
taille est aussi petite que celle des tribus indiennes du
bas Oyapok , leurs niembres sont en ge'neral bien failsj
ils sont tres robustes; niais leurs feninies, presque con-
stituees comme des Laponnes sans formes et sans tour-
nure, sont de veritables preservatils centre le peche : du
reste, actifs et laborieux, on les voit rarenient a ne rien
faire; ils possedent toujours beaucoup plus de racines
alimentaires qu'il ne leur en faut pour leur consomma-
tion; leurs femmes emploient a filer du coton ou a tisser
des bamacs fort bien ouvrages, tous les momens qui
ne sont point consacres aux soins du menage, et les
bonimes, assis a coted'elles, fabriquent des bancs, des
arcs et des fleches.
Les Emerillons longs et fluets, plus arrieres sous le
rapport de I'induslrie sociale que les an tres Indiens,
babitent les rivages du Cainopi et de ses affluens; a
peine s'ils cultivent les racines alimentaires, dont les
Oyampis ont de si grandes quantites, ils n'en ont pas
suffisamnient pour vivre; la chasse est leur seule occu-
pation; les againis ^ les singes , les jaguars, les tapirs el
les pecaris ^ etc., et en general tous les oiseaux et tous
les mammiferes servent a leur nourriture, tandis qu'ils
touchent a peine au poisson dont toutes leurs rivieres
abondent ; ils n'ont pour se coucber que des bamacs
grossiers en lanieres depeau d'arbre , au lieu des bamacs
r 225 )
cliauds des Oyainpis; les traits de leur figure, nialgre
leur apparence de maigreur, sont assez jolis, et leurs
temnies proportionnellement plus petites qu'eux , sont
mieux faites que les autres Indiennes du bassin de
I'Oyapok.
VOCABULAIRE.
JVoms Ojampis.
T^te
Eacang.
Garcon (petit,
Front
Erouwape.
grand)
Y6iiira,counou
Nez
Inci.
mikirey.
Joues
Eroba, erava.
Frere
Eroi.
Bouche
Ecourou, eicou.
Soeur
Niania.
Oreilles
Nami, inami.
Fille
Ninieni.
Yeux
Erea.
Oncle
Pai.
Menton
Erediba.
Xante
Pipi.
Langue
Cincou.
Cousin
Tairo.
Dents
Erai.
Cousine
Cacaene.
Cheveux
Apira.
Arc
Paira.
Barbe
Eacouara , ea-
Fl^che
Ourapara.
couawa.
Casse-tete
Cawarapa.
Sourcils
Eropoukaraba.
Jarre.
Macoua,
Col
Couroukawa.
Chapeau
Caniererou,cha
Epaule
Eribapoui.
pore.
Bras
Eriba.
Pilon
Eimoura.
Main
Epapoui.
Canari
Touroua niis-
Doigts
Epouji.
sig.
Phalanges
Epouakang.
Assiette
Parapi.
Ongles
Epampe.
Fusil
Mokawa.
Poitrine
B^pocia.
Poudre
Couroupara.
Seins
Assoussous.
Plombdechasse
Pirato miri.
Dos
Eape.
Balles
Pirato wassou.
Ventre
Eroue.
Miroir
Worawa , war
Nombril
Epouroua.
wa.
Cuisses (dessus
Couteau
Kicet.
dessous)
Evakoua.erapo.
Sabre.
Sabre.
Genoux
Enepouissame,
Hache
You, wiwi.
^nen^pouang.
Aiguille
Cacoussa.
Jambes
Eretoumakang.
Han'iac
Tya, tia.
Mollets
Eretouma.
Calinibe
Camisa.
Cheville (mal-
Juppe
Temoukourou.
leole)
Eperena.
Chemise
Tilou.
Pied
Epoucoupe.
Culotte
Siroa, chiroUes
Doigts du pied
Epoijia.
Oui
Th6.
Talon
Epouita.
Rassades
Mohira.
Homme
Yo, teco.
Hamecons
Pina.
Femme
Nim^ne.
Bois
Ewirapoko.
Enfant
Yawira.
Feu
Tata.
( 226 )
Cliarbon
£au
Couiic
Cass.ive
Ignan'ies
Patate
Papaye
Bananes
Canne a sucre
Manioc
Pistaches
Pimeiit
Miel
* orde d'arc.
Pitre
Abatis
Case
Chemia
Arbre
Canot
Bois a bruler.
Fou
Sot
Pa gale
Sable.
Epiue
Crique
Soleil
Luiie
Etoiles
Vieux
Camarade.
Citrouille
Gros
Cong
Maigre
Etroit
Haut
Bas
Marais
Montagne
Roche
Riviere
Petit
Mortier
Banc
Pagara (petit id)
Tatarapoiug.
t:ouleuvre(a pas
•
lb.
ser le manioc)
Tapici.
Houhi.
Platine
Yape-ein.
Meyou
Pluie
Anianne.
Cara.
Vent
Wetou.
letig.
Bon
Icaton.
?Jabon.
Mauvais
Nicaiou^e.
Bacowe.
Demain
Coye, covi.
Acikarou.
Hier
Cou6.
Manihoc.
Plume
Ipepo.
Moiidowi.
Aile
Ipepokang.
Ikeing.
Bee
Icic, incic.
Eira.
Patte de cliien
Yawarapo.
Ourapama.
Rasoir
Nawaye.
Courawa.
Nid
Wira".
Ecco.
Os, id. de pois-
Oka,
son
Canguara, pira
Pe.
canguara.
Iwira.
Bambou
Courtnouri.
Igara.
Taba
Cawaitata, para-
Eiboura,
teni.
Yawette.
Travail
Mocico.
Necacoje , no-
Bien
Nay coye.
cacoye.
Fi^vre
Carayeu, cara-
Epoucoita.
you.
Issing.
B^toa
Epouitou.
Gniou.
Pipe
Peipo.
Taca, yarape,
Tabac
Petemnia, nia-
tacarerew.
courey, petem-
Cay are.
niora.
Yae.
Courir
Eniane.
Yae-tata.
Content
Erourou.
Tamou, tairi,
Colore
Avniouroume.
tamouchi.
Tantot.plustard Courmou.
Semou, iya,ate-
N^gre
Mecrou,necroii.
wavra.
Noir
Epiou.
Acikava.
Vert
Saheuk.
Tourou
Rouge
Pirang.
Ipokamoi.
Blanc
Sing.
Ocining.
Sale
Okia.
EkoL
Dormir
Okette.
Ij)oko.
J^eaucoup
Yatliew.
lapoua.
Tuer
Eyouka.
Ipawa.
Mourir
Omanou.
Iwitira.
Paresseux
Niavirari , ynia-
Tacourou.
wane.
Euyee, ibyee.
Poltron
Okiye.
Missig.
Hardi
Nokiy^ye.
Eiiiaca, einoua.
Habile
Omouuian.
Apoca.
Ivrogne
Wavvepore.
Carourou ( ya-
Querelleur
Nfrecassi.
mateuk).
Aimer
Erareou.
( 227 )
Hair
Naorewi.
Faini
Amouaeni.
Malade
Ikaraw.
Donner
Heme heng.
Chasseur
Oyouka, ipo-
Prendre
Ekik , eiki.
rang.
Couper
Acoussi.
Pecheur
Okouwa.
Laver
Ecoutoug.
Sel
Saoto, Corey.
Casser
E6uka.
Huile
Yande, yiandi.
DeGer
Name , niam^.
Las
Eraoupape.
Parier
Emonmeau.
Livres
Ireme.
Pleuvoir
Anianout, okite
Favoris
Eratoubape-pi-
Montrer
Onpia mou-em
raba.
Regarder
Emaea.
Moustaches
Nemeraba.
Ecorcher
Epirok.
Foil
Haba, hava.
Pendre
Moyassiko.
Queue
Waya.
Accrocher
Evonkouate.
Inibecille
Nokouw.iye.
Murir
Ipirang,
Saligot
Eponino.
Apporter
Eroule.
Matin
Oyeiwe.
Devoir
Naponme.
Midi
Avicateu.
Cuire
Oyippe, oyoup
C.otoniiier
Awamonianiw-
pe.
ira.
Pagayer
Epouicoui.
Colon
Amonian.
Nager
Eyayou.
RocoyeF
Roucourawa.
Haler
Emoting.
Rocou
Roucou.
Tirer
Eilik, eilik.
Soif
E'iwate.
Ramasser
Eoupite.
Manger
Eyemiyon.
Gronder
Yawon.
Fuiner
Emououk.
Allumer
Amoini.
Piquer
Fossok.
Mouclier
Eoutim.
FlechfT
Ejewa , ejiwon.
Pouvoir
Einoung.
Raper
Eapika, ekilik.
Filer
Epowane.
Bouiliir
Emounioye.
Coudre
Emoupouponk.
liotir
Ennite.
Fend re
Yeoka , eoka.
Phuner
Eawiit.
Bache (pahnier^
Mirici, miriti.
Noms cT
animaux.
Haccos
Mountou, moui-
Aimara
Tarouerou, ta
tou.
louerou.
Marage
Maraye
Jaguar
Yawara, caicou
Coujouvi
Coujouvi, cou-
chi.
youvi.
Tapir
Tapiira.
Agami
Akami, iakami
Pecari
Taititou
Tinamou gros
Inamon.
Caricacou (petit
Tinamou petit
Soiii.
chevreuil)
Cariacou.
Cotinga ponceau Erslouka.
Biche
Eoii , eassou ,
Cordon bleu
Wanamiwara.
eoiiassou.
onname.
Paca
Paca.
Paca paca
Pacapacarou.
Agouti
Acouchi, acouci
Ouette
Arawira.
Acouclii
Acouchi-waye.
Coq de roche
Peoung.
Cabiais
Capivoira.
Cohbri
Pereperewara.
Coq (poule)
Massakara.
Raniier
PicaOu.
Tortue
Yaoussi, yavyi.
Poisson
Pira.
Chien
Yawar.
( "8 )
Rat
Anouyaou.
(Uiique
Tounne.
Souris
Anouya.
Caurale
Kerei.
Papillon
Panama.
Tique
Yatheoughe.
t:asside (petit CO
Crapaud
Youwaye.
leopt^re)
Niabi.
Grenouitle
Couta.
Bourdon
ISlaiiana.
Serpent liane
Mociniug.
l^ochon
Tayaouslng.
Puce
Touny.
Serpent (vrni-
Mouches
Merou.
meux)
Yararaga.
Maringouins
Nacioung , Na-
Singe rouge
Akikeu,akikew.
ciou.
Coiata
Coiaia.
Pompiles
Moutouk.
Sapajon
Cahi.
Abeilles
Eirarouwa.
Cayman
Yakavi-.
Gu^pes
Caba, cava.
Lezard (monitor) Ikirwarou.
Elaters lumi-
Iguane
Wayamaka.
neux
Monang.
Harpie
Wiraou.
Fourmis
Taracua.
Vautour brun
Ourouwou-j)iwa.
Taons
Maganga.
Perdrix
Oulou.
IVI utiles
Taoya.
Boa
Mohiou.
Hirondelle
Ourasinga.
Chattigre
Maracayapou-
Perruclie
Perici.
cou.
Perroquet
Courey.
Plongeon
Tarara.
Ara
Arara.
Unau , Alii
Aliicaye, ahi.
Pou
Kiwa.
Canard
Arapono.
Autre petit tina-
Sarcelle
Cawiriri.
mou
Moucoucawa
Beeuf
Tapiroussou.
Chauve-souris
Amira.
Taiou
Capachi.
Engoulevent
Wakirawa.
(«:uf
Oupia .
Loutre
Yavvakakgha.
Noms de quelques etoiles ou groupes d'etoiles chez les
Palicours.
Le soleil Tamoye.
La lune Cairi.
Les trois rois Mahori.
LacroixduSud Tey6bon.
a et b du cen-
taure Tekempen,
La grande ourse Tepessiri.
U^pi
La poullni^re
Aldebaram
Antares
Les petites
Etoiles
Noms et phrases Palicours.
Ouroukama.
Coussoupou.
Awaori.
Acourre.
Orapyoubouye.
Case
Paitipin.
Couac
Couac.
Homme
Wairi.
Cassave
Onlate.
Femme
Tanan
IJceuf
Paca.
Enfant
Cabcandia.
Maques
Aneyou.
Carbon
Makibinani.
Beaucoup
Banekonek
Canot
Monho.
Coq
Takarak.
Poissou
Aima.
Coui
Tomaur.
Pagaie
Poulaite.
Eau
Oni.
229 )
Je crois
Kata.
J'ai du chagrin
Bononka dini.
Qu'estce que
Manie.
Je veux aller
Que pikelt'.
Bonjour
A'itene.
Je suis content
Bon
Kebeinr.
de ma femme
Bambetkiou.
Je veux aller a
ronkakia.
ma case
Pinhouet pin.
Je veux te don-
Beaucoup de
ner des rassa-
poisson
Baneken atma
des
Enepa kar)>i-
ki.
tate.
J'ai beaucoup
11 est g&t6
Babouse.
de tafia
Baneke polata-
Je ne veux pas
wiu nomone.
manger
Ana eske.
Tiens ton coui
Aponi tomanr.
Je ne suis pas
Donne -moi de
content de ma
I'eau
Enonta oni.
femnie
Kanbetek non-
J'ai soif
Arabouin.
kaka onaga.
Mettez la-haut
Ikeue nota.
As-tudu chagrin
'Maba pika dini.
NOTICE SUR LES lESGUIS ,
Par M. FoKTANiER.
Je venals de stiivre les bords de la mer Caspienne
depuis Derbenl jiisqu'a Bakou, et je devais retourner a
Tiflis. Deux routes pouvaient uie conduire a celte ville;
I'une est tracee dans la vallee baignee par la Koura, et
I'autre, laissaut ce fleuve sur la gauche, traverse le
pays desLesguis et ensuite la province deCakel. La pre-
miere ne presente que de legers accidens de terrain :
elle conduit sur une plaine inculte, dont les montagnes
sont assez eloignees; la seconde, au contraire, oblige
les voyageurs a parcourir de> contrees aussi belles qu'au-
cun pays de TEurope. Je connaissaisdeja le cbeinin qui
suit la Koura, ainsi je n'hesitai pas a prendre celui qui
conduit chez les Lesguis.
D'autres voyageurs ont deja decrit le pays qui separe
Bakou de Schuniaki, ancienne capitale du Chirvan ;
je n aurai done pas a m'en ocruper. Schuntaki est
( 23o )
batie sur le penchant dune colline, au sonimet de la-
quelle se trouve la raaison dii commandant, ancienne
demeure du Khan de Chirvan,qui, peu d'annees avant,
s'etait enfui en Perse. Sur une belle terrasse, d'ou Ton
domine tout le pays, on placait encore sa tente, qui,
divisee en plusieurs compartimens , couverte de tapis
ct de coussins, me servit de domicile. La ville est peu
considerable et n'est guere babilee que par des malio-
metans; elle a un bazar et ne differe nullemen.t des cites
persannes. On n'y conipte que deux cents maisons. Jen
partis pour Nouka, capitale de la province de Cheki ;
malheureusement il n y a pas de postes de Cosaques
organises sur cette route, de telle facon qu'il faut re-
courir aux Ketkodas, ou maires des villages, qui met-
tent des chevauxen requisition, et font aiiisi passer les
voyageurs de commune en commune. Ce transport est
opere sur I'ordre du commandant, etpresente un a van-
tage qui n'est pas toujours a dedaigner, celui d'etre
gratuit. II est impossible de faire rien accepter a ces
montagnards, soit pour le loyer des chevaux , soit pour
la nourriture et les rafraicbissemens qu'ils s'empressent
d'oftrir. Dureste, la nature les pourvoit abondamment
de toutes sortes de productions; partout on voit des
forets de miiriers , des fruits de toutes especes , parmi
lesquels les melons sefontremarquer parleur grosseur;
si Ion traverse des bois, on est etonne de la vigueur
de la vegetation. Bien que les rizieres soient nombreuses,
que la maniere de cultiver le murier que Ion plante en
petits bosquets souventarroses, doivent faire supposer
des maladies endemiques , les liabitans paraissent jouir
d'une sante vigoureuse, et ne semblent pas tourmentes
par les fievres qui desolent une grande partie des pro-
vinces du Caucase. Leurs habitations sont en bois ou en
( -3i )
osier, niais elevees et spacieuses j ordinairenient on les
enloure dan verger; elles secomposent le plussouvent
de la maison des homines, du harem on apparlement
des fenujies, et enfin dune autre maison destinee a I'e-
ducation des vers a soie. Pour se rendre de Schumaki
a Nouka, on n'a a traverser qu'un rameau peu eleve
du Caucase, puis on se trouve au pied de la chaine prin-
cipale quel'on suit en remontant une large vallee: lors-
qu'on avance vers Nouka , la vallee se resserre et se
trouve engagee dans les montagnes ; aussi le nombre des
villages, la richesse dupaysdiminuent progressivement.
II n'y a pas dans ce trajet de cours d'eau digne d'etre
cite, mais des torrens, qui, a de certaines epoques, se
precipitent des sonirnets neigeux du Caucase, fertilisant
et ravageant alternativement les campagnes. La civilisa-
tion peu avancee de ces pays, I'etat continuel de guerre
dans lequel vivent les habitans, ne permeltent pas la
construction de ponts, de telle maniere qu'il faut tra-
verser a gue les cours d'eau; quelquefois les communi-
cations sont interrompues. Souveiit aussi les chevaux
posant un pied mal assure sur d'enormes rochers, sont
avec leurs cavaliers entraines par les torrens. Quant
aux paysans Lesguis, ils ne marchent qu'armes dune
longue branche d'arbre ; taiitot ils I'eniploient Dour
sonder le terrain; tantot ils s'appuient dessus pour s e-
lancer d un roc sur un autre : ainsi ils traversent les
cours d'eau quelle que soit leur rapidite , etdans toutes
les saisons.
Nouka n appartenait pas a I'empire persan , mais son
chef ou khan reconnaissait le schah pour son suzerain;
II etait d'ailleurs a-peu-pres independant et hereditaire.
Les Russes s'etaient empares de cette ville sans raison
fort legitime; mais les descendans des anciens princes
( =^32 )
vivaient dans les environs et etaient assez considered.
Cette ville est grande, reniarquable par ses jardins et
par ses nombreuses Fontaines; un torrent la traverse
et sert a des tanneries. Le palais des khans est in-
con testablement le plus beau monument, et pent-etre
ie seul que les Russes possedent de I'ancienne archi-
tecture persanne : c'est une forteresse tout-a-t'ait asia-
lique, dans laqnelle resident le colonel-gouverneur et
les principaux of'ficiers; comme d'usage, elle ^st placee
dans la partie la plus eleveede la ville elsur un plateau.
On y entre par une grande porte, et Ton se trouve dans
la cour ; en face on voit le divan , c'est-a-dire le lieu ou
le khan recevait et rendait la justice ; a droite et a gau-
che sont line foulo de constructions destinees aux
ecuries et aux domestiques; sur le derriere se troiivent
les anciens appartemens du harem , ou Ton me logea.
Les chambres que j'occupais etaient fort agreables; de-
vant les fenetres se trouvaient des jardins converts de
rosiers en fleurs et de reservoirs d'eau; les murs etaient
ornes de peintures , incrustes de dorures et converts
de fragmens de glaces. La grande salle du Divan ren-
fermait des tableaux persans, et tout autour se trou-
vaient representes les hauts faits des arniees persannes
dans les guerres des Nadir-Schah contre les Turcs et les
Russes. Suivant I'usage, la perspective et le dessin n'y
etaient guere respectes; mais le coloris et la fidelite
des costumes les rendaient fort reniarquables. II n'est
pas une peuplade de I'Asie mahometane, depuis lln-
dusjusquaux montagnes du Causase, depuis Constan-
tinople jusqu a la mer Rouge, qui ne s'y trouvat re-
presentee.
L'administration du paysappartenait auchef militaire
qui etait aide par un maitre de police niahonietan ; comme
( 233 )
1e gouverneur ne savait pas iin mot dela langue tartare,
et que le maitre de police n'etait pas plus habile que
lui en russe, on ne s'etonnait pas que la bonne harmo-
nie regnat enlre eux. J'avaisete precede dans cette ville
par une recomniandation du general Willeminoff, gou-
verneur militaire du Caucasejaussi n'eus-je quamelouer
de I'accueil queje recus. Comnie je desirais parcourir
les environs , le colonel chargea le maitre de police de
men fournir les moyens; ce dernier comprit mal et
crut qu'il s'agissait d'une lutte entre un Tartare du
pays et un Mingrelien , que la population chretienne
avail fait venir a grands frais pour soutenir un pari.
11 se hata de faire les preparatifs convenables , et, au lieu
demontera cheval, nous nous rendimes sur la terrasse
du chateau ou s'etaient rassenibles les spectateurs. On
fit d'abord conibattre deux coqs, puis deux beliers:
mais les acteurs principaux ne purent s'entendre sur
les formes du combat ; le Tartare etait revetu de son cos-
tume, c'est-a-dire couvertd'un calecon depeau serreala
ceinture, nu et les membreshuiles pour que son anta-
goniste neput le saisir.Il tenait un«e massuedans chaque
main et les faisait tourner sur sa tete pour donner de
la flexibilite a ses muscles. Le Mingrelien pretendait,au
contraire, combattrc vetu comme d'habitude; il voulait ,
disait-il , pouvoir librement saisir son adversaire; et, pen
salisfait du jeu habituel qui consiste a le placer sur le
dos, il aspirait a le frapper et meme a lui ronipre les os,
s'il etait possible. Un exercice auquel il se livrait le
maintenait sans doute dans ces dispositions hostiles.
II avalt apporte une outre de vin et un grand verre ;
pour quelque monnaie il remplissait son verre, ouvrait
unebouche enorme , etyjetait la liqueur, qu'il englou-
tissait d'un coup sans en repandre une goutte. Pendant
1?
( 234 >)
cju'on neguci. it et au grand scandale des Mahometans,
ilvidasoii outre, qui ne conlenait pasnioins de dix bou-
teilles , puis il se retira trioniphant de ce qu'on n'osait
le coniLattre, et ne paraissaiii niillfuieiit incommode.
Sa place fut prise par d'auties lutteurs, qui, sous la pre-
sideiice dun mollah, se livreient a leurs exercices. Le
motlah prenait les antagonistes par la main, leur faisait
proniettre de lutter d'apres les regies, de ne point se
frnpper, de n'avoir aucun ressentiment de la defaite;
il iuvoquait le nom de Dieii et du propliete pour cha-
cune de ces promesses, puis il les laissait libres de com-
mencer. II est impossible de voir ces jeux de la lutte
sans reconnaitre I'exactitude des descriptions que nous
en ont laissees les auteurs grecs et latins.
Quand celte ceremonie (ut terminee, le gouverneur
fit en fin comprendre an chef dr police qu'il devait me
faire parcourir les environs; pour se rendre plus intel-
ligible sans (loute, il le menaca de quelques coups de
baton; niais ce n'en valait guere la peine, car je ne vis
que quelques jardins et les collines circonvoisines.il n'y
avait qu'une chose remarquable dans le pays, le serail
dontj'ai parle.
La province deNouka ne paie rien en argent au gou-
Virnement russe; on se contente de preleveren nature
une contribution sur la soie ; celte soie transportee 4
Tiflis, ainsi que celies duChirvan, est ensuite niiseaux
encheres et vendue pour I'etat. La justice estrendue par
le commandant aussi bien que le pent un juge qui nt;
comprendpas ce qu'on lui dil. Je dois rapporliM- cepen-
dant que I'obligation de rendre des arrets etait fort
penible au chef que je rencontrai, et que, plus scrupu-
leux qued'usage, il sollicitait un changcnient deresidence.
On, ne peut appeier Schoumaki et Nouka des ville»
( 235 )
tie Lesguis, bien queles pays environnans soient habites
par des Mahometans qui parleut le tartaie, et dont plu-
sieurs professent le rile des Sunnis. Ge sont plulot des
cites persannes, tandis que les veritables Lesguis sont
dans les nionlagnes et pius au nord; j'allais passer sur
leur territoire et cliez un de leu rs chef's noninie Elinsky-
Sultan. Coinme le trajet n est pas facile et que Ion
court risque d'etre attaque par des montagnards,
on me donna une forte escorte pour la route; le fils du
maitre de police fut meme charge de m'accompagner.
Nous ne traversames pas,apres etre sortis de Nouka,un
pays aussi riche (jue celui quej avals d'abord parcouru,
cependant levoisinage des montagnes et la rapidite des
torrens le rendaient fort pittoresque; apres deux jours
de marche nousatteignimes les etats du prince que j al-
lais visiter. Comme il etait prevenu de mon arrivee, mes
compagnonsretournerent sur leurs pas tandis qu'il quitta
son chateau et s'approcha jusqu'au village le plus voisin.
llmeprenait prohablement pour unillustre personnage,
et fut singulieremen t desappointe lorsqu'il m'apercut seul
et sans suite, arme dun marteau , et portant tout mon
bagage renferme dans une mechante valise. A peine pou-
vait-il en croire ses yeux, et il attendit quelque temps pour
reconnaitre si mes gens n'arriveraient pas. Enfin, comme
j'approchais pour le saluer , il se precipita dans mes bras
avec tant deffusion que nous faillimes tomber. Sa Majeste
ri'avait pas cru pouvoir fairea un chretien un accueil plus
flatteur que de se griser completement. Lorsqu'elle eut
repris lequilibre, on la conduisit dans une barraque de
bois, oil elle se livra ausoinmeil pendant qu'on me traita
par ses ordres. Ensuite nous nous mimes en route, et,
suivant les bords dun torrent que nous traversames
plusieurs fois , nous gagiiames sa demeure ordinaire. La
'7-
( 236 )
rapitale lie ce potentat n'etait qii»un miserable hanieau
situe dans un ravin , d'ou Ton pouvait egalement fuir
surlamontagnequand les Russesapprochaient, ou faire
des excursions dans la plaine. On avail de distance en
distance eleve des murailles pour couper la vallee et se
defendre dune surprise. Le palais imperial ne differait
guere des maisons des particuliers; il se distinguait par
uneeohelleen bois que Ion retirait ex.icteinent chaque
nuit. J'ignore la splendeur du harem j quant a la salle de
ceremonie, elle etait precedee dune anti-chambre en-
tierement nue,et on n'y remarquait qu'un trone en bois
blanc couvert d'un mauvais tapis ; un feutre regnait tout
autour et servail de siege aux grands officiers et aux
dignilaires de I'Etat. Quand les fumees du vin furent dis-
sipees , je reconnus que le sultan vivait en fort bonne
intelligence avec ses sujets. Les plus distingues se ren-
daient chez lui aux heuresdes repas etvivaieiit des restes
de son diner. Comme etranger j etais alors place pres de
lui sur son trone; on apportait une grande quanlite de
mets turcs, et quand nous avions choisi cc qui nous
convenait, il envoyait les dilferens plats aux assistans
avec autant degravite qu'exit faitle Grand-lMogol. Ceux-
la ne recevaienl pas une si grande faveur avec moins
de reconnaissance et de respect que les habitues des
grandes cours asiatiques. Elinsky-Sultan avail soixante
ans environ; sa famille etait iiombreuse ,et pres de lui
vivaient trois de ses fils ; un autre etait a Tiflis employe,
ou plutotgarde comme otage par le gouvernement local.
Quant a I'aine, (jui portaitdans I'armee russe le titre de
capitaine , comme son pere celui de colonel, il avait
trouve nioyen de rester dans son pays. On ne peut bl4-
merces precautions, si Ton considere qucles Lesgiiis ont
toujours passe pourde haidis brigands, et que leur re-
( ^'S? )
Ggion les porte a faire des excursions contre les tlire-
tiens. Bien que le sultan pretendit etre ties devoue a la
Russie, je doute qu'il n'eiit cherche dans line occasion
favorable a se soustiairea sa domination. Du moins, il
me paiutque I education de sa famille n etait pas dirigee
dans des vues de tendresse pour les Europeens. Deux de
ses jeunes enfonsqui ne le quittaient pas me temoignaient
uneaversion qui rejouissait singulieiemenileur pere, et
il me disait: <ah! si vous etiez Russe, ce serait bien pis
encore! » Toutes les peines que je pris pour plaire a ces
petits sauvages furent inutiles. Un jour je surpris Tun
deux, a peineagede septans, qui ne pouvants'echapper,
me regarda Cxement, puis, dedaignant mes demonstra'
tions amicales, s'elanca sur moi comme un jeune chat
et me saisit a la gorge, decide sans doute avendre chere-
ment sa vie.
Je fusretenu pendant deux jours chez mon bote, qui,
probablement fache du peu d appareil avec lequel je
m'etais presente, me fit accompagner par son fds et par
de nombreux cavaliers jusque sur les bords de I'AIazane,
limite des possessions russes. Cette partie du trajet est
la plus dangereuse, parce qu'au nord des etatsdu sultan
se trouvent deux petites republiques de Lesguis. Ces
deux republiques nommentchaque annee leurs chefs et
sont exposees aux troubles et aux divisions qui distin-
guent ce genre de gouvernement ; apres avoir vecu
en paix avec leurs voisins, le moindre pretexteles poite
a des hostilites, et, dans ce cas, les citoyens se repan-
dent sur les routes sans qu'on puisseprevoirl'epoquede
leur irruption. Cependant nouspassames heureusement,
et apres avoir traverse la riviere, jemetrouvai en quel-
ques heuresaCaragatch, ou etaitcampe un regiment de
diagons. Ainsi j'etais rentre en chretiente.
( 238 )
Telle est, messieurs, I'excursion dont je desirais vous^
entretenlr; elle ne pourrait offrir de I'interet que parce
qu'il s'agit d'un pays que personne encore n'a decrit, et
que Ion ne saurait traverser qu'aide d'une puissante
protection. Cette protection je I'ai obtenue du general
lermoloff, et Ion ne s'etonnerapas si devant vous, mes-
sieurs, j'en temoigne ma reconnaissance. Cest pour les
Toyageurs un devoir que d exprinier leur gratitude , soit
qu'ils nomment les person nes qui, dans les pays etran-
gers, leur ont permis de visiter des provinces mal sou-
mises, et dont une politique peut-etre prudente defend
lacces; soit que, comme ici, ils s'adresseni a un presi-
dent, qui, ministre dun grand royaume , a donne aux
.sciences une noble impulsion , et les a cboisis sur le banc
des ecoles pour les placer dans la brillante et perilleuse
carriere des voyages.
MEMOIRE
Sur fancienne geographic historiqiie dc la Grece ,
Par M. Roux de Rocheli.e,
Lu a la Societe de Geographic dans sa s6ance gen^rale
du 4 avril i834.
Si nous parcourons les descriptions geographiques
d'un pays a diverses epoques, nous eprouvons, en pas-
sant d'un siecle a lautre, le meme interet de curiosite
qu'un voyageur qui visitesuccessivement plusieurs con-
trees. Frappes d'objets nouveaux et inattendus, nous
reconnaissons a peine les lieux qui nous avaient occupes;
les memes noms s'y retrouvent par intervalle; mais le
spectacle de la nature et des hommes a change.
( ^39 )
Ces mutations s'expliquent souvent par la conquete ,
sou vent par la seule influence desprogres cle la societe;
et la Grece ancienne oflre particulierement ce dernier
phenomene. Letat civil des nations s'y perfection ne :
dies ont leur enfance, leur maturile : 'es hommes ar-
raches a la vie sauvage ou aux occupations des simples
pasteurs, se groupent autour de ditferens chefs : les
cabanes succedent aux tentes, les cites auxhameaux,
les lois ecrites aux usages et aux traditions; les tribus
deviennent un peuple, et leurs territoires reunis for-
nient des empires.
Le temps ou la Grece commence a se peupler de co-
lonies egyptiennes et pheniciennes aniionce a lEurope
I'aurore de la civilisation ; mais elle ne brille encore que
sur quelques points. Le royaunie d'Argosse fonde; ceux
d'Arcadie, de Sicyone, de Corinthe, d'Athenes, de La-
cedenione rasseniblent les peuples de la Grece en dif-
ferens corps de nations. Tantol la guerre divise leurs
interets et dechire ces Contrees, tantotelles reunissent
leurs forces pour attaquer Troie, et detruire le plus
puissant empire de lAsie. On voit , plus dun siecle
apres , s clever sur les ruines de ces premieres monar-
chies les nombreuses republiques de la Grece : toutes
brillenl par leur courage, et plusieurs par leurs con-
quetes : elles penetrent dans des regions inconnues;
elles en changent les moeurs barbares, et y fondent des
colonies, qui deviennent a leur tour d autres centres de
conquete et de civilisation. C est ainsi que s'etablissent
Olynthe, Amphipolis sur les cotes de Macedoine , Pe-
rynthesur les rives de la Propontide, Byzance sur celles
du Bosphore. La guerre, par ses desastres ou par ses
victoires, conduit d'autres colonies sur les rivages de
la Sicile, et sur ceux de I'ltalie nicridionale : des Pho-
( 24o)
ceens, chasses de leur patrie,vont fonder Marseille dans
les Gaules; conime des bannis de Phenicie avaient eta-
bli Carthage sur les cotes d'Afrique : les plus illustres
origines des cites du mldi se lient a I'histoire de I'Orient
et surtoul a celle de la Grece.
Arretons-nous an temps ou a fleuri cette grande na-
tion, pour Jeter les yeux sur son territoire. 11 nest pas
remarquable par son etendue; mais chaque nom geogra-
phique y est devenu celebre, depuis les monts Henius,
antique barriere de la Macedoine, jusqu'a I'extremite du
Taygete, qui couvrait le territoire de Lacedeinone.
Nous diviserons en trois grandes parlies cette memo-
rable contree. Au nord du golfe d'Ambracie et de la
chaine du mont OEta , nous placons VEpire et la Thes-
salie, sans faire encore mention de la Macedoine : au
midi de cette ligne de liraites, s'elendent d Occident en
Orient I'Acarnanie, I'Etolie, la Phocide, la Beolie et
I'Attique. Ces contrees ne touchent que par I'isthme de
Corintheau Peloponese; et nous comprenons dans cette
peninsule TAchaie, les territoires de Sicyone et de Co-
rinlhe, I'Elide, I'Arcadie, I'Argolide, la Messenie et la
Laconic.
A I'epoque ou florissait le midi de la Grece, ses re-
gions septentrionalesn'obiinrenlpas la meme celebrite.
Elles prirent souvent part a la defense commune; elles
eurent leurs guerriers; mais la gloire restaaux pays qui
chercherent a-la-fois celle deslettres et celle des armes,
qui surent eriger les monumens de leurs victoires, et
ou les hommes donnerent pendant la paix un nouvel
eclat a la patrie qu'ils avaient sauvee.
La renommee de la Thessalie etait anterieure aux
traditions historiques etremontait aux temps fabuleux.
Les poetes ont peint les beautes champetres des rives
(24i )
dii Peuee et de la vallee de Tenipe : ils ont chante I'O-
lympe ou s'assemblaient les divinites du ciel, le Pinde
consacre aux muses et au dieu de la lyre, le mont OEta,
fameux par lebucher d'Hercule, et les vallees ou il avail
vaincu les centaures; mais si Ion quitte le temps des
demi-dieux pour arriver a I'histoire des hommes, la
Thessalie est oubliee , et les nations y sont encore dans
renfance,quandies peuples du midi de la Grece se sont
agrandis. Les noms de villes qui s'y sont le mieux con-
serves sont ceux de Larisse, de Pheres, de Magnesie, et
d'une cite de Thebes, moins celebre que celle deBeotie.
L'Epire,rEtolie, TAcarnanie eurent, comme la Thessa-
lie , quelque illustration dans les temps heroiques, et la
mylhologie ancienney a rendu plusieurs noms fameux.
L'Acheron , le Oocyte coulaient en Epire : le chene de
Dodone y randait ses oracles : I'Achelous, dompte par
Hercule, avail inonde I'Acarnanie : Meleagre delivra I'E-
tolie des ravages d'un sanglier furieux. La plupart des
traditions qui s'appliquent a ces contrees se nielenl au
plus ancien systeme religieux des Grecs, ou represen-
tent les hommescomme echappant a I'etat sauvage, lut-
tant contre tons les fleaux quitiennenta cette situation,
et proteges par quelques heros, par quelques bienfai-
teurs, superieurs a leurs siecles, el misensuitepar la re-
connaissance au nombre des dieux.
Les prodiges de la fable jellent sur la Phocide un plus
grand eclat : le Parnasse s'eleve au milieu de cette con-
tre'e; la Pythic de Delphes y rend ses oracles; toute cette
terre est sacree, et I'entree de la Phocide est gardee
vers le nord par les Thermopyles. Elatee , Crissa , Ara-
physe, Naupacte, Delphes surtout, occupent dans les
annales historiques ou religieuses de cette contree un
rang remarquable.
( 240
Mais dans quelle pariie de la Grece ne retroiiverons-
nous pas la presence et Taction de ces divinites ! L'Heli-
con, le bois des inuses, la fontaine d'Ascra, les eauxdu
PermessCjdont la poetique renonimee se niele a celle de
Pindare, sontsitues en Beotie;ilsy attestent le sejour
des dieux; et Tliebes , Leuctres, Plalee, Thespies y at-
testent les exploits des heros, Thebes, fameuse par ses
deux sieges et par les malheurs de la famille de La'ius,
Leuclres par les guerres de Lacedemone,Platee et Thes-
pies par la defaite des Perses qui avaient envahi la Grece.
Nous ne parlerons pas encore de Cheronee, ou son
independance expira.
Entrons enfin dans I'Attique, dans ce pays ou sereu-
nirent tous les genres de gloire; il est peu etendu,
peu fertile; mais il renterme Athenes, et cetle ville a
donne an nionde des modeles de tout ce qui peut le
plus honorer la nature humaine. Placee entre Marathon
et Salamine, elle est viclorieuse sur les deux elemens;
lesdieux luidoiventdes temples dignes d'eux; ses poetes
chantent sa gloire, ses orateurs defendent ses droits :
elle est la Inniiere de la Grece; et Timage d'Athenes,
enlouree dune aureole eclataute, resplendit jusqu'a
nous a travers les siecles.
Le Peloponesenousoffreun autre spectacle. L'Achaie,
qui donnera un jour son noni a une iigue fameuse, el
qui se placera a la tete de la Grece pour def'endre sa
liberie niourante, n a pas encore de celebrite : elle oc-
cupe au iiord le versant des niontagnes qui s'abaissent
jusqu'au golfe de Corinthe. Corinlhe, tenant les clefs
de listhme et dominant sur deux mers a-la-fois, com-
mence a recevoir d'Athenes le gout des arts et les mo-
numens dont Rome doit un jour scnrichir. L'Elide, fa-
meuse par ses joux olynipiques, attire a ses fetes toute
( 243 )
la Grece : on y deceriie des couroiiries au eeniecomme
au courage :tous les dieiix y ont leurs temples, tous les
grands hommes leurs statues, tous les arts leur illustra-
tion.
L'Arcadie, contre'e plus champetre, jouit encore de
lobscinite : les peuples s'y bornent a la vie pastorale,
et le bonheur de leur situation est long-temps chante
paries poetes. Les foretsdu mont Menale, les rives du
Ladon et de I'Alphee sont consacres aux choeurs des
nymphes; mais ce pays doit briller a son tour sur la
scene de la Grece. Deux hommes, Epaminodas et Pelo-
pidas abaissent la fortune de Sparte; et la victoire de
Mantinee, qui suitde pres celle de Leuctres, re'pand sur
I Arcadie d'autant plus de gloire que Lacedemone avail
passe pour invincible.
L'Argolide n'est plus, comme au temps de la guerre
de Troie , a la tete des affaires de la Grece. Argos et
Mycenes, Trezene, Hermione, lieux autrefois fameux,
ont garde leur ancienne renommee, et le culte d'Escu-
lape continue d'attirer les peuples a Epidaure; mais la
fortune et la grandeur ont passe a d'autres etats.
La Messenie, deux fois vaincue par Sparte, a perdu
sa puissance : Pylos, Messene, Steniclaros, Methone se
relevent avec peine des desastres qui ont suivi la con-
quete.
L'aucienne rivale d'Athenes, Lacedemone dispose
long-temps des forces du Peloponese; mais quelquefois
sesausteres vertus sont insociables, etl'on admire, sans
vouloir limiter, son systeme politique et sa grandeur.
Le courage des Spariiates est le seiil rempart de leur
cite : ils ont loutes les vertus guerrieres; mais ne cher-
chez sur les bords de I'Eurotas ni les arts ni le com-
merce. Les Lacedemoniens aiment la pauvrete; ils fuient
( 244 )
la contagion des richesses etrangeres, et la guerre seuTe
leur donne des relations avec les autres peuples. Leur
domination tut dure dans la victoire, leur fermete ine-
branlable dans les defailes : ils garderent pendant liuit
cents ans les loisqu'ils avaient recuesde Lycurgue; et,
dans la decadence de la Grece, ils s'obstinerent a sa de'-
fense, tant qu'ils virent briller pour leur pays quelque
lueur d'espoir.
La eelebrite des lies de la Grece renionte, comme
celledu Continent, jusqu'aux siecles heroiques : lesiles
les plusremarquables ont ete consacrees par la naissance
et le sejour de quelque divinite , avant de tomber en par-
tage aux enfansdes hommes.
Le groupe le plus cclebre des iles de I'Archipel est
celui des Cyclades, ainsi nomnie de sa forme circu-
laire. On y remarque Delos, ou Apolion et Diane recu-
rent lejour ;Naxos, ou Ariane fut abandonnee par Bac-
chus; Paros, dont le marbre statuaire fut anime par
Phidias et devint le plus bel ornement des temples,-
Thera, qui s'eleva comme Delos, du fond de la
mer.
Au nord des Cyclades, vous rencontrez Tile d'Eubee,
ou Chalcis n'est separee du continent que par I'etroit
canal del'Euripe; et si vous remontez vers I'Hellespont,
vous voyez 1 ile de Lenmos , autrefois fameuse par le
sejour et les forges de Vulcain.Cette tradition vous rap-
pelle que Lemnos fut ravagee par les feux dun volcan;
I'aspect de I ile en annonce encore I'ancienne existence;
et la fable s'explique ici, comme en dautres occasions,
par un phenomene de la nature.
La Saniothrace , renommee par le culte de Cybele , est
au nord de Lemnos. A 1 Orient et vers la cote d'Asie,
se trouve I'llede Tenedos, ouseretira laflottedes Grecs
( 245 )
avant de revenir surprentlre et detniire Illion. On voit
pres du meme littoral, et en descendant vers leniidi,
Lesbos, patiie de Sapho; Chio, dont les habitans dispu
tent a six autres villes leberceau d'Homere ; Samos,ou
naquit Pylhagore; Cos , egalement illustree par la nais-
sance dHippocrate, ot Rhodes, dont la puissance et
les lois maritimes ont ete celebres.
En suivant vers I'Orient les cotes d'Asie , on alteint
rile de Chypre, oil s'elevent les villes de Paphosetd'A-
mathonte.
La Crete, au midi de Varchipel, vit elever I'enfance
de Jupiter, qui fut confie aux nymphes du mont Ida.
Celte lie est fameuse par son labyrinthe; elle s'est enri-
chie des biens du commerce ; et les lois quelle recutde
Minos assurerent long-temps le bonheur de ses habitans.
A I'extremite de la Laconic, et pres du cap Malee ,
les rochers et le temple de I'lie de Cythere s'elevent au-
dessus des flots, et nous parcourons, en suivant les
cotes occidentales de la Grece, les lies de Zacynthe et
de Cephalenie, celled'Ithaque, qu'illustra la gloire d'U-
lysse, Leucade, ou se terininerent les malheurs de Sa-
pho, et Corcyre, dont les pirates furent long-temps le
fleau des mers, avant qu'un commerce regulier vint les
enrichir.
La condition des iles de la Grece a ete moins va-
riable que celle du continent. Le besoin de parcourir la
iner reglait la profession de la plupart de leurs habitans :
ils se livrerent successivcment a la course, au commerce ;
leurs flottes contribuerent aux victoires navales d'A-
thenes ou de Lacedemone, et leur position les mit plus
long-temps a I'abri des invasions etrangeres.
Mais a Tepoque de la guerre des Perses, cette secu-
rite fut perdue : les nombreuses flottes de Darius et de
( ^46 )
Xerces nienacerent tous les points de I'iirchipel, et les
Perses orcuperent luoinentanenient quelques iles qu'une
defaite leur lit bientot abandonner. Athenes, iorccie de
deveiiir puissance mariliine pour assurer son salut et
celui de la Grece, fit ensuite servir ses forces navales a
son propre aggrandissement : elle conquit la plupart
des iles de la nier Egee , y trouva pour sa marine de
nouvelles ressources, et se niit ainsi en etat de soutenir
centre Lacedenione et ses allies la longue guerre du Pe-
loponese, jusqu'a la f'atale joiirneed'/Egos-Potamos, qui
lui fit perdre I'empire de la Grece.
Ce rapide precis de la situation d une contree si ce-
lebre ne dispense pas sans doute d'entier dans un exa-
nien plus approlondi; niais quelle nation, quelles epo-
ques de lanliquile lurent jamais plus dignes d'occuper
nos pensees! On eprouve quelque charme a etudier la
geographic des lieux tameux. Les noms consacres par
une victoire, par la naissance dun grand honime, par
les monumens des arts, on. par I'immortel eclat des let-
tres, se gravent aisement dans la memoire. La Grece est
la terre classique : elle nous olVre le modele de tout ce
qu'il y a de beau, de grand, dberoique a. iniiter ; niais
si sa gloire est iniperissable , sa puissance tut passagere :
elle ne dura que quelques siecles; et la contree qui avail
attache sur elle les regards du monde ne devjnt plus
qu'une province dun immense empire.
Tout a change dans la situation de la Grece, pendant
le cours de deux mille ans, et depuis les temps de son
ancienne spleiideur jusqu'a I'epoque marquee pour sa
renaissance. Mais les destinees qui lui sont promises au-
iourd hui nous reporlent involontairement a I etude de
ses aiicienncs annales. Les noms de lieu les plus cele-
bres reprennent leur rang sur la carle de la Grece; sa
( =^47 ) '
geographie redevient celle du temps de ses heros; les
actions niemes de ses guerriers niodernes sont souvent
dignes des exploits de ses ancetres.
Telle est ! lieureiise influence qu'exercent de grandes
renommees. La puissance des souvenirs eleve lame, en-
flamme remulalion, force un peuple a s'estimer, a se
relever s'il tut ahattu , et a montrer au monde qu'on
peut etre regenere par les nobles exemples de ses peres^
NOTE
Sur ritineraire de M. Dessahne d'Orbigny clans V A-
merlque meridionale^
M, dOrbigny s'est rendu en 1826 a Buenos- Ayres. De
la, il a visite la province de Corrientes; au sud , il s'est
porte du cote des Pampas. II a visite la Patagonie et ob-
serve cette nation, ses moeurs et ses usages j il a reconnu
que sa taille moyenne ne depassait pas 5 pieds 4 pouces.
Revenu a Buenos-Ayres, il est parti pour la mer du
Sud. II s'est arrete a Valparaiso, Potosi, Arequipa et
Lima, et il a atteint le 11^ degre sud, en visitant tou-
jours la chaine des Cordilleres. II a fait une longue re-
sidence sur le long plateau central, et sejourne au lac
de Tilicaca. G'est la qu'il a observe quantite de monu-
niens Peruviens, dessine les temples, les mines, avec
les sculptures colossales et les bas-reliefs. Au milieu de
ses dessins nombreux, on remarque la montagne elevee
sur le sommet de laquelle elait un ancien lavage d'or,
au temps des Incas , et les travaux taits dans la montagne,
des excavations pratiquees sur les rochers. M. d'Orbi-
gny s'est rendu au pays peu connu de los Moxos, qu il
a parcouru dans tous les sens. G'est de la qui! a fait
( 248 )
quatre ou cinq ascensions aux Cordilleres. Son sejour
sur le grand plateau siiperieur I'a mis dans le cas de re-
cueillir une ioule de documens nouveaux. II a dessine
les nionumens a I^paz, visile Cochabamba , Santa-Cruz
de la Sierra, la province de Moxos et celle des Cliiquitos,
dont la taille est si differente de celle des Pataorons.
puisque leur stature nioyenne est de 4 pieds 9 ponces;
Mato-Grosso et la riviere du Paraguay, enfin la riviere
de Madera, I'un des principaux affluens de I'Amazone.
Lesobjets materiels qu'il arapportessont nombreux :
ce sont des armes, des etoffes, des outils, des instru-
mens, des costumes, etc.; une foule de documens, ecrits
historiques et statistiques, recueillis chez les cures, dont
quelques-uns d un temps posterieur de peu a la con-
quete. On remarque, entre autres, des documens de
1543 ; le testament dun des conquerans, date de i54i
ou 1669, renfermant des details tout a-fait curieux.
M. d Orbigny a aussi rapporte de tres anciens livres
espagnols, imprimesen Amerique,et d'uneassezgrande
rarete; beaucwip de statistiques originales; enCn des
antiques, des vases, des poteries et des momies peru-
viennes. En un mot, il a parcouru les parties du Haut
Perou ou de la rcpublique de Bolivia qui etaient incon-
nues. Plusieurs des monumens decrits dans Garcilassose
reconnaissent dans ses dessins ; mais il en existe aussi
beaucoup dont on ne connaiss.iit pas I'existence.
M. d'Orbigny a vu beaucoup de pierres de taille de
839 metres de longueur.
Son journal, ecrit avec le plus grand soin , et dune
etendue considerable, est rempli d'observations geogra-
phiques, de descriptions de moeurs et usages, et de
nombreux vocabulaires, disposes dans un ordre com-
mode pour en faire la comparaison. Mais ce qui ajoute
( -^^9)
un tres grand prix a cet important voyage, c'est une
collection de cent cinquante a deux cents feuilles de to-
pographic, sur iesquelles sont figures ses routes et iti-
neraires, toutes avec une echelle , et orientees. propres
a la composition d une belle carle a grands points. Les
montagnes y sont etudiees , ainsi que tous les cours
d eau , avec heaucoup de details. II faut ajouter que ce
voyageur a rapporte une immense collection d'histoire
naturelle. Ce voyage , qui embrasse I'espace compris
entre le 1 1' degre de latitude sud et le 43" , a dure huit
ans , et merite a M. d Orbigny la reconnaissance du
nionde savant.
JOMARD.
A Monsieur le secretaire de la Societe roy ale
de Geographie de Paris.
Societe royale geographique de Londres.
Regent's street n" 2r,le 12 avril i834.
P/Ionsieur,
J'ai Vhonneur, au nom de notre Societe , de vous ac-
cuser la reception, il y a quelques mois , dune serie,
en trois volumes in-4'', des Memoires publics par la So-
ciete royale de Geograpliie de Paris, et doffrir a cette
savante Compagnie nos plus vifs remercimens pour
cette marque d'obligeance et d'attention envers une
plusjeune association.
Cette reponse eiit ele faite plus tot si les livres ne fus-
sent arrives sans etre accompagnes d'aucune lettre, ce
qui nous laissait ignorer a qui nous etions redevables
de re precieux envoi.
Je dois a mon tour prier la Societe ; ovale de Geo
18
( a5o )
graphic ile Paris d'accepter en echaiige une collection
de notre journal; non que nous le considerions comnie
egal en merite, maisparce que nous desirous saisir tons
les moyens en notre pouvoir de vous exprimer notre
gratitude pour votre obligeancc et votre courtoisie. Je
suisegaleinent charge par IeCons«il de notre Societe d'of-
t'rir a votre Coninagnie un exeniplaire dune carte d'Ar-
nienieque nousavons derniercment publiee, et quiaete,
comme le porte son litre, en partie construite sur des
reconnaissances nouvelles , et en partie redigt-e d'apres
les plus recentesautorites, par son auteur le colonel W.
Monteith, du corps des ingenieurs de la compagnie des
Indes Orientales, et qui a long-temps reside en Perse.
Notre Conseil sera heureux de voir se continuer uu
systeme de niutuel echange de publications si favora-
blenient commence entre les deux Societes ; et je serai
personnellement fort heureux aussi d'etre I'interme-
diaire des relations ulterieures.
J'ai I'honneur d'etre, monsieur, voire tres obeissant
serviteur.
A. Maconochie ,
Capitaiiie de vjiisseau de In mnrine royale
• britannique, et secretaire de la Society
royale geograpliique de Londres.
( 201 )
TROISIEME SECTION.
ACTES DE LA SOCI^TE.
RAPPORTS.
Prix destine a la decouverte la plus impoHante, e« i83i.
La commission chargee de prendre connaissance des
principaux voyages qui peuvent concourir au pcix an-
nuel destine a la decouverte la plus iniportante , a d'a-
bord porte son attention sur les deux expeditions ma-
ritimes les plus saillantes parnii celles qui se rapportent
a I'annee i83i. Elle s'est occupee ensuite des explora-
tions principales faites pendant ce nienie temps dans I'in-
terieur des continens. Apres un examen attentifdes do-
cumens parvenus en France jusqu'a ce jour, elle a dA
placer au premier rang les dernieres decouvertes du ca-
pitaine J. Ross au nord de I'Amerique. Graces a I'expe-
rience consommee de cet officier intrepide, et a la con-
stance inebranlable qui la fait triompher d'une situation
perilleuse, sans exemple dans les annales de la naviga-
tion (pour emprunter les termes de I'illustre secretaire
de I'amiraute anglaise), nous coniiaissons aujourd'hui
line nouvelle partie du littoral ame'ricain a I'ouest du de-
troit du Prince-Regent, jusqu'a un point situe sous le
70" parallele, et qui nest distant que de 5o lieuesdu cap
Turnagain : cette portion du continent a recti le nom de
Boothia, de celui de Felix Booth, le promoteur gene-
i8.
( =^5a )
reux de rexpeclition a qui Ion iloit rarmemenl dii na-
vire la Victoire. Nous avons aussi connaissance d'une
grande presqii'ile, de I isihine eleve qui la ratiache a la
terre-fernie , de plusieurs bons ports, et de nombre
d'lles, de lacs et de rivieres. Enfin , nous avons la certi-
tude que le continent americain s'etend de ce cote jus-
qu'au y4' de<^re latitude nord , an nord-oiiest de I'entree
<lu Prince-Regent.
Nous devons encore a ce memorable vova<re une riche
collection d'observations sur les phenonienes magne-
tiques, sur la composition du sol , et sur les productions
vegetales dos con trees polaires.
La commission centrale, en consideration du service
que celte expedition a rendu aux sciences geographi-
ques, et regrettant toutefois de n'avoir pas eu a sa dis-
position les iiiateriaux qui en auraient pu laire appre-
cier toute liniportance, a decide quune mepaille d'or
serait decernee en seance publique au capitaine John
Ross, de la marine royale d'Angieterre. Ses braves coni-
pagnons de voyage, et notamuient le Commattfler Ross
son neveu, ont pris part a ses fatigues, a ses perils, a
ses heroiques soullrances.Ils UK'ritentde s'associer a sa
gloire et de partager notre reconnaissance.
L'cxpedition qui nous a paru nieriter ensuite d'etre
citee !e plus honorablement, est le voyage fait dans
I'ocean antarctiqv.e par le capitaine Biscoe, aussi de la
marine d'Angieterre. Apres les decouvertes du capitaine
C^ook en 1772, de I'Anglais G. Smith et du capitnine
russe Beiinghausen en 1819, du capitaine Weddell en
r822 et du capitaine Forbes en 1829, il n"y avait phu
lieu de croire a 1 existence d un continent austral; ce-
pendant , a la premiere annonce du resullat du voyage
( 2S3 )
du capitaine Biscoe en i8i3<) et i83i, il fiit encoro
question des grandes terres australes , ettacees de[)uis
long-temps cie la carte du globe. Toutetois, en redui-
sant a leur valeur les nouvelles observations, il est juste
de reconnaitre que le capitaine Biscoe a beaucoup
ajoute a nos connaissances sur la mer polaire australe
en faisant connaitre I'existence des terres de Graham et
d'Enderby, et en determinant avec exactitude Icur po-
sition geographique; decouvertes qui ont deja ete ap-
preciees par la societe geographique de Lonc'res, ainsi
que par un de nos plus savans navigateurs trancais.
Aussi, quoique M. Biscoe ne se soit pas approche du
pole autant que le capitaine Weddell et qu'il n ait pas
depasse de beaucoup le point extreme de la navigation
du capitaine russe, comme il a determine des terres qui
leur avaient echappe, la conmiission a decerne a M. le
capitaine John Biscoe une mention tres honorable.
Unedes explorations con tinentales qui ont Tixeensuite
I'altention de la commission , est celle de Victor Ja(que-
mont en Asie. Nous aurions vivement desire de posse-
der les resullats scientifiques du voyage de noire infor«
tune compatriote, en iHSo et i8^i, dans le ll.iut-Indos-
tan, le Thibet, le Peridjab et le royaume de Ivachemire.
Mais il n'a paru encore que sa correspondance, et nous
ignorons s'il existe des observations et materiaux geo-
graphiques suffisans pour fixer la position des points
jusqu ici imparFaitement connus. II nest pas douteux
qu'avec le credit dont i! jouissait dans le Pendjab, et
les Tares qualites qui le distinguaient , il eut reussi a
franchir plusieurs parlies inconnues du llaut-Himalaya,
et nous devons deplorer la perte d'un voyageur si ha-
bile, enleve a la science a la fleur de 1 age. En conse-
( 254 )
quence, la commission a decide que le voyage de Victor
Jacquemont serait cite avec distinction.
Plus heureux, M. Dessalines dOrbigny revientapres
huit ans d absence, charge dune abondante moisson de
decouvertes et de docuniens nouveaux, recueillis dans
des pays qui fixent depuis long-temps les regards des
geographes. Personne n'avait encore apporte des obser-
vations aussi precises sur la Patagonie et la race remar-
quable qui I'habite; M. d'Orbigny la explore avec fruit.
Plus tard, il en a faitautant des provinces de Chiquitos
et de Moxos. De ce dernier pays, il a gravi et franchi
plusieurs fois la pente orienlale des oordillieres; il a vi-
sile, decrit et figure le grand plateau central; explore
lefameux lac deTiticaca; dessine les temples eleves dans
les lies , et d'autres monuniens dune antique civilisation
peruvienne, a peine connus des historiens, et qui n'a-
vaient pas encore ete figures; reuni 60 vocabulaires ;
recueilli des manuscrits espagnols du temps de la con-
quete, de nomhreux objets d'art et d'economie domes-
tique des natifs, formant une veritable collection ethno-
graphique des anciens indigenes, eclairee par les usages
subsistans des habitans actuels du Haut Perou; note
la hauteur des lieux, et enfin rapporte une longue serie
de reconnaissances , de details topographiques et d'iti-
neraires suivis, qui, appuyes sur les points de la cote
connus avec exactitude, ferontles materiaux dune carte
embrassant 27 provinceset presque entierement neuve,
surtout poui' les pays des Moxos et des Chiquitos. Un
resultat geographique assez saillantserala determination
de pres de 80 rivieres, h rectification totale du cours
de plusieurs d'entre elles etie redressement de plusieurs
erreurs graves qui deparent nos cartes les plus recentes,
La surface des pays que M. d'Orbigny a parcourus et
( 255 )
explores avec line Constance infatigable, est plus que
double decellede la Fiance et leuretendue en longueur,
de plus de 32 degres de latitude: dans ce vaste espace,
il est peu de points d ou il n'ait rapporle quelque fait
nouveau soil en geographic, soit en liistoire naturelle.
Mais conuue c'est en i832 qu'il a fait ses principales
decouvertes, la commission reserve tons ses droits
pour I'anne'e prochaine. En attendant, la commission
a decide que le voyage de M. d'Orbigny serait cite avec
distinction.
A I'egard du dernier voyage fait dans I'interieur de
la Guyane par M. Leprieur, aceompagne de M. Adam
de Bauve, avec le but de remonter lOyapock, et de sc
porter aux sources du Maroni , conune c'est apres i83it
que M. Leprieur a atteint les sources de lOyapock, el
en a determine la position , la commission reserve aussi
ses droits, et elle le felicite ici de son zele, de ses loua-
bles efforts, et de ses premiers succes. On lira tout-a-
riieure un exlrait de sa relation.
3i mars i8'?4.
d'Avezac. Roux.
J. d'Urville, JoMABn, rapporteur:
J.-B. Eyries.
RAPPORT
Sur tin Memoire relntif au nivellement dune partie
du cours de la riviere de la f'esle.
Messieurs ,
Vous avez nonmie une commission , composee de
MM. Dumont d'Urville, Daussy et moi , pour vous.
rendrecompte dun Memoire adresse a la Societe pour
le concours ouvert sur le nivellement hydrographique
( 256 )
tie la France ; cette commission m'a charge de vous faire
le rapport suivant. Le Memoire soumis a notre examen
offre le nivellement geometrique de la partie du cours
de la riviere de la Vesle comprise en Ire Reims et son
embouchure dans I'Aisne ; il porte pour epigraphe : « La
« Riviere de la Vesle, pour etre utile a la prosperite de
• ['Industrie manut'acturiere et coinmerciale de la ville
■ de Reims, a besoin d etre canalisee. »
L'auteur de ce Memoire expose que le projet d eta-
hlir la navigation dans la riviere de la Vesle, depuis
Reims jusqu'a I'Aisne, fut concu sous Henri III; que,
repris sous le regne de Henri IV, il recut un commen-
cement d'execution dont il existe encore de nos jours
des traces pres de la petite ville de Braisne.
A diverses epoques du siecle dernier cette idee fut
reproduite par des particuiiers, mais toujours infruc-
tueusement.
En i8o3, la jonction navigable de Reims a I'Aisne
tixa de nouveau I'attention du gouvernement; mais sa
bienveillance pour une entreprise aussi utile a une de
nos principales villes manufacturieres ne tut que pas-
sagere.
L'auteur indique ensuite tous les avantages qui re-
sulteraient de I'etablissement de ce canal, tant sous le
rapport de 1 industrie manulacturiere en grande activite
sur tout le cours de la Vesle, et principalemeni dans la
ville de Reims et ses environs, que par le changement
favorable que son ouverture produirait dans une vallee
mare'cageuse en quclques points, dont il assainirait les
terrains, augmenterait leur valeur et en transporterait
les riches produits.
Get expose succinct niontre sufBsamment dans quel
but ce nivellement a ete entrepris : son execution nous
( 2^7 )
parait avoir rempli completement, sous le rapport clir
I'exactitude, I'objet quel'auteur avail en vue. L'instru-
ment dont il a fait usage est un niveau a bulle d'air de
Lenoir, dont la bonne conslruclion a perrnis d'obtenir
des rayons de 200 a 3oo metres de longueur, ce qui
donne i 5o metres pour le coup de niveau avant , et pa-
reille distance pour le coup de niveau arriere. II parait
neanmoins que, dans certains cas , ces rayons out pu
etre prolonges sans inconvenient avec le meme instru-
ment, puisque dans ce nivellemcnt nous trouvons de»
piquets qui sont espaces de 35o a 400 metres , et que
les deux derniers le sont meme de 1,200 metres; I'au-
teur ne dit pas que, dans ces cas particuliers, il ait fait
usage dun autre instrument.
Le cours de la Vesle offre un developpement de
5o,ooo metres depuis Reims jusqu'a I'Aisne.
Le nombre des piquets du nivellement est de 162 :
leurs distances reciproques ont ete chainees avec soin
et presque regulierement fixees a 3oo metres. Sur ces
162 reperes de cotes de nivellement, on en compte 17
qui peuvent servir, soit a la verification de cette ope-
ration si cela devenait necessaire, soit a faire entrer ce
nivellement isole dans le systeme general du nivelle-
ment de la France. Ces reperes sont etablis I'un a I'em-
bouchure de la Vesle, un autre au pont de Fisnies, et
les quinze autres aux moulins qui sont places sur le
cours de cette riviere.
L'ensemble de I'operation est presente dans trois ta-
bleaux :
Le premier offre la pente de chaque biez des mou-
lins de la riviere de la Vesle , depuis Reims jusqu'a son
emboucbure dans I'Aisne pres de Cond*^-; la pente to-
tale des biez est de 17 metres, 646.
( 258 )
Le deuxieme doiine le deveioppenienl de cette m^me
portion de la vallee de la Vesle ( developpement que
nous avons dit etre de 5o,ooo metres ), avec la longueur
des biez des nioulins et la hauteur des chutes d'eau : la
iiatiteur totale de ces chutes est de i8 metres,o8i.
Le troisieme tableau renfernie I'indication des or-
donnees de chaque piquet du nivellement en long de
la riviere de la Vesle, sur le meme developpement de
5o,ooo metres.
II resulte de ce nivellement que le niveau des eaux
de la Vesle, pris aux ponts de Reims, est eleve, au-
dessus de rembouchure de cette riviere, de 35 met., 727,
Ce chiffre represente la reunion des chutes des niou-
lins avec la pente totale des biez dont les valeurs sont
inentionnees ci-dessus. On trouve egalement que la
pente moyenne par metre des eaux de la Vesle, depuis
Reims jusqu'a I'Aisne, est de o met., 00071.
Enfin , le Memoireest acconipagne du profil graphi-
qm; du terrain et de la riviere; lequel profil est dresse
a I'echelle du 5oo,ooo ""e pour les longueurs, et a celle
du 5,000 "'* pour les hauteurs.
Ce travail reunit loutes les conditions demandees dans
le concours : I'etendue du nivellement depasse la limite
du minimum que Ion a cru devoir fixer dans le pro-
gramme; les moyens d'execution sont indiques suffi-
samment, et les resultals offrent le caractere de I'exac-
titude qu'impose ce genre de determination.
D'apres ces considerations , votre commission , mes-
sieurs , a I'honneiir de vous proposer de decerner a
I'auteur du Memoire une medaille d'or de la valeur de
cent francs.
Lc 7 mars i 834.
P. Daussy, d'Urville.
CoRABOEUF, rapporteur ;
PROGRAMME DES PRIX.
I. PRIX ANNUEL
POUR LA DECOUVERTE I.A PLUS IMPORTANTE.
Medaille iTor de la ualeur dc i, ooo francs.
La So'ciete de Geographic offre une medaille d'or de
la valeur de mille francs au voyageur qui aura fait, en
geographic, pendani le cours de lannee i832, \i\decoii-
verte jugee la plus importante parmi celles dont la So-
ciete aura eu connaissance; il recevra , en outre, le litre
de Correspondant perpetuel , s'il est etranger, ou celui
de Membre, s'il est Francais, etil jouira de tous les avan-
tages qui sont attaches a ces litres.
A defaut de decouvertede cctte espece, une medaille
d'or du prix de cinq cenls francs sera decernee au
voyageur qui aura adresse pendant le meme temps a la
Societe les notions ou les communications les plus neuves
et les plus utiles aux progres de la science. II sera porte
de droit, s'il est etranger, sur la liste des candidats pour
la place de correspondant.
II. PRIX FONDE
PAR S. A. R. I.E DUC DORLEANS.
Medaille dor de la valeur de 2,000 francs.
S. A. R. le due d'Orleans offre un prix de deux mille
francs au navigateur ou au voyageur dont les travaux
( 26o )
gcographiques uuiont procure, dans le cours de i834
ft i835, la decouverte la plus utile a I'agriculture , a
I'industrie ou a riuimanite. S. A. ayant bien vouiu char-
ger la Sociele de geographic de decerner ce prix, la
Societe s'attachera de preference aux voyages accom-
pagnes d itiiieraires exacts ou d'ohservations geographi-
ques.
III. PRIX D'ENCOURAGEMENT
POUR I,F.S DECODVERTES E\ AFRIQUE.
Vo)agc aux lieux conniis sous le noin de Marawi.
Medaille d'or de la valeur de 2,5oo/r. (i)
La Societe offre une soniine de deux mille francs, et
un anonynie celle de cinq cents francs pour scrvir a
fonder un prix d'encouragement en faveur du premier
voyageur qui sera parvenu jusqu'au lieu designe sur les
cartes d'Afrique sous le noin de Marawi ^ et qu'on croit
tiitue vers leSa" degre de longitude orienlale, et vers le
lo" parallelc sud. II s'elforcera de reconnaitre quelque
parlie du cours du fleuve appele LoJJih, qui, dit-on ,
coule vers ce parallele, et descend, dans la direction
S.-E. , du revers de la grande chaine transversale d'ou
sort le Nil Blanc. II recherchera s'il existe quelque
communication entre le Loffih et les eaux courantes
ou sta<rnanles desijjnees sur les cartes sous le noni de
Marawi.
On desire que le voyageur fixe d'unemaniere certaine
la position des lieux qu'il aura visiles, el qu'il doniie
i) Voy. page a68.
( -^6 1 }
une relation de son voyjige, et les niateriaux d uiie carJe
exacte sur laquelle sera trace son itineraire; cju'il decrive
autant que possible le cliniat, les montagnes, les acci-
dens du sol, en un mot, la geographic physique des
con trees qu'il aura parcourues , et qu il recueilie des
renseignemens sur les montagnes et les contrees envi-
ronnantes.
11 observera la population , les nioeurs et les usages
des hahitans , les principales especes d'animaux et pro-
ductions du pays ,• enfin i! essaiera de former des voca-
bulaires des differentes nations.
IV. PRIX UENCOURAGEMENT POUR UN VOYAGE DE DK-
COUVERTES DANS LINTERIEUR DE LA GUYANE.
MedatUe dor de la valeur de y ^noo Jr'ancs.
Reconnaitre les parties inconnues de la Guyane fran-
caise, determiner la position des sources du fleuve
Maroni, et etendre ces lecherches aussi loin qu'iI sera
possible, a I'ouest, dans la direction du deuxien.e paral-
lele de latitude nord , et en suivant la ligne de partage
des eaux entre les Guyanes et le Bresil.
Le voyageur fixera les positions geographiques et le
niveau des principaux points, d apres les nieilleures me-
thodes , et rapportera les elemens d'une carte neuve el
exacte.
La Sociele desire qu'il puisse recueillir des vocabu-
laires chez les diverses peuplades,
Le prix sera decerne dans la premiere asserablee ge-
nerate de I'an i835.
La relation devra etre deposee au bureau de la Com-
mission centrale au plus tard le 3i decembre i834-
( 262 )
V. HISTOIRE MATHBMATIQUE ET CHITIQUB DES MESURES
U£ DEGRES.
Medaille (Tor de la valeitr de 600 francs.
Tracer I'histoire mathematique et critique de toutes
les operations qui ont ete executees depuis la renais-
sance deslettres en Europe pour mesurer des degres des
meridiens terrestres et des degres de paralleles a I'e-
quateur.
Presenter les resultats de ces operations de nianiere
a faire connaitre les liniites des erreurs ou des incerti-
tudes dont ils pourraient etre affectes.
Deduire les consequences qui derivent de ces resul-
tats, relativenient a la determination de la figure du
globe terrestre, et a la valeur precise des mesures itine-
raires geographiques les plus usitees pour la construc-
tion des cartes.
Ce prix sera decerne dans la premiere assemblee ge-
nerale de i835.
Les memoires devront etre deposes au bureau de la
Commission cenlrale au plus tard le 3i decembre i834-
VI. ANTIQUITES AMERICAINES.
Medaille d'or de la valeur de 1 ^^00 francs.
La Societe offre une medaille d'or de la valeur de
2,400 fr. a celui qui aura le mieux rempli les conditions
suivantes :
On demande une description , plus complete et plus
exacte que celles qu'on possede, des ruines de I'ancienne
cite de Palenque, situees au N.-O. du village de Santo-
( a63 )
Domingo Palenque, pres la riviere du Blicol , dans I'Etat
de Chiapa de lancien royaume de Guaiimala et desi-
gnees sous le iioni de Casas de Piedras dans le rapport
du capilaine Antonio del Rio , adresse au roi d'Espagne
en 178^ (i). L'auteur donnera les vues pittoresques des
monuniens avee les plans, les coupes et les principaux
details des sculptures. (2)
Les rapports qui paraissent exister entre ces nionu-
mens et plusieurs autres de Guatinjala et du Yucatan
font desirer que l'auteur examine , s'il est possible, I'an-
tique Ulallan, pres de Santa-Cruz del Quiche, province
de Solola (3), Tancienne t'orteresse de Mixco et plusieurs
autres semblables, les mines de Copin , dans I'Etat
d'Honduras (4), celles de I'llePeten, dans la la 'una de
Itza , sur les limites de Chiapa , Yucatan et Verapaz; les
anciens balimens places dans le Yucatan et a vingtJieues
au sud de Merida , entre Mora-y-Ticul et la ville de No-
cacab (5) ; enfin , les edifices du voisinage de la ville de
Mani, pres de la riviere Lagartos. (6)
(1) Foy. Description of the ruins of nn ancient city discovered
near Palenque, in the kingdom of Guatemala, in Spanish America;
translated from the original manuscript report of captain don Anto-
nio del Rio. London , 1822 , in-4°.
(2) II est a desirer qu'il soil fait des fouilles pour connaitre la des-
tination de galeries souterraines pratiquees sous les edifices, et pour
constater I'existence des aqueducs soutei-rains.
(3) La caverne de Tibulca , pr^s de Copan , est soutenue par des
colonnes.
(4) On compare les restes d'Utatlan, pour leur masse et leur gran-
deur, a tout ce que le plateau de Couzco et le Mexique offrent de
plus grand, et Ton preteud que le palais du roi a 728 pas g^ome-
triques sur SyC.
(r>) L'un de ces bitimer.s a , dit-on , 600 pieds de face.
(6) Ces derniers etaient encore habites par un prince iudien .i I'e-
poque de la conqudte.
( 264 )
On recherchera les bas-reliefs qui represententrado-
ration d une croix , tel que celui qui est grave dans I'ou-
vrage fait d'apres del Rio.
11 importerait de reconnaitrel'analogiequiregne entre
ces divers edifices, regardes comme les ouvrages d un
nienie art et dun meme peuple.
Sous Ic rapport geographique , la Societe demande
surtoul : i" des cartes particulieres des cantons ou ces
ruines sont situees, accompagnees de plans topographi-
ques : ces cartes doivent etre construites d'apres des
nietho(ies exactes; 2° la hauteur absolue des principaux
points au-dessus de la mer; 3° des remarques sur I'etat
physique et les productions du pays.
La Societe demande aussi des recherches sur les tia-
ditions relatives a I'ancien peuple auquel est attrihuee
la construction de ces monumens , avec des observa-
tions sur les moeurs et les coutumes des indigenes, et
des vocabulaires des anciens idiomes. On examinera spe-
cialement ce que rapportent les traditions du pays sur
I'ase de ces edifices , et Ion recherchera s'il est bien
prouve que les figures dessinees avec une cerlaine cor-
rection sont anlerieures a la conquete.
Enfin I'auteur recucillera tout ce qu'oii sait sur le
Votan ou Wodan des Chiapanais, personnage compare
a Odin et a Boudda.
Ce prix sera decerne dans la premiere assend^lee gene-
rale de 1 836.
Les memoires, cartes etdessins devront etre deposes
au bureau de la Commission centrale, au plus tard le
3 1 decembre i835.
( 265 )
GEOGRAPHIE DE LA FRANCE.
PRIX ANNVELS.
VII, VIII. DESCRIPTION niYSIQUE d'oNE PARTIE QUEL-
CONQUE DU TERRITOIRE FRANCAIS.
Medaille cTor de la valeur de ^oo francs et une autre de
la valeur de ^oo francs.
La Societe met au concours le sujet de prix suivant :
« Description physique dune partie quelconque du
« territoire francais, formant une region naturelle.»
La Societe indique , comnie exemples , les regions
suivantes : les Cevennes proprenient dites, les Vosges,
les Corbieres, le Morvan , les bassins de I'Adour, de la
Charente, du Cher, du Tarn,ie Delta du Rhone, la cote-
basse entre les Sables-d'OIonne et Marennes, la Solo-
gne, enfin toute contree de la France distingue'e par iin
caractere physique particulier.
Les rapports physiques et moraux de Ihoinme , lors-
qu'ils donnent lieu a des observations nouvelles, doi-
vent etre rattaches a la description de la region.
Les memoires doivent etre accompagnes d'une carte
qui indique les hauteurs trigonometriques ou barome-
triques des points principaux des montagnes , ainsi que
la pente et la vitesse des principales rivieres , et les li-
mites de diverses vesfetations.
Les memoires devront etre remis au bureau de la
Commission centrale, au plus tard le 3r decembre i834.
IX-XVIII. NIVELLEMENT DES FLEUVES ET DES RIVIERES
DE FRANCE.
Dix medailles d^or de la valeur de loo francs cJiacune.
La Societe offre une medaille d'or d'encouragement a
celui qui aura procure le nivellenicnt geonietrique dune
'.9
( 266 )
parlie notable du cours des fleuves etdes principales ri-
vieres de la France.
La Societe n'admettra pas au concours les copies des
nivellemens deja deposes dans les archives des ponts-
et-chaussees et des aulres administrations publiques.
Dix niedailles seront consacrees chaque annee a cette
destination, et seront decerneesdans hi premiere asseni-
blee generale. Le minimum del'espace a niveler est fixe a
dix lieues devingt-cinq au degre.
Chaque medaille sera de la valeur de lOo francs.
Les memoires et profils,accompagnes des cotes et des
elemens des calculs , devront etre deposes au bureau de
la Commission centrale, au plus tard le 3 1 decembre 1 834-
XIX, XX. NIVELLEMENS BAROMETRIQDES.
Deux niedailles (Tor de la valeur de i oo francs chacune.
Deux medailles d'encouragement sont offertes aux
auteurs des nivellemens barometriques les plus etendus
et les plus exacts, faits sur les lignes de partage des
eaux des grands bassins de la France.
Ces medailles, de la valeur de loo francs chacune,
seront decernees dans la premiere asseniblee generale
annuelle de i835.
Les memoires et profils,accompagnes des cotes etdes
elemens des calculs, devront etre deposes au bureau de
la Commission centrale, au plus tard le 3 1 decembre i834.
Les fonds de ces deux niedailles sont faits par M. Peb-
ROT , membrede la Societe.
Total , viNGT PRIX de la valeur de dix-sept .mille
NEUF CENTS FRANCS , indcpendammeut des souscriptions
qui sont ouverles au bureau de la Societe ( rue de I'Uni-
versite, n" ^3) et chez le tresorier (rue de Seine, n° 6),
pour les decouveiies en Jfrique {vuy. page 4)»
( 267 )
CONDITIONS GENERALES DES CONCOURS.
La Societe desire que les memoires soient ecrits en
francais ou en lalin ^ cependant elle laisse aux concur-
rens la facnlte d'ecrire leurs ouvrages en anglais, en
ilalien , en espagnol ou en portugais.
Tons les memoires envoyes auconcours doiventetre
ecrits dune maniere lisible.
L'auteur ne doit point se nommer, ni sur le litre, ni
dans le corps de I'ouvrage.
Tous ies memoires doivent etre accompagnes d'une
devise et dun billet cachete , sur lequel cette devise se
irouvera repete'e , et qui contiendra, dans linterieur, le
nom de l'auteur et son adresse.
Les memoires resteront deposes dans les archives de la
Societe, mais il sera lihre aux auteurs den Jaire tirer des
copies.
Chaque personne qui deposera un memoire pour le
Goncours est invitee a retirer un recepisse.
Tous les membres de la Societe peuvent concourir,
excepte ceux qui sent membres de la Commission cen-
tral9.
Tout ce qui est adresse a la Societe doit etre envoye
franc de port , et sous le convert de M. le president, a
Paris, rue de lUniversite, n" 2 3.
Paris, le 4 avril i834.
( 268 )
PROCES-VERBAUX DES SEANCES.
Assemblee generate du t\ avril i834-
La Societe de Geographic a tenu sa premiere assem-
ble'e generale pour I'annee i834, le vendredi 4 «ivril ,
dans una des salles de I'Hotel-de-Ville. M. Jomard , I'uii
des vice-presidens, ouvre la seance en I'absence de
M. le due Decazes.
M. de Larenaudiere , secretaire de la Societe , donne
lecture du proces-verbal de la derniere seance generale;
la redaction en est adoptee.
M. le secretaire communique la liste des divers ou-
vrages deposes sur le bureau et offerts a la Societe.
(Voir p. 273.)
M. Jomard communique aussi les cartes manuscrites
du voyage de M. Leprieur, dans I'interieur de la Guyana ;,
una nouvelle carte du Groenland, renfermant les de-
couvertes du capitaine Graah , avec partie de I'lslande
et de la cote orientale d Amerique, et le dessin dun
bateau Groenlandais conduit par des femmes; il presante
I'introduction du voyage du capitaine Graah, et ses in-
structions traduites par M. de La Roquette , consul a
Elseneur et membra de la Societe.
L'assemblee vote des remercimens aux auteurs , et or-
donne le depot de leurs ouvrages dans la bibliotheque
de la Societe.
M. le president proclame les noms des candidats pre-
sentes pour etre admis dans la Societe. (Voir p. 273.)
M. le colonel Coraboeuf , au nom d'une commission
( 269)
speciale, composee de MM. Coraboeuf, Daussy et d'Ur-
ville, fait un rapport sur le concours relatif a I'hydro-
wraphie des rivieres de la France. L'assemblee adopte
les conclusions de ce rapport, et decerni; une medaille
d'or de la valeur de cent francs a M. Maic Jodot, ar-
cliilecie - ini^enieur, pour son Memoire sur le nivelle-
ment de la vallee de la Vesle.
M. Jomard, au nom d'un« comniission speciale desi-
gnee pour s'occuper du concours relatif au prix annuel,
el composee de MM. d'Avezac, d'Urville, Eyries, Jo-
mard el Roux de Rochelle, presente un rapport sur la
decouverte la plus iuiportante faite dans I'annee i83i.
La comniission appelle d'abord lattontion de l'assem-
blee sur I'expedition maritime du capitaine John Ross
dans les mers polaires, et sur celle du capitaine John
Biscoe dans I'Ocean anlarcliqne. Le rapporteur pass'; en-
suile en revue les expeditions principales faites a la
meme epoque dans linterieur des continens , notam-
ment les voyages de MM. Victor Jacqueinont dans le
Haut-Indostan , Dessalines d'Orbigny dans lAmerique
meridionale , et Leprieur dans rinterieur de la Guyane.
Apres un examen attentif des documens parvenus en
France jusqu'a ce jour, la commission place au premier
rang les dernieres decouvertes du capitaine Ross au
nord de I'Amerique; et , en consideration des services
que cette expedition a rendus anx sciences geographi-
ques, regrettant toutefois de n'avoir pas a sa di'jposition
tous les materiaux qui en auraient pu fiire apprecier
encore mieux I'importance , la commission dc'( erne une
grande medaille d'or au capitaine John Ross, de la ma-
rine royale d'Angleterre ; elle accordeune mention tre?
honorable au capitaine John Biscoe, aussi de la marine
royale d'Angleterre . pour son voyage de decouvertes
C 270 )
dans rOceanantarclique. Enfin , elle decide que le voyage
de Victor Jacquemont vl celui de M. Dessalincs d'Orbi-
gny seront cites avec distinction. Les droits de cc der-
uier sunt reserves pour leconcours de i832.
M. le president donne lecture du programme du prix
fonde par S. A. 11. le ducd'Orleans , pour erre decorne
par la Societe an voyageur ou au navigateur dont les
iravaux geographiques auront procure la decouverte la
plus utile a I'agriculture, a liiidustrie ou a rhunianite.
M. le president annonce que la Societe remet au con-
cours les deux sujets de prix relaiifs aux nntiqultes ainc-
rieaines et a Vhistoire mathematiqnc et critique dcs me-
sures de di^gre^ le premier pour I'annee i83(), le second
pour I'aiinee i835 : il rappelle ensuite le prix annuel
pour la decouverte la plus imporiante; les prix pour les
decouverles en Afrique el dans Tinterieur de la Guyane;
el enfin les diverses medailles offcrtes pour la geogra-
phie de la France, et pour le nivellemenl de ses (leuves
et rivieres.
M. de Larenaudi^re lit , pour M. Leprieur. una notice
sur son voyage dans I'interieur de la Guyane, et prin-
cipalenieiit aux sources de 1 Oyapock et du Jary.
M. Fontanier lit une notice sur une excursion quil
a faito cliez les Lesgliis, dans le cours de son dernier
voyage en Orient : il donne, sur I'aspect du pays et sur
les moeurs et usages des Iiabitans, des details qui fixent
I'attention de rassemblee.
L'assend)lc'e ecoute aussi avec interet la lecture d'un
Memoire de M. lloux de Hochelle, sur I'ancicnne geo-
graphic liistorique dc la Gruce.
La Societe, aux termes de son reglemcnt, procede au
i-enouvellcmcnt des membres de son bureau pour I'an-
( 271 )
nee i834-i835 , et a la nominuliun de deux membres de
la Comrnission centrale.
M. le president proclame ainsl le resultat du scrulin :
President, M. le cotnte de Montalivet, pair de France^
!M. le baron Walkcnaer, nienibre
de rinstitut.
M. de Larenaudiere.
C M. le baron de Ladoiicette.
Scriitateurs . . .( M. Isambert, niembre de la cham-
bre des Deputes.
Secretaire, M. Denaix, colonel au corps royal d etat-
major.
M. Micbaux , voyageur- naturaliste, et M. Delcros,
ebef d'escadron au corps royal d'etat-major, soiit nonv-
Mios membres de la commission centrale.
La seance est levee a dix beures et demie.
Seance du i8 april i834.
Le proces- verbal de la derniere seance est lu et adopte.
MM. Walckenaer et Michaux, nommes le preiiiior
vice-president , et le second, membre de la Commission
ceft^rale, dans la derniere assemblee generate , adres-
sent leurs remercimens a ia Socieie.
La Societe royale Geograpbique de Londres , remercie
celle de Paris de I'envoi quelle lui a fait de la collection
de ses Memoires et elle lui adresse ses propres publica-
tions moins conime un echange que comme un temoi-
gnage du desir de voir continuer des relations si heu-
reusement commenrees. La Societe de Londres joint aux
trois premiers volumes de son journal une carte dune
( 272 )
partie tie la Georgie, ile rArinenie et de plusieiirs pro-
vinces de la Peise, par le colonel W. Monteith.
M. le docteur Guyetand, secretaire perpeiuel de la So-
ciete d'l'-mulation du Jura , adresse le conipte lendu cles
travaux de cette Societe et le'nioigne le desir de recevoir
en echange, le Bulletin de la Societe de Geographic. Ac-
corde.
M. le president communique de la part de I'auteur
un extrait de la relation manuscrite du voyage de M. de
La Pylaie, en i83o, i83i, i832et i833, dan^ les de-
partemens de rouest de la France. Get extrait . qui con-
cerne specialement les villes de Rochefort (du Morbi-
han) et de Vannes, est renvoye an comite da l.ullctin.
M. Warden communique de nouveaux renseigne-
mens sur la colonic de Liberia; une note sur la prison
d'Elat dAuburn, ainsi qu'une analyse du Pilolc de la
cote desdeux Ameriquespar Edmund Blunt. — Renvoi au
comite du bulletin.
M. Roux de Rochellc lit un menioiie sur la reco nais-
sance des cotes orientales d'Ainerique.
A I'occasion du prix annuel , un niembre propose de
caracteriser desormais les distinctions acrord('es par la
Societe en decernant desmedailles de trois ordres, toutes
(lu nieme module, et differant seu'.rnient par le metal
(or, argent ou bronze). Deux ant res dogres de distinc-
tion existeraient encore dans la mcniion honorable et la
citation. Cette proposition est renvoyee a une commis-
sion composee de MM. le baron Coslaz, dAveza ; et
dUrville.
( -73 )
MEMBRES ADMIS DANS LA SOCIETE.
Seance generate du 4 avril i834.
S. E. Boghos-Bey, ministre du commerce et des af-
faires etrangeres en Egypte.
M. Etem-Bey, gouverneur de I'Ecole Poly technique
egyptienne au Caire.
M. Artyn Effendy, sous-directeur de I'Ecole Poly-
technique egyptienne au Caire.
M. AuDOT, libraire.
M. le baron Pichon.
Seance clii i8 avril.
M, le docteur Alfrkd Reumont, d'Aix-la-Chapelle.
M. le docteur Woerl , de Fi'ibourg.
OUVRAGES OFFERTS A LA SOCIETE.
Seance generale du 4 airil.
Par M. le ministre de la marine : Voyage de la cor-
vette la Coquille. — Botanique, i4, i5 et \&^' livraisons.
— Voyage de la corvette l' Astrolabe : Observations de
physique, broch. in-4°. — Zoologie, 27, 28 et 29"= livr.,
et le 4° vol. de texte. — Botanique, 9"= livraison.
Par I'Academie imperiale des sciences de Saint-Peters-
bourg : Memoires de cette acadeniie, tome xi de la 5" se-
( 274 )
lie, et les livraisuns 2 a 6 des Sciences raathematiques,
physiques et naturelles ; les 1" et 3" livraisons des Sciences
poHliques, Histoire et Philologie ; les 2= a 5= livraisons
(les Menioires des savans etrangers, et le recueil des actes
tie la seance publique de I'Academie , tenue le 29 de-
cembre 1829.
Par M. Albert-Montemont : Bibliotheque universelle
ties voyages , I'j" livr. , in-S" ( Voyages de Krusenstern
et de Kotzebue).
Par M. Arthus Bertrand : Voyages en Arable , conte-
nant la description des parties du Hedjaz, regardees
comma sacrees par les Musulmans ; celle des villes de la
Mecque et de Medine, etc., traduits de I'anglais de
J.-L. Burchardt, par M. J.-B. Eyries. Tome i , in-S". —
Excursion en Grece, pendant I'occupation de I'annee
francaise en Moree dans les annees 1882 et i833, par
M. J.-L. Lacour. I vol. in-S".
Par M. Bottin : Statistique annuelle de Vindustrie (Al-
inanachdii commerce) /jo«/-i834. i vol. in 8°.
Seance du 18 avril i834.
Par la Societe royale Geographique de Londres : Les
3 premiers volumes de son journal, et une carte d^une
partie de la Georgie, de VArmcnie et de plusiews pro-
vinces dela Verse, par le colonel W. Monteitb.4feuilles.
Par M. Ainswoith : An account of the caves oj Bally-
hunian^ county of Kerry; with some mineralogical details.
Dublin, 1834. I vol. in-S".
Par M. Gide : Nouvelles Annates des voyages, cahier
de mars.
Par la Societe asiatique : Cahier de mars de son
Journal.
( 275 )
Par M. Bajot : ^nriales maritimeset coloniahs,cahiers
de mars et avril.
Par M. de Moleon : Becueil de la Societe Poljtech-
nique , cahier de mars.
Par M. le capitaine d'Urville : 2 5° et 16^ livraisons du
Voyage pittoresque aiitour du monde.
Par la Societe d'asriculture d'Ans[ouleme : Annates
de cette Societe , cahiers de Janvier et fevrier.
Par MM. les directeurs : Plusieurs numeros du jour-
nal rinstitut et le premier numero de I'Echo du monde
savant.
MORT
DE RICHARD LANDER.
Lander remoiitait !e Niger sur une clialoupe, se ren-
dant a 3oo milles de distance dans une petite ile qu'il
avail achetee du roi de Benin, et ou il avait ctabli un
comptoir. II etait deja a loo milles, lorsqu'une decharge
presque a bout porlant liree de derriere un taillis, tua
trois homnies sur la chaloupe, et en blessa quatre au-
tres. M. Lander fut un de ceux qui recurent les plus
graves blessures. Au nieme moment la chaloupe tou-
chait terre; il descendit pour sechapper, mais cinq ou
six canots de guerre se mettant aussitot a sapoursuite,
nourrirent pendant cinq ou six heures un feu tres vif
contre les siens, et ne s'arreterent que lorsque la nuit
les leur eut fait perdre de vue. M. Lander, qui avait ete
blesse de nouveau, a declare avant de mourir qu'il avait
reconnu les cunots pour etre de Bonny, de Brats et de
Benin; ainsi Ion peut croire que des negriers oud'autres
( ^76)
Europeens se sont rendus coupables de cet odieux as-
sassinat. Le parlement d'Angleterre a demande une se-
vere enquete a ce sujet. Tout annonce que des negriers,
craignant de perdre Ics avantages que leur infame com-
merce leurfaisait trouversur cette cote, ont tue Lander,
homme simple et genereux, et qui portait la civilisation
jusqu'aux sources du Niger.
AVIS.
.La carte du cours de I'Oyapock et dune partie de
celui dn Jary, jointc a la relation de M. Leprieur, pa-
raitra avec le prochain numero.
BULLETIN
1)E LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE.
MAI i834.
PREMIERE SECTION.
MEMOIRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPlPORTS.
RELATION
D'un voyage dans Pinterieiir de VAfrique septentrionale,
Par Hhaggy Ebn-el-Dyn el-Eghouathy.
M. William B. Hodgson , qui etait attache nu consulat general
des 6tatsUnis a Alger pendant la mission de M. William Shaler, et
qui succeda en 1828 a ce dernier, dans ses fonctions, profita de sa
position pour recueillir des lumieres sur les dialectes berbers de
cette portion de I'Afrique, et sur I'etendue des contrees ou domine
ce langage. Le HAggy Ebn-el-Uyn El-Eghouathy fut I'un des infor-
niateurs auxquels il eut recours.
Ebn-el-Dyn, dont le nom est arabe et signiiie le fih de la Foi est
natifou originaiie de la ville d'El-Eghouath , d'ou lui est venu le
surnom d'El-Egliouathy; et il a accompli le h/iagg ou saint pelerir.age.
qui lui a valu le titre respecle de Hhdfjgj ou pelerin.
A la prieredu consul americain . le hhaggy ecrivit une relation de
ses voyages et lui en fit present elle formait un caliier de qnafnrze
20
( =^78)
pages in 4°. d'une ^crituie qui n'etait ni belle ni correcte, execute*
dans le caract^re maghrebj, c'est-a-dire occidental ou africain.
M. Hodgson la traduite en anglais, et sa version a ete imprimee a
Londres par les soins du Comitd des Traductions orientales, en un fas-
cicule de 3a pages in-8° , qui comprend aussi une liste des noins de
lieux et de tribus mentionues dans la relation, et leur transcription
en caracteres arabes d'apres I'ortbographe d'Ebu-el-Djn.
Des extraits etendus en ont ct^ donnes dans le cabier de juillet
l832 de la North-American Keview de Philadelpliie, et fid^lement
traduits dans le cabier de novembre suivant des NouveUes Annales
des -voyages.
A mon tour j'ai fait une version francaise d'apres celle de
M. Hodgson , en retablissant dans le texte les noms propres confor-
mement a I'orthograpbe arabe de I'auteur original , bien quelle ne
soil point toujours d'une exactitude satisfaisante. J'y ai joint quelques
annotations et remarques geographiques.
La date mise a la fin de I'ecrit est de la seconde lune de Reha' de
I'aunee 1242 , c'est-a-dire du mois de decembre i8a6; mais d'un
autre c6te, une expedition militaire effectuee deux ans auparavant,
et mentionnee a I'article A'jn-Mddhy , est rapportee a ranneei243,
qui a commence en juillet 1827, cequi supposerail la relation ecrite
a la fin de 1829 : il y a done erreur de chiffre k I'un ou I'autre de
ces millesimes, peut-dtre a tons deux.
*A
RELATION DU VOYAGE.
Au nom d'AUah le compatissant, le misericordieux !
Les benedictions et le salutd'Allah sur notre seigneur
Mohhammed, sa famille et ses compagnons !
Get ecrit contient une description de diverses con-
trees et villes, par le Hh&gg Ebn-el-Dyn el-Eghouathy.
El-Eghoudlh.
El Eghouath est une grande ville, et elle estentoure'e
dune muraille avec des fortifications. Elle a quatre por-
( 279 )
tes, et qualre niosquees. Le laiigage des habitans est
arabe, et ils portent des veteniens de laine. Les femmes
d'un rang eleve ne quittent jamais leurs maisons; mais
les autres paraissent dans les rues. II n'y a point de
bains dans cette ville. Le pays produit des fruits en
abondance, tels que dattes, figues, raisins, coings, gre-
nades et poires.
La ville d'El-Egbouath est divisee en deux portions
par la riviere Emzy qui coule au travers. Cette riviere
est bien connue dans toute cette region. Les habitans
eux-menies sont divises en deux partis, appeles el-Khe-
laf et Aouled-el-Serghyn, lesquels sont souvent en
ofuerre Tun avec I'autre. La cause d'hostilite entre eux
est generalement le refus de I'un deux de se soumettre
au Scheykh.
A Test d'El-Eghouath sont les mines d'une ville, dont
les prirtces, a une epoque eloignee, etaient chretiens.
II y a aujourd'hui beaucoup d'inscriptions que Ton
peut voir parnii ces mines. sf-t
La ville d'El-Eghouath est batie principalement d'ar-
gile ou de terre ; il y a cependant quelques maisons
construites de mortier et de pierres. Les mosquees n'ont
point de minarets j etil n'y a , dans la ville, ni place de
marche determinee, ni bain.
La monnaie courante est celle d'El-Gezayr et de Fes.
Le commerce y est florissant et la culture y est soignee.
Les scorpions et la pesle n'approchent point de la ville,
parce quelle a ete fondee sous «n favorable horoscope.
Cette region est fort raontueuse, et dans le nord il y a
uue grande montagne rocheuse.
Tegemout.
A la distance d une journee de route au nmd d'El-
^o.
( 28o )
I'lgliouath est situe le village cle Tegeniout. Leshabitans
(le ce village sont clivises en deux partis et n'ont point
de chef ou goiiverneur. lis se battent entre eux conime
font les gens d'El-Eghouath. Les maisons sont baties
en pierre et en terre. Au nord de Tcgemout est une
ties liaute montagne appelee Gebel-el- A'lnour, 11 y a
aussi une montagne de sel aupres du GebeI-el-A'mour>
^ j« Mddhy.
Cette villa est situee a I'ouest de Tegemout. Elle est
entouree de nmrailles seniblables a celles de Thablos,
et a deux portes inimense'nient fortes. Le hhakeni ou
gouverneur, dont le nom est Ould-Tagyn, a environ
cent esclaves, et un tresor rempli. II y a deuxans (i243
de I'Hegire) son frere assenibia des troupes dans le
dessein de marcher contre Ouahran et de s'emparer de
ses tresors. Tous les Arabes de la contree environnantc
accoururent sous son etendard; et ils partirent avec des
tambours et des fifres; et ils etaient munis de chevaux
et de tentes. Omm-A'sskara toniba entre leurs mains,
et ils s'avancerent sur Ouahran. Le bey de Ouahran,
pour defaire cette armee, distribua de Targent parnii les
Arabes de I'expedition, ce qui les detourna de soutenir
Ould-Tagyn, Icjuel fut ensuite tuc dans une attaque
de ses troupes par le bey.
Son frere est maintenant hhakem de A'yn Madhy. 11
a un bain au milieu de la ville; et entreautres precieux
objets, il possede des selles et des harnais brodes en
or. II a de plus une grande quantite de livres.
Les femmes de A'yn-Madhy paraissent dans les mar-
ches.
La distance de cette ville a I'egard d'El-Eghouath est
d'une journee de route.
( ^8t )
Gehel-el'A' mour.
Cest une tres haute montagne, qui contient une ceii-
taine de sources d'eau. II en sort une grande riviere^
que Ton appelle El-Kliayr et qui est universellement
connue. La terre est cuUivee sur cette montagne, et
elle fournit toute espece de hois de charpente. Sa lon-
gueur et sa largeur peuvent ctre estimees chacune a
deux journees de niarche. Les naJifs elevent des cha-
meauxj et quelques-uiis soignent du betail et des trou-
peaux. lis sontbons cavaliers; leur langage est Tarabe;
et ils ne sont point gouverues par un soltlian.
Le nombredeshommes amies dans leGebel-el-A'niour
est d'environ six mille. A yn-Madhy en a environ trois
cents; et El-Eghouath , niille.
Itinera ire d'El-Eghondt/i a Metslyli dans le Ouddy
Mozdb.
D'El-Eghouath a Ras el Scha'b, un jour. II n'y a point
d'eau en cet endroit, et !e pays produit le terebinthe
(el botbm).
De Has el Scha'b a Safil el Fayadh i! y a une journe'e
de route. On n'y trouve point d'eau. De la a El-Khadem,
oil croit le terebinthe, une journee. De la a El Lefhhat,
qui sont deux grandes niontagnes rocheuses. De El-Let-
hhat on gagne Metsiyli.
MetslyU.
Ce nest point une ville ierniee, et il n'y a d'eau que
celle fournie par les niouiins. Le sol de la contree n'est
point une plaine de sable, niais il est niontueux et < on
vert de cailloux aigus qui coupent romnie un coutoau.
( 282 )
II y croit des dattes , et il y tonihe queUjiiefois de la
pluie. Les langages des habitans sont rarabeetleberbei
Us moment des chameaux et sont amies d'lin fusil e,
d'une epee. A Test de Metslyli sont les hauteurs dii
Ouady Mozab.
Ouddy Mozab.
Dans ce ouady il y a six villes et villages; la plus
grande est Ghardeyah. Cette vllle contient deux nii!le
quatre cents maisons, y compris les mosquees. L'cau
est entierement fournie par des puits. EUe est enlourec
d'une iriuraille, et elle a una g ande place de roarclie,
deux tours et deux portes. Elle n'est point sous le gou-
vernement d'un sol than. Les habitans pailent la langue
bei'bere.
En matiere de foi, les Mozabys ditTerenl des Arai)es.
Us se refusent a reverer les compagrions de I'Envoye
d' Allah (sur lequel soient la benediction et le salut).
Us sont opposes aux Sunnites, mais ils s'accordent pour
la doctrine avec les Ouahabys, les Persans, et les habi-
tans de O'man et de Maskat. Tons ces gens sont ]\loa-
tazelytcs ou dissidens. Les Mozabys sont fort temperans;
ils ne fument du tabac ni ne boivent du vin. Le ouady
produit des dattes.
Les indigenes de tout ce ssalihra sont familiers avec
I'ait de fabriquer la poudie a tirer. Le procede est ce-
lui-ci : la terre ou le niorlier des villes ruinees est re-
cueilli; cette terre, qui est naturellement silee, est niise
dans un grand vase , et Ion verse de I'eau dessus, de la
nienie facon qu on traile les cendres dans la fabrication
du savon.L'eau ainsi obtenue est mise a bouillir jusqu'a
ce qu'elle acquiere de la consistance. On en iiiele alors
urie livre avec quatre livres de soufre et quatre livres
( 283 )
de charbon de bois de laurier-rose. Ces ingrediens sont
melanges ensemble pendant I'espace de trois heures,et
alors la poudreest faite.
II y a dans le Ssahhra une mine conside'rable de
plomb, d'ou les Arabes en tirent des quantites pour
vendre, Cettemine n'est dans le domaine d'aucune tribu
en particulier. Elle est situee a lest des Aoulad Nayl , et
est appele Gebel-el-Ressass.
Itiiieraire de Metslyli a El- Qalyah.
De Metslyli vous allez a ei-Tsemad en une journee. II
s'y trouve beaucoup de puits , et le pays produit du hhaljd
(spartum?); vous arrivez de la a el-Scharef, qui a iin
puits profond de vingt edzra (coudees). Les deux autres
stations entre el-Scharef et el-Qalya'h sont el-Sa'adeny
et Ouady el-Scbaheb. A la premiere il y a un puits, et
le hhalfd y croit. A la seconde il n'y a point d'eau.
El-Qalyd h.
Ce village est situeau milieu des sables, et il n'a point
d'eau autre que celle qui est tiree des puits. Lesbabitans
sont appeles Scha'anber, et ils parlent la langue arabe;
ils montent des cbameaux, vu qu'ils n'ont point de
cbevaux; leurs arnies sont des epees, des mousquets et
des lances: leurs vetemens sont de laine. Le villaofe n'a
point de murailles; les femmes sont comme les Bedouins:
ellesvont aux puits, puisent del'eau, et I'apportent sur
leur dos, dans des outres. Le pays produit des dattes et
du hhalfd.
Ouerqelah.
De el-Qalya'b a Ouerqelah il ya une distance deciri({
jours de marcbe. Ouerqelah est une tres grande ville,
entouree dune mnraille avec de nombreuses portes.
( 284 )
Elleest gouvernee par un solthan, etestdivisec entre trois
tiibusdont lesnoinssont Beny-Ouaqyn, Beny-Ibrahyni,
et Beny-Sesyn. Le langage des babitans est le berber.
Le pays abonde en datliers.
Ouerqelab a d'abondantes sources d'eau; elles soiit
obtenues de la maniere suivante: un puits est creuse a
une profondeur de cent soixante dix edzra\ ce qui at-
teint I'eau douce. Le puits se remplit inimediatenu^nt
d'eau, et devient un ruisseau.
Les babitans sont appeles Erouagbab; leur couleur
est noire, et leurs veleniens sont de laiue et de coton.
Tout le pays est une sebkhah de sel. Dans la juridiction
de Ouerqelab est un Ueu appele el-Scbatb ; et dun mi-
naret dans la viDe, I'oeil peut decouvrir les villages sui-
vans , Rouysat , A'gegeb et Meqousab. Au sud de Ouer-
qelali, le pays offre une etendue de sable non interroni-
pue, se poursuivant jusqu'au Ber el-A'byd (pays des
esclaves).
Itineraire de El-Qnlydh a El-Toudt.
De El-Qalya'ha Aoulan il y a un jour de route. II y a
des puits a celle station, el le pays produit des daltes.
Le village est dans le Ssabbra , et est bati en terre. Le
peuple parlc la languearabe.
De Aoulan a El-Ahbmar. II y a la un puits d'eau,
d'environ trente edzrd de profondeur.
De el Ahbmar a Byr el-Nabl, un jour.
De Byr el-Nabl a Byr el Lefa'ayab , un jour.
De Byr el-Le(a ayab a Byr el *Tarqy, un jour.
De Byr el Tarqy a Byr el-Zerq , un jour.
De Byr el Zerq a Byr Bedenian , un jour.
De Byr Bedeman a Temymoun , un jour.
( 285 )
Temjmoiin.
Temymoun est une {jrande ville; niais elle n'a point
de murailles comme celles qu'on eleve pour la defense ,
parce que les maisons sont loutes attenantes. Elle a une
grande place de marche. II y a des dattes ainsi que d'au-
tres fruits, et une grande abondance d'eau. II y a ega-
lement une couche d'alun rouge. Le dialecte des indi-
genes est le herber. Leurs moutons, comme ceux des
Soudan , sont couverts de poils , semblables a ceux des
chevres, et d'une couleur noire; et ils ont de longues
queues. Les clievaux sont nombreux. II y a au centre de
la ville de I'eau qui y est amenee par des conduits. II s'y
tient un marche ou Ton echange, en grandes quantiles ,
des esclaves et de la poudre dor ; ce dernier objet est
■vendu au poids par mitsqdl et oiiqyeh. La couleur des
habilans est diverse, blanche, rouge et noire; etilss'ha-
billent de vetemens de laine et de coton, et d'un say
noir. Les maisons de Temymoun sont baties d'argiie ou
de terre; et il y a quatre mosquees. Les habitans pos-
sedent de grands troupeaux, et les Touareq font le com-
merce avec eux. Ge sont de vrais musulmans : ils prient,
font des aumones, €t lisent le qoran.
Au sud de Temymoun est un village appele Aouqe-
rout, et un autre nomme Aoulef.
Anulef.
C'est la principale ville de I'oasis d'El-Touat , et sa ju-
ridiclion s'etend sur tout le pays. Le solthan a des sol-
dats, et les tambours battent devant lui. II a le pouvoir
d'infliger des peines et d'emprisonner. II possede des
chtvaux et des esclaves, mais il n'a point de tresor
d'argent.
( 286 )
Aoulefa des murailles qui rentourent, lesquelles sont
construites en argile et en briques. Le pays abonde eii
eau et en dattes , et les habitans possedent beaiicoup
d'esclaves.
Teyth.
All sud de Aoulef est un village appele Teyth, et a.
I'ouest un autre nomme Atouat-el-Hhenne.Cette con tree
produit du hhenne et des dattes en abondance.Les murs
des maisons sont d'argile. II y a des mosquees a Atoiiaf,
et les habitans jeunent , prient, lisent le qoran , et font
des auniones. Us sont sous le gfouvernement du solthan
d'Aoulef. Les indigenes parlentla langue berbere.
En-Ssdlahh.
Pres de Atouat est En-Ssalahh, au sud 5 alors vienl
le pays des Soudan, plus au sud, lequel est frequenh-
pour la traite des esclaves et de la poudre d'or.
QordraJi.
Cette oasis est a environ une journee de route de Te-
mymoun. Elle comprend a-peu -pres vingt villages , qui
sont tous alimentes d'eau par des conduits. Les indi •
genes s'habillent dun say noir et de vetemens de laine.
Leiirlangage est le berber, et leur couleur est noiratre.
La nionnaie courante est celle de Fes.
A I'ouest de Qorarah, et a la distance de vingt joui -
nees de route , est le pays appelti El-Schenqylhah.
El-Schetiqythah.
Les gens de ce pays elevent des chaineaux , et leur
principale nourriture est le lait et la chair de ces ani-
inaux. Le ble et I'orge leur sont inconnus.
Le qoran est beaucoup lu par les liabitaiis de Sclieii-
' ( ^87 )
qytah ; les fenimes aussi le lisent. On y peut voir tel
homme lisant a sa mere et a sa femme ; et Ion y est pas-
sionne pour les rapports sociaiix. Schenqytah n'a point
de solthan. Les fruits qu'on y recueille sent les dattes,
le lotus , et quelque peu de melons.
Tenbokto est voisin de Schenqytah , vers le sud et
Test; a I'ouest on trouve le Bahhr-Malehh , ou la nier
salee. Quand les indigenes de Schenqyteh partent pour
le pelerinage de la Mekke, ou ils passent a travers les
Soudan, ce qui est le plus court, ou par le Ouady-
Dera'h dans le Maraksch.
P^oyage da Beled-el-SoiuIdn a V oasis d'El- Toudt.
Les kafelahs ou caravanes ne partent du pays des Sou-
dan qu'au commencement de I'annee. A cette epoque , les
marchands se reunissent en grand nombre, dans le but
de voyager ensemble et de se garantir des Touareq, qui
ne dependent d'aucun gouvernement.
Pour former la ligne de marche, les chameaux sont
places les uns a la suite des autres, en files de deux cents
de prolondeur. G'est ainsi qu'on traverse le desert.
Les articles de commerce exportes du pays des Sou-
dan sont des esclaves et de la poudrc d'or, en echange
desquelsTouat etQorarah envoient des soieries , du fer,
des verroteries et autres marchandises analogues.
Itineraire de Ouerqelah a Aqddines.
De Ouerqelah a Sydi-Akhuuylid , il y a unejournee.
Ce dernier est un village au milieu du sable, offrant de
lean et des dattes. Les maisons sont baties d'argile. Les
indigenes parlent la langue arabe. Ils se servent de cha-
njcj'.ux pour monture, et de laine pour la confection de
It'urs vetemens.
( ^«8 )
De Sydi-Akhouylid vous ailez a Hh^sy el-Naqeli, ou
se trouve un puits au milieu d'une sebkliali de sel qui
est bien connue dans ces regions.
De la a A'yn , ou est une source d'eau a la surface du
sol. Tout ce pays est une etendue de sable , oii Ton ne
voit ni pierre, ni montagne autre que des collines de sable.
De la a El-A'aqer, qui est uue colline de sable; et la
station voisine de El A'aqer est El-Thybat.
El-Thybat est un village au milieu du sable, et sans
murailles. II a beaucoup de puits d'eau , et la campagne
produit des dattes et d'autres fruits.
De El-Thybat vous allez a El- Abter, qui est un ouady
desseche ; de la a un grand ouady connu sous le nom de
OuadySouf. Dans ce ouady il y a de nombreux daskeras
ou villages qui peuvent fournir vingt mille homnies, des
chevaux et des ineherrys. Ces jrens vivent de dattes et de
lait de cbameau. Les femmes vont aux places de marche
sans se voiler, et elles se montrent dans les jardins. II se
commet parmi elles beaucoup d'adulteres.
Les habitans de ce district ne sont point soumis a. un
gouverneur, et ils sont continuellement occupes a lever
des troupes et a voler aux Arabes leurs effets. lis pons-
sent leurs ^i^a;j/eAJusqu'au pays de Touareq. Ils parlent
la langue arabe. Ils sont entierement independans , et ne
se sont jamais soumis a un soltlian. Leur commerce se
fait surtout avec Aqdames, ou ils veiident des estlaves ;
et quelques-uns des indigenes font metier de faire le
voyage du pays des Soudan avec des niarchands d'Aq-
dames , a I'effet de chercher des esclaves.
De Ouady-Souf a Aa'mysch il y a une journee de
marche. C'est un village sur les coniins meridionaux du
ouady. Les maisons sont baties en terre et brique, at-
tendu qu'on ne trouve point de pierres en cet endroit.
( 289)
De Aa'mysch a Aqdames, la distance est de huit jours
de route. Le pays intermediaire est un seul desert in-
interronipu. II n'est point frequente par les Arabes 5 il
ne contient point de villages , ne fournit point d'eau, et
nest point varie par des collines ou des pierres. Partout
I'oeil rencontre une etendue de sable. Le chacal , le tigre
el le lion ne viennent point ici , a cause de I'exireme
chaleur et de la soif ; Tautruche et le beqr el ouahhasch
sont les seuls animaux que Ion trouve dans ce desert.
La maniere de chasser I'autruche est la suivante : le
chasseur monte son cheval, pourvu des vivres neces-
saires , et prend avec lui de lean. II chevauclie douce-
ment jusqu'au milieu du jour, instant ou les Autruclies
se rasseniblent en troupes de cent ou plus. Aussitot
qu'elles apercoivent un homme elles s'enfuient. On con-
tinue de les poursuivre pendant quatre heures , ou
Tiioins, jusqua ce que, accablee par la soif et la crainte,
Tautruche commence a se lasser. Le chasseur etant
pourvu d'eau , boit quand il a soif, et finalement, atteint
I'oiseau epuise, dont les entrailles sont deja consumees
par la chaleur. Le chasseur alors le frappe sur la tete,
ce qui I'abat a terre. Descendant de son cheval , le chas-
seur coupe la gorge de I'autruche.
Le chasseur est accompagne par un homme qui porte
ses provisions de vivres et d'eau. Get homme suit les
traces faites sur le sable, jusqu'a ce qu il aitrejoint son
compagnon. lis placent alors I'autruche sur un chameau,
et I'apportent chez eux. Telle est la description d'une
chasse a I'autruche.
jiqdd
mes.
Aqdames est une grande ville , batie d'argile ou de
terre. Le pays aVjonde en dattes. Les habitans parlent
( 290 )
l;i langue berbere , et leur habillemeiit est de laine el
de colon. Leur teint e*t noir; el les femnies ne se nion-
Irent point. 11 y a dans celte villa une grande quantite
d'ulenias et de thalebs. On y tienl un grand niarche ,
mais il n'y a ni bains ni nioulins a manege. Les femmes
broienl le ble dans les maisons. On ne veil point de
bazars dans la ville , et il n'y a, au deliors, aucune
culture.
Aqdames a un grand nombre d'esclaves dont le prix
est d'envii'on 3o duros ( p. esp 22 ). Une mere est eva-
luee au meme prix. La ville est situee au milieu du sable,
et la distance entre elle et El-Toual est de vingt-quatre
journees. Le pays intermediaire est exclusivement oc-
cupe par des Touareq : il n'y a point d'Arabes.
Toudreq.
C'est un peuple puissant. lis ont'le teint fort blanc;
et ils se servent de chameaux pour raonlure. Leur nour-
riture consiste entierement en viande et en lait , car ils
n'ont aucuns grains. Ils s'habillent dun sai de colon
noir, et leurs seroudl ou pantalons sonl pareils a ceux
des Chretiens. Les Touareq prientdebout,el secouvrent
le visage d'un voile ou dune piece de colon. Jamais ils
ne boivent ou ne mangent devant personne. lis font des
srliazies dans le Soudan , et en rapportent des esclaves
et desdenrees. Ceci est une notice complete el detaillee
<]e Touareq.
Mathmathah et ses etwiions.
Mathmathah est un village sur le sommet d'une mon-
tagne , 011 Ion descend par une ouverture. Celte exca-
vation a ele faite en creusant. Les maisons, la-dedans,
sont comme des chambrej et sonl enduiles ou crepies
( 291 )
avec de I'argile. Le langage des habitans est le qobihe;
ce nest ni du berber, ni du turk, ni de I'arabe, c'est
du qobthe.
Qabes est un village au bord de la iner, a environ
deux journees de Mathmuthah. Quand un natif de QA-
bes desire se marier, il s'echappe avec sa pretendue pour
aller a Mathmathah, et c'est la qu'il I'epouse. lis sejour-
nent en cet endroit un an et un mois ; alors ils retour-
nent chez eux.
Gerbeh est a deux journees de Matbmathah, qui est
a I'ouest.
La tribu de Naouayl est aussi a deux journees de
Mathniathali; et apres la tribu de Naouayl est celle de
Mahhamyd, peuple puissant qui habite une grande
chaine de inontagnes, et sur lequel le pascha de Tha-
blos n'a point d'atitorite. lis ont un gouvernement qui
leur est propre, et possedent un grand nombre de
troupes et de chevaux. Entre eux et le pascba de Tha-
blos il y aura guerre continuelle, et il ne pourra jamais
obtenir deux aucun tribut.
Le langage de la tribu de Naouayl est le qobthe. Les
tribus qui occupent les montagnes voisines, de Gharyan,
Ben-Oualyd , Mesellatah et Ghayah , parlent toutes le
nieme dialecte. Les femnies de ces tribus sorlent libre-
ment aux places de marche, et ne sont point voilees.
La principale nourriture de ce peuple consiste en gibier
et en dattes. Leur habillement se compose du khayq et
du siriah ou chemise ; fort peu ont des bernos. Ils por-
tent des scheschias assez grands pour couvrir les yeux.
Depuis Mahhamyd jusqu'a Efzan (Fezzan), la distance
est dun mois de route.
Nous allons relater maintenant les autres choses que
nous avpns vues et trouvees.
( 293 )
Tcqort.
Teqort est une ville de richesses et d'abondance. Le
nays produit des dattes, des figues , des raisins, des
grenades, des ponunes, des ahricots, des peches et d'au-
tres fruits. Le marche de Teqort est tort grand. Cettft
ville est la capitale de ce district, et a juridiction sur
vingt-quatre villages. Elle contient environ quatre cents
inaisons , et elle est ceinte de murailles avec des portes.
Ces murailles sont entourees d'un fosse qui peut etre
compare a un fleuve. II communique avec des sources
d'eau qui toutes s'y dechargent. Sur ce fosse il y a trois
ponts. Les mosquees ont des minarets fort eleves.
II y a a Teqort une race de gens appeles El-Megeha-
ryeh, qui occupent un quartier separe dans la ville. lis
etaient juifs autrefois ; mais pour echapper a la mort
dont ils etaient menaces par les indigenes, ils firent pro-
fession de I'Eslam, et maintenant ils sont lecteurs assidus
du qoran, qu'ils apprennent par coeur. Ils sont encore
distingues par le teint particulier aux juifs; et leurs mai-
sons , comme celles de cette nation, exhalent une odeur
desagreable. Ils ne se marient point avec les Arabes , et
il arrive raremcnt qu'un Arabe prenne femnie chez les
Megeharyeh.
Le gouverneur de Teqort choisit parnii ces gens-la des
scribes et des teneurs de livres ; mais ils ne sont jamais
adniis a la dignile de qadliy ou d imam. lis ont des mos-
quees dans leur quartier, et ils prient aux. lieures le-
gates, hors le jour de gema, qu'ils n'observent point
comme un jour de repos. Ils possedent de grandes ri-
( hessL-s. Leurs femmes sorteut voilees dans les marcbes,
ct conversent entreellesen hebreu, quand ellcs desirent
n'etre pas compi ises. Le gouverneur de Teqort possede
( ^93 )
une grande quantite de chevaux et de selles avcc leurs
harnais brodes en or. On bal le tambour dcvant lui. II
a le pouvoir d'infiiger la peine capitale, de l)ruler les
maisons et de confisquer les biens des coupables.
Dii baiit des minarets de la ville, beaucoup de villages
et de plantations de dattiers peuvent etre apercusdans le
pays environnant. El-Nezlah, Tebesbest , Temys, El-
Moqaryn, El-Mogliayr,et d'autres villes, jusqu'au nom-
bre de vingt-quatre, se voient toiites des minarets de
Teqort. On ne rencontre point ici de pierres ; niais des
sources d'eau y existent en abondance. Le nombre des
troupes qu'on peut lever est de cinq inille honmies. Le
teirit des gens de Teqort est noir,et on les appellc Eroua-
ghah.
Une liqueur appelee el-eqmy est en usage parmi ce
peuple; elle est extraite des branches du dattier, en les
coupant et les pressant. Elles donr)ent un liquide dune
couleur rougeatre et doux comnie du sorbet. On le vend
a la mesure dans les marches.
Les saisons du labour dans ce pays sont octobre et
mai. Aucun Arabe ne vient en ce lieu, a moins que ma-
lade de la fievre. II y a une mine de sel a Teqort , et en
verite tout le pays est une sebkhah de sel.
Ce qui precede est une description de Teqort.
Vile de Gerheh.
Gerbeh est une ile au milieu de la mer, d'environ dix-
huit milles de tour. Cette ile etendue est productive de
divers fruits : olives, raisins, peches, grenades, figues 61
amandes; mais il n'y vient pas de dattes. II y tombe une
grande quantite de pluie. L'ile est divisee en parties se-
parees, et chaque maison a un jardin y altenant. Le
marclie est grand et bien approvisionnej et boauroup
21
( 294 )
tie iiiarclmnds ont des fondones ou iiiajrasins. Gerbeh
depend dii pascha de Tunis, qui nomine le gouverneur
ou Idiakeni.
Les femmes de Gerbeh soitent voilees. Les maisons
sont baties dargile, et quelques-unes en biiques. La
population est composee de plusieurs peuples difterens.
Le district de I'ouest, dont le port est vis-a-vis de Qiibes,
esthabite parun peupleappele Agym,donl le langage est
le berber. lis lisent le qoran, et les doctrines de leur foi
sonl seniblables a celles professees par les Ouehabites
et les Beny-Mozab. Quelques-uns d'entre eux rejettent
A'ly ben Aby-Thaleb (a qui Dieu soit propice). Ces
uOg!nes sont observes par ces gens, mais ils ne les pro-
f'essent pas publiquement , et les caclient plutot. lis ne
prient point en commun avec la secte de Malek; ils ont
des mosquees a eux.
Gerbeh a quatre ports : Agyrn a I'ouest; Gergys a
lest; Mersat-el-Souq au nord ; et Mersatel-Qanlharah
au sud. Les habitans fabriquenl de la poierie, et ils fa-
briquent de la chaux ainsi que de grandes quantites
d'huile qu'ils vendent aux Arabes.
Tribu arahe de Ouerqemah.
Cette tribu est adonnee au vol de grands chemins;
et ils sont soumis au pascha de Tunis.
Qcibes.
De oette ville h Thablos , par terre , il y a six journees
de route.
Derayeh.
Nous decrirons ce pays , celui de Negcd et les A'rab
elOuehab. Dera'yeh est une grande ville avec des mu-
( 295 )
rallies, et detencliie juiv uii nombro considerable de
troupes coniposees d Arab e!-Oiiehab. Cette ville a des
mosqueps ; niais le peuple diffeve , en ses articles de foi ,
des habitans de la Mekke, et ils n'ont point de respect
pour le propbete ni pourses compagnons. lis professent
ne reconuaitre que Dieu seul ; ils ne prient point le pro-
phete et ne lisent point le Delyl el-Rhayrat. S'ils le trou-
vent en la possession de quelqu'un, i!s battent I'indi-
vidu ft brulent le livre. Le tesbehb ou chapelet nest
point tolere; s'il est irouve entre les mains de quelque
personne , celle-ci est punie, iraitee d'idolatre , et exhor-
tee a retourner a Dieu, Ces Arabes sont une puissante
irlbu. Aucun deux ne parle la langue berbere. Leur ha-
))illenient est un qaftban de laine , attacbe avec une cein-
ture de courroies de cuir, et ils nouent autour de leur
tete des nioucboirs de soie teints avec du safran. Cette
leinture est grandenient estimee parnii eiix, et vaut jus-
qu'a vingt-quatre de leurs piastres par iivre. Leur nion-
naie consiste en piastres et sequins qu'ils appellent
meschchds.hes arnies en usage parmi euxsont la lance,
et le genhiah qui se met a celle-ci. Le genbiab est une
lame recourbee d'environ une dzeraa'et deuiie de louir.
et alfdee a couper la lete. Les Arabes appellent. ceir(!
arme asir.
Le prix dun cheval au marcbe est de trente cba-
meaux. Les Arabes appellent leurs clievaux kahhnlyeh ,
comme un objet precieux. Ce sont de beaux animaux ,
qui sont aussi legers que le vent. Us sont niaintenant
fort rares, et ne se trouvent que dans les liaras des
princes en Egypte, en Syrie eta Fes.
Le solthan actuel de Dera'yehestTerky-ould-Ssa'oud.
Son predecesseuretaitSsaoud. La ville est batieen terre,
cbaux et pierres. Quand une expedition guerrierc est
■J. 1.
( ^96 )
proposee , cinquante mille Arabes, ou davantage, se ras-
seinl)lent. Dans cettc contree sont plusieuis peuples
difforens. Quelques-uns sont adorateursdufeu; d'autres
adorent le soleil , et quelques-uns venerent les parties
sexuelles de leurs fenimes et de leurs botes. Que Dieu
les dclivre de cette erreur!
Ces Arabes ne chevauchent pas toujours avec des
sellesj s'il y a a combattre dans les montagnes, ils mon-
tent sans selles; niais ils sen serventdans les plaines, ou
ils vont avec leurs sabres. Qaelques femmes se batten t
ii cote de leurs maris. Ils sont bien pourvus d'arnies.
Le teint de ces gens est rougeatre.
Ce qui precede est un recit de ce que nous avons vu,
ecrit en 1 aunee 1242 , en Rebya' el-Tsany.
EXTRAIT
DU JOUUNAL DES MISSIONS EVANGELIQDES ,
Premiere et deuxi^me livraisons de i834.
De nouveaux renseignemens sur les peuplades de
I'Afrique meridionale se trouvant compris dans les der-
nieres lettres des missionnaires qui explorent ces contrees
si peu connues; nous nous eiiipressons , comme nous
I'avons deja fait, d'en extraire tout ce qui peut concou-
rir aux progres de la geographic.
Le niissionnaire Casalis ecrit de Philippolis le 3i juil-
let i833 que Moshesh chef des Hassoutos ayantentendu
parler des stations de Philippolis et de Kurunian , com-
prit de suite combien de parcils etablissemcns fondes
' ( ^^97 )
dans ses domaines pourraient etie avantageux a ses sii-
jets; decide a employer tous les moyens possibles pour
attirer chez lui les niissionnaires , il remit 200 bceuf's a
quel(jues-uiis de ses serviteurs et leur commanda d'aller
trouver le grand-tnaitre des blancs, afin d'obtenir de liii
en echange de ce troupeau, des /io?n??ies capables d'in-
struire les noirs. Ces hommes ayant ete pilles par les Ko-
rannas revinrent aupres de Moshesh, qui, plus tard
ayant appris qu'un Griqua venu de Philippolis chassait
sur ses terres, le fit venir et apres i'avoir questionne
sur les intentions et les travaux des missionnaires, le
pria de I'aider dans laccomplissement de ses desirs.
Le Griqua aussitot son retour , rapporta ce fait
a M. Kolbe, celui-ci engagea MM. Casalis, Arbousset et
Gosselin a entreprendre cette excursion , ce qu'ils s'em-
presserent d'oxecuter.
En consequence, le 5 juin i833 iis quitterent Philip-
polis avec une seule de leurs voitures; incertains qii'ils
etaient de se fixer pres du roidesBassoutos, ils laisserent
la plus grande partie de leurs bagages et leur seconde
voiture aux soins de M. Kolbe; ils avaienl pour guide
un Griqua habile nomme Adam, connaissant tres bien
le pays, et qui, accompagne de quelques chasseurs a
cheval et de quelques Bechuanas monies sur des boeufs,
partaient pour la chasse de I'antilope. La carte jointe a
cet extrait montre la route suivie par les voyageurs , la
ligne qui I'indique, passe par les Kraals de Ramacau et
de Kugnanane et s'etend de Pliilippolis a Bossiou capi-*
tale des etats de Moshesh , puis de Bossiou a Morija ou
ils fonderent une station; enfin, pour revenir a Philip-
polis chercher le reste de leurs bagages, I'un deux, M.
Casalis suivit la route qui, passant par Popokuan, va re-
joindre la ligne du nord au campement Gnou, et redes-
( 298 ;
rend ilc la a (Liledoii pour remoiiler t^nsuile al'hilipjioli.'..
Les detours fails par les voyageurs onl ete necessiteis
par los difiicultes du sol ci par le manqiic d'eau. Voici
leur itineraire (i) :
Le 5 Juin. Apres avoir voyage 3 heures moitie E.,
nioitie E.S. E. ils camperent pres d un kraal de Griquas
ou Baastaanis, i\ppe\e Divart-rifcr.
Le 6. Obliges dechercher uue parlie de la journee les
chevaux egares pendant la nuit, ils ne niarcherent que
pendant 3 lieures 1/2, direction S. E. et E. S. E. pour ar-
viver a Rooie-Port-Fontein petit kraal abandonne.
Le y. Partis a 9 heures 1/2 et ayant marche E. S.-E.
jusqua II lieures, ils visiterenl une source abondante
appelee Komitjos- Fontein. Usy trouverent quelques noirs
qui y etaient venus ehercher du fourrage pour leurs
bestiaux; 1 un deux portaienl lenonitrancais de / isage.
Apres 20 minutes de lepos, ils niarcherent E. S. E. jus-
qu'a niidi. lis avaietit alors a leur gauche dans la direc-
tion N. N.-E. une montagne haute et ties longue, que
leurs gens esliniaient etrea i4 lieues deux, non loin
de la riviere Riet. A une heure ils passerent Kopjes-
Kraal qui est habite par quelques Bushmen , et an pied
duquel coule une ['etite fontaine dans la direction N.
a I h. 42 m. ils etaient entre trois inonts, dont deux en
forme de dome et I'autre en forme de pain de sume,
remarquables par leur position respective: ils leur donne-
rent le nom de Trois moids. A ah., ayant complelemeut
change de direction pour ehercher de rean,ils suivirent
(i) Les missionnaires ayant appris la laiigiie holliiiidaise , qui est
parlie par les feiiniers de la colonic du Cap tt par les tribus voisines
(le Griquas, de Korannas, etc., peuvent, au nioyen de laditc langiie,
se faire comprendre des iiidigt-nes, soil par cux-mdmcs , soil par des
interprfetes.
( '^-gp )
la ligne S. E. E jusqu a 2 h. 35 m. , et trouverent que le
pays comiiiencait a nionter.
Le 8. De 9 h. a 9 h. aS m., direction S. S. E. — De 9 h.
35 m. a II li. 35 m., E. — De 1 1 h. 35 m. a 12 h. 45 m. ,
E. N. E. — De 1 2 h. 45 ni. a 2 h. 45 m., E. — De 2 h. 5o in.
a 3 h. 25 m., E. — De 3 h. 25 ni. a 3 h. 46 m., N. Cette
deviation de 21 minutes a encore ete necessitee par le
manque d'eau.
A 10 h. 7 in., ils avaient a nne demi-lieue de distance
N. una chaine de coilines qu'Adam, leur guide, nomme
Winter s Port Berg, ou Port d'Hiver. En ineme temps
on apercevait au S. E. dans un eloignement de 6 h.
une montagne qui se terininait en pain de sucre, appelee
Hang-Lip. A 11 h. 35 m.,ils passerent une source de la
riviere Riet coulant N. Une demi-lieure plus lard on
distinguait dans le lointain du cote N. E. une nouvelle
chaine de montagnes dont I'une fut nommee par les
chasseurs Olijn-Fontein Be7g, et qui n'est sans doute
que le prolongement du Hang-Lip. A 1 h. etdemie, cette
men»e chaine senihlait s'etendre IN. et N. N. O. ; a i li.
7 m., ils passerent une seconde source dela ii\iere Riet
cojilant N. E.; et a 3 h. 2j ni. ,ilsatteignirent quelques
coilines assez elevees, quits appelerent les Redout es ,
a cause de leur forme. J^e pays abonde en antilopes et
en lievres.
Le 9. Jour de dimanche, selon leur coutume, les mis-
sionnaires ne voyagerent point.
Le 10. De 8 h. a II h. 12 m. , E. — De 11 h. i5 m. a
12 h. 3o m. , E. N. E. — De I h. a 4 h. i5 m., E.N. E.
A 1 1 h. 25 m., une nouvelle source de la Riet coulant
W. A 2 n. 25 m. cinquieme source de la meme riviere
nieme courant. A 3 h. 6 m., rencontre d'une f'ontainede
fort belle apparence, mais sans eau, qiion appeLs Drooz-
( 3oo )
Fonlein on loiUaine s6i;li<;. A 3 li. 20 in. auUo source
tie la Riet. Ces sources sontsi peu de chose qu'elles ne
merilent point qu'on leur tlonne un noni quant elles
n en ont pas. A 4 li. i5 m. une petite chaine de collines
de fort belle apparence sur la gauche, s etendant N. E.,
elle a ete appelee Sokoa en raisoii de sa ressemblance
avec le fort de re nom. Campement pres d'une source
de la Riet , la plus considerable (ju'on ait rencontree;
elle a le menu; courant que les precedentes, son lit est
profond et argileux, ses rives abondent en canards et
en cailles. On lui a donne le nom de Moie-Spruit (belle
source); quelques monies assez semblables a celles
qu'on ramasse au bord de la mer y ont ete recueillies.
Le pays continue a nionter.
Le 1 1. De 2 h. a 4 h. 4 ni. E. Campement aupres dune
source de la Riet qu'on a nommee Gnou (i) a cau.se de la
nndlitude de ces animaux que Ton trouve dans les en-
virons. Ce jour la on vit des montagnes dans toutes les
directions N. S. E. O. A 5 h. du soir il y eut un orage
avec eclat de !a foudre.
Le 12. De 7 h. 4o m. a 10 h., N. E. — De 1 1 h. 35 ni.
a 3 h. 45 m., entre I'E. et I'E. N. E.
A midi , passage a Shiet-port, petite source de la Riet
(donton n'etait, au dire d'Adam,qu'a 2 h. de marche N.)
Tout pres de la est un Kraal de Bushmen ; quelques hom-
mes et une dizaine de fenunes portant leurs enfans lies
derriere leur dos vienneni voir les voyageurs. Leurs
traits sont entierement defaits par la soutfiance. Les
Bushmen viveiit dans unegrande misereet se nourrissent
presque uniquement de sauterelles. lis sont rahongris,
laids de visage et ressemblenta des spectres : et comme si
(i) Mainmifi're de re.<ipecc des aiuilopes. , 1 j
( 3oi )
ce n etait pas assez de maux, ils se voii^nt geiieralemeiit
mepiises par les autres indigenes du sud de I'Afrique.
Dieu, disent les Bechuanas, ayant voulu creer riiomnie,
fit d'ahord uii singe, puis un Bushmen^ ensuite nous et
enfin les hlanes. Ils parlent la A'ieille langue hottentote
ou namaquoise, langue dure, imparlaite, et dans laquelle,
dit-on, chaque mot se prononce par un claquenient. Les
Bushmen de Shiet-Port demanderent de la graisse pour
se frotter le corps et du tabac dont ils sont fort avides.
En echange ils donnerent deux fleches empoisonnees,
exoellentes, dirent-ils, et qui ont ete envoyes au musee
missionnaire de Paris, (i)
A I h. 9 m., passage dune derniere source de \a Riet
coulant N. Cetait la dixieme vue, elle porte le nom de
Ifoensdag ou Mercredi. A 2 h. 12 m. , on avait sur la
gauche un beau lac d'eau douce, d'un quart de lieue de
largeur sur une demi-lieue de longueur. Un nombre
considerable d'oiseaux se leva lors de I'approche des
voyageurs. Dans les environs, les gnous fourmillaient.
11 faut etre a cheval pour f'aire la chasse a ces aniniaux :
comme toutesles especes d 'antilopes, ils regardent long-
temps le chasseur, le laissent approcher, vont menie
a sa rencontre; mais a une certaine distance, ils se met-
tent a batlre leurs llancs de leur queue, tournent cinq
a six lois en rond au nombre de 10 ou 12, puis prennent
la fuite a la fde en faisant lever sur leurs pas un nuage
de poussiere. Au bout d'un moment ils s'arretent, vous
regardent de nouveau et n'attendent que votre appro-
che pour recommencer leur manege.
Le 1 3. De 10 h. 20 m. a i h. So m., E. N. E. — De 2 h.
(i) Ce musee se compose d'ohjets d'histoire nafurelle, d'armes
de guerre, d'nstensiles, d'oiiiemens , etc.
( 302 )
20 m. a 3 li. , E. Rencontre dun gnoii ((iii venait d'etre
terrasse par un lion : I'animal n etait qua demi devore,
des aigles , des vautours el quelques corbeaux volti-
geaient non loin, prels a se jeter sur ces restes si les
lioinnies de I'escorle ne s'en f'ussent enipares.
Le pays abonde en gnous, en coucous(i)et en gazelles,
il est a reniarquer que ces ditierentes especes se suivent
ordinairenient : on rencontre aussi beaucoup de pin-
cadet(2). La vegetation devient plus Ibrte a niesure qu'on
avance, on ne trouve cependant encore que des arbus-
les,on traverseun espaced'une iieuecarree quiavaitete
brule par les natiuels pour prendre dessauterelles ; bien-
t6tapres,a ah. iT) ni., arrivee au premier Kraal des I5as-
soutos. 11 cotisisteen une trentaine de huttes construiles
au pied dun coteau en forme de terrasse. A lapproche
lies voyag(!urs, les habitans prennentla fuite, el vunt oc-
euper le sommet de leur petite montagne, sur la pointe
de laquelle ils s'accroupissent a la maniere des singes.
Trois Becluianas avaient cependant ete envoyesen avant
pour les rassurerj toutefois deux jeunes gens d'entre
eux arrnes de sagaies vinrent plus tard a la rencontre
de I'expedition, apres avoir ete accueillis amicalement,
ils tnrent renvoyes aupres des leuis , pour raffer-
mir leur courage. Bietitot les sauvages s approclierent,
recurent quelques presens et e« rctour ap|)orterent du
pain et de la biere fails avec du ble cafre. lis se fami-
liariserent si bien que le soir, hommes , femmes et enfans,
tout le village enfin , descc ndil au lieu du canipenient et
semelaauxgens de Tescorte. Leur chef, Rampese, portait
suspendue a son cou une tabatiere d'ivoire joliu)eiit tra-
(1) Sans doute le Coudous y^iililojie itiepsiccros.
(7.) Ce tcniie doit (*lre une erreur de copiste, car il ne s'applique
n iuiriin olijct iriii-.toire natiirt'llc.
( 3o3 )
vaillee, un de ses sujets en avail uiie pareillc faite dc
peau de gnouj la riviere prts de laqiielle oi) canipa, est
une source supposee de la Modder.
Le 14. Marche : A 4 h. 3o m. , direction E. N. E. Ge
jour-la, on passa trois sources reconriues de la Modder,
coulant N. E. el sortanl de quelques coteaux eleves qui
avaient ele vus vers 6 h. a une demi-lieue dans la direc-
tion de S. el S. E. La prenjiere, Iraverseea 7 h. 4-^ m- '
a ele appelee Dendroide-Boem-SpnUt , a cause des notn-
breux cytises qui croissent sur ses bords ; la seconde ,
rencontree a 8 h. 5 m. , el qui est rocailleuse, a ete
nonimee Steen- Spruit ; et la iroisienie, passee a 9 Ii.
10 ni., recut le nom de Grass Spruit, a cause de Iherbe
qui y croil en abondance. A 10 b, on traversa la Modder
meme, dans uuendroil rocailleux dun gres durelborde
d'immenses rocbers disposes en anipbitbealre. Seseaux,
qui se precipitenl d'abord de cascade en cascade, cou-
lent ensuite lenlenient dans les fentes du terrain. Sa
source primitive n'estqu'a 2 beures de la,du coteS. E.
Son veritable couraril est N. O.
A 2 b. 1 5 u). , passage dun bas-f'ond plante de ble
cafre, et 20 minutes plus tard , arrivee an Kraal Mou-
tvutapouliino, qui appartient au chei Magori. Get boinine
voyail des blancs pour la premiere fois 5 un miroir el
unemonlre ramuserenl beaucoup ainsi que son peuple.
Pour leur donner une idee de ce petit objet blanc qui
les etonnait tanl par son liiitin lepele, M. Arbousset
I'appela litsatsi, du nom du soleil, dans leur langue. On
delela sur la rive d'lme nouvelie source de /a Modder
(Busbmei) Rivier) , coulant N. O. et passant au [lied de
Mouroutapoulimo.
Le 1 5. De8li.37 '"• '^'^ 3 b. 5 m,, voyage entre leN. E.
et le N. N. E.
( 3o4 )
Dans I'espacc de moins d'une heiire on passa trois
sources de la Modder, I'une a 9 h. 45 n). , laiitio a 10 h.
10 ni., la deniiere a 10 h. 3o in. Toutes trois coulent
N. O. Qiielques heures apres le depart, on apercut au
N. N. O., au N. E. et a IE. N. E. , les montagnes de
Tabnnrsou et <.]e Tamapatsoa, deux kraals considerables
de Bassoutos. Arrives a i h. 10 ni. en vue de ces monts,
on put distinguer tres clairemenl dans le lointain une
chaine de hautes nionlagnes s'elendant du S. au N. , et
(jue Ion suppose elre la continuation du Storm-Berg
(Montague de la Tempete). Les naturels disent qu'elle
se prolonge jusque dans les etats de Muselekatsi. Parve-
nu5 au pied de Tabantsou, les voyageurs envoyerent
deux hommes pour les annoncer, et planterent leurs
tentes pour y passer le sahbat du seigneur.
Le dimanche 16. Plusieurs sujets de Mossemi , chef
de Tahantsou, vinrent visiter le camp. Leur chef, apres
setre long-temps fait altendre, arriva enfin comme on
funssait un service divin , fait au peuple en sichuan , par
le moyen de I'interprete de I'expedition. lutroduit dans
la tentedes missionnaires, il accepta un couteau et deux
onces detabac; niais ni les presens, ni les demonstra-
tions amicales, ne purent lui inspirer de confiance : il
ne comprit rien de ce qui lui fut dit du but de ce voya-
ge, etronsentit avec peine a accompagner les voyageurs
pour leur faire voir su ville. On n'eut pas plus totatteint
la hutte du chef, que toute sa suite parut partager ses
craintes. Kalala! kalala! « loin, loin, les messagers de
JVIakatchain » , crierent les sauvages, dans I'intention
d'effrayer les missionnaires , qu'ils prenaient probable-
ment pour des Korannas.W taut savoir que les Korannas
portent partout la devastation et I'epouvante dans ces
rontrees. Ikigaiuls insatiables, reunis en troupes dehiiit
( 3o5 )
a vingt cavaliers, pourviis d'armes a ten , ils dispersent
des peuplades entieres : ce sont eiix qui ont euleve a
Tabantsoii ses bestiaux. Taniopatsoa en est prive aussi.
Les autres villages dont il a ele question plus haut ont
ete egalement depouilles \ et tout cela est 1 oeuvre de ces
medians hommes, qui refoulent ainsi loin de leurs lerres
les tribus paisibles. Ceci explique pnurquoi toutes les
peuplades sont perchees sur de hautes montagnes : elles
esperent s'y defendre plus facilement contra ces cruels
ennemis. Tahantsou est eleve de 800 pieds au moins au-
dessus de sa base. Les environs sont pen fertiles, et I'eau
y manque. Sans ces inconveniens graves, on pourrait
fonder une station dans cet endroit, car les habitans de
Tahantsou et ceux de Tatnapatsoa reunis formei'aient
une population dun millier dames.
Le 17. Le depart ayant tout-a-fait rassure Mossemi ,
des qu'il apercut les w^aggons dans la plaine , il vola
vers les voyageurs, dans le but sans doiite de leur voir
tirer quelques pieces de gibier.
De 8 h. 3o m. a 12 h. , E. — Do 12 h. a 2 h. 4o ni. ,
N. E. etN,
Le pays parcouru est presque partout briile, et offre
un aspect desagreable : on ne voit de tous cotes que de
grandes collines noires, fans un ruisseau, A 2 heures ce-
pendant on rencontra une petite source, et tout pres
d'elle un kraal nonime Lochoron, habile par une cen-
taine d'ames. Le chef'apporta des citrouilles excellentes
qu'on lui acheta. Pres du village on vit des niilliers de cor-
beaux. Leur nom est reste a la fontaine. Toutes les es-
peces dece genre d'oiseaux vivent en grand nombre dans
ce pays , principalement les corbeaux, les corneilles, les
pies, et les casse-noix, dont la voix sonore est surpre-
nante.
( 3o6 )
Le 18. Deyh. 35 in. a 12 h. 7 ni., E. N. E. — Do 1 h.
3o n:. a a li. 35 111., E. N. E.
A 9 h. 3o III. , on avail sur la droile une riviere doiii
les eaux paraissaientet clisparaissaientalternativcment,ot
formaient en serpen tan t nne foiile de petits lacs tie toutes
les formes. Elle tut appelee la Zebre , a cause de la quantite
prodigieuse de cesanimaux qui frequentent ses bords.
A 20 m. de la s'eleve sur un vaste plateau, du cote du
S. E. , un kraal de Bassoutos, appele Umparane. Son chef
se nomine Mossi. On campa a demi-fieure de ce kraal;
aussi presque tous les homines, an nombre d'une cen-
taine , vinrent aux waggons. Le chef ayant recu une poi-
gnee de sel, la porta aussitot a sa bouohe et romercia
avee reconnaissance.
Le 19. Toute la nuit precedenteon entendit le cri des
chakals et des tigres, et en effet, on sut le matin qu'une
hrebis avail ete devoree.
Le terrain est tellement crevasse, qu'il fut impossible
d'arriver en waggon a deux kraals de Zoulas ou Metebe-
les, situes N. E. II fallut aller les visiter a pied. L'uii
deux, nomine Kugnanane, est situe au sommet de la
inontagne. Son chef est Moiissignanane. L'autre, qui est
situe plus bas et un pen sur la gauche, s'appelle il/o^««/-
lein. Son chef est Tapissa. C'est un vieillard rcmarquable
nar son beau mainlien, sa taille haute et sa tete chauve.
Non loin de Mokuallein est un autre kraal deMetebeles,
nomme.Tabana/cugnanane. Ces trois endroits reunis peu-
vent renfermer environ 3oo hommes qui furent chasses
autrefois de leur pays par le cruel Chaka el vinrent s e-
lablir dans ces contrees, ou ils sont detestes; aussi fei-
gnent-ils de n'avoir aucun rapport avec le peuple des
Zcjulas; mais tout les trahit, leurs moeurs, leurs traits,
leur langage, (jui sont les inemes que coux de ces der-
( ^"7 )
niers. llsci;ltiveiitlcblecaFre,leinais, lescitrouilles, 'esme-
joiis, romrue tous les Bechuanas vus par les niissionnaires.
De nieiiie que les sujets cle Muselekatsi, ils portent
pour veteinent une simple peau sur les epaules, et, a
I'exception des femmes, qui s'liabillent un peu plus deceni-
inent, ils paraissent avoir bien merite le nom de Kal-
Cnfers ou Cafres nus que leur donnent leurs voisins.
L'oeil des Cafres nus est cruel et feroce; leur physio-
nomie a quelque chose de romanesque, mais de tres
desagreable. Ils different, sous tous les rapports, des
BassoutoS; qui sontdoux et affables quant au caractere,
et dont le vetement consiste en deux grandes peaux dont
Tune couvre leurs epaules et I'autre retombe sur le de-
vant du corps.
Quant a la difference du langage des deux tribus ,
voici un tableau comparatif de quelques-uns des raots
des deux langues , recueiilis avec beaucoup d'altention :
Xoulas ou Metdbeles.
Onokope
Nkabel
Olekauk
Omokhondo
Kosi
Operulu et Setuia
La plupart des mots de la premiere colonne ont ete
donnes par Moiissignanane, et ils ne different aucune-
ment de ceux rapportes de cbez Miiselekatsi par le
frere Peliissier. Deux ou Irois sont recoiinus pour etre
entierement cafres, tels que ^»iang et Onokope ^ ce qui
sert a confirnier I'opinion que les Zoulas du nord sont
sortis de ces contrees-ci; niais on ne peut decouvrir ni
dans quel temps nl dans quelles conjonctures.
A Moknatlein, les voyageurs s'arreterent pour con-
huatias on
nassoiitos.
Francois.
Hogobe
Pain.
Korao
Bceuf.
Letsatsi
Soleil.
Assagai
Sagaie.
Monina et
Kossi
Chef.
Morimo
Dieu.
( 3o8 )
siderer la belle eiiaine de montagnes apercue le i5 et
qui en ce moment etait tout-a-fait en face d'eux el se
niontrait couveite de neige. EUe court du S. au N. , ce
n'est assurement que la continuation du Storm-Berq.
Les chasseurs de 1 expedition I'appelaient sous ce nouveau
point Uitle-Berg, on montagne blanche. U etait facile
de voir a la simple vue quelle est plus haute que le
Sneuw-Berg, qui pourtant esteleve de 6,000 pieds au-
dessus du niveau de la mer. (1)
« Jusqu'ici , dit M. Arbousset, nous avons marche 60
« heures et parcouru environ 2 degres ( 5o lieues ) en
« ligne directe; d'apres cela il est tres possible que le
« docteur Philip ait place cette chaine, qu'il ne fait que
« supposer, un peu trop pres de la mer, sur la carte qui
« accompagne son ouvrage de Recherches sur le sud de
« C Ajrique. Mais je n'ai ou ni le temps ni les instrumens
« n(;cessaires pour resoudre cette question aussi interes-
« sante qu'utile, et qui determnierait dune maniere cer-
« taine la vraie position geographique de ces montagnes
« encore ignorees. »
Le lieu ou Ton campa semble propre a retablissement
d'une station. Le sol y est bon on y troiive de I'eau et
du bois.
Le 20. De 7 h. 4-3 m. a 9 li. 35 m.,S. O. — De 9 h. 35 m.
a 10 h. 33 m. , S. — De 10 h. 33 m. a i h. 3o m. , S. E.
— De I h. 3o m. a 3 h. 45 m., E. S. E.
Au moment de deteler on apprit qu'a une demi-heure
de marche sur la gauche etait un kraal considerable de
(i) Les monts Witle-herg sont la continuation des monts Storm-
berg (monts des Temp^tes), qui sont eux-m(?mes une suite du Sneuw-
berg ( montagne de Neige). Les natifs font continuer la chaine jus-
(in'au-dela du Molopo dans la direction N. II est probable qu'elle va
se joindre a celle qui traverse lesroyaumes dc Sofala et do Sabia.
( 3o9 )
Bassoutos appele Moutsanane, il fut visite le lendeniain
par les freres Casalis et Gosselin, ils y trouverent 200
individus environ; le chef Gogola leiir a fait quelques
objeclions contra la religion, auxquelles les freres ont
repondu et il a paru satisfait.
Mosheh aynnt appris que des missionnaires venaient
chez lui, envoya deux niessagers au - devant deux
pour leur enseigner le cheniin et leur dire qu'il serait
venu en personne a leur rencontre, s'il n'eut pas craint
une, attaque de la part des Korannas.
On niarcha 3 h. E. S. E. ; niais en faisant miile de-
tours. Adam ayant appris aux missionnaires que des
Mantoitis, gouvernes par une regente nommee Mokuatsi,
habitaient a unejournee de clieval do la , ils crurent im-
politique de les visiter avant d'avoir vu le chef des Bas-
soutos, qui apres les avoir vaincus il y a 18 mois dans
une bataille, les rendit ses Iributaires.
Le 22. On marclia de 10 h. 3o m. a 2 h. 45 m. S. E.
— De 3 h. a 3 h, 10 m. , et de 3 h. i j m. a 4 b. S.
A 2h. 10 m., on renconlra une fontainc aux environs
de laquelle le sol est dune fertilite etonnante et qui
fut nommee Freugt-bear-Fontein^ ou source fertile. Un
kraal de Bassoutos nonune Mnssite s,e trouve a ime lieue
de la, on lacha d'y arriver afin de pouvoir evangeliser
les babitans le lendeniain dinianche, cc; qui fut fait. Ils
babilent au pied dun mont, du flauc duquel s('chap-
pent qualre fontaines dont deux sont fort abondantes,
il fut nomme Water bet g ou montagne des eaux; Tune
de ces fontaines tombe en cascades, ce qui nest pas
commun en Afrique. Ce bel endroit, jadis h.d)ile par
des Zoulas, pourrait deveuir une station importance, at-
tendu les avantages du sol ; on y trouva qiiatre ou cinq
22
( 3io )
kraals deserts, et dans les champs, etaient epars ck et
la quelqiies cranes humains.
Le 23. Dimanchc.
he 24- De 9 1^' 20 ru. a 9 h. 4^ m-, marche E. S. E. — De
ph. 45 "'• ^ 10 h. 17 m., E. N. E. , — De 10 h. 3o m.
a 4^. 17 in., E.
Avant loheures du matin, on apercut clu haul dun
plateau la riviere Cnledon, Tune des prinripales sources
du fleuve Orange. M. Arbusset s'approcha de ses herds
€t en suivit le courant pendant une petite heure.
Le Caledon prend sa source dans les montagnes
blanches et coule lentement du S. O. an N. E. dans un
lit profondetsablonneux. Lariv ere est bordee de saules,
qui y croissent naturellement , et siir la rive droite se
trouvent de pclits bosquets que frequentent de nom-
breux oiseaux parnii lesquels on reconnut le flammant
et I'hirondelle. Le passage des rivieres d'Afrique est en
general penible ct difficile. Pour traverser \ Orange il
avail I'allu se jeter a la nage et saisir a deux la litiere des
boeufs afin de leur aider a traverser le (leuve. Ici e<rale-
inentil fallut prendre I'un un pic, lautre une pioche et
ouvrir un cliernin a travers des remparts de sable; mal-
gre ces precautions le waggon des missionnaires resta
au milieu de I'eau jusqu'a ce qu'un attelage frais vint
Ten tirer. Le ilmon de la voiturc d Adam se rompit au
fort du travail.
Le aS. La journee fut employee a reparer les dom-
mages soufferts la veille; on fit aussi des maillets, des
manches doutils et Ton recueillit dans les champs, du
quarz de toutes les especes. Les pierres siliceuses sont
tres communes dans ces contrees , un hyalin, une ame-
thyste, une fausse topaze et quelques fragmens degres,
dont sp component presque toutes les montagnes visitees
(3x1)
et quelques autres objets de geologic plus ou moins cu-
rieux furent reunis pour etre envoyes au musee de
Paris.
Le 26. On traversa deux sources de laCaledon : Tune
coulc E. , la seconde E. S. E. 5 relle-ci est i-estee sans
nom ; la premiere, plus considerable, tut appelee Stenie,
du mot hollandais Steen, pierre, a cause des enormes
rochers de gres sur lesquels elle roule ses eaux.
On campa a gauche d'un kraal considerable de Bas-
soutos nomme Litsonein, chef Chatchane. Les habitans
en foule vinrent aux voitures feliciter les voyageurs de
leur arrivee.
Le 27. On decouvrit de loin la montagnede Tluan sur
laquelle Moshesh habile avec son peuple. La riviere pres
de laquelle on campa apres avoir marche E. S. E. toute
la journee est une source considerable de la Caledon et
comme cc-lie-ci elle estbordee desaules, c'est pourquoi
on 1 appela \-ASaule. Son lit estprofond et sablonneux, et
son courant est N. E.
Le fils du roi des Bassoutos, envoye le 24 en embas-
sade pres des missionnaires, se retira le soir. II crai-
gnait son pere, qui lui avait recommande au moment
de parlir, d'amener les voyageurs sains et saufs, et 1 'avait
rendu responsable du nia! qui leur arriverait; voila ,
disait-il avec effroi qu'une des voitures est cassee!
Le 28. Arrivee a Bossiou ville capitale du royaume.
Les Bassoutos recurent les missiorinaires comme des
bienfalteurs. Moshesh ne negligea rien pour leur prou-
ver la joie quil eprouvait de leur arrivee. M. Casalis
avait devance les voitures afin de sahier Moshesh au nom
de ses freres. Lorsqu'il fut parvenu a vinquart de lieue
delamontagne sur laquelle la ville est situee, il apercut
23.
( 3'-^ )
line foule iiiiiiiense qui cherchait a decouvrir Vetrangcr
dans la plaine. De fortes tlecharges de fusils se succe-
daient sans interruption au milieu des acclamations de
la multitude. Arrive au pied du coteau, il dtit descendre
de cheval, pour gravir les rochers qui le separaient en-
core du roi Bassouto. Aussitot qu'il fut pres des pre-
mieres huttes, un profond silence s'elablit et quelques
indigenes s'avancerent pour le conduire pres de jMos-
hesh. II le trouva assis sur une natie, au milieu de ses
conseillers; le roi lui tendit la main dun air affectueux
et I'invita a j)rendre place a son cole; un serviteur lui
apporta un pot de biere et quelques batons de eanne a
Sucre. La conversation s'engagea, et le roi dit au mis-
sionnaire : « Si vous conser.tez a demeurer avec moi ,
vous m'apprendrez a connaitre votre Dieu ; mon pays
est a votre disposition ; l)alisse2, cultivez comme vous
le jugerez a propos; je veux lassenibler tous nies sujets
et m'etabljr aupres de vous. Lorsque vous vous serez
un peu repose, nous partirons ensemble pour aller
chercher un emplacement convenable. »
Cela dit, Moshesh se leve, place M. Casalis a sa droite
et le conduit vers sa hutte; le peuple suit a vingt pas
de distance, une femme recite a liaute voix les louan<res
dn fils de Mogachane. Arrive pres de lademeure royale,
le cbef fait appeler tout le serail et presente 1 etranger
a chacune de ses femmes; elles etaient une Irentaine
outre la reine legitime qui jouit de grands pri\ileges et
demeure a part dans une hutte particuliere. Gelte cere-
monie termina la visite; les voitures etaient arrivees au
pied de la montagne et le voyngeur demanda au roi la
permission de rejoindreses amis.
Le 29. Lendemain de I'arrivee a Bossiou. M. Arbous-
set fut visiter la vi!!e. Elle est balio sur une niontn-
(3i3)
gne dtj gr^s, haute, escarpee, longue de 6,000 loises
fiur 5 a 600 cents de largeur environ, et faisant suite a
la chaine des niontagnes blanches. i5o hutles au centre,
puis de nonibreux Kraals tout autour, voila a-peu-pres
de quoi. se compose cet endroit. A droite s'elcve une
pyraniide nalurelle de deux a trois heures de circonfe-
renee, ce qui donne a ce lieu un aspect fort reniarqua-
ble. Le nonibre des habitans de Bossiou est de 5oo au
moins , ce qui passe au sud de I'Afiique pour une po-
pulation considerable. Dans les montagnes environnan'
tes, on compte une trontaine de villages sans y com-
prendre ceux deja menlionnes ci-dessus, et qui, ainsi
que ces derniers, sont tous sous la puissance de Moshesh.
Mosbesh est uu hoinme de belle taille; il a une figure
a la roniaine, le visage ovale, le nez aquilin, un peu
aplati, le menton long et le front proeminent. Son ceil
est vif , sa parole animee et sa voix rauque. II est gra-
cieux dans toutes ses nianieres, et son sourire a de la
bienveillance. II est maintenant dans la vigueur de I'age,
et parait dispose a toute espece de sacrifices pour I'amour
de la civilisation, dont il est grand admirateur.
Les Bassoutos, en general, sonl de beaux hominesj
leurs moeurs sont douces et paisibles : ils ne sont pas,
connne les Cafres, disposes a la violence, mais en echange
ils sont un peu paresseux. Ils cultivent, coniine on I'a
deja vu, le ble cafre, les courges, les melons, la canne
a Sucre, le ble de Turquie , presque tous le dacha (i),
qu'ils prennent en poudre, et quelques-uns letabac pro-
prement dit.
Les femmes reduisent le ble cafre en farine par la presr
sion entre deux gres, puis elles le petrissent grossiere-
(i) Espece de narcolique assez actif.
( 3x4)
ment a I'eau froide et le font ensuite bouillir dans una
espece de poterie de faience indigene; ainsi apprete, il
est mange sous forme de pain.
Le nieme grain fermente, cuit dans lean et tamise
dans un sac de jonc, produit une biere forte et tres ra-
fraiuhissante.
Les huttes des Bassoutos out la forme des ruches
d'abeilles; ils les consiruisent aveo des roseaux et les
recouvrent de nattes. Comme elles se trouvent trop pe-
tites pour contenir les provisions de leurs habitans, les
naturels se faconnent des paillassons ou ils niettent leurs
recoltes. Ce peuple, et tons les Bechuanas en general,
ne connaissent pas I'art de tanner tel qu'il est pratique
en Europe; mais ils ont, pour la preparation du cuir,
des procedes a eux, fort simples, et qui leur reussissent
tres bien. Sept a huit individus s'agenouiilent a terre
autour d'une peau qu ils ont prealablement laisse trem-
per dans I'eau froide, et chacun d'eux, la saisissant for-
tement avec les mains, la tire, la presse, la refoule en
tous sens, en poussant des oris aigus pour s'animer a
I'ouvrage. lis parvicnnent ainsi peii-a-peu a I'amollir et
a la rendre propre a etre portee sur les epaules en guise
de manteau , ou a etre faconnee en forme de sac.
Les Bassoutos ijjnorent leur origine. Moshcsh disait
un jour a ce sujet : « J'ignore d'ou nous sommes venus ;
ce que je sais , c'est que Dieu nous a mis depuis fort
long-temps dans ce pays « ; puis il ajoutait : « Nous
sommes sorlis des roseaux de la fontaine. »
Un serieux examen de Bossioii et de ses environs
ayant convaincu les voyageurs que cet endroit n'elait
nu'lenient propre .a la fondation dune station mission-
naire, ils redescendirent a leurs voitures suivis de Mo-
shesh, avec lequel ils avaient eu plusieurs entretiens.
( 3i5 )
Le soir, apres avoir fait leur cuisine sous ses yeux, ils
lui firent signe de venir souper avec eux, ce qui le com-
bla de joie. Adam aussi fut invite. La cruclie servait de
siege a lun d'eux, et un petit tabouret a Taulre. Quant
aux niissionnaires, ils avaient chacun une chaise. M. Ar-
bousset servit a manger au roi dans une cuvette, et a
Adam dans le couvercle de la soiipieie, n'ayanten tout
que trois assiettes. Mieux fournis des objets necessaires
a la vie, ils eussent pu passer pour des richards aux
yeux de cos bonnes gens. Le prince prend sobrement
son repas, se fait sorvir le sucre dans la main, et boh
son the non sucre afin de mieux savonrer le doux apres
Tamer. II appelle ensuite son fils et partage avec lui. Le
repas se termina par une priere , et Moshesh en parut
fort content. Deux heures apres, pendant qu'assis au-
tour du feu les missionnaires faisaient lire et chanter
leurs gens, le roi, qui trouvait cela fort bean, voulut y
prendre part : on lui fit repeter, tant bien que mal, en
battant la mesure, un cuntiquede louanijes auSeisneur,
enhollandais jpuis les voyageurs seretirerent dans leurs
waggons. Les domestiqiies , et les Bassoutos qui ont le
caractere tres genereux, passerent une parlie de la nuit
a faire cuire de la viande et a la mangrer tous ensemble.
Les indigenes causent gaiment, et avant de s'endormir,
ils chantent en choeur la chanson guerriere des Zoulas :
Quelques voix :
« Je veux faire la guerre,
» Je viendrai conlre toi. »
D'autres repondent :
« Non , tu n'oseras pas !
« Approche , je t'attends. »
Refrain :
• Mais tu n'oseras pas ! •
( 3i6 )
Le lendemain dimanche, attendu la grande quantite
de neige qui etait tombee la nuit, et le mauvais temps
qu'il faisnit encore, les missionnaires, bien qu'ils eussent
desire que le peuple de Bossiou descendit dans la vallee,
prirent le parti de nionter a la viile, ce qui plut beau-
coup a Moshesh ; il fit appeler beaucoup de nionde ,
Balas! bassai'i! liouimes et ienimes. On leur annonca
en termes clairs, et aussi simples que possible, la venue
du fits de Dieu au monde. Les cinq ou six cents
auditeurs de ce preche parurent etonnes comme si un
bruit merveilleux eut frappe leurs oreilles, mais sans
qu'on put croire qu'ils en comprenaient le sens. Nean-
moins le roi , prenant la parole avec feu apres le
predicaleur, en dit beaucoup plus que lui, et avertit
ses sujets qu'il etait resolu aaller avec les missionnaires
chercher un lieu convenable pour leur etablissement,
et qu'ensuite il s y transporterait avec tous les siens. En
menie temps il fit de vioiens reproches a son Faiseurde
pluie dece qu'il n'avait pasameneMogachaneson pere;
non que la vieillesse soit fort honoree chez ces peuples,
oar ils ont une telle peur de la mort, qu'ils eloignent
d'eux tout ce qui la rappelle, et cbez eux un homme
disparait sans qu'on en sache rien : ses proches I'enter-
rent en cachette ; il n'y a que ceux qui meurenl sur le
champ de bataille dont le corps reste sans sepulture.
Mais Moshesh parait sincere, et, dans cette circonstance,
il eixX. sans doute desire que son pere nous entendit.
Ce Rain-maker (Faiseur de pluie) est le premier que
les voyageurs aient rencontre sur leur route. On ne croit
guere a I'efficacite de son art ; mais comme Bossiou est
un endi'oit considerable, il y remplit les fonctions de
herault public et de commissaire de police. C'est lui qui
est charge d'entretenir la proprete dans la ville. II est
( 3'7 )
affuble de 7 a 8 colliers graisses, et sur la tele il porte
un plumel fait avec ties vessies, signe preseivatif de tout
mal. Au temps que la furie I'inspire, il ne cesse de crier
unipa! uwpa ! en levant en lair ses deux mains, qu'il
ouvre et ferme alternatlvement.
Les Bassnutos portent tous deces colliers deverroterie
ou de cuir ; les plus riches sont en cuivre avec des bra-
celets de meme metal ou de vessies, autant qu'ils peu-
vent s'en procurer. Get usage n'est pas commun aux
temmes; niais en revanche, elles se tatouent la figure
et le.; bras, et se frotteht le corps avec de la craie rouge ^
celles qui ont le plus d'embonpoint sont regardeescomme
les plus belles.
Le viardl ijuillet. 11 tomba beaucoup de neigc, ce qui
empecha le de'part. M. Arbousset ayant nionte a la ville,
y Irouva dix CatVes proprement dits, venus a Boss'wa de
dix journe'es de la, dans le but de faire des echanges.
lis se disaient sujets de Tjkani(i)j chef tres puissant
residantdans une ville qu'ilsappellent !\i all ake in ou. Mos-
s/'giiasse, c'est-a dire, selon leur propre interpretation,
Grande nier a i4 soinineils de Tlitan, E. N. E. Ce Tikani
est le frere deChaka, et, par parenthese, son nieurtrier.
Muselekatsi n'est quun sujet revoke, qui, apres s'etre
fait un grand parti, s'est retire vers le nord. On apprit
encore des voyageurs cafres qu'a 3journees demarche
E.N. E. , plus loin que Mntlnkeiii, on aperco t la mer,
qui, d'apres ces renseigneniens, serait encore a 17 jour-
ne'es de marche de Bossiou.
Le "ijuillet. Des, le bon matin, Moshesh , sollicite de
partir, y consentit. De 2 h. a 2 h. 53 m. , on marcha O.
(i) Probablement le meme que Dingan. Voy. t(* ann^e, p. aug, ,1
( 3i8 )
— De 3 h. i 5 h. 3o m., S.O. A 2 h., on avait traverse une
source de la Caledon, coulant S. O.
Le 4. De 9 h. 3o ni. a i Ii. , S. O. — De i h. a i h. ao
m. , S. et S. E. , — de 2 li. 3o in. a 4 h. 3o m.,S.-0.
A une henre on avait en vue,au S. E. , un bean mont
borde dune large colline, au milieu de laquelle serpente
une eau assez abondante, mais qui plus loin se perd
dans des creux qu'elle rencontre sur son passage. Tout
le monde jugea que ce lieu etait un fort bel emplacement,
et Ion s'y serait pent etre arrete, si le roi n en eiit pas
eu un autre en vue. Ce dernier endroit pourtantne reu-
nissait pas, a beaucoup pres. les avantages du premier,
et Mosliesh lui-nieiiie en convint, une fois qu'il lout
niieiix examine. II Cut done question, apresquatre lieures
de marche au N. O. , de revenir au mont abandonne la
veille a regret. Mais pour satisfaire le roi, il fallait y re-
lourner de suite et ne le plus quitter. Comme la plus
grande partie des bagages des missionnaires eiaita Phl-
lippolis, ils deciderent que deux d'entre eux resteraient;
njais avant de prendre cette determination extreme, ils
demanderent au chef s'il serait dispose a leur donner une
douzaine d hommes pour rester avec eux. «Oui, repon-
ditil aussilot, mon fils alne et toutes les productions du
pays sotit a votre disposition. — Eh bien ! reparlit
M. Arbousset, a cette condition, notre resolution est
prise, le frere Gosselin et moi nous restons ». Aussitot
cet homme , comme inspire du ciel, se leve, et, avec un
sentiment profond, il s eerie : « Maintenant je crois qu'il
y a un Dieu, car une trop grande benediction tonibe
sur nioi; je ne croyais pas que ce fiit serieusement que
vous voulussiez rester. »
On se remit en route, et Ion revint a I'endroit choisi
pour y fonder la station. La montagne se prolonge tres
loin au S. E., etdeson flanc s'echappentde quart dheure
en quart d'heure, cinq belles fontalnes qui vont arroser
un sol recouvert dun pied de bonne terre au nioins,au-
dessous delaquellese trouvede la terre glalse; en outre,
le bois de chautfage et celui de construction s'y trouvent
en abondance. Mosbesh ayant quitte les voyageurs,
leur eiivoya , conime il I'avait promis , son fils, quelques
honimes et des provisions. IJn de ses fieres, chef d'int
grand peuple comnie lui, envoya dix hommes pour aider
a construire une petite maison en roseaux, et quand le
temps sera devenu plus opportun, ils sont rcsolus tons
deux a venir se fixer pres des missionnaires. Pour le
moment, ils en sont empecbes par les Kovannas, qui
rodent dans les environs. Detniereinent, ctuxci allerent
attaquer les Mantaetis, mais ils perdirent tous leurs
chevaux dans cette expedition.
Le i8jiu7let. La petite maison que MM. Arbousset et
Gosselin devaient babiter ayant ete terminee, M. Casalis
quitta Morij'a (nom donne a letablissement) a 3 heures
de lapres-midi , pour retourner a Philippolis et en ra-
mener le second waggon el le reste des bagages. Apres
trois beures de marcbe S. O., il fit deleter pres dune
source dela riviere Caledon. (i)
Le ug,marcke.De 1 1 h. a i2 b. i5 m. , S.O. — De 12b.
i5 m. a 2 h. 5 m. , N. O. — De 2 h. 5 m. a 3 b. , O. N. O.
— De3b. a 4h. i5m.,0. — De 4 b. i5ni.a5h., N. O.
A 2 b. 10 m. , il decouvrit une mine de cbarbon de
terre qui sera une grande ricbesse pour relabllssement.
Le conducteur des boeufs assure que les Bassoulos ex-
ploitent la houille et s'en servent pour preparer leurs
(i) L'inspection de la carte fera voir que les missionnaires se ser-
T«nt constamment du mot de source pour celui d'affluenl.
( 3:zo )
fers de lance. Le soir, ayant envoye chercher de I'eau ,
tous les gens s'ecriereiit qu'iletait impossible den boire,
vu que la source avail sans doute ete corrompue par la
caicasse de quelquc animal. M. Casalis supposa d'abord
qu'ils avaient puise a unc source sulfureusc: la d('gus-
tation Fen convainquil bienlot.Un J3ass()uto,pkis instniit
que les autres, piil la parole pour prouver que ceite
eau parfaitement pure, loin de nuire a la sante, avail des
proprieles medicinales Ires marquees. Observation tout.-
a-fait inauendue de la part d'un sauvage.
Zeao.Onavaitcampe la veille pres de Popokuan, petit
village de Bassoutos. M. Casalis s'y rendit le matin avec
son interprete, ot fut comble de caresses par le chef
Matcliouse. On niarcha ensuite N. O. pendant 5 heures,
el Ton campa sur le rivage de la Caledon.
A I h. 20 m. on avail passe pres dun lac d eau douce
assez considenible.
Le 21 , tnarche. De 10 h. 10 m. a 10 li. i5 ni. , S.-O.
— De I oh. 1 5 m. a 1 1 h. i5 in., O. N.O. — De r ih. i5 m.
a 1 1 h. 2om., O. — De 1 1 h. 20 m. a 12 h. ,N. — De 12 h. a
3 h. i5 m.,0. La Caledon n'etant plus gueable vis avis
le lieu du campement, il fallut longer la cote jusqu'a
II h. i5 m.
La Caledon nierite de compter parnii les principales
rivieres du sud de I Afrique. D apres le rapport des Bas-
soulos , elle prend sa source dans les monts W itte-herg
pres du pays des Mantaetis ; elle coule O. el O. S. O., el
sejetle dansle fleuve Orange, a 2 ou 3 heuresde la station
des Bushmen , c'est-a dire a 16 ou 18 lieues S. E. diePlu-
lijjpolis.TLWe a 60 pieds de largeursur 4 de profondeur
a I'endroit ou elle futtraversee. Son lit estrocailleux, son
cours rapide, el des dunes de sable la bordent de chaque
cote. Des troupes d'autruches avant attire lattention
( 3.t )
lie M. Casalis pendant le reste tie la journee , il acquit
de nouvelles prcuvos qu'elles convent leursoeutscoinme
les autres oiseaux. Les Bassoutos garantissent cefait, et
ils ajoutent cette parlicularite interessante, que la fe-
melle couve pendant le jour, et le male pendant la nuit.
Le 11 , dimunche. Repos.
Le 23. Les betes f'eroces avaient Inquiele I'expedition
toute la nuit. Les bords du Caledon sent infestes par de
lerribles lions qui devorerent un des meilleurs boeufs de
I'atlelage.
Marche. De g a 4 b. , O. Vers i beuies de I'apres-
midi , on arriva sur le bord dun profond ravin qui bar-
ratt le passage. A.yant vainement cberche une issue, il
fallut se decider a Irancbir ce fosse , ce qui ne put se faire
qu'a grande peine. Au-dela , un danger plus imminent
attendait le courageux voyageur : lessauvages ont I'ha-
bitude de mettre le feu a I'herbe , afin de bonifier le
terrain et d'obtenir ainsi de meilleurs paiurages ; M. Ca-
salis se vit entoure bientot par un pareil incendie. Ne
pouvant reculcr a cause du ravin, il faliut tiaverser les
flammes en les eteignant a coups de baton, dans un en-
droit ou elles etaient moins inlenses.
Les 24 et aS , marche. — 24 : De 1 1 a 12 h., O. — De
1 2 h. a I b. , N. O. De I b. a 3 h. 3o m. , O. De 3 h. 3o
m. a 4 b. , N. N. O. — 25 : De 11 h. 3o m. a i b., O. S. O.
— De 1 a 4 b. , O.
Pendant ces deux journees , on voyagea presque tou-
jours au milieu de bandes nombreuses de zebres et
d'antilopes. II est dilficile , pour ne pas dire impossible ,
de se faire une idee du nombre prodigieux de betes
feroces qui vivent dans les deserts de TAfrique, lant
qu'on i/'on a pas jng(^ par ses propres yeux. Trois especcs
( 3a. )
dantilopes sont siirtout remarquables,le spring-bock (i),
le riet-bock (2) et le hart-beest. (3)
Le springbock eniporte le prix de la beaute : I'ele-
pance de ses formes, la rapidite de sa course, la grace de
ses nioindres mouvetnens, le rcndent rornement du
desert ; ses cornes, longues defiii 8 pouces, varient entre
le niarron foiice et le noirjila ledos faiiveet les parties
inferieures blanches; une longue raie brune s'etend le
long de ses flancs.
Le riet-bock tire son nom de ce qu'il vit communement
dans les roseaux. Son poil est laineux et d'unecouleur
cendree ; ses comes se recourbent en avant en forme de
croc.
Le hart-beest se distingue par une longue tete et des
cornes fortement annelees , penchant en arriere.
Les chasseurs africains font un grand cas de ces trois
especes , niais ils preferent lanlilope blanche (leucoryx),
dont le cuir se vend assez cher en raison de sa (orce.Cet
animal est remarquable par ses dimensions, qui ne le
cedent guere a celles du boeuf. Ses cornes sont longucs,
parfaitemenl droites , coniques , et entourees vers la base
d'anneaux en spirale. Son poil est ras et presque blanc.
Sa queue ressembie a celle de la girafe.
Le 26', marche. — De 9 a 10 h.,0. — De 12 a 7 h., S. O.
Les 27 et 28 , marche S. O. Arrivee a la station des
Bushmen; de la, on atteignit Philippolis en 17 heures.
M. Casalis espere reparlir pour Morijn lorsque ses
boeufs seront assez reposes, c'est-a-dire dans deux ou
trois semaines.
Ambroise Tardieu.
(i) Antilopea bourse ou antilope eucliore.
{•I) Lc riet-rhee-bock ou nagor des roseaux, ou antilope-eleotragus.
(3) Lecaama ou cerf du cap, ou antilope caama.
( 3.^ )
APPENDICE.
Dans les numeros 4 et 5 de i834 du Journal des mis-
sions evangeUques^ on tronve quelques nouveaux ren>
seigneniens sur les etablisseniens tlu sutl de rAFrique : la
reponse suivante d un Hottentot indique dune raaniere
vigou reuse et vraie, les heureux resultats des missions
parnii ces peuples.
« Quand les missionnaires vinrent au milieu de nous,
• nous n'avions d'autres vetemens que de sales peauxde
• mouton; maintenant nous sommes liabilles du produit
« des manufactures anglaises. Nous n'avions point de
« langue ecritej maintenant nous pouvons lire la bible,
« ou au moins nous la laire lire. Nous elions sans religion;
• et maintenant nous adorons Dieu dans nos families.
• Nous ne possedions aucune idee de morale, tandis
■ qu'aujourd'hui chacun de nous reste fidele asa propre
« femme. Nous etions adonnes au libertinage et a I'i-
« vrognerie, tandis qu'aujourd'luii I'industrie et la so-
H briete regnent parmi nous. Nous n'avions rien en pro-
• prej mais les Hottentots de Betlielsdorp ont mainte-
« nant cinquanle chariots et un nombre proportionne
« de bestiaux. Enfin nous etions exposes a etre massa-
» cres comme des betes feroces ; mais les missionnaires
« se sont interposes entre nous et les fusils de nos en-
« nemis. »
Ces importans resultats ont entierement change la
condition de ces peuples qui, d'opprimes qu'ils etaient,
sont devenus coumie tons les autres habitans anglais
ou hoUandais de la colonic, libres sous la protection
des lois.
Les Criquas , indigenes de la station de Philippolisy
( 324 )
possedenl 35,ooo moutons, 3,ooo tetes de gros betail
et 5oo chevaux, ce peuple sert de boulevard a lacolo-
nieducoteN. et N. E. et epargne ainsi au gouvernement
colonial I'entretien de 5oo homnies de troupes, qui, se-
raient necessaires pour proteger cette parlie de la fron-
liere, longue de 3oo inilles.
Les Griquas ^7i\\ commencement de la mission, etaient
aussi ignorans et denues de ressources que les Korannas^
les Biischiiien et les Bcchuanas qui les entourent, et dont
ils sont deveniis les protecteurs, bien que cinq fois
inoins nond)reux qu'eux.
La station de Caledon qui avait ete abandonnee, a re-
pris par les soins de M. Pelissier, une importance, qui
pourra devenir utile au progres des explorations ulte-
rieures, il est parvenu a reuni'r en ce lieu 1,200 Btchua-
nas, qu'il s'occupe a civiliscr et a instruire.
Une lettre de M. Casalis en date du 4 octobre i833
rend compte des circonstances de son voyage de relour
a Morija , nous en extrayons les faits suivans. A Pliilip-
polis un grand nonibre de Baastaards (i) voulurent le
suivre pour se fixer a Morija, afin d'eviter les enlre-
prises devastatrices des Korannas (2); mais il s'y opposa,
ne voulant pas donner les mains a un projet qui eut pii
entrainer la mine de la station anglaise. W partit vers
(i) Les baastaards sont des enfans illegitimes des fermiers liollan-
dais et des Hottentotes profiremerit dites; les griquas sont issus des
fermiers et des namnquoises. M. Casalis se propose d'indiqiicr les
differences de caraclere de ces deux races inlxtes, dans uii court
apercu sur les peiiplades du sud de TAfrique qu'il doit envoyer au
comile des Missions.
(1) La denomination de Koranna designe ( aux environs de Phi-
lippolis) inoins une jieuplade qu'une association de brigands. Il
existe beaucoup de Korannas ainsi nomnies a cause de leur origine ,
et qui virent neanmoins d'une maniere fort lionn^fe.
( 325 )
le millieu d'aoiit et s'arreta qiielques jours a (laledou
pres dii frere Pelissier, ils y recurent la visite dune
bande de Korannas qui venait de piller et massacrer les
Cafres-Taniboukis. Ayr.nt quitte Caledon le 27 aout,
M. Casalis prit une route plus directe que la premiere,
il traversa la Caledon a une journee de la stition de
M. Pelissier et se dirif;;ea toujours vers Test. Cette route
a cependant un grand inconvenient, cest qu'elle tra-
verse uu pays uniquement hahite par des betes feroces.
Presque chaque soir des troupes de lions rodaient au-
tour de la voiture et deux hommes devaient alternati-
vement faire des rondes pour protegerles bestiaux. Ce-
pendant le danger n'est pas aussi grand qu'on pourrait
le supposer, en se tenant enfenne dans sa voiture, ou
en entretenant un grand feu, on necourtaucun risque.
M. Casalis arriva a Morija le j septembre, il s'etait ar-
rete deux jours pour reparer sa voiture, il mit done
neuf jours effectifs a^se rendre de Caledon a Morija, II
trouva cette station tlorissante, le roi Mosliesb vint ren-
dre visite aux inissionnaires aussitot qu'il eutappritle
retour de M. Casalis; ils lui proposerent alors d'acbeter
le terrain de Morija^ cest une precaution qu'ils ne ne-
gligent jamais ; la possession du teriain qu'ils babitent
leur donnant la liberie den ecarter les individus d'un
caractere dangereux , de s'opposer a limportation des
liqueurs fortes el de realiser tons les plans qu'ils jugent
favorables ^ I'avancement de leur oeuvre. Moshesb apres
les avoir sondes adroitemenl a ce sujet, satisfiut de leurs
reponses, recul en paiement un babillement europeen
complet. La rassade est beureusement a-peu-pres in-
connue dans ces contrees ou les marcbands anglais n'ont
jamais penetre; les missionnaires pieferent pour objet
d'ecbange, les uslensiles utiles, la ou la rassade nest
u3
( 3^6 )
pas indispensable. L*- roi , toujours desireiix de venir se
fixer a Morija puisque deja il a pris les veteniens euro-
peens et qu il s'esl defait de beaucoup de bestiaux pour
acheterdequelques chasseurs ,des ustensiles de menage,
des fusils, de la poudie, des chevaux, etc.,parait vouloir
se voiiger des Koiaiinas et leur donner une lecon dont
ils se souviennent. Son coeur est, dit-il , plus gros qu'une
maison et plein de projets grands et genereux, il va
commencer par envoyer pres des missionnaires tons ses
«nfans et une partie des habitans de Bossiou.
Les betes feroces iiiquietent sans cesse les troupeaux
de la station , et comnie elles avaient devore un cheval,
une chasse fut resolue; dix cliasseurs dont MM. Casa-
lis et Gosselin faisaient parlie, se niirent en route et au
bout d une heure de reclierches, la trace du lion fut
retrouvee, elle conduisait direclement au sotnmet d'une
montagne dont il fallut gravir les rochers. Arrive'e sur
je plateau la troupe se divisa en deux bandes, M. Ca-
salis, suivi de trois homines, avait a peine parcouru un
quart de lieue qu'un magnilique lion male se presenta
devant lui. II appartenaita cette variete que les fermiers
hollandais designent sous le nom de zwart-leemv (lion
noir) a cause de la couleur noiratre de sa criniere, et
qui se distingue de I'espece commune par son extreme
ferocite. Get animal , qui n'avait pas nioins de sept pieds
depuis le nez jusqu'a I'insertion de ia queue, s'arrela un
instant pour regarder les chasseurs; mais ceux-ci ayant
lance leurs chevdux au galop, il courut se refugier der-
riere un roc; parvenus a cinquante pas de lui et ayant
mis pied a terre, ils firent feu; protege par le rempart
nalurel qu'il avait choisi , aucune balle ne parut avoir
atteint le lion; mais 1 explosion I'irrita , il commcnca a
brandir sa queue et a pousser iin rugissement sourd ,
( :^-7 )
on se disposait a tirer uMe secoiide fois sur lui loisqu'il
quitta sa letraite sans que sa fiiite eut rien de precipite,
il ninrchait dun air furieux en retournant souvent la
tete. On conlinua a le poursuivre jusqu'a ce qu il eut
atteinl un buisson ou il attendit les chasseurs; il parais-
sait resolu a ne plus bouger de ce retranchenient, et sa
posture faisait presumer qu il se disposait a sauter sur
I'und'eux; la position devenait tres dangereuse, tous
les cliiens avaient sulvi I'autre bancJe, des trois hoin-
nies qui accompagnaient M. Casalis I'un etait sourd , il
etait prudent d'aller chercher le reste de la troupe et
Ion partit au galop. En arrivant pres de leurs compa-
gnons ils les trouverent occupes avec une lionne qui
faisait beaucoup de resistance : apres avoir essaye plu-
sieurs fois de s'elancer sur les chasseurs, elle s'etait
placee dans les fentes dun rocher, les chiens excites
pour la debusquer s'avancent jusque sous ses griffes,
I'un d'eux ose lui mordre la queue, mais elle se precipite
sur lui, le saisit dans sa gueule et le laisse pour mort,
aussilot une grele de balles pleut sur elle, et elle tonibe
expirante. Sa peau fut adjugee a M. Casalis qui se pro-
pose de 1 envoyer au musee de Paris. Son premier soin
fut d'examiner un point d'histoire naturelle fort interes-
sant. Didyme d'Alexandrie, coninientateur d'Homere,
Hit au sujet dun passage du xx*" livre de I'lliade, que
la queue du Hon est armee d'uneespece d'aiguillon ca-
che dans le poil , qui sert a irriter la bete, lorsqu'elle
en frappe ses flancs. Blumenbach assure avoir vu cet
aiguillon de ses propres yeux, tout en observant que
sa petitesse le rend impropre a I'usage qu'on lui prete.
M. Casalis a vu distinctement dans la peau une ex-
croissance epineuse, longue de deux lignes et demie,
et supportee, comnie la remarque le savant naturaliste
23.
( 3a8 )
par une espece de f'ollicule ( i ). Cette lionne avait six
pieds de longueur sur trois de hauteur ; elle etai t pleine.
Dans Tapres-midi on chercha le lion; mais on ne put
le retrouver.
II ne faut pas croire que de pareilles battues soient
souvent neressaires, la presence de I'liomme en grand
nombre, suffit pour faire fuir les lions; dans les con-
trees depuis long-temps explorec-s, les betes ferocessont
devenues tres timides , et Ton n'a pas plus a craindre
sur la route du Cap a Lattakou, que dans les environs
de Paris. Mad. Moffat a fait, en avril i833, I'immense
Irajet de Kuruman a Graham's Town avec un enfant de
rinq ans sans renrontrer un seui animal dangereux.
M. Arbousset, reste a Morija pendant que M. Casalis
retournait a Philippolis chercher le reste des bagages,
fait le plus grand eloge des nioeurs et de la douceur des
Bassoutos; jamais de querelles entre eux, ils ne savent
que manger, chanter, rire et dormir et poussent Thos-
pitalite au plus haut point: un etranger arrive-t-il, con-
nu ou non, il a le droit de mettre la main au pot avec
les autres, sans deniander permission; il n'y a que chez
le roi oil il faille attendre cette autorisation.
(i) Depuis long-temps cette observation est connue de toutes les
personnes qui s'occupent d'histoire naturelle , et I'existence d'une
espice d'epine ou d'ergot dans le pinceau de la queue du lion ne fait
phis doute. ( Note du rvdacleitr, )
( 3^9. )
RAPPORT
SUR UN OUVRAGE DB M. LE MAJOR POUSSIN,
INTITULE :
Travaujc (T amelioration interieure, entrepris ou executes
par le gouvernement des Etats- Llnis,
Lit » la Soci^te de G^ographie dans sa seance du i6 mai 1 834-
Par M. Roux de Rochhllk.
Nous ne pouvons nous rendre compte des travaux
entrepris par les Etats-Unis d'Amerique, pour perfec-
tionner et multiplier leur navigation interieure, qu'en
examinant d'abord leur situation geographique, et les
premieres lignes de tommunication , dont ils ont suivi
la trace et prolonge le developpement.
Les Etats de I'Atlantique ont eu les premiers a s'oc-
cuper de ce systeme d'amelioration. Leur immense lit-
toral, prolonge du nord-est au sud-ouest entre I'Ocean
et la chaine des Alleghanys, est traverse dans toute s;i
longueur par un grand nombre de rivieres navigables.
Les unes coulent du nord au sud, commele fleuve Hud-
son et le Connecticut : les aulves coulent vers le sud- est,
et le cours de toutes ces rivieres est d'autant plus long
qu'elles ne se rendent pas directement des Alleghanys
( yso )
a lamer : elles suivent dans leuis coiirbiires ies vaFItfe*
etendues et echelonnees entre Ies differeiis plans de ces
niontagnes : leur longueur augniente ie volume de leurs
eaux : quelques-unes des bales ou elles se jettent out
une grande profondeur, et toutes ces dentelures du ri-
vage, depuis la baie de Passamacquodi jusqu'au cap
Hatteras facilitent Ies comtnunications mutuelles des
Etats maritlmesj non-seulement parce qu'elles pene-
trant au loin dans I'interieur des ter«'es, niais parce
qu'il a ete possible d'etablir entre elles de nouvelles li-
gnes de navigation.
Un autre systenie bydrograpliique regne dans Ies
vastes contrees situees a I'occident des Alleghanys. Celte
chaine de montagnes separe d une inaniere absolue le
Tersant des eaux; et tous Ies fleuves de ces regions oc-
cidentales sont Ies tributaires du Mississipi, ou s'ecou-
lenl directement dans Ie golfe du Mexique.
A mesure que ces nouvelles acquisitions de territoire
sont entrees dans la confederation des Etals-Unis, Ies
bommes frappes de la necessite d'unir enlie elles toutes
Ies parties d'un si vaste corps, out cherclie Ies nioyens
den assurer Ies conununications; et I'idee primitive, la
plus grande, la plus feconde de toutes, a ete d'etablir
une lonjrue lijjne de navigation entre Ies Etats de lest
et de I'ouest, entre I'Atlantique et le Golfe du-Mexique.
Washington , le heros, le bienfaiteur de son pays, avait
concu cette grande pensee : il regardait de faciles com-
munications avec I'ouest comme le seul moyen d y fa-
Torisei" la civilisation; et cc qui avait ete projete par ce
grand homme, dans la vue d'ameliorer dans des con
trees encore sauvages le sort de la race humaine, a ete
execute apres bii, pour favoriser a-la-fois Ies interetsde
la socielf» , de I Industrie el du commerce
( ^^» )
Le projet de Washington etait d'unir la Chesapeak a
lOhio et par la au Mississipi ; mais un autre plan celui
d'unir le fleuve Hudson au lacEiie, est le premier qui
ait recu son execution. Ce plan, dont la legislature de
I'Etat de New-York s'occupa en 1808, ditferait d'abord
de celui que Ton a ensuite adopte. On voulait, a I'aide
du fleuve Hudson, du Mohawk qui en est le principal
tributaire, du lac Oneida et de la riviere Oswego, eta-
blir une communication entre New-York et le Lac On-
tario, d'ou Ton serait remonte au Lac Erie, en creusant
un canal, sur la rive orientale du Niagara, Mais les in-
genieurs charges de I'exploration de ces contrees, re-
connurent qu'il valail niieux ne pas emprunter la na-
vigation de rOntario, et qu'il serait possible de tracer
un canal direct entre I'Hudson et le lac Erie. La niaree
remonte dans IHudson jusqu'au-dela d'Albany, et la
Mohawk sejette dans ce fleuve a quelques lieues plusau
nord. Ce confluent tut le point de depart : on fit sur
la rive du Mohawk le trace dun canal qui devait en re-
monter le cours jusqu'a Rome. De la jusqu'aux plaines
ou coule le Genesee, on eniprunta les eaux des rivieres
et des differens lacs qui s'ecoulent vers le lac Ontario; et
les eaux du lac Erie et de ses affluens durent alimenter
toute la partie occidentale de cette ligne de navigation.
Ces operations preparatoires firent icconnaitre la
possibilite du canal; mais la guerre de 1812 entre les
Etats-Unis et I'Angleterre, vint en retarder I'execuiion
On ne reprit ce projet qu'en 18 16; et apres avoir con-
li'acte, sous la garantie de I'Etat de New-York les pre-
miers emprunts necessaires pourconimencer les Iravaux
sur le terrain, ils furent mis en adjudication en 1817,
el ils furent repartis entre un assez grand nombre de
( ^i-^ )
coiitiactans, pour etre executes a-la-lois sur uiie ties
vaste etendue. La section du milieu entre la villedUtica
et la riviere Seneca fut achevee la premiere, dans I'es-
pace de deux annees, et avec un developpement i\e g6
niilles anglais : les sections de lest et de I'ouest furent
ensuite executees simultanement : Tune a io3 millesde
loncueur, I'autre en a i63: et cet immense ouvrajre
dont la longueur totale est de 362 milles (environ 120
lieues de France ) fut completement termine en iSaS,
huit ans apres le comtnencenient d'execution. On a
donne a ce canal deux embranchemens : celui de Sene-
ca qui a 20 niilles de longueui", correspond avecle lac de
ce liom ; celui dOswego qui a 38 milles s'etend jus-
qu'au ac Ontario.
Un autre canal, destine a lier le lac Champlain ct la
riviere d'Hudson s'etait execute en meme temps: on en
avail commence les fouilles en 1818, et le canal etait
termine en i8i3. Son eleveloppenient est de 61 milles,
et son embouchure dans I'Hudson aboiitit au meme
point que celle du canal Erie. L'on a ainsi etabli et mis
en contact Tunc avec I'autre deux grandes lignes de na-
vigation , Tune diiigee au nord vers le Canada et le
fleuve St. Laurent, I'autre arrivant a I'ouest jusqu'au
lac Erie.
Cette derniere communication a immediatement don-
ne lieu a une autre entreprise, qui n'est que le deve-
loppement et le complement du meme systeme. Le
gouvernement de I'Ohio s'est determine a ouvrir un
canal entre le ileuve de ce noni et le lac Erie ; et ce ca-
nal, dont le developpement est de3io milles anglais , a
ete commence en 1825 et termine en i832 : il debou-
che a Cleveland sur le lac Erie, passe a Newark, a Cliil-
licote, et se dirige sur Portsmouth, ou il s'unit a lOhio.
( 333 )
Vers lepoque ou I'etat de lOhio projetait retablisse-
ment de ce canal, le gouvernenient central des Etats-
Unis formait un autre plan de communication entre les
regions de I'est et de I'ouest. Si la ligne de navigation
de IHudson et du canal Erie etait particuliei-ement utile
aux Etats du nord, il convenait d'etablir pour les Etats
du centre que baignent la Delaware et la Chesapeak, de
semblables relations avec I'ouest. Un comite d'amelio-
rations interieures, dont le general Bernard faisait par-
tie, s'occupa de ce beau projet; et le general fut charge
en 1824, de faire toutes les reconnaissances necessaires
entre Washington sur le Potomac et Pittsbourg sur
rOhio, afin de juger si I'execution dun canal entre ces
deux villes serait praticable, quelle direction on aurait
a lui donner, conunent on pourrait franchir la chalne
des Alieghanys, quels ouvrages dart on aurait a con-
struire, et quelles seraient les depenses de lexecutioii.
Le major Poussin , qui rend compte de ces travaux
dans limportaiit ouvrage que nous avons sous les yeux,
etait aide-de-camp du general ; il le suivit dans toute
cette reconnaissance; et deuxFrancaiseurent I'honneur
de cooperer a des travaux qui influeront un jour de
la maniere la plus remarquable sur la prosperite des
Etats-Unis. II nous est doiix de retrouver des noms fran-
cais, cite's avec eloge dans les annales de leur histoire ,
et de ne pas nous regarder comme etrangers, soil a leur
glorieuse independance, soit a quelques-unes des causes
les plus propres a alf'ermir leur union et a developper
leur puissance.
II resulta des observations et des traces faits par les
ingenieurs, que le canal etait possible, que son deve-
loppement serait de 34i milles anglais, que pour fran-
chir les Alieghanys dans leur cliaine la plus elevee on
( 334 )
aiirait a ouvrir uu souterrain de 5,ooo metres , que ce
point fornierait le bief de partage, que la penle du cote
du Potomac serait de 546 metres, qu'elle serait de 345
du cote de I'Ohio , et qu'il faudrait 240 ecluses a Test
et 148 a I'ouest, pour rachcter I'une etl'autre penle. La
depense totale fut evaUiee a 121 millions de francs; mais
elle ne parut pas trop elev«^ pour un si important pro-
jet, et Tentreprise des travaux fut faite par une compa-
gnie doni les priricipaux actionnaires etaient le gouver-
nement general, interesse a faciliter les commiuiications
de lest avec I'ouest, les etats de Virginie, de Maryland ,
de Pensvlvanie, dont ce canal devait traverser le terri-
loire, et les villes de Washington , de Georgetown et
d Alexandrie, siluees sur le Potomac.
Pour graduer I'execution des travaux, on a partage
celte ligne en trois divisions, et Ion a commence par la
division de Test, qui aboulit a Georgetow^n. Toute celte
partie du canal doit etre alimentee par les eaux du Polo-
mac , dont elle remonte la rive gauche : on s'est deja
eleve au-dela des montagnes Bleues, jusqu'a la manufac-
ture d'armes de Harpers-Ferry ; el cetle ligne , qui a 64
inilles de longueur, et dont les creusages n'ont ete en-
Irepris qu'en 1828, est en ce moment ouverle a la na-
vigation. La section de lest, dont elle fait partie, doit
>,e prolonger jusqu'au confluent de la Savage et de la
branche nord du Potomac: elle aura 186 milles en 10-
lalile, et toute la partie ilu Maryland qu'elle doit traver-
ser, depuis Cumberland jusqu'au voisinage de George-
town , jouira la premiere des avantages de cette com-
munication.
La division du centre sera alimentee par les eaux du
Savage a lest des Alleghanys, et par celles de Cassel-
man a I'ouesl; elle le sera dans la partie inleiniediaire
( 335 }
par deux bassins artificiels oil I'on reunira loutes les
prises d'eaii des liaules nioritagnes. Le volume et Ja con-
soniniation en ont ete calcules.
Qiumt a la division occidenVale qni doit se terminer
a Pittsbuurj^ suri'Ohio, eile sera abondamment pourvue
par les eaux du Youghagany et du Monongohela, dont
elle suivra la rive droile.
L'utilite dVlablir des communications entre iaChesa-
peak el I'Ohio, par la ligne que ce canal doil suivre, a
excite quelques rivalites, et Ion a forme I'entre-
prise d'un chemin de fer dont une compagniedu Mary-
land a commence I'execution. Cette route, qui part de
Baltimore, et qui doit aboutir a Wheeling sur lObio,
aura aSo milles de longueur. Les travaux ont ete con-
duits JMsqua Point-of-Ilocks sur le Potomac, et le quart
de la distance totale est parcouru ; mais ici Ion entre
en concurrence avcc les entrepreneurs du canal : il faut
egalement remonter la vallee du fleuve, et quelques-uns
de ses defiles soiit si etroils, qu'ils ne laissent pas la
place necessaire pour continuer parallelement les deux
operations. II seraita desirer que I'une et I'autre com-
pagnie se concertassent pour n'employer que I'un des
deux moyens de communication ,soit dans la haute val-
lee du Potomac, ou le canal continue d'etre construit,
soit dans les regions encore plus elevees ou les eaux sont
plus rares , ou il faudra s'ouvrir un passage a travers la
chaine des Alleghanys, et oil Texecution d'une route de
fer pourrait etre moins dispendieuse.
Get emploi alternatif descanaux de navigation et des
chemins de fer a ete adopte avec succes par I'etat de
Pensylvanie, lorsquil a fait ouvrir une communication
entre I'Ohio et la Delaware. Deux lignes de navigation
out ete creusees a Test et a Touest des montagnes : le
( 336 )
caua! de lest enipruiite sucressivenient les eaux do la
Juniata, de la Susquehana, du Schuilkyll, doiit il suit
les bords jiisqu'a Philadeiphie : le canal de I'ouest est
alimente par les eaux du grand et du petit Gonemangli
et de la riviere Alleghanys, jusqu'a Pittsbourg, ou il se
termine; et pour lier entre elles les deux parties de ce
canal de Pensylvanie, dont le developpement total estde
4i4 inilles (environ i4o lieues), on a etabli entre Johns-
town sur le Coneinangh et Franckstown sur la Juniata ,
un cheniin de ler ds Sj milles de longueur. Tous les tra-
vaux de cette grande entreprise sonl entiereinent ter-
mines.
Nous avons vu qu'en etablissant entre Test et I'ouesl
de si importantes communications, on a cherche a les
faire aboutir a I'Ohio, qui offre a son tour un develop-
pement innnense a la navigation, et qui permet de la
prolonger jusqu'au Mississipi et de la jusqu'au golte du
Mexique. II a f'allu, pour assurer dune maniere com
plete ces avantages, s'occuper egalement du cours de
rOhio et faciliter sur quelques points sa navigation. Les
chutes que Ton rencontre pres de Louisville abaissent
subitemenl de quelques metres le niveau du tleuve, et
Ton ne pent les f'ranchir que dans la saison des crues ,
ou les eaux superieures et inferieures sent niomentane-
nient remises de niveau. Un canal que Ton a creuse sur
la rive meridionale de TOliio, dans une longueur de
2,376 metres, assure dans tous les temps la navigation.
II a ete termine en i83i, et les proportions quon lui a
donnees permeltent le passage des plus grands bateaux
a vapeur qui font le commerce entre la Nouvelle-Or-
leans, Louisville, Cincinnati, Wheeling et Pittsbourg.
La navigation de 1 Ohio offre d'autres obstacles, dans
les bancs de sable ou de giavier qui obstruent quelques
( ;^37 )
parties de son lit, et qui n'y laisseiit subsister cjue des
passes intermediaires ou il est difficile de se niaintenir;
mais le coinite des ameliorations interieures a propose
de diminuer ces obstacles par des digues de barrage
qui forceraient lecourant a suivre une ligne deterininee,
et a creuser le lit du chenal ou il passerait.
Des travaux analogues ont ete executes d'apres les
plans de cette commission, pour approtondir i'entree
du port de Presqu'ile sur le lac Erie, et Ton est parvenu
a obtenirun fond de quelques metres de plus.
Des reconnaissances et des operations dune autre
nature ont long-temps occupe le comite d ameliorations.
L'intention du gouvernement federal etant d'etablir une
route militaire et commerciale entre Washington et la
Nouvelle-Orleans , il tallait examiner les differentes di-
rections qu'elle pourrait suivre et toutes les contrees
intermediaires qu'on aurait a traverser. La plupart de
res regions etaient couvertes de forets, ou herissees de
rocliers et de montagnes, ou embarrassees par des tor-
rens , des fleuves, des marecages, ou occupees par des
tribus indigenes; le trajet de ces pays nouveaux et sau-
vages etait aussi perilleux que difficile, el Ton avait a se
rondamner a toutes les fatigues, a toutes les privations.
Cette reconnaissance fut faite par le general Bernard,
dont le major Poussin partageait les travaux : ils par-
courui'ent et releverent ensemble toutes les contrees
qui separent ces deux villes, reflrent plusienrs fois ce
long trajet dans differentes directions, comparerent entre
eux les traces de quatre routes qui pouvaientetre etablies
entre I'un et I'autre point, les examinerent egalement
sous les rapports militaires , poliliques, economiques et
commerciaux, et rendirent compte de leurs travaux au
gouvernement federal. La route de lest offrait I avantage
( 3:^8 )
(ie mellre en coniiiiiiniration les unes avec les aiitres
toutes les rapitales des etats dii sud : son developpemenl
etait de i,i36 niilles. La route du milieu se rapprochait
du pied des Alleghanys ; elle avait i,iofi milles de lon-
gueur: les deux routes de I'ouest allaient franchir les
nioDtagnes par les cols les plus accessibles; elles ga-
gnaient la vallee du Tenessee , traversaient successive-
nient la Coosa , le Tumbeckbe et les autres affluens du
golfe du Mexique : Tune de ces routes occidentales avait
i,i4o n)illes, I'autre en avait 1,282. Les rapporteurs
penserent qu'une seule route ne snffirait point a toutes
les coninmnications , et qti'il serait utile d'en etablir
tieux, I'une a lest , I'autre a I'ouest, soit pour multiplier
les relations avec la Nouvelle-Orleans, soit pour favoriser
les interets coinrnerciaux et la defense de lous les etals
intermediaires.
Le gouvernement federal s'occupa bientot d'unenou-
velle ligne de communication entre I'Atlantique et le
golfe du Mexique. Devenn possesseur des Florides en
1 82 1, il chargea le general Bernard de faire dans cette
contree toutes les reconnaissances necessaires pour eta-
blir un canal de navigation a travers la partie superieure
de la prt'squ lie, den tracer la direction, et de determi-
ner les differentes prises deau dont on pourrait dis-
poser pour son usage. Dans cette reconnaissance qui fut
commencee en 1827, le general , accompagne de son
digne collaborateur, parcouri.t, entre I'Atlantique et le
golfe, tous les cours deau, toutes les hauteurs ou Ion
pouvait tracer la direction d'un canal. II s'a r re ta a u pre-
set de le faire deboucher dans I'Ocean par la riviere
Sain te -Marie , qui separe la Georgie et la Floride ; d'ou-
vrir une communication entre cette riviere el celle de
Saint-Jean, dont on remonterait le cours jusqu'au Black-
(339)
Creek; d'etoblir entre le Black-Creek et la riviere de
Santa-Fe , uti canal ou lo)) ferait arriver les eaux de
plusieurs etangs intermediaires , et particulierement de
celui de Sampson; de remonter ensuite le cours de la
Suwannee depuis le confluent de la Santa-Fe jusqu'a
Charles-Ferry, et de diriger la continuation du canal vers
I Occident, fjusqu'a la riviere Saint-Marc, qui se jette
dans le golf'e du Mexique.
Les ingenieurs, charges de poursuivre leurs recon-
naissances , penserent qu'on pourrait prolonger vers
I'occident cette ligne de navigation interieure, en ou-
vrant un canal entre la riviere d Ocklockhony et le de-
troit de Sain I George , entre le lac Wimico et la haie de
Saint-Joseph, entre la baie de Saint-Andre et celle de
Santa-Rosa , qui communique par une passe du meme
nom avec la baie de Pensacola. On pourrait egalement
ouvrir un canal entre le Lagoon et la baie Perdido,
entre cette baie et celle de la Mobile. De ce dernier
point on peut se rendre au lac Pontchartrain par les
passes du littoral , en creusant davantage celle du Heron;
et la commission a trace le plan d'un canal a etablir entre
le lac Pontchartrain et le Mississipi. Si tous ces travaux
viennent a s'executer, on aura une ligne de navigation
continue entre la Nouvelle-Orleans et I'Atlantique, sans
etre expose aux accidens de la haute mer et aux chances
d'une guerre maritime. Ce systeme de navigation inte-
rieure et parallele au littoral, qui n'est encore qii'nn
projet pour les plages du golfe du Mexique , a deja ete
applique sur une partie des cotes de I'Ocean, et Ton y u
successivement execute plusieurs (ranaux destines a assai-
nir les marais voisins du rivage, a multiplier les commu-
nications, a faciliter la defense. Nous pouvons citer le
canal de Savannah, qui doit se prolonger vers le midL
( 34- )
jtjsqu'au roiirs de lAlatamalwi ; le canal du Dismal-
Swamp, qui traverse de longs marecages, et qui met
en communication la haie d'Albemarle et celle de Nor-
folk ; le canal de la Cliesapeak ii la Delaware, qui a etabli
une navigation directe entre Baltimore et Philadelphie,
sans qu'on eut a parcourir dans toute leur longueur les
deux grandes baies qu'il reunit; le canal de la Delaware
au Rariton, qui met en communication directe les ports
de Philadelphie et de New-York; le canal projeteatra-
vers Tisthme du cap Cod , entre les baies de Buzzard et
de Barnstable , pour epargner aux batimens coliers le
danger de doubler ce cap ; un autre canal egalement pro-
jf'te entre la baie de Boston et celle de Narraganset; et
ciifin , plus au nord, le canal de 3Iiddlesex , qui ouvre
une communication entre la rade de Boston et le cours
du Merrimack. Ce canal , qui a 27 milles de longueur,
est le plus ancien qui ait ete creuse aux Etats-Unis :
Boston , cette ville si distinguee par les progres des
sciences et de la civilisation, a pris souvent I'initiative
de ce qu'on a fait d'utile et d important, et c'est dans
cette region de I'Amerique du Nord qu'on peut placer
I'origine et le berceau de sa grandeur.
En tracant , dans cette analyse, le systeme des prin-
ci[)ales comnumications, destinees a lier entre elles les
differentes parties de la confederation americaine, nous
iioiissommessuccessivementarretesa cellesqui devaienl
!inir lesetats de Test a I'ouest, et a cellesqui avaient pour
but d'etablir dans toute I'etendue du littoral ame'ricain
tnie ligne de navigation interieure. D'autres canaux,
d'autres routes de fer ont ete entrepris dans des vues
agricoles, industrielles, ou commerciales; tels que le
canal Morris, destine a I'exploitalion particuliere des
Jx'llcs mines de charhon anthracite de la Pensylvanie; il
( 34i )
a 90 niilles ile longueur, ci il se terniine a la Passaie
qui se jette dans la bale de New-York : le canal du Lehig,
el celui de la Delaware a I'Hudson ont eu pour but de
tavoriser les niemes exploitations ; I'un a 46 milles de
longueur, I'autre en a 65 milles. Nous indiquons souvent
la mesure de ces lignes de navigation, afin d'en mieux
faire apprecier I'importance.
Parmi ces entreprises qui, sans etre necessaires au
Hen de la confederation entiere, ont un grand interet
commercial, pour plusieurs etats, nous citerons le pro-
jet d'ouvrir un canal le long des rives du Tennessee
ou sont situes les rapides du Muscle-shoals : cette lon-
gueur est de 36 milles : les plans du canal ont ete tra-
ces, et ils seront sans doute executes par le gouverne-
ment d'Alabama, qui a deja fait entreprendre d'autres
travaux dans le lit meme du fleuve, pour en faciliter ia
navigation entre Florence et Waterloo. Toute cetle
partie du Tennessee traverse le territoire de I'Alabama;
el ce dernier etat est particulierement interesse a debar-
rass€r le lit du fleuve de ses derniers obstacles.
Nous devons mentionner ici, comme entreprise en-
core plus importante, le canal de Miami qui doit ouvrir
une nouvelle communication entre I'Ohio et le lac Erie.
Ce canal, deja ouvert entre Cincinnati et Dayton , aura
265 milles de longueur: on en a execute plus du quart
en remontant la vallee du Miami ; louvrage se continue,
et Ion doit le conduire jusqu'a la riviere Maumee qui
aboutit a I'extremite occidentale du lac Erie.
Un autre canal projete entre Maumee et le Wabash
I'un des affluens du Mississipi; et un troisienie canal
e'galement projete entre le lac Michigan et rillinois,
autre affluent du Mississipi, sont destines a etablir entre
les grands lacs du nord et le golfe du Mexiqne les
24
( 342 )
iiieines coniniunicatiuns que celles que nous avons vu
tracer entre las etats de Test et de I'ouest, entre leurs
principales villes, entre les differentes parties de leur
immense littoral.
Quelle que soit I'etendue du territoire federal , deux
puissans moyens, dus an genie inventif de I'homme,
sont venus faciliter les communications et rapprocher
pourainsi dire les distances. L'application des machines
a vapeur a la navigation rend les voyages beaucoup
plus rapides sur loutes les rivieres, sur tous les canaux
oil ce procede est pralicable; et I'etablissement des
routes de fer, partout ou elles peuvent etre construites,
accelere encore davantage les communications.
Aussi I'emploi de I'un et de I'autre moyens s'est promp-
tementmultiplieaux Etats-Unis. On n'a pas mcme craint
den faire usage simultanement, entre les differens lieux
qui par leuriinportance etleur commerce etaient interes-
sesa multiplier leurs relations mutuelles; et la commis-
sion des ameliorations interieures, dont les travaux ont
pu etre d'autant mieux analyses dans I'ouvrage deM. le
major Poussin, qu'il y avait lui-meme habituellement
participe, a eu a s'occuper du trace et de I'etablissement
de plusieurs grandes routes de fer. Nous ne suivrons
point le detail de ces operations nouvelles : ce serait
entreprendre de parcourir les differentes lignes dun
reseau complique, qui s'etend de proche en proche sur
de nouveaux territoires. Bornons-nous a signaler ici un
frappant exemple de la rapidite des communications
que Ion espere obtenir par I'emploi combine des chemins
de fer, et de la navigation a la vapeur. Lorsqu'on aura
lermine les chemins de fer commences entre Washing-
ion et Baltimore, ontre Ballimore et Philadelpliie, entre
Philadelphie et New-lork, on croit pouvoir parcourir
( 343 )
en i5 heures cette distance qui est de 210 milles anglais
( environ yS lieues. ) On a le projet de construire egale-
ment une route de fer entre Boston et I'entree de la
baie de Narragansett, et d'etablir entre cette baie et
New-York un service de bateaux a vapeur : la distance
des deux villes est de 241 milles, environ 88 lieues : on es-
pere la parcourir en 12 beures. Ainsi, en faisant succe-
der immediatement I'un a I'autre tous les services de
cette longue ligne de communication, Ion se rendrait
en moins de 3o heures de Boston a Washington, qui,
en suivant les routes actuelles, en est eloigne de
166 lieues.
Arretons-nous un instant a I'un des plus importans
travauxdont lecomite d'amelioralionait eu a s'occuper,
a la construction d'un port artificiel, pres du cap
Henlopen qui s'avance a I'entree de la Delaware. L'em-
bouchure de la baie, semee de has-fonds qui rendent
difficile la navigation de son chenal , avait besoin d'un
port, ou Ion ne craignit pas les coups de vent, et le
choc des glaces qui, en hiver, s'accumulent dans la
Delaware; et la commission s'est determiueea la con-
struction de deux grandes digues destinees a proteger
ce port contre les vents, les coups de mer et les glaces.
fci'une de ces digues, ou break-water (brise-lames) a
un developpement de 1,100 metres; I'autre digue ou
brise-glaces a 4^7 metres. On a consulte les travaux de
meme nature qui ont ete executes a Cherbourg et a
Plymouth, afin de bien calculer les angles des talus de
chaque digue, et de mieux se rendre compte des pro-
portions et du poids des materiaux a employer pour
les massifs et pour les reveteniens.
On a adopte 4^ degres pour I'inclinaison des talus
nterieurs : celle des talus exterieurs , plus soumise a
( 344 )
I action des vagues, varie a differens points de la hau-
teur; c'est entre les niveaux de la haute et de la basse
iner que cette inclinaison est la plus grande, parce que
cette partie du talus doit plus habituellement resister
au volume et au mouvement des tlots.
Nous n'etendrons pas davantage nos observations :
elles ont pu faire apprecier I'importanre des travaux
publics executes aux Etats-Unis, et le merite des hom-
mes recommandables qui furent appele's a y prendre
part. L'ouvrage oil M. le major Poussin rend compte
d'une grande partie de ces travaux fera mieux juger
encore de leur utilite et de I'influence qu'ils ont deja
sur laprosperite d'une nation si promptement agrandie.
Les hommes de I'art y etudieront avec fruit les procedes
dont on a fait usage, soit pour favoriser sur un meme
point la navigation ascendante et descendante, par nn
double rang d'ecluses accolees, comme on la fail a
Lock-Port sur le canal Erie; soit pour economiser la
depense des eaux, en remplacant les ecluses par des
plans inclines et des sas mobiles comme on i'a fait sur
quelques points du canal Morris, soit pour la construc-
tion de quelques pouts en bois, et pour celle des routes
de fer, qui varie selon les niateriaux et les terrains dont
on pent disposer; soit enfin pour toutes les operation;*
de calculet d'application qui ont besoiu d'etre eclairees
par I'experience. Nous nous sommesbornes a analyser
ces grands travaux ; c'etaitpeut-etre la mcilleur maniere
<le les louer.
Heureux sous ce rapport, les pays oil les grandes
speculations sont souvent dirigees vers I'interet public,
et oil I'amour de la patrie devienl I'ame des plus gene-
reuses entreprises! Ces pays peuvent eprouver d'autres
orages;mais la terre conserve le bien quelle a recu , el
( 345 )
les gernies de prosperite qui lui sont confies : les canaux
restent ouverts a une circulation d'homines et de ri-
chesses qui se croisent dans tous les sens; et depuis le
premier bateau a vapeur que Fulton a lance sur un
fleuve des Etats-Unis, leur nonibre s'est accru de plus
de onze cents dans lecours de quelquesannees. Lenieme
systeme de mouvement applique aux transports qui se
font par les routes de fer, pent recevoir d'autant plus
de developpeniens que les Etats-Unis abondent en com-
bustibles. Les firets diminuent; elles ne couvrent plus
les pays ou la culture et la civilisation se sontavancees;
mais celles qui se sont ensevelies et carbonisees dans la
terre suffiront pendant plusieurs siecles a la consomma-
tion des hommes.
( 346 )
TROISIEME SECTION.
Actes de la Soci^te.
PROCES-VERBAUX DES SEANCES.
Seance du 2 mai i834.
Leproces- verbal de la derniere seance est lu et adopte.
La Commission centrale, sur la proposition d'un de
ses membres , decide que son Bulletin sera adresse a
la Societe royale geograpbique de Londres, et elle reii-
voie au comite du Bulletin la lettre de M. le capitaine
Maconochie, son secretaire, relative aux relations qui
viennent de s'etablir entre les deux Societes.
La Societe royale des Antiquaires du nord adresse les
volumes iv et v du recueil qu'elle publle sous le titre
de Scripta historica Islandorum.
M. le capitaine Graah fait hommage a la Societe
d'un exemplaire de son voyage a la cote orientale du
Greenland , qui a obtenu en 1829 la medaille de 5oo
francs pour le prix annuel. M, Eyries est prie de vou-
loir bien rendre coniple de cet ouvrage ecrit en langue
danoise.
M. Caballero ecrit de Madrid pour offrir a la Societe
un exemplaire de I'ouvrage qu'il vient de publier sous
le titre de Nomenclatura geografica de Espaha. L'au-
teur croit avoir ouvert une nouvelle route , en redui-
sant cette nomenclature a des regies et a des principes
fixes, etd'une maniere qui lui senible plus pbilosopbi-
que et plus instructive que celle qui a ete usitee jus-
qu'a present.
( 347 )
M. d'Avezac est prie d'examiner cet ouvrage et d'en
faireun rapport verbal.
M. Roux de Rochelle offre a la Societe , de la part
de M. le major Poussin , iin exemplaire de I'ouvrage
qu'il vient de publier sur les travaux d'amelioration
inlerieure projetes ou execute's aux Etats-Unis. M. Roux
est prie de rendre compte de cet ouvrage.
M. Jomard communique, de la part de M. le baron de
Hammer, une notice extraite des annales de litterature
de Vienne , et renfermant plusieurs eclaiicissemens
geographiques sur la mer Noire et les provinces russes
voisines. M. de Hammer adresse aussi a la Societe le
texte persan dun article curieux sur I'lnde , tire de
Thistorien Wassafj et il annonce I'envoi prochain
d'une seconde notice sur I'ouvrage du meme historien.
— M. Bianchi est prie de rendre compte de*s differens
fragmens envoyes par M. de Hammer.
MM. Al. Barbie du Bocage et Ansart deposent sur le
bureau, le premier un exemplaire de son Dictionnaire
geographique de la Bible , et le second une nouvelle li-
vraison de sa traduction de I'atlas de Kruse. Des remer-
rimens sont adresses aux deux auteurs au nom de la
Commission centrale.
M. Jomard annonce qu'il se propose de coramuniquer,
dans une prochaine seance, I'itineraire qua redige a sa
priere M. de Bove , naturaliste qui a reside quelque
temps en Egypte , en Arabie et en Syrie , et qui vient de
partir pour Alger. L'un de ces voyages a ete execute
dans le Yemen , I'autre de Suez a Gaza et de Gaza a Je-
rusalem, par un chemin peu trequente.
M. le president rend compte a I'assemblee de la visite
que les membres du bureau de la Societe et du bureau
de la Commission centrale ont faite a M. le comte de
( 348 )
Montalivet, president de laSotiete, et de I'accueil qu'ils
en ontrecu. M. le comte de Montalivet a promis des'oc-
cuper avec un vif interet des divers ohjets sur lesquels
on a cru devoir appeler son attention.
Seance da 16 mai.
Leproces-verbal de la derniere seance est lu etadopte.
M, Dessalines d'Orbigny ecrit qu'il se trouve tres
honore de I'opinion favorable que la Societe a bien
voulu concevoir de son voyage dans I'Amerique me-
ridionale, et qu'il fera tons ses efforts pour repon-
dre a I'idee quelle parait avoir prise de ses travaux
geograpbiques.
M. le president infoime la Commission centrale de
I'offre que lui a faite M. Clement-Mullet , membre de
la Societe , de rediger gratuitenient une table generale
analytique pour les vingt volumes de la premiere serie
du Bulletin. Le comite du Bulletin est cbarge de pre-
senter un avis sur I'offre de M. Clement-Mullet.
M. Warden depose sur le bureau, de la part de la
Societe libre d'Agriculture , sciences et arts de I'Eure ,
le cahier d'avril du recueil de cette societe.
MM. Dubuc , Roux de Rochelle et d'Avezac li-
sent successivement trois rapports, le premier sur le
voyage en Suede de M. Daumont; le second sur un ou-
vrat^e de M. le maj«)r Poussin , intitule : Travaux d'a-
meliorations interieures entrepris ou executes aux Etats-
Unis d'Amerique, et entin le troisieme sur I'ouvrage
intitule : Recherches sur I' emplacement de Carthage par
M. Falbe, consul general de Danemark a Tunis.
Ces trois rapports sont renvoyes au comite du Bul-
letin.
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Jiiilli-tift ifr- til .fniie'tf t/r tii-i«/nift/i,
ff'AVrte X!
BULLETIN
1)E LA
SOCiETE DE GEOGRAPIIIE.
juiN i834.
PREMIERE SECTION.
MEMOIRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPPORTS.
RELATION
D^iin voyage dans rinteriear de V Afrique septentrionalei
Par Hhaggy Ebn-el-Dyn el-Eghouathy.
( suite).
annotations et remarques geggraphiques.
Ainsi que M. Hodgson en a fait la remarque, lenom
d'El-Eghoucit se rapporle an nieme lieu que Shaw ap-
pelle Loivaate: le voyageur anglais a joint Tarlicle coninie
partie integrante du nom, sous forme de L initiale, ce
([ui arrive assez frequemment aux personnes qui necon-
naisserit point gramniaticalement la langue arabe; de
plus, il a supprinie I'articulation gutturale du ghayn,
et sous re rapport, il s acoorde avee la prononciation
( 35o )
ties Arabes d'Alger de la bouche desquels j'ai en tend n
ce nom, et qui font sentir seuleinent larticulation dti
ayn : toute la dit'terence, quant a lorlhographe origi-
nale , consiste en un seul point diacritique, dont I'ab-
sence jnotiverait, dans la transcription einopeenne, la
substitution de El-^a'oiiath a El-Eghouath. C'est la le-
con pour laqueile j'incline d'autant plus, que les officiers
francais qui ont entendu prononcer le nieine nom a
Oran ont exprime par Lahoitat 1 emission orale dont
leur oreille avail ete frappee.
Shaw n'a point su I'existence dune grande ville d'El-
Aa'ouatli ; il siguale seulement une tribu deZ,o«'rtfl/e(i),
dont les diiskerahs , situes a neut lieues dans I'ouest de
Demid, forment, avec ce dernier lieu et relui de Ayn
Madhy, les villages les plus considerables de cette partie
du Ssahhra. Les renseignemens recueillis a Oran doti-
nent aux 5e«/ Za^oart? (c'est-a-dire Beny-el-Aa'ouath)
une ville entouree de murs de pise , situee vers la source
d'une petite riviere a deux journees dans Test de A'yn-
Madhy, et ayant au sud une grande chaJne de montagnes
dans laqueile se trouve une ville nommee StiJilen.
Dans une lettre adressee a M. Peter-Stephen Dupon-
ceau, et inseree aux Transactions of the American
philosophical society de Philadelphie (2), M. Hodgson a
donne, sans doute d'apres les explications verbales
d'Ebn-el-Dyn, un plan d El Aa'ouath, figure par une
ellipse coupee, suivant son plus petit diametre, par un
innr de separation qui se prolonge, au-dela de lenceinte
elliptique renfermant la ville proprement ditc , jusqua
une seconde enceinte quadrangulaire entourant les jar-
dins dependans de la ville; le luur de separation offre,
(l) yqyages en llarbarie, edition francaise de I.n Haye, page 107.
(a) Transactions , etc., tome iv, p^go -iXf,
( 35i )
en son milieu , une seule porte de communication , que
Ton terme lorsqne les deux tribus sonten hostilite mu-
tuelle; chaque tribu a ses portes particulieres pour
comminiiquer soit avec les jardins, soit avec la cam-
pagne exlerieure.
Cette division d'El-Aa'oualh en deux parties parait a
M. Hodgson un plienomene d'autant plus digne d'at-
tention, qu'il se reproduil dans les villes de Ghadaines,
Ouerqelah et Telenisen; le capitaine Lyon I'avait deja
signale pour Gliadames, le docteur Sliaw pour Teleni-
sen ,• niais il croit etie le premier qui Fait indiqiie pour
Ouerqelah et El-Aa'oualli. ftl. Hodgson a oublie de citer
la plus celebre do ces villes biparlites , Fes, dont les dis-
sensions intestines entreles Qiiyrouyyn et les Andalous
sont rappelees par Leon et Marmol et rr.contees par
I'auteur du Qarllias (i). L'Ediysy avait aussi nientionne
la douljle individualite de Telenisen (2) comme celle de
Fes. Tegeinont est encore dans le meme cas.
La riviere Emzy,qui traverse El-Aa'ouath ,n'est point
figuree sur le plan de M. Hodgson ; elle n'a ete men-
tionnee, que jesache, par aucun voyageur ni geographe
connu : c'est probableinent un des af'fluens superieurs
du Ouad-el-Gedy ou riviere du Chureau decrite par
Shaw. (3)
Tegemont n'est point mentionne dans le texte de
Shaw, niais il est inscrit sur I'une de? cartes qui acconi-
pagnent son livre, sous I'orthographe Tejcinoute,k 12
milles au nordest d"El-Aa'ouatli. Un autre Tegemout
(I** Leon, dims liamiisiot troisicme edition, folio 34 vorso. —
Marmol , edition francaise, tome n, page 157. — El - Quarthasi
premiere partie.
(■2) Edrisi de Hartmann , pages 171 et 191.
(3) Tome I, page 167.
a5.
( 332 )
est indique par Abou-Obayd el-Bekry, de Cordoue, sur
la route dc Tahart a la mer. (i)
A'yn-Mddhy est pareillement indiqiie sur les cartes
de Shaw, qui ocrit ce nom Ain-Mnithie; niais loin de le
placer dans I'ouest de Tegemout alnsi que le fait Ebn-
el-Dyn, il le met a 17 miiles dans lest un pen nord de
ce daskerah ; dans son texte, il enonce simplenient que
A'yn-Madhy et Deniid sont tous deux au sud-ouest de
Fethh-el -Bothnia (2) ; mais la situation de ce point a
Touest de Tegemout est confirmee par des renseigne-
niens recucillis a Oran, et d'apres lesquels A'yn-Madhy
est a deux journees dans louest d'EI-Aa'onath.
Shaw designe aiissi sous ie nom de Maithie I'une des
tril)us qui errent en ces parages.
Dans Omin-A'sskaid , qu'il eut ete mieux peut-etre
d'ecrire Mo'askar ou Mnskarah, il est aise de reconnaitre
la ville appelee vulgairement Mascar ou Mascara, et dans
Ouahrdn, Oran.
he Gebel el-^'mour, qu'Ebnel-Dyn met au nord de
Tiegeniout, n'est autre que le district montagneux des
Ammer {\e Shaw, voisin d'El-Aa'ouath et de Tegemout,
et distant de six lieues, au sud , du daskerah de Mede-
ray. II resulte des paroles memcs d'Ebn-el-Dyn, que ce
district a deux journees d'etendue en longueur comme
en largeur, et que cette etendue parait devoir etre
< omptee, pour une partie, au nord-ouest de Mcderay,
puisqu'il y place les sources memes duSchelit, ainsi
qu il va etre dit.
(i) Notice d'uii manuscrit arabe «lo la bihlioilieqiie du roi, conte-
iinnt la description dc I'Afrirjiie, par M. Qiintremcrc, paf;rs S7 et 09.
(2) Tome I, page 107.
( 353 )
La riviere El-Khnyr, que M. Hodgson ecrit Alkhyr.,
et qui est univcrseUeinent connue au dire d'Ebii el-Dyn ,
lie Vest aucunenient en Europe sous cette denomination.
J'avais d'abord suppose que le Khayr n'etait autre que
le rtiisseau de Mederay, ou Midroe de Shaw , I'un des
aftluens superieurs du Schelif; mais ayant eu , depuis ,
connaissance dun releve des noms geographiques em-
ployes par Scliaw, avecla transcription arabe , en regard,
des denominations qui sont usitees a Oran (document
recueilli et envoye par M. le capitaine d'etat -major Le-
vret, el qui ma ete nbligemment communique par M. le
colonel Lapie), j y ai trouve, vis-a-vis de Seha^ ounA^joun
(nomdes sources du Schelifd'apres Shaw (')), Vindication
Oued-el- Khayr, avec cette note , que I autre nom nest
pas connu a Oran.
Rdsel-Schah , Sdfel-el-Fayddh , El-Khadem y El-
Lefahhdt^ sunt autant de stations dont les noms sont
arabes, et qui n'ont ete mentionnes, a ma connaissance,
dans aucun autre document edit.
Metslyli, qui doit se prononcer Metslily [Mitslelee)
au dire de M. Hodgson , est egalement un lieu qu'Ebn-
el-Dyn a mentionne le premier , et qui parait place sur
le versant occidental des hauteurs qui I'orment la tete
du Ouady-Mozab.
Le OuddyMozdb^ ou vallee de Mozab , est habite par
les Beny-Mozab ou Mozabys, qui se donnent eux-memes
le nom de A'yts-Eoug-a/an ou AjtS'Ongelan (2); ni la
forme plurielle du mot berber Eougalan ou Ougelan, ni
lorthographe du mot ;nabe Mozab, ne se pretent a I'in-
[i] Tome I, page 44.
(9) Transactions, e/c. , tome iv , p. 3o->4.
( 354 )
terpretation d'apres laquelle M. Hodj^son traduit I'une
et I'autre par les enfans de V austere (en arabe mossaeU)^
Shaw les appelle Bcni-Mezzah , et place leur pays a 35
lieiies ail sud dea tribus d El-Aa'ouath et d'EI- A'niour. ( i )
M. Hodgson dit que leur oasis ou eghzer est a environ
3oo niilles au sud d'Alger, et separe des Wadrcagans et
des JFurgelans , c'e:jt-a-dire des oasis de Teqort et de
Ouerqelah , par iin desert de huit journe'es sans route
tracee; il cstime que leOuady-Mozab doitetre place vers
le 3i'^ degre de latitude, et il fail observer que cespeu-
ples sont remarquablement blancs , landis que ceux de
Teqort et de Ouerqelah sont noirs. (2)
Shaler, dans ses lettres a M. Duponceau , datees de
1823, a consigne des informations (repetees ensuite
dans Ihs Esquisses d^ Alger') qu'il avait recues dun tha-
leb de la nation de Mozabys, lequel, en effet, etait
blanc : elles portent que ce peuple hahite un district du
desert, entoure de niontaenes hautes , rugueuses et
steriles, a vingt journees de caravane au sud d'Alger;
qu'il est partnge en cinq villes ou cantons, savoir, Gar-
dica, Birigan, Wargalah , Engensn qI Nadrama, chacun
desquels est gouverne par un conseil de douze nota-
bles nonimes par voie d'election (3). Malgre les fautes
lypographlques qui defigurent quelquesuns de ces
noms,il est aise de reconnaitre dans Gardica ou Gor-
dica ^ la Gardeiak de Shaw, la Ghardeyah d'Ebn-el-
Dyn, capitale du Ouiidy-Mozab d'apres ces deux der-
niers ecrivalns; Birigan n'est autre que Berygan^ indi-
que par Shaw comme le daskerah le plus considerable
(i) Shaw, tome i.page 108,
(2) Transactions ^elc. , tome iv , page 22.
(3) Ibidem, tome i, page 45 1. — Esquisse de P^tat dJlger, p. 1 14.
( 355 }
apres Ghardeyah, et comme situe a neuf lieues k Test
du chef-lieu ; mais Giara n'est mentionne que par Shaw
seul. WargaJah est la Ouerqelah d'Ebn-el-Dyn , dont je
parlerai plus loin ; Engcnsa on Egoussa est XEiigousah
de Shaw (i); enfin Nadrama est uiie station que nous
n'avions vue mentionnee nulle autre part que dans L'E'^
drysy, lequel la nomnie dans I'itineraire d'El-Uahnesa
d'Egypte jusqu'a Segelmesah , itineraire trace sur les
cartes de D'Anville.
La mine de plomb qui se trouve dans le desert voisin
n'est connue que par lindication d'Ebn-el-Dyn ; le nom
de Gebel el-Ressdss quelle porte ne signifie point autre
'chose que la montagne de plomb ; il y en a une ainsiap-
pelee tout pres de Tunis.
La tribu des Aouldd-Ndjl est mentionnee par Shaw,
sous Torthographe de iVo/7e (2), comme errant dans le
voisinage des montagnes d'El-Aa'ouath et d'El-A'mour,
non loin de la tribu de Matmata; nous verrons ces deux
noms sereproduire dans les environs du golfe de Qabes.
Les stations de El-Tsemdd, El-SchdreJ ^ El-Saddeny ,
Ouddy-el-Schaheb , intermediaires entre Metslyli et El-
Qolya'h, portent des noms arabes; elles ne sont men-
tionnees nulle autre part qu'ici.
El-Qolyah, qui se trouve situee a cinq journees de
marche de Ouerqelah , pourrait bien etre le meme lieu
que Fray Diego de Haedo , dans sa Topografia e historia
general de Argel {?>), mentionne comme ayant servi de
refuge au roi de Ouerqelah lorsque Salehh el-Rays >
(i) Tome I, page 169.
(2) Tome I, page 107.
(3) Cap. VII de la deuxienie partic , folio (J7.
( 356 )
bascha d'Alger, inarcha contre sa capitale en i5;")2 :
« El rey de Hiiergueld estai>a de aJli siete jornadas , que
son cincuenta leguas , en una tier/a < ue se llama Alcala,
y niny vecina de la tierra de los negros «. II faul convenir
cependant que, malgre la ressemblance des noms , la
distai)ce de cinq journties indiquee par Ebn-el-Dyn oe
peut concorder avec celle de sept journees ou cinquaute
lieues comptee par Haedo.
On trouve aussi dans Abou-Obayd el-Bekry (i) un
lieu appele ElQala'h, ou Ion se rend en partantd'une
ville situee sur la limite du Ssabhra ; niais le defaut de
lumieres plus etendues ne perniet pas d'en prononcer
I'identite avec El-Qolya'h d'Ebn el-Dyn.
Ouerqelah est appelee Guargala par Leon. Guergucla
et Guerguelen par Marmol, Huerguela par Haedo,
Oudrkeldn par I'Edrysy (lu Vareklan par Hartmann aussi
bien que par les Iraducteurs rnaronites), Oudrqelan par
A.bou-Obayd, TVurglah par Shaw, IVargalah par Sha-
ler, IVurgelah par Hodgson. Gramaye la nomme Guar-
gala ou Huerguela^ suivant qui! copie Leon ou Hae-
do. (2)
Suivant Leon, Ouerqelah est une ville bien batie,
bien fortifiee, ou les dattes abondent , et dont les habi-
tans sont noirs, chose que repete Marmol, bien qu'il
ait moins servilement que de coutume reproduit ici le
texte de Leon. Haedo ne parle que de I'abondance des
(i) Notice, etc., page 102.
(2) Leon, dans Ramusio, folio 81 verso. — Marmol, tome in,
pages 32 , 5 r. — Haedo , folio 67. — Edrisi de Haitmaiin , page i38.
— Notice, etc., page 101. — Schaw ,tonie i, page 169. — Shaler ,
Transactions , etc. , tome i, page 45 i- — Hodgson , ibidem , tome iv ,
page 2». — Gramaye , pari. 2 , p. 65 , 190.
{ 357)
dattes, et marque la distance a qiiatre journees de Te-
qort, ce qui, a son compte, suppose vingt-cinq journees
depuis Alger. Shaler comprend Ouerqelah parini les
villes du Ouady-Mozilb, niais il est coiitredit en ceci par
les autres autorites. M. Hodgson la met a trente iieues
sud-ouest de Teqort : Shaw attribue precisement cette
position a Engousah , et porte Ouerqelah a cinq Iieues
plus loin a I'ouest. Riley mentionne, d'apres le recit de
Sydy Ahhmed , une ville de Gnjelah (^i), ou Ton passe
en venant de Tonat a Teqort a travers le Beled el- Geryd ;
n'est-ce point Ouerqelah qui! a voulu indiquer?
Ce qu'Ebn-el-Dyn raconte des puits artesiens que Ion
creuse a Ouerqelah s'accorde completement avec ce
que Shaw rapporle , a cetegard, de tous les villages du
Wadreag en general. Photius nous a conserve un pas-
sage d Olynipiodore, qui parle de puits semblables (2),
creuses quelquefois jusqu'a cinq cents coudees, dans une
oasis innomniee qu'il y aurait toute raison de prendre
pour celle des Erouaghah.
Le mot sehkhali, applique par Ehn el-Dyn au plat
pays qui enloure Ouerqelah, se trouve employe fort
souvent par Shaw dans sa description de la Barharie ;
ce mot signifie un marecage sale. D'apres cette disposi
lion du terrain , on doit etre peu surpris d'y voir croitre
aussi frequemment le hhalfd, qui est une plante marine,
et, a ce quil parait, de la famille des algues.
Schath et ScJickhy sont des mots arabes qui signifient
oonimunement les rivages de la mer, mais qui se trou-
vent appliques a divers endroits de linterieur de I'A-
frique septentrionale, ou il existe des terrains has sou-
(i) Riley, £ofj of the brigli Commerce , p. 3S7.
{■>.} Pholii bibliollieca {Roiieii , i()S3) coloiines 191 ct iy2.
( 358 )
Tent inondes. Shaw signale, dans le pays de Zab , au
nord de Oiied-el-Gedy, des terres noyees qui recoivent
le nom de Schath ; mais le scliath situe dans la jnrjdic-
tion de Ouerqelah n'avait cte encore signale par per-
sonne. Des renseignemens recneillis a Oran indiquent
pareilltnient un schath a quatre joiirnees au sud de
Ma'skarah.
Les villages de Roujsdt, A'gcgeb et Meqousoh, n'a-
vaient ete mentionnes par aucun ecrivain avant Ebn-
elDyn ; a moins toutefois que Ton ne suppose Meqou-
sah idenlique a Engousah de Shaw et de Shaler, ce qui
ne serait point denue de vraisembiance.
Les diverses stations de Aouldn, El-Ahhmar, Byr-el-
JSahl, Byr-el-Lefndjtth, Bp-el-Tdrqy , Byr-el Zerq,
Byr-Bedemdn , Temymoun^ Aouqerout, n'avaient non
plus eteindiques, queje sache, dans aucun document
anterieur.
Mais ^o«/e/ est compris dans les informations recueil-
lies par Lyon , qui ecrit Awlcf , et qui place ce lieu dans
I'oasis de Touat, a dix-huit journees au nord de Taou-
dyny. (i)
Suivant Ebn-el-Dyn , Aoulef est la ville principale de
Touat; Lyon designe A'yn-elSsalclih y bien que Ritchie
cut precedemment \x\i\\<\y\^ A gahly ; le scheykh Hhaggy
Qasem signale aussi Agably, qu'il dit avoir ete fondee
par Abou-Naameh ; Abou-Bekr de Seno-Palel nomme
El-Oudlyn (2); enfin si Ton remonte jusqu'a Ebn-Ba-
thouthah, qui le premier a parle du pays de Touat, on
(i) Lyon' s narrative , page 148. — Quarterly Review- , tome xxiri.
(a) Walckenaer, Rccherches sitr V Afrique, pages 4a3 , 481.
( 359 )
trouve !a ville cle Boiidd indiquee comme capitate (i) :
cette ville est aussi inscrite sur la carte catalane de la
bibliotheque du roi, sous la forme Buda. (Pour le dire
en passant, le genie de la langue arabe se refuse a ad-
mettreaucun rapprochement onomaslique tel que celui
qu'a tente M. Walckenaer (2) entre Bouda et Abou-
Na'ameh.)
Leon , Cadamosto , Marmol , nomment simplement
Tuath, Tiiat ou Toet ; Lempriere ecrit Thouat , Caille
Taoual, Jackson Tiiat et Tinvat, Sydy-Abhmed dans
Riley Twati, etc. (3). Lyon dit que cette oasis s'elend
en longueur du nord au sud.
Teyth et Atouat-el-Hhenne etaient inconnus jusqu'ici,
a moins que ce dernier lieu ii'ait ete designe qtielque-
fois sous le nom de Touat, ecrit alors Atoudt par les
indigenes, comme dans I'ilineraire d'Abou-Bekr de
Seno-Palel.
En-Ssdlahh est orthographic par Ebn-el-Dyn dune
maniere completement concordante avec celle de Laing
qui ecrit Ensala^ et avec celle d Ensiedel qui met Enzala
( le ^ allemand est sifflant). Mais le scheykh Hhaggy
Qasem fait remarquer que le nom de ce lieu signifie
Fontaine des Saints (4), a raison des santons musulmans
qui y demeurent et de ceux qui y ont leurs tombeaux,
et des-lors son orthographeest A'jn-el-SsalahJi^ laquelle
(i) Kosegarten , pages 45 , 49-
(2) Walckenaer , «t/.5K/>r(i, page 287.
(S) Rnmusio, folios 83 recto et loS versti. — Marmol, tome m .
page 5o. — Lempriere , edition francaise, page 287. — Caille, t. in,
page 54. — etc.
(4) Walckenaer, page 422.
( 36o )
est aussi celle de Ritchie, et se trouve aujourd'hiii gene-
ralemcnt atloptee.
Laing a fixe la position dc cette station, a ce que
rapporte la Quarterly Review (^i), a 27' ii" nord,'et
2" i5' est de Greenwich, soil 0° 5' ouest de Paris, et
d'apres les renseignemens donnes a M. Jomard par le
capitaine Sabine, a 27^ 1 1' 3o" nord et o' 29' onest de
Paris. Le meme voyageur observe que cette ville est la
plus orientate du pyys de Touat, ce qui Concorde avec
ce qu'avait dit Rilchie, que A"yn-el-Ssalahh est sur la
frontiere de Touat du cute de Ghadames.
M. Hodgson , qui ecr'xl A in-Salah en blamant I'ortho-
graphe de Laing, place cette vllle dans une oasis spe-
ciale, qu'il appelle Tedykels (Tedeekels) (2) j et cette as-
sertion parait appuyee sur des temoignagcs indigenes ,
car il dit ailleurs qu'il a converse avec des habitans de
Dra, Tafdet, Fighig, Tvi^at, Tegorara, Tedeekels, Wur-
gelah, Ghadames, Djerbi et Ghirian, tons cantons ou
se parle le berber. Mais comnie Ebn-el-Dyn ne dit rien
a cet egard, et que tons les autres voyag<Hirs ou ecri-
vains s'accordent a placer A.'yn-el-Ssalahh ou En-Ssalahh
dans loasis de Touat, je pense qui) tant supposer tout
au moins que I'oasis de Tedykels est une des depen-
dances d'ElTouat.
■ Le Oiuidy Qordrah est aussi une nouveaute geogra-
phique. M. Hodgson, en I'appelant Teghorara a sans
doute en vue le pays de Tegorarin de Leon , Mannol vi
Gramaye , le Tigury de Diego de Torres ; niais il est
(i) Tome xxxvm , cahier 75, art. 4. — Caill6, tome iii , p. a3r
et a45.
(i) Transactions , tome iv , pages 28 et 34.
( 36i )
evident que la position respective de ces deux cantons
se refuse a une paieilleconfission. (i)
El- Schcnqythah est etrangemcnt rapproche, par
M. Hodgson dii Shangala des geographes, qui! fant
aller trouver eu Abysuinie; c'est une de ces aberrations
trop frequentes parnii les ecrivains qui parlent de geo-
graphie sans avoir etudie suffisamment les matieres dont
ils s occupent (nous en pourrions citer dautres de la
nienie force). Le pays de Schenqythah est, comnie le
dit Ebn-el-Dyn , dans le nord-ouest de Ten-Boktoue,
vers rOcean. Le Scbeykh deOuadan, Sydy Abhmed ben
Thouyr-el-Genneh, en passant a Thaugeli en i833, a
designe a M. de La Porte le pays de Changuit conmie
souniis a son autorite (2). Un inaure du Senegal qui
avail beaucoup voyage, Ahbined Fal , avait fourni a
M. Cliarles Berton , une note des distances des princi-
pales stations du desert enlre Ten-Boktoue et Arguin ,
ou Ion voit figurer deux fois Schingeti, a dix journees
d'Araouan et a sept journees deTyscbyt (3); cetle note,
inseree au Bulletin de la Societede geograpbie , y est par
erreur comprise (sous le n° 2) parnii des renseignemens
founiis par le mnure Mohhammed de Tjschjt; ce litre
n'appartient qii ;V I'itineraire de Portendick a Ten-
Boktoue porte sous le n" i. M. Berlon avait judicieuse-
ment reconnu etindique la correspondance de Schingeti
avec le Chingarin des cartes d'Afrique, inscrit pour la
premiere fois en 179S , sous la forme Shingnrin, dans la
(1) Ramusio, folio 81. — Marmol, tome in, folio 29. — Histoire
tics scherj/s, page 45. — Gramaye , part, ii, page i8g.
(2) Bulletin de la Socie'te lie Oeograpkie , 'pTemii-re serie , tome xix,
pages 343 et 354.
(.i) Ibidem, tome x , page 35.
( 362 )
carte du voyage de Mungo-Park, ilressee par Renne!
d'apres lesdocumens que le voyageur avait mis a sa dis-
position; niais le mot ayant ete iiial t-crit ou mal lu,
un rj rcmplacait le t de la syUabe finale.
Quant an nom de Tenbo/c/o, j'ai depuis long-temps
fait remarquer que la veritable ortliographe est Ten-
Boktoue^ c'est-a-dire le puits de Boktotie [i) I c'est celle
qu'a employee Ebn-Balhoulhali , le premier voyageur
qui en ait parle.
Entre Ouerqelah el Gbadaines aucune station n'etait
connue : Ebn-el-Dyn en coniptehuit, toutes comprises
dans la premiere moitie de la route, savoir : Sydi
Ahkhouylid dont rorthographe veritable est d'apres
M. Hodgson AkhouUd ^ puis Hhasy-el Naqeh , A'yn,
El-A'dquer, El-Thybdt, El-Jbter, Oiiedy-SouJ, et enfin
Aamjsch.
Aqddines est ecrit par Ebn-el-Dyn d'une maniere qui
vient confirmer la transcription Aghddmas employee
par Caille pour representer la prononciation dont son
oreille avait ete frappee. (a)
On pent voir dans le Bulletin de la Societe de geogra-
phic une iettrede M. Graaborg deHemsoe, en date de
Tripoli, ou se trouve cette assertion, que le nom de
celte ville tel qu'il se pronoiice par les indigenes, com-
mence par un ayn tres guttural et non par un ghayn,
lettresqui nexistent point dans les dialectes des popula-
tions berberes,le son du^'^teutonique serendantcliez el les
par le qdf des Arabcs. Le docte Sueduis a deja essuye les
(i) Noil reati j'oit/nfil asialique , tome iv . page rg^.
(a) C.iille, tome ii , page 377, etc.
{i] Bulletin, tome v, page 68a.
( :i63 )
critiques ci'iin orientalislefrancais a raison deses notion*
equivoques sur les analogies gramma licales de la langiie
arabe(i); ici nous avons a relever pareillement une
double erreur : i" En ce qui concerne la pronoiicialion
du ghaj-n arcihe , que M. Graaberg n'a sans doute en-
tendu que de la bouche des Turks , puisqu'il le confond
avec \e g teutonique; pour un Arabe, \e g/ia/n est une
articulation gutturale assez analogue au grasseiement
des provencaux; 2" en ce qui concerne I'ensploi graphique
de cette consonne par les Berbers, une autorite grave
en cette matieie, \enture, affunie que c'est la lettre
qui (/online dans la langue Berbere avec le tse a trois
points; et Ion pourrait ajouter que ce n'est point le
qa/arahe mais bien le kef on \eqdf, a trois points, qui est
employe par les Berbers pour exprimer le son du ^
teutonique. Le cjq/a. un point conserve sa prononciation
speciale, qui est celle dun q guttural, se rapprochant
du ghajn , mais sans vibration de la glotte.
Revenons a Qaddmes ou Ghaddines : Ebn-el-Dyn
I'ecrit par un qof, Abou el-Fedha par un ghayn; et les
orientalistes europeens sont partages entre les trans-
criptions qui admettent I'une ou Tautre de ces lettres.
M. Marcescheau qui , dans une lettre inseree au Bulletin
de la Societe de geographic (2), a consigne les renseigne-
mens qu'il a recueillis sur cette ville pendant son sejour
a Tou7er, explique que le nom de Ghadames se pro-
nonce a-peu-pres R'demse en donnant a I'R un son fort
guttural, ce qui ne pent convenir qu'au ghayn; toute-
fois, Tavis de Langles qui opte pour le qaf, m'a paru
d'autant moins hasarde , que j'ai vu des transcriptions
(l) Nouveaii journal asialiqne, toine ili, p. 160.
(u) Bulletin , tome vi , page 120.
( 364 )
eiiropeennes faites sous I'unique influence de la proiion-
ciation des Arabes du desert, designer sous la forme
/W«//«jlenalifdeQadamesqui etaitau service deLaing.
Mais les reinarques speciales faites [.ar M. Giaaberg de
Henisoe aussi hien que par IM. Maicescheau sur la
prononciatlon de ce mot, I'autorite d'Abou-el-Fedha ,
d'Aboii Obayd, I'exempledeM. de La Porte, deM. Rous-
seau , et il fautle dire, de la majoriie des voyageurs et
desgeographes, m'ont determine a considerer le ghayn
comme plus exact.
Quant a \EIif initial employe par Ebn-el-dyn et
exprime aussi par Caille, c'est un vulgarisme analogue
a la prononciation populaire de quelques mots, a Paris
par exemple , ou Ton entend frequemment eiif dis pour
je dis, eiic que pour ce que, eid jour pour le jour, etc.
Dans I'ecrilure, cet emploi d'e/j/ initial devient un sole-
cisme reprouve par I'analogie grammaticale; c'est ainsi
que le nom Emhammed ou Imhammed, inlroduit dans
rhistoire de la geographic africaine par Ledyard et
Lucas, est une transcription monstrueusc de la forme
normale Mohhammed.
Laing parait avoir fait des observations astronomiques
aGhadames : la Quaiierly Review {i) qui en donnele re-
sultat, porte 3o" 7' Nord et 9° 16' Est de Greenwich,
soite- 56' Est de Paris. Hhaggy Qasem met cette ville a
treize journees de Tripoli et a vingt-deux journees dc
Ayn-el-Ssalahh. Les informations recucillies a Tunis
par M. Magra, coinptent vingt-trois a vingt-quatre
journees de Tunis a Ghadames, en passant parQabes,et
en inclinant vers la droite a partir de cette derniere
ville. Les renseigneniens recus a Touzcr par ]\L IMar-
(1) Tome XXXVIII, cahicr 73, art. 4-
( 365 )
cescheau, marquent tlixsept journees cle la jusqu'a
Ghatl allies.
Leon I'appelle Gademe , Marniol Gademiz; I'un et
Taiitre n'en diseiit que qiielques mots, et marquent sa
dislanre de la mer , vers le midi , le premier a trois cents
milles , le second a cent lieues.
Toudreq est le pluriel de Tarqy adjectif forme' dii mot
Terqa, tribu, dont le pluriel est 7o?/er^«. Horneman, le
premier, a donne une notice sur cepeuple; Lyon, Den-
ham et Clapperton , Laing,Caille, ont respectivement
fourni a cet egard quelques lumieres; Ivl. Hodgson a re-
digesurlememe sujct utie note, insereedans les Transac-
tions de la Societe de Pliiladelphie, et dont je vais resumer
ici les points principaux. (i)
« Les Tuarycks ont pour limite a lest les Tibhou et
le Fezzan, an sud les peuples negres de Barnouh,
Hhaousa, Ghouber et Ten-Boktoue, a I'ouest les oases
dc Tedykels et de Touat, au nord celles de Mozab,
Engousah, et Ghadames. Parmi les populations negres
its portent differens noms : celui de Sergous est connu
partout; pres du Fezzan, a Aghades et Hhaousa ils
sont appeles Kelliwi ^ a Sakatou et a Ghouber, ils sont
nonimes Etesan ; a Ten--Boktoue et le long du Kouara
ils sont designes sous I'appellation de Oulemidan; les
tiatifs de Hhaousa les traitent aussi de Ouzanoroah,
c'est-a-dire kafresou infideles; enfin le nom de Kilgaris
leur est encore donne entre Aghades et les Soudan. lis
sont blancs; de race berbere, musulmans nialekytes.
Ont-ils un nom commun , oa bien leurs diverses tribus
ont-elles chacune un nom distinct.? A la premiere question
on peut repondre que'le nom de Bereber est universelle-
(i) Transactions , etc., tome iv , pages 3i a 35.
36
( 36G )
nientarcepte par toiit.es; a la seconde question, queHoest,
(jhenier, Baclia et Jackson pom- lempiie cic Marok, Shaw
pour les etats d'Alger et de Tunis, ont fait connaitreles
nonis de beaucoup de tribus. Parnii celles de Hagara,
qui liabilent I'inierieur du desert, sont les Aith el-Hadj ^
Aith-el-]Soali , Aith-Emgat , et Esukemaran. Ce mot
Aith, litteralement synonymedu motarabe£"/(!/,s'eniploie
pour designer les tribus, conune !es mots Beny et
Aouled chez les Arabes. Le langage des Tuarycks est
entierenient conforme a celui des Qobayl de I'Atlas. »
Mungo-Park a noinme les Sourkas, qui sont identiques
aux Sergous de Hodgson, de ineme que les Sorgous de
Caille; il a mentionne aussi les Mahinga; Donham et
Glapperton ont j.arle des Tagania et des Kilgris; Hor-
neniann des Kollouviy des Hhagard^ des ihatkara et
des Tagamu; Laing fut attaque et pille par les Hhagard;
le negre Francois, interroge au Bresil par M. D'An-
drada (i), lui nomma les Vlumdaii ou Llumadah, qui
ne sont autres que les Oulemidan deM. Hodgson ; enfin
I'histoire de Takrour, de Mohhammed Bello , ajoute a
cette nomenclature les Amakitan, les Tninkak, \mSen-
dal, les Agdalar et les Adjeranin.
Mathmdthah estle nom dune des tribus Berberes qui
font partie de celle de Tdmesnd d'apres I'Edrysy, de celle
de Barghaoudthaii d apres le Bekry , de celle de Dharysah
d'apres Ebn-Khaldoun (2). Elle a donne son nom a di-
vers cantons ou villages quelle a peuples : Shaw I'appli-
que a la presqu'ile qui s'eiifonce dans le coude du Sche-
lif , et Abou-0'bayd el-Bekry mentionne ce district sous
(i) Journal des voyages , tome xxxii, pages 2i3, 2i5.
(a) Hartmann, page ifir. ■ — IS'otice , etc., page i55. — Nonvcau
journal asiatique , tome ii , p. n5.
f 367 )
1« nieme iiom ; ce dernier auteur parle aussi d'uiie ville
de Mathmathah-Amkesour sur le Molouyah, a-peu-pres a
nioitie chemin entre Fes et Segelmesah. Mais je n'ai
trouve mentionne dans aucun des anteurs que j'ai con-
suites, le village de Mathmatliah indiqueparEbn-el-Dyn
a deux journees deQabes eta pareille distance deGerbeh;
seulement ce nom est inscrit au milieu des monlagnes
au sud de Qabes, dans la carte du golfe de Qabes de
Smyth. Toujours estil que cette situation relative exige
le gisement de Gerbeh a Test ou au nord-est de Math-
matliah, et non a Touest comme lindique la version
de M. Hodgson : Djerhi is two days^ journey from Mate-
mata, to the west. II est evident quil y a la une inadver-
tance de traduction , inadvertance absolument pareille
a celle de Florianus dans sa version latine de Leon, a
I'article Borgi, oJ \\ Iradml verso ponente du texte ita-
lien par orienteni I'ersus. De nienie on trouve dans Hart-
mann, parlant du port de Qol; « In parte prima climatis
« tertii ab Edrisio hue usque descripti, ultima est urbs,
« atque rlislat a Kosantina meridiem versus duorum sta-
<« tionum intervallo. » II est pourtant incontestable que
c'est Constantine qui est au sud de Qol.
Qabes est bien connue; Shaw la nomme Gabs, Leon
Capes jM.ATn\o\ Capez et Cabez, M. Desfontaines Gahess.
L'Edrysy en dit peu de chose, mais le Bekry en raconte
de curieuses particularites (i). Le capitaine Smyth en a
determine la position par 33" 53' 55' nord , et j" 44' i" ^!>t-
Apres lui avoir consacre un premier article de quelques
lignes, Ebn-elDyn y revient plus loin une seconde fois
(r) Shnw , tome i, page 25-2. — Ramusio, folio (iy verso. — Mar-
mol, ^dit. esp. , tome ii, folio 9.88. — Hartmann, page 262. —
Notice, elc, pages a8 et suiv.
26.
( 368 )
pour remarquer qu'elle est a six journees de niarche
cle Tripoli.
Gerbeh est paieillementindiquee d'abord a deux joui-
nees de Mathir.athah; puis un second article plus etendu
lui est consacre deux pages plus loin; nous reunirons
ici tout ce que nous avons a en dire.
Cette lie est appelee Gerba ou Jerbn par Shaw, il
Gerbo par Leon , los Gelves par Marniol , qui parle fort
au long des expeditions espagnolcs dirigees contre elle;
les Letters from Tripoly, le voyage de Maggil a Tunis,
le second voyage de Paul Lucas, contiennent quelques
lignes sur cette i!e; I'Edrysy ne fait gnere que la noin-
mer, et le Bekry n'en dit que pea de mots. L'Etat des
royaunies de Baibarie, attribue au pere de La Faye, en
donne une esquisse plus detaillee, et M. de La Porte en
a envoye, dans ses reponses aux questions de la Societe
de geograpliie, une breve description, qui s'accorde
tres bien, ainsi que la precedente, avec celle qu'en
a fiite Ebn-el-Dyn. M. Guys, de son cote, a fourni sur
cette lie une note inseree au Bulletin de la Societe, et
dans laquelle il donne, sur les dattes de Gerbeh ( qu'il
appelle Zerby), des details qui ne concordent point
avec I'assertion d'Ebn-el-Dyn, que I'lle neproduit point
de dattes. (i)
Quant aux ([uatre ports de Gerbeh, celui de Agjm
est marque sur la carte du golfe de Qabes du capitaine
Sniyih, a I'endroit ou celle de M. Lapie porte Tour
(i) Shaw, tome r, page 254. — Ramusio, folio 70. — Marmol (•Axt,
esp., tome II, folio 289 verso. —Hartmann, page 289. — Notice, etc.,
page 3o. — Etat , etc., pages 81 et siiiv. — Leilers from Tripoly,
tome I, page 22. — Maggil, pages iSy, 168, 175. — Paul Lucas,
second voyage, tome 11, page i35. — Manoires de la Socicti de Geo-
graphic, tome' II, pages 72 , 73. — Bulletin, tome v, pages 549, 5()0,
t^Agira; celui tie Gergys est probablement le Qassr
Mendqes menVionne par M. de La Porte, et qui, repre-
sentantla wWeAe Meninx de Ptolemee, aurait pu,comme
d'autres villes de la province d'Afrique, recevoir le nom
de Gergys en memoire du sejour du patrice grec Gre-
goire, prefet d'Afrique. Le Mersat-el-Qantharah^ ou plus
ey^actemexit Merscif-el-Qantharah, c'esta-dire le port du
pont, ne peut etre eloigne de I'endroit ou M. de La
Porte enonce qu'on peut passer a gue le detroit qui se-
pare, au sud , 1 ile de la terre fernie; les anciens plans
y representent en effet un pont, et c'est au voisinage
sans doute qu'il faut placer avec DAnvillele /^o«/e-Z;Va
mimicipium de 1 itineraire d'Antonin. Pour ce qui est
du Mersat-el-Souq ou plus exactenient Mersaj-el-Souq
c'est-a-dire leportduniarche, que la version de M. Hodg-
son place to the east ^ il nest evidemment ainsi indique
que par inadvertance de traduction ou decriture, car
le port qui est a lest est deja nomme immediatement
auparavant; c'est done to the north qu'il fallait lire, et
c'est ainsi que je I ai corrige ; au nord en effet est le
portde Gerbeli, avecia residence du gouverneur de lile
et un soiiq ou marche, ainsi que le remarquent M. de
La Porte et M. Guys : la carte de Smyth inscrit en cet
endroit le mot ^ug , qui nest evidemment qu'une
transcription, defiguree par I'orthographe anglaise, du
mot arabe Sotiq.
Dans le voisinage de Mathmathah , de Qabes et de
Gerbeh, Ebn-el-dyn place les tribus de Naouayl^ de
Mahhdmyd et de Ouerqeniah^et les montagnes de Gha-
rydn^ de Ben-Oualjd, de Meselldtah et de Ghdyah.
Tons ces noms sont deja plus ou moins connus : les
tribus de Naouayl et de Ouerqemah sont appelees
( 370 )
Aowa/les et IVargarnmas dans les Letters from Tripoly,
Nolle et Wargumma par Biucc. M. de La Porte,
dans ses reponses aux questions de la Societe de gcogra-
pliie, parle de la tribu de Mahhainyd sous le noui de
MahaiJiides , et il en indique les denieures dans les
plaines que circoriscrivent les montagnes de Yafran; il
donne aussi line notice des montagnes de G/idrydn, de-
crites soninjairement par Leon et par Marmol. M. de
La Porte mentionne en passant la montagne de Ben-
Oualyd qu'il appelle Benoulid ; et c'est probablement
la nieine que Leon et Marmol ont designee sous le nom
de Beni Guarid. Ces deux auteurs decrivent brieveinent
aussi la province de Mesellatah,appelee iT/eJ5/<3^« eX. Me-
zulala Jans les Letters from Tripoly (i). Quant au nom
de Ghayah , il se trouve, a la verite, mentionne par
Abou-0'bayd el-Bekry, mais comme appartenant a une
riviere dans restdeThobnab;on pent conjecturer seule-
ment que cette riviere a recu son nom de quelque frac-
tion de la tribu qui habite les montagnes dontils'agit ici.
Efzan pour Fezzdn est un nouvel exempie de I'em-
ploi abusit'dV/jy initial dans les mots dont la premiere
syllabe est breve.
Apres avoir indique la route qui, de Ouerqelab,conduit
a lest parGhadames et le Gharyan, Ebn-el-Dyn revient
siir ses pas afin de donner une description de Teqort^
que son traducteur ecrit Tuggurt, et qui est transcrit
Tegghert dans les extraits donnes en francais par les
Nouvelles Annales des voyages (2) d'apres la North-
American Revimv (3). Dans ses lettres a M. Dupon-
(r) Letters from Tripoly, tome i, page 27. — Memoires de la SociSU
{le Geographic, toDie 11 , pages 65 et suiv. — Ramusio, folio 7 i verso.
— Marmol , edit. e.sp. , tome 11 , folio 307.
(1) Tome tv de i832 , pages iSg a 142-
(3) Cahier de juiilet i83i.
( 371 )
ceau (i), M. Hodgson dit que cette capitale du Wadreag
est a cent milles au sud-est des Biscar'is ^ qu'il place a
leur tour a deux cents milles au sud-est d'Alger. II ajoute
que les habitans de ce canton appellent leur langue
Eregaiah, qu'ils se noniment eux memes Aith Eregaiah^
et que le mot Wadreag est la denomination arabe du
Wad ou Egzer de Ereag. Ebn-el Dyn eiionce que les
habitans de Teqort, lesquels sont noirs, sont appeles
Erouds,hah; leur oasis est done alors correctement de-
nommee Ouddy- Eroudghah. II est a reinarquer que les
habitans de Ouerqelah sont noirs aussi et portent le menie
nom, d'ou il y a lieu de conclure qu'ils sont de la meme
race, et forment peut-etre avec eux les restes des Melano-
Getuliens de la geographic ancienne,
Leon Africain consacre un article unpen etendu a la
ville de Techort(ji) , quil dit batie sur une montagne
au pied de laquelle passe une petite riviere; il la place
a cinq cents milles de la Mediterranee, vers le sud, et a
trois cents milles de Tegorarin. Marmol(3) repete, avec
des additions , la notice de Leon, Le benedictin Diego
deHaedo (4) la nomnie Ticarte ou Ticurti^ et la met a
vingt-et-une journees d'Alger, cinq journees audela de
Bescari ^ eslimant la distance totale a cent cinquante
petites lieues. Gramaye, qui a ptiise tantot dans Haedo,
tantot dans Leon, parle de Ticarte comme le premier
et de Techor comme le second (5). La carte catalane
de la bibliotheque du roi contient aussi le nom de
Tacorl au sud de I'Atlas. Shaw dit que le Wad-Reag
(i) Transactions , etc. , tome iv, page 22.
(2) Ramusio, folio y5.
(3) Tome III , folio i r verso.
(4) Topografia de Argel, folio 66 verso.
(5) Gramaye, 2'' partie , pages 55 , igc
( ^7^ )
est un amas de vingt-cinq villages ranges dans une di-
rection nord-est et siid-ouest , dont la capilale Tuggurt
est balie dans une plaine ou ne coule aucune riviere,
mais ou I on se procure de I'eau an nioyen de puils
artesiens (i). II senibierait que le voyageur anglais, ha-
bituellement si exact, se serait mepris ici en donnant,
pour le canton de Teqort, des renseignemens que ses
informaleurs entendaient appliquer au canton deOuer-
(jelah qui est un autre Ouddy Eroudghah.S-^dj h\\\\m^(\^
dans Riley, signale Tuggurtah^ close hy a mountain near
the rh'er Tegsah ; c est , dit-il , une grande ville entouree
de hautes et epaisses murailles (2). Des renseignemens
recueillis a Alger par les otficiers tiancais indiquent la
ville de Teggourl , grande comrne Alger, au milieu du
desert, sur la riviere Rahani, entouree de murs avec
sept portes et une citadelle, a treize journees de Tunis.
M. Desfontaines , qui vit un des chefs d Erouaghah
a Touzer, en 1784, appelle ces gens des Ouareglj et
dit que leur pays est a six journees de Touzer (3). Oua-
reglj semble une forme adjective turke derivee du nom
de Wadreag j ou peut-etre est-ce un singulicr du nom
que Ics Maronites ct Hartmann ont lu Vareklan dans
lEdrysy; Ouerqelah en serait la racine, en se prononcant
Ouahreqlahf d'ou Ouareqly et Ouareqldn , habitant et
liabitans de Ouareqlat.
Hartmann et autres (4) ont prononce avec plus ou
moins d assurance que Teqort etait la meme ville que Td-
hart ou Tayliarl ^ capitale des Rostamydes au neuvieme
siecle, men lion nnee par lesgeographesorientauxjc'est une
(i) Sh.iw , tome i, ]>age ifig.
(a) Riley, page 387.
(3) Noiivelles Annates des vorages, tome iit de i83o, page 72.
(i) Hartmann, page aor. — Notice, etc., pages 88, 99, 104.
( 373 )
grave erreur, que I'examen geographique le plus leger
siiffit pour rendre evidente : en eff'et, Tdlinrt ou Tayhar
est a quatre journees de Telemsan , autant de Asian,
c'est-a-dire du golfe d'Areschqoul, a trois journees de
Melianali et a cinq de Tenes; enfinelle etait batiedans
le voisinage des niontagnes de Ouanaschryscli. 11 est
vrai qu'il y avail deux vilies de Taliart, I'une appelee
A'lyd ou haute , I'autre Safalhf ou basse, distantes entre
elles d'une journee suivant les uns , de cinq milles seu-
lement suivant dautres ; Ssadyq el-Eslahany , dans son
Taqoujm el-Bolddn , leur donne des positions telle-
inent excentriques qu'on n'en peut tirerauciin parti (i).
De toutes les indications utiles combinees on peut
conclure que remplacenient deTahart etait peu eloigne
de cehii de Ma'skarah. De la a Teqort il y a cent lieues.
Les daskerah de El-Nezlah, Tebesbest , Temys , El-
Moqar/n , El-Moghajr, qu'Ebn-el-Dyn place aux envi-
rons de Teqort, paraissent completenient nouveaux; a
nioins que dans El-Moghayr on ne veuille reconnaitre
le Majyre deShaw, ce qui n'est guere plausible, attendu
que I'un des deux noms est ecrit par un ghayn, et que
I'aulre parait devoir I'etre par un gym.
Je suppose que c'est de ce Majyre que tirent leur
nom les Megeharyeh dont parle Ebn-el-Dyn; M. Hodgson
a tort de les confondre avec les Mohngeryeh ainsi ap-
peles de ce qu'ils accompagnerent Mahomet dans son
hegire ou fuite de la Mekke.
Ebn-el-Dyn termine son ecrit par une description de
Derdyeh dans I'Arabie centrale. Je ne m'en occuperai
point ici ; ne voulant traitei* que de TAfrique, ce serait
un hors-d'oeuvre.
*A
(i) Geographical works of Sadik lijahani , pages 82 , 83 .
( 3-4 )
NOTICE
SDR LE VOYAGE EN SOEDE DE M. ALEX. UAUMONT,
Lue par M. Edouard Duuuc a la Societe de Geographic ,
dans sa seance dii 1 6 mail 834.
Sans entrer dans aucun detail sur le lieu comniun de
1 utilite des voyages et sur los nombreuses productions
de ce genre qui viennent sucressivement grossir la
somme de nos richesses , j'entrerai imniediatement en
niatiere et communiquerai a la Societe les diversss im-
pressions que nous avons ressenties a la lecture de
louvra^e de M. Daunionr.
L'auteur, compatriote du Bearnais roi de Suede, ho-
nore des sa premiere jeunesso de la bienveillance de ce
prince, ayant servi sous ses ordres, concut le projet de
se rendre a Stockholm pour lui faire agreer loifre de
ses services. Sil ne nnissit pas dans sa demarche au
gre de ses desirs nous devons toutefois le feliciter d'a-
voir enlrepris un voyage qui nous a valu des rensei-
gnemens precieux sur une parlie de notre Europe dont
les connaissances geographiques etaient loin d'etre com-
pletes.
M. Daumont mit a la voile du Havre le 24 mai i83o a
bord du trois mats laJeanne-d^AiCf en destination pour
Saint Petersbourg, devaiit debarquer a Elseneur.
Le 3o au matin il etait en vue de la Norvege. II aper-
cevaitpour la premiere fois cette terre dont Inspect est
( 37^> )
eminemmeiit severe j de hautes inontagnes quiseniblent
avoir leur base dans la mer bordent le rivage sans in-
terruption. Leurs flaiics sombres et escarpes sont reve-
tus de forets desapins entremelees de quelques espaces
cultives, de fermes et de banieaux.
Apres quelques difficultes, la Jeanne-d' Arc parvint a
doubler ie cap Skagen et penetra dans le Skager-Raek.
La cote danoise presenta a notre voyageur un contraste
parfait avec celle d« Norvege. Autant celle-ci est elevee
et imposante, autant I'autre est basse et monotone !
c'est une plage aride, triste. sans verdure, sans vegeta-
tion , bordee de dunes sablonneuses, sur lesquelles on
apercoit, a de grandes distances, quelques moulins a
vent ou quelques maisons sol;taires , mais aux approches
du Sund, I'aspect de ces rivages change completement,
ils se couvrent d'unebrillante verdure, de villages nom-
breux et bien batis, de hameaux entoures de t'rais bos-
quets et de benux arbres.
Bientot M. Dauniont se trouve a Elseneur, au milieu
d'une rade couverte alors de plus de deux mille navires,
que les vents y relenaient depuis plusieurs jours.
D'Elseneur, M. Daumont se rend a Helsineboraf el le
paiallele qu'il etablit entre les deux cites est tout a I'avan-
tage de la premiere. Toutefois le port d'Helsingborg
dont le retablissement coniplet ne date que de i833 ot-
frira,a I'avenir, deprecieuxavantages au commerce et a
la navigation de cette partiede la cote de Scanie.
Les environs d'Helsingborg se presenterent a M. Dau-
mont de la maniere la plus agreable, il s'apercut bientot
que la Scanie, cette Provence de la Suede, etait digne de
sa reputation. A la sortie de la ville sa vue s etendait
sur des coUines doucement ondulees, entre lesquelles
serpentait la route peu large, mais parfaitement unie;
(376)
deux petits chevaux iioirs, vit's et pleins d'ardeur empor-
taient dune course rapide son t'rele char-a-bancs, tandis
queses regards erraientdetoutes parts pour saisirl'image
gracieuse et fugitive des objets qui passaient rapidement
sous ses yeux ; des terres bien cultivees , parees de vertes
nioissons, deshanieaux isoleset heureusement groupes,
des fernies animees, des villages rians et bien batis, des
chateaux entoures de pares, s'offraient de toutes parts
a ses regards surpris et charmes.
L'auteur a su repandre sur ses descriptions un attrait
puissant par ses peintures animees et gracieuses ,* son
style revetu des plus brillantes couleurs trace a grands
traits de vives images des contrees qu'il parcourt et nous
ne pouvons resister an desir de donner une idee de son
style, par quelques citations; voici comment il retrace
les sensations que lui firent eprouver les nuits du nord.
" A onze heures et demie (d u soir) lorsque nous ani vames
« au relai de Fagerliult, il faisait encore presque jour. Je
« n'ignorais pas que dans les contrees boreales, le soleil
>■ a cette epoque de I'annee, reste fort long-temps sur
« I'horizon ; neanmoins je dois avouer presque a nia
« honte, que maintenant cette suppression de la nuit,
"sans me causer aucune surprise laissait errer dans
«mon ame une impression vague et indefinissable qui
••repandait son influence sur tout ce qui m'entourait; je
n savais bien que je parcourais d'autres zones , que j'etais
'•sous d'autres cieux; mais lorsque vers niinuit, en tra-
"versant un beau hameau eclaire encore par les reflets
« des feux brillans du jour j'y voyais regner le calnie
<■ profond et le silence de la nuit, je ne pouvais me de-
« fendre malgre la voix de la raison , d'un sentiment
"penible el desordonne; mon imagination me rappelait
"involontairement les mille et une nuits avec ses villei<
( 377)
« desertes, solitaires, asiles de feeset de perils invisibles;
« et ces idees bizarres repandaient sur l.i belle et riante
"nature que j'avais sous les yeux, un air etrange et
« fantastiqiie. »
Le tableau que M. Daumont nous offre des scenes de
la nature aux approches de Joenkoeping (Yonchouping)
n'est pas moins remarquable. « Dans quelques lieures
« nous arrivames a la base de la chaine de montasfnes
" dont la ciuie s'elevait devant nous et qui forme la cein-
« tare du lac Vetter. Nous nous trouvanies transportes
"dans des gorges inculles, bordes de precipices; les
« champs, les prairies, les habitations, toute trace de cul-
«tureavaient disparu, pour taire place aux aspects les
«plus sauvages el les plus arides; nos chevaux gravis-
« saient au grand trot, avec leur ardeur ordinaire, la
« route escarpee qui s'elevait par d'innombrables sinuo-
« sites jusqu'a la crete des montagnes; cette contree
nisolee, solitaire, semblait etre separee du reste de la
« terre et de toute creature vivante ; dans ces montagnes
« couvertes d'epaisses foret-*, un silence solennel n'etait
"interrompu que par le murmure des vents qui balan-
« caieiit la cime des pins; la voix plaintive de la t'oret re-
"pandait dans lame une teinte melancolique mais exal-
«■ tee et je me croyais transporte aux concerts des Bar-
«des de Fingal; a chaque pas, mon imagination se pe-
«netrait de la poetique influence de ces scenes de la
"nature. . .... Plus j'avancais, plus la scene devenait
« varie'e, je descendis le revers des montagnes que je
« venais de gravir ; des ruisseaux tombaient en cascades
"argentees, des torrens fougeux roulaient avec fracas
« leurs eaux impetueuses sur un lit de granit et allaient
«se Jeter dans le lac Yelter dont j'apercevais devant
«moi les eaux paisibles et bleuatres : bientot je pus y
( ^-^ )
« (lislinguer les navires qui y vogiiaient a pleines voiles,
o Alors tout changea d'aspect comniepar enchantement:
« auxsonibres forets, aiix inontagnes escaipees, succeda
« touta-coup une petite plaine riante, fertile, couverte
n de champs, de prairies, de vergers, de maisons et de
"jardins jusqu'a I'entree dela ville. »
JcKiikoeping est bati a lextremite sud du lac Vetter.
Ce lac, dit M. Daumont, a 3o lieues de long sur 7 a 8 de
large ; la navigation y est tres active, mals les batimens
y sont souvent assaillis par des tempetes violentes, cau-
sees par les hautes niontagnes qui I'entourent de toutes
parts; les vents en se precipitant impetueusement de
leur sommet sur la surface des eaux, occasionnent des
grains plus subits et plus terribles qu'en pleino mer.
Les navires sombrent en uu moment, et ces evenemens
sont inalheureusement trop frequens.
De Jonkceping notre voyageut se rend a Linkoping,
capitate de TOstrogothie, Tune des plus antiques villes
de Suede, mais dont la population nexcede pas 4,000 ha-
bitans. Les seuls objets dignes d'littention qu'elle ren-
ferme sont une belle eglise cathedrale, etson gynuiase
ou college, qui passe pour le plus considerable de tout
le royaume, si on en excepte ceux de Stockholm.
A Norrkoeping (Norcheuping) M. Daumont s'embar-
que pour Stockholm. La description qu'd trace de I'ar-
chipel pittoresque et innombiable qui couvre I'entree
du port de cette ville offre les details les plus attachans.
" On ne se douterait guere, dit-il,au milieu decededale
«d lies, que Ion est dans le voisinage dune grande et
« belle capitale; mais a mesure que Ton s'en approcbe,
« on apercoit par intervalles, des maisons, des ctablis-
« semens publics disperses sur les flancs et a la base des
!< montagnes ou sur la crete des rochers grisatres de
( 379 )
« granit ; les hois et les rorhers sont repandus partout
« avec profusion ; les cultures sontrares, tout conserve
" un aspect apre et severe; I'art senible ici etre impuissant
" pour seconder la nature, et elle seule avec ses sauvages
« beautes fait les honneurs et rornement de ces lieux. »
En arrivant dans cette capitale, ce qui frappe d'abord,
est I'aspect imposant du chateau. C'est un edifice magni-
fique, et le seul veritablement remarquable de la ville,
ou du moins il les efface tons par le grandiose de ses
proportions.
La situation de Stockholm est admirable; c'est, avec
Edinibourg, Constantinople, Lisbonne et Genes, une
des villes les plus pittoresques de I'Europe : rien n'egale
I'aspeci singulier de cette ville, ou Ion voit se deployer
a-la-fois la pompe des arts et la grace energique et sau-
vage de la nature; c'est un melange de palais , d'edifices,
de roi'hers, de verdure, d'eaux transparentes , d'arhres,
de bosquets, dejardins, de forets , de navires, de bar-
ques, dont I'ensemble offre le coup-d'ceil le plus enchan-
teur.
Nous ne suivrons pas M. Daumont dans ses nom-
breuses excursions aux environs de la capitale; nous ne
parlerons pas non plus de son entrevue piquante et
pleine de franchise avec Charles X[V Jean ; nous conti-
nuerons de le suivre dans son voyage vers les con trees
plus septentrionales de la Scandinavie.
Parti de Stockholm par le bateau a vapeur, I'auteur se
rend a Upsal, d'ou il passe dans les contrees voisines
de rUpland et de la Dalecarlie, et visite les mines fa-
meuses de Falun et de Danemora.
L'aspect d'Tlpsal , cette Athenes de la Suede, n'eut
pour lui rien de bien imposant ; niais tout y annonce
un sejour agreable : la contree qui I'entoure est riche ,
( 38o )
teconde, «'t abonde en sites niagnifiques. Les souvenirs
tnylhologiques repandent le plus vif inteiet sur toute
cette con tree. M. Daiiniont en pi-end occasion dentrete-
nir ses lecterns de la cosniogonie scandinave; il parle
d'Odin, et trace le caractere de ces conquerans goths,
qui, sortis de la Germanic, deplacerent a leur tour
d'autres peuples ; il parle ensuite de I'universite celebre
d'Upsal, et s'etend sur sa bibliotheque importanle, qui
renfernie plus de soixante milje volumes et un grand
nombrt; de nianuscrits parnii lesquels il en est quijouis-
sent dune grande renommee.
La Dalecarlie, ceite province si pittoresque, et dont
les habitans donnerent des preuves si multipliees de
fidelite a leurs souverains, dut fixer I'attention du voya-
geur. Toiitefois, il ne s'est pas contente de ses propres
observations, il a fondu dans son ouvrage des extraits de
celni de M. Forsell , publie en i83o a Stockholm , sous
le litre de : Un an en Suede ; on y lit avec interet un
episode 6'une noce dalecarUenne , et des details fort in-
teressans sun^es aventures du celebre Gustave Wasa.
Apres avoir fait une excursion a Mora, en Upland ,
bourg celebre en Suede, puisque c'etait dans la plaine
voisine que se faisait I'eleciion desrois,et avoir visite la
belle manufacture de porphyre d'EU'dal,soutenue par la
munificence du roi, et qui assure I'existence de plusieurs
centaines de families d'ouvriers on d'employes, M. Dau-
mont revint a Stockholm. Ce second sejour dans la ca-
pitate fut mis utilement a profit : il s'occupa du soin de
saisir et de retracer les moeurs el les usages des Suedois.
S'occiipant ensuile de la topographic de cette con tree, il
fait connaitrel'aspect general du pays, indiquo la configu-
ration geodesique du sol ; puis , se livrant a des conside-
rations philosophiques sur la population, il expose 1 'o-
■ ( 38.)
rigine des diverses races qui ont peuple la Suede : nous
y lisons au cliapitre xv, tome i", que la population de
cette contree, sans y comprendre la Finlande, etait, en
1^5 1, de i,;785,ooo habitans, et d'apres le dernier re-
censement de i83o , elle est de 2,871,^152 , ce qui doniie
iin accroissement de 1,086,000 ames dans I'espace de
80 ans, et si ce inouvenient se soutenait comme dans
!es dernieres annees , elle doublerait avant cinquante
ans.
Tout ce qui regarde le climal , I'agriculture et I'liorti-
culture, offre une foule de details reniplis d'inleret et
jusqu'alors inconnus; la partie des mines et des manu-
factures est traitee avec un talent remarquable. Toutes
ces notions nouvelles sur un pays si peu connumeritent
de fixer lattenlion des personnes que ces specialites
pourraient interesser, avecd'autant plus de raisoii que
lauleur etait sur les lieux, et qu'il lui a ete possible de
puiser aux meilleures sources par ses relations avec les
diverses autoriles de Suede, qui se sont fait un plaisir,
nonseulement de laccueillir avec bienveillance , mais
de lui faciliter tous les moyens d'accelerer et de com-
pleter ses rechercbes.
Dans son second volume, M. Daumont poursuit le
cours de ses investigations sur la statistique de la Suede:
il traite successivement , dans des cbapitres speciaux, et
avec beaucoup de lucidite, du commerce, de la naviga-
tion , des douanes , de I'armee de terre et de mer , des
cultes, du clerge lutberien, de la noblesse, de I'inslruc-
tion publique, de la litterature, des arts, de 1 adminis-
tration civile et politique de la Suede , des finances et
des rapports de cet elat avec les divers pays d Europe.
II termine ses tableaux par des considerations sur les
causes du changement de dynastie.
27
( 38->- )
Tons ces siijcls, comnic on le sent bien, soul cle la
derniere importance, iiecessitent des details nomhieiix
qui occupent les deux tiers an tnoins du second volume,
ft qui, pour etre analyses, exigeraient uu travail plus
approfondi.
Nous dirons cependant un mot du commerce, de la
navii^ation,de larmee, del'administration etdes finances.
Le commerce interieur de la Suede est tres liniite,et
il ne peut guere en etre autrement, dit raufeur, dans un
pays qui ne possede aucun nioyen d'echange entrc des
provinces dont les productions oflrent partoul uiu'
constaute unitormite. La masse des produits que le com-
merce suedois envoie a Tetranger, alinieiiU' [)ar le pro-
duit des mines et des forets, seule ressource de cette
contree, donne naissance a une navigation tres active,
et sous ce rapport, il est digne d'intcret : c'est la vie du
pays.
En 1 83 1, les exportations de la Suede se sont eievees
a 27 millions de francs, et ses importations a 24 millions j
d'ou suit que la balance etait eii sa faveur de 3 nullions
de francs. La presque totalite des articles se composait
de n)atleres premieres; les produils manufactures n'en-
traiont que pour environ un dixieme dans la masse des
exportations, dont le fer formait plus de la moitie de la
valeur ; le bois et le cuivre etaient ensuite les objets les
plus importans.
L'auteur a emprunte au ra[)port presente le 5 de-
cembre i832, au roi de Suede, par M. G. Poppius,
president du college decouuucrce, quelques details tres
precieux, par cela meme qu'ilssont autbentiques, sur la
nature des relations mercanliles de la Suede en i83i,
avec les principales puissances. Cc docun)ent donne une
idee complete de I'etendue du commerce decepays,
( 383 )
et ii est d iin liaut inleret pour ceux qui se livrenl a
I'etude tie lecoiiomie politique.
La navigation et ses progres en Suede ne pouvaient
echapper aux meditations du voyageur ; aussi fait-il ob-
seiver avec laison , en tete du chapitre qui y est relatif,
qu'un peuple entoure de niers orageuses, un pays coupe
de lacs imnienses, presque lous navigables, doit fournir
une pepiniere d'excellens matelots j et qu'en effet, les
Suedois, calnies et duis a la peine, iiitrepides, subor-
donnrs, possedent toutes les qualites qui constituent le
bon marin.
La Suede a sous sa main tout ce qui lui est necessaire
pour la construction des vaisseaux, a I'exceplion, toute-
fois, du bois de chene et du cbanvre, quelle ne pro-
duit pas en assez grande abondance ; mais le bas prix du
fer, du cuivre, des planches, des matures et des aulres
maleriaux, offre une compensation tout en faveur des
constructions suedoists, qui, dit-on , peuvent etre exe-
cutees a trente pour cent meilleur marche que partout
ailleurs : c'est pour ce motif que Mohammed -Ali y a
fait construire une grande partie de la marine egyptienne.
La marine marchande de Suede, qui ne conqotait, an
quatorzieme siecie, que 200 navires, s'elevait, en 1800,
a 1,224, ^^ *^n i83i, a plus de 2,400, outre les batimens
de toute sorte de grandeur destines au petit cabotage.
Sur ce noinbre, i,5oo navires ont ete employes au com-
merce de la Baltique et du Danemark, 345 ont frequente
la Mediteiranee et lAdriatique, 21 5 les ports de I'Ocean
et de la nier du Nord , 22 ont ete expedies pour I'An-
gleterre, 45 pour le Bresil et ig pour les Elats-Unis.
La navigation a la vapeur a ete introduite en Suede il
y a douze ans : il y existe maintenant i4 batimens a
vapeur, tons construits dans le-pays. L'atelier mecanique
2-7.
( 384 )
etabli a Motala en Ostrogolhic livre des machines a
vapeur aussi parfaites qu'eii Angleteire, et a intiniment
meilleur marche.
Les chapitres xxiv et xxv du Voyage de M. Dauniont
sont consacres a des details sur I'armee de terre et de
niei" : c'est un liistorique coniplet dans les details du-
quel il ne nous est pas possible d'entrer; il y en a de
ties curieux sur larniee dite indclta : c'est ainsi que I'on
nomine les troupes qui forment la masse principale (l<;
I'armee suedoise. Ce sont de veritables soldats labou-
rcurs; depuis le colonel jusqu'au simple soldat , chacuu
selon son grade , possede un domaine plus ou moins
etendu, qui leur est assigne pour le cultiver, founiir a
leur entrelien el leur tenir lieu de solde. II serait a
souhailer qu une pareille mesure put s appliquer a nos
troupes coloniales, principalement a Alger.
En 1 83 1, I'armee suedoise selevait a 171,540 hommes,
dont 163,070 d'infanterie parn^i lesquels i3o,ooo de
landwelir ou gardes nationales, 5, 100 de cavalerie ,
3,000 d'artillerie et 370 du genie. L'indelta s'elevait a
33,600 hommes.
La flotle suedoise est maintenue sur le pied le plus
respectable j elle est entretenue avec le plus grand soin.
Suivant M. Daumont, son materiel s'elevait, en octobre
i833, a II vaisseaux de Hgne, 8 fregates, 4 corvettes
et 6 bricks j sa flottille comptait 2 jo navires de moindre
force ; son personnel s'(;levait a i\,\x^ officiers , sous-
officiers et matelots.
Sous le rapport de ladministration civile, notre au-
teur nous transmet des details importans sur la division
territoriale de la Suede en vingtcinq gouvernemens.
Les gouverneurs representent iios prefets , mais avec
des aitrii)Utions beaucoup plus etendues. Ces gouverne-
( 385 )
mens se subdivisent en cantons composes cliacun Je
quatre a tlouze paroisses. Tout ce qui regarde les tribu-
naux, la statistique judiciaire et la legislation civile ot
politique, est tiaite longuement dans une suite de cha-
pitres fort interessans a lire.
Quant aux finances, les details presentes par I'auteur
lui ont ete. f'ournis par le secretaire d'etat des finances ,
M. Skogmann ; i! evalue la totalite des contributions de
toute sorte, payees soit en especes, soit en nature, de
34 a 36 millions de francs. Le budget de la Suede s'e-
leve a 18 ou jg millions en especes, les depenses en
nature pouvant difficilement avoir une evaluation fixe.
L'ouvrage est terniine par des considerations politi-
ques dun ordre fort elevesur la reunion de la Norvege
a la Suede, et sur la cession de la Finlande. L'auteur
deplore la perte de cetle derniere province , tout en re-
connaissantquesa possession etait devenue une necessite
absolue pour la Russie ; la securite de sa capitale depen-
dait de tette position , qui devenaitmenacante aux pre-
mieres bostilites; et la reunion de cette province aux
vastes domaines de I'autocrate a tari la source de tout
contlit.
L'auteur developpe, dans deux chapitres qui seront
his avec un vif interet, les causes qui amenerent I'elc-
vation au trone du roi Charles XIV (Jean-Bernadotte) ,
et dans le cours de l'ouvrage, il trace un tableau tres
remarquable de I'habile et sage administration de ce
souverain.
Un atlas est joint au Voyage de M. Daumont : il con.
tient une carte de Suede dressee par M. Andriveau pour
servir a l'ouvrage; elle comprend non -seulement la
Suede , mais encore la Norvese et le Danemark. Cette
carte est accompagnee de neuf lithographies represen -
( :m )
tant soil des vues de villes, soil des costumes iiatio-
noiix. Nous y avons reniarque une vue de Stockholm
et des costumes dalecarliens et suiolandais.
En tete de louvrage , et sous le litre modeste d I'/i-
troduction, se tiouve une chronologic historlque des
diflerens voyages entrepris dans le nord , et notamment
en Suede, depuis le celebre Pytheas de Marseille jus-
qu a John Carr en 1804. Mais il est evident que dans
ces derniers temps, la Suede a change de face; que ces
divers ouvrages ont laisse beaucotip a desirer, et que
nous devons savoir gre a M. Daumont d'avoir cherche
a combler la lacune.
Nous avons parle du style elegant et fiicile de cet ou-
vrage ; a ce merite est joint celui de I'authenticite, de l.i
veracite, et une variete de faits el d'apercus qui decelent
dans son auteur des connaissances Ires elendues. Sous
ce double rapport, le Voyage de M. Daumont est vrai-
ment remarquable. II eiil ete a souhaiter neanmoiris
qu'il eut pu nous donner des renseignemeris precis sur
la topographic de I'immense Nordland , sur lequel nous
n'avons que des donnees vagues et peu satisfaisunles ;
nous eussions desire encore qu'il nous eut iransmis
quelques details plus circonstancics sur la geographic
physique et la statislique de la Norvege; quoique n'e-
tant pas sur les lieux, il pouvait, ce nous semble, com-
pleter plus que personne la description totale de la mo-
narchic suedoise.
En somme, M. Daumont a rendu un service a la
science geographique , a ajoute aux connaissances st.i-
tistiques, et son ouvrage pent dignement figurer sur les
rayons de nos bibliotheques, a cote des specialiles que
nous avons vu paraiire de nos jours, sur la Sanlaigne,
la Perse, le Monte-Negro et le Caucase.
( 387 )
RAPPORT VERBAL
Sur I'ouviage de M. le capilaine de vaisseau C.T. Falbe,
consul general de Danemark a Tunis, intitule: lie-
cherches sur V emplacement de Carthage ^ sith'ies de ren-
seignemens sur plusieurs inscr/ptions piui icpies incdites .
de notices historiqucs , geographiqiies , etc., ai'ec le
plan lopographique du terrain et des mines de la ville
dans I ear ctat actiiel, et cinq autres planches ^
Fait a la seance du i6 mai, par M. d'Avezac.
Messieurs,
Le premier plan ettectif de Carthage qui ait ete livie
k la euriosite du nionde savant , a ete mis sous vos yeux,
des avant sa publication , par son auteur M. le capitaine
de vaisseau Falbe, de la marine danoise, qui a con-
sacre a cette oeuvre les loisirs de sa residence a Tunis
comnie consul general de son souverain aupres du Bey
El-Hhasan. Un exeniplaire du volume et de I'Atlas ou
cet officier a consigne les re'sultats de ses travaux ,
vous a recemment ete reniis en son nom par noire
collegue M. Jouannin, dont I'auteur danois ne nous a
point laisse ignorer !a cooperation active a la redaction
francaise de son texte. Vous m'avez charge de vous
rend re un comple verbal de ce bel ouvrage, etje viins
m'acquitter de ce devoir.
Le travail de M. Falbe n'est point borne au simple
relevement des ruines qui constatent encore, sur rein-
placement del'ancienne Carthage, I'etendueet '{uelques-
unes des distributions de cette grande et fameuse cite;
une deuxieme section de son livre offre des remarqucs
geogra[)hiques et topogiapliiqnes iiileressanlos sur la
( 388 )
contree qui se prolonge au sud jusqu a El-Legem (I'an-
vlenneT/tjsdriis); une tioisieme section est consacree a
des fragniens de paleograpliie et de numisniatique car-
thaginoises et niauritaniennes.
I . Carthage.
M. Falbe a execute consciencieusenient , et avec cette
exactitude que donne la pratique usuelle desreleveniens
nautiques, un plan detaille du sol ou gis:iit la rivale de
Rome. Les configurations physiques du terrain ont
ete soigneusenient expriniees, et des indications pres-
que niinutieuses signalent tons les vestiges d'anciennes
constructions que I'auteur a rencontres ou apercus :
ce sont des jalons a I'aide desquels nous pouvons, par
la pensee, restituer ces niurs et ces edifices delruits par
les insouciantes et journalieres demolitions des Arabes
aussi bien que par I'incendiaire orgueil deScipion. On
s'accorde a deplorer que si peu de hiniieres nous aient
ete conservees par les auteurs grecs et latins surla topo-
graphic de cette reine du commerce d'occident ; le beau
travail de M. Falbe rend aux antiquaires un service
d'autant plus precieux, que non-seidement il leur facilite
I'intelligence complete des indications si concises et si
clairsemees d'Appien, de Strabon, de Polybe, de Tite-
Live,de Procope, d'Orose, etc., mais qu'il leur signale
en outre des details que I'erudition ei\t vainement de-
mandes aux textes anciens : el, par excmple, I'amphi-
theatre, dont il a verifie I'existence et le gisement,
avait-il une incontestable realite tant qu'il ne nous etait
revele que par une fugitive mention de la nmse de
Virgile? Mieux encore: le ciique avait-il quelque part
une mention, meme en des vers douteusenient sinceres?
Toutefois, il le laut ilire, ces indications que la litte-
( 38.9 )
rature classiquea omises, un auteur aiahe du xi'" siecle
ne les a point negligees : Abou-0'baycl-eI-Bekry, de Cor-
doue, enonce que dans I'enceinte de Carthage, ou le
voyageur curieux decouvre chaque jour quelque nouvel
objet digne d'attention, le monument le plus admirable
de son temps etait le theatre^ voisin deMa'lqa/i^ du
Hhoumas (qui paraitetrele cirque), et des citernes des
diahles : tout cela est en parfaite harmonie avec les re-
levemens de M. Falbe etvient confirmer I'exactitudede
ses observations 5 mais il est a regretter que cet officier
n'ait point connu I'auteur andalous, pour nous aider
aresoudre unedifficuUe qui se presente dans i'applica-
tion du nom de Ma'lqah (ou plus correctement Ma'al-
laqah, la Suspendue) , qui appartienl anjourdhui au
hameau bati sur les grandes citernes, tandis que Abou-
O'bayd le donne a un palais d'une elendue et dune
elevation prodigieuses, dominant sur la nicr, et qui
semblerait d'apres ces termes devoir etre cherche sur
le haut plateau de la citadelle Byrsa.
Ladecouverte laplus notable que nousaient piocuree
les explorations locales du docte danois, c'cst celle des
vestiges bien determines du double port, avec sou
mole exterieur, avec ses murs, avec son kothon peniu-
sulaire, ses deux entrees successives, et la coupureacci-
denteile eJfectuee pendant le siege : ces traces persis-
tantes, en demontrant que le port etait au sud de la
ville, renverse completement 1 opinion, generalement
adoptee depuis Leon Africain , quece port etait jadis sur
i'emplacement AEl-Mersay^ denomination qui, a la ve-
rite, etait bien faite pour induire en erreur.
M. Falbe porte ensuite ses observations sur les ruiues
de Byrsa, sur ceiles des citernes, sur celles du grand
aqueduc, dont Torigne no pouvait etre au ilcla des
( 390 )
hauteurs d Aryanah, ainsi (jue le demon lien t a lu-iois la
verification comparative des reliefs du sol et les traces
encore subsistantes des travaux, ce qui ne permet plus
de croire avec Shaw que les eaux amenees a Carthage
vinssentduGebel-Zaghouan(aujourd'huiappeleSsouan).
11 soccupe ensuite des vestiges de temples, de ceux de
lamphithealre, du cirque, de quelques rues, lies
murs denceinte, des loiid)eaux. Ces investigations
le conduisent a la determination conjecturale du circuit
de la Carthage punique, et des liniites plus reslreintes
de la Carlhage roniaine, autourde laqufile apparaissent
encore presque completes les divisions agraires du sol
atlribue aux trois mille colons envoyes par Augiiste.
2. Details geographiqiies ct Inpographiqites.
Lorsque M. Falbe voulut encadrer son relevenient
geodesiquedans les travaux hydrographiques de Smytli
et deGauttier, il fut arrele a-la-fois par la disrordance
de ses resultats avec les leui'S, et par les dissidences no-
tables que presentaient entre ellesnon-sculemeulles car-
tes respectives de ces deux habiles marins, mais meme
trois cartescontemporaines derhydrographeanglais; ce-
pendant apres avoir reconnu que la feuille de detail
donneepar celui-ci pour la cote de Tunis depnis la ville
d^ AfricajusqiL auxFreres de Bizerte, se rapprochait beau-
coup, dans ses bases, des positions observees par Gauttier,
il a adopte cette derniere carte comme un canevas dans
lequel il a insere le trace que lui avaient procure ses
propres triangulations depuis le voisinage du cap de
Qamait jiisqu au-dela de Solyman sur le littoral, et a
linlerieur jusqu'au Gebel el-llessass et au Gebel Ssouan.
11 y a employe en outre ses relevemens itineraires depuis
Tunis jusqu'a Sousah et de la jusqua El-Legem, en
( 391 )
suivantdiverses routes ou inoyen desquelles il a corrige
des meprises et des transpositions assez notables de la
carte anglaise; neanmoins il a conserve intacte la posi-
tion de Hhammamet, bien qu'il eiit verifie que cette
position etait ainsi beaucoup irop rapprochee de Tunis;
car au lieu de 26 milles geographiques entre elle et
Hhanimani-el-Enf, levoyageur danois a compte4o mille
tunisiens ou 9 heures de chemin au pas accelere dun
cheval ou a Tambledune mule, ce qui equivaut a plus
de 3o milles geographiques d'apres ses propres evalua-
tions : or il est a remarquer (^ue s'il eut adopte la position
que Smyth a donnee a Hhammamet dans sa General
chart of the situation of the Sicily^ il eut precisement
trouve cette distance ; mais il n a voulu modifier en rien
iin trace de cotes qu il avait adopte comme le moins de-
fectueux dans son ensemble, et ce scrupule se mauifeste
ailleurs pai' les solutions de coiitinuite qu'il a laissees
subsister aux points ou son propre relevement n'eut pu
se lier a ceuxde Smyth qu'au moyen d un leger raccord
qu il a abandonne a la discretion des cartographes.
Faute de s'expliquer convenablenient ce respect tran-
sitoire et conventionnel pour les parties defeitueuses
d un travail adopte dans son ensemble, les geographes
du Depot de la guerre, qui, dans leur carte lithogra-
phiee des Possessions francaises en Barbaric, ont fait
entrer les resultats de M. Falbe, ont simplenient copie
sa carte en raccordant les lignes qu'il a laisseesinterrom-
pues, mais en conservant a Hhammamet la position
pour laquelle il a averti qu'une correction est indispen-
sable.
M. Falbe avait aussi, dans sa carte maniiscrite ainai
que dans les premieres epreuves lithogiaphiees, place
Qayrouan dans la position ab.sohie 011 il se trouve sur la
( ^90
carte cleSliaw, et ccUe position lui est pareilleinent con-
servee clans la carte lilhographiee tin Depot de la guerre :
cette derniere circonstance ine porte a reproduire ici
les observations critiques que javais a cet egjard adres-
sees a M. Falbe, et qui I'ont porte ii effacer de sa carte
I'indicalion de ce point. Shaw n'ayant pas determine
la situation de Qayrouan par des observations directes,
mais au nioyen de lignes itineraires s'appuyant sur
Tunis, Sousah et F.hraqlyah, ce sont ces conditions re-
latives de distance qu'il importe de conserver, et non
une fixation geononiique qui n'a rien d'absolu ; il est
vrai que Shaw ne negligeait point les observations as-
trononiiques, et que selon toute probabilite il en ii
fait a Qayrouan ; niais il ne faut point perdre de vue que
dans ce cas son instrument n'a pu etre exempt en cette
station des erreurs qui Caffectaient a Tunis, a Sousah, a
Ehraqlyah; c'est done, a cet egard , sur les differences
en latitude qu'il ya lieu d'asseoir ses calculs : or la com-
Ijinaison des distances itineraires et des dif'lerenees en
latitude fournies par les observations, doit procurer a
Qayrouan une position sensiblement plus septentrio-
nale. 11 est vrai que d'autres considerations ont ete in-
voquees pour I'abaissement de la latitude deQuayrouan,
savoir, les conditions de distances relatives dans les-
quelles les itineraires romains placent le Fiats y4ugust/,
qu'(m suppose avoir occupe I'emplacement de Qay-
rouan j mais malgre I'autorite de Shaw, de d'Anviile et
de tous leurs successeurs , je n'hesite point a nier cette
identite pretendue; !cs historiens aiabes rapportent que
Qayrouan , fonde au septieme siecle par le celebre
O'qbah el-Feliry ou parson lieutenant Mo'aouyah ebn
Khodaygj, lut bati en un lien jusqu'alors desert, et
couuert d'cpaisses forcts remplies de betes feroces ct do
( ^9^ )
serpens. Nous voyons dun autre cote Ibraliym eba-el-
Aghlab construire , en I'annee 800, Medynet el-Qassr-
el-Qadjniy la ville du Vieux-Chateau , a trois milles au
sud de Qayrouan ; or, une ville nouvelle ne pouvait
tirer un tel nom que des constructions antiques qui deja
se rencontraient sur son emplacement : voila tout au
plus, peut-etre , le P'icus Augustl des itineraires ro-
mains ; mais il est evident qu'on ne pent le chercher a
Qayrouan. Je desire que ces observations empechent
desormais la reproduction dune erreur qu'une routine
constante avait si nialheureusement consacree.
Un releve des villes et villages compris dans les dis-
tricts de Sousah et de Monaster, avec leur population;
des observations sur les concordances de la geographic
anoienne et de la geographic actuelle en ce qui concerne
Grasse, Decimum , Hadruniatum, Ruspina , Thysdrus ,
avec I'indication des vestiges subsistans a Sousah et a
El-Legem, terminent cette section.
3. Paleographie et numismatique .
M. Falbe s'occupe, dans les articles suivans , du de-
chifiiement de plusieurs inscriptions puniques, de la
description de diverses medailles africaines et de quel-
ques autres objets d'antiquite. Malgre tout I'interet que
presentent ces dernieres recherches, je n'ai point a vous
en faire ici I'analyse , puisqu'elles n'ont plus un carac-
tere geographique, bien qu on put toutefois pretendre
avec quelque justice que la geographic n'est pas tou-
jours completement desinteresseeen de telles questions.
Je nie bornerai a presenter une seule observation sur
une niedaille attribuee a la ville de Hadrumetum : elle
porte, a I'une des faces, une tete barbue avec des ca-
racteres peu apparens qui semblent pouvoir etre his
( 394 )
HAD ; M. Falbe explique I'line et lautre pai la Tele cle
Neptune et le mot HADRVMETVM 5 sans disculer I'aii-
lonomie de la luedaille, il seinble (ju't;n la comparant a
celle du niusee Medicis, publiee par Eckhel , Pellerin,
Carorii , Mionnet, et reproduite par M. Falbe lul-nieme,
on doive supposer que la tete barbae est celle d'un em-
pereur, et quo la legende portait le noin HAURIANVS,
comme la niedaille du musee Medicis donne la tele
d'Auguste avec !a legende IMP. AVG. PP., etc.
Je terminerai par uuc reniarque generate, mais d'une
importance fort accessoire : le texte de M. Falbe a ett*
imprime a limprimerie royale , ou les types orienlaux
abondent; quelques noms de lieux, tels que MaHqali,
Ssoudn, Doudr el-Sckath , etc. , out ele indiquesen carac-
teres arabes ; pour le surplus, M. Falbe s'est contente
d'un systeme particulier de transcription dont il a donne
la clef au commencement de son livre : nous regrettons
qu'avec les facilites qu'il avail a sa disposition pour don-
ner tous les noms en caracteres orientaux , il se soit
contente de transcriptions qui manquent Icui butcliaque
fois qu'elles laissent le moindredoutesur Torthographe
ori<nnale,comme cela arrive dans le systeme de M. Falbe,
oil Sousa , Mersa, Scihra, par e\en:ple, s'ecrivent uni-
formement par un a fmal, tandis que I'arabe terniine le
premier nom par un //<?, le second par un ye, le iroi-
sieme par un ely/i lui nieme n'a point etc toujours fidile
a ses propres regies, et quelques noms (tels que R.isas,
Soukara) sont transcrils, dans son livre ou dans lat-
las, sans aucun egard a son tabUau do correspondance
alpliabetique.
J ai lini, Messieurs, et je m'apercois que nuUelouange
ne m'est echappee pour I'auteur, ni pour Touvrage ; ce
r 395 )
n'est j)oii)t ouMi , mais couvenance : voire estime leur
etait deja Irop bien acquise pour qu'ils eussent besoin
d'etre loues devant vous.
*A
TEXAS.
Observations historical, geographical and description, etc. ,
par inadaine Mary Austin Holley. — i6o pages in-12.
Baltimore, i833.
Ce petit ouvrage, plein d'interet, a ete ecrit pour
eclaircir quelques questions relatives au Texas et soule-
vees par la soclete geographique de Londres, dans des
vues de calonisation.
Le Texas fait provisoirenient partie de I'etat de Coa-
huila et du Texas, en attendant qu'il forme seul un etat
distinct (i). II est situe entre le 28° et le 34° de !at. N.
et borne, a lest, par la Louisiane; au nord, par la riviere
Rouge, qui le separe du territoire d'Arkansas ; a I'ouest,
par la riviere Nueces, qui le separe de Tamaulipas et de
Coahuila ; enfin, au midi, par le golfe du Mexique.
Aspect du pays; sol. Toute la cote, de la riviere Sa-
bine a celle de Nueces, est generalement basse et unie,
mais point marecageuse ; elle est bordee par de vastes
prairies, qui s etendent jusqu'a 8 a 10 mille en largeur.
La portion du plat pays, comprise entre les rivieres
(i) La colonic americaine connue sous le nom de colonic Austin,
est fontraire a toute tentative pour separer le Texas de la confede-
ration Mexicaine; mais elle voudrait que ce territoire formiit «n etat
pariiculier, en prcnaiit la rivifere Nneces conime ligne de demarca-
tion aveo Coahuila.
( 396 )
Sabine et San-Jacinlo, s'avance dans 1 inteiieur, a jo
niilles de la cole, dansune direction nordet nord-ouest.
Tout eel espace est couvert de belles foreis de chenes,
de frenesjdecedres, cypres, etc., ot arrose par la Sabine,
la Naches el la Trinite.
La region situee enlre les rivieres San-Jacinlo elGua-
daliipe, coniprenanl les parties inferieures des affluens
Brazos de Bios, San Bernaido, Colorado cl La Baca, s'e-
tend, vers le nord, a 80 niilles de la cote ; elle est encla-
vee dans les possessions de la colonic Austin ; le sol en
est fertile et bien arrose.
Les terres sur le Brazos, le San-Bernard, le Caney, le
Colorado, sont conipose'es dun sol d'alluvion d'une
couieur rouge brun, a-peu-pres comnie lechocolat. Cel-
les baignees par la Guadalupe, la Baca, la Navidad, etc.
sonl formees de coucbes alluvionnaires, d'une couieur
noiratre, el tres productives, surtout en colon el en mais.
Le sol de la vallee de Brazos est an terreau noir, qui,
dans plusieurs endroits penetre jusqu'a 20 pieds de
profondeur.
Au-dessus de la plaine inferieure du Brazos, du Co-
lorado el de la Guadalupe, le pays oftVe unc surface
ondulee et s'elend, en suivanl une direction N. O, a
une distance qui varie de t20 a 200 milles, a partir de
la region inferieure jusqu'a la cliaine des montagnes du
Texas. L'aspect du pays est agreable , le terrain ex-
cellent. On y voit de vastes prairies entourees de bois
de cedre, de cbene, etc. , et entrecoupees de ruisseaux
et de sources d'eau vive.
Montagues. La cbaine du Texas, prolongation do la
Sierra Madre^ ou « montagne mere >> commence pres le
confluent du Bio Puerco avec le Rio Bravo et se diri-
geant an N. E., entre sur le teniloire du Texas, aux
(^^97)
sources de la Nueces; cle la elle se prolonge dans la
nieme direction jusqu'aux eaux superieures de la San
Saba,branche du Colorado, et inclinant a lest, elle tra-
verse le Colorado, a peu de distance de I'einbouchure,
et s'etend jusqu'aux terrains ondules qui avolsinent le
Brazos, sans passer a travers cette riviere. Des chainons
penetrent au sud, au-dessus de la Medina et de Gua-
dalupe, dans le voisinage de Bexar; d'autres descendent
audela des rivieres Llanos, Piedernales et des petits
affluens du Colorado a I'ouest, remontant cette riviere
a une tres grande distance de San Saba et environnent
les sources de San Andress et Bosque , tributaires du
Brazos.
Cette chaine, de troisieme et quatrieme grandeur, par
rapport a son elevation, est couverte en beauconp de
parties, de chenes, de cedres et d'autres grands arbres;
on y a trouve du fer, du cuivre et du charbon.
Rivieres., baies, etc. — Toutesles rivieres de cette cote
sont, en general, obstruees par des bancs formes par la
predominance des vents du sud, qui agissent dans uu
sens contraire a celui du courant.
Lo<! hrazos de Dios (les brasdeDieu) prend sa source
dans le pays des Comanches. Sa branche la plus oc-
cidentale arrose une contree ou plaine salee, de i6o a
200 milles d'etendue; et quand les pluies sont abon-
dantes, il s'y forme un etang passager, qui se decharge
dans le Brazos et dont les eaux sont quelquefois impre-
gnees dun sel suffisant, pour pouvoir servir a mariner
le pore. Dans la saison des chaleurs, toute cette plaine
est couverte de sel cristallise.
La largeur moyenne du Brazos, depuis son endiou-
chure jusqu'a Bolivar, est de i5o pieds ; sa profondeur
varie entre 3 a 5 brasses. Jamais, cet affluent ne fran-
28
( :^98 )
rhit ses liortis, quoique son cours soil tie pliisieurscen-
taines <le milles. Ses eaux ressemblent, pour la oouleur,
a celies du Missouri et du Mississipi.
La barre etroile, qui obstrue I'entree decetle riviere,
n'a pas plus de 20 verges ou 60 pieds de large el est re-
(•ouverle ordinainnient par six pieds d'eau^ en dec:i de
cette barre, lehavre est sur. Les grosl)atimens peuvent
remonter jusqu'a Bi-azoria.
L'entree la plus rapprochee du Drazos, du cole de
I'ouest, est lePasso Cavalio. Cette passe a 12 pieds d'eau
au-dessus de la barre, et en deca on y trouve un bon
ancrage de 4 brasses; mais la profondeur moyenne,
a I'enibouchure de la riviere Colorado, n'excede pas 8
pieds.
Le Colorado est obstrue par des bois flottes, qui se
trouvent a 10 milles au-dessus de la ville de Matagorda
et qu'on peut facilement debarrasser, ce qui rendrait
cette riviere navigable presque jusqu'aux monlagnes.
he. lac Sabine , i{u'\ ie trouve a I'extremite urientale
de la cole , a une entree fournissant 6 pieds d'eau , d'un
difficile acces, a cause des bancs de sable qui existent
vis-a-vis.
Gaheston, l'entree la plus voisine a I'ouest, donne
12 pieds d'eau au-dessus de la barre. Le liavre, silue
enlre les lies de Galveston et du Pelican , fournit un
bon ancrage de 5 brasses, sur un fond de vase. De la
pour allcr a Tembouchure de la Trinite ou du San
Jacinto , la navigation est embarrassee par red fish bar,
ou barre du poissoPi rouge, recouverte de 5 pieds d'eau
a maree haute, el de 3 seulement, pendant le regne
des vents du nord.
Un bras occidental de la bale de Galveston s'allonge
vers le S. O. a 2 milles if2 de la riviere d'el Brazos, avec
( ^99 )
laquelle on pourrait tacilement le faire communiquer,
au nioyen dun canal.
Le bras oppose de la meine bale, appele "Bale de
I'Est » savancc le long de la cote et recoit une orique
piofonde, qui est elle-menie presque coupee par un
petit affluent du lac Sabine; en unissant cesdeuxcriques,
on pourrait ainsi communiquer de la baie au lac.
La Trinite et le San Jacinto se jettent dans la baie de
Galveston. La premiere de res deux rivieres dans Tangle
N. E.; I'autre , du cote oppose. Le San Jacinto olfre une
belle baie a son eudioucliuie et est nayigable pour tous
les balimens qui peuvent franchir la barre, jusqu'a
Teuiboucbuie du Buffalo Bayou , qu'on pent remonler
egalementjusqu'a sa bifurcation au dessus deHarrisburg
eta 40 milles de San Felipe de Austin. Ce cours d'eau,
qui traverse une vaste prairie , avec des bords eleves et
bien boises, ressemble a un canal. La maree se fait
sentir jusqu'a la bifurcation dont on vient de parler.
La baie de Aransaso recoit aisement les navires ne
tirant pas plus de 7 pieds d'eau; elle est sure et plus
profonde que celle de Matogorda etde Galveston. C'est
le principal rendezvous desbatimens quicbargent pour
Goliad, Bexar et pour les Colonies Irlandaises sur la
Nueces.
La Naches permet une navigation commode jusqu'a
sa junction avec I'Angelirja, a aS niilles S. E. de Nacog-
doches.
La liviere San-Antonio prend sa source a trois lieues
de Bexar; elle est formee d'une multitude de petits
ruisseaux, qui se reunissent tous, a quelques verges du
lieu de leur source , par une seule riviere, coulant rapi-
dement sur une masse calcaire. Le Sau Anlonio ne de-
borde que tres rarement.
28.
( 4oo )
Productions. — Le sol est propre a la culture du
colon, du Sucre, de rindigo , du tabac, des olives, de
]a vigne, du riz, du uiais, du soigle, de I'orge, de I'a-
voine, du lin, du chanvre, des palates douces, etc.
Les prairies naliirelles sont Ires lavorables a I'edu-
calion des chevaux, du betail noir, des pores, des
brebis et des chevres.
Le colon est dune excellente quallle. La plantation
de coton de M. Mai-Neal, siluee au dessous de Brazo-
ria, a lo niilles du golfe, donne un revenu annuel de
lo mille dollars. Le travail n'exige que six personnes,
et vingt negres. L'indigo est egaleuient bon; le mais
rapporte environ yS boisseaux par acre.
Les arbres renferment un niiel des plus exrjuis; et la
cire est vendue principalenienl, aux eglises du Mexi-
que, ou elle est estimee un haul, prix, meme un dollar
la livre, quand elle est blanchie.
On a decouvert, pies des sources du Brazos, une
masse de fer malleable, du poids de plusieurs tonneaux,
dont une piece fut envoyee a Nevt^-York, il y a quel-
ques annees. On pretend que cette masse est un objet
d'adoration chez les Indiens Tomanche.
Arbres. — La region du chene vert s'elend depuis la
bale de Matagorda jusqu'a roxtremite ouest dti la baie
de Galveston, et sur les bords du Brazos, en s'avancant
vers I'interieur, environ jo milles. On remarque, a
Bolivar, un chene (jui porte 16 pieds de circonference,
a plus de 3o pieds du sol \ a 10 milles de distance, on
en voit un autre, qui mesure 19 pieds.
Le chene vert linit a i5 njilles a Test du Brazos. De la
a la riviere Sabine, on trouvede belles forets de cedres,
de chenes espagnols, rhenes noirs, rouges, miiriers,
frenes, etc. Tout 1 pays cnvironnant, cntrecoupe de
( 4oi )
rivieres, criques et ruisseaux, est ouvert, uni, avec tie
riches et hautes prairies entremelees de bouquets de
bois.
L'arbre appele en anglais murkit-tree , espece de lo-
custe, abonde aupres de la riviere Guadalupe. II est
tres estime des Mexicains, a cause de la duree de
son bois et de ses cosses, qui servant a engraisser les
pores et le betail.
Le murier croil en tons lieux et on pent elever les
vers a soie avec une grande facilite. Des raisins indige-
nes de diverses especes viennent en profusion.
Climat. — Le climat est, en general, excessivenient
doux.
Dans tout le plat pays , il tombe tres peu de pluie
de mars en novembre j et la surface du sol exposee a
Taction constante des ravotis solaires est rafraichie
par une brise de mer, qui souffle presque constamment
du sud-est, excepte a la pleine lune on aux changemens
de cet astre. II y a aussi quelques interruptions durant
les calmes du milieu de I'ete, et lorsque les vents du
nord apparaissent un moment, au printemps et en au-
tomne. En novembre, ces vents regnent touta-fait,
avec les pluies, qui viennent rafraichir la terre- Les
nionlagnes de 1 interieur, alors couvertes de neige, re-
froidissent aussi I'atmosphere, tandis que les eaux du
golfe, mises en mouvement par Taction du soleil, rare-
fient Tair qui arrive, et produisent un fort courant
venant du nord. Ce courant d'air traverse les plaines,
dans les mois de decembre et de Janvier, aussi regu-
lierement que le vent du sud-est durant Tete, n'etant
interrompu de meme qu'aux diverses phases de la lune
et quaiid elle est dans son plein.
( 4o2 )
L'infliience de ces vents sur les marees est telle, que
la hauteur en est reduitede 3 a 4 pieds.
Commerce. — Dapres ra[)ercu qu'on a donne des
ports et rivieres du Texas, ce pays parait tres favorable
a la navigation interieure. Sa situation sur le golfe du
?vlexique lui permet de communiquer facilement avec
les ports uiexirains du sud, avec les Etals I nis au
nord, et les Indes Occidentales a Test. Un commerce
d'interieur trej etendu peut etre engage a travers les
ports du Texas, avec le nouveau Mexique, Chihahua
et toules les parties septentrionales de la republique
mexicaine. Ce commerce est fait maintenant au moyen
de fortes caravannes, qui partent de Saint-Louis, dans
le Missouri , pour se rendre a Santa-Fe, dans le nouveau
Mexique, au milieu Je solitudes infeslees dlndiens
hostiles; tandis que de quelque port du Texas qu'on se
dirige jusqu'au Passo del INorte et Chihahua, ou au
nouveau Mexique, la distance est nioindre que celle qui
separe Saint-Louis de ces divers, points el rien ne serait
plus facile que detahlir une boime route pour les Wa-
gons o\x charrettes.
On a construit une scierie a vapeur a Harrisburg;
un autre moulin , pour le meine objet, est en construc-
tion sur le bord oriental du San-Jacinto, vis-a-vis I'era-
bouchure du Buffalo Bayou.
Colonies, etahlissemens, villes, etc. — La ("olonie Au-
stin confenait, en i83i, 6,000 habitaiis, principalement
Americains, avec un certain nonibre d'lrlandais, d'An-
glais, d'Allemands ei de Francais.
I>a (juantite de le.rre distribuee avec des litres legaux
est d'environ ,'1400 lieues mexicaines (i). Une lieue de
(i) Une lieue de ce pays est de 5,ooo varas mexicaines carrpes ,
ou 4,4iS acres anglais. 1,'acre ainericain est a I'arpent de France
comme 1,000 est ii 1,262.
( 4o3 )
terrain revient, tout compris, a 4 centiemes de dollar par
acre.
Dans la colonie de Wilt, sur la riviere Guadalupe'
plus de 200 lieues de terres ont ete concedees a des
eniigrans des Etals-Unis, et a-peu-pres aulant aux indi-
genes.
Les colonies iriandaises sur la Nueces ont ete formees
par MM. Mac-Mullen et Mac-Glone; celtes sur la cote
entre les rivieres La Baca et Nueces, par MM. Powers et
Hewilson.
Le pays sur !e San Antonio et celui quiavoisine 1 em-
bouchure de la Guadalupe, appartient en general a des
Mexicains, qui resident a Bexar et a Goliad.
La vaste contree a 1 est de la colonic Austin jusqu'a
la riviere Sabine, est exploitee par des conipagnies et
des particuliers recommandables, qui en ont passe des
contrats.
Une autre concession a ete faiie par legouvernement,
pour etalilir une colonie iriandaise entre la Guadalupe
et la Nueces, compren.int toutes les terres enclavees
entre ces deux rivieres, a 10 lieues du golfe.
Au-dessus de cette plaine, la region ondulee s'etend
vers le N. O. en s'elevant a rnesure quelle s'approche
dela chaine desnionlagnes. Toute cette paitie est con-
vene dune espece d'iierbe appelee riiiis/at^ qui ressemble
a Xherbe bleue des Etats-Unis et fournit d'excellens pa-
turages.
Bexar, vllle situee sur le San Antonio, par latitude
2y° 5o', a i4omilles de la c6te,contient 2,5oo babilans,
tous natifs Mexicains, sauf quelques lamilles Aniericai-
nes. Un poste militaire y avait ete etabli par le gouver-
nement espagnol en 1718; en 17^1, des eniigrans des
lies Canaries y fonderent la ville actuelle, qui prospera
( 4o4 )
jusqii'a la revolution de 1812, ou elle eut a souffrir de^
altaques des Comanches et autres Indiens. Cette place
est adiiiirablenient situee pour des etablisseinens ma-
nufacturier>.
Le \iliage de Goliad, autrefois la Bahia, situe sur la
live droite du San Antonio, a environ 1 lOinillesS.E.de
Bexar et 3o dela cote, contienl 800 habitans, tousMexi-
caius.
San Felipe de Justin, ville fondee en 1824, par le
colonel Austin et te baron de Bastrap, commissaire du
gouvernement, est le chef-lieu de la colonic Austin. Elle
est situeesurla rive droite du Brazos, a8oniillesdugo!fe
(par terre ) et 180 niilles en suivaiit les sinuosites de la
riviere.
Matagorda, nouvelle ville sur la baie du menie noni,
a Temboucliure du Colorado, parait devoir prosperer
rapidenient.
Gonzales est une ville situee sur le cote gauche de la
Guadalupe au point din tersection entre cette riviere et
la route directe conduisant a San Felipe de Austin.
San-Patrick, ville comniencee sur la Nueces et peu-
plee exclusivement d Irlandais.
Brazoria, situee sur la riviere Brazos, est a 3o milles
par eau et i5 milles parterre, de son embouchure.
f^ icloria, village sur la Guadalupe, a 20 milles de 1 em-
bouchure de la Baca, pres laquelle il ya un poste mili-
taire.
Nacogdoches, ancien poste militaire espagnol et vil-
lage, situe dans la region orientale du Texas, par 3i" 4o
de latitude, est a environ 6omillesO. de la riviere Sa-
bine. En 1819 ou 1820, ses habitans furent disperses
par des troupes espagnoles et se refugierent sur le ter-
ritoiie de la Louisiane ; Nacogdoches ful repeuple en
( 4o5 )
1822 et 1823 ; on y compte mainteiiant, conipris les
alentours, 5oo Mexicains. 11 y a aussi une garnison de
la menie nation.
Anahuac est un poste militaire, etabli vis-a-vis I'em-
bouchure de la Trinite, a 40 niillesN. O. de la baie de
Galveston par ordre du general Teran.
Tenoxticlan est encore un poste militaire, sur la rive
droiledu Brazos, a 12 millesau-dessus de !a route supe-
rieure conduisant de Bexar a Nacogdoches, a i5 milles
au-dessous de I'embouchuredu San Andre et 100 milles
au-dessus de San Felipe de Austin. On doit y entre-
tenir une garnison afin de proteger cette partie de la
colonic, contre les depredations des Indiens et faciliter
les progres au N. O. au-dessus de la riviere Brazos.
Le colonel Austin doit etablir une ville sur le cote
gauche du Colorado, au point ou la route ci-dessus se
trouve coupee par la riviere.
M. de Zavala, ministre plenipotentiaire des Etats Mexi-
cains pres la cour de France, a recu de son gouverne-
ment, en 1829, une concession de terres de goo milles
carres, lesquelles s'etendent depuis le golfe du Mexi-
que, a I'ouest de la Sabine jusqu'a la route qui conduit
de Natchitoches a Nacogdoches. Ces terres ont ete di-
visees par lots de chacun I'j^j acres ^^;^; 3oo families
emigrantes de New-York s'y sont etablies, pour former
une colonie, en se conformant aux regies etablies par la
loi de colonisation, rendue par letat souverain de Coa-
huila et Texas, Ie4 :>vril 1825.
Indiens. Les Comanches habitent le pays au N. et au
N. O. de San Antonio de Bexar. Ce peuple nomade ne
subsiste entierement que des produits de la chasse. Les
vastes plaines de cette contree sont couvertes d'immen-
ses troupeaux de buffles et de chevaux sauvages ; ces
( 4o6 )
liiilions en surprennent et ;ipprivoisent un grand noni-
bre pour leur servir de ressources, en cas de chasse in-
tructueuse. Les Gomanches sont braves a la sfiierre et
civils pendant la paix ; i!s vont toujours a cheval et por-
tent pour armes, un arc, des flecbes et un long epieu.
Amis des Aniericains dii nord, ils detestent les Mexi-
cains; et ceux-ci, lorsqu'ils veulent adresser a quelqu'un
une {jrosse injure, le qualilient de Comanche. Ces In-
diens ont un principal cbef, qui a plusieurssubordonnes.
Ils ont des conseils par quartier, et une fois I'annee, on
reunit le grand conseil de toute la tribu, ou sont reglees
les atlaires importantes.
Les Carancahuas, qui peuplaient autrefois toute la
cote, ont ete chasses au-dela de la riviere Baca, liinite
occidentale du territoire. Celte tribu guerriere, apres
avoir inquiete pendant plusieurs annees les colons arne-
ricains et t.ue quelques-uns d entreeux, tut attaqueepar
un corps de 60 carabiniers sous le colonel Austin, qui
en detruisit la nioilie. Le reste se refugia dans I'eglise
niexicaine des missions delal};ihar, ou, surl'intervention
des pretres, on leur accorda unetreve, a condition qu'ils
ne repasseraienl point la riviere Baca.
Les Cushatees sont etablis en petit noinbre, sur les
bords de la Trinite. Leiirs maisons sont propres, leurs
terres bien cultivees. lis font un bon conmierce de che-
vaux el de bestiaux, se servent dristensiles culiiiaires et
sont hospitaliers envers les etrangers.
Les autres petitestribus sont les IVacos, TaxvaJianies,
Tankaways et Lepmis,
>(4>
IJTAT DU TEX\S EN I J 4^.
Le T/ieatro Jmericano (^puhVie a Madrid en 1748) a
donne une description detaillee, de la province dii
Texas on Neuvas Philippinas^ dans laqueile on trouve
les renseigneniens suivans :
La province du Texas, separee de celle de Coaguila
ou Coaiiuiia , par le Rio-Medina, a plus de 220 lieues
de longueur, sur 60 de largeur. Dans cette vaste etendue
iJe pays, on ne compte que quatre etablissemens {po-
blaciones) ^ tres eloigne's les uns des autres, savoir :
I" Lepresidio de San-Antonio Bejar (longit. 2^4° 5' de
lile de Ferj lat. 3o° 7') distant de 80 lieues du Rio de
Medina ;
2" Presidio de Nuestra seiiora de los dolores (longit.
281° 10', lat. 32° 1 5') sans garnison , au centre de la
province, a )54 lieues de San Antonio;
3° Presidio de Nuestra senora del Pilar de los Adaes
(longit. 284° i5' , lat. 32^ 20') a 61 lieues du precedent;
4" Presidio de la Bahia del Espiritu Santo (longit.
277° i5' lat. 29° 10') a 44 lieues de San Amonio et
12 de la cote. Ce presidio fut detniit et retabli en
J721.
La ville de San Antonio de Bejar, capitale du Texas,
fut fondee en i63i par le marquis de Casa Fuerte, vice-
roi de la nouvelle Espagne.
1690. Mission de S;m Francisco, etablie par le gou-
verneur de Coahuila.
1691. S. M. ayant ordonne la reduction et la pacifi-
cation de la province, D. Domingo Teran, gouverneur
de Coahuila et Texas, arriva avec 5o soldats, i4 reli-
gieux et 7 laiques, pour fonder 3 missions au Texas,
( 4o8 )
4 dans le pays de los Cadodachos et i sur le Rio de la
Guadalupe J niais il ne reussit aucuncment, attendii
les hostilites des Indiens, la perie du belail et autres
calamites.
1714. Ces missions sont retablies par D. Luis deSan-
Denis, D. Mcdar Jalot et deux Franc,iis, sur I'ordre du
due de Linares, vice-roi de la nouvelle Espagne. D'au-
tres missions furent aussi fondees dans le presidio de
los Adaes.
Le marquis de Valero , nomme gouverneur de Coa-
huila et Texas, amena un renfort de 5o soldats et un
certain nonibre d'ouvriers constructeurs, avec les ma-
teriaux necessaires, ponr augmenter les etablisseniens;
mais la guerre survenue entre I'Espagne et la France
arreta ses projets . Les Francais retournerent a Pensa-
cola (19 mai 17x9) et au moisdejuin suivant, les mis-
sionnaires d' Adaes se retirerent a S. Antonio.
Le marquis deS. Miguel de Aguayo, qui succeda au
precedent gouverneur, marchaa la tete de 5oo cavaliers,
contre les Francais restes dans les presidios de Cado-
dachos et de Natchitoos, qui n'opposerent aucune
resistance. En consequence, un ordre royal defendit au
gouverneur d'attaquer les Francais et celui-ci reussit a
retablir les trois missions d'Adaes et a creer le presidio
de Nuestra sefiora del Pilar.
Indiens. Les Texas (qui ontdonne leur nom au pays)
Nechas, Malleyes, Asinais, Aes, Nacogdoches, Adoses,
Cocos et autres. Ce fut les Texas, qui, en 1687, massa-
crerent la plupart des conipagnons de De la Salle.
( 4o9 )
NOTE
SUR UNE SOCIETE DE GEOGRAPHIE PROJETEE A PARIS
EN 1^85.
C'est en 1788 que s'est formee a Londres une societe
particuliere pour les decouvertes en Afrique. On pour-
rait la considerer, a certains egards, comme la premiere
qui ait songe a reiicouragement des decouvertes geo-
graphiques , si plusieurs tentatives analogues , et meme
pour un but plus general, n'avaient ete faites en France
avant cette epoque. D'Anville, en ce qui regarde les de-
couvertes en Afrique, avait deja, vers le milieu du dix-
huitieme siecle, porte son attention sur ce sujet. II doit
exisler dans les archives des affaires etrangeres un plan
de recherches auquel il avait coopere {^Acad. des inscr.,
tome xxvi). Le document qui suit, extrait des archives
d'un etablissement public, date de I'annee 1785; il
prouve que Ion s'occupait a Paris, des cette epoque,
dune association du meme genre; I'objet en est moins
etendu que celui que la societe actuelle de Paris s'est
propose , mais il n'est pas borne a une seule partie du
globe, comme le but special de la societe anglaise for-
mee en 1788 , il embrasse la geographie et les cartes de
toutes les parties du globe. L'auteur du projet voulait
surtout remedier a I'un des vices les plus facheux qui
aient nui a la diffusion des connaissances exactes eu
geographie, savoir, le defaut de bonnes cartes et la mul-
titude de mauvaises. L'on ne pent nier que ce but es-
sentiel eut ete atteint par le nioyen propose il y a un
demi-siecle, et pour le plus grand avantage des savans.
Le bien que la societe aurait pu faire par cette voie est
jio )
iiicalculalile : il est evident, d'nilleurs, que son plan se se-
rait graduellemenl etendu avec le succes de rinstitution.
Plusjeurs projets analogues ont ele concus en France :
a Paris, au commencement de la revolution, uiie asso-
ciation pour les decouverles en Afrique, a I'instar de la
societe nnglaise , devait se former, sous la protection du
gouvernement. Une autre societe s'est etablie en i8oa;
voici conime le secretaire de la Societe Africaine de
Londres s'fxprimait a lassemblee generale du 26 mai
i8o4 (*) : '• Aussitot apres que le journal du voyage de
• Frederic Hornenianii mil tie coninmnique au consul
« general de France par ordie de la societe, celui-ci le
« fit traduire en francais; M. Langles , membre de I'ln-
« stitut national, editeur de I'ouvrage, apres avoir ex-
« plique les vues de cette institution ct appele Tattention
1 de son eouvernement et de tout Francais ami de son
o pays et de la science, sur les considerations impor-
« tantes developpees par la societe anglaise , provoqua
« la forniition d'une societe semblable en relation avec
« la premiere , et bientot apres la publication du journal
« d'Hornemann en France, une societe s'etablit en ei'fet
« a Paris, sous le litre de Societe de V Afrique interieure
a- et de decouvertes ». Ses reglemens nieriteraient petit-
etre d'etre reiniprimes.
II a fallu dix-neuf ans encore, et surtoui la paix gene-
rale, pour permettre ici, a une societe geographique de
se former et de se consolider. La societe actuelle,
etablie <?n i82i,a pu deja donner une grande impulsion
et porter ses fruits dans plusieurs parties du monde. On
pent affirmer qu un des resultats les plus positifs ([u'elle
aura produits , est la formation de societes semblables
•'''(l) Voy. Procedings of the association for promoting the dtscoveriea of
Ihe inferior parts of A fried . vol. i , p. S^i? , 337. — 1810.
( 4ri )
en Angleterre, en Prusse, dans I'lnde et aux Etats-Unis.
On se tromperait fort si I on pensait que cette Note
a pour but de rien oter au meiite de la societe pour l en-
couragement des decouvertes dans Vinterieur de rAJrique :
qui ne sait que, par les immenses services qu'elle a ren-
dus,ellea des droits a la reconnaissance du monde entier?
JOMARD.
Extrait du plan d'une societe geographique projetee a
Paris en i^85.
«■ On ne connait point de science qui demande une
plus grande etendue de connaissances et un travail plus
penihle que la geographic. En el'fet, pour former un
excellent geographe, il faut qu'un homnie soit bon ma-
themalicien, bon astronome, connaisse la navigation,
ait etudie la physique, sache parfaitement I'histoire,
ait prodigieusement lu, extrait et etudie les relations
des voyageurs de terre et de mer, connaisse et entende
beaucoup de langues; il faudrait de plus que, quand il
dresse une carte, il put avoir sous les yeux et faire une
etude particuliere de tout ce qui a ete ecrit et publie sur
lepays qu'il dessine etdecrit, pouj- comparer et eoncilier
les sentimens differens, et les juger avec une critique
profonde et eclairee , pour demeler le vrai au milieu des
erreurs. Les cartes geographiques devraient done etre
plutot I'ouvrage d'une societe de gens savans que celui
d'un seul artiste; et si Ton pouvait former une societe
d'artistes et gens de lettres qui vonlussent reunir leurs
travaux, on parviendrait promptement a perfectionner
la geographie , et a faire des cartes qui deviendraient
plus exactes et meilleures, it mesure que le depot de la
societe s'accroitrait , et que le travail et les recherches
de ses membres s'accumuleraient. On ne doute point
( 4i2 )
ineme que le gouveriiement, sentant I'utilite de cet eta-
blissement , ne lui accoidc tine protection marque et des
secours pour le favoriser. Dans cette idee, on va tracer
le plan de cette societe , les travaux dont ses membres
devraient s'occuper , et le regime de son administration.
n De la formation de la societe.
« Pour donner de la consideration a cette r.ompagnie
et lui obtenir de la protection , il serait essentiel d'enga-
ger plusieurs personnes de marque et en place, de
prendre la qualite d'associes honoraires, et ils forme-
raieut la premiere classe.
« On composerait la deuxieme des meilleurs geogra-
phes de Paris, de ceux qui se sont acquis le plus de
reputation dans leur etat par leurs talens el par leurs
travaux. On y joindrait quelques gens de lettres ayant
ecrit sur la geographic ou en ayant fait une etude par-
ticuliere.
« On formerait une troisieme classe d'associes ordi-
naires, composee de personnes qui se seraient deja dis-
tinguees par quelques travaux utiles, soit en cartes, soit
en menioires communiques a la societe, et qui montre-
raient du zele pour ses succes et la perfection de ses
ouvrages.
«I1 conviendrait aussi que, pour mieux Her ses corres-
pondanres dans les pays etrangers, elle s'aggregeat des
membres auxquels elle donnerait le titre d'associes
etrangers.
« Les membres de la societe s'assembleraient une ou
deux fois la semaine, se rendraient compte de leurs tra-
vaux et s ecUureraient reciproquenient de leurs counais-
sances, et decideraient entre eux le travail que ibacun
entreprendrait.
(4i3.)
« Plan et ordre des travaux de la societe.
« Nul associe ne pourrait donner aucune carte a gra-
ver qu'il ne I'eut soumise auparavant a I'examen tie la
societe dans ses asseniblees , en I'accompagnant dim
niemoire dans lequel il rendrait compte des observations
astrononiiques, des relations, journaux, me'nioires,
cartes tnanuscrites et autres inateriaux qui liii auraient
servi pour la dresser et le guider dans son travail.
«Ces minutes de cartes et niemoires seraient deposees
aux archives de la societe, apres que I'ouvrage aurait
recu son approbation, et , alors, on ferait, auxdepens
de la societe, graver la carte et iniprimer un memoire
instructif pour son explication.
« Le nondjre d exemplaires qu'on tirerait de 1 un el
de I'autre serait regie par la societe, et la planche de la
carte deposee ensuite a ses archives. Pendant le cours
du debit de ces exeniplaires , la societe recevrait tons les
memoires d'observations qui pourraient iui etre remis,
tant sur les nouvelles decouvertes propres a y faire des
augmentations et ameliorations, que sur les erreurs
qu'on y aurait trouvees.
« Avaut de tirer de nouveaux exemplaires de cette
carte , I'auteur, ou un autre membre de la societe, serait
chaige de revoir tons ces memoires et observations, et
de iaire en consequence les corrections et augmentations
qu'il croirait convenables , et qui ne seraient retablies
sur la planche et gravees qu'apres en avoir fait le rap-
port aux asseniblees de la societe et avoir eteapprouvees
de ses membres.
« Par cet ordre de travail, les cartes publiees par la
societe acquerraient un degre de perfection qu'aucun
ouvrage geographique n'a eu jusqu'a present. Les cartes
29
tic la sociele et ses memoires etant reelleincnt fails pour
loriner des alias, il conviendrait qu'elle decidat la gran-
deur du papier qu'elle emploierait , et qu'elle suivit in-
vaiiablenient ce format.
« II serait aussi convenable que, lorsqu'on se trouve-
rait dans le cas, soil par la grandeur des echelles, soil
par les details, de publier des cartes en plusieurs feuilles,
il y eut toiijours des reperes suffisans d'une feuille a
I'autre, pour qu'etant reliees en atlas, on n'eiit pas be-
soin de consulter chaque feuille separement, ni de re-
gretter de ne les avoir pas collees ensemble.
« Du regime de V administration de la societe.
« II serait essentiel que la compagnie se choisit quatre
officiers principaux pour conduire son administration ,
savoir, un president ou recteur, un secretaire, un garde
de ses archives, et an tresorier ; niais il conviendrait quo
ce dernier officler , qui serait comptable, ne fut pas
membre de la societe.
« II serait tenu un registre exact des recettes des fonds
de toute nature, soil des secours ou dons d'encourage-
ment provenant des bienfaits du roi et des ministres,
soil des dons particuliers fails par des amateurs, soil des
souscriptions que la societe ouvrirait pour se procurer
plusfacilementl'impressionet la gravure de sestravaux...
« 11 est inutile de s'etendre davanlage dans des details
<le resime et d'administration.
« Ce qu'on vient d'exposer suffit pour donner une
idee de la formation de cette societe et faire sentir son
utilite. S'il etail question de regler des constitutions ou
des statuts, on entrerait dans tons les details convena-
I)les; mais on doit etre persuade, par la lecture de ce
(4i5 )
Memoire, que I'cxecution du plan qu'il contient serait
un des meilleurs moyens pour porter la geographic a
toute la perfection que cette science peut atteindre.
« Paris, juillet 1^85. »
NOTE
Sur le fragment ci-joint cTune carte de V Anierique
septentrionale.
La publication de la carte du dernier voyage du ca-
pitaine Ross, au nord de I'Amerique, etant dif'feree jus-
qu'a celle de la relation^ on a cru devoir mettre, en at-
tendant, sous les yeux du Lecteur, un apercu de ses de-
couvertes, tire dune nouvelle carte que vient de pu-
blier M. Arrowsmith, donnant une idee assez exacte
de la terre de Boothia^ et contorme aux renseignemens
qu'a communiques, a son relour a Londres, le capi-
taine Ross.
29.
( 4iG )
TROISIEME SECTION.
Actea de la Soci^te.
FROCES-VERBAUX DES SEANCES.
Seance du 6 juin i834.
Le proces- verbal deladerniere seance est luet adopte.
M. Arago adresse a la Societe les remerciniens de
rAcadeiuie des Sciences pour I'envoi des premiers nu-
meros de ia nouvelle serie de son Bulletin.
M. le baron Alex, de Humboldt adresse deux livrai-
sons (7* et 8') de 1' Atlas de la relation historique deson
voyage, ayant pour titre Atlas gcographique et physique
des regions eqiunoxiales du r.oni>eau continent, etc., com-
prenant 1° un exanien critique de Ihistoire de la geo-
graphic du nouveau continent et des progres de i'as-
trononnie nautique auxxv* et xvr siecles. 2° Six cartes a
1 appui. M. Jomard se charge den rendre compte et an-
nonce qu'il a prie I'auteur, au nom de la Societe, de
completer les premieres livraisons.
M. le docteiir Woerl ecril de Fribourg pour remer-
cier la Societe qui vient de I'adniettre au nombre de ses
membres.
M. Berthet fait hommage a la Societe d'une geogra-
phic historique, industrielle etcomnierciaie de la France
et de ses colonies, ainsi que dun tableau historique et
iudustriel de toutes les villes du royaume. M. Cesar
Moreau est prie d'en rendre compte.
( 'i«7 )
M. Gr4berg de Heinso adresse de Florence plnsieurs
opuscules dont il est I'auteur; entre autres un tableau
du commerce de I'empire de Marok; une notice sur
Ebn-Khaldoun et des notes statistiques sur le iittocal
de la mer Noire.
M. J. Lamy, ancien employe du cadastre, au Caire,
ecrlt a la Societe pour I'informerqu'un desesamis vient
de se mettre en route pour visiter le littoral de la mer
Rouge et une partie de I'Arabie, tandis que deux autres
remonteront le Nil. Ces voyageurs s'empresseraient de
repondre aux questions que la Societe voudrait bien
leur adresser dans I'interet des sciences geograpbiques.
La Commission centrale decide que plusieurs exemplai-
res du cahier des questions redigees par la Societe, se-
ront adresses a M. J. Lamy. Elle regrette de ne pouvoir
y joindre, ainsi que M. Lamy en exprime le voeu, des
cartes de ces contrees, dont elle n'a point d'exemplaires
a sa disposition.
M. Jomard lit une note contenant quelques indica-
tions historiques sur le projet qui avait ete concu a Pa-
ris des 1785, de creer une Societe Geographique, et il
annonce qu'il en communiquera le programme a la pro-
chaine seance.
Le meme membre rend compte de I'examen subi re-
cemment par onze eleves de la mission Egyptienne de-
vant la faculte^ de niedecine de Paris et il appelle I'at-
tention de la Societe sur I'aptitude des jeunes Arabes
pour les langues et les sciences naturelles. Tons ces ele-
ves ont subi leurs examens avec un succes remarqua-
ble. En 16 mois ils ont appris le Franeais, les elemens
de matbematiques, la chimie, la physique et plusieurs
branches de I'histoire naturelle; cette annee ils vont se
livrer a I'etude des sciences geograpbiques, et les succes
(4i8)
qu'ils viennent d'oblenir donnent a Li Commission cen-
trale une juste mesiire desservices qiielaSociete pourra
ulterieurement attendre des connaissances speciales
qu'ils vont acquerir.
M. Warden lit une notice sur un ouvrage intitule :
Observations hlstoriques , geograpkiques et descriptives
sur le Texns^ par madame Mary Austin HoUey. Renvoi
au comite du Bulletin.
M. Jomard commence la lecture dune relation du
voyage de M. de Bove, voyageur naturaliste attache au
gouvernement d'Egypte, dans le Hhedjaz et le Yemen ;
line autre relation du meme voyageur, d'une excursion
dans I'Arabie-Petree et la Syrie meridionale, sera ulte-
rieurement communiquee.
M. Roux de Rochelle entretient la Societe de la perte
douloureuse qu'elle vient de faire en la personne de
M. Mathieu de Lesseps, decede dernierement a Lisbonne,
ou il etait consul-general. II etait parti en lySS avec
Laperouse,et iH'avaitaccompagne jusqu'au Kamtchatka,
d ou ce navigateur I'expedia pour France avec ses de-
peches. Une notice sur M. de Lesseps sera inseree au
Bulletin.
Seance du 10 juin.
Leproces-verbalde la derniere seance est lu etadopte.
M. le comte de Montalivet, intendant-ge'neral de la
liste civile , annonce que, sur sa proposition , le roi vient
d'allouer a la Societe une somme de mille francs a titre
d'encouragement pour I'annee 1 834- La Commission cen-
trale vote des leniercimens a M. le comte deMontalivet.
L'Academie imperiale des sciences de Saint-Peters-
.bourg cnvoie la suite de ses memoires et le recueil des
actes de sa seance publiquede i833.
( 4i9 )
M. le docteur Guyetant fait hoinmage a la Societc
d'un tableau de I'etat actuel de I'economie rurale dans
le Jura; et il offre au nom de la Societe d'Emulation de
ce departement, la relation de la ceremonie qui a eu lieu
a Thoirette dans la inaison qui a vu naitre le celebre
Bichat. M. le president adresse a M. le docteur Guyetant ,
present a la seance, les reniercimens de la Societe, et
il prie M. Roux de Rochelle, de rendre compte de la
partie du premier ouvragequia le plus de rapport avec
les travaux de la Societe.
M. Boucher de Perthes , president de la Societe d'E-
mulation d'Abbeville, adresse au nom de cette Societe, un
exemplaire du recueil de ses meraoires pour I'annee 1 833.
M. Jouannin, membre de la Societe d'Emulation de
Rouen, fait hommage dun tableau du systeme metrique
legal et dune notice sur les monnaies considerees comme
faisant partie du systeme melrique. M. le president
adresse a M. Jouannin les reniercimens de la Societe.
M. Albert-Montemont offre la vingtieme livraison
( 21*-' volume) de la Bibliotheque imiverseUe des voyages ^
contenant les voyages de Basill-Hall aux iles Lou-Tchou ;
de Weddel vers le Pole sud ; de King , autour de la Nou-
velle Hollande ; de Fanning et de Biscoe, dans la mer du
Sud.
M. le comte de Fortis, ecrita la Societe pourappeler
son attention sur trois grandes cartes de la France, de
I'Europe et des deux hemispheres , qu'il a publiees de
concert avec MM. Jogand , Engelmann et Grandperret.
Ses collaborateurs et lui, dans I'interet des sciences geo-
graphiques, desirent etendre ce travail aux autres par-
ties du monde, et pour atteindre leur but, ils deman-
dent que la Societe veuille bien les seconder dans celte
entreprise.
( 4:^0 )
M. labbe Pallegoix , missionnaire francais en Chine,
adresse a la Societe deux lettres datees dc Bangkok,
capitale de Siam, et de Si Outhaja (Julhia) les 2 Jan-
vier 1 832 et I" aout i833. Ces lettres , qui contiennent
divers renseignemens sur les pays parcoiirus par ce
inissionnairc et sur ses travaux geographiques et ethno-
graphiques, sont renvoyees an comite du Bulletin,
ainsi qu'un itineraire de Juthia a Xai-Nat, qui les
acconipagne. Les documens quil demande pour I'aider
dans ses recherches, lui seront adresses.
M. le chevalier Jaubert met sous les yeux de I'assem-
blee une epreuve (jlU fac-sitnile de I'une des cartes qui
doivent acconipagner la traduction de I'Edrysy; il
annonce ensuite que I'impression du deuxieme climat
est sur !e point d'etre terminee, et que Ton commencera
immediatement celle du troisieme climat.
M. Jomard communique le memoire donl il a entre-
tenu I'assemblee a la derniere seance, et dans lequel se
trouve developpe le plan d'une Societe Geographique,
concu a Paris des I'annee ijSS. II Jijoute ensuite quel-
ques developpemens sur les autres tentatives analogues
faites dans le cours du xviii'' siecle, et au commence-
ment du XIX*. La Commission centrale entend avec
interet la lecture de ce memoire et elle le renvoie au
comite du Bulletin.
Le meme membre continue la lecture de la relation
du voyage de M. de Bove le long du Hhedjaz et leYemen ;
renvoye au comite du Bulletin.
( 421 )
MEMBRE ADMIS DANS LA SOCIETE.
Seance du 10 ju'ui i834-
M. J. G. Hoffmann, de La Haye.
OUVRAGES OFFERTS A LA SOCIETE.
Seance du 2 mai i834.
Par la Societe royale des antiquaires du Nord : Scn'pta
historica Islandorum de rebus gestis veterum Borealium
latine reddita et apparates critico instructa (volumen
quartum et quintum , in-S". — Nordisk Zidschrift
for Oldkyndighed, udgwet as det Kongelige Nordiske
Oldskrift selstah , 2* mimero. — De mensura et delinea-
tione IslandicB interioris, cura societatis islartdicce his
temporU)us facienda scripsit, Bjornus Gwinlnugi filius ,
broch. in-S".
Par M. le capitaine Graah : Undersogelses-Reise til
Ostknsten as Groenland ^ efter kongelig befaling udfort
i varene i828-3i as W.A. Graah^capit.-lieut. i vol.in-4".
Par M. Albert-Montemont : Bibliotheque universelle
des -voyages, 18** llvr. (Voyages de D'Entrecasteaux et
de Marchand), i vol. 10-8°.
Par M. Alex. Barbie du Bocage: Dictionnaire geogra-
phique de la Bible, i vol. 111-8".
Par M. le major Poussin : Travaux d^ amelioration in-
terieure projetes ou executes par le gouvernement general
des Etats- Unis d'Jmerique , de 1 824 « 1 83 1 . Paris, 1 834-
I vol. in-4* avec un atlas de 10 pi. in-f".
Par M. Ansart: yitlas presenta?it en apercu, dans une
suite de cartes et de tableaux , Vhistoire de tons les etats
europeens, etc. , par Ch. et Fr. Kruse, traduit <le I'alle-
niand par MM. Lebas et Ansart, 2* livr.
( 422 )
Par M. Firmin Caballero : Nomenclutum geograpkica
(le E span a. i vol. in i8.
Par M.le capitaine d'Urville : ay.- et 28= llvraisons tlu
Voyage pittoresque autour du monde , et la carte gene-
rale du voyage.
Par rAcademie de Dijon : Memoires de cette Academie
pour i833. I vol. in-8''
Par M. le directeur : Memorial encjclopedique , caliier
d'avril.
Par la Societe d'agriculture de Rouen ; Extrait de ses
travaiix, Si" cahier ( trimestre d'octobre i833).
Par la Societe d'Emulation d'Abbeville : Exposition
dss produits de Cinduitrie de C arrondlssenient (C Abbe-
ville en i83o (Lettre du president de la Societe aux ou-
vriers), broch. in-8''.
Par MM. les directeurs : N"* 49 et 5o de Vlnstitut et
numeros 3 , 4 et 5 de VEcho du monde savant.
Seance du 1 6 niai.
Par M. Monin : Planisphere et Oceanie, dresses par
M. C.-V. Monin pour la Bibliothec/ue universelle des
•voyages.
Par M. d'Urville : Voyage pittoresque autour du monde,
29* et 3o^jlivraisons.
Par M. Gide : Nouvelles Annales des Voyages , cahier
d'avril.
Par MM. les auleurs et editeurs: Quinze Uvraisons de
la France pittoresque.
Par la Societe d'asriculture de I'Eure : Recueil de cette
Societe, trimestre d'avril.
Par MM. les directeurs : Numeros 5i el 52 de Vln-
stitut et numeros 6 el 7 de CEcho du monde savant.
( 4-^3 )
Seance du 6juin.
Par M. le baron de:\{\\mho\(}it: J tias geographique
el physique da Foyage aucc regions equinox iales du nou-
veau continent , 7" et 8*= livraisons. In-folio.
Par M. Albert-Moritemont : Bibliotheque universelle
des voyages , ig^ livr. (Voyages autour du nionde, —
Beechey. )
Par M. Berlhet : Geograp/ue histGiique , industrielle et
commerciale de la France et des colonies , i vol. in-S". —
Carte historique , industrielle et commerciale de toutes les
villes de France , 1 feuiiles in-folio.
Par M. Graberg de Hemso : Notes statistiques sur le
littoral de la Mer-lSoire, relatives a la geographie, a la
population, a la navigation et au commerce, par le
comte L. Serristori (analyse tiree de Jl Progresso delle
scienze delle lettere et delle arte). — Atlante geografico ,
fisico e storico del Granducato de Toscana, dell dottore
Attilio Zuccagni Orlandini (rapport a Tacademie des
Georgophiles, par M. G. de H.)
Par M. le capitaine d'Urville : 3ie a 34*^ livraisons du
Voyage pittoresque autour du monde.
Par la Societe asiatique : iVo«cea« Journal Jsiatique^
nos y6 et 77 , avril et mai.
Par M. Gide : Noiwelles Jmiales des vojages, cahier
de mai.
Par M. Bajot : Annales maritimes et coloniales, cahier
de mai.
Par M. le directeur : Revue des voyages, nom>eau
magasin encyclopedique , n° 4, mars.
Par M. le directeur : Memorial encyclopedique , ca-
hier de mai.
( 4M )
Par M. Hueine de Poniineuse : Observations sotn-
maires sur les canaux navigables et ies chemins de fer ,
et sur ies avantages que la France peut obtenir de sa
canalisation. Broch. in- 8.
Par la Societe des Missions evangeliqiies : Journal
de cette Societe , cahier de mai.
Par I'Academie de I'industrie : Journal des travaua: de
cette Academic, n°* 4o et 4^ ? avril et mai. — Recueil
supplementaire de memoires , xxv" livraison.
Par la Societe de stalistique : Journal des trai'aux
de cette Societe, n"* lo et ii, avril et mai.
Par MM. les directeurs : L'Institut, n"* 53, 54 et 55 ;
Vicho du monde sai'ant , n«» 8 et 9 ; le Moniteur ottoman,
no j'j ; le Journal de Smyrne , g numeros ; le Moniteur
egj'ptien^ 7 numeros.
Seance du 20 /uin.
Par racademieimperiale des Sciences de Saint-Peters-
bourg : Memoires de cette Academic, \i^ serie , ^ livrai-
sons. — Recueil des actes de sa seance publique du 29 de-
cembre i833. Broch. in-S".
Par la Societe royale d'Euiulalion d'Abbeville : Me-
moires de cette Societe pour i833. i vol. in-8°.
Par M. Albert Montemont : Bibliotheque universellc
des voyages, 20° livraison (Voyages autour du monde:
B. Hall, Weddell, King, Bellinghausen , Fanning, Bis-
coe). I vol. in-80.
Par M. Guyetant: Tableau de Vetat actuel de V econo-
mic rurale dans le Jura , etc. , avec des considerations sur
la geographic physique de ce departement, i vol. in-S".
Par la Societe d'Emulalion du Jura : Honneurs rendus
par cette Societe a la niemoire tie Bichat. Broch. in-8".
»'»vi»'**-v»v^»V».'*wfc'k».-*-*.*.'»'vv-v%.^"v^*.-» w*^*'*^*^*^-^^-*
TABLE DES MAT TERES
COKTKKUES
DANS LE J" VOLUME DE LA T SERIE
N" I a 6
(Janvier i834 a Juin).
PREMIERE SECTION.
MEMOmES, EXTKAITS5 ANALYSES ET RAPPORTS.
Voyages amour du monde , avec des extraits choisis de voyages
dans les mersdu Sud et les Oceans Pacifique, Septentrional
et Meridional, en Chine, etc. , entrepris sons les ordres de
I'auteur, ou sous sa direction, etc., par Edmund Fanning;
lu a la Societc de Geographic par M. Warden i
Mcmoires sur I'aucienne Geographic historique des pays voi-
sins de la Mediterranee , lus a la Sociite de Geograpbie par
M. RoUX DE ROCHELLE, 2 4
Note sur la communication mutuelle de la Gambie et de la Ca-
zamanse if>
Des Colonies agricoles, parM. Huerne de Pommeuse (compte
rendu par M. Isambert) 54
Rapport de M. Isambert, sur un ouviagi- intitule : De la Fen-
dee militaire 58
Examen ct reciification des positions dcterminoes astronoini-
quemcnt en Afrique par Mungo-Park, par M. d'Avezac. . 78
Voyage dans I'interieur de la Guyane, par MM. Adam he
Bauve et P. FERRi; (suite) io5
Rapport sur un manuscrit espagnol presenle a la Societc de
G(''o^:iplnc par M. H. Ternaux , |)ar M. T. d'Hrville. ... i45
( 4^6 )
Pnges.
Voyage dans I'interieur dc la Guyane, par MM. Adam de
Bawve et P. Ff.rrk (suiteet fin) i65
Extrait du journal d'un voyage sur la c6te de la Chine 179
Voyage dans la Guyane centrale , par M. Lepripur 20 r
Notice sur les Lesguis , par M. Fortanieh 229
Memoire sur I'ancienne geographic historique de la Gr^ce,
par M. RoDX de Rochellk ^38
Note sur I'ilineraire de M. Dessaliue d'Orbigny dans I'Ameri-
cjue meridionale »47
Lettre de M. le secretaire de la Soci6t6 Geographique de
Londres 249
Relation d'un voyage dans I'interieur de I'Afrique septentrio-
nale, par Il'.iaggy Ebn-el-Dyn el-Eghou4thy ( i'"'' et a^ ar-
ticles) 377 et 4^9
Extrait du Journal des Missions evangeliques, i"^' et a"" li-
vraison de i834 , par M. Ambroise Tardieu 296
Rapport sur un ouvrage de M. le major Poussin , intitule :
Travaux d' amelioration interieure, entrepris on executes par le
gouverncment des Etats-Unis , par M. Roux de Rochei-le.. . . 829
Notice sur le P'ojage en Suede de M. Alex. Daumont, par
M. E. DoBtJc 374
Rapport verbal sur I'ouvrage de M. le capitaine de vaisseau
C.-T. Falbe, intitule : Becherches sur V emplacement de Car-
thage , par TVI. n'AvEZAC 38?
"0" '
P
Analyse de I'ouvrage intitule : Texas. — Observations historical ,
geographical and descriptive, etc., par madame Mary Austin
Holley , par M. Warden . . SgS
Etat du Texas en 1748 '♦07
Note sur une Societe de Geographic projetec a Paris en 1785,
par M. JoMARD 409
DEUXIEME SECTION.
DOCUMKNS, COMMUNICATIONS, NOUVELLES GEOCH APHIQnES.
lies Ralik 60
Reapparition de I'ile Ferdinandea (ou Julia) dans la Mcditer-
ranee 6a
( 4^7 )
P.lgPS.
Nouvelles dii voj-age de Lander , 63
Snr la situation et la distance des villes d'Almaligh , Fichba-
ligh , Karakoroum , Kantcheou et Peking , d'apr^s I'histoire
persane de Wassaf , par M. J. de Hammer ii8
Travaux du capitaine Yidai sur les cotes occidentales des \les
Britanniques 120
Nouveau traite de limites entre les Etats-Unis de rAmerique
du Nord et le Mexique ia3
Societe americaine des Missions 1^5
Population du Canada (annees 1829, i83o, i83i et 1S32).... 129
Population de la Crete en 1882 i3r
Voyage de MM. Adam de Bauve et Leprieur dans I'interieur de
la Guyane iSj.
Extrait d'une lettre de M. GrSberg de Hemsd a M. Jomard . . i36
Notice sur les monts Cotocton de la Virginie et du Maryland ,
par C.-S. Rafinesque (avec une carte) 184
Etablissement d'une nouvelle colonic pour les noirs libres, au
cap Palmas 186
Etat de I'enseignement dans la colonic de Liberia (Afrique). . 189
Traite entre les Etats-Unis et Sia;n igo
Retour de Nathaniel Jarrys Wythe, chef de la compagnie d'a-
venturiers qui ont fail recemment le voyage jusqu'a I'Ocean
Pacifique par terre Ibid.
Canal de Chesa])eake et de Delaware liid.
Canal de Chesapeake et de I'Ohio Ibid,
Lettre de M. Townsend 19 1
Pilote de la cote des Deux-Ameriques 192
Mort de Richard Lander 275
Note sur uu fragment de carte de I'Amerique septentrionale . 4'5
TROISIEME SECTION.
ACTES DE LA SOCIETE.
Presentation de la Societe au Roi , a I'occasion du nouvel an. . 64
Rapport sur le prix destine a la decouverte la plus importante
pour r.Tnnee i83i 25 1
Rapport sur un memoire relatif au nivellement d'une partie
du cours de la riviere de la Vesle aSS
Programme des prix aSg
( 4^8 )
Procds-verbaux des seances de la Commission centrale ( janyier
j834ajuin) 66, 69, i38, 140, 194, igS, a68. 271, 346, 348,
416, 4i8.
Menibres admis dans la Society 198 , 373, 421
Ouvrages offerls a la Socitte 71, 143, 198, 278, 421
BIBLIOGRAPHIE.
Bibliographie geographique 71
CAKTES ET PLAXS.
Esquisse des monts Colocton , jiar M. RaGnesque.
Carte d'une partie de I'Afrique meridionale , pour I'iuteiligence-
des travaux des missionnaires francais.
Carte d'une partie de TAmerique Septentrionale.
Fl\ DE LA TABLE DES MATIERES DV l*"" VOLUME.
IMPRIME CHEZ PAUL RENOUARD,
HUE uiiaAKciknE n. 5.
i'/// ' ^/y///////'/<'//f///'t ,
""/i'olaire
■f'^m, T^^G/JE
Cerclc Polaire
lyatude k I'Oecidenl
ih-jf'- nrr^-fnitrvij-e ZtrtAet.
Arclit^vK* _
(lu Mcridieude.Eaii
yz'^:^ - IJ-
BULLETIN
OE LA
/• /
SOGIETE DE GEOGRAPHIE.
Deuxi^me S^rie.
TOnf£ DEUXIEME.
IMPRIME CHEZ PAUL RENOUAUD,
RTE GARANCIERE , N. 5.
BULLETIN
DE LA SOCIl^T]^
DE GEOGRAPHIE.
Deuxidme S^rie.
tome JBmxime.
PARIS ,
CHEZ ARTHUS-BERTRAND,
LIBRAIRE DE LA SOCI^T]^ DE GEOGRAPHIE,
RUE HAUTEFEUILLF , k" 23.
1834.
BULLETIN
DE LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE.
JUILLET l834.
PREJUIERE SECTION.
MEMOIRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPPORTS.
MEMOIRES
sur la djicouverte et la reconnaissance dbs cotes
d'anerique,
Liis a la Societe de Geographic dans ses stances du 21 mars
et du 18 avril i834 ,
Par M. Roux de Rochelle.
La reconnaissance des cotes orientales d'Ameiique
entre le Labrador et le delroit de Magellan , et celle des
cotes occiden tales entre ce detroit et le nord de la Ga-
lifornie, ont ete rapidement faites par les premiers na-
vigateurs qui ont visite le Noiiveau-Monde ; mais la de-
couverte des cotes plusseptentrionales a deja coute plus
de trois siecles sans etre encore terniinee. Nous nous
sommes propose de suivre la progression de ces recher-
ches, et nous rendrons compte des expeditions succes-
( (^ )
sives qui ont eu pour but et pour resultat de reoon-
naitrc et de fixer la forme du littoral aniericain. Le cadre
du continent etant ainsi trace, le tableau de sa ceogra-
phie interieure deviendra plus facile a saisir, et Ton aura
sous les yeux un ensemble auquel tous les details pour-
roiit se rattacher.
Le Paria est la premiere terre du continent d'Ame-
rique, dont Christoplie Colomb ait reconnu les rivages.
II avait decouvert , dans sa premiere navigation , I'ar-
chipel de Bahama, file de Cuba, celle d'Haiti , et dans
un second voyage, une partie des lies Caraibes , liori-
quen ou Puerto-Rico et la Jamaique : les notions qui!
recut des insulaires leporterenta croirequ'il existait au
midi de plus vastes conlrees , et le but de sa troisieme
expedition fut de les decouvrir. Colomb partit de San-
Lucar de Barameda le 3 mai i4y^; •' ^'''g"-' '^s lies Ca-
naries et celles du Cap- Vert, cingla vers le sud-onest,
se maintint ensuite a la hauteur du io« parallele jusque
vers le terme de sa navigation, et donna a la premiere
terre qu'il decouvrit le 3 juillet le noni de la Triniie. Le
golfe qui separe cette ile de la Terre-Ferme est borne
au nord par une longue presqu'ile que Colomb crut d'a-
bord separee du continent, et qu'il nomma He de Gra-
zia. II reconnut a I'occident du golfe les autres rivages
du Paria, en admira la fecondite, eut de nombreuses
relations avec les naturelsdu pays, observa leurs traits,
leur couleur, quelques-uns de leurs usages, et recut
d eux de premieres informations sur les lieux on se trou-
vaient les perles , lesmetaux, les picrres precieuses,
(jue les Indiens echangerent alors avec lui contre quel-
ques productions d'Europe.
Deux phenomenes attirerent specialement I'attention
fie Christophe Colomb a rette epoquo de sa navigation :
( 7 )
I'lin etait la presence des eaux douces dans quelques pa-
rages maritimes qu'il traversa; I'autre etait la violence
des courans et le choc des vagues, soit a I'entree, soit
a la sortie du golfe. Ces eaux douces devaient provenir
de rembouchure d'un fleuve, el Golomb conjectura que,
pour avoir un si grand volume el une trace si prolongee
dans la mer, ce fleuve devait prendre au loin sa source
dans de hautes montagnes et recevoir les affluens d'une
vaste contree. Un genie si penetrant reconnaissait par
ce seul indice I'existence d'un continent etendu; et les
courans qu'il remarquait aux deux issues du golfe de
Paria lui paraissaient etre I'eftet inevitable de ce niou-
venient general des eaux de I'Ocean , qui dans les re-
gions des tropiques participent de la direction des vents
alises , et sont ernportees d'orient en Occident.
Golomb sortit du golfe par la bouche du Dragon f
il suivit vers I'ouest la cote du Paria, reconnut les iles
Marguerite et de Gubagua, ou les Indiens faisaient la
peche des perles, et se rendit a Santo-Domingo, d'ou il
envoya a la cour d'Espagne le recit de son voyage et de
ses decouvertes. II avait joint a sa relation une carle
geographique, des echantilions d'or, et les premieres
perles que les Europeens eussent trouvees dans le Nou.-
veau -Monde.
Alonzo de Oyeda , qui avait suivi Golomb dans sa-
seconde navigation, etait alors en Espagne : il eut con-
naissance des papiers et des plans envoyes par I'amiral,
et I'archeveque de Seville Fonseca , surintendant des
affaires des Indes, I'autorisa a faire un voyage dans les
lieux que Golomb n'avait pas decouverts avant I'annee
1495. L'expedition d'Oyeda, composee de quatre vais-
seaux , partit de Seville le 5 mai i499 ' *' avait aveclui
Americ Vesp\ice, etabli depuis plusieurs annees duns
( 8 )
cette residence , et Juan de la Cosa , qui avait ete pilote
de Golomb dans ses premiers voyages.
Les navigateurs reconnurent le continent, a deux
cents lieues a Test de I'Orenoque, vers ces contrees de
la Guyane situees entre I'Oyapok et I'Essequibo , oil les
Francais et les Hollandais ne formerent que tres long-
temps apres leurs premiers etahlissemens. L'expedition
se dirigea ensuite vers le golfe de Paria , quelle traversa
du midi au nord; elle reconnut I'lle Marguerite, longea
la cote de Terre-Ferme , decouvrit les golfes de Vene-
zuela, de Maracaibo, et s'etendit vers I'ouest jusqu'au
cap de la Vela. Americ Vespuce , revenu a Cadix avec
Oyeda (i), adressa bientot une relation de son voyage
a Laurent de Medicis.
Quelques mois apres son retour, on vit entrer dans
le meme port (2) la caravelle qui ramenait en Europe
Colomb charge de fers. II avait ete arrete, ainsi que ses
deux freres Barthelemy et Diego Colomb, parBobadil-
la , gouverneur d'HaIti , et I'Espagne voyait revenir
comnie un criminel celui qui lui avait donne le Nou-
veau-Monde, tandis que A.meric Vespuce, arrive plu-
sieurs annees apres dans cette parlie du globe, allait lui
laisser son nom.
Nous n'examinons point en ce moment si Vespuce
avait fait en i4gy un premier voyage dans le golfe de
Paria et sur les cotes de laTerre-Fenne, et s'il y avait
precede Chrislophe Colomb , qui ne s'y rendit en effct
qu'en 1498. QueUjue opinion qu'on puisse se former sur
cette question, tres digne dun exainen separe, nous
nous bornerons a remarquer ici qu'il ne pent selever
(i) 18 juiliet i5o<>.
(7) Decembrc i:'>oo.
(9)
aucun doute sui- lauteur tie !a d'icouverte du Nouveau-
Monde. Le merite, le courage, rinimortelle renommee
de Tentreprise, appartient au navigateur qui, en fraii-
chissant I'abime immense de I'Atlantique, fraya la route
a ses successeurs , et parcourut les principales lies , je-
tees comme autant d'avant-postes et de dependances, a
I entree et sur les cotes dn continent aniericain. Colomb
avait accompli dans un premier voyage tous les prodiges
de la decouverte, et les diverses expe'ditions qui furent
tentees depuis ne firent que confirmer la gloire qu'il
setait aoquise. On vit bientot ses titres r.ippeles dans les
armoiries qui lui furent accordees par Ferdinand et Isa-
belle, et dans cette legende qui les accompagnait :
A Castilla y a Leon
Nuevo -Mimdo did Colon.
Trois siecles apres , il fut encore plus haulement reba-
bilite dans ses droits. La Colombie devint le nom de
cette belle portion du continent ou il avait aborde : les
Etats-Unis de I'Amerique du Nord nommerent Colom-
bia le district ou ils etablissaient leur capitale ; et le nom
de ce grand bomme, applique a d'autres regions, a des
fleuves, a de nombreuses villes du meme continent,
semble y avoir seme partout le souvenir et les titres de
sa conquete.
Lorsque Oyeda et Vespuce partaient pour les Indes
occidentales, Pedro Alonzo Niiio et Cbristoval Guerra
allaient s'embarquer a Palos, pour une semblable desti-
nation : ils arriverent quinze jours apres Oyeda sur les
cotes de la Terre-Ferme, visiterentle golfe de Paria,se
dirigerent ensuite vers I'lle Marguerite et vers les cotes
de Cumana, d'ou ils revinrent en Galice.
Rodrigo de Baslides partit de Seville en i5oo, pen
de temps apres le retour d'Oyeda. II etendit ses decou-
( »o
vt^rles sur la cote de Terre Ferme , tlepuis le cap de la
Vela, oil Oyeda s'etait arrete, jusqu'au port de Nombre
de Dios, a I'occident du golfe dii Darien ; il regagna
ensuite 1 ile d'Haiti, et levint a Cadix en i5o2. Les de-
couvertes se trouvaient alors prolongees d'orient en Oc-
cident, depuis le goK'e et la cote de Paria jusqua I'isllime
de Panama.
L'epoque dii voyage de Bastides fiit sign alee par
d'auties decouvertes sur les cotes orientales d'Ame-
rique. Vincent- Yanez Pinson, un des trois freres qui
avaient suivi Colomb dans son premier voyage , etait
parti de Palos an mois de decembrc i499 j et il aborda,
le 28 Janvier i5oo, pies du cap Saint- Augustin , qui
forme la pointe la plus orientale du Bresil. 11 revint vers
le noid-ouest, reconnut successivement reinboucbure
du Maragnon, celle de I Orenoque el quelques rivieres
intermediaires , entra dans le golfe de Paria, Iraversa
la bouche du Dragon, gagna File d'Haiti et I'archipel
de Bahama, ou il eprouva une violente tempete, et re-
vint a Palos au mois de septembre suivant.
Un navigateur portugais, Pedro Alvarez Cabral, avait
reconnu les cotes du Bresil quatre mois apres Yanez
Pinson. Cabral devait se rendre aux Indes : il avait d'a-
bord navigue vers le sud pour couper la region des
vents alises, et avait ete ensuite porte vers le cap Saint-
Augustin.
La nieme direction tut suivic par Diego de Lepe, el
elle le fut encore I'annee suivante par Americ Vespuce,
qu'Emmanuel, roi de Portugal, venait d'attacher a son
service. On cherchait alors les moyens de gagner et de
doubter plus aisement le cap de Bonne-Esperance ; et
Ton avait reconnu que,, pour eviter les courans con-
Iraires, it Lilhiii iiniller tcs coles dAbique et (inglei'
(I' )
vers le sud-ouest. Dans cette navigation, commencee
le lo mai i5oi, Ameiic renconlra les cotes du Bresil, et
il les suivit jusque vers le Rio tie !a Plata.
Cenavigateur, revenu aLisbonneen i5o2,fut charge,
I'annee suivante, d'une autre expedition dont le but
etait de chercher par I'ocrident un passage vers les Mo-
luques; niais cette entreprise n'eut pas le resultat qu'on
avait espere : Americ perdit dans unetempete son prin-
cipal vaisseau ; il se rendit sur les coles du Bresil, gagna
la baie de Tous-les Saints et les parages des Abroihos ,
construisit un fort sur le rivage voisin , y laissa une gar-
iiison, et revint en Portugal treize niois apres son de-
part. Ses grandes expeditions etaient lerniinees : Americ
en e'crivit les relations; elles se repandirent de toutes
parts, et furent promptcinent traduites en portugais, en
espagno! et en latin. Ces recits, qui furent successive-
ment imprirnes, soil avec son aveu , soil par d'autres
editeurs, augmenterent la reputation d' Americ; et I'ini-
portant cmploi dont ce navigateur fut revetu en Es-
pagne, ou on !e chargea de tracer les plans des nou-
velles decouvertes a faire, et d'organiser le systeme des
colonies dans le Nouveau-Monde, attacha tellement son
nom aux destinees de cette contree, sur laquelle on ne
connaissait encore que ses relations, que son nom, de-
venu populaire, s'appliqua an continent entier.
Vers la fin de sa vie, Americ entreprit encore une
longue navigation : la mort le surprit dans ie trajet, et
son corps fut inhuma dans I'lle deTercere; quelques
debris du vaisseau la Victoire , qui avail servi a ses de-
couvertes, furent suspendus a la voiite de la catliedrale
de Lisbonne.
Quoique son nom soit moins illustre que celui de
Cbristophe Colomb , neaiimoins la posteritc Ini assi-
( 12 )
giieia toujours iiii rang ties eleve : Florence le conipte
avec raison au iiombre de ses honimes les plus celebres;
le merite et la lenommee d'Americ Vespuce comblerent
de joie sa patrie : elle fut emerveillee de ses premieres
relations, et le senat de Florence fit illuniiner pendant
trois nuits la maison du voyageur; honneur qui ne s'ac-
cordait alors aux particuliers que pour les actions les
plus nieuiorables. On doit sans doute continuer de se
rappeler a Florence avec un juste orgueil cette pensee
d'Averrani sur Americ et Galilee : -< L'Etruriea produit
« deux honuiies auxquels je ne sais si I'univers entier
« pourrait en comparer d'aulres : I'ui! a donne son noni
» a la quatrieme partie du mondequ'il avail decouverte,
'< I'autre a decouvert une grande partie du ciel «. La pos-
terile confirnieraii ce jugement sur Americ Yespuce ,
si Cbristophe Coloiid> n'avait pas exisie.
Colomb, qui avail precede dans les parages du Nou-
veau-Monde tous les autres navigateurs, fut egalement
le premier qui decouvrit et visita les rives occidentales
du golfe du JMexique. Venge par 1' admiration pid)lique
des injustes accusations de ses persecuteurs, il eta it
rentre dans la carriere de ses decouvertes. II reconnut,
dans son quatrieme voyage (i), les cotes septentrionales
de Honduras, depuis le cap de ce nom jusqu'au cap
Grazias a Dios; il suivit la cote des Mosquites et celle
de Veragua, et il descendit, en longeant I'istbme de
Panama, jnsqu'a Porto-Belo et a la riviere de Helen. La,
son expedition eprouva de nombreux desastres : la
guerre conf.re les Indiens, la revolte d'une partie des
equipages, ne lui permirent pas de consolider I'etablis-
semerit qu'il avait entrepris, et le delabrement de ses
(i) I. 'Jos.
( i3 )
navires le forca d'allcr chercher eii toute hate iin abri
sui" les cotes de la Janiaique.
Le vaste champ qui s'etait ouvert aiix navigateurs es-
pagiiols etaitdevenu le theatre dune emulation et d'une
activite infatigables. Oyeda entreprit, en i5o2, un nou-
veau voyage avec quatre vaisseaux. II toucha aux lies
Canaries suivant la coutume , atterit sur les cotes d'Ame-
riquevers Tentree du goUe deParia, reconnut I'lle Mar-
guerite, debarqua sur la cote de Cumana, et prolongea
sa navigation au-dela du golfe de Maracaibo jusqu'au
port de Baya-Honda : quelques annees apres, il fit dans
les memes parages une troisieme expedition (i). Nous
remarquerons ici que, dans son premier voyage le long
des cotes de la Terre-Ferme, Oyeda avait rencontre,
pres des rivages deCoquibacoa , des aventuriers anglais
qui faisaient comme lui un voyage de decouvertes. Get
evenement nous rappelle que, a la suite des premieres
navigations de Jean et de Sebastien Cabot en 1497,
quelques entreprises maritimes furent formees en An-
gleterre, et se dirigerent vers les regions du Noiiveau-
Monde. Henri VII en encouragea plusieurs par des actes
et des lettres-patentes , et des armateurs aventuriers en-
trerent aussi, a leurs propres risques, dans les hasards
de ces expeditions.
Oyeda devait couronner ses decouvertes par un plus
solide etablissement : on avait jete a Carthagene les fon-
demens dune colonie;ils'yrendit de Santo-Domingo (2),
fit la guerre aux Indiens , perdit Juan de la Cosa dans
un premier combat, parvint a former une autre co-
lonie dans le golfe d'Uruba, et donna a cette ville nou-
velle le nom de Saint-Sebastien.
(i) i5o5.
(2) tSoy.
( M )
N'ayant a considerer ici que sous le rapport des de-
couvertes les capitainesespagnols qui parcoururentcette
cote du Nouveau-Monde, nous nous bornons a rappeler
que Diego de Nicuesa, I'un de ces conquerans, o'eni-
barqua en iSop a Carthagene , pour gagner la cole de
Veragua j il se rendit dans la riviere de Belen , ou Co-
lomb avait tant souffert dans son quatrieme voyage, et
il reconnut ensuite Puerto-Belo et Nombre de Dios , que
Colomb avait egalement visites.
Fernandez de Enciso vint, I'annee suivante, recou-
vrer la forteresse de Saint-Sebastien , dont les indigenes
etaient parvenus a s'einparer. IJn honime qu altendait
une grande celebrite faisait partie de cette expedition :
c'etaitVasco Nuiiez de Balboa, qui devait bientot con-
querir le Darien et faire la decouverte de la Mer du Sud.
Accable de dettes et cherchant de hasardeuses entre-
prises, il etait parti clandestinement de Santo-Doniingo
et s'etait fait transporter dans une caisse a bord de la
flottille d'Enciso, aCn d'echapper aux poursuites de ses
creanciers. Un autre honinie, Francois Pizarre, destine
a la conquete du Perou , vint rejoindre Enciso a Saint-
Sebastien. On forma dans le Darien un nouvel etablis-
sement auqiiel on donna le nom de Santa-Maria de la
Antigua.
Pedro Arias Davila , conimunement nomine Pcdrarias,
remplaca Enciso dans le gouvernement du Darien (i).
Les sanglantes guerres qu'il eut a soutenir contre les
sauvages lui firent acheter bien cherement les progres
des decouvertes. On esperait trouver le temple dor de
Dobayba, que Nunez de Balboa avail deja cberche : ce
(i) i5i4.
( '5 )
temple fabuleux s'evanouit, et I'aviclite cles conqueraiis
fut trompoe; niais cette contree leur resta.
Les decouvertes de I'Espagne se dirigeaient aussi vers
d'autres points. Cette puissance voyait avec jalousie les
Portugais s'etablir conime elle dans le Nouveau- Monde.
La bulle d'Alexandre VI (i) ne leur aurait donne aucun
droit d'y pretendre , puisque la ligne de partage que
cette bulle tracait dun pole a I'autre devait passer a cent
lieues a I'occident des iles Acores et de cellos du Cap-
Vert, et qu'elle n'atteignaii aucune partie de I'Ame-
rique; niais le traite de Tordesillas(2), qui avait ensuite
porte cette ligne de demarcation a 3yo lieues a I'ouest
des lies du Cap- Vert, comprenait dans la limite portu-
gaise les cotes du Bresil qui furent decouvertes six ans
apres. Cet arrangement permit aux Porlugais de s'eta-
blir paisiblement dans une region que I'Espagne avait
cependant reconnue quatre mois avant eux, et meme ils
etendirent leurs possessions jusqu'au-dela des points qui
correspondent effectivenient a ce meridien. Mais les
Espagnols dirigerent ensuite leurs decouvertes vers le
Rio de la Plata. Diaz Solis penetra en i5i6 dans I'em-
bouchure de ce fleuve; il en remonta le cours, y fonda
plusieurs colonies, et fut tue dans la guerre qu'on eut a
soutenir centre les sauvages. Sebastien Cabot reconnut,
dix ans apres (3), les rivages du meme fleuve, et ils fu-
rent ensuite visites par Juan de Ayala (4) , qui fit dans le
Paraguay de nouvelles explorations. On avait deja vu ,
en iSao, accomplir la decouverte des contrees plus
merldionales par I'illustre Magellan, qui traversa le de-
(i) 1493. (3) i526.
(2) 1494. (4) i53(i.
( '6 )
troit silue enlre le continent et la Terre tie feu , at qui
lui donna son nom.
Apres avoir conduit jusqu'a Toxtremite meridionale
de TAmeiique cette serie d'observations , revenons aux
reconnaissances faites quelques annees auparavant sur
les lives occidentales du golfe dii Mexique, en comnien-
cant par la pointe la plus avancee de ce littoral.
Valdivia, regidor de la province du Darien, avait ete
jete par une tempete sur les cotes du Yucatan (i), en
revenant de cette province a Hispaniola. Son equipage
se composait de vingt hommes : il en avait perdu sept
dans le naufrage; cinq autres, et Valdivia lui-meme,
lurent massacres par les sauvages; le reste fut fait pri-
sonnier, et presque tons succoniberent a I'exces de leurs
fatigues et de leurs miseres , sur les rivages dun vaste
empire que I'Espagne etait a la veille de conquerir, et
qui allait devenir une de ses plus riches possessions.
Les peuplades du Yucatan virent , quelques annees
apres (2) , paraitre sur leurs cotes de grands vaisseaux :
c' etait I'escadre de Francisco Hernandez de Cordova, qui
faisait un voyage de decouvertes. L'annee suivante, Juan
de Grijalva visita les rivages du Yucatan et parcourut
ceux du Mexique , 011 il reconnut les rivieres de Tabas-
co, d'Ulloa , de Panucoj mais il ne forma aucun etablis-
sement : la revolte de ses equipages le contraignit a re-
venir dans I'lle de Cuba.
Une expedition plus importante y etait alors prepa-
paree. Cortez partit de la Havane le 10 fevrier i5ig. II
toucha I'lle de Cozumel , longea la cote septentrionale
du Yucatan, s'arreta sur les rives du Tabasco, gagna
(l) l5l2.
(») i5i7.
( »7 )
oelles de I'Ulloa, et forma a Vera-Cruzson premier eta-
blissement. La conquete dii M-exique, dont nous n'a-
vons point a suivre ici les divers evenemens, donna lieu
a d'autres entreprises. Narvaez debarqna pres de Zem-
poal; Garay se dirigea vers I'embouchure du Panuco,
deja reconnu par Grijalva ; il visita les contrees voismes
de ses bords, et accompHt la reconnaissance des rivages
orientaux du Mexique.
La decouverte des pays sitnes au nord du golfe avait
ete comniencee(i), quelques annees avant I'expedition
de Cortez, par Juan Ponce de Leon , qui avait accom-
pagne Colomb dans son second voyage. Ponce deLeon,
deja signale par la conquete de Puerto-Rico dont il fut
ensuite gouverneur, avait entendu parler d'une region
plus septentrionale, ou coulait une fontaine qui avait la
propriete de rajeunir. Le vieux guerrier equipe trois
vaisseaux pour en faire la decouverte; il fait voile vers
Tarchipel de Bahama, arrive a San-Salvador, cherche
inutilement I'lle de Bimini ou devait etre la fontaine, se
dirige ensuite vers le nord-ouest, et, dans la nuit du
2 avril , jette I'ancre pres du continent, au-dela du 3o^
degre de latitude. C'etait le jour des Rameaux ou de
Paques fleuries , et Von nomma Floride la contree qu'il
avait decouverte. Ponce de Leon suivit la cote, en des-
cendant vers le midi ; il doubla le cap Caiiaveral , pro-
longea ses reconnaissances a Test et au sud de la pres-
qu'ile , et revint dans le port d'ou il etait parti. Ses pro
jets de decouvertes furent repris par Juan Perez de
Ortubia,qui parcourutegalement I'archipel de Bahama:
il reconnut cette He fameuse de Bimini , mais sans y
trouver la fontaine de Jouvence.
( '8 )
La plus seduisante, la plus fabuleuse ties esperaiices,
avail ete en cette occasion le premier stimulant des de-
couvertes ; on vit que le guerrier le plus prodigue de
son sang obeissait lui-meme a eel instinct secret qui
nous attache a la vie, el nous fait redemander en vain
nos plus beaux jours. Ponce de Leon etail arrive a la
vieillesse en cherchantles moyens de sen preserver; il
etait accable de jours el d'infirmiles lorsqu'il tenta une
nouvelle expedition pour soumettre les Florides(i):
blesse dans un premier engagement avec les sauvages,
il vim mourir quelques jours apres dans I tie de Cuba.
Ces decouvertes furent reprises en iSay parNarvaez,
dont I'expedition n'eut pas de succes, el ensuite par
Fernand de Soto, qui fit en i53q une invasion en Flo-
ride. 11 debarque , a la tete de douze cents liommes, dans
la baie de Spiritu-Santo , gagne vers le nord le pied des
Apalaches,«e dirige ensuite a I'ouest, traverse la Coosa,
le Tombegbe, le Mississipi , se rend a la Riviere-Rouge,
et de la au Brazo de Dios, et revienl vers le confluent
de I'Arkansas et du Mississipi, qui fut le terme de sa
carriere. Son expedition avail dure quatre annees, elses
compagnons, n'etanl plus soutenus par sa Constance
heroique, se haterent de descendre le fleuve et de se
retirer au Mexique,
Ne soyons pas surpris que les possessions voisinesdu
golfe de ce nom et celles de I'Araerique meridionale
aient ete ocoupees par les Espagnols et les Portugais,de
preference a celles des cotes orientales qui s'etendent
du sud-ouest au nord-est, depuis les limites de la Floride
jusqu'aux regions siluees entre le golfe Saint-Laurent et
la baie d'Hudson. Nous avons pu voir, en observant la
(i^ I 5^ I .
( '9)
direction suivie par^ces premiers navigateurs, qu'ils
gagnerent les tropiques , pour y profiler de la direction
des vents alises. Get avantage, dont ils parent jouir dans
toute Telendue de la zone situee entre les deux tropi-
ques, deterniina les differens points ou ils reconnurent
rarcliipel des Antilles et le continent. Les voyageurs qui
s'engagerent sur la trace de leurs devanciers, chercherent
a prolonger dune nianiere continue les decouvertes qui
venaient de se faire avant eux. Les differens groupes des
lies qui bordaient I'entree du golfe du Mexique, et la
vasta etendue du continent lui-nienie, excedaient leurs
moyens de colonisation , et tons les regards furent long-
temps attires vers les memes points. Cetaient les pays
de Tor; on y detruisait des empires, et Ton avail a y
transporter une partie de la population de ses anciens
etats.
Les climals que Ion avail reconnus avaient plus d'a-
nalogie aveccelui de la patrle des conquerans. II fallait
a des peuples meridionaux une temperature elevee,
telle qu'ils la retrouvaieiit dans leurs premiers etablis-
mens du Nouveau-Monde. Cette chaleur y etait moins
forte que ne I'est celle d'Afrique situee sous les memes
latitudes; elle leur rappelait la temperature de TEspa^ne
et du Portugal, beaucoup plus que celle de la Mauri-
tanie et du Saarah.
La plus grande partie des coles de I'Amerique septen-
trionale fut ainsi abandonnee a d'autres Europeens. Ce
ne fut plus pour y chercher des tresors qu'on entreprit
de les explorer: il fallut d'autres mobiles pour y con-
duire une longue suite de navigateurs, et les peuples du
centred du nord de I'Europc commencerent a dinger
vers les differens points de celte vaste cote leurs ex-
peditions.
2.
( 20 )
Jean et Sebastien Cabot avaient decouveit, en i497,
rile de Terre-Neuve et une partie du continent voisin ;
mais aiicun projet de colonisation ne fnt tente dans ces
parages pendant plus de soixanle ans, et la premiere
entreprise de cette nature fut essayee sous le regne de
Charles IX par Tamiral de Coligny, qui desirait assurer
nn asile aux calvinistes persecutes en France. Jean Ri-
baut s'enibarqua, en i562, sur deux vaisseaux que I'a-
niiral avait obtenus de Charles IX. II descendit avec un
corps de troupes calvinistes sur la cote orientale de la
Floride, pres de la riviere San-Juan, remonta plus au
nord , €t erigea dans la Caroline nieridionale le fort
Charles, qui devint le premier etablisscment des Fran-
cais dans ces parages.
Deux ans apres , il partit des ports de France une
nouvelle expedition de protestans , conmiandee par
Rene de Laudoniere, qui debarqua dans la meme con-
tree et construisit sur les bords de la riviere de Mai une
autre forteresse. Laudoniere visita I'interieur de la Flo-
ride , de la Georgie, de la Caroline , et il recut (i) dans
son etablisscment un nouveau renfort que Ribaut etait
alle chercher en France. Mais une escadre espagnole ,
commandee par Pedro Melendez de Avila, venait de-
truire cette nouvelle colonic. On n'attaquait pas les hu-
guenots comme F rancais , mais comme heretiques : le
fanatisme religieux ne voyait en eux que des ennemis
irreconciliables , ei I'on fit usage de la ruse, de la perfi-
die , de la force , pour les exterioiner.
Un acte si baroare excita en France I'indignation, et
Dominique de (jourgues, ne a Mont-de-Marsan , forma
le projet de vcngar tomes ces victimes, acte d autant
(0 i565.
( 21 )
plus reniarquable dans ces niomens cle guerre civile re-
ligieuse, que de Gourgues etait catliolique. Cent cin-
quante gentilshommes aventuriers I'accouipagnent ; il
part de Bordeaux pour le golfe du Mexique(i); double
la pointe occidentale de lile de Cuba, remonte vers la
rioride, s'approche d un fort occupe par les Kspagnols,
et en concerte I'nttaque avec les Indiens qui s'unissent a
son entreprise. Le fort est emporte par escalade , ceux
qui cherchent a se refugier dans les bois tombent sous
les coups des Indiens : aucun nest epargne ; et de Gour-
gues,apres avoir demoli les forts, revient en France avec
les hommes qui I'avaient suivi dans cette expedition.
La colonic calviniste, projetee par I'amiral de Coligny,
n'avait eu que quelques annees d' existence; niais au
nord-est de ces lerritoires , I'Ansleterre coninienca bien-
tot de plus durables etablisseniens. On ne s'etait occupe,
ni sous le regne de Henri VIII, ni sous celui de Marie,
d'etendre les decouvertes dans le Nouveau-Monde. Eli-
sabeth, qui jeta les fondemens de la puissance navale
de I'Angleterre, accorda sa protection a ces grandes en-
treprises, et les deux premiers hommes qui se signale-
rent dans une si noble carriere furent Humphrey-Gilbert
et Walter-Ralegh son beau-frere. Elisabeth leur avait
accorde des lettres-patentes (2) pour etablir une colonic
au-dela desmers; et Gilbert, qui conduisit lui-nieme les
deux premieres expeditions, perit dans la seconde (3\
sans avoir pu accomplir son dessein. Mais Ralegh ob-
tint de nouvelles lettres-patentes (4), et,apres avoir fait
reconnaitre par quelques balimens iegers plusieurs par-
ties du littoral qui recurenl en I'honneur d'Elisabelh le
(0 1567. (3) i58o.
(') 1578. (4) ifJfi'i.
( ^o
nom de V^irginie, il envoya dans I'lle de Roanoke, voi-
sine du continent, plusieurs colonies qui , sans prosperer
elles-memes , devinrent I'origine dun grand nombre
d'autres etablissemens.
II se forma, sous Jacques I", deux associations char-
gees d'etablir en Amerique des colonies : Tune etail la
compagnie de Londres, I'autre celle des negocians de
Plymouth, de Bristol et de quelques autres villes.
L'expedition de la compagnie de Londres, qui devait
se rendre dans I'lle de Roanoke (i), fut poussee vers le
nord par des vents contraires, et arriva dans la baie de
la Chesapeak : elle en remonta le fleuve le plus meri-
dional, et fonda sur ses bords la ville de James-Town,
la plus ancienne que les Anglais aient erigee dans le
Nouveau-Monde.
Les premiers etablissemens fails sur le continent I'u-
rent ensuite affermis par larrivee de lord Delaware(2):
la population s'etendit de proche en proche autour de
James-Town; on protegea laculture, et particulierement
celle du tabac ; lesBermudes venaientd'etredecouvertes
dans lAtlantique; de nouvelles villes se formerent au-
tour des baies de la Chesapeak et de la Delaware; les
attaques des Indiens furent repoussees, et la oolonie
n'eut plus a craindre pour son existence.
Telle etait la situation de- la Virginie, lorsque les eta-
blissemens de la compagnie du Nord on de Plymouth
commencerent a se former. La contree qui leur avait ele
cedee par les lettres-patentes de Jacques I" etait situee
dans un cliniat plus rigoureux ; il devenait difficile d'y
attirer des colons, et les premiers Europeens qui s'ex-
(i) 1606.
(a) 1609.
( 23 )
patrierent pour I'habiter furent les puritains , persecu-
tes par I'Eglise anglicane, refugies d'abord en Suisse,
en HoUande , et autorises ensuite par Jacques l*"" a se
fixer dans les terres conoedees a la compagnie anglaise.
Leur etablissement se fit dans le Massacbusett (i), et
ils donnerent le noni de New-Plymouth a leur premiere
ville. D'autres dissidens les suivirent , et fonderent la
ville de Salem. On vit bientot de nouvelles colonies
eriger d'autres villes autour de la baie de Massacbu-
sett (2); Boston, Cbarlestown , Dorchester, lloxbo-
rougb, furent fondees. La continuite des persecutions
religieuses attirait sans cesse de nouveaux babitans, et
les affreux ravages que la petite-verole fit chez les indi-
genes mirent a I'abri de leurs attaques les etablissemens
naissans des Europeens : ceux-ci purent s'etendre dans
I'interieur. II se forma dans le Massacbusett plusieurs
associations particulieres , qui differaient par leurs
dogmes religieux; elles se separerent de la famille pre-
miere (3) , chercberent dans les terres voisines des eta-
blissemens particuliers , et formerent successivement
ceux de Rhode-Island , du Connecticut, de New-Hamp-
shire et du Maine.
Le nombre des emigrans qui se rendaient d'Angle-
terre en Amerique etait devenu si considerable, que
Charles I"vouluty mettre des bornes, en soumettant
ceux qui voulaient partir a un serment de confonuite
aux regies de I'eglise anglicane. II est a remarquer que
Olivier Cromwell, pret a s'embarquer pour le Nouveau-
Monde (4), fut retenu en Aiigleterre par I'ordre du roi,
que deux ans apres il fit condamner a mort.
(») 1620. '(3) i636.
(3) l63o. (4) ,(^{8.
( ^4)
Cromwell, ilevenu oonquerant tie la Janiaique pen-
dant son protectorat, voulut y attirer les puritains de
la Noiivelle-Angleterre; mais ce projet n'eut aucune
suite, et les religionnaiieS conserverent leurs premiers
etahlissemcns.
Toiite lAnierique anglaise avail ete partagee par
Jacques I" enlre deux compagnies ; mais celles-ci n'e-
taient encore parvenues a former d'etablissemens que
dans la Virginie et dans les regions voisines de la baie
de IMassachusett. Charles I'^ separa de la Virginie le
pays situe au nord du Potomack et de laChesapeake(i) :
il le donna en propriete a lord Baltimore , et son fils
vint y fonder la premiere eolonie du Maryland.
Apres la restauration de Charles 11, les pays situes au
midi de la Virginie furent donnes au due d' Albemarle ,
a lord Clarendon, a d'autres seigneurs (2). Leurs eta-
blissemens furent plus prosperes que ceux qui avaient
ete essayes avant eux, et la concession qu'ils obtinrent
comprit aussi la Georgie et s'etendit jusqu'a la Flo-
ride. Locke fut appele a donner une constitution a ces
contrees (3) J mais elle ne convenait point a leur situa-
tion , el elle n'eut que dix annees d'exisience.
De nouveaux possesseurs s'etaient introduits entre le
Maryland el les etats de la JNouvelle-Angleterre : les
Hollandais ctablirent des colonies sur les bords de la
riviere d'Hudson ; ils fonderent , a Tentree de ce fleuve,
la ville de New-Amsterdam qui en devint la capitale,
ils remonterent le cours de I'Hudson jusqu'a Albany, et
revinrenl vers I'Ocean occuper dautres posies; mais ils
(i) i632. (3) 1G70.
(a) i(.oi.
(.5)
en furent depossedes en i664 pa'" '«» troupes du duo
d'York, auquel le roi d'Angleterre son frere avait cede
ce territoire. Les Anglais, en faisant attaquer la colon ie
liollandaise, se fondaient sur le droit de decouverte; et
en effet, Hndson, un de leurs plus illustres navignteurs,
avait reconnu et renionte en i6oy le fleuve auquel il
donna son nom. Les Hollandais, apres avoir reconquis
leur colonic en 1673,1a perdirent definitivement I'annee
suivante : New-Amsterdam prit le nom de New-York ,
et ce dernier nom devint celui de I'etat qui est aujour-
dhui le plus etendu, le plus peuple, le plus riche de la
confederation americaine.
L'etat de New-Jersey fut un de'membrement de celui
de New-York; il fut fonde apres la conquete que I'Aii-
gleterre en fit sur les Hollandais.
La colonic la plus remarquable par le nom de son
t'ondateur et par les principes que Ton suivit dans son
etablissement , fut celle de Pensylvanie. Penn avait
obtenu de Charles II la concession du territoire (i) ;
mais il voulut encore en acheter la propriete des indi-
genes lorsqu'il y conduisit une colonie de quakers.
D'autres sectes religieuses , et particulierement des
moraves, des anabaptistes, venus de Hollande,de Suede,
d'Angleterre, fournirent a ce pays de nouveaux colons.
La tolerance devenait un des principes du gouverne-
ment de la colonie; la division des proprietes en facilita
la culture; I'etablissement d'une banque de credit aidait
a solder les acquisitions. La ville de Philadelphie etait
fondee; un siecle apres, elle devint le centre d'une
grande puissance, et I'inde'pendance des Etats-Unis y
fut proclamee.
(.) .tJSi.
( ^6 )
Au noril des possessions anglaises qui bordaient les
coles orientales d'Ainerique, s'etendaient les etablisse-
niens francais, sur les rives du golfe et du fleuve Saint-
Laurent. Ges pays avaient ete successivenient reconnus,
des I'epoque du regne de Francois l'^'' , par le baron de
Lery (i), par Verazzani (2), pilote florentin, et par le
capitaine Jacques Cartier, de Saint-Malo(3), qui penetra
dans les lerres de Canada , Hochelaga et Saguenay. La
Roque de Roberval construisit plusieurs forts dans le
Canada (4), et I'ingenieur francais Alphonse (5) visita le
Labrador, anterieurement decouvert par Cortereal.
ApreseuXjles expeditions dans cette partie du monde
furenl interrompues pendant un denii-siecle ; on les
reprit sous le regne de Henri 111 , et elies furent succes-
sivenient dirigees par Chaton (6) , Jacques Noel et
Ravillon (7). La guerre de la ligue les fit suspendre
encore , et Henri IV ayant retabli la paix , chargea La
Rocbe-Breton (8)d'afferniir et d'etendre les possessions
francaises dans tons les lieux qui ne seraient pas occupes
par d'autres elals chretiens. Une nouveile escadre fut
envoyee sous les ordres de Mons (9), dans les pays de
Canada , de Norumbega et d'Acadie, dont se composait
la Nouvelle-France. Champlain faisait partie de cette
expedition , et il continua la decouverte des regions
voislnes : on fonda la ville de Quebec (10) et celle de
Montreal, el Ion s'avanca progressivement vers ces
mers interieures qui bordent le Haut-Canada.
Les Francais apprirent que de vastes contrees s'elen-
(0 i5i8. (6) i588.
(2) i5a4. (7) '^tjr.
(3) 1534. (8) i5<)8.
(4) 1 540. (9) 160.5.
(5) I 5', I. (10) 1 60S.
( ^7)
daient au niidi des grands lacs, et ceux qui partirent
pour les reconnaitre (i) decouvrirent les regions qu'ar-
rose le Haut-Mississipi, et descendirent cefleuve jusqu'au
confluent de I'Aikansas.
La Salle, qui succedait a Frontenac dans le gouver-
nement du Canada, voulut suivre lui-meme les decou-
vertes conimencees : il Lorna son premier voyage (2) a
I'embouchure de la riviere des Illinois, et le pere Hen-
nepin, qui I'accompagnait, publia cette relation. Dans
une seconde reconnaissance (3), il descendit jusqu'a
I'embouchure du Mississipi. La Salle vint former en
France une troisieme expedition qui partit du port de
La Ilochelle : il voulait fonder un nouvel elablissement
sur les rivages meridionaux de la Louisiane; et lorsqu'il
eut penetre dans le golfe du Mexique, les vents ou les
courans le porterent jusque dans la baie de Saint-Ber-
nard (4), oil il erigea le fort Saint-Louis , et ou il tomba
victime d'une conspiration.
Iberville reconimt, quelques annees apres(5),les
regions sitihees sur I'une et I'autre rive du Mississipi ;
mais les etablissemens epars dans cette contree ne com-
mencerent a prendre quelque importance qu'a I'epoque
ou Grozat obtint le commerce de la Louisiane (6), et y
conduisit un certain nombre de families pour y former
des colonies agricoles. Ce n etait encore qu'unefaible et
passagere lueur de prosperite. Le privilege dont Crozat
jouissait temporairement fut cede, quelques annees
apres (7), a la compagnie d'Occident , que Lavif avail
(0 1673. (5) 1699.
(2) 1679. (6) 1712.
(3) 1682. (-) 171,.
(4) i685.
( ^8 )
cret-e en France, et qui tut l)ientul entrainee dans la
commune ruine. La Nouvelle-Oileans n'existait pas en-
core, et le pere Charlevoix, dent les relalions remon-
tent a cette epoque, ne vit elever dans la canipagne de-
serte, ou cette ville fut ensuite batie , qu'une tente ou
Ton cclebrait les saints mysteres : ce lieu devait, un jour,
devenir un des plus beaux etablissemens du Nouveau-
Monde.
Nous nous sonimes arretc's , dans ce Menioire, aux
epoques des decouvertes et a celles des premieres colo-
nies fondees sur les rivages orientaux de lAnierique.
Les expeditions faites sur ses cotes occidentales seront
I'objet d'un second Menioire.
NOTICE
Lue .i la Societe de Geographic , clans sa seance du 4 juillet i S I i ,
Par M. Roux dc Rocuelle.
Nous venons de perdre le dernier homme qui ml
acconipagne La Perouse dans les deux premieres annees
de son voyage. Jean-Baptiste Bartheleniy de Lesseps,
ne a Cette, departement de I'He'rault, le 2^ Janvier 1766,
et decede le 6 avril iS?>4 ;i Lisbonne oil il etait consul-
general de France, avait ete attache a cette expedition :
il parcourut avec La Perouse I'Atlantique, les parages
meridionaux ct les cotes nord-ouest du Nouveau-Monde,
une partie des arcliipels du grand Ocean, les mers de
la Chine, celles du Japon , de la Tartaric et du Kaml-
chalka, ou il se Uouv.iil en 17H7. la Pi'iouse desiraM
( 29 )
alors faire parvenir en France le recueil de toutes les
observations qu'il avait faites, confia tous ces docuinens
au jeune Lesseps qui eut a traverser par terre tout
I'ancien continent pour revenir dans sa patrie.
Nous allons le suivre dans son voyage autour du
monde, en nous bornant a rappeler d'une maniere
sommaire la direction et les circonstances princlpales
de sa navigation; et nous nous arreterons plus speciale-
ment au voyage qu'il fit ensuite a travers les glaces et
les deserts de la Siberie, voyage dont la relation fut
publiee en 1790, deux annees apres son retour en
France.
L'expedition mise sous les ordres de La Perouse se
composait des fregates la Boiissole et I Astrolabe : la
seconde etait commandee par de Langle; et Lesseps
partit a bord de ce batimcnt, en qualite d'interprete.
La langue russe lui etait familiere; il I'avait apprise a
Saint-Petersbourg ou son pere etait consul-general; et
sa presence pouvait etre d'autant plus utile aux navi-
gateurs, quits avaient a relacher successivement , soit
en Amerique soit en Asie, aumilieu des possessions
ruRses.
Les deux fregates, armees a Brest, mirent a la voile
le i""" aout 1785, toucherent a Madere, a Teneriffe, et
se dirigerent vers le sud-ouest : elles devaient doubler
le cap Horn pour se rendre dans le grand Ocean. On
observa dans cette traversee la position des iles de Martin-
Vaz et de la Trinite, et Ton relacha a Sainte-Catherine
du Bresil : le cap Diego qui forme la pointe occidenta'e
du detroit de Le Maire fut releve le 20 Janvier 1786;
et, apres avoir heureusement depasse le cap Horn, les
navires se rendirent au Chili dans la baie de la Concep-
tion, en reconnaissant dans leur route quelques parlies
( 3o)
de la cote Magellanique. Les vaisseaux se dirigereni
ensuite vers I'lle de Paques ou ils alterirent le 9 avril,
de \d vers les ties Sandwich, et euGri sur les cotes nord-
oiiest d'Amerique, oii Ton reconnut, a la date du
23juin , le niont Saint-Elie.
En indiquant la direction des navigateurs, nous n a-
vons point a nous occuper ici des observations de di-
verse nature qui furent faites dans la Iraversee : ces
reniarques appartiennent specialement au recit du
voyage de La Perouse; mais nous ne pouvons passer
sous silence les premiers malheurs d'une expedition
qui devait se terminer dune nianiere si desastreuse. La
reconnaissance, les sondagesdune nouvelle baie, situee
pres du cap Beau-Temps, occasionnerent !a perte si
justenient regretlee, de Descires, des jeunes de La-
horde, signales par un merite premature et par leur
union fraternelle, de plusieurs autres ofBciers et de
quinze homnies d'equipage, qui , en traversant la passe
de la haie, furent entraines dans ses brisans, et englotitis
par la violence des vagues. Ce lieu avait recu le nom de
Port des Francais; notre etahlissement n'y fut marque
que par un monument funeraire.
Le 3o juillet les de ux tregates reprirent leur naviga-
tion. LaPeroiisecherchaila ranger hahituelletnentlacote
dont il ne se tenait eloigne que de deux a trois lieues,
et quelquefois nioins; de maniere a pouvoir y prendre
le relevement de tous les points principaux ; mais sans
determiner d'une maniere continue tous les details de
cetle longue ligne de littoral , et sans penetrer dans les
passes des divers archipels qui en sont voisins. II ne
voulait relacher qua Monterey, ou les deux fregates
qui avaient toujours navigue de conserve arriverent
le 1 5 septembre, et il remit a la voile le i/\ pour gagner
( •" )
les parages (le I'Asie. La Perouse decouvrit I'lle Necker
dans cette traversee; il reconnut rextreniite septen-
trlonale des lies Marianes, et arriva le 3 Janvier 1787
dans la rade de Macao. Son intention etait d'y faire
vendre les pelleteries dont on avail fait la traite sur
la cote nord-ouest d'Anierique, afin d'en reparlir le prix
entre les equipages, et un niarcband suedoisse cl)argea
de cette consignation.
On parlit de Macao pour I'lle de Lucon le 5 fevrier,
et le 28 on inouilla dans le port de Cavite. La Perouse
reconnut ensuite I'lle Formose : il releva les lies Pongf-
hou ou Pescadores, entra dans I'archipel de Likeu, na-
vigua dans la nier Jaune qui s'etend entre la Chine et
cetarchipel, prit connaissance de 1 lie de Quelpaert,
passa dans le detroit de Goree qui separe le Japon du
continent, et releva la cole de I'extremite de cette -
presqu'lle.
Apres avoir determine qiielques points de 1 ile de
Niphon , les voyageurs revinrent vers I'occident sur les
cotes de la Tartaric. Cette region n'avaitpas eieexploree
par d'autres navigaleurs europeens : La Perouse en
observa avec soin les rivaees , et il continua sa recon-
naissance jusquau fond dii long canal maritime qui
separe le continent de I'lle de Seghalieri, et que Ton
connalt sous le nom de Manche de Tartaric. II releva
ensuite du nord au niidi la rive occidentale de cette ile,
decouvrit le detroit qui la separe de I'ile de Jesso ,
passage auquel on a donne le noni de detroit de La
Perouse, et poursuivit sa navigation vers le iioid, entre
rile Seghalien et le long archipel des lies Kuriies, dont
il reconnut une partie, depuis le i5 aout jusqn'au 5 sep-
tembre. Alors on apercut les cotes du Kamtchalka ; et
le 6 septemhre 1787,168 doux fregates furent niouillees
( 32 )
tlans la baie il'Avatcha devant le port cle Petropau-
lovvski.
Ce fut dans cette contree que le jeune interprele de
I'expeditioH put se f'aire reniarquer par des services
liabiluels. 11 devint 1 interniediaire de toutes les com-
inunicalions de La Perouse avec le lieutenant Kaboroff,
conuuandant du port; et , grace aux soins de Lesseps
et a I'obligeant empressement de cet of'ficier, les astro-
noraes formerent a terre un etablissenient commode
pour leurs observations, les naturalistes furent secondes
dans leurs recherches, et entreprirenl une ascension
jusqu'au cratere du volcan le plus voisin de la baie
d'Avatcba : aucun voyageur ne les y avait precedes.
Le Kamtchatka depenoait a cette epoque du gouver-
nement d'Okotsk; et le colonel Raslotf-Ougrenin qui en
elait charge visitait alors cette province et voulait tout
y observer, dans la vue d'ameliorer le sort des babitans.
II vint a Petropaulowski pendant le sejour de La Pe-
rouse; et sa politesse aftectueuse envers les Francais,
dont il enlendait parfaitement la langue, leur fit retrou-
ver, aux exlremites de I'Asie, tous les agremens d'une
societe europeenne.
Huit jours apres I'arrivee des fregates, Lesseps de-
couvrit le malbeureux Ivaschkin , dont les compagnons
deCook avaient deja public la disgrace. Ivaschkin , exile
depuis plusde cinquante ans, avait ete eleve en France :
son education, sa figure aiuiable lefaisaient alors reniar-
quer : il devint page de I'imperatrice Elisabeth, et offi-
cier dans le regiment des gardes Preobajenski ; mais sa
favour fut passagcrc, et quelques propos indiscrets,
tenus a la fin d'un repas ,devinrent la cause de sa perte :
il tut degrade, recut le knout, eiit les narines fendues
et lut exil('' au Kamt<:hatka. Pendant vingt ans, Ivaschkin
( 33 )
fut traite avec line extreme i-igueur, et rediiit a vivre
au milieu desKamtchadales du produit de ses penibles
chasses. En6n son sort fut allege; plusieurs gouver-
neurs d'Okotsk intercederent pour lui; on obtint qu'il
put habiter une ville de Siberic ; mais il s'etait plie aux
moeurs des Ramtchadales, et il se proposait de mourir
au milieu deux. Portantsur lui la trace ineffacable dun
cruel cliatiment, et se voyant marque du sceau des
criminels, il cherchait a se derober aux regards des
etrangeis, et il conservait la fierte de son caractere: son
visage etait mutile, mais I liomme n'etait pas fletri.
Ivaschkin avait ete temoin en iy4^ des obse(|ues de
LaCroyere, savant francais qui avait fait partie des ex-
peditions de Beliring et de Tchirikoff : il indiqua le lieu
de son tombeau , et La Perouse y fit graver sur cuivre
I'epitaphe suivante : « Ci-git Louis de Lisle de La Croyere,
« de I'academie royale des sciences de Paris, mort en
«i74i, au retour d'une expedition faite par ordre du
« czar pour reconnaitre les cotes d'Amerique; astro-
« nome et geographe, emule dc deux freres celebres
"dans les sciences, il merita les regrets de sa patrie.
« En 1786, M. le comte de La Perouse, commandant les
" fregates du roi la Boussole et V /istrolahe, consacra sa
« memoire, en donnant son nom a une lie, pres des
" lieux ou ce savant avait aborde. »
Le capitaine Gierke, charge apres la mort de Cook, du
commandement de son expedition, etait mort et avait
ete inhume en 1779 dans la meme contree; La Perouse
fit egalement graver sur cuivre linscription mise sur
son tombeau; ct le gouverneur d'Okotsk promit d'ele-
ver a ces deux hommes celebres un monument plus
digue d'eux.
Nous arrivons au moment ou Lesseps doit sc scparci-
3
( 34 )
de rexpedition dont il avail fait partie pendant vingl
six mois. Ses services comiiie interprete n'etaient plus
aussi necessaires, puisque les fregates allaient quitter
les possessions russes pour se rendre dans les regions
equatoriales : La Perouse I'expedia en France avec les
journaux de son voyage, et il s'en est ainsi expriine
dans sa relation : « Je crus rendre service a ma patrie, en
• procurant a M. de Lesseps roccasion de connaitrepar
«lui-nieme les differentes provinces de I'empire de Rus-
« sie, oil vraisemblabiement il remplacera un jour son
« pere, riotre consul-general a Petersbourg, M. Kasloff
n medit obligeamment qu il I'acceptait pour son aide-de-
« camp jusqua Okotsk, d'ou il lui faciliterait les nioyens
<< de se rendre a Petersbourg , et que des ce moment il
« faisait partie de sa famille, »
L'amenite et les qualites aimables de Lesseps lui
avaientpromptement concilie la bienveillance de M. Kas-
loff: il laissait a bord des deux fregates de nombreux
amis,et La Perouse donna des regrets a son depart.
" Nous ne pumes, disait-il, quitter sans attendrissement
" M. de Lesseps, que ses qualites precieuses nousavaient
<i rendu cher, et que nous laissions sur una terre etran-
« gere, au moment d'entreprendre un voyage aussi long
« que penible. • Si nous rapportons le textc meme de
ses paroles , c'est que le bon temoignage d'un liomme
illustre devient le premier et le plus precieux de tons les
eloges.
Lesseps parlit, le y octobre 1787 , de Petropaulowski
ou Ion ne comptait alors que quarante babltations : il
entreprenait dans une saison rigoureuse un voyage par
lerre de plus de quatre mille lieues, et les communica-
tions etaient alors tres difficiles. II fallut, apres avoir
traverse le Kamtcbatka jusqu'a Bolcheretsk, attendre
(35)
la saison du trainage : la caravane qui devait remonter
vers le nord , et parcourir par un tres long circuit tous
les rivages de la mer d'Okotsk, ne partit qu'a la fin de
Janvier 1788 : elle se composait de trente-cinq traineaux,
conduits par des chiens, de I'espece des chiens de ber-
gers : il en fallait cinq pour un attelage ordinaire; on
en employait dix pour chaque traineau de bagage, et
beaucoup plus pour ceux du gouverneur d'Okotsk et
de son nouvel aide-de-camp. La fatigue et la faini en
firent bientot perir une grande partie: on manquait de
relais pour reparer cette perte; les survivans ne suffi-
saient plus qua un petit nonibre de traineaux; etLesseps
ayant une mission a remplir, reconnut la necessite de se
separer dun long cortege qui n'avancait qu'avec peine.
II ne garda que les guides indispensables, changea plu-
sieurs fois pour un attelage de rennes celui avec lequel
il etait parti, et dut employer plusieurs mois pour par-
courir dans toute leuv longueur le Kanitcbatka et le
gouvernemeut d'Okotsk, pour se rendre a Yakoutsk,
remonter le cours de la Lena, et arriver a Irkoutsk,
situe dans le voisinage du lac Baikal.
Ce voyageur profita de son sejour dans les principaux
lieux uu il dut s'arreter, pour recueillir des informa-
tions sur les differentes peuplades repandues dans ces
contrees,sur les Kamtcbadales, les Koriaks, les Ton-
gouses; et il a enrichi de ces documens la relation de
son voyage. G'est ainsi qu'en parcourant les Ostrogs
ou villages du Kamtchatka, il decrit la forme des Yoiirtes
ou demeures souterraines qui etaient celles des anciens
habitans, celles des Isbas ou cabanes dont les parois
sont composees de troncs d'arbres, coucbes les uns sur
les autres et entrelaces par leurs extremites, celles des
halagmis ou babitations d'ete, elevees a quelque dis-
3.
C 36.)
tance du sol sui iles poteaux plaiiles dans la terre.
Lesseps, en peignant la maniere de vivre des Kamt-
chadales , rappelle que la racine de sarana leur tient
lieu de pain, qu'ilsconiposent avec de Tail sauvageleurs
boissons fermenlees, que la peclie des saumuns, des
truites, du hareng, du loup-marin , la chasse des rennes,
des argalis, des renards, des loutres, des castors, des
niartres zlbelines, sont leuis principales occupations,
lis ainient, dans leurs danses, a imiter les niouvenieos
des animaux sauvages et ceux de Tours surtout: ils
representent sa demarche, ses jeux, ses habitudes, les
mouvemens des petits autour de leur mere, leur agita-
tion, leur defense quand le chasseur les poursuit.
La description de I'etat physique du pays, de sa tem-
perature, des tempetes, des ouragans auxquels 11 est
expose, des eaux ihermales de Natschivin, du cours
des rivieres, des phenomenes de plusieurs volcans, oc-
cupe notre voyageur; et souvent il niele a ces analyses
le recit de quelques evenemens propres a y repahdre
plus d'interet et de variete. On pent citer an nombre
de ces aventures les plus romanesques celles de Be-
niowski, ancien olficier polonais qui avail servi en
1 769 sous les drapeaux de la confederation de Bar : il fut
fait prisonniei par les Russes, qui I'envoyerent en Si-
berie et au Kamtchatka. On le vit bientot paraltre a
Bolcheresk a la tete d une troupe d exiles : il se procura
des armes, surprit la garnison ct s'empara d un navire
a bord duquel il s'embarqiia. Les informations de Les-
seps ne vont pas plus loin; mais nous lisons dans les
voyages de {]ook que Beniowski laissa dans les
lies Kuriles une parlie des matelots russes de son
equipage , et qu'il se rendit dans I'ile de Lucon et en-
suite a Canton : la il obtint passage sur un vaisseau
( 57 )
francais qui retoiirnait en Europe^ il fat admis an ser-
vice de France, et en 17741! gouvernait I'etablissement
francais de Madagascar.
Le voyage de Lesseps a travers les con trees que fre-
quentent les Koriaks et les Tongotises lui offre I'occa-
sion de faire de nombreuses remarques sur ces tribus,
dont les unes sont sedentaires, dont les autres sont
encore noniades. Des troupeaux de rennes sont leur
principale richesse; ces peuples y trouvent leur nour-
riture et leurs vetemens ; ils ont de coninuins usages qui
tiennent a la similitude de leur situation dans I'ordre
social; niais leurs langues sont dift'erentes; et Lesseps
nous a donne un vocabulaire comparatif dune partie
des niotsde leurs idiomes.
A son arrivee a Okostk , il vit construire les deux
naviies que Ion destinait a Texpedition du capitaine
Billings, et il rencontra, quelque temps apres, a Ya-
koutsk cet officier qui avait accoinpagne Cook dans sorr
troisienie voyage et que !a Riissie avait ensuite attache
a son service.
Le port d'Okotsk etait alors destine aux principales
relations qui s'etablissaient avec la cote nord-ouest
d'Amerique, pour la traite des fourrures, commerce
important qui prenait de jour en jour UJie nouvelle
extension. L'origine et les accroissemens de ce negoce
atiirerent I'attention de Lesseps , et il a repandu sur ce
sujet d'interessantes notions dans son ouvrage: il yrap-
pelle les progres successifs des Russes dans les ditie-
rentes parties de la Siberie, situees a I'orient de la Lena.
Les conquerans n y trouvaient pas de fertiles campagnes
a culliver; mais lu decouverte des mines de la Siberie
occidentale les excitait a elendre plus loin leurs recher-
ches : ils etaient d'ailleurs attires par I'abondance et la
( 38;
finesse des pelleteries : on conimencu des echanges , on
constniisit des forts , on s'avanca de proche en proche
jusqu'a lii nier d'Okotsk et jusqu'au cours de I'Anadir.
L'acquisilion du Ramtchatka vint augmenter ce com-
merce. Des lies inconnuts furent occupees; c'etaient
au niidi les lies Kuriles qui se prolongeaient veis celles
du Japon, et a I'orient les iles Aleutiennes qui s'eten-
daient vers la presqu ile d'Alatska. Un ancien plan nia-
nuscrit des lies Kuriles se trouvait dans les archives
dOkotsk: il fut commimique a Lesseps, comme iin
temoignage authenlique des relations etablies depuis
long-temps entre cet archipel et la cute d'Asie.
Le commerce de la Russie avec la (Miine, dont Lesseps
s'est occupe egalement, remonle vers I'annee 1670: il
ne pouvait se faire que par caravanes, et il fut regu-
larise en i68y par un premier traite, Les caravanes
russes penetraient d'abord jusqu'a Pekin , eiles se soul
depuis arretees sui" les frontieres. Pour donnerau com-
merce des deux etats plus d'importance, Lesseps jugeait
qu'i! serait utile a la Russie de faire partir d'Okotsk ou
du Kamtchtka des navires qui allassenl dlrectement
faire leurs echanges a Canton ou a Macao.
Les observations que Lesseps recueillit a Irkoustk sur
les communications des deux empires sont les derniers
developpemens auxquels il se soit arrete dans sa re-
lation. En partant de cette ville il ne cliercha plus qu'a
poursuivre son voyage avec rapidite: un service de
poste etait etabli; on en avail remis la charge a des
exiles, qui etaient tenus de pourvoii- chaque station du
nombre de chevaux necessaires ; et Lesseps remarqua
plusieurs fois la severite avec laquelle on punissait les
inoindres infractions de ces bannis. Il en renconlra
plusieurs detacheniens, conduits par des escortes mili-
( ^9)
taires jusqu'aux lieux de leur exil : on les distribuait
sur differens points de la Siberie, pour les y attacher
au travail des mines ou a d'autres penibles emplois.
Lesseps avait a parcourir six mille verstes (quinze
cents lieues), pour se rendre d'likoutsk a Saint-Peters-
bourg. II fit ce voyage en quarante-deux jours, en se
dirigeant par les steppes de Barabinskoi , par la ville
de Tomsk dont un Francais, nomme De Villeneuve,
etait alors commandant, par Tobolsk qui venait d'etre
la proie d'un incendle, par Yecatherinbourg dans le
voisinage de laquelle sont des mines d'or, par Casan,
Makarietf, Nijeney-Novogorod et Moscou. Toute cette
partie de la route a travers la Siberie occidentale et la
Russie d'Europe avait deja ete decrite par plusieurs
voyageurs, et Lesseps s'est borne a renvoyer le lecteur
a leurs relations , surtoul a celle de Pallas : il etait
impatient de revoir sa patrie, et il arriva de Saint-Pe-
tersbourg a Versailles le ly oclobre 1788. Le nieme
jourilfutpresenteau roi par leoomte de La Luzerne, qui
etait aiors luinistre et secretaire d elat de la marine, et
Louis XVI I'accueillit avec un interet d'autant plus vit
que ce prince avait lui-meme trace les instructions de
La Perouse : il donna au jeune voyageur un temoignage
de sabienveillance, en le nomjuaut consul de France a
Cronstadt.
Peu de temps apres son retour en Europe, on y ap-
prit la fin deplorable de M. de Langle et deonze autres
personnes de cette expedition (jui ffirent massacrees
conime lui, U; 11 dccenibre 1787, (tar les sauvages do
rile de Maouna qui fait partie de larcbipcl des Naviga-
teurs. Get ot'ficier distingue avait eu pour Lesseps
I'atfection d'un pere: une semblable perte lui inspira
de profonds regrets.
C'elait lo second desastre de I'fxpeditioti de La Pe-
( 4o )
rouse. Los uouvelles tjue I'on recut tie lui etaiont adres-
sees de Jiotaiiy-lJay , sons la date du 26 Janvier 1788; et
depuis CO temps il s'etendil un long, un eternel silence
sur ses navigations ulterieiires : le temps et la mort ont
lout devore : nous n'avons recueilli que quarante ans
apres,par le capitaine Dillon , et par M. Dumont-Dur-
ville, notre honorable collegue, les derniers vesliges de
son nautrage dans 1 lie de \ anicoro.
Nous nous sommes arreles long-temps aux voyages
qui signalerent la jeunesse de M. de Lesseps, parco
qu ils interessent plus specialement la Societe de geo-
graphic, et 'qu ils sont devenus , suivant le temoignage
de I'auteur lui-nieme, I'epoque la plus memorable de sa
vie. Depuis son retour en Europe, il parcourut la ear-
riere consulaire, et il y fut quelquetois trouble par
les o rages de la revolution ou par les vicissitudes de la
guerre. Devenu gendre du venerable Ruffin, 1 un de
nos plus savans orientalistes et de nos agens les plus
recommandables, il le suivit a Constantinople, et il y
partagea les dangers de nos conipatriotes, pendant la
duree de notre expedition d'Egypte. Ses f'onctions de
consul-general en Russie furent suspendues deux I'ois,
par la rupture de 1807 et par celie de 1812; et il lut
nomme en 181 5 consul-general aLisbonne, ou il remplit
egalenient, dans des circonstances difficiles, les hono-
rables f'onctions de chaise d affaires.
Les connaissances de M. de Lesseps le mirent tou-
jours a la hauteur de ses eniplois : les agremens de son
esprit et la bonte de son ca>ur le firent rechercher : son
caraclere fut noble, et sa conduite honora le nom fraii-
cais. Estime de son gouvernement, ainie dans les pays
ou il residait, il emporte les regrets des hommes de
bien , et la consideration pul)lique s'attachca sa me-
moire.
( 4i )
EXTRAIT
DE DEUX I.ETTKES ADRESSEES A lA SOCIETE DE
GEOGRAPHIE PAR M. PALLEGOIX,
Missionnaire francais ii Siam-
Bangkok , capitale de Siani, le 2 Janvier i832.
Messieurs,
J'ai lecu avec satisfaction et reconnaissance la lettro
que la Societe m'a fait Ihonneur de m'adresser le 8
juin i83o.
Puisque vous daignez m'adniettre au nomhre de vos
correspondans, je niettrai tout le zele possible a vous
etrede quelque utilite.
Je vous prie de m'adresser quelques questions sur les
objets dont vous desirez le plus avoir connaissance lou-
chant les contrees que j'ai a parcourir , c'est-a-dire le
royaume de Siam , et les cinq petitsetats Laociens tribu-
taires de Siam.
A peine vient-il ici chaque annee un navire de Syn-
capor, et ce royaume reste plonge dans la plus crasse
ignorance.
Je prie la Societe de me procurer une carte de Siam,
la meilleure qu'elle puisse trouver, afin que dans mes
frequens voyages je puisse decouvrir si vos cartes indi-
quent juste la direction du fleuve, des rivieres, et des
montagnes; car je vois des erreurs extremes dans celles
que j'ai apportees moi-meme.
Je prends la liberte de vous envover un itineraire de
sept journees de chemin en remontant le fleuve Menam
( 4a )
a paitir de Juthia (donl le vrai nom est Outhaja qui
signifielleu de delices , jardin delicieux).
Depourvii comme je le suis d'instrumens, je n'ai pas
pu mettre dans I'observation et le calcul des distances
une justesse mathematique.
Si Outhaja (Juthia), le i"aout i833.
Messieurs,
Je vous ecrivis en i832 pour reniercier la Societe de
ce qu'elle avait daigne m'admettre au nondjre de ses
correspondans; cette annee-ci, je vousecris denouveau
non pas encore pour vous envoyer mes notes, qui sont
trop en desordre, niais pour vous donner avis de mes
travaux et vous deniander s'ils vous seront agreables.
1° Je compose un diclionnaire sianiois et une gram-
mairede cette langue. J'ai deja recueilli vingt mille mots;
neanmoins ce ne sera que dans trois ou quatre ans que
je serai a nienie de vous I'offrir;
2° Mon minisiere m'appelant niainlenant au Laos, je
lerai le nieme travail sur la langue laocienne, qui, du
reste, a presque tous le^ mots siamois avec quelque
alteration et une prononciation differente;
3" Je fais aussi un vocabulaire de la langue liAli,
langue sacree des Siamois ;
4° J'ai recueilli un bon nombre de livres elementaires
de ces trois langues, qnej'aurai I'lionneur de vous fairc
passer avec les dictionnaires et gramniaires ;
5" Je compose peu-a-peu une sorte de tableau physi-
que, moral et politique des pays que je parcours ; mais
comme c'est un ouvrage de plusieurs annees , j'ignore
quand il sera en etat de vous ctre offort ; car ce ne sera
( 43 )
qu'apies avoii' ninri et corxigemes notes, que je pouinii
las livrer a votre curiosite;
6" Le Laos est un pays inconnu en Europe; or, je suis
sur le point d'y penetrer, et nion intention estd'allerau
moins jusqu'a P'ieng Channe (i) situee sur le fleuve du
Gamboge, saccagee par les Siamois en 1828, el fort nial
designee dans nos cartes sous le nom de Langtcliang.
Vieng Channe veut dire ville royale de ia Luiie. II ne
faut pas croire que ce soit la capitale de tout le Laos.
D'apres les renseignemens tires des Laociens amenes en
caplivite a Siam et etablis a la partie est du royaume, le
Laos est un compose de huit ou^dix petits etats qui re-
levant tons , les uns de Siam les autres de Cochinchine.
Vieng Channe est I'etat le plus considerable de tous,
niais les autres etats ne dependent pas de lui et lui-
nieme depend du roi de Siam. La nation laocienne se
divise comme en trois tribusPhoung Khao ;[ventre blanc)
Phoung dam (ventre noir) Phoung Khio (ventre vert).
La i" ne se tatoue pas, la a*' se tatoue en noir, et la
troisieme en vert. Chaque tribu a son dialecte; nialgre
ceia les trois tribus peuvent s'entendre mutuellement.
Le caractere des Laociens est tres doux, tres hospitalier.
On a ecrit jadis qu'il n'y avait pas de voleur parmieux;
cela pouvaitetre alors : car le roi de Vieng Channe pu-
nissait de mort les vols les plus legers; niais depuis, ses
sujets, pousses peut-etre par I'extrememiserejse sontmis
a voler comme les autres peuplades qui I'avoisinent. Je
pourrais vous donner d'assez longs details sur eux ,
puisquej'y ai deja fait trois voyages, mais je crains en-
core qu'il ne m'echappe quelques erreurs.
(i) II faut pronoiicer le cA comme //, mais tres adouci : channe y
prononcez tianne.
( U )
Itineraire dc Juthia a Xainat (Janvier i83i), en re-
montant le grandjleuve appelc Menain[Mere des eanx).
N'ayant pas d'aulre instrument qii'une boussole, je
me contenlai de noter les contours du Heuve, et surtout
leur direction, le plus exactement que je pus. Je com-
mence I'itineraire a la sortie meme de Juthia , en re-
montant la principale branche du fleuve.
Direction
du fleuve-
O.O.N. Uue lieue environ. Alors on voit un petit
bras du fleuve a droite, dont nous retrou-
verons I'ouverture iin peu plus haut.
O. Un quart de lieue. Les deux bords du (leuve
garnis de bambous et parsemes de cabanes
isolees.
O. 0. N. Un quart de lieue. Vue flimnienses cani-
pagnes.
O. 1/2 N. Un quart de lieue.
O. O. N. Un demi-quart de lieue. Village appele Tuk-
Farang, c'est-a-dire Edifice europeen. 11 pii-
rait qu il y avait la autrefois un village clue-
lien , compose en partie d'Europeens.
N. O. Un demi-quart de lieue. Village appele Ma-
hapbram , c'est-a-dire Grand-Brachniane.
La sont les mines d'un grand college fonde
par les eveques francais etablis a Juthia.
O. O. N. Un quart de lieue. La , a gauche, s'ouvre un
gros bras du fleuve qui va s'y rejoindre a
six lieues au-dessous de Juthia. La aussi le
fleuve forme une petite ile d'envirou cent
toisos dc longueur.
N.
0.
N.
N.
0.
N.
N.
E.
N.E.
(45)
N. N. O. line demi-lieue. Petit bras qui remonte a
droite. On \ voit un village chinois appele
Ban-Houa-Taphan.
N.N.O. 1^2 O. Trois quarts de lieue. A droite, villages
siamois. Urie douane. Campagnes de riz. Les
bords du lleuve s'elevent insensiblement.
On commence a trouver ca et la des bancs
de sable ou les barques ont de la peine a
passer a cause du pen d'eau.
Un quart de lieue.
Un quart de lieue. A droite, Ban-N6n (vil-
lage des vers).
Un demi-quart de lieue. Ca^janes isolees.
Un demi-quart de lieue. Cabanes isolees a
droite et a gauclie. Le fleuve borde de
bambous.
Une demi-lieue.
Un quart de lieue. Petite ile.
Une demi-lieue. A droite, village ; a gauche,
petit bras du fleuve courant au midi.
Une demi-lieue.
Une demi-lieue. A droite, petit bras qui
court vers Jutliia.
Un demi-quart de lieue. Gros bras qui re-
monte a droite.
Un quart de lieue. A gauche, petit bras qui
remonte a la ville nommee Hang-Thong.
Campagnes de riz.
N. E. Un demi-quart de lieue.
N. N. E. Un quart et demi de lieue. Cabanes a droite
et a gauche.
E. Un demi-quart de lieue.
N. Une demi-lieue.
0.
N.
N.
0.
N.
0.
N.
N.
N.
0.
N.
N.
0.
(46)
N. N. E. Un quart de lieue. Petit bras a gauclie coii-
rant au S.-O.
N. N. O. Un quart de lieue.-
O. O. N. Une demi-lieue.
N. Un quart et demi de lieue.
N. N. O. Une derai-lieue. A droite, hras du fleuve qui
renionte au nord, Cahanes isole'es. Point de
bambous. Village garni dune espece de ro-
seau grele et fort eleve.
N.N.i^aO. Une demi-lieue.
N.N.0. 122 N. Trois quarts de lieue. Nombreuses ca-
banes a droite et a gauche.
N. N. O. Trois quarts de lieue. Ville appelee Hang-
thong (queue d'or); elle n'a guere que
i,5oo habitans, mais c'est le siege dun
gouverneur assez puissant. Depuis Juthia a
cette ville, les rivages se sont eleves insen-
siblement d'environ lo pieds de hauteur.
Le terrain y est tres sablonneux, et on n'y
trouve d'argile qu'a la profondeur dune
vingtaine de pieds. A I'extremite de la ville,
a gauche, est un petit bras qui remonte, dit-
on. jusqu'a Xainat (dont j'aurai a parler).
N. E. Un quart de lieue. Banc de sable. A gauche,
pagode remarquable par une superbe plan-
tation de manguiers bien alignes, chose in-
finiment rare a Siam. A I'extremite du con-
tour, a droite, Bang-Kco (village du verre),
compose de pres de cent families chinoises
et dix families siamuises. Ce village est sur
une pointe de terre terminee par un im-
mense banc de sable. A droite, passe le
village, gros bras qui court au midi et
( 47 )
rentre dans le fleuve a Juthia. Plantations
ds Cannes a sucre.
N. N. O. Une demi-lieue. A droite, Ban-Horn (village
odoriferant). L;i et dans les villages voisins.
on cultive beaucoup de Cannes a sucre, dont
on evapore le sue qu'on reduit en petits
gateaux ronds.
N. E. Un quart de lieue.
N. Une demi-lieue a gauche, village appele
Talat-Krout (marche des cailloux). A droite,
village appele Tou-Pho (village des peu-
pliers).
N. N. O. Trois quarts de lieue.
N. N. E. Une demi-lieue, A gauche , village des Cail-
loux. Cast la que les bancs de sable com-
mencent a devenir des bancs de cailloux.
La aussi, les rivages eleves sont converts de
broussailles , et on ne jouit plus que tres
rarement de la belle vue des campagnes de
riz. On remarque aussi ca et la, dans les
plaines , d'antiques palraiers comme jetes
au hasard et sans alignement.
N. Trois quarts de lieue. A droite^ petit bras
presque a sec. Village du Chat et du Croco-
dile qui se battent.
Un quart de lieue. Cabanes disseminees sur
les rives.
Une demi-lieue. Village du Crocodile qui
pousse des cris.
Une demi-lieue. Nombreux villages malais.
Une demi-lieue un quart. He de 200 toises
de longueur environ.
N. Un quart de lieue.
N.
E.
N.
N.
N.
0.
N.
0.
( 48)
JN. O. Un tiers de lieiie.
N. N. O. Une demi-lieue. A gauche, villnge siamois.
N. E. Trois quarts de lieue. Bras presque a sec a
droite.
N. N. E. Une denii-lieue.
N. O. Un quart de lieue. Les rivages conimencent
a etre garnis d'arbustes et bambous sau-
vages,
N. N. E. Un quart de lieue. Village du Sable ; a gauche,
village du Betel. Le fleuve tres profond ,
etroit et tres poissonneux. Beaucoup de
crocodiles. Pays presque inculte.
N. N. O. Un tiers de lieue.
N. E. Trois quarts de lieue. Vue claire d'une chaine
de montagnes situees a I'E. et qui court
N. E. Leur distance estimee approxiniative-
ment a huit lieues. Montant sur le rivage,
on apercoit pen de champs de riz, mais une
quantite de petits bois formes seulement
d'arbustes epineux.
N. O. Une demi-lieue. Village de I'Eau rapide.
N. Trois quarts de lieue. La on rencontre une
ville laocienne, batie sur les ruines dune
ancienne ville sianioise appelee Muang-
Phrom ( ville des Archanges ). J'ai visite ces
ruines, qui ne consistent qu'en quelques
pagodes et une longue enceinte carree dun
mur qui est detruit. Ces Laociens, amenes
en captivile au nombre d environ deux
mille, out un gouverneur qui leur fait
labriquer de la chaux pour le service du
roi de Siam. Une chose qui decele les uioeurs
douces et hospitalieres de ces Laociens ,
N.
N.
0.
N.
N.
E.
0.
0.
N.
O.
O.
N.
N.
0.
N.
N.
E.
( 49 )
cest qu'ils ont fait un ladeau muni dun
loit et amarre au bord du fleuve pour servir
d'asile aux voyageurs, exeniple peut-etre
unique dans tout le royaume de Siam.
Un tiers de lieue.
Una demi-lieue. Cabanes isolees et beaucoup
plus rares.
Trois quarts de lieue. A gauche, village
Tete du desert (commencement du desert),
Trois quarts de lieue; on voit deja les traces
du tigre sur le rivage ; vastes forets a gauche.
Un quart de lieue.
line demi-lieue, village pegouan.
Une demi-lieue; a droite le fleuve forme une
branche qui court au sud-est et vient se re-
unir a lui a I'extremite sud de Juthia. Un peu
au-dessus de cet embranchement est une
petite ville appelee Embouchure du village
des Jujubiers; la se trouve une grande fa-
brique d'aralc, il y a un mandarin chinois
pour gouverneur, et la population, presque
toute chinoisc, pent se monter a deux mille
ames.
N. N. O. Trois quarts de lieue. Desert. Bambous sau-
vages.
N. O. Un quart de lieue. \
N. Un tiers de lieue. I Presque inhabite.
O. O. N. Un quart de lieue. ( Bambous sauvases.
O. Un tiers de lieue. j
N. N- O. Une demi-lieue; village desBuffles.
N. O. Trois quarts de lieue ; cabanes isolees.
N. Une demi-lieue; village de I'Asyle, a droite
et a gauche.
(5o)
N. N. O. Trois quarts de lieue. Campagnesde Riz.
N. N. O. lln tiers de lieue.
O. Tin quart de lieue.
N. N. O. Uue demi lieue. Rivage eleve. Le terrain
change d'aspect, il est niele de grains de
mine de fer en quaniite.
N. N. O. Un tiers de lieue. Desert.
N. O. Une denii-lieue. Le fleuve fort etroit et par-
seme de bancs de cailloux. La commence
une ville appelee Muang-In (vilie des prin-
resdesanges) laocienne et siamoise, dune
longueur interminable, luais composee de
cabanes assez clairsemees. On evalue le
nombre des Laociens a mille, et celui des
Cbinois et des Siamois a deux mille. II y a la
un mandarin siauiois. lis sent laboureurs et
cultivent aussi le betel et le cotonnier. Le
fleuve y est extremement poissonneux : dans
un certain cndroit, il est si rapide que ma
petite barque a trois grandes rames ne pou-
vait pas monter.
N. Une demi-lieue. Immense banc de sable. Le
vrai lit du fleuve tres resserre, ay ant tout
au plus vingl pieds de largeur.
N. N. O. Trois quarts de lieue. Suite de Muang-In ,
parlie Siamoise j deux petites iles.
N. Une demi-lieue. Suite de Muang-In ; partie
Laocienne.
N. N. E. Un quart de lieue. Suite de Muang-In j partio
Laocienne.
N. N. O. Trois quarts de lieue. Desert.
N. 1/2 O. Une demi-lieue. Absolument desert. Croco-
( 51)
diles uoiubreux clans le fleuve. Sinsos ('^
paons sur le rivage.
N. O. Tiois quarts de lieue. Arbres charges de
gros pelicans qui nagent par troupes sur le
fleuve sans presque senfuira Tapproclie du
voyageur. Desert.
N. N. E. Un quart de lieue. Quelques cabaneseparses.
O. Une demi-lieue. De'sert. Bambous sauvaees.
N. Trois quarts de lieue. Le fleuve rapide. Banc
de sable. Dun coup de filet nous prenons
un crocodile qui nous echappe. Le poisson
est si abondant qu'il saute dans ma barque.
N. N. O. Une demi-lieue. Village du Cheval a droite.
Grande plantation de bananiers.
N. Trois quarts de lieue. Desert. Aspect sau-
vage des rives.
N. N. O. Un tiers de lieue. Commencent les erands
arbres des hautes forets. Arbres resineux
d'un port magnifique dont on tire une es-
pece de vernis inconnu en Europe.
O. O. N. Une demi-lieue. Village des cotonniers
(arbres) ; jignore le nom de ce grand arbre
qui, presque sans feuillage, porte une quan-
tite de grosses gousses remplies d'un duvet
fort semblable au coton , mais inferieur a
celui du cotonnier arbuste. A eauche.villajre
des Trois-Rois situe presqu'au pied de l:i
premiere colline qu'on rencontre et qui
termine la grande plaine de Siam que j'es-
time avoir einquante lieues de longueur
et quarante dans sa plus grande largeur.
La colline des Trois-Rois est bien boisee et
c'est dans les forets des environs qu on
4-
( 5. )
tabiiquf avec Li resine dcs gros arbres les
torches dont on se sert ici en guise dc
chandelles.
N.O. 1I2 IN.Trois quarts de lieiie. Rivages deserts.
N. N. O. Un tiers de lieue.
N. Una demi-lieue. On commence a rencontrer
de petites roches dans le lit du fleuve, et
le terrain de la rive est presque tout com-
pose de globides ferrugineux.
N. O. Une lieue ; village des Cannes a sucre, a gau-
che. L'inondation annuelle et qu'on peut
appeler generate n'arrive pas ordinairement
jusqu'a ces terres elevees,non plus qu'aux
autres villages en montant vers le nord ;
il arrive cependant cerlaines annees que
des pluies extraordinaires occasionnent
des inondations passageres, quoique le
rivage ait plus de quarante pieds an dessus
du niveau ordinaire du fleuve.
O. O. N. Trois quarts de lieue ; village a droite et a
gauche.
N. O. Une demi-lieue. Rivages droits et escarpe's,
mines par la violence des eaux dans lasai-
son des pluies.
S. O. Trois quarts de lieue. Vue d'une multitude
de collines eloignees du fleuve d environ
qnatre lieues.
O. line demi-lieue; village a gauche, cabanes
eparses , rivages rocailleux, bancs de cail-
loux.
S. Un tiers de lieue; desert.
O. Une demi-lieue; desert.
N.O. 1/2 N. Trois quarts de lieue. La commence une
( 53 )
ville appelee Xai-Nat (riva;;es niaguifiques
ou majestueux) ; les habitaus fabriquent
des torches, cultivent le betel et le riz. II
y a un mandarin ou gouverneur.
N. O. Una demi-lieue. Suite de la ville de Xai-Nat
des deux cotes du tleuve. J'evalue les habi-
tans tout au plus a i,5oo, Siaiuois , Chi-
nois , Laociens. A I'extreniite de la ville,
grande pagode royale antique, decoree de
figures et statues fort curieuses. Un peu
au dessus de la ville, a gauche, debouche
dans le fleuve un canal sablonneux que je
trouvai a sec. Sa direction est au N. O. et
il va aboutir de nouveau au fleuve a I'en-
droit ou se trouve une ville appelee La-
khonne Savan (comedie du ciel). Un peu
au dessus de Xai-Nat, est une ville chinoise
appelee Tha Soiing (c'est-a-dire rive haute)
ou sontetablies des forges dirigees par les
Chinois. On y travaille le far quon fouille
dans les environs et quon y transporte a
dos de buffla et d'elephant. J aurais voulu
pousser ma course a plus de douze jour-
nees au nordjmais mes conductaurs, aux-
quels une si longue promenade etait biefi
loin de faire plaisir, prirent le parti de se
dire malades; et a mon grand regret, il me
fallut redescendre ce fleuve que j'aurais
desire suivre jusqu'a sa source s'il ni'eAt
ete possible.
(54)
ITINERAIRE
DE LA CA.NEE A CAJVDIE PAR RETUI.MO,
ET DE CANDIE A LA CaNEE ,
Eu revenant par Gortyue, les monast^res d'Assomatos ,
d'Arcadi et Retliimo.
Get itin^raire serait un des plus utiles a ravancement de la geo-
graphic, si le vojageuryvait pu iadiquer, comnn; dans le precedent,
a la suite des distances observees avec tant de soin , les differentes
aires de vent de la boussole. C'est un regret que nous devons expri-
mer ici , aOn que I'auteur et ceux qui nous adresseront comme lui
des documens puissent nous les envoyer encore plus complets. Nean-
moins, nous devons beaucoup remercier I'auteur du zfele qu'il a
montr^ dans cette description detaillee de la route qu'il a faite. II
serait .i desirer que notre recueil fut rempli de renseignemens de
cette nature.
Nous avons cherche a reproduire ici le texte m^me afln de ne pas
changer la valeur des expressions.
De la Canee aux Salines, fond du golfe de la
Sude, toujours en plaine.(i) 45
On cotoie la mer, on arrive aupres d'une tour. 3o
On suit une chaussee venitieiine , on rencontre
encore deux tours , on arrive a unefontaine. 4^
(A 5 minutes de la, on est pres d'une qua-
trieme /o//7-;on dorainela rade. i5 minutes apres
on perd la rade ou golfe de la Sude de vue , et
on est au haul de la montee en 5 minutes).
De \diJontaine a la fin de la montee. a 5
A reporter. .... 2 25
(i) On laisse a droite les jolis villages de Nerocho'i et Tziko:l,iria,
eu face des salines.
( 55 )
ni.
D^ autre part 2-25
(D'ici on se rend a un Paleo-castro qui est a
gauche en allant a Rethimo. On suppose que ce
sont les ruines de Minoa. )
On descend, et Ton decouvre un tfes beau
pays : c'est la province d'Jpocorona. On ren-
contre deux chapelles dii inoyen age, en ruines.
Du commencement de la descente a la 2* cha-
pelle. ^o
On est alors dans un vallon delicieux , ou huit
a dix sources prennent naissance sous les pas des
voyageurs; quelques-unes sont assez fortes pour
faire aller un moulin a leur naissance. On a, a
drolte, Pemonia, Offres{\)\ en face, a environ
unelieue, lejoli village AeNeo-chorio. A une lieue
de Pemonia, sur la droite, il existe un reste de
chdteaufort nomme KiUo-mouroiiimWQ mesures);
a gauche, on a Armenous y Ratzoufriana ^ et plus
Las Kalives. (2)
Pour traverser ce vallon et arriver a Neo-
chorio. 4^
A reporter. .... 3 45
(i) Ces villages, aiiisi que ceux de Melidoni et Nipos , sont sur la
carte Lapie evideniment trop vers le sud.
(2) La carte presente ici des erreurs et des oublis. Le nom de
Katzoufriana est porte comme Caffonpiana ; et aprfes Arnienoiis , elle
indique un autre village sous le nom de Calsnttssina, qui n'existe pas.
C'est une confusion, et ce village, par sa ressemblance avec Kat-
zoufriana, est sans doute le ni^me. Vers la hauteur, des villages qu'on
nomme Givaras , Gavalachori , Vamos, ne sont pas indiques. Vers la
mer, on a indique sous le nom d'£gremnos un village qui n'existe
pas. Egremnos en grec signliie Champ sterile , ciride.
(56 )
ti. m.
D'autre part 3 4^
On s'engage dans an horrible cliemin pier-
reux, et Ion nionte (vue magniGque) pendant aS
On redescend , on rencontre un kandetruit^ et
Ton arrive a uneyo«?rt<«e (eau excellente). 4^
Peu apres on traverse un misseau. Le pays est
d'un fort joli aspect, mais le chemin est mauvais.
On suit le ruissean tout borde de lauriers-roses.
On voit peu apres de tres jolis mctoki ( metairies,
niaisons de canipagne) sur la hauteur a droite; on
traverse de nouveau le ruisseuu, ce qu'on fait plu-
sieurs fois. A gauche, on voit \es, resins dun tres
grand mais tres ancien monastere. On arrive au
moulin.
Uepuis la fontainejusqu'uu moulin de Camara,
qui est sur la gauche. 45
Le pays qu'on decouvre sur la droite est tou-
jours ravissant; on continue a voir Offres, Meli-
doni ^ Nipos. On traverse encore plusieurs fois
le rulsseau. A gauche, on voit les villages de
Calamiti el Sopoli{i). On arrive au chateau (\e-
nitien) d'Armjro, flanque de quatre tours. Tout
pres est une /ontaine ; mais elle manque d'eau
pendant les mois de juillet, aoiit, septembre et
quelquefois octobre. A cote de cette fontaine
dont I'eau est excellente, surgit une source
A reporter. .... 5 4^
(i) Ces deux villages ne soiit pas m^nie indiqucs sur la carte.
Parmi les villages oublies sont PTOfrt/wa, dibalha , Filipo , Mathi ,
Calanizia , Caridi. Les autres , quoique nomm^s , ne sont pas toujoiirs
hien places : c'est un defaut cnnimun .i toutes les cartes qui ne sonl
pas le resultat crime ti ianguhitio"
(57 )
)i. m.
D'autre part 5 4o
abondante, et qui tait aller un moulin; mais cette
eau est saumatre, et elle purge. On trouve, ici
un poste d'Albanais et on peut s'y arreter. [Ar-
myro veut dire eau salee.)
Du moulin de Camara a Arinjro ( le chateau) 3o
On sedirige vers lamer. YiaX-Afontainek la plage. 1 5
On longe la plage sur un tres beau sable, et
on arrive a un pont casse, i i 5
Pendant le trajet, qui est de la largeur du
golfe d'Armyro , on traverse cinq oii six torrens
qui vont se jeter dans la mer, et qui en hiver
sont tres dangereux. On voit sur la colline a
droite, a distance d'environ une iieue , plusieurs
tillages tels que Arcouvena, Drammia , Filaki,
Castello j un peu au-dela du pont casse, est
Episcopi. (i)
Du pont casse (ou Ion traverse la riviere a
gue) a la tour de Caraca. au
11 faut descendre de cheval, a cause du mau-
vais chemin , 5 minutes avant d'arriver a cette
tour, et ne remonter que 5 minutes apres.
On cotoie la mer par un mauvais chemin, on
monte et on descend plusieurs fois ; apres avoir
laisse deux tours a gauche, on arrive, en descen-
dant, sur le bord de la merj on trouve la une
chapelle grecque ruinee, tout pres de laquelle
est un puits dont I'eau, quoique a 3o ou ^o
A reporter 8 »
(i) Filaki est indique sur la carle comme Plaki. Episcopi, (|ui est
pourtaiit un assez gx-and village, est oinis ainsi que Gaidainputt ,
lUouii , Kuliumanero , I'li/iti. — I'erani est sur la carte Reiani.
( 58 )
li. in.
D autre part 8 »
pieds au-dessous du niveau de la nier, est fort
bonne.
De la tour de Garaca au puits. 40
On inonte rapidement; on trouve ensuite un
pont SUV un ruisseau tres encaissej peu apres on
decouvre Rethinw. 3o
De la a un autre pont. 25
Ce pont est encore plus encaisse que le pre-
cedent. II a double rang d'arches commele pont
du Gard.
De ce pont a Rethimo , 011 Ton arrive en s>ui-
vant la plage. 5o
De la Canee a Relhiino. 10 20
Nota. On ne peut guere aller coucher de
la Canee a Rethimo, parce que les portes ne
s'ouvrent a la Ganee qu'au lever du soleil et se
ferment a Rethimo des qu'il se couche. Gomme
le chemin est feitigant, il faut compter 2 ou 3
heures derepos, cequiferait i31ieures; a moins
que les jours ne soient fort longs (on peut pour-
tant gagner 2 heures en allant bon train), il faut
coucher en route; alors on s'arrete dans les vil-
lages de Neo-chorio ou d' 0/fri's ; on peut encore
demander asile au inonastere de ***
De Rethimo a Candie.
On suit le bord de la mer sur le sable, ou Ion
traverse le village de PerevoUa, qui lui-mcme
longe le rivage. Jusqu'a la fin du village. 2 5
A reporter « 2;")
( 59 )
m.
D' autre part » 25
On traverse une belle plaine marecageuse ,
coupee de sept torrens qui se jettent dans la
mer et rendent cette route dangereuse en hi-
ver. On rencontre plusieurs puits. La plaine est
riche, mais peu cultivee. A gauche est la mer;
a droite, line colline sur laquelle on voit plu-
' sieurs beaux villages. Cette colline appartient a
la belle province de Milopotamos , tres riche en
oliviers. (i)
De la fin dePejevolia jusqu'a la fin de ]a plaine. i 35
On monte, et Ton traverse un joli pays agreste,
ou Ion trouve un ou deux moulins abandonnes ;
on redescend dans un raui/i ou il y a un torrent. 4o
On remonte, et quand on est sur la hauteur,
on decouvre la province de Mllopotainos , dont
la vue est admirable, et ou les oliviers sont
commeune foret. Quand on commence a redes-
cendre, il taut mettre pied a terre,car le terrain
etant en terre glaise la descente est tres niau-
vaise, et les chevaux glissent continuellement.
On arrive a un ruisseau aupres duquel est un
puits. 5o
De ce puits au village de Perama. aS
A 5 minutes de la, on traverse la riviere de
Perama, aupres d'un pont auquel il manque une
arche. Tout pres du pont, sur le bord de la ri-
viere, on rencontre une fontaine d'excellente
eau. On traverse plusieurs fois la m erne riviere ,
A reporter '^55
(i) Plusieurs de ces villages nianquerit sur la carte.
(6o )
b. m.
D'autrc [jtiit 3 55
et apres avoir tVanchi une montagne on arrive au
joli village de Daphnides.
De Perama a DapJinides. i -j-o
(Avant d'etre a Daphnides, sur la gauche, on
voit le village de Melidoni , aiipres duquel se
trouve une grotte fort remarquuble )•
On traverse encore phisieurs fois le ruisseau,
et on arrive a une iontaine delicieuse ombragee
par des platanes. 20
Pour monter de cette Fontaine au village de
Carasso. (i) 5
( Si Ion ne veut pas coucher a Carasso , on
continue sa route en plaine, la niontee et la des-
cente de Carasso etant tres t'aligante. )
Au sortir de Carasso, forte descente (ju'il est
prudent de taire a pied. i5
On traverse le torrent et on arrive a un joli
ruisseau. 2 5
A 5 minutes de la on trouve un puits. Ce pas-
sage se nomme Clep/isinia^ du uoiu dun village
qui est tout pres, sur la droite, en allant vers
Candle. 3o
Un autre puits. A deux pas de la, un joli ruis-
seau ombrage de beaux platanes. Ou pourrait
faire la une halte pour un repas; niais ces ruis-
seaux n'ont souvent point d'eau pendant les trois
ou quatre mois d'ete.
De ce ruisseau a la fontaine de Cania-Oglou. 4"
A reporter 6 00
(i) Carasso est indiquc sur la carte cominc Lassos.
( 6I )
h. m.
D' autre pait 6 3o
Cette Fontaine est detoutebeaute; elie estom-
bragee de beaux arbres, et toujours fort abon-
dante: c'estdoncla niellleure balte de la route.
De la fontaine au commencement de la mon-
tee qui conduit a Damasta. 5o
Duree de la montee, qu'il faut faire en grande
partie a pied, car le pave est de marbre ; toute
la montasne etant une carriere de marbre blanc
tres beau. 20
De Damasta, par une horrible route, on ar-
rive presque au sommet du mont Strombolo ,
d'ou Ton apercoit Candle et la pleine mer. 2 a5
On descend fort rapidement le Strombolo, et
on s'arrete, pour faire souffler les chevaux, a un
han ou se trouve une bonne fontaine. Ce lieu se
nomme Servili. (i) i
De Servili a Candie, toujours en plaine. i 3o
De Rethimo a Candie. i3 35
Gomme on ne peut pas faire cette course en
un jour, on peut coucber a Daphnides ou a Ca-
rasso , meme a Clephsinia. On pourraitbien aller
jusqu'a Damasta, mais c'est un village miserable.
Quelquefois on pousse jusqu'a Servili, etle len-
demain matin de bonne beure on est a Candie.
Pour aller de Rethimo a Candie, on prend
quelquefois la route de MeJidoni^ qui se trouve
nvant d'arrivcr a Daphnides. Dans ce cas, on tra-
verse le joli village de Fhodelcs ou Fodetes. La
route nest pas plus longue , mais encore plus
mauvaise que celle de Damasta.
(i) Arotede Servili, la carte indique un />a!/)//«/Ww quin'existe pas.
( (^^ )
De Candie au Lahyrinthe.
h . in
La route directe est :
De Candie a Daphnides. 3 3o
De Daphnides a Aya Barbain ( on ecrit indif-
feremineiit Ajaoxx hajia, sainte). i 55
D'Aya Barbara a Ayos Deca ( les dix saints). 2
D'Ayos Deca (voir ci-apres) au Lahyrinthe, en
traversant les ruines de Gortyne. i lo
8 35
La route suivante quoique plus longue, est
plus interessanle. •
De Candie au metoki de Cnnia-Oglou (i), ou
il y a une excellente fontaine. 4o
Quelques minutes apres on est sur les ruines
de Gnosse, dont il ne reste que quelques murailles
de construction romaine.
(On voit sur la hauteur a droite, un village
noninie par les Grecs Fortessa. Cest ce village
dont les Turcs ont ete niaitres pendant presque
tout le siege de Candie.)
Du metoki de Cania-Oglou a Macri'dico. i5
On voit ici des grottes assez profondes , ayant
servi a des sepultures, de Gnosse sans doute.
Embranchement du cheniin qui conduit a
CJiersonese. i o
On laisse un pont a gauche, on sui< le ruis-
seau et on arrive a un nioulin. 5
A reporter i 10
(i) Ce Cania-Oglou etait un des plus riches agas de I'ile, qui a
fait plusieurs construciions d'utilite pubjique.
(63 )
m.
D' autre part .... i lo
Pea apres on traverse le ruisseau; on laisse a
tlroite un moulin. Sur la hauteur a drdite, on
distingue les ruines. On voit de la I'aqueduc qui
conduit les eaux a Candie. (i) lo
Canipagne aride en montant pendant 55
On descend jusqu'a Cato- Archanes ( has Ar-
chanes). i5
Commencement dun joli vallon un peu res-
serre. On arrive a Archanes, oii Ton recolte d'ex-
cellent vin. 3o
Jusqu'a la fin du terrain cultive. 3o
On descend jusqu'a une riviere ( terrain sans
culture) I
( Au milieu de la descente on trouve un ruis-
seau.)
De la riviere a Kanli-Castel. (2) 3p
C'est une tres ancienne forteresse qui entou-
rait un rocher. H y a des murs encore en bon
etat, et la position de cette forteresse , d'ou Ion
a une belle vue, est faite pour piquer la curiosite.
Au-dessous du fort est un village a quelques
minutes duquel il y a une excellente fontaine ou
Ion est Ires bien pour une halte.
DeRanli-Gastel on arrive en descendant a une
riviere. aS
A reporter 5 aS
(1) A 3o minutes de la se trouve un village nomme Silainos , (|ui
n'est pas indique dans la carte.
(a) Kanli-CAsleX , qui signifie ChAteau du sang, est indique sur la
carte conime Cani-Castel.
( 64)
li. in.
D'aiUie part 5 aS
De la riviere qu'on traverse, a Daphnides. (i) 35
De Daphnides a Venerata, 20
En descendant, on trouve a quclques minutes
deux jolies fontaines de bonne eau,
De Venerata a Aricniki^^i) , qu'on peut laisser
un peu sur la droite. 20
La route passe aupres d'une eglise grecque
detruite ; on traverse un ruisseau. 5
On monte par une route ennuyeuse et aride
pendant 5o
On arrive a Ayos-Thomas (3) apres avoir tra-
verse un ruisseau. 20
Ce village est fort interessant, non-seulement
parlaculturedes cerises don t on exporte pi usieurs
bateaux pour I'Egypte, mais encore par sa po-
sition. Le rocher sur lequel etait situe le village
a ete partage par un tremblenient de terre, et
des tombeaux tailles dans le roc setrouvent ren-
verses ca et la. Us sont fort grands, et, quoique
vides raaintenant, leur forme est faite pour ex-
citer les recherches des archeologues.
D'Ayos-Thomas a Megali-Vrissi. 20
On arrive a un point culminant ou Ton aper-
coit la mer de Ljbie. On distingue I'llede Goze. 25
On rencontre nn puits. 20
A reporter 9 »
(i) II y a ici confusion sur la carte. Ellc nomme ce villnge Casiel-
Temenos. II y a aux environs de Daphnides plusieurs villages qu'elle
n'indique pas.
(2) Ce viiliige n'est pas indiqu^ sur la carte.
(3) /Iron-Thomas est noinnu' snr la raite Caslel-Ilonifacio.
(65 )
)■ IH.
D^ autre part t^ .
On passe aupres dun cimetiere turc dont on
ne voit le village que 5 minutes apres. D'ici on
decouvre les fertiles plaines 6e Messara. Ce vil-
lage est Cato-Moidiana. (i) 5
Fontaine maintenant sans eau. 35
On laisse a gauche P/-eVe'Aa/m (2),et Ion ariive
a une jolie Fontaine ( bonne eau ). 20
On arrive a un embranchement de route : a
droite on va a Gortyne , a gauche a Ayos-Deca.
La distance est la meme. i5
Si Ton va a Ayos-Deca , on suit le lit d'un tor-
rent, et si Ton va a Gortyne, on longe I'aqueduc
qui conduisait les eaux a Gortyne. Le torrent est
tres encaisse et d'un effel tres pittoresque.
D' Ayos-Deca a Metropoli. i5
D' Ayos-Deca a Me'tropoli, la terre est couverte
de debris, et le dessin qu'en a donne Tournefort
est encore exact : il doit y avoir eu peu de chan-
geniens dans ces ruines. En general, a quelques
colonnes de granit pres, on ne trouve aucun
vestige demonumens helleniques ; toutes les con-
structions etaient romaines , c'est-adire en bri-
ques, pierre et ciment. II existe vingt-cinq ou
trente colonnes de granit qu'il serait facile d'em-
barquer, si on pouvait les utiliser pour queique
monument en Europe, a Ambeloussa. i5
A reporter. .... 10 45
(i) Calo-MotiUuna et Panomouliaiia n'existent pas siir la carte, k
moins qne ce ne soit Muglia; mais alors il est mal place.
(2) Preveliana n'est pas sur la carte.
5
(66)
h. m.
D' autre part lo 45
D'Amheloussa, qui est un fort joli village, a
I'entree flu Labyrinthe. 4<*
Ainsi, pour alter de Candie au Liibyrinthe en
visitant jirchanes, Kanli-Castel et Ayos-Deca,
on met i r 2 5
\S Archanes on peutaller a Ayos Thomas sans
passer par Daphnides quon laisse alors a droite;
mais I'essentiel est de voir Kanli-Castel.
On pent tres bien ooucber a Archanes , a
Daphnides, a Ayos-Thomas , a AyosDecn et a
Ambeloussa. Tous ces villages offrent quelques
ressources. Toutefois, ici comme dans toute la
Crete, it faut porter avec soi son lit et une cair-
tine contenant provisions ou du moins du pain,
et quelques usterisiles de cuisine. D'ailleurs, on
est parfaitement bien accueilli partout.
Si Ion veut aller par la route dire(;tc, on peut
tres bien coucber a Ambeloussa j le lendeniain
de grand matin, voir le Labyrinthe el relour-
ner coucber a Candie.
Le Labyrinthe est a-peu-pres comme la decrit
Tourncfort; il n'y a eu que peu d'eboiilemens;
on sy promene maintenant sans ficelle, parce
qu'on a pour guide des Grecs qui ont fait
pendant la revolution leur retraite de cette
caverne. (i)
(i) J'ai trouv6 plusieurs fois le nombre 1700, qui est de la niairt
de Tournefort; le noni A'Ambriet , son dessiuateur; les iioms de Sa-
vary, Mathieu Dumas , e'c. , et line foule d'autres indiqiirs par Toui'»
nefort ou ccrits depuis sa visile.
( f>7 )
Du Lahyrinthe a Re'thimo ,
Par Assomatos et Arcadi.
h. in.
D'Ambeloussa on prend la direction de lamer.
Onlaisse a gauche les villages di' Alicani,Bobia[i)
jusqu'a une fontaine du village de Coperiana (a). 4o
Petit village de Mires (3). i5
On rencontre \ii Lethe ^ mais on ne le traverse
pas. 3o
(De I'autre cole, on voit en face de soi le vil-
lage de Petro-Kephale.')
On s'eloigne un pen du Lethe , que Ion re-
trouve a. . .. 3o
On passe sous I'arche d'un aqueduc. 5
3 ou 4 minutes apres, on voit sur sa droite le
joli village de F'orous;\A campagne est des plus
riches et des plus belles.
On traverse une petite riviere qui se jette dans
le Lethe. lo
On en traverse une autre. 20
De I'autre cote du Lethe on voit Aja-Triada, (4)
La plaine est magnitique. De la riviere a Thibaki. 20
De Thibaki, qui est a peu de distance de la
mer, on se dirige vers la monlagne-, on trouve
un ruisseau. ao
A reporter 3 10
• >!'
(i) Bobia n'est pas sur la carte.
(2) Caporiana est sur la carte Castel-Nuovo.
(3) Mirh n'est pas sur la carte.
(4) Aya-Triada ou Hay^ia-Triadn , qui en grec veut dire Sainte-
Trinite , est indique sur la carte comme HOdyitria. U y a bien un peu
de coiiforniite; mais cela prouve que les noms ont ele donnes par
des personnes ignorant le grec.
5.
( es )
li. ra.
W autre part 3 lo
Un autre. 25
On coinme^ice a monter ; on arrive a Clima[i). lo
On peut se rendre directemenl d'Ambeloussa
a Clima, et I'on abregerait d'line heure ; mais il
vaut mieux passer parThibaki, a cause du beau
chemin.
On arrive a la fin de la monlee. aS
En conimencant a descendre, on trouve a
2 minutes une fontaine, et a lo minutes une
autre plus abondante.
Du commencement de la descente jusqua
Salla{i). 1 5
Fontaine. 3o
Un ruisseau a la fin de la descente (3). lo
On remonte pendant lo minutes , et on est a
Fasiliako (4). lO
De Vasiliako a Apodoulo , on Ton trouve une
eau abondante. 20
Font.iine. 10
On contourne la mont Ida, qu'on a a droite.
En face du torrent qui descend de cette nion-
tagne. 35
On continue a descendre, et on traverse ce
torrent, i5
On monte pendant quelque temps, puis on
descend. Du torrent a la fin de la descente. 35
A reporter 7 10
(i) La carte indiqtie la rivifere ou ruisseau Climaiiana , niais n'in-
dique pas le village de Clima.
(a) N'est pas iiidique sur la carte.
(3) On voit le village de Plaiana . non iudique sur la carte.
(4) Non indique , quoique assea grand village.
(69)
t>. m.
D^ autre part 710
On traverse un ruisseau. 3o
On arrive a f^isari ou. Cryo-Vryssi. 5
On rencontre un ruisseau; on le cotoie pendant i5
On le quitte, et Ion parcourt un des plus
beaux vallons de lile, tres boise et prodiiisant
des fruits de toute espece.
On arrive au monastere ^ Assomatos. 5o
Du monastere on prend, a droite, un chemin
escarpe a travers un bois de chataigniers, pres-
qne toujours montant et descendant. On trouve
une fontaine dont on dit que les eaux sonl
bonnes pour la gravelle. 60
On descend jusqu'a un ravin, puis on remonte,
et on trouve une ^w^^xhe, fontaine tres ombra-
gee et propre a une hake. 3o
On continue a nionter pendant 10
La on quitte le chemin , et on prend a droite
un sentier escarpe, et Ton monte pendant 5
De la (ou se trouve la fin de la montee) au
monastere ^Jrcadi. ^5
Ce monastere, dans une position moins agrea-
ble que celui d'Assomatos , mais pourtant fort
pittoresque, est tres riche. On y trouve un loge-
ment convenable et des ressources en provisions.
Pour allerdu village d'Ambeloussa a Arcadi, la
route est trop fatigante ; il vaudrait mieux s'ar-
reter a Assomatos. On est passablement a Apo-
doulo, et on peut s'y arreter en partant au mi-
lieu du jour du Labyrinthe.
A reporter 11
20
( 7" )
b. mi
W autre pari 1 1 20
On descend d'Arcadi en se dirigeant vers le
noid. On traverse un pont sur un ruisseau. 10
On rencontre unejbntaiiie bien ombragee. aS
De la fontaine a Jmnatos. i5
D'Amnatos a une riviere. 55
On arrive a Pi'gii. 20
On cotoieun ruisseau qn'on traverseau bonl de 5
On rencontre un puits. i5
On se trouve assez pres de la nier ; on traverse
deux on trois des torrens dont j'ai deja parle
dans 1 itineraire de Rethimo a Candie , et on
arrive au commencement des jardins de Retliimo
ou village de Perevolia, qui en grec signifie jardin. aS
Du commencement des jardins a Rethimo^
soil qu'on suive la rue du village ou la plage. aS
D'Ambeloussa a Rethimo par Assomatos et
Arcadi. Ji4 35
En pai tant de bonne heure d'Auibeloussa , on peut ,
en faisant une petite halte a Tkihaki , aller dejeuner a
Apodoulo , . 5 35 1
Et aller coucher au monastere iAs- ^. 8 5o
somatos. 3 i5 '
j;.j<-i (111 ,-)/ui !
D' Assomatos on va dejeuner a Ar- \
cadi. ^ 3o ' 5 45
Et on se rend, a Rctliinw en 3
.5 I
14 35
Comme on arrive de bonne heure a Rethimo , on
peut en partir encore le soir, et aller coucher, soit a
( 7' )
Archipopoido ou a Episcopi ^ le lendemain on se rend
a la Canee.
Mais le vent de terre soufflant tons les soirs,on peul
a Relhiino, louer une barque qui en quelques heures ,
poeiivu que la mer ne soit pas forte , vous conduit au
fond du golfe de l.i Sude. De la a la Canee, ii faut une
henre el deniie a pied.
Ou bien on debarque au'cbateau de la Sude, et, en
se faisant, de la, porter au lazareth , qui est en fiice ,
on arrive en trois heures, a pied, a la Canee par le pays
pittoresque de L' Acrotyri.
EXPEDITION MERCANTILE
DANS LINTERIEUR DU SUD DE l'aFBIQUJS.
(Extrait du journal des Missions evangeliques.)
Un passage du journal de Graham Stown ,re|)roduit
par le journal asiatique, renferme les details suivans sur
un voyage entrepris dernierement dans I'interieur de
I'Afrique nieridionale, par deux negocians de la villedu
Cap, MM. Humeet Mallon. (i)
lis quitierent Lattakou au niois de juin i832, etapres
avoir traverse la riviere Lauipoupo, qui sejette dans la
bale de Delagoa, a quelque distance plus loin que le
dernier point atteint par M. Whittle, ilsse dirigerent a
I'ouest, et longerent pendant neuf jours leNacongo, qui
est unebrancheduLampoupo. De la, apreshuit jours de
(i) A leur arriv^e en Afrique , les derniers missionnaires fran^ais
partis pour ce pays ont eu une entrevue avec M. Hume, et ont re<ju
de lui des renseignemens precieux sur le pays qu'il a parcouru.
(7^ )
inarche an nord , ils atleignireiit les JJa-Kass, tribu de
Bechouanas, et a deux journees plus an nord, ils trou-
verent les Manguetos , autre tribu de Bechouanas , habi-
tant lui pays coupe' par dc nombreuses collines, posse-
dant beaucoup de gros et de menu betail, et cultivant
du ble en abondance. Arrives a ce point de leur voyage,
ayant suspend u a midi un perpendicule, ils trouverent
que Touibre qu'il projetait au nord etait presque imper-
ceptible ; d'ou Ton pent inferer qu'ils netaient pas loin
du tropique.
Apres avoir acheve dans ce pays leur cargaison d'i-
voire, ils revinrentsur leurs pas , en prenant la direction
sud, et arriverent, apres seize journees de marche, a la
riviere du Loup, visiteeauparavant par M. Moffat. Cinq
jours apres, ils etaient dans le pays habile par le chef
Sobiquac, et douze jours plus tard ils etaient de retour
au Kourouman. Les mceurs des tribus qu'ils ont ren-
contrees sur leur route sont en general celles des Be-
chouanas. Lepays est plat, couvert de bois et de palura-
ges, mais mal arrose. Le gibier y abonde, surtout les
girafes, dont ces messieurs ont vu des centaines a-la-
fois. Ils ont trouve chez les Manguetos (ou Bamanque-
tos) quelques articles de manufacture portugaise, que
les indigenes s'etaient sans doute procures sur la cote
de Mosambique ou a la baio de Delagoa. Anciennement
il parait qu'il se faisait un grand commerce d'ivoire
entre la tribu des Maloquins (probablemenl les memes
que les Baquins) et les colonies du nord de la mer.
(73 )
TROISIKME SECTION.
Actes de la Soci^te.
PHOCES-VERBAUX DES SEANCES.
Seance du f\ juillet i834.
Le proces-verbal de la deriiiere seance est lu et adopte.
M. le comte de Montalivet, intendant general de la
liste civile, annonce qu'il vient d'autoriser une nouvelle
sottscription des Bibliotheques de la couronne au Bnl-
letin de la Societe ainsi qua sou recueil de Voyages et
de Memoires. La Commission vote des remercimens a
M. le comte de Montalivet.
M. le docteur Reumont, de Florence, remercie la
Societe, dont il vient d etre recu nricmhre, et il lui an-
nonce diverses communications, entre autres une notice
sur les nouvelles publications geographiques qui ont
paru en Toscane.
M. Galindo adresse de nouvelles recherches choro-
graphiques sur la province de Guatemala , avec plusieurs
journaux mexicains qui en ont rendu compte. Sur sa
demande , la Conmiission centrale decide qu il sera en-
voye a ce correspondant plusieurs numeros du Bulletin
dans lequel ont ete inseres ses premieres recherches sur
les antiquites de Palenque.
MM. Vander-Maelen et Meisser adressent a la Societe
le Dictionnaire de la province d'Anvers, qui est le qua-
trienie appartenant a la Description geographique de la
Belgique; ils presentent en meme lemps, pour faire
( 74 )
paitie de la Societu, M. le prolesstiir Perkins, char"e
depuis plusieiirs annees de la construction de la plus
grande partie des carles publiees a 1 etablissemeni geo-
graphique de Bruxelles.
M. le lieutenant Alex. Durnes ecrit de Londres pour
fairehommage a laSocieted'un exemplairedesonVoyaoe
a Bokhara, accompagne de la carte des contrees qu'il a
parcourues, et sur laquelle se trouve trace son itineraire.
M. Eyries veut bien se charger de rendre compte de
cet ouvrace.
M. Beke ecrit egalement de Londres pour faire hom-
iiiage a la Societe d'uri ouvrage qu'il a publie sous le litre
de Origines hiblicce or researches in primeval history. —
Renierciniens.
M. Eyries offre a la Societe, de la part des auteurs ,
la premiere f'euille de la Carte selenographique publico
par M31. Beer el Madler. M. Coraboeuf est priedevou-
loir bien rendre conipie de cette carte lorsqu'elle sera
terniinee.
M. Eyries otlre aussi , de la part de niadatne veuve
Brue, deux carles de lAinerique uieridionale, 1 une <»n
qualre feuilles, I'autre en une seule. Ces cartes, jlont
M. Brue surveillait la gravure au moment de son deces,
viennenl d'etre lerminees et livrees a la publicile.
M. Eyries est prie de transnietUe a uiad.inie veuve
Brue les renierciniens de la Societe pour la remise de
ces iWa-n. cartes qui soiit recues avec un vif interet.
M. d'Avezac, en rendanl justice avec ses collegues au
merile et a la beaule des carles qui sont en ce moment
sous les yeux de I'assemblee, ne peul se dispenser d'y
relever hautement une parlicularitc dont il vient d eire
frappe quant a la determination des l-imites communes
des Guyanes francaisc et portugaise: elle consisle dans
( 75 )
I'indication de ces liinites a 1 Oyajjok, c'est-adire aussi
loin que les pretentions les moins juslifiees des Poitu-
gais se soient jamais avancces. La fixation definitive des
liniites dont il s'agit est, ii est vr.ii, une question diplo-
matique encore pendante ; niais elle est fondee sur une
question geographique qu'il iniporle de poser netle-
ment. Les derniers traites ont reniis les deux pays sous
I'enipire du traite d'Utrecht, qui attribuait au Portugal
les terres du Cap Nord situees entre la riviere des Ama-
zones et celle de Japoc ou de Vincent Pinson, et inter-
disait aux Francais de depasser cette nieme riviere de
Vincent-Pinson. Or, nul geographe ne peut avoir I'idee
de contester que la riviere de Vincent-Pinson la plus
septentrionale, est celle que La Condamine a reconnue
a quelques uiilles du Cap Nord , et aupres de laquelle il
existe une autre petite riviere portant le nom de Japoc.
De tait, nous avons conserve jusqu'en 179^ une mission
et nn poste niilitaire au Macari, a la hauteur du Cap
Nord.
M. Eyries appuie I'observation de M. d'Avezac de
considerations puisees dans I'histoire des navigations de
Vincent Pinson , dont il a fait une etude particuliere , ce
qui lui a donne Toccasion d'examineravec une attention
speciale la question qui vient d'etre rappelee.
M, Jomard communique a I'assemblee quelques de-
tails qui lui sont parvenus sur les circoiislances qui re-
tardent ia publication des cartes du voyage du capitaine
lloss. II depose sur le bureau une carle que vient de
publier M. Arrowsmith, et sur laquelle on a indique en
petit, d'apres des docuntens originaux, les nouvelles
decouvertes du capitaine au nord de I'Amerique.
Le meme membre annonce que le voyage de M. Li-
nant dans I'interieur de I'Afrique orientale a ete differe
( 76 )
jusqu'ici par ses fonctions tlingenicur des canaux de la
Haiile-Egypte, et qu'il va I'etre encore par le travail
important que vient de lui cnnlier le vice-roi.
M. Liiiant est charge du barrage qu'on doit executer
a Ballin el-Beqreh (ventre de la vache), afin de sontenir
le niveau du Nil a une plus grande elevation , et alimen-
ter ainsi , au profit de lagriculture, trois grands canaux
dont la prise d'eau sera de ce cote, savoir, un canal qui
traversera le Delta du sud au nord , un autre a I'orient
de la branche de Damiette , et le troisieme a I'occident
de la branche de Rozette.
M. Roux de Rochellc rend comple de I'ouvrage de
M. le docteur Guyetant sur I'agriculture et la geogra-
phic physique du Jura. — Renvoi de ce rapport au co-
mite du Bulletin.
Le meine menihre lit une notice sur les voyages de
M. J.-B. B.irtheleuiy de Lesseps, conipagnon de Lape-
rouse, mort recemment consul general de France a Lis-
bonne.
La Commission centrale eiitend avec interet la lecture
de cette notice , et elle la renvoie au comite du Bulletin.
Seance du i8 Jui/let.
M. le secretaire donne lecture du procesverbal de la
derniere seance.
Ce proces-verbal est adopte apres quelque discussion,
sauf revision dun paragraphe auquel il parait conve-
nable de ne donner qu'un moindre developpement.
M. le commandant Delcros , nonmie membre de la
Commission centrale a la derniere assemblee generale ,
adresse ses remercimens a la Societe , et proniet de con-
tribuer activement a ses travaux.
(77 )
M, Baradeie fait liomniage a la Societe , tant en son
noni qu'en celul de ses collaborateurs , des cinq pre-
mieres livraisons de la Collection des antiquUes inexi-:
caines. II demande qu'un rapport soil fait a la Societe
sur cet ouvrage, et qu'elle veuille hien prendre une de-
cision pour le prix relatif a la description des mines de
Palenque. II annonce en outre qu'il doit partir le pre-
mier septembre prochain avec une expedition coniposee
de deux dessinateurs , dun ingenieur-geographe, dun
naturaliste, etc. L'expedition ira debarquer dans le Yu-
catan , afin d explorer une ancienne ville qui se trouve
a environ douze lieues de Meiida; elle se rendra ensuite
dans rile d'EI-Carmen , a Palenque , a Chiapas , Mitia ,
Xochicalco , Tezcuco et Mexico. 11 prie la Societe' de
vouloir bien lui reniettre une serie de questions et des
instructions detalllees.
La Commission centrale adresse de vifs remercimens
a M. Baradere pour I'envoi de son interessante publica-
tion. M. Jomard, deja cliai'ge du rapport sur la premiere
livraison , est prie de rendre compte des livraisons sui-
vantes, et de proposer des questions supplementaires au
programme publie. Enfin il sera repondu a M. Baradere
que la Commission regrette de ne pouvoir decerner le
prix avant I'assemblee generale qui suivra le 3i decembre
1 835, epoque de I'expiration du concours.
M. Vaughan, bibliolhecaire de la Societe philosophi-
que americaine de Piiiladelphie , envoie au noni de cette
Societe la troisieme partie du volume iv de ses Transac-
tions. — Remercimens.
MM. Albert-Montemont et Arlhus Bertrand otbent a
la Societe, le premier, la 21" livraison de s,a Bibliotheque
universelle des voyages , dernier volume des Voyages
autourdii monde^ compienant les relations des naviga-
( 78 )
louT!) I'rancais till dix-neuvienie sitrle, Baudin, Freycinct,
Diiperrey, Duniont-d'Urville, Troniclin, Bougainville
fils et Laplace; le second, les F'oyages du cnpitaine
Basil Htill ^ (le la marine anglaise ,au Chili , an Perou et
au Mexique. — Remerciniens.
M. Joinard depose snr le bureau le proces-verbal de
la premiere asseniblee generale de la Societe ge'ogra-
phique de Berlin , leque! lui a ete adresse par M. Ritter
pour etre offert a la Societe de Paris.
M. Roux de Rochellc an nonce le depart prochain de
M. Codrika , consul de France a Campeche. II fait part
de son desir d'entrer en correspondance avec la Societe,
et il demande qu'une serie de questions lui soit adressee.
Le meme nienibre communique le denonibrement de
la population des provinces Chiliennes deValdivia et de
Chiloe, fait en i8!ii. — Renvoi au comite du Bulletin.
L'heure avanceV ne permct pas dentendre la lecture
de differenles communic;uions de MM. Jomard et
Warden.
OUTRAGES OFFERTS A LA SOCIETE.
Seance du \jiiiUet i834.
Par M. Al. Burnes : Travels into Bokhaia being the
account of a journey Jioni India to Cabool^ Tartary and
Persia; also narrative of a voyage on the Indus from the
sea to Lahore with /presents from the king of Great-
Britain, etc., in the real s i83i, ^2 and 33, by lieut. Alex.
Burnes, n'itli an entirely new map ^ etc. 3 vol. in 8°.
Loiidres , i834.
Par madame veuve Brue : NouveUe carte de VAme-
rique meridionale et des lies qui en dependent ., dediee a
( 79 )
lAcadeinie royale ties Sciences par A. Brue. 4 feuilles.
La meme carte en nne feuille.
Par MM. Beer et Madler : Mnppa selenographicn totam
luncB hemispfueram visihilein , etc. — Premiere feuille.
Berlin, i834.
Par M. Beke : Origines bihlicce or Researches in prime-
val history. Londres, i834. Premier volume.
Par MM. Vander-Maelen et Meisser : Dictionnaire
geographique de la province d'Anvers. Bruxelles , i834.
I vol. in-H".
Par M. !e comte de Bylandt : Resume preliminaire
d'une theorie des volcans. Paris, i834, 2'' edit. , in-8 '.
Par M. d'Urville : Voyage pittoresque autour du monde ,
3y" et 38® livraisons.
Par M. Gide : Nouvelles Annales des Voyages , cahier
de }uin.
■ Par M. Bajot : Annales maritimes et coloniales, cahier
de juin.
Par laSociele d'agriculture de Rouen : Sa'^ cahier de
Vextrait de ses Travaux.
Par MM. les directeurs : Numeros 58 el 69 de /'/«-
stitut, el numeros 12 el i3 <!e VEcho du monde savant.
Seance du \% juillet.
Par M. Baradere : Antiquites mexicaincs. — Relation
des trois expeditions du capitaine Dupaix, ordonnees
en i8o5, i8o6 et 1807, pour la recherche des anticpjites
du pays, notamment celles de Mitla et de Palenque ;
acconipagne des dessius dc Castaneda et dune carte du
pays explore, etc.; par MM. Alex. Lenoir, Warden ,
Farcy, Baradere et de Saint-Priest. — i''«, 2*, 3", 4*
et 5" livraisons, in-folio. Paris, i834.
( 8o )
Par la Societe Philosophique de IMjiladelphie : le vo-
lume IV, III'' partie de la noiivelle sene de ses Trans-
actions.
Par M. Albert-Monteniont : Bihliotheque universellc
des voyages, 21^ livr. , dernier volume des Voyages an-
tour du monde (Voyages de Baudin , Freycinet, Duper-
rey, Dumont-d'Urville , Tromelin , Bougainville fils et
Laplace).
Par M. Arthus-Bertrand : Forage au Chili, auPerou
et an Mexlque y pendant les annees 1820, 21 et 22 , par
le capitaine Basil Hall. 2 vol. in-8''.
Par M.le capitaine d'Urville : 89, 4o et 4i' livraisons
du Voyage pittoresque autour du mondc.
Par M. Morin : Correspondance pour Vauancement de
la meteorologie ( 6 menioire ) , i vol. in -8".
Par M. Bitter : Proces-verbal de la premihre assemblee
generale de la Societe geographique de Berlin ( annee
i833-i834).
Par MM. les direcleurs : I'lnstitut, numeros 60 et 61,
et I' Echo du monde sai>ant, numeros i4 et 16.
BULLETIN
1)H LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE.
A OUT i83i.
PREMIERE SECTION.
MEMOIRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPPORTS.
RELATION
D^un, voyage dans Vinteriear de V Ajrique septentrional e,
Par Hhaggy Ebn-el-Dyn cl-Eghouathy.
(suite).
NOTICE SUR LE TRACE GEOGRAPHIQUE
D UNE PARTIE DE l'aFRIQUE SEPTENTRIONALE.
J'ai voulu tenter une esquisse graphique des'pays qii'Ebn-el-Dyn
a mentionnes dans sa relation; et le besoin d'assurer des bases a
I'itineraire complexe du voyagcur arabe ni'a conduit a une investi-
gation generale des eleinens qui constituent le cahevas geodesique
d'une region beaucoup plus etendue : je me hate de declarer que
tout en prodiiisant un nouveau trace, purge de beaucoup d'erreurs
anterieures, j'apprecie mieux que personnel'insufCsance d'un travail
6tabli sur des donnees aussi imparfaites . et que nul autant que moi
ne souhaite voir des dt-terminations plus certaines prendre la place
des resultats simplement approximatifs auxqnels j'ai ete force de me
borner.
Le desir de tracer sur une petite carle les itineraires
donnes par Ehn-el-Dyn, ma conduit a recherclier
6
( 82 )
quelle carte deja construite je pourrais adopter pom
me servir de base; j'avais d'abord jete les yeux surcelle
de M. Lapie, en deux feuilles (i), qui jusqu'alors etait
ce que Ion possedait de mieux sur ces contrees; uiais
bicntot i! tut lithographie, au Depot de la guerre, une
nouvelle carte en trois feuilles (2), offrant sous plu-
sieurs rapports des ameliorations a celle de M. Lapie,
et je me disposals a opter pour elle, lorsqu'un examen
plus attentif ni'y fit renoncer. Nul, certes, n'aura lidee
de contester lliabilete des geograpbes du Depot de la
guerre, et moi-menie moins que personne, car nul
n'apprecie, avec une conviction si profonde, les admi-
ralties cbefs- d'oDuvre sortis de cette ecole pratique de
geograpbie positive; mais leur bal)itude memo de n'ern-
jdoyer que les excellens materiaux recueillis par lenrs
propres operations , les rend mal liabiles a tirer parti
de mauvais materiaux; ici commence le domaine de la
geograpbie critique, qui appelle a son aide, au lieu
des metbodos exactes, les tatonnemens d'approxima-
tlon, au lieu d'une juste confiance dans les donnees,
line severe discussion prealable de leur valeur, et pour
la combinalson umluelle des documens emanes de di-
verses sources, une etude speclale des synonymies,
J'ai done sentl qu'il me fldlalt faire table rase de tous
les travaux anterieurs , et construire a neuf une carte
de la region dont Ebn-el-Dyn a donne la notice.
Les seuls itineraires qu'il f'ournisse dune maniere
suivie, condulsent depuis El-Agbouatb jusqua A'yn-el-
Ssalahb du nord au sud , puis, par embrancbement,
(i) Carte comparee des rc-gences d'Alger etde Tunis, i8a8.
(4) Carte des possessions fran^aises en Afrique et d'une partie de
la regence de Tunis, i833 (i834).
( 83 )
depuis El-Qolya'h jiisqu'a Ghadames, tie I'ouest a Test.
A'ynel-Ssalahh, Ghatlames et la cote determinent done
a-peii-pres le cadre naturel de la carte; mais comnie
d'une part Ghadanies s'appuie sur Tripoli, et qu'il y a,
d'autre part, interet a montrer la liaison de A'ynel-
Ssalahh avec les autres dependances de Tempire de
Marok, j'ai etendu nion cadre a Test jusqu'a Tripoli, a
Touest jusqu a rembouchure du Ouady Noun.
Ne voulant donner qu'une esquisse a petit point,
puisque j'ai adopte I'echelle dun millimetre pour lieue
ge'ographique de 20 au degre(c'est-a-dire un 5,555,555°),
et n'ayant d'autre but que de faire ressortir les rapports
d'ensemble du pays d'Alger, solt avec les etats limitro-
phes, soit avec la portion du desert qui en est voisine,
je n'ai point du me livrer a une discussion appro t'ondie
du detail des cotes, et je me suis borne a reproduire
les travaux fails les plus recens et les plus dignes de
confiance. J ai dabord choisi, pour canevas general, la
Chart of the Western dwisioii of the Mediterranean sen ,
de Smyth, apres lavoir i;ollalionnee avec celles de
Tofino et de Gauthier; et sur ce canevas j'ai simple-
ment substitue, a certaines parties de cotes, des rele-
vemens plus recens ou mieux etudies : ainsi, par des
motifs que j'ai exposes ailleurs (i), c'est a la general
Chart of the hjdrogrnphical situation oJ'Sicily, du rneme
Smyth, que j'ai emprunte le golfe de Hhamamet;
M. Falbe m'a fourni les environs de Carthage; les rele-
vemens edits de MM. Berard et Dortet de Tessau m'ont
servi pour le golfe de Qol et celui de Bougie, ainsi que
(i) Rapport verbal sur Touvrage de M. Falbe re.latif.a.,Carthage,
dans le Bulleliu de la Socli-lc de Geographie, deuxieme seiie, tome i,
page 391.
6.
(84 )
pour la portion comprise cntre Tedlis et I'llot de Be-
denj^cl; et j'ai en outre puise dans leurs trayaux inedits
la position de Scherscliel et celle de Bone, ainsi que
quelques autres qui n'ont avec mon travail qu'un rap-
port nioins direct. A partir de I'llot aux Colombes
(Gezyret-el-PIhanjaai) jusqu'aux lies des Dja'faryn, j'ai
eu ie relevenient du lieutenant de vaisseau Gamier, con-
firme par les operations plus etendues de MM. Berard
et Dortet dp Tessan. La carte de Marok du lieutenant
Washington, basee elle-meme sur les travaux de To-
fino, de Badia, de Boteler et les siens propres, m'a
donne la cote en-deca du detroit depuis la petite ri-
viere des peupliers (JIamos), et au-dela jusqu'aupres
de Santa-Cruz ; enfin, j'ai pris la suite, jusqu'a la riviere
de Noun, dans la carte de Borda.
J'ai eu ainsi les positions suivantes des points de la
cote sur lesquels s'appuie ma construction :
Tripoli 3a"'54'N. io"5i'E.
Qabes 33.54 7.44
Sfaqs 34.44 8.ao
Mehdyah 35.32 8.47
Sousah :i5.48 8.21
HhammSmet 36. 20 8.22
Tunis 36.46 -j.St
Bone 36.54 5.26
Ruines de Rusicade 36.53 4.33
Qol 37. I 4. 1 1
Gygel ,... 36. 5o 3.24
Bougie 36.46 2.44.
Tedlis 36,55 i.35
Alger 36.47 0.44E.
Scherscliel 36.37 o . 1 2 O.
Caplvi 36. « a. 5
Embouchure du Schelif ... . 36. 3 2.10
Mostaghdnem 35.5; 2.12
( 85 )
Oraii 35.42 3. o
Embouchure de la Tafnay. . 35.19 '.5o
Taouant 35. 8 4-Ij
Emhoucliure dii Molouyah. . 35. 7 4- 36
Cap Noun 2S.39 I 3. 35
EniboucliiireduOuady-Noun.28. 17 i3.5i
Dans riiUerieur, les travaqx geodesiques de la bri-
gade topograpliique d'Alger m'ont fouriii les detennina-
lioiis suivaiUcs :
Qolya'h SCABS' N. o°27E.
Belydah 86.28 o.3o
Mehdyah 3G.i4 0,26
M, Falbe m'a donne
El-Legem ( aiicienne Tliys-
drus) ..'..... 35.20 8.. 27
Enfin, j'ai emprunte a Badia, dont I'exactitude a ete
verifiee, sur Maiok, par le lieutenant Washington, les
positions ci-apres:
Ouetchdah. 34"'4i'N. 4° 8' O.
Tezay 34.10 6. o
F(?s • 34. 6 7.19
Marok 3i.38 9. 56
Les documens itlnei'aires qu'il est possible de ratta-
cher a ces bases, conime elemens dune triangulation
grossiere, sont a distinguer en plusieurs categories :
1° Les routes parcournes et relevees par des voyageurs
europeens; 2° les voies romaines, dont la niesure etait
officielle, et nous a ete transniise ( non sans incerti-
tudes) par ritineraire d'Antonin et la table Peutinge-
rienne; 3<^ les routes rapportees en lieures de niarche
par les indigenesj 4° cclles qui nc sont mesurees qu'cn
journees 4c clieminj 5° les indications plus ou moins
precises de distances et de gisemens lournies par les.
ecrivains arabes, etc.
( 86 )
De ces (liverses categories, la premiere est evidem-
ment celie a laquelle il y a lieu d'accorder le plus de
confiiince; et Shaw y tient le premier rnn^ par letendue
des lignes qui! a suivies , et qui Ibrment trois groupcs
en apparence indepcndans, I'un cntre Tunis etQabes,
le second entre 13one et Alger, le dernier entre Alger
et les montagnes de Tatcherah. II n'est pas sans iiiteret
de rapporter ici ce qu'il dit lui-menie de sa maniere de
voyager et dVstimer sa route; voici ce que porte, a cet
egard, sa preface (i) : « Nos chevaux et nos chameaux
« avaient generalement iin pas uniforme, les derniers
" faisant par lieure deux niilles et demi, les autres trois
« milles ge'ographiques de Go au degre. La distance que
« nous avions purcourue etait d'aljord comptee en heu-
« res, puis reduite en milles.... Je m'arretais ordinaire-
« ment a midi pour prendre la hauteur meridienne du
« soleil, et ohtenir ainsl la latitude, relevant tons les
« gisemens et directions de notre route avec une bous-
« sole de poche , dont je reconnus que la variation dtait
« alors (en 172^) a Alger de 14" et a Tunis de iG" vers
« I'ouest. Chaque soir, des que nous etions arrives a
« notre gite, j'avais coutume d'examincr a quelle lati-
« tudc nous nous troiivions, combien d'heures, et dans
" quelle direction nous avions marche pendant la jour-
« nee, en tenant exacteinent conipte des sinuosites et
n des detours accidentols que nous avions fails hors de
« la route directc. Quand notre cheniln traversait des
'■montagnes et des forets , ou que les plaines etaient
« coupees de rivieres (sans que des haies , niurailles ou
" clotures nous causassent du retard ou de I'embarras) ,
« il arrivait souvent que, apres avoir marche huit heu-
(i) Travels, etc. London, 1757, page xjv.
( «7 )
ores, cest-a-dire 24 niillos, je trouvais, par la metliode
" ci-dessus expose'e, et ert ayant egard aux longitudes
■< et latitudes, qu'il ne tallait pas porter I'estime aii-dela
" de 18 a 20 milles. »
Apres cette explication preliminaire, je vais successi-
venient reprendre chacune des trois sections de I'iline-
raire deShaw, et I'assnjetir au nouveau trace des cotes
determine par les derniers relevemens.
Comniencons par celle de Tunis a Qabes en passant
par Qayrouan, S«beytiialah, Qaf'ssah et Touzer. Dans
ce long circuit, la route de Shaw n'est liee a la cote
par des communications transversales qu'au seul point
de Qayrouan , indique par le voyageur a 8 lieues
dans I'ouest de Sousah, el a-peu-pres a la meme di-
stance au sud-ouest d'Ehraqlyah; sa carte lui assigne
une latitude de 35" 36' N., Sousah etant par 35" 39'.
J'ai releve ailleurs (i) I'erreur d'apres laquelle les car-
tographes conservent a Qayrouan cette latitude, sans
tenir compte du deplacement que doivent aineuer les
corrections operees dans le trace du littoral, et j'ai
refute la concordance admise par Shaw et d'Anville
entre cette cite et le vicus Angusti des itineraires re-
mains. La carte du voyageur anglais ne met que bj
milles entre Tunis et Qayrouan 5 mais comme de Tunis
a Qabes il ne compte que i63 milles au lieu de 174 qui
existent en realite d'apres les relevemens et les obser-
vations moderues, il faut avoir egard a Tinsuffisance
de son echelle, et operer en consequence une correc-
tion proporlionnelle sur toutes ses mesures de distan-
ces :les Sy milles indiques plus haut se traduiront aiusi
(i) Rapport verbal sur I'ouvrage de M. Falbe relatif a Cartilage,
BiiUetin de la Societe de Geographie, deuxieme serie, tome i, page igi-
(88)
en 60 milles an maximum, ce qui ne permet pas une
latitude moindre de 35" 4G' pour Qayrouan : et ce chif-
fre conserve, a legard de la latitude veritable de Sou-
sah, la mininie difference qui resultait aussi des obser-
vations de Shaw. Quant a la longitude, elle se deduit
de la distance sur Sousah, qui est de 8 lieues ou 24
milles geograpliiques d'apres Shaw, mais qui doit etre
reduite a 22 milles d'apres les donnees de Leon et de
Marmol, de 21 a 24 milles d'apres Dapper, a 21 milles
d'apres Lacroix; craployant la moyenne de 22 milles,
Qayrouan me vient par 7" 55' E.
Sobeythalah est, toute correction faite, a 58 milles
de Qayrouan d'apres Shaw, qui ne lui attribue qu'une
difference en latitude de 12' sur celle de Qayrouan, et
la met a 100 milles de Theny et 35 milles d'El-Legem;
mais il faut tenir compte dun rapprochement vers ces
deux points, sollicite par les itineraires romains : il est,
en eftet. Lien reconnu que Sobeythalah estidentique a
I'ancienne Suffelula, Theny a I'ancienne Thenae, El-
Legem a I'ancienne Tysdrus. Or I'itineraire d'Antonin,
dans la route de Thenaj a Theveste, n'admet que io5
mille pas jusqu'a Suffetula, c'est-a-dire 84 milles geo-
graphiques au maximum. Lc meme ilineraire offre con-
stanmient, dans les routes de Carthage a Suffetula par
Adrumetum, de Tusdrus a Theveste, de Theveste a
Tusdrus par un autre chemin, et de Suffetula a Clypea,
une distance de 36 mille pas enlre Suffetula et Mas-
clianaj, et une distance de 18 mille pas de Masclianaj a
Aquae Regiae; en tout 54 milles romains ou un peu
plus de 43 milles geograpliiques" de Suffetula a Aqua?
Regiaj; puis nous trouvons dans la table Peutlngerienne
une route d'Aquic llegiae a Thysdrus ainsi marquee :
(89)
Aqua? legise.
Terento xvj.
yEIiac x
Tliisdro »
Le tlernier chiffre manque, niais I'itineraire d'Antoniii
y supplee dans le fragment suivant de la seconde route
de Theveste a Thysdrus :
Aqufe regiae.
Gerraaniciana M. P. xxiv
Eiiac xvr
Tusdro XVIII
Dans jEIice ou Elicu on ne pent meconnaitre, a Tun
de ses cas obliques, un seul et merne point, dont le
nom, identique a celui de la Jerusalem romaine, rappelle
pareillement celui d'^Elius-Verus. On ne saurait done
admettre la double lecon de la carte comparee de
M. Lapie, qui transcrit d'une part Achac , et de I'autre
Elice^ et en fait deux mutations distinctes. En suppleant
done dans la table Peutingerienne le chiffre xyiii entre
^lia et Thysdrus, on aura une distance totale de 44
mille pas entre Aquae Regioe et Thysdrus, c'est-a-dire
un pen plus de 35 miiles geographiques, en sorte qu'il
faudra compte- au maximum ^8 i;'2 miiles geographi-
ques entre Suffetula et Thysdrus; or, en partant de la
position assignee a El Legem parM. Falbe, le concours
de cette derniere mesure avec les 58 miiles depuis Qay-
rouan , amenera Sobeythalah par 35° 22' N. et 6° 5o' E.,
a 82 miiles de Theny.
Qafssah est placee a son tour, d'apres la route de
Shaw, a Sy 1/2 miiles de Sobrythalah, avec une diffe-
rence en latitude de 54' vers le sud , et une distance
de 75 miiles sur Qabes ; mais un raccourcissement est
pareillement necessite sur cette distance par les itine-
raires remains, qui nous donnent la rout<! de Capsa a
(90 )
Tacapas , en passant paries Aquas Tacapinas , lesquelles
correspondent sans contestation a El-Hhamniab. Si
Ion s'en rapportait a litineraire d'Antonin , tel qu'il
nous est parvenu, la distance scnihlerait nieaie ne
devoir etre que de 63 niilles romains ou 5o niilles gtio-
graphiques entre Qafssah et El-Hhanimah; niais il y a
evideniinent une faute de copiste dans la serie des nonis
de lieux, ainsi qu'on sen peut assurer en coniparant la
route de Telepte a Tacapas d'Antonin avcc cello do la
table Peutingerienne. La premiere est ainsi enoncee :
Iter a Telepte Tacapas, M. P. clii. Sic: ,
Gemellas xxu
Gremellas xxv
Capse xxuii
Tasarte xxxv
Aquas Tacapinas . . . xxviii
Tacapas xvm
La seconde , soigneusement relevee sur \ejhc simile
de Scheyb , se lit ainsi :
Thelepte colonia.
Vico Gemellas xx
Capsa colonia xxiiij
Veresuos xxi'ij
Tliasarte xix
Silesua xij
Aquas xix
Tacapa xvj
II est evident que dans la premiere le copiste a fau
tivement ecrit deux fois le mot Gemellas et a omis celui
dune mutation entre Capsa et Tacapas ; Capsa est ainsi
eloignee de Telepte de 24 mille pas en trop, et rapprochee
d'autant de Tacapas : la distance de Capsa a Tacapas,
qui semblerait n etre marquee qu a 81 milles romains
par I'itineraire d Antonin , en resulle done en realite
( 9' )
a io5 mille jias. La route de la table Peutingeiienne
est des-lors la plus courte : elle exige, reduction faite,
que Qafssah ne soil point a plus de 71 niilles geogra-
phiques de Qabes, dont 58 r/2 de Qafssah a El-Hliani-
mah et 12 1/2 d'EI-Hhanimah a Qabes. Or El-Hham-
mah est place, sur la carte de Shaw, a 10 niilles ouest
de Qabes ; dans un endroit de son texte il donne 4 Heues
pareillement a Touest, niais dans un autre endroit il
dit que c'esl au S. S. O. de Qabes qu'il faut chercher
les Aquas Tacapinas (i); Smyth, dans sa carte du golt'e
de Qabes marque le gisement S. O., et je me conforme
a cette indication en etablissant El-Hhammah par 33°
42' N. et y" 35' E. Partant de la avec les 58 1/2 milles
qui doivent cojicourir a Qafssah avec les by 1/2 milles
venant de Sobeythalah, je tombe vers 34" 25' N. et
6" 44' E.
Entre Qafssah et Qabes , la route de Shaw fait un
coude vers Tegewse et Toser, oii Ion reconnait aise-
ment Thiges et Thusuros de la table Peutingerienne ,
Teqyous etTouzer des geographes arabes (2I 5 Teqyous,
a 39 milles de Qafssah et 71 milles d"El-Hhanuuah , tom-
bera vers 33° 57' N. et 6° 12' E. ; et Touzer, qui est a
12 milles S. O. de Teqyous, viendra par 33° 49' N. et
60 3' E.
Entre Sobeythalah et Qafssah , Shaw a visite Cassa-
rinequiest eviderament El-Qassryn de I'Edrysy (3), et
Feriana ou le voyageur croit retrouvev Tancienne
Telepte des iiineraires romains ; cclte coincidence me
parait exacte, bien quelle ait ete repoussee par M. La-
{i)Shaiv. 1743, tome t, pages 253 et 276.
(2) Edrisii ^/r/ca, de Hartmaun, pages aSi, 257.
(3) Ibidem.,page aSo.
( 9'^ )
pie. Ma construction amcnc Feryanali a S^o 5,j' N. et
6° 17' E., a 35 oil 36 niilles geograpliiques tie Qafssah,
ce qui repond a merveille aux 44 mille pas de la table
Peutingeiienne, et aux 45 niille pas que donnera lili-
neraire d'Aiitonin apres correcfion du double eniploi de
la mutation Gemellas.
Quant a El-Qassryn , il me vient par 35" i3' N. et
6° 27' E. De ce point se dirige vers le N. N. O. uii
embrancbement de route conduisant a Gellah at Snaan
( probablement Qala't-El-Atsnyn ) , a une distance de
48 milles en ligne droite, et tondjant vers 35° 55 N. et
5-59 E.
Avant de quitter I'etat de Tunis , je placerai ici qucl-
quesiignessur la position d'EI-Kef, dontles inscriptions
locales ont demontre lidentite avec la Sicca Venerea
des anciens, colonic pbenicienne sans doute d'apres
le'tymologie de Sokout-Benout que Selden a si bien de-
montree (1). Shavr n'y est point alle, et tous les rensei-
gnemens itineraires qu'il rapporte a cesujet lui veriaient
du pere Francisco Ximenez, religieux espagnol qui
avait fait plusieurs voyages dans I'interieur : il indiquc
El-Kef a 24 lieues O. S. O. de Tunis, puis il donne, sur
les distances et les gisemens mutucls des lieux inter-
mediaires, des details qui se resument ainsi :
Tunis.
Mezezil-Bab (Megez-el-Bab). 10 lieues S. O.
Testoure (Destour) 2 — O.
LorJ)uss (Elorbos) 5 — O.S. O.
Kef(El-Kuf) 5 _ o.
Mais on voit que ces distances partielles additionnees
ne produisent que 22 lieues effectives ; il est evident, a
(i) De Diis Syris, synt. 2, chapitre 7; voir aussi le (juatiiemc livrc
des Rois, chapitre xvii, verset xxx.
(93 )
ia seule inspection de la carte , que cat itineraire est
incomplet , et qu'il manque une mutation entie Mege?.-
el-Bab et Destour ; d'un autre cote, la combinaison des
gisemens partiels, au lieu de conduire O. S. O., c'est-a-
dire O. 22° 3o' S. , donne une direction totale
O. 3(i " S. et meme O. 38° S. si Ion retablit la mutation
de Selouqyah a 2 lieues S. S. O. de Megez- el-Bab.
Le relevement de la route suivie, en octobre i8i5,
par le comte Camille Borgia, de Tunis a Ei-Kel , et
dont un caique ma ete obligeamment communique par
M. Lapie, lournit un document beaucoup plus sur. II
donne a El-Kef un gisementvraiO. 3o°S.; mais quant
aux distances, elles sont tellement exagerees, ou, en
d'autres ternies, leclielle qui les mesure est tellement
raccourcie, quelle marque 4o lieues entre Tunis etEl-
Xef; en supposant que cesoient meme des lieues de poste,
il en resulterait plus de 28 lieues geograpliiques , ce qui
est encore trop; mais si Ion prend pour echelle la dis-
tance de Tunis a Megez-el-Bab , estimee 10 lieues par
Shaw , la longueur totale d la route ne sera plus que
de y6 milles, ce qui est fort voisin des 24 lieues indi-
quees plus liaut; transportant I'ilineraire de Borgia sur
ma carte d'apres cette base, je place Megez-el-Bab a
36" 32' N. et 7" 1.3' E., Destour a 36" 27' N. et f 4' E.,
El-Kef a 36" 7' N. et 6° 25' E.
Jen'aborderai pas la discussion des itineraires remains
qui pourraient lier ces points a ceux que j'ai precedem-
nient places; cette discussion est herissee de questions
trop ardues pour etre traitees dune maniere transitoire.
Je me bornerai a indiquer plus loin une seule liaison
commune.
J'arrive a la route de Shaw entre Bone et Alger en
passantpar Constantine , Sethyf etQala'h, avec embran
(94)
chement de ce dernier point sur Tedlis. Scs longitudes
entre Alger et Bone offrent une difference de 4" 33'
tnndis que les observations les plus nouvellcs portent
rette difference a 4" 4^' i/^, equivalant sur le uioyoii
parallele de 36° 5o' N., a aaSmilles geographiques. En
corrigeanl d'apres tetle base I'echelletrop restreinte de
la carte de Shaw, on trouvera que son itineraire con-
stale en realite entre Bone et Constantine une distance
de j3 milies.
Constantine est, de plus, rattachee a Gygel par une
distance de i6 lieues N. O., dont 5 jusqu'a Mylah et 1 1
ensuitejusqu'a Gygel, route que Sliawn'a point suivie et
qui n'est des-lors qu'un simple renseignement. Cette
ville est en outre appuyee sur les mines de lliisicade ,
dont la table Peutingerienne indique la distance a 6j
niilles roniains, ou pres de 54 niilles geographiques; il
est vrai que d'Anville, cdrHgeant cet itineraire, a re-
tranche 1 5 niilles sur la distance de Rusicade a Villa-
Seze, ce qui donne seulenient Sa milies romains a comp-
ter pour la distance tdlale, ou environ 4^ i/^ milies
geographiques; niais Pline nous fournit une distance
pluscourte(i), puisqu'il la fixe a 4^^ miHe pas, equivalant
a38 1^2 milies geographiques au plus; comme ilestim-
possible de fiiire cohcourir en un meme point les trois dis-
tances sur Bone, Gygel et Sokaykadah, je fais porter la
modification necessaire des-lors a I'une des trois distan-
ces, sur celle qvti offre le moins dc garantie, celie siir
Gygel, que je raccourcis de 5 milies, faciles a retrouver
dans une brisurea IMylah. Constantine viendraalnsi par
SG" 2^' N; et 4° 4' E. 11 f'audrait nn^me raprocher encore
un peu cette position de Sokaykadah , si Ion sen rap-
(i) Histoitt liaturelle, livi-e xv, chapitie ui.
( 95 )
portait :iu dire de Leon , qui ne tompte que 35 niilles
de I'une a I'autre. Les renseignemens fournis par les
indigenes representent cette route conime egale a celle
d'Alger a Mehdyali, laquelle est de 3; milles. Ces indi-
cations sont trop voisines de celle de Pline pour n eire
point considerees coninie une confirmation.
Pour le dire en passant, la question de la position de
Salda; et de Choba des itineraires roinains, si diverse-
nient re'solue par Shaw et par d'Anville, trouve, dans
les relevemens de MM. Berard et Dortet de Tessan , des
elemens de solution qui coincident parfaitement avec
la lecon que j'ai adoptee pour la distance de Coba a Igil-
gili dans la route de Saldie a Rusicade , d'Antonin ; voici
comment je retablis la route entiere :
A Saldis Russiccade, M. P. ccxvn (i), sic:
Muslubio XXVII (a)
Cobll .... . .i y... XXVIII
Igi'g''' xxviri (3)
Paccianis xxiv (4)
Chullii j_x
Russiccada i,.
Coba devant se trouver ainsi a 28 mille pas d'I<ri|oili,
c'est-a-direa 22 i;2 milles geographiques, au plus, de
Gygel , ne saurait coincider avec Bougie comme I'a ad-
mis d'Anville ; mais les liydrographes francais ont releve
precisement a cette distance de marche effective le long
du rivage, aupres du petit mouillage de Mansouryah,
(1) Variantes: cxvii, cccxvui. La somme des distances de la table
Peutingerienne n'est que de 2 16 mille pas, ainsi : de Salda a Muslubio,
xxvj — Choba, xxviij — Igilgili, sxviij — Paccianis, xxiiij — Cul-
lu, Ix. — Rusicade, i.
(2) Variante : xxviii.
(3) Variantes: xxvii, xxxix.
(4) Vaiiante ; xxxv.
( 9ii )
des mines qui sont des-lors evidemment cclles de Cho-
ba; puis, a pareille distance de ces premieres mines, et
a 3 niilles au sud de Bougie, d'autres mines qui des-lors
representent necessairement Muslubium ; et Saldae, qui
est encore a 26, 27 ou 28 niille pas dans I'ouest de Mus-
lubium, ne peut co'incider avec Bougie comme I'avait
etabli Shaw. C'est aux explorateurs niodernes a retrou-
ver les mines de Saldoe sur la cute a une vingtalne de
ir.illes dans I'ouest de Bougie.
Entre Constantine et Bone , Shaw est passe a Gel-
niah, oil jiliis exactement Qalemah, qui resulte de sa
route a 33 milles de Bone et 48 de Constantine, c'est-
a-dire vers 36" 26' N. et 5° 4' E.
C'est par la que la grande ligne de route que je con-
stmis actuellement se lie aux precedentes parTeyfasch,
que Shaw place a 6 lieues de Qalemah, et qui s'appuie
en outre sur Bone; car Teyfasch etant I'ancienne Ti-
pasa (quoique Shaw, par une singuliere transposition ,
la fasse correspondre a Teveste), et les mines de Tan-
cienne Hippone royale gisant noii loin au sud de Bone,
la table Peiitingerienne fournit entre ces deux points
une I'oute de 43 milles romains , ou environ 34 1/2 milles
geographiques au maximum. U resulte de la combinai-
son de ces deux distances, que Teyfascli doitelrc etabli
vers 36^ 18' N. et 5" 25' E.
Or Teyfasch est lie, dune part a Gellah par El'
Gattar, suivant les indications que Shaw a recueillies,
et d'autre part a El-Kef ou Sicca-Venerea au moyen de
I'itineraire d'Antonin, qui fournit les distances de Ti-
pasa a Naraggara, puis de Naraggara a Sicca, et qui
rattache en outre Naraggara a Hippone par Tagaste.
Shaw remarque expressement que El-Gattar est une ville
ancienne,de meme queTagiltqu'il met a 3 lieues N.N.E.
( 97 )
d'El-Gattar. Or, si nous atlmettons avec tl'Anville
qu'El-Gattar soit I'ancienne Tagora et Tagil t I'ancienne
Tagaste, ce qui me parait toul-a-fait plausible, nous au-
rons les donnees et les resultals suivans.
Scliaw dit qu'El-Gattar est a 8 lieues de Teyfasch,
sans mention de gisement; et il ajoute que ce point est
a 5 lieues N. N. O. de Gellah ; mais an lieu de 8 lieues
on 24 milles geographiques, I'itineraire d'Antonin n'ad-
met que 24 mille pas( i ) entre Tipasa et Tagora, c'est-adire
environ ig milles geographiques , dont la combinaison
avec les 5 lieues N. N. O. de Gellah placera El-Gattar
vers 36° p' N. et 5° 46' E.
La route d'Hippoi»e royale a Carthage , de I'itineraire
d'Antonin , nous foinnit les distances suivantes :
Hippone regio.
Tagaste M. P. 1,111
Naraggara. . . . xxv
Sicca-Veneria. xxx (x)
Les 53 mille pas, soit 42 i;2 milles geographiques depuis
les mines d'Hippone, combines avec les 3 lieues N.N. E.
depuis El-Gattar, me procurent Tagaste a 36° i5' N. et
5" 53' E.
La route de Musti a Cirta nous offre d'autre part les
distances ci-apres :
Sicca. "
Naraggara. , . . M. P. xxx
Thagnra xx
Tipasa xxlv
(i) Une variante porte xxxiv, mais elle est inadmissible d'apres la
somme totale des distances.
(2) L'itineraire porte en cet endroit xxxii sans variante; mais c'est
le chiffrexxx qui convient ponr tiouver exactement la somme totale;
et la route de Musti a Ciita fournit d'autre part le nomine 3<>, sans
variante, pour cette meme distance.
( 98 )
Nous avons done Naraggara a 3o luillc pas de Sicca ,
20 niille pas de Tagora ct 25 niille pas dc Tagasto, ou,en
dautres termes, a 24 niilles geograpliiques d'El-Ref, 16
inilles d'FJ-Gatlar, et 20 niilles deTagilt; lo point (fe
Qala't el-Atsiiyn correspond precisement a cos trois dis-
tances, ct representc par consequent I'ancienne Narag-
gara, liant ainsi les deux grandes lignes de route de
Shaw tant entre elles qu'avec la route du comic Borgia.
Poursuivons avec Shaw la route qu'il a parcourue de
Constantine a Alger. Sethyf n'y etant appuye que sur
Constantine etCallah (Qala'h), il faut placer d'ahord ce
dernier point, qui se trouve rattache a-la-fois, par un
reseau commun , a Alger et a Tedlis. Les distances,
corrections faites, sont : d'Alger a Qala'h, 72 millesjde
Tedlis a Qala'h, 4^> niilles ; de Qala'h a Sethyf, 4;") niilles;
et enfin de Sethyt a Constantine, 56 niilles; ce qui me
donne Qala'h par TiG" 16' N. et 2'' 5' E. , Sethyf par
36" 3' N. et 2° 59' E.
La route, entre Sethyf et Qala'h, passe par Sydy-
Mobarek et Megenah , qui tomberont, le premier par
35" 57' N. et 2» 3i' E. , le second par 36° o' N. et 2° 19'E.
Le texte du voyageur conticnt en outre divers ren-
seignemens sur la position de quelques points notables
plus avances dans I'interieU'T, et qui s'appuient , par des
distances ct des giscniens, sur Sydy-Mobarek , Sethyt
et Constantine : en relevant soigneusenient les indica-
tions qui peuvent concourir a une triangulation gros-
siere, on trouve, d'une part, El-Mcsylah a 9 lieues
S. S. O. de Sydy Mobarek , puis Emdoukhal (plus cor-
rectement Modakhan , ren/iime) a i6 lieues S. O. d'El-
Mesylah, ce qui produit, en ligne droite, une distance
totale de 64 milles S. S. E. D'autre part, une serie de
distances et giscniens conduit de Constantine a Moda-
(99)
khan en allant d'abord h Tattubt, 8 lleiies S. S. O. ; puis
a Omoley-Sinab , 4 lieiies S. O. ; ce point a, d'un cote,
Zainah a 4 lieues O. , et de I'autre, Medraschem a une
lieue, dans lest suivant le texte, dans le sud suivant la
carte; de ce dernier endroit, on a 12 lieues jusqu'a
Tliobnah,qui est en nienie temps a 10 lieues de Zainah;
enfm, de la a Modakhan, y lieues S. S. O. ; la construc-
tion de ces indications partielles procure une distance
totale de 92 milles dans une direction a-peu-pres S.S. O.
1/2 O. Ces deux lignes , de 64 milles sur Sydi Mobarek,
et de 92 milles sur Constantino, determinent la position
de Modakhan par 35" i' N. et 3° 9' E. El-Mesylah se
trouve en meme temps portee vers 35° 3o'N. et 2"22'E.j
a 43 milles de Sethyf, ce qui s'accorde avec les deux
journees que Abou O'bayd el-Bekry (i) met entre ces
deux villes en passant par Ghadyr, ou sont les sources
de la riviere Scheher qui passe a El-Mesylah.
Zainah, liee d'une part a la ligne de Constantine h.
Modakhan , se rattache d'un autre cote a Sethyf par une
distance de 8 lieues dont la direction est N. N. O. d'a-
pres !e texte de Shaw, O. N. O. d'apres sa carte , ce qui
cadre mieux avec les autres dijnnees; d'apres ces condi-
tions, je place Zainah vers 35° 5i' N. et 3° a5' E., et
Thobnah vers 35° 22' N. et 3' 16' E. a 44 milles d'El-
Mesylah, ce qui correspond aux deux journees comptees
par I'Edrysy pourcette distance, ainsi qu'aux trois jour-
nees enoncees par le Bekry. (2)
Tattubt, qui viendra par 35° 58' N. et 3° 54' E. , ne
saurait etre le Tadutti d'Antonin comme la cru Shaw,
et M. Lapie apres lui ; car Zainah etant Diana ainsi que
le demontrent les inscriptions locales , on ne pent cher-
(1) Bchrr, pngc 100.
(2) Edrysy, page ■).'\/\ ; nikry, page i6i.
( ««o )
cher Tiidiilti qu'a une distance dc iGniille pas on environ
1 3 niilles <^t'<)grapirK{Uos an niaximum, taiidis qn'il y en
a 24 jiisqu'a Tattubt.
A. iin pen molns de 9 lieiies dans lest d"Kl-Mesylah
Shaw place las Geouani el-Mugvah , qui rappellenl la
ville de Maqqarah qne I'Edrisy (i) met a une journee
deThobnah, et que d'Anville identifie au Maori d'An-
tonin. Quanta El-Mesylah, c'est une ville moderne qui
ne saurait represcnter Zndi ainsi que I'a cru iVI. Lapie;
niais il existe, a pea de distance , des mines quipeuvent
recevoir celle application.
Entre El-Mesylah et Maqqarah s etciid la plaine a la-
(juelle Shaw donne le noni de Ilulhnah, et danslaquelle
il place A'yn el-Kelb. Cette dei-nicre denomination me
parait otfrir la veritable lecon du mot que M. Quatremere
a hi A'yn el-Katan dans le Bekry ('2) ; quant a Ilutlmah ,
c'est evidemment le district d'Adnah (peut-etre mieux
Adznali)«(lu Bekry, ainsi appele d'apres une ville de-
truite par les TThamoudytes, au ilixienie siecle. Dans le
triangle forme par El-Mesylah, Ghadyr et Maqqarah,
doit se trouver le chateau d'Abou-Tawil, que M. Qua-
tremere (3) a raison de conslderer comme Identique au
Qala't-B('ny-Ilhammad du Nouayry, mentionne egale-
ment sous ce nom par I'Edrysy, qui I'indique a 12 milles
d'El-Mesylah J le Bekry designe tour-a-tour les trois
villcs qui forment cc triangle , comme derniere etape
pour arrlver a Abou-Taouayl (4^ : j'attribue en conse-
quence a ce point une position conjecturale de 35" 34'
(1) rage aJ6.
(2) Page 160.
(3) Notes siippltnientaircs, page 517.8.
(,',) Behj, pages 70, 74, 80, — Edrysf, pages 210, 21a.
( loi )
N. et 1" '5y' E. , qui ne pent etic biei: eloignee de ia
verite.
Bien que la double lignequi, sur les carles de Shaw,
indique son itiueraiie, ne soit point tiacee jusqu au
Boi'oj Hanizah , appele aussi Sour el-Ghozlan, nous
avons cependant la certitude qu il y estallejcar, outre
les inscriptions qu'il y a copiees , et qui prouveiU que ce
lieu est I'ancienne Auza des itineraires roniains , il est
consigne dans le journal de route de Hebenstroit, qu'ils
se Irouvaient ensemble en ce lieu , appele Pourtsch-
Hanipsa par le naturaliste alleniand (i), a la date des i 5
et i6 niai 1732; qu'ils s'y etaient rendus de Melnlyali
en traversant les tribus de Aouled-Ibrahyni , Ik'uy-
Selyni , Aouled-Taan et le canton de Castoula , et qu'ils
revinrent de la a Alger par la plaine de Hanizah et la
tribu de Beny-Haroun. Shaw connaissait done bien par
lui-menie ce point, qu'il indique a 16 heues au S. E.
d'Algei-, 24 lieiies E. S. E. de Scherschel , 26 lieues O. de
Sethyf", et qu'il place , sur sa cai te, par une latitude de
3t)''7'N. Les trois conditions de distances ne peuvenl si-
niultanement concourir en un nienie lieu; Shaw n'a tli-
rectement parcouru que celle sur Alger, et il a estinie ies
deux autres approxiniativemenl j or elles se Irouvent
trop courles, nieme en tenant compte de la correction
precedemnient indlquee, laquelle procure, pour les Ircjis
distances, 5o, y5 et 83 niilles ; !a position nioyennedc
Ihunzah se trouvera vers 36° 3' IN. et i" i5' E. , a 0'4
niilles de la position supposee de Zabi, ce qui convieirt
a merveille pour les Somille pas que I'ilineraire d'Anto-
(i) Summlii/ig Ide'mtr P.cuc/i, de JieiiiouiUy, tome ii; la tryiliKtloii
eu est inseree dans les Aiinales des voyages, tome 2 de i83o, inais
les iioiiis propres y sont deligures i)ar des (.uUcs typograpliiqites.
( I02 )
nin (expurge) met entre Z;ibi ct Auzu, sur la route de
Sitifi a Gesaree , que je retablis ainsi :
A Sitifi Cacsareii , M. P. ccci, sic:
Perdices xxv
Cellas XVIII (i)
Maori xxv
Zahi XXX (2)
Aras xviii (3)
Talilti XVIII
Auza xLmi(4)
Rapidi XVI
Tirinadi xxv
Caput Cillani.. . . xxv
Sufasar xvi
Aquis XVI
Caesarea xxv
D'Auza a Cesaree il reste 128 mille pas, equivalant a
98 1/2 milles geogiapliiques; c'est trop peu pour
arriver jusqu'a Tenes, ou d'Anville a place Cesaree, et
qui est a no milles au molns de Borgj Hanizah; d'An-
ville n'a pu y atteindre qu'cn meconnaissant I'identite
de ce dernier point avec Auza, malgre I'autorite des
inscriptions locales. Cependant on pourrait pretendre,
avec quelque apparence de raison , que si la position
de Tenes est a-peu-pres assuroe , celle de Borgj Hanizali
est trop incerlaine pour qu'on ne la put affecter d'une
correction qui la reportat quelque peu vers I'ouest,
bien qu'il soit a considerer qu'il faudrait alors renoncer
a la correspondance de Macii avec Maqqaiah eta celle
de Zabi avec les ruines peu distantes d'El -Mesylah;
(i) Tariante: xxv.
(a) Variaiite: xxv.
(3) Variautc : xxx.
(4) Variante : xlvii
( i"3 )
Jaime niieux laisser tic cute ces consideralions negatives
pour donner une denjonslration direcle que I'aucienne
Cesaree est lepiesentee , ainsi que I'avait pense Sliaw,
par la nioderne Seherscliel.
Que Ton prenne ritineiaire le long du rivage entie
deux points incontestes , tels que 1 embouchure du
Mulua, bien connu pour etre le Molouyah d'aujour-
d'liui, et Jgilgilih\en connue aussi pour etre la modeiiie
Gygel ; verification exactenient faite de toutes les varian-
tes, aiin d'operer sur un lexte bien epiue, ou la sonime
des distances partielles concorde avec le cbifiie des di-
stances totales, on aura, du fleuve Mulua a Igilgili, 717
niille pas ainsi partages :
Mulua, fleuve.
Cesaree M. P. 41O
Igilgilis 3oi
c'est-a-dire 333 et 241 milles geographiques j c'est l.(
mesure exacte des distances relatives du Molouyah a
Scherschel et de Scherschel a Gygel ; il ne peut done
rester le nioindre doute que Scherschel ne soit I'antique
Cesaree. II serait derisoire d Opposer a cette solution
precise les tables de Ptoleaiee, vrai chaos ditineraires
heterogenes , chevauchant les uns sur les autres, quel-
quefois a rebours, et traduits ensuite en series de
positions absolues.
Presque tons les itineraires d'Alger a Constantine,
recueillis par les officiers francais de la bouche des
naturels (i), passent par Hamzah , Meget)ah, Sydy
(i) Je ne saurais me louer assez hautement de la bienveillance
avec laquelle M. le lieuteuant-gt'neral I'olet a fait mettre a nia disiio-
sition lesdocumens envoyes au Depot de la guerre par nos ofUciers
d'etat-major, ct du gracieux cmpresscmciU de RJ. le toluuul Lapie 11
effectuer cclte couimuuicatiou.
( »o4 )
Mobarek ot Selhyf"; je n'en ferai ici aucun usage, parce
qti'ils lie sauraierit me procurer que des points de de-
tail entre ies diverses stations principales , que la route
de Shaw m'a fourni le moyen de placer avec plus de
certitude. Ces itineraires sont portes sur la carte liiho-
graphiee du Depot de la guerre, mais avec des doubles
eniplois et des transpositions : ainsi, Borj inita Hamza
( Borgj metha Hamzah, fort a Hanrzah ) nest point un
autre lieu que Borgj Ham/ah ou Sour-cl-Gliozlan, et il
faut effdcer la position distincte qui lui est assignee
dans Test de celui-ci; I'erreur provient de ce que I'itine-
raire qui designe ce fort en employant une locution
triviale, nicntionne auparavant Ras Hamzah, qui a ete
confondu avec le Borgj ou fort de nieme nom : or
Ras Hamzah, c'est-a-dire le chef-lieu de Hamzah, est
indique par Shaw, lequel nous dit que Sydy Hanrzah ,
qui a donne son nom a ces plaines, a son tombeau pres
du roc Magrowa (Maghraouah); sur sa carte, la posi-
tion est marquee au confluent du W^ed Ashyre (^Oued.
El-Scha'yi") et du Oued ElMelahh, mais le nom du lieu
est oublie ; M. Lapie navait omis ni I'un ni I'autre sur
sa carte comparee; I'omission est a reparer sur la carte
lithographiee du Depot.
Un itineraire d'Alger a Beskarah, envoye par M. le
capitaine d etat-major Gougeon , me servira , faute de
donnees plus precises, a placer cette derniere ville; il
est en 12 journees ainsi distribuees :
D'Alger ii Hamza 3
FomadDjeiiau,pres des tentes des Ouled
Sidi Aica i
Ain-Ghorab, a droite du Oucd-Ekseb.. I
Bbe^ra, plaiuc avec beaucouj) d'cau.. . i
^ reporter 6
( io5)
Report 6
Msila, sur une riviere i
Am el -Kelba i
Mdokan i
Glatt-Hammam i
Outaya , sur une riviere i
Biscara i
Nombre total des journees 12
Dans Foiiiad Djeiian , il est aise de reconnaitre le
Phouni Jineene de Shaw, plus exacternent Fom-el-
Genan (Tentree des jardins), a 5 ou 6' lieues de 13orei-
Hanizali, non loin dii tombeau de Sydy I'say. Ain Gho-
rab, qui vient ensuile, est pareillement identique a Ain
el-Graab de Shaw, plus exacternent A'yn el-Ghorab (la
fontaine du corbeau), et le Oued Ekseb qui est sur la
gauche, et qui doit elre lu Oued el-Qassab (la riviere
du rosean) , n'est autre chose que la riviere qui passe
a El-Mesylah, et que Shaw appelle egalement de ce
nom. Bheyra est sans doute une plaine souvent inon-
dee, ainsi que I'indique sa denomination, qu'il faut
ecrire correctement Bohhayrah. Msila, Am el-Relba,
Mdokan , sont alses a retablir en El-]Mesylah, Ayn el-
Kelb, JModakhan , qui sont deja connns et places; reste
done a employer Glatt Hammam et Outaya DOur arriver
a Beskarah ; le premier de ces noms , qui sans doute
doit se lire Qala't elHhammam , ne se trouve point dans
Shaw; mais le second avec rarlicle, El-Outayah, corres-
pond nalurellenient a Lwotaiah du voyageur anglais,
qui I'indique sur sa carte a 9 lieues vers IE. S. E. de
Modakhan, et 4 lieues vers le N. N. O. de Beskarah;
ces distances nie paraissent trop courtes pour trois
journees de route, et je les porte a 12 lieues et 6 lieues,
ce qui me fait avoir Beskarah par 34" 3o' IN. et /{o E.
( '^6}
line route Av Constantino a lieskarali viciit cuira-
borer cette determination; la voici :
Di'part de Constantine.
I5ir cI-Bekerat , sur l.i route d'Alger. ... i jour.
Segghaii,avec une riviere coulant ail Slid, i
Mchira, avec une riviere i
Moulsenah i
Leteiia i
Ksour el-Ganiiava , ])laine i
Kantara i
K[-IIaininam i
El-Outaya i
Biscara i
Nombre total des journces lo
Byr el-lieqeret (le puits des vaches) est une station
indiquee pav d'autres lenseigneniens a 5 heures, equi
valant a lo niilles, dans I'ouest de Constantine; quellf
que soit la situation de Segghau et de Mchira, i\ est evi-
dent que I'etape suivante, Mouisenab, est identique a
Onioley Sinab de Shaw, Amoula Senab de Peyssonnel,
bien que la carte lithograpbiee du Depot de la guerre
tasse trois stations distinctes de ce seul point, en con-
fondant meme I'une d'elles avec le Tattubt de Shaw ,
ce qui ne pent etre nuUenient adniis. Aprcs Mouisenab
vient betena, qui est bien le Baitnah du voyageur an-
glais, indique sur sa carte a 8 lieues S. 1/2 O. d Oinoley
Sinab. Ksour, qu'il faut lire Qossour ( les chateaux),
est reconnaissable sous I'orthographe Cossoure, em-
ployee par Shaw, qui I'a inscrit un peu au sud de Bait-
nah. El-Qantharah (le pont) est sur la riviere de Bes-
karah; puis la route rejoint celle (|ui vient d'Alger,
sinon a El-IIhaniniani (les bains), qui senible etre Ic
meme point que Qala't cl-IIhammam (le fort des bains),
au moins a MlOiUayah. IJc (juclquc nianicre ([ue ces
( ^07 )
diverses mutations soient placees, il me sutfit cle le-
marquer que Shaw dit expressement que Baitnah mar-
que la moitie du chemin entre Coiistantine et Beskarali;
or cast ce qui se verifie exactement dans ma construe-
tion, ou Baitnah se trouvera a distance egale (58 milles)
de ces deux villes.
Ma position de Beskarah est ainsi reculee de phis dun
degre a I'orient de celle qui est adoptee dans la carte
du Depot de la guerre; mais loin qu'il y ail exageration
dans cette protension de la route, il y a lieu de remar-
quer qu'elle laisse encore subsister, entre Beskarah et
Nefthah, une distance d'au moins cent milles, a repartir
en cinq journees seuleraent, qui sont ainsi indiquees
par le Bekry. (i)
Depart de Beskarah.
Telioudali i
B;\dys de Zab i
Qaythoun-Bayddliah i
Nefthah 2
Temymy, cite par Hartmann (2), ne donne meme que
quatre journees de Beskarah a Touzer, espace qui dans
ma construction est de 108 milles , ce qui fait 9 grandes
lieues a lajournee, marche tres peu commune. Le Be-
kry y met cinq journees.
Badys (Badass de Shaw), qui me vient par 34" 9' N.
et 4° 42' E-j parait correspondre a la mutation Badias
de la table Peutingerienne , de meme que Tehoudah
ville ancienne(Toodah de Shaw) representerait la mu-
tation voisine, Thabudis.
La route comprise enfre Badias et Thelepte, avec
embranchement sur Theveste, est facile a placer dans
(i) Bekry, pages 96, 98.
(2) Page 238.
( io8 )
ma construclioii. En clletj la route dcTluiiiL- a Tiicvc.ste ,
d'Aiitonin , ine donm; jo iiiille pas ou 56 iiiilles geo-
graphiqiies de Suffetvila a Tlieveste. Sur cetle route se
trouve Aciniedera, qu il iie iaul point, avec d'Anvillcot
T\I. Lapie, placer sur Ilydrah , car colic ci est rancienne
ThunudronuMJ, ainsi que le prou\crit les inscriptions
locales. D (in autre cote, Theveste ne doit etrc qua 90
mille pas ou 72 inilles geographiqucs de Musti d'apres
la route siiivante de la table Peutingerienne :
Theveste.
Ad Jlcrcuriiim .vj.
Ad Medera riiij.
Mutia xvj.
Oi ba XVJ.
Larabus 17.
Drusiliaiia xij.
Tbacia ivy.
Musti i'ij-
Or reinplacemcntde Musti, constate par les iiisciiptions
locales, se trouve, d'apres Shaw, en vue dc Tidjersoke,
etdeDugga, et d'apres les itineraires romains entre Sicca
etTignica, a Sa miUe pas de la premiere suivant Antonin,
ct a i3 mille pas de la seconde suivant la table Peutinge-
rienne, c'est-a-dire a ^5 iji milles geograpliiques d'El-
Kef et a 10 1^2 milles de Tunga : les relevemens du
comte Camille Borgia marquent , a I'ouest de Teboursek
et de Dugga, a 24 milles en ligne droite d'El-Kef et a
C) milles de Tliunga, une ville ruinee qui correspond a
merveille a toules ces indications , ct qui, dans ma con-
struction, vient par 36° 20' N. et 6' 5i' E. M. Lapie a
place Musti sur Teboursek ; mais les inscriptions locales,
en signatant Musti sur un autre point (Sydy Abd-e!-Abbus
deShaw),rappellentcnTebonrsekrancienThnbuisi(iini.
11 taut, des eleinens tpii precedent , conclure Theveste,
( I09 )
ou la moderne Tebesah qui la represente, par 35"o5' N.
et 5o 43' E. Ubalia castelluni, sitae a 5g mille pas de
Theveste et a 20 mille pas de Thelepte, tonibera vers
34"49'N. et 5"58'E. a 76 rnilles de BadysdeZab, distance
qui repond precisenient aux pS mille pas que la table
Peutingerienne met entre ce point et telui de Badias.
S'il etait permis d'alleguer comme autorite un docu-
ment aussi pen siir que les tables et les cartes de Ptole-
mee, je ferais remarquer que, entre Tliouhoiina qui est
bien notre Tbubnab, et Oueskether ( Vescetbrea des
editions latines) que Ion s'accorde a considerer comme
correspondant a notre Beskarah, elles donnent une dif-
ference de 20' en longitude et de i» en latitude, ce qui
constitue une distance de 62 miiies, exactement la meme
que celle qui existe dans ma construction. Une consi-
deration qui nest pas a dedaigner pour donner un peu
plus de poids a cette concordance , c'est qu'il est pro-
bable que c'est cette distance meme qui a servi a la de-
termination des differences en longitude et latitude
ci-dessus rappelees.
Je rapporterai encore ici un itineraire d' Alger a Bes-
karab, non plus comme une nouvelle justification dema
construction , niais seidement pour reconnaitre en pas-
sant quelques stations.
Depart d'Alger.
Sour
Oued el-Lahm
Hermam
Boucada
Mhagliem, siir la rivifere Maleh
Hoba
Saboun
Doucen
Taolgha
Biscara
Nonibre total des jouvnees.. . 12
( "o )
Sour-cl-Ghozl;in (lo mur dos Gazelles), on simple-
iiient Sour, est le ineme lien que le Rorgj-Hamzah
eleve sur les mines d'Auzia, et distinct dii lias Hamzah
ou Souq-Hanizali (le rlief-lien ou le niarclie deHanizali),
place, ainsi (jue je I'ai dit plus haul, au confluent du
Oued el-Scha'yr (la riviere de lorge) et du Oued-el-
Malehh (la riviere du sel), dont la reunion forme le
Oued-el-Zeytoun (la riviere des olives ).
Oued el-Ham est evidemment le Oued El-Ham de
Shavp, plus correctement Oued el-Lahhm (la riviere de
J'engloutissemenl), autre nom du Oued el-Genan
(la riviere desjardins). Herniam est mentionne par
Schaw (i) comnie un daskerah remarquable au nord
deBoosaadali, ecrit Doucada dans iitineraire ci-dcssus,
et dont lorthogrnplie reelle est Abou-Sa'adah (le pere du
bonheur). Mhaghem est plus difficile a reconnattredans
le Maiherga de Shaw, mais la prononciation anglaisede
ce dernier mot [Mehnghc) le rapproche beaucoup du
premier, et la riviere Maleh, Mailah de Shaw, est un
indice de plus.
Hoba etSabounse placentaisement dans I'espace vide
laisse par le voyageur anglais entre le Oued el-Malehh
et Dousan (2), qui est bien notre Doucen et le Deusen
de Leon. Taolgha, ecrit Tulgah par Shaw et Theolaca par
Leon, est aussi mentionnee par le Bekry (3), qui I'ortho-
graphie Thaoulqah:il la place au nord de Denthyous,
dont le nom a ete parfaitement lu par M. Quatremere ,
bien que ce savant n'y ait pas reconnu le Ranteuse de
Shaw (4), identique dans la prononciation anglaisc ^
(i) Page loC.
(i) Shaw, tome i, page iG6.
(3) Bekry, page 96.
(/i)5/irt«', ubi supra.
( III )
Benthyous est a line journee tie Beskarali , aiissi hicn
que Thaoulqah. Cette derniere etape s'effectuc en {)as-
santsoit par Lichana qui est a i heure de Thaoulqah
et a 5 oil 6 heures de Beskarah, soil par Ouiillel qui
est a 4 heures de la premiere et 6 heures tie la se-
conde. Dans Lichana et Ourillel on n'a aucune peine a
reconnaitre Leshanah et Ourelan de Shaw.
Je vais soumettre a un exanien seniblbble un itint;-
raire de Mehdyah a Beskarah envoye d'Alger par nos
officiers tl'etat-major, et qui ne me parait pas trace avec
toute I'exaclitude desirable sur la carte lithographiee
du Depot de la guerre. Le voici :
Depart de Medea.
Passage de la riviere de Tit^ry.
Barbanaguia 6 heures.
Tilery , camp 7
Hajer, sur une riviere de meme noin. 7
Sidi-Issa , pres du Ouad el-Jenan . . 7
Sidi-Hazerac, prfes du Ouad el-Lahm. 7
(Les Arabes de ce pays sont , entre
autres, les Aulad el-Madi).
Chelal, au-del.i du Oued el-Sidra,
et a 2 heures du Chott 7
(Route tie Constantine, h gauche;
route du desert allant au Ouad el-
Gedid , a droite).
Allant au Ouad el-Gedid , Seada. . i jour.
Halte sur les bords tie la Deffla. . . 7 heures.
Moelhamel i
Sadauri i
Dossal I
EI-Toual, sur le Ouad el-Gedid. . . 4
( En remontant le Ouad el-Gedid vers I'cuest , on trouve
les Aulad-Jellal et autres tribus.
A Test, le long de la riviere , sur les deux rives , et a une
flistancc successive de i a 2 heures , les boujgades sui-
( ^'2 )
vantes:Laua, Schara , Meckadenia, I'.en-Tias, Hauril-
las, Zaoud ben Guard, Bigo, Meualiela, Taoud el-
Charfa.Lili, Mouach , Sidi-Ocuba, Tbouda, Gartba,
Seriana, Sidi-Kalil, El-Driz, Chatma, Felial.
Beskara , ville.
Bezcbagron, Lecbana, Zeatcba , Farfar, Taoug el Bey,
Focala , El-Aineri ).
La premiere station est a Barbanagnin, qui me
parait n'etre qu'une faute de copiste pour Barrauaguia
ct representer iles-lors le Burwakeah de Shaw, plus
correctement Barouaqyah (lieu abondant en barouaq,
qui est line plante epineuse); la distance indiquee cadre
parfaitement aveccette coincidence, et la riviere de Ti-
lery correspondrait des-lors au cours d eau qui , sur la
carte de M. Lapie et sur celle du Depot, afflue au coude
le plus oriental du Scheiif ; I indication dece cours d'eau
est fourniepar un relevenient anglais que j'aurai occa-
sion de citer plus loin.
Titery, dont le noin s'e'crit plus correctement Ty-
thery, est bien connue comme le camp du bey qui
conimandait jadis a toute la province, et comme situe
au pied dcs niontagnes appelees par les Arabes Hha-
gjar Tylhery (les rochers de Tythery). Hajer se retrouve
dans ces memes Hhagjar ou rochers. Sidi Yssa et Ouad
El-Jenan sont les inenies que Sydy I'say et le Oued
El-Genan, deja mentionnes plus haul. Sidi Hazerac pres
du Ouad El-Lehm, ne pent etre autre qui le Sidi Hadje-
rass de Shaw, pres du Oued el-Lahhm, ct je ne puis
me rendre raison du double emploi commis a cet egard
sur la carte lithographiee du Depot de la guerre. Chellal
se trouve determine par sa distance a I'egard de Sidi
lladjerass combinee avec celle de i heures a legard du
Schath; et la petite riviere Oued el-Sidra, qui en est
(ii3)
voisine,tire son nom des jujubiers- lotos, qui sans doute
croissent a sa source ou sur ses rives. J'ai constate a
dessein , pour en tirer parti p lus tard , que les Aouled-
Madhy habitent au-dela de Sydy Hadjerass et pres de
Cheilal ; Shaw les indiqueaussi dans ces parages sous
la forme Welled Maithie. Seada, qui suit, est'evidein-
nient le daskerali d'Abou-Sa'adah, deja indique plus
haut. La riviere de Deffla nous rappelle naturellenient
le Ain Difla de Shaw, plus correcCement A'yn el-Defalay
Qla source de I'Oleandre). Moel Hamel et Sadauri sont
inconnus, et prendront aisement leur place dans le vide
qui existe entre A'yn el-Defalay et Deousan, qu'on ne
pent meconnditre dans le Dossal de notre iiineraire ; la
carte lithographiee du Depot de la guerre incline done
cette route beaucoup trop vers I'Ouest. Le Ouad el-
Jedid est bien le Oued el-Gedy ou riviere du cbevreau ,
qui est suffisamment connue. Shaw maique non loin de
ses bords les Welled Jillel , qui sont evideninient les
Aulad Jellal de I'itineraire ci-dessus.
La serie des bourgades indiquees ensuite sur les
deux rives du Oued el-Gedy , en descendant vers lest,
se retrouvepresqueentierenient dans Shaw, oi'i I'onpeut
relever successivement, dans I'ordre de notre itineraire,
Lewah, Syrab, Mukadmah, Banteuse, Oiirelan [Zaoud
Ben Ouard manque), Beegoe, El-menalah {^Taoud-el-
Charfa manque), Meleely, Oniash , Seedy Occ'ba ,
Toodab , Carta , Seriana [Sidi-Kalil et El-Driz nian-
quent), Sbitmab (^Felial manque), Biscara, Boosha-
groone,Lesbanab , Zaatshab , Farfar, Tulgah {Focala
manque), el Lamree.
Je m'occuperai encore, sous le meme point de vue ,
d'un autre itineraire envoye d'Alger, lequel est cense
conduirede Mebdyah a Gonstantine, et dont I'emploi
8
• ii4 )
trop confiant a defiguni en plusieurs parties , d'une ma-
uierc notable , la carte litliographiee dii Depot de la
guerre.
Depart de Mfcliah.
Schkaou (ou Sebkaou) lo heures.
Beroiiakie 9
Oued e!-Chehir 8
Oued Oullad el-Ziana 9
Oued Oullad el-Zenin 9
Clieliain 10
Sidi-Saliid 7
SIdi HIssa '2
Schellal, ville des OuUad-Midi 9
Messila ro
Sarther 7
Ben-Sidi-Sahid 10
Const Sntiue 7
Ilelevons d'abord , sur cette route, tout ce qui nous
est deja connu , sans prendre garde aux indications des
distances: Nous avons d'abord Berouakie, qui est bien le
Burwakeabde Shaw, etquis'ecritpluscorrectenientBar-
ouaqyah ou Berouaqyeh; le Oued ei-Chebir est egale-
ment le Wed Ashyre ou Shaier de Shaw, c'est-a-dire la
riviere de I'Orge, Oued elSha'yr, Plus loin , en suivant
de proclie en proche, sur la carte du chapelain anglais,
la direction de cette route , nous trouverons Shilellah, qui
doit coincider avec le Chellala de I'itineraire ci-dessus.
Sidi Hissa represente p.ireillenient le Sidi Eesah de
Shaw, que nous avons deja mentionne plusieurs fois, et
dont la veritable orthographe est Sydy i say. C'est ainsi
que nous arrivons, par plusieurs etapes connues, a
Schellal, ville ties Oullad Miuli ^ que nous avons tout-a"
Iheure trouvee dans I itineraire de Mehdyaii a Beskarah,
ou elle est marquee sous la torme Chellal^ precisement
dans le p^'»JS hiibite par los Aoulad-Madhy , et comme
( 'i5)
situee en menie temps k i heures cle marche seulement
du Scliath. Inimetliatement apres vient Messila on plu-
tot El-Mesy!ah, tropconnuepourqna son egardaiicune
equivoque soit possible, et dont la position s'accorde
d'ailleurs amerveille avec les indications qui precedent.
Le.reste jusqu'a Gonstantine est tout-a-fait ignore.
La serie de concordances successives entre Mehdyah
et El-Mesy!ah se compose d'anneaux trop nombreux
pour qu'on puisse admettre que les deux routes qui ot-
frententreelles tanl de reperes,puissent etre totalement
differentes; les mesureshoraires des distances necadrent
point, il est vrai , en beaucoup d'endroits; niais loin de
trouver dans cette circonstance un motif qui justifiat
I'emploide I'itineraire actuel de maniere a creer arbitrai-
renient des details topographiques denues de tout autre
fondement, j'y apercois une cause de rejet absolu de
I'itineraire ou an moins des indications de distances
qu'il presentent. Que Ion juge de Tetrangebouleverse-
nient que la construction litterale d'un tel document a
cause sur la carte du Depot de la guerre , par ce seul fait
qu'El-Mesylah s'y trouve transporte a moitiechemin de
Sethyf a Gonstantine, toutes les rivieres, tousles noms
de lieux etant ainsi en double emploi a d'enormes dis-
tances de leur veritable place: des lignes de route ima-
ginaires semblent Her ces positions a des points connus
appartenant a d'autres itineraires. Te nff saurais trop
m'elever contre cet abus de liirnes de communications
indiquees la ou des documens precis n'en constatent
point I'existence : e'est un veritable piege, un dedale
presque inextricable prepare aux verifications et aux
recherches des geographes qui tentent de se rendre
compte des elepiens employes.
8.
[ ti6)
EXTRAIT
Du tapport des directeurs de la Societe americainc de
colonisation pour Vannee i833. (i)
Ce rapport commence par appeler I'attention sur les
expeditions qui ont ete dirigees sur la colonic de Libe-
ria, pendant le cours de I'annee i833.
Le 21 avril , le brick V Ajax (capitaine W. -H.Taylor),
fit voile de la Nouvelle-Orleans pour Liberia, avec i5o
emigrans dont 102 de I'etat de Kentucky, 44 <lii Ten-
nessee, el le restc de la Nouvelle-Orleans, de Saint-
Louis et de rOliio , la plupart esclaves liberes. Le cho-
lera, qui coniniencail justenient a sevir a la Nouvelle-
Orleans a cette epoque, fit perir 29 de ces emigrans.
L'expedition, forcec de s'arreter dans une lie des Indes-
Occidenlales, n'arriva a destination que le 11 juillet.
Le 10 niai, un petit convoi de colons, la plupart de
I'etat de New- York, s'enibarqua a Philadelphia snr le
brick V Americnin , capitaine Abels.
Le capitaine Knapp , commandant le batiment le
Jupiter, mit a la voile le 5 noveinbre avec 5o emigrans,
dont 44 esclaves liberes , presque tous de la Virginie. II
fut suivi, le 25 du meme mois, par le brick r Argus ,
capitaine Peters, lequel, en outre de quantite d'effets et
de provisions pour la colonic, recut a son bord, a Nor-
folk, 5 1 passagers dont 35 esclaves rachetes, du Mary-
land , du district de C()lund)ia et de la Virginie.
La conunission regret te davoir a apprendre que I'etat
(l) Voir The /imerican ^Repository atid colonial Journal , vol. IX ,
n" 11. Wasliiiiglcii, fevii<.T i834-
( XI7 )
sanitaire de Liberia a ete pen satisfaisant, siirtout parini
ks clerniers arrivans. Siiv 649 eniigrans amenes par les
batimens Lafayette , Roanoke^ Jupiter, American , Jjnx
et Hercule, il en est mort i34- Les funestes effets de
la nialadie ont ete ressenlis generalenient, et plus par-
ticiilierement dans les lieux les plus eleves et les plus
eloignes vers le nord. Cependant !a commission croit
devoir attribuer cetie grande mortalite plutot a Tinsalu-
biite extraordinaire de la saison ,a I'absence des liommes
de I'art, au manque de precaution et a I'usage de mau-
vais remedes de la part des colons, qu'au caractere mal-
sain et pernicieux du climat. Les directeurs sont conlir-
mes dans cette opinion par le recensement qui vient
d'etre fait a Liberia , et qui , bien que peu favorable sous
le rapport sanitaire, ne presente point de resnltats ca-
pables de faire desesperer du succes. Le nombre total
des emigrans , depuis le commencement de la colonisa-
tion , a ete de 3,i23, y compris les Africains racbetes
(dont partie prise dans le pays nieme); la population
actuelle de la colonic est Kxee a 2,816, non compris une
cinquantaine dindividus absens lors du recensement,
Dans ['opinion du docteur Mechlin , letablissement
qu'on vient de commencer a Grand-Bassa est plus sa-
lulue (|ue celui de Monrovia, et toutes les expeditions
futures devraient y etre envoyees. tin territoire d envi-'
ron i5o a 200 milies carres, situe pres la riviere Saint-
Jean, vient d'etre ajoute a la colonic, el ne laisse ricn
a desirer sous le rapport de la fertilite, de la position et
des hois de construction. Environ i5o colons s'y sont
etablis il y a une annee, el deja les maisons sont con-
struites , les lots sont enclos , et la culture fait de grands
progres. Lanouvelle ville a ete appclee Edina,en I'lion-
neur de la liberalite des habitans d Edinibouro en Ecosse.
( ii8 )
Les approvisionneniens soiit plus faciles k Grand-Bassa
qu'a Monrovia ; la riviere Saint-Jean aboncle en poisson,
et le niais et une grancle variete de vegetaux peuvent y
elre ciiltives avec succes. Les naturals du voisinasrc ma-
nifestent les dispositions les plus aniicales, el plusieurs
chefs de Bassa ont exprime leur desir de conceder des
terres a la societe.
La prosperite commerciale de la colonic va toujours
enaugmentant : plusieurs naviresy ont ete construits, et
le Liberia herald i\ public unc liste d.e 60 a 70 arrivages
dans le cours des huit derniers niois. Des niesures ont ete
prises afin d'explorer le pays dans i'interieur et d'ouvrir
des communications comnierciales avec les puissantes
tribus de linterieur. II est a regretlcr cepcndant que les
profits immediats du commerce soient generalement
preferes a ceux plus lents, mais plus surs , de I'agricul-
ture, et que cctte derniere branche de prosperite n'ait
pas entierement realise les esperances concues prece-
deniment. Cependant les t'ermes des Africains ra(;iietes
ontbien recompense leurs travaux, et les colons d'Edina
paraissent compter principalement sur leurs ressources
agricoles pour augmenter leur prosperite.
L education publique continue a s'ameliorer. Presque
toutes les families veulent donner a leurs enfans les
bienfalts de I'instruction, et les ecoles, au nombre de
six (dont trois sous le patronage d'une societe de dames
de Pbiladelphie) , sont bien dirigees et tres frequentees.
Get objet important rccoit beaucoup d'encouragement
de divers particuliers et associations ; plusieurs institu-
teurs ont offert leurs services, et la plupart des londs
necessaires a leur etablissement sont trouves.
Tous les Africains indiirenes situes dans le voisinage
de la colonic sont disposes a recevoir les elemens des
( 119 )
arts et du christianisme ; pliisieurs ont oftert des conces-
sions de terres, a la seule condition de donner a leurs
enfans une education anglaise.
Quel(^ues missionnaires de diverses communions sont
arrives a Monrovia , entre autres M. W. Anderson , qui
s'est rendu chez les J^yes^ tribu du cap Mount, non-
seulement pour precher I'evangile aux adultes, mais en-
core pour enseigner la langue anglaise aux enfans.
Dans un rapport special , posterieur a celui qui pre-
cede (i), on lit le tableau suivant :
« Depuis I'annee 1820, les recettes et depenses et le
nombre des eniigrans, pour chaque annee, ont etc
comnie il suit :
AKNtES.
RECETTES.
DEPENSES.
EMIGRANS.
1
1820-22
5,627
66
3,785
79
1823
4,798
02
6,766
17
390
1824
4,379
89
3,861
42
1825
10,125
85
7,543
88
1826
14,779
24
17,3lG
94
> 781
1827
1828
13,294
13,458
94
17
13,901
17,077
74
12
1829
19.795
61
18,487
34
1830
26,583
51
17,637
32
259
1831
27,999
15
28,068
15
441
1832
40,365
08
51,644
22
790
1833
37,242
46
35,637
54
108
2,769
i
II a ete adopte , dans la reunion generale des socie-
tairesdu 3o Janvier i834, diverses resolutions nouvelleS
ou modificaiives , concernant 1 organisation interieure
de la colonic.
(1) AttiencAn Repotitory, e/c. , vol. x , n" I.
( I20 )
MEMOIRES
De i'Academie americaine des Sciences et Arts de
Cambridge.
Le premier volume (nouvelle sene)du recueil de I'A-
cademie americaine des sciences et arts (Cambridge,
i833), contient plusieurs articles interessans. Nous dis-
tinguons entre aulres les deux suivans, dont nous don
nerons une jinalyse, comma ayant plus specialement
rapport a la stalislicjue et a la geographic.
1° Observations siir la longevite et la duree de la vie
ana: Etats-Unis , et plus particulierement dans Vetat de
New-Hampshire i avec des remarques comparatives sur
d'autres pays , par J.-E. Worcester.
Dans ce petit e'lat de New-Hampshire , on a compte,
de I'annee ij32 a 1824 > c'est-adire en 98 ans, 98 per-
sonnes ayant passe I'age de cent ans, et il estaremar-
quer que les exemples de la plus grande longevite sont
fournis par des emigrans europeens : Zaccheus Love-
vsrell , Anglais, a atteint I'age de 120 ans; Robert Met-
lin, Ecossais , celui de 1 10 ; et William Scoby, Irlandais,
celui de 1 10 ans.
Le docteur Belhkap, historien du New-Hampsliire,
affirme que les premiers planteurs du district de Lon-
donderry ont vecu I age nioyen t'e 80 annees.
U'apres le releve des bills de mortalite de 32 villes ou
villages , pendant une pei'iode de 21 ans , on a calcule
que dans I'etat de N;^w^-nampshire, la mortalite annuelle
( '^I )
est dans le rapport de i a 83 ; en France, elle est conime
I a 3o J en Suede, conime i est a Sp; en Angleterre,
comme i est ii 49 5 ^^ Russie, comme i est a Sg.
En 1784 , Kian-Long , empereur de Chine , fit faire le
denombrement de I'empire , et sur une population esti-
mee 200 millions d'individus , ii ne s'en trouva que 4
au-dessus de 100 ans. La Suede, en i8i5, comptait
9 centenaires sur 2,465, 066 habitans. L' Angleterre , en
1821, en avail 168 pour 9,880,461 ; I'Ecosse, 102 pour
1,936,706; rirlande, en i8a4j 349 pour 6,801,827
habitans.
II resulte des tableaux etablis par M. Worcester, que
le New-Hampshire (E. U.) f'ournit un nonibre propor-
tionnel de centenaires, bien plus considerable que la
Suede et la Russie, pays qui ont fourni les exemples
les plus frequens dune longevite avancee.
Un autre tableau contient les nomS et les lieux de re-
sidences de i3o personnes des Etats-Unis qui ont atteint
I'age de no ans passes; 7 sont arrives a i3o ans; 7
autres a i33, i36 et 137; une a i42 , une a i43, et une
negresse nommee Flora Thompson, a i5o.
Ces faits detruisent les assertions de plusieurs ecri-
vains qui ont pretendu que les habitans des Etats-Unis
vivent moins long-temps que les Europeens.
Le docteur Ramsay, dans son Histoire de la Caroline
du Sud, dit que quelques emigrans allemands, francais,
irlandais, ecossais, anglais, etdes parties septentrionales
de rUnion , y sont parvenus a I'age de 100 ans et nieme
de no ans, tandis que peu de naturels du meme eta!;
passent 80 ans. La plus grande partie des cas remarqua-
bles de longevite se trouvent dans les etats meridionaux
de PUnion; mais les individus qui les presentent sont
venus pour la plupart des etats septentrionaux de I'Eu-
( 122 )
rope ou de I'Afrique. II piiraitrait ainsi que le chaiige-
ment de cliniat est favorable a la prolongation do I'exis-
tence, connne le renouvellement de lair est utile a la
sante.
C'est un fait hien etabli (juo les femmes vivent plus
long-temps ({ue les honunes. Selon les observations du
docteur Price, la proportion entre les deux sexes, jus-
qu a I age de 80 aiis, est comme 49 a 34 5 "lais P«sse cet
age, on trouve plus d'honimes que de femmes. Sur pS
individus habitant le New-Hampshire, ages de 100 a 1 10
ans, il y avait 69 femmes et 34 hoinmes; 5 personnes
ayant passe no ans etaient toutes du sexe masculin. La
majeure partie des individus plus tjue centenaires, qui
existent aux Etats-Lnis , sont du meme sexe.
M. Worcester remarque que les centenaires appar-
tiennent generalement a la classe pauvre et laborieuse;
on en compte tres peu parmi les gens fortunes ou ver-
ses dans les sciences et la litterature. On a vu rarement
des souverains passer ieur 7o'=annee , et sur 3oo papes,
7 seulement ont atteint 80 annees.
Le meme volume contient une excellente Description
mineralosiqne et geologique de In Nouvelle-Ecosse ^ par
MM. Jackson et Alger. Cette presqu'ile, situee entre les
43 et 46° de latitude nord, et entre les 61 et 67° de
lon'^itude ouest de Greenwich, a pres de 3oo milles de
longueur et i5o de largeur, ou environ i5,ooo milles
de surface carree.
Le pays est parcouru par trois lignes distinctes de
hauteurs {High lands^ dont deux sont connues sous la
designation de montagnes septentrionales et montagnes
meridionales, els'elevant rarement a 5oo pieds au-dessus
du niveau de la mer ; la troisieme chaine se compose de
collines arrondies. Les montagnes du nord formant la
( »23 )
cote sud-ouest tie la Nouvelle-Ecosse , s'etendent, sans
line seule interruption, I'espace cJe i3o milles, el pre-
sentent a la nier line insurmontable barriere ; celles du
Slid sont bornees au nord et a I'ouest par une vallee a
travers laquelle la riviere Annapolis decrit un cours de
plus de 80 milles.
Le meme volume renferme des observations meteoro-
giques faites par le docteur Holyoke depuis lySG jus-
qii'en 1829. W.
RAPPORT VERBAL
Sur la IS oinenclatui-a geogrdfica de Espana ,
DK M. CABALL.ERO ,
Fait a la seance du 22 aout 1834,
Par M. n'AvEZAC.
Messieurs,
M. Firmin Caballero a publie a Madrid et fait parvenir
a la Societe de Geograpbie un petit volume intitule :
Nomcnclatura geogidphica de Espaiin , dont je viens
vous rendre un conipte sornmaire.
Le but de I'auteur a ele de passer en revue les noms
geographiques de la Peninsule, pour les soumettre a
une classification fondee sur I'analyse grammaticale, et
recbercher, dans leiir signification , le motif de leur
applicatiort aux localites.
Dans I'ensemble de la nomenclature topograpbique
de sa patrie , M. Caballero a cru devoir distinguer sepa-
rativement les noms proprement dits, les sunionis,et les
particules qui servent a Her le surnom an nom princi-
pal; puis il a examine quclles especes d'alterations mo-
difient le plus ordinaireinent les denominations de
lieux ; enfin il a consacre un chapitre aux proverbes , si
( 124 )
frequens dans la Peninsu'e , siir les qualites et los de-
lauls des populations ou des localites.
Quant aux nonis proprement dits , il les considerc
tour-a-tour conune simples ou composes, radicaux ou
derives, appartenant a la langue nationale, u des patois
provinciaux, oua des idiomes etrangers. Entre les patois
ou les langues des provinces, il distingue successive-
nicnt le Basque; le Li/uoiisi/i, comprenanl le Catalan,
le Valencien et le Baleare ; puis enfin le Galicien , qui
«'est autre que le Porlugais. En ce qui touche les deno-
minations empruntec's a de§ idiomes etrangers, il les
classe en celtiques, phenicienncs ou puniques, grecques,
romaines ou latines, gothiqucs et enlln arahes.
Cechapitre est la portion la plus intercssantedu travail
de M. Caballero; e'en etait aussi le plus difficile ,et I on
doit rendre justice, en general, a la sage reserve qu'il
a apportee dans la chanceuse recherche des etymologies;
mais c'est una matiere si delicate, ou I'esprit est si aise-
nient trompe par de fausses lueurs, que nialgre sa re-
serve, I'auteur s'est laisse entrainer a des conjectures el
des assertions hasardees que des etudes linguistiques
speciales lui eussentfait eviter.
Je ne m'arreterai point a relever 1 intrusion des mots
arabes ah-tlialayah (vigie) et al-meiidrah (phare) dans
la liste des noms caslillans, puisqu'ils sent complete-
ment naturalises dans la langue espagnole; mais je ne
puis me dispenser de me recrier sur le classement d'«/-
pujarras parmi les noms celtiques , comine derive de la
racine alp , dont je suis loin d'ailleurs de contester le
celticisme; mais c'est un fait historique constant, que
alpujarras estvenu de I'arabe al-bonigehit , nomdonne
a ce canton a cause des tours nombreuses qui y avaient
ete elevees. C'est egalement un fait historique que Gi-
( 1.5 )
braltar vient de Gebel-Tlidreq et nom de Gehel-Tharjf.
Jlpuente me parait representer exactemerit le latin ad
poiitem , et je ii'y saurais reconnaitre, non plus que dans
ses analogues, Ihybride produit de I article arabe et
d'un nom castillan. Caldf eX Benica/df qua M. Caballero
rapproche de Calat , Alfdques et Benalfaqid, dont il
veut trouver la racine dans al-zaque , ont evitlemment
uiie toute autre origine, et 11 est surprenant, au nioins
quant au dernier nom, que le mot si coiinu de faqjh
ne soit point venu a la pensee de I'auteui-.
Dans les etymologies basques , il me semble avoir trop
legerement accorde creance aux reveries de quelques
enthousiastes qui ont deraisonne sur leur langue mater-
nelle. La signification actuelle dumot ola (cabane), celle
d II mot egui (colline) , me semblent , par exemple,
offrir un caractere de simplicite et de verite bien prefe-
rable a I'explication torturee de ses guides. II meconnait
frequemment lui-meme , dans sa traduction des noms
basques, les regies de la syntaxe decetidiome, dans
lequel,par exemple, Iturbide ne signifie point, comme le
dit M. Caballero , Fontaine du cheniin , niais bien Cbe-
min de la fontaine; ou Echegojen et Goyeneche n'ont
point un sens identique, car I'un exprime un haut de
maison , lautre line maison den haut 5 ou Elexa\>eilia ne
veut pas dire lebas de I'eglise, mais feglise basse, etc., etc.
On reconnait qu'il a manque a M. Caballero , pour le
basque, I'etude des deux excellens ecrits deM.Guillaume
de Humboldt {Berlchtigungcn und Zusdtze zum Mithri-
dates^ et Prii/ung der iintei suchungen iiber die urbewoh-
ner Hispaniens verinittelst des vaskischen spi-ache) ^ ou il
eut trouve I'analyse et I'application la plus philosophi([ue
qu'on ait encore faite de ce curieux langage 5 et pour
I'arabe, i! a eu tort de negliger les secours nombreux
( ^^e )
que lui eussent offerls la Bihiiothecn (trnbi('0-his])ana de
Casiri, et la description de I'Espngne du scliei-yf El-
Edrysy, traduitc et commenlee par Conde.
Passant des detads a lensemble, je me demande si
I'ordre dans lequel ^I. Cabaliero a classe les divers Ian-
gages n'est point susceptible d'amelioration : il me
senible, en etfet, que le castillan , K; basijue, le limou-
sin, le galicien , le celte, le phenicien, le grec, le latin,
le gothique et I'arabe, ainsi ranges, n'offrcnt point
entre eux la serie la plus rationnelie a laquelle il soit
possible d'atteindre; je verrais plus d'avantages a rap-
procher niutuellenient le grec, le latin, et le groupe que
j appelleraidu nomcommun qui lui appartient, romane,
sauf a le subdiviser en Catalan , portiigais et castillan 5
puis a cote je voudrais placer le basque , qui dans son
etal actuel doit aux langues neo-latines la majeure par-
tie de ses mots; puis d'autre part, le celte et le gothi-
que ;eteiifin dans une derniere categorie, le punique
et I'arabe, mettant ainsi cote a cote les langues que des
racines communes et un systeme peu dissemblable da-
nalogie grammaticale doivent reunirpar families.
Apres les noms, iM. Cabaliero traite des surnoms ,
qu'il classe en douze articles ditferens , suivant qu'ils
indiquent une propriete royale, ou une domination
seigneuriale, soit laique , soit ecclesiastique; qu'ils sont
empruntes de la ville voisine, ou de la circonscription
territoriale, ou de (jiielque personnage, ou dune ri-
viere; qu'ils enoncent, entre plusieurslieux homonymes,
I'etat relatif d'anciennete , d'importance, de situation;
ou qu'ils font allusion d'une mauiere absolue k la posi-
tion topographique , aux productions naturelles ou \xt-
dustriellos,ou bien cnfin a c{uelque souvenir historique.
Certains li«;ux sent indifferennnent designes par deux
( 127 )
on plusiours clenominalions diverses^ M. Caballero ii'a
point oublie den pailer.
Puis il vient aux particules qui entrent dans la com-
position des noms geographiques espagnols : il y recon-
nait tantot des prepositions, tantot des adverbes, sou-
vent un simple article.
Ensuile il traite \\es figures, qui le plus liabituellement
alterent les denominations primitives, telles que la syn-
cope, I'apocope, la synalephe, I'apherese et lametatbese.
Le livre tout entier, mais cet article surtout, sont em-
preints dun certain vernis scolastique auquel les
etudes modernes ne sont gaere plus accoutumees.
Enfin le dernier tiers du volume est consacre aux
proverbes et dictons populaires relatifs aux localites, a
leurs babitans, a leurs productions, etc. , etc., distri-
bues en une serie de vlngt paragraphes. Cette partie
n'est pas la moins curieuse de I'ouvrage.
Sauf ce dernier chapitre, qui parait aussi complet
qu'il ait dependu de Tauteur de le faire, et qui ne pent
etre considere, au surplus, que comme un interessant
nppendice a ses considerations sur la nomenclature geo-
graphique de I'Espagne, on ne pent s'empecber de re-
gretter que M. Caballero se soit borne a tracer un cadre
sans le remplir; il nc me parait point douteux, toute-
fois, qu'il n'air dresse pour lui-meme un complet inven-
taire de cette nomenclature dont il a fait une etude si
perseverante; c'est un travail qu'il ne peut etre qu'utile
de publier, et dor.t il serait a desirer que Ion possedat
les analogues pour les autres contrees du globe : les
noms locaux ne sont que trop souvent defigures a I'e-
tranger, et c'est un service a rendre que d'en fixer la
veritable orthographe, fondee sur I'analyse grammati-
cale et la signification originelle.
( 1^8 )
NOTICE
SUR UN OUVUAGE »E M. LE DOCTEDR GUTETAND,
INTITULE :
Tableau dc Vetat actucl de Veconomie rurale dans le
Jura , et considerations sur la geographic physique de
ce departemcnt,
Lue a la Societe de Geographic , dans sa seance du 4 juillet i83/, ,
Par M. RoUX DE RoCUELLE.
Les etudes geographiques nous paraitraient incom-
pletes si elles se bornaient a de simples recherches sur
la forme de la terre, suv le trace de ses con linens, des
chaines de montagnes qui les traversent , des fleuves qui
en parcourent les regions inferieures. Tous cesaccidens
de la surface du globe nous conduisent a d'aulres con-
siderations sur les couches dont son enveloppe se com-
pose etsur laparure dont elle est revetue. Nous regar-
dons la terre comme I'habitation de 1 homnie : tout ce
qui peut concourir au soutien de son existence et on
developpement de son bien-etre est digne d'interet
pour nous.
De la resulle une alliance nalurelle entrc la geogra-
phic et quelques autres sciences egalement litfes a I'e-
tude de la terre ou a celle de la race humaine. Nous ai-
mons a chercher quels rapports offre la situation d'un
pays avec les plantes dont il est orne , avec la culture
qui peut encore Tenrichir; et nous pouvons, sous ce
( 129 )
point de vue, puiser une nouvelle instruction, dans nn
ouvrage qui vient d'etre offert a la Societe par M. le
docteur Guyetand, sur I'etat actuel de re'conomie ru-
rale dans le Jura, et sur la geographie physique de ce
departement.
Un precis raplde sur la situation de cette contree de-
vient necessaire pour que Ion puisse suivre avec plus
de fruit la marche de I'auteur dans les differentes par-
ties du terriloire qu'il veut parcourir.
Le Jura prend son noni de la chaine de niontagnes
qui forme sa limite orientale et qui !e separe de la Suisse.
Cette chaine, tracee dans la direction du nord-est au
sud-ouest, s'abaisse graduellement vers I'occident, par
une suite de plateaux, de vallees , de niontagnes infe-
rieures, dont les cinies sont generalement paralleles. Les
principales rivieres qui coulent dans cette direction des
vallees du Jura sont laBienne, I'Ain , la Valouse. La ri-
viere d'Ain recoit les deux autres ; elle parcourt ce vaste
plateau situe cntre les plus hautes sommites des nion-
tagnes et leurs degres inferieurs , qui descendent de c6-
teaux en coteaux jusqu a la plaine.
La plaine occupe les parties occidentales du departe-
ment : elle s'incline vers le lit du Doubs et vers celui
de la Saone par des pentes insensibles; c'est au nord-
ouest quelle a le plus d'etendue. Les principales rivieres
qui la traversent, et dont le cours general est d orient
en Occident, sont : lOgnon , la Loue, la Cuisance, la
Glantine, la Seille, la Valliere.
Cette difference entre les deux grandes parties du
territoire fait deja reconnaitre que I'une et I'autre ne
doivent pas avoir les menies productions. Celles de la
niontagne et celles de la plaine sont essentiellenient dis-
tinctes : il s est meme forme dans la zone qui les separe
9
( >3o )
une region inlermediaiie (jiii occupc tout le premier
rang lies collines : cette contree est celle ties vignobles;
la r('£;ion tie Li plaine est consacree aux ct?reales,et celle
(!es niontagnes lest aux paturages et aux forets. C'est en
t^ntiant dans les details de ccs trois "landes divisions
que ion est conduit a examiner les dil't'eientes propriett?s
de leur sol , leurs productions naturelles , et les cultures
varices dont elles sont susceptibles.
La region qui se presenle la premiere est celle des
uiontagnes : elle est la plus etendue; elle occupe les
deux cintjuiemes du departement; et connne t;lle pre-
sente dans ses plus hauls sommets et dans ses parties
infeiieures deux caracteres bien distincts, I'auteur la
divise en haute et basse inonta£;ne. La haute uiont;i£fne
reiiferme le vallon de I Orbe , la vallee de la Bicnne ,
celle du Grandvaux; la basse montagne, situee a I'occi-
dent de la premiere, comprend la Combe d'Ain, et les
plateaux et les vallees qui se prolongent du nord est au
sud-ouest, depuis les hauteurs de Salins jusqu'au bourg
de Thoirette , qui Jut le berceau de Bichat , et qui ter-
mine le departenient au midi.
La pierre calcaire dont se compose le massif de ces
montagnes se partage en deux varietes : eJle est dure ,
compacte, et dun grain fin dans les chainons les plus
rapproches des Alpes ; e'.le a un tissu lache et a gros
grains dans les chainons inferieurs, et cette seconde
qualite renlerme un grand nombrc de zoophites et de
coquillages petrifies. Les mines de fer, les tourbieres,
les carrieres de gypse de cette contrt»e, y tlonnent lieu
a des exploitations utiles.
Les arbres resineux croissent spontanement dans la
haute montagne, et les forets y sont principalement
coniposees (\o sapins proprement dits, et d'epiceas.
( i3^ )
Quelques autres essences de bois y sont aussi melees;
mais, a I'exceplion du hetre, elles sont tres peu noin-
breuses.
Dans les forels de la basse montagne , on reraarque
le cbene , I'erable, lefreno, le betre, I'orme, le peu-
plier, le lilleu!. L'auteuv a rassemble dans son ouvrage
une nomenclature etendue des arbies, des aibrisseaux,
des planles herbacees qui croissent dans les differenles
parties de ces regions, ou elles caracterisent a-Ia-fois le
climat et la nature du sol : il a distingue les plantes qui
croissenl dans les lieux les plus eleves ou sur les pla-
teaux inferieurs, et celles que Ion y trouve an bord des
tourbieres ou dans les prairies les plus ferliles. Son ou-
trage pourrait servir de guide pour la geographic bota-
nique du departement du Jura, et il offre I'applicalion
de quelques vues gcnerales que j'ai eu I'bonneur de vous
soumetlre dans un precedent Meinoire.
Lorge, I'avoine, la pomme deterre, sont les seules
cultures qui puissent reussir dans la haute montagne :
I'entretien des troupeaux, la fabrication des fromages ,
y deviennent la principale ressource des habitans. Les
chalets ou 1 on exerce cette branche d industrie sont si-
tues au milieu des hauts paturages : on y monte avec
les troupeaux vers le commencement de juin ; on les
quille des le 9 octobre, et Ion s'applique, pendant le
reste de I'annee, a la culture de la terre ou a I'exercice
de quelque profession mecanique; genre d'industrie qui
distingue les habitans des regions les moins fertiles , et
qui leur procure une aisance dont ils seraient prives par
I'ingratitude du sol. Dans la basse monlagne, ou la terre
est plus feconde, on a donne plus de developpement a
I'agriculture. On joint aux graines que nousavons nom-
necs le iroment d aulunme, le seigle , les pois, les vesces,
( l32 )
Jes lentilles, le mais, el Ton fait alterner la culture des
planles alimentaires par ties assolemens regulicrs. Les
ceieales d'automne sont cultivees la [jremiere annee ;
on donne la seconde aux cereales dii printenips, la troi-
sienio aux legumineuses, et une partie des champs est
niise en jachere.
On fait aussi eiitrer dans cettc culture la navette, le
colza, la canieline, d'oii Ion extrait de I'huile j la rave,
le choux, le chanvre, lelin,et tjuelques autres semis,
tels que le trelle, reserves a la consommation des
bestiaux.
Le vignoble, qui se prolonge sur la chaine occlden-
tale du Jura, et qui en occupe toutes les collines infe-
rieures, est la region la plus productive de ce departe-
ment : les villes de Salins , d'Arhois, de Polignv , de
Lons-le-Saulnier, de Saint-Amour, se trouvent place'es
dans la direction de cette ligne de culture, et la ville de
Dole est a I'extremite d'une seconde lisiere de vignobles
qui s'etend vers le departement de la Haute- Saone.
Des bancs de marne, de I'argile, des couches calcaires
auxquelles sont melees de nombreuses coquilles d'ani-
raaux marins, fossiles ou petrifiees , composent en ge-
neral le sol de cette region. La culture de la vigne y
commence au pied des roches calcaires, a 4oo metres
environ au-dessus du niveau de la Mediteri-anee. On
evalue a une surface de plus de seize niille hectares car-
res le vignoble du Jura : I'auteur indique les differens
plants de raisin que Ion y cultive, et les qualites de vins
les plus renommees, telles que celles de Salins, d'Ar-
bois, de I'Etoile, de Chateau-Chalon. Tous les arbres
fruiliers reussissent dans le vignoble ; les noyers , les
cluitaigners , y e'taient autrefois nmltiplies; mais a me-
sure que Ion a etendu cette culture, elle a envahi les
( i33 )
forets du haut des collines et !a phi part des plantations
inferieures.
Toute la contree du vignoble est arrosee d'lm gi^nd
nombre de ruisseaux, et Ion a remarque que la pluparl
des sources salees s'y trouvaient egalement. Celles de
Lons-le-Saulnier et de Salins ont dorine lieu a des re-
cherclies et a des decouvertes de mines de sel dont nous
avons rendu compte a la Societe.
La piaine du Jura peat etre consideree conime un
terrain d'alluvion ou sont melees des substances cal-
caires, divisees en sable, en gravier, en galets : elles re-
posent sur des bancs de marne ou d'argile, et sont i-e-
couvertes d'une couche de terre vegetaleplus ou nioins
profonde, plus ou moins melee aux autres substances
de sa base.
Cette region renferme entre le Dorain et la Seille de
nombreux etangs et des terres marecageuses. L'abaisse-
ment ct le peu de pente du territoire en rendent sans doute
le dessechement tres difficile, et les plaines voisines du
Doubs et de la Loue y sont egalement exposces aux
inondalions. II serait digne des soins du gouvernement
d'affaiblir par de sages mesures cette cause de dommage
et d'insalubrite : I'auteur croit ce resultat possible, et
ses vucs sont celles ddn homme eclaire.
Toutes les cereales, toutes les autres plantes alimen-
taires, reussissent dans la piaine du Jura. Le froment
d'automne en est la production la plus importante; on
y a midtiplie les arbres fruitiers , le betail , les chevaux,
tons les animaux et les oiseaux domestiques. De nom-
breuses ameliorations dans la culture se sont intro-
duites depuis quarante ans dans la piaine, comme dans
le vignoble et les montagnes : I'auteur les indiquc; il en
conseille encoi'e plusieurs autres, et ce salutaire mouve-
( i34 )
ment imprinie a Tagriculture continue de faire des
progres.
Nous avons pu remarquer , en lisant cetouvrage,
combion de rapports avaicnt les productions de la terre
ayec la geographic physique dun pays , avec la nature
du sol , la distribution des eaux , le relief du terriloire et
la temperatuie du cliuial. La geographic ainsi liee aux
etudes agricoles , tend a leur donner une sage direction:
elle merite d'etre envisagee sous ce rapport, et tout
nous ramene a cette observation generale, qu'une science
acquiert plus d'iniportance par lutilitc de ses appli-
cations.
L'ouvragedout nous venous d'otfrir lanalyseest celui
d'un observaieur habile et d'un bon citoyen. Ses con-
naissances en histoire naturelle lui ont permis de s'e-
tendre sur la geologic du departement du Jura, et sur
la grande variete de ses productions; il y a joint toutes
les notions de zoologie qui pouvaient se iier a son tra-
vail sur leconomie rurale, et tous les principes d'hy-
giene que lui suggerait son habilete comme medecin.
L'etude du bien-etre de ses cumpatriotes la occupe
avant tout : il sest empare avec cuipressement dun
sujet que la Societe dEmulation du Jura avait mis au
concours, et il a nierite et obtenu que la Societe cou-
ronnat son ouvragc.
( ^y- )
DEUXIEME 8ECT10N.
DOCUMENS, COMMUINICATIONS, NOUVEILES
GEOGRAPHIQUES, ETC.
NOUVELLE-GREXADE.
On lit (laiis cm rapport en date dii 2 mars i834»
adresse au congres de la Nouvelle-Grenade , pa:- le
secretaire d'etat de I'interieur et des relations exterieures
Lino de Poinbo(i), qu'il a ete deride de dresser un
atlas conipiet de toutes les provinces de la republique ,
en tracant une carle cliorographiquc de cliacune d'elles
en particnlier, et une carte generale de tout ie terrltoire.
Celte qperation, confieea deux Commissions, composees
de gens cxpeiimenles et munis de tous les pouvoirs ( t
iinslrumens necessaires, parait devoir durer de six a
hnit annees.
Ce rapport est termine par un tableau dii nonibre
iVecoles et d eleves des deux sexes, existant acluelle-
nient a la Nouvelle-Grenade. Nous donnons ci-apres ce
document.
(i) Esposicion del secrelario de cstiido en el despaclio itel interior i
relaciones exteriores del gobierno de la Nucva-Grcnad<i at congieso
conslUucional, del ano |8;)4- Uogold.
ECOLES DES
Existant en i834 a la Nouvcllc- Grenade, en distinguant
par Vancienne
PROVINCES.
Antioquia , . .
Bogota
Buenaventura
Cartagena . . .
Casanare . . , .
Choco
Mariquita . . .
Mompox . . . .
Neiva
Panama
Pamplona . . .
Pasto
Popayau . . . .
Rio-Hacha . . .
Santa-Marta .
Socorro
Tunja
Velez,
Veragua . . . .
ToTAUX . . .
METIIODE LANCASTERIENNE.
GARCONS.
Ecoles.
U
27
»
3
»
3
3
3
4
»
3
»
1
10
2
»
70
t\h\
8o(i
1,405
»
3 70
»
209
99
208
140
))
130
)>
))
54
297
123
»
3,841
FILLES.
Ecoles
Eleves.
45
TOTAL DES
Ecoles.
11
28
1
10
2
71
t\k\
850
1,450
»
32f.
»
))
209
99
208
140
»
130
5)
»
54
297
123
3,880
DEUX SEXES
celles regies par la methode Lancaster ienne de celles regies
methode.
ANCIENNE
METHODE.
TOTAL
GENERAL
des
GARCONS.
FILLES.
TOTAL DES
]£coles.
Eleves.
Ecoles.
Eleves.
Ecoles.
]Sleves.
ficoles.
Eleves.
54
1,965
14
354
68
2,319
79
3,169
42
1,269
8
255
50
1,524
78
2,974
13
325
»
»
15
325
15
325
15
331
40
562
55
893
58
1,219
8
225
»
))
8
225
8
225
6
104
))
»
6
104
6
104
))
»
))
»
»
»
»
»
26
299
16
241
42
540
45
749
17
561
«
))
17
561
20
660
11
380
»
»
11
386
14
594
22
774
»
»
22
7 74
26
914
19
4 36
7
23
26
459
20
459
42
1,829
15
336
57
2,165
60
2,895
2
163
»
))
2
163
2
163
23
729
))
11
23
729
23
729
15
815
)>
»
15
815
10
869
25
774
I
9
26
783
30
1,080
14
320
1
10
15
336
• 17
459
1
2:)
»
;»
I
23
1
23
357
11,328
102
1,796
459
13,124
530
I7,0l0l
w.
( '^8 )
SOCIETE AMERICAINE DE COLONISATION.
La Societe de Colonisation ile I'etat d ■ Maryland
avait annonce I'inlention de fornicr un etablissenient
au cap Palmas, sur la cote d'Afriijne. Scs aj^ons viennent
d'y acquerir la possession d un teiritoire de 4^0 niilles
Carres environ, s'etendant de 20 inillcsle long de la cote
sur a-peu-pres autant en profondeiir. Cette acquisition
comprend le cap et le liavre qu'on dil ctre le mcillLiir
de la cote depuis Sierra Leone Jusqu'a Fernando Po.
La situation est elevee, parait salubre et n'est environ-
nee par aucuns marais ou aniius deau slagnante^ le sol
est riche et les eaux qui le baignent abondent en huitres
et en poisson. La Societe a [)aye cc terrain , en diverses
inarcban discs, exclusion faitede liqueurs foites ou esprits,
et moyennant Tengagement d'etablir, dans le delai d'une
annee, trois ecoles libres a I'usage special des naturels,
dans les trois principales villes. Les indigenes inontrent
les dispositions les plus aniicalcs et un grand desir de
s'instruire. (i)
Le capitaine Rdey, connu parsonzele philantbropique
et par les souffrances dune longue caplivite parnii les
Arabes du desert, a rccemnient rapporte d'un voyage de
Moiradore et offert a la Societe Ainericaine de colonisa-
tion , deiix boisseaux de ble de Barharie^ dans I'espoir
qu'il serait mieux adapte au sol de Liberia que le grain
qui y est cnltive. Le ble de Barbaiie passe pour le nieil-
Icur quil y ail, et croit clans un pays oil le froid n'est
point connu. W.
{^Liberia H?rald, 24 deceinbre i833. )
(l) T/ie nfricaii ReposUory, vol. X, li" 4 'juili l834).
( i39 )
Bo Poro, I'lin des etablissemens indigenes voisinsde
Liberia, est silue sur une hauteur et peut etre vu de
plusieurs niilles a la ronde. La route qui y conduit de
Monrovia va toujours en montant, est rocailleuse et
bordee de cliaque cote par de tres grands arbres, entre-
meles de quelques vigneset arbrisseaux, principalement
dans les lieux qui ont ele cullives. A i5 ou 20 milles de
Bo Poro, on n'apercoit qu'un tres petit nombre d'arbres
forestiers dans (juelques petites places inaccessibles a la
culture. La raison de cette difference est que les natu-
rels se rapprochent tous les ans, de plus en plus, de
la ville pour elablir leurs fermes , et fontautant de clai-
rieres des endroits qu'ils abandonnent.
On trouve a Bo Poro de Teau fraiche en abondance
( qu'on croit provenir dune source d eau vive)dune
excellente qualite; elle est toujours froide, surtout en
novembre et en deceinbre. — La ville consiste en 3oo a
35o niaisons contenant environ 3,ooo habilansde toutes
sortes de tribus, dont Boatswain est empeieur souve-,
rain , quoique chacune d'elles ait son nionarque ou chef
particulier. Qtielques-uns de ces derniers se croient
egaux en pouvoir a Boatswain , raais ils se garderaient
bien de manifester cette pretention en sa presence. II y a
a Bo Poro un niarche quotidien , ou Ton peut se fournir
de riz, cassave, plantains, huile et noix de palmier, et
de toutes sortes de viunde sauvage, depuis celle de I'ele-
phant jusqu'a celle (\i\ singe. On s'y procure aussi du
poivre, du set, des poules, dj.i poisson , des oeufs de
poule, des mats, des corbeilles de fantaisie , du coton
tisse, des draps de coton , etc. , contre du labac et tous
les articles de manufacture europeenne. Bo Poro est
genera lenient frequente par la plupart des Africains, qui
( '4'> )
veulent faire proniptement lour trafic ; c'esl daillcurs le
point capital (le la cote occidentale d'Afrique, dans nne
longueur de 200 a i^oo milles, 011 le commerce ne peut
s'etendre par 1 influence et la terreur cjua su inspirer
Boatswain. W.
( Liberia Herald y 24 fevrier i834. )
COLONlIi DE LIBERIA (Aflique).
M. Voorhees , commniandant le Sloop de guerre,
John Adams, de la marine des Elats-Unis , a visite
recemment la colonic de Liberia. Dans son rapport,
date du cap Mesurado, le i4 decembre i833, et
adresse, au secretaire de la marine, cet officier repre-
sente Monrovia k comme etant dans une condition
prospere , ses habitations offrant un air d'aisance et de
proprete vrairnent remarquables. Plusieurs magasins
. construits en pierre et des quais^galement en pierre ,
bordent le fleuve j d'autres sont en construction; des
batimens debarquent ou font leur cargaison de retour;
enfin , il regne un mouvement et un aspect d'affaires,
tels qu'on en voit dans nos ports marcliands. Tout le
monde parait occupe; ct le lion ordre et la moraiite
se font sentir dans les rapports avec les babitans.o
11 y a quelque temps, un baleinier francais fit nan-
frage au sud de Grand-Bassa. L equipage, compose de
20 individus, fut recueUli par les colons du lieu, qui
lui faciliterent les moyens de se rendre, en longeant la
cole, jusqu'ii Monrovia; la, les nauf'rnges furcnt places
a bnrd dune goclette du gouvernement, qui les con-
duisit aGoree, lieu de leur etablissemcnt. Le gouverneuc
( '4i )
de celte colonle envoya un clesesofficiers , pour adres-
ser aux liiibitans de Liberia, les remercimens qui leur
etaient dus pour leur conduite genereuseet hospitaliere
dans cette circonstance.
On dit que des navires de Cuba frequentent actuel-
lement cette cote, vers I'equateur , pourse livrer a 1 o-
dieux trafic de la traite. Le capilaine Voorbees pense
qui! faudrait un bateau a vapeur arme en guerre, pour
croiser dans ces parages, attendu les calmes quiysont
tres frequens et durent plusieurs jours; les batimens
ordinaires fdent rarement plus de deux nceuds a I'beure,
et Ion considere 40 milles par jour comnie une niarcbe
tres rapide. Le John Adams, ayant toutes voiles de-
hors, a mis 10 jours a faire 240 milles sur cette cote.
W.
CHEMIN DE FER POUR UNIR LES DEUX OCEANS.
Une souscription de 90,000 dollars a ete faite a Pa-
nama pour la construction d'un chemin de fer de cette
ville a cellede Porto-Bello, c'est-a-dire de I'ccean Paci-
fique a I'Ocean Atlantique. On a decouvert un passage
qui, en general , n'est point occupe par des collines et
qui n'a pas plus de 35 milles de longueur.
Les commissaires charges d'explorer cette route par-
tirent de Panama le 25 mars dernier et n'etaient pas de
•retour le 6 avril. W.
^2 )
TROISIEME SECTION.
Actes de la Soci^te.
PP.OCES-VERBAUX DES SEANCES.
Seance da if^"" aoilt i834.
Leproces-verbalde la dernlere seance est In etadopte.
M. JomartI communique tieux leltivs parlictilieres
qu'il a recucs de M. Frederic Waldek , voyageur en
Amerique, ancien eteve de lecole francaise. Ces lettres
datees de Tabasco dii 21 mars et du 20 avril i834,
coniiennent des details circonstancies sur les antiquites
de Paienqiie el des pays environnans explores par cet
artiste, qui a deja passe deux ans sur leslieux, et qui
se propose d'y sejourner deux autres annees encore. II a
releve une carte topographique, copie avec soin les bas-
reliefs des nionumens, leve les plans, dessine les coupes
et elevations des edifices, etc. M. Joniard ajoute que le
talent de M. Waldek, comme dessinateur, etant bien
connu, Ion doitesperer des representations lidcles des
nionumens de celle partie de lAmeriquc.
M. Leprieur depose sur le bureau le rapport qu'il a
presente au miuistere de la marine sur son voyage
dans la Guyane centralc.
M. Warden rend comptc du premier volume (nou-
velle serie) des Memoires de I'Acade'mie americaine des
sciences et arts. II comnmni(jue ensuile 1 extrait d'un
rapport desdirecteurs de la Societe americaine de colo-
nisation pour i833, ainsi qu'ime note sur le chemin
de fer projet*^ dans I'isthme de Panama, et qui doit
unir les oceans Allantique et PaciCque. Ces diverses
conununications sont renvoyees au Comite i\u JiuUetiii.
( '43 )
Seance dn 22 nuut.
Le proces-vei bal cle la derniere seance esl lu et adopte,
M. le Ministre de la marine ecrit a la Societe pour
lui deniaiider communication du resultat de I'exanien
qu'elie aura fait des travaux de M. Leprieui"' sur la
Guyane; i! desire aussi qu en exprimant son jugement
sur lenierite de rexploration elfectuee par ce voyageur,
la Sociele emelte son avis sur les dispositions qui se-
raient a faire pour coniinuer utilement cette reconnais-
sance. M. le President designepour s'occuper de cette
question, MM. Coraboeuf, D'Avezac, et V\ arden.
M. De Jablonsxki, administrateur de la paroisse d'Op-
pova en Hongrie, sur la trontiereturque, offre de faire,
aux frais de la Societe un voyage dans I'interieiir de la
Guyane, et il demande les secours et les instrumens
qui lui sont necessaires pour entreprendre ce voyage.
La Commission arrete que M. Jablonsxki sera remercie
dune offre de zele dont elle regretle de ne pouvoir
prof'ter, les usages de la Societe ne lui permettant pas
de faire les frais des voyages de decouvertes.
M. le secretaire de 1' Academic royale des sciences
de Berlin adresse a la Societe le premier volume de ses
Memoires pour lannee 1882, et M. le secretaire du
comite des traductions orientales de Londres transniet
une serie de volumes publics par ce comite. — Remer-
clmens.
M. D'Avezac communique I'extrait dune lettre par-
ticuliere qui lui estadressee de Londres etdans laquelle
on lui annonce qu'il se prepare actuellement deux ex-
peditions geographiques en Angleterre : I'une serait
chargee de I'exploration de la Guyane anglaise et aurait
pour but principal de determiner la geographic pby-
( M4 )
sique de ses districts interieurs, en les liant aux posi-
tions fVancaises dans lost et a cellesde M. de Humboldt
dans rouest;rautre serait destinee a pe'netrer dans I'in-
terieur de I'Afrique australe par la haie Da-Lagoa, pour
Her les decouvertes des niissionnaires dans Ic nord du
Cap de Bonne-Esperance avec ce point du littoral et
peut-etre nieme avec les sources du Zanibeze et Ics eta-
blissemens portugais de I'interieur le long de ce lleuve.
M. Joniard communique une lettre particuliere de
M. le baron de Hammer, annoncant I'envoi d'une
notice sur le voyage de M. Leon De Laborde, et d'un
nouvei o[)uscule de M. le comte de Serristori sur la
statistique de I'ltalie.
Le meme membre annonce que M. Haradere lui a
donne communication d'une panic des manuscrits de
M. le colonel Dupaix sur les niitiquites de Palenque,
d'apres la copie falte sur les originaux du musee de
Mexico. M. Baradere est sur le point de se rendre au
Mexique, ou il esperereunirdes moyens d'exploration.
M. Bottin ecrit a la Societo pour lui of'f'rir, de la part
de 1 auteur, J\L Noellat, de Dijon, une carte de France,
politique, industrielle, commerciale, classique et rou-
tiere, ainsi qu'une geographic universelle ancienne et
moderne.
M. Warden, communique divers renseignemens,
I" sur le nombre des ecoies et des eleves des deux
sexes existant acluellement a la Nouvelle-Grenade ;
2° sur le nouvei etablissement forme par les Americains
au Cap Palmas; 3°surBoPoro, I'un des etablissemens
voisin de Liberia. — Ilenvoi au Comite du ]5ulletin.
M. D'Avezic fait un rapport verbal sur la nomencln-
clatura geograficade Espahadie. M. Caballero. — Renvoi
au Comite du Bulletin.
BULLETIN
DE LA
SOCIETE DE GEOGRAPIilE.
SEPTEMBRE i8j4.
PREMIERE SECTION.
3IEM0IRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPPORTS.
RELATION
DUin -»oyage dans Vinierieur tie V Afrique seplentrionale,
Par Hhaggy Ebn-el-Dyn el-Eghouathy.
NOTICE SUR LE TRACE G^.OGR APHIQUE
d'uNE parti E DE L'ArRIOTJE SF.PTENTRIONALE.
(suite ET FIN.)
Avant de quitter la province de Constantine, j'ai iiii
mot a dire de Baiihayali, orthographie Bagai par Shaw, -
qui parait avoir eniprunte ce qu'il en tlit a la relation
nianuscrite d'Antoine Peyssonnel , lequel lavait visitee
a la fin de juin 1725. Je n'ai pu nie procurer cette rela-
tion originate; et il me parjit d'autant plus indispensa-
ble den faire une etude approt'oiidie, qu'ayant pu com-
parer aux resultats que Shaw^ eh a conclus ceux que
lO
( '46)
M. Lapie et M, Guillaume Barbie du Docage en onl tires
a leur tour, je nie suis Irouve embarrasse d'optor entre
trois versions diverses : encore rcstait-il la ditficulte de
faire cadrer Tune on I'aulre d'elles avoc K's indications
puisees a d'autres sources; j'ai renonce des-Iors a re-
soudre quant a present une question qui n'avait d'ail-
leurs pour Tensemble de mon travail aucun interet ac-
lu(d, et j(; me suis d'autant plus aisenient resigne a
ni'abslenir, que mon excellent ami M. Guillaume Barbie
du Bocage , qui m'avait coinplaisamment communique
ses propres extraits de la relation de Peyssonnel , s'oc-
cupe de rechercher loriginal de celle-ci , afin de la pu-
blier avec une construction grapliique de la route de ce
voyageur.
Des extraits et des croquis que j'ai eus sous les yeux,
je dois me borner a concluretjueLandjese et Bagai sont
seulement a 8 heures ou 20 niilles de distance mutuelle,
ainsi que la adoptcShaw; or la distance de Lambese a
Diana n'est que de 33 mille pas ou 26 1^2 milles geogra-
phiques, au maximum, d'apres I'itineraire d'Antonin,
ce qui , avec les 24 milles entre Zainab et Selbyf indiques
par Shaw et qui resuhent egalement de I'itineraire de
Peyssonnel, ne produira que 70 iji milles entre Setliyf
et Bagbayah. Or Scbaw donne, d'un autre cole, une
niesure de 24 lieues ou 72 milles entre Qala't-el-Alsnyn
et Biigbayali (x); ccs deux lignes ne peuvent se rencon-
trer merae sur la voie directe do SetbyfaQala'h, et bien
nioins encore en inclinant loutes deux au sud pour aller
au-dela du Gebei-el-Ouastli, qui lui-meme est au-dela
de la montagne de Seedy Rougeise , visitee par Sbaw, et
siluee a 42 milles au S. 1''. i;4 S. deConstantine.
(f) De Gellah a AynT\l!ali , 18 lieues dans I'ouest, et de lA a
Bagai, r> lieues dans la nidme direction.
( ^47 )
Dune autre p-ut, lEdrysy iiulique ljaghay;ih a 8
jouniees de Bougie, el a 4 stations deTliobnali, qu'il
met elle-menie a G journees de Bougie; le Bekry met,
de son cote, Bagliayali a 4 journe s de Beskarah (i) ;
une position nioyenne de 35" 23' N. et 4° 3o \l. rempli-
rait tres bien res conditions, au taux uniforine de i5
niilles a lajournee; mais elle ne peutcadrer avec celles
qui resultent de la ligne plus precise deSethyfa Ba-
ghayah par Diana et Landjese. Je signale ces incertitudes
au zele invesligateur de nos otliciers de larniee d Afri-
que : a eux est 1 honorable tache de fixer en fin la geo-
grapliie de loute la region l)arbaresque.
Prenons maintenant la route de Shaw entre Alger et
les montagnes de Tatcherah , qu il appelle Traia. La
carte litbographiee du Depot de la guerre est en cette
partie, du moins pour tout ce qui est compris dans la
premiere feuille, la reproduction d une carte dressee a
Oran, sur les renseianemens des iudii>enes combines
avec les documens anterieurs, .par M. le capitaine d'etat-
niajor Tatareau, qui a fait preuve, dans ce travail, de
beaucoup de sagacite, mais dont je ne crois pas moins
indispensable de controler les resultats afin de ne m'ap-
puycr que sur des bases que j'aurai personuellement
verifiees; j'analyserai done directement I'itineraire de
Shaw, qui se rattacbe a un assez grand nombre de points
de la cote pour en obtenir une construction satisfai-
sante.
Apres avoir reconnu que le docte Anglais a vu de ses
yeux tout le cours du Schelif entre son endjouchure et
le confluent de la petite riviere Harbeene (probable-
(i) Edrysy, pages 228 , 237 et 234 ; Belu-y , page 70.
10,
( '48 )
iHciit Oued-el-Kharhyn) , jc vais tn'occiiper d'en reea-
blir le trace. Le confluent de cette riviere a lieu aupres
diirio ville ruinee, designee par Ics Arabes sous I'appel-
latif I'Ll-Mcdyiiah el-RlicrJjah (la^ille detruile), qui se
rencontre si Irequemment dans la geograpliie nioderne
de ces contrees. La caite deShavv met EI-KIierbah vers
le S. O. de Melidyah, a une distance egale a celle de
Mehdyah a Belydah ; c'esl aussi ce quolfVe une carle
plus detaillee, levee, a ce qu'il parait, par des officiers
auglais lorscjue se preparait rexpeditioii d'Exmouth, et
dont M. Lapie ma obligeamment communique iin
caique. Jai, d'apres cette base, place cette premiere
Kberbah a 36" 2' N. et o" 16' E.
De la a I'embouchnre du Schelif , la distance reelle est
de iiy milles, tandis que Shaw n'en compte que 87,
ce qui constitue une insufllsaiicc d'estime dun tiers j
correction faite , les mesures partielles du cours du
Schelif donnees par Shaw doivent etre employees ainsi
qu'il suit :
Depart du confluent c!u OuOd-el-Klierbyn.
Confluent du Ou»5del-Fadhah, au lieu de 14 lieues, 56 miiles O.
Coufluent de la rivifere Arliyone, au lieu de 7 — 2S — O. S. O.
Confluent de la riviere Mjnali , au lieu de 5 — 20 — • O,
Cap Ivi ou Gebel el-Dys au lieu de 5 — 20 — N. O.
La ligne que jai ainsi construite se trouve accompa-
gnee, dans la majeure partie de son elendue, par la
route que Shaw a suivie el tracee depuis KubberRomeah,
vers I'ouest, avcc end^ranchement sur Mostaiihanem et
Oran. Rubber Romeah, plus correctemenl Qobr el-
Roumyah, est un monument bien connu, ou il est a
desirer que soicnt operees des fouilles, qui selon toute
apparence seront fructueuses pour I'archeologie man-
( ^49 )
ritaniquc, cur nous savons par Ponipor.ius Mela (i)que
c'elait la sepulture royale des souverains de Cesaree.
Nous avons un autre point de repere dans Seedy Jbidy
plus exactcnient Sydy O bayd, que Shaw nous dit etre
a 2 niilles (correction faite, pres de 3 niiUcs) a lest du
confluent de VArhew (Arliyoue); il se place ainsi vers
35° Sa' N. et i° 20' O. dans ma construction , qui me
donne en meme temps Mazounali vers 35" 59' N. et
1° 28' O., Senab vers 35° Sg' N. et i- i' O. , et Melya-
nah vers 36' i4' N. et o" 10' 0. 5 cette derniere est I'an-
cienne Malliana, d'ou I'itineraire d'Antonin nous con-
duit a Rusuccurruni , ainsi qu'il suit :
Malliaua.
Sufasar M. P. xvin (i)
Velisci XVI (3)
Tanara Musa Castra xvi
Tamariceto pra;sidio xvi
Rapida Castra xvi
Rusuccuno coloiiia xii
D'autre part, nous avons deja vu (4) que Suiasar est
a i6 mille pas de Aquje, et celles-ci a aS niille pas de Ce-
saree : les bains Hanunam Meriga, a 20 milles de Scher-
schel, correspondent a merveil'e a Aquoe; de sorte que
la position de Sufasar se trouve ainsi assuree \ et Ton
apercoit aise'ment que la route doit aboutir aux mines
voisines du cap de Temedfous, Rapida Castra niarquant
le passage du Hhanatch.
Le surplus de la route de Shaw n'ofire d'impoitant a
placer que Telemsen , qu'il met a i") milles S. S. E. de
(i) Mela , lib. i,cap. iv.
(2) Variante : xviiii.
(3) Variante: xv.
(4) Ci-dessus, p. lo?..
( ^5o )
reuibouchure cle la Tafnay, et a pareille distance ties
montatfiies de Tatcherah. La carte de M. Gamier place
la <Traii(le montairne deTadiera ou mont Noe a 35°8'N.
et 4° !V O.; elle indiquc on memo temps, vers remhou-
chure de la Tafnay, sur la rive gauche, nn village dans
lequelon rie pent nieconiuutre los restcs d'Areschqoul(i)
dont le noni s'est perpetiie dans 1 ile voisine, deligure
louleiois sur nos cartes en ceux de Harschgoune, de
llis<^oun, etc. Aboult'eda compte 20 milles deTelemsen a
Areschqoul, et ce chilCre, con forme a celiii ijua em-
plove M. Tatareau , prouve que les i5 milles de Shaw
doivent etre augmentes suivant la proportion (jiie nous
avons deja enqjloyee sur le Schelif ; mais en appuyant
ainsi Telomsen par 20 milles sur remhouchure de la
Tafnay et 20 milles sur le mont Not;, il ne restera plus
que 53 milles jusqu'a Oran , tandis que Shavv en met 54
dans son texte, 5i dans sa carte, c'est-a-dire a-peu-pres
la distance meme que je trouve, sans qu'il y ait lieu a
raufmientation ordinaire. Celte diificulte est levee par
un itineiaire dOran a Ouelchdah recueilli par M. le ca-
pitaine d'etat-major Levret, et qui porto ^4 heures
d'Oran a Telemsen et i/\ heures de Telemsen a Ouetch-
dah ; or en partanl de la position de Ouetchchdi determi-
nee par Badia , Telemsen me viendra par 35" i' N. et
3° 39' O. , a 3 I n)iiles de Ouetchdah et 53 milles d'Oran
comme ci-dessus. Ainsi Shaver, dont Testime de route
entre Alger et les montagnes de Tatcherah est en gene-
ral trop courte d'nn lieis, a pourtant estinie a sa valenr
reelle la distance dOran a Telemsen : il suffit, pour
s'expliquer celte auomalie , de considerer que, a part
cette distance (juil a indubitahlement fixee par deux
(1) Voir Beki y, page 102.
( i5i )
observations de latitude, tout le surplus de sa route
dans cette province est principalement dirige dans le
sens des longitudes el entache dune erreur couiniune.
Le trace que Shaw a donne de son itineraire ne se
poursuit pas jusqu'a Nedroumah, qui est au revers oc-
cidental des montagnes de Tatcherah ; ce point est in-
scrit, sur la carte de M. Garnier, a la ineme position,
a un niille pres, que celle de 35" 3' N. et 4" 6' O. , que
me procurent, dune part une distance de lo heures
sur Telemsen , indiquee a M. Levret et que je traduis,
d'apres les precedentes donnees, par 22 niilles geogra-
phiques, et d'autre part une distance de 8 niilles sur
Ternany et Taouant , marquee par le Bekry. (i)
La route de Shaw ne va pas non plus a Ma'skarah ,
•nais il en indique dans son texte, sans doute d'apres de
bonnes informations, la situation relative a I'egard de
Mostaghanem , par une ligne brisee courant d'ahord
8 lienes auS. S. E. jusqu'a Qala'h, et de la 5 lienesS.O.
jusqu'a Ma'skarah ; il ajoute que cette derniere ville est
en meme temps a 33 miiles S. S. E. d'Oran ; mais il est
evident que cette distance ni ce gisement ne sauraient
concorder avec les preceilentes donnees, tandis (|u ils y
cadreraientassezbien si le point de depart de cette nou-
velle ligne, au lieu d'etre fixe a Oran, se trouvait a Ar-
zeou; il semble qu'il y ait, sous ce rapport, line me-
prise, d'autant plus que la carte du docteur, en redui-
san.t h 29 miiles la distance de Mostaghanem a INIa'ska-
rah, allonge au contraire jusqu'a 38 celle de Ma'skarah
a Oran ; et cette derniere indication s'accorde tics bien
avec un compte de 17 heures qu'offre un Itineraire re-
cueilli par M. Levret; mais nous venous d'acquerir a
(1) Piige 106.
( >5a )
cet egard des donnees beaucoup plus precises : M. Bei*-
nior de Maligiiy, capitaine d'etat-njajor, a, depuis 1a
souniission dii bey A bd-cl-Qader, rcleve soigiieiiseinent
la route d'Onin a Ma'skaridi et de la a Mostaolianeiii ; il
eii resulte que Ma'skarah est a une distance de 21 i/3
lieues de 4,000 metres en iigiie droitc a legard d'Oran ,
et a 17 1^3 lieues a legard de jMostaglianeni , ce qui re-
vient a ^6 el '^~ milles geographiqiies, et auiene Ma'ska-
rah par 35^ 20' N. et 2" i5 ' O. , a 33 milles d'Arzeou et
a 71 milles de Telemsen : cette derniere mesure s'dc-
corde dune maniere salisfais;'.nte avec une marche de
33 1^2 lieures indiquee par 1111 iliiieraire oralement
founii a M. Levret.
Les indications de distances et de gisemens recueillis
par Sliaw se poursuivent audela de Ma'skarah vers
Tagadenipt, et de la par Svvamma jusqu'au Nader et a
Goojeda; puis, s'appuyanl sur divers points connus du
Schelif, ces indications determinent le cours superieur
de ce (Icuve, et s'avancent, par Midroe , jusqn'aux mon-
tagnes des Amnier et de Lowaate. Elles doivent ainsi
nous conduire jusqu'au point de depart des itineraires
d'Ebn-el-Dyn.
D'autres routes, oralement recueillies aussi par des
olficiers IVancais , nous mencronl au jnenie but, et ces
donnees diverses aiderontmuluellement a leur construc-
tion commune.
Je relevc, dans le texte de Shaw , une premiere ligne
ainsi divisee :
Depart de Sinaah.
IMoiitngne de Wannashreese 8 lieues S. E.
Tessumseely ... 3o milles S. S.E.
Tuckereali 20 milles.
Midroe 6 lieues S.
Montagnes de Lowaate et Ammer. 6 lieues.
( '53 )
Sinaah (plus correctenient El-Essnab)se trouve doj^
place, (Inns la conslniction de la route suivie par Shaw
]e long (111 Schelif. J'ai deja fait remarquer que tians toute
cette partie, le docteur anglais a, par une reduction
trop forte, estime generalemenl; ses distances un quart
au-dessous de leur cliiffie reel : en retablissant le taux
ett'eclif, le Wannashreese , dans lequel il est aise de re-
connaitre le Ouanaschrysch des geographes arahes ,
trouvera sa place a 32 iiiille? S. E. d'EI-EssnAb, vers
35o 36' N. el o" 33' O. ; Tessomsyly,a 4o niilles S. S. E.
de la , tonibeia vers 35° o' N. et o' i4' O. Le gisenient
deTokeiyah n'est pas marque : la carte I'indiquc S. i^4
S. E. deTessonisyly, et Miuroe (plus correctenient Me-
deiay) y est place au S. i/4 S. O. de Tokeryah, ce qui
revient a inettre Mederay au sud de Tessomsyly.
On y arrive pareillemcnt par une autre vi.ie : Shaw
rappoite que le Sclielif , forme par la reunion des Se-
ba'oun A'youn (les Septante soujces) au Nahr-Ouassel,
commence a 8o milles de son end^oucluire, ce qui, cor-
rection faite de la distance, etablit ce point vers
34'' 46' N. et o<'37' 0. ; et comme, de la, il couipte
lo lieues jusqu'a Mederay , ce village viendra, par
cette voie couime par la precedente, vers 34° lo' N.
et o'^ i4' O.
La montagne des Lowaateet des Ammer, c'est-a-dire
le Gebel el-A'mour, situe a 24 milles dans le sud de
Mederay, se trouvera des-lors par une latitude de 33°
46' N. offrant un premier repere aux routes d'Ebn-el-
Dyn.
Verifions si les informations recueillies par nos offi
Ciers de I'.irmee d'Afrique concordeiit avec ce resukat.
Jai a ma disposition deux itineraires qui, se soudant
bout a boula Eerendah, conduisent ainsi depuis Oraii
( '54 )
jusqu'a A'yn-Madhy, autre point de repere avec les in-
dications d'Ebn-el-Dyn.
Le premier de ces itineraires, recueilli par M. Levrel
en iSl^i, fournit les indications suivantes:
Depart d'Oran
Msulen, village i heure».
TIelat, ruisseau 3
Teig , ri vit;re 4
Oued Hammem 4
Mascara 4
Tiganefin , ruisseau 'i
Oued Hadded 4
Oued el-Abt 4
Mina , riviere 4
Medrossa , hameau 4
Frimdey, village ferme 4
Le second, recueilli par M. Tatareau en i833 , se di-
rige d'abord vers le S. E. , puis directenient au S. par les
etapes suivantes :
Depart de Frendah.
Enliar Ouessei 4 heures
Susellem , riviere courant de droite a gauche. 5
(A I beure sur la gauche est le village de
Gougela ).
El-Feygia ( le col ) 4 "fi
El-Bayda , terre blauche 4
Oued elAleg, riviere coulant vers le N. E. . ft
Hadra , village S
Teyloula 5
Ain-Madi , prfes des Ouled el-Amour 4
( La ville de Beni-Lahouat est a a jours
dans Test , et celle de Chileia a 5 ou 6
jours dans I'ouest d'Ain-IVIadi. )
Le premier de ces deux itineraires compte ly lieures
pour les 46 milles qui se trouvent en ligne droite dOran a
( ^35)
Ma'skarah , ce qui doit f'aire eslimer a 65 inilles les 24
heures restantes pour aller jusqu'a Ferendah ; a defaut
de direction indiqiiee, on pent presumer que celle d'O-
ran a Ma'skarah sepoursuit au-dela; cette presomption
se trouve corroboree par d'autres considerations, savoir:
que Shaw indique les sources du Oued-el-A bd a 3o
niilles (qui en valent 4") ^i' S. E. de Ma'skarah; que
I'itineraire actuel traverse le meme ruisseau a 12 heures
ou 6'2 1/2. niilles de Ma'skarah, el que le ruisseau dont
il s'agit coulant du snd au nord , le passage doit avoir eu
lieu au nord des sources, par le double motif que ces
sources sont lorigine du courant traverse, et que la
route qui y conduit est la plus longuc. Par une raison
sendjlal)le, Tagadenipt (que Leon dit signifier Antique,
et dont la veritable orthographe est des-lors Taqadymt,
forme berberisee du mot arabe qadym ) , doit se trouver
au nord de I'itineraire dont je m'occupe , car Shaw in-
dique ce point a 60 niilles (qui en valent 80) d'Oran,
c'est-a-dire en realile a 34 niilles au-dela de Ma'skarah,
sur la rive droite de la Mynah, a quelque distance au
nord des sources de celle-ci, tandis que litineraire ac-
tuel traverse cette riviere a 16 heures ou plus de 43
niilles de Ma'skarali. Or Taqadymt est a 82 ou phitot
43 niilles au nord du Nador ( plus correctement El-
Na/hour, la Vigie), d apres Shaw ; et d'autre part , des
informations recueillies par M. Levret placent El-Na-
zhour a 20 heures des mines de Mynah, qui sont entre
Ma'skarah et Sydy O bayd a 9 heures de 1 un et p 1^2
heures de I'autre : cela donne 18 1/2 heures pour les
55 niilles compris reellement entre ces deux points,
d'ou il faut conclure 60 milles pour les 20 heures de
Mynah a El-Nazhour : et de la a Goojeda sur le Susel-
lini, Schaw compte 18 niilles ({ui en valent a4 ; le se-
( ^56}
cond des itineraires ci-dessus traverse le Susellem a une
heure oiiest de Gougelali , qui est evideinmetit le Goo-
jeda de Shaw : il est done indubitable que la route de
Ma'skarah a Ferendah passe en ire Taqadymt et El-Na-
zhour, et celle de Ferendah a A'yn-31adhy enlre El-
IVazhour et Ghougelah. Je niets ainsi Ferendah a 65
milles sur le prolongement de la ligne d'Oran a Ma'ska-
rah, ce qui me donne une position conjeeturale de
34° 44' N. et 1° 9' O., le passage intermediaire dc la
Mynah se trouvant vers 34" 56' N. et 1" 3i' O.
Cette position de Ferendah diflere singulierenient ,
comme on voit, non-seulement de la va»ue indication
de Shaw , qui la met parmi les daskerahs qui entourent
les sources du Oued el-A'bd , mais aussi de la carte
lithographiee du Depot de la guerre, qui la |)lace sur la
rive gauche du Oued el-Haddct, le Oued el-IIadded dt;
noire itineraire, c'est-a-dire au tiers de sa distance veri-
table a I'egard de Ma'skarah; et encore de la carte de
M. Tatareau , (jui letablit a 22 niilles seulement de Ma's-
karah, c'est-a-dire a nioitie de la distance reelle.
La route de Mynah a El-Nazhour, tracee sur la carte
lithographiee du Depot de la guerre, est ainsi distribuee:
Depart de Miiia (ruines roniaines).
Sifii-Mohammecl Ben-Heisa S h»-iiies.
Ouled-Sclurif 6 j/7.
Nador 5 i/i
Cette route ne traverse ;.ucun cours d eau , et parait
reraonter la rive droite de la Mynah; la direction eu est
des-lors determinee par la situation relative du point
de depart (vers 35° 36' N. et 1° 49 O.) et de ceiui oii
la route de Ferendah coupe la Mynah : la position d El-
Nazhour sera ainsi portee vers 34" 4f'' N. et 1° 22' O.
De la conqUaut 43 milles vers le nord jusqu a line dis-
( '57 }
tance de 34 milles dans Test de Ma'skarah , Taqadymt se
iroiivera place a 35° 23' N. et 1° 33' O.
La route de Ferendah a A'yn-M.adhy est de 36 r;2
hemes; niais quelle valeur itiiieiaire convient-il de don-
ner a cette niesure lioraire? C'est une question d'autant
plus difficile a resoudre, que les appreciations de cette
nature sont Ires variables, et que nous sonimes ici de-
nues dune portion connue qui nous serve de taux pour
les autres. Dans les precedentes investigations, nous
avons trouve la valeur de I'heure de route en milles geo-
grapliiques, tantot de 2 i/6, tantot do 2 2p, tantot de
3 : cela depend du mode de voyage, soil a pied, soit a
dos de chameau ou de mulct ; de la nature du chemin,
battu ou non, en plaine ou en montees, etc. Rien ne
nous fait connaitre ici ces bases d evaluation, si ce nest
une presoniption generale que Li route est en nionlee,
d'abord parce qu'elle traverse le Nahr-Ouassel, affluent
superieurdu Sclielif, puis les hauteurs que Shaw indique
entre El-Nazhour et Ghougelah, ensuite El-Feygia ,
qui parait etre le mot Fegj ou Fe^jah ( un defile), et
qu'elle s'avance enfin vers les hautes montagnes d'El-
A'niour. Uapres cette consideration, je choisis le taux
le plus court, celui de 2 i^6 milles, au moyen duquel
les 36 1/2 heures se traduiront en 85 milles dans une
directionr^ue la carte de M. Tatareau porte d"ai)ord au
S. S. E. jusqu'a ElFegjah, puis au S. 174 S. E. ; en com-
binant les ly 1/2 milles de Ferendah au passage du Sou-
sellein avec les 24 milles d'El-Nazhour a Ghougelah
aboutissant a 3 ou 4 milles sur la gauche du passage
dont il s'agit, jobliens celui-ci par 34° 27' N. et o'S^'O.
Dans I'intervalle de Ferendah a ce point, et a pres de
1 1 milles de ce dernier, se trouve le passage du Nahr-
Ouassel , qui est la fort pres de sa source, et qui, dans
( i58 )
ma construction, it'a plus a parcourir qu'un espace
d'environ aS niilles pour arrivrr au point ou, reuni aux
Seba'oun A'youn, il prend le noni deSchelif. A ^annlles
dans lest de ce premier confluent, et a 4" niilles dans le
sud do celui du Oued el-Kharbyn, se trouve, dapres
Shaw, celui du ruisseau de Mederay, c'est-a-dire, cor-
rection faite, a un coude determine par environ 4 5 niilles
sur le premier confluent, et environ 53 niilles snr le
troisienie, ou, en d'aulres lermes, vers 35° 8' N. et
o" 8' E.
Arrive a El-Fegjah, la route incline davantage an sud;
sa direction sera dcterminee a laide des indications
d'Ebn-el-Dyn, qui place A'yn-Madhy a une journee
dans I'ouest deTegemout, et ce point-ci a une journee
au sud du Gebel el-A'mour; je niontrerai plus loin que
la journee d'Ebn-el-Dyn vaut i8 niilles, au moyen de
quoi Tegemout me vicnt vers 33° 28' N. et o^ i4' O. ,
Ayn-Madhy vers 33o 28' N. et o" 36' O. , et enfin El-
A'dioualh, qui est a une journee au sud de Tegemout,
vers 33° 10' N. et 0° i4' O. De cette maniere il y a deux
iournees de A'yn-Madhy a El-Aghouath comfiie le
marque notre itinciaire, si Ton passe par Tegemout , ot
une journee seulement ainsi que le dit Ebn-e!-Dyn, si
Ion suit la route directe, qui n'est que de 21 niilles.
Le Oued-Alegh, qui marque une des etapes^inlerme-
diaires, coulant vers le N. E. , ne peut aller tomber dans
le Schath qui est a louest, i omme le lui fait faire la
carle lilhographiee du Depot de la guerre. II est pro-
bable que c'est un affluent du ruisseau de Mederay, et
par consequent du Schelii.
M. le capitaine Levret a envoye, en i833, un itine-
raire qui conduit deMa'skarah aEl-Aghouiilh sans passer
par Ferendah; les nonis de lieux y sont accompagnes
( ^''9 )
iViine transcription en earacteres arabes, qui sans etre
ni aisement dechiffrable , ni parfaitement correcle, pent
neanmoins aider a fixer lorlhographe; niallieureuse-
nient les distances ne sont point indiquees. Voici cet
itineraire , ou j'ai mis entre parentheses la lecture fidele
des transcriptions arabes :
Depart de Mascara ( Ama'skara ).
Maousa ( Mousi'iy ), luisseaii.
Kachreu ( Kasclira' ) , hameau.
Oiied el-Abdt ( Oiied el-A'bd) , riviere.
Tagazoule (Taqa'out), village.
Susellam ( Sousellem ) , riviere.
El-Ogala (El-OghaU), puits.
El Beda ( EI-IiaydliA ) , ruisseau.
El-Fedja (El-Fegjah) , petite riviere.
Oued el-Alag (Oued el-A'laq) , riviere.
Ei-Kadara ( El-Kliadiira) , hameau.
Teiioiila (TevlouIA ) , hameau.
Beni-Lagrouat (Beny-LaghouSth ) , ville.
On pent supposer que la distance de chaque station
a la station suivante est d'line journee de route, sauf
pour la derniere mutation , ou nous savons qu'il y a
trois ('tapes. II est a remarquer en outre que les sta-
tions d'El-Baydha et d'El-Fegjah setrouvent, dans ce
dernier itineraire, placees dans une situation relative
inverse de celle (jui a ete indiquee precedemment. En
retablissant El-Fegjah avant El-Baydha , ainsi que la
porle I'ilineraire envoye par M. Tatareau , ii faudra
compter, pour I'itiueraire actuel, 7 journees de Ma'ska-
rah a El-Fegjah, ce qui donne environ i3 mil'es par
journee. La rencontre du Oued el-A'bd aura ainsi lieu
loutaupres de la source, et la rencontre du Sousellem
a quelques milles au-dessous d'El-Nazhour. Taga'zout,
que Shaw^ ecrit Tagaz.ou'ie el indique avec Ferendah
I
( '60 )
au voisinage des sources du Oued el-A'bd, se trouvera
dans ma construction, vers 34"43' N. , et i°3o'0. , a
i'6 niilles desdites sources et a ly milles de Ferendah.
Revenons aux indications du cipitaine Tatareau :
elles portent que A'yn-Madhy est a 5 ou 6 journees de
Chilela, position au sud d'Oran , a laquelle conduit la
route suivanle, recueillie par le meme officier :
Depart d'Oran.
Melcta 7 lieuies.
El-Gazul , petite riviire 5
Tesselah , montagne 5
Mekerra, cours superieur du Sig 4 i/'»
Hanimen Sidi Ali Him Youb 5
Raz el Mall , source du Mekerra, 3
Travers d'El • Beghera u Benihiza , deux
montagnes a 4 lieures sur la droile 7 r/2
Oued el-Haniem , tcrrent 8
El-Sholt, grande sebgha longue de plusieurs
journees , large de inoins de i lieure 4
Senia (>
El-MelleliaL, source salee 7
Teniah , col dans le grand Atlas 5
Chilela, petite ville daus le desert 7
Dans la carte [corrigee) qu'il a envoyee en i833,
M. Tatareau donne cette route avec des variantes qui
tendent a en restreindre I'etendue, de manicre a ce que
I'estime des distances de litineraire ci-dessus doive etre
reduite a environ 1 3/4 milles par heiire; je mo range
d'autant plus volontiers a cet avis, que les indications
de Shaw ne permettent point une evaluation plus large;
ainsi, par exemple, le voyageur anglais met a ai milles
(qui en valent 28) au sud vd'Oran , la ville de Tessailah ,
situee au pied du versant septentrional de la montagne
du meme nom , que litineraire ci-dessus place a 17 h.
( x6i }
d'Oran , produisant pres de '-^o inilles, a raison de i 3^4
milles par heure, dans une direction S. 8° O. De la aux
Hhanimam Sydy A'ly hen Ayoub , il y a 9 lya heures
produisant un pen plus de 16 J/2 milles qu'il taut com-
biner avec les 4o milles (correction f'aite 53 milles) que
Shaw compte depuis Arzeou jusqu'a ce point, lequel
demeurera ainsi determine vers 35''o' N. , et 2"5()' O.
Les trois heures qui suivent, et qui valentun peuplus de
f) milles, conduisent au Ras el-Maa Ma t^te de lean ) ,
d'ou Von trouvera aisoment deux journees jusqu'a El-
Ghour, position qui elle-meme se trouve, par uu au-
tre itineraire , a 12 heures ou 26 milles au sud de Te-
lemsen ; en placant Ras el-Maa sous le meridien d'Oran,
il y aura, entre les deux points, 36 milles pour les deux
journees dont il s'agit. En continuant la route droit au
sud, on a 44 ip heures ou environ y8 milles jusqu'a
Schilelah, qui, maintenue sous Ic; meridien d'Oran, se-
rai t a 120 milles de A'yn-Madhy , ce qui verifierait la
condition des 5 a 6 journees de distance, suivant qu'on
les supposerait de 24 ou '^^ '^'^ milles , deux taux fort
admissibles; s'ils paraissaienl toutefois un pen eleves , il
siitfirait d'incliner un peu la route vers 1 est, de maiiiere
a faire tomber Schilelah , soil a 108 , soit a 100, suit
meine a 90 milles de Ayn el-Madhy, le taux de la jour-
nee descendant ainsi a 18 et i5 milles.
Quant au Schath , que la route ci-dessus traverse a
19 1/2 heures ou 34 milles du Ras el-Maa , M. Tata-
reau a envoye en i833 un autre itineraire qui y abou-
tit en partant de Ma'skarah, et allant droit au sud par
les etapes suivantes ;
Depart c!e Mascara.
Beiii-Hen, affluenl dii Ouecl el-Haminem. 5 hemes.
I.aliod , autre affluent ', 1/2
I I
( l(i->- )
I'alet , ruviii 4
Sgliouna , lac (i
E10glil;i , piiits 4
Sldi-Klialifa, villnge 8
El-C.liott , grande sebglia o tp
Cest (11 loul ^2 heures, cju jl y a lieu d'estimer a envi-
ron [joniillt's, d'apres Ic t.uix iinitorme qui parait ap-
plicable anx itineraires fourtiis en dernier lieu par le
nienie oificier.
In rapport de M. le lieutenant - general Boyer
enonee que, dapres les renseigneniens tournis a Oran,
en novenibie i<S32, par des Arahes qui arrivaient du
voisinage de Schilelah , Bozamoghan est a une journee
au hud de celle ville , a parlii' de laquelle on met 3o
jours pour alter dans le pays des Soudan , savoir , lo
jours jusqua Gourara, sans eau 5 lo jours jusqu'a Te-
dikitz, qui ne parait pas pouvoir elre autre que le Te-
dikels de M. Hodgson; et enfin 10 jours encore jus-
qu au Belad-el-Soudan.
Ayant dispose dans le nord le cauevas auquel s'at-
tache I'itinerairc t< Ebn-el-Dyn , je vais uiarquer dans
lest et dans le sud les points auxquels il aboutil , el
determiner les principaux nceuds de sa ligne de route,
Je pars de Tripoli pour aller aGliadames en i3 jour-
nees , avec le sclieykli Hbaggy Qasem, si connu par les
savantes rechercbes de M. Walckenaer ; Smytb ma
fourni la position de la premiere de ces villes, Laing
celle de la seconde ; I'intervalle est de 260 niilles , ce
qui determine a 20 milles le taux de la journee. De Gha-
dames a A'yn el-Ssalabb, Hliaggy QAsem a employe en
apparence 20 journces , dout la valeur, calculee sur
cette base, devrait etre de 4oo milles; en realite la
distance est de 4oy milles jusqu'a la positioa la plus
( i63 )
orientale de A'yn-ei-Ssalah, rie 4^6 niilles jusqu'a la po-
sition la plus occidentale ; laquelle des deux est plus
exacte ? On serait tenie, d'apres ces chiffres, d'opter
pour la premiere, et rieanmoins il semhle que la se-
conde presente plus de garanties , etarit donnee avec
plus de precision, et ayant fait Tobjel d une commu-
nication speciaie de la part dun ami de Laing , fort
verse dans les calculs de celte nature; une considera-
tion plus decisive vient se placer ici : c'est que , an lieu
des 20 journe'es comptees par le redacteur de I'iline-
raire de Hliagoy Qasem ontre Ghadames atteint le i3*
jour, et Ayn el-Ssalahh atteint le 33"^ jour, le detail des
etapes donne en realite 22 jours, ainsi qui! suit:
Depart de Ghadames.
Ten-Yakken 3 jouriu'es.
Bir elTabbeyed 3
El-Mosseguem 4
Bir el Gabah 4
Has.si Farsik 4
Ain el-Salahli .' 4
Nombre tolal des journees 22
La meme distance est de 2.4 jours d apres Ehii-el-
Dyn : c'est, a Ires pea de chose pres , 18 inilles par
jour, et ce taux, ainsi determine, me fournit le moyen
d'aller planter quelques jalons principaux pour les rou-
tes du voyageur.
Je commence par Ouerqelah , qui doit etrfe etablie a
16 journees ou 288 niilles de Ghadames, d'apres I'in-
di(;ation d Ebn-el Dyn. Le Bekry compte i4 journees
depuis Touzer : admettons que ce soient encore des
journees de 18 milles , ce sera en total 252 milles , qui
coincideront avec la mesure precedente en un point
place vers 3i°44' N. et i"36' E. j pour devenir defini'
II.
( Ifi-i )
live, coltc position doit itiiiplir ime croisirme condition,
it'sultiinl lies informations recueillios par Shaw, (^c^lui-
«'i parlo dun anias de villages parnii lesqucls il nomine
Badass, le badys de Zab dii Bokry, deja place sur ma
carte; et il compte de la iri lieiies vcis le sud jusqu'a
Ei-Fytlie , on plus correcteinent El-Fethh , puis lo
lieucs encore dans le sud juscin'a Majyre , qu'il faut
sans doute ecrire Megehir ; on a ensuite Tummarnah a
6 lieues dans I'ouest, Tuggurt (Teqort) a 12 lieues de
la an S. O. ; ct do lieues plus loin , dans la meme direc-
tion, Engousah, apres laquelle vient enlin Ouerqelah,
a 5 lieues dans I ouest. Si Ion retlecliit que ces gise-
mens n'ont eie t'onrnis a Shaw que par des indigenes
ayant une idee fort pen precise des directions de la
boussole et ne parlant (i'ailieurs que de souvenir , on
sera surpris de voir combien leurs indications se rap-
prochent d iine exactitude rigoureuse , puisqu'il suffit
d'un leger redressenjent des flexions de la route pour la
faire cadrer aux 211 niilles (ju'ol'fre ma construction
entre Badys et Ouerqelah.
De Ouerqelah a A'yn-el-Ssalahh , Ebi:-el Dyn parait
compter 17 journees, savoir, 5 de Ouerqelah a El-
Qolyah, el 12 de la a A'yn el-Ssalahh, ce qui amene
El-Qolya h a 90 milles de I'une et 216 milles de Tautre,
vers 60 42.' N. , et o''2i' E.
Enfin Metslyly, a 5 journees d'EI-Aghouaih et autant
d'EI-Qolya h , se placera vers 3i''45' N. , et o°54' O. ,
ayant Ghardeyah necessairemenl dans I'ouest, puisque
Shaw dit que tette ville est la plus occidenlale du
Ouady-Ptlozab; et conmie il la met a 35 lieues ou io5
milles d El-Agliouath, je lui attribue une position con-
jecturale de 3i°3o' N- et i"o' O. , inscrivant Beryghan
a 9 lieues de la, dans le haul du Ouady-Mozab , c'est-a-
( i65 )
dire a Test tie Metslylv. On voit (jue dans eette situation
le Ouady-Mozah est separc; de Oiieiqelah et Teqort par
line distance moyenne qui repond assez bien au desert
d(! 8 journees mentionne par M. Hodj^son.
Je vais maintenant jeter un coup-d'teil rapide sur la
liaison du trace qui precede avec les points connns de
I'ouest, bien moins dans le dessein d'etablir des resul-
tats , que dans le but d exposer linsiiflisanee des don-
nees que nous possedons, et de fane niienx apprecier
les points sur lesquels il iniporte d'acqnerir des bnnieres
nouvelles.
M. le capitaine Levret a recneiifi a Oran , en i832 ,
un itineraire fort interessant , qui! a cru dirige vers
Tougourt (Teqort), niais (|ui en realile conduit a Tarou-
dant, capitale de la province de Sous dans !e Marok, en
passant par un grand nondjre di; points deja determines
avec assez de precision, tels que Ouetchdah, Tezay ,
Fes, Meknesah, El-Rabath , El-Manssouryah , El-Dar-
el-Baydha , Azainour, Sniira et Marok; sans parler de
quetques autres lienx dont la position est moins as-
suree, entre autres A'yt-Mousay, an passage de I'Atlas
entre Marok et Taroudatit. Toutes les etapes internie-
diaires entre les stations deja fixees, penvent etre aise-
nient placees. De ce cote la liaison est bien etablie entre
le trace de la province d Oran et les etats de Marok.
La carte de M. Lapie en indique une autre entre
Ouetchdah et El-Nazhour : une seule mutation y est
marquee non-loin de ce dernier point, sous le nom de
Loggnath : celte route m'est completement inconnue,
mais je soupconne ce nom de JjOggnath de constaler
simplemenl une vague indication d EI-Aglio;ialh.
La carte jointe aux recherches de M. Walckenaer
jnontre anssi une roiite de Marok a Tripoli jiar Aksabi
( i66 )
Surefa, Fiz, Gardeia , Grara, Wurglah, Ingousab et
Ghaclames; el la meme route est traeee sui- la carte de
M. Lapie jointe au voyage cle M. Cochelel, par Aksabi
Suref'a, Fiz, Gardeia el Giara; puis sur sa carte coiu-
paree , en deux feuilles , des regences d'Alger et de
Tunis, par Figliig , Tsebid, Gardeia , Berigan , Grara,
Ghargala, Engousah , le Djebel Salubain, Necau el
Gbadanies. Ce serait uiie ligne fort iniportante; mais je
soupconne fort que ce nest qu'uue liaison conjecturale
indiquee a I'aventure enlre des points qui seniblaient
s'aligner sur la carte. Analysons en effet : Aksabi Surefa,
ou plutot Aqssaby el-Scherfa , est une station pres des
sources du Molouyab, sur laquelle je reviendrai tout-
a-1'heure. Fiz parait elre un simple lapsus pour Fighig,
sans quoi il m'est conipletemeni inconnu. Tsebid est
inscrit sous cette ortbographe dans la carte generale
de Badia ; il est aise d'y reconnaitrs le Tesebit de Leon ,
Tecevin de Marmol , reunion de quatre cbateaux, qu'ils
indiquent a 200 niilles de Segelniesah et 100 niilles de
I'Atlas, 120 niilles de Tegorarin , ei qu'ils disent places
sur la route de Fes et de Telenisen a Agades. Gbar-
deyah , Berygbiin , Gbrarab , Ouerqelab, Engousah,
nous sont connus en deux groupes distincts, mais non
dans un rapport d'ensenible determine. Enfin, Ebnel-
Dyn nous donne un itineraire de Ouerqelab a Gbada-
nies, ou lie figurent ni le Gebel Salouban ni Neqaou ,
lesqucls appartiennent a une route entre El - Bahnesa
d'Egypte et Segelmesab, rapporlee par I'Edrysy, mais
dont il n'est pas a ma coiinaissance que la geographic
nioderne ait retrouve aucune trace, si ce n'est dans la
douleuse indication, faite par Sbaler, de Nedroinab
parmi Ics villes du Ouady Moziib, ou il confond indi-
stiuctement Ghardcyab ct Ouerqelab , Berygban et
( i67 )
Engousali, en sorte que je sotipconne fort I'honoiable
consul da voir leleve sur une carte inexacte une partie
des renseignomens qu'il crut ensuite lui avoir ete tour-
nis par son thaleb.
Ainsi s'evanouit la liaison apparente de tant de points
dont il y aurait en eff'et grand inleret a connaitre les
rapports muluels de gisement et de distance, niais qui
ne forment, quant a present, aucune ligne suivie :
Aqssaby - el-Scherl^ est sur la route de Fes a Tafilelt,
mais sans liaison directe connue avec Marok ni avec
Fighig; ce point-ci appartient, ainsi que Tesehit, a
une ligne qui va de Segelmesah a Tegorarin; ce sont,
comnie on voit, des tragmens detaches, pour la niise
ensemble desquels il n'exisle jusqu'a ce jour que des
nioyens fort indirects.
Je passe a une ligne nioins douteuse, quoique non
encore employee, mais dont la construction, faute de
donnees auxiliaires, demeure, sous plusieurs rapports,
un peu vague et conjecturale.
J'ai indique dans un autre ecrit (i) comment A'yn
el-Ssalahh doil etre rattache a la cote occidentale par
une serie de distances, qui, partaiit du cap Noun ou
de I'embouchure de la riviere de nieme nom, s'eche-
lonnent par la ville de Noun, Tatia, El - Harib ( de
Caille), Muucina, Tebelbelt et TouAt. Je vais essayer
de placer ces divers points intermediaires.
La ville de Noun est assise sur le Ouady Noun, a 3
journees dans les terres suivant I'Edrysy (2), a 2 jour-
( i) Revue critique des Remarques et recfierches geographiques annex^cs
au voynge de Oaille a Ten-Boktoue; memoire lu a la Societe Asia-
tique dans sa seance du 3 octobre iSlJi.
(a) Edivsy de Hartuiaiiii, page i3o.
( iG8 )
nees suivant les renseignemens jadis fournls a I'asso-
ciation africaine de Londres par le Maure Ebii-A'ly (i) ;
a rie porter qua i5 milles les journees de I'Edrysy, on
aurait pour resuUat utie distance de 4^ niilles, indiquant
iin taux de plus de 20 niilles pour les journees d'Ebri-
A'ly. Cependant Kennel (2) nalloue que 170 niilles
( c'est-;'.-dire iS niilles par jour) pour les 9 i;2 journees
qu Ebn-A'ly avail coniptees enlre Marok et Tatta , et
il laisait un calcul analogue pour les 12 journees entre
Tatta et la ville de Noun j ces distances sont trop cour-
tes, noii-seulement par comparaison avec la valeur de
la journee entre la cote et la ville de Noun , niais aussi
a raison d autres considerations que je vais exposer a
linstant.
J'ai eu occasion de remarquer ailleurs (3) qu'en ap-
pliquanl a la lonj^ue route de Caille enlre le Rio de
Nunho Tristao etEl-Rabath, les regies proposees par
Rennel sur la disposition des lignes magnetiques dans
1 interieur de 1 AfVique, on devait trouver que cette
route, relevee a la boussole, etait passible, a raison de
la variation niagnetique, dune correction N. O. siicces-
sivement croissante en avancant d'abord a lest, puis
an nord. Si done la route a ete comniencee sous I'in-
fluence dune variation de. 12 environ, comnie je lai
etabli autre part (4), il est aise de verilier qu'elle s'est
achevee sous un angle de 3^° de declinaison niagneti-
(i) Memoire de Rennel dans les yoj^ages de Ledyard et Lucas ,
page 29',.
(2) Rennel , tibi supra.
(3) Revue critique deja citee.
(4) Considerations critiques sur la geographie positive de I'A-
frique interieure occidentale; sect, ir , § i : routes jusqu'a Tembou.
{^Revtic des Deux- Monde s , tome iii de i8'3o, page 261.)
( i69 )
que, ainsi que ie niontrent !es marclics depuis Fes jus-
qu'a El-llabath. En admettant que dans celte dei iiiere
porlion de route I'aiguille ainianice ait subi unc devia-
tion ex!iaordinaiie pai- suite du voisinage des nionta-
gnes, et que la meme cause ait pu agir en sens inverse
au sud de I'Atlas, toujours est-ii qu'on ne sauraitesti-
mer a nioins de 20 et quelques degres la correction
applicable aux gisemens depuis El-Harib jusqu a Tes.
El-Harib est un canipeinent dont le noni , qui est
aussi celui dune tribu considerable, in'avait paru d'a-
bord devoir elre restitue en celui d'El - Hharets (i) ;
deja Caille avait altere de uieme une finale analogue en
ecrivant Mouladrib pour Moulay Rdrys; mais en ecou-
tant atlentivement de sa bouche la prononciation de
son El-Harib, je n'y ai point retrouve I'aspiration forte
d'EI-Hbarets, et j'en ai conclu qu'i! fiiut des-lors lire
El-A'ryb, autre noni de tribu qui se retrouve jusque
dans le pays d Alger. El-A'ryb est a 5 journees au S. E.
de Tatta, et a i3i heures en ligne droite de Fes, dans
une direction S. 17° O. de la boussole d'apres la con-
struction de detail de M. Jomard , et faisant par conse-
quent avec la direction sur Tatta un angle de 62°. Or
si Ion ne coniptait que 18 niilles par journee, ainsi que
I'a fait RenncI , pour placer Tatta et El A'ryb, ce dernier
point se tiendrait dans I'ouest de 7° 40' de longitude
occidentale, c'est - a -dire au S. 3° O. de Fes , ce qui
reduirait a i4" la correction afferente a la variation:
or noM- seulement cette quantite est trop petite eu
egard aux considerations tirees de la disposition des
(i) Cette restitution se trouve iidoptee dans la carte Au Marok
que vient de faire graver a Florence, par Segato, M. Graaberg de
Hetnsoe.
( »70 )
lignes magnetiques de Renriel, niais encore par limpos-
sibilite de liii faire remplir ses propres conditions cl'ap-
plication , savoir, de donrier, entre les lignes tirees de
Fes et de Tatta , un angle de 61" portant son soniniet a
El-Aryb; ces conditions s'accomplissent an contraire
dans riiypothese d'une valeur de 20 miltes pour la jour-
nee de route, car alors Tatta vient par 28° 4i' N. et
8" 33' O. , d'ou une ligne de 100 milles, coupant sous
un angle de 62° une ligne tiree de Fes, affecte elle-
meme une direction E. 24" S. , et amene I'antre a une
direction S. 4" F. , verifiant ainsi pour toiites deux une
correction niagnetique de 21° ]N. O., qui assure a El-
A'ryb une position de 28° o' N. et 6"'' 4g' O., a 366 milles
en ligne droite de Fes. En construisant sur cette base
le trace de la route effective de Caiile, j'obtiens les po-
sitions suivantes :
Mimcina, dans le gays de Dara'h aS" 37'N. et 5"3i' O.
(jhourland , principal lieu du Tafil^lt. . 3i. 4 4.42
Wt'iivara 3i.5i 5. 11
Tamaroc . , 32.20 5.25
Cars 32,35 5.33
L'Eksebi 33. 3 5.5c,
Soforo 33.48 7. 6
La nouvelle carte de M. Graaberg de Hemsoe (i), en re-
produisant litteraienient le trace de la route de Caiile
donne par M. Joniard, a encore outre I'erreur primitive
de situation niutuelle entre Tatta et El-A'ryb, par suite
d'une correction sur la latitude de Tatta : les construc-
teui's de cartes oublient crop souvent quune position
(l) Cette carte est intitulee : Carta del Mo^ltnli id ylcsa ossia dell'
impero di ilarocco, giiista le pii't recenci scopeiw c conibinazioni, formata
c desciitla da Jacopo Graaberg di Ucimoe , ed incisa da Girolamo Sc-
gnto,iit Pirvnzc, i83 4.
( 17^ )
n'est presque jamais incieperidniite, »t qu'il I'ant toujoiirs
tenir compte des rapports quelle doit conserver avec
d'autres points ; faute de ce soin les cartes des contrees
pen connues offrent un veritable chaos ou sont jetees
coiiinie a laventtire une toule d'indications erronees,
et fourniillerit de doubles et triples emplois ; ce dernier
inconvenient est tres frequent dans la carte qui me sug-
gere ces reflexions, et qui est loin cependant d'etre sans
nierite. Pour n'en donncr qu'un exeniple, il me sulfira
de citer Ifren , Ufaran , Eufaran et Oferan , ainsi ecrit
quatrefois sous des ortliograpbes diverses et en des po-
sitions distinctes, bien que ce soit un seul et nienie nom
que Leon, Marmol, Cochelet et quelques autres ont in-
dique avec une simple difference d'orthographe ; et
comme le village d'lllekh est dans Je voisinage, il se
trouve repete, non pas quatre fois a la verite, mais deux
fois, sous les formes Ilekh et Ilirgh- Talent, qui figure
aussi tlans le nieme district, est pareillemenl double,
inais dune maniere moins irappante. M. Cochelet est
passe a Talent, et il a dautre part rapporte un itine-
raiie par lui recueilli de la boiiche d'un rabbin et qui
passe a Talendaietegerrer. M. Graaberg a reconnu avec
raison que ce dernier noiu est compose de plusieurs,
niais il ne nie send^le pas avoir ete heureusement in-
spire en le lisant Talendai-el-Tegerrer : il me parait, sauf
nieilleur avis , qu'il le faut relablir en Talent-A'yt-Ge-
rar, c'cst-a dire Talent appartenant a la tribu berbere
de Gerar. Et puisque je touche en passant ce sujet, j'a-
jouterai un mot sur la restitution d une denomination
analogue fournie par le voyage de Robert Adams : sa
derniere etape avanl Ouady-Noun est par lui prononcee,
et par M. Cok ecrite sous sa dictee, Aieta-Mouessa-
Ali ; il mc parail hors de doute qu il en iaut deduirc
( »72 )
A Yt-Al)ou-i say-A'ly. Ces exemnles doivent faire senlir
la necessite clapporter r.rie graricle attention ilaiis le
mode de saisir et de transcrire I emission orale des nonis
geographiqiies. Maisje me hale d'abandonner cetle di-
gression pour revenir a 1 ilineraire de Caille, a I'egard
diiquel M. Graabcrg, loin d'eviter les doubles emptois
dii trace priiiceps, y ^encore ajoute de fautives redupli-
cations, comme on le verra tont-a-l'heure.
J'ai deja signale autre part (i) les coincidences de cet
itineraire avec celui deAhhmed ebn El-Hhasan elMet-
syouy, employe par M. Walckenaer pour determiner le
point de Tafilelt. Ces coincidences, en partant de Fes,
s'echelonnent ainsi : Soforo de Caille avec Safrou ( plus
exactement Ssofrouv) d Ahlmied, bien connu aussi par
le Bekry, lEdrysy, Leon, Marmoi, etc. (2)5 c'est la pre-
miere etape d'Ahbmed, a 20 milles de Fes. Sa seconde
etape a Ouyoun-el-Asna, n'est pas indiqueedans Caille,
mais elle se retrouve dans le Haiti-Lisnan de Leon , El-
Essnani du Bekry (3), et dont on pent retablir des-lors
le nom en A youn-el-Essnam (les sources des idoles);
Caille a pu y passer sans etre averti de cette denomina-
tion, et peut-etre est-ce le bas-fond indique sur sa carte
oomnK! un entonnoir, on il a rencontre le village mo-
derne de Guigo. Quoi qvi'il en soil, ce nom de Guigo ,
que notre voyageur a retrouve diverses fois comme de-
signant un ruisseau (probablement dune maniere ap-
pellative) , se reproduit dans !e fleuve Gygou d'Ahh-
med.
(i) Revue critique citee plus haut.
(2) Je ne crois pas que les geographes Jiihlistes aient encore rap-
prochc ce nom <le celui des Safaroiivm de rEcriturc.(Aow , IV. xvii.
3r.)
(3) Uekry, page i65.
( »73 )
A[)res avoir passe la inontaf^iic de Scha bet J?eriy-
O'baycl , au pied de laquelle coule le Moloiiyali , Ahh-
nied rencontre des daskerahs appeles Eqssehy-el Scher-
f a , oil il est aise de reconnaitre I'Eksebi de Gaille, pres
dun ruissean au pied dune chaiiie de niontagnes,
Le Nozelaii d'Ahhnied (qu'on peut trad m ire par I'es-
pagnol 'veiita), est reprcisente par le Nzeland de Gaille.
Le Ghers d'Ahhnied se retrouve pareillement dans le
Cars de Gaille, et tons deux repondent au Gherseluin
de Leon et de Marmol, qui doit probablenient etie or-
thographie Ghers-A'louyn. La encore Gaille a vu un ruis-
seau qu'il appelle Guigo, et qui, cette fois , est le Zyz
ou le fleuve de Tafilelt. Je ne croyais pas possible, apres
!a demonstration irrefragable donnee par M. Walcke-
iiaer de I'identite du Zyz et du fleuve de Tafilelt, qu'au-
cune carte reproduisit desormais I'erreur relevee parce
savant academicien : elle se retrouve pourtant encore
sur la carte de M. Graaberg!...
Dans le Taniaroc de Gaille, il est facile de reconnaitre
le Tsemrakest (ou plus exacteinent Tamrah-Qosth )
d'Alihined, Taniaracost do Leon et de Marmol (i);
M. Graaberg en a fait trois positions differentes. En
quittant cette station , Ahhmed parvint le jour suivant
dans le district de Medgharah , decrit par Leon et Mar-
mol, et auquel semble se raltacher le nom de Mdayara
rapporte par Gaille.
Ge n'est qu'a trois jouinees de la, ou une soixantaine
de nillles , qu' Ahhmed , sa,vancant dans le pays de Ta-
filelt, parvint a El-Dar el-Baydha; cela porte, a ce
qu'on voit , precisement dans le canton designe par
Gaille comme formant le territoire de Tafilelt. Y a-t-ii
(i) Leon, lib. vi,art. 6'Aeneg' ; Marmol , lib. vix, cap. a6.
( '74 )
uiie ville de ce iiomPCest une question tort coiitrover-
see, mais qui le scrait beaiicoup inoins si Ton redechis-
sail que les Arabes donnent fVequemment au chef-lieu
dun pays !e noni du pays liii-nieine, quelquc uoin par-
ticulier quait d ailleurs oe chef-lieu; cela revient a re-
tourner aiusi la question : Quel est le chef-lieu reconnu
du canton de Talilcit? Quoi qn'il en soit, M. Walcke-
naer place Tafdelt 3191 niilles geographiques de Fes, et
en conclut une position de 3o 10' N. et 4" 55' O. II y
a evideniinent la quelque nieprise , car Fes etant par
34" 6' N. , la distance serait de 2G4 niilles, chiffrc qui
suppose la journee de 24 niilles au lieu de 17 i/3 (juila
pris pour base. Dans ma construction , il faut s'arieter
vers 3i» N. et 4" 3o' O. Cest aussi ta que nieiient les
huit journeeS qu un itineraire recucilli par M. Cochelet
donne entre Tedla et Tadlelt.
J'aurais voulu determiner avec quelque precision I'em-
placement de la celebre Segelmesah; en m'attachaiit a
une etude comparee des details chorographiques de
Leon et d'Ahhmed, j en conclurais, j)ar des rapproche-
mens qui n'ont point echappe a M. Walckena^r, que le
territoire particulier de Segelmesah , presque identique
a celui qui porte aujourd'hui le nom de Tafiielt, etait
conipris entre 3i"et3i'' 20' N. Mais cette position est
loin de cadier avec les distances itineraires donnees par
Leon, savoir, 120 niilles depuis Gherseluyn, i5o milles
depuis Fighig et 100 niilles depuis Tebelbelt.
Fighig est fourni par Shaw a 5 jours S. S. O. des Beni-
Smeal (sans doute Benylsma'yl, lesquels sont a 6 heues
sud des montagnes de Karkar , placees elles-niemes a 6
heues S. de Sinan. En tenant compte de la correction
afferenle a Testime de Shaw pour la province dOran,
i'aurai Fighig vers 33° 2' N. et 4" 8' O. (kj-jJ i
( '75 )
Tebebelt se troiive, d'apres Caille, a 6 journecs dans
lest de Mimcina et a 8 joiunees de Toiiat ; or Touat
lui-meme, ou Agliably (Ekably d'Einsiedel ) , nest indi-
(jue que par ? journecs sur le prolongetuent de la route
de Ghadames a Ayn e!-Ssalahb, ce qui lui vaudrait une
position conjecturale de 26' 53' N. et log' O. Tebelbelt
tomberait alors vers 28" 49' N. et 3° i5' O. De la a Fi-
ghig il y a aSS niilles rpi'il serai t a la verite facile de
leduire a aSo miiles, somnie des distances donnees par
Leon entre ces deux points et Segelniesah ; niais Segel-
mesah eile-meme se trouverait, par ces distances, a plus
de 5o niilles au sud du Qassr Mouley I\Ianioun , qui ce-
pendant etait peu eloigne de I ancienne capitale des
Mediarytes.
II est a desirer que les officiers employes dans la pro-
vince d'Oran, et qui ont pu s'y procurer des itineraires
tels que celui qui conduit, par Fes etMarok, jusqu'a
Taroudant, mettent leurs soins a en recueillir qui ail-
lent a A'yn el Ssalahh ou a Aghably par Figliig, Tafdelt
et Tebelbelt J a Marok parTafilelt; du Ouady-Mozab a
Fes par Tafilelt; dans toutes les directions, en un mot,
ou de nouvelles lignes peuvent verifier ou completer la
triangulation grossiere sur laquelle est base le canevas
de nos cartes de I'Atrique septentrionale. Qua Alger ainsi
qu'a Bone, que dans tous les lieux oii se rencontreront
des indigenes ayant voyage dans I'interieur, on ait soin
de recueillir leurs itineraires avec tous les renseiirne-
mens accessoires qui s'y rattacbentj que d'intelligentes
questions ameneut les eclaircisseraens qu'il est le plus
utile dobtenir: que les lignes douteuses soient confir-
mees ou rectifiees par la reunion de nouveaux temoi-
gnages ; que des lignes transversales assurent la situa-
tion relative de celles qui sont connues, en les reliant au
( 176 )
iiioycn lie roptiros l)it'ii iletcMinines. Que chacjue station
principale soil un centre autour duquel on se fasse in-
dicjtier, en suivant les points cardinaux et leurs interme-
diaires, les distances a d'autres stations plus on moins
eloignees. Lc champ ouvert a de telles investigations est
iinmense : qu'il soit, a force de questions et de recher-
clies, sillonne dans tons les sens par des renseigneniens
ilineraires sans nombre : la seront l«rs meilleurs eleniens
dune carte du Maghreb, jusqu'a ce que I'oeil europeen
y puisse penetrer assez avant pour y planter les jalons
d un relevenicnt plus exact. Sachons preparer les voies
d'une exploration si desirable, niais encore si loin dans
lavenir!...
* A
LETTllE
DU CURE DE SANTIAGO TEPEHUACAN A SOX EVEQCE ,
Sur les inocurs et coutumes des Indiens
sotimis a ses soinsj
Traduite par Henri Ternacx, sur le manuscrit original
qui se tiouve dans sa Mhliotlieque.
Les details que Ton va lire soiit contenus dans une lettre dii cure
de Santiago Tepeliuacan, adress('>e a son evt^ue. I-e but du pas-
teur, en faisant connaitrc les inoeurs des Indiens, est d'apprendre cl
ses successeurs quels obstacles ils auront a vaincre dans I'exercice de
leurs fonctions , et en m^me temps d'appeler I'attention de I'ev^que
sur les moyens de faire disparaitre les idees superstitieiiscs qui re-
giient encore r.liez les Indiens
Chez les Indiens Huastecas, quaii<l une foninic ac-
couche, on tail une off'rande de comestibles dans Ten-
( »77)
droit meme oil elle est accouchee, afin que les teornames^
ou femmes des dieux, ne fassent aucun mal au nouveau-
ne ou a la mere, et dans les premiers huit jours qui
suivent I'accouchement, on fait un grand festin. A ce
festin, il doit y avoir, sans aucune exception , de toutes
les choses dont on a mange dans la maison de laccou-
chee , car s il y manque quelque chose, les teornames
fontmourir I'enfant. La sage-femme prend en paiement
le mais, les feves et la viande que possede I'accouchee,
et si on ne les lui donne pas, I'accouchee doit mourir.
La sage-femme prend I'enfant, et si c'est un garcon, elle
lui met le machette a la main, allume quelques raineaux
de pins avec lesquels elle fait des fumigations dans
toute la maison et autour de I'enfant. Elle le promene
ensuite par toute la maison, et lui niontrant chaque
chose avec la main, elle lui dit : « C'est la que se leve
le soleil et c'est la qu'il se couche; cest ici le chemin
du champ cultive , c'est la le chemin de la foret, c'est ici
que tu iras labourer, c'est la que tu iras couper du hois.
Til ne resteras pas dans la foret , mais tu reviendras par
le meme chemin. Cest ici quest ta maison, c'est ici que
tu vivras ». Si c'est une fille, elle lui met dans la main
un fuseau et une navette, et lui dit : « C'est ici ta mai-
son , c'est ici que tu vivras , c'est ici que tu fileras et que
tu tisseras des etoffes pour thabiller»j puis elle ajoute
les autres choses telles quelle les a dites au garcon. Les
Indiens sont persuades que les enfaiis ne savent, quand
ils sont devenus grands, que ce dont on leur a parle an
moment de leur naissance.
Lorsquune femme meurt en couches, on porte tons
ses effets dans les hois, et on place a I'envers le plat
dans lequel elle mangeait; car I'esprit de la defunte
viendra chercher ses veteniens, et si on ne les porte pas
12
( »78 )
dans les bois, et si on nc; place pas a IVnveis le plat
dans leqiiel elle mangeait , la feninie avec laquelle le veuf
se remarieia niourra dans sa premiere couclie. Quand
ces Indiens lont baptiscr leur entant, ils font cuiie des
gAteaux au chile ot des oeufs et les dislribuent aux en-
fans, et ils croient que s'ils ne le fuisaient pas, I'entant
resterait seul et sans compagnie dans sa niaison.
Apres le baptenie d'un enfant , les parrains le reniet-
tent au pere et a la mere, qui lui disent : « Viens avec
nous a notre maison , ne reste pas ici », et ils disent la
ineme chose dans tons les endioils ou ils se reposent
sur la route, tournant la figure de lenfant vers le lieu
de leur habitation, et ils croient que s'ils negligent cette
precaution, I'esprit de I'enfant restera dans I'eglise ou
dans I'endroit ou ils se sont reposes.
Quand ils s'en retournent avec I'enfant qui vient d'etre
baptise, ils jettent de la cendre et de la chaux dans tons
les chemins qui traversent celui qu'ils suiventjils agis-
seut aiiisi afin que I'enfant, quand il sera grand , ne
s'egare pas dans ces chemins.
Un enfant est il tombe des brasde celui qui le portait,
et une rnaladie a-t-elle suivi cette chute, les parens pren-
nent la chemise de I'enfant, I'etendent a Tentlroit ou il
est tombe, et diseul : « Viens, viens, viens rejoindre
I'enfant >». lis eniporlent ensuite un peu de terre enve-
loppee dans la chemise et la lui remetlent; ils disent
que de cette mauiere I'esprit est rappele dans le corps
dumalade, el qu'il guerit.
Quand les femnies en mal d'enfant ont de la peine a
accoucher, ils balaient la maison et disposent des sieges,
afin que les dieux puissent s'asseoir quand ils viennent
visiter la malade, et ils croient que s ils negligeaient
cette precaution elle perirait.
( »79 )
Le i8 octobre, fete de saint Luc, tons les Indians se
reunissent et balaient les chemins, afin que les ancien»
Indiens du temps du paganisme les trouvent propres a
leur passage, car ils disent que cette nuit ils viennent
les visiter et qu'il faut les honorer.
Les Indiens croient que les iemmes qui meurent en
couches n'iront ni au ciel, ni en purgatoire, ni en enfer,
mais qu'elles resteront dans Fair pour faire alier le ton-
nerre. Lorsqu'un Indien est pique par un serpent, ils
font aussilot des gateaux de fete et en dislribuent aux
enfans; ils en portent aussi au serpent pour qu'il retire
le poison qu'il a verse dans la plaie er qn'il ne niorde
plus personne de cette niaison.
Tout Indien qui va travailler dans la montagne porte
avec lui da tabac en poudre, coninie un preservatif
centre la niorsure des serpens. Si un Indien nieurt de
la morsure dun serpent, ou s'il se noie,il n'est point
enterre dans une eglise , parceque les Indiens pensent
que la foudre viendrait le deterrer, et qu'en meme temps
elle mettrait le feu a I'eglise.
Quand un Indien vient a rnonrir, la veille de I'enter-
renient son lit est porte tout autour des niaisons voi-
sines. Les Indiens croient que s'il.s manquaient a cette
pratique, le mort viendrait prendre conge de ses voi-
sihs; et en revenant de I'enterrement, ils jettent de la
cendre autour <le la niaison du defunt, afui qu'il ne
vienne pas tirer une .utre j/ersonne de sa niaison; car
tons les Indiens croienl que personne ne meurt de mort
naturelle, niais que les enchantemens des dieux ou teor-
naraes peuvent seals faire mourir.
Lorsqu'on enterre un mort, une vieille femme met
a la porte du ciinetiere ou de la niaison du mort un
pot renverse conlenaiit quatorze grains de mais(moi-
12.
( »8o )
nieine je les ai comptes), et le bouche avec de la terrej
le dernier de ceux qui portent le mort met le pied sur
le pot et le casse. Us agissent ainsi pour trois raisons :
d'abord , ce pot doit servir de canot au mort dans I'autre
nionde et I'aider a passer les rivieres ; le mais est destine
a servir de senience pour que le mort se procure de
quoi vivre et nourrir ses poules dans I'autre monde, et
enfin le pot est rompu pour qu'on lui ouvre les portes
de Tenter, oil les Indiens disent qu'ils doivenl tous alter.
Us disent que quand une vierge se marie avec un
veuf, le mari se reunira dans I'aulre nionde avec sa pre-
miere femmc, et la seconde fenune sera employee a ecar-
ter leschauve-souris avec une baguette, afin qu'eljes les
laissent en repos. Us disent encore qu'une femme qui
meurt vierge doit, dans I'autre monde, se prosterner
devant Dieu, se retirer, puis se prosterner de nouveau
et passer ainsi toute I'eternite.
Pendant la ceremonie du manage, si le fiance laisse
tomber I'anneau , ils croient que la femn>e mourra bien-
tot, et si c'est la fiancee, que ce sera le mari. De meme,
si le cierge du mari s'eteinl quand il est devant I'autel,
c'est signe de mort pour la fiancee; si c'est celui de la
fiancee, c'est signe de mort pour le mari.
Aucun Indien ni aucune Indienne n'ose sebaignera
I'beure de midi, parce que, disent-ils, c'est I'beure a la-
quelle les dieux des eaux se reunisscnt pour se divertir,
el que celui qui se baigncrait a celte beure tomberait
malade.
Quand les nouveau-maries se rendent a leur maison
pour faire le festin de noce, et qu'ils se sont assis a la
table, c'est la marraine de la mariee qui met le pre-
niier morceau dans la boncbe du marie, et le parrain
du marie qui met le premier morceau dans la bouche
( i8i )
cle la mariee. Sil en elait autrement, I'amour niutuet
des deux epoux ne pourrait pas durer. On danse
le soir, et quand le moment de se coucher est venu ,
la marraine va faire le lit des nouveaux epoux et
etend dessus un drap parfaitement blanc. Elle des-
habille ensuite la mariee et la couche sur ce drap. Le
lendemain , les parens et les lenioins des epoux vont
relever ce drap, et s'ils le trouvenl ensanglante, ils
I'ecommencent leurs festins ct leurs danses en pro-
menant ce drap dsns le village; si, au contraire, le
drap est encore blanc, ils ne font ni festins ni danses ,
tnais iis prennent deux lasses dont ils otent le fond , et ,
les mettant sur un plat, ils les reniplissent de chocolat
et vont ensuite les presenter aux parens de la mariee,
de sorte que quand ils vont pour les porler a la bouche,
]e chocolat se repand, et de cette maniere, ils leurfont
entendre que la mariee n'etait pas vierge.
Pendant le temps que Ton emploie a semer le colon
et le chile , les Indiens ne mangent ni graisse, ni viande,
ni oeufs , parce qu'ils croient que cela ferait tomber les
fleurs et nuirait a la recolte. De menie ils n'approclient
pas de leurs champs quand ilssont en (leurs, ni ne tnon-
trent du doigt aucune plante en fleurs, parce qu'ils
croient que les fleurs tomberalent ct ne donneraient pas
de fruits.
Quand ils font la recolte du mai's, ils cholsissenl les
meilleurs epis, qu'ils suspendenta la fumee, et quand le
temps des semailles est venu , ils en prennent les grains
avec le plus grand soin , evitant surtout que les pores ,
les poules ou d'autres animaux ne mangent aucun de
ces grains, et avant de les semer ils les trempent dans
une eau courante. Cette derniere ceremonie a lieu pour
ohtenir du dieu deseaux qu'il donne aux champs une
( »82 )
hutnidite suffisante, et la premiere, parce qu'ils croient
que si un seul grain de ceux qui sont destines a la se-
mence avail ete mange par un animal , les sangliers et
les oiseaujf viendraient manger le reste , et que le champ
ne produirait rien.
Lorsque les epis de inais sonl leves, ils apportent un
grand gateau qu'ils brisent et dont ils setncnt les mor-
ceaux dans le champ, disant que c'est la nourriture des ,
dieux , et qu'ils la leur doiment pour qu'ils epargnent la
recolte; ils font la nieme cerenionie pour les autres pro-
ductions de la terre.
Quand un Indien tombe malade, ils croient que c'est
un chatiinent des dieux, et pour obtenir d'eux sa gue-
rison , il laut quil fasse trois fois sept gateaux, qu'il en
place sept au sommet du pin le plus eleve de la foret ,
qu'il en enterre sept au pied du meiiie pin, et qu'il en
jette sept dans un piiits et se lave ensuite avec I'eau de
ce meme puits ; alors la maiadie y restera et le malade
suerira.
Pour empecher les oiseaux de manger le mais, ils en
peignent un sur une planche, ils 1 ornent de plumes, et
le suspendent ensuite dans le champ.
Quand ils etablissent un nouveau moulin a ecraser
les Cannes a Sucre, ils font un grand festin. Ils pren-
nent d'aboid une bouteille d eau-de-vie ( de cannes) et
la repandent sur la machine, et quand on sert le repas,
ils lui disent : « C'est toi qui es notre pere, c'est toi qui
nous nourriras, ne te i'ache pas conire nous «. Si la ma-
chine blesse quelqu'un, ils lui servent un repas pour
I'apaiser, et afin que le blesse guerisse et qu'ellc n'cn
blesse pas d'autres.
lis font aussi un festin quand ils vont couper un
grand arbre, afin de I'apaiser et aiin ((uil ne blesse per-
( i83 )
Sonne en tonibant. Quand ils batissent une inaison,
ils placent sur le toit des branches de soiimar, afin
dVmpecher les sorciers de venir s'asseoir dessus et de
I'enfoncer.
La nuit de la Saint-Jean, les Indiens vont fouetter les
Grangers et les pruniers, afin qu'ils prennent de la force
et donnent de bons fruits, et la veille du jour des Cen-
dres , ils appliquent de la cliuux sur le tronc, afin que
les malefices des sorciers n'y puissent trouver prise.
Tout Indien qui, dans sa vie, a enterre un cadavre,
ne peut planter un arbre fruitier ; I'arbre qu il planterait
secherait et ne pourrail prosperer. Les autres Indiens ne
veulent pas I'employer a la peche, disant que sa pre-
sence ferait fuir le poisson.
Quand ils mangent du sangiier ou du gibier, ils n'es-
suient pas leurs doigts contre les inurs ni centre les
portes de la maison, et ils disent que sils le faisaient,
jamais ils ne pourraient prendre d autre gibier.
Les Indiens qui pechent a Thamecon ne veulent pas
preter leurs bainecons aux Indiens civilises, donnant
pour raisou que ceux-ci jettent aux chats les restes du
poisson, et que cela les enipecherait den piendre d'autres
avec les nienies hamecons.
Quand on enlend les cris du renard , ils disent one
c'est signe de niort pour quelqu'uii du village, et que le
renard est I'alguazil de I'enfer.
Si une feninie est sterile, ils disent qu'uu grand ver
vient la teter toutes les units, el ils appellent ce ver
tertopitri.
Lorsqu'on entend le cri de deux oiseaux nomtnes
toio et teapirnni, qui sont assez communs dans les
champs de cannes,ils croient que cest un signe que celui
qui les entend se noier.i.
( '84 )
Un oiseau nomnie tecolote se placet-il sur la cabane
dun Indien et fait-il entendre son ci i , ils lui disent :
«Va-t'en, demon (««/«//««), va»j et ils jettent du sel
dans le feu , croyant que cela raveuglera.
Quand il y a une eclipse de soleil, ils attaclient ii la
ceinture des lemnies enceintes une paire de ciseaux et
une navette, et ne les laissent pas sortir : ils croient que
sans cette precaution elles avorteiaient. lis pensent que
I'eclipse est causee par un aigle enoime qui s'eleve vers
le soleil et le cache de ses ailes.
( '85 )
DEUXIEME SECTION.
DOCUMENS, COMMUNICATIONS, NOUVELLES
GEOGRAPHIQUES, ETC.
Lettre de M. John Ross, capitaine dc vaissean de Id
marine royale britannique , ii MM. les president , se-
cretaire , etc. , de la Societe de Geograplde de Paris.
Londres, i *■' septembie i834.
Messieurs,
M. de Bacourt, charge d'affaires de France, m'ayant
l-emis votre lettre du i3 avril, ainsi que la medaille d'or
dela Societe de geographie, je vous prie de vouloir bien
assurer cette Societe savante et distinguee , qu'entre
plusieurs citconstances de profonde satisfaction qui ont
suivi men retour en Europe , apves un voyage d'une
longueur et d'unedifficulte plus qu'ordinaires,iln'en est
aucune qui ait plus vivement excite nies sentimens de
respect et de gratitude, que I'honneur, digne d'envie,
que la Societe m'a confere.
Recue dans ces sentimens, la medaille dor qui m'a ete
decernee dune maniere si flatteuse , sera transmise a
ma posterite comme un precieux temoignage de I'es-
time que les membres de la Societe accordent a mes ef-
forts pour lavancement des connaissances geographi-
( »86 )
ques; et je vous pile de croire que je lie suis pas luoins
sensible a la inaiiiere flatteuse tlont les president, secre-
taire , etc., m'ont exprinie leurs sentimens en celte oc-
casion.
J ai 1 honneur d'etre avec le plus profond respect,
Messieurs ,
Voire tres obeissant et tres humble serviteur,
John Ross ,
cnpitaine de ■vaisseuu.
CHKMIN DE FEK A TUAVERS I, ISTHiMK Uli PANAMA.
Dans le courant des annees 1828 et 1S29, M. Lloyd,
ingenieur anglais , et un otiicier siiedois, tons deux
comrnissionnes par Bolivar, (irent un nivellement com-
plot dune partietle i'istlune, afin de s'assurer de la pos-
sibilite de joindre VOcean Pacifique a I'Ocean Atlan-
tique. Nous avons deja donne un extiait du rapport de
cesdeux ingenieurs (r); entre autres observations, on y
lisait celle qui suit: « L'endroit oil le continent ameri-
cain est resserre dans ses plus etroites limites, est aussi
remarcfuable par une rupture de quelques niilles, exis-
tant dans la grande chaine de montagnes qui, a quel-
ques legeres exceptions pres , traverse ontierement
cette partie du pays, de I'extremile nord a I'extremite
sud. La principale ditficulte, pour etablir une coniniu-
nication entre les deux niers, ne viendrait done point
des montagnes, niais bien d'une foule de ruisseaux a
traverser, qui sont a sec dans I'ete, et deviennent de
(i) Voir le n" 88 du Bulletin 'tome xiv).
( ^87 )
veritables torrens dans I'hiver ou la saison des pluies. »
Le meme rapport Indiquait aussi dune maniere precise
la difference de niveau entre les deux oceans, diffe-
rence qu'on avail cru jusqu'alors plus considerable.
Les ingenieurs concluaient cependant par la possibi-
lile d'etablir un cheniin de fer qu ils jugeaient devoir
etre prefere a un canal. Outre les difficultes bien plus
grandes que ce dernier moyen de communication len-
contrerait dans I interieur de lislbme , le peu de pro-
fondeur de I'Ocean Pacifique, a plusieurs milles de la
cote, en rendrait I'abord inaccessible aux aros bati-
mens, et son but serait par consequent manque. Dans
I'etat actuel des clioses, un cbemin de fer qui permet-
trait le transport des marchandises, des passagers et des
lettres, remplirait, pour la Nouvelle-Grenade en parti-
culier, et le monde commercial, en general, lous les
avantages qu'on doit raisonnablemeiu esperer.
Ces diverses considerations ont determine les deux
decrets dont voici la substance :
Decret de la legislature de la repnblique de la Nou-
velle-Grenade , autorisant Ic pouvfiir execiuif a oiivrir
une comumnication entre les deux mers , a travers
I'isthme de Panama.
Art. i*"^. Le pouvoir executif est autorise a recevoir
toutes les propositions qui pourraient lui etre faites ,
pour letablissemenl d'une route traversant listlime de
Panama, d'uu ocean a I'autre , el ce, aux conditions
du present decret.
Art. 2. Les entrepreneurs pourronl former cette
communication , soil par un cbemin de fer, soil par
une route ordinaire, en usant de tons les cours d'eau
qui pourraient les aider dans leurs Iravaux.
Art. 3. La route sera coninieiict'C deux ;uis au plus
( '88 )
tard, a dater de la concession du privilege, et etre ter-
ininee dans un delai qui sera fixe par le contrat.
Art. 4 ^t 5. Si le cheniin passe a travers des pro-
prieles particulieres , les possesseurs seront obliges de
les ceder a juste prix , c'est-a-dire a la valeur qui sera
fixee par experts, a I'epoque du commencement des
travaux. Si les terres ou passera la route sont publiques
(^valdias) , elles seront cedees gratuitement et sans exi-
ger aucune indemnite.
Art. 6. Les entrepreneurs auront la jouissance du
revenu suivant la nature de la communicalion qu'ils
auront creee, pend.ant un temps qui ne sera pas moindre
de dix ans, ni au-dessus de cinquante. Le maximum du
droit a percevoir sera fixe par la legislature.
Art. r et 8. Les entrepreneurs recevront en recom-
pense 20,ooo fanegadas (exwiron 100,000 acres) de
terres publiques dans I'isthme', propres a la culture, et
qui seront , pendant vingt ans , exemptes de toutes
charges publiques. Les articles 9, 10 et n sont regie-
men taires.
Fait a Bogota, le 22 mai i834.
L'autre decret, qui est la consequence du precedent ,
est rendu par le president. II fixe le i5 Janvier i835 ,
comrae terme de rigueur pour Tadmission des proposi-
tions ; on fixera ulterieurement le jour et Iheure ou leS
soumissions seront publiquement ouvertes. Le contrat
sera passe avec la personne qui offrira les conditions
les plus avantageuses et les siiretes les mieux etablies.
Bogota, 29 mai i834.
Si'gne : Frapjcisco de Pacla Santander ,
president ;
Lino de Pombo ,
sccfctairc de rinterieur et des affaires etrangeres.
( x89 )
EXTRAIT
d'cN MEMOIRK SUR UN CHEMIN DANS LISTHME
D£ PANAMA ,
Adresse a la Societe de Geographic de Paris par M. Juste
Pa REDES, membre de cette Societe.
De tous les projets que ce siecle de progres a fait
eclore, il ii'en est aucun qui soil dune importance plus
grande que celui qui a pour objet d'ouvrir une com-
munication entre I'Ocean Atlanlique et la nier Pacifique
au travers de I'isthme de Panama. On a beaucoup parle
de cette conception depuis la de'couvertede lAmerique,
comme propre a faciliter les relations commerciales du
nionde en tier; mais pendant la longue doriiination de
I'Espagne, il a ete impossible den obtenir la mise a exe-
cution, et il a lallu abandonner ce projet jusqu'a une
epoque plus propice.
Depuis que les colonies espagnoles ont secoue le
joug, cette question a repris une existence nouvelle.
Elle a fixe I'attention des gouvernemens et celle des
particuliers : tous les hommes entreprenans de lAme-
rique comme de lEurope , voient dans son execution
le moment desire qui operera par les interets du com-
merce le rapprochement materiel et inteliectuel des in-
dividus des differens points de la lerre, geographique-
ment trop eloignes les uns des autres, pour avoir entre
eux des relations frequentes.
Aucune position n'est aussi favorable au commerce
de I'univers que celle de listhme de Panama, dont le
( «9o )
sol , les productions et Ic diniat soiit autant de rares
bientaits do la nature. Leur concours heureux a fait
de ce pays un sejour enchante ou Ton jouit d iiu prin-
temps peipetuel , et ou le travail, que les hiibitans don-
nent a la terre , les recompense deux tois par an de
leurs peines, qui sent legeres en comparaison de celles
que les cultivateurs ont ordinairemeut dans des pays
moiris favorises par la fertiiite et la temperature.
Le cacao , le tabac, le coton , le caie , le sucre , la
salsepareiile , la cocbenille , lindigo , les bois de tein-
ture , le riz, etc. , etc., peuvent s'y cultiver avec une
extreme taoilite. On y Irouve aussi des mines dor, d'ar-
gent, de mercure, toutes productions qui sont autant
de moyens d'echange parlaitement conformes aux be-
soins de I'Europe.
La nature qui s'est plue a repandre une telle abon-
dance de Ijiens sur cette terre privilegiee , a encore
voulu que son terrain fut le plus uni , le plus etroit et
le plus bas de ceux de toutes les Ameriques ; c'est la
que s'interrompt si beureusement entre I Amerique nie-
ridionale et T Amerique septentrionale , la cbaine de
montagnes qui s'etend presque uniformemeni et sans
autre lacune de I une a lautK! extremite du pays.
Ce point est le plus <;onvenable, sous tous les rap-
ports , a une communication commerciale entre les
deux mers.
Dans de telles circonstances , anime dun sincere
amour pour ma patrie, et penetre de Timportance de
I'objet qui m'occupe, j'avais demande a la clianibre
provinciale de Panama le privilege special pour I'exe-
cution dun si grand iravail, et ce corps, etant con-
vaincu de I'utilite de ce projet, a accueilli ma demande,
m'arepondu favorablement, et a emis un decret auquel
' 19 1 )
I'isthme devra sa prosperite, qui donnera iiiic grandc
preponderance a I'elat auqiiel il apparlient , et rendra
un immense service au commerce du monde entier.
On pent done hautement approiiver toute personne
qui appelle I'attention publique sur un tel projet; a une
epoque ou I'esprit d entreprise est repandu par tout, et
ou aucun plan, qui oftre quelque utilite , n'a manque
d'etre mis a I'essai. Cette heureuse tendance vers le per-
fectionnement general, sera unc grande gloire pour le
siecle ou nous vivons.
Non-seidement cette entreprise fait partie des ame-
liorations actuelles , mais I'epoque est tout-a-fait pro-
pice a son execution , el il ne faut plus qu'une unifor-
mite d'idees pour la realiser. L'objet qui m'occupe in-
teresse plus ou moins directement toutes les parlies de
la terre, et un bien si general ne peut pas etre entre-
pris par les seuls habitans de I'isthme , quand i'uiilite
est commune et les avantages egaux. Cette osuvre doit
elre partagee par les autres pays qui ont le meme in-
teret.
On a songe a etablii' une communication au nioyen
du lac de Nicaragua, dans TAmerique du centre, pre-
ferant cette voie a celle de Tisthme de Panama , mais
la grande distance de 77 lieues qui separe I'Atlantique
de la mer Pacifique dans I'Amerique du centre , com-
paree aux i4 lieues qui traversent I'isthme de Panama,
sul'fit pour prouver les avantages que Ton trouverait a
s'occuper de preference de ce dernier point. Portobello,
quoique Ton ait dit de son insalubrite , n'a reellement
pas ce defaut, <'t forme une excellente baie a I'abri des
vents. Une compagnie s'est organisee dans I'isthme ; et
la souscription monte deja a 5oo,ooo fr. pour I'entre-
prise de la communication par terre , entre Portobello
( '92 )
et Panama; de plus, un certain nonibre de capitalistes
de cette ville, m'ayant offert de I'aider, Ic moment est
venu d'executer cat utile projet.
Une fois que la communication sera ouverte par
I'isthme, qui est dans le centre des regions les plus peu-
plees de lAmeriquej et dans la ligne la plus directe de,
I'Europe a I'Asie, elle facilitera extraordiiiairement le
commerce par la grande promptitude , la singuliere com-
modite et I'extreme economie, et mettra en contact des
millions d'individus qui se trouvent separes paries bar-
rieres que la nature a placees entre eux, et qui les ren-
dent tout-a-fait etrangers les uns aux autres. Les habi-
tans de I'ouest de I'Amerique, depuis le Chili an sud
jusqu'aux possessions russes dans le nord , ce qui em-
brasse une distance de 2,070 lieues , jouiront enfln dun
grand bienfait par le nouveau passage oftert aux com-
munications lie leur commerce avec lest de I'Amerique
et avec I'Europe. Ce passage facilitera leurs echanges
avec tout le globe, et il augmentera les relations du
commerce de I'Europe avec tout I'occidcnt de I'Ame-
rique, en diminuantd'environ i,33o lieues les distances
a parcourir,
Le commerce de toutes les nations dans I'Ocean Paci-
fique, trouvant par la un puissant auxiliaire , s'etendra
et deviendra beaucoup plus lucratit, en abregeant de
plus de moilie les voyages des marins et des negocians
qui vivent de ce trafic, et en les mettant a meme de re-
cueillir le fruit de leurs travaux avec moins de risques,
plus d'economie et moins de temps; des voyages reite-
res el moins dispendieux rapporteront beaucoup plus de
benefices que ceux qui se faisaient auparavant.
II est done evident que le commerce et I'industrie de
toutes les nations rctireront de celte nouvelle voie ou-
( ^93 )
verte a leurs relations , d'incalculables avantages qui
opereront une lieureuse revolution dans le monde mer-
cantile, parce que les productions manufacturees au-
ront plus de circulation pour satisfaire un plus grand
nombre de consonitnateurs auxquelsellesserontoffertes
dans les differens marches qui s'etabliront sur de nou-
veaux points on il n'en existait pas.
RAPPORT SUR LES COMMUNICATIONS A ETABLIR AVEC
LINSTITUT niSTORIQUE,
Lu a la Societe de Geograpliie, dans sa seance du 3 octobre i834,
Par M. Roux de RocHEtLE,
Messieurs ,
Lescontreesdontla geographic donne la description
ne doivent pas etre considerees comma des deserts sans
vie et sans habitans. Nous nous attachons d'abord ii
observer leur situation , leurs fleuves, leurs montiignes,
les productions, les phenomenes qui leur sontpropres ;
et si ces pays sont occupes par des peuples civilises,
linleret de nos recherches augmente : nous voulons
aussi connaitre les homnies, suivre les revolutions qu'a
eprouvees leur sejour, soit par le cours des evenemens
poliriques, soit par la niarche de la nature, et nous ren-
dre conipte de I'influence que leur position geogra-
phique a pu exercer sur leurs destinees.
Dans ce nouveau sujet d'etude, tout nous conduit a
reconnaitre Tintime liaison de la geographie avec
riiistoire. Lune et I'autre science se pretent un mutuel
secours : elles s'eclairent; ellesdonnentplus de variete,
d'importance et de grandeur aux tableaux que nous
avons sous les yeux.
Convaincus de I'utilite de ce genre d'association,
i3
( ^94)
nous vous avoiis soutiiis, dans cle piticeclcntes lectures ,
quelques essais sur la geographie historique de plu-
sieurs conlrees, el nous aurons encore recours a votrc
indulgence pour la suite de ce travail.
Yous pourrez juger, messieurs, par celle direction
donnee a une parlie de nos etudes, que nous regardons
la Sociele de geographie et llnstitut historique comma
naturellement unis entre eux par la tendance de leurs
travaux. Get Institut forme depuis le 23 n)ars <lornier,
se propose d'embrasser lensenible des connaissances
historiques; el comme lours principales branches
exij^ent des connaissances speciales, il s'est partage en
six classes, quicomprennent I histoire generale, Ihis-
toirc des sciences morales et philosophiques, celle des
langues et des lilteralures, cellc des sciences physiques
el malhematiques, ! histoire des beaux-arts el I'histoire
de France.
Quelque variee que sou la direct on de chacune de
ces branches, elles partem d'une meme tige , elles sont
le developpement dun meme systemej et toutes ces
etudes apparliennent enelYeta I'histoire, qui doit ctre
le recil des actions et des opinions des homnies.
L'elendue des recherthes auxquelles Tinstitut histo-
rique a liiiteniion de se livrer, et Tinteret des articles
que renferme le premier nuniero de son journal, nous
fonlprevoir que des communications entre les deux
Socieies ne peuvent qu'elre favorables a leurs travaux,
et j'ai I'honneur devous proposer, "messieurs, d'accep-
terlolTre que eel Institut vous a faite de vous envoyer
chaque mois son journal, en echange du Bulletin de la
Sociele de geographie.
( 195 )
EXTRAIT
DU JOURNAL DES MISSIONS KVANGELIQUES
( Ncuvieme livraison de i834).
Continuant la t^che que nous nous sommes imposee
de tenir les niembres de la Societe de geographie au
courant de tout ce que la correspondance des misslon-
naires offrirait d'interessant, nous extrayons du dernier
nuinero de leur journal des details sur les nioeurs et
la geographie de lAfrique meridionale, cetle contree
qui attire maintenanl I'attention si vive des geographes
et sur laqueile lexpedition dirigee par le docteur Smith
nous apportera sans doute de curieuses et nouveltes
iumieres. (i)
Lettres des missionnnaire.i Lemue , en date du 4 dJ-
cembrc i^'iZ , et ryollaiid dii i4 /ec/v'e/' i834.
La secheresse ayant ete universelle dans le pays des
Bechouanas pendant les inois de septenihre, octobre et
novembre i833 la famine y fit de si s^nds ravages,
qu'aux environs deLaltakou, les missionnaires trou-
vaient frequemment des cadavies sur les chcmins; la
barbaric de ces peuples est telle qu'ils refusent la sepul-
ture aux gens morts de faim , stigniatisant ainsi la pau-
vrete coninie la plus grande des maledictions.
Durant cette desastieuse saisoii, on se livrait au
Rraal du chefdc Lattakou aux pratiques superstitieuses
(i) fielte expedition, composee du docteur Smilli, du cajiitaliie
Edje , de MM. Charles Bell et Burrow, est partie du Cap le lo juillet
dernier.
i3.
( '96)
usitees pour obteiiir tie la pliiie de leur Dieii, veritable
iiiKigc till Diable puisqu'ils lui attribuent tous leiirs
malheuis et jamais leurs prosperites. Deux grands
vaisseaux de terra consacres depuis nombre d'annees u
celte sorte de niagie , etaient remplis d'eau et places
dans I enceinte dii Kraal , tout aiitouron seme quelques
poignees d lierbes eparses pour faire comprendre a la
divinite que la pluie est necessaire pour faire croitre
rherbe.
Le 1 5 octobre Moiinametsi s'a?ieantit, c'est-a-dire
mourut, c'etait I'un des vieillards les plus ages du pays,
il connaissait a point nomme toutes les revolutions qui
ont eu lieu depuis cinquante ans sous ses yeux. John
Campbell fait souvent mention de lui dans ses ouvrages.
Voici les ceremonies usitees pour les inhumations, sur
lesquelles M. Lemue a pu se procurer quelqces rensei-
gnemens, bien qu'il ne lui eul pas ete permis d'y assis-
ter. Lorsque quelqu'un est sur le point de mourir ses
parens et ses amis se rassemblent dans sa maison. Le
patient n'a pas encore rendu I'esprit, qu'on se hate de
lui plierles membres, pour lui donner la posture qu'il
devra avoir dans son tombeau. Ses propres domestiques
I'emportent les piedsen avant , non par la porte (cela
n'appartient qu'aux vivans), niais par une ouverture
pratiquee a la haie qui environne d'ordinaire la hutte
des Bechouanas. On le transporte ainsi dans le Kraal
proprement dit, qui est I'enceinte reservee au betail ,
c'est la qu'on le met dans une fosse creusee a I'ecart)
place dans la posture que prennent ordinairement les
Bechouanas lorsqu'ils s'asseyent; on lui tourne le visage
vers le iiord. C'est le ma<^[c'ien , /at'seur de pluie, qui
est charge de cet office ; les spectateurs lui font signe
de tourner la tete un pen plus a droite ou un peu plus
( ^97 )
a gauche, suivant qu'ils lejugent iiecessaire, jusqu'a cc
que lasseiiiblee ayaut piononce unanimement qu'il est
bien , I'on procede a riniuimatioii. On recouvre le
rnort de terre jusqu'a !a tele, puis on apporte tout ce
qui se trouve dans la demeure du defunt , et Ion depose
cliaque objet pres de la tombe en lui en rappelant I'usage,
ensuite tout est reporte dans la liulte et on hii pose une
coiironne d herbe verte sur la tete; alors les femmes
apportent de I'eau dans des vases de terre pour arioser
la tombe. Les chefs et les proches parens la repandent
les premiers et avant de se retirer chacim a soin de
sen mouiller du doigt le aros orteil. Les femmes con-
tinuent ces ablutions pendant tres long-temps, en
poussant les cris repetes de piila ! /iluie, auxquels suc-
cedent des gemissemens, qu'on entend retentir pen-
dant plusieurs jours.
M. Rolland donne des details curieux sur le mariage,
la polygamic, etc.
Hors des stations missionnaires, les Bechouanas con-
siderent la polygamic comme une chose toute nalurelle.
Jamais un Mochouana (singulier de Bechouanas) no
limite le nombre de ses femmes; il en prend autant
qu'il peut en entretenii-. L'homme du peuple se borne
a deux ou trois, mais chaque chef tant soil peu respec-
table en a au moins six. Loin d'etre jalouses les unes des
autres, ces femmes se glorifient d'appartenir a un mari
qui peut entretenir plusieurs d'entre elles, et elles
regardent dun ceil de pitie celle qui vit seule dans la
maison conjugale et dont son mari se contente. La
premiere femme est consideree comme la femme legi-
time, et quoique chacune d'elles vive dans une maison a
part, elle conserve une certaine autorite sur les- plus
jeunes et ses enfans sont les seuls heritiers legitimes.
( ^98 )
Le jemie lioniiiiequi veul se marier choisit liii-meme sn
femme, si son choixconvient a ses parens, ceux-ci font la
deinnndepour liii : sa mere fait alors les demarches ne-
cessaires, accompagnee de son beau-frere et de sa belle-
sojnr; elle se rend chez la mere de lajeune personne,et
s'exprinie a-peu-presen ees lermcs : « Mon fils a concu
« line grande passion pour ta fille; je te prie, demande
■' tout ce que tu voudras, ct donne-la lui pour femme. »
Celle-ci ne repond pas, mais faitappeler son niari , qui,
s'il consent a la demande dil : <■ Je veux bien donner
n ma fdle a ton fils, a conJilion que vous prendrez soin
« d'elle et que vous m honorerez en me faisant un
« present qui soit digne de celle queje vous cede. »
La mere du jeune homme retonrne vers son mari et lui
fait part du resultat de sa visite. Celui-ci dit : " C'est tres
bien , retournez deniain , et faites savoir que j'ai corn-
pris ce que Ion exige de nioi, el que je t^cherai de sa-
tisfaire leurs desirs.u Apres ces diverses entrevues, on
tue un boeuf de part et d autre pour celebrer le bcelelo
ou les fiaiicailles. Chez les pauvres gens on se contente
detuer des moutons. Dans I intervaliequi s'ecoule entre
cette ceremonie et celle du manage, les deux parties
s'envoient reciproquement des presens. SI la jeune
fille est nubile, le manage suit de pres lesfiancailles, si
elle est trop jeune il n'a lieu qu'apres la circoncisioii.
Lorsqu'elle a atteint I'a^e de douze ou trei'/e ans , sou
pere fait savoir aux parens du fiance que sa fille sera
circoncise cette annee-la, et une fete a lieu a cette
epoque, chaque famille envoie a I'autre un boeuf a tuer.
Apres la ceremonie de la circoncision, vient celle du
manage qui a lieu a la fin de I'automne. Le perc du
fiance prepare une recompense de dix a vingt jeuncs
vaches, qu'il envoie au pere de la fiancee ; celui-ci en-
( ipD )
voie a son tour quatre on six boeuts gras an pere du
jeune liomme pour faire les noces. Alors sans aulres
formaliles que quelques clanses, le jeune homme a la
liberie de visiter sa f'emme; mais ce n'est que (\e\\x ans
apres I'age de puherte qu'il peul la prendre chez lui.
Si! arrive que la jeune fenime soit paresseuse ou
qu'elle ne plaise pas a son mari, il est libre de !a ren-
voyer a ses parens, qui sont obliges de la reprendre et
de rendre la rancon qu'ils out retue pour prix de leur
fille. S'il n'y a point d'enfans, le mari restitue aussi la
valeur des bosufs qui lui avaient ete donries pour faire
les noces j dans le cas contraire, ils la considerent
comme appartenant aux enfans dont il prend soin.
Le premier ne des enfans herite de tout, et a le cotn-
mandement sur ses freres ; les filles n'ont que I'ameu-
blement. Lorsqu'il n'y a pas d'enfans males dans une
famille , c'est le frere du defuqt qui devient heritier.
A la mort du pere, c'cst encore I'aihe des tils qui be^ite
des femmes; il respecle sa mere; mais quant aux au-
tres, il les met au rang de ses propres femmes. Si le fils
aine meurt, le second prend sa place, et dans le cas du
deces du cadet, c'est I'oncie qui ht'ritede la veuve; les
enfans qui! an a sont censes appartenir an dcfunt ;
mais si un autre homme desire cette femme et paie aux
parens le prix qu'elle a coute au mort, eile lui appartient
ainsi que les enians qu'elle peut encore avoir. Qnand
un homme meurt sans heritiers, ses femmes sont libres
d'epouser qui elles veulent ; muis si dies viennent a avoir
des enfans , ils appartiennent au premier mari.
Purification ponr le meiirtre. — Quand un homme en
a tue un autre a la guerre ou dans un combat singu-
lier, il ne lui est permis de rcntrer en ville qu'apres avoir
tfte puritic, Sil est pauvre, ses parens ou le chef four-
( 200 )
nissent un boent pour sa purificalioii. Cette cereraonie
se fait le soir : on egorge le boeuf , on jette ses entrailles,
et, apres lui avoir fait une large ouverture au milieu du
corps avec une lance , on fait passer le meurtrier au
travers, pendant que deux lioninies tiennent ouvert le
ventre de I'animal. Le boeuf ainsi tue est donne pour
nourriture aux pauvres ; la tele et le cou sont envoyes
a loncle de celui qui a ete purifie. — Le meurtre pro-
prement dit n'est pas toujours puni de mort, car le
meurtrier peut se racheter avec quelques boeufs.
Purification des femines. — La purification des fcmmes
dure un mois apres raccouchemenl ; pendant ce temps,
elles tiennent leur porte ferniee, et une gardlenne est
placee devant la maison pour en defondre Ten tree, Au
bout de ce mois, deux boeufs sont egorges pour cele-
brer la naissance du nouveau-ne. L'un des boeufs est
donne par les parens de la femme , I'autre par ceux du
mari. Apres cette fete, la femme peut reparaitre en pu-
blic , et son mari est libre de rentrer cliez elle. 11 n'y a
pas de purification pour ladultei'e et le vol. Dans le
premier cas, le coupable est prive de tout ce qu'il pos-
sede; quant au vol, c'est le chef qui fixe la peine, sui-
vant les cas particuliers. Presque toutes ces pratiques ont
ete abolies, ou du moins singulierement diminuees ,
dans les stations habitees par les missionnaires.
{La suite au prochain numero.)
TROISIEME SECTION.
Actes de la Societe.
PROCES-VERBAUX DES SEANCES.
Seance du 5 septembre i834.
Le proces-verbal de la derniere seance est lu et adopte.
M. d'Avezac communique une lettre de M. Fian-
cisque Michel , envoye en Aiigleterre par ie ministere
de rinstiuciion publiqiie, a leffel de rechercher tout
ce qui interesse Ihistoire et la litteratui'e anciennes de
la France. M. Michel annonce qu'il a retrouve dans les
bibliotheques de Londres et de Cambridge, (juatre co-
pies du texte latin du Voyage de Rubruquis , en Tar-
taric, et il propose a la Societe de le publier dans le re-
cueil de]ses Memoires.
Get objet est renvoye a I'examen de la section de pu-
blication , pour faire un prompt rapport.
M. le president invite la Commission speciale , char-
gee de donner son avis au ministere de la marine , sur
le voyage de M. Leprieur , dans la Guyane, a presenter
son rapport a I'une des prochaines seances. II adresse
la meme invitation a la Commission a laquelle a ete
renvoye le memoire de M. Jouannin , sur le Choix des
diametres des globes terrestres artificiels.
La Societe royale de Londres adresse la suite de ses
transactions pour I'annee i834; TAssoclation britan-
nique pour I'avancement des sciences envoie le compte
rendu de I'assemblee qu'elle a tenue a Cambridge >
en i833.
M. Eyries oltVc , de la part de M. Malenas, capitaine
' ( 202 )
au long cours , ime rarte autograpliit'e des lies de
Tristan da Cunha.
IVl. Renault Becourt ecrit a la Societe pour lui faire
honiniage dun exemplaire de son exposition d'un nou-
veau Systenie de lunivers.
M. Warden communique une notice du voyage exe-
cute en 1769, dans I'interieurde la Guyane, par M. Pa-
tris, niedecin botaniste du roi et conseillcr au conseil
snperieur de Cayenne. — Renvoi au comite du Bulletin
qui pourra donner un extrait do cette relation.
M. Roux de Roclielle lit Mine notice sur la Geogra-
phie historique de la Gaule.
M. d'Ave/ac lit quelques iragmcns rclatifs au trace
geographique d'une partie de I'Afiique septentriouale ,
' d'apres les itineraires d'Ebn e!-Dyn. — Renvoi au co-
mite du Bulletin.
La Coniniission centrale decide sur la proposition
d'un de ses membres, qu'il sera ouvert des relations
avec la Societe de Geograpliie qui vient de s'etablir a
Bombay.
M. Jomard annonce a I'Asseniblee que M.Delaporte,
ancien consul de France a Tanger , est present a la
seance ; il rappelle les services rendus par ce zele corres-
pondant a la Geographic de lAtrique septentriouale et
ses communications a la Societe. M. Delaporte doit
retourner bient6t a Alger, ou sa position lui permettra
d'etre utile aux sciences geogr.iphiques.
Seance du 19 septcDihrc.
Leproces-verbalde la derniere seance est lu etadopte.
M. le capilaine John Ross ecrit pour remercier la
Societe dela medaille dor qn'ellc lui ;i decernee dans sa
( .o3 )
derniere assenihlee generale, pour son voyage dans les
iTiers Polaires. Celte lettre sera inseree au Bulletin.
M. Noyer , niembre de la Societe , de retour de
Cayenne, adresse une serie d'observiitions sur I'etat
actuel de la Gtiyane. — La Comtnission vote des re-
niercimens a M. Noyer, et reiivoie sa communication
au comite du Bulletin.
M. Euaene de Monglave adresse, au noni de I'lnsti-
tut historique , le premier caliier de son journal , et il
en demande I'echange contre le Bulletin de la Societe.
— Cette demande est renvoyee au comite du Bulletin.
M. Jomard depose sur le bureau les ditfeiens rap-
ports faits a 1 Inslitut, sur les resultats scieiitifiques du
voyage de M. dOrbigny, dans I'Anierique du Sud.
M. Warden conununique une nouvelle note sur I eta-
blissement dun cliemin de fer dans I'istbme de Pana-
ma. — Remerclmens et renvoi au comite du Bulletin.
M. Cesar Moreau presente , de la part de M. Hel-
lert , une carte de la Moree jointe a la traduction de
rhistoire de I'empire Ottoman , de M. de Hammer.
Le nieme niendjre depose sur le bureau un rappoit
sur la navigation de I'Euphrate, par le capitaine Clies-
ney , ouvrage deja communique par M. Fontanier, et il
en signale divers tragmens qui sont de nature a etre
analyses dans le Bulletin de la Societe.
La Commission centrale, sur le rapport de sa sec-
tion de pidjlication, accepte I'offre que lui a faite M. Fr.
Micbel , de publier , dans le tome iv du recueil des
Memoires, le texte latin du voyage de llubruquis, d'a-
pres le plus complet des qualre manuscrits qu'il a re-
trouves a Londres et a Cambridge , en y ajoutant les.
variantes des trois autres manuscrits.
J.a Commission rcnvoie a une piodiaino seance , la
( 204 )
discussion de la pioposilioii de IM. Clement-Mullet,
relative a la redaction dune table analytique des ma-
tieres, pour la premiere serie du Bulletin.
M. Joniard annonce que M. Paredes, de Panama, de-
mande a entrer en relation avec la Societe de geogra-
pLie, et lui oftre ses services pour cette partie de I'A-
nierique. M. Paredes est charge dune partie des ope-
rations relatives au chemin de fer qui va etre execute,
de Panama a la riviere de Chagres.
MEMBRES ADMIS DANS LA SOCIETE.
Seance du 5 sepleinbre i83.4.
M. J.-B.-F.-R. JOUANNIN.
Seance du 19 septembre.
M. Juste Paredes. de Panama.
OUVRAGES OFFEUTS A LA SOCIEtE.
Seance du i*^' aoiit 18 34-
Par M. dAvezac : Carte geographo-gcologique dc la
Gujanefrancaise, dressee surlesrelevesde M. Leblond,
par Poirson, 1814, "ne leuille.
Par la Societe geologique : Feuilles 20 a 24 du tome iv
de son Bulletin.
Par M. d'Urville : Voyage pittoresque autour du monde ,
42* , 43" et 44^ livraisons.
Par la Societe d'agriculture de I'Eure : Recueil de cette
Societe, i caliier in 8°.
( 205 )
Par M. Barbie du Bocage : Journal des conseiliers
municipaux ^ avec une carte statistique de la France.
Brochure in-8°.
Par MM. les directeurs : Numeros 62 el 63 de I'ln-
stitut, el numeros 17 el 18 de VEcho dn inonde savant.
Seance du i5 aoilt.
Par TAcadeniie royale des sciences de Berlin : Me-
moir es de cette academie pour i832. i vol. in-4o.
Par le Coniite des traductions orientales de Londres :
The travels of Macarius , Patriarch of Antioch ,• written
by his attendant Archdeacon , Paul oj Aleppo in Arabic;
parts 11^ III, IF and F; translated by F. C. Belfour.
London^ i83i a i834. — Narrative of travels in Eu-
ropa, Asia^ and Africa in the seventeenth century by
Evliyd Efendi; translated from the Turkish by the
Ritter Joseph von Hammer. London, i834- Un volume
in-4°. — The Geographical works of Sddik Isfahdni;
translated by J. C. from original Persian mss. in the
collection of sir JFilliam Ouseley. I^ondon, i832, un
volume in-8°. — San Kokf tsou ran to sets , ou Apercu
general des Tro is - ro yau j?ies, traduh de roriginal japo-
nais-chlnois , par PA. Jules Klaproth. Paris, i832 , un
volume in-8''. avec un atlas de 5 cartes. — A Description
of the Burmese Empire , compiled chiefly from native
documents by the Rev. Father Sangermano , and trans-
taled from his mss. by fFilliam Tandy. Rome, i833,un
volume in-4°- — Tianslation from the chinese and ar-
menian with notes and illustrations, by Charles Fried.
Neumann. London^ i834, un volume in-8°.
Par la Societe Geologique : Resume des progres des
sciences geologiques pendant I'annee i833, par A. Boue.
un volume in-8.
( 2o6 )
Par M. Albert-Monti'tnont : Btblivlfietjue unu'erse/le
des voyages ,11" \i\r. (Voyages en Atrique, Levaillanl ).
Par M. Noellat : Nouveaux elemens de geographic
wnverselle ancienne et moderne ^ etc. Un volume in-i 2.
— Nouvelle carte de France, politique, industrielie , etc.
Une feuille.
Par M. le comte tie Soniuori : Primo siippleiiwnto al
saggio statistico deiV Italia, etc. Vienne, i834- Bro-
chure in-8°.
Par M. le capitaine d'Urville : 45* a 48*^ livraisons <Ju
Foyage pittoresque antoiir du monde.
Par JVI. Gide : Nouvelles Annales des f^'oyages , cAnev
de juillet.
Par M. Bajot : Annales viaritimes et colonialcs , cahier
de juillet.
Par la Sociele des Missions evangeliques : Journal
de cette Societe , cahier d'aout
Par la Societe d'agi iculturc de la Charente : Annales de
cette Societe , cahiers de juillet et aout.
Par MM. les directeurs : N"s 64 et 65 de Vlnstitut et
numeros 19 et 20 de I'Echo du monde sai>ant.
Seance da 5 septenibre.
Par la Sociele royale de Londres : Philosophical
Transactions Jor the year i8.54j part. I, in^""*
Par IWssociation hritannique pour lavancenient des
sciences : Report of the third meeting oj the british asso-
ciation, etc. Held at Cambridge in i833. London, i834
I vol. in-8.
Par M. Klaproth : Lettre a M. le baron de Humboldt
stir I'invention de la boiissole , i vol. in-8.
Par 1\I. le directeur du Spectateur militaire : Frag-
( 207 )
ment de I'ldstoire militniie de la France. Giierres de re-
ligion de i585 a i5c)Oj redigees d'apres les docuniens
recueillis et discutes avec soin par le comite d'etat-
niajor, par Ic colonel de Saint-Yon. Paris, 1 834, avec
3 plans.
Par M. Arthus Bertrand ; V oyage dans les Elats-
Unis de VJmeruiue du Nord et dans le Haiit et le Bas-
Canada , par le capitaine Basil-Hall. 2 vol. in-S", i834.
Par M. Matenas : Carte des iles de Tristan da Cunha,
extrait de latlas anglais par C.-B. Matenas, capitaine an
long-cours, i834.
Par M. d'Urville : Voyage pittoresqiie ■ aiitour du
monde , 49*^ et 5o" livraisons.
Par M. llenaull-Becourt : Le tombeau de toutes les
philosophies tant anclennes que inodernes , ou exposition
raisonnee dun nouveau systeme de I'univers, etc.
I vol. iiJ-S''.
Par la Societe Asiatique : Cahier de juillet de son
Journal.
Par la Societe pour I instruction elementaire : Cahier
de juillet de son Bulletin.
Par M. de Moleon : Recueil industriel et manufactu ■
tier, cahier de juin.
Par MM. les directeurs : Bibliolheqne univetselle de
Geuei'e , caliier de juin. — Memorial encyclopedique .,
cahier d'aout. — Ulnstitul , nos Qj et 68. — L Echo
du monde sai>ant^ nos 21 et 22.
Seance du 1 9 septembre.
Par M. Alhert JMonternoiit : Bibliotlieque universellc
dcs voyages, 23" livraison (Voyages de Bruce ).
Par M. S.-X. Botelho : Resumo para servir de intro-
ducccto a Memoria estadisticasobre os dominios portugue-
( 208 )
zes na Africa oriental. Lisbon , iia Imprensa nacional,
1834. I vol. in-8".
Par jM. Hellcrt : Carte de la Mnree, dressee pour la
traduction de I'histoire del"EiiipireOttoinan,parM. J. de
Hammer, une feuille.
Par M. Jomard : Rapport fait a Vacademie rojale des
sciences de I'lnstitut de France , siir les rcsidtats scienti-
fiques da voyage de M. Alcide d'Orhigay dans V Anie-
rique du Sud pendant les annees 1826 a i833, in-4°.
Par ]M. Graberg de Hemso : Nutizin intorno alia fa-
inosa opera historica d'Ibnu Klialdiin fdosofo affricano
del secolo xiv. Firenze, i834. Broch. in-8". — Prospetto
del commercio dell' impero di Morocco. Lezione delta nelV
I. e R. Acaderuia del gcorgofili^ il di 4 agosto i833.
Firenze, i833. Broch. in^".
Par M. d'Urville : Voyage pittoresque autour du
nionde, Si*^ et Sa" livraisons.
Par la Societe Asiatique : Cahier d'aoilt de son Journal.
Par la Societe des Missions evangeliques : Cahier de
septembre de son Journal.
Par I Institut hislorique : Premiere livraison de son
Journal,
Par MM. les directeurs : Plusieurs numeros de I'ln-
stitut, de VEchodu monde savant, du Mom'teur ottoman
et du Journal de Smyrna.
BULLETIN
«E LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE.
OCTOBRE l834.
PREMIERE SECTION.
MEMOIRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPPORTS.
NOTICE ET ANALYSE
DE LODVRAGE DE M. KLAPROTH, INTITULE : Lcttre CI M. Ic
baron de Humboldt sur I'invention de la boussolej^i) ,
Lue a la Societe de Gi^ographie dans sa stance du 17 octobre i834,
Par M. DE L.VHHNAUDIlERE.
Gette savanle dissertation repond a iine demande de
renseignemens adressee il y a quelques mois, par M. de
Humboldt a M. Klaproth, sur I'epoque ou les Chinois
ont connu la polarite de laiinant. Sans cette question,
les notes depuis long-temps recueillies par M. Klaproth,
tussent peut-etre restees en portefeuille, incompletes et
sans ordre. Mais en cherchant a satisfaire le desir de
son illustre compatriote , il a ajoute a ces memes notes
d'aulres extraits d'auteurs chinois, et dans ces nouvellcs
recherches, il a ete assez heureux pour rencontrer des
fails qui, par leur nombre et leur importance, lui ont
permis de tracer une hisloire a-peu-pres complete de
I'invention de I'aiguille aimanlee, en Chine.
(i) Un vol. in-S".
i4
Ct; travail diilicilc, (jiu; M. Kkijyroth s'est cleterinine a
publier, et donl vous m'avez cliarge tie vous offrir I'a-
nalyse, eclaircit un cles points les plus curieiix de I'his-
toire de la civilisation huniaine.
Les anciens, nos maitres dans les arts dont le gout et
limagination font tons les frais , poesie, eloquence, ar-
chitecture, mais si loin de nous dans les sciences exactes,
ignoraient conipletcmeut la polarite de I'aimant, etnian-
quaient par consequent de ce puissant moyen de direc-
tion et d'observation. Ont-ils su meuie vaguenient que
lainiant a la propriete d'altirer le fer d'un cote et de le
repousser de I'autre? c'est encore ce dont on peut dou-
ter, car il n'existe de ce tait aucune preuve positive, et
les erudits en sont aux conjectures.
Si Claudien, dont Its vers sur I'aimant sont admira-
b!es de pensees et d images, ei*itconnu la plus precieuse
de ses proprietes, il ne leiit certes pas oubliee, lorsquil
fait allusion a la passion amoureuse de cette pierre pour
le fer, a leur sympatbie mutuelle, a leur constant atta-
chement. Pas une ligne echappee aux anciens ne parle
de I'aiguille ainiantee et de son utilite pour la naviga-
tion. Les marins grecs et romains ignoraient coniplete-
ment I'usage du conipas de mer, et se dirigeaient prin-
cipalement dans leurs voyages, la nuit, par les etoiles,
le jour , par les conuaissances acquises des iles , des
cotes et des dangers.
Vincent de Beauvais et Albert-le-Grand citcntii la ve-
rite un passage d un livre arabe, sur les pierres, attribue
a Aristote, et dans lequel il est clairemcnt question de
la polarite de I'aimant et de son usage dans la marine,,
mais ce passage n'est evidemment qu'une note iutercaloe
par quelque copiste, dans le texle arabe. II est nieme a-
peu-pres certain quece traite des pierres n'est point d'A-
( 211 )
rislote. II est rernpli de tant de puerilite, qu'il faut en
vouloir au precepteiir d'Alexanclre pour en charger sa
memoire.M. Klaprolh ne s'appesantit clone pas sur cette
question qui n'en est pas une pour I'homme instruit. II
a beaiicoup mieux a faire en nous donnant la liste Ires
curieuse des noms divers del'aimant, dans les langues
de I'Europe et de I'Asie.
Les anciens sonten tete de cette nomenclature. Pour
eux, I'aimant c'est \a pierre d' He?vu/e, )& pierre (VHera-
clee^ ou de magnesie, ou \i\ pierre de Lydie ^ ou vulgai-
renient magnes. Pour Aristote, c'est la pierre sans au-
tre designation, la pierre par excellence (r, XiQci;).
Au quatrieme siecle de notre ere, nous voyons Mar-
cellus Empiricus, niedecin de Theodose-le-Grand , don-
ner a I'aimant !e nom d'antiphyson , et lui reconnoitre
la double propriety d'attirer et de repousser lo fer. C'est
cette derniere qui est expriniee par ce mot A'ajitiphjson.
Un passage de Manetlion, cite par Plutarque (delside
et Osiride), fait soupconner que les Egyptiens avaienl
eu long-temps avant les niemes notions sur I'ainiant. lis
lappelaient \os dc Horns, et le fer Xos de Typhon. En
considerant la nature dans I'etat d'union et de decom-
position, sous le symhole de Horns et de Typhon , ils
croyaient voir I'image de ces deux etats dans Taction
de Taimant sur le fer, selon que la pierre attire ce me-
tal ou qu'elle le repousse. Les domains, qui apprirent
des Grecs a connaitre I'aimant, lui conserverent son
nom de magnes, et admirent la tradition de I'origine de
cette denomination , comme on le voit par ces vers de
Lucrece :
Quern niagncta vocnnt pntrio dc nomine Groii :
Mfignetiini, (jiiifi sit ijotriis in rnontiluis oitiis.
( 212 )
I^ luoyeii age . dans sa barbare latinite , liii donna le
noni de adninas^ nom qui designaii originairement le
diamant, et qui parait a M. Klaproth, d'origine orien-
tale. II est plus difficile d'expliquer I'orlgine du noin de
calainita , que les Italiens, comme les Grecs modernes,
donnent a I'ainiant. Nous croyons, avec M. Klaprotli,
que la seule explication raisonnable de ce mot a ete
donnee par le P, Foamier qui dit, en parlant de cette
pierre : <> Les niarins irancais la nominent calamite qui ,
:■ proprement en trancais , signifie une grenouille 'vertc ^
' parce quavanl qu'on ait trouve I'invention de sus-
« pendre et de balancer sur un pivot Taiguille aimantee^
'< nos ancelres I'enferinaient dans une fiole de verre de-
« mi reniplie d'eau, et la faisaient Hotter sur I'eau comme
« une grenouille. Hugo Berlius, qui vivait du temps de
II saint Louis, en meme temps ou a-peu-pres queGuyol
" de Provins dit que tel etait lartifice duquel les mate-
" lots, en ce tenips-la, se servaient pour connaitre la
« nuit, ou etait le nord. «
M. Klaproth est d'accord avec le savant jesuite pour
le fond , mais le mot calamite ^ pour designer la petite
grenouille verte, lui parait grec. Ce mot calnmita est
aussi usite dans d'autres idiomes europeens, on le trouve
dans le dialecte de la langue romane de Surset, chez les
Bosniaqucs, chez les Croates, et dans le dialecte sla-
von des Windes ou Wendes de la Styrie.
II faut lire dans la dissertation de M. Klaproth, tout
ce qui concerne la denomination de I'aimant dans les
autres langues. Nous devons nous borner a i'aire re-
marquer ici, que, pour le bas-breton, c'est la pierre de
toiiclie ; pour le Hollandais, le Suedois et le Danois, c'est
la pierre a J aire -voile; pour I'lslandais et I'Anglais , la
pierre conductrice ; pour I'lrlandais et le Welch, la pierre
( 21-^ )
<liti nttire. Uii fait ties reniarqitable , cest que presque
toutes les denominations cle I'aiinant, en Europe, se re-
tiouvent aussi, quant a leur signification, dans les laii-
gues de I'Asie. Dans celles des Indiens, des Singhalais,
des Chinois ; pour ces derniers, c'est la pierre airnee du
fer , la pierre qui s'unit au fer par iin tendre baiser , la
pierre qui aime. Le mot thsu chy en chinois, nom le
plus vulgaire de I'aimant , ne sigmfie pas autre chose.
Un auteur de cette nation ecrivait vers I'an ^So de J.-G. :
i ainiant altire le fer comme une tendre mere qui fait
vejiir ses enfans a elle, et c'est pour cela qu'il a recu son
nom.
Venons maintenant aux denominations de la bous-
sole ou de I'aiguilleaimantee. L'un des plus anciens noms
quelle ait porte en Europe, el qu'on rencontre pour la
premiere fois dans la satire de Guyot de Provins , est
celui d'amaniere , et non pas mafuiette , comme on I'a
souvent imprime par erreur. Les Italiens lui donnent
aujourd'hui le nom de bussola qui parait deriver d'un
des mots employes par les Arabes , p»our designer la
boussole ; savoir : mouassala , le dard qu'on prononce
vulgairement moussala. Pour decouvrir cette identite ,
il ne faut pas oublier que dans le moyen age, I'M ini-
tiale des mots arabes a souvent ete cliangee en B, et
qu'il y a des tribus arabes dans le dialecte desqiielles
ce changement est encore tres frequent. Apres le mot
boussole , le ternie de compas pour designer la boite qui
contient I'aiguille aimantee, est le plus repandu en Eu-
rope.
Apres avoir passe en revue tons les noms de I'aiguille
aimantee, soit en Europe, soit en Asie, M. Klaproth
arrive aux donnees historiques sur I'epoque ou les di-
verses nations de ces deux parties du monde ont en la
( ^'4 )
pieimere corinuissance de la polarite de raiinant, et de
1 usage de I'aiguille aimantee, dans la navigation.
Aucun des temoignages qu'on possede sur ce sujet ,
ne remonte, pour TEurope , au-dela de la fin dii dou-
zieme siecle, et toiite hypolhese contraire manque de
preuves. II est deniontre que I'upinion du professeur
Hansteen , sur I'usage de I'aiguilie aimantee, par les Is-
landais, des le oiizieme siecle , ne repose (|ue sur un
passage ajoute a la premiere redaction de VJs/a/uls Lan-
diuiDiabok, laquelle premiere redaction date vraisembla-
blement de la fin du onzieme siecle. Mais cetouvrase fut
revu et complete clans la suite par plusieurs ecrivains ;
et enfin Haiik^ fils d'Ei-land, qui mourut en i334, le
refit en entier. A ce nouveau travail appartient certaine-
uient le passage cite par M. Hansteen. II f'aut done en
levenir, pour premiere mention de I'aiguille aimantee,
a la satire de Guyot de Provins, deja citee , qui parut
sous le titre de Bible, vers 1190, date que lui donne
M.Paulin PariSjSi parlaitementversedans toutcequicon-
cerue notre ancienne langue et notre vieille litterature.
Guyot apres avoir declame contre tons les etats, in-
vective aussi contre la cour de Home. Le |)ape , selon
lui, devrait etre pour tons les fideles, ce quest, pour
les matelots, la tremontaigne (I'etoile polaire), sur la-
quelle ils out toujours les yeux fixes quaud ils sont en
mer. Les autres etoiles , dit-il , tournent et circulent
sans cesse dans le ciel ; elle seule est invariable et les
guide surement. M. Klaproth fait suivre ici les vers de
Guyot, dans lesquels nous trouvons la description de
Vcunaniere, et I'indication de son usage et de ses pro-
prietes. Je regrette bien que le cadre borne dans lequel
je suis oblige de me renfermer , m'empeche de citer ici
en entier ce curieux passage que M. Paulin Paris a ex-
( 2i5 )
liiiit tie plasiears mamiscrita lie la liibliolheque loyalc^
ju.tis jo ne (lois pas omettre un fait tiop iiiiportanl pour
H etre pas signale, c'est que Guyot parle tie raiguille
aimautee, non pas comme dune invention recente, u)ais
connne dune chose sutfisamment connue de son temps.
hi seconde mention de la bonssole se troiive dans la
Desoription de la Palestine^ de Jacques de Vitry (12 1 5-
1220). Le fait qui 1 raconte se rappoile a I'annee 1204.
Les termes dont il se sert sont a-peu-pres ceux de
Guyot; pour lui non plus Taiguille ainiantee n'est point
line decouverte noiivelle , inais iiu itistrument ahsolu-
nient necessaire aux niarins, at dune connaissar^ce de-
venue generale et vulgaire. Brunetto Latini , dans son
/><?Aor compose a Paris, vers 1260, nous Iburnit un
iu)uveau temoignage sur Yaigiiille d'yainant ouca/anute,
temoignage plus clair encore que les precedens. II pa-
lait avoir appris du moine Bacon, pendant un voyage
(ju il fit en Angleterre, ce qui! sait de la houssole, c'est*
a-dire la maniere d'aimanter raiguille et de la disposer
pour I'observation. « Bacon, dit il, me montra la ma-
" gnette, pierre laide et noire ob ele fer , volontiers st>
« joint, Ion touclie ob une aiguillet et en festue Ian
" ficlie , puis I on met en I'aigue et se tient dessus et la
" pointe se tourne contre I'estoile qu;ind la luiit tut
« tenebrous et Ion ne voit estoille ni lune poet li niari-
« rinier tenir droite voie. »
ViOyez un pen comme notre moyen age s'empare de
I'aimantpour I'accommoder a son goiltdu uierveilleux, a
sa passion des choses surnaturelles. Albert-le-Grand ,
digne representant de son epoque dans les sciences na-
turelles, va se charger de vous apprendre ce que les
|)lus instruits d'alors pensaient de c€tte pierre admirable.
Lui .Albert ne se fie |)as a ce (|ue ses cuntemporains
( 2i6 )
avaient observe. II en appelle au tenioignage d'Aristote,
de I'Aristote qui lui convient, de I'Aristote de la facon
des Arabes , de I'auteur pretendu du Traite des pierres.
Avec une telle autorite , Albert se sent a I'aise, aussi
remarquez ce que I'ainiant devient entre ses mains. II
en existe, dit-il , qui attire lor reduit en poudre fine,
melaiigee de sable; le sable reste tout seul. II est un au-
tre aimant iroid , humide, blanc, et craquant sous la
dent, celui-ci c'est I'argent qu'il prefere a tout. Fut-il
eloigne de trois ou quatre coudees , I'argent vient a lui
tout dun bond , et meme forteinent cloue , I'argent
s'echapperait et viendrait encore. Tin troisienie aimant
exerce une influence bien autrement remarquable; c'est
sur la chair qu'il opere ; il a pour elle un tel attrait ,
qu'elle s'attache a lui de maniere a ne pouvoir plus en
etre separee , et alors pas une goutte de sang ne reste
dans cette pauvre chair qui ne renait plus sur le corps
auquel elle appartenait. On sent tout le parti qu'un ro-
mancier pouvaittirer de I'aimant , a I'epoque d'Albert-
le-Grand.
Tout porte a croire que ce fut a I'epoque des croi-
sades, alors que les peuples de I'Occident se melerent
sur les champs de bataille avec les peuples de I'Asie ,
que les premiers apprirent des Arabes lusage et les
proprietes de I'aiguille aimantee.
Apres avoir refute les opinions contraires a cette hy-
pothese , M. Klaproth I'environne de tous les temoi-
gnages historiques qu'il a pu recueillir. L Edrisi qu'on
avait invoque ne lui en fournit aucun. Le passage at-
tribue a Aristole prouve au moins , qu'avant i25o, le
pretendu traducteur arabe connaissait la polarite de I'ai-
mant. II est fort difficile d'etablir a quelle epoque pre-
cise It'S Arabes ont fait usage de I'aiguille aimantee dans
( ^^7 )
la navigation. Tout fait supposer que leurs marins s'en
servaient long-temps avant que leurs astrononies ne la
connussent , ou du moins n'en aient parle dans leurs
ecrits. On en trouve la premiere mention dans le Tresor
des Marchands pour la connaissance des pierres^ ouvrage
que Ba'ilak, natif du Kibdjak, redigea en 1282 de J.-C.
C'est en naviguant de Tripoli, de Syrie a Alexandrie, en
1242, qu'il vit les capitaines en faire usage. II entre, a
ce sujet, dans des details d'autant plus curieux qu'ils
pres<'ntent une description complete de I'instrument et
de la maniere de sen servir.
« Les capitaines, dit Bailak, qui naviguent sur les
niers de Syrie, dans les nuits obscures , alors qu'on
n'apercoit aucune etoile et qu'on ne peut se diriger
d'apres les quatre points cardinaux remplissent un
vase d'eau, et le posent a I'abri du vent dans I'inte-
rieur du navire, puis ils enfoncent une aiguille dans un
chalumeau et disposent le tout en forme de croix dans
le vase plein d'eau ou I'appareil surnage, puis ils pren-
nent une pierre d'aimant assez grosse pour reniplir la
paume de la main , I'approchent a la superficie de I'eau,
impriment a leurs mains un mouvement de rotation
vers la droite, de maniere que I'aiguille tourne sur la
surface du liquide , et tout-a-coup retirent leurs mains
avec dexterite et promptitude, I'aiguille alors par ses
deux pointes fait face au nord et au midi D'autres
capitaines, qui voyagent dans I'lnde, remplacent I'ai-
guille et le chalumeau par une sorte de poisson de fer,
mince, creux , et dispose de telle facon que, jete dans
I'eau, il surnage, et de sa tete et de sa queue designe
les deux points dont nous venons de parler. >>
On voit, par ces details, qu'il s'agit de la boussole
aqualique, la merae dont il est question dans Hugo Bes-
( 2l8 )
lius, dans Giiyot de Provins , nii la IjoussuIc des iiiarin;;
Iraiicais. Ici, s'appuyaiil de lautoiite de Bailak, lemoin
oculaire de ce quil rapporte, M. Klaprolli cond»at sur
tin tei'rain fort avantageux les ecrivains qui, tels que
llenaudot, CoUitia , le president Aznni, rontestent aux
Arahes la connaissance de la boussoledans le treizienie
siecle. Ces ecrivains se sont etayes de tenioignages iie-
gatifs, soil dune note existanle siir le tanieux plani-
sphere des Camaldules , apporte du Calliai par Marc
Paul, soit dun passage de Conti , Venitieii , qui (it le
voyage de I'inde, vers le milieu du quinzieme siecle.
L'auteur de la note pretend que sur cette mer on navi-
gue sans boussole ; Conti assure quil n'en a pas vu a
bord du batiment sur lequel il se trouvait. Ces deux as-
sertions peuvent etre vraies sans infirmer en la moindre
chose le temoignage de Bailak. On sail que devant la
justice la deposition de riiomnie qui n'a pas vu ne balance
en aucune maniere, celle de I'honime qui a vu de ses
propres yeux, la seconde seule fait la conviction du jugc
et sertde base a sa decision, ainsi en doit-il etre devant
la critique.
.> Jl parait done demontre que la boussole aqualique
jitait, en 1242, aussi bien en usage chez les Arabes que
chez les Europeens; et que le poisson, dont on se ser-
vaitdans les niers des Indes en guise d'aiguille , y etail
connu avant I'epoque du voyage de Bailak. Nous allons
voir niaintenant que la boussole aquatique des (Illinois
etait, entre iiiietiii^de I'ere chretienne,absolument
^"aite de la menie maniere que la boussole d«s Arabes,
que la boussole vue par Brunetto Latini^ chez le moine
IJacon avant 1260, pendant son voyage en Angleterre.
INous sommes parvenus a la partie la plus neuve de
la dissertation de M. Klaproth. Lui, le voici avec les
V 219 )
Chinois, gens de sa connaissance in lime. Rien ile plus
curieux qne la masse de fails qu il emprunte a leuis
ecrivains, el a I'aide desquels il etablit les droits de la
Chine a I'invention dun instrument dont les copistes
europeensse servent un peu niieux que les decouvreurs.
Je prie d'avance M. Klaprolh de me pardonner si je
manque a quelque chose dans 1 orthographe des noms
fhinois , en revanche je tacherai de n'omettre aucun
des fails principaux qu il fait vaioir avec une si judi-
cieuse critique.
Si Ion remonte a la lai" annee de J -C. , on trouve
deja le nom d'ainiant impose par les Chinois a la pierre
(wec laquelle on pent donner la direction a C aiguille, Ge
passage important est cite dans le Lexique de lenipereur
Khaiiglii et dans la plupartdes autres dietionnaires chi-
nois. Voila done au second siecle de notreere , laiguille
aimantee connue dans la Chine; nous lisons, dans le
granti dictionnaire Poei wen run fan, qu'aux troisierne,
qualrienie et cinquieme siecles, sous la dyn;istie de
Tsin de 265 a 4^95 d y avail des navires qui se diri-
geaient au sud par I'aimant. Plus lard, dans le on-
zieme siecle, les diseurs de bonne aventure , les hate-
leurs , les charlatans de place, s'emparaienl de laiguille
dont iis frotlaienl la pointe avec la pierre d'aimant, en
prometlanl aux spectateurs que le petit morceau de fev
allait leur indiquer le midi, ce qu'il ne manquait pas de
taire. La declinaison de laiguille etait alors connue,
et, chose remarquable, la variation observee au com-
mencement du douzieme siecle etait a-peu-pres la meme
que celle que le P. Amyot trouvait a Peking. Ce der-
nier, en I'indiquant entre 2° et 2** 5o' vers I'ouest, se
rencontre avec un vieil auteur chinois do i 117 , qui la
porte e.sl 5/6' sud; car on sail (ju<* pour cc Illinois
( aao )
comme pour ses ronipatriotes ile toiites les epoques, Ic
pole principal de I'aiguille aimantee est celui qui
inontre le sud. Ainsi I'expression de I'un et de I'autre de
ces observateurs , quoique ties differente en apparence,
se trouve absolument la meme.
Chez les nations de I'Occident, la premiere applica-
tion de I'aiguille aimantee a ete faite par la marine;
cliez les Chinois, elle n'a point servi d'abord a guider le
navigateur au milieu des solitudes del'Ocean. II fautbien
distinguer le double usage qu'ils en ont fait. Le plus
ancien etait de les employer a dinger leurs chars de
guerre, de voyage ou de ceremonie. Celui de ces chars,
porteur de I'appareil, s'appelait char magnetique. Et
I'appareil, tel que I'indique la gravure donnee par
M. Klaproth , consistait dans une petite figure de bois
tournant sur un pivot et sous le vetement de laquelleune
barre de fer aimantee se trouvait artistement cachee.
Cette statue avail le bras etendu, et de quelquecote que
le char tournat elle montrait le sud de la main; on va-
riait la forme de cet ingenieux condurteur, il se voyait
quelquefois sous celui d'un genie, pare d'un habit de
plumes, entoure de dragons; mais toujours le meca-
nisme interieur etait le meme. Toutefois , ce char mer-
veilleux, porteur de Ihomme ou du genie , prenait la
tetedu convoi. II indiquait la route aux voitures qui le
suivaient et la position des quatre points cardinaux.
Les histoires chinoises sont pleines de details sur la
construction de ces chars magnetiques, et M. Klaproth
n'a neglige aucun de ceux qui peuvent servir a leur
histoire. L'orgueil chinois en fait remonter I'origine a
des temps fabuleux, a I'ancien empereur Ilouang-ti ,
c'est-a-dire environ 2600 ans avant J.-C. On pense bien
que M. Klaproth ne s'avise pas de discuter une sem-
( 221 )
blable antiquite; il saute quinze siecles pour se trans-
porter dans des temps veritableinent historiques, et la i
trouve les chars nientionnes dans les Memoires histo-
riques de Szu ma tJisian, sous lannee iiio avant J.-C.
C'est encore une fort belle noblesse. Depuis le troisieme
siecle de I'ere chretienne, on rencontre de frequens te*
moignages, et des tenioignages authentiques, de leur
existence, de leur forme et de leur emploi. On voit
qu'ils furent connus au Japon dans laseconde moitie du
septieme siecle. A toutes les epoques, ce fut toujours
une grande rarete : on les donnait en cadeau aux prin-
cipaux dignitaires; ils tenaient le premier rang dans les
corteges d'apparat. Lorsque Chj hou (335-349) sortait
en ceremonie, un des commandans de la garde de ses
carrosses conduisait toujours un de ces chars en avant.
Lesouvriers qui les construisaient etaient fort conside-
res : c'etaient des academiciens qui etaient ordinaire-
ment charges de cette besognej elle leur valait d'hono-
rables distinctions du prince, et leur rapportait beau-
coup d'argent.
Quant a I'invention de la boussole proprement dite,
M. Klaproth n'en trouve pas la date dans les livres chi-
nois a sa disposition. Nous avons vu que, depuis le
milieu du troisieme siecle jusqu'au commencement du
cinquieme , on dirigeait deja des vaisseaux d'apres des
mdications magnetiques. Nous savons que dans les
septieme et huitieme siecles, les Chinois faisaient de
longues courses maritimes; qu'ils partaient de Canton ,
qu'ils traversaient le detroit de Malacca, qu'ils allaient a
Geylan , au cap Coniorin , a la cote de Malabar, aux
embouchures de I'lndus et ensuite a Siraf , et jusqu'a
I'Euphrate.
Si au troisieme siecle les Cliinois connaissaient la pro-
( uaa )
|)iiet«' (111 liT aiiiuinU' pour si- tlirifror a l;i nu-r, il u'osl
pas possible que dans los ifnips posterieurs ils ii'nient
pas fait usage do la boussole en traversant I'Ocenn In •
dien. Neaninoins, la descriplion la plus aiicicMiiie de cet
instrument, trouvee par M. Klaproth dans les livres
thinois, ne date que «les anneos i ii i a i i i;; de J.-(^. ;
tinijours csl-il constant que son usage etait general dans
la marine chinoise vers la fin du treiziemc siecle.
11 ne faut pas onblier que la boussole dont il s agit
ici etait la boussole aqnatiqtie, qui parait s'etre conservee
lort long-lenips entihine; on ignore ni^nie I'epoque ou
elle tut remplacee par lo systenie actuel, c'est-a-dire
par une aiguille suppor(ee et se inonvant suv un pivot,
et rentermee dans une boite sur laquelle sont tracees les
divisions de 1 iiorizon ou des signes astrologicjues dis-
poses dans des cercles eoncentriqiies.
La description «les l)ous>oles chinoises telles qu elles
existent aiijourd hui terniine cette curieuse dissertation.
Gette partie ne pent etre ni ahregoe ni analysee : pour
etre conipris, il t'audrait tout citer; car ici, rien de su-
perllu, rien (|ui ne soit utile a lintelligence de I'instru-
inent et a ses divers emplois. ,le ferai remarqtier seide-
nient que M. Barrow accorde de grands eloges aiix
boussoles chinoises, et (ju'il en regards la roiistruetian
ooinnie preferabU; a cello des boussoles i\e I Europe :
dans los premieres , I'aiguille doit son extreme sensibilite
a son pen de longueur el d'epaisseur; par la nianiere
dont cette aiguille est niontin;, elle resto txmstamnwnt
poin lee vers la memo partie du oiel, quelle que puis'se
etre la rapidite avec laquelle tourne la botte qui la oon-
tient; sa potilesse, sa leocrote et la maniere doiii olle est
suspondue, lui donnent un grand avanlage pour vaincro
le ponvoir niagnetiquo de linolinaison dans toutos los
( ..3 )
|jurties du globe, et eiilin ello n'epiouve jamais do de-
viation dans sa position liorizontalc.
En resume, la dissertation de M. Klaproth etaUlitque
c'est a tort que Ion attribue a Flavio Gioia, ne dans les
environs d'Amalfi vers la fiti du treizieme siecle, I'in-
vention de la houssole; que cent ans avant lui elle elait
connue en Europe^ que la seule part qui pourrait lui
elre laite se hnnitirait a la forme aetuelle de Tinstru-
ment, a un perlectionnement de la houssole ancienue
ou aqnatique; que cette derniere etait usitee en Cliine
quatre-vingts ans au moins avant la composition de la
satire de Gnyot de Provins; que les Arabes la posse-
daient a peu-pres a la meme epoque; ((u'ils la recurent
directetnent ou indirectement des (Jbiiuns, et qua leur
tour ils la comnuiniquerent aux Francs a I'epoque des
premieres croisades.
!i ,i! -/>{> :i;': •'.■•' ''
RAPPORT
SUR LE VOYAGE DE M. I-EPRIEUR DANS LINTERIEtJR DE
LA GDYANE,
Fait au nom d'une commission sp^ciale, par M. d'Avezac.
( Stance du 17 octobre 1834.)
Messieurs,
Vous avez charge MM. Warden, Corabojuf et moi,
d'examiner, pour vous en rendre compte , un memoire
remis par M. Leprieur el contenant la relation de son
voyage dans Tinterieur de la Guyane Erancaise j vous
avez assigne a cet exanien un double objet; d'jine part ,
I'appreciation de ce que le voyageur a accompli j d'autre
( 224 )
part , la recherche des moyens a employer pour rendre
aussi fructueuse que possihle !a continuation de I'ex-
ploralion qui a ete commencee.
Nousne pouvionsmanquerd'attacherbeaucoup d'in-
teret a cette double question; mais elle tire encore a
nos yeux un nouveau degre d importance, de cette con-
sideration, que le departement de la marine nous pro-
voque a eclairer, par nos observations, la marche qu'il
lui paraitra la plus utile d'adopter pour mener a fin une
reconnaissance generate des parties inconnues de la
Guyane Francaise.
Depuis long-temps la convenance d'une telle explo-
ration a ete appreciee par la Societe de geographie :
des 1826 , elle a mis au concours un prix de ^,000 fr. a
decerner au voyageur qui I'aurait accomplie; et le de-
partement de la Marine, avec lequel la Societe se trouve
unie par des liens si nombreux et si bonorables , est
entre lui-meme pour 2,000 francs dans la fixation de
cette somme.
Deja une commission (1), reservant pour I'avenir les
droits de M. Leprieur, avait applaudi au zele dont il
avait preuve dans ses premieres tentatives , mais avait
du reconnaltre qu'il n'avait point encore rempli le pro-
gramme de la Societe.
Charges aujourd'hui de porter une investigation spe-
ciale sur les documens plus detailles que voiis a soumis
M. Leprieur , et d'apprecier a-la-fois ce que le voya-
geur a fait, ce qu'il est capable dc ftiire, et la voie qu'il
devra suivre pour tirer un parti aussi utile que possible
dc son propre zele et des moyens d'observation qui
(i) Elle ttait composee de MM. Eyries,' Roux rle Rodielle,
d'Urville, d'Avezac, et Jomaid rapporteur.
( ■^■^-1 )
scientifique, cette inciuie des carlograplies, d'autant
plus facheuse que les erreurs quelle accredite se consa-
crent en quelque sorte par la deplorable habitude de
plagiat qui a envahi le domaiiie ou iie regnent plus les
Delisle et les d'Aiiville.
Vous vows rappelez tous, messieurs, lexcellente note
qui vous a ete adressee de Caienne le 4 septembre 1829,
etdans laquelle notre confrere M.JNoyer vous enlreiint
de Vetat actuel de la geographie de la Guiane Francaise^
et dhm projet d' exploration dans t interieur de cette con~
tree ; nous savons, grace aux renseigiiemens pulses dans
les souvenirs personnels de I'ancien depute de Caienne,
que de toutes les carles publiees sur le pays dont il a
fait lui-nieme, par devoir conune par gout, une soi-
gneuse etude, les nieilleures sont celles de Men telle et
de Leblond , I'une reduite par I'ingenieur hydrographe
Bonne pour I'atlas de Raynal , et reproduite a une
autre echelle au Depot de la marine, en 1817, lauli'e
redigee par Poirson sur les releves du second voyageur,
et publiee en i8i4-
L'un et lautxe avaient observe quelques latitudes; il
n'v a point entre leurs resultats respeclifs un accord
parfait; les differences se bornent a quelques minutes,
dont les routes de Leblond se trouvent plus courtes
que celles de Mentelle; ces differences sont trop pe-
tites pour qu'il y ait lieu de s'y arreter ; on pent seu-
lement annoter qu'un troisieme observateur, M. Mil-
thiade, ancien aspirant de la marine, qui fit en 1822,
une excursion dans I'interieur, obiinl des latitudes con-
firmatives de celles de, Mentelle, et que deja, en 1819,
M. Dumonteil, sous-ingenieur de la marine, a\ait re-
leve quelques parties vues par Leblond, et avait Irouve
sa route un pen plus longue que celle du voyageur na-
if).
( 228 )
turaliste.Quantaux longitudes, il ne parait pas qu'il y en
ait eu d'observees.
Les releveinens de Mentelle etant reproduits, sauf
quelques modifications a reviser, sur la carte de Le-
blond, celle-ci est, en definitive, ce que nous posse-
dons de plus complet sur les parties explore'es de la
Guiane Fraiicaise. Elle ne se trouvait plus dans le com-
merce; mais j'ai ete assez heureux pour en decouvrir
le cuivre, au moyen duquel ont ete obtenues de nou-
velles epreuves dont une est sous vos yeux. Quelques
ameliorations y pourraient etre faites, d'abord sur une
zone assez large du littoral , d'apres une grande carte
nianuscrite relevee par M. Siredey, arpenteur-geometre
de la colonic (laquelle ne doit cependant etre suivie
qu'avec precaution et discernemenl) ,• puis dans le haut
de rOyac, d'apres le relevement manuscrit de M. Du-
monteil, le tout combine avec la carte de Mentelle:
quelques indications pourraient etre approximativement
marquees , vers les sources de TApprouague , d'apres
la relation de BI. Milthiadc; mais il ne faut pas se dissi>
muler que la redaction de ces elemens divers exige un
travail critique qui n'est point sans difficulte's.
Dans une contree couverte de forets vierges , ou les
routes sont remplies de difficultes, coupee dailieurs de
nombreux cours d'eau que remonte ou descend avec
adresse la pirogue du sauvage indigene, tons les voyages
se font par les rivieres et les criques , et les cours d'eau
les plus considerables sont la voie la plus naturelle pour
des reconnaissances etendues : I'Oyapok et le Maroni
sont, sous ce rapport, les deux grandes routes de I'in-
terieur de notre Guiane. Le cours du Maroni est connu
depuis son embouchure jusqu'a son confluent avec
I'Araoua, connu lui-meme depuis re confluent jusqu'a
( '■^■'^^ )
pourront etre mis a sa disposition, vos nouveaux com-
niissaires se sont partage la tarhe que vous leur aviez
imposee en coinmun : M. Warden s'est charge de re-
chercher quels nKyens materiels paraissent necessaires
pour effectuer le voyage do maniere a ne point rencon-
trer d'obstacles insurmontables, de dangers contre les-
quels on ne se trouve preniuni; M. Coraboeuf a recher-
che de son cote quels nioyens d'observations devraient
etre mis a la disposition du voyageur pour faciliter et
assurer d'une maniere salisfaisante le relevement de sa
route. L'examen du travail d'exploration deja effecluee
par M. Leprieur, el le soin de vous exposer I'ensemble
de nos investigations , tel est le lot qui ma ete speciale-
ment departi. II nous a semble que I'ordre dans lequel
il convenait de vous en rendre compte e'tnit de vous
entretienir d'abord des reconnaissances faites, puis des
directions scientifiques qu'il importe de ne pas perdie
de vue dans les tentatives ulterieures d'exploration, et
enfin des dispositions materielles a prendre pour mener
a heureuse fin une aussi louable entrepiise.
Pour mieux vous faire apprecier, messieurs, le degre
d interet que peuvent offrir les premiers relevemens de
M. Leprietir, il conviendrait peut-etre de vous presen-
ter d'abord un tableau d'ensemble des resultats procii-
res par les explorations anterieures , de discuter la va-
leur de chacun des elemens dun trace general des con-
naissanccs deja acquises sur I'interieur de la Guianc
Francaise. Mais pour remplir dignement une pareille
tache, il eut fallu ne rien ignorer de tout ce qui a ete
tente , avoir a sa disposition les documens recuelliis par
tons les explorateurs qui ont precede le voyageur ac-
luel;et s'il nest point impossible aujourd'hui de re-
i5
( 226 )
trouver un a un , a force de rechcrches et de soins ,
tous ces elemens perdus ou ignores, leur analyse
coinparee denieurerait encore un travail, difficile peut-
etre, devant lequel sans doute notre courage n'eut
point recule , niais qui eiit exige des verifications et des
etudes trop longues pour se traduire ici en un simple
expose de quelques pages.
Et pourtant un examen de cette nature iniporterail A
la science et au pays ; car une deplorable ignorance de
ce qii a ete fait, depuis un denii-siecle, se revele dans
le trace de la Guiane Francaise , donne par des geo-
graphes, fort reconiniandables d'ailleurs, tels que Spix
et Marlins, excusables peut-etre, en leur qualite d'etran-
gerSjd'avoir si fort neglige dans leur travail unecontrec
placee au surplus en dehors du theatre de leur explora-
tion; mais tels aussi que notre defunt collegue et ami
Brue, dont les belles cartes recemnient edites par sa
veuve se bornent a reproduire, pour notre Guiane,
les configurations surannees et fautives des deux voya-
geurs bavarois, copistes eux - memes des vieilles es-
quises portugaises.
Les constructeurs de cartes, che/ nous comnie a
I'etranger, ne se trouvent cependant point destitues a
cet egard d'indications siires et de salutaires conseils;
un ingenieur goographe qui a passe sa vie a la Guiane,
leur a signale, dans une note breve, niais substantielle,
quels travaux avaient ete faits jusqu'a lui, et quels
documens edits offrent les lumicres les plus certaines ;
niais on ignore ou on neglige les indications de
M. Noyer, on ne recherche point les releveniens de
Mentelle et deLeblond; et c'est aux vieilleries portu-
gaises que Ion va emprunter le trace graphique de nos
possessions !... Je voue, messieurs , a une reprobation
( ^^^' )
de M. Leprieur avec celui de Leblond : ils offrenl pour
I'Oyapok, avec quelque diversite de formes, les niemes
sinuosites, et, si j'ose m'exprimer aiiisi, la meme physio-
nomie ; c'est le cas de dire avec le poete :
Fades non omnibus una ,
Nee diversa tamen , qualis decet esse sororum.
Ce recollement m'a convaincu de Texactitude des deux
voyageurs, qui se servent ainsi de controle niutuel : ils
ont I'un et I'autre tire du meme modele deux copies sem-
blablesj je dis semblables et non point egales, car s'il y
a una grande ressemblance entre leurs configurations,
il y a une enorme difference dans I'estime , ainsi qu'on
peut s'en convaincre par le parallele suivant :
Du Cahiopi an Yave
Du Yave au Moutoura (ou Samacou).
Du Moutoura au Jenagarey
Du Jenagarey a Ipoussinghe ( ou
Suacari )
De ripoussJnghe au point oii I'Oya-
pok cesse d'etre navigable
Leprieur.
35 milles.
28
23
Leblond.
16 milles.
20
17
Ainsi, terme moyen , M, Leprieur aurait eslime 2"'i/4
pour mille; et en reduisant ses evaluations sur ce pied,
la mesure en ligne droite de la distance totale qui! a
parcourue depuis rembouchure du Camopi nest que
d un peu plus de i5j njilles au lieu de 354-
M. Leprieur nous a fourni lui-meme des renseigne-
niens qui confirment la plausibilite de ce laux de reduc-
tion ; il nous a fait connaitre en effet que, d'apres les
informations qui! tenait da indigenes, il y avait, en
descendant le Jari , dix journees de It'tablissement de
•lose Omuu jusqu'a rembouchure du ("iarapanalouba , et
( 23a )
de la duuzu journees jusqu'a I'Amazone. II evalue ces
journees a 5 lieiies, c'est-a-dire i 5 rnilles. Or on voit
que, inenie en retranchant un tiers pour les detours,
on aurait, pour ces 22 jours, 220 niilles devaluation
qui, ajoutes aux 354 niilles, formeraient un total de
5^4 niilles (ne mettons que 56o) pour la distance du
confluent du Camopi a I'Amazone; cette distance n'est
en realite que d'environ aSo milles : c'est done encore,
conime tout-a-l'heure, 2 1/4 niilles d'eslime pour un
niille effectif.
Une troisieme verification conduit encore a une con-
clusion pareille : M. Adam de Bauve nous a envoye la
relation d'un voyage qu'il a fait a la fin de i83i et au
commencement de i832, par 1 Oyapok et le Jari, jusqu a
I'Amazone; il a mis, de I'embouchure du Camopi a I'e-
tablissement de Jose Antonio , onze jours pour une dis-
tance que M. Leprieur evalue a i5i niilles: ce serait pres
de i4 milles en ligne droite par jour, en remontant ! ...
Dela a I'embouchure du Piraouery dansle Jary,M. .Adam
de Bauve a mis 1 4 jours pour une distance de 1 18 milles
siiivant M. Leprieur; puis, descendant le Jari , M. Adam
a fait en 8 jours le trajet de lembouchure du Piraouery
a celle du Yenipoko , laquelle est, au rapport de M. Le-
prieur, a 3o milles au-dessous de rclablissement de Jose
Ourou, ce qui porte a plusde 120 milles, sur son rele-
vement , la distance parcourue en ces 8 journees : c'est
done I 5 milles en ligne droite a compter par jour pour
la descente du Jari. M. Adam de Bauve a continue de
suivre cette voie pendant 12 journees encore, jusqu'a
6 lieues au-dessous de Fragozo ; en comptant i5 milles
pour ces 6 lieues, on aura, a I'estime de M. Leprieur,
16T) milles du Yenipoko a Fragozo, et 549 ni'"*?s ( "«
luellons que 53o) du (>amopi ii Fr.igozo. Or comnie la
( ^29 )
la crique Tako. Au-dessus du confluent dont il s'agit, le
Maroni a encore un cours que Ton suppose fort eten-
du; niais il n'est plus possible d'y arriver en remontant
!e fleuve depuis son embouchure, a moins que Ion n'eut
des forces suffisantes pour vaincre Toppositlon des
negres niarrons de Surinam, qui barrent le passage et
forment une peuplade redoutable.
Reste done I'Oyapok, que Leblond avait releve jus-
qu'a sa source en aout et septembre 1789 , ayant memc
reconnu, au-dela, la tete de quelques ruisseaux affluens
du Yari, qui lui-meme va se jeter dans I'Amazone visa-
vis du fort de Gurupa.
Dans le comple qu'il vous a rendu de son voyage,
M. Leprieur vous a fait connaitre qu'il a remonte I'Oya-
pok jusqu'a sa source, puis descendu leRouapira, ap-
pele ^lus bas Jari, jusqu'a plus de cinquante lieues ; que
la, prive par une circonstaiice imprevue de la majeure
partie de son monde et de son bagage, il revint sur ses
pas, et fit par terre une tentative dans lebutde rallier
le Maroni ; mais qu'au bout de trente lieues, deux de ses
trois compagnons etant tombes malades, force lui fut de
retrograder et de regagner I'Oyapok, d'ou il revint a
Caienne.
M. Leprieur a soigneusement releve sa route au-dessus
du confluent du Camopi : on avait jusque-la le trace de
Mentelle,et il croyait inutile de s'occuper d'une partie
deja connue; il ignorail lexistence du relevement de
Leblond au-dessus de ce point, et nous devons a cetle
circonstance le soin qu'ii a pris de consigner dans son
journal les details du fleuve depuis cei endroit.
Le voyageur avait I'intention d assurer le trace de sa
loute par des observations astronomiques ; il avait uii
cercle dc reflexion , une montre a secondes , boussoles
( 23.) )
barometre et ihernioinetre.Naturaliste distingue, il avait
Ihabitude des observations meteorologiques; niais il
n'e'tait point assez familier avec la pratique des observa-
tions celestes pour eviter ou surnionter les dit'ficultes que
lui presentait lusage d'un instrument a reflexion sous
d'aussi basses latitudes, ou les hauteurs solaires merl-
diennes sont impossibles a prendre en employant I'hori-
zon artificiel. Le voyageur voulut y suppleer par des
hauteurs non meridiennes; mais malheureusement il
n'avait point a cet egard des connaissances assez precises
pour nomettre aucun des elemens indispeusaliles au
calcul de ses observations, etil ne peut etre tire aucun
jiarti de loutes celles qu'il a rapportees.
Nous navous done le trace de sa route qu'a Festime,
et cette estime ellememe, basee sur la niesure horaire
des espaces parcourus, combinee avec la force d'impu!-
f-ion ou de resistance des courans en oval ou en anion t,
nest fondee, quant a ce dernier element, que sur une
appreciation nientale, sans verification quelcoiique de la
vitesse effective de la marche par la voie du lok. Voila
comment a ete obtenu un relevement qui offre en ligne
droite une longueur de 354 millcs geographiques estimes
esitre le confluent du Camopi , point de depart, et leta-
biissement de Jose Ourou, point darrivec.
En admettant que le voyageur ait fait une juste eva-
luation relative des diverses fractions de sa route, il reste
a se demander ce que valent en realite les 354 milles aux-
quels il estime I'axe general sur lequel serpente sa ligne
itineraire. II faut reconnaitre qu'il n'a pas recueilli de
donnees suffisantes pour resoudre directement cette
question ; j'ai des-lors cherche ailleurs des elemens de
verification.
J'ai dabord altentiveinent coHationni^' le relevomrnr
( 235 )
ner les latitudes et les longitudes des lieux , leiir hauteur
au-dessus du niveau de la mer, donner les relevemens
et le trace du cours des rivieres, les directions des
chaines de montagnes, etc. , comme aussi a faire con-
naitre la niesure de la temperature et des variations at-
mospheriques.
Les differences deja signalees entre le relevement
d'essai (jue vous a remis le voyageiir et ceux qu'avait
obtenus Leblond, rendent evidente I'indispensable ne-
cessite qu il y aura pour M. Leprieur a recueillir, aux
points notables de ses routes, les elemens astronomiques
propres a fournir des determinations exacles dans les-
quelles viendront s'encadrer ses relevemens de detail.
La commission rend justice a la bonne volonle dont il
a fait preuve a cet egard dans sa premiere exploration ;
elle espere qu'au moyen des instrumens qu'elle indiqne
et de I'instruction speciale preparee par M. Coraboeuf , il
n'y aura plus de me'compte a redouter dans I'observa-
tion et la notation des elemens dont il s'agit.
Personne ne sait mieux que M. Leprieur lui menie
quelles parties de la Guiane restent a explorer; la Sociele
de geographic a, du reste, propose un progranmie qui
signale particulierement comme importante la recon-
naissance des sources du Maroni et des reliefs qui de-
terminent, en se prolongeanta I'ouest, la ligne du par-
tage des eaux des deux bassins opposes. L'interet na-
tional indique en nieme temps une ligne entre le haut
Oyapok et I'Araounry; mais il semble convenable den
faire I'objet dune seconde tentative qui prendrait son
point de depart a Tetablissement de Mana , afin de lier
par des portages successifs le cours superieur de cette
riviere a celui du Sinaiuary, puis aux sources de 1 Oyac
( ^36 )
eta celles d'Approuague, d'ou Ton atteindrait uisemeiit
1 Oyapok par llnipi et le Camopi. Nous ne nous occu-
perons ici que de la premiere route.
Le succes de I'expedition depend nioins des efforts
necessaires pour vaiiicre las obstacles physiques inhe-
reus a la nature du pays, que des uiesures effioaces a
prendre pour segaranlir des hoslilites des indigenes et
surtout des nejjres marrons de la Guiane Hollandaise.
qui occupent les bords du Maroni au-dessus des sauts
Itoupoucou et s'avancent jusque assez avant sur I'A-
raoua J il est essentiel que le voyageur evite soigneuse-
nient d'approcher de leurs etablisseniens, en se portant
imniediatement sur les plus hauts afiluens du Maroni
par une route analogue a celle qu'il a tentee au nord-
ouest de letablissenient de Couve et Rouapira, et qui le
conduira probablernent chez les lloucouyennes du
Oualioni, d'ou il pourra descendre, a travers les Aranii-
chaux, jusqu'au Maroni, apres s'elre assure que les
negres marrons n'onl point encore pousse jusque-la
des detachemens. Pour revenir au meme point, en re-
montant le Maroni depuis son embouchure, il faudrait
lutter a diverses reprises contre les negres marrons, et
une escorle niilitaire serait indispensable; on aurait, il
estvrai,par cette route , I'avantage de pouvoir assurer
par des determinations de latitude et surtout de longi-
tude, le cours encore fort peu certain de ce fleuve, et
den reconnaitre les portions comprises entre I'enibou-
chure de I'Araoua et celle du Ouahonl. Mais la securite
de I'expedition, aussi bien que I'econoniie , semblent
conseiiier I'autre voie, deja familiere, en majeure partie,
a M. Leprieur, et qui lui pcrmettra d'atteindre beaucoup
plus tot le but principal, les sources du Maroni et de ses
afHuens superieur^. Apres la reconnaissance de ccltc re-
( 2^3 )
distance leelle est d'environ 235 milles, I'estiine de
M. Leprieur est de nouveau demontree reductible dans
la proportion de 2 i^4 ^ i-
Nous pouvons done rondure que le terme le plus
eloigne qu'ait atteint ce voyageur est a iSj ou 160 milles
du confluent du Camopi avec I'Oyapok.
La direction generate de cette ligne resulte, de laserie
des gisemens partiels, au S. 28" O. de la boussole; le
voyageur a observe iine declinaison magnetique de
90 N.E., ce qui poiterait la direction dont il s'agit au
S. 37° O. et devrail faire assigner a Te'tablissenient de
Jose Ourou, une position conjecturale vers Tin lersec-
tlon du parallele de 1° N. avec le nieridien de 56' O. de
Paris. Ce resultat paraitra peut-etre bien recule a I'ouest,
eu egard a la direction supposee du Jari, qui debouche
a-peupres sous le nieme meridien que I'Oyapok 5 dans
1 etat actuel des notions acquises, nous n'avons aucun
moyen d'eclaircir cette question. Nous devons toutefois
remarquer, qu'a partir de lembouchure du Moutoura,
Leblond incline le haut Oyapok beaucoup plus vers
I'ouest que le nouveau voyageur, en sorte qu'il y a
peut-etie compensation, dans le trace de celui-ci,
entre la direction trop occidentale du Jari et la direc-
tion trop orientale de I'Oyapok. G'est a M. Leprieur que
demeure la tache de faire a ce sujet les verifications
convenables, en poursuivant une exploration qu'il n'a
laissee imparfaite que faute de directions assez precises
pour tirer tout le parti possible du zele reinarqualde et
de I'aptitude que nous nous plaisons a reconnahre
en lui.
Lesconseils dictes par I'experience de M. Corabanifle
premuniruiit desormais contre les dilKcultes el les
( 234 )
ecueils de sestravaux de reconnaissances, en le guidant
sur lusage des instrumens les niieux appropries 4 de
telles operations et a un tel pays, en lui signalaiit la na-
ture et les elemens constllutits des observations les
plus siires ou les plus convenables, en lui tracant une
niarche invariable pour la notation de tons les details a
consigner dans un journal de route regulier. Notre
coUegue prepare, a ce sujet, une instruction speciale en
rapport avec le degre dhabilete du voyageiir, a qui elle
sera remise lors de son depart.
Quant au choix des instrumens dont il importe que
M. Leprieur soit pourvu , nous regardons connne neces-
saires a la determination des positions geograpliiques
qui jalonneiont sa route :
1° Un cercle repetiteur dun dianietre de 27 cent.
(10 pouces) muni de tons les accessoires indispensables
aux observations astronomiques, au nonibre desquels
il sera convenable de comprendre deux oculaires dc rc-
cbange pour la lunette superieure, dont 1 un aura son
ouverture fixee parallelenient a 1 axe oplique de la
lunette et dans une direction perpendiculaire au plan
du linibe, pour donner la facilile d'observercommode-
nient les plus grandes elevations des astres au-dessus de
r horizon J
20 Un cercle de reflexion avec un horizon artiliciel ;
3° Deux chronometres de poche;
4° Une lunette astrononiique pour les observations
des eclipses et des occultalions d'etoiles ;
5" Deux barometres portatifs a la'Gay-Lussac, montes
selon la methode de Buntcn;
6» Deux thermomelres libres;
•j" Deux boussoles niontees sur des boitcs de metal.
Tels sonl les instruniens a employer pour determi-
( -39 )
NOTICES
Sui' Vaucienne geographie historique des pays voisins dc
la Medilerranee ,
Lues a la Societe de Geographic, dans ses seances du 5 septenibre
etdu 3 octobrei83/i,
Par M. Roux de Rochei.i.e.
Avant de passer aux expeditions des Roniains en
Grece et en Orient, il est utile de se rendre compte de
la situation ou se trouvaient alois ces con trees , et des
principales revolutions qu'elles avaient eprouvees de-
puis la mort d'Alexandre.
Ce conquerant avail souniis la Grece, I'Asie-Mineure,
la Syrie, la Perse, I'Egypte. Apres sa mort, ses vastes
conquetes se demenibrerent pour former encore de
puissans etats : la Macedoine echul a Philippe-Aridec ;
et Cassandre , qui le fit perir avec sa famille , usurpa
ensuite la couronne : Ptolemee-Lagus fonda en Egypte
une nouvelle dynastiej toute I'Asie-Mineure appartint a
Antigone J et la Syrie , d'abord partagee entre ces deux
derniers rois , leur fut bientot enlevee par Seleucus-
Nicator.
La possession de la Macedoine tentait specialenient
I'ambition des successeurs d'Alexandre. Ce royaume fut
tour-a-tour attaque et souniis par Demetrius Poliocerte,
roi de I'Asie-Mineure , par Lysiniaque qui avait fonde
dans la Thrace une monarchie nouvelle, et par Seleu-
cus-Nicator, roi de Syrie. La Macedoine repiit ensuite
ses rois: elle fut souvent en guerre avec les etats du
{ i\o )
midi de la Grece, ct piofita oe leuis querelles et de
leurs divisions pour on soiiniettre une parlie.
Deux ligues, celle d'Etolie ct celle d'Achai'e, connnen-
caient a sp former : la plupart des elats de la Grece se
reunirenl a I'une ou a I'aulre pour y chercher un ap-
pui , Pt la rivalite de ces deux confederations contri-
bua sans doute a donner plus d'animosite aux dissen-
sions interieures de celte contree; niais les secours de
la ligue achecnne, particulierenient formee contre les
attaques des etrangers, protegerent long-temps I'inde-
pendance du Pelcponese, et lui assurerent encore un
siecle d'existence. Cettc ligue eut ses moniens d'illustra-
tion , sous Aratus et sous Philopo-men , qui defendi-
rent avec gloire leur patric : on les a regardes comme
les derniers des Grecs. Apres eux, les moeurs puhliques
avaient change; la ligue achc'enne netait plus dominee
que par des factieux; et la Grece, sans force et sans
union , devait coder a I'ascendant des Romains.
Nous sommes arrives a une epoqu do la geographic
et de I'histoire , ou chaqne guerre agrandit Rome, et
ou les conquetes de ce peuple s'enchainent les unes aux
autres. La seconde guerre pnnique avail conduit en
Espagne les armees romaines ; elle leur ouvrit aussi
I'entree de la Macedoine ; et les premieres hostilites
contre Philippe, quatrieme prince de cc nom, amene-
rent successivement la soumission de la Grece entiere.
Pyrrhus, roi d'Epire, avait commis , avant lepoque
des guerres puniques, de premieres agressions contre
les Romains; mais ceux-ci n'occupaient alors qu'une
partie de I'ltalie; et, apres avoir repousse I'invasion de
Pyrrhus, ils n'avaient ni le pouvoir ni I'intenlion de
porter leurs armes en Grece. Ils n'y parurent long temps
apres que comme allies des Etoliens contre le roi d'll-
( ^37 )
gion, il devra faire parvcnir a Caienne, par lOyapok,
uii double de son journal , ou du moins un extrait con-
tenant tons les eieniens geograpliiques jusqu'alors re-
cueillis. II pourra cnsuite cheminera I'ouest et effectuer
son retoiir par 1 Essequebo, dont il ne tardera pas a ren-
contrer les bras orientaux: il aura ainsi I'avantapfe de
lier ses operations a celles des explorateurs anglais qui
selon toute prol)abilite seront envoyes a la reconnais-
sance des hautes regions de la GuianeBritanniquejil ar-
rivera d'ailleurs ainsi chez une nation amie, ou les re-
commandations efficaces d'une Societe avec laquelle
nous enlretenons des relations de la plus courtoise
confraternite, pourront le devancer et lui preparer un
favorable accueil. Un retour par I'Amazone serait an
contraire herisse de cbances defavorables, tant pour la
sante des voyageurs que pour la surete de leurs per-
sonneset de leurs papiers.
M. Leprietir a deja voyage dans Tinterieur de la
Guiane; nul ne pent juger mieux que lui du nombrc de
personnes qu'il conviendrait de lui adjoindre pour com-
poser une expetlition de reconnaissance j ce nombre
doit elre calcule de nianiere a lui offrir assez de res-
sources pour la manoeuvre des canots , les transports
pendant les marches, les corvees de chasses, pe-
che , etc., sans exiger des approvisionnemens trop con-
siderables. Dans tous les cas, il parait indispensable qu'il
y ait au moins un autre Europeen avec lui, et que ce
compagnon soit autant que possible en etat de laider
dans ses observations, de le suppleer meme, en cas de
maladie, d'accident, de separation momentanee; dans
tous les cas, celui-ci devrait tenir un journal de route
separe , et faire aussi des observalions distinctes autant
qu'il le pourrait.
( 238 )
M. Leprieui' est habile naturalistej toute recomnuin-
dation serait done superflue a son egard sur los objets
di"nes de fixer son attention; cependant on peut lui si-
gnaler coninie plus particulierenient utiles les observa-
tions de toute nature auxquelles peuvent donner lieu
les diverses peuplades indigenes qu'il rencontrera ; outre
les vocabulaires quil aura soin de recueillir,il s'appli-
quera a dessiner, dans cliaque tribu,quelques proGls, en
choisissant pour modeles les honunes qui oi'friront le
niieux les traits caracteristiquesde leur peuplade.
Nous bornons la, messieurs, le compte que vous
nous avez deniande des travaux faits par M. Leprieur et
des voies a suivre pour niettre a profit, dans une nou-
velle exploration, le zele et I'aptitude de ce voyageur.
La commission pense qu'il est tres propre a romplir
la mission d'exploration qui parait lui etre destinee , et
elle fait des voeux pour qu'il accomplisse lieureusement
une tentative dont la science et le pays lui sauront gre.
D.-B. Warden.
CoRABOETiF. d'Avezac, mppoHcur.
( Ml )
lyrie ; dallies ils devinient conqueransj lis souinirent
cl'abord une partie de I'lllyrie , et en reduisirent la moi-
tie en province romaine.
Apres la bataiile de Cannes , Philippe , roi de Mace-
doine , se declare allie d'Annibalj mais I'equipement
d'une flotte romaine I'intimide, lui fait lever le siege
d'Apollonie, et le determine a regagner ses etats. Phi-
lippe, ayant ensuite attaque une partie des republiques
de la Grece , les Atheniens reclament le secours de
Rome.
La seconde guerre punique venait d'etre terniinee, et
les Romains, accrus en gloire et en puissance, pouvaient
appliquer toutes leurs forces a d'autres guerres ; celle
qu'ils declarerent a Philippe fut terniinee, quatre ans
apres, par deux victoires de Quintius-Flamininus, I'une
en Epire , lautre a Cynocephale. Les Romains procla-
merent la liberte de toutes les villes de la Grece , ou
plutot ils les rendirent toutes independantes et faibles ,
pour preparer leur assei vi^sement. La Grece etait alors
enervee par ses divisions : Nabis, roi de Lacedemone,
pretendait a I'assujetir; mais elle avait pour defenseur
Philopoemen, chef de la ligue acheenne. Les Romains
intervinrent dans ces demeles , tantot en faveur des
Acheens , tantot en faveur de Sparte. Ils ne se mon-
traient encore que comme protectouis dans les affaires
des republiques de la Grece ; etce fut ace titre qu'ils de-
clarerent la guerre a Antiochus , roi de Syrie, qui avait
attaque les villes grecques de I'Asie-Mineure.
Philippe de Macedoine, ancien ennemi des Romains,
etait devenu momenianement leur allie contre Antio-
chus j mais il vit bientot avec omhrage leurs succes et
leur agrandissement, il fit en secret des armemens contre
euxj et ses preparatifs, que la morl viiit interrompre,
16
( ^42 )
entrainerent la niiiiede Persee, son successeur, mallieu-
reux prince qui fiit vaincu par Paul Emile pres des
ninrs tie Pydna, se vit recluit a fuir sans armee et sans
asile, et se remit bientot entre les mains du vainqueur.
Gentius, roi d'lllyrie, av.iit ete detrone en nieme
temps: son royaume fut partage en trois etats, et la
Macedoine le fut en quatre; mais le but de ces divisions
de territoire n etait que d'aifaiblir davantage les nations
conquises. De nouveaux troubles dans la IMacedoine, ou
Andriscus et un faux Philippe cherchaient a recueillir
I'heritage de Persee , y rappelerent les legions coniman-
dees par Metellus, et cetle contree fut reduite en pro-
vince roniaine.
Le meme sort devait etre common a touts la Grece.
Rome prend soin d'y affaiblir d'abord la ligue acheenne
dont elle detache plusieurs villes; elle s'empare ensuite
de Corinthe, ou presque tous les monuniens sont de-
truits par un incendie , et la Grece entiere est sous le
Alors toutes les parties de I'Orient, qui n'etaient pas
encore soumises aux Roniaius, obeissaient deja a leur
influence. L'Asie-Mineure ne pouvait plus leur resister ;
elle avait ete demenibree depuis la mort de Demetrius-
Poliocerte, et il s'y etait forme quatre monarchies inde-
pendantes, celles de Pcrgame, deBithynie,de Pont et de
Capadoce. La Galatie, dont le nom etait derive d'une co-
lonic militaire de Gaulois, les menies qui avaient envabi
sous Brennus la Macedoine , la Grece et la Thrace ,
formait un gouvernement separe, entre les deux chaines
du Taurus; et Ion voyait a I'occident et au midi de
ces montagnes, I'lonie, la Phrygie, la Pamphylie , la
Cilicie , souvent exposees a I'ambition des conquerans
et a des changemens de souverains.
( -43 )
Si nous comparoiis a ces laibles etats et a ces mor-
cellemeiis de tenitoire , qui faciliterent I'invasion des
Remains , le vaste empire de Syrie, tel qu'il existait sous
le regne d Antiochus, cette grande monarchie semble
offrir plus de moyens de resistance. Elle comprend
dans ses limites orientales I'Armenie, le pays des Par-
thes, des Perses, des Medes et la Babylon>e; au midi ,
elle s'est rendue maitresse de la Palestine; a I'occident,
elle s'est emparee dune partie de I'Asie - Mineure;
niais elle a Lientot perdu le fruit de ses conquetes,
lorsqu'elle est entree en guerre centre les Romains,
et ses armees qui avaient vaincu I'Orient flechis-
sent sous la force et la discipline des legions. Lucius
Cornelius Scipion attaque et defait Antiochus pres de
Magnesia; il lui dicte la paix dans la ville de Sardes,
capitale de ses etats; et cc prince est force d'abandon-
ner les rivages de I'lonie et ses provinces de I'Asie-Mi-
neure. Cette conquete des Romains est suivie d autres
deniembremens : I'Armenie se declare independante, et
il se forme, dans la grande et la petite Armenie, deux
monarchies sepaiees. L etendue de lempire de Syrie va
toujours en decroissant ; le royaume des Parthes sen
est separe; et les vains efforts que fait Antiochus Epi-
phane pour recouvrer cette conquete I'affaJblissent en -
core; ce prince perd successivement la Palestine, la
Mesopotamie, la Syrie; et dun empire si puissant et si
vaste il ne reste bientot a ses desceudans que le faible
royaume de Comagene.
Les Romains, avant d acquerir une partie de ces
riches depouilles de la Syrie, s'etaient avances de
proche en proche a travers I'Asie-Mineure; ils avaient
protege contre Antiochus le royaume de Pergame, etils
avaient ensuite profile d un testament vrai ou suppose
1 6.
( 2/,4 )
(I'Altale pour liii siiccetler dans ses titats. La IJilhynic,
celebre par I'exil et la niort tl'Aiinibal, avail subi le
luenie sort que Pergame; elle avail ete leguee aux. Ro-
inains par Nicomecic; les vainqueurs avaieiit enleve a
Antiochus les provinces meridionales de I'Asie-Mineure;
el toules leiirs acquisitions clans ces con trees leur don-
iiaicnl des facilites nouvelles pour altaquer la Pa-
phlagonic et le royaume de Pont, alors possedes par
Mithridate.
Cependant les Koniains, avanl de prolonger leurs
conqnetes en Orient, voulaient consolider leur domina-
tion dans les contrees deja soumises; et leur prudente
politique evitait de s'attirer plusieurs puissans ennemis
a-la-iois. Us s'attacherent a soumettre les Dalmates et
les Thraces,a terminer en Afrique la guerre contre
Jugurtha, a delivrer leur pays de I'invasion des Cimbres,
a soutenir la guerre sociale qui avail souleve contre la
republique presque tous les peuples d'ltalie; ce ne fut
qu'apres la pacification de cette peninsule que la guerre
eclata contre Mithridate. Sylla pril Athenes qui s'eiait
declaree pour ce prince; il battit ses generaux a Che-
ronee, a Orchomene; I'attaqua lui-meme en Asie, et le
forca, en lui accordant la paix, a se renfermer dans le
royaume de Pont, el a rendre a leurs anciens rois la
liitliynie et la Cappadoce.
Mithridate ayaut recommande la guerre dix ans apres,
fut baltu plusieurs fois par Lucullus, et perdit, pres de
Cabires, la plus grande partie de son armee. Ses defaites,
et celles du roi d Armenie, son gendre, I'avaient pres^
que epuise, quand Pompee vint enlever a Lucullus
I'honneur de terminer cette guerre, par une derniere
et facile vicloire.
Pompee fixa le sort de I'Asie; il laissa a Tigrane I'Ar-
( 245 )
nienie, et a Phaiiiace, fils de Mitliridate , Ics i-tais de
son pere; il detrona Antiochus, el reduisit la Syrie en.
province romaine.
Pour ne pas interrompre la serie des evenemens , el
pour les Her entre eux par des rapporls plus naturels,
nous avons suivi de proche en proche les conquetes
des Romains sur difterens rivages de la Mediterranee
et dans plusieurs parlies de I'Orient. II nous reste a
parcourir d'autres regions ou ren)pire roniain, qui s e-
tait agrandi de toules parts, trouva pendant plusieurs
siecles les prlncipaux appujs de sa force et de sa duree.
Notice sur la Gaule.
La Gaule , dont les Romains firenl la conqtiete peu-
de temps apres la morl de Mitliridate, s'eteiidait entre
rOcean , les Pyrenees, la Mediterranee, les Alpes et le
Rhin. Les principaux fleuves qui traversent ce vaste
territoire sont la Seine, la Loire, le Rhone et la Ga-
ronne. De hautes montagnes separent les hassins de ces
trois derniers fleuves, et forment une chaine internie-
didire entre les Pyrenees et les Vosges.
On partageait la Gaule en trois grandes regions , l.i
Belgique au nord de la Seine, la Celtiqiie entre la Seine
et la Garonne, I'Aquitaine entre la Garonne et les Pyre-
nees: Rome etait deja maitresse des provinces que baigne
la Mediterranee, depuis les rivages de la mer jusqu'aux
Cevennes et au pays des Allobroges. Cliacune de ces
trois divisions coniprenait un grand nombre de peupies,
unis par la comrnunaute de langue et dorigine,et lor-
mant entre eux des confederations militaires lorsqu il
fallait entreprcndre an loin de perilleuses expeditions,
(» 246 )
niais s'accordant moins ensemble pour la defense com-
mune, et souvent dechirees par des dissensions.
La plupart des noms de ces differens peuples se sont
conserves dans ceux des provinces ou des plus an-
ciennes villes : un tableau particulier en comprendra
renumeration , et nous nous bornons a rappeler ici
quelques-uns de ceux qui occupent un rang plus eleve
dans I'histoire. A I'orient de la Gaule Celtique etaient
les Sequanais et les Helvetiens, separes les uns des autres
par la chaine du mont Jura : les Helvetiens occupaient
les Alpes; les Sequanais s'etendaient jusqu'aux rives de
la Saone : Vesuntio etait leur capitale. ' "-''" '
Les Eduens, places entre la Saone et la Loire, furent
les premiers allies des Romains : c'etait la nation gau-
loise la plus avancee vers la civilisation. Bibracte, leur
capitale , etait remarqnable par les encouragemens qu'on
y donnait a la culture des lettres.
Les colonies de Lingones, de Senones, de Boiens ,
que nous avons deja remarquees en Italic, attestent le
genie militaire de ces nations. Le menie caractere dis-
tinguait les Arverni, montagnards endurcis aux fatigues,
et que 1 on vit souvent a la tete des confederations
•rauloises.
On venait, tous les ans, celebrer dans les forets des
Carnutes les grandes ceremonies religieuses des druides,
et Ion yremarquait les monumens celtiques ous'accom-
plissaient leurs rites et leurs sacriGces.
La confederation Armorique comprenait, entre les
embouchures de la Loire et de la Seine, les provinces
Occiden tales, les plus avancees vers I'Ocean.
Cesar, dont la plus glorieuse expedition militaire fut
la conquete de la Gaule, avail d'abord obtenu le gou-
veriiement de la Cisalpine et de I'lllyrie : on y joignit,
V 247 )
dans la lueine aniiee, celui tie la Gaule Tiansalpiiie. 11
sortait du consulat : son triumvirat avec Pompee et
Crassus etait forme : la guerre niit bientot dans ses mains
les principales forces de Rome, et Cesar devint tout
puissant.
Sa premiere operation futde rej^ ter dans leurs mon-
tagnes les Helvetiens, qui les avaient quittees pour aller
<;hercher des etablissemens sous un ciel plus doux et
vers les fronlieres de la Gaule Narbonnaise : il les har-
cela dans leur marche, les vainquit plusieurs fois, et les
forca de regagner les Alpes, apres avoir leduil a cent
dix mille bommes la population qui cbercbait a s'expa-
trier. Arioviste, roi des Germains, fut ensuite vaincu
pres du Rhin , et fut conlraint a repasser le fleuve.
Toutes les nations de la Belgique, depuis la Seine
jusqu'au Rbin, se liguerent alors pour attaquer un en-
nemi qui, en s'etablissant dans la Gaule Celtique, me-
iiacait leur independance : elles avaient plus de deux
cent mille bommes sous les arnies; mais Cesar prevint
leur reunion , et les attaqua isolement : il vainquit tour
a-tour les Suessones, les Bellovacieiis, les Ambianiens,
les Nerviens, envoya une legion dans la partie occlden-
tale de la Gaule qu'babilaient les Armoriques, et vint
achever lui-meme la difficile conquete de ce pays.
Le vainqueur se porta ensuite sur les bords du Rbih,
tandis que ses lieutenans poursulvaient leurs expedi-
tions dans I'Aquitaine. II attaqua, entre la Meuse et le
Rhin, les Usipetes et les Tench teres, nations Germa-
niques que les Sueves avaient cbassees de leur pays , il
passa ensuite le Rhin sur un pont de bateaux qu'il avait
fait construire, defit les Sicambres, protegea les Ubiens
contre les Sueves, et forca cette nation conquerante a
se rejeter dans ses forets. Cesar ne voulait que faire res-
( 248 )
pecter^en Germanic les armes des Roniains : il n'essaya
d'y former aucun etahlissement, rentra dans les Gaules,
et fit bientot une descente sur les cotes de la Grande-
Bretagne, ou il obtint de premiers avantages.
Celte attaque etait le prelude d'une expedition plus
considerable. Cesar fit rassembler dans le port d'ltius
plus de six cents galeres ou il embarqua cinq legions,
deux niille hommes de cavalerie romaine et beaucoup
plus de cavalerie gauloise. Les Bretons se replierent
dans leurs forets : leurs chefs se desunirent, et iis ache-
terent la paix par un tribut; inais Cesar ne forma en
Bretajrne aucun etablissement.
Si nous portons nos regards sur la situation de cette
derniere contree lorsqu'elle fut attaquee par les Romains,
nous voyons des peoples separes de la civilisation par la
mer et les tempetes, partages en un grand nombre de
tribus qui se font la guerre entre elles , pour s'enlever,
des forets ou des paturages. Ces nations n'ont de ca-
ractere commun que la barbaric : la diversite de leurs
langues atteste ceile de leur origine ; on y voit des colo-
nies Celtes ou Gauloisesj les Pheniciens et les Cartha-
ginois qui etaient en Espagne sont venus s'etablir an
midi de cette lie : les Scythes, les Bretons, les Scandi-
naves, y sont arrives du centre et du nord de I'Europe.
L'Hybernie s'est peuplee de la meme manierc, et ces
deux lies ont ete la proie des nations aventurieres qui
ravageaient I'Occident.
Les peuples du nord de la Grande-Bretagne etaient
dans I'usage de se peindre : ils recurent le nom de
PicteSjCt Ton donnait celui d' Albion aux contrees plus
nieridionales. Ce pays etait alors le plus sauvage de
I'Europe; mais une fois apercu par les Roniains, il
( M9 )
etait reserve a leur domination, et il devait enlrer uii
jour dans la grande famille des nations civiiisees.
Les annees qui suivirent I'invasion de la Grande-
Bretagne se passerent en expeditions pour reprimer snr
differens points les soulevemens des nations gauloises.
II fallut combattre les Nerviens, les Treviriens : Cesar
tcnta encore une excursion au-dela du Rhin , et il y for-
tifia une tete de pont, pour assurer aux Rouiains un
facile passage dans la Germanie.
Gependant de nouveaux combats allaient se livrer
dans la Gaule, Toutes les nations de cette contree se re-
volterent a-la-fois : elles avaient profile de I'eloignenient
de Cesar, qui etait alors dans la Hautc-Italie, ou il pas-
sait ordinairement I'hiver ; et leur ligue, formee par
Vercingetorix , chef des Arverni, prit subilement les
armes. Les Eduens meme, ces anciens allies des Re-
mains, se joignirent ensuite a la coalition. Jamais Cesar
n'avait eu tant d'ennemis a combattre : il fut superieur
a tous. Sa campagne fut memorable , par la rapidite de
ses levees, de ses marches , de ses succes, par les sieges
de Genabum, de Noviodunum, de Gergovie, d'Alesia,
et par les defaites de Vercingetorix. L'annee suivaute
vit eclater de nouveaux soulevemens qui furent egale
ment comprimes : le siege d'Uxellodununi en fut lope-
ration la plus remarquable. Cesar put alors appliquer
tous ses soins a Tadministration de la Gaule : il en con-
solida la conquete par sa clemence , par la moderation
des charges publiques , par lunion, I'ordre, les lois
qu'il fit succeder a lanarchie. Depuis neuf ans il cotn-
mandait dans la Gaule, quand la guerre s'engageant
entre lui et le parti de Poinpee, le rappeia en Italic et
le conduisit successivement a Pharsale, en Egypte, dans
( aSo )
les plaines d'Utique, a Miinda , au Capitole, ou ildevait
perir aux pieds de la statue de Ponipee.
La Gaule avait eu des nioeurs barbares, une langue
informe, une religion cruelle, des lois aveugles et sou-
vent iiupuissantes : elle dut a son administration nou •
velle une longue suite d'ameliorations. Des camps ro-
mains se changerent en villcs; d'autres cites s'eleverent
sur la rive des fleuves ou dans les lieux les plus favo-
rables au commerce : on fonda des colonies ; les routes,
les canaux s'ouvrirent ; les fleuves devinrent plus navi-
gables : des monumens de la puissance romaine turent
eriges dans les villes, dans les campagnes, et consacre-
rent partout la domination dn grand peuple destine a
chansrer le sort du monde.
D'autres temps de barbaric pourront succeder a cette
memorable epoque, mais quels qu'en puissent etre les
desastres et les bouleversemens, ils n'aneantiront pas
tous les fruits de la conquete.
NOTICE
sua LE VOYAGE EN BOUKHARIE DE M. ALEX. BUKNES(l),
Par M. Eyries.
M. Alexandre Burnes a public la relation de son
voyage en Boukharle , et s'est empresse den envoyer uu
exemplaire a la Societc de Goograpbie. Nous n'avons
pu qu'ctre extremement Ilattes de recevoir cettc marque
(i) Uiie traduction francaise He ce voyage est sous presse, et pa-
raitra piochainement chez le libraire de la Societe.
I 25l )
d'attention de !a part dun honinie qui vient de rendre
un service eminent a la science dont nous nous oc-
cupons.
La ligne que M Burnes a suivie est tres remarquable
par son importance, car il a voyage dans des pays qui
ne sont pas connus, ou du moins ne le sont que tres
imparfaitement; il suffira de tracer brievement son iti-
neraire pour faire apprecier I'interet extreme de sa
longue peregrination dans une partie de I'Asie centrale.
Le 2 Janvier i832 , M. Burnes , accompagne de M. le
docteuf Gerard, d'un ingenieur hindou , d'un jeune Ca-
cheniirien etd'un domestique hindou, partitdeLodiana,
ville de I'Hindoustan britaimique , situee sur un petit
bras du Setledje , pres de la frontiere du territoire de
Rendjit Sing , maharadjah des Seiks.
Apres un sejour dun mois a Labor, capitale des etats
de ce prince , M. Burnes se dirigea vers les rives de I'ln-
dus, et passa ce fleuve celebre a gue, un peu au-dessus
d'Attok. C'est la que les conquerans de llnde , depuis
Alexandre-Ie Grand jusqn'a Nadir-Chah, ont franchi la
barriere naturelle que la nature a placee entre cette
contree et celles qui sont plus a I'ouest.
Peicbavs^er , que les voyageurs virent ensuite , est b4ti
sur un rameau de I'Hindou Kousch , le Paropamisus des
anciens. M. Burnes a traverse entierement cette fameuse
cbaine de montagnes : il a d'abord suivi les vallees ou
coulent le Hezareh ou la riviere de Gaboul et ses al-
flens; au-dela de Caboul, il a continue pendant quelque
temps a marcher a I'ouest; ensuite, tournantau nord ,
il s est engage dans le defile de Kalou , dont le col est a
i3,ooo pieds anglais au-dessus du niveau de la raer, et
qui forme le point de partage des eaux entre I'lndus et
rOxus. Dans une haute vallee ou coule le Serkab, il fit
2a2
halle a I3aniian , ville fort siiiguliere, car une partic ties
liabitaliovjs consisie en caveriies creusees dans k; roc a
toutes les hauteurs. 11 y conteinpla ces idoles gigan-
tesques dont les livres orientaux font mention, et aux
quelles ils attribiient une antiquite fabuleuse, uiais qui
sont cerlainement poslerieuresau siecle de Mahomet.
Au village de Heibek , situe sur le Khouloum,
M. Burnes quitta entierement les montagnes , et entra
dans ces plaines imnieiises, generalenient sablonneuses
et entrecoupees de quclques oasis, qui se proloiigent an
nord jusqu'au dos du pays peu eleve <lu step des Kirghiz.
Oblige de s'ecarler de sa route pourobeira une som-
mation du chef de Khoundouz, M. Burnes rejoignit
bientot ses compagnons resles a Khouloum, et ne tarda
pas aarriver aBalkhjvillc qui jadis merita le litre poni-
Tpeux de Mere des cites, et qui, denienieque tantd'autres
nietropoles anciennes de I'Orient, n'estplus quel'ombre
de ce quelle fut aux jours tie sa splendeur.
On traversa le dt?sert des Turkomans , on passa I'Oxus,
et bientot on se trouva 'dans les nmrs de Bokhara, la
Bactra des historiens d'Alexandre, et encore aujourd'hui
capitale d'uii royaume puissant. Le 2 ju'illct, M. Burnes
en partit, et cessant tie voyager dans la direction du
nord, il prit.celle du sud. La caravane avee laquelle il
marchait fut obligee de s'arreter pendant plus dun mois
pres de Karakoul , ville du Turkestan ; quand elle se fut
remise en route, elle traversa de nouveau I'Oxus et
sejourna quatre jours aTchaourdji, ville qui est au sud
du lleuve, et que nos cartes placeiU sur sa rive septen-
irionale. C'est le dernier lieu liabite par des honuues ci-
vilises enlre laBoukharie etla Perse. Au-dela, on voyagea
une seconde fois dans le grand dtisert qui est le theatre
(les excursions des Ttirkomans nomades. Le i«' sep-
( 253 )
Teinbre, on aptMCUt les montagncs clu Khorasan , (jui
sont le prolongenienl occidental de rHindou-Kousch;
onze jours apres, on entra dans les defiles qui les tra-
versent, et oj;i toucha le territoire persan, apres avoir
couru plus dun danger de la part des farouches habi-
tans du desert.
A Meched, M.Gerard se separa de M. Burnesj il
voulait retourner versCaboul et THindus en passant par
Herat et Candahar. M. Burnes gagna, en se dirigeant a
louest, les rivages de la mer Caspienne,en longeant la
partie du Khorasan ou sont etablis des Turkomans et
des Curdes soumis a la domination de la Perse. 11 vit
successivement , dans les plaines basses et humides du
Mazanderan , Aslrabad et Aschraf ; ensuite il voyagea
vers le.sud, dans la belle valleeou coule leTilar,et dont
la longueur est de 60 milles. Avant de quitter le pays
inferieur, M. Burnes avait apercu la haute chaine du
Demavend,couverte de neiges perpetnelles. Apres avoir
paroouru la moitie de la vallee, on n'apercoit plus la
riche verdure du Mazanderan, et, a son extremite su-
perieure, on a monle graduellement jusqu'a une hau-
teur absolue de 6",ooo pieds : on est sur le plateau de
la Perse, ou Ion parvient par le col de Gadoukjil cor-
respond aux Partes caspiennes , par lesquelles Alexandre
passa quand il poursuivit Darius vaincu. Firouzkoh,
village a peu de distance, a des maisons qui rappellent
les habitations souterraines de Bamian.
Le 21 octobre, M. Burnes eut la satisfaction- d'etre
accueilli a Teheran par I'envoye de la Grande-Bretagne.
II fut ensuite presente au souverain de la Perse. Deja il
avait vu, pres de Meched, Abbas Mirza , que ce mo-
narque reconnaissait depuis long-temps pour son heri-
tier presomptif , et que depuis un an la niort a enleve.
( 254 )
L'objet du long voyage tie M. Buriies etait accompli;
il partit de Teheran le ler novembre, el passant par
Isfahan et Chiraz, il alia s'enibarquer a Abouchir, d'ou
il partit le i8 decembre. Le vaisseau de^guerre de la
compagnie des Indes, qui le portait, mouilla le 18 Jan-
vier 1 833 dans le port de Bombay, et M. Burnes se hata
d'aller presenter le resultat de ses voyages au lord W'"
Bentinck, gouverneur general de I Inde.
Nous pensons qu'il nest pas hors de propos d'offrir
ici les reflexions par lesquelles M. Burnes termme son
importante relation : « En partant , dit-il, j'avais en per-
spective tout ce qui dans les temps anciens et modernes
pent exciter I'interetet enflammer limagination : la Bac-
triane, la Transoxane, la Scythie et la Parthie ; le Kha-
rism, le Khorasan et llran. Maintenant nous avions
visite toutes ces contrees, nous avions suivi la plus
grande partie de la route des Macedoniens, voyage dans
les royaumes de Porus et de Taxile, vogue sur IHydas-
pes, traverse le Caucase indien, etsejourne dans la ce-
lebre cite de Balkh, d'oii des monarques grecs,tres loin
des academies de Corinthe et d'Athenes, avaient jadis
repandu parnii le genre humain la connaissance des arts
et des sciences , de leur propre histoire et de celle du
raonde. Nous avions contemple le theatre des guerres
d Alexandre, des invasions devastatrices et barbares de
DJMighis et de Timou r des campagnes et des prouesses
de Baber, telles qu il les a racontees dans le langage ra-
vissant et brulant de ses memoires. Dans notre voyage
aux cotes de la mer Caspienne, nous avions marche
sur la meme route par laquelle Alexandre avait pour-
suivi Darius; enfin, en retournant dans I'lnde, je lon-
geai la cote du Mekran et le chemin suivi par Nearque,
arairal de la flotte du conquerant macedonien. »
( 255 )
r Apres avoir acheve le recit de son voyage, M. Burnes
le fait suivre dun ecrit intitule : Memoire general et geo-
grapJdque suriine partie de V Asie centrale. Son intention
a ete de decrire, dans ce memoire, les choses qui, sous
le rapport de Ihistoire generale et de la geographie, lui
ont paru dignes de fixer ('attention. « On verra, ditil,
par la ligne de ma route, que j'ai traverse une partie de
rinde, du royaume de Gaboul, de la Boukharie, du
Turkestan et de la Perse ; et j'aurais pu , dans ma des-
cription , uie conformer avec raison a cette division -,
mais je n'ai pas le dessein de recapituler les travaux
d'autrui, ni de m'occuper de ce que le monde connait
deja : je me suis done borne a ce qui est nouveau et in-
teressant. Ma carte reetifiera beaucoupde positions dans
ces cpntrees, et meme fera changer de place a plusieurs
chaines de montagnes considerables; mais la notice ge-
nerale de cbaque province du royaume de Caboul a et^
donnee el dessinee par M. Elphinstone dans son pre-
cieux ouvrage sur ce pays : mon domaine s'etend dans
les voies non encore parcourues au-dela de I'Hindou
Kousch , au milieu des Tartares nomades et des deserts
animes quelquefois par beaucoup d'oasis brillantes et
fertiles. Si mon lecteur place devant ses yeux la carte de
mon voyage , il verra que je traite seulement des pays
que j'ai vus. »
M. Burnes ajoute qu'il ne s'est ecarte de cette regie
que pour ce qui concerne les sources de I'lndus, et les
communications des etrangers avec la Chine, par terre.
Dans ce memoire important, M. Burnes presente suc-
cessivement a ses lecteurs des notices detaillees sur le
royaume de Boukharie, I'Oxus et le lac d'Aral, les pays
situes dans la vailee superieure de I'Oxus; sur les sources
de rindus, sur la province d'Yarkend , laquelle appar-
( a56 )
tieht a I'empire Chinois, sur ses relations avec Peking,
le Tibet et la IJoukharie, sur la chaine de I'Hinilou
Kousch; sur la Turkonianie, sur les incursions des Tar-
lares et sur les tribus du Turkestan, enlin sur les che-
vaux de ce pays. On lit ensuite une esquisse historique
des pays situes entre I'lnde et la mer Caspienne. Les di-
verses revolutions qui, de nos jours, out agite ces con-
trees si sujettes aux bouleversemens politiques, sont ex-
posees avec une nettete, une exactitude, une precision
dignes d'eloges. Enfin, ce vaste tableau est termine par
des considerations sur le commerce de I'Asie centrale,
depuis le Pendjab souniis a la domination de Rendjit-
Sing, jusqu'en Perse.
L'ouvrage de M. Burnes est en trois volumes; le troi-
sieme contient un voyage anterieur a celui dont on vient
de parler.
En i83o, un batiment anglais apporta au gouverneur
de Bombay cinq chevaux de race , que le roi de la
Grande-Bretagne envoyait en present au maharadjah des
Seiks. Une lettreaniirale du monarque europeen accom-
pagnait ce don au souverain asiatique. Sir Jolin Mal-
colm, dont la geographic deplore la perte recente, etait
alors gouverneur de Bombay. U nomma M. Burnes chef
de la legation qui devait presenter les coursiers, et lui
reconmianda en menie temps de prendre le plus de ren-
seignemens qu'il lui scrail possible sur la navigation de
rindus jusqu'au Pendjab.
Le 2 1 Janvier i83i, la legation partit de Mandivi ,
port de la cote du Cotch. Le 24, les bateaux indigenes
qui la portaient, entrerentdans une des bouches de ITn-
dus. On avait oublie de prevenir les emirs du Sindi ,
dont on devaii traverser le territoire; il fallut rebrous-
ser chemin. Des negociations t'urent entamees, ellesdu-
( ^57 )
rerent long-temps : le lo mars, on mit de nouveau a la
voile, on penetra clans i'lndus par une autre bouche ,
puis on debarqua dans le Sindi, pres de Tatha ; mais
des obstacles physiques obligerent de retourner encore
a I'enibouchure du fleuve, enfin , le 12 avril, on s'em-
barqua sur des bateaux propres a sa navigation. Le 18,
on etait a Haiderabad , capitale du Sindi. Les emirs fi-
rent un accueil tres gracieux a 1 envoye britannique, qui
n'eut qua se louer des egards qn on eut pour lui dans
leurs etats. Le 21 mai il partit de Bekkou sur la fron-
tiere de ce pays , et ne tarda pas a en tier dans une con-
tree qui obeit a des chefs beloutchis. Le 3o on sorlit
du cap de I'lndus pour remonter I'Aersines ou Tche-
nab. Apres etre reste quelques jours a Outch, capitale
des etats de Bhavoul Khan, on ne tarda pas a se trou-
ver dans ceux du Maharadjah , et sous les murs de
Moultan, I'une des villes les plus anciennes de I'Hin-
doustan, et que M. Burnes regarde comme la cite des
Main , dont les historiens d' Alexandre font mention.
Ensuite M. Burnes passa de I'Aersines dans I'Hydaspes
ou Ravi, et le 17 juin, apercut les minarets de la mos-
quee royale de Labor. Le lendemain il fit son entree en
grande pompe dans cette capitale des Seiks , et alia lo-
ger chez M. Allard, officier francais, qui est general de
cavalerie du Maharadjah; ily vit M. Court, autre Fran-
cais , qui est egalement un des ofHciers-generaux de ce
prince. L'envoye dun potentat puiss;int fut naturelle-
ment accueilli avec distinction, et ensuite comble de
marques dattention et de riches cadeaux. Rendjit Sing
traita ses botes avec magnificence etgenero.site,jusqu'au
16 aout, qu'il leur accorda leur audience de conge. Le
jour suivant, M. Burnes se mit en route pour rejoindre
le gouverneur general de I'lnde britannique. II ne man-
»7
( 258 )
qua pas de visiter Amretsir, la cite sainte des Seiks; et
iin peu plus loin., il atteignit les rives de I'Hypliasis ou
Biha. II traversa ensuite le canton situe enlre cette ri-
viere et le Setledje , et le 26 aout , ayant passe rette
derniere, il se trouva snr le territoire brilannique , a
Lodiana. La il apprit que le gouverneur general etait
dans les monts Himalaya j ce fut a Simla qu'il le ren-
contra, et qu il termine le recit de son voyage.
M. Burnes a fait suivre egalement la relation de celui-
ci , dun travail relatif aux contrees qu'il a parcourues.
II est intitule Memoire siir riiulits et sur les rivieres du
Pendjnh ses afflncns. Ce titre pourrait induire en erreur
en faisant croire que I'auteur ne traite que du Sind et
des rivieres du Pendjah qui lui portent le tribut de leurs
eaux. Mais un expose sommaire des chapitres fera con-
naitre la diversite des objets que M. Burnes presente
aux lecteurs.
Tableau general de I'lndus , et comparaison de ce
fleuve au Gangej son Delta, ses boucbes; le Sindi, ses
habitans , son gouvernement ; I'lndus, depuis Haider-
ab;>d , en remontant jusqu'a Attok; pays et villes quil
baigne ; I'Aersines ou Tclienab, auquel se joint THysu-
drus ou Setledje; etats de Bhavoul Rban ; le Pendjab ;
etals de Rendjit Sing; I'Aersines ou Tcbenab , auquel se
joint I'Hydraotes ou Ravi. En decrivant le cours de tou-
tes ces rivieres, M. Burnes trace le tableau des pays
qu'elles parcourent. II 6nit par un memoire sur le bras
oriental de I'lndus, et sur le Ren ou grand marais du
Cotcb, contree riche en phenomenes remarquables , et
sou vent bouleversee par des tremblemens de terre.
M. Alexandre Burnes , lieutenant d'infanterie de la
conipagnie anglaise de;> Indes, est frere de M. James
Burnes, chirurgienniajor a Bhoudj dans le Cotcli. Ce
( 259 )
dernier fut appele en 1827 ii Haiderabad, pour donner
ses soins a un des emirs. II a publie une relation de son
voyage. Ainsi les deux freres ont bien merite de la geo-
graphie, en nous donnant des details sur des pays peu
connus. Quiconque a lu le livre de M. Alexandre Burnes
ne pourra que confirmer le temoignage que lui rend le
gouverneur general: « Vous avez des droits a des eloges
pour la quantite de renseignemens relatifs a la geogra-
phie et a divers sujets que conrient votre relation. » Si
M. Burnes merite des louanges pour les progres qu'il a
fait faire a la geographie , il en merite egalement pour
la maniere dont sa relation est ecrite. De meme que les
voyageurs dont les ouvrages sont cites comme des mo-
deles, M. Burnes sait exciter I'attention et I'interet : il
raconte avec clarte et simplicite, et ne cause pas un
seul moment d'ennui.
( i6o )
DEUXIEME SECTION.
DOCUMENS, COMMUISICATIONS, NOUVEF.LES
GEOGRAPHIQUES, ETC.
EXTRAIT
d'cne lettre adressee a la societe de geographie
par m. noyer.
Paris, le i3 septembre 1834.
I" Geographic et statistique de la Guiane francaise.
Depiiis long-temps la geographie de la Guiane est
restee a-peu-pres stationnaire. En 1824, M. le baron
Milius, gouverneur de la colonic, lit une expedition
pour la reconnaissance des sources de XOjapoc et de
Maroni. Cetle entreprise n'eul pas tout le succes qu'on
devait esperer. M. Milliade , et, apres lui, MM. Adam
de Bauve et Feret, ont fait des excursions dans lOyapoc
et ses aflluens. Ces explorations ne nous ont rien appris
de nouveau , et les explorateurs n'ont determine au-
cune position geographique, ni releve leur route dune
maniere assez rigoureuse pour qu'on put en faire la
carte. M. Leprieur vient nouvellement de faire un
voyage dans Y Oyapoc et dans le Jari. II a reconnu la
communication de ce fleuve avec un embranchenient
de VJniazone, au moyen d'un portage. Cette reconnais-
sance avait deja ete faite anciennenient par les PP. Gril-
let et Bechamel , et par Jacques des Sauts , le soldat de
(' 26 1 ^.
Louis XIV , qui hubitait le voisinage cles cataractes.
L'itineraire de M. Leprieur a ete insere clans les bulle-
tins de la Societe. Sur la demande de M. Jubelin, gou-
verneur de Caienne, j'ai ecrit une notice sur I'etat ac-
luel de la geographic de la Guiane francaise, et sur les
moyens d'sntreprendre un voyage de decouvertes dans
rinterieur. Cette notice a ete inseree dans les Annales
maritinies (Janvier i83o). Je me propose d'envoyer a la
Societe des notes fort ioteressantes sur un voyage de
M. Benoil , taxidermiste, fait dans les savanes de Cachi-
pour, qu'il a traversees en canot dans la saison des
pluies
2° La Mann.
Cette petite colonie a ete fondee en 1821 , sur les
projets de Catineau-Laroche. En 1828, cet etablissenient
a ere cede a madame Javouhey, superieure generale de
la congregation des dames de Sainl-Joseph. Depuis que
cette petite colonie a fait quelques progres, le probleme
de I'acclimatement descultivateurs europeens a ete, en
partie, resolu. Les soeurs converses , que la snperieure
generale avait emnienees avec elle, se sont habituees au
travail de la terre et a la nourriture du pays. L'esprit
de congregation et la discipline religieuse etaient bien
plus pi'opres a atteindre ce but que tous les encoiira-
gemens que Ion pourrait donner a des families inde-
pendantes.
3° Population de la Guiane.
La population des noirs a augmente; elle elait , au
i" Janvier i832, de 19,102
Cet accroissement est dii
A reporter 19,102
( 262 )
Report. ... 19,102
surtout aux ameliorations qui
ont ete introduites dans le
regime des noirs.
Le nombre des blancs etait,
a la meme epoque , de. . . . 1,573
Celui des hommes de cou-
leur 2,625
23,3oo
Las importations, en i832, ontete
de 1,882,336 f. 73 c.
Les exportations , de 1,607,826 92
Difference. . . . 274,509 71
Les affranchissemens donnes , ou regularises a
Caienne , depiiis la promulgation de i'ordonnance du
12 juillet i832 , s'elevaient, au 21 Janvier i834 , a
295 personnes de tout sexe.
Au i*"^ Janvier i832 , on comptait, a Caienne,
11,94a hectares de terrain en culture.
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( 264)
CARTE DE FRANCE
( 2« LITRAISON.)
L'apparition de nouvelles feuilles de gravure de la
Carte de France est une preuve incontestable des pro-
gres toujours croissans de cette vaste et interessanteen-
treprise. La seconde livraison , qui vient d'etre niise en
venle (i), se compose de douze feuilles ayant pour
litres : Chdlons-sur-Marne , Lauterhourg , (e Havre,
Longvvy, Montreuil , Provi/is , Retliel , Saint-Valen'-en-
Caux , Sarreguemines , Sierck, Soissons , PVeissenibourg.
Les nonibreux documens topographiques qui out ete
employes dans la redaction de ces feuilles, sont en
grande partie, comma de coutume , une reduction des
plans du cadastre que des officiers d etat-inajor out ete
charges de coordonner a I'aide dune triangulation pre-
liminaire, et de completer, soit en remplissant les la-
cunes qu'ils presen talent, soit en y exprimant le relief
du terrain a I'aide de lignes de plus grande pente for-
mant des teintes dont les intensites croissent conniie la
rapidite des pentes. Cest ainsi que, chaque annee, les
operations geodesiques devancent les leves de detail et
les reconnaissances militaires, et que de seniblables ma-
teriaux topographiques sont recueilliset mis immediate-
nient en oeuvre pour la gravure. 11 est done certain que
(i) A Paris, chez Picquet, geographe du roi et <le S. A. R. le due
d'Orleaiis, quai Conti, n" 17.
( 265 )
ies livraisons pourront continuer tie paraitre a tie courts
intervalles tie temps.
Si la promptitude nuit quelquefois a la perfection,
il n'en est pas de meme relalivement aux travaux d art
de la Carle de France, parce que Texecution en est con-
fiee aux plus habiles graveurs de la capitale, et qu'elle
est soumise, dans ses moindres details, a une surveil-
lance active et eciairee.
A cette belle livraison Sent jointes , comme precedem-
ment, des tables des positions geograpliiques ties prin-
cipaux lieux compris dans chaque teuille,et dont Ies
nonis sont inscrits par ordre alphabetique. Deux des
coordonnees , savoir la longitude et la latitude, servent,
a I'aide de la graduation iracee le long du cadre, a trou-
ver sur-le- champ le lieu tjue Ion clierche; et la troisieme
coordonnee, designee sous le nom d'altitude, exprime
en metres la hauteur de ce lieu au-dessus de la mer.
G'est a ces points de repere qu'ont ete lies Ies nivelle-
mens topographiques destines a t'aire connaitre egale-
ment, dans des espaces resserres, Ies hauteurs absolues
dusol, hauteurs inditfuees par de petits chiffres arabes,
et qui concourent essentieilenient, avec le syslenie de
hachures , a donner Ies notions Ies plus precises sur Ies
asperites de la terre et Ies plus faibles inegalites de sa
surface. 11 sera done, par la suite, tres facile tl'entre-
prendre une description physique du territoire francais
selon ies idees lumineuses de I'auteur du nouveau Cours
de geographic generate , entrepris d'abord comme essais
de geographic melhodique et comparative; ouvrage qui
serait non moins important que la nouvelle description
geometrique du royaume, dont la premiere parlie forme
le sixieme volume du Memorial du Depot de la guerre.
Quoique sur Ies feuilles de gravure, f|ui soni une re-
( 266 )
ductiou au 80 inillieme des teuilles minutes construilcs
k lechelle dun pour 40 niille, les noms des lieux soient
assujetis a rorthographe generalement usitee par les au-
torites locales, cependant on ne saurait disconvenir
que cette partie du travail ne laisse encore a desirer,
tant il est souvent tres difficile de lever les incertitudes
qui existent sur la veritable origine des mots. Aussi le
Depot de la guerre, desireux de mettre a profit les re-
niarqnes judicieuses qui ont ete faites a ce sujet dans le
tome 1" (lu Bulletin de la Societe de I'histoire de
France, redoublera d'efforts pour amener la nomencla-
ture de la nouvelle Carte au degre de merite qu'elle est
susceptible d'acquerir; en meme temps , il ne negligera
rien de tout ce qui pourra hater les publications subse-
quentes, afin que le public soit , le plus promptement
possible, mis en jouissance d'une oeuvre veritablenient
nationale, et dont I'utilite sera generalement d'autant
mieux appreciee, que la gravure en aura multiplie da-
vantage le type.
( a67 )
TROISIEME SECTION.
Actes de la Soci^te.
PROCES-VERBAUX DES SEANCES.
Seance du 3 octobre i834.
Le proces-verbal de In derniere seance est lu et adopte.
M, Juste Paredes, de Panama , remercie la Societe
qui vient de I'adniettre au nombre de ses memhres , et
offre de lui adresser tous les documens qu'il poiirra se
procurer sur un pays qui , par sa situation topogra-
phique, excite un si vif interet. M. Paredes commu-
nique ensuite divers documens relatifs a I'ouverture
d'un chemin de fer projete a travers I'isthme , et dont
il a provoque I'execution , ainsi que le decret de la
cliambre provinciate de Panama, qui le charge de I'o-
peration ; enfin le nouveau decret rendu par le congres
de Bogota , au sujet de cette entreprise. Renvoye au
comite du Bulletin.
M. Harkness, secretaire de la Societe royale asiatique
de Londres, adresse le tome iii (3= partie) des Transac-
tions, et le premier cahier du Journal de cette savante
compagnie. — Remercimens.
M. Vander-Maelen adresse la suite des recueils de
documens et de tableaux statistiques sur la Belgi(|ue ,
publics a I'elablissement geographique de Bruxelles.
M. Henrichs, attache au Ministere des affaires etran-
geres , exprirae le desir d'etre admis au nombre des
membres de la Societe, et il lui fait hommage de plu-
( 268 )
sieurs volumes cle l;i colleclion des Archives du com-
merce , (lont il est le fondaleur.
M. le directeur du bureau de lagricultuie demande
I'echaiige du Bulletin de la Societe contre la Bei'ue dc
/'agriculture universelle, qui paraitra a partir du i^"^ oc-
lobie. — Renvoi de cette demande au coniite du Bul-
letin.
M. Jomard communique I'extrait d une lettre de
M. Graberg de Hemso, au sujet de sa carte de I'em-
pire de Maroc, et il depose un exemplaire de cette carte
sui' le bureau, de la part de I'auteur. — Des remerci-
mens lui seront adresses.
La Commission centrale , sur le rapport de M. Roux
de Roclielle, accepte I'echange du Journal de I'institut
historique contre le Bulletuj de la Societe.
M. Roux de Roclielle lit une notice sur I'ancienne
situation de I'Orient, avant la conquete des Romains.
— Renvoi au comite du Bulletin.
Seance du 17 octohre.
Le proces-verbal de la derniere seance est lu et adopte.
M. J.-F.-M.-R. Jouaimin , remercie la Societe qui
vient de ladmetlre an nonibre de ses mendjres, et il
lui fait hommage dun exemplaire de la premiere partie
de la Melrologie generale qu'il vient de publier de con-
cert avec M. J.-M. Jouannin son frere. — Remerei-
luens.
M. Vander-Maelen adresse le Dictionnaire geogra-
pliique de la province de Flandre onentale , public a
I'etablissement de Bruxelles. — Remercimetis.
M. de Larenaudiere fait uti rapport sur la letlre de
M. Klaprotb a M. le baion de Humboldt, relative a
( ^69 )
I'invention de la boussole. — Renvoi au coniite du
Bullelin.
M. d'Avezac fait, en son nom et au noni de MM. Co-
raboeuf et Warden , un rapport sur le menioire remis
par M. Leprieur , sur son dernier voyage dans Tinte-
rieur de la Guiane francaise. L'examen de cette com-
mission avait pour objet , d'une part I'appreciation de
ce que le voyageur a accompli , et d'autre part la re-
cherche des moyens a employer pour rend re aussi t'ruc-
tueuse que possible la continuation de rexploration
commencee. — La commission adopte ce rapport.
M. Albert-Montemont lit une notice sur la vie et les
voyages de Mungo-Park : M. Jomard fait , a cette oc-
casion , quelques observations, notamment sur I'opi-
nion attribuee a ce voyageur, relativement a 1 embou-
chure du Niger, dans le golfe du Benin j M. d'Avezac
rappelle que , dans un memoire qui a deja plusieurs
annees d'existence, il a determine la date precise de la
catastrophe dont I'infortune Park fut victime a Bousa.
MEMBRES ADMIS DANS LA SOCIETE.
Seance du 3 octobre i834.
M. P. Henrichs, attache au ministere des affaires
etrangeres.
Seance du ly octobre.
M. le docteur A. Boue, vice-president de la Societe
de Geologie.
( 270 )
OUVRAGES OFFERTS A LA SOCIET^.
Seance du 3 octobre i834.
Par la Societe royale Asiatique de Londres : Tran-
sactions de cette Societe,vo\. iii, part. 3. London i834,
in.4"'. — The Journal of the royal Asiatic Society, n° i,
in-8°. London, July i834. — Proceedings of the tenth
annual meeting of the royal Asiatic Society held on Sa-
turday, maj II 1 833,- with th& report 0/ the council, and
committee of correspondence. London, i833. i broch.
in-S".
Par M. Albert-Montemont : Bibliotheque universelle
des voyages fi^'YiVT. (Voyages en Afrique, Denham et
Clapperton. )
Par M. Vander-Maelen : liecueil de documens sta-
tistiques (Belgique, 2° cahier). Bruxelles, i833. — Ta-
bleaux statist iques des patentables de la Belgique en i833,
d'apres les documens officiels , coordonnes a I'etablisse-
inent geographique. Broch. in-8''. — Statistique des sept
provinces de la Belgique, 7 feuilles in-folio. •
Par M. Graberg de Hemso : Carte del Moghrib-ul
acsa deir inipero di marocco giusta le piii recenti scoperte
e combinazioni Jormata e descritta , da J. G. de H. et
incisa da Girolamo Segato in Firenze , i834. Une feuille.
Par M. Warden : Descriptions of the inferior maxillary
bones of mastodons in the cabinet of the American philo-
sophical Society , etc. , by Isaac Hays. Philadelphie, i834.
Broch. in-4".
Par M. Arthus-Bertrand : f^oyage pittoresque dans
( 271 )
hs Basses-Pyrenees , suwi (rune Notice sitr Cambo, ses
eaiix minernles et ses environs, par M. J.-L. Lacour.
I voi. in-S**.
Par M. Ambroise Tardieu : Atlas dexercices de geo-
graplUe moderne , redige et grave par A. Tardieu. Partie
elementaire. 8 cartes. In^"-
Par M. d'Urville : Voyage pittoresque autoiir du
monde , 53' , 54* et 55" livraisons.
Par la Societe Asiatique : Cahier d'aout de son
Journal.
Par la Societe royale d'agriculture de Seine-et-Oise :
Memoires de cette Societe pour i834. Un vol. in-8".
Par la Societe des Missions evangeliques : Journal
de cette Societe , cahier de septenibre.
Par la Societe de Civilisation : Revue sociale , 6° livr.
Par Pd. le directeur : Memorial encjclopedique , ca-
hier de septembre.
Par la Societe pour I'instruction elementaire : Cahier
d'aoiit de son Bulletin.
Par M. de Moleon : Recueil industriel et manufactu-
lier, cahier de juillet.
Par M. Henrichs : Archives du commerce el de l' Indus-
trie agricole et manufacturiere , tomes v, vi et vii. In-8°.
Par MM. les directeurs : L'Institut, nos 71 et 72.
— L'Echo du monde savant , n" 26.
Seance du I'j octobre.
Par MM. Baradere , Warden , de Saint-Priest, etc. :
Antiqidtes mexicaines , 6* livraison.
Par M. Vander-Maelen : Dictionnaire geographique de
la province de la Flandre orientale. Bruxelles, i834.
Par MM. Jouannin freres : Metrologie generale, pre-
( 272 )
miere partie. Nouvelles tables de comparaison entre les
iiiiciens poids et niesures generalenienl usites et ceux
qui les remplaeent dans le nouveau systeme melrique
decimal, etc. Paris, i834. Un vol. in-4°.
Par M. Jacob Porter : Topographical description and
historical sketch of Plain/ield in Hampsldre county Mas-
sachusetts ; niai 1834. Broch. in-8°.
Par M. Martin : Essai sur la mesure des longitudes par
la rotation de la terre. in-S".
Par M. le capitaine d'Urville : 56% 57*^ et58<= livraisons
du Voyage pittoresque autour du rnonde.
Par rinstitiit historique : Deuxieme livraison de son
Journal.
Par la Societe de geologic : Feuilles aS , 26 et 27 du
tome IV de son Bulletin.
Par la Societe des Missions evangeliques : Cahier
d'octobre de son Journal.
Par MM. les directeurs : Numeros 73 el 74 de Vln-
stitut, et numeros 28 et 29 de FEcho du monde savant.
ERRATA
De la lettre de M. de Hammer, inserce dans le cahier
de fevrier i834.
Page 1 18 , lignes 5, 18 , ^
I au lieu de Fischbnligh et Fich-
— I ic) , — 2, 3, 7, 8, 1 4, 1 5, \
/ baligh , lisez Gischhaligh.
— i?o, — 4, }
— 118, — 16, ^ au lieu de D/ossmi et D/ovaitis, lisez
— no , — I, ^ Djovaini,
— 1(8, — 32 , au lieu de liebuchtung , lisez Reletichtung.
id. id. , au lieu de Torschuiipa , lisez Forschungcn.
— 119, — 10, au lieu de : a Karakoroum . II y a, lisez:
a Karakoroum il y a
BULLETIN
J)E LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE.
NOVEMBRE l834.
ASSEMBLEE GENERALE
DE LA SOCIETE DE GEOGRAPHIE
DU 28 NOVEMBRE 1834.
DISCOURS D'OUVERTURE
PKONONCE PAR M. LE COMTE DE MO^fTALIVET.
Messieurs,
Appele a I'honneur de pvesider votre reunion an-
nuelle, j'eprouve un sentiment de defiance bien legi-
time. Au milieu de personnes si distingueos par ieurs
<;onnaissances, que puis-je apporter en echange de la
bienveillance qui ma place monientanement a votre
tete, si ce nest I'appreciation sincere des services que
la Societe de geographic rend chaque jour a la science?
Personne, en etfet , mieux que moi, ne sait recon-
naitre le devoiiment de ces esprits genereux, qui, s'ap-
pliquant a des travaux steriles pour eux-memes, niais
feconds pour tous, cherchent, souvent meme au prix
de I'existence , le progres et le bien general.
Ce devoiiment, messieurs, est celui qui vous anime ,
et le but de vos efforts est de I'inspirer aux autres en
i8
( 274 )
pre'sentant a leiirs iravaux I'atlrait, on des recompenses
que votie desiiiteressement refuse, on de la reconnais-
sance publique a laquelle vous avez vous-menie lant de
droits. Noble devoir accompli ! ge'nereuse mission a
reuiplir!
Dans voire derniere seance gencrale, il vous a ele
rendu compte de I'expedition nKuitime du capitaiiie
Ross, dans les niers Polaires; et du capitaine Biscoe,
dans rOoean antarctique; des voyages de M. Leprieur,
dans I'interieur de la Guyane, et de M. d'Orbigny, dans
I'Amerique nieridionale. Depuis, aucune entreprise im-
portante ne s'est signalee a I'attention i\u nionde sa-
vant.
Mais en adiniraut ces liommes courageux , que I'in-
stinct des decouvertes pousse a la recberche de regions
inconnues , en pretant a leurs lointaines entreprises
votreappui et vos voeux, vous n'oubliez pas, messieurs,
que sur des bords nioins lointains, il reste encore des
decouvertes a faire, dans des pays deja conquis de nou-
velles conquetes a eiiregistrer , conquetes moins bril-
lantes , j'en conviens . mais dune utilite plus directe
peut-etre, plus journaliere. Sans sorlir du sol qui nous
a vu naitre , ce sol est-il done si bieii decrit , qu'il ne
laisse pliis rien pour des etudes nouvelles?
Certes , s'il fallait entendre par la science geogra-
phique I'art derepresenter !a position relative des divers
lieux sur une surface plane, en y ajoutant meme la me--
sure dun certain nonibre (le bauteurs, on pourrait dire
que chez nous, cette science est parvenue a son der-
nier degre de perfection. La carte, a laquelle Cassini a
donne son nom , est un de ces mouumens que le temps
pent alterer sur quel([ucs points , niais dont la masse
reste comme un grand et magnifique ensemble. II est
( =7^> )
siirtout une oeuvre chorograpliiquc qui se recomniande
ail plus haul degre a noti'e estime; je veiix parler de la
nouvelle carte de France, executeeau Depot de la guerre,
avec un zele et un soin qui font le plus grand honneur
aux officiers qui concourent, depuis seize annees , a la
confection de ce beau travail , travail d'autant plus im-
portant, que les nivelleniens trigononietriques qui s'y
rattachent , fourniront la hauteur au-dessus de I'Ocean,
de plus de trente mille points dans toute la France.
Mais, j'oserai le dire, vous croyez plus etendue encore
la mission que vous vous etes librement et gratuitement
impose'e.
Ainsi , a vos yeux comme aux notres, il ne faut pas
que la science geographique offre seulement un guide
sur,.au voyageur dans ses explorations, et au general
d'arrnee, dans ses operations strategiques, inais encore
elle doit evaluer, dans I'interet du commerce et de la
propriete, la niesure de la vitesse et de la pente des eaux
dans les bassins de diverses grandeurs , qui forment le
relief de notre sol, et determiner la direction et la na-
ture des divers terrains qui les composent ou les sepa-
rent : etude nationale et feconde , ou viennent prendre
place successivement tous les resultats utiles a I'ouver-
ture des communications, a I'exploitation des mines, a
la rapidite du transport, a la realisation des desseche-
mens, et par consequent a tout ce qui interesse au plus
haut degre la prosperite publique, a tout ce qui est le
plus propie a en vivifier les sources.
C'est dans ce but que la Societe de Geographic a
fonde plusieurs piix annuels qui doivent etre decernes
aux meilieures descriptions physiques d'une partie quel-
conque du territoire frant^ais, aux nivellemens des
1 8.
( ^76)
fleuves et rivieres de France, et enfin aux nivelleniens
barometriques.
Je sais, messieurs, qu'une forte objeclion a ete faite
contre le systenie deja coiicu par vous , et que je viens
de vous rappeler en peu dc mots. Son plus grand in-
convenient est sa grandeur meme ; et limmensite de la
taclie est, dit-on , une invincible difficiilte.
Cast un avis que nous ne saurions partager, et nous
somnies heureux de pouvoir nous appuyer a cet egard
de I'opinion emise en iSaJ par un membre de I'lnslitut
que la Societe deGeograpbie s'bonore de compter dans
son sein.
Sans doute, si la Societe etait reduite a ses seules
ressources, le nombre si restreint de ses membres, et
les limites que sa constitution meme lui impose, ne lui
permettraient que difficilement d'elcver un monument
aussi vaste, et de tracer la carte mineralogique etby-
drographique de la France; mais ce secours dont elle a
besoin, c'est aupres de I'administration qu'elle doit le
chercber.
Deja une fois la Societe de Geograpbie s'est adressee
au ministere de Tinterieur, pour obtenir le concours
des corps savans des ingenieurs des ponts-et-chaussees
et des mines.
Quel resullat, en effet, ne pourrait-on pas esperer,
lorsque les ricbesses isolees et partielles que ces deux
corps possedent viendront se reunir aux precieux mate-
riaux recueillis par les ingenieurs-geograpbes!
C'est la, disons-le, une application grande et belle
de la centralisation ; dej.i si feconde en politique, qu"el!c
le devienne encore pour les arts et pour les sciences!
Le temps est propicc, messieurs, a la reprise des
negociations deja entamees, il y a sept ou buil ans,
( 277 )
avec le niinislere de I'interieur : nous soninies a Tune
de ces epoques ou les conquetes pacifiques succedent a
d'autres conquetes glorieuses sans doute, mais presque
toujours steriles pour I'luimariite , et ou la protection
Royale est assuree a toutes les entreprises nationales.
"Vous le savez, messieurs, la science geographique a
plus d'une fois eprouve les effets de la bien veil lance
edairee du Roi, et nous somnies charge de vous en
transmettre une nouvelle marque. Sa Majeste, en ap-
prenant que la Societe rassemblait les elemens du qua-
trieme volume de ses MenioireSj a desire contribuer a
cet ouvrage si utile et si impatiemment attendu , et lui
consacrer un nouvel encouragement. S. A. R. le due
d'Orleans, qui ne laisse e'chapper aucune occasion de
s'asspcier a tout ce qui peut honorer la France et servir
les interets du pays, a bien voulu, de son c6te,concou-
rir a la nouvelle publication quevos soins ont pre'paree.
Je suis heureux, messieurs, d'avoir du au choix done
vous m'avez honore , de pouvoir vous transmetti'e moi-
meme ce temoignage d'une bienveillance auguste.
Des voix qui vous sont plus connues que la mieniie
vont vous entretenir des travaux de la Societe, et je n'ai
plus qu'a vous exprimer de nouveau toute ma recon-
naissance pour la distinction si flatteuse que vos suf-
frages m'ont accordee.
NOTICE
DES TRAVAUX DE LA SOCIETE DE GEOGRAPHIF,
FT nu PROGRES UES SCIENCES GEOGUAPHIQUES,
PENDANT l'aNNEK i83/|,
PAR M. d'aVEZAC,
Secretaire general de la commission ceiitiale.
Messieurs,
Aujourd'hui s'accomplissent trois annees depuis que
votre gracieuse bienveillance daigna m'appeler a-la-iois
dans le sein de la Societe de geographic et dans celui
de la Goniinission centrale ; ingenieuse a se dissiinulcr
mon insulfisance , votre indulgente amitie ma elu de-
puis uu an pour votre organe habituel et Ihistorien de
vos Iravaux : j'ai besoin de rappeler de si precieuses fa-
veurs, pour m'en faire un litre a un redoublenient d'in-
duigence de votre part, au moment ou je viens remplir
cette tache annuelte, que douze fois deja des l)OUches
plus exercees ont accomplie dcvant vous. (i)
Chaque aiuiee vient accroitre I'importance et I'eten-
due des matieres qui doivent trouver place dans le ca-
dre restreint ou Ics bornes d une lecture publique toi-
(i) i8a2, 1823, i8a4 , Alaltc-Bniii ; iSa5 , M. lloux de Ko-
rhelle; i8a(j, 1827, 1828, 1829, M. de Larcnaudi^re ; iS.lo, i83r,
M. Jouannin; 18 H , M. Alexandre Barbie du Bocage; l833 , M. Co-
r;il)renf.
( 279 )
cent a les reduire ; aiiisi comprimees tie plus en plus sur
\e tableau qu'elles pourraient animer de leur develop-
pement , elles n'ont guere la hiculte de s'y prodiiire
qu'ea une sorte de catalogue enumeratif, avec tons les
desavantages dune accumulation de nonis propies , <le
tuits et d'indications, au milieu desquels I'esprit a peine
a reconnaitre et ponderer le tribut que chaque adepte
vient apporter au tresor c-jnimun des connaissances
geographiques. Pour expot.er et apprecier I'oeuvre de
cbacun , dans un tableau raisonne des progres de la
science , il faudrait ecrire un gros volume; et Tespa-e
in'est limite a I'etendue dun simple discours.
Et ce discours lui-menie n'aura-t-il point une longueur
demesuree s'il veut enregistrer, nieme en une secbe no-
menclature, tous les travaux accomplis ou tentes dans
I'immense domaine des sciences geograpbiques, ou I'as-
tronomie, la pbysique generale, la geologic, les innom-
brables rameaux des sciences naturelles, et tant d'au-
tres branches des connaissances bumaines viennent ,
comme autant de canaux ubeieux, deverser de iecon-
dans principes. Peut-etre le geograpbe a-t-il le droit et
le devoir d'embrasser ainsi, dans la revue generale des
richesses scientifiques qui kii soin acquises , toutes les
verites demontrees, tous les problemes resolus, toutes
les questions .soulevees , dans ce cercle incommensu-
rable de science, dart, d'erudition, dont il est legitime
usager, soit qu'il en tire des metbodes et des formules,
soit qu'il y puise des resultats elabores, pour les coor-
donner dans le tableau densemble de cette terre qu'il a
mission speciale de decrire.
Effrayti de limmensite d'un tel cadre , viendrai-je ,
meconnaissant les imprescriptibles limites de la science
dont voire election me constituc aujourd'hui I'apotre,
( uSo )
tenter de la lestroindreaux mesquines proportions d'une
simple delineation dii sol sillonne par les lignes itine-
raires du voyageur, ou niesure par les triangulations du
geometre? Ah! trop soiivent le vulgaire s'est mcpris sur
la veritable essence de la geographie , en ne conipre-
nant au hilan de ses richesses que les resultats des ope-
rations geodesiques , en proclaniant qu'elle se trouvait
tout entiere dans ces indispensables mais insulfisans
canevas, ou I'art du dessinateur resume en traits divers
le cours des fleuves, le figure des reliefs, le trace des
limites , remplaccnient des A'illes : puissans anxiliaires
sans doute d'etude et de classement, mais froide et in-
complete peinture de ce monde aninie, vivant, pitto-
resque a tant de titres, dont elle ne nous offre que I'i-
nerte squelette. Ah ! si c'est la toiite la geographic ,
qtielle serait done cette autre science a laquelle il f'aii-
drait demander compte des phenonienes de la vie ter-
restre? Quelle est-elle , autre que la geographie, cetto
science qui enregistrera dans un syno{)tiquc tableau la
disposition geognostique des terrains, la direction et la
puissance des courans oceaniques, retablissemenl des
niarees, la loi des variations de la boussole, les civcou-
slances meteorologiques et climateri(jues , I'liabilat des
etres organiques depuis la mousse jusqu'au cedre , de-
puis le zoophyte jusqu'a I'homme; et la distribution des
races hnniaines suivant les demarcations diverses que
tracent cntrc ellcs les caracteres physiques et moraux ,
et les ianfrases, et les crovances reli^ieuses, et les cou-
tumes traditionnelles, et les nationalites politiques, en
co!iservant !a memoire, en recueillant les vestiges des
revolutions qui out change les configurations du sol
ou les limites des popidations. Quelle autre science que
la eoo^raphic s'altribucra done la mission de rassendjier
- ( .8. )
tous ces grands traits dont aucun ne veut etre oublie
dans la Description de la Terre.
Oui, la veritable geographic n'est point renfermee
dans les cartes^ comnie s'est trop hate de le proclanier
iin paradoxe populaire, uniqueiuent applicable an pue-
ril enseignement de nos colleges. Elle est la science des
descriptions terresti-es; et elle enseigne a-la-fois a en re-
cueillir comme a en coordonner les elemens : elle a sa
theorie , ses applications, ses resultats d'ordre et d'im-
portance diverse; elle a aussi s>n histoire, et vos eflorls
eclaires vous assiirent, messieurs, une page dans ses
tastes.
Ce n'est pas devant vous qu il pent etre permis de me-
connaitre le veritable caractere de la ge'ographie, dene-
gliger aucune des branches qui se rattachent a cette
souche feconde.
Mais nous ne devons pas non plus nous laisser en-
trainer aventureusenient dans un ocean sansrivages, et
suivre dans toutes leurs ramifications les sciences con-
nexes dont les applications speciales viennent se grou-
per dans le systeme general des connaissances geogra-
pliiques. Ces applications seules ont droit de nous oc-
cuper : aux sciences mathematiques ii taut se borner a
deinander leurs formulcs, pour la determination des po-
sitions geonomiques , la mesure des dimensions du
globe etde ses parties, la projection graphique des coor-
donnees du spheroide ,• aux sciences physiques, 1 expo-
sition des phenomenes generaux de magnetisme ter-
reslre, de meteorologie , de climatologie; aux sciences
naturelles , la distribution des etres tant inorganiques
qu'organiques a la surface de la terre ; a chaque science,
en un mot, ce qu'elle a d'essentiellement , d'exclusive-
ment geographique.
( .8a )
Telle est I'eteiulue, telle aussi lulimite du champ que
vos efforts tendent a feconder.
Dans cette earriere speciale que votre zele a ouverte,
vous n'etes plus reduits a vos seules forces: de puissans
auxiliaires sent venus ajouter, a Tinlluence de votre im-
pulsion, leurs propres efforts pour I'acceleration des
progres de la Geographie. Vous aviezvivementapplaudi,
messieurs, a la creation des Societes geographiques de
Londres et de Berlin ; ces jeunes soeurs de la Societe pa-
risienne n'ont point doute de I'empressement de leur
ainee a leur ouvrir les bras : des relations de la plus
aimable courtoisie, de la plus affectueuse confraternite,
se sont etablies entre nous et la Royal geographical So-
ci'e/^deLondres, et s'entretiennent par unniutiiel echange
de publications aussi bien que par I'amicale correspon-
dance des deux secretaires. La Geselhchafl fiir Erdkunde
de Berlin a, de son cote, entameavec nous dcsemblables
relations, en nous adressant le premier conipte annuel
dc ses tiavaux, redige par le savant docteur Hitter. Les
journaux de I Inde anglaise nous avaient en outre ap-
pris la formation et les premiers travaux dune nouvelle
Societe geographique fondec a Bombay ; nous avons
lieu d'esperer que des communications directes nous niet-
tront bientot en rapport avec elle.
Independamment de ces associations geograpliiques
conslitueesa notre exempleet dans lesqucUes nous trou-
verons desalliees, des emules peut-etre, mais jamais des
rivales, une autre institution encore, ayant pour objet
lavancenientdune specialit'i geographique, s'est formee
a New-Yoik sous le litre de United slates naval Lyceum ,
et nous avons recu en son nom des ouvertures que
nous avons accueillies avec autant d empressement que
d'interet.
( 283 )
Ces auxiliaires directs que vous avez acquis, ne peii-
vent vous faire oubiier I'aide que deja pretaient a lob-
jet de vos etudes tant d'autres corporations savantes
avec lesquelies vous conservez les plus honoi'ables re-
lations : le Bureau des longitudes, les Depots generaux
de la Guerre et de la Marine ont droit d'etre cites au
premier rang, a raison de la specialite geographique des
publications dont ils nous gratifient; lAcademie impe-
riale des sciences de Saint-Petersbour^ reclame une
mention particuliere pour le nombre de memoires rela-
tifs an nieme objet qui sont contenns dans le precieux
recueil qu'elle nous fait exactement parvenir; 1" Aca-
demic royale des sciences de Berlin vent aussi etre
nommee au meme litre; la Societe royale de Londres,
I'Academie royale dessciencesd'EdimbourgbjlAcademie
omericaine des sciences et arts de Boston , la Societe phi-
losophique de Philadelphie , I'Acadeniic royale des
sciences de Turin , entretiennentpareillement avec nous
des relations dont nous aimons a rappeler la continuite ;
et parmi les societes nationales vouees a la culture des
Sciences et qui nous apportent le tribut de leurs publi-
cations, je dois citer en premiere ligno la Societe de
geologic de Paris, dont les travaux se resolvent en re-
sultats que la geograpbie enregistre au grand livre de ses
acquisitions speciales; apres elle je nommerai encore,
dans la meme categoric, les Academies de Caen , de Di-
jou, de Rouen, les Societes de Lille, de Valenciennes,
de I'Eure, du Jura.
Je ne saurais oubiier non [)lus ces vastes Associations
qui, en Angleterre et en France se reunissent annuelle-
ment en coiigres scientifiques , et qui n'ont point ne-
glige de nous faire parvenir les comptes-rcndus qu'cile.s
ont publics de leurs conferences.
( ^84 )
Different est le programme mais non moindre pour
nous lutilite des Societes Asiatiques etablies a Paris, a
Londrcii, a Calcutta , et avec lesqiiellesnos liaisons sont
si etroites et si affectueuses : elles restreignent I'objet de
leurs etudes au sol de I'Asie et aux ecrits des orientaux
sur lesautres parties du monde; mais n'est-ce point un
champ immense, inepuisahlc, qui procure a la geogra-
phic les plus riches moissons? Aussi leurs Transactions
sont-elles accueillies par vous avec le plus vif interet. A
la publication de ses memoires par volumes in 4°, celle
de Londres vient d'ajouter un journal in-8% dont le
premier cahier nous est recemment arrive, et qui nous
promet un redoublement d'activiie dans nos relations
avec elle. Les Asiatic researches de Calcutta ont, a raison
de leiir etendue et du lieu de leur publication, un degre
particulier d'importance que vous appreciez , et votre
impatience gemit du retard qui vous prive encore du
xvii^ volume, parvenu en Europe depuis une annee,
et qui est compose, en majeure partie, de documens
geographiquesaccompagnes de cartes et de dessins.
A cote de la Societe royale Asiatique de la Grande-
Bretagne et d'Irlande, et comme une succursale de cette
savante compagnie, V Oriental translation committee s'est
constitute avec I'utile mission de repandre la connaissance
des ouvragesorientauxaumoyende versions europeennes
publiees a ses fiais; plusieurs des livres mis en circula-
tion par cette voie ont un interet specialement geogra-
phique, tels que les voyages d'Ebn-Bathouthah, de Ma-
carius, d'Evliya Effendi, d'Ebn-el-Dyn el-Aghouathy ;
les tables de positions de Ssadiq el- Essfahany; I'apercu
tie Corce, Lieou-Khieou el Yeso; I'Histoire de I'enipin;
barman : tous ces livres ont pris place dans noire bi-
bliotheque, grace a I'envoi plein de courtoisie que nous
( .8f5 )
en a fait le Comite : et d'autres nous sont annonces,aux-
quels la geographic nest pas moins interessee.
Les sciences morales et poiitiques , I'histoire, la statis-
tique, les arts agricoles et industriels, offreiit encore
des foyers autour desquels gravitent nn grand nonibre
de Socieles savantes et liiteraires, qui entretiennent avec
nous des relations suivies : Tlnstitut liistoriqiie, recem-
mentfonde a Paris, n'a point oublie le scolastique adage
que la geograpMe estun des yeux de Vhistoire^ et il nous
a con-vies a des rapports de confraternite auxquels nous
avons accede avec plaisir; la Societe royale des anti-
quaires du Nord, a Copenhague, continue de nous
ouvrir les tresors de cette litterature septentrionale ou
la geographic a lant d anciennes conquetes a retrouver,'
la Societe de statistique universelle accuniule des ele-
mens d'une autre nature, destines a s'encadrer aussi dans
!« cercle de nos etudes. Nous recevons encore les publi-
cations de I'Academie de I'industrie, de la Societe d'in-
struction elementaire, des Societes departementales de
I'Aube, deSeine-etOise, de la Seine-Infe'rieure, de Caen,
d'Angouleme, et de la Societe coloniale d'Alger.
II me reste a nonnner enfin une derniere association
parmi celles qui pretent formellement leur aide a notre
oeuyre; je devais reserver ainsi une place distincte a la
Societe des missions evangeliques, dont les communi-
cations nous procurent de si interessantes lumieres sur
les contrees ou s'aventurent, en des explorations har-
dies, tant de courageux apotres de la foi chre'tienne.
Outre cette centralisation spontanee des travaux re-
cueillis ou elabore's dans le sein des corporations di-
verses dont je viens d'esquisser le rapide inventaire, de
nombreuses sources d'information existent pour nous
dans les ecrits et les rapports de toute espece qui forment
( 286 )
la masse no:i nioins importanie des tributs indiviclucls.
Tanlotce sontdcs publications peiiodiques , les unes
exclusivement, les autres partielleinent, quelques-unes
inenie accidentellement fouriiies de fails et de nouvelles
geograpliiques, telles sont, au premier rang, les ^n-
nales des Voyages de nos doctes confreres MM. Eyries,
de Larenaudiere et Rlaprolb, telles les Annales mari-
times et coloniales de M. Bajot, la Bibliot/ieque urtwer-
selle de Geneve^ \e Memorial encfc/opediqiie de MM. Bailly
et Malepeyre; tels encore VInstitut de M. Eugene Ar-
iioult, \Echo da monde savant de M. Boubee,!e Re-
cued polytechnique de M.de Moleon, les Archives dii com-
merce et de r Industrie de M. Heinricbs; puis encore le
Moniteur ottoman^ le Journal de Smyrne, et le IFaqdy
Messryeh imprime au Caire en arabe et en turk.
Tantot ce sont des ecrits et des communications spe-
ciales. Les uns consistent en des oeuvres edites, telles
que nous en ont fait parvenir les nombreux amis de la
science que nous comptons dans tous les pays , et par-
mi lesquels nous avons a citer , pour I'annee qui s'a-
cheve, en Ilussie , le savant amiral de Krusenstern et
le colonel J. 11. Jackson; en Allemagne,MM. de Hum-
boldt, de Canstein, Beer et 3Iaedler; en Danemark,
MM. Rafn, Graah, Falbe; en Belgique , MM. Vander-
Maelen et Meisser; en Angleterre, MM. Ainsworth ,
Alexandre Burnes et Tilstone Beke; en Italic, MM. Graa-
berg de Hemsoe, deBylandt, de Serristori; en Espagne,
M. Firmin Gaballero ; en Portugal , M. Xavier Botellio ;
et chez nous une fouie de donateurs a la tete desquels
nous aimons u citer ie ministre de la Marine, qui con-
tinue de nous faire remettre les livraisons successives
des beaux voyages de la Coquille, de V Astrolabe et de la
Favorite^ publics par ses ordres; et apres lui, MM. An-
( 287 )
sard, Baradere, Barbie da Bocage, Boblaye, Bottin, Fon-
tanier, Jaubert, Klaprotb, de Ladoucelte , Montemom,
Poussin, Towiisend, Virlet, et tant d'autres.
J'aurais a repeter plusieurs de ces noms en vous par-
lant des communications epistolaires que nous devons
a nos coirespondans et a nombie d'autres de nos con-
freres , soit etrangers, soil regnicoles ; j'aime mieux lais-
ser a voire memoire le soin de les suppleer sur cette
nouvelle liste, ou je me bornerai a vous signaler
MM, Raffinesquo, Mease, Tanner, aux Etats-Unis;
Goobelet, au Mexique ; Galindo, Waldeck, Paredes ,
dans I'Amerique centrale; Ramon de ia Sagra et Francis
Lavallee dans lile de Cuba; Adam de Bauve , dans I'A-
merique du sud; Pallegoix, dans le royaume de Siam ;
plus pres de nous, MM. Reumont a Florence, de
Hammer a Vienne, Ritter a Berlin, Molt a Utrecht, de
la Roquettea Elseneur; et en France, MM. Henri Ter-
naux, Desaugiers, Noyer, d'Hombres-Firmas , de la
Pylaie.... Je n'ai plus, belas! a compter, parmi ces colla-
borateurs distingues, M. Guillemin, que la mort a
frappe cette annee dans son considat general de la Ha-
vane, et qui s etait fait remarquer par son zele entre tant
de consuls empresses de joindre leurs efforts a ceux de
la Societe ; ni M. Barthelemy de Lesseps , que la mort a
pareiilement enleve cette annee a son consulat general
deLisbonne, etaux sciences geographiques , anxquelles
il avait consacre les plus belles annees de sa vie, conime
compagnon de voyage du celebre Laperouse.
Enfm, messieurs, les lectures que vous avez enten-
dues dans vos seances semi-mensuelles completent le
catalosue general des travaux individuels qui sont ve-
nus se produire devant vous : MM. Warden, Roux-de-
Rochelle, Daussy, Goraboeuf, Jomard, d'Urville, de
( 288 )
Larenaudiere, Walckenaer, Fontanier, Leprieur, Joiian-
nin, Dubuc, out plus ou moins frequeinment capte
votrfe attention par I'interet des communications orales
qu'ils vous ont faites; moi-niemc j'ai plus dune tois ete
ecoute avec une indulgence que je serais coupable de
lie point rappeler ici.
Apres cette enumeration sonimaire des sources di-
verses qui d'elics - meines affluent a vous, et aux-
quelles vous n'avez point neglige d'ajouter encore
I'utile complement de quelques notables productions
de la presse periodique ctrangere, telles que \ Jsialic
journal^ la Literary gazette et autres senil)lables, ]'ai a
derouler devant vous le rapidc tableau des acquisitions
nouvelles par vous obtenues ou constatees, pendant I'an-
nee qui s'acheve, au profit des sciences geographiques,
dont I'avancement est le constant objet de vos veilles.
La theorie, qui dans les sciences d'observaticn nait
de I'elude comparative d'une masse iniposanle de faits
observes, et qui a pour objet den deduire les regies
generales dont les fails eux-memes ne sont plus consi-
deres que comme des applications, a le grand avantage
de creer, pour l;u determination , le classement et lex-
position de ceux-ci , des methodes qui deviennent un
pre'cieux instrument de progres, en imprimant aux in-
vestigations des neopbytes aussi bien que des adeptes
une marche plus directe vers un but mieux connu, en
leur signalant toutes les dependances du vastc domaine
qu'ils ont a explorer, en Icur servant de guide pour les
parcourir, en leur enseignant jusqu'a un langage special
pour traduire en descriptions cxactes et precises tous
les resultats de leurs observations.
M. Denaix, qui depuis tant d'annees consacre de per-
severans efforts au perf'ectionnement des metliodes
( ^89)
geographiques, s'occnpe aclivement de rediger un texte
expositif de la theorie generale qui lui parait devoir re-
gir desortnais les applications de la science, en meme
temps qu'une descriplion assujetie a ces preceptes; le
monde savant attend avec impatience cette clet indis-
pensable de I'enseignenient rationnel que notre confrere
a si fort a coeur de substituer aux vieilles routines sco-
lastiques, et nous serons les premiers a saUier de nos
applaudissemens I'apparilion dune oeuvre qui doit ac-
coniplir tant de promesses.
Le colonel Jackson nous a adresse, de Saint-Peters-
bourg , divers travanx de theorie geographique dignes
d'attention : je signalerai d'abord, comme le plus impor-
tant, son aide-memoire du voyageur, recueil metho-
dique de questions relatives a la geographic physique et
politique, a Vindustrie et aux beaux-arts, destine aux
gens qui veulent tirer parti de leurs voyages ou acque-
rir la connaissance exacte du pays qu'ils habitent; it
senible que I'auteur ait donne des proportions plus
etendues aux parties successives de son livre, a mesurc
qu'il avancait dans sa redaction ; en sorte que les derniers
chapitres sont bien plus developpes que les premiers ;
I'insuffisance de ceux-ci est meme telle, que Torogra-
phie y est completement oubliee , ainsi que I'indication
des procedes astronomiques et geodesiques ne'cessaires
au voyageur pour determiner sa position, relever sa
route, et projeter le trace des con trees qu'il aura par-
courues; le magnetisme terrestre, la pression atmosphe-
rique, n'y sont pas traites non plus; en un mot les par-
ties les plus essentiellementgeographiques sont negligees.
De pareilles lacunes veulent etre reparees, et il suffitde
les signaler a notre zele confrere pour etre sur qu'elles
seront completement remplies.
19
( 290 )
Nous avons encore de lui un interessant niemoiie sm
les lacs , olfrant un utile developpement de I'article trop
concis consacre a cette matiere dans son autre ouvrjige.
II y faut annexer une note sur le phenomene des Seiches
ou marees lacustres, observees sur le Leman et autres
lacs de la Suisse par M. Vauclier , et sur quelques lacs
des Alpes autrichiennes par notre confrere M. Ami
Boue : M. Jackson a pris des mesures pour reunir des
observations sur le nieme phenomene, quant aux grands
lacs de la Russie , de la Suede , et des Etats-Unis.
Nous devons enfin au memc officier des considerations
pleines d'interetsur la nomenclature ge'ographique et la
disposition materielle des details dans les cartes: depuis
long-temps les esprits positifs desirent I'etablissement
dune nomenclature raisonnee des elemens geographi-
ques; divers essais ont ete faits a cet egard, mais il ne
parait pas qu'ils aient encore pu satisfaire aux capricieu-
ses exigences des oreiiles francaises.
La physique generale du globe occupe les premieres
pages du grand livre que I'etude de la geographic tient
ouvert devant nous. L'illustre Laplace, que nous conip-
tons avec orgueil parmi les fondateurs de notre asso-
ciation, provoquait une attention toute speciale des
adeptes de la science sur la constatation des elemens
qui, sous ce rapport, constituent I'elat de notre planete.
La chaleur terrestre, la meteorologie generale, le ma-
gnelisme, etaient surtout par lui signales a leur inves-
tigation.
M. Arago a traite le premier de ces sujets avec la su-
periorite qui lui est familiere, et dont I'heureux privi-
lege est de se rendre accessible aux esprits vulgaires
sans rien pertlre de son elevation : la JSotice sur Cetat
iherniometjique du globe terrestre , inseree dans I'annuaire
( 291 )
du Bureau des longitudes de i834, est devenue popu-
laire.
Les comptes-rendus des congres annuels del'Associa-
tion britanriique, vous ont offert un rapport digne d'at-
tention, de M. James Forbes, sur les progres recens et
I'etat actuel de la meteorologie. Cette science est le con-
stant objet des soilicitudes de notrezeie confrere M. Mo-
rin, de Saint-Brieuc, qui a etabli sur cet important objet
d etudes une correspondance fortetendue, dans la pen-
see de reunir une masse d'observations assez conside-
rable pour en deduire une tbeorie, au moyen de laquelle
il croit possible d'arriver a la prevision des phenomenes,
pour un point et un instant donnes, conime se prevoient
les pbenomenes astronomiques. On doit au contre-ajni-
ralBardenfleth, de Copenhague, un memoire qui semble
fournir un argument favorable a cette hypothese, en
etablissant que les grandes perturbations aimospheri-
ques appeleesouragans, sont en quelquesorteparquees
en de cerlaines limites determinees. Les observations
meteorologiques comparatives n'eussent-elles point I'im-
mense resuitat qu'en augureM. Morin, leur multiplica-
tion aura du moins I'avantage incontestable de contri-
buer a la formation dun tableau moins incomplet des
moyennes de frequence, d'intensite, de duree des cir-
constances atmospheriques accidentelles ou continues,
pour chaque lieu d'observation; et sous ce point de vue
les instructions adressees par M. Morin a tons ses cor-
respondans, ont ete accueillies par vous, ainsi que les
divers me'moires du nienie auteur, avec un interet
non equivoque. II importe dautant plus de favoriser le
collectement des observations sur lesquelles doit se
fonder la theorie meieorologique, que cette partie de
la pbysique lerreslre est encore dans I'enfance.
( 292 )
II en faut dire autant de la theorie des niarees :
M. Lubbok , a Londres, a demontre que la formule de
Bernouilly est bien loin de s'accorder avec I'observalion ;
et d'autre part on se plaint de manquer d'observations
assez exactes pour verifier la formule de Laplace. On
doit une revue de I'etat actuel de cette partie de la
science, a M. Whewell, qui avait tente, I'annee der-
niere, de dresser une carle approximative des lignes
cotidales ou lignes de synclironisme des marees. Nous
attendons avec une vive' impatience la publication, an-
noncee comme prochaine, du beau travail sur les ma-
rees communique il y a deux ans deja a 1' Academic des
sciences par M. Savary. L'influence des marees sur la
formation des barres a lenibouchure des rivieres a ete
ingenieusement exposee dans un menioire lu a cette
menie Academie par M. W issocq , iiigenieur hydro-
graphe de la marine.
Le magnetisme terrestre a ete I'objet de plusieurs tra-
vaux remarquables : le capitaine de corvette James
Clark Ross, neveu du celebre capitaine de vaisseau Jobn
Ross , et son compagnon de voyage , a fait , dans les
hautes latitudes septentrionales ou ces coumgeux de-
coiwrcurs s'etaient avances , des observations suivies qui
lui ont offert, par 70" 5' 17" N. , et 99° 6' 12" O. de Pa-
ris , une indifference complete de I'aiguille de declinai-
son, et une position verticale de I'aiguille d'inclinaison,
d'ou il a conclu que sa position etait alors au pole nia-
gnetique boreal , ou tout au moins a une tres petite
distance de ce point.
Pendant que le commander James Ross communi-
quait ce resultat a la Societe royale de Londres , notre
confrere M. Dupcrrey, reprenant et completant le ta-
bleau coniparatif diesse par Hansleen , des observations
( ^93)
d'intensite magnetique faites jusqu'alors a la surface du
globe, produisait ici le fruit de ses recherches pour la
determination de I'equateur magnetique : il en resulte
que cet equateurn'est point une ligne d'unite constants
d'intensite , mais la courbe complexe des moindres in-
tensites, identique , a-peu-pres sinon completement , a
celle des plus hautes temperatures, et tranchant brus-
quement, sans se laisser traverser par aucune d'elles, les
lignes isodynamiques de I'un et I'aulre hemisphere, qui
concordent a leur tour avec les Ugnes isothermes. Les
declinaisons magnetiques sont, de leur cote, constam-
ment normales aux courbes isodynamiques , en sorte
qu'une triple relation se trouve etablie entre la tempe-
rature, I'intensite magnetique et la declinaison.
Des observations directes de M. Peltier sont venues
confirmer pleinement la correlation de ces deux der-
niers elemens^ precedemment reconnue d'ailleurs par
M. Saigey.
M. Morlet s'est applique a rechercher les lois du ma-
gnetisme terrestre, en considerant le globe comme une
sphere aimantee a laquelle on appliquerait les principes
generaux de la theorie mathematique du magnetisme :
on se rappelle que M. Biot avait deja donne I equation
des intensites magnetiques terrestres, en fonction de la
latitude.
Ces investigations de la science moderne n'otent rien
de leur interet aux applications empyriques qui nous
ont valu la boussole. L'erudition de M. Klaproth vient
de reconstruire a neuf I'histoire de cet instrument. II
a peu de peine a enlever au douteux Flavio Gioja d'A-
malfi, I'honneur d'une invention qu'un poete francais
(Guyot de Provins) decrivait plus d'un siecle aupara-
vatit; elle avait probablement ete transmise aux Francs
( 294 )
par les Arabes, navigateurs de la mer de Syrie aussi
bien que de la mer des Indes, ou ils avaient pu la rece-
voir, nieme directement, des Chinois. Chez ces derniers,
la boussole etait en usage depuis une antiquite imme-
moriale, au dire de leurs fabuleuses histoires; le Tite-
Live chinois, Sse-ma-Tlisien , en signale reniploi des le
douzieme siecle avant I'ere vulgaire; mais a ne renion-
ter que jusqu'a I'historien lui-meme , c'est encore au
deuxieme siecle avant noire ere qu'il faudra reporter
I'usage constate de la boussole chez les Chinois.
A cet instrument grossier, qui souvent encore est le
seul dont puisse se munir le voyageur, les progres de
I'art ontsuccessivementajoute d'autres instrumens plus
parfaits; mais on ne parcourt pas les contrees incon-
nues ou barbares avec toutes les facilites de transport
que reclament trop souvent, par leur volume et leur
poids , ces machines si utiles, mais si embarrassantes;
nous devons done accueilliravec interet les ameliorations
qui tendent a les rendre plus portatives.Un explorateur,
qui le plus souvent voyage a pied avec peu de monde,
pouirait difficilement consacrer deux hommes a porter,
avec sa monture, une lunette achromatique applicable
aux observations d'ecUpses des satellites de Jupiter,
observations qui lui fourniraient cependant une grande
ressource; un telescope otfrirait moins d'enconibrement,
mais un poids plus considerable, et d'ailleurs la suscep-
tibilite de derangement, et la tlifficulte des reparations
le mettraienl bientot hors de service. Sous le nom de
Telescopes dialytiques , M. PossI , opticien a Vienne, est
arrive a construire,d'apres les indications de M. Littrow,
des lunettes achromatiquesauxquelles une nouvelle dis-
position de la lentille de correction a I'egard de I'objec-
til, perniet de donner des dimensions et un poids
( ^95 )
beaucoup mointlres, tout en ameliorant dune maniere
notable leur degre de precision et de clarte. C'est une
veritable conquete pour les operations pratiques de la
Geodesie.
Mais si le perfectionnement des instriiniens merite
votre attention, elle est due a non moins juste titre a
celui des tables asli'Onomiques destinees a faciliter le
calcul des observations , et vous avez remarque avec un
vif interet les ameliorations notables qu'a eprouvees la
Connaissance des temps dans le nombre et la disposition
des elemens de comparaison rapportes a I'Observatoire
de Paris. Vous avez en menie temps sincerenient ap-
plaudi k la refonte complete, entreprisepar M. Daiissy,
de la table des positions geographiques, oiinul resultat
n'a plus ete admis qu'accompagne de la double indica-
tion de I'observateur et du calculateur, apres un soi-
gneux triage fonde sur les garanties d'exactitude of-
ferles par I'un et I'autre. M. Goraboeuf a contribue a
enricbir cette table en fournissant les resuhats, calcu-
les parlui, des observations de latitude et de longitude
faites dans I'interieur de I'Afrique par le lieutenant de
vaisseau Ernest de Beaufort en iSaS. Dans la Connais-
sance des temps pour iSSj, qui est maintenant sous
presse, la table des positions, encore amelioree, con-
tiendra les determinations qui ont ete obtenues dans
I'Amerique du sud par M. Pentland, et qui etaient de-
ineurees inedit.es jusqu'a ce jour.
Et puisque je vous eutretiens de listes de positions
geonomiques, je ne veux point laisser en oubli Ic cata-
logue de cent soixante-deux determinations pour divers
points de I'empire cliinois,insere au Nouveau journal asia-
lique, et exlrait par M. Neumann, de Munich, de la des-
( 296)
criplion officielle de la Chine, publiee en 1818 a Pekin.
Le Nautical Magazine de Londres f dont les Jinnales
maritimes reproduisent, par les soins de M. Daussy, les
indications les plus utiles), et le Krilischer Jt egweiser
de Berlin, enregistrenl avec un louable empressement
les acquisitions journalieres de la geographic sous cet
important rapport.
Ces positions, quelaslronomiefournit a Ta geographic
descriptive, sout inseparables des denominations indica-
tives des lieux d'observationjet I'exaclitude, qui fail le me-
rite des determinations geonomiques n'estpas moins in-
dispensable dans la fixation de ces denominations locales:
. le secours de la philologie, niais d'une philologie tou te spe-
ciale,est ici necessaire,et par malheur troprarenient invo-
que. La geographic s'est loutefois enrichie celto annee de
quelques travaux particuliers de cette nature; le plus
considerable est celui que M. Firniin Caballero vous a
adresse de Madrid, sur la nomenclature geographique
de I'Espagne; les Transactions do la Societe philosophique
de Philadelphie vous en offrent un second, fort cu-
rieux, pubUe au nom de I'auteur (feu M. John Hecke-
welder), par notre corresporidant M. .Daj)oiiceau, et
ayant pour sujet les nonis geographiques imposes par
les aborigenes Lenni-Lennape et Delaware, aux rivieres,
ruisseaux, et lieux remarquables, dans les etats actuels
de Pensylvanie, New-Jersey, Maryland et Virginie; vous
en avezun troisieme dans un memoiredu savant Aker-
blad sur les noms copies de quelques villes et villages
de I'Egypte, publie dans le Journal de la Societe asia-
lique de Paris par les soins de M. de Sacy. Enfin les
feuilles edites de la nouvelle carte de France redijree au
Depot de la guerre, out fourni a M. Guerard I'occasian
d'enioltrc, sur la nomenclature des lieux qui y sont
*■ ( 297 )
portes J des observations critiques pleines de juslesse et
d'interet; hatons-nous d'ajouter que le Depot de la
guerre les a accueillies et en a profile.
Nous arrivons ainsi, de proche en proche, a une
consideration plus immediate du sol. La geologic , de-
venue I'objet special des travaux de plusieurs societes
savantes,a acquis une sorte de vogue, qui lui menage
sansdoute de rapides progres. Sans denieurer etranger
aux theories aventureuses au moyen desquelles le geo-
logue cherche hativement a s'expliquer des faits encore
incompletement observes, le geographe doit surtout
considerer la partie descri{)tive et fondamentale de cette
science , la geognosie ; les descriptions locales qu'elle
produit se multlplient chaque jour davantage : je n'ai
pas la pretention de vous en laire ici, messieurs, une
enumeration qui a fourni a notre confrere M. Ami
Boue, vice-president de la Societe de Geologic de Pa-
ris, la matiere dun gros volume, auquel je me borne
a vous renvoyer. Les resultats ainsi obtenus se tradui-
sent frequemment en cartes speciales, sur lesquelles un
systeme uniforme d'enluminure, adopte par les geo-
logues francais et anglais, denote la nature des terrains
a decouvert; M. Leopold de Buch a propose, en A.lle-
magne, un nouveau choix des teintes applicables aux
diverses formations, et il a donne une carle geognos-
tique de lAlleniagne enluminee d'apres sa niethode.
M. de Humboldt a, de son cote, adopte, pour la desi-
gnation des roches dans les coupes geognostiques, un
systeme de signes symboliques, qu'il a employes sur
une carte particuliere de la vallee de Mexico.
Avant de quitter le domaine de la geologic, j'ai a
vous signaler la nouvelle Theorie den Volcans du comte
do Bylandt; Ic resume analylique qu'il nous a fait par-
( 298 )
venir de I'ouvrage ou il a consigne le fruit de ses medi-
tations et dune etude assidue sur le terrain, ne peut
que nous (aire desirer les developpemens et les justifi-
cations qu'il nous annonce avoir renfermes dans son
livre.
Quant a la distribution geographique des vegetiiux ,
les Flores speciales oft'rent de veritables chorographies
botaniques , lorsqu'elles notent avec soin I'haljitat des
plantes, et siirtout le degre de frequence des individus
de chaque espece ; la Flore de Senega mbie, de MM. Guil-
lemin, Perrottet et Richard, est une acquisition inte-
ressante sous ce rapport, et le deviendra davantage en-
core par les considerations generates dans lesquelles
M. Guillemin se propose de resumer les fails particu-
liers dont I'ensemble determine le caractere constitutif
de la vegetation du pays.
L'emploi de cartes phytographiques n'a point encore
ete adopte pour ces travaux de detail , pour lesquels
elles seraient si utiles, en meme temps qu'elles en reti-
reraient un notable perfectionnement ; il est vivement a
desirer que Texemple des geologues soil suivi a cet
egard par les botanistes. Quant a des cartes generales
des zones de vegetation du globe, ou de ses grandes
divisions , I'usage en est plus repandu ; et le baron de
Canstein nous a recemment adresse de Berlin, avec un
texte explicatif, une mappemonde partagee en zones et
climats correlatifs a la distribution des plantes les plus
utiles, non-seulement dans le sens des latitudes, mais
encore dans celui des altitudes, au moyen de deux pro-
fils qui encadrent le limbe exterieur des deux hemi-
spheres.
Ce que j'ai dit des Flores s'applique aux Faunes lo-
cales; peu de travaux generaux onl ('le f.iits sur la dis-
( 299 )
tribution geographique des ariimaux a la surface du
globe : ils semblent en effet appartenir moins etroite-
ment au sol qu'ils parcourent , et peut-etre d'ailleurs la
connaissance plus generalement repandue de leur ha-
bitat a-t-elle moins fait sentir le besoin den dresser
des tableaux mneraoniques : sous ce dernier rapport ,
rentomoloirie , ou les genres sent si nond3reux, fait ex-
ception : aussi s'est-on occupe davantage de leur classe-
ment geographique, et divers memoires ont ete publics
en Angleterre et en AUemagne, sur ce sujet. On an-
nonce toutefois un travail d'ensemble du docteur
Swainson , sur la geograpliie des animaux.
Apres avoir ainsi passe en revue les eleniens divers
que fournissent a la geographic les differentes sciences
qui sc lient a elle d'une maniere si intime , ce sont ses
oeuvres speciales dont nousallons feuilleter, en courant,
le catalogue varie.
Parmi les trailes generaux, celui de Malte-Brun, revu
par notre confrere M. Huot, a livre en dernier lieu le
tome X contenant I'Afrique; et M. Ritter a donne un
troisienie volume de son Erdkunde, completant la des-
cription de I'Asie orientale. La renommee de ces deux
beaux ouvrages est europeenne, et ma faible voix n'y
pent rien ajouter ; qu'il me soil perniis du moins d'e-
mettre le voeu qu'une version fidele nationalise chez
nous I'ceuvre du geographe allemand.
D'autres noms plus modestes viennent s'inscrire apres
ces grandes celebrites ; M. Noellat de Dijon , M. Ber-
thet, professeur a Saint-Dizier, vous ont adresse des
traites de geographic rediges dans un louable but d'a-
nielioration dans I'cnseignement vulgaire.
Avec les traites generaux , les atlas generaux : une
uouvelle edition de celui' de MM. Lapie pere et fils
( 3oo )
se prepare en ce moment pour suppleer a I'epuiseinent
lie la premiere; a cote de ce grand el beau recueil , il
vous en a ete presente un de dimensions et d'aspect
bien modestes , public par M. Ambroise Tardieu ; ce
cahier si mince a pourtant un degre d'importance qui
lui merite voire faveur : c'est qu'il est destine a popula-
riser la connaissance des configurations gcograj)biques
avouees par la science, en se produisant a un prix d'une
modicite presque incroyable.
M. Benoit , ingenieur-mecanicien a Troyes , a cher-
cbe , a son four , a rendre I'usage des globes de grandes
dimensions accessibles aux moindres etablissemens d'in-
slruclion elementaire, et il y a reussi en construisant ,
a Ires bon marche , en papier- parcbemin , des globes
aeropbyses de quatre pieds de diametre : il est a regret-
ter qu il n'y ait pas applique de meilieures delineations.
De son cote, la presse n'avait a aucune epoque de-
ploye tant d'aclivite a repandre des publications mises
par leur bas prix a la portee des lecteurs de toutes les
classes, el redigees neanmoins avec un soin reserve
d'ordinaire a des ouvrages moins accessibles; c'est un
grand raouvement de diffusion de lumieres dont I'An-
gleterre nous a donne I'exemple el que nous suivons
avec ardeur.
La geograpbie ne pouvait manquer d'obtenir une place
distinguee dans de telles entreprises : ellea, en Angle-
terre, une encyclopedic speciale, redigee par M. Hugb
Murray et les professeurs Wallace, Jameson, Hooker
et Swainson : de tels noms suffisent a la fortune du iivre.
En France la geographic a inspire Y Unluers pittoresque ,
oil MM. Cbanipollion, Delamalle, de Larenaudiere,
Bory deSaint-Viticent, Jouannin, Golbery, Rozet, comp-
tcnt parmi les n-dacteurs ; le Fo) ni^'c pittorcsquc auloitr
( 3oi )
du monde n'a pas besoin d'autre garantie que le nom
de M. D'Urville.
La geographic n'est pas I'objet exclusif , niais elle est
una des parties les plus developpees de ^ Encyclopedie
piUoresque , dont le premier volume, termine , vient de
vous ^tre adresse par MM. Leroux et Reynaud , qui en
dirigent la publicalion.
C'est presque dans la nieme classe, tant le prix en est
borne, qu'il y aurait lieu de comprendre la Bibliotheque
uniK>erselle des voyages^ publiee par M. Albert-Monte-
mont avec une rapidite peu commune, une incroyable
activite ; vingt-et-un volumes ont successivement fait
passer sous vos yeux les relations abregees des voyages
autour du monde, jusqu aux plus recentes circumnavi-
gations \ et une seconde serie , consacree a I'Afrique , a
deja mis en vos mains cinq autres volumes.
A cote de cette rapide emission de livraisons succes-
sives, nous avons au contraire a deplorer Tinterrupiion
prolongee de la collection a laquelle M. W alckenaer
donnait son nom et ses soins. Ayons espoir que ce mo-
nument eleve a la geographic ne demeurera pas ina-
cheve , et que notre savant confrere sera appele a en
poser les dernieres assises comme il en a pose les pre-
mieres.
De I'histoire des voyages a la geographic historique,
il n'y a qu'un pas : celle-ci n'est-elle point en effet le
resume des voyages et des relations descriptives des an-
ciens temps "^ M. Roux de Rochelle a souvent caple
votre attention par des lectures ayant pour sujet la
geographic ancienne de I'Occidenl. M. Ansart vous a
presente , de concert avec M. Lebas, son collaborateur,
les premieres livraisons dun atlas historique de I'Eu-
rope , traduit de celui de Rruse, mais revise par les edi-
( 302 )
teiirs francaisj lout en accordant a ce travail la juste
estime qu'il nic-rite, vous n'avez point mis en ouhli ce-
liii que M. Denaix a deja public pour le memo objet.
M. Alexandre Barbie du Bocage , qu'une sante gra-
vement alteree eloigne encore une fois de nos reunions
et de sa chaire de geograpliie a la Sorboiine , nous a
donne uu dictionnaire peu voluniineux, mais clair et
substantiel , de la geographie biblique telle qu'elle est
generalement admise ; M. Ch. Tilstone Beke en a entre-
pris au contraire, dans les Origines bibliccB dont il nous
a adresse le premier volume , une refonte complete ba-
see sur I'unique consideration du texte sacre : aussi son
livre est-il empreint dun caractere de nouveaute fort
remarquable, dont le principe fondamental est que les
peuples denombres au x' chapitre de la Genese, n'y
sunt point genealogiquement disposes d'apres I'ordre de
primogeniture , mais qu'ils y sont geographiquement
ranges dans leur ordre de contiguite successive d'est en
ouest; principe fecond en consequences inattendues,
qui changent completement la physionomie de la map-
pemonde mosaique.
Je ne veux pas quitter le champ de la geographie an-
cienne sans vous parler du grand travail que notre con-
frere, le colonel Lapie , prepare depuis plus de six an-
nees , et qui a pour objet la construction graphique des
periples et itineraires que nous ont laisses les anciens.
Une grande carte en neuf feuilles, comprenant I'empire
romain avec I'Asie jusqu'au Gauge, accompagnera une
uouvelle edition de ces routiers, dont 1 impression sa-
cheve sous les yeux deMM. de Fortia, Hase et Guerard ;
M. Lapie espere que le tout pourra vous etre presente
dans un delai peu eloigne.
Une publication qui doit exciter votre interet au
( 3o3 )
nieme litre, est celle qua entreprise , en AUcniagne,
M. Sickler , dun Corpus geographorum grcecorum et la-
tiiioruin qui supersuiit omnium.
Revenonsmaintenantal'epoqueactuelle, et voyageant
a notre tour de continent en continent, recueillons, dans
notre marche hative, les lumieres nouvelles que la geo-
graphic a obtenues cette annee sur chacun d'eux'.
lis sont respectivement constitues dans des conditions
tellement individuelles et mutuelloment exclusives, que
I'interet qui s'attache de leur exploration, affecte, pour
chacun, un caractere tout particulier.
Notre Europe, jeune et forte de civilisation, se con-
nait trop bien elle-meme pour vouloir etre etudiee a la
legere; tout ce qui, loin d'elle, pourrait passer pour
etude approfondie du sol et de ses habitans, ne serait
chez ielle que mediocre et superficielle etude; ce n'est
point a une geodesic expeditive qu'elle pent demander
le relevement de ses territoires, ni a I'hydrographie sous
voiles le trace de ses cotes, ni a des evaluations approxi-
malives la statistique de ses forces, de ses besoins, de
ses ressources: ce sont des operations rigoureuses, (\es
travaux consciencieux , qu'elle exige, et des-lors chaqtie
branche d'etude s'individualise pour s'attacher a une
nionographie exclusive : c'est ainsi que s'executent des
cartes topographiques telles que la carte de France du
Depot de la guerre, des cartes hydrographiques telles
que les cotes de Fi'ance du Depot de la marine, et des
milliers de statistiques speciales par departemens terri-
toriaux ou par matieres. II est evidemment impossible
d'entrer ici dans la nioindre enumeration de tant de pu-
blications accumulees, et je ne tenterai nieme pas de
vous faire la recapitulation de ceiles qui sont venues
prendre place dans vos collections : qu'il me suffise de
( -^04 )
rappeler que It; Depot de la guerre a, par uiie receiUe
emission, porte a vingt-quatre le nombie cles feuilles
edites de la carte de France; qu'il a publie la carte de
Moree due aux travaux geodesiqucs de nos ingenieurs
geographes MM. Peytier, Boblaye et Servier, dont
I'ocuvre se poursuit, pour le reste de la Grece, sous les
ordresdu premier ilentreeux, notre colleguc M. Peytier;
et que le Depot de la marine, qui a termine nos cotes
occidentales, s'occupe maintenant de relever les cutes
de la Manche, dont la triangulation est conOee a M. Begat.
Parmi les statisliques departementales , je n'excepterai
d'une pretermission absolue que le livre de M. de La-
doucette sur les Hautes Alpes, que vous avez juge d'une
maniere si favorable.
Quant a I'etianger, je ne saurais me dispenser d'une
mention honorable en faveur de M. Vandermaelen, a
raison des nouveaux volumes qu'il nous a envoyes de
son Dictionnaire geoginphiqiie de la Belgique et qui com-
prennent les provinces de Hainaut, d'Anvers et de la
Flandre orientale, sans parler de divers autres documens
stalistiques pleins d'interet; le comte Serristori nous a
adresse de Florence nnSaggio statistico delV Italia^ au-
quel il a successivement ajoute deux supplemens; et
M. Graaberg de Hemsoe nous a fait tout recemment
parvenir de son cote un ecrit DeW atlunle condizioiic
dellascienza statistica in Italia^ e di alciine opere statisti-
che noi>e//amente pubh/icaie; i'aurais a indiquer encore di-
vers ouvrages sur les etats aulrichiens qui nous ont ete
transmis de Leipzig par M Gross-Hoffinger, un tableau
statistique de la monarchic russe que M. Schnilzler a
mis sous presse a Paris, un nou\ cau Gazetteer of Eng/a/id
and IValesi^iu vierit de parattrca Londies; mais le temps
me m;inqiie pour m abandonncr a unc telle enumeration
( 3o5 )
Alger est a nous, et a nos portes : c'est done par la
que je dois naturellenient commencor mon tour d'Atri-
<£ue : MM. Berard et Dortet de Tessan ont acheve cette
annee le relevenient complet des cotes de la Regence,
et s'occupent de rediger les resultats de leurs travaux.
Nos officiers d'etat-major, auxquels nous devons le plan
de la ville et des environs d'Alger, ont fait quelquos
nouvelles explorations dans la plaine de Metygjah, et
prennent soin de recueillir des renseigneniens sur I'in-
terieur; M. Tatareau avait dresse, pendant son sejour a
Oran, une carte de cette province, qui nous donne la
mesure de ce qu'on peut attcndrc du zele de cet officier
pourl'eclaircissenientde la geographie,si obscure encore,
de la province d'Alger, ou il est maintenant employe.
MM. Levret et de Maligny sont reste's dans celle d'Oi-an,
que nos rapports pacifiques avec Abd-el-Qader leur
permettent de sillonner de leurs propres lignes de route.
Dans celle de Bone, MM. Delcambe, Franconniere et de
Presbois etendent leurs explorations autour du chef-
lieu , et ont dernierement leve le plan de Bougie et de
ses environs^ les renseigneniens qu'ils ont recueillis sur
les routes de I'interieur n'ont point jusqu'ici ete pousses
au-dela de Constantine. C'est a Taide des docuniens
envoyes par lous ces officiers, et qui m'ont ete liberale-
ment communiques par le Depot de la guerre, que j'ai
tente d'esquisser un nouveau canevas geodesique d'une
partie de I'Afrique septentrionale, en y puisant les ele-
mens des corrections applicables au trace de Sllav^^
Dans cette revision critique se trouvent compris, d'une
part I'etat de Tunis, pour lequel M. de Faibe nous a
offert son beau travail sur Carthage et !a contree vei-
sine, d'autre part I'empire de Marok, sur lequel notre
zele correspondant M. Graaberg de Hemsoe a tout re-
20
( 3o6 )
ceniment piihlie iin Specchio historico e statistico plein
dinteret, et acconipagne d'une carte d'une execution
soignee, ou 1 on peut regretter seulement que I'erudi-
tion de I'auteur n ait pas toujours etc doniptee par une
critique plus rigoureuse.
Sur la cote occidentale, la Societe anierioaine de colo-
nisation de I'etat de Maryland a jete, an cap des Palmes,
les fondemens d'un nouvel etablissement analogue a ce-
lui de Liberia : c'est encore une porte ouverte a I'explo-
ratlon geographique d'une contree dont on connait a
peine une etroite lisiere lelong du rivage.
L'expedition du Niger, qui faisait concevoir line si
flatteuse esperance de voir enfin etablie une grande
route, conduisant jusque dans le coeur de cette com-
pacte Afrique, si obstinement fermee a notre avide cu-
riosite ; cetle expedition, grosse de tant d'avenir, n'a pu
braver a-la-fois I'ardeur dun climat inexorable et la
perfidie de peuples inbospitaliers : vainqueur du climat
qui avail moissonne ses compagnons, Richard Lander est
tombe sous les coups des aborigenes. Mais son voyage
nest pas demeure sans profit pour la science, bien que
les resultats n'en aient pas ete publies : Lander s'etait
avancti dans son bateau de fer, avec le lieutenant Wil-
liam Allen jusqu'a Rabbah; ils etaient entres aussi dans
le Tchaddah, et I'avaient remonte jusqu'a une distance
de i5o milles,par un lit frequeinment obstrue d'iles ;
les assertions precises et repetees des indigenes ne lais-
saient aucun doute sur sa communication avec le lac
Tchad, et de ces excursions, le lieutenant Allen a rap-
porie des observations qui sans doute recevront une
publicite procbaine. Au surplus, la voie est ouverte, et
1 inleret mercantile ne reuoncera pas a la tenter de nou-
veau; pendant que des contrarietes deplus d'un genre
( ^07 )
preludaient a la fatale issue cie 1 expedition organisee
par la compagnie de Liverpool , une autre compagnie
se formait a Glasgow, dans le but d'organiser uue se-
conde expedition ; et depuis la mort de Lander, le co-
lonel Nicholls , parti de Fernan-do-Po , est entre dans le
Niger, afin de s'enquerir parlui-meme des circonstances
et des causes de la niort du voyageur, et d'etablir sur des
bases solides des relations commerciales avec les na-
turels.
Dans I'Afrique australe, les explorations des niission-
naires, des. naturalistes, des marchands, etendent de
plus en plus nos connaissances sur les regions inte-
rieures ; les missionnaires francais Arbousset et Cazalis
ont recemment penetre chez les Bassoutos, peuplade
jusqu'alors ignoree,entre les Korannas et les Zoulas; et
le missionnaire Leniue vient de faire parvenir en
France une carte, qui sera prochainement publiee, des
pays qu'il a lui-meme visiles, ou sur lesquels il a obtenu
des renseignemens positifs, tant de la part de ses com-
pagnons d'apostolat, que des marchands Hume et Mel-
lon, qui ont parcouru une ligne assez avance'e au nord-
est. Une expedition scientifique, dirigee par M. Smithy
estpartie du Gap pour etiectuer une reconnaissance plus
exacle des memes pays.
La Sociele geographique de Londres a concu le pro-
jet d'une exploration qui, preliant son point de depart
h la baie Dalagoa, s'avancerait a I'ouest pnur iier a la
cote les relevcmens faits par les missionnaires, et se
porterait ensuite vers le Zambeze, peut-etre jusqu'a ses
sources, pour redescendre ensuite aux etablissemens
portugais; c'est le capitaine Alexander, deja connu par
de nombreux voyages, qui est charge deconduire cette
nouvelle expedition. Uu interessant niemoire de
20.
( 3o8)
M. Cooley, sur les tribus kafres qui hahilent les liautes
lerres aiix environs dc la baie Dalagoa , a ele insere
par extrait dans \e journal de la nienie Societe, qui a pa-
reillement public une breve esquisse de Monbase et de
la coiitree environnante, par le lieutenant de vaisseau
Emery. M. Xavier Botelbo nous a envoyc; de Lisbonne
un resume destine a servir d'introducliori a un me-
moire statisiique sur les domaines portugais do I'Afrique
orienlale : cet apercu fait desirer le reste de I'Duvrage.
On ne peut qu'attendre, avec une impatience propor-
tionnee au merite reconnu du voyageur, la relation du
sejonr que M. Edouard Riippel a fait en dernier lieu en
Abyssinie. Le niissionnaire Gobat a recenmient public le
journal de sa residence de trois annees dans ce pays.
Quant au bassin du Bahhr Abyadli, I'exploration
qu'en avait projetee M. Adolphe Linant, se trouve encore
ajournee a raison des fonclions qui lui sont departies par
le pacba d'Egypte pour etablir un barrage sur le Nil.
Nous n'avons aucune nouvellc des tentatives de
M. Henri Wilford , qui avait resolu de penetrer parcette
voie dans I'Afrique centiale.
L'Asie , plus accessible et moins nieurtrjere que I'Afri-
que, excite nioinsvivement I'ardeur des de'couvertesjaussi
n'ai-je point a vous donner ici la nouvelle de grandes
explorations effectuees ou en cours d'execulion dans I'in-
terieur de eel immense continent; car on ne saurait ran-
ger dans cette categoric la reconnaissance preparatoire de
I'Euphrate, effectuee par M. Chesney, et qui va etre re-
conimcncee par le meme officier, en compagnie de notre
correspondant M. Ainswortb; et nous ne connaissons
point les resultats, d'une haute importance sans doute,
que nous rapporte de Syrie notre collegue M. Callier,
apres quatre annees d investigations. Je n'ai done pro-
( 3o9 )
prement a vous signaler que qiielques publications, sur
lesquelles la physionomie particuliere des populations
asiatiques jette un tout autre genre d'interet que celui
qui s'attaclie aux relations des aventureuses expeditions
de decouvertes. Nous devons a M. Eyries une traduction
du voyage de Burckliardt en Arabie; nous lui devrons
bientot celle du beau voyage de M. Alexandre Burnes en
Boukharie, dont les i-esuitats vous t'urent annonces
I'annee derniere par nion predecesseur, at qui avalu a
son auteur le prix royal annuel de la Societe geagra-
phique de Londres.
La publicite donnee a la correspondance privee de
Victor Jacqueinont nous a mis a porteede niieux appre-
cier le mei-ite si original et si vrai du voyageur fran-
cais; les papiers et colleciions qu'il a laissees constituent
sans doute les niateriaux dun niagnifique ouvrage;
niais ces niatej-iaux ne sont point encore parvenus en
France, et peut-etre s'ecoulera-t-il long-temps avant
que nous puissions jouir du fruit de ses recherches.
Je ne veux point ajouter a ces indications une vaine
liste des nombreuses publications de voyages en Asie
dont les presses anglaises alimentent le public de Lon-
dres; ce n'est pas qu'elles manquent d'interet, soit qu'a-
vec John Madox nous eussions a parcourir la Pales-
tine et la Syrie, avec Arundell TAsie-Mineure , avec
Smith et Dwight I'Armenie, avec sir Henry Brydges la
Perse, ou qu'avec le lieutenant ConoUy nous allassions
par terred'Europe dans I'lnde , a travers la Perse et I'Af-
ghanistan; mais j'occupe votre attention depuis trop
long-temps pour qu'il me soil permis de la fatiguer en-
core par une recapitulation trop scrupuleuse de ces
tours qui n'ajoutent guere aux (!onquetes de la science.
Je ne saurais toutetois ometlre quelques documens
( :^io )
speciaux relatils aux logions les nioiiis connues de iu
Haute-Asie; tels que la Dreue nntizia del ivi^no del
Thibet d\i here Orazio della Penna de Billi , remontant a
J'arniee 1730, et qui a eie tout receminent publiee
dans le Nouveau journal asialique; la relation dun
voyage du Nepal auTubet, par le kascluiiyrotubetain
Amyr, inseree par M. Hodgson au xvii*^ volume des Asia-
tic researches ; et I'itineraire de Si-Outhaia a XaiNat,
qui nous a ete envoye deSiam par M. Pallegoix.
Si de I'Asie je passe dans I'Austialie , je ne trouve
guere non plus rien qui nierite une mention speciale,
depuis les explorations du capitaine Sturt,qui vous ont
ete signalees, des I'annee derniere, d'apres la notice de
M. Allan Cunningham, et dent la relation originale a ete
publiee ulterieurement; je me contenterai dindiquer le
livre nouvellement public a Londres par M. Lang, et
contenant un apercu de I'origine et des migrations dela
nation polynesienne.
lei viennent se classer les graudes navigations de
Fanning, de Chromtscbenko et de Henri Forster, qu'il
me suffit de vous nommer.
J'aborde I'Amerique du sud , et la du moins je ren-
contre les traces non encore dellorees dun voyage digne
de tout voire interet, et dont les resultats vont doter
la science de riches et solides conquetes : parti de
Fran<;e au milieu de I'annee iSaf), M. d'Orbigny est
alle passer huit annees a etudier, comme naturaliste
voyageur, I'Amerique meridionale, designee a ses inves-
tigations par les professeurs du Museum; ses recherches
et ses travaux se renferment dans deux cercles distincts
d'exploration : I'un comprenant, avec I'Uruguay, les
provinces argentines de Entre-Rios, (jorrientes et Bue-
nos-Ayres, et les pampas de la Patagouie conligues a
( 3ii )
celles cle Buenos-Ayres ; 1 autre conespondaut a la re-
publiqiie de Bolivia. Dans la piemiere de ces deux re-
gions, laclif voyageur avaitsoigneiisement rccueilli tons
leseleuieiis d'une description complete sous le rapport
des sciences naturejies, de I'etlinographie , de la lin-
guistique; le trace geodesique etait seul incomplet;
niais M. d'Orbigny a ete aide en cette partie par I'amitie
de M. Parchappe, qu'il rencontra a Corrientes , et qui
lui a donne ses propres relevemens. Sur le second
theatre de ses investigations , M. d'Orbigny s'est exclu-
sivement suffi a lui-meme, et sans parler desmateriaux
de toute espece qu'il a coUectes avec discernement , il
rapporte des leves itineraires assez nombreux pour
former un reseau geodesique a niailles serrees, auquel
les observations de M. Pentland viennent heureuse-
ment fournir des reperes ; en sorte; que meme a ne tenir
compte que de son deuxieme voyage, M. d'Orbigny
aura dote la geographic, pour uue region non nioins
etendue que I'Espagne, de tous les elemens dune carte
topographique non nioins satistaisante que celle que
par des moyens semblables le celebre Lopez a dressee
de lEspagne elle-meme. Bien plus, une sorte d'instincl
geographique senible avoir constamment preside a la
notation de toutes les observations qu'il a faites dans le
domaine des sciences connexes, de manierea ce qu'elles
puissent, en quelque sorte, se traduire en cartes geo-
gnostiques, phytographiques , zoologiques, ethnogra-
phiques. Ce n'est pas sans quelque orgueil, messieurs,
que vous enregistrez dans vos souvenirs les litres geo-
graphiques de M. d'Orbigny; si laFrance est peu feconde
en publications de voyages; du nioins les voyageurs
qu'elle produit peuvent-Ils etre inscrits parnii ceux du
premier ordre.
( ^'2 )
C'est encore dans lAmeiique du sud que M. Le-
prieur , et M. Adam de Bauve, son precurseur puis
son conipagnon , ont fait des tenlalives d'exploration
qui vous ont doiine Tespoir d obtenir , dune nouvelle
expedition de reconnaissance, un trace general des par-
ties inconnues de la Guiane francaise: vous avez re-
grelte de ne pouvoir niettre a profit, dans le meme but,
les offres de service qui vous sont venues jusque du
fond de la Hongrie, de la part de M. Jablonszki , dOp-
pova. M. Hillliouse, deDenierary, a, de son cote, re-
connu, dans une assez grande etendue , le cours du
Masarouni , affluent principal de TEssequibo ; la So-
ciete geographique de Loudres a resolu d'encourager
une exploration de la Guiane britannique, assez eten-
due pour en rattacher les determinations, d'une part a
celles de M. de Humboldt, de I'autre a celles de nos
voyageurs.
Je ne saurais oublier ici les belles cartes de I'Ame-
rique meridionale et du Mexique, oeuvres posthumes
de notre ancien collegue Brue, receniment pubiiees par
sa veuve.
Pour lAme'rique du nord, outre les lettres de Henri
Tudor, sur le Mexique, les Etats-Unis, et les colonies
anglaises voisines, j'aurais a vous rappeler quelques do-
cumens particuliers , tels que I'itineraire suivi par une
caravanne qui est allee du Mexique dans la Haute-Cali-
fornie, envoye, de Mexico par M. Cochelet ; la notice
sur !es niouts Cotocton , envcyee de Philadelphie par
M. Raflinesque; et d'autres pieces analogues. Mais un
interet bien plus pr»;ssant nous entraine aux terres arc-
tiques : la, pendant trois annees consecutives, notre at-
teiitioJi, uotre sollicitude, persista , pleinc encore d'es-
perancc, a errer sur les traces disparnes du capitaiue
( ^^^ )
Ross, dont le retour est venu cornbler tant de voeux
f'ervens. Ah ! de nouvelles soUicitudes , non nioins vi-
ves, non moins perseverantes , s'egarent aussi sur les
traces perdues de la Lilloise , qui apres etre allee im-
poser , au sud du cap Barclay, les nonis francais de
Breaute, de Rigny, de Daussy, de Pouyer, a qiiatre lies
nouvelles de la cote orientale du Greenland, parait
s'etre obstinee a poursuivre de plus imporlantes decou-
vertes; et les voeux de retour qui appelaient Ross se
tournent aujourd hui vers Blosseville, retenu peut-etre
conime lui dans les glaces , et qui nous reviendra sans
doute non inoins heureuseinent : en vain une premiere
tentative de recherches a echoue ; que I'espoir ne faiblisse
point, que les tentatives se renouvellent plus ingenieu-
sement combinees! La perseverante Angleterre expe-
diait Back trois ans encore apres la disparition de Ross :
resterions-nous en arriere dun si louable exeniple?
Le nom de Ross vient se leplacer sous nia plume
pour etre proclame de nouveau dans ce rappel accou-
tume des prix que vous avez decernes dans I'annee;
c'est aux rudes travaux, fructueux pour la science, qu'il
a acconiplis dans celte memorable expedition, que vous
avez confere votregrande medailleannuellej vous avez
en nieme temps deeerne une mention tres honorable
au capitaine Biscoe, dont les navigations aux terres
australes vous avaientsi vivement interesses. Vous n'a-
vez eu a couronner quun troisieme laureat, M. Jodot,
qui a recu, pour son nivellement de la Vesle, une des
medailles specialement destinees a encourager les tra-
vaux de ce genre.
Le programme du nouveau concours que vous avez
ouvert n'ol'fre pas moins de vingt prix , dune valeur
tolale d'environ dix-huil niille francs : pcu dc chitTres
( ^x4 )
suttisent ainsi a resuiner les encouragement non)l)reux
cjue vous etes henreux de distiibuer dans I'inlereldes
progres geograpliiques; vos efforts n'ont pas ete vains
jusqua ce jour, et leur etficacite passee vous garanlit
leur succes a venir.
Ces prix ne sontpas le seul stimulant dont vous ilat-
tez la noble ambition des concurrens que vous appelez :
une place est reservee, dans le recueil de vos IMemoiri-s,
aux travaux qui sont juges dignes de cette nouvelle dis-
tinction : c'est ainsi qu'un volume toutentier a ete con-
sacre a I'orographie de I'Europe de M. Bruguiere, et
que d'autres menioires couronnes sont destines a une
insertion prochaine.
Quelques difficultes avaient entrave I'impression si-
niultanee des deux volumes qui sont en preparation, et
dont I'un contiendra I'oeuvre geographique de I'Edrysy,
I'autre une collection de miscellanees. L'impression de
I'Edrysy a ete recommencee a rimpiimerie royale, ou
elle se poursuit avec regularite , et vous avez sous les
yeux des epreuves du juc simile des trois premieres
cartes ; M. Amedee Jaubert vient de son cote d'achever
la traduction du troisiemeclimat. Le volume ouvertaux
miscellanees ne contenait naguere encore qu'une seule
piece, imprimee depuisplusieurs annees : c'est le voyage
du frcre Jourdain de Severac dans quelques unes des con-
trees visitces par Marco Polo; vous y avez ajoute cette
annee la relation originate dun voyage fait, en 1774? ^
rile de Taiti, par le commandant dun paquebot qui
naviguait de conserve avecla fregate VAguila^ sous les
ordres de Domingo de Jjonechea , le decouvreur de
cette lie; a la suite de cette relation ont ete imprimes
les vocabulaires recueillis en Egyptc par M. Koenig;
ces pieces composent le demi-volunie dont un premier
( 3i5 )
exempkiiie est en ce moment devant vous. Laulie
demi-volume sera consacre a une edition , soigneuse-
mentcollationnee sur les nianusciils, de la relation ori-
ginale du voyage de Rubruquis, en Tartaric , par ordre
de saint Louis; des traductions anglaises et francaises
en existaient depuis long-temps; le texte original, reste
inedit, en a ete retrouve, par M. Francisque Michel
dans les bibliotheques de Londres et de Cambridge; une
copieexacte, preparee par ses soins et ceux de M. Tho-
mas Wright, nous est recemment parvenue; limpies-
sion en va etre immediatement commencee,etle volume
entier s jra probablement termine dans un bref delai.
II me reste a parler d'une autre publication , celle de
notre 15ulletin , dont I'apparition periodique vient
chaque mois raffermir le lien de confraternite qui unit
tons les membres de notre association. Quelques efforts
ont ete tentes pour en ameliorer la composition et le
rendre plus substantiel; une premiere serie de volumes
a ete close avec le tome vingtieme, et une nouvelle se-
rie s'est ouverte avec Tannee courante; les cartes qui y
sont jointes me donnent occasion de vous rappeler le
desinteressement avec lequel M. Ambroise Tardieu et
M. Selves ont mis a la disposition delaSociete leurs ate-
liers de gravure et de lithographic. Le vceu constant du
comite auquel est remis le soin de publier ces cahiers
mensuels a ete de leur procurer le plus haut degre pos-
sible d interet geographique; mais il ne sauraitse flatter
d'etre encore parvenu a remplir toutes les conditions de
perfectionnement qu'il est dans notre desir de lui voir
atteindre.
II m'est enfin permis de clore ici le compte-rendu
que je vous devais de nos travaux del'annee; trop heu-
reux, niebsiiuirs, si dans racconiplissenient dece devoir,
( ;^'(^' )
une lecture si loiigue, et poiirtaiU si avare de develop-
pemens, n'a point fatigue lattention que votre bien-
veillance daignait ni'accoider,
CONSIDERATIONS NOUVELLES
SLR LES ETUDES GEOGRAPHIQUJES ET SCR I.EXl'RESSIOiS
DES CARTES,
Par M. lu lieutenant-colonel Dejnaix.
Messieurs ,
Vous m'avez fait Ihonneur de me nonimer votre
secretaire. Cette faveur a pour moi d'autant plus de
prix. que je la dois moins a la part que j'ai prise a
vos travaux qua mes publications , pulsqu'en nie rete-
nant dans le cercle etroit des connaissances eleiuen-
taires du domaine de I'enseignement, elles ne me per-
mettent pas de vous suivre dans les hautes directions
sur lesquelles se porte votre attention.
Par ce fait, par I'adliesion que vous avez don nee aux
jugeniens favorables emis sur nies premiers essais, cir-
constances qui prouvent que vous ne negligez aucune
occasion de donner des temoignages d interet a tout ce
qui pent exercer une influence utile sur les progres de
la geographic, il m'est permis d'esperer que je trioni-
pherai des entraves que m'opposent les erremens de la
routine.
Deja des instituteurs engagent leurs eleves dans les
voies nouvelles tracees par mes e'tudes; deja toutes les
personnes donees d'un esprit eclaire et de connais-
sances positives recherchent, dans I'expression physique
des cartes , les ligues hydrogeiques par lesquelles se de-
(3i7)
finisscnt les plans tie revetement dii polyetlre terrestrc.
Loin cle redouter, a ce sujet, la Iiitte que d'autres ma-
nieres de voir peuvent engager, je crois utile de la pro-
voquer.Je vais, dans ce dessein, avoir I'honneur de vous
entretenir un moment des vues particulieres dans les-
quelles je poursuis mes travaux.
L'etude de la geographie,par son immense etendue, par
lavarietedesobjets qu'elle embrasse, est, sans contredit,
de toutes les connaissances classiques celle qui trouve
le plus souvent son application dans le monde. A.ussi
sen occupe-t-on des que Ion est en etat de s'adonner
a des lectures dont il importe de conserver le souvenir.
Consideree generalementcomme une science demots,
on cherche, comme pour les langues , objets de nos
premiers soins, a en fixer la nomenclature dans la me-
moire, en en faisant soit un jeu , soit un exercice pra-
tique presente avec plus ou moins d'attrait.
Toutes ces methodes, purement elementaires , con-
viennent a des eleves trop jeunes encore pour niieux ap-
prendre a I'aide du raisonnement. La facilite qu'en ge-
nei'al elles presentent , fait qu'on les adopte avec em-
pressement, et que promptement aussi on les delaisse,
les hautes etudes portant bienlot a negliger celles qu'on
ne regarde plus que comme un exercice dememoire.
Dans cet etat de choses, on entre en general dans le
monde sans savoir la geograpbie. On y eprouve bientot
le besoin de reparer , par des lectures, finsuffisance des
notions elementaires. On a recours alors aux metbodes
a I'usage des gens du monde ; mais le peu de fruit qu'on
en retire , tant a raison des elemens variables sur les-
quels se regie I'ordonnance des matieres, qu'a cause de
I'exuberance des details dans la foule desquels se perd
I'encbainement des circonstances physiques principales,
( 3i8 )
fait enfiii preferer les dictionnaires. C.eux-ci ne sont
pour I'enseignement que rles oracles, dont les reponses
sans liaisons, sans rapprochemens utiles , s'effacent du
souvenir comme la pensee eventuelle qui conduit a les
con suites.
Les traites que nous possedons jusqu'a present ne
sont done pas des ouvrages veritahlement classiques.
Celui qtii, a juste titre, tient le premier rang, est le
precis du celebre Malte-Brun. Apres avoir travaille avec
Mentelle, a une grande geographie en seize volumes, il
sentit que ce vasle repertoire etait plutot un livre de bi-
bliotheque qu'une methode d'enseignenient. 11 reprit
alors tous ces materiaux , les elabora, et senia son recit
de tableaux synoptlques , d'elegantes descriptions qui
grouperent, pour la premiere fois, des apercus phy-
siques , politiques et statistiques, presentes jusqu'alors
sans ordre et sans discussion. Ces innovations, et la
verve feconde d'une erudition peu commune , assure -
rent le succes du nouvel ouvrage.
M. Balbi , I'ami et parfois le collaborateur du savant
Malte-Brun , s'est , apres lui , attache a reunir en un
abrege toutes les connaissances qui, a son avis, sont
du domaine de I'enseignement. Get ouvrage , veritable
resume encyclopedique des connaissances geographi-
ques et statistiques, est, avec justice , fort accredite;
car, sous ce double rapport, il contient une foule de
documensprecieux que Ton chercherait vainenient dans
d'autres traites. Get abrege n'avait pas encore paru, que
deja, depuis plusieurs annees , je me trouvais engage
dans des etudes geographlques demandees dans des
vues niilitaires. A I'instar des auteurs qui ont aborde
avant moi cette specialite, j'ai du coinmencer par la
Geographie naturelle, celle qui decrit les formes du so!
( 3^9 )
sans aucune trace de vegetation on de vie aniniale, en-
core nioins de lieux d'habitation humaine.
Ces etudes devaient naturellement commencer par la
division du globe en bassins, divisions que Philippe
Buache a le premier redviite en systeme; divisions qui
ont ete depuis reprises et developpees d'abord par
M. Lacroix de I'lnstitut, ensuite par M. le chevalier Al-
lent, de maniere a faire connaitre les lois que suit la
distribution des eaux a la surface du globe, et les rela-
tions qui subsistent entre les masses solides et liquides
du spheroide terreslre.
Moi qui liens a honneur de reconnaitre pour maitres
en cette matiere les Bourcet, les Darcon, les Andreossy,
et plus particulierement encore I'auteur du savant Essai
sur les reconnaissances militaires, je ne reclame d'autre
part dans cette voie de regeneration des etudes geogra-
phiques,que celle d'avoir eu le courage de faire de grands
sacrifices pour donner de la vie a des preceptes trop
long-temps meconnus, ou regardes comme des the'ories
inapplicables a un enseignement que Ion retient, par
routine ou par paresse, dans les premiers erremens tra-
ces dans des vues etroites pour de faibles intelligences.
Presentement que ma voix a trouve de I'echo dans
cette enceinte, presentement que des noms justement
celebres protegent mes efforts, presentement que de
jeunes eleves sont inities avec succes au nouveau mode
d'exposition dont ils apprecient de plus en plus les
avantages, je dirai, en laissant a chacun le merite de
ses ceuvres, qu'il manque entre les livres elementaires
proprement dits, ou les exercices de memoire, et les ou-
vrages a I'usage des gens du monde ou les traites plus
substantiels, une methode presentant dans un ordre
rationnel toutes les connaissances qui a raison de leur
( 320 )
importance effective , peuvent etre considerees comnie
les points de repere auxquels doit s'arretcr un ensei-
gnement solide. Cest cette lacune, messieurs, que je
me suis propose de remplir.
Engage dans des voies nouvelles, je ne pouvais de
prime abord etablir irrevocablement toutes les amelio-
rations qui me seniblaient necessaires. De la j'ai hasarde
mes premieres pensees sous le litre d'Essais. Des ob-
jections trop faibles pour arreter ma marche me don-
nant plus d'assurance, j'ai continue mes publications
comme elemens progressifs d'un nouveau cours de geo-
grapbie generale. Aujourd'hui que beaucoup dinstitu-
teurs, qu'un grand nombre de personnes eclairees s'in-
teressent vivement a la poursuite de mon entreprise,
je publierai incessamment, comme elemens de geographic
rationnelle, la premiere partie du texte dans lequel se
developpera enfin la marche philosophique de mes
etudes.
Messieurs, ma tache est plus difficile et plus etendue
qu'on ne pense. Je I'aurais deja abandonnee sans la pro-
tection du gouvernemenl; car des lecons presentees
presque entierement sur des cartes et des tableaux dune
assez grande etendue, content fort chera etablir, et par
cette raison sont d'un difficile ecoulemenl. En cette con-
joncture, c'est aux personnes en position de favoiiser
les entreprises utiles, c'est aux amis des progres, c'est
aux associations philantropiques a s'emparer des moyens
de repandre avec liberalite les ouvrages propres a con-
courir a I'amelioration de I'enseignement.
Messieurs, iivrecomme je le suis a I'etude toute particu-
liere de la configuration des superficies terrestres , etude
qui, par ses considerations d'ensemble, m'a conduit a
etablir dune maniere positive les regies de I'analyse geo-
( ;^^t )
graphique naturelle, etude qui, renfermee dans de plus
etroites limites, a revele a de savans militaires, \es pre-
ceptesrepandus aujourd'huidans toute rAlleniagne sotis
le nom particuJier de Theorie dii terrain. Je vous dirai
avec toute la franchise quautorise une opinion qui n'est
point hasardee, que les carles aiijourd'hui meme les
iiiieux accreditees, ne sont pas encore presentees avec
1 expression caracteristique propre aux contrees dont
elles offrent I'image. 11 ne suffit pas au merite dun ta-
bleau que toutes les pai ties prises separement en soient
parfaitemenl et minutieusement execulc-es, ilfaut encore
que ces parties fornient un ensemble bien coordonne,
et que cet ensemble ne soit rien autre que celui qu'on
apercevrait en se placant au point de vue du tableau.
Ce qui est present pour la representation des objets vus
dans des distances assez rapprochees, n'est-i! pas ration-
nellement exigible pour des cartes dont en effet les de-
tails doivent s'elaguer d'autant plus que la distance men-
tale entre le point d'observation et le plan de site est
supposeeplus grandePCe n'est done qu'abusivement que
Ion s'evertue a modeler dans la chorographie et dans
la topographic generale, une infinite de reliefs accessoires
au milieu desquels se perdent les traces de la confio-u-
ration generale. Gette observation a lieu non-seulement
pour toute I'etendue dune carle, mais nieme pour cha-
cune de ses feuilles prise isolement , car dans chacune
aussi, il y a des relations obligees entre le tout et ses
dependances.
Les comparaisons qui se font communenient entre les
sites que Ton connait et ceux que Ton voit figure's, n'ont
pas assez de portee pour que Ton puisse en inferer que
!a meme harmonic a lieu dans tons les rapports que do-
mine I'intelligence. L'unanimite des jugemens etablis de
21
( ^^^^- )
cettenumiere, neprouvedonc rien ni cii faveuide I'oeuvre
apprecie, ni contre les protestations irrefragables delaiia-
lyse; elleprouveseuleiuentque d habitude on ne juge des
superficies terrestres que par abstractions, et que par suite
deces abstractions on regarde lavarieleinfinie des formes
du globe comnie un dedale inextricable. De la on ne
cherche pas du tout a se rendre raison de la liaison et
de la dependance absolue des differens plans d'une
carte , persuade que Ion est qu'on n'y parviendrait menie
pas en explorant le terrain dont elle offre le tableau. Et
en effet les cartes ne sont ni ordonnees, ni massees sui-
vant les lois hydrogeiques, par la raison peremptoire que
ces lois n'ont encore ete etablies avec quelques deve-
loppemens que dans mon analyse naturelle de I'Europe
centrale, et que leur expose n'est encore aux yeux de
beaucoup de personnes qu'une methode systematique
qui ne merite pas nieme d'etre contestee. Cette methode
n'en jelte pas moins des germes qui deja commencent
une ere nouvelle dans I'enseignement de la geograpVue
et dans lexpression physique des cartes. Toutes les per-
sonnes sans prevention qui ont pris la peine de s'initier
a ces progres ne sont plus etonnees que de I'aveuglement
dans lequel on persiste plutot par prcjuge que par motif
de conviction.
Quel que soil le mode adopte pour exprinier le relief
du terrain, deux grands preceptes doivent regler de-
sormais I'ordonnance continue des plans de configura-
tion dune carte. Ces preceptes sont rapportes dans les
termes suivans par M.Allent, dans son Kssai sw les re-
connaissances mililaires :
« Les projections ou les traces des cours d'eau sur
les cartes generales sont des courbes arborifornies, dont
la tige, les branches ou les ratneaux penetrent dans les
( 3.3 )
terres et dont les Ironcs sont tinis par la ligne dinter-
section de la mer et des cotes.
« Les cretes du bassin ou les lignes du partage des
eaux y sont projetees par d'autres courbes arboritormes
dont la tige, les branches ou les rameaux, souvent an-
guleux, embrassent les ramifications des coiirs d'eau et
dont les troncs sont unis par la chaine centrale qui tra-
verse tout le contineni. »
Quand une fois a I'aide de ces lignes caracleristiques,
on presentera dans leur valeur relative et dans leur de'-
pendance reciproque tous les plans qui dessinent les
formes effectives des superficies terrestres, les descrip-
tions des montagnes et des eaux, jusqu'a present rap-
portees a des circonscriptions souniises a de frequentes
vicissitudes, se rattacheront naturellementades demem-
bremens definis de I'entier dont elles constituent les par-
ties. Alors tout sera lie dans la pensee, comme tout est
lie dans la nature. Alors on sentira que si par des noms
on pent indiquer les relations, les analogies que les
cartes permettront dorenavanl de saisir, il deviendra fa-
cile de decrire nettement et dans tous leurs rapports,
des circonstances physiques qui anterieurement ne se
presentaient que dune maniere confuse.
Ge n'est done pas par entrainement a innover que j'ai
basarde une nomenclature analytique, les noms en usage
pour determiner les differentes parties dun meme mas-
sif de montagnes ne pouvant en aucune maniere preciser
la situation, les rapports, les connexions des aretes dont
les deux systemes parfaitement distincts forment les re-
seaux hydiographiques et hypsograpbiques.
Je mets, messieurs, sous vos yeux des cartes presentees
dans I'esprit queje viens d'indiquer. Les lignes de par-
tage des eaux y sont caracterisees par des nervures tra-
21.
( ^M )
cees en blanc, et les cours H'eau , coinnic a I'ordinaire,
par des traits arboriforines qui se Hotaclient en noir.
Les liauteui 5 relatives des reliefs y sont aussi exprimees »
selon I'usage, par I'intensite plus ou moins prononcee
des teintes. II n'y a par consequent dans ces cartes ,
d'autre innovation que celle d'une correlation continue,
etablie fentre tous les reliefs par les lignes de partage des
eaux. Pour faire ressortir en tous lieux ces lignes , il
fallait necessairement teinter toutes les pen tes, lors nieme
que leur inclinaison est absolument insensible. Mais
cette necessite qui parait fausser les conventions recues,
n'est, en realite, qu'une application generale d'un prin-
cipe auquel on pretend, sans raison , assigner des li-
mites : il n'y a de surfaces horizontales , sur le globe,
que celles qui sont donnees par les niers, et par le mi-
roir des eaux liquides , a I'etat de repos ; ou les eaux
coulent, il y a pente; ou elles se rasseniblent , il y a
cavite. Les parois de revetement du globe se partagent
done dune maniere absolue en deux classes , en sur-
faces horizontales et en versans. Ou les lienes d'inter-
section de ces plans cessent d'etre indique'essurlcs cartes
les pentes sont indefinies.Qui pent dire alors a quel bas-
sin appartient tel objet ou telle position ?
Ces observations me paraissent suflire pour inettre
en evidence: i" que les livros elenientaires , n'ayant
d'autre but que celui de fixer , dune maniere quel-
conque , des noms de pays, d'etats, de lieux, dans la
niemoire, les meilleurs sont ceux qui, par des exercices
faits dans des vues diverses , ramenent souvent ces
noms a la pensee.
2" Que les traites a I'usage des gens du nionde, sont
en general surcharges de details politiques et statisti-
ques qui empcchcnt de saisir les rapports qu'ont entre
( 325 )
elles les circoiistanccs physiques , mal presentees d'ail-
leiirs par la coutume que Ton a cle morceler les oeuvres
(le la nature , pour en assujelir les descriptions aux di-
visions eventuelles donnees par les circonscriptions des
etats.
3° Qu'entre ces ouvrages nianquent des etudes, dent
I'enchainenient presenie dans I'ordre nieme des faits na
turels, pent seul constituer Tenseignement rationnel.
4° Que I'expression physique des cartes , hien qu'en
progres, est encore loin de presenter la conformation
effective des contrees qu'elles embrassent, parce que les
grandes explorations et les etudes du terrain se font, en
general, sans aborder les considerations successives de
dependance auxquelles toutes les parties dun pays sont
siibordonnees.
Une longue experience et des etudes consciencieuses
m'ont suggere, messieurs, les reflexions que jesoumets
a vos lumieres. Yeuillez les accueillir avec la l>ienveil-
lance dont vous in'avez honorejusqu'a ce jour. Veuillez,
dans I'interet commun de la science qui est I'objet de
nos reunions , m'adresser les objections que vous juge-
rez convenables. Je les recevrai avec reconnaissance , et
je me ferai un devoir de signaler devant vous toutes
oelles qui me dessilleront les yeux, sur mespropres er-
reurs.
( 3S..6 )
APERCU
O'UN VOYAGE DANS l'aMERIQUE MEUl DION ALE
i)E 1826 V iSS3,
l»AR ALCIDE D'oaUIONY.
Protectrice nee de tout ce qui tend aux progres des
sciences en general, et surtout de la science qui fait,
plus specialement, I'objet de ses etudes et de ses en-
couragernens, la Sociele de Geographic a daigne penser
qu'un expose de mes courses et de mes decouvertes en
des contrees dont plusieurs sont encore totalement in-
connues , ne serait pas sans interet pour elle et pour
I'auditoire que rassemble, aujouid hui, dans cette en-
ceinte, une de ces interessantes solennites , dont le
programme pique toujours, a si juste titre, la curiosite
pul)li(jue. Quel({ue flatte que je fusse de son appel, si je
n'avais cousulte que mes forces, j'aurais pu craindre d'y
repondre; mais, confiant en son indulgence, en Tin-
dulgence de Ihomme distingue qui la preside en ce
jour, et non nioins snr de celle dun public qui mesure,
sur ses voeux seuls pour I avancenient des sciences, la
faveur quit accorde a leurs amis, mon zele me soutien-
dra dans I'acquit d'une tache difficile, Je dirai ce que
j'ai vu, sans jamais viser a I'effet , convaincu que la ve-
rite, !a simplicite, qui furent toujours les premieres
vertus d'uii voyageur, sont aussi , plus que jamais, au
( 3.7 )
siecle ou nous vivons, le premier gage de ses succes et
le plus siir garant de sa gloire.
La Societe, sans doute , a deja senti qu'aux termes
meme de ses reglemens, le pen d'instans qui ni'est ac-
corde ne me permet de lui offrir qu'une esquisse des
plus rapides de mes explorations transatlantiques dans
le cours de huit annees. La Societe sait , d'ailleurs,
qw'une vaste publication qui se prepare, sous les aus-
pices d'un ministre , ami des sciences, renfermera tous
les details de I'expedition , sous tous ses rapports his-
toriques , geographiques , ethnologiques et d'histoire
naturelle. Je croirai done avoir, en ce moment, re-
pondu au voeu do la Societe et rempli la tiiche quelle
m'impose, sije parviens a repandre quelque interetsur
les principales etapes de cette longue campagne scien-
tifique d'un jeune audacieux, que son amour pour la
science et pour la patrie ont arraclie de ses foyers , et
que la providence y ramene , heureux et fier de pou-
voir deposer , a leurs pieds , les premiers tributs de ses
efforts.
Parti de Brest en juin, 1826, en qualite de natura-
liste voyageur , avec la mission d'explorer les etats de
Buenos- Ayres, du Chili et du Perou , sous les divers
points de vue de Ihistoire naturelle et de ses applica-
tions , j'arrivai a Rio de Janeiro, au commencement du
inois d'aout de la meiue annee.
J'epargne a mes auditeurs Ihistoire de mon sejour au
Bresil et meme a Montevideo, ou une observation ba-
rometrique, prise par des officiers ignorans , pour iin
levedu pays , hostile aux interets des occupans, faillit
compromettre tout I'avenir de ma mission, en ne me
permettant de poursuivre mon voyage et de me rendre
a iUienos-Ayres, qu en Janvier, 1827. Je ne sejournai
( 328 )
que quelques jours d;tiis cetle deniiere villo , enipresse
de m'embarquer sui la riviere du Parana, pour gagner
les frontieres du Paraguay. Je remontai cctte immense
riviere sur une etendue de plus de trois cent cinquante
lieues. A cette distance de son embouchure, ses eaux.
majeslueuses coulent encore dans un lit de pres d'une
lieiie de largeur ; ses Lords et les lies nombreuses dont
ii est seme , s'ornent de vastes forels ou les e'le'sans
palmiers viennent entrelacer leur leger f'euillage a celui
de mille autres arbres de tout genre, le plus souvent
couverts de lianes, dont les fleurs, au printemps, email-
lent de pourpre t,t dor, ces guirlandes naturelles.
J'eus lieu de reconnaitre, des-lors, rombien sont in-
fideles nos cartes les plus accreditees de cette partie de
la republique argentine, surtout en ce qui concerne la
grande lagune d'Ibera , dont elles doublent gratuite-
ment I'etendue, et qu'elles reportent, d'ailleurs , d'un
degre trop a I'ouest ; sans parler de plusieurs rivieres ,
telles que celles de Corrientes, de Bateles et de Sainte-
Lucie, dont le cours y est trace tout-a-fait a faux ; er-
reurs, que mes observations personnelles et les lumieres
que j'ai dues a M. Parchappe, savant aussi modeste que
distingue, m'ont permis de corriger sur mes cartes, avec
beaucoiip d'autres non moins graves.
Dans ce voyage, qui ne se prolongea pas moins d'une
annee, j'ai parcouru succossivement les provinces de
Corrientes et des Missions; et, apres avoir penetre au
milieu des hordes sauvages qui pcuplont le jrrand Cha-
co, et dont j'ai pu observer de pres les mocurs diverses,
en vivant presque toujours de leur vie, je suis rentre
sur le terrain de la civilisation europeenne par les pro-
vinces d'Entre-rio3 et de Santa-fe.
De retour a Ikienus-Ayres, le.s guerrcs intestines qui
( 329 )
dechiraient 1 etat, depuis la signature de la paix avec les
Bi'esiliens, me niettant dans rimpossibilite de traverser
sans danger le continent, pour me rendre , par terre ,
au Chili ou au Perou, je me decidai a partir pour la Pa-
tagonie, cette terre mysterieuse, ou sipeu d'Europeens
peuvent se vanter d'avoir vecu , et dont le nom seul
avait encore quelque chose de magique. Je m'y rendis
par mer, a la fin de 1828, et j'y sejournai huit mois.
Mes recherches s'y fireni d'abord assez paisiblement,
quelque penible qu'il soit de parcourir un paysdes plus
arides , ou le manque d'eau se fait sentir a chaque pas,
au sein de deserts uniformes et sans fin ; mais les In-
diens cesserent bientol de vivre en bonne intelligence
avec les colons. Les nations Puelches , yVucas et Te-
huelches ou Patagons, tout-a-coup insurgees, sans mo-
tif connu, se coaliserent contre la colonie naissante du
Carmen, sur le Rio-Negro, ou je m'etais refugie, des
les premieres attaques; et je fus obhge de me joindre
momentanement aux habitans, pour contribuer a la de-
fense commune.
Independamment de plusieurs observations iniporlan-
tessuria geologic du pays, dont les formations presentent
une analogic frappante avec celles du bassin de Paris ,
j ai recueiili bon nombre d'ubservations curieuses sur
les trois nations indigenes de ces parties australes.
Le gigantesque fantome de ces fameux Patagons de
sept a huit pieds de haut, decrit par leg anciens voya-
geurs, s'est evanoui pour moi, J ai vu la des hommes,
encore tres grands, sans doute, comparativement aux
autres races americaines, mais qui, pourtant, n'ont rien
d'extraordinaire, meme pour nous; car, sur plus de
six cents individus observes, le plus grand nombre n'a-
vait que cinq pieds onze poures de France, et je crois
( S5o )
pouvoir evaluer leur taille nioyenne a cinq piecis qiiatre
pouces. Peut-etre la inaniere clont ils se drapent, avec
de grandes pieces de fourrure, expliquerait-clle I'an-
cienne erreur. Dans tous les cas, nul doute que mes
Patagons ne soienl la nation qu'ont vue les premiers
navigateurs ; car eux -memes m'ont assure qii'ils faisaient,
tous les ans, des voyages aux cotes du sud , et qu'ils ne
connaissaient, a la pointe de I'Anierique, d autre nation
que celle qui habite la Terre de Feu.
Qui le croirait? Temoin de leurs ceremonies religieu-
ses, J'ai retrouve, chez plusieurs de ces hordes les plus
sauvages, des images, grossieres il est vrai, mais pour-
tant fideles, des rites si poetiques des anciens Grecs.
J'ai vu leur Pythie , au milieu des plaines, entouree dun
vaste cercle dindieus silencieux , leur interpreter, I'oeil
en feu , les oracles du Gualichu (genie du mal et du
bien), et leur prophetiser des victoires. J'ai vu des pu-
rifications superstitieuses celebrer, dans chaque t'amille,
1 instant marque par la nature pour la puberte des jeunes
Indiennesj j'ai, comme chez quelques autres peuples,
vu massacrer, sur la tombe dun Patagon. tous les ani-
maux qui lui avaient appartenu pendant sa vie; bruler
les v^temens de loute sa tamiile; et sa veuve , barbouil-
lee de noir, attendre , avec ses enfans denues de tout,
que quelques parens daignassent lui jeter les lambeaux
qui doivent la couvrir; faits qui, tous, avec beaucoup
d'autres, ne paraitront sans doute pas inditterens aux
moralistes et aux philosophes, jaloux de recueilUr, sur
toute la surface du globe , les traits distinctits de I'hu-
manite, sous quelque forme qu'ils se presentent.
Revenu pour la seconde fois a Buenos-Ayres , je re-
trouvai le pays dans I'anarchie la plus complete; et I'ini-
possibilite bien reconnue de gagner le Chili par le con-
( 33i )
tinent, me cletermina a my rendre en doublant le Cap
Horn. A peine arrive au Chili, au commencement de
i83o, la guerre civile, non moins animee qu a Buenos-
Ayres, me fit prendre le parti de tenter un voyage dans
la Bolivia (ancien Haut-Perou ), ou tout devait me faire
esperer, de la part du gouvernement, une bonne recep-
tion et des moyens de poursuivre mes voyages.
Cobija, le port actuel de Bolivia, m'offrit j'aspect
imposant des chaines volcaniques dont il se couronne ;
puis je debarquai a Arica , republique du Perou , ou je
commencai mes voyages par terre.
J'observai d'abord le versant occidental des Andes.
La suite d'un sol aride, sablonneux, ne m'y offrit que
de la geologie. La nature , en ces lieux , n'a rien fait pour
embeliir les vallees : tout y est I'ouvrage de I'art; et si ,
parmi ces deserts de sable, I'oeil se repose, par inter-
valles, sur un terrain plante d'oliviers, de figuiers, de
grenadiers et de bananiers, I'eclat de cette vegetation
f'aclice n'est du qua Taction eombinee de mille canaux
qui, a des jours et a des heures fixes, viennent lui don-
ner ou lui rendre la vie. Telle est toute la partie du Pe-
rou situee it I'ouest des Andes.
Je gravis ensuita, par des ravins affreux, le sommet
des Andes. La , bien loin de rencontrer une seule crete
ressemblant a celles que representent les cartes, je me
trouvai sur un immense plateau ou selevent, de dis-
tance en distance, des montagnes volcaniques qui n'af-
fectentaucune direction suivie. La, partout, une nature
aride, une secheresse affreuse etune rarefaction de lair,
telle que je men sentis tres douloureusement affecte.
J'arrivai sur le versant oppose du plateau, que mar-
quait une chaine intermediaire entre le plateau particu-
lier des Andes et le plaliau general des Cordilleres. IJne
( 33-i )
vuc admiiable se de veloppait, la , de toutes parts , ii nies
yeiix : a I'ouest et au sud-ouest, les sominets imposans
du plateau des Andes j au nord-est, la Cordillere orien-
tale, plus haute encore et plus continue ; et des polntes
dechirees, couvertes de neige, seniblant shuniilier de-
vant niimani et le Sorata , ces geans des Alpes ameri-
caines, qui doniinent de leurs fronts orgueilleux la re-
gion des hivers eternels.
Je descendis ensuite sur un autre plateau qui est en-
core a pres de douze niille pieds au-dessus du niveau
de la mer. Ce plateau separe les Andes de la Cordillere
que j'appelle orieiitale. L'espace compris entre ces deux
chaines principales peut etre de trente lieues, et con-
serve le meme aspect. C'est sur cet immense plateau ,
forteteiidu au nord et au sud , que se trouvent les plus
noinbreuses populations de Bolivia et du Perou; ce qui
tient, sans doute, au grand nonibre de llamas et d'alpa-
cas qu'il nourrit. C'est aussi sur ce plateau remarquable
que s'etend I'immense lac de Titicaca , si fanieux par les
anciens temples du soleil et de la lune, ouvrage des In-
cas, dans les lies dont il est seme. Plus tard, j'ai par-
couru, dans tout leur developpement, les rives escar-
pees de ce nieme lac , si riches en souvenirs de 1 histoire
ancienne du Perou.
Ce plateau , et surtout les environs de la Paz, turent,
pendant quelque temps , le theatre de mes recherches.
J'ai corrige, sur le gisement de cetle ville, une grave
erreur consacree par toutes les cartes, sans menic en
excepter celles de Brue, bien qu'assurement les moins
fautives pour I'Amerique. La Paz n'est pas situee sur le
versant oriental de la chaine, mais dans un inmiense ra-
vin du sud-ouest de la cordillere, sur le grand plateau.
Au commencement de )uillet,i83o, toujours marchant
( 333 ) •
a Test, je gravis le sommet de la Cordillere orientale;
et la s'offrirent a mes yeiix, dun cote les nionta»nes
arides du grand plateau, ou le ciel , pendant neuf mois
de I'annee, garde invariablement la meme purete; de
I'autre , des niiages amonceles, toujorns se inaintenant
a quelques niille pieds au-dessous du lieu de mon ob-
servation, et qu'on prendrait pour les flots d'une mer en
furie, quand ils se heurlent centre les pointes abruptes
des niontagnes; penetres, d'ailleurs, de loin en loin, par
les points culminans de quelques pics qui figurent assez
bien des lies; niais, que ces nuages viennent a laisser
cntre eux quelques intervalles, I'oeil , alors, tout dun
coup, plonge dans une profondeur immense sur les pics
converts de bois qui couronnent les chaines paralleles.
11 est plus facile de sentir que de rendre la sublimite
dun tel spectacle.
Ces nuages, de plus, determinent une zone distincte,
et signalent, pour les parties inferieures , le commence-
ment d'une vegetation comparable, a tons egards, a la
vegetation la plus riche et la plus variee de la zone
tropicale.
Je m'avancai jusqu'aux niontagnes dechirees qui for-
nient le versant oriental de cette chaine, descendant al-
ternativement du lit des rivieres au sommet des chaines;
et, dans ce long et penible voyage, j'ai reconnu qu'aucun
des immenses et nombrcux torrens de ce versant ne sont
marques sur les cartes, et qu'une confusion des plus
grandes, ou des espaces entierement vides, y tiennent,
le plus souvent, lieu des accidens varies dont est rempli
le pays entier. Ces lieux reproduisent , mais avec plus
de luxe encore, la pompeuse vegetation des environs de
Rio de Janeiro; une humidite chaude y couvre de
plantes magnifiques meme les rocliers les plus escarpes.
( 334)
Je reraontai, pies de Gochabamba, la mcine Corclillere;
et suivis line longue serie de montagncs arides dont la
pente m'amena dans les belles plaines l)oisees on se
trouve la ville de Santa Cruz de la Sierra. Cet intervalle
de cent vingt lieues est aussi peu connu que le rcste.
J ai passe de grandes rivieres qui n'existeiit pas sur les
cartes , et les systeines de versans my paraissent sur-
tout des plus faux.
J etais deja a trois cents lieues de la mer; niais, vou«
lant connaitre aussi les lieux peuples seulement par les
indigenes, je resolus de penetrer plus avant dans I'inte-
rieur des terres habilees; et, a la fin de la .saison des
pluies, qui interronipt toute communication, je ropris
ma marche vers Test, en traversant une toret dont I'c-
pais f'euillage couvre une etendue de plus de soixante
lieues de largeur, est et ouest, et dans laquelle on cher-
cherait vainement d'autres botes que les jaguars ou
tigres d'Amerique. J'arrivai ainsi dans la province de
Chiquitos, que je parcounis en tous sens, jusqu'a la ri-
viere du Paraguay et a la ville de Mato-Grosso du Bresil.
La province de Chiquitos a plus de douze mille lieues
de superficie. J'y ai trouve, sinon dans toute sa splen-
deur passee, du moins encore intact dans ses formes et
avec tous ses caracteres primitifs, le gouvernement qu'y
avaient jadis etabli les jesuites, gouvernement encore
inconnu et bien nial apprecie, malgre tons les ecrits
dont il a ete I'objet, et qui sut, par une patience dont
il serait difficile de se faire une idee, reunir et rallier
en dix villages , sous les memes lois et sous 1 empire dun
idiome idenlique, dix-sept nations bien distinctes, par-
lant chacniie une langue differente.
Les Chiquitos, chretiens seulement de nom, ont
conserve la plnpart de leurs anciennes superstitions. II
( 335 )
est curieux den voir les souvenirs se nieler, le plus
innocemment du nionde , aux ceremonies les plus aus-
teres du culte catholique.
J'ai ete frappe du contraste de gaite et d'insouciance
qui les distingue des taciturnes habitans du grand Cha-
CO, non moins que de ['extreme bizarrerie de quelques-
uns de leurs jeux nationaux , et entre autres, dune es-
pece de jeu de paume qui s'execute avec la tete, sans
le secours des mains.
Une singularite des plus piquantes, et caracteristique
dune des langues du pays, c'est que la pluparl des
substanlifs se designent par un mot different, en raison
du sexe de la persoune qui parle.
Au milieu de ces vastes et sonibres forets, qui sepa-
rent les immenses provinces de Chiquitos etdeMoxos,
dans un vaste territoire marque comme inconnu sur nos
meilleures cartes, coulc une riviere egalement ignoree,
quoique navigable, et dont les bords, enrichis dune
vegetation aussi active que brillante, sont habites par
une nation de celles que nousappelons sauvages, nation
aussi inconnue en Europe que le sol quelle foule, mais
qui n'en pourrait pas moins servir de modele a beau-
coup de peuples civilises. Ce sont mes chers Guarayos,
realisant en effet, en Amerique , par une bospitalite
franche et loyale, par les moeurs simples des temps pri~
mitifs, le reve poetique de I'age d'or. Chez ces honimes
de la nature, que I'envie ne tourmente jamais, le vol,
non plus, n'a pas penetre; le vol, cette plaie morale
des civilisations les plus grossieres comme les plus par-
faites; le vol, regarde pres(|ue comme une vertu par
leurs plus proches voisins, les Chiquitos j et, au milieu
meme des missions , ou la corruption des moeurs est a
son comble, on aime a retrouver chez leurs femmes une
( 336 )
piuleur, line conduite exeniptc de reproches. La, j'ai vu
de respectables vieillards a longue barbe, caractere sin-
gnlier parnii les races anK'ricaines, qui sont generale-
menl imberbes; vrais patriarcbes dn desert, vetiis dime
loTigue robe, faite de I'ecorce des arbres de leurs forets.
Bien different des serviles neophytes des missions des
jesuites , qui ne parlent que le front baisse vers la terre
et les bras croises sur la poitrine, le Guarayo, fier de la
liberie dont il jouit, marche la tete haute, se presente
avec assurance, et, tout en vous traitant oomme son
egal, se regarde conime bien superieur aux autres In-
diens, quil nieprise parce qu ils sont voleurs ! Aussi
prevenans que fiers, les chefs de cette noble nation ve-
naient tons les jours interroger mes voeux pour les
prevenir.
J'ai vu toutes leurs ceremonies religieuses; je les ai
entendus, dans leurs hymnes sjlennelles enricbies da-
mages riantes et gracieuses , inviter les oiseaux d'alen-
tour a venir egayer le feuillage, et prier les fleurs de
s'epanouir, pour feter avec plus d'eclat le tamoi (le
grand pere), leur dieu bienfaisant, qu'iU adorent sans
le craindre, parce quil preside a I'abondance des re-
coltes sans jamais punir les cultivateurs.
Dans I'immense province de Moxos, au nord-est du
HautPerou, plus de coUines granitiques, plus de gres
comme dans Chiquitos; mais bien des terrains extreme-
ment plats, en partie inondes par un dedale de rivieres.
La vivent, divises en dix nations distinctes et parlant des
langues diverses , des peuples, tons navigateurs, qui
connaissent parfaitement les moindres detours de leurs
canaux naturels , journellement parcourus deux sur de
iongues pirogues formees dun seul tronc d'arbre creuse
par le fer et par le feu j je les ai souvent employees
(337 )
flans ines reconnaissances cle la province entiere, el je
leur dois les materiaiix tlune refonte integrale des cartes
de cetle partie du sol aniericain.
De Moxos, qui conserve la temperature chaude et
humide de sa latitude, je voulus remonter au sommet
de laCordJllere orientate, afin de parcourir successive-
nient, jusqu'aux neiges, les differentes zones dhabita-
tion des plantes et des animaux. Je remontai alors In
Rio-Chapare, jusqu'au pied des derniers contreforts des
Andes, ou vivent les Yuracares. La, au sein des f'orets
les plus belles du monde, ou, a la hauteur de deux ou
trois cents pieds au-dessus du sol , les rameaux d'arbres
inimeiises viennent s'enlacer en voiites de verdure im-
penetrable aux rayons du soleil, au-dessus de palmiers
gigantesques eux-niemes, protegeant a leur tour une
vegetation des plus elegantes et des plus varices; la,
parmi ces tableaux de I'aspect le plus niajestueux,
I'homnie sauvage s'est cru I'etre le plus heureux et le
plus privilegie; ses idees ont grand! avec la nature. Les
Yuracares, en effet, possedent une histoire sacree assez
etendue et reniplie des idees les plus originales sur la
creation du monde et sur I'origine des nations , le tout
mele de fictions les plus gracieuses , souvent analogues
a celles du riant polytheisme des Grecs.
Ainsi, par exernple, une jeune fdle parvenue a I'age
des passions, reve seule,an sein des vastes forets; elle
s'y plaint a I'echo des bois du malheur de sa solitude.
Son ceil s'y fixe avec attendrissement sur un bel arbre
charge de fleurs purpurines. S'il etait homme , elle I'ai ■
merait La jeune fillo pleure, soupire, attend , es-
pere Elle espere, et ce nest pas en vain.... L'amour
lui devait iin prodige : I'arbre devint homnie; il devint
homnie, et la jeune fille est luMU'cuse.
22
( 338 )
Ces Yuracares, doues d'une imaginaliun si exallee ,
ii'ont pas moins d'orgueil que d'exaltation. lis menaceiit
le ciel de leurs fleches, quaiid il tonne, bravant ainsi
jusqu'a la divinite.
Ma ciiriosite etait encore bien loin d'etre satisfaitej
et , des lieux que je viens de decrire, on meat vu m"e-
lever, bientot apres , de ravin en ravin, jusqu'a Coclia-
baniba , passant lour-a-tour d'une zone torride a uue
zone temperee , et de cette derniere a celle des neiges.
Je ne tardai pas a revenir a Moxos, me frayant un che-
niin sur un autre point du versant de la Cordillere
orientale, dans le but de verifier nies premieres obser-
vations et de reconnailre le point de partage du grand
versant du Rio-Beni et du Mamore, fait important pour
la geographic.
De Moxos je revins a Santa-Cruz, et de Santa-Cruz
je passai a Cliuquisaca, capitale do Bolivia, distante de
cette ville de cent trentesix lieues.
Je revins ensuite a la Paz , apres avoir visile Potosi ,
lieu dont la richesse est proverbiale j et de la Paz enfin,
repassant pour la derniere fois la Cordillere des Andes,
apres avoir explore trois ans toutes les parties de la re-
publique de Bolivia, je me trouvai sur la cote du Perou,
oil je ni'embarquai le n5 jiiillet,! 833, pour la France, en
passant par les ports d'Arequipa, de Lima el du Chili.
Dans cette absence de huit annees, j'ai parcouru qua-
torze millesept cent qualre-vingts lieues, y compris mes
voyages par tcrre, sur les rivieres et par mer , ct j ai vu
lAmerique meridionale en sens divers, du 1 1" au 4'^*^
degre de latitude australe.
(339)
COMPTE- RENDU
DES RECETTES ET DEFENSES DE LA SOCIETE
pendant Vexercice i833-i834.
RECETTES.
Reliquat du compte de i832-i833j interels des
Ibnds places; montant des souscriptions renouvelees
<'t des diplomes delivres aux nouveaux membres ; sous-
cription du roi et fondation du prix de S. A. R. le due
(I Orleans; vente du recueil des Menioires et du Bul-
letin 12,198 f. 78 c.
DEFENSES.
Frais d'administration, d'agence, de
loyer; impression du Bulletin; nion-
tant des prix decernes en i834; achat
d'une inscription de 100 fr. de rente
5 pour 0^0 pour le prix de S. A. R. le
due d'Orleans 10,761 >-
En caisse le 28 novembre i834. ^A^l 7^
Deux placemens representant un
capital de i5,ooo »
Total de I'actif 16,437 f. 78 c.
Certifie par le Tresorier de la Societe et approuve
par V asseinhUe generale^
Paris, le ?.8 novembre i834.
Signe Chapellier.
( 34o )
PROCES-VERBAL
©« l'aSSEMBLEE CENERALE do 28 NOVEMBRE l834.
La Societe Je Geographic a tenu sa (leuxieine assem-
blee generale tie i834, le vendredi 28 novemhre , clans
une des salles de I'Horel-de-Ville, sous la presidence de
M. le comte de Montalivet, pair de France.
M. le President ouvre la seance par un discours dans-
tequel il signale les genereux encourageniens que la So-
ciete accorde aux decouvertes geograpliiques. Rappe-
lant ensuite des travaux non moins utiles, il ia felicite
de ses premiers efforts pour obtenir la description phy-
sique , la carte hydrographique et le nivellenient gene-
ral de la France. Le temps est propice, dit-il, pour re-
prendre I'execution de cette grande entreprise, et hi
Societe doit compter sur Tempressement du gouverne-
ment a lui faciliter les moyens datteindre un but aussi
utile. M. le president annonce que S. M. et S. A. R. le
due d'Orleans , qui portent un vif interet aux sciences
geographiques et aux travaux de la Societe , veident
bien consacrer un nouvel encouragement aux publica-
tions dont elle a deja rassemble les elemens. M. de Mon-
talivet se felicite de devoir au choix de la Societe de
pouvoir lui Iransmettre ces temoignages de haute bien-
veillance.
M. le colonel Denaix, secretaire de la Societe, donne
lecture du proces-verbal de la derniere assend)lec eene-
rale. — La redaition en est adoptee.
( 34i )
M. le Secretaire lit une lettre de M. le general Pelet,
qui annonce I'envoi des nouvelles publications du De-
pot de la guerre, et il communique la liste des divers
ouvrages offerts a la Societe. — L'assemblee vote des
remercimens aux donateurs , et ordonne le depot de
leurs ouvrages a la bibliotheque.
M. le President proclame les noms des candidats pre-
sentes pour etre admls dans la Societe.
M. Jomard, president de la Commission centrale, de-
pose sur le bureau la premiere partie du quatrienie vo-
lume des Memoires de la Societe, composee de la Be-
lation d'un voyage fait dans I'lnde, au quatorzieme
§iecle; de la relation inedite dun voyage fait a Taiti, en
1774 j et de plusieurs vocabulaires de I'Afrique septen-
trionale et orientale.
M. d'Avezac, secretaire general de la Commission
centrale , presente la notice annuelle des travaux de la
Societe. Apres avoir determine quelle est la veritable
etendue du doniaine de la geograpbie, il passe en revue
les diverses parties du champ que les efforts de la So-
ciete tendent a feconder , et les puissans auxiliaires
qu'elle a nouvellement acquis pour remplir cette noble
tacbe; il montre combien de sources diverses affluent
spontanement au centre commun que leur offre la So-
ciete de Geograpbie, et il fait connaitre avec precision
tous les progres que I'association a obtenus ou consta-
tes dans le cours de I'annee qui s'acheve j il signale les
travaux geographiques les plus importans, et expose
les re'sultats des explorations les plus recentesj enume-
rant ensuiie les encouragemens que la Societe a distri-
bues et ceux qu'elle met au concours, il excite I'interet
de l'assemblee par le tableau des efforts que les res-
sources de I'association lui ont permis de faire, pour at-
( 342 )
teindre le hut de son institution; et il fonde, sur les re-
sultats obtenus, un flatteur espoir de succes plus re-
marqiiables encore.
M. le lieutenant-colonel Denaix remorcie la Societe de
ITionneur qu'elle lui a fait en le nonimant son secretaire.
II doit moins, dit-il , cette distinction a la part qu'il a
prise a ses travaux, qua la perseverance avec laquelle
il poursuit le grand ouvrage dont il s'occupe, tant pour
la regeneration de I'enseignement de la geographie, que
pour rameiioration de I'expression physique des cartes.
M. Denaix fait reniarquer rapidement, en payant toute-
fois un tribut d'homniages aux oeuvres de MM. Malte-
Brun et Balbi , que le peu d'instruction que Ton retire
en gene'ral des livres elenientaires et des traites a I'usage
des gens du monde, I'a engage a s'ocouper d'un ouvrage
propie a Xenseignement normal. II expose a ce sujet
qu'elles sont ses vues, et prie les meaibres de la Societe
de vouloir bien lui faire part de leurs objections.
L'Assemblee entend avec un vif interet un apercu de
M. d'Orbigny, sur le voyage qu'il vient d'executer dans
I'Amerique nieridionale, de 1826 a i833 , avec la mis-
sion d'explorer les etats de Buenos-Ayres, du Chili , du
Perou, de Bolivia et la Patagonie. II signale des traits
de nioeurs tres caracteristiqnes et inconnus jusqu'au-
jourd'hui. Dans une absence de huit annees, M. d'Orbi-
gny a parcouru pres de quinze mille lieues , tant par
terre, que sur les rivieres de I'interieur, et sur les dil-
ferentes mers; enfin, il a visite I'Amerique nieridionale
en sens divers, du 11° au 43" degre' de latitude aus-
trale.
M. Chapellier , tresorier, presente le compte-rendu
des recettes et depenses de la Societe , pour Vexercice
annuel i833-i834.
( 343 )
M. le I'lesidoiit lappelle a MM. les meniljies que iii
Bibliolhetine leur est ouverte tons les jours , de onze
heures a quatre , et que les seances de la Cominissloii
centrale ont lieu au local de la Societe , les premier et
troisienie vendredi de chaque mois.
On procede au depouillement du scrutin pour la no-
mination de quatre menibres de la commission centrale;
M. le President proclame les noms de MM, Denaix ,
lieutenant-colonel au corps royal d'etat-niajor, Boblaye,
capitaine au meme corps; Berard , lieutenant de vais-
seau de la marine royale ; et d Orbigny , voyageur-
naturaliste du Museum d'histoire naturelle.
MEMBRES ADMIS DANS LA SOCIETE.
Seance generate du 28 novemhre i834.
M. Ernest de Blosseville.
M. BouRiAT, membre de I'Academie de niedecine.
M. HuzARD , membre de i'lnstitut.
M. Alcide d'Orrigny, voyageur-naturaliste.
M. le lieutenant-general baron Pelet, directeur du
Depot general de la guerre.
OUVRAGES OFFEUTS A LA SOCIETTK.
Seance generate du 28 novemhre.
Par M. le directeur du Depot general de la guerre :
Novvelle carte de France, 12 feuilles ; Ghalons-sur-
Marne, Lauterbourg, le Havre, Longwy, Montreuil ,
Provins, Bethel, Saint-Valery-en-Caux, Sarreguemines,
( M4 )
Sierck, Soissons, Weissembourg. — Carfe generale des
principaiicn etats de I Europe, 4 feu i lies , 1 832. — Carte
de la Moree, retligee et gravee an Depot general tie la
guerre, d'apres la triangulation et les levcs executes en
1829, i83o et i83i , par les officiers d'ctat-inajor atta-
ches au corps d'occupatiou, etc.; 8 f'euilles. — Carte
(In territoire d" Alger, dressee au Depot general de la
guerre, d'apres les leves de MM. les officiers detat-
major , employes a Tarniee d'Afrique. Paris, i834:
1 feuille. — Carte des etunrons d' Oran et de Mers-el-
Kebir, dressee au Depot general de la guerre, d'apres
les leves de MM. les officiers detat-niajor , employes a
I'armee d'Afrique. Paris, i834; i feuille.
Par M. le ministre de la marine : Voyage de P Astro-
labe : philologie, tome i"", 2° partie ; zoologie, 3o, 3i ,
32, 33, 34 et 35" livraisons, et tome iii, 2<^ partie; t. iv,
i" et a* partie; botanique, lo^ livraison et 2' partie du
texte. — Voyage de la Favorite: atlas hydrograpliique.
Paris, i833, I volume in-folio, et 8* et 9*= livraisons de
I'Album bistoriqup.
Par M. Artbus-BertraTid : Voyages en Arable, con te-
nant la description des parties du Hedjaz , regardi-es
comme sacrees par les musulmans, celle des villes de la
Merque et de Medinc, etc., suivis de notions sur les
moeurs, les coulumes el les usages des Arabes seden-
taires, et des Arabes scenites ou Bedouins, etc.; tra-
duits de I'anglais dti J.-L. Jiurckardt, par J.-B. Eyries,
3 vol. in-8". - Guide des emigrans francais aux Etats-
Llnis, brocbure in-8".
Par M. Piban de la Forest: Essai sur la vie et les ou-
trages de M. S.-F. Sc/iu'll. Paris, i834; i vol. in-S\
i- ,• . •■■■■( \.Ti ■ » \
de Gepgraphie.
(a) 1 5 1 1 .
/iu/A^tm f/e /a • 'hcte/c i/e i'COi/r,ip/u>-'
7'Srrif f-
ufiMludc k I'Oceidciit du Mcndipii Av rObscr%aloii'o i-o\ .\I Jo I'.i
BULLETIN
UK LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE.
DliCEMBRE l834.
PRDMIERE SECTION,
MEMOIRES, EXTRAITS, ANALYSES ET RAPPORTS.
SUITE
DBS MEMOIRES LUS .4. LA SOCIETE DE GEOGRAPHIE
SUR LA DECOUVERTE ET LA RECONNAISSANCE
DES COTES d'aMERIQUE (l),
Par M. Roux de Rocheme.
COTES OCCIDENTALES.
Vasco Nunez de Balboa, conquerant du Darien , ap-<
prit des naturels du pays que, du haut d'une monta-
gne, on decouvrait a I'occident une nier immense, et il
se rendit (2), avec cent quatre-vingt-dix Espagnols et
une escorte d'Indiens , au pied des Cordilleres. On les
gravit avec des dilficultes inouiesj on eut a livrer plu-
(i) Voyez dans le nieme volume le n" 7 du Bulletin de la Societe
de Gepgraphie.
(2) i5ii. '.
23
( M6 )
sieurs combats aux liabitans, et il ue restait a Balboa,
(jue soixaiitc'-sepi liommes en etat tie le suivre , lo?s-
qu'il atteignit eiifin le dernier somniet , et (lecouvrit
Tocean Pacilique (i). A cette vue, il tonibe a genoux ,
rend graces a Dieu d'etre le premier Eiiropeen aiiquel
il soit accorde de faire cette grande decouverte, ap-
pelle tout le monde a temoin qii'il prend possession de
cette mer , de ses lies et des terres environnantes, au
nom du soiiverain de Castille , et fait dresser par uii
notaire cet acte d'occupation , que les Espagnols reve-
tent aussi de leurs signatures. Le guerrier descendit
ensuite la pente occidenlale des Cordilleres , eut d'au-
tres engagemens avec les Indiens, s avanca vers la plage
de rOcean , y entra jusqu'aux genoux, et deployant sa
banniere , ou etaient peintes les amies de Leon et de
Castille, il renouvela sa prise de possession.
Le golfe ou Ton etait parvenu, recut le nom de golfe
de Saint-Michel ; Balboa niit a la voile dans 1 Ocean
qu'il avait decouvert , visita quelques parties de la cote
durant cette expedition , et en entreprit une nouvelle,
plusieurs annccs apres (2), avec quatre brigantins.donl
toutes les pieces avaient ete preparees dans le golfe du
Mexique , et transportees ensuite dune mer a I'autre, a
travers I'isthmc du Darien.
La premiere croisiere de Balboa fut dirigee vers le
groupe des lies des Perlesj il reconnut bientot apres
([uelques parties du continent , et il se proposait d'e-
lendre plus ati niidi ses decouvertes, lorsqu il fut rap-
pele par Pedrarias, gouverneur du Darien, qui, dans s;i
jalouse liaine, laccusa de rtibellion pour le pen! re , et
le (it decapiter.
( i) afi septcml)re i5 i 3.
(a) i5«C.
( Ml )
Francois Pizarre avail suivi Balboa dans son expt-tii-
lion; ce tut ensuite hii qui rarit'-t:) , el ce memo guer-
rier fit, quelques annees apres, la decouverte et la tou-
quete du Perou Nous n'avons point a rappeler ici les
circonstances de cette memorable expedition, et il nous
sutfit de faire observer quelle donna lieu de recon-
naitresuccessivement toules les parlies de cette contree,
oil les villes de Quito et de Cusco , residences royales
des deux branches de la famille des Incas, furent promp-
tement occupees par les conquerans, et oil Ton vil ra-
pidement s'elever , sur les debris de lempire peruvien ,
de nombreuses colonies europeennes attirees par lor
du Nouveau- Monde.
L'expedition d'Almagro dans le Chili , oil il penetra a
travers les Andes, donna aux Europeens de premieres
notions sur eelte contree j mais elle ne put etre explo-
ree avec soin, que lorsque Valdivia en eut fait la con-
quete (i). San Yago en devint la capitale, et on lui
donna pour port Val-Paraiso, ainsi nomme de I'aspect
enchanteur des vallees voisines. La navigation etait le
plus si'ir moyen d'etahlir les communications habituelles
du Perou avec le Chili; elle fut d'abord suivie Ires pres
des cotes, et elle permit de reconnaitre , dune maniere
continue , de longues lignes de rivages. La forme de ces
cotes occidentales fut ainsi delerminee : elle le fut jus-
qu'au detroit de Magellan, qui etait alors la seiile route
des navigateurs europeens. On avail embrassetous les ri-
vages de I'Amerique du sud : sa configuration generale
etait a-peu-pres tracee ; et si elle etait encore inexacle, du
nioins les navigateurs du seiziemesiecle avaientfait tout
ce que Ton pouvail allendre deux; vu I'etat d'imper-
(i) i5/lo,
23,
( 348 )
fection oii se trouvaient les sciences , les inslrumens el
I'ai'l i\u calcul.
On suivit penilant un siecle le detroit de Magellan ,
decouvert en iSao. La teire de Pen, qui le borne au
niidi , etait regardee conuue une pointe avancee de cet
immense continent austral , dont tousles anciens geo-
graphes supposaient I'existence ; et ce ne tut qu'en
1617 , que Schouteii et Lemaire , se dirigeant plus au
sud pour trouver un autre passage, traverserent entre
la terre des Etats et la terre de Feu, le vaste detroitau-
ciuel Lemaire a donne son noni. Toutes les cartes ante-
A
rieures a cette dt^rniere decouverte, assignent aux terres
australes la eirconfereiice entiere du globe : elles en
suivent les sinuosites , et elies en tracent les limites en-
tre le 55' et le 65° degre de latitude 5 limites imagi-
naires, que les navigateurs plus recens ont sans cesse
reculees vers le sud, a mesure qu'ils ont tente des ex-
peditions plus aventureuses, ou que les perfectionne-
mens de la science, el le desir de prolonger les decou-
vertes , les ont entraines loin des traces de leurs devan-
ciers.
Avant que los rives occidentales de I'Amerique du
sud eussent ete entieremenl reconnues, la conquete du
Mcxique avait deja permis de commencer et d'etendre
vers le nord plusieurs series de decouvertes. Cortez en-
voya (i) quelques detachemens sur differens points de
ce littoral , afin d'en prendre possession ; et les navires
qu'il fit construire dans les ports occidenlaux du Mexi-
qne en visiterent dabord les cotes : elles furent recon-
nues vers le midi, par Fernand de Grijalva (2) ; et Cortez
et lui , decouvrirent ensuite (3) la pointe de la (^alilor-
(1) i5xi. (•2) i5ri. ii) i535.
( M9)
Tire, ainsi ([u'une partie de la mer Vermeille (i) , oi'i
Francesco de Ulloa prolongea ensuite ses reconnais
sances. (2)
A leur exemple , d'autres navigateurs s'engageient
dans cette iner interieure. Vasquez Cotonado en par-
coirrut les rives orientales (3), et il recueillit dans les
contrees de Cinaloa et de Sonora , heaucoup dc rn-
meurs confuses sur line fanieuse -ville de Quivira, que
Ton supposait situee plus au nord, et que Ton repre-
spntait comme la capltale dun puissant empire. L'Anie-
rique etait alors le pays des fictions , et limagination
y avail tout agrandi.
Francesco de Alarcon etait charge, a la menie epoquo,
d'un nouveau voyage de decouvertes le long des cotes
oceidentales de la Californiej et Pedro Alvarado , un
des plus illustres conquerans du Mexique, se preparait
a une autre expedition, lorsque des conjures indietis
I'attaquerent pres de Guadalaxara, et !e pre'cipiterent
du haul d'un rochei'. (4)
Chaque annee se signalait alors par quelque entre-
prise maritime. Mendoza, vice-roi du Mexique , fit ex e-
cuter (5), par Juan Rodrigue Cabriilo, un voyage le
long des cotes de la Californie ; et le cap Mendocin,
ainsi nomme en niemoire du vice-roi , fut le point ex-
treme de cette navigation , ou !e littoral navait ete re-
Gonnu que par intervalles et sur dilferens points.
II ne se fit, dans les parages de cette contree, au-
cun autre voyage memorable, jusqu'aux navigations de
sir Francis Dracke , (jui , a la suite de ses memorables
(i) '53(>. C) ,541.
(2) 1037. (5) 1541.
( S.'.o )
expeditions militaires contre les colonies espagnoles ,
leconnut (i) les coles crAmerique depuis le 38" degre
jusquau 48* : il voulail s'elever plus au nord ; mais le
niecontentemenl de ses equipages lui lii abandonner
son projet , et il se dirigea vers les Moluques.
Un voyage du nord au sud fut bienl6t fait (2) dans
les memes parages , par le capitaine espagnol Gali, qui ,
apres s'etre rendu a Formose et au Japon, se porta sur
la cote nord-ouest d'Amerique , vers le ^'j" degre, et
revint du cap Engaiio a la Nouvelle-Espagne.
Ces cotes furent ensuite visitees iV) par Sebastien
Viscaino, que Monterey, vice roi du Mexique, avait
expedie d Acapulco : il reconnut d abord le littoral de
la Nouvelle-Espagne et une partie de la mer Vermeille ;
il visita dans un second voyage (4) les cotes occiden-
lales de Caiitornie, et s'eleva vers le nord , jusqua la
poinie de Monterey ct au c;ip Saint-Sebastien. Un na-
vire de cette expedition gagna le 43*^ parallele (5) , et
Ion y decouvrit une liviere proionde que le mauvais
lenips ne permit pas de remonter : on la nonima entree
ot riviere de Martin d Aguiiar.
Juan Yturbide navigua en i6i5, dans la mer Ver-
meille, on d penetra jusqu'au 3ic degre : la pecbe des
perles y attimit alors les navigateurs ; et Francesco de
Ortega y fit, dans cette vue, differens voyages (6). Gon-
zale de Barriga eut bientot a s'occuper dune noiivelle
reconnaissance , et il parcourut les cotes de la Califor-
iiie, oil Pinadero (8) et ensuite Lescurilla furent char-
oes d'elablir des colonies.
n
(0 1 57;). (5) i6o:t.
(2) i58>. (6) i63a, iin,!, i(i3',.
(3) iSQfi. (7) ifi4o.
(/,) i6(>;>. fS) 166/i , ififi; PI tfif>8.
( 35i )
Mais toutes les expeditions dont nous avons succes-
sivement rendu comple n'avaient pas ete faites d'une
nianiere assez exacte , assez -omplete pour determiner
la forme de la Californie.
Cette contree fut d'abord representee comme une
presqu'ile dans les anciennes cartes du Nouveau-Monde,
dans celles que Ton a jointes aux editions de Ptolemee,
dans celles d'Ortelins (i), de Mercator (2), de Ramu-
sio (3), dans une grande et belle carte manuscrite, pu-
bliee en i6o4 et deposee a la Bibliotheque royale : cette
forme etait encore la nieme dans les cartes de Guillaunie
Blaew qui parurent en 16 ^5; mais elle fut bientot al-
teree par des conjectures ou des relations erronees; et
la Californie fut tracee comme une ile dans les cartes de
Guillaume Samson pubiiees en i6bc); elle le fut egale-
ment dans celles de Wischer (4), de Jean Blaew, de Jan-
son (5), de Francois de Witt (6),- de Nicolas Samson (7),
et dans le grand globe terrestre de Coronelli qui orne
une des salles de la Bibliotheque royale. Cette erreur
sur la forme de la Californie dura soixanle ans; et la
figure d'une presqu'ile ne !ui fut rendue qu'en 1720 dans
les cartes de Guillaume de Lisle, I'uu des hommes qui
ont repandu le plus de lumieres sur la geograpliie, et
qui Tent degagee d'un plus grand uombre d'erreurs, soit
sur la forme des rivages, soit sur le calcul dfs positions,
et particulierement sur la fixation des lonu^itudes.
Les jesuites envoyes en Californie avaient alors ve-
rifie que cette contree n'etait pas une ile, et ils fircnt
(1) 1 570, (5) if.(ii.
(2) i585. (fi) 1660.
(■?) 'C06. (7) lG6n.
(■\\ ififii..
( 35. )
explorer (i),dans loute sa longueur, le golf'e profond qui
la separait du Nouveau-Mexicjue.
Peu de temps apres cette epoque, il parut entre I'Asie
et I'Anierique un nouveau pavilion qui allait en enve-
lopper toutes les extreniites nord-ouest. Cetait celui
dune puissance qui sortait a peine de la barbarie, s'ele-
vait coninie un geant au nord de I'ancien monde, em-
pruntait des nations poHcees les elemens d'une gran-
deur qui pouvait leur devenir redoutable, et atleignait
par la vaste etendue de son territoire, les rivages de
toutes les mers de I'Europe, et du nord de I'Asie.
La Russie etait particulierement interessee a etendre
ses navigations a I'orient de son vaste empire; Pierre F',
qui fut le createur de sa marine comme des autres ele-
mens de sa puissance, voulut d'abord faire verifier si le
nord-est de I'Asie etait separe de I'Amerique, ou si les
deux regions etaient contigues. Ce prince hit con-
struire deux navires vers la pointe rneridionale du Kam-
tchatka, dans le port de Petropaulowski: on y transporte
des chantiers de Saint-Ptitcrsbourg, et a travcrs les im-
nienses regions de la Siberie, toutes les pieces de gree-
nient et d'ainienient necessaires a cette expedition; et
Bebring s'embarque en 1728, pour reconnaitre les cotes
nord-est de I'Asie. II est le premier navigateur qui en
ait depasse la pointe la plus orientale, celle qui forme
le rivage le plus avance du detroit auqucl on a donne
son nom.
Bebring ne decouvrit pas la rive americaine dans ce
premier voyage et dans celui de Tannee suivante; mais
en 174' "J"*^ nouvelle expedition init a la voile sous ses
ordres et sous ceux de TcbirikoMj et la tenqiete ayanl
(i) 1721
( 353 )
separe leurs iiavires, chacun deux (itsur differens points
la reconnaissance dune partie des cotes noid-ouest de I' A-
nierique. Behringlesdecouvrit au nord du 58' deore: il en
suivit la direction de lest a I'ouesl , depuis les parages du
mont Saint-Elie jusqu'a la presqu'ile d'Alaska ; il recon-
nut ensuite larcliipel des iles Aleutiennes , qui se pro-
longe a I'oiiest de cette peninsule, et il vint expirer dans
une lie encore plus occidentale qui a retenu son noin.
Tchirikotf avait de'couvert les cotes d'Anierique an pen
plus au niidi, entre le 56® et le 58" parallele : il perdit
sur CO littoral quelques homines de son equipage, et il
revinl au Kanitchatka.
Delislede la Groyere, frere de notre celebre geograpbe
Guillaume Delisle, faisait partie de cette expedition, au
succes de laquelle il contribua par les memoires qu'il
avait faits sur d'autres decouvertes anterieures. Pierre-
le-Grand I'avait honore de sa bienveillance et de frequen-
tes visites dans le voyage qu'il fit a Paris en 1717 : La
Groyere fut du nombre des savans que ce monarque le-
gislateur attira dans son empire; ct Behring lui-meme,
ne en Jutland, et distingue dans la marine danoise par
ses connaissances et son intrepidite, fut associe par
Pierre I"" a I'execution de ses'grandds vues : ce prince
se connaissait en hommes; il adopta tous les etrangers
qui pouvaient concourir a sa gloire.
La route ouverte vers les cotes nord-ouestd'Amerique
par Behring et Tchirikoff fut suivie avec zMe et avec
?ucces par les navigateurs russes qui explorerent ces ri-
vages. Notre dessein n'est pas de retracer tous les pro-
gres que leurs voyages ont fait faire a la geographie de
ces contrees; et nous nous bonions a rappeler ici que
les expeditions successivement entreprises, depuis celle
de Tchirikoff en 1741 jusqu'a celle de Krenitzin ct de
( 354 )^
Levasheft eii 1769, expeditions que Muller el Villiani
Coxe ont sutlisamuieiit lail connaitrc, doiinereiit iiais-
sance a un commerce etendu sur la cote nord-ouest
d'Amerique, el aux importans etablissemeiis que le gou-
veinement russe y a tornies. La iiouvelle de leur fon-
dation determina I'Espagne a cherclier les uioyens d'e-
tendre et de proleger ses possessions occidentales : elle
fit occuper en 1-68 les forts de San Diego et de Mon-
terey. Une seconde expedition fut bienlot confiee a Juan
Perez, qui s'eleva jusqu'au 5^^ parallele, et revint au
49° degre 13o minutes, dans un mouillage auquel on a
ensuite donne le noni de Nootka.
La relation du voyage (jui fut entrepris en 177^, sous
la direction de Ayala, a ete ecrite par le capilaine Mau-
relle son pilote. Les navigateurs cherchaient a recon-
naitre le detroit designe dans les cartes sous le noin de
laniiral de Fonle : ils examinerent sans le decouvrir,
toutes les sinuosites de la cote jusqu'au 58" parallele, et
revinrent, en toucliaiit plusieurs points du littoral, a
Monterey eta San-lilas.
Les Anglais cherchaient, eux-niemes a etendre sur ces
cotes leurs decouvertes et a les prolonger vers le nord.
Le plus remarquable de ces navigateurs est le capi-
laine Cook J il avail ete charge de reconnaitre dans son
troisienie voyage (car nous n avons pas a nous occuper
ici des deux premiers) toules les cotes nord-ouest de
lAmerique, et de penelrer aussi loin quil le pourrait
le long de ses cotes seplentrionales : il commenca son
cxploratiou (1) au nord du cap Mendocin dans la nou-
velleCaliforiiie, visita successivemenl lentLce de Nootka
ot celK; du piince Guillaume, penetra dans la riviere qui
(i) Mars 1778.
( 355 )
lecul le nom de Cook, longea la presqu ile d'Alaska, en
suivit la cote seplentrionale jusqu'a la riviere de Bristol,
gagna le detroit de 13ehriiig, seleva vers le nord et le
long des plages d'Anierique, jiisqu'au cap glace qu'il at-
teignit le i8 aout 1778, el (iit force par uiie barriere de
glace qui etait alors impenetrable , de borner siir ce
point ses decouvertes. II gagna ensuite, en se dirigeant
vers I'ouest, les cotes orientates de I'Asie, jusqu'au 68^
degre, ou il fut egalement arrete par les glaces, et il re-
vint par le detroit de Behring dans la mer Pacifique.
L'anne'e suivante Cook recommenca ses explorations^
niais il rencontra la barriere de glaces un niois plus tot,
el il ne put pas nienie atteindre les points qu'il avail
observes precedemment.
Nous n'omeltrons point ici que la France et laGrande-
Bretiigne etaient alors en guerre, et que le gouverne-
ment irancais prescrivil a tous ses commandans de vais-
seau de trailer le capiiaine Cook conime apparlenanl a
une puissance neutre et alliee : salutaire exeinplc de
celte bienveillante protection que meritent tous les amis
de la science et tous les bienfaiteurs de Ihumanite!
Une vive el noble emulation, excilee par le desir des
decouvertes, s'elablissait alors enire les naiions. Arleaga
et Quadra parlirent de San-Blas en 1779, el seleverent
au nord-ouest jusqu'au port Bucarelli , au monl Sainl-
Elie el a la riviere de Cook. La France prit une part plus
active a ces expeditions apres la paix glorieuse de 1783.
La Perouse, parti de Brest en 1785, arriva le 23 juin de
raiinee suivante sur la cole nordouest d'Ameiique, a la
liautciir du mont Sainl-Elie, el il parcourut et releva
celte cote, depuis le 60'' degre jusqu'au 3()' : Cook ne
1 avail lecoiuiue que de distance en distance, el il n'avait
alten (juan 44^ '^«S'''' > pfxir rcnionlci' cnsuilo vers le
( 356 )
nord. Cette partie dii voyage de La Perouse donna la
preuve qu'il n'existait entie les deux niers auciine com-
munication, vers les points oi'i Ton snpposait que I'limiral
deFonte avait nayigue.
Dans I'annee 1788, une ilotiille espagnole , coni-
niandee par Estehan Martinez et Lopez de Haro, recon-
nutjusqu'a Unalaska les cotes ou les Russesavaient forme
des etablissemens.
Deux expedilions furent dirigees en 1789, vers la baie
de Nootkaj Tune etait sous les ordres du meme officier
espagnol Esteban Martinez, I'autre etait envoyee par
la compagnie anglaise de Macao. Au milieu des discus-
sions po'.iliques qui s'eleverent a cette occasion et qui
sont etrangeres a 1 ohjet de ce memoire, on reconnut
avecplus d'exactitude toute cette partie des cotes d'Ame-
rique. Elle tut encore visitee en 1791 par Salvador Fi-
dalgo qui etendit ses explorations vers le nord jusqu a
la riviere de Cook : on releva le port Mulgrave, le mont
Saint-liiic, I'entree du prince Guiilaume,'et Ton verifia que
le passage indique par Ferrer Maldonado n'existait pas.
Jacinte Caamano fit, I'annee suivante (1), les niemes
observations surle prt'lendu passage de ramiral de Konte.
On snpposait cette communication etablie par le detroit
place au sud-est de la pointe de Bucarelli, et Caamano
donna a cette entree le nom de Bocca y Brazos de Mo-
iiino.
Les goelettes espagnoles la Subtile et la Mexicaine ,
etaient chargees a la meme epoque de reconnaitre I'en-
tree de Juan de Fuca : Gagliano et Valdez qui comman-
daient les deux navires reconnurent que ce passage n'ou-
viait aucune communication avrc 1 Atlantique.
( 357 )
Les memes resultats furent obtenus par Vancouver,
(.harge de consiater s'il existait, entre le 89" et le 60"
ile<^re de latitude, une nier interieure et un passage de
I'un a I'autre Ocean : il atteignit, le 16 juin 1792, la cote
d'Amerique vers le 89" parallele, ii la parconrut jusqu'au
52° et reconnut i'entree de Juan de Fuca. L'annee sui-
vante ii conlinua ses recherches jusqu'au 56° degre, et
il les prolongea en 1794 au-deladu 61".
Quelques annees avant I'expedition de Vancouver,
un voyage de reconnaissance avait ete entrepris sur la
cote nord ouest; et cette expedition, faite sous les ordres
de Malespina, promettait a la geographic et aux sciences
naturelles d'importantes decouvertes, Mais elle u'a ja-
mais ete publiee. Malespina fut arrete apres son relour
en Espagnej ses papiers furent saisis, et toute publica-
tion fut interdite aux savans qui I'avaient accompagne.
Ainsi la puissance qui etait le plus a portee d'etendre
nos connaissances sur ce vaste littoral cherchait encore
a y envelopper dun voile myslerieux toutes ses decou-
vertes. Ce systeme avait ete suivi depuis la date de ses
conquetes : elle craignait pour TAmerique espagnole le
contact des autres peuples; elle y voyait ieurs pavilions
avec onibrage; sans prevoir encore que les etrangers n'y
seraient pas les premiers artisans de lindependance , et
que des possessions si eloignees, si vastes, et retenues
pendant trois siecles dans la minorite, trouveraient en
eiles-menies tous les principes de leur emancipation.
Nota. Nos Memoires sur ia cote orientale et sur les differentes ex-
peditions qui onl ete faites au nord du Nouveau-Monde , pour y trou-
ver un passage entre les deux Oceans, compl^tent la serie de nos
Observations sur la decouverte et la reconnaissance des c6tes d'A-
inei-ique. (Voy. le Bulletin de decemhre i833, page SSg. )
( 358 )
ITINERAIRE
DE CONSTANTINOPLE A ABOUCHIil
Par Arz-Roum , Tavris, Teheran , Isfaliaii
et Chiraz;
Rcdige dans Ics amities 1828 t7 1829
Par le comte Sebristori, ancien colouel d'etat-major an service
(le Russia.
Constantinople [Byzance. — Stai)ihouV).
Ville, population incertaine.
ScDTARi (ChijiopoUs. — Lsgou(lar).
Yille, population incertaine. Port de iner en face de
Constantinople.
On traverse le Bosphore pour se rendre de Constan-
tinople a Scutari.
Kartal, 21 verstes. (i)
Village de 5oo maisons, situe au milieu d'un pays
riche et bien cultive.
La route de Scutari a Kartal passe sur un terrain schis-
teux et quarzeux.
GuiBizEH iLil/issa). 26 verstes.
\illage de 45o maisons, situe sur une hauteur a la
distance d'environ 8 verstes du bord de la nier. C'esl ici
que se trouvait le tombeau d'Annibal.
De Kartal a Guibizeh on traverse un terrain calcaire.
Six verstes apres Guibizeh on passe par le village de Lan-
(i) Le rapport des ver.stes aux myriam^tres est de i a 0,10668.
( -^59 )
(liki qui est a hull verstes de la mer. Depuis Scutari
jusqu'a Guihizeli , la route cotoie les borcis du golfe de
Nicomedie.
IsMiD (^Nicomedie de Bylhinie). 42 verstes.
Ville de 6,000 maisons, situee sur les bords du golte
du meme nom, et sur le penchant dune colline.
Entre Guibizeh et Ismid , la route est taillee dans le
roc: on trouve a mi-cliemin le village d'llerekia [Hern-
clee)\ toutle pays compris entre Isniid et ce dernier vil-
lage (distance 24 verstes), est convert de bois.
Kara-Moussal, 3j verstes.
Ville de 800 maisons, situee au sud d Ismid a I'ex-
iremite orientale du <jolfe.
Entre Isniid et Kara-Moussal, le pavs est riche et bien
pays
cullive, on y trouve neanrnoins quelques prairies ina-
recageuses. Le golfe de Nicomedie a trenle-six verstes
de longueur sur six de largeur et cent cinq de cir-
cuit.
KxzDERVEND, 2C) verstcs.
Village de i5o maisons, population boulgare emigree
il y a cent trente ans environ; les habitans sont labo-
rieux et riches; on voit beaucoup de plantations presde
ce villajre.
La route se prolonge le long du golfe de Nicomedie;
lorsqu'elle le quitte, elle traverse un pays aride qui de-
vient toujours plus trisle a mesure que le cheniin s'en-
fonce dans les terrcs.
IsNicn (A'/trV), 20 verstes.
Ville de 12,000 habitans : climat mal sain et fievreux.
— Situee dans une plaine a I'extremite orientale sur les
bords du lac Tchinizit (^Ascaniiis).
Peu de verstes apres Rizdervend , la route traverse
( 36o )
line niontagne dii soiuniet de laqtielie on apercoit le
lac Tchinizit et la petite vallee do Pialedja situee sur ses
bords. Ensuite la route atteint les bords de ce nieine
lac qui sont marecageux et couverts de roseaux.
Ak-Serai, 38 vei'stes.
Village de i5o maisons.
La route traverse un bois de grenadiers et ensuite la
plaine d Isnich qui est tres cultivee et arrosee par le
Sakharia (^Sangarius) qu'on passe sur un pont en pierre
avant d'arriver au village d'Ak-Serai.
GuEivEH, 12 verstes.
Village de 4oo maisons.
La route traverse la riviere Sakharia avant d'atteindrei
Gueiveh.
Teraklou, Sfvverstes.
Village de 420 maisons; les environs sont bien cul-
tives, on voit beaucoup d'arbres fruitiers.
En quittant Gueiveh on gravit la pente dun rocher
escarpe, ensuite la route passe par un bois traverse par
un ruisseau, et vers la fin de la journee on passe par des
montagnes couvertes de pins.
ToRBALou 29 verstes.
Ville de 3,ooo habitansj elle est situee sur le plateau
dune montagne.
De Teraklou la route pa^se par des hautes montagnes
et ensuite par des vallees incultes. Pres de Torbalou,
on voit une montagne; on en atteint le somniet par un
sentier large a peine de trois pieds et qui a des preci-
pices a ses deux cotes.
Kodstebek 4o verstes.
Village.
(36i )
Pour arriver a Roiistebek on monte une cote extre-
niement raide qui conduit a des montagnes couvertes de
pins et de chenes ou il faut cheminer a travers des pre-
cipices par des sentiers etroits.
Nalikhan 36 verstes.
Ville de [700 maisons, la banlieue de cette ville est bien
cultivee.
En sortant de Koustebek, la route passe a travers des
bois de pins qui aboutissent a une plaine cbarmante ar-
rosee par un ruisseau.
Syoury-Hissar 24 verstes.
Village situe sur les bords dune riviere peu profonde.
On manque ici entierement de bois de chauffage.
Bey-Bazar 28 verstes.
Cette ville est batie sur un terrain inegal et est arro-
see par un ruisseau qui se jette dans I'Aias.
AiAS (^Issus), 4 1 verstes.
Village de 600 maisons; dans les environs on voit des
eaux minerales.
En quittant Bey-Bazar, on descend une monlagne
tres rapide; on traverse la riviere Aias dont le cours est
singulierement tortueux : elle porta aussi le nom de
Rermion-Kermin; ses eaux vont se confondre a celles
de la Sakharia pres de Gueiveh. La route passe ensuite
par un pays desert et incultej puis on rencontre des
cbamps converts de riz et pres d'Aias des tenains eten-
dus consacres a la culture du coton.
Angora {^Ancyre. — Engurieh), 42 verstes.
Ville de 25, 000 babitans; quelques voyageurs la font
monter a 4o>ooo; latitude 39" 3i' , longitude 30" 21' :
elle est situee sur un terrain inegal sur le penchant dune
24
( 362 )
coUine. La riviere Kizzil-Irniak coule a I'orient de la ville
de m^me qu'iin ruisseau qui arrose les jardins qui se
trouvent dans ses environs. C'est una ville des plus
commercantes de I'Asie. On connait les chales lissus de
poil de chevre de son territoire, En fait d'anliquiles on
y voit les ruines d'un temple en I'honneur d'Auguste.
Le terrain qui environne Angora se trouve etre dans une
plaine.
En sortant d'Aias , la route traverse plusieurs mon-
tagnes d'une etendue assez considerable, elle passe en-
suite par une plaine assez etendue et fertile, gravit une
montagne escarpee du sonimet de laquelle on decouvre
Angora, et de la en descendant apres plusieurs detours
dans la plaine on arrive a cette ville.
Hairi-Keui 36 verstes.
Village de 280 maisons.
La route jusqu'a Hairi-Keui traverse ou des plaines
verdoyantes , ou dejolis bois arroses par des ruisseaux.
Kilislar-Reui, i3 verstes.
Village situe au bord de la petite riviere Kouroudjik-
Sou.
Aksakhan, 32 verstes.
Village de 160 maisons.
De Kilislar-Keui a Aksakhan la route passe par une
Cute rocailleuse et couverte de bruyeres. On traverse la
riviere Kizzil-lrmak {Iris).
Baldjik, 26 verstes.
Village de 260 maisons.
Pays ties pauvre.
KiATiB-OuNY 1 3 verstes.
( 363 )
Village de 60 maisons, ce village esl entoure par dcs
luisseaux d'eau salee.
De Baldjik a KiatibOiiny, on traverse a gue une petite
riviere qui coule au fond dune plaine par laquelle passe
la route.
Ieuzgatt, 60 verstes.
Ville de 4)000 habitans, residence du grand feuda-
taire Tchapan-Oglou. — Ville florissante.
De Kiatib-Ouny a Ieuzgatt, le cheniin passe par un
pays plat, inculte et aride, ensuite on voil de la culture
raais seulement dans les environs des villages.
DiCHLiDJE 22 verstes.
Village de 60 maisons.
Serkioun 21 verstes.
Village de lOO maisons.
Hadji-Keui 44 verstes.
Village de 120 maisons, ce village est situe sur une
cote au fond dune plaine bien cultivee; ici se reunissent
les routes des caravanes de Smirne el d'Angora.
Entre Serkioun et Hadji-Keui, le pays est convert de
vignobles.
KiztLDJiK 36 verstes.
Ce village est arro&e par un ruisseau; il est situe sur
une hauteur au milieu de jardins potagers.
A six verstes d'Hadji-Keui vers Kizildjik on traverse
a gue une petite riviere, la route longeant ensuite pen-
dant quelque temps ses bords passe par un grand village.
Le pays en general est fertile et bien cultive.
Bazar-Keui 36 verstes.
Village de 2,000 habitans.
De Kizildjik a Dazar-Keui, la route traverse un pays
fertile et convert de villages. Apres dix verstes on laisse
24.
( 364 )
a qualre verstes a gauche la villc de Zil qui a une popu-
lation de dix niille habitans.
ToKAT 2 5 veisles.
Ville de 4o,ooo habilans, Turcs, Grecs et Armeuiens;
cast une des plus grandes villes de TAsie-Mineuie, elle
est situee sur le penchant de trois collines dont les bases
se leunissent : ses environs sont tres fertiles. On y fait
un commerce considerable de cuivre qu'on tire des mines
de Kebban, et de Malatia. Tokat est lapanage d'une sul-
tane qui en nomrae le musselim. Gette ville est sous la
dependance de Sivas (Sebaste), elle est a trois journees
d'Amasieh et a six de Sinope.
En sortant de Bazar-Keui on voit les ruines d'un
vaste caravanserai construit en pierres de taille. La route
est bonne et agreable; elle cotoie la riviere Tosanloue
qu'on quitte pour entrer dans une plaine fertile el peu-
plee. La route ensuite est renfermee dans des jardins clos
qui se trouvent pres de Tokat. La riviere Tozzan-Irmak
arrose la plaine de Tokat et va ensuite porter le tribut
de ses eaux dans le Kizzil-Irmak.
NiKSAR (iVt'o Cesaree de Cappadoce)^ 44 verstes.
Ville de 5,ooo habitans, elle est situee sur une hau-
teur tres escarpee: elle est environnee de marais et de-
fendue par un chateau en assez mauvais etat.
Partant de Tokat a six verstes, on passe a gue la ri-
viere Tozzan-Irmak. La route ensuite traverse un pays
arrose et fertile, et ensuite un bois ou coule un ruisseau
dont les eaux tombent en cascades. Lorsqu'on sort de ce
bois, la route est dans une plaine marecagnuse. Avant
d'arriver a Niksar on traverse la riviere Kelki-Innak.
Armeni-Keui, 42 verstes.
Village de 120 niaisons, population arinenieiuie j ce
( 363 )
village qui est le premier du pachalik d'Arz-Roum , est en-
vironne de gras paturages, et on y voit beaucoup debetail.
La route traverse continuellement des bois de sapin.
Kizil-Geuzmk, 26 verstes.
Village de 60 rnaisons, il est adosse a de hautes mon-
tagnes couvertes souvent de neige.
La route traverse des montagnes escarpees, et ensuite
de vastes forets de sapins.
Meium, 3 1 verstes.
Village de 56 rnaisons; dans ce village tons les habitans
etaient inscrits dans la niilice des janissaires.
La route de Kizil-Geuzlik a Meium fail de grands de-
tours dans les bois de sapin qui couvrent les montagnes.
Ces lieux sont souvent infestes par les Kurdes.
KouLE-HissAR, 37 verstes.
Village de 60 rnaisons , il est sitae sur la riviere du
nienie nom, et entoure d'un grand nombre de jardins;
le chateau appartenant a ce village est sur la cinie des
montagnes adjacentes; tons les habitans faisaient parlie
du corps des janissaires.
La route de Meium a Koule-Hissar, passe par un bois
de pins bien epais, ensuite elle gravit une montagne ar-
gileuse; dans cet endroit elle n'a que trois pieds de lar-
geur et longe les bords d'un precipice Ires profond, enfiii
parvenueau sommet elle descend par un ravin escarpe au
bas duquel on passe un torrent dune grande rapidile.
Endres, 4o verstes.
Village de 80 maisons, il est situe au fond d'une plaine
circonscrite par des montagnes, entoure de beaux jar-
dins et bati a moitie sur une hauteur el moitie sur un
terrain uni. Les trois quarts de sa population sont des
Armeniens.
( 366 )
En sortant tie Koule-Hissar on traverse la riviere du
nieine nom sur nii pont eu piene et apres on lotoie sa
rive tlroite pendant plusieurs verstes.
Kara-Hissar, 38 verstes.
Ville de 9,000 habitans ; elle est batie en ampbiiheatre
siir la pente dun rocher couronne par une citadelle, elle
n'est eloignee que d'une joiirnee des bords de la mer
Noire.
La route d'Endrcs a Kara-Hissar, apres buil verstes
atteint une montagne argileuse, douze verstes plus loin
elle traverse une vallee coupee par la riviere Koule-His-
sar, qu'on passe sur un pont en pierre. A Tissue de ce
pont on marcbe environ cent pas dans un chemin diffi-
cile taille dans le roc, et ensuite on descend une mon-
tagne assez elevee. Six verstes avant d arrivcr a Kara-
Hissar au sud on voit la route de Diarbekir et de
Bagdad.
ZiLEH, 32 verstes.
Village tres pauvre de 20 maisons.
La route de Kara-Hissar a Zileli descend une mon-
tagne au bas de laquelle est un beau village rempli de
peupliers et d'arbres fruitiers.
Sabarhdan, 5o verstes.
Village de 20 maisons, donl i5 grecques et 5 turques.
Kerkif, 27 verstes.
Village de i5o maisons; ce village, bati sur les bords
d'une riviere tres rapide, est entourc de beaux jardins.
LoRV, 33 verstes.
Village de 100 maisons, situe clans un pays agreable
el fertile en bleet en orge.
De Kerkif a Lory la route ne f;ut (juc inonlei el des-
(367 )
cendre des montagnes tres hautes , et traverse des bois
de sapins.
Tholas, 20 verstes.
Village tres miserable, de 35 inaisons, dont 3o ar-
meniennes et 5 turques.
Pekerik, 24 verstes.
Village de 65 maisons, la plupart aux Armeniens. II
est place au pied d'un rocher d'ou jaillit une source
d'eau potable. Ses habitans ont I'air d'etre dans I'aisance.
La route de Tholas a Pekerik traverse la branche oc-
cidentale de I'Euphrate , huit verstes avant d arriver a
Pekerik. On passe cette riviere a gue. Dans ce point, les
eaux ont une grande rapidite.
Ak-Kaleh, 44 verstes.
Village de 100 maisons dont 91 armeniennes et
9 turques.
De Pekerik a Ak-Kaleli, la route traverse de hautes
montagnes. Dix-huit verstes apres Pekeiik, on passe a
gue I'Euphrate, qui longe la route jusqu'a Ak-Kaleh.
Elidjah, 3o verstes.
Village de 72 maisons. On trouve dans ce village une
soui'ce d'eau minerale.
En sortant d' Ak-Kaleh, on passe I'Euphrate sur un
pont en pierre; on arrive ensuite, par un terrain peu
coupe, au village de Nardizan, plus loin a celui d'lennis,
et enfin a ceux d'Aranda et d'Alaga.
o
Arz-Roiim, II verstes. Lat. 39° 58' 5 long. 39° i5'.
Ville de 5,ooo maisons dont 3,6io aux Turcs, i,35o
aux Armeniens et 4o aux Grecs. Cette ville est situee
dans une plaine qui est une presqu'ile formee par les
sources de I'Euphrate; elle se trouve adossee a des mon-
tagnes qui sont souvent couverles de neige, et a quatre
( 368 )
versles de circuit. Le cliniat y est froid , :i cause de I'e-
levation du sol. Apres Bagdad, c'est la ville la plus im-
portante de la Turquie Asiatique; elle est I entrepot du
commerce entre la Turquie et le nord de la Perse. Les
Turcs habitent I'interieur de la ville, les Armeniens et
les Grecs les faubourgs. Au milieu de la ville, qui est
defendue par de hautes murailles et par un fosse pro-
fond, s'eleve le palais du pacha. Son territoire manque
de bois de chauffage ; on I'y apporle des environs de
Kars. Les pauvres brulent de la funte de vache. Les en-
virons sont tres fertiles en ble et en orge.
On voit pres de la route les villages de Azoumi , de
Belour et de Gez ; on traverse ensuite un petit ruis.seau
qui porte le nom de Rarasou , et on entre ensuite dans
la plaine d'Arz-Roum.
Alouak, village, ly verstes.
Population armenienne.
Ce village est situe dans la plaiiie d'Arz-lloum, ados-
see au pied des montagnes qui la bordent du cote de
I'ouest.
La route parcourt la plaine d'Arz-Roum.
I/viAN, village, 22 verstes.
Ce village est a peu de distance de la ville d'Haffan
Kale, peuplee de 5, 000 habitans , et situee aux bords
d une petite riviere qui se jette dans I'Araxe.
D Alouar alaian, la route laisse sur la gauche la ville
el la forteresse d'Hassan-Kale,qui est a 16 verstes de dis-
tance d'Arz-Roumj elle est batie sur un roc. Le pays est plat
et bien cultive. Les principaux villages qu'on rencontre
sent, sur la droite, celui d'Arsonjeh, et sur la gauche
ceux de Miagen et de Gomec. Ensuite la route passe par
e village de Kopri-Keiii , et puis on traverse I'Araxesur
( 369 )
un ponten pierre. Dans cet endroit, la riviere a i6o pas
de largeur.
Deli-Baba, 36 verstes. Village silue dans une plaine.
On traverse, en sortant d'laian, des montagnes; en-
suite la route passe par un pays plat et fertile. Les ha-
bitans cependant sont ici bien miserables, a cause des
vexations du gouvernement.
Torpa-Kaleh, 6o verstes.
Ville de 600 maisons, la plupart armeniennes , pla-
cee sur la pente dune colline couronnee par un fort
en terre, Elle est dominee par la montagne Kossek Dagh.
La route franchit d'abord un defile tres e'troit nomme
passage de Gerdina, et forme par des rochers. Elle passe
par Debar, village kurde, et ensuite elle traverse Mo-
lah-Soleiinan, village peuple dArnieniens catholiques.
En general , elle traverse un pays toujours plus ou
moins montagneux.
louNDjALi , 28 verstes, village.
Ge village et tons ccux envlronnans sont tres pauvres,
a cause des frequentes devastations des Kurdes.
La route depuis Torpah-Kaleh passe par une plaine
au centre de laquelle se trouvent des marais. On y voit
cependant plusieurs villages. Elle atteint ensuite le vil-
lage de Kara-Rilisia, peu peuple par des Kurdes et par
des Arnieniens. On passe ensuite h gue trois torrens qui
viennent des montagnes situees au nord, et qui vont se
Jeter dans I'Euphrate, qui court a lextremite meridio-
nale de la plaine , de lest a I'ouest. La route enfin tra-
verse une belle plaine arrosee par des ruisseaux noni-
breux, et couverte de villages dont les principaux sont
ceux de Datte, de Tape , de Kesick et d'Arnat.
DiAiJiNj 48 verstes.
( 370 }
Village considerable, fortifie en terre et peuple par
ties Turcs et des Armeniens. En has , on voit iin lit
profond forme par des rochers coupes a pic ou coule
I'Euplirate oriental, qui n'esl qu'un faible ruisseau d'en-
viron vingt pieds de large. 11 prend sa source a i8 versles
de Diadin.
La route d'loundjali a Diadin traverse Abakou, vil-
lage en mines, apres avoir laisse a cinq verstes sur la
droite le village de Cosmoulja et celui de Belasou, si-
tue aux Lords de I'Euplirate. Elle longe ensuite le bord
de cette riviere, qu'on traverse sur uri pont de pierre.
L Eupbrate coule ici a 1 extremite de la inontagne, pres
de laquelle est situe le village d'Utcli-Rilisia. La route
passe ensuite pres du village de Djogan, qui est a sa
droite et a la distance de deux verstes ; enfin elle suit les
bords de I'Euphrate, qui parcourt ici un pays de patu-
rages ou Ton voit peu de culture.
Baiazid, 36 verstes.
Ville de i4,ooo habitans, situee a 12 verstes de la
frontiere persane. Elle est batie en ampbitheatre sur la
pente dun rocher tres escarpe et defendu par quatre
forts dont un se trouve au bas de la niontagne. Sa po-
pulation est composee en grande partie d Armeniens.
Areh-Dilesi, 28 verstes, village.
Population persane et kurde.
Ce village est defendu par un fort eleve sur un rocher
qui le domine.
En quittant Baiazid, on traverse pendant 16 verstes
des niontagnes pelees et aridesj on passe ensuite par le
village de Kilisia-Kendi ou Agadjik, peuple par des
Armeniens et par des Rurdes; ensuite on descend dans
un pays moins accidente. Tous les villages et bourgs de
la Perse voisins de la frontiere sont defendus par des
( 371 )
petits forts en terre , a cause des incursions et dii pil-
lage des Kurdes.
KARA-lNEH,32verst., village. Population armenienne.
Zadvieh, 3o verstes ; village.
Entre Kara-Ineh et Zauvieh, on voit , sur la droite
de la route, le village de Korz-Kendeh , et pres de Zau-
vieh celui de lekafti.
Khoi, 35 verstes.
Ville de i,ioo maisons. Population persane et arme-
nienne. Elle est situee dans une plaine bien cullivee,
couverte d'arbres et de jardins. La ville est ceinte de
hautes murailles en briques. II y a des catholiques du rit
chalde'en, avec un eveque.
De Zauvieh a Khoi, le pays traverse par la route est
en general niontagneux. On voit sur la gauche le village
de Selaoun, et a droite ceiui de Khoiej cnsuite ceux de
Zaide et de Peseh, et non loin de la on traverse celui
de Pereh.
Tesotjtch , 28 verstes.
Village situea peu de distance du lac d'Ouroumieh.
En sortant deKhoi, on perd bientot de vue la plaine
qui environnecette ville; on passe la riviere Kotour sur
un pont en pierre de sept arches, et on gravit ensuite
une chaine de hauteurs, en laissant sur la gauche le vil-
lage de Desadjiz. L'aspect du pays est bien sterile jus-
qu'a Tesoulch.
Chebister, 4o verstes. Yille.
Elle est situee sur le penchant dune montagne for-
tifiee et environnee par nonibre de jardins.
A peine sorti de Chebister, et parvenu au somniet des
montagnes, on decouvre le lac d'Ouroumieh, ap'pele
par les Persans , Adai-Chali. Son circuit est de qtiatre
( 372 )
cent quatre-vingt, sa largeur de soixante-dix, et sa lon-
gueur de cent trente verstes environ. On y voit plu-
sieurs iles, dont la principale est celle noinniee Adai-
Chahl , qui contient plusieurs villages ; la seconde en
grandeur, est celle qui porte le noni de Kiasoun-Kale ;
le reste de ce petit archipel nest compose que d'iiots et
de rochers. Les eaux de ce lac sont bituniineuses et
par consequent on n'y trouve pasde poissons. A peu de
distance de Tesoutch, on voit suv la droite , le village
de Rhadar-Kone, ensuite a quatre verstes des herds du
lac, celui d'Ali-Banglou , et plus loin, les villages de
Kozec-Donar, Cliinouar, Kliomaieh, Bech-Kalelout, et
enfin ceux d'Ali-Arsaleth , et de Micholeh.
Tavris, 44 verstes.
Ville de 5o,ooo habitans. Cette capitale de I'Aderbid-
jan (ancienne Medie Atropatenc), a six verstes de cir-
cuit. Les ge'ographes pretendent que c'esl I'ancienne
Ecbatane. Elle est situee au pied du mont Oronte
(Djedeli-Dagh) , au fond dune plaine arrosee par le
Springt-Chah qui la traverse , et par I'Adgi , ruisseau
sale qui coule au nord. Elle est entouree de uiurailles
flanquees par des tours et par un fosse. Un chateau ,
nonime Kalai-Rachidie , servait jadis a la defendre du
c(!>te de lest : il tonibe maintenant en mines, ainsi que
d'autres monumens epars ca et la sur les hauteurs voi-
sines. Dans les environs de cette ville , on voit aussi ,
sur la droite, une reunion de jardins et de niaisons,
cndroits connus sous la denomination d'Hocknever.
Tavris est la residence du prince royal Ahbas-Mirza,
et elle est encore une des villes les plus commercantes
de la Perse.
De Chebisler a Tavris, la route traverse un trisle de-
( 373 )
sert , le terrain est presque partout couvert de sel , et
I'eau qu'on y rencontre est salee. On traverse le village
d'AIi-Chah , cnsuite ceux d'Alouan et de Maian, et en-
fin on passe sur un pont de neuf arches la riviere Agi ,
qui couie de 1 est a I'ouest, et qui se jettedans le lac de
Chehi.
Seid-Abad, 28 verstes.
Village situe au pied de Kara-Dagh , ou montagnes
Noires.
A quatre verstes au sud de Tavris, on voit les villages
de Basmidge et de Condouroud.
TiKME-DACH , 40 verstes. Village.
Sept verstes apres Seid-Abad, on trouve le village de
BiniKeui, et ensuite on traverse celui d'Oudjan. Tout
le chemin , entre Seid-Abad et Tikme-Dach , est en ge-
neral foit mauvais.
Turkman , 38 verstes. Village.
MiANA, 38 verstes et demi. Ville.
Cette ville est arrosee par une petite riviere qui se
jette dans le Kizzil-Orran. On y fabrique des tapis qui
sent tres estimes dans lout I'Orient.
Entre Turkman et Miana , le chemin traverse des
montagnes volcaniques. Sur la gauche on voit le village
de Garayeh. Tout !e pays compris entre Tavris et Mia-
na, est inculte et montagneux. On rencontre souvent
les mines dun grand nombre de villages et de cara-
vanserais.
Ah-Kend, 40 verstes et demi.
Ce village est entoure dune muraille , et situe sur
une coUine d'ou s'echappe uu ruisseau.
La route, en sortant de Miana, traverse sur un pont
de vingt-deux arches , la riviere Roud-Khauneh-Miau-
( ^74 )
neli , qui, avaiit le point ou on la traverse et pas loin
de la , recoil le Ceransou , le Cheher Cheye et I'Aye-
Dognibuch. Ensuite elle quitte la plaine et entre dans
une gorge etroite fonnee par le Koflan-Koiih (branche
dii niont Taurus). La riviere Kizzil Orran (le Mardus
des anciens), qui coupe en deux ce defile, et qu'on tra-
verse entre Miana et Ak-Kend , sur un pont en pierre
qui a ici un lit de soixante-quatre sagenes de largeur ,
forme la frontiere entre I'Aderbidjan et 1 Irak-Adjeim ;
elle va porter dans la mer Caspienrie le iribut de ses
eaux. On trouve ensuite le village de Koltepe qui est
sur la ligne des montagnes nommees Koflan-Kouh.
Herman Khane , 36 verstes.
Ce village, qui est fortifie, est du ressort du Khan
de Zenghan.
Entre Ak Kend et Hernian-Rhane , on voit , sur la
droite , le village de Decht-Boulagh.
Zenghan , 34 verstes.
Ville de io,ooo habitans , quelques t'aniilles arme-
niennes. C'est la capitale du pays d'Hamzeh , qui fait
partie de rirak-Adjeim : I'Hamzeh comprend en outre
les villas d'Abher-Fazoum et de Zerzin-Abad. Zenghan
est situe dans un pays sablonneux ou 1 on voit peu de
traces de culture , excepte les parties arrosees par la
petite riviere Zenghan, qui coule a peu de distance de
la ville du nieuie noni.
Entre Hcnnan-Khane et Zenghan , on trouve les vil-
lages d'Houloulch , et ensuite oeux de Kouchek et de
Bcrri.
SuLTANiE, 23 verstes.
Village de 4o maisons, jadis ville considerable et ca-
pitale de la Perse jusqu'au regne du Ghah Abbas T',
( 375 )
qui transporta le siege a Isftihan. C'est deja a douze
verstes du village actuel qu'oii commence a fouler aux
pieds les debris de ses beaux monumens. La plaine de
Sultanie est nue et totalement depourvue d'ombrage ;
cependant les moritagnes environnantes en rendent le
climat d'une extreme fraicheur. La cour y sejourne
pendant les mois d'ete, et le roi habite une maison con-
struite sur un monticule, a uneverste et demie de dis-
tance du village actuel.
Entre Zenglian et Sultanie, a droite du chemin , on
voit le village de Dechis.
Ebher, 4 1 verstes.
Ville de 6,000 habitans. Elle est situe'e au bord dune
riviere du meme nom, ct dans un pays fertile.
Entre Sultanie et Ebher, on traverse le passage nom-
me Teng-Ali-Akbar , ensuite on trouve le village im-
portant et fortifie de Sihin-Kalhe, ou s'arrete ordinai-
rement le roi lorsqu'il va chaque annee a Sultanie. Puis
on trouve sur la droite les villages de Che'raf-Abad, de
Korem-Dereh et d'Hieh , outre plusieurs autres moins
considerables.
KoRoup, 18 verstes.
Village.
Entre Ebher et Roroup, on voit, sur la droite, le
village de Cherat-Abad.
Sia-Dehen, 3o verstes.
Village de 5oo maisons. U est entoure de murailles.
Entre Koroup et Sia-Dehen, on trouve le village de
Nourri, dernier du district d'Hamzeh; ensuite sur la
gauche , les villages de Parsin et de Ziabet 5 et puis sur
la droite, les cinq villages d'Alangaya , d'Aseh-Hasar,
d'Ak-Hegan , Keniseh et Keck.
(376 )
Kazvin, 28 verstes.
Ville de 12,000 habitans. Longitude 4^^ i3', latitude
36" 11'. EUe est au pied du inont Elvend, branche du
Taurus. Elle fut t'ondee par Chapour 11 de la dynastie
des Sassenides; les Peisans la iionunent Djeinal-Abad.
Elle est defendue par des remparts flanques par des
tours en briques. Elle contient un grand nombre de
jardins ou se trouvent des excellens fruits. H y a des
manufactures de soie et de coton. On y recolte des pis-
taches qui font un article important de son commerce.
La plaine de Kazvi,n est riche en vignobles et en ar-
bres fruitiers.
Hassan-Abad , r4 verstes.
Village.
Kerbouz-Abad, 36 verstes.
Village.
Entre Hassan-Abad et Kerbouz-Abad, on trouve le
chateau de Kichia, maison de plaisance du Chah. C'est
ici qu'on commence a entendre parler la langue per-
sanne par le bas peuple.
K.£Mal-Abad, 40 verstes.
Village doiit les environs sont fertiles.
Ali-Chah- Abbas , 28 verstes.
Village.
Entre Kemal-Abad et Ali-Chah-Abbas , on trouve
plusieurs villages, entre autres , sur la droite, celui
d'Angouri-Mahale ; et sur la gauche, ceux de Chahin-
Tapi, Chainer-Lou, Hassan-Abad, Hossein-Abad, Kich-
lock , Gauzir Seng et Koran. On traverse ensuite la ri-
viere Aub-Keratch , sur un pont en briques, et les vil-
lages de Cherar et Baragoun.
( -^11 )
Teheran, 3o veistes.
Ville de 5o,ooo habitans. Latitude 35° 4<>'. Capiiale
du royaumc et (jlief-lieii de riiaii-Adjcni ( ancienne
Media). Elle est situe'e dans uri pays malsain, pies de la
chaine Albour ou Elbours. II s'y trouve le Deniavend ,
qui en est le pic le plus eleve. Son elevation est de djx~
huit cents toises au-dessiis de la nier Caspienne.
D'Ali Cbah-Abbas a Teheran, a qualre verstes de la
route, sur la droite , on voit le village do Geldin ; on
passe ensuite une riviere, au bord de laquelie est le vil-
lage de Karatch , et apres douze verstes on arrive a Te^
heran.
KiNAR-AlGHERD , 26 VCrStCS.
Village de 3,ooo habitans. II est traverse par un ruis-
seau.
En sortant de Teheran , on parcourl un pays prive
de culture; a dix verstes, sur la gauche, on voit les
ruines de Rey ou Rhagae, dont la latitude est 35" 3$',
et la longitude ^o" 20'.
PouL-DoLLAUK , 1 8 vcrstes.
Village.
La route traverse le passage de Mollohal-Mot,
KoM , 60 verstes.
Ville de i5,ooo habitans. Elle est regardee par les
Persans, conime une ville sainte , renfermant entre au-
tres le tombeau de la soeur de I'lmani-Reza.
De Poul-Dollauk a Koin, on trouve le Caravanserai
d'Houz Sultan, ensuite on traverse le marecage de Ra-
vir; et pres de Kv)m , on traverse la petite riviere de
Kour-e-Chotour.
NoussERABAD, 1 3 verstcs.
Village de i,25o habitans.
2 5
( ^7« )
Ue Koni a Nousserabad , on rencoiitiT le villa<re de
Larigaroud , ensuile le Caravanserai de Passangour , et
plus loin un second. On voit sur la gauche de la route,
les ruines de la ville de Dehnar , et enfin le Caravan-
serai de Sin-Sin.
Kachan , 19 verstes.
"Ville de 25,ooo habitans. C'est ici que Ton trouve
les meilleurs melons de la Perse.
De Nousserabad a Kachan, sur la droite duchemin,
on voit les villages d'AIi-Abad , Nouchabad , Britgoli ,
et Aroun ; et sur la gaurhe, ceux de Carabad, Badgoun,
Sen, Kay et Cosar.
GuEBER-AnAD, 12 verslcs.
Caravanserai.
Sonant de Gueber-Abad, la route suit les bordsd'un
petit lac artificiel qui porte le noni de Bound-Klioroud.
KoRODD, 48 verstes.
Ville de 1,000 habitans. Elle est situee sur la pente
d'une montagne.
MouRCHE-KouRD, 33 vcrstcs.
Village de i,5oo habitans.
De Koroud a Mourche-Koujd, le cheinin passe par
un caravanserai nomnie Aga-Remal. Ensuite a droite, a
Test, on voit les villages de Bendai, Khosro Abad et tic
Vazuoun.
G£Z, 24 verstes.
Village dc 2,5oo habitans.
La route traveise un pays pauvre et depeuple. On
voit des ruines eparses de tous cotes.
Isfahan, 9 verstes.
Ville de 200,000 habitans. Longitude 49° 3o', latitude
( 379 )
32" 24'. Elle est situee dans une [jlairie traversee par la
riviere Zenderoiul, et autrefois capitale chi royaume.
De Gez a Isfahan , on voit, sur la gauche du rhemin,
le village de Sagin.
tsFAHANEH, 3o verstes.
Village de ySo habitans. II est situe au pied d'line
chaine de montagnes. Ce n'est plus aujourd'hui qiTun
petit tort qui renfernie les maisons des habitans.
La route traverse le Zenderoud sur un pont de trente-
trois arches, et ensuile on commence a gravir des mon-
tagnes. On voit partout des ruines causees par I'inva-
sion des Afghans,
Mayar , 21 verstes.
Village de i,ooo habitans. II se trouve au pied dune
monlagne. H y a un beau caravanserai fonde par la
mere de Chah-Abbas.
KoMCHAH , 1 8 verstes.
Ville de 3o,ooo habitans. Ce lieu a ete considerable
et tres peuple du temps des Sophis; il occupe encore
un espace considerable et il est entoure de uiurs. De-
puis I'invasion des Afghans , il est considerablement
dechu.
De Mayar a Komchah, i! existe beaucoup de forts en
ruine , et a quatre verstes avant d'arriver a Komchah ,
on voit le tonibeau de Chah-Reza.
MosKOD-BoGGY, 2y vcrstes.
Village tres miserable; on n'y voit que des ruines.
Yezdi-Kast , 2 2 verstes.
Ville de3,ooo habitans. Cette ville, limitrophe des pro-
vinces du Fnrs et de I'lrak, otait un lieu important avant
I'invasion des Afghans. Elle est au fond d'uno vallee
bien cultivee et arrosee de phisieurs canaux.
.: ^:'<<
25.
( 38o )
Choutgostan , 1 6 verstes.
Village (le 5oo habitans. II «>sr situe dans un fort
ronstriiit en terre.
Abadaii, i8 verstes.
Ville de 5,ooo habitans. Elle n'ofrre qu'une longiie
etendue de murailles ruinees. Sa population actuelle
est toute renfermee dans un fort carre , defendu par
une tour a chaque angle, et par trois tours dans la lon-
gueur de chacun des o6tes.
SouRMAK, ii verstes.
Village de 4,5oo habitans.
KhoneKorrah , 2 1 verstes.
Caravanserai.
Debid, in verstes.
Caravanserai.
A peu de distance de KhoneKorrah, on franchit un
passage tres eleve, impossible a passer lorsqu'il tonibe
de la neige.
Khone-Kergaub, 19 verstes.
Caravanserai.
De Debid a Khone-Kergaub , i;i route traverse un
pays aride et prive de hois.
MouRGAUB, 2 1 verstes.
-I ,
Village. On y voit un fort et plusieurs jardins enclos.
De Khone-Kergaub a Mourgaub, la route traverse
un pays inegal , depeuple et prive de culture.
Kemin , 22 verstes.
Village de 5, 000 habitans.
De Morgaub a Kemin, la route passe cntre les bases
de deux chaines des moiUagnes.
Sevou^d, 19 verstes.
( 3<Si )
Village tie 85o hahitans. II est sitiie an pied dun es-
carpenient d'une niontagne, mais toutefois a une eleva-
tion assez considerable.
Zergoun, 36 verstes.
Village de 5,ooo habitaus. 11 est miserable et situe au
pied dune fde demontagnes, a I'extreniite meridionale
il'une plaine peu etendue.
De Sevound a Zergoun, la route traverse une plaine
arrosee par la riviere Roud-Khone-Siound, ensuite on
passe sur un pont la riviere Bender-Emir ( I'Araxe des
anciens) qui se jette dans le lac Baktegliian.
Chiraz, 1 5 verstes.
Vilie de i3,ooo maisons , ou (55,ooo liabitans. Lati-
tude 29° 36'. Capitale du Tarsistanj elle est traversee
par la riviere Rokn-Abad. Son climat est excellent, n'e-
tant pas sujet a de grandes variations. Elle est extre-
menient decline de son ancienne splendeur. Au nord-
esl, a peu de distance, on voit le tombe<iu d'Hafi , etj
dans la meme direction, mais plus loin, se trouventles
ruines de Persepolis.
De Zergoun a Chiraz, on traverse des montagnes
privees de vegetation , et ensnite on suit les bords tor-
lueux de la riviere Rokn-Abad.*
Bagh-Cheragh, 5o verstes.
Village.
De Chiraz a Btfgh-Cheragh , le chemin est extreme-
ment mauvais, et presque aussi iabnl(Mix que flans Its
montagnes.
Khone-Zenioun , 1 5 verstes.
Village de 3.5 maisons, ou 12:^ habit.in.s. Viis de ce
village coule un ruisseau.
De Bagh-Cheragh a KhoneZeiiioun, la route traverse
( 382 )
sur uti pont en pierrc, une riviere pros da village ile
Radars, et passe ensuite par un pays de inontagnes.
Desterdjix, II verstes.
Villa de 600 maisons , on 3, 000 habitans. En i-'Sy ,
ce n'etaic qu'un village , aujourd'hui ville considerable
siluee dans une plaine, au pied d'une niontagne.
La route traverse uue forel, passe ensuite au pied
d une niontagne , pres de la on voit un caravanserai
qui n'est pas encore acheve.
Abdoui, 24 verstes.
Village de 800 niaisons, ou 4,000 habitans. 11 est si-
tue dans une petite et jolie vallee plantee de chenes.
La route parcourt la plaine de Desterdjin , ensuite
elle gravit la longue et fatiguante chaine nominee Pirai-
Zoun, et la traverse au passage nomnie Dokter, enfin
elle passe par ia vallee d'Abdoui.
Kazroun, 36 verstes.
Ville de 4,000 niaisons , ou 20,000 habitans. Elle est
situee dans une plaine. Elle occupe une grande surface,
niais ses murs sont presque lous en ruine; a peu de dis-
tance de la ville, on voit les vestiges de I'ancienne ville
de Chapour,
La route passe par la vallee d Abdoui , et ensuite
traverse une niontagne. Dans le point le plus difficile
de la descente, on a construit une route et pratique des
parapets. On traverse ensuite un inarecage qui est for-
me par I'extremite dun lac qui s'etend au sud, ensuite
on trouve une chaussee appelee Pouli-aab-Guini. Enfin
on traverse la plaine de Karzoun.
Khaumauidge, 8 verstes.
Village de 5oo maisons, ou 2,r)cfo habitant. II est
C 383 f
situe dans une plaine du meme noin, dorit letendue est
de sept verstes de longueur sur deux de largeur.
La route de Kazroun a Khaumaridge passe par le vil-
lage de Dires et quitte la plaine de Kazroun. Elle tra
verse ensuite des montagnes au passage noninie Tergui-
Tour-Koun , et apres elle , passe par la plaine de Khau •
maridge.
Khicht, 24 verstes.
Village de 600 niaisons, ou 3,oou hahilans. II est .si-
tue dans une plaine.
La route traverse la plaine de Kliouinaridge, atteint
ie sommet de hautes montagnes, ou Ton rencontre par
fois des passages dangereux. Apres avoir atteint le pied
du versant oppose des montagnes, on cotoie une riviere
qui a sa source pres deChapour, ensuite la route tra-
verse encore une haute montagne nommee Moidlouh., et
passe par le village de Konarai-Takt , a cinq verstes
avant d'arriver a Khicht.
Daliki, 18 verstes.
Village de i,coo maisons, ou 5, 000 habitans. 11 est
considerable et defendu par un fort. On y voit plusieurs
jardins plantes de palmiers , et des sources d'eaux
thaudes. Une petite riviere le traverse.
A quatre verstes de Khicht , la route commence a
gravir des hautes montagnes qui appartiennent a la
chaine de Cotul. En les descendant, la route lon^e les
J)ords dune riviere pendant deux veistes, et ensuite on
la traverse a gue trois fois, ct apres six verstes griwis-
sant encore des montagnes, on arrive a Daliki.
BiRASGouN ou BouAZJouN , W"] vcrstcs.
^ illo de n,ooo maisons, ou 10,000 habitans. Elle est
^ { 384 )
eniouiee de murailles, et fait, avec Abouchir, uii com
iiierce iniporlaiit ile colon , tabac et froment.
En partaiit de Daliki, ia route parcourt des inunta-
j^nes pendant vingt-hiiit a Irente verstes : elles sont
prcsqiie entierenient de roc. Le cheiniii y est difficile el
inauvais. Avanl de coniineiicer a gravir ces monlagnes,
on traverse un ruisseau plein dc naphle. Douze verstes,
avanl d'arriver a Birasgoun, on trouve plusieiirs villages
sur la droile et sur la gauche, dans vin terrain pen ac-
ridente.
Alichaingi, 2 1 verstes.
Village de i5o niaisons, ou ; 5o habitans.
En sortant de Birasgoun , la route traverse un pays
cuitive ou Ion voit beaucoup de plantations d'arbres.
Ensuite elle passe pres du petit fort Kocli-Aub, apres
deux verstes, par le village d'Amadieli, et enfin elle tra-
verse une pelite riviere qui se jettc dans la nier, et dans
la direction de I'ouesl , on arrive a Alichangi.
Aboucmir ''
Ville et port, sur le golte Peisique. Lalilu. ^8° 5g .
(),ooo habitans Persans , Indiens et quelques Arabes.
Elle est situee sur une presqu'ile, entouree par la nier
L't par des marecages. Mauvais climat , il y regne des
vents violens, une grande secheresse et des exhalaisons
malsaines. Les ophtahnies y sont endeniiques. Elle com-
merce avec les Inde.s el 1 Arabic. Les Anglais seuls, parmi
les Europeens , y font le couunerce.
La route d'Alichanefi a Abouchir se diri"eant a lest,
traverse, pendani luiil verstes, des marecages qui se
prolongent jusqu au port d'Abouchir: elle se dirige en
suite vers !e pic rlllalila , el pies dc six verstes, aboulil
a Abouchir.
( 38f5 )
DESCRIPTION
U I! Q IT A R T I E U r> E S A I N T E - C A T H E R I N E
ET 1)1! SES EWVIROKS
(lie cle Cuba).
La coil tret; , ttacee sur la carte ci-jointe , figure iiii
Iriaugle , forme, an sud , par la thaine de niorilaones,
diles de la Sierra 'Maeslra , du limon , et en parlie par
les cotes ; an nord , par les nionts iClateru , du Libun ,
du l\iunis ^ et le prolongement de celte chaine j entin,a
Test , par la ligne tiree de rextreinite de la baie de
Guantanamo , au mont latera. Sa surface carree est
d'enviroii cent quararite lieues 5 elle est divisee en plu-
sieiirs qiiartiers (partidos) , 011 Ton eompte trois vil-
lages , savoir : le Saltadero , ie Tigunbo , le Caney, et
apeu-pres cinq cent cinquante propnetes nivales , y
conipris les hates, ou grands paliuages. Dix-huit niillo
negres et lioninies de couleur cidtivenl ces canipagnes;
le nonibre des blancs ne s'eleve pas a plus de deux niille.
Ces differens quartiers sent aduniiislres par des chefs
appelos capitaiies de partUlo ^ qui reunissenl I'autorite
civile et mililaire. Le Saltadero et le Tiguabo sout les
seuls points 011 il y ait quelques soldats espa'gnols com-
niandes par un offioier , (jui reside dans le premier dc
ces villages.
AvauL le defrichenient assez recent des terres , il
n'exislait , dans cette contieo, priniitivenient couverte
d'inniierises i'orets, (|ue des hates on Ion clevait des
bestiaiix; faute d'holclleries , les |)roprietaires de ces
( 386 )
hates etaient obliges, coniiiH; ils le soiit souvenl encore,
lie (lonner Ihospilalile anx voyageuis. Ce nc fiit que ,
lorsque lie nonibreux colons, presque tous refiigies de
Saint-Domingue, vinrent apporter, dans celte lie, leur
active industrie et ies debris de leurs ancieiines fortunes,
que ce vaste teiritoire pril un aspect nouveau, que des
etabiissemens agiicoies Furent fondes, et qu'eut lieu la
formation des q.iartiers, auxquels on donna Ies nonis
des principaux hates, ou celul des rivieres.
On reniarque dans cette parlie de Tile de Cuba , an
milieu des bois epais qui I'onibragent encore, quelques
belles plaines arrosees par de nonibreuses rivieres qui
descendent des montagnes environnantes ; Ies prinri-
pales sont : le Guantanaino, le Inibo^ le Goaso et Anvyo-
kondo^ la premiere, qui est aussi la plus iniportanle, re-
coil le laibo, ainsi que plusieurs autres torrens , et se
jelte ensuite dans la vaste baie a iaquelle elle a donne
son nom-, Ies Bongos, ou Mistics, remontenl cette ri-
viere jusqu'a I'embarcadero, qui est a quatre lieues de
son embouchure; c'est a cet embarcadero, expose a de
frequentes inondations , que Ies habitans de ce canton
sont obliges mainlenant d'envoyer leurs denrees , pour
etre expediees a Santiago de Cuba. La grande quantite
de sables que charroie cette riviere, surtout lors de la
crue des caux , forme des bancs qui la rendront bien-
tot innavigable. Le Goaso recoit le Bano el le Rio de los
P/atanos, et continue paisiblenient son cours ; il nest
pas navigable. \J Arroyo-hnndo , avant d'arriver a la mer,
se perd suhiteinent dans Ies sables, a peu de distance
de la baie de Giiantanamo. Cette baie , a Iaquelle Ies
Anglais onl donne le noni de Cuinberlajid, est une des
plus belles el des plus vasles que I on coniiaisse ; elle
penetre, a plus de six liouos , dans Ies tcrres et fnirn<^
( 387 )
plusieurs bassins ou Ton pourrait elablir d'excellens
ports. Sa largeur est d'environ quatre a cinq lieues dans
certains endroits, et dans d aiitres d une denii-lieue seu-
leinent, ce qui permettrait qii'on la fortifiat a peiide frais.
Toutes les rivieres dont nous avons parle plus haut,
et qui la plupart out ordinairenient tres peu d eau, de^
viennent des torrens impetueux et redou tables , lors-
qu'il pleut seulement deux jours de suite ; personne ne
pent les francbir alors. Les plus grandes sont le sejour
d'une multitude de caymans, qui font une guerre a mort
aux bestiaux qui s en approchent. Lorsqu'une vache ,
ou tout autre bete a corne , vient boire dans la riviere,
et que le cayman I'apercoit , il s elance a 1 instant sur
ei!e, la saisit par le museau , lentraine avec lui dans
I'eau pour la noyer, et la devore ensuile tranquillement.
Get animal, le seal nialfaisant d'ailleurs, qui existe dans
ce pays, n'attaque pas I'homme, dont il redoute au con-
traire I'approche.
Entre le Goaso et TArroyo-bondo , on reniarque les
traces dun ancien canal qui parait avoir servi de ligne
de communication de la baie, au bate de los Canos. Vn
vieillard octogenaire, et qui a babite cette contree de-
puis sa jeunesse , assure que ce fut Touvrage des An-
glais, qui , il y a environ soixante-dix ans , opererent
une descente sur cette cote, ou ils prirent position sur
le pencbant des montagnes, et creuserent ce canal, afin
de pouvoir transporter plus (acilement, dans leur camp,
les vivres et munitions qu ils tiraient de leurs navires ,
mouilles dans la baie de Guanlaiiamo. C'est, sans doute
de ce canal et des brandies que forment les deux ri-
vieres, entre lesquelles it se trouve place, que le hate
de los Cnnvs a pris sou nom; ((un) si^nilie, en espagnol,
canal, ou conduit deau.
( 388 )
Les moiitagnes jui traversent les plaiiies de Sainte-
Catherine nieriteiit toiite rallention du vovaoeur. En
outre des beaux points de vue dont on jouit , a chaque
pas, du haut de ces belles niontagncs, elles renfernieiit,
a n'en pas doutcr , de riches mines de fer, de cuivre et
ineme dor j assez d'indices I'annoncent.
Au nord du nioiit Liban, existent des grottes vrai'
ment curieuses; elles ne sont connues que depuis une
quinzaine d'annees. Ces grottes , au nombre de douze,
se suivent toutes dans la nienie direction^ elles vont de
lest a I'ouest ; on y penetre par une seule entree , et
ion passe successiveinent de iune dans I'autre; elles
sont d'ailleurs d'un acces pUis ou moins difficile; il y
en a quelques-imes dont les voiites sont d'un poli re-
marquable et dune eclatante blancheur. Ces voutes
distillent incessainnient une eau cristaline, dont se for-
ment des stalactites brillantes qui representent niille fi-
gures diverses, et produisent, a la clarte des flambeaux,
leffet le plus merveilleux. II faut deux heures pour par-
< ourir ces souterrains.
A deux cenla pas environ de ces grottes se trouve
une autre caverne, dont on ne connait pas encore loute
1 etendue, et dans laquelle serpenle une petite riviere ,
dont les eaux glacees et transparentes , semblcnt s'a-
bimer dans un gouffre sans fin. Le moindre bruit que
Ton fait aupies de cette caverne , a un retentissement
immense. La riviere du Goaso, ayant ses sources appe-
lees par les Espagnols, /as Cabezas del Goasu , a une
lieue de Ki , et ses eaux se perdant subitement sous
terre , on presiune, avec raison , que celle qui coule
dans le souterrain est le Goasu lui-niOmc. Cette riviere
leparait d ailleurs de lautre cote de la montagne, a une
demi-lieue au dossus du hate do Gonso-Rivn.
( 389 )
Les cafeieres, dans le quartier tie Sainte-Gatherine ,
sont presque toutes sur les hauteurs, oii regue une tle-
licieuse fraicheur que le cafe piefere au soleil hrulant
de la plaine. Ce nest au contraire que dans les plaines
que Ion cultlve la canne a Sucre, le colon, I'indlgo et
le tabac.
La niesure de superficie en usage dans celte con tree,
comme dans le reste de I'lle, est la cabaUeria^ qui com-
prend dix carreaux de terre ; le carreau a sojxante
toises carrees.
David ,
Consul de France a Santiago de Cuba.
Nota. La carte du quartier de Sainte-Catlierine, qui accompagne
cette Description , paraitra avec le prochain nuni^ro.
DEUXIEME SECTION.
DOCUMENS, COMMUNICATIONS, NOUVELLES
GEOGRAPHIQUES, ETC.
ExTRAiT (Vune lettre de M. Graberg de Hemso
a M. d'Avezac.
Florence, le aonovembre i8'54.
Pour repondre a Ihoiiorable coiiiniission dont
vous me chargez.de vous donner q elques indications
siir les travaux geographiques les plus recens qui aient
paru en Italic, je me suis empresse de vous transmettre
pour la Societe de geographic, un cxeuiplaire dun me
moire de n)a facoii , iniprime dans le journal napoiitain
nomme le Progresso , et qui presente la revue de cinq
ouvrages de ce genre dernierement publics en Italic.
A cettc liste il faudra maintenant ajouter :
1° 'LeFojdge dans la Ligurie maritime^ par David Ber-
tolotti , Turin, 3 volumes in-S", avec carte jreoora-
phiquc;
i°Dizionario geografico e statistico deiducatidi Parma^
Piacenza e Guastalla, par Laurent Molossi, Parme i832-
i834, gros volume in 8" avec carte geographique des
trois duches;
3° les 4* tit 5" cahiers ou livraisons de celui dc la
Toscane, par Emmanuel Repetli, dont les livraisons pre-
cedenles se trouvent analysees dans mon article du
Progresso ;
4° Le 3' cahier du Dictionnaire geographique et sta-
( %' J
tistique ties eta ts dii roi de Saidaigne , par Goffrcdo
Casalis. *
Quant a I'ouvrage de M. Molossi qui vient de paravtre,
c'est un ouvrage plutot historique qu'etiiDographique,
calqiie sur un essai ecrit en 1794 par feu Muratori et
imprime en 1824, pour les etats dii due de Modene. II
renferme toutefois des notices et des rensei"neniens d'un
grand inleret et d'une grande importance pour la geo-
graphie et la statistique {Cenni geogmfici e statistici); et
s'il cede en merite intrinseque a ceux de MM. Repetti
et Casalis, il les devance en ce qu'il se trouve tout-a-fait
aclieve, au lieu que les deux autres ne le soiit que pour
un sixieine de leur carriere, et ne seront pent-etre ter-
mines que dans quelques annees. La troisieuic livraison
du dernier est a peine aux lettres AZZ; la cinquieme
de Repetti au mot Camuscin^ et il en faudra deux autres
pour terminer, avec la lettre C, le premier des trois vo-
lumes de Touvrage.
A Rome Ton s'occupe aussi d'un pared dictionnaire
pour les etats de TEglise, et a Naples Ion est depuis
quelque temps en possession de I'excellente chorographie
du royaume des Deux-Siciles, en 22 cartes accompagnees
de descriptions, par Benoit Marzolla.
Pour la topographic provinciale nous avons deux bons
volumes de M. Mathieu Franacreta , intitules Teafro to-
pografico-storico-pratico della capitanata.
Une cinquieme edition de la geographic physique et
politique de Louis Galanti se continue aussi a Naples,
et le 3^ volume vient de paraitre.
Un autre ouvrage aussi curieux qu'interessant, pu-
blic cette anne'e a Genes, est le Saggio sid moto rotntoiio
del Mediterraneo, dimoslrato teoricamente, e comprovato
( 392 )
colle allia'ioni e coiiosioni deUe caste, par Jerome Bolliiii,
architectc ingenieur.
On me parle encore d un coiirs tMenientaire de topo-
graphie par Gaetan Palermo, dont le premier livre vient
de paraitre a Naples.
En Toscane, le savant et laborieux docteur Zuccagni
Orlandini s'occupe tres serieusement dun grand ouvrage
statistique et geographique de toute lltalie, sur le plaii
et I'etendue de son excellent Atlante geografico, fisico e
storico del aranducato dl Toscana.
Un second supplement au Saggio statistico delF Italia
do M. le comte Louis Serrislori, vient de paraitre a Lau-
sanne. Vous savez deja que I'ouvrage principal et ie pre-
mier supplement orit paru cette annee a Vieiine. Et sa-
chant que j'allais vous ecrire, cet illiistre et savant con-
frere vient de me remettre, pour vous etre transmis, un
exemplaire dudit second supplement, avec priere de le
presenter, en sou nom, a la Societe de geographic, a
laquelle il me charge encore de taire parvenir ci-joint un
Itineraire manuscrtt de Constantinople a Ahouchir par
Arz-Iioum, Tour/'s, Teheran, Isfahan et Chiraz, rcdige
dans les annees 1828 et 1839. II serait flatte et charme
si cet Itineraire pouvait trouver place soit dans un ou
deux des prochains numeros du Bulletin de la Societe,
soit dans le volume IV des memoires, qui doit etre sur
le point de paraitre. Je prends la liberte, Monsieur, de
vous recommander ce manuscrit el sa destinee future,
et de vous assurer que 1 accueil qui lui sera fait sera re-
garde par moi comme fait a une de mes propres produc-
tions scientifiques.
Le comte J. Gkaberg de Hemso.
( 393 )
ExTRAiT (i'nne lettre rle M. Alfred lieumont , inemhre de
la Socit'te h M. le president de la Commission centrale.
Florence, le 24 novembre i834.
Je ne veux pas tarder plus long-temps, Monsieur, a
vous communiquer quelques renseignemens sur des
publicalions recentes qui concernenl la Toscane, et qui
peuvent avoir de I'interet pour la Societe de geographic.
Le nombre n'en est pas grand : mais le Diclionnaire qeo-
gj'aphique, physique et historiqite de la Toscane , par
M. Em. Repetti, que je dois nommer en premier lieu
et qui contient un vrai tresor de notices et de dates*
equivaut a lui seul a bien d autres. Jusqu'a present cinq
cahiers du premier volume de cet ouvrage ont para
(Florence, 1 833-34- 44° P- in-8^). Les materiaux hlsto-
riques sur ce pays etant en grande abondance , cette
partie de I'ouvrage a dii offrir moins de difficultes que
celle de la statistique : qu-^ ique, vu la quan tite d'endroits,
tous interessans ncmmement pour I'histoire des temps
des republiques, rous nommes dans une foule d'ecrivains
et de diplomes , cette portion alt du donner lieu a de
longues recherches, qui certainement n'auraient pas pu
etre executees avec plus d'exaotitude et plus conscien-
cieusement, que ne les a faites M. Repetti. Dans les oas
ou les historiens et les chroniques ne sont pas d'accord,
on laissent dans I'incertitude, I'auteur a consulte les ar-
chives, qui lui ont fourni quantite d'eclaircissemens.
La statistique, qui trouve si peu d'encouragement dans
plusieurs pays de I'ltalie, n'est pas traitee avec nioins
de soin, et les tableaux de la population a ditferentes
epoques, nomniement du temps du regne de Come P'',
vers la moitie du dernier siecle, et a I'epoque ounous
a6
( 394 )
sommes, tlonnent des resultats tres interessans et a-la-fois
tres avantageux quant a I'etat actuel. II y a des cas, ou
le nonihredes habitanss'est presque double depuis x'j^^i
par exemple dans les communes d'Anghiari (vallee du
Tibre), d'Arcidosso (vallee de I'Orcia), de Calcinaia (val-
d'Arno Florentino), etc.; il s'est plus que double dans la
commune de Gampiglia (Maremme) qui en 1745 avail
773 babitans et en a a present 2,i4i; dans celle de Cam-
pagnalico (vallee de lOmbrone sienois) et d'autres; il se
trouve meme un exemple comme celui de la paroisse de
Bolgberi dans le comte de la Gherardessa, qui en 1745
ne comptait que 109 individus, et en a aujourd'hui 535.
Parmi les articles les plus remarquables sous le rapport
bistorique et descriptif se trouvent ceux qui traitent des
anciennes abbayes de la Toscane, de la ville d'Arerro,
de Barberino, de Bientina, de Gampiglia, etc.
Les cabiers publics con tiennent encore des descriptions
tres etendues et exactes de I'Apennln toscan , de ses
differentes branches, des terrains et des roches qui le
composent, du caractere de ces montagnes, des sources
d'eau minerale qui en jaillissent (qui se trouvent classees
en six especes d'apres leurs qualites, et dont celles de
Lucques, de Monte Gatini, de S. Casciano, et le Bagno
Amorba dans la province de Volterre, pres duquel on
recueille du borax en grande quantite, sont les plus re-
marquables), des mines et veines metalliques qu'elles
contiennent, etc. Un article tres important est consacre
a I'Arno, et donne des details sur la formation, le cours,
les differens bassins et la chute de ce fleuve. M. Repetti
lui-meme etant savant mineralogue et geologue, il a su
donner a cette partie de son ouvrage un interet tres
prononce, et I'histoire naturelle de la Toscane n'est
certainement pas ce qu'il y a de moins soigne.
( 3y5 )
Le dictionnalre dont je vieiis de parler, qui embrasse
outre le grand-duche de Toscane encore le duche de
Lucques, la Garfagnana et la Lunigiana, et qui fait le
plus grand honneur au savoir et a lexactilude de I'au-
teur, doit former trois volumes, chacun da-peu-pres
36 feuilles d'impression tres serree en deux colonnes,
J'eus deja occasion de doniier une notice plus detaillee
des trbis premiers cahiers dans un article sur cet ouvrage
et sur TalmanacU pour la Lunigiana, de M. Gargiolli de
Fivizzano, petit volume dun merite tout-a-fait particu-
lier; article insere dans le journal allemand pour la
conversation litteraire (Leipsick, i834, cahier d'aout).
Une societe s'etant formee I'annee derniere pour ex-
ploiter les mines de plonib sulfureux argentifere, qui ^e
trouvent dans le val-di-Castello, pres de Pietrasant^ en
Toscane, le directeur general M. F. Narro-Perres, vient
de publier un rapport et compte-rendu sur I'entreprise
et les travaux executes, accompagne d'une relation sur
ees mines par le professeur Targioni-Tozzetti (Livourne,
^834, 83 p. in-B" avec 5 plans). La vallee de Castello,
situee a lest des montagnes de Farnocchia, qui appar-
tiennent a la cliaine de \ jilpe-Apiiana et s'etendent
vers la Mediterranee, est formee au milieu de roches qui
appartiennent en partie aux terrains primitifs, en par-
tie aux terrains secondaires. Les premiers sont du genre
du schiste talqueux; ils sont recouverts a leur erete d'e-
normes masses calcaires qui appartiennent aux terrains
secondaires et dans lesquelles on rencontre de puissantes
mines de fer. Les mines de plomb argentifere se trouvent
dans le schiste; la galene y est disseminee avec plus ou
moins d abondance et de purete, et en grains plus ou
moins fins. On a ouvertsuccessivementliuit exploitations
Durant la premiere annee des travaux Ion a mis en fusion
( 39<; )
en schlicli livres 6*9, 827, dont on a ohtenu en plonili
J'ceuvre I. 0.4,067, et en classes riches I. 21,264. Le
contenu moyen en argent du plonib d'oeuvre est de
5oo grammes par 100 kilogrammes. Les mines de cette
contree, nommement celle qui est toujours connue sous
le nom de I'Argentiera, furent deja exploitees dans le
moyen age, et Ton ne cessa d'y Iravailler qu'en i5g2
''sous le grand-due Ferdinand V''), la niauvaise adminis-
tration rendant le profit a-peu-pres iiul.
La jotie petite ville de San-Giovanni , dans le Val-
d'Arno superieur, a moitie cliemin entre Florence et
Arezzo, fondee par les Floientins, en 1296, pour de-
fendre leurs terres centre les agressions des seigneurs
gihelins de la Toscane, est le siijet d'une brochure pu-
l)liee sous le titre : Memorie sulla terra di San-Giovarini,
par M. F. Ghernrdi Dragomanni (Florence, i834,
142 pages in-B" ). Ces memoires historiques et des-
criptifs, et qui contiennent une serie de documens,
sont accompagnes d'une carte assez detaillee de la com-
mune et de phisieurs plans. La commune susdite , qui
a une surface de 7 3/4 niilles italiens canes, compte
3,876 habitans.
Tons ceux qui ainient les sciences geographiques et
statistiques , et en reconnaissent la grande utilite , ap-
plaudiront au zele infatigable avec lequel M. le comte
Serrislori continue ses travaux. Le second supplement
de son essai statistique sur i'ltalie, contientdes correc-
tions et des additions a I'ouvrage, ainsi que des don-
nees tres curieuses sur les cultes catholiques , sur le
commerce et la navigation ; et un tableau synoptique et
statistique des etats italiens, en i834, auquel se joint un
autre sur I'instruction publique dans le royaume lom-
bardovenitien, et les duches de Parme et de Lucqucs,
( '^7 )
les seuls etats sur lesquels il a ete possible d'oljtenir des
notices satisfaisaiites. Les tables de la population abso-
lue, dans les ditferens pays, donnent les resuUats sui-
vans : Lombardie 4i436,ooo ; Sardaigne 45484)00o;
Parme 459,000; Modene 4^1^000 -^ Lucques i53,ooo;
Toscane i,384,ooo; etat de I'Eglise 2,^29,000 ; Deux-
Siciles 7,606,000; Corse 198,000. La population rela-
tive est de 334, 195, 268, 260, 478, 218, 209, 243 et
69. Le nonibre des enfans qui frequentent les ecoles
elenientaires, par rapport a la population, etaiten i832,
dans le royaunie lombardo venitien , conime r : 12;
dans le duche de Parme, i : 46; dans le duche de Luc-
ques, I : 55.
En me reservant de vous donner a I'avenir des de-
tails ulterieurs sur ce qui paraitra de nouveau, je vous
prie, monsieur, d'agreer I'assurance reiteree de ma con-
sideration la plus distinguee.
Alfred Reumont.
Lettre fie M. le capitaine iCartillerie Chesney, inembre
de la Societe rojale de Londres , a M. le secretaire de
la Societe.
Londres, le 3 juillet i834.
Monsieur,
Permettez-moi d'offrir a la Societe royale de geogra-
phic de Paris , le rapport ci-joint sur la navigation de
I'Euphrate, comme une faible preuve du reconnaissant
souvenir que je conserve des bontes et des services im-
portans qui m'ont ete rendus, dans mes differens voya-
ges, par des membres de votre Societe, qui , sans y
etre porles par aucune consideration personnelle ou
nationale, se sont montres aussi babiles qu'empresses a
( 398 )
me fournir la plus favorable assistance , et les meilleurs
conseils dans le cours de nies explorations , en diverses
parties de lOrient, pendnnt les annees iH'^g , iSiio,
i83i et i832.
J'ai rallie lEiiphrate i^apres avoir traverse le desert
d'Arabie) en un lieu appele el Kaini, entre Anna et Deir j
de la j'ai suivi le fleuve pendant 892 milles , jusqu'au
golfe Persique ; et , apres avoir cbenjine a travers la
Perse et I'Asie-Mineure, j'ai rejoint celte importante ri-
viere a Sanisah , Bir , etc.
Le petit ouvrage que j'envoie ne coiitient qu'un
simple rapport sur I'etat de I'Euphrate , redige pour
notre gouvernement , sans donner ( ainsi que vous le
verrez) aucune narration personnelle ,* et le delai ne-
cessaire pour examiner la question plus amplement
m'a seul empeche, jusqu'a present, de vous offrir mon
tribut de reconnaissance, pour les durables acquisitions
qu'ont procurees au monde savant , les genereux tra-
vaux de votre compagnie, auxquels je pourrai peut-etre
contribuer quelque jour, en mettant sous vos yeux les
autres informations geographiqiies contenues dans mes
journaux, si vous les jugez dignes de cet honneur ,
lorsque j'aurai rassemble mes papiers.
En faisant allusion a quelques-uns de vos membres
qui mom ete utiles dans mes voyages , je ne saurais
omettre de signaler M. Fontanier , que j'ai rencontre a
Trebizonde ; M. Guys, a Beirout ; le consul francais ,
it Damiette ( precedenmient a Bagdad ) ; et I'eveque de
cette derniere ville, lequel y est mort de lapeste, pen de
temps apres que j'eus pris conge delui.
F.-R. Chesney ,
- Capitaine de I'artillerie royale et niembre dc la
Societe royale de Londres.
( ^99 )
ExTRAiT (rune lettre tie M. le ^apitaine de vaisseau
Maconochie , a M. d'Avezac , secretaire general de
la ^Commission centrale,
Notre exploration africaine est partie, mais celle de
la Guiane attend encore; et je ne sais rien autre d'inte-
ressant dans le monde geographique, si ce n'est le re-
tour du docteur Coulter, qui , pendant les onze der-
nieres annees, a fait des recherches sur la Geographic
physique de la cote nord-ouest d'Amerique, et a ce que
j'ai appris, sous presque toules ses faces; et le retour
prochain de M. Douglas , qui a employe sept annees a
herboriser, presque sur les menies lieux.Ce dernier nous
a deja ecrit une lettre fort interessante, datee des iles
Sandwich , dont il a visite les crateres volcaniques.
Le premier est alle en Irlande voir sa famille, avant de
consacrer I'hiver a la mise en oeuVre et a la publication
de ses materiaux.
En ce qui concerne notre expedition d'Afrique , je
dois ajouter que c'est seulemenl d'Angleterre quest
parti le capitaine Alexander, qui en est le chef. II pren-
dra une suite convenable au cap , ou il arrivera proba-
blement ce mois-ci; mais il ne se rendra a la baie Da
Lagoa , qu'a la belle saison (avril). J'ai recu I'autre jour
line lettredelui, datee de laGambie, qu'il allait quitter.
L'expedition de la Guiane ne pourra remonter TEsse-
quibo qu'en aout, ce qui nous laisse tout loisir pour
les preparatifs ; en redigeant les instructions, nous te-
nons compte de I'itineraire de vos voyageurs venant de
lest; aussi nos vues se portent-elles entierenient vers
I'ouest. Ce qui ajoute beaucoup a I'interet de toute l'ex-
pedition , c'est, a mon avis , que les deux nations et les
deux Societes y cooperent.
( 4oo )
Nous avons dernierement decerne notre prix royal
pour la presente annee, au lieutenant Burnes , auquel
je remets aussi une lettre d introduction aupres de voiis.
C est un excellent jeunc lionime , et je ne saurais vous
le recommander trop vivenienl.
A. Maconochie.
Carte d'une partie de la cote du Groenlaiid reconiuie par
M. DE BLOSSEViLLE, Commandant le brick laLilloise.
Au inunient oii une nouvelie expedition est ordon-
ne'e pour aller a la reclieiclie de la Lilloise , nous pen-
sons qu'on ne verra pas sans interet le croqnis dela par-
tie de la cote orientate du Greenland, que M. deBlosse-
ville avait reconnue a la fin de juillet i833. La distance
a laquelle ilavaitete arrete par les glaces ne perniet pas
sans doute de regarder ces determinations coninie tres
exactes,- voici au reste ce q'l'il en disait dans sa der-
niere lettre dalee de \apnaIiord, le 4 aout :
■< La cote du Groenland, que j'ai vue, est placee d'a-
pres un seul relevement ct une distance estimee; niais
cette distance ne peut pas etre tres fautive, les re'eve-
niens de Scoresby croisant les miens au cap Barclay.
Depuis Dunkerque, je n ai pu regler mes montres , mais
un jour de soleil, a Nordfiord, et un autre, a Vapna-
fiord , ni ontdonne dans ces deux endroits la longitude
juste de la carte danoise; ainsi la marche n'a pas varie.
Le 27 juillet, i! n'y a pas eu d'observation de latitude,
inais les corrections out ete faites d'apres la veille, et le
lendemain ou le soleil a paru. Le 29, les observations
nnt ete completes, mais I'esserres par les glaces, nous
u'avons eu qu'une route mal estimee, et il a ete impos-
sible de courir pour tracer une base. Je retourne aux
menies parages, je vais tacher de revoir les menies
points et de continuer la reconnaissance vers le sud ,
en ni'approchant le plus possible. Moii premier souhait
est pour un temps clair, mais cast etre bien presomp-
tueux que de concevoir une telle esperance sur la cote
Au Groerdiind oil nous avoiis trouve tous les vents bru-
meux. »
(4oi )
TROISIEME SECTION.
Actes de la Soci^te.
PROCES-VERBAUX DES SEANCES.
Seance du 7 noveinhre i834.
Le proces-verbal de la derniere seance est lu et adopte.
M. le piofesseur Perkins, de Bruxelles , remercie la
Societe qui vient de I'admettre au nombre de ses niem-
bres.
M. Francis Lavallee, charge de travaux geodesiques
par le gouvernement de I'lle de Cuba, adresse les me-
mes remerciinens, et annonce le prochain envoi d'un
ouvrage qu'il vient d'achever sur cette lie , et qui lui a
coute de longues et penibles recherches.
M. le baron de Canstein ecrit a la Societe pour lui
faire homiiiage d'une mappemonde , presentant la dis-
tribution des plantes les plus utiles a la surface du
globe , avec une notice explicative , et il appelle I'at-
tention de la Societe , sur ce travail.
M. le baron Walckenaer fait don a la Societe, pour
etre depose dans ses archives , d'un Vocabulaire des
Qobayles, provenant de M. Desfontaines, et compose
en 1787, par M. Barre, negoeiant a Bone.
M. le secretaire lit la tiaduction faite par M. de la
Roquette, de I'lntroductiou du voyage a la cote orien-
tale du Groenland, execute de 1828 a i83i , par M. le
capitaine Graah, de la marine danoise.
( 402 )
Seance da 21 itovembre.
Le proces-verbal de la derniere seance est lu etadopte.
M. Uonnet ecrit a la Societe pour lui faire hommage
d'une carte topographique de Tarrondissenient de Cor-
beil, qu'il vient de publier.
M. Daussy annonce que le depot de la marine vient
de recevoir, du charge d'affaires de France a Stockholm,
une caisse trouvee par des pecheurs, sur les cotes de
Norwege, et contenant des cartes que le gouvernement
suedois supposait avoir appartenu a la Lilloise ^ com-
niandee par M. Jules de Biosseville. Ces cartes ont ete
examinees au Depot de la marine , et le resultat de cet
examen ne permet plus de supposer qu'elles aient ap-
partenu a la Lilloise. II n'existe done encore aujour-
d'hui aucune preuve materielle de la perte de ce bati-
ment , dont on n'a point de nouvelles directes, poste-
rieures au 4 aout i833.
M. le president , a cette occasion , propose que la
Societe fasse une demarche aupres de M. le Ministre de
la marine, pour lui temoigner le vif interet qu'elie prend
a M. de Biosseville, et lui exprimer le voeu que des re-
cherches nouvelles soient tentees pour decouvrir le
sort de rexpedition.
M. Albert-Montemoiit lit un fragment d'un voyage
en Angleterre.
M. Jomard donne lecture de la relation dun voyage
recemment fait par un indigene, d'Alger a Constantine,
et contenant des details sur la geographic de cette par-
tie de I'Afrique, ainsi que sur les usages des habitans.
( 4o3 )
Seance du 5 decembre.
Le proces-verbal de la derniere seance est lu et adopte.
M. le secretaire donne communication du proces-
verbal de la seance generale du 28 novembre. La redac-
tion en sera soumise a la prochaine assemblee.
M. le general Pelet , directeur general du depot de
la guerre, en adressant ses remercimens a la Societe
qui vient tie I'admettre au nombre de ses membres, lui
annonce qu'il sera tres heureux de s'associer a ses efforts
pour contribuer aux progres des sciences geographiques,
et qu'il s'empressera de lui faire toutes les communi-
cations qui dependront de lui et que la Societe ju-
gera utiles au succes de ses travaux.
M. Ainsworth, correspondant etranger de ia Societe,
lui ecrit pour lui annoncerque le gouvernem'^.nt anglais
et la compagnie des Indes orientales preparent une expe-
dition qui a pour but d'effectuer la navigation de I'Eu-
phrate, au moyen des bateaux a vapeur, et d'etablir, s'il
est possible, une communication courte et facile entre
I'Europe et les Indes. M. Ainswortb qui doit faire partie
de cette expedition commandee par le capitaine Chesney,
demande tant en son nom qu'en celui de ses compagnons
de voyage, que la Societe veuille bien leur adresser ses
instructions. — Renvoi de cette demande a la section de
correspondance.
M. le docteur Reumont, membre de la Societe a Flo-
rence, adresse une notice sur les publications recentes
qui concernent la Toscane et qui ont des rapports avec
la geograpbie. — Renvoi au comitedu Bulletin.
MM. Leroux et Reynaud adressent le i" volume de
rEncyclopedie pittoresque contenant plusieurs articles
( 4o4 )
relatifs a la geogiaphie, et jis demaiident que la Societe
veuille bien se faire rendre co«pte de cette publication,
et leur adresser ses conseils. — Reniis a M. Boblaye pour
uti rapport verbal.
MM. Beer et Maedler tout lioniniage de la 3" teuille
de la carte de la lune qu'ils publient. — Renvoi a M. le
colonel Coraboeuf.
M. Warden depose surSle bureau le 15" volume de la
collection de I'art de veriiier les dates. Ce volume est en-
tierement consacre a la description geographiqueet his-
torique de la Gujane. 0lfWl**it' '■■-
M. Jomard annonce lerfetolir en France de M. le ca-
pitaineCaliier, apres un voyage de plusieurs annees dans
rOrient, ou il avait accompagne M. Michaud. M. Callier
rapporte de nombreux materiaux geographiques sur les
divers pays qu'il a explores.
M.Jomard communique aussiunelettredeM.lecheykh
Refa'h, professeur de geographic, d'histoire et de langue
francaise a la mosquee el-Azhar du Caire, ancien eleve
de 1 ecole egyptienne a Paris, et il le presente pour deve-
nir membre de la Societe. Le cheykli Refa'h a public en
arabe les ouvrages suivans : i" Livre des mccurs et den
c nut limes ^ avcc un petit dictionnaire geographique et
biographique; 2" Traite de niineralogie d'apres Brard ;
3" la relation de son voyage a Paris; 4" Geographic de
MM. Meissas et Michelot, et Traite de cosniographie.
MM. Wright et Francisque Michel adressent le com-
mencement du manuscrit de Rubruquis et promettent
la suite de leur travail aussitot qu'il sera termine. M. d'A-
vezac annonce que le manuscrit a ete envoye imme-
(liatementa 1 impression.
M. Jomard continue la lecture de la relation du voyage
recemmcnt lail par un indigene, d'Alger a Constantine.
( 4<»5 )
Seance dii ip deceinhre.
Le proces-verbal de la derniere seance est lu et adopte.
M. Levasseur, ingeiiieur-geometre dii cadastre, ad-
niis dans la seance du 23 aoiit dernier, adresse ses re-
mercimens a la Societe.
M. le professeur Rafinesque , correspondant de la
Societe, a Philadelphie , iui adresse: i" une notice sur
les voyages de Pattie, Willai'd, Wyeth et Dodge, dans
le nouveau Mexique, la Californie el I'Oregon, de 1824
a 1833 ; 2° sa reponse a une attaque anonyme publiee
en Angleterre, sous le litre de The negroes of Kwan-Lun ;
3° une collection du journal le Tsalagi , ou Cherokee
Phenix, contenant des docuniens historiques tres cu-
rieux; 4" u" exemplaire de son Journal atlantique, et un
opuscule ayarit pour litre Herbarium Rafinesquianum .
La commission ordonne le depot des ouvragesiniprimes,
a la Bibliolheque, et le renvoi des notices manuscrites
au Comite du bulletin. Le temps ne permet pas de don-
ner lecture des remarques du meme savant, sur line
brochure critique relative aux negres de Ruen-Lun.
M. d'Avezac communique i'extrait d'une lettre do
M. Graberg de Hemso , contenant de nouvelles indica-
tions sur les travaux geographiques les plus recens qui
onl paru en Italic , et dans laquelle il rappelle I'envoi
qu'il a fait a la Societe , de son Specchio geograjico e
statislico (TelU Impero di Marocco ; d'apres son desir ,
la commission centrale prie M. Jomard de vouloir bien
rendre compte de cet ouvrage.
M. Graberg de Hemso transmet aussi , de la part de
M. le comte de Serristori , un itineraire manuscril de
Constantinople a Abouchir , par Arz-Roum, Tauris ,
( 4o6 )
Teheran, istalian tt Chiraz, fait dans les annees iS^S
et 1829. — Renvoi cle ces docuniens au Comite dii
bulletin.
M. le capitaine Chesney adresse un exemplaire de
son rapport sur la navigation de I'Euphrate, et il saisit
cette occasion pour payer un tribut de reconnaissance
a plusieurs membres de la Societe, dont il a recu les se-
eours les plus empresses, et I'accueil le plus bienveil-
lant dans le cours de ses voyages. M. Chesney cite par-
ticulierement MM. Fontanier, a Trebisonde; Guys, it
Beiroul; le consul francais, a Damiette; et I'eveque de
Bagdad.
M. Barbie du Bocage communique , de la part de
M. David, consul de France a Santiago de Cuba , une
description du quartier de Sainte- Catherine et des con-
trees environnantes, avec une carte levee en i834, par
M. Alexandre Jaegerschmid. — Renvoi au comite du
bulletin.
Le meme membre depose sur le bureau diverses no-
tes , 1° sur le voyage de M. Goudot a Mozambique ;
:2*> sur les voyages 'de M. Texier, dans I'Asie centrale ;
3° sur le leve de la carte topographique de la princi-
paute des Asturies.
M. Jomard invite la section de oorrespondance a
adresser des instructions a M. Goudol ; ce voyageur
s'efforcera de visiter le Zambeze, et de le remonter le
plus haut possible.
M. le president appelle I'atlention de la Societe sur
une circonstance interessante du voyage de M. Callier.
II a observe, pres de Beirout, des inscriptions de 'a
plus haute antiquite , deja sigHalees par d'autres voya-
geurs, et situees non loin de la mer; une en caracteres
persepolitains, et les autres en figures hieroglyphiques.
( 4o7 )
M. Warden communique une notice sur la relation
de I'expedition de M. Schoolcraft, dans le Haut-Missis-
sipi et au lac d'ltasca , pendant I'annee i832. — Renvoi
au Comite du bulletin.
M. le chevalier Jaubert donne des renseignemens sur
les progres que fait la publication de I'Edrisi ; I'impres-
sion des deux premiers climats est achevee, et I'on s'oc-
cupe de celle du troisieme climat. Apres une discus-
sion a laquelle prennent part plusieurs membres , la
commission centrale, sur la demande de M. Jaubert,
ajourne la publication des cartes destinees a acconipa-
gner le texte de I'Edrisi.
M. Eyries donne la nouvelle de la mort de M. le car-
dinal Placido Zurla. Cette perte sera vivement sentie
par les amis des sciences geographiques , aux progres
desquelles M. Zurla a beaucoup contribue.
M. d'Avezac communique a I'assemblee une lettre de
M. Maconochie, secretaire de la Societe geographique
de Londres, qui vient de lui etre remise par M. le lieu-
tenant Alexandre Burnes, auteur du voyage en Bouk-
harie, present a la seance, et deja accueilli avec em-
pressement par chacun des membres de la reunion.
M. le president adresse a ce voyageur lexpression de
I'interet de toute la Societe, pour les resultats de son
importanle exploration. M. Burnes remercie la Societe
des marques de bienveillance dont elle veut bien I'ho-
norer, et il se loue , avec une egale effusion , de I'ac-
cueil paternel que lui ont fait, pendant ses voyages, les
officiers francais, Allart et Court, generaux au service
de Rangit-Sing, souverain du Pendjab.
La Commission centrale , aux ternies de son regle-
raent , procede au renouvellement de son bureau pour
I'annee i835, elle nomme :
I 4o8 )
President^ M. Roux de Rochelle ;
F ice-preside ns ^ MM. Daussy et Coraboeiif j
Secretaire general, M. d'Avezac.
M. Roux de Rochelle reraercie ses coUegues de la
nouvelle marque de contiance qu'ils viennent de lui
donner, et il compte sur leur honorable concours pour
atteindre plus facilement le but que se propose la So-
ciete.
11 exprime en meme temps, au nom du bureau , les
remercimens de la Societe a M. Jomard , pour le zele
eclaire avec lequel il a rempli les fonctions de la presi-
dence , pendant I'annee i834, et pour les services
qu'il a constamment rendus a la science et a la So-
ciete.
MEMBRES ADMIS DANS LA SOCIETE. -
Seance du 11 aout i834-
M. Levassedr , ingenieur-georaetre du cadastre.
Seance du 5 decernbre.
M. le cheykli Refah, professeur de geographic,
d'histpire et de langue francaise au Caire.
— ^O M
OUVRAGES OFFERTS A LA SOCIETlS.
Seance du 7 novembre i834.
Par M. Albert-Montemont : Bibliotheque universellc
des voyages., aS* livraison (Voyages en Afrique. —
Rurchell).
( ^^^9 )
Par M. Autlot : Lllnlie, la Sicile , (es iles Eoliennes ,
File (VElbe, la Sardaigne , Malte ^ Vilede Calj'psu, etc.
(Toscane, par M. Saint Germain-Lediic, i vol. in^"- —
RoyauiDC tie Naples, par M. G. D. tie la Chavanne.
4 livraisons , in-4'.)
Par M. le baron de Canstein: Einige Begleitworle ziir
cliarte von der verhreitung dernutzbarsten pflaiizen iiber
den Erdkorper von Ph. Baron von Canstein. Berlin, i834-
Une feuille et line brochure in-8°.
Par M. Graberg de Hemso ; Tableau geogj-aphique
el statistiqne de V empire de Maroc. Genes, i834. i vol.
in -8°.
Par M. le capitainc d'Urville : Voyage pittoresque au-
tour du nionde , 5g a 63" livraisons.
Par la Societe Asiatique : Cahiers de septemhre el
octobre de son Journal.
Par la Societe pour I'instruction elementaire : Cahiers
de septembre et octobre de son Bulletin.
Par M. T. Perrin : Beuue de F agriculture universelle ,
premiere et deuxieme livraisons.
Par la Societe d'agriculture de I'Eure : Reciieil de
cette Societe, cahier d'octobre.
Par MM. les directeurs : Plusieurs numeros du Re-
cueif, industriel, des Jrchii-es du commerce^ dii Memorial
encyclopedique , de I'lnstitut , de r Echo du monde savant
du Moniteur ottoman , dn Journal de Sinjrne et du Jour-
nal du Caire.
Seance dn 21 nopembre.
Par madanie veuve Brue : NouveUe Carte du Mexiquc
et d'tine partie des proi'inces unies de V Anierique cen-
trale , etc. , une teuilie.
Par M. Donnet ; Carte topographique de P arroudisse-
ment communal de Corlieil , iv du departenient deSeiiie-
27
( 4io}
ct-Oise et dune partie des cantons limitrophos; dressee
a 1 echelle d'uii mdtre pour 5o,ooo , et**. — unc feuille.
Par MM. Alberl-Monteniont et Monin : Atlas pour
seri'ir a r intelligence de la Bihliotheque imiverselle des
■voyages, 2" livraison.
Par M. le capitaine d'Urville : Voyage pitloreaqiic an-
tour du monde, 6"4 , 65 ct G6^ livraisons.
Par M. Gide : Nouvelles Annates des voyages , rahier
d'oclobre.
Par la Societe des Missions evangeliques : Cahier
de novemhre de son Journal.
Seance du 5 decemhre.
Par M. Warden : V Art de verifier les dates , dfpuis
Vannee 1770 jusqud nos jours; suite de la chronologie
historique de I'Amerique (Guiane). i vol. in-8°.
Par MM. Beer et IMaedler : Feuille 3e de la carte de
la lune.
Par M. Graberg de Hemso : Dell' attuale condizione
della scienza statislica in Italia, broch. in-S".
Par MM. P. Leroux et J. Reynaud : Encyclopedie pit-
toresque , premier volume, in-4''.
Par rinstitut bistoiique : Troisiemc livraison de son
Journal.
Par M. le capitaine d'Urville : Voyage pittoresque au-
tourdu monde, 67 a dye livraisons.
Par M. Bajot : Annales maritimes et coloniales, cahier
de novembre.
Par M. de Moleon : Recueil industriel et manufactu-
rier, cahier de septembre.
Par RI. le directeur : Memorial encjclopediquc , ca-
hier de decembre.
Par MM. les dirccteurs : Numeros 81, 82 el 83 de
(4i.)
rjnstiluf, el nurntiios 34, 35 et 36 (ie VEcho da nionde.
savant.
Seance dn 19 deceinbre.
Par M. A. Boue : Essai geologiqiie siir VEcosse , i vol.
in- 8°. — Menioireji geologiques et paleontologiques ^
tome ler, in-8".
Pai" M. Rafinesque : Uiie collection du Tsalagi ou
Cherokee Phoenix. — Journal Atlantique^x vol. iu-S". —
Herbarium Rafinesquianuni , broch. in-8°.
Par M. le capitaine Chesney : Reports on the naviga-
tion of the Euphrates , i vol. iu-tolio.
Par M. le comte de Serristori : Secondo siippleniento
al Soggio statistico delV Italia. Lausanne, i834, in-8°.
Par M. le capitaine d Urville : V oyage pittoresque au-
tour du nionde , ^o et 71^ livraisons.
Par M. Gide : Nouvelles Annales des ■voyages, cahier
de novembre-
Par M. le commandant Roguet : De la Vendee nii-
litaire. Livre iii , broch. in-8''.
Par rinslitut historique : 4* livraison de ion Journal.
Par la Societe de geologic : Feuilles 28 tt 29 du
tome IV de son Bulletin.
Par M. de Moleon : Recueil industriel el manuf'actu-
rier, cahier d'octobre.
Par M. Henrichs : Archives du commerce (novenibre).
Par la Societe d'agricultiire et de commerce deCaen:
Rapports sur la cinquihne exposition des produits des arts
du Calvados en i834, broch. in 80.
Par la Societe dagricultnre de Versailles : Rapport
sur les ravages occasiones par les vers blancs , etc. , in - 80.
Par M. Boiisquet : Journal de la jeunesse , n" 8.
Par MM. les directeurs : N"' 84 et 85 de Vlnstitut et
numeros 37 et 38 de VEcho du monde savant.
( 4i2 )
ANNONCES.
Pri/icipcs d'lt/ie stntisfirji/e generate soiis le point de
vuc decononde nationale , par W.-E.-A. de Scliliebcn.
Vienne , i834, i vol. in-8.
Statistiqtte des frontCeres militaires de la Transyh'a)iie,
par Benigni de Mildenherg , secretaire du coiiimaiide-
inerit general de Transylvariie. Hermansladt , i834 ,
I vol. in-i2.
Nouveau Dictionnaire kydrogiapluque des etats alle-
niandi , contenant la description des rivieres et ruis-
seaux , etc., etc. , par le baron de Sedlitz. Hall, iSX) ,
I vol. in-8.
Mesures des hauteurs dans la Thuringe et dans les en-
virons^ reunies et coniparees avec quelqiies observations,
par de Hoff, directeur du Consistoire superieur ile
Gotba ; avec deux planches, i vol. in-4.
Expose geographique et statistique de la force des etats
qid font partie de la Confederation gerniaruqnc , avec un
grand tableau comparatif de la superficie, de la popu-
lation et des ressources des differens etats de lAlle-
niagne , par le docteur Aug.-Fr.-Guill. Crome.
Histoire des croisades entreprises pour la delivrance de
la Terre-Sainte ^ par Charles Mills; traduite de I'anglais
par M. Paul Tiby; ouvragc accompagne d'une carte de
I'Asie-Mineure, des plans d'Antioche et de Jerusalem , el
d'une carte de la Syrie , de la Terre-Sainte et de la basse
E^yple, parAmbroiseTardieu.3 vol. in-8. Paris, Depelatol
'riicr.u-leCopui, w" 4), i835.
(4i3)
Aventuresde Kamrup^ tiaduites de I'hindoustany, par
M. Garcin de Tassy, nienibre des societes asiatiques de
Paris, Londres, Calcutta et Madras, professeur d'hin-
doiistany, a I'ecole speciale des langiies orientalesvivan-
tes, I vol. in-8. Paris, Debure freres (rue Serpente, n° 7)?
i835.
Journal d'lin sejour en Ahyssime pendant les annees
i83o, 1 83 1 et 1 832, par Samuel Gobat, niissionnaire de
1 Evangile^au service de la Societe episcopale d' Angleterrej
publie par le comite de la Societe des missions de Geneve,
et precede dune introduction historique et geographique
sur TAbyssinie; avec carte et portrait. Paris, Risler (rue
de rOratoire, n° 6), i835; prix 6 francs.
Etudes sur la France (pour paraitre en i835 \ — At-
las pbysique, politique et bistorique de la France,
dresse sur le menie plan que ce!ui de lEurope , mais a
une plus grande echelie et avec plus dedeveloppemens;
douze carles avec texte marginal et tableaux comple-
meiitaires; pai' M. le lieiitenaiit-colDiic! Dt'iiaix.
TABLE DES MATIEUES
CONTEKUES
DANS LE II* VOLUME DE LA 2' SERIE
N"^ 7 a 12
(Juillet a decembre i834.)
PREMIERE SECTION.
MEMOIBES, EXTRAITS. ANALYSES ET RAPPORTS.
I'jg.t
Menioires sur la decouverte el la reconnaissance des c6tes d'A-
merique, par M. Roux de Rochelle 5 et 34i
Notice sur les voyages de M. de Lesseps , par M. Roux de
KoCHELLE aS
Extrait de deux lettres adressees a la Societ6 de Geographie
par M. Pallegoix , missionnaire francais a Siam. — Itine-
raire de Juthia a Xai-Nat 4 <
Itineraire de la Canee h Candie par R^thimo, et de Candie a
la Canee .54
Relation d'lin voyage dans I'interieur de I'Afrique septentrio-
nale, par Hiiaggy Ebn-el-Dyn el-Eghou4thy (3'et 4' ar-
ticles) 8i et 145
Extrait du rapport des directeurs de la Societe americaine de
colonisation, j)our I'annee i833 i !♦>
Menioires de I'Acad^mie americaine des sciences et arts de
Cambridge (comte rendu par M. Warden) lao
Rapport verbal sur la NornenclaCrira geogrAfica de Espaila , de
M. Caballero, fait a la stance du aa aout, par M. d'Avezac. 17.3
Notice sur un ouvrage de M. le docteur Guy^tand , intitule ;
Tableau de I'etat actiiel de I'economie riirnie Jans le Jura, etc.,
lue .1 la Societe de Geogr.Tphie dans sa seance du 4 juillet
18J4, par M. Roux de Rocheilu la"
( 4i5 )
Piiges.
LcUre dii cure de Santiago-Tepehuacan a son ^v^que, sur les
mceiirs et coutumes des Indians soumis a ses soins; tiaduite
par Henri Ternaux 176
Notice et analyse de I'ouvrage de M. Klaprolh, intitule : Lettre
a M. le baron de Humboldt sur i'invcution de la boussole, par
M. DE LiVREN,VtJDIERE 209
Rapport sur le voyage de M. Leprieur dans I'interieur de la
Guiane , par M. d'Avezac 223
Notice sur I'ancienne geographic historique des pays voisins
de la Mediterranee , par M. Roux de Rochelle aSg
Notice sur le voyage en Boukharie de M. Alexandre Burnes,
par M. Eyries sSo
AssEMBLEE GENERALE .^ Discours d'ouverturc prononce par
M. le comte de Mowtalivet, pair de France , president de
la Societe • 2^3
Notice des travaux de la Societe de Geographie et du progres
des sciences gcographiques pendant I'annee i834 , par
M. d'Avezac , secretaire general 278
Considerations nouvelles sur les Etudes geographiques e! sur
I'expression des cartes, par M. le lieutenant-colonel Denaix. 3i6
Apercu d'un voyage dans I'Amerique meridionale, par M. At-
cide d'Orbisny 326
Ilineraire de Constantinople a Abouchir, par Arz-Rouin , Ta-
vris, Teheran, Isfahan et Chiraz; redige dans les annees
1828 et 1829, par le comte Serristori, ancien colonel
d'etat-tnajor au service de Russie 358
Description du quartier Sainte-Catherinc et de ses environs,
par M. David, consul de France a Santiago de Cuba 385
DEUXIEME SECTION.
DOCUMENS, COMMUNICATIONS, NOUVELLES GEOGRAPHIQUES.
Expedition mercantile dans I'interieur du sud de I'Afrique . . 71
Nouvelle-Grenade. — Ecoles des deux sexes, existant en i834
a la Nouvelle-Grenade *35
Societe americaine de colonisation i38
Colonic de Liberia (Afrique) i4o
Chemin de fer pour unir les deux Oceans i4i
( 4i6 )
Pages.
Lettre de .'M. Jolin Ross , capitaine de vaisseau de la marine
loyaie britannique, a MM. les president, secretaire, eii\ ,
de la Socit'tP de Geograpliie de Paris i85
Cliemin de fer a travers I'isthme de Panama i86
Extrait d'un Memoire sur un cheroin dins ristiiine de Panama,
adresse a la Societe de Geographic j)ar M. Juste Paredes . . 189
Rapport sur les communications a etabliravec I'lnstitut liisto-
rique , par M Roux de Rochellf. 193
Extrait du Journal des Missions evang^liques ig?"
Extrait d'une lettre adressee a la Societe de Geographic par
M. NoYER 260
Denomhjement de population fait an Chili en iS3i , dans les
provinces de Valdivia et de Cliiloe 203
Carte de France ( deuxieme livraisbn ) : a64
Extrait d'une lettre de M. Graberg de Hemso a M. d'Avezac . . . Sgo
Extrait d'une lettre de M. Alfred Reumonl , membre de la
Societe, a M. le president de la Commission centrale SgJ
Lettre de M. le capilaine d'artillerie Cliesney, membre de la
Societe rovale de Londres, a M. le secretaire de la Societt*. 897
Extrait d'une lettre de M . le capitaine Maconochie .i M . d'Avezac. Sgg
TROISJEME SECTION.
VCTES nr. I,\ SOCIETE.
Proofes-verbanx des scauces de la Commission centrale (juil-
let a decembre) j3 , i42j » aoi, 167, 4oi
Proc^s-verbal de I'assemblce generale du 28 novembre 3/\o
Membres admis dans la Societe 204 . 269, 343 , 408
Ouvrages offerts a la Societe '78, 204, 270, 343 , 408
Compte - rendu des recetfes- et des depenses de I'exercice
iS33-j834 33g
FIN nH I,A TABLE DES MATIERES DU Ilf VOLUME.