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Full text of "Bulletin de la Société de Géographie"

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BULLETIN 


DE    LA 


SOCIETE  DE  GEOGRIPHIE. 


QuBtrienie   S^rie. 
TOME  III. 


COMMISSION  CENTRAL!:. 


COMPOSITION      DU     UURF.AD. 

(Eleclioii  (111  23  Janvier  iS'ii. 


President.  M.  GuioifixtiT. 

T^ice-Presideiits.       MM.  Jomard  j-t  Daussy. 
Secretaire  general.  M.  de  i.a  RoQLtiiE. 


Section  de  Corre.spondance. 


MM.    A.  d'AbUaJie.  MM.    Meissas." 

Bajol.  C.  Moreaii. 

Callier.  Noel-Desvergers. 

Coclielet.  D'Orhi^'iiy. 

D'Avezac.  I'oulain  de  Rossay. 

Lafond.  Texier. 


Lebas. 


Section  de  Publication. 


MM.    Albert  Montemonl.  MM.    A.  Maury. 

CorlanibiTt.  de  Santarem. 

de  Froberville.  Sedillol. 

Gay.  Tcniaux-Compans. 

Itiil)erl  des  Molleleltes.  Walckenaer. 

Section  de  Coniptabilite. 

MM.  EJ.  de  Brimont.  MM.    de  Lovenstern. 

Isambert,  Thoniassy. 
Jacobs. 

Comite  charge  de  la  redaction  et  de  la  publication  du  Bulletin. 

MM.  de  la  Rdqiietle,  secretaire  i^i'iieral  MM.   Daussy. 

de  la  Conimissiou  centrale,  re-  Sedillol. 

dactcur  en  chef.  de  rroberville. 

Malte-Bnin,  sccrelaire  aJjoiut.  Cortambert. 


M.  Meignen,    iiotaire,  tresorier  de    la   Societc,  rue  Saint-Honore ,  870. 
M.   Noirot,  agent  general   el  bibliolliecaire  de  la  Sorietc,   rue  de  TUniver- 
fiie,  13. 


BULLETIN 


DE    LA 


r  r 


SOCFETE  DE  GEOGRAPHIE 

M.  DE  LA  ROQUETTE 

SECRETAIRE  GENERAL  DE  LA  COMMISSION  CBNTRALE 
RMacteur  en  cbef 


QUATRI^ME  SfiRIE.  —  TOME  TROISlfeME 

ANNfiE  1852 
JANVIER  —  JUIN. 


PARIS, 
CHEZ  ARTHUS-BERTRANl), 

LIBUAIRE    DE    LA    SOCI^T^    DE    GEOGRAPHIE, 

RU>     BAUTEPEniLLE,     K"    a3. 

1852. 


HURFAU    DE    LA    SOClfiTf: 

(EtEGTIONS  DU  11  AVRir.  1851.) 


Priiidfnt.  M.  le  coiitre-ainiral  Mathiec,  directeur  general  dti  depot  de 

la  inai'iDe. 

„   ,     ,         I  MM.  CoNSTAWT  Pbevost,  mcnibre  de  I'Acadeniic  des  sciences. 
Vice-Presuleiils.  ,.  „ 

I  r  HANcois  Delessert. 

i  MM.  JIeissas. 

I  Isidore  Low6^9TERI(. 

Scof^ltilff,  M.  Sinii.i.oT. 

Lisle  des  presidents  honnraires  de  la  Societe  depiiis  son  origine. 

MM.  MM.  MM. 

De  L.\rLACE,  J.-B.  Eyries.  Do  Las  CAsts. 

De  Pastoret.  l.,'ai)ui'al  de  Kiomt.  Villemaiic. 

De  Chateaubriand.  Dumont  d'Urvili.e.  Cunin  (Iridaine. 

Cmabhui.  dk  Voi.vic.  Dhc4j^s.  I/amimI  Uoussiw. 

I'lECQLEY.  De  MoNTALivET.  L'umiral  do  Mackau. 

Ar.EX.  Dt  HiiMBOLDT.  De  Barante.  Le  vice-ainiral  Hai.gan. 

Chabroi.  de  Croxjsol.-  Le  general  Pelet.  Walckenaer. 

CUVIER.  GuiZOT.  Moi.E. 

Hyde  de  Nkuville.  De  Salvandt.  Jomard. 

De  DouDEAVvif.i.E.  Tupis<er. 

Correspondants  etrangers  dans  Vordre  de  lew  nomination. 
MM.  MM. 

H.  S.  Tanker,  a  Philadelphie.  Le  doctenr  Kriegk,  a  Fiamfoit. 

\V.  WooDBRiDGE,  a  BosluH.  Adolplie  Frman,  a  Berlin. 

Le  It-col.  Edward  .Sabine,  a  t.ondres.  Le  durtHur  \\  atpaus  ,  a  Goeltinjue. 

Le  doeleiir  I'.eini;an(jm,  a  Berlin,  Le  ooloiibl  .Tackson  ,  ,i  Londres. 

Le  ducteur  Kicharcson,  a  I.ondres.  Lepi  iMccDEGALiTZiN.aSlPetersbourg. 

Le  prolessiiir  Rafn,  a  Copenliague.  Ferdinand  de  Luca,  a  Naples. 

AiKSWoKTH,  a  Edimljourg.  Le  docleiii-  Baudffi,  a  Tni  in. 

Lc  colonel  Long,  a  Lonisville.  Ky.  Le  ponoral  Semino,  a  1  eheraii. 

Lcrapitaine  Macorochie,  a  Sydney.  le  lient.-rol.  Fr.  CoEr.Lo,  a  Madrid. 

Lc  conseiller  de  Mackdo,  a  Lisljonne.  Le  prcifcSieur  Munch,  a  Cliiisliaiiia. 

Le  professenr  Karl  RiTTER,  a  Berlin.  Le  gi'ii.  .Viln'rl  de  la  MARMr)RA,  aTiiiiu. 

Le  cap.  John  Washington,   a  Londres.  FnlijiMicr  Fresnei.,  a  Mossonl. 

P.  DE  Angelis  ,  a  Bnenos-Ayres.  Ch.  Schefer,  a  Conslanlinople. 

Correspondants  perpetuels  dans  Vordre  de  leur  nomination. 

MM.  MM. 

Le  capit.  sir  J.  FRAni(x.i|i,  a  Londres.  Le  rapitaiiie  G.  Race. 

Lf  capitaine  Gra-ah,  ,i  Copenliagne.  Le  capit.  James  Clark  Ross,  a  Londres. 

Le  capit^iue  w  Juhn  Ross,  a  Londies.  Li-  doctiur  I  eichardt. 


PAKIS.  -  IMPniJltl'.IH  lit  1.    MilillNET, 
rue  Mit'lion,   2. 


BULLETIN 


DE     L\ 


SOCIETE  DE  GEOGRAPHIE. 

JANVIER  1852. 

lieiiioireii^ 
HoUeeis,  Doeuiiientii  origlnauiL^  etc 


DE 

LA  DISPOSITION  GfeOGRAPHIQUE  DES  LIEUX 

SDR 

LA  SURFACE  DU  GLOBE, 

ET   DE 

SON  mFLllENCE  SUR  L'HISTOIRE  DE  L'HUMANITfe, 

PAR 

CHARLES   BITTER. 

Dissertation  liie  a  I'Acadeinie  des  sciences  de  B^rliil 
le  i"  avril  i85o. 

EXTRAIT   TRADIHT    DE  l'aLI.EMAMD. 


Le  litre  meme  du  nouveau  travail  de  M.  Charles  Riltcr 
en  indique  .sunfisamment  I'objcl.  L'illuslre  geographe 
cherche  a  coiistater  le  rapport  intime  existant  enlie 
les  difl'e^rentes  parties  de  notre  planfete,  qui  semblciil 
assemblees  au  hasard.  La  determination  aslronomi(pie 
des  lieux,  la  geodesie,  rhypsom^lrie,  la  m6t6orologie, 


(  6) 
la  plijsique,  s'uccordeiit  pour  reveler  cette  profonde 
harmonie;  la  masse  dcs  conlinenls  qui  segroupenl  dans 
rh^misphere  septentrional,  el  qui  conlrastcnt  avec  la 
vaste  etendue  des  mers  anlarctiques,  n'a-t-elle  pas  dii 
causer  la  preponderance  du  nord?  L'allongement  des 
terres  en  forme  de  cones  tourn^s  vers  ces  mers,  comme 
I'a  remarque  M.  de  Humboldt;  les  polnles  sud  des  con- 
tinents plus  articulees  que  les  poinles  nord  ;  I'existence 
d'un  espace  maritime,  ou  tant  d'iles  sent  dispers6es , 
n'ont-ils  pas  eu  une  influence  directe  sur  le  plus  ou 
moins  grand  d^veloppement  d'activit^  de  loutes  les 
forces  vitales  ? 

«  Parmi  les  dispositions  exl^rieures  des  surfaces  de 
notre  plan^te,  ajoute  M.  Charles  Ritter,  il  ne  faut  pas 
seulement  remarquer  I'immensile  du  cercle  forme  par 
les  mers,  mais  encore  le  cercle  de  feu  qui  se  raanifeste 
par  des  groupes  de  volcans  sujets  a  des  Eruptions  p6- 
riodiques. 

»  Un  des  premiers  naluralistes  de  notre  si^cle  a  d6- 
monlre  I'existence  de  ce  cercle,  qui  s'arrondit  autour 
du  bassin  de  I'ocean  Pacifiquc,  ne  suit  qu'en  parlie  la 
vasle  ceinture  des  cotes,  d'aboi'd  le  long  de  I'Amerique 
occidentale,  puis  dans  le  nord  de  I'Asie,  tandis  que, 
vers  le  sud-est,  ce  continent  ofTrc  de  longues  rangees 
d'lles  paralleles  au  rivage,  et  qui,  divergeant  lout  a 
coup,  s'enfoncent  dans  les  profondeurs  de  la  mer  du 
Sud.  Le  cercle  menlionn6  ne  repose  done  qu'k  mollis 
sur  la  partie  solide  de  la  lerre,  et  embrasse  en  outre, 
au  milieu  de  I'ocean  oriental,  ces  milliers  d'llols,  sou- 
Iev6s  par  des  forces  internes,  ces  nombreux  groupes 
d'iles  basalliques  qui  se  dressent  hors  dos  eaux,  re- 
connaissables  a  la  formation  analogue  de  leurs  mon- 


( ' ) 

tagnes ,  mais   bleu   ctlTaihlis  dans  leur  aclivltu  sons- 
marine.    Siir   le  bord    occidenlal   de    I'Ameiique  ,   la 
chalne  des  Cordillercs,  longue  de  pres  de  mllle  lieiu  s 
gdographiques  (1),  n'est  elle-meme  qu'une  fraction 
de  cet  anneau ;  et  sur  celte  grande  epine  dorsale  du 
nouveau  monde,  Alexandre  de  Humboldt  a  compte  de 
cinquante  a  soixante  cral^res  en  activite,  sans  faire 
mention  de  tant  d'aiitres  qui  sont  encore  inexplor^s. 
A  I'ouest  du  Grand  Ocean,  cette  ligne  de  feu  se  divise 
en  de  nombreux  paralleles.  ainsi  que  Leopold  de  Buck 
I'a  deraontre,  et  se  contourne ,  sur  de  longs  groupes 
d'iles  montagneusos,  autour  des  coles  de  la  Nouvelle- 
Hollande  et  de  I'Asie  orientale.  Ces  lies,  dont  les  axes 
de  longueur   paralleles  se  dirigent  dans  le  sens   du 
nord-ouest,  oifrent  invariablement  le  meme  aspect  ot 
les  memes  formations;  leur  ligne  volcanique,  bifur- 
qu6e  vers  les  Moluques,  presente  dans  sa  longueur  de 
mille  lieues,  et  toujours  sur  ses  rives  orientalcs,  plus 
de  quatre-vingts  gouffres  de  feu  qui  font  trembler  la 
terre  depuis  I'lle  jumelle  de  la  Nouvelle-Z<^lande  jus- 
qu'au  nord  des  Philippines.  C'est  la  que  le  cercle  se 
recourbe  vers  le  nord  ,  en  suivant  les  groupes  du  Ja- 
j)on,  dos  Kouriles ,  du  Kamtscbatka,  des  lies  Aleou- 
tiennes  el  d'Ounalascbka,  donl  les  cinquante  volcans 
sont  en  parlie  marilimes,   comme  ceux  des  lies  de 
rOcean,  en  partie  alignes  sur  le  continent  auiericain. 
Enfin ,  le  cercle  se  ratlache  au  nord  des  Cordilleres 
par  le  volcan   dc  Sainl-Elie  et  son  voisin ,  le  gigan- 
lesque  Cerro  de  Buen -Tempo.  Ce  n'est  done  pas  a 
tort  que  nous  donnons  a  cet  immense  anneau  de  plus 

^i)  C'est  la  lieue  de  ao  au  degre. 


(« ) 

(le  (Iciix  ceiils  volcans  sans  cesse  en  action  le  nolil  do 
ccrcle  de  feu. 

»  .NYanmoins  colte  couronne  de  volcans  reste  ouvcrte 
vers  lo  Slid,  landis  fine,  vers  Ic  pole,  la  sdpardlion  ded 
conlinenls  de  I'ancien  et  du  nouveau  tnonde  n'a  aiica- 
nenienl  empeche  la  ligne  de  jonclion  de  se  Conlinuef 
sous  la  inei".  II  est  vral  que  les  continents  se  rappi'6- 
client  an  dotroit  de  Beliring  jusqu'ii  la  distance  de 
quelques  lieures;  el  Cela  m6nie  pourrait  nous  faire 
admetlro  uno  contemporandite  d'origine  enlre  ccllc 
couronne  de  feit  qui  jaillit  de  rablme  des  inei'S  ct  los 
vastes  plaines  conlinentalcs  qu'elle  soul^Ve  au  dcla. 
Ce  qui  senibierait  confirnier  cette  idee,  c'est  pl'cicls^'- 
uienl  Ic  phdiiouiene  negatil'  de  cette  grande  lacune  dd 
mille  lieues  geographiques  qui  s'^lend  de  la  pointe  sud 
du  cap  Horn  jusqu'a  celle  de  la  Tasmanio,  oii  la  cein- 
lure  de  volcans  cesse,  et  avec  elle  la  foruie  conlinert' 
tale.  A  partir  de  ces  deux  points  eXtrftines,  commence 
un  Vaste  ocean  presque  complelement  vitlc  d'lles  et 
bien  plus  gt'and  que  la  iner  polyn^sienne  comprise 
dans  le  cercle  des  volcans.  La  grande  tone  ^quatoriale 
dds  lies,  pcncliee  dans  la  direction  de  I'^cliplique, 
s'avartcc  des  Philippines  Vers  le  sud-est  h  ttavers  un 
grand  nomhre  de  groUpes  serres  les  uiis  conlre  les 
autres  jusqu'h  la  solitaire  ile  du  Piques  j  Comme  une 
nouvelle  vuie  laclee  ,  elle  aniu:e  la  mer  azuree  du  Sud  : 
une  autre  ligne  j)aralRle,  niais  bien  plus  faible,  part 
de  rarchipel  du  Japon  et  s'en  va  finir  au  voicail  colossal 
des  lies  Sandwich.  A  toutcs  ces  richesses  dU  cercle 
volcanique ,  I'oc^an  du  sud  u'oppose  dans  sa  region 
mcritlionale  qu'une  extreme  pauvrete  de  fori»es  insu- 
laires  bien  connues  des  niarins.  Le  navigateur  antarc- 


(9) 
lique  n'a  pu ,  dans  tout  rh^inisphfere  qui  s'elend  au 
sud  de  la  grande  lacune,  d^couvrir  que  de  simples 
6cueils  isol6s,  a  peine  dignes  du  nom  d'iles,  tels  que 
ceux  d'Alexandre  I"  et  de  Paul  I",  sauf  toutefois  la 
terre  de  Victoria  et  sa  crete  de  volcans  reconnus  paf 
James  Ross.  Dans  I'immense  espace  de  la  mer  du  Sud 
que  James  Weddel  travefsa  en  1822,  aucune  terre  ne 
fut  signalee.  II  en  est  de  meme  dans  la  mer  des  Indes, 
entre  la  terre  de  la  Nouvelle-HoUande  et  le  sud-est  de 
rAlViquc;  car  Kerguelen,  Saint-Paul,  et  Amsterdam  , 
sont  a  peine  dignes  du  nom  d'6cueils ,  et  les  lies  ju- 
iilelles  de  Mauince  et  de  Bourbon  sont  parfaitement 
Isoldes.  Dans  I'ocean  Atlantique,  a  pai't  les  r^cifs  de  la 
terre  de  Sandwich  et  le  groupe  du  Shetland  meri* 
dional ,  on  ne  voit  au  midi  de  I'equateur  que  des  lies 
tres-distantes  les  unes  des  autres,  la  Trinite,  Sainte- 
Hel^ne,  TiVscension ,  qui  surgissent  des  mers  les  plus 
profondes  qu'on  ait  encore  mesurees;  car  le  premier 
sondagc  de  Ross  donne  14  550  pieds  anglais,  c'est-a- 
dire  la  hauleur  du  Mont-Blanc,  et  le  second  indique 
une  profondeur  de  27  600  pieds. 

»  C'est  au  nord  de  T^quateur  seulement,  aux  anti- 
podes des  lies  de  la  mer  du  Sud,  que  des  groupes  plus 
nombreux,  mais  cependant  solitaires  et  volcaniques, 
s'elevent  au-dessus  de  la  surface  maritime  :  telles  sont 
les  Canaries,  les  Agores,  les  Feroer,  peut-6tre  meme 
rislande,qu'il  vaut  pourtantmieux  compter  au  n ombre 
des  lies  du  cercle  polaire;  de  mealc,  ainsi  que  le  lait 
observer  James  Ross,  au  nord.  Tile  de  Jean  Mayen;  au 
sud,  le  volcan  Er6be,  haul  de  12  000  pieds,  rcgagnent 
par  leur  nouvelle  activity  et  par  leurs  formations  in- 


(  10) 
cessaiiles  le  leiraln  que  le  vaslo  espace  des  mei's  a  fait 
perdre  a  la  surface  des  continents. 

»  La  force  de  soulevenient  de  la  matiere  en  fusion, 
qui  en  dehors  du  cercle  dc  fou  ne  s'est  manifestec  que 
par  de  rares,  mais  d'aulant  plus  vastcs  centres  d'erup- 
tions  dresses  au-dessus  des  profondeurs  de  I'Ocean,  de- 
rail autrefois  dt^pioyer  une  puissance  bien  plus  grande 
dans  le  bassin  tout  enlier  de  la  mer  du  Sud  ;  car,  outre 
les  lies  qui  s'elevent  hors  des  eaux,  d'autres  lies,  res- 
ides invisibles,  se  sont  soulevees  par  milliers  sur  le 
fond  gonfle  de  la  mer,  et  se  sont  approcliees  de  la  sur- 
face sous  forme  de  has  fonds,  d'ecueils,  de  recifs,  ou 
les  polypes  et  les  madrepores  fondent  leurs  colonies, 
quand  I'ondulation  des  flots  le  leur  permet.  Ainsi  la 
force  interne,  dislribuee  sous  tous  ces  milliers  de 
points  a  la  fois,  semble  6tre  bien  impuissanle  pour 
d'lever  au-dessus  de  la  surface  des  mers  ce  continent 
invisible  dont  une  suite  de  sondagcs  n'a  pu  encore  de- 
terminer jusqu'a  present  I'^tendue. 

»  Celte  action,  appliquee  a  de  vastos  espaces  et  non 
pas  seulement  a  des  points  isoles,  se  uiontre  partout 
en  dehors  du  cercle  volcanique  dans  le  soulevenient 
de  I'ancien  et  du  nouveau  raonde ;  leurs  plus  hauts 
plateaux  continus  et  leurs  chahies  les  plus  allieres 
s'entassent  autour  de  I'anneau  des  volcans,  tandis  que 
du  cote  oppose,  vers  I'interieur  des  terres  ,  s'elendent 
les  grandes  depressions  qui,  dans  les  deux  mondcs, 
sc  (lirigent  toutes  \ers  le  nord  ,  le  nord-oucst ,  I'ouest, 
le  nord-est,  ainsi  que  vers  I'ocean  Atlantique  et  les 
latitudes  arctiques  de  notre  plan^te  ,  evidemment 
parce  que  la  force  interne,  en  dimiuuant  peu  a  peu 


( 11 ) 

son  6lan,  pouvalt  d'autant  inieux  reserver  son  action 
pour  soulever  du  cote  de  cette  region  polaire  des  terras 
basses,  horizontales,  et  parfailement  unies.  G'est  ainsi 
qu'a  ^te  cre6  le  contrasle  entre  la  formation  conli- 
nenlale  et  les  formations  insulaires ,  et  que  le  progres 
dans  I'histoire  du  pass6  et  de  I'avenir  a  616  rendu  pos- 
sible. 

»  A  I'ouest  de  la  rang^e  des  volcans  de  I'Oc^anie , 
dont  aucun  ne  se  reproduit  sur  le  continent  qui  s'etend 
en  face,  on  remarque  la  vaste  depression  de  la  Nou- 
velle-HoUande,  masse  enorme  que  la  force  interne,  si 
active  dans  le  bassin  de  la  mer  du  Sud,  n'a  pu  soulever 
plus  haut ;  meme  le  detroit  si  peu  profond  et  si  riche 
en  coraux,  qui  separe  ce  continent  de  la  Nouvelle- 
Guinee ,  n'a  pu  etre  hausse  au-dessus  de  la  mer,  ou 
bien  a  6t6  replong^  sous  les  vagues. 

»  Celte  depression  du  continent  austral  se  poursuit 
aussi  vers  le  nord-ouest  entre  la  Carpentarie  et  le  sud 
de  Malacca,  au  moyen  de  I'isthme  de  la  Sonde,  perc6 
de  si  nombreux  detroits.  Au  dela,  sur  le  continent 
niSme  de  I'Asie,  s'etendent  les  basses  terres  de  I'lnde 
au  dela  du  Gange  ,  du  Tonkin  ,  de  la  Chine  orienlale  , 
jusqu'a  ce  qu'enfin  la  premiere  muraille  du  grand 
plateau  central  asiatique  6leve,  vis-a-vis  des  volcans  du 
Japon ,  sur  les  cotes  escarp^es  de  Leao-Tong  et  de  la 
Cor6e,  une  barri^re  infranchissable. 

»  Un  ph^nomene  analogue  se  montre  dans  les  deux 
Am^riques ;  la  aussi  toutes  les  grandes  depressions 
commencent  immediatement  en  dega  de  I'anneau 
volcaniqwe  des  Cordilleres  et  des  plateaux  eleves , 
mais  etroits  et  allonges,  que  cette  chaine  soul^ve  sur 
son  epine  dorsale.  Analogic  remarquable  ;  da,ns  \'\m- 


(  12  ) 

iiiense  espaco  des  plaines  Ho  I'Ain^rique  orientale 
n'npparalt  pas  un  seul  volcan  ,  pas  pins  que  sur  le 
continent  de  rAuslralie,  et  la  pentc  des  gt-andes  de- 
pressions et  (111  syst^me  des  fleuves  descend  des  bords 
exl^rieurs  du  cercle  de  feu  qui ,  dans  celt6  parlie  du 
monde,  se  conl'ond  enti^rement  avec  la  grande  cein- 
ture  terrestre.  Quant  aux  bords  intdrieurs  du  cercle 
volcanique ,  ils  se  pr^cipitent  vers  le  bassin  de  la  mer 
du  Sud ,  landis  que  de  I'autre  c6t&  les  depressions 
continentales,  parseinees  c^  et  Ih  de  groupes  inf(irieurs 
de  inontagnes,  s'abaissent  el  s'aplalissent  de  terrasse 
en  terrasse  vers  l6  grand  oc^an  Allantique. 

»  Quel  spectacle  plus  admirable  que  celte  analogie 
des  deux  nouveaux  mondes,  de  I'Oc^anle  el  de  I'Aine- 
rique  ,  dans  leiirs  soul^vements  el  leui'd  d(§pressionS 
par  rapport  au  cercle  de  feu  insulaire  et  continental , 
qui  des  profondes  fissures  de  son  foyer  de  chalour 
refond  et  soul^vo  les  lerres  environantes  I 

»  Dans  I'ancien  continent,  on  voit  se  reproduirc  la 
mt'ine  loi  g^n^rale  dans  la  constitution  analogue  des 
soul^vemenls,  des  abaissemonts  et  des  depressions; 
mais  cette  loi  est  modifiee  par  la  forme  articulee  dcs 
presqu'iles  meridionales  et  par  I'j^loignemenl  du  cercle 
volcanique,  qui  se  replie  tout  a  coup  vers  le  sud-6sl 
du  Grand  Ocean  ;  apres  cette  separation  ,  la  grande 
ceinlure  des  cotes  suit  les  contours  de  la  Chine  in^- 
ridionale,  des  deux  Indes,  de  I'Arabie,  de  lEthiopic, 
de  I'Alrique,  en  face  d'^  Madagascar,  dl  va  se  terminer 
au  cap  de  lJonne-Esp(^rance, 

))  II  sorait  instructif  d'appliquer  A  Tensomblc  du 
continent  ce  qii'Alexandro  de  Humboldt  a  proiive  en 
ce  qui  cdncerne  le  plateau  rhomboidal  du  centre  de 


(  ^3  ) 
I'Asie ,  car  le  ph^nom^ne  parliculier  dont  il  parle  se 
retrouve  partout  comnio  loi  invariable  :  la  diagonale 
qui  traverse  ce  plateau  central  du  sud-ouest  au  nord- 
QSt,  et  le  divise  en  deux  moilies  trjangulaires,  le  Thibet 
et  la  Mongolie,  est  en  m6me  temps  I'axe  du  grand  sou- 
levenient  entre  les  puissants  colosses  qui  se  dressent 
au  sud-est,  et  la  depression  generale  du  nord-ouest. 
Le  plus  grand  renfleraent  s'elfeve  jusqu'a  l/i  000  pieds 
dans  le  haut  Thibet,  el  les  somraels  de  I'Hiiualaya 
alteignept  jusqu'a  la  hauteur  absolue  de  20  000  el  de 
25  000  pieds.  La  muraille  escarp6e  qui  domine  les 
vasles  plainea  du  sud  de  la  Chine  et  des  deux  hides, 
etendues  a  ses  pieds,  parail  alleindre  a  de  plus  grandes 
hauteurs  encore  et  depassor  toutes  les  autres  chahies 
du  globe.  Bien  que  des  mesures  directes  ne  le  demon- 
trent  pas  encore,  cependant  rel6vation  loujours  crois- 
sante  des  souimets  vers  Test  semblerait  I'indjquer. 
Ainsi  dans  le  Sikkim  ,  le  Kintschin-dschinga,  auquel 
le  colonel  Waugh  et  Hooker  ont,  par  leur  derniere 
Evaluation,  donne  la  hauteqr  de  26438  pieds  parisiens, 
s'eleve  encore  plus  haut  que  le  Dschawahir,  le  Dhawa- 
laghiri  et  le  Tscbamalari,  et  par^i  les  monts  de  I'Hi- 
ijialaya  toumes  vers  le  sud-egt,  ce  g^anl  pprait  avoir 
beaucoup  de  fr^res. 

»  Au  dela  de  I'axe  diagonal  du  grand  plateau  central 
asialique  ,  la,  ou  la  MongoUe  s'abaisse  vers  le  nord- 
ouest,  I'ancien  nionde  tout  enlier  descend  de  terrasse 
en  terrasse,  par  de  larges  degres,  jusqu'a  la  mer  Gla- 
ciale,  au  nord  de  j'Europe  et  de  la  Siberie, 

»  La  lisiere  raeridionale  du  plateau  de  Gobi,  au- 
dessus  de  Peking,  est  de  8  000  pieds  plus  elev6e 
que  la  surface  de  la  mer;  n^ais,  d'apr^s  le  nivelle- 


( 14 ) 

raent  dcs  acatlcmiciens  russes ,  la  penle  descend  vers 
le  nord-ouest  par  des  gradations  successives  de  5  000, 
A  000,  3  400  el  2Z|00  picds,  jusqu'au  niveau  du  lac  de 
Baikal,  et  plus  has  encore  jusqu'au  lac  Dsaisang,  aux 
sources  de  I'lrtisch,  a  1  000  pieds  do  hauteur  absolue. 
Puis  celte  depression  ,  s'elendant  sur  toute  la  largeur 
de  I'ancien  continent,  s'abaisse  peu  a  peu  vers  I'ouest 
jusqu'aux  cavites  ,  mieux  connues  deja,  de  la  mer 
d'Aral  et  de  la  mer  Caspienne  ( —  72  |  pieds);  a  To- 
bolsk, elle  n'a  plus  que  100  pieds  d'elevation  au-dessus 
de  la  mer;  un  peu  plus  loin,  au  milieu  de  I'h^misph^re 
continental,  elle  se  reunit  avec  les  grandes  plaines  de 
I'Europe,  entre  la  mer  Noire,  la  mer' Caspienne  et  la 
mer  Baltique,  et  enfin  va  rejoindre  le  cercle  polaire, 
que  forment  autour  de  la  zone  arclique  les  terres  gla- 
cises et  parfaitement  semblables  du  nord  de  I'Europe 
et  de  I'Am^rique. 

»  La  meme  loi  qui  a  souleve  a  pic  de  colossales  mon- 
tagnes  tout  autour  de  la  grande  ceinture  de  cotes,  et 
d^prime  les  continents  dans  la  direction  opposee  vers 
I'interieur  de  I'hemisph^re  continental,  se  repute  dans 
les  formations  de  plateaux  continus  ou  isoles,  et  suit 
toujours  la  direction  du  grand  cercle.  Elle  nous  fait 
ainsi  conclure,  de  I'analogle  des  ph^nomenes,  a  I'ana- 
logie  des  causes  actives  et  productrices.  La  direction 
normale  de  I'axe  de  soulevement  du  plateau  central 
de  I'Asie  est  absolument  la  meme  que  celle  de  tous 
les  renflements  du  globe,  et  tous  les  plateaux  suivent 
la  mfeme  direction  a  travers  les  continents;  de  facon 
que  celle  diagonale  particuli^re  du  plateau  asialique 
semble  altester  la  loi  universelle  des  soulevements  de 
I'^corce  terrestre ;  mais  cette  direction  g^n^rale  des 


( ^^) 

plateaux  n'est  point  la  mOme  que  celle  des  chalnes  rie 
inontagnes,  souvent  diam^tralement  oppos^es,  dont  le 
cours  est  indique  par  les  dechirures  des  vallees  inter- 
m^diaires,  et  qu'Elie  de  Beaumont  a  classics  dans  leur 
oidre  geologique  et  chronologique. 

»  Dans  le  plateau  persique,  la  haute  muraille  du 
Bdoutchistan  se  dresse  vers  le  sud  est  aux  environs  de 
Kh6lat,  jusqu'a  la  hauteur  considerable  de  8000  pieds; 
raais  le  sol  s'abaisse  vers  le  nord-ouest,  et  n'a  plus  a 
Ispahan  que  la  moitie  de  cette  elevation;  a  Teheran, 
que  3  700;  a  Cora,  que  2  000  pieds;  plus  loin,  vers  la 
Bucharie  et  la  mer  d'Aral,  il  descend  encore  plus 
rapidement,  et  au  sud  de  la  mer  Caspienne,  il  se  pr6- 
cipite  tout  a  coup  au-dessous  du  niveau  de  I'Ocean. 
Le  plateau  du  D6can  s'^leve  a  Utacanund  ,  dans  le 
Nilgherri,  pr^s  du  cap  Comorin,  jusqu'a  9  000  pieds; 
puis  il  descend  par  le  Mysore,  le  Malwa  et  le  Mewar, 
jusqu'au  Vindhyan  et  aux  plaines  du  Scinde,  et  ren- 
contre enfin  vers  le  nord  labarriferede  I'Himalaya.  C'est 
egalement  dans  le  Netsched  (pays  ^leve),  a  Tangle  sud- 
est  de  I'Hadramaut,  de  I'Oman  et  de  I'Y^men,  que  le 
plateau  de  I'Arabie  atteint  sa  plus  grande  elevation,  les 
nionts  de  I'Encens,  a  Makalla,  s'^levant  a  5000  pieds; 
le  Djebel-Ashdar,  dans  le  pays  d'Oman,  a  6  000 ;  Djebel- 
Taas,  au-dessus  de  Taas ,  a  7  000,  d'apres  Bolta.  Mais 
a  Sanaa,  plus  au  nord,  ce  plateau  compte  tout  au  plus 
h  000  pieds ;  aux  environs  de  la  Mecque,  a  Taif,  3  000  ; 
et  vers  Bahrain,  sur  les  cotes  du  golte  Persique,  vers 
le  Schat  el-Arab  et  les  plaines  de  la  M6sopotaniie ,  le 
pays  tout  entier  n'est  plus  qu'une  vaste  depression.  Le 
groupe  m6me  du  Sinai  suit  la  loi  g^neralc,  bien  qu'il 
s't^l6ve  sur  nne  langue  de  lene  enire  deux  gollos  de  la 


(  16  ) 
mer  Rouge,  el  bien  que  son  plateau  septeoliional  soil 
a  peine  inclique.  Lui  aussi  pr^sente  du  cot^  de  la  mev 
Rouge  sa  pente  la  plus  haute  et  la  plus  escarpee,  de  la 
meme  uianiere  que  le  grand  soulevomenl  des  plateaux 
de  I'Afrique,  dout  la  crete  doniinante  est  lournee  vers 
le  Grand  Ocean  Indien  :  dans  les  niontagnes  Neigeuses, 
le  plateau  uionte  a  10  000  pieds  pr^s  des  sources  de 
rOrange;  a  (3  000  au  moins ,  a  Touest  de  Mouibaza, 
aussi  haut  que  dans  les  montagnes  Neigeuses,  ainsi 
queRebnianu  Fa  recemment  decouvert;  dans  la  liaute 
Abyssinie,  a  Schoah  {C/ioa),  pr^s  d'Angolalla ,  le  sol 
$e  renfle,  d'apres  Harris,  jusqu'a  9  i\  10  000  pieds;  a 
7  000,  d'apres  Ruppel ,  dans  I'Abyssinie  du  nord ,  a 
Gondar;  a  13  000  dans  le  Schamen  [Seinen].  Comuie 
on  le  sail,  TAfrique  s'abaisse  au  nord  vers  le  desert 
de  Sahara,  et  par  Tinterra^diaire  de  la  grande  vallc^i.' 
du  Nil,  vers  la  plus  vasle  depression,  que  comblc  en 
partie  la  Mediterranee ,  oii  debouchent  les  vasles 
plaines  de  I'Europe  orientale  el  de  la  mer  Noire ,  de 
la  lueiue  maniere  que  les  plaines  de  I'Europe  cenlrale 
debouchent  dans  la  mer  Baltique  el  dans  la  mer  du 
Nord. 

»  Le  syst^me  des  montagnes  paralleles  au  meridien 
interronipt  seul  cet  all'aissemenl  gdneral  du  nord-ouest 
des  continents,  et  les  trois  grandes  chaines  de  I'Oural, 
dea  Alpes  Scandinaves  et  des  All»Sghanys  ,  qui  appar- 
liennent  toules  trois  aux  latitudes  septentrionales,  par- 
lagenl  les  vastes  plaines  du  nord  en  lerritoires  le  plus 
souvent  parsemds  de  lacs.  D'aulres  chaines  isolces,  et 
parfailcment  dislinctes,  qui  se  dirigenl  de  Test  a  I'ouest, 
comme  le  Caucase,  les  Karpalhes,  les  Alpes,  les  Pyr»i- 
n^es,  se  sent  d^velopp6es  d'une  maniere  plus  ind^- 


(17) 

pendante  de  cet  organisme  compacle,  auqnel  n'^laienl 
soumis  que  les  renflements  montagneux  du  bord  des 
plateaux ;  ces  chaines  forment  a  elles  seules ,  surtout 
vers  I'ouest ,  si  decoupe,  de  I'ancien  continent,  des 
syslemes  particuliers  et  individuels,  qui  sont  le  carac- 
I6re  distinclif  de  I'Europe.  » 

M.  Ritter  fait  ensuile  observer  que  I'opposition , 
devenue  bistorique,  do  I'Orient  el  de  I'Occident,  s'ex- 
plique  par  la  situation  respective  des  diverses  parties 
du  nionde  ,  mais  que  la  civilisation  a  du  modifier 
profondement  I'influence  de  la  disposition  geogra- 
phique  des  lieux;  el  il  trace  un  briliant  tableau  des 
decouvertes  qui  sont  venues  successivement  iniprimer 
aux  esprits  une  nouvelle  direction;  puis  il  passe  en  revue 
les  grandes  divisions  de  I'univers,  I'Asie ,  I'Afrique , 
I'Europe,  I'Ara^rique ,  les  iles  qui  s'y  rattachent,  et 
teroiine  ainsi  : 

«  Le  nord  de  I'Asie  devait ,  au  commencement  des 
siecles,  demander  le  principe  de  sa  civilisation  au  pla- 
teau central  d'oii  coulaient  ses  grands  fleuves,  et  c'est 
ausside  luqu'il  ai'CQusesbabitants,  jusqu'a  cequ'enfin 
le  progr^s  de  I'Europe  orientale,  sa  voisine ,  I'ait  en- 
vahi;  car  les  richesses  melalliques  du  syst^me  de  I'Oural 
font  decette  cbaine  unc  medialrice,  de  barriere  qu'elle 
(3lait.  Les  rapports  du  groupement  des  trois  anciennes 
parties  du  monde  autour  de  laMediterranee,  quibaigne 
leurs  rivages  interieurs,  ont  determine  la  marche  qu'a 
suivie  le  developpement  du  sud  de  I'Europe;  mais  ce 
n'^tait  la  qu'une  action  temporaire,  contre  laquelle, 
dans  les  derniers  temps,  il  y  a  eu  reaction. 

»  Chaque  parlie  du  globe  lient  originairement  de  sa 
forme  el  de  sa  position,  sa  fonclion  parliculiere  dans 
III.    lANviEn.   2.  2 


(  '18  ) 
la   uitirclie  de  I'liuinanil^,  comme  ^l^nient  de  I'orga- 
nisiue  terreslre. 

»  L'Asie  a  dii  choisir  ses  propres  cotes,  c'est-a-dire 
ses  riches  articulations  du  sud  et  dc  I'ost,  pour  theatre 
de  son  develojipemenl  progressif;  aussi  les  Indes  sont- 
elles  restees  pendant  de  longs  siecles  un  centre  vivant 
d'attraclion, 

»  La  constitution  si  riche  des  Irois  presqu'iles  civi- 
lisees  de  I'Asie  du  sud,  c'est-a-dire  des  deux  Indes  el 
de  I'Arabie,  se  reproduit  sur  une  plus  j)etite  echolle 
au  sud  de  i'Europe,  dans  les  trois  I'orinalions,  diffe- 
rentes  il  est  vrai,  uiais  cependant  peninsulaires,  de 
rilalie  au  milieu ,  de  I'Espagne  et  de  la  Grece  aux 
deux  coles  :  seulement  ces  presqu'iles  ne  sont  plus 
dans  la  proximite  tropicale  de  I'equateur,  mais  a  20  de- 
gres  de  latitude  plus  haut,  dans  la  zone  temperee; 
voila  pourquoi  leurs  fouctions  devaient  aboutir  a  de 
lout  autres  effels  dans  un  autre  cercle  de  pays,  de 
peuples  et  d'idees. 

»  Ces  deux  groupes])6ninsulaires  de  I'Asie  el  de  I'Eu- 
rope, lous  les  deux  composes  de  trois  presqu'iles  large- 
ment  pourvues  de  ressources  nalurelles  el  de  forces  in- 
tuiligentcs,  oilrent  les  plus  grandes  richesscs  de  la 
terre.  C'esl  par  eux,  c'est  par  leurs  articulations  el 
ie  facile  developpemenl  de  leur  vie  interieure  et  exte- 
rieure  que  I'Asie,  dans  la  zone  toi-ride,  el  I'Europe, 
dans  la  zone  temperee ,  ont  pu  fonder  la  civilisation 
liumainc  ;  de  mfime,  I'Amdirique  du  nord  et  la  Tasma- 
nie,  I'une  vers  la  zone  arctique,  I'autre  vers  la  zone  an- 
larctique,  ont  a  accomplir  dans  la  suite  des  temps  une 
ceuvrequine  sera  pas  longtcmps  un  mystore,  car  d(^ja 
nous  voyons  percer  les  germes  dc  leur  avonir. 


(19  ) 

»  Ainsi  ties  a  present  nous  pouvons  pr^voir  la  pre- 
ponderance future  du  jeune  continent  de  TAm^rique 
dent  I'expansion  est  vraiment  gigantesque;  deja  nous 
pouvons  lire  en  traits  bien  marques  comment  la  con- 
figuration de  la  partie  m^ridionale,  de  FAm^riquc  du 
nord  surlout,  doit  remporter  sur  celles  despresqu'iles 
du  sud  de  I'Europe  et  de  I'Asie;  mais  ce  triomphe 
n'apparailra  avec  6clat  que  du  jour  ou  le  continent 
du  midi  aura,  comme  son  voisin  du  nord,  appi'is  a  eta- 
blir  I'equilibre  dans  les  progrfes  de  la  civilisalion  et  de 
la  culture.  En  effet,  les  p6ninsules  de  I'Asie  s'avancent, 
en  partie  du  moins,  dans  I'ocean  Indien,  vide  d'ilos  el 
d'hommes ;  les  presqu'iles  de  I'Europe  n'ont  en  face 
que  les  contrees,  inhospitalieres  ou  difliciles  a  con- 
qu^rir,  de  la  Liljye,  de  I'Algerie,  de  la  Mauritanie. 
Les  regions  m^ridionales  de  i'Auj^rique  du  nord  (Caro- 
line, Georgie,  Floride ,  Louisiane,  Texas,  Mexique, 
Caiifornie)  s'avancent  vers  des  rives  lout  aussi  beanies 
(le  la  nature ,  et  par  dela  vers  le  continent  tropical 
et  sous  -  tropical ;  de  meme  que,  dans  les  anciens 
temps,  I'Asie  plus  civilisee  vojait  I'Europe  a  son  cou- 
cbant  grandir  de  plus  en  plus,  de  meme  I'Amerique 
du  nord  voit  un  monde  nouveau  se  lever  au  midi. 
Aussi  n'y  a-t-il  pas  a  douter  qu'a  I'avenir,  le  groupe 
mediateur  des  Antilles  ne  reunisse  bien  plus  les  deux 
continents  qu'il  ne  I'a  fait  jusqu'ici. 

»  La  constitution  physique  du  globe  a  refuse  a  I'Ame- 
rique le  privilege  que  I'ancien  monde  a  possede,  pen- 
dant les  siecles  d'autrefois,  de  d^velopper,  de  I'Orient 
a  rOccident,  a  travers  des  contrees  et  des  temperatures 
analogues ,  les  phases  toujours  nouvelles  de  son  deve- 
loppement  historique ;  mais  le  nouveau  continent  a 


(  20  ) 

regu  en  revanclie,  dans  sa  direction  principale  dii  nord 
au  sud  ,  la  facility  d'un  j)iogr^s  plus  rapide. 

»  La  suiahondancc  do  ricliesscs  que  la  ^iluation 
g^ograpliique  procure  a  tant  de  lieux  du  globe  ne  peut 
etre  conimuniquee  qu'avec  le  temps  aux  pays  plus 
pauvres  ou  encore  en  friclie. 

»  Dans  quelle  mesurc  le  progres  de  la  civilisation 
terrestro  peut-il  ainener  cette  egalisation  des  richesses? 
Nous  Tapprcnons  par  les  conlrastes  dc  I'liistolre  an- 
cienne  el  moderne,  el  d'une  nianiere  Lien  plus  frap- 
pante  encore,  par  la  contemplation  de  cette  vie  nou- 
velle  que  les  elements  de  la  civilisation  europeenne 
ont  fait  gei'mer,  par  le  moyen  de  la  navigation ,  sur 
les  rivages  des  continents  les  plus  eloignes  et  sur  les 
groupes  du  monde  oceanique. 

))D'un  autre  c6t6,  la  haule  perfectibility  qui  se  ma- 
nifesle  dans  la  mise  en  cEuvre  de  tous  les  elements  de 
civilisation,  r^pandus  sur  la  surface  solide  des  divers 
continents,  nous  laisse  a  peine  encore  un  doule  sur  la 
possibilile  de  transformer  la  nature  ])ar  I'induslrie, 
pour  la  rendre  apte  a  de  nouvelles  fonctions  dans 
I'histoire  du  genre  humain.  » 


(  21  ) 
EXPEDITION  DANS  L'AFRIQLE  CENTRALE, 

Tn*DUiT  DK  l'anolais 
PAR    M.    DE   LA    ROQUETTE. 

sriTB  (1). 

M.  le  docteur  Barlh  a  icrit  de  Kouka,  1"  septeinbre 
1851,  la  lettre  suivante  au  docteur  Beke  : 

Mon  cher  monsieur, 

Nous  ne  somnies  pas  encore  jiarlis ,  mais  il  semhlc 
maintenant  que  lout  est  pret  pour  noire  rldipart,  les 
Arabes  s'etant  procur*^  des  chevaux  et  des  provisions. 
Dans  huit  jours,  s'il  plait  a  Dieu  ,  nous  aurons  hiisse 
derriere  nous  cette  villa,  ou  la  fievre  allaque  on  ce 
moment  les  elrangers,  conime  les  naturels.  Je  dois  dire 
que  je  suis  tres-affail)li ;  mais,  grace  au  (lie!,  je  suis 
n^anmoins  en  etat  d'agir  et  de  me  mouvoir.  Apres 
avoir  mis  en  ordre  raon  journal  depuis  cette  place  jus- 
qu'a  Yola,  j'ai  fait  une  csquisse  de  la  route,  ct  essaye 
de  placer  sur  une  meme  feuille  tous  mes  itineraires 
traversantia  contree,  jusqu'ici  inconnue,  cn\ve\eS/iarf 
(Chary)  et  le  Ktvarn  (Kouara).  J'ai  pu  corriger,  sous 
plusicurs  rapports,  cts  routes  que  j'avais  cu  le  plaisir 
de  vous  communiquer,  etj'ai  recueilli  encore  plusieurs 
autres  r^nseignements  sur  de  nouvelles  voies  de  com- 
munication. La  position  de  Yacoha  est  pour  moi  un 
point  de  difficulty,  et  je  nc  doute  pas  que  cette  place 
n'ait6te  portee  beaucoup  trop  loin  au  sud;  mais  je  n'ai 

(l)  Voyez  le  Bulletin  de  la  Socie'te  de  geographie,  decenibre  i85t, 
4*  sei.,  t.  H,  p.  .{09-413. 


(  '^2  ) 

lien  change  a  eel  oL^aid.  Si  I'houiiDe  qui  se  cliartj;e  de 
celte  lettre  retarde  son  dt^part  cl  reste  ici  encore  Irois 
ou  qualre  jours  de  plus,  j'ospere  envoyer  ma  carte  en 
Angleterre  par  la  m6me  occasion.  Cependant,  comme 
cela  n'est  pas  tres-siir,  parce  que  je  ne  suis  pas  toujours 
en  elat  de  travailler,  je  vous  adresse  ici  les  positions 
des  points  les  plus  imporlants  de  ma  route. 

Tola,  8°  2'  lat.  N.,  13"  5'  longit.  E.  de  Greenwich  (10» 
Ab'de  Paris). 

Le  Taepe,  ou  point  de  jonction  des  deux  rivieres , 
S*  I'i'lat.  N.,  ilx'  37'  longil:  E.  de  G.  (12^  17'  de  P.). 

Uba,  place  frontiere  du  nord  de  I'Adamawa,  9°  45' 
lat.  N.,  U'-riongit.  E.  deG.  (11"  41' de  P.). 

Uje-Kasoukkoula,  11"  20'  lal.  N.,  15"  17'  longit.  E. 
deG.  (12''57'deP.). 

J'ai  maintenant  lant  de  points  sur  le  Benoue,  qu'on 
peul  tracer  tout  le  cours  de  cette  riviere  presque  avec 
uno  complete  certitude.  L'opinion  de  W.  Alien  a  ce 
sujot  me  semble  presque  incroyablc.  II  ne  coule  pas 
Ic  plus  petit  ruisseau  de  Yacoba  au  Benoue;  et  quanl 
au  petit  cours  d'eau  observe  par  Lander,  au  nord  de 
ce  qu'il  appolle  Dungoura,  il  [>rend  une  direction  lout 
a  fait  oppos^e. 

Mais  il  n'est  pas  necessaire  pour  moi  d'iusister  sur 
celte  opinion  djmise,  en  opposition  a  ce  qui  a  ete  i^labli, 
par  un  vojageur  I'istingue  par  son  esprit  Ingenicux  et 
observaleur.  Je  Iracerai  le  cours  de  cette  iinportantc 
riviere  de  TAdamawa,  avec  ses  principaux  Iributuires. 
Je  fais  en  m6me  temps  de  grands  progres  dans  mes 
rechercbes  sur  la  conlree  siluee  entre  le  Chary  1 1  le 
JNil,  et  j'ai  deja  reuni  un  reseau  de  routes  s'elendanl 
presque  au  sud  de  I'equateur. 


(  '^:^  ) 

Quant  a  la  route  que  nous  sommes  au  moment  de 
prendre,  nous  suivrons  celle  de  Mourzouk  jusqu'au 
puits  de  Kachifeiy ;  puis  nous  nous  dulgerons  au  nord- 
est,  immediatemenl  apres  avoir  {.\\\\\\.k.  Ingaegimi,  vlUe 
situee  a  I'extremite  nord-ouest  du  lac.  Nos  stations  de 
la  en  avant  sont  ;  Maiijat,  Bir  Nefasa,  Bir  She-rifa  (Che- 
rifa),  Bir  el-Hosha^  el  Hamir,  Bir  Hadnj,  Birel-'Halesh, 
Bir  ben-Mussebi,  Bir  Sn/i,  Kederi,  Dira,  Birfo,  Agae., 
Tarro-u-Karro,  Udanga,  Yaio  el-Kebir;  et,  non  loin  de 
la  ,  Yaio  el-Svir  :  un  voyage  de  trois  journees  dans  le 
Borgon  conduit  le  voyageur  a  Lenger,  appele  par  les 
Arabes  Beled  el-Amian.  G'est  la  route  moyenne  enti'e 
la  route  supt^jrieure  de  Bir  Kachifery  el  une  route  basse 
j)ar  le  Kanem,  qui  conduit  par  Turra,  Balaia,  Berri, 
Kaskaiva,  Talgiii,  Fn/i,  etc. 

J'ai  ote  tellement  occup^  des  contr^es  du  sud ,  que 
j'ai  entiferement  neglige  de  vous  envoyer  mes  routes  a 
Matv  des  deux  cotes  du  lac.  S'il  plait  a  Dleu.  nous 
serons  bionlot  en  (^tat  de  faire  mieux  connaitre  le 
Kanem,  contree  qui,  dans  les  anciens  temps,  avail  tanl 
d'iraportance,  lorsque  Enjimie  etait  la  celebre  capitale 
de  ce  puissant  royaume ,  dont  le  Bornou  n'est  qu'un 
rejeton. 

Ce  dont  nous  manquons,  ce  sont  des  subsides  consi- 
derables;  car  en  ce  moment  notre  situation  financierc 
nous  cause  de  Tinquietude  et  meme  les  plus  grandes 
difllcultes  (1). 

(i)  Voyez  a  la  suite,  d.uis  ce  ineme  numero  du  Bulletin,  le  proces- 
vei'bal  (111  3  Janvier. 


(  2/i   ) 

VOYAGE  1)E  DOM  IGNACE  KNOBLECIIER 

SUR  LE  HALT  FLEUVE  BLANC  (1). 

(Article  communique  par  M.  Jomard.) 

Pendant  I'annee  184G,  Gregoirc  XVI  congut  le  projet 
lie  porter  la  foi  catholique  dans  I'Afrique  centrale,  et 
il  toiirna  les  yeux  du  c6t6  de  la  region  du  Nil  supe- 
rieur  :  ce  n'est  que  sous  le  pontifical  dc  Pie  IX  que  ce 
projet  rc(;ut  un  commencement  d'ex^cution.  Le  reve- 
rend dom  Ignace  Knoblecher,  de  Laybach,  fut  charg6 
de  cetle  mission,  ct  il  regut,  a  cotte  occasion,  le  tilre  de 
missionnaire  apostolique,  vicaire  general  de  I'Afrique 
centrale.  II  se  rendit  d'abord  en  Syrie,  et  parcourut  le 
mont  Liban  et  la  Palestine.  Ensuite  il  passa  en  figyptc, 
se  munit  de  bons  instruments,  et  partit  pour  visiter 
Phiiae  et  la  Nubie,  Ouady  el-Kenous,  Batn  el-Hadjar, 
Dar-Sokol,  Mabas  et  Dongola. 

Le  26  Janvier  18Zi8,  il  6tait  a  Ambukol.  De  la  il  se 
rendit  a  Bayouda  et  a  El-Khartoum,  oil  il  se  livra  a 
des  observations  suivies  pendant  assez  longtemps. 

Enfin  ,  le  13  novembre ,  il  quitta  Khartoum,  pour 
reraonter  le  fleuve  Blanc.  II  accompagnait  une  expe- 
dition (igyptienne,  moiti6  commer^ante  et  moitie  mi- 
lilaire.  Apres  avoir  visile  les  Scliillouks,  les  Dinkas,  les 
Kyks,  les  lleliabs,  les  Bor,  les  Zhir  et  les  Bary,  il  ar- 
riva,  au  milieu  de  Janvier  1850,  au  lieu  de  Logwek, 
par  la  latitude  de  h"  9'  nord  :  il  avail  eu  roccasion 

(l)  Voyez  les  coinniunications  failes  par  M.  de  la  Roquetle  a  l.i 
seance  de  la  Commission  centrale  (111  -  niais  i  85 1,  et  les  observations 
de  M.  Ant.  d'Abbadie  dans  ic  meme  Bulletin  dc  mars  i85i,  4*  seric, 
t.  I,  p.  237  ft  suiv. 


(  -^5  ) 
d'examiner  Nierkany,  Belenyan,  el  aulres  lieux  voi- 
sins,  en  parlie  visiles  et  mentionn^s  par  notre  com- 
patriote  d'Arnaud. 

Dom  Knoblecher  n'a  donne  jusqu'ici  que  peu  de 
details  sur  son  voyage;  mais  on  est  assured  qu'il  a  re- 
cueilli  d'inl^ressants  documents  sur  les  peuplades  du 
haul  Nil  Blanc,  sur  les  Zhir,  les  Bary  et  les  autres  na- 
tions, comme  aussi  sur  les  v^g^taux  de  ces  regions 
Iropicales.  L'objet  principal  de  sa  mission  6tant  d'y 
r(!!pant]re  la  foi,  il  s'est  occupe  activement  des  moyens 
d'^vang^liser  les  indigenes,  ce  qui  parail  presenter 
moins  de  difficult^  que  la  ou  la  langue  des  Arabes  et 
la  religion  mahometane  sont  etablies.  II  a  en  conse- 
quence propose  de  faire  de  Khartoum  le  centre  de  la 
mission  :  d'apres  son  avis,  on  a  du  y  etablir  des  ^colcs. 
Cette  circonstance  me  semble  expliquer,  en  partie 
du  moins,   la   mesure  qu'a  prise  le  vice -roi  acluel 
d'figyple ,  el  qui  a  »^tonne  tout  le  monde  :  I'envoi  re- 
cent, a  Rbarloum,  du  cheykh  Refah-Bey,  le  directeur 
de  I'ecole  des  langues  et  de  traduction,  etablie  au  Gaire 
depuis  vingt  ans.  En  eflet,  Refah-Bey   a  ete  charge 
d'ouvrir  a  Khartoum  des  (^coles  musulmanes. 

Je  ferai  suivre  ces  courtes  lignes  sur  le  voyage  de 
dom  Ignace  Knoblecher  par  le  relev^  de  dix-huit  de  ses 
observations  de  latitude  et  de  longitude,  failes  sur  les 
bords  du  Nil  superieur  en  des  points  principaux  :  le 
nombre  tie  celles  qu'il  a  I'aites  est  plus  considerable; 
on  lui  doit  aussi  cent  quatrc-vingt-huit  observations  du 
thermomelre  et  neuf  observations  de  la  temperature 
du  fleuve,  execut^es  du  13  novembre  1849  au  17  Janvier 
1850;  le  minimum  du  th(!rmometre  a  ele  observe,  le 
11  d^cembre  a  sepl  heuros  du  malin,  a  savoir  +  15", 7; 


(  26  ) 

lo  m^me  jour,  k  quatre  heures  apr^s-inidi  ,  il  ^tait 
a  57°.  Le  maximum  a  eu  lieu  le  19  novemhre;  le  Iher- 
mom^tre ,  a  quatre  heures,  marquait  39".  Toutes  les 
observations  ont  el6  failes  k  I'Dmhre  et  au  thermo- 
mfetre  centigrade. 

D'apr^s  les  fragments  de  carle  que  j'ai  regus  de  la 
part  du  savant  voyageur,  j'ai  lieu  de  croire  qu'il  a  dQ 
faire  des  rclev^s  dcs  Lords  du  fleuve  le  long  de  son 
cours,  ce  qui  permetlra  de  comparer  ce  relev^  avec 
le  travail  important  et  tr^s-etcndu  qu'a  fait  M.  d'Ar- 
naud  (1).  Ccs  fragments  sont  relatifs  aux  environs  du 
mont  Logwek,  deja  reprosentes  dans  la  carte  de  notre 
compatrioto,  c'est-a-dire  le  mont  Belenynn,  le  mont 
Kerek,  le  mont  Lu-lury,  le  mont  Nyerkani,  le  mont 
Nyamour  (des  Dinkas),  le  mont  Rego,  le  mont  Belen- 
ghin,  les  lieux  d'^//^«/r,  Gondokoro,  Goumho,  etc. 

JoMAUD. 

EXTRAIT    DKS   OBSERVATIONS. 
DATES.  LIEUX.  I.ATIT.         LONOIT.  EST  *. 

Lei3nov.i849  Depart  de  Kliartoum  ....  i5°33'27"  ag".*)!'     i" 

Le  17 Posit,  des  Aiabes  Hassanicli.  i4  4^   24  29  37  4' 

Le  19 Les  negres  Snhillouks.    ...  i3   33    29  29  37  5l 

Le  23 Bakkara  el  Diiika 12    21   53  29  4^  5o 

Le28 lledesSchillouks 9  44  36  a8  26  4i 

»      M'  iSyamour,  Dlnka  (granil).      »      »      «  29   28  « 

Le  2  decembre.  Malaka  (  SL-liillouk  ) 9  27   29  27   37  57 

Le  5 Les  Nouer's 92455  26     4  ^9 

Le  1 1 Les  Kyks 7184^  26  37  3o 

(1)  Les  fraf;mentsauraientete  publics  dans  le  Bulletin,  s'ils  n'avaii-iit 
pas  ete  inallieureusement  egare's  par  le  graveur. 

*  II  est  (JiHicile  ile  devincr  quel  est  le  mi'iidieii  a  pailir  duqucl  le  pure  Kiioble- 
clicr  a  coinpic  ses  longitudes.  Eu  efiel,  la  luiigiliidc  connue  <le  K.liailoum  isl  de  .'iO* 
17' 50"  a  Porienl  de  Paris.  (Cailliaiid,  Fcyagc  a  Me'roe,  I.  111.)  Ici  011  lioiive  29°  5(V 
l"i  or,  on  lie  cuunait  aucua  observatoire  place  a  0*  26'  29"  a  Tett  du  me'iidicn  dc 
Paria. 


(  27  ) 

UATES.  LIEUX.  LATIT.  LONGIT.  EST. 

LeaS LesHeliab 6*  a 4' 56"  q6°38'    5" 

Le  28 Les  Heliab  et  Bor 6     6  56  26  4'   53 

Le  3o Les  Bor 5  54  56  26  43  ii 

Le3i Les  Bor  et  Zhir 5  49     6  26  '43  4? 

Lei"janv.i85o  Les  Zhir 5  45  4^  26  43  Sy 

Leg LesBary 5     4    '^  26  33  23 

»      Mont  Nyerkani 5     »      »  26*   >•      » 

Le  14 MontBelenyan 4  36  34  26  24   n 

Le  1 7 Mont  Logwek 4     9      "  26  *   »      » 

•  Le  chift'rc  rond  de  26o,  rapporle  sans  autre  indication,  annonce  assez  que  I'ob- 
servalion  n'esl  qu'uoe  simple  eslime;  ce  nombre  n'esl  pas  porle'sur  le  tableau  et  ne 
figure  que  sur  le  plan  ;  il  diitere  d'ailleurs  considc'rablement  de  Teslime  de  M,  d^Ar- 
nauil. 

OBSEnVATlONS  DE  M.  ANTOINE  D'ABBADIfi. 

II  est  tres-possible  que  cetle  diffe'rence  de  26' 29"  proviennc  ,  soil  d'une  obser- 
vation vicieuse,  soil  de  quelque  erreur  dans  la  reduction  des  distances  lunaires,  que 
nous  croyons  avoir  e'te  cmploye'es  a  determiner  ces  longitudes.  II  semble  que  M.  Call- 
liaud  n'uit  pas  public  ses  ubservalions  originates,  niais  seulemeut  leurs  re'sultats,  et 
Ic  reverend  pere  Knoblecher  parail  en  avoir  agi  de  meme ,  ce  qui  est  toujours  re- 
gretlable;  car,  en  principc ,  il  est  difficile  d'aftirmer  que  la  longitude  de  Khartoum 
tlounee  par  M.  Cailliaud  soil  meilleure  que  celle  que  lui  assigne  le  savant  mission- 
naire,  Dans  tous  les  cas,  celle  difference  ou  erreur  de  26'  29"  est  bien  loin  de  sufTire 
puur  le'coucilier  la  parlie  haute  du  (leuve  avec  celle  de  M.  d'Arnaud;  el  si  les  raemcs 
noms  ne  s'y  trouvaient,  on  serail  lente  de  croire  que  ce  dernier  voyageur  aurait  re- 
moule'  uue  liviere  differcnte,  car  ses  longitudes  soul  plus  oricutales  de  trots  degre's 
que  celltfs  de  M,  d'Aruaud,  et  I'azimut  mo;  en  du  flcuve,  entre  5  et  9  degre's  do  lati- 
tude ,  indiquerait  anjourd'hui  un  conrs  dirige'  vers  le  nord-e^t ,  landis  que  M.  d'Ai- 
naud  dirigeail  ces  memes  eaux  vers  le  nord-ouest.  II  suffit  d'avoir  sigoale'  ces  singu- 
lieies  differences,  et  sans  insisler  sur  les  directions  moyenues  donnees  par  les 
relcvemenls  fails  a  la  buussole,  nous  a'^sure-t-on  ,  duranl  toulc  la  navigation.  Nous 
nous  contcnlerons  de  fairc  observer  que  le  cours  du  haul  Nil  Blanc,  selon  doni  Rno- 
lilechcr,  est  plus  conforme  a  celui  qui  fut  prcftrd  par  d'Auville.  Le  moot  Kcuia  , 
Iriis  eloigne'  vers  Test,  n'aurait  alors  rien  a  faire  avec  les  sources  de  ce  fleuve.  La 
discieiunice  remarquable  que  nous  signalons  serait  eclaircie  si  dom  Kooljlecher  et 
M.  d'Aruaud  publialent  dans  noire  Bulletin,  ou  ailleurs,  leurs  observations  origi- 
nates, II  est  facheux  que  les  fragments  de  carte  donl  il  est  parle'  dans  la  communi- 
cation ci-dessus  aient  ele'  egares  ;  s'ils  avaient  pu  etre  publics,  on  aurait  vu  si  dom 
Kniiblecherfaitcouler  la  riviere  versle  nord-ouest  ou  vers  le  nurd-est,  dans  In  parlie 
qui  s'elend  enUe  les  4!- et  9«  paralleles  de  latitude. 


(  "28  ) 
SUR  LA  TOPOGIIAIMIIE 

DES 

GLACIERS  DE  LA  CHAINE  DES  ALPES. 

COMMl'!<ICATI0N  FlITB  A  LA  SOCIETE  DE  CioGnAPIIIE 

PAR  M.  AD.  SCHLAGINTWEIT. 


Les  glaciers  sc  trouvent  generalemcnt  r^unis  en 
groupes  plus  on  inoins  considerables  autour  des  points 
culminants  de  la  chalne  des  Alpes.  Depuis  M.  de  Saus- 
sure,  on  les  divise  en  glaciers  de  premier  et  de  second 
ordre,  d'apres  Icur  etendue  et  leur  formation  plus  ou 
moins  reguliere.  Les  glaciers,  on  le  sail,  ne  consti- 
tuent pas  un  phcnoniene  parliculier  aux  Alpes;  ils  se 
relrouvent  dans  beaucoup  d'aulres  cbaines  (^lev^es, 
coaime  en  Norvegc,  au  Spilzberg  et  aussi  dans  I'llima- 
laya,  d'apres  les  observations  reoentes  de  M.  Stracbey. 
La  temperature,  la  quanlite  des  pluies  et  des  nelges,  et 
la  structure  des  vallees,  forment  les  principes  esscn- 
tiels  de  leur  existence  et  de  leur  developpement.  Dans 
une  valleo  des  Alpes  remplie  par  un  glacier,  il  faut 
disllngucr  le  glacier  proprement  dit  ( de  glace  com- 
pacte )  et  les  grands  cirques  de  weVr',  formes  d'une 
neige  grenuc.  Cepcndaiit  la  glace  ct  les  neigcs  adberent 
forlement  enlre  elles,  et  la  transition  de  I'une  a  I'aulre 
de  ces  matiires  est  presque  insensible.  L'inclinaison 
des  glaciers,  comparativemenl  a  celle  des  pentes  envi- 
ronnantes,  est  faible ;  on  ne  I'dvalue  en  raoyenne,  pour 
les  glaciers  les  i)lus  reguliers  de  premier  ordre,  que  de 
3  a  7  degr^s  de  leur  exlr6miie  inferieure  a  leur  exlrd- 
luite  superieure  ,  aux  creles  des  montagnes ,  oil  ils 


(   29  ) 

prennent  leur  origine.  Les  pai'ois  des  niontagnes  en- 
vironnantes  sontortlinairemenl  recoiivertes  tie  couches 
de  neigc  et  de  glace,  bien  moins  epaisses,  beaucoup 
plus  inclinees,  et  neltement  separees  d'aillcurs  du 
cirque  de  net^e  du  glacier  par  de  profondes  et  longues 
fentes  ou  crevasses,  designees  aussi  sous  le  nora  de 
primayes.  Cliaquc  glacier  se  compose  ensuite  de  divers 
afiluents,  s^pares  les  uns  des  aulres  par  les  moraines, 
ou  depots  naturels  de  pierres  roulees  et  entrainees  par 
les  neiges. 

Dans  les  Alpes  suisses,  le  glacier  d'Aletsch ,  situ6 
dans  le  canton  de  Berne,  est  celui  qui  atteint  la  plus 
grande  longueur  (20  kilometres,  y  compris  les  cirques 
de  neve).  La  liniite  inf^rieure  des  glaciers  correspond 
ordinairement  a  une  hauteur  de  4  000  a  6  000  pieds 
de  Paris.  Si,  pour  le  Grindelwald,  elle  descend  jusqu'a 
2  989  pieds,  ce  fait  remarquable  ne  peut  n^anmoins 
elre  consider^  que  comme  une  rare  exception. 

Nos  observations  personnelles  en  18/i7  et  18^8  se 
sont  particulierement  dirigees  sur  le  glacier  de  la 
Pasterze  [Pasterzengletscher],  qui  s'elend  au  pied  du 
grand  Glockner,  en  Carinthie,  et  sur  le  groupe  des 
glaciers  de  I'Octzthal,  en  Tyrol.  Nous  sommesdonc  en 
6lat  de  donner  ici  quelques  details  sur  les  dimensions 
de  ces  glaciers.  La  plupart  des  chiffres  qui  indiquent 
ces  mesures  ont  dte  obtenus  par  des  precedes  trigo- 
nom^triques.  lis  ont  servi  de  base  pour  le  trac6  des 
deux  cartes  jointes  au  compte  rendu  de  nos  explora- 
tions relatives  a  la  structure  physique  et  au  mouve- 
ment  journalier  de  ces  glaciers. 


(  30  ) 

I.   Glacier  de  la  Pasterze. 
a.   Dimensions  longitudinales. 

Metres. 

Longueur  du  cirque  de  neve h  032 

—  du  glacier  proprement  dit,  a  partir 
du  cirque  de  nhe  jusqu'a  rextrdmil6  inle- 
rieure 5  /|10 

Longueur  du  glacier  dans  loute  son  6lendue.   .     9  ZiOO 

b.    Dimensions  transversa les. 

Maximum  de  largeur  du  cirque  de  neue.  ...  Zi  J  10 
Largeur  du  glacier  a  sa  sorlie  du   cirque  de 

«eW  (ligne  A  de  la  carte) 806 

Largeur  moyenne  du  glacier  pr^s  de  la  Jolian- 

nisLiilte  (ligne  B  de  la  carte) 201 

c.  Elevation  au-ctvssus  du  niveau  de  la  mcr. 

Hauteur  du  cirque  de  neve  au  passage  des  ca- 

\\\t&  6.i\es  cles  Morts  [Todtenlcecher].  .  .  .  3  358,9 
Exlremite  inf^rieure  du  glacier 1950,5 

d.  Inclinaison. 

En  combinant  la  mesure  des  longueurs  avec  cello 
des  hauteurs  au-dessus  du  niveau  de  la  nier,  on  arrive 
aux  r^sultats  suivants  : 

Pegriis. 

Inclinaison  moyenne  du  cirque  de  neve.  ...     8"  30' 
—          du  glacier  proprement  dit  du  point 
ouilsortdu  cirque  de /(cVt' ju"^qu';i  la  ligne  B, 
sur  une  longueur  de  1  853  melres 8"  » 

Inclinaison,  a  parlir  de  la  ligne  B,  jusqu'a  la 

partie  la  plus  reguli^re  du  glacier 2°  15' 


(  31    ) 
II.  Glaciers  de  VOetzthal. 

Ce  groupe  de  nomlireiix  glaciers  est  situ6  dans  le 
grand  massif  de  I'Oetzthal,  partie  la  plus  importante 
de  la  cliaine  cristalline  et  centrale  du  Tyrol.  Voici 
I'indicalion  de  quelques-unes  des  dimensions  princi- 
pales  : 

Metres. 

Grand  glacier  de  Gurgl ;  longueur  entiere  ...     8  820 

Glacier  du  Hintereis;  id 8  260 

—     de  Vernagt;id.,  enl8i7etl8Zi8.  ...     5  GIO 

Ce  glacier  est  tres-remarquable  par  les  oscillations 
d'j  sa  marclie.  Dans  le  cours  des  dei'niers  siecles,  il  a, 
a  plusieurs  reprises,  considerablement  augmenle  de 
volume  et  de  longueur,  pour  revenir  iteralivement  a 
ses  anciennes  proportions.  En  18/|7,  il  avail  atteint  le 
maximum  de  son  developpement,  tandis  qu'en  1823, 
a  I'epoque  ou  les  officiei's  de  I'etat-major  aulrichien 
firent  ie  love  de  leur  belle  carle,  il  ne  pr^sentait  qu'une 
longueur  de  A  000  metres.  La  largeur  du  glacier,  dans 
sa  partie  la  plus  reguli^re,  6tait  de  996  metres  en 
18/i7. 


SUR  LES  HOMiMES  A  QUEUE. 


II  a  et6  plusieurs  fois  question,  dans  les  seances  de 
la  Commission  centrale  de  la  Societe  de  geographic, 
de    I'existonce    prelendue,    en   Afrique ,    d'une    race 


(  32  ) 
d'homnies  donl  la  colonne  vert^brale  so  piolongerail 
en  un  appendice  carlilagineux  ayant  fnrnic  de  queue, 
existence  que  M.  du  Couret.  voyagciir  fran^ais  dans  la 
meme  partie  du  monde,  annoncait  coinme  certaine, 
sans  toutefois  jusllfier  son  assertion.  Depuis,  M.  Rochet 
d'Hericouii,  autre  voyageur  Iranijais  (en  Abyssinie), 
declarait  le  23  novembre  J8/i9,  a  la  Sociefe  oricntale, 
non  pas  qu'il  eut  -vu  des  individus  possesseurs  d'un 
prolongement  caudal ,  mais  qu'il  en  avail  entendu 
parler  sur  les  lieux  a  beaucoup  dc  personnes. 

Bicn  avant  eux,  plusieurs  anciens  voyageurs  avaient 
6crit  dans  le  meuic  sens,  el  en  1G77,  un  HoUandais 
nomme  Jean  Struys,  homuie,  il  est  vrai ,  fori  credule 
el  consid6r6  comme  peu  veridique,  assurait  avoir  vu 
un  iudividu  ayant  «  une  queue  longuc  de  plus  d'un 
pied,  etc.  » 

On  avail  lout  a  fait  oublie  ks  liommes  a  queue, 
lorsque,  dans  la  seance  de  la  Commission  cenlrale  du 
h  juillel  1851,  M.  Francis  de  Caslelnau,  connu  par 
d'importanls  voyages  et  une  longue  residence  en  Am6- 
rique ,  a  remis  cette  question  sur  le  tapis,  en  faisant 
connaltre  qu'il  semblait  r^suller  de  ses  frc^quentes 
conversations  avec  des  noirs  d'Haoussa  et  de  I'Ada- 
mawa,  interroges  par  lui  a  Bahia,  qu'il  existe  r^elle- 
raent,  dans  un  pays  situe  au  sud-ouest  du  lac  Tchad, 
une  nation  sauvage  appel6e  Niam-Niam  dont  lous  les 
individus  seraient  pourvus  d'une  queue  nalurelle. 
M.  de  Caslelnau  communiqua  a  ce  sujet  une  note  qui 
a  6t6  inser6e  au  Bulletin  (1),  et  qu'il  a  developp^e  en- 
suilc  dans  une  brochure  pObliee  egalement  en  1851 

(i)  Voye/.  le  Bullitiii  tl*-  juillet  iB.'ii,  4'  sr'iic,  t.  11,  j».  25,  77. 


(33  ) 

sous  ce  litre  :  Renseignements  sur  r Afiiqae  cenlrale  el 
surune nation d'hoinmes a  queue  quis'f  troiwerait,  cVapres 
les  rapports  des  negres  du  Soudan,  exclaves  a  Bahia. 

Le  secretaire  general  de  la  Commission  centrale  a 
cru  devoir  rappeler  Ics  faits  prect^dents,  aujourd'iiui 
que  la  memo  question  se  represente  devant  la  Society. 
Dans  la  stance  de  la  Commission  cenlrale  du  9  Jan- 
vier 1852,  M.  de  Paravey  a  depose  sur  le  bureau  deux 
caiques  tires  de  I'Encyclopedie  chinoise  et  de  I'Ency- 
clop^die  japonnaise,  et  qui  olTrent  des  hommes  a  queue. 
«  Dans  I'un  des  caiques,  dil  M.  Paravey,  les  clieveux 
semblent  crepus  et  courts;  dans  I'autre,  les  clieveux 
sont  longs.  Les  queues  sont  assez  longues  et  velues; 
mais  dans  le  Pen-tsao-kang-niou  (livre  de  I'hommeJ 
on  dit  que  les  peuples  de  cette  nature  ont  des  queues 
de  tortue,  c'est-a-dire  non  velues. 

»  Dans  le  Chan-hay-king,  tres-ancien  livre  chinois , 
mele  de  fables,  ce  peuple  a  queue  est  aussi  indiqu6 
et  nomme  Po-Jin,  et  ici  le  nom  Po  est  ecrit  sous  la 
clef  du  cliien ,  au  lieu  d'etre  6crit  sous  la  clef  de 
I'homme,  comrae  dans  les  deux  encyclop6dies  cities 
ci-dessus.  Dans  ces  encyclopedies,  lo  nom  de  ces 
peuples  est  Kiao-po^  nom  qu'on  peut  traduire  par 
esclaves  lies,  enchaines,  sens  de  Kiao.  On  les  met  a 
1500  lis,  ou  150  lieues,  du  royaume  de  Yong-Tchang, 
et  au  sud  de  ce  pays  :  on  dit  qu'ils  creusent  un  trou 
dans  le  sable,  pour  y  placer  leur  queue,  quand  ils 
veulent  s'asseoir,  et  Ton  ajoute  qu'ils  raeurent  si  on 
coupe  cette  queue. 

»  Tout  ceci  semblerait  en  partie  d'accord  avec  ce  que 
les  negres  du  Bresil  ont  affirme  a  iVI.  de  Castelnau ;  et 
si  cevoyageur  avail  eie  mieux  informe,  il  eiit  pu  citer 

ni.    JANVIER.    3.  3 


(  Id 
horhiiiitiiiii,  qui  ,  liien  a\ant  liii,  a  cit^  en  Afriqiie  les 
JMaiii-IMatn,  on  nnilnDpdphfipes  ;i  queiio,  el  qui  les 
met  aussi  pnlrc  I'Abyssinie  et  Je  goll'e  de  Benin  (1). 
M.  (le  Pnravey  se  reserve  do  puhlior  im  mc^moiro  plus 
devclopp^  sur  une  race,  qui  sorait  plus  qu'a  iiioilie 
d(^truile,  qui  scmblerait  avoir  exisle  dans  le  suil  dc 
I'Asle,  k  Foruiosu  el  a  Manille  ,  el  qui  a  donne  lieu, 
poiit-elrc,  a  ce  que  nous  cilent  les  anciens  deslles  des 
Saiyies. 

»  11.  de  Paravey  espere  pouvnir  monlror  aussi  ,  a 
Tuide  des  livres  consorv(}s  on  Chine,  I'origine  indiennc 
des  Abyssiiis  nuliiens  a  longs  clieveux ,  des  Fellahs  de 
rE^yjUe,  des  Fellalahs  on  Filanrs  de  I'Afrique  cenlraio 
et  du  pays  d'llaoussa.  » 

«  M.  d'Abhadie  dit  que  cetle  communicalion  lui  en 
rappelle  une  qu'il  a  ro<;ue  pcu  dp  lemps  avant  son  de- 
part do  Gonilar  pour  lEurope.  Ellc  lui  .a  ^le  faile  par 
Ridana-Maryau) ,  ulaqa  ou  cure  dune  petite  t^glise  du 
Gojjani,  sa  terre  nalale.  Cel  bomme,  fort  inslruil 
pour  un  Abyssin,  iie  paraissait  avoir  aucun  penchant 
pour  le  Mierveilleux ,  et  ne  racontait  de  sfs  longs 
voyages  qu'un  seul  fait  extraordinaire,  I'exislence  des 
homuies  ayant  une  queue,  qu'il  coniparail  a  celle  de  la 
chevre.  Les  boiumes  qui  en  seraient  pourvus  viennent 

(i)  M.  de  Castelnau  n'a  point  manifesle  la  pretention  d'avoir  p'te 
le  premier  a  parler  des  hoinmes  a  queue  b^iLitant  TAfriqur,  et  il  n'a 
pas  voiilii  lion  plus  ciler  lous  les  voyajreurs  qui  en  ont  fait  mcnlion  ; 
il  n'a  en  ([u'un  hnt  unique,  relui  de  faire  ronnaitre  les  rapports  d'un 
{5r.iiid  iioMilne  d'p>rl;ivps  ne{>res  (jn'il  a  mnsnlip.s  snr  les  IN'iam- 
Niam. 

n  I,  R, 


(  35  ) 
chaque  ann^e  a  la  foire  de  Berberah,  ville  situ^e  lelle- 
ment  pres  d'Aden,  qu'on  peul  esperer  de  faire  porter 
bienlot  une  invesligalkm  soignee  sur  un  fait  aussi 
anornial;  car,  si  ccs  horauies  caciieiil  soigueuseiiient 
leur  appentlice,  par  la  uiodcslie  nalureile  a  ions  les 
lithiopiens,  leurs  voisins,  Jes  Comal  {S6mn/is),  doivent 
en  savoir  quelque  cho.e,  et  il  sera  lacile,  a  Aden  meme, 
de  connailre  leurs  sentiments  a  cet  egard.  Quoi  qu'il 
en  soit,  nous  Iranscrivons  toule  la  cunmiunicalion  de 
k.  Miiryani ,  afin  de  faire  voir  que,  saul' en  une  seuie 
assertion,  ii  n'y  a  rien  d'extravaganl  dans  son  recit. 

»  SelonralarjaRidana-Maryam:  «  Je  suisalle  au  Caire 
la  premiere  fois  par  Aliu-Amba,  llarar,  iieiberali, 
Mokba  el  la  mer  Rouge.  Nous  mimes  26  jours  de  Aliu- 
Amba  a  Harar,  et  noire  caravane  comprenait  7  jabo, 
dils  cliel's  de  caravane  ici,  et  ayanl  ciiacun  500  mar- 
chands  armes  sous  lui.  La  tele  el  \d  queue  de  la  cara- 
vane se  composaient  de  gens  amies  seulement,  lous 
les  bagages  elant  au  centre.  Les  Gallas  rende.it  lorl 
dangereuse  celte  route,  qui  est  prtsque  lout  enliere  en 
Quaila  (pays  bas  et  elouil'ant  de  ciiaieur), 

»  Harar  a  2  500  maisons,  la  plupart  en  branciiages; 
mais  il  y  a  aussi  quelques  maisons  en  pierro.  Le  ter- 
riloire  autom'  de  la  ville  n'est  pas  plus  grand  que  du 
Magac,  presTadda,  jusqu'a  Walaka,  pres  Gondar.  Les 
ruisseaux  abondent  dans  ce  petit  terriloire,  et  vont  se 
perdre  dans  les  sables,  du  cote  de  Test,  chez  les  Haba- 
rawal.  Tout  est  planl6  en  cal'e  el  en  wars,  qui  sert  a 
leindre  la  peau  en  jauiie,  et  est  Ires-recberche  dans 
lout  le  sud  de  I'Arabie.  J'achetai  a  Harar  du  wars  pour 
50  talaris,  et  le  revendis  pour  120  talaris  a  Mokha, 


(  36) 
Mfeme  les  Gallas  Yto  ciiltivent  un  pen  de  caf^.  Harar 
poss^dc  environ  cent  pid'ces  fl'artillerie,  toules  de  tres- 
petit  calibre,  et  beaiicoup  de  fusiliers.  Le  chef,  qui 
porte  le  litre  d'amir  (6myr),  ne  commando  que  dans 
la  ville,  et  les  cultures  suhurbaines  sonl  abandonnees 
chaque  soir,  de  peur  des  Gallas,  qui  du  reste  ne  cher- 
client  que  les  hommes,  et  ne  detruisent  pas  les  plan- 
tations. Ces  Gallas  font  souvent  la  paix,  qu'ils  respec- 
tent  parfois  deux  ol  tiois  ans  de  suite. 

»  A  quinze  journ6es  au  sud  du  Ilarar  est  un  pays 
dont  j'ai  oubli6  le  nom  el  oil  tous  les  bommes  ont  une 
queue  longue  d'une  palme,  couverte  de  poil,  et  situee 
imni^diatemenl  au-dessus  do  I'aiius.  Les  femmes  de 
ce  pays  sont  belles  et  sans  queue.  Cetle  peuplade  a 
un  teint  ou  fuligineux  ou  noir,  et  possede  boaucoup  de 
vaches  et  de  moutons,  raais  peu  de  chameaux.  Un  de- 
sert sans  eau  la  sd'pare  de  Harar.  J'ai  vu  une  quinzaine 
de  ces  gens  a  Bcrberah,  et  je  suis  bien  sur  que  la 
queue  est  naturelle ;  mais  je  ne  I'ai  pas  touchee  de  mes 
mains. 

« Je  livre  cette  hisloire  avec  loule  la  reserve  qui 
doit  accueillir  I'assertion  unique  d'un  Africain.  Dans 
cette  contr6e  lenebreuse,  un  premier  dire  est  une  in- 
dication; une  deuxi^me,  si  elle  est  idenlique,  est  une 
confn  mation ;  une  troisi6me  du  meme  genre  est  une 
verification }  et  il  est  dangereux  de  croire  en  Afrique 
le  rcnseignement  d'un  scul  temoin.  En  attendant 
qu'on  puisse  confirmer  I'existence  des  hommes  a 
queue ,  je  racontcrai  une  tradition  universelle  en 
fitbiupie,  qui  place  pres  de  celle  conlr^e  un  pays  ou 
tous  les  males  sont  des  cbiens  ayant  des  femmes  pour 


(  ^7  ) 
conipagnes.  En  Tigiay,  a  Gondai-  et  en  Gojjam,  on 
pla^ait  ce  pays  du  cote  du  sud ;  en  Kainbal-e  et  en 
Kaffa,  on  le  mettait  au  nord ;  chez  les  Gallas,  on  ne  m'a 
pas  indique  Ja  direction.  Ces  chiens  gardent  leurs  va- 
ches;  leurs  fenmies  tirent  le  lait  et  preparenl  leurs 
aliments.  Cost  loujours  un  voyageur  (^gare  qui  a  ra- 
cont6  ce  qu'il  a  vu  de  cet  etrange  pays. 

»  Une  tradition  bien  elablie  repose  tonjours  sur  un 
fait  plus  ou  moins  defigure  par  le  temps  et  la  distance, 
etl'on  congoit  d'ailleurs  qu'on  ait  compart  a  des  cbiens 
des  hommes  pourvus  d'un  appendice  caudal.  Je  n'ai 
jamais  entendu  attribuer  cette  queue  a  la  mysterieuse 
tribu  des  Gnamgnani,  dont  le  vrai  site  est  encore  in- 
connu,  bien  qu'on  le  place  toujours  a  I'ouest  du  Dar- 
four.  On  les  accuse  toujours  d'etre  naturellement  an- 
thropophages ,  et  un  European  etabli  au  Caire  m'a 
assur^  qu'une  jeune  esclavo  Gnamgnam  devora  dans 
cette  ville  le  nourrisson  qu'on  lui  avail  confie ,  et  dit 
pour  toute  excuse  que  la  chair  humaine  6tait  prefe- 
rable a  toute  autre.  La  meme  assertion  m'a  ete  con- 
firmee par  Chadiy,  chef  des  gens  de  Sawakin  etablis  a 
Djiddah,  et  dont  je  dois  la  connaissunce  au  z^le  com- 
plaisant de  M.  Fresnel,  aloi's  consul  de  France  dans 
cette  ville  celebre.  » 


(  38  • 
ROUTliS  I'AU  BATliAlJX  A   VAPELR , 

ETABI,  lES,      PnOPOSEES     liT     EN     PIIOIETS 

DANS  L'OCIUN  INOIEN  (1). 

xriADriT  UK  l'a>clais 
PAR    M.    l)E    LA    ROQl'ETTE. 


UOUTES  ^TABLIES. 

I.  Route  (le  la  malle  entre  V Angleterre  et  la  Chine. 

La  plus  ancienne  ligne  de  bateaux  a  vapeur,  etablie 
pour  Ics  comnninicalions  avec  I'oodan  Intlien,  est  cellc 
qui  porle  les  malles  luensuolles  enlre  lAiiglelerre  et 
la  Chine,  touchant  a  Pinang  et.  a  Singapore,  et  qui, 
di'puis  sa  creation  en  1845,  a  ele  dans  les  mains  de  la 
Compagnie  orientalc  {Peninsular  and  Oriental  steam 
navigation  Company).  Un  bateau  a  vapeur  part  de 
Southampton  le  20  de  chaque  mois,  avec  des  malles 

't)  Dans  un  mi'moire  He  M.  Charles  de  Kerliallet,  capitnine  de  frc- 
fjate,  que  li-s  Annates  liydrogmpliiques  viennent  de  fairc  paraitre  sous 
le  litre  de  Couiicti'Vations  genSrales  sur  toceun  Inclien,  cet  ofjicier  dis- 
tingue denit  dune  inauii'ic  concise  et  (jijncrale  les  vents,  les  coiirants 
el  ia  nnvigiitioii  de  cet  ocean.  L'une  di-s  trois  cartes  qui  acccmna- 
gnent  li;  nn'moirc,  intimlt'e  Carle  (les  routes  Jc  I'ocenn  Iiidien,  forme, 
avec  le  toxle  qui  le  conceriie,  le  comiilenient  de  la  notice  que  nous 
donnons  ici,  el  qui  e.^t  extraile  du  Jounutl  of  I  lie  Indian  Aicliii/elago. 
L'auteiir  indique,  en  effet,  dans  son  mc'uioire  et  trace  sur  sa  c.irte  les 
routes  a  prendie  [loiir  nttcindre,  a  paiiir  du  cap  de  Bonne-Esperance, 
,  avec  des  navires  a  voiles,  les  cotes  de  llmle  et  de  la  Chine.  Nous  y  ren- 
voyons  nos  lecli-urs. 

M.  dt;  Ki-rhallet  a  d(  j.'i  decril  dans  lui  autre  memoire,  (pie  le  iiienie 
rccueil  a  pultiic',  les  routes  a  t'aire  poui  se  rendre  d'Eiirope  au  cap  de 
HonneEsperance.  D.  I,.  I\, 


(  M)  ) 
pesanles  el  de  petits  Lallols  pour  Alexandrie,  en  toii- 
chant  a  Gibraltar  et  a  Mulle;  on  embarqiie  a  cette 
derniere  place  la  malle  supplomentaire ,  qui  quilte 
Loiidres  le  111  du  mois,  et  se  rend  par  la  France  h 
Marseilles,  et  de  la  a  Malle  par  baleau  a  vapeur.  Puis, 
d'Alexandrie  la  malic  est  poiti^e  a  Iravers  Tisllime 
jusqu'a  Suez,  ou  un  bateau  h  vapeur  de  la  Compagnie 
orienlale  attend  son  arrivee.  Ce  baleau  se  dirige  sur 
Calcutta;  mais  il  louche  a  Aden  et  a  Coylan,  ou  les 
malles  et  les  voyageurs  en  destination  pour  la  Chine 
et  pour  Tarchipel  Indien  passent  sur  un  bateau  a  va- 
peur appartenant  aussi  a  la  Compagnie  orienlale.  Ce 
bateau,  apres  avoir  alleint  Bombay,  se  remet  en  route 
assez  a  temjis  pour  rencontrer  a  Pointe  de  Galles  ie 
bateau  a  vapeur  des  mers  exlcrioiu-cs,  qui  se  rend  a 
Hong-Kong,  en  touclianl  a  Pinang  et  a  Singapore.  Le 
voyage  de  retour  suit  les  monies  directions  en  sens  in- 
serse.  Quoiqiie  les  malles  en  Ire  Suez  et  Ilong-Kong 
soient  aussi  Iransportees  par  deux  lignes  distinctes  de 
bateaux  a  vapeiu-,  telle  a  6le  n^anmoins  la  perfection 
de  lour  mise  en  reuvre,  nu'elles  peuvent  etre  consld6- 
rees  comme  une  seule  gran  !e  ligne,  dont  les  branches 
accessoires,  elablies  ou  proposees,  ^e  dirigent  sur  les 
possessions  hoUandaises  et  esp.agnoles  dans  rarchipel, 
sur  TAustraiie,  et  enfm  sur  les  ports  septenlrionaux  de 
la  Chine. 

La  portion  de  cette  gratide  ligne,  qui  traverse  les 
mers  de  I'archipel  Indien,  a  une  longueur  d'cnviron 
2000  millos(3  220  kilometres)  (1).  La  premiere  parlie, 

(i)  J'ai  pense  que  le  mille  tlont  1  aiiteiir  de  I'aitlcle  orij'iiial  a  fait 
mention  etai(  le  ilatnte-iiiilc  iles  Aiu'lais,  Pf;al,  romnie  on  le  sail  , 
a   I  6o9"',3i.  P.  L.  R. 


( A') ) 

cnlre  Pinang  et  Singapore,  Iraverso  le  delroit  de  Ma- 
lacca, ou  la  uavigalion  n'est  jamais  inlenonipue  par 
des  lempetes ;  et  en  r^glant  oonvenablomenl  le  dejiart 
des  bateaux  a  vapem-  de  chaque  point  de  relache,  on 
peut  franchir  de  jour  les  parties  dangereuses  dudetroit. 
La  route  de  la  malle  entre  Singapore  et  Hong-Rong 
traverse  directement  la  nier  de  Chine  par  Poulo-Sapata, 
et  comnie  les  bateaux  a  vapeur  ont  a  lulter  conlre  la 
mousson,  il  n'y  a  que  de  puissanls  navires  qui  soicnt 
employes  ])our  ce  service.  Les  bateaux  a  vapeur  de 
cette  ligne  marchent  comparativement  avec  lenteur,  a 
I'exception  du  Singapore,  maintenant  a  son  premier 
voyage;  mais  ils  sont  construils  si  solidement,  qu'ils 
n'ont  encore  eprouve  aucun  accident  grave. 

Les  bateaux  a  vapeur,  avec  la  malic  anglaise  qui  part 
le  2/i  du  mois,  arrivcnt  a  Singapore  au  commence- 
ment du  second  mois  suivant,  quelquefois  le  12,  mais 
generalemenl  Ic  /i  ou  le  5,  et  mfeme  plus  tot,  puisque 
la  malle  du  2Zi  mai  est  arrivee,  d'Angleterre  a  Singa- 
pore, dans  la  matinee  du  1"  juillet,   c'est-a-diro  en 
trente-huit  jours.    Le  bateau    a  vapeur  revenant  de 
Hong-Kong  arriva  dans  la  soiree  du  meme  jour,  don- 
nant  aiiisl  les  moyens  de  r^pondre  presque  inslantane- 
ment  aux  lettres  revues  d'Europe ;  et  ce  fait  se  renou- 
volle  pendant  la  periodc  bisannuelle  dans  laquello  les 
bateaux  a  vapeur  (juittent  la  Chine  sept  jours  plus  tot 
que  le  reste  de  I'annee.  A  cet  6gard,  Singapore  jouit 
de  grands  avantages,  car  il  n'est  pas  possible,  meme 
avec  unc  accelt^ratlon   noiivelle  dans   la    marche  des 
bateaux  a  vajieur,  que  ses  habitants  puissent  corres- 
pondre  plus  prompleinent  avec  I'Europe  par  la  malic 
de  retour. 


, 


( Al ) 

Dans  le  mois  de  juin  de  la  pr^senle  ann^e,  la  Com- 
pagnie  orientale  a  ^tabli,  entre  Calcutta  et Hong-Kong, 
une  ligne  reguli^re  de  bateaux  a  vapeur,  dent  le  de- 
part doit  avoir  lieu  vers  le  12  du  mois,  et  I'arrivee  a 
Singapore  vers  le  20.  Cette  ligne  a  d;te  etablie  princi- 
palement  pour  transporter  en  Chine  I'opium   vendu 
aux  ench^res  mensuelles  de  la  Compagnie  des  Indps 
orientales.  Le   r^sultat  de  la  premiere  campagne  du 
mois  de  juin  fut  de  nature  a  salist'aire  les  esp^rances 
les  plus  hardies,  le  Fret  de  I'opium  seul  ayant  produit 
un  gain  considerable  tous  frais  payes.  Aujourd'hui  que 
les  derniers  incendies  de  navires  dans  les  ports  do  Cal- 
cutta et  de  Bombay  ont  decide  les  assureurs  a  ne  pas 
repondre  des  risques  que  courent  les  batiments  equi- 
pes  par  les  marins  du  p«ys,  les  bateaux  a  vapeur  re- 
cueilleront  tous  les  profits  du  transit  entre  I'lnde  et  la 
Chine,  et  les  communications  deviendront  hebdoma- 
daires  et  peut-etre  plus  fr^quentes  encode  (1). 

II.  Route  de  la  malle  de  Singapore  a  Java  et  a  Macassar. 

Bientot  apr^s  I'elablissement  des  nialles  mensuelles 
entre  I'Anglelerre  et  Hong-Kong,  le  gouvernement  des 
Indes  neerlandaises  a  otabll  un  bateau  a  vapeur  qui 
transporte  la  malle  et  des  passagers  de  Batavia,  et 
rencontre  le  bateau  a  vapeur  de  Hong-Kong  a  Singa- 
pore ;  les  nouvelles  d'Europe  sont  distribuees  dans 
rile  de  Java  au  moyen  des  routes  de  postes  organis6es 
d'une  extr^mile  de  Tile  a  I'aulre.   Depuis  le  mois  de 

(l)  Depuis  que  ceci  a  tte  ecrit,  les  ilcux  bateaux  a  vapeur  employes 
sur  cette  ligue,  iErin  et  le  Pacha,  se  sunt  reiicouties  avcc  taut  ile 
violence  ilans  le  tielroit  de  Malacca,  que  le  dernier  a  coule  bas  ini- 
inediatetnent,  tt  que  I'Eriii  a  lailli  eprouver  le  nieme  sort. 


(  A2  ) 
mai  dernier,  la  malic  ijollaiulaise  esl  tiansporlee  pur 
un  bateau  a  vapeiir  apparleiiant  a  une  associalion, 
fondee  a  Java  sous  le  nom  do  Coinpagnie  dcs  bateaux 
a  vapeiir  de  I'liule  iteerlandaise.  Ce  iiaviie  quilte  Singa- 
pore vingt-quatre  lieurcs  apres  larrivi^e  de  la  malle 
d'Europe,  ct  se  rend  a  Balavia  par  les  detroits  de  Illiio 
elBanca,  en  touchanl  sur  sa  route  a  la  residence  de 
Rliio  et  a  Minto  ,  capilale  de  Banca.  De  Batavia,  le 
bateau  a  vapeiir  se  rend  a  Samarang  el  a  Soural)aya, 
capitale  oricntale  de  Java,  ou  les  malles  pour  Macassar 
sonl  remises  a  un  bateau  du  gouvernement,  qui  les 
porte  a  Celebes.  Les  bateaux  a  vapeur  de  la  Com|)a- 
gnie  N.  J.  S.  altendent  I'arrivee  du  bailment  de  Ma- 
cassar, el  conlinuent  ensuite  leur  voyage  de  relour, 
toucliant  aux  memes  lieux ,  et  abordent  a  Singapore 
assez  a  temps  pour  profiler  des  nialles  do  relour  i)ar 
les  bateaux  a  vapeur  de  la  Compagnie  orientale  venant 
de  Cbine.  Ainsi  une  ligne  reguliere  mensuelle  de  com- 
munication par  bateaux  a  vapeur  est  elablie  a  un  |)oinl 
^loign(J  de  moins  de  700  milles  du  continent  de  I'Au- 
stralie,  et  seulemenlde  2700  milles  de  la  bale  Moreton, 
sur  la  cole  orientate  du  conlinenl,  ou  il  existe  une 
communication  leguliere  par  baleaux  a  vapeur  avec 
Sjdney  et  la  lerre  de  Van-Dieuien. 

III.  Route  de  la  rnaUe  eiitre  Hong-Kong  et  Manille. 

Le  gouvernemeul  espagnol  des  Pliilippines  a  olu 
dans  I'usage  de  depeclier  un  petit  batiment  de  guerre 
a  vapeur  partanl  de  Manille  pour  rencontrer  les  malles 
de  Singapore,  loutes  les  foisqu'une  transmission  rapido 
de  d6p6cbes  pour  la  mere  patrie  a  <il6  jugoe  neces- 
saire;  mais  comme  la  communicalion  par  ce  canid  est 


( ll^ ) 

qiielquefois  interrompue  pentlanl  deux  ou  trois  tnois 
consecutifs  ,  on  ne  pent  pas  appeler  cela  une  Ii2;ne 
r^"uU6roinent  etaMie.  Une  association  a  6l6  derniere- 
ment  form(!!e  a  Manille  pour  cntrelenir  une  comrnu- 
nicalion  par  la  vapeur  avec  Honu;-Kong  au  moyen  d'un 
navire  qui  avail  ^16  envoye  a  Sydney  pour  6lre  vendu, 
et  qui  a  et6  achet6  a  cet  effet.  Comma  la  distance 
entre  les  deux  places  est  d'un  peu  plus  de  600  millcs, 
ce  seul  navire  sera  suflisant  pour  entretenir  une  com- 
municalion  mensuelle  et  reguli^re. 

ROUTES  PROPOSfcES. 

I.  Entre  Sydney  et  Singapore  par  le  detroil  de  Torres. 

Le  premier  pas  pour  ouvrir  un  service  de  malle 
entre  I'Angleterre  et  les  colonies  auslraliennes ,  par 
la  voie  de  I'lnde,  a  etc  fait  en  1843.  Le  docteur  Ni- 
cholson ,  alors  membrc  pour  le  port  Phillip,  et  main- 
tenant  orateur  du  conseil  de  la  Nouvellc -Galles  du 
Sud,  proposa  la  formation  d'un  comile  pour  examiner 
la  possibilite  d'ouvrir  une  route  par  terre  jusqu'a 
Port-Essinglon,  ^tablissement  sur  la  cote  nord ,  cre6 
en  1838  el  abandonne  en  1849.  Le  comite,  apres  avoir 
pris  toules  les  informations  possibles,  approuva  le 
orojet,  el  le  conseil  vota  les  fonds  necessaires  pour 
renvoi  d'une  expedition  exploralrice  chargee  de  tra- 
cer Ja  route;  mais  ie  gouverneur  de  la  Nouvelle-Galles 
ilu  Sud  1  efusa  de  donner  sa  sanction  avant  d'en  avoir 
rdf^re  au  gouvernemcnt  de  la  m^re  [latrie.  Neanmoins 
les  colons,  qui  avaienl  pris  feu  a  ce  projel,  mecontents 
de  ce  delai,  (iront  entre  eux  dcs  souscriplions  pour 
preparer  une  expedition,  laquelle,  sous  la  direction  du 


(  AA  ) 
docleur  Leicliluirdt,  vo)ageur  alleiiuind,  alleignit  Poil- 
Essington,  ot  reconniil  qu'aucunes  difficultos  ne  s'op- 
posaienl  a  I'ouverture  immediate  d'une  route  do  poste 
a  la  partie  extreme  scptcnlrionale  du  continent.  Mais 
avant  le  relour  de  I'expedilion  a  Sydney  en  1846,  il 
surgit  a  Londres,  sous  de  favorables  auspices,  un  [)rojet 
de  communication  directe  de  la  malle  par  la  vapeur  el 
la  voie  de  I'lnde,  qui  detoui'na  I'allenlion  des  colons 
de  la  voie  de  terre ;  un  comite  du  conseil  l^gislatif  de 
la  Nouvelle-Galles  du  Sud,  ayanlM.  E.  Deas  Thomson, 
secretaire  colonial,  pour  president,  en  raison  de  I'ac- 
cord  unanime  du  coniit6,  se  prononga  en  favcur  de 
la  route  par  le  detroit  de  Torres,  el  le  conseil  l(^gisla- 
tif  vola  une  somme  annuellc  de  6  000  livres  sterling 
(150  000  francs  environ)  pour  faciliter  le  service  de 
cette  route  par  la  vapeur.  Cette  decision  n'etait  pas  de 
nature  a  etre  acceptee  par  les  autres  colonies ;  I'Au- 
stralie  mcridionale  tavorisait  la  route  par  le  cap  Leewen 
ou  le  cap  de  Bonne-Esp6rance ,  qui  lui  donnerait  la 
priorite  pour  la  reception  des  malles,  et  la  Nouvelle- 
Z^lande  donnait  la  preference  a  la  route  de  I'ocean 
Pacifique  par  la  voie  de  Panama.  Comme  ces  deux 
colonies  avaienl  un  nombre  consid^ralilc  dodefenscurs 
influents  dans  la  mere  pali'ie,  la  question  de  la  com- 
munication par  la  vapeur  avec  I'Auslraiie  devint  une 
veritable  pomme  de  discorde  entre  les  colonies  rivales 
et  les  compagnies  de  la  navigation  par  la  vapeui\ 
Comme  ces  dernieres  suivront  probablement  leurs 
vues  particulitjres  lorsqu'elles  auront  appris  la  decou- 
verte  des  mines  d'or  en  Australie,  on  aura  des  occa- 
sions d'acqu«^rir  une  experience  pratique  sur  le  choix 
a  faire  entre  les  differentes  routes;  ainsi,  il  n'esl  point 


( l^'^ ) 

n^cessaire  de  disculer,  quant  a  present,  celte  ques- 
tion. 

Le  projet  originaire  de  la  communication  par  la  va- 
peur  avec  rAuslralie,  pax'  la  voie  du  detroit  de  Torres, 
comprenait  Batavia  et  Sourabaya,  dans  la  direction  de 
la  route;  mais  il  n'etait  pas  alors  gdineralement  connu 
que  le  gouvernement  neerlandais  voyait  avec  un  tr^s- 
vif  deplaisir  I'inlrusion  d'etrangers,  au  moyen  de  la 
vapeur,  dans  I'arcliipe]  Indien  (1).  La  route  directe,  et 
qui  sera  sans  doute  adoptee,  traverse  le  passage  Cari- 
mata,  vers  le  nord  ;  puis  se  dirige,  des  lies  situees  a  Test 
de  Java,  vers  le  delroit  de  Torres,  directement  du  c6t6 
est-sud-est,  route  qu'on  peut  suivre  sans  interruption 

(ii  Voiti  ce  que  dit  a  ce  sujet  Temminck  dans  son  Coup  d'ail 
general  sur  les  possessions  neerlandaises  dans  I'lnde  arcltipelagitjue, 
ouvrage  compile  sur  des  documents  officiels,  et  recommande  publi- 
quement  pour  servir  de  guide  aux  personnes  occupant  un  postc  dans 
les  possessions  indiennes  de  la  Hollande,  oii  Ion  trouve  le  passage 
significatif  suivant : 

•  II  n'est,  nous  regrettons  d'etre  oblige  de  le  dire,  que  irop  bien 
avere  que  le  commer9ant  anglais  est  rarenient  satisfait;  notre  gou- 
vernement, quels  que  soient  les  sacrifices  qu'il  puisse  faire  aux  pre- 
tentions du  commerce  de  la  Grande-Bretagne  dans  nos  Indes,  lie 
parviendra  point  a  contenter  le  desir  immodere  de  I'industrie  an- 
glaise  a  etendre  de  plus  en  plus  les  debouches  qu'il  faut  necessai- 
rement  au  produit  colossal  de  ses  fabriques;  cette  ne'cessiti;  d'ex- 
porter  I'excedant  e'normement  disproportionne  aus  besoins  de  la 
consommation,  et  dont  le  chiffre  s'accumule  de  jour  en  jour  dune 
maniere  effrayante,  pousse  le  commerce  a  insister  sans  cesse  aupres 
du  pouvoir  pour  que  des  debouches  nouveaux  lui  soient  ouverts. 
Ces  elameurs  incessantes  conduisent  le  gouvernement  britannique 
a  ;ibuser  de  la  suprematie  qu'il  exerce  sur  les  mers,  par  I'emploi  de 
moyens  contraires  aux  droits  des  nations,  seulement  dans  le  but  de 
SiUisfaire  aux  exigences  du  commeice  anglais. 

»  Bienlot  ses  pre'tenlion.s  ne  se  bornerotit  plus  a  radmission  de  son 


( A*l ) 

tie  mill  conime  de  jour.  Si  on  a  besoin  d'un  d^pdt  de 
charbon  ,  on  peut  en  rormer  un  a  Larantuka  ou  dans 
quelque  aulre  des  ^lablissemenls  porlii;>ais  pirs  do 
Timor,  qui  so  liouveiil  sur  la  route  el  sont  cxaclemenl 
a  moilie  cheuiiii  enlre  Singapore  el  Ic  delroil  de 
Torres.  Mais  conime  la  distance  enlre  Singapore  ct  le 
cap  }oik  est  seulement  de  2500  niiiles  (A  000  kilonie- 
tres),  et  qu'aujourd'liui  on  ne  se  sort  uniquement  pour 
la  route  que  de  bateaux  a  vapeur  de  premiere  classe , 
il  n'esl  pas  nticessaire  de  disculer  la  question  de  depots 
imniediats  de  charbon. 

Ainsi  qu'on  la  elabii  ci-dessus,  la  route  entre  Sin- 
gapore et  I'entree  occidenlale  du  d^troit  de  Torres 
pcul  etre  suivie  avec  surete  aussi  bien  pendant  la  nuil 

pavilion  clans  les  ports  qui  lui  soul  ouveits  tiaiis  les  iles  piincijj.iles 
de  iios  ai<!liij)els,  ou  ileja  il  cxeixe  hs  suprematie,  ii  fauilra  au  com- 
merce des  concessions  plus  elendues  [lOur  ^atisfaire  son  ainbilion 
demesuree.  11  insistera  sur  unc  posses^ion  britannique  au  centre  dc 
nos  archipels;  peul-iitrc  la  politiijue  aiiylaise  eu  nounil-elle  le  desir, 
par  I'espoir  euiis,  et  donl  <icja  il  a  tie  l.iit  inenlion  par  la  presse  pe- 
riodique,  nolamuient  de  former  une  ligne  de  bateaux  a  vapeur  enlre 
Singapore  et  la  parlie  septeulrionale  de  I'Aiistralie;  a  cetie  fin,  on 
inediie  peut-iitre  une  violation  des  trailer,  semblable  a  celle  de  la 
prise  de  Laboan  et  de  relablisseiiient  a  Singapore.  Mais  nous  nvons 
I'espoir  que  la  Hoiiande  se  tiendra  pour  avt-i  lie  par  les  lecons  d'uiie 
exiieiience  tlierernent  achelec;  sa  muiine  dans  I'arcliipel  sera  dore- 
navant  asscz  nonibreuse  pour  ((ue,  par  sa  presence  ei  par  ses  di'inon- 
slralions,  elle  puisse  rendre  moins  facile  loule  siiolialion  quelconque 
au  ccTitre  de  nos  possessions  iuterlropicales,  que  le  premier  des  de- 
voirs du  pavilion  necrlaiiilais  est  de  garanlir  lonire  toute  alleinte,  en 
ce  qu'il  est  appele  a  prolegcr  1  licriiajje  le  plus  preci<ux  ct  le  plus  ne- 
cessaire  an  bien-elre  de  la  nation,  heritage  tiansmis  pr.r  nos  ance- 
tres,  et  dont  ceux-ci  out  ar(|uis  la  possession  par  leur  perseve- 
rance, ainsi  qu'au  prix  de  leur  rourageux  devouement.  »  (Vol.  FlI, 
p.  3o.) 


(  47  ) 

que  pendaiU  le  jour;  inais,  en  Jipjirochant  du  d^troit 
de  Torres,  il  est  necessaire  de  prendre  de  grandes 
precaulions.  Le  leve  recent  de  feu  le  capitaine  Owen- 
Slnnley,  du  navire  de  la  marine  brilannique  Rattles- 
nake,  a  trace  le  sondage  dans  le  detroit  de  VEn- 
(leavoitr  [i]  avec  une  exacdlude  qui  permet  de  doubler 
les  lies  Booby  et  Red-lValUs,  et  de  passer  le  detroit 
de  I'Endeavour,  en  ^vitant  les  bancs  de  sable.  La 
distance  de  I'entr^e  occidenlale  au  cap  York  est  de 
35  milles  (50  kilometres).  Le  point  recommande  par 
le  conseil  l<^gislalif  de  la  Nouvelle-Galles  du  Sud,  pour 
un  6lablissement  et  un  depot,  est  Port  -  Albany ,  a 
5  milles  a  Test  du  cap  York.  La  distance  de  Port- 
Albany  au  phare  de  Tile  Raine,  plac6  sur  la  barre  extd- 
rieure  des  r^cifs ,  est  de  1'20  milles  (193  kilometres) 
par  le  passage  du  milieu,  et  il  resle  a  examitier  si  uno 
route  plus  directe  r^duirait  verital)lement  la  distance  a 
100  millis;  on  saura  si  un  navire  a  vapeur  d'une  vltesse 
moderee,  quittant  le  d^pdt  a  la  chute  du  jour  et  allanl 
a  toule  vapeur,  peul  en  sorlir  avanl  la  nuil  et  entrer  en 
pleine  mer,  en  evitant  les  recifs.  Le  comile  de  la  navi- 
gation a  vapeur  de  18/i(i  recommantlait  le  passage  in- 
ttWieiir  le  long  de  la  cote  nord-est  de  I'Australie ,  en 
dedans  de  la  barri^re  des  r6cifs;  niais  on  ignorait  a 
celle  epoque  qu'on  emploierait  une  classe  de  navires 
a  vapeur  aussi  grands  que  ceux  dont  on  doit  se  servir. 
Lorsque   le  passage  interieur  sera  indique  avec  des 

(l)  Ce  nom  a  etc  longtemps  donne  a  tort,  snr  les  cartes  onglnises, 
au  detroit  de  Torres;  on  le  restreiiit  niaiiilenant  a  un  detroit  sccon- 
daire  sitiie  rntre  la  cote  la  plus  voisine,  a  roiiost  du  cap  York,  et  mi 
ilot  an  sud  des  iles  Windorave  et  du  Prince  de  Calles, 

U.  L.  B. 


(  48  ) 
signaiix  tl  ilos  phart-s ,  il  esl  liors  ilc  clonic  (jiril  de- 
viendra  le  passage  pr^tt^re  ;  niais  jusquo-la  il  sera  plus 
siir  de  continuer  la  route  en  dehors  des  rdcifs.  Les  llots 
de  corail  sont  moins   dangcreux    on  jiloino  uier  que 
dans  des  eaux  parfaitement  calmes.  En  plcine  mer, 
Icur  posilion  est  generalenicnt  signaloe  par  des  bri- 
sanls,  et  si  un  navire  louche  sur  un  ile  ces  r^cils,  il  est 
bientot  releve  par  la  mer,  et  la  vie  des  Equipages  est 
preserv^e.  Cost  ainsi  que  presque  lous  les  navires  qui 
ont  ete  jetes  sur  la  barricre  exterieure  existent  encore, 
el  pourront  continuer  leur  service,  jusqu'a  ce  qu'ils  suc- 
conibent  aux  ravages  du  temps.  Mais ,  dans  le  passage 
interieur,  le  cas  est  dilTerent.  Lu  les  recifs  se  cachent 
sous  la  surface  de  la  mer,  sans  que  rien  indique  leur 
existence,  a  I'exception  d'une  l^gere  decoloration  de 
I'eau  au-dessus,  qui  ne  pent  nieme  6tre  apercue  (jue 
par  un  temps  clair,  et  dans  cerlaines  positions  a  I'^gard 
du  soleil.  Comme  les  cotes  des  r6cifs,  semblables  a  des 
murailles,  s'elevent  d'une  mani^re  abruple  dans   les 
eaux  profondes,  le  plomb  de  la  sonde  ne  donne  aucun 
avertissement,  et  la  presence  du  danger  n'est  signalee 
que  lorsque  le  vaisseau  vient  se  briser  sur  le  rccif,  et, 
Irois  fois  sur  qualre,  il  rebondit  avec  tant  de  force  et 
de  rapidity,  que  les  passagers  ont  a  peine  le  temps  de 
monter  sur  le  pont  (1).  Knlre  le  cap  York  et  la  baie 
Moreton,  les  vents  sontfavorables  a  la  navigation  pen- 
dant une  partle  de  Tannic  ;  entre  la  baie  Moreton  et 
Sydney,  ou  deux  petits  bateaux  a  vapeur  font  un  service 
regulier. 

(i)  Tel  ful  le  cas,  pour  I'Hrroine,  a  son  passage  de  Sydney  a  I'ort- 
Essinj'ton  en  avril  i84').  L'autour  dc  cette  notice  eul  a  regielter,  dans 
ce  deplorable  evenetnent,  la  perte  de  son  frere  unique. 


(  A9) 

II.  Aux  colonies  de  V Australie  par  la  vote  du 

cap  Lee u win. 

La  route  occidentale ,  proposee  par  Jes  colonies 
rndridionales,  borde  seulement  la  partie  sud-ouest  de 
I'archipel.  La  route  de  Singapore  au  detroit  de  la 
Sonde  est  identique  avec  celle  qui  suit  la  ligne  des 
bateaux  a  vapeur  de  Balavia.  De  la  pointe  de  Java  a 
Freemantle,  port  principal  de  I'Australie  occidentale, 
la  premiere  station  propos6e,  la  course  est,  presque  au 
sud-sud-est,  de  1700  milles  (2  700  kilometres).  Les 
navires  a  vapeur  de  la  premiere  classe  pourront  Stre 
employes  sur  cette  ligne,  en  raison  de  la  mousson  du 
sud-est;  au  mois  de  decembre ,  Janvier  et  fevrier, 
lorsque  la  mousson  de  I'ouest  domine  dans  le  sud  de 
Java,  des  ouragans  survlennent  en  mer  entre  cette  ile 
et  le  cap  nord-ouest  de  I'Australie.  Les  decouvertes  r6- 
centes,  relatives  a  la  loi  des  tempdtes,  metlent  les  ba- 
teaux a  vapeur  en  6tat,  avec  des  precautions  ordinaires, 
d'eviter  les  tourbillons.  La  saison  d'biver,  sur  la  cole 
occidentale  de  I'Australie,  correspond  a  la  saison  d'6te 
d'Europe.  Pendant  cette  periode,  les  vents  de  I'ouest 
soufflent  sur  la  cote,  ce  qui  rend  le  passage  le  long  de 
cette  cote  assez  desagreable.  La  seule  partie  de  la  route 
dans  laquelle  les  puissants  navires  a  vapeur  I'encon- 
trent  des  difficultes  se  trouve  pros  de  la  cote,  entre  le 
cap  Leeuwin  et  la  pointe  d'Eatrecasteaux.  Dans  ce 
voisinage,  les  vents  tournenl  soudainement  du  nord- 
ouest  au  sud-ouest,  et  causent  souvent  de  grands 
malheurs.  Je  n'ai  point  le  desir  d'exagerer  les  dan- 
gers de  ce  cap;  mais  ayant  reside  dans  ces  parages 

III.  JANVlEll.    li.  k 


(  50  ) 
pciulunt  line  saisoii  iriiiver  loul  eiilieie,  et  ayanl  plus 
d'une  lois  tiprouve  des  tcrnpetes  au  large,  je  pense 
qu'il  est  convcMable  d'enregislrer  celte  opinion  pour 
ceux  qui  paricnt  avec  legerete  des  pt^rils  qu'oflVe  ce 
cap.  Dii  detroit  du  lioi-Georges,  I'un  des  incillours 
porls  de  rAusUalie  ,  a  Adcltnde,  le  passage  d'aller  et 
dc  relour  peul  etre  lail  sans  griiiide  dillicull«i  on  totile 
saison .  altendu  que  les  navires  a  \apftur  sent  en  elat 
de  lutter  conlie  la  force  du  vent,  en  se  tenant  on  de- 
dans de  la  grande  crique  de  rAuslralie,  ou  les  vents 
(i'ouesl  perdent  une  grande  partie  de  lour  violence. 
Lorsque  les  colons  du  niidi  auronl  appris  quo  leurs 
veritables  inlerels  reposent  sur  le  developpenicnt  le 
plus  eleodu  des  communicalions  par  terre,  une  route 
de  posle  pour  des  malles  et  des  passagers  sera  ouverte 
enlro  la  bale  de  Shark  el  le  detroit  du  Roi-Georges,  les 
seuls  ports  aisement  abordables  de  I'Australie  occiilen- 
tale.  Les  dangers  de  la  cote  inlerinediaire  peuvent  etre 
alors  eviies,  et  la  route  occidenlale  sera  preferee  des 
voyageurs. 

ROUTES  EN   PROJETS. 

I.  Entre  Singapore  et  Manille. 

On  a  d^ja  fait  connaJtre  dans  la  premiere  partie  de 
cet  essai  que  le  gouvernement  espagnol  des  Philippines 
est  dans  I'usage  d'envoyor  un  bateau  A  vapeur  do  Ma- 
uillc,  pour  rencoutrer  les  malles  a  Singapore,  toules 
les  lois  qu'on  a  quelquc  depeche  iniportanto  a  coni- 
inuniquer  au  aiinislere  de  la  mere  palrie,  des  succ^s 
brillants  a  annuncer  contre  les  pirates,  etc.  Les  malles 
espagnoles  sont  apportees  de  Gibraltar  par  les  bateaux 


{  51  ) 
a  vapeur  de  la  Gompagnie  orientale,  sous  la  garde  d'un 
agent  du  bureau  de  la  poste.  Pcu  de  passagers,  exceple 
de  hauls  fonclioniiaires,  arrivent  ou  parlent  par  le  ba- 
teau a  vapeur  espagnol.  Los  autres  se  rendent  de  leur 
mieux  aSingaj)ore,  ou  en  parlent  par  des  navires  a 
voile;  et  s'il  ne  se  presente  ])as  d'occasion,  ils  pren- 
nent  la  voie  d'Hong-Kong.  Conime  lout  cliangement 
de  iiiinislere  en  Espagne  entraiue  le  cbangeuient  coni- 
plet  des  foucliuunaires ,  le  transit  des  passagers  est 
considerable,  et  deviendrait  beaucoup  plus  conside- 
rable encore  si  une  comniunicalion  directe  etait  elablie 
entre  Singapore  el  iManille.  Lcs  bateaux  a  vapeur  em- 
ployes sur  cette  ligne  passeraient  le  long  des  cotes  de 
Borneo  et  de  Palawan,  ou  ils  seraient  mis  a  couverl 
par  les  r^cit's  qui  existent  au  sein  de  la  mer  de  Chine, 
et  des  navires  d'une  puissance  moilie  moins  grande, 
que  ceux  qu'on  einploie  aiaintenant  pour  la  route 
directe  jusqu'a  Hong-Kong,  seraienl  sullisanls.  C'elait 
la  route  qu'on  avail  originairement  en  vue,  lorsquoa 
proposa  d  elendre  jusqu'en  Cliiae  la  communication 
par  la  vapeur,  el  lorsque  la  ligne  biinensuelie  de  Suez 
sera  elablie,  on  adoptera  ctrtainemenl  cette  roule.  La 
distance  de  Singapore  a  Labuan  est  du  7/i0  niilies 
(1 190  kilometres);  de  Labuan  a  Manilie,  6A0  (103U  ki- 
lometres); et  de  Manilie  a  Hong-Kong,  020  (1000  ki- 
lometres) :  en  tout,  2000  milles  (3  220  kilometres). 
Coinme  la  roue  directe  a  la  mer  de  Chine,  de  Singapore 
u  Uong-Kong,  est  de  moins  de  1  500  milles  (2Zi60  kilo- 
metres), la  question  a  decider  est  de  savoir  si  les  avan- 
tages  de  I'ouverture  dune  communication  mensuelle 
avec  Labuan  et  Manilie  sont  assez  considerables  pour 
conlre-balancer  les  iuconvenients  dune  plus  grande 


(  52  ) 
distance  ii  parcourir.  Si  les  goiiverncments  espagnol  et 
anglais  calculaient  le  nionlant  des  ddpenses  faites  pour 
envoyer  des  malles  a  Manille  et  a  Labuan  par  dos  vais- 
seaux  du  gouverneniont ,  on  trouverait  piobablcment 
qu'elles  depassent  grandemeiit  le  nionlanl  de  celles 
pour  lesqueiles  la  C.oinpagnie  orientale,  ou  toute  autre 
Compagnie  de  bateaux  a  vapeur,  enlreprendrait  una 
ligne  uiensuelle  el  reguli^rc  se  dirigeant  sur  la  Chine 
en  passant  par  ccs  ports. 

II.  Dn  (letroit  de  Torres  a  Singapore  d'un  cote,  el 
a  Manille  et  Hong-Kong  de  r autre. 


La  ligne  de  navires  a  vapeur  a  elablir  entre  Singa- 
pore et  la  Nouvelle-Galles  du  Sud  sora  soutenue,  a 
cause  de  la  necessile  d'une  communication  entre  les 
colonies  et  la  mere  patrie ,  et  pourra  en  consequence 
etre  appelee  la  ligne  impdriale  ou  nalionale.  Les  co- 
lons eux-memes  demandent  d'autres  lignes  de  cbm- 
municalion,  et  comme  ils  seront  bientot  en  position 
de  supporter  la  d^pense ,  on  les  verra  s'^tablir.  Pour 
arriver  a  quelque  cliose  de  definitif  en  ce  qui  concerne 
les  routes  que  ces  lignes  suivront,  il  est  n^cessaire  de 
passer  en  revue  les  relations  commerciales  de  ces  co- 
lonies avec  les  aulres  pays.  Jusqu'a  une  epoque  tres- 
r^cente,  les  seules  exportations  de  la  Nouvelle-Galles 
du  Sud  el  de  la  Terre  de  Van-Diemen ,  qui  fournis- 
saient  aux  colons  le  moyen  de  se  procurer  les  articles 
proiluits  ou  manufactures  de  I'etranger,  conslslaient 
en  laine,  suit",  peaux,  conies,  et  huile  de  baleine.  La 
mere  patrie  titail  le  principal  et  certainemenl  presque 
le  seul  marche  pour  ces  productions,  el,  comme  con- 


(  53) 
sequence  naturellc,  tous  les  articles  pvodults  ou  nia- 
nufaclures  d'Europe  demandes  par  les  colons  etaient 
importes  de  la  Grande-Bretagne.  Mais  les  colons  de- 
vaient  chercher  ailleurs  les  produits  tropicaux  (qui 
leur  manquaient),  specialeraent  les  thes  et  les  sucres, 
consommes  par  eux,  en  qualitesinfinimentsup^rieures 
a  celles  de  tout  autre  peuple  du  monde,  proportion- 
nellement  au  chiffre  respectil'des  populations.  Les  th6s 
6taient  importes  direclement  de  la  Chine;  les  sucres 
Etaient  tires  dans  I'origine  de  Calcutta  et  de  I'Ue  Mau- 
rice; mais  comme  les  produits  de  ces  deux  places 
dlaient  alors  proteges  par  un  droit  elev6  sur  les  sucres 
Strangers  a  I'int^rieur,  les  colonies  etaient  compara- 
tivement  negligees ;  et  lorsqu'un  grand  flot  d'emigrants 
vint  en  1837,  et  pendant  les  trols  annees  suivantes, 
augmenter  la  consommation  du  sucre ,  ils  eurent  a 
s'adresser  au  monde  entler  pour  s'approvisionner.  Les 
producteurs  des  ^tablissements  anglais  preferaient  le 
marche  de  la  mere  palrie ,  ou  leurs  denrees  etaient 
protegees;  aussi  les  colons  eurent-ils  a  chercher  ce 
dont  ils  avalent  besoio  dans  les  possessions  etrangeres. 
Les  marchands  de  Java  et  des  Philippines,  ou  la  pro- 
duction du  Sucre  avait  pris  recemment  un  accroisse- 
ment  considerable  ,  entrferent  avec  ardeur  dans  un 
commerce  qui  etait  extremement  avantageux;  les  co- 
ions,  qui  avaient  chez  eux  de  nombreuses  raffineries 
de  sucre,  demandaient  seulement  les  qualites  les  plus 
communes,  (jui  ne  pouvaient  etre  transportees  en  Eu- 
rope, a  cause  du  taux  eleve  du  fret.  Plusieurs  navires 
furent  construits  a  Java  expressement  pour  ce  com- 
merce, les  reglements  concernant  le  fisc  et  les  revenus 
etablis  dans  I'ile  porlaient  prejudice  a  la  navigation 


(  5A  ) 
tie  transporl  par  les  l)aliments  anglais,  et  tout  sem- 
blait  devoir  favorisor  ce  nouvean  commerce  ,  lorsqn'il 
fut  coupi  dans  sa  racine  par  la  mise  en  vigueur  d'un 
ancien  ordrc  du  Conseil ,  qui  declarait  illegal  tout 
Iransport,  dans  les  colonies  anglaises,  d'autres  produits 
que  ccux  de  la  mere  patrie.  Le  commerce  du  sucre  se 
concentra  alors  dans  les  Philippines,  d'oii  les  produits 
6taient  port^s  dans  la  Nouvelle-Galles  du  Sud  par  des 
navires  anglais.  Des  tenlatives  ont  6(6  faites  occasion- 
nellcnient  pour  dtablir  des  relations  de  commerce  avec 
Singapore  et  d'autres  places ,  mais  toujours  sans 
succt;s. 

Los  marchands  de  Sydney  ont  toujours  trouv^   a 
Manillc  plus  d'avantages  que  partout  ailleurs  par  le 
monopole  qu'ils  y  ont  constamment  exerc^  avec  leurs 
capitaux  a  la  main  ;  mais  lorsque  les  producteurs  des 
Pliilijipincs  auront  cu  le  temps  d'accrollre  leurs  plan- 
tations, les  affaires  prendronl  un  autre   aspect.    Les 
Philippines  fournissent  aux  colons  tous  les  aulies  pro- 
duits tropicaux  dont  ils  ont  bosoin ,  a  I'exception  du 
the ;  un  jour  ellos  etendront  plus  loin  leurs  rapports 
conimorciaux.  Quand  une  seconde  ligne  ou  une  ligne 
biniensuelle  sera  d'tablie  par  le  d^troit  de  Torres,  on 
peut  s'allendre  a  ce  qu'elh^  diiigera  son  cours  a  tra- 
vers  les  Moluques,  en  touchant  a  Amboine  el  Ternate 
et  a  Labuan,  d'ou  des  navires  a  vapeur  auxiliaires  se 
rcndront  a  Singapore  d'un  cole,  et  de  I'autre  a  Ma- 
nille  el  en  Chine.  La  distance  a  Singapore  par  cette 
route  sera  allongee  dr  400  niilies  (640  kilometres); 
mais  on  n'l^pargnera  pas  moiiis  do  800  milles  (1  280  ki- 
lometres)  sur  la  route  jus(|u'a   Manille,   et   environ 
]  000  milles  (1  600  kilom6lrcs)  sur  celle  pour  la  Chine. 


( ^^ ) 

II  est  possible  que  le  goiivernoment  liollandals  ohjccte 
qii'on  s'interpose  dans  ses  transactions  avec  les  Molu- 
qucs;  mais  les  temps  de  protection,  soil  pour  les  An- 
glais, soil  pour  les  strangers,  sont  passes,  et  ceux  qui 
rcstent  obstinement  stationnaires  dans  le  meine  sen- 
tier  risquent  d'etre  rudement  jet^s  de  c6t6. 

III.  Route  de  Carpentarie. 

Le  projet  originaire  d'ouvrir  une  communication 
avec  rinde  et  la  mere  patrie,  au  moyen  d'une  route 
de  poste  de  Sydney  a  I'entree  du  golfe  de  Carpentarie, 
qui  avait  6te  suspendu  dopuis  18Z|6,  a  6le  remissurle 
tapis  par  le  journal  de  Singapore  [Free press  neivspaper) 
vers  la  fin  de  I'annee  derniore ,  a  une  6poque  ou  les 
partisans  de  la  communication  par  la  vapeur,  par  la 
\oie  de  I'lnde,  etaient  tomb^s  ''ans  le  plus  profond  de- 
couragement  par  suite  de  I'opposilion  apparente  de  la 
Compagnie  des  Indes  orienlales,  et  par  la  retraite  de 
la  Compagnie  orientale  en  ce  qui  regarde  la  route  re- 
commandee  par  les  colons  et  sanclionnee  par  I'ami- 
raule;  laissant  les  partisans  de  la  route  de  Panama 
maitres  du  terrain  ,  les  journaux  les  plus  influents  de 
Calcutta  eux-m6mes  etaient  assez  aveugl^s  sur  les  vrais 
interets  de  I'lnde  anglaise,  au  point  de  vue  commercial 
et  politique,  pour  se  joindre  a  la  reclamation  en  faveur 
de  la  navigation  a  la  vapeur  pour  I'Auslralie  par  la  voio 
de  Panama.  Mais  les  dernieres  informations  de  Sydney 
font  revivre  le  projet  de  route  de  Carpentarie.  Les 
colons  de  I'Australie  different  par  leur  situation  des 
Anglais  de  I'lnde,  dont  le  principal  objet  est  de  se  re- 
lirer  dans  la  mere  patrie  avec  les  richesses  qu'ils  ont 


(  56  ) 
acciiuiul^es.  Les  protniers,  au  coiilraire,  placent  leurs 
ppnrgnes  dans  los  speculations  locales,  el  derniere- 
nient  les  associations,  lormees  pour  I'amelioration  des 
communications  interieures  qui  ont  tant  d'effet  sur  le 
devLlopjiement  des  ressourcesd'une  nouvelle  conlree, 
ont  ^te  hautement  favoris^es  par  ceux  qui  ont  des  ca- 
pitaux  a  placer. 


(57  ) 

JLiial^iscfi,  Extraits  d'ouTragcs, 
lielaiiges,   etc. 


LE  CHILI  ET  LES  ARAUCANS, 

PAR 

M.  EDMOND  DE  GINOUX. 
PKEMIER  ARTICLE. 

M.  de  Ginoux  a  fait  inserer  dans  la  Politique  nouvelle, 
au  mois  de  juillet  dernier,  sur  les  sauvages  de  I'Arau- 
canie,  une  s^rie  d'articles  qui  offrent  un  vif  int^rSt. 
Nos  lecfeurs  nous  sauront  gr6  de  leur  faire  connaltre 
par  quelques  extraits  cette  publication,  qui  revile  chez 
I'auteur  un  esprit  d'observation  remarquable  et  le 
talent  d'un  ecrivain  distingue.  M.  de  Ginoux  etait  a 
Santiago  au  mois  de  fevrier  18Zi9;  il  se  joignit,  avec 
quelques  amis,  a  un  jeune  cacique  de  I'Araucanie 
soumise  (1)  ,  qu'un  int^rfit  de  Iribu  avail  amene  au- 
pr^s  du  g^n^ral  Bulnes  ,  president  de  la  r^publique, 
et  qui  se  disposalt  a  regagner  son  pays  ;  il  s'agissait  de 
faire  quatre  cents  lieues  a  cheval  et  de  traverser  le 
Chili  du  nord  au  sud  dans  loute  sa  longueur,  en  I  re- 
prise bardie  qui   n'eflVaya  point  notre  voyageur,    et 

(l)  On  doniie  ce  iiom  a  deux  lisieres  elioites  qui  bordent  I'Arau- 
canie,  I'uiie  au  uord,  I'autre  au  sud,  mais  qui  sont,  de  fait,  indepen- 
dantes;  ces  habitants  entretiiinnent  seukinent  des  relations  d'atnilie 
avec  le  {jouveinenient  du  Chili. 


(58  ) 

qui  devait  6tre  pour  lui  I'occasion  des  reinarqiies  lea 
plus  insfructives  et  do  descriptions  saisissantes. 

Le  Chili  ne  possedant  pas  uno  carle  (1)  exacte  de 
son  territoire,  une  description  rapide  de  la  configura- 
tion physique  des  contrees  comprises  enlre  la  capilale 
et  Valdivia,  les  grandes  Andes  el  I'ocean  Pacifique,  ne 
peut  manquer  d'avoir  pour  les  gdographes  I'int^ret 
d'une  nouveaut^. 

La  ville  de  Santiago  est  assise  au  fond  d'un  tr^s- 
beau  bassin ,  silu6  enlre  la  Corilillere  des  Andes  et  la 
Cordillere  de  la  cole,  Ce  bassin  commence  ,  a  vingl- 
cinq  lieues  au  nord ,  au  pied  de  la  njonlagiie  de  Clia- 
cabuco  ,  poinl  celubre  dans  les  fastes  de  I'ind^pen- 
dance  chilienne  par  une  victoire  reniport6e  en  1817 
sur  les  forces  espagnoles.  Le  volcan  d'Aconcagua,  au 
bas  duquol  la  riviere  de  Quillola  prend  sa  source, 
s'^I^To  a  peu  de  distance  au  nord-esl  de  Chacabnco. 

A  parlir  de  celle  derni6re  locality,  le  bassin,  qu'on 
suit  constammenl  pour  arriver  au  del^  du  pays  des 
Araucans  ,  coupe  du  nord  au  siid  la  partie  meridio- 
nale  du  Chili,  sans  en  excepler  I'Araucanie  elle-meme. 
Creuse  entre  d'immenses  monlagnes,  courant  paral- 
Idlemenl  du  nord  au  sud,  en  abaissant  toulefois  peu 


(i)  M.  Gay,  f]ui  a  re'siile  longtemps  au  Chili,  se  propose  ile  piiblier 
incessatnment  une  carte  generale  de  ce  pays;  il  a  cleja  fait  paraitre 
en  espngnol  dix-huit  volumes  de  son  grand  ouvrage  intitule  Historia 
fisica y  polilica  de  Chile,  scgnn  dociimenlos  ndquiriffos  en  esla  fcjniblica 
durante  doce  at'ios  de  rcsideiicia  en  ella.  Paris,  l844  et  i852.  Ci  t  ou- 
vrage sera  accompagne  d'un  Alias  de  aSo  planches  in-folio,  compre- 
iiant  un  grand  noniljre  d'objfits  d'hisloire  nalurelle,  des  carles  de 
cliacune  dos  provinces,  d'une  carte  generale,  et  enfin  de  cinquante- 
cin(|  vues  du  Chili  et  de  i  Araucanie. 


(  59) 
a  peu  leurs   letes ,  il  est  borcl6  a  Test  par  la  chalne 
des  Ancles,  a  I'ouest  par  la  Cordillere  dite  de  la  Cote. 

La  Coi-diliere  de  la  Cote  est  forin^e  de  groiipes 
arrondis  ,  pen  Aleves  en  coinparaison  des  masses  de 
gauche  ou  de  Test.  La  cliaine  des  Andes,  aux  flancs 
escarpes,  sillonnds  en  tout  sens  de  precipices  ^pouvan- 
tabl^s ,  aux  cretes  aigues  et  hachees ,  presente  a  une 
certaine  hauteur  des  lignes  de  s^atification  apparte- 
nanl  a  diverses  epoques  grologiques  ;  viennent  ensuite 
les  neiges  eternelles.  Au-dessus  des  neiges ,  brillenl, 
comme  d'enormes  phares  semes  sur  un  rivage  rempli 
d'ecueils,  les  volcans  qui  couronnent  avec  majest6 
cette  merveilleuse  charpente  de  la  terre  ,  la  reine  des 
montagnes. 

Le  hassin  interm^diaire  est  un  fond  plat  ,  acci- 
dente  de  coUines  verdoyantes,  de  cones  basaltiques 
aux  teintes  sombres  ,  et  traverse  dans  loules  les  direc- 
tions par  une  multitude  de  cours  d'eau  qui  fertilisent 
un  sol  d'une  quality  rare.  Si  les  Chiliens  savaient  cul- 
liver  conVenablement  ces  terres  ,  la  bande  interme- 
diaire  et  plate  dont  il  est  question  serait,  dans  une 
proportion  giganlesque,  plus  belle,  plus  riche  que 
notre  Touraine,  que  la  Limagne  d'Auvergne  et  la  valine 
de  Gresivaudan.  Aujourd'hui  elle  ressemble  plus  aux 
pampas  de  la  republique  Argentine  qu'a  la  terre 
nourriciere  d'un  peuple  qui  se  pretend  avance  en  ci- 
vilisation. 

A  la  latitude  de  Santiago,  la  Cordillere  de  la  Cole, 
couverte  de  verdure  en  autoinne,  en  hiveret  au  prln- 
temps,  nc  d^passe  pas  1200  metres  d'el^valion  au- 
dessus  du  niveau  de  la  mer,  tandis  que  les  Andes  pro- 
jellenl  leurs  tetes  charg^es  de  neige  et  de  volcans  a 


(  ^^0  ) 

pr^s  de  5  000  lu^lres.  Lc  premier  grand  torrent  a  ciler, 
depuis  Chocabuco  ,  est  le  Mapoclio  ,  qui  conloiirne  la 
capitale  du  Cliili.  Aprils  avoir  pris  Tune  de  ses  deux 
sources  dans  la  monlagne  a  Test  de  Chacabuco,  I'autre 
dans  le  Cerro  de  Porlillo,  il  descend  en  desordre  du 
nord-est  au  sud-ouest,  et  va  se  jeter  dans  le  Maypu,  a 
quelques  lieues  au  sud-ouest  de  Santiago. 

Le  Maypu  est  un  joli  fleuve  qui  prend  sa  source  a  ia 
base  du  volcan  de  San-Jose,  et  dont  ies  eaux  roulent 
de  Test  a  I'ouest  jusqu'a  la  mer.  Son  nom,  glorieux 
dans  Ies  annales  des  guerres  de  I'independance,  ovcille 
dans  tous  Ies  coeurs  chiliens  Ies  sentiments  du  patrio- 
tisme  le  plus  profond,  Ce  fut  sur  le  bord  de  ce  fleuve 
que,  dans  la  journee  du  5  avrill818,  cut  lieu  la  fameuse 
balaille  engagee  par  Ics  indepcndants  coalis^s  conlre 
Ies  Espagnols,  et  dont  le  resultat  fut  le  trioinphe  defi- 
nitif  de  la  cause  republicaine. 

De  ce  point,  on  d^couvre,  en  amont  du  Maypu,  un 
de  ces  systemes  aeriens  inventus  par  le  genie  des  indi- 
genes pour  le  passage  des  rivieres.  Selon  loute  vrai- 
semblance,  ces  macbines,  fort  simples  au  Cbili,  com- 
pliqu^es  au  Perou ,  ont  fourni  I'idee  m^re  de  nos 
ponls  suspendus  ,  si  perfectionn^s  en  Europe.  Le  ma- 
nege a^rien  organise  sur  le  Maypu  est  construit  a  un 
itranglement  du  fleuve,  cause  par  deux  rocbes  fermes 
formant  un  d6fil6  assez  elroil ;  il  consiste  en  de  fortes 
cordes  de  cuir,  solidement  arr^tees,  tendues  d'une  rive 
k  I'autre  au-dessus  de  I'ablme,  et  portant  suspendii  un 
grand  panier  de  cuir.  Le  voyageur  s'assied  dans  le 
panier,  et,  au  moyen  d'un  va-et-vient  qu'il  fait  jouer 
avec  Ies  bras,  il  arrive  sur  la  ri"  opposee.  Au  Cbili, 
il  en  existe  de  moins  exigus,  sur  lesquuls  peuvent  pas- 


(  Gl  ) 
ser  les  b^tes  de  somnie.  Pkisieurs  cables  en  cuir,  roidls 
borizontalement,  supportent  un  tablier  en  planches  et 
en  poau  de  bceiif,  large  d'un  metre  environ  ;  ce  tablier, 
bien  cousu  aux  cables  de  support,  est  en  outre  main- 
tenu ,  autant  que  possible,  a  I'dtat  horizontal,  et  non 
mobile,  par  des  cordes  d'elaie  d^crivant  une  courbe 
au  dessus  de  lui. 

Dans  la  saison  des  pluies  et  a  I'^poque  de  la  fonte 
des  neiges  dans  les  Cordill^res ,  les  gues  ^tant  impra- 
ticables,  les  voyageurs  a  cheval  sont  dans  I'obligation 
(le  se  detourner  de  la  route  directe  pour  aller  passer 
par  un  de  ces  derniers  ponls;  les  hommes  a  pied  se 
risquent  en  tout  temps  a  I'exercice  acrobatique  du 
panier  de  cuir.  Sous  la  domination  des  Incas,  un  poste 
de  gardiens  etait  inslalle  a  chaque  extremite  de  ces 
voies  perilleuses;  les  gardiens  avaient  pour  fonctions 
de  veiller  a  la  surete  des  materiaux,  et  de  preter  gra- 
tuitement  leur  assistance  aux  vieillards,  aux  femmes, 
aux  infirmes. 

L'hislolre  pittoresque  des  ponls  suspendus  serait 
un  travail  interessant  a  ^crire.  Les  cocoliers,  de 
soixante  a  quatre-vingts  pieds  de  longueur,  jeles  cole 
a  cote  sur  les  petites  rivieres  de  Tahiti  et  des  autres 
lies  de  rOc6anie ,  donneraient  le  point  de  depart; 
les  ponls  indiens  du  Chili  viendraient  ensuite.  Le 
troisieme  tableau  presenterait  les  merveilleux  ponls 
de  roseaux  cre^s  sur  I'Apurimac  par  les  empereurs 
p6ruviens.  Deux  de  ces  chefs-d'ceuvre  de  la  conception 
humaine  subsistanl  intacts,  il  est  ais6  de  les  etudier; 
enfin,  translormant  les  tressos  de  roseaux  et  de  joncs 
en  faisceaux  de  fils  de  fer,  on  obtiendrait  nos  magni- 
fiques  ponts  suspendus.    Le  perfectionnement  de  ces 


chemins  lagers,  enjambanl  (le  larges  coins  d'eau,  ost 
du  an  genie  de  noire  siecle;  uiais  il  est  juste  d'accor- 
der  le  luerite  de  Kur  invention  aux  Indiens  de  I'Aiue- 
lique  du  Sud,  qui  en  I'aisaient  usage  pres  de  mille  ans 
avant  nous. 

A  la  lin  du  premiei-  jour,  la  petite  caravane  chei- 
chail  uu  abri  dans  une  pauvre  cabane  en  branchagcs, 
dresseeconlre  un  niaiuelon  de  la  Cordill^re  de  la  Cote; 
la,  les  deux  Cordilleres,  brusquement  rapprochecs, 
etranglent  le  bassin  inlennediaiie.  Ce  lieu  est  nomin6 
Angostura  de  Payne.  Une  fois  dans  I'liolellerie,  on  nc 
pouvait,  sans  une  vive  compassion,  tourner  les  regards 
sur  les  quaire  coins  de  cclle  deiueure  d'une  fauiille 
condamnee  a  la  plus  aUVeuse  niisere.  Dejeles  pnr  I'ac- 
lion  du  vent  ou  par  des  tremblements  de  terre ,  les 
arbresnoueux,  auxquels  s'appuyaient  les  brancbagcs 
foriuant  luurailles,  avaient  considerablement  perdu  la 
perpendiculaire,  si  jamais  ils  I'avaient  gardee  ;  la  ca- 
bane, enlraiuee  en  enlier  par  leur  mouvement,  incli- 
nail  sur  le  tlanc  gaucbe,  el  menagait  de  loaiber.  La 
toilure,  persiilee  de  trous,  donuaillibre  issue  a  la  lu- 
tniere,  a  la  pluie,  au  vent,  a  la  poussiero.  Le  sol  6tait 
sans  plancber,  la  porle  sans  del'eiise.  NuUe  part  on  ne 
voyait  un  uieuble,  une  table,  un  siege;  des  peaux  de 
bceul,  etendues  sur  de  I'berbe  sfeche,  remplagaient  les 
lils ,  cbose  inconnue  a  ces  malheiireux  desberites  du 
ueccssaire,  el  a  un  pelil  leu,  flambant  en  liberie  au 
centre  de  I'unique  piece  de  I'habilaiion,  cuisaient,  dans 
un  vieux  pot  ebrecbe,  quelques  regimes  de  mais,  pain 
quotidien  de  la  lamille. 

L'Angoslura  de  Payne  ,  oil  Ton  couche  ,  est  une 
gorge  assez  courle  ,  llanquee  de  monies  surbaisses.  Ce 


(  63  ) 
passage  franclii ,  on  debouclie  dans  la  vaste  plaine  de 
Rancagua.  A  la  sortie  de  rAngoslura,  les  Cordilleres 
se   relirent   rapidement  ,    et    le    l)assin    s'evase    pour 
prendre    bienlot   line  largeiir  de  12  a  13  lieues.   La 
plaine  de  Rancagua  ,  tristement  memorable  dans  I'his- 
toire  des  guerres  du  Chili,  se  lermine,  25  lieues  plus 
au  sud ,  a  une  inuraille  naturelle   qui  ferme  entiere- 
ment  le  bassin.  Rancagua,  ville  insignifianto  ,  triste , 
morle  ,  arrier^e  ,  mal  balie ,  est  assist;  a  peu  pros  a 
egale  distance  eutre  Pavne  et  la  muraille  de  Regolemo, 
sur  le  bord  du  rio  Cacliapual,  torrent  impetueux  qui 
roule  sans  frein,  de  Test  a  I'ouest,  jusqu'a  la  rencontre 
du  rio  Rapol,  auquel  il  mele  ses  eaux   redoutables. 
Le  rio  Rapel  tire  sa  source  du  pied  du  volcan  de  Tin- 
guririca ,  et  se  jette  dans  la  mer  pr^s  du  cap  de  Topo- 
cahna,  Lorsqu'on  parcourt  la  belle  plaine  de  Ranca- 
gua, on  ne  pent  s'empecber  de  remarquer  le  contraste 
curieux  qui  exisle  entre  la  vegetation  du  penchant 
occidental  des  Andes  et  celle  du  versant  oriental  des 
montagnes  de  la  cote.  Sur  les  premieres,  au-dessous 
des  neiges  perpetuelles,  en  touchant  presqu'a  la  ligne 
ou  les  v^gelaux  expirent ,  on  observe ,  detachee  en 
vert  sombre ,    une    bande   serree    d'arbres   resineux 
essentlellement  du  domaine  des   regions   australes  ; 
sur  les  secondes  montagnes,  au  contraire,  se  montrent 
les  palmiers  et  les  cactus,  indices  caracleristiques  du 
voisinage  des  tropiques.  Ainsi ,  a  queiques  lieues  de 
distance  ,  sur  la  meme  latitude ,  on  trouve  d'un  cdt6 
le  froid  des  poles,  de  I'autre  les  chaleurs  des  contrees 
sans  hiver. 

La  muraille   naturelle  qui  coupe  au  sud  la  plaine 
de  Rancagua  a  du  etre  sans  nul  doute  un  isthuie  qui 


(  Oi  ) 
unissail  les  deux  chalnes ,  alois  que  la  mer  occupait 
le  fond  du  bassin  inlerm^diaire.  Ce  barrage  ,  appelt^ 
Angostura  de  Regolemo ,  est  le  soul,  de  Charabuco  a 
Cliilo6,  qui  ferine  tout  a  fait  riminense  vallee  que 
longe  la  route.  Au  nord  ,  il  regarde  le  village  de 
Rt-ngo,  amas  de  chellves  maisonuelles  enfoncees  dans 
un  l)ois  d'arbres  fruitlers  ;  au  sud  ,  il  protege  San- 
Fernando,  petite  bourgade  batie  sur  le  rio  Rapel. 

Iimn6dialement  aprfes  I'Angostura  do  Regolemo  ,  le 
bassin  se  developpe  de  nouveau,  et  sa  largeur  devient 
plus  considerable  qu'auparavant.  Sur  une  etendue 
d'en\iron  50  lieues  de  France,  cest-a-dire  jusqu'au 
rio  Maule ,  le  terrain  plat  que  Ton  parcourt  est  cul- 
live  en  partie  el  d'un  aspect  riant ;  il  porte  un  asscz 
grand  nomine  de  fermes  ou  haciendas,  des  baineaux  , 
des  villages  dont  quclques-uns,  entre  autres  Curico  et 
Talca  ,  sont  decor^s  du  nom  de  ville. 

Talca  est  a  100  lieues  de  Santiago,  et  nos  voyageurs 
avaient  mis  cinq  jours  pour  franchir  celte  distance;  ils 
se  trouvaient  au  milieu  d'une  conlr(!!e  fertile,  arros6e 
par  beaucoup  de  ruisseaux  ,  surtout  par  lo  Maule, 
riviere  profondc  et  navigable.  Talca  parait  destin6e  a 
acquerir  plus  de  prosperite  que  les  autres  villes  de 
I'interieur  du  Chili ;  par  le  Maule  ,  les  forets  de  la 
Cordillere  de  la  Cote  peuvenl  6tre  exploilees  lucra- 
tivement,  et  deja  il  se  fait  par  cette  voie ,  du  dedans 
au  dehors,  un  commerce  tr^s-suivi  de  cer^ales ,  de 
fromages,  de  laines.  La  riviere,  dont  les  eaux  se 
perdent  dans  le  Grand  Ocean,  a  Porl-Conslilucion  , 
prend  naissance  sous  I'imposant  Descabezado  ,  mon- 
lagne  haute  de  six  mille  uietrcs  ,  devant  laquelle 
celles  qui  iui  font  face,  a  I'ouest,  ne  sont  plus  que  des 


(  65  ) 
^l^vations  sans  importance.  En  revanche,  ces  derniires 
sont  riches  en  /ai>aderos ,  ou  mines  d'or. 

Au  sud  du  Maule,  sur  une  longueur  de  50  lieues, 
la  plaine,  qui  va  toujours  s'elargissant,  n'est  qu'un 
desert ,  pareil  de  tout  point  aux  vastes  pampas  de  la 
r^publique  Argentine.  Ici,  plus  d'arbres,  plus  de  vege- 
tation vigoureuse ,  mais  seulement  des  broussailles 
^parses  sur  un  sol  mar^cageux.  On  voit  qu'aucun  elre 
humain  n'a  jamais  pass^  par  la.  Les  villages  ont  cess6 
de  se  montrer,  et  si  de  loin  en  loin  apparaissent  quel- 
ques  ranches,  ces  demeures  respirent  la  plus  affreuse 
mis&re.  La  vilie  de  Chilian,  avec  ses  modestes  vergers, 
ses  paturages,  sa  jolie  riviere,  rompt  enfin  I'affli- 
geante  monotonie  de  la  pampa. 

Pour  enrichir  ce  desert ,  il  faudrait  uniquement  le 
travail  de  I'homme.  Les  pluies,  dit-on,  sont  trop  con- 
linuelles  pour  que  tous  les  efforts  ne  soient  pas  de- 
penses  en  pure  perte.  II  serait  facile  de  remedier  a 
cet  inconvenient;  les  pluies  sont  caust^es  surtout  par 
le  voisinago  des  ^paisses  forets  qui  ,  a  droite  et  a 
gauche,  tapissent  les  monlagnes.  Si  Ton  detruisait  ces 
forets inutiles,  inexploitables  pour  la  plupart,  les  pluies 
diminueraient.  Ce  n'est  pas  la  qualite  du  sol  qui  peut 
d^courager;  ce  n'est  pas  non  plus  le  froid  de  cette 
zone;  car  si  les  arbres  entasses  sur  le  flanc  des  Andes 
et  sur  la  Cordillere  de  I'ouest  sont  de  ceux  qui  se 
plaisent  dans  les  latitudes  aux  hivers  rigoureux ,  les 
palmiers  de  I'anlique  Chilian  et  les  orangers  de  la 
petite  valine  d'Ytata  ,  attestent  suffisamment  que  la 
temperature  du  fond  du  bassin  est  fort  douce. 

En  longeant  cette  triste  pampa,  on  laisse  a  sa  gauche, 
vers  le  30«  degre  de  latitude,  lo  volcan  de  Chilian.  On 

III.    JANVIER.     5.  5 


(  66  ) 

coupe  alors  la  ligne  d'un  nouveau  volcan  ,  celui  d'An- 
tuco.  de  3  000  metres  de  hauleur,  au  bas  duqiiel  com- 
mence a  couler  la  riviere    de  la  Lnja. 

La  Laja,  Niagara  du  Chili,  apres  elre  sortie  d'un 
lac  ouvert  au  pied  du  volcan  d'Aniuco,  serpen le  sur 
un  lit  de  laves  en  s'avan^ant  vers  I'ouest.  Au  milieu 
du  Lasbin  ,  la  terre  fait  dcl'aut  subitement,  ot  la  riviere 
se  precipile  en  une  cascade  ^cuineuso  dans  un  abime 
proloud.  Ce  saul  de  la  Laja  est  lecoiid  en  souvenirs  et 
en  inspiralions  poetiqnes.  Temoin  de  uiaintes  courses 
hardies  de  la  part  des  Indiens  contre  les  Espagnols , 
de  combats  acharn^s,  d'exploits  laracux,  il  occupe  a 
lui  seul  une  des  grandes  pages  de  I'hisloire  de  la  con- 
quete.  Au  fond  de  I'abime,  enlre  deux  rives  bordees 
de  lauriers  et  (le  inyrtcs,  la  Laja  poursuit  une  mnrche 
lente,  tranquille ,  jusqu'a  la  rencontre  du  Biobio, 
ou  elle  finit.  Avant  sa  jonction  avec  le  Biobio,  elle 
recoit  le  rio  Claro,  qui  descend  du  nord  au  sud,  en 
arrosanl  les  vigncs  de  Yuinbel  el  de  San-Cristobal. 

A  Test  de  la  calaracte,  le  volcan  d'Aniuco,  aux 
penles  blanches  de  neiges,  a  la  cime  noire,  lance  dans 
I'air  ses  ^ternelles  flammes  el  vomit  des  torrents  de 
laves.  Du  Lord  du  cralere,  on  decouvre  un  ponorama 
grandiose,  etendu,  vari^ ;  a  Test,  la  Cordillere  de  Pi- 
chachen,  patrie  des  Indiens  Pehuenches;  au  nord, 
les  Cordilleres  de  Chilian  et  de  Talca;  a  I'ouest,  la 
Laja,  dont  les  eaux,  contrariees  d'abord  par  des  amas 
de  scories,  vont  fertiliser  les  jardins  d'Aniuco,  puis 
les  tcrres  de  Tucapel,  la  Nueva,  village  adosse  a  des 
fordts  vierges,  et  pres  duquel  gisent  des  ruincs  aujour- 
d'bui  sans  nom ,  qui  bordent  I'enlree  du  dtiserl.  Plus 
loin  ,  toujours  a  I'ouesl,  le  saut  de  la  Laja.  Apr^s  quoi. 


(  67  ) 

Tceil  se  repose  sur  Vlsla  de  la  Laja,  vaste  plaine  verte, 
comprise  enlre  la  Laja,  le  Biobio  el  d'autres  rivieres. 
Au  sud,  le  regard  eaibrasse  a  la  I'ois  le  colossal  Cerro- 
Belludo,  les  champs  de  las  Canturas,  ceux  de  ios  An- 
geles, de  Sauta-Barbara,  enfin  I'Araucanie. 

Au  pied  du  volcan  d'Antuco,  sur  la  marge  meme 
du  lac,  passe  le  chemin  qui  permet  de  communiquer 
d'un  versant  a  I'autre  de  la  chalne  des  Andes.  Decou- 
verl,  il  y  a  quaranle  ans  environ,  par  le  general  Cruz, 
dans  I'exp^dition  de  Buenos-Ayres,  ce  chemin,  trac6 
par  les  Pehuenches,  donnail  carriere  a  leurs  excur- 
sions devastatrices  entre  les  villages  voisins,  dont  ils 
elaient  la  lerreur.  Le  sabot  de  leurs  chevaux  a  laisse 
de  forles  empreintes  sur  les  nappes  de  laves  qui,  bien 
que  non  relVoidies  et  non  solidifi^es,  n'arrelaienl  pas 
leurs  courses  barbares.  Le  meme  chemin,  grace  a  une 
paix  consenlie  par  le^  caciques  Pehuenches,  est  Ire- 
quente  maintenanl  par  les  Chiliens  d'Antuco,  de  Tu- 
capel,  de  Ios  Angeles,  qui  vont  chercher  du  sel  gemme 
dans  les  salines  de  la  pente  orientale  des  Andes. 

A  peu  de  distance  du  Cerro  de  Pichachen,  a  Test  du 
volcan  d'Antuco,  dans  la  petite  valine  du  Mancol ,  on 
trouve  d'excellentes  eaux  ihermales,  Le  rio  iviaucol, 
grossi  du  rio  Tucuman ,  se  mele  au  rio  de  Nanguen, 
lequel  porte  le  tribut  de  ses  eaux  on  ne  salt  ou,  en 
Patagonie. 

Les  salines,  les  eaux  thermales,  les  vallees  des 
Andes,  apparliennent  aux  Pehuenches,  ludiens  no- 
mades,  pasteurs  guerriers,  vivant  sous  des  lentes. 
Leur  existence  en  temps  de  paix  est  simple  comme  la 
nature;  ils  ne  travaillent  pas ;  la  chair  des  troupeaux 
fait  leur  hourriture;  la  depouille  du  mouton,  laine  et 


(  (^8  ) 
cuir,  leur  sert  de  vetement  et  de  lit.  Deux  journ^es 
de  marche  sufllsent  a  ces  sauvages  pour  fondre  sur 
Anluco;  de  la,  en  une  etape,  ils  peuventvenir  ravager 
les  campagnes  de  Vlsla  de  la  Laja^  et  semer  la  d«isola- 
tion  jusqu'aux  porles  de  Chilian  et  de  Nacimiento. 

Le  pays  situ6  a  I'ouesl  du  saut  de  la  Laja  n'est  pas 
moins  inlerossant  que  celui  de  Test.  Derri^re  Yumbel, 
qui  fut  jadis  une  forteresse  conslamment  d^truite  par 
les  Araucans,  constamment  relevde  par  les  Espagnols, 
aujourd'liui  pauvre  village  sorli  des  vieilles  ruines,  les 
premieres  hauteurs  que  Ton  gravit,  nues,  rougeatres, 
rappellent  les  mornes  ddsoles  de  Valparaiso ;  mais  a 
mesure  qu'on  s'avance  vers  la  raer,  des  vignes,  des 
bois,  des  habitations,  animent  le  paysage.  Dans  cette 
parlie  de  la  Cordillere  existaient  les  plus  belles  mines 
d'or,  exploitees  sous  I'administration  du  conqueranl 
Valdivia.  La  aussi  se  dressent  Rere ,  autrefois  riche 
d'une  cloche  d'or ;  Gualqui  ,  Floridas ,  bourgades 
comptees  au  nombre  des  futures  villes  du  Chili.  Bientot 
apres,  on  arrive  a  la  large  embouchure  du  Biobio.  Ce 
fleuve  coule  du  sud-est  au  noi'd-ouest,  en  se  promenant 
avec  nonchalance  a  travers  le  bassin  encaiss^  dans  les 
Cordilleres.  Sur  le  cole  nord  dc  son  embouchure,  deux 
bales,  frequenlees  par  les  gros  navires,  se  creusent 
dans  lesterres;  I'une  est  nomraee  bale  de  San -Vicente; 
la  seconde,  feraiee  par  le  lourd  promonloire  de  Gual- 
pen  et  I'ile  de  Quiriquina,  estle  magnifique  raouillage 
de  Talcahuano.  La  petite  ville  de  Talcahuano,  batie  au 
sud-ouest  de  la  baie,  sur  une  langue  rocheuse,  regarde 
au  sud-est  les  ruines  de  I'infortunde  capitale  du  nom 
de  Penco,  qui  ful  I'orgueil  des  conqu<iraiits.  Ln  pauvre 
fortin,  avec  son  lion  de  Caslille,  vcille  encore,  mais 


(  69  ) 

piteusement,  sux  les  mines  de  la  fiere  cite,  et  quelques 
families  de  pecheurs ,  blotties  sous  les  decombi'es, 
remplacent  a  cette  heure  les  riches  Espagnols  qui 
avaient  sculple  leurs  blasons  sur  de  soraptueux  hotels. 
Maltrait^e  a  diverses  reprises  par  les  Araucans,  plu- 
sieurs  fois  renvers^e  par  des  Iremblemenls  de  terre, 
Penco  dut  a  la  fin  etre  compl^tement  abandonnee.  La 
population  a  transporte  ses  p6nates  a  trois  lieues  de  la 
mer,  et  elle  a  conslruit  Concepcion,  ville  de  vingt 
mille  araes  a  present,  et  capitale  de  province.  Quoique 
dechir^e,  elle  aussi,  par  plusieurs  tremblemenls  de 
terre,  notamment  le  20  fevrier  1835,  cette  ville  semble 
avoir  oubli6  ses  d^sastres  et  rever  un  brillant  avenir. 

Nos  voyageurs  avaient  fait  cent  lieues  de  plus  en 
neuf  jours,  sur  lesquels  il  y  avait  a  relrancher  vingt- 
quatre  heures  de  repos  a  Talca  et  quarante-huit  au 
volcan  d'Antuco  :  c'elait  aller  bien  lentement,  au  dire 
des  Chiliens,  habitues  a  devorer  trente  de  leurs  lieues 
dans  chaque  course  du  soleil  au-dessus  de  riiorizon. 
Le  lendemain,  la  caravane  passait  le  Biobio,  et,  saluant 
de  loin  I'Araucanie,  defllait  devant  les  maisons  de  Col- 
cura.  Les  environs  de  ce  village  renferment  des  mines 
de  houille,  exploil^es  d'une  mani^re  deplorable,  et  ne 
rendant  encore  qu'un  combustible  maigre,  pyrileux, 
impropre  au  chauflFage  des  chaudieres.  Au  dela  de  Col- 
cura,  le  chemin  gravit  la  montagne  d'yVndalican,  sur 
laquelle,  en  I'annee  1554  on  1555,  le  fameux  cacique 
Caupolican  tailla  en  pieces  les  troupes  du  general  de 
Villagran,  lorsque  ce  dernier,  a  la  nouvelle  de  I'exter- 
mination  des  Espagnols  dans  la  plainc  du  vieux  Tu- 
capel ,  voulut  aller  venger  la  mort  du  heros  Valdivia. 
De  I'Andalican,  on  descend  dans  une  vallee  arros^e 


(  70) 
par  Ic  Carampangue;  onsuite  le  cliemin  court  direc- 
tement  vers  la  forteresse  d'Arauco,  sitii^e  au  pied  de  la 
rnonlagne  de  Colocolo. 

Aujourd'liui ,  le  Biobio  n'cst  plus  la  limite  qui  s6- 
pare  les  Araucans  indt^pendants  de  la  republique  du 
Ciiili;  le  petit  espace  couipris  enlre  rembouchurc 
du  (leuve  et  Araiico  est  au  pouvoir  des  Chiliens.  Les 
torres  ind^pendanles  ont  acluellement  pour  frontieres  : 
au  nord,  la  ligne  determinee  par  la  montagne  de  Co- 
locolo et  les  maisonnettes  grises  de  Nacimienlo,  de  los 
Angeles,  de  Sanla-Barbara  ;  a  Test,  la  ciine  des  Andes, 
jaionneo  par  les  volcans  d'Antuco,  de  Villarica ,  de 
liuenaluie;  a  louest,  la  cote  de  I'Ocean  jusqu'aux 
miuailles  de  Valdivia;  au  sud ,  la  riviere  de  Valdivia. 
Ces  terres  enibrassent  une  superficie  de  4  degres  cartas 
ou  2  500  de  nos  lieues  carrees. 

Dans  un  prochain  article,  nous  suivrons  M.  Edmond 
de  Ginoux  au  centre  meme  de  I'Araucanie. 

S^DILLOT. 


(  7'1  ) 
DAMAS.  SES  HABITANTS  ET  SES  ENVIRONS. 

EXTRAIT   DU  VOYAGE    EN   SYRIE 

DE 

M.  LE  COMTE  CHARLES  DE  PARDIEU 

PAR 

M.  DE  LA    ROQUETTE  (1). 

Damas,  antique  capitale  de  la  Syrie  (2),  presque 
aussi  ancienne  que  le  monde  (3),  suivant  M.  le  comle 
Ch.  de  Pardiou,  auquol  nous  emprunlons  ces  informa- 
tions, est  aujourd'lmi  la  ville  la  plus  considerable  de  la 
Turquie  d'Asie,  le  chef-lieu  d'lin  pachalik,  et  en  outre 
la  residence  du  semskier  de  Syrie.  Conquise  dans  les 
premiers  temps  de  I'etablissement  de  Tislamisme  par 
le  calife  Omar,  elle  devint  la  ville  principale  et  la  resi- 
dence des  califes  Ommiades,  ses  successeurs,  et  elle  est 
consideree  depuis  comme  une  ville  sainte  entre  toutes 
apr^s  la  Mecque,  ce  qui  explique  I'intolerance  des  ha- 
bitants, qui  regardent  comme  une  souillure  la  presence 
des  infulMes  dans  ses  murs.  Depuis  le  changement  in- 
troduit  dans  les  mceurs  par  Ibrahim-Pacha,  et  que  les 
pachas  turcs  ont  cherche  a  maintenir,  lorsque  la  Tur- 
quie est  rentree  en  possession  de  la  Syrie,  la  crainte 
arrele  I'dTet  du  fanalisme  et  de  la  mechancete  des 

(i)  La  relation  du  voyage  de  M.  le  comle  de  Pardieu  a  ete  publiee 
dans  la  Revue  de  I'Onent. 

(2)  Les  Arabes  I'appellent  encore  el-Scham,  capitale  de  Bahr  el- 
Schain,  ou  de  la  Syrie. 

(3)  Elle  est  du  moini  d'une  tres- haute  antiquite,  puisqu'il  en  est 
parte  dans  la  Genese.  D.  L.  R. 


{  72  ) 
habitants  de  Domas ;  ils  n'osent  du  moins  I'exercer 
contre  les  Chretiens  d4rangers,  centre  les  Francs,  qui 
peuvent  enlrer  dans  cette  ville  comme  ils  veulent,  de 
meme  que  dans  toutes  les  aulres  villes  de  I'Orient, 
tandis  qu'autrefois  un  chr^lien  n'aurait  os6  se  ha- 
sarder  a  y  penetrer  a  cheval ;  il  fallail  qu'il  uiit  pied 
a  terre. 

Toutefois  les  Damasiens  n'uscnt  pas  de  la  lu^me  to- 
lerance pour  les  rayas,  qu'ils  insultent  toutes  les  I'ois 
que  I'occasion  s'en  prt^sente.  Notre  voyageur  en  cite  le 
fait  suivanl :  «  Les  enfants,  comme  partout,  sont  les 
plus  ardents.  J'en  vis,  un  jour,  plusieurs  qui  raallrai- 
laient  un  pauvre  petit  Chretien  qui  se  sauvait  en  criant. 
Je  me  chargeai  de  la  justice  distributive.  Je  delivrai 
mon  pauvre  petit  coreligionnaire,  et  je  tirai  les  oreilles 
aux  jeunesmahometans,  qui  decamperent  vite.  Jadis, 
pour  ce  simple  fait,  on  se  serait  attire  toule  la  ville 
sur  les  bras. 

»Damasrenrernie  environ  1 50  OOU  habitants  (d'aulres 
hii  en  donnent  200  000),  parmi  lesquels  15  000  ca- 
tholiques,  5  000  schismatiques  et  2  000  juifs.  Les  rues 
sont  gt^neralement  ^Iroiles,  sales,  tortueuses,  mal  pa- 
yees ou  pas  pavees  du  tout,  comme  dans  toute  la  Tur- 
quie.  Lorsqu'il  a  plu,   elles  sont  tellement  boueuses, 
qu'on  ne  peul  marcher  sans  enfoncer  dans  la  fange ; 
aussi  les  habitants,  dans  ce  cas,  sont  obliges  de  se  ser- 
vir  d'esp^ce  d'^chasses,  formt^es  d'une  semelle  de  bois, 
supportee  par  deux  planchetles  de  plus  de  6  pouces 
de  haut.  Ces  chaussures  scrvcnt  aussi,  dans  I'interieur 
de  la  maison,   aux  fcnmies  qui   no  veulent  pas  poser 
leurs  babouches  sur  la  terre  ou  sur  le  marbre  froid  : 
c'est  comme  les  sabots  de  nos  paysannes. 


(  73  ) 
))  II  y  a  cependant  quelques  belles  rues,  principale- 
ment  dans  le  quartier  lure,  ou  elles  sont  larges,  payees 
et  assez  propres.  Quelques-unes,  plantees  d'ai^bres  et 
garnies  de  boutiques,  rappellent  un  peu  nos  boulevards. 
Dans  le  quartier  franc,  il  y  a  une  belle  rue  pavee  en 
dalles ,  comme  nos  trottoirs.  Ce  sonl  les  franciscains 
qui  ont  fait  cet  embellissementdevant  leur  couvent.  Le 
gouverneur,  tout  en  reconnaissant  que  c'etait  d'un  tres- 
bon  exemple  pour  la  ville ,  a  fait  payer  aux  religieux 
une  forte  amende,  pour  s'etre  arroge  un  droit  qu'ils 
n'avaient  pas.  Une  des  rues,  la  rue  Droite,  traverse  la 
ville  d'un  bout  a  I'autre,  depuis  la  porte  Orientale :  c'est 
la  que  nous  demeurions.  Les  maisons  sont  en  briques, 
ou  en  bois  reconvert  de  boue,  quelquefois  cr6pies  a  la 
chaux;  elles  ont  ext^rieurement  un  aspect  assez  mise- 
rable. II  y  en  a  cependant  quelques-unes  en  pierres 
peintes  avec  des  raies  rouges  et  blanches  :  ce  sont  sur- 
tout  celles  du  quartier  lure  et  les  edifices  publics.  On 
est  etonn6  du  luxe  qui  regne  dans  I'interieur  de  ces 
maisons  d'un  aspect  si  mesquin. 

»  J'en  visitai  plusieurs  des  plus  belles,  parmi  celles 
des  Chretiens  et  des  juifs;  ces  derniers,  qui  ont  beau- 
coup  d'argent,  sont  Ir^s-bien  loges...  On  entre  dans  la 
maison  de  raon  ami  le  docteur  Amstein,  qui  voulut 
bien  nous  donner  I'hospilalil^,  par  une  petite  porte 
qui  donne  sur  un  couloir  obscur,  et  Ton  arrive  dans 
une  belle  cour,  pav^e  en  marbrc ,  au  milieu  de  la- 
quelle  un  jet  d'eau  alimente  une  vasque  octogone  en 
marbre  blanc.  Cette  cour  6lait  ornee  de  toutes  sortes 
d'arbres  fruitiers  et  aulres,  et  de  fleurs.  Des  plantes 
grimpantes  raontaient  jusque  sur  la  terrasse,  et  lais- 
saient  pendre  d'enormes  grappes  de  graines.  Au  fond 


(74) 

se  troiive  un  vestibule  ouvert,  garni  de  niches  et  d'6ta- 
gores,  avec  des  peinlures  rouges,  jaunes,  noires.bleues, 
reprt^senlant  tant  bicn  que  mal  dos  arbres,  des  fleurs, 
des  luaisons,  des  inosquees.  Un  divan  regne  aulour  de 
ce  vestibule  pav6  en  marbre,  et  que  Ton  occupe  dans 
VM.  De  ohaque  cold  s'ouvrent  des  porles  peinles, 
garnies  de  portieres  en  lissus  brodds  d'arabesques,  qui 
donnent  entree  aux  appartements.  Le  salon  est  pave  en 
marbre,  et  rafraichi  par  un  jet  d'eau  qui  tombe  dans 
une  vasque  en  tnarbre  blanc.  Des  divans  r^gnenl  au- 
tour  d'une  petite  eslrade  en  bois,  elev6e  de  2  pieds 
au-dessus  du  sol,  et  couvertc  de  nattes  el  de  tapis.  On 
depose  ses  babouclies  ou  souliers  au  pied  de  I'estrade, 
pour  ne  pas  salir  les  tapis.  Les  murs  sont  peinls  en 
paysages  et  decoris,  comuie  lo  veslibule  ,  de  niches  a 
formes  moresques,  d'6lag6res,  de  boiseries  sculptees, 
peinles,  dorees,  et  d'arabesques.  La  maison ,  n'ayant 
qu'un  dtage  assez  elevd ,  I'appartement  monte  jus- 
qu'en  haul,  divise  vers  le  milieu  de  sa  liauleur  par  une 
corniche  moresque.  Le  plafond  est  soutenu  par  des 
poulresde  peupliernonequarri;  les  poutresetles  latles 
sont  peintes  et  dories. 

»  La  disposition  de  la  maison  dont  on  vient  de  don- 
ner  la  description  est  la  meme  pour  loutes  celles  des 
personnes  aisles.  La  difference  consiste  dans  le  nom- 
bre  des  cours  et  des  appartements,  dans  1 'elegance  des 
sculptures  et  des  peinlures,  dans  la  richesse  des  mar- 
bres  ct  des  dorures.  II  y  a  des  arabesques  et  des  orne- 
menls  dans  le  slyle  des  Maures,  el  d'une  grande  deli- 
catesso.  Les  divans  sont  aussi  couverts  d'etoffes  plus 
ou  moins  riches,  et  les  tapis  sont  plus  ou  moins  pr6- 
cieux. 


(  75  ) 

»  Les  bazars  de  Damas  sont  tr^s-beaux,  quoique  ce- 
pendant  je  les  trouve  inf^rieurs  a  ceux  de  Constanti- 
nople. Ce  sont  de  longues  rues  voulees,  entre  deux 
rangs  de  boutiques.  Ces  boutiques  sont  des  tables,  sur 
lesqnelles  le  marcliand  est  accroupi,  la  pipe  a  la  bou- 
che.  Les  marcliandises  sont  sur  des  rayons  derriere 
lui,  ou  pendues  autour  de  son  ^choppe.  Le  soir,  lors- 
qu'il  s'en  va,  il  n'a  qu'a  abaisser  sur  la  boutique  un 
couvercle,  qu'il  ferme  avoc  un  cadenas.  Les  raarchands 
arrivent  ordlnairement  tard,  partentde  bonne  lieure, 
el  ferment  leurs  boutiques  a  la  moindre  occasion,  Ces 
bazars  sont  richement  fournis,  ct  divis^s  par  esp^ces 
de  maiThandises,  ici  les  ^toffes,  la  les  selles,  plus  loin 
les  raeubles,  etc. 

))  II  faut  remarquer  que  tout  ce  qui  est  beau  est  tir6 
d'Europe.  Les  belles  eloffes  de  soie  brocliees  d'or  vien- 
nent  dc  Lyon;  les  mousselines,  percales,  draps,  de 
Suisse,  de  France,  ou  d'Angleterre,  etc.  II  y  a  encore 
des  marcliandises  apportees  par  les  caravanes  de  Bag- 
dad ou  de  Bassora,  dont  Damas  n'est  plus  que  I'entre- 
pot.  L'industrie  dans  la  ville  est  presque  nulle  ;  on  y 
fait  beaucoup  de  soieries,  mais  grossierement  travail- 
I6es.  Quant  aux  lames  do  Damas,  il  y  a  longtemps 
qu'il  n'en  est  plus  question. 

»  Dans  le  bazar  se  trouve  un  des  plus  beaux  kham 
d'Orient :  c'est  une  vaste  enceinte  circulaire,  dont  la 
voute  se  compose  de  plusieurs  coupoles  soulenues  par 
des  colonnes.  On  voit,  en  outre,  une  fontaine  et  un 
bassin  en  marbre  blanc.  Les  murs  sont  ornes  de  mar- 
bres  et  de  peintures;  les  marcliandises  sont  rangees 
dans  des  magasins  au  rez-de-chaussee.  Dans  une  ga- 


(  76  ) 

lerie  supeiieure,  qui  fait  le  tour  de  I'enceinte,  sont  Ics 
chambres  des  negociants. 

»  La  grande  mosquee ,  edifice  niagnifique  qu'on  dit 
avoir  6t6  autrefois  une  eglise  sous  I'invocalion  de 
saint  Jean-Bapliste,  est  entour^e  par  les  bazars,  sur 
lesqucls  s'ouvrent  les  portes,  de  raaniere  qu'on  peut 
la  regarder  de  loin ;  quant  a  I'entree,  elle  est  interdite 
aux  giaours  ou  infideles,  sous  quelque  pretexle  que  ce 
soit.  Les  porles  de  celle  mosquee,  situ^e  au  milieu 
d'une  cour  enlour^e  d'un  portique  corinthien  ires- 
orne,  sont  en  bronze  et  decor^es  de  dessins  en  relief. 
Dans  la  cour  se  trouvent  de  trfes-belles  fontaines. 

»  Prfes  d'une  des  portes  de  la  mosquee ,  on  voit  le 
caf<^  le  plus  renommd  de  Damns,  frc^quente  par  les  gens 
riches,  et  qui  n'esl  cependant  qu'une  saWe  pen  propre, 
avec  son  divan,  sur  lequel  s'accroupissenl  les  consom- 
maieurs,  a  moins  qu'ils  ne  preferent  s'asseoir  dehors, 
devant  une  gerbe  tl'eau  qui  lombe  dans  uno  asscz  jolie 
vasque  de  marbre  blanc.  Le  caf6,  le  chibouque  et  le 
narguileh  y  jouent  un  grand  role.  On  n'y  voit  rien  de 
bien  feerique. 

»  Au  bout  de  la  rue  Droite,  a  I'ouest,  pres  du  quartier 
turc ,  est  une  belle  place  appelcie  le  March6  aux  Che- 
vaux,  ressemblant  k  un  champ  de  foire,  et  renl'ermant 
beaucoup  de  boutiques.  Le  chateau  n'en  est  pas  loin  ; 
il  occupe  un  grand  espace,  est  entoure  de  murs  flanqiK^s 
de  quelques  lours,  le  tout  en  mines:  c'etait  la  citadellc: 
il  sertde  caserne.  La  ville  est  divis^e  en  quartiers,  fer- 
m6s  tous  les  soirs  par  de  grosses  portes  :  ceux  des  Turcs 
sont  les  plus  beaux  et  les  plus  propres ;  ceux  des  juifs 
sont  d'une  salele  extreme. 


(  77  ) 
»  Outre  les  couvenls  grecs,  il  y  a  a  Damas  plusieurs 
ordres  latins,  des  peres  franciscains  de  laTerre  Sainte, 
des  capucins,  des  lazaristes  :  cos  derniers  ne  sont  que 
deux,  avec  unfrere  lai,  tous  Frangais,  et  possedant  une 
assez  jolie  ^glise  attenante  a  leur  maison.  Us  ont , 
parmi  les  enfants  syriens,  de  nombreux  6l^ves,  aux- 
quels  ils  apprennent  specialement  la  langue  frangaise. 
»  On  montre  au  boul  de  la  rue  Droite,  pres  de  laporte 
d'Orient  ou  de  Saint-Paul,  la  maison  d'Ananie,  dans 
laquelle  Paul,  aveugle,  fut  conduit,  recouvra  la  vue,  et 
fut  baptise.  Plus  loin,  hors  de  la  ville,  est  I'endroit  oil 
il  fut  frappe  de  la  lumiere  celeste,  au  moment  oil  il 
marchait  contre  les  chr^tiens,  avant  de  se  convertir  et 
de  devenir  I'apotre  des  chretiens. 

»  La  partie  inferieure  des  murs  de  la  ville  est  an- 
cienne  et  construite  en  enormes  pierres ;  le  reste  est 
moderne  et  bati ,  comme  la  plupart  des  maisons,  en 
terre  melee  de  paille  el  de  pierres,  sechee  et  recou- 
verte  de  chaux.  Ces  murs,  crdineles ,  tombent  deja  en 
ruine ,  comme  tout  ce  qui  avoisine  la  porte  d'Orient. 
»  Aux  envii'ons  de  Damas,  il  y  a  de  ravissanles  pro- 
menades, au  milieu  de  tous  ces  jardins,  de  toutes  ces 
eaux  cristallines,  de  toutes  ces  prairies,  qui  s'etendent 
dans  un  rayon  de  pr^s  de  2  lieues ,  et  qui  sont  semes 
de  kiosques ,  lieux  de  repos  pour  les  habitants  de 
la  cit6.  Toutes  ces  eaux  sont  fournies  par  la  Barrada 
et  par  quelques  autres  rivieres.  Elles  sont  divisees  par 
des  canaux  nombreux  et  conduites  a  travers  tous  les 
jardins,  ainsi  que  dans  toutes  les  maisons,  oii  elles 
alimenlent  ces  fonlaines  qui  rafraichissent  les  cours 
et  les  appartements.  Ces  eaux  se  rejoignent  a  la  sortie 
de  la  ville,  et  la  Barrada  va  se  perdre  a  quelques  lieues 


(  78) 
de  la  dans  le  lac  Bahr  el-Merdj,  auquel  on  ne  connatt 
pas  d'issuo.  De  noinbreux  villages  entourent  ces  ver- 
gers,  qui  me  rappelaieiil  la  huerta  de  Murcie  ,  en 
Espagne.  Lcs  habitants  riches  el  les  consuls  ont,  prin- 
cipalemenl  dans  la  niontagne,  de  jolies  raaisons  de 
campagne,  dans  lesquelles  ils  se  retirent  pendant  la 
saison  des  chaleurs. 

))  Des  indivldus  de  loutes  les  parlies  de  I'Asie  se  rcn- 
denl  a  Dauias,  dont  les  rues  sont  encombrees  par  une 
I'oule  qui  se  fail  reruarquer  par  une  grande  varit^le  de 
costumes.  Les  hahitanls  portent  une  robe  serree  par 
une  ceinturo,  el,  jnu-dessus,  un  cafelan  garni  de  four- 
rures;  le  turban  est  Ires-volumineuA.  Les  chr6liens  el 
les  juifs  sonl  encore  forcds  de  porter  des  couleurs 
noires  ou  foncees,  landis  que  les  musulmans  adopkMit 
les  nuances  les  plus  tranchantes...  Lcs  pretres  Chre- 
tiens roulenl  aulour  de  Itur  tele  un  luiban  bleu  fonce, 
en  anneaux  superposes,  de  manicre  a  lui  donner  Ja 
forme  d'une  large  roue.  Lcs  rajas  n'ont  guere  qu'un 
fichu  uoue  aulour  d'un  turbonsch. 

n  Les  Bedouins  du  desert  sont  vetus  de  Ja  chemise 
blanche,  par-dessus  laquelle  ils  portent  une  pcau  de 
mouton  ou  un  abba  de  laine.  Us  soul  coiff^s  d'un  Jiou/'- 
/ie/i  sale,  serre  par  une  corde  de  poil  de  chameau.  Ils 
ont  en  general  de  njuuvaises  figures.  A  cheval,  on  porte 
un  maschlah  ou  manleau,  espece  de  sac  en  laine, 
I'endu  par  devanl,  ouvcrl  aux  deux  coins  pour  le  pas- 
sage des  bras,  el  ornc  de  broderies  en  laine,  en  sole  ou 
en  or.  Ce  vetement  resscmble  a  une  chasuble. 

))  Quant  aux  femmes,  loules,  meme  les  chreliennes, 
sonl  couvertcs  de  voiles  blancs  de  la  tele  aux  pieds,  et 
ressemblent  ainsi  a  des  fanlomes.  Un  fichu  de  mous- 


(  79) 
seline  leur  masque  enti^reinenl  la  figure.  Aucune 
n'oserait  sortir  sans  cela;  elle  rlsquerait  de  se  faire  in- 
sulter.  II  est  done  difficile  de  savoir  si  elles  sont  jolies. 
En  rentrant  chez  elles,  elles  se  ddpouillent  lie  leurs 
voiles  blancs  et  de  leurs  hotlines  jaunes,  et  restent 
dans  leur  costume  d'interieur,  qui  consiste ,  couune 
dans  tout  I'Orient,  en  un  large  panlalon,  sur  lequel 
elles  meltent  une  robe  fenuue  sur  la  poitrine  et  en 
l)as  sur  les  coles,  Les  manches,  ouvertes  et  pendantes, 
sont  garnies  de  pellts  boulons,  de  broderies  et  de  dea- 
telles.  La  poitrine  est  couverte  par  un  fichu  lorsqu'il 
fait  froid;  quant  au  corset,  on  sait  qu'il  est  inconnu 
dans  le  Levant.  La  robe  est  serree  a  la  taille  par  un 
cachemire,  dans  lequel  les  dames  passent  leurs  mains, 
comme  nous  dans  nos  poches.  Par-dessus  la  robe, 
elles  portent  une  veste  longue  brodee  en  drap,  en  ve- 
lours ou  en  sole  garnie  de  fourrures,  et  sont  chaussees 
de  babouches  brodees.  Leur  coiffure  se  compose  d'un 
tarbousch  garni  d'un  fichu,  orne  quelquei'ois  de  perles 
ou  de  pierreries.  Les  cheveux,  tresses  en  potites  nalles 
fines,  descendent  par  derriere. 

»  Les  I'emmesdeDamas  on  t  la  peau  blanche,  de  beaux 
yeux,  etsont  Ires-gracieuses;  lesjuives,  en  particulier, 
sont  jolies,  onl  une  tres-belle  peau  et  surtout  beau- 
coup  de  i'rakheur.  Les  vetements  de  celles  que  j'ai 
vues  etaienl  de  riches  etofles  broch^es  d'or,  mais  mal 
ajustees  et  sans  gout,  et  toutes  leurs  perles,  leurs  dia- 
mants,  leurs  pierreries,  tout  leur  ecrin  enfin,  etaient 
accroches  au  hasard  sur  leurs  tarbouschs,  sur  leurs 
cajetans,  sur  leurs  robes,  extreuiement  ouvertes;  car 
elles  ne  savent  pas  laisser  deviner.  Leurs  sourcils  sont 
ras6s  de  nianiere  a  ne  laisser  qu'une  ligne  noire  tres- 


(  80  ) 
mince.  Malgr6  leur  beaul^,  ces  juives  faisaient ,  sous 
leur  brillant  costume ,  I'effet  de  poup^es  peinlos  et 
doi'ees. 

»  La  monnaie  de  France,  toujours  recue  a  Damas, 
change  de  valeur  dans  presque  loutes  Ics  villes;  la 
pi6ce  de  20  IVancs,  qui  vaul  au  Cuire  82  piastres,  en 
vaut  85  a  Jerusalem,  88  a  Bayrouth,  el  90  a  Damas. 
Dans  cette  derniere  ville,  la  pi^ce  de  5  francs  vaut 
22  piastres  ,  et  la  piece  turque  de  20  piastres  en 
\aul  21. 


VOYAGE 

DE 

LA  BAYONNJISE  SUR  LES  COTES  DE  CHINE 

ET 

DANS   LE  GRAND   OCEAN, 


M.  JURIEN  DE  LA.  GRAVl^RE, 

CapitaiDe  de  vaisseau. 

ILE    urSPARUE    DANS    LES    CAROLINES. 


La  ReiMie  des  Deiix-Mondes  contient  un  article  de 
M.  le  capitaine  de  vaisseau  Jurien  de  la  Gravi^re  sur 
son  voyage  aux  cotes  de  Chine  en  18^8,  D6ja  plusieurs 
aulres  articles  avaienl  ete  donnas  dans  los  livraisons 
du  1"  septembrc,  15  octobre  et  1"  dcccmbre  1851; 
ils  ni(^ritent  tous  d'etre  lus  altenlivcmcnt,  conime  pre- 
senlant  les  r^suitats  d'une  campognc  des  plus  iiit^res- 
santes.  Celui  dont  nous  parlons  aujourd'luii  est  inti- 
tule :  les  Mariannes  et  les  Louchou.  II  comprend  le  recit 
de  la  navigation  de  la  Bayonnaise  depuis  avril  IS/iS 


(  81  ) 
jusqu'au  mois  de  Janvier  18Z|9.  Dans  cet  inlervalle,  co 
batiment  visita  les  iles  Mariannes  et  les  Louchou,  re- 
vint  a  Manille,  de  la  a  Macao,  puis,  api'^s  avoir  longe 
I'ile  Formose,  il  vint  moniller,  le  21  Janvier  18h9,  a 
I'entree  de  Yang-tze-Riang. 

Nous  avons  remarque  dans  ce  recit  un  fail  qui  ne 
nous  parait  pas  avoir  6le  signale  jusqu'a  ce  jour,  et 
c'esl  pour  cela  que  nous  croyons  devoir  le  citcr  ici.  On 
a  souvent  parie  d'iles  nouvelles  fornixes  par  le  Iravail 
des  polypiers,  sur  lequel  les  sables  viennenl  s'accu- 
muler,  et  ou  quelques  cocoliers  ,  en  croissant,  conso- 
lident  le  sol.  Mais  ici  il  s'agit  d'une  lie  disparue. 

M.  Jurien  rencontra  dans  les  Mariannes  des  insu- 
laires  des  Carolines  qui  etaient  venus  se  r^fugier  a 
Guam  apres  la  disparition  de  I'lle  qu'ils  habitaient. 
Voici  comment  il  rapporte  ce  fait  : 

«  Les  iles  dont  nos  Carolins  nous  apprirent  les  noms 
sont  marquees  sur  nos  cartes  du  d6p6t  de  la  marine  a 
peu  pr^s  dans  I'ordre  suivant :  Ulie,  Elat  et  Satahoual. 
C'est  au  milieu  de  ce  groupe  que  s'elevait  jadis,  comme 
une  coupe  de  corail,  I'ile  qu'ils  avaient  ete  contrainls 
d'abandonner.  « II  s'est  fait  un  trou  dans  notre  iie,  » 
rd!p6taient  avec  douleur  ces  Troyens  de  I'Oc^anie,  pen- 
dant qu'ils  essayaient  de  satisfaire  de  leur  mieux  notre 
impitoyable  curiosite;  «  la  mer  a  p^netre  par  cette 
breche,  et  nous  avons  du  nous  refugier  au  haut  de  nos 
cocotiers.  »  Cjette  ile  submergec,  cette  pleiade  perdue, 
s'est-elle  done  afTaissee  sur  elle-m6me  apr^s  un  de  ces 
tremblemenls  de  terra  qui  ebranlenl  si  souvent  les 
archipels  de  la  Polynesie?  ou  bien ,  comme  le  disent 
les  Carolins,  un  niorceau  de  la  barriere  qui  entourait 
I'esp^ce  de  bassin  place  au-dessous  du  niveau  de  la 

HI.    JANVII'R.    i5.  t) 


(82  ) 

mcr  s'osl-il  en  efl'oi  dcroiile  ?  C'csl  l;'i  ce  qu'il  nous  fut 
impossible  declaiicir ;  mais  il  nst  certain  que  cello  lie 
line  lois  envaliie  par  les  flols,  ne  fiil-ce  qu'a  la  suite 
d'un  ouragan ,  la  corruption  cles  sources  d'eau  douce 
dul  snffire  pour  la  rcndre  inliabilable  et  pour  obligor 
les  Carolins  a  chercher  vers  le  nord  un  sol  niieux  af 
fernai  et  un  asile  moins  precaire.  » 

Le  recit  do  Al.  Jurien  presente  a  la  fois  un  vif  intc^rdt 
par  la  uiani^re  donl  il  raconte  los  observations  qu'il  a 
pu  Faire  sur  les  pays  qu'il  a  visitds,  et  une  grande  uti- 
lilo  pour  les  marins,  qui  }  trouveront  des  rensoignc- 
menls  precieux  sur  la  navigation  de  ces  parages. 

D— Y. 


SUR 

LtMlGRATION  DES  FERMIEUS  HOLLANDAIS 

ou 
BOERS  DE  LA  COLONIE  ANGLAISE 

DO 

CAP  DK  BON>'E-ESPERA]SCE. 

Nous  avons  fait  connaltre  dans  les  BnUetins  de  f6- 
▼rier  1838  el  de  fi^vricr  ISZiO  le  fail  Ires-romarquable 
de  I'emigration  des  fermiers  hollandais  ou  Boers  qui , 
blesses  de  la  conduile  dcs  Anglais  envers  eux,  ab'an- 
donneront  en  1835  la  colonic  du  Cap,  pour  aller 
former  hors  de  la  domination  anglaise  un  Etat  indd- 
pendant.  Nous  avons  danstes  deux  numeros  donno  le 
r6cil  de  leurs  premieres  tenlatives  d'clablisscmcnl  au 
Port-Natal,  el  de  I'opposition  qu'ils  avaienl  trouvcio  de 
la   |«art  dos  Anglais.  Nous  avions  toujours  clierchi'  a 


(  83  ) 

connaltre  le  r<^sullal  de  ce  fail  si  rare  d'lino  emigralion 
nationale.  Un  article  (1)  fort  inl^ressant,  que  nous 
trouvons  dans  la  Revite  des  Deux  -Mondes,  185"2,  2°  li- 
vraison,  nous  apprend  ce  qui  s'est  passe  a  ce  sujet  jus- 
qu'en  1851.  Sans  nous  arreler  au  point  de  vue  t!e  I'au- 
leur  de  cet  article,  qui  est  de  comparer  le  mode  et  les 
succ^s  de  notre  domination  en  Algerie  avec  le  systeme 
suivi  par  le  gouvernement  anglais  au  cap  de  Bonne- 
Esp^rance,  nous  nous  occuperons  seulemenl  de  ce  qui 
pent  nous  instruire  sur  le  sort  des  Hollandais  qui  cher- 
cliaient  a  se  soustraire  a  la  domination  anglaise.  Nous 
avons  vu  precedemment  que  les  Boers  etaient  venus 
s'6tablir  au  Port-Natal,  el  qu'une  expedition  anglaise 
avail  ^te  envoyee  en  1839  pour  s'emparer  de  ce  point ; 
cependant  cette  position  ful  bientot  ahandonnee,  et 
les  Boers  crurent  pouvoir  se  declarer  independants 
sous  le  tilre  de  Republique  de  Port-Natalia ;  mais  on 
congoit  facilement  que  le  gouverneur  du  Cap  ne  pou- 
vait  laisser  ainsi  s'etablir  aupres  de  lui  une  colonie  qui 
fCit  bientot  devenue  une  rivale  dangereuse ;  une  nou- 
velle  expedition  fut  done  envoyee  en  1842  pour  prendre 
definilivemenl  possession  de  Port-Natal  ct  forcer  les 
Boers  a  rcconnaltre  la  suzerainele  de  I'Angleterre. 
Pour  leur  adoucir  autant  que  possible  le  joug  qu'on 
leur  imposail,  et  tout  en  les  regardant  comme  des  su- 
jels  rebelles,  on  leur  garantissait  cependant  les  pro- 
priet^s  qu'ils  avaient  acquises  ;  on  leur  assurait  pro- 
lection  conlro  leurs  ennemis,  les  Zoulous,  et,  ce  qui 
etait  bien  plus,  on  leur  permettait  de  conserver  les 
institutions  civiles  et  Padministralion  int^rieure  qu'ils 
s'elaient  dormees. 

(i)  Get  article  est  intitule  :  le  Cap  ioui  la  domination  anulatse,  par 
M,  Xavier  Raiipond. 


(84) 

Toules  ces  concessions  ne  purent  cependant ,  aiix 
yeux  de  tous,  compenser  la  perle  de  leui"  independance 
qu'ils  avaient  preleiidii  acquerir  en  quiltanl  le  terri- 
loire  anglais;  la  j)lupart  rejet^icnt  les  iernies  d'lin 
traits  qui  avant  tout  les  obligeait  a  se  reconnallre  sujels 
anglais.  Tres-j)eii  de  ceux  qui  avant  18ii2  n'avaient  jias 
encore  transporte  leurs  families  el  leurs  troupeaux  a 
Port-Nalal  s'y  sont  elablis  depuis,  el  un  certain  nombrc 
de  ceux  qui  I'avaienl  d^ju  fait  ont  repassti  les  monts 
Qualtamba,  pour  renlrer  dans  le  desert  el  sur  la  terre 
libre;  el  comme  un  bill  de  1835  avail  ^lendu  la  juri- 
diction  des  tribunaux  du  Cap  jusqu'au  25'  degr6  de  la- 
titude, la  plus  grande  partie  dVnlre  eux,  une  dizaine 
(le  mille  ames,  coniptant  plus  de  deux  mille  bommes 
en  6tat  de  porter  les  arnies ,  ont  rejnis  le  cbemin  de 
I'exil  el  sonl  alles  s'^tablir  enlre  Ic  25"  el  le  22'  degr6 
de  latitude,  oil  ils  errent  aujourd'hui  avec  leurs  trou- 
peaux, sans  qu'on  saclie  bien  pr(5cisement  quelle  a  6te 
leur  fortune  et  leur  hisloire  dans  celle  nouvelle  migra- 
lion.  Separes  aujourd'bui  de  la  colonic  par  une  bande 
de  terrain  large  de  plus  de  150  lieues,  ils  ecbappent  a 
I'allenlion  publique,  qui,  distraite  par  d'autres  6vene- 
ments,  s'occupe  peu  de  leur  destinee. 

Les  Boers  emigres  viennent. cependant  de  rompre 
tout  a  coup  le  silence,  et  d'une  maniere  qui  fait  hon- 
neur  a  leur  generosity.  L'insurrection  de  la  Cafrerie 
anglaise  a  mis  en  6moi  toute  la  race  noire  du  sud  de 
I'Afrique  ;  I'agilalion  s'est  propagde  jusque  cbez  les 
tribus  qui  errent  dans  le  voisinage  des  camps  bollan- 
dais.  Au  fond  de  leur  exil,  les  Boers  ont  appris  que, 
parmi  les  populations  qui  bordentla  frontiere  nord  do 
Natal,  il  se  tramait  de  sinistres  projcls  conlre  cette  co- 
lonic laiss^e  presque  sans  defense  el   composee   en 


(  85  ) 

parlie  de  gens  de  leur  race.  A.lors  leiir  conseil  s'est  as- 
semble, et,  en  son  noin,  A.  W.  PrcEtorius,  qui  est  lou- 
jours  reste  leur  chef  niilitaire,  a  fait  savoir  aux  tribus 
suspect^es  que,  si  elles  commettaient  aucun  acte 
d'lioslilite  centre  Port-Natal,  il  irait  leur  en  deinander 
satisfaction  a  la  tete  d'un  delacliement.  D — y. 


NOTE 

StJR  UNE  VUE  COLORIZE,  SOUS  FORME  DE  PANORAMA, 

DU    CANAL    PROPOSE 

POUR  LA  JONCTION  DE  LOGMAN  ATLANTIQUE 

ET 

DE  LA  MER  PACIFIQUE, 

PAR  M.   SQUIER  (1). 

En  presentant  a  la  Societe  de  g^ographie  cetle  Vue 
de  la  conlree  situ^e  enlre  le  lac  Managua  et  le  port  de 
Realejo,  M.  Squier  fait  observer  que  la  vue  a  etc  prise 
du  somniet  d'une  pelile  coUine ,  a  peu  de  distance  au 
sud-ouest  de  la  ville  de  Leon,  siluee  au  centre  d'une 
grande  plaine  portant  le  m6me  nom.  «  De  cette  emi- 
nence, dit-il ,  I'ocean  Pacifique  et  le  port  de  Realejo, 
dloignds  de  27  milles,  sont  dislinclement  visibles;  le 
lac,  eloigne  de  16  milles,  serait  egalement  visible  sans 
]es  forets  qui  existent  entre  les  deux  points;  mais  on 
peut  parfaiteraent  distinguer  les  iles  qu'il  contient.  » 
La  contree  comprise  dans  cet  essai  de  panorama  a,  en 
longueur,  une  etendue  de  !ib  milles;  et  comme  il  est 

(i)  Voyez  les  articles  insere's  dansle  Bulletin  de  i85i,  4'  serie,  t.  I, 
p.  2495  279  et  4"i)  et  1. 11,  p.  235,  etc. 


(  86  ) 

fail  d'apris  nature,  et  que  les  lieux  sont  peints  avec  une 
extr^iue  exactitude,  M.  Squler  pense  qn'il  n'a  auciiiie 
exj)lication  a  donner  a  ce  sujel.  La  contrive  offie  aux 
yeux  I'apparence  d'une  plaine  vaste  el  tres-fertile ,  et 
on  a  reconnu  que  la  plus  grande  ^Uvation  au-dessus  du 
niveau  du  lac,  sur  la  ligne  du  canal  propose,  ne  depasse 
pas  f)/l  pleds,  Icsquels  ajoules  a  156  pieds,  hauteur  de- 
terminee  du  lac,  donnent  21 0  pieds  pour  la  plus  grande 
elevation  au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  Ce  point,  Ic 
plus  6iev6,  est  a  environ  2  niilles  du  lae,  et  de  la  la  des- 
cente  est  graduelle  et  imperceptihle  jusqu'a  la  mer. 

«  Les  personnes  accoutumees  a  ratmosjjh^re  bru- 
meuse  de  I'Angleterre  et  de  la  majeure  parlie  du  con- 
tinent, ajoute  M.  Squier,  comprcodront  dKficilemenl 
(ju'on  puissc  voir  distinclement  toutes  les  parties  de 
celle  vaste  plaine,  telles  qu'eiles  sont  ici  representees. 
Tout  ce  qu'on  peut  dire,  c'esl  que  sous  ce  rapport, 
ainsi  que  sous  lous  les  aulres ,  on  a  imite  exactement 
la  nature. 

»  Les  volcans  represent^s  dans  le  dessin ,  quoique 
paraissant  oJTrir  une  chaine  continue  s'^tendant  du  lac 
au  golfe  de  Fonseca ,  sont  en  reality  deux  cones  d^ta- 
ch^s,  formes  de  leurs  propres  depots.  Entre  leurs 
bases,  la  plaine  n'est  point  interrompue,  et  au  dela 
se  trouve  uno  autre  plaine  appel^e  Llano  del  Conejo 
(plaine  du  lapin),  qui  s'etend,  en  largeur,  depuis  les 
volcans  jusqu'aux  plateaux  6lev6s  de  Mata,  Polpa,  et 
on  longueur,  depuis  le  lac  jusqu'au  golfe  de  Fonseca, 
Cette  plaine  correspond  g6n6ralement  avec  celle  de 
L^on  ,  except^  que  scs  sommels,  dans  les  parties  les 
plus  elevees,  ont  seulcment  Zi5  pieds  au-dessus  du 
niveau  du  lac.  Dans  plus  de  la  uioitie  d^  sa  longueur, 


(  87  ) 
elle  esl  travorsee  par  VEstero-Real,  cours  d'eau  remonle 
par  la  inar^e  et  d'une  grande  profondeur,  qui  s'etend 
depuis  le  golfe  de  Fonseca,  dans  la  direction  du  lac. 
C'est  dans  celte  plaine  ,  au  raoyen  de  cet  Estero,  que 
le  canal  propose  pour  des  navires  doit  6tre  construit , 
non  que  la  ligne  au  port  de  Reaiejo,  sur  laquelle  il  a 
el6  tant  ^crit,  soit  impralicable,  mais  parce  qu'elle  est 
plus  courte  et  est  termin^e  par  le  port,  sans  contredit 
le  plus  vaste  ot  le  plus  beau  de  la  cote  d'Amerique,  sur 
la  mer  Pacifique,  celui  de  San-Francisco  seul  excepte. 

))  Et  maintenant,  qu'il  me  soit  perinis  de  corriger 
une  erreur  qui  exlste  sur  toutes  les  cartes  de  Nicaragua, 
que  j'ai  vues ,  ceile  d'un  large  cours  d'eau  ou  riviere, 
appele  Rio  Tosta,  a  partir  du  port  de  Reaiejo.  II  n'exisle 
pas  de  riviere  portanl  ce  nom,  et  il  n'y  a  pas  de  cours 
d'eau  considerable  coulant  dans  le  port  de  Reaiejo.  Le 
plus  grand  est  un  petit  cours  d'eau  insuffisant  pour  faire 
flotler  un  canot,  except^  pendant  une  courte  distance, 
au  moment  de  la  maree.  II  est  appele  Rio  Telica  ou 
Quesalgaqite.  Leon  est  aussi  g6neralemenl,  sinon  lou- 
jours,  repr^senle  comme  place  sur  une  elevation  ou 
Diontagne;  e'est  une  erreur  provenant  probablcment 
d'une  mauvaise  traduction  du  mot  espagnoi  munte,  qui 
signifie  champs,  ou  champs  eleves,  avec  des  halliers, 
mais  non  monlagnes  ou  collines. 

»  Le  lac  de  Managua  a,  sur  toutes  les  cartes  que  j'ai 
vues,  une  6tendue  trop  petite.  Sa  plus  grande  longueur 
lie  peut  elre  beaucoup  moins  de  50  milles,  et  sa  lar- 
geur,  de  30  a  35.  Je  pense  que  la  superficie  de  ce  lac, 
comparee  a  celle  du  lac  Nicaragua,  est  exaclement 
donnee  dans  la  carte  que  j'ai  eu  I'honneur  de  mettre 
oe  soir  sous  les  yeux  de  la  Societe,  et  qui  contienl 


(  88  ) 
(outes  les  infornialions  qu'il  m'a  ele  possible  de  re- 
ciieillir,  pendant  inon  sejour  dans  ce  pays,  sur  les 
Iraits  caracl^risliques  de  cct  islhme  si  interessant,  spe- 
cialement  en  ce  qui  concerne  le  canal  propose  enlre 
les  deux  oceans.  » 


COMPTE   RENDU, 

PAR 

LE   PRESIDENT   DE   LA    COMMISSION   CENTRA  LE, 

SCR 

L'ENVOI  DES  GRAINES  DE  LA  CHINE. 

Messieurs, 

Le  consul  de  France   a  Shanghai  et  a  Ning-po, 

menibre  de  la  Socield  de  geographic,  lui  a  adresse, 

pour    6tre    cxpi^rimentees    a    diverses    latitudes ,    en 

France  el  en  Algerie,  un  certain  nombre  de  graines 

de  la  Chine.  Plusieurs  de  cos  veg^laux,  s'ils  venaient 

a  s'acclimaler  sur  noire  territoire,  seraienl  une  pr6- 

cieuse  acquisition  pour  I'industrie,  pour  Tagricullure, 

pour  riiorticulture ,  pour  I'economie  domeslique,  et 

la  Sociele  acquerrait  par  la  unnouveau  litre  a  Teslime 

generale.  Ce  serait  accomplir  un  de  ses  voeux  les  plus 

chers,  puisqu'elle  a  offert  un  prix  aux  voyageurs  pour 

rimportation  des  substances  utiles  a  I'economie,  aux 

arts,  a  I'agricullure.  Pen<!(tre   dc  I'imporlance  de  eel 

objet,  voire  president  n'a  neglige  aucun  soin,  aucune 

peine  pour  rempiir  la  mission  donlvous  I'aviez  charge. 

II  a  commence  par  s'eiiquerir  aupres  des  ministircs 

de  I'instruction  publique,  du  commerce  et  dc  la  guerre, 

des  Socieles,  des  jardins,  et  dc  tous  les  etablisseraimts 


(  89  ) 
constitu6s,  en  France   et  en  Alg^rie ,   pour  I'accU- 
malation   des  plantes  exotiques.  Una  liste   d'environ 
quarante  elablissements  choisis  a  ^t6  forniee  ;  qualre 
soci^tes  agricoles  de  I'Algerie  etablies  a  Alger,  Bone, 
Phillppeville   et  Oran  en  faisaient  partie;  M.  le  mi- 
nistre  de  la  guerre  a  bien  voulu  comprendre   dans 
renvoi  le  jardin  d'acclimatation  de  Biscara,  province 
de  Constantine.la  pepini^re  centraledugouvernement 
a  Alger,   et  les  p^pinieres  secondalres.  Environ  qua- 
rante lettres  ont  616  6crites,  en  consequence  de  la  liste 
de  distribution,  aux  Elablissements,  aux  Societ^s  et  k 
plusieurs  prefets. 

Le  ministre  du  commerce  a  seconde  aussi  la  Soci^te 
en  faisant  passer  sans  frais  les  graines  a  leur  desti- 
nation dans  un  grand  norabre  de  localites;  les  autres 
Soci^tes  ont  fait  pi'endre  ici  les  graines  qui  leur  Etaient 
destinees.  Toutes  a  peu  pres  ont  accuse   recej)tion ; 
elles  ont  lemoigne  a  la  Societe  de  geographic  une  vive 
reconnaissance  pour  ces  envois  ,  et  ont  ecrit  dans  des 
lermes  qui  garantissent,  de  leur  part,  une   attention 
toute  parliculiere  et  les  soins  les  plus  empresses  pour 
rensemencement  et  la  culture  des  plantes  de  la  Chine. 
Elles  s'engagent  a  faire  connaitre  les  rcsultats  qu'elJes 
auront  oblenus,  et  on  a  lieu  d'esperer  quelques  succes, 
sur  un  point  ou  sur  I'aulre  de  I'echelle   climaterique 
de  la  France,  puisque  M.  Itier,  le  voyageur  en  Chine, 
celui  a  qui  vous  avez  accorde  une  m^daille  juslement 
nieritee,  a  fait  reussir  chez  nous  quatre  v6getaux  de  la 
Chine  :  le  lo-md  (Cannabis  gigantea),  le  tsing-ma  [Cor- 
chorus  textilis),  le  cho-nia,  sjero  des  Japonais  (Urtica 
nivea),  en  fin  le  lin  de  la  Chine. 

Toutes  ces  planles  ont  reussi ;  deja  menic  elles  ont 
fourni  des  recoltes  asscz  impovt^ntes  :  on  peut  les  re- 


(  f>o  ) 

garder  coujiiie  naturalisees;  files  ont  flemi,  fruclifie 
el  rapporte  des  graines  qui  ont  parfailemeiit  inari.  Le 
tsiug-ind,  I'uije  d'elles,  promet  de  fournir  ce  fil  d'une 
extreme  it^miiie,  doiil  se  compose  la  batiste  de  Canton, 
supericiire  en  finesse  a  tuulcs  les  planles  textiles  cuHi- 
vees  en  Europe.  Ces  experiences  ont  ete  faites  eu  i8A9 
et  1850,  et  ont  ete  conlinuees.  Le  lo-tnd  a  atleint  jus- 
qu'a  5  ai<-!lres  el  demi  a  Marseille  ot  a  Perpigaun ,  et 
5  metres  a  llonlpellier,  avec  4  a  0  centimetres  de  cir- 
conf^rence;  a  Marseille,  la  circonference  a  alteiut 
26  centimetres.  Cinquante  cenliarcs  ont  rapportd  \h  ki- 
logrammes de  graines,  etc.;  mais  je  reviens  aux  graines 
procurees  par  M.  de  Montigny. 

II  serait  infiniment  trop  long  de  citer  le  contenu  des 
leltres  ecriles  par  les  etablissements  en  reponse  a 
celles  de  la  Societe.  Je  me  bornerai  a  quolques  exem- 
ples  :  le  tableau  ci-joint  suppleera  au  reste. 

M.  Jurie,  conseiller  a  la  cour  d'appel  de  Lyon,  pre- 
sident de  la  Society  d'horticulture  du  Rhojie,  ecrit: 
«  Les  progresque  I'horticullure  a  fails  depuis  quelques 
»  annees  dans  notre  departenient ;  le  succ^s  qu'a  ob- 
»  tenu  I'ecole  pratique  que  notre  conseil  general  a 
»  institute;  I'habilete,  le  z6le  el  Tintelligenceque  mon- 
»  treat  nos  liorticulteurs,  amateurs  ou  praticiens,  me 
»  donnent  la  coiifiance  que  les  essais  qu'ils  vont  tenter 
»  avec  les  elements  nouveaux  (jue  vous  leur  procurez, 
»  repoadront  aux  esperances  de  ceux  qui  s'ellorceat 
»  d'introduire  de  nouvelles  richesses  surle  solde  notre 
»  palrie.  » 

Le  comice  agricole  de  Toulon  se  felicite  de  voir,  au 
nombre  des  graines,  utie  belle  esp6ce  de  conil'ere, 
le  Ciyptomerin  japonica ;  il  ajoule  :  «  Le  comice  recevra 
»  loujours   avec   bonlieur  des  missions  semblables  a 


{ i>l ) 

»  cellesqut!  vous  voulez  bien  lui  confier.  Inleresse  aux 
»  progres  de  la  science  agricolc,  il  mcttra  tous  ses 
»  soins  a  vous  seconder,  dans  son  liunible  sphere, 
))  dans  vos  efforts  genereux  pour  doter  le  pays  de  nou- 
»  velles  rlchesses  veg^tales.  » 

Le  directeur  de  la  pepini^re  d'Angers  :  «  J'airegu 
»  cette  Douvelle  avee  joie,  persuade  que  les  richesses 
»  qu'on  vous  envoie  auront  le  plus  lieureux  vesultat 
»  pournotre  l)elie  France,  attendu  le  rapjjort  quiexiste 
))  entre  le  nord  de  la  Chine  el  noire  pays  pour  le  climat 
»  tempere.  II  serait  a  desirer  qu'on  eut  ailleurs  la 
»  pensee  gen^reuse  que  vous  avez.  J'ai  maintes  t'ois 
»  soUicit^  qu'on  6lobllt  sur  cinq  ou  six  points  de  .1^ 
»  France  une  succursale  d'essais  d'acclimatation  poor 
»  Ics  vegelaux,  qui  sont  muUiplies  et  abondanls  su 
»  Jardin  des  Plantes.  J'ai  pense  que,  par  ce  moyen,  il 
))  se  revelerait  peut-etre  des  produits  utiles  qui  restent 
»  ignores.  Le  climat  de  Paris  n'etant  pas  favorable  a  la 
»  vegetation  des  arbres  a  feuilles  persistanles,  il  est 
»  done  urgent  de  tenter  des  essais  en  diverses  regions 
»  climaleriques  du  pays.  » 

Le  doyen  de  la  faculty  des  sciences  de  Montpellier, 
professeur  di,'  botanique,  a  deja  fait  seuier  une  parlie 
des  graines;  il  suivra ,  dans  leuv  d^veloppenaent ,  les 
plantes  qui  en  proviendront,  et  nous  fera  part  du  r^- 
sultat  de  ses  observations.  Tout  le  inonde  connait  la 
reputation  du  jardin  de  Montpellier  sous  cc  rapport  ^t 
les  beaux  succes  qu'y  A  obten.u3  le  professeur  Delile, 
menibre  de  I'lnstitutd'I^lgypte  (lecemment  enlcve  aux 
sciences  et  a  ses  aujis),  pour  raccljinatation  des  \§g^- 
laux  cle  rOrient. 

Enfui,  le  secretaire  de  la  Sociele  d'horliculture  de 
Paris  nous  ecrit  eji  ces  ternies  :  (j  Jie  yieps,  ay  jiom  jie 


(92) 

))  la  Sociele  d'horticiilture  vous  offrir  de  sinceres  reuier- 
»  cimcnls  pour  la  precieuse  collection  de  graines  de 
»  Chine  que  vous  avez  bien  voulu  lui  faire  remellre  de 
»  la  part  de  votre  savante  compagnie.  Nous  vous  prions 
»  en  meme  temps  d'exprimer  nos  sentiments  de  grali- 
»  tude  au  donateur,  M.  de  Montigny,  voire  honorable 
»  collegue,  qui,  au  milieu  des  graves  inl6rels  confies  a 
»  ses  soins,  sait  leur  d^rober  quelques  instants  pour 
»  les  consaci-er  a  I'^tude  des  sciences,  et  dote  son  pays 
»  des  richesses  veg^tales  de  la  contree  loinlaine  ou  I'ont 
»  appel6  les  devoirs  de  sa  haute  mission.  » 

Vingt  autres  lettres  semblables  t^moignent  de  la  re- 
connaissance des  ^tablissements  que  nous  venons  do 
doter  et  de  Tempresseraent  qu'ils  meltront  a  nous 
faire  part  des  resultats  de  leurs  soins. 

Selon  le  vcbu  de  M.  de  Montigny,  les  graines  se  trou- 
venl  distribuees  dans  vingt -sept  d^partemonts,  siir 
presque  toute  I'^chelle  climalerique  de  la  France,  et 
dans  huit  a  dix  localil^s  de  TAlgerie. 

II  est  difficile  do  douter  que  toutes  les  experiences, 
faites  simultanement  en  Algerie  et  en  France,  ne  con- 
duisent  promptement  a  de  bons  resultats,  a  la  pro- 
duction de  vegetaux  utiles  :  la  Societe  aura  alors  a  so 
f^liciter  de  n'y  etre  pas  reslee  ^trangere.  Aprfes  tout, 
messieurs,  notre  science  n'a  pas  seulement  pour  objel 
de  decrire  le  globe;  elle  a  aussi  pour  mission  de  le  faire 
connallre  dans  la  vue  d'augmenler  la  richesse  nationale. 

Je  rappellerai  mainlenant  que  les  vingt-lrois  especes 

de  graines  cnvoy(!tes  parM.  de  Montigny  comprennenl 

des  v^g^taux  d'une  utilite  (ividenle.  Parmi  les  planles 

textiles,  je  cilerai  trois  cspe(  es  de  clianvre  du  Leao-long 

(Mandchourie)  et  du  Chan-tong  (Haimen),  le  coton  de 

Kiang-nan ;  parmi  les  planles  tinctoriales,  trois  especes 


(  93  ) 
d'lndigo  du  Kiang-si,  du  Chan-tong  et  du  Kiangnan ; 
parmi  les  cereales,  deux  esp^ces  de  riz  du  Hai-men; 
parnii  les  plantcs  potageres,  deux  especes  de  chou,  dont 
I'un  atteint  le  poidsd'environ  liO  livres;  deux  pasteques 
du  Kiang-nan,  une  grande  aubergine  de  Tche-fou-pan, 
deux  especes  de  melon  et  de  potiron,  et  aussi  le  saye, 
grand  lubercule  du  Kiang-nan,  du  gout  de  la  pouime 
de  lerre ;  parmi  les  fruits,  la  peche  du  Shang-liai  et  une 
espece  de  pamplemousse,  de  grosseur  extraordinaire; 
parmi  les  grands  v^gelaux,  un  arbre  du  Tch^-kiang,  a 
larges  fcuilles,  et  le  Ctjptomeria  du  Japon. 

On  a  eu  ^gard  dans  la  distribution,  autant  que  pos- 
sible, a  la  situation  de  chacune  des  provinces  de  la 
Chine,  soil  quant  a  la  latitude,  soit  quant  a  la  position 
maritime  ou  medilcrranee. 

On  aurait  desire  pouvoir  adresser,  en  meme  temps 
que  les  graines,  des  instructions  oudes  conseils  surles 
semis  et  sur  la  culture.  M.  de  Montigny  n'en  a  point 
fourni  et  Ton  n'a  pu  que  recommander  les  methodes 
suivies  par  M.Itier,  puisqu'elles  ont  eu  de  bons  r^sultats. 

Tel  est  le  compte  succinct  que  j'avais  a  vous  rendre, 
messieurs,  des  d-marches  n^cessitees  par  I'agreable 
mission  que  vous  avez  regue  de  notre  collegue,  le  con- 
sul de  France  a  Shang-hai  et  a  Ning-po. 

Les  pieces  de  la  correspondance  sont  d^posees  sur 
le  bureau.  Jomard. 

Le  2  Janvier  1862. 

N.  B.  Un  petit  nombre  d'^tablissements  n'ont  pas 
fait  prendre  les  graines  qui  leur  sont  destinies;  les 
paquets  sont  prets  a  remettre  ou  a  expedier,  selon  la 
demande  des  interess6s. 


( yi ) 


fiouvelles  geo;8;rai»hic|iie<s. 


EDROPK. 


SOPERFICIE   ET   POPULATION   DE    LA   NORV^GE,    o'APRiS   LE    DERNIER 
RECENSEMENT,    AU    31    DECEMBRE   18/45. 


Ak(!rshtiu5  . 
Smaalebiieiie 
Hedemark  . 
Chri>«Bniii<  c,„is,i,ns    . 


STIFTS 

ml 
CRAKDES 
PaEFEC- 
TURES. 


AMTS 

ou 

PBEFECTORES. 


Buskerud. 


Jarlsl)erg  et 
Laui  vi°  .   . 


Bralsberg. 


'  Nedenas  el 
Cbrislinn-    1     Robygdelogel  . 


sand.  . 


BCrgeii  . 


Trondbjcm 


FOGnERIES 


DISTRICTS   RL'BAUX. 


'Aker  el  Foiloiig 

Nedre  Romci  ike 

Uvie  Runicnke 

Mossc 

Idde  el  Mjrker 

Rukkeatiid 

SulOei  el  OJ.,1 

lisieidal , 

ilt'deilliilk 

Tolhen 

Giidbiaiidailul 

Vulder.Laiid  cl  Hi'idthind 

Ringeiige  el  Hallingilal. 
)  Nuniniedal  el  Sandsver  . 

I  Buskerud 

/  Jul  I  bei  g 

}  Lii.iivig 

Hanilde 

Nedre-Telh-mnik  .   .   .   ! 

OvrcTellcmaik 

Nedeliws 

Rolijgdelagel 


U     C     i_    Hi 


4  S20 

I  idi 

7  792 

7  85C 

4  o52 
672 

4  064 

5  488 


^  Lister  et  Mandal 
Vstavanger,  .  .  . 
'  SOndre-Bergenhaus 

(NordreBergenbaus 
Romsdal 

fSOndrc-Trondbjem 
ITordre-TrondFijein 
Noi'dlaod 


Mandal 


j  l.isler 

J  Jiedereii  el  Dalerne  , 
J  Kjljike    ....... 

^OudliiJidlandelHardan 


Finmnik  , 


I 

(  Finmaii 


/  .^uiiuiioiaiuiineiiiaruan 
j  Nurdbordtund  et  Bossc 
.-  Ytli  e  el  I  lull  e  Sogii.  . 
j  Noid  el  SandiTjuid  . 

^  &OiidniOie 

1  K'iiiisdul 

}  Noi  diiiore 

/Orke  el  Guldal  .   .  ] 
1  Slriiidc  el  Sselbo  . '. 

I  Fos 

)  Stoi-  el  Vcrdal.  .  .  '. 

)  Indero 

J  Numdal .' 

f  Helgelnnd 

I  Jiall.ii 

I  Lofoten  el  Veslciaal 
)  Seiijen  ct  TionisO  .  . 

j  All,n 

(  Hiimmcifest 

I  Osl-Fiiimark 


ge 


) 

j  1  562 
2  65G 
4  368 
a  072 

I  4  !>',i 
!>408 
6  624 
H  O03 


(20fi 


f;60 


92  7U5 


109  432 
75  422 
87  IIS 

J  02  730 

83  918 

63  070 

72  891 

55  932 
61918 
78  210 
M6  989 
77978 

81  314 
89  329 
68  570 
05  til  2 

43938 

1328  471 


(  95j 


VILLES  »E   NORVEGE  RANGEES  SUIVANT  L'iMI>ORTANCE  BE   LECR   POPULATION. 


I'opul. 

Chiisliaiiia  ....  51  703 

Bergen 23  5i!t 

Tiondhiem  ....  U  778 

Slnviiiiger 8  646 

Dranimen 8  ri76 

Chnstiansanii.   .   .  S  349 

Freder.ksh;iia    .   .  5  790 

Koiigsberg  ....  i  i^G 

Moss 4  0-2o 

Limivik 4  012 

Skien S  677 

Arcudal 3  56-2 


Popul. 

Christiaiisiind.  .   ,  5  i6r> 

KrageiOe 2  740 

Fredeiikstad  ...  2716 

Maiidal -ioO/i 

ToiislJL-ig 2  245 


l^orsgruiid.  .  . 
TiomsO.  .  .  . 
Osleri  iesOer    . 

nOiaa'! 

liolmebti  and  . 
Flekkef|oid.  . 
Pievig    .... 


2  214 
2011 
2  008 
1  856 
1  708 
1  610 
1  455 


Popul. 

Drobak i  550 

Sarpsborg 1  525 


Ekersiind  . 
Svelvik  .... 

Molde 

Aalesund  .  ,  . 
Faisiiiul.  .  ,  , 
Hammerfest.  . 
Lillehamnier. 

Vad.sO 

Bcdo 

Vardo 


1  251 

1  201 

1  185 

I  157 

1  095 

927 

695 

588 

258 

193 


OBSERVATIONS. 

Nous  avons  pnblie  pn  1 843,  dans  le  Bulletin  de  la  Soci^te  de  g^ogra- 
pkie  (i),  le  tableau  de  la  superJicie  et  de  ia  population  du  royaume  de 
Norvige,  et  celui  de  la  population  de  scs  principales  villes,  d'apres  le  re- 
censeriu'nt  de  I'annee  i835.  Nous  donnons  aujourd'hui  ces  memes  iiifor- 
mations,  puisees  dans  le  dernier  recensement  olticiel  de  I'annee  1 845  (?.j, 
en  faisant  reniarqner  que  la  population  totale,  qui  n'etait  en  1 835  que  de 
I  194827  habitants,  s'est  elevee  en  18 15  a  I  328  47 1)  e' a  ainsi  augmente, 
en  dix  ans,  de  11,18  pour  100. 

La  population  de  toutes  les  villes  a  augmente  dans  des  proportions 
tres-diFfeienles,  a  I'exception  d'une  seule,  Porsgrund,  qui  avail  en  1  835 
2218  habitants,  et  en  i845  2  2i4;  difference  insignifiante.  Celles  dont 
I'augnientation  relative  a  ete  la  plus  considerable  sont : 

Lille-Hammer,  qui  a  augmente  de     175,62  pour  100. 

Aalesund 140,04 

HainnieifesI 137,08 

Nous  avons  cru  devoir  citer  toutes  les  villrs  du  NordlanJ  el  du  Fininark, 
parte  qu'elles  y  sont  rares,  quoiqu'il  en  exlste  dans  d'aulres  provinces  qui 
n'ont  point  ete  mentionnees,  bien  que  leur  population  lul  plus  elevee. 

Le  nombre  des  habitants  des  trois  villes  les  plus  peuplees  de  la  Norvejje, 
Christiania,  Bergen  et  Troudhjem  (Drontheim),  a  augmente,  savuir  : 

Dans  la  premiere,  de 37,12  pour  100. 

—       seconde  3,02 

*—       Iroisieme 19,38 

D.  L.  R. 

(1)  2e  Serie,  I.  XX,  p.  5  et  suiv. 

(2)  Les  recensemeuls  sont  fails  eu  Nurvcgc  luus  les  dix  luis. 


(96   ) 
AFHIQrE. 

Kgyi'te.  —  Monuments  DicouviiRTs  pau  M.  Mariutte. 

EXTRAIT    DUNK    MCTTRE    DE    M.    REMN,    CHANCIiLIEU    DU 

COKSULAT  DE  FRANCli    \V   CaIRE,    ECRITE    A   M.  JoMARD    I.E 

4  JANVIER  1851.  —  11  y  a  quelqucs  jours  seulement  que 
mes  occupations  in'ont  permis  de  laire  une  excursion 
a  Abousyr,  pour  voir  M.  Marielte;  il  s'cst  etabli  tout  u 
fait  la  dans  le  desert,  et  il  y  a  elev6  une  niaison  en  bri- 
ques  crues,  afin  de  se  j>r^server  des  intemp6ries  de  la 
saison  et  de  surveiller  ainsi  de  plus  pr^s  ses  travaux, 
suspendus  pour  ce  moment  par  ordro  du  vice-roi, 
mais  dont  les  resultals,  sans  colle  precaution,  auraient 
pu,  comme  vous  le  savez  bien ,  etre  I'objet  de  vols  et 
de  d^tournements  de  la  pari  des  A  raises.  Une  grande 
parlie  des  monuments  les  plus  importanls  sont  encore 
sous  le  sable ,  mais  au  moins  personne  nc  peut  les 
enlever,  et  il  Taut  esp^rer  que  le  r^sultal  des  negocia- 
tions  pendanles  am^nera  le  vice-roi  i\  faire  don  de  la 
plus  grande  partie  des  objets  a  la  France. 

Vous  aurez  probablemenl  appris  la  dccouverte  des 
souterrains  pharaoniques,  ou  se  trouvaient  vingt-huit 
immenses  sarcopliages,  sepultures  desdiffi^rents  boeufs 
sacres  (1).  Ces  souterrains  magnifiquos,  quo  j'ai  par- 
couruSj  auraient,  dit-on,  etc  viol(is  par  Cambjse,  et, 
depuis  lors,  personne  ne  les  aurait  plus  visites.  II  en 
reste  encore  d'aulres,  que  M.  Mariette  connait;  il  en 
a  vu  I'enlree  :  ce  sont  les  souterrains  ptolemaiques;  il 
n'attend  que  i'aulorisation  du  vice-roi  et  des  fonds  de 
France  pour  recommencer  les  travaux,  etc. 

(i)  On  rapporte  que  la  plus  grande  parlie  des  sarcopliages  sont 
depouivus  d'hieroglyphes.  J — d. 


(  97  ) 

AMtolQUE. 

Chili.  —  Ses  divisions  administratives  et  sa  popu- 
lation. —  Le  Chili  ( Chile),  dont  le  nora  vient,  suivant 
Lastarria  (1),  du  mot  tchili,  qui,  dans  la  langue  an- 
cienne  des  Peruviens,  signifie  iieige,  et  dout  les  Incas 
du  P^rou  avaient  fait  une  province  de  leur  empire,  fut 
envahi  pour  la  premiere  fois  en  1535  par  les  Espagnols 
sous  les  ordres  d'Almagro.  Ce  pays,  devenu  une  r6- 
publique  independanle  depuis  la  victoire  decisive  de 
Maypu ,  que  ses  habitants,  soutenus  par  quelques 
Buenos-Ayriens,  remporterent  sur  les  troupes  royales, 
le  5  avril  1818,  est  encore  assez  peu  connu,  m6me  en 
Ainerique.  II  n'en  sera  pas  longtemps  ainsi ,  il  faut 
I'esp^rer,  apr^s  la  conclusion  du  grand  ouvrage  ,  en 
langue  espagnole ,  que  M.  Claude  Gay  public  sous  les 
auspices  du  gouvernement  du  Chili,  conlr6e  dans  la- 
quelle  il  a  tail  un  sejour  de  douze  ann6es,  et  dont  il  a 
explore  loutes  les  parties  en  geographe,  en  g^ologue 
el  en  naturaliste  (2).  C'est  dans  les  informations  qu'il 
a  bien  voulu  nous  fournir  que  nous  avons  puise  les  faits 
exposes  clans  le  tableau  ci-apres. 

On  sait  que  la  Cordillere  des  Andes,  cette  immense 
chalne  de  pyramides  elevees  par  la  nature  comme  une 
barriere  contre  les  vents  et  la  mer,  et  le  signe  caracte- 
ristique  le  plus  saillant  du  nouveau  raonde,  s'etend  sur 
toute  la  longueur  de  I'Amerique,  dans  la  partie  occi- 
dentale.  Vers  le  tropique  du  Capricorne ,  elle  est  ac- 
compagn6e  a  I'ouest  d'une  autre  chaine  de  montagnes 

(i)  Voyez  Lastarria,  Geogmfia,  article  Chile. 
(2)  Voyez  ci-dessu3  I'article  do  M.  de  Ginoux  sur  le  Chili,  p.  5". 
III.    JANTIP.R.     7.  7 


(98  ) 
Leaiicoup  moins  6lev6es,  d'une  formation  gt^ologique 
toule  differenle,  el  qui,  la  suivant  parallelemenl  clans 
une  elendue  de  20  degres,  donne  lieu   a  une  li-6s- 
longue  vallee  interrompue,  vers  le  nord,  par  de  nom- 
breux    rameaux   lateraux  ,    qui    la    rendenl    presquo 
uieconnaissable ,  niais  prolongee  cnsuile  sans  inlcr- 
ruplion  depuis  Chacabuco  (33°)  jusqu'a  Cliiloe  (42°). 
Cette  valine  de  six  a  huit  lieues  de  largeur,  el  aiianl 
loiijours  en  diminuanl  de  bauteur  depuis  son  origine, 
ou  elle  alleinl  2300  pieds,  jusqu'a  Reloncavi ,  oil  elle 
va  finir  sur  le  rivage,  est  la  portion  la  plus  imporlante 
du  terriloire   de  la  republique  du   Cbili ;  c'ost  hi ,  en 
effel,  que  Ton  Irouve  concentree  presque  toule  la  po- 
pulation  et   que  sont  situees  les  principales  villes  et 
les  grandes  lermes  qui  font  la  ricbcssc  du  pays.  C'esl 
aussi  dans  cette  vallee  et  sur  les  terres  lateralcs  com- 
prises enlre  le  37*  el  le  40'  degr6  de  laliUide  que  se 
trouve  I'Araucanie ,  dont  la  pbysionomie  est  absolu- 
menl  la  meme  que  celle  des  pays  voisins  babites  par 
les  Cbiliens. 

((Line  cole,  deux  cbalnes  de  monlagnes,  donx  de 
Cordill^res,  el  unepampa  inlerm^diaire,  lelle  est,  »  dit 
Doineiko  dans  son  Arnucania,  imprimec  a  Santiago  en 
J8A5,  ft  la  configuration  exl^rieure  du  terriloire  jn- 
dien.  » 

Les  limiles  du  Chill  sont  :  au  nord,  la  republique  de 
Bolivia,  dont  le  grand  desert  d'Atacama  la  separe;  a 
I'esl,  la  rdpublique  Argentine  ou  de  la  Plata,  donl  elle 
esl  separee  par  les  baules  Cordill^res  dos  Andes;  et 
enlin  au  sud  el  a  I'ouest,  par  roc(ian  Pacilique. 


PROVINCES. 


La  Seiena, 

IMupel.  .  . 

Conuimbo. .  {  Comh-^vhu 

^  Ovallc.  .   . 

Elqui  .   .    , 


Gopiapo.  •   . 


DEPARTEM. 


Copiapo, 
Vallenar. 
Freirina. 


Aconcagua,. 


r  Sou-Felipe 
Los  AnJes. 
Putaendo  . 
I.igua.  ,  . 
Petorca.    . 

•Val 


Valpara 


Santiago. 


Colchagua. 


^Talca  . 


Muule. 


/"Valparaiso 
iso..  I  Qi'illola.  . 

/Sanliiigo,  . 
\  Mrllipilla. 


Concepcion. 


Valdivia. 


Chiloe. 


Rai 

La  VicLori 

'  San-Fcrnando 
'  Caiipolican 
Ciirico.  .  . 

;Talca  .  .   . 
!  Molina   .    . 


^  Cauqnenes 
Linares . 
Parval.  . 

,  Sau-Cai  lo 
'  Quiiiiiue 
^Bilbao,  . 

^Concepcion 
Talcahnano 
Laul jrn.  , 
Laja.  .  .  . 
I^Pi  c.  .  .  . 
Chilian  .  , 
Puchacay , 

/Valdivia.  . 
j  La  Union  . 


r  San-Carlos 
Carelmapu 
Chacao  . 

1  C;iIhnco. 

Oalcaliue 

Qiienac  . 
I  Qiiinchao 

Caslru.  . 

Le  Mny  . 
^Chonchy. 


(99  ) 


POPULATION  DES 
de'iiail.         prov. 


H  o43) 

10  846  !    27  783 
5  594J 


13  199 

14  746 
10  231 
26  977 

8  50G 


73  669 


VILLES  PBINCIPALES. 


Francisco  de  la  Selva 

Vallciiar 

Freirina 


20  695  \ 
28  246  / 
12  477  I    92  83! 
81 

42; 


8  48 
23  04! 


50  OOO  ) 

44  200  !l06  134 

11  954) 


97  786 


97  786  \ 
30  493  L,7 
72  3W  ( -" 


637 


17  010 


51  793 -J 

50  672     167  418 

64  931  j 


40  305  \ 
20  405  I 

54  633  \ 
23  101  j 
14  791  f 

i6i  I 
W7\ 

541  y 


28  86i 

18  83 

9  34 


60  710 


129  626 


La  Serena  . 
Illapel.  .  .  . 
Conibarbala. 
Ovalle.  .  . 
Elqui  .... 


San-Felipe  . 

Sitnta-ilosa.  . 
Putaendo  ,  . 
SanAniouio. 
Petorca  .    .  . 


8  000 
5  000 
3  000 

9  OOo' 
2  OdO 
1  000 
1  (100 

1  000 

8  000 

2  000 
:iOO 

I  000 
J  500 


Valparaiso 50  000 

Quillola I  8  000 

Casablanca I  2  000 

i 

SANTIAGO I  80  000; 

Mellipilla j  1  5U0 

R;incagna i  3  OllO 

San-Bernardo 50U, 


San-Fernando 

Rengo ..... 
Gurico 


Talc  a. 
Molina. 


6  958 
2  22fl 

7  850 
7  939 

15  386 
44  484 
20  163 


8  860 


104  989 


8  860 


43  832 


1  023  487  1023  487 


Cauquenes 

Linares  .  .  . 
Parral.  ,  .  , 
San-Carlos.  . 
Qiiirihue  .  . 
Bilbao.   .  .   . 


Concepcion.  .  .  . 
Talcahnano  .... 
Sanla  Jiian'a.  ... 

Los  Angeles 

San-I.uis  Gonza»a 

Chilian 

La  Florida    ... 


Valdivia  . 
La  Union  . 
Oiorno.  ,  , 


San-Carlos. 


3  000 
1  800 
3  000 

oOOO 
800 

5  000 
8ilO 
50IJ 

1  500' 
800 

2  im 

I 
8  000 
2  000 

800 
1  500 

50O 
4  000 

1  200 

2  000 

300' 
1  000 

3  500 


(  100  ) 

OBSERVATIONS. 

II  n'est  pas  inutile  de  faire  observer  que  le  Chili  s'etend,  au  nord, 
jusqu'au  Paposo,  ferme  situee  presque  au  milieu  du  desert,  par  24° 
3o'  ou  2f)°  de  latitude;  qu'au  sud  de  Cliiloe  le  terrain,  jusqu'au  cap 
Horn,  n'est  habite  f|ue  par  des  Indiens;  qu'au  detroit  de  Magellan, 
pres  le  port  Famine,  il  existe  une  petite  colonie  cliilienne  d'une  tren- 
taine  de  families,  fondee  en  i843,  ayant  pour  chef  un  gouverneur, 
et  portanl  le  nom  de  Colonie  de  Maqellan  ;  et  enfin,  que  la  republique 
de  la  Plata  proteste  eontre  I'occupalion  de  cette  colonie  par  les  Chi- 
lens,  attendu  qu'elle  est  situee  a  lest  des  Cordilleras. 

Le  recensement  d'apres  lequel  Ics  populations  soiit  donnees,  dans 
le  tableau  d'autre  part,  a  eie  fait  en  i832,  mais  d'une  maniere  tres- 
imparfaile,  vu  la  graude  dispersion  des  habitants  el  IVsprit  de  de- 
fiance qui  les  anime;  aussi,  sauf  Santiago,  capitate  de  la  province  de 
ce  nom  et  de  tout  le  Chili,  oii  les  recherches  ont  ete  plus  faciles,  on 
peut  hardiment  augmenter  ces  chiffres  d'un  quart ,  peut-etre  meme 
d'un  tiers.  En  outre,  depuis  i832,  la  population  s'cst  considerable- 
ment  augmentee.  Dans  cette  population  ne  sont  point  compris  les 
Araucans  et  quelques  autres  tribus  iridiennes  independantes,  qui  peu- 
vent  s'elever  en  totalite  de  60  a  1 00  000  environ. 

Presque  tous  les  geographcs,  meme  les  plus  modernes,  divisent  le 
Chili  en  huit  provinces  seulement,  savoir  :  Cotfiiimbo,  Aconcagua, 
Santiayo,  Colchagua,  Maule,  Concepcion,  yaldivia  et  Chiloe,  a  I'ex- 
c.eption  de  M.  Eugene  BaIbi,  qui,  dans  ses  Nuovi  elementi  di  Geo- 
tjrafia,  Turin,  i852,  lui  en  accorde  neut.  Tous  flxcn^  arbitrairement 
sa  superficie  :  les  uns,  a  170000;  les  autres,  a  175000  milles  carres 
anglais ;  d'autres,  enfin,  a  44°  000  kilometres  carres,  ou  bien  a  337  000, 
y  compris  I'Araucanie,  et  a  325  000  sans  I'Araueanie.  Les  differences 
)ie  sont  pas  moins  considerables  cu  ce  qui  conccrne  la  population. 

La  premiere  ville  de  la  colonne  des  villes  est  la  capitale  de  la  pro- 
vince. Quant  a  la  population  des  villes,  je  dois  faire  observer  qu'elle 
est  loin  d'etre  exa(;te,  et  c'est  par  ce  motif  que  nous  I'avons  appele'e 
population  approximative ;  les  chiffres  donnes  n'ont  d'autre  but  que 
celui  de  faire  apprecier  I'importance  relative  de  chacune  de  ces  villes. 
La  province  de  Chiloe  n'a  guerc  que  des  habitations  isolees. 


(  101  ) 


Actes  tic  la  Soeiete. 

Proces-verbaux  iBes  seances,  Oiivrases 
offerls,  etc. 


PRiSIDENCE    DE    M.   JOMARD. 


Proces-7>erbal  de  la  seance  chi  9  jnni'ier  1852. 

Le  proems -vei'bal  de  la  derniere  seance  est  lu  et 
adopts. 

Le  ministre  de  I'instruclion  publique  r^pond,  le 
30  decembre,  a  la  lettre  que  le  president  de  la  Com- 
mission centrale  lui  avail  ^crite  le  30  du  mois  prece- 
dent. II  est  favorablement  dispose  pour  la  Societe  de 
geogi-apbie,  et  feia  tout  ce  qui  depend ra  de  lui  pour 
encourager  ses  travaux. 

Le  president  annonce ,  a  celte  occasion,  qu'il  a  fait 
auprfes  des  niinislres  de  la  marine,  de  la  guerre,  ties 
affaires  ^Irangeres ,  et  du  commerce ,  des  demarcbes 
semblables,  et  il  a  lieu  d'esperer  qu'elles  seronl  bien 
accueillies. 

M.  le  general  Morin  rappelle  au  secretaire  genera] 
de  la  Commission  cenlrale,  par  sa  lettre  du  20  de- 
cembre, celle  qu'il  lui  avail  ^crite  le  8  fcvrier  prece- 
dent, pour  lui  transmettre  les  13"  cl  14*  livraisons  de 
la  Nouvelle  Carte  de  France,  et  le  prie  d'on  signer  un 
r^c^piss6,  pour  6lre  joint  aux  pieces  de  comptabilite. 
En  Iransmettant ,  le  28  decembre,  a  M.  le  g^n^ra! 
Morin,  le  rdc^pisse  qu'il  a  demand^,  le  secretaire  ge- 


(  102  ) 

neral  a  cru  devoir  lul  faire  observer  que,  le  8  f^vrier, 
il  avait  accuse  reception  des  doiix  livraisons  ci-dessus 
m3nlionn(5es,  et  offert  a  M.  le  dirccteiir  du  d^pot  de  la 
guerre  les  remerciments  dc  la  Soci^te  de  geographie. 

M.  le  president  de  la  Commission  centrale  donne 
connaissance  d'une  leltre  ocrite  de  Londres  par 
M.  Ahsbel -Smith ,  ancien  charge  d'affaires  du  Texas 
a  Paris  et  a  Londres,  et  menibre  de  la  Soci^t^  ,  au 
sujet  du  meat  biscuit,  ou  biscuit  de  viande,  et  de  la 
medaille  qui  a  6le  d^cern^e,  lors  de  V Exposition  iini- 
i'erselle,  a  I'inventeur  de  celte  substance  alimcnlairo 
propre  a  etre  port^e  facilemont  en  voyage. 

Par  une  lettre  dalce  de  Saint -Petersbourg ,  18  = 
30  octobre  1851,  M.  Longuinod'annonce  au  secretaire 
general  qu'une  absence  dc  plus  de  six  mois  I'a  etn- 
peche  de  repondre  aux  demandes  que  celui-ci  lui  avait 
faites  les  14  mars  et  23  juin.  II  regrette  de  ne  pouvoir 
lui  envoyer  en  cc  moment  la  traduction  des  articles 
liiihlies  en  languc  russe  par  M.  Blaremberg;  mais  il 
aura  soin  de  le  tenir  au  courant  des  travaux  du  conseil 
de  la  Soci^tc  imperiale  russe  dc  geographie. 

Le  secretaire  gc^neral  communique  la  liste  des  ou- 
vrages  offerts  a  la  Societe,  en  ialsant  observer  que  les 
editeurs  du  Litermy  World,  de  New- York,  ont  omis  de 
faire  parvenir  le  n"  249  de  ce  journal;  il  sera  r(?!clam6. 

M.  le  chevalier  de  Paravey,  pr«^senl  a  la  seance,  de- 
pose sur  le  bureau  deux  caiques  tires  de  \ Encyclopedic 
chinoise  et  de  V Encyclopedic  japonaise,  et  repri^sentant 
des  hommes  a  queue,  Apres  avoir  rappele  ce  qui  a  ete 
ecrit  a  ce  sujet  par  M.  de  Castelnau,  et  avant  lui  par 
d'autres  voyageurs,  M.  de  Paravey  soumet  a  la  Com- 
mission quelques  observations  sur  cette  singuliere  race 


(  103  ) 

d'homines,  donl  ii  seinble  aclmetti'c  I'existence,  en 
clonnant  cles  informations  siir  les  differentes  contrees 
ou  die  a  die  et  est  encore  otablie.  A  catte  occasion , 
M.  Anloine  d'Abbadie  soumet  a  la  Commission  quel- 
ques  observations,  et  fait  connaltre  I'opinion  repandue 
en  Abyssinie  sur  les  hommes  a  queue  et  surquoielle 
se  fonde.  MM.  de  Paravey  et  d'Abbadie  sont  invites  a 
r^diger  leurs  observations  par  ^crit  et  a  les  transmettre 
au  comile  du  Bulletin. 

Le  secretaire  general,  redacteur  en  cbef  du  Bulletin^ 
annonce  a  la  Commission  que  I'^tat  de  la  sant6  de 
M.  Alfred  Maury,  secretaire -adjoint,  et  membre  du 
comile  du  journal  de  la  Sociele,  ne  lul  permet  pas  de 
se  livrer  a  des  travaux  continus;  il  propose  en  conse- 
quence, et  d'accord  avec  M.  A.  Maury,  de  nommer  a  sa 
place  M.V.  A.  Malte-Brun,deja  avantageusemenl  connu 
de  la  Societe,  et  dont  il  croit  inutile,  par  consequent, 
de  faire  connaitre  les  litres  :  il  I'a  deja  cboisi  pour  un 
des  collaboiatcurs  dans  la  redaction  du  Bulletin,  d'ac- 
cord avec  MM.  Daussy  et  Sedillot.  Celte  proposition  est 
mise  aux  voix  et  adoptee. 

Le  meme  communique  a  la  Commission  les  nou- 
velles  officielles  recues  en  Anglotcrro  sur  I'expedilion 
dans  I'Afiique  centrale.  La  dorniere  du  docteur  Bartb, 
qui  les  contient,  est  dat^e  de  Kouka,  21  aout,  et  est 
post^rieure,  par  consequent,  de  dix  jours  aux  com- 
munications dont  il  a  ete  donne  connaissance  a  la 
Commission  dans  sa  seance  du  21  novembre  dernier. 
A  cette  (ipoque,  le  savant  voyageur  faisait  des  prepa- 
ralifs  pour  se  rendre  dans  Ic  Borgmi  (1). 

(i)  Voyez  l« /?u//e(i;i  lie  (lecetnbre  i85i,  4"  sihie,  t.  11,  p.  4<J9- 


(  10/1  ) 

Apres  celle  lecture,  M.  Jomard  prend  la  parole  el 
explique  le  motif  qui  a  fail  donner  par  Burckhardt  ce 
noni  de  Borgou  au  Ouaday.  Le  Borgou  est  un  pays 
dislinct ,  au  iiord  du  Ouaday,  et  dont  la  tribu  des  Te- 
bous  (Tibboo  ou  Touboii),  la  plus  voisine,  lire  son  nom: 
on  les  appelle  Toubon-Borgou  pour  les  dislinguer  des 
Toubou-Towkman  et  des  T ouboii- Rechdd .  Ces  tri])us, 
qui  occupent  le  desert  entre  le  Ouaday  et  Audjelah, 
sont  le  plus  souvent  en  guerre  ;  elles  arretent  les  voya- 
geurs  jusqu'a  intercepter  les  caravanes  qui  se  rendeni 
a  Benghazy,  ou  bien  elles  les  ranconnent  en  leur  ca- 
chant  les  puits.  Si  M.  Barth  revenait  a  la  Mediterran6e 
par  cette  voie,  il  nous  ferait  connailrc  un  pays  presque 
enti^rement  ignore,  et  sur  lequel  on  n'a  d'autres  no- 
tions que  ce  qu'en  a  dit  le  clieykh  Mohammed  el -Tounsy 
dans  le  Voyage  au  Ouaday,  recomment  public  (1). 

La  Commission  centrale,  ayant  arrele  que  le  renou- 
vellement  des  membres  de  son  bureau  aurait  lieu  dans 
sa  prochaine  seance  du  29  Janvier,  M.  Noirot ,  agent 
de  la  Society,  est  invite  a  informer  de  cette  decision  les 
differents  membres  de  la  Commission. 

PB^SIDENCE  DE  MM.  JOMARD  ET   CUIGNIAUT. 

Proces- verbal  de  la  seance  du  23  jatwier  1852. 

Lc  proems -verbal  de  la  derni^re  stance  est  lu  et 
adopts. 

M.  Poulain  de  Bossay,  membrc  de  la  Commission 


(i)  Vojez  le  Bulletin  de  tle'ctinliic  i85i,  4'  si-rie,  I,  II,  p.  4oq  ct 
suiv. 


(  105  ) 
centrale,  annonce,  par  sa  lettre  du  23  Janvier,  que  son 
^tat  de  nialadie  rerapfechera  de  prendre  part  aux  tra- 
vaux  de  la  Commission ;  il  en  temoigne  lous  ses  re- 
grets. 

M.  Araed^e  Moure  ,  medecin  fran^ais  en  ce  mo- 
ment, demande,  par  sa  lettre  du  2  octobre,  6crite  de 
Cuyaba,  capitale  de  la  province  de  Mato-Grosso,  dans 
le  Br^sil ,  que  le  litre  de  correspondant  de  la  Soci^l^ 
soil  accords  a  M.  Auguste  Leverger,  president  de  la 
province,  represente  par  lui  comme  un  savant  aussi 
modeste  qu'erudit;  etil  ofTrederesoudre  les  questions 
qui  pourraient  lui  etre  adresst^es  sur  le  pays  qu'il  ha- 
bile. En  rdpondant  a  M.  A.  Moure,  on  lui  fera  con- 
nailre  les  dispositions  du  reglement  de  la  Society,  et 
on  I'invitera  a  nous  communiquer  officieusement  les 
informations  qu'il  a  pu  ou  pourra  recueillir  sur  la  pro- 
vince du  Br^sil  qu'il  habile,  etc. 

M.  E.  G.  Squior,  savant  americain  ,  ancien  charg6 
d'affaires  des  Elats-Unis  dans  le  Nicaragua,  offre  a  la 
Societe  plusieurs  cartes  descriplives  de  cet  Etat,  accom- 
pagnees  d'un  extrail  de  ses  observations  a  son  sujet.  II 
annonce,  par  sa  lettre  datee  de  Paris  le  20  Janvier  cou- 
rant,  qu'il  serait  charm^  d'apprendre  que  la  Societe  a 
juge  convenable  de  faire  usage  de  ces  documents. 

M.  Jomard  fait  connaitre  que  ,  s'6tant  adrc  sse  au 
R.  Ignace  Knoblecher,  pour  avoir  quelques  details  sur 
son  voyage  au  Nil  Blanc  superieur,  par  I'interm^diaire 
d'un  de  ses  compatrioles,  il  en  a  re^u  quelques  docu- 
ments dont  il  donne  communication.  II  en  a  ri'dige  un 
extrait  dont  11  donne  lecture,  et  il  met  ensuile  sous  les 
yeux  de  la  Commission  des  fragments  de  cartes  rela- 
tives aux  environs  du  mont  Logwek.  Sur  la  demande 


(  106  ) 

de  M.  d'Abbadie  exprimant  le  desir  qu'on  public  oes 
dcssins,  M.  Joinard  annonce  qu'il  reinollra  en  inSnie 
lemps  les  details  dossincs  par  noire  compalriote 
M.  d'Arnaud  velatifs  aux  localiles  voisinos. 

Le  secretaire  general  donno  lecture  de  la  lisle  des 
ouvrages  oflorts. 

M.  Jomard  ,  prtltsident  de  la  Commission  ccntralc  , 
donne  lecture  d'un  compte  rendu  relatif  i\  la  distribu- 
tion des  graines  envoy^es  de  Chine  par  M.  do  Montigny, 
consul  de  France  h  Shang-Hai,  et  depose  sur  le  bureau 
toute  la  correspondance  qui  a  iile  tenue  a  cette  occa- 
sion ,  ainsi  i]ue  les  rec(^pisses  des  presidents  des  So- 
ci6tes  d'horliculture,  des  directeurs  des  pt^pinicres, 
ferines-mod^ies  et  jardin  d'acclimatalion.  —  Renvoi 
au  comite  du  Bulletin. 

M.  Jomard  communique  une  lellro  de  M.  Belin , 
chancelier  du  consulat  du  Caire,  en  dale  du  h  Janvier 
conrant,  annoncant  la  decouverl(>,  par  M.  Mariette  , 
aupr^s  du  S(^rapeum,  a  Memphis,  do  souterrains  pha- 
raoniques,  ou  Ton  a  irouve  vingt-huit  sarcophages  gi- 
gantesques  destines  a  recevoir  les  boeufs  sacr^s. 

M.  le  secretaire  g^n^ral  annonce  la  perte  que  la  So- 
ci6l6  vient  de  faire  dans  la  personne  de  M.  le  colonel 
Poinsett,  qui  vient  de  mourir  aux  fitats-Unis.  C'etail 
un  des  correspondants  les  plus  inslruils,  les  plus  z(M6s 
et  los  plus  gen^reux,  el  la  Sociele  iui  doit,  entre  autros 
hoinmagcs,  celui  du  bel  ouvrage  du  lieutenant  Wilkes, 
olTert  derni6rement  par  Iui.  M.  do  la  Roquolte,  so  pro- 
posant  de  consacrer  une  notice  a  la  niemoire  de  ce 
correspondant  distingu^ ,  reunit  des  inat(^riaux  a  cet 
on'ot. 

On  precede  au  scrutin  pour  le  renouvellomenl  du 


(  107  ) 

bureau  de  la  Commission  rentrale;  les  membres  dont 
les  noms  suivent  ont  et6  elus  pour  I'annee  1852  : 

President :  M.  Guigniaut. 
Vice-presidents  :  MM.  Jomard  et  Daussy. 
Secretaire  general :  M.  de  la  Uoquette. 

M.  Guigniaut,  nouveau  president  de  la  Commission 
centrale,  adresse  ses  remerclments  a  I'assembldie;  il 
fera  tout  ce  qui  dependra  de  lui  pour  activer  les  tra- 
vaux  de  la  Soci^te,  auxquels  il  contribuera  personnel- 
lement.  M.  Guigniaut  olFre  ensuile  a  M.  Jomard  ,  son 
pr^decesseur,  les  lemoignages  dc  reconnaissance  de  la 
Socicile,  pour  le  zele  qu'il  a  montr6  pendant  I'annee 
qui  vient  de  s'^couler. 

Sur  la  proposition  du  secretaire  general  de  nommer 
les  membres  de  la  Commission  centrale  cbarges  de 
prononcer  sur  le  prix  annuel,  il  est  decide  que  cette 
nomination  sera  faite  dans  la  prochaine  seance. 

Sur  la  proposition  du  secretaire  g^n^ral,  M.  V. -A. 
Malte-Brun  ,  deja  nomme  secretaire  adjoint,  est  ^lu 
membre  adjoint  de  la  Commission  centrale  ;  et 
MM.  Pierre-Elienne  Daussy,  employe  au  depot  de  la 
marine,  et  Louis -Hyacinlbe  Hecquard,  oRicier  de 
spahis,  sont  nonim'^s  membres  de  la  Soci^le  sur  la 
presentation,  le  premier  de  l\M.  Daussy  et  Jomard, 
et  le  second,  de  MM.  Gamier  et  Antoine  d'Abbadie. 

M.  E.-G.  Squier,  ancien  represenlant  des  l5ltats-Unis 
d'Ameriquc  dans  le  Nicaragua ,  auteur  de  plusieurs 
ouvrages  estinies,  et  enlre  autrcs  du  Serpent-Symbol, 
des  /Intiqnites  du  Mississipi,  de  deux  volumes  sur  le  Ni- 
caragua, etc.,  dont  il  a  fait  bommage  a  la  Societe,  est 
prt^sent  a  la  seance.  II  met  sous  les  yeux  de  la  Com- 


(  108  ) 
mission  cenlrale,  sur  la  Jomande  qui  lui  est  faite  par 
le  president,  iine  Vue  colorize,  sous  forme  de  pano- 
rama, de  la  contree  situce  enlre  Ic  lac  Managua  et  Ic 
port  de  Realejo,  sur  la  ligne  du  canal  interoct'-anique 
proposee  pour  la  jonction  de  I'oc^an  Allantique  el  du 
Grand  Oc^an  (oc6an  Pacifique).  En  pr^sentant  cc  pa- 
norama ,  M.  Squier  donne  des  explications  pleines 
d'interet  sur  le  mode  suivi  pour  sa  construction  ct  sur 
les  conlrdes  qu'il  represenle.  II  est  pri6  de  vouloir  bien 
remettre  a  ce  sujet  une  note  pour  le  comite  du  Buf- 
letin.  ( \  oyez  plus  haut  aux  Extraits  d'ouvrages,  Me- 
langes, etc.) 

M.  de  la  Roquette  communique  de  nouvcaux  rensei- 
gnements  sur  les  progres  de  I'exploralion  de  I'Afrique 
centralo.  Us  seront  inseres  dans  le  Bulletin. 

M.  Antoine  d'Abliadie  enlretient  la  Commission 
centrale  des  voyages  eflectu^s  dans  I'Afiique  occiden- 
tale  par  M.  Hecquard  ;  et  cet  officicr,  present  a  la 
seance,  complete  ces  informations  par  les  details  in- 
teressants  dans  lesquels  il  entre  lui-meme.  II  est  prie 
de  vouloir  bien  r^diger  une  note  pour  le  comite  du 
Bullelin. 

Le  secretaire  general,  redacteur  en  chef  du  bulletin, 
annonce  a  la  Commission  centrale  qu'il  vient  de  s'ad- 
joindre  un  nouvcau  coUaborateur,  M.  Coitambert, 
dont  la  Commission  connalt  le  zele  el  le  lalent; 
M.  le  president  le  f^licite  de  cette  acquisition. 


(  109  ) 
OUVRAGES  OFFERTS 

DANS  LES  STANCES  DES  9  ET  23  JANVIER  1852. 


TITRES. 


DONATEUBS. 


EUROPE. 


ouvnACEs. 


Atlanie  annesso...  (Atlas  annexe  au  Journal  tie 
statistique).  l"  et  second  tiiniestre.  i  B3g.  Com- 
merce exterieur  de  la  Sicile  en  1 887  et  i838. 
N°'  10  et  I  I.  2  caliiers  oLloi)g<,  broches. 

Giornale  di  Statistica...  (Journal  de  statistique, 
compile  par  les  employes  de  la  direction  cen 
trale  de  statistique  de  la  Sicile.  N°'  17  et  18. 
Palerme,  1 844-1 846).  2  broch.  in-8". 

Tavola  de'  niovimenti...  (Tableau  des  mouve- 
ments  de  la  population  sicilienne  pendant 
I'annee  i84i)-  Bioch.  in-8°. 

Tavola  de'  Circondarj...  (Table  des  arrondisse- 
ments  existants  au  1"  Janvier  i85o).  Br.  in-8' 

Genni  statistic!  suUa  popolazione  Palermilana... 
(Indications  statistiques  sur  la  jjopulation  de 
la  viile  de  Palerme,  publiees  par  Frederico 
Cacioppo.  Palerme,  l832  ).  I  vol.  in -I  a, 
broche. 

Tavola  statistica...  (Tables  statistiques  de  la  po- 
pulation de  Palerme  pour  les  annees  iSSy, 
1 838,  1841,  184a).  3  feuilles  in-fol. 

AMfeRIQUE. 

OBVnAGES. 

Inleroceanic  canal...  (Le  canal  interoceanique, 
Broch.  in-8°  de  33  pages,  extraite  d'un  ouvrage 
en  2  volumes  in -8°  intitule  :  Nicaragua;  its 
people,  scenery,  tnonuments  and  proposed  inter- 
oceanic  canal,  par  M.  E.-G.  Squier,  ancien 
charge  d'affaires  des  Etats-Unis  pres  des  r^- 
publiques  de  I'Amerique  centrale).  New-York 
et  Londres,  1  85 1. 


MM. 


Baron  Cacio 


ppo. 


Idem, 

Idem. 

Idem . 
Idem. 

Idem. 


Squie 


(  110  ) 


m 


TITBES. 


CARTES. 

Map  of  Nicaragua...  (Carle  tie  Nicaragua,  iiidi- 
quant  ses  divisions  ilepartementales  et  les  routes 
de  coiiiniunitaiion  projelee.s  entre  les  deux 
oce'ans).  i85l.  I  fcuille. 

Map  of  tlie  river...  (Carte  de  la  riviere  de  Saint- 
Jean  de  Nicaragua).  i85i.  I  feuiile. 

Map  and  sections...  (Carte  et  sections  dn  canal 
lie  Tipiiapa,  contenant  les  Inus  Managua  et 
Nicaragu.T  ;  et  la  I'laine  de  Leon,  ou  section  de 
Nicaragua,  entre  le  lao  Managua  et  le  golfe 
de  Fonseca).  i849-   '  ft'uille. 

MELANGES. 

Considerazioni  intorno...  (Conside'ralions  sur  le 
moyen  <ie  determiner  la  deviation  locale  du 
fil  a  ploinl)  et  I'erreur  quelle  iiUroduit  dans  le 
mercure  de  la  l.ititude  astrononiir|ue  et  de 
I'azimul,  par  C.isiniir  Schiavoni,  ingcnieur  du 
Bureau  royal  lopographiquc).  Naples,  l8,5i. 

Du  pays  priniilif  des  vers  a  soie,  et  du  lieu  du 
retablissement  de  la  civilisation  apres  Ic  de- 
lu{{e,  par  le  chevalier  de  Paravey.  TJroeh.  de 
7  pages  in-8°. 

Des  ossements  liumains  et  des  ouviages  de  main 
d'liomine  enfiiuis  dans  les  roclies  et  les  cou- 
ches de  la  terre,  pour  servlr  a  r'clairer  les  i  ap- 
ports  de  {'arclieolcgie  et  de  la  gcologie;  par 
M.  Alfred  Maury.  Paris,  i852.  Broch.  in-8". 

M^MOIRES   DES  S0CIETE5  SAVANTES  ET  JOUnNAUX. 

Fraitfais. 

Annates  du  commerce  exterieur.  Octobre  i85t. 

Nouvelles  annates  des  voyages.  Octobre -no - 
vembre  i  85  I . 

Bevue  coloniale.  Novembre  et  decembre  i85i. 

Journal  des  missions  evangeliqnes.  Dee.  iS.ll. 

Annalcs  de  la  propagation  d(^  la  foi.  Janvier  i  fiFil. 

Bulletin  de  la  Sociele  centrale  d'agiiculture  du 
departeuient  de  la  Seine-lnferieure,  t.  IV, 
a'  cah.  Rouen,  i85l.  bi-8*.  I 

Bevue  de  I'Orient.  Octobre  i85l.  I 

Journal  d'education  populaire.  Novembre  i85i. 


DONATEURS. 


MM. 
Squier. 

Idem. 
Idem. 


FreJ.  Schiavoni. 


Chev.  de  Paravev. 


Alfred  Maury. 


Ministre  du  comm. 
Les  editeurs. 

Minist^re  dela  mar. 

Les  editeurs. 

Idem. 

Soc.  ccntr.  d'agric. 

de  la 

Seine-Inferieuie. 

Les  editeurs. 

Idem. 


(  111  ) 


TITRES. 


DONATEURS. 


Anglais. 

The  churcli  missionary  intelligencer.  N"'  d'oc- 
tobre,  novembre,  decembre   i85l,  et  Janvier 

1  852.  In-P)0.  Londres. 

Busses. 

Memoires  de  TAcademie  des  sciences  de  Saint- 
I'etersbourf;,  sciences  malhematiques  et  phy- 
siques, t.  IV,  3'  et  4°  livr.  Saint-Petersbonrfj, 
1849  et  l85o.  -i  vol.  in-4°. 

Memoires  presentes  a  I'Acndeniie  imperiale  des 
sciences  de  Sainl-Petersbourf;  par  divers  sa- 
vants et  lus  dans  ses  assemblees,  t.  VI,  4*^,  5* 
et  6'  livr.  Saint-Petersbourg,  1849  et  i85i. 

2  vol.  in-4°. 

lleciieil  des  actes  des  se'ances  publiqncs  de  I'Aca- 
deinie  imperiale  des  sciences  de  Saint-Peters- 
boiirjj,  tenner  le  28  decembre  1847  ^'  ^9  ^^' 
ceinbre  1  848.  Saint-Petersbodrg.  1849  i  vol. 
in-4". 

Bulletin  de  la  classe  historico-pbilologique  de 
I'Academie  imperiale  des  sciences  de  S;iint- 
Petersboutg,  t.  VI,  1849;  t-  VII,  i85o;t.  VIII, 
1 85 1.  Saint-Pe'tersbourg.  3  vol.  in-4°. 

Allemaiids. 

Monatsberichl...  (Journal  mensucl  des  actes  de 
la  Societe  pour  la  cnnnaissance  du  globe  de 
Berlin,  re'dige  par  le  doclcur  T.  E.  Gumpieclu. 
Nouvelle  serie.  VIII'  volume.  Mai  i85o-i85l, 
avec  5  planches  lithographiees,  i  vol.  in-8°  de 
xxii-320  pages.  Berlin,  i85i. 

Ame'iicains. 

The  literary  World.  N°'  25o,  aSi.  i5  et  22  no- 
vembre i85i.  (Manque  le  n°  2^g.)  New-York. 
ln-4°. 

Bresiliens. 

Revisla  trimensal...  (Revue  trimestrielle  d'histoire 
et  de  geographle.  2''  serie,  n°'  1  a  17  (1846- 
i85o),  plus  i3  numeros  complementaires  des 
annees  anterieures.  Rio-Janeiro. 


MM. 

Les  editeurs. 


Acad,  des  sciences 

de 
Saint  -  Petersbourg. 

Idem. 


Id€ 


Soc.  ge'ographique 
de  Berlin. 


Les  editeurs. 


Idem. 


I 


I 


•  trtf/ViS 


*'"'SeHeJiu//flm  dL-Janvicr]8.i2 


Dil.th7brrvs  L^  r  'Vv 


tf<ni/Huiff Orimiah da Mrridim  tie Pivi^.      ^j 


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V'SrrifBalMm  iej„„,^jgi2 

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YELL  F,       U  O  I, 


CARTE    ROVTIEUE 


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Thrre  d^  ^ui/tt 


des  Pnqucbois  a  Vapeur     '^  -  '';i^  ^rth.  ne  la  Kcrhetvhe 


--/  traoers 


Hoiiie.^  e/ipnyet. 


fi'" 


£££ 


I.Kim,    ftitr^Mjift^s 
I.<if  fan      '--f 


JMh.deFmwifUPmin  r.ifuron  fi 


BULLETIN 


DE    t\ 


SOCIETE  DE  GEOGRAPHIE. 

FfiVRIER   1852. 

lleiiioireis, 
Moticeis,  Documents  originaiix,  etc. 


DE 

L'EXPLORATION   DU    MISSISSIPI, 

ET   EN   PARTICULIER 

DE   LA 

DECOUVERTE  DES  SOURCES  DE  CE  FLEUVE, 

DAI'IIKS    M.    II.   Sr.llOOLCnAFr, 

PAR   M.    DE   LA  ROQUETTE. 


n  paralt  resulter,  do.s  documenls  archeologiquos  pu- 
blies  par  M.  Ternaiix-Compans,  que  Pamphile  Narvaez, 
contemporain  et  rival  do  Cortis,  clicrcliant  a  former 
un  (itablissement  siir  la  cole  occidentale  de  laFJorlde, 
ful  le  premier  Europeen  qui  apercut  le  Mississipi,  et  on 
d^couvril  rernboucliure  au  mois  de  novembro  1527. 
D'aulres,  cependant,  altribuent  cette  decouverte  a  Fer- 
nan  1  de  Soto,  qui  aurail  alteint  en  15i  i  Ics  rives  de  ce 
grand  fleuve,  auquel  les  Espagnols  donnerenl  le  nom 
de  Sniiit-Esprit,  que  les  Indiens  appelaient  Chncagua, 
el  qui  coulait,  suivant  eux,  non  loin  de  la  ville  de 

in.    FivRIER.    1.  8 


(  114  ) 

Chiscn  (Qufzqii/z,  suivant  Viedma),  pros  do  la(]iiolle  il 
avail  une  largeur  d'unc  lleiie  ol  iine  profondeiir  de 
vingt  ])rasses. 

Fernand  de  Solo  tlescendit  plus  lard  lo  Mississipi 
jusqu'a  son  confluent  avcc  la  riviere  Rouge.  Apr6s  sa 
mort,  arrivee  en  1552,  ses  compagnons,  poursuivis 
par  les  Indicns,  arnv6rent,  en  suivant  le  cours  do  ce 
fleuve,  a  son  embouchure,  dans  le  golfe  du  Mcxique. 

Plus  d'un  siecle  s'ecoula  sans  qu'on  puisse  citer  de 
nouvelles  explorations  du  Mississipi.  Les  Francais  du 
Canada  avaient  bien  appris  des  indigenes  tju'au  voisi- 
noge  des  grands  lacs  6taicnt  les  sources  d'un  grand 
fleuve  qui  coulait  vers  le  sud  a  travers  de  superbcs 
forets;  mais  ce  ne  fut  qu'en  1673  que  deux  mission- 
naires  de  cette  nation,  Jolyel  ct  Marquette,  partis  de 
Quebec,  le  descendirent  jusqu'au  confluent  de  I'Ar- 
kansas.  Plus  tard  (1(582),  un  autre  Francais,  La  Salle, 
qu'accompagnait  le  missionnuire  recollet  Louis  Hen- 
nepin, le  parcourut  presque  tout  entier,  et  iuiposa  au 
pays  qu'il  avail  visile  le  noni  do  Louisiaiie  :  le  fleuve  a 
longlemps  porle  celui  do  Saint-Louis.  Presque  a  la 
nieme  epoque,  le  ])aron  de  la  Hontan,  donl  Schoolcraft 
altribue  par  erreur  les  ti'avaux  au  moine  delVoque 
Gueudcvillc,  qui  n'a  pas  visitd;  I'Anu^rique,  vit  Ic 
Michillimackinac,  gagna  le  Mississipi  par  le  Wisconsin, 
ct  le  descendit  ensuite  jusqu'a  I'Oliio  (i). 

(i)  Charlevoix  considcre  comme  une  ficiion  unc  partie  au  moins 
tics  voyages  ile  la  Hontan,  dont  Eyries,  bon  juge  rn  ccUe  maticre, 
defend  les  travaus.  C'est  a  partir  seulement  de  ce  qui  concerne  le 
missionuaire  francais,  que  nous  avons  traduit,  en  I'abregoant  quel- 
quefois,  une  notice  de  Selioolcraft,  insi'ice  dans  un  ouviage  du  plus 
haut  interet,  dont  le  savant  americain  a  reuni  et  prepare  les  mate'- 


(  115  ) 

Lc  jesuite  Charlevoix,  qui  parcourut  la  contr^e  dans 
une  visite  g^nerale  des  missions  IVancaises ,  passa  en 
1720,  par  la  route  de  rillinois,  des  lacs  au  Mississipi, 
qu'il  dcsccndit  a  son  tour  jusqu'a  son  cmboucliure.  II 
fit  des  observations  judicieuses  et  utiles  surles  scenes 
ct  Ics  sujets  qui  s'oflVaient  a  sa  vue,  et  temoigna,  rela- 
tivement  a  la  fameuse  operation  des  mines  du  Mis- 
souri, des  doutes  qui  malheureusement  ne  se  realise- 
renl  que  trop  vite. 

Lorsque ,  par  le  traite  de  1763,  le  Canada  eut  ete 
abandonne  a  I'Angleterre ,  plusieurs  avenluriers  do 
cette  nation  entrerent  dans  le  vaste  champ  d'explora- 
lions  vers  les  regions  de  I'ouest.  Carver  fut  le  seul,  dans 
le  noniljre  de  ceux  qui  nous  sont  connus  par  leurs  pu- 
blications, qui  poussa  ses  voyages  jusqu'au  Mississipi 
superieur.  Les  travaux  de  ce  voyageur  n'ont  peut-elro 
pas  etc  apprecies  a  leur  juste  valeur.  II  avail  forme 
Taudacieux  dessein  de  traverser  le  continent  jusqu'aux 
rivagtis  de  I'ocean  Pacifique,  ce  qu'il  croyait  pouvoir 
executer  en  suivant  les  chahies  qui  dominent  le  Missis- 
sipi. II  alleignit  le  Michiliimackinac  dans  I'et^  de  1766, 
et,  poursuivant  son  chemin,  arriva  le  3  septembre  a  la 
haic  Verte  (Green-Bay),  et,  par  I'ancienne  route  fran- 
gaise,  des  vallees  du  Fox  et  du  Wisconsin,  a  Prairie 
du  Chien.  A  cet  endroit,  les  h'afiquants  avec  lesquels 

riaux,  sous  la  direction  du  Bureau  des  affaires  indiennes,  et  qui  a  ete 
publie  sous  ce  lilie  :  Historical  and  statistical  iitfonnalion  respecliiiti 
the  hiitory,  condition  and  prospects  of  the  Indian  tribes  of  the  United- 
States.  Pliiladelpliio,  1 85 1  La  Societe  de  geographre  doit  I'exeniplaire 
qui  ni'a  servi  a  la  bienveillance  de  M.  L.  Lea,  commissaire  pnur  les 
affaires  indiennes;  il  en  sera  rendu  prochainement  un  compte  detaille 
dans  le  Bulletin.  D.  L.  B. 


(  116  ) 

il  avail  voyag6  prircnt  lours  postcs  d'hiver.  II  achela 
alors  un  canot ,  et ,  avec  deux  iiommes ,  un  Cana- 
dien  ct  un  M(mawk,  rcmonla  la  rivit're,  alteignil  Ics 
chules  du  Sainl-Aiiloinc  le  17  novembre,  ct  s'cileva  au- 
dessus  dc  ce  point  jusqu'a  la  riviere  Saint-Francois, 
point  qu'Hennepin  avail  alleint  du  temps  de  La  Salle. 
Ce  ful  le  torme  de  son  voyage.  II  n'etendit  done  point 
ie  chainp  des  decouvertes  vers  le  nord,  dans  celte  direc- 
tion ,  quoique  son  exploration  post(5rieure  du  Saint- 
Pierre  el  des  rives  seplculrionales  du  lac  Supdrieur 
place  son  nom  parmi  ceux  qui  ont  recule  les  frontiferes 
de  lageographie  de  I'Amerique  (1). 

Carver  avail  mal  juge  les  difficultds  d'unc  entreprise 
aussi  serieuse  que  celle  d'un  voyage  parterre  a  Iravers 
le  continent,  ou  les  moyens  dont  il  pouvait  disposer 
pour  son  accompllssement,  probablement  les  deux 
objets;  car  nous  le  trouvons,  au  mois  de  juillet  de 
I'annee  suivante,  naviguant  sur  le  lac  Superieur.  II  se 
rendil  peu  apr^s  a  Londres  pour  soumeltre  son  plan 
au  gouvernement;  niais  il  ne  put  le  faire  adopter.  Les 
libraires  n'accueillirenl  pas  sa  relation  avec  plus  dc 
faveur  :  on  I'accusait  en  ellet,  avec  quelque  raison, 
de  s'etre  monlre  souvent  peu  judicieux  ,  et  d'avoir 
copie  ce  qu'il  disail  des  nicciirs  et  des  coutumos  des 
Indiens  dans  les  ouvrages  de  Cbarlevoix,  d'Adair,  de 
la  Uonlan,  etc.,  sans  i'aire  connaitre  les  sources  dc  ses 
eniprunts.  Carver,  d^sesp6r6,  mourut  a  Londres  dans 
la  dernicre  niisere.  II  est  le  seul  voyageur  venant  des 
colonies  anglaises  qui  se  soil  aventurd'  dans  la  region 

(l)  II  p.'iiaitrait  ce[)endant  qu'il  ii'a  pas  remoiitc  le  Mississipi  plm 
haut  que  Ic  Pere  Hennepin,  et  que  peut-etrc  il  n'est  pas  allc  a  I'ouest 
plus  loin  que  la  Hontan.  D.  L.  R. 


(  117  ) 

du  haul  Mississipi ,  ct  le  noin  (.{'Oregon,  dont  I'origine 
est  incertaine ,  parait  pour  la  premiere  fois  dans  la 
relation  de  ses  voyages.  G'est  aussi  probablement  a  lui 
qu'il  faut  remonter  pour  le  noni,  sans  doute  mal  inler- 
pr6te ,  de  riviere  de  Rum,  important  cours  d'eau  pre- 
nant  sa  source  dans  un  grand  lac  appele  Mille-Lac 
par  les  Frangais,  situe  a  I'oLiest  do  I'extr^mite  du  lac 
Superieur.  Ce  cours  d'eau  entre  sur  lo  cote  gauclie  ou 
oriental  du  Mississipi,  au-dessus  des  chutes  du  Saint- 
Antoine. 

L'expedilion  de  Pike  vient  ensuite  dans  I'ordre  des 
decouverles.  L'acquisition  de  la  Louisiane,  faite  en 
1803,  avait  rendu  ce  pays  un  objet  d'un  juste  int^rdt 
pour  le  gouvernement  des  Etats-Unis  pour  la  fixation 
de  son  extreme  limite.  Lcs  instructions  necessaires 
pour  explorer  la  grande  riviere  de  I'ouest,  appelc^e 
maintenant  Columbia,  s'etendant  jusqu'a  I'ocean  Paci- 
fique,  furenl  confiees  au  general  Wilkinson  et  execu- 
t^es  par  Lewis  et  Clark.  Le  lieutenant  Pike ,  dont  on 
avait  fait  choix  pour  remonter  el  decrire  le  Mississipi 
jusqu'a  sa  source,  quitta  Saint-Louis  le  9  aout  1805, 
deux  mois  beaucoup  trop  tard  pour  pouvoir  atteindre 
la  source  du  fleuve  avant  la  saison  du  froid  le  plus 
intense.  Aux  cliutes  du  Saint-  Antoine,  qu'il  vit  le 
26  septembre,  il  reconnut  que,  dans  un  inlervalle  de 
260  poles  [1300  metres  (I)],  Ic  niveau  de  la  riviere 
s'abaissait  de  58  pieds;  une  chute  prt^sentait  une  dif- 
ference perpendiculaire  de  16  pieds  et  demi.  Passant 
le  Saint-Francois,  point  le  plus  extreme  atteint  par  ses 
pr^dccesseurs  en  decouverte,  Pike  poussa  avec  la  phis 

(i)  Le/)o/e  =  5™,3. 


(  118  ) 

grancle  clifficult6  ses  bateaux  par-dcssus  de  nombreux 
rapides  en  franchissant  les  chutes  du  Painted-Rock, 
distance  de  233  milles  et  demi  au-dessus  des  chutes 
du  Saint-Antoine,  et  600  au-dessus  de  la  jonction  du 
Wisconsin,  d'a|)r6s  ses  estimations  personncllcs  faites 
jour  par  jour  (1):  ce  hit  le  16  oclobrc  qu'il  atleignit  ce 
point.  A  ce  moment,  le  temps  vint  a  changer;  il  lomba 
bcaucoup  de  ncige  ,  les  rivieres  lurent  prises  par  les 
glaces,  ct  la  temperature  de  I'cau  baissa  tellement, 
qu'il  devinl  beaucoup  trop  pi^nible  de  continuer  a 
trainer  les  bateaux  par  dessus  des  rapides.  Pike  se  de- 
termina  alors  a  conslruire  dans  cet  endroit  un  petit 
campement  pour  y  laisser  les  bagages  les  plus  pesanls 
et  une  partie  de  ses  compagnons,  sous  la  direction 
d'un  ofTicier,  et  a  poursuivre  sa  route  a  pied. 

Le  10  decembre,  muni  de  provisions,  produits  de  la 
chasse,  et  de  tralneaux  transportables  a  bras,  il  prit 
avec  lui  une  partie  de  ses  horames,  et  marcha  en 
avant.  II  atteignit  le  lac  Snndy  le  8  Janvier  1806,  et  le 
lac  Leech  le  1"  f^vrier  suivant.  Les  cours  d'eau ,  les 
lacs  et  les  savanes  sc  trouv6rent  forlcment  pris  par 
les  glaces,  ce  qui  fut  tr^s-avantageux  pour  les  progres 
de  son  cxpddilion,  en  lui  permettant  de  s'avancer 
dans  le  pays  par  une  route  directe.  La  neige ,  qui 
avail  commence  a  tonibcr  vers  le  milieu  d'octobro , 
paralt  s'filrc  6lendue  egalement  sur  la  surface  de  la 
contree,  et  Ton  n'cut  point  a  sc  plaindro  de  son  epais- 
seur,  parce  qu'elle  permellait  de  pousser  les  trai- 
ncaux.  Pike  trouva  les  factcurs  de  la  Compagnie  du 
Nord-Ouest  en  possession  de  tout  le  pavs.  lis  avaicnl 

(i)  Pike's,  exped..  Append.,  part,  i,  p.  2G. 


(  119  ) 

forme  des  etablisscmenls  pros  clu  lac  Sandy  et  du  lac 
Leech,  el  faisaient  un  commerce  considerable  au  moyen 
de  cent  neuf  commis,  interpretcs  et  canotiers,  outre 
leurs  families.  Par  leur  intermediaire,  deux  cent  ti-ente- 
trois  balles  de  fourrures  et  de  pellelories  etalent  expor- 
tdes  annuellement,  et  les  droits  sur  les  mai'chandises 
apportees  de  ce  cote  dans  les  btats-Unis  s'dlevaient 
annuellement  a  une  somme  assez  considerable.  Pike 
fut  traite  avec  les  plus  grands  egards  par  les  agents 
etablis  au  lac  Sandy  et  au  lac  Leech.  Le  12  fevrier,  les 
facteurs  de  ce  dernier  poste  se  rendirent  avec  lui , 
dans  des  traineaux  tires  par  des  chiens,  au  lac  Upper- 
Red- Cedar,  distance  estimee  a  30  milles.  II  y  passa 
la  nuit,  et,  le  jour  snivant,  il  retourna  au  lac  Leech, 
ou  il  arriva  le  14.  Ce  fut  le  terme  de  son  explora- 
tion. 

L'exp^dition  de  Pike  nous  a  donne  les  premieres  no- 
tions Kur  cette  portion  reculee  de  ce  qu'on  appelait 
alors  liaute  Louisiane,  sur  sa  topographic  generale  et 
sur  ses  ressources.  A  son  retour,  il  ecrivit  au  general 
Wilkinson  :  qu'll  avait  voyage  a  pied  I'espace  de  sept 
cent  milles;  que  six  mois  sur  neuf,  landis  qu'il  se  trou- 
vait  dans  la  contr^e  au-dessus  des  chutes  du  Saint- 
Antoine,  la  neige  couvrait  le  terrain,  ce  qui  aurait 
empeche  de  faire  des  observations  minutieuses  sur 
I'histoire  nalurelle,  s'il  eut  ete  competent  dans  cette 
branche  des  connaissances  humaines,  et  que  le  froid 
<^lait  souvent  si  rigoureux,  que  I'encre  gelait  dans  sa 
plume,  landis  qu'il  prenait  des  notes.  Pike  a  fait  des 
observations  de  latitude  a  I'embouchurc  de  la  riviere 
Turtle,  sur  le  lac  Upper-Red- Cedar,  qu'il  place  au  hi" 
42'  40",  quoiqu'il  ne  soil  reellement  qu'au  hi"  25'  23", 


{  120  ) 

ainsi  que  M.  Nicolet  I'a  calcul(^  plus  lard,  un  I8/16.  11 
parle  do  ce  lac  «  comme  de  la  source  superieuic  (upptii 
source]  du  Mississipi,  »  et  rcmarque,  au  sujcl  du  lac 
/.eec/i,  que  «celul-ci  csl  coiisidere  conuiie  la  source 
principale,  quoique  ia  branche  winnipeque  soil  navi- 
gable a  uiie  j)lus  t;ran(le  distance  (1). 

Des  geograpbes  consid^rent  comme  la  source  d'unc 
riviere  la  branche  qui  the  ses  eaux  du  point  le  plus 
^loigne  de  son  embouchure.  Sous  ce  rapport,  ni  le 
lac  Leech,  qui  est  neanmoins  la  masse  d'eau  la  plus 
considerable  de  ce  plateau;  ni  le  lac  Lppcr  -Red- 
Cedar,  qui  n'est  qu'une  simple  expansion  du  Mis- 
sissipi, ne  peuvcnt  en  aucune  facon ,  d'apres  nos  in- 
formations acluelles,  etre  rcgardes  comme  la  source 
de  ce  culebre  cours  d'eau  (2).  Mais  Ics  employes  de  la 
Compagnie  du  Nord -Quest,  (jui  se  inonlraicnt  fort 
empresses  envers  le  lieutenant  Pike,  et  facilitaicnl  ses 
moindrcs  recherches  d'exploralion  du  lac  Sandy  aw  lac 
Leech  et  au  lac  Upper-Red- Cedar,  so  born^renl  a  hii 
fournir  toules  les  informations  qu'il  dumandail  (sans 
aller  au-devant  de  ses  questions)  ct  sans  essayer 
d'agrandir  volontairement  le  ccrcle  de  ses  connais- 
sanccs  sur  les  trails  generaux,  topograpbiqucs  el  sla- 
tistiques  du  jiays.  Que  ce  soil  la  politique  ou  tout  autre 
motif  qui  leur  dictat  cette  conduitc  reservee,  il  est  cer- 
tain que  ces  agents  d'unc  puissance  (itrangere  ne  mi- 

(1)  Exped.  de  Pike,  Append.,  port.  1,  ji.  5G.  I'liiladclpliic,  t'-Ait. 
(le  1810. 

{7.)  II  ii'eit  pas  t(nij(nns  f.K.ilt'  di;  d('(eriiiiii(  r  i|uellr  I'sl  l.i  hiiinclic 
d'uiit;  riviere  qu'on  duit  a(ipeler  sa  source  :  f'esi  line  qucslinn  ((un- 
plexe  pour  la  sululioii  de  lafjuelle  il  n'exisle  p  is  de  rej;|i."  bien  pre- 
cise. U.  L.  H. 


(  121  ) 

rent  point  sous  ses  yeux  ce  que  des  hommes  intelli- 
gents  conime  ils  I'^taient  devaient  cei'tainement  avoir 
connu,  c'est-a-dire  le  point  ou  les  points  d'ou  cette 
riviere  tirait  ses  premieres  eaux.  lis  lui  indiquerent 
comnie  d;lant  la  source  la  plus  reculee  le  Portage  Turtle 
(Turtle-Portage),  plateau  excedant  peu  ZiO  railles,  au 
nord  des  rivages  nord-est  du  lac  Upper-Red-Cedar .  En 
meuic  temps,  ils  partageaienl  I'opinion  de  M.  Thomp- 
son ,  astronome  employe  autrefois  par  la  Compagnic 
du  Nord-Ouest,  que  la  limite  nalionalc,  tracdse  a  I'oucst 
du  lac  des  Bois,  couperait  le  Mississipi;  ancienne  idee, 
fondee  sur  les  esquisses  de  la  carte  de  Mitchell,  dont 
il  parait  qu'on  faisait  usage  a  I'epoque  du  traite  defi- 
nitif  de  1783;  mais  le  lieutenant  Pike  n'^lait  pas  dis- 
pose a  adopter  cette  opinion ,  bien  qu'il  ignorat  que 
les  eaux  du  Mississipi  propre  s'epanchent  dans  le  lac 
Upper-Red-  Cedar,  a  son  extremite  ouest ,  en  partant 
d'une  hauteur  qu'on  sail  etre  maintenant  a  un  degre 
entler  au  sud  de  ce  point,  et  par  un  chenal  donl  la 
longueur  n'est  gu^i^e  au-dessous  de  200  milles. 

Le  18  fevrier  1806,  Pike  quilla  le  lac  Leech,  pour 
cfFectuer  son  i-etour;  et  le  5  mars  suivant,  il  rejoignil 
ses  compagnons  dans  le  camp  fortifi^  de  Pine-Creek, 
au-dessous  de  la  riviere  E//c,  sur  les  rives  occidentales 
du  Mississipi.  La  riviere,  commengant  a  devenir  navi- 
gable le  h  avril,  le  7  du  meme  niois  il  put  mettre  a  la 
voile,  en  descendant  le  coui's  d'eau  dans  sa  plus  grande 
pirogue;  il  fut  pousse  en  avant  par  le  courant  avec 
une  velocite  extraordinaire,  attcignit  Prairie  du  Chien 
le  18  avril,  et  relourna  Jinalement  a  Sainl-Louis  le  30, 
apr^s  une  absence  de  huit  inois  et  vingt-deux  jours, 


(  122  ) 

dont  il  avail  passe  la  plus  grande  parlic  au-dessus  dcs 
chutes  du  Saint-Anloine. 

A  parlir  de  cetto  excursion ,  I'esprit  de  decouvcrlo 
sc  ralenllt  ])cndant  douze  annics.  Dans  Ics  coiDmeii- 
cemcnls  de  1820,  le-gcneral  Lewis  Cass,  cliel"  du  pou- 
voii"  ex^culif  du  terriloirc  de  Michigan,  adressa  au  gou- 
vcrnement  un  in6raoire  pour  jiroposer  de  continuer 
les  d^couvertes  a  parlir  du  point  oil  on  ies  avail  lais- 
s6es.  line  expedition  ful,  en  consequence,  organisce 
dans  le  printemps  de  cetle  annoe ;  clle  devait  6tcndrc 
ses  investigations  sur  I'liisloire  naturelle  etsur  les  res- 
sources  du  pays,  aussi  hien  que  sur  la  topographic  et 
sur  I'etat  de  la  population  indiennc.  EUe  traversa  la 
s^rie  des  lacs  superieurs,  en  suivit  les  rivages,  et  con- 
sacra  une  allcnlion  sp^ciale  aux  mines  de  cuivre  cxis- 
tant  sur  les  hords  du  lac  Supericur.  Quittant  ce  lac  a 
son  extr^inite  occidentale,  cllc  rcmonla  la  rivi6re  Saint- 
Louis  jusqu'au  point  ou  elle  cesse  d'fitre  navigahle,  fit 
une  excursion  par  lerre  en  traversant  le  plateau  qui 
s6pare  celte  riviere  de  la  vallee  du  Mississipi,  et  attei- 
gnit  les  eaux  de  ce  fleuve  au  lac  Sandy.  La  on  trouva 
le  fort  de  la  Compagnie  du  Nord-Ouest,  mentionne 
par  le  lieutenant  Pike;  mais,  dans  Tinlervallc,  ce  fort 
etail  sorti  depuis  qua  Ire  ans  des  mains  de  cetle  Com- 
j)agnie ,  ayant  ele  achet6  en  1816,  ainsi  que  tons  los 
aulres  posies  de  celte  contrce,  par  M.  Jcan-Jacoh  Astor. 
Cehii-ci  voulait  former  une  nouvollc  sociele  en  parti- 
cipation,  sous  le  nom  de  Comj)agnie  ani(^ricainc  de 
fourrures;  mais  une  loi  du  Congr^s  dc  la  meine  anneo 
ayant  intcrdit  toute  affaire  de  celte  nature  aux  com- 
merganls  (Strangers,  Astor  fit  des  d6n)arches  pour  ob- 


(  128  ) 

tenir  que  des  citoyons  americains  coiivrissent  I'entre- 
prise  de  leurs  noms  :  elles  reslerent  sans  succfes  pendanl 
plusieiirs  annees.  En  faisant  flotter  pour  la  seconde 
fois  son  pavilion  national  dans  ces  I'egions  reculees,  et 
en  cliercliant  a  etablir  une  paix  permanente  cntre  les 
tribus  indiennes  des  Sioux  et  des  Chippewas,  le  gou- 
vernement  americain  acquit  un  grand  credit  aupres 
des  aborigenes.  C'est  de  ce  moment  que  sa  suprematie 
sur  eux  fut  incontestee. 

Le  gouverneur  Cass,  qui  conduisait  cette  expedition, 
se  determina  a  faire  du  posle  du  lac  Sandy  le  depot  de 
ses  provisions  encombrantes ,  a  y  laisser  son  escorle 
militaire,  avec  une  parlie  de  ses  canotiers  frangais,  et' 
a  s'avanccr,  avec  de  legers  canots  et  une  troupe  choisie, 
pour  remonter  la  riviere.  Considerant  le  lac  Sandy 
comrae  son  point  de  depart,  il  etait  maintenant  a  une 
distance  estimee  d'environ  200  milles  au-dessus  de 
I'endroit  ou  Pike  avait  passe  I'hiver  do  1805-1806.  On 
etait  au  mois  de  juiilet;  le  pays  offrait  I'aspect  de  la 
saison  d'et^,  avec  ses  lacs  innombrables  ,  ses  savanes, 
et  ses  terres  a  riz;  et  Ton  devait  esp^rer  que  les  eaux 
des  plateaux  seraient  suffisanles  pour  permettre  de  na- 
viguer  jusqu'a  leur  source  la  plus  reculee. 

La  troupe  d'^lite  choisie  pour  remonter  les  cours 
d'eau  s'embarqua,  le  17  juiilet,  au  lac  Sandy,  dans  des 
canots  d'uno  capacity  convenable.  Apres  deux  jours 
d'une  heureuse  navigation ,  on  atteignil  les  chutes  de 
Pitc/wgania,  ainsi  appelees  par  les  Chippewas,  a  cause 
du  portage  qu'il  est  necossaire  do  faire  a  un  coudc  de 
lerrc  forme  par  le  passage  de  la  riviere  a  Iravers  une 
formation  de  roc  quartzeux  sablonneux.  A  cet  endroil, 
la  riviere  est  tres-resserr^e ;  elle  se  conlourne  graduel- 


(  12/1  ) 

lement  dans  son  chenal,  et  s'^lanco  avec  rapidite  eten 
6curaant,  sans  chute  loulefois,  mais  en  formanl  nean- 
raoins  une  barre  qui  interrompt  la  navigation.  C'est 
au-dessus  de  cc  point  que  se  trouvc  le  niveau  du  lac 
Leech,  dont  Ic  plateau  cmnprend  de  vastes  savanes, 
des  champs  de  riz,  et  dcs  lacs,  sur  lesquels  on  pout  na" 
\ip;ucr  en  canot  la  plus  grando  parlie  dc  la  saison.  On 
passa  la  fourche  du  lac  Leech  Ic  troisiuinc  jour,  apres 
avoir  quitt(^  le  lac  Sandy .  Le  jour  suivant ,  on  entra 
dans  le  petit  lac  ^^'innipcc,  et  ensuilo  dans  la  riviferc, 
qu'on  suivit  jusqu'au  lac  Upper- Red- Cedar,  ou  I'expti- 
dition  penetra  Ic  21  aoAt.  On  cainpa  sur  le  c6l6  occi- 
dental de  I'enibouchure  de  la  riviere  Turtle  :  ce  fut  la 
le  terme  de  leur  voyage.  A  leur  retour,  nos  voyageurs 
desccndirentle  Mississipi,  dans  la  direction  des  chutes 
du  Saint-Antoine  jusqu'a  rcmbouchure  du  Wisconsin, 
et  suivircnt  cnsuile  Ics  valines  dc  celte  riviere  ol  du 
Fox,  jusqu'a  la  bale  Vcrte,  a  Chicago  ol  aux  lacs,  dont 
les  rives  furcnt  lopographiqucnionl  lov6es. 

Dans  cetto  secondc  expedition  ,  faile  par  ordre  du 
gouvernoinent  pour  determiner  les  sources  du  Missis- 
sipi ,  le  chenal  ful  d'abord  reconnu  a  partir  du  cam- 
pement  de  Pike,  aux  chutes  du  Painted-Rock,  jusqu'au 
lac  Upper-Bed-Cedar,  ou  lac  Cass,  qu'il  no  faut  pas 
confondre  avec  un  autre  lac  Bed- Cedar,  situo  au- 
dessous  du  lac  Sandy.  Les  bords  dcs  lacs  Huron , 
Michigan  et  Sup^ricur,  furcnt  topographiqucmonl  rc- 
lcv(5s  par  le  capitainc  Douglas,  ollicicr-iugonieur  dc 
TAcadouiic  de  IFcst- Point,  ainsi  quo  los  valleos  des 
rivi6res  Saint-Louis  et  Savannah,  qui  formcnt  le  lieu 
de  communication  ontre  le  lac  Supericur  el  le  lac 
Sandy,  du  haul  Mississipi.   Cette  excursion  servil  a 


(  125  ) 

faire  reconnailre  la  slruclure  geologique  et  min^rale 
du  bassin  clii  lac  Siipcricur,  et  desvastes  plaines  dilii- 
viales  reposant  sur  la  roche  pi^iinilive  ou  volcanique, 
vers  la  source  du  Mississipi,  ainsi  que  les  larges  aretes 
au  nord  des  grands  calcaires  carboniferes  et  magn«^- 
siens  du  bassin  de  ce  fleuve. 

Les  geographes  continuaient  de  croire  que  la  source 
du  Mississipi  n'etait  pas  encore  bien  fix6e.  Les  bandes 
de  Cbippewas  des  bords  du  lac  Cass  representaient 
cetle  riviere  comme  se  rendant  dans  le  lac  vers  son 
exlremite  sud-ouest,  et  y  versant  un  volume  d'eau  peu 
inferieur  en  largeur  a  sa  sortie  de  ce  meme  lac ;  ils  la 
decrivaient  comme  s'epaiichant  successivement  dans 
de  nombreux  lacs,  et  ofl'rant  beaucoup  de  chutes  et 
plusieurs  rapides  ;  ils  affirmaient  enfm  que  son  origine 
actuelle  6tait  une  nappe  d'eau  appelee  par  les  Fran- 
gais  lac  la  Biche,  ou  Elk-Lake,  situe  au  milieu  d'une 
cliaine  de  coUines  qui  separent  ses  eaux  de  celles  qui 
coulent  au  nord  dans  le  gi-and  bassin  du  lac  Winnipec 
de  la  baie  d'Hndson. 

En  1823,  les  Etats-lJnis  r^solurent  de  terminer 
cette  exploration  de  lours  domaines  septentrionaux. 
Le  major  S.  H,  Long,  de  I'armee  americaine,  enlra  en 
consequence  dans  la  riviere  Saint-Pierre,  qu'il  re- 
monta ;  puis  dans  la  riviere  P«.ouge  du  Nord  [Red-Rii>er 
of  the  North),  qu'il  descendit  jusqu'a  son  embouchure 
dans  le  grand  lac  Winnipec  j  il  cotoya  ensuite  les  rives 
m6ridionales  de  ce  lac  jusqu'au  lac  des  Bois,  ct  de  la 
il  se  rcndit  au  Sault  Sainte-Marie  par  le  lac  liain/,  ou 
de  la  Pluic,  et  atteignit  le  fort  "William,  sur  les  rives 
scptenlrionales  du  lac  Superieur.  line  longue  ligne  de 


(  126  ) 

Tcxlrfime  fronti^re  nord  de  I'tinion  dlait  done  ainsi 
ouvertc  el  d^crite. 

Ln  ^].  Beltrami,  qui  s'^tait  attache  a  I'expedition  dii 
major  Lonp:,  la  quitta  a  l'eta])lissemcnt  ^cossais  de 
lord  Selkirk,  vers  Forl-Douglas,  on  Kildunnan,  sur  la 
riviere  Rouge,  et  se  rendit  ensuite  dans  le  lac  de  ce 
nom ,  et  do  la,  par  la  route  ordinaire  dcs  trafiquanls, 
a  travers  le  plateau  du  portage  Turtle,  k  la  riviere  du 
raeme  nom;  puis  il  descendit  ce  cours  d'eau ,  et  p6- 
netra  dans  le  lac  Cass  a  I'endroit  memo  ou  I'expe- 
dilion  de  1820  avail  termine  ses  explorations.  M.  Bel- 
trami ,  dont  I'ouvrage  est  sans  aucune  valeur  sous 
beaucoup  do  rapports,  et  rempli  de  descriptions  aux- 
quelles  on  no  pent  guere  ajoulor  I'oi ,  doit  etro  nean- 
moins  considere  comme  le  premier  ecrivain  qui  ait 
decrit  la  route  do  la  riviere  Turlle.  II  nomme  Julia 
un  lac  a  la  lete  de  cetie  riviere,  apparemmenl  j)our 
pouvoir  ap[)eler  celle-ci  la  source  Julienne  du  Missis- 
sipi. 

Pendant  les  huit  annees  suivantes,  les  affaires  sur 
cctte  fronii^re  tiprouv^rent  des  complications.  En  1831 , 
le  gouvernernenl  chargea  M.  Schoolcraft  de  visitor  les 
tribus  des  Chippewas  et  des  Sioux,  occupant  le  bassin 
de  la  vallee  du  haul  Mississipi,  alin  de  mettro  un  teriiie 
a  leurs  querelles  conlinuelles,  qui  venaient  de  se  rc- 
nouveler  rdcemment ,  ct  do  rolablir  la  paix  sur  les 
frontieres.  On  lui  donna  une  escorto  mililaire,  com- 
mand(ie  par  le  lieutenant  R.  Clary.  «  Je  quiltai,  dil 
Sclioolcraft,  le  bassin  du  lac  Sup6rienr  a  Chegoiniegon, 
ou  In  Pointe,  et  remontai  la  riviere  appel^e  Mushkego 
par  les  indigenes  et  Mmwais  par  les  Francais,  jus- 


(  127  ) 
qu'au  point  oil  clle  est  separee  des  eaux  coulant  clans 
la  riviere  Mississipi.  La  nionloe  elait  dilFicile  et  les 
eaux  basses.  Par  unc  s6rie  de  portages  et  de  lacs  qui  se 
succedent  alternalivenient,  je  Iransportai  mes  bagages 
et  les  canots  au  JSamakdgon,  brancbe  du  Sainte-Croix, 
et  descendis  cc  dernier  cours  d'eau  jusqu'a  la  riviere 
Jaune  [Yellow -lU^er).  L'etat  de  guerre  qui  existail 
entre  les  Chippewas  et  les  Sioux  ine  forga  de  re- 
monter  le  Sainte-Croix  el  le  Namakagon ;  et,  en  quit- 
lant  les  bords  de  cette  derni^re  riviere ,  de  traverser 
le  portage  jusqn'au  lac  Ottowa,  I'une  des  sources  de 
la  riviere  Chippewa.  Je  descendis  ensuite  le  passage 
de  cc  lac  au  lac  Chetcic ,  source  du  Red-Cedar^  ou 
Folle-Ai>oine,  branche  de  la  Chippewa,  et  suivis  cetle 
brancbe  jusqu'a  la  Chippewa  elle-meme  et  au  Mis- 
sissipi. Je  remonlai  ensuite  ce  dernier  jusqu'a  I'em- 
bouchure  du  Wisconsin,  puis  je  retournai  par  les 
vallees  du  Wisconsin  et  du  Fox  a  la  baie  Verte,  a  Mi- 
chilliniackinac  et  a  Sainte -Marie.  »  On  explora  dans 
le  cours  de  celte  expedition  les  vallees  du  Maskigo,  le 
Namakdgon,  le  Sainte-Croijc  superieur,  le  Chippewa  et 
le  Folle-Ai'oine. 

L'aiineo  suivaiite,  les  Sauks  el  los  Foxes  (Renards) 
commencerent,  sous  la  conduite  de  Black-Hawk  (Fau- 
con-Noir),  des  hoslilit^s  coiilre  Jes  Ltals-Unis  par  le 
meurlre  de  M.  Saint -Vrain,  leur  agent,  et  en  tombant 
a  I'improviste  sur  les  Am^ricains.  Celte  rupture,  in- 
connue  au  commencement  de  I'annee ,  mais  sur  la- 
quelle  le  gouvernement  avail  seuloment  concu  des 
soupcons ,  fournit  de  nouveaux  molifs  pour  continuer 
les  efforts  commences  I'annee  prec^denle,  afin  de  con- 
server  la  paix  entre  les  tribus  septentrionales.  Un  me- 


(  128  ) 
decin-naturaliste  (feu  le  doctciir  Douglas  Houghton ), 
faisait  partie  de  rexpt'dition  ,  oscortde  par  un  pclil 
delachemcnt  d'iiifanlcrie  sous  le  commandemenl  du 
lieutenant  James  Allen,  qui  fut  charge  de  la  topogra- 
phie;  et  Ton  fournit  un  nonihre  convenable  do  guides, 
d'inlerpri'tes  et  de  canoliers  canadiens  necessaire  pour 
de  semblables  operations.  D'apres  les  instructions  don- 
nees  en  vertu  d'un  acta  recent  du  Congres,  les  meui- 
bres  de  I'expedition  devaient  fairc  connailre  leur  opi- 
nion sur  les  amendements  a  introduirc  dans  les  lois 
r^gularisatiices  du  commerce  et  des  communications 
internationales  sur  les  fronti^res,  ainsi  que  sur  I'^tal 
actuel  et  I'avenir  des  tribus,  sur  leur  nombre  et  leur 
situation  ,  enfm  sur  la  statisUque  du  pays  en  general. 
Se  dirigeanl  au  nord,  vers  les  sources  du  Mississipi, 
par  le  bassin  du  lac  Superieur  et  de  la  riviere  Saint- 
Louis,  I'expedition  atteignit,  le  9  juilletl832,  le  point 
extreme  des  decouvertes  anl^rieures  du  lieutenant  Pike 
et  du  general  Cass,  c'esl-a-dirc  lo  lac  Upper- Red- Cedar, 
ou  lac  Cass,  ayant  parcouru  en  cinq  jours  toute  la  dis- 
tance depuis  Ic  poste  de  commerce  du  lac  Sandy.  On 
trouva  que  le  Mississipi  avail  a  Tissue  de  ce  lac,  d'apres 
les  mesures  qui  I'urent  prises,  172  pieds  do  large  ct 
une  prolondeur  evaluee  a  8  pieds.  On  a  fait  observer 
precedemment  que  cette  largeur  etait  de  318  pieds  au 
confluent  du  lac  Sandy. 

On  ne  peut  donner  qu'approximativement  par  de 
simples  estimations  le  volume  coraparatif  des  caux 
d'une  rivifere ,  si  Ton  ne  mesure  pas  avec  une  grande 
precision  les  diffdrenles  profondeurs  de  son  chenal; 
mais,  quelles  qu'elles  soient,  do  semblables  approxi- 
mations augmentent,  du  moins,  nos  connaissances  sur 


(  129  ) 

le  volume  relalif  des  conrs  d'eaii  eloignes  et  mal  ex- 
plores. Si  les  informations  dont  nons  venons  de  parler 
sonl  eonsiderees  sous  cc  poinl  dc  vuc,  dies  anaihliront 
I'opinion  eaiise  par  lo  lieulenanl  Pike,  quo  c'est  la 
branche  du  lac  Leech  qui  iournit  la  plus  grande  masse 
d'eau,  quoique  le  lac  Itasca,  appele  par  lui  la  branche 
IVinnipique,  amene  ses  eaux  du  point  le  plus  eloigne. 
11  est  deraontre  que  le  lac  Leech,  avec  le  volume  entier 
de  I'eau  que  lui  apportent  onzc  Iributaires,  entre  son 
embouchure  et  le  lac  Sandy,  n'a  point  double  celui 
qui  est  determine  par  la  largour. 

«  Je  fis  camper  ma  troupe  et  6tablis  mon  depot  sur 
une  grande  lie  situee  au  centre  du  lac,  oil  les  Indiens 
ont  des  jardins  et  cullivent  du  mais  depuis  la  periode 
connue  la  plus  reculee.  Ayant  trouve  ici  le  dernier 
village  des  Chippewas,  en  remontant  le  Mississipi,  ou 
entre  ce  fleuve  et  le  lac  Rouge  [Red-Lake],  au  nord  de 
scs  sources,  et  termine  nies  Iravaux  olTiciels,  je  resolus 
de  suivre  la  riviere,  en  cherchanl  a  alleindre  sa  source. 
II  ful  reconnu  qu'il  y  avail  suffisamment  d'eau  pour 
naviguer;  mais  les  rapides  m'ayant  ^te  represenl6s 
commc  Ires-nombreux  et  comme  tout  a  fait  impra- 
licables  pour  les  canots  d'une  grande  dimension  , 
dont  je  faisais  usage ,  je  m'en  procurai  quelques-uns 
plus  pelils,  lels  que  ceux  dont  les  Indiens  so  servent 
pour  la  chasse.  Je  m'inslallai  dans  un  de  ces  bateaux, 
et  chacune  des  qualre  personnes  qui  m'accompa- 
gnaient  en  ayant  pris  un  autre,  nous  nous  disposames 
le  matin  suivant  a  remonter,  munis  de  carles  indiennes 
d'ecorce  [with  Indian  maps  oj bark)  et  des  guides  in- 
diens. Ayant  precedemment  decrit  cetle  excursion  en 
detail  dans  un  ouvrage  public  en  183/i,  et  accompagnii 
in.   FivRiEn.   2.  9 


(   »30  ) 
de  cnrtes  (1),  il  sufllra  de  dire  scnlement  ici  que  nos 
efTorls  furent  couronnos  par  Ic  siicces.  Nous  croyons 
cepcndant  devoir  joindre   line   csqiiise  a  noire   nar- 
ration ,  afin  qu'on  puisse  la  siiivro  avec  facilile  (2). 

»  Jc  quittai  le  caiupeiuent  de  I'lle  a  quatre  heures 
du  matin,  le  10  juillet,  dans  cinq  pelils  canots  de 
chasse,  ayant  cliacun  un  Indien  et  un  Canadien  a  son 
avant  et  a  son  arriere;  le  tout  dirig^  par  le  chef  du  vil- 
lage, Ozawimdib,  ou  la  Tete-Jaune.  Je  pris  ce  chef  dans 
mon  canot.  Le  lieutenant  Allen  avait  dans  le  sien  la 
boussole  et  les  autres  instruments  qui  nous  avaient  616 
confi^s  par  le  d^parlement  lopographique.  Le  docteur 
Houghton  mit  sa  pressc  a  plantes  derri^re  lui;  M.  John- 
ston, mon  interprete,  el  Ic  reverend  M.  Boutwell,  mis- 
sionnaire,  occupaient  chacun  dcs  canots  dislincls.  11 
fallaitcertaincnicnlderadrcsso,  mcme  pour  un  honnnc 
pratique,  pour  s'asseoir  dans  un  b&liuient  si  diflicile  a 
gouverner  et  dans  un  espace  aussi  exigu.  Nous  niar- 
chames  en  avant  avec  rapidity  loules  les  fois  que  I'eau 
nous  le  permit.  Une  heure  de  travail  a  la  rame  nous 
amena  pr6s  de  i'extr^mile  du  lac,  oii ,  pour  eviter  le 
cours  tres-sinueux  de  l^riviere,  nous  fhnes  un  portage 
de  50  yards(3)  depuis  les  Lords  du  lac  jusqu'a  la  rivi6re 
au-dessus.  Nous  pussames,  dans  une  courte  distance, 

(i)  Narrative  of  an  expedition  throiigli  ihc  ujijitr  Misiissipi  to  Itdsca 
Lake.  New -York,  Harpers,  i  83.}. 

Un  an  avant  la  publication  Je  cetfe  relation,  noire  excellent  et  si 
regrettable  confrere,  le  savant  el  hiborieux  Warden,  avait  annonce 
I'exiiloralion  de  Schoolcraft  dans  le  Bulletin  de  i833,  I.  XIX,  ]>.  45. 

D.  L.  15. 

(a)  Voyez  la  petite  carte  a  la  fin  dti  Bulletin.  D.  L.  R. 

(3)Leyard  =  o'«,9i438  D.  L.  M. 


(  131  ) 

deux  petits  lacs,  qui  sont  des  expansions  de  la  riviere, 
et  renconlrames  do  nombreux  et  difficiles  rapides,  au- 
dessus  du  quelques-uns  desquels  les  hommes  trainferent 
nos  canots.  En  paiiie  de  cellc  mani^re,  et  en  parlie  a 
force  de  rames,  nous  avancaines  petit  a  petit,  et  at- 
ieignimes  enfm  le  plateau  du  Peinidjiguinaitg,  ou  lac 
Cioss- Water,  a  une  distance  evalu6e  a  A5  milles  au- 
dessus  du  lac  Cass,  Ceci  fut  le  premier  essai. 

»  Le  lac  Cross -Water,  appele  par  les  Francais  Tra- 
verse^  est,  sous  toua  les  aspects,  une  charmante  nappe 
d'eau  limpide  de  10  a  12  milles  de  long;  il  est  situe 
sur  le  nieme  plateau  que  le  lac  Turtle,  si  longtemps 
et  si  impropremont  consider^  comme  la  source  du 
Mississipi.  L'elevation  du  Cross  -Water,  ou  Pennidji- 
gumaiig,  a  et6  d^terminee ,  par  les  observations  baro- 
nietriques  de  Nicolet,  a  52  pieds  au-dessus  du  lac 
Cass.  C'est  un  point  qui  doit  etre  note  dans  la  lopo- 
grapbie  de  ce  courant  d'eau,  comme  sa  plus  extreme 
extension  de  latitude  nord;  loutes  ses  eaux  au-dessus 
de  ce  lac  provenant  de  sources  au  sud  et  au  sud-ouest 
de  ce  paraliele.  Son  point  le  plus  meridional  est  place, 
dans  les  tables  de  M.  Nicolai,  au  1x1"  28'  h<o"  de  lati- 
tude. 

»  A  un  demi-mille  au-dessus,  nous  entrames  dans 
un  lac  auquel  le  nom  de  Washington-Irving  fut  donne. 
Ce  lac  pourrait  etre  consid^r^  comme  une  reexpansion 
du  CrossJFater,  s'il  n'en  elait  pas  separepar  un  chenal 
ou  detroit  de  peu  de  largeur,  ayant  un  courant  per- 
ceptible. A  environ  h  milles  plus  haut,  le  Mississipi  est 
marque  par  la  jonction  de  ses  premieres  branches, 
deux  desquelles  prennent  leur  source  sur  les  plateaux 
elevt^s  de  la  ligne  du  partage  des  eaux  [des  hauteurs  des 


(  132  ) 
terres  (4)].  La  branche  da  c6l6  droit,  ou  la  plus  consi- 
derable, sort  (111  lac  Itasca.  Je  pris  I'aulre  branche,  ou 
la  source  Planlagenel,  paroe  qu'elle  a  moins  de  rapides 
el  de  plus  pelilcs  chutes  a  sunuonter.  On  reconnut 
bienlot  qu'elle  se  versait  dans  un  petit  lac  appele  ]\Iar- 
(juette,  et,  un  peu  phis  haul,  dans  un  autre  lac  nomm6 
la  Salle.  Quelques  milles  au-dcssus  du  dernier,  nous 
entramc'S  dans  I'expansion  la  plus  considerable  du 
Kuhbekaning^  a  la  tete  duquel  nous  campanies ,  a  unc 
heure  assez  avaucee ,  par  une  petite  pluio ,  au  milieu 
d'une  foret  de  sapins  et  de  Larix,  auxquels  des  mousses 
epaisses  suspendues  a  toutes  les  branches  donnaient 
un  aspect  sopulcral. 

J)  Lc  lendemain  matin  ,  de  bonne  heure  ,  nous  quit- 
liimes  ce  trisle  campement,  lorsque  le  brouillard  se 
lul  dissipc,  et  suivimes  un  chenal  ires-tortueux,  dans 
lequel  le  cours  d'eau  continue  sa  route,  a  Iravers  des 
savanes,  avec  un  couranl  a  peine  perceptible.  Ces  ter- 
rains, remplis  de  fondrieres,  etaient  Strolls  el  hordes 
d'une  foret  de  pins  gris  rabougris  et  de  tamaracks  I'es- 
tonnes  de  mousses.  Des  pieces  infoi'mes  d'aunes  et  de 
saules  couvraienl  les  rives.  La  vegi^lation  avail  un  ca- 
ract6re  alpeslrc  Nous  troublions  frequemment  le 
repos  des  oiseaux  aqualiques  j)endant  noire  passage, 
el  obscrvions  des  daims  sur  le  rivage;  I'un  de  ces  der- 
niers  Tut  tire  par  Ozawnndib.  Le  cours  d'eau  semblait 
travcx'ser  un  pays  desole.  Vers  le  soir,  nous  passames 
le  Aaisva,  ou  la  Riviere  du  Serpent  i\  tete  cuivrde 
[  Copper- headed' snake  liiver)^  Iribulaire  qui  s'y  jelte, 

(i)  Ces  mots  hauteurs  des  terres  soiit  n'pc-tes  plusieurs  fois  en  fran- 
rais  et  en  italu|Ur  (l.uis  I'orijjiiial.  D.  L.  l\. 


(  133  ) 

sur  la  rive  gauche  ;  bientot  api'os,  nous  renconlrames 
des  rapides  et  quelques  chutes  moins  considerables. 
Le  guide  s'arrfita  au  pied  d'une  haule  colHne  de  cail- 
loux  roules  et  de  sable,  au  haut  de  larjuelle  nous  grim- 
pames;  les  canols  et  les  bagagcs  nous  suivirenl.  Nous 
fimes  ux\  portage  a  iravers  une  peninsule,  et  glissames 
de  nouveau  sur  le  cours  d'eau  au-dessus  des  chutes, 
oil  nous  campames,  fatigues  par  les  petits  incidents 
d'une  longue  journee. 

»  Le  troisienie  jour  de  noire  voyage,  nous  arrivames 
de  bonne  heure  au  lac  Assowa  (1),  que  nous  passamcs 
a  la  rame  en  vingt  minutes.  En  atteignant  sa  tele , 
Ozawimdih  poussa  mon  canot  dans  une  entree  mare- 
cageuse,  couverte  de  lis  d'elang  et  d'autres  pi  antes 
aqualiques.  II  le  fit  avancer  aussi  loin  que  possible  vers 
le  terrain  sec,  et  s'arreta.  Nous  avions  atteint  le  point 
extreme  de  cette  branche  ;  nous  ^tions  dans  un  veri- 
table marais.  La  commence  \q  portage  du  lac  Itasca, 
a  travers  la  hauteur  des  terres.  Aucun  endroit  dans  toute 
notre  route  ne  nous  causa  un  travail  aussi  penible  ; 
nous  avions  continuellement  a  gravir  des  collines  ou  a 
plonger  dans  des  ravins.  G^ologiquement  parlant,  cette 
elevation  consiste  en  collines  du  groupe  diluvial  ou  de 
blocs  erraliques,  disposes  en  cretes  uiamelonnees,  au- 
dessus  desquelles  des  pins  d'especes  diffcrentes  etaienl 
disperses.  Les  dt^pressions  ou  les  profondeurs  enlre 
ceux-ci  ont  servi  de  lieu  de  d^pot  pour  les  matieres 
v6g(^talcs  accumul^es.  Le  fond  de  ces  ravins  est  quel- 
quefois  mai'ecagcux;  plus  souvent,  il  est  coupe  par  de 
petits  lacs  ou  etangs.  Les  pins  sont  couverts  de  moussi; 

(i)  II  })orle  sur  la  carte  le  noin  d'Assawa.  D.  L.  I!. 


(  13A  ) 
griso  parasite  ;  nous  vimes  des  pigeons  de  passage  ot 
uno  ou  deux  especes  de  la  famille  du  faucon  :  c'eluit 
une  journ^G  chaude  de  juiliet;  nos  intrepides  cano- 
liers  interrompirent  plusieurs  fois  leur  t5cUe  pendant 
la  route,  que  nous  fimes  en  Ireize  repos  ou  (jpugUl- 
jhvunun,  coninie  Ics  Chippewas  Ics  appcllont,  ce  qui, 
en  cstiraant  la  distance  actucllo ,  donne  a  cetle  ^Ic^va- 
lion  une  largeur  d'environ  6  milles.  Nous  Irouvtinies  la 
fraise  mure;  de  frequentes  traces  de  daims  rouges,  ou 
daims  communs  de  Virginie,  furent  apercues,  ct  nous 
reconnuuies  des  preuves  6videntes  de  Taction  de  I'Occan 
dans  les  pierres  usies  par  le  frollenient  ct  dans  les 
cailloux  des  deux  especes  de  rocs  primaires  ct  s^dimen- 
taires.  II  semblerait  que  les  oceans  soplentrionaux  ont 
du  couvrir  autrefois  cette  region.  Nous  passions  evideui- 
nicnt  sur  un  terrain  forme  de  couches  siiccessives  de 
detritus  vegetaux,  et  (juoiqu'une  espece  do  sable  marin 
couvrlt  les  hauteurs,  il  etait  Evident,  d'apres  les  petits 
lacs  ct  les  nombreuses  sources,  qu'il  existail  au-des- 
sous,  a  une  profondeur  peu  considera])le ,  une  base 
alumineuse.  J'nttachais  beaucoup  Irop  d'inl6ret  a  voir 
la  source  d'une  riviere  si  cel6bre  pour  m'arreter,  et 
comme  les  bagages  que  j'avais  avec  raoi  ne  so  compo- 
saient  guere  que  d'une  lunette  [spy-glass]  et  d'un  porte- 
feuille,  je  pus  avancer  rapidement,  et,  le  13  juillct, 
j'arrivai  heureuscment  an  terme  de  ma  course.  Le 
temps  etait  clair  ct  calme,  et  le  lac  s'^tendait  comme 
un  miroir  aussi  loin  (|ue  la  vue  pouvait  se  porter,  en*- 
fcrme  dans  un  bassin  couronne  de  collines  pittores- 
ques;  I'aspcct  en  6tait  tout  a  fait  agresto ,  quelques 
ormes  et  d'autrcs  arbrcs  bordaient  le  rivage.  Aussilot 
que  les  bagages  et  les  canols  furent  arrives,  nous  nous 


(  135  ) 

cmbarquames,  et ,  apr^s  avoir  navigiie  (juelqucs  in- 
stants sur  le  lac,  nous  allames  camper  clans  une  lie 
situee  presque  an  centre,  ou  se  reunissaient  las  deux 
bras  dont  il  se  compose. 

»  Le  lac  Itasca  doit  entierement  son  origine  a  des 
sources  ol  a  de  petits  ruisseaux  d'une  eau  liuipide, 
vcnant  des  (il^vations  sablonneuses  qui  I'environnent. 
D'apres  deux  estimations  de  distances,  qui  ont  ete  pu- 
bli^es ,  ce  lac  peut  etre  plac6  a  3  025  milles  du  golfe 
du  Mexique  ;  son  eltivation  au-dessus  de  I'ocean  Atlan- 
tique  fut  evaluee  dans  le  temps  a  1  A90  pieds,  en  pre- 
nant  pour  base  ma  precedentc  estimation  de  la  bauteur 
du  lac  Cass,  faite  pendant  I'expedition  de  1820,  et 
fixee  a  1  330  pieds,  et  I'^levation  du  lac  Itasca  au-dessus 
du  lac  Cass  cstim(!ie  a  160  pieds. 

»  yVyant  termine  les  observations  necessaires  relati- 
vement  au  lac  Itasca ,  recueilli  des  specimens  de  tout 
ce  qui  ]iouvait  interesser  I'bistoire  naturelle,  je  m'em- 
barquai,  en  effectuant  mon  retour  par  I'une  des  bran- 
ches de  ce  lac,  et,  on  pen  de  jours,  sans  s^rieux  acci- 
dent, je  rejoignis  mon  campement  au  lac  Cass.  Le 
lieutenant  J.  Allen,  qui  a  fourni  les  elements  de  la 
carte  jointe  a  cette  notice,  evalue  la  distance  a  290  mil- 
les, dont  125  en  remontant  le  Plantagenet,  et  165  en 
descendant  la  branche  de  I'ltasca  (1). 

B  Tout  ce  qui  concerne  I'bistoire  naturelle  de  ce  lac 
fut  iaisse  dans  les  mains  du  docteur  Hougbton,  dont 
la  mort  recente,  en  faisant  I'examen  geologiquc  du  lac 

(i)  La  route  suivie  par  M.  Schoolcraft  est  indiqaee  sur  In  pciiie 
carte  ilressee  pnr  M  S.  Eastman,  officier  tic  rarinte  des  Elats-Unis , 
d'apres  les  doniiees  de  M.  Alien;  nous  la  joignons  a  ce  numero. 

D.  L.  R. 


(  136  ) 
Sup^ricur,  a,  nous  le  craiqnons,  prive  lo  puhlic  do 
hcaucoup  d'observations  preciouses.  II  a  signale,  on  Ire 
autres  plantcs  de  I'ilc,  dcs  Microstylis  ophiog,  lossoides, 
Physalis  ianceo/ala,  et  ties  Silciie  niitinhinn ;  on  trouva 
aussi  rormc,  le  pin,  I'cpinelte  rouge  [Lnt-i.c  aniericana) , 
ainsi  que  le  cerisier  sauvagc;  je  vainassai  du  rivage  le 
pelit  Planorbis  canipamilatus.  Nous  rcncontraines  quel- 
ques  debris,  restes  d'un  fcstin  fait  anciennement  dans 
un  canipenicnt  indien  abandonne  :  ce  furent  les  seuls 
indices  qui  nous  apprirenl  que  le  lac  etait  poissonneux  ; 
il  y  avail  aussi  des  ecailles  d'une  esp^ce  de  grandc 
tortue.  Nous  vimes  une  jolic  bfite  fauve  se  d^salteranl 
sur  les  bords  du  lac,  dont  I'cau  pure,  profondo  el 
froide,  laissait  apercevoir,  a  la  profondeur  de  plusieurs 
nieds,  un  fond  clair,  plein  de  cailloux  et  sabloniicux. 
D'aprfes  les  observations  lopograpbiques  du  lieutenant 
Allen,  sa  plus  grande  longueur  est  de  7  miiles.  » 

Qualrc  anneos  plus  lard,  savoir  en  1836,  M.  J.  J.  Ni- 
colet  \isita  ce  lac  d'apres  les  instructions  du  Bureau 
lopograpbique  des  Ltals-Unis,  a  la  lete  duquel  est 
place  le  colonel  J.  J.  Abert.  II  ratteignil  le  29  aout, 
el  nous  lui  devons  plusieurs  renseignements  scicnti- 
fiques  imporlants,  parmi  lesquels  nous  citerons  la  lati- 
tude de  rile,  qu'il  place  au  hi'  13'  35",  ot  la  bauleur 
du  point  le  plus  eleve  de  Hauteur  des  terres  qui  ail  ele 
mesur6,  et  qu'il  evalue  a  130  picds  au-dessus  du  lac. 
Son  rapport,  comniuniqu6  apres  sa  mort  au  Congr^s 
par  le  colonel  Abert,  est  un  document  d'une  grande 
importance.  Suivanl  dcs  observations  barotnetriques 
faites  par  lui,  I'altilude  extreme  du  lac  Itasca,  au- 
dessus  du  golfe  du  Mexique.ostdc  \  bib  pieds.  Le  m6me 
observateur  a  Irouvc  que  le  point  le  plus  cleve  de  la 


(  137  ) 

Hauteur  des  terres  est  de  1 680  pieds  au-dessus  du  golfe, 
altitude  tres-peu  considerable ,  si  nous  la  consid^rons 
comme  I'^levation  continentale  entre  les  Indes  occiden- 
lales  et  les  mers  septenlrionales. 


VOYAGES 
DES  DOCTEURS  RRAPF  ET  REBMANN 

DANS 

L'AFRIQUE  ORIENTALE. 


Dans  le  Bulletin  du  mois  de  septcmbre  1850,  3°  sei'ie, 
t.  XIV,  p.  2/iO,  j'ai  consacr6  quelques  lignes  aux  tra- 
vaux  d'exploration  de  I'Afrique  orienlale,  dus  au  doc- 
teur  Rebmann,  I'un  des  missionnaires  les  plus  zeles  el 
les  plus  intruils,  qui  pen6tra,  au  niois  d'avril  1848, 
dans  lo  Rilema,  et  decouvrit  la  montagne  de  Kiliman- 
jaro, couverte  de  neige  perpdtuelle,  par  environ  3  de- 
gr^s  et  quelques  minutes  de  latitude  sud  et  30°  25'  de 
longitude  est  de  Greenwich  (28°  5'  E.  de  Paris),  u 
75  lieues  a  I'ouest  de  Rabbai-M'pia ,  station  des  mis- 
sionnaires, sur  la  cote  orienlale  d'Afrique.  J'annongai 
en  meme  temps  que  le  reverend  docteur  Krapf,  non 
moins  zel6  que  le  docteur  Reljmann  (1),  apr^s  avoir 
visits  rUsambara,  situ6  au  sud-ouest  de  la  station,  avail 

(i)  Le  docteur  Krapf  avait  fjuitte  Aden,  venanl  d'Abyssinic,  le 
1 1  novembre  l843,  pour  s'etahlir  sur  la  cote  orientale  d'Afrique.  Au 
mois  de  juin  1846,  le  docteur  Rebmann  vint  le  rejoin Jre  a  la  station 
de  M'pia,  pres  de  Montbaz.  Ce  fut  peu  apres  qu'ils  commencerenl 
leurs  explorations  les  plus  importantes. 


{  138  ) 

accompli,  ilans  les  niois  de  novcmbro  et  deccnabrc 
18/(9,  un  voyage  p^rillciix  dans  I'lJcamba  {Oukamhn), 
a  100  millcs  au  nord-ouest  dc  Rabbai-M'pia ;  qu'il 
paraissait  avoir  fait  des  dc^scouverles  tres-iraporlantcs  el 
confirm^  celles  de  M.  Rebmann,  dout  jc  me  proposais 
de  rendre  corapte  dans  un  procbain  Bulletin,  alnsi  que 
de  la  carte  dressee  pour  rintelligcncc  de  ces  dccou- 
vcrtes.  Lorsque  je  falsais  cettc  promesse,  la  relation  do 
I'cxploralion  du  doclciir  Krapf  n'cHait  pas  encore  on- 
ti^rement  publiee.  Quoiqu'clle  ne  le  soil  pas  encore 
compl^lement ,  pour  ne  jioint  laisser  exister  unc  trop 
longue  lacune  ,  nous  donnerons  procbainement  an 
moins  une  analyse  de  ce  qui  aura  paru  sur  le  voyage 
de  ce  missionnaire  depuis  les  premiers  jours  de  no- 
vembre  1849  jusqu'en  1851,  qu'il  a  continue  le  cours 
de  ses  explorations  ct  de  ses  decouvertes. 

Voici,  en  attendant,  quelques  informations  nouvcllcs 
communiqu^es  par  M.  Anloine  d'Abbadic. 

De  la.  Roquette. 

Le  Church  Missionary  Intelligencer,  pour  le  mois  dc 
fevrier  1852,  vient  de  nous  apporter  des  nouvellcs  in- 
l(^ressantes  du  reverend  docteur  Krapf,  I'un  des  plus 
bardis  pionniers  dans  les  decouvertes  africaines.  Sa 
lottre,  qui  est  du  7  octobre  1851,  a  die  dctruite  en 
grande  partie  par  une  fatality  singulifere,  le  feu  I'ayant 
accidentellcmenl  consumde  en  partie  dans  Aden. 
M.  Rebmann  n'a  pu  eteindre  I'inccntlie  a  lemps,  el  il 
a  du  envoycr  celle  precicuse  Icttre  dans  un  miserable 
6tat  de  mutilalion  qui  cxplique ,  jusqu'a  un  certain 
point,  les  quelques  incertitudes  qu'eprouvcront  les 
gdograpbes  apres  avoir  parcouru  le  r6cit  suivant. 


(  139  ) 

Parti  de  la  mission   anylicanc   elablio  a  Rabbai- 
M'pia,  M.  Krapf,  apr^s  avoir  franchi  la  mont(ie  tie 
200  pieds  qui  conduit  au  plateau  de  Teita,  parvint  au 
torrent  Woi,  qui  se  jelte  dans  le  Tzavo.  Cette  derniore 
riviere  parait  avoir  sa  source  dans  la  montagne  nei- 
geuse  dite  Kiliraandjai-o,  el  so  joint  un  peu  plus  bas  a 
la  riviere  Adi,  qui  s'appelle  Sabaki  dans  le  bas  de  son 
cours,  el  se  joint  a  I'ocean  Indien  dans  la  baie  de  Me- 
linde.  La  petite  caravane  ne  tarda  pas  a  elre  attaquee 
par  les  Aendi,  peuplade  qui  habile  la  contree  basse  de 
Bura.  Apres  avoir  traverse  I'Adi ,  les  voyageurs  attei- 
gnirenl  la   plaine   de  Yata  ,   elev^e  de   1  800  pieds, 
M.  Krapf,  etant  alorsdans  le  paysd'Oukamba,  s'avan^a^ 
en  trois  journees  de  route,  jusqu'a  Kitui,  afin  d'y  voir 
le  chefKivoi,  et  d'aller  avec  lui  visiter  la  riviere  Dana, 
qui  est  encore  a  Irois  journees  au  nord  de  Kitui.  Le 
Dana  a  sa  source  dans  le  mont  Kenia,  deja  signale 
dans  nos  cartes  comme  une  haute  montagne,  et  sur 
lequel  M.  Krapf  nous  a  appris  que  la  neige  sejourne 
cternellement.  Apres  un  mois  de  ces  delais  toujours 
inevitables  dans  I'interieur  de  I'Afrique,  M.  Krapf  che- 
raina  vers  le  Dana,  qui  se  jelte  dans  I'ocean  Indien, 
entre  le  2"  et  3'  degre  de  latitude  sud ,  sous  le  nom 
d'Ozi(l).  Notre  hardi  missionnaire  etait  accompagne  de 
Kivoi,  qui,  par  maliieur,  n'avail  avec  lui  qu'une  petite 
escorte  de  cinquante  personnes.  Les  voyageurs  furent 
attaqu^s  par  des  brigands  dans   un  endroit  boise  et 
dangereux.  Kivoi  fut  lue,  avec  plusieurs  des  siens,  et 

(i)  Celte  riviere  est  identii|ue,  scion  M.  Krapf,  avec  le  Quiliinaiicy, 
mot  qui  sifjniHe  cau  ile  mrjnlarjHe.  {Voyez  f^ocabulaiiv  de  six  lanrjues 
de  I'Aj'rifjue  orieiilaic^  par  J.  L.  Krapf.  Tubiii{»up,  i860.)       A.  A. 


( lao ) 

Rl.  Krapf,  se  Irouvant  tout  soul  dans  ce  pays  inconnu, 
parvint  noanmoins  a  altcindrc  le  Lord  dc  la  large  ri- 
viere pres  de  I'endroil  oii  de  grands  rochcrs  elevi^s  do 
6  a  10  picds  facilitcraienl  dans  Tavonir  la  construction 
d'un  pont.  C'est  en  ce  point  que  s'dlove  une  haute 
colline,  dans  la  contr6c  de  Mbe,  apparemment  sur  In 
rive  gauche  du  Dana.  Forc6  de  s'en  rctourner  a  Iravers 
un  pays  desert,  sans  nourrilurc  aucune,  ct  sans  autre 
provision  d'eau  que  celle  qu'il  avait  rccueillie  dans  le 
canon  de  son  fusil  ct  dans  I'etui  de  sa  lunette,  M.  Krapf 
cut  le  honheur  de  parvenir,  a  la  nuit  tombante,  au 
pied  du  uiont  Kcnso.  La,  il  coupa  de  I'hcrhe  seche , 
pourse  garantir  contre  les  vents  froids,  et  dorniit  une 
heure  ou  deux  sous  un  arbrc.  A  son  r^veil,  une  colline 
voisine  etant  entouree  de  feu ,  le  courageux  voyagcur 
put  s'orientcr  :  il  evita  autant  qu'il  ^tait  en  lui  la  plaine 
nue  de  Kcnse ,  et,  vers  le  milieu  du  jour,  il  quitla  la 
montagne,  pour  atteindro  le  lit  sabloiuicux  ct  desseclie 
d'une  riviere  ou  les  cris  des  singes  le  guidcrent  a  un 
trou  contenant  de  I'eau  cxccllente.  Dieu  ne  I'avait  pas 
abandonnc  sur  cette  tcrre ,  car  il  ne  tarda  pas  a  ren- 
contrer  deux  mcmbros  do  sa  caravanc  dispersce,  un 
homme  et  une  femrae.  Celle-ci  (les  femines  sont  tou- 
jours  charitables ! )  donna  au  voyageur  de  la  chair  d'une 
vache  sauvage,  et  il  cut  un  peu  de  force  pour  continuer 
sa  route.  Au  point  du  jour,  les  trois  aventuiners  s'aper- 
covant  qu'ils  alhiicnt  Irop  vers  Test,  quitlcrcnt  cetle 
direction  pour  le  sud-esl,  et,  a  huil  lieures  du  matin, 
ils  rencontr6rcnt  cnlin  deux  indigenes  qui  aliaient  a 
Liu,  dans  le  pays  d'Uukambani.  Les  malheurs  de  I'in- 
fortunc  missionnaire  n'elaient  pas  fmis  quand  il  eul 


(  IH  ) 

alleini  le  premier  hameau  Kikamba(l),  car  les  parents 
de  Kivoi  voulalenl  venger  sa  mort  dans  le  sang  de 
I'Europ^en.  M.  Krapf  crut  devoir  s'enfuir  nuitamment 
des  mains  d'un  parent  de  Kivoi  qui  le  tenait  prison- 
nier.  Apr^s  avoir  erre  deux  jours  ot  deux  nuils  parmi 
les  broussailles  du  desert,  il  parvint  a  Yata.  De  la  il 
descendit  a  Kikumbuliu  ;  puis,  apres  avoir  fait  un  de- 
tour pour  eviter  les  brigands  de  la  tribu  Aendi,  il 
reussit  a  alleindre  heureusement  la  station  de  Rabbai- 
M'pia.  II  avail  fait  a  pied  une  route  qui,  vu  les  detours, 
ne  saurail  etre  raoindre  de  360  milles  geographiques. 

(i)  On  aura  remarque  dans  le  recit  du  docteur  Krapf  que  le  mot 
Kikainba  est  employe  presque  conime  synonyme  du  mot  Ukambani 
qui  le  precede.  II  est  bon  de  donner  aux  lecteuis  une  explication  a 
cet  e'gard.  Dans  les  langues  euiope'ennes,  le  nom  adjectif  qui  designe 
le  peuple  ou  la  langue  se  forme  du  mot  substantif  indiquant  le  pays, 
avec  une  terminaison  ou  syllabe  auxiliaire  mise  a  la  fin  du  mot.  C'est 
ainsi  que  du  nom  France  on  forme  I'adjectif  Francah.  Dans  les  lan- 
(jues  d'alllteration,  qui  paraissent  etre  parlees  dans  toute  I'Afrique 
australe,  on  emploie  bien  quelquefois  une  syllabe  suflixe,  comme  ui 
dans  Ukambani,  mais  on  use  aussi  et  surtout  d'une  syllabe  pretixe;  et 
un  voyageur  comme  M  Krapf,  qui  park'  la  langue  du  pays,  se  sent 
porle  a  faire  prevaloir  cette  regie  afiicaine  quand  il  a  besoin  de  citer 
un  mot  indigene,  meme  en  ecrivant  en  anglais.  Dans  le  mot  qui  nous 
oecupe,  A'rt»i6aseraitdoncla  racine;  Ouliamba  ou  Oukainbani,  lenom 
du  pays;  K'thamba,  celui  de  la  langue;  et  Wakamba,  celuidu  peuple. 
II  est  d'ailleurs  a  remarquer  que  ce  nom  de  Kamba  de'signe  aussi  un 
pays  a  I'est  des  Yamma,  par  environ  7°  de  latitude  nord  ct  36"  de 
longitude  orii-ntaie.  Celte  contree  est  ye'neialement  appelee  Kambate, 
d'apres  les  Abyssins,  qui  ne  savaient  pas  que  le  ta  final  de  Katnbata 
est  employe  comme  artiile  par  les  indigenes  de  ce  pays.  En  disant 
Kambata,  ccux-ci  expriment  la  meme  idee  qu'un  Francais  rendrait 
par  le  Kamba,  absolument  conune  dans  les  expressions  illalie,  la 
France. 

Antoike  d'Abbadie. 


(  1A2  ) 
Au  milieu  des  lacunes  de  la  leltre  de  M.  Krapf,  on 
a  reussi  a  saisir  le  passage  suivant : 

«  D'abord  la  riviere  Dana,  qui  tournc  aulour  de  la 
contiee  Kikuyu,  et  va  a  la  grandc  nier.  La  seconde 
grande  riviere ,  parlant  du  Ndurkenia  (  montagne 
blanche),  est  le  Tunibiri,  qui  coule  a  Iravcrs  le  pays 
Wakuafi,  et  atteinl  aussi  la  grande  n^er  (ocean  In- 
dien).  » 

Malgre  les  lacunes,  il  reste  assez  de  toxte  pour  coni- 
prendro  la  conviclion  de  M.  Krapf,  que  la  riviere  im- 
mense qui  se  diverse  vers  le  nord-est  d'un  lac  situiL'  au 
pied  du  Kenia  est  idenlique  avcc  le  Bahr  cl-Abiad , 
fleuve  Blanc,  ou  vrai  Nil. 

Dans  une  autre  leltre  dc  M.  Krapf,  communiquee 
par  le  r^v^rend  M.  Barlh,  on  remarque  aussi  les  pas- 
sages suivants  :  «  La  riviere  Dana  est  a  180  heures  de 
route  de  Rabbai ,  savoir  :  90  bcuros  de  Uabbai  a  Ki- 
kumbuliu,  110  a  Yata,  140  a  Kivoi,  et  34  au  dela.  Lin 
marchand  de  Lembu ,  conlree  situee  a  deux  journees 
de  route  au  nord-est  du  Dana,  apprit  a  M.  Krapf  qu'au 
pied  de  la  montagne  neigeiise  Ndurkenia,  ou  Keretila, 
etait  un  lac  qui  donne  naissance  au  Dana,  au  Tumbiri 
et  au  Nsaraddi ;  que  Ic  Dana  et  le  Tumbiri  se  d^versent 
dans  I'ocean  Indien ,  mais  que  le  Nsaraddi  dirigc  son 
coui's  vers  un  lac  encore  plus  grand,  appelc  Baringo, 
donl  on  ne  pourrait  attoindre  I'exlr^mite  qu'apres  un 
voyage  de  bien  des  journees;  qu'il  y  a  cinq  journees  do 
route  de  Uemba  a  Kirenia,  et  de  la  ncuf  journ<!;cs  jus- 
qu'a  Baringo,  mot  qui  signifie  grande  mer.  Maintc- 
nant,  dit  M.  Krapf,  nous  avons  presque  la  certitutio 
qu'il  faut  cUercher  les  sources  du  Nil  dans  le  lac  Ndur- 


(  m  ) 

kenia,  duquel  s'^coule  le  Nsaraddi,  ce  dernier  coulant 
a  Iravers  Bariiigo. 

En  retournant  vers  la  cole,  M.  Krapf  eut  a  souffrir 
bien  des  miseres  :  il  eut  les  mains  et  les  pieds  remplis 
d'epines  ;  il  voyagea  pendant  deux  jours  et  deux  nuifs 
de  suite,  et  ne  dut  son  salut  qu'a  la  charite  des  parents 
de  Kivoi,  ceux-ci  paraissant  ne  lui  en  avoir  pas  voulu 
de  sa  fuite  nocturne.  De  Kikunibuliu  a  Rabbai-M'pia, 
il  fit  neuf  journ^es  de  marcbe  forc^e,  en  evitant  la 
route  battue  et  en  se  frayant  un  cliemin  a  travers  un 
desert  des  plus  bois^s,  le  long  du  pays  des  Gallas,  afin 
d'^chapper  aux  brigands  de  Bura.  On  n'aura  pas  de 
peine  a  le  croire,  quand  il  affinne  qu'a  son  relour  a 
Rabbai,  il  pouvait  a  peine  se  lenir  sur  ses  jambes. 

Je  me  permellrai  de  faire  deux  remarques  sur  le 

r<^cit  interessant  qu'on  vient  de  lire.  M.  Krapf  estime  a 

550  milles  la  distance  de  Rabbai  an  point  du  Dana 

qu'il  a  visite.  D'aulre  part,  il  dit  expressement  que 

le  parcours  total  est  de  180  beures  de  marche.   Ce 

serait  done  3,05  milles  geographiques  par  lieure,  ce 

qui  me  semble  exag^re.  En  attendant  qu'on  ait  etabli 

par  la  comparaison  soignee  de  nombreux  itinc^raires 

quelle  est  la  marcbe  moyenne  d'un  voyageur  pitjslon 

dans   un  pays  accidente,  jc  me  bornerai  a  citer  le 

r^sultat   obtcnu   par  M.  Dusgale  sur  la  marcbe  des 

cbameaux  en  Ai'rique.  Le  capitaine  Lyons  a  parcouru 

1085  milles  en  523  beures,  ou  2,075  milles  par  heure; 

M.  Cailliaud  a  francbi  887  milles  en  ASO  beures,  ou 

2,06  par  beure ,  tous  deux  sur  des  cbemins  peu  acci- 

dentes,  ou  les  sinuosites  augmenlent  la  distance  par- 

courue  de  l/i.  Dans  les  pays  montagneux,  on  estime 

gendsralement  cet  accroissement  comme  egal  a  1//|. 


(  lU  ) 

Je  n'ai  pas  encore  realise  mon  intention  de  deduire 
(Ic  la  somme  de  foiis  mes  ilineraires  en  I^llhiopie  la 
valeur  moyenne  d'unc  hcure  de  marche ;  niais  des 
resultats  partiels  ni'ont  fait  voir  qu'un  parcours  de 
plus  de  2  milles  a  I'heure  est  an  moins  douteux, 
lorsqu'on  cherclie  le  residtat  d'une  ligne  droite  on 
l^gerement  brisee,  et  lorsqu'on  chcniine  avec  vingt- 
cinq  ou  trente  personnes.  Plus  la  caravane  est  nom- 
breuse,  plus  la  marche  se  ralentit.  M.  Krajji'n'a  voyage 
seul  que  la  ou  il  dit  expressdraent  qu'il  faisait  des  de- 
tours ;  il  semble  d'ailleurs  avoir  toujours  voyage  a  pied. 
D'apres  toules  ces  considerations,  il  paraitrait  dilllcile 
d'adnieltre  qu'il  ait  fait  plus  de  2  milles  a  I'lieure,  et  si 
Ton  retranchc  des  360  milles  ainsi  obtenus  un  quart 
pour  les  sinuositt!;s,  on  trouvera  que  le  point  extreme 
de  sa  belle  reconnaissance  n'cst  qu'a  270  milles  de 
I'ocean  Indicn.  C'esl  d'ailleurs  la  distance  admise  dans 
I'esquisse  insercc  au  Church  Missionaif  Intelligencer 
(vol.  I,  p.  38i). 

II  est  loujours  raalais6  de  juger  un  voyageur  sur  ses 
Icttres,  qui  sont  prosque  toujours  ecrites  pour  annoncer 
les  fails  saillants,  et  qui  taisent  nalurellement  celle 
foule  d'accessoires  sans  lesquels  un  g^ographe  a  le 
droit  de  meltre  en  doute  tout  fait  qui  est  en  contra- 
diction manifosle  avec  ce  que  Ton  connalt  de  la  clima- 
lologic.  Je  me  garderai  bien  de  dire  que  M.  Krapf  a 
fonde  sa  com'iction,  quant  aux  lieux  des  sources  du  Nil, 
sur  le  temoignage  isole  du  marcband  de  liembu ;  le 
z6l6  voyageur  alleraand  doit  avoir  eu  sans  doute  un  de- 
tail de  distances,  de  noms  de  lieux,  ct  surtout  de  tti- 
moignages  ind^pendants,  avant  de  s'etre  permis  autre 
chose  qu'une  simjile  opinion  a  eel  egard.  11  n'y  a  pas 


(  l/i5  ) 

d'impossll)illte  physique  a  ce  qu'un  coins  treau,  parli 
de  la  tr6s-haule  inontagne  de  Renla ,  aille  sc  joindre 
ii  la  riviere  qui  coule  par  ]e  niont   f.ogwek ,  choz  les 
Barri,et  qu'on  lient   communt'incnt  pour  liiffluenl 
principal  du  Nil;  mais  I'opinion  opposee  s'etayc  do 
plus  d'un  argument.  L'incerlitude  qui  regne  encore  sur 
la  longitude  du  mont  Kenia  ne  permet  neanmoins  pas 
de  placer  celte  sonimile  beaucoup  a  Fouest  du  33*  de- 
gre  de  longitude,  c'cst-a-dire  a  environ  sept  degres  a 
Test  du  mont  Logwek ,  ce  qui  impliqne  une  distance 
considerable.  La  latitude  du  mont  Kcnia  est  par  en- 
viron un  degre  au  sud  de  I'equateur.  Done,  la  riviere 
qui  aurait  sa  source  au   mont  Kenia  devrait,  avant 
d'alteindre  le  mont  Logwek,  couler  vers  le  nord-ouest, 
ct  dom  Knoblecher  nous  apprend  expressement  qu'elle 
vient  du  sud-ouest,  ce  qui  est  iino  contradiction  evi- 
dente.  On  sait  d'ailleurs  que  ce  dernier  voyageur  parle 
d'une  direction   quil  a  vue,   landis  que  iM.  Krapf  en 
indique   une  autre  d'aprfes  des  oui-dire.  De  plus,   la 
comparaison  des  sources  du  Balagaz ,  du  Takaze  et  de 
I'Abbay  en  Aliyssinie,  montre  que  les  sources  les  plus 
^lev^es  sont   loin  de  fournir  les  rivieres  les  plus  consi- 
dtirables.  Dans  I'Afrique  oricnlale,  il  n'osl  done  nulle- 
ment  imperieux  de  s'adresser   a  une   monlagne  trfes- 
haulc  pour  y  cheicher  les  sources  d'un  grand  fleuve. 
Enfin  ,  cc  qui  domine  puissamment  toutes  ces  conside- 
rations, c'est  Tobjeclion  mise  en  avant  par  d'Anville, 
rcproduitc  par  M.  Ayrton  dans  le  Journal  de  la  Societe 
de  geographic  de  Loiidres,  et  qui  n'a  pas  encore  etc 
mfeme  efileuree  par  les  admiraleurs  les  plus  passionnes 
de  I'origine  auslrale  du  Nil,  Cette  objection  porte  que 
les  crues  de  ce  fleuve,  ayant  lieu  pendant  I'^td  boreal , 
III.  FivniF.R.   3.  10 


(  146  ) 

doivenl  fitre  aliment(^es  par  dcs  piciios  qui  loinljcnl 
clans  la  paiiie  seplenliionale  dc  la  zone  torride  alVi- 
caine.  Si,  conlrc  Ics  probabililes  acluclles,  un  gros  al- 
fluent  du  Nil  avail  sa  source  au  sud  de  I'equateur,  ce 
Iributaire  ne  saiirait  s'arroger  Ic  droit  d'fitre  regarde 
comme  I'afllueiit  jirincipal ,  a  moins  loulefois  que  des 
observations  nouvelleset  precises  ne  viennenl  plus  tard 
nous  apprendre,  qu'en  d^pit  de  toutes  celles  qui  nous 
sont  connues,  les  grandes  pluies  de  I'liemisphore  au- 
stral, pres  de  I'equateur,  coincident  exactement,  quant 
a  leur  6poque  ,  avec  celles  qui  lonibent  par  7  et  8*  de 
latitude  septentrionale. 

Antoine  d'Abbadie. 

Paris,  22  feviier  i852. 


EXPEDITION  DANS  L'AFRIQLE  CENTRALE, 

TRADUIT    DE    l'aNCI.AIS 

PAR   M.    DE   LA    llOQUETTE. 
SUITE  (1). 


M.  Augustus  Pelermann,  auquel  on  doit  tant  de  ren- 
seignemenls  sur  cette  expedition,  nous  ap])rend ,  par 
une  lellre  portant  la  dale  du  20  Janvier  dernier,  in- 
s^r^e  dans  \! Athenceum,  que  des  subsides  viennent 
d'etre  envoy^s  aux  docteurs  Barlh  et  Ovcrvvog  pour  les 
inetlre  en  <^tat  d'enlrepremlre  la  parti e  imporlanto  de 
leur  excursion  de  Bornou  aux  rivages  de  I'oc^an 
Indien. 

(i)  Voyezle  Bulletin  (lej.iiivier  iSAl,  4*  se'rie,  t    HI,  p.  si-ali. 


(  1A7  ) 

Presque  imuiediatement  apres  avoir  recu  les  inlti- 
ressantes  relalions  du  voyage  clii  docleiir  Barth  dans 
I'Adainawa,  et  de  I'exploraiion  du  iac  Tcliad  et  des  iles 
Bidduma  par  le  docleur  Oveiweg,  lord  Palinerston  a 
accorde  liberalemenl  a  la  mission  nne  nouvelle  somme 
de  800  livres  sterling  ( un  pen  plus  de  20  000  francs). 
Des  instructions  ont  ete  adressees  en  meme  temps  par 
le  Foreign- Office  au  capitaine  Homerton,  agent  anglais 
a  Zanzibar,  pour  qu'il  ait  a  lournir  tout  ce  dont  les 
voyageurs  pourraient  avoir  besoin  aussitot  qu'ils  feront 
leur  apparition  sur  la  cole.  En  outre,  la  demande  faite 
par  le  docteur  Overweg  de  certaines  marchandises  an- 
glaises  a  ele  accueillie,  et  une  somme  de  65  livres  ster- 
ling (1650  francs)  a  ete  alloueo  a  cet  offet.  Les  mar- 
chandises ont  d6ja  ete  choisies  avec  soin  et  achetees 
apr^s  la  note  specifique  envoyee  par  le  docteur  Over- 
weg, et  elles  sont  maintenant  en  route  pour  I'Afrique. 

Les  voyageurs  verront  ainsi  leurs  voeux  realises  de  la 
maniere  la  plus  encourageante,  et  ils  poursuivront  avec 
une  nouvelle  vigueur  leur  perilleuse  entreprise,  qui 
promet  les  plus  importanls  resultats. 

II  ne  sera  peut-etre  pas  sans  int^ret  de  faire  bri^ve- 
menl  mention  des  articles  de  commerce  demandes 
principalement  par  les  nations  de  I'int^rieur  de  I'Afri- 
que. Les  voyageurs,  a  leur  depart  d'Europc,  avaient 
emporte  avec  eux  quelques  marchandises  anglaises 
bien  choisies;  mais,  arrives  a  Tripoli,  ils  furent  obliges 
d'y  ajouter  une  quantite  considerable  de  marchandises 
de  quaiite  inferieure  de  Nuremberg,  de  Trieste,  et 
meme  de  Tripoli;  et  ils  employerent  de  la  meme  ma- 
niere les  subsides  qui  leur  furent  subsequemment 
envoyes.  II  en  resulla  un  grand  desavantage,  car  les 


(  1A8) 

voyageiirs  rcconnurcnl  que  Ics  divorses  Iribus  qu'ils 
eiirent  occasion  de  visiter  connaissaicnt  parfaitemenl 
Ics  dilTcrcnles  cspi^ces  de  marchandises  d'Europo  ,  et 
qu^/es pre/eraient  immriahleinenl  les  marchandises  an- 
glaises  a  tonics  Ics  tint  res.  De  plus,  ellcs  s'attendaicnt  a 
recevoir  des  marchandises  anglaiscs  de  vojageurs  re- 
pr^sentants  dii  gouveruement  anglais. 

La  nolc  du  docleur  Overweg  indique  diffiircnles  es- 
peces  de  quincaillerie  et  de  coutelleric,  plusiours  dou- 
zaines  de  rasoirs,  plusieurs  milliers  d'aiguilles  (cent 
mille  aiguilles  emporlees  par  les  voyageurs  avaient  et6 
plac(!!es),  des  ciseaux,  des  canifs ,  des  pistolcts,  des 
haches,  des  compas  et  des  thermom6lres,  des  boltes  a 
niusique,  des  soieries,  un  grand  nombre  de  petits  nii- 
roirs  dans  de  fortes  caisses  d'etain,  des  bagues  en  ar- 
gent, et  autres  menus  articles. 

Plus  los  marchandises  sent  fortes  et  solides,  plus 
ellcs  sonl  eslimecs  par  les  naturcls,  qui  preferent  aussi 
a  I'or  les  bagues  ou  autres  articles  fails  en  quelquc  cs- 
pfece  que  ce  soit  de  melal  blanc. 

On  espere  quo  les  marchandises  choisies  soigneuse- 
menl  el  envoyecs  seronl  d'unc  grande  ulilite  pour  les 
voyageurs  dans  leur  exploration  des  contrees  situecs 
enlre  le  bassin  du  lac  Tchad  el  la  cole  de  Zanz.ibar, 
ou  I'argent  monnayc  scrail  dc  peu  ou  point  d'usage. 
C'est  probablement  la  derniilsre  communication  que 
nous  recevrons  dc  nos  amis  en  Europe  pr^alablemcnl 
a  ce  qu'ils  s'cnfonccnt  dans  les  d^scrls  tout  a  fail  in- 
connus  de  rinlerieur  de  I'Afrique. 


(  U9  ) 

iliia];fi§eis,  GiLtraitts  d'oii^rages, 
Alelaiiges ,   etc. 


LE  CHILI  ET  LES  ARAUCANS. 

PAR 

M.  EDMOiND  DE  GINOUX. 
DEUXliiME    ARTICLE  (1). 

La  configuration  de  I'Araucanie ,  cette  contree  si 
pen  connue,  et  dont  le  noni  apparalt  a  peine  sur  nos 
cartes  geographiques,  presente  les  memos  reliefs  que 
le  Chili;  le  bassin  inlermediaire,  tres-vaste  mainte- 
nanl  et  d'une  pente  fort  douce,  poursuit  sa  marche  du 
nord  au  sud,  en  longeant,  a  Test,  les  grandes  Andes, 
et  a  I'ouest,  la  Cordill6re  de  la  cote.  Une  quantitc  de 
jolies  rivitires  sillonnent  les  plaines  de  I'Araucanie;  les 
principales  sont  :  le  Carampangue ,  I'Araquete ,  le 
Llembu,  le  Paycavi,  le  Llcrillen,  le  Tirua  ou  Cauten, 
le  Budi,  le  Tolten,  et  le  Queulc,  D'autres  cours  d'cau 
d'une  moindre  importance  descendent  aussi  des  mon- 
tagnes  et  se  promenent  dans  le  bassin ;  niais  leurs 
nortis  sont  ignores  :  on  sait  seuloment  que  la  plupart 
de  ces  grands  ruisseaux  se  ri^unissent  au  Biobio,  au 
Cauten ,  et  au  Tollen.  Ces  Irois  rivieres  sont  navi- 
gables. 

Les  parlies  basses  du  pays,  liabiteespar  dessauvages 

(i)  Voycz  Ic  Bulletin  tic  janvicr  iSSa,  4°  scrie,  t.  Ilf,  p.  Sy. 


(  150  ) 
farouches,  soiit  crime  ricliesse  cxlraordiiiairo ,  cl  los 
soins  que  les  Araucans  prodiguent  a  I'agriciilture  font 
honte  a  Icurs  voisins  du  Cliili.  Siir  les  deux  ligiics  de 
montagnes,  la  vegetalion  est  incroyablement  belle, 
\igoLireuse,  \ariec.  L'arbre  le  plus  commun  (il  efface 
presquc  tous  les  autres )  est  un  helre  colossal ,  Ic 
Feigns  Dombeyi  de  Mirbel,  Fagiis  aiistralis  de  Pocppig. 
Get  arbre,  dans  les  Andes,  alteint  au  dela  de  80  pieds 
de  hauteur;  son  tronc ,  raboleux,  ujais  reuiarquablo- 
menl  droit,  est  sans  branches  jusqu'a  la  moitie  de  son 
elevation  :  au  dire  do  Poeppig ,  il  egale  en  qualile  les 
meillcurs  bois  de  rAuitiriquc  du  Nord,  A  cole  do  ce 
ch6ne ,  il  faut  ranger  immediatement  le  Rauli  des  In- 
dians, Fagus  procera  de  Poeppig;  et ,  aussitot  apr^s, 
un  laurier  aux  rameaux  d'un  vert  fonco  ,  fort  elegant 
dans  sa  coupe,  nomme  Laurelia  ammatic/i  par  Jus., 
Laurelia  denlala  par  Bert.  Les  Indiens  lirent  de  cet 
arbre  une  r^sine  qui,  brulee,  repand  une  odeur  plus 
delicate  que  celle  de  I'encens.  Viennent  ensuite  :  le 
pittoresque  lingue,  aux  branches  ^lastiques,  Laiiriis 
lirigue  de  Hook ;  le  gracieux  Peunio,  coquetleuienl 
charge  de  baies  rouges;  puis  une  multitude  d'especes 
de  myrles,  diversifiees  par  Jeurs  formes,  leurs  dimen- 
sions, I'arrangemont  des  feuilles  el  des  fleurs ;  la 
Luma,  Escalloiiia  Thirsoidea,  dont  la  fleur  blanche  et 
rdcoi-ce  rosee  conlrastent  avec  le  veil  pur  de  ses  pelites 
feuilles,  tapisse  a  profusion  les  rives  de  tous  les  cours 
d'eau. 

Au  pied,  conime  al'aljri  de  la  vegdlatlon  puissanlc, 
croissent  humblemont  des  myriacles  d'arbusles  et  de 
planles  fragiles  qui  seinblent  avoir  bcsoin  de  so  senlir 
prot(iges.   La   abonde    un    coudricr    dont   la    feuille , 


(  151  ) 

niiancee  de  plusieurs  teintes,  iippellc  ratteulion;  pres 
de  liii  foisonne  un  cannelier,  Ic  Driinis  chilensis,  re- 
marquable  par  la  disposition  syinetrique  de  ses  ra- 
raeaux  tendus  horizonlalement ,  surtout  par  le  jet  si 
fin,  si  elance  de  sa  tige  flexible.  Partout,  dans  ces  v6- 
getaux,  la  copigue,  la  plus  adorable  des  plantes  grim- 
pantcs,  agite  ses  clochettes  d'un  angeJslique  incainat, 
landis  qu'a  la  base,  au  plus  fourre  de  ces  masses  de 
verdure,  vierges  de  reptiles  et  d'insectes  venimeux,  les 
pales  fougeres ,  et  une  infinite  d'autres  plantes,  trou- 
vent  encore  a  disputer  leur  part  d'air  et  de  lumiere. 

Pour  completer  cette  trop  rapide  esquisse  de  la 
richesse  des  Cordillferes  ,  priiicipalement  do  celle 
d'Ai'auco,  il  soffit  d'ajouter  que,  n'iuiporte  par  quel 
point  on  essaye  de  pen^trer  dans  ces  forets  ou  arbres, 
arbustes ,  plantes,  berbes,  lianes ,  se  trouvent  con- 
fondus,  entrelaces  de  mille  mani^res,  cette  surabon- 
dance  de  vegetation  n'olTre  qu'un  chaos  inextricable. 
Si  toul  ce  qui  est  tendre,  faible,  rampe  sur  le  sol, 
s'etouffe  entre  les  grosses  racines,  envahit  les  [rones 
solides  ou  s'accroche  au  moindre  appui,  les  grandes 
lianes,  a  leur  tour,  s'elancent  orgueilleusemenl  jusqu'a 
la  cime  des  arbres,  et,  des  pointes  les  plus  elev^es,  elles 
retorabent  a  regret  vers  la  terre.  Ici  ce  sont  les  souplcs 
Boques,  que  Ton  prendrait  pour  les  cables  d'un  na- 
vire;  la,  n)ultipliees  a  I'exces,  se  niontrent  les  C4oli- 
gues,  qui  font  ressembler  les  forets  a  d'inimaginables 
chevelures  cmbrouillees  par  le  vent.  Les  nalurels  de 
I'Araucanie  taillentleurs  lances  redoutables  clans  celle 
graminee. 

Derri^re  les  forets  priniilives,  au  couronnement  des 
raontagnes  de  la  cote  et  a  la  region  supcrieurc  de  la 


(  152  ) 

zone  subondine,  on  voit  s'^tagor,  comme  dernier  mot 
des  prodigalilcs  do  la  nature,  de  jnassives  guirlandcs 
de  ces  sapins  gigantcsqiies  et  celubrcs  connus  sous  lo 
nom  d' Araiicaria.  Get  arbro,  cher  aux  Intlicns,  t'deve 
a  cent  pieds  dans  I'air  son  tronc  robuste,  toujours  aussi 
droit,  aussi  uni  que  le  grand  mat  d'un  vaisscau.  Sa 
tele,  en  forme  d'hemisphcre,  perpclucllomenl  secouee 
par  la  brise ,  rend  un  biull  luguln-e,  semblable  a  la 
voix  prelee  aux  fantomes;  mais,  si  des  csprils  resident 
dans  ces  arbres,  il  faut  convenir  qu'ils  sont  bienfai- 
sanls,  car  Ics  longues  branches  fourchues  de  ces  sa- 
pins, pareillos  a  d'iinmonses  bras  termines  chacun  par 
une  main  ouverte,  portent  enlre  leurs  dernieres  rami- 
fications un  I'ruit  nutrilif,  pain  ordinaire  des  Arau- 
cans. 

Telle  est  la  magnificence  du  manleau  de  verdure 

deploye  sur  les  montagnos  qui  encadrent  longitudina- 

lement  I'Araucanic  depuis  lo  Biobio  jusqu'a  Valdivia. 

II  y  a  plus  encore  que  cctle  superbe  beauts  a  conteni- 

pler  :  la  providence  parait  avoir  voulu  mettre  ces  terros 

a  I'abri  de  loule  conquete.  Du  cold  de  la  mcr,  deux 

ceinlurcs  continues  dc  forels  font  comme  des  rem- 

parts  inaltaquables;  au  nord  et  au  sud ,  le  bassin  est 

defendu  par  des  rivieres;  a  I'oucsl,  los  Andes  en  in- 

terdisent  rapprocbe  :  le  voyageur,  cependant,  peul 

parcourir  les  diverscs   parlies   dc   I'Araucanic   sinon 

commodemenl ,    du    moins   avec   securild.   Les  deux 

principales  voies  de  communicalion,  raaigres  senliers 

traces  par  le  pied  des  chevaux,  bordent  laleralemoul 

le  territoire;  elies  sont  appeldes,  I'une  Cliemin  de  la 

Cole,  I'aulre  Cliemin  de  la  Pampa. 

La  plus  curieuse  de  ces  voies  sauvages  conduit  a 


(  153  ) 
Arauco,  nom  bien  trompeur,  et  qui  rappelle  une 
grave  inexactitude  commise  par  les  g^ograplies  d'Eu- 
rope.  Balbi  pretend  que,  de  toutes  les  villas  fondees 
par  les  Espagnols  en  Araucanie,  une  seule ,  Arauco, 
est  demeur^e  en  la  possession  des  Indlens.  Or,  c'est 
diam^tralement  le  contraire.  Les  sept  villes  creees  par 
les  Espagnols  sur  ces  terrcs  ont  et6  rashes  presque 
aussitot  apres  leur  naissance ,  et  les  lieux  ou  elles 
existaient  ne  sauraient  etre  disputes  aux  indigenes. 
Arauco  est  le  seul  des  petits  centres  de  population 
organises  jadis  au  sud  du  Biobio  qui  soit  reste  au  gou- 
vernement  chilien. 

Cetle  ancienne  forteresse,  tour  a  tour  occupee  par 
les  Espagnols  et  paries  Araucans,  protege  une  ville  en 
esp6rance,  assise  au  fond  d'une  jolie  baie.  Arauco, 
theatre  de  tant  de  combats  furieux,  restera  a  jamais 
c^lebre  par  le  souvenir  des  exploits  guerriers  do  Cau- 
polican,  de  Lautare  et  de  I'intrepide  Colocolo.  Dans 
un  coin  obscur  de  la  citadelle,  on  montre  un  gros  lion 
dc  Castille,  taille  dans  un  bloc  de  pierre.  II  y  a  deux 
si^cles  el  demi,  lorsque  les  Espagnols  le  hiss6rent  sur 
la  grande  porte  d'entree,  ce  lion  inspira  aux  Araucans 
la  terreur  et le  respect. 

La  contree  que  Ton  traverse,  apres  avoir  quitte 
Arauco,  est  richement  accidentee  de  haules  collines 
vertes,  de  vallees  riantes,  de  cours  d'cau  frais  et  lim- 
pides,  le  tout  distribue  avec  une  admirable  harmonic 
a  la  base  de  la  Cordillfere  de  la  Cote.  De  distance  en 
distance,  derriere  une  buttc,  ou  bleu  au  fond  d'un 
ravin,  parfois  aussi  au  milieu  d'un  bouquet  d'arbres 
isole  dans  les  plaines  de  gauche ,  une  petite  colonne 


{  1B4  ) 

defumee,  loulantcnlourde  spirale,  (rahit  uncdctueure 
iiulienne. 

Les  Araucans  n'ont  jamais  v^cu  en  families  grou- 
pies, en  foyers  reunis,  en  soci«^le  enfin  ;  jamais  ils 
n'ont  eu  une  ville ,  un  village  ,  un  hameau.  Tous  ics 
centres  de  population  Aleves  jadis  sur  leur  lerriloire 
elaient  oxclusivemonl  du  fait  des  Espagnols.  Tantot 
vainqueurs,  lantol  battus,  mais  jamais  clecourages,  les 
Espagnols,  dans  leurs  jours  de  triomphc ,  se  halaieiil 
de  balir  un  fort  sur  chaque  portion  de  terre  passag(^- 
rement  conquise.  A  I'interieur,  ou  sous  les  niurs  de  ce 
fort,  ils  petrissaient  quelques  maisons  de  terre,  et  ils 
d^coraient  le  tout  du  nom  de  ville  et  de  chef-lieu  d'une 
province.  De  cette  fagon,  ils  etaient  parvenus  a  cou- 
struire,  dans  I'Araucanic,  sept  villcs,  parmi  lesquelles 
les  plus  notables  etaient  I'luiperial  et  Villarica.  L'lm- 
perial  6tait  appelee  a  devenir  la  capitale  du  gouverne- 
ment  du  Chili :  or,  les  sept  villes  ont  ete  detruites  par 
les  Araucans,  et  quelques-unes,  qui  ont  ele  roedifiecs 
deux  ou  trois  fois,  ont  aussi  ete  deux  ou  trois  fois  rcn- 
versees  par  les  Indiens.  II  ne  reste  pas  une  seule  de 
celles  qui  furnnt  assises  sur  une  portion  du  territoire 
nomme  aujourd'hui  Araucanie  independanle. 

CiCS  Indiens  nc  con^oivent  pas  que  Ion  puisse  vivre 
cote  a  cote,  d'une  vie  presque  commune.  Ils  ne  sup- 
porteraient  pas  plus  deux  habitations  attcnanlesqu'ils 
ne  consentiraient  a  se  grouper  plusieurs  ensemble  sur 
un  lieu  decouvert;  la  sociabilite  n'est  ])oint  dans 
leur  caracterc.  Le  pays  est  divise  en  tribus  distincti-s, 
inviolables  ,  cl  chaquo  Iribu  est  coupee  en  aulant  do 
pelils  liefs  qu'elle  comple  do  families.  Le  soin  de  tout 


(  156  ) 
individu  a  se  tenir  isole  recllement  chez  soi ,  comple- 
lement  a  I'abri  de  tout  regard  etranger,  est  pousse  si 
loin,  que  du  seuil  d'une  habitation  on  doit  n'en  pas 
apercevoir  une  seconde ,  fut-ce  celle  d'un  fr^re,  d'un 
oncle,  d'un  fils.  Ces  demeures  sont  cacUees  les  unes 
aux  aulres  par  dns  bois,  ou  encore  par  des  accidents 
de  terrain  scrupuleusenient  etiidies.  Lne  armee  d'in- 
vasion  a  repousser,  une  junto,  une  orgie  an  sujet  de 
quelque  grand  evenement,  sont  les  seulescirconstances 
capables  de  faire  sorlir  ces  bommes  de  leurs  sombres 
retrailes  et  de  les  rassembler  momenlan^ment. 

Jadis,  comnie  aujourd'liui ,  I'Araucanie  etait  parta- 
gee  en  un  grand  nombre  de  tribus.  Chaque  tribu  etait 
gouvern^e,  coiTime  aujourd'hui  encore,  parun  cacique 
ou  chef  de  famille  noble,  dont  I'autorite  se  transmet- 
tait  par  droit  naturel  et  en  ligne  directe  a  ses  enfants 
males.  Mais,  au-dessus  des  caciques,  venaient  les  to~ 
quis  et  les  ulmenes ,  sortes  de  souverains  politiques  et 
religieux,  elus  par  les  assemblees  des  nobles.  Les  to- 
quis  et  les  ulmenes  veillaient  aux  interets  generaux  et 
commandaient  les  armees  ;  grace  a  eux,  la  nation 
n'avait  qu'une  volonte  et  njarchait  avec  un  ensemble 
admirable.  Un  danger  exterieur  menacait-il  le  terri- 
toire,  des  coureurs,  envoyes  dans  chaque  direction, 
pour  informer  les  caciques  du  peril  commun,  leur 
faisaient  connaitre  les  ordres  du  gouvernement  su- 
preme, et  aiissitotles  chel's  de  tribu  meltaientsur  pied 
leur  contingent  de  guerriers ,  et ,  guides  par  des  feux 
allumes  la  nuit  aux  cimes  des  montagnes,  ils  savaient  a 
quel  pohit  ils  devaienl  se  reunir,  de  quel  cote  venait 
I'cnnemi  ;  s'il  fallait  marcher  en  avant,  a  droite  ou  4 
gauche.  Maintenant  les  dignites  de  toqui  et  d'ulm^ne 


(  156  ) 

n'exislent  plus;  il  ne  reste  plus  que  ies  caciques  ordi- 
naires,  et  cet  6lat  de  clioses  est  la  cause  premiere  dc 
raffaiblissement  de  la  nation.  Tout  cacique  est  maltre 
absolu  dans  son  district;  nul  ne  relive  d'un  autre.  Le 
pays,  en  consequence ,  est  morcele  en  une  multitude 
de  pelilcs  principautes  indopcndantes,  ct,  par  suite 
des  jalousies,  des  disaccords  personnels  entrc  Ies  divers 
chefs,  Ies  interets  de  la  nation  sont  abandonnes  au 
caprice  des  ivinements. 

Nos  voyageui'S  devaient  I'cclamer  I'hospitalite  d'un 
cacique  de  Tucapel,  aucjuel  ils  itaient  recomraandis ; 
mais  que  de  precautions  a  prendre  !  Les  habitations, 
en  Araucanie,  doivent  eli*e  sacrees  pour  quiconque  n'a 
pas,  par  droit  de  naissance,  le  privilege  d'y  pcnetrer.  La 
moindre  violation  d'un  senil  peut  attirer  la  mort  sur 
la  personne  du  coupable;  u  table,  on  est  servi  par  les 
fcmmes  du  cacique  ;  leur  parlcr,  les  regarder  meme 
est  une  ofiense  grave  faito  au  proprietaire  du  logis. 
Les  cases  des  Araucans  n'ofl'rent  qu'une  seule  piece 
de  rez-de-chaussee ,  dont  une  partie  est  consacrie  au 
foyer,  aux  soins  et  aux  Iravaux  du  manage;  I'aulre 
sert  de  dortoir  commun.  Lorsque  des  etrangers  sont 
admis  a  passer  la  nuit  dans  ces  tristes  demeures,  les 
femmes  veillent  etfilent  de  la  laine,  immobiles  et  silen- 
cieuses  comrae  des  statues.  Leur  esclavage  est  le  plus 
barbare  que  I'homme  ait  jamais  invente.  La  cuenca , 
c'est-a-dire  I'enclos  de  I'habilation,  est  leur  univcrs; 
rien  du  dehors  ne  doit  les  intercsser;  aucune  relation 
de  voisinage  ne  leur  est  permise.  A  I'inlorieur,  une  loi 
inllexiblc  les  fait  rampcr  devant  leur  maltre  et  dicle 
leurs  actions,  leurs  gestes,  leurs  paroles. 

M.  de  Ginoux  quitle  bientot  le  cacique  du  Tucapel 


(157  ) 

pour  aller  assisler  aux  fun^railles  d'un  chef  voisin ;  il 
so  diiige  vers  le  rio  Cudico,  en  traversanl  des  plaines 
riantcs.  Du  rio  Cudico  au  rio  Tiiua,  le  chemin  esca- 
lade, puis  redescendun  bras  de  la  Cordillere,  a  iravers 
des  terres  profondement  boueuses ;  puis,  au  sortir 
d'une  epaisse  foret,  se  dt^veloppe  la  vallee  de  Tirua. 

((  Si  nous  n'avions  pas  6t6  prevenus,  dit  notre  voya- 
geur,  du  sjjectacle  qui  nous  y  attendait,  nous  aurions 
hesite  a  nous  approcher,  pendant  la  nuit,  de  la  sc6ne 
fantasliquc  que  nous  dominions  du  pied  de  la  Cordil- 
lere. A  peu  de  distance  ,  sur  notre  gauche ,  la  valine , 
illuminee  dc  torches,  semblait  Stre  envahie  par  un 
debordement  de  legions  infernales.  Dans  un  cercle 
immense,  formed  par  des  lignes  de  feux  fixes,  on  voyait 
passer,  repasser,  courir,  se  croiser  en  toos  sens ,  des 
ombres  noires  perchees  sur  des  chevaux  noirs,  et  lais- 
sant  apres  chacune  d'elles  uue  large  Irahiee  de  flamme  ; 
du  sein  de  cette  arm^e  dialiolique,  des  cris,  qui  n'ont 
point  de  nom  dans  notre  langue,  faisaient  freniir  les 
^chos  des  montagnes,  et,  pareilles  a  des  spectres  gigan- 
tesques,  les  silhouettes  des  grands  arbres,  animeespar 
les  mouvements  des  flammes,  avaient  I'air  d'applaudir 
a  ces  jeux  infernaux. 

»  On  preludail  aux  funerailles  d'un  cacique,  qui 
exigent  toujours  un  temps  fort  long  ;  tandis  qu'on  s'en 
occupe,  le  corps  du  defunt  repose  sur  un  lit  de  parade 
construit  en  fortes  lianes  dans  I'interieur  de  sa  case, 
et,  a  partir  du  jour  du  deces,  les  femmes  se  meltent  a 
tisserdes  velementsde  luxe  pour  en  habillcr  le  cadavre. 
Les  proches  parents  s'empressent  de  rassembler  ou  de 
fabriquer  assez  de  chicha ,  liqueur  qu'ils  pr^ferent , 
pour  en  offrir  en  abondancc  aux  Irois  ou  quatre  cents 


(  15«  ) 
convies  reconnus  digncs,  par  leur  rang,  dc  prondro 
part  a  la  lete  des  funeraillcs;  ils  amasscnt  du  hlo,  clii 
rnais ,  des  farincs,  des  IVuils,  lout  ce  (|ui ,  dans  une 
telle  ciiconstance ,  uierile  d'etre  dislrihue  a  plusieurs 
centaines  de  voisins  ,  el,  prcnant  dc  cliacune  de  ces 
choses  une  iaible  [portion,  ils  en  eniplissent  un  ccr- 
cueil  en  forme  de  pirogue,  taiile  dans  un  Ironcd'arbre. 
Ce  cercueil  doit  suivre  dans  la  fosse  celui  destine  a 
rccevoir  le  corps  du  noble,  afin  que  I'esprit  de  ce  chef 
ne  manque  pas  de  nourriture  dans  I'aulre  monde. 

))  II  n'esl  pas  rare,  avant  de  proceder  aux  cere- 
monies de  rinbumation,  que  Ton  allende  pendant 
deux  ou  trois  mois  la  bonne  saison  de  la  cbiclia,  prin- 
cipal encens  des  funerailles,  egalenicnt  agreable  aux 
dieux  et  aux  liommes,  devanl  servir  a  faire  les  liba- 
tions exig^es.  Durant  ce  long  espace  de  temps,  !e  ca- 
davre  se  decompose  en  paix  sur  son  lit  de  parade,  et 
la  faraille  est  lenue  de  vivre  dans  ce  milieu  empoi- 
sonn6. 

»  Un  peu  a  droile,  sous  nos  pieds,  la  case  du  cbel', 
adoss6e  a  une  colline  verle,  poinlant  dans  la  vallee,  re- 
gardait  un  vaste  terrain  plat ,  champ  et  jn-airie  du  richo 
doniaine,  d^l'endu  par  une  ceinture  de  bois;  tout  ce 
terrain  etait  entoure  de  feux  que  des  Indiens  alimen- 
laieiit,  etl 'espace  libre,  eclaire  encore  par  des  hommos 
atheval,  porlanldes  torches,  n'^tait  plus  qu'une  arenc 
ou  se  deroulait  un  spectacle  etrange.  La,  trois  ou  qualrc 
cents  nobles  cavaliers,  nus,  ivres,  el  la  lance  au  poing, 
s'abondonnaient  presque  enfurieux  aux  extravagances 
les  plusdangereuses;  ccux-ci  se  priicipilaienl  au  grand 
galop  dans  des  courses  perilleuses ,  ceux-la  lutlaienl 
de  force  et  d'adresse,  d'autres  s'acharnaient  a  des  si- 


(  159  ) 

mulacres  de  combals  assoz  souvent  fnnestes  a  quel- 
ques-uns  des  cliampions.  Paifois  aussl  cette  arniee  dc 
sauvages  se  massait  a  une  oxtr^mile  du  terrain,  puis, 
au  bruit  des  tronipelfes  de  guerre,  au  hennissement 
des  chevaux,  ils  partaient  venire  a  lerre,  et ,  en  defilant 
devant  la  case  du  inort,  ils  faisaient  retentir  les  mon- 
tagnes  de  cris  affreux,  qui  glacaient  le  sang  dans  nos 
veines.  Ges  Indiens  ne  resseniblaient  plus  a  des  honi- 
nies,  mais  a  de  veritables  diiaions  :  exaltes  par  I'ivresse, 
surexcites  en  menie  temps  par  Tainbition  de  mettre 
en  evidence  leur  adresse  a  manier  un  cheval  ou  les 
arnies  de  guerre,  ils  se  ruaient ,  tete  baissee,  dans  ces 
exercices  effrayants,  leur  gloirc  durant  la  paix  ,  parce 
qu'ils  retracent  leurs  prouesses  dans  les  balailles 
r^elles. 

»  La  fete  avait  commence  la  veille,  elledevait  finir  le 
lendemain  par  I'enterrement  du  cacique  dont  on  ce- 
lebrait  la  puissance  cl  la  bravoure.  Les  deux  journ^es 
^coulees  avaient  ete  remplies  exclusivement  par  des 
banquets  ou  I'ivresse  elait  de  rigueur,  et  par  des  dis- 
cours  a  la  louange  du  chef  Irepasse.  Les  deux  nuits 
avaient  et6  consacrees  aux  courses,  aux  lultes  guer- 
rieres  et  au  culle  des  chichas  enivranls.  L'esprit  du 
cacique  devait  cerlainement  etre  salisfait;  car  si  le 
nonibre  des  nobles  Araucans  accourus  a  la  celebration 
des  funerailies  elait  considerable,  si  le  gaspillage  dc  la 
prodigieuse  quantite  de  vivres  el  de  cbicha  mise  a  la 
disposition  des  convi^s  atteslait  qu'il  avait  ete  largement 
fait  honneur  a  la  munificence  de  la  famille,  ii  etail 
impossible  aussi  de  glorifier  avcc  plus  de  frenesie 
qu'on  n'en  avait  d6ploye  pendant  deux  nuits  les  males 
verlus  d'un  beros.  Le  lendemain  ,  les  nobles  Araucans, 


(  1(J0  ) 

reveilles  par  I'^clal  des  liompellcs,  avaient  tanl  l)ion 
que   mal  repris  leur  aplomb,  el  deja   ils  se  jetaient 
comnie   des  alTaines  sur   des  ni(tnccaux  de  vivros  et 
d'outres  pleinesdc  cliiclia,  que  des  Indiens  aclievalent 
de  d^poser  a  unc  petite  distance  de  la  case.  L'orgie 
recommengait ,  et  jamais  chez  les  sauvages  des  aulres 
parlies  de  I'Amerique,  ni  cliez  ceux  de  1 'Oceanic,  on 
nc  vit   I'exemple  d'une   pareille    gloutonnerie.  Entre 
neuf  et  dix  heures,  des  orateurs,  jjarents  du  cacique 
defunt,    parcoururent  la   I'oule.    L'ignoble   festin    fut 
suspendu,  et  tous  les  nobles  convives  se  porterent  pre- 
cipilamnient  devant  la  case,  ou  ils  se  pelotonnerent  a 
droite  et  a  gauche  de  la  porte,  en  laissant  un  passage 
libre.  Bienlot  parul  le  corps  du  cacique,  porl6  triom- 
plialcmcnt  par  des  chefs  a  I'air  supcrbe ,   fiers  sans 
doute  d'avoir  ele  choisis  pour  cette  haute  fondion.  Le 
cadavre,  revetu  des  riches  vetements  que  lui  avaiont 
fabriques  les  femmes,  6tait  couche  dans  la  latale  pi- 
rogue, creusee  expr^s  pour  lui  servlr  de  cercueil.  11 
aurait  ele  difficile  d'appliquer  un  age  quelconque  au 
xnasque  decompose  dc  ce  chef  :  les  cheveux  ,   noirs  et 
abondanls,  temoignaient  seuls  que  le  cacique   avail 
elu  moissonne  avanl  I'epoque  de  la  vieillcsse.  Lne  cer- 
lainc  pompe  presidait  a  sa  sortie  du  foyer  domestique, 
salute  })ar  le  retenlissemenl  des  Irompetlos  ct  par  des 
cris  barbares.  Le  cortege  marchail  lenlement,  et  tan- 
dis  qu'il  s'acheniinait  vers  la  tombe  ouverle ,  les  en- 
fants  du  niort,  second^s  par  des  personnages  qui  me 
semblaient  devoir  elre  les  pretres  du  fc^tichisme  des 
Araucans,  se  demenaicnt  a  acconiplir  des  pratiques 
superstitieuses,  dent  le  but  dlait  d'cmpeclicr  I'ame  ou 
I'esprit  du  defunt  de  s'en  retourner  a  la  case. 


(  161  ) 

))  Sur  les  Lords  de  la  fosse,  Jes  jonglories  des  pretres, 
imitees  par  les  fils  du  cacique,  redoublercnt  de  vio- 
lence ;  a  leur  tour,  les  autres  parents  repandirenl  de 
la  chicha  dans  la  tombe.  On  descendit  ensiiite  la  pi- 
rogue du  mort,  puis  celle  conlenant  les  niets  prt^par^s, 
les  grains,  les  fruits,  les  semences  qui  devaient  nourrir 
le  noble  chef  dans  I'autre  monde  et  le  mettre  a  meme 
de  mener  la-bas  une  vie  dc  delices  ;  enfin ,  on  d^posa 
a  cote  des  pirogues,  avec  tous  les  objets  chers  au  ca- 
cique, sa  chueca,  espece  de  jeu  de  crosse  fort  en  usage 
en  Araucanie ;  sa  lance ,  ses  laqiu's,  autres  amies  de 
guerre;  son  manteau  de  fourrure,  ses  eperons;  en  un 
mot,  tout  ce  que  Ton  supposait  avoir  ele  pr^cieux  k 
un  homme  de  son  rang  et  de  son  caractere.  Apres  ces 
diverses  cert^monies,  la  masse  des  assistants  salua  une 
derni^re  fois  le  mort  de  cris  terribles,  de  discours  af- 
freux  a  entendre,  et  des  folies  les  plus  exlravaganles 
que  puissent  inspirer  a  des  centaines  d'individus  de 
cetle  Irempe  un  fanatisme  grossier  uni  au  delire  de 
I'ivresse.  Des  pellet^es  de  terre  tombferent  dans  la  fosse, 
Ic  trou  se  combla;  la  fete  des  funerailles  (!;tait  ter- 
nain^e.  » 

Les  juntes  politiquos  ,  les  assomblees  g^norales , 
n'importe  le  motif  qui  les  provoque  ,  reproduisent  les 
scenes  deplorables  que  nous  venons  de  ^'crire.  Le 
sujet  de  la  deliberation  se  discule  invariablement  au 
milieu  d'une  ai)ominable  orgie,  a  laquelle  loutefois 
ne  sont  admis  que  les  hommes,  les  femmes  elant 
rigoureusement  exclues  de  toutes  les  reunions  ,  de 
toutes  les  fetes  ,  de  tous  les  jeux.  D'ordinaire  ,  les 
assemblies  ont  lieu  dans  une  plaine,  et  loujours  elles 
atlirent  un  concours  consid6ral>le  d'Indiens,  nobles 
in.   F/:vniF.R.   h.  11 


(  102  ) 
ou  non.  Sur  lo  priiicip;il  cniplacomcnt  ,  on  construit 
a  Ja  hale  cles  liultes  do  brancliages,  destinies  a  reccvoir 
les  provisions,  a  abriter  Ics  caciques  et  les  meinljrcs 
des  families  ])rivilL^giees ;  le  peiiple  dort  a  la  belle 
utoile,  il  sell  les  chefs,  il  ecoute  ,  il  joiie  ,  il  mange, 
il  boit  a  loisir,  niais  il  n'a  pas  voix  di'diberalive.  Le 
banquet,  app&l  le  plus  ri^el  de  ces  assemblees  ,  com- 
mence d^s  le  debut  de  la  reunion  ,  et  ne  cesse  que 
lorsqu'elle  est  dissoutc,  c'est-a-dire  le  troisieme  ou  le 
qualrieme  jour.  Les  heures  non  employees  a  discourir 
ou  a  manger  sont  remplies  par  des  exercices  a  cheval, 
par  des  jeux  de  diverses  sortes  particuliers  A  I'Arau- 
canie,  et  enfin  par  des  danses  pitoyables,  indignes  do 
ce  peuplo  lier  et  belliqueux. 

Les  Araucans,  encore  livr(^s  aux  suporstilions  paicn- 
nes,  personnilient,  dans  Apo  ot  Pillan,  les  deux  prin- 
cipes  du  bien  et  du  mal.  Apo,  ne  jjouvant  jiroduire  que 
le  bien,  ils  jugenl  inutile  de  I'adorcr,  et  ils  ne  lui  ren- 
dent  aucune  espoce  de  culte  ;  au  conlraire  d'Apo  el  de 
toule  la  serie  bienfaisante  ,  le  dieu  Pillan  ,  el  les  aulres 
genies  du  mal,  ne  cessant  pas  d'engendror  des  calami- 
les  communes  ou  particuliercs,  physiques  ou  morales, 
ils  ont  un  culte  ,  des  hommages,  des  sacrllicos  ofl'orls 
dans  le  but  de  d^sarnier  lour  colore,  de  dtilournor 
leurs  cou[^  A  I't^poquc  des  gucrres  avcc  lesEspagnols, 
la  veille  des  grandes  balaillcs  surloul,  on  immolait 
des  prisonniers  a  la  Mori  et  a  la  Vengeance,  princi- 
pales  diviniles  implor6es  dans  ces  moments  criliqucs. 
Grace  a  la  paix  avec  la  republique  chiliennc  ,  cos  pra- 
tiques barbares  ne  se  renouvollcnt  plus.  L'Araucan 
est  cruel  dans  I'occasion  ,  uiais  il  nest  pas  leroce  par 
goul,  el  si  di^moralise  qu'il  soil  devant  la  puissance 


(  163  ) 
(le  Pillan  ,  les  orgies  constiluenl  presquo  en  enliei"  lo 
cultc  qu'il  liii  offre  aujoud'hui. 

Les  pretres  do  ce  feticliisme  sont  des  augurcs  qui , 
dans  I'esprit  du  people,  ontle  don  d'interprcter  les 
tremblements  de  lerre ,  les  fortes  eru]-)hons  volca- 
niques,  les  vents  furieux ,  les  orages,  les  trombes,  les 
eclipses,  et  aussi  I'apparition  de  certains  animaux. 
Ces  pretendus  devins  ,  inslrunients  non  avoues  des 
caciques  ,  cxerccnl  un  pouvoir  incroyable  sur  les 
masses  ,  el  secondent  puissamment  les  projets  des 
cbefs  politlqiies.  Par  leurs  jongleries,  les  Indiens, 
habitues  a  trembler  au  seul  nom  de  Pillan  ,  sont  en- 
tretenus  dans  une  superstition  telle  que ,  eux  si  intre- 
pides  au  combat,  ils  freraissent  lorsqu'ils  rencontrent 
un  lizard  ,  un  bibou,  une  cbouette,  annonce  de  mau- 
vais  presages. 

En  temps  de  paix,  I'fndien  de  ce  pays-ci  est  afl'able, 
hospitaller,  fidele  a  ses  engagements,  attache  au  point 
d'honneur;  il  sail  discerner  le  bien  d'avec  le  mal ,  le 
juste  d'avec  I'injusti;,  la  probite  d'avec  la  fourberie , 
la  gen^rosite  d'avec  la  bassesse.  Ses  manieres  et  son 
humeur  sont  douces ,  presque  cultivees,  quant  aux 
dehors  du  nioins.  Soumis  a  ses  chel's  ,  grave  ,  serieux, 
penseur,  il  est  aussi ,  par  une  singuliere  contradiction, 
nonchalant,  goulu ,  ivrogne,  joueur.  Chez  lui,  tout 
est  pousse  a  I'extreme;  d'un  sentiment  ou  d'un  etat 
quelconque  ,  il  passe  au  sentiment  ou  a  I'^lat  diame- 
Iralement  contraire  avec  une  promptitude  incroyable. 
Pour  peu  qu'un  mobile  I'eicite,  du  calme  le  plus 
prol'ond,  de  i'impassibilile  la  plus  reelle,  il  arrive  sou- 
daineuient  au  comble  de  la  i'ureur. 

En  temps  de  guerre,  I'Araucan  n'est  plus  le  meme 


(  16/1  ) 

indlviflu.  Tonics  sos  niauvaiscs  passions  sont  dechai- 
nees  alors  ,  ct  il  n'c'coute  que  les  j^ires  instincts.  La 
liaine ,  la  ciuaute,  la  vengeance,  sont  les  sentiments 
que  son  cceur  nourrit  avec  predilection  ;  il  devient 
sans  pilic  poui'  les  etres  faibles  ou  desarin^s,  inca- 
pable d'un  clan  de  g^nerositii  pour  les  vaincus ,  les 
malheureux  prisonniers,  les  femmes,  les  cnfants.  Mais 
si ,  taut  que  durenl  les  guerres  ,  il  se  montre  I'urieux, 
implacable  ,  sanguinaire  ,  il  faut  reconnaitrc  qu'il 
retournc  avec  joie  aux  babitudes  de  sa  vie  ])aisible  d^s 
que  riieiue  du  repos  a  sonn6.  Plus  encore  que  les 
combats  ou  brille  sa  valeur,  il  aime  sa  tranquille  re- 
Iraite  ,  son  harem  ,  les  juntes,  les  sorcicrs  ,  le  jou.  Pen 
enclin  a  cntretenir  un  proci^s ,  a  prolonger  un  diffe- 
rcnd,  il  d(^daigne  les  longs  discours,  ainsi  que  le  ju- 
gcment  des  bommes ,  et  lout  de  suite  il  en  appelle  a 
la  decision  du  sort.  La  chueca  (crosse  avec  laquelle 
on  cbasse  une  boule  vers  un  but  donnd)  constllue 
en  Araucanie  le  syslemc  judiciaire,  ct  decide  souvo- 
raincment  de  toute  contestation. 

Pour  sortir  du  pays,  deux  routes  s'ofl'renl  au  voya- 
geur.  L'unc  court  sur  la  lignc  de  Test  au  pied  des 
grandcs  Andes  :  c'cst le  mellleur,  le  plus  facile;  on  le 
nomme  cbemin  de  la  Pampa.  L'aulre,celui  de  I'ouest, 
que  dcvait  prendre  M.  de  Ginoux ,  lo  plus  direct  el  le 
plus  piltoresque ,  est  le  cbemin  de  la  Cote.  Du  rio 
Tirua  au  fleuve  Cautcn ,  Ic  Rio -Imperial  des  Espa- 
gnols,  le  cbemin  est  ditcstable;  il  se  prolonge  sur  une 
i'tendue  de  60  kilometres  environ  ,  mesure  prise  A  vol 
d'oiscau  ;  le  senlier,  espece  d'ecbelle  faile  par  en  tallies 
sur  Ic  dos  de  la  Cordillc^re  de  la  Cote,  monle,  descend, 
remonle  ct  redescend  toujours  avec  une  roidcur  telle. 


(  165  ) 

que  les  chevaux  araucans  seuls  peuvent  s*y  engager : 
en  France ,  nous  prendrions  les  chamois  pour  ternie 
de  comparaison.  Ce  sentier  poursuit  ses  penibles 
zigzags  en  se  trainant  sur  une  roche  gllssante  et  au 
bord  de  precipices  affreux.  En  bien  des  endroits,  cet 
epouvantable  cscalier  laisse  juste  au  cheval  la  largeur 
de  son  sabot;  la  bete  alors  est  dans  I'obligation  de 
marcher  en  croisant  les  jambes,  et  son  instinct  la 
pousse  a  incliner  le  corps  du  cote  opposed  au  precipice, 
comme  si  le  vide  immense  ouvert  sous  elle  I'attirait 
vers  I'abime. 

Quand  on  est  arrive  au  sommet  de  la  Cordillere,  on 
n'a  encore  derriere  soi  que  la  moitie  de  ce  trajet  dan- 
gereux,  qui  exige  deux  journ^es  de  marche.  Un  nouvel 
obstacle  arreta  un  instant  nos  voyageurs.  Sur  le  che- 
min  gisait  la  carcasse  d'un  cheval  abandonn^,  sans 
doute  la  veille,  par  un  acteur  de  la  Irisle  fete  de  Tirua, 
et  en  I'air,  au-dessus  des  gigantesques  araucarias  , 
planaient,  en  tourbillonnant  ,  des  troupes  de  magni- 
fiques  condors.  Le  vol  majestueux  de  ces  redoutables 
oiseaux,  leurs  cris  de  rage,  les  menaces  que  lancaient 
ieurs  yeux  de  sang  ,  et  la  marche  lente  ,  p6nible  de  la 
colonne  a  travers  la  foret  suspend ue  au  front  du  pre- 
cipice, tout  cela  composait  un  tableau  qui  aurait  fait 
deborder  en  inspirations  sublimes  Tamo  d'un  poete. 

Brise  par  les  rudcs  travaux  des  deux  journees  que 
necessite  I'escalade  de  la  Cordillere,  Ton  repose  agrea- 
blemcnt  sa  pensee  lorsqu'on  descend  vers  les  riches 
campagnes  que  fertilise  le  beau  fleuve  de  I'lmperial. 
Non  loin  de  I'embouchurc  de  ce  fleuve,  dans  un  site 
charmant,  dorment  depuis  trois  siecles  les  mines  de 
la  ville   de   ce    nom.    La    puissance   de    I'empereur 


Charles-Qiiinl  ,   patron  de  cettc  cite ,   no   I'a   pas  di- 
fenrlue    contre   la    fureur    dcs   Araucons  ;    I'linpc'iial 
clevait  etre  la  capilale  dii  gouvernemcnt  du  Chili  ,  ol 
elle  n'a  vecu  que  peu  de  jours.  Au  sud  dcs  Irihus  de 
Caulcn ,  les  plainos  de  Budi  on  de  Golem,  ct  celles  do 
Token  ,  prescntenl   la  infime  richcssc  (jue   Ics   cam- 
pagnes  de  I'laiperiai.  Dela  on  aperroil  Ic  volcan  ile  Vil- 
larica ,  que  les  Indiens  supposent  elre  la  dcmeurc  de 
Pillan ,   et  I'on   altcint  hientot  le   rio  Quoule  ,  a   un 
point  ou  commence   un   nouvcau   casse-cou  ,  moins 
perilleux  cependant  que  celui  do  Tirua.   II  faul  alors 
reprendrc  la  file  un  a  un  ,  et  guider  ses  monlures.  Le 
mauvais  passage  se  continue  sur  un  cspacc  de  dix  a 
douze  lieues,  a  iravers  une  haute  montagne  coupc^e  de 
ravins  dont  le  fond  est  tellement  houeux ,  que  parfois 
les  chevaux  s'y  enloncent  jusqu'au  poilrail.  Cette  Cor- 
dill^re  I'ranchio  ,  le  rio  duces  apparait,  et  dorrierc 
lui  on  apercoit  la  ville  de  Valdivia ,  lerme  du  voyage. 
Lorsqu'on  prend  le  cherain  de  la  Parapa,  on  passe 
dans  lo  voisinage  des  ruines  d'Angol  el  de  Purcn;  a  la 
sortie  de  I'lsla  de  La  Laja,  sur  la  rive  droite  du  Biobio, 
on  entre  dans  les  plaincs  oii  les  Espagnols  biitirent  ces 
deux  villes.    Puren  est  aujourd'luii  la  ri^sidence  d'un 
des  plus  audacieux  caciques.  Ce  chef  doit  ses  litres  de 
noblesse,  non  a  sa  naissance,  mais  a  sa  bravoure  el  a 
ses  vieilles  cruautes.  Pvbs  de  lui  vivent  des  tribus  bar- 
bares  et  vaillantes,  parmi  Icsqueiles,  au  dire  de  la  re- 
nomuK^e,  il  est  un  cacique,  Payiunial,  descendant  des 
plus  ancicns  chefs,  qui  conimande  a  sept  cents  guer- 
riers,  et  qui  posst'dc  dc  tres-grandes  richcsses.  A  ces 
Iriinis  indomjitablos,    touchent   celles   de   Cholchol , 
inquieles  el  turbulenles;  puis  celles  dc  Boroa.  Les  In- 


(    167  ) 

clieus  de  Boroa  sont  vantes  on  Araucanie  pour  la  beautu 
de  leur  visage.  En  continuant  vers  le  sud,  on  visile  les 
Araiicans  de  Maquegiia  ,  ensuite  ceux  de  Viilarico. 
L'hisloire  rapporte  qu'a  rapproche  de  I'armee  espa- 
gnole,  leslndiensde  Villarica  cacherent  soigneusement 
Tor  qu'ils  avaient  amasse  ;  mais  cette  precaulion  ne  fit 
qu'attirer  sur  eux  de  plus  gi^andes  atrocites.  Le  rio 
Tolten  sortd'un  lac  ouvert  sur  leur  lerritoire,  a  la  base 
du  volcan  de  Pillan.  A|)res  ces  tribus,  viennent  celles 
de  Peiecauchin  et  de  Petufquen. 

Au  dela  de  Valdivia ,  vlllc  chilienne,  adossee  aux 
tcrres  independantes,  resident  les  Cuncos  et  les  Iluil- 
liches,  peuplades  aux  mceurs  douccs,  qui  se  refusent 
a  avoir  des  relations  avec  les  Araucans ,  qu'ils  ont 
toujours  considert^s  comme  leurs  ennemis  naturels.  A 
r^poqiie  des  guerros  de  la  conquete,  les  Cuncos  et  les 
HuilJiclics  consentirent  a  oublier  momentanement 
leur  ininiiti(^  pour  leurs  voisins,  et,  a  I'appel  do  ceux-ci, 
ils  march^rent  contre  les  troupes  castillanes.  Cespetits 
pcuples  prirent  une  part  tr^s  active  a  la  destruction 
des  sept  vlUes. 

II  n'est  pas  sans  importance  pour  la  gcographie  de 
faire  observer  que  la  distribution  du  terrain  en  deux 
cbaines  de  niontagnes  et  en  un  bassin  intermediaire 
se  poursuit,  vers  le  sud,  assez  loin  dans  la  mer.  Depuls 
Chacabuco,  la  Gordillere  de  la  Cote,  les  Grandcs  Andes 
et  le  fond  du  bassin  Intermediaire  ont  graduellement 
abaisse ,  les  unes  leurs  tetes,  I'aulre  son  niveau,  sans 
toutefois  cbangerleur  direction  nord  et  sud.  vVrrives  a 
la  haulcur  du  Zi2°degre  de  latitude,  un  peu  au-dessous 
du  parallele  qui  passerait  par  le  volcan  de  Calbuco  ou 
d'Osorno,  la  Gordillere  de  la  CiOteet  le  bassin  plongent 


(  1«8  ) 

tout  a  coup  sous  la  mer,  landis  que  ,  prolongeani  sa 
marche,  la  chainedes  Andes,  ties-amoiruhie,  va  senier 
encore  les  volcans  de  Chaypira,  du  Corcovado,  do  Yan- 
teles,  regions  riches  en  mines  d'or,  pour  aller  mourir 
a  son  tour  dans  le  detroit  de  Magellan,  a  la  prosqu'llc 
de  Port-Famine.  Mais,  en  cxaminant  los  lieux  avec 
attention ,  on  est  force  de  reconnaltre  que  les  iles  de 
Chiloe,  les  archipels  de  los  Chonos,  etc.,  no  sont  que 
les  cimes  du  prolongement  dcs  montagnes  de  la  cote 
qui  remontent  a  Cliacabuco,  et  que  le  bassin  compris 
entrc  cos  Cordilleres  et  les  Grandos  Andes  so  continue, 
sous  la  mer,  dans  lo  golfe  de  Reloncavi,  Ic  canal  d'Au- 
cud,  les  detroits  du  Corcovado,  do  los  (Ihonos ,  etc. 
Ces  portions  de  I'ancien  continent  ont  dil  elre  submer- 
gdes  lors  du  dernier  surgissement  de  la  chaine  des 
Andes,  a  I'epoque  goologique  a  laqucUe  il  convient  de 
rapporlor  le  deluge  de  la  Gen^se. 

Parti  de  Santiago  le  16  fovrier  18/17,  M.  de  Ginoux 
entrait  a  Valdivia  le  13  mars,  apros  vingl-cinq  jours  do 
voyage;  cinq  jours  apr^s,  il  s'embarquait  pour  Valpa- 
raiso, et  le  recit  de  celle  excursion,  dont  nous  n'avons 
fait  ressortir  que  les  traits  principaux,  sera,  nous  n'en 
doutons  pas,  accueilli  du  public  avec  faveur. 

SliDM.LOT. 


(  169  ) 
VOYAGE  DANS  LE  SUD  DE  LA  BOLIVIE, 

PAR 

M.  H.-A.  \VEDF3ELL, 

Ancien  Voyugeur-Natiiraliste  dii  Museum  J'hisluire  iialuiclle, 
clc,  elc,  elc.  (I). 


Nous  avons  d^ja  fail  connaiti'e  aux  lecteurs  du  Bul- 
letin le  voyage  de  M.  Weddcil  par  Textrait,  public  dans 
ce  journal,  d'un  inleressant  chapitre  que  le  savant  ct 
consciencieux  voyageur  a  consacre  a  la  descriplion  du 
Gi-and- Chaco  (2).  En  citant  quelques  autres  passages, 
nous  avons  cherch6  a  fixer  raltention  sur  un  ouvrage 
qui,  dans  un  mince  volume,  renferme  sur  des  pays 
mal  connus  des  informations  exactes  et  precises  qu'on 
ne  trouve  pas  souvent  dans  de  gros  in -quartos.  Aujour- 
d'hui  que  M.  Wcddcll  est  de  retour  d'une  contr^e  qu'il 
vienl  d'oxplorer  pour  la  seconde  fois,  et  qu'il  va  pu- 
blier  la  relation  de  son  nouveau  voyage,  nous  croyons 
utile  d'indiqucr  au  moins  les  traits  principaux  de  sa 
premiere  excursion  dans  la  Bolivie. 

Parti  de  France  en  avril  18A3,  M.  Weddell ,  attache 
comme  medecin  a  I'expedition  scientifique  de  M.  de 
Castelnau  dans  I'Amerique  tlu  Sud,  accompagna  pen- 
dant plus  de  deux  ans  ce  voyageur  dans  ses  longues 
courses  a  travers  les  forets  et  les  deserts  et  sur  les 
fleuves  de  I'empire  hr^silien.  Se  Irouvant  le  2/i  mai 

(l)  La  relation  de  ce  voyage,  lire'e  a  part  a  un  petit  nombre  d'excni- 
plaires,  a  ete  jointe  a  V Expedition  dans  les  parties  centrales  de  I'Ame'- 
rique  du  Sud,  de  M.  Francis  de  Castelnau,  dont  eiie  forme  le  6*  vo- 
lume. 

(a)  Bulletin  de  fe'vricr  i85i,  4*  seiie,  1. 1,  p.  122. 


(   170   ) 

18/15  clans  iin  petit  village  de  la  province  brdsilieniio 
(le  Matto-Grosso,  siluee  sur  le  Rio-Paraguay,  a  une 
distance  a  pen  pres  dgale  des  deux  oceans,  M.  Wcddell, 
([ui  ne  perdait  point  de  vue  la  mission  particuli6rc 
qii'il  avail  recue  de  notre  Museum  d'liisloire  naturelle, 
et  curieux  de  visiter  des  regions  oil  aucun  naturalislc 
n'avait  encore  penelre  ,  se  separa  de  M.  de  Caslelnau. 
Apres  avoir  visits  Ics  forels  a  Ipt^scacuanha,  qui  con- 
stituent une  des  principalcs  richesses  de  cette  partio  dc 
I'empire  du  Bresil,  M.  AVoddeJl  so  dirigea  vers  la  fron- 
tifere  de  la  r^publiquc  de  Bolivic,  qu'il  passa  le  29  aoiil 
de  la  nieme  annee.  11  ne  voit,  pour  aiiisi  dire,  qu'cn 
passant  la  province  de  Chiquitos,  si  bion  etudiee  juir 
M.  Alcide  d'Orbigny.  II  dticrit  en  pen  do  mots,  quoique 
avec  exactitude,  le  Curuciici,  coleopttiie  du  genre  Py- 
rop/iorus,  vrai  joyau  vivant,  que  la  coquettcrie  des 
jeunes  fiUes  de  Santa-Caaiz  de  la  Sierra  a  mis  a  profit 
pour  se  or^er  des  parures  charmantes,  et  dont  ellcs 
lornient  des  guirlandes  luniineuscs.  Lc  13  octobre,  il 
traverse  le  Rio-Grande,  qui  di^crit,  comme  Ion  sail, 
un  vaste  coudo  avant  d'enlrer  dans  la  jnovince  de  Cbi- 
quitos  et  de  se  reunir,  vers  le  nord,  au  Rio-Beni.  Le  Ih, 
il  enire  a  Santa-Cruz  de  la  Sierra,  qu'il  ne  tarde  pas  a 
quitter.  Traversant  ensuite  quelques  bourgades  peu-. 
pl^es  par  les  Indians  Chiriguanos,  il  arrive  h  Gutierrez 
(2  decembre),  r<icemment  <^rigee  en  capitale  de  la 
province  bolivienne  de  la  Cordillera,  et  silu(^e  dans 
une  prairie  marecageuse.  Le  mais,  le  manioc  et  le  riz, 
constituent  le  fond  de  la  nourriture  v(^g6tale  des  habi- 
tants de  cette  province,  ou  Ton  cultive  ^galemont  la 
patate,  le  mani ,  le  bananier  et  la  canne  a  sucre.  Elle 
est  divis<!!e  en  deux  cantons  :  celui  de  Piray,  au  nord, 


(    171   ) 

etcelul  do  Gutierrez,  au  siul,  cliacun  d'eux  renfcrmatit 
un  grand  nombre  de  hauieaiix,  dans  lesquols  sont  dis- 
simines  Ics  habitants.  Aiix  environs  de  Gutierrez,  se 
trouve  le  lac  Opahusti,  lequel,  au  dire  des  nalurels, 
occupe  la  plai  e  d'un  village  consiilerable,  qui,  un 
jour,  s'enfonca  subitenient  (1).  Comme  on  prelendait 
aussi  que  des  iles  enchantees  [Ceri-itos),  que  le  pied 
d'aucun  etre  humain  n'avail  foulees,  se  trouvaient  au 
centre  du  lac,  M.  Weddel! ,  dans  son  desir  de  tout 
connailre  et  de  rompre  le  charnic,  se  rcndit  sur  les 
lieux ,  accorapagne  d'un  grand  nombre  d'liabitanls 
de  la  vallee  de  Limonzito,  qui  se  grossit  d'un  corps  de 
fenrimes  de  tout  age,  d^sireuses ,  disaient-elles,  d'as- 
sisler  au  moins  de  leurs  prieres  au  succes  de  I'ev^ne- 
rnenl;  mais  a  peine  fut-il  question  de  retirer  \es  pon- 
chos, les  bottes,  et  aulres  vfetements,  que  les  bons 
[Jmotizi!c7ws  se  relirerent  un  a  un  jusqu'au  dernier, 
laissanl  M.  Weddell  seul  pour  aflVonter  les  esprits  des 
cerritos.  II  traversa  le  lac  partie  a  la  nage  et  partie  erl 
iTiarchant  sur  un  linion  noir  comme  de  I'cncre,  parti- 
culi^rement  doux  au  toucher,  ayant  de  la  boue  jusqu'a 
mi-corps.  Lorsqu'il  mitpied  a  terre,  il  s'apercut  qu'au 
lieu  de  Irois  iles  dont  on  supposait  que  cet  archipel 
olait  compose,  il  y  en  avail  quatre.  II  avait  done,  sans 
s'en  douler,  d^couvcrt  une  terre  inconnue  a  laquelle 
il  pouvail  donner  son  nom,  si  la  fantaisie  lui  en  avait 
pris.  La  plus  grandc  de  cos  iles  elait  couverte  de  vege- 
tation; mais  il  n'y  vit  aucun  arbre  en  fleur.  Sur  le  bord 
meme  de  I'eau ,  charg<ie  de  7  pour  100  de  parties  sa- 

(i)  C'csl  a  cause  de  cclic  circonstance,  preteiid-on,  que  le  lac  recut 
If!  nom  iVOpiihusu,  '|ui  si;;iiifi(;rait,  en  lannue  giiarani,  tout  dhparut. 


(172) 

lines,  il  rcinarqua  que  les  pierres  ctaienl  couvertes 
d'une  iTiali^re  violaceo  qui  lui  parul  6trc  de  nalurc 
vogetale  ;  il  en  emporla  phisieurs  pour  sa  colleclion. 

Le  12  decembrc,  M.  WeildcU  pril  congd-  de  Gulierrcz 
el  de  ses  i)ales  iiabitanls,  pour  se  dirigcr  vers  la  pro- 
vince d'Azero.  Sauces,  sa  capilaio,  tire  son  nom  du 
grand  nombre  de  saulcs  [soaces,  en  espagnol ),  qui  sc 
renconlrcnt  aux  environs;  ellc  a  des  maisons  assez 
bien  construites  et  couvorles  en  tuilcs.  La  Cordill6re 
de  Illinchnpa,  situee  a  trois  lieues  au  nord-cst  de  cette 
villc ,  presentc  un  intdret  parliculier,  en  ce  qu'olle 
forme  la  lignc  du  partage  des  eaux  du  Rio-Grande  cl 
de  celles  du  Parabiti.  A  Sauces,  M.  Wcddoll  vit  pour  la 
premiere  fois  la  coca,  feuille  dessdcliee  d'un  arbrisseau 
que  les  Indiens  macbent,  el  dont  on  se  sert  pour  faire 
une  espi^cc  de  the.  II  y  resta  quelqucs  jours,  pour  at- 
tendre  une  escorte,  et  se  reiulit  ensuito  a  Pomnbaniba. 
Cette  capitate  de  la  province  de  Toraina  a  des  maisons 
assez  bien  alignees ,  dont  los  toils  sonl  couvorls  en 
tuiles  comme  ceux  de  Sauces,  el,  de  plus  que  celle-ci, 
plusieurs  de  ses  rues  sonl  pav^es.  Elevee  d'environ 
2  600  metres  au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  Poma- 
bamba  passe  pour  avoir  une  population  de  700  ames; 
la  temperature  moycnne  de  I'annee  est,  a  peu  do  cliose 
pr6s,  de  14  degr^s  cenligrades,  et  Ton  y  parle  le  qid- 
chua,  bien  plutot  que  Tespagnol.  La  cliarrue  dont  on 
se  sert  dans  cette  conlrcic,  et  presque  universellomenl 
dans  les  ci-devant  colonies  espagnoles  de  TAmericjuc, 
consiste  en  un  grand  crochet  de  bois,  garni  d'une 
pointe  de  fer,  et  I'ien  de  plus;  ce  sont  des  bceufs  que 
Ton  y  allele. 

De  Pomabamba,  M.  Weddcll,  api'es  avoir  pass6  a  gue 


(  173  ) 

le  Pilcomayo  a  environ  hO  ou  50  lieues  de  sa  source, 
se  dirigea  vers  Cenli ,  jolie  vlllc,  capitale  de  la  pro- 
vince du  meine  noni ,  dent  la  population  est  6valuee  a 
1 100  auies;  on  donne  a  la  province  un  pen  moins  de 
40  000  habitants,  dont  6  000  Indiens.  C'est  dans  les 
environs  qu'un  Iroupeau  de  Llamas,  dont  la  patrie 
venerable  est  la  Puna,  frappa  pour  la  premiere  fois  son 
attention. 

Chaque  habitation  de  Tarija ,  placee  au  fond  d'une 
vallee  que  M.  Weddell  vit  apres  avoir  quitte  Centi , 
seniblc  sortir  d'un  petit  massif  de  verdure.  De  son 
centre  s'el6vent  les  tours  de  briques  de  deux  eglises  ; 
les  toils  des  maisons  sont  presque  plats  et  compl^te- 
mcnt  reconverts  de  terre.  Quelques-uns  seulement  sont 
orn^s  sur  leurs  bords  d'un  mince  lisere  de  tuiles.  Les 
rues  sont  bien  alignees  et  assez  bien  pav^es,  et  des 
ri^verberes  sont  suspendus  a  des  distances  r^guliferes. 
Tarija,  dont  la  population  ne  depasse  pas  4000  times, 
est  du  petit  nombre  des  villes  boliviennes  dans  les- 
quelles  I'elemcnt  indien  est  en  grande  minorite. 
Fondee  en  1574  par  les  jesuites,  ils  en  avaient  fait  le 
chef-lieu  general  de  leurs  missions,  qui  etaient,  a  la  fin 
du  xviii*  siecle ,  au  nombre  de  vingl  et  une,  et  comp- 
taient  16  571  habitants.  Celte  ville,  placee  sur  les  con- 
fins  de  la  Republique  Argentine,  dont  elle  a  longtemps 
dependu,  pent  etre  consideree,  sous  le  rapport  de  ses 
mceurs  et  de  ses  coutumes,  comme  faisant  encore 
partie  de  ce  pays.  C'est  en  1826  qu'elle  en  fut  violem- 
ment  s^paree,  pour  etre  unic  a  la  Bolivie;  elle  est  au- 
jourd'hui  la  capitale  de  la  province  du  raemc  nom.  Un 
usage,  que  M.  Weddell  considere  comme  propre  a  Ta- 
rija, ou  du  moins  qu'il  n'avait  encore  remarqu6  dans 


(  17/i  ) 
aiicune  autre  ville  do  rAmcriquc ,  est  celui  qu'onl  Ics 
fomtiios  de  se  farder;  il  vout  I'aire  allusion  a  colles  dcs 
classes  eleveos,  car  prcsque  partoul  lo  lard  est  em- 
ploye dans  certains  rangs  du  has  pi.uple.  Cclle  coii- 
tume  est  porlee  si  loin  dans  (juckjucs  families,  que 
Ton  pourrait  dire  qu'il  s'y  troiivc  dos  femmes  dont 
on  n'a  jamais  vu  la  couleur  naturellc.  II  y  a  a  Tarlja 
une  congregation  de  peres  franciscains  qui ,  par  la 
pureld  de  leurs  mceurs  el  par  les  services  qu'ils  ont 
rendus  a  la  \illc,  out  su  s'attlrcr  le  respect  de  toutes 
les  classes  de  la  society  ;  leur  bibliotlieque  ne  renfcrmc 
pas  moins  de  ({uatre  mille  volumes,  la  plupart  traitanl 
de  sujets  religieux ;  il  y  en  a  cependanl  un  certain 
nombre  sur  la  geographic,  I'histoiro,  etc. 

De  Tarija,  M.  Weddell  sc  rendil  par  San -Luis  el  Vil- 
larodrigo  a  la  fronti^re  meridionale  de  la  Bolivie,  d'oii 
il  s'aventura  dans  le  Grand- CJiaco.  Apres  cclle  excur- 
sion, notre  voyageur  revint  a  Tarija,  a  Cenli,  et,  de 
la,  gagna  Chuquisaca,  lermo  do  son  exploration  dans 
lo  sud  (le  la  Bolivie.  II  y  arriva  le  19  aoAl  1841. 

Nous  ajouterons  que  M.  Weddell  a  consacre  un  cha- 
pitrc  fori  intdressant  do  sa  relation  a  I'histoirc  cles 
Missions,  creees  par  les  religieux  de  Tarija  ,  dont  il  a 
puis6  la  plupart  des  elements  dans  un  recueil  de  do- 
cuments publics  en  1836  par  don  Pedro  dc  Angelis, 
I'un  de  nos  corrcspondants  elrangers,  dout  nous  rc- 
grellons  tous  que  le  silence  se  jirolonge  un  pcu  Irop. 
Si  ces  lignes  tombent  sous  ses  ycux  ,  nous  esperons 
qui!  essay  era  de  se  juslifier  sans  doute.  Mais  nous 
devons  lui  declarer  que  nous  n'acceptons  sa  juslifu  a- 
lion  qu'accompagn(ie  d'un  bon  article  pour  le  Bulletin. 

De  la  RoQUjiTTj:. 


(  175  ) 

NOTICE 
SUR  LES  NOIRS  DE  LA  COTE  DE  KROO 

(AFf.IQUE   OCCIDENTALE)  (1), 

PAR 

M.   CONNELLY  (2). 

II  y  a  deux  cents  ou  deux  cent  cinquante  ans, 
quelques  tribus  de  Bushmen,  du  nom  de  Claho , 
etablis  a  2  ou  300  milles  dans  rinterieui",  vinrent , 
en  descendant  Ja  riviere  Pauvie  [Poor  river),  se  fixer 
pres  de  la  baie ,  ou  ils  apprirent  a  connailre  le  sel. 
D'aulres  tribus  de  I'interieur  vinrent  avec  leurs  chefs 
respectlfs  se  reunir  aux  premiers  et  se  fondre  en  un 
seul  gouvernemcnt,  comprenant  cinq  villes,  sous  les 
noms  de  Liltle-Kroo,  Settra-Kroo,  Kroo-Bar,  Nana- 
Kroo  et  Kbig-jyUV s-Towii.  Du  temps  de  la  Iraile,  ccs 
tribus  aidaienl  les  n^griers  portugais.  Ils  pretendent 
que,  par  suite  d'un  comprorais  enlre  eux  et  les  negriers 
portugais  ou  aulres,  ils  devaienl  elre  exempts  de  I'cs- 

(1)  C'est  une  depemlance  de  la  rote  Jcs  Graines,  ou  de  Mal;){»uelte, 
pies  la  republique  dc  Liberia.  Le  pays  de  Kroo,  ou  Ivrou,  s'elend  jus- 
qu'aiipres  de  la  rivirie  Saiicjuiuy  au  nonl  (5"  12'  laiit.^,  et  jusr|u";i 
Badoti,  au  sud.  u  Les  hoinmes  du  Kiou,  dit  M.  le  capilaiiie  de  Kei- 
li.illet  [Manuel  dc  la  navi<j(ilion  u  la  cote  occideiitale  d'AfrijUc^^  soiit 
inlelligpiit-i,  d'un  uatuie!  Joiix,  obeissants,  et  Ues-piopres ,  par  leui- 
liabiuuJe  du  travail  des  embarcations,  lenr  connaissance  de  la  cote, 
leur  Iiabilete  a  franchir  les  bar.res  et  L  s  brisant.<,  aux  loiainunications 
si  difficiles  a  e'tablir  sur  celte  eote ,  qui  en  est  yaniie  dans  toute  son 
eteiidue.  Ce  sout  les  meilleur;;  travailleiirs  de  toute  la  cote  d'Afrique, 
sans  en  excepler  les  Yoloffs  du  Seii('(ia!.  >i  D.  L.  U. 

(2)  Cette  interessante  notice,  dont  I'auteur  est  -NL  Connelly,  ttiis- 
sionnaire  americain,  a  ele  inseree  dai1s  YAtiti- Slavery  reporter^  et  tra- 
duite  dans  la  Rcvi'.c  rolo)iiale,  d'oii  nous  I'avons  extraite.         D.  L.  It. 


(  176) 

clavagc ,  et  portaient  comme  signe  de  reconnaissance 
line  marque  noire  sur  le  front  et  le  ncz.  Cette  coulume 
exisle  encore  cliez  eux.  II  est  egaleincnt  exact  qu'ils  ne 
se  vendent  pas  comme  esclaves.  Quant  a  leur  nom  do 
Kroomen  ,  il  jiasse  pour  n'etre  qu'une  corruption  de 
Crewmen  ( homrae  d'equipage),  nom  qu'ils   auraient 
regu  a  cause  de  leur  frequent  emploi  a  bord  des  navires 
qui  visitenl  la  cote  d'Afrique.  La  polygamic  est  tros- 
repandue  parmi  eux,  et  I'esclavage  y  est  en  vigueur  : 
loutefois  leurs  esclaves  appartiennent  tous  a  d'autres 
peuplades  et  ne  sont  jamais  vendus  aux  Strangers  ni 
meme  en  dehors  de  la  triliu.   Leurs  habitations  sent 
de  forme  carree,  conslruiles  en  picux  revelus  de  bam- 
bous  tresses,  avec  un  toit'couvert  de  feuilles.  Le  plan- 
cher  est  form6  de  bambou  Ircsse,  6lev6  sur  des  pieux 
de  18  pouces;  la  portc  et  le  plafond  qui  supportc  leur 
grenicr  ont  si  pen  do  hauteur,  qu'un  adulte  nc  peul 
y  entrer  debout.  II  y  a  d'ordinaire,  dans  chaquc  case, 
trois  clxambres  separees  par  des  cloisons  de  bambou 
trcssd.  Le  foyer  est  construit  en  terre  glaise ,  dans  un 
coin  de  la  chambre,  ou  se  Irouve  I'unique  fenelre  qui 
laisso  penetrcr  le  jour  et  sorlir  la  fumee.  La  fumee,  du 
reste,  en  penetrant  dans  le  grenier  par  les  inlerslices 
du  bambou,  preserve  Ic  riz  des  atlaqucs  des  insectes, 
qui  autremeut  Ic  devoi'eraient. 

Leur  ameublement  consislc  presque  uniquement  en 
quelques  ustcnsllos  de  cuisine.  Le  parquet  leur  lient 
lieu  do  lit,  de  tabic  et  de  chaises;  ils  ont  pour  oreiller 
un  moiccau  de  bois  rond.  Une  piece  d'etollc  roul6e 
aulour  des  reins  forme  leur  vctement.  Leur  culle  con- 
sislc dans  une  contemplation  superslilieuse  de  la  nou- 
vclle  lune;  une  fcle  est  cdiebrc^c  le  premier  jour  de  la 


(  177  ) 

lune  par  les  chefs,  qui  font  une  promenade  de  devo- 
tion dans  un  fourr^  appel(i  le  Bois  dn  Diable.  lis  met- 
tent  leur  con  fiance  dans  la  protection  des  amulettes  et 
des  gris-gris.  Ce  peuple  altribue  la  mort  et  la  maladie 
a  des  sortileges,  et  ils  s'adi-essent  a  leurs  docteurs  pour 
savoir  quelle  est  la  personne  qui  par  sortilege  est  cause 
de  ces  maux.  Les  reponses  de  ces  docteurs  sont  accueil- 
lies  comme  infaillibles.  La  personne  designee  par  eiix 
comma  coupable  de  sorcellerie  est  arret^e  par  le 
guerrier-roi,  et  condamnee  a  I'epreuve  du  sassy-ivood. 
L'^corce  de  ce  bois  est  un  narcotique  puissant  dont 
l'accus6  est  contraint  de  boire  une  forte  decoction. 
Apres  avoir  bu,  il  se  promfene  de  long  en  large,  en 
s'ecriant  :  «  Suis-je  un  sorcier?  suis-je  un  sorcier  ?  » 
pendant  qu'un  des  executeurs  le  suit ,  en  disant  : 
«  Vous  etes  un  sorcier,  vous  etes  un  sorcier.  »  Cette 
c^remonie  dure  jusqu'a  ce  qii'il  ait  rejete  le  poison 
et  alors  son  innocence  est  prochunee ;  mais  si  la  dose 
agil  comme  purgatif ,  on  declare  le  malheureux  cou- 
pable, et  on  le  contraint  de  boii^e  de  nouvelles  doses  de 
la  decoction  et  de  subir  d'autres  mauvais  traitemenls 
qui  entrainent  bientot  la  mort.  Quand  I'innocence  est 
proclamee,  c'est  une  grande  joie  et  un  grand  trioinphe 
parmi  les  amis  de  I'accus^,  qui  pai'courent  la  ville  en 
chanlant,  en  dansant,  en  lirant  des  coups  de  fusil  :  le 
raagicien  rend  a  ceux  qui  ont  eu  recours  a  lui  I'argent 
qu'il  a  regu.  Nous  eslimons  que  cette  malheureuse  su- 
perstition du  sassy-ivood  cause  chaque  annee  la  mort 
de  milliers  d'Africains. 

Dans  les  tribus  qui  se  sonl  r^unies  pour  former  la 
nation  des  Kroomen ,  il  est  probable  que,  dans  I'ori- 
gine,  le  gouvcrnement  <Hait  })alriarcal ;  aujourd'hui, 

III.    Fi;VRlER.    5.  12 


(  ^78  ) 
^'est  line  olij.  archie  qui  so  perpelue  d'elleraSme,  bien 
qu'un  des  chelsait  le  litre  do  roi  et  un  autre  celui  de 
gouverneur.  Les  chefs  sont  au  noaibre  de  douze   a 
quinze  ;  ils  portent  comme  signe  d'autorite  un  anneau 
de  I'er  a  la  juuibe.  La  dignile  de  roi  est  huriidilaire; 
i'office  de  gouverneur  est  donne  a  une  faniille  pour  des 
services  anciens  rendus  par  ies  ancelres  dans  la  con- 
quete  du  pays.  Le  guerrier-roi  est  elu  pour  un  lenaps 
indefini  par  les  chefs;  il  est  general  des  troupes,  qu'il 
commande  en  teuips  de  guerre ,  ct  charge  de  faire 
arreter  et  executer  ceux  qui  sonl  condamnes  a  boire  le 
sass/-i\'ood.  Celte  charge  est  fort  rccherchee,  car  celui 
qui  en  est  I'evetu  a  droit  a  une  retribution  assez  large 
pour  chaque  arresLation.  Outre  ces  hauls  dignilairos  et 
leurs  assistants ,  il  y  a  encore  six  ou  huit  chefs  qu'on 
appelle  les  hornmes  du  palabre ;  ceux-ci ,  reunis  aux 
autres  rois  et  gouverneurs,  fonnent  lo  couseil  de  la 
nation.  Chacune  des  trihus,  dout  la  reunion  lonne  le 
people  des  Rroomen ,  a  son  roi,  et  le  roi  supreme  est 
pris  a  tour  de  role  dans  chacune  des  families  royales. 
Les  lois  de  ce  people  sonl  un  corps  de  coulunies  Irans- 
mises  par  la  tradition  ,  Inlerprelees  el  appliquees  par 
le  conseil  general ,  qui  rend  a  I'occasion  des  lois  sp6- 
ciales,  le  plus  souvent  sugg6r»!!es  ou  diclees  par  le  doc- 
teur  ou  magicien.  Ces  lois  sonl  imparfailcs ,  incoh6- 
rentes  et  injustes.  Si  queique  objct  se  perd,  et  qu'un 
Kroonian  soil  accuse  de  I'avoir  derobe,  I'accus^  est 
contraint  a  boire  le  sassy-wood  pour  prouver  son  inno- 
cence. 

Les  motifs  dirigeants  chez.  les  Kroomen  sont  la  sen- 
suality et  la  vanil6.  Les  hommos  employes  a  la  naviga- 
tion sur  la  cote,  ou  romme  facleurs  .i  terro,  sont  indus- 


(  179  ) 

trieux  et  actifs;  dans  leurs  villages  et  sur  les  plantations, 
lis  demeurent  oisifs,  les  femnies  seules  s'occupent  des 
travaux.  Les  lioiiimos  consti'iiisenl  les  cases  et  defri- 
chenl  les  tei'ies  ;  les  lemmes  font  les  semailles,  surveil- 
lent,  cultivent,  uioissonnent  et  battent  le  riz;  elles 
coupent  et  apportent  le  bois  et  font  tout  le  Iravail  a 
i'int^rienr.  II  est  rare  qu'elles  mangent  avec  les 
hommes ;  la  favorite,  on  premiere  femme,  est  senle 
exempte  de  cette  exclusion  :  c'est  elle  qui  surveille  la 
caisson  des  aliments  et  en  goute  la  premiere  avant  que 
le  mari  y  touciie.  La  polygamie  est  une  cause  constante 
de  jalousies  et  de  querelles  entre  les  femmes.  Toutes 
les  femmes  legitimes  sont  achetees  pendant  qu'elles 
sonl  enfanls,  et  remises  a  leurs  maris  quand  elles  ont 
alteint  I'age  nubile. 

Les  femmes  agees  et  incapables  d'autre  travail  s'oc- 
cupent avec  assiduite  a  faire  du  sel  par  Tebullition  de 
I'eau  de  mer.  C'est  uii  de  leurs  principaux  articles  de 
traite  avec  les  tribus  de  I'int^rieur.  Les  chefs  des  fa- 
milies influentes  ont  sous  leur  direction  des  jeunes 
gens  (parmi  lesquels  on  comptc  souvent  des  hommes 
de  trente  uu  quarante  ans),  et  ils  agissent  avec  eux 
comme  des  luteurs  avec  des  pupilies.  Ces  jeunes  gens 
se  rc^pandent  sur  differents  points  de  la  cote  de  Sierra- 
Leone  au  cap  Coast,  et  meme  a  Fernando -Po,  par 
groupesdedix  ou  douze,  qui  choisissent  un  d'entre  eux 
comme  chef  :  c'est  lui  qui  fait  les  engagements  pour 
tous.  Apr^s  avoir  amasse  le  plus  d'argent  qu'ils  peu- 
venl  par  leur  travail  dans  une  periode  de  temps  de  six 
raois  a  deux  ou  irois  ans,  ils  reviennenl  dans  leur  pays. 
Leurs  Economies  sont  alors  disLiibuees  a  leurs  families 
par  leurs  tuteurs.  qui  doivent  aussi  acheter  des  femmes 


(  180) 

pour  chacun  de  cos  jeunes  gens  dus  que,  par  son  lra« 
vail,  il  en  a  nic^rit^  une.  On  juge  chez  les  Kroomen  de 
I'importaiice  d'un  homme  d'apr^s  le  noinbre  de  ses 
femmes  et  la  rlchesse  de  ses  troupeaux  de  bcEufs  :  c'est 
en  bestiaux,  en  effel,  que  consisle  la  principale  richesse 
de  cette  nation. 

La  mission  presbyt^rienne  clicz  les  Kroomen  a  deja 
hull  annees  d'existence.  Celle  mission  a  loujours  eu 
comme  annexe  une  6cole  oii  les  enfanls  sonl  nourris, 
vetus  el  inslruils  gratuilement.  Pendant  trois  ans , 
I'dcole  a  compte ,  en  moyenne ,  environ  60  dcoliers ; 
mais,  depuis  cinq  ans,  elle  est  en  decadence,  et  n'en 
a  plus  que  25.  Trois  cents  enfants  environ  ont  appris, 
grace  a  ces  lemons,  a  lire  intelligiblement ,  plusieui's  a 
^crlre ,  et  tous  ont  ^te  instruits  des  doctrines  de  la  re- 
ligion cbriHienne.  Un  petit  noinbre  s'est  livre  a  I'etude 
de  quelques  sciences;  un  nombre  bien  plus  grand  n'a 
pu  rien  apprendre,  qu'a  6peler  ou  ua6me  a  connaltre 
I'alphabet. 


NOTE  SUR  LE  MAROC. 


11  est  pen  de  pays  sur  lesquels  on  ait  6crit  plus  de 
volumes  que  sur  le  Maroc,  et,  il  faut  bien  Ic  dire,  il 
en  est  pcu  sur  lesquels  nous  soyons  moins  ^clair(5s. 
Independammenl  de  ce  que  nous  ont  laiss6  Polybe, 
Strabon ,  Mila,  Pline,  Plolomee,  etc.,  etc.,  sur  cette 
contree  mysl6rieuse,  nous  possedons  vingt-neuf  ou- 
vrages  d'auleurs  arabes,  deux  cent  cinquante-buit 
d'aulcurs  europeens,  des  cartes,  des  plans,  des  vues 


(  181  ) 

par  milliers.  Nous  possi^clons  en  outre  I'excollent  tra- 
vail de  M.  Renou,  travail  qui  fait  partie  des  Etudes  de 
la  commission  scientifique  d'Alger ;  mais  la  lumiere 
est  loin  d'etre  complete. 

Cast  surtout  par  voie  d'analogie  avec  ce  que  nous 
savons  de  nos  possessions  algeriennes,  et  nous  sommes 
loin  encore  de  connaitre  compl^teraent  ce  magnifique 
pays,  que  nous  pouvons  soupgonner  ce  qu'est  en  r6a- 
lil6  le  Maroc.  On  sait,  par  exeniple,  que  ce  vaste  em- 
pire a  une  superficie  de  5  775  myriametres  carres, 
ce  qui  fait  un  pays  plus  grand  que  la  France,  dont  la 
superficie  n'est  que  de  5  300  myriametres.  Mais  quel 
est  le  chiCfre  de  la  population  qui  couvre  cette  immense 
etendue  ?  Ici  nous  retombons  dans  les  evaluations.  Le 
voyageur  Jackson  estimait  ce  chiffre  a  15  millions ; 
mais  c'est  la  une  exageration  puerile,  et  en  tenant 
compte  de  ce  que  nous  voyons  en  Algerie,  il  n'est  pas 
permis  d'evaluer  la  population  du  Maroc  a  plus  de 
6  millions  d'habitants. 

Cette  population  se  divise,  comme  dans  le  pays  du 
nord  de  I'Afrique,  en  Berb^res,  Arabes,  Maures,  juifs 
et  negres,  et  dans  des  proportions  a  peu  pres  iden- 
tiques.  Les  Berberes,  anciens  maltres  du  sol,  dont  ils 
furent  deposs^des  par  les  Arabes,  occupent  presque 
exclusivement  la  zone  montagneuse  qui  traverse  le 
Maroc  du  sud-ouest  au  nord-est. 

Les  montagnes  du  Rif,  plus  rapprochdes  de  la  cole, 
et  qui  sont  un  contre-fort  de  la  grande  chaine  centrale, 
sont  babit^es  par  des  tribus  indomptees,  dont  nous 
connaissons  a  peine  les  noras,  et  encore  ne  les  avons- 
nous  appris  que  par  les  recits  de  Jean  L6on  I'Ai'ricain, 
qui  datent  de  trois  siecles. 


{   182  ) 

Cc  que  nous  connaissons  le  iiiieux,  ce  sont  les 
grandes  plaines  qui  fornient  la  seconde  zone,  oil  se 
trouvent  les  principales  villes  marocaines,  telles  que 
Ouchda,  Taza,  Ouezzan ,  Mekn^s,  Fez,  Maroc  ,  et  les 
villes  du  littoral  de  I'Ocean. 

Tout  a  fait  au  sud ,  se  trouve  la  contr^e  monta- 
gneuse  de  Gazoula,  oil  se  tiennent  les  grands  marches 
d'^change  pour  les  tribus  du  sud.  Tout  cc  que  nous 
savnns  de  ce  inysl^rieux  pays,  c'esl  qu'il  possfede  des 
vallees  ot  des  plaines  fertiles,  de  grands  lacs  navigables, 
des  forels  magnifiques,  des  cours  d'eau  poissonneux. 
Mais  cette  contr^e,  comme  la  plupart  de  celles  qui 
formenl  I'empire  du  Maroc,  n'est  soumise  que  nomi- 
nalement.  Et  en  voici  la  preuve  :  la  superficie  de  I'em- 
pire, avons-nous  dit ,  est  de  5  775  myriamdtres  carr^s,  ||| 
2  500  a  peine  consenlent  a  payer  I'impot,  et  encore 
on  cnmprend  dans  ce  cbifTre  le  Rif  et  plusieurs  tribus, 
comme  les  Chaonia,  qui  ne  payent  les  taxes  que  lors- 
qu'elles  y  sont  conti^aintes  par  la  voi^  des  armes  et 
des  razzias  ;  le  reste  6chappe  a  toute  colonisation. 

Le  Maroc  se  divise,  comme  notre  Alg^rie,  en  Tell  el 
en  Sahara.  Le  Tell  marocain  a  une  longueur  d'environ 
75  myriametres;  il  en  a  30  ci  hO  de  largeur,  et  sa  su- 
perficie est  de  3  225  myriametres  carr^s,  ce  qui  fait 
une  ^tendue  double,  ou  peu  s'en  faut ,  de  celle  de  notre 
Tell  algerien.  Le  Sahara  marocain  est  d'une  ^tenduc 
h  peu  pr^s  ^gale  a  celle  du  Sahara  algerien.  Ce  puis- 
sant element  do  richesse  agricole  est  a  peine  exploits. 
On  cultive  autour  des  villes  seulement  quclques  le- 
gumes et  quelques  fruits.  La  canne  h  sucre  a  4t^  cul- 
tiv^e  autrefois  dans  les  provinces  de  I'ouosl,  et  cette 
culture  avail  couipletemenl  rt^ussi.  Les  forels  sont  g^- 


(  183  ) 

n^ralement  pourviies  d'essences  variees  qui  acqui^rent 
de  magnifiques  d^veloppements. 

Ce  pays  doit  a  la  hauteur  de  ses  montagnes  et  a  I'uni- 
formite  de  la  pente  gen^rale  les  cours  d'eau  les  plus 
considerables  que  possfede  le  nord  de  I'Afrique.  Nous 
cjterons  le  Miouia,  le  Loukkos ,  I'Ouarra  ,  le  Sbou , 
]'Omm-er-R'hia ,  le  Bouragraz,  qui  arrosent  les  pro- 
vinces septentrionales,  et  le  Guir,  le  Ziz  et  I'Ouad- 
Draa,  qui  pourraient,  si  Ton  savait  utiliserleur  cours, 
f^conder  les  provinces  m^ridionales.  Les  ricliesses  mi- 
n^rales  sent  peu  connues  ^  mais  faut-il  s'en  etonner 
quand ,  apres  vingt-deux  ans  d'occupation ,  nous  ne 
connaissons  pas  encore  toutes  celles  que  renfenne  le 
sol  algerien,  soumis  a  notre  domination?  Quelques 
mines  decuivre  sontgrossierementexploil^es,  dememe 
que  les  montagnards  du  Rif  exploitent  du  minerai 
de  fer,  pres  de  la  riviere  Miouia;  mais  ces  industries 
rudimentaires  sufTisent  a  indiquer  quels  tresors  la 
science  moderne  saurait  tirer  des  flancs  de  ces  mon- 
tagnes inexplor^es. 

Quant  aux  villes  principales,  Tanger,  Fez,  Maroc, 
Tetouan ,  etc. ,  etc. ,  elles  peuvenl  etre  I'objet  de  mono- 
grapliies  interessantes,  et  elles  ont  6te  plus  d'une  fois 
decrites  avec  soin  par  les  vovageiirs  du  siecle  dernier 
et  par  les  consuls  qui  y  resident  :  c'est  a  ces  seules 
villes  que  s'est  longtemps  bornee  la  connaissance  geo- 
graphique  que  nous  avons  cue  do  I'empire  du  Maroc. 

{Extrait  (Viin  article  dc  la  Revue  orientale  d6  1852,  par 
M.  Louis  Jonrdan.) 


(  m  ) 

rVonvelle^  geo$r»{ilii(|iies. 


ASIE. 

Le  PuNJAun  (Pundjab),  or  pays  des  Sihks  (Sikhs). — 
Le  Punjaub,  plus  connu  en  Europe  sous  le  (ilre  de 
royaumc  dc  Lahore,  el  tout  r^cemment  annexe  aux 
possessions  anglaises  de  I'lndo,  tire  son  nom  des  cinq 
fleuves  qui  le  sillonnent  ou  limitent  dans  leurs  par- 
cours  :  ces  fleuves  principaux  di\isent  le  Penjaub  en 
cinq  zones,  de  la  forme  d'un  secteur,  connu  sous  le 
nom  de  Doabs.  Born6  au  nord-ouest  par  I'lndus  el  au 
sud-est  par  le  Sutleje,  le  Punjaub  proprement  dit 
figure  assez  exactement  un  ti'iangle  dont  le  sommet  est 
plac6  a  Milhencote,  a  la  jonction  de  ces  deux  fleuves, 
la  base  etant  form^e  au  nord-est  par  les  chaines  de 
vastes  montagnes  appartenant  a  I'llimalaya,  ou  Cau- 
casc  hindou.  Pechawcr  et  la  D^jarat,  conquis  sur  les 
AfTgbans,  sont  les  seules  provinces  qui  appartiennent 
aux  Sihks,  au  dcla  de  I'lndus,  en  dehors  du  triangle 
dont  on  vient  de  parler. 

Le  climat,  la  nature  du  sol,  et  le  caractere  du  pays, 
varient  infiniment  dans  celle  vaste  contree,  qui  s'etend 
dcpuis  les  dd'serls  bridants  du  Scinde  jusqu'aux  mon- 
tagnes neigcuscs  dc  I'Aflghanistan  et  du  Cachemire. 
Le  Punjaub  contient  unc  j)opulatlon  dc  cinq  millions 
d'habilants,  qui  rendent  un  revenu  annuel  d'environ 
trente-cinq  millions  de  notre  monnaie  ;  les  fleuves  qui 
le  travcrsent  sont,  pour  la  plupail,  navigables  a  qucl- 
ques  centaines  de  milles  au-dessus  dc  Icur  point  de 
jonction,  ct  relenduc  do  la  navigalion  inl(5rieurc  atteint 
environ  670  licues. 


(  185  ) 

La  secle  des  Sihks  fut  fonclee  par  un  gooroo,  ou  pro- 
ph^le ,  du  nom  de  Nanae ,  qui  florissait  vers  la  fin  du 
xv°  siecle  de  notre  bve.  La  religion  de  ce  peuple  consis- 
tait,  a I'origine,  dans  un  pur  deisme  :  les  Sihks  croyaient 
a  la  transmigration  des  ames,  et  consideraient  la  vache 
comme  un  animal  sacr6 ;  aujourd'hui  encore  ils  font 
usage  de  tousles  aliments  solides  ou  liquides,  sauf  la 
chair  de  boeuf.  La  liberie  de  renoncer  a  leur  caste , 
I'admission  des  proselyles,  et  le  devoir  religieux  de  se 
consacrer  au  metier  des  armes,  distinguent  suffisam- 
ment  ce  peuple  des  autres  Hindous.  Les  Sihks  se  per- 
mettent  a  I'occasion  les  plus  grossi^res  debauches,  et 
professent  pour  les  mahomctans  la  haine  la  plus  inv6- 
teree  ;  leur  livre  sacre  porte  le  nom  de  Griinht;  leur  cri 
de  guerre  est  :  Victoire  au  gooroo!!! 

Vers  la  fm  du  xviii*  siecle ,  le  Punjaub  fut  ravage  a 
plusieurs  reprises  par  les  incursions  des  montagnards 
alDFghans  ,  jusqu'au  moment  oil  une  confederation  des 
principaux  chefs  des  tribus  sihkes  mit  un  terme  pas- 
sager  aux  soudaines  agressions  de  leurs  farouches  voi- 
sins.  Neanmoins  le  pays  des  cinq  fleuves  ne  commenga 
a  figurer  dans  les  annales  de  I'lndoustan  que  sous  son 
dernier  souverain  ,  le  fameux  Runjet-Singh  ,  fils  d'un 
chef  d'un  rang  6lev(^. 

Runjet-Singh  laissa  a  sa  mort,  arrivee  en  juillet  1839, 
au  debut  de  la  premiere  campagne  d'Affghanislan,  une 
grande  renomm^e  de  talents,  de  bonheur  et  d'immo- 
ralit(!!.  C'^tait  ce  prince  qui  avail  extorque  au  shah 
Soojah,  alors  sous  sa  protection,  le  fameux  fvooh-I- 
Moor,  ou  montagne  de  lumiore,  le  plus  beau  et  le  plus 
c^l^bx-e  diamant  du  monde  entier,  lombe  depuis  au 
pouvoir  des  Anglais. 


(  186  ) 

All  comuienceiiient  de  1848,  la  r^volte  d'un  des 
principaux  chefs  sihks,  alors  gouverneur  de  Mooltan  , 
amena  line  insurrection  gon^rale  centre  les  Anglais. 
Apres  une  liitte  sanglante,  signal<^e  par  les  batalllos  de 
Chillianwallah  el  de  Goojrat,  el  la  prise  de  Mooltan, 
les  Sihks  diirent  ceder  sur  tous  les  points  aux  forces 
imposantes  que  la  Compagnie  avail  mises  en  cam- 
pagne.  Une  proclamation  du  mois  de  mars  18Z|9  a 
annonc6  aux  peuples  de  I'lnde  la  conqufile  definitive 
du  Punjaul)  et  son  annexion  aux  possessions  britan- 
niques. 

[Extrait  d'unc  notice  de  M.  Richild  Gfwel,  enseigiie  de 
vaissenii,  inseree  dans  la  Revue  de  I'Orient,  de  I'Al- 
gerie,  et  des  colonies.) 


AFRIQUE.  :|j 

Abyssinie.  —  INouvELLES  DE  M.  Theophile  Lefebvre  , 
LIEUTENANT  DE  VAissEAU,  —  Unc  lellrc  de  M.  Plowden  , 
consul  anglais  a  Gondar,  arrivee  a  Paris  le  20  ou  27  aout 
1851,  el  qui  paralt  avoir  616  6crite  au  mois  d'avril  pre- 
cedent, fait  connaitre  que  M.  Th.  Lefebvre ,  dont  la 
famille  n'a  pas  re^u  de  nouvelles  depuis  trois  ans,  se 
trouvail  a  celle  6poque  en  Abyssinie.  M.  Antoine  d'Ab- 
badie  avail  vu  aMugawa,  en  septembre  ou  oclobre  1848, 
ce  voyageur  dislingu6,  auquol  la  Sociele  g^ographique 
a  accorde  une  mddaille  d'or  en  18Zi7, 


{  187  ) 

AM^RIQUE. 
Etats-Ums.  —  Tehritoire  u'Utah  (1).  —  Divisions 

ADMINISTRATIVES   ET    POPULATION  d'aPrLS    I,E   DERMER  RE- 
CENSEMENT  DE    1850  (2). 

Comtes.  Population. 

Davis I  1 34 

Great-Salt-Lake 6  i5[; 

Iron 36o 

San-Peter 365 

Toorle ,  i52 

Utah 2  000 

Weber i  186 

Total , ,  354 

On  pense  que,  depuis  le  dernier  recensement ,  la 
population  a  augment^  de  3  a  4  000  individus. 
D'apres  le  meine  recensement,  le  nombre  des 

Maisons  d'liabitation  etait  de ,  2822 

Families  . 2  83o 

Ferines  cultivees 026 

Manufactures,  doni  leproduit  est  evaiue  a  5oo  dol- 
lars   16 

(1)  Voyez  le  Bulletin  d'octobre-novembre,  4'  serie,  t.  II,  p.  ayS. 
(a)  Communique  par  M.  Squier. 


(  188  ) 


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(  192  ) 

itctes  cle  la  Society. 

Proces-verliaiix  tlvs  seances,  Oiivrnges 
oiTeets,  etc. 


PRiSIDENCE    DE    M.    GuiCNIAUT. 


P races •'iierbal  de  la  seance,  clu  6  fevrier  1852. 

Le  jiroc^s- verbal  cle  la  derni^rc  seance  est  lu  et 
adoptti. 

M.  le  ministre  de  la  marine  annonce  au  prdsident  de 
la  Commission  centrale,  par  sa  lettre  du  2/i  Janvier 
courant,  que,  dans  le  but  de  favoriser  aulant  qu'il 
depend  de  lui  un  ^tablissement  utile  a  la  science  geo- 
grapbique  et  bydrograpbique  tout  a  la  fois,  il  a  d6cid6 
que  la  marine  souscrirait  a  soixante  nouveaux  abonne- 
mcnls  du  Bulletin  de  la  Societe  de  geograpJde. 

M.  le  ministre  de  I'inl^rieur,  de  I'agriculture  et  du 
commerce,  tout  en  rendant  pleine  justice  aux  efforts 
de  la  Society  de  g^ograpbie  pour  venir  en  aide  au  d^- 
veloppement  des  ^cbanges  de  la  France  avec  les  pays 
Strangers,  et  a  ses  litres  a  la  bienvcillance  du  gouver- 
nemenl,  temoigne,  par  sa  lettre  du  2  fevrier,  au  pre- 
sident de  la  Commission  centrale ,  scs  regrets  que  la 
situation  de  son  budget  ne  permelte  pas  d'accorder 
actuellement  de  subvention.  II  ne  pcrdra  pas  de  vue  la 
demande  qui  lui  a  etc  faite,  et  sera  beureux  de  Tac- 
cueillir  ulterieurement,  etc. 

M.  le  ministre  do  la  guerre  Iransmct,  avec  sa  lettre 
du  k  fevrier,  au  president  de  la  Commission  centrale, 
des  renseignemenls  sur  les  grainesdc  Cbine  cnvoy^es 
par  M.  de  Monligny,  consul  de  France  k  Sbang-Hay, 
pour  6lre  semees  en  Alg(irie.  II  fera  connailre  succes- 


(  193  ) 

pour  6tre  semees  en  Alg^rie.  II  fei'a  connailre  succes- 
sivenient  les  observations  auxquelles  pourronl  donner 
lieu  les  cultures  entreprises ;  el,  en  adressant  des  re- 
mercimenls  a  la  Societe,  il  la  prie  de  vouloir  bien  con- 
linuer  son  concours  a  son  departemenl. 

M.  Ricbard,  mem])re  de  I'lnslitut,  directeur  du  jar- 
din  botanique  de  la  FucuHe  de  medecine,  accuse  re- 
ception, par  sa  lellre  du  27  Janvier,  du  paquel  de 
graines  de  la  Cbine ,  adress^es  par  le  president  de  la 
Commission  centrale  ,  pour  I'etablissement  de  la  Fa- 
culte.  II  espere  que  plusieurs  des  plantes  y  r^ussiront. 

M.  Hecquart,  officier  de  spabis,  elu  recemment 
raembre  de  la  Soci^le  ,  transmet  au  president  de  la 
Commission  centrale,  avec  sa  lettre  datee  de  Paris,  le 
6  fevrier  courant,  une  analyse  sommaire  du  voyage  qu'il 
vient  de  faire  dans  I'inlerieur  de  I'Afrique.  Si  la  Societe 
le  desire  ,  il  compl^lera  ce  travail,  en  comrauniquant 
plus  lard  ses  notes  au  fur  et  a  mesure  qu'elles  auront 
et6  mises  en  ordre  ,  et  y  joindra  une  esquisse  de  carte. 
Celle  proposition  est  accept^e  avec  reconnaissance. 

M.  Tougard,  pr<^sident  de  la  Societe  centrale  d'agri- 
culture  du  departeftient  de  la  Seine-Inferieure,  re- 
mercie  la  Societe,  par  sa  lettre  du  29  Janvier,  pour 
I'envoi  qui  lui  a  el6  fait  de  graines  provenant  de  la 
Chine,  adressees  par  M.  de  Monligny.  II  tiendra  au 
courant  des  essais  qui  vont  etre  tentcs. 

Le  secretaire  du  cornice  agricole  de  Toulon  ecrit, 
sous  la  dale  du  22  Janvier,  une  lettre  seniblable  a  la 
precedente,  et  I'accompagne  de  quelques  observations 
faites  sur  un  certain  nombre  de  graines  par  M.  Robert, 
chef  des  cultures  d'essai.  II  ajoule  qu'il  croit  devoir 
formuler  le  vceu  que  la  Societe  de  geographic,  qui  a  des 
m.   FivRiER.   6.  13 


(  m  ) 

repr^senlanls  sur  lous  les  |)oinls  clu  globe,  veuille  bien 
appeler  rattcnlion  de  ses  corrospondanls  sur  I'envoi 
dc  gralnes  d'aibrcs,  surtoiit  de  la  grandc  famille  des 
conijeres,  donl  on  n'a  pu  encore  multiplier  sufllsam- 
ment  les  belles  especes  am^ricaines.  La  Societe  rt^pon- 
<]rait  ainsi  a  un  besoin  du  pays,  ou  s'agile  inuUleraent 
depuis  de  si  longues  ann^es  I'importanle  question  du 
reboisement  dos  montagnes,  el  ni(  Itrait  |)roi)ablemenl 
6  in§ine  dc  la  resoudre  prntiquemcnl. 

M.  le  docteur  A.  Bacbe,  surinlendant  du  Coasts 
Survey,  6crit  de  Washington,  le  13  Janvier  1851 ,  pour 
accuser  i'^ceplion  des  leltres  que  le  secreilaire  general 
de  la  Commission  centrale  lui  a  ^crites  les  25  octobre 
el  3  decembre,  ainsi  que  des  IhiUetins  qui  les  accompa- 
gnaienl.  11  annoncele  prochain  envoi  de  quelques  docu- 
ments qu'il  olFre  a  la  Soci^t^,  el  de  son  rapport  annuel. 

M.  de  la  Roquelte  donne  communication  d'un  docu- 
ment que  vienl  dc  lui  iransmcllre  M.  Squier  sur  les 
divisions  adminislralives  el  la  jjopulalion  du  territoire 
d'Utah. 

Le  secretaire  g^n(!;ral  lit  la  lisle  des  onvragcs  olTeris 
i\  la  Soci6l<i. 

La  proposition  de  nommer  M.  Frank  libraire  de  la 
Societe,  concurremmcnt  avcc  Al.  Arthus-Berlrand,  €st 
wnvoy^e  a  la  section  decomplabililo,  qui  devra  se  r<iu- 
nir,  ct  presenter  son  rapport  dans  la  prochaine  sdance. 

La  Commission  centrale  proc6de  a  I'^lection  des 
membres  de  la  Commission  sp6ciale  du  concours  au 
prix  annuel  pour  la  ddcouverlc  la  |)lus  importaute  en 
gd'Ographic  faite  dans  Tannine  1840.  MM.  Daussy,  Jo- 
niard,  d'Avezac,  Antoine  d'Abbadie  ot  Guigniaut,  sont 
nomm^s,  el  devront  se  r6unir  le  plus  tot  possible  pour 
choisir  un  rapporteur. 


(  195  ) 

M.  rle  laRoquelte  fail  uno  communication  sur  l*ex- 
pedition  nnglaisc  qui  explore  en  ce  moment  I'Afrique 
centrale. 

MM.  L.  A.  Richy  et  le  major  Giordano,  de  Naples, 
sent  elus  membres  de  la  Socidste  de  g^ograpliie,  sur  la 
presentation,  savoir  :  lo  premier,  de  MM.  Jomard  et 
Garnier;  etle  second,  deMM.  de  Froberville  et  Jomard. 

Proves- verbal  de  la  seance  dn  20  fevrier  1852. 

Lc  proces-verbal  de  laderniere  seance  est  lu  et  adoplc. 

Le  ministre  de  la  guerre  annoncc ,  par  sa  lellre  du 
9  f^vrier,  que,  par  une  decision  de  ce  jour,  il  a  arrfite 
qu'il  serait  pris  pour  le  compte  de  la  direction  des 
affaires  d'Algerie  quatre  abonnements  au  Bulletin 
mensuel  de  la  Societe  de  geograpliie.  11  regrette  que 
I'absence  au  budget  d(!  la  guerre  de  tout  credit  special 
pour  souscriptions ,  et  I'extrfeme  limite  dcs  fonds  dont 
il  peut  disposer  pour  cet  objet  ue  lui  permettent  pas 
de  prendre  aux  publications  de  la  Societe,  dont  il  ap- 
precie  toute  Fimportance ,  un  aussi  grand  nombre 
d'abonnements  qu'il  I'eut  desired. 

M.  le  ministre  des  alTaires  etrangeres  ecrit  au  pre- 
sident de  la  Commission  centrale,  sous  la  date  du  9  fe- 
vrier,  pour  lui  l6moigner  ses  regrets  de  I'impossibilite 
oil  il  se  Irouve  de  donner  a  la  Societe  de  geographic 
une  preuve  de  I'interet  qu'il  prend  au  succ^s  de  ses 
travaux ;  mais  les  lois  des  finances  ,  en  reduisant  les  cre- 
dits accordes  a  son  deparlemenl,  au-dessous  desbesoins 
rigoureux  de  son  service  special,  lui  ont  ote  les  moyens 
d'accorder  a  cetle  Societe  une  allocation  p^cuniaire  ou 
de  prendre  des  souscriptions  au  journal  qu'elle  jjuhlie. 

M.  le  ministre  de  I'instruction  publique  inlorme  le 
president  de  la  Commission  centrale,  par  sa  lettre  du 


(   196  ) 

16  f^vrier,  qu'afin  de  Idmoigner  a  la  Sociele  de  geo- 
grapliie  sa  toule  sympalhie  pour  ses  ulilos  Iravaux,  il  a 
donne  dcs  ordres  jioiir  que  son  dc^parteinenl  continue 
pendant  I'annee  ISoS  la  souscription  aux  cinquantc 
exemplaires  du  journal  de  la  Societe  qui  avait  ele  phs 
I'annee  derniere.  II  regrelle  de  ne  pouvoir  accordei' 
en  ce  moment  une  subvention  plus  considi^rable. 

M.  Bajot  fait  connaltre  au  president  de  la  Commis- 
sion centrale  (9  fevrierj  tous  les  regrets  qu'il  eprouve 
de  ce  que  son  6loignement  de  Paris  I'oblige  a  cesser  de 
faire  partie  de  la  Commission  cenlrale  de  la  Societe  de 
g^ograpliie,  dont  il  a  et^  un  dcs  membrcs  fondateurs. 

M.  Dussicux  ccrit  de  Versailles,  sous  la  dale  du  17  i6- 
vrier,  pour  annoncer  que  ses  occuj)alions  mullipliees 
comme  professeur  d'histoire  a  Saint-Cyr,  et  I'impossi- 
bilite  oil  il  se  trouve  de  venir  prendre  part  aux  travaux 
de  la  Society,  le  forcent,  a  son  grand  regret,  de  don- 
ner  sa  demission  de  membre  de  la  Commission  cen- 
trale et  de  la  Societe  de  geographic. 

Par  une  letlre  dative  de  iMont-de-Marsan ,  9  fdvrier 
1852,  M.  le  prt-fet  des  Landes  accuse  reception  des 
Ictlresque  le  president  de  la  Commission  centrale  lui 
a  (jcrites  pour  lui  annoncer  un  envoi  de  graines  de 
Clune,destineesa  la  Societe  d'agricullure  de  son  depar- 
tement.  Ces  graines  ne  lui  sonl  pas  encore  parvenues. 

M.  Juric,  president  do  la  Sociele  d'horticulture  de 
Lyon,  anuonce  (7  f^vrier )  qu'il  a  charge  M.  A.  Ma- 
theron,  n^gociant,  de  reliier  K;  paqucl  de  graines  de  la 
Chine,  deslinees  a  celtc  Societe,  et  d'en  donner  un  re<;u. 

M.  J.  Lefebvre,  capilaine  de  frtigate,  ccrit  de  Brest, 
sous  la  date  du  11  fevrier,  au  secretaire  g(^neral  de  la 
Commission  centrale  ,  pour  annoncer  que  Ic  lieutenant 
dc  vaisseau  TheophUc  Lefebvre,  son  Irere,  aiiquel  la 


(  107  ) 
Socielt!!  de  g^ogiaphie  a  decern^  une  m^daille  d'or  en 
18/17,  a  cesse  depuis  trois  ans  de  donner  dcs  nouvelles 
a  sa  famille,  el  loules  les  d-marches  qui  ont  ete  failes 
pour  oblenir  des  renseignements  sur  son  sort  ont  jus- 
qu'ici  ete  vaines.  II  prie  le  secretaire  general  de  lui 
dire  si  la  Sociele  de  geograpliie  a  et6  plus  lieureuse. 

M.  de  la  Roquette  a  fail  connaitre  a  M.  le  capitaine 
J.  Lefehvre  les  demarches  failes  par  lui  et  leur  resullal. 
( Voir  aux  Nouvelles  geographiques.) 

M.  Joseph  de  Barbosa-Canaes  transmet  au  secre- 
taire general  de  la  Commission  centrale,  avec  sa  letlre 
dalee  de  Lisbonne,  le  2  decembre  1851,  un  m^moire 
sur  la  ville  de  Soure,  et  quelques  autres  documents  en 
langue  porlugaise.  Ces  documents  seront  examines, 

M.  Bache,  surintendanl  du  Coast-Survey,  des  Etals- 
Unis,  envoie  a  la  Sociele  quelques  documents  geogra- 
phiques. ( Voir  aux  Ouvrnges  offerts.  ] 

M.  Jomard  communique,  do  la  part  de  M.  le  capi- 
taine Laliier,  uiie  carle  du  Golfo-Dulce  (Costa-Rica). 
M.  Uaussy  est  prie  d'en  rendre  compte. 

Le  secretaire  general  lit  la  lisle  des  ouvrages  ofTerts  , 
jiarmi  lesquels  on  remarque  la  premiere  livraison  de 
I'Atlas  du  Voyage  de  M.  Francis  de  Castelnau  ;  les  deux 
premiferes  livraisons  de  I'Atlas  du  f^oyage  de  M.  Tre- 
maux,  et  une  nouvelle  t^idition  des  Elements  de  geogra- 
pliie, publics  recemment  a  Turin  par  M.  Eugene  Balbi, 
dont  M.  Guigniaut  se  propose  de  rendre  compte. 

M.  A.  d'Abbadie  lit  une  notice  sur  Ic  Voyage  du  doc- 
tcnr  Ji  rap f  dans  U  Jfrique  orientale. 

M.  Jomard  communique,  de  la  part  de  M.  de  La 
Pylaie,  mcmbre  de  la  Sociele,  une  note  relative  a  la 
situation  du  Pagus-Nauerus,  maison  de  campagno  du 
poele  Ausone  a  Bordeaux. 


(  198  ) 
OUVRAGES  OFFERTS 

DANS  LliS  STANCES   DES  6  ET  20  piVRIER  1852. 


TITHES. 


BONATEDRS. 


AFRIQUE. 


PLANCHES. 


Voyage  au  Soudan  oriental  et  dans  rAfiujue  scp- 
tenlrionale  pendant  les  annees  i847  et  1848, 
par  M.  I'ierre  Tieiiiaux.  i"  el  2'  liviaison. 
Iii-fol.  Paris,  1802. 

AMtolQUE. 

OtVrAGES. 

The  Coast-Survey  of  the  United-States.  Wash- 
ington, i85  I. 

Notices  of  the  Western-Coast  of  the  United- 
States,  United-Stales  Coasl-Survey,  A.  D.Bache, 
surin  ten  dent.  Revised  edition.  Washington.  De- 
cembre  i85i. 

Extracts  from  ihe  report  of  the  superintendent  of 
the  Coast-Survey,  in  relation  to  Liglit-Ilouses, 
Beacons,  Buoys,  etc.,  in  execution  of  the  acts 
of  congress,  approved  sept.  28  i85o,  and 
march.  3,  i85i.  Washington,  i85i. 

FLANCIIES. 

Expedition  dans  les  parties  centrales  de  I'Ame- 
rique  du  Sud  ,  de  Rio-Janeiro  a  Lima,  et  de 
Lima    au    I'ara,    par    Francis    de   Castehiau. 


1"  hvr.  Paris, 


852. 
MELANGES. 


M^MOlnES   IlES  SOCIETIES  SAVANTICS   ET   JOl'IlNAUX. 

Franfais. 

Precis  analytlque  des  travaux  de  r.\cadi'mie  des 
sciences,  helles-Ieltres  et  arts  de  Rouen,  pen- 
dant I'annec  i85o.   l  vol.  in-8".  Rouen,  i85o. 


MM. 

Treinatix. 


Le  professeur 

A.  Bache. 

Idem. 


iJem. 


Dc  Castclnau. 


i 


Acad,  des  sciences, 

helles-letlres  et  arts 

de  Roucti. 


(  199  ) 


TITRES. 


DONATEURS, 


Extrait  des  travaux  de  la  Societe  centrale  d'agri- 

culture  du  departement  de  la  Seine-Iiiferieure. 

4°  trimestre  de  I'annee  i85i. 
Bulletin  de  la  Sociele  centrale  d'horticulture  du 

departement  de  la  Seine-Inferieure,  t.  IV,  3'  et 

4*  cahiers. 
Revue  coloniale,  2'  serie.  Janvier.  Paris,  iSSa. 

Revue  de  rOrient.  Noveiubre  et  decembre  i85i; 

Janvier  i852.  Paris. 
Nouvelles  annales  des  voyages,  etc.   Decembre 

I  85 1.  Paris. 
Journal  des  missions  evangeliques.  Janvier  i852. 

Palis. 
Bulletin    de    la    Socie'te   geologique    de    France 

(feuilles  1  a  '}).  3  novembre  i85t. 
Journal  asiatique,  4''  serie,  t.  XVIII.  Juillet  a  de- 
cembre i85i.  Paris. 
Letires  retrospectives  sur  la  marine,  par  M.  Bajot. 

N"  5.  Paris,  1 852. 
Journal  d'eduealion  populaire.  Decembre  i85i. 

Puis. 
L'lnvcsligateur,  journal  de  I'lnstitut  historique. 

Octobre,  novembre  et  decembre  i85i.  Paris. 

Anglais. 

Original  papers  read  before  the  Syro-Egyplian 
Society  of  London.  Vol.  I,  part.  1  et  11.  Lon- 
dres,  1845  el  i85o. 

The  journal  of  tbe  Indian  Archipelago...  (Jour- 
nal de  rarcliipel  indien  et  de  I'Asie  orien- 
tale).  Js""  de  mai  1848,  mars,  avril  et  octobre 
i85i. 

The  Church  missionary  intelligencer,  a  monthly 
journal  on  missionary  inforaiation...  N°  2, 
vol.  111.  Fevrier  i853. 

Allemands. 

Zeitschrift  der  Deutschen  morgenlandischen  Ge- 
sellschaft...  (Journal  de  la  Societe  orientate 
d'Allemagne),  6*  vol.,  i"  cab.  Leipzig,  i852. 


MM. 

Soc.  d'agriculture 

de  la 

Seine-Inferieure. 

Soc.  d'horticulture 

de  la 

Seine-Inferieure. 

Ministre 

de  la  marine. 

Les  editeurs. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 


Idem. 
Idem. 

Idem. 


Ide 


•200  j 


■htues. 


Ameiicaiiis. 

'Ilio  Literary  world.  A  journal  of  American  and 
foreign  literature,  science,  and  ait.  rs"'  ^49, 
252,  253,  254  (8  et  29  novemlirc,  6  et  i3  dc- 
ceiiibre  1  85i). 

DIVERS. 

Kuovi  clenientl  di  geogralia  sa;>,f;io  d'una  descri- 
zjone  {>cner:de  della  terra  di  Adriano  Balbi  ed 
Eugenio  I'allii,  seconda  ediziono  sola  appro- 
vata  degli  antori.   1  vol.  in-12.  Torino,   l852. 

Moise,  poeme  en  vin{;t-(|ualrc  chants,  par  Ana- 
tole  de  Monlesquiou,  t.  I  et  II.  Paris,  i85o. 
2  vol.  in-8°. 

Notice  sur  les  cartes  {>e'ogiapl)iques,  extraite  de 
I'Rncyclopedie  du  dix-neuvieme  sieclc.  Rrocli. 


DON.\TliURS. 


MM. 

Les  editenrs. 


.\diien  Balbi. 


A.  de  M 


ontesquiou. 


Joinard. 


Lti  Hgne  ponehice  it  ^iipie  In  rmili' 
.nripfi-  par  J/'.'  Srhi^ou-r-n/y 


i.^j.  lii^  {■roifmphif 


i-""Si-i-i.- /in //,.,,„  ,/,.  Av.„.v   ,.^•. 


Ltih'ifnP  poncfiict'  iiiiii^ie  ta  ronf,' 
1  .rifh'h'  p(tf  Mi'  iSchifPi  'era/). 


fS  %i 


^OT-^T^i^ 


'"'yt.7n>n,.t/n„>„fi 


Unqilude  Otrnh-r !.,/.■  du  Mvfiiei>  ,h-  /:„■/. 


f>rv.*fe  fir  .*'  Kashtiait  dt  ■  I  nntw  ./<  .r/>N/..  -/  > 


BULLETIN 


DE    LA 


SOCIETE  DE  GEOGRAPHIE. 

MARS   1852. 

lleiuoircjs, 
Motice^,  Docuuieiitii  originanx,  etc. 


APERCU 
D'UiN  VOYAGE  DANS  LE  NORD  DE  LA  BOLIVIE 

ET 

DANS  LES  PARTIES  VOISINES  DU  PEROU, 

PAR  M.  WEDDELL  (1). 

Partis  de  Southampton  le  17  f^vrier  (1851),  sur  le 
lialeau  a  vapeur  des  Indes  occidentales,  nous  longions, 
le  15  mars,  la  cote  de  la  Nouvelle-Grenade,  en  vue  de 
la  Cordillere ,  encore  si  peu  connue,  de  Santa-Maria. 
11  est  difficile  d'imaginer  quelque  chose  de  plus  admi- 
ral)le  que  le  profil  de  cetle  chalne  neigeuse,  qui  serable 
s'dilancer  de  I'Ocean,  et  dont  I'ceil  embrasse,  par  con- 
sequent, toute  la  grandeur.  Les  villes  de  Santa- Marta 
et  de   Carthagene   ne  nous   arret^rent  que  quelques 

(i)  M.  Weddell  a  fait  ce  voyage  en  compafjnie  de  M,  Ch.  Borniche, 
avocat  a  la  cour  d'appel  de  Paris,  et  de  M,  Martial  de  Heirypon, 
ingenieur  civil. 

HI.    MARS.    1.  14 


(  202  ) 

licurcs.  Enfin,  le  IS  mars,  on  nous  doljarqua  au  sale 
village  de  Chagros ,  a  renli^e  de  la  pelile  riviere  que 
nous  allions  remonler,  pour  gagner  le  cold  oppose  de 
I'islhme  de  Panama. 

Le  chemin  de  for,  qu'une  Compagnie  americaine 
construit  en  ce  moment  pour  relier  les  deux  oceans, 
elait  bien  peu  avanc6  ;  les  maladies,  des  desertions  sans 
nombre,  augmentaient  encore  les  difllcultes  naturelles 
de  celle  enlreprise.  On  critiquait  beaucoup  la  Com- 
pagnie pour  ne  pas  avoir  commence  les  Iravaux  j)ar 
I'extremite  Paci/ique  du  chemin  oil  le  sol  esl  moins 
niarecageux,  el,  par  consequent,  moins  malsain. 

On  sait  que,  pendant  la  saison  scche,  le  Rio-Cba- 
gres  n'est  navigable  que  jusqu'a  Gorgona,  c'esl-a-dire 
pendant  I'espace  de  vingt  lieues  environ;  le  reste  du 
Irajet  se  fail  a  dos  de  mulet,  et  il  est  de  beaucoup  le 
plus  penible  durant  les  pluies;  aussi  eut-il  ete  a  de- 
sirer  que  Ion  subslituut  tout  d'abord  u  cetlo  parlie  du 
chemin  une  voie  lacilement  pralicable  en  tout  temps. 

La  roule  qui  traverse  Fislbme  a  San-Juan  de  Nica- 
ragua, ou  Grey -Town,  fait  aujourd'hui  une  rude  con- 
currence a  cello  de  Chagres.  Je  crois  qu'elle  finirail 
par  lui  etre  prelerde,  si  les  choses  reslaient  dans  leur 
etat  actuel,  surlout  si,  comme  on  so  le  propose,  on 
venait  a  faire  un  chemin  de  planches  entre  le  lac  de 
Nicaragua  et  Virgin-Bay, 

A  I'epoque  de  noire  passage,  on  avail  repris  en 
consideration  le  jjrojet  cle  faire  communiqucr  los  deux 
raers  au  luoyen  d'un  canal  (1)  qui  relierait  le  llio- 

(i)Quel<|ues  cartes  iiuliqucnt  coinuie  exislant  deja  un  canal  dtr 
cette  iiatuie;  inais  il  n'l-ii  est  rien,  aiiiiji  que  dcpuis  longlenips  I'a  dit 
M.  de  HiiiiilioMt. 


(  203  ) 
Alrato  a  quelqu'un  des  affluents  de  I'oc^an  Paclfique. 
Deux  plans  fixent  en  ce  moment  ratlention. 

Dans  le  premier,  la  communication  aurait  lieu  par 
Ics  rivieres  suivantes  : 

1°  Rio-Atralo  (il  se  jette  dans  le  golfe  de  Darien); 

2"  Rio-Quibdo  (affluent  du  Rio-Atrato); 

3°  Rio-San-Pablo  (affluent  du  precedent); 

4°  Rio  de  San-Juan  ( il  tombe  dans  I'oc^an  Paci- 
fique); 

5"  Un  canal  qui  relierait  le  San-Pablo  au  San-Juan. 

Dans  le  deuxieme  projet,  on  aurait  en  vue  de  joindre, 
par  un  canal  qui  n'aurait  que  six  lieues  de  longueur, 
la  Laie  de  Cupica,  dans  I'ocean  Pacifique,  au  Rio- 
Napipi,  affluent  de  I'Atralo.  Cette  derniere  voie  semble 
6tre,  sous  beaucoup  de  rapporls,  supcrieure  a  I'aulre, 
lant  pour  sa  grande  brievet^  qu'a  cause  de  la  diQi- 
cul_t(^  qu'on  eprouverait,  dansl'autre,  a  aborder  le  Rio- 
San-Juan  ,  par  suite  des  bancs  de  sable  qui  en  mas- 
quent  I'embouchure.  La  baie  de  Cupica  est  ti  135  niilles 
de  Panama,  et  lormerail  un  port  excellent. 

Nous  quitlames  Panama,  pour  le  Perou,  ie  23  mars. 
Dans  I'apres-midi  du  jour  suivant,  nous  elions  ^i 
I'ancre  devant  San-Buenaventura,  port  franc  de  la 
Nouvelle-Grenade,  oil  s'embarquenl  tout  Tor  el  le  pla- 
line  qui  se  recueillent  dans  les  alluvions  de  la  province 
de  Ghoco. 

On  va  de  San-Buenaventura  a  Santa-Fe  de  Bogota 
en  vingt  et  un  jours,  dont  les  trois  premiers  se  passont 
sur  le  Rio-Dagua,  que  Ton  remonte  jusqu'a  un  eadroit 
appclt^  las  Juntas.  Du  ])ort  (|ue  Ton  a  etabli  sur  cette 
riviere,  un  cliemin  passable  mene,  en  deux  jours,  a 
Cali ;  puis  un  autre,  un  peu  moins  bon ,  conduit  en 


(  20/i  ) 
qualrc  jours  h  Carlago.  Pour  passer  de  la  a  Ibague , 
il  faut  Iravcrser  los  monlagnes  el  les  forcls  (]c  Quindiu, 
oil  la  circulation  est  loin  d'^lic  facile.  Enfin  ,  apres 
cinq  autres  jours  de  marche  sur  une  route  conipara- 
tivement  bonne ,  a  travers  la  vallee  de  la  Magdalena , 
on  est  rendu  a  sa  destination. 

Apr^s  San-Buenaventura,  nous  vimes  successivcment 
Guayaquil,  Payla,  Lambayeque,  Huanchaco  (port  du 
Truxillo),  et  Casma. 

Le  h  avril,  nous  jelames  I'ancre  dans  la  rade  de 
Callao.  Un  excellent  chemin  de  fer  fail  communiquer 
ce  port  florissant  avec  Lima,  capitale  de  la  r<ipublique 
du  Perou.  On  parcourt  en  une  demi-heure  la  distance 
qui  separe  les  deux  endroils.  Notre  station  a  Lima  fut 
un  pcu  plus  longue  que  dans  les  autros  points  de  I'os- 
cale ;  nous  en  primes  conge,  le  10  avril,  et  nous  abor- 
dames,  le  Ih,  a  Arica,  apres  avoir  visile  en  passant  les 
pelits  ports  de  Pisco  et  d'Yslay.  A  partir  de  ce  point, 
noire  voyage  allait  se  conlinuer  par  lerre  jusqu'A  la 
ville  de  La  Paz,  en  Bolivie. 

Arica  est  a  J/i  lieues  de  Tacna.  Un  desert  de  sable 
en  pente  douce  separe  les  deux  points;  loule  cclte 
ri^gion  est  presque  complelcment  depourvue  de  vege- 
tation spontanee,  cl  il  ne  sera  possi])le  d'y  etablir  des 
cultures  qua  la  condition  d'y  amoner  de  I'eau.  A  cet 
eflet,  on  s'occupe  a  Arica,  depuis  plusieurs  annees, 
du  creusement  dun  puits  artt^sien  ;  mais  jiisqu'ici  rien 
n'a  indique  que  Ton  approchat  du  but  desire. 

Tacna,  niieux  parlag6  que  son  port,  est  enlour^  d'un 
cadre  de  verdure.  L'eau  qui  sert  a  I'arrosemcnt  de  cette 
charmantc  oasis  vient  d'unc  pclile  riviire  qui  descend 
de  la  Cordill^ro  do  Tacora,  dont  on  voit,  au  loin. 


(  205  ) 

s'elevor  les  grands  pics  blatKs.  Pas  line  goullc  clii 
ruisseau  pricicux  n'esl  perdue.  Lo  climal  Icmpero  de 
celle  partie  du  Perou  y  permet  la  prodiiclion  <le  la 
plupart  dcs  fruits  do  la  France.  Dans  les  fermes  qui 
s'y  renconlrent,  on  cultive  surlout  des  legumes  et  des 
fruits;  rnais  une  grande  partie  de  chacune  d'elles  est 
semee  de  luzerne  qui  sert,  avec  la  paille  de  mais,  a  la 
nourriture  des  nouibrcuses  troupes  dc  mules  qui  arri- 
venl  journelleinent  de  I'int^rieur. 

II  y  a  frc^quenunent  des  trerablemenls  de  terrc  a 
Tacna;  aussi  la  plupart  de  ses  maisons  sont-elles  de 
bois  ou  de  terre ;  leurs  toils  sent  de  planches  recou- 
vertes  d'une  couche  de  boue. 

Le  23  avril,  nous  parlimes  pour  La  Paz. 

Notre  route  devait  passer  au  milieu  des  pics  neigeux 
donl  j'ai  deja  parle.  Tout  le  sol,  jusqu'au  pied  des 
montognes,  etait  couvert  de  pierres  I'oulees  :  on  pou- 
vait  croire  que  quelque  courant  nionstrueux  vcnait 
de  ravager  ce  pays.  Ca  et  la  apparaissaient  une  plante 
grasse  et  quelques  arbrisseaux  appartcnant  a  la  tribu 
des  Eupatoires.  Nous  ne  tardames  pas  a  nous  trouver 
au  pied  de  la  chaine  qui  est  connue  sous  le  noni  dc 
Cordillere  lillorale;  nous  suivimes,  en  la  gravisssanf, 
le  ravin  au  fond  duqucl  coule  la  riviere  dc  Tacna. 

Le  petit  village  de  Paica  est  situe  au  milieu  de  ces 
montagnes,  a  une  hauteur  de  2  950  metres  au-dessus 
du  niveau  dc  la  mer.  Nous  y  ressenlimcs  un  assez  fort 
trcmblement  de  terre.  La  vegetation  y  est  encore  assez 
vigoureuse.  Les  Solanees  frulescentcs  y  abondcnl;  mais 
on  n'y  rencontre  aucun  arbre. 

Accoutum6s  a  I'alr  plus  dense  des  plaines ,  nous 
coramen^auies  a  ^prouver,  en  respirant,  celte  angoisse 


(  206  ) 

parliculiere  a  laquelle  les  habitants  du  pays  donnent 
le  nom  de  soroche.  Nos  mules,  quoique  plus  habituecs 
que  nous,  etaient  au  moins  aussi  uial  ;'i  leur  aise.  A 
une  (Jl^vation  considerable  au-dessiis  de  Paica,  nous 
rcncontrSines,  sur  une  crcte  dc  lamontagnc,  un  de 
CCS  monticules  de  pierres  que  les  Indicns  y  amassent, 
et  qui  sonl  si  communs  au  Perou ;  nous  crilmcs  que 
nous  (^tions  arrives  a  la  passe  principale  de  la  Cordil- 
l^re ,  mais  il  s'en  fallait  beaucoup.  Plus  loin,  tous  les 
ruisseaux  se  montr^rent  couverts  d'une  couche  dc 
glace;  trois  ou  quatre  plantes  :  un  Baccharis,  un  Se- 
negon,  un  Bolax,  consliluaient  a  peu  pres  toute  la 
vegetation. 

Bientol  un  nouveau  monticule  de  pierres  nous  avcrtil 
que  nous  6tions  arrives  a  I'un  des  points  culminants  de 
notre  route  :  a  la  passe  de  Gualillos.  De  vastes  plaines 
presquc  nues  se  montr6renl  a  nos  regards,  plaines 
glacees  qui  portent  Ic  nom  dc  Punas,  et  que  les  vigo- 
gnes seules  babilent.  Plusieurs  Gramin^os,  parmi  les- 
quelles  se  faisaient  remarquor  les  toufTcs  grisatrcs  du 
Deyeuxia  i-igidn,  y  croissent  en  compagnie  d'un  Bnc- 
charis  resineux  appele  Tola.  Get  arbrisseau,  vrai  type 
de  plantes  sociales,  est  aussi  abondant  dans  cette  r<i- 
gion  que  le  sont  les  bruyeros  dans  nos  landes.  Les 
mules  et  les  baudels  mangent  avec  [)laisir  le  Deyeuxia, 
ou  pasto-brabo,  comme  on  TappcUe  dans  le  pays;  mais 
les  vigognes  prdlerent  los  herbes  plus  bassos,  qui  Tor- 
ment le  gazon  le  jilus  fin  de  la  Puna,  on  pastito. 

II  y  avait  autrefois,  le  croirait-on?  un  village  sur  ces 
hauteurs  :  le  village  de  Tacora,  Ses  habitants  furent 
obliges  dc  I'abandonner.  Nous  passames  une  nuit  sur 
ses  ruines.  La  nuit  qui  suivit  celle-lji,  nous  lumes 


(  207  ) 

obliges  dc  couchci'  en  plein  air  a  un  niveau  a  peu  pres 
semblable,  et  nous  fumes  cnterres  clans  la  neige  qui 
etait  tombee  sur  nous  pendant  noire  sommeil.  Le 
point  ou  nous  fumes  ainsi  traitcs  porte  le  noin  de 
Hospicio  ;  pres  de  la,  coule,  entrc  deux  montagnes  de 
roche,  le  Rio-Maure,  qui  marque  la  limite  entre  le 
Pdrou  etla  Bolivie.  Le  terrain  s'eleve  doucement  de  la 
rive  opposee  jusqu'au  point  culminant  de  la  route, 
connue  sous  le  nom  de  Apacheta  de  Chulunquaiani. 
La  passe  est  a  li  600  metres  au-dessus  du  niveau  de 
la  mer. 

En  laissant  derriere  nous  ce  point  eleve,  nous  allions 
gagner  (sans  cependant  quitter  les  Punas)  des  regions 
moins  inbospilalieres.  Quelques  estancias  (fermes  a 
bestiaux)  se  monlrerent,  et  nous  vimes  des  troupeaux 
de  moutons  et  d'alpacas  sur  les  gazons  veloutes  qui 
tapissaient  le  fond  des  ravins;  puis  nous  arrivames  au 
petit  village  de  Santiago,  et,  un  peu  plus  loin,  a  celui 
de  San-Andres  :  villages  d'Indiens  Aymaras,  aux  buttes 
de  boue,  couvertes  d'un  cbaumc  noirci.  A  peu  de  dis- 
tance de  la  derniere  de  ces  localites,  notre  route  coupa 
la  direction  du  curieux  canal  naturel  qui  fait  commu- 
niquer  le  lac  deTiticaca  avec  celui  de  Aullagas,  et  qui 
porte  le  nom  de  Desaguadero. 

Nous  apercumes  I'lllimani,  lorsquc  nous  eumes 
alteint  I'entree  de  la  grande  plaine  appelee  Pampa  de 
Biacha,  ou  se  Irouve  un  assez  gros  bourg  du  meme 
nom. 

A  I'extremitd  de  cette  plaine,  on  aperooit,  comme 
par  encbanlemcnt,  la  villc  de  La  Paz.  Elle  est  au  fond 
d'une  vaste  cavite,  qui  est  un  (ilargissement  du  ravin 
ou  coule  la  riviere  qui  I'alimentc.  L'lUimani  s'eleve,  a 


(  20S  ) 

droito,  au-clossus  de  toiites  les  autres  nionlagno.s  de  la 
Cordill6re;  il  scmble  6lre  Ic  genie  de  I'imniense  chaos 
qui  est  venu  si  subitement  s'offrir  aux  yeux  du  voya- 
geui\  On  parvient  au  pied  de  la  descente  par  un  che- 
min  taille  de  tonics  pieces  dans  une  berge  qui  n'a  pas 
moins  de  ZiOO  metres  de  hauteur,  et  qui  est  lout  a  fail 
perpendiculaire  dans  beaucoup  de  poinls.  Elle  est  en- 
li^rement  formee  de  depots  alluviaux. 

La  villa  de  La  Paz  est  trop  connue  aujourd'hui  du 
monde  savant  pour  que  je  croie  necessaire  d'entrer 
ici  dans  des  details  a  son  sujet.  Le  sejour  que  nous  y 
flmcs  fut  employ^,  en  partie,  a  Texploralion  des  allu- 
vions de  la  partie  superieure  de  la  riviere  de  Chuquia- 
guillo,  sur  le  compte  desquelles  il  courail  les  hisloires 
les  plus  merveilleuses;  nous  preparamcs  ensuite  le 
voyage  que  nous  comptions  faire  au  districl  aurif^re 
de  Tipuani.  C'elait  la  le  but  principal  de  noire  expe- 
dition. Je  rappellerai  en  passant  que  ce  fut  dans  la 
riviere  de  Chuquiaguillo  que  Ton  decouvrit  la  fauieuse 
pepite  qui  se  trouve  au  mus^e  de  Madrid.  L'or  que  Ton 
rencontre  dans  ceite  riviere  est  d'un  jaune  trcs-pale, 
etant  allie  a  une  quantity  considerable  d'argcnt;  aussi 
se  vend-il  a  un  bon  tiers  de  moins  cjue  cclui  qui  est 
apporle  de  Tipuani. 

Vers  le  milieu  du  mois  d'aoiit,  nous  nous  mimes  en 
roule  pour  Sorata,  petite  viilc  situee  k  30  lioucs  de  La 
Paz,  el  a  moitie  chemiu  environ  enlrc  cclle  ville  ct  les 
mines  vers  Icsquelles  nous  nous  dirigions.  Di's  quo 
nous  fumes  sortis  du  ravin,  nous  chemiiiames,  dans 
une  Puna  presquc  unic,  vers  le  grand  pic  neigeux  de 
Ancohuma,  auUemenl  tht  lilampo,  siluc  au  nordnord- 
ouest  de  la  ville  que  nous  venions  do  laisser  en  arri^re. 


[  209  ) 

Le  bourg  de  Penas,  ainsi  nomme  a  cause  des  rochers 
a  pic  qui  I'avoisinent,  est  a  13  lieues  de  La  Paz;  nous 
le  passames  sans  y  entrer.  La  position  d'Achacache , 
capitale  de  la  province  d'Omasuyos,  6tait  marquee  par 
la  presence  d'un  immense  cone  de  grfes  rouge  qui  ap- 
paraissait  dans  le  loinlain. 

La  monotonie  du  pays  que  nous  traversions  n'etait 
rompue  que  jar  quclques  fermes  indiennes ,  clair- 
semees  sur  sa  surface.  Pas  un  arbre  nc  se  presentait 
pour  egayer  la  scene.  Des  touffes  d'une  herbe  roide,  et 
jaunie  par  la  gelee,  donnait  a  I'immense  ^tendue  qu'elle 
couvrait  une  teinte  uniforme.  Voila  la  vegetation  de 
ces  tristes  campagnes.  Le  troisieme  jour,  nous  pumes 
apercevoir,  du  sommetdes  premiers  echelons  que  nous 
eumes  a  gravir  pour  nous  rapprocher  de  la  Cordillere, 
une  partie  du  contour  de  la  Mediterranee  peruvienne^ 
avec  ses  grands  ilots  noii's.  ficlair^es  par  le  soleil,  ses 
eaux  etaient  bleues  comnie  celles  d'une  mer  tropicale. 
Quelques  points  cultives  continuaicnt  a  se  montrer 
dans  les  plaines  abritees;  mais  a  mesure  que,  de  pla- 
teau en  plateau,  nous  arrivions  a  des  climats  moins 
temperes,  et  que  nous  approchions  du  sommet  de  la 
chaine  qui  separe  la  plaine  d'Achacache  de  I'entree 
de  la  vallec  d'liilubaya,  les  I'crmes  devinrent  de  plus 
en  plus  rares.  La  table  terminale  ne  nous  presenla 
plus  qu'une  grande  surface  deserlo ,  balayee  par  un 
souffle  glacial. 

Bienlot  noire  vue  put  plonger  du  cote  de  la  valleo; 
mais  les  nuagcs  en  reinplissaient  toules  les  profon- 
dcurs. 

Notre  senlier  paraissait  colic,  couinic  uu  long  fil,  a 
une  de  berges  de  rimmense  ravin  qui  elail  sous  nos 


(  210  ) 

pieds,  ct  donl  le  fond  6tait  occujxi  par  le  Rio-Hilabaya, 
petit  affluent  du  Rio  de  Sorata.  Nous  descendimes  ra- 
pidenicnt,  le  froiJ  devenanl  moins  aigu  a  chaque  nou- 
veau  pas  que  nous  faisions. 

Bienlot  les  cultures  reparurent,  les  arbrisseaux,  les 
arbustes ,  et  enfin  uieme  quelques  arbres.  Nous  ne 
lardamcs  pas  a  arriver  au  village  de  Ililabaya,  habile 
presque  entierement  par  des  Indiens  Ayinaras. 

Apr^s  avoir  double  une  petite  Crete  de  la  niontagne, 
nous  nous  trouvaraes  dans  la  vallee  de  Sorala.  Le  grand 
pic  d'lUanipo  etait  en  face  de  nous,  et  nous  aperctiraes 
a  notre  gauche,  sur  une  sorte  de  terrasse,  a  peu  de 
distance  au-dessus  du  torrent,  la  ville  de  Soi'ata  elle- 
meme ,  avec  ses  maisons  blanches  et  ses  toits  de  tuile. 
EUe  est  comme  perdue  au  milieu  du  vaste  reseau  de 
raontagnes  qui  I'entoure  de  toutes  parts. 

Le  chemin  de  La  Paz  a  Sorala  est  Ircs-bon.  II  s'en 
faut  beaucoup  qu'il  en  soil  de  nieuie  des  /lO  lieues  qu'il 
restail  a  parcourir  pour  arriver  k  Tipuani.  Je  n'hesile 
pas  a  affirmcr  que  cetle  route  est  une  des  plus  abonii- 
nables  du  raonde.  Les  mulcts  qui  font  le  trajet  ne 
peuvent  porter  qu'un  poids  de  60  a  70  kilogrammes, 
encore  esl-il  quelques  points  oil  il  est  necessaire  de  les 
decharger,  pour  qu'ils  puissent  avancer.  En  general,  il 
est  preferable  de  se  servir  d'horames  pour  le  transport 
des  bagagcs.  Un  Indien  porte  assez  facilement  une 
charge  de  30  a  35  kilogrammes. 

Les  voyageurs  emm^nent,  lorsqu'ils  le  peuvent,  des 
animaux  de  selle  ( il  en  est  de  specialemenl  dresses  a 
faire  ce  trajet);  mais  ils  ont  soin  de  descendre  de  leur 
monture  dans  les  mauvais  endroits  {fos  malos pnsos). 

La  ville  de  Sorata  est  a  environ  2  700  metres  au- 


(  211  ) 

dessus  dii  niveau  de  la  mer;  son  climat  est  agreable- 
ment  tempere,  et  il  est  repute  tres-sain.  Sa  popula- 
tion est  d'environ  i  200  ames ;  celle  du  canton  est  de 
3  000  ames;  et  celle  do  la  ])rovince  de  Larecaja,  dont 
Sorata  est  la  capitale,  est  estimee  a  35  ou  hO  milles.  Les 
autres  cantons  de  Laracaja  sont  :  Sorata ,  Hilabaya , 
Timusi  5  Combaya  ,  Cliuchulaya  ,  Conzata  ,  Mapiri  , 
Chinijo,  Yani,  Ananea,  Tacacoma,  Linata,  Challana, 
Songo,  Tipuani,  Guanay  et  Quiabaya. 

La  montee  de  Sorata  a  la  Crete  de  la  Cordillfere 
est  d'abord  facile;  le  sol  y  est  presque  nu;  quelques 
arbusles  en  composent  toute  la  vegetation.  Plus  haul, 
nous  traversaraes  des  laillis  assez  epais ,  qui  rest^rent 
en  arri^re ,  a  leur  tour,  pour  faire  place  a  une  vege- 
tation de  plus  en  plus  basse. 

Nous  atleignimes,  enfin,  la  region  des  Graminees. 
Surpris  par  un  brouillard  epais  et  par  la  nuit,  dans 
cotle  phase  de  noire  marche ,  nous  faillimes  nous 
perdre,  et  ce  fut  par  miracle  que  nous  reusshnes  u 
gagner  les  ruines  d'une  petite  ferme  indienne  nommee 
Lacatia,  ou  nous  devions  couclier. 

Toutes  les  montagnes  au-dessus  de  notre  gite  etaient 
couverles  de  neige.  Une  piante  ligneuse,  a  feuilles  glu- 
tineuses,  fetides,  le  Senecio  adenotrichius,  se  voyait  en- 
core dans  ces  regions;  elle  nous  accompagna  jusqu'au 
point  le  plus  6leve  de  la  route,  c'est-a-dire  a  une  plus 
grande  elevation,  peul-etre,  que  ne  Test  le  plus  liaut 
point  du  chemin  de  Tacna. 

La  Crete  passee,  une  descente  roide,  mais  facile, 
nous  conduisit  sur  les  bords  d'un  ruisseau  qui  descen- 
dait  des  neiges  voisines  :  c'etait  le  Rio  -Tipuani.  A 
partir  de  ce  point,  nous  ne  devions  le  quitter  qu'en 


(  21-2  ) 

arrivant  a  son  cn)boiicluire.  Toulos  Ics  j)artios  dc  la 
niontagnc  que  nous  avons  vues  ei  decouveit  pendant 
cc  trajet  sont  foiui^cs  de  scliistes  pliylladiques. 

Notre  scconde  journee  de  marche  nous  mcna  a  un 
petit  hanieau  appele  Tusuaya,  ramassis  de  hulles  aux 
murs  de  scliistes  noircis  par  I'liuniidil^  el  aux  toils  de 
chauinc  plus  noirs  encore.  Les  eaux  du  Tipuani ,  qui 
avaient  grossi  par  I'addition  do  plusieurs  affluents , 
avaient  pris  une  teinte  laiteuse.  Les  torrents  ne  sc  co- 
lorent,  en  general,  que  lorsqu'ils  sont  en  crue.  Dans 
ces  circonslances,  ilscharrient  loujours  quelques  par- 
licules  du  sol  qu'ils  traversent,  el  en  prennent  la 
nuance.  On  dil  alors  qu'il  y  a  cxjwnjada.  Quaiid  la 
crue  est  Ires-consid^rable  ,  elle  porte  Ic  nom  de  ai>e- 
iiida. 

En  nous  eloignant  de  Tusuaya,  dont  la  hauteur  au- 
dessus  de  la  incr  est  a  peu  pr6s  la  naeme  que  ccUe  de 
La  Paz,  nous  gagnions  graduellcmenl  un  climat  plus 
duux.  Aux  Buddleia  vinrent  bienlot  se  joindrc  dcs 
Bamlious,  des  Polygalees  arboresccntes,  el  quelques 
Gaultherias.  Les  taillis  devenaient  plus  epais,  et  les 
branches  des  arbustcs  se  chargeaient  de  Tillandsias, 
d'Orchidees,  el  d'autres  plantes  epiphytes.  Enfin,  pa- 
rurent  les  grandes  forels.  Lc  clicmin,  qui  s'etait  niontre 
passable  jusque-la,  commenc^a  alors  a  prendre  quel- 
qucs-uns  de  ces  caracteres  qui  lui  out  donne  en  Bo- 
livie  un  renom  piesque  proverbial.  Les  plus  mauvais 
morceaux  de  la  route  consistent  en  escaliers  irregu- 
liers,  formes  de  pierrcs  talqueuses  et  glissantes.  Les 
dogrcs  on  sont  souvent  si  eleves,  que  si,  en  les  descen- 
dant, les  animaux  ne  sont  pas  bien  rctenus,  ils  courent 
lc  risque  de  passer  par-dessus  le  bord  d'un  precipice 


(  213  ) 

et  de  roulcr  an  fond  du  ravin.  Un  des  points  qui  inspi- 
rent  le  plus  de  craintes  aux  voyageurs  qui  sc  confient 
a  ce  sentier,  est  celui  qui  porte  le  nom  de  Qiiilapituni. 
La  niontagney  esttaillee  apicjusqu'a  su  base,  et  c'est 
sur  la  face  verlicaie  du  roc,  ou  il  decril  une  diagonale, 
que  le  chemin  est  sculple.  Au  has  de  ce  roclier,  passe 
le  principal  affluent  du  Tipuani,  le  Rio-Quilapituni , 
sur  lequel  on  a  jete  un  pont  tres-pilloresque.  Parmi 
les  autrcs  affluents,  les  seuls  qui  meritent  une  mention 
speciale  sont  :  le  Rio  de  Tora,  ou  il  y  a  un  bureau  de 
peage,  et  le  Rio  de  Yabia, 

A  six  lieues  du  village  de  Tipuani  se  trouve  Sexploi- 
tation de  Romanplaya,  que  nous  visitames  en  passant. 
La  couche  de  sable  aurifere,  ou  venero,  se  rencontre, 
la,  a  pres  de  20  metres  au-dessous  dc  la  surface  de  la 
plage  de  la  riviere.  Pour  y  arriver,  on  a  creuse  un 
large  puits  jnsqu'au  plan  de  roc  sur  lequel  repose  le 
'venero,  et,  du  fond  de  ce  puits,  on  a  creuse  une  serie 
de  galcries  horizontales,  ou  frontones,  dans  I'opaisseur 
du  sable  aurifere.  La  lerre  retiree  dans  cette  operation 
est  celle  qu'on  lave  pour  en  extralre  le  md'lal.  On 
donne  au  genre  de  travail  que  jc  viens  de  decrire  le 
nom  de  labor  de  banqueria,  a  cause  des  grands  blocs 
de  rocher,  ou  bnncos,  qui  se  rencontrent  au-dessus  du 
plan,  dans  la  parlie  de  la  riviere  ou  les  Iravaux  en 
question  s'executenl. 

En  nous  rapprochanl  de  Tipuani,  les  forets  dispa- 
rurent  presque  compi^tement ,  dans  certains  points, 
pour  faire  place  a  de  verts  gazons  semes  d'aibusles 
en  fleurs  ou  de  quelques  arbres  isoles.  On  aj)pelle  les 
lieux  ainsi  caracterises  des  pajonales.  lis  rappeilent 
assez  exactement  les  Campos-gemis  du  Bresil,  a  cela 


(  21Zi  ) 

prt's  quo  le  terrain  y  est  bicn  pliisin^gal  qu'il  ne  Test 
dans  ces  dcrniers. 

Un  solcil  brulant  dardait  sur  nous  ses  rayons  pen- 
dant que  nous  Iraversions  ces  endroils  decouverts,  et 
nous  faisait  apprccier  davantage  los  bosquets  qui  so 
presenlaient  encore  de  loin  en  loin.  Ce  sont  les  ana- 
logues des  capoes  des  Bresiliens. 

Le  village  de  Tipuani  se  montra  enfin.  II  occupo  la 
rive  droile  de  la  rivi6i'e,  dans  un  point  ou  le  ravin  se 
dilate,  de  maniere  i\  former  une  espece  d'ampoule. 
Au-dessus  et  au-dessous  de  reiargissement  de  la  vallee, 
la  riviere  se  Irouve  resserree  dans  des  gorges  trfes- 
etroitos,  appelees  encanadas.  C'etail  la  seconde  visile 
que  je  faisais  a  cc  lieu  remarquable.  Je  trouvai,  cette 
fois,  le  village  un  peu  plus  grand,  luais  aussi  sale  et 
aussi  malsain  qu'au])aravant.  De  grandes  (laques  d'eau 
couvertes  d'une  ccunie  verle,  accumulee  a  la  place 
d'anciens  diggings,  en  occupent  I'entree  :  foyers  con- 
tinuels  des  fievres  qui  d^solent  cette  conlree. 

Les  maisons  de  Tipuani,  au  nonibre  de  cinquanle 
a  soixanle,  sont  en  troncs  de  paliniers  places  dubout 
et  cote  a  cote  ;  leurs  toits  sont  fails  avec  les  feuilles  des 
rafemes  arbres.  Des  orangers,  des  cafeyers,  et  quelques 
cacaoyers ,  forniaient  autour  des  babitations  des  ver- 
gers dont  on  aurait  pu  envicr  la  possession,  si  la  boue 
qui  couvrait  le  sol  n'en  eut  presque  defendu  la  jouis- 
sance  a  d'autres  qu'aux  pores,  qui  se  vaulraient  a  leur 
ombre. 

Tipuani  doit  son  existence  aux  Ir^sors  qui  enrichis- 
sent  son  sol.  Que  ceux-ci  s'epuisent,  et  il  rentrera  dans 
le  n6ant.  La  d^couverle,  par  les  Espagnols,  du  sile  qu'il 
occupe  parail  renionler  a  I'annee  1535,  A  celle  ^poque, 


(  215  ) 

le  corregltlor  fie  Sorata  Iraversa  Ja  Cordillere,  et  pe- 
nelra  jusque-la.  Pr^s  cio  Irois  miile  Indiens  etaient 
occupes  au  lavage  des  sables. 

line  Cojnpagnie  portugaise  exploitait  les  plages  de 
Tipuani  a  I'epoque  de  la  grande  insurrection  indienne 
de  1780,  et  avail  ainass6,  dit-on,  un  capital  immense, 
qui  pdrit  avec  elle. 

Les  etudes  que  nous  avons  faites  dans  cette  region 
nous  ont  permis  d'aflirmer  que ,  toute  proportion 
gardee,  elle  est  plus  riche  que  les  districts  auriferes 
les  plus  vantes  de  la  Galifornie  ou  de  I'Australie.  L'or 
que  Ton  y  rencontre  est,  ainsi  que  je  I'ai  d^ja  dit,  de 
la  plus  grande  puret6 ;  il  est  sous  forme  de  petites  p6- 
pites  aplaties,  plus  ou  moins  ellipliques  ou  ovalaires, 
t  du  poids  de  5  a  15  centigrammes  chacune. 

J'ai  dejii  parle  de  I'un  des  modes  d'exploitation  en 
usage  dans  cettc  vallee  :  de  celui  qui  porte  le  nom  de 
banqueria.  II  en  est  encore  deux  principaux,  qui  sont : 
1"  le  trabajo  dejalda  (travail  de  montagne);  2"  le  tra^ 
bajo  de plaja  (travail  de  plage). 

Le  travail  de  montagne,  ou  dQfalda,  a  pour  but  de 
retirer  l'or  qui  se  rencontre  diss6mine  dans  les  sedi- 
ments des  berges  [Jaldas)  de  la  vallee.  Pour  y  arriver, 
on  amene  subitement,  sur  les  monceaux  de  terre  que 
Ton  a  prealablement  remues  avec  la  pioclie  ou  la  pince, 
une  masse  considerable  d'eau  qui  entraiue,  en  un  clin 
d'ceil,  toutes  les  parties  legeres  du  sol,  sous  forme  de 
boue,  et  qui  fait  meme  rouler  les  plus  grosses  pierres 
a  une  distance  considerai)le,  tandis  que  l'or  reste  , 
pour  ainsi  dire ,  sur  place.  Cetle  operation  porte  le 
nom  de  cocheo.  II  est  Evident  qu'elle  ne  pent  elre  pra- 
tiquee  que  sur  un  sol  situe  en  dessus  du  niveau  de  la 


(  ^16  ) 
riviere,  puisque  c'est  vers  ellc  quo  doivent  se  pr6ci- 
piter  toules  les  raalieres  suspendues  par  la  cocha. 

Le  travail  de  playa  diCFere  de  celui  de  bcmqueria  par 
sa  plus  grande  siiuplicile.  II  est  en  usage  dans  les 
plages  ou  la  strata  aurif6re,  ou  venero,  est  a  une  faible 
profondeur  (6  a  8  metres).  II  consiste  a  decouvrir 
celle-ci  par  un  terrassement  a  ciel  ouvert,  et  i\  en  laver 
le  sable  par  les  moyens  ordinaires. 

Nous  avions  trouve  si  detestable  le  cliemin  qui  nous 
avait  conduit  a  Tipuani,  que  nous  resolumes  d'en  clier- 
cher  un  autre  pour  etlectuer  noire  relour.  Diverses  rai- 
sons  nous  engagerent  a  fixer  notre  clioix  sur  la  voie  du 
Rio  de  Coroico.  Quelques  mots  sur  la  distribution  g^- 
n^rale  des  rivieres  de  cette  parlie  de  la  Bolivie  peuvent 
trouver  place  ici. 

Le  Rio  de  Sorala,  apr^s  avoir  recu  celui  do  Ililabaya, 
se  dirige  vers  le  nord-ouest ,  en  longeant  le  c6t6  occi- 
dental de  la  Cordillere.  Apres  quelques  lieues  de  cours, 
il  regoit  un  affluent  qui  vient  du  nord,  du  cote  de  Mo- 
comoco,  et  se  coutle  aussitot  a  Test  j)our  traverser  la 
chalne  des  Andes.  II  prcnd  d(^s  lors  le  nom  dc  Rio-Ma- 
piri.  C'est  dans  cette  riviere  que  se  jetle  le  Rio -Tipuani, 
a  huit  lieues  environ  au-dessus  du  village  que  j'ai  d6- 
crit.  Dans  Tangle  que  torment  les  deux  cours  en  se 
reunissant,  se  trouve  siluee  la  Mission  de  Guanay.  Au- 
dcssous  de  ce  point,  Ic  Mapiri  porte  le  nom  de  Rio  de 
Guanay.  11  rcQoil  a  droite,  a  uno  centaine  de  metres 
au-dessous  de  la  Mission,  le  Rio  de  Cliallana,  qui  vient 
du  sud-ouest;  et,  a  une  demi-lieue  au  dela,  le  Rio  de 
Coroico,  qui  vient  de  la  province  de  Yungas.  Le  Rio- 
Beni,  formci  par  la  jonclion  du  Rio  de  La  Paz  et  de 
I'Ayopaya,  se  reunit  au  Mapiii  a  deux  journ«ies  de  na- 


(  217  ) 

vigatlon,  au-dessous  du  confluent  du  Coroico.  Le  tronc 
commun  conserve  ensuite  le  nom  de  Beni  jusqu'a  sa 
reunion  avec  le  Rio  de  Madeira. 

Tous  ces  cours  d'eau  sont  navigables,  jusqu'a  une 
certaine  hauteur,  pour  les  embarcations  connues  sous 
le  nom  de  balsas.  Ce  sont  des  radeaux  termines  en 
pointe  relevee  en  avant,  faits  avec  les  troncs  juxtapos(^s, 
et  cloues  ensemble,  de  sept  arbres  a  bois  tres-l6ger, 
appartenant  a  la  famille  dcs  Bombac^es.  On  appelle 
respece  Palo  de  balsa. 

Ce  fut  sur  un  de  ces  vehicules  que  nous  descendimes 
le  torrent  de  Tipuani,  jusqu'a  la  Mission  de  Guanay 
dont  il  a  616  question  plus  haut. 

La  navigation  n'est  pas  sans  danger,  et,  quoiqu'elle 
ne  dure,  en  moyenne,  que  quatre  a  cinq  heures,  on  a 
le  temps"  d'y  eprouver  bien  des  emotions.  Mais  que 
de  compensations  au  fr^missement  involontaire  occa- 
sionne  par  le  passage  des  vial  pasos,  dans  le  spectacle 
des  admirables  points  de  vue  qui  se  presenlent  a  tout 
moment!  Lanc6e  avec  la  rapidity  de  I'eclair  au  sein 
des  rapides,  la  balsa  semble  devoir  se  briser  inevita- 
blement,  ou,  pour  le  moins,  se  renverser  sur  les 
rochers  qui  so  monlrent  a  tout  instant  sur  son  pas- 
sage; mais,  au  moment  critique,  les  iongues  perches 
de  barabou  des  balseros  la  font  ddvior  de  sa  course 
perilleuse.  Elle  s'elance  alors  de  plus  belle  dans  celte 
voie  de  naufragcs,  loujours  imminenls,  mais  touiours 
evites. 

Pres  de  Guanay,  la  riviere  s'dlargit,  et  elle  y  deCrifc 

un  coude  assez  brusque,  pour  aller  se  rdunir  au  Ma- 

piri.  La  Mission  s'eleve  sur  une  jolic  esplanade,  dans 

I'espoce  de  p^ninsule  qui  exisle  a  la  jonclion  des  deux 

III.   MAi\s.   2.  45 


(  218) 

rivieres.  Scs  inaisons,  qui  eiitoiircnt  pour  la  plupart 
une  grandc  place,  a  unc  des  exlr^mites  de  laquelle  se 
trouvent  I'liabitatiou  du  curt!;  el  Toglise,  sont  loutes 
construites  en  bambous  el  recouvertes ,  connne  cellcs 
dc  Tipuani,  d'un  chaume  de  feuilles  de  palmier. 

La  populalion  de  Guanay  est  d'cnviron  300  aines. 
Elle  consisle  presque  uniquement  en  Indiens  Lecos, 
nation  qui  occupail  autrefois,  a  ce  qu'il  paralt,  une 
des  plages  de  Tipuani  et  les  rives  de  Mapiri.  Ses  meni- 
bres  I'urenl  catechises,  en  ISOZi ,  par  un  religieux  du 
couvenl  de  Nuestra-Seuora  de  Ocopo,  qui  les  dislribua 
dans  les  Missions  de  Guanay  el  de  Mapiri,  fondees  a 
leur  intention.  Pius  lard,  la  nation  emigre  ful  reunie 
dans  le  premier  de  ces  villages.  Pendant  noire  s6jour 
dans  cette  localile,  nous  vimes  arriver  une  balsa  de  la 
partie  inferieure  de  la  riviere;  elle  etait  charg<ie  d'ln- 
diens  de  la  nation  des  Mozetenes.  Celle-ci  occupe  trois 
Missions,  silu^es  sur  le  Piio-B^ni ,  au-dessus  du  con- 
fluent du  Pvio  de  Guanay  ou  Mapiri.  La  premiere, 
appel^e  Muchanes,  fondee  en  1725,  est  a  4  lieues  au- 
dessus  de  lenibouchure  de  la  riviere.  Santa-Ana ,  la 
seconde ,  est  a  cinq  journoes  de  navigation  au-dessus 
du  Muchanes.  Magdalcnas,  enfin ,  j>e  tiouve  a  5  lieues 
plus  haul  que  la  Mission  precedente,  a  IVMubouchure 
du  Piio-Ayopaya,  qui  descend  des  parties  elevees  du 
departeinent  de  Cochabaniba.  La  population  des  trois 
Missions  est  d'environ  1  350  habitants. 

Oulre  les  Indiens  dont  je  vicns  de  parler,  nous  en 
vlmes  encore  a  Guanay,  qui  venaienl  des  villages  dc 
Tumopasa  ct  d'YsianKis,  dans  la  province  de  Caupo- 
lican.  Us  appartenaienl  a  la  nation  Tacana. 

T oules  ces  peuplades  parlent  des  langues  particu- 


(  219  ) 

litres,  bicn  clisVinclos  de  celles  qui  sonl  en  usage  dans 
la  province  de  Moxos.  Elles  n'ont  meme  tie  commun, 
entre  elles,  qu'un  point  que  je  signalerai  en  passant : 
c'est  I'usage  qui  y  esl  fait  d'une  numeration  quinaire. 
Cette  numeralion  date-t-elie  de  Tepoque  de  la  forma- 
tion de  leur  langue ,  ou  y  a-t-elle  ete  introduite  par 
les  missionnaires?  C'est  ce  que  je  n'ai  pu  constaler; 
mais  la  derniere  supposition  me  parait  elre  la  plus 
vraiseniblable. 

La  physionomie  des  Locos  est  bien  dilferente  de 
celle  des  Indiens  Aymaras  et  Quichuas,  des  liautes 
terres  de  la  Bolivie.  Us  ont  le  teint  plus  clair,  le  front 
plus  eleve,  le  nez  moins  6pate;  leur  boucbe,  quoique 
grande  ,  est  bicn  faite  et  sourlante.  La  plupart  d'entre 
eux  portent,  aujourd'liui,  les  cheveux  courts  et  partag6s 
sur  le  cole.  La  taille  des  hommes  est  en  general  assez 
^lev6e  ;  ils  sont  d'une  force  et  d'une  agilite  pcu  com- 
munes. Le  costume  des  deux  sexes  consiste  en  une 
grande  cliemisc  sans  manches,  appelee  talle,  en  tout 
semblable  au  (ijjoi  des  Missions  de  Mojos  et  de  CUi- 
quitos.  L'arc  est  encore  d'un  usage  frequent  chez  eux; 
mais  ce  n'est  guere  que  pour  la  peche;  ils  le  rempla- 
cent  par  le  fusil  dans  toules  les  aulres  circonstances 
oil  des  amies  leur  sont  n^cessaires. 

Ce  ne  fut  pas  sans  peine  que  nous  nous  procurames 
les  ladeaux  et  les  Indiens  dont  nous  avions  besoin  pour 
remonler  le  Coroico.  Cependant  tout  ful  pret  le  18  sep- 
lembre,  et  nous  fimes  nos  adieux  a  la  Mission. 

En  arrivant  a  I'embouchure  du  Coroico,  nous  nous 
aper^umes  qu'une  des  quatre  balsas  que  nous  avions 
cmmenecs  manquait  de  stabilite,  et  nous  fumes  obliges 
d'y  faire  ajouler  des   troncs  suppU'^mentairos.  Ln  lar- 


(  220  ) 

geiir  du  Coroko  a  son  embouchure  n'(5lail  gu^re  que 
le  tiers  de  celle  du  Mapiii.  Les  plages  dcs  deux  rivieres 
^taient  couvertes  d'une  grandc  nappe  de  ccs  grami- 
nees  geanles,  qui  portent  le  noni  do  Gynerium  sngil- 
ta/e.  Les  tiges  de  ces  vegetaux  Elegants  entrent  dans  la 
construction  de  toutcs  les  habitations  du  pays;  j'cn  ai 
parl6  sous  le  nom  de  Bambous. 

Nos  reparations  elant  termini^es,  nous  nous  rcmimes 
en  route.  On  avait  fixe  solidcinent  au  bee  de  chacune 
de  nos  balsas  deux  cordes-lianes  tres-resistantes.  Ellcs 
avaicnt  8  a  10  metres  de  longueur.  Deux  Indiens  y 
claient  alleles  et  tralnaicnt  la  hnha  le  long  de  la  berge 
de  la  riviere;  pendant  qu'un  troisi(!;nie ,  resle  a  bord , 
renipt'chait  d'accoster,  en  se  servant  d'une  longue 
perche.  Quand  la  nature  du  rivage  ne  permeltait  pas 
I'usage  des  cordes ,  c'otaient  les  perches  seules  qui 
fonctionnaienl. 

Les  premiers  jours  de  notre  navigation  furent  com- 
parativement  faciles;  les  rapides ,  quoique  tr^s-fre- 
quents,  n'avaicnt  rien  d'clTrayant.  Les  rives  dlaient 
couvertes  de  rochers  noirs  ct  arrondis,  polls  par  I'ac- 
lion  de  I'eau;  une  foret  impenetrable  les  encadrait  de 
sa  sombre  verdure.  Le  qualrieme  jour,  nous  passames 
I'embouchure  dune  petite  riviere  appcl(5e  Caranavi.  A 
parlir  de  cc  point,  les  obstacles  auginenlerenl.  Les 
rapides  etaient  si  nombreux,  qu'il  ne  se  passait  guure 
cinq  minutes  sans  que  nous  en  rcncoutrassions  au 
moins  un.  Dans  quelqucs-uns  d'entre  eux,  la  rivi6re 
faisait  une  chute  tolalo  de  2  ou  3  metres. 

Pour  fairc  passer  nos  balsas  par-dessus  les  rochers 
qui  Torment  cos  calaracles,  il  fallut  plusieurs  fois  les 
soolcvcr  a  force  de  bras.    Nos  ombarcalions  so  pen- 


(  221  ) 

chaient  lellenient  paifois,  que  c'eluil  miracle  qu'elles 
ne  se  renvcrsassent  pas  plus  souvcnt.  Cet  accidenl  nous 
arriva  Irois  fois;  mais  la  dexterile  de  nos  Indiens  etaiL 
telle,  que  nous  n'eumes,  en  aucun  cas,  a  ddplorcr  de 
partes  serieuses. 

Depuis  que  nous  elions  enlres  dans  la  region  des 
grands  rapides,  les  monlagnes  presenlaient  a  I'ceil  un 
aspect,  different  de  celui  qu'elles  avaient  plus  bas ; 
beaucoup  d'entre  elles  etaient  laillces  a  pic  et  encais- 
saient  dtroitenient  la  riviere.  Lcurs  flancs  etaient  cou- 
verts  de  grands  Tillandsiasetd'autres  v^gotaux  a  forme 
pittoresque  ,  ou  feslonnes  de  lianes,  sur  lesquelles 
jouaient  des  bandes  d'^cureuils.  Puis ,  dans  leurs  re- 
coins  les  plus  sombres,  etaient  perches  des  coqs  de 
I'oclie  qui  s'envolaicnl  a  notre  approche,  en  sillonnant 
I'air  comnie  des  traits  de  fou. 

Neuf  jours  apres  notre  depart  dc  Guanay,  nous 
abordames  au  pied  de  la  montagne  sur  laquellc  est 
batie  la  ville  de  Goroico,  chef-lieu  de  la  riche  province 
de  Yungas.  Nous  y  entranies  le  27  septembrc ,  et  en 
reparlimes  le  1"  octobre. 

Le  cliemin  que  nous  allions  prendre  pour  repasser 
la  Gordillere  est  aussi  bon  que  celui  que  nous  avions 
parcouru  jusque-lu  est  mauvais.  II  suit,  a  pcu  pres 
partout,  la  direction  du  Rio  de  Goroico,  et  a  coute, 
dit-on,  au  gouverncment  boli\ion,  unc  somme  de 
300  000  piastres.  Plusieurs  mules  ciiargees  peuvent  y 
marcher  de  front  dans  les  endroils  les  plus  diilicilos. 
Le  voyageur  s'y  croisc  a  tout  moment  avec  des  cara- 
\'anes  qui  portent  au  dehors  les  produits  des  fortilcs 
vallees  de  Yungas. 

J'ajoutcrai   que  je  ne  connais    aucunc   passe  des 


(  222  ) 

Andes  ou  le  pavsage  ait  un  aussi  reniarq liable  cachet 
de  grandeur. 

Aprcs  une  course  sinucusc  au  milieu  de  raille  mer- 
veilles  nalurelles  ,  nous  arrivauies  a  un  petit  village 
nouiuie  Chaiila-Pampa,  ramassis  de  cabanes  et  de  ban- 
gars  ou  st'journent,  au  nioins  une  nuit,  les  troupes 
d'anes  et  de  mulcts  qui  sortent  des  Yungas  ou  qui  s'y 
dirigent.  La  grande  vt^getation  y  cesse  j  celle  des  ar- 
busles  y  commence;  plus  haut  encore,  ceux-ci  dispa- 
raissent ,  el  Ion  ne  voit  plus  qu'un  sol  nu  ,  seine  de 
blocs  de  granit. 

Dans  ces  lieux  desoles,  on  trouvc  cependant  quel- 
ques  habitations  ,  parmi  Icsquelles  est  une  csp^ce 
d'hotel,  ou  tnmbo,  appel6  Cluicura,  oil  se  vendent,  a 
prix  d'or,  les  objets  do  premiere  nocessitc^.  Bicn  plus 
haut  encore,  non  loin  au-dessous  du  niveau  des  neiges 
perp6tuelles ,  se  trouve  un  autre  tambo,  que  Ton  dis- 
tingue par  le  nom  de  Cbucura-chica.  Nous  y  passames 
la  nuit  du  3  octobre,  et  nous  rentrames,  le  lendemain, 
a  La  Paz. 

Notre  mission  elanl  terminee,  nous  ne  pensamcs 
plus  qu'a  regagner  I'Europe.  Je  mis  au  plus  vile  en 
ordre  les  collections  d'histoire  naturelle  que  j'avais 
formees  depuis  mon  arriv6e  en  Bolivie,  el  je  partis 
pour  la  cole  par  le  chcmin  de  Puno  ct  d'Arequipa.  11  y 
a  sur  cetle  route  une  ligne  de  posies,  dont  je  prolilai. 
filablie  par  les  Kspagnols  pour  raciiiter  les  commu- 
nications enlre  les  cliefs-licux  de  leurs  vices-royautes, 
on  a  continue,  lant  l)ien  que  mal,  a  I'eutrelenir;  mais 
il  s'en  faut  beaucoup  qu'elle  soil  parfaite. 

Les  inaisons  de  poste  sont  dislantes  I'une  de  I'autre 
de  3  h  6  lieues  environ ,  et  les  mules  ou  les  chcvaux 


(  223  ) 

que  I'on  y  loue  se  payent  a  raison  d'uii  real  (60  cen- 
times) par  lieue.  Un  Indien  ,  decore  du  tilre  de  pos- 
tilion, auqucl  on  paye  un  medio  (30  centimes)  par 
lieue,  accompagne  les  animaux  loui^s  d'une  maison 
de  poste  a  une  autre ,  et  prend  soin  de  ceux  qui  sont 
charges.  Ces  hommes  ont  une  telle  habitude  du  me- 
tier qu'ils  font  que,  quel  que  soit  le  train  que  Ton 
aille,  ils  ne  re?tent  jamais  en  arriere;  et,  ce  qu'il  y  a 
de  plus  singulier,  c'est  qu'ils  ne  paraissent  jamais 
s'essouffler,  tandis  que,  dans  ce  meme  pays,  un  Euro- 
p6en  peut  a  peine  courir  dix  pas  sans  6tre  oblige  de 
s'arrSler. 

En  sortant  du  ravin  de  La  Paz,  je  me  dirigeai  dans 
la  direction  du  grand  lac  de  Titicaca ,  a  travers  une 
puna  pierreuse  el  nue.  Quelques  cbamps  cultivi^s  y 
apparaissaient  ga  et  la ,  mais  sans  verdure.  D'innom- 
brables  tas  de  pierres ,  disperses  de  tous  cotes ,  tdmoi- 
gnaient  des  peines  que  s'dtaient  donnees  les  Indiens 
pour  chercher  h  tirer  quelque  chose  de  leur  terre  in- 
grale. 

Apres  que  j'eus  passe  le  petit  village  de  Laja,  les 
pierres  cesserent  de  se  montrer ;  elles  etaient  cacht^es, 
sans  doute,  par  un  d^pot  plus  recent.  Quelques  col- 
lines  s'^levaient  abruplement  du  plan  uni  de  la 
Pajiipa. 

II  n'est  pas  possible  de  douter  que  cette  plaine  n'ait 
forme,  a  une  epoque  assez  peu  recul^e,  le  bassin  d'un 
lac  qui  se  conlinuail  avec  celui  qui  existe  actuellement 
un  peu  plus  au  nord. 

Une  chaine  dc  coUines,  cssenliellement  composees 
de  gr^s  d'un  rouge  pale,  separe  la  Pampa  de  Laja 
d'une  autre  plaine  tout  a  fait  semblable,  a  une  des 


(  22/1  ) 

exlr^mil^s  do  laquellc  se  Irouvent  Ics  cel^bres  riiines 
dcTiaguanaco.  Celles-ci  sont  siluecs  sur  une  eminence 
tr^s-niarquee.  En  y  arrelant  mon  allenlion,  j'ai  pense 
que  ce  lieu  devait  foi-nicr,  durant  une  ccrtaine  periodo, 
une  petite  ile ;  s'il  en  ctait  ainsi  a  I'epoque  ou  les  edi- 
fices dont  on  voit  les  ruines  out  ele  dlcvos,  on  s'expli- 
querait  peut-etre  plus  facilcmcnt  comment  les  pierres 
colossales  qui  les  constituent  y  furent  transportees. 

Plusieurs  autres  eminences  do  la  plains  dc  Tiagua- 
naco  portent  a  leur  base  des  traces  non  equivoques 
de  Taction  d'une  nappe  d'eau  qui  les  aurail  battues 
pendant  longtcmps. 

Qualre  lieues  separcnt  Tiaguanaco  des  rives  du  lac 
actuel  dc  Titicaca,  ou  il  y  a  un  village  nppcle  Guaqui. 
Enlre  ces  deux  points,  le  sol  est  convert,  sur  une 
grande  ^tendue,  d'une  couche  de  gravier,  et  porte  les 
marques  les  plus  ^videntes  d'avoir  etc  occupe  par  les 
eaux  a  une  epoquc  comparalivement  tros-peu  reculee. 

En  quittant  Guaqui,  jc  suivis  les  bords  du  lac  qui 
decrit,  de  ce  cote,  un  grand  angle,  et  j'arrivai,  apr^s 
une  marche  de  quatre  lieues,  au  canal  du  Desaguadero, 
qui,  comme  on  le  sait,  forme,  en  ce  point,  la  limite  dc 
la  Bolivie.  Un  pont  do  bateaux,  a  cliaque  extremito 
duquol  il  y  a  une  douane  el  un  bureau  de  peage ,  fait 
communiquer  los  deux  rives.  Jo  pris  conge,  en  le  Ira- 
versanl,  de  la  Ropublique  Bolivioniie,  ct  j'abordai  celle 
du  Perou. 

Les  monlagncs  au  milieu  dcsquelles  jo  dirigcai  ma 
course,  apres  avoir  passe  le  petit  village  dc  Zepita , 
sont  d'origine  volcaniquo.  Elles  forment  un  groupc 
remarquablc,  qui  m'a  scmJjlo  clrc  un  dos  centres  prin- 
cipaux  du  grand  soulevement  qui  a  du  s'operor  dans 


(  225  ) 

celte  parlie  de  rAmdrique  post^rieuremenl  a  la  fur- 
mation  des  Andes;  ce  soul^vement  parait  avoir  combl(^ 
une  immense  vallee  qui  separait,  avant  celte  epoquc, 
la  GordillSre  interieure  de  la  cliaine  littorale. 

Le  district  que  je  traversais  forme  partie  du  d6par- 
teraent  de  Puno.  II  etait  autrefois  un  des  plus  floris- 
sants  du  Perou ;  sa  decadence  a  suivi  I'expulsion  des 
jesuites,  auxquels  on  en  doit  surtoul  la  civilisation.  II 
suffit  de  Jeter  les  yeux  sur  les  nonibrcuscs  eglises  ou 
ruines  qui  s'el^vent  encore  comrae  des  colosses  au- 
dessus  des  chaumes  enfumes  des  villages  d'a  present, 
pour  avoir  une  idee  des  cliangements  survenus  dans  la 
constitution  de  ce  pays.  Juli  etait  anciennement  la  ca- 
pitale  du  departement,  et  Test  encore  de  la  province 
la  plus  peuplee,  qui  est  celle  de  Cliucuito.  De  la  plu- 
part  de  ses  maisons,  il  ne  reste  que  les  murs;  il  en  est 
de  m§me  de  cellcs  du  village  de  Pomata,  que  je  tra- 
versai  le  mfime  jour,  de  Hilabc,  de  Acora,  et  nieme  de 
Chucuito,  qui  n'est  ^loigne  c[ue  de  quatre  lieues  de 
Puno,  capitale  actuelle  du  departement  du  memc 
nom. 

Entre  le  Desaguadero  et  Pomata ,  la  route  traverse 
la  base  de  la  p^ninsule  de  Copa-Cabana.  Elle  se  rap- 
proclie  ensuite  des  rives  du  lac,  et  continue  de  les 
suivre  jusqu'a  Puno.  Le  sol  d'une  grande  partie  des 
plaines  que  j'y  parcoiiriis  consisle  en  une  terrc  allu- 
vialc  d'unc  extreme  ferlilite.  On  y  cultlvc  la  pomme  de 
terrc.  Forge,  I'lJlkico,  les  fevcs  de  marais,  et  I'Oca  ou 
Oxalis  tubcrosa.  Eos  seuls  fruits  que  Ton  ait  r^ussi  a 
y  faire  murir  dans  quelqucs  endroits  abrites  sont  la 
cerise  ct  la  IVaise.  Un  fait  curieux  a  signaler,  c'est  que 
le  mais,  qui  ne  miirit  son  grain  dans  aucun  des  points 


(  226  ) 

quo  je  viens  de  nommer,  donne  uu  produil  lr6s-estiine 
dans  plusieurs  des  iles  du  Jac  qui  sont  au  infinie  ni- 
veau. 

Au  dela  de  Chucuito,  la  route  contourne  une  grande 
bale,  au  pied  de  montagnes  de  gres  ou  de  roches  vol- 
caniques  auxquelles  I'action  de  I'eau  a  donn^  les 
formes  les  plus  bizarrcs,  et  elle  aboutit  enfin  a  Puno. 

Presse  par  le  temps,  je  me  vis  dans  I'obligalion 
d'abandonner  le  projet  que  j'avais  form6  de  passer 
quelques  jours  dans  cette  ville  intc^ressuiite  sous  tant 
de  rapports;  je  me  lialai  de  partir  pour  Arequipa, 
ou  j'arrivai  le  2/i  octobre,  et,  le  2  novembre,  je  m'era- 
barquai  pour  I'Europe. 


LES  OASIS  DU  SAHARA  ALGKRIEN. 


Lorsqu'cn  1830  la  France  planta  son  drapeau  sur 
les  murs  d'iVlger,  et  dclivra  I'Europe  cbretienne  du 
joug  hontcux  que  quelques  forbans  faisaient  poser  sur 
le  commerce  de  la  Mediterranoe ,  nos  connaissances 
g^ographiques  sur  I'Algerie  n'^taient  guere  plus  6tcn- 
dues  que  celles  que  nous  avons  aujourd'hui  sur  le  Ma- 
roc.  On  connaissait  assez  mal  les  cdtes  redoulees  des 
Elats  barbaresques ;  on  avait  par  les  consuls  cl  les  rela- 
tions assez  rares  d'inlr6pidcs  touristes  quelques  d(itails 
sur  les  grandes  villes  maritimes  d'AIgcr,  d'Oran,  dc 
Bone;  on  savail  que  dans  I'interieur,  par  dela  les  pre- 
uiiorcs  cbaines  jusqu'alors  infranchissables  dc  I'Atlas, 
il  exislait  quelques  cites  importantcs  :  Constantino, 
I'ancienne  capitale  de  Jugurlha;  Titteri,  oil  r^sidait  un 


(  227  ) 

bey;  TIemcen,  ville  mllitaire.  Lc  Suedois  Restelius,  lo 
Danois  Scliavv,  I'Anglais  Bruce  et  le  Frangais  Desfon- 
taines,  disaient  dans  leurs  relations  tout  ce  que  Ton 
savait  de  I'Algerie, 

Gependant  les  Romains  avaient  parfaitement  connu 
ce  pays;  ils  I'avaient  couvert  d'un  reseau  de  grandes 
routes,  reliant  enlre  elles  les  colonies  qu'ils  avaient 
etablies  jusqu'a  80  lieues  dans  I'interieur  des  terres. 
Si  Ton  en  juge  par  les  ruines  des  nombreuses  cit^s  qui 
couvrent  le  versant  septentrional  de  i'Aures,  ils  avaient 
fini  par  s'etablir  fortement  dans  ce  pays ;  mais  I'inva- 
sion  arabe,  le  fanatisine  musulman ,  I'indolence  des 
Turcs ,  avaient  a  I'envi  plonge  dans  la  nuit  de  I'oubli 
et  du  n^ant  touts  trace  conserv^e  de  celle  antique  civi- 
lisation. 

11  a  done  I'allu  que,  dans  I'espace  de  vingt-deux  ans, 
la  France  reconquit  patiemment,  et  pour  ainsi  dire 
lieue  par  lieue ,  a  la  science  geographique ,  I'entiere 
connaissance   de    cette    belle    contree.    Aujourd'liui , 
grace  aux  int^ressants  travaux  de  MM.  Dureau  de  la 
Malle,  d'Avezac,  Graberg  de  Hemso,  et  surtout  a  ceux 
de  M.  Prax  et  des  officiers  de  notre  savant  corps  d'etal- 
major,  a  la   lete  desquels  nous  citerons  avec  justice 
MM.  Daumas,  Carette,  Renou,  nous  avons  vu  les  liniites 
de  nos  connaissances  geograpbiques  reculees  jusqu'au 
dela  du  grand  Atlas,  et  ie  desert  de  Sahara  n'a  meme 
pas  arrete  nos  intrepides  exploraleuri.  Les  limites  de 
I'Algerie  vers  le  sud  doivent  cependant  depasser  les 
dernieres  cimes  de  I'Allas;  car,  a  I'entree  du  Sahara, 
on  rencontre  unc  ligne  de  six  oasis,  senlinelies  avan- 
cees  de  la  civilisation,  liecs  par  leurs  int^rets  commer- 
ciaux  et  leurs  besoins  les  plus  imp^rieux  avec  I'Al- 


(  228  ) 

gerie  ;  cllos  en  depeiulenl  naturcllement ,  el  cllcs 
pourront  clrc  appclcos  dans  un  avenir  prochain  a 
servir  d'clapes  cominercialcs  entrc  I'Algeiie  el  Ic  pays 
des  noirs,  car  clles  sont  plus  voisines  de  Tounboktou 
que  loules  les  aulres  oasis  africaines.  Les  oasis  du 
Sahara  algerien  sont  peuplees  par  des  Iribus  plus  in- 
lelligcnles  et  plus  aplcs  a  recevoir  les  enseigncinenls 
dc  la  civilisation  que  les  Arabes  du  Tell.  Elles  cultivent 
avec  habilcle  le  palmier,  occupeut  des  villes  entourees 
de  remparts,  et  ont  un  gouvei'neinent  regulicr,  form6 
en  grande  partie  par  I'election.  Ellos  ont  amcne  a  un 
certain  point  de  perfectionnement  plusiours  brandies 
de  leurs  manufactures  indigenes,  et,  au  moycn  do 
leurs  caravanes,  elles  ont  clabli  de  vastes  relations 
de  commerce  avec  les  districts  du  nord  et  du  centre  dc 
I'Afrique.  Ces  oasis  sont  separees  Tunc  de  I'aulre  par 
des  bandes  dc  sable  parseniecs  dc  planles  ct  d'ar- 
busles  qui  ne  peuvcnt  servir  qu'a  la  nourrilurc  des 
iroupeaux.  Chacune  d'elles  presente  un  groupe  anim6 
de  villes  et  de  villages;  chaque  village  est  enloure 
d'une  quanlild  d'arbres  a  fruit.  La  s'el^ve  Ic  palmier, 
Ic  plus  beau,  le  plus  gracieux  de  tous  ces  arbres,  qui 
fournit  chaque  annee  une  ample  r^colte  de  dattcs,  cc 
qui  avail  valu  au  Sahara  algerien  le  nom  dc  Belad-el^ 
Djerid,  ou  pays  des  dalles;  le  grenadier,  le  figuier, 
I'abricotier,  Ic  peclier,  la  vigne ,  croisscnt  a  cole  dc 
lui ,  et  mOlent  leur  ombre  a  la  sienne.  Quclquefois 
on  rencontre  pres  dc  ces  lies  dc  verdure  des  bns-fonds 
qui,  en  hiver,  sc  reinplissent  d'eau  salic,  et,  en  <ito  , 
olTrent  unc  plaine  aride,  dessechcie,  couverte  d'une 
couche  de  sel  facile  a  exploiter  :  cc  sont  les  Sebkhas. 
D'aulres  fois  encore  ,  c'est  unc  zone  monlagneusc  he- 


(  229  ) 

riss^e  de  poinles  de  roches  ou  de  monlagnes  de  sable. 

Les  six  oasis  que  nous  allons  successivement  visiter 
sent,  en  allanl  de  Test  vers  I'ouesl :  I'Ouad-Souf  (uieri- 
dien  de  Philippeville),  I'Ouad-Rir  etTemacin  (nieridien 
de  Djidjeli),  TOuard-gla  (uieridien  de  Bougie),  I'Ouad- 
M'zab  (meridien  d'Alger),  enfin  Toasis  de  Oulad-Sidi- 
C4heikh  (meridien  d'Oran). 

L'Ouad-Souf  est  la  plus  voisine  de  la  fronliere  de 
Tunis;  ellc  comprend  le  Ziban ,  qui  est  au  sud  de 
Constanline. 

Le  Ziban  se  compose  de  Irente-liuit  villes  ou  villages 
occup^s  par  18  tribus,  formant  ensemble  une  popu- 
lation d'cnviron  lOOOOOames.  Biskara  ou  Biskra  est  le 
chef-lieu  politique  de  cettt:  oasis  :  c'est  un  poste  avanc6 
des  FranQais  dans  le  desert,  qui  y  tiennent  garnison  au 
fort  Saint-Germain,  destine  u  prot^ger  I'oasis  centre 
les  incursions  des  Arabcs  de  I'Aur^s.  Laville,  dont  les 
maisons  sont  conslruiles  en  briques  sech6es  au  soleil, 
renferme  environ  2  500  habitants.  Sidi-Okba  est  la 
meti'opole  religieuse.  Cetle  dernierc  ville  est  arrosee 
par  un  ruisseau  appele  Oudd-Braz,  la  riviere  da  com- 
bat, qui  descend  des  monts  Aures,  pour  se  jeler  dans 
rOuad-el-Djedi.  Les  autres  villes  sont  :  To/ga  ,  Liana, 
Farfar,  Zadcha  ou  Zaatcha,  qui  tenta ,  rnais  en  vain, 
de  rtlssister  a  nos  armes,  et  Bonchagronn;  les  princi- 
pales  tribus  sont  celles  des  OnJad-Zeian,  des  Sahdri, 
des  Ouldd-Saci,  et  des  Oaldd-Harkat.  Cctle  oasis  est 
partag^e  en  Zab  du  nord ,  du  sud  ,  de  Test ,  de  I'ouest, 
et  est  environnee  par  les  terres  des  parcours  des  tri- 
bus nomades,  qui    apparliennent  a  la  province   de 

Constanline. 
VOudd-Soiif,  oasis  siluee  au  sud- est  de  la  pr^cti- 


(  230  ) 

denle,  sur  la  fronti6ro  la  plus  orlcnlale  de  I'Algc^ric, 

presente  un  tout  autre  caract^re  :  die  est  perdue  au 

milieu   d'un  labyrinlhe  do  monlagnes  de  sable,  qui 

absorbent  iminediatcment  conime  autant  d'^ponges 

les  pluics  les  plus  abondanles.  M.  Caretle  les  compare 

a  de  hautes  et  larges  dunes.  11  est  hors  de  doute  que 

la  mer  en  a  jadis  baignc  le  pied ,  ainsi  que  le  t^moi- 

gnent  les  nombreusos  coquilles  marines  que  Ton  y 

rencontre.  Les  replis  do  ce  lahyrintlie  recfelenl  liuit 

petitos  villes  ou  villages  dont  les  habilallons,  couvertcs 

de  domes  pointus,  presenlent  exaclement  Timago  de 

ruches;  ellcs  sont  entourees  de  jardins  et  de  paluiiers 

qui  produisent  les  plus  belles  daltos  du  Sahara.  El- 

Oudd^  Ezgoiim,  TarzouH,  Behiina  et  Goumar,  sont  les 

principales  de  ces  villes.  El-Ouad,  la  capitale  de  I'oasis, 

commerce  avec  Tunis  par  Nella  ct  Rairouan ,  el  lui 

envoie  ses  dattes  si  eslimecs  a  Paris  sous  le  nom  de 

dattes  de  Tunis;   mais  il   serait  plus  naturel  qu'elle 

exportat  ses  produits  par  Biskara,  Constantino  el  Phi- 

lippeville.  Une  route  part  aussi  de  cetle  ville,  pour 

penetrer  dans  le  pays  des  noirs  en   traversant  Gha- 

damcs.  Ghat  et  Aghades,  les  grandes  oasis  du  desert. 

Parmi  les  tribus  qui  habitent  I'Ouad-Souf,  nous  cile- 

rons  :  les  OulddMansoury  les  El-Djebirdt,  les  Oiddd- 

Hamza  et  les  El-Gouaul.  Sa  population  est  evalude  a 

environ  AO  000  habitants.  La  situation  do  cette  oasis 

impose  a  ses  habitants  une  servitude  p^nible  :  le  vent, 

qui  denude  la  cime  des  coUincs,  en  chasse  les  sables 

dans  les  villages  construils  a  lour  plod  ;  aussi  voit-on 

les  Souafa  occupes  du  matin  au  soir  a  d^blayor  lours 

cours  et  leurs  jardins,  pour  Eloigner  I'invasion  qui  les 

menace  sans  cesse. 


(  231   ) 

A  qualrc  journ^es  a  I'oiiest  de  I'oasis  d'Ouad-Souf 
se  trouvc  celle  de  Oudd-Rir,  qui  est  bien  plus  6lendue : 
elle  occupc  un  vaste  bassin  dont  quelques  parties  sont 
envahies  par  des  eaux  slixgnanles.Tuggurt  ou  Tongourt, 
capilale  de  celte  oasis,  est  balie  au  milieu  d'une  plaine 
l^g^rement  ondulee;  au  sud  et  a  Test  sont  ses  jardins 
et  ses  bois  de  dattiers.  L'espace  occup6  par  la  ville 
figure  a  peu  pres  un  cercle,  au  sud  duquel  est  la  Kas- 
bab  ou  cbateau  du  cheikb.  Elle  est  entouree  par  une 
muraille  baule  de  3  a  Zi  metres,  et  defendue  par  un 
foss6  de  10  metres  de  largeur ;  on  y  penetre  par  deux 
portes,  la  portedu  Pecker,  Bdb-el-Khoukha,  au  sud-est, 
et  la  porte  de  Sidi-Abd-es-Salam.  II  existe  une  Iroi- 
si^me  porte  appelee  Bdb-el-Ghdder  (la  porte  de  la  tra- 
bison);  elle  appartient  a  la  Rasbah,  et  ne  s'ouvre  ha- 
bituellement  que  pour  le  cbeikb  :  c'estpar  cette  porte 
qu'entrent  ses  fiancees;  c'est  par  cette  meme  porte 
que  sortent  les  criminels  condamn^s  a  mort. 

Les  maisons  de  Tuggurt,  balies  de  lerre  et  de  moel- 
lons,  n'ont  qu'un  etage,  beaucoup  meme  n'ont  qu'un 
rez-dc-cbaussee.  La  ville  possede  vingt  mosquees,  et  un 
bazar  ou  Ton  vend  la  laine,  la  gomrae,  les  bonnets 
rouges,  les  kbaiks  et  les  dattes.  Les  hommes  cultivent 
leurs  dattiers  el  font  le  commerce,  tandis  que  les 
femmes  fabriquenl  des  lissus  de  laine  et  de  soie.  La 
population  de  la  ville  est  d'environ  3  000  babitants  de 
races  differentes  :  les  Beni-Mounour  ont  le  teint  noir; 
\es  Med/haria  ont  loule  la  pbysionomie  desJuifs,  dont 
ils  ont  conserve  la  langue. 

La  ville  de  Tuggurt  est  un  des  points  les  plus  impor- 
tanls  sous  le  rapport  de  I'avcnir  commercial  du  Sahara 
alg^rien ;  elle  exerce  sur  les  autres  oasis  une  certaine 


(  23i>  ) 

supr^malle  :  c'cst  en  ofTet  une  des  ]>rinclpales  dtnpes 
du  desert.  Elle  communique  avec  Philippeville  et  Con- 
stantine,  parEl-M'gheir,  Biskara  etBatna;  avec  Toun- 
boklou ,  Agliadfes ,  Glial  et  rAfrirjuc  ccntralc ,  par 
Ghardeia,  Timimoun  et  Insalah.  Pcul-etre  la  France 
tirera-t-elle  un  jour  parti  des  ressources  qu'oflViraicnt 
a  son  commerce  cos  differenios  voles  do  communica- 
tion qu'elle  ignorait  naguero,  en  faisant  dc  Tuggurt 
un  march6  important  ou  les  caravanos  viendraient 
s'approvisionncr  des  articles  ciu'opeens ,  en  ^change 
des  denr^es  de  I'inlerieur  de  I'Afrique  (1). 

Aux  environs  de  Tuggurt  sc  trouvent  de  nombreux 
villages  :  nous  cilerons  ceux  de  Beni-Icouacl,  deNezla, 
de  Ba-Jllouch;  leur  population  monlc  i  environ  16  ou 
17  000  habitants.  Plus  au  nord  et  sur  la  route  du  Zi- 
ban ,  Meggariii  Moggiir,  Sidi-Rached  et  Ourlana.  Les 
principales  Iribus  qui  habllent  celtc  oasis  sont  les 
Oiddd-bcn-Djellab,  les  Ouldd-Moidat,  les  El-Freit  et 
les  Ouralin, 

Les  oasis  dc  Te.mncin  etdo  Onnrcgla  sont  au  sud  de 
I'oasis  d'Oiiad-Piir.  La  premiere  a  pour  chef-lieu  EU 
Giiecer,  petite  villc  entouree  de  quelques  villages, 
parmi  lesquels  nous  nommerons  El-Koudia,  El-Aouar 
et  Gong;  ils  sont  habites  par  les  tribus  des  Saul-Oiddd- 
Jmer  et  des  Ouldd-Seiah.  La  secondc,  sur  I'extrfime 
limite  du  desert,  est  a  20  lieues  au  sud  de  la  prece- 
dente;  la  route  qui  y  conduit  longe  une  chaine  dc  col- 
lines  elevi^cs  nommees  .Ivcg-ed-Dein ,  ainsi  que  I'an- 
cienne    oasis   d'Aioun-Bordad ,  que   les  devastations 

(i)  Voyez,  ilans  la  Rcnic  de  I'Oricnl  ct  dc  l\Hijerie,  les  remanjua- 
bles  Me'moires  ilc  M.  Prax,  ct  la  CarW  des  routes  commciciules  de 
CAlgerie  cni  puys  des  noiis,  par  Ic  niemc. 


(  233  ) 

des  Touarlks  ou  Touaregs,  ces  pillards  du  desert,  ont 
fail  abandonner.  Avant  d'entrer  sur  les  terros  oii  re- 
parait  la  vegetation  ,  on  passe  VOudd-el-Jzal ,  qui  pa- 
ralt  6tre  Ic  principal  cours  d'eau  de  la  contree.  L'oa- 
sis  d'Ouar^gla  pr^senle,  comme  celle  d'Ouad-Souf, 
un  terrain  fort  accident^ ;  on  y  trouve  quelques  col- 
lines  ^levees,  qui,  dans  le  ddsert,  peuvent  passer  pour 
des  inontagnes ;  quelques  -  unes  sont  couverles  de 
ruines,  teraoignages  muetsd'une  ancienne  civilisation. 
OuaregJa,  qui  donne  son  nom  a  I'oasis,  est  une  ville 
importante  par  sa  position  a  I'entree  du  desert;  elle 
commerce  avec  Insalah ,  capilale  du  Touat.  N'gotica, 
Ba-Mendil  et  Rouicat  sont  des  villages  ou  Ton  tisse  la 
laine  en  khaiks  et  couvertures.  Cette  oasis  est  peupl^e 
par  les  Sa'id-Atba  et  les  Mekhadina ;  sa  population 
peut  monter  a  10  000  habitants. 

Dans  ces  differenles  oasis,  I'eau  est  fournie  par  de 
veritables  puils  artesiens;  leur  ouverture  est  g^nera- 
lemont  large  et  carr^e,  elle  est  protegee  par  un  coffrage 
en  bois  de  palmier.  Aprfes  les  avoir  creuses  jusqu'a 
une  moycnne  profondeur,  on  arrive  a  une  couche 
semblable  a  I'ardoise ,  qui  couvre  et  comprime  la 
nappe  d'eau.  Lc  percement  de  celte  derniere  couche 
est  une  operation  diflficile  et  qui  exige  de  grandes  pre- 
cautions. Avant  de  descendre  dans  le  puits  pour 
rompre  le  diaphragme,  I'ouvrier  est  attache  a  la  cein- 
ture  par  une  corde  ;  plusicurs  honimes  tiennent  I'extr^- 
mit6  oppos^e.  A  peine  a-t-il  brisd  d'un  coup  de  pioche 
I'obslacle  qui  s'opposc  a  I'ascension  de  la  colonne 
d'eau,  qu'il  faut  s'empresser  de  le  relirer,  car  I'eau 
monte  avec  une  cffrayante  vilesso,  franchit  les  bords 
du   puits  el   se   repand   alentour.   On  la   dirige  alors 

111.    MA1\S.     3.  K) 


(  -23/,  ) 

;clans  (les  canaux  disposes  a  ravance  pour  la  recovoir; 
a  parlir  de  cc  moment,  elle  ne  cesse  de  couler;  ce- 
pendanl  on  a  vu  des  puits  qui,  apres  quelques  ann6es 
de  service,  s'arrelent  tout  a  coup,  et  dont  le  niveau  sc 
mainlient  au-dessous  du  sol;  cetle  interruption  subite 
entraine  alors  la  ruine  du  village  et  des  plantations 
qu'il  desservait  (1). 

L'oasis  de  Oudd-M'zab  est  a  I'ouest  de  la  precedente; 
elle  est  herissee  de  montagncs  prcsque  nues  et  com- 
plelement  arides,  donl  les  plus  imporlantes,  connucs 
sous  le  nom  do  Djebel-Mazcdj,  la  scparenl,  vers  le 
nord-ouesl ,  du  plateau  de  Feiudli.  Dans  les  vallees 
que  Torment  ces  monlagnes  s'elevent,  au  milieu  des 
palmiers,  huit  pelites  villes  babitees  par  la  population 
la  plus  active  et  la  plus  commercante  de  loule  I'Alge- 
rie  ;  dies  comptenl  environ  AO  000  iimes,  et  n'ont  pas 
moins  de  3  000  negocianls  elablis  sur  les  difl'erents 
points  du  Tell.  Les  vallees  ou  se  irouvenl  les  villes  son  I 
Iraversees  Y)Vt.\:VOudd-lS'sa,  VOudd-M'zab,  qui  donne 
son  nom  a  l'oasis,  VOudd-JMethli  el  VOudd-el-Touiet. 
Mais  ces  torrents,  qui  dans  la  saison  des  pluies  sent 
fori  redoutables,  laissent,  a  cause  de  la  rapidite  des 
pentes,  leurs  lils  completement  a  sec  pendant  I'el^  ; 
les  babitants  sont  alurs  reduits  a  I'eau  de  puits,  qui 
est  bonne  el  abondante.  La  capitale  de  l'oasis  est  Ghar- 
deia ;  c'est  une  ville  de  12  000  amcs,  situee  sur  les 
bords  de  lOuad-iMzab,  cntre  trois  montagnes  isol^es. 
Son  importance  commerciale  est  tr6s-grandc;  elle 
communique,  par  Timimoun  ,  avec  Insalub  ,  et  de  celte 
ville  avec  les  grandes  villes  du  pays  des  noirs.  Qu'une 
caravane  aussi  nonibreuse,  aussi  cbargee ,  aussi  inal- 
lendue  qu'elle  puisse  elre,  arrive  a  Gbardeia;  en  quol- 

fi)  V\.enon^  Description  de  I'AlgMe. 


(  235  ) 

ques  heures,  elle  a  effectu^  le  placement  ties  ses  mar- 
chandises  et  fait  son  chargement  pour  le  rotoiir.  Les 
aiitres  villes  iniportanles  de  I'oasis  sont :  Mlika,  la  ville 
sainle  des  Beni-M'zab;  Bou-Noicra,  Giiernm,  Berrian  et 
Metlili.  La  tribu  des  Beni-Mzab  qui  peuple  ces  villes 
se  fractionne  en  Chaamba,  Beni-Helal ,  Oiddd-Ainer  et 
Ouldd-Iahia,  11  est  probable  que  le  sol  de  cetle  oasis 
et  de  celle  de  Tuggurt ,  qui  en  forme  presque  la  conti- 
nuation, ne  se  Irouvequ'a  unefaible  hauteur  au-dessus 
de  la  Mediterranee, 

Au  nordde  I'oasis  de  Beni-M'zab,  lorsqu'on  afranclii 
les  derniercs  pentes  du  plateau  de  Feidali,  on  ren- 
contre quelques  montagnes  arides  et  isoleos,  puis  on 
descend  vers  I'oasis  des  Ksour,  que  traverse,  de  I'ouest 
a  Test ,  rOuad-Djellal ;  ses  villes  principales  sont  £/- 
Jghoudt  (1)  et  A'in-Madhy .  La  description  de  celte  der- 
iiifere  ville  pourra  donner  une  idee  de  ces  villes  de  I'in- 
terieur  de  I'Afrique  qui  ont  a  protiger  leur  commerce, 
et  contre  les  Arabes  du  desert,  et  centre  les  tribus 
des  oasis  voisines. 

Batie  sur  un  rocher,  au  milieu  d'une  plaine  aride, 
A'in-Madhy  est  a  67  lieues  de  Mascara;  ellc  est  envi- 
ronnee  de  jardins  plant^s  de  grands  arbres  qui  cachent 
tellenient  la  ville,  qu'en  dehors  de  ces  jardins  on 
n'apercoit  que  les  terrasses  les  plus  elevees  et  le  liaut 
des  forts.  Au  nord-ouest  de  la  ville,  coule  un  petit 
ruisscau  appele  Quad- A'in- M adhy ,  qui  prend  sa  source 
dans  les  montagnes  que  les  Arabes  noniment  Djebel- 
Ainer,  ou  Djebel~Ainout\  et  qui  se  pcrd  a  quelques 
lieues  de  la  dans  les  sables.  Lorsque  la   ville  soutient 

(i)  Voir  au  Bulletin  de  fevrier,  p.  laa,  un  coinpte  rendu  de  I'es- 
pedition  de  Lagliou.u  (El-Agliouaf )  failo  rn  i844  P'T'  ^-  1'"  geiu'ral 
Marey. 


(  1>36  ) 

un  si(^ge  conire  quelques  Irilnis,  les  assiogoanls  no 
manquent  pas  do  ddtourncr  co  ruissoau  ;  les  habilanls 
sont  alors  roduits  a  la  sculo  cau  dc  quelques  puils  qui 
sont  dans  son  enceinte.  Ain-Madhy  est  petite  ;  elle  ren- 
ferme  environ  300  uiaisons  et  2  000  habitants.  Ses  for- 
tifications consistent  en  une  chemise  Ires-forle  en  pierre 
de  taille  et  enduitc  d'un  recouvremcnt  en  b^ton.  La 
hauteur  inoyennc  de  cetle  muraille  est  de  7  a  8  me- 
tres, et  son  epaisseur  est  assez  grande  pour  que  quatre 
chevaux  puissent,  dil-on,  y  galopcr  de  front;  elle  est 
flanquee  de  12  forts  faisant  saillie  de  /i  metres.  En 
dehors  de  I'enceinte  principale,  s'etendent  cinq  ou  six 
autres  murailles  qui  sc  font  face  el  qui  separenl  les 
jardins  dc  la  ville.  Ces  murailles,  hautes  dc  5  a  6 
metres  et  epaisses  seulement  d'un  demi-metrc,  sont 
balies  en  moellons  a  morlier  de  chaux. 

Ain-Madhy  a  Irois  porlcs  :  une  a  I'ouest,  une  au  sud 
el  une  i  Test;  les  deux  premieres  sont  masquees  par 
des  travaux  avances,  et  flanqu^es  de  tours  qui  en  de- 
fendeiit  I'approche;  la  troisieme  communique  seule- 
ment avec  les  jardins.  La  ville  est  perc6e  de  deux  rues 
principals  :  I'une,  qui  communique  de  la  porte  do 
I'ouest  a  cellc  du  sud ,  traverse  une  petite  place  qui 
forme  a  peu  pr6s  le  centre  de  la  ville;  I'aulre  fait  le 
tour  de  la  muraille  et  la  separc  des  habitations  :  a 
celle-ci  aboutissent  un  grand  nombre  de  ruelles.  La 
Kasbah,  residence  habituelle  du  marabout  qui  gou- 
verne  Ain-Madhy,  est  situee  pres  de  la  porte  du  sud  ; 
elle  est  entouree  de  murailles  crenelles,  et  renferme 
un  puils  et  lous  les  magasins  du  marabout. 

Suivant  les  Arabcs,  la  forme  gen^rale  d'Ain-Madiiy 
est  cclle  d'un  ceuf  d'autruche,  donl  la  pointe  est  diri- 
gee  vers  la  porte  du  sud. 


(237  ) 

Ce  qui  donno  de  rimporlance  a  Ain-Madhj ,  c'est  sa 
situation  dans  le  desert,  a  quinze  journees  de  marclie 
do  louts  villc;  c'est  rinfluence  qu'clle  exerce  au  loin 
sur  les  Iribus  qui  rentourent;  c'est  enfin  qu'elle  est  le 
passage  oblige  des  caravanes  qui  vont  dans  I'interieur 
de  I'Afrique.  Les  habitants,  composes  d'Arabes,  de 
quelques  families  juives  et  d'esclaves  negres,  ne  vivent 
que  de  commerce  ;  cliaque  maison  est  un  entrepot  ou 
les  Arabes  du  dehors  mctlent  en  siuete  leurs  recoltes. 
La  population  de  I'oasis  des  Ksour  est  de  10  000  habi- 
tants. 

Au  nord  de  I'oasis  des  Rsour,  entre  les  plateaux  du 
Sersou,  ou  du  haut  Ghelif,  de  Sidi-J'ica  et  de  la  chaine 
du  Djebel-Amour  et  du  Sahari,  se  trouve  le  bassin  des 
lacs  sal^s  du  Hodna  et  de  Zarez;  on  n'y  rencontre  pas 
de  ville  importante ,  a  I'exception  toutefois  de  Bou- 
Sada,  situee  au  sud  de  Chott-es-Sa'idn ;  elle  fait  un 
assez  grand  commerce  avec  les  oasis.  Le  reste  de  la 
contree  forme  les  terres  de  parcours  des  Iribus  du  sud 
de  Tilleri,  et  est  aussi  occupe  par  la  grande  tribu  des 
Ouldd'Na'il. 

La  derniere  des  oasis  du  Sahara  algcrien  qui  doit 
nous  occuper,  et  la  scule  que  Ton  rencontre  dans  la 
province  d'Oran,  c'est  celle  des  Ouldd-Sidi-Cheikh ; 
?lle  est  situee  a  30  lieues  de  la  derniere  limitc  du  Tell, 
au  dela  du  petit  desert  d' Angad,  sur  le  revers  mei'i- 
dional  du  Djebel-Amour.  Les  Iribus  qui  I'occupent  se 
sont  montrees  plus  hostlles  a  la  domination  francaise 
que  celles  des  oasis  pr6cedentes.  Ses  piincipales  villos 
sont;  El-Ahied-Sidl-Cheikh,  qui  parait  elro  la  capitale; 
Bizinay  Rassoid^  Bou-SenigJioun-ChelUUa,  et  Ai'n-SeJ'a ; 
elles  font  un  commerce  h'6s-actif  avec  le  Maroc,  et  sont 


(  238  ) 

en  rapport  avec  Tounboktou  et  le  pays  des  noirs  par 
I'oasis  marocaine  de  Figuig. 

Tclles  sonl  les  oasis  qui  seniblent  litnilerrAIg^rie  au 
sucl ;  il  y  a  a  peine  quelques  annees,  leur  existence  6tait 
ignorec;  en  rapports  journaliers  avec  les  provinces  et 
les  grandes  villes  du  nord,  avec  lesquelles  elles  ^clian' 
gent  leiirs  laines  brutes  et  leurs  dattes  contre  les  grains 
necessaires  a  lenr  subsislance  ,  elles  pourraient  servir 
d'entrepot  et  d'inlermediaires   a  un  commerce  aclif 
avec  le  Soudan.  Aujourd'hui  I'interieur  de  I'Afrique  se 
trouve  approvisionn^  par  le  Maroc,  Tunis,  Tripoli ,  et 
I'Egypte,  a  I'exclusion  de  I'Algdiie.  II  serait  cependant 
facile  d'etablir  des  relations  commcrciales  suivies  avec 
Oran,  Alger,  Philippeville,  par  El-Aghouat,  Tuggurt, 
et  El-Ouad  ;  la  France  trouverait  un  nouvel  ^coulement 
pour  ses  tissus  de  soie,  de  laine,  de  colon,  son  eorail, 
ses  verroteries,  ses  essences,  et  divers  lagers  articles; 
elle  recevrait  en  echange  la  poudre  d'or,  I'ivoire,  les 
plumes  d'Aulruclies,  et  les  denrees  qu'elle  ne  recoit 
aujourd'hui  que  de  seconde  main,  et  Ton  pourrait  voir 
une  society  de  marchands  porter  pacifiquement  la  do- 
mination et  I'influence  frangaise  jusqu'aux  bords  du 
Niger.  On  pourrait  memc  ctablir  d'imporlantes  com- 
munications avec  notre  colonic  du  Senegal  par  Bis- 
kara,  Timimoun,  Bel-Abbas  (ville  au  centre  du  desert)* 
Chinguieti  (ville  de  I'oasis  d'Adrtlr,  au  nord  du  Sene- 
gal ),  et  Saint-Louis.  Qu'il  nous  soit  done  permis  d'es- 
p^rer  que  le  gouvcrnemenl,  jaloux  de  tout  ce  qui  peut 
contribucr  a  la  grandeur  do  la  France,  s'occupera  dans 
un  avenir  procliain  de  la  question  du  connnorce  de 
I'Alg^rie  avec  le  pays  des  noirs  par  les  oasis  du  Sahara 
algcrien.  V.  A.  MALXJi-BRUiv. 


(  239  ) 
PLACE  DE  LA  GfiOGRAPHIE 

DANS 

LA  CLASSIFICATION  DES  CONNAISSAISCES  HUMAINES(i). 


Rien  de  plus  commun  que  de  voir  la  geographic  mal 
classes  parmi  les  aulres  connaissances  humaines  :  dans 
les  catalogues,  dans  les  tables  encyclopediques,  dans 
les  sections  des  soci^tes  savantes,  elle  est  rangee  tanlot 
parmi  les  sciences  hisloriques,  lantot  parmi  les  sciences 
sociales,  ou  dans  les  sciences  physiques,  ou  dans  les 
sciences  matliematiques.  Essayons  de  mettre  quelque 
ordre  dans  cette  confusion ,  et  de  chercher  la  vraie 
place  de  cette  noble  ^tude.  Remontons,  pour  cela,  a 
I'ensemble  des  travaux  varies  auxquols  se  livre  I'espece 
humaine;  et  qu'on  nous  permette  d'en  presenter  un 
tableau  rapide,  sans  que  nous  ayons  assurement  la 
pi'^tention  d'entrer  dans  une  classification  rivale  de 
celles  des  Bacon  et  des  Ampere.  Nous  serons  aussi 
simple  que  possible ,  et  nous  conserverons  le  langage 
usuel  dans  cette  distribution,  ou  Ton  est  trop  souvent 
porte  a  introduire  un  savant  n^ologisme. 

Demandons-nous  d'abord  d'oii  proviennent  les  tra- 
vaux des  liommes.  L'iiomnie  peut  filre  consid^re  sous 
un  double  caractere  :  le  physique  et  le  moral.  De  la 
deux  sortes  de  besoins  :  ceux  du  corps  et  ceux  de  I'auie, 
les  hc?,o\ns physiques  et  les  besoins  morau.v  ou  spiriduels. 
De  la  sont  n6s  successivement  les  arts,  destines  a  re- 
pondre  immediatement  a  ces  deux  series  de  besoins; 

(i)  Voyez  Bulletin,  i845,  3''  serie,  I.  ill,  p.  388,  Classification  des 
collections  ethnographiques,  par  M.  Joiiiard. 


(  2A0  ) 

—  le  commerce,  qui  I'ait  circuler  on  ccliangcr  |)arini 
Ics  lionniios  les  procluils  dcs  ails;  —  cnlin,  les  sciences, 
qui  eclaireut  les  arls  et  le  commerce. 

Les  arts  se  sent  nalurellemenl  divises  en  deux  series : 
les  uns  pour  les  besoins  physiques  :  ce  sont  los  arls 
materiels ;  les  auti'es  pour  les  besoins  moraux  et  spiri- 
luels  :  ce  sont  les  beaux-arts,  auxquels  se  joignenl  les 
belles-lettres, 

Le  commerce  s'exerce  sur  deux  grandes  divisions  de 
produits  :  ]es prodia'ts  naturels  et  \gs produits  fabriqnes. 

Les  sciences,  a  leur  tour,  comprennent  trois  divi- 
sions :  les  sciences  physiques,  qui  ont  pour  objetle  monde 
materiel;  —  les  sciences  morales,  qui  onl  Irait  particu- 
licrement  a  I'esprit  humain  ;  —  eufin  les  sciences  qui, 
s'appujant,  d'un^  part,  sur  la  description  ou  les  ri- 
chesses  de  la  nature,  et,  de  I'autre,  sur  les  Iravaux  et 
riiistoire  de  I'liuraanite,  tiennent  a  la  fois  aux  connais- 
sances  physiques  et  aux  connaissanecs  morales  :  ce 
sont  cellcs  que  nous  appellerons  sciences  physico-mo- 
rales,  et  que ,  dans  le  tableau  des  connaissances  hu- 
maines ,  nous  placerons  entre  les  sciences  physiques 
et  les  sciences  morales,  parce  qu'elles  sont  une  tran- 
sition des  unes  aux  aulres. 

Voici  connnenl  il  nous  semblc  que  chacune  de  ces 
grandes  sections  pourrait  elre  partagie  : 


.1.  ARTS. 

1.    ARTS   MATERIELS 

Agrii.'uliiire 

a.  Anrs  rnornts  a  LALiMEnxAiinn 


/  Agrii.'ulliir 
i  Ilorticnltu 
1  Cliassc. 

j  I'fc  lie. 

I  Soil!  lies  Iroupcnu 


X. 

^Boulai){;erie,  elc. 


(  2/il 


b.   Arts  pnopnEs  a  i.'habillemest 

EX  A  LA  PAIilinE. 


Arts  phopres  au  logement  et  a 

l'^COKOMIE  nOMESTIQl'E. 


d.  Arts  phopres  a  la  defehse. 


Arts  PBcrnES  ai'x  commiinica- 

riONS   DE   LA   PF.Ns6e. 


/.  Arts  pbopres  aux 
transports. 


'.  Arts  propres  a  la  mescre  du 

TEMPS,  DU  POIDS  ET  DE  l'eSPACE. 


h.  Arts  propres  a  guerir. 


Arts  propres  a  la  fabricatios 

DES  instruments  UTILES  AUX  AU- 

tres  arts. 


'Filage. 
I  Tiss.T{;e. 

Alt  lUi  lailltur. 
'  Chnpellerie. 
V Bijouterie,  etc. 

Maconnerie. 

Cliarpeuterie. 

Seirurerie. 

Peinture  en  batiment. 

Fabrication  des  vase». 

Orfevrerie,  etc. 
(  Guerre. 

}  Art  des  furlifications. 
(Fabrication  des  amies. 
(•  Langagp. 
)  Ecriiure. 
I  Lecture. 
\  Telegraphic. 
/  Fonts  et  chausse'es. 
1  Navigation. 
I  Carrosserie. 
I  Cliarronneric,  etc. 

Calculfi).       . 

Horlofjerie. 

Fabrication    des    instruments   de 
piecision  et  d'optiqiie. 

Fabrication   des   poids,  des   me- 
sures  et  des  monnaies. 

Geodesic. 

Aipentage. 

/Mcdecine. 

\  Cliirurgic. 

\  Pharmacie. 

\  At  t  veterinaire. 
/Me'tallurgie. 
I  Travail  des  carrieres. 
I  Art  dc  forger. 

Coutellerie. 

Quincailleric. 

F\djri(  ation  des  macliincs. 

Fabrication   des   produits  chimi- 
fjiies. 

k  Fabrication  du  papier,  etc. 


(I)  On  a  soiivenl  disculu  sui-  \a  disllmlion  rjiril  faut  faire  eulre  un  art  ct  uiie 
science.  Ne  pcut-ou  pas  diie  (iiie  I'art  est  lelalif  a  la  prnliijiie,  et  la  science  u  la 
Iheorie  ?  Nous  repiilous  ijuc  I'arl  uous  paiail  rc'ponilre  immeilintement  a  un  Ijesuiii, 
ct  (|ue  la  sciejice  sell  a  e'clairci-  I'arl.  Cost  aiiiii  que  nous  meltons  Ic  calcul  painii 
les  oris,  el  I'aiilhmeliqne  parmi  les  sciences;  par  la  menie  raisoB  ,  uous  classons  la 
mcdecina  dans  les  ails,  et  lu  palLologle,  la  plijiioloijie,  etc.,  daus  Jcs  scieuccs. 


(  2/j2  ) 


n.  Arts  gbaphiqces. 


2.    BSAUX-ART8   ET  BELLES-LETTRES. 

/Callifjraphie. 

Dessin. 

Peinture. 
1  Sculpture. 
'  Architecture. 

Gravure. 

Plastique. 

Cnrto{;i'aphie. 

Typographic. 

Lithographic. 

Photographie. 
'Style. 

Potsie. 

Art  oratoire. 

Declamation. 

Critique. 
,Poleini(|ue. 
(Chant. 

I  Musique  instrumentale. 
'  Danse. 

Art  tnimique. 

Gymnastique. 

E'^criine. 
■  Equitation,  etc. 


b.  Anxs  LiTTEnAiBBS. 


«.  Abts  mcsicaux. 


d.  Abts  choregravhiques, 

CTMBASriQDES,  ETC. 


B.  COMMEl'.CE, 
1.    COMMERCE   DES  PRODUITS   NATURELS. 

Cereales. 


\ 


„  ■  \  Cereales. 

a.  Pboduits  pbopbes  k  l  alimbntation.     <  ,.     .. 

{  rruits,  etc. 

»  ( Peaux. 

h.  Pboduits  pbopbes  a  l  habillemest,  etc.  J  ,^  .    ' 

j  Polls,  etc. 

2.    COMMERCE   DES   PRODUFTS   FABRIQUES. 

rPain. 
a.  Pboduits  pbopbes  a  l'alimentatios.     \  Comestibles    divers    pre- 

\      pares,  etc. 
,    r.  '  ( Tissus. 

fc.  PbODI'ITS  PBOPBES  A  LIIABILLEMENT,  ETC.  J  „         _       .,  ,i;  ,„„    o,„ 

I  Ornements  divers,  etc. 

C.  SCIENCES. 

1.    SCIENCES   PHYSIQUES. 

Astronomie. 
Geometric. 
I.  SclE^CES  mathematiques.      ^  Arithmetique. 

Alfiebre. 
Mecanique. 


k 


(  m  ) 


h.  Sciences  industbielles. 


c.  Sciences  naturelles. 


Technologic,  etc. 

Physique. 

Chiniie. 

AimtomiB. 

Patholo,nie. 

Physiologie. 
iThe'rapeutique. 

Pharmaceutique. 
iHyj^iene. 

Meteorologie. 
IZoologie. 
iBotanique. 

Geologic. 

Mineralogie. 
•  Cosmographie. 


SCIENCES  PHYSICO-MORALES. 


a.  Sciences  geogbaphiques. 


h.  Sciences  economiques. 


(Geographie. 
Ethnogiapliie. 
j  Topographic. 
IStatistique. 
/"Economic  politique. 
'  Economic  rurale. 
(  Economic  industrielle. 


3.    SCIENCES   MORALES. 


a.  Sciences  hisxobiques. 


6   Sciences  reugieuses. 


c.  Sciences  PHiLosoPHiQUEs. 


d.  Sciences  sociales. 


e.  Sciences  dvj  langage. 


(Histoire. 
Chronologic. 
^  Biographic. 
yArchcologie. 
(  Theologic. 
j  My  t  ho  logic. 

if  Philosophic. 
I  Morale. 
)  Meiaphysique. 
Logique. 
Eslhetique. 
Pedagogic. 
'Politique. 
I  Jurisprudence. 
I  Legislation. 
^Administration. 
'Granimaire. 
Rlietorique. 
Linguistique. 
Litte'iature. 
•■Philologie. 


La  geographie,  melange  de  descriptions  piiysiques. 


(  '2!i!i  ) 

poliliqucs  ol  morales,  vient  done,  suivant  nous,  se 
placer  a  la  lele  des  sciences  physico-morales,  cntic  Ics 
sciences  nalurelles,  d'un  cote,  el  les  sciences  econo- 
miques  et  liisloriques,  dc  I'aulre. 

Nous  croons  une  section  si)ecialc  pour  les  sciences 
geographiques,  car  la  description  de  la  Torre  et  de  scs 
habitants,  embrassant  des  choses  acluelles  plus  encore 
que  des  choses  passees,  ne  pent  etre  comprise  dans  les 
sciences  historiques;  on  ne  doit  pas  la  renfermer  non 
plus  dans  les  sciences  sociales,  car  elle  n'a  pas  pour 
but  que  la  classification  des  peuples  et  des  Etats;  ce 
n'est  pas  davantage  une  des  sciences  nalurelles,  puis- 
qu'elle  n'a  point  pour  objet  unique  de  d6criro  Total 
nalurel  de  la  surface  du  globe,  quoique  ce  soit  un  de 
ses  plus  importants  travaux.  Les  sciences  geographi- 
ques ont  done  lour  propriety,  lour  valeur  et  leur  place 
propres  et  independantes,  commc  les  sciences  histo- 
riques ont  les  leurs,  et  elles  sont,  avec  les  sciences 
economiqucs,  la  transition  entre  les  sciences  physi- 
ques el  les  sciences  morales.  Outre  la  geographic  pro- 
prement  dite,  chargce  de  la  description  generale  de 
la  Terre  sous  lous  scs  raj)porls,  nous  y  renfernions 
rethnographie,  qui  ^ludie  specialement  les  hommes 
dans  leur  filiation,  leurs  races,  leurs  langues;  —  la 
topographic,  qui  d^cril  les  lieux  avec  detail;  —  la  sta- 
tislique,  qui  enumore  et  compare  les  I'orces  et  les  ri- 
chesses  des  divisions  poliliques.  Quant  aux  arts  qui 
re^oivent  leurs  lumiercs  des  sciences  geographiques 
ou  qui  s'y  raltachent  plus  ou  moins  directement,  nous 
les  avons  places  dans  les  sections  d'arls  auxquels  ils 
appartiennenl  :  ainsi ,  la  cartographic ,  clans  les  arts 
graphiques  ;  la  geodesic ,  dans  les  arts  propres  a  la 


( nb  ] 

mesure  de  I'espace.  La  cosmographle,  qui  d'abord 
pourrail  paraitre  la  compagne  inseparable  de  la  geo- 
graphic, nous  a  semble  cependant  devoir  6tre  rang^e 
dans  les  sciences  naturelles,  et  non  dans  les  sciences 
g^ographiques;  elle  n'embrasse  rien,  en  eflfet ,  qui  ne 
soil  du  domaine  unique  de  la  nature;  elle  n'est  elle- 
meme  qu'une  description  large  et  g^nerale  de  la  na- 
ture ;  elle  nous  a  paru  assez  differer  de  I'astronomie, 
pour  ne  pas  elre  placee,  conime  celle-ci ,  dans  les 
sciences  mathematiques;  elle  examine  I'univers  dans 
son  ensemble,  dans  sa  pittoresque  magnificence,  et 
non  avec  les  details  savants  et  precis,  meles  de  calculs 
multiplies  et  minutieux,  qui  sont  le  propre  de  I'astro- 
nomie. 

Telles  sont  les  I'emarques  que  nous  a  suggerees  I'in- 
certilude  oii  nous  voyons  flotfer  les  meilleurs  esprits 
eux-memes  quand  il  s'agit  de  classer  la  geographic. 
Nous  serions  hcureux  que  la  place  que  nous  lui  as- 
signons,  et  que  celte  distribution  g^nerale  des  travaux 
des  hommes,  fussent  approuv^es  du  monde  savant,  et 
particuli^rement  de  nos  honorabics  confreres  de  la 
Societe  de  geographic,  dont  nous  appelons,  du  reste, 
la  critique  ^clairee  sur  ce  sujet  pliilosophique. 

E.   CoRTAMBERT. 


(  ne  ) 

LETTRE  DE  M.  ANTOINE  D'ABBADIE 

A  M.  LE  SECRETAIRE  GENERAL 

DE 

LA  SOCIETY;  DE  G^OGRAPHIE. 


Vous  me  demandez,  inon  chei^  conlVire,  de  moltre 
par  ecrit  les  remarques  que  j'ai  faitos  sur  la  comnui- 
nication  int(5ressaule  de  M.  Cortamberl.  J'avais  clu, 
comino  lui,  tres-frappe  de  la  position  anormale  assi- 
gnee a  la  geograpliie  dans  nos  meilleurs  catalogues. 
Malheureusement  il  existe  peu   d'harinonie  dans  les 
differcntes  classifications  proposees  pour  I'ensemble 
des  connaissances  humaines.  Avant  tout,  il  faudrait 
une  melhode  ou  du  moins  un  syst^me  g^n^ralcment 
adopto  el  qui  put  servir  de  point  dc  depart;  mais  les 
grands  savants  semblent  dedaigner  les  soins  de  classe- 
iiient  d'une  bibliollieque  ,  soins  si  ^l^nientaires  ,  mais 
si  faslidieux.  Les  Linn(^e  et  les  Jussieu  ont  porte  leurs 
pas  ailleurs.  ISeanmoins,  quand  on  a  lu  le  plan  de 
Debure,  ordinaircment  suivi  en  France;  celui  de  la 
bibliolheque  du  Conseil  d'ttat,  et  de  plusieurs  aulres 
novateurs ;  quand  on  b^sile  a  se  plonger  tout  d'abord 
in  medias  res,  comme  un  bibliolbecairc  de  mes  amis 
qui  commence  par  les  encyclopedies,  il  ne  resle  qu'a 
d^clai'er  qu'une  methode  est  encore  i\  I'aire ,  et  que  si 
elle  porte  ce  cachet  de  siinplicite  et  d'c^vidence  qui  ca- 
ract^rise  tout  progr^s  r^el,  elle  ne  devra  ces  avantagos 
qu'a  une  science  6lev(^c,  appuyoe  sur  dc  longues  me- 
ditations. 

Je  suis  loin  dc  pr^tendrc  mieux  faire  que  notre  es- 


( m  ) 

limable  collogue;  mais  je  propose  mes  doutes  avec 
celle  liardiesse  que  lout  critique  assume  sans  de- 
uiander  pardon  de  mal  recompenser  de  profondes 
etudes  et  des  recherclies  penlbles.  Veuillez  done  m'ac- 
corder  le  b^n^fice  de  ma  francbise,  el  me  permettre, 
sans  examiner  toute  la  classification  de  M.  Cortambert, 
de  meltre  en  question  la  conviction  ou  il  parait  6tre 
que,  dans  I'bistoire  de  I'humanile,  les  arts  ont  precede 
les  sciences.  Avant  de  songer  a  I'agricuiture,  les  peu- 
ples  pasteurs  ont  fait  de  la  lilterature  en  fables  ;  le  soin 
de  leurs  herbages  a  provoque  des  discussions  de  juris- 
prudence et  de  politique  longtemps  avant  qu'ils  n'aienl 
song6  a  sculpter  une  boulette  ou  a  tisser  la  toile  de 
leurs  tentes.  Si  on  suit  le  meme  ordre  d'idees,  la  plu- 
part  des  penseurs  croiront  aussi  que  les  beaux-arts 
ont  suivi  les  sciences  morales,  et  que  Fart  de  la  guerre 
a  precede  la  premiere  idee  de  la  chimie. 

Ces  remarques  sont  faites  d'apr^s  I'opinion  qu'une 
classification  des  sciences  devrait  etre  concue  selon 
I'ordre  naturel  oil  elles  se  sont  ddsveloppees;  mais  cette 
opinion  est  peut-6tre  contestable,  et  il  faudrait  avant 
tout  s'entendre  sur  le  principe  a  suivre.  En  attendant 
qu'on  Tarrfile ,  faisons  ressortir  I'embarras  de  bien 
classer  la  geographic  ,  et  ne  craignons  pas  d'agrandir 
encore  celle  difficult^,  si  bien  comprise  par  M.  Gor- 
tambert. 

La  geographic  n'existe  peut-etre  pas  sans  le  secours 
de  plusieurs  sciences  connexes  dout  on  s'etonne  de  la 
voir  separde  dans  une  classification  methodique.  Ainsi 
la  cosmographie,  I'aslronomle,  la  g^od^sie,  la  phy- 
sique, la  m^leoroiogie,  la  geologic,  et  toutes  les  sciences 
naturelles,  sonl  de  son  domaine  tout  aussi  bien  que  la 


(  'i/i8  ) 

topographic  el  la  slalisliquc.  L'elhnographie ,  science 
essenliellement  geographique,  ne  saurait  renier  I'al- 
liance  de  la  plulologie.  Une  guograpUie  serait  bien 
maigre  si  elle  ne  disait  rien  de  ragricullurc  et  du  com- 
merce. Je  demanderai  surlout  ou  ii  faut  placer  les 
voyages  :  ils  formenl  nne  division  iraportante  dans 
toutes  les  bibliolh^ques;  ils  tiennent  a  la  chronologic, 
a  Tarchdologie,  etc.,  etc.,  et  Torment  le  plus  souvent 
une  sorte  d'encyclopedie  donl  le  lien  commun  est  cs* 
sentiellement  une  l)iographie.  Ne  pourrait-on  pas  re- 
noncer  a  faire  de  I'histoire  une  classe  a  part?  Chaque 
science,  chaque  ait  meme,  a  la  sienne;  car  I'expos^ 
complet  d'unc  connaissance  humainc  consisterait  en 
trois  divisions  :  theorie,  pratique  et  histoire.  On  dcrira 
aussi  bien  I'histoire  de  la  chapellerie,  de  la  carrosserie, 
que  celle  de  Tastronomie  ou  de  la  cartographic.  Ou 
rangera-t-on  un  ouvrage  essenliellement  complexe  qui 
serait  intituld;  Histoire  de  la  geogrnphie? 

En  definitive,  et  sans  oser  proposer  un  systemc,  je 
rappellerai  que  loule  classification  lineaire  esl  neces- 
sairemcnl  incomplete;  car  la  parole  ne  proc^de  que 
par  lignes  droites,  tandis  que  toutes  les  connaissances 
humaines  se  tiennent  selon  des  rapports  cubiques  ou 
tout  au  moins  superficielles.  Bornons-nous  a  ces  dei'- 
nitres,  en  reconnaissant  que  la  geographic  se  classe  le 
raieux,  comme  une  carte,  ou  telle  region  louche  plus 
ou  moins  aux  pays  contigus. 

Toutefois,  si  la  science  doil  applaudir  a  une  classifi- 
cation bien  faile,  en  une  seule  ligne  ou  en  colonnes 
paralU'les,  on  aime  mieux,  dans  la  pratique,  un  arran- 
gement clair,  arliliciel  si  Ton  voul,  raais  ou  Ton  s'orienlc 
sans  h^siter.  Dans  eel  ordre  d'id^cs,  ie  conservateur 


(  m ) 

d'une  blbllotlieqiie,  apr^s  avoir  fait  un  grand  nombre 
de  subdivisions,  les  disposerait  par  ordre  alpbab^- 
tique,  el  cette  niethodc.  si  pen  pbilosophique,  ne  serait 
probablement  pas  la  plus  confuse  (1). 

Antoine  d'Abbadie. 


SUR 

LA    NATION   DES  CHEROREES, 

TRAnrir  de  l'anglais 
FAR    M.    DE    LA   ROQURTTE. 

«  Je  profile  de  mes  premiers  instants  de  loisir  pour 
remplir  la  promesse  queje  vous  ai  faite  de  vous  donner 
une  esquisse  sur  la  condition  generale  et  les  j)rogr^s 
extraordinaircs  fails  dans  la  carriferc  de  la  civilisation 
par  ce  peuple  aussi  romarquable  qu'inleressant,  pro- 
gr^s  qui  n'ont  de  paralleles  dans  I'hisloire  d'aucune 
autre  nation. 

))  II  y  a  trente  ans  que  j'eus  occasion  de  passer 
quelque  temps  parmi  eux.  Leur  condition  generale 
differait  alors  fort  peu  de  cello  dos  autres  tribus  in- 
dienncs.  Us  vivaient  presque  tons  dans  de  petils  vil- 
lages indiens,  dans  de  miserables  luittes,  et  subsis- 
laient  presque  uniquement  dos  produits  peu  abondants 
de  la  cbasse.  On  pent  a  peine  dire  que  I'agriculture 

(i)  C'est  preciseinenl  Ic  parti  qu'a  piis  il  y  a  longteinps  le  conser- 
viiteur  lie  la  Bibliollieque  nalionale,  depai'lemeiit  des  cartes  geogra- 
pliiques.  (  Voyez  {'Encyclopedic  du  dix-neuvieiue  siiclc,  article  Cahtes 
GEOonAPniQiiEs,  et  un  ecrit  intitule  :  De  la  Collection  (feograpliique, 
creee  ii  la  Biblotlieque  natinxalf.  P.iiis,  1848.)  J — d. 

MI.  MAns,   !i.  17 


(  250  ) 

exislal  parmi  eux.  A  un  petit  nombre  d'exceplions 
pr6s,  il  n'y  avait  point  tlo  cullivaleurs ;  mais  quelqiies 
rares  pieces  de  lerre  elaient  semees  en  grains,  princi- 
palementparlesfemmesindienncs;  les homines  elaient 
generolemenl  ignorants,  indolents  et  adonnes  a  I'ivro- 
gnerie.  II  6tait  tres-pen  coinmun  de  trouverun  Indien 
qui  put  parler  ou  coniprendre  I'anglais,  tandis  qu'ils 
ont  niaintenant  un  gouvernement  rdgulierement  orga- 
nist, avec  des  departements  legislalif,  excicutif  et  judi- 
ciaire,  une  constitution  (icrite,  presquc  calquee  sur 
celle  des  btats-Unis;  des  6glises,  des  ecoles,  des  hotels, 
des  magasins,  et  qu'ils  peuvent  sous  tous  les  rapports 
6lre  compares  avec  lous  les  Etats  que  j'ai  visites. 

»  La  population  de  la  nation  des  Cherokces  peut 
fetre  evaluee  de  17  a  18  000  individus,  non  compris 
1  Shk  n^gres  esclaves  et  64  libres.  J'ai  extrait  d'un  rc- 
censeuient  recent  les  donn^es  statistiqucs  suivanles  : 
Les  Cherokces  ont  27  6coles  publiques,  38  c^glises, 
65  boutiques  de  forgerons ,  III  nioulins  arnoudro, 
10  moulins  a  scier,  2  moulins  a  tan,  et  de  belles  sa- 
lines, lis  poss6(lenl  5  770  chevaux,  28705  l^les  de  be- 
tail,  35  832  cochons,  233  mulcts  et  anes. 

»  Ce  recensement  comprenait  seuloment  Ics  Che- 
rokces emigrants,  ou  ccux  qui  ont  quiUe  lour  pays  de- 
puis  1835.  Ceux  tpii  ont  emigri^  anlerieurcment  a  cetlc 
6poque  sont  cerlaineinent  beaucoup  plus  nombreux. 
Mais  aucune  table  genc^rale  nc  peut  donner  une  id(ie  des 
progros  faits  par  cette  peuplade  encore  si  r^cemment  a 
I'dlat  barbare.  Leurs  maisons  sont  ordinairemcnl  con- 
struites  en  troncs  de  bois  et  couvertes  avec  des  laltes; 
elles  onl  des  cheminees  en  pierre,  et  sont  proprement 
tenues ;  h  s  fermes  sont  en  bon  ordre,  et  t^moignent  de 


(  251  ) 

rinduslrie  do,  coiix  qui  les  habilent.  lis  ont  compl^te- 
ment  renonc^  a  la  vie  de  chasseur,  ainsi  qu'a  I'ancien 
costume  indien.  Je  passai  trois  semaines  paniil  eux, 
el  pendant  ce  temps,  sur  un  millier  d'indivldus  que  je 
vis,  je  n'en  trouvai  pas  un  seul  qui  me  fournit  un 
exemple  contraire;  et  ce  qu'il  y  a  de  plus  fort,  je 
n'aperQus  pas  un  seul  Indien  convert  de  haillons,  sale 
ou  ivre.  Les  lois  de  temperance  sont  exlremement  se- 
v^res.  On  considere  comme  une  offense  capitale  de 
posseder  des  liqueurs  fortes;  soutenues  par  I'opinion 
publique,  ces  lois  ont  enlierement  extirpt^  I'ivrognerie, 
ce  vice  si  pernicicux  partout,  mais  plus  sp^cialement 
parmi  les  Indiens. 

»  La  nation  est  divis^e  en  huit  districts  judiciaires  et 
d'olection,  avec  des  juges  de  circuit  et  d'appel.  Les 
maisons  ou  siegent  les  tribunaux  sont  construites  en 
i)onnes  briques,  et  la  justice  y  est  rendue,  sous  lous  les 
rapports,  aussi  bien  que  dans  les  Llals-Unis.  Chaque 
district  envoie  Irois  membres  a  la  Chambre  basse  et 
deux  a  la  Chambre  haute.  La  legislature  6tait  en  ses- 
sion lorsque  je  m'y  trouvai,  et  je  n'ai  jamais  vu  les 
affaires  traitees  avec  plus  de  dignity  et  de  promptitude. 
Le  president  du  comitd  (S6nat)  et  I'oraleur  [speaker] 
du  conseil  entcndent  les  deux  langues,  et  traduisent  les 
discours  des  membres.  S'ils  sont  prononces  en  anglais, 
ils  le  r6p6tent  en  cherokee,  et  vice  versa.  Le  St^nal,  ou 
comit6 ,  se  compose  de  seize  membres,  tous  clioisis 
parmi  les  hommes  les  plus  respectables,  et  ayanl  la 
tournure  la  plus  distinguee.  Les  deux  principaux  ora- 
teurs  [debntors]  titaient  M,  W.  P.  Ross,  gradue  du  col- 
lege Princeton,  el  M.  James  Kell.  M.  Ross  est  un  orateur 
s'^non^ant  avec  grace  et  clarte ,  et  montrant  aulanl 


(  252  ) 
tie  capncitt;  qu'un  aiirail  pu  lmi  liouver  clans  auoiin  lUs 
corps  tlont  j'ai  ele  incnibre.  .M.  Kell  ne  possode  piis 
)es  meiiics  avanlagos  sous  le  rapport  de  i't^dncalion  , 
mais  il  est  a  tous  egards  un  liomnie  remarquable.  Son 
aspect  est  extraordinairemenl  frappanl.  11  a  la  pliysio- 
nouiie  d'un  homme  de  talent  cl  dc  caractero,  et  son 
costunic,  ainsi  que  ses  manieres ,  paraissont  prouver 
qu'il  a  surnionle  les  desavanlages  du  manque  d'edu- 
calion.  Tous  les  deux  ont  le  caracterc  le  plus  pur  et  le 
plus  6lev6,  tant  dans  la  vie  publique  que  dans  la  vie 
privee,  et  ils  scmblenl  deslint^s  a  rendre  les  plus  im- 
portanls  services  a  leur  pays  et  a  leur  nation. 

»  L'honiiue  qui  figure  en  prennerc  lignc  dans  la 
Chanibre  basse  est  sans  conlredit  M.  Pott ;  par  sa 
clarle,  sa  perspioacite  et  la  force  do  ses  raisonnenienls, 
il  occuperait  ccrlaineinenl  uue  place  remarquable 
dans  quelquc  legislature  dc  nos  Elals  que  ce  soil. 
Apres  lui  vient  raon  vieil  ami  Six  Killer,  Cherokee  pur 
sang.  Je  ne  pouvais  pas  comprendre  son  langage,  mais 
je  n'ai  rien  vu  de  comparable  a  son  organe ,  a  ses 
gesles,  a  sa  lenue,  et,  plus  que  lout  cola,  a  I'enlhou- 
siasme  avec  lequel  il  s'cxprimait.  J'ai  entendu  Keo- 
kuck  et  d'autres  celebres  oraleurs  indicns ;  mais  au- 
cun  ne  ma  plu  autanl  que  Six  Killer. 

»  Los  ccoles  sunt  toutcs  entrelonues  aux  depens  de  la 
nation.  Outre  Irois  au  moins  qui  existent  dans  cliaque 
district,  il  y  en  a  deux  principales  pr^s  de  Talcquah, 
capitale  de  la  nation.  Lorsque  vous  elcs  arrive  a  six 
millos  environ  de  la  ville,  ajnes  avoir  traverse  une 
conlrec  allVeuse  et  tres-peu  pcupl^e,  vous  apercevez  a 
une  ilislance  de  deux  ou  trois  millos,  el  au  milieu  d'une 
vasle  prairie,  deux  splendides  bSliuienls,  el  ne  pouvcz 


(  253  ) 
relenir  unc  exclamalion  dc  surprise  en  falsaiit  re- 
flexion que  vous  vous  trouve/  rlans  un  pays  habile  par 
deslndlcns.  Lebaliment  principal  a  qualre-vingtspicds 
de  diametre ,  avec  deux  ailes,  cliacune  de  quaranle 
pieds,  entOLirees  d'unc  bcUc  colonnade;  Ic  tout  con- 
struit  d'un  style  plein  de  gout.  L'une  de  ces  institu- 
tions est  exclusivemenl  destinee  a  I'educationdes  fillos. 
Chacune  est  dispos^e  pour  cent  Aleves,  qui  y  restent 
quatrc  ans.  Vingt-cinq  sortent  annuellement  ct  le 
meme  nombre  est  admis,  en  sorte  qu'il  en  n^stc  iou- 
jours  cent,  tous  eleves  auxfrais  de  la  nation.  J'assistai 
au  service  religieux  dans  la  chapclle  dc  I'ecole  des 
lilies,  el  entendis  un  excellent  sermon.  II  ^tait  reelle- 
ment  fort  inl6rcssant  de  voir  ces  fillcs  indiennes,  mo- 
destes,  bien  vetues  et  d'une  excellentc  tenue,  se  pr6- 
parant  a  devenir  Ics  malrones  futures  de  leur  pays.  Ces 
ccoles,  ct  la  pliq)art  des  autres  principales  ameliora- 
tions, sent  dues  a  John  Ross,  et  ces  ecoles,  celles  des 
filles  surtout,  doivent  etre  cities  ]iarmi  ce  qui  fait  le 
plus  d'honneur  a  son  patriolisme  et  a  son  intelligence. 
C'est,  tn  eflet,  principalement  sur  I'inslruction,  I'edu- 
cation  et  la  verlu  des  femmcs,  qu'un  peuple  doit  baser 
sa  vertuet  son  b  onheur. 

))  Lorsque  je  rappelais  a  mon  souvenir  ce  qu'elait,  il 
y  avait  a  peine  trente  ans,  la  nation  des  Cherokees,  et 
que  je  voyais  ce  qu'clle  est  maintenant  :  alors  gros- 
si^re,  barbare  et  plongee  dans  la  ilebauche,  aujour- 
d'hui  alfable ,  bien  clevee,  religieuse  el  civilisee ,  il 
semblait  vraiment  qu'un  pouvoir  plus  qu'humain  eul 
accompli  ces  prodigcs ;  mais  c'est  seulement  une 
preuve  de  tout  ce  que  peut  faire  un  homme  doue  d'une 
haute  intelligence ,  anime  par  un  patriolisme  fervent 


(  25i  ) 

cl  desinlercsse.  Fcii  I\!.  Callioun  avail  coulunie  Je  dire 
que  «  c'^tait  un  grand  liomme  qui  avail  fonde  une  fa- 
mille.  »  Si  ce  n'est  pas  a  M.  Ross  seul  qu'on  doit  allri- 
buer  tout  ce  qui  s'esl  fail  dc  bien  chez  les  Clun-okces  , 
iJ  faut  du  moins  reconnallre  qu'il  a  donn6  I'impulsion. 

))  Je  ne  dois  pas  omellre  de  dire  ici  quelques  mols 
clu  Cadmus  indien.  11  existe  dans  le  dialecte  cherokeo 
beaucoup  de  mots  et  de  sons  qui  nc  peuvcnt  pas  etrc 
exprimes  par  les  caraclei'es  d'aucun  alphabet  connu. 
De  la  la  necessity  d'un  nouvcau,  qui  fut  invente  par  un 
Indien,  dont  le  noin  est,  je  ciois,  Guest.  C'est  cer- 
lainemenl  I'acle  le  plus  rcmarquable  de  rintelligence 
de  ce  peuple,  acle  si  cxlraordinaire  ,  qu'on  a  mis  en 
question,  si  le  premier  alphabet  etait  I'ouvragc  de 
I'liomme  ou  le  rosultatdc  I'inspiration.  J'avoue,  quant 
amoi,  que  je  penche  pour  cette  derniere  hypolh^se. 
Des  Cherukces,  pleins  d'inteliigence,  et  ayant  requ  de 
I'education,  m'ont  assure  que  cet  alphabet  6tait  par- 
fail  rclativement  a  son  ajij)lication  au  langage  de  ce 
peuple.  Le  journal  hebdomadaire  ,  public  a  Tn/ef/ua/i, 
est  imprimd  a  moiti^  dans  ce  nouveau  caractire. 

»  Le  nom  de  Talequnh,  donne  a  la  capilale,  6tail 
celui  d'une  ancieuno  villc,  siluilse  sur  la  riviere  Holslon, 
dans  le  Tennessee,  conslruito  sur  remplacemcnt  d'un 
fort  cel^bre,  appele  ordinaircmcnt  Tellico.  Celtc  an- 
cienne  ville  etait  un  lieu  de  refuge  dans  lequel  I'au- 
teur  d'un  crime,  quelque  atroce  qu'il  flit,  etait  com- 
pletemenl  en  silrelti  s'il  parvenail  a  Tatleindre  :  c'esl 
une  nouvelle  preuve  a  ajouter  k  beaucoup  d'aulres, 
particuli6rement  parmi  les  Iribus  des  parlies  les  plus 
occidenlales  ,  de  I'origine  hobraiquc  des  Indiens  de 
rAmorique.  Je  ne  connais  aucun  autre  exemple  de  la 


(  255  ) 

meme  espece  paiini  uos  tribus  indiennes.  On  peut 
ajouter  foi  a  celui-ci,  dont  le  souvenir  est  conserve 
par  line  tradition  fondee  sur  des  preuves  ayant  quelque 
authenticite. 

»  John  Ross,  dont  j'ai  d^ja  parle,  aujourd'hui  prin- 
cipal chef  de  la  nation  cherokee,  avec  un  modeste 
Iraitement  de  hOO  dollars  (2  200  fr.  environ),  est  un 
homme  qui,  sans  avoir  re^u  une  education  liberale,  est 
neanmoins  ecrivain  elegant,  et  peut  etre  plac6  au  pre- 
mier rang  par  sa  rare  intelligence,  son  Anergic  et  son 
indomptable  courage.  II  a  epouse  en  secondes  noces 
une  demoiselle  Stapler,  du  Dehiware,  el  reside  a  quatre 
milles  environ  de  Talecjiiah,  dans  une  vaste  et  confor- 
table  maison,  conslruite  en  hois,  dont  il  fait  les  hon- 
neurs  avec  autant  d'aisance  que  de  dignite  et  de  cor- 
diality. Lewis  Ross,  son  unique  frere,  est  un  Irfes-riche 
marchand,  dont  I'etablissement  egale  celui  de  quelque 
particulier  que  ce  soit  aux  Etats-Cnis.  » 


(  256  ) 

.titaljNCS.   K*trai<«  «r«uvragcs. 
^lelaiigeis,   etc. 


CONSIDERATIONS 

SUB 

LA  GtOGRAPIIIE  BOTANIQLE  ET  PHYSIQUE 

LA  RUSSIK  SEPTENTRIONALE, 

r.\U  M.   ALIUED  MAI'RY. 

PREMIKR   ARTICLE. 

Un  savant  professcur  dc  boUuiiquc  a  I'LJniversile 
imperialc  do  Saint -Madimlr,  do  Kiev,  M.  E.  R.  de 
Tiautvetler,  a  public  en  1850  un  intf^ressant  resume 
des  travaux  de  gdograjilHC  liolaniquo  donl  la  Russic  a 
ete  I'objel  (1).  Peu  de  conlrees,  par  I'^tenduc  de  leur 
tcrriloire,  la  variety  de  leur  climat,  les  differences  de 
conditions  topograpliiques,  so  pretent  mieux  que  cet 
empire  a  dcs  recbei'cbcs  comparatives  sur  la  geogra- 
pbic  des  planles ;  ct  en  faisanl  connaitre  au  ])ublic 
francais  I'opusculc  siibslanliel  de  M.  dc  TrautvcUer, 
j'anrai  ainsi  une  occasion  de  motlrc  ce  memo  public 
au  courant  du  progres  que  cette  science  a  fait  dans  ces 
dernieres  annces.  11  suQit  de  jeter  les  yeux  sur  les 
comptes  rendus  que  M.  A.  Grisebacli  fait  paraltre  an- 

(i)  E.  R.  von'riaulNcller,  Die  PJlnnzen(jto.jraphhchc'n  f'crhitllnisse 
des  Europiiischen  Husilands  (Berlin,  i860).  II  ii'a  piiii  eix  ore  <]Uf  deux 
fascicules,  coinprenant  la  parlie  eeptentiiunalr. 


(257) 

nuclleinenl  (1)  jiour  se  convaincie  que  la  geogiaphie 
hotanique  est  aujourd'liui  cuhivec  avec  unc  grande 
ardeiir,  surlout  an  dela  du  Rliin.  II  in'oul  ete  diflicile 
d'analyser  en  iin  article  tons  les  rapporls  do  M.  Grise- 
bacli,  car  ces  rapporls  nc  sont  eiix-memes  que  des 
analyses.  Le  travail  de  M.  de  Trautvelter  me  fournira, 
je  lo  repele ,  I'occasion  d'cntretenir  Ic  lectcur  de  cer- 
tains fails  de  geographic  physique,  exposes  dans  les 
rapports  du  professeur  de  Gcetlingue. 

On  a  souvent,  dans  I'etude  de  la  g(!*ograpliie  phy- 
sique de  la  Russie,  tente  d'adopter  pour  cc  pays  un 
syslfeme  de  divisions  naturelles,  fonde  sur  les  rapporls 
climatologiques  ou  les  productions  du  sol.  Ces  essais 
ont  ^te  aussi  i-nutiles  qu'impuissanls,  parce  qu'en  r^a- 
lit6  la  Russie  n'offre  pas  de  divisions  topographiques 
qui  puissent  cadrcr  avec  les  lignes  represenlant,  soil  la 
temperature,  soil  les  limitos  de  vt^gotation  de  telle  ou 
lolle  csp^ce;  et  Ton  comprcnd  que,  de  loutes  les  divi- 
sions adoptcics  jusqu'ici ,  aucune  n'ail  satisfait  com- 
plelement  aux  donnees  qu'on  s'etait  posees. 

La  division  la  plus  naturelle  est  encore  celle  qui 
partage  la  Russie  en  trois  regions  :  1°  la  mcridionale, 
comprise  entre  la  frontiere  de  I'empire  et  le  50'  degr6 
de  latitude  nord ;  2"  la  moyenne,  allant  du  50°  degre 
au  57";  .3"  la  seplentrionale,  allanldu  57=  a  la  frontiere 
du  nord. 

C'est,  en  ell'ot,  celle  qu'adopte  I'ukase  de  l78Zi,  el 
quo  Georgi  a  suivic  dans  sa  description  g^ogrnpliico- 
pliysique  de  I'cmpirc  de  Russie,  en  la  niodifianl  loute- 


(l)  A.  Grisoljacli,  Bcriclit  iibcr  die  Lcistuiujcii  in  tier  Pflaiizcvgeo- 
graphic  (Berlin,  Nicoiai,  18441848). 


{  258  ) 

fois  et  en  la  raincnant  a  cettc  aiilio  quadripartite: 
1°  zone  meridionale,  coinrnc  la  precedente ;  2°  zone 
temper^c,  du  51"  degre  au  57*=;  3°  zone  froide,  du 
58*  degr^  au  67";  A"  zone  arcliquc,  ou  hyperbor^enne, 
du  67"  degrt^  a  rexlremite  de  la  frontiere  nord. 

Brincken  a  adopte  une  division  analogue,  en  pr^ci- 
sant  seulcment  davanlage  les  caracteres  de  chaque 
zone.  Ledebour  divise  la  Russie  cisouralienne  en  six 
zones  :  arctique,  septentrionaley  vioyenne,  allant  de  la 
limile  septentrionale  du  chdne  a  celle  de  la  vigne ;  me- 
ridionale, Criniee,  Caucase. 

Le  conite  Cancrin  a  abandonnd  les  paralleles,  et  les 
lignes  de  tempera  lures  conime  principes  de  divisions  ; 
il  se  guide  sur  les  productions  du  sol,  el  obtient  ainsi 
les  huit  zones  suivantes  :  1°  zone  glaciale,  la  Nouvclle- 
Zcmble  {Novaia-Zemlia)  et  la  partie  nord  du  cercle  de 
Kola  ;  2"  zone  du  Lichen  Ra/igijeriniis,  des  buissons,  ou 
arbres  rabougris,  bornee  au  sud  par  les  lignes  oii  ap- 
paraisscnt  le  pin  et  le  m^leze ;  3"  zone  des  f"or6ts  el  du 
b^tail,  ou  se  montrent  les  grands  coniferes;  4°  zone 
agricole,  caracterisee  par  la  culture  de  I'orge,  les  vaslcs 
forets  et  les  belles  prairies,  limitee  au  sud  par  le  63'  pa- 
rallele  nord;  5"  zone  du  seigle  et  du  lin,  se  terminant 
environ  au  51'  parallele ;  6°  zone  du  fromenl  et  des  ar- 
bres I'ruitiers,  qui  finil  au  AS'  parallele ;  7°  zone  du  mais 
et  de  la  vigne,  comprenant  la  Bessarabie,  la  Nouvelle- 
Russie,  le  pays  des  Cosaques  du  Don,  le  cei'cle  d'As- 
trakan  et  du  Caucase  ;  8'  zone  de  I'olivier,  de  I'industrie 
s^ricicole  el  de  la  cannc  a  sucrc  (Russie  transcauca- 
sique). 

M.  de  MeyendorfT  adopte  le  meme  syst^me  de  divi- 
sion ;  mais  il  tient  compte  des  hauteurs  des  plateaux, 


(  259  ) 

ce  qui  le  conduit  a  cinq  regions  :  1°  le  versant  haltique; 
2"  celui  de  la  mer  Blanche,  born6  par  une  chaine  de 
collines  qui  unit  les  Valdai  a  I'Oural ;  3°  le  plateau 
moyen ;  A"  le  versant  meridional  de  la  ligne  meridio- 
nale  du  plateau  moyen;  5"  les  steppes.  Chacuno  de 
ces  divisions  naturelles  est  assez  caract^ris^e  par  des 
productions  et  unc  industrie  particulieres. 

Blasius  fonde  sa  division  tripartite  sur  Tadmission 
de  ce  fait ,  que  les  fronti^res  meridionales  de  VJlnus 
incana,  et  la  liraite  seplentrionale  des  arbres  fruiliers, 
forment  les  lignes  de  division  naturelle  de  la  Russie 
d'Europe. 

Arsenieff  comple  huit  regions,  qu'il  fixe  d'api-es  les 
differences  de  climat  el  de  sol.  Le  comte  Keyserling 
ne  reconnait  que  trois  zones  :  nord-ouest,  moyenne  et 
meridionale.  D'autres  autours  admettent  dix  groupes, 
ou  encore  cinq  regions  :  1"  celle  des  Toundras ;  2"  celle 
des  forels;  3"  celle  de  I'industrie  manufacturifere  et 
metallurgique;  A"  celle  des  terres  arables  noires;  5°  celle 
des  prairies. 

Dans  la  division  par  groupes,  on  ne  tient  gu^re 
comple  que  des  conditions  choregraphiques;  dans  la 
derniere ,  au  contraire,  on  a  perdu  de  vue  celles  qui 
licnnent  a  la  constitution  du  sol. 

II  est  difficile  de  prononcor  sur  celui  des  deux  sys- 
Iferaes  de  division  qui  est  a  preferer,  systemes  dans 
lesquels  rentrent  les  divers  essais  de  circonscriptions 
physiques  qui  viennent  d'etre  cites;  ou  plutot  il  faut 
convenir  qu'aucun  ne  satisfait  au  but  qu'on  se  pro- 
pose, el  que,  dans  I'un  et  I'aulre,  il  y  a  une  trop  grande 
part  faite  au  factice,  au  conventionnel.  La  Russie  d'Eu- 
rope est,  conime  on  sail,  une  vaste  plaine,  n'offrant 


(  200  ) 

que  (les  difleronces  hypsoiU(^ti'iques  Ires-leg^ics,  qu'on 
indique  sur  les  carles,  nials  qui  no  sont  pas  scnsibles 
en  r^alit6  sur  le  terrain.  Les  souls  caracl6res  qui  dif- 
f^rencienl  nolablomcnt  les  divcrses  regions  de  la 
Russie  sont  lires  dc  la  constilulion  geognostique  ;  mais 
de  tels  caracteres  ne  sont  pas  sufiTisamment  appa- 
renls  pour  servir  de  point  de  depart  a  un  systeme  do 
circonscription  physique.  Co  n'est  qu'indiroclement, 
par  les  influences  que  ccs  dinoronces  conslitutives  du 
sol  exercent  sur  Ic  regno  vegetal,  visible  a  tous,  quo 
Ton  pent  juger  des  dilTerences  physiques  qu'ofrrc  la 
Russie  dans  scs  diverses  parties.  Celui  qui  parcourt  ce 
vaste  pays,  ne  saura  pas  ^valuer  au  premier  coup  d'ajil 
la  difference  des  niveaux,  juger  des  differentes  natures 
de  terrains,  mais  il  distinguera  tout  de  suite  les  Toun- 
dms  du  nord  et  les  Steppes  du  sud  dos  districts  fores- 
tiers  du  centre,  ct,  entre  ceux-ci,  il  ne  confonlra  pas, 
memo  quand  I'hiver  derobe  tons  les  autres  caracteres 
apparenls  du  sol,  les  sombres  forots  dc  conifercs  sep- 
fentrionales  avec  les  vianls  bois  formes  des  arbres  a 
feuilies  caduques  du  niidi.  La  goographie  bolaniquc, 
voila  done  quelle  est  la  base  d'une  bonne  chorographic 
de  la  Russie,  el  c'est  ce  qui  fait  de  I'essai  de  M.  dc 
Trautvetter  tout  aulanl  un  travail  d'une  importance 
geographiquo,  que  d'une  importance  botanique. 

La  goographie  zoologique  nesaurait  olVrir  los  memcs 
avantoges.  Les  faunes  n'ont  pas  duns  Icur  distribution 
la  m6me  fixil6  que  les  (lores.  Suivanlles  saisons,  les  an- 
n^es,  idles  ou  telles  especes  animates  s'avancenl  plus 
ou  moins  vers  lo  sud  ou  vers  le  nortl;  leur  habilat  n'est 
pas  allaclie  inlimcmenl  au  sol  comiuc  Test  celui  dos 
plantes.  Lesvegolaux  lient,  aucontraire,  les  conditions 


(  2oi  ) 
g^ognosllques  et  cliniatologiques;  car  ils  subissent  leur 
double  influence  :  ligncs  isotbermes,  isolbtjres,  isochi- 
mfenes,  d'une  part;  lignes  d'affleurement  des  dift'6- 
rentes  I'ocbcs  et  strates  de  I'autre,  fonnent  comme 
leurs  deux  axes  de  coordonnecs.  Les  plantes  repr^- 
sentent  la  niarche  des  uncs  et  des  autres,  et,  comuic 
lous  les  caracteres  pbysiques  n'onl  pas  la  meme  im- 
portance dans  la  cii'conscription  physique  d'un  pays, 
ces  v^g^taux  mesurenl  pvecisement  le  mieux  I'in- 
fluence  de  ceux  qui  jouent  le  plus  grand  role.  Dans 
un  pays  de  temperature  sensiblement  egale,  ils  se  nio- 
d^lcnt  sur  la  nature  du  sol,  el  sur  un  sol  d'une  mfime 
constitution,  ils  varient  avec  le  climat. 

Mais  les  v(5gelaux  n'ont  pas  eux-memes,  comnie  in- 
dicateurs  dans  un  sysleme  de  division  d'un  pays,  et  la 
Russie    on  particulier,    une    ^gale    importance.    Les 
plantes  cultivees,  que  I'industrie  de  I'bomme  parvient 
souvent  a   faire  reussir  dans  des  climats  et  des  sols 
pour  lesquels  elles  ne  sont  pas  n6es,  ne  fournissent 
pas  des  caracteres  aussi  surs  que  les  plantes  sylvestres 
et  les  especes  agrestes.  Si  telle  ou  telle  culture  peut 
souvent  servir  comme  d't^cbello  climatologique,  elle 
n'est  proprc  a  fournir  un  caractere  geographique  que 
lorsqu'elle   est  particuiierc ,  speciale  a  lei  caractere, 
a  telle  conlree.  Au  contraire,  les  especes  agrestes,  sur- 
tout  celles  qui  vivent  en  societe  ,  rcpresentent  fidele- 
ment  la  pbysionomie  naturelle  d'un  pays,  et,  enlrc 
toutes,  les  especes  arborescenles  fournissent  les  carac- 
teres les  |)lus  surs,  les  plus  IVappanls.  Cela  est  vrai 
surlout  pour  la  Russie  d'Europe ,  ou  la  vegetalion  fo- 
resti^re  joue  un  si  grand  role.  Certaines  esseacos  ne 
viennent  que  dans  des  cantons  (lelermines;  les  coni- 


(  -262  ) 

f^res  ,  Its  nmentac^es ,  les  autres  families  jigneuses , 
ont  leurs  fionli^res  fixes,  qui  (h^coupenl  le  sol  en  pro- 
vinces nalurclles.  Quand  les  especes  ne  suffisent  pas  (^ 
dilli  rencier  les  districls  ,  les  vari^tes  peuvent  servir  de 
moyens  de  division  physique.  Ainsi ,  en  rdsuni6,  on 
pent  dire  que  la  gf^ographie  botanique  en  general ,  et 
la  v6g6tation  arborescente  en  particulier,  sont  les  bases 
d'une  bonne  division  physique  de  la  Fuissie. 

De  tous  les  conif^res ,  Ic  pin  commun  ( Piniis  syl' 
vestris,  L.)  est  celui  qui  occupe  en  Riissie  I'aire  la  plus 
6lendue.  Sa  limile  se]>lenlrionale  s'arrfete ,  d'apres 
Vahlenberg,  a  Enonlekis,  et,  selon  Wirzen  {En.  pi  of'fic. 
Fennice,  j).  78),  ellc  courl  de  Paloyoensun  a  la  source 
de  rivalaioki,  ou  elle  coincide  avec  la  limite  seplen- 
Irionale  du  Picea  vulgoHs.  D'Enonlekis,  Vahlenberg 
pi'olonge  la  ligne  frontiere  du  Pinits  syhestris  le  long 
du  Baskoioti  jusqu'au  lac  Pelsikoiaur,  et  le  long  du 
Neudamyski  jusqu'au  Pasvigfiord,  Mais  Fellniann  [Bull. 
des  tiat.  de  Moscou,  t.  HI,  p.  328)  porte  cctte  ligne  un 
peu  plus  au  nord,  la  faisant  suivre  la  cote  seplentrio- 
nale  de  la  presqu'ile  de  Kola,  jusqu'au  golfe  du  meme 
nom,  puis  rentrer  ensuile  plus  au  sud;  si  bien  que 
Boehlling  retrouve  celle  espece  sur  la  cote  orienlale 
de  la  presqu'ile  de  Kola,  en  lace  de  I'ile  Sosnovelz. 
Sur  la  coto  orientale  de  la  mer  Blanche,  celle  essence 
atteint  jusqu'a  Mezen,  et  voit  sa  limite  se  conlondre 
avec  celle  du  Larix  sibirica. 

Ruprecbl  a  observd  [Fl.  Samoj.,  p.  IG)  que,  dans  le 
pays  des  Samoiedes,  c'est  le  Piced  obovata  qui  constilue 
I'essence  doniinante  des  forfils,  tandis  que  c'est  le 
Pinussylvestris  a  I'ouest,  et  le  Larix  sibirica  a  Test.  Dans 
I'Oural,  la  limite  du  Pin  syhesire  redescend  jusqu'au 


(  263  ) 

6/i*  degr^  tie  laliluile  nord ,  limile  dont  cct  arbre  ne 
s'(^loigne  gu^re  a  iin  degr6  pr^s,  dans  la  Siberie,  saiif 
sur  les  bords  da  Jenissei,  oii  M.  de  Middendorff  [Reise, 
t.  II,  p.  169)  I'a  rencontre  jusqu'au  66°  degre. 

Dans  les  plaines  de  la  Russie  d'Europe ,  le  Ptnus 
sylvestris  d^passe  de  beaucoup  dans  son  aire,  vers  le 
sud,  la  fronti^re  meridionale  du  Picea  vulgaris,  quoi- 
qu'a  parlir  de  cette  ligne  il  s'eclaircisse  de  plus  en  plus 
el  finisse  par  ne  plus  se  rencontrer  qu'a  I'etat  isol^, 
dans  les  vallees  des  grands  cours  d'eau  de  la  Russie 
meridionale;  il  suit  cependant  ces  valines  jusqu'aux 
steppes,  mais  il  manque,  au  conlraire,  completeraenl 
dans  les  regions  qui  les  separent;  en  sorte  que  I'exlreme 
frontiere  du  Pin  sjh>estre  se  confond  au  sud  avec  celle 
de  la  v(^gelation  arborescente,  et  forme  la  limile  sep- 
tentrionale  des  steppes  de  la  Russie  meridionale. 

Si  Ton  lire  une  ligne  passant  par  le  sud  de  la  Vo- 
Ihynie  ,  coupant  le  gouvernement  de  Kiev  dans  la  di- 
rection sud-ouest  (car  le  Pin  sylveslre  remonte  le  long 
de  Dnieper  jusqu'a  Krioukoff),  et  celui  de  Poltava  au 
nord,  traverse  TUkraine  par  Izioum  et  rembouchure 
de  la  Borovenka;  puis,  se  relevant  dans  le  gouverne- 
ment de  Voronej  jusqu'a  la  hauteur  du  chef-lieu  de 
cette  province,  sur  la  rive  gauche  du  Don,  repiongeant 
au  sud  sur  la  rive  droite ,  et  atteignant  les  cercles  de 
Bobroff  et  de  Pavlovsk,  ou  se  I'enconlre  lagrande  foret 
de  ChipolT;  puis,  redescendant  le  long  du  Khoper, 
pour  aller  couper  le  gouvernement  de  Saratoff  dans 
son  milieu;  remontant  enfin  dans  le  gouvernement 
d'Orenbourg,  ou  Pallas,  on  n'a  pas  rencontre  cet  arbre 
au  sud  de  Borsk,  sur  la  Samara,  on  obtient  aiiisi  la 
frontiere  sud  du  Pinus  sylveslris. 


( --^^i ) 

A  I'oucsl  de  la  Russie ,  eel  arbrc  tienl  sa  llniito 
moins  seplcnlrionalc  :  ainsi,  il  sc  rcnconlrc  en  Tran- 
sylvanie,  en  Galicio,  on  Silosie ,  en  Piusse.  A  I'csl  de 
Ternpire ,  il  redescend  jusqu'au  lac  Baikal  ct  a  la 
Daourie. 

Le  Pinus  cembra  occupe  en  Russie  une  aire  bien 
plus  restreinle  que  I'essence  precedenle,  ct  s'arrete 
surloutaune  fronli^re  beaucoup  moins  septenlrionale. 
Si  dans  I'Oural  il  allcinl  aussi  le  6Zi°  latil.  nord ,  on 
ne  le  trouve,  par  conlre,  ni  dans  le  gouvernemonl  d'Ar- 
kbangclsk,  ni  dans  ceux  de  \  ialka ,  de  Kazan.  Dans 
celui  de  Vologda,  le  Piiuis  cenihra  n'ap|)aralt  que  dans 
la  vallt^e,  a  I'ouesl  de  la  Petchora.  Au  sud,  eel  arbre 
disparait  de  la  parlie  nord  du  gouvernonient  d'Oren- 
bourg,  oil  il  descend  par  la  cbaine  de  I'Oural,  qu'il 
sorre  de  pros  dans  le  gouverncment  de  Perm. 

Au  dcla  de  I'Oural,  Ic  Picca  cembra  pr6senle  Ic 
memo  pbenomene  (|uc  le  Piccd  syh'estris,  ct  e'l  un  degr<i 
plus  prouonce;  sa  lignc  fronli^re  redescend  jusqu'a 
la  Daourie  et  au  lac  Baikal,  landis  que  le  long  du  Je- 
nissei,  il  se  montre  encore  par  le  08°  30'  lalil.  nord. 

De  memo,  a  I'oucst  do  la  Russie,  le  Picen  cembra  sc 
rapprocbo  de  la  zone  Icmpdree  cbaude,  et  on  le  Irouve 
dans  Ics  Carpallies  et  la  Transylvanie. 

La  delcrmination  de  I'airc  cxacte  liu  Picca  vulgaris 
oflre  quelqucs  diniculles,  car  la  pluparl  des  auteurs  ne 
I'ont  point  distingue  du  sapin  de  Siberic,  le  Picea  obo- 
vafa  de  Ledebour.  Deux  Tails  cepcndant  peuvcnl  elre 
consideres  comrae  sufTisamment  etablis  :  c'est  d'abord 
que  Ic  Picca  vulgaris  no  s'clend  pas  jusqu'a  I'Oural, 
el  que  plus  on  s'eleve  vers  le  nord,  plus  sa  frontierc 
orienlale  s'eloigne  de  cctle  cluilne;  c'osl  ensuile  que 


4 


(  265  ) 

la  limlte  occitlcnlale  du  Picea  ohovaln  se  rapproche 
beaucoup  do  la  liniite  orienlalo  du  Picea  -vulgaris,  les 
deux  espt'ces  ne  croissant  a  c6t6  I'une  dc  1 'autre  que 
dans  un  espace  fort  resserr6. 

En  cffet.  les  botanistes  qui  ont  explore  Test  de  la 
Russie  ont  observe^  que  le  sapin  s'avance  beaucoup  plus 
verslenord  que  le  pin.  Ainsi  Boebllingk  arcncontr^  des 
individus  de  la  premiere  (sspece,  hauls,  il  est  vrai ,  a 
peine  de  2  pleds,  a  I'enibouchure  du  Ponoi,  tandis  que 
les  pins  ne  se  monlrent  qu'a  I'ile  Sosnovelz.  Schrenk, 
dans  le  pays  des  Saoioiedes,  a  trouve  de  meme  le  pin 
venant  mourir  au  sud  des  lignes  de  sapin.  A  Touest  de 
la  Russie,  le  contraire  a  lieu;  landis,  par  exemple , 
que  le  Picea  vulgaris  n'arrive  pas  jusqu'a  Enaretrask, 
le  Picea  sylvestris  s'eleve  jusqu'au  lac  Petsekoyaur.  Cela 
tient  a  ce  que  I'espeee  de  sapin  n'est  pas  la  meme  dans 
les  deux  regions,  le  Picea  de  la  Siberie  septentrionale 
appartenant  a  la  varitite  obovata. 

Le  Picea  vulgaris  parait  avoir  pour  fronli^re  orien- 
tale  une  ligne  qui  coupe  la  partie  est  de  la  presqu'ile 
de  Kola,  el  qui  va  joindre  le  confluent  de  la  Viatka  et 
de  la  Rama.  La  limite  meridionale  nous  est  donnee 
par  une  ligne  qui  traverse  le  nord  de  la  Volbynie  et  du 
gouvernement  de  Tchernigon,  la  frontifere  meridionale 
du  gouvernement  dc  Kalouga,  le  nord  de  cekii  de  Ria- 
zan,  et  qui  laisse  au  nord  le  gouvernement  de  Kazan, 
ou  le  sapin  abonde. 

A  I'ouesl  de  la  Russie,  le  Picea  vulgaiis  peuple  lea 
gouvernemenls  de  Grodno,  de  Lithuanie ,  de  Cour- 
lande,  I'ile  d'Oesel,  la  Finlande,  et,  par  la  Pologne,  va 
gagner  la  Transylvanie  el  la  Silesie. 

Le  Picea,  ou  Abies  obovata,  forme,  apres  le  boulcaii 
ni,   M.\ns.    5.  18 


(  260  ) 

binnc,  le  dernier  rcpr(^spntant  do  la  v^gelalion  arliores- 
ccnle  dans  le  nord.  A  I'ouest  ,  la  ligne  fronti^ro  court 
de  rcntiboucliure  dii  Ponoi  a  la  prcsqu'lle  de  Kanin  , 
oil  Ics  nionls  Cheninkliovski ,  situ^s  par  67"  25'  Inlit. 
Bord,  sont  ombrages  par  cc  sapin  de  Siberie.  Ruprecht 
nous  apprcnd  que  sa  ligne  deliniitalive  a  Test  passe 
par  Omoul ,  sur  I'lndega  et  Pustosersk  ,  puis  se  replie 
jusqu'au  cercle  polaire  dans  le  voisinage  de  I'Oural , 
redescend  ensuite ,  comme  les  autres  conif^res,  jus- 
qu'au 6/1°  parallele,  pour  remonler  plus  au  nord  dans 
la  Russie  d'Asie.  Ledebour  I'a  rencontr6,  en  effet,  dans 
I'Altai;  Middendorir,  par  69"  1/2  de  latit.,  sur  le  Je- 
nissei,  et  Turczaninoft',  au  lac  Baikal  el  en  Daourie. 

Le  Lnrix  sihirica  manque  compl^temenl  sur  le  ver- 
sant  occidental  de  I'Oural,  et  la  limitc  septenlrionale 
de  ce  conitere  ne  paralt  pas  I'rancliir  les  bords  occi- 
denlaux  de  la  mer  Blancbe.  Middendorll'  a  rencontr6 
le  Larix  sihirica  au  Jenissei  jusqu'au  OG"  degrd,  point 
qui  paralt  etre  le  plus  septentrional  qu'atteigne  celle 
essence. 

La  frontiere  occidentale  du  T^ar-iv  sihirica  court  au 
nord  de  Kargopol,  dans  le  gouvernement  d'Olonetz,  a 
la  mer  Blancbe,  et,  au  sud,  du  gouvernement  de  Kos- 
lron)a,  ou  ellc  cmbrasse  les  cercles  de  la  parlie  occi- 
dentale, savoir,  ccux  de  KologrilF,  MakarieiT  et  Var- 
navin  ,  au  gouvernement  de  iNijnei -Novogorod.  On 
rencontre  encore,  quoiquc  en  peu  d'abondanco,  le 
Larix  dt'nommt!;  dans  les  corcles  situes  sur  la  rive 
gaucbe  du  Volga ,  Balaklui ,  SemenolT,  MakariclF  et 
Vasil.  Plus  au  sud ,  cet  arbre  a  enti6rement  disparu. 

En  tirant  une  ligne  du  gouvernement  de  Nijnei-No- 
vogorod  a  celui  de  Vialka,  on  obtient  la  fronti^re  md- 


(  267  ) 

rklionale  de  celte  essence.  Arrive  a  Sarapoul,  sur  la 
Kama,  celte  ligne  descend  au  sud,  va  couper  le  gouver- 
nement  d'Orenbourg,  en  passant  par  Sterlilamak,  sur 
la  Bielaia,  et  atleint  FOural  par  le  bh"  lalit. 

En  somine,  le  Larix  sibirica  occupe  en  dc^a  de 
rOural,  tant  au  nord  qu'au  sud,  une  aire  beaucoup 
plus  resserr^e  que  le  Picea  obot'ata,  tandis  qu'a  I'ouest 
c'csl  le  contraire  qui  se  produit. 

\J Abies  sibiricn  s'^leve  peu  au  nord;  on  nc  le  ren- 
contre ni  en  Finlande  ni  dans  le  pays  des  Samoi^des,  et 
il  ne  parait  pas  remonter  au  dela  du  cercle  de  Vologda, 
dans  le  gouvernement  du  meme  noni ;  en  marchant 
vers  rOural ,  il  se  tient  cependant  moins  bas  en  lati- 
tude, puisqu'on  le  signale  au  nord  du  gouvernement 
de  Perm ,  dans  le  cercle  de  Tcherdin  ,  sur  les  bords 
de  la  Kolva. 

Le  capitaine  Dlatowski  repr^sente  la  limite  occiden- 
lale  du  sapin  blanc  de  Silesie  par  une  ligne  parlant 
du  cercle  de  Vologda  ,  dans  le  gouvernement  du  meme 
nom,  et  se  dirigeanl  vers  les  dislx'icts  orienlaux  du 
gouvernement  de  Kostroma ,  envoyant  ses  points  les 
plus  avances  dans  les  cercles  de  MakariefT  et  de  Var- 
navin,  et  comprenant  tout  celui  de  Vettouga,  oil  le 
sapin  blanc  abonde.  Celte  ligne  de  vegetation  redes- 
cend  par  lo  gouvernement  de  Kazan  ,  el  va  joindre 
I'Oural  par  celui  d'Orenbourg.  Au  dcla  de  cette  ( liaine, 
cet  arbre  gagne  le  lac  Baikal  et  la  Daouric. 

L'if  [Taxus  baccata,  L.)  n'appartient  qu'a  la  Russie 
occidentale.  II  se  prdsente  dans  les  lies  d'vVland  el 
d'Oesel,  en  face,  sur  la  cote  de  Livonic  i\  Pernau,  et  sur 
quelques  points  de  la  Courlande.  La  ligne  de  vegetation 
de  eel  arbre  redescend  ensuile  par  la  Pologne ,  par  le 


(  268  ) 

gouvcrnement  de  Grodno  el  la  woiwodled'ALigustowo, 
et  vient  s'arreler  aux  Carpalhes,  laissanl  dc  cole  la 
Llllmanie,  les  gouvernenienls  de  Volliynie,  de  Podolie, 
do  Kiev,  ct  ne  reparaissant  que  dans  laCriinee,  le  Cau- 
case,  sur  le  versant  nord  de  ccUe  montagne  jusqu'au 
Terek,  scion  Guldcnstadt ,  et  jusqu'u  la  Kouma,  solon 
M.  de  Brincken. 

MM.  Palze,  E.  Meyer  el  Elkan,  dans  lour  Flore  de 
Prtisse ,  representcnt  la  fronlierc  seplcntrionale  du 
hfilrc  [Fagus  syhatica)  par  unc  ligne  allanl  d'Edini- 
bourg,  par  la  Norvegc  m^ridionale,  le  Skanie  el  le 
Smaland  ,  a  la  mer  d'AzolT,  ct  au  milieu  de  la  Cas- 
pienne ,  coupant  la  Russio  dans  la  direction  sudoslj 
M.  de  Traulvelter  reporle  davanlage  cette  ligne  fron- 
liere  a  I'ouest;  il  la  fait  passer  par  Kiinigsbcrg,  la  Po- 
logno  orienlale  et  I'oucst  de  la  \  olhynic.  En  effct, 
Waga,  dans  la  Flore  polonaise,  place  le  lielre  dans  les 
provinces  de  Gracovie,  Sandomir,  Lublin,  Masovie, 
Plock  el  Kalisch.  Au  sud,  le  helre  reparall  dans  les 
forets  qui  couvrent  les  liauleurs  de  la  Tauride  et  du 
Caucase.  M.  de  Brincken  nous  dil  qu'il  peuple  les  forets 
comprises  enlrecetle  montagne,  le  Terek  el  le  Kouban, 
el  qu'il  remonle  jusqu'a  la  foret  de  Stavropol. 

Le  charme  [Carpinus  belidus,h.)  ne  sc  montre  gu^re 
plus  au  nord  que  la  Gourlande,  dans  sa  jiartie  sud- 
ouesl,  oil  il  conslitue  unc  essence  de  la  foret  dcRulzau. 
Rare  dans  le  gouvernemenl  de  \\'ilna,  il  abonde  da- 
vanlage dans  celui  de  Grodno;  il  peuple  la  cdiebre 
foret  de  Bielowieza,  el  compose  en  parlie  les  forets  de 
Pologne.  On  le  rencontre  Ires-frequemnienl  en  Vo- 
Ibynie  et  en  Podolie,  dans  le  gouvernement  de  Tchcr- 
nigoff,  dans  Ic  nord  de  celui  de  Rberson,  dans  cclui 


(  209  ) 
de  Poltava;  niais  11  njaiiquc  chins  ceux  de  Roiirsk,  do 
Tamboff,  tandis  qu'il  reparait  dans  cclui  dc  Voronej. 
Du  Dniestr  au  Jaik,  le  long  dc  la  fronliere  seplcnlrlo- 
nale  des  sleppes,  cetle  essence  n'occupe  qu'unc  aire 
fort  resserrec;  mais  elle  descend  asscz  avant  le  long 
des  grands  fleuves  qui  coupent  cette  region,  d^passe 
m6me  les  steppes,  et  reparait  ensuite  en  masse  dans  la 
Criaiee  ct  la  Caucasie. 

h'Acer  pseudoplatanus  s'etend  des  Carpathes  par  la 
Pologne,  les  gouvernements  de  Kiev,  Poltava,  Voronej 
et  Penza,  et  disparait  a  Test  dans  celui  de  Saratoff, 
compris,  dans  le  sens  latitudinal,  enlre  les  steppes  et 
les  5Zi  et  55°. 

\J Acer  cnmpeslre  s'avance  plus  au  nord.  Rare  en 
Pologne,  et  manquant  complotement  en  Lithuanie,  il 
s'eleve  jusque  dans  les  forets  situees  au  sud  de  I'Oka , 
mais  redescend  dans  le  sens  de  la  longitude  orientale 
dans  le  gouvernement  de  Penza. 

L'Acer  tataricum  est  etranger  a  toutes  les  provinces 
orientales  delaRussle,  a  la  Pologne,  a  la  Lithuanie.  Dc 
lallongrie,  delaSyrmie,  delaCroatieetdelaGalicic,  les 
seules  contrees  de  I'Europo  centrale  occidentale  ou  on 
le  rencontre,  cette  essence  gagne  la  Podolle,  entre  la 
frontiere  nord  et  sud  de  laquelle  11  so  tient  exactement 
confine,  puis  11  remonle  de  la  dans  le  gouvernement 
de  Moscou,  a  Mahnich ,  dans  le  gouvernement  de 
Vlalka,  prenant  a  peu  pres  pour  sa  limlte  nord  la  luulte 
sud  du  Picea  vulgaris,  et  pour  fiontierc  meridlonale, 
la  fronliere  soptentrlonale  des  stoppcs. 

La  vegetation  du  bouleau  nain  [Belala  nana,  L.j  est 
representee  par  une  bande  partant  du  cap  Nord  , 
comprise  enlrc  la  mcr  Arctique  et  la  fronliere  septen- 


(  ^70  ) 

triuuale  du  charme  {Carpmus  betalus),  les  gouvemc- 
nienls  de  Wilna  et  de  Moscou,  le  lacTcluichloma,  dans 
le  gouvernement  de  Roslronia  et  rOuiija  ;  puis  celle 
zone  se  terniine  au  voisinage  de  I'Oural;  celte  essence 
ne  se  renconlrant  plus  dans  lo  gouvernement  de  Kazan 
el  de  Viatka. 

Je  viens  d'analyser,  d'apres  IM.  dc  Trautvelter,  Ic 
tableau  de  la  vegetation  des  principalcs  essences  d'ar- 
bres  (le  la  llussie  ;  en  couibinanl  ensemble  les  lignes 
de  vegelalion  de  ces  diverses  esp6ces,  et  plus  particu- 
lierenient  des  coniteres,  on  oblienl  quatie  regions 
naturelles  :  1°  une  au  noid,  la  Russie  septenlrionale , 
ou  region  des  Joiindras ;  2"  une  a  I'ouest,  la  Russie 
occidenlale ,  ou  region  du  sa[)in  d'Europe;  3°  une  a 
Test,  la  Russie  orientale,  ou  region  des  conlferes  de 
Siberie ;  /i"  une  au  sud ,  la  Russie  meridionale ,  ou  re- 
gion des  arbres  non  coniferes ,  appelcis  par  les  AUc- 
inands  Laubholzer,  par  opposition  aux  premiers,  qu'ils 
nomment  Nadelholzer,  c'est-a-dire,  mot  a  mot,  arbres 
a  feuilles  aciculairos,  arbres  a  feuilles  larges. 

Premiere  nfeciON.  —  liussie  septcntrionale. 

Ce  qui  caract^rise  la  premiere  des  zones  que  M.  de 
Trautvelter  a  ^lablies,  c'est  le  manque  absolu  de  loutc 
vegetation  arborescente.  Dc  vastes  dtonduos,  oii  le  sol 
n'est  convert  que  de  mousses  et  de  licbens,  la  re- 
couvrent  :  c'est  ce  que  Ton  appelle  les  loimdras.  Les 
Totindras  sont  I'image  de  la  ilcsolation  el  de  la  mort. 
Lorsque  le  froid  s6vit  avec  rigueur,  le  sol  se  crevasse, 
il  s'y  forme  de  profondes  fondriercs;  I'cau ,  contenue 
dans  les  enirailles  de  la  lorrc,  sort  par  ces  ouverlures, 
56  repand  au  deliors  en  fumant,  et  sc  Iransforme  im- 


(  -271  ) 

m^diatement  en  glace  (1).  A  peine  y  decouvro-t-on 
Qa  et  la  quclques  representanls  des  phanerogames  ar- 
borescents  de  nos  climats,  r^duits  aux  proportions  les 
plus  rabougries,  cachant  sous  le  sol  leur  faible  tige 
j)our  la  preserver  de  la  rigueur  du  climat.  Cette  succes- 
sion de  deserts  glacis  correspond,  a  I'ouest,  a  la  rivifere 
Kola,  ou  au  lac  Imandra,  Sa  fronti^re  meridionale 
passe  au  nord  de  I'embouchure  du  Ponoi ,  sur  la  cote 
occidentale  de  la  iner  Blanche,  et  du  Mezen,  sur  la  cote 
Giienlale ,  et  descend  vers  I'Oural  un  peu  au  sud  du 
confluent  de  la  Petchora  et  de  I'Ouza.  Cette  limite  n'est 
pas  cependant  absolue,  et  de  veritables  Toundras  s'of- 
frent  quelquefois  plus  au  sud ,  de  ineme  que  ga  et  la  la 
vegetation  arborescente  depasse  cette  ligne  fronlifere  et 
remonte  en  certains  points  de  la  zone  septentrionale. 
Boeiitlingk  signale,  par  exemple,  un  bouquet  de  bou- 
leaux  de  20  a  25  pieds  de  haul,  au  nord  de  Kola,  sur 
la  presqu'ile  des  Pecheurs,  presque  par  69"  7' latitude 
nord.  Ruprecht  a  rencontre  a  la  |)resqu'lle  Kanin,  dans 
les  vallees  du  mont  Chemakhovski,  sous  le  67°  30'  latit. 
nord,  un  petit  bois  de  Picea  ohovala,  essence  qui  s'ob- 
serve  a  Poustozersk,  sur  la  Petchora,  et  qui  boise  tout 
le  cours  inferieur  de  I'Ouza. 

Les  veritables  Toundras  n'apparaissent,  au  reste,  qu'a 
lest  de  la  nier  Blanche.  Dans  la  Laponie  russe,  ce  qui 
y  correspond  n'est  reellement  qu'une  region  subal- 
pine,  en  prenant  cette  epithete  dansie  sens  de  Wahlen- 
berg;  niais  entre  la  mer  Glaciale  et  le  cercle  polaire 
jusqu'a  Poustozersk,  et  de  cette  ville  a  I'Oural,  par 
64°  latit.,  les  solitudes  septentrionales  se  presentent 

{i)  Voyez  (le  Wrangell,  Le  Nordde  la  Sibe'rie,  trad,  franjaise,  (.  II, 
p.  343. 


(  27:>  ) 
dans  loule  leur  Uisle  vorile.  A  pailir  cic  h'l,  los  Toiini/ras 
s'dlcntlcnl  jusquc  dans  TAiiji^iiijue.  Tantut  pierrcux  el 
couiplelement  arides,  lanlot  sees  et  simpleinenl  con- 
verts de  lichens,  parfois  l^nerement  liumides  ot  avant 
alors  pour  vegetation  le  Poljtrichiim  (li,  ou  plus  hu- 
inidcs,  el  donnant  naissance  au  Sphagnum;  enfin , 
souvcnt  d'unc  apparence  moins  apre,  et  revetuc 
d'une  couche  do  vegetation  que  composent  des  Jon- 
eses, des  Graminees,  dcs  Cyperacecs,  los  Toundras 
varicnt  suivanl  la  nature  du  sol  el  sa  composition  geo- 
gnostiquc.  Tantot  c'esl  la  foriiialion  ncplunienne  qui 
domine  :  on  a  alors  la  zone  que  Rupreclit  appelle  alpine, 
et  ou  le  Louloau  s'oflro  encore  a  I'cHat  uain  ;  tanlol  la 
formation  hypogeue  pretlouiine  :  c'ost  la  zone  arctique 
du  nieme  auteur,  oii  les  arbres  ont  tolalcment  disparu. 
Enfin,  on  pcul  distingucr  la  zone  tout  a  fait  polairc,  la 
region  de  la  mer  Glaclalo,  qui  s'offic  avec  dcs  carac- 
teres  propres. 

Ruprecht  a  specialemcnt  etudie  la  derni^rc  de  cos 
regions,  et  nous  a  fouini  los  elements  do  sa  geogra- 
phic botanique.  11  y  a  trouvc  cinquante-trois  especes 
d'alguos,  donl  vingl-qualre  sc  rencontrenl  dans  d'au- 
tres  ri^glons,  el  sur  lesquelles  vingl-cinq  apparliennent 
a  la  partie  oucst  do  la  zone  do  la  mer  Glaciale,  a  la 
Laponic  russc ,  el  qualre  aux  cotes  de  la  Nouvclle- 
Zemble.  A  Test  de  cettc  lie,  les  algucs  marilimes  de- 
viennenl  graduellement  plus  rares.  Les  especes  qui 
persistent  le  plus,  el  ollrenl  |)ar  consequent  dans  celle 
zone  une  aire  plus  etendue,  sont  :  Ic  Fucus  vcsicu/osns , 

(l)  Voyczlecuiiciix  (iiljican  (|ue  IMiM.dc  IMiildciidorlT ctTiatitvctler 
donnciit  ilc  la  Touiulia  do  Taiinour,  ilaiis  le  pays  ties  baiiiuiccles  (aj). 
Griscbach,  Berichtfur  1847,  [>■  34-) 


(  273  ) 
le  Laminavia  aacdinrina,  Ic  Dcsiiiarcsdn  (icnlenta.  Sur 
la  cote  cle  hi  Nouvelle-Zemblc  ,  il  y  a  une  floro  toule 
speciale,  representee  par  le  Sphacehuia  heteroiCcma ,  le 
Calithamnion  plwna,  le  Bangia  laminarice,  el  le  Du- 
montia  lepechinii . 

La  flore  des  algues  cle  la  Laponio  norvegienne  a,  sur 
les  bords  memes  de  la  mer  Glaclale,  d'assez  nombreux 
representants,  tols  que  X Himanthalia  lorea,  le  Deles- 
serea  sanguinea,  le  Chondrus  inammilosiis ,  V Haljmenia 
rubescens.  Deux  causes  agissent  comme  elements  mo- 
dificateurs  sur  la  flore  boreale  de  la  Russie  :  la  profon- 
deur  de  la  nier  et  la  temperature.  On  no  possode  mal- 
heureusemenl  aucun  sondage  bien  precis  pour  la  mer 
Glaciale;  ce  que  Ion  a  reconnu,  c'est  qu'en  general 
cetle  mer  est  peu  profonde.  A  Test  de  la  route  de  I'ilc 
Vaigatz ,  la  profondeur  est  faible;  elle  augmcnte  en- 
suite  assoz  nolablement  vers  Test,  mais  diminue  en 
s'elevanl  au  nord.  Les  sondages  executes  montrent 
que  cetle  profondeur  varie  enlre  84  el  1Z|7  pieds. 

Boehtlingk  a  observd  a  Kola  la  lemperature  de  la 
mer,  cclle  de  I'almospliere  variant  do  16  a  18°  Reau- 
mur, et  il  a  Irouve  de  8  a  10°.  Ruprecht  donne  pour  la 
temperature  de  I'eau  sur  la  cole  de  Laponie,  du  1"  au 
19  aout,  de  -i-  5°  I  R.  a  8°  I  R.  ;  el  dans  la  bale  de 
Matotchkin,  du  'Ik  au  30  juillet,  de  -H  3  a  +  h"  R. 

D'apres  Ru|)rechl  et  Wahlen])erg,  la  haute  mer  sur 
la  cole  de  La])onic  ne  g6le  pas  meme  dans  le  fort  de 
I'hiver.  Au  goU'e  de  Kola  ,  en  Janvier  el  fevrier,  la  mer 
so  couvre  de  glace  a  une  distance  d<>  20  a  25  vverstes 
de  la  cole;  mais  cela  n'a  pas  lieu  duranl  les  hivcrs 
doux,  el,  des  Ic  mois  de  mai,  la  baic  est  libre  de  glaces. 
La  mer  g^le,  au  conlraire,  regulierejnenl  sur  la  cote 


(  274  ) 

orienlale  de  Ja  Russie,  sur  les  coles  clu  pays  dcs  Sa- 
inoiedes  et  de  la  NouvoUe-Zemhle ,  et  mfeme,  dans  les 
hivors  ligoureux ,  la  route  de  Vaigalz  se  preiid. 

II  faut  encore  tenir  compte  de  la  quantity  de  sel  et 
des  debris  calcaires  contenus  dans  les  eaux.  Marcet, 
Franklin  et  Parry  ont  trouvo  39  a  40  parties  de  sel 
pour  1  000  parlies  d'eau  ;  et  Mlddendorfl"  compte  cent 
soixanle-lreize  esp^ces  de  mollusques. 

Daos  la  zone  alpine ,  les  plantes  apparaissent  au- 
dessus  du  niveau  du  sol ,  phanerogames  coninie  cryp- 
togames;  aucune  tourbiere,  par  consequent ,  puisque 
mousses,  lichens,  gramin^es,  y  offrent  a  peine  des  liges. 
Parmi  les  vegetaux  qui  subsistent  a  cet  etat  presque 
embryonnaire  ,  dominent  les  renonculacees,  les  saxi- 
iragees  et  les  graminees.  Les  plus  ch(itifs  repr^sentants 
de  la  flore  arborescenle  y  sont  complelement  absents, 
et  Ton  y  cherche  en  vain  le  Betida  nana,  le  Junijjertis 
comniimis,  V Empetnan  myrnni,  meme  a  I'^lal  de  sous- 
arbrisseaux.  Les  bruy^res  meme  font  dtifaut.  Des  es- 
paces  elendus  sont  entierement  d^pourvus  de  plantes, 
lesquellos  ne  se  rencontrenl  que  sur  les  rochers  des 
Toiindras.  La  zone  alpine  comprend  encore  dans  ses 
limiles  les  iles  de  la  Nouvelle-Zemble  et  de  Vaigatz,  de 
Kalgouef,  et  les  roches  du  nord  do  I'Oural.  D'apr^s  de 
Baer  et  Ruprecht,  la  Nouvelle-Zemble  et  le  pays  des 
Samoiedes  presenlcnt  cent  cincjuante-deux  especes ; 
mais  c'est  u  peine  si  Ton  peul  donner  le  nom  de  pha- 
nerogames a  ces  plantes,  puisque  les  liges  les  plus  ele- 
vees  n'atteignent  pas  6  pouces,  et  que  la  Uryas  octope- 
lata  est  la  seule  planle  sociale  qu'on  rencontre  dans  la 
Nouvelle-Zemble  ;  les  especes  herbac^es  qui  represen- 
tenl  le  genre  Sa/ix,  le  Salix  polaris,  le  Salix  reticulata, 


(  275  ) 
le  Salix  lanata,  sont  des  vegetaux  pour  ainsi  dire  mi- 
croscopiques ;  le  premier  n'etant  qu'une  sorte  de 
mousse,  le  second  ne  depassant  pas  Iv  a  5  pouces,  el  le 
troisieme  alteignanl  a  peine  une  palme  {spanne).  En 
revanche,  la  vegetation  souterraine  prend  un  d^velop- 
pement  qu'on  ne  rencontrerait  pas  sous  un  sol  moins 
glace.  La  derniere  espece  citee  ,  par  exemple  ,  pousse 
des  rhizomes  de  12  pieds  de  long,  et  I'epaisseur  de  ces 
tiges  souterraines  est  de  1  a  2  pouces. 

Dans  les  contrees  ou  la  rigueur  de  la  temperature 
s'oppose  a  la  croissance  des  plantes,  c'est  le  sein  meme 
de  la  terre  qui  se  charge  do  fournir  aux  vegetaux  le 
calorique  que  I'atmospherc  leur  reluse.  Walilenberg 
a  montre  que,  dans  les  regions  polaires,  la  temperature 
moyenne  du  sol  depasse  celle  de  I'air;  aussi  M,  RupfTer 
a-t-il  remarque  [f^oyage  dans  rOurnl ,  ^.  307)  que, 
sous  ces  paralleles  eleves,  les  periodes  de  vegetation 
se  reglent  autant  sur  les  periodes  de  temperature  du 
sol  que  sur  celles  de  I'air.  Au  centre  de  la  Russie,  la 
vegetation  du  printemps  se  d(^veloppe  un  peu  plustard 
qu'en  Allemagne,  mais  la  recolte  se  Fail  a  peu  pres  a 
la  meme  ^poque  dans  les  deux  pays,  c'est-a-dire  au 
mois  de  juillet.  Quand  on  s'avance  ensuite  verslenord, 
et  quand  on  depasse  les  latitudes  dont  la  moyenne  de 
I'air  est  0",  on  voit  les  recoltes  retarder  jusqu'au  mois 
d'aout;  et  enfm,  avant  que  I'agriculture  disjiaraisse  en- 
tierement,  jusqu'au  mois  de  septeudjre;  ce  qui  montre 
que  I'epoque  de  la  r^colle,  qui  coincide  ordinairement 
avec  celle  de  la  plus  haute  temperature  de  I'air,  marche 
dans  le  nord  vers  I'epoque  oil  la  temperature  du  sol 
atteint  son  maximum. 

La  Nouvelle-Zemble,  au  dire  de  M.  de  Baer,  offre  tout 


(  276  ) 
a  fiiit  Ta-spccl  dcs  Al])cs,  au  dola  dc  la  llinile  des  ncigcs 
perpetucUos.  Presquc  loutcs  Ics  planles  dc  la  Laponio 
que  Wahlenberg  a  rcnconlrees  au  soniniel  dc  cos 
inontagncs,  lo  Rnnnnciilus  nh>alis,  le  SaxiJ'raga  niimlis, 
sc  represenlenl  dans  les  plaines  de  la  Nouvelle-Zeaiblo. 
ftlais  la  pkipart  de  ccs  planles,  meinc  les  mousses,  no 
Irouvent  pas  dans  celle  ile  hyperborocnne  unc  clialeur 
sufljsanle  pour  arriver  a  maturite  el  donner  des  graincs; 
quelqucs-unes  ne  fleurissent  niemc  pas.  Cost  lo  vent 
qui  jelle  sur  la  cole  ces  graines,  qui  se  sonl  develop- 
p6es  sous  un  ciel  moins  apre ,  el  ces  habitanls  du 
r^gne  vegetal,  couinic  ceux  du  regne  animal,  no  sont 
que  dcs  individus  de  passage,  qui  no  hanlenl  cello 
lerie  que  durant  la  saison  prinlaniere. 

La  floie  du  pays  dcs  Sanioiedes  est  un  peu  moins 
pauvie;  cllc  rcnferme  des  cspeces  absolument  incon- 
nues  a  la  Nouvelle-Zemble,  mais  qui  s'avancent  jusqu'i'i 
I'ile  de  Kalgouef. 

La  flore  dc  cello  derniere  ile  est  un  Inlerm^diaire 
cnlrc  cello  de  la  Nouvelle-Zemble  el  du  nord  de  I'Oural; 
olle  sell  commc  de  liaison  entie  la  region  du  bouleau 
nain  el  du  genevrier  ct  celle  ou  lout  arbie  a  disparu. 
Mais  I'aspect,  la  nature  gencrale  de  la  vegetation  du 
pays  des  Samoiedes  est  la  meme,  ainsi  que  la  consti- 
tution geognoslique,  qui  resle  idenlique  de  I'Oural  aux 
lies  dc  Vaigatz  el  de  la  Nouvelle-Zemble.  Tous  ces  pays 
sont  monlagneux.  A  Kalgouef,  le  Dorochkina  altcinl 
420  pieds ;  le  Seikaviiu,  hlQ;  el  les  Gubiiti-Gori,  580. 
A  la  Nouvelle-Zemble,  la  cliaine  de  Milioucliefl"  alleinl 
une  allllude  de  3  '20/i,G  pieds  anglais,  el  Liitke  a  mesurc 
a  la  baio  de  Malolclikin  des  cimes  baules  dc  plus  do 
200  pieds.  Au  nord  do  I'Oural ,   I'Obdorski  s'eleve  a 


i 


(  277  ) 

5  286  pleds;  et  entre  le  G8  et  le  69"  latit.  nord,  a  I'est 
de  la  chalne,  le  Sedabai  esl  encore  haul  de  800  pieds, 
landis  qu'a  I'ouest  le  Padajagoi  mesure  1  475  pieds,  et, 
sous  le  cerclc  polaire,  le  massif  du  Gaito,  4190  pieds. 

A  la  Nouvelle-Zenible,  ce  n'est  qu'a  la  fin  de  juillet 
que  la  neige  disparait  des  plaincs;  mais  pour  pcu  que 
le  vent  ail  amoncele  les  neiges ,  on  voit  des  glaciers 
subsislcr,  meme  durant  la  saison  chaude,  au  niveau  de 
la  mer.  Au  nord  de  I'ile,  les  coles  sont  perpetuellement 
gel^es.  C'est  qu'on  effet  la  temperature  s'abaisse,  au 
point  qu'a  la  baie  des  Rocliers,  par  70°  37'  latit.  nord, 
la  temperature  moyenne  de  I'annee  est  de  —  7°, 56  R. 
(— 9%Z|5  cent.),  et  a  la  baie  do  Malolchkin,  par  73"  19', 
de  —  6%69  R.  (—  8",37  cent.) .  Pour  ces  deux  locaIil6s, 
la  moyenne  d'observations  de  quatre  ans  ne  doane  pas 
un  seul  mois  de  I'annee  dans  lequcl  il  n'ait  au  moins 
gele  une  fois. 

La  region  du  bouleau  nain  oflre  une  couclie  veg^tale 
6paisse ,  quoique  fort  peu  elevee  et  loialoment  de- 
pourvue  d'arbres  et  arbrisseaux  ou  arbustes.  On  voit 
d6ja  apparaitre  quelques  Ericac^es,  telles  que  le  Le- 
dum, la  Callitna  et  VJndromeda,  qui  accompagnent  le 
bouleau  nain. 

Cette  zone  embrasse  les  parties  du  gouvernement 
d'Arkhangelsk  ,  qui  s'etend  au  nord  de  la  frontiere 
m^ridionale  de  la  region  des  Tonndras,  donnee  plus 
haul,  a  I'exception  cependant  des  versants  rocheux  de 
rOural  septentrional  et  des  lies,  el  s't'tend  de  I'ouest  a 
Test  de  la  mer  Blanche  jusqu'a  I'Oural,  et,  dans  la 
direction  est-nord  de  la  fronliere  mtiridionale,  de  la 
region  des  Toundras  a  la  mer  Glaciale. 

Rupi'echl,  dans   son  grand    travail    intitule^  :  Flora 


(  278  ) 

Snmo'iedorum  cisiira/e/isiii/n,  remarqiie  que  la  flore  do 
cette  zone  esl  tres-pauvre  en  esp^ces.  On  n'en  conipte 
pas  plus  de  deux  cent  neuf ,  appartenant  a  la  division 
des  phanerogames,  c'est-a-dire  cinqtiante-sept  seule- 
inent  de  plus  que  dans  la  zone  jir^cedentc.  Sur  ces 
deux  cent  ncut"  especes,  cent  dix-scpt  appartiennenl 
egalement  a  celte  dernicre  zone,  laquellc  en  conipte 
trente-cinq,  qui  manquent  absolument  a  la  zone  du 
bouleau  nain.  Cette  zone  a  son  tour  en  compte  quatre- 
vingt-douze,  qu'on  cherche  vainement  dans  la  zone 
alj)ine. 

La  vegetation  de  la  zone  du  bouleau  nain  r^pond  a 
peu  pr^s  a  celle  des  J/pes  injerieures  de  Wahlenberg. 
On  y  rencontre  des  especes  qui  inanquenl  aux  haules 
regions  alpines  de  la  Laponie,  telles  que  Ic  Cornus 
siiecica,  V EpUobiuin  palustre,  le  Solidago  'virgaurea,  le 
Trihentalis  europea ,  le  Cirsiuin  heterophyllum ,  VAn- 
tJioxanthum  odoratum. 

Les  especes  sous  -  arborescentes  sont  representees 
par  le  Ribes  nigrum,  qui  n'atteint  pas  en  Laponie  la 
liniite  extreme  de  la  vegetation,  niais  s'avance  jusqu'a 
Sodankyla,  et  a  Test  de  la  nier  Blancbe  redescend,  u 
une  latitude  moins  boreale;  le  Calluna^iulgaris,  qu'on 
rencontre  dans  la  partie  inferieure  du  cercle  de  Kola, 
et  qui  disparait  vers  I'Oural;  le  Ledum  paluslre,  qui 
d^passe  en  Laponie  le  70"  lalit.,  et,  a  Test  de  la  mer 
Blanche,  s'avance  jusqu'a  la  Rambalnitza;  le  Juniperus 
communis,  var.,  nana,  qui  se  rencontre  dans  toute  la 
presqu'ile  de  Kola,  s'offrc  a  I'ile  Kalgouef,  et  remoiilc 
sur  les  bords  du  Jenissei  jusqu'a  200  metres  au-dessous 
de  Touroukhansk. 

La  zone  du  bouleau  nain  est  en  general  assez  basse  : 


(  279  ) 

c'est  une  plaine  qui  s'eUve  seulemcnt,  a  Test,  auX 
aborcis  de  I'Onral  septentrional.  Dans  la  presqu'lle  de 
Kola,  on  rencontre  quelques  mamelons  assez  6leves. 
D'apr^s  Murchison,  le  terrain  jurassique  doinine  dans 
celte  zone,  sauf  a  I'ouest  de  la  Petchora,  oti  apparais- 
sent  le  syst^me  silurien  el  devonien  et  quelques  for- 
mations houilleres  ou  lertiaires.  Mais,  altitude  comme 
composition  g^ognostique  paraissent  exercer  peu  d'in- 
fluence  sur  la  flore  des  divers  cantons  de  cette  zone. 

(Z,a  suite  a  un  prochain  numero.) 


(  2S0  ) 


EUROl'E. 
D£COUVIiRTE   DUN   ANCIEN  ITIMiRAIRE  DE  GadLs  A  RoMR. 

—  On  vient  de  faire,  i\  quelquc  distance  de  Rome,  une 
d^couverle  de  geographie  ancicnne  des  plus  curicuses 
aides  plus  inattenducs.  On  no  connaissait  gu6re  jusqu'a 
present  d'autres*  tables  itindraires  antiques  que  I'itin^- 
raire  d'Antonin ,  la  table  de  Pcutingor,  ritinerairc  de 
Bordeaux  A  Jerusalem,  et  quelques  autres  fragments. 
En  voici  un  nouveau,  partiel  il  est  vrai ,  mais  plus 
aulhcntique  peut-etre  que  tous  les  autres.  C'est  un 
milliaire ,  ou  toules  les  distances  sont  soigneusement 
gravees  sur  des  vases  d'argent,  de  manierc  u  servir  de 
correctif  ou  de  conlrole  aux  cliiflrcs  de  Tilineraire 
d'Antonin.  Voici  le  fait  :  11  exisle  une  source  d'eaux 
min^rales  aux  bains  de  Sicarello,  pres  de  Bracciano 
(I'ancienne  Arcenum),  bourg  de  la  Coniarca,  a  7  lieues 
el  demie  de  Rome;  le  lac  Bracciano  [Sabalinns  lacus] 
en  est  pcu  cloigne.  Cetle  source,  qui  parait  corres- 
pondrc  aux  Jqiice apollinares,  elait  jadis  un  lieu  de  pele- 
rinage  lr6s-frequente  par  les  maladcs  qui  s'y  rendaient 
de  toutes  les  parlies  de  I'empire  remain.  Les  voyageurs 
offraient  a  la  divinile  de  la  source  des  e.v  voto,  c'est-a- 
dire  divers  ouvrages  travaillis,  de  toute  espece.  II  nous 
a  ele  donne,  uit  le  journal  romain  du  niois  dernier  {la 
Civitta  cato/ica) ,  den  retircr  des  bronzes,  des  monnaies 
de  tous  les  temps,  Vces  riicic,  comme  Vces  si^/uttani,  des 
figures  et  des  objets  antiques  en  argent,  elc,  nolam- 
ment  Irois  vases  du  plus  baul  inleret.  Ces  vases  sont  de 
forme  cslindrique  ;  on  y  a  grave  les  noms  de  toules  les 


(  281  ) 

stations  du  chcmin  qui  conduit  de  Cadix  a  Rome,  avec 

le  cliiffre  des  intervalles  qui  les  s^parent.  Independam- 

ment  des  chiiTres  qui  expriment  les  nombres  des  milles 

entre   une  station  et   I'autre,   il  y   a   un   r(isuni6   du 

nombrc  total  des  milles  de  la  route.  Voici  la  disposi- 

lion  de  ces  petits  monuments  itineraires,  que  le  savant 

pero  Marchi,  auleur  de  I'article,  compai'e  a  des  homes 

inilliaireSy  dont  ils  ont  en  effet  la  forme.  Cliaque  vase 

est  orne  en  haul  d'une  cimaise,  el,  en  bas,  d'une  base 

sur  laquelle  est  inscril  le  releve  du  nombre  des  milles. 

Quatre  petites   colonneltes  en  divisent  la  superficie, 

d'ou  il  resulte  quatre  espaces,  sur  lesquels  sonl  grav(§s 

lesnoms  des  mansions  avecleurs  distances.  Le  nombre 

des  mansions  n'est  pas  le  mfime  sur  les  trois  vases  :  sur 

le  premier,  on  en  compte  lO/i;  sur  le  deuxieme,  105; 

sur  le  troisieme,  107.  Le  nombre  total  des  milles  est  de 

18/iO  ctde  18Zi2;  Ic  nombre  moyen  pour  chaque  inler- 

valle  est  done  de  dix-sept  milles  ct  demi  environ.  C'esl 

le  22  Janvier  dernier  que  les  vases  d'argenl  en  question 

onLete  observes,  pour  la  premiere  fois,  a  la  suite  des 

fouillcs  faites  pres  de  la  source  ;  on  les  a  depuis  exposes 

au  college  romain.  Les  peres  du  college  se  proposent 

de  les  publier  soigneusement,  pour  en  faire  jouir  le  plus 

promptement  possible  le  monde  savant,  a  qui  appar- 

lienl,  disent-ils,  celle  pr(5cieuse  decouverle.  lis  cioient 

que  ces  vases  sont  post^x'ieurs  a  I'ilineraire  d'Antonin, 

et  que,  d'ailleurs  ,  ainsi  que  celui-ci  et  I'itincraire  de 

Bordeaux  a  Jerusalem,  ils  ont  une  commune  origine, 

savoir  le  milliaire   dore   d'Augusle.   Nous   donnerons 

suite  aux  remarques  que  cette  dC'couvcrle  doit  nalurel- 

lement  sugg6rer. 

JoMAIiD. 

III.  M.vr.s.  (3.  19 


(  '28-2  ) 


Gnh.CF.  [Hellas).  —  PoruF.ATioN,  i)'apr}:s  i.e  DiciiNiF.n  nE- 

CENSEMENT  DU  GOUVERNEMEKT  CREC,  PLBLII^:  DANS  LA  GA- 
ZETTE OFFICIELLE   (1). 


KOMAIICHIES. 

1.  Attique  et  Beolie.   .   . 

2.  Eubee 

3.  Plilliiolidi' ct  I'lioclde. 
4-  Arnrnanie  el  Elolie  . 
/i-  Ai"(;oliile  el  Coiiiitliie. 
C.  Ailiaie  et  Elide.    .    .   . 

7.  Arcadie 

8.  Messenie 

9.  Laconie 

10.  Cycla<les 


Tola 


Soil,  pour  I'Hellade.  . 

—  le  Peloponese 

—  les  lies  .   .    . 


rOPlLAT. 
88273 

64  8n8 

80  (;()3 

98  o(io 

106  iG?. 

116757 

1 18  40' 

97957 
86899 

137  856 


CIIEFS-LIEUX(2). 

Ail)enes. 

r.halcis. 

Ampliissa. 

Mis^oluTiplii 

Naiiplie. 

Pall  as. 

Tripolitza. 

Kyparissia. 

Spaite. 

Syra. 


AFRIQUE. 

l)i':cotvEnTi-s  dans  i.'Afrique  AtsTriALE.  —  Do  nou- 
velles  cl6coiivortes  ont  el6  faites  dans  rAfrique  nu-ri- 
dionalc  par  MM.  D.  Livingston  ol  Cotton  OsAvell.  Ccs 
voyageiirs  ont  p^n6lre  au  dela  du  lac  N'gami  jiisqu'a 

(I)  Exiiail  dc  la  Gazelle  d'Aiigsboing,  du  li  mors  1852.  —  Nonscspc'ions  iloiinci 
hiciilul,  enpuisant  directemcnt  dans  les  sources  olTicielles,  la  )jopulatiun  des  dillc- 
reDles  provinces  du  royanme  de  Grcce  el  de  ses  priucipales  villcs,  ainsi  que  la  su- 
perOcicdece  roynumc,  qirAdrien  Guibert  livtlin- ,  tlam  son  Dictioiiiiiiire  ge'ogrn- 
phii/iie  et  .itdlislique,  ^  47  015  000  slremmn,  ou  4  761  .'iOO  heclaves, 

ilonl  31  596  000  sliemmn  pour  la  Moree, 
19  498  000        —         pour  la  Livadic, 
6721000        —        pour  les  lies. 

U.   I..   R. 

^i)  Les  noms  des  chefs-lieux  ne  lonl  pn«  indiques  dons  la  Gazette  d'Aiig.tboiirg. 


J 


(  288  ) 

'17°  27'  (le  latitude  snd.  Apr^s  avoir  traverse  le  lit 
clii  Zouga,  les  voyageurs  chemin^rent  droit  au  nord  a 
travers  un  pays  vempli  de  soincos  el  pies  des  rivieres 
Mababe  el  Tcbol)^.  Celle-ci  avail  iine  iargcur  de  hO  a 
50  metres  et  un  courant  rapide.  Sa  profondeur  el  ait 
de  li  a  5  metres.  La  mouclie  dite  Tsetse,  si  dangereuse 
pour  le  belaii,  abondait  dans  ce  pays.  La  riviere  Ta- 
munakle  comn^unique  parfois  avec  ie  Tcliobe,  de 
sorte  que  ,  dans  les  annees  pluvieuses,  des  canots 
peuvent  se  rendre  d'une  de  ces  rivieres  a  I'autre,  etLon 
passe  ainsi  de  la  grande  riviere  Sikola  au  lac  N'gami. 
M,  Livingston  arriva  enfin  au  rcndez-vous  de  Sebi- 
toane,  le  puissant  cbef  du  pays.  Ce  cbef  retourna  avec 
lui  jusqu'a  ses  bagages,  sous  IS"  20'  de  latitude  sud , 
lomba  malade,  et  mourut,  emportant  avec  lui  les  re- 
grets de  tous  les  voyageurs.  Ceux-ci  allerent  ensuile  a 
Secbeke,  sur  la  riviere  Borotse,  laquelle,  u  la  fin  d'une 
saison  Ires-s^clie ,  avail  de  300  a  500  metres  de  large 
el  un  grand  volume  d'eau.  Celte  riviere  vient  d'un 
lieu  6loigne  dans  le  nord,  et  paralt  etre  une  continua- 
tion du  Zainbeze.  Le  pays  est  tr^s-peuple,  et  ses 
babitanls  parlent  differents  dialectes  du  selcbouane 
melanges  avec  d'aulres  idiomes.  En  1850,  pour  la 
premiere  fois,  la  Iraite  des  noirs  alleignit  ce  pays;  car 
des  trafiquants,  partis  de  la  cole  occidenlale,  y  avaient 
ecbange  une  grande  quantile  d'esclaves  contre  des 
produils  de  manufacture  anglaise. 

La  relation  qui  pr6c5de,  et  qui  est  exlraite  des  jour- 
naux  anglais,  donne,  malgre  son  laconisme,  de  nou- 
velles  et  precieuses  notions  sur  une  des  parlies  les 
moins  connues  de  I'Afrique  int^rieure. 

Antoine  d'Abbadie, 


(  28/i  ) 
.%c*<cs  fie  la  ftoele(4^». 

Proces-v«'rl»n"«  «les  seances,  Oiivrnges 
ofTei'lSi,  etc. 

COMPTE   r.ENDU    DLS   RliCETTLS  LT  DES   DEFENSES,   EFFECTUfeES 

RECliTTES. 


DESIGNATION 
iIi'S  clnipili'cs 
de  la  HECETTE. 


NATURE  DES  RECETTES. 


5  I.  PioduU  01  di-  I 
nail  e  des  nice^-  ' 
lious 

\  11.  Pniiluil  cxlr. 
TdfS  ri'cciilioiis.   . 

5  111.  PioUiil  lies 
liulil;c;iUons.   .    . 


1  I  Proits  d'enlrcc  el  de  di- 

I     plome 

9  1  (■  Aniicecoiirantc 

Culis^it 


4i 


U-    <,  .£  ^* 


U      Z    — 

f"  'i  « 

H    =   « 


I' Aniicecoiirantc' 
.  <  Aniiccs  piccrd. 
(^      —       uiilicip. 

ulisat.  une  fois  piiyues.. 

/  dii  Uullclm.  .  .   . 

enlc  !  do  Mrnioii  cs.  ,  . 

(  dc  Cailcs  .   .   .  . 


Arn'ragcs  de  rentes   sin 
IT.lat 


5  IV.  Rcctlles  di- 
vcrscs  .... 


JV.  SiiMeduconi- 
plu  pi  cccdcllt .   . 


IG 


Allocalion  dc  M.  le  iiii- 

nistie  de  I'inslr.  |iiildii[. 
Allocalion  do  M.  le  iiii- 

llistrc  de  la  marine.    .   . 
Allocatiiiii  de  M.  le  nii- 

iiistre  de 
Allocaliiin  de   M.   le  mi 

nistre  dc 

Reccltcs  imineviies  .  .  . 
Divers  


Totaux  des  rccettes. 


Reliqiint    en    caissc    an 
51  decemlire  ISKl).  .  .  . 


Tolaiix  de   la   recette   et 
dii  reliqiiiit  en  caisse, . . 


400  1. 
4  000  . 

r,oo  » 

coo  .) 

iOO  » 

■20  .. 

c:>o  50 

2-280  » 


tiO 


8  480  50 


712  52 


r;oo  V 

58IG  > 
540  .. 

noo  » 

I  G(i2  05 

HI  • 


CG8  50 

2  2S0  II 

B        ■ 
I        l> 


a 
z 


502 


J  002  05 


58 


100 


115  « 

20  .. 


9G23  55 


712  52 


0  195  02  10  512  07 


50  ., 


1  432  05  285 


COMPAR.VISON  : 

Ln  leceltc  presunice  ctail  tie c)  i()3  oa 

La  recclto  effectin'c  osl  dp io342  07 

11  y  a  aiifjiiientalioii  .lo  rtC(;ttR  do.    .   .  1   i^p  o.*) 
iif:sri.TAr  cjtMlnAi.  et  sihaiio  w  3i  hkck.muhf.  iS.Ii 

1/1  riicctle  tiil:ile  tl:iiit  de loS.Js  07 

Et  la  defense  totalc  I'laiil  di; 1002a  70 

II  restP  rn  c.Tiise  .niiilif  joiir 3lQ  37 


(  -285  ) 

rOUn   LA   SOClEl£   DE   CtUGKAPllIE,   PI.MjAM   I.'A.N.NtE   1S51. 


L)  F.  P  E  N  S  E  S. 


DESIGNATION 
dc5  cliapitres 
dc  lu  DEFENSE. 


NATURE  DES  DErENSES. 


S  I.  Persoimel.  .  .  '  2 
\  5 
I 


4 


§  n.  Frais  do  logo- 
menl 


§  III.  Frais  de  bu- 
I  call 


S  IV.  Malciicl  . 


Ag.'iit. 


Trailcmeiit ,  .  . 
Droilsderecelte 
Tiavaux  cxlr.  . 


Loycr 

Coiili ibulions.  .  , 

Clia(ifl"iii;e 

Eclairage 

Service  dcs  i>allc5 


§  V.  ruljlicjlio;is.r'  20  ' 


Df'iioHsn;  divcrscs .  .  ,  . 
Ports  do  lutlix's  et  affraii- 

clri^SL-nirnls 

Inrprcssiuii  d'avis,  ciicu- 

laiie«,  etc 

Eiilrclien  dii  nioJiilicr.   , 

Toi  t  de  livrcs 

cl  joiirnaux . 

Affranchisse  - 

Ijiljliolli.  •'     nirnl  dc  livr. 

j  Aclialdclivr. . 

f     elc 

;  Frais  de  rel, . 


All  icrc  ( iiov.  \ 
cidcc.  18i'J).  ( 

Impress.,  pa-  i 
pit'l',  etc.  ,    .  J 

Purl  el  affraii-  | 
chissenreiits. 

Grav.  de  cart, 
>^Tiragedecart 


^Bulletin. 


)Memoir, 


JVI.  Placcrtieuldc 
capitaux 

§    VII.    De'penses 
gcnerales  .  .  .  . 


'  Impress.,  pa- 
pier  

Port  ct  affiaii- 

ciiissements. 

Giav,  de  carl. 

^Tiragedecart. 


Achat  dc  rent.  si:r  I'Etal. 

Prix  aiiiuiel 

Dcpcnscs  iniprevues,  .  , 


Total  lie  la  depcnsc.  ..     9  192  35 


I  201)  » 

ICO  » 

200  >. 

1000  . 

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I  Olio  . 

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1,j9  00 

130  90 

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1G9  25 

.-.2  5o 

50  B 

80  . 

.     Gi  So 

•        A 

B        B 

I^jO  b 

4  GS8  Go 

lot    111 

4Si  70 

450  90 

lo   )) 

))     » 

B        B 

80  50 

289  70 

21 G  8S 

42  95 

B  » 

7  I 

B  1 

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B  » 

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)>  J) 

>  B 

59  25 

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B   » 

B   « 


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CO  50 


>  > 

»   B 


3  riO 

.1  40 
0  04 


)>   n 

B   1) 

II  « 


48  81  I 
15  50! 


n  r> 
40  > 
I)  » 

10  30 

3  1.^ 

7  o;> 


10  022  70  1018  70 


188  55; 


COMPARAISON  : 


La  de'pense  pre'sumc'e  clait  lie 9  '9'   ^5 

La  clipense  effectiiee  est  de 10022   yo 


II  y  a  au^;men!atiui)  de  dqiense  de   .    .  83o  35 

Pari?,  mars  185J. 

Le  py^sideiil  de  la  seitioii  de  vomptabiliic, 
Dai  on  UK  JiniMOM. 


(  286  ) 
RAPPORT  SLiR  LA  VITRIFICATION 

DES 

COMPTES  DES  RECETTES  ET  DES  DEFENSES 

DE 

LA  SOCitTt  DE  GfiOGRAPHIE 

PEsnANT  l'asnee  I 85 I, 

paESE?iTli 

A  LA  COMMISSION  CENTRALE  (SEANCE  DU  19  MARS), 

PAR 

M.  LE  KAROiS  DE  BRIMOIST, 

President  de  la  section  dc  cumptabiliU'. 


Messieurs  ; 

Organe  de  voire  commission  charg^c  d'cxaminer  les 
comples  des  recettcs  ct  des  dupenses  de  la  Sociele  de 
geographic  pendant  I'annee  1851,  jo  vais  avoir  I'lion- 
ncur  do  vous  soumettre  le  r^siiltat  de  cet  exainon, 

RECETTE. 

La  recelte  presumec  ctait  portce  an  budget  de  1851 
pour  une  sorame  de  9li)3  fr.  02  cent.,  y  compris  le 
reliquat  actif  du  compte  de  1850,  monlant  a  712  fr. 
52  cent.  Elle  s'esl  elevec  a  I0  3/|2  IV.  07  cent.  Diffe- 
rence en  plus,  1  1/|9  fr.  05  cent.  Cet  exc^danl  porlc 
principalement  sur  deux  articles  que  je  vais  examiner 
succcssivcmenl. 

Art.  2.  (Colisations.)  Cet  article  prescnte  une  aug- 
mentation dc  392  fr. ,  provonanl  en  partie  de  la  renlree 
dc  colisations  arrierees. 

Art.  6.  Get  article,  relalif  a  la  vente  des  Bulletins, 
prcsenle  la  difference  la  plus  notable.  Evalue  a  600  fr. 


{  287  ) 

dans  le  butlgel,  il  est  monte  a  1602  fr.  0.)  cent.,  c'est- 
a-dli'e  a  1  002  fr,  05  cent,  en  plus,  ce  qui  provient  en 
presque  totalite  d'un  certain  nombre  d'exeuiplaires 
de  la  nouvelle  serie  de  noire  Bulletin  pris  par  le  mi- 
nistere  de  rinslruction  publique  a  titre  d'encourage' 
ment. 

Les  aulres  articles  de  la  recette  ont  subi  quelques 
diminutions,  notaminent  celui  qui  concerne  la  vente 
desnum^ros,  cartes,  etc.  Coinme  je  compte,  dans  le 
r6sum6g6n6ral,  faire  a  cetegard  quelques  observations, 
je  ne  m'etends  pas  davantage  en  ce  moment  sur  ce 
sujet. 

En  definitive. 

La  recette  effectuee  est  de io342  07 

La  recette  presiimc'e  etait  de 9 '93  02 

DifFerence  en  plus i  i49  o5 

D^PENSE. 

Les  trois  premiers  articles,  relalifs  au  personnel, 
n'ont  point  eprouve  de  modifications. 

Divers  articles  compris  dans  les  frais  de  loge- 
inent  ont  fourni  quelques  diminutions  sans  impor- 
tance. 

Quant  a  ceux  compris  dans  le  paragraphe  3,  inti- 
tule Frais  de  bureau,  ils  ont  pour  la  plupart  depasst^  les 
previsions  du  budget,  nolainmcnt  I'arl.  9  :  Depenses 
di\'erses,  et  I'art.  10  :  Ports  de  letlres,  pnquets  et  a/fran- 
chisseme/its;  et  a  celte  occasion  je  I'erai  remarquer  que 
la  majeure  parlic  de  cello  derni^ro  depensc  a  etc 
supportt^e  geni^reusenient  par  M.  de  la  Roquetle,  secre- 
taire general  dc  la  Commission  centrale.  Sans  cela,  la 


(  28S  ) 
soiumc  voice  pour  1851  caicl6  bion  ceiiaiiiemcDt  cjiiin- 
liiploe,  comnie  on  jionrr.'i  Ic  voir  par  unc  nolo  inser(!'o 
(Jans  Je  dossier  des  comptes  de  I'exercicc  1851. 

Les  previsions  pour  I'imprcssion  du  Biillelin  onl  cte 
d^passd'es  de  688  fr.  65  cenl.,  et  celles  pour  la  gravure 
et  le  lirage  des  cartes,  de  150  fr,  90  cent. 

Get  excedant  provient,  d'une  part,  dit  dt^veloppe- 
ment  qu'a  recu  Ja  nouvellc  serie  du  BttHetin  de  la 
Sociele,  cl  de  la  resolution  (jui  a  die  prise  par  la  Com- 
mission cenlralc  d'enricliir  le  plus  possible  nos  publi- 
cations d'une  serie  de  carles  nouvelles  ou  peu  connues, 
dans  I'inleret  des  voyageurs,  des  comnierganls ,  et 
enfin  de  tous  ccux  qui  jircnncnlinlerct  aux  progres  des 
sciences  geograjihiqucs. 

Dne  seule  cotisation  tie  300  IV.  a  cl(i  verice  cclle 
annee  par  un  membie.  Gctte  somnic  a  ele  placee  en 
rentes  sur  I'Elat,  el  a  augnienle  de  15  fr.  Ic  cliillVe  des 
rentes  que  possede  la  Socidle  de  geographic,  et  qui  est 
acluellement  de  670  fr. 

Quant  aux  autrcs  articles,  les  augnienlalions  ou  di- 
minulions  sont  si  minimcs,  qu'il  csl  inutile  de  s'y 
arreler. 

En  resultal. 

La  ticpense  cft'ectuee  a  ele  do 10022   70 

La  depense  presiimce  ctait  de g  lya  35 

Excedant 83o  35 

IIA  LANCE  ; 

La  recetle  lotdic  i)ijur  i85i  a  ('ti!  de ii)34'->-  07 

Ya  la  depense,  de 10022   70 

Coiisei|iieiiimtiii  d  leslr  eii  caissc  <i  icpoi  Icr  au 

budget  de  l852 3i;)   ■^7 


(  ?89  ) 

Tels  sont,  messieurs,  los  rcsullals  de  la  vc^rification 
du  complc  du  Iresorier.  Si  Ics  depenses  ont  el6  com- 
jjarativcment  elevecs ,  Jos  ameliorations  ohtenues  ont 
largeinent  compense  ce  surcrolt  de  charges.  Pormeltez- 
jmoi  maintenant ,  puisque  vous  m'avez  fait  I'lionneur 
de  me  nommer  president  de  la  section  de  comptabi- 
lite,  d'accomplir  ma  tache  enlierement. 

J'ai  pense  qu'il  etait  dc  mon  devoir  de  vous  rendre 
un  comple  exact  des  ressources  actuelles  de  la  Societe, 
et  pour  vous  meltrc  a  meme  de  bien  fairc  ressorlir  sa 
vtlsritable  position  fmanci^re,  je  veux  la  comparer  a 
celle  des  annees  qui  ont  suivi  sa  fondation ,  et  exami- 
ner a  I'aide  des  ces  rapprochements  I'etat  oil  elle  se 
Irouve  acluellement. 

Le  tableau  ci- contra  (1)  des  recettes  et  des  de- 
penses de  1851,  etabli  sur  les  comples  du  Iresorier, 
compare  aux  budgets  des  ann6es  pr«^c6dentes,  sera  la 
preuve  la  plus  convaincante  qu'il  y  a  beaucoup  a  faire 
pour  rendre  a  la  Societe  rimportance  qu'elle  avait 
dans  le  passe. 

(i)  Cc  tableau  a  tile  donnc  en  i85o  par  M.  le  sccie'laire  general  de 
la  Commission  centiale;  je  i'ai  complete  jusqu'cn  i85i. 


(  290  ) 


RESUME   DES   COMPTES   DES   RECETTES   ET   DES   DEPENSES    DEPUIS 
L'ORICINE   DE   la    SOCIl^T^    DE    G^OGRAPIIIE   JUSQU'A    1851. 


En  examinanten  efl'el  les  chifTrcs  de  ce  tableau,  el  en 
comporant  ks  ann^cs  qui  oDt  suivi  la  fondalion  de  la 
Societe,  el  notanimonl  de  1S22  a  1830,  avec  les  an- 
uees  posloricures,  on  voit  qu'il  y  a  unc  diiniaulion  de 
recetle  sensible,  souvenl  de  plus  de  luoili^. 


S2 

RESTE 

1 

■u 

BECETTES. 

DfPENSES. 

ea 

OBSERVATIONS. 

s 

cAisse 

i8a2 

10740 

II 

3  847  53 

6892   47 

5000  fr.  Ju  lestanl  en  cui«sc  onl 
ele  places  cu  lenlcs  5  p.  100  sur 
I'Elat. 

\ 

1823 

17  362 

47 

6044  17 

II  3 1 8  3o 

iiUOUfr.             Jo. 

1824 

16  23o 

3o 

5549  90 

10680  40 

7  OOO  fr.              ilo. 

l8:!5 

24  107 

40 

14417  21 

9^9"   '9 

6  000  IV.              do. 

1826 

1 6  652 

09 

i5527  19 

I  124  92 

11  y  avail  douc,  en  18-26, 23000  f. 

182- 

16971 

92 

16  168  69 

8o3  23 

places  cu  rentes  siii-  I'Elat. 

1828 

.7m5 

33 

16868  o5 

247  28 

1829 

14702 

53 

18795  75 

906  78 

F.ii   1829,   uu   cncoiiiagenienl  de 

i83o 
i83i 

1 5  900 
i3  )5o 

21 

81 

.4395  45 
12  955  80 

I  5o4  76 
195  01 

8  523  fr.  ilonne'  a  M.  Caillie'  a 
rcJiiil  le  funds  de  'iS  000  fr.  o 
14  475  fr. 

i832 

10618 

3i 

10248  o3 

070  28 

Capilal    reduil    do    noiivcau,    en 

1 833 

9^11 

78 

8  348  65 

I  329  i3 

1852,  i  13OO0  fr. 

1834 

12  198 

78 

10  761    I) 

I  437  78 

Lc  due  dOrlcaiis  donne  2  000  f  r . 

1 

i835 

12  63 1 

73 

10643  77 

I  987  96 

achat  de  100  fr.  .k-  rente  5  p.  lUO 

f 

i836 

ID  126 

42 

9908  5i 

"163  61 

ayaiil  covilo  2  120  f c .  60  c. 

Le  lapilal  place  est  douc,  en 
1834,  de  15  000  fr. 

183; 

10  01 1 

61 

1 1  9i5  24 

Exccd    de  dcp. 

Pour  couvrir  le  delicit  de  1  fl03  fr. 

i838 

8755 
II  286 

32 

8729  42 

25  90 

63  c.ona  vendu  100  f.  de  u-nle. 

i83q 

20 

10  353  95 

932    25 

qui  out  prodiiil  2  182  fr.  25  c 
R.liqiial,  278  fr.  62  c.  Restc . 
600  fr.  de  rente. 

1840 

1 1  3oo 

25 

10  694  61 

6o5  64 

.84. 

10  725 

39 

9  23 1  42 

'  493  97 

1842 

10612 

57 

8492  87 

2  1 19  70 

1843 

1 2  659 

75 

10  524  65 

2  i35   10 

I1844 

1 2  29.5 

» 

i3  235  4o 

59  60 

1845 

8628 

60 

8495  85 

132  75 

i84fi 

9198 

20 

8  857  ^0 

340  qo 

t 

■847 

10  107 

70 

9978  89 

1  o38   81 

^ 

1848 

6796 

81 

6590   i5 

206  ()6 

1 

.849 

6  468 

5i 

6431   06 

37  45 

1 

i85o 

9872 

04 

9 '59  52 

712   52 

1 

i85i 

10  342 

07 

10022  70 

319  37 

1 

(  291  ) 

Ceci  s'explique  par  la  rlisparition  d'mie  grande 
l)arlie  du  personnel  de  la  Society,  qui  comptait  dans 
son  sein  un  grand  nombre  de  notabilites  scienlifiques 
ct  de  noms  illuslres,  d^sireux  a  celte  epoque  de  pro- 
teger  celte  Society  naissanle  ,  et  de  developper  en 
France  I'etude  des  connaisances  geographiques.  La 
faible  cotisation  que  chaque  niembre  avait  a  verser 
annuellemenl  suffisait  pour  jModuire  un  tonds  capable 
de  payer  les  depenses  occasionnees  par  la  publication 
du  BiiUetln  et  des  Menioires  de  la  Soci^te,  coinine 
aussi  de  distribuer  des  encouragements  aux  voya- 
geurs,  ce  qui  n'a  pu  se  faire  depuis  1834,  comme  on 
le  voit  par  le  tableau  imprime  en  tete  du  Bulletin  de 
I'annee  1851,  etc. 

Pendant  les  dix  premieres  annees,  le  nombre  des 
membres  s'elevait  en  moyenne  a  250.  Depuis  celte 
epocfue,  il  a  6le  toujours  en  dirainuant.  Ainsi ,  de 
1830  a  18A4,  il  atteint  a  p(.ine  le  chiffre  de  180,  et,  je 
dois  le  dire  en  passant,  lieaucoup  deja  ne  payaient 
plus  exaclement  leurs  colisalions.  Do  18/14  a  1850,  on 
comptait  environ  200  meiubres. 

Cbarge  alafin  de  1850deprd!siderlasecliondecomp- 
tabililede  laSociele,  j'aidii,  en  ^lablissant  les  couiptes 
sur  des  bases  nouvelles,  afin  de  le  mettre  en  rapport  avec 
le  budget  deja  modifie  anl^rieuremenl  par  le  secretaire 
general  de  la  Commission  centrale,  verifier  I'exaclitude 
de  la  lisle  officielle  des  membres  composant  la  Societe 
de  g^ograpbic.  Je  n'ai  point  larde  a  m'apercevoir  que 
les  cblllVes  indiques  etaient  exageres.  J'ai  voulu,  avant 
d'y  apporter  quelques  modilicalions,  I'aire  uu  dernier 
appel  ei  de  Irop  nombreux  retardataires;  plusieurs  ont 
acquilte  leur  arri^re,  d'autres  onl  rel'us^  de  satisfaire 


(  -292  ) 

aiix  cngogcmenls  (|iic  la  Sociili  impose;  ils  donenl 
done  elre  consklercs  coiudio  iiemissionna'ues.  11  rc- 
sulte  de  cc  Iravail  que:  la  Sociele  iic  complo  |,lus  dans 
son  sein,  au  1"  janvicr  1852,  que  162  nienibros,  donl 
134  payaat  exacleaienl  lour  colisalion  ,  ce  qui  rcpri- 
senlc  une  somnie  do  /lOOO  h\  cn\iron,  destines  aux  dis- 
penses de  son  Bulletin. 

En  rosume,  nous  voyons  par  le  labloau  qui  precede 
que  les  recetles  elTecluecs,  do  1 822  a  1830, 

S'elev.iieni  anniu-llemeiil  cu  inoyeniic  a 18000  fr. 

Et  nu'cn   l85l   elles  n'oiit  atlciiit  que  \c  cliiflre  ile  .      loooo 
Environ,  donl  il  f.iiit  deiluire  uric  somme  dc.   ...        i  280 

donnee  exceplionnellenicnt  par  M,  le  niinlslre  de  I'in- 
slruclion  publique,  ce  qui  olFre  en  realile  une  dilFe- 
rence  norniale  annuellc  d'environ  lOOOOfr,  sur  les  re- 
cetles produilcs  par  ie  verseiuent  des  colisalions. 

De  memo,  si  je  compare  les  vcntes  du  UullcUa  cl  des 
Memoires  eft'ecluies  dans  los  premieres  annees  d'cxis- 
tence  de  la  Societe,  je  trouve  une  notable  difference. 
II  y  a\ait  annuellcmcnl  un  produit  variant  entre  3  cl 
h  000  fr.,  landls  (jue  de  nos  jours  la  venlc  de  nos 
recucils  alleint  a  peine  en  moyenne  la  somme  dc 
1  000  a  1  200  fr. ,  encore  faul-il  comprendre  dans 
cellc  somme,  el  j'cn  ai  parle  dcSja  plus  haul,  le  pro- 
duit d'un  certain  nombre  d'cxcmplaircs  que  le  mi- 
nistrc  de  rinstiuction  publique  a  fail  prendre  cctte 
annee  a  litre  de  subvention. 

Je  saisirai  avec  empressemonl  cello  occasion  dc  rc- 
mcrcier  ce  ininistre,  au  nom  de  la  Commission  cen- 
Irale ,  de  cet  encouragement  qu'il  a  bien  voulu  ac- 
cordor  a  la  Societe  de  gdograpliie,  de  continuer  pour 


(  293  ) 

I'ann^e  1852.  II  est  a  regreller  que  les  autres  ministres 
ses  collogues  n'aient  pas  agi  de  meme  clans  I'int^ret 
de  notre  Soclete ;  nous  aurions  pu  ainsl ,  en  augmen- 
tant  nos  recettes  d'une  maniere  sensible,  joindre  k 
notre  Bulletin  un  plus  grand  nombre  de  cartes  geogra- 
phiques,  de  la  plus  baute  utilile  pour  noire  commerce. 
Je  termine  cet  expose  en  faisant  un  appel  serieux  a 
la  bienveillance  du  gouvernement.  Je  ne  doute  pas  que 
le  prince  eclaire  entre  les  mains  duquel  se  trouvent 
actuellement  les  deslinees  de  la  France  ,  et  que  nous 
avons  I'bonneur  de  compter  parmi  les  membres  de  la 
Soci^le  de  geograpbie  ,  nc  cberche  par  tous  les  moyens 
possibles  a  rendre  son  ancienne  splendeur  a  notre 
Compagnie,  quand  il  aura  connu  sa  position  finan- 
ciere  actuoUe  et  les  efforts  de  quelques  membres,  amis 
fiddles  et  desinleresses  de  la  science  geograpbique.  II 
apprd'cicra,  j'en  suis  certain  d'avance,  les  services  im- 
menses  qu'elle  peut  rendre,  et  il  voudra  en  faire  une 
rivale  serieuse  des  Societes  geograpbiques  d'Angleterre 
et  de  Russie ,  fillcs  cadcltos  de  la  Societe  de  Paris,  si 
puissantcs  par  leur  organisation  ct  par  les  encourage- 
ments p^cuniaires  qu'ellesrccoiventdeleursgouverne- 
ments  et  de  quelques  particuliers  (1). 

(i)  Les larges  souscriptions  de?  itiembies  iKs  tleiix  jiai leiiicnts  et  des 
riciies  [jioprietnires  et  coiiitnercaiils,  ties  officieis  (jeneranx  et  autres, 
soutiennent  surtout  la  premiere  de  ccs  societes,  a  laquelle  sir  Georges 
Slaunton,paiexempIe,souscrit  pour  plus  de  Sooofr.  pnran.EnRussie, 
le  gouvernement impe'ria!  a  mis  on  i85n  al,i  disposition  de  la  Socie'te 
(jcograpliiqne  de  Saint  Petersliourf;  nne  somniede  3oooo  loubles  pour 
aider  a  mener  a  bonne  fin  une  cntreprise  qu'elle  avait  commencce,  et 
en  une  seule  anne'e  deux  mendjres  de  cette  Sociele,  MM.  Golonbkoff 
et  le  comte  Tschnpsky,  ont  duniu'-,  I'un  200000,  I'ande  100 000  fr. 


(  29/i  ) 

Qu'il  me  soil  permis  en  ce  niomcnl  d'indiqucr  tout 
d'abord  un  moyen  facile  d'augmenler  la  fortune  de  la 
Sociclo.  II  consisterait  a  lui  acheter  les  coliecUons 
noiubreuses  de  Bulletins  (i)  el  de  Menioires  qui  exis- 
tent en  depot  dans  sa  bibliollieque ,  et  d'en  dolor  les 
elablissements  publics  do  nos  villes  niarilinaes,  ou  une 
jeunesse  studieuse  et  les  armalours,  Irop  peu  verses 
gendiraleinenl  dans  les  sciences  geograpbiqucs,  vien- 
draienl  puiser  des  venseignenients  precieux  sur  la 
civilisation,  les  moeurs  el  les  coutumes  des  nations  oil 
les  porle  leur  commerce  maiilinie,  comme  aussi  sur 
la  nature  des  raarchandises  qu'ils  pourraient  y  trans- 
porter. II  existe  de  ces  scries  d'etablissements  a  Lon- 
dres,  aSaint-Petersbourg,  et  generalemcnt  danstoules 
les  villes  maritimes  importanles  que  le  genie  do  ces 
nations  a  su  creer  et  faire  prosperer.  Pourquoi  la 
France  ne  marcbcrail-clle  pas  sur  leurs  traces? 

Outre  le  profit  immedial  que  la  Societe  retircrail 
de  cetle  acquisition  faile  par  un  gouvernement  eclaire,  '\ 
et  qui  serait  peu  couteuse  en  definitive,  ces  collections 
interessanles,  repandues  dans  les  villes  maritimes, 
auraient  un  avantage  precieux,  celui  de  donner  une 
plus  grande  notoriete  a  la  Societe  de  geograpbie ,  et 
d'exciter  ainsi  cbez  un  grand  nombre  de  personncs 
le  d6sir  d'en  faire  partie.  Le  Bulletin  deviendrait  alors 
un  nouvel  objel  de  recettes;  car  il  est  a  croire  qu'au 
prix  modique  fixe  pour  cliaque  volume,  beaucoup 
de  personnes  voudraienl  en  avoir  la  collection  com- 
plete. 

(i)  II  se  iroiive  en  magasin  environ  5oooo  nume'ros  dn  Bulletin, 
formanl  pres  de  3ooo  volume*  eomplets. 


(  295  ) 

Je  lerniine  ,  mossieurs,  en  vous  prianl  de  bien  votis 
penetrer  tie  I'^lat  acluel  de  notre  Socielo.  Ainsi  que 
vous  avez  pu  en  juger  par  ce  coniple  rendu  ,  elle  est 
loin  d'alteindre  le  degre  de  prosperite  des  premieres 
annees  de  sa  fondalion  ;   niais,   cependant,   liatons- 
nous  de  constater  que  le  tableau  des  recettes  et  des 
d^penses  depuis  son  origine  offre ,  pour  les  dernieres 
ann(^es,  une  leg^re  amelioration;  aussi  pouvons-nous 
esp^rer  de  voir  celte  amelioration  faire  des  progr^s  et 
d'fiti'e  en  etat  de  tenir  les  lecteurs  de  notre  journal  au 
courant  de  tous  les  progr^s  de  la  science  a  laquelle 
nous  nous  sommes  consacres,  et  de  publier  de  jour  en 
jour  un  plus  grand  nombre  de  cartes ,  si  le  gouverne- 
nienl  nous  accorde  les  encouragements  que  nous  lui 
demandons,  s'il  dispose  en  noire  faveur,  par  exemple, 
pour  le  local  de  la  Soci^te,  do  I'un  des  nombreux  bail- 
ments qui  sonl  en  ce  moment  sans  emploi,  et  si  cbacun 
de  nos  collogues  i-edouble  d'efforls  pour  assurer  I'avan- 
cement  de  la  science  geograpbique  et  le  d^veloppemenl 
progressif  du  commerce  maritime  de  la  France. 

Le  president  de  la  section  de  comptabilite. 

Baron  dk  Brimont. 


(  296  ) 


BUDGET   DES   RECETTES   ET   DES   DfiPENSES    A   FAIRE   PAR 


RECETTES. 


DCSIC  NATION 

des  chnpilres 
tie  la  RECETTE. 


I.  PruJiiil oidtnaire 
lies  iL'cepUous.  .  . 


NATUBE  DES  RECETTES 


Aiilli'u  coul&nlc. 
2  I  Colisalioiis.  ^  Anne'cs  pirced.  . 
"  '       —       ■■ulicip. 


II.    P 
des  rc'c 


I        I 

utiuil    extr,  i  ^  )  Dlplonic; 

'eptioiis.  ,  .  i  fj  )  Colisalious  unc  fuis  payees,  ,  , 

'    P.ud.nldespu-f  -     v^,„ 

dicutious 1  ^1 


de  nnlleliiis.  , 
de  Mt'imiires  . 
de  Cartes.   .  • 


IV.  RecrllBi  d.vor 
iei 


Arrcragcs  dc  iciilcs  sur  I'Elal. 


/10\  Allocation  de  M.  le  niiriistie  de 
I      I'in^truclion  pii|jli<|ue  .   .   .   , 

11  i  Allucaliun  de  M.  le  niinistie  de 
f       la  niaiitie 

12  ^ Alloialioii    de   M.    le   ministic 
ds 

15  ^Allocation    ilc  M.    le    niinistje 
(le 


\    14     Kecctles  ini|)tevues. 
\  \'S     Diveis 


5  V   Suldeducompte 
precedent 


10 


Totaii 


4  0P0  9 


iOO  « 
500  > 

GOO  » 

300  I 

20  . 

C30  !.0 


2  280  . 

SO  » 

»      I) 


5  816  » 

K40  .. 

56  u 

500  » 
500  > 

1  602  05 
87  » 


G68  ^0 

1  280  . 
»     » 


»     » 
■     > 


u  u  i: 

S         B. 


8  ^80  SO  9  629  SS 


Relicjiiat  eii  caissc  au  51  decen.ljre  IISI 


Total  de  la  rocetle  prevue  pour  I8.'>2. 


4  000  > 

SOO  > 

56  * 

400  I 

500  1 

900  « 

100  » 

50  . 

676  . 


600  » 
840  » 


8  4S2 


519  57 


8  771  57| 


(  297  ) 


LA   S0CI£TE  DE   GfiOGRAPHIE   PENDANT   L'aNN£e   1852. 


DEFENSES. 


DESIGNATION 

(les  chiipitres 
de  la  DEFENSE. 


§  I.  Peraaniicl. 


5  II.  Frais  de  loge-J     g 
ment )     -j 

8 
I 

S  III.  Frais  de  bu-  (    9 

reau i  10 

\  11 


'S  IV.  Male'riel. 


NATUBE  DES  DEFENSES. 


Agent, 


Trailoment 

Travails  extiaordiii. 
Droits  de  rccelle,  .  . 


Loyer 

Conlriliulions.  .  , 

Chuiiffiige 

Eclaiiage 

Service  des  salles. 


5  V,  Publications. 


S  VI.  Placement  de 
capiUiix 

$  VII.    Dcpenses  ge- 
nerates   


De'penses  Jiverses 

Ports  de  lellres  ct  iiirr;uiibiss.  . 
Impress.  d"avls,  circulaires,  etc. 

Entretien  du  mobilier 

/  Port  de  livr. ,  ionrn.. 
)  AttVancbis5.de  livr.. 
i  Acbat  de  livr.,  etc. . 
VFruis  de  reliure.  .  . 


(  Impress.,  pap.,  etc. 
J  Gniviire  de  curies,  . 
\  Tirage  de  ciirtes.  .  , 
(.Port  el  affrauchiss.  . 


fBiblioth. 


,  BiiUetiu. 


Memoir. 


25     Achat  de  rentes  sur  I'Elat. 


["Impress.,  pap.,  etc.. 
)  Gruvirre  de  cartes.  . 
\  Tiiuge  (Jc  cartes.  .  , 
[,Porl  et  all'ranchiss. . 


Prix  annuel 

Depenses  imprevucs  . 


Totaux. 


1  200  » 
200  >. 
160  » 

1  000  n 
112  25 
IGO  » 
140  D 
100  » 

no  j> 
20  » 
50  » 

120  » 
40  » 


l.-iO  » 

4  0O0  » 
500  » 
500  .. 
2U0  » 


40  » 
20  « 


500  B 


220 
50 


a   0)  _; 

w  "2  JO 
z  2  1° 


9 192  25 


1  200 
200 
1G7 

1  000 
109  05 
159  60 
130  96 

100  » 

169  2,'. 
32  35 
39 

80 
6'.  83 


150  >i 

i 688  63 
484  70 
450  90 

151  19 

15  » 

»     fi 
80  50 
»      u 

289  70 

916  83 
42  95 


10  022  70 


z  J- 

u 


I  200 
200 
167 

1000 
110 
160 
150 
100 

U>0 

100 

40 

200 
60 


150  > 

2  600  » 
400  » 
400  » 
150  » 


300 

1  000 
60 


8  667 


La  recette  presumee  elant  de 8771    87 

El  la  depense  de 8  667   » 


La  difference  serait  de loi  3- 


lU.    MAIiS.     7. 


20 


(  -298  ) 
SOCIlfcr^  DE  GI<:OGRAPHIE. 


MOUVEMENT    DES   COTISATIO.NS    l?fE    FOIS    PAYEES 
ET    DES   PLACEMENTS    DE    CAPITAUX. 


Recette  aiUerieuremeni  a  i85i, 
—       pendant  I'annee  i85i. 


Total  des  capitaus  encaisse's 

PLACEMENT  EK    RENTES. 

G6i  fr.  de  rentes  5  p.  lOO  acquises  anieiieu 

rement  a  i85i 

I  5  fr.  de  rentes  5  p.   lOO  acqviises  pendant 
lannee  i85i  


G76  fr.  de  rentes. 

Exeedant  de  la  recette  sur  la  depense  . 


NOMBRF. 

de 
COTISATIONS 


14  ai)0    >' 
3o()     • 


1 4  5oo  » 


14  160   1.5) 

■4  449  85 

70; 


.89 


5o  1 5 


MOUVEMENT  DES   ENTRIES   ET   DES   SORTIES   DES  MEMBRES. 

An  31  d^cembie  1850,  les  meinbres  niainlenus  stir  les  listes  offi- 
cicllcs  comme  dcvaiit  contribcer  aux  dL^penses  de  1851  s'61evaienl 
ail  nonibre  de  142,  dont 

i34  membres  payant  cotisation  annuelle '341    ./ 

8  membres  a  vie 8  ) 

1^5  receptions  du  i"  Janvier  au  3l  de'cembre  l85l  sent  mon 

tees  a  

En  plus,  un  nouveau  membre  a  vie 


A  deduire  pour  cause  de  deces,  demissions  et  radiations.  .   .   . 

]je  nombre  des  membres  inscrits  sur  les  registres,  au  3i  Jan- 
vier iSSa,  est  de 

Kn  plus,  3o  correspondants  elrangers 


1 54 

23 


l32 

3o 


iGs 


Le  president  de  la  section  de  comptabilil^, 
BaronDE  Brimost. 


(  299  ) 


PniSIDENCli    Dli    M.    JOMARD,    V1CE-Pr£sIDEIST, 

EN    l'abSENCE    DU    PRESIDENT. 


Proces-'verhal  de  la  seance  dii  5  Diars  1852. 

Le  proems -verbal  de  la  derniere  seance  est  lu  et 
adopts. 

M.  le  ministre  de  la  guerre  annonce,  par  une  lettre 
en  date  du  28  fevrier,  adress^e  au  president  de  la 
Commission  centrale,  I'envoi  d'un  exemplaire  du  ta- 
bleau de  la  situation  des  elablissements  frangais  en 
Alg^rie  pendant  les  annt^es  18Zi6  a  18/19. 

M.  le  secretaire-adjoint  lit  la  liste  des  ouvrages  of- 
fer ts. 

M.  Hecquard  met  sous  les  yeux  de  I'assembl^e  la 
carte  de  son  voyage  dans  la  Sen^gambie;  il  pr^sento 
quelques  considerations  relativement  a  certaines  er- 
reurs  de  M.  Mollien,  relatives  aux  sources  du  Sene- 
gal ,  qu'il  a  relev6es,  et  il  donne,  de  plus,  des  expli- 
cations sur  les  points  de  contact  de  sa  route  avec  celle 
de  Caillie.  On  demande  qu'il  soit  mis  un  tirage  de  cette 
carte  a  la  disposition  de  la  Societe  pour  le  Bulletin. 
M.  Hecquard  est  pri^  d'y  joindre  son  itin^raire, 

M.  Jomard,  vice-president,  annonce  que  la  commis- 
sion du  concours  au  prix  annuel  s'est  r^unie,  et  qu'elle 
fei'a  son  rapport  a  la  procliaine  seance. 

Le  m6me  membre  annonce  que ,  d'accord  avec  le 
president  de  la  Commission  centrale,  M.  I'amiral  Ma- 
tUieu,  president  de  la  Societe,  a  fixe  au  2  avril  pro- 
chain  la  premiere  seance  gen^rale  annuelle. 

M.  Cortamberl   prcsenlc   un  tableau  general  indi- 


(  300  ) 

quant  la  classification  raisonni^e  de  toules  les  sciences 
liumaines;  il  se  propose  surlout  d'assigner  a  la  g6o- 
graphic  la  place  qui  lui  convient.  On  devrait,  selon  lui, 
la  placer  dans  la  classe  des  sciences  pliysico-morales. 
Lcs  developpements  que  donne  I'lionorable  meiubre  a 
I'appui  de  son  travail  sont  6coules  avec  interel.  Plu- 
sieurs  membres  (MM.  Jomard,  Maury,  Daussy  et  Ant. 
d'Abbadie)  font  quelques  obsei'vations  a  ce  sujet. 

M.  Ant.  d'AI)badie,  a  propos  d'un  travail  qu'il  prti- 
pare,  demande  les  avis  des  membres  de  la  Societe  sur 
cetle  question  :  A  cjuel  signe  reconnait-on,  en  remon- 
tant une  rlvi6rc,  quelle  est  sa  continuation  ,  on  quel 
est  son  conlluent?  MM.  Jomard,  Cortambert,  Daussy, 
Maury,  Isambert  et  V.-A.  Malte-Brun  prcnnent  part  a 
la  discussion  qui  s'engage  a  ce  sujol.  II  en  r6sulte  qu'il 
n'y  a  pas  encore  de  regie  definitive,  etque  Ton  doit  tenir 
compte  du  volume  des  eaux,  de  leur  couleur,  de  la  ra- 
pidity el  de  la  longueur  du  cours,  de  la  cdtiliguration 
g(^ognoslique  clu  pays,  du  nom  donn6  par  les  naturcls, 
etc.,  etc.,  etc. 

Sur  la  demande  de  M.  le  secretaire  gd-n^ral,  la  Com- 
mission centrale  decide  que  Ton  enverra,  k  V Institution 
Smithsonienne,  de  Philadelpliie  ,  la  quatri<^mc  s^rie  de 
la  collection  du  Bulletin  de  la  Soci^td. 

Proces- verbal  de  la  seance  du  19  mars  1852. 

Le  proc6s -verbal  de  la  dernit;rc  seance  est  lu  el 
adopt6. 

Le  secretaire  de  la  Societe  philosophique  amtiricaine 
pour  la  propagation  des  connaissailces  utiles  dcrit  do 
Pliiladelphie,  15  levricr  1852,  |)our  accuser  rdceplion 


(  301  ) 

des  tomes  XII,  XIII  el  XIV  du  Bitlletin  de  la  Socit^le  do 
g^ograpliie,  3°  serio. 

M.  Ant.  d'Abbadie  ecrit,  sous  la  dale  da  19  mars, 
pour  proposer  I'admission  au  nombre  des  membres 
de  la  Soci^t^  de  M"""  Alexandre  Kerr,  dame  anglaise, 
auteur  de  plusieurs  ouvrages,  et  connue  par  son  amour 
pour  les  sciences  et  les  belles-lellres.  (  Voir  a  la  fin  du 
Proces-'verbal.) 

M.  le  prince  Emmanuel  Galitzin  fait  hommage  a  la 
Society  d'un  voyage  en  Finlande,  qu'il  vient  de  publier 
a  Paris. 

M.  Hecquard  adrcsse  au  president  de  la  Commission 
cenlrale  (mars)  quelques  informations  sur  son  voyage 
en  Afrique  ;  elles  seront  joinles  a  celles  que  eel  officier 
a  d^ja  transmises  sur  le  meme  sujet. 

Le  secretaire  general  propose  d'otlrir  a  la  Smithso- 
nian Institution,  de  Philadelphie  ,  a  laquello  la  Societc 
de  g^ographie  doit  un  si  grand  nombre  de  precieux 
ouvrages,  la  troisi^me  s^rie  du  Bulletin.  Deja  on  a  de- 
cide dans  une  precddente  stance  que  la  quatri^me 
serie  serail  envoy^e  a  la  meme  Institution.  Cette  pro- 
position est  adoptee. 

Le  secretaire  g(in^ral  donne  lecture  de  la  lisle  des 
ouvrages  offerls. 

M.  Jomard ,  vice-pr6sident  de  la  Commission  cen- 
trale,  presenle,  comme  rapporteur  de  la  commission 
sur  le  concours  au  prix  annuel  pour  la  d^couverte  la 
plus  imporlante  en  g^ograpbie,  un  resum^  de  cc  raj)- 
port,  qui  doit  etre  lu  a  I'assemblee  generale  ,  dont  la 
tenue  est  fixee  au  vendredi  2  aviil  (1). 

(l)  La  coinniissioii  tin  jui\  ;ininu'l  f>t  coiiipose'e  de  MM.  Djussy, 
•I'Avczac,  Giiij'jiiiaiU,  Aiit.  d'AliLadic  cl  Juiiiard,  lajipoiteur. 


(  302  ) 

M.  cle  la  Roquette,  secretaire  ginoral,  lit  uiie  notice 
succincle,  traduite  cle  I'anglais  par  M.  Ant.  il'Abbatlic, 
sur  les  nouvelles  decouvertes  faites  par  MM.  Livingston 
et  Cotton  Osvvell  dans  I'Afrique  australe ,  au  dela  du 
lac  N'gami. 

M.  le  baron  de  Brimont,  prdsidenl  de  la  section  de 
comptahilite,  prisente  le  Inulgct  de  1852,  cl  fait  son 
rapport  sur  les  comptes  de  1851.  Ces  documents  se- 
ront,  aux  termes  du  rfeglement,  pr6senlos  a  rassemblee 
generale,  et  imprimes,  suivant  I'usage,  dans  le  Bulletin. 

M.  Jomard  lit  une  notice  sur  la  decouverte  rdcem- 
mcnt  faile  de  Irois  vases  d'argent  sur  Icsquels  soiit 
graves  des  ilineraires  de  Gades  a  Pionie. 

Le  meme  niembre  entrctientlaComiuissloii  centralc 
dos  fouillcs  faites  en  Egypte  dans  des  mines  el  des  de- 
couvertes qui  en  ont  ele  le  r^sultat. 

M.  Ferry  soumet  a  la  Commission  deux  instruments 
donl  il  est  I'inventeur,  cl  doul  I'un  est  unc  boussolc. 

M'"°  Alexandre  Kerr  est  re^uc  membre  de  la  Societe 
sur  la  presentation  de  MM.  Ant.  d'Abbadie  et  Jomard. 


(  303) 
OUVRAGES  OFFEUTS 

DANS  I.liS  SliANCES   DES  5   ET  19  MARS  1852. 


TITRES. 


DONATEURS. 


EUROPE. 


OCVnAGES. 


La  Finlande;  notes  recueillies  en  1848  pendant 
une  excursion  de  Saint-Pe'tersbourg  a  Torneo, 
par  le  prince  Emmanuel  Gnlitzin.  Tom.  I  et  II. 
Paris,  i852.  2  vol.  in-8°,  avec  une  carte. 

Les  Sciences  historiques  et  yeographifjues  envi- 
sa^ees  dans  leur  mouvement  actuel  cliez  les 
dift'erents  peaples  de  I'Europe.  F!lsr|uisse  par 
Vivien  de  Saint-Martin.  Paris,  i85i.  BrocJi. 
in- 8°. 

ASIE. 

OUVnAGE. 

Sur  les  Khazars,  par  Vivien  de  Saint-Martin. 
Paris,  1 85 1.  Broch.  in-8«. 

A  Geographical  description  of  certain  ports  of 
the  Southeast  Coast  of  Arabia...  (Description 
geographique  ile  certaines  portions  de  la  cote 
sud-est  d'Arahie,  avec  un  court  essai  sur  la 
geograpliie  comparative  de  toute  cette  rote,  par 
H.  J.  Carter,  esq.  Singapore).  Broch.  in-8". 

AFRIQUK. 

Tableau  de  la  situation  des  etablissements  fran- 
cais  enAlge'iie,  1846,  1847,  1848,  1849.  '  ^°'- 
in-4''  avec  cartes. 

OUVRAGES. 

Rapport  sur  un  ouvrage  d'exploration  dans  I'in- 
terieur  de  I'Afrique,  par  M.  Hecquard,  sous- 
lieutenant  de  spahis.  Br.  in-8°,  avec  une  carte. 

MELANGES. 

MEMOIRES    DES   SOCIETES  SAVANTES   ET   JOURNAUX. 

Francois. 

Nouvelles  annales  des  voyages.  Janvier  i85a. 
Journal  des  missions  evangeliques.  Fevrier  i852. 


Le  prince 
Emmanuel  Galitziu. 


Vivien 
de  Saint-Martin. 


Idem. 
Idem. 


Ministere 
de  la  guerre. 

llecguard. 


Les  editeurs. 
Idem. 


(  30/1  ) 


TimES. 


DONATI'.URS. 


Hcvue  coloninle.  Foviier  i85'j. 

Aiinales  ilu  conitni'ire  PMoiieur.  Nov.  I  85 1. 

lievuc  (le  rOiictit.  Fcvrier  iSSa. 

.lournal  irrddciilioii  popiilaire.  J^invicr  l85'i. 

Revue  oiientale  ct  il'Aljji'rie.   Janvier  ft  tcvricr 

1852   ln-8°.  Paris,  i852. 
Archives  des  iriissions  scientifiques  el  litleraires. 

Janvier  a  aoiit   i85l.  Paris. 
Revue  de  rinslruclion  [)ublique.  26  fcviier  l852. 

Anqlais. 

Journal  ofllie  Rotubay  branch  of  ihe  royal  Asiatic 
Society...  (Journal  <le  la  Societe  asiati(|ue  de 
Bombay),  n°'  i,  2,  4,  7,  8,  9,  10,  1 1,  l3,  14. 

The  Church  Missionary  Intelligencer.  Mars  i852. 
Londrcs.  Grand  in-8". 

Amciicains. 

The  Literary  world  (leMonde  littcraire).  N"  257, 
3  Janvier  1852;  258,  10  Janvier  ibSa;  25f), 
17  Janvier  i852;  260,  24  ja'iviiM-  i852. 

Proceedincs  of  the  American,  philosophical  So- 
ciety... (Actes  dt;  la  Societe  philosophitjnc  aiiie- 
ricaiiic).  N"  45,  avril-decenibrc  i85o;  4(',  Jan- 
vier a  juillet  i85i . 

IJIVEllS. 

■Report  from  the  select  committee  on  Ordnance 
Survey  ( Scolland  )...  (Rap|)ort  du  Comile  sur 
le  leve  de  I'Imos^c). 

A  school  .\tlas  of  physical  {;eoj;raphy...  (  .Ulas 
sc(daire  dc  {jeograpliie  physif|uc). 

A  .school  Atlas  of  general  and  descriptive  geo- 
graphy... (Atlas  scolaire  de  {;eographie  gene- 
rale  et  descriptive). 

Hisloire  de  la  vie  d'lliouen  -Tlisang  ot  de  ses 
voyages  dans  I'liule  eiitre  les  annees  (i2()et645 
de  notre  ere. 

Prcuves  de  r.intiijue  science  ipi'ont  posscdc'c  Ics 
pcnples  a  ccritmc  hierof!lyphi(pic  et  antedilu- 
vienuc.  Rroch.  in-8".  Paris. 


MM. 

I.cs  e<llleurs. 

Minisltire  du  comin. 

Les  cditeui  s. 

Idem. 

Idem. 

Ministeie  de  I'inslr, 

publiquc. 

Idem. 


edileur 


l.le 


Mem. 


Societe  philosopli. 

ainericaine 

dc  Philadtilphie. 


A.  K.  Jolinston. 

Idem. 
Idem. 

SianislflS  Julicn. 

Chev.  de  Paravey. 


"■  X-n-  r.ul/.tiji  ./r  .//«/>■    /,'/.;i' 


^'^A'. 


^^^^-^K/i^  jjsnmHJKi/ms 


I       E 


/// 


Suri^'if  *■/*'  i't'i'i/iiii'liif 


i.ili,.,l,-/.:,uiy„,.„„„   ,,  M,m» 


BULLETIN 


DE    LA 


SOCIETE  DE  GEOGRAPHIE. 


AVRIL   1852. 


ASSEMBLfiE  GENERALE  DU  2  AVRIL  1852  (i). 


DISCOURS 

PHONONCE 


PAR   M.  LE  CONTRE-AMIRAL  MATHIEU. 

Directeur  general  du  depot  de  la  mnrinc, 
Pre'sident  de  la  Socie'te. 


Messirurs, 

C'est  avec  une  confusion  extreme  que  je  succ^de  ici 
a  I'illustre  M.  Dumas ,  et  que  je  viens  occuper  ce 
fauteuil  sur  lequel  un  savant  seul  devrait  s'asseoir. 

Mais,  messieurs,  en  me  choisissant  pour  6tre  voire 
president ,  vous  avez  voulu ,  sans  aucun  doule ,  donner 

(l)  Le  Compte  rendu  des  recettes  et  des  depenses  de  la  Societe  pen- 
dant I'annee  1 85  I ,  le  Rapport  sur  la  verijication  du  compte  des  recettes 
et  des  depenses  ci-dessus,  le  Budget  des  recettes  et  des  depenses  a  f aire 
par  la  Sociifte  pendant  I'annee  i852,  et  le  releve  du  Mouvement  des 
colisations  une  fois  payees  et  des  placements  des  capilaux,  ainsi  que 
\'  Apercu  du  voyacfe  dans  le  nord  de  la  Dollvie  et  dans  les  parties  voisines 
du  Perou,  par  M.  Weddcll,  communiques  a  I'assemblee  gcnerale,  sont 
iinpriuits  dans  le  Bulletin  de  mars,  p.  201 ,  a84,  298. 

111.    AVIUL.    1.  21 


(  306  ) 

un  tuinoignage  do  bionvoillanrc  ct  dc  considoralloii 
au  corps  de  la  marine  militaire  el  a  celui  dos  ing(5- 
nieurs-hydrographcs ,  a  la  tete  duqiiel  j'ai  I'lionneur 
d'elre  place. 

A  ce  double  tilre,  j'ai  accepts  avec  une  vivo  et  res- 
peclueuse  reconnaissance  I'honorable  position  a  la- 
quelle  vous  ni'appeliez,  certain  que  je  trouverais  en 
vous  I'indulgente  bont6  dont  j'ai  besoin. 

Aiusi  que  vous  I'a  dit  M.  Dumas  dans  voire  dcrnidre 
seance  annuelle  ,  la  geograpbie  ,  la  navigation  el  lliy- 
drograpliie  sont  sceurs;  elles  se  prelent  un  mulncl 
appui.  Grace  a  leur  concours  eclairc ,  les  dilTerentes 
parlies  du  globe  se  relient  enlre  cllos ;  loutes  les 
brandies  des  sciences  s'enricbissenl  do  leurs  utiles 
decouvertes,  et  le  commerce  ,  cette  source  fdconde  do 
la  grandeur  et  de  la  prosperity  des  Etats,  dans  les 
renseignements  exacts  qu'il  y  puise,  ci  dans  la  rapi- 
dit(^  de  scs  communications,  en  recoit  de  precieux 
developpements. 

Tout  ce  qui  peul  contribuer  a  agrandir  ce  domaine 
du  bien  public,  a  le  perloctionner,  no  saurait  done 
nous  otre  indiirerent,  et  alors  combien  no  dois-je  pas 
approcier  d'olre  a  la  I6te  d'unc  Societe  qui  j)0ursuit 
un  tel  but  et  qui  comple  dans  son  sein  lant  de  savants 
illuslres,  lant  de  ciloyens  distingues! 

Vous  pouvez  done  vous  reposcr,  messieurs,  sur  le 
devoucment  de  voire  president  aux  inlerels  do  la 
Society  de  goograpbie,  sur  son  aflection  etson  respect 
pour  cbacun  de  vous.  En  retour,  j'ose  vous  demander 
cello  sympalbie ,  celle  conliance  ,  cette  amitie  qui 
rendonl  lior  rUoinme  qui  cu  osl  I'objet. 


(  '^^'7  ) 
rapport' 

sua 

LE  CONCOlJRS  POUR  LE  PRIX  ANNUEL 

(voyages  de  1849)  (1). 

Messijeurs, 

L'ann^e  pour  laquelle  voire  Commission  du  pr/.f 
annuel  a  un  rapport  a  vous  faire  est  I'annee  18/i9;  en 
d'atilres  termes,  les  voyages  qui  peuvent  coneourir  a 
ce  prix  sont  ceux  qui  ont  et6  effectues,  ou  qui  ont  ^te 
termines  pendant  le  cours  de  ceile  annee.  Vous  savez 
doja,  par  le  dernier  rapport,  que  plusieurs  interes- 
sautes  decouverles,  en  Afrique  principalement,  dntent 
de  cetle  p^riode.  Avant  d'exposer  sous  vos  yeux  les 
resultats  de  ces  excursions,  nous  parlerons  d'abord 
de  celles  qui  ont  ele  accomplies  dans  les  autres  con- 
trees  du  globe  :  les  plus  dignes  d'attenlion  sont  les 
explorations  faitos  en  Asie. 

D'intrej)ides  voyageurs  anglais  se  sont  elevt^ss  dans 
I'Himalaya  a  de  grandes  hauteurs,  a  des  points  oil  on 
n'^tait  pas  encore  parvenu ,  et  ils  ont  decouvert  de 
nouvelles  passes  a  travers  ces  montagnes  gigantesques. 
On  sail  quo  le  gouvernement  des  Indes  orienlales  a 
ordonne,  il  y  a  quelques  annees,  une  serie  d'explo- 
ralions  au  nord  de  rilimalaya.  Le  docteur  Charles 
Thompson  ,  le  lieutenant  Slrachey,  du  corps  des  inge- 
nieurs  du  Bengale,  le  capitaine  Cunningham,  du  meme 


(i)  Commissaires  :   MM.  Guigniaut,  D<»ussy,  ci'Avi^/.ac,   Antoine 
d'Abliadie,  pi  JoiiiKid,  rapporteur. 


(  308  ) 

corps,  sc  sont  paitagt';  celle  pj^nlhle  mission.  L'annde 
dcrniero,  nous  avons  fail  connailre  Ics  principaux  rt!;- 
siiltalsobtenus  par  cliacun  d'eux.  Partis  dc  Simla  dans 
diverses  directions,  ils  se  son  I  diriges  :  le  premier,  vers 
Karakorum,  los  vallees  dc  Nubra  et  de  Schayok,  puis 
vers  Kachemyr ;  le  second,  vers  lo  Sampoo,  les  grands 
lacs  de  Cho-Lagan  (on  tso-Mapham)  et  Cho-Mapan 
(ou  Iso-Lanak),  cele])res  dans  les  l^gendes  sacrees  des 
Indous,  sources  du  Sulloj,  el  6lev^s  de  15  000  pieds 
anglais ;  le  troisi^me  devait  se  porter  vers  Rhotan  , 
Lassa  et  la  Chine. 

Le  docleur  Tliompson  a  campu  d'abord  a  15  500 
pieds  de  hauteur,  a  la  passe  de  Sassar,  et  plus  loin,  a 
une  sommite  de  plus  de  18  600  ])ieds ;  les  pics  neigeux 
qu'il  a  vus  n'ont  pas  moins  de  2/i  000  pieds.  Ces  excur- 
sions se  rapportent  a  I'annee  18/|8;  mais  I'annciie  sui- 
vanle,  le  docleur  Hooker,  savant  naturaliste,  a  di^cou- 
vert  un  nouveau  passage  au  Thibet,  a  Donkiah-lah. 

Le  docleur  Thompson  n'avait  pas  trouve  de  vegeta- 
tion, uicme  de  cryplogamcs  a  la  passe  de  Karakorum, 
ni  a  500  pieds  plus  bas;  mais  Ic  docleur  Hooker  a 
trouvd  a  19  000  pieds  de  hauleur,  plusicurs  lichens,  et 
particuliercment  un  lichen  d'une  brillantc  coulcur 
orangee,  Lecanera  miniata,  planle  qui  avail  et6  observee 
dans  les  Alpes  scandinaves  ct,  parlui-meme,  a  I'ile 
Cockburn ,  par  64°  sud  ,  rapprochement  digne  d'atlen- 
tion.  Le  passage  qu'il  a  d^couvert  dans  Test  de  la 
chaine  est  a  23  000  pieds  de  hauteur.  Le  point  cul- 
minant de  ce  c6t6  est  a  plus  de  28  000  jiicds  d'c^dva- 
lion.  On  doit  au  voyageur  une  csquissc  rjui  a  scrvi  a 
M.  Polermann  (en  m6ino  lcmj)s  que  des  observations 
de  MM.  Waugb,  Campbell,  (ironimolin  et  Hodgson), 


(  309  ) 

a  tracer  line  ])etile  carlo  de  Sikhiin.  On  v  voil  rjuo  la 
sominile  dont  nous  venons  de  parler  a  28177  pieds 
(mesure  trigonometrique),  sous  le  nom  de  Kunchin- 
Jinga  (1).  La  passe  de  Lachoong,  lalitude  27°  55' nord, 
longitude  86°  27'  est  de  Greenwich,  atteinte  par  le 
docleur,  a  J  9  000  pieds  de  hauleur;  la  sommite  de 
Donkiah-lah,  qui  est  voisine ,  a  23175  pieds  (mesure 
trigonometrique).  La  limite  dcs  nciges  perpetuelles, 
du  cote  de  Test,  est  a  17  000  pieds  (2);  au  Kunchiu- 
Jinga  et  a  I'ouest,  die  est  bien  plus  has,  c'est-a-dire 
k  \h  700  et  a  Ih  500  pieds,  quoique  ces  divers  points 
soient  sur  le  meme  versanl  meridional. 

C'esl  de  cette  partie  de  I'Himalaya,  voisine  du  Ne- 
paul ,  du  Boolan  et  du  Thibet  et  conliguii  au  terri- 
toire  britannique,  que  descendent  Ics  rivi-ei'es  de  Tara- 
bur  et  de  Teesta.  Le  docteur  a  fait  la  de  nombreuses 
observations  sur  les  glaciers  et  sur  la  direction  dcs 
montagnes  neigeuses.  Jointes  aux  reciierches  si  cu- 
rieuses  de  M.  R.  Slrachey  sur  la  geographie  physique 
des  provinces  de  Kumaon  et  Garhwal,  et  d'autres 
contr^es  de  I'Himalaya,  elles  jeltent  un  grand  jour  sur 
des  questions  qui  interessent  a  un  haut  degre  les  geo- 
graphes,  les  physicicns  ct  les  geologues;  ellcs  em- 
brassent,  savolr  :  les  montagnes,  cols  et  vallees,  les 
plaines  et  plateaux,  les  lacs  et  sources  de  I'lndus,  du 
Sutlej,  du  Gange  el  tUi  Bralmia-putra ;  la  nature  ties 
terrains  des  ditlerentes  formations,  les  roches  erup- 
lives  ct  les  fossiles  divers;  la  meleorologie  :  glaciers, 

(i)  On  eciit  aussi  Kancliin,  Kiiulian,  ct  KniulinliiJinrja. 

(2)  Etanta  cette  hauteur, le  docleur  avail  cniiuncncu  un  pitlorcsque 
panorama  de  la  chaiiie  ct  de  tons  ses  sites  iiiiposant!i,  lorstju'uue  teiii- 
pete  d«  neige  vint  arreter  son  ouviage. 


(  si<»  ) 

liinites  des  neiges  perpctiielles  el  liinites  cle  la  v^gi^ta- 
tion  ;  Ics   productions  vegelales  et  la  zoologie,   enCin 
I'clhnologie,   les  races   et  le  Inngage  des  hahilanls. 
Toutes  ces  observations  dc  MM.  Strachey  et  Hooker 
m6rilent  d'etre   mentionnees  de  la  mani^ro  la  plus 
honorable,  qiiand  m6me  on  ne   liendrait  compte  que 
des  fatigues  et  des  perils  surmonliis  par  les  voyagears. 
L'Arabie  a  efe  parcourue  ou  travors6e  en  diilerents 
endroits  depuis  I'annee  1817  par  Badia,  par  les  offi- 
cicrs  francais  de  I'armee  il'Ibrahim  Pacha,  par  le  ca- 
])ilaine  Sadlier,  1819,  par  M.  Arnaud  et  d'autrcs;  ce 
dernier  a  pu  penetrer  en  Yemen  jusqu'a  Mareb ,  I'an- 
cienne   Mariaba  (ou  la  ville  de  Saba);  une  parlie  de 
I'Arabie  Pdtree  a  6te  visitde  par  plusieurs  voyageurs, 
enlre  autres  par  M.  Leon  Delabordo ;  plus  tard  M.  BoHa 
a  fait  {'ascension   du  mont  Gharcb;  le  INodjd,  I'Asyr 
ont  el6  explores  ainsi  que  I'Hedjaz.  Les  voyageurs  an- 
glais AVelsted  ,  Haines,  Cruttenden  ,  ont  releve  les  cotes 
fie  I'Arabie  meridionale ,  penetre  dans  I'inl^rieur  do 
rOman  ,  etc.;  mais  il  reslait  a  visiter  une  vasle  region 
de  I'Arabie  septenlrionale ,  comprise  entre  les  27°  el 
31"  paralleles  et  entre  les  SA"  et  /|2'  meridiens  a  I'orienl 
do  Paris,  au  nord  du  Nedjd,  c'est-a-dire  depuis  I'Eu- 
phrale  jusqu'a  la  nier  Morle.  Get  espace  a  etc  traverse 
dans  toule  son  etendue  par  M.  Ic  docteur  Georges  Au- 
gustus Wallin,  Finlandais  (d'Helsingfors).  Lorsde  son 
dernier  voyage,  il  est  parlidu  Caire  au  coinmcncemcnl 
de  18Zi8,  il  Iraversa  la  peninsule  de  Sinai,  visita  Tor, 
el-Gl»arm  et  Muweilah;  bicnvenu  des  Iribus  arabes, 
avec  lesquelles  son   genre  dc  vie  tout  oriental  et  sa 
parfaitc  connaissance   do   la   langue  le  niellaient   en 
rapport  inlluio,  il  parvint  a  traverser  tout  rintorvalle 


( .'ill ) 

qui  separe  ie  goll'c  (ie  I'Akaba  clu  hasbiii  ilc  I'Euphralo. 
II  arriva  ensuite  a  Hail,  an  nord  de  la  province  de  Kasiiii 
(du  Nedjd),  pays  montagneux  ,  nomine  Djebel-Cuain- 
mar.  De  la,  se  dirigeant  au  nord,  il  parvint  hctireu- 
sement  a  Meclied-ali.  A  Bagdad  ,  il  est  entre  en  relation 
avec  Ie  c6lel)re  colonel  Rawlinson,  consul  d'Angleterre, 
qui  a  fait  connaitre  les  excursions  du  dpcteur,  et  ses 
heureuses  dispositions  pour  les  voyages  d'Arabie ;  il  a 
dii  continuer  ses  peregrinations  sous  les  auspices  du 
gouverneoient  anglais  et  de  la  Cooipagnie  des  Indes. 

La  route  du  docleur  Wallin  ,  dans  la  partie  la  plus 
meridionale  (vers  Ie  27'  degre  de  latitude),  est  peu 
eloignce  de  celles  des  troupes  6gyptiennes  et  du  caj^i- 
taine  Sadlier,  qui  ont  deja  procurii  de  bonnes  notions 
sur  ces  conlrees  (1);  mais  en  remontant  vers  Hail, 
cette  route  ajoute  a  nos  connaissances,  et  la  carle  de 
la  peninsule  arabique  s'eni'ichira  des  observations  du 
docteur  Wallin.  Sa  relation  est  plcine  de  details  topo  - 
graphiques  sur  Tebouk,  Teima ,  Djebel ,  Hail,  etc. 
Tebouk  se  trouve  sur  sa  carte  plus  eloign^  de  la  mer 
Rouge  que  sur  nos  carles  actucUes  ;  on  sait  que  c'est 
la  que  Mabomet  reraporta  une  vicloire  celebre  I'an 
630  de  notre  ere.  Teima  ,  suivanl  Ie  voyageur,  quoique 
dans  un  lieu  bas,  appartient  au  Nedjd  ,  et  il  en  doniie 
une  raison  philologique  assez  plausible.  Hail  (Ie  meiiie 
lieu  que  El-Haeyl)  est  a  environ  mille  pieds  au-dcssus 

(i)  Hail,  Ivhalbar,  Teima,  Hguraiuiit  dtji'i  sui  nos  caitis,  Tebouk 
aussi,  mais  trop  ;i  i'ouest.  (  Voyez  Ie  Voya{5e  du  capitaine  Sadlier,  la 
Notice  {;('o;;ia|)liiriuo  sur  I'Ar.ilji.;  cciUiale,  avec  la  Carte  du  INedjd 
(i823),  et  la  Carte  de  I'zWaljic,  etc.,  dressee  pour  rintellifjence  de 
I'liisloire  de  TEgypte  sous  Mohammed-  Aly  el  des  marches  des  troupes 
egyplieinies,  1807.) 


(  312  ) 

de  la  plaino,  el  silu(i  cnlre  deux  montagnes  grani- 
liques  fameuses,  nomm6es  Aga  (ou  Aja)  el  Selina,  oii 
la  Irihu  de  Tay  so  refiigia  apr^s  I'inondalion  de  I'Ye- 
men.  Sur  la  carte  dii  docteur  ^^allin,  entre  Hail  el  le 
niidi  de  la  mcr  Morte,  an  lie  grand  e  lignc  de  sa  route(l), 
ot  a  moilie  clieinin,  on  doil  signaler  pour  sa  configu- 
ration un  district  isole  au  milieu  du  doserl ,  du  nom 
de  Jal-Algawf,  entoure  de  montagnes  de  toutes  parts,  et 
qui  correspond  au  district  nomine  Djof  dans  Ics  cartes 
actuelles.  La  relation  du  voyageur  est  riche  en  obser- 
vations des  mceurs,  des  usages,  des  habitudes,  et  il  y 
fait  preuve  d'erudition ;  partoul  il  cite  les  auteurs 
arabes,  en  comparant  leur  texte  aux  traditions  encore 
vivanles  et  aux  lieux  qu'il  a  visit^s  en  observateur  at- 
lenlil"  et  judicieux.  On  avail  attribue  aux  Soubout  a 
cause  de  leur  noni ,  unc  origine  juive,  et  on  les  croyait 
attaches,  encore  aujourd'hui,  aux  pratiques  du  ju- 
daisme.  Apres  avoir  etudi^  leurs  coulumes,  et  les  avoir 
interroges,  il  s'est  convaincu  qu'il  n'en  etait  rien , 
que  le  nom  de  leur  tribu  d6rivait  de  celui  des  Soubei- 
lan  ,  et  que  rien  ne  les  distinguait  des  aulres,  si  ce 
n'est  I'usage  d'une  cloche  attach^e  au  maltre-pilier  de 
la  tenle;  cetle  cloche  serl  seulement  de  signal  pour 
faire  rentrer,  au  couclier  du  soleil ,  les  cliameaux  et 
les  Iroupeaux  qui  sonl  a  la  palure.  Dans  les  villes  et 
villages ,  le  docleur  a  voulu  s'assurer  si  quelques  uns 
professaient  une  autre  relipion  que  I'lslam ;  nuUe 
part  il  n'a  Irouv^  de  Iribus  ni  d'individus  attaches  en 
secret  a  une   croyance   particulicjre ;  mais  bcaucoup 

(i)  La  description  deceUt;  li(»iie  dc  roule  iiian<|ue  dans  la  relation 
qui  nous  est  connue. 


{  313  ) 

d'enlre  eux,  livi'^s  h  uno  vie  extremeinent  simple  et 
rdduits  a  une  sorte  de  pauvrel^,  sonl  dans  iin  grand 
^lat  d'ignorance  et  pen  zel6s  pour  les  pratiques  reli- 
gieuses.  Le  docteur  fait  reiuarquer  au  sujet  des  Wa- 
habys,  qu'on  a  eu  tort  de  les  regarder  comme  ayanl 
cree  une  croyance  absolument  nouvelle ;  ce  sont, 
suivant  M.  Wallin,  de  purs  reformateurs  et  non  pas 
des  heretiques,  et  ils  professent  \eritablement  le  rite 
de  Hanbaly.  Enfin,  pendant  le  cours  de  son  voyage, 
le  docteur,  ne  negligeant  rien  de  ce  qui  pouvait  avoir 
de  I'inldiret,  a  remarque  et  copie  quelques  inscriptions 
antiques,  gravees  sur  les  rochcrs,  a  Wadi-Uweinid ,  a 
Wadi-Gubla  et  dans  le  defde  de  Darb-albekra ,  du 
pays  de  Harra  ;  elles  rappellent  un  peu  les  inscriptions 
sinaitiques  et  aussi  I'ancien  pheniclen.  Tel  est  le  court 
resume  des  obsei'vations  failes  par  le  savant  voyageur 
fmlandais  et  le  resultat  de  I'etude  de  sa  carte  (1). 

Mainlenant,  si  francbissant  un  grand  espace ,  nous 
passons  de  I'Asie  au  grand  Ocean,  I'altenlion  se  fixe 
un  moment  sur  la  Nouvelle -Z6lande ,  a  cause  des 
excursions  de  MM.  Tbom.  Brunner,  Stokes  et  Mltcbell, 
dans  la  grande  ilo  du  sud.  Le  premier  de  ces  voyageurs, 
danslaparlie  septentrionale  et  occidentale  de  I'ile,  s'est 
6leve  jusqu'a  de  hautes  montagnes  couvertes  de  neiges. 
Les  seconds  ont  explort^  la  partle  orientale  et  septen- 
trionale ,  depuis  Nelson  jusqu'au  port  Victoria  ou 
Cooper.  M.  Brunner  a  determine  le  cours  de  deux 
rivieres  principales,  depuis  leurs  sources  jusqu'a  leurs 
embouchures ,  et  11  a  decouvert  de  grands  lacs.  Son 


(i )  II  est  a  reyrctler  (|ue  reue  carle  lie  rciireriiie  (|u'iiiie  jietitc  jniriie 
des  lieux  cites  dans  la  relation. 


( -^iA ) 

voyagf  a  duio  pendant  plus  de  dix-liuil  luois;  il  a 
soufl'iMl  de  grandcs  diflicult^s  et  cssuye  des  fatigues 
infinies,  mais  sans  qu'il  ait  jamais  on  ricn  c'l  redonter 
des  nalit's.  Le  residlat  final  do  ces  excursions  est  (|ue 
le  sol  de  cette  parlie  de  I'ile  est  iinpropre  on  peu  favo- 
rable a  la  colonisation. 

Les  deux  rivieres  dont  nous  venons  de  parler  sont 
la  I'iviere  Grey  ou  Mavvhera,  et  la  riviere  Buller  ou 
Kawatiri.  La  premiere  sort  d'une  monlagne  neigeuse 
appelee  Kaimatau,  au  /iS"  degre  de  lalitudo  sud  au 
nord-esl ;  au  sud-ouest  est  le  lac  Coleridge  ;  la  seconde 
riviere  sort  d'une  autre  montagne  neigeuse,  siluee  au 
62*  degre,  source  d'un  troisieme  lac  ;  une  autre  riviere 
sort  aussi  du  pied  de  la  montagne  ,  mais  court  dans 
un  sens  oppose. 

M.  Brunner  a  otudie  soigneusoment  le  sol  et  ses 
pi'oduclions,  notamment  Ics  racines  et  Ics  autrcs  sub- 
stances vegelales  dont  lesnalurels  s'alimenlent,  el  dont 
lui-meuio  a  du  faire  un  frequent  usage  au  milieu  des 
plus  grandes  privations.  II  reste  encore  bien  des  desi- 
derata dans  la  geographic  do  I'ile  ,  mais  on  no  pout 
douter  qu'avant  peu  ces  lacunesne  soient  remplies. 

Si  les"  travaux  d'hydrograpbie  pouvaient  etre  compris 
ilans  I'examen  jauquel  s'est  livree  la  Commission  , 
elle  n'aurail  pas  manque  de  vous  signaler  les  o[)era- 
tions  ordonnees  par  I'amirautc^  anglaise  et  par  noire 
ministere  dc  la  marine,  Iravaux  (|u'iidmire  le  mondo 
entier  et  qui,  aux  services  cminenls  qu'ils  rendent  a  la 
navigation  el  au  commerce,  ajoutent  le  merile  scien- 
llfiquc  et  les  merveilleux  soins  donnes  a  la  publica- 
tion. Cet  exemplc  commence  u  etrc  suivi  par  la  jeune 
Amorique,  oil  existe  aussi  une  administration  de  Coaal- 


4 


(  315  ) 

Siiivc)-,  qui  a  deja  tail  executer  des  reconnaissances 
livclrographiques  sur  une  grande  ^chelle.  A  defaut 
d'liiio  recompense  pour  ces  imjiorlantes  observations, 
que  leurs  auteurs  ou  los  savants  qui  ies  dirigent  recoi- 
venl  ici  le  lenooignage  de  la  gratitude  des  amis  des 
sciences,  et  de  lous  ceux  qui  s'interessent  a  la  prospt^rit^ 
du  commerce.  li  appartient  a  toutes  Ies  nations  mari- 
linics  de  uiarclier  dans  celte  voie,  ouverte  par  la 
France  el  la  Grande -Bretagne. 

Puisque  le  nom  de  I'Auierique  a  t;t6  prononce , 
Ton  nc  sauralt  passer  sous  silence  Ies  recherches 
g^ographiques  et  ethnographiques  faites  par  M.  George 
Squier,  d'abord  dans  la  vall(!!e  du  Mississipi  et  sur  Ies 
rives  du  Scioto  et  de  I'Ohio,  puis  dans  le  Nicaragua. 
Ce  savant  infatigable  a  port^  ses  recherches  sur  tous 
Ies  points  de  geographic  et  d'archeologie  quipouvaient 
inleresser.  Dou6  d'une  egale  ardeur  pour  robservation 
el  pour  I'etude,  il  a  rapporte  de  ses  voyages  de  pre- 
cieux  mat^riaux  dont  la  Society  smithsonienne  de 
Washington  a  reconnu  Timporlance  en  Ies  publiant 
a  ses  I'rais  d'une  maniere  splendide. 

Nous  arrivons  a  I'Afrique,  objet  constant,  surlout 
depuis  soixante  annees,  de  lallenlion  et  de  la  curiosile 
generales.  On  I'a  dit  tant  de  fois  que  ce  serait  tombor 
dans  un  lieu  commun,  si  Ton  repelait  que  ce  continent, 
le  plus  voisin  de  I'Europe,  est  aussi  le  moins  coniui 
de  tous.  On  a  ele  plus  loin,  en  allant  jusqu'a  pretendre 
que  I'anliquite  I'a  mieux  connu  que  Ies  modernes 
au  slecle  dernier;  mais  si  cola  a  pu  jamais  elro  vrai , 
il  n'est  plus  permis  aujourd'hui  d'avancer  une  pareille 
assertion.  Les  voyages  de  Bruce  a  Test ,  cekii  de 
Browne  lendanl  vers  le  centre,  ceux  deMungo-Park 


(  316  ) 
a  roccidciit ,  el  \'uv^l  antics  non  moiiis  linpoitanU 
accomplis  depuis  ccs  cel6brcs  cxploraleurs,  ont  cliange 
completemcnl  Ic  raj>porl  d'olencluc  cnlre  les  notions 
anciennes  et  los  connaissances  acluelles.  AUaquec  par 
lOLis  les  poiiiLs,  do  lous  les  coles  a  la  fois,  la  penin- 
sule  d'Afriqiio  nc  peut  inanquoi"  lie  nous  r6v^lor 
bicntot  les  mysleres  les  plus  caches  de  sa  ])ailie  con- 
Irale.  On  sail  assez  quelle  sensation  a  produlte  clans 
le  niondc  savant  I'exploralion  liardie  et  memorable 
de  Clappcrton ,  Denhani  d  Oiulncy,  partis  de  la  cole 
nord  en  182/i ,  et  parvenus,  jusqu'au  inont  .Mendefy 
au  sud  ,  jusqu'a  Sakkatou  au  sud-ouest.  Depuis  ce 
jour,  comiTse  avanl ,  on  n'a  cessc  de  multiplier  les 
expeditions  olficielles  ,  les  excursions  isolees  ,  les 
voyages  patroness  par  les  Soci6l6s  savantes.  On  a  pene- 
tre  par  le  sud  en  partant  du  cap  do  Bonne-Esperance 
jusqu'au  24''  degre  de  latitude  sud  el  plus  loin  encore  ; 
par  le  sud-ouosl  jusqu'a  Yaouri  sur  lo  Quorra  ;  par  le 
Nil  jusqu'au  /|°  degr6  de  lalilude  sud.  On  a  fait  la 
dOiCouvertc  de  plusieurs  grands  lacs,  et,  chose  inal- 
tendue,  en  venanl  par  Test,  par  la  mer  des  Indes,  on  a 
d^couvert  des  montagnes  couverles  do  neiges  porp6- 
tuelles.  Enfin  ,  vers  le  centre  du  continent  africain , 
Ton  a  depasse  la  liniile  qu'avail  atleinle  Ic  major 
Denham,  et  un  Europcion  a  pu  se  baigner  dans  les  eaux 
qui  vonl,  de  ces  points  Aleves,  se  rendrc  dans  le  Quorra, 
et  dans  la  mer  do  Guinde  ;  mais  dans  ce  tableau  des 
ddcouvertes  recentes  ,  nous  n'avons  a  considerer  ici 
que  les  voyages  continues  ou  tormines  pendant 
I'ann^e  18Z|9. 

On  devra  bcaucouj)  aux  mlssionnaires  pour  les  pio- 
gr^s  que  vient  dc  laire  la   geographic   de  TAlVique, 


(  317  ) 

D^ja  lis  ont  fait  leiirs  preuves  Hans  presque  toutes  les 
contr^es;  leurs  decouveites  recentes  tdmoignent  aulant 
de  leur  zele ,  de  leur  instruction  et  de  leur  habilet6 
que  de  leur  courage  et  de  leur  d^vouement  pour  la 
sainle  cause   qu'ils  poursuivent.  Le   r(^verend  David 
Livingston,  etabli  depuis  longtemps   a  la  station  de 
Kolobeng,  par  25   degres  de  latitude  sud  et  environ 
23  degres  et  demi  de  longitude  est  de  Paris  (a  900  milles 
de  la  baie  d'Algoa),  avail  entendu  parler  d'un  grand 
lac,  situe  vers  le  nord  a  une  grande  distance,  et  au  dela 
de  ce  qu'on  appelle  le  desert.  En  18/i8,  une  caravane  de 
Griquas  essaya  de  traverser  cet  espace  en  ligne  directe, 
pour  aller  a  la  recherclie  de  I'ivoire;  inais  le  manque 
d'eau  fit  (!;cbouer  I'entreprise.  L'ann^e  suivante,  M.  Li- 
vingston resolut  de  tenter  I'aventure;  des  gens  de  Ba- 
louani,  tribu  voisine  du  lac,  vinrent,  de  la  part  de  leur 
chef,  I'inviter  a  lui  rendre  visite.  Sur  ces  enlrefaites, 
deux  gentlemen,  MM.  W.  Oswell  et  Mungo  Murray, 
arriverent  expres  d'Angleterre  pour  s'associcr  a  son 
voyage.  La  route  directe  etant  impraticable  pour  des 
chariots,  il  partit  de  Kolobeng,  avec  ses  compagnons, 
sous  la  conduite  d'autres  guides,  le  1"' juin  18/|9,  se 
dirigeant  par  le  pays  des  Bamanguato,  a  Test.  La  cara- 
vane complait  beaucoup  de  nalifs,  80  bcEufs  et  20  che- 
vaux.  La  premiere  partie  du  voyage,  a  Iravers  le  desert, 
suivant  les  directions  est,  nord  et  nord-ouesl,  a  exige 
une  marche  de  300  milles,  pleine  de  fatigues  et  de  pri- 
vations, surtout  sous  le  rapport  du  manque  d'eau.  Le 
pays  est  sablonneux,  excessivemeut  aride ;  la  popula- 
tion est  aussi  d'une  extreme  misere ,  que  rcOete  leur 
constitution  [)hysiquc;  en  ellet,  il  n'y  en  a  peut-tilre 
pas  de  plus  grSle  et  de  plus  chetive.  Toiitefois  le  pays 


(  Uh  ) 

n'ost  pcis  dopourvu  d'arbres,  ni  niume  cle  verdure;  ce 
qu'il  y  a  de  singulior,  c'ost  que  Ics  anirnaux,  quoique 
prives  d'cau,  y  vivenl  ct  prosperenl  beaucoup;  I'elan 
surtout  y  devient  tr^s-gras,  et  nieme  dnorme,  et  com- 
parable a  un  boeuf,  tandis  que  I'espece  bumaine,  qui 
vit  principalement  de  racines,  reste  miserable  et  de- 
cbarn^e ;  en  un  mot,  c'est  un  conlraste  absolu.  Le  l)uft]c 
abonde,  le  rhinoceros  est  rare.  M.  Livingston  signalo 
une  petite  plante,  qui  n'a  que  quelques  pouces  hors  de 
terre  et  porte,  a  un  pied  au-dessous  du  sol,  une  racino 
grosse  conime  la  Idle  d'un  enfant,  de  nature  spon- 
gieuse,  etpleiue  d'une  eau  fralche  el  pure.  Le  4  juilict, 
la  caravane  atteignil  Bakurulsi,  environ  par  21'  22' 
sud  (1) ,  et  une  magnifique  riviere  appeJie  Zoiiga,  large, 
en  ce  point,  de  30  metres,  el,  plus  loin,  de  100  metres, 
se  dirigeant  a  I'esl  vers  la  mer  des  Indes.  L'eau  en  est 
douce,  limpide ,  el  Ires-froide,  el  semblable  a  l'eau 
de  neige  iondue.  Le  voyageur  confirme  cette  analogic 
par  le  fait  que  la  crue  de  ia  riviere  a  lieu  au  commen- 
cement de  la  saison  cbaude.  En  etl'et,  le  Zouga  s'est 
accru  de  Irois  pieds  en  juillet  et  aoul;  or,  la  saison 
s^che  dure  do  mai  a  octobre:  c'est  aussi  en  octobrc 
que  la  riviere,  ayanl  atleint  son  maximum  d'elevation, 
commence  a  baisser.  Les  liabilauls  ignorenl  la  cause 
de  son  accroisseuieul  p^riodique,  mais  ils  disent  que 
ce  n'esl  pas  la  phiie;  ils  ajoutent  qu'il  y  a  un  chef  au 
pays  cle  Mazzakwa,  Ires-eloigne  dans  le  nord ,  qui, 
cbaque  annee,  sacrilie  un  hoinme  el  le  pr^cipite  dans 
la  inviere,  laquclle  alors  commence  a  s'(ilever.  D'apres 

(i)  Les  latituiles  ont  ete  observees  a  Taide  d'un  exctllent  sext.ini, 
et  les  hauteurs,  ;"i  I'aidc  du  thiTnioinelrp  barninetrique  de  Newinauii. 


(  319  ) 

Tohservalion  faile  a  co.  point  du  Zouga,  avec  I'inslrir 
nienl  de  Newmaun ,  Ic  lieu  est  a  plus  do  2  000  pieds 
anglais  de  hauleur  absolue  (M.  Oswell  dit  2  856).  Les 
habitants  difl'erent  enliereaient  des  Becliuanas  par  le 
leint  coaime  par  le  langage;  ils  s'appellent  homines 
(  par  excellence  )  (  Bayeiye  )  ,  et  ils  nomment  les 
B^chuanas  esclat'es  (Bakoba).  On  remarque  I'alkire 
Tranche  et  male  de  cos  lioinmes;  ieurs  barques  ne  sont 
autre  chose  que  le  canot  primitif ,  un  tronc  d'arbre 
creuse.  Le  voyageur  observa  en  ce  lieu  des  arbres 
giganlcsques  ,  des  varieles  de  Baobabs  qui  ont  76 
pieds  de  tour  a  3  pieds  de  lerre ,  et  d'autres  arbres 
d'une  grande  beaute  ,  avec  des  fruits  nouveaux  pour 
lui ,  en  lie  auircs  un  IVuit  d'un  pied  de  long,  gros  de 
3  pouces,  donl  la  graine  est  bonne  aussi  a  manger. 
A  I'invcrse  des  autres  rivieres,  le  Zouga  s'accroit  en 
largeur,  en  remontant  vers  sa  source;  non  loin  flu  lac 
il  est  large  de  100  metres  et  plus;  le  point  le  plus 
elev6  de  son  cours  observe  est  par  environ  20  degres 
latitude  sud.  On  arriva  au  lac  Ngami  a  la  fin  de 
juillel,  chez  les  Batouanis,  a  300  metres  de  Bakurutsi  : 
celait  I'extremite  nord-est  du  lac  ;  celui-ci  est  tlirige 
a  pen  pres  du  nord-nord-est  au  sud-sud-ouesl.  Son 
(Ctendue  est  grande,  et,  dit-on  ,  de  70  milles  de  lon- 
gueur (d'autres  disent  50  seuleraeut ,  deux  jours  et 
demi  dc  marche)  ;  il  remplit  tout  I'horizon  et  I'eau 
s'elend  a  perle  de  vue.  Une  grande  riviere,  semblable 
au  Zouga,  le  Teoge,  s'y  jelte  a  I'extremite  nord-ouesl  et 
le  rejoint  a  un  autre  lac  superieur,  situ6  a  150  milles 
g^ographicjues  plus  au  nord.  Ce  deinier  fait  ouvre  un 
vaste  et  nouveau  champ  aux  recberches,  aux  observa- 
tions de  loule  cspece  ,   comnie  il   inspira  au  mission- 


(  320  ) 

naiie  un  enlhousiasuio  et  iin  espoir  sans  homes  pour 
I'objet  de  sa  mission. 

Avant  le  lac  Ngami,  le  Zouga  regoit  une  grandc 
riviere  et  aussilot  sa  largeur  s'accrolt  considerable- 
ment  (1);  it  acquiert  en  ni6inc  lemps  une  grande  pro- 
fondeur ;  il  nourrit  des  hippopotames  et  des  croco- 
diles. Un  radeau  fut  construit  par  M.  Livingston  pour 
traverser  la  riviere  sur  un  point  ou  elle  n'a  que  50  k 
60  metres,  mais  le  bois  en  elait  trop  pesant,  et  il  coula 
siir-le-champ ;  il  fallail  songer  a  un  autre  moyen. 
M.  Livingston  pensa  d'abord  a  gagner  la  rive  gauche  k 
la  nage,  mais  il  reflochil  qu'un  etal  de  nudity  complet 
n'elait  pas  le  costume  le  plus  convenable  a  un  ministre 
de  rtvangile  pour  apparaitre  aux  yeux  des  nalifs;  sans 
parler  de  la  chance  d'etre  saisi  au  passage  par  un  alli- 
gator. 11  fallut  ajourner  u  I'annee  suivantc  I'explora- 
tion  de  la  rive  gauche  du  Zouga  :  ce  qui  a  eu  lieu  en 
partle. 

Maturellenient  on  doit  desirer,  pour  le  complement 
d'une  si  interessante  dciicouverte,  que  le  cours  infi^rieur 
du  Zouga,  a  partir  de  Bakurcitsi ,  ou  les  voyageurs  I'ont 
rencontre,  soil  suivi  et  explore  tout  enlier  jusqu'ii  son 
embouchure  dans  I'Ocean  indien,  ou  dans  un  autre 
fleuve  a])oulissant  a  ccllc  mer.  C'etait  aussi  le  projet 
de  M.  Livingston  et  du  caj)itaine  Frank  Vardon  (de 
I'armee  de  Madras)  de  completer  ainsi  I'exploration 
de  celte  grande  riviere,  que  M.  Oswcll  suppose  tomber 
dans  le  Limpopo.  M.  Oswell  se  proposail  aussi  de  s'as- 
surer  si  Ton  pouvait  gagner  par  I'interieur  les  etablisse- 

(i)  Scconde  visile  dc  M.  Livingston  au  lac  iSgami  en  i85o.  Seloii 
M.  Oswell,  cette  largeur  vaiicrait  Piitiv  200  et  5oo  yardj  (i8,J  et 
457  metres). 


(  Si^'l  ) 
merits  portugais  sur  Ic  Zanibezo.  L'expL'rlence  acquise 
dans  ce  premier  voyage,  si  rempli  d'obslacles  el  de  diffi- 
cultes  a  cause  des  bois  inextricables  et  dcs  sables  qui 
sont  a  francliir,  facilitera  l)eaucoup,  sans  mil  doiite , 
les  excursions  sul)Sequenles. 

Les  Batouanis  n'ont  pas  de  communication  direcle 
avec  les  ^tablissemenls  portugais;  mais  S6b6toane,  le 
grand  chef,  qui  vit  a  200  milles  au  nord  du  lac,  dans 
une  ile  placec  sur  un  aifluenl  du  Tamunakle,  com- 
munique avec  eux  par  I'interm^diaire  d'une  autre 
tribu. 

Apres  ce  recit  succinct  des  decouvertes  de  MM.  Li- 
vingston, Oswell  cl  Murray  dans  I'Afrique  m^ridionale, 
nous  n'avons  plus  a  considerer  que  les  autres  voyages 
accomplis  jaar  MM.  Rebmann  et  Krapf,  du  memo  C(Me 
de  la  ligne  equinoxiale,  et  qui  ont  un  inleret  plus  grand 
encore,  parce  que  le  theatre  de  ces  excursions  est  plus 
rapproche  de  r(5quateur,  c'est-a-dire  peu  dloign^  de 
ces   regions  mysterieuses ,  oii  Ton  croit  aperccvoir  la 
I6te  du  bassin  superieur  du  Nil.  Ainsi  que  nous  I'avons 
dit ,  les  rivitres  al'ricaines  qui  s'^coulent  dans  la  mer 
des  Indes,  bien  que  presque  inconnues  au  dela  de  leur 
embouchure,  ont  semble  des  longtemps  etre  une  vole 
de  decouvertes  toute  naturelle  et  meme   plus  facile, 
par  la  raison  qu'il  n'y  avail  en  quelque  sorte  qu'a  les 
remonter  pour  penilrer  tres-loin  dans  I'intirieur.  II 
y  a  bien  des  annees  que  M.  de  Beaufort  voulait  pai  til- 
des limites  du  Senegal,  arriver  au  Loflili,  cl  le  des- 
cendre  jusqu'a  son  embouchuie,  pcndanl  qu'un  autre 
vovageur  reraonterait  le  fleuve  el  viendrait  a  sa  ren- 
centre.   On  a  renoncti  a  ces  projels  gigantesques  ot 
presque  fabulcux;  mais,  ce  qui  (itait  possible,  on  I'a 
Ml.    Avnii..   2.  22 


(   .^25  ) 

liMit^,  el  cninme  i!  anivo  souvenl ,  nii  lion  do  ce  qn'on 
vuulail  allciiulre..  on  a  Irouve  ce  qu'on  lie  clieroliait 
pas,  plus  inome  que  ce  qu'on  s'altendait  a  trouver. 

La  mission  du  reverend  J.  Rebmann  el  clu  reverend 
docleur  Krapf  est  stalionnee  a  Rabbai-Mpia,  non  loin 
de  Mouibas  (  h  degres  sud);  elle  a  commence  en  iShli. 
Le  premier  quitta  la  station  le  27  avril  18Zi8,  se  por- 
tant  au  pays  de  Jagga,  en  se  dirigeant  au  nord-ouest; 
il  etait  accompagne  par  neuf  liommcs.  II  traverse 
d'abord  une  parlie  du  pays  montiieux  de  Taila,  ou  est 
une  grande  montagne  appelec  Boora,  et  il  arrive  a  Bo- 
guda  apres  de  grandcs  fatigues,  le  guide  s'^tant  Ironipe 
de  I'oute.  Le  cbeniin  est  herisse  de  buissons  epais  ot 
epineux,  et  rendu  diflicile  par  les  incursions  cl  les 
depredations  des  <jallas,  vrai  fleau  des  tribus  de  Test. 
Nous  entrons  dans  ces  dt^lails  que  I'interet  et  I'inipor- 
tance  de  la  decouverte  rendenl  necessaires  et  feroni 
excuser. 

La  montagne  de  Boora  se  compose  de  plusieurs 
lignes  paralleles,  dirigees  nord  el  sud;  il  laihit  Irois 
jours  pour  les  iVancliir  I'une  apres  I'aulre  :  le  sol  est 
convert  de  bananiers  el  de  cannes  a  sucre.  Rien  do  plus 
pilloresque  que  celte  contree,  c'esl  la  nature  des  pays 
montagneux  dans  touie  sa  magnificence  :  ce  beau 
spcclacle  rappelait  a  iM.  Rebmann  les  montagnes  et  les 
vallous  du  Jura,  tant  I'air  elait  pur  et  Taspccl  deli- 
cieux;  cependant  I'air  des  valiees,  malgre  le  soloil 
convert,  ^lait  plus  chaud  qu'en  Europe.  «  J'elais,  dil 
))  Ic  voyageur,  dans  I'Al'rique  orientale,  a  pen  de  dis- 
»  lance  de  I'equaleur,  ct  je  raarchais  a  iravers  les  mon- 
»  lagnes  ct  les  valleos  de  Taita,  aussi  libre,  aussi  tran- 
))  quille  que  sur  leshauleiirsdu  Jura.»  Arrive  au  village 


(  323  ) 

tie  Miisagnombe ,  il  distribua  ses  presents  a  plusieurs 
chel's,  principaleinent  au  clief  Miuina.  On  liii  parlait 
clepuis  longteuips  d'une  rnonlagne  tr6s-grancle,  exces- 
sivement  clevee,  dans  le  pays  de  Jagga,  a  cinq  journees 
a  I'ouest  de  Taila  ;  el  comme  il  domandait  a  s'y  rendre, 
le  guide,  qui  iic  voulait  pas  se  risquer  a  une  si  grande 
hauteur,  se  Lorna  a  lui  niontrer  le  nionl  Tare,  a 
18  lieues  au  sud  ,  et  le  naont  Ugono,  a  20  lieues  au 
sud-oucst  ;  au  pied  de  celui-ci  est  le  lac  Ibe ,  qu'un 
houime  de  la  caravane  put  dislinguer  a  I'ceil  nu,  a 
celte  diblance.  11  continua  n^annioins  d'aller  en  avant 
avec  six  Taitas,  liavei'sant  d'epais  el  inextiicables  Luis- 
sous  el  plusieurs  rivieres;  la  nuit  relenlissait  du  rugis- 
seinent  des  hyenes.  On  arriva  le  10  du  mois  a  un  lieu 
oil  les  naturals  ont  I'habitude  de  pratiquer  de  grands 
irous  ou  pieges  converts,  dans  lesquels  viennent  se 
prendre  les  elephants  el  les  autres  aniniaux ,  comme 
dans  le  Ouaday  et  d'autres  contrees  de  I'Afrique  inte- 
lieure.  On  vit,  pendant  la  marche,  de  grandes  troupes 
de  zebres,  des  girafes  et  des  rhinoceros.  Ce  dernier 
animal  esl  celui  que  les  natifs  redoutent  le  plus;  des 
qu'ils  rapergoivent,  ils  courent  se  rel'ugier  sur  uu 
arbre.  Au  nord-est  se  dessinait  le  mont  Ongolia  aussi 
elev6  que  le  Boora.  G'esl  la  qu'cst  le  pays  de  Lkamba 
(Wakamha),  liniite  du  pays  des  Gallas  et  des  Taila. 
De  la  ,  les  montagnes  de  Jagga  s'apergoivent  pins 
distinctement ,  s'elevant  par  degres  jusqu'a  des  hau- 
teurs ininienses.  Le  11,  vers  dix  heures,  il  apergut, 
sur  la  grande  monlagne,  des  sommets  d'une  blan- 
cheur  reniarquable,  qu'il  crut  d'abord,  ainsi  que  son 
guide,  etre  un  nuage  blanc;  mais  a  peine  avaient-i!s 
fait  quelques  pas ,  que  cettc  explication  cessa  de  les 


( ?>n ) 

salisfalre,  cl  ]e  P'oide,  quoiqiic  ne  connaissanl  pas  cet 
objet  l/Innc,  snpposa  que  c'cHait  commo  qiielquo  chose 
de  froid  (coldness);  I'csprit  de  M.  r\el)iiiann  fut  fiapp(^ 
comine  par  un  eclair;  il  songea  aussilotace  7>icil hole 
de  V Europe,  comme  il  I'appclle,  si  connu  sous  le  nom 
de  neige  [the  most  del ightj'iil  I'ecognition  took  place  in  my 
mind  of  nnold  ivell-knoivn  pAiropean  guest  called  snoiv). 
Alors  aussi  s'expliqucrcnl  a  scs  youx  les  etranges  his- 
loiros  qu'il  avail  souvcnl  cnlenducs  sur  la  inontagne 
d'or  et  d'argeiit  du  Jagga ,  inaccessible,  scion  les  lia- 
bilants,  a  cause  des  mauvais  esprils  qui  en  ddfendent 
I'approclie.  «  Ccs  dihnons,  disent-ils,  onl  Uui  Leau- 
»  coup  de  gens  qui  avaient  voulu  la  gravir.  »  Ces  contcs 
devenaient  intelligibles  pour  lui ,  puisque  rextreme 
froid  qui  regne  dans  ces  liautcs  regions  devait ,  en  elTct, 
saisir,  glacer  et  tuer  de  pauvres  gens  a  denii  nus.  Le  re- 
verend ne  manqua  pas  d'expliquer  a  ses  compagnons 
de  voyage  la  nature  de  cclle  chose  blanche  qu'il  avail 
cru  d'abord  filre  sans  nom  parmi  eux ;  dcpuis,  M.  Krapf 
a  connu  ce  nom,  qui  est  Kibo,  lequcl  sc  confond  avec 
le  mot  qui  signifie  enu.  G'est  done  une  id6c  fondee  sur 
la  nature  de  la  neige  qui  I'a  fait  denommcr  par  les 
habitants,  et  ceux-ci  n'ignorent  pas  que  los  rivieres 
en  decoulcnt.  II  n'en  resulte  pas  moins  que  la  crainlc 
et  la  superstition  ont  delournci  les  nalurels  de  fairc 
I'ascension  du  Kilimandjaro  (Kiliman-dja-aro,  c'cst  le 
nom  de  la  monhigne).  Ce  nom  signifie  la  montngne  de 
la  grandeur  (Kiliman  ou  Kiriman,  veut  dire  mon- 
tagne)  (1).  On  raconte  qu'un  puissant  roi ,  lo  p6rc  du 
roi  acluel  de  Madjamo,  pays  Ic  plus  a  i'oucst  du  Jagga, 

(i)   Killina-(1o-innii-.l   (inonln'fne  ilc  rcau),  il'oii  le  lltuve  Quili- 


tnanrc. 


(  •'^ss  ) 

envoya  une  sorte  d'ambassade  au  mont  Kiliiiiandjaro, 
pour  examiner  sur  place  la  nature  de  cette  etrnngc 
chose  qui  couronne  la  montagnc;  lous  perircnt,  liors 
un  seul  liomme  qui  en  revint,  pour  raconter  le  sort 
de  ses  compagnons;  il  avail  les  mains  ct  les  pieds 
geles.  Lc  mont  Kilimandjaro  a  la  tele  ordinairement 
enveloppee  dans  les  nuages. 

Les  montogncs  de  Taila  ont  de  /i  a  6  000  pieds  d'el<i- 
vation ;  le  plus  haul  pic  s'appelle  Vcrdiga ;  les  mon- 
tagnes  s'adoucissent  par  degres  en  allant  vers  I'Duest, 
pour  se  relever  ensuite  brusquement  aux  monts  glaces 
de  Jagga.  Le  reverend  Rebmann  francliit  cnsuile  lc 
Loomi ,  apres  quoi  il  vit  des  arbres  de  la  plus  grande 
beaute,  un  sol  d'une  vegetation  luxuriante,  «  un  et6 
perpeluel,  dit  M.  Rebmann,  a  une  journee  seulemenl 
de  i'eternel  hiver.  »  Ce  Loomi  parait  se  confondre  plus 
loin,  dans  le  sud,  avec  le  Louffic,  tombant  dans  la  mer 
des  Indes  par  5"  1/2  sud.  Le  Goila,  traverse  par  le  voya- 
geur,  est  une  autre  belle  riviere,  encore  plus  grande 
que  le  Loomi,  el  qui  va  lc  rejoindre;  I'eau  en  est  tres- 
froide,  ce  qui  prouvc  assez  que  sa  source  n'est  pas  autre 
chose  que  la  neige  fondue  ;  puis  vient  une  vaste  plaine 
sans  aucun  etre  humain ;  les  montagnes  seulement 
sont  habitues,  chacune  par  une  tribu  distincte.  Cello 
de  Kilcma  donna  i'hospitalile  aux  voyageurs,  le  roi  les 
accucillit  amicalement ,  le  reverend  lui  oEfrit  son  ca- 
deau ,  ct  un  moulon  ful  tue  en  signe  d'amilie.  Le  25. 
mai,  M.  Rebmann  gravit  une  sommitc  d'environ  2  000 
pieds  de  haul,  d'ou  Ton  avail  la  pcrspeclive  la  plus 
etenduc,  jusqu'a  une  distance  de  plusicurs  juurnees 
aumidi;  la,  dil-on,  est  un  ancien  chateau  ruine,  oii  il 
resle  des  debris  de  canon  ,  el  qui  duil  avoir  appartenu 


(  a^rt  ) 

aux  Portugal?,  II  y  a  d'ailleurs,  dans  le  pays  de  Jagga, 
cliez  les  Madjame,  tribu  aborigine,  tradition  d'un  ('-ta- 
blissemcnt  portugais,  qui  existait  il  y  a  deux  slides. 
On  voit  encore  an  chateau  de  Mombas  line  inscription 
porlugaise  de  1639,  rpii  fait  mention  d'un  roi  fait  tri- 
bu laire  dans  les  temps  anciens. 

Pendant  lout  son  sejour  au  Jagga,  M.  Relimann  eul 
occasion  d'observer,  soil  le  sol ,  soit  les  habitudes  dos 
nalifs.  Les  monlagnes  de  Jagga  et  celles  dXgono  sent 
riches  en  fer  ;  les  habitants  ont  coutume  de  pricr  pour 
leurs  parents  d^funts,  ils  diposent  sur  lour  tombe  (In 
lait,  du  riz,  du  vin  de  palme  :  les  Jaggas  sont  uno 
race  belle  et  forte.  lis  font  un  fr6quenl  usage  dcs 
bains,  lis  ont  une  certaine  Industrie  et  travaillent  avcc 
adrosse  ;  les  femmes  font  do  la  brodcrie,  Los  Jaggas 
sont  plus  civilises  que  les  aulres  peuplades  ;  I'auloril*^ 
(hi  Mangi  (ou  roi)  y  est  phis  grande  qu'aillours.  On 
ne  se  marie  qu'avec  sa  permission.  Los  Iravaux  do 
lagriculture  sont  Ic  lot  des  femmes,  aussi  bien  que  le 
soin  du  menage. 

I,a  distance  en  ligne  droite  de  Mombas  au  piod  de 

la   monlagne  de  neige  est  dc  75  liouos.  Au  retour, 

M.  Rebmann  a  mis  ill  jours  pour  revenir  a  la  station  : 

jiarti  le  29  mai,  il  etail  rentr6  le  11  juin  a  Rabbai-Mpio. 

Quelques  semainos  apr6s  (juillct  18^9),  ledocleur 

Krapf    parlit   de    la   slation    pour   rCsanibara,    pays 

,    monlagncux  au   sudouosl,    et  aulour   duquol  parail 

circuler  la  rivid^re  do  Lodic ,  continuation  du  Loomi  ; 

ce  voyage  a  de  rinld-ret,   mais  le  sulvant,  du  memo 

(locteur  Krapf,  remporlc  de  beaucoup,   parce  qu'il 

conhrmc  pleinement  I'exislence  de  la  montagne   do 

noige,  du  Kilimandjaro,  qu'on  avait  quehpie    temps 


(  327  ) 
inise  en  doute.  II  se  dirigoa  sur  Madjame ,  le  point  le 
plus  occidental  de  Jogga ,  an  sud  de  la  montagno.  On 
marciia  dans  des  vallees  de  1  500  a  2  000  pieds  de 
profondcur,  au  fond  desquelles  coulent,  pendant  la 
saison  de  la  secheresse  (ce  qui  est  a  noter) ,  des  torrents 
perpetuels,  enlretenus  par  la  fonte  des  neiges.  En  un 
seul  jour,  on  traversa  douze  rivieres;  enfin  ,  on  arriva 
a  3  niilles  du  pied  de  la  montagne.  II  fut  facile 
alors  de  I'examiner  plus  en  detail  que  n'avait  pu  lo 
faire  M.  Rebmann;  elle  se  partage  en  deux  sonimit^s, 
distantes  de  10  a  12  niilles  :  celle  de  Test  est  la  phis 
basse  el  se  tcrmine  par  plusieurs  pics;  celle  de  I'oucsl 
est  considerablement  plus  elevee,  sous  la  forine  d'un 
dome  immense  :  c'est  elle  qu'il  faut  appeler  proprc- 
ment  la  montagne  neigcuse.  L'intervalle  qui  Ics  separe 
ressemble  a  un  dos  de  selle  ,  et  ne  parait  pas  con.'-orver 
la  neige. 

C'est  dans  ce  voyage  que  M.  Krapf  a  fait  la  dt^cou- 
verle  d'une  autre  montagne  de  neige  encore  plus 
^tendue,  plus  elev6e  ,  et  beaucoup  plus  a  I'ouest,  le 
mont  K^nia(l)  ( la  montagne  Blanche],  situ6  par  1  degre 
environ  de  latitude  sud  ;  il  en  sort  le  fleuvo  Dana,  qui 
\ient  aboutir  a  Melinde  ,  lieu  colebre  dans  I'bisloire 
des  voyages,  mais  aujourd'hui  sans  un  seul  babitanl. 
On  assure  qu'a  I'ouest  et  non  loin  du  mont  Kenia  ,  il 
existe  un  volcan  allume.  Au  nord,  est  un  lac. 

Au  niois  de  septembre ,  M.  Uebmann  faisail  tics 
pr^paralifs  pour  ailer  jusqu'au  pays  d'Llniameci,  situe, 
(lit-on,  a  150  on  200  heures  de  Jagga ;  mais  ce  voyage 
n'a  pu  s'effectuer,  les  Gallas  el  les  Wakuafi ,  toujours 

(i)  Aussi  a)>|)c'le  NcUukenia  et  Kiiem.^. 


(  328  ) 

en  guerre,  iufobliint  la  route  crLkauiboni  ot  porluiil  par- 
tout  le  incurlre  el  le  j)i]l:igo.  On  paile  aussi  d'un  tres- 
grand  lac,  beaucoup  pins  a  I'Duest  encore,  cekii  d'Ljnia- 
meci,  lout  a  fait  distinct  du  lac  Njassi,  et  navigable. 

Par  des  nouvellcs  posterieures ,  on  a  su  que  le 
guide  da  docleui'  Krapf  lui  a  assure  avoir  vu  a  Uscri, 
dans  le  Jagga,  dcs  liommes  d'uno  Ires-courte  stature 
(3  pieds  et  1/2  a  h  pieds  do  hauteur),  qu'il  appelle 
Wabilikinio  ,  et  que  le  docteur  assiuiile  aux  Doko  ou 
pyguiees  ,  dont  on  lui  avait  purle  dans  le  Choa ;  ila 
venaient  a  Uscri  du  nord-ouest,  pour  troquer  du  fer 
centre  des  verroterics  :  ces  nains  ont  une  epaisse  cheve- 
lure  pendante  sur  leurs  epaulcs. 

Elant  a  Lkaniba  ,   a  /lOO  milles  au  nord-ouest  de 
Mon:>bas,  dans  I'inlerieur,  le  docteur  Krapf  a  eli  par- 
faitement  lequ  des  habitants  ;  un  chef  lui  a  nieme  pro- 
pose do  le  conduire  a  300  milles  encore  plus  loin ,  a 
Kikuyu  ,  a  Mbe  et  a  Liimba  ,  aiais  il  faut  savoir  que  la 
route  a  parlir  de  la  rner  est  pleine  de  perils.  Lors  dc 
son  second  voyage,  M.  Krapf  n'ost  revenu  a  la  station, 
sain  et  sauf,  qu'apres  avoir  couru  niille  dangers  et 
cssuyc  un  combat  meurtrier,   ou  le  roi   avec    qui  il 
cheminait  fut  tue  a  ses  cotes,  enfin,  apr6s  avoir  cruelle 
iiient  souflert  de  la  faim  et  de  la  soif ,  sans  parlor  des 
b6les  fcroces,  qui  abondent  dans  le  pays.  Telles  sont 
les  dillicultesqui  arretent  les  missionnaires  dans  I'ac- 
com])lissement  de  leurs  entrepriscs  el  dout  la  science 
nc  saurait  trop  leur  tenir  coniple;  car  les  decouverles 
donl  clle  leur  est   redevablc  sonl  souvent  payees  dc 
leur  vie.  lis  uc  se  boruLnt  pas  a  eclaircr  la  geographic, 
ils  rccucilli  nt   cnccre   de   precieux  materiaux    pour 
I'etude  des  laiigucs,  dcs  idiomes,  et  c'est  hcureu:e- 


(  329  ) 

ment  une  des  n^cessites  de  leur  mission,  puisqa'il 
leur  faut  se  inellre  immedialcment  en  rapport  avec 
les  habitants.  On  doit  a  M.  Krapf ,  seulement  dans  ce 
dernier  voyage,  un  vocabulaire  Kihiau  ,  et  un  vocabu- 
laire  Kilima. 

La  Dana  ,  qui  descend  du  lac  plac^  an  pied  da  mont 
Kenia,  parait  elre  le  meme  fleuve  que  cclui  qui  aboutil 
a  la  mer  des  Indes  sous  le  nom  d'Ozi ;  on  pourrait  done, 
en  remontant  celui-ci,  arriver  directeaient  dans  I'inte- 
rieur  du  Iiaut  du  pays,  et  eviter  bien  des  perils  ct  des 
obstacles.  Outre  la  Dana,  il  sort  du  lac  deux  autres 
rivieres  dont  le  Nsaraddi ,  qu'on  dit  tomber  aussi  dans 
un  autre  lac  nomme  Baringo,  encore  jilus  grand, 
long  do  j)lusieurs  journees  :  ce  mot  de  Baringo  ,  veut 
dire  grande  mer. 

II  resulte  des  calculs  approximalifs  que  Ton  a  fails 
pour  determiner  la  hauleur  du  Kilimandjaro  ,  que  la 
sommile  est  a  environ  20  000  pieds  anglais  d'altitude, 
Iq  liunte  des  neiges  perpetuelles  a  cettc  latitude  elanl 
d'a  peu  pres  17  000  pieds.  Ce  meme  caicul  doit  s'appli- 
quer  au  mont  Kenia  comme  un  minimum  jusqu'a  ce 
qu'on  ait  observe  a  I'aide  d'inslruments. 

En  lerminant  ccs  opercus  des  voyages  en  Afrique 
executes  en  18/|9,  il  nous  reste  a  nommer  le  baron 
Midler,  de  Stuttgard,  naturalisle,qui  ne  s'est  pas  borne 
a  recueillir  des  observations  d'ijlstoire  naturelle,  mais 
qui  s'est  occupe  aussi  des  races  humaines  en  observa- 
teur  altentif.  II  a  parcouru  les  rives  du  liaut  Mil  Blanc 
avanl  le  reverend  dom  Rnobleclier,  dont  le  voyage  sera 
menlionne  a  I'd'jioque  du  procliain  concours,  ainsi  que 
les  decouverles  de  feu  Ricliardion  et  de  MM.  Bartli  el 
Overwek,  qui  ont  cu  un  giand  rclenlissenienl. 


(  Ui)  ) 

Tel  est  Ic  tableau  succinct  que  nous  ;ivions  a  ineltro 
sous  vos  ycux  pour  Ic  concouis  dc  ciUto  annec.  Les 
excursions  !es  plus  importantcs  sont  cclles  do  MM.  Li- 
vingston ,  Osweil,  Robinann  et  Kropf  en  Afrique,  el  cle 
M.  G.  Wallin  en  Aral)ie.  La  Commission  du  prix  an- 
nuel les  a  jiig(ies  dignes  de  noire  grande  m^daille 
d'argent;  ellc  accorde  des  mentions  honorables  a 
MM.  Thomj)son,  Cunningham,  Hooker  ol  Strachcy, 
pourleurs  voyages  dans  rinde;  a  MM.  Thomas  Brnnner 
et  Stokes,  pour  leurs  voyages  dans  la  Nouvelle  Zelande, 
el  a  M.  Georges  Squier,  pour  ses  voyages  archdolo- 
giques,  nolammenl  dans  I'Etat  de  Nicaragua. 

La  Soci^le  frangaise  de  geographic,  fid6le  au  plan 
de  son  institution ,  aimcra  loujours  a  recompenser  It- 
courage  tt  le  d6vouemenl  dcs  voyageurs  sans  distinc- 
tion de  nalionalile,  pcrsuadee  que  ravancement  dcs 
connaissances  dans  un  pays  quelconque  tourne  au 
profit  de  I'humanite  tout  entiere.  Aussx  esp6re-t-elle 
que  son  zele  et  ses  efforts  pour  los  progros  des  decou- 
verles  el  des  Etudes  geographiques ,  efforts  gencireuse- 
ment  continues  depuis  plus  do  ironle  ans ,  a  IraviMs 
bien  des  obstacles,  seront  cnfin  apprecies  dans  noire 
palrie  comme  ils  lo  sont  au  dehors;  qu'ils  lui  cunci- 
lieront  la  bienveillance  et  la  protection  du  gouvernc- 
ment;  enlin  ,  qu'ils  appolleronl  dans  ses  rangs  tons 
ceux  qui  prcnncnl  inl^ret  au  develop|)ement  dos  rela- 
tions I'ommercialos,  a  raccroissement  ile  la  richoss'' 
publiquo  el  a  I'lionnour  du  num  frangais. 

JoMAnn,  rapporteur. 


(  ^531    > 

NOTICE  NI&CROLOGIQUE 

sun         I 

M.    DIJ    BOIS    DE    MONTPERREIJX, 

Coriespondaiil  perpe'liiel  de  la  Suciete  <le  gecgiaiihie. 

PAR    M.    DE    LA    ROQUETTE, 

Sccrc'laire  general. 

I.DK  A  LA  STANCE  GENERALE  DU   2   AVRII,   I  85a. 

Messieurs, 

J'avais  annonce,  dans  le  rapport  quo  j'ai  eu  I'hon- 
neui-  de  presenter  a  voire  derniere  assembl^e  g^nerale, 
que  je  consacrerais  line  notice  necrologique  sp^ciale 
a  la  uiemoire  d'un  de  vos  plus  regrettables  corrospon- 
danls  perpetuels,  M.  Du  Bois  de  Monti'.erreux. 

C'est  ce  devoir  que  je  viens  remplir  aujourd'luii. 

Fred(^ric  Du  Bois  de  Montperreux,  n6  le  28  mai  1798, 
dans  le  village  Suisse  de  Moliers-Travers,  oil  son  pere 
avait  un  ^lablisseinent  de  commerce,  passa  les  pre- 
mieres annees  de  son  cnlance  a  la  campagne.  Ayant 
perdu  de  bonne  beurc  son  pere,  qui  s'eiait  rendu  en 
France,  ou  il  avait  ele  appele  pour  occuper  un  emploi, 
le  jeune  Du  Bois  se  trouva  avec  un  second  frere  el  deux 
sceurs  remis  a  la  direction  de  sa  mere ,  i'emme  douee 
d'une  baulc  capaclUs  A  dix  ans,  il  enlra  dans  I'instilut 
de  M.  Cbanel,  a  Saint-Aubin  ,  village  peu  eloign^  do 
Neuchatel;  et  il  continua  ensuite  ses  etudes  dans  le 
coli(^ge  de  cettc  ville;  il  y  monlra  une  grande  aptitude 
et  beaucoup  de  zele  pour  le  travail;  aussi  I'ut-il  lou- 
jours  place  aux  premiers  rangs. 

Sa  pliilosopbie  terminee  sous  un  maltre  qui  le  d6- 
tourna  de  la  cairiere  th^ologique  a  laquelle  il  desirail 


(  332  ) 

d'obord  sc  vouer,  Du  Bois  dc  Monlj^crreux  passa  deux 
ans  coniino  mailre-adjoint  dans  unc  pension  de  Saint- 
Gall.  11  en  sortit  nialade  au  mois  de  fdvrior  1819; 
a  peine  letabli,  il  partil  la  nieme  annee  pour  la  Cour- 
lande,  et  enlra  a  Mlltau,  dans  la  uiaison  de  M.  Ferdi- 
nand de  Ropp,  en  qualile  de  pr^ccpteur  des  enfants 
de  cet  honorable  gonliliiomme,  cliez  lequel  il  tiouva 
une  riche  biblioth^que  et  unc  belle  collection  de  ta- 
bleaux et  de  marbres  des  meilleurs  maltres,  ressource 
precieusc  pour  un  jeune  liomme  passionne  pour  les 
arts  et  avidc  de  s'inslruirc.  Apres  deux  ans  de  sejour  a 
Miltau,  Du  Bois,  qui  ne  s'y  croyait  pas  asscz  occup^ , 
fut  place  par  M.  Ferdinand  de  llopp  chez  son  frere 
Theodore,  residanl,  avec  unc  Ires-nonibreuse  fauiille, 
dans  sa  lerre  de  Pokroy,  en  Lilhuanic.  La  bibliolheque 
de  la  maison  etait  Ires -considerable  ct  surtout  abon- 
dammcnt  pourvue  d'ouvrages  sur  I'archilcclure,  que 
Du  Bois  s'auiusa  d'abord  a  parcourir,  et  qu'il  etudiu 
ensuite  avec  un  zelc  opinialre.  Longtemps  abandoon^e 
par  scs  proprietaires,  la  lerre  de  Pokroy  manquail  dc 
batinienls,  memo  des  plus  indispensables;  lout  clait 
dans  le  plus  uiblc  delabrcment.  Apres  avoir  pris  une 
connaissance  exacte  des  lieux,  rarchilecle  improvise 
tra^a  d'une  main  bardie  les  plans  de  lous  les  cliango- 
menls  qui  lui  paraissaient  necessaires.  II  veillait  a  Icur 
execution,  Iravaillait  souvcnt  dc  ses  mains,  pour  in- 
struirc  et  diriger  des  ouvriers  pcu  experimenles ;  il 
s'occupa  meme  de  la  crt^ation  d'un  grand  jardin  ,  et 
bientot  la  propriclc  pril  un  aspect  complolemcnt  dif- 
ferent :  la  valcur  en  fut  prodigicusemont  augmenleo. 

En  quittant,  en  1829,  la  Lilhuanie,  apres  y  avoir  se- 
journe  pendant  buil  ans,  Du  Bois  de  Montpcrreux  visila 


(  333  ) 

la  Podolie  ct  la  Volhynio,  loujours  observant,  eludiant 
el  recueiliant  des  nialerlaux.  En  J 829,  il  acconipagna 
a  I'Liniversile  de  Berlin  un  jeune  polonais,  Alexandre 
Razlborowsky,  dont  la  direclion  lui  avail  ele  confi(5e, 
et,  deux  ans  aprcs  (1831) ,  il  fit  avec  son  eleve  un  voyage 
en  Suede,  en  Danemark,  et,  plus  tard,  sur  les  Lords 
du  Rhin.  Ce  ful  pendant  son  s^jour  dans  la  capitale  de 
la  Prusse  qu'il  publia,  sous  les  auspices  de  M.  Leopold 
de  Bucb  ,  qui  lui  avail  voue  un  veritable  allacliement, 
un  opuscule  intitule  :  Conchyliologie fossile ,  ou  Apercii 
geognostique  des  formations  du  plateau  volhyni-podolieiiy 
accompagn(^  de  huit  planclies  lilliograpbiees  et  d'une 
carte  des  localites  oii  il  avail  observe.  Get  ouvrage, 
publie  en  1831,  et  place  fort  haul  dans  I'opinion  des 
bommes  corapetenls,  tanl  pour  la  juslesse  des  vues 
que  pour  Texactitude  des  dessins,  executes  par  I'auteur 
lui-meme,  fonda  sa  reputation  comme  geologue. 

Au  mois  d'aout  1831  ,  Du  Bois  de  iMontperreux 
revint  en  Podolie,  ou  il  s'arrela  encore  se])t  a  buit 
mois,  pour  explorer  les  rives  du  Dnieper.  11  executa 
pendant  cette  excursion  une  quanlite  de  plans,  de 
carles,  do  coupes  de  terrain,  de  vues  piltoresques, 
vraiment  incroyable;  ils  auraicnt  sufli  pour  occuper 
la  vie  enliere  d'un  bomme  moins  beureusement  dou6 
que  lui.  11  s'allacbail  parliculierement  aux  nombreux 
monuments  epars  dans  ces  vastes  contrees,  restes 
d'une  civilisation  d^cbue  ,  et  qui  lui  servaient  de 
jalons  pour  d^couvrir  les  traces  des  migrations  des 
peuples  dont  il  s'etalt  impose  la  tacbe  de  retrouver  les 
origincs,  a  tlefaul  d'aulres  traditions.  Quelques  amis, 
qui  ont  eu  le  bonbeur  de  I'accoinpagner,  claienl  lou- 
jours surpris  do  la  prodigieusc  adivilt!',  de  I'elendue 


(  :^3/i  ) 

el  de  la  varidlij  de  ses  connaissances.  Lc  r6gne  V(^g6tal 
aussi  avail  une  pari  dans  scs  synipalliies ,  et  la  hola- 
nique  iui  doit  phislciirs  ddcouveries  inl(;rcssanles. 

Au  piinlemps  de  1832,  il  explora  la  Crimcic,  d'oii 
un  vaisseau  russe  le  porta  dans  les  provinces  Iranscau- 
casiennes.  Ce  fut  alors  qu'il  comnaenca  le  grand  voyage 
qui  a  principaleinenl  elabli  sa  reputation  ,  et  auqutl 
furenl  consacr^es  les  annees  1832  a  183/|.  La  pUipart 
du  temps,  Du  Bois  de  Moiilperreux  n'avail  pour  coni- 
pagnons  que  quelques  guides;  born^  a  ses  ressourcos 
personnelles,  il  n'elait  soutcnu  que  par  I'energie  de 
son  caraclere.  II  s'elait  piesenlc  aux  fronli^res  des 
htats  russes  seul,  obscur,  inconnu  el  sans  autre  litre 
a  la  bienveillance  que  la  ferme  resolution  manifeslee 
par  Iui  de  consacrer  lous  ses  moments  a  des  rccher- 
ches  qui  pussent  un  jour  fitre  utiles  a  la  science;  le 
souverain  eclaire  de  ce  vasle  empii^e  I'encouragea  et  fit 
loniber  loutes  les  enlraves  qui  auraient  pu  arreler  ses 
premiers  pas.  Parti  de  Sevastopol  au  mois  de  mai  1832, 
Du  Bois  de  Montperreux  employa  irois  annees  a  visiter 
la  Crimee,  I'Lkraine,  la  Nouvelle-Russie ,  et  toules 
ces  contr^es  jadis  si  celebres  qui  portent  les  noms 
de  Caucasic,  d'Abkhasie,  de  G^orgie,  d'lmt^reli,  d'Ar- 
m^nie.  Circonscrivant  la  haute  cbalne  du  Caucase , 
ce  grand  centre  de  tanl  de  ph^nomenes  bistoriques  et 
geologlques,  il  jjarcourut  ses  valines,  etudia  I'antique 
Kolklie,  ou  Georgien  ,  pres  des  sources  du  Phase  et 
du  Cyrus,  et  descendit  dans  les  vasles  bassins  ou  ce 
peuple  a  concentre  ses  monuments,  ses  capitales ; 
puis  il  penelra  dans  TArmcnie,  au  dela  des  hautes 
montagnes  qui  la  separcnl  de  la  G^orgie,  et  au  pied 
de  eel  Ararat ,  loujours  n)ysl6rieusemenl  couronne  de 


(  335  ) 
neigos  rl  do  glacos,  Suivant  ensuito  In  rours  do  I'im- 
pc'tueiix  Amxc,  celte  limite  de  I'enipire  d'Alexandre, 
jusqu'aux  larges  plaines  de  la  mer  Caspienne,  il  coupa 
le  Caucase  par  sa  ligne  ceulrale,  pour  i-entrer  dans  ces 
steppes  immenses,  vasles  palurages,  vastes  champs  de 
bataille,  grandes  routes  de  tant  de  peuples  divers  qui, 
sorlis  de  I'Asie  comme  un  torrent,  ont  6te  refoules  vers 
Je  nord  parriaiposanl  obstacle  du  Caucase,  sans  pou- 
voir  le  franchir.  Les  canipenients  et  Ics  tomboaux  des 
Scythes,  des  Sarniales,  des  Goths,  des  Slaves,  des  Va- 
regues,  fixerent  particulierement  son  attention,  et  il 
salua  en  passant  la  presqu'ile  Taurique,  grand  marche 
de  la  Grece  antique,  qui  recele  encore  tant  de  tr6- 
sors,  dont  noire  savant  voyageur  a  decouvert,  d(!!cril 
et  dessine  une  partie,  en  tra^ant  I'histoire  et  les  mi- 
grations sucoessives  des  anciens  et  des  nouveaux  ha- 
bitants. 

A  peine  eut-il  tevmine  ce  voyage  si  interessanl  a 
lant  de  titres,  qu'il  alia  passer  I'hiver  en  Lithuanie 
chez  M.  Theodore  de  Ropp,  son  patron  et  son  ami; 
puis  il  rcvint,  I'annee  suivante,  a  Berlin,  ou,  comme 
lors  de  son  premier  sejour,  il  suivit  plusieurs  cours 
et  froqnenla  les  nombreux  savanis  que  renfernio  celte 
capilale,  cherchant  jusqu'au  dernier  moment  a  aug- 
menler  la  masse  de  scs  connaissances,  qu'il  ne  Irou- 
vait  jamais  assez  elendues,  pour  entreprcndre  la 
redaction  de  I'ouvrage  dont  il  venail  de  reunir  les  prin- 
cipaux  materiaux.  C4'est  en  1836  qu'il  retourna  duns  sa 
patiie. 

Pendant  le  sejour  qu'il  fit  plus  tard  en  France,  Du 
Bois  de  Montp(  rreux  soumil  a  la  Sociel^  de  geographie 
phisieurs  menioires  sur  los  races  caucasiennos,  sur 


(  330  ) 

quelqnes  points  d'arclioologic  cl  do  pt^ographie  an- 
cienno  (1),  el  enfin  Ics  nianusciils  cic  son  exploration 
de  la  Crinide,  du  Caucase  et  de  rArnK^nic ,  alnsi  quo 
Ics  planches  et  les  cartes  qu'il  se  proposait  d'y  joindre. 
line  commission  ,  composee  de  MM.  Walckenaer,  Jo- 
mard  ,  Eyries,  de  la  Renaudieic  cl  Roiix  de  Rocliclic, 
aj)preciant ,  par  Torgane  dc  ce  dernier,  nomrae  rap- 
porteur, Ic  merltc  dcs  immenscs  travaux  du  savant 
neucliatclois  sur  les  regions  situi^cs  au  nord  et  a  Toriont 
dc  la  mer  Noire,  qu'il  avail  examinees  et  decriles  sous 
tous  les  rapporls  qui  pouvaient  allirer  FaUcnlion  du 
g6ogi'aj)lic,  du  gdologue,  dc  riiislorien,  de  I'antiquaire, 
de  I'arlistc  et  de  Fobscrvaleur,  diiclda  qu'il  Femporlait 
sur  lous  ceux  qui  s'etaicnt  jirescnles  au  concours,  et 
lui  adjugea  le  grand  prix  annuel  de  181^8. 

Avant  la  publication  dc  son  voyage  (2),  M.  Du  Bois 
de  Montperreux  avail  elc  nommd  adminislrateur  du 
Musec  de  Neuclialol,  el  charge  plus  specialemonl  de  la 
partie  olhnographique  el  numismalique  de  cet  dtablis- 
semcnt.  En  18/il,  il  ful  elu  professeur  d'arch^ologie  a 
rAcademie  de  cette  ville,  place  qu'il  occupa  jusqu'en 
lS/i8;  a  cclle  6poque,  il  ful,  a  la  suite  de  boulevcrse- 
mcnls  poliliqucs,  brusquemenl  destituc,  ainsi  que  lous 
ses  collegues  (3). 

(i)  Ce  ilernicr  nii'moire  av;iit  ulc  ili'jh  snuniis  j).ir  lui  avcc  plus  Je 
doveloppeiDcnis  a  l'Acaik'n)io  dcs  inscripiions  ct  belles-lettres. 

(a)  Cette  puljlication  a  ole  faite  a  I'aris  de  i83c)  a  I  843,  en  6  vol. 
in-S",  sous  le  litre  de  Voyage  auloiir du  Caucase,  chez  Ics  Tclierkessei 
et  les  Abkases,  en  Colchide,  en  Georjie,  en  Aimeine  et  en  Ctimde.  Les 
planches  ct  Ics  cartes  dn  {jrand  atlas  in-fol.  qui  raccompapne,  el  <pii 
est  dedie  a  rcrnpcr(Ui-  dc  lUissir,  onl  etc  lilliographiees  a  Neuchatel. 

(3)  M.  Uu  )!«is  de  Montperreux  avait  jtriuiitiveiuent  fait  don  a 


(  337  ) 

Rentri^  dans  la  vie  pi'ivee,  clonl  personne  plus  que  liii 
n'^tail  capable  d'ajiprecier  les  douceurs  et  d'einployer 
utilenient  les  loisirs,  Du  Bois  de  Monlperreux,  qui  avail 
Spouse  en  1839  la  veuve  d'un  de  ses  parents,  madame 
Ther^se  Du  Bois,  nee  Montandon,  prepara,  sous  le  litre 
i\''Jiitiquites  neuchdteloi.ses ,  un  important  travail,  dont 
il  s'occupait  depuis  18/|3,  et  qui  devait  enibrasser  les 
monuments  des  premiers  ages  de  I'histoire  de  Neu- 
chalel ,  jusques  et  y  compris  les  comtcs  de  I'ancienne 
maison  de  ce  nom.  Malheureusement,  aux  agitations 
morales  vint  sc  joindre  le  ressenlimcnt  d'une  fifevre 
intermittente  qu'il  avail  gagnee  dans  la  Transcaucasie, 
et  les  remedes  heroiques  employes  pour  le  soulager 
port6ront  une  grande  atteinte  a  son  robuste  tempera- 
ment. Quoique  le  mal  qui  le  minait  sourdement,  et 
auquel  il  fmit  par  succomber,  ne  valenlit  en  rien  son 
activity,  et  qu'il  eut  presque  jusqu'a  ses  derniers  mo- 
ments la  plume  ou  le  crayon  a  la  main ,  il  ne  put 
mener  completement  a  fin  I'oeuvre  qu'il  voulait  con- 
sacrer  a  I'histoire  ancienne  de  sa  patrie  (1).  II  cessa 

I'Academie  de  Neuchatel  Jes  belles  collections  recueillies  par  lui  dans 
le  coui's  de  ses  voyajjes;  mais  a  la  suppression  de  cette  Academie  en 
1848,  il  reporta  ses  dons,  devenus  sans  objet,  a  la  ville  de  Zuiicli,  oil 
il  avail  des  relations  fort  intimes  avec  divers  savanis,  et  dans  lo  but 
d'etre  encore  utile  a  sa  patriu  au  cas  oil  une  Uiiiversite  federale  vien- 
drait  a  s'y  ctablir. 

(1)  Les  nornbreuses  plancbes  de  cet  ouvrage,  toutcs  dessinees  de  la 
main  de  M.  de  Montperreux,  etaient  terminees  a  sa  mort;  il  restait  a 
rediger  le  texte,  pour  Iccjuel  il  n'avait  laisse  que  des  notes  imparfaites, 
(jue  M.  Sandoz  Roliin,  ancien  president  du  canton  de  Neuehalel,  a 
bien  voulu  sc  cliai{;er  de  rediger  et  dc  completer.  La  premiere  partie 
de  I'ouvraje  de  M.  Du  Bois,  formant  un  volume  in-4",  a  ete  publie'e 
a  Zurich  en   i852  par  les  soins  et  aux  frais  iIc  la  Socirtc  d't'mulation 

III.   Avnn..   3.  '2Z 


(  338  ) 
de  vivre  le  7  mai  1850,  dans  sa  rc^siilence  do  Peseux, 
pr6s  dc  Ncuchulel,  ne  laissanl  a  sa  fcnime  el  u  la  jeune 
fille  qu'elle  avait  eue  do  son  premier  manage,  et  que 
Du  Bois  cherissait  comme  son  propre  enfant,  qu'une 
modeste  fortune,  mais  aussi  le  souvenir  d'un  noble 

■palriotiqiie  de  Neuchatel,  dissoute  depuis  1 848.  Elle  porte  le  litre  de  : 
Antiqnites  de  Ntuchatel,  est  piecedee  d'une  Notice  sur  M.  Du  Bois^ 
i-t  conipreud  Go  planches  relatives  au  Bourg,  a  la  Coliegiale,  et  an 
Chateau  de  NL-uchatel.  La  seconde  partie  lenfermera  les  antiqtuli's 
celtiques  et  romaines,  avec  iin  Atlas  bistorique  pour  la  Suisse  ro- 
niaiide;et  la  iroisienie  olfrira  les  sceaux ,  les  nicdailles,  et  les  mon- 
naies  de  Neucliaiel ,  dessines  par  M.  Du  Bois  avec  une  rare  perfer- 
tioii.  Les  planches  gravees  de  la  premiere  [lartie  laisscnt  bcaucoup  a 
desirer  quant  a  leur  execution. 

Outre  les  ouvrages  deja  cites  dans  la  Notice,  on  doit  a  M.  Du  Bois 
de  Montperreux  les  opuscules  suivants  : 

1.  Geognosthche  Bemerkungen  ilber  Lithaucn,  inscre  dans  le  t.  V] 
des  Ardnv  fixr  mineralogie,  geognosie,  du  docteur  Karstcn.  Berlin, 
I  83o.  In-8". 

2.  Excursion  aux  raptdes  de  I'Araxc,  dans  les  Nouvclles  anniilcs 
des  voyages.  Paris,  l836. 

3.  Lettrcs  sur  les  princ.ipaux  ■phdnotnenes  (jeologiqucs  da  Caucase  el 
de  la  Crimc'e,  adressees  a  M.  Elie  de  BeaunionI,  Paris,  9  mai  i  887,  el 
inserees  dans  le  Bulletin  de  la  Sociele  gi^ologique  de  France,  r(''uiiii)ii 
extraordinaire  a  Alencon,  sepleniLre  1837,  avec  une  pl.inclie. 

4.  Des  Tunndus,  des  Forls,  des  Ulardelles,  et  des  Hemparts  de  la 
Russie occidentale,  en  trois  articles,  insert's  dans  V.hinuuire  det  voyages 
el  de  la  geocjraphie.  Paris,  Hide,  i8/|5,  1846  et  1847- 

5.  Le  Chateau  de  Pounir,  I'-pisode  de  1  liisloire  de  Lit iiuanie,  iii-,i'i(' 
dans  la  Hevue  Suisse,  nuniero  de  septendjre  1846. 

6.  La  Bataille  de  Grandson,  insere  dans  le  Mittlteiluiigni  iler  /ii- 
rischen  antiquarischen  Gesellschaft ;  t.  H. 

Et  quelques  manuscrils  sur  la  collcgiale  de  Payerne  et  sur  leglise  tie 
Pioniaiii-Moticrs,  (pii  seront  publies  probal)l.;rnent,  avec  les  dessins 
(lui  l(  s  acconipajjncnt,  ilans  la  seconde  partie  des  nionunienis  dc 
Keucliatel. 


(339  ) 

ccEur,  d'un  esprit  distingue,  avec  la  repulalinn  d'uii 
savant  honorable.  La  Societe  des  beaux-arts  lui  avail 
decerne  une  m^daille,  et  il  etait  en  meme  temps  cor- 
respondant  perpetuel  de  notre  Societe,  menibre  de  la 
Soci6t6  geographique  de  Londres,  ainsi  que  de  plu- 
sieurs  autres  societes  savantes. 

«  Rarement,  »  dit  en  parlant  de  M.  Du  Bois  de  Mont- 
perreux  un  juge  competent,  M.  Brosset,  meinbre  de 
I'Academie  des  sciences  de  Saint-Petersbourg,  «  rare- 
ment un  exploraleur  de  contrees  lointaines  reunit  en 
lui  tant  de  moyens  de  succes.  Habitue  a  manier  le 
crayon  du  dessinaleur,  le  marteau  du  geologue,  les 
instruments  precis  du  topographe,  amateur  urudit  de 
numismatique  et  d'antiquit^s ,  ayant  i'espril  nourrl 
par  une  vaste  lecture,  observateur  attentif  et  eclaire  de 
toute  espece  de  faits,  et  sacbant  donner  a  son  style  le 
coloris  d'une  imagination  ardentc,  il  n'est  pas  t^ton- 
nant  que  son  livre  (1)  forme  une  sorte  d'encyclopedio 
caucasienne  qui  pourra  etre  surpassee  dans  quelques 
parties,  niais  qui  sera  difTicilcmenl  egalee  dans  I'en- 
semble.  Quant  aux  monuments  georgiens  qu'il  a  si 
bien  decrits,  dit  le  meme  savant,  Du  Bois  de  Montper- 
reux  est  le  premier  qui  en  ait  releve  les  inscriptions, 
car,  avant  lui,  un  prejuge  re^u  en  niait  n^enie  I'exis- 
tence.  J'ai  pu  personnellement ,  ajoute  M.  Brosset, 
profiter  des  indications  de  M.  Du  Bois  et  en  verifier  sur 
place  I'exactitude.  » 

D'un  esprit  juste,  dune  intelligence  superieure  et 
d'un  caract^re  pers^verant,  Du  Bois  de  Montperreux, 
qu'aucun  obstacle  n'arrelait,  a  parcouru  sa  carriere 
scientifique  au  milieu  de  fatigues  incessantes,  d'elVorls 

(j)  Voyaqe  nulour  du  Caitcuse,  elc,  etc. 


(  3/,0  ) 

et  de  veilles.  Douo  d'uno  rare  modesllo,  d'lino  extreme 
bienveillance,  on  poui'i'ait  dire  d'une  singuliore  l)on- 
liomie,  jamais  ii  ne  soupconnait  le  mal.  Rondant  lou- 
jours  justice  au  moindre  meritc  de  ceux  qu'il  aurnit  pu 
considerer  comme  ses  rivaux,  il  s'efTacait  en  loule  occa- 
sion, et  ne  raontra  en  aucune  circonstance  d'autre  am- 
bition que  celle  du  bien ;  aussi  n'eul-il  pas  un  seul  d6- 
Iracteur,  tandis  qu'il  s'^tait  concilie  Tcstime  ct  Tamiti^ 
des  Humboldt,  des  Leopold  de  Buch,  des  Llic  de  Beau- 
mont, dcs  Brossel,  dos  Meycndorf,  etc.,  on  pourrait 
dire  de  toutes  les  personnes  on  (^tat  do  I'apprecier  qui 
I'avaicnt  connu  (1). 

Tel  etait,  messieurs,  le  savanl,  I'liomme  cslimablo, 
dont  j'ai  essaye  de  vous  rappeler  le  souvenir,  el  dont  la 
perte  a  laiss^  un  grand  vido  dans  les  rangs  de  vos  cor- 
respondants  pcrpeluels. 


ISOUVELLES  DU  HAUT  FLEUVE  BLANC, 

commuisiqu£es  par  m.  A^T.  d'abbadie. 

M.  Vaudey,  consul  de  Sardaignc  a  Kharloum,  vient 
de  ra'envoyer  des  nouvelles  interessantcs  du  haul  fleuve 

(i)  M.  Ic  professeur  Charles  Godet  et  M.  Brosset,  <[ue  j'ai  doji  cite', 
ont  public,  le  premier  a  Neuchatel,  ou  il  I'l.iit  inspecteur  des  etudes  du 
college  avant  18/(8,  et  le  second  a  Saint-Pet ersbour^j,  des  notices  ne- 
crologitfues  sur  M.  Du  Bois  de  Montpeneiix;  j'ai  d('j,\  iudiquc  celle 
qui  est  en  tele  ile  I'ouvrage  postliuiiie  du  savant  iicucliatcldis;  j'en 
connais  unu  quatrieme  qui  a  paiu  on  allemaiid,  a  Zuiiidi  (i8j2),san3 
nom  d'auteur,  comme  la  precedcnte.  Les  renseignements  quej'ai  puises 
dans  CCS  notices,  dans  la  relation  du  Voyaije  antour  du  Caucase,  etc., 
et  ceux  qui  m'ont  ete  communiques  par  mailame  veuve  Uu  Bois  de 
Monipeireux,  par  M.  Louis  Coulon  fiU,  ci  par  M.  de  Sandoz  Rollin, 
ni'oni  servi  a  n'di{;er  celle  (|ue  je  donne  ici. 


(  3H  ) 
Blanc,  sur  leqiiel  M.  Brtin  Rollel  a  naviguo  au  commen- 
cement de  I'annee  derniere.  D'api-^s  ce  voyageur,  Ics 
barques   ordinairement   employees  sur   ce  fleuve  ne 
peuvent  aller  en  amont  de  Bellenia,  ville  ou  s'est  6tabli 
Ic  missionnaire  dom  Angelo  Vinco.  M.  Rollet  a  suivi  la 
meme  branche  que  le  savant  dom  Ignace  Knobleclier, 
la  memo  encore  dont  I'existence  fut  revelee  au  monde 
savant  en  ISZiS  par  le  voyage  de  M.  d'Arnaud.  On  sait 
d6ja  que  Ic  fleuve  Blanc  a  trfes-peu  de  pente  d^s  le 
11°   degre  de  latitude  nord.   Ses    caux   sonl  presque 
stagnantes  a  partir  de  ce   point  jusqu'au  7=  degr^  de 
latitude,  ct  c'est  dans  cet  espace  de  plus  de  300  milles 
g^ographiques  que   le  fleuve  recelc,  au  milieu  de  ses 
meandres  ,   des  fievres   terribles   que    redoutent    les 
plus  bardis  voyageurs.  Heureux  ceux  a  qui  un  vent 
propicc  permet  de  francbir  promplement  ces  tristes 
marais!    Ea    attendant   qu'on    applique  la  vapeur  a 
I'exploralion  de  ce  fleuve  encore  si  peu  connu  ,  je  me 
bornerai  a  mettre  en  relief  I'assertion  si  remarquable 
deM.Vaudey,  que  les  expeditions  faites  jusqu'ici  n'ont 
jamais  remonle  qu'un  seul  des  aflluents  qu'elles  ren- 
contrent,  et  qu'il  existe  plusieurs   do  ces  Iributaires 
dont  les  noms  memes  sont  encore  un  mystfero  pour  la 
science. 

Une  leltrc  de  M.  Rollet,  dont  je  dois  la  communica- 
tion au  zelo  do  M.  Vaudey,  ajoute  encore  des  details 
inleressants  sur  le  fleuve  Blanc  : 

«  Bellenia  est  une  ville  siluee  sous  li"  30'  (1)  de  lati- 
tude nord,  au  sud  des  montagnes  des  Berrs,  Nigello, 
I'un  des  cbefs  indigenes  qui  prenait  les  barques  des 

(l)  Selon  la  Icllrc  do  iM.  IioIIlI. 


(  3/i2  ) 

Europ^ens  ])our  cles  maisons  que  rinondatioii  aurait 
(letachees  dcs  rives  du  floiivc,  Nigello  a  accompagne 
MM.  Lafargue  ct  Rollcl  jusqu'a  Khartoum;  hi,  il  a  pris 
Ics  chevaux  pour  dcs  z^brcs  et  les  chameaux  pour  des 
girofes.  » 

MM.  Lafargue  ct  Rollct  ont  nou6  des  relations  avcc 
les  Berrs,  les  Lok^s,  les  Mekedos  et  les  Ouguars.  Les 
Irois  prcnii(ires  peuplades  se  trouvent  depuis  trois  jus- 
qu'a Imit  journ^es  de  route  a  Test  de  Bellcnia.  La  der- 
niere  tribu,  qui  est  tr^s-considerable,  liabite  les  bords 
du  fleuve,  au  sud  de  Lokaya;  ensuite  viennent  les  Pou- 
londj ,  pres  des  calaractcs  situ^es  a  buit  journ^es  au 
sud  de  I'ilc  de  Djanfar.  Au  dcla  de  ces  cataractes,  Ic 
fleuve  fait  d'abord  un  coude  au  sud-cst;  puis,  arrive 
eidrc  3  et  2°  30'  de  latitude  nord ,  il  se  dirige  a  I'est- 
iior<l-ost  vers  les  monlagnes  des  Gallas,  d'oii  viennent 
deux  rivieres  qui  se  raelent  a  lui,  entre  le  6°  et  7*  degre 
dc  latitude  nord.  Le  fleuve  fait  ainsi  une  prcsqu'ile  , 
large  de  vingt-cinq  journeos  de  marcbe,  ou  150  lieues, 
ct  situec  par  environ  5°  de  lalilude.  Les  Lokfes  et  les 
Berrs  rencontront  le  fleuve,  soit  qu'ils  se  dirigent  au 
sud-esl  de  leur  pays,  soit  qu'ils  aillenl  vers  le  nordest, 
cote  j)ar  lequel  ils  sont  souvent  en  guerre  avcc  leurs 
voisins  les  Galla;=.  Au  dire  des  Berrs,  le  Nil  recevrait 
encore,  vers  le  3"  degre  de  latitude  nord,  un  autre  af- 
fluent qui  parait  venir  de  Test.  Les  Blidos  vivont  entre 
cet  afiluenl  et  la  rive  gauche  du  fleuve.  lis  sont  en  rap- 
port avec  des  niarchands  blancs,  qui  portent  la  barbo 
el  qui  ont  des  cheveux  longs  ct  lisses.  Cos  marchands 
viennent  chaque  annde  de  I'ouest  pour  acheter  chez 
les  Blidos  de  I'ivoire  que  ceux-ci  vont  cheiclier  juscjue 
chez  les  Barri.  Ces  niarchands  se  diseut  issus  dc  gens 


(    Uo    ) 

blancs  coinine  nous,  ayant  des  ai'ines  a  feu,  et  qui  les 
ont  al)andonnt^s  dans  un  pays  entoure  de  inontagnes, 
a  deux  niois  de  la.  Outre  leur  lance  et  leur  bouclier, 
ils  portent  des  sabres  d'Allemagne  a  deux  tranchants  : 
leurs  maisons  sont  baties  en  briques  cuites,  et  ils  con- 
naissent  I'ecrlture.  Les  marcbandises  qu'ils  portent 
chez  les  Barri  consistent  principalement  en  porcc- 
laines  ou  coquillages  dits  Cauri,  et  en  bracelets  do 
jaiton  ,  dont  nos  voyageurs  Europ^ens  ont  vu  plusieurs 
ecbanlillons.  Les  Barri  se  rendent  chez  les  Blidos  en 
vingt-cinq  journ^es  de  marclie ,  dans  la  direction  du 
sud-est.  Le  pays  qu'ils  iravcrsent  est  accidente  et  coupe 
par  des  canaux  aboutissant  au  fleuve,  qu'ils  passent 
a  la  nage.  Les  Barri  portent  de  I'ivoire  chez  les  Blidos, 
qui  font  parvenir  cette  denree  aux  marchands  blancs; 
ceux-ci  les  vondent  a  des  Irafiquanls  rouges,  qui  com- 
rnuniquent  diroclenient  avec  les  coniptoirs  situes  sur 
I'ocean  Indien.  Le  vieux  Laoutor,  oncle  de  Nigollo,  et 
fr^re  de  Lagou,  roi  des  Berrs,  raconle  que  ces  mar- 
cbands  blancs  venaient  cbaque  an  nee,  du  temps  de  son 
pfere,  acheter  do  I'ivoire  chez  los  Barri,  qui  mirenl  fin 
aces  relations  en  egorgeant  toutc  la  caravane  pendant 
son  somrneil.  Lorsde  I'arrivee  des  premiers  Turcsct  des 
Europeans  chez  les  Barri ,  ces  pcuplcs  crurent  naive- 
ment  que  les  nouveaux-venus  (^taienl  les  membres  de 
la  caravane  rcssuscilee,  qui  venait  lirer  vengeance  de  cc 
massacre  conimis  depuis  plus  de  quatre  vingts  aiis. 

Quand  les  Barri  ont  tue  un  lion  ,  ils  le  briilcnt 
d'abord,  puis  jettent  ses  cendres  aux  vents,  alin  de 
I'empecher  dc  prendre  sa  premiere  forme.  Leurs  jon- 
gleurs pretendent  lire  dans  I'avenir  au  moyen  de  signes 
qu'ils  Iracenl  sur  des  tablettes. 


(  3/iA  ) 

M.  Rollol  a  ap|)ris  rcxislence  d'un  cours  d'eau  qui, 
d'un  poinl  situe  au  siul  de  la  calaraclc  de  Djanfar, 
coule  parallclcinent  a  trois  journees  de  distance  de  la 
rive  occidenlale  du  flcuve  jusqu'aii  Din,  dont  ronibou- 
chure  esl  par  7°  dc  Jatilude  nord.  Afin  de  visiter  ce 
canal,  M.  Rollcl  laissa  la  barque  aBouigu,  avcc  M.  La- 
fargue  ,  ct  parlit,  lui  seplieme,  avec  le  noninie  Dout, 
chef  des  villages  Reks  qu'il  avail  a  traverser.  Get 
honinic  clait  aussi  parent  du  roi  des  Loots,  chez  lequel 
M.  RoUel  devait  se  rendrc.  Malheureusement  les  indi- 
genes prirent  ce  dernier  pour  un  magicien,  lui  firent 
subir  plus  dune  avanie ,  et,  nialgrd  les  efforts  de  son 
guide,  il  crut  prudent  de  retourner  sur  ses  pas.  Un 
desert  large  de  deux  journees  et  inleste  de  lions  le  se- 
parail  encore  des  Loots. 

La  terre  des  Barri  est  accidentee,  arrosee  par  des 
rivieres  aux  mille  m^andres,  et  propre  a  toute  esp^ce 
de  culture.  L'air  est  tres-sain,  et  ce  premier  jugement 
des  voyagcurs  esl  confirme  par  les  formes  atbleliques 
des  habitants,  par  le  grand  nombre  de  vieillards,  et 
par  la  Irayeur  manifeslee  par  Nigello  lorsqu'il  vit  la 
mortality  qui  regne  habituellemenl  a  Khartoum.  Les 
Barri  ne  savent  pas  se  scrvir  de  leurs  bceufs  comnie 
beles  de  charge  :  les  ancs  ct  m6rae  les  chovaux  sont 
inconnus  chez  eux.  M.  RoUct  allribue,  el  apparemment 
avcc  raison ,  une  parlic  de  ranli<[uc  prosperile  de 
Meroe  aux  relations  commercialcs  que  ce  pays  aurait 
entretenues  avec  le  haul  fleuve  Blanc. 

Aux  renscigncmcnls  ci-dessus  il  faut  ajoulcr  ccux 
qiiisuivenl  et  qui  furciil  communiques  anion  frero  par 
M.  Lafarguo  dans  le  comuiencoment  de  cette  annce. 


(  3/i5  ) 

«  J'ai  inteiroge  Suleyman-Aba-Zaitl  ,  qui  seivit  dc 
pilote  a  dom  Rnoblechcr.  Ce  Nubicn  a  dit  que  la  crue 
du  fleuve  a  la  mi-janvier,  chcz  les  Barri,  elait  impos- 
sible, et  qu'elle  n'avait  pas  eu  lieu  ;  que  I'expediliou 
qu'il  dirigeait  esl  revenue  aprfes  que  les  barques  ont 
donne  sur  un  banc  de  sable  ;  que  le  fleuve  ne  passe 
pas  entre  les  deux  monlagnes  citees  par  dom  Knoble- 
cher,  mais  a  I'ouest  de  ces  montagnes ;  qu'a  Test  le 
terrain  est  boursoufle  par  des  montagnes  qui  conli- 
nuent  vers  la  haute  Ethiopie,  et  qu'a  Touest  s'etendent 
d'immenses  plaines  ,  au  milieu  desquelles  s'el^vent 
de  loin  en  loin  des  collines  isolees,  qui  ne  depassent 
pas  3  ou  400  metres  de  haut.  » 

Comme  la  reconnaissance  du  haut  fleuve  Blanc, 
entamee  d'une  manii^re  si  brillante  par  M.  d'Arnaud 
(voyez  le  Bulletin,  18Zi3,  t.  XIX,  p.  90  et  suiv,),  resle 
encore  enveloppee  de  beaucoup  d'incertiludes,  il  n'est 
pas  sans  interet  de  resumer  ici  tout  cc  qu'on  en  sail  : 

En  amont  de  Khartoum,  le  fleuve  parait  avoir  peu 
de  pentc  dans  sapartiereconnue.  II  s'epanouiten  larges 
nappes  jusqu'au  lac  Nu,  et  recoil  trois  affluents  :  le  So- 
bat,  dont  le  cours  superieur  n'est  encore  elabli  que 
par  conjecture;  le  Bahr-Keilak,  dont  I'embouchure 
seule  est  connue;  etenfinTaffluent,  jusqu'ici  innomme, 
dont  nous  devons  la  connaissance  a  M.  Lafargue.  (Voyez 
le  Bulletin,  1850,  t.  XIII,  p.  293-29/i.)  Au-dessus  du 
lac  Nu,  les  nombreux  affluents  du  fleuve  sont  a  peine 
indiques;  nous  ne  connaissons  ni  leurs  lieux  d'origiue, 
meme  approximallvement ,  ni  leurs  noms,  sauf  celui 
du  Iribulaire  do  rive  gauche  appeld  Din  ,  mot  qu'on 
pouvait  prendre,  sur  la  carte  de  M.  d'Arnaud,  pour 
un  nom  de  lieu  ct  non  pour  celui  d'uuy  vivipre,  En- 


(  3/iO  ) 

core  la  rolalion  (jue  nous  donnoiis  iic  tlil-clle  pus 
bien  clairemenl  si  le  Din  est  un  affluent  on  un  bras  <lu 
fleuvc.  Cellc  cicrnierc  supposition  est  bien  admissible 
dans  une  contr^e  ou  les  nombreux  meandres  du  Nil 
6tablissenl  combien  sa  pente  y  doit  fitre  faible. 

Un  des  points  les  plus  saillanls  des  renseignemcnts 
de  M.  \  audcy  est  I'indicalion  de  deux  affluents  de 
rive  droile,  dont  les  embouchures  seraient  dans  lo  pays 
occupe  par  les  Bliorr  ou  Thului,  deux  peupladcs  qui 
sont  connues  des  chasseurs  du  Gudru.  On  ne  doit  pas 
s'6lonner  que  la  presence  de  ces  embouchures  ait 
"echappe  aux  investigations  de  M.  d'Arnautl.  En  effct, 
rien  ne  fait  soupconner  I'adjonction  d'un  nouveau 
couranl  d'eau  dans  un  pays  plat,  a  moins  (]u'on 
n'tilablisso  soigneusemenl  le  d^bit  du  flouve  par  des 
mesures  reiterc^es  de  distance  en  distance.  D'aillcurs 
la  v6g(italion  obstrue  et  cache  des  rives  plates  dans  un 
pays  inalsain  el  pcu  habile.  Jusqu'ici  les  voyagcurs  sc 
sonl  prcsque  toujours  avancos  par  eau,  et  les  barques 
ne  naviguent  pas  dans  des  flaqucs  cpanchees  sur  des 
bcrges  mal  d^finies,  quo  Ton  ne  saurait  ainsi  dtudier 
ni  par  terre  ni  par  eau.  Les  g^ographos  ne  doivcnl 
done  pas  juger  avec  trop  de  s6verit(!;  les  voyageurs  qui, 
bornos  au  parcours  du  courant  ])rincipal ,  et  gen6s 
dans  leurs  rcnscignemenls  par  lo  nian-iiue  do  bons 
inlerproles,  sc  sont  vus  obliges  do  taire  jusqu'ici  lo 
detail  de  tons  les  afilucnts  secondaires. 

En  Europe ,  on  se  pr<^occupo  pen  de  ces  investiga- 
tions si  p^nibles  et  si  m6riloiros.  On  n'insisle  pas  asscz 
sur  la  n6ccssit(i  do  bien  etablir,  d'apres  h;  volume 
rclalit' des  eaux ,  quel  est  rafllucjnt  dont  le  bassin  est 
le  plus  (ilendu,  ou  qui,  nourri  par  des  pluies  plus  Ir^- 


(  3^7  ) 

quentes  ct  desscrvant  par  consequent  uu  pays  plus 
liclic  ,  a  Ic  t'roit  d'etre  choisi  cornmc  afiluent  princi- 
pal. On  accepte  lacitement  ( n  cctte  qualite  le  cours 
d'cau  suivi  en  18Z|3  par  M.  d'Arnaud.  Celle  maniere 
d'identifier  le  fleuve  Blanc  est  peut-elre  fondee  en 
raison  ,  mais  elle  est  certainement  d^nuee  de  preuves, 
vu  le  dedale  d'aflliients  indiques  de  toutes  parts. 

C'est  encore  pen   si  Ton   elait  born6  a  loutes  ces 
incertitudes ;  malgre  la  precision  du  langage  usil<^  par 
les   vojageurs  europeens  ,  et  qui    leur   donne  un  si 
grand   avautage   sur  les   descriptions   vagues  des  an- 
ciens  ,  quelqucs  personnes  renduos  defiantes  par  les 
Cdntradictions  des  voyageurs  modernes  ont  mieux  aime 
s'appuyer  sur  les  dires  de  Ptolemee  que  de  chercher 
a  concilier  ou  du  moins  a  peser  les  assertions  des  divers 
explorateurs  qui  ont  suivi  les  pas  de  M.  d'Arnaud.  Ce 
dernier  dit  que  I'affluent  principal  vient  de  Test,  entre 
les  3*  ct  h"  degres  de  latitude  nord.  M.  Werne ,  qui 
I'accompagnait,   affirmc  au  contrairc  que  le  courant 
d'cau  principal  vient  du  sud,  Coinme  ces  deux  voya- 
geurs se  renseignaient  par  interpretes,  on  pent  h^siter 
enlrc  leurs  t^inoignages.  M.  Thibaut,  que  j'ai  vu  au 
Cairo,  confirmait  I'opinion  do  M.  d'Arnaud,  et  M.  La- 
fargue  a  eniis  plus  tard  le  meme  avis.    (Voir  Btdletin, 
18/iO,  t.  XllI,  p.   296.)  Dom  Rnoblecher  a  commu- 
niqu(§  au  monde  savant  unc  assertion  tres-dilTerenle  et 
I'ort  digne  d'examen ,  parce  que  ce  zele  niissionnaire 
avail  appris  la  langue  de  ces  Barri,  qui  lui  disaient 
que  le  Nil  vient  du  sud  ,  et  non  du  sud-ouest  seule- 
nient,  ainsi  que  loutes  les  ohserimtions  de  doni  Knoble- 
clier  lendenl  a  le  faire  croire.  Les  assertions  de  ce 
dernier  nous  semblont  d'un  si  grand  poids  ,  que  nous 


{  3/i8  ) 

voudrions  cioirc  qu'il  s'cst  engagi  clans  un  autre  af- 
flucnl  que  celul  qui  vicndrait  dc  I'est,  selon  les  der- 
nieies  informations  de  MM.  Vaudey,  Lafarguc  et 
Rollet.  Car  los  renseignemenls  de  ces  trois  voyageurs 
ne  se  bornent  pas  a  de  s6ches  informations;  ils  sont 
appuyds  de  details,  de  noms  de  peuplcs,  ct  d'uno 
remarque  importantc  sur  la  situation  peninsulaire 
des  Barri. 

L'annonce  d'un  aflluenl  de  rive  droite  venant  des 
monlagnes  des  Gallas  ct  sc  nielant  au  fleuve  entre  les 
C'  ct  7'  paiallelcs  est  tout  a  fait  neuve.  Jusqu'a  quel 
point  ce  jiouvel  adluent  pcut-il  se  confondrc  avec  le 
tribulaire  innomme  revel6  par  M.  Lafargue  (voyez 
le  Bulletin,  1850,  t.  XIII,  p.  293),  ct  sur  Icqucl  on  a 
navigue  jusqu'a  environ  6°  30'  de  latitude?  Nous  nous 
contcnterons  de  poser  cette  question,  car  il  est  lou- 
jours  dangercux  de  meler  des  hypotheses  a  des  faits. 

Terminons  cependant  ces  remarques  par  un  rap- 
prochement pcrmis.  Les  marchands  hiancs,  commer- 
^ants  qui  se  rendent  chez  les  peuplcs  voisins  pour 
trafiqucr,  ne  seraient-ils  pas  ces  raemcs  trafiquanls 
nommes  Gala  par  les  Mace,  Mekan,  ou  Suro  ?  La  des- 
cription faile  par  ces  derniers  m'avait  induit  a  rap- 
porter  a  la  race  Arabe  ces  Gala,  au  teint  clair,  portant 
barbe,  et  qu'il  ne  faut  pas  confondrc  avec  les  Galla. 
Cette  identification,  si  die  clait  bien  6lablie,  relicrait 
les  renseignements  geographiqucs  donnds  par  les  Suro 
avec  ceux  que  les  Barri  nous  ont  fournis,  grace  au 
z6le  de  M.  Vaudey.  Conime  ces  notions  jeltcnt  de  I'in- 
tdrfit  sur  unc  des  contrives  les  nioins  connues  dc 
I'Afrique,  je  transcris  I'cxlrait  suivant  des  conversa- 
tions de  Nalle,   fcmme  du  pays  Mekan,  reduitc  en 


(  3/i9  ) 

esclavage  a  iin  age  avance ,  et  que  j'ai  vue  chez  son 
maltre  clans  Inarya. 

Saka,  1 3  Janvier  1846. 

Selon  Nalle,  «  les  Bayti  et  les  Gala  parlent  la  meme 
langue.  Ces  derniers  portent  im  petit  nombre  de  tasses 
a  caf6  chez  les  Mekan,  dont  les  fenimes  riches  attachent 
chacune  leur  tasse  au  haul  de  leur  bras  droit  en  allant 
faire  leurs  visites,  afin  de  boire  avec  distinction  le  caf6 
qu'on  leur  sert.  Les  Kirim  et  les  Mala  habitent  la  rive 
gauche  du  Paco  et  parlent  la  meine  langue  que  le  Me- 
kan;  leur  teint  est  taym,  c'est-a-dire  fuiigineux,  mais 
non  noir.  lis  sont  pour  la  plupart  petits,  bien  qu'il  y 
ait  parfois  parmi  eux  des  gens  de  taille  elevee;  mais  ils 
n'atteignent  jamais  celle  de  l'",75  (1),  et  ils  ont  des 
cheveux  blancs  sans  grandir  davantage.  J'en  ai  vu  ainsi 
hauls  seulementdel'",50.Cependantilssontvigoureux 
et  se  battent  bien.  Les  Bayti  sont  rouges  (2)  comme 
vous  et  de  laille  ordinaire.  lis  ont  la  barbe  epaisse  et 
des  moustaches ;  il  en  est  de  meme  des  Gala,  lis  portent 
un  turban,  une  lance,  un  bouclier  large  d'unc  coudde 
et  un  long  poignard.  lis  ont  des  hvres  en  sautoir  sur 
leurs  corps  et  ils  en  font  porter  a  leurs  esclaves.  Les 
Bayli  me  vendirent  pour  une  piece  d'argent  une  ba- 
guette d'etain  qui  m'a  servi  a  faire  des  bracelets.  Dans 
mon  pays,  on  invoque  la  protection  de  mauie;  on  at- 

(i)  L'ambassadeur  de  Gobo  a  la  cour  d'Inaria  disait  i°,3.  Je  pris 
ces  deux  mesures  sur  les  tallies  des  enfants  Gallas,  fjni  etaient  com- 
pares aux  Kirim. 

(s)  Nalle  m'appelait  aussi  loiii/f,  car  le  mot  ipii  signiHe  btunc  n'est 
applique  en  Ftliiopie  qu'a  cenx  qui  sont  decoloie's  j)ar  la  lepre 
blanche. 


(  350  ) 

taclie  dc  grancles  cloches  aux  vaches;  on  aclitile  aiix 
Gala  dii  zinc,  dc  I'dtain  et  de  I'argent.  » 

Plusieurs  autres  details  que  je  sujiprimc  montrent 
que  les  Mekan  sont  plus  riches  et  plus  industrieux  que 
les  habitants  du  Raffa,  avee  lesquels  ils  sont  d'ailleui's 
toujours  en  guerre. 

Selon    Kasim ,    interpr^te   du    roi    d'Inarya,   ales 
Gala  ont  un  roi,  sont  musulmans,  et  trafiqucnt  avcc 
los  Suro  (Mekan),  qui  sont  chretiens.  II  y  a,  dit-on  , 
dix  journdes  de  route  de  Curcurra  au  pays  des  Gala.  » 
Celle  distance  fut  conlirmee  par  le  messager  de  Gobo. 
Dans  mon  esquisse  publi^e  en  18/|9  (voye/.  Bulletin^ 
j8Zi9,  t.  XII),  j'ai  place  les  Ising  et  les  Mokan  dans 
la  fourclie  formee  par  deux  grandes  rivieres  :  c'cst  la 
position  assignee  aujourd'hui  aux  Blidos,  qui  cux  aussi 
ont  des  relations  commerciales  avec  un  peuple  au  teint 
blanc  et  portant  barbe.  Quand  on  connaitra  le  noni 
que  se  donnent  les  Blidos ,  on  saura  posilivenient  s'il 
faut  les  identifier   avec   la  nation  dite  Ising   par  les 
Suro,  Kaba  par  les  Kafacco,  et  Gaba  par  les  Se,  ou 
Gimira.    On    saura    aussi    si   les   Mekcdos    cites    par 
M.  RoUet  sont  differcnts  des  Mekan  :  ce  dernier  noni 
est  celui  que  se  donnent  les  Suro. 

L'esquisse  qui  accompagne  cetle  notice  est  trac(^e 
principalement  d'apres  le  rccit  de  M.  RoUet,  qui  a  fail, 
avec  M.  Lalargue,  deux  voyages  sur  le  haut  lleuve  Blanc. 
L'embouchure  do  I'afiluentde  rive  gauche,  aupres  des 
Blitlo,  est  indiqu(i  par  M.  RoUel  conuBe  6lant  par  en- 
viron 3°  de  latitude  el  58°  de  longitude  comptee  de  I'ile 
de  l''er,  ou  37°  30'  a  Test  du  meridien  de  Paris,  ce  qui 
donnerait  au  haut  fleuve  Blanc  une  etenduc  conside- 


(  351  ) 

rable,  meme  si  I'on  adoptail  les  longitudes  plus  orien- 
tales  cle  M.  d'Arnaud. 

L'absence  de  details  ne  permet  pas  de  suivre  M.RoUet 
dans  Ic  calcul  de  sa  longitude;  on  est  done  reduit  aux 
suppositions  :  voici  celles  que  j'ai  faites  : 

M.  d'Arnaud  place  rile  Jeanlier  par 29°  lo' E.  de  Paris. 

Ajoulant  aS  joiirnees  a  20  niilles  par  jour, 

on  aura 8    20 


Ce  qui  (lonne  pour  longitude  du  confluent 

desP.lldos 37"  3o' E.  de  Paris. 

Mais  on  ne  saurait  prendre  plus  de  16  milles  comnie 
valeur  d'une  journee  moycnne  de  route  en  Afrique. 
On  aura  ainsi  /iOO  milles;  et  si  Ton  soustrait  17i,  ou 
100  milles  pour  les  sinuosit^s  de  la  route,  il  restera 
soulemcnt  5  degres  dc  longitude  environ ,  ce  qui 
mellrait  tout  au  plus  le  confluent  ])ar  34"  10'  de  lon- 
gitude orientale,  comptee  du  meridien  de  Paris.  S'il  v 
a  de  I'exageration  dans  cetle  eslime,  elle  ne  sera  pas 
du  moins  trop  falljle,  car  le  pays  est  accidente,  il  y  a 
de  nombreux  canaux  a  traverser  a  la  nage,  le  detail 
des  lieiix  de  couchee  n'est  pas  donne,  ct  enfin,  dans  un 
pays  voisin ,  celui  des  Mekan,  Nalle  m'a  dit  expressd- 
menl  que  les  journees  de  route  sont  moins  longues  de 
moiti6  que  celles  des  hauls  plateaux,  ou  un  sol  com- 
parativement  uni  et  rafraichi  par  des  vents  permet  au 
voyageur  de  faire  des  Iraites  beaucoup  plus  longues. 

Je  n'ai  pas  tract^  les  embouchures  des  deux  rivieres, 
qui  se  joindraient  au  courant  principal  entre  (5  et  7" 
de  latitude  et  pres  du  29=  meridien.  En  efTet,  lour  pre- 
sence s'accorde  mal  avec  I'aflluent  innomm6  de  M.  La- 
largue,  sur  lecjuel  on  a  navigutS  (>t  qu'il  a  etc  par  con- 


(  352  ) 
sequfinl  impossible  d'omeltro.  D'aillours,  I'cxplication 
(le  M.  Rollet  n'ela>nl  pas  assez  precise  ,  on  pourrait,  a 
la  rigucur,  supposer  que  ces  deux  Iributaires  sent  dans 
les  environs  dc  Walanio  el  fort  loin  des  Bor  ct  Tliului. 
Mais  alors,  en  supposant  que  le  confluent  des  Blidos  est 
bien  plac6,  il  faudrail  admcllre  que  le  fleuve  coule  pa- 
rall^lement  a  I'Lma,  ct  par  consequent  a  Test  du  lac 
Abbala.  Or,  je  n'ai  jamais  oui  parler  d'un  grand  cours 
d'eau  do  ce  cole-ia.  Pour  laisscr  toule  latitude  aux 
syslemes  ,  je  transcris  ici  textucllement  le  passage  de 
M.  Rollet,  qui  cite  a  son  tour  iinc  lettre  du  rt^vercnd 
p^re  Angelo  Vinco,  dalee  dc  Bcllcnia,  11  avril  1851  : 
«  La  m(^me  Icttrc  de  dom  Angelo  vous   fera  con- 

nailre que  nous   avons  iiout^  des  relations  coni- 

merciales  avec  los  nouvellcs  tribus,  cellos  des  Berrs, 
des  Lok6s,  des  Mekedos  et  des  Ouguars,  qui  ne  s'elaient 
jamais  monlrees  aux  pr»^cedenles  expeditions.  Lestrois 
premieres  se  trouvent  depuis  trois  journ^es  jusqu'a 
huit  a  Test  de  Bellonia.  La  derni^re ,  qui  est  lr6s-con- 
sidiirable,  habile  les  bords  du  fleuve,  au  sud  de  Lokaia. 
Ensuite  viennenl  les  Paloudjs,  pres  des  calaracles  si- 
tuecs  a  huit  jours  sud  de  I'ile  Djanfere.  Au  dcla  de  ces 
calaracles,  le  Nil  fail  d'abord  un  coude  au  sud-est; 
j)uis,  arriv6  entre  le  3"  et  le  2°  30' do  latitude  nord,  il 
retourne  directenient  a  I'est-nord-cst,  vers  les  monla- 
gnes  des  Gallas  ct  du  royaumc  d'Adel,  d'ou  viennent 
deux  rivieres,  probablement  connues,  qui  se  mSlent  a 
lui  cnlre  le  7°  et  le  6*  degre  de  latitude  nord.  II  fait  ainsi 
une  presqu'ile  de  la  forme  d'un  fer-a-cheval,  large  de 
vingl-cinq  journ^es  de  marche,  sous  la  latitude  des 
Berrs,  soil  de  150  lieues  environ.  » 

L'esquisse  ci-jointe  monUc  combien   le   trac^  du 


(B53) 

tleiive  Blanc  do  rlom  Knoblecher  s'eloigne  do  celui  do 
M.  d'Arnaud.  Ln  sotde  pcrsonne  qui  ait  examine  Ics  oh- 
sorvotlons  astronomiques  de  ce  dernier  m'a  dit  qu'un 
calcul  rigourcux  mcUrail  ses  positions  un  pen  plus  a 
Test  qu'ellcs  ne  le  sont  dans  la  carte.  Ceci  aiigmente- 
rait  encore  la  discordance  entre  les  deux  voyageurs.  II 
est  plus  que  jamais  desirable  de  publier  leurs  obser- 
vations originalcs;  et  si  leurs  calculs  sont  exacis,  le 
monde  savant  ne  sera  content  que  lorsqu'un  voyageur 
aura  mis  fin  a  lous  nos  doules,  en  faisant  une  obser- 
vation precise  de  longitude;  par  exemple,  en  deter- 
minant, a  Bellenla  on  dans  les  environs,  lo  moment 
exact  d'une  occultalion  d'etoile  par  la  lune.  Les  explo- 
rateurs  a  venir  auront  aussi  a  preciser  I'origine  de 
I'affluent  oi-iental  de  M.  Lafargue,  et  a  s'enquerlr  si  Ic 
Din  est  un  tribulaire  independant  du  fleuve,  ou  sira- 
plemenl  une  de  ses  branches  anastomosdes. 

Antoine  d'Abbadie. 


SUR  LES  NtGRES  YAMBO. 


Les  Gallas  connaissent  sous  le  nom  de  Yambo  une 
tribu  negre  qui  leur  est  contigue,  qii'ils  distinguent 
des  negres  Kamo,  Aguli,  Bonga  et  Masango,  et  qui 
est,  comme  ceux-ci,  etablie  a  I'ouest  des  plateaux  ha- 
biles  par  les  Gallas.  D'apres  I'assertioti  d'un  Yambo 
qui  m'apprit  que,  dans  sa  langue,  on  ne  I'appelail 
pas  Yambo,  mais  bien  Bor,  et  aussi  par  suite  d'autres 
raisons  exposccs  ailleurs  (voyez  Bulletin,  18Zi9,  t.  XH, 
p.  156),  j'avais  cru  pouvoir  identifier  les  Yambo  avec 
les  Heliabs,  Bhorr,  Tluilui  et  Dinka,  (ft\\,  selon  M.  d'Ar- 
ni.    AVRii..   /i.  2/| 


(  35/|  ) 

naud,  pailonl  loiis  la  meme  langue.  (.lommej'al  rc- 
cueilli  un  ticlianlillon  de  la  iangiic  des  Yambo,  j'ai 
voulu  la  comparer  avec  ccUe  des  Dinka ,  pcuir  6laver 
nies  conclusions  d'une  prcuve  de  plus,  U.  Joiuard  a 
Lien  voulu  deferer  a  ma  prifere  ,  en  demandant  a 
M.  d'Arnaud  les  echantillons  des  trois  langues  qui  sui- 
vent.  En  les  Iranscrivant,  je  mels  en  regard  les  niois 
correspondants  de  la  langue  des  Yambo  : 


finn^ais.  beiT.                 dinkn.                  chilouk.                  \anibo.        autre  ilialpcte  > 

nu gaelok  .  .  .   touk akie arhcio,   .   .  ncliem 

dcuj mari-k  .   .   .  law ariavv ario  .   .   ,   .  alio 

liois michala  .   .  Uiak adak ad^go  .   ,    .  ailago 

qualre nioiiwan  .   .  wan angnnou.   .  .   .  angjiio.  .   .  aiigupiiu 

ciiKj tiumkaiuit.  .  dicke  .   .  .    .  aliilerhe,   ,   .   ,  aliiyo,.   .  , 

six lniu(|iiel  .   .  ditem.   .  .   .  abirkiel .   .   .   .  aliikalo  .  .  oliisalii 

se|>t lioiiiio  .   .   .  Jeraw.   .   .   .  abiziaw  .   .   .   .  ubiiio  .  .  .  al)iiio 

huil gudik.  .  .   .  douhel   .   .   .  abidak aliiddago. .  abidago 

nciif beau.   .    .  .   ilawan.  .   .   .  abigunou  .   .   .  abingauii. .  abingnano 

liix I"ik le:"' apieraw.  .  .   .  afar.  .  .   .  apar 

oiue pukgiiclok.  tea  aniok  .  .  apiero  oia  kiel.                         apar  kiisi.,!,. 

douze ouiaw.  .    .   .                                                        ap;ii  kuiiu 

treize lea  diak.   .   .                                                        ap.,,.  k,„|..,g,, 

langue nindep  .  .   .  licp Icse leb 

lail lail tihid kiac cak  .... 

nei haumei.  .  .  houm  .  .  .  .  ouun urn ammo 

b.iiijoiir timelau.  .   .  badamloiii  .                                 niopol .  .  . 

bonne  nuit   .   .  .  Jolo  ....  logloche.  .  .  ouardoki.  .  .    .                          loia  nii-nii 

elcphaiil tome.    .  ,    .  aeon loohk llec  .... 

dent  d  rlci'lianl.  kolelatami.  toumglacon.  lukliek (denl,  lielo  kulu 


Dans  les  ecbantillons  Berr,  Dinka  et  Chilouk,  j'ai 
suivi  rortliograpbe  de  M.  d'Arnaud.  Dans  los  mots 
Yanibo  qui  m'onl  eti  fournis  a  de  longs  intorvallos 
par  deux  personnes  diff^rentes  ,  la  lettrc  c. indique  le 
son  corresjiondanl  a  noire  tch;  c  est  le  mdme  son  avec 
un  claquemcnt.  Le  premier  Yambo  qui  m'a  renseigne 
employait  un  son  qui  m'etail  nouveau  ct  qui  partici- 
pail  si  bien  aux  sons  de  qualre  lellrcs  diCfcSrcntos,  que 
j'ai  Iraduit  le  mot  fran^ais  rnat'n  par  ceno,  seno,  keno 
et  tetio. 

I/acccnl  lonlque  est  forlemcnl  accuse  par  lesYambo: 
lour  Innguo  Ik-i^  ;"i   relic  dos  (lliilouk,  mais  avec  di-s 


(  355  ) 

difl'^rences  nssoz  fortes  pour  qu'on  n'ose  ridentilier  j 
car  les  innls  qui  exprlment  dix  et  onze  ne  coincidenl 
pas  asscz  pour  un  nieme  idiomc.  Le  mot  leb  ou  lieb  res- 
seinble  au  Uep  (linka.  La  deuxieinc  qiiinte  est  forniee 
de  la  premiere,  plus  un  aflixe,  systeme  qui  indique  la 
numeration  par  cinq,  et  que  je  regarde  comine  I'un 
des  caract^res  de  ces  langues  que  j'ai  nommees  kami- 
tiques. 

D'apr^s  les  rants  Barri  et  Dinka  ,  ces  deux  langues 
pavaissent  dislinctcs  de  35  idiomes  ^Ihiopiens.  dont 
j'ai  recucilli  des  echantillons. 

En  rapprocliant  la  langue  du  Yambo  ou  Jambo  de 
celle  des  Cliiluk,  je  n'ai  nullement  la  pensee  d'identi- 
fier  ces  deux  peuples,  et  cela  par  les  raisons  suivanles  : 

1°  Haro,  messager  de  Walaga ,  qui  me  rcnseignait 
dans  Inarya,  faisait  ainsi  I'enumeralion  des  negres 
qu'il  connaissait  comme  parlant  des  langues  difTe- 
rentes  :  Chiluk,  Komo ,  Yambo ,  Aguto,  Masongo, 
Gabatu  ,  Bonga,  Donga;  il  faisait  done  une  distinciion 
enlre  les  Cbiluk  et  Yambo. 

2°  Les  Yambo  se  battent  avec  leurs  voisins  Gallas 
de  Sayo  ;  or,  on  sait  que  les  Chiluk  nc  s'^tendcnl  pas 
a  Test  de  I'lle  Donab,  ou  la  rive  droite  du  fleuve  Blanc 
est  occupee  par  les  Dinka. 

3°  Les  ressemblances  entre  les  echantillons  ci-dessus 
des  langues  Chiluk  et  Yambo  ne  sont  pas  assez 
grandes  pour  qu'on  doive  en  conclure  I'identite  de  ces 
deux  langues. 

Quant  a  I'ile  Lakku  ,  situee  dans  le  fleuve  nouimc 
Bago  par  les  Gallas,  fleuve  qui  recoit,  selon  cux,  le 
Gojab  el  le  Baro,  ccttG  lie  ne  saurait  nullement  oire 
dans    le   cours   il'eau     qu'on     regarde    g^ntiralement 


(  35(5  ) 

coninie  le  flonvo  Blanc  ,  si  I'on  ailopto  lo  lrac6  Ac  ce 
fleuve  d'opr^s  les  lalitiides  dc  dom  Kuohlochor.  Dans 
cc  dernier  cas,  il  faudra  ,  pour  (^taljlir  I'ilo  Lakku  ,  ad- 
moltre  I'existence  d'un  errand  afllLiont  oriental  qui 
couleraif,  en  parlic  dii  nioins,  cnlre  les  30°  cl  31*  d(^- 
gr6s  de  longitude  est  dc  Paris. 

Antoine  d'Abbadie. 


(   '^07  ) 

lleiuoires, 
Moticc^,  Dociiiuciilis  oi*ig;lnaiix,  etc. 


NOTES  SUR  UN  VOYAGE 

DA^S 

L'INTERIEUR  DE  L'AFRIQUE. 

PAR    M.    HECQUARD, 

Officier  de  spaliis. 


Depuis  longlemps,  les  Europeens  ont  cherche  avec 
ardeur  a  soulever  le  voile  qui  couvre  encore  la  myst(^- 
rieuse  Afrique.  L'amour  de  rhumanite,  le  desir  d'aug- 
nienter  nos  connaissances  g^ogra])hiques,  I'espoir  de 
faire  jouir  des  populations  encore  barbares  des  bien- 
faits  de  la  civilisation  ,  le  besoin  d'augmenter  les  res- 
sources  de  noire  industrie,  concoururent  a  aliinenter 
cet  esprit  de  decouverte. 

Penetr6  de  ces  idees  nobles  et  genereuses,  et  aspi- 
rant a  donner  un  nouvel  essor  au  commerce  du  S(^- 
ndgal,  le  gouvernemcnt  francais  fit  plusieurs  tentatives 
pour  ouvrir  une  route  enlre  Saint-Louis,  Segou  et  les 
nombreux  centres  de  populations  places  sur  les  bords 
du  Niger.  G'cst  dans  ce  but  que  partit  M.  Anne  Raf- 
fenel;  I'insucces  de  son  voyage,  qui  doit  etre  attribue 
aux  difiicultes  insurmontables  qu'il  rencontra  chezles 
Bambaras  du  Kaarta,  ne  devait  pas  discourager  le  gou 
ternenient,  ni  les  amis  do  la  science  et  du  piogies. 

^i)  ConimuiiHjU!,'  a  I'assemblee  generale  ilu  2  aviil  i852, 


(  358  ) 

M.  Aiigusle  Bouet,  lieulenanl  tie  vaisseiiu ,  lit,  on 
18ii9,  I'cxploration  de  la  riviere  dc  Graiul-Bassam ;  ic 
basanl  sur  les  renseignemenls  que  lui  avnient  donnes 
les  Banibaras ,  qui  viennent  de  Tinl^ricur  conimerccr 
dans  ce  pays,  eel  officier  pensa  ct  ecrivit  que  la  riviere 
d'Akba  semblait  etre  un  aflluenl  ou,  pour  mieux  dire, 
un  des  noinbreux  d^versoirs  du  Niger.  Cette  lij  polbesc 
])arul  digne  d'etre  verifiee.  Quel  avenir,  en  elFet,  pour 
notre  coniploir  de  Grand-Bassani  si  Ton  parvenait  a 
oonduire  par  celte  riviere  nos  marcbandises  sur  les 
ricbes  et  populeux  marcbes  de  Segou,  Djcnne,  etc.! 

Je  fus  done  cbarge  par  le  gouverneur,  M.  Baudin, 
et  par  le  commandant,  M.  Bouet-Willaumoz,  de  cher- 
cbcr  la  route,  soupgonn^e  plulot  qu'indiquec,  par 
M.  Augusle  Bouet.  En  meme  temjjs,  une  partie  des 
instructions  faites  pour  M.  RalFenel  par  la  Societe  de 
geograpbic  me  fut  remise ;  elles  me  prescrivaient  de 
ni'assurer  de  I'existence  des  montagnes  Kong,  portees 
sur  toules  les  cartes,  et  de  tracer  I'ilinerairc  que  sui- 
vcnt  les  colporteurs  qui  viennent  de  I'Afrique  inte- 
rieure  commercer  avec  les  elablissemcnts  du  bas  de 
la  cote. 

M.  le  commandant  Bouei-Willaumez  me  conduisil 
a  Grand-Bassam ,  oil  nous  arrivcimes  le  20  novembre 
1850,  et  il  traita  aussitot  avec  des  guides  Bambaras, 
(jui  s'engagerent,  moyennant  une  somme  do  7  500  IV. 
payable  a  leur  relour,  et  une  autre  de  2  500  iV.  |)our 
les  frais  du  voyage,  a  me  conduire  a  Segou  par  la  route 
indlqu^c  plus  baut.  lis  avaiont  promis  de  partir  sans 
retard;  mais,  lorsque  M.  Bouet  se  fut  eloigne ,  ils  me 
reuiirent  de  jour  en  jour,  tnc  faisant  voyager  avec  eux 
dans  les  villag<'8  qui  bordenl  les  rivierea  d'Ebri^  el  de 


(  359  ) 

Balo,  tanlol  tons  le  [)relexle  de  rccouvitn-  tic  I'dr  (|ul 
leur  elait  du,  lanlol  soiiscelui  d'y  clierchci"  dt\s  caplifs 
leur  appaiienant,  ct  sans  Icsquols  ils  ne  pouvaient 
partir. 

Ce  ne  fut  qu'au  milieu  de  levrier.  qu'a  l)out  d'ex[)6- 
dients  et  dans  la  crainte  d'un  cliatiraent  s'ils  uion- 
Iraient  leiu'  inauvaise  volonte  ,  ils  se  d^ciderent  a  se 
mettre  en  route.  Le  20  du  meme  mois,  nous  nous  em- 
harquames  a  bord  de  la  goelette  le  Marigot,  qui  nous 
conduisit  jusqu'a  un  barrage  situ6  a  trois  lieues  d'Akba, 
infranchissaljle  en  cette  saison.  Le  chef  de  ce  village 
nous  fit  un  excellent  accueil,  et  oflTrit  de  nous  prater 
des  pirogues  pour  remonter  jusqu'a  la  plus  pro- 
chaine  station.  -I'acceptai,  et  je  me  disposals  a  partir 
aussitot;  mais  mes  guides  pretexterent  des  affaires, 
et  il  fallut  sejourner.  Je  profitai  de  ce  nouveau  retard 
pour  aller  visiter  Yacasse,  grand  \illage  sltue  a  six 
lieues  environ  du  point  oil  nous  nous  Irouvions. 

A  mon  relour,  je  nc  retrouvai  plus  mes  guides;  ils 
avaient  disparu  ,  et  je  restai  seul  avec  mon  noir  el  un 
vieillard  de  leur  nation  ,  qu'ils  avaient  laisse  pour 
m'avertir,  ct  qui  me  dticlara  qu'ils  avaient  renonce  a 
me  conduire,  ne  voulant  pas  s'exposer  aiix  represailles 
des  blancs,  dans  le  cas  oil  je  viendrais  a  succomber  aux 
latigues  du  voyage. 

Alterre,  mais  non  decourage,  j'employai  aupres  di- 
ce vieillard  tous  les  moyens  en  mon  pouvoir  pour  I'en- 
gager  a  faire  ce  voyage  seul  avec  mui.  Menaces,  pre- 
sents, promesses,  lout  fut  inutile;  le  roi  d'Akba  lui- 
infime,  que  j'avais  Irouve  si  bien  dispose  pour  moi. 
avail  change  d'avis,  et  exigeait  une  permission  d'Auia- 
lifon,  roi  d'Alaihi.  Voyanl  tous  mes  efforts  sans  effel. 


(  m)  ) 

jc  fus  done  coiilraini,  Ic  diisespoir  dans  ranie,  a  ruvcnlr 
en  j)irogucs  a  Grand-Bassam,  avec  Jacques,  mon  fidelo 
con)pagnon,  De  Ja  je  regagnai  SaiiU-Louis,  oii  11  ful 
decide  par  MM.  Baiidln  et  Bouet-A\  illauincz  que  je 
contlnuerais  nion  exploration,  en  prenanl  pour  point 
de  depart  noire  poste  deSedliioii,  d'ou  jc  devais  gagncr 
le  Foula-Dialon,  y  voir  I'almami,  et  obtonir  de  lui  le 
passage  pour  me  rendre  a  S^gou. 

Le  1"  juln  1850,  le  cutler  r Ecureuil  m\i  a  la  voile; 
le  lendemain  a  deux  heures  de  I'apres-mldl,  11  lalssalt 
touiberl'ancre  devanlSainle-MarleBalliurst  (Gamble), 
oil  j'avals  a  prendre  du  gros  corall.  J'y  fus  accuellli, 
par  M.  le  gouverneur  anglais  Macdonel,  de  la  maniere 
la  plus  gracleuse. 

Le  5,  je  qulltal  Salnte-Marie,  et,  apres  une  naviga- 
tion de  qiiarante  heures,  nous  moulllaines  devanl  Ca- 
rabane,  petit  comptolr  francais,  oil  nous  avons  un  r6- 
sidcnl.  Nous  y  reslames  un  instant,  et,  le  S  juln  a 
inlnuit,  nous  avions  attelnt  le  poste  de  Sedhlou. 

Je  debarqual  le  lendemain,  et  m'occupal  aussilot 
d'organiser  mon  voyage.  Avant  de  parlir  de  Saint- 
Louis,  j'avais  passe  un  marche  avec  un  peulh  de  Mus- 
sina, qui  devalt  me  condulre  a  Segou,  et  qui  disait  con- 
nallre  lous  les  chel's  des  contrees  que  nous  devious 
traverser.  A  peine  arrive  a  Sedhlou,  je  reconnus  que 
cet  homme,  appele  Amadou,  nous  avalt  tiompes,  et 
je  dus  chcrclier  un  autre  guide. 

Tous  mes  preparatifs  termines,  jc  qiilllai  Sedhlou 
le  13  juln  :  quolque  conlrarie  par  une  lornadc,  j'ar- 
rlvai  a  Diannah  le  lendemain  a  dix  heures  du  matin. 
A  peine  debarque,  bravant  les  rayons  biillants  d'un 
soleil  d'hivernage,  je  mc  rendis  chez  Ic  chvf  d.;  ce  vil- 


lyge ,  qui  prend  Ic  tide  d'almanii.  D'apr6s  ce  qui 
m'avait  et6  dit  a  Sedhiou  ,  je  devais  Irouver  chez  lui 
aide  et  protection,  el,  grace  a  son  influence,  traverser 
sans  danger  le  Cabou.  Un  long  palabre,  dans  lequel 
lout  le  monde  parla  sans  ordre,  me  fit  voir  que  je  ne 
devais  pas  avoir  une  foi  trop  vive  dans  les  promesses 
qu'il  me  fit,  apres  avoir  regu  le  cadeau  que  je  lui  ap- 
portais,  et  je  pris  le  parli  d'aller  voir  un  chef  voisin , 
appele  Bakary-Koye,  peulli  du  Fouta-Dialon,  qui  ^tait 
venu  fonder  un  village  sur  le  territoire  du  Brasson. 

Le  16  juin,  a  sept  heures  du  matin,  je  me  dirigeai 
done  sur  Kolibentan  ,  eloigne  environ  de  deux  lieues 
de  Diannah.  J'y  arrival  a  neuf  heures  quaranle-cinq 
minutes.  Silue  dans  une  clairiere ,  ce  village  a  une 
double  enceinte  de  palissades  et  un  fosse  d'un  metre 
et  deuii  de  large  :  il  est  consider^  dans  le  pays  comme 
imprenable.  Bakary-Koye,  averti  de  mon  arriv^e,  vint 
au  devant  de  moi,  et  me  promit  qu'aussitot  qu'il  se 
serait  entendu  avec  le  chef  de  Diannah,  il  m'aiderait 
autant  qu'il  serait  en  son  pouvoir. 

Le  19,  nous  eumes  un  grand  palabre  avec  I'almami 
de  Diannah,  dans  lequel  il  fut  convenu  que  chacun 
des  deux  chefs  me  fournirait  un  guide,  et  que  nous 
partirions  deux  jours  apres. 

J'elais  plein  d'allegresse;  mon  voyage  s'annon^ait 
sous  les  plus  heureux  auspices.  Un  moment  suflit  pour 
lout  remettre  en  question  :  la  veille  du  depart  arriva 
un  homme  du  Fouta-Dialon  nous  annon^ant  que  la 
guerre  existait  dans  le  Cabou,  ou  il  avait  ele  pille  el 
devalise.  Les  craintes  de  Bakary-Koye  s'eveillerent ; 
en  me  communiquanl  cetle  nouvelle,  il  me  ddclaia 
qu'il  ue  pouvait  plus  me  faire  parlir,  sans  ra'exposer 


(  ^m  ) 

a  6tt'c  assassiiie,  ainsi  que  los  guiclos  qu'il  iiie  domic- 
rail;  (lu'il  n'y  avail  qu'un  inojcn  :  c'olail  d'eiivojer 
(leinaudcr  a  rahnami  du  Foula-Dialon  uiic  escorle 
assez  lorto  j)our  me  |n"ot6ger.  J'iiisistai  vainemcnt;  il 
fut  inebraulablo,  et  je  fus  ainsi  I'orct!  de  depecher  un 
envoye  a  Timbo,  que  je  ne  croyais  pas  6trc  aussi 
eloigne. 

Laissant  Jacques  a  Koiibenlaii,  jo  fi-aucbis  a  pied  la 
distance  qui  separe  ce  villa.e  du  poslc  francais,  et, 
piofilant  du  sejour  force  que  j'y  lis,  je  visilai  lo  bas  du 
flfcuve,  unc  paitie  de  la  riviere  Saint-Gr^goirc,  el  elu- 
diai  avec  le  plus  grand  soin  les  mceurs  et  I'organisation 
politique  dos  nombreuses  peuplades  qui  bordcnt  ce 
fleuve.  Dans  un  travail  plus  6tendu,  j'aurai  I'honncur 
de  vous  coniniuniquer  les  observations  que  j''ai  lailes, 
les  nombreux  renseigncments  qui  ni'onl  ete  donnes 
par  les  Europeens  liabitanl  le  pays,  parmi  lesquels  je 
dois  citer  MM.  Bocande  et  Jules  Kapcl. 

Le  25  juillel,  ayant  i'intenlion  de  remonler  la  Caza- 
luance  jusqu'au  point  oii  elle  cesso  d'etre  navigalile, 
je  in'embarquai  sur  la  clialoupe  du  poste.  Arrive  a  Ko- 
libentan  ,  j'y  passai  quelques  jours  ,  pendant  lesquels 
je  fus  temoin  d'un  pillage,  el  assislai,  sans  pouvoir 
rerapecber,  a  la  mutilation  de  deux  prisonniers  de 
guerre,  auxquels  on  coupa  les  orellles  et  les  poignels, 
et  qu'on  renvoya  a  leur  village  apres  leur  avoir  altacho 
au  cou  ces  troncons  sanglants. 

Les  eaux  elant  encore  trop  basses,  je  lus  oblige  de 
m'arrfeter  a  dix  milles  au-dessus  de  Kolibenlan;  niais 
j'y  recueillis  des  renseigncments  precis  sur  les  villages 
qui  bordent  cette  riviere,  sur  son  cours,  el  I'endroil  on 
elle  prend  sa  source.  En  revenanl,  nnus  I'Omes  assaillis 


[  303  ) 

|Kii'  line  violenle  lornade,  qui  fit  cliaviror  la  cluiloupo. 
Lc  lleiive  (itant  Ir^s-large  en  cet  endroit,  j'eus  beaucoup 
de  peine  a  gagner  la  rive  a  la  nage.  Ayanleu,  pendant 
le  tiajet,  le  nialheur  do  perdre  mon  jianlalon  et  aies 
soldiers,  que  j'avais  attaches  sui^ma  tele,  je  dus  gagner, 
en  chemise  et  pieds  nus,  par  una  pluie  baltante,  eu 
traversant  d'iminenses  rizi^res  couvertes  d'eau,  Maaia- 
konno,  eloigne  de  trois  lieues  de  la,  ou  je  trouvai  un 
chalan  au  moyen  duquel  nous  pumes  relever  la  cha- 
loupe;  el,  le  13  aout ,  j'arrivai  a  Sedhiou ,  en  proie  a 
une  fi^vre  violenle. 

Ma  sanle  s'f^lanl  anielioree ,  ne  voyanl  pas  revenir 
riiomme  que  j'avais  envoy^  a  Talnianii  du  Foula- 
Dialon  ,  je  me  decidai  a  modifier  mon  itineraire.  Deux 
chcmins  s'offraient  :  par  I'un ,  en  traversant  la  Sene- 
ganibie  porlugaise,  je  pouvais  me  rendre  a  Geba ,  et 
prendre  la  route  suivie  j)ar  MoUien  ;  par  I'autre,  en 
gagnant  Falalenda,  comploir  anglais  sur  la  Gamble,  je 
devais  renconlrer  quelques  caravanes  operant  leur  re- 
tour  dans  le  Fouta-Dialon.  La  premiere  etail  la  plus 
courte,  mais  la  moins  interessanle;  par  la  seconde, 
j'evitais,  en  le  tournant,  le  theatre  de  la  guerre,  et 
je  pouvais  \isiter  I'espace  compris  enlre  la  Gamble 
el  le  Rio-Grande,  qui  n'avait  jamais  ele  parcouru 
par  les  Europeens.  Je  me  delerminai  pour  ce  dernier 
parli. 

Je  comptais  partir  le  8  seplembre  ;  les  pluies  lorren- 
ticlles  qui  tomberent  sans  inlerru|)lion  me  relinrent 
jusqu'au  16. 

Abandonne  une  fois  encore  par  mon  guide,  pour  le 
remplacer,  je  pris  I'ancien  alcali  dii  ])()ste,  hornme  du 
Fouta-Toro,  qui  me  fit  les  plus  belles  promesses,  ainsi 


(  304  ) 

que  lous  ceux  (juo  j'avais  eu3;  il  ne  les  tint  pas,  el 
m'abandonnu  dans  le  Diagara. 

Tout  en  voulant  faire  ces  notes  le  plus  completes 
possible,  il  ni'est  impossible  de  raconter  jour  par  jour 
mes  marcbes  dans  I'interieur  :  ce  sera  I'objet  d'uu 
ouvragc  que  jc  prepare.  Je  rappellerai  seulemenl  les 
circonslances  les  plus  importantes  de  mon  voyage. 

Le  pays  qui  separe  Sedblou  de  la  Gamble  est  unc 
vaste  plaine  couverle,  tanlot  de  for6ts  impenetrables 
ou  a  peu  pres,  tanlot  de  vasles  raarais  dans  lesquels  les 
habitants  plantenl  du  riz;  au  milieu  s'filevcnt  quelques 
collines  de  basalle  courant  dans  le  sens  de  ces  deux 
rivieres. 

Le  18  septembre  ,  j'arrivai  a  Diembali,  village  situ6 
a  un  niillc  environ  de  la  I'ivierc  Saint-Gregoiro,  que 
nousdcvions  traverser;  la  pirogue  nc  s'y  trouvantpas, 
je  me  di^cidai  a  altendre  au  lendemain ,  et  profilai  de 
cc  con  Ire-temps  pour  examiner  le  cours  de  cetle  ri- 
viere. Marchant  a  I'est-sud-est,  j'arrivai  a  sept  heurcs 
el  demic  du  soir  a  Taba  ,  dernier  village ,  situe  sur  les 
bords  de  ce  cours  d'eau ,  qui  n'a  la  que  U  metres  de 
largeur;  son  fond  y  est  encore  de  2  metres  au  milieu 
du  lit.  Je  d(^sirais  remonter  jusqu'a  sa  source  ;  j'en  I'us 
emp6ch(i  par  les  naturels,  qui  me  dirent  qu'il  serait 
impossible  de  le  faire  a  ce  momenl  de  I'annee,  les 
cbemins  elant  couverls  d'eau.  Les  rcnscigncmcuts 
qu'ils  me  donnercnl  furent  du  resle  les  memcs  que 
ecus  que  j'avais  recueillis.  Le  Saint-Grcgoire  prend , 
d'apres  eux,  sa  source  dans  un  grand  marais  presque 
a  sec  pendant  I'etc,  a  une  journee  de  pirogue,  c'csl- 
a-dire  environ  six  lieues  est  de  Taba. 

Le  lendemain,  a  six  heures,  j'etais  dc  retour  a  Diem- 


(  3G5  ) 

ball,  d'ou  jc  parlis  anssitot  pour  traverser  la  riviere, 
qui,  dans  la  saison  sfeche,  a  environ  25  a  30  mfetres  de 
largeur  et  3  de  profondeur.  Le  21  septembre,  a  une 
heure  de  I'aprfes-niidi ,  nous  fimes  balle  sur  I'empla- 
cement  de  Cabada,  village  bru!6  par  les  Yolas.  Pres  de 
la  Ton  me  monlra  le  marigot  de  Bintam,  qui  n'est  plus 
qu'un  ruisseau,  tellement  a  sec  pendant  les  clialeurs, 
que  les  habitants  de  Cabada  elaient  obliges  d'y  creuser 
des  puits  :  ce  ruisseau  coulait  la  de  I'ouest  a  Test. 

Ainsi  se  confirmait  ce  qu'avait  suppose  et  ^crit  avant 
moi  M.  Bocande  dans  un  memoire  qu'il  eut  I'honneur 
de  remetlre  a  votre  savante  Societe,  que  le  marigot  de 
Bintam  et  la  riviere  Soncodou  (Saint-Gr^goire)  ^taient 
deux  cours  d'eau  bien  distincts  ,  et  ne  formaient  pas, 
comme  I'indiquenl  toutes  los  cartes  anciennes,  un  pas- 
sage entre  la  Gambie  et  la  Cazamance.  Se  basant  sur 
ce  que  I'embouchure  du  marigot  de  Bintam  se  trouve 
presque  vis-a-vis  de  celle  de  la  riviere  Saint-Gregoire, 
sur  ce  que  le  courant  de  lous  deux  va  du  nord  au  sud, 
les  anciens  geograpbes  durenl  penser  que  ces  deux 
cours  d'eau  n'en  formaient  qu'un.  Je  crois  cependant 
qu'ils  ont  ete  induils  en  erreur,  car  il  r^sulte  pour  moi 
la  certitude  que  ces  cours  d'eau  sont  bien  distincts  et 
qu'ils  coui'ent  parallelement ;  et  pour  que  Brue  ait  fait 
par  eau  le  trajet  entre  la  Cazamance  et  la  Gambie 
( ainsi  que  I'ecrit  le  p6re  Labat ) ,  il  fallait  qu'il  existat 
alors  quelques  marigots  joignant  entre  eux  ces  deux 
cours  d'eau,  marigots  qui,  d'apr^s  les  rapports  des 
naturels  et  des  pecheurs  qui  fiequentent  la  riviere 
Saint-Gregoiro  ,  n'existenl  plus  aujourd'luii. 

Le  22,  j'arrivai  a  Souboundou -Diagara ,  village  de 
peulbs  pastcurs ,  sitae  a  /j  ou  5  lieuos  de  la  Gambi<>, 


(  -m  ) 

el  linbilc'  |iar  ilfs  peiilhs  dii  Ditiiar.  Si  pri^s  do  nolro 
coiiiptoir  d'Albr^da,  jo  me  dt'cidai  a  y  descondro, 
pour  iJie  procurer  quplques  provisions  et  des  mar- 
chandises  pour  faire  des  cadcaux  aux  chefs.  J'clais 
de  retour  le  17  octobre.  Apr^s  unc  visite  au  roi,  a  qui 
jo  donnai  un  fusil  a  deux  coups,  jo  mc  mis  en  route 
le  19,  et ,  par  des  chemins  couverts  d'oau ,  dans  les- 
quels  j'enfoncais  quolqucfois  jusqu'aux  genoux ,  je 
gagnai  Domasansan ,  ou  M.  Thomas  Lafeuillee ,  trai- 
tant  anglais,  ne  a  Goroe,  mil  a  ma  disposition  une 
ombarcation  qui  me  conduisit  jusqu'a  Nyaniga,  village 
situe  sur  lo  marigot  dc  ce  nom,  d'oii  jo  gagnai  par 
terre  Dhiendhienbonre,  petit  village  de  trailants  man- 
dingues,  oti  j'arrivai  le  29  a  trois  b.eures  et  deraie.  Ce 
village  est  silu6  vis-a  vis  I'ile  Makarty.  Le  commandant 
anglais,  M.  Eaton,  ayant  appris  mon  arrivee,  m'en- 
voya  une  embarcation  ,  et  m'invita  a  venir  loger  au 
fori,  oil  je  trouvai  le  plus  doux  accueil ;  les  soins  du 
docteur  Thompson  m'y  gu^riront  d'une  fievre  qui  de- 
puis  Domasansan  ne  me  laissait  aucun  repos.  Tous  les 
negociants  anglais  furcnt  tres-bienvcillants  pour  moi; 
et,  le  12,  quoique  faible  encore,  je  m'enibarquai  sur 
un  cotre  apparlenont  a  M.  Richard  Loyd,  qui  me  trans- 
])orta  jusqu'a  Fatalcnda,  ou  Ic  naviro  mouillait,  le  23, 
a  huit  heures  du  matin,  apr6s  douze  jours  d'une  pe- 
nible  navigation.  J'en  partis  le  2  decembre,  acconi- 
pagne  par  un  traitanl  mandinguc  appele  Carum-Dabo, 
qui  me  conduisit  jusqu'a  Mam'',  ou  nous  arriscunos  a 
trois  heures  et  domic,  la,  cet  hommo  me  recommanda 
a  un  de  ses  amis  seur6,  chef  de  Serrugia,  qui  me  donna 
un  guide  pour  m'accoinpagner  jusqu'a  Timbo. 

Lell  decembre,  nous  Iraversames,  h  huit  houros  de 


(  367  ) 

marcho  do  I'lMidroit  ou  elle  prond  sa  source,  la  rivi^iH' 
Ba-Geba  (riviero  do  Geha),  dont  les  rives  sont  oxcessi- 
vcment  escarp(^es  et  Ic  lit  encombre  d'arbres  qui  em- 
p^cbent  d'y  naviguer;  elle  court  de  Test  a  I'ouest,  et 
separe  le  Rangai  du  Pourada.  Nous  fumes  ce  jour-la 
arreles  par  un  individu  a  qui  je  dus  faire  un  cadeau 
assez  considerable  ])our  obtenir  le  passage. 

Le  1/i  d^cembre,  j'^tais  a  Kank^t^fa ,  residence  du 
roi  du  Paquesi,  apjiele  Vlansa-Bakar  [mansa,  roi),  qui 
me  recut  tres-bien,  et  rne  donna  un  bonime  pour 
ni'accompagner  jusqu'au  Piio-Grande,  sur  les  bords 
duquel  nous  etions  le  17.   Cette  riviere,  appel^e  Roli 
par  les  Peulhs,  Ba-Kabou   (riviere  du  Gabou)   par 
les  Mandingues ,  coule  a  I'ouest,  et  a,  a  I'endroit  ou 
nous  la  joigninics,  plus  de  150  metres  de   large   el 
au  moins  5  metres  de  profondeur  au  milieu  du   lit. 
Gourant    entre    deux   rives   a   pic   d'une  bauteur  de 
1  metre  au  moins,  elle   est  tres-rapide;  des  arbres 
magnifiques,  parmi  lesquels  on  remarque  des  benlan- 
niers ,  des  cailadrats  et   des  taba ,  croissent  sur  ses 
bords.  En  voyant  ce  grand  fleuve,  au  moyen  duquel 
on  pourrait  si   facilement  exploiter  I'iannense  com- 
merce du  Foula-Dialon,  du  Gabou,  et  des  nombreuses 
peuplades  mandingues  qui  babitent  sur  ses  bords  ,  je 
regreltais  vivement  qu'un  peuple  actif  ne  vint  pas  le 
sillonner  et  y  introduire  lout  a  la  fois  la  civilisation  el 
et  les  produils  europeens. 

J'ai  conserve  au  Koli  le  nom  de  Rio-Grande,  que  lui 
a  donne  M.  Mollien.  Les  dires  des  naturcls  out  ce- 
pendanl  jete  a  cet  cgard  des  doutes  dans  mon  esprit. 
Les  marchands  mandingues  m'onten  elTel  assure  qu'cn 
suivanl  lo  Koli,  on  ;ii'rivo  a  un  r<)m|)loir  povlugai';  qu'ils 


(  368  ) 

appellenl  Ba-Geha  (/?«,  riviere;  Geha),  du  noni  do  la 
riviere  sur  lequel  il  est  silud.  Si  cette  assertion  elait 
londdc,  ce  cours  d'eau  serait  done  un  dcs  afllnenls  du 
Rio-Geba.  D'apres  eux,  il  serait  barr^,  a  deux  jours  de 
pirogue  (30  milles  environ)  de  Kade,  par  des  rochers 
couverts  dans  la  saison  des  pluies. 

Le  meme  jour,  a  sept  lieures  et  demie  du  soir,  nous 
arrivames  a  Kade,  encombre  par  la  suite  d'un  chef  du 
Fouta-Dialon  :  nous  n'aurions  pu  y  irouvcr  de  loge- 
nient,  si  le  chef  lui-ni6me  ne  nous  eiit  fait  preparer 
une  cave,  d'ou  il  nous  faisait  sortir  le  lendemain  soir, 
pour  nous  devaliser  de  lout  ce  que  nous  posst^dions. 
Apres  ce  pillage  ,  j'obtins  dc  ce  chef,  qui  plus  tard 
paya  de  sa  tote  cette  trahison  ,  I'aulorisation  de  con- 
linuer  ma  route.  Six  jours  apres ,  notis  couchames 
a  Dombia,  grand  village  tiapy,  ou  nous  apprlmes 
qu'Amadi-Ouri ,  frere  de  Leo-Boudou  ,  qui  vcnait  dc 
nous  piller,  6tait  a  peu  de  distance  avec  une  arni^e 
allant  dans  le  Cabou.  Je  Irenibhii  alors  de  me  voir 
enlever  le  peu  de  marchandises  qui  me  restait;  mais 
J'en  fus  quilte  pour  la  peur,  et  ce  chef,  quo  nous  re- 
joignimes  a  Kambala ,  petit  village  situe  au  pied  des 
montagnes  de  ce  nom,  me  fit  un  excellent  accueil  et 
ne  voulut  n)6mc  pas  ,  lorsqu'il  sut  que  j'allais  chez 
I'ahnami,  rcccvoir  le  petit  cadeau  que  jc  lui  olTrais. 
J'appris  aupris  de  lui  que  le  pretendant  Ibrahini- 
Seuris  se  Irouvait  a  Labbe,  ou  il  rassemblail  une  arra^e 
pour  aller  combatlrc  son  cousin  I'almami  Omar,  et  je 
fus  oblige  de  changer  encore  une  fois  de  route,  pour 
ne  pas  tomber  cntre  ses  mains. 

Continuant  dc  marcher  au  sud-onest  jusqu'a  Dara, 
quillant,  le  1"  Janvier,  tout  chemin  baltu,  je  me  jetai 


(  369  ) 

dans  les  monlagnes  du  Bauves,  pour  aller  chercher  la 
X'oule  suivie  par  les  caiavanes  qui  vonl  de  Kakandy 
(Rio-Nunez)  a  Timbo;  mais,  au  milieu  d'un  pays  inha- 
bite,  nos  provisions  furent  bienlot  epuisees.  Nous 
eilmes  alors  a  souflrir  d'un  mal  plus  terrible  que  tous 
ceux  que  nous  avions  affronl^s  jusqu'a  ce  jour  :  nous 
fumes  exposes  a  mourir  de  faim,  ce  qui  serait  arrive 
si  a  de  longs  intervalles  nous  n'avions  pas  rencontre 
quelques  gardiens  de  troupeaux  qui  parlag^rent  le  peu 
qu'ils  avaient  avec  nous. 

Nous  pumes  ainsi  alleindre  la  route  de  Kakandy, 
sur  laquelle  nous  nous  Irouvames  le  6  Janvier.  Nous 
primes  alors  la  direction  est-nord-est,  renconlrant  a 
chaque  instant  des  caravanes  qui  se  rendaient  aux  ela- 
blissemenls  europeens  du  Rio-Nunez  et  du  Rio-Pango. 
Ce  meme  jour,  nous  passames  le  Dolonqui,  riviere 
large  de  50  a  60  metres  et  profonde  de  1  metre  au  plus 
dans  celte  saison.  Ses  rives  sont  taill^es  a  pic,  dans  una 
roclie  poreuse ,  apre  au  toucher,  d'une  couleur  noi- 
ratre.  Dans  les  endroits  ou  le  courant  est  rapide,  ces 
rochers,  au  milieu  desquels  la  riviere  s'est  creuse  un 
lit,  sont  polls  et  excessivement  glissants,  ce  qui  rend 
le  passage  Ires-difficile  pour  les  hommes  charges.  C'esl 
cetle  riviere  que  Caillie,  dans  son  Voyage,  appelle  Do- 
lonqua,  qu'il  dit  avoir  passee  plusieurs  fois;  le  ruisseau 
qu'il  nomme  Bengala  est  un  des  afflueiits  de  ce  cours 
d'eau,  souvent  confondu  avec  le  Dolonqui,  qui  n'est 
lui-meme  que  le  Rio-Pungo  :  car  Ics  habitants  donnent 
indiQeremment  au  Dolonqui  le  nom  de  Bengala  (du 
nom  du  comptoir  europ^eii  silui  sur  le  Rio-Pungo)  et 
celui  de  Caporo,  du  mol  Rio-Pungo,  qu'ils  prononcent 
mal. 

III.   Avnii..   5.  25 


(  370) 

A  parlir  de  ce  polnl ,  nous  suivinies  a  peu  pix-s  la 
mfeme  route  que  Caillit^,  rencontranl  tous  les  cours 
d'eau  qu'il  a  indiques.  Le  10  Janvier,  nous  couchauies 
a  Bounia,  ou  ce  voyageur  avail  sejourne;  el  le  lendo- 
main,  11  Janvier,  nous  arrivuaies  sur  le  Lord  du  Ko- 
koula,  qui  forme,  a  I'endroit  ou  nous  le  passames,  dc 
nombreuses  cataractes  et  une  chute  d'eau  d'un  elfcl 
tuagique,  au-dossous  de  laquelle  dut  passer  Cailiie, 
qui  niarcliait  au  sud-sud-est ,  alin  d'evitcr  Timbo , 
landis  que  nous  I'aisions  le  sud.  Gette  chute  d'eau  s'ap- 
pelle  dans  le  pays  Kanibadaga. 

Le  12,  nous  arrivames  a  Broualtapu.  Nous  n'6tions 
plus  qu'a  quelqucs  jours  de  marche  dc  Tinibo,  el  je 
comptais  me  reposer  en  ce  lieu,  ou  la  vegetation  luxu- 
rianle  des  orangers  et  des  citronniers  nous  prometlail 
des  rarraichissenienls  dont  nous  avions  le  plus  grand 
besoin ;  inais  un  nouveau  desappoinlement  nous  y 
attendail.  L'almami  Ibrahim,  cousin  d'Oxnar,  qui  avait 
suscil^  une  guerre  civile  centre  ce  dernier,  (ilait  a  une 
journ6e  de  marche  de  Bi'oualtape,  et  s'avangait  dans 
I'interieur  pour  livrer  bataille  a  son  comp^titeur.  Le 
lendemain ,  il  devail  depasser  le  lieu  oCi  nous  6tions , 
el  s'arreler  a  Kebale.  Quelques-uns  de  ses  hommes 
de  confiance,  qui  «ilaient  dans  le  village  a  recruler 
des  partisans,  I'averlirent  du  sejour  que  nous  y  fai- 
sions;  et,  le  lendemain,  il  envoyait  a  Broualtaj)6  un 
de  ses  cousins,  qu'il  i'aisait  accompagner  de  cent 
hommes  arm6s,  avec  ordre  de  m'amener  morl  ou  vif. 

En  prc^sence  de  I'ordre  que  me  communiqua  I'cn- 
voy^,  et  des  dispositions  des  chefs  de  Broualtap^,  qui 
mouraient  de  peur  de  se  compromeltre,  toute  hesita- 
tion elail  inutile.  Je  partis  done  Ic  soir  m6me,  accoiii- 


(  371  ) 

pagnti  de  mon  guide  pculli,  laissant  Jacques  au  lieu 
que  je  quittais,  avec  mes  bagages  el  un  des  porteurs, 
qui  avail  la  fi^vre  depuis  la  veille. 

Le  lendemain,  Jacques  me  rejoignail  a  Diouria,  d'oii 
nous  parllines  pour  aller  relrouver  Ibrahim  a  Kebaie. 
Je  vis,  ce  jour-la,  le  pr^lendant  pendant  un  instant; 
le  lendemain,  il  m'emmena  avec  lui  a  Foucoumba , 
ville  ou  Ton  sacre  les  almamis  el  ou  se  liennent  les 
grandes  assemblees  politiques.  Le  18,  j'assislai  au  cou- 
ronnement  d'lbrahim,  qui  partit  le  lendemain  pour 
aller  livrer  bataille  a  I'almami  Omar.  Avanl  son  de- 
part, il  eut  soin  de  me  di^pouiller  du  peu  qui  me  res- 
lait,  ne  rae  laissant  que  mes  [)apiers,  mon  fusil  a 
piston  donl  il  ne  pouvait  pas  se  sei  vir,  mon  sabre,  el 
le  fusil  anglais  de  Jacques,  mauvaise  arme  qu'il  trouva 
Irop  lourde.  II  ne  donna  aucun  ordrc  pour  que  des 
vivres  nous  fussenl  fournis;  de  sorte  que,  n'ayantplus 
rien  pour  en  acbeler,  il  y  avail  trois  jours  que  nous 
n'avions  mange,  lorsque,  heureusementpour  nous,  au 
moment  ou  je  sorlais  de  la  mosqu^e,  dans  laquelle  je 
venais  de  faire  la  pri^re  u  la  facon  des  musulmans,  le 
vieux  tamsir  s'etant  aperc^u  que  la  faim  me  tourmenlait 
m'eminenu  cbcz  lui  pour  nianger,  eloblintdescroyanls 
de  nous  donner  ce  qui  elait  necessaire  a  noire  subsis- 
lance. 

Le  vendredi,  24  Janvier,  I'almami  Omar,  apres  un 
combat  de  quelques  heures ,  mil  en  fuite  I'armee 
d'lbrahim ,  qui,  voyant  la  tournure  que  prenaient  ses 
affaires,  envoya  I'ordre  u  celui  qui  commandail  en  son 
nom  a  Foucoumba  de  me  raetlre  a  morl;  il  ne  voulait 
pas  que  je  pussc  communiquer  a  I'almami  le  message 
du  gouverneur.  iMon  hole,  qui  revenait  de  la  bataille, 


(  372  ) 
ot  qui  avail  enlomlu  donner  eel  oixlre,  m'on  aveilil. 
Je  passai  une  parlie  de  la  nuil  dans  unc  grande  per- 
plexity. Nous  avions  barricade  la  porle ,  nos  armes 
6taienl  charg6es,  et  nous  etions,  Jacques  el  nioi,  bien 
decides  a  vendre  cherement  noire  vie.  Vers  luinuit, 
on  vint  nous  appeler  ct  frapper  u  noire  porle.  Je  pensai 
que  notre  derniere  heure  elait  venue.  11  n'en  6tait 
rien;  nous  ellons,  au  conlraire,  sauv6s  :  ceux  qui 
nous  appelaient  venaient  nous  annoncer  qu'un  parenl 
de  I'almanii  Omar  venait  d'arriver,  avec  cinquante  ca- 
valiers qu'il  envoyait  pour  nous  prot^ger;  ils  nous 
apprirent  en  nienie  lem])S  quo  ralniami  lui-meine 
allail  vcnir  a  Foucoumba  pour  y  lenir  une  assemblee 
de  lous  les  chefs. 

En  effel,  I'almami  arriva  le  5  levrier  a  onze  heures 
et  deinie  du  niatln.  Je  sorlis  pour  aller  a  sa  rencontre. 
Aussitot  qu'il  m'apercut  il  mit  pied  a  terre.  J'en  fis 
aulant  de  mon  c6l6.  II  s'approcha  vivemcnt  de  raoi , 
m'aborda  d'un  air  noble  et  empresse,  et,  apr^s  m'avoir 
serr6  la  main,  m'assura  qu'il  olait  heureux  de  me  voir, 
qu'il  savait  lout  ce  que  j'avais  souffert,  ct  qu'il  fcrait 
tous  ses  eilorts  pour  me  le  faire  oublier.  II  remonla 
ensuite  a  clieval,  me  donnant  un  de  ses  hommes  de 
confiance  pour  m'accompagner,  el  ajoutant  qu'il  m'in- 
diquerait  plus  tard  I'heure  a  laquelle  il  pourrail  me 
recevoir. 

J'avais  retrouve,  dans  la  suite  de  I'almami,  Amadou- 
Laminc,  Ic  peulh  que  j'avais  envoys  dc  Kolibcntan.  II 
me  dit  que  I'almami  elait  persuade  que  j'avais  entre- 
pris  ce  voyage  pour  kii  personnellement;  que  cc  pro- 
c(ide  avail  flatti^  san  amour-j)ropre  d'une  maniere  ex- 
traordinaire; que  je  ne  devais  pas  le  delromper,  sous 


(  373  ) 

peine  tie  me  voir  refuser  la  permission  d'aller  a  Segoii, 
J'entrai  dans  cet  ordre  d'idoes.  J'avais  ecrit  au  com- 
mandant de  Bakel  de  m'envoyer  quelques  marchan- 
dises  a  Timbo  et  une  lettre  dans  laquelle  le  gouverneur, 
pr^textant  des  affaires  subites,  lui  demaiiderait  de  me 
faire  conduire  a  Segou.  Je  me  decidai  a  altendre. 

Le  soir,  je  suivis  I'almami.  II  fiit  excellent  pour  moi, 
et  me  combla  de  prevenances  de  toute  espece.  J'etais 
atteint  d'une  dyssenterie  tresforte ,  et  il  vint,  bravant 
1 'etiquette  qui  lui  defend  d'aller  chez  les  elrangers,  me 
visiter  chaque  jour  dans  ma  case,  et,  pendant  toute  la 
duree  de  ma  maladie,  il  cnvoya  trois  fois  par  jour  sa- 
voir  des  nouvcUes  de  ma  sanle. 

Le  h  mars,  ma  sante  s'elait  amelioree.  L'almami 
m'engagea  a  I'accompagner  a  Timbo.  J'acceptai,  ct , 
le  9,  nous  entramcs  dans  sa  capilale ,  ou  il  me  donna 
pour  logcment  une  habitation  charmante  qu'occiipenl 
les  almamis  lorsqu'ils  viennent  a  Timbo,  avant  d'etre 
sacres.  Le  17  mars,  les  affaires  pour  lesquellos  il  avail 
rassemlde  les  chefs  etanl  termin^es ,  nous  partimos 
pour  une  de  ses  maisons  de  campagne,  appelee  Sou- 
coutouro.  A  six  heures  quaranle-cinq  minutes  du 
matin,  nous  nous  mimes  en  route.  A  onze  heures, 
nous  etions  sur  les  bords  du  Senegal ,  appele  par  les 
peulhs  Maio-Balcio,  et  Bafing  par  les  Mandinguos  (ces 
deux  mots  signifient  riviere  noire).  II  est  en  cet  endroit 
large  dc  100  metres  environ;  son  lit  est  obslrue  par 
des  rochcrs  qui  pcrmellcnt  de  le  passer  a  gu6  dans  la 
saison  sechc.  Un  pcu  plus  has,  il  est  coupe  en  deux 
par  une  petite  ilc.  Au-dessus ,  il  est  Ues-profond  et 
court  ouest-nord-ouest  dans  un  lit  dont  les  bords  sont 
a  pic.  Le  fond  est  un  gros  sable.  Sur  les  roches  se  trou- 


(  :^7/i  ) 

vent  les  nierncs  huitres  nacrees  qu'on  voit  a  Bakel  (Se- 
negal). Les  caimans  ot  les  hippopotanios  y  sont  en 
grande  quantite.  A  deux  lieues  dc  la,  son  coins  est 
nord-nord-est,  et  ilarroselepicd  degrandesmontagnes 
qui  le  dessinent  au  loin.  A  midi,  nous  dtions  install(is 
a  Soucoulouro. 

Le  temps  que  je  passai  la  fut  le  plus  heureux  de  men 
voyage.  Au  milieu  de  ces  pays  inconnus  et  que  Ton 
representc  comme  sauvages ,  j'(!!lais  I'ohjet  dos  alton- 
lions  les  plus  delicates  et  d'un  omprcsscment  qui  ne  sc 
dementit  jamais.  Chaque  soir,  I'almanii  Omar  me 
mandait  pres  de  lui ;  nous  nous  cnlretenlons,  dans  de 
longucs  causeries,  de  la  France,  de  sa  puissance,  et 
surtoul  de  la  mani^re  dont  les  blancs  font  la  guerre.  Je 
profilai  dc  ccs  bonnes  dispositions  pour  oblcnir  de  lui 
la  promessc  qu'll  emploierait  tous  ses  elTorts  pour  fa- 
voriscr  notre  commerce  et  diriger  sur  Bakcl  ou  Sedhiou 
les  caravanes  qui  traversent  son  pays. 

J'attcndais  toujours  avec  impatience  riiomme  que 
j'avais  demande  a  Bake! ;  je  parlai  souvent  a  I'almami 
de  mon  desir  d'aller  a  Segou,  et  je  finis  par  oblenir  de 
lui  la  promesse  qu'il  mc  donnerait  une  oscorte  pour 
rae  conduire  sur  le  tcrriloire  du  roi  de  ce  pays,  avec 
lequel  il  cnlrcticnt  des  relations  amicales ,  si  le  gou- 
verncur  lui  en  teinoignail  le  desir. 

L'almami  lomba  malade.  Seul  je  fus  admis  a  le  voir, 
nialgrc;  I'usage  qui  interdil  I'entrtio  de  sa  case  pendant 
sau)aludic  a  lout  ce  qui  I'enloure.excepte  a  ses  fommes. 
Je  commenQais  a  desesperer  dc  voir  arrivcr  des  nou- 
velles.  Voulant  motlre  le  lemps  a  profit,  j'allai  visiter 
les  sources  du  Senegal.  L'almami  me  donna  un  guide 
el  une  escorto,  et,  le  2  avril,  jc  partis  a  cinq  licujes  tlu 


(  375) 
malln.  A  une  heure  de  rapres-muli,  iiouselions  arrives 
a  DoLibel,  ou  nous  passames  la  nuit  chez  le  chef  du 
village.  Le  lendemain,  apres  avoir  traverse  Bouria, 
nous  arrivames,  a  dix  heures  quarante-cinq  minutes 
du  matin,  aPoredaka,  village  situe  au  pied  d'une  mon- 
tagne.  Le  h,  a  six  heures  du  matin,  nous  quitlames  cc 
lieu.  Nous  dirigeant  au  sud,  nous  Iraversames  d'abord 
une  montagne;  puis,  apres  en  avoir  gravi  une  secondo 
du  noin  de  Dabala,  nous  vhnes  un  petit  bois  excessi- 
vement  touffu,  a  I'extremite  duquel  etait  une  sorto  de 
bassin  nalurel  dont  I'eau  s'^coulait  par  un  petit  mis- 
seau  dans  un  second,  puis  dans  un  troisi^me  situe  un 
peu  plus  has,  d'ou  elle  sortait  avec  beaucoup  de  foi'co, 
rencontrant  presque  aussitot  des  rochers  granitiques 
qu'elle  franchit  en  formant  cascade,  puis  s'ecoule  au 
sud-est  :  c'elait,  me  dit-on,  la  source  du  Senegal. 

Je  me  disposais  a  retourner  sur  mcs  pas,  lorsqu'on 
me  demanda  si,  pendant  que  j'en  etais  pres,  jo  voulais 
voir  aussi  la  source  du  Tene.  Surpris  de  cette  propo- 
sition, qui  derangcait  tout  ce  que  j'avaislu,  j'acccptai, 
et  Ton  me  fit  tourner  la  montagne  do  Dalaba ,  le  ter- 
rain s'elevant  sensiblement;  sur  le  cote  oppose  a  celiii 
oil  est  situee  la  source  du  Senegal,  on  me  montra  un 
ruisseau,  large  d'environ  2  mitres,  jaillissant  d'lin 
rocher  de  granit,  d'oii  il  coule  a  I'ouost.  Je  niani- 
I'estal  mon  6tonnement  a  inon  guide;  mais  il  m'as- 
sura  qu'il  ne  se  h'ompail  pas.  D'apres  cela ,  Mollicn 
aurait  ele  induit  en  erreur,  ce  qui  ne  serait  pas  eton- 
nant,  d'abord  parce  que  elant  oblige  de  se  caidier, 
il  ne  put  controler  ce  que  lui  dit  le  soul  guide  qu'il 
avail,  ensuite  parce  que  le  lieu  cju'il  d^signe  comme  la 
source  du  Tone  m'a  etc  indique  a  moi  coninie  cclle  de 


( •'^/<> ) 

la  riviere  Boie,  qui  se  jeltc  dons  le  Teiiti  (Fal^ine),  ct 
il  scrail  possible  que  I'hommc  qui  I'indiqua  a  Mollion 
se  flit  Irorape  sans  Ic  vouloir.  Je  crois,  du  resle ,  que 
plus  lard  je  pourral  Ic  prouvcr,  lorsque,  ines  mat6- 
riaux  arrives,  je  reconslruirai  ie  cours  de  la  partie  su- 
pericurc  de  cette  riviere. 

Cetle  excursion  finie,  nous  rovinmes  a  Porc^daka,  oii 
nous  couchames,  ct,  le  lendemain  ,  nous  reprimcs  la 
route  de  Soucoulouro,  que  nous  atteignlmes  le  0  avril 
a  niidi.  L'almami  allait  beaucoup  mieux;  Ic  9,  il  sortit 
pour  la  premiere  fois ,  ct ,  le  11,  jc  I'accompagnai  a 
Tsain ,  puis  a  Sembakoum  et  a  Counlat.  Pour  faire  ce 
voyage,  il  me  fit  cadeau  d'un  Ires-joll  cheval, 

Le  7  mai,  nous  etions  de  rctour  a  Soucoutouro.  Ne 
voyanl  pas  arriver  I'homme  que  j'attcndais  de  Bakel, 
les  pluies  commencant  a  tombcr,  je  demandai  a  I'al- 
niami  la  permission  de  parlir.  11  me  pria  de  ne  pas  me 
mettre  en  route  avant  que  son  cousin  eiit  fait  sa  sou- 
mission ,  et  (I'allcr  pros  de  lui  avcc  son  frere  pour 
m'assurcr  s'il  etait  sincere  dans  les  offrcs  qu'il  lui 
faisail.  J'acceplai  cette  mission,  ct  j'cus  le  bonhourde 
lui  annoncer  qu'Ibraliun  consentalt  a  renonccr  aux 
drolls  qu'il  croyait  avoir,  a  la  scule  condition  d'avoir 
la  vie  sauve.  Le  6  juln,  jour  de  salam,  nous  nous  i-en- 
dlmes  a  la  mosqucc  de  Tiinbo.  La,  en  presence  dcs 
anclens  ct  des  princlpaux  chefs,  Ibrahim,  suivl  des  plus 
influents  d'entre  ses  partisans,  renon^a  a  loiile  preten- 
tion au  pouvoir,  et  jura  sur  le  Coran  fidclitc  a  l'almami 
Omar. 

Apr^s  cette  cer^monie,  ralmanii  s'occupa  des  pr^- 
paralifs  de  mon  depart  ,  chnisit  la  route  du  Bondou, 
comn)C  clanl  la  plus  siire,  ct  me  donna  deux  de  scs 


(  377  ) 

parents  pour  m'accompagner  et  reniellre  une  leltre  au 
gouverneur.  Nous  partimes  le  25  juin  a  sept  heures  et 
demie.  Mes  adieux  avec  I'almami  excil^rent  respecli- 
vement  notre  sensibilite ;  il  m'avait  temoigne  nne 
affection  que  jc  lui  rendais  bien.  II  me  fit  promettre 
de  revenir  aupr^s  de  lui,  me  jura  qu'il  serait  toujours 
I'ami  desFrancais,  et  que  toute  sa  vie  il  protegei'ait 
de  tout  son  pouvoir  leurs  personnes  et  leur  commerce. 
A  liuit  heures  et  demie,  nous  traversames  le  Bafing  en 
pirogue  :  il  y  avail  alors  5  pieds  d'eau  a  I'endroit  ou 
nous  I'avions  passe  a  gue  en  avril.  Nous  primes  la  di- 
rection ouest-nord-ouest.  Nous  cheminames  sans  in- 
cident remarquable  jusqu'au  3  juillet,  jour  ou  nous 
arrivames  a  Lab6,  seconde  ville  du  Foula-Dialon. 

Obliges  de  rester  la  deux  jours,  pour  donner  le  temps 
au  chef  de  nous  prt^parer  des  provisions,  j'en  profitai 
pour  aller  visiter  Mouminla,  montagne  tres-elev^e  qui 
separe  la  province  de  Lab6  de  celle  de  Timbi,  dont  la 
cime,  disait-on,  etait  couverte  de  neige.  Je  n'en  trouvai 
pas,  peut-6lre  a  cause  de  la  saison  dans  laquelle  nous 
^tions;  mais  je  remarqnai  qu'elle  etait  presque  entie- 
rement  composee  de  pierres  magnetiques  d'une  grandc 
puissance,  dont  j'ai  rapporte  des  echantillons.  Nous 
quittamos  Labe  le  6  juillet.  Le  8  nous  etlons  a  Toulou, 
oil  je  fis  arretor  la  caravane,  pour  aller  voir  les  mon- 
lagnes  de  Bade,  dans  lesquelles  se  trouvent  la  Gamble 
et  le  Rio -Grande.  Cos  fleuves  sont  appelds  par  Ics 
peulhs  :  le  premier,  Dinah ,  et  le  second ,  Coumba , 
dans  son  cours  sup^rieur,  et  Maio-Koli  (riviere  de 
Roll),  dans  sa  partie  interleure.  Cette  excursion  ^tait 
linle  a  deux  heures,  ct  le  lendeuiain  nous  nous  re- 
miines  en  route. 


(  378  ) 

Le  III  juillet,  nous  couchAnies  a  Mali,  oii  Mollien  se- 
journa  lors  de  son  voyage  :  depuis  Courhari,  j'avais  fait 
a  peu  pi'^s  la  nifiaie  route  que  lui ;  je  la  perdis  cepen- 
dant  de  I'autre  cot^  des  montagnes  du  Tangut^,  que  je 
dus  passer  par  le  meme  cheinin  qu'il  avail  pris.  J'y 
cherchai  vaincnient  la  source  donl  il  parle;  je  n'y  vis 
aucun  cours  d'oau.  Je  crois  qu'il  a  dil  elro  induit  en 
erreur;  car,  d'apr^s  ce  voyageur,  la  riviere  qui  pren- 
drail  sa  source  dans  les  montagnes  du  Tangue  se  jel- 
terait  dans  lo  Rio-Grande,  et  serail  connue  sous  le  nom 
de  Coumba.  Or,  nous  avons  vu  que  ce  nom  est  celui 
qu'on  donne  au  Rio -Grande  dans  sa  partie  supe- 
rieure ;  car,  en  nous  montrant  sa  source,  les  natu- 
rals nous  dirent  bien  :  Ore  Coumba  inato ;  Maio-KoU 
ac  Coiinihn  goto,  c'est-a-dire  la  tele  de  la  Coumba 
est  la;  la  riviere  de  Roli  et  la  Coumba  ne  font  qu'un. 
A  partir  du  Tangue  ,  nous  ne  trouvames  que  Nadel 
oil  ait  pass6  IMollien ;  puis,  dans  le  Bondou,  Mara- 
raacila. 

De  I'autro  c6t6  du  Tangue,  nous  rcneontrames  les 
populations  decimees  par  la  famine;  les  sauterellcs 
avaient  devor^  toutes  les  r^coltes ,  et  les  habitants  no 
pouvaient  plus  soutenir  leur  existence  ([u'au  moycn 
d'herbes  et  de  racines.  A  compter  de  ce  jour,  j'eus 
horriblemont  a  souffrir  dc  la  faiui ;  plusieurs  fois  nous 
restames  deux  jours  sans  manger.  A  ces  privations 
vinrent  se  joindre  d'autrcs  souflraiices.  Mcs  souliers 
ne  pouvant  plus  me  rendrc  aucun  service,  j'avais  dil , 
depuis  mon  depart  de  Timbo,  me  servir  des  sandales 
du  pays.  Peu  habitue  a  ce  genre  de  chaussure  ,  mes 
pieds  furent  bicntot  en  sang  et  tout  meurtris;  mais 
I'espoir  de  rcvoir  la  France  soutenail  mon  courage  el 


{  379  ) 

me  doiinajt  des  forces  pour  supporter  loutes  iiics  dou- 
Icurs  sans  mo  plaindro, 

Le  lundi  28  juillet,  oyant  traverse  lo  Niocolo,  nous 
dilmes  passer  dans  une  pirogue  la  Garaljie,  que  nous 
suivions  depuis  trois  jours.  Sur  I'autre  rive,  laissant 
Dentilia  a  Test  el  le  Badon  a  I'ouest,  nous  nous  trou^^ 
vames  dans  de  grandes  forfits  inhabilees  aujourd'liui , 
dans  lesquellcs  nous  voyageames  deux  jours.  Enfin,  le 
30  au  soir,  nous  pumes  attelndre  Mamakonno,  toujours 
lourrnenles  par  la  faim;  car,  depuis  les  bords  de  la 
Gamble,  notre  nourriture  n'avait  consist^  qu'en  quel- 
ques  racines  ct  fruits  sauvages  que  nous  rencontrions 
ca  ct  la. 

Mamakono  est  le  liou  de  residence  du  perc  de  la 
femme  de  ralmami  qui  voyageait  avec  nous.  II  est 
riche  par  ses  mines  d'or  et  par  I'ivoire,  provenant  des 
nombreux  elephants  qu'on  tue  aux  environs.  Nous 
comptions  nous  y  refaire  et  y  oublier  les  horribles 
privations  de  la  route.  On  nous  avail  dit  que  I'abon- 
dance  y  regnait.  Nous  fumes  cruellement  desappoin- 
tes  :  la  disette  avail  envahi  le  village  a  la  suite  d'un 
siege  qu'il  avail  soutenu  contre  des  gens  de  Bambouk, 
et  il  restait,  a  ces  malheurcux,  a  peine  assez  de  grain 
pour  ensemenccr  Icurs  champs.  Cependanl  nous  y  re- 
sumes un  bon  accueil.  Le  chef  me  hi  cadeau  de  deux 
bceufs  que  devora  la  caravane.  Quanl  a  moi ,  grace  a 
la  protection  d'Ariadna,  femme  de  I'almami ,  je  pus 
faire  deux  legers  repas  avec  le  grain  qu'on  nomme 
Jogne  dans  le  pays. 

Nous  parlimes  de  Mamakonno  le  1"  aoilt ,  n'ayant 
pour  toute  provision  qu'un  jeune  chevrcau  destine  a 
servir  pendant  Irois  jours  a  la  nourriture  de  tout  lo 


(  380  ) 

monde,  c'esl-a-dire  d'une  vinglaine  d'houimes  com- 
posanlla  caravane.  Celto  faible  ressource  ful  absorbee 
en  un  seul  repas.  Nous  rcstamcs  pendant  ces  Iro'is  jours 
sans  manger  el  sans  rien  rencontrer.  Ileureusement 
que  nous  pumes  enfin  atleindre  Maramacita.  La,  nos 
souffrances  ^taient  finies,  nous  ^lions  dans  le  Bondou, 
ou  r^gnail  line  abondance  bien  n^cessaire  au  rdlablls- 
seraent  de  nos  forces.  Le  lendemain,  siki-  de  nc  pas  6tre 
inquiel^  dans  un  pays  ou  tous  les  chefs  rae  connais- 
saient,  je  pris  les  devants  avec  mon  fidele  noir,  et  fis  en 
trois  jours  ce  qui  en  demande  ordinairenient  six  aux 
noirs  qui  suivent  celte  route;  et  j'arrivai  le  6  aotit  a 
buit  licures  du  soir;  le  bon  accueil  que  je  re^us  de 
M.  Welire,  commandant  du  fort,  et  lo  bonheur  de  re- 
voir  mes  compatriolcs,  me  fircnl  bienlot  oubllcr  mes 
fatigues  et  mes  souffrances.  De  la  je  me  rendis  a  Bakel, 
ou,  grace  a  MM.  Key,  commandant,  et  Zeller,  gerant 
de  la  Compagnie,  je  pus  reprendre  les  habits  euro- 
peens.  Le  8  septembre,  je  m'embarquai  sur  le  bateau 
a  vapeur  dc  I'Etal  le  Basilic,  pour  retourner  a  Saint- 
Louis,  oil  j'arrivai  dans  la  nuit  du  10  au  11  du  m^mo 
mois. 

Si  mon  voyage  n'a  pas  eu  des  resultats  aussi  com- 
plcts  que  je  rcsp(^rais,  s'il  m'a  ete  impossible  dc  ga- 
gncr  Scgou  el  d'cxplorer  le  centre  dc  I'Afrique,  ainsi 
que  j'en  avais  le  fcrme  dosir,  permettcz-mol  de  croire 
que  mon  cntreprise  ne  sera  pas  tout  a  fait  infruc- 
tueuse.  11  m'a  etc  donne  de  visiter  quelques  contr6es 
inconnues ;  j'ai  st'-journ^  asscz  longlemps  duns  le 
Fouta-Dialon  pour  en  otudicr  hi  geographic,  ainsi  que 
les  mceurs  et  I'organisation  politique  de  ses  habitants. 
Avec   les  nombreux   cchantillons   mindralogiques  et 


(  381  ) 
g^ologiques  que  je  rapporte ,  les  liommes  sp^claux 
pourront,  sinon  reconstruiie ,  dii  moins  donner  une 
juste  idee  du  sol  de  ces  riches  pays;  j'ai  enfin  trac(§  la 
route  a  une  expedition  nouvelJe,  qui  pourra  aujour- 
d'hui,  je  le  crois  du  moins,  arriver  facilement  a  Segou 
et  mSme  a  Torabouctou,  avec  la  protection  de  I'al- 
mami,  allie  du  roi  de  ce  pays  et  parent  d'Abdoulaye- 
Schir,  chef  du  Massina,  maltre  aujourd'hui  de  Tora- 
bouctou. 

Dans  le  croquis  que  je  joins  a  cet  expos^  sommaire 
de  mon  voyage,  on  remarquera  que,  d'apr^s  men 
estime,  les  sources  du  Senegal  se  trouvent  placees  a 
10"  16'  nord  et  13"  19'  ouest,  tandis  que  M.  MoUien  les 
indique  par  10"  6'  nord  et  13"  35'  ouest.  Nous  diffe- 
rons  davanlage  sur  remplacement  des  sources  de  la 
Gamble,  qu'il  met  par  10"  36'  nord  et  14"  37'  ouest, 
tandis  que  je  I'ai  Irouve  (toujours  d'apres  mon  estime) 
par  11°  2li'  nord  et  13°  36'  ouest.  A  I'appul  de  ces  ob- 
servations ,  je  joins  une  copie  de  mon  ilineraire ,  qui 
pourra  servir  a  contrdler  le  trace  que  j'ai  fait. 


ROUTE  D  ALLER. 

De  Mandina marclie     9  inilles  a  TO.  pourine  rendie 

iSalikene 10                  N.  E. 

Sankouta 10                  N.  E. 

Diembati i5  E.  S.  E.,  puis  3  a  I'E. 

Taba 00 

Dumbati li                N.  IN.O. 

Hiviure  Saiiit-Gregoiie  .   .  i                   N.  N.  O. 

Kareiilaba  Soukontlougou  1                    N.  JN.  E. 

Diannab 4                  E.  ;  S.  E. 

BaVeiibab 4                 N.  E. 


(  382  ) 

DelaSauJa marclie     8  inilles  au  N.  E.  p.  me  rendre 

a  Marigot  (le  Bintam  ....  a  N.  E. 

5  N.O. 

Seuo-Baildi 4^  N.O. 

Souboundou-Diagara.   .    .  g  E. 

Diapiiia 3  E.  N.  E. 

Baylde oo 

N'dianiga 6  E. 

Ps'guuder 6  E. 

Nianniaubeta i6^  E.^S.E. 

Kassan 4  E. 

Pallam fi  S.  E. 

Kataba 3  S.^S.E. 

•    Diannah 3  S.  7S.E. 

Makarty o 

Fatatenda 3  S. 

Coulari 4  S- 

Sicecounda I  7  E. 

Badari 7  S. 

Marigot  deBadari   ....  i^  S. 

Mane 7  S. 

Toubinto 2  S. 

Serrugia 5  S.  O. 

Grand  Foulacunda  .   ...  3  S.  O. 

Petit  marigot 3  S.  S.  E. 

Ore'kinguai 1 1  S.  O. 

Riviere  Badienbah  ....  2  S.  E. 

Manato 9  S.  E. 

Outoumba 8  S.  E. 

Ma'io-DVaoube  ......  4  S.  E.  j  S. 

Cob-Sale I  E. 

Mamacunda 5  S.  E. 

Kantefa 6  S.E. 

Kambene -6  S.  E. 

Riviere  du  Mana 6  S.  E. 

Sare-Diaobe 2  S.E. 

Kamb^re 7  ^' 

Kag^necounda 8  S.  S.  E, 


(  383  ) 

DeKoli inarche     6  inilles  an  S.  pour  merenilip 

aKade 7  S.S.  O. 

Cours  d'eau n  E. 

Kissara 8  S. 

Kankody 3  S. 

Paiiacon 3  S, 

I'aiiacoudie 1  S. 

3  E. 

3  S.O. 

Doinbia 7  S.O. 

i\  S.E. 

I  S.iS.O. 

KaniL.ila 4  S.jS.O. 

Sareibe 4  S.  E. 

Kalaqui 4  E. 

3  S. 

6  S.E.iS. 

Riviere  Dara 2  S.E. 

Daia 8  S. 

8  S.O. 

Tineton 3  S.O. 

Tan^'uiiata 5  S. 

Neterel-Toude 6  S.O. 

Medina 5  S. 

7  S.E. 

3  S. 

Toumane 4  S.O. 

6  S.E. 

2  N. 

7  E. 

5i  S.E. 

Bengalan 8  E.  S.  N. 

12  E.N.E. 

Dolonqui 6  N.E. 

20  E.iS.E. 

5  E.S.E. 

4  s. 

Kak.iba 18  E.iS.E. 


DeM'be:i 

a 

Bouiiia 

Kokoulo 

Lenie'te 

Broualtape 

Diouria 

Donato • 

Foucouinba 

Sankarlal 

PoiiJaka 

Bourin 

Douljel 

Titnbo 

BaGng 

Soucoutouro 

Tsai'ii 

Countat 

TsaVn  a  Sembnkoinu  .  . 


(  38/i  ) 

.  luarclie     3   mill,  a  I'E.^S.E.  p.  me  renii. 
5 
5 

7 

3i 
6 
G 

2 

8 
3 


C 
3 

4 


ID 

6 
o 
(i 


S.E. 

S. 

s. 

s. 

E.iS.E. 

E.iS.E. 

E.iS.E. 

S.E. 

S.O. 

S. 

S.E. 

S.E.iS. 

S.  S.  E. 

E.-iS.E. 

E. 

S.  E.  i  E. 

E.S.E. 

N.iN.E. 

ROUTE  DE  RETOLR. 


De  Soucoutouro  .  .  maiche    7  iiiilles  au  N.O.  pour  me  rendre 

a  Herico 3  N.O. 

Henio-Torode.  .  7  O.iN.O. 

Pian 4  O.iN.O. 

Gongore 8  N.^N.O. 

2  N.IN.E. 

Niango G  N.S.E, 

Riviere  Be're.  .  .  2  N.S.E. 

Quc'liguia.   ...  2  N.jN.E. 

Tene s  N.IN.E. 

Kouloum  ....  3  N.iN.E. 

6              '    N.N.E. 

3  N.E. 

Sefour 6  N.N.O 

>i'gali  (riviere).  2  N.N.O. 


(  385  ) 

De  I»J'galli.  .  .  i   .   .  Tiiarche  5  milles  an  N.  N.  O.  pour  me  rendre 

a  Nassi 3  N.  O. 

Dumbele  ....  5  N.  O. 

Labe '22  O.  jS.  O. 

Mouminia.   ...  6  N.  v  N.  O. 

Toiintourou.   .   .  4  N.  O. 

Montague  Bade.  lo  O.N.O. 

Toulou 4  N.O. 

Toumongirou.  .  5  O.  N.  O. 

Bandeia y  O.  N.  O. 

Oieliti 3  O.N.O. 

Boudou-Bouini.  5  N.jN.O. 

Doiihole I  N. 

Jeleta  ..,:..  .I  N. 

Caube I  N.N. 

Caube  supeiieur  5  N.N. 

Bondou-Ollandt?.  a  N.N. 

Mali 4  N. 

La  Kanta  ....  4  N.O. 

Missira 3  N.O. 

LaDiia 6  N.N.O. 

Nadelle a  N.  E. 

Malalcouillc.  .  .  a  N. 

Nangatara.  ...  .'>  N.jN.O. 

Idell lo  N.iN.O. 

Guidougoutata  ,  6  N.  O. 

Less-Maio.  ...  6  O.^N.O. 

Sene'couta.  ...  6  O.iN.O. 

Syllacunda  ...  5  O. 

BinguillaV.  ...  I  N.O. 

La  Gamble  ...  34  N.O. 

6  N.K. 

Maraakono  ...  3  N.O. 

-2  N. 

S..-koto 33  N.iN.O. 

Counda 4  N. 

Maramasita.   .   .  5  N. 

Sama 3  N. 

in.   .wRii..   6.  26 


De  Niosonco  . 
•iTaifa  .  .  . 
Leve.  .  .  . 
Coussau.  . 
Dara.  .  .  . 
MaianguVcou 
Fenin  .... 
Sainacono.  . 
Tieriio-Mali. 
Sumljouiilaka 
Debou. .  .  . 
Senoudcbou. 


(  386  ) 

marclu';    3  inilles  au  N.  S.  O.  pour  iiif  iciulre 


(i 
3 

3 

a 

2 

9 

a 

3 
5 
3 


N.S.O. 

N.E. 

N.E. 

N.E. 

N. 

N. 

N. 

N.S.E. 

E.iN.R. 

N. 


NOTE  SLR  LA  ROUTE  DU  DARFOIJR, 


M.  AN'l'OINE  U'ABBAUIE. 


Browne  est  le  premier  qui  nous  ail  donnc  des  no- 
tions un  peu  exactes  sur  le  Dail'our.  Longtemps  apres 
j'ai  essaye  de  faire  de  ce  pays  une  stalistique  (voir 
Bulletin,  18Z|2,  I.  XVIII )  intcrroinpuc  bienlol  par  le 
I'el'us  de  celui  qui  me  renseignait.  Malgre  la  relation  de 
Mohammed  el-Tounsy,  dont  nous  devons  la  publica- 
tion aux  soins  de  J\l.  Jomard  el  surtoul  a  ceux  de  M.  le 
docleur  Perron,  on  peut  afiirmer  que  nos  connais- 
sanccs  sur  le  Darfour  sont  encore  imparlaitcs,  et  I'ex- 
trait  suivant  d'une  lellre  qui  m'a  He  adressee  par 
M.  Vaudey  ne  sera  pas  denue  d'interet. 

«  Craignant  I'ambition  envahissante  du  fameux  Mo- 
bammed-Aly,  vice-roi  d"Egyple  ,  le  sultan  du  Darfour 
a  d(il'endu  di;s  1820  I'entr^e  de  ses  ttats  a  aucun  indi- 
vidu  de  race  blanche.  Si  ndanmoins  I'un  d'eux  parvient 


(  387  ) 

a  entrer  au  Darfoui',  il  est  bien  regu  el  bien  Irait^ ,  a 
condition  de  n'en  plus  sortir.  En  oulre,  le  sultan  paye 
de  lenips  en  temps  un  tribut  a  la  Porte  Oltomane,  afin 
que  celle-ci  le  protege  conlre  les  vues  ambilieuses  de 
TEgypte.  Enfin  il  a  defendu  sous  peine  de  mort  I'en- 
tree  dans  ses  filals  par  la  province  de  Dongolah,  De  ce 
c6l6-la,  en  clTet,  il  n'y  a  que  douze  journeesde  marche 
du  Nil  a  Kobbeh,  ville  ou  r^sida  Browne  et  ou  sejour- 
nent  encore  les  caravanes.  II  y  a  d'ailleurs  Irois  fois  de 
I'eau  dans  le  trajet,  ct  la  vegetation  spontanee  de  ce 
desert  fournirait  abondamment  a  la  nourriture  des 
chameaux  indispensables  a  une  expedition  envahis- 
sante  et  dont  la  charge  complete  est  d'cnviron  300  ki- 
logrammes. 

))  Depuis  la  conquele  du  Soudan  par  I'Egypte,  ce 
pays  ne  communique  avec  le  Darfour  que  par  le  desert 
de  Selimeb,  ou  Ton  s'engage  en  partant  de  Sioul.  Les 
caravanes  emploient  au  moins  deux  mois  a  traverser 
ce  desert,  et  le  tiers  des  chameaux  meurt  en  route, 
quoiqu'on  les  charge  de  100  kilogrammes  seulement. 
Mais  ils  doivent  en  outre  porter  leur  nourriture  en  eau 
el  en  grain,  car  ce  desert  est  presque  parloul  aride. 
Ces  difficultes  materieltes  font  qu'on  ne  retire  du  Dar- 
iour  que  des  esclaves,  de  I'ivoire  et  de  Tor.  Le  trans- 
port du  natron,  de  la  gomme,  etc.,  serait  trop  couteux 
par  une  route  choisie ,  pour  elre  la  moins  pralicable. 
Chaque  caravane  qui  la  parcourt  perd  plusiours  de  ses 
esclaves  el  le  tiers  au  moins  de  ses  chameaux,  soil  par 
la  fatigue,  soil  par  les  privations  de  toute  espece.  Les 
rafemes  raisons  empechent  qu'on  ne  porle  au  Darfour 
beaucoup  de  produits  manufactures  en  Europe,  et  leur 
prix  est  ainsi  tellemont  elevt^ ,  que  les  grands  du  ptjys 


(  388  ) 

sonl  seuls  ;">  en  fuire  usage.  La  cessation  dii  commerce 
avec  le  Darfour  a  poit6  un  coup  funesle  a  la  province 
de  Dongolali,  qui  a  vu  disparaitre  sur  son  terriloire  des 
villages  enliers  dont  les  dalles  el  les  toiles  ne  sonl  plus 
achelt^es  par  les  caravanes.  Les  prix  sonl  ainsi  des- 
cendus  a  2  fr.  los  100  kilogrammes  de  dalles  et  a  1  fr. 
50  c.  les  15  metres  de  loile  pesant  plus  d'un  kilo- 
gramme. 


LETTRE  DE  M.  ROLLl^  AU  CONSUL  D'AUTRICIIE 

(  DU    SENNAll ) , 

E.N  DATE  DE  GABTODJl   (  KHARTOUM  ),   LE   20  JUILLET   18S!, 

COMMUNIQUEE  PAR  M.  VADDEY,  CONSUL  DE  SAKDAIGi\E  AD  SENXAR, 
ET  EXTRAITE  D'UiNE  LETTRE  DE  M.  D'AR.\ACD, 

OAMIETTE,     LE    20    F^VniER     185-2. 

«  Le  retour  de  nos  barques  a  resolu  un  pro- 

bl^me  qui  int^resse  la  navigalion  et  le  commerce  sur 
le  fleuve  Blanc.  Avec  trois  fusils  chacune  et  quelques 
Arabcs,  nos  barques  ont  traverse  loutes  les  peuplades 
nfegi-es,  ccbelonnees  jusqu'a  li°  30'  lalil.  nord,  oil  les 
expeditions  lurques  n'ont  ose  penelrcr  qu'avec  des 
forces  considerables.  Les  deux  voyages  que  j'ai  fails 
avec  M.  Lafargue,  cl  riiospilalile  que  doni  Angelo 
Vinco,  mon  ami,  a  Irouvee  cliez  les  Berrs,  toul  me 
prouve  que  les  sources  du  fleuve  Blanc  ne  sont  plus 
inaccessibles  aux  savants  et  aux  industricls  de  TKurope. 
Dom  Angelo  Vinco  nous  apprend  d'abord,  parsa  letlre 
du  11  avril,  datee  de  Belonia,  qu'il  est  olahli  dans  celte 
ville,   situee  sous  h°  30'  lalil.   nord    (I),   au  pied  des 

(l)  II  )  a  ici  line  eiipiir  :  l/i'-li-iila  est  par  J"  f)  i '  5".  l)'An>*i;o. 


(  389  ) 

raontagnes  des  Berrs,  dont  il  a  recii  raccuell  le  plus 
amical,  parce  qu'un  des  chefs  les  jdIus  influents  de  ces 
pays  est  devenu  pour  lui  el  nos  gens  un  hole  et  un 
ami  qui  les  protege  et  les  acconipagne  dans  toutes  les 
courses  qu'ils  font.  Vous  devinez,  monsieur  le  consul, 
que  cet  ami  c'est  le  niemc  Niguello  dont  je  vous  ai 
plusieurs  fois  parle,  et  qui,  dans  mon  premier  voyage, 
a  voulu  me  suivre  a  Gartoum,  pour  voir  le  pays  d'ou 
venaient  les  fruils,  le  vin ,  les  objets  d'art  quo  je  lui 
avais  donnes ,  et  surlout  les  conteries  et  nos  maisons 
flottantes  que  I'inondalion  avait,  disait-il,  detachees 
de  la  rive  et  entrainait  jusqu'a  nous,  c'est-i-dire  nos 
barques ,  dont  il  ne  comprenait  pas  encore  le  m6ca- 
nisme.  Pour  faire  le  voyage  avec  lout  le  confortable  dA 
a  un  homme  de  sa  consideration  ,  il  avait  amen6  avec 
lui  deux  de  scs  femmes  et  quelques  domestiques ;  mais 
cetle  famille,  ou  plutot  sa  valeur,  avait  excite  la  cupi- 
dite  des  barques  liirques,  qui  me  I'avaient  cnlev6  :  c'est 
a  peine  si  j'ai  pu  oblenir,  a  Gartoum,  qu'il  reslat  libre, 
et  flit  envoye  I'annee  suivante  dans  son  pays.  Malgr6 
le  ddsenchantement  que  Niguello  a  clu  eprouver  entre 
les  mains  des  Turcs,  qui,  pour  I'^loigner  de  nous, 
i'avaient  interne  a  Ouelad-Medine ,  ou  ils  I'ont  laisse 
manquer  de  lout,  eel  homme  est  devenu  dans  sa  tribu 
le  facteur  des  blancs,  qui  ont  toujours  trouve  chez  lui 
une  grande  quantity  d'ivoire.  Les  recits  qu'il  a  fails,  a 
son  retour,  sur  son  voyage,  ont  lellement  excite  I'imagi- 
naliun  de  ses  semblables,  que  nombre  d'ejilre  eux  ont 
voulu  venir  visiter  a  leur  tour  la  villo  des  blancs,  ou 
les  boutiques  elaicnl  remplies  de  conteries  ou  venote- 
ries,  de  toiles  de  loutes  coulours,  etc.,  etc.,  et  dont  les 
habitants  marchaienl  monies  sur  des  zfebres  (anes  ou 


{  M)0  ) 

chcvaux)  el  sur  des  girafes  (chameaiix).  Malheurcuse- 
menl  I'esclavage  est  vonu  mettre  fin  a  ccs  beaux  reves. 
Ces  vdvageurs  ing^nus,  qu'on  aura'it  dd  accueillir  et 
favoriscr  de  loules  mani^res,  furent  vcndiis  oii  fails 
soldals  a  leur  aniv^c  a  Garlomn,  el  auciin  de  ces  der- 
niors  n'a  revu  son  pays,  exceple  Sado,  que  j'ai  pu  ra- 
cheler.   Ainsi  les  Turcs  onl  niieux   aim6   profiler  do 
qiielques  csclaves,  et  passer  pour  anthropophages  aux 
yeux  de  ces  sauvages,  dont  ils  ont  trompc  la  bonne  foi. 
Neanraoins   le   voyage  de  Niguello  a   6te   avanlageux 
pour  nous,  qu'il  a  appris  a  dislinguer  des  Turcs  dont 
il  connait  la  cupiditc  et  la  uiauvaise  foi;  ct  ces  fautos, 
en  regard  de  nos  bons  procedos,  nous  ont  laisse  I'avan- 
tage  chez  ce  peuple  ,  et  la  manit^re  donl  ils  nous  onl 
accueillis  en  est  la  mcilleure  preuvc. 
.     »  La  letlre  de  dom  Angelo  vous  fera  connaitre  aussi 
que  nous  avons  noue  des  relations  commerciales  avec 
dc  nouvelles  tribus,  celles  des  Benj,  des  Lakes,  des 
Mekedo  et  des  Jtiguars,  qui  ne  s'etaient  jamais  mon- 
trees  aux  precedenles  expeditions.  Les  trois  premieres 
so  Irouvent  depuis  trois  journees  jusqu'a  huit  a  I'osl 
^e  Belenia.   La  derni^re ,   qui  est  trfes-consid6rable  , 
habite  les  bords  du  fleuve,  au  sud  dc  Lokaia;  ensuite 
viennent  les  Po/oudjs,  pres  des  cataractes  situees  a  huit 
journees  au  sud  dc  I'ile  de  Jamker  (*/V).  Au  dela  de 
ces  cataractes,  le  Nil  fait  d'aboid  un  coude  au  sud-ost; 
puis,  arrive  onlre  le  3°  degre  et  2"  30'  de  lalit.  nord,  il 
rctourne  directemenl  a  I'est-nord-est,  vers  les  monta- 
gnes  des  Gallas  et  du  royaume  d'Adcl,  d'ou  viennent 
deux  rivifercs,  probablement  les  mfimes  qui  so  inelent 
a  lui  cntre  lo  7"  el  lo  0°  degr^  de  latit.  nord,  d'ou  r6- 
sulle  une  presqu'ile  de  la  forme  d'un  fer  a  chcval,  large 


( •'^^1 ) 

cle  vingl-cinti  journces  tie  marche  sous  la  latitude  des 
Bens,  soil  de  150  lieues  environ.  Les  Lokes  el  les  Berry 
renconlronl  le  flcuvo,  soil  qu'ils  se  dirigent  au  siid-est 
de  leur  pays,  soil,  au  nord-cst,  chez  les  Gallas,  Icurs 
voisins,  avec  lesquels  ils  sont  souvent  en  guerre.  Au 
dire  des  Berry,  le  Nil  recevrail  encore,  vers  le  3*  degre 
de  latit.  nord  et  le  58"  de  longit.  est  de  I'lle  de  Fer, 
un  autre  affluent  qui  pourrait  venir  de  Zinzibar.  Enlre 
eel  affluent  et  la  rive  gauche,  sont  les  Blido^  gens  chez 
lesquels  dom  Angelo  se  propose  de  se  rendre.  C'cst  la 
que  nous  pourrons  connailre  les  vraies  montagnes  d'ou 
part  le  Nil.  Nous  y  renconlrerons  probablement  des 
commerQants  chez  lesquels  nous  trouverons  des  no- 
tions du  plus  haul  inleret  sur  leur  pays  et  sur  la  route 
qu'ils  suivenl  pour  arriver  si  pros  des  sources  que  nous 
cherchons. 

»  Ces  niarchands  sont  blancs,  la  barbe  et  les  chevcux 
longs  et  lisses,  lels  qu'on  en  trou\e  dans  les  contrees 
de  I'Abyssinie  oil  lesPortugais  ont  sejourne  longlemps. 

Us  viennent  chaque  annee  de  S (I)  chez  les  Blido 

pour  aclieler  de  I'ivoire,  que  ccux-ci  vont  chercher  jus- 
que  chez  les  Barry.  Ils  se  disent  issus  de  blancs,  ayant 
des  amies  a  feu  ,  et  qui  les  ont  abandonn^s  dans  un 
pays  entoure  de  montagnes,  a  deux  mois  de  1^.  Oulre 
la  lance  et  le  bouclier,  ils  portent  encore  des  sabres  a 
deux  Iranchants,  que  les  negres  ne  coiinaissent  pas. 
Leurs  maisons,  disenl-ils,  sont  balies  de  briques  crues; 
ils  ont  une  ecriture ,  du  papier,  que  les  Barry  coin- 
parent  aux  nolres ;  leurs  marchandises  s'echangenl 
conlre  des  cauries,  des  bracelets  de  laiton,  dont  nous 

(i  j  Ce  niol  dc  la  lettic  copies  par  M.  irAiiKiud  est  illisible. 


(  392  ) 

avons  VII  plusieurs  ochanlillons  cliez  les  fabricants  dc 
cetle  derniere  trlbu,  qui  les  tenaient  de  ces  blaiics. 
Or  ces  articles  sont  inconnus  des  populations  rivc- 
raincs  que  nous  avons  rencontrees,  et  aucune  expe- 
dition lurque  n'en  a  jamais  porte  (1). 

))  Les  Barry  vent  chez  les  Blido  en  vingt-cinq  jours 
dans  la  direction  sud-est.  Le  pays  qu'ils  traversent  est 
accident^  el  coupe  par  des  canaux  aboulissant  au 
fleuve;  comme  ils  n'ont  pas  de  bateaux,  ils  traversent 
le  fleuve  a  la  nage  et  tirent  a  eux,  au  moyen  de  cordes, 
les  dents  d'tSl^phanl,  qu'ils  portent  chez  les  Blido.  Ces 
blancs  ne  communiquenl  pas  direclenient  avec  les 
coaiploirs  du  littoral  de  la  iner,  ou  ils  se  procuronl 
des  amies  a  feu ;  mais  ils  savent  que  leur  ivoiie  est 
vendu  aux  blancs,  possesseurs  dc  ces  armes,  par  des 
marchands  qui  les  ach6tenl  d'eux. 

»  D'apres  une  tradition  que  j'ai  Irouvee  chez  les 
Berrs,  il  paraitrait  que  ces  etraiigers  seraient  vcnus 
autrefois  chez  eux.  Le  vieux  Laoulol ,  oncle  de  notre 
ami  Niguello  et  frere  du  roi  Lacono,  que  M.  d'Arnaud 
a  connu,  m'a  raconte  que,  du  temps  dc  son  pfere ,  il 
arrivait  chaque  an,  par  la  rive  gauche,  une  caravane 
de  marchands  de  cettc  coulcur,  pour  acheter  de  I'ivoire, 
ol  qu'une  nuit  ils  Font  egorgee  pendant  lour  sommeil, 
au  pied  de  la  monlagnc,  ou  est  situe  le  village  de  Be- 
lenia.  11  ajoulail  que  la  vUe  de  la  premiere  exp6di- 

(i)  i<  J'ai,  en  effet,  rencontre  chez  les  naturels,  a  la  premiere  expe- 
0  dilion,(]epuis  les  Kequesjusque  chez  les  Berrs,  un  assezbon  nombrc 
II  (le  bracelets  de  1  lilon  el  cuivre  rouge,  auxi[uels  ils  allaclient  lieau- 
"  coup  dc  prix,  et  nous  en  avons  rapporte  une  rpiinzuine;  ils  disaienl 
»  les  tenir  de  naiurels  venaiit  de  I'ouest  poui'  le  cuivre  rouge,  et  de 
»  Test  pour  Ic  laitoii.  •  l)'An.>Aiu. 


(  393  ) 

lion  (1)  avail  fori  cffiaye  lous  ceux  qui  connaissaient 
ce  fait,  crojanl,  d'apres  la  m^tenipsycose  qu  ils  ont 
recue  des  blhiopiens,  que  nous  reiirenons  nos  formes 
apres  un  laps  dc  temps  plus  ou  molus  long.  Ils  s'etaient 
iu)agine  que  nous  n'etions  rien  moins  que  ces  memes 
(inies  qu'ils  avaient  assassin^es  dcpuis  pres  de  qunlre- 
vingls  annees. 

))  Ils  ont  des  pretres  jongleurs  qui  font  des  signes 
cabalisliques  el  croient  lire  dans  I'avenir;  les  naturels 
les  croient  et  assurent  qu'ils  ne  se  trompent  jamais  sur 
la  morl  de  quelqu'un  ou  Tissue  d'un  combat.  Par  ana- 
logic, ils  sont  ten  les  de  nous  altribuer  les  memes  pou- 
voirs;  aussi  avons-nous  cu  quelquefois  a  souffrlr  cliez 
ce  peuple  lorsqu'il  arrivait  quelque  evenement  facheux, 

qu'on  n'a  pas  manque  de  nous  atlribucr » 

(  Conuminique  par  31.  Joniard. ) 


HEMARQUIiS  Sl'R  LE  DOCUMENT  QUI  PRiciiDE. 

Les  details  que  donne  M.  Rollet  des  voyages  qu'il  a 
fails  avec  M.  Lafargue,  el  les  notions  qu'il  tienl  de  dom 
Angelo  Vinco  (lequel  residait  a  Belenia  au  mois  d'avrll 
1851),  jettent  (juelque  jour,  enlremele  d'un  peu  d'obs- 
curil(!i,  sur  la  question  toujours  pendante  de  la  direc- 
tion du  Balir  el-Abiad ,  au  sud  du  4"  degre  nord.  On 
n'est  pas  tout  a  fait  fixe  sur  la  vraie  longitude  du  point 
extreme  atteint  par  M.  d'Arnaud;  mais,  quelle  qu'elle 
soil,  il  est  toujours  tres-imporlant  de  connatlre  quelles 
sonl  les  dernieres  notions  sur  le  cours  ult^rieur  du  Nil 

(i)  Celle  de  M.  irArniiiid,  ou  relii:  de  Stlim  Biniliachi.  (  Voir  Bul- 
letin de  I  840,  I.  II,  p.  5  {,  et  I  B.^J,  I.  H,  p.  ')  el  suiv.) 


(  3i>/i  ) 

i\u  dela  de  ce  poinl.  Sans  s'attaclier  an  r^cit  iiicomplcl 
de  dom  Ignacc  Knoblecher,  ni  a  la  longiliido  d'environ 
26°  qu'il  parait  assigner  au  poinl  en  queslion ,  il  est 
bon  de  savoir  ce  que  pense  a  I'egard  de  cette  direction 
dom  Angelo,  qui  fut  son  coiupagnun  de  voyage,  et  qui, 
lui,  est  resle  sur  les  lieux.  Or  nousvoyons,  dans  la 
lettre  ci-dessus,  qu'on  a  appris  des  Berrs  que ,  vers  Ic 
3°  degre  de  latitude  nord  (laissons  la  longitude  de 
c6l6),  Ic  fleuve  recevrait  un  aftluent  qui  pourrail  venir 
de  Zanzibar  (c'est-a-dire  du  c6t6  qui  regarde  Zanziljar, 
on  ne  pourrail  Tenlendre  aulrement).  Ce  n'est  la  qu'un 
recit  des  indigenes,  une  vague  presomplion ;  niais  dom 
Angelo  se  propose  de  se  rendre  en  personne  chez  les 
Blido.  Or  la  lettre  ci-dessus  nous  donne  la  position  des 
Blido.  «  Les  Barry  vont  chez  les  Blido  en  vingt-cinq 
))  jours  dans  la  direction  du  sud-esl  (1).  »  On  ne  peut 
supposer  moins  de  quinze  milles  g^ograpbiques  par 
journeo ,  et  Ton  pourrail  admellre  beaucoup  plus. 
Maintenant  que  la  position  des  Barry  change  en  lon- 
gitude, qu'on  les  place  un  peu  plus  a  Test,  ou  mSnie 
beaucoup  plus  a  I'ouest  (comme  cola  r^sultcrait  des 
assertions  de  doui  Knoblecher),  I'afilucnt  dc  dom  An- 
gelo (suppose  le  renseigneinent  exact)  viendrait  ton- 
jours  des  environs  de  requalciu'.  Mahitcnant,  cst-ce  la 
le  principal  affluent,  est-cc  celui  qu'il  faut  qualifier  dc; 
tfile  du  Nil?  ('.'est  la  uno  autre  question  ;  il  n'en  scroit 
pas  moins,  dans  le  cas  contraire  ,  une  d^pendance  du 
bassin  du  ISil.  Cette  id6e  n'est  encore  sans  doute  qu'une 
bypolh^se,  et  appelle  grandement  une  confirmation  ; 
mais  elle  est  du  moins  tr^s-simple  ,  nullement  com- 

(i)  Les  Barry  habitent  sui  les  rives  du  Nil  Blaiic,  sous  le  5"=  jiaial- 
lele  nord. 


(  305  ) 

pli([uoe ,  facile  a  salsir  el  facile  a  verifier.  Voili  pour- 
(juoi  lions  I'avons  isolee  du  reste  :  le  premier  qui  par- 
lira  dii  3"  parallelc  nord  devra  suivre  raffltient  indique, 
s'il  existe ,  et,  sans  le  quitter,  le  remonter  jusqu'a  sa 
source,  ou  aiix  environs;  car  il  est  ais6  de  deviner 
qu'iiiic  telle  source,  placee  si  loin,  doit  habiler  un  lieu 
bien  eleve.  Reste  la  (juestion  de  la  longitude  par  58" 
est  de  Ferro  :  je  ne  saurais  I'eclaircir  quant  a  present. 

II  faut  faire  remarquer  que  le  document  prec«^dent 
renferme  une  indication  qui  est  d'accord  avec  I'opi- 
nion  de  dom  Angelo.  Les  Blido  tirenl  I'lvoire  des 
Barry  (qui  aussi  le  leur  portent),  et  ils  I'echangent 
centre  des  armes  a  feu,  aux  mains  de  certains  mar- 
cliands  dits  hlancs,  qui  Irafiquent  avec  les  blancs  du 
littoral  de  la  mer  (  des  Indes ) .  Cela  ne  peut  s'cntendre 
que  des  ancions  comptoirs  portugais.  Or,  quiconque 
aura  lu  avec  attention  les  relations  si  curieuses  des 
voyages  du  reverend  doctciir  Krapf,  non  loin  de  I'equa- 
leur,  y  trouvera  une  singuliere  corrcspondance  avec  ce 
qui  precede. 

L'adluent  du  3°  degri,  signale,  je  pense  pour  la  pre- 
miere fois,  n'empeche  nullement  qu'il  y  en  ait  encore 
d'aulres  aparlir  du  /["degro,  tels  que  ceux  que  M.  d'Ar- 
naud  a  indiques  sur  sa  carte  par  des  amorces  vers  I'est 
et  le  sud  ;  mais,  ne  sacliant  rien  de  neuf  sur  ce  point, 
on  ne  peut  en  rien  dire  de  plus  quant  a  pr(^sent,  si  ce 
n'est,  peut-6tre ,  que  nous  avons  conslamment  con- 
seille  depuis  dix  ans,  au  futur  chef  de  la  nouvelle  ex- 
pedition ,  d'avoir  assez  de  monde  et  d'observateurs 
capablcs,  pour  que  tons  les  nj fluents  soient  remontes 
el  decrils,  non  seulement  les  derniers,  mais  tous  ceux 
qui  [)rec^dcnt,  el  donl  on  n'a  vu  que  les  embouchures, 


(  396  ) 

el  encore  uniquement  d'une  partie.  Tout  lecleur  aura 
remarqiie  un  passage  de  la  lettre  qui  vient  en  confir- 
mation (le  ropinion  du  savant  voyageur  en  Abyssinie, 
M.  Anloine  d'Abbadie,  savoir,  que,  vers  2*  45'  dc  lati- 
tude nord ,  le  Nil  retourne  dircctcnienl  a  I'est-nord- 
esl,  vers  Ics  niontagnes  des  Gallas.  Ce  fait  n'a  ricn 
d'impossiblc  ,  ni  d'invraiseiublable  ,  ct  il  n'exclut  pas 
d'ailleurs  d'autres  aflluenls  venant  d'une  region  plus 
meridionale.  Enfin,  quelle  que  soil  la  solution  d<ifini- 
live  que  recevra  la  question  de  la  maitresse  source  du 
fleuve  Blanc,  noire  compatriote  aura  toujours  la  gloire 
d'avoir  d^couvert  et  determine  malhemaliqucment, 
dans  le  pays  d'tnarea,  la  source  d'une  riviere  qui  ap- 
partient  au  bassin  du  Nil. 

II  y  aurait  encore  a  relever  plus  d'un  point  dans  I'in- 
teressanle  lettre  de  iM.  RoUet,  mais  qu'il  est  plus  sage 
d'oniettie,  et  je  prefere  terminer  ces  couites  remar- 
qucs  en  rappelant  une  reflexion  d^ja  faite,  savoir  qu'on 
approclie  lous  les  jours  davanlage  de  la  solution  du 
problenie  ct  de  la  decouverte  de  la  verity.  J'ajouterai 
seulemenl  un  mot  de  la  lettre  d'envoi  de  M.  d'Arnaud, 
qui  peint  bien  sa  droilure  et  sa  modestie  :  u  Mon  but, 
»  dit-il,  n'a  jamais  eii  que  d'etre  utile,  et  la  verilc 

»  seule  peul  I'etre » 

JoMAnD. 


(  r>97  ) 


Analysed;   GiLtraitii  d'ouvrag^es^ 
illelang^es ,   etc. 


DBS  CHAINES  DE  HAUTEURS 

DONT  EST  SILLONNfi  LE  SOL  FINLANDAIS 

ET 

DES  DIVERS  SYSTfe.MES  D'EAUX 

AUIQUELS  ELLES  DONNENT  NAISSANCE, 

M.  LE  PRINCE  EMMANUEL  GALlTZIN(0. 


La  Finlande  est  couple  dans  plusieurs  sens  par  des 
exhaussements  granitiques  en  parlie  converts  de  sable 
caillouteux,  de  glaise  et  d'une  mince  couche  de  terre 
v^g^tale.  lis  formenl  des  chaines  qu'enlourent  de  vastes 
lacs  et  des  marecages  etendus.  Ces  exhaussements 
s'abaissent  peu  a  peu  ,  du  cote  du  nord  ,  vers  I'ocean 
Glacial,  tandis  qu'au  conlraire,  vers  le  midi,  ils  se  ter- 
minent  brusquement  aux  rivages  du  golfe  de  Finlande. 
Les  plus  Aleves  d'entre  eux  n'ont  pas  plus  de  1 ,200  pieds 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  lis  sont,  d'ailleurs,  si 
extraordinairement  ramifies  ,  que  le  pays,  d'un  bout 

(i)  Ell  attendant  le  compte  rendu,  qui  ne  tardera  pas  ;i  paraide 
dans  le  Bulletin,  de  I'interessante  relation  du  Voyage  en  Finlande 
que  M.  le  prince  Emmanuel  Galilzin  vient  de  publier  a  Paris,  il  nous 
a  paru  utile  d'en  detacher  le  morcoau  t'oi  t  curieux  consacre  pai'  lui  it 
rorographie  et  a  I'liydrographie  de  cette  vasle  province  russp. 

D.  L.  R. 


(  398  ) 

al'autre,  en  est  pour  ainsi  tilre  couvert.  La  profondeur 
des  vallees  n'a  nulle  part  plus  de  600  pieds. 

De  ces  diflei-entes  cluiines  roclieuses,  la  principale, 
par  I'etendue  de  pays  qu'elle  traverse,  est  celle  a  la- 
quelle  on  donne  le  noni  de  Maanselsk.  Peu  elevee  en 
g^ndral ,  il  est  des  endroits  ou  elle  s'abaisse  au  point 
de  se  confondre  avec  la  plaine.  De  grands  lacs  et  de 
spacieux  niari^cages  s'eiendent  a  sa base  ;  aillcurs,  I'cau 
est  remplacde  par  des  forels  epaisses  et  moussues.  Le 
Maanselsk  a  son  point  de  d»5parl  pres  des  sources  de 
la  riviere  Tanaelf,  aux  confins  du  Finmark  norvogion 
et  de  la  Laponie  finlandaise  ,  par  68"  i  2  de  latitude. 
Coupant  la  Laponie  finlandaise  dans  la  direction  de 
Test,  il  atteint  presque  jusqu'a  la  limile  du  gouvcrne- 
ment  d'Arkhangel ;  la  il  tourne  vers  le  sud,  et,  conti- 
nuant a  suivre  une  ligne  briseo,  s^pare  ce  gouvernement 
de  la  province  d'Uleaborg.  Dans  Tangle  sud-est  que 
forme  le  trac6  de  cette  province ,  sous  le  6h'  parall6le , 
la  chaine  tourne  au  sud-ouest,  et ,  variant  entrc  cette 
direction  etccUede  I'ouestet  du  sud,  elle  va  se  terminer 
au  midi  do  Christineslad ,  A  petite  distance  du  golfe. 
Vers  son  extremito ,  elle  separe  I'Ostro-Bolhnie  dc  la 
Carelie,  du  Savolaks,  du  Tavaslland  et  du  Satakunda. 

Ln  premier  rameau  part  du  Maanselsk,  par  63"  iO'  dc 
latitude,  de  I'endroit  oij  se  rencontrcnt  les  lignes  de 
delimitation  des  trois  provinces  d'Uleaborg,  de  Kuopio 
et  de  Vasa.  Ce  rameau  incline  d'abord  vers  le  sud-est, 
puis  il  se  dirlge  vers  le  sud  pour  traverser  la  pailie  du 
pays  ou  se  Irouvent  les  villesde  Kuopio,  (le  Sainl-Micliols 
et  de  \iborg,  et  s'en  aller  conlourner  par  I'ouesl  des 
eaux  dependantes  du  Saima.  La  et  au  sud  de  ce  grand 
lac,  il  se  parlage  en  deux  branches  :  I'une  des  branches 


(  399  ) 

pique  au  midi,  k  I'ost  dii  cours  da  Kymmene,  et  se 
teniiine  non  loin  du  defile  de  Manlylaks,  a  I'ouesl  de 
Frechiksham;  I'aulre  bratiche  varie  dans  sa  direction 
entre  Test  et  Ic  nord-est,  passe  presdeWillniansti'and, 
interrompue  par  la  coupure  au  fond  de  laquelle  roule 
la  Vuoksa,  et  aboutit  a  Serdobol. 

Un  second  rameau  part  du  Maanselsk  par  60"  50'  de 
latitude,  et  prend  sa  direction  vers  le  sud.  II  penelre 
dans  la  province  de  Vasa  et  traverse  une  partie  du  Sa- 
takunda  et  du  Tavaslland.  Ce  rameau  forme  ligne  de 
partage  entre  deux  grands  reservoirs  d'eau,  dont  I'un 
se  deverse  par  le  Kymmene  dans  le  golfe  de  Finlande, 
et  I'aulre  par  le  Kumo  dans  le  golfe  de  Bothnie. 

Un  rameau  lateral,  ind^pendant  des  deux  rameaux 
que  nous  venons  de  decrire  ,  part  du  Maanselsk  par 
61°  de  lalit.  Celuici  se  dirige  a  Test,  suit  les  bords 
m^ridionaux  du  lac  Peine  jusqu'au  Kymmene,  et  de 
la  gagne  "Willmanstrand.  Pass^  cette  ville,  il  suit  une 
ligne  contourn^e  qui  varie  entre  le  sud  ,  le  sud-ouest 
el  I'ouesl.  Poussant  de  la  plusieurs  rameaux  plus  pe- 
tils  vers  le  golfe  de  Finlande  ,  il  finit  par  incliner  au 
nord-ouest,  oii,  s'abaissanl  de  plus  en  plus,  il  dispa- 
rait  a  proximite  du  golfe  de  Bothnie,  pr^s  de  la  ville 
de  Biorneborg. 

Les  differents  rameaux  dont  se  compose  la  cbalne 
du  Maanselsk  parlagent  les  eaux  de  la  Finlande  en  cinq 
syst^mes  :  le  premier  systeme  a  son  6coulement  dans 
I'ocdian  Boreal,  le  second  et  le  troisifeme  dans  I e  golfe 
de  Bothnie,  le  quatrieme  dans  le  golfe  de  Finlande,  le 
cinquieme  dans  le  Ladoga. 


(  /lOO  ) 

1*   SYSTkME  DK  I.A  LAPONIE  BOnfiAI.E. 

Le  syst^me  de  la  Laponie  boreale  a  pour  limiles  une 
chaine  de  hauleuis  qui  prennent  Icur  dii'cction  prin- 
cipale  vers  le  sud ;  il  s'ccoule  vers  le  nord.  Le  lac  Enare, 
principal  reservoir  de  ce  syst6nie,  devcrse  sos  eaux 
dans  Ja  riviere  Patsiioki,  dans  le  gouvernement  d'Ar- 
khangel  et  non  loin  des  bords  meridionaux  du  golfo 
de  Varanger  (Varanger-Fiord) ;  le  Palsiioki  les  porte 
ensuile  jusque  dans  la  baie  de  Pasvig.  Le  cours  d'eau 
le  j)lus  considerable  de  ce  sysleme  dibouche  dans  le 
Tana-Fiord  en  Norvege. 

2"  SYSTkME  OSTRO-BOTHNIEN. 

Ce  syst^me,  qui  embrasse  la  presque  lotaliti  de  la 
Laponie ,  verse  ses  eaux  dans  le  golfe  de  Bothnie  :  la 
chaine  du  Maanselsk  I'encaisse  du  cole  du  nord,  du 
cote  de  Test  ct  du  c6t6  du  sud.  Passons  en  revue  les 
principaux  cours  d'eau  qui  lui  servent  d'artt;res.  La 
Tornea  est  une  riviere  considerable  qui  prend  sa  source 
dans  le  Lappmark  de  Torneo,  apparlcnant  a  la  Su^de  ; 
quaiid  elle  a  Iranchi  la  fronliere  dos  possessions  sue- 
doises  ,  elle  regoit  le  Muonio ,  puis  s'en  va  gagner  le 
fond  du  golfe.  La  riviere  Keniioki  sort  d'un  petit  lac 
plac6  au  centre  d'un  nceud  de  nionlagncs.  L'Ll^o  est 
la  plus  Importante  des  rivieres  du  systeme  sous  le  rap- 
port commercial ;  dans  le  lac  Ul^o  d'ou  elle  sort,  vien- 
nent  converger  une  infinite  de  petites  arteres  ,  ayant 
toutes  leur  point  de  depart  dans  la  chaine  du  Maan- 
selsk. Le  Kyroioki  est  le  plus  considerable  des  cours 
d'eau  de  I'Oslro-Bolhnie  mthidionale,    Celte   riviere 


(  ^01   ) 

coule  dans  la  direction  du  nord-r.uesl  et  va  gagnt  r  le 
golfe  un  pen  au-dessus  de  Vasa. 

3'  SYSTtiME  UU  SATAKUNDA. 

Les  eaux  du  systeiue  du  Satakunda,  autrement  dit 
tie  Biomehorg ,  sont,  comme  celles  du  pr^c^dent,  cir- 
conscrites  de  Irois  col^s,  au  nord,  a  Test  et  au  sud,  par 
les  exliaussements  du  Maanselsk.  Le  sysl^me  a  son 
point  de  d«^partpar  63°  50' de  latit.  dans  le  nord  du  Sa- 
lakunda ,  a  la  limile  de  lOslro-Bothnie.  Apres  avoir 
forni6  le  vaste  lac  d'Elseri,  il  traverse  une  multitude 
de  lacs  moins  importants,  en  partie  par  le  moyen  de 
rivieres,  en  partie  aussi  par  de  simples  canaux.  De  ces 
amas  d'eaux,  le  plus  digne  d'alteniion  est  le  lac  Toe- 
vesi,  qui,  apres  avoir  recu  vers  le  nord-est  Jes  eaux  da 
lac  Keiivansclka,  s'en  va  joindre  le  lac  Ruovesi,  la  ou 
convergent  les  lignes  de  delimitation  des  provinces  de 
Vasa,  d'Abo  et  de  Tavastheus,  Plus  loin,  le  syst^me  re- 
goit  de  nouveaux  tributs  que  d'aulres  lacs  lui  fournis- 
sent  :  ainsi  renforc^es,  ses  eaux  vont  joindre  le  lac 
Nasiarvi.  Ce  dernier  lac ,  apr^s  avoir  forme  une  cata- 
racte  pres  de  la  ville  de  Tamerfors ,  porte  ses  eaux 
dans  le  lac  Pyaiavi  ou  Lac  sacre ;  il  sert  do  reservoir 
central  a  tous  les  lacs  et  canaux  qui  sont  disperses  aux 
environs.  Plus  loin  encore  les  eaux  du  systeme  de 
Biorneborg  formenl  dans  Icur  marche  les  lacs  impor- 
tants de  Vanaia,  de  Langelmavesi,  de  Roine  et  de  Ma- 
lasvesi,  et  vont  se  r^unir  au  grand  lac  de  Raiitunselka. 
A  partir  de  ce  point,  elles  conlinucnt  a  s'ecouler  par 
des  art^res  sans  nombre  vers  la  limito  des  provinces 
d'Abo  et  de  Tavastheus,  ct  gagnenl ainsi  le  lacPujeicrvi 
par  son  cxlr^mite  sud.  Co  lac,  a  son  toui-,  deverse  ses 
ni.    uRii,,   7.  27 


(  /|02  ) 

eaiix  ,  consid^rablemcnt  accrues  ])ar  divers  aflluonts 
venant  tlu  norcl,  dans  la  riviere  Nokioi  qui  se  jetle  dans 
le  lac  Kulovosi.  C'est  dans  ce  lac  quo  le  Kuiuo  prond 
sa  source  ;  cetle  importante  riviere  absorbc  dans  son 
cours  les  petilcs  rivieres  laterales  qui  vont  s'y  reunir. 
Enoulre,  cent  soixante  et  onze  lacs  s'y  ecoulent.  Aprus 
avoir  d^crit  un  arc  de  cercle  et  avoir  iVanclii  des  rapides 
forniidables  et  noinbreux  ,  le  Kunio  finit  par  gagner 
le  golfe,  a  une  distance  de  30  verstes  doBiorucborg  (1). 

ll°  SYSTliMli   DU  TAVASTLAND. 

Le  syst^ine  du  Tavastland,  autrement  dit  de  In  I'iti- 
lande  centrale,  a  pour  commun  rc^ceplacle  le  grand  lac 
Paijane,  qui,  avec  los  lagunes  qu'il  forme,  se  doploie 
dans  une  ctonduc  de  180  verstes  dc  longueur  siir  25 
verstes  de  largeur  maximum  :  il  est  dleve  de  253  picds 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  C'est  du  nord  ,  de  la 
partie  du  Tavastland  qui  niainlenanl  se  trouve  englo- 
bee  dans  le  gouvernement  de  Vasa,  que  lui  vienuenl 
par  plusieurs  arieres  les  eaux  qui  I'approvisionnenl. 
Elles  prennent  leurs  sources  par  63°  31'  de  latit.,  dans 
un  groupe  monlagnuux  silue  a  la  liiuite  <Iu  gouverne- 
ment d'Ult^aborg.  Au  sortir  de  ce  lac,  les  eaux  du  sys- 
l^me  rcncontrenl  sur  leur  cbcmin  des  vallees  larges 
el  profondes  qu'elles  rcmplissent  de  rnaniere  a  former 

(i)  Jl  convient  d'observer,  comiiit;  remar(|ue  {jeiierale,  que  les  eaii\ 
qui,  traversant  I'Ostro-Bothnie,  vont  debouchpr  dans  Ic  golfe  de 
Boilinie,  torment  plus  ou  inoins  des  rivieres  part'aitement  disiinctes 
les  uiies  des  autres.  Au  coiitraire,  leb  eaux  de  la  I'iniande  uieridionale 
composent  de  vasles  ajjyioineralions  effecluant  leur  ecouieinent  ven 
le  ;;oire  de  Finlande  par  I'entremise  d'une  surcession  de  lacs  de  foiiiie 
all<)ii{»i'e,  r<Mmi<  par  ileii  ciiuaux. 


( m  ) 

de  nouveaux  lacs ,  donl  plusieurs  sont  tris  grands. 
PariTii  eux,  11  convient  de  ciler  le  lac  Kolimajarvi,  qui 
a  30  vorsles  de  long  ,  et  celui  de  Keilele,  qui  en  a  pros 
de  80  :  le  lac  Keitele  est  en  communication  avec  le  lac 
Kivijarvi,  silue  a  I'ouest  du  precedent  et  qui  lui-meme 
a  50  verstes  de  longueur.  Les  deversements  de  tous  ces 
lacs,  dont  lo  produit  se  trouve  continuellement  accru 
par  de  nombreux  affluents  lat6raux  ,  prennent  leur 
cours  vers  le  sud,  ou  ils  rencontrenl,  en  le  traversant, 
le  lac  Haapavesi,  pour  gagner  ensuile  le  lac  Peine. 
Celui-ci,  qui  sert  de  reservoir  commun  aux  eaux  du 
lac  Pualavesi  et  de  plusieurs  autres  de  dimensions 
moindres,  ainsi  qu'a  celles  du  lac  Vesijarvi,  situ6  plus 
au  sud,  abandonne  sonexcedant  a  la  riviere  Kalkisome, 
qui  le  jiorte  ensuile  au  lac  Piudtsalene.  C'est  dans  ce 
dernier  lac  que  la  riviere  Jirango  prend  sa  source  ;  elle 
debouclie,  apr^s  un  cours  peu  etendu,  dans  le  lac  Kon- 
nevesi  :  ies  eaux  qui  en  sortent  vont  se  r^unir  au  Kyni- 
mene.  Ainsi  grossie,  celte  importanle  riviere  traverse, 
dans  la  direction  de  Test,  une  foule  de  lacs  de  gran- 
deurs varices.  En  ariivant  sur  les  confins  des  gouver- 
nements  de  Nyland  et  de  Viborg,  elle  lournc  du  c6l6 
du  sud  ,  et,  apres  avoir  franchi  des  ressauts  formida- 
bles,  parmi  lesquels  la  cataracte  d'Hogslois  tient  le 
premier  rang  ,  debouche  par  cinq  bias  dans  le  golfe 
de  Finlande. 

5°  SYSTkME  DB  LA  FINLAND!;  ORIENTALE. 

Les  eaux  du  systeme  de  la  Finlande  orientate,  au- 
trement  dit  dii  Savolaks  de  Carclie,  ont  aussi  leur  point 
de  depart  dans  les  replis  du  Maanselsk,  a  I'endroit  oil 
la  chaJne  s^paro   la   Kaianie ,    c'est-a-dire  la   region 


(  hOli  ) 

crienliilo  tlu  gouvernomenl  cl'Lloaborg,  ilu  Savolaks  el 
de  la  Carelie.  ElU-s  I'ormciit,  (J6s  lo  ilebut,  deux  gran- 
des  tiiieres,  I'une  occidentalc  et  I'autre  orlentale. 

L'arlere  occidcnlale ,  apros  etre  partlc  do  Q>!i°  W  do 
lalit. ,  proud  son  coins  dii  coto  dii  siid  a  tiavcrs  le  Sa- 
volaks, en  parseinanl  lo  pays  dun  nouibre  prodigicux 
de  lacs  et  de  lagunes.  Parnii  cos  lacs,  plusiours  nieri- 
lent  par  leurs  proportions  une  mention  parliculicre. 
Nous  citerons  rOrivesi  qui  a  30  verstes  de  longueur, 
puis  le  Maaniakavcsi  qui  on  a  50,  puis  enfin  Ic  Kalla- 
vesi  au  bord  duquel  se  Irouvo  limporlante  villc  de  Kuo- 
pio.  Le  Rallavesi,  du  cole  du  nord,  regoit  les  eaux  sur- 
abondantes  du  lac  Jiirusvosi ,  et,  du  c6t6  du  sud-est, 
celles  des  lacs  Suvasvesi  et  Jiiojarvi.  A  parlir  de  la,  les 
eaux  du  sysleme,  on  continuant  de  couler  du  cole  du 
sud,  s'en  vont  former  de  nouveaux  lacs.  Bienlot,  ren- 
lorcfies  par  un  grand  nonibre  do  tributaires,  elles  se 
precipitent  vers  I'itroit  defile  de   Verkaiis,  en  forcenl 
le  passage  ot  y  formenl  une  cataracle  remarquable  a 
lous  egards  :  la  masse  d'eau  qui  s'en  ecbappe  forme 
les  lacs  Aimisvesi ,  llaapavesi  ol  Haukivesi ,  ainsi  que 
la  riviere  Haapavesi;  celte  riviere,  lout  pros  de  la  ville 
de  Neuschlolt ,  debouchc  dans  lo  lac  fMldasvesi. 

L'arlere  orienlale  du  systeme  ,  qui,  elle  aussi,  vient 
aboulir  au  lac  Piblasvcsi,  a  son  point  de  depart  en 
(lar^lie  par  63°  58'  de  latil.  Parmi  les  nombreux  lacs 
qu'ellc  forme  dans  sa  course,  nous  citerons  lo  lac  Pie- 
lisjarvi,  dont  la  longueur,  avec  les  lagunes  qui  s'y  rat- 
lachcnt,  d^passe  100  verslos,  ot  le  lacOrivesi  qui  s'd- 
lend  en  longueur  dans  un  ospaco  de  70  vorsles.  Les 
masses  d'eau  qu'onlriiiiic  cctlo  arlore  ,  constamnionl 
accrues  par  un  grand  nonibro  de  liilmlairos  lat^raux, 


(  Zi05  ) 

Iraversenlla  paitie  de  la  Carelie  iiicluse  dans  le  gou- 
vernement  de  Kuopio,  pour  gagner,  en  defuiilive,  le 
lac  Pililasvesi  deja  cite,  qui  s'etend  en  forme  de  cein- 
luro  aulour  de  la  ville  de  Neuscblott. 

A  parlirde  celte  ville,  les  eaux  dusystfeniecontinuent 
leur  marclic  progressive  vers  le  sud,  presque  loujonrs 
par  I'entremisc  de  lacs  de  forme  tres-allongee ,  ralla- 
clies  enlre   eux  par  des  canaux  sinueux ,  pour  aller 
s'epandre  dans  le  gouvernement  dc  Viborg  el  y  former 
le  Saima.  Ce  vasle  amas  d'eau  a  environ  50  verstes  de 
longueur;  il  prend  vers  le  sudlenom  de  lac  Lappavesi, 
pour  s'en  aller  baigner  les  remparts  de  la  forteresse  de 
Wilmanstrand.  Nous  avons  deja  eu  occasion  de  dire 
ailleurs  que  les  eaux  du  Saima  avaienl  pour  deboucbi^ 
le  cours  torrentueux  de  la  Vuoksa.  C'est  a  six  verstes 
du  point  de  depart  de  cctle  riviere  que  se  trouve  le 
rcssaut,  devenu  celebre,  d'Imatra.  Au  dela  de  la  cata- 
racle,  la  Vuoksa  continue  de  coulcr  dans  la  direction 
du  sud-est,  puis  elle  tourne  au  nord  et  ensuite  a  Test. 
Ce  n'estqu'apres  avoir  fourni  un  Irajet  de  170  verstes. 
toujours  conlrariee  par  des  rapides  nombreux,  qu'elle 
gagne  pardeuxbras,  un  pcu  au-dessous  de  Keksholm, 
I'immense  reservoir  du  Ladoga  (1). 

niVltRES  QUI  KE  si;  nATTACHEN'T   A  AUCUN   S\STkME 

d'eaux. 

Les  differents  sysl^mcs  d'eaux  que  nous  venons 
d'enumerer  ombrassent,  comme  on  I'a  pu  voii",  I'cten- 
due  enlicrc  du  pays.  Pour  completer  celte  nomencla- 
lure,  il  ne  reste  plus  qu'a  nommer  un  petit  nombre  dc 

(l)  La  lon^jiieiir  ilu  Ijaclo;;;!  c»t  tic  17S  verslei;  sa  laryeiir  est  de 
io5  verstes. 


(  /|06  ) 

rivieres,  doiil  Ic  cours  ne  se  rattuche  a  auciiii  des  sys- 
Ifenies  siisdits.  L'Auraioki  debouche  dans  la  Balliquo, 
aiiprt'S  de  la  ville  d'Aho.  Lo  Kario  debouche  dans  uno 
baio  de  forme  allong^e  que  forme  Ic  golfe  de  Finlande, 
non  loin  de  la  ville  d'Ekenas.  La  Vanda  coule  aupros 
de  Tancien  Helsingfors.  La  Borga ,  pres  de  la  ville  de 
ce  nom.  Le  Raiaioki  enfin  ,  qui  coule  a  la  limile  occi- 
dentale  du  gouvernement  de  Viborg,  a  servi  pendant 
pr6s  de  trois  siecles ,  de  1323  a  1617,  a  separcr  Ics 
possessions  russes  des  possessions  suedoises. 


(  A07  ) 


COMT^S. 


ASGLETEKRiJ. 


M'nUilesex ■ 

Surrey  

Rem 

Sussex 

Hamp  {'2) 

Berk 

Hertford 

Burkingham 

Oxford 

Noilliamplou 

Hiintiiig'loi).   ..... 

lieilford 

Cambritigc 

Essex 

Suliblk 

Norfolk 

Wilt 

Dorset 

Devon 

CoriiwiiU . 

Somerset 

Gloucester 

Heref!)r(l 

Shrop(4) 

Slad'ord . 

Worcester 

Warwick.   ...... 

Leicester 

Rutlaiul 

Liuculii 

Nottingham 

Derliy 

Chester 

Lancaster 

York-West-Riding.  . 
~  E.  —  .  . 
—        N.         —    .  . 

Durham 

Northumberland.    .    . 

Cumberland 

Westmorland 

Monmouth 


PROVINCE    DE    GALLES 


'Denbigh  .   .  . 

Montgomery. 
I  Carnarvon  .   . 

Flint 

Anglesey,  .  . 
^  Rlerionelh  .   , 


I  i'urdigau,    . 
eckuock . 
,  Radnor.   .  . 


SUPERFICIE 

des 

COMTES 


en  m.r. 

any  I.  (J) 


en   kit. 


!3  /  Glamorgan.  .  ,  . 
-^  L  Carniai  then  .  .  . 
£   1  Pemljt  uke  .... 

^      Brec 

ri;    \   Rndi 


Pci'sonnes  vnyiigpaiUsur 
les  chemitis  de  fer  el 
catiiiux  pendant  la  nuit 
du  0  an  7  |nin  t841 


Totaitx  gc'ncranx. 


281 
gl4 
4Go 
464 
5"i6 
747 
605 
731 
745 
9B8 
r.48 

4r>5 

(J8fi 

5-28 

bliil 

OlG 

186 

ic-2 

491 

410 

553 

125 

!)74 

406 

I9!t 

677 

987 

819 

20. 

710 

777 

080 

010 

809 

659 

211 

113 

043 

812 

500 

725 

519 


728 
2110 
5  795 

0  795 
5  980 

1  956 
1  568 
1  946 

1  051 

2  508 
913 

I  12: 

1  7ti6 
5  959 

4  065 

5  225 
5  07j 

2  955 

0  4: 

5  655 

4  021 
2  915 
2  524 

5  64: 

5  lfi7 

1  755 

2  538 
2  122 

527 
7  227 
2  014 
2  798 
2  617 

4  687 

6  856 

5  295 
3416 

2  704 
4  694 

3  S86 
1  879 
I  545 


50  210 


751 

982 
775 
509 
402 
691 

822 
9-26 
375 
726 
751 
455 


8  123 


58  555 


150  0i4 


1  895 

2  545 
2  007 

800 
1  041 

1  790 

2  129 
2  599 
\  489 
I  881 
1  895 
1  178 


Jl  Oi 


POPULATION 

des 

COMTES 


CM  1841. 


1  583  918 
587  058 
531  291 
302  460 
352  548 
190  372 
162  594 
158  248 
103  216 
199  208 
53  363 
1 12  378 
169  658 
520  811 
314  681 
505  124 
242  772 
167  876 
557  270 
345  521 
448  795 
395  555 
96  315 
241  683 
5-28  867 
250  587 
40!)  158 
2-20  504 
25  151 
350  2-26 
270  751 
259  791 
568  400 
1  698  609 
1  176  514 
221  570 
1 86  226 
526  045 
266  020 
178  058 
36  609 
151  021 


14  991  606 


92  05G 
7!  I  756 
86  755 
40  798 
58  106 
50  715 

178  050 
89  559 
78  557 
96  0;)2 
55  420 
31  776 

1)17^26 


5  016 


en  1851. 


151  087  15  911  148 


1  893  710 
684  803 
619  207 
339  428 
402  055 
199  154 
175  965 
1 45  G70 
170  -286 
215  784 
60  520 
1-29  789 
191  856 
3i5  9l6 
353  991 

455  803 
241  003 
177  597 
572  207 
336  662 

456  257 
419  473 

99  112 

245  019 

650  50S 

258  7G2 

479  979 

254  958 

24  272 

400  266 

294  458 

260  707 

423  458 

2  065  915 

1  559  902 

254  181 

194  624 
411  552 
o03  535 

195  487 
58  580 

177  165 


(5) 


CHEFS-LIEUX 

des 

COMTES, 


16  911  112 


96  820 
77  129 
94  6G8 
4 1  055 
45  248 
51  242 

240  152 
94  663 
84  436 

97  667 
59  162 
31  416 


1  OH  656 


17  9-22  768(6] 


Lonilrcs, 

Guilfoiil. 

M.iidslunc. 

Lewes. 

Siuilliamplon. 

Keadiuj;. 

Heilford. 

Bnekinghani, 

Oxford. 

Norliianiplon. 

HinUinf;don. 

Be.ir.iiJ. 

Canil)iidj;c. 

Ch.-lnisfoid. 

Ipswich. 

Norwich. 

Salishm-y. 

Dorchesler, 

E.felcr. 

I.aunceslon. 

Tannlon, 

Gloucester. 

Hcrerurd. 

•Shi  e\v!.}niry. 

Slairuid. 

WoiTcslcr. 

Wai  wick. 

Leiec^ler. 

Oakham. 

LiuLuIn. 

NMllingham. 

De,  l,y. 

Chesler. 

Lancaster, 

York. 

Durham. 

Alnwick, 
Carlisle. 
Appleby. 

Monmoull). 


Denbigh. 

Moiilgonieiy. 

Carnarvon, 

riinl. 

lieaumaris. 

Dolgelly. 

Cardiir. 

C  II  inarthen. 

I'diiiiroke. 

('ardigan, 

Brecon. 

Prcstcifiu, 


( 

/lOS 

) 

£C05! 

sL'ptr.nciE 

POPl'LATION 

1 
VILLES            ' 

COMT^S. 

COMTES 

des 
COMTES 

cliols-Ueux 

dui 

en  ni. 
allg.c. 

en  kil. 
curr. 

en  1841. 

eu  1851. 

COMTES. 

COMTKS    MfcnlD10^&L'X. 

1 

Onmfiies 

279 

725 

72  850 

78  057 

Dumfries. 

Kirkcu()b>igh( 

815 

2  111 

41  119 

45  510 

KiiliPiidhrighl. 

413 
1  Oil 

154 

2-.-2 
1  271 

994 

1  147 

2  699 
599 

001 
5  292 
2  574 

59  195 
104  556 

15  740 
155  072 

44  290 
426  972 

45  255 
189  280 
l(i  576 
159  64 
44  925 
552  1 1 4 

\\  i^tuwn. 

Ayr. 

Rollicsaj. 

lUufveV/. 

Dumbarlon. 

Glasgow. 

1  Avr       

Mule      

1   Lar.uik 

Stirling 

55-2 
1-24 

1  578 
5-21 

82  057 

ofi  «72 

85  720 
50  0^1 4 

Stirlini;. 
Mnlilhsiiw. 

Linliiligrnv 

F.dinl.nrgll 

5«7 

1  0(1-2 

2-25  454 

258  824 

Edinhiii'gl). 

i  Pecblc-J 

547 
200 
720 
470 
291 

899 

689 

1  880 

I  255 

754 

10  499 

7  990 

40  0-25 

54  458 

55  886 

10  582 

9  7' 17 
51  r.7ll 
50  287 
36  .596 

Pc-liL'S. 

Selkiik. 

Jedljuig. 

Lander. 

Haddlugloil. 

1   Selkiik 

Berwick      

1   Haddin'ilun 

!   J-iff.  . 

521 

84 
55 

I  349 
218 
157 

140  140 

8  765 

19  155 

153  011 

8  915 

22  985 

Cijpiir. 

Kinross. 

Clackmannan. 

Clackmiiniian 

COMrtS  SEfTEWTRlOADI. 

Pertli 

2  861 

978 

1  954 

7  418 
2  555 
1  039 

5  009 

157  457 

170  455 

55  075 

192  587 

159  216 

174  751 

51  743 

214  6.58 

Penh. 
Dundee, 
Hcrvie. 
Aberdeen. 

AbiTilcen 

BaiiiV. 

655 

1  059 

49  679 

55  955 

n.niff. 

Kljjin 

472 

197 

3  845 

1  222 

510 

9  959 

7  848 
7  505 

55  012 
9  217 

97  799 
97  57 1 
78  6X5 

58  671 
9  960 
96  528 
88  507 
82  025 

Klgin. 

Nairn. 

Inverness, 

Itivorury. 

Cromarty. 

1   Nuirn 

Aigvll 

3  050 

2  897 

Ros^  et  Ciomaiiv 

Sulliei  land 

1  905 

4  9-29 

24  782 

25  771 

Dor  nock. 

Ciiitliness 

744 
859 

1  927 

2  175 

56  545 
61  065 

58  512 
62  313 

Wick, 
Kirkwall. 

Oikucy  {Orcatles)  el  Shel- 
latiJ 

1 

1 

29  774 

77  Mb 

2  620  184 

2  870  784  • 

VILLES  PRINC. 


CailuW,   .  . 

Dlll>liM  .    .    . 

'  Alhy   .... 

Naas 

.KiUlaic.  .  . 
I  Kilkenny  .  . 
(  I'llilipjluwil. 

King's (Juioi)  J  Biir 

VTcillamore  . 

Longford  .  . 

N.'w-Ross.   . 

Emiiscorlhy. 


KilJaie. 
Kilkenny 


O 


u 

Q 

z 

fiS 


Lougfortl. 

I  Louth   .  , 
f  Mealh 


Weslmealli 

Wexfoid.    . 
i  Wicklow.  . 


I  Droslie.Ia.    . 
>  Dundalk  .   . 


Tiini 


Queen's  (Je  la  j  Poi  t.irlingtun 
reine).    •   •  .  f  Maiyljoruugli 
j  Mullingai.  . 


[  Alhlone.  . 
I  Wcxroi.l  . 
j  W.cklow  . 
(  AikloW.   . 


/Clare Ennis.  .  .  . 

'  Col  k  .  .  .  . 

B.Tiidon  .   .  . 

Kin^ale.    .  . 

Yonglial.  .  . 

Fernioy.  ,  . 

Mallow.   .  . 

Tialec.  .  .  . 

Killiirney  .  . 

Dingle.  .  .  . 

Limeiick  .  . 

Clonmel  .  . 

Cashel  .    .  . 

Tipperaiy.  . 
("an"  on-.Suir 

Kiiscrea.   .  . 

Walcifurd  .  ,  )  , . 

(.  Lism- re.  .  . 


Cork  .   .  . 

Kerry.  ,   . 
I  Limerick. 

Tipperary 


/Antiim. 


Armagh. 

Cavali   . 

1  Dunegal 


/  Belfast  .    .    . 

;  Carricfeigtis 

'  j  Anil  ini .  .   . 

\  Lisliiirn.  ,  . 


^  y  Down. 


Fermniiagh. 

'  Londonderry 

Monaghan  . 

Tyrone  .  .   . 


'Galway. 

Leilrion 


c 

\  Mayo 

/  R'iscumnioii  . 

Vsi'S" 


Ainiugh.  . 

Cavan.  .    . 

Rallyshannou 

Lifford  .   .    . 

Newry  .    .   . 

Dowiipalrick 

Donagliadee. 
I  EnniskiUcu. 
(  Londonilcriy 
\  Coleiaine.  , 
I  Monaghan    . 

Oniagh  ... 

Diingannon. 

Galway,  ,  . 
Tuani.  .  ,  . 
Hallinasloe  . 
Cailick-on-bll 
Caftlebar.  . 
Rosconimon. 
Sliso  .... 


r  S  " 
fc  *   . 

3  -5   '^ 


214 
2>l 

oG9 

4G9 

4'iO 

209 
173 

nC7 
oGl 

486 

744 
1  G38 


].0 


12 

C04 

867 
410 

G05 


28.-. 

478 

1  061 


544 

4i0 
479 
280 
724 

I  546 

40U 


1 


541 
5S6 


Tolaux  gene'iaitx. 


18  05: 


roPULATlO.N 

des 

COMTES 


eulS41. 


86  228 
572  77,3 

114  488 
202  420 
1/(6  837 

1 15  491 

128  240 
183  828 
155  950 

141  300 

202  033 
126  143 


1  973  731 


286  394 
834  118 

293  880 
330  029 

435  553 
196  187 


2  396  161 


300  875 


232  393 
243  158 

29G  448 


oGl  4i6 

156  481 
222  17 'i 
200  442 
312  956 


2  38G  373 


440  198 

155  2!)7 
388  887 
233  591 
180  S8G 


en  1851, 


6S  15 
402  356 

96  627 

160  217 

112  875 

83  198 

107  921 
130  706 
109  747 

107  510 

180  170 
99  287 


1  G67  771 


212  720 

63"  637 

238  241 
256  887 

323  829 
162  503 


I  831  817 


358  50: 


196  420 
174  303 

234  288 


517  778 

113  978 
191  744 
143  410 
251  805 


2  004  289 


352  826 

1 1 1  808 
271716 
173  798 
158  7U9 

I  Oil  or 


6  515  794 


rOPULATlON 

de  rpielcpics 

villes  piincip. 

en  1841    eu  1851 


233  726 


16  201 


80  720 


23  216 


17  275 


254  850 


16  876 


86  485 


26  667 


24  697 


(  AlO  ) 

^OTES  liT   OBSEBVATIONS  SUR   l.KS  TROIS  TAULEAUX 
QUI    PRickUENT, 

(I)  J'ui  piiise  mes  informations,  siir  l;i  iHipulutioii  dc  la  Graiide-Biclagnc  (Anglc- 
terrc,  pays  de  Galles  el  Ecossf),  dans  Ic  Census  oj  Great  Biilain,  1851  (tableaux  de 
population  prescntes  au\  deux  chanibies  da  parlement;.  Qucml  a  la  populaliou  de 
rirlande,  n'ajanl  pu  me  procurer  les  labUaux  oiricieis ,  j'ai  consulle  Ic  relcve'  qui 
en  a  tile  fait  dons  lu  Gazette  d'Jiigsbouig. 

En  ce  qui  ti.ncerne  la  superficic  des  Irois  Royaumcs-Uuis,  j'ai  adoplc  Ics  cvalua- 
lions  polices  dans  Touvrage  de  M.  WjKl,  Notes  to  nccnmpany  .W.  H^ylrls  model  of 
the  earth,  l-oiidre;,  1851. 

Quelquis  vurialions  cxislaiil  enlre  lei  slalisliqnes  relativenienl  a  la  superfiiie,  jc 
crois  devoir  (aire  observer  que,  daiirei  Spackmauii  (Tab!,  stiilislii/.,  p.  115),  cite 
par  M.  dc  Rcden  {Statislique  comparee  ties  grn/ules  puissances  ile  I'Eiirope,  I.  I, 

p.  8): 

Mill.r.  tiiigl.     Kit.  rarr. 

LAngletcrre  auiail 50  387  loO  502 

Priiicipaule  de  Galles 7  «3  t!)  -J'll 

Ecosse  et  iles Sa  167  83  313 

Irlande 31  874  82  55* 

Pel  iles  iles  de  la  Manchc.  .  .  .  352  839 

Totaux 122  185      316  459 


M.  M'Culloch  ii'evalue  la  niemc  superCcie  lerritorialc  qu'j  110  924  milles  carrcs 

anglais ;  savoir : 

Mill.cair.  Kil.carr. 

Pour  rAugklerre  et  les  petites  iles  adjacentcs.  .  .       50  587  130  502 

—  la  principautede  Galles 7  42:;  19  231 

—  I'Ecosse 30  238  7S  31G 

_     I'Irlande 51   874  82  554 

Totaux 119  924  310  603 


Ou  sail  que  Ic  mille  anglais  est  e'gnl  a  I  609  metres. 

Je  rcgreltc  de  n'avoir  pu  Irouver  jusqu'a  ce  moment  la  population  (iliicielle  com- 
parative des  principalesviUcs  du  Royaume-Uni  en  1801,  1811,  1821,  1831,  1S4I,  1851, 
au  moins  pour  ces  deux  dernicres  anuees. 

(i)  he  Hampshire,  ou  comle  de  Hanip,  est  cKiilcmcnl  appcle'  comtc  do  Hants,  ou 
de  Southaniplon. 

(3)  Le  comte  de  Shrop  porte  au^si  Ic  nom  de  Salop. 

(4)  Les  pcrsonnes  voyageanl  snr  les  chemins  de  fer  pendant  la  noil  du  dimaiic  be 

30  mars  (1851)  out  etc  complees  dans  les  lioux  oii  cllcs  sonl  arrivees  le  lundi  nialin  ; 
un  petit  nombre,  qui  n'avaieul  point  termine  leur  voy.ige  Ic  lundi  niallu  ilc  bonne 
hcure,  ont  etc  complees  a  Loudres  a  lu  station  dc  EaslonSijiiare. 

(5)  M.  Wyld  fait  observer,  dans  Touvragc  deja  cite',  que  les  sopeiliiics  donnec; 
dans  le  tableau  relatif  a  I'h  laiule,  qnoiquc  compilees  d'apres  des  documents  olTicie  Is 
par  M.  Mac-Grcgor,  soul  piobablemeiil  crronecs.  U  peuse  qu'on  a  liii  I'airc  usage  de 
millet  iriandais;  qu'alurs,  si  Ton  deduit  les  pctil»  lacs  et  les  cours  d'ean,  on  uc  sera 
pas  Ires-eloigncde  la  vcrile,  et  que  la  superficie  actuelle  de  I'lilande  est  d'environ 

31  202  milles  carres  anglais  (80  813  kil.).  Nous  avons  dit,  dans  une  note  precedentc, 
que  la  superficie  de  ce  royaumc  ctait  cvalnce  par  Spackmann  cl  par  M'Cullo  (h  '" 
31  874  milles  carrcs  anglais  (82  554  kil.). 


( ^lll  ) 


RESUJlfi    GENERAL    COMPAKATIF    DE    LA    POPULATION    EN 


1801 


1811 


18-21 


1851 


1841 


1851         StiperHc. 
en  kil.c. 


Angl.iM  |irinc. 

.leGalles...  8802536  10IC40GS  H99!)9-2   15896707  15914148  1792-2768  151087 

Kcosse 16084-:0     I80o86i     20915-21      27,64586  26-20184  2870784     77815 

liluiuk- «                  »            68018-27     7767401  81751-24  6515794     80815 


Tolal  gtnc.al. . .     20895-280  24028584  2670:i456  -27509546  5090IS 


lltl;Al'm)LATlo^  et  proportion  entre  i,es  deux  sexes 

DANS  LE   ROYAUME-UNI  EN 


1841 


1851 


Hommes.    Femmes.       Tolal.       Hommes.    Fenimes.       Tolal. 


Ansl.  cipiliicip. 

deGalles.  .  .  .  7  777  586 

Ecosse 1-241  86-2 

Irlaude 4  019  576 


8156562  13914148  8762588  9160180  17922768 
1578  5-2-2  2  6-20  184  1565  6-22  I  507  162  2  870  784 
4155  548     8175  124     5176  727    5  559  067    6  515  794* 


13  059  024  15  670  432  26  709  456  13  302  957  14  006  409  27  509  546 


II  laut  ajoiilcr,  en  ce  qui  conceine  la  Grande-Rre- 
lagne,  pour  la  populalinn  des  i!es  dans  Ics  niers 
'ja'onappaWe  en  Xiig\eleire  Brilisli  seas  .   .   .   . 


66511 


76  405       142  916 


13369  448  14082814  27  452-262 


El,  de  plus,  pour  la  partie  de  raimee  de  lene,  de 
l;i  murine  loyale,  el  des  marins  des  batinients  de 
commerce  apparleoaiil  a  la  Graiide-Bietagrie, 
mais  hors  du  pays,  a  I'epufpie  dii  rcccnscmeiil.  . 


267  604 


167  604 


13537  052  14082814  27619866 


Le  Blackwood  Magazine  fail  ohservir  i]uc  le  decroissomenl  de  la  populalioii  de 
I  Irlaude,  qui  e'lail  lombee  de  1841  a  1851  a  1  658  530,  quelqiie  e'norme  qu'il  soil,  est 
liien  plus  considerable  encore  sil'on  compare  I'annee  1846,  oil  la  population  depassail 
telle  de  1841,  avec  1831;  car  cc  scrail  alors  unc  diniiuulion  de  1  863102. 

D.    L.   B. 


(  /Il2  ) 

.%e<e?ii  fie  la  Moeletc. 

Froces-vt'i'lfniix  ties  Mennceix,  Ouvrases 
ofTerls,  etc. 


Proces-  verbal  de  Vassemhlee  "i^neralc  du  2  iwrd  1852. 


O" 


La  Societe  de  geographie  a  lenu  son  assemblee  ge- 
nerate annuellc  le  vendredi  2  avril  1852,  dans  le  local 
do  la  Societe  d'encouragement  pour  rindustrie  nalio- 
nale ,  sous  la  presidenco  do  M.  le  contre-amiral 
Mathieu,    dii'ccteur  general  du   depot  de  la  marine, 

iM.  le  president  ouvre  la  seance  par  un  discours 
ccoute  avec  un  vif  interet.  Apros  avoir  rcnierci^  la 
Sociel(5i  dc  I'iionneur  qu'cllo  lui  a  fait  en  I'appelant  a 
succtider  a  I'illustre  M.  Dumas,  il  ajoute  que  la  Sociole 
a  voulu  sans  doute  honorer  dans  sa  personne  la  ma- 
rine militaire  etle  corps  des  ingenieurs  hydrographes, 
a  la  I6te  desquels  il  est  plac6. 

M.  le  secretaire  lit  le  procfes-vcrhal  de  la  derni^re 
assemblee  general e,  ct  donnc  communication  de  la 
lisle  des  cartes  el  ouvrages  ofTerts  a  la  Societd  ct  d(5- 
pos^s  sur  lo  bureau. 

II  doniie  ensuite  lecture  des  letlrcs  suivantes  : 

M.  Francois  Dclessert,  I'un  desmembresdu  bureau 
de  rassemblcc  g^nerale,  t^raoigne  ses  regrets  de  ne 
pouvoir  assisler  a  la  stance. 

M.  le  secretaire  de  la  Socielc  royalc  de  Londres 
accuse  reception,  par  sa  letlre  du  15  fevrier,  du  Bid- 
letindela  Soci'efr  de  gengrnp/na,  I.  I",  li'  seric. 

M.  le  secretaire  de  la  Societe  asiatiquc  du  Bengale 


(  M3  ) 

accuse  reception,  par  sa  leltre  dalee  tlu  17  novembre 
4851.  du  I.  XIV,  3-=  serie  dii  Bulletin. 

M.  le  prince  Emmanuel  Galitzin  adresse  a  la  So- 
ciete  (Paris  31  mars)  la  premiere  partie  d'une  notice 
qu'il  vient  de  rediger  d'apres  des  documenls  officiels 
sur  les  voyages  autour  du  monde  executes  par  les 
navigateurs  russes;  il  transmettra  plus  tard  la  seconde 
partie  de  ce  travail. 

M.  Jomard,  vice-president  de  la  commission  ccn- 
trale,  fait  ensuite ,  au  nom  d'une  commission  dont  il 
est  rapporteur,  composee  de  MM.  Antoine  d'Abbadie, 
d'Avezac,  Daussy,  Guigniaut  et  de  lui,  un  rapport  sur 
le  concours  au  prix  annuel  pour  la  decouverte  la  plus 
imporlanle  en  geographic,  faite  dans  le  cours  de 
I'annee  18Z|9.  Apres  avoir  passe  en  revue  les  princi- 
paux  voyages  ex6cut(5s  pendant  ladile  annee  en  Asie, 
Afrique,  Amerique  et  Ocdianie,  le  rapporteur  annonce 
que  la  commission  du  concours  a  pense  que  les  explo- 
rations les  plus  imporlantes  sont  celles  de  M\].  Living- 
ston, Oswell,  Rebmann,  et  Krapf  en  Afrique,  et  de 
M.  G.  Wallin  en  Arabic,  et  que  chacun  de  ces  voya- 
geurs  a  ete  en  consequence  juge  digne  de  la  grande 
m^daille  d'argent.  II  ajoute  que  la  commission  accorde 
en  oulre  des  mentions  honorablcs  a  MM.  Thompson, 
Cunningham,  Hooker  el  Strachey  pour  leurs  ouvrages 
dans  rinde  ;  a  MM.  Thomas  Bruner  et  Stokes  pour  leur 
exploration  de  la  Nouvclle-Zelande,  et  a  M,  Squier 
pour  ses  voyages  archt^ologiques ,  notamment  dans 
I'Ktat  de  Nicaragua. 

M.  de  la  Roquelte,  secretaire  general  de  la  commis- 
sion centrale,  lit  one  notice  necrologique  qu'il  a  con- 
sacr^e  ^  la  memoire  de  M.  Frederic  Du  Bois  de  Mont- 


(  h\lx  ) 
perrenx,  corresponclant  perp^luel  do  la  Socicle  de 
geographic,  inort  au  mois  de  mai  1850,  a  peine  &ge 
de  cinquante-deux  ans,  qui  avail  obleiui  la  grandc 
niedaille  d'or  de  I'ann^e  1838  pour  son  Foyage  au- 
tour  clu  Caiicase,  en  Colchide,  en  Gi'orgie,  en  Armenie  el 
en  Critnee, 

Aprfes  cetle  lecture,  M.  Antoine  il'Abbadio  enlre- 
tient  I'assembli^e  des  d^couverles  rdcentes  qui  viennent 
d'etre  faitos  sur  le  haul  fleuve  Blanc,  el  coniniuniquees 
par  M.  Vaudey,  consul  de  Sardaigne  a  Khartoum  ,  <'l 
qui  auraient  pour  resultat  d'etablir  qu'il  existerail  on 
amonldu  O'degre  dc  latitude  plusieurs  affluents  du  Nil 
Blanc,  dont  les  noms  sent  pour  la  plupart  inconnus; 
que  les  Barri  sont  enserres  cntre  deux  de  ces  affluents, 
venant  tous  deux  de  I'esl;  el  cnlin  qu'il  faudrait  cher- 
cher  de  ce  c6t6  la  source  du  fleuve  Blanc. 

M.  Hecquard,  officier  de  spahis,  fail  connaltre  ce 
qu'il  a  observe  de  plus  remarquable  pendant  les  ex- 
cursions faites  par  lui  dans  i'Afrique  occidentale  et 
contrale,  ou  il  avail  ^16  charge  d'une  mission  par 
le  gouverneur  du  S6n6gal. 

M.  le  docteur  Weddell,  deja  connu  par  le  grand 
voyage  qu'il  a  fail  dans  I'Amerique  ui(iriclionale  avec 
M.  Francis  de  Caslelnau,  et  par  unc  inloressante  ex- 
cursion dana  le  sud  de  la  Bolivie,  don  I  le  Bulletin  a 
j)ublie  plusieurs  fragments,  communique  un  ajjorgu 
du  nouveau  voyage  qu'il  vient  de  faire  dans  la  parlie 
septentrionale  de  celte  r^publique.  II  a  su,  malgrii 
i'heure  avancec,  captiver  ratlention  de  ses  audilours. 

En  I'absence  de  M.  le  baron  de  Brimont,  president 
do  la  section  de  comptabilile,  le  secretaire  general  de 
la  commission  centrale  depose  surle  bureau  le  comjite 


(  A45  ) 

rendu  des  recetlos  cl  dvs  dipeuses  de  In  SocicHi^  pen- 
dant I'ann^e  1851,  le  rapport  fait  ])ar  M.  de  Brimont 
comnie  organe  de  ladite  section  sur  cg  compte  rendu, 
le  budget  de  i'exercicc  1852,  et  une  note  sur  le  mou- 
venienl  des  cotisations  unc  fois  payees  et  des  place- 
ments des  capitaux  de  la  Soci^te. 

L'assemblee  avail  a  proceder  a  I'election  de  trois 
membres  tie  la  Commission  centrale,  et  au  renouvelle- 
ment  de  son  bureau.  Elle  a  noninie  aux  trois  places 
vacantes  dans  la  commission  centrale,  MM.  V.-A.  Make- 
Brun,  dcja  membre-adjoint,  Ferry  et  Gamier,  et  6lii 
membres  du  bureau  pour  I'annee  1852  : 

n   '  ■  J    .  (  M-  le  contre-arniral  Mathieu,  directeur 

f  resident.  .  .  .1 

(     general  du  d^pot  de  la  marine. 

/M.  Daussy,  hydrographe  en  chef  de  la 

I      marine. 
Fice-presidentsl ,,,    ,        i  •         .     ■     ^  i 

j  IVJ.  Isambert,  membre  de  la  Gourde 

\^     cassation. 

c      ,  ,  (M.  des  Vergers. 

ocriitateurs.  .  .1  _     , 

(M.  le  capitaine  G.  Lafond. 
Secretaire.  .  .  .  I  M.  Gortambert. 


PRJiSlDENCE   DE  M.  DAUSSY,  VICE-PRESIDENT. 

Proces-verbal  de  la  seance  du  16  ai'ril  1852. 

Le  proces-verbal  de  la  derni^re  stance  est  lu  el 
adopts. 

M.  de  la  Roquetle,  secretaire  general,  donne  lecture 
du  proces-verbal  de  la  derniere  assembl^e  g6n6rale. 
(Voir  p.  /|12.) 


(  41(5  ) 

M.  Riviere  p^re,  proprielaire  a  Mauzti  siir  le  Mignon, 
annonce,  par  sa  leltre  du  9  avril,  qu'il  vientde  se  rendre 
acqu(^ieur  de  la  maison  ou  naquit  le  voj ageui'  frangais 
Rone  Caillc,  et  il  propose  a  la  Socielc  de  coder  cet 
immeuble  dont  le  prlx  ne  depasserait  pas  3  000  francs, 
ou  15(1  francs  do  renle  perpeluolle. 

Malgre  son  doslr  de  rendre  iin  nouvcl  liommago  a 
la  ini^moire  do  Rone  CallH(!!,  la  Soclole  n'ayant  [)oint 
de  fends  qu'clle  puisse  employer  a  une  semblable 
acquisiliou,  il  sera  ropondu  a  M.  Rivi6ro,  qu'ellc  re- 
grelte  do  ne  pouvoir  accepter  roflre  qn'jl  vcul  bien  lui 
faire. 

M.  Itier,  voyageur  en  Chine,  donnc  quelques  in- 
formations sur  Ics  resullats  el  la  naturalisation  dos 
plantes  textiles  de  Chine  a  Montpollier;  et  M.  Jomard 
fait  honunage  a  la  Soci(5te,  au  noni  de  ce  voyageur, 
de  plusiours  cxemplairos  do  la  brochure  j)ublieo  a  ce 
sujet. 

Le  secretaire  general  lit  la  liste  des  ouvrages  of- 
ferls. 

Le  meuie  rappelle  la  proposition  qu'il  a  faite  a  la 
derni6rc  seance,  d'autoriser  rechango  du  Bulletin  de 
la  Soci^te  avec  la  Reuiie  orientale  et  algerienne.  L'exa- 
nien  qu'il  a  fait  des  premiers  num(^ros  de  cette  revue, 
d'apr<^s  I'invitation  de  M.  le  president  de  la  Counnis- 
sion  centralo,  lui  pcrmet  d'annoncer  que  ce  recueil 
oITre  beaucoup  d'inlorol.  La  Commission  centralo  au- 
torise  I'ochange. 

M.  Jomard  communique  des  uouvollos  qu'il  vienl 
de  reccvoir  de  M.  d'Aruaud.  ( Voyez  ci-dessus,  p.  388.) 

Le  mome  membre  donne  lecture  du  fragment  d'une 
letUo  do  M,  Uullel,  ocrilc  do  Gartourn  [l\/iar(oum]vii\ 


(  hi7  ) 
consul  d'Aulriclie  (du  Sennar),  le  20  juillet  1851, 
comuiuniqueo  par  M.  Vaudey,  consul  de  Sardaigne 
dans  la  mfime  contree,  et  contenant  des  informations 
curieuses  sur  le  Nil  Blanc.  — Renvoy6  au  comit^  du 
Bulletin . 

M.  Antoine  d'Abbadie  fait  observer  qu'il  a  deja 
donn6  a  I'assembl^e  g^nerale,  dans  sa  seance  du 
2  avril  dernier,  les  rnfiraes  renseignements  que  M.  Jo- 
mard  met  sous  les  yeux  de  la  Commission,  et  qu'il  a 
puis^scommeluidans  laletlrede  M.  RoUet,  dontils  ont 
da  tous  deux  la  communication  a  M.  Vaudey. 

M.  Thomassy  lit  le  comple  rendu  fait  par  lui  du 
voyage  au  Waday  (Ouaday)  du  Cheyk  Moiiammed- 
Ibn-Omar  el-Tounsy,  traduitde  I'arabepar  iVI.  le  doc- 
teur  Perron  et  public  a  Paris  en  1851  par  M.  Jomard, 
qui  I'a  fait  preceder  d'une  preface.  —  Renvoi  au 
comile  du  Bulletin. 

M.  d'Abbadie  communique  des  renseignements 
qu'il  vient  de  recevoir  sur  le  Darfour.  II  est  prie  de 
r^diger  unc  note  a  co  sujet  pour  Ic  Ballelin. 


lu.    Aviur..   S.  2K 


(  A18  ) 
01 VR AGES  OFFEUTS 

DA.WS    I.KS    Si!:ANCES   DE    L'ASSEMBLlili  ct.NtRALE    UU   2  l.T   Df. 
L\  COMMISSION  CEKTnALE  I)U    16   AVRIL  1852. 


— ♦ 

TITRES. 

DONATEURS. 

EUROPE. 

OUVRACES. 

MM. 

Pilote    fran9ais.  Instnictions   nautiques   (paitie 

Depot  (Ic  la  marine. 

(les  cotes  septentiionales  de  France,  comprise 

autre  le  pliare  ties  Hoauxde  Brehal  et  Ic  phare 

«lu  cap  de  la  Hafjue),  rediyees  par  M.  de  Givry, 

I  vol.  in-4°.   1 85 1 . 

Description  de  I'archipel  des  Acores,  par  M.  Ker- 

Idem, 

hallet.Bro.h.  in-8°.  l85l. 

Annuaire  des  marees  des  cotes  de   France  pour 

Idem. 

I'annee  i852.   i   vol.  in-32. 

CARTES  IIVDROGBAPHIQUES. 

Carte  des  iles  Acores,  n°  1266.    i85l. 
Mer  mediterranee :  C6tes  d'ltalie;  Tarente,  Co- 
trone,  Gallipoli,  n°  1972.  iSSi. 
_  Port   d'Otrante  (golfe    de  Venise),  n°  1273. 

.QC. 

.85 


Ideni, 
Idem. 

Idem. 

Idem. 
Fdrni. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 
Idem. 

Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 

Ideiu. 


(  419  ) 


TITnES. 


DONATEURS. 


Mer  iiietliteiT.inee  :  Canal  I.emo  (golfe  de  Venise), 
no  1286.  I  85 1. 

—  Port  Venula  (golfc  de  Venise),  n°  1287.185 1. 

—  Port  Aufjnslo  (lie  Lossini),   n°  1288.  i85i. 

—  Port  Be{;Ujilia  (ile  Melada),  n°  1289.  i85i. 

—  Port  Ti)jei(ile  Grossa),  n"  1290.  l85l. 
Carte  de  la   incr  Adiiatique,    1"  et   2*   feuilles, 

n°'  i3oi-i3o2.  i85o-i85i. 
Carle   des  atterrapes  des  coles  meridionales  de 

France,  n°  i3o3.  i85i. 
Carle  de  la  mer  d'Irlande,  n°  i3o4.  l85l. 
Caite  des  golfes  de  Venice  et  de  Trieste.   Ports 

de  Venise  et  de  Trieste,  n"  i3o5.  l85l. 
Carte   gene'rale  de   la  Me'dilerranee.   a"  feuille , 

n"  1  265.  1 85 1. 

ASIE. 

OUVRAGES. 

Instructions  iiautiques  snr  la  mer  de  Chine,  I  vol. 
in-4",  par  J.  Horsburp,!),  Iraduit  parM.  !e  Pre- 
dour,  '3'  edit.  Darondean  et  Reille,  i85i. 

Considerations  ge'nerales  sur  roceanlndien,pour 
(■aire  suite  a  celles  sur  I'ocean  Atlantinue, 
par  M.  de  Kerhallet.  Broih.  in-8°.  i85i. 

Ha|)port  sur  la  campagne  de  la  corvette  la 
Bayonnaise  dans  les  niers  <le  Chine,  par 
M.  Jurien  de  La{»raviere.  Broth.  in-B".   i85i. 

De  la  Ciiiine  consideree  an  point  de  vue  du  de- 
houche  qu'eile  pent  olfi  ir  a  I'indiisti ie  vilicole. 
Montpellier,  t849-  Broch.  in-8°,  par  M.  liier. 

CAIITES   IIYDRUGRAPUIQUES. 

Carte  de  la  mer  de  Chine ,  t '"  feuille.  Cote  ine'ri- 
dionale  de  Cochinciiine,  n"  1271,   l85l. 

Carte  dii  goife  de  Smyrne  et  de  ses  abords.  En- 
tree du  port  de  Longone.  Entree dupoit  Olivier, 
no  I  292.  i85i. 

Golfe  de  Smyrne,  n°  1293.  t85i. 

AFBIQUE. 

OrVIlACF.S. 

Manuel  cIb  Ih  navignlion  a  I.i  cole  iMcidiiitale 
il'-Vhiipu.  Ilideli,  in-K'. 


M.M. 

Depot  de  la  marine. 

klem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 

Idem. 
Idem. 

Idem. 


Idem. 

Idem. 

Mem. 

J.  Iiier. 

Depot  de  la  m.uine. 
Idem. 

Idem. 


(  /|20  ) 


TITKES. 


DONATEUnS. 


MM. 


Instiuciions  nautii|ui;s  sur  les  rotes  oecidentales 
d'AFrique,  coinpiises  enlre  le  detroit  de  Gi- 
braltar et  le  golt'e  de  Benin,  tiaduit  de  I'an- 
jdais  par  M.  Daiondeau.  Uioch.  ln-8°.  l85l. 

Description  de  I'nrcliipel  des  Canaries  et  de  I'ar- 
.Iiipcl  des  lies  ili>  cap  Vert,  par  M.  de  Ker- 
hallet.  Brocli.  111-8".  i85i. 

Du  commerce  fiancais  a  la  cote  occidentale 
d'Afrique,  par  M.  Jules  Itier.  Ikoch,  iiv8°. 
Marseille,  i847- 

C\BTES   HYDROOnAPBlQUES. 

Carte  de  I'ife  d'Abd-el-Kowri;    iiiouillage  a    la 

cote  sud  d'Abd-el-Kouri,  n"  1297.   'S.')l. 
Mouillage  de  Meurka,  11°  1268.  i85i. 
Mouillnge  de   Braoua,  n"  1269.  C6te»d'Afrique. 

Carte  du   fleuve  Ca/.amaiice  jusqu'ii   I't'lablisse- 

inentZin{;hincli'or  (cote  occidentale  d'At'rique). 

Plan    de  Temboucliure    du    fleuve    de    Caza- 

manche,  n°  1270.  i85i. 
Plan   du    port    d'Atnbavaranou    ou    baie   Rifjny 

(cote  nord-estde  Madagascar),  n''i29[    i85i. 
CartedesllesSalv,if;es(c6leoccidenlaled'Afrique), 

n°  I  2g4-  '85 1. 

Plan  du  muuillage  de  Saint-I.&uis  ou  de  Guet- 
IN'Dar  et  de  la  bane  du  Heuve  du  Senegal 
(cote  occidentale  d'AfriqueJ,  n°  1295.  l85i. 

('.ours  du  fleuve  du  Senegal  depuisPodor  jusqu'a 
son  einboutliuie,  11°  1296.    i85i. 

Plan  de  I'ile  et  du  port  de  Morabaze  (cole  orien- 
tate d'AtVique),  n"  1797.  i85i. 

Mouillage  de  Ouarilieikli  (cote  orientale  d'Afri- 
i|ue),  n°  I  298.  1 85 1. 

Plan  du  mouillage  du  port  et  de  la  ville  de 
Bizerte,  n°   1299.  i85i. 

Plan  lies  mouillages  de  Slora  etde  Pliilippeville, 
u"  i3o6.  i85i. 

Plan  du  mouillage  de  Collo,  n"  1  3oR.  i8.')2. 

AMi:r.iQUi:. 

OfVr.AC.ES. 

Instructions  naulifpies  sur  Ics  cotes  01  icii talcs  (lc| 
rAuieriqiie  <lii  Slid,  <(jinprises  tniie  l.i  I'lal.i  clj 


Depot  de  la  marine. 


Id( 


J.  Itier. 


Depot  de  la  marine. 

Iilcin. 
Idem. 

Idenk. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 

Idem. 
lden\. 
Idem. 

Idem. 

Idem. 

Iden>. 

|iltrn>. 


(  A21   ) 


TITHES. 


DONATliURS. 


le  detroil  de  Magellan,  par  M  le  capitaineFitz 
Roy,  traJuit  de  raii{;lais  par  M.  de  Coriolis 
BrocI).  in-8".  i85i. 

Instructions  nautiques  pour  naviyuer  sur  les  cotes 
dcs  Guyanes,  par  M  Tardy  de  Montravel.  Br. 
in-8°.  i85i. 

Appendice  a  I'instruction  aiifjlaise  pour  le  pas- 
sage du  detroit  de  Magellan,  par  M.  Mauge  de 
I'Etang.  Broch.  in-S".  l85l. 

Tableau  general  des  phares  et  fan:uix  des  cotes 
orientales  de  rAnieriqiie  du  Nord.  liroch.  in-8°. 
i85i. 

Expedition  dans  les  parties  centrales  de  I'Anie- 
rique  du  Sud,  de  Rio  de  Janeiro  a  Lima  et  de 
Lima  au  Para;  ilineraires  et  coupes  geotogi- 
ques,  2'  livr.;  par  M.  Fiancis  de  Castelnau. 
Paris,  1 85a. 

CARTES   HVDnOOIlAPIIIQllEi. 

Carte  des  canaux  de  la  Providence  et  de  Ba- 
hain:i,  n°  1260.  l85l. 

Carte  d'une  partie  dcs  cotes  orientales  de  I'Aine- 
riqiie  nieridionale,  depuis  I'embouchure  du 
Rio  de  la  Plata  (35°  de  latitude  sud)  jusqu'au 
45°  5o'  de  latitude  ine'ridionale,  n"  1262.  1 85 1 . 

Carte  des  coles  de  la  Palagonie,  depuis  le  detroit 
de  Magellan  (53"  de  latitude  sud),  jusqu'au 
44°  de  latitude  uieridioiiale,  n»  126).   i85l. 

(]arte  particuliere  de  la  cote  sud-ouest  d'Aine- 
rique,  partie  comprise  entre  les  iies  Evange- 
listas,  a  I'entree  du  detroit  de  Magellan,  el  le 
golfe  de  Penas,  n°  1307.  i85l. 

OCEAN  IE. 

OUVUAGES. 


MM. 

Dep6t  de  la  marine. 

Idem. 


Idem. 


Idc 


Francis 
de  Castelnau. 


Depot  de  la  marine. 
Idem. 

Idem. 
Idem. 


id   et  da 


I'Oce 


le 


Voyage  au  pole  sud  et  dans  I  Uceanie  sur  les 
corvettes  I' Astrolabe  et  la  Ze'le'e,  par  M.  Du- 
iiiont    d'Urville;   hydrograpliie,   t.    II.    1    vol. 

.11-8".  i85i. 

CAnXES   HYUIieXJUAI'IIIQUES. 

I'Uii  de  la  cole  oecidenlalc  de  Taiti,  de  l'aj)ectc 
a  Piniaavia,  11"  1  •.>6i .  1  85  1. 


Ide 


Ide 


(  422  ) 


TITIVES. 


DONATEUnS. 


Carte  generale  de   I'ocean    Pacitique,    n"    1264- 

l85l. 
Plan  de  I'ile  'I'aliuata  (ilos  Marquises),  Plan   ile 

laltaie  dt>  Vaitaliu,  n°  i3oo.  i85i. 

MELANGES. 
MEMOIBES   DES  SOCIETES  SATANTES  ET  JOUnKAUX. 

Fran  pa  is. 

Seances  el  travanx  de  I'Academin  de  Reims,  n°  Q. 
Builelin  de  laSociete  industrielle  d'Anjjers,  a'ser., 

2*  vol   i8r>i . 
Extrail  des  seances  de  la  Socipte  d'anricullure  et 

de  cominiMce  de  C:ien.  Anne'e  l85l  . 
Rulleltn    de    la    Societe    j'eologique   de   France, 

feuilles  5-io  (3  nov.  l85i  —  12  janv.  iSSa  ). 
Journal  d't'ducaiion  populaire.  Fcvuer  i852. 
Annales  de  la  propnyalion  de  la  toi.  Mars  i852. 

Anglais. 

Pliilosophical  transactions...  (Transactions  pbi- 
losopliiques  de  la  Societe  royale  de  Londres 
pour  I'annee  i85i,  part.  11).  Londres,  i85i. 
1   vol.  in-4". 

Proceedinjjs...  (Actes  de  la  Societe  royale  de 
Londies).  Mai  i85o.  N»  76. 

l^isle  des  menibres. 

Espagnoh. 

Meniorias...  (Mi'inoires  <le  I'Academie  royalc  des 
sciences  de  M.idrid,  .'i'  ser.,  sciences  naturelles, 
1. 1,  part.  II.  I  vol.  in-4")-  Madrid,  1  8,')  1 . 

R(>-;unien...   (  Ilcsuine   iles   actes    de    lAcadiiniie 
royale  des  sciences  de  MaJiid  de  l85o  a  I  85 1, 
lirocli.  in-i8  de  55  pages. 

DIVERS. 


MM. 

i)ep6t  de  la  marine. 

Idem. 


Acad,  de  Reims. 
Societe  industrielle 

d'Anf;ers. 
Societe  d'agr   et  dc 

cotnin.  de  Caen. 
Societe  geologiquc. 

Les  editeurs. 
Idem. 


Societe  royale 
de  Londres. 


Idem. 
Idem. 


A(M(I.  des  sciciK  cs 
•  It  .Mi.drid. 


Idc 


Mini.-li  I' 


I'roces  (lis  Tenipliers,   t.   II,    iS.Jl,   pnlilii'   p.ir 

M.  Miclielel  (cidleclion  des  documents  inedils  dc  I  iii>lr.  puMi'pir 
Mir  I'liislnii  c  (Ir  1'  r.iiii  i').  I 


(  /i23  ) 


TITRES. 


DONATEURS. 


Gcofjraplue  complete  et  universelle,  nouvelle 
edition,  par  V.-A.  Mjlte-Briin  (fils),  proFes- 
spiii-  (i'histoiie  et  ile  geogiaphie  an  college  Sta- 
nisl.is,  t.  I-V,  grand  111-8°.  Paris,  1862. 

Memoir  of  the  European  colonization  of  Ame- 
rican ,  in  anle-  histoiic  times,  par  D.  C.  A. 
Zesterniann,  de  Leipsi;;,  avec  des  observations 
par  G.  fv  S(|uier.  Avill  l85i  (from  the  Pio- 
ceedings  of  the  American  ethnological  So- 
ciety). 

Voyage  autonr  dii  munde,  execute  pendant  les 
annees  1  836  et  1837,  snr  la  corvette /a  Boju'fe, 
par  M.  Vaillant,  capitaine  de  vaisseau  :  his- 
Toire  naturelle,  zoologie,  par  MM.  Kydoux  et 
Souleyet,  ly*  livr. ;  bolanique,  i  \'^  et  i5'  livr. 

Des  avaiitages  de  I'irrigation  souterraine,  par 
M.  Jules  Itier.  Broch.  in-8".  Montpellier,  1 849. 

De  la  naturalisation  en  France  et  en  Algerie  de 
plusieurs  planles  textiles  originaires  de  la 
Chine,  et  de  I'application  des  procedes  chinois 
a  la  preparalion  de  filasses,  par  M.  Jules  Itier. 
Broch.  in-8".  Monlpellier,  i85i. 


MM. 
A.  Malte-Brun. 


Jomard. 


Depot  de  la  niarim 

J.  Itier. 
Idem. 


PaH-~- 


;u! 


^■uir/i^itf  ^ ■'n'ifntftftit 


■.   lU..\.t.»  .i    l,^/    /.v 


titi/,,  hnMi  j: 


v.soiiss/'; 

.III 

IIAl  T  ILKlAKIil.VM 

SrlcHl   li-s  l-i-lisi-it^llrllltrils  4-1 

ll'SollM'I'VnIilHIS    .ll 

.M.|VAlH.Mll<l.lllltlM<.l.,l.l.'.lu'l 

c't.lr.M.MJ.alui'^llri'l  llollrl 

P... ..  A>Til  IBS; 


!<"' 


/  .ii^/iliitlf   Kit    t/n]  ^6rii/ifri  Ja  f\iri^ 


/./A  ,/<- A\,-v"-"""  '    ""■■■"  ' 


:  I. A  MAUIM. 


^''"."'  Xc'ru' ;  IUt/h-/in  ,/  .  tt>r,7    /S. 


l.if):':ih-  Ciali'i 


I  \li;MI     111,   I   V   |;|,M  I,  (  llldMU  I,,    \M,(     ,     m    I  ii|\I>  VI  II  in    111     M     1.1     MI\|nII\1     HI.   I    \    MM'.IM 


BULLETIN 


DE    LA 


SOCIETE  DE  GEOGRAPHIE. 


MAI  1852. 


llciiioireii, 
IVoticei^^  Docuiueuts  origiiiaiix,  etc. 


AFRIQUE  ORIENT  ALE. 


NOTES  SLR  LES  VA-NGINDO. 


M.  EUGEiNE  DE  FROBERVlLT,E. 


L 

Geogr.iphie  du  Ku-Ngindo.  —  Etendue  dii  pays.  —  Montajjnes.  — 
Rivieres.  —  Climat.  —  Vegetaux  ;  animaux. 


Les  Va-Ngindo  occiipent,  a  environ  50  lieues  de  la 
cote  orientals!  d'Afriquc,  la  contrce  siluee  entre  le 
fleuve  de  Lum/na,  au  sud,  ct  celiii  du  Luegu,  aii  nord. 
lis  sont  limitrophes  :  a  lest,  des  Ua-Muetra  el  des 
A-Mnko)ide;  —  a  I'ouest,  des  A-Nindiai  des  Fa-Diaon  ; 
—  au  nord,  des  J-Matunibi  et  des  Ua-fJma ;  —  au  sud, 
des  A-Makiui.  —  La  plus  grandc  longueur  de  leur  ter- 
ni.   MAI.  i.  29 


(  420  ) 

ritoire,  en  allant  dc  I'csl  a  I'ouesl,  est  d'environ  dix 
journoes  do  marche,  ce  qu'on  peul  evaluer  a  prcs  de 
GO  lieues. 

On  ne  voit,  nullepart  dans  ce  pays,  de  chalne,  ni  A 
proprement  parler  dc  hautes  montagncs ;  on  cite  ce- 
])endant  les  sommots  de  Nlh/ign ,  de  Ai^iirugue  ct  dc 
iX/aiiigiia  chez  les  Va-Ngindo  occidentaux;  el  Ton  dit 
que  certains  cantons  sont  coupes  de  ravins  escarpos  et 
de  masses  de  rochers  parmi  lesquels  on  Iroiive  dcs  ca- 
\ ernes  prolondes. 

Le  sol  ne  renferme  pas  de  mines  mcitailirercs;  du 
moins  les  Va-Ngindo  n'en  exploilenl  -  ils  pas,  bicn 
qii'iis  connaissent  les  prociides  de  la  fonle  du  fer  pour 
les  avoir  \u  pratiquer  chez  Icurs  voisins  de  I'oucsl  et 
du  sud. 

Des  forets  impenetrables  couvrint  unc  parlic  du 
pays,  ct  de  nombreux  cours  d'oau,  que  leiu'  rapidilc 
ou  Tincgalile  do  leur  prol'ondeur  rendenl  inuavigablos. 
fcrlilisent  les  lerres  cultivees  principalementen  millel, 
en  riz  ct  en  ccrlaines  cspeccs  de  baricots.  Aucune  des 
rivieres  ne  roulent  dans  leurs  sables  ces  parcelles  dc 
m«ilaux  precieux,  objet  dun  commerce  considerable 
chez  les  peuples  du  bassin  du  fleuve  Zembedzi.  Les 
principaux  cours  d'eau  du  terriloire  des  Va-Ngindo 
sont  :  le  Lukimua,  grand  torrent,  qui  n'a  des  eaux 
prolondes  qu'apres  les  fortes  pluies  de  I'^t^,  et  qui 
aboulil  au  Lumina;  —  le  Liikohe,  —  le  Luhusi-lukiiru 
(c'est-a-dire  la  grande  riviere),  —  le  Dziiga,  affluents 
du  Lukimua;  —  le  ISainbua,  —  Luluwu,  —  le  Lugoiii- 
bukua,  —  le  Luku/esi. 

11  nc  parail  pas  exister  de  villages  considerables  dans 
ce  pays;  chaquc  I'amille  vit  independanle  et  isolee  au 


(  /i27  ) 

milieu  des  terres  qu'elle  cultive,  se  divisant  desqu'elle 
devient  trop  nombreuse,  et  se  tenant  sur  un  pied  de 
mefiance  sinon  d'hoslilite  envers  ses  voisins. 

Tiois  saisons  parlagont  irr^gulierement  I'annee  : 
Tune,  seche  et  mediocremenl  chaude,  cominence  en 
septembre  el  linit  en  Janvier ;  la  seconde,  qui  est  la 
saison  des  orages,  des  ondees  torrenlielles  et  des  cha- 
leursetouflfantes,  dure  jusqu'en  mai ;  enfinia  troisi^nie, 
pendant  laquelle  r6gnent  une  petite  pluie  fine  el  des 
brises  legeres,  termine  I'annee. 

Les  orages,  pendant  les  mois  de  fevrier  et  de  mars, 
sont  d'une  grande  violence,  et  il  ne  so  passe  pas 
d'annee  sans  que  la  foudre  ne  tombe  sur  quelque  ha- 
meau.  La  grele  est  un  meteore  uioins  frequent;  niais 
les  Va-Ngindo  en  citenl  des  averses  dent  les  grelons, 
gros  comnie  des  ceufs  de  pigeon,  font  parfois  p6rir  les 
jeunes  aniraaux  et  detruisent  entierement  certaines 
recoltes. 

Parmi  les  vegelaux  qui  croissent  dans  le  pays,  et  qui 
sont  du  restc  communs  aux  contrees  voisines,  je  uien- 
tionnerai  : 

Arbres  et  arbrisseaux.  -  Lc  inunhoro  et  le  nhekera, 
arbres  sacres,  au  pied  desquels  on  depose  lafarine  au- 
guralc. 

Lo  miingu-inuhdi ,  dont  on  adminislro  comine 
6preuve  ou  ordeal  I'^corce  vc^neneuse  aux  personnes 
accusces  de  sorcelleric. 

Le  siingu,  grand  arbre  dont  la  s6ve  sert  a  empoison- 
ner  les  filches. 

Le  kihegua,  dont  I'^corce  pilee  dans  un  mortier, 
fournit  un  vernis  impermeable  dont  on  enduit  la  vais- 
selle  en  jonc  tresse. 


I  A28  ) 

Le  ndi'onibo,  —  Ic  mtsiengn,  —  lo  ndii-geia  [ficus  tere- 
hmtci),  donl  les  ecorces  fibrcuscs  seivenl  a  faire  des 
cordes  et  des  filets  pour  la  chasse. 

Le  tondzie,  cotoniiier. 

Lo  ni/iiii'ii  { jaiiibosn  vulgaris)  qui  sert  a  la  tointure 
des  etolles. 

Lc  nijiindi/u/nbi,  arbrc  a  bois  dur  dont  on  fait  des 
uiortiers  et  des  oreillers  ou  coussins. 

Le  ninahe,  esp6ce  de  bambou. 

Le  iniduiigu  [iiini'inda],  donl  les  fouilles  se  mangent 
en  pelage,  ressource  precicuse  en  temps  de  diselte.  (Le 
jioui  de  inu/iiiigu  signifie  le  bon  g^nie,  la  Providence.) 

Le  iniikuasu ,  tamarinier. 

Le  kurakida,  obeiiicr. 

Lc  ui/jhigiie,  autre  arbro  a  c(Eur  noir  dont  on  fait 
des  cbevilles  pour  los  ouvragcs  de  menuiserie  ,  et  des 
pointcs  de  Hecbcs  pour  la  cbasso  aux  oiseaux. 

Lo  iniisaiir/ariisi,  qui  produit  la  gomme  copale, 

Le  b'dikd,  ricin,  dont  I'liuile  sert  egalement  comuie 
cosm6li(]uo  ct  conime  assaisonnement  dans  los  luets. 

Le  inthndo  [takarnaka), 

Le  nilapa,  baobab. 

Le  vulava  [^jlacourtia  Ramontchi). 

Le  linghmho,  bananier. 

Le  inupapuiiii,  papayer. 

Le  dundihire,  espece  de  citronnier;  —  lo  nihemba 
{Icea  sambucina);  — \&  maraud zh he  [kirganelia];  lo 
mava  [harotiga),  donl  les  fouilles  aromatiques  sont 
employees  dans  les  bains  de  vapeur. 

LiANES.  — ^  Le  riiiithmo,  donl  la  racinc  est  reconi- 
nuindto  dans  les  maladies  de  poitiino. 

Lo  (aiiibu/i,  ou  botcl ,  dont  on  niacbo  la  fouiiio  avec 


(  /i20  j 

tlu  tabac  ol  tie  la  chaux,  a  I'lnstar  cic  Unis  les  pcuplcs 
de  I'ocean  Indien. 

Le  Jiithle ,  dont  los  racines  rouriiissent  un  (il  excel- 
lent. 

Le  mirimdu-iinihiilxad,  donl  les  liges  rampantes  sont 
tellement  enlacees  que  les  betes  fauves  s'y  prennent 
conime  dans  des  filets. 

Plantes.  —  Le  Uhhnht  [arum  colocasia). 

Le  biinibe,  moulaide. 

Le  lihiiimii-H  ,  esp^ce  de  gros  oignons,  employes 
centre  I'bydropisie. 

Le  makoio,  espece  do  chanvro,  que  Ton  fume  en 
guise  de  tabac,  et  (pii  cause  suuvent  une  ivresse  sem- 
blable  a  de  la  demence. 

Le  hihhnii  et  le  Inkiwl,  herbes  donl  on  couvre  les 
huttes  en  guise  de  chaumc. 

Le  inallhipe  [paniciim  maxiinnin) . 

Le  makangaga,  graminee  donl  les  feuilles  sonl  Ires 
coupantes. 

Le  mnpemba,  millet;  —  le  u/e/it,  espece  de  legumi- 
neuse  a  graine  rouge ;  —  le  inpiinga,  riz,  base  de  la 
nourrilure  des  Va-Ngindo,  qui  cultivent  aussi  le  se- 
rame,  le  mais  [rnapcniba-inangh]  (1),  et  diverses  especes 
de  dolies,  de  haricots  et  de  cucurbitacees. 

Les  buoga,  nom  generique  des  champignons  dont 
les  Va-Ngindo  savcnl  distinguer  les  varietes  veneneuses. 

Parmi  les  animaux  qui  vivent  dans  le  Ku-Ngindo, 
on  menlionne  :  Les  singes  {kitumbi),  — les  macaques 

(l)  Le  rnaVs  est  exotique  a  rAliir|ue,  couinie  I'indique,  son  nom  : 
millet  de  la  met;  c'est-a-diie  des  pays  d'oiitre-mer,  dans  la  plu|)ait  des 
Ijngues  ostro-negres.  Eu  siihaili  et  en  lima,  sa  provenance  de  I'lude 
est  flairetnent  sigiialee  par  le  nom  de  mah'ntdi,  mllnndi. 


(  430  ) 

{mallpa),  —  la  chaiive-souris  {kinima),  —  Ics  roiissclles 
[mnndziri),  —  la  nuisaraignc  {lihiinibandlra) ,  —  Ic  ralol 
(^Ijfu^e),  —  le  chien  domestiquc  (  mhitn),  —  Ic  chacal 
[limen), —  la  hyene  {lituniingu) ,  —  le  lion    {lilumha), 

—  le  leopard  {hihin>i),  — le  chal  {kilunginn),  le  rat 
{likiile)  ,  —  la  souris  [kinangu) ,  et  un  grand  nombrc 
d'aulres  rongeurs  ,  — une  especo  de  herisson  [tavara), 

—  Ic  pore  epic  [fllno  e\  kinhngu),  — lo  Ilevre  {kipetsa), 

—  le  sanglier  {ligwiive),  —  le  rhinoceros  a  deux  cornes 
[hera),  —  I'liippopolaine  [domonde)  ,  —  I'^lephant 
[dembo], —  ieztjbre  {/ipiuida), —  un  grand  nombre  d'cs- 
peces  d'anlilopes,  et  particulierenient  le  gnou  [IhiikIzii), 

—  le  cabri  [bidd),  —  le  uiouton  [butt),  —  le  bullle 
[ndziati),  Ic  bceuf  {gumbc,  Iresrare  dans  le  pays),  — 
[dusieurs  especes  de  grands  serpents  (terine  generique  : 
/i/ioka,  qui  signific  d6mon,  mauvais  genie),  parmi  les- 
quels  le  boa  [lihhto),  —  le  crocodile  [libainba  ),  —  le 
canieleon  [luhlu),  —  la  torluc  de  lerre  [kbtigue],  la 
sangsiie  [hiinde). 

Paruii  Ics  insectes  :  les  grosses  termites  [bamba  el 
giimbi),  dont  les  fourmiliercs  sont  haules  corame  les 
bullcs  des  indigenes,  —  les  scolopendrcs  {gerenehiia)^ 

—  les  scorpions  [kipUili),  —  les  inousliques  [dzendzema) , 

—  les  sautorelles  devastalrices  {maparahai-a),  dont  les 
Va-Ngindo  lont  une  sorte  de  confiture. 

Parmi  les  oiseaux  :  le  tsatsengua  sacre, — la  poule 
d'eau  [kihunanri).  —  le  canard  sauvage  {/iimtn),  — 
la  pintade  {kduga),  —  la  poule  domeslique  {giikn),  et 
un  grand  nombre  d'oiseaux  de  proie,  enlrc  autres  le 
vautour  [nnmueve). 

Les  rivieres  sont  tr6s-poissonneuses,  mais  on  n'y 
p6chc  pas  dc  grands  poissons.  (Poisson,  terme  gene- 


(  431  ) 

I'ique  :  hoinba; — anguille,  giuiga  ,  —  (^crcvisses,  ^a/i- 
gahanga;  —  crabes,  likara;  —  coquillages,  goivinhe). 


11. 

Type  des  Va-Ngiiido.  —  Leur  langue.  —  Leurs  facultes  iniiHec- 
tuelles. —  Superstitions;  coutumes  caracteristif|ues.  —  Tiadition^ 
relifjieuses.  —  Culte  :  la  farine  augurale;  I'invocation  pour  la 
pluie. 


La  race  ngindo,  an  point  de  vue  ethnographique, 
tait  partie  de  la  grande  famille  des  peuples  de  I'A- 
frique  orientale  au  sud  de  I'^quateur,  fatnille  a  la- 
quelle  j'ai  propose  de  donncr  le  nom  A'Ostro-Negres,  et 
dont  on  pent  ranger  les  types  en  quatre  groupes  prin- 
cipaux  : 

Le  premier,  ayant  le  caracl^re  du  Ntigre  pur,  dans 
sa  classique  laideur; 

Le  second,  se  rapprocliant  dii  type  predominant 
chez  les  Cafres  et  les  Bechuana ; 

Le  troisieuie,  tr6s-analogue  a  celui  des  Nfegres  ocea- 
niens  ; 

Le  quatri6ine,  ou  le  caraclere  de  ia  race  s6mitique 
se  raontre  avec  ime  grande  Evidence  (1). 

Sous  le  rapport  linguistique,  I'idiome  ngindo,  par 
son  vocabulairo  et  par  sa  syntaxe,  se  rattache  intime- 

(i)  La  question  Lrethnologie  historique  relative  a  I'originc  dc  oe 
dernier  type  a  c'tc  traitee  ilans  un  memoire  prosente  a  TAcademie 
des  sciences,  en  meme  temps  que  les  mDulaf;es  sur  nature  exe'cutes 
par  I'autf'ur  anx  ilts  Boui  Ijon  et  Maurice.  Lc  tome  XVIII  des  Comptes 
renchis,  scante  du  aG  I'cvrier  1849,  '^"  renfermo  unc  analyse  succiucte, 
et  le  tonic  XXX,  seance  du  3  juin  i85(J,  contient  le  rapport  de  la 
commission  noinmcc  par  I'Academie,  et  composee  de  MM.  Serres , 


(  /i32  ) 

mcnt  non-seulement  aux  aulres  idiomes  ostro-n^greo, 
mais  a  loules  les  langues  connues  de  I'Afiique  mdri- 
dionalc  et  do  I'Afriquo  occidentale,  qui  ont,  coinme 
on  le  salt,  uue  construction  grainmalicale  fondee  sur 
I'emploi  do  prefixes  euphoniquciuent  ropeles  dans  le 
cours  d'une  phrase  (1).  Le  tableau  synoptiquo  annex^ 
a  cctte  note  donne  le  resultat  auqucl  ont  conduit  les 
coniparaisons  philologiques  dont  cette  f'amille  de  lan- 
gues a  (ite  I'objet. 

Lintelligence  des  Va-Ngindo,  conime  celle  de  tous 
les  peoples  de  I'Afrique  orienlale,  paralt  m^diocre- 
nienl  developpce  ;  mais  die  n'est  que  paresseuse  ou 
engourdie.  Lorsqu'ils  sont  places  dans  un  njilieu  d'edu- 
cation  moins  barbare,  —  chcz  les  Arabes  de  Zanzibar 
ou  des  lies  Comores,  par  exeinplc ,  —  lours  facultes 
s'eveillenl  rapideuicnt  et  les  mettent  inlellectuellement 
au  niveau  de  tout  le  nionde. 

Le  tissage  du  colon,  la  fabrication  des  lances,  des 
arcs  et  des  fleclies,  celle  de  la  jiolerie  el  de  divers 
instruments  de  musique,  la  construction  depieges  in- 
g(5nieux  pour  les  betes  fauves,  la  sculpture  do  moublcs 
et  de  figures  en  bois,  les  compositions  musicales  et 
les  longues  histoires  racontees  aux  veillees  allestent 
qu'ils  ont  de  I'induslrio,  do  riniaginalion,  et,  jusqu'a 
un  certain  degro,  du  gout  pour  los  arts. 

Flourens  ot  Dupeney.  Co  r.ijuioit,  du  ;i  la  jilniiio  df  M.  Scires,  uc 
louche  (ju'a  la  paitie  anthropologiquc  du  mrinoiie  precito,  dont  il 
approuve  les  coupes  ct  divisions;  it  reserve  la  tlieschistorique, coninie 
n'etant  pas  du  rossori  de  rAcadeuiie  des  sciences. 

(l)  Voir,  dans  les  Proci's-verhciiix  ties  seances  de  la  Socie't^  d'histoire 
naturellc  de  Maurice  (8  fc'vrier  i  8.j4i  p-  ^4"7o)i  V-'hirilyse  (/'uh  travail 
de  M.  Eugene  de  Froberville  sur  les  laiu/ucs  et  les  race?  de  V .Ifriijur 
orienlale. 


(  /js;?  ) 

Le  Mu-Ngindo  est  sensuel,  independant  de  caractfere, 
hospitaller,  ni  mediant,  ni  cruel.  Je  ne  le  crois  ni 
courageux,  ni  belliqueiix ;  car,  tandis  que  les  guerres 
generales  sont  rares  et  durent  peu,  les  querelles  et  les 
vengeances  furtives  enlre  tribus  n'ont  jamais  de  terme. 
Le  vol  parait  a  peu  prea  inconnu  chez  ce  peuple. 

Les  superstitions  les  plus  grossiferes  et  les  plus  ab- 
surdes  enchainent  la  volonte  des  Va-Ngindo  et  dirigent 
la  plupart  de  leurs  actions.  Une  s(^rie  interminable  de 
prohibitions,  d'augures  et  de  charmes  exerce  &ur  leur 
esprit  I'empire  le  plus  despolique. 

L'heredite  del'oncle  au  neveu  par  la  ligne  feminine, 
I'horreur  de  I'inceste  et  de  I'adullere,  le  devoir  de 
venger  un  parent  assassin^,  I'interdiclion  de  certains 
aliments  consid^res  comme  impurs,  sont  des  traits 
saillanls  de  leurs  coutumes  et  de  leurs  moeurs. 

La  connaissance  des  croyances,  des  traditions  reli- 
gieuses  et  des  coutumes  est  donnee  aux  jeunes  gens 
par  une  cspece  de  pretre  ou  de  savant,  nomme  a nhiago, 
durant  la  retraite  a  laquelle  on  soumet  les  garcons  a 
I'epoque  de  leur  circoncision,  et  les  fdles  au  moment 
de  leur  mariage.  Ces  instructions  constituent  loute 
I'education  morale  de  la  jeunesse.  Je  les  rapporte  dans 
les  pages  suivantes,  lelles  qu'elles  m'ont  6le  naivement 
racontees  par  un  vieux Mu-Ngindo,  aussi  remaiquable 
par  son  intarissable  memoire  que  par  I'etendue  de  son 
intelligence. 

«  C'cst  Mulungu  qui  a  I'ait  toute  chose,  et  il  est  dans 
»  tout  cc  qui  est  beau  et  bien.  II  demeure  dans  le 
»  ciel  au  soleil  levant,  oil  il  vit  au  milieu  des  bonnes 
))  ames  et  dos   bons  genies.   Jusqu'au  moment  oil  la 


(  Zi3/i  ) 

B  terre  ful  faito,  Mahoka  (1)  errait  dans  I'cspaoc  sans 
»  pouvoir  se  reposer.  — Au  commencement,  Miiliingu 
»  fut  louche  de  la  niisere  de  Mahoka,  il  lui  dil :  «  Vencz 
»  demeurer  chez  moi,  nous  Iravaillerons  ensemble  et 
B  nous  parlagerons  les  fruits  de  nos  travaux.  »  Mahbka 
»  y  consent.  Mulimgu  avail  sem6  un  champ  dc  rnillol. 
»  Lorsquc  les  epis  furunt  murs,  il  dil  a  Malibka  :  «  Fai- 
»  sons  la  recolle.  »  Mulimgu  cueillil  ks  grains,  qu'il 
»  jeta  sur  la  lerro ,  ou  ils  crurcnt  abondamment.  Ma- 
»  hoka  nc  recolta  que  la  paille  inutile.  —  Mulimgu  dit 
»  a  Mahoka  :  ((  Faisons  du  miel ;  cc  sera  bon  poui'  les 
))  hommes.  »  II  crea  I'abeille;  Mahoka  fil  la  gu6pe.  — 
»  Mulimgu  dit  a  Mahoka  :  «  Faisons  un  animal  qui 
»  garde  les  maisons  des  pauvres  gens  sans  famille.  »  II 
»  fit  le  chlcn  ;  Mahoka  fit  le  cliacal.  —  Mtdiujgu  voyanl 
»  alors  I'csprit  dc  contradiction  de  Mahoka,  le  chassa 
»  do  choz  lui  en  le  maudissant.  » 


((  Dans  cc  temps-la,  Mulimgu  parcourait  la  tcrrc  ct 
»  visilail  les  hommes.  Un  jour,  sept  hommes,  nommes 
»  Nasandc  ,  Kumb^nda  ,  Kungumuali  ,  Aimaniai"  , 
»  Nzovera,  Kimbimga,  ot  Kipcicro,  voyageaicnt  en  ca - 
»  ravane    (2).    Kipeiere   mourut    subitoment.    Tandis 


(i)  Ce  moi,  liicn  (iiriniliquant  iino  individualitc',  nsl  toujours  prc- 
tciite  sous  la  forme  du  pluriel  quand  il  s'appliqiic  ;iu  principe  ft  a 
rautenr  du  inal.  Li-hoka,  qui  est  la  forme  du  sin(julicr,  signifio  iiii 
demon  suhaltcrne,  iin  ctre  malfaisant  crce  ou  inspire  par  Ic  {;eiiic 
supreme  du  mal  Mahoka.  Le  mot  r|ui  si;;nific  serpent  differe  peu  dr 
ccux-ci  :  au  singulicr,  lihibka  ;  au  pluriel,  makibka.  Ce  rapproclic- 
ment  peul  se  faire  dans  presque  toules  les  l;ui(;ues  oslronej^res. 

(2)  Voici  la  signiHcatiou  de  ces  noms  :  Nasandcy  enclumc  jA'um- 


(  /i35  ) 

»  que  ses  compagnons  se  desolaient  a  I'ecart,  survicnt 
»  un  etranger  qui,  apprenanl  la  cause  de  leur  cha- 
»  grin,  leur  dit  de  se  consoler;  car  il  sait  le  secret  de 
»  rcssusciter  les  niorts.  S'approchant  du  cadavre  ,  il 
»  Ic  frotle  d'un  onguenl ,  et  Kipeiere  revient  a  la  vie. 
»  Pleins  d'adniiralion  pour  le  savanl  elranger,  les  sept 
»  voyageurs  I'invitent  a  faire  route  avec  eux  ;  il  y  con- 
»  sent ;  mais  il  marchc  silcncieusement  a  I'ecart.  On 
»  traversait  un  pays  aride  :  la  soif  va  faire  perir  les 
»  voyageurs  ;  ils  diiliberent  de  quel  cote  il  faut  aller 
»  chercher  une  source.  Ciiacun  a  un  avis  different;  ou 
»  se  dispute  ,  on  va  en  venir  aux  coups.  L'etranger 
»  s'approche  et  leur  dil  de  se  baisser :  unc  fonlaine 
wjaillit  a  leurs  piods.  —  On  continue  le  voyage.  Le 
))  lendemain  ,  nouveau  peril  :  la  faim  se  fait  seutir. 
»  L'etranger  vient  encore  sauver  les  voyageurs  :  il  leur 
»  niontre  au  detour  du  chemin  un  repas  excellent  sur 
»  lequel  les  affames  se  jettent  avec  avidite.  Apres  avoir 
»  bien  bu  ot  bien  mange  ,  les  sept  compagnons  refle- 
»  chissent  a  la  puissance  de  I'honinie  qui  les  accom- 
))  pagne  sans  se  meler  a  eux.  —  II  va  nous  r^duire  en 
»  esclavage  ,  disent-ils  ;  il  faut  le  tuer  !  —  Kinbunga 
»  sc  charge  d'execuler  le  crime.  11  se  place  Iraitreuse- 
»  mcnt  derri^re  l'etranger,  et  lui  enfonce  sa  lance 
))  dans  le  dos.  La  viclime  pousse  un  soupir,  leve  les 
»  bras  et  s'envole  vers  le  ciel :  c'etait  Mulungu.  Saisis 
))  d'effroi,  les  meurlriers  se  jeltcnl  la  face  contrc  torre 
))  et  invoquent  leur  pardon.  La  voix  de  Mulungu,  qui 
»  vibrc  comme  le  lonnerre,  apres  les  avoir  terrifies, 

brnda,  le  |)liisjemic  Jes  tils,  le  liciijarnin  ile  la  fatnille;  Kiiiinumunli, 
nom  il'une  liacie  odoriferante;  Aimanuii",  lierbe;  A'^r/idi/ciYi,  clanieuij  ; 
Kinbunga,  Ic  vent;  Kipeiere,  iioni  d'une  des  especes  de  rassades. 


(  A3(i  ) 

»  pardonuo  a  six  d'entre  eux  :  le  seplieme,  Kiiibiinga, 
»  ineurtfrapp^  par  la  foudre.  Son  aine  devint  Ic  vent; 
»  pour  expier  son  crime ,  il  parcourt  la  plaine ,  les 
))  montagnes  ct  les  eaux,  c.l  nc  Irouve  jamais  do  repos. 
»  — Depuis  ce  lemps,  les  liommes  no  voienl  plus  Mu- 
))  liingu  parini  eux.  Mulungu  (^coute  encore  leurs 
»  prieres,  fail  murir  Icuis  rdcoltes  et  los  protege  contre 
»  la  malice  de  Malioka;  mais  il  nc  se  hasnrde  plus  au 
»  milieu  de  celle  race  ingrate  et  perverse.  » 


«  Les  ames  des  liommes  bons  {milhn^n;  au  singulier, 
»  mhng/i)  vont  dans  Ic  ciul,  a  I'oricnt,  ou  est  la  demeure 
»  de  Muiiingu.  Les  ames  dos  meclianls  deviennent  des 
»  Milioka,  ct  rcstent  sur  la  terre  oii,  lantot  ils  prennent 
»  la  forme  d'animaux  laids  ou  nialfaisants  ;  tantot,  in- 
»  visibles  ,  ils  soulevent  des  tourbillons  de  poussiere, 
»  conduisent  les  nuees  de  sauterellcs  ddvastatrices  , 
«  ecartent  de  I'horizon  les  nuages  charges  de  pluie , 
»  entrent  dans  le  corps  des  fous  et  des  malades ,  cas- 
»  sent  les  ustensiles  de  menage  ,  president  enfin  a  lout 
»  cc  qui  est  mauvais,  laid  ou  bele.  Si  une  femrae  ac- 
»  couclie  de  deux  jiimeaux  ou  d'un  enfant  contrefait, 
»  c'esl  un  liiioka  qui  I'a  voulu  ;  si  die  est  toule  sa  vie 
»  slerllc ,  c'est  encore  Foeuvrc  du  malin  :  Dieu  I'avait 
»  faite  pour  (lu'elle  consul;  Mnlioka  lui  a  ilonne  des 
»  enlrailles  d'liomme.  Si  votre  pied  lieurte  une  pierre 
»  ou  une  racine  d'arbrc,  c'est  (ju'un  lilioka  s'y  est 
»  blolti  ilessous ;  si  vous  vous  ctranglez  on  mangeant, 
»  c'est  (|u'uM  lilioka  se  met  on  travers  dans  votre 
»  gorge.  II  est  dilliclle  do  so  preserver  des  male/ices 
»)  des  milioka.  La  stricte  observance  des  couluiues 
»  nalionales  peul  jusqu'a  un  certain  point  meltre  a 


(  A37  ) 
»  I'abri  des  grands  niallieurs  t'omenles  par  ces  m6- 
))  chants  esprits  ;  mais  on  est,  ijiiol  que  Ton  fasse,  lou- 
))  jours  expos6  a  leurs  espiegleries.  Les  mihokas  sont 
»  inalheuroux ;  ils  n'ont  d'autre  abri  que  le  feuillago 
»  agite  des  arbres ,  deux  excepl»^s:  le  niiinhoro  et  le 
»  nhekera,  qui  sont  consacres  a  Muliingu.  » 


Le  culte  des  Va-Ngindo  parait  se  reduire  a  deux 
actes  d'invocatlon  augurale. 

Le  premier,  qui  s'appelle  kneiula  kti-v}kirn  rnbbpe/iii, 
c'esl-a-dire  aller  disposer  la  farine;  ou  ku-popeira  mu- 
liingu, c'est-a-dire,  litleralement,  enfariner  Midungu, 
consiste  a  broyer  avec  des  pri^caulions  partlculieres 
de  proprete  une  certaine  quanllte  de  millet,  d'ul^hi , 
ou  de  rizj  a  verser  la  farine  qu'on  en  oblient  dans  un 
petit  panier  plat  consacr^  a  cet  usage  [kiheneko  tsa 
mbbpei],  de  fagon  a  ce  qu'elle  forme  un  cone  aigu,  et 
a  la  deposer  Ic  soir  au  pied  et  a  I'orienl  d'un  mimhoro 
ou  d'un  nhekera  en  disant:  wMulungu,  eh!  si  vous  ne 
voulez  pas  que  j'enlreprenne  telle  chose,  faites-le-moi 
savoir  en  eparpillanl  cette  farine,  et  j'obeirai  a  voire 
volonle.  »  Le  lendemain,  on  visile  le  depot  de  farine, 
el,  d'apres  cet  examen  ,  on  execute  le  projet  qu'on  a 
forme  ou  Ton  y  renonce. —  Cel  acte  se  repete  a  chaque 
circonstance  que  le  MuNgindo  consid^re  comme  im- 
portante  dans  sa  vie,  telle  que  la  chasse  a  I'clephant 
el  au  buille ,  la  plantation  ct  la  recolte  du  millet,  de 
I'ulehi  et  du  riz,  les  voyages  lointains,  etc. 

Le  second  acte  [uglnibe  un  iiln,  c'est-a-dire  I'arak  ou 
tafia  de  la  pluie)  a  pour  objot  de  conjurer  I'inlluence 
funeste  de  Mahoka ,  lorsqu'clle  se  manifesle  par  des 


(  /i38  ) 

sechercsses  deslruclivcs  de  la  gorinination  ot  de  la 
vegelalion  dos  grains.  Ce  sont  Ics  chefs  ct  Ics  vicillards 
qui  rondionnent  dans  celte  ceronionie.  lis  sc  rendenl 
en  procession  a  la  riviere  voisine  en  tenant  dans  leurs 
mains  des  vases  remplis  d'arak,  et  en  chantant  les  pa- 
roles suivantes  : 

Miiti-hiim  v(jiituse! 
Juoide  viiha  mucjiindal 

c'est-a-dirc  :  Vous  enlendez  que  nous  pleurons  !  Se- 
cheresse,  sorlez  des  campagnes! 

Arrives  au  bord  de  la  riviere  ,  les  chefs  et  les  vicil- 
lards se  depouillent  de  leurs  vetemenls ,  puis  ils  des- 
cendenl  dans  I'eau,  et  y  versenl  I'arak  en  criant  et  en 
chantant  jusqu'a  ce  que  la  pluie  tombc,  ce  (jiii  a  lou- 
jours  lieu,  diseut  les  Va-Ngindo  ,  si  la  ceremonie  est 
faite  conformeraenl  aux  coutunies  antiques.  L'ondee 
oblenue ,  la  |)rocession  revicnl  au  luuneau  en  chan- 
tant surle  meme  air  : 

Tu  tiuliio  nupiri  (juitu! 

c'esl-a-dire  :  Nous  revenons  avec  noire  conlcnlemenl! 


III. 

Gouverncincnt  ties  tiibus  nc'inilu.  —  l>e  Tsinnicne,  on  c!u;f,  ci  I'as- 
scniblec  puLlique.  —  Repression  des  ciinies  cl  delits.  —  l.';ulnl- 
teie  chez  les  Va-Ngindi).  —  \l Aliilltm,  on  avocal  nit'diatenr.  — 
Son  intervention  oonciliante. —  Details  sni-  ie  (linido-lulnuMUi  on 
vendetta  ties  Va-iNgindo. 


Les  Va-Ngindo  sont  divis^s  en  tribus  trfes-peu  nom- 
breuses,  vivant  sous  I'autoril^  prt^caire  de  petits  chefs 


(  /i39  ) 

[tsimuene an khimnene)  iiulependaiitslcs  unsdes  auties, 
et  s'alliant  raremenl  cnlrc  eux,  par  suite  d'anciennes 
lioslilites.  La  forme  originairement  patriarcale  de  leur 
gOLiverneinent  a  perdu  presque  entieremcnt  ce  carac- 
tere  par  I'introduction  d'nn  element  eminemment  re- 
pul)licain  :  la  participation  de  tons  les  membres  de  la 
communaut6  a  la  discussion  des  projets  concus  par  le 
tsimu^ne.  Ce  chef  est  her^ditaire  par  primogeniture 
dans  la  ligne  ft^minine  collalt^rale,  c'esl-a-dire  qu'il 
succ6de  au  fri^re  de  sa  mere.  Bien  que  g^ncralement 
respected,  sos  privilt^ges  sont  presque  nuls,  et  son  pou- 
voir  est  borne  par  I'esprit  d'independance  individuclle 
qui  est  tr^s-prononce  chez  ces  tribus,  el  qui  les  poussc 
souvent  a  se  fraclionner  en  nouvcUes  conimunaules, 
sans  liens  ct  sans  force,  des  qu'il  surgit  parmi  elles  un 
germe  de  meconlentement ,  soil  contre  le  chef,  soil 
cntre  parliculiers. 

Le  tsimu^ne  est  charge  du  jugcment  el  de  la  repres- 
sion des  crimes  ct  debts  ordinaires  ;  mais  le  plus  sou- 
vent  il  reunit  pour  eel  objet  une  assemblee  ou  toul  le 
monde  a  le  droit  de  donner  son  avis.  Les  peines 
infligees  suivant  la  gravite  des  cas  sont  I'amende.  les 
coups,  la  mise  aux  ceps  et  la  reprimande  publique  ; 
mais  le  condamne  peut  toujours  rachcter  la  peine  au 
moyen  d'une  indemnite  envers  la  partie  plaignante. 
Le  meurtre  est  puni  de  morl,  a  moins  f[ue  les  proches 
parents  de  la  victime  ne  prefferent  accepter  le  prix  du 
sang ,  ou  envoyer  vendre  le  coupable  comme  esclave 
surla  cote.  La  femme  surprise  en  flagrant  delit  d'adul- 
lere  est  quelquefois  mise  a  mort  par  son  mari ;  mais 
generalementcelui-ci  se  contcnte  de  la  vendre  comme 
esclave  avec  son  dernier  enfant  s'il  est  encore  a  la 


(  ii/iO  ) 
manielle  ;  son  complice  n'oluient  jamais  grace  de  la 
vie.  Les  Va-Ngindo  considerent  radullere  coinme  le 
plus  grave  des  attentats ;  ils  le  poursuivcnl  avec  uu 
acharnement  ellV^ne  ,  et  neaninoins  rien  n'cst  plus 
frequent  cliez  eux. 

Un  personnage  r^ellement  influent  dans  la  societe 
Dgindo  est  Vakitara,  esp6ce  d'avocat  m^diateur  qui  se 
charge  d'apalser  les  querelles  j)riv6es  ou  publiques. 
L'akilaia  n'est  pas  un  fonctionnaiie,  bien  que  son  in- 
tervention ait  loujours  une  gravite  officielle.  C'est  un 
simple  particulier  que  son  experience,  son  eloquence, 
son  caraclere  serieux  et  conciliant  recomniandent  au- 
pres  de  ceux  qui  out  des  reclamations  a  exercer.  — 
Lorsque  I'akitara  am^nc  une  reconciliation  enlie  les 
deux  parlies ,  elle  s'opihc  de  la   manifere  suivante ,  ce 
qui  s'appellc  deina  liii^o/ii  (aclloii  de  couper  le  cou)  : 
I'un   des  adversaires   tient  les  palles,    I'aulre  la  tete 
d'une  poule  ;   I'akitara  ,  place  entro  eux,  apres  avoir 
prononce  quelques  paroles  qui  constalent  le  rappro- 
cliemenl  des  parties,  coupe  le  cou  de  la  poule  ;  puis  la 
bete,  sur-lc-cbamp  mise  au  pot,  est  servie  aux  deux 
adversaires  dans  un  repas  qui  scelle  leur  raccommo- 
dement. 

Si  les  elTorts  du  mediateur  ont  (ichoue  devanl  Ten- 
telement  des  parlies,  il  se  retire,  el  laisse  la  vengeance 
de  I'olTense  s'exercer  par  le  meurtre  furlif,  soit  de  son 
ennemi,  soit  d'un  membre  de  la  tribu  dont  celui-ci  fail 
partie ,  soit  enfin  d'une  personne  elrangere  a  cette 
Iribu,  ce  qui  donne  naissancc  a  d'intcrminablcs  re- 
prt^sailles  de  tribu  h.  tribu. 

Quelques  details  sent  n^cessaires  a  I'explicalion  dc 
cette  singuliei'e  cspece  dc  vendetta  [guii((o-luhnlinn), 


(  hh\  ) 
guerre  furtive  a  la  i'acon  cles  voleurs)  (lonl  I'absurdile 
passe  toulc  croyance.  —  Je  prends  coniinc  exemplc 
un  cas  de  vol.  —  Lin  hornme  onlcvo  uii  calui  dans  un 
hamcau  voisin.  Le  proprielaire,  apies  avoir  pris  quel- 
ques  informations  ,  cnvoic  I'akitara  deniander  au  ra- 
visseur :  1°  la  restitution  de  I'aniinal  vole  ;  2°  une  forte 
indemnity.  Si  celui-ci  refuse  de  satisfaire  a  ces  de- 
mandes,  I'akilara  declare  la  tribu  solidaiie  du  crime, 
et  tache  d'obtenir  d'ellc  ce  que  !c  voleur  refuse  d'ac- 
cordor.  L'assembleo  publiqiie,  r^unie  par  le  tsimuene, 
d^libere  alors  et  se  prononce  :  ou  elle  force  le  coupable 
a  rendre  le  cabri  el  a  payer  rindemnil6,  ou  elle  livre 
le  voleur  au  vole  qui  le  vend  a  son  profit  aux  mar- 
chands  d'esclaves;  on,  eniiu,  elle  refuse  absolument 
d'entrer  en  accommodement,  Dans  ce  dernier  cas,  le 
vole  s'ettorce  de  lier  sa  propre  famille  a  sa  cause  ;  s'il 
y  reussit,  la  guerre  est  declar^e  entre  les  deux  tribus, 
et  ne  cesse  qu'apres  la  dispersion  de  I'une  ou  de 
I'autre.  Si  ToUcnse  ne  parvient  pas  a  persuader  a  sa 
famille  de  prendre  fait  el  cause  pour  lui,  il  va  roder 
autour  du  hameau  de  son  ennemi,  et  se  fail  justice  en 
tuant  le  voleur  ou  un  de  ses  parents  ;  mais  le  plus  sou- 
venl  toule  la  Iribu  est  sur  ses  gardes  depuis  la  ddsclara- 
tion  faite  par  I'akitara  ,  et  personne  ne  se  laisse  sur- 
prendre.  Commc  il  faut  ccpendanl  que  sa  vengeance 
s'exerce,  I'oCfense,  pour  n'etre  pas  la  risee  de  sa  tribu, 
se  dirige  alors  furtivement  vers  un  autre  liameau,  et 
perce  de  sa  fleche  le  premier  babilant  qu  il  rencontre 
a  I'ecart;  puis,  en  se  relirant,  il  laisse  tomber  sur  le 
chemin  des  rameaux  et  des  feuilles  qui  permettront  a 
la  famille  de  I'assassine  de  suivre  les  traces  du  meur- 
trier.  «  J'ai  tue  voire  frerc ,  dira  cclui-ci  a  Takitara 
in.   M,\i.   2.  30 


{  hill  ) 

envoj(i  pour  demaiidcr  reparalion  du   criine;  j'ai  lii6 
voire  fr^re,  parce  que  celui  qui  m'avail  offense  s'e.sl  d6- 
loljeania  vengeance.  Si  vous  i\\ei  ducceur,  allezniellro 
a  uiort  comme  il  Ic  tnerilc  celui  que  j'ai  poursuivi  en 
vain.  »  Et  il  donne  al'akitara  une  pioclic  pctur  indiquer 
qu'il  Taut  aplanir  le  cheuiin  (jui  conduil  au  village  de 
I'offenseur.  La  Iribu  a  laquelle  appmlienl   la  viclimo 
ne  se  conlenle  pas,   comme  on   le   jirevoit,   dc  cetle 
raison  syniliolique ;   elle   exige  la  t6le  du   nieurlrier, 
A,  ne  I'ohlenant  pas,   clle  agit  comrae  il   I'a   fait:  le 
plus  proche  parent  de  I'assassine  se  charge  do  pour- 
suivre  et  de  luer  soit  son  ennemi,  soil  un  innocent  de 
quclque  autre  Iribu.  Dcs  hameaux  eloigp.es  sc  voicnl 
ainsi  engage  s   par  le  nicurlre   inopine  dun   de  lours 
habitants  dans  une  querelle  donl  ils  ignorent  souvent 
le  prc'XDicr  luolil'.  —  Si    i'assassine    ne  laissc  que  d(> 
jeunes  neveux,  leur  mere  rappelle  do  toinps  en  temps 
a  I'aind  d'cnlre  eux  qu'il  aura  un  jour  a  lavor  le  sang 
de  leur  oncK-,  et  c'est  un  devoir  (ju'il  accomplil   des 
qu'il  alleinl   I'age   de   raison.  II  cherche  alors  a  ren- 
contrer  le  meurtrier,  et  si  celui-ci  dchappe  a  sa  ven- 
geance, il  ajoule  un  nouvel  anneau  a  la  cliaine  de  ces 
crimes  ordonnes  par  une  falale  coulume,  en  I'rappani 
une  viclime   elrang^re    au    demeld    originaire.    C'est 
ainsi  que  loule  si;curite  est  bannie  de  la  icrre  des  Va- 
Mgindo.  Souvenl  un  grand  nombre  d'annees  sc  passe  ; 
I'auleur  de  rotlense  premiere  a  oublie  sa  faute  ;  il 
ignore  menie  qu'une  foule  d'innocenls  Font  pay6c  de 
leur  vie,   lorsqu'une    fl^ciie   decochde   par  une  main 
inconnue  vienl  I'alleindre  a  son  lour.  —  I'arl'ois,  mais 
cela  est  rare,  grace  aux  efforts  des   tsimuene  et  d'aki- 
lara  habilcs,  plusieurs  tribus  decimees  par  le  gondo- 


(  /i/i3  ) 

luhiiimu  s'unissent  pour  chalier  la  tribu  a  loquellc 
appartient  le  premier  auleur  tie  ces  sanglanles  iiosti- 
lites.  La  paix  se  conclut  alors  ;  niais  la  tranquillite 
dont  le  pays  jouit  n'est  jamais  complete  ni  assur^e. 
La  mefiance  avec  laquelle  chaque  tribu  s'isole  de  ses 
voisins  el  Ics  observe  monire  que  les  ressenliments 
vivent  toujours  clans  les  cceurs,  et  n'attendent  qu'une 
occasion  pour  ^clater  de  nouveau. 

La  vendetta  ngindo  conserve,  dans  un  grand  nombre 
d'autres  cas ,  son  caractere  primilif  d'acte  expiatoire 
du  sang  repandu.  Par  exemple,  lorsqu'un  voyageur  a 
peri  par  accident  en  traversant  le  territoire  d'une  tribu 
^trang^re,  lorsqu'un  homme  a  6t^  tu6  en  faisant  la 
guerre  au  service  d'un  tsimuene  etranger,  ses  nevcux 
sonl  censes  ignorer  comment  les  fails  se  sont  passes ; 
un  d'entre  eux  est  lenu  de  venger  leur  oncle  en  luant 
ou  le  tsimufene  ou  un  membre  de  la  Iribu  au  milieu 
de  laquelle  la  mort  a  eu  lieu.  A  d^faut  de  ceux-ci,  il 
devra  sacrifier  un  homme  apparlenanl  a  un?  autre 
tribu. 

( La  suite  a  un  prochain  numero.) 


(  hlili  ) 


VOYAGES  ADTOUR  DU  MONDE 
NAVIGATELRS  RUSSES. 

NOTICE 
FAH  M.  LE  PRINCE  EMMANUEL  GAIJTZIN, 

CorrespoiiUuiil  eli';ingei  tie  lu  SolIuIc  du  g>:ogrj|>liif  (Ij. 


PREMIERE  PARTIE  (1803-1824). 

KRUSENSTEnN   ET    MSIANSKY    (1803-1806). 

AuU'cfois  loules  Ics  couiniunications  cnlre  les  colo- 
nies russes  do  I'Ameriquo  el  la  luelropole  avaient  lieu 
par  la  voio  d'Okliolsk,  en  traversant  la  Siberic,  ce  qui 
enlralnait  do  grands  dclais  et  dcs  diiTicultos  sans 
nombrc.  Frappo  de  ces  inconv(inicnls,  M.  dc  Krusen- 
stcrn  proposa  d'approvisionner  a  I'avenir  ces  elablis- 
semcnls  au  nioyen  de  navires  partant  du  port  de 
Kronslwl.  Ce  projct  ayant  ete  adopt(!i,  on  decida  d'ex- 
pedier  celte  premiere  fois,  a  litre  d'essai,  le  vaisseau 
Nadejda,  sous  le  commandement  de  M.  de  Krusen- 
slern  hii-menie,  et  le  vaisseau  Neva,  sous  celui  de 
M.  Lisiansky.  Oulre  Ic  ravilailloniont  des  colonies  de 
rAni6rique,  ces  navires  devaient  transporter  le  per- 
sonnel dc  I'ambassade,  qui  etail  sur  le  point  dc  parlir 
pour  le  Japon,  dans  le  dessein  d'y  nouer  des  rappoi'ts 
conimerciaux. 

Le  depart  des  deux  balimenls  eul  lieu  deKronslad,  Ic 
26  juin  1803.  Apres  avoir  relache  ensemble  k  Copen- 
hague,  ils  se  separ^rent,  au  sorlir  du  Callegat,  pour 

(i)  CeUe  notice  esl  uii  abreye  du  travail  sur  la  iiiatii'iu  (|ui  a  ule 
iiiiblie  recemtnent  par  Ics  soiiis  de  ratniiaule  de  Sainl-l'etersbour{j. 


(  /iZio   ) 

nc  se  rejoiiuli'c  (juc  pros  des  coles  d'Anglotorre.  M.  le 
chambellan  ResanofT,  charge  de  se  rendie  an  Japon  en 
qualile  d'ambassadeur,  profita  dc  la  rencontre  d'lin 
bailment  anglais  pour  gagner  dlreclement  Londres,  oii 
ses  instructions  I'appclaicnt,  tandis  que  MM.  de  Kru- 
senstern  et  Lisiansky  franchissaient  le  Pas-de-Calais, 
el  allaient  mouiller  dans  la  rade  de  Falmouth.  Le 
26  septembre,  M.  Rcsanofi"  arriva  de  Londres,  et  s'em- 
barcjua  aussilot  siir  la  Nadejda.  Le  8  octobre  ,  on  re- 
lacha  a  Santa-Cruz.  Le  25  du  meme  mois,  apros  avoir 
pass6  la  ligno ,  les  deux  l)atiments  se  rapprocherent 
des  cotes  de  TAmerique  meridionale ,  pour  continuer 
ales  suivre ,  dans  le  but  d'en  gagner  I'exlremlte.  Le 
1"  ddcembre ,  ils  se  trouverenl  a  la  hauteur  du  cap 
Frio;  puis  ils  all^rent  jeler  I'ancre  pres  tie  I'ile  Sainte- 
Catherine. 

Le  cap  Horn  ful  doubk^  sans  grandes  difficulles,  le 
3  Janvier  i80Z|.  Bienlol  apr^s,   de  violenls  coups  do 
vent  s^par^rent  les  deux  batiments.  Le  2/i  avril,  M.  de 
Krusenstern  alteignit  le  port  d'Anna-Maria,  dans  I'ile 
de  Nouka-Hiva,  oii  il  ne  tarda  pas  a  etre  rejoint  par 
la  Neva.  Le  commandant  s'y  livra  a  un  grand  nombre 
d'operatlons  de  relevement,  et  fit  la  decouverte  d'une 
anse,  a  laquellc  il  donna  le  nom  flc  bale  TchitchagofT. 
De  Nouka-Hiva,  les  doux  navircs  firent  route,  do  con- 
serve,  vers  les  iles  Sandwich.  A  parlir  de  ces  ilcs,  ou 
Ton  fit  relache,  M.  Lisiansky  se  s^para  de  M,  de  Kru- 
senstern :  le  premier  fit  route  directenicnt  vers  I'ile 
Kadiak  (Amerique  russe),  et  le  second,  vers  le  Kamt- 
schatka. 

En  parlanl  dcs  iles  Sandwich  ,  M.  dc  Krusenstern 
tint  le  cap  enlre  les  routes  qu'avaient  suivies  tour  a  lour 


(  lihd  ) 

Cook  et  Clarke.  Arnvci  au  36°  parailole,  il  eiilrej)rit 
de  recherclier  Ja  pretondue  Irrro  indiquee  a  I'csl  tlu 
Japon  sur  d'unciennes  carles  espagnolcs;  niais  co  lul 
en  vain  qu'il  affronla  dans  ce  bul  des  brumes  epaisses; 
ses  reclitrches  n'aboulircnl  a  aucun  r^suitat.  ArrivOe 
au  Kamtschatka  ,  /a  Nndejila  dul  siibir  un  radoub  g6- 
n^ral  dans  Ic  port  de  Pelropavlovsky.  Cclle  operation 
achevee ,  le  batiment  reprit  la  incr  le  27  ;iout,  el  se 
dirigea  vers  le  Japon.  Des  bourrasques  continucllos 
Taccompagnerenl  jus(|u'au  3  sej)tembre ;  le  20  du 
rnfime  mois,  il  essuya  une  tempele  violentc  a  proxi- 
mity des  coles  japonaises.  On  sail  d'ailleurs  que  I'ani- 
bassade  ne  fut  pas  accueillie  par  le  gouvernemcnt  ja- 
ponais,  et  qu'apr^s  une  allenle  de  cinq  inois,  force  lul 
a  M.  Pn^sanoff  de  se  rembarquor,  pour  s'eloigner  d6fi- 
nilivemenl  des  cotes  inbospilalieres  du  Japon. 

M.  tie  Krusenslern  quilta  le  port  de  Nangasaki  lo 
5  avril,  et,  traversanl  le  canal  de  Coree ,  il  deboucha 
dans  la  raer  du  Japon  ;  son  intention  6tait  ti'oxplorcr 
ce  bassin.  Le  28avril,  on  niit  a  Tancie  sur  la  cole  nord 
de  I'ile  Malsmai,  dans  une  anse  nouvellonient  decou- 
vcrle,  qui  rcQut  le  noni  de  bale  Rouniiantsofl".  Chemin 
faisanl,  la  position  de  plusieurs  lies  avail  ete  soigneu- 
sement  dotermin^e.  Plus  loin,  la  Nndejda  penetra  dans 
le  d^troit  de  La  Perousc ;  mais  de  grandes  masses  do 
glace  que  Ton  rencontra  le  15  mai,  dans  le  voisinage 
du  cap  Patience,  forc^rent  d'abandonner  Ics  rcclior- 
ches  couimencees ,  pour  faire  route  vers  le  Kamt- 
scbalka.  Tandis  qu'il  longeait  la  clialnc  des  Kouriles, 
M.  tic  Krusenslern  decouvril,  le  18  mai,  un  gionpe  de 
petites  lies.  Ce  no  fut  pas  sans  de  grandes  difliculbis 
et  beaucoup  de  perils  qu'il  vint  a  bout  de  s'ouvrir  un 


(  hlxi  ) 

passage  dans  I'Ocean.  II  y  parvint  cependant,  et  qualre 
jours  a])r^s  il  mil  de  nouveau  a  Tancre  dans  le  port  de 
Petropavlovsky.  M.  Rosanoff  y  doscendit  a  terre.  Geci 
fail,  la  Nadcjda  remit  on  uier  pour  tenter  une  excur- 
sion a  reinboucliure  de  TAmour  ;  le  7  juiilel,  le  bati- 
ment  doubla  le  cap  Patience ,  et  s'avanga  ensuite  vers 
I'embouchure  de  la  riviere.  En  cc  dernier  endroit, 
M.  Krusenstern  eut  soin,  entre  autres  choses,  de  veri- 
fier les  observations  failes  par  La  Perouse  ;  apr^s  quoi, 
il  lui  faJlut  retourner  au  Kanitschatka  pour  la  derniere 
fois. 

Le  moment  de  songer  a  revenir  en  Europe  elail 
arriv6;  mais,  avanl  d'entreprendre  une  longue  naviga- 
tion, il  etail  necessaire  de  I'aire  au  batiment  plusieurs 
reparations  urgentes.  Ceci  entraina  des  delais,  de  ma- 
niere  que  le  depart  ne  put  avoir  lieu  que  le  23  sep- 
tembre.  M.  de  Krusenstern  parlit  pour  Canton ,  avec 
Fesp^rance  d'y  etre  rejoinl  par  la  Neva.  Le  25  octobre, 
la  mousson  se  fit  sentir  dans  le  voisinage  du  tropique 
du  Cancel- ,  ce  qui  permit  d'avancer  rapidemenl  :  a  sa 
laveur,  le  batiment  p^netra  dans  la  mer  de  la  Chine  le 
6  novembre,  et,  deux  jours  apres  ,  il  atterrit  a  Macao. 
Le  27  du  mois,  la  Neva  rejoignit,  charg6e  de  pelle- 
teries.  Le  depart  de  Wampoa  eut  lieu  le  29  Janvier.  Le£ 
deux  navires  repasserent  I'equateur  pour  la  troisi^me 
fois  le  12  fevrier.  Le  21,  ils  entr^rent  dans  I'ocean  In- 
dien,  et  se  dirigerent  vers  le  cap  de  Bonne-Esp^rance. 
Le  15  mars,  ils  pass^rent  le  tropique  du  Gapricorne. 
Bienlot  un  coup  de  vent  les  separa,  ce  qui  fit  que  M.  de 
Krusenstern  arriva  seal  a  SainleHdilfene  le  21  avril.  N'y 
ayant  pas  x'encontre  la  Neva,  il  renonga  a  I'atlendre, 
et  fit  voile  vers  I'Europe.  Le  10  mai,  il  traversa  pour  la 


(  liliS  ) 
qualriemo  fois  I'equaleur.  A  jiarlir  de  cc  poinl,  nous 
nc  sulvrons  plus  le  navigateur  dans  sa  course,  et  nous 
nous  bornerons  a  dire  qu'il  effeclua  son  relour  definilif 
dans  Ic  port  de  Kronslad  le  7  aoill  1806. 

Retournons  a  M.  Lisiansky,  qui,  comme  on  I'a  vu  , 
s'6lait  s6pare  de  M.  de  Rrusenslern  aux  iles  Sandwich, 
pour  se  rendre  dans  TAmerique  russe.  La  iVewi  ef- 
fcctua  heureusement  cette  traversec  ,  et  rnit  a  I'ancre, 
le  1"  juillet  180/1,  dans  la  rade  de  Saint-Paul,  de  I'ile 
de  Kadiak.  Le  commandant  du  balinient  ayant  ajipris 
que  les  Koloches  avaient  devaste  le  village  de  Novuia- 
Arkhanghelsk  (Nouvelle-Arkhangel),  et  que  le  gouver- 
neur,  M.  Baranoff,  etait  assieg6  par  eux  dans  I'ilo  de 
Sitka,  fit  aussitot  ses  dispositions  pour  lui  porter  se- 
cours.  Grace  a  cette  cooperation,  le  fort  fut  degag^,  et 
des  otages  furent  pris  parmi  les  Koloches.  L'afTaire 
ainsi  reglee,  /a  l\ei>a  retourna  a  Kadiak,  ou  le  batiment 
fut  de  rctour  le  16  novcmbrc.  M.  Lisiansky,  qui  devait 
embarqucr  les  pcUetcries  de  la  Compagnie,  se  Irouva 
dans  la  nc^cessitd  de  passer  Thiver  sur  place ;  il  Ic  mit 
a  profit  pour  cxecuter  un  grand  nonibre  d'operations 
dc  rel^venienl. 

La  Nei'a  quitta  lo  golfe  de  Silka  le  20  aout  1805, 
pour  gagner  Canton  ,  y  rclrouvcr  (si  fairo  sc  pouvait) 
M.  de  Kt  uscnslern  ,  ot  puis  cflectucr  son  relour  en 
Europe.  M.  Lisiansky  cut  soin  pendant  cette  navigation 
de  passer  par  I'endroit  ou,  en  1 786,  lo  capitaine  Porllak 
avail  aper^u  des  indices  de  lerre.  Toutefois  il  ne  rcn- 
conU-a  rien  dans  I'endroit  design^ ,  ct  des  venis  va- 
riables continuant  a  conlrariir  la  marchc  du  naviro , 
il  sc  decida  aj'airc  route  vers  les  Mariannes.  Le  3  oc- 
tobrc ,  le  buliaienl   touiba  sur  un   rccif  dc  corail,  a 


(  hh9  ) 

proximite  d'unc  tcire  basse,  a  laquolle  le  comman- 
dant donna  son  nom.  II  fallut  beaucoup  d'efforts  pour 
venir  a  boul  de  se  dtlsgager,  a  ce  point  que  ce  fut  seu- 
lement  le  7  octobrc  que  Ton  put  remetlre  a  ]a  voile. 
L'ile  est  situee  par  26°  2'  48"  de  latitude  nord,  et  193» 
42'  30"  de  longitude  a  I'ouest  de  Greenwich  (163°  57'  6" 
est  de  Paris).  Quatre  jours  apres,  M.  Lisiansky  eut  la 
bonne  fortune  de  decouvrir  une  autre  terre,  bordee  de 
r^cifs,  a  laquelle  il  donna  le  nom  d'ile  Krusenstern  : 
celle-ci  est  situee  par  22°  15'  nord  de  latitude,  et  175" 
37'  de  longitude  ouest  (177°  57'  de  Paris). 

En  se  rendant  des  Mariannes  a  Formose  ,  /a  Nei>a 
essuya  un  ouragan  terrible.  Au  plus  fort  de  ce  tvphon, 
le  batiment  penchait  a  un  tel  point,  que  la  mer  en  la- 
vait  le  pont  jusqu'au  pied  des  mats.  Beaucoup  de  pel- 
leteries  furent  avariees  pendant  cetle  lempete,  et  la 
Neun  fut  gra'vement  endommag^e.  Le  16  novemhre, 
M.  Lisiansky  p^netra  dans  la  mer  de  la  Chine,  ou  il  se 
I'eunit,  le  26  du  mois,  a  M.  de  Krusenstern. 

Nous  Savons  que,  de  Canton,  /a  Nch'a  navigua  de  con- 
serve avec  la  Nade/da,  et  qu'un  coup  de  vent  les  separa 
le  3  avril  1806.  A  jiartir  de  ce  jour,  M.  Lisiansky  con- 
tinua  seul  sa  navigation,  qui  n'offrit  plus  d'incident 
remarquable.  Le  20  avril,  il  doubla  le  cap  de  Bonne- 
Esperance,  et  de  la  il  gagna  Portsmouth.  La  traversee 
de  Canlon  dans  ce  port  avail  ete  execulee  en  cent  qua- 
rante-deux  jours.  Enhn,  le  24juillet  de  I'annee  1806, 
il  ramena  son  navire  dans  le  port  de  Kronstad. 

Le  voyage  de  circumnavigation  de  MM.  de  Kru- 
senstern et  Lisiansky  a  ceci  de  remarqMal)lo ,  quo  ce 
fut  le  premier  voyage  aulour  du  monde  accompli  par 
des  marins  russes. 


(  bbO  ) 

GAGEMEISTER    (1806-1807). 

A  peine  le  vaisseau  /a  Nei>n  etait-il  revcnu  a  Kronstad, 
dc  retoiirde  la  campagno  que  nous  veiions  d'csquisscr, 
que  I'ordre  fut  donn^  de  Ic  motlre  en  6tat  de  reprendrc 
la  aicr;  M.  Gageineisler,  lioutonanl  do  marine,  fut  do- 
signo  pour  Ic  coininandci.  II  s'aglssail  dc  Iransporlcr 
un  chargeuient  d'oLjels  necessaiies  aux  ctahlissoinL-iils 
russes  dc  rAnidrique. 

Tous  les  preparatifs  d'arniement  olant  aclioves  ct 
le  chargemenl  mis  a  bord  ,  lo  navirc  mil  a  la  voile  le 
20  octobre  1806.  II  se  rendit  d'abord  a  Copenliague, 
oil  il  avail  a  prendre  clivers  apparaux  destines  aux  \nx- 
Uments  de  la  Compagnic.  Pour  eviter  la  lencontrc  dos 
croiseurs,  M.  Gagcmeisler  cut  soin  de  gouverner  do 
maniere  a  faire  le  tour  des  lies  Britanniques,  sans  p6- 
nelrer  dans  la  Manclic.  Ensuitc  il  mil  le  cap  a  Test, 
el  fit  route  vers  Ic  cap  de  Bonne -Esperanco,  qui  I'lit 
double  sans  difliculte.  De  la  il  oingla  vers  la  tcrre  de 
Van-I)i6mcn  ;  puis  il  s'approcba  dc  I'Auslralie,  ct  mil 
a  I'ancre  dans  Port-Jackson.  CVelail  le  premier  bcUi- 
ment  russe  qui  y  faisait  a|)parition. 

De  Port- Jackson  M.  Gagcmeisler  conlinua  sa  roule, 
traversa  I'^quateur  pour  la  seconde  I'ois  le  1"'  aoill,  ct 
mil  le  ca]i  sur  I'lle  Sitka.  Le  13  seplembre,  il  amenait 
son  baliment  dans  Ic  port  de  Novaia -Arkhangelsk 
(  Nouvelle-Arkliaiigel ) ,  ainsi  nomme  depuis  la  recon- 
struction dc  Iclablisscment,  a  la  suilc  des  depredations 
des  Koloches.  A[)rcs  avoir  d^barque  une  parlic  dc  son 
chargement ,  le  commandant  conduisit  la  iSeva  dans 
I'lle  de  Kadiak.  Elle  y  passa  I'liivcr,  cl  cc  ne  ful  que 
I'annee  suivante  qu'cllc  repril  la  mcr,  pour  rcvcnir  A 


(  451  ) 

Sitka.  Ensuite  elle  visila  les  iles  Sandwich,  etse  rendit 
a  Pelropavlovski-Porl.  Ici  se  tertnine  ce  que  nous  avions 
a  (liro  tie  celte  navigation.  M.  Gagcmeistcr  quilla  le 
batiment,  et  parlit,  pour  rclourner  a  P^tersbourg  par 
terre,  cu  travcrsant  Okhotsk  et  Irkoutsk.  Quant  a  la 
Aet'rt,elle  dcraeura  dans  Ics  niers  de  rAuaerique  russe, 
oil  clle  continua  a  naviguer  jusqu'enl813.  Cette  raeme 
annec,  la  I\ei^a,  qui  se  trouvait  alors  sous  le  comman- 
dcment  de  M.  le  lieutenant  de  marine  Padouchkine, 
donna,  par  une  erreur  d'estime,  sur  un  recif  voisin  de 
la  cote  nord-ouest  de  I'Amerique,  sous  le  67°  parallele, 
oil  ce  vaisseau  se  perdit. 

GOLOVNINE    (1807-1809). 

A  Fopoque  oil  il  s'etait  agi  d'exp^dier  le  vaisseau  /a 
Neva  au  Kamtschalka ,  sous  le  commandement  de 
M.  Gagemeisler,  on  avait  juge  a  propos  de  lui  adjoindre 
un  batinient  destine  a  I'escorter.  Le  sloop  de  guerre  la 
Diane  fut  dd^sign^  pour  ce  service,  avec  mission  d'ex6- 
cuter  dilTerents  relevemenls  geographiques  dans  les 
mers  de  I'Ami'riquc  russo.  M.  le  lieutenant  Golovnine, 
officier  tres-experimente,  recut  le  commandement  du 
sloop.  Cependant  la  Neva,  qui  avait  conserve  son  ar- 
mcment  depuis  son  retour,  put  etre  prete  bien  plus  lot 
qu'un  baliment  neuf  qu'il  s'agissait  de  disposer  con- 
venablemenl  pour  une  lougue  caaipagne  :  il  en  resulta 
que  la  Nih>a  parlit  la  premiere,  et  que  la  Diane  dut  se 
preparer  a  naviguer  separement. 

M.  Golovnine  mil  a  ia  voile  de  Kronstad  le  "25  juillet 
1807.  Lorsqu'il  entra  dans  le  Sund  ,  les  Anglais  assi6- 
gcaient  en  ce  moment  Copenhague.  Apres  une  courte 
relachc,  la  Diane  p6n6tra  dans  le  Kattegat,  pour  debou- 


(  A 52  ) 

clier  bientot  apies  clans  la  mer  d'Allemagnc.  Ici  le  sloop 
cssiiya  line  rude  icmpele;  toutefois  il  sen  lira  sans 
de  graves  avaries,  ct  put  arriver  a  Portsmouth  quarantc- 
trois  jours  apr^s  son  depart  de  Russia.  DifTerenls  objels 
destines  au  batinient,  qui  avaient  el6  comrnandes  a 
Londres,  tarderent  beaucouj)  a  arriver,  ce  qui  for(;a 
le  commandant  de  demeurer  a  Portsmouth  pendant 
pr^s  de  deux  mois.  Des  que  ces  objels  curcnt  etc 
erabarques,  /«  Diane  ]e\n  I'ancre ;  elle  fit  son  entree 
le  1"  novembre  dans  TAllanliquc.  D'abord  le  vent 
favorlsa  la  marclie  du  balimciit ;  mais  au  deia  du 
AS'  paralk'le,  ilcessa  d'etre  favorable.  Le  15  novembre, 
le  sloop  aborda  a  I'ile  Porto-Sanlo  ;  de  la  il  fit  route 
vers  I'ilo  San-Antonio.  Lo  20  novembre,  il  Iraversa 
I'equateur.  Desirants'assurer  de  I'existence  pretendue 
de  rile  de  I'Ascension,  M.  Golovnine  passa  lout  pr^s 
de  I'endroil  ou  elle  dtait  reputoe  cxister;  mais  il  ne  put 
la  voir.  De  ce  point,  il  conlinua  sa  route  vers  I'ile 
Sainte-Calliorine,  oii  il  aborda  pour  se  procurer  des 
vivres. 

Son  ravitaiilement  achcve ,  M.  Golovnine  quitta  I'ile 
le  19  Janvier,  et  lit  voile  vers  I'extremlte  sud  de  I'Ame- 
riquc.  Le  12  fcvrier,  il  coupa  le  meridien  du  cap  Horn  : 
tout  jiisque-la  semhlait  presager  une  hcureuse  fin  a 
son  voyage,  quand  lout  a  coup  des  vents  violents  s'd'lc- 
v6rent.  Pendant  jilus  de  quinze  jours  ,  il  lutta  inutile- 
menl  conlre  cux.  S'apercevant  endn  de  I'inutilitti  de 
ses  elTorls,  il  pril  le  parti  de  modifier  son  ilin^raire, 
ct,  virant  de  bord,  il  se  porta  du  cote  du  cap  de  Bonnc- 
Esporance.  Des  lompeles  contiiuielies  raccompagne- 
rent  dans  cdle  navigation  jiisqu'a  Tile  dc  Tristan- 
d'Acunha;  plus  loin,  le  temps  dcvint  moins  mauvais. 


(  /i53  ) 
II  en  r^sulta  qu'il  put  atteiiulre  le  cap  le  21  avril ;  le 
baliuient  y  niit  a  I'ancre  dans  Sinison-Bay.  L'objet  que 
se  proposait  M.  Golovnine  etalt  de  se  procurer  quel- 
ques  vivres  frais;  mais  au  lieu  des  secours  qu'il  esp6- 
rait,  ce  furent  des  conlrarietes  qu'il  rencontra  :  on  lui 
signifia  la  defense  de  qiiilter  le  port  jusqu'a  ce  qu'on 
eut  eu  le  lemps  de  demander  des  ordres  a  son  sujet  en 
Angleterre. 

Treize  mois  s'ecoulerenl  dans  une  attente  d'autant 
plus  cruelle  qu'il  y  avait  lueme  insuffisance  de  vivres 
pour  I'equipage.  M.  Golovnine,  ayant  proteste  contre 
la  violence  qu'on  lui  faisait ,  el  ne  recevant  point  de 
reponse  favorable,  prit,  en  dt^sespoir  de  cause,  le  parli 
de  tenter  de  s'echappci-  a  tout  prix.  En  consequence, 
le  15  mai  1800,  au  soir,  les  deux  cables  qui  retenaient 
la  Diane  furent  coup6s ,  et,  favorise  par  le  vent,  le 
sloop  s'avanga  vers  I'entree  de  la  baie.  II  ne  fut  pas 
poursuivi,  et  bientot  apres  I'equipage  ayant  replace  ses 
voiles,  qui  avaient  ete  enlevees,  il  s'avanga  dans  la  di- 
rection du  sud.  Cctte  route  continua  a  elre  suivie 
jusquo  sous  le  40°  parallele,  ou  Ton  mil  le  cap  a  Test. 
Le  7  juin,  la  Diane  doubla  la  pointe  meridionale  de  la 
terre  de  Van-Di6mon.  Une  lempete  furieuse,  que  le 
batiment  essuya  bienlot  apres,  relarda  sa  niarcbe,  et 
fut  cause  qu'il  ne  put  aborder  Tarcliipel  des  Nouvelles- 
Hebrides  que  le  25  juin  :  M,  Golovnine  y  relacha  dans 
le  port  Resolution,  de  I'ile  de  Tana. 

Le  sloop  quilla  I'ancrage  le  31  du  mois,  et  fit  voile 
vers  le  nord.  Le  !x  aoul,  il  passa  en  vue  de  I'ile  Tukopia ; 
puis,  apres  avoir  traverse  I'equateur  par  191°  30' de 
longitude  orienlale  de  Greenwicb  (170'  50'  2Zi"ouest  de 
Paris),  il  continua  dans  la  menie  direction  jusqu'au 


(  454  ) 
10'  degrd  de  lalilude.  De  cc  point,  le  commandanl 
mancEuvra  de  maniore  a  couper  rarchipcl  des  Caro- 
lines, pour  s'avancer  ensuile  directement  vers  le  Kani- 
Ischalka.  La  Iraverseo  fut  lieurcuse ;  le  25  septouibro, 
il  p6n6trait  dans  Polropavlovsky-Port,  deux  ans  et  doux 
jours  apres  son  depart  de  Rronslad. 

Pendant  I'automne  de  celle  njeme  ann^e ,  M.  Go- 
lovnine  fit  une  course  a  Novaia-Arkhangclsk ,  pour, 
immediatemcnl  aprtjs,  rclourncr  au  Kaintschalka.  II 
continua  a  y  sojourner  pendant  I'annee  1810  lout  cn- 
tit;re.  Au  commcnceinenl  de  181  J,  d'apres  des  ordres 
arrives  de  Saint-P^lersbourg,  il  parlit  de  nouveau  siir 
/a  Diane,  pour  operer  le  rci^venient  d'une  parlie  des 
lies  Kouriles  et  Chantar,  et  de  la  cole  avoisinanlc. 
Tandis  qu'il  6lait  en  train  de  remplir  celle  mission 
scientitique,  se  trouvant  dans  I'ilc  Kounatira ,  il  y  fut 
surpris  ])ar  un  parli  de  Japonais  enibusquos,  el  fait 
prisonnier  avec  ceux  qui  I'accompagnaient  (1). 

LAZAREFF  (1813-1816). 

Le  vaisscau  le  Soiwarqjf  (batimcnt  de  grande  di- 
mension ,  ayant  pres  de  100  pieds  de  quille )  ful  de- 
signe  en  1813  par  I'aulorite  maritime  pour  operer  le 
transport  d'objets  de  ravitaillcnient  aux  ^lablissenients 
vusses  de  I'Amerique.  M.  le  lieutenant  do  marine 
Lazareir,  qui  en  avail  reQu  le  connnandement,  quitta 
la  rade  de  Kronstad  le  9  octobre  de  la  meme  annee. 
Sans  nous  arreter  a  d(^crire  le  debut  de  celle  naviga- 

(i)  Apres  eire  reste  deux  ans  et  deini  en  captivite,  Golovnine  put 
enfin  retonnier  dans  sa  patiie  au  mois  d'octobre  i8i4,  pa'"  suite  d'un 
echanye  avec  Tequipafje  d'un  naviie  japonais  (|ue  le  capitaine  Iticord, 
son  second,  avail  enleve  a  I'abordage. 


(  /|55  ) 
lion,    qui   n'ollrit  aucun   incident   porliculier,    nous, 
nous  hornerons  a  dire  que  /e  6'o«('«/-o^' alleignit  Rio- 
Janeiro  le  22  avril  18U. 

M.  LazareiTquilta  les  coles  du  Bresil  le  23  niai,  pour 
se  dirigcr  vers  le  cap  de  Boiine-Esperance.  f.e  12  juin, 
II  passa  en  vue  de  I'ile  Diego-Alvarez,  ct  le  20  du 
nieme  mois,  il  coupa  le  meridien  du  cap.  Arrive  dans 
I'Ocean  Indien,  il  s'y  niaintinl  enlre  le  l\0^  et  le  lill"  pa- 
rallele.  Le  1"  aout ,  il  doubla  I'exlreuiite  sud  ouesl 
de  la  terre  de  Van-Di^mcn.  Douze  jours  apres,  il  con- 
duisit  son  batinienl  dans  la  rade  de  Port-Jackson.  La 
il  fallut  reparer  diflerenles  avaries  et  se  pourvoir  de 
vivres  frais.  Ces  soins  accomplis,  /e  Soiwarofj  remit  a 
la  voile  le  3  septenihre.  Le  15  du  nienie  mois,  se 
trouvant  par  30°  12'  de  latitude  sud,  nos  navigateurs 
6prouverent  un  singulier  accident,  cjui  pendant  quel- 
ques  secondes  repandit  I'inquietude  a  bord  :  le  navire 
avancait  sur  une  mer  unie,  quand  un  tressaillement 
subit  se  fit  senlir.  (kt  incident,  qui  n'eut  pas  de  suite 
faclieuse ,  a  ete  altribu^  au  passage  par-dessus  une 
baleine  endormie.  Cela  est  d'autant  plus  probable, 
qu'on  voyait  un  grand  nombre  de  baleines  se  jouer 
aulour  du  bailment. 

Lc  28  seplcmbre,  M.  Lazareff ,  qui  se  trouvait  alors 
par  3  3°  de  latitude  sufI  et  196"  et  demi  de  longitude 
(Idl**  9'  36"  est  dc  Paris),  eut  la  bonne  fortune  de  d^- 
couvrir  un  groupe  d'iles  compose  de  cinq  lies  de  corail 
cnllercment  descries.  Celle  qui  s'avance  le  plus  du  c6l<^ 
du  sud  estsitueepar  130°  13' de  latitude  et  163°31'de 
longitude  occidenlale  dc  Greenwich  (165°  51'  24"  de 
Paris).  Le  groupe  enlier  s'etend  du  nord-est  au  sud- 
ouest,  et  occupe  un  espace  de  9  milles.  M.  Lazareff  leur 


(  !ib6  ) 

donna  le  nom  crilcsSouvaioll' ;  c'tHait  cclni  dii  baliincnl 
qu'il  nionlait. 

L'equaleur  fut  traversti  lo  10  octohre.  A  parlir  de  cb  I 
inslanl,  le  niaiuais  temps  se  clcclara,  el  les  rafales  sui- 
virent  nos  navigaleurs  juscju'a  leur  arrivee  a  Novaia- 
Arkliangolbk,  le  18  novembre. 

Pendanl  le  corns  de  Tanuee  J815,  M.  Lazarell  vistla 
tour  a  tour  les  iles  Saint-Paul  et  Saint-Georges  dans  la 
mer  de  Beering.  De  retour  a  Sitka  ,  il  dul  songer  a 
operer  son  retour  en  Russie.  Ln  chargenienl  do  pelle- 
teries  apparienant  a  la  Gonijiagnie  Amerieaine  fut  mis 
a  Lord  du  SoiwaroJJ',  ainsi  que  difltlircnts  objcls  dcs- 
liii^s  a  etre  iransportes  a  Lima.  Ces  preparatifs  achc- 
v6s,  M.  La/arert"  quilla  TAmerique  vusse  le  23  juillel 
1816,  et  lit  vuilc  pour  la  Californie.  Ajires  avoir  em- 
barque  des  vivres  a  San-Francisco,  il  leva  rancre,  et 
mil  le  cap  au  sud  pour  longer  les  coles  am6ricainos. 
Cbemin  faisant ,  il  determina  la  situation  des  iles 
Sainle-Berlhe  et  Sokora.  Le  23  seplembre  ,  il  relacba 
dans  I'lle  des  Cocos  pour  y  regler  la  marchc  de  ses 
chronom6tres.  Arrive  pr^s  des  coles  de  la  Colombie  , 
il  descendit  de  nouveau  a  terre  ,  et  passa  quatre  jours 
dans  le  village  espagnol  de  Santa-Rosa  ,  qui  est  situ6 
tout  pres  de  I'^quateiu'.  Le  n  octobre,  le  Soiwaroff 
penetra  dans  I'liemispbere  autral,  oil  bicnlot  apres  le 
vent  du  sud  se  mil  a  souffler,  ce  qui  contraria  sa 
marclie.  Ce  ne  ful  qu'apr^s  avoir  lenu  le  cap  au  sud- 
ouest  pendant  un  mois,  el  que  le  vent  eut  change,  que 
M.  Lazareir  put  gouverner  a  Test.  Le  25  novembre  ,  il 
rait  a  I'ancre  a  Callao,  qui,  comme  on  sail,  serl  de  port 
A  la  ville  de  Lima. 

Des  affaires  a  regler  pour  le  compte  de  la  Compagnie 


(  /l57  ) 
Am^ricaine  retinrenl  le  balimenl  a  Lima  jusqu'a  la 
mi-fevrier  tie  I'ann^e  suivante.  M.  LazarefT  mil  ce  de- 
lai  a  profit  pour  opirer  plusicuis  relevemeiils ,  et  il 
detei'mina  entre  autres  la  latitude  de  Gallao  au  moyen 
d'un  grand  iionibre  de  dislances  lunaires;  celte  lati- 
tude est,  suivant  lui,  de  77°  5'  15"  a  I'ouest.  Avant  de 
quitter  Lima,  le  SouvarofJ  vQcnl  plusieurs  objets  d'an- 
tiquites  dont  le  vice-roi  dt^sirait  iaire  liommage  a  la 
cour  imperiale. 

En  s'en  retournant,  M.  LazarefT  eul  a  lutler  conlre 
de  terribles  ouragans  dans  les  parages  du  cap  Horn. 
Plus  tard ,  il  alia  relacher  pr6s  des  coles  du  Br^sil, 
dans  I'ile  Fernando  del  Norte.  11  traversa  I'equateur  le 
27  avril,  ct  alteignit  Portsmouth  le  6  join  suivant.  Trois 
semaines  de  repos  y  furent  accord^es  a  I'equipage; 
aprts  quoi  le  baliment  reprit  la  mer,  pour  gagner 
Kronstad,  ou  leSoia'aroffhxi  de  retourle  25juilletl816. 
(Lrt  suite  a  lui  prochain  nuniero.) 


LETTRE  DU  DOGTEUR  KRAPF 

REVEREND    C.  W.   ISENBERG,  A    BOMBAY, 

SUR  l'afrique  oriektale, 

PUBLIEE  DANS  LE 

BOMBAY  CHURCH  MIHSIONARV  RECORD, 

nil    MOIS   DE    DElF.MBRE    I  85 1, 

TKADUIT    DE    L'ANGLAIS 

PAR   M.    DE   LA  ROQUETTE. 


I'  habb;ii-Mpia,  i*"'  octobre  i85i. 

))  Par  la  misericorde  de  Dieu,  il  m'est  pcrmis  de  vous 
adresser  ces  lignes  quelques  jours  apres  Uion  relour 

III.    UAI.    3.  31 


(  /i58  ) 

d'un  voyage  aussi  dangercux  que  penible  clans  ITikam- 
hani...  Aprils  la  inort  inatlcndue  de  noire  cher  frere 
Pfefferle ,  je  me  demandai  si  je  no  devais  pas  me 
rendre  de  suite  dans  I'Usambara  ,  ou,  comme  cela 
avail  He  originairoment  le  d^sir  du  comile ,  dans 
I'Lkanibani ,  pour  y  etablir  une  station  provisoire.  Je 
nae  determinai  a  prendre  ce  dernier  parti ,  qui  me 
parul  plus  conforrac  aux  instructions  iram^diates  de 
notre  comite,  ct  quittai  en  consequence  Rabbai-Mpia 
aussitot  apr^s  la  saison  des  pluies.  J'aurais  pris  volou- 
tiers  avec  moi  I'un  de  nos  ouvriers,  mais  aucun  d'cux 
n'etait  assez  bien  portant  pour  supporter  les  fatigues 
du  voyage.  C'est  pourquoi  je  fus  oblige  de  me  mettre 
en  route  sans  compagnon,  commn  jc  I'avais  dcja  fait 
lors  de  mon  autre  expedition  dansTAfrique  orienlale.  » 

Le  docteur  Krapt"  raconte  ici  comment  il  a  Hi  atta- 
que  une  premiere  lois  par  des  voleurs  pres  de  la  ri- 
viere Tzavo,  et  continue  en  ces  termes  : 

«  Nous  n'^tions  pas  encore  sorlis  de  la  forfel  que  le 
cri :  «  Les  Aendi !  les  Aendi !  »  vinl  de  nouveau  frappcr 
nos  oreilies  ;  mais  c'etait  une  i'ausse  alcrte  :  les  Wa- 
kambas  reconnurent  bientot  qu'elle  avail  Hi  causae 
par  I'approcbe  de  la  grande  caravane  Wakaniba,  que 
les  honimes  du  Ririama  et  du  Toruma  altcndaient 
dans  le  Maungu.  Nous  recommenQames  la  fusillade 
tant  bien  que  nial;  mais  trois  de  ces  AVakambas  ac- 
coururent  a  Iravers  la  forfil  en  criant  :  «  iNous  ne 
sommes  pas  mendas  (ennemis),  mais  Wakainbas  et 
amis  1  »  Nous  fitmes  Irop  beureux  de  pouvoir  arreter 
notre  miserable  fusillade,  et  accueillimes  ces  bommes 
amicalement.  La  caravane  se  dirigeait  vers  la  cote  de 
Mombas,  ou  ellc  portait  trois  ou  qualre  cents  dents 


(  459  ) 

d'c^l^phants.  La  Providence  nous  avail  done  preserves 
encore  une  fois  dun  grand  danger.  Nous  alleignimes 
bientot  apres  les  bords  du  Tzavo ,  dont  les  eaux  fral- 
ches  ^taient  une  heureuse  rencontre  pour  des  voya- 
geurs  alteres  comme  nous.  C'^lait,  depuis  deux  jours 
que  nous  avions  quitle  le  Woi,  la  premiere  riviere  qui 
se  trouvat  sur  notre  route.  Le  Tzavo  sort  du  lac  de  ce 
nom,  que  Ton  dit  situe  au  pied  du  mont  Kilimanjaro. 
Je  cherchai  a  tirer  de  nos  Wakambas  quelques  rensei- 
gnements  utiles ;  je  leur  demandai,  entre  autres  choses, 
ce  qu'ils  savaient  des  Wabilikimo  ou  nains,  que  Ton 
dil  habiler  le  centre  de  FAtrique.  Ln  Mkaniba  m'as- 
sura  qu'ayant  beaucoup  voyag6  dans  sa  jeunesse  a  une 
grande  uibtance  au  nord-est  de  I'Lkambani,  il  y  avait 
vu  beaucoup  de  nains  au  dos  voute,  dont  les  janibes 
6taient  comparativement  longues  et  le  buste  court. 
Les  Wakaaibas  ne  comprenaient  pas  leur  langage. 
Afin  de  s'attirer  I'amiti^  de  ces  nains,  ils  leur  don- 
naient  des  anneaux  de  cuivre.  Pour  chacun  de  ces 
anneaux ,  les  nains  leur  remeltaient  un  sac  de  cuir 
rempli  de  uiiel.  Le  teriitoire  qu'ils  habitent  est  plus 
eloign^  de  I'Llkambani  que  ce  dernier  pays  ne  Test  de 
Mombas.  J'avais  beaucoup  entendu  parler  autrefois 
de  gens  qui  avaient  des  queues.  Le  Mkamba  lue  dit 
qu'il  y  avait  du  vrai  dans  cette  assertion;  car  il  existait, 
a  i'ouesl  du  Jagga,  des  tribus  qui  porlaient  des  queues 
de  vacbes  comme  oi'nement.  » 

Le  paragrajibe  suivant  traite  du  s6jour  que  le  doc- 
leur  Rrapt"  lit  dans  le  liameau  de  Rivoi,  en  attendant 
ce  cbef,  qui  devait  raccompagner  jusqu'a  la  Dana. 

«  Danslamaison  de  Kivoi,  je  lislacoiinaissance  d'un 
marcband  de  I'Dembu,  pays  diloign^  de  la  riviere  Dana 


(  h&O  ) 

de  deuxjournt^cs  vers  le  nord.  Get  homme  avail  beau- 
coup  voyage  ,  ct  etail  par  consequent  en  6lal  do  mc 
donner  des  renseignemenls  precieux.  II  aic  dit  que  le 
Ndurkenia  ou  Kirenia,  conime  I'appcllent  les  Wakua- 
fis  et  les  habitants  de  I'lJembu,  6tait  a  cinq  jo  urnees 
de  niarche  de  ce  dernier  pays.  Quant  a  la  substance 
blanche  (neige)  qui  se  trouve  au  soramel  de  la  mon- 
lagne ,  on  lui  donnait  le  noui  de  kirira  dans  la  langue 
kikuafi.  A  partir  de  la  Ndurkenia,  les  eaux  coulent  dans 
un  lac  sitae  au  nord-est  de  la  montagnc  neigeuse  de 
Kenia.  C'est  de  ce  lac  que  sortenl  la  Dana,  le  Tumbiri 
et  le  Nsaraddi  (1).  La  derniere  de  ces  rivieres  se  dirige 
au  nord-est,  et  se  jette  dans  un  autre  lac  beaiicoup 
plus  grand  appel6  Baringo.  Ce  lac,  suivant  men  infor- 
mateur,  n'avait  point  de  fui,  et  on  pouvail  y  naviguer 
pendant  cent  jours  sans  voir  son  exlremil6,  et  de  I'une 
des  rives  il  etalt  tout  aussi  impossible  de  distinguer  la 
rive  opposee.  La  riviere  Tumbiri,  medit-il,  traverse 
le  pnys  des  Wakuafis  de  Kibia,  pour  se  rendre  a  la  mer. 
Celle  riviere  doit  etre  idenlique,  soit  avec  I'Osi,  soit 
avec  le  Jub  (2).  Cos  details  ne  laissent  aucun  doule  sur 
les  sources  du  INil;  elles  se  trouvent  dans  le  lac  du 
Ndurkenia,  ou  de  la  montagnc  Blanche,  qui  alimente 
par  consequent  les  plus  grands  cours  d'eau  de  1' Afriquc 
orientale,  la  Dana,  le  Jub  et  le  Nil  (3). 

»  Apres  avoir  passe  quelques  jours  avec  Kivoi,  je  le 


(i)  Un  lac  a  trois  deversoirs  seniii  un  Lien  rare  phenonienc. 

A.  d'A. 
(2)  On  iclenlitie  en  general  le  .Tub  avec  le  VVebi-Ganana  des  gonial. 

A.  d'A. 
(3j  Si  le  lac  Haringo  est  si  grand,  il  doit  lurnn'r  un  hassin  ;i  part 
tout  a  fait  distinct  ct  du  Nil  ct  du  Jub,  A.  n'A. 


(  Zit5l  ) 
priai  dc  m'accompagner  jusqu'a  la   Dana,   piiisqu'il 
avait  le  projet  de    s'y  rendre  avec  quejques  lial)itaiils 
de  rUembu  et  du  Mbe  ,  aiiisi  que  sos  chasseurs  d'ele- 
phants.  II  ine  le  promit;  mais  il  s'ecoula  un  mois  en- 
tier  avant  que  je  pusse  mc  rnettve  en  route.  Je  mis  ce 
temps  a  profit,  el  prechai  I'fivangile  a  un  grand  nombre 
de  Wakambas  qui  vinrent  mc  voir,  et  a  quinze  hommes 
qui  arriverent  du  Mbe  en  caravane,  et  que  les  sujets  dn 
Kivoi   massacrerent  bientot  apres,  ainsi  quo  vous  lo 
verrez  bientot.   Notre  depart  pour  la  Dana  fut  enfin 
decide.   Kivoi  quitta  sa  muzi,  ou  ville,  avec  vingt-six 
hommes   environ ,    auxquels    s'cn   joignirent    cnsuite 
vingt-cinq  aiitres.  Au  bout  de  quatre  heures ,  nous  at- 
teignimes  les  limitos  du   territoire   habile.   Les  Wa- 
kambas de  Kitui  s'etendcnt  jusqu'au  mont  Kidimul , 
que  je  gravis  ;  il  a  environ  1  200  pieds  de  haul,  et  de 
son  sommel  je  pouvais  voir  presque  tout  le  territoire 
d'Ukambani ;    en    sorte    que   je   connais   niaintenant 
beaucoup  mieux  qu'autrefois  la  residence  de  chacune 
des  tribus  Wakambas.  Une  carte  exacte,  que  je  join- 
drai  a  mon  journal,  le  montrera.  Nous  nous  enga- 
geames  cnsuite  dans  un  veritable  desert,  qui  avait  ete 
habile  jadis  par  les  sauvages  Wakuafis  ,   et  dont  ils 
furent  chasses,  d'abord  par  les  Wakambas,  et  ensuito 
par  les  Masals.  Lc  quatrieme  jour  apres  notre  depart 
du  mont  Kidiinui,  nous  atteignimos  la  Dana.   A  Test, 
s'etendaient  devant  nous  les  montagnes  du  Mb6  et  dc 
rUembu;  a   I'ouest ,  nous  ddscouvrions  les  cimes  ele- 
v6es  des  monts  Kikuyu,  dont  le  Ndurkenia  est  le  point 
le  plus  eleve  et  le  plus  lointain  ;   mais  cclte  dcrniere 
montagne  etant  couronnee  de  nuages,  il  me  fut  impos- 
sible de  la  voir  on  ce  moment  d'lme  maniere  dislincte. 


(    A62  ) 

Nous  venions  a  peine  cle  suivre  h  c6t6  cle  la  Dana,  pen- 
dant I'espace  do /i  milles  environ,   iine  plaino  fertile, 
que    nous    vimes    soudaincnieut    un    grand    nombre 
d'liommes  venant  de  diflerents  coles  el  se  dirigeant  sur 
nous.  Kivoi  s'ccria  aussitot  que  c'etaient  des  voleurs,  ct 
nie  pria  de  tirer  un  coup  do  I'usil ;  lui-inenie,  donnant 
I'exemple,  dechargea  Ic  sien  sans  plus  larder.  II  clait  du 
pelit  nombre  des  Wakambas  qui  |)oss6daienl  un  tusil ; 
celui  qu'il  portail  lui  avail  ele  donne  par  le  gouverneur 
du  Mouibas.  Lc  bruit  du  fusil  nc  parut  pas  faire  une 
grande  impression  sur  cos  voleurs  ;  car  ils  ne  lardferenl 
pas  a  se  rapprocher  tout  a  fail  de  nous.   Kivoi  donna 
ordre  a  ses  gens  de  se  former  en  bataiile,  taiulis  qu'il 
se  pla(;^ait  lul-mfime  enlre  eux  et  I'ennemi ,   alin   de 
tenter  une  conciliation.  Ti'ois  hommes  s'elanl  delaclies 
des  rangs  des  voleurs  pour  se  rapprocher  encore  de 
nous,  Kivoi  leur  adrcssa  la  parole;  il  leur  apprit  qu'il 
etait  le  cel6brc  Kavori   (Kivoi),  etc.    A  ce  nom  ,   les 
voleurs    parurent  saisis  de    crainle  ;    car  Kivoi  ^tait 
connu  au  loin  comme  un  raagicien  dont  la  puissance 
allait  jusqu'a    faire   pleuvoir  lorsqu'il   le  voulait.    Ils 
6taient  du  Kikuju  ct  du  Mbd ,   et  la  fumee  de  I'herbe 
que  Kivoi  avail  fait  brQler  pendant  lout  noire  voyage, 
selon  son  habitude,  avail  attire  leur  attention.   A  ce 
signe,  ils  avaient  reconnu  que  des  Wakambas  ajipro- 
chaient.  Apr^s  une  longue  conversation  ,  pendant  la- 
quelle  ils  examin^rent  atlentivement  nos  bagages,  ces 
Irois  homuies  rejoignircnt   leurs   compagnons.    Nous 
nous  mimes  en  marchc,  et  ils  nous  suivirent.  Au  mo- 
ment oil  nous  enliumes  dans  la  forfit ,    qui    s'elend 
jusqu'a  la  riviere,  cinq  d'enlre  eux  environ  coururent 
se  placer  a  la  tfite  de  noire  caravane,  afin  de  nous  in- 


(  Zi63  ) 

diquer  le  chemin  qu'il  fallait  suivre  pour  gagner  la 
riviere.  Mais,  quelques  instants  apres,  ils  retourn^rent 
subileinent  sur  leurs  pas,  pouss6rent  un  grand  cri ,  et 
commenc^rent  a  nous  lancer  leurs  fleches  empoison- 
n6es.  J'^lais  en  avant  avec  le  gi'os  des  Uembus,  tandis 
que  Kivoi  et  rhomme  qui  portait  mon  lit  et  mes  autres 
effels  marchaient  parderriere.  Les  voleurs  ^taient  en- 
viron cent  trente,  et  notre  petite  troupe  comptait  cin- 
quante  hommes  tout  au  plus.  Les  assaillants  entou- 
rerent  Kivoi,  et  se  mirent  a  tirer  leurs  filches  conlre 
les  "Wakambas.  Aussitot  que  ceux  d'entre  les  Wakam- 
bas  qui  etalent  avec  moi  en  avant  s'apercurent  du 
danger,  ils  jeterent  leurs  charges  ,  et  prirent  la  fuite  ; 
je  restai  seul ,  et  les  filches  tonibaient  de  tous  cotes 
autour  de  moi.  J'imitai  bienlot  mes  compagnons  les 
Wakambas  et  les  Uembus  ,  el  me  jetai  a  leur  suite 
dans  le  fourre.  Mais,  tout  en  courant,  je  rencontrai  un 
foss6  un  peu  large  et  tres-profond  ;  m'^lant  elanc6 
pour  le  franchir,  je  manquai  le  bord  oppose,  et  lombai 
au  fond.  Je  me  fis  mal  aux  reins,  et  la  crosse  de  mon 
fusil  a  deux  coups  fut  bris^e  dans  cette  chute  ;  mais 
aussi  j'echappai  par  la  aux  regards  do  I'ennemi. 
Lorsque  je  sortis  du  fosse ,  il  me  fut  impossible  de 
decouvrir  un  seul  de  nos  hommes;  ils  s'^taient  refu- 
gies  dans  les  bois  environnants.  Mais,  en  avan^ant, 
j'atteignis  un  point  de  la  foret  qui  etait  moins  garni 
d'arbres,  et  vis,  a  envii'on  trois  cents  pas  de  distance, 
un  certain  nombre  d'individus  dans  lesquels  je  crus 
reconnaltre  nos  fuyards.  Je  les  examinai  avec  mon 
telescope,  et,  a  mon  grand  elTroi,  j 'acquis  bientot  la 
conviction  que  c'^taient  les  ennemis  qui  s'eloignaient, 
emporlant  en  triomphe  le  bulin  sur  leur  dos.  Je  me 


(  IM  ) 

halai  aussilot  de  rentrcr  dans  la  forcl;  mais  j'y  fis 
la  rencontre;  de  deux  gros  rhinoceros,  animaux  Ires- 
nombrcux  pr^s  de  la  Dana  ct  dans  le  desert  que  nous 
avions  traverse.  A  peine  avais-je  fait  qiielques  pas  pour 
les  eviler,  qu'ils  disparurcnt  dans  la  foret.  Apres  avoir 
erre  quclque  leinps  soul  an  hasard  ,  je  m'assis  au  pied 
d'un  arbre  ,  et  me  mis  a  reflechir  sur  ce  que  j'avais  a 
faire  dans  celte  triste  circonstance...  J'avais  besoin  de 
prendre  un  peu  de  nourriture  et  j'etais  Ires  altere  ;  car 
nous  n'avions  ni  bu  ni  mange  depuis  le  milieu  du  jour 
precedent;  I'eau  etant  venue  ci  raanquer,  nous  n'avions 
d'espoir  que  dans  notre  prompte  arrivec  a  la  riviere 
Dana.  Quant  a  moi ,  je  r^solus  de  ne  point  retourncr 
sur  mes  pas  avant  d'avoir  vu  celte  riviere  et  goiitc  do 
ses  eaux.  Mais  cette  resolution,  je  dois  le  dire,  me  fut 
plulot  inspiree  par  unc  soif  ardenio  que  par  une  cu- 
riosile  scientifiquc.  Quant  a  la  nourriture,  je  n'avais 
absolument  rlen  sur  moi;  carmon  domcslique  portait 
loutes  mes  affaires,  ct  je  I'nvais  complelement  perdu 
de  vue  au  milieu  do  la  bagarre  et  pendant  ma  fuitc. 
En  consequence,  je  me  recommandai  a  Dieu...,  et  me 
mis  a  courir  de  mon  micux  dans  la  direction  de  la 
Dana.  Je  distinguai  enlin  la  surface  de  ses  eaux  a  tra- 
vers  les  buissons.  Arrive  au  bord  do  la  riviire,  je  pris 
r^tui  de  mon  telescope  ,  et  m'cn  servis  pour  6tancher 
la  soif  qui  me  devorait.  L'eau  de  la  Dana  etait  aussi 
froide  que  oelle  de  la  Tzavo,  a  laquelle  clle  resscm- 
blait.  Apr^s  avoir  sulFisamment  bu ,  je  romplis  d'eau 
les  deux  canons  de  mon  fusil ,  el  les  bonc:hai  de  mon 
mieux;  je  consacrai  au  meme  usage  I'^lui  de  mon 
telescope  ,  ct  j'aurais  pu  en  faire  autanl  de  ma  poire 
a   poudre,  mais  jc  n'y  songcai  pas.  J'examinai  celte 


(  h(3b  ) 

riviere,  que  je  desirais  voir  clepuis  si  longtcmps;  elle 
pouvait  avoir  en  cet  endroit  150  yards  do  large,  et  6 
a  7  pieds  de  profondeur.  11  pleuvait  prdcisement  en 
ce  momenl  sur  le  Ndurkenia.   II  y  a,  dit-on,  ordi- 
nairement  assez  d'eau  dans  la  Dana  pour  qu'une  per- 
sonne  adulte  en  ait  jusqu'au  cou.   Je  remarquai  dans 
cette  riviere  de  grands  rochers ,  lesquels ,  s'ils  6taient 
reunis  par  de  longucs  poutres,  pourraient  aisement 
servir  de  pont ;  ils  etaient  assez  ^loignes  I'un  de  I'autre 
pour  donner  passage  a  une  barque.  Le  courant  paralt 
assez  rapide  ;  il  ne  Test  cependant  pas,  et  I'eau  coule 
sans  aucun  bruit.  Les  deux  rives  elevees  de  la  riviere 
sont  garnies  de  grands  arbres  sauvages.  Justement  en 
face  de  moi,  je  distinguai  une  haute  montagne  situee 
dans  le  Mbe  ou  Mberrc.  Je  ne  vis  point  d'habitants.  Au 
reste,  j'aux'ais  ete  fort  peu  satisfait  d'en  rencontrer; 
car  les  voleurs  Etaient,  a  ce  que  m'avait  dit  Kivol,  du 
Mbe  meme.  Aussi  me  parut-il  prudent  de  me  cacher 
dans  les  buissons,  et  d'attendre,  pour  me  remettre  en 
route,  quo  lo  soleil  fut  couch^.  Lorsque  la  nuit  fut 
venue,  je  partis  sans  savoir  au  juste  le  cherain  que  je 
devais  prendre.  La  nuit  otait  tres-sombro ,  ct  j'enten- 
dais  de  tons  cotes  los  ci'is  effrayants  dcs  betes  fauves. 
Dans  cette  situation,  je  pensai  a  Mungo-Park,  qui  avail 
et6  expose  aux  memos  dangers  dans  I'Afrique  occidon- 
tale  ;  mais  il  avail  son  cheval ,  tandis  quo  moi ,  depuis 
cent  quatre-vingls  heures  que  nous  avions  quilt(^  Uab- 
bai ,  je  n'avais  pas  cessc  do  cheminer  a  pied.  Jo  me 
remis  en  route  aussi  bien  que  je  pus,  en  foulant  des 
branches  lonibdes  et  des  pierres ,  quoique  cependant 
il  m'arrivut  plus  d'uno  fois,  en  traversant  une  herbc 
haute  el  toulTue,  qui  m'empechait  d'avanccr,  d'etre 


(  466  ) 

tellement  accabl6  de  fatigue  et  inond6  de  sueur,  que  je 
fus  sur  le  point  de  me  laisser  lomber  a  terra.  Mais  je 
compris  que  rimmobilite  n'atn^liorerait  pas  ma  posi- 
tion, etqu'il  fallail  aller  en  avant.  Je  continual  done  k 
marcher;  mais  la  faim  et  la  soif,  qui  me  lourmen- 
laient,  ^taient  devenues  inlolerables.   L'eau  fillrail  a 
travors  la  boile  de  mon  telescope,  ct  les  ronces  et  les 
buissons  que  j'accrochais  en  passant  enlevaient  parfois 
les  bouchons  qui  fermaient  les  canons  de  mon  fusil ; 
en  sorte  que  l'eau  qu'ils  contenaient  se  perdait  peu  a 
peu.  Cependant,  vers  minuit,  il  en  restait  encore  assez 
pour  m'en   humecter  la  languo  ,  quoique   la   poudre 
lui  donnat  une   saveur  d6sagr6able.   A   ce  moment, 
j'arrivai  ainsi  au  pied  d'une  montagne  que  je  connais- 
sais,  et  qui  servit  a  m'orienler.  fipuis^  de  fatigue,   je 
m'(^tendis  par  lerre,  et  m'endormis,  bien  que  j'enten- 
disse  de  tous  c6t6s  les  rugissements  dcs  liyenes.  Lors- 
que  je  m'^veillai,  j'apergus  a  ma  gauche  une  monlagnc 
envelopp^e   de  flammes.  Get  incendie  provenait  sans 
doute  des  feux  que  Kivoi  avait  fail  allumer  sur  son 
passage,  Je  me  dirigeai  de  ce  cote  ,   et   me    Irouvai 
bientot  dans  la  bonne  route  ;  mais  il  me  fut  impossible 
de  marcher  plus  longtemps,  et  je-  m'6tendis  de  nouveau 
sur  le  sol,  tout  a  fait  epuise.  Pour  me  garantir  du  vent 
du  sud  qui  soufilail  par  moments,  el  qui  6tail  tr^s-vif, 
je  ramassai   une  grande   quanlite  d'herbes,   et  m'en 
^tanl  couvert,  je  m'endormis  au  pied  d'un  arbre.  En 
me  r^veillant,  je  voulus  apaiser  la  faitn  et  la  soif  qui 
me  lourmenlaionl,  et  cherchai  des  racines;  mais  ce 
fut  en  vain.    Lorsque    le   jour  parut,   je   renconlrai 
dans  la  foret  quatre  rhinoceros ;  ils  prirent  la  fuite  k 
mon  approche.  Je  continual  a  marcher  au  milieu  des 


(  467) 

jungles  (1),  et  ne  m'aventurai  pas  a  prendre  la  plains, 
dans  la  crainte  d'y  rencontrer  les  voleurs.  Vers  le  mi- 
lieu du  jour,  etant  ddvore  de  soif ,  j'entrai  dans  le  lit 
sablonneux  d'une  inviere  ;  mais  elle  6tait  maintenant 
a  sec,  Bientot  apr^s,  j'entendis  les  cris  que  poussaient 
des  singes  ;  je  me  dirigeai  de  ce  c6t6,  pensant  y  trouver 
de  I'eau ,  et  je  ne  me  trompais  pas;  j'en  decouvris 
dans  un  creux  au  milieu  du  lit  de  la  riviere.  Je  calmai 
nia  soif,  lout  en  remercianl  le  Seigneur  d'avoir  eu  pitie 
de  moi.  Pour  avoir  une  plus  grande  provision  d'eau, 
j'en  remplis  ma  poire  k  poudre,  dont  je  vidai  le  contenu 
dans  mon  mouchoir.  Mais  comment  apaiser  ma  faim  ? 
J'essayai  de  manger  de  la  poudre  et  des  pousses  d'un 
arbre  que  je  ne  connaissais  pas;  mais  cet  aliment  ne 
tarda  pas  a  me  causer  de  vives  douleurs  d'cstomac. 
Je  gravis  alors  une  montagne,  et  y  trouvai  un  parent 
de  Kivoi,  qui  avail  aussi  pris  la  fuite  avec  sa  femme.  II 
me  donna  environ  2  onces  de  viande  el  autanl  de 
cassada.  Celle  nourrilure  devait  me  suflire  jusqu'au 
moment  ou  nous  aurions  gagn6  la  partie  habitue  de 
rUkambani.  Je  ne  m'elais  pas  allendu  a  ceci.  Je  mar- 
chai  maintenant  nuit  et  jour  dans  la  compagnie  du 
Mkamba ,  souffrant  de  la  faim ,  de  la  soif,  el  du  froid , 
jusqu'au  premier  village  Rikaml^a,  qui  s'offrit  a  nous; 
il  appartenait  a  un  jiarent  de  Kivoi.  J'y  appris  que 
mon  domestiqiie,  un  Mnika,  et  beaucoup  de  Wakam- 
bas,  etaient  de  relour,  mais  que  Kivoi  el  un  grand 
nombre  d'aulres  Wakambas  avaient  peri.  Aussilot  que 
la  nouvelle  de  la  mort  de  Kivoi  se  fut  repandue  dans 

(i)  Ce  mot  indien  est  employt;  par  les  Ancjlais  pour  designer  un 
endioit  desert  einpeire  par  les  buissons  et  par  toute  la  riche  vege- 
tation des  tropiques.  A.  d'A. 


f  /ltt8   ) 

son  village,  les  inarchands  du  iMbc,  dont  j'ai  parle  plus 
haul,  furenl  massacres  par  sa  famille.  II  inc  fiit  rap- 
porte  que  cellc-ci  me  deslinait  le  inemc  sort,  puree 
que  jo  n'avais  pas  peri  avec  Kivoi.  » 

Dans  le  passage  suivant,  le  docteur  Krapl"  parie  dcs 
Wakambas,  et  presente  quelques  observations  sur  lour 
caractcrc. 

«  Kivoi  avail  cxprinid  I'intention  de  se  rendre  sur  la 
cote  Tannic  suivante,  et  il  avail  jM'omis  a  cette  occa- 
sion de  prendre  avec  lui  (piinze  Suaheli,  qu'il  desti- 
nail  a  lu'v  batir  une  inaison,  ear  jc  dcvais  vivre  aupr^s 
de  lui,  ct  non  a  Yata.  Mais  ses  parents,  bien  loin  de 
tenir  coinptc  de  cette  promesse ,  nic  l^nioignerent 
une  grande  indifference.  lis  ne  me  I'ournirent  mCme 
pas  de  vivres  en  quantite  suffisante,  et  me  prierent  de 
leur  donner  le  pen  d'effets  qu'on  ni'avait  laisses... 

»  Les  Wanikas  sont  un  pcu  moins  desordonnds  dans 
leurs  habitudes  que  les  Wakambas,  que  j'ai  appris 
sufiisamment  a  connailre  maintenanU  lis  sont  adonnes 
a  I'ivrognerio,  vindicatifs,  Irfes-irascibles,  terriblement 
sensuels,  ct,  en  outre,  voleurs,  traitres ,  menteurs 
6hontes  el  pusillanimes.  A  Yata  ,  les  anciens  furent 
obliges  de  d^lendre  par  une  loi,  aux  hommos  ivres , 
de  venir  me  rendre  visile,  sous  peine  de  se  voir  saisir 
une  chevrc.  (Le  docteur  Krapf  donne  ici  sur  leur  im- 
moralild  dcs  details  que  nous  croyons  devoir  suppri- 

mer.)  En  un  mot,  leur  depravalion  est  deplorable 

Lorsque  jc  pris  cong6  des  anciens,  ils  se  remplircnt  la 
bouche  d'eau  et  ni'en  aspergerent;  puis  ils  me  sou- 
haiterent  loules  les  jiros|ieriles  possiijles,  et  expritno- 
rent  le  desir  d'obtenir  bientol  ile  la  pluie.  Je  vous  prie 
de  croirc  que  si  ma  mission  n'a  point  eu  de  succds. 


{  liQ9  ) 

ce  n'est  point  a  cause  de  la  nation  wakamba ,  qui 
aurait  au  conlraire  voulu  me  retonir,  mais  qu'elle 
manqua  a  cause  des  gens  que  j'avais  avec  moi.  Je 
connais  maintenant  les  precautions  qu'il  faudrait 
prendre  :  il  conviendrait  d'envoyer  quelques  Suahelis 
et  Wanikas  pour  construire  une  liabilation  conve- 
nable ,  car  il  est  impossilde  de  loger  dans  une  hutte 

wakamba,  et  aussi  de  vivre  en  plein  air Je  con- 

seillerais  aussi  a  un  missionnaire  d'amener  avec  lui 
une  famille  de  Kinikas  (1)  pour  le  servir,  afin  de  ne 
point  d^pendre  des  Wakambas. 

»  De  Yata ,  nous  nous  rendinies  a  Rikumbuliu  ,  ou 
nous  achetames  des  provisions  pour  la  route  et  des 
calebasses  pour  porter  de  I'eau.  Cela  fait,  nous  par- 
limes,  et,  afin  d'eviler  les  voleurs  Aendis,  nous  nous 
dirigeames  a  travers  les  forels  les  plus  epaisses  du  pays 
des  Galla.  A  Rabbai-Mpia,  que  nous  atleignimes  aprfes 
avoir  marche  pendant  cinq  fortes  journ^es  depuis  notre 
depart  de  Rikumbuliu,  on  avail  annonce  noire  raorl. 
Nous  eumes  h  endurer,  pendanl  notre  longue  excur- 
sion, la  faim  el  la  soif;  et  au  lerme  de  mon  voyage,  je 
souffrais  tellemenl  des  pieds,  qu'il  m'aurait  et6  impos- 
sible de  marcber  plus  longtcmps.  Nos  dignes  freres  de 
Rabbai  se  joignirent  a  moi,  et  nous  rendimes  lous 
grace  au  Seigneur,  qui  ne  m'avait  point  abandonne 
pendant  cette  exploration,  qui  avail  dure  pres  de  trois 
mois. 

»  Quant  a  mes  travaux  et  voyages  projet»is,  voici 
quelles  sont  mes  intentions  :  Je  resterai  a  Rabbai-Mpia 
jusqu'au  retour  de  M.  Rebmann.  Nous  nous  consulte- 

(i)  L'orij',in;il  angliiis  porte  Kinikas.  Ne  serait-ce  pas  Wanikas  qxxil 
faudrait?  D.  L.   R. 


(  470  ) 
rons  ensuite  sur  le  projet  d'ctablir  a  Kadiaro  une  nou- 
velle  slalion.  Kadiaro  n'est  quh  trois  ou  qualre  jours 
de  inarche  d'ici,  et  il  esl  silue  sur  la  route  qui  conduil 
dans  I'Lsambara,  le  Jagga  et  I'Lkauibani.  Ce  dernier 
pays  me  parail  elre  trop  eloigne,  et  le  chemin  qu'il 
Taut  suivre  pour  y  arriver  esl  trop  dangereux ;  je  crois 
done  qu'il  faut  renoncer  pour  le  moment  a  y  fonder 
une  mission.  II  conviendrait  aussi  d'envoyer  ici  de 
nouveaux  I'reres,  donl  deux  pour  I'Lkambani ;  lorsque, 
apres  avoir  v6cu  un  an  environ  au  milieu  des  Wakauibas 
du  littoral,  ils  en  connaitront  a  fond  les  mceurs  et  la 
langue,  on-j^ourra  les  envoyer  chez  les  Wakambas  de 
I'int^rieur.  II  nous  faut  necessairement  posseder  pour 
base  d'opdralion  Teita  avant  de  nous  rendre  dans 
rUsambara  ou  dans  le  Jagga.  » 


(  /471  ) 

itiialyses,  Kx trails  d'ouvrages, 
Melanges,   etc. 


LE  OUADAY. 

RAPPORT   SUR   LE  VOYAGE 

DU 

CHKYKH  MOHAWMED-IBN-OMAR  EL-TOUNSY  (1), 

PAK 

M.   R.   THOMASSY. 


Les  questions  de  geographie  africaine  ont  acquis 
depuis  un  demi-siecle  le  privilege  de  susciter  les  plus 
indoraptables  curiosit^s,  de  provoquer  tous  les  genres 
de  d^vouemenl.  Le  continent,  oh  elles  signalent  lant 
de  lacunes  a  remplir,  est  le  plus  voisin  de  I'Europe, 
foyer  de  la  civilisation  chrt^tienne;  et  il  est,  au  nord, 
baign^  par  notre  Mediterranee,  rendez-vous  des  plus 
grands  int^rets  du  monde.  C'est  ce  qui  explique  Tim- 
portance  et  le  noinbre  des  travaux  sur  I'Afrique  sep- 
tenlrionale  et  1 'insatiable  desir  d'en  connaitre  tous  les 
abords,  d'en  franchir  les  barrieres  redoutees,  d'en 
p^petrer  les  regions  mysterieuses.  De  la  aussi  tant  de 
martyrs  de  la  science,  jaloux  de  leguer  lours  itin6- 

(i)  Vojage  au  Ouaday,  par  le  cheykh  Mohamraed-Ibn-Omar  el- 
Tounsy,  traduit  par  le  docteur  Perron  et  publie  par  M.  Jomard;  ou- 
vra{;e  precede  d'une  preface  de  ce  dernier,  et  accompagne  de  cartes 
et  de  planches. 

A  Paris,  chez  Artlms-Bertrand,  libraire  de  la  Societe  de  geogra* 
phie,  rue  Hautefeuille,  5i.  —  Duprat,  lihraire  de  I'lnstitut,  etc. 


( 'l^'i ) 

raires  etleurs  decouvorlos,  meme  Ics  plus  incompletes, 
a  ceux  qui  plus  heuroux  les  suiviont  dans  la  in6ine 
cai'riere,  et  pourionl  un  jour  profiler  d'uno  experience 
pay^e  si  cher. 

Pour  avanccr  la  carte  gen6ralc  de  i'Afrique,  ou  les 
voyageurs  de  I'Europe  n'ont  encore  fixe  que  des  points 
isol^s,  trace  que  des  lignes  ^parses,  nous  pouvons  en- 
core nous  aider  des  voyageurs  indigenes.  Ceux-ci  nia- 
ncEuvrent,  en  eCfet,  sur  leur  propre  terrain,  et,  en 
depit  de  leurs  pr^juges,  ils  peuvent  y  recueillir  des 
notions  prccieuses ,  indispensables  uienie  pour  nos 
travaux.  C'esl  a  ce  point  de  vue  que  les  Arabes  de- 
vienncnt  d'iinporlauts  auxiliaires,  tout  en  restant  nos 
constants  rivaux  d'iulluence  coiumcrciale ,  ol,  en  re- 
ligion, nos  irreconciliables  contradicteurs.  Mais  si  de 
la  contradiction  jaillil  la  kunierc  ,  n'csl-co  pas  de  la 
coniparaison  (:es  recits  clirdliens  et  musuhnans  que 
doivent  aussi  jaillir  a  Leaucoup  d'egards  les  plus  vives 
claries  .ur  les  questions  alricaines? 

Goncentrer  ces  claries,  les  metlre  a  la  porlec  de 
tous:  tel  estmainlonantie  service  que  viennentde  nous 
rendre  M.  le  doclcur  Perron  et  M.  Joniard,  en  publiant 
le  Voyage  au  Ouaday  du  cheykh  Mohan] ined-lbn- 
Omar  el-Tounsy,  I'auleur  deja  connu  du  Voyage  au 
Uaijbuv. 

Ce  precedent  ou^rage,  Iraduit  aussi  par  M.  Perron  et 
public' par  M.  J  oiuiard,  que  la  France  s'honore  de  Irouver 
en  tele  de  toules  les  reclierchcs  sur  lAlrique,  est  Irop 
bien  apprecie  des  g^ograplies  pour  en  laire  ici  I'elogo 
a  propos  du  Voyage  an  (Juaddy,  W'oublions  pas  loulo- 
I016  la  liaison  logique  de  ces  deux  publications,  la 
premiere   n'etunl  que  rinliocluclioii  dc  la  secouJe, 


(  hn  ) 

comme  celle-ci  le  sera  des  futures  investigations  dans 
le  Soudan  oriental,  dont  le  Ouaday  et  le  DaiTour  for- 
ment  la  portion  influente  et  directricc. 

Dans  rensemble  do  I'Afrique  septenlrionaio,  quelle 
est  maintenant  rimportance,  soil  inlrlnseque,  soit  re- 
lative du  Ouaday?  Telle  est  la  premiere  question  a 
examiner,  d'apres  la  relation  du  voyageur  niusulman. 

Dans  I'immense  trapeze  compi'is  enlre  les  parall^les 
du  Maroc  et  de  I'Egypte  au  nord,  de  la  S(^ndgambie  et 
de  I'Abyssinio  au  sud,  se  trouvent  trois  zones  bien  dis 
tinctes  pour  le  geograpbe  : 

La  zone  dominee  par  les  puissances  barbaresques, 
et  si  bien  connue  par  soii  bisloire,  son  commerce  et 
son  contact  avec  la  M^diterranee; 

La  zone  int^ricure  tlu  Soudan,  ou  Nigritie,  a  demi 
civilisee  par  I'islamisme,  qui  en  a  fait  sa  conquete,  et 
seulement  entrevue  par  quelques  voyageurs  cbretiens: 
celle-ci  comprcnd  le  Ouaday,  et  reclamera  de  notre 
part  une  attention  particuli^re  ; 

Enfin ,  la  zone  voisine  de  I'equateur,  ou  les  races 
noires  et  encore  paiennes,  protegees  sans  doute  par 
des  contre-forts  naturels,  se  defendent  contre  les  mu- 
subnans  cbasseurs  d'csclaves.  Lh  sont  les  Fertyt,  les 
Djena-Kh6rab,  et  les  N^gres  independants,  qui  s'etcn- 
dent  jusqu'a  la  Guinee  septenlrionale. 

Cette  derniere  zone,  inabordee  jusqu'a  ce  jour  par 
les  Europ6ens,  est  celle  du  Soudan  idolatre.  Elle  oc- 
cupe  les  regions  equinoxiales,  et  tout  fait  supposer  que 
les  races  noires  y  vivent  a  I'etat  de  populations  com- 
pactes.  C'est,  en  ellet,  ce  qui  rosulte  de  I'exp^dition 
^gyptienno,  qui,  aprtjs  avoir  remonte  le  cours  du  Babr 
el-Abyad  jusquau  h"  l\'l' ,  a  trouve  au  .sud  du  Sennar 
III.    MAI.    /i.  32 


(   i7/,  ) 

lout  le  bassin  du  Nil  occupc  par  des  peuplades  denses 
etnomln'cuses.  D'un  autre  cole,  sous  la  infime  latitude, 
au  sud  du  Kordol'an,  du  Darfour  et  du  Ouaday,  el  a 
partir  du  9"degro,  Ic  cliejkU  el-Tounsy  nous  signale, 
a  son  tour,  d'innombrables  Iribus  idolalres  peuplant 
des  contr^es  sans  limites. 

Quant  a  la  Nigritie  musulmane,  qui  nous  est  un  peu 
mieux  connuc ,  le  Sennar,  le  Kordol'an  ,  le  Darfour  et 
rOuaday  en  forinent  la  parlie  orientale. 

Au  dela  et  au  centre,  se  Irouvent  les  Baghuirmeh, 
le  Bornou ,  I'Adiguiz. 

Enfin,  a  I'occident,  TAfnau,  le  Dar-Tounbouclou  et 
le  Dar-Mclla,  ancien  royaume  dc  Mclli,  menlionn^ 
par  les  premieres  navigations  chr6tiennes  aux  coles 
occidentales  de  I'Afrique. 

Ainsi  done,  en  tout  dix  contrecs  principales. 

Telles  sont,  du  moins,  les  divisions  que  noire  voya- 
geur  musulman  trace  de  la  Nigrilie,  el  qui  sont  assez 
confornies  a  I'elat  present  de  nos  connaissances  (1). 
Maintenanl,  parmi  ces  dix  conlrees ,  il  s'ogil  de  nous 
laire  une  idee  aussi  jusie  que  possible  do  I'Ouaday,  en 
TtHudianl  d'apres  la  relation  hislorique  et  commer- 
ciale,  niais  fort  peu  g^ograpbique,  que  nous  en  donnc 
le  cheykh  iVlobainmed  el-Tounsy. 

Et  d'abord,  pour  comprendre  rimportance  de  toutes 

(i;  11  faiil  toutet'ois  ilonner  a  let  ensemble  les  deux  exlremite'.s  na- 
lurelles  (lui  le  c  ompliteiit  :  TAbyssinie,  avec  le  pays  des  Galla  et  la 
refrion  a  I'csl  iln  Nil  lilane  d'un  cole';  et,  de  I'aulro,  la  Sr'nejjaiubic, 
le  haul  Djoliha  avec  lout  le  pays  a  I'ouest  de  Djenne.  ("est  entip  ces 
deux  extremes  que  se  placent  les  trois  precedeiites  divisions  du  Sou- 
dan :  oiJcnlal,  cenlral,  et  occidental. 


(  A75  ) 

nouvelles  notions  sur  I'Ouaday,  il  suffira  tie  rappeler 
ce  que  notre  Eminent  collegue,  M.  Jomard,  a  et^  I'un 
des  premiei's  a  dire  au  monde  savant  :  «  C'est  entre  le 
bassin  du  Nil  et  celiii  du  lac  Tchad,  d'un  colt!;,  el  de 
I'autre  cote  entre  le  lac  Tchad  et  Tombouctou  ,  que 
sont  les  nceuds  piincipaux  de  la  geographic  de  TAfrique 
septentrionale.  »  Or,  I'Ouaday  nous  dounera  la  solu- 
tion du  premier  de  ces  problemes.  On  sait  bien ,  par 
exeinple,  que  son  voisin ,  le  Darfour,  est  une  d6pen- 
dance  du  bassin  du  Nil,  ou  ses  grandes  eaux  foriuent 
I'affluent  signals  par  M.  d'Arnaud  vers  le  9*  degr6  de  la- 
titude nord.  Mais  en  est-il  de  nieme  de  I'Ouaday  ?  et  ce 
nouveau  pays  ne  depend-il  pas  plulot  du  bassin  du  lac 
Tchad  ?  En  second  lieu,  que  sont  les  regions  nomm^es 
Ferlyt,  Dj6na-Kherah,  etc. ,  au  sud  de  I'Ouaday,  ou  les 
chasseurs  d'esclaves  penetrent  en  ligne  droite  cinq 
niois  durant,  jusqu'a  6lre  arrel^s  par  un  ileuve,  ou  lac 
interieur?  Et  cette  vaste  surface  d'eau,  est-ce  le  Nil, 
ou  bien  un  de  ses  affluents  ?  Toutes  questions  susciteos 
par  les  souvenirs  du  cheykh  el-Tuunsy,  mais  oil  nous 
somnies  loin  de  trouver  une  rejionse  satisfaisanle.  Avec 
lui,  en  effet,  nous  seniblons  toujours  voyager  en  plaine, 
comnie  si  le  cheval  ou  le  chamcau  I'avaient  dispense 
de  remarquer  qu'il  gravissait  parl'ois  des  hauteurs.  II 
est  done  impossible  de  se  figurer  le  relief  du  sol  ou  se 
passent  les  6v6nements^  qu'il  raconte ,  ni  d'entrevoir 
nettement  aucune  ligne  culminanle  determinant  le 
partage  des  eaux. 

Le  cheykh,  pourtanl,  dans  son  Voyage  au  Dnrfour, 
nous  a  pail6  d'unc  chaine  de  moutagnc  allant  du  nord 
au  sud,  et  qui  a  permis  a  M.  Jomard  de  placer  ce  pays 
dans  les  d6pendances  du  bassin  (hi  Nil.  Or  I'Ouaday, 


(  A7G  ) 
qui  recoil  a  I'ouest  les  ^coulemenls  de  cette  chaine, 
enlre  aulres  la  riviere  d'lro,  n'apparlient-il  pas  a  un 
syslerne  plus  occidental,  el  par  suite  au  bassin  du  lac 
Tchad  ?  Telle  est  la  question  qu'il  est  permis  de  poser, 
mais  non  encore  de  resoudre  ;  car  «  la  direction,  I'im- 
»  portancc ,  Tissue  finale  dos  eaux  qui  circulcnt  dans 
))  rOuaday  ut  aux  environs,  restcront  un  prohlomo  jus- 
»  qu'aux  futures  decouverles  des  Europecns  qui  sau- 
»  ront  y  penetrer  inunis  d' instruments.  »  C4'est  faute  de 
cos  moyens  d'oliservalion  que  nous  no  connaissons 
])as  luieux  la  veritable  position  geograpbique  du  Oua- 
day,  ni  la  distance  precise  do  sa  capitale,  Ouarah,  a 
Kobeyb ,  Tunc  des  capilales  du  Darfour.  La  position 
exacte  de  cette  derniere  nous  est  donnee  par  Browne, 
qui  I'a  fix^e  a  1/1°  11'  de  latitude  nord  et  a  25°  hS'  de  lon- 
gitude a  Test  de  I'observatoire  de  Paris.  Or,  de  Kobeyb 
a  Ouarah,  la  distance,  faute  d'obscrvations  math^- 
maliques  ,  pouvait  etie  determin^e  au  moyen  des  iti- 
neraires  do  caravanes  ;  inais  los  journees  de  marche 
resultant  des  diverses  relations  varient  tant ,  quant  a 
leur  nombrc  ot  quant  a  la  inanifere  de  les  appr^cier, 
que  M.  Joniard  a  du  rcnoncer  par  cette  voie  i  tout 
calcul,  meme  approximalif,  sur  la  position  du  Ouaday 
et  de  sa  capitale.  Quani  au  docteur  Perron,  il  place  ie 
Ouarah  vers  le  13°  degre  de  latitude,  et  vers  le  21°  ou 
22°  de  longitude,  mais  sans  fonder  son  opinion  sur 
aucune  Evaluation  precise;  sa  topographie  du  Ouaday 
n'c^tant  d'ailleurs  qu'un  simple  essai  de  carle. 

Sous  le  rapport  vrainienl  geograpbique,  la  relation 
du  cbe}kb  el-Tounsy  n'ajoute  done  rien  de  positif  a 
nos  connaissanccs  surlo  Soudan  oriental.  Aussi,  quand 
les  cartes  modcrnes  presenlenl  Ouarah  surle  parallele 


(  A77  ) 

de  Kobeyli,  et  le  Ouaday  on  gt^ineral  sous  la  lalitude  du 
Darfour,  du  Kordofan  et  du  Sennar,  on  doit  savoir  la 
confiance  trfes  limitee  qu'elles  meritcnt. 

En  attendant  que  la  gdographie  mathematique  pe- 
nelre  dans  le  Ouaday,  contentons-nous  de  savoir  que, 
du  nord  au  sud,  sa  longueur  est  d'environ  trente  jour- 
nees  de  caravane ,  et  sa  largeur,  de  I'esl  a  I'ouest,  de 
vingt  journees.  De  nombreuxcours  d'eau  le  Iraversent, 
dont  le  plus  meridional  et  le  plus  considerable,  I'lro, 
parait  se  jeter  dans  lo  fleuve  Scharry,  s'il  ne  se  pcrd 
pas  dans  les  sables  du  desert.  Quant  a  la  population  du 
Ouaday,  elle  est  plus  nonibreuse,  plus  riche ,  surtout 
plus  brave  et  plus  hospitaliere  que  celle  du  Darfour  ;  et 
c'esld'elle,  par  monienls,  (jue  dependent  les  destinecs 
du  Soudan  oriental  :  la  conquSte  du  Baguiruieh  par 
Saboiin ,  sultan  des  Ouadayens,  en  sera  bientot  la 
preuve  evidente. 

Au  surplus,  le  noni  de  Ouaday,  que  nous  avons 
jusqu'a  present  donn6  a  cette  conlree  ,  parce  qu'il  est 
le  plus  repandu  dans  le  Soudan  ,  n'est  pas  le  seul 
qu'elle  porte.  Ses  propres  habitants  I'appellent  de 
preffirence  Dar-Seleih  ou  pays  de  Saleh ,  nom  du  foii- 
dateur  de  la  dynastie  regnante  qui  fut  aussi  leur  pre- 
mier legislateur  religieux. 

«  Saleh,  descendant  des  anciens  Abbassides ,  etait 
»  un  habile  jurisconsulto  et  Ires  d^vot,  retire  dans 
»  I'Hedjaz.  Des  ulemas  du  Sennar,  I'ayant  connu  dans 
»  leur  pelerinage  a  la  Mecque,  s'attacherent  a  lui  d'in- 
»  time  amitie,  et  I'engagerenl  a  les  suivre  dans  leur 
»  pays ;  mais  Saleh  ne  sej'ourna  que  pou  de  temps 
»  dans  le  Sennar.  11  y  rencontra  tanl  de  liberlinage  ct 
»  de  debauche ,  que  sa    susceplibilitc  de   conscience 


1 


(  A78  ) 
»  s'efTaroucha  ,  et  il  s'enfuit,  passant  de  contr^e  en 
»  contrde  jusqiie  dans  le  Ouaday.  II  s'y  fixa  parmi  les 
»  habitants  du  niont  ab-Senoiln  qui  ^talent  idol&tres, 
»  et  la  il  remplissait  scrupuleusoment  ses  devoirs  de 
»  religion  ,  priani ,  jeunant,  faisant  le  zikr  (1)  souvenl 
»  a  lui  seul,  et  recitanl  le  Goran.  —  Pourquoi  fais-tu 
»  toutes  ces  choses?  lui  deuiandail-on  fr6queninient. 
»  —  Pour  rendre  honimage  a  Dieu.  —  Qu'esl-ce  done 
»  que  Dieu  ?  Et  Saleh  salisfaisait  la  curiosite  de  lous 
»  ces  idolatres  avec  autant  d'a-propos  qu'il  en  avail 
))  mis  a  la  provoqucr.  Les  habitants  d'ab-Senotfkn,  el 
»  ensuile  tout  le  Ouaday,  finirent  par  embrasser  I'isla- 
»  misme  ,  choisissant  Saleh  pour  chef  rcligicux  et 
»  politique.  Le  pieux  sultan  leva  Tiinpot  sacre  sur  les 
»  riches  pour  subvenir  aux  bcsoins  des  pauvres ,  ct 
»  passant  ensuite  r!u  jeune  et  de  la  priere  a  la  guerre 
))  sainle,  il  convertit  par  les  amies  toutes  les  tribus 
»  ouadayennes  qui  ne  professaient  pas  Tunil*^  de 
»  Dieu.  » 

Cerlaines  traditions  locales  feraient  supposer  encore 
que  le  Darfour  et  le  Rordofan  se  convertireut  de  la 
meme  maniere  et  en  m6me  tomps,  c'est-a-dire  vers  la 
premiere  moiti6  du  xvn"  si^cle.  L'islainismo,  que  Ton 
croil  beaucoup  trop  stationnaire ,  aurait  done  fait  la 
conquele  du  Soudan  oriental  depuis  environ  deux  cents 
ans ,  juste  vers  I'^poque  oil,  a  I'aulre  exlremite  de 
I'Afiiqiie,  le  Maroc  retrempait  son  vieux  fanatisnie 
sous  I'aulorite  d'une  nouvelledynastie  arabe.  L'n  autre 
^branlenient  general  ,  rappel6  par  M.  Jomard  ,  et 
beaucouj)  plus  recont ,  a  de  nouveau  prouv6  tout  co 

( i)  Ceremonial  de  priires  pmliqu^par  les  derviches  tourneurs. 


{  579  ) 

qui  reste  de  force  et  d'expansion  dans  la  soci6t6  mu- 
sulmane.  Les  Foullah  s'en  sont  fails  les  r^forniateurs 
et  les  missionnaires  armes  dans  loute  la  Nigrille  occi- 
dentale  ,    tandis    que    les  Wahabiles    reveillaient   en 
Arabic   I'ardeur  des  guerres  de   religion  ,   cl  que  le 
sultan  du  Ouaday,   Saboun  ,   faisail   la  conquete   du 
Baguirmeh  au  nom  de  la  morale  du  Goran  outiagee 
par  un  souverain  incestueux.   Tant  d'indices   d'effer- 
vescence  rellgieuse  indiquenl  une  vitality  bien  loin  en-> 
core  de  s'eteindrc  et  memo  de  s'affaibllr.  Aussi  n'ajou- 
terons-nous  qu'une  remarque  siir  la  maniere  dont  le 
premier  sultan  du  Ouaday  y  introduisit  I'islamisme  : 
ce  fnl  par  le  spectacle  de  la  prifere  et  de  la  mortifica- 
tion que   Saleh   frappa  I'imagination   des  Ouadayens 
idolatres;  ce  fut  par  I'intervention  d'un  code  religieux 
et  d'une  morale  ecrite  qu'il  epura  et  fixa  du   meme 
coup  leur  etat  social. 

C'est  pr^cisement  par  ces  memes  vertus,  par  ces 
mSmes  proc^des,  eprouv^s  d'ailleurs  depuis  dix-huit 
siecles,  que  les  sauvages  de  I'Oc^anie  se  convertissent 
de  nos  jours  au  cbristianisme  el  so  laissent  pen(^trer 
par  la  civilisation.  Que  manquerait-il  done  a  celte 
derni^re  pour  s'introduire  egalement  en  Afrique,pour 
planter  sa  tenle  la  ou  I'islamisme  n'a  point  encore 
mis  le  pied,  c'est-a-dire  dans  le  Soudan  idolatre  ?  Ce 
qui  lui  manque  sous  celte  zone  torride,  ce  ne  sont  point 
sans  doule  des  chrelions  priant  ct  jeunant  coinme  le 
musulman  Saleh,  mais  bien  plutot  des  missionnaires 
de  race  noire  ou  mulatre ,  comme  les  premiers  evan- 
g^listes  de  I'Abyssinic ,  dont  les  traces  se  reconnais- 
senl  encore  aux  debris  disperses  de  la  chretientd  orien- 
lale.  M.  Jomard  a  rappel6  divers  t^moignages  toucliant 


{  480  ) 

quelques-uns  de  ccs  dtlibiis  qui  exisleraient  encore  au 
Slid  des  monts  Kiimri  et  au  noid  de  la  cole  de  Gui- 
nee  (1);  cc  sont  des  triljus  qui  irapparlienncnt  en 
tout  cas  ni  a  I'idolalrie  ni  a  I'islamisnie  ,  et  qui  sem- 
blent  d'originc  chreliennc.  Mais,  quoi  qu'il  en  soil  de 
lour  culte  et  nifime  de  lour  existence,  il  est  evident 
que,  pour  y  inU-oduire  ou  y  rajeunir  nos  croyances, 
il  faudrait  nous  creer  des  niissionnaires  a  Tusago 
de  I'Afrique  cenlrale,  en  les  recrulant,  s'il  Ic  faut, 
parmi  les  osclaves  emancipes  de  nos  colonies.  Origi- 
naires  de  la  Nigritic  on  nieme  temps  que  Francais  el 
Chretiens  par  rcducalion,  ceux-ci  rontreraient  avec 
moins  de  peine  dans  lour  patrie  |)riniilive ,  et  y  fonc- 
tionneraient  beaucoup  niieux  que  des  Europeens  dans 
I'ceuvre  jusqu'ici  avort^e  de  la  propagation  chretienne. 
Ces  r6flexions-la  ne  sont  pas  sans  doule  de  la  giogra- 
phie  ;  mais,  realis^cs  ,  elles  fourniraienl  ie  moyen 
d'en  faire  plus  lard,  el  de  la  mclllcure  ;  car  chacun 
sail  les  progr^s  que  la  science  doit  aux  travaux,  memo 
les  plus  modesles,  ainsi  qu'a  la  piete  de  nos  mission- 
naires. 

Dans  la  perspective  decette  eventualild  si  desirable, 
nous  no  saurions  Irop  (iludior  I'etal  moral  do  la  Ni- 
grille  idolalre.  Le  cheykli  ol-Tounsy  nous  la  repre- 
sonle  morcelee  en  tribus  ct  sous-tribus  vraimenl  in- 
nombrables,  mais  impuissanlcs,  malgre  leur  suporio- 
rile  num^riquc,  a  se  defendre  conlre  les  niusulman«. 

Ceux-ci,  coDinie  un  anneaii  jele  an  milieu  iVtm  dcseii, 
lie  fornwnt  qn'iinr  horde  an  milieu  de  popiihitions  noin- 
b reuses :  cc  qui,  pourtanl,  no  les  empocho  pas  d'avoir 

(i)  Voir  pngC'j  Lxviii  i-\.  l.xxill  dn  royaga  uu  Ouadny. 


{  liM  ) 

la  haute  main  sur  ces  masses  sauvages  et  de  les  do- 
miner. 

«  Ce  fait,  dit  noire  voyageur,  s'explique  par  Tesprlt 
»  de  corps  et  de  conlVaternite  qui  unit  les  Soudaniens 
»  musulnians.   Les  peuplades  idolalres,  au  contraire, 
»  divis^es  d'inlerets,  sans  accord  entre  elles,  ne  s'en- 
»  Ir'aidenl  jamais.  Bien  plus,  chaque  station  est  hos- 
»  tile  aux  stations  qui  I'avoisinent;  et  quand  I'ennemi 
))  vient  tomber  sur  un  village,  I'attaque,  en  cnleve  les 
»  femmes  et  les  enfants,  le  village  voisin  regarde  d'un 
))  ceil  indiil^rent,  et  ne  cherche point  a  conjurer  I'orage. 
))  Aussi,  (les  que  I'ennemi  en  a  fini  avec   une  station, 
»  va-t-il  s'adresser  a  une  autre,  et  il  la  traite  comme  la 
»  priced ente  sous  les  yeux  des  villages  les  plus   rap- 
))  procWs ,    qui   demeurent  encore  spectateurs   tran- 
»  quilles  du  malheur  de  leurs  frercs.  Si   ces  idolatres 
»  savaient  se  r6unir  conlre  leurs  agresseurs,  aucun  des 
»  fitats  musulmans  du  Soudan  n'oserait  les  attaquer.  » 
(Page  274.) 

Ces  attaques  foriennes  et  ouadayennes  p^netrent  le 
plus  souvent  dans  I'inlerieur,  a  des  distances  dc  trois 
mois  de  niarclie,  d'ou  elles  revicnnent  ensuilc  apres 
un  parcours  de  six  mois,  chassant  dcvant  elles  des 
troupeaux  d'esclaves  dont  les  trois  quarts  perissent  de 
misere,  le  reste  6tant  destine  aux  marches  de  la  IMigri- 
lie  musulmane  el  des  puissances  barbaresques. 

«  Les  Ferlyt,  ajoute  noire  voyageur,  n'ont  aucune 
»  religion ;  quand  ils  sont  roduits  en  esclavage,  ils  ac- 
»  ceptenl  la  religion  dc  ceux  dont  ils  sont  devcuus  la 
))  i^ropriete.  »  En  d'auhes  lermcs,  ces  peuplades  in- 
cultcs  appartiennent  corps  et  ame  au  premier  occu- 


(   /i82  ) 

]iant :  double  niolif  de  rcgretter  que  notre  civilisation 
ne  puisso  les  aborder  et  les  confjuf^iir  I 

Quant  a  I'islamisine  ,  on  sail  qu'il  autorisc  en  prin- 
cipe  lour  esclavage,  et  qu'en  fait,  il  les  consid^re 
comme  sa  proie.  Favorise  par  le  voisinage,  il  les  as- 
servit  et  les  converlit  du  metne  coup,  sans  que  le  pro- 
selylisuio  chretien  essaie  encore  de  lui  disjiuler  ces 
tribus  alVicaines ,  «  doul  \o.  sol  est  pourlanl  si  fertile, 
»  et  chez  qui  la  purele  de  I'air  est  si  romarquable.  » 

Ainsi ,  la  ferlilile  et  la  salubritc^  du  climat  convient 
encore  I'Europe  a  se  devouer  a  raflVancbissemcnt  des 
negres  idolalios ,  et  a  fonder  a  eel  ellet  des  ^tablis- 
seinents  dans  I'interieur  do  I'AIVique. 

Pareilles  entreprises  sans  doule  passionnent  de  plus 
en  plus  les  missionnaiies  de  rEvangilo ;  mais,  pour 
preparer  avec  succds  celte  redemption  des  races  noires, 
on  n'en  saurail  Irop  bien  etudior  los  diHicuit^s,  qui  ne 
ne  se  bornent  pas  a  la  Nigritie  musuiniane.  Cclle-ci, 
en  elVet,  loin  d'etre  seide  coupable  de  I'oppression  des 
idolutres,  y  est  excit^e  par  les  puissances  barbares- 
ques,  qui  lui  demandent  sans  ccsse  d'approvisionner 
lours  uiarchi^s  d'esclaves.  Parfois  meme  des  avenlu- 
riers  du  nord,  traversant  par  bandes  araiees  les  vastes 
deserts  du  Soudan,  vont  directeraent  a  la  chasse  des 
noirs,  pour  n'avoir  point  ci  les  acheter  de  seconde 
main.  Cette  communaut6  d'int^ret,  joinle  au  fana- 
tisme  des  noiivoaux  ronverlis,  apianit  tous  les  obsta- 
cles devanl  les  niissionnaires  de  rislamisuie,  et  elle 
cenluplerail,  |iar  le  memo  motif,  la  difliculle  des  mis- 
sions cbriticnnes,  si  celles-ci  ne  pr^feraicnt  pas  les 
regions  du  sud  pour  s'inlroduire  et  s'^tablir  en  Afrique. 


(  483  ) 

Ce  qu'il  faut  clone  signaler  ici,  ce  qui  fait  la  force 
interieure  de  rislamisme  cliez  ies  noirs  et  lincompa- 
rable  superiority  de  ses  moyens  d'action  ,  c'est  I'inti- 
niite  et  I'aisance  des  relations  de  la  Nigritic  niusui- 
inane  avec  Ies  puissances  barbaresques  du  nord. 

Voyez  d'abord  leurs  communications  par  caravane, 
qui  nous  semblent  entravees  de  mille  difTicultes. 
Eh  bien  !  el  ies  s'operent  ot  se  raconlenl  en  Afrique 
conime  la  chose  la  plus  simple  du  monde ,  sans  plus 
li'embarras  que  des  matoiots  feraient ,  par  exemple  , 
de  leurs  traversees  de  I'Ocean.  Ainsi ,  noire  cheykh 
Mohammed  el-Tounsy  quitte  en  1792  sa  ville  natale,  et 
de  Tunis  se  rend  au  Caire  pour  joindre  son  pere  Omar, 
qui  elait  dt^ja  parli  pour  le  Soudan.  Le  jeune  Moham- 
med, croyant  le  trouver  dans  le  Darfour,  a  Tendelty, 
s'y  rend  aussitot;  mais  son  pere  n'y  elait  deja  plus; 
il  etail  dans  I'Ouaday,  oil  son  savoir  et  son  m^rite  lui 
avaient  concilie  I'estime  du  sultan.  Grace  au  credit 
dont  le  pero  avail  joui  dans  ces  deux  contr6es  du  Sou- 
dan oriental,  le  fils  y  sejourna  dix  ann^es,  en  attendant 
d'aller  rejoindre  son  pfere ,  d6ja  retourne  a  Tunis  par 
la  route  du  Fezzan  et  de  Tripoli.  Le  vnila  done  a  son 
tour  sur  la  meme  route  ,  voiturant,  lui  aussi ,  des  es- 
claves ,  plumes  d'autruche  ,  et  autres  pacotilles  de  la 
Nigritie.  Cheminfaisant,  il  6prouve  chcz  Ies  Tibbous  et 
Ies  Fezzanais  des  aveiUures  qui  nous  initient  aux  ha- 
bitudes fiscales  du  desert,  et  a  une  sorte  de  droit  des 
gens  prolecteur  des  associations  voyageuses.  II  arrive 
enfin  a  Tunis,  ou  son  pere ,  lui  trouvant  une  ceinture 
de  voyage  fort  lourde,  la  vide  et  en  garde  tout  I'argent, 
Le  pere  Omar,  se  rappelant  alors  le  Ouaday  oil  Ton 
fait  de  bonnes  affaires,  et  oil  il  a  d'ailleurs  laiss^  une 


(  A84  ) 

partie  de  ses  biciis  et  dc  sa  t'amillc  ,  I'orme  bientot  le 
piojet  d'y  retourner.  Son  fils  a  beau  lui  representer  et 
son  age  avance  et  les  fatigues  d'un  loinlain  voyage  ,  le 
vieillard  se  met  en  route  avec  des  presenls  pour  le 
sultan  Saboun.  Deux  ans  apres,  la  nouvelle  de  la  mort 
d'Omar  parvient  a  son  lils.  Celui-cisc  rend  inim^dia- 
tement  a  Tripoli,  pour  traverser  une  fois  de  phis  la 
region  cUi  desert;  mais  il  arrive  trop  lard,  la  caravans 
etait  parlie.  Enibarque  dans  uiie  st'condo  caravane,  il 
renconlre  a  moitie  chemin ,  cnUn;  les  Tibbous  cl  les 
Fczzannais,  son  oncle  Zarrouk  rclournaul  du  Ouaday 
avec  toiiles  ses  richessos.  Les  deux  caravanes  s'arrelent 
ensemble  vingt-quatre  beures.  Enfin,  le  jeune  Moham- 
med el-Tounsy  abandonne  la  sienno,  prend  cello  de 
son  oncle,  ct  il  revient  a  Tunis,  apres  nous  avoir  donne 
la  preuve  la  plus  evidcnle  des  correspondancos  regu- 
li^res  el  faciles  qui  unissenl  loutes  les  regions  de 
I'Afrique  musulmane. 

Un  autre  detail  cxpliquera  mainlcnant  ces  relations  : 
c'est  la  coumiunaut(!!  de  loi  religieubC  ct  civile,  et,  par 
suite,  tic  jurisprudence  comnierciale,  qui  fait  accepter 
dans  le  Fezzan,  cl  j usque  dans  le  Ouaday  et  le  Darfour, 
les  decisions  des  ulemas  dc  Tunis  ou  de  Tripoli ,  et  rc- 
ciproqucment  par  ceux-ci,  les  pieces  Icgalisees  par 
les  grands  jugos  du  Ouaday  (I).  Rappclons,  enfin,  que 
le  pere  de  notre  voyageur,  Omar  el-Tounsy,  bicn  que 
de  Tunis ,  fut  nomnie  vizir  du  Ouatlaj   par  Ic  sultan 

(i)  Voir,  a  la  page  22  1  du  Voynije,  1  cinploi  (ju'nii  cIn'iiF,  ori{',iiiairc 
(leFcz,  Ahiiinil  ('l-i'"acy,  fit  dans  lo  Ouaday  duyi/foiui/i  "U  ronsiiltatioii 
juriilinuo,  nii'il  avail  ohtenue  de>  ulpnias  do  Tripoli  ;el,  a  la  pape  Sg.i, 
la  rijconiiaissance  par  le  tribunnl  de  Mourzouk  des  pieces  Icgalisees 
par  le  cachet  du  grand  cadi  du  Ouaday. 


(  485  ) 

Saboun,  qui  liii  donna  pour  successeur  un  habitant  cie 
Fez,  Adnicd  el-Facy  (1). 

Pourquoi  celte  liaule  opinion  des  musulmans  du 
nordPParce  que  le  Soudan  se  consid^re  lui-menie 
comme  unc  d^pendance  coloniaie  des  puissances  bar- 
baresques.  Aussi  ces  gouvernements  y  excrcent-ils, 
soil  au  nom  du  sullan  de  Constantinople,  soil  de 
celui  du  Mai'oc ,  non-seulement  I'influence  resultant 
d'echanges  commerciaux ,  mais  encore  la  suprematie 
morale  et  la  juridiction  religieuse  de  veritables  m6- 
tropoles. 

On  comprend  en  tous  les  cas  les  facilites  que  les 
musulmans  ont  a  voyager  et  commercer  en  Afrique. 
Unis  par  des  liens  de  fraternite  et  de  droit  coinniun , 
ils  s'aident  et  s'eclairent  enlre  eux,  landis  que  I'explo- 
rateur  chr^tien  ne  peut  s'y  avcnturer  qu'isol6ment,  et 
a  Tencontre  de  raille  obstacles  de  la  part  des  honimes 
et  de  la  nature. 

C'est  done  le  moment  de  rappeler  I'avis  que  M.  le 
docteur  Perron  adresse,  de  la  ville  du  Caire,  aux  Euro- 
peens  tenths  de  se  livrer  a  I'exploration  de  la  Nigritie, 
en  prenant  poiir  base  d'operation  I'AlVique  septen- 
trionalc. 

((  Qui  n'aura  pas,  leur  dit-il,  le  vialique  de  la  langue 
»  arabe ,  la  langue  sacr^e  des  Musulmans ,  qui  ne  se 
»  rc^soudra  pas  a  se  musulinanisei-  comme  moyen  de 
»  sauf-conduit,  qui  ne  se  d^cidera  pas  a  se  donner  les 
))  apparences  de  credulite,  de  croyances,  de  sauvagerie 
»  menie  des  musulmans  du  Soudan  ,  ne  doit  pas  son- 
»  ger  a  se  netlre  en  route;  qu'il  reste  chcz  lui.  M6me 
))  les  derniers  voyages,  ceux  du  major  Denham    au 

(i)  Pn«e  Qi4  tie  la /}e/ntio/(  du  clicykli  el-'l'ounsy. 


(  /i86  ) 

»  Maudarah,  sont  minces  en  r^sultats.  On  voyage  nial 
»  avec  des  liahits  rouges  anglais.  II  faut  la  blouse  du 
»  Forien,  dii  Ouadayen  pour  courir  dans  Ic  Darlour  cl 
»  le  Ouaday  ;  il  laiit  se  brunir  le  leint  jusqii'au  bronze 
))  fonc6  pour  ne  pas  choquer  trop  rudemenl  I'ujil 
»  d'homuies  noirs  comme  du  charbon  ;  il  Caul  s^jour- 
))  ner  quclques  saisons  de  suile  a  Kobeib,  a  Tendelly, 
»  a  Ouarah,  pour  s'y  lier  avec  des  nalurels  du  pays, 
))  avec  des  niarcbands,  dps  negriers ,  des  cbasseurs 
»  d'esclaves ;  il  faut  tout  cela,  ot  par  consequcnl,  il 
»  faut  sauter  a.pieds  joints  sur  nombre  de  iios  ripo- 
»  gnances  curopeennes  ( n'en  deplaise  a  qui  que  ce 
»  soil),  si  vous  voulez  suivre  un  voyagour  indig6ne,  un 
»  expedilioniiaire  ou  chasseur  aux  esclaves  jusqu'aux 
))  liuiites  sud  peut-etre  des  Ferlyt,  jusque  peul-otre  au 
»  dela  des  Djenakherab  idolatres ;  si,  enfin ,  vous 
))  voulez  savoir  ou  sont  les  extreuiit^s  nierldionales  du 
»  Soudan,  ce  que  sont  el  ou  sont  ccs  monts  de  Counir 
»  que  Ton  appelle  monts  de  la  Lime...  Et  puis,  il  y  a  a 
))  chercher  les  nioyens  d'ed'acer  de  dessus  de  la  terre 
»  ces  voies  de  souilrances  et  de  honles  par  lesquelles 
»  on  traino  chaque  annee  tanl  de  milliers  d'esclaves , 
»  c'est-a-dire  lant  de  chair  huniaine  a  vendre  sur  les 
»  inarches,  ou  bien  a  laisser  morte  en  [)ature  aux  betes 
))  feroces  des  deserts.  » 

Quel  but,  d'ailleurs  ,  plus  cluelien  que  celui  des 
savants  editeurs  du  l^oyage  an  Ouuddy?  et  quelle  ne 
serait  pas  la  force  de  la  civilisation  contre  la  barbaric 
musulmaiie,  si  jamais  nos  missionnaires  parvenaient 
a  r^unir  contre  cette  barbaric  les  peuplades  innom- 
brables,  mais  si  divisees  de  I'equateur?  Limite  vers  le 
sud  en  n>6me  ten)ps  que  penelr6  au  nord  par  ri">gyple 


(  /i87  ) 

et  I'Alg^ne,  rislauiisme  se  Irouvetait  pris  enlre  deux 
feux,  et  I'aclivite  chrelienne  ressaisirait  en  Afrique  les 
meillcures  chances  de  I'avenir.  Quanta  present,  I'isla- 
mismc  y  regne  sans  partage ,  et ,  cliaque  annee ,  il  y 
fait  d'innombrables  proselytes  :  c'cst  jiar  millions  que 
ses  missionnaires  armes  y  comptent  les  nouveaux  sec- 
tateuis  de  Mahomet. 

L'hisloiie  recente  des  Foullah  ne  laisse  aucun  doule 
sur  ces  progres,  digne  pendant  de  I'exemple  fouini,  11 
y  a  deux  tic^cles,  par  la  conversion  du  Kordofan  ,  du 
Darfour  et  du  Ouaday  (1).  Soustraits  a  rinfluenco  de 
la  Nigritie  idolatre,  ces  trois  pays  furenl  incorpores 
sans  relour  a  la  Nigritie  musulniane  ,  et  par  la  mis  en 
relation  avec  tout  I'interieur  du  Soudan  jusqu'aux 
bonis  de  la  Mediterran^e  et  a  ceux  de  I'Atlantique.  La 
religion  nouvelle  y  devint  aussitot  le  v^hicule  du  com- 
niei'co ;  et  depuis  que  I'islamisme  a  p^netre  dans  la 
Senegambie ,  celle-ci  est  devenue  le  point  de  depart 
d'une  autre  route,  Iraversanl  I'Afrique  de  part  en  part, 
et  conduisant  d'ouest  en  est  les  marchands  ct  les  p6lo- 
rins  qui  se  rendcnt  a  la  Mecque. 

M.  Fresnel  nous  a  donne  (2)  un  de  ces  itineraires 
parlant  de  Fouta-Toro  dans  la  Senegambie ,  et  apres 
deux  cent  vingl  et  une  journees  de  caravane  venant 
ahoutir  a  Obeid,  capilale  de  Kordofan.  Les  pelerins , 
parlis  de  Fouta-Toro ,  arrivent  d'abord  a  Goinbo 
(Comba),  liniile ,  selon  eux,  des  Elals  iributaires  de 
noire  colonic  du  St^ndg^;  de  la,  suivani  par  S6go 
la  rive  gauche  du  Niger,  ils  le  traversent  a  Logoro,  el 

( i)  I'dur  la  ilatc  tie  ictte  conversion,  Voir  la  page  yS  de  la  Relation 
(III  i-licykh  el-Tonnsy. 

(2)  Ihdletin  de  la  Soriete  de  cjeographie,  septenibri!  i  85o. 


(  /|S8  ) 

par  sa  rive  droile ,  apr6s  quatre-vingl-douze  joiirn^es 
de  marche  ,  ils  arrivent  a  un  point  ou  le  fleuvc,  qui 
courait  an  sud,  revient  a  I'esl,  d'apres  le  i-ecit  du  cara- 
vaniste,  et  laisserait  ainsi  dans  le  doute  s'il  se  rend  au 
golfe  de  Benin  ou  vers  le  lac  Tchad. 

De  Sakkatou  ,  capilaie  du  Haoussa,  ou  regne  le 
deuxieme  successeur  du  sultan  Bello  ,  les  p&lerins, 
apr6s  quarantc  et  une  autres  journees ,  se  rendent  a 
Angornou  ,  pres  du  lac  Tchad  ,  qui  lui-nifime  a  sept 
journees  de  longueur.  Continuant  leur  route  par  Lo- 
goun,  dependance  de  Bornou ;  par  Mo6to,  capitale  du 
Baghermeh;  par  Wara,  capitale  du  Ouaday;  par  Ko- 
beyli,  capitale  mercantile  du  Darfour,  et  Tcndelty,  qui 
en  est  la  residence  imperiale,  ils  arrivent  en  quatrc- 
vingt-huit  autres  jours  a  Ob6id,  capitale  du  Kordofan, 
aprfjs  avoir  parcouru  en  ligne  droite  onze  ou  douze 
cents  lieues,  que  les  sinuosites  du  cheinin  peuvent 
porter  a  quinze  ou  seize  cents,  ce  qui,  divise  par  deux 
cent  vingt  et  une  journt^es ,  donnerait  environ  sept 
lieues  par  etape  moyenne  de  caravane. 

Telle  est  une  des  voies  suivies  par  les  pfelerins  et  par 
les  marchands  de  la  Senegambie,  qui,  pour  se  rendre 
a  la  Mecque  ,  suivcnt,  enlre  le  15"  et  le  10'  degrc  de 
latitude,  les  inarches  situes  sur  les  confins  de  la  Nigritie 
niusulmane  et  de  la  Nigritie  idolatre. 

A  cctte  voic  paraliele  a  I'equateur,  il  nous  laut 
ioindrc  inainienant  une  voie  pcrpendiculaire  passant 
par  le  Ouaday.  Celle-ci  a  ite  indiquee  par  des  voya- 
geurs  aiusulmans  a  M.  Fresnel ;  ct  le  recit  du  Cheykh 
el-Tounsy  a  ))erniis  a  M.  Joniard  de  I'^tudier  sous  un 
nouveau  jour.  Je  veux  parler  de  la  route  partant  de  la 
Cyrenaique,  et  aboulissant  a  Wara,  capitale  du  Oua- 


I 


(  /i80  ) 

day,  siluee ,  d'apres  I'esliine  des  caravanistes  musul- 
inans,  sur  la  meridienne  de  Benghazi  et  mfeme  un  peu 
plus  a  I'ouest,  ce  qui  deplacerail  la  position  da  lac 
Tchad,  et  oldigerait  a  refaire  nos  cartes  de  I'interieur 
du  Soudan. 

En  attendant  qu'on  ait  ^ciairci  ce  point  g^ographique, 
^ludions  la  question  commerciale  qui  s'y  rattache ;  et 
d'abordrevenonssurrimportance  generale  du  Ouaday. 

Nous  Savons  deja  que,  sous  le  sultan  Saboun ,  cet 
Etal  fit  la  conquete  du  Baghirnieh.  II  s'est  depuis  lors 
etendu  a  I'ouesl,  jusqu'au  lac  Tchad,  par  I'occupation 
du  Kaniim  ,  et,  plus  r^cemment,  son  influence  a  eti 
prouvee  ]iar  I'expedilion  contie  le  Bornou.  Celle-ci  a 
eu  lieu  en  18Zi5  (1).  L'arm^e  des  Ouadayens,  presque 
uniquement  coniposee  de  cavalerie,  Irainait  un  bagage 
immense  et  quelques  pieces  de  campagne.  Le  sultan 
sch^rif  la  commandait,  et  apr^s  etre  passed  par  le  lac 
Fittre  et  par  Modto,  capitale  du  Baghirmeh,  il  travei'sa 
le  fleuve  Scharry  sur  de  grands  bateaux ;  et  en  soixante- 
trois  journ^es  de  marche,  il  arriva  a  Logoun.  Ayant 
aloi's  mis  en  d^route  les  Bornouans,  il  fit  la  conqu6le 
de  tout  leur  royaume  ;  et  bien  qu'il  ne  put  la  conserver 
apres  I'evacuation  de  scs  troupes,  il  y  fit  sentir  n^an- 
moins  le  role  dominateur  du  Ouaday  sur  les  regions  a 
Test  et  au  sud  du  lac  Tchad. 

Avec  un  Etat  aussi  preponderant,  la  politique  afri- 
caine  se  pose  naturellement  celte  question  :  Comment 
el  par  quelle  voie  se  mettre  en  relation  avec  lui?  Or  le 
sultan  du  Ouaday  nous  en  indique  le  moyen  parl'in- 

(i)  Memoire  de  M.  Fresnel  sur  le  WcJay,  Bulletin  de  la  Societd  dt 
qeocjraphie,  septembre  i85o. 

HI.    MAI.     5.  i)3 


(  h90  ) 

fluence  qu'il  exorce  egalement  sur  la  route  des  cara- 
vanes  de  Tripoli  et  de  la  Cyr6naique.  Et  d'abord  il  la 
fait  senlir  d'une  inani^re  indirecle,  mais  pourtant  de- 
cisive, jusque  chez  les  Tibbous,  (jui  se  parlagent  avec 
les  Fezzanais  la  protection  de  celle  grande  voic  coui- 
mcrciale. 

Ainsi ,  par  les  Arabes  Mohamid  ,  qu'il  peul  lancer  a 
volonl6  conlre  les  premiers,  il  oblige  leur  sullan  a  se 
rendre  responsable  de  toutes  les  perles  occasionn^es 
chez  lui  aux  voyageuis.  La  s6curit6  des  caravanes  y  est 
done  parfaite  ,  et  c'esl  pour  les  I'ecevoir  sur  les  bords 
de  la  M^diterranee  qu'il  avail  6iabU  un  agent  commer- 
cial a  Benghazi,  princi|)ale  ^chello  do  la  Cyrenaique. 

La  est  le  c6t6  tout  nouveau  et  le  plus  abordable  du 
Oiiaday  ;  et  c'est  par  la  que,  des  I'annee  1809,  celte 
region  a  ^te  pour  la  premiere  t'ois  miso  on  rapport 
direct  avec  la  Mediterran(^e. 

Le  sultan  Saboun,  ce  Mohammed-Ali  du  DSr-Seleih, 
voulut  alors  6cbanger  directement  avec  Tunis  et  Tri- 
poli les  marchandises  que  ses  predecesseurs  livraient 
aux  Fozzanais ;  cherchant,  en  d'autres  termes,  a  sup- 
primer  ces  courtiers  du  desert,  pour  economiser  leur 
courtage  et  s'approprier  le  gain  de  ces  interm^diaires 
parasites,  il  expedia  par  la  route  ordinaire  du  Fezzan 
une  caravane  marchande  destin^e  tout  enliere  a  Tri- 
poli. Les  Fezzanais,  qui  avaienll'habitude  d'acheler  en 
bloc  les  cargaisons  du  passage  pour  les  revendre  en- 
suite  dans  le  Magreb,  iurent  surpris  de  1  innovation  du 
sultan  Sabodn,  et  n'admirent  pas  qu'elle  tut  pour  eux 
un  progrfes  economicpie.  Ne  pouvant  done  acheler  les 
esclaves  qu'on  ret'usait  de  leur  vendro,  ils  en  retinrent 
une  partie  corame  ran^on ;  ce  que  nous  appelons  vo- 


(  A91  ) 

lonliers  pillage  chez  les  nomad es  afrlcains,  en  le  nom- 
manl  en  Europe  droit  de  transit.  Eh  Lien !  c'est  ce 
droit  inusile  de  transit  qui  irrilaprolondemenlSaljoun, 
ct  le  porta  a  s'ouvrlr  une  route  directe  sur  la  Mediler- 
ranee. 

Guide  par  les  indications  d'un  Bedouin,  voisin  du 
Barcali,  qui  s'etait  egare  dans  le  deserl  et  avait  et^  re- 
cueilli  auOuaday,  il  dirigea  une  premiere  caravane  sur 
Djalau  et  Audjelah,  et  de  la  sur  Dome  et  Benghazi, 
Celle  expedition  commerciale,  qui  renionte  a  I'annee 
1809,  ayanl  pleinement  r(^ussi,  d'autres  la  suivirenl 
et  se  renouvelerent  en  1814,  1815,  1818,  el  plus  tard 
aprfes  la  niort  de  Sahouu  en  1832,  1837,  18/iO,  1843 
el  1846.  Cos  derniers  et  precieux  details  ne  se  trouvont 
pas  dans  la  relation  du  cheykh;  niais  ils  ont  6l6  decou- 
verts ,  gr&ce  aux  indications  que  M.  Jomaid  y  avait 
lues  avant  qu'elle  fut  publiee,  et  grace  a  la  mission 
que  re^ut  notre  savant  orientaUste,  M.  Fresnel,  envoys 
a  cet  effet  dans  la  Cyrenaique. 

C'est  a  celui-ci  qu'on  doit  I'hisloire  des  caravanes 
en  question,  lesquelles  ne  laissent  plus  aucun  doute 
sur  les  communications  directes  du  littoral  de  la 
M^diterrande  avec  le  Ouatlay  (1)  :  une  route  d'environ 
ciuquanle-sept  journ^es  de  marche,  a  travers  un  ar- 
chipel  d'oasis  facile  a  parcourir  pour  quiconque  se 
mellra  bien  au  courant  des  moeurs  al'ricaines. 

Que  r6sulterail-il  maintenant  de  cetle  nouvelle  com- 
munication ouverte  sur  I'inlerieur  de  I'Alrique  ? 

L'ancienne  route  du  Fezzan  a  6te  jusqu'a  ce  jour 

(i)  Memoire  de  M.  Fresnel  sur  le  Waday,  dans  le  Bulletin  de  la  So- 
ei^te  de  geographic  de  1 85o. 


(  /i92  ) 

exploil6e  par  les  Anglais,  qui  s'appuient  volonliers  sur 
Tripoli;  uiais  la  voie  qui  part  de  Benghazi  une  fois 
d^couverte ,  tousles  avantages  semblcnt  appartenir  a 
cetle  dernifere,  qui  nous  rapproche  beaucoup  plus  vite 
du  Ouaday.  Ce  sorait  done  a  la  France  a  clioisir  a  son 
tour  celle-ci,  comme  I'itin^raire  naturel  de  ses  futures 
relations  avcc  le  Soudan  oriental. 

Cette  alternative  d'ailleurs  n'existe  ])as,  et,  pour 
elle ,  c'est  bien  plutot  une  niicessile,  puisque  la  route 
du  Kordofan,  que  les  voyageurs  suivaient  de  prefe- 
rence, est  actuellement  ferm6e.  On  sait,  en  eCFet,  que 
I'occupatiou  de  ce  pays  par  les  troupes  egypliennes  a 
mis  le  Darfour  dans  un  elat  de  mefiance  et  d'liostilite 
permanente  envers  I'ligypte  ,  el  I'a  i-endu  ,  sous  peine 
de  niort  ou  de  caplivilti,  lout  a  fait  inabordable  du  cote 
de  rOrienl.  II  ne  resterait  done  plus  que  les  routes  du 
nord  ,  parmi  lesquelles  le  che\kli  el-Tounsy  nous  a 
signalc  la  plus  direele  et  la  plus  facile.  Celle-ci,  des- 
tinee  a  rclier  lancienne  et  feconde  Cyrenaique  a  I'in- 
terieur  du  Soudan ,  est  une  porte  de  plus  ouvcrte  aux 
speculations  du  commerce,  comme  a  lous  les  devoue- 
menls  civilisateurs;  et  il  faut  esp^rer  que  le  gouverne- 
ment  fran^ais  n'abandonnera  pas  a  d'autres  nations 
I'honncur  d'y  envoyer  les  premiers  missionnaires  de 
la  science.  Ce  but  est  digne  de  lui,  comme  tant  d'au- 
tres, chaque  jour  plus  envids,  et  lous  con^us  a  la  meme 
source,  au  souvenir  iuspiralcur  d'une  heroiquc  et  16- 
conde  croisade. 

C'est  depuis  I'expedition  frangaise  en  ifegypte,  et  plus 
recemmcnt  depuis  noire  conquele  de  I'Algerie,  que 
les  investigations  sur  le  continent  africain  ont  acquis 
ce  haul  degr6  d'importance.   L'Alg6rie  tend  deja  la 


<  1 

'J 


(  593  ) 

main  a  notre  colouie  du  Senegal,  si  voisine  du  Nii^er; 
et  une  fois  nos  a\ant-postes  s'y  reliant  par  caravanes, 
qui  les  erapecliera  d'attaquer  ensuite  les  citadelles 
myst^rieuses  des  Soudans  musulman  et  idoIulrePLa 
France  a  done  iin  noble  but  a  atteindre ,  une  mission 
vraiment  providentielle  a  remplir  en  Afrique.  Dieu 
veuille  qu'elle  n'y  fasse  point  d^faut ! 


LES  CINQ  PORTS  DE  LA  CHINE 

OUVEBTS 

AU  COMMERCE  STRANGER  (i), 

PAR 

M.   DE    L\    UOQUETTE. 


((  Un  des  articles  les  plus  importants  du  traite  de 
Nankin  [IShll-ll^)  est  celui  qui  fixe  les  cinq  ports  com- 
merciaux.  Lorsqu'on  les  choisit ,  nous  olions  encore 
fort  peu  au  fait  de  I'etat  du  pays  sous  le  rapport  topo- 
grapbiquo.  Le  port  de  Canton  etait  le  seul  qui  nous  fut 
connu ;  ceux  de  Ningpo  et  A'  Juioy  ^taient  d^sign^s 
dans  les  instructions  du  gouvernement  comme  ayant 
et6  ouverls  autrefois  au  commerce  europeen;  mais  on 
y  mentionnait  aussi  Shnnghne  ( Chang -liai)  et  Foo- 
chowfoo,  qui  otaient  enlierement  nouveaux  pour  nous. 
Le  port  de  Slianghae,  qui  avail  du  moins  el(i  visile, 

(i)  (jet  article  a  ete  oxtrait,  par  les  redactcnrs  de  \' Alhenwuni,  de 
I'ouvrage  intitule  :  China  cluriiii/  the  war  and  xincc  the  peace,  recem- 
meiit  publie  a  Loiulres  par  sir  John  Davis,  charge  de  la  mission  an- 
glaise  en  Chine  pendant  les  cini|  ou  six  dernicres  annees  qui  ont  siiivi 
la  pais  entre  cet  empire  et  I'Anffleterre.  D.  L.  R, 


{ im  ) 

s'est  trouv6  etre  par  l'ev6nement  un  tr^s-heureux 
choix.  Quant  a  Foo-cliow-foo  ( Fou-tcheou-fou ),  sur 
lequol  on  n'avail  aucune  donn^e  pratique  ,  il  se  re- 
commanclailpnr  sa  posilion  g^ographique  relalivenient 
aux  dislricts  qui  fournissent  le  Ih^  noir.  Mais  une 
experience  de  plus  de  sept  ann^es  a  prouv6  qu'on 
s'elait  completement  tronip6  a  son  sujet. 

»  En  passant  ces  ports  successivernenl  en  revue,  on 
commengant  par  le  sud  ,  sous  Ic  rapport  des  inconve- 
nients  et  des  avantages  qu'ils  presentent ,  on  est  con- 
duit aux  remarques  sulvantes  :  1°  La  situation  du  port 
de  Canton  le  rendaitdans  I'origine  fort  peu  convcnahle 
pour  un  commerce  avec  I'Europe,  et  le  gouvernement 
chinois  I'avait  ouvert  aux  dlrangers  uniqucmont  parcc 
qu'il  se  Irouve  le  plus  eloigne  de  P6kin.  Son  (^Inigne- 
ment  des  provinces  qui  produisent  le  th6 ,  la  liaule 
temperature  de  son  climat,  peu  favorable  et  au  tem- 
perament des  Anglais  et  a  la  consommation  des  pro- 
duils  de  leurs  manufacturis ,  lout  enfin,  a  I'exception 
des  avantages  que  son  port  offrait  n  in  navigation, 
fait  nattre  des  objections  contre  un  tel  ]>()rt ,  qu'on 
n'avait  adopts  que  parce  qu'il  n'y  en  avail  point 
d'autres  ou  il  fut  permis  de  so  rcndre.  Le  commerce 
qu'on  y  faisail ,  quoique  considerable,  avail  etc  en 
quelque  mani^re  force ;  mais  par  suite  de  I'irapor- 
lance  qu'il  avail  prise,  el  du  long  espace  de  temps  que 
cet  elat  de  clioses  avail  dure,  il  ne  devenail  pas  pos- 
sible dele  transporter  ailleurs  subitement ;  tout  chan- 
gement  de  cette  nature  ne  saurait  s'efTectuer  qu'a  la 
longue  et  avec  le  concours  de  I'experience.  Quoique 
la  riviere  de  Canton  soil  d'une  navigation  facile,  il  faut 
reconnaltre  cependant  que  le  port  a  toujonrs  presenie 


(  A95  ) 

et  pr^sentera  toujours   de  grands   d^savantages.   Le 
commerce  des  Anglais  avec  la  Chine  s'y  fait  plus  avan- 
lageusement  le  long  de  leurs  navires,  et  la  profondeur 
de  I'eau  ne  permet  a  la  majeure  partie  d'enlre  eux  de 
se  rapprocher  de  la  ville  que  d'environ  8  milles.  A 
Chang -hai,  au  contraire,  les  batiinents  sont  ancr^s 
pr6s  des  magasins  de  la  station  anglaise ,  et  a  Amoy, 
en  face  de  la  ville.  Ce  sont  la  des  avantages  de  la  plus 
haute  importance.  2"  Le  plus  grand  des  inconvenients 
que  presente  le  port  d'Amoy,  c'est  la  pauvret(^  com- 
parative  des  habitants   et  le   peu   d'etendue   de   son 
commerce ;  mais  cet  etat  de  choses  peut  fitre  modifi^ 
par  suite  du  developpement  de  nos  relations  commer- 
cinles   elles-mftmes.    Les    ofliciers  du   gouverneraent 
chinois  etaient  d'abord  fori  mal  disposes,  et  ils  tente- 
rent  d'y  6tablir  des  monopoles  et  de  pers^cuter  les 
natlonaux  qui  avaient  engage  des  affaires  avec  nous; 
n)ais  ces  obstacles  ne  tarderent  pas  a  6tre  heureuse- 
ment  surmonte?.  Les  progr^s  commerciaux  de  ce  port 
ont  6t6   peut-etre  retard^s  en  quelque  sorle  par  le 
voisinage  et  la  vivalit^  des  stations  des  navires  faisant 
le  trafic  de  I'opinm,  etablis  a  Chincheiv  et  a  Chimmo ; 
mais  les  avantages  du  port  d'Amoy,  qui  offre  tant  de 
siiretd  et  est  d'un  acces  si  facile,  doivent  militer  en  faveur 
de  ce  port,  qui  d'ailleurs   a  616  longtemps  I'un  des 
marches,  pour  le  detroit  de  Malaca ,  des  produits  des 
lies  Malaies.  3°  Le  port  de  Foo-chow-foo  (Fou-tcheou- 
fou)    a   6t6   d^signe   d'apres   des   donn^es   beaucoup 
moins  certaines  sur  la  localile  qu'aucun  des  nouveaux 
ports.   L'exploralion  soigneuse  de  la  riviere ,  faite  par 
le  capitaine  Collinson ,  a  prouve  qu'elle  6tait  d^favo- 
rable,  sinon  dangereuse,  et  il  y  exisle  le  meme  des- 


(  490  ) 

a\antage  qu'a  Canton,  qu'aiiciin  navire,  quel  quo  soil 
son  lonnago,  ne  peul  s'approclier  de  la  ville  qu'a  une 
distance  d'environ  8  milles.  La  Proserpine,  bateau  a 
vapeuf  en  fer  lirant  seulenienl  5  piedsd'eau,  rcsta 
echouee  pendant  deuxheures  en  descendant  la  riviere; 
et  le  Spiteful  ful  loUeinent  endomaiage ,  qu'il  dut  se 
rendre  a  Bombay  pour  s'y  faire  reparer.  Le  Min  est 
rempli  de  rochers  cl  de  has-fonds;  le  reflux  court 
8  nceuds  a  I'lieure,  et  la  dilFerence  de  niveau  y  est  de 
18  pieds  d'une  mar^e  a  I'aulre.  Du  reste  ,  les  beautes 
pittoresques  de  celle  riviere  sont  aussi  remarquables 
que  son  insignifiance  comme  voie  commerciale ;  en 
quelques  parlies,  elle  ressemble  extreniemont  au  Fvhin. 
Aux  desavantages  nalurels  de  ce  port  il  convient 
d'ajouler  les  intrigues  hostilcs  du  gouverneur  de  la 
province,  Lew-Yunko,  donl  j'ai  d^ja  parle.  4°  Ningpo 
est  assez  bien  situe  quruil  a  la  facilile  de  Facets ,  se 
Irouvanl  a  environ  11  a  12  uiilles  en  atnont  de  la 
riviere,  dejiuis  son  entree  a  6Vi/«<?/t(?ii' justju'au  con- 
fluent de  deux  cours  d'cau  venant,  I'un  au  nord  de 
Tsekee,  el  I'aulre  de  Foong/uva,  au  sud.  Le  consulat 
anglais  a  m  dtabli  dans  une  niaison  de  campagnc 
appaitenanl  autrefois  a  un  riche  proprii^taire,  situce 
sur  les  bords  de  la  riviere,  qui  csl  nioins  large  que  la 
Tamise  a  Fulham,  eten  face  du  cole  oriental  tie  la  ville. 
Malgr6  les  excellentes  dispositions  de  la  population  de 
Ningpoo  (Ning-po)  et  les  belles  soies  que  le  pays  fournit, 
ce  port  a  et6  couqilelement  ec]ips6  par  le  tres-grand 
voisinage  et  les  avantagcs  infiniment  superieurs  du 
nouveau  |)orl  |)lus  septentrional  dont  je  vais  parler. 
5°  Shnnghae  (Sbankhay).  Quoique  les  bailments  mar- 
chands  eprouvent  queUjue  didicullc  a  s'approcher  de 


(  ^97  ) 

I'exterieur  de  son  port,  ils  peuvent  cepenclant  jeter 
I'ancre  en  face  de  la  ville.  L'emplacement  accorde  ici 
au  commerce  anglais  esl  Ir^s-avantageux;  il  comprend 
plus  de  cent  acres  de  terrain  propre  a  des  construc- 
tions. C'est  un  espace  aere  et  aux  abords  faciles,  a  un 
mille  environ  do  la  ville,  au  point  ou  une  branche  de 
la  riviere  conduit  a  Soocbow,  et  forme  un  angle  avec 
le  cours  d'eau  principal.  Beaucoup  de  demandes  ont 
m  faites  pour  un  entrepot  des  prod  aits  des  manufac- 
tures de  coton  de  la  Grande-Bretagne,  aussi  bien  que 
de  soies  brutes  ou  ^crues,  pour  les  I'etours.  Le  com- 
merce du  the  y  a  pris  egalement  un  d^veloppemenl 
considerable,  et  tout  porte  a  croire  que  cette  place 
fmira  par  supplanler  Canton,  ou  le  prix  de  ce  dernier 
article  sera  toujours  plus  eleve,  en  raison  de  I'eloigne- 
ment  des  points  d'ou  on  le  tire  par  voie  de  terre.  C'est 
a  un  excellent  ofllcier  cbinois,  I'intendant  de  Shanghne^ 
et  aux  judicieuses  dispositions  du  consul  anglais  qui 
y  reside,  qu'on  doit  allribuer  en  grandc  partie  les  pro- 
grfes  fails  dans  ce  port  important.  » 


(  498  ) 
DISCOURS  PRONONCt  PAR  M.  JOMARD 

AllX 

OBSEQUES  DE  M.  WALCKElNAER, 

29  AVRiL  1852. 

Messikurs, 
La  Soci6l6  fie  geogrophie,  ainsi  quo  la  science  objet 
de  sestravaux,  fait  aujourd'hui  une  grande  perle  dans 
la  personne  du  haron  Walckonaer.  Tonics  les  parties 
(le  la  science  lui  etaienl  familieres  au  inome  degr6  ;  la 
g(iograplue  ancicnne  el  la  geogi-apliie  sacr^e,  la  geo- 
graphic niodeinc,  la  geographio  du  moycn  &ge,  la 
slalistiqiie,  la  topograpliie,  la  connaissance  des  races, 
enfin  cclle  de  la  lene  6tudiee  sons  le  rapport  de  sos 
habitants,  de  ses  productions,  de  ses  cliniats  divers, 
et  des  lois  qui  rdgissent  le  monde  physique.  Comme 
il  6tait  sorti  de  la  grande  6cole  creee  en  179/i,  il  en 
porta  les  principos  et  I'csprit  de  m^thodo,  dans  cette 
etude  de  predilection  coinme  dans  Ions  ses  travaux, 
etil  contribua,  avec  le  baron  de  Humbloldl,  avecMalte- 
Brun  et  d'autres  hommes  d'elite,  a  faire  envisager  la 
science  sous  un  nouveau  jour,  sous  un  aspect  d'en- 
seinble,  je  veux  dire  d'un  point  de  vue  tres  6leve.  II 
n'en  etail  pas  moins  dou^  d'un  esprit  eminemment 
analytique  :  il  aimait  a  pen^lrer  dans  les  details  in- 
limes  des  questions.  Patient,  sagace,  travailleur  infali- 
gable,  pourvu  d'une  rare  organisation,  il  est  venu  a 
bout  de  niener  de  front  et  d'accomplir  beaucoup  d'en- 
treprises,  dont  chacune  aurait  pu  occuper  un  hoinme 
tout  enlier.  Peu  de  savants  ont  eu  une  vie  plus  labo- 
rieuse  et  plus  remplie,  peu  ont  possede  une  critique 


(  li99  ) 

plus  juclicieuse  que  celle  qu'il  a  d^ployee  en  plusieurs 
de  ses  Merits,  rappelant  ainsi  un  noin  cher  a  la  lilt^ra- 
lure  ancienne. 

II  n'apparlient  pas  a  I'oi'gane  de  la  Society  de  geo- 
graphie  de  parler  des  travaux  si  varies  qui  ont  occupe 
sa  vie,  et  ce  n'est  pas  d'ailleurs  dans  celte  trisle  en- 
ceinte qu'on  peut  payer  le  juste  tribut  qui  lui  est  dd  ; 
mais  on  peut  du  moins  citer  ses  principales  produc- 
tions geograpliiques,  celles  (jui  doivent,  a  I'egal  des 
aulres,  le  recomniander  ei  la  post^rite.  Lorsque  John 
Pinkerton  eut  fait  paraitre  sa  grande  geographic  , 
M.  Walckenaer  se  joignit  au  geomelre  Lacroix  pour 
on  donner  uiie  edition  frangaise  ;  il  sut  I'enrichir 
d'une  foule  de  notions  precieuses  d'histoire  naturelle, 
science  dans  laquelle  il  n'6tait  pas  moins  vers6.  Le 
premier,  il  publia  I'ouvrage  in^dit,  et  presque  enti^re- 
ment  ignor^  de  I'lrlandais  Dicuil,  Le  Monde  maritime 
et  la  Cosmologie  suivirent  de  pr^s  CGiie  ^^i\.\on princeps . 
Les  Recherches  sitr  Vinterienr  de  V Ajrique  ont  rappel^  et 
fixe  I'attention  sur  ce  continent  mysl^rieux,  et  n'ont 
pas  ete  sans  influence  sur  les  efforts  multiplies,  tenths 
depuispour  declarer  le  voile  qui  en  cache  le  centre  a 
nos  yeux. 

Dans  sa  grande  Histoire  generale  des  voyages,  mal- 
heureusemeut  inachevee,  il  consacra  plus  de  vingt  vo- 
lumes a  ce  meme  sujet,  qui  a  le  privilege  d'attirer  les 
regards  de  I'Europe  civilisee,  parce  que,  placee  en  face 
el  conime  a  la  porle  de  la  Grt!ce  et  de  I'llalie,  de  la 
France  et  de  I'Espagne,  I'Afrique  serable  defier  ccs  na- 
tions savanlcs,  et  provoqucr  les  expeditions  de  decou- 
verles,  punissaiit,  trop  souvent,  helas !  les  voyageurs 
aventureux,  de  leur  insatiable  curiosite.  Mais  le  mo- 


(  500  ) 

ment  n'est  pas  loin  oii,  grace  aux  travaux  des  savanls, 
au  courage  des  exploralcuis,  le  voile  sera  enfin  arra- 
che,  el  M.  Walckenaer  aura  la  gloirc  d'y  avoir  con- 
tribu^. 

Son  dernier  grand  ou\rage  est  la  Geographic  des 
Gaules.  Quelques  lacunes,  quelques  imperfections  de 
detail,  n'otent  rien  au  mc^rile  de  celte  production  sa- 
vante,  dont  de  recenles  ddcouvertes  faisaient  sentir  le 
besoin,  et  qui,  si  elle  n'a  pas  effac6  I'tEuvre  de  D'An- 
ville,  sera  loujours  consult^c,  ainsi  que  les  cartes  an- 
cienne  et  physique  de  la  France  qui  I'accompagnent, 
par  tons  ccux  qui  veulont  6tudier  a  fond  I'histoire  de 
notre  patrie,  et  la  constitution  physique  du  terriloire 
frangais.  Toutes  ces  productions  assurenta  M.  Walcke- 
naer unc  des  premieres  places  parnii  nos  plus  savants 
geographes,  a  cote  des  Guillaume  Uelisle,  des  D'An- 
ville,  des  Barbie  Du  Bocage  et  des  Gossellin.  La  mort 
est  venue  inlerrompre  des  Iravaux  qui  auraient  ajoule 
a  sa  rdpulalion  europeenne,  et  creer  un  grand  vide 
parmi  les  savants,  parini  les  gens  de  lettres,  surlout 
dans  le  sein  de  la  Societi^  de  geogra[)liie,  dont  il  elait 
un  des  premiers  fondateurs,  comme  il  en  laisse  un 
bien  douloureux  j^arnii  les  slens,  parmi  ses  amis,  et 
parmi  lous  ceux  que  reunissait  aulour  de  lui  son  alla- 
bilitd. 

La  Biblioth6que  nationalo  nc  fait  pas  une  perte 
moins  sensible  que  la  Societe  de  g(^ograplii(! ;  clle 
aura  de  la  peine  a  rctrouver  un  liommc  aussi  prolond 
dans  la  science  qu'il  repr^senlait. 


(  501  ) 
NOUVELLE  NOTE  DE  M.  DE  PARAVEY 

sun 
LES   NIAM-NIAMS. 


Le  chevalier  de  Paravcy,  ayant  el6  visiter  la  galerie 
zoologique  du  capitaine  Huguet,  pr^s  la  barriere  de 
rfitoile,  y  a  questionn^  un  des  deux  n^gres  du  centre 
de  I'Afrique  qui  soignent  les  animaux  f^roces,  et  a  su 
de  celui  des  deux  qui  parle  le  frangais  assez  bien,  que 
les  Niaiii-Niams,  ou  negres  a  queue  el  anthropophages, 
lui  ^taient  bien  connus.  II  ne  dit  pas  en  avoir  vu  par 
lui-meme,  mais  il  a  chante  a  M.  de  Paravey  une  chan- 
son afiicaine  ,  sur  ces  IViam-Aiams,  chanson  dent  on 
pourrail  avoir  par  lui,  et  le  texte  et  la  traduction. 

A  regard  de  la  position  de  ce  peuple,  negre  a  queue, 
M.  de  Paravey  a  constate  qu'on  la  mot  dans  les  limiles 
du  sud,  et  dans  des  pays  de  monts  et  de  forets,  ou  ils 
vivent,  dit-on,  sur  des  arbres  et  comme  dans  des  nids. 

Or,  c'est  precls^ment  la  position  et  le  site  que  les 
negres  einmenes  au  Bresil  en  csclavage,  el  qu'a  inter- 
rogesM.Castelnau,  assignentaux  Niam-ISiams  a  queue, 
du  sud -est  du  Soudan. 


(  502  ) 
EUROPE.  —  IVonvelles  gcograpliicines. 


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(  50/1  ) 

ASIE. 
JaPON.     —     IlES     PRliTENDUES    ofecOUVERTES     UNTRR     I.E 

Japon  et  les  ILES  LiEou-KiEou.  —  Lc  joumal  su^dois 
Post  och  Inrikes  Tidningar  contenait  dans  son  numero 
du  7  avril  1852  I'annonce  suivanle,  dont  la  plupart 
des  jouniaux  francais  ont  public  la  substance  en  la  d6- 
naturanl  un  peu, 

«  Le  chef  du  d^parlement  de  la  marine  vient  de  re- 
cevoir  du  capitaine  J.  T.  Lubock  la  lettre  suivante , 
6crite  de  Golherabourg  : 

))  Je  soussigne  ,  capilaine  du  Irois-niats  AntUope  ^ 
appartenanl  a  la  maison  Gronwall  el  conipagnie,  de 
cetle  ville,  ai  I'honneur  de  donner  avis,  qu'en  navi- 
guanl  de  Hong-Kong  a  San-Francisco,  j'ai  d^couvert 
dans  la  mer  du  Japon,  entre  les  iles  Loo-Choo  (Lieou- 
Kieou,  sans  doute)  el  le  Japon,  Irois  iles  qui  n'6taienl 
point  marquees  sur  les  cartes  marines  pour  18/17.  Ces 
Iles  sonl  situecs  par  28  el  29  degres  de  latitude  nord, 
et  128  et  130  degres  de  longitude  est,  et  ont  6l6  porlt^os 
par  nioi  sur  nies  cartes  sous  le  nom  A' iles  du  Prince- 
Oscar. 


Gotembourg,  i853. 


»  Signe  :  J.  T.  Lubeck.  » 


En  supposant  que  la  longitude  est  celle  de  Green- 
wich, il  n'est  pas  douleux  que  les  iles  dont  parle  le  ca- 
pilaine Lubeck  sonl  les  iles  Ou-Sima,  C/eopdtre,  cic, 
plac6es  sur  la  carte  n"  117/1  du  d^pot  de  la  marine, 
dress^e  par  M.  de  la  Roche-Poncie ,  ingenieur-hydro- 
graphe,  d'apr^s  sespropres  obser\ aliens faites  enl8A6. 
Ces  iles  sonl  siluees  entre  les  28"  et  29"  degrds  de  la- 
titude nord,  el  entre  les  1250  /jO'  et  127*  40'  de  longi- 
tude orientale  de  Paris. 


(  505  ; 

L'lle  Ou-Sinia  a  d^jt'i  tloniie  lieu  ;i  une  note  ins6r6e 
dans  le  lonie  V,  p.  95,  des  Anmiles  hfdrographiques ; 
elle  a  6l.e  vue  en  18/i9  par  la  fregale  h  Preeble,  dont  le 
capitaine,  ainsl  que  celui  de  I  Ant  Hope,  avait  cru  a  lort 
faire  une  decouverte. 

Ces  observations  nous  ont  ole  luuinies  au  Depot  dc 
la  marine,  et  elles  figureronl  dans  le  prochain  numero 
des  Jnnales  hydrograpIiUptes . 


AMfiHIQUE. 


NOUVELLE     SoCIJiXi      GiOGRAPHIQUK     ET     STATISTIQUE  , 

FONDLE  Aux  firATS-llNis.  — Les  joumaux  americains 
annoncent  qu'une  nouvelle  Soci^te  gdographique  et 
statistique  vient  d'etre  fondle  a  New-York.  Dans  la 
reunion  qui  a  eu  lieu  dans  cette  vilie  le  9  octobre  1851, 
on  a  adopts  une  constitution  et  complete  I'organisa- 
tion  de  la  Societe,  M.  Henri  Grinnell,  connu  par  les 
ddmarches  qu'il  a  faites  pour  parvenir  k  la  diicouverte 
du  capitaine  Franklin,  a  et(^  ^lii  pr(!!sident;  MM.  Joshua 
Leavitt ,  Henry  E.  Picrreponl,  Archibald  Russell  et 
Freeman  Hunt,  vice-])residenls ;  Charles  Cougdon, 
Irdisorier;  Charles  A.  Dan,  secri^tairc-rapporleur,  etc. 


III.    MAI.    6. 


(  500  ) 

Acieis  «le  la  ^oeteK". 

ProceM-verbaiix  ilea  seances,  Oiivrageii 
olTeris,  etc. 


PnAsiUENCK     DE     M.    GUICNIAUT. 


Proces-7'crbal  de  la  seance  tin  7  nuii  1852, 

Le  proct'S- verbal  de  la  derniere  seance  est  In  e.t 
adopts. 

M.  Antoine  d'Abbadie  met  sous  les  yeux  de  la  Com- 
mission ccnlrale  une  esquisse  du  cours  du  Nil,  rcpre- 
^ienlant  les  dilTerentcs  opinions  emises  au  sujot  du 
cours  su])tnieur  de  ce  grand  fleuve,  par  MM.  d'Ar- 
naud,  Knoblocbcr,  Becke  el  lui.  II  est  prid  de  voidoif 
bien  compltler  cclle  esquisse. 

M.  Rulherford-Alcock,  consul  general  d'Anglelerre 
a  Sliang-liai  (Cbine),  ecrit  de  eelte  ville  sous  la  date 
du  IQjanvier  1852,  pour  remercier  la  Sociel^  di;  I'avoir 
admis  au  noinbrc  de  ses  membres  ;  il  saisira  avec  em- 
]iressement  toutcs  les  occasions  qui  sc  presonleront 
pour  communiquer  Ic  Iribul  de  ses  eludes  sur  les 
vaslcs  conUecs  de  la  Cliine,  el  annonce  qu'il  a  cliargi!! 
M.  Woodliead  (1,  James  Saint-Adelphi),  son  agent  a 
Londres,  d'acquiller  sa  colisalion  annuellc. 

M.  le  secretaire  de  la  Socield  pbilolechnique  (Paris), 
adresse,  avec  sa  lettrc  du  2  niai  courant,  qualrc  bii- 
lels  pour  assisler  a  la  seance  publique  du  9. 

M.  Paul  Autran,  secrclaire  perpetuel  de  I'Acadeniio 
des   sciences  de  Marseille,  annonce  dans  une  lellre 


(  507  ) 
parliculi^re  adresst^e  le  17  avrll  an  secretaire  general 
rle  la  Coiiimisslon  centrale,  qii'il  a  regu  le  nuuiero  du 
BnUetin  d'aout-septembre  1851,  que  ce  dernier  avail 
envoye  a  I'Academie,  et  qu'il  en  rendra  coinpte  dans 
I'line  des  stances. 

M.  le  directeur  des  colonies  annonce  an  secretaire 
gi^neral,  sous  la  dale  du  6  niai,  en  reponse  a  une  de- 
mande  que  celui-ci  lui  avail  adressee,  qu'il  a  autorise 
le  graveur  de  la  carte  de  M.  Ilecquart,  voyageur  en 
Afrique,  a  s'entendre  avec  M.  de  la  Roquelte  et  a  tirer 
pour  la  Socicte  tel  nombre  d'exeniplaires  que  le  secre- 
taire g^n^ral  d^sirera. 

M.  Francisco  Coello,  correspondant  de  la  Society 
a  Madx'id,  fait  homtuage  do  sept  nouvelles  cartes  de 
son  atlas  d'Espagne  ;  et  dans  une  letlre  particuli^re, 
qu'il ecrit  au  secretaire  genex'al  sous  la  date  du  15  avril, 
il  annonce  divers  Iravaux  qu'il  se  propose  de  sou- 
mettre  a  la  Societe. 

iM.  W.  Milutine,  secretaire  de  la  Soci^tt^  g^ogra- 
phique  iinperiale  deRussie,  transnietde  Saint-P^ters- 
bourg,  avec  sa  lettre  du  8  mars  (1852),  un  oxemplaire 
du  rapport  public  (en  langue  russe)  par  cette  Soci(^t6 
et  sous  sa  direction,  sur  les  observations  faites  pen- 
dant I'eclipse  du  soleii  du  Kijuillct  1851. 

M.  Vander  Maelen  envoie  de  Bruxclles,  avec  sa 
lettre  du  10  avril,  un  extraitdu  dernier  travail  ofTiciel 
sur  la  statislique  de  la  Belgique  que  le  secretaire  ge- 
neral de  la  Commission  centrale  lui  avail  demande. 

M.  Ferry  fHippolyte)  annonce  au  secretaire  g^n^ral, 
par  sa  lettre  datee  de  Joigny,  6  mai  courant,  que  les 
documents  que  celui-ci  lui  avail  remis  sur  la  Cali- 
I'ornie,  et  dont  il  si'a  pu  s'occupor  plus  tot,  sont  aujour- 


(  508  ) 

criuil  un  pen  iinciens;  il  ne  los  perdra  pas  de  vue 
lorsqu'on  en  roccvra  de  plus  rocents.  Quanl  au  compte 
rendu  dos  lellres  de  M.  Tabbe  Brasseur  sur  le  Mcxique 
et  les  origines  aniericaincs,  qu'il  avail  aussi  promis  do 
faire,  il  pense  qu'il  convienl  d'attcndre  que  I'autcur  ait 
Icrmine  son  ceuvre. 

Le  secretaire  donne  lecture  do  la  listo  des  ouvrages 
offerls  a  la  Sociele. 

M.  Joniartl  depose  sur  le  bureau  le  discours  pro- 
nonce  par  lui  aux  obseques  de  M.  le  baron  Walcke- 
naer,  d^ccde  a  Paris  ic  27  avril  1852.  Le  secretaire 
general  lit  ce  discours,  dont  I'insertion  au  Bulletin  est 
adoptee  Sur  la  deniande  de  M.  d'Abbadie.  A  cetle  oc- 
casion, M.  Corlambert  oITrc  de  rediger  une  notice  bio- 
j^rapbique  sur  le  savant  collogue  que  la  Sociele  \ient 
de  perdre,  et  propose  de  faire  des  deuiarcbes  pour 
obtenir  de  la  famille  de  M.  le  baron  Walckenaer  le 
portrait  de  ce  savant  confrere,  alin  de  I'exposcr  dans  le 
local  des  seances  dc  la  Societe. 

Ces  deux  propositions  sonl  adoptees. 

M.  Jomard  annonce  qu'il  a  fait  passer  les  quatro 
medaillcs  destinees  a  IIM.  Livingston,  Osvvell,  Reb- 
mann  el  Krapf,  par  I'intermediaire  des  rjidacteurs  du 
Church  niisxioiKiij  Intelligencer,  et  celle  de  M.  le  doc- 
leur  Wallin ,  Finlandais,  par  M.  le  prince  Emmanuel 
Galitzin.  Quanl  aux  diploracs  porlant  mention  bono- 
rablc,  ils  out  elo  adress6s  a  M.  le  secretaire  de  la  So- 
ciele rojale  geograpbique  de  Loudres. 

Le  meme  meinbrc  appelle  raltenliou  de  la  Societe 
sur  une  nouvclle  voie  de  communication  en  Ire  le  golfe 
du  Mexique  et  le  grand  Ocean,  que  le  gouvernemcnl 
uiexicain  paralt  prciferer  a  la  voic  de  rislbmc  de  Te- 


.'! 


(  500  ) 

luianlopoc.  Elle  parlirait  do  la  \'ora-Cruz,  irait  au  lac 
Cliapala  ;  tlo  la  on  suivrait  la  riviere  Mcscala  jiisqu'a 
San-BIaz,  oii  ellc  porlc  Ic  nom  do  Rio  San  Yago.  Lc  but 
serait  de  se  rapprucher  do  Mazallan  et  de  San-Fran- 
cisco, beaucoLip  plus  que  par  Tohuantepec,  Nicaragua, 
Cosla-Rica  ot  Panama. 

Le  memo  proj)ose  de  nomnicr  a  la  prochaino 
stance,  a  Tune  des  places  vacantes  de  membres  cor- 
respondants,  M.  Paul  Chaix,  professeur  de  Geneve,  bien 
connu  de  la  Socidtd ,  a  laquellc  il  a  envoye  quelques- 
uns  de  ses  ouvrages.  M.  de  la  Roquclte  appuie  forte- 
monl  la  proposition  de  son  collogue.  Depuis  quolques 
anneos,  M.  Paul  Cbaix  a  bien  voulu  etre  son  corres- 
pondant  oflicieux,  et  lui  fournir  d'excellentes  ini'orma- 
lions  dont  il  s'est  empresse  d'enrichir  le  Bulletin. 

M.  d'Avezac  ayant  offerl  a  la  Soci^le,  et  depose  sur 
le  bureau  ,  un  exemplaire  d'un  ouvrage  qu'il  vicnl  de 
publior  sur  fitliicus,  M.  Thomassy  propose  de  faire  un 
rapporl  sur  ce  travail  imporlanl.  Cetle  oiTre  est  agrei^o 
par  la  commission. 

Le  secretaire  general  donne  lecture  de  la  traduction 
d'une  lettrc  ecrile  par  lo  doclcur  Krapf  au  reverend 
C.  W.  Isenberg  de  Rabbai-Mnia  ,  l""'  octobre  1851,  et 
inseree  dans  le  Bombay  church  tnissioiiary  Report  du 
niois  de  decembre  dernier. 

M,  le  chevalier  de  Paravey  lit  uiio  note  sur  les  Niam- 
Niams. 

M.  do  la  Roquette  donne  lecture  d'un  article  pu- 
blic dans  le  Journal  ties  Debuts,  d'apr^s  une  correspon- 
dance  de  Gothembourg,  d'ou  il  semblerait  rt^sulter  que 
deux  lies  non  encore  port(5cs  sur  les  carles  on  I  ^ie  d6- 
couvertes  par  M.  Lubqck,  capilaine  d'un  navire  sue- 


(  oil)  ) 
rlols,  ••iilio  lo  Japon  cl  Ics  ilcs  Loo-Choo  i^  Liooii-Kiooii) 
ot  qn'il  a  oppclecs  iles  tin  Prince  Oscar. 

II  resiiltc,  des  expllcalions  donneos  par  M.  Daussy 
([MO  toutes  Ics  cartes  du  Depot  do  la  marine  font  hum 
lion  dcpuis  longteuips  des  iles  dont  la  reconlc  decou 
vcrlc  est  annoncee,  etc. 


1- 


}■  races-  I'dbdl  lie  la  seniice  rln  21  iiuii  '1S5"2. 


Le  pr<>CL's-vcil):>l    de   la   derniere  seance  est   In    d 
adopt  e. 

M.  le  professeiir  Paul  Chaix,  de  Geneve,  ecril  au 
secretaire  general  de  la  Commission  centrale,  sous  la 
date  (111  l|^ai,  pour  le  prier  de  le  presenter  comme 
candidal  a  la  place  de  membre  correspondant  de  la 
Soceitt^  dont  on  lui  apprend  aujourd'hui  meme  la  va- 
cance.  II  annonce  en  m6me  temps,  que  pour  satisfaire 
au  desir  que  M.  de  la  Uoquelle  lui  a  temoigne  d'operer 
un  cchange  ontre  le  Bulletin  de  la  Societe  de  geogra- 
nlde  ct  la  l)iblintltei[iie  nnii'erselle  de  Genefe,  il  offre  a  la 
Societe  Texomplaire  de  ce  recueil  qu'il  rcQoit  comme 
collaborateur. 

M.  le  major  Fridoliuo  Giordano,  directeur  du  bu- 
reau lopograpliiquc  de  Naples,  annonce,  par  sa  Keltic 
(icrite  de  Naples,  sous  la  date  du  8  inai,  qu'il  vienl 
d'envoyer  a  la  Societe,  par  rinlermediaire  du  consul 
des  Deux-Siciles  a  Marseille  ,  la  carle  de  la  Mcditer- 
ranee,  Arcliipcl,  mer  Noire  el  mer  d'Azol",  enSfeuiiles; 
les  12  feuilles  de  la  Carte  ilcs  environs  de  Naples,  a 
reehelle  du  1/25000'';  et  enlin  la  premiere  feuille  de 
la  grande  Carte  lopograpbiquc  inililaire  du  loyauinc. 
;'(  I'echelle  du  1/80000'.  11  enverra  successivcmcnl  les 


(  511  ) 

aulros  carles  (jui  stM'ont  publiees  par  Ic  buieau  tlonl 
il  a  la  direction. 

Dcs  remerclmenls  seront  adresses  a  M.  Giordano, 
aussilot  quo  Ics  cartes  annonc^es  par  lui  seront  par- 
venues. 

M.  Eugene  de  Froboiviile  Iransniet  de  Naples,  au 
secretaire  g^nih-al  de  la  counnission  cenlrale,  avec  sa 
leltre  (parliculiere)  du  12  inai,  des  notes  sur  les  Va- 
Ngindo,  peuplade  de  I'Afiique  occldentale;  cette  no- 
tice est  remise  au  comil6  du  Bulletin,  ainsi  que  la  carte 
manuscrite  et  !o  tableau  synoptiquc  qui  I'acconi- 
pagnent. 

M.  W.  de  Milutine,  secretaire  de  la  Societe  geogra- 
phique  imperiale  de  Russie,  envoie  au  secrt^taire  ge- 
neral, avec  sa  leltie  de  Saint-P^tersbourg  du  9  avril 
dernier,  la  preini6re  livraison  du  Bulletin,  public  (en 
russe)  par  cette  Society  pour  I'annee  4852. 

D'apres  le  desir  tenioigne  par  M.  Cortambcrt  et 
par  d'aulres  menibres  de  la  commission  cenlrale,  de 
posseder  un  portrait  de  M.  le  baron  Walckenaer,  I'un 
des  fondateurs  de  la  Sociele  qui  a  eu  le  maUieur  de  le 
pordre  le  27  avril  dernier,  M.  Jomard  a  fait  aupresde 
la  famille  du  d^lunt  des  d-marches  qui  onl  ele  bien 
accueillies. 

M.  Jomard  annonce  qu'un  projet  relatifa  I'etablissc- 
menl  d'un  point  de  depart  uniforrae  pour  les  obser- 
vations astronomiquos  et  meleoro]ogi(jues  ,  provoqui!; 
par  les  gouverneinenls  de  France,  d'Angleterre  el  des 
Elats-Lnis,  vienl  d'etre  prescnle  a  I'Academie  des 
sciences. 

Le  sccrclairc  general  lit  la  lisle  dcs  ouvragcs  ol- 
lerts. 


(  51-2  ) 

M,  Paul  CliaJx,  proresseiir  clc  Geneve,  esl  6lii  a 
runanimilc  nienil)re  corrcspondanl  dc  la  Sociele. 

M.  lie  la  Uoqiiello  annoncc  qu'une  Socielii  gdogra- 
phiquc  vient  d'elre  fondiic  a  New -York.  ( \  oir  aux 
Noiu'elles  geoi^rfipliiques.)  II  a  dcmande  aux  lilals-Lnis 
des  inforniations  sur  celte  iiouvelle  inslilulion  ,  ot 
s'emprcsscia  de  les  coininiinlquer  a  la  Commission 
cenlrale  aussilol  qii'olles  liii  sciont  parvenus, 

M.  Alfred  IMaiiry  fail  connallre  les  rcnseigncmenls 
parvenus  a  Paris  sur  les  rosultats  des  fouilles  failes  par 
le  consul  frangais,  M.  Place,  sur  le  terriloire  do  I'an- 
cienncBabylonie,  elnotammenlaKliorsabad.  M.  Place, 
devan^anl  la  commission  scicntifiquc  que  le  gouverne- 
raent  frangais  a  envoyee  dans  ce  pays,  a  fait  explorer 
avee  le  plus  grand  suoces  les  lieux  fouilles  jadis  par 
M.  Botla.  Une  longue  galeric,  unc  colleclion  de  vases, 
de  nombreux  cylindres,  ont  6te  d^couverts.  Le  Louvre 
va  bicntol  recevoir  un  premier  envoi  des  anliquites 
decouverles  dans  ces  fouilles  inliressantes. 

M.  Edmond  Ansard,  profosseur  d'hisloire  el  de 
geograpliie  au  college  de  Saumur,  est  nomme  membrc 
de  la  Socielo  sur  la  pr(^sentalion  de  MM.  Jomard  ot 
Mallc-Brun. 


(  &13  ) 
OUVRAGES  OFFERTS 

DANS  LJiS  Si5aNCES   HUS  7  ET  21   MAI   1852. 


TITRKS. 


DONATEtRS. 


EUROPE. 

OUVBAGKS. 

MM. 

Notice    snr   les   .Tltitudes  dii   Mont-Rlanc  et  du 
Mont-Rose,  deleiiiiiiiees  pai-  des  inc^ures  ba- 
romelriqucs  ct  {jcodesiqiies.  (Extrait  de  VAii- 
nuaire  nieteo}oln(/tque  de   la   France,  aniiee 
i85i.)  Rioch.  in-8"  de.  36  pac^es. 

Le  coniniandaiit 
Uelcros. 

CARTES. 

Province  de  Castellon  de  la  !'Iana  (Atlas  de  Es- 
jjana  y  sus  posesiones  de  ullraiiiar).   i  feuille 
grand-monde.  |852. 

—  Logrofio    —    t85i. 

—  Gt-rona.     —    i85l. 

—  hlas  Baleaies.  —   i85i. 

Lieutenant -colonel 
Francisco  Coc-lli>. 

Iden). 
Mem. 
Idem. 

.\FRIQLE. 

CABTIiS. 

hlas  Y  presidios   en   la  casta  septentrional  de 
Africa -Islas  del  f;olFo  de  Guinea,  en  la  oosia 
occideiilai.  i   feuille  grand-monde.  i85o. 

Idem. 

AM^RIQUE. 

CAnTES. 

Isla  de  I'uerto-Rico.  i  feuille  {jrandnionde.  i85i. 
—     Cuba.                                —                    _ 

Idem. 
Idem. 

ITINERAIRES,    PLA^S   ET  COL'PKS. 

Expedition  dans  les  parties  centrales  de  I'Anie- 
rique  du  Sud ,  de  Rio-Janeiro  a  Lima,  et  de 
I>ima    an    Para,    par    Francis    de   Gastelnau. 
4'livi.  Paris,  i85a. 

Francis 
de  Castelnai». 

(  51/1  ) 


TITHES. 


DONATEURS. 


ASIE.  —  Al  UIQUK.  —  AMl-aiQUE. 

ODVIUGES. 

Tableaux  de  population,  <le  culture,  de  com- 
merce et  lie  navijj.ilion,  formant,  pour  I'annee 
1848,  la  suite  des  tableaux  insere's  dans  les 
Notices  statisliques  sur  It-s  i.olonies  franraises. 
I  vol.  in-8".  Paris,  fevr.  iSaa. 

Ml^LAKGES. 

MEMOinES   DliS  SOCIETES  SAVANTES  ET   JOUBNAUX. 

Francais. 

Nouvelles  annates  des  voyages.  Fevrier  et  mars 

i852. 
Bevue  de  rOrient.  Avril  I  852. 
Journal  des  missions  evanjjeliques.  Avril  l852. 
Annales  de  la  propajjation  de  la  foi.  Mai  i8.')2. 
Annales  du  commerce  esterieur.  Janvier  et  Fevr. 

i852. 
Revue  coloniale.  2*  serie.  Avril  et  mai  i852. 
Journal    d'educaiion    populaire.    Mars    et  avril 

1862. 
Histoire  de  I'Academie  de  Marseille  depuis  sa 

fonddtlon  en  1726  jusqu'en  i836,   par  J.  B. 

Lautard.  3  vol.  in-8°.   Marseille,  1826,   1829, 

1843. 
Memoires  de  I'Academie  des  sciences,  belles  let- 

tres  et  arts  de  Marseille.  Annees  184(1,  1847; 

Marseille,   1848.    Annees   1848,    1849,  iSSo; 

Marseille,  i85l.  2  vol.  in-S". 
Se'ance  publifpie del' Academic  royali'des  sciences, 

belles-lettres  et  arts  de  Marieille,  du  G  sep- 

tembre  1846. 
Travaux  de  I'Academie  des  sciences  de   lleims. 

4*  trimeslre.  l85l. 

Annlais. 

'Hie  cliurcli  missionary  Intelligencer.  Avril  et  mai 

1 852.  Londres. 
Journal  of  the  Indian  an  liipelayo...  ( Juuiiial  de 


MM. 

Minisire 
de  la  marine. 


Les  editeurs. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Minist.  du  comm. 

et  de  I'interieur. 

Ministre  de  la  mar. 

Les  editeurs. 

Acad,  des  sciences 
de  Marseille. 


Idem. 

Idem. 
Acad,  de  Ucims. 

Les  eiliicur>. 
Idem. 


(  515  ) 


TITHES. 


DONATEURS. 


rarchipelliidieii).  Novemljieet  deceinbre  i85i ; 
Janvier  1 85a.  Singapore. 

Riisses. 

liappnrt  sur  !es  observations  fai(es  pendant 
I'eL'lipse  de  soleil  dii  i6  joillet  i85i,  sous  la 
direction  de  laSocietej^eograpliicjuede  Kussie, 
et  )nibli('  par  elie  en  lan(;ue  russe.  Hroih.  in-S", 
avpc  planclies. 

Ameiicains. 

Tlie  Literary  \voriil...  (  le  ^fon(le  litteiaire  ) , 
n""  261,  262,  263,  a64,  271  (3i  Janvier,  7,  14 
ct  21  fevrier,  loavril  I  862). 

niVERS. 

tlbiciH  et  les  ouvragps  co.smo{;rapliir|ues  intitules 
de  ce  noin,  snivi  d'un  Appendice  par  M.  d'Ave- 
zae.  I  vol.  in-4°.  Paris,  i852. 

Tables  auxiliaires  pour  le  calcul  des  differences 
de  niveau  donnees  par  des  hauteurs  baronie- 
triques,  calculees  d'apres  la  formule  complete 
de  Laplace,  niises  dans  un  nouvel  ordre  et 
elendues.  Broch.  in-8°  de  26  pages.  Neuchatel, 
1846. 

Tables  pour  facililer  le  calcul  des  surfaces  sur 
ri-llipsoide  terrestre,  calculees  pour  des  qua- 
drilateres  de  1',  10',  20',  3o',  i^,  5''  et  10'',  en 
latilutde  el  en  longitude,  depuis  I'cquateur  jus- 
f|u'au  pole  (i  840),  extrait  de  I'Annuaire  mete'o- 
rologique  de  la  I'Vance,  aiinue  (i85o).  Broch. 
in-8"  de  iG  pa{;es. 

Perlezione  sul  progresso  rurale  nel  i85o...  (Dis- 
cours  sur  les  progres  de  I'agriculture  en  i85o, 
lu  la  dixienie  annee  du  Cours  de  physique  ap- 
l>lique  a  I'aijriculture  et  a  I'economie  domes- 
tique).  (Extrait  du  Repertoire  d'a{;ricullure  et 
des  sciences  economiques  et  industrielles.)  Va- 
rallo,  I  852.  Broch.  in-12  de  32  pages. 

Sur  les  trenddeuienis  de  teire  el  sur  les  inouve- 
incnls  du   sol.  (I'^xtiait  du  CDnqilc  rendu  des 


MM. 

Les  editeurs. 


Soc.  {jeoj^raphique 
de  Russie. 


Lps  editeurs. 


D'Avezac. 


Le  commandant 
Delcros. 


Idem. 


Le  ])rofcsspin- 
Barufti. 


Ant.  il'Abbndie. 


( 51<3 ) 


TITHES. 


seances  de  rAcademic  dcs  sciences.)   Rrocli 
in-8°  d'line  pag<'-  i852. 
Ptlite  {!;('o{5ia|)lile  inoderiic  a  I'lisafje  des  ucoles 
primaires.  i  vol.  in-Jia.  Paris. 


CAHTKS. 


Alias  historiqne  el  ceORmphique,  ancien  et  tno 
deine,  dresse  pour  I'usape  des  colleges,  etc., 
par  Felix  ct  Ed.  Aiisarl 


1  vol.  in-4°.  {  re]. 


DON.VTliURS. 


MM. 

Ant.  d'Abl)adie. 

Ed.  Ansait. 


Ideti 


ERRATA. 


D.Tns  quelqiie*  exeinplaires  du  Bulletin  d'avril  iSSa,  p.  4'7»  ""  '* 
mis  ;i  tort,  en  pailai.l  <le  la  letde  de  M.  RuUct,  que  MM.  d'Abbadie 
et  Jomard  en  ont  du  ions  deux  la  coninmnicalion  ^  M.  Vaudey,  tandis 
que  celui-ci  Pa  seulemcnt  communiquce  a  M.  d'Abbadie  :  c'est  de 
M.  d'Ainaud  quo  M.  Jouiard  a  re^u  la  c.pie  do  la  nieme  lettie  qui  lui 
eft  pai  venue. ^ 


*""   irrir  /l,i//.-ti„   ,/,//,„    /S.>;. 


:!6' 


,  ll^Axa 


'/r. 


sKhi'vini  -  niii/ii 


Quiloa 

Q  (Khiiuu) 


^ 


1 


I-./,/,'  ./('  {n'lymphi 


i.ith.ih-ltuuUuni  lul.'l  (th»'t;.ani,'0\ 


'^  Incfujuant  if- 


I. A      PMiK.SrK      A.\AIA>(;iQlF. 
VKS    /.A.VOlfiS 

UK   L'AKniC^lTE   AD^KIDIOXALK, 

Parj\P'l'ht<iriioih''Frobcrvi//c 
1851 


.So 


Jhtlt-^t'  tit-  (r'fl't/fU/'/ll, 


•*  '^' Xru'  /hi/J.fin  Jr  .//,//   tSM  . 


T      J 


-'0 

1 


^  t/funu/o 


r.  J. 


Ka^hn 


,^^^/hiimo    _^_ 


f'o/ti/o 
.  Iiitfohl 
/itru/iif/ii 
( Liuiifiiivi' inula  ) 


Siihui 
^\    Miirma 


r\__     ^  ~ '%" 


^^^ 


Kaxtmhe 


ScndnC 


ify 


Dattuiiii 


rsiiiinlio  '^V"^ — ~/ 

Ituriit*  \  VTAonbo 

I  Niitnibunr  '    \    \ 


til    l/f  f.i^lftHI. 


(lToH<-ntols) 


^W.i^^-ittiitmf/u'.v  /oriinvti'iin  ^mit  txm/uw 

titvuttvi/tt  iafatni/ii'  Ostrt»-X*-girr. 
OVW///it////«//miv/«w/  i'luihiu'ti  fttiwiJii 


I, A    i-MiK.yTK    a:<m.iu;iqvk 
m:s  /..lyt-iKs 

l)K   L'AKKiylK    MKHIDIONAM'; 
1851 


Lt-r^UnJc  t¥tt9i/a/€'  Ifu  J&ititfn  t/f  /hris. 


I 

y 


.,/,■  K,i,/,;m  >..  '•■  I  'l'lK,iiiuni 


BULLETIN 


DE    LA 


SOCIETE  DE  GEOGRAPHIE, 


JUlN  1852. 


llciuoires, 
Molices,  Docuiiieiitjs  originaiix,  etc. 


TRIBUS  DE  NKGRES  Bl-GAYELRS 

AU  ISORD  DE  LA  CAFHKRIK, 
,   M,  liUGkNJi   DE  FROBKRVII.I.E  (1). 

«  Parmi  les  Niambana  que  j'ai  question n^s  a  Teflel 
de  composer  luon  vocabulaire  compare  ilcs  langues 
ostro-negres,  j'en  i-cncontrai  un  clont  la  prononcialion 
chevrotanle  et  comma  delraquee  ofTrait  unc  parlicula- 
rite  curieuse.  II  inlroiluisait  confusement  au  milieu  de 
tous  les  mols  de  sa  langue  (2)  la  sjllabe  sit  (cliil).  Ainsi 
le  mot 

Niambana  tievenait  dans  sa  bonclie  Nia-sil-ainbana. 

Iniritna  (viaiiile) inia-sil-nma. 

KuetU'le  (dunnir) kuetle-^il-ele. 

Tuliuni  {dahoh) tuhu-sil-imi. 

Kuf(imba  [marc]ici) laifa-sil-aniba. 

Nlbko  (tete) nlo-s'il-oko 

Enompfu  (riez) eiio-iiloiii|)rii. 

(i)  Extrait  ties  Notes  sur  les  races  ostro-ui(/res. 
(2)  Le  niambana  est,  parmi  les  idiomes  osli-o-ne{;i'e*,  un  de  reux 
dont  les  formes  se  rapprocbent  le  plus  du  cal'ie. 

III.  JOIN.  1.  85 


(  518) 
»  Je  crus  d'abord  que  cet  homuie  i'lait  aflligo  tl'un 
vice  naliirel  de  prononciation  ,  et  j'allais  le  ronvoycr 
coniuic  loul  u  ri\il  iuipropre  au  luil  que  je  nic  j)roj)o- 
sais,  lorsque  je  m'aperciis  qu'il  ])ouvail,  quoiquc  a^cc 
difliculhS  aiticuler  les  mots  sans  y  introduire  le  l)izaire 
crement  dout  je  viens  de  parler.  Je  me  rappelai  alors 
un  passage  de  la  relation  du  voyage  de  MM.  Arijousset 
et  Daumas  au  nord-est  de  la  colonic  da  ca|)  do  Honnc- 
Esp^rance,  dans  lequel  il  est  dit  (s  que  cerlaines  trlhus 
»  cafrcs  a  nez  incisd,  a  dents  limees  en  poinlo  (mon 
Nianibana  ]iresentait  ces  caractrres ),  avaiont  recii 
d'auUes  CalVes  plus  nn^ridlonaiix  le  surnora  de  begues 
(p.  357).  »  De]iuis,  j'ai  souvenl  remarqiie  chez  d'autres 
Niamhana  cette  sorte  de  rude  begayement  qui  m'avait 
frappe  dans  la  bouclie  de  mon  premier  informalour; 
la  syllahe  intercalee  difTerait  suivant  les  tribus  ou  ne  se 
nianifeslait  pas  aussi  reguli^rcment ,  mais  le  i)rincipe 
6tait  le  mfime.  A  la  sonority  pr6s,  on  ne  saurait  niieux 
comparer  la  pronunciation  maladroile ,  bollcusc  (I 
cbancelanlc  do  ces  n^gres,  qu'a  celle  des  enfants  qui 
begayent  leurs  premiers  discours.  Le  sobricpiel  par 
lequel  leurs  congeneres  du  sud  les  di^signent  csl,  en 
ce  sens,  paifaitement  applique.  II  m'a  scmhlo  qu'en 
inlercalant  plus  ou  nioins  systeaialiquemont  luie  syl- 
labe  de  fantaisie  au  milieu  de  cliaquc  mol,  ils  nu  I'ai- 
saienl  qu'obeir  au  bcsoin  de  mellro  de  temps  en  temps 
dans  lour  parole  commc  des  points  de  rcpeii,'  euplio- 
niqucs  ou  leur  organe  aliurj  venail  en  passant  se  rccon- 
nailre  el  se  rafFermir  (\].  » 


(i)  L'inseriiuii  voluiUaire  dune  ou  <1('  jilLisieurs  syllalics  d.ins  les 
iitots  est,  on  le  sait,  uiio  lut'lhoilc  dont  iios  ecoliers  se  seivfiit  li.ibi- 
liiellement  pour  reiidre  leurs  discours  ininteiliyibles  aux  iiuditcurs 
non  iiiilies.  M.  Anloinc  d'Abbadie  in'npprend  quo  rclfc  csjicre  d'.)i{;ol 


(  519  ) 
NOTES  SIJR  L'lLE  DE  IIAI  -  NAN. 

M.  Guillemin,  de  la  Sociele  des  missions  6lrang6res, 
communique,  dans  une  lellre  ecrite  de  Hont^-Kong , 
on  Chine,  le  20  mai  1851  (1),  quelques  infoimalions 
foiiinies  par  le  p6rc  Mailfait,  missionnairo  apos- 
tolique,  sur  I'ile  de  Hai-nan,  ou  11  vient  de  mouiir, 
a  peine  age  de  Irenle-cinq  ans.  Ces  Informalions  ont 
parii  ofl'rir  de  rinlerfit;  elles  servironl  a  completer  et  a 
I  ectifier  celles  qui  ont  eti  publides  il  y  a  plus  de  vingt- 
cinq  ans  dans  ce  Bulletin  ("i). 

«  L'ile  d' Hai-nan,  situee  an  midi  de  la  province  de 
<2"('//^^- ^o«^  (  Kouang- toung) ,  dil  M.  Guillemin,  est 
une  des  plus  grandes,  des  plus  peupit^es  et  des  plus 
rurieusos  de  I'Asie.  Elle  ne  comple  pas  moins  de 
Koixante  lieues  de  long  sur  quaranle  de  large,  et  envi- 

e>t  employe  tlans  le  iiienie  but  par  les  BuliLMiiieiis  d'Eiirope,  it  niissi 
|i;ir  li-s  Abyssins,  qui  appellent  zahaza  cette  manieJi!  <li'  di^jjiiiser  la 
biii;;iie  aniaiififia ;  la  syllabe  iiilercalec  par  ceux-ci  parait  etre  ba.  Je 
niL"  suis  assure  que  ines  Niambana  bredouiliaieiil  et  interralaient  leiir 
syllai)e  dans  les  mots  satis  y  eiileiidie  malice.  (lelte  clieville  syllaljique 
m'a  |uiru  avoir  pour  but,  non  d.:  defijjurer  leur  parole,  iiiais  an  con- 
tiaire  d'en  raUaciier  lant  bien  que  mat  Liisenible  la  cliarpente  dislo- 
(pieo.  II  serait  difficile  d'assigncr  une  cause  prc'cisi'  a  la  ditCurinile  de 
leur  [)roiionciatiou,  d'aulant  plus  etraiijje  dans  ceUe  i('j;iou  de 
i'Afrique,  que  tous  les  OsIro-iic';>res  et  les  neuF  dixieuies  des  Iribus 
niambana  ellus-meraes  ont  I'oreille  dclieale  et  sensible  au  supreme 
dejTre  et  font  le  plus  grand  cas  il'une  elocution  facile  et  sonore.  Une 
nervositc  anormale  el  une  conformation  iniparf.iite  des  organes  de  la 
parole  jouent  certainement  ici  un  r6le  licrcdilaire,  que  Ton  ne  pent 
meconnailre  apres  avoir  cnteiidu  un  certain  nombre  de  ces  negres. 

(i)  Annales  de  la  profaijation  de  la  foi,  i852,  n°  i4o,  p.  4o  el 
suiv. 

(2)  Note  sur  tile  de  Ildi-nan,  etc.,  etc.,  par  M.  Je  la  Koquette 
[Bulletin  de  lu  Sociele  de  ijeogniphic,  i8>7,  i"  serie,  t.  VII,  p.  ail). 


(  520  ) 

ron  deux  millions  d'habitanls.  La  parlie  baignee  par 
la  merest  liabllee  par  desCljinois  ;  rinlerieur  se  Iroiive 
occupe  par  dos  sauvages  nommes  Laos  ou  Loies ,  qui 
siiivent  pour  regie  les  instincts  de  la  nature,  n'a\ant 
qu'une  simple  butle  pour  se  logor,  Tare  pour  se  d6- 
fendre  ct  pourvoir  aux  bcsoins  de  la  vie.  Ces  bommes, 
du  reste,  sonl  d'une  laideur  remarquable  claugmen- 
tent  encore  leur  dillormit^  nalurelle  par  le  bariolage 
dont  ils  sillonncnt  leurs  joues.  II  y  avail  autrefois  un 
grand  nouibre  ile  chriiiens  dans  I'ile;  mais  les  pers<i- 
culions  qui  s'eleverent  sous  Kang'hi  ei  sessucccsseurs, 
I'abandon  auquel ,  a  diflerentcs  epoques,  ils  lurent 
laisses,  en  dimiiuiirent  considerablement  lecbilFre, 
jusqu'a  ce  qu'enfin  la  Providence  cboisil  un  apotre  qui 
devail  en  recueillir  les  debris,  et  ouvrir  parnii  eux  une 
nouvelle  voie  aux  progr^s  de  I'Kvangile. 

»  Parti  de  Hong-Koni^  le  2  mars  1850,  M.  Maill'ait  ar- 
rivait  quinze  jours  aprcs  au  rivage  qu'il  avait  tant  desire 
[Ha'i-nan].  \}i\  autre  missionnaire,  M.  Duponl.qui  con- 
naissail  la  langue  et  qui  avail  un  calecbiste  du  pays, 
devait  I'inlroduire.  C'cst  lui  qui  alia  a  la  decouverte  des 
cbrt^-licns,  tandis  que  M.  Mailfail,  blotti  au  fond  de  sa 
barque,  altendait  avec  anxiete  Tissue  de  cctlc  demarcbe. 
Trois  jours  apr^s,  M.  Duponl  revinl  aupres  de  son  con- 
frere, et  put  lui  annonccr  que  quelques  lidelcs  consen- 
laienl  a  le  recevoir.  Alors,  a  la  faveur  des  lenebres,  on 
relira  le  jcune  missionnaire  de  sa  barque,  et  on  le  con- 
duisit  dans  la  pelilo  cbreliente  de  Soh-tsai,  a  six  lieues 
de  la  mer.  Quelque  temps  apres,  ne  Irouvanl  pas  assez 
de  s^curile  dans  ce  lieu,  il  se  rendit  dans  la  cliretiente  (1) 

(l)  C'est  le  iioin  Joiiric  j)ar  Ics  tnissioniiaircs  cnilioliqucs  aux  pa- 
roisses  ou  lucaliti's  iLiiis  lesquclles  sc  liouvfiit  t-Uiblics  ties  reunions 
de  chr^tien<. 


(621  ) 

de  Siang-lo,  qui  dcvint  dt-s  lors  sa  residenco  Iiabituelle 
et  le  cenlre  de  ses  courses  apostoliques.  Mais  deja 
M.  Dupont  avail  accompli  sa  mission  ;  il  rlil  un  dernier 
adieu  h  son  confrere,  qu'il  ne  devait  plus  revoir,  et  re- 
joignit  le  poste  que  la  Providence  lui  avail  marque  aur 
un  autre  point  de  la  province. 

«  C'etait  sansdouto  beaucouppour  noire  jeune  niis- 
sionnaire  d'avoir  mis  le  pied  sur  son  ile  ;  mais  c'etait 
peu  de  chose  en  comparaison  des  autres  dilTicuItc^s  ((ui 
lui  reslaienl  a  vaincre.  II  failait  se  faire  accepter  par 
un  peupie  dont  il  connaissait  a  peine  la  langue,  et 
aupres  duquel  on  avait  su  nous  rcpresonter  comme 
dcs  hommcs  qui  venaient  uniquemenl  dans  ce  pays 
pour  s'cnrichir  atix  depens  des  indigenes.  M.  Maillait, 
par  sa  prudence,  sa  douceur,  et  surtout  par  sa  con- 
fiance  sans  bornes  on  cclui  qui  I'envoyait,  surinonla 
lous  ces  obstacles,..  Muni  d'un  chapfau  de  paille  donl 
I'ampleur  equivaut  a  cellc  de  nos  parapluies,  apres 
s'etre  jauni  la  figure,  les  mains  et  les  jambcs,  pour  se 
rendre  plus  semblable  aux  gens  du  pays,  il  parlit  pour 
son  excursion  evangelique » 

Suivent  les  details  sur  les  lieureux  resullals  obtenus 
par  M.  Mailfait,  a  Siaiig-lo  ot  dans  les  deux  paroisses 
de  Faseii  et  de  Po-ao  ;  puis  il  ajoute  : 

«  II  (le  perc  Mailfail)  avail  terminii  les  lonclions  de 
son  ministere  a  i'o-ao,  et  il  n'elait  plus  qu'a  Irois  lieuos 
de  Kin-tea,  lorsqu'il  lui  pril  cnvie  d'aller  visiter  I'an- 
cien  cimeticre  clirelien,  situe  a  cole  de  cellc  capitalo  de 
I'ile  (1).  II  parlit  en  Kieoulcoti,  ou  chaise  a  porlcurs, 

(l)  Le  nom  de  Kiu-lcn  ne  se  tioiivc  point  [Kule  il.iiis  l.i  lisle  (lei 
villes  tie  I'llc  de  Hai-nan,  ilotiiiec,  a  l.i  siiilc  de  I  i  [)a{;e  lil  de  mo  note 
deja  citee,  d'aprcs  le  Koiiatig -Toiiiig -  tchi,  ou  description  Iiistoiicpio 
de  la  province  de  Canton.  Suivant  cctte  description,  la  capitale  de 


(  5-22  ) 

afiii  d'cviter  loule  ronconlrc  cles  paiens.  »  «  J'avais  for* 
))  Innuiit  recoinmaiuli  a  mcs  guides,  cllt-il ,  do  s'eloi- 
»  gnor  dc  la  ville,  ou  se  trouvait,  assiire-l-on,  uno  gar- 
))  nison  dc  dix  mille  homines;  inais  ne  voilii-t-il  pas 
»  qu'aii  momcnl  oCi  jo  m'y  atlendais  Ic  inoins,  nous  vc- 
))  nous  debouclier  au  pied  tnfinic  de  la  tour  du  gouvcr- 
»  ncur.  Celte  nioprisc  de  la  pari  de  mcs  gens  me  fit 
»  observer  plusiciirs  clioses  que  jo  u'aurais  pas  vues 
J)  sans  cela.  La  lour,  assez  dlcvee  ,  est  balie  de  piorres 
»  dc  l.'iille ;  elle  a  buit  (itagcs  superposes  les  uns  sur  Ics 
wauhcs,  avt'C  uno  diminution  d'epaisseur  a  cliaque 
»  cordon.  Au  Iroisiemo  etagc,  sc  Iroiivait  une  senlinclle 
»  ou  pclit  mandarin  en  habit  blanc,  ipii,  du  haut  dc  sa 
))  vigie,  regarda  passer  nion  A  ieu-tcon  ;  je  lo  lorgnai  (^ga- 
»  Icment  du  fond  de  ma  liti6re,  el  jc  continuai  mon 
))  chcmin.   Non  loin  de  la  tour,  on  rencontre  une  pa- 
))  godc  dediee  au  pere  des  dicux  du  pays;  a  rinlerlour 
»  est  un  grand  dicn  en  bronze  avec  un  ventre  moiis- 
))  irueux,  assis  dans  un  large  IV.uteuil  dc  in6ine  niclal. 
»  Comnie  mcs   porteurs  marcliaienl  rapiilement ,    je 
))  n'eiis  pas  le  Icmps  d'en  voir  davanlage.  Je  conlournai 
»  Test  de  la  villo  ,  qui  ne  ni'a  pas  paru  fosi  grandc,  ct 
»  j'arrlvai  au  lieu  (pio  je  chcrcliais.  La  commence  uno 
»  plaine  immense,  loule  couvcrle  de  lombeaux  :  elle 
»  s'elend  dc  rexlreniilc  de  !\in-tc(i  jusrju'.'i  Kni-knoii, 
»  c'esl-a-dire  sur  un  cspace  dc  deux   lieues.  Rien  de 
w  plus  imposant  que  cetle  tcrrc  a  pcrte  de  viie,  ou  se 
»  irotivrnt  accuniules  les  morts  do  plusieurs  si^clos. 
»  Je  lis  plusieurs  milles  cliinois  (i)  au  milieu  dc  ces 
»  debris  de  gd'nerations  bumainos,  pour  decouvrir  le 

rill!  (I'lliii'-naii  <!Tnil  Kion(j-lcUci)ii  /on,  (t  niiiMit  iiiii'  pnpiil.ilion  dc 

Io3  oSg  liabitanti.  I/aMin  Grosicr  ra|i|icllf  Kit  nn-Trhcnu. —  D.  L.  K. 

(i)  C'-est  sill?  tli)Uic  Ic  //,  fjiic  M.  tlr  McjMiij;iiy  iip|)(.llc  aiissj  millc 


(  523  ) 

»  lieu  quiservait  autrefois  de  sepulture  aux  Chretiens. 
))  Arrive  a  une  assez  vaste  enceinle,  oil  Ton  n'enterrc 
»  plus,  je  reconnus  bicnlol  rjuo  c'etait  la  I'ancien  citno- 
»  liere  de  nos  fr^res.  J'y  Irouvai  une  cinquanlaine  de 
»  pierres  tumulaires,  qui,  n'etant  plus  soutenues,  sont 
»  lombees   au  niveau   du   sol  :  elles   datent  toutes  de 
»  cent  cinqiiante  a  deux  cents  ans.  Au  centre  se  dia- 
»  lii'.guent   Irois  monuments  plus  reinarquables  quo 
»  les    auU-es;  co  sont  les  lombeaux  dc  Irois  jesuilcs  : 
))  Jean  Forget,    Francais ,   inort  en  1661;    Stanislas 
»  Forreo,  Ilalien,  en  1681 ;  Joachim  Cornes,  en  1686. 
))  A   pen  de  distance  de  ces  monuments  ,  on  en  re- 
»  marque  deux  autres  qui  paraissent  (^galement  erig(''s 
»  a  la  memoire  dc  quelques  missionnaires  :  les  carac- 
»  teres  en  sont  effaces,  mais  je  croirais  assez  volontiers 
»  que  I'lin  est  le  tomlieau  de  Benoit  de  Mathos,  pro- 
)i  mier  apolre  de  I'ile,  et  I'autre  celui  de  Francois  de 
»  V6gns,  Porlugais,  qui  sont  morts,  le  premier  en  1651 , 
)j  et  le  deuxieme  en  1659.   Pliisieurs  pierres  soul  doji'i 
»  usees  par  le  temps;    mais  la   forme    de   la    croix, 
»  profondement    creusee,    reste    loujours   pour   ser- 
»  \ir  lie  caractere    distinctif  a   la    tombe   chretienne. 
»  Aulour   dc    prcsque  toutos   ces   croix,    on  lit  celle 
»  inscription  :  Lehcn  kao  ching  hooii,    vnrce  rcligioiiis 
■))S(iciniti  signiiin  (1).    Grace  au  respect   des  Cliinois 
»  pour   les   lurabcatix,    aucune  main    profane  n'y   a 
»  touclid.  Seul,  a  gcnoux  au  milieu  de  cetle  plaine  im- 
)i  mensc,  je  dis  un  De  prnfnmUs  pour  tous  nos  freres 
))  qui  reposeiit  en  ce  lir-ii  :  c'etait  peul-&tre  le  premier 
))  rju'ils   recevaient  depuis   cinquanlo   ans.    Jc    m'eu 

I  liiiiois,  etf|u'il  c'value  a  jjS  inel  res.  ( Voir  B/t//t(i«  dc  scplfiiiLfe  i85o, 
r.  XIV,  p.  ii6.}  D.  I,.  R. 

{I)  Signc  sacrd  de  la  vraie  iilijjion. 


(  524  ) 

))  relouinai  lo  ctjeur  bicn  Irisle,  en  me  ilcmandanl  ce 
»  (|u'(-Haienl  dcvenus  les  descendants  do  tons  ces  niorls, 
»  ct  jo  pris  a  I'inslanl  la  resolution  d'envoyor  un  cati- 
»  chisle  |)our  s'assurer  s'il  en  reslail  encore  quelqiies 
»  vestiges.  II  est  bien  a  craindro  qu'on  no  Irouve  plus 
»  que  des  souvenirs  a  la  place  des  nomhreux  clireliens 
»  qui  peuplaient  autrefois  celle  ville.  » 

«  Apres  ceile  visile  au  ciuietierc  de  Kin-ten,  iM.  Mail- 

fait  se  rendit  a  Aorta- nan,  a  Siotn- tout  cl  dans  plu- 

sieurs  aulres  chrelienles,  dislribuant  parloutla  [larolc 

sainlc  el  le  pain  de  vie ;  puis ,  Ic  2/i  juin  ,  ffilc  de  saint 

Jean-Baptiste,  il  dtait  de  retour  a  Siang-to,  salisfail  du 

r^sultal  de  scs  fatigues  apostoliques.  «  J'arrive  de  mes 

))  courses,  dit-il;  j'ai  confesse  tout  nion  mondc  el  remis 

»  chaque  chose  sur  un  meilleur  pied.  Des  ulceres  me 

»  sont  vcnus  aux  jambcs;  j'en  atlribuc  la  cause  aux 

»  chaleurs  et  a  la  mauvaise  eau  que  nous  buvons.  Cost, 

»  du  resle,  unc  infirmit6  dont  pcrsonne  ici  n'est  exempt: 

»  la  moindre  egratignure  suflit  pour  former  une  plaie. 

»  J'ai  paje  mon  tribut,  et  j'esp^re  en  6lrc  qultte  pour 

»  le  moment.  J'ai  rencontre  dans  mes  excursions  plu- 

»  sieurs  pctitcs  curiosit^s  dont  je  vous  fais  pari.  Ainsi 

))  j'ai  vu  les  corbeaux  a  cravatc  blanche,  el  les  merles 

))  bleus  aux  oreilles  jauncs,  dont  parlent  les  anciens 

»  jt^suitcs.  J'ai  aussi  romarque  des  abeilles  rajecs  de 

»  bleu  ,  cl  do  grosses  gu6pes,  qui  viennenl  fixer  leurs 

))  alveoles  sur  one  simple  fcuille  d'arbre.  Ici  tous  les 

»  groupes  d'hnbitalions  sont  caches  au  milieu  d'arbres 

»  fruitiers;  les  ananas  servent  de  haies  aux  jardins;  il 

»  y  a  des  li-tchi,  des  mangues,  des  bananes,  des  cocos, 

))  des  papayers,  et  quanlite  d'aulres  fruils  inconnus  en 

))  Europe,  el  qui  soutiendraienl  facilement  la  compa- 

»  raison  avcc  les  votres.  Quant  a  nos  insulaircs,  ils  tra- 


(  525  ) 

»  vaillent  a  pen  pres  qualre  mois  de  rannec  ;  a  la  cin- 
))  quieuio  lune  pour  seiner  leriz,  et  a  la  septi^me  pour 
»  le  recolter  ;  a  la  liuitieme  pour  le  seiner  de  uouveau, 
»  et  a  la  dixieine  pour  faire  la  seconde  moisson ;  le 
))  reste  du  temps,  its  se  reposent  et  dorment.  Les  en- 
»  fanls  sont  occupes  a  garder  les  bufiles.  Grace  a  la 
))  siinplicit(!!  et  surtout  a  la  pauvret^  de  raes  neophytes, 
»  ils  se  conservent  assez  bons  chr^tiens.  » 

))Jusque-l^  tout  avail  prosp(^r6  sous  les  pas  du 
missionnaire  ;  mais  le  temps  des  dpreuves  arrivait...)> 

II  fut  persecute,  puis  arrete;  il  venait  enfin  d'etre 
rendu  a  la  liberie,  et  s'occupait  de  la  construclion 
d'une  petite  chapelle  h  Siang-to,  lorsque  I'occasion  se 
presenla  de  realiser,  en  partie  du  moins,  le  grand 
projel  auquel  il  pensait  constamment,  celui  de  porter 
Ic  flambeau  de  la  foi  parmi  les  sauvages,  qui  habi- 
tent  I'interieur  de  File.  D^ja,  au  jour  de  I'Assomplion, 
un  bon  marchand  chinois,  qui  fait  lo  commerce  avec 
cescontrees,  elail  venurecevoir  le  baptemeavec  safille. 
II  connaissait  un  chef  de  ces  peuplades,  et  s'offrait  vo- 
lontiersa  porter  tous  les  messages  dont  on  voudraitbien 
le  charger.  Le  missionnaire  lui  confia  quelques  cadeaux 
destines  a  gagner  les  bonnes  graces  du  prince  :  c'ctaient 
des  trailes  de  religion,  deux  couleaux,  deux  paires  de 
ciseaux,  des  epingles,  des  boutons  luisants,  une  image 
de  Notre  Seigneur  ct  une  medaille  de  la  tres-sainte 
Vierge.  Sa  majesle  sauvage  fit  bientot  savoir  a  notre 
confrere  qu'elle  agrdsait  ses  presents,  ct  qu'elle  eludiait 
avec  fii'deur  ses  livres  de  religion. 

Encouragf!!  par  ce  premier  succes,  M.  Mailfait  se 
mil  liii-meme  en  route  pour  tenter  une  excursion 
parnii  les  sauvages. 


(  526  ) 

((  Je  paiiis,  ecrivil-il  a  I'un  cle  ses  confreres,  accoin- 
»  pagn6  cle  deux  guides.  Je  me  chaussai  de  sandalcs  de 
»  paille,  c'l,  le  parapUiio  snr  I'c^paule,  je  in'aclieininai 
»  vers  ce  nouveau  ])ajs,  conlrefaisant  I'lnsulaire  de 
»  mon  mieux,  afin  de  n'felre  pas  reoonnu.  Lc  deuxifeiiie 
»  jour  de  inarche,  au  matin,  j'nrrivai  aux  preini6res 
))  monlagncs  des  Loics  ou  sauvages.  Enfant  des  Ar- 
»  dennes,  vous  pouvez  jugcr  si  mon  cceur  a  Iressailli 
»  en  voyant  ces  belles  futaies  qui  me  rappelaienl  celles 
»  ou  j'avais  autrefois  Vecu.  Combicn  j'aurais  d^sirci 
»  vous  avoir  pr^s  de  nloi  au  milieu  dc  ces  forets  im- 
»  menses,  ou  les  arbres  tombent  de  v(5tustc  les  uns  sur 
»  les  aulres!  Malbeurcusement  on  y  ronconlre  une 
»  quantity  de  pctites  sangsues  qui  vous  grimpont  par 
»  les  jambes,  et  qui  vont  jusque  sur  le  dos  y  prali- 
»  quer  de  largcs  saignecs,  sans  I'ordonnance  de  la  fa- 
»  cuke.  Puis,  ce  sont  des  ravins,  des  ruisseaux,  des 
»  rivieres  qui  s'opposent  a  votre  passage;  il  faul  alors 
»  en  tenter  le  gue  en  ayant  del'cau  jusqu'a  la  ceinluro, 
»  ou  I)ien  atlendre  que  le  torrent  se  soitecoule;  car, 
»  en  ce  lieu,  il  u'y  a  point  de  barques.  Je  tiaversai 
))  une  dcrnifere  for^t  d'environ  quatre  lieues  d'rtendue, 
»  ct  j'arrivai  a  un  viillon  enclave  entrc  des  niontagnes, 
»  ou  des  Chinois  sont  venus  s'etablir.  A  TexIrcWnit^  de 
))  la  gorge  sc  trouve  Len-nioui,  le  marchc  central.  II 
»  peut  y  avoir  dans  les  environs  une  centainc  de  pe- 
))  tits  liamcaux,  perdus  dans  les  broussailles  et  sur  les 
»  monis;  de  lieue  en  lieiie,  on  rencontre  des  baraques 
»  en  paille  qui  servcnt  d'hotelleries ;  j'y  passai  Irois 
»  nulls,  disputant  quelquc  pen  de  place  aux  poulcs, 
»  aux  pores  ct  aux  voyageurs  qui  vicnncnt  y  cbercber 
»  un  abri.   Le  quatrienie  jour,  j'allai  m'installcr  dans 


(  527  ) 
»  line  loge  en  lierbe,  oii  je  savais  qu'un  paien  mon- 
»  trait  quelques  dispositions  a  recc\oir  le  bapleme. 
»  11  me  donna  une  tranche  hospitalite  dans  sa  case,  et 
»  de  la  j'envoyal  mes  gens  a  la  decouveite.  Les  pre- 
»  inlcrs  jours  je  n'avais  pas  grande  esperance;  enfin 
»  un  saniedi,  apres  avoir  conjure  Marie  d'avoir  egard 
»  a  nion  long  voyage,  que  j'avais  cntrepris  unlque- 
»  ment  pour  la  gloire  de  son  divin  Fils,  jo  dis  la  messe  ; 
»  el,  pendant  neuf  jours,  je  recilai  rollice  de  la  Iri'S- 
»  sainte  Virrgo  :  Irois  honiuies  aussilol  ni'arriverent. 
»  I. a  Saint  Francois-Xavler  ni'en  ainenad'autres  ;  enfin 
»  Irois  jounes  gens  vinrent  nie  prier  tl'aller  leur  cnsei- 
»  gner  la  sainte  doctrine.  Je  me  rendis  dans  leur  vil- 
»  lage;  je  nie  logeai  dans  leur  case,  et  j'y  passai  la  fole 
»  de  riinmaculee- Conception.  On  vint  me  voir  en 
»  foule,  quolque  co  lul  le  temps  de  la  moisson  ;  chaque 
»  soir,  jusqu'au  milieu  de  la  nuil,  mes  guides  cateclii- 
n  saieut.  Second^  par  leur  zele ,  j'eus  le  bonheur 
»  d'administrcr  le  bapleme  a  onze  personnes;  un 
»  grand  nombre  d'autres  se  pre[)arenl  a  recevoir  la 
))  m6me  grace,  a  la  premiere  visile  que  je  ferai  dans 
»  ccsmonliignes.  \in  gend-ral,  ce  sontdcsgcns  simples, 
»  dont  linduslrio  se  borne  a  savoir  couper  les  arbres 
»  de  la  I'oret,  cultiver  quelques  rizieres  et  garder  Icurs 
»  bceufs.  Du  resle,  ils  sont  laids  a  faire  peur.  Accou- 
»  iresd'une  petite  culotte  presqu'a  jour,  la  peau  rouge 
»  commc  des  ecrevisses,  bs  jambes  tacbetees  par  les 
»  morsures  des  sangsucs,  un  petit  panier  a  la  ceinliire 
»  dans  lequel  ils  |)ortcnl  lour  coutelas,  ils  inspirentdu 
»  premier  aliord  une  certaine  crainte;  mais  le  fond  du 
»  cceur  est  pacilique. 

»  Le  bourg  de  Lca-nwitl ,  qui  est  a  une  lieue  plus 


(  558  ) 

»  loin,  est  un  bazar  oii  affluent  Jes  sauvages  de  tons 
»  les  costumes  el  de  toiites  les  trihus.  La  vous  voyez  le 
))  Nnou-tong,  qui  porte  les  cheveux  roules  sur  le  haul 
»  du  front;  le  Kac-tniaon.  dent  la  lule  est  armee  dc 
))  deux  crocs  de  bambou  en  forme  do  cornes :  le  Bam- 
»  miaou ,  avec  son  arbalelc ;  le  Doa-siain  et  le  Foie- 
»  siarii,  qui  n'ont  qu'un  petit  morceau  de  toile  pour 
»  se  couvrir.  Du  lieu  ou  j'babitais,  je  suis  all^  a  la  d6- 
»  couverte  sur  le  haut  d'uii  pic  pour  rcconnailro  lo 
»  pays  et  le  b^nir.  A  perte  de  vue,  s'etendonl  des  mon- 
»  tagnes  couvertes  de  forfits  si  epaisses,  que  mon  vieux 
»  catecbistc  y  a  marcbe  plusieurs  jours  sans  pouvoir 
»  d^couvrir  le  cicl.  Dans  cos  gorges,  sonl  dissemin^es 
»  les  Iribus  des  sauvages,  divis^s  en  petils  groupes  do 
))  qiiinze  a  vingt  families.  Leurs  malsons  ne  consistent 
))  qu'en  un  toil  de  paille,  soutenu  par  qualre  pieux 
»  d'arbrcs  a  betel,  et  envlronne  d'une  cloison  do  bam- 
))  bous;  quelques-uns  mcMne,  comme  les  Doa-siam  et 
»  les  Foie-siam ,  babilent  des  creux  de  rocliers,  et 
»  m^nent  unc  vie  erranle.  Chaque  tribu  est  gouvernee 
))  par  un  Fang-koun,  ou  procureur,  qui  a  des  soldats  a 
))  sa  soldo  pour  gardcr  I'entr^e  des  montagnes  conlre 
»  I'invasion  des  Cbinois.  Voila  done  que  j'altaque  le 
»  pays  des  sauvages  de  trois  cotes  :  par  le  Li~hone- 
))  koiiai,  oil  un  catecbiste  est  alle  annonccr  I'Evangile ; 
»  par  le  sud,  pros  de  Bam-tsiou,  ou  deux  villages 
»  s'(5branlent  pour  recevoir  la  bonne  nouvelle  ;  et  par 
»  le  cbemin  que  je  viens  moi-m6mo  d'ouvrir.  Le  pre- 
»  mier  coup  est  porle;  la  lente  de  la  foi  est  dressee ; 
))  prioz  la  bonne  mere  de  la  remplir.  » 

»  Aprd'S  cetlo  juciniere  excursion  parmi   los    sau- 
vages, M.  Maillail  revint  au  wilieu  de  ses  bien-aimes 


(  529  ) 

Chretiens  a  Siang-to,  pour  leur  prficher  le  Jubilt^;  puis 
il  repaitit  pour  uiie  nouvelle  expcdillon,  qui  devait 
fitre  la  derni^re  de  ses  courses  aposloliques.  II  se  diri- 
goadu  c6l6  du  goife  du  Tung-King,  comptanty  Irouver 
quelques  families  chretiennes,  depuislongtemps  aban- 

donnees.    Son   esperance  nc  fut  pas  vaine Co  I'ut 

apres  avoir  passe  quelques  jours  dans  une  niaison  de 
neophytes,  qui  dopuis  soixanle-dix  ans  ^taient  venus 
se  fixer  dans  les  bois  pour  y  cultiver  quelques  rizi^res, 
ot  s'fitre  egar6  dans  les  landes,  a  la  recherche  d'une 
autre  famille  qui  demeurait  vers  la  cote  occidenlale, 
qu'il  arriva,  au  milieu  de  la  nuit,  accable  de  faim  et 
de  fatigue,  a  la  cabane  d'un  ancien  chr^tien,  qui  de- 

puis  vingt-neuf  ans  n'avait  pas  rencontre  de  pretre 

A  la  suite  d'une  autre  course  qu'il  fit  a  pied,  peu  de 
jours  aprfes,  pour  aller  au  secours  d'un  moribond  qui 
I'avait  fait  appeler  et  qui  demeurait  a  quinze  lieues  de 
sa  residence,  il  fut  attaque  d'une  fiuvre  violenle  a  la- 
quelleilsuccomba  le  31  mars,  dans  la  trente-cinqui^mo 
annee  de  son  age. 

))  On  pent  juger  de  la  douleur  que  causa  la  mort  du 
p^re  Mailfait  parmi  les  chreliens  de  I'ile  par  I'ainiction 
que  conservaienl  encore  ici  les  courriers  qui  nous  ap- 
porterent  cctte  triste  nouvelle.  En  se  pr^senlant  dcvant 
notre  Supdrieur,  qui  leur  demandait  avec  empresse- 
ment  si  le  Missionnaire  allait  mioux,  ils  ne  repondi- 
rent  rien ;  mais,  se  prosternant  la  face  contra  terre, 
Irois  fois  ils  la  frapperent  de  leur  front;  puis  ils  s'^crid- 
rent,  en  pleurant :  uLe  P^re  est  mort! » 


(  530  ) 

itiialyiscs,   Exti*ai<«  «1'oiivragcs, 
lil^laiiseM,   etc. 


RAPPORT 

sun 
LE  VOYAGK  ^UX  SAINTS  LIEUX  DE  Mgh  MISL1\  (1  , 

Lu  (laiis  la  seance  tlu  /(  juiii  i852 

PAR 

M.    COUTAMBKRT. 
RiESSinURS, 

Vous  m'avez  chargti  de  vous  presenter  iine  analyse 
de  I'ouvrago  de  Mgr  Mislln  ,  intilule  les  Saints  l.ieitx ; 
je  viens  m'ncquilter  de  celle  laclie,  avec  d'aiilant  plus 
d'einpressemeiil  qiioj'ai  trninr  beaucoup  dc  plaisir  ot 
d'inl^rel  a  lire  iino  relation  consciencieuse,  instruclive 
et  iininemmenl  propre  a  jeler  iin  noiiveau  jour  sur 
celte  rc^gion  sacree  qui  ful  le  lierceaii  de  nohe  religion, 
et  qui  est  reside  jusipra  present  si  inyslerieuse  encore 
sur  bien  des  points,  malgre  tant  de  vovagps. 

Mgr  IMislin  est  un  rcspeclable  ecciesiaslique,  qui  a 
le  titre  d'abbe  mitre  de  Sainle-Marie  de  Deg,  en 
Hongrle;  ne  en  Suisse,  attacbe  a  rAulriche  par  ses 
fonctions  pastorales,  il  6crit  cepcndant  le  francais  a\oc 
elegance;  il  a  uneprofonde  erudition  bibliquc,  dont  il 
fait  abondanoment  profiler  le  leclijur;  il  a  consulle  et 

(l)  Les  Saints  Lieux.  Pelerlnage  a  JdriisaUni.  cii  puisnnt  par  i Au- 
triche,  la  UoiK/rir,  la  Slavouiey  les  juov'iiicfs  Juuitljifiui.  s,  Conslaiitl- 
nople,  lArchipel,  le  Libati,  la  Syiie,  Alexandrie,  Malte,  la  Sicile  et 
Marseille;  par  M{jr  Mislin,  abbe  mitre  ib;  Saime-Maric  de  Deg,  en 
Hongrie,  caincrier  secret  de  S.  S.  Pie  IX,  etc.  Paris,  i85i .  a  vul  iii-8°. 
Guyot  freres. 


(  531  ) 
appreci^  les  relations  des  nombroux  autetirs  qui  Font 
pi<5c6cle  clans  la  peinlure  dc?  la  Paleslinc;  il  les  cite,  il 
les  criliqiie  an  besoin  :  il  connait  a  fond  les  descriptions 
dc  Vcdney,  du  marechal  Marmonl,  de  Cljateaubriand, 
de  Eurckbardt,  de  Maundrell ,  de  NiebLdn%  de  MM.  de 
Laiuartine,  Jules  David,  Poujoulat,  Schubert,  Scbultz, 
Lynch,  Russeggei',  du  jiere  de  Geramb.  de  I'abbe  Ma- 
rili  ,  dc  niadame  de  Gasparin ;  rexploralion  si  I'e- 
conde  de  MM.  Robinson  et  Smith;  ii  fail  de  frcVjucnts 
emprunls  a  Quaresmius ,  qui,  dans  le  xvu'^  siecle , 
a  deja  si  bien  eclairci  un  grand  noaibre  de  points  dilFi- 
ciles  de  la  geographic  et  de  Fhistoirc  du  la  Judoe.  II 
ne  pouvait  pas  connailre  les  excursions  si  fructueuses 
que  noire  savant  compatrioie,  M.  de  Saulcy,  a  publiees 
recennnenl. 

Mgr  Mislin  est  parti  de  Viennc  en  18/|8,  au  milieu 
de  la  tourmenle  revolutionnaire  qui  agitait  I'Europe, 
et  en  compagnie  du  venerable  <5veque  Pompallier,  dont 
vous  connaisscz  les  missions  courageuscs  dans  I'Ocea- 
nie;  il  descend  le  Danube,  et  jelle,  en  passant,  un 
coup  d'ceil  inleressant  sur  plusieurs  villes  de  la  Hon- 
grie ,  de  rEsclavonie  et  de  la  Servie  :  Piesbourg, 
Comorn  ,  Gran,  Bude,  Pesth  ,  Neusatz,  Semlin  ,  Bel- 
grade; il  decrit  la  magnificence  du  passage  qu'ofl're 
le  fleuve  lors;ju'il  est  resserr^  entre  les  Carpalhes  et 
les  derniers  rameaux  du  Balkan,  et  cetle  celebre 
Porte  de  Fer,  ou  le  couranl  rapide  roule  ses  eaux  sur 
nn  plateau  de  rocher  I'espace  de  plus  de  7  000  pieds. 

II  voil,  en  Turquie,  Yiddin  ,  Nicopol,  lloustchouk, 
Giurgevo  ,  Brahilov,  Galatz,  et  entre  dans  la  mer 
Noire  par  la  bouche  de  Salina.  Notre  voyageur  arrive 
enfin   a   Constai\linople  ,   sur  laquelle  il    donne   des 


(  532  ) 

ilclails  int^rcssanls;  il  parle  des  frequenls  incendies, 
Irouve  les  Turcs  hienveillants ,  mais  nt^j^lif^/^s  ot  indo- 
lonls,  Inuc  la  loKhance  de  ce  poui)le  pour  h.'S  divcrses 
religions,  ct  s'etond  avcc  complaisance  sup  les  ecoles 
clinUiennes  dont  on  a  permis  r6tabrisseinent  a  Pera,  A 
Galata  ct  a  Bebek  ;  mais  ii  n'uime  pas  les  Juifs  ,  cl  il  les 
aUaqueavec  une  \ivacit6  peul-6tre  un  peu  tropardente. 
II  navigue  siir  la  mer  de  Marmara,  ct  rap|)elle  I'lii- 
l^ret  qui  se  rattachc  aux  villes  de  la  cote  asiatique  de 
ce  pellt  et  magnifique  hassiii  :  Cbalcedoine,  Nicode- 
mie  ,  Mcee  ,  donl  les  noms  sunt,  a  divers  titrcs ,  chers 
au  clergii  calliolique;  Cjzique,  Lampsaque,  plus  con- 
nucs  dans  I'liisloire  des  Grecs  et  des  Romains.  11  passe 
les  Dardanelles,  menlionne  les  onze  clialeaux  forts 
qui  les  defendent,  six  en  Europe,  cinq  en  Asie , 
munis  de  monceaux  do  boulets  de  marbrc  qu'on  a 
formes  des  colonnes  d'Alexandria-Troas.  II  a  naturel- 
lement  un  souvenir  pour  Troie  ;  11  visite  Ten«^dos,  cetle 
ancienne  Insula  du'es  opitni,  aujourd'hui  si  pauvre;  Md- 
lelin,  cetle  voluplueuse  Lesbos  de  I'antiquiti,  maiute- 
nant  silencieuse  et  desolee;  Smyrnc,  au  port  magni- 
fique, a  I'aspecl  delicieux,  a  I'interieur  disgracieux,  ci  la 
population  cosmopolite,  etrangementmOlee  de  Turcs, 
de  Grecs,  de  Juiis,  d'Armeniens,  de  Francs;  ville  si 
aniinee  ct  si  riclie  par  son  conunerce,  uialgre  tous  ses 
mallieurs,  ses  incendies,  ses  tromblemcnls  de  Icrre, 
ses  pesles.  Mgr  Mislin  passe  a  Kbio,  qui,  blen  que  dti- 
solee  par  les  Turcs,  est  encore  ft^conde  en  vins  oxccl- 
lents,  en  terebentbine ,  en  mastic;  il  parle  d'Epbese, 
qui  I'int^resse  moins  par  son  ancien  et  cdil^bre  temple 
que  par  le  souvenir  de  saint  Paul  et  celui  de  saint  Jean ; 
cet  illustre  6vangeliste  y  est  mort,  et  c'esl  a  cause  de 


(  533  ) 

lui  quo  reniplacenient  acluel  de  la  villo  s'appelle  Aia- 
Soulouk  (Saint-Tlieologien ).  Bientot  on  venconti'e 
Samos,  qui  rappelle  a  la  fois  le  culte  de  Junon,  Py- 
Ihagore,  Anacreon,  Ht^roclote,  Polycrate  et  saint  Paul; 
INicaria ,  qui  est  I'ancienne  Icaria ;  Pathmos,  ou  saint 
Jean,  exile,  ecrivit  I'Apocalypso;  I'anlique  Milet,  celte 
reine  des  colonies  grecques  de  I'Asie  Mineure,  qui,  au 
temps  de  Strabon,  ^tait  au  bord  de  la  mer,  et  se  Irouve 
aujoui'd'hui  assez  loin  dans  I'intdrieur ;  la  presqu'iie  de 
Boudroun,  ou  brillait  autrefois  Halicai'nasse,  et  pr^s 
de  laquelle  sont  repanduesde  nombi-euses  petites  lies 
piltoresques;  Cos,  qui  rappelle  Hippocrate  et  encore 
saint  Paul,  dont  presque  loute  I'Asie  Mineure  atleste 
les  travaux  apostoliques;  Rhodes,  pleine  de  souvenirs 
Chretiens,  et  dont  la  ville ,  peupl^e  de  10  000  auies, 
futpour  ainsi  dire  le  plus  int^ressant  musee  du  nioyen 
age,  et  couronna  son  histoire  par  I'heroique  defense 
des  Chevaliers.  On  aborde  en  Chypre ,  a  Larnaca , 
I'ancienne  Cithium,  ainsi  noramee,  dit-on,  du  pctil- 
fils  de  Japhet,  Cethini,  dont  le  nom  est  meme  donne, 
dans  la  Bible  ,  a  I'ile  enti^i'e ,  ile  si  vantee  jadis  par  sa 
beaute,  et  aujourd'hui  abandonn^e ,  ravagee  paries 
fi^vres,  les  ophthahnies,  la  l^pre;  elle  corapte  100  000 
habitants,  dont  60  000  Grecs. 

Enfin,  Mgr  Mislin  touche  celte  lerre  de  Syrie  qui  est 
I'objetde  scs  voeux;  il  apercoit  le  Liban,  aux  sommcls 
resplondissants  ,  et  qui  parait  devoir  son  nom  au  mot 
h^breu  Idban  ,  etre  blanc.  C'est  a  Beyrouth  qu'il 
aborde  :  cette  ville  6tait  la  Beryle  des  Grecs,  mais  elle 
avail  d'abord  porl^  le  nom  de  Gen's,  a  cause  de  Gir- 
gasi,  cinquicnie  fils  de  Canaan;  elle  dovint  line  colo- 
nie  de  Sidon,  t^uis  une  colonic  romaine  sous  Auguste, 
III.   JUiN.  2.  3t) 


(  6SA  ) 

qui  lui  donna  le  noin  tie  sa  fiUe  el  I'appela  Julia  Fe/ij  . 
Quo  de  souvenirs  se  pressenl  en  ce  lieu,  dans  I'hisloire 
d'Horode-le-Grand  ,  d'Herode-Agri[>pa  .  de  Vespasien, 
de  Flavius  Josephe  ;  dans  celle  de  Baudouin  I",  qui , 
par  parenlh^se  ,  tiia  d'une  lorfil  de  pins  voisine  ses 
machines  de  guerre,  ce  qui  prouve  qu'elle  ne  fut  pas 
planlee  par  lemir  Fakreddin ,  coninie  plusieurs  au- 
teurs  I'ont  avance  ;  dans  I'hisloire  enfin  de  Saladin , 
qui  en  fit  la  capilale  musuhnane  de  la  Syrie!  Elle 
lomba  ensuile  sous  la  doniinalion  des  Druses,  el  ful  la 
residence  de  I'^mir  Fakreddin  ,  qui  y  pdrit  en  defen- 
dant ses  Etals  contre  le  sultan  Amurath  IV.  Quoique 
sa  rade  soit  peu  silre,  Beyrouth  est,  apr^s  Smyrne,  la 
place  de  commerce  la  plus  imporlanle  de  la  cote 
ollomane  de  I'Asie;  elle  a  30  000  habitants,  donl 
12  000  musulmans,  12  000  Grecs  schlsmaliques  ,  le 
reste  catholiques,  Maroniles  ct  Arm^niens. 

Au  sujet  de  la  population  variee  de  Beyrouth, 
Mgr  Mislin  jelte  un  coup  d'oeil  general  sur  les  habi- 
tants de  la  Syrie,  cette  terre  extraordinaire,  qui,  d^s 
I'origine  des  soci^t^s  ,  fut  le  champ  de  balaille  de  lant 
de  conqueranls,  la  terre  promise  de  lant  d'exil^s;  au- 
jourd'hui,  c'est  un  melange  do  Juifs,  do  Persans,  de 
Giecs,  de  Francs,  d'Arabes,  de  Maroniles,  de  Melualis, 
de  Druses,  de  Samarilains,  de  Kedemac^s,  de  Kal- 
l)iehs,  de  Yezidis,  de  Turcs,  de  Kurdes,  qui  composent 
un  total  d'onviron  2  millions  ct  demi  d'habilanls. 

L'autcur  donne  des  details  assez  etendus  sur  les 
Druses  el  les  i\laronites  ;  sans  essayer  de  les  repro- 
duire ,  je  dirai  seulement  que  les  fenimes  druses 
mariees  el  les  femmes  maroniles  de  distioclion  out 
pour  ornemcnl  principal  ime   sorle  de  corne  I'orm^e 


(  535  ) 

d'un  tube  en  cuivre,  souvenl  en  argenl ,  allache  au 
haul  de  la  l6te  ;  un  voile  blanc  et  leger  s'accroclie  au 
sommet,  et  se  clivise,  en  descendant,  de  chaque  c6l6 
de  la  figure.  Mgi  Mislin  prefere  beaucoup  les  Maroniles 
aux  Druses,  et  il  se  sent  probablenient  entraine  da- 
vantage  a  les  aiiner  a  cause  de  leur  religion,  qui  est  le 
catholicisme ;  il  les  d6peint  comme  bons,  simples, 
liospilaliers,  Tort  attaches  a  leur  foi.mais  il  avoue  leur 
profonde  ignorance.  Cette  petite  nation  cbrelienne  a 
dil  se  former  peu  a  peu  par  des  |)roscrits  qui,  a  I'epo- 
que  oil  Heraclius  perdit  la  Syrie,  avaient  chcrch^  dans 
les  montagnes  du  Liban  un  refuge  contre  los  cruault!!S 
de  I'armt^e  de  Chosro^s.  Vers  la  fin  du  vii«  si^cle,  I'lus- 
lorien  Tlieophane  les  montre  deja  assez  nombreux. 
Un  solitaire  appele  Maron  ,  appele  des  bords  de 
rOronte  pour  etre  <!!veque  de  Botris,  ville  situee  au 
pied  du  Liban  ,  entre  Tripoli  et  Biblos,  rendit  de  si 
grands  services  a  I'Eglise,  qu'il  fut  6leve  a  la  dignile  de 
patriarche  du  Liban;  il  fixa  sa  residence  a  Ranobin, 
ou  un  monast^re  avait  it6  fonde  par  Theodoso-le- 
Grand;  de  ce  personnage  est  done  venu  le  noni  donne 
a  cetle  popidation.  Les  Maronites  participerent  bril- 
lainnient  aux  entreprisos  descroises;  lil>res  alors,  ils 
sont  retombes  depuis  sous  le  joiig  musulman,  mais 
avec  une  sorte  d'organisation  propre,  presque  tou- 
jours  sous  le  gouvernement  de  la  famillo  Clienah,  qui 
est  originaire  de  la  Mecque,  selon  Burckliardt.  De  nos 
jours,  I'emir  Bdchir,  issu  de  cette  i'amille,  avait  pousse 
a  bout  les  montagnards,  qui  se  soulev^rent  contre  lui; 
mais,  par  ses  redoutables  severites,  il  niaintint  son 
pouvoir.  Lorsqu'en  1832,  Ibrabim- Pacha  conquit  la 
Syria,  il  desaruia  les  Maronites  et  les  obligea  a  payer 


(  536  ) 

de  lourds  impots ;  ccpendanl,  une  insurrection  ayant 
eclale  parini  les  fellahs  et  les  Bedouins  du  Haouran , 
en  1838  ,  il  envoya  des  arraes  aux  Mavonilcs  pour 
I'aider  a  com  primer  la  revolto.  Mai  recompenses  de 
leur  zele,  ils  s'insurgcnt  a  leur  tour,  en  ISliO ,  ainsi 
que  les  Druses  et  les  Metualis,  contre  Meh^met-Ali  et 
I'eniir  Becbir,  et,  soutenuspar  les  allies  de  la  Porte,  les 
Autrichiens  et  les  Anglais ,  ils  6crasent  les  troupes 
egyptiennes.  Bechir  quitta  son  palaisde  Deir  el-Kamar, 
avec  loule  sa  famille,  et  se  dirigea  sur  Saida,  pour  se 
livrer  au  commandant  de  la  flotte  anglaise. 

L'origine  des  Druses  ne  date  que  du  xi"  si^cle.  Un 
im]iosteur,  Hakem,  de  la  race  des  Fathimites ,  s'etant 
fait  adorer  comme  un  dieu,  ses  seclaleurs,  persecutes 
par  son  successeur,  s'enfuirenl  d'Egvple  et  vinrcnt 
chcrcher  un  asile  dans  le  Lihan  ;  ils  prii  ent  le  nom  de 
leur  chef  Druzi.  Leur  religion  est  un  melange  bizarre 
de  christianisme  et  de  mahometisme  ;  ils  n'ont  pas 
d(^  temple,  mais  ils  tiennent  des  assemblees  secretes 
toutes  les  Irenle  nuils;  ils  sont  (iers ,  trisles  et 
sombres,  mais  excellents  soldats  et  Ires-liospitaliers. 

iMgr  Mislin  quitta  Beyrouth,  admirant  ses  gracieux 
environs  el  rappelant  que  les  Orientaux  la  comparent 
a  une  charmante  sultane  ,  accoudee  sur  un  coussin 
vert  et  les  yeux  tourn^s  vers  les  flots,  dans  une  reveuse 
indolence.  II  fait  une  excursion  dans  le  Liban  ,  et  ne 
pout  se  lasscr  de  coutempleV  I'aspect  jiiltoresquc  de 
ces  moulagiies,  oii  la  nature  est  grandiose,  mais  ou 
Lrillenl  aussi  les  merveilles  de  la  culture  et  du  soin 
d'un  peuple  patient,  laborieux  et  Chretien;  elles  sont 
couronnees  9a  el  la  de  couvents  et  d'^glises  maronites, 
dont  beaucoup  ont  616  elev6s  par  la  nuinificcnce  de  la 


(  537  ) 

France.  Les  plushautes  ciines  dii  Libaii  ot  dc  I'Anti- 
Liban,  d'aprfes  M.  Russeggor,  n'atteignent  pas  la  ligne 
des  neiges  eternelles,  qui,  sous  cette  latitude,  est  a 
10  000  pieds  ;  le  Sannin,  qui  est  le  Sanir  cle  TEci'lture, 
n'a  que   6  800  pieds;  le  Makmol ,  8  800;  le   Djohel- 
Cheikli,  9  500.    Les   chemins  sont,  de  toutes  paiis, 
impraticables  sur  le  Liban  ,  et  les  Maronitcs  ne  ticn- 
nent  nullement  a  les  ameliorer,  parce  qu'une  position 
inaccessible  est  pour  eux  un  gage  de  liberie,  Nos  voya- 
geurs  sont  partout,  dans  ces  montagnes  bospitalieres, 
obliges   de  subir  les  parfums ,  le  cafe  et  le  chibouk , 
dont  mainte  fois  sans  doute  ils  pr6fereraient  etre  pri- 
v^s;  ils  s'arretent  a   Gliosta,  oil  ils  visilent  plusieurs 
membres  de  la  famille  de  I'^mir  Becbir;  ils  passent  au 
couvent  de  Bzommar,  situe  dans  une  position  magni- 
fique,  et  residence  du  patriarche  armenion  calholique, 
qui    a    sous    ses   ordres  deux  evfiques   dioc^sains  et 
12  000  fiddles,  epars  en  Cilicie,  en  Syrie,  en  Mesopo- 
tamie ;  —  a  Raifun ,  ou  il  y  a  un  ^tablissement  de  la- 
zarisles;  —  a  Miruba,  oil  reside  I'archeveque  d'Helio- 
polis   (Baalbek),  lis  voient  le  Nahr-Saib  (riviere  de 
miel),  le  Nabr-el-Leben  (riviere  de  lait),  et  le  mont 
Sannin,  oil  se  trouvent  des  mines  de  houille  et  de  fer. 
Apros  avoir  parcouru  le  Kesrouan,  ils  entrent  dans  la 
province  de  Djourd ,  et  se  trouvent  chez  les  Melualis 
ou  M6tarv(^lis,  peuplade  nuisulniane,  aux  uioeurs  dui'es 
et  inhospitalieres ,  qui  lire  son  nom  de  ce  qu'elle  est 
de  la  secte  d'Ali,  et  qui  est  particuli^renient  fixee  dans 
le  nord  du  Liban  ,  dans  I'Anti -Liban  ,  et  onlre  Baal- 
bek et  Tyr.  Ils  rencontrent  ensuite,  pour  la  premiere 
fois,  des  Bedouins,  et  Mgr  ftlislin  les  Irouve  bien  tels 
que  Mahomet  lui-ni^mc  les  a  designes,  les  plus  opium- 


(  538  ) 

tres  des  infideles  :  ils  n'ont  ni  pretres,  ni  inosqu^es ; 
ils  ne  se  soumeltent  pas  a  la  loi  du  jeilne  el  ne  font 
pas  le  pfelerinage  de  la  Mccque ;  toujours  arines,  sol- 
dais  ct  bergers  a  la  fois,  d'uno  extreme  sobriete,  in^- 
piisant  los  fellahs  et  les  fenimiS,  Tiers  de  leur  oiiglne, 
de  leur  liberie,  de  leur  solilude,  le  brigandage  est 
pour  eiix  un  art,  un  besoin,  une  passion.  Nos  pfelerins 
s'arr6lent  a  Diuian,  chez  le  patriarche  maronite,  qui 
prend  le  litre  depalriarche  d'Antioche.  Pr6s  dela,  au- 
dessns  de  ce  qu'on  appelle  la  valine  des  Saints,  ou  la 
Radicba ,  sont  les  faineux  cedres,  formanl  une  petite 
forel    appuyee    sur    un    plateau    qu'entourent  ,    vers 
I'orient,  I'enceinte  demi-circulaire  des  dernieres  cimes 
du  Makmel,  el,  au  couchant,  des  I'oches  a  pic  qui  des- 
cendenl  dans  la  vallee  des  Saints;  ils  sont  dissemines 
sur  une  dizaiiie  de  manielons,  et  se  Irouvenl  a  6  000 
piods  au-dessus  du  niveau  de  !a  mer;  on  n'en  compte 
plus  que  douze  vieux,  de  ceux  qui  ont  dii  voir  le  r6gne 
de  Salomon,  el  ils  sont  groupes  sur  deux  monticules; 
il  V  a  deux  si^cles  que  Quai-esmius  en  coraplait  encore 
vingl  Irois ;  deux  d'entre  eux  ont  AS  pieds  de  circonf6- 
rence;  leur  liauteur  peul  etre  dc  60  pieds.  Les  aulres 
c(^dres ,  au  nombre  de  Irois  cent  soixante-deux ,  sont 
evidcmmenl  beaucoup  plus  jeunes,  et  appartiennenl 
a  diirerenles  6poques;  ce  sont  des  arbres  d'une  belle 
venue,  aussi  hauls  que  les  vieux  cedres,  niais  d'un 
diametre  beaucoup  moindre.  C'est  la  seule  localile  du 
Liban  ou  il  y  ail  encore  des  ct'dres  de  cette  espfece. 

Non  loin  de  la,  a  une  altitude  de  4  450  pieds,  est 
liden,  gros  village  de  3  000  ames  en  (^le,  et  reduit,  en 
hiver,  a  une  \iiiglaine  d'liommes,  charges  d'oler  la 
neige  qui  ^craserait  les  maisons  ;  c'est  un  si^ge  ^pis- 


(  539  ) 

copal  dt's  Maronilcs;  il  y  a  en  lout  nouf  eveques  pour 
cette  population,  (jui  s'eleve  a  300  000  ai.es. 

Kanobin  ,  qui  tire  son  nom  de  coenobiuin ,  est  le 
couvent  par  excellence  clans  le  Liban.  Bali  par  Tlieo- 
dose-le-Grand  ,  il  devint  la  residence  de  Maron ,  et, 
aprds  lui,  de  tous  les  patriarches  maronites  ;  ce  n'esl 
qu'un  grand  couvent,  et  non  une  ville. 

Mgr  Mislin  ,  apres  avoir  visits  tous  ces  lieux  ,  sur  le 
versant  occidental  du  Liban,  passe  sur  le  versant 
oriental,  et,  au  lieu  des  coteaux  verdojanls  et  bien 
cidlives,  des  nombreuses  babitalions  et  de  la  vie  de 
I'aulre  cote,  il  nc  trouve  plus  qu'une  region  aride, 
blanche  et  inhabitee.  II  apergoit  I'Anti-Liban,  que  les 
Arabes  appellent  El-Charq  (la  montagne  de  Test);  il 
contemple  de  loin  les  ruines  de  Balbek,  qui  font  sur 
lui  une  impression  ind^finissable ,  mais  oil  ses  guides 
refusent  de  le  conduire,  par  crainte  du  cholera,  qu'on 
pretend  regner  danscelle  parlie  de  la  Syrie.  II  s'arrfele 
au  lac  Liamoni  ou  Jammuneh,  qui  olTre  un  fond  en 
partie  dessechd,  ou  s'engouffre  un  fdet  d'eau  et  ou 
sonl  quelques  ruines.  Celle  eau  serait-elle,  comme 
quelques-uns  le  supposent,  la  source  du  Nahr-Ibra- 
iiim,  c'est-a-dire  de  la  riviere  Adonis,  qu'on  voit 
sourdre  abondamment  sur  le  flanc  occidental  du  Li- 
ban? Ces  ruines  appartiendraient-elles  a  I'ancienne 
Aphec  ou  Aphaca,  ou  Ton  voyait  le  temple  de  V^nus 
Aphacite,  etpres  de  laquelle  se  livra  une  bataille  enlre 
Achab  et  Benadad  ? 

En  quiltant  le  Li!)an,  Mgr  Mislin  fait  connailre  I'etat 
politique  actuel  de  cetle  remarquable  region ,  qui 
lorme,  nqn  un  district  ordinaire  de  I'un  des  paclialics 
de  la  Syrie,  mais  une  division  distincte,  partag^e  entre 


(  o/iO  ) 
doiix  ktiiinacans  ou  lleiitonanls,  I'un  pour  Ics  Druses, 
Taulre  pour  les  Maronilcs.  La  rcsltlcnce  actucUe  do 
I'emir  cles  iMaroniles  Cbl  Bokfaja.  Leur  patriarche  de- 
mcurc,  comnie  nous  avoiis  dit,  a  Kanobin  ;  cependant, 
eu  liiver,  il  reside  au  palais  do  BLkorlc.  La  capitalo  des 
Druses  est  D6ir  el-Kamar  (Ic  couvenl  de  laLune),  qui 
lombc  en  ruines. 

En  revenant  vers  Beyrouth,  Mgr  Mislin  traverse,  sur 
la  liniitc  meridionalc  du  Kesrouan ,  lo  Nahr  cl-Relb 
(riviere  du  Chien),  traduction  prcsquo  littcrale  de 
I'ancien  nom  du  Lycus,  flouve  du  Loup.  Des  stalactites 
et  des  ossemcnts  fossiles  romarquables  se  voienl  a  la 
source  de  cctte  riviere,  et,  a  son  embouchure,  est  une 
route  clroite,  resle  de  la  voie  Antoninc,  qui,  sous  le 
nom  de  defde  de  B^ryte,  est  devenue  colebre  du  temps 
des  croisades,  par  le  passage  de  Baudouin  I".  Enlin  , 
il  arrive  au  Nahr -Beyrouth,  le  Magoras  des  anciens , 
A  I'embouchure  duquel,  dans  la  mauvaise  saison ,  les 
vaisseauxstationn^s  devant Beyrouth  viennentchercher 
un  mouillage  moins  dangereux  que  celui  de  la  rade. 

Mgr  Mislin  sort  de  nouveau  de  Beyrouth ,  et  celte 
fois  c'est  pour  se  rendre  dans  la  Palestine  ,  objet  defi- 
nitif  de  son  pelorinage;  il  suit  Ic  bord  de  la  Mediter- 
ranec ,  car  la  cole  est  la  grande  route  do  la  Syrie  ;  a 
trois  lieues  et  demie  au  sud  de  la  \iilc,  il  Irouve  des 
ruines,  qui  sont  probablcmcnt  celles  de  LeonlopoUs.  II 
franchil  le  Nahr  el-Kadi,  le  Tamyras  des  anciens,  qui, 
de  m6me  que  prcsque  toutes  les  rivieres  de  Syrie,  est 
arr6t6  a  son  embouchure  par  urn'  barrc  de  sable;  il 
veil  le  Ras-Nebbi-Jon^'S  ( le  cri])  du  prophete  Jonas), 
pr6s  duquel  doivcnt  se  trouvcr  les  ruines  de  Porphy- 
rion.  Cc  n'cst  pas  loin  de  la  non  plus  qu'est  Djoun , 


(  5H  ) 

lieu  dcvenu   celebre  pai  le  sejoiir  de  lady  Stanhope. 

On  rencontre  ensuite  Sidon ,  que,  malgr6  sa  situation 

enPh^nicic,   on  pent  appeler  la  premiere  ville  de  la 

Terre-Sainte ;  car,  clans  le  partage  que  fit  Josue  do  la 

lerre  de  Canaan,  clle  echut  a  la  tribu  d'Aser.  Illustre 

dans  I'antiquite  par  son  commerce  et  de  nombreux 

^v^nements,  celle  cite  joue  aussi  un  role  interessanl 

dans  rinstoire  du  christianisme;  Jesus-Clirist  et  saint 

Paul  y  sejourn^rent ;  il   y  avail  un  grand  nombre  de 

Sidoniens    parmi    les    disciples    du    Sauveur.    Prise, 

reprise,  delruile  ct  rebatie  du  temps  des  croisades, 

elle  n'a  aujouid'hui,  sous  le  noni  de  Saida  ou  Seide, 

que   7  000  habitants,   presente  un    triste  assemblage 

de  maisons  basses,   blanches,   a  terrasses  tr^s-rap- 

prochees,  et  ne  possede  qu'un  mauvais  port  comble 

par  les  sables,  comme  tons  ccux  qu'on  rencontre  entre 

Saint-Jean  d'Acre  el  Beyrouth;  enfin  il  n'y  a  meme 

pas  de   traces  respectables   d'antiquiles  ,    si   ce  n'est 

quelques  futs  de  colonnes  bris^es  ;  elle  est  du  moins 

renommee  par  ses  bananes,  les  meilleures  de  Syrie. 

Sarepta,  si  connue  par  la  veuve  du  temps  d'Elie,  n'a 

laisse  que  des  restes  presque  insignifiants  ;  son  nom 

parait  venir  de  snrapli,  qui  en  hebreu  veut  dive  fondre, 

parce  que  les  Sidoniens  y  faisaient  fabriquer  le  verre  ; 

pendant  les  croisades ,  c'^lait  un  siege  episcopal ,  et  on 

I'appelait  chateau  de  Gerez;  lespoetes  ont  chante  jadis 

le  vin  de  ses  coteaux;  aujourd'hui  cette  cote  est  d'une 

extreme  aridite  ;  il  est  vrai  qu'a  una  petite  distance, 

le  village  de  Sarfond  est  au  milieu  d'une  petite  foret 

d'oliviers.  Un  peu  avant  d'arriver  a  I'emplacement  de 

Sarepta,  Mgr  Mislin  avait  remarque  les  grottes  d'Ad- 

noun ,  qui  lui  ont  paru  avoir  servi  de  sepultures  aux 


(  542  ) 

habitants  de  celle  ville  :  sont-ce  les  groUes  indiqu^es 
sur  loules  les  anciennes  carles  de  la  Palestine  sous  le 
nom  de  Manra  Sidoniorum  (caverne  des  Sidoniensj? 
Des  ruines  qui  se  montrenl  ensuile  sont  peuletre  celles 
d'Ornithopolis  ou  Ornilhon,  qui  elait,  d'apr^s  Stra- 
bon ,  a  egale  distance  de  Tyr  et  de  Sidon  ,  par  conse- 
quent entre  Sarepla  et  Tyr;  Pline,  de  son  c6t6 ,  place 
Ornitbon  ontre  Sidon  et  Sarepta.  On  traverse  le  Nahr- 
Kasmieh  ,  qui  est  le  Leonles  des  anciens,  el  qu'on  a 
coutume  d'appeler  aussi  le  faux  Eleutheros,  pour  le 
distingucr  du  vrai  Eleutberos ,  aujourd'hui  Nahr-el- 
Kebir,  qui  se  jelle  dans  la  tner  au  nord  de  Tripoli; 
cependant,  pourquoi  ne  pas  supposer  que  I'Eleutberos 
identique  avec  le  Leontes  est  veritable  aussi?  11  peul 
y  avoir  eu  deux  Eleutberos.  II  esl  fait  mention  deux 
fois  dune  riviere  de  ce  nom  clans  le  preuiier  Livre  de% 
Machabees  :  on  ne  peul  guere  vouloir  parler  a'.ors  que 
d'un  fleuve  place  vers  les  liiuites  de  la  Judee,  el  non 
d'un  fleuve  aussi  eloigne  vers  le  nord  que  rEleutberos 
de  Strabon  et  de  Pline.  A  la  quatri^me  croisade ,  les 
Chretiens  remporl^rent ,  pres  du  Nahr-Kasmieh,  une  ^ 
vicloire  eclatante.  La  vallee  de  Bkaa,  d'ou  vient  cette 
riviere,  ofl're  les  plus  beaux  sites. 

Tvr,  I'antiqiie  f-l  opulente  melropole  de  la  Plieni- 
cie,  a  pour  testes  de  sa  splendeur  une  porte  ebr^ch^e. 
des  rues  nolres  et  pleines  de  d^combres,  quelques 
colonnes  brisees ,  de  faibles  traces  de  mnrs  dVn- 
ceinte ;  I'ancienne  Tyr,  Palae-Tyros,  a  meme  disparu 
tout  entiere;  on  sailqu'elle  fulrebalie  dans  une  lie  aprcs 
sa  destruction  par  Nabuchodonosor;  qu'Alexandre 
ruina  encore  la  nouvelle  ville;  mais  elle  se  relevasous 
les  successeurs  de  ce  conquerant;  elle  fut  r^duile  en 


I 


(  543  ) 

cendres  par  Niger,  en  I'anlSS,  parce  qii'elle  avail  pro- 
clame  Severe.  Elle  clevint  c^lebre  clans  I'histoire  du 
cliristianisme;  I'eglise  de  Tyr  etait  la  premiere  de 
rOrient,  apres  Jerusalem,  el  I'archeveque  avail  qua- 
torze  eveclies  dans  sa  d^pendance.  Les  Sarrasins  et  les 
crois^s  se  dispiiterenl  avec  acharnement  cette  ville, 
qui  tomba  enfin,  en  1291,  entre  les  mains  des  musul- 
mans;  elle  ne  s'est  pas  reJevee  depuis,  et  ce  n'est  au- 
jourd'hui  qu'une  esp^ce  de  tombeau,  sous  le  nom  de 
Sour.  On  y  compte  a  peine  2  000  habitanls,  dent 
1  000  Turcs  el  Melualis,  800  Grecs  scliismatiques  et 
200  Maronites.  L'ancienne  cathedrale,  a  laquelle  se 
rattache  le  souvenir  de  I'archeveque  Guillaume  de 
Tyr,  un  des  plus  judicieux  hlstoriens  des  croisades, 
esl  a  moitie  cachee  sous  les  debris. 

A  une  lieue  et  demie  de  Sour,  sont  des  reservoirs 
niagnifiques  connus  sous  les  noms  de  Ras  el-Ain  et  de 
puitsde  Salomon,  etconstruitspour  Iransporterdel'eau 
a  l'ancienne  Tyr,  puis  a  la  nouvelle,  par  un  aqueduc. 
Bienlol  apr^s  s'offrent  les  restes  du  fort  de  Thozon, 
connu  par  lemallieureuxsi^ge  qu'en  firent  les  croises. 

Le  cap  Blanc  (Ras  el-Abiad)  termine  au  sud  la 
plaine  de  Tyr;  il  ofTre  un  passage  6troit  et  difficile, 
qui  a  el6,  dit-on,  creuse  par  Alexandre.  Le  fort  de 
Scanderium,  dont  Templacement  est  pres  de  la,  rap- 
pelle  le  nom  de  ce  conquerant.  On  passe  au  cap  Na- 
kora ,  qu'on  appelait  autrefois  I'Echelle  de  Tyr.  On 
laisse  a  gauche  le  monl  Saron,  que  les  auteurs  arabes 
appellent  Karouba,  probablement  a  cause  des  carou- 
biers  dont  il  6tait  couvert ;  les  chevaliers  teuloniques 
eurent  sur  ses  principales  cimes  Irois  lorteresses  :  Cas- 
trum-Lamberti ,  Indi,  et  Mons-Fortis.  On  arrive  au 


(  bhh  ) 

monticule  do  Zil) ,  siirmonl6  d'un  pelil  nomine  de 
maisons  :  c'est  lout  ce  qui  rcsle  de  I'antiquc  ville  pli6- 
nicienne  d'Achzil).  On  rencontre  la  d^licieuse  petite 
oasis  d'EI-Esmorich,  et  Saint-Jean  d'Acre,  Tantiquc 
Ptolemais,  so  presentc  pen  de  lemi)s  apies ;  mais  le 
cholera,  qui  ravage  cette  ville,  empeclie  Mgr  Mislin  d'y 
entrer;  il  se  contente  d'observer  la  plaine  qui  porlc 
son  nom  et  s'6tend  I'espace  de  7  lieues  du  nord  au 
sud,  depuis  le  mont  Savon  jusqu'au  mont  Carmel ; 
plaine  trfes-fertile,  qui  pourrait  etre  florissante,  et  qui 
est  miserable  et  d^serte ;  on  y  remarque  ga  et  lu  de 
petits  palmiers,  arbre  aujourd'hui  assez  rare  en  Pales- 
tine. 

Pour  se  rendre  au  mont  Carmel,  on  trouve  le  B6lus, 
si  c6l6bre  parce  qu'on  pretend  que  le  sahle  de  son 
lit  servil  a  faire  le  premier  verre ;  son  nom  actucl 
parait  elre  Nahr-Naman  ;  les  auteurs  arabes  du  moyen 
age  I'appellenl  Nalir- AUalou.  On  passe  ensuile  le 
Nahr-Mokalla  ou  Nabr-Haifa,  I'ancien  Cison,  si  connu 
dans  I'ficriture  par  la  victoire  de  D^bora  sur  I'arm^e 
de  Jabin  ,  roi  des  Canan^ens.  A  son  emboucbure ,  au 
fond  d'unc  vaste  baic ,  est  Caipba,  trisle  bourgade 
aujourd'hui,  siege  d'un  6v6che  pendant  les  croisadcs, 
et  donncc  a  Tancr6de  par  Godci'roi  de  Bouillon, 

On  arrive  enfm  au  mont  Carmel,  d'un  aspect  ma- 
jestueux,  quoiquc  eleve  seulemont  de  "2  000  pieds ;  il 
court  du  sud-esl  au  nord-ouest,  I'espace  de  cinq  lieues, 
et  se  termine  dans  la  mer  par  un  promontoire  remar- 
quable,  a  I'exlremite  duquel  est  situe  le  c^iebre  cou- 
vent  des  Carmes,  a  une  hauteur  de  582  pieds.  Avec 
ces  religieux,  les  seuls  habitants  du  Carmel  sont 
des  Druses  disscmintis  dans  les  vallees ,  quclques  M- 


(  5Z,5  ) 
douins  et  iin  grand  nombre  de  chacals.  On  I'appelle 
quelquefois  le  Carmel  de  la  mer,  pour  le  distinguer 
d'un  autre  Carmel  moins  connu  dont  il  estparle  dans 
le  premier  Lh>re  des  Rois,  et  qui  se  Irouve  au  sud  de 
Jerusalem.  De  tout  temps,  il  fut  v6nere  comme  un 
mont  sacr6,  meme  chez  les  paiens  :  Py  thagore  s'y  rendit 
a  un  temple;  Vespasien  y  alia  consulter  le  pretre  Ba- 
silide.  Dans  I'Lcriture,  il  est  toujours  peint  comme 
un  lieu  de  d^lices  et  de  gloire ;  tlie  et  lilisee  s'y  reti- 
rerent,  et,  pour  les  imitersans  doute,  depieux  ermites 
vinrent,  des  le  premier  siecle  de  I'ere  chr^tienne,  s'eta- 
blir  dans  les  grottes  nombreuses  dont  il  est  perce ; 
ce  n'est  qu'au  xii°  siecle  qu'ils  furenl  rC'unis  en  com- 
munaul6.  En  1821,  Abdaliah,  pacha  d'Acre,  detruisit 
I'eglise  et  le  convent,  et  batit  un  palais  avee  les  mat6- 
riaux.  Mais,  depuis,  le  monastere  a  616  reconslruit 
sur  une  immense  echelle,  par  les  soins  du  frere  Jean- 
Bapliste  de  Frascati,  aide  de  nombreuses  souscrip- 
lions.  C'esl  a  la  fois  un  couvent,  une  6glise,  une 
holellerie,  une  forteresse  et  un  lazaret.  La  maison  du 
Carmel  avait  6te  converlie  en  bopital  pour  les  blesses 
et  les  pestifer6s  francais,  apres  le  siege  de  Saint-Jean 
d'Acre  par  Bonaparte,  et  ce  fut  la  que  le  premier 
consul  vint  faire  cette  visile  si  c^lebre  aux  malheureux 
soldats,  pour  relever  leur  courage.  Apres  la  retraite 
des  Frangais,  les  Turcs  massacr^rent  lous  nos  infor- 
tun6s  compatrioles,  et  laisstirent  epars  sur  la  raonta- 
gne  leurs  ossemenls,  que  les  Cannes  ont  ensuile  re- 
cueillis  et  ensevelis.  Quolque  d<ipouillee  en  grande 
partie  des  forels,  des  vignes  et  des  cultures  qui  I'or- 
naient  autrel'ois,  cette  monlagne  conserve  des  restes 
de  son  ancienne  l)eaule;  des  urbros  en  couroimenl  le 


(  5/ib  ) 

sommet,  et  les  tlancs  en  sont  tapiss^s  cle  plantes  odo- 
rif^rantes,  avoc  Icsquelles  Ics  religioiix  font  une  liqueur 
medicinale  estimee. 

Conlinuuns  a  suivre  le  bord  de  la  uior  avec  MgrMis- 
liD,  et  nous  renconlrons,  a  3  lieues  de  Caiplia,  ce  defile 
des  Chemins  Klroits,  oii  pass^rent  les  crois6s  apr^s  la 
prise  de  Ptol(^mais;  puis  des  ruines  nomnK^es  Athlit, 
sur  une  petite  presqu'iie  el  a  cotti  d'un  port  :  c'est  un 
monceau  de  decombres,  qui  paralt  i^pondre  au  Syca- 
minuin  de  Slrabon ,  au  Magdalel  de  Josue  et  au  Fort 
des  Pelerins  des  Templiers;  ensuile  nous  voyons  Tan- 
toura,  village  et  petit  port,  corrospondaut  a  i'ancipnne 
Dor,  qui  fut  la  caj)itale  d'uiie  des  contrcies  du  Cjanaan, 
et  sans  doute  une  forteressc  considerable,  puisqu'An- 
tiochus  Sid^tes  I'assiegea  avec  une  arinee  de  130  000 
homines.  Nous  Iranchissons  la  riviere  Koradje  (I'an- 
cien  Kers6os),  puis  la  Zerka  ,  I'ancienne  riviere  Cro- 
codilon,  qui  ne  paralt  cepondant  avoir  jamais  noiirri 
de  crocodiles,  a  cause  du  peu  de  volume  de  I'eau ,  et 
vers  laquelle  Richard  (]oeiir-de-Lion  rcmporta  une  bril- 
lante  victoire  sur  Saiadin.  Nous  parvenons  a  Cesaree, 
jadis  si  importante ,  aujourd'hui  arnas  desert  de  co- 
lonnes  de  granit  brisecs,  de  blocs  de  marbre,  de  frag- 
ments de  poiphyre,  de  debris  de  temples  el  de  palais, 
de  tours  renversees  et  d'un  amphitheatre  coaible.  Ce 
fut  d'abord  un  simple  fort,  nomme  Tour  de  Straton; 
H^rode  en  (it  une  ville ,  qu'il  noinma  Cesaree,  on 
I'bonneur  d'Augusle,  ot  il  y  etablil  un  port  niogni- 
fique ;  elle  fut  a|)pel<^e  Colonia  Flavia  lorsque  Ves- 
pasien  lui  accorda  les  privileges  do  colonie  romaine, 
et  elle  devint  la  capitale  do  loute  la  Palestine  apr^s  la 
ruine  de  Jerusalem.  Los  souvenirs  du  centurion  Cor- 


(5Zi7  ) 

n^lius,  de  saint  Philippe,  de  saint  Paul,  lies  crois^s, 
surlout  ceux  do  saint  Louis,  reniplissent  aussi  Ce- 
sar6e.  A  une  lieue  de  la,  est  una  masse  d'eau,  longue 
et  encaissee  comme  un  fleuve,  qui  est  probablemenl 
I'dlang  de  C^sar^e  dont  parlent  les  auteurs  du  moyen 
age,  el  au  bord  duqtiel  les  crois^s  camperent  sous 
Richard,  On  voit  ensuite  des  montagnes  couvertes  de 
petits  arbres,  d'un  as[)ect  sinistre,  et  asile  de  voleurs; 
c'est  peut-filre  la  foret  d'Arsur  des  chroniques  du 
moyen  age ;  et  non  loin  de  la  devait  se  Irouver  la  for- 
teresse  d'Arsur,  assieg^e  par  les  croises. 

Pr6s  de  celte  partie  de  la  cote  s'etond  la  plaine  de 
Saron,  qui  pourrait  iiourrir  30  000  habitants,  et  qui 
n'ollre  que  quelques  tentes  de  Bedouins,  quelques 
troupeaux  de  ch^vi^es  et  quelques  oliviers  t^pars.  On 
ne  voit  plus  de  traces  de  la  riche  ville  de  Saron,  et 
Ton  cherche  vainemeul  aussi  celles  de  plusieursautrcs 
places  de  cette  partie  de  la  Judee  :  Antipalris,  Aphe- 
rima,  Helon,  Baalsalisa,  la  Tour  d'Aphec.  Nos  voya- 
geurs  Iraversent  I'El  Haddor,  riviere  nommd'e  Roche- 
talie  par  les  croises,  et  pros  de  laquelle  les  Sarrasins 
furent  defaits.  Pres  du  village  d'Ali-Ben-Ilarami ,  sont 
des  ruines  qui  appartiennent  probablement  a  I'an- 
cienne  Apollonia.  Le  Nahr-Ugeh,  que  Ton  x^encontre 
ensuite,  est  le  torrent  de  Gaas  de  I'licriture.  Bienlot 
apr^s  on  arrive  a  Jaffa,  la  Jopp<i  des  anciens,  la  Japhe 
des  croises,  plac^e  sur  un  rocher  qui  s'avance  dans  la 
mer,  avcc  un  petit  port  cnsabl6,  des  murailles  crene- 
lees,  surmontt^es  de  quelques  petits  canons,  un  inl^- 
rieur  miserable,  et  uno  population  qui  s'el^ve  a  peine 
a  (5000  habitants;  mais  ellc  a  des  bosquets  d'orangers, 
des  palmiers  el  les  plus  beaux  jardins  de  la  Palesline. 


(  548  ) 

Que  (1ft  souvenirs  aussi  sf  pressenl  dans  I'histoiro  de 
cette  antique  cil^,  depuis  No^,  qui,  dil-on,  y  conslruisit 
I'arche,  et  depuis  Androm^dc,  qui  y  fut  enchainee  a  un 
rochcr,  jusqu'a  Jonas,  aux  Machabees,  a  saint  Pierre, 
a  Vespasien,  et  depuis  saint  Louis  jusqu'a  Bonaparte  ! 
Mgr  Mislin  quitte  a  Jalla  la  route  du  rivage,  et  rentre 
dans  I'interieur,  pour  se  rendre  a  Jerusalem.  II  ren- 
contre d'abord  la  lour  des  Quarante  Martyrs,  an- 
cienne  6glise,  consacree  sans  doule  aux  solduts  de 
la  12*  legion,  martyrises  sur  I'^tang  sale  de  Sebaste; 
puis  Ranila,  petite  ville  de  3  000  habitants,  qui  parait 
^tre  I'ancienne  Arin)alliie,  connue  par  une  balaille 
funeste  aux  clirelicns,  sous  Baudouin  I"''^,  et  par  les 
combats  que  s'y  livrerent  Uichard  et  Saladin.  11  passe 
vers  les  mines  de  Lydda,  citee  dans  I'histoire  de  saint 
Pierre,  ou  existait  une  cd'lebre  ^glise  6levde  a  saint 
George,  sous  Constanlin;  —  vers  I'emplacement  de 
Modin  ,  ou  demeurait  Matalhias ,  perc  des  Macha- 
bees ;  —  vers  celui  de  Thamna,  ou  Juda,  fds  de  Jacob, 
rencontra  sa  belle-fdle  Thaniar,  et  ou  Samson  se  maria; 
—  a  Lalroun,  lieu  presume  du  s(^jour  du  bon  larron  de 
TEvangile;  —  au  Beer-Ayoub  (puits  de  Job) ,  appel6 
dans  I'Ecriture  fontaine  de  NeplUoa.  II  visile  I'empla- 
cement de  Nicopolis,  appclt^  aussi  Emmaiis,  mais  non 
rEmmaiis  mentionne  par  saint  Luc,  et  qui  etait  plus 
pres  de  Jerusalem.  A  mesure  qu'il  avance  dans  ce 
pays  aux  souvenirs  sacres,  notre  voyageur  est  de  plus 
en  plusfraj>pedela  tristesse  etde  la  depopulation  d'une 
conlree  autrefois  si  animee ;  il  calcule  que,  du  temps 
de  David,  la  Palestine  devait  avoir  au  moins  6  500  000 
habitants,  tandis  qu'aujourd'luii  on  y  en  compte  vingt- 
qualre  fois  moins.  II  voit  Kirialh  el-Enab  (la  ville  du 


(  5/iO  ) 

Raisin),  residence  du  ]a  famllle  longtemps  si  redoutee 
d'Abou-Gosch,  au  brigandage  de  laquelle  M^hemet- 
Ali  a  mis  fin;  —  ensuile  les  ruines  d'uiie  eglise  que  les 
Chretiens  appelient  Saint- Jeremie ,  et  qui  paralt  re- 
pondre  a  I'eniplacement  de  Cariathlarim  ou  Kiriath- 
Jearim  (la  ville  des  Forels),  patrie  du  prophete  Uri, 
fils  de  Sem^i,  et  du  prophete  Zacharie.  Le  village  de 
Saint-Samuel,  qu'on  rencontre  ensuite,  a  ete  appel(i 
ainsi  parce  qu'il  repond  au  Sophim  de  la  Bible,  patrie 
du  prophete  Samuel ;  on  le  nomme  aussi  dans  I'anti- 
quit6  Rama  ou  Ramalhaim.  A  moitie  chemin  entre 
Saint-Samuel  el  Jerusalem,  est  un  amas  de  ruines, 
avec  quelques  maisons  de  fellahs;  c'est  I'Emmaus  de 
I'Evangile  de  saint  Luc. 

On  traverse  la  valine  du  Ter^binthe,  une  des  plus 
rianles  de  la  Palestine,  et  celebre  par  la  victoire  de 
David  sur  Goliath;  puis  Ton  arrive  enfin  a  Jerusalem. 
Nous  ne  voulons  pas  decrire,  avec  Mgr  Mislin ,  cette 
illustre  cite,  tant  de  fois  depeinte ;  mais  I'impression 
g^ndirale  que  fait  sur  chaque  voyageur  I'aspect  d'un 
lieu  si  int^ressant,  si  riche  en  grands  souvenirs,  est 
pr^cieuse  a  recueillir,  et  nous  laisserons  parler  ici  le 
savant  p^lerin  dans  son  pieux  enlhousiasme  : 

«  J'etais  au  milieu  d'une  plaine  nue  et  pierreuse; 
mes  compagnons  s'elaient  ddicouverls  et  se  tenaient 
immobiles  et  silencieux ;  je  vis  sur  une  montagne  quel- 
ques edifices  d'une  eclatante  blancheur  :  c'etait  le  mont 
des  Oliviers;  et  bientot  apr^s ,  des  murs  creneles,  des 

domes,  des  tours  :  c'etait  Jt^rusalem ct  je  sentis 

couler  mes  larmes. 

»  En  arrivant  a  Jerusalem  par  Jafl'a,  on  ne  rencontre 
au  dehors  de  la  ville  aucunjardin,  aucuue  habitation; 
III.  JuiN.   3.  37 


(  550  ) 

rien  ne  s6|)are  la  ville  de  Sion  du  desert  qui  I'envi- 
ronn(?.  On  la  voil  apparaltre  tout  a  coup,  dix  minutes 
avant  d'y  entrer,  avec  scs  creneaux ,  ses  coupoles,  ses 
murailles,  ses  tours;  tout  cela  a  une  teinte  gris^lre 
comine  les  vallees,  les  monlagnes,  coninie  le  pays 
tout  entier.  Je  remarquai  que  I'ensenible  de  la  ville, 
de  sesmurs  et  de  ses  moniiinents  a  un  air  de  dignitt\ 
qui  mo  fit  un  vif  plaisir,  et  je  me  dis  :  elle  est  belle 
encore  dans  sa  desolation.  Mon  imagination  etait  lel- 
lement  t'rapp^e  qu'il  me  semblait  dislinguer  coiilme 
une  image  de  la  ville  sainte  dans  les  vapeurs  blancbes 
qui  voilaieiil  legerement  une  partie  du  ciel,  et  je  voyais 
a  la  fois  la  cite  de  David  sur  la  colline  de  Sion,  el 
une  Jerusalem  nouvelle,  resplendissante  de  clarte,  qui 
descendait  du  ciel,  ■venant  de  Dieii. 

))  Jerusalem  ne  ressemble  a  aucune  autre  ville;  ce 
u'est  pas  une  place  forle ,  comme  nous  en  voyons  en 
Europe;  ce  n'est  pas  une  ruine  antique,  noircie,  ou 
couverte  de  lierres;  c'est  mcins  encore  une  cil6  mo- 
derne,  agil6e  et  bruyanle;  c'est  une  enceinte  vaste  et 
lugubre,  enlour^e  de  debris  et  de  monumenls  fun^- 
raires  ;  aucun  bruit  ne  sort  de  ses  murs,  aucun  etre 
vivant  ne  parcourt  les  senliers  pierrcuxde  ses  valines, 
les  oiseaux  du  ciel  se  taiscnt,  le  torrent  du  Cidron  est 
sans  eau  ,  les  piscines  sont  dessech^es,  les  rochers 
d'alentour  sont  brisks,  les  coUines  sont  des  monceaux 
de  sable,  la  lerre  est  comme  brOl^e  el  couverte  de 
cendres,  les  animaux  des  champs  n'y  trouvent  point 
de  palure,  la  mort  et  la  douleur  babilent  seules  ceite 
profonde  solitude.  » 

Nous  ne  suivrons  pas  I'autenr  dans  ses  descriptions 
tie  lout  ce  que  la  religion  ventre  dans  l;i  iil«^  sainte; 


(551   ) 

notis  rappellerons  seulement  avec  lui  que  le  Golgotlia 
ou   Calvaire  est  maintenant  coinpris  dans  la  ville ,  a 
I'ouest,  et  que  les  maisons  qui  le   couvrent  ne  per- 
inettent  pas  de   parcourir  dans  loute  son  elendue  ce 
qu'on  appello  la  Voie  douloureuse  ou  le  Chemin  de  la 
Croix.  La  ville  a  eu  successivement  Irois  enceintes, 
dont  la  premiere  et  la  deuxi^me,  celle  de  David  et  de 
Salomon  ,  et  celle  des  rois  Joatlian  ,  fizechias  et  Ma- 
nassas, embrasserent  les  monls  de  Sioii*,  de  Moria  et 
d'Acra,  tandis  que  la  troisieme,  celle  d'Herode-Agrippa, 
s'^lendait  beaucoup  plus  au  nonl,  et  comprenait  aussi 
le  mont  Bezetha,  que  renceinte  actuelle  ne  contient 
plus  depuis  longtemps.  Jerusalem  est  conmie  sur  une 
presqu'ile,  entouree  du  Cedron,  a  Test,  de  la  vallee  de 
Gehenna,  au  sud,  et  de  celle  du  Gihoii,  a  I'ouest.  Les 
rues  sont  6troites,   souvent  voulees  et  obscures,  tou- 
jours  sales  et  en  grande  partie  d^sertcsj  les  maisons 
abut  basses ,  carries,  presque  sans  ouvertures  sur  le 
devant,  couvertes  de  terrasses,  non  tout  a  fait  plates 
cependant,  mais  surmontees  d'un  petit  dome  ;  le  pave 
est  exlremement  glissant ;   des  chiehs  ei*rent  de  toules 
parts;  beaucoup  de  mendiants  sollicitent   la  charity 
des   passanls ;   les   relations   commerciales   sont  fort 
entravees  par  la  diversity  des  religions,  puisqu'il  n'y 
a  que  quatre  jours  d'afl'nires,  le  vendredi ,  le  samedi 
et  le  dimanche  etant  choraes  successivement  par  les 
mahometans,  les  juifs  et  les  chreliens. 

Autour  de  la  ville,  on  trouve ,  a  I'ouest,  I*  piscine 
sup^rireure  ou  Birkel-el-Mamillali  (lafontaine  des 
Serpents);  vers  le  nord-est,  le  reservoir  a])pele  Birkel 
el-Hirdjeh,  et  celui  qu'on  nomme  Birket-Hammam- 
Sitti-Mariam  (bains  de  Sainle-Marie);  a  Tesi,  comme 


(  552  ) 

nous  I'avons  dlt ,  le  C^dt'on ,  torrent  presque  loujours 
dessecht",  dont  Ic  nom  vient  de  I'h^jjreu  Cddor  (obscii- 
rile),  parce  qu'il   coule   dans  des   lieux  profonds  et 
obsciirs;  il  y  parcourl  la  vallce  de  Josaphat  et  y  baigne 
le  village  de  Gelbsemani  ou  El-Djeinaniieh,  au-dessous 
duquel  la  vallee  so  retrecit  el  finit  par  n'avoir  plus  que 
la  largeur  du  torrent  lui-meme.  A  Test  de  cetle  valine, 
s'elove  le  mont  des  Oliviers,  divis6  en  trois  sommols  : 
celui  du  milieu,  qui  est  la  montagne  des  Oliviers  pro- 
prcmcntdile,  haute  de  2  556  pieds  ;  celui  du  nord  , 
qu'on  a  appele  Viri-Galila^i,  et  celui  du  sud,  nomm6  la 
montagne  du  Scandalo,  parce  que  ce  fut  la  que  Salo- 
mon fit  clever  des  temples  aux  idoles.  II  y  a  encore  sur 
la  montagne  des  Oliviers  luiit  des  arbres  auxquels  elle 
doit  son  nom ;  ils  sont  6normes ,  et  c'est  probablement 
sous  leur  ombrage  que  le  Christ  s'est  arrets.  Le  village 
de  Zeiloun  est  au  plus  haul  point  de  la  montagne  ; 
c'est  sur  un  escarpement,  un  peu  a  Test  de  cet  endroit, 
que  Ton  jouit  du  plus  beau  panorama  peut-6tre  de 
toute  la  Jud(^o  :  a  Test,  la  mer  Morlc ,  resplendissante 
au  soleil  comme  un  m^tai  en  fusion ;  par  dela  celto 
mer,  le  mont  N6bo  et  la  chaine  qui  s'y  ratlache;  plus 
pres,  sur  la  gauche,  la  verdure  du  Jourdain  ;  au  nord, 
les  monls    d'Lphraim ;   a  I'ouest ,   Jt^rusalem.    L'an- 
cienneBelhpliage,  pres  et  a  I'csl  du  mont  des  Oliviers, 
n'offre  aucun  vestige  aujourd'hui ;  Belhanie,  dtisign6e 
mainlenant  sous  le  nom  d'El  Aziriieh ,  offrc  encore 
une  vinglaine  de  maisons. 

Au  sud-esl  de  Jtirusalem ,  on  voit  la  fontaine  de  la 
Sainle-Vierge  (Ain-um-elDerai,  I'ancienne  source  du 
Dragon),  et  celle  de  Siloe,  communiquant  enlre  elles 
par  un  canal  souterrain,  et  qui  pr<isentent  un  curieux 


(  553  ) 

phenoin^ne  d'iiitevmittence ;  un  pen  plus  loin,  sont  la 
piscine  de  Siiod  et  la  Fontaine  de  Rogel ;  au  sud-ouesl, 
on  voit  la  piscine  Inierieure  ou  Nouvelle,  et,  pves  de  la, 
les  resles  de  I'aqueduc  de  Ponce- Pilale ,  qui  amenait 
I'eau  des  etangs  de  Salomon  (a  3  lieues  de  Jerusalem) 
jusque  dans  le  Temple. 

La  vallee  de  Gehenna  ou  des  Enfanls  d'Hennon,  dont 
le  fond  s'appelait  Topheth,  est,  comme  on  sail,  au  sud 
de  la  ville  ;  elle  etait  en  grando  pai'tie  consaciee  aux 
sepultures,  et  les  Juifs  se  servirent  de  son  nom  pour 
signifier  la  tristesse,  I'enfer.  La  monlagne  du  Mauvais- 
Conseil,  qui  rappelle  le  conseil  tenu  dans  la  maison  de 
Caiphe,  I'avoisinc  au  midi. 

Mgr  Mislin  n'a  pasmanqut!  d'entreprendre  le  voyage 
de  Bethlehem.  La  route  qui  y  conduit  est  belle,  et  passe 
par  la  valine  de  Raphaim  ou  des  Geants,  si  celebre  dans 
rficrilure;  vers  le  puits  des  Trois  Rois,  qui  se  rapporte 
a  I'histoire  des  Mages,  et  vers  le  tombeau  de  Rachel. 

Bethlehem  est  agr^ablement  placee  sur  une  colline 
et  entouree  d'oliviers.  La  grolte  de  la  Nativite  est  une 
caverne  nalurelle,  longue  de  quinze  pas,  large  decinq. 
Saintellel^ne,  mere  de  Constantin,  I'a  renfermce  dans 
une  belle  eglise  ,  dont  les  niahometans  emploient  au- 
jourd'hui  la  nef  comme  un  bazar,  et  dont  le  chceur 
sert  d'eglise  aux  Grecs  et  aux  Armeniens  ;  la  chapelle 
Sainte-Catherine  ,  qui  est  attenante  ,  appartient  aux 
catholiques  ;  on  descend  dans  la  grotte  v(ineree  par  le 
chceur  des  Grecs,  etMgr  Mislin  regrellc  vivcm^nt  qu'un 
lieu  si  saint  ne  soil  pas  au  pouvoir  de  I'Eglisc  latinc  ; 
cependant  les  catholiques  ont  une  autre  grotte  pre- 
cieuse  tout  pr6s  du  lieu  de  la  Nativity  :  c'est  celle  ou  le 
Sauvcur  fut  place  dans  la  creche    el  adore  par  les 


(  554  ) 
Mages  et  les  bergers.  II  faut  remarquer  en  passant 
qu'un  grand  nombre  de  demeures,  non-seuleinent  a 
Bellilehem,  mais  dans  toulc  la  Palestine,  sonl  des grottes 
taillees  dans  les  rocliers,  pour  garanlir  les  habitants, 
soil  centre  lapluie,  soit  meme  centre  la  neige  dans 
les  lieux  Aleves.  Bethlehem  est  a  une  altitude  de 
2538  pieds,  c*est-a-dire  a  59  pieds  plus  haut  que  Je- 
rusalem. Elle  coniple  3  000  bahitants,  donl  1500  ca- 
tholiques,  1000  Grecs ,  une  centaine  d'Armeniens  et 
quelques  Arabes.  Son  nom  signifie  maison  de  pain;  on 
I'appclait  aussi  Ephrata,  /er/iV/Ve. 

Mgr  Mislin,   continuant  sa  route  au  sud  ,   va  visiter 
Hebron,  et,   chemin  faisant,  il  remarque  ce  jardin 
ferini^  (Hortus  conc/unis)  qui   faisait  les  delices  de  Sa- 
lomon, et  qui  est  un  petit  ilot  de  verdure  au  milieu 
d'un  paysage  de  pierre;  —  d'immenses  reservoirs,  que 
les  Arabes  appellent  El  Burak,  et  qui  sont  les  anciens 
etangs  cle  Salomon  ;  —  Bezek,ou  ser^coltait  le  meilleur 
vin  de  la  Palestine,  quoique  aujourd'hui  il  n'y  ait  plus 
de  vignes ;  —  Beit-Djibrin  ( maison  de  Gabriel ) ,  belles 
ruincs,  qui  sont  probablement  celles  d'Eleutberopolis 
ou  Betograba ;  —  ensuile  d'autres  mines  qui  paraissent 
appartenir  a  Bclhsour  de  V llistoire  des  Machabees,  la 
meme  sans  doule  que  cetle  Belhar  qui  fut  le  dernier 
asilc  des  Juifs  sous  le  regne  d'Adrien.   Hebron  ,  situ6e 
en  amphitheatre  sur  une  colline  de  2  8^2  pieds  d'alti- 
lude,  a  I'aspect  lo  plus  d^solc;  elle  compte  cependant 
encore   5  000    habitants,   tous   musulmans,    except^ 
/lOO  Juifs.  Cetlc  ville,  pleine  des  souvenirs  des  premiers 
patriarches  et  de  David  ,  est,  comme  on  salt,  une  des 
pllis  anciennes  du  monde  ;   elle  s'appelait  aussi  Ca- 
riath-Arb6,  ville  d'Arbe,  du  nom  du  fils  d'Enac,  qui  en 


(  655  ) 
flit  le  fondateur;  or  Enac  donna  son  nom  aux  geants 
Enacites,  qui  habitaient  encore  Hebron  quand  Josue 
en  fa  Ja  conquete.  Les  Arabes  I'appellent  El  Clialtl 
fville  de  I'Ami,  c'est-a-dire  de  Dieu).  Au  iv"  siecle, 
sainle  Helene  ^leva  une  eglise  sur  la  double  caverne 
qui  renferme  les  tombeaux  des  patriarches.  Du  temps 
des  croisades,  on  en  fit  un6v6ch6  sous  le  nom  de  Saint- 
Abraham, 

La  vallee  de  Mambr^,  au  nord-ouest  d'H^bron,  est 
ornee  de  pistachiers ,    d'oliviers,  de  vignes,  et  J'on  y 
remarque  un   beau  chene   qui   s'^leve  ,   dit-on,a   la 
place  de   celui   donl  il    est  question    dans   I'histoire 
d'Abraham,  Non  loin   de  la  est  I'eraplacement  de  la 
forteresse   de  Dobir,   ou   Cariath-Sepher ,   prise   par 
Othoniel.  C'esl  pres  d'Hebron  enfin  que  commence  le 
desert  d'Engaddi,  ainsi  nomme  d'une  petie  oasis,  En- 
gaddi,  la  fontaine  du  Bouc,  dont  differe  peu  le  nom 
arabe  actuol,  Ain-Djeddi  (fontaine  de  la  Cbevre);  c'ost 
pres  d'Hebron  aussi  que  s'6lfeve  cet  autre  mont  Carmel, 
moins  celebre  que  celui  de   la  cote  ;   on  voit  encore 
quelques  restes  des  antiques  forets  du  ddsert  de  Zin, 
illustrees    par    I'alliance   de    David    et  de   Jonathas. 
Mgr  Mislin,  revenant  vers  le  nord,  et  suivant  une  route 
plus  voisine  de  la  mer  Morte ,  va  visiter  celte  caverne 
fameuse  de  Thecua,  d'Engaddi  ou  d'Odollam  ,  ou  se 
r^fugia  David  :  les  voyageurs  I'appellent  le  Labyrinthe, 
et  les  Arabes  El-Maama  (la  Cacbette).  Pr^s  de  la  sont 
les  resles  dc  la  ville  d'Odollam   ou   Adullam,   meu- 
lionnee    plusieurs    I'ois    dans   la   Bible ;    et  ceux    de 
Thecua,  celte    forteresse   du  desert,   (jui  fut  habitec 
par  les  prophetes  Amos  et  Habacuc. 

Ce   qu'on    apj)elle    aujourd'hui   la    montagne    des 


(  556  ) 

Francs,  en  arabe  El  Fareitlis  (le  petit  Paiadis),  repond 
a  Tancienne  forteresse  d'Hcrodiuni,  qui  est  probahle- 
ment  la  Belhacara  de  I'Lcriture,  el  qu'il  ne  faut  pas 
confonclrc  avec  une  autre  Herodium  ,  situ^e  de  I'autre 
c6te  de  la  nier  Morte,  vers  le  mont  N(^bo  :  F^lixFabri, 
au  XV  siecle,  en  parle  sous  le  nom  de  Belhulie.  La  val- 
ine do  Bdnediclion  ,  ou  Ton  sail  que  Josapliat  rdunit 
les  Israelites  pour  benir  le  Seigneur  d'avoir  sauve  son 
peuple  des  Ammonites,  s'elend  cntrc  la  monlagne  des 
Francs  et  la  raer  3Iorte. 

Mgr  Mislin  fait  une  excursion  a  I'Duest  de  Bethlebem, 
dans  le  desert  de  Saint -Jean.  A  trois  lieues  de  Beth- 
lebem, on  arrive  a  la  grotle  de  Saint-Jean-Baptisle  : 
c'est  la  que  vecut  longtemps  le  Precurseur,  se  nour- 
rissant  de  miel,  de  sauterelles,  et  sans  doute  aussi  de 
caroubes ,  pnisque  ce  fruit  se  nomnie  encore  pain  de 
Saint-Jean.  Pres  de  la  est  le  village  de  Saint-Jean-de 
la-Montagne  (en  arabe  Ain-Karim),  ou  il  y  a  un  cou- 
vent  de  Franciscains. 

Revenu  a  Jerusalem,  Mgr  Mislin  dirige  une  explo- 
ration vers  le  Jourdain  :  il  signale  d'abord  un  village 
mine  qui  est  probablement  Baluirini,  ou  David  fut  at- 
taqu6  par  Semei ;  —  ensuite  la  valine  des  Acacias,  qui 
est  peut-6tre  la  valine  de  Sittim,  et  qui  doit  son  nom  ac- 
tuel  ade  tr^s-beaux  acacias  gomraiers  qui  Tombragent; 
—  enfin  Templacemenl  d'Adomiuitn,  au  milieu  d'un 
paysage  affreux  et  d'un  canton  infesle  de  voleurs.  Plu- 
sicurs  /nitres,  c'est-adire  des  reunions  d'crniitagcs,  ont 
autrefois  jjeupl^  ce  canton  sau\age,  oil  commence  Ic 
desert  de  la  Quarantaine,  illustrd  par  le  sejour  du  Sau- 
veur.  L'Ouady-Kelt,  qu'on  y  rencontre,  est  probable- 
ment le  torrent  de  CaritU  de  la  Bible.   La  rauntagno 


(  557  ) 

de  la  Quarantaino,  appelee  Djebel  Kourountoul  par 
lesArabes,  terminele  deserl;  on  y  voit  de  nombreiises 
cellules  qu'onl  habil^es  des  anachoretes  des  premiers 
siecles  du  cbristianisme.  A  un  quart  de  lieue  de  la 
montagne  ,  est  la  Fontaine  d'filisee  (Ain- Sultan  en 
arabe),  entouree  d'agr^ables  bocages  de  jujubiers,  de 
palmiers,  de  mirobolans,  de  cypres,  et  de  cbalefs  (zuk- 
kum) ,  avecles  fruils  desquels  on  fait  I'buile  medicinale 
de  Jericho  ;  on  y  voit  aussi  ce  fruit  qu'on  appolle  com- 
munement  pomme  de  Sodome ,  fruit  ti'ompeur,  tres- 
beau  au  dehors,  mais  dont  le  sue  est  niortel.  Quant 
aux  rosiers  si  celebres  de  Jericho,  Mgr  Mislin  n'en  a 
point  vu  ;  ce  qu'on  ajipeile  aujourd'hui  rose  de  Jericho 
ou  j^rose  hygrometrique  [anastatica  hierochuntina) 
est  une  plante  de  la  famille  des  conifercs ,  qui  croit 
dans  quelques  localites  sabionucuscs  de  la  Syrie  et 
de  I'Arabie,  et  que  Ton  cherche  vainement  pr^s  de 
Jericho. 

Le  miserable  village  de  Rieha ,  a  une  lieue  de  la 
niontagne  de  la  Quarantaine  ,  est  tout  ce  qui  reste  de 
I'ancienne  Jericho  :  c'est  une  cinquanlaine  de  cabanes 
entourees  de  haies  de  nopal  etde  branches  d'arbustes 
dpineux,  qui  les  protegent  contre  Ics  chacals  et  les 
leopards.  Le  batiment  principal  qu'on  y  remarque  est 
ce  qu'on  appelle  la  Tour  ou  le  Chateau,  et  c'est  autour 
de  cet  edifice  que  la  ville  rebatie  par  H^rode  et  Adrien 
devait  etre  groupee ;  I'ancienne  Jericho  ,  celle  des 
Cananeens,  s'otendait  plus  particuliercment  dans  la 
direction  de  la  Fontaine  d'Elisee.  Toule  la  plaine  voi- 
sine  est  appelee  ElGhor  par  les  Arabes;  il  y  r^gne 
une  chaleur  suffocantc.  De  Rieha  jusqu'au  Jourdain  , 
celte  plaine  s'abaisse  graducllement  de  57/1  pieds;  on 


(  558  ) 

trouvesur  la  route  beaucoup  d'^rosionsqui  l^molgnent 
de  ces  anciens  debortleineiits  donl  il  est  parlt^  dans 
rtcriture.  Galgala ,  ou  les  Iliibreux ,  conduits  par 
Josue,  pass5rent  le  Joui'dain,  n'a  lalss4  auciine  trace  ; 
c'est  vers  le  lieu  de  ce  passage  que  Mgr  Mislin  a  vu  Ic 
fleuve  ;  il  I'a  trouvd  d'environ  soixanle  pas  de  largeur 
et  peu  profond,  mais  c'^lail  a  I'epoque  des  basses  eaux. 
Le  Jourdain ,  appele  Yarden  par  les  Hebreux  ,  est 
noranie  aujourd'bui  El  Lrdoun  ou  Cbariat-el-Kebir 
(grand  fleuve)  par  les  Arabes;  il  se  forme  de  trois 
petits  cours  d'eau  descendus  de  I'Anti-Liban  ,  et  pro- 
duitbientolle  lac  de  Houle  ou  de  M^rom,  a  une  demi- 
lieue  au-dessous  duquel  est  le  pont  en  basalte  connu 
sous  le  nom  de  pont  de  Jacob;  c'est  au  sud  de  ce  pont 
que  commence  la  fameuse  depression  de  la  vallee  de 
ce  fleuve,  avant  son  entree  clans  lo  lac  de  Tiberiade ; 
^en  sorlant  de  ce  lac,  il  est  fort  large,  mais  peu  pro- 
fond;  il  se  retr^cit  ensuite,  et  forme  d'innombrables 
sinuosites. 

La  difference  de  niveau  du  lac  de  Tiberiade  et  de  la 
mer  Morte  est  de  716  pieds;  les  sources  du  Jourdain 
sont  a  plus  de  800  pieds  au-dossus  de  la  Mediterran^e, 
et  spp  embouchure  a  13/11  pieds  au-dessous,  cc  qui 
donne  pour  la  pente  lotale  21 41  pieds.  Des  roseaux 
{nrundn  donax)  en  garnissent  les  rivages,  et  sont  le 
repalrc  des  onces  et  des  cbacals.  La  navigation  en  est 
fort  difficile,  et  les  riverains  d'ailleurs  n'en  font  aucun 
qsage.  En  1847,  J\L  Molyneux,  oflicier  anglais,  le  des- 
cendit;  M.  Lynch,  qui  y  111  en  1S/|8  un  si  memorable 
voyage  avec  deux  bateaux  en  fer  conslruitsen  Amc-rique, 
eslime  a  200  milles  anglais  la  longueur  du  couranl  entre 
les  deux  mers ,  en  tenant  cotnpte  des  dolours.  Ce  cpq- 


{  559  ) 

rageux  explorateur  a  fait  deux  fois  le  tour  de  la  met 
Morle.    Nous  ne  rappellerons  pas  la  description  de 
celte  etrange  uiasse  d'eau ,   prolongee  a  perte  de  vue 
entre  deux  inurailles  de  naontagnes,  s^parees  I'une  de 
I'autre  de  cinq  a  six  lieues ;  mais ,  comme  un  auleur 
c^iebre  a  dit  que  I'aspect  n'en  est  ni  trisle  ni  funfebre, 
il  est  utile  de  faire  remarquer  que  Mgr  Mislin  a  trouve 
les  bords  arides  el  nus,  couverts  d'une  bordure  de  sel, 
blancs,  calcines,  exposes  a  une  chaleur  de  fournaise,  a 
une  forte  odeur  de  soufre ,  et  inspirant  la  tristesse  et 
le  dugout.  S'etant  baign6  dans  cette  nier,  il  vit  que  le 
corps  y  est  porte  facilemenl  sans  doute  par  Teffet  de 
la  grande  pesanteur  specifique  de  I'eau,  mais  que  la 
natation  y  est  presque  impossible  parce  que  les  pieds 
s'elevent  au  deiiors,  et  que  le  nageur,  sans  point  d'ap- 
pui  sufiisant,  n'est  pas  maitre  de  ses  uiouvements,  et 
se  trouve  soulev6  et  ballotle  a  droite  et  a  gauche  .:   il 
gouta   malgre  lui  de  cettc  eau ,   et  la  trouva  horribie- 
ment  amere  et  nauseabonde;  il  en  eut  la  langue  et  le 
palais  comme  brules.  La  raer  Morte  est  appelee  mer 
de  Sel  dans  la  Gcnese,  mer  du  Desert  dans  le  Deut^ro- 
nome,  raer  Orlentale  dans  Joel,  lac  Asphaltite  par  les 
Remains  et  les  Grecs ,  mer  Maudlte  ou  uior  du  Diable 
au  moyen  age,  lac  de  Lot  (Babr-Lout)  par  les  Arabes. 
L'extrdme  degre  de   salure  qu'on  y  remarque  paralt 
etre  la  principale  cause    de  I'absence  des  etres  ani- 
mes  dans  son  sein,  et  Ton  atlribue  cetle  salure  extraor- 
dinaire au  voisinage  des  monlagnes  formees  de  grand? 
blocs  de  sel,  a  I'^norme  dej)ression  du  niveau  de  cetle 
raer  el  a  la  haute  temperature  qui  en  riSsulte.  Que  deve- 
nait  I'eau  du  Jourdain  avant  I'existence  de  cette  raer 
qui  a  abime  sous  ges  flots  une  valine  fertile,  cinq  vjlles 


(  560  ) 

etunenombreuse  population  ?  Mgr  Mislin  lend  a  croire 
qu'ello  se  rendait  dans  la  mer  Rouge,  et  M.  Anderson 
dit  que  Ic  lit  du  fleuve,  jusqu'au  golfe  d'Akaba ,  ne 
saurait  etie  nieconnu;  cettc  opinion  est  combattue 
par  M.  Russegger ;  mais  les  affaissoinents  et  Ics  sou- 
Ifevements  de  terrain  que  la  geologie  expiique  ne 
peuvent-ils  pas  laisser  un  champ  tr^s-lil)re  aux  hypo- 
theses? Nous  renvoyons  d'ailleurs,  pour  la  description 
de  cette  nier,  a  rinleressanle  monographie  qu'en  a 
donnee  notre  savant  collogue  ,  M.  Isambert,  dans  le 
Bulletin  de  ftivrier  et  mars  1850,  au  sujet  de  I'ouvrage 
de  M.  Montague  et  du  voyage  de  M.  Lynch. 

Mgr  Mislin  est  all6  visiter  le  curieux  monasl^re  grec 
de  Saint-Sabas,  sur  Ic  C^dron  ,  a  5  lieues  de  la  mer 
Morte  et  a  2  lieues  de  Jerusalem;  il  s'6leve  en  gradins 
sur  des  rochers  qui  dominent  lo  torrent,  et  doit  sa 
fondalion  a  saint  Sabas,  qui,  dans  le  v°  siecle ,  riunit 
autour  de  lui  un  si  grand  nombre  d'anachor^tes,  que 
ce  desert  en  elait  tout  peupli;  Quaresmius  dit  qu'il  y 
en  avait  10  000  dans  les  antres  des  rochers,  et  !\  000 
dans  le  monast^re  seulement. 

Mgr  Mislin  a  pris  ensuite  la  route  du  nord  pour  re- 
venir  a  Beyrouth  par  Tinterieur  de  la  Judt'C.  Parlout 
s'y  offrenl  des  chemins  Strolls,  inipralicablcs  pour  des 
chars,  mais  seulement  propres  aux  chameaux  et  aux 
chovaux;  et  cepcndant  il  y  avait  autrefois  i)lusieurs 
routes  pav(^es,  connnc  on  en  voit  encore  des  traces  a 
Htibron  el  sur  les  rives  du  Jourdain. 

Sur  le  chetnin  do  Jerusalem  a  Naplouse,  on  ren- 
contre remplacemenl  d'Anatlioth,  palrie  de  Jcrdmie; 
celui  de  Gal)oa,  palrie  de  Saiil  ;  et  Ram,  qui  est  une 
ancienne  Ramaj  mais  quelle  Rama?  ce  nom  est  tr^s- 


(  501    ) 

vague,  car  il  signifie  siinpleraent  hauteur.  El  Bir  est 
B^^rolh,  ville  des  Gabaonites;  le  village  de  Mukmas 
reniplace  sans  doule  Machmas;  on  passe  vers  rerapla- 
cement  de  Bethel,  appelee  d'abord  Loaz  (amandier)  el 
plus  lard  Bethaven  ;  un  peu  a  Test,  6tait  Hai  ou  Haiath, 
ou  Abraham  dressa  sa  tente.  On  voit  le  village  de 
Djufna  (I'ancienne  Gophna),  entour^  d'une  valloe  ver- 
doyante.  On  laisse  plus  loin  Silo,  si  connue  dans  I'his- 
toire  de  I'arche  sainte  et  de  Samuel;  et  Ton  decouvre 
dans  une  heureuse  situation  Naplouse ,  rancienne  Si- 
chem  ou  Sichar,  qui  fut  le  sejour  de  Jacob  et  la  capi- 
tale  du  royaume  de  Jeroboam  ;  on  montre  encore  le 
puits  de  Jacob  ou  de  la  Samaritaine,  et  le  torabeau  de 
Joseph;  Vespasien  en  fit  une  colonie  romaine,  sous  le 
nom  de  Flavia  Neapolis,  et  de  la  le  nom  moderne  de 
la  ville.  On  y  couipte  encoi'e  8  ou  10  mille  habitants, 
parmi  lesquels  se  trouvent  quelques  descendants  di- 
rects des  Samaritains,  vivant  isol^s  dans  un  misei'able 
quartier,  et  dont  le  chef  prend  le  tilre  de  pretre- 
levite. 

Samarie,  qu'on  rencontre  peu  apr^s,  s'appelait  plus 
exactement  Someron,  d'apres  Semer,  maitre  du  terri- 
toire  de  qui  Amri  acheta  I'emplacement  ou  il  batil  la 
capilale  du  royaume  d'Israel.  Elle  ne  sc  compose  au- 
jourd'hui  que  de  ruines  considerables,  entre  autres 
des  temples  et  des  palais  d'Herode,  qui  I'appela  S6- 
baste  en  I'honneur  d'Auguste.  Sanour  ou  Santorri  est 
consid6ree  comme  identique  avoc  la  B^thulie  de  Ju- 
dith. La  bourgade  de  Djennin  rappelle  les  noms  an- 
ciens  de  Ginea,  Nais ,  Ginum,  Giliui  ou  Djemni,  qui 
paraissent  tous  designer  un  meme  endroit. 

La  plainc  d'Esdrelon  s'olTre  ensuilc  :  c'est  la  plus 


{  562  ) 

vtiste  et  la  plus  cdl^bre  de  la  Palestine,  npr^s  celle  du 
Juurdain.  Le  monl  Herinoii  s'elf;ve  au  centre  ot  la 
divi.se  en  deux  versanls,  qui  envoient  leurs  eaux  d'une 
part  dans  la  Medileiranei?,  de  Taulre  dans  le  Joui- 
dain  ;  le  niontThabor  ia  borde  au  nord.  Elle  Tut  aussi 
appelee  dans  I'anliquite  j)laine  de  Jezrael ,  le  Grand 
Champ,  campa^ne  d'Esdrela,  plaine  de  Mageddo  ,  an 
nioyen  age  plaine  de  Sabas,  d  aujourd'liui  les  Arabes 
la  nomment  Merdj-ibn-Amer.  C'eslpres  du  village  de 
Fouli  ou  Fuleli,  sur  la  parlie  occidenlale  du  mont 
Hermon,  que  se  livra,  en  1799,  la  bataille  dite  du  Tha- 
bor;  elc'est  presde  la  aussi  que  s't-levaillelortde  Faba, 
bati  par  les  Templiers.  11  ne  faut  pas  cont'ondro,  bien 
enlendu,  ce  luonl  llormon ,  que  les  Arabes  appeilenl 
Djebel  Duy,  avec  le  Grand  llermon  (Djebel  Cheikb  ), 
qui  apparlienl  a  I'Anli-Liban,  a  Test  des  sources  du 
Jourdain.  Quant  au  montTliabor,  appele  Itabyrion  et 
Atabyrion  par  les  anciens  Grecs,  Djebel  INour  ou  Djebel 
Tor  par  les  Arabes  modernes,  c'est  une  des  plus  belles 
monlagnes  de  la  Syrie  ,  quoiqu'il  n'ail  que  1  755  pieds 
d'altilude;  de  son  soinmet  on  jouit  d'une  vue  admi- 
rable sur  la  Judee  presque  emigre,  el  peu  de  points 
offrent  autant  de  souvenirs  ;  c'est  sur  son  sommct,  ou 
sur  le  Cison,  qui  coulo  a  ses  pieds,  que  Debora  el 
Barac  illustrerent  leur  valenr ;  el  la  tradition  place  en 
ce  lieu  la  tranfiguralion  du  Sauveur.  U  y  avail,  avanl 
J6sus-Christ,  une  ville  de  Tbabor  sur  celle  montagne; 
plusieurs  ^glises  chretiennes,  aujourd'liui  rain6es,  y 
I'urent  elevees  dans  les  premiers  siedes  de  noire  ere. 

Mazareth,  en  arabe  En-jNazara,  autrefois  Medina- 
Abiad  (ville  Blanche),  inconnuo  avanl  J^sus-Christ, 
mais  si  celebre  dopuis  le  siijour  du  Sauveur  el  de  la 


(  56?   ) 

Vierge,  est  bati§  irr^gulifeiement  et  eh  gfadins,  sur 
une  colline  et  clans  uii  bassin  elev^,  tout  entoure  de 
monlagnes,  et  orne  tie  vignes,  de  grenadiers,  d'oliviors, 
de  nopals;  elle  a  3  000  habilanls,  dont  1000  calho- 
liques,  des  riles  latin  et  maronite.  Les  batiments  les 
plus  remarquablessont  les  cou vents  d6s  Franciscainsot 
des  Grecs.  Sainte  Hel^ne  y  avail  fait  b&tir  une  magnifi- 
quebasilique.ruineeaujourd'hui.D'apr^sUnecroyance 
commune  en  Italie,  la  raaison  de  la  Vierge  fut  rairacu- 
leusement  Iransporlee,  au  xiii"  sifecle ,  sur  la  cole  de 
Dalmatie,  pres  de  Fiume,  puis  dans  un  bois  de  lau- 
riers  pr^s  de  Recanati,  puis  sur  une  montagne  voisine, 
enfin  a  Lorette,  oii  depuis  600  ans  on  accourt  de 
toutes  parts  pour  la  ven^rer. 

En  se  rendant  de  Nazareth  au  lac  de  Tiberiade,  on 
rencontre  le  mont  et  la  plaine  d'Hittin ,  ou  Ids  Chre- 
tiens perdirent  en  1185  la  vraie  croix,  la  possession 
de  la  Jud^e  el  la  liberie  de  leur  roi,  Gui  de  Lusignan. 
Le  lac  de  Tiberiade  ou  de  Gen^sareth,  connu  aussi 
sous  le  nom  de  mer  de  Galilee  ou  de  Cin^roth ,  se 
presetite  ci  la  vue  du  voyageur  sous  I'aspect  le  plus 
d^licieux ,  dans  un  bassin  evidemment  volcanique  , 
entour^  de  hautes  et  belles  monlagnes;  il  a  5  lieues 
de  longueur,  deux  de  largeur,  et  se  trouve  a  625  pieds 
au-dessous  de  la  Mt^diterranee.  L'eau  en  est  limpide, 
douce  el  agr^able  a  boire,  commc  celle  du  Jourdain, 
et  les  poissons  y  abondent.  Mais  que  sont  devenues 
le9  populations  nombreuses  qui  se  pressaient  sur  ses 
rives,  les  quinze  viiles  qui  I'entouraient ,  les  barques 
qui  la  sillonnaient  ?  Tout  est  silence  et  mort  aujour- 
d'hui  dans  cette  region  charmante. 

La  ville  de  Tiberiade,  en  arabe  Tabai-iyya ,  est  en- 


(  564  ) 

core  cnsevelie  sous  les  decombres  amoncelc^s  par  le 
trembloment  do  tcrre  de  1837.  Butic  par  Herode- 
Antipas,  qui  en  fit  sa  capitale  et  lui  donna  le  nom  de 
I'enipereur  Tib6re ,  elle  resta  la  melropole  de  la  Ga- 
lilc^e  jusqu'au  rfegne  d'H^rode-Agrippa  II,  qui  lui  pr6- 
f^ra  S6plioris ;  apres  la  deslruclion  de  Jerusalem  par 
Titus,  les  plus  savants  docleurs  juifs  vinrenty  fonder 
une  6colecelebro  d'ou  sorlil  le  lexte  talmudique.  L'an- 
cienne  ville  s'6lendail  au  sud  de  la  ville  actuellc,  entre 
le  lac  et  les  montagnes,  el  a  laisse  des  ruines  conside- 
rables. Les  eaux  lliermales  de  Tiberiade  sont  a  quel- 
que  distance  de  la,  dans  un  lieu  qui  a  port^  le  nom 
d'Emalb,  et  aussi  celui  d'Emmaiis,  nom  si  commun 
sans  doute,  parce  qu'il  dolt  indlquer  des  sources  ther- 
males  (du  mot  cliammatli,  bains  cbauds). 

Magdala  (aujourd'hui  El-Medjdel),  vers  I'extremit^ 
nord-ouest  du  lac,  dtait  la  propriete  de  cette  c6l6bre 
Marie  qu'on  a  surnomni(^e,  d'aprfes  cet  endroit,  Marie- 
Magdeleinc. 

Dans  le  voisinagc,  on  voit  la  montagne  ou  Jesus- 
Christ  fit  la  multiplication  des  pains  ;  ot  le  lieu  oii  Ton 
pense  que  lut  pronouce  Ic  sermon  sur  la  montagne. 
Sefarieh,  pauvre  village,  est  I'ancienne  Sephoris ,  qui 
tut  appelee  Dio-C6saree  par  llerode-Antipas ;  Cana, 
illustree  par  le  premier  miracle  du  Sauveur,  est  une 
bourgade  de  800  habitants,  qui  a  conserve  son  nom. 
El  Meched  repond  a  Goth  ou  Gcthophar,  patrie  de 
Jonas,  et  celebre  par  la  bataille  de  1187,  entre  les  Sar- 
rasins  et  les  Templiers. 

Mgr  Mislin,  apres  avoir  traverse  les  montagnes  de 
Zabulon,  se  rclrouva  sur  cette  cote  de  la  Mediterran^e 
qu'il  avail  deju  visilee,  et,  de  rclour  a  Beyrouth,  il 


(  565  ) 

s'emliarqua  pour  I'Hgyple,  d'oi'i  11  ne  tarda  pas  a  re- 
venir  en  Occident. 

Tel  est  en  resume  celinteressant  voyage,  qui  esl  une 
des  plus  completes  explorations  qu'on  ait  failes  depuis 
longlenips  en  Palestine  ;  I'auteur  porte  dans  I'observa- 
tion  des  lieux  un  esprit  de  sage  critique,  une  sagacit6 
savante,  qui  rendent  les  plus  grands  services  a  la  geo- 
graphie;  il  d^peint  hien  les  moeurs ;  il  raconte  I'his- 
toire  d'une  maniere  lumineuse,  et  sait  rallacher  aux 
lieux  qu'il  visite  un  grand  nombre  do  fails  qui  dimi- 
nuent  I'aridile  de  la  nomenclature.  11  est  facheux  qu'il 
n'aitpas  joint  une  carte  de  la  Palestine  a  son  ouvrage, 
qui  est,  du  reste,  accompagn^  de  plusieurs  plans  de 
Jerusalem. 


COMPTE  RENDU 

DE    DEUX   ATLAS   CLASSIQUES   (  EN   ANGLAIS  ) 
DE 

GtOGRAPHJE  PHYSIQUE  ET  DE  GEOGRAPHIE  G]£lNb:RALE 

UE  M.  A.  KEITH  JOHNSTON, 

PAK 

M.    SfeDILLOT. 


Nous  avons  rendu  un  compte  trfes-favorable  du 
grand  atlas  physique  de  M.  Keith  Johnston  dans  le 
Bulletin  de  la  Soci6t6  de  geographic  (1851,  tome  II, 
page  328),  et  nous  regrettons  de  ne  pouvoir  dire  le 
nifime  bien  des  nouvelles  publications  qui  lui  sonl 
dues.  En  reduisant  sous  un  petit  format,  pour  I'usage 
des  ecoles,  ces  belles  cartes  qui  piesenlciil  un  taljleau 
III.   juiN.   h.  38 


{  5(ia  ) 

si'parfait  des  merveillcs  tie  la  ilatur."',  rauiour  s'osl 
condamn^  a  inodifier  profondemcnt  son  premier  tra- 
vail, et  a  reprotluire  une  esqulsse  souvciit  confuse  des 
phenomenes  qui  se  manifestcnt  sur  la  surface  emigre 
du  globe.  Des  cinq  carles  consacr^es  par  M.  Jolinslortj 
dans  son  premier  ouvrage,  a  la  meleorologie,  Irois  iseu- 
lemcnt  sont  conservees,  celles  qui  troilent  des  ligneS 
isotlierlnes,  des  venls  constants  ou  periodiques>  dc  la 
dislriljution  des  pluies  et  des  neii^s.  Aux  dix  carles 
concernaiit  la  geologic  ,  se  Irouvent  subsliluues  Bept 
pelites  cartes  qui  represenlent  les  montagnes,  pla- 
teaux, plaines  et  vallees  de  I'Europe,  de  I'Asie,  de 
i'Afrique,  des  deux  Am^riques,  des  lies  Brilanniqaes, 
avec  un  tableau  synoptique  des  volcans  et  des  princi- 
paux  treinbleineuls  de  terre.  Pour  I'hydrologie,  nous 
n'avons  plus  que  trois  cartes  au  lieu  de  six,  deux  indi- 
quanlles  couranls  oceaniques  et  le  systeme  des  grands 
lleuves  de  la  teiTC,  el  une  nouvelle  qui  ollre  la  confi- 
guration des  lacs  el  des  mers  inlerieures  de  I'Asie. 
Enfin,  sur  les  neuf  cartes  dont  se  coniposait  la  partie 
pliylologique  et  zoologique  du  premier  alias,  qualre 
seulenieiil  subsislent,  I'une  pour  les  vegetaux,  I'autre 
pour  les  auimaux,  la  troisieme  pour  les  races  hu- 
maiues,  la  qualrieme  enlin,  monlrant  les  divisions  du 
globe  sous  le  jjoint  de  vue  des  croyances  rcligieuscs. 
La  Ironlispive  fail  conuailre  les  divers  eiemenls  de 
la  carlngiapliiu  et  de  la  geograpliie  physique. 

Le  bccond  alias,  publi6  par  M.  Keith  Johnston,  a 
I'usage  des  ecoles,  conlienl  \ingt-deux  carles  :  douze 
pour  TEurope,  trois  pour  I'A&ie,  une  pour  I'Afrique  el 
['yJiabce,  cinq  pour  I'Anierique  el  I'Auslralie.  La 
Erance  est  divisee  en  provinces,  el  Ton  est  lout  &urpris 


I 


(  567) 

de  rencontrer  rAunis,  la  Guyenne,  le  Langiiedoc,  le 
Comtat  (Venaissin),  etc.  Nous  avions  cru  un  instant 
que  M.  Johnston  nous  reportait  a  I'ann^e  1789,  mais 
le  nom  des  departemenls  est  indique  en  tout  petits 
caracteres,  ct  il  ne  manque  en  r^alite  que  leur  delimi- 
tation. 

Un  index,  qui  nous  a  paru  fort  complet,  donne  la 
longitude  ct  la  latitude  des  principales  places  du 
monde;  seulcment  I'editeur  no  cite  point  les  aulorites 
sur  lesqueiles  il  s'est  appuye  pour  ce  travail. 

Malgi"*^  les  observations  qui  precedent,  nous  recun- 
naissons  toutefois  que  les  deux  atlas  de  M.  Keith  John- 
ston seronl  ulilenient  places  entre  les  mains  des  jeunes 
gens  studieux. 


(  568  ) 


NOTES  SUR  LES  DIFF^RESCES  EXISTAST  DAJIS  DIVERSES  CARTES  Di; 
I.'aMKRIQDE  CENTRALE  SUR  LES  LATITUDES  DE  LA  RIVlfeRE  DE  SA.X- 
JLAN   DE  NICARAGUA,  PAR  M.  LE  CAPITAINE  GABRIEL  LAFOND, 


DtSlCNATlON   r)ES  CARTES. 


CarlP  de  la  cote  dii  Mexique  , 
d'uprcs  les  nouvelles  cartes  es- 
pa|iioles,  publipe  en  ISi."  par 
ordie  da  roi ,  an  deput  general 
de  la  marine  de  France 

Carle  de  la  Colomliie,  par  Bnie  , 
18-25,  d'apres  les  observalions 
de  M.  de  Hiiniboldl  el  des  navi- 
galeiiis  esp.ignols 

Carte  des  Aulille';,  par  le  meme 
nine,  1 85-2  ,  dedit-e  a  rinslilnt 
de  France 

Giaudc  carle,  du  nieinc  Brue, 
gravee  eii  1853  (  ceuvre  pos- 
lliiime  ] 

Carle  de  Gusta-Rica  et  dcs  Elats 
de  Nicaragna  ,  levee  en  1828  el 
1829  par  MM.  Rouhaud  et  De- 
marlray,  gravee  en  18r)2  .... 

Carte  du  lac  de  Nicaragua,  pour 
servir  a  rmlcUigence  du  projet 
de  jouclioii  de  Uocean  Atlanti- 
que  au  Pacilique,  par  un  canal 
a  vaisseaux,  1832 

Carle  de  sir  E.  B.  Baruelt,  officiei 
de  la  marine  anglaise,  publie'e 
en  1844  par  ordre  de  I'umiraule 
anglaise.    . 

Carte  dc  la  riviere  de  San-Juan 
de  Nicaiagua,  |iar  Squiei-,  1851. 

Carle  faile  suns  la  direction  du 
capilainu  general  Lafund  ,  chez 
Kubiquct .  i'uris  ,  1851  ,  d'aprcs 
les  indications  suivanles:  l°pour 
la  cole  ouest,  dc  Ph.  Hauza,  i-n 
1794,  avec  cnrrectiun  par  E.  Bel- 
cher en  1857,  el  L.  J.  Wood  en 
184S;!2*  pour  la  coleesl,  <lu  com- 
mandanl  liarnell.  183'j;  5'  Pa- 
nama .  du  cumnian<lant  Lelcher 
en  1837,  el  du  commandant  de 
Rosaniel  en  181U;  4°  Guile  de 
Nicoya  ,  par  le  nieme  ,  1854; 
5'  Qiiilio,  par  le  lieulenanl  S. 
Wood,  1848;  6»  Gulfo- Dulce  , 
par  Louis  Chcrou  ,  I8.'i0;  7*  des 
avis  de  MM.  Datissy,  bydrogra- 
phe  en  chef;  de  Vincendon- l>u- 
niouliii,  ingi-nieur  hydrographe 
de  la  marine  franf.ii$e;  el  de 
Jomard,  conservaleur  des  carles 
a  la  Ui)>liotbcque  iiationale  ; 
8°  enlin  ,  des  cartes  de  MM.  les 
rapit. lines  S.  Lallier  et  Goluni- 
bel.  I85i 


NOMS   DES   AUTEUR.^. 


Ministere  de  |j  maiine,  1823. 


Brue,  1823 

Brue,  1832 

Brue,l853(oeuvreposlhume). 

Rouhaud  et  Demarlray,  1832. 
Iluerne  de  Pommcreuse,1832, 


E.  B.  Barnell,  1841. 
Squicr,  18S1    .  .  .   . 


(^up.  G.  LafoBd,  coniul  |e'n, 
de  Cusla-Ricu,  1851  ct  1852. 


LAT.  INBIQU^E 


H*  40" 


It 

04 

It 

04 

11 

SO 

It 

00 

tl 

30 

tl 

00 

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10  SS 


«   (.    c 


ll'OO' 


It    05 

It   00 

10  S6 
to  58 


II   08    10  86 


{  869  ) 

0BSBIIVAT10>S  SUR    LB   TABLEAU   CI-COHTR].. 

La  carte  n°  i  de  la  C6te  du  Mexique  est  d'unc  exactiliule  dou- 
teuse. 

Celle  n°  5,  de  MM.  Rouliaud  et  Deniartray,  pniait  avoir  cte  diesse'e, 
8ur  une  plus  jiande  e'chelle,  d'apies  les  cartes  de  Nirarafjua  et  de 
Costa-Rica,  par  M.  Joachim  Rousseau;  ou  bien  celles-ci  d'apres  la 
carte  de  MM.  Rouhaud  et  Deniartray,  {'annee  n'elant  pas  indiquee 
sur  celles  de  M.  Joachim  Rousseau.  II  est  evideut,  a  la  siniplu  vue, 
que  I'une  a  servi  de  modele  a  I'autre. 

La  carte  n*  7,  de  M.  E.  B.  Barnett,  parait  d'une  exactitude  incon- 
testable et  superieure  i  toutes  les  autres  cartes.  11  est  a  croire  qu« 
c'est  celle  sur  laquelle  il  faut  s'en  rapporter  le  plus. 

Celle  n"  8,  de  M.  Squier,  sur  une  grande  e'chelle,  presente  de  grands 
developpements  et  semble  aussi  d'une  plus  rigoureuse  exactitude  que 
les  autres.  Le  parcours  des  sondes  y  est  indique  avec  de  niinutieux 
details,  et  la  ligne  suivie  et  marquee  tout  le  long  du  Heuve  demontre 
<|ue  I'auteur  a  explore  avec  soin  et  exactitude.  Tout  y  est  parfaitc- 
nient  trace;  mais  il  est  une  importante  observation  a  faire  sur  le  tra- 
vail de  M.  Squier.  II  est  le  seul  qui  ait  porle  la  sortie  du  flcuve  du 
lac  de  Nicaragua  a  io">  55',  et  son  embouchure  dans  I'ocean  Ailan- 
tique  a  10"  58'.  Toutes  les  autres  cartes  ct  rnappemondes  poiteot  a 
t  1°  et  plus  dans  le  lac;  et  toutes,  egalement,  niarquent  rendjouchure 
dans  I'Atlantique  gene'ralement  plus  bas  que  dans  le  lac.  (Voir  le 
tableau  ci-contre.) 

C'est  un  point  a  verifier  et  a  determiner  dc  maniere  a  ne  plus  laisser 
de  doules. 

Je  crois  devoir  appeler  I'attention  des  navigateurs,  des  voyageurs 
et  des  hydrographes  sur  cette  importante  question,  qui  se  ratlache 
aux  etudes  du  passage  des  deux  oceans  par  le  lac  de  Nicaragua, 


(  570  ) 


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(  072  ) 

Expedition  sciE>Tii-inrK  franqaise  IiN  Orient.  — 
L'ne  com  te  letlre,  ecrile  do  Bagdad,  20  avril  1852,  par 
M.  Oppert,  jc'une  savant  alloinand  attache  a  I'expe- 
dilion  scientifique  que  le  gouverneiiient  IVangais  a  en- 
voyee  pour  coutinuer  les  d(icouverles  comiuencees  par 
M.  Eolla,  donne  I'ilineralre  suivant  de  I'expedition  : 

29  deceinbie  l85l.  .    Depart  tie  Reyrout. 
5  Janvier  I  852.  .   .  Depart  d'Alexandielte,  apres  une  nouvelle  qua- 
rantaine. 
Du  10  au  19  Janvier.  SejouraAlep. 

25  —         Arriv('e   h  Biredjik  ,   sui    I'liupliralo.    JJoiivelle 

quarantaine. 

28  —        l'assaf;e  de  i'Eiiplirato. 

29  —        Depart  de  ISiredjik. 

1*' fevricr Arrivee  a  Severek.  Arret  du  hull  jmirs  par  suite 

de  pluies  contimielles. 

8         — De'part  de  Severek. 

Dti  laau  17 Sejour  a  Diarbekir. 

18 Depart  de  Diarbekir  pour  Mossoul,  par  Mardie, 

Nisihie,  Gezireli  et  Omar. 

1"  mars Arrivee  a  Mossoul. 

Du  i"  nil  "i^ Scjour  a  Mossoul. 

22 Depait  [Jour  Baf^dad  sur  des  radeaux  d'outres. 

27 Arrivee  a  Bagdad. 

Plusicurs  circonslanccs  facheuses  sont  vciuies  arreter 
les  travaux  do  rcxpodilion.  Le  firman  du  scliah  de 
Perse  .se  faisait  atlendre;  le  pays  ctait  cii  ploine  r6- 
volle;  les  lehelles  mena^aient  serieusemenl  Bagdad 
et  assi^geaicnt  meme  celle  de  Hillali,  desolee  par  la 
famine.  Pour  comblc  dc  malheur,  la  ville  dc  Babylone 
elait  inondee  par  le  debordemenl  des  oaux. 

D.  L.  11. 


(  573   ) 

VFIUQUE. 

Parmi  les  coiuuuinicalions  lailes  a  la  Soci^te  geo- 
grapliiquc  de  Londres  dans  sa  seance  dii  26  avril  der- 
nier, il  en  est  deux  qui  m^ritont  de  fixer  particuliere- 
ment  I'altention  des  geographes. 

La  premiere  est  relative  a  I'Afrique  auslrale  ;  la  se- 
conde  concerne  I'Afrique  occidentale  (1). 

AFRIQUE   AUSTRALE. 

M.  Francis  Gallon,  nouvellement  arrive  descontrees 
sud-ouest  de  I'Afrique,  presenle  un  expose  sommaire 
de  son  exploration.  11  a  traverse  Ics  vastes  conlrees 
qui  s'elendent,  depuis  le  point  extreme  atteint  par  sir 
James  Alexander,  presque  jusqu'a  la  riviere  Nourse , 
au  nord;  et  a  Test,  jusqu'au  21°  degre  de  longitude,  ou 
a  peu  de  distance  de  ce  cole  du  lac  N'gami.  Les  nom- 
breuses  observations  aslronomiques  faites  par  M.  Gal- 
ton,  et  dont  I'exactitude  a  ete  v^rifiee  solgneusement 
au  bureau  hydrographique  de  I'amiraule,  augmenlent 
infmimont  la  valeur  de  ces  explorations. 

UnSuedois,  M.  Anderson,  qui  accompagnait  M.  Gal- 
ton,  est  reste  en  Afrique,  et  se  propose  de  pen^trer 
plus  avant  dans  le  pays,  dans  la  direction  du  nord  et 
de  Test.  II  pense  que  deux  rivieres  sortent  du  c6l6  oc- 
cidental du  lac  N'gami;  que  Tune  de  ces  rivieres  est 
coniparativement  peu  considerable,  uiais  que  I'autre, 
ou  la  plus  seplentrionale,  doit  elre  iniportante  et 
forme  le  grand  cours  d'cau  qui  borne  au  sud  les  eta- 

(i)  Communique  a  la  Commission  cmtrale  de  la  Societe  de  geo- 
fjraphie  dans  sa  seance  du  .\  juin  I  852.  I>.  L.   R. 


(  374  ) 

blissements  portugais  dans  le  Beiigucla  {Bengnila),  et 
dont  le  Ciianen^  est  une  des  branches. 

AFRIQUE   OCCIDENTALE. 

Dans  un  memoire  lu  par  M.  Mac  Leod,  lieutenant 
de  la  marine  royale,  eel  oflicier  ayant  propose  de  re- 
naonter  le  Niger,  ct  de  descendre  ensuite,  si  oela  6tait 
pratitaljle,  la  riviere  Gambie,  une  commission  nonimee 
par  le  president,  crul  devoir,  apr6s  dc  soigneuses  in- 
vestigations, presenter  sur  les  questions  qui  lui  dtaienl 
soumiscs  un  rapport  dont  voici  a  peu  pr6s  la  substauce. 

Dans  un  contrat  i-ecemment  conclu  pour  le  trans- 
port des  malles  entre  I'Angleterre  el  la  cote  d'Afrique, 
il  existe  une  clause  d'apr^s  laquelle  le  contractant  de 
cc  service  est  tenu  d'envoyer  un  pelit  navire  a  vapcur 
a  h^lice,  pour  remonter  I'une  des  rivieres  d'Afrique, 
dans  le  double  but  de  faire  des  decouvertes  ct  de  com- 
mercer,  sous  la  condition  de  n'exiger  des  passagcrs 
que  h  shillings  par  mille.  Le  comile  pense  que  Ton 
pourrait  combiner  la  condition  imposee  dans  le  conlrat 
ci-dessus  avec  la  proposition  du  lieutenant  Ulac-Legd. 
Celui-ci  a  deja  servi  ])endant  sij^  ans  sgr  la  cole  pccl- 
dentale  d'Afrique ;  il  a  etudid  avec  le  plus  grand  soip 
la  question  ,  el  sa  proposition  a  tie  favorablement  ac- 
cueiljie  par  les  autorilds  les  pigs  respeclableg.  M.  Mac 
Gregor  Laird  (1)  fait  observer  a  co  sujet  qijc  re:i6culipn 
de  ce  plan  <5tal)lil  qu'il  n'y  a  poinl  dc  doule  que  ce  plan 
pe  soit  parfailement  praticable  sous  le  rapport  rq(^ca- 
nique.  Son  contrat  avec  ramirautd  Toblige  a  faire 
choix  d'un  bon  navire,  tr^s-bicn  equipe,  et  a  I'envoyer 

(i)  C'eat  sans  doute  le  contractant.  D.  L.  B. 


{  575  ) 
pour  remontor  I'une  des  rivieres  navigables  de  la  c6le 
occidentale  cl'Afrique.  Ce  batiment  poiirrait  prendre 
sur  son  pont  le  l;aleau  a  vapeur  en  fer  propose  par  le 
lieutenant  Mac  Leod,  et  qui  doit  avoir  50  pieds  de  long, 
8  de  large,  3  pieds  6  pouces  de  profondeur,  2  pieds  de 
tirant  d'eau ,  et  une  puissance  de  8  chevaux,  avec  une 
vitcsse  de  8  a  9  milles  a  riieure.  Ce  bateau  pourrait 
elre  complelement  termine  moyennant  une  depense 
de  900  a  950  livres  sterling.  11  serait  conslruit  de  telle 
sorte  que  les  pieces  d'avant  et  d'arri^re  pourraientetre 
chargees  dans  lo  compartinient  du  centre.  Les  cylin- 
dres  et  la  chaudiere  seraient  renfermes  dans  une  merae 
caisse ,  de  maniere  a  pouvoir  etrc  facilement  embar- 
ques  sur  le  bateau  lorsqu'il  serait  mis  a  I'eau  et  r6uni 
a  I'helice. 

L'introduction  de  la  quinine  et  d'autres  substances 
medicales  dans  le  traitement  des  fi^vres  d'Afrique  a 
grandeujent  diminue  la  mortalite  <!ans  ce  pays,  en 
sorle  que,  dans  les  rivieres  ou  Ton  va  chercher  Vhuile 
de  Palme,  et  ou  la  fievre  emportait  souvent  autrefois 
lout  I'equipage  d'un  batiment,  on  n'y  perd  pas  aujourr 
d'hui  comparativement  plus  d'bomraes  que  dans  les 
Indes  oricntales.  L'^poque  actuclle  est  particuliere- 
ment  favorable  pour  essayer  de  pen^trer  en  Afrique 
parle  Niger.  D'apr^s  les  derniers  rapports,  il  paraitque 
la  traite  a  entierement  cesse  dans  les  golfes  de  Benin  et 
de  Biafra.  L't^migration  d'un  grand  nombre  d'Africains 
affrancbis  et  parlant  anglais,  de  Sierra-Leone,  dans 
leur  pays  natal,  qui  borde  le  Niger  ou  qui  n'en  est  pas 
eloign^! ,  comme,  par  exemple,  d'Abeo-ku-ta,  doit 
exciter  fortement  a  entreprendrc  I'exploration  ull6- 
rieure  de  ce  grand  debouclie  de  I'Afrique.   Les  natu- 


(  S76  ) 
rels  ne  tarcleraieiil  probableinent  pas  a  appr^cicr  les 
avantagesqu'ils  pourraient  lirer  d'un  commerce  regu- 
lier  avec  I'Anglcterre;  et  I'introiluction  de  I'li^Iice  met- 
trail  les  bateaux  a  vapeur  en  etat  d'etre  dirigds,  avec 
leur  provision  de  charbon  et  leurs  cargalsons,  direcle- 
ment  a  reinbouchure  du  fleuve ,  ainsi  qii'avec  leurs 
equipages,  en  bon  etat  de  sanl6,  sans  avoir  et6  allecles 
par  le  climat.  Les  navigateurs  qui  ont  eu  a  employer 
sur  des  rivifcres  des  bateaux  a  vapeur  a  I'ond  plat  con- 
naissontlesdirficult^s  pratiques  qui  ont  disparu  depuis 
rintroduclion  de  la  macbine  a  helice.  Le  lieu'tenant 
Mac  Leod  propose  de  remonter  la  riviere  au  moment 
de  la  crue  des  eaux,  afin  d'echapper  aux  miasmes  qui 
s'en  exbalenl  lorsqu'elle  est  basse.  Le  consul  Becroft  a 
deju  atteint  la  ville  de  Zever,  situde  a  plus  de  600  milles 
au-dessus  de  I'emljouchure  de  la  riviere. 

La  Sociele  a  d6ja  appele  I'attention  de  la  Chauibre 
de  commerce  de  Mancbester,  sur  la  possibilite  d'ou- 
vrir  des  relations  commorciales  avec  I'Afrique  cenlrale, 
par  la  voie  de  Zambese  [Zainhe.i) ,  ct  le  moment  est  ar- 
rive de  remonler  nou-seulement  le  Niger,  mais  tous 
les  fleuves  de  I'Afrique  orientale  et  occidentale. 

D.  L.  R. 


(  577  ) 

.%cle«8  de  la  Socl^l^. 

Proeea-verbaiix  ties  seances,  Oiivrages 
oflerfs,  etc. 


PnisiDENCE    DE    M.    GuiGNIAUT. 


Proces-v6rbal  de  la  seance  dii  h  juin  1852. 

Le  proems -verbal  de  la  dernifere  seance  est  la  et 
adopts. 

M.  Eugene  de  Froberviile  envoie  au  secretaire  ge- 
neral, avec  son  billet  date  de  Naples,  24  mai,  une  note 
sur  les  tribus  des  negres  b^gayeiirs  au  nord  de  la 
Cafrerie. 

M.  Benedetto  Marzolla  annonce  dans  la  lettre  qii'il 
ecrit  de  Naples  ,  sous  la  date  du  27  avril,  que  le  pre- 
mier envoi  des  cartes  qu'il  a  fait  a  la  Societe  se  com- 
posait  de  quarante-quatre  au  lieu  de  quaranle-deux 
seulement  indiqu^es  dans  le  Bulletin.  II  en  transmet 
aujourd'hui  six  auties.  (Voir  aux  Outrages  et  Cartes 
ojferts.) 

M.  Paul  Chaix  remercie  la  Soci6t6  de  son  admission 
comme  correspondant  Stranger.  (Lettre  parliculi^re 
dat^e  de  Geneve,  1'' juin. ) 

Le  secretaire  de  la  Societe  geograpbique  de  Londres 
adresse  le  rapport  fail  a  la  r(!!union  annuelle  du  ik  mai 
dernier,  par  le  conseil  de  cette  Societe  sur  son  elat 
int^rieur,  etc.  Le  secretaire  g^ric^ral  de  la  Commission 
cenlrale  fait  remarquer  que,  parmi  les  correspondanis 


(  578  ) 
recemmenl  nommi-s  [^ar  la  Socit'-lo  gi^ogrnpliique  ilo 
Loudres,  liguie  Isl.  ie  prince  Eiuiunniiel  (Kililzin,  quo 
la  Societe  de  geograpliie  a  i'liouneur  dc  coiupler  de- 
puis  louglomps  au  noiiibre  de  ses  uieuibres  corres- 
poudanb  etranyeis. 

M.  Joniard  couiuiunique  une  lettre  ecrile  de  Con- 
slauliuople  le  15  mai  dernier  par  M.  Vattier  de  Bour- 
vilie,  drogman  de  la  legation  Irangaise,  relative  a  uno 
recente  decouverte  qudii  vicnt  de  I'aire  a  Sehouff, 
quatre  iarsak  de  Schuster,  sud  de  la  Perse.  Ce  sunt  des 
constructions  imiucases  des  colounes  uionolilliei.  en 
marbre  dune  hauteur  Considerable  dont  les  chaj)i- 
teaux  sont  ornes  de  letes  d'animaux;  dies  sont  au 
nonibre  de  trente-tix  :  non  loin  de  la  sont  Ireule-six 
aulres  piedestaux.  Quelques-unes  de  ces  colonnes  soni 
couverles  d'iuscriptions  syriennes  et  chaldeennes.  On 
a  Irouve  aussi  quantite  de  luedailies  couiiques,  dont 
I'une  est  de  I'annee  105  de  I'hegire  (  ).  ties 

details  sont  tires  de  la  gazelle  persane  du  2  redget  I'itJS 
(21  avril  1852). 

Le  secretaire  gen^i'ai  donne  lecture  de  la  lisle  ties 
ouvrages  oliels. 

M.  le  general  Auvray  el  Al.  le  docleur  Boudin  sont 
noninies  uiembrcs  de  la  Societe  sur  la  presentation  de 
MM.  Guigniaut  et  Joniard. 

M.  de  la  Koqueltc  Tail  connailre  i  la  Commission 
cenlrale  deux  communications  taltes  a  la  Soci^te  geo- 
graphiquc  de  Londres,  dans  sa  stance  du  26  avril,  la 
premiere  relative  a  une  exploration  de  M.  Francis 
Gallon  dans  la  partie  sud-ouesl  de  lAlrique,  el  la  se- 
conde  a  uu  projet  concu  par  M.  Mac  Leoii,  olhcier  de 
la  marine  royale,  de  renionter  le  iNiger  et  de  descendre 


(  579  ) 

ensuite  la  Gainbie  si  cela  est  praticable.  Renvoi  au 
coinit^  du  Bulletin.  (  Voir  ce  Bulletin,  p.  57Zi.) 

M.  Cottarnbert  lit  un  rapport  sur  I'ouvrage  de 
Mgr  Mislin,  intitule  :  Les  saints  lienx.  P^leriiiage  ti  H^ 
rusalem,  publie  a  Paris  en  1851.  Renvoi  au  comity  dli 
Bulletin.  (Voir  ce  Bulletin,  ]).  5oO.) 

M.  Anloine  d'Abbadie  demande,  a  I'occasion  des 
crues  du  Nil,  s'il  ne  serait  pas  possible  d'obtenir  dil 
gduverntnnent  egyplien  la  publication  des  observa- 
tions de  nilometrc  qui  ont  pu  etre  faites  jusqu'a  ce 
jour,  et  il  prie  M.  Jomard  de  vouloir  bien  iaire  a  ce 
sujet  quelques  demarches  auprds  du  gouvernement 
egyplien. 

Proces-verhal  de  la  seance  du  IS  juin  1852. 

Le  proces -verbal  de  la  derniere  seance  est  lu  et 
adopte. 

M.  le  major  Fridolino  Giordano  reraercie  laSociete, 
par  sa  lettre  dalee  de  Maples,  Zi  juin  1852,  de  I'avoir 
admis  au  nombre  de  ses  membres,  et  fait  horamage 
des  nouvelles  cartes.  ( Voir  aux  Oui^rages  offerts.) 

M.  de  la  Roquette  communique  a  la  Commission 
I'extrait  d'une  lettre  que  M.  Oppert,  jeune  savant 
attache  a  la  mission  Irangaise  en  Orient ,  ecrit  de 
Bagdad  ,  sous  la  date  du  20  avril  dernier,  el  qui  con- 
tient,  outre  I'itineraire  de  I'expdidition  depuis  Beyrouth, 
quelques  informations  sur  les  Iravaux  de  la  mission. 

MM.  les  membres  du  bureau  de  I'inslilut  historique 
adressent  a  la  Soci^le  plusieurs  lettres  d'invitation 
pour  assister  a  la  seance  annuelle  de  cette  compagnie. 

Le  secretaire  general  donne  lecture  de  la  lisle  des 
ouvrages  olTerls. 


(  68.i)  ) 

M.  Gabriel  Lafoml,  consul  p^niiral  de  la  r^piihlique 
do  Nicarap.ua,  atlresse  do  Piiris,  avpc  sa  ietlre  du 
16  juin,  des  Notes  sur  les  Inlitudos  et  les  longitudes 
(lonnees  par  les  diflereutcsjCiuleLS.connuesAla.  source 
et  a  rembouchure  de  la  riviere  Saint -Jean  de  Nica- 
ragua. (Renvojl6  au  comit6  du  BuUetin.) 

M.  Thomassy  entrelieul  la  Coinmission  des  ricliesses 
g^ographiques  que  renf'erment  les  galeries  du  Vatican. 
U  est  p.vie  de  remettre  une  note  d^taill^e  au  comite  du 

UulleUn.  ,,u  j  .,<!iy*)  J  ,r?3i  ,,  r.xinfv-^H 

M.  Sanis,  prdfesS6ui*  d&^^o^aphie  au  college  Louis- 
le-Graiid,  est  elu  uieujbre  de  la  Soci^t^  sur  la  presen- 
tation dp. MM.  Guisniaul  et  Joiuard. 

mJibsM  sit- 


.»o. 


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.illr;,'. 


''iA^^.z.■  A 


(tC-JSi 


,IU«       liki 


(  581  ) 
OUVRAGES  OFFERTS 

DINS  LES  Sl^ANCES  DES  A  ET  18  JUIN  1852. 


TITRES. 


EUROPg. 


CIBTES. 


Provincia  di  Noto.  Napoli,  i852.  i  feuille. 
Provincia  di  Calabria  citeriore.  JSapoli,   i85i. 

I  feuille. 
Provincia  di  Messina.  Napoli,  i85i.  I  fenille. 
Provincia  di  Rasilicata.  Napoli,  i85i.  i  feuille. 
Provincia  di  Calania.  Napoli,  i85i.  I  feuille. 
Carta  topojjrahca  ed  idrofjrafica  dei  contorni  di 

Napoli,  12  fenilles. 
Carta   redotia  del  mare   Mediterraneo.  Napoli, 

1845.  3feuilles. 

ASIE. 

OUVRAGES. 

Voyage  dans  I'archipel  Indien,  par  M.  V.  Fonta- 
nier.  1  vol.  in-8°  de  820  pages.  Paris,  i852. 

AMliRIQDE. 

OUVnAGES. 

A  series  of  charts  with  sailing  directions,  embra- 
cing surveys  of  tbeFarallones...  State  of  Cali- 
fornia, by  Cadwaladei-  Ringffold,  commander. 
Broch.  in-4°  de  44  papes.  Washington,  i85i. 

Statistics  of  American  railroads...  (  Statistique 
des  chemins  de  fer  ame'ricains,  par  J.  C.  G. 
Kennedy,  du  bureau  de  reccnsement  des  Etats- 
Unis.  Broch.  in-8°  de  6  pages.  Washinptou, 
i85i.) 

CARTES. 

General  chart  embracing  surveys  of  the  Faral- 
loncs  entrance,  to  the  bay  of  San-Fraucisco, 


UONATEURS. 


MM. 

MarzoIIa. 
Idem. 

Idem. 
Idem. 
Idem. 
Bureau  topo{»raph. 
de  Naples. 
Idem. 


V.  Fontaoier. 


111.    JUIN.    5. 


39 


(  582  ) 


.enuaTAWoci 


TITRES. 


.eaari 


•I'M  i  . 

hays  of  San-FiaAiusco  and  ban 
ofGa^rtines  an4  Siiisun  loy,  ; 


P.il)lo  strailf!, 
.Tiui  die.  Sacra- 
inenlo  anil  .Snn-JoaqUm  rivets- to  l\\v  i.iU«s  ut 
Sacramc-iiio  anil  iSaii-Joatiniii  (Cilifornia),  by, 
Cailwalailer  Ringiotd^eoiumaiHleiv  V.iSjlKavy, 
l85o.  J 

Chart  of  the  Farallines  and  entrance  to  llie  bay 
of  San-Fran(i=co' (California),  by  Cadwalailer 
Miii(;{;olil,  i85o. 

Chan  (if  the  hay  of  San-Pablo  straiis  of  Cat- - 
.|Uines  and  (iart  of  ibo  bay  of  San-Fraii- 
t i<<o   (Califoinia|,   l)y  Cadvvalader    Hinycold, 

■^"iS^iaf^r^"  '- -^  1"^^  i;>.,.-  ■,.<■  ■■  .-.■  --^  ^    ■ 

Chart  of  Sttisiin  and  Vidlejo  hays  with  thi^  con- 
Huenix  of  the  rivers  SacriiiaeDlo  and  ^fan- 
Joaciuin  (Cdifoniia),  by  Cadwalader  lUngyol.l, 
iSSo.  ■"■  |--."o  ■    •■    .^:-::.. 

Chart  of  the  Sacramento  river  from  SuinMi  ti'y 
lo  the  American  rivi  r  California,  by  Cudw.i- 
huler,  l85o. 

Nuova  California.  Napoli,  i85i.  i  feuille. 

MELANGES. 
MtMOlBKS   DES  SOClETlis  SAVAKTES  ET  JOIIINAIX. 

Franca  is. 

Archives  ties  missions  scicntitiiines  el  iiili  laiies. 

9*^  ct  lo"  cahiers.  Septeinbre  el  octoiirc  i  8 "j  i . 

I'aris,  i852. 
Nouvelles    annales    des    \oyages.   Avrii    el   m.ii 

l852. 
Jonrnal  des  missions  evau{^oliques.  Mai  i852. 
Journal  d'l'ducaiion  |)o|iulaire.  Miii  1 852, 
Hevui-  do  l'Oricnt,de  rAl(',tric  H  dts  colonies. 

Mai  l852. 
r.evue  oiienlale  et  al{;erienne,  t.  II.  Mai   iG.''>2. 

I'aris. 
Annales  du  commerce  i.xleritur,  n"  57G  a  r)83. 

Mars  I  852. 
L'hivihliiV'lenr,   journal  <\c  I'lnstitnt  histori(|iie 

Avrill852. 


DONATKUnS. 


MM. 

in  «iip3(lioi((lifT 
11.1)?.    ?,9f)    20virfoiA 
'Mil  —  101/  jr.l, 
iiil  9iip4il)nil(lit{ 


Maizolla. 


Ministere 

de  rinsirut'lion 

publii|tie. 

Les  edileui  s. 

hlem. 
Iileni. 
Idem. 

Idem. 

Minislere 
de  I'interieur. 
Le.s  edileurs. 


|E§M 


■,K^"'A  ! 


ITITRES. 


:&iiii'-_  I 


DONATEURS. 


{  Suisses. 


rf.  T 


!  iC'iT  ■ 


<<[.?•  hctr,  o'Mii'j 

niI)liollie()Me  universelle  de  Geneve.Ycd  au^uiii  ,  irir.  ^swl  Chai3ff„ 
Airhivcs   lies  scienres   pliysiqive»'e63nnJu««l}3M«i  L-rrch  imi;  oJria.'H 

Janvier  —  nini  iSfn.         ■  ••■' 'i^bOj   riitip/;oL-in;f 
l!il)li()tlirc|iie  universelle  tl^Gene%fe.  Janvier— 

iiuii  1862. 

.  ,;flj  iuU   i)2  SI3(lCiin9  bur,   itlJi  I 


U06  olrismEioeg 

.028  J 
J.'fiifi'-I  sHj  lo  nsfO 

i'l    biiB    a-jrtixip 
Soc  geographique 

Gouvern«;i9e*jt 

.o»"",8a  ,'!9[)f.( 
'qeW  .fiirtioii/uC)  ufouK 


The  seareli  for  Franklin  ..  by  Anj^uslus  Peter- 
tnann.  London  i85a.  Brooh.  in»8f  de  24  P^ges 
et  I  cai te. 

Report  of  the  conneil...  (  Rapport  du  conseil  de 
la  Societe  {i[eoj*raphique  <le  Londres  sur  I'etat 
de  cette  Socie'le,  hi  a  la  reunion  anuuclle  du 
24  mai  i85a). 

Observations  made  at  the  magnetical  and  meteo- 
rological observatory.  Vol.  II.  London,  i85a. 
I  vol.  in-4°.  - 


MM. 


8WJainiM 

f(oit'iff?li'f«('(  h' 

•Jiiobl 
.insbl 


-•IU'9jib?l  «9j 


li.fH    J  a 


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■        '  ■''•itqa^  .etsiilso  »oi(  f3  JQ 
.££3  J  ^ehs'i 
•jfsnnfi   eailsri/oW 
.c58i 
,)(jG/»  anoigKinit  gob  iBmaot 

.       •  'ufioq  noijeai/bn'b  iBniool 

.«9inoio3  aafa  Ja  snaglA'l  ab  ^jriai^O'l  ah  aovaa 

ia     •  Tjr   Tf  .  ,    .  '=^^'  '"* 

•scdi  icM  .n  .1  ,3ftH3.iagt6  is  affjnano  90,9;! 

.£82  G  O^a  •"«  ,-«U9ii:jJjt9  aa-ismftfoa  wb  aalsmiA 

.  ■     .    ■■  .£28i  gisM 

l.-^opiioJaid  u,Jn!>nVl  ob  fnn-.iioi  ,i"a";.'}H<i''nrj 


(  58/1  ) 

TABLE  DES  MATIERES 

DANS   LE   TOME  III   DE   LA  W   SERIE. 

seat  jjavft  e  !?^T  ^-  ^'^^'    > 

(Janvier  a  juin  i852.) 
lual'Wlih  

MEMOIHES,  NOTICES,  DOCUMENTS  OUIGINAI'X,  ETC. 

Dc  la  disposition  geographique  Jes  lieuxsurlasurfacedufiTobe 

et  de  son  influence  sur  rhisioire  de  I'liumauile ,  par  Charles 

Ritten  .li  jra)  ,^sii4i!wi;'K •   •   •  ^ 

Expedition  dans  I'Afrique  centralc,  traduit  (Ic  I'anylais  par  M.  de 

la  Roquettc  — Suite 21      146 

Voyage  de  dom  Igoace  Knobleclier  sur  Ic  liaut  flenve  Blanc.  — 
Communique  par  M.  Jomard.  —  OUservations  de  M.  Anloine 

d'Abbadie ^4 

Sur  la  topoyiaphie  des  glaciers  de  la  rliaine  dcs  Alpts  —  Com- 
munication faiie  a  la  Societc  de  geographic  par  M.  Ad.  Scbla- 

6'nlweit ..,j^  .,. ^ 

Sur  Ic3  bommes  a  (jueue.  —  Introduclion  par  M.  de  la  Roquelte. 

Notes  de  MM.  de  Paravey  elAntoiiie  d'Abbadie.   .....        3i 

Routes  par  bateaux  a  vapeur,  etablies,  proposees,  et  en  projet 

dans  I'ocean  Indien  ,  Iraduit  de  I'anglais  par  ISI.  de  la  Ro- 

38 

quelle 

De  I'Exploralion  du  Mississipi,  el  en  partirulierde  la  deconvcrle 
des  sources  de  ce  fleuve,d'apies  M.ll.  Schoolcrati,  pa.  M.  dc 
laRoquette "'^ 

Voyages  des  doctcurs  Krapf  et  Rebmami  dans  I'Afrique  orien- 

tale^parMM.de  la  Roquelteet  Anloine  d'Abbadie I  3; 

Expedition  dans  I'Afrique  centrale,  deBftl.  les  docleiirs  B.irih 
et  0,VF*v?C' '"'^""  '^^  ranglaispar'M.  dela'Roquetie. — 

Suite.      '.      .      .     .     ■     ■     •■"■''■     ■     ■     ■      ■■     ■     ■     ■      '''^ 
Apercu  d'un  voyage  dans  le  nord  de  la  Rolivie  et  dans  les  par- 
ties voisines  duPerou,  par  M.  Weddeli aoi 


.(MP) 

Les  Oasis  du  Sahara  al{^''iiin,,4)ar^X.jy_^;^^A^Mjj^tej}iun.  ;  .  ..  .  326 
Place  de  la  Gcoj^injiiiie  dans  la  classificalion  des  coniiaissaiices 

hmnainps,  par  M.  Coi  laiiiijcrt  i- ,  ^i-f.   n- .   .,.,  .   . 239 

Lellre  tie  M.  Ant.  <i  Aliliadie  an  secittairc  jjciicral  de  la  Soc'n  lit 

de  {jeojfiaphie  au  sujet  de  I'arlicle  precedent aJJG 

Sur  la  nation  des  Cherokees,  Iraduit  de  i'anglais  par  M.  de  la 

r>  f         'T  <■?  T    ^    '        "y    ?J1'  f"\  'i'        '   •      t  'y   <'--     I      ■  i   , 

lioqwette .-i  v^^.  ,'  .'  -t  .- t  '.■.•.   i  .  »;.„',   .■  .   ,:  *    'S49 

ASSEMBLES  cIlSfellAL^'DU  2  AVP.IL  1852 

Discours  prononce  par  M.  le  contreramiral  Matliieu,  direcieur 

{jeneral  du  depot  de  la  marine,  president  de  la  Socielg  .,   J   .   .     3u5 

Rajiport  jur  le  concours  pour  le  prix  annuel  (voyajjes  de  1849)5 

par  M.  Jomard,  rapporteur i^obg  flQui2«fjl*iij  bI  ^>)7 

Notice  nc'crologique  sur  M.  Du  Bois  de  Montperreux,  corres- 
pondant  perpetucl  de  la  Sociele  de  geographie,  par  M,  d?  la   , 
Eonuette,  secretaire  general  de  la  Conimission  eentrale.  .  i,'>    ,3ill 

Nouvelles  du  liaut  fleuve  Blanc,  couimuuiquees  par  M.  Antoiiie.,1 
d'ALbadie.  .  .   ."'i  \'''i''.^l 'i'"^. >i"'i:>^li4'-iij<i  a^isuyi  £rjaJ>9iia-.;<.yr34o 

Sur  les  ncgres  Yambo  ( AMtpie),  par M.  Anioi'iie  d'Abbadie  . , :.     335 
(Pour  les  auties  coninuiiiications  taites  ;\  las-endjlue  geue- , 
rale,  voir  la  note  page  SSy.)  ,i,'5oqoj  sA  -,f,^ 

MiimoinES,  notices,  cocuhents  originaux,  etc. 

Notes  sur  un  voyage  dans  Tintericur  de  l'Afri(|uc,  parTM.  IIic-  '' 

_^   .       ,          ,  .                                                 '-■  ■■ -■•i'iiitji.i  c' -  '  rty- 
quai  t,  orticicr  de  spahis ,. ''■'7 

Note  sur  la  route  du  Darfour,  par  M.  Antoine  d'ALbadie  .   .   .    .     3S6 

Lettrc  de  M.  Rollc  an  consul  d'Autriclie  du  Sennar,  comniuni- 
quee  par  M.  Vaudty,  consul  de  Sardaigne  au  Sennar,  et  ex- 
traite  d'une  lettre  de  M   d'Arnaud  a  M.  Jomard 388 

Reinarques  sur  le  document  qui  precede,  par  M.  Jornaid.  .   .   .     3yo 

Notes  sur  les  Va-Nf;\ndo  (  Afritiue  orientale) ,  par  M.  Eugi'-ne  de 

Eroberville /[iS 

Notices  sur  ies  voyages  autour  du  niondedcs  navlgaleurs  russcs, 
par  M.  Ic  prince  Emmanuel  Galitzin,  corrcspondant  de  la  So- 
ciete  degeograpliie  (premiere  partie;  .  i  .  ........   A  ^f\^ 

Lettre  tlu  docteur  Krapf  sur  son  cNploralion  de  rAlVr'qne  oHcn- 

tale,  iraduite  de  I'anjdais  par  M.  de  la  Rofiuelte.  .    .,  .   .-  '.'".     ASl 

Tribus  de  negrcb  bc'gayrurs  au  uciid,;Lle^!^^^afijjii^  j^c^M^de^^ 


i'-i 


(  5^6  ) 

Fiohervill" •••tiHj  litya  QC.iil  ,1411617 

He   tie  Hiii-n3n-<aii<S($mWui('ri«iWe'jJ3ivMfilo'la  RA^iieitevoa  slk'vifaij 

^NAL^-^iiiS,  EXt'tlMTS  oVtlX'rt AC^tS ,  Mirr.ANCES';  Etc;!"^ 

.        '    ■  ■    .    ■  -    .    -       .   -         .        .'..!.,,    ..X.'   M 

l.f  Cii<li  et  les  Aiaucnns.  pnrrM.  Edinoud  il^Giiioux.exlr^iit  par 

M.  Sgdillot...  .,.,,  f-.  J  ...  .,-.,..,... Si     tia 

./    ,    .   '.....iKjul    iltijA    ,A    .!/■    sL     al/.ijiiu;;    'j:i,.((;tjuj;!    'j1i       •    * 

Dainns,  ses  lialiiiaiits, et  ses  eiivirims. —  Exirnit  <lii  voyanf;  ea 
Syriede.M.  )e  romte  Charts  Je  JParJieu,  par  Si.  tie  la  Ro- 

Yoyage  de  la  Bajonnalse  sur  les  rotes  (leCliincet  (Inns  1p  Grant! 
Ocean,  par  M.  Juricn  de  la  Graviere,  oapilaiiie  de  vaifseau, 
extrait  par  M.  Danssy. 80 

Sur  remigratioTi  <le«  fennnie'rs'lirtllA'n<?ai>,'!t)ii  £o«^,  «]«  In  caa^oi'i'-A 
loiiie  anglaisfi  du».c.aj» 'de  BfWne-^E.spt'ranoe.  ^— Extrait  pap~'' 
M.  Daossy.  l'^^'?  i-*""."'!  >i  K'-i'-:' .''. 82 

Note  sxir  un  panorama  du  canal  propose?  pour  In  jonction  de      1 
i'oc^an  Atlanliipie  cl  de  la  nier  Pacifi(|ne,  ])ar  M.  Stpiier,  tra- 
diiit  par  M.  de  la  Rnqnette 85 

Compte  rendn  snr  I'envoi  de  graine.f  de  la  Cltiiif*,  fnil  par 
M.  deMontigny,  consul  de  France  a  Shank-Hai,  par  M.  Jo- 
inarctj-.''l'*^"?-V.  Vi';--^'.'  »-i.'=?itj»T.i<.ri'C.oj  ;  «lui->  ■■..! 88 

Voyage  dans  le  sud  de  la  Bolivio,  par  M.  H.  A.  Weddell,  an-- 
cien  voyageuj^natiiraliste  d«  Mu.seuiu  d'histuire  naturelle.  — ^lul 
Compte  rendu  par  M.  de  la  Roquetle  . idy 

Notice  stu*  les  noirs  de  la  cote  de  Kroo  (Krou)  (Afrique  occiden—  .aiiA 
tale),  ]iar  M.   Connelly,  inl.ssionnaire  americaii). — Commu- 
nique'par  M.  d«  la  Roquette 17.S 

Note  sur  le  Maroc.  —  Communique  par  M.  de  la  Roquelte.  .      l8<> 

Considerations  snr  la  fjeograpliie  Lotanique  et  physique  de  lapur-iA. 
Russie  Sep  ten  Irion  ale,  p.Tr  M.  Alfred  Maury.' (Premier  article).     'if.'iG 

Dcs  chaines  dts  hauteurs  dont  est  s'llonne  le  sol  Rnlandais  ct 
des  divie'ts  systemcs  d'eaux  auxquels  clle.s  donnent  nai^sance,       f 
par  M.  Je  prince  l'"mmn««el  Galit7iiwi>.  :jJ''JJOci  ti.t.  islj.c'l  aau^Q? 

I,e  Ouadfiy.  Rapport  .sur  le  voyn(i;e  du  elieykli'Mbliaihined-Ibiiriii/  < 
Omar  el-Tounsy,  p.Tr  M.  R.  TlioMKi.s.«y ,    .   .  .  ..u^j^ji 

Le*  Ciri*f  Jiofts  dc  la  Cliinciouvcrie  nu  t>ommcit;p  e'traiigcr,  tia>)ijili 

^"duitde  l'an{;lai$  par  M.  do  la  Hoqucttc  .   .   .  .-Jli-xufiCkli.iil  uL    'J{^?> 

Disi.'ourx  prfinoiire'  p.-ip(yi'.'Jntn.trd  »ux  obstirjuiwido-Mi' HValrJip,    ,./•   . 


{ m. ) 

nacr,  le  2g  avril  i852. -..fjliv-fgf;,   4*)^ 

Nouvelle  note  Ae  M;  <le' PUraicy  snr  les  ISi.im  Niains.  , ,.  rt,V\  •;  >  50ji 
Rapport  siu-  le  vavafie   aui  Suiuts  Lieux  de  ftlgr  MisUn.  par 

M.  Cortambert  .  . 53o 

^  .  ■'    "i^'.'V  .Uf'-'iiO  v')  hqon\h'i\  ,M,7rq.  ^-ir.-iKf.  lA  }:■!  Jo  iii;!3  •>, ! 

Compte  rendu  tie  deux  atlas  cTassiques  de  {jfeftgrapTiie  physique 

et  de  geographic  generale    de  RT.  A.  KeilL  Johnstoiij  pa'f'      ' 

M.  Sedillot .  .  • / 565 

-,  '•■  '  j.-cc'^'    '''•'!  r  ii.iifjisTi ')lj  E4)Jit:i{;)  siiiSQ-)  si  .linnU  ."^.liy'i 

Notes  surles  ditterenceS  existant  dan.s  diverses  cartes  del  Ame-    i 

lique  centrale  sur  Fes  latitudes  de  la'  riviere 'de  Sa'n-Jba'ii  de      '' 

-,.      •...; .' J  .;  i^i  Y  '  i.  J  tiajfi.'.)  oUs-jJaT  f  ai  ■!.;:;  "vsi,;!  no  to^  i>\  ab  3;it»Bj/ 
JSicaragua,  par  le  capitaine  GaDrierLatoiid  .  .    .\ "  S08 

;••■::■':''  :  111  .Ifi  tea  f  aBh^O 

NOtVELLES   OEOUllAPinOUES^    ,, 

EiiRoPG.  —  Supeiiicie  e;t  populatiuii  de  la  ISorvegft,  A'?li*5^ite'i  -suS 
dernier  receiisemeiH,  au  3l  dece^brc  l845,  94;  T^Jf|<?fift"5f.,io! 

igverte  d'uii  aiicien  itineraire  de  Gades  h  Itoaie,  commuijic^upj   m 
par  M.  Joiiiard,  280;  —  Divisions  adiiiiiiislrativcs  et  popiila--  gjofS 
tion  dii  royauuiL-  de  Grece,  282;  —  SupeiHcie  et  populaiiyrt  ,(,'J 

■ri^du  Uoyauine-Uuide  laGraude  liretagueelde  rirlai}de,d'api(es  juf, 
le  dernier recensement  officiel,  407  ;  —  Su|)erficjedu  rpylajunM^q^^Q^ 
de  Belgique,d'apres  M.  le  docteur  Jules  Carlier,  et  sa  popnia-     }■/[ 
tion  au  3j  dei:eii)ljie   i8jo,d'apios  le  dernier  iecenseinertt,s/ij 
oi'liciel,  5o2;  —  Division  administrative,  superficie  et  p<>pUr^^gyg,Y' 
lation  du  royauuie  des  Deux-Siciles.  —  Communiqu^  ,pi»r  j.j,^ 

ycM.  Benedetto  Marzolla ;  nn^nfi-r'sfiniiiii^O 

AsiE.  —  Le  Panjaub,  ou  pays  des  Sihks,  1  84  ;  —  lies  pret-endi^S;,Tii;,^<i 
decouveries  enire  le  Japoii  el  les  ilcs  Lieou-Kieou ,  5o4 ;  pr^-,;r,;i 
Itine'raire  de  la  commission  scieniiHepie  envoyee  en  OiieriJtifnin 
par  le   gouvernetnent   francais.   .;M;i.!i*r,.o«.*— .  T(y?f«i«  sj  niK  al^JI 

Ai'iiiQCR. —  Monuments  decouveits  par-M.  Marietle ,  gG j ,.TT7;,ig„o^ 
Nouvelles  de  M.  'I'heopliile  Lel'ebvre,  lieutenant  de  vaisseaMt.-oi|' 
1 86;  —  Nouvelles  .decouveries  faites  dans  I'Afrique  central<;!,j^  e-jf? 
par  MM.  Livingston  el  Cotton  Oswell,  282  ;  —  Coniniuniia>  .ji> 
lions  I'aites  a  la  Sofiete  de  geograpbie  <le  Londies  sur  les  ;,;(. 
exploitations  de  M.  Fr.Tncis  Gallon  d.ins  I'Afiique  australe,:,Q  3J 
et  sur  une  pro|iosiliun  du  lienti-nirnt  M''  Leudpourund  e$per;niO 
dilion  dans  r.M'rique  oceident.ile,   iraiUiit  de  i  Anglai$,'|M|ii3  ;,3,| 
M.   lie   la  Ko(iuelle ...,...;  .f^iioSyS 

AMtr.iQUE. —  Di\isions  admiuisti'ali.v-e.s  el  pupitlatiou  du  CUili,,   ,  ,;,ii7 


(  588  ) 

97  ; —  Divisions  administrativrs  et  population  ilu  terriloire 
d'Utah  (  EtaLs-Uiiis),  i85;  —  Population  des  principalcs 
villes  des  litats-Unis,  d'apres  les  difft'rents  recensements  offi- 
ciels,  avec  leur  latitude  el  leur  longitude,  186; — Latitude  et 
longitude  de  quelques  localites  des  Etats-Unis  et  du  Mexi(|ue, 
190;  —  Nouvelle  Societe  geo^jraphique  et  statistique  fondee 
a  New-York  (  Klats-Uuis) 5o5 

ACTES  DE  LV  SOCIETE. 

ComptR  rendu  des  recettes  et  des  dt'penses  effectuees  pendant 

Tannce  l85l  par  la  Socirte' de  geojjraphie 584 

Rapport  sur  la  veriticalion  des  comptes  des  recettes  et  des  de- 
penses  de  la  Societe  de  geograpliie  pendant  I'annee  i85i, 
par  M.  le  baron  de  Briinont,  president  de  la  section  de  comp- 

tahilite 28G 

Budget  des  receties  ct  des  depenses  de  la  Societe  de  geographic 

pendant  I'annee  1 852 296 

Mouvement  des  cotisations  une  fois  payees  et  des  placements 

decapitaux 2<}8 

Proces-verbaux  des  seances  de  la  Commission  centraie,  102, 

'905  2991  4' 5,  5oG 577 

Proces-verbal  de  rassemhiee  generale  du  2  avril  i852 4'^ 

Ouvrages  offerts  a  la  Socie'te,  1 10,  197,  3o3,  4 '8,  5i3 58 1 

Errata Si  6 

Table  des  matieres 584 

CARTES. 

Carte  routiere  des  paquebots  a  vapeur  a  travers  I'archipel  Indien.  38 

Carte  des  sources  du  Mississipi ii3 

Csrte  du  nord  de  la  Bolivie  ct  des  parties  voisines  du  Perou.  .  201 

Esqnisse  du  liant  fleuve  Ul.inc 3^0 

Croquis  d'une  pnrtie  de  I'Afrique  ocridentale 357 

Esquisse  des  pays  situes  cntre  les  fleuvesde  Luvuma  et  deLufizi 
(Afrique  orientate),  d'apres  les  relations  des  indigenes;  par 

M.  Eugene  dfi  Froherviiie  (He  de  Friince,  1847) 4'5 

Tableau  synoptiijue  indiqiiant  la  parentc  analyiique  des  Un- 
gues de  I'Afrique  meridionale,  par  M.  Eugene  de  Froberville.  4*5 


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