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Full text of "Bulletin de la Société des Sciences Naturelles de Neuchatel"

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M. Louis Coulon, Neuchâtel. 


SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DE NEUCHATEL, 


. 1844—45—46, 
Tome premier. 
ê NEUCHATEL , 
e IMPRIMERIE DE HENRI WOLFRATH. ” 
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BULLETIN 


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SOCIÉTÉ DE SCIENCES MU | LV 


DE NAUCHAME, 
TOME I. - 


NEUCHATEL., 


IMPRIMERIE DE HENRI WOLFRATH. 


1847. 


AVANT-PROPOS. 


En publiant des Bulletins de ses séances, la So- 
ciété s’est proposé un double but, 1° de tenir au cou- 
rant de ses principaux travaux ceux de ses membres 
qui sont empêchés d’assister à toutes ses séances ; 
2° d'offrir un moyen de prompte publicité aux obser- 
vations qui sont de nature à intéresser le public scien- 
tifique tout en entier. 

Elle se flatte en même temps que ces résumés des 
principales questions qui ont été agitées dans ses 
réunions , tant à Neuchâtel qu’à la Chaux-de-Fonds, 
obtiendra les suffrages de ceux qui, sans prendre 
une part active aux investigations de détail, encou- 
ragent tous les efforts qui ont pour but la recherche 
de la vérité, et que ces feuilles contribueront ainsi à 
répandre toujours plus le goût des sciences dans le 
public neuchâtelois. 


Le Président , 


Louis COULON fils. 


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BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DS NEUTCEATER, 


Séance du 8 novembre 18453. 


Présidence de M. L. Coulon. 


M. Agassiz fait part des mesures qu'il a fait exécuter pendant 
le courant de l'été au glacier inférieur de l'Aar, pour consta- 
ter le mouvement du glacier. Ces mesures ont été faites à deux 
époques différentes ; une première fois vers la fin de juin etune 
seconde fois vers la fin d'août , afin de faire connaître , outre 
la somme du mouvement annuel, le mouvement proportionnel 
des différentes époques, ou en d’autres termes les accélérations 
et les ralentissemens du mouvement selon les saisons. M. Agas- 
siz avait fixé pour les premières mesures le moment où les 
neiges auraient suffisamment baissé pour permettre de recon- 
naître les principaux signaux du réseau trigonométrique. 
Cette époque a été très-tardive cette année ; MM. Wild et Desor 
qui s'étaient chargés de cette opération , n’ont pu se mettre 
en route que vers la fin de juin, et encore n'ont-ils pu me- 
surer que les blocs de la moraine médiane qui sont le plus 


en vue. Voici les chiffres du mouvement de ces différens blocs 
1 


ENT NC LES 
tels qu'ils se succèdent de haut en bas, à des distances assez 
uniformes ( à-peu-près de quart de lieue en quart de lieue}, 
depuis l'Hôtel-des-Neuchâtelois jusqu’à l'extrémité du glacier. 


N° 2. 169! 2. () 
5. Frs 
8. 1411 3. 
10. 150! 1. 
11. 133! 1. 
14. 83! 7. 
18. 58! 3. 


Il résulte de ce tableau que le N° 5 a marché le plus vite 
et que les N°$ suivans ont cheminé dans une proportion dé- 
croissante , si bien que le N° 18 qui se trouve près de l’ex- 
trémité du glacier, n’a fait que le tiers du même chemin. Or 
le N° 5, auquel correspond le maximum du mouvement, est 
un grand bloc de granit, situé à 2,000’ en aval du N° 2, 
qui est l’'Hôtel-des-Neuchâtelois. D’après cela , le maximum 
du mouvement se trouve à-peu-près à une distance de 6000 
de l'endroit où les deux branches du glacier, le Lauter-Aar 
et le Finster-Aar, se réunissent au pied de l'Abschwung, 
pour former le glacier inférieur de l'Aar. C'est sans doute à 
cette confluence de deux branches aussi considérables dans 
un lit moins large que celui de chacune de ces branches 
prise isolément, qu’il faut attribuer l'accélération du N° 5. 
Chaque bloc a en outre éprouvé un déplacement latéral plus 


(*) Les mesures sont en pieds suisses, de trois décimètres. 


PART SR 
ou moins notable, qui est le résultat de la forme même de 
la vallée. 

Les secondes mesures donnent les chiffres suivans, pour 
la marche du glacier, depuis le 20 juin jusqu’au 16 août 
(57 jours ). 


N°2. 50! 2. 
2. o4! 8. 
8. 47! 9. 
10. 47! 1. 
11. 39 0. 
14. 25! 5. 
18. 18" 3. 


Ce tableau indique une progression tout-à-fait semblable 
à celle du tableau précédent. Ici aussi le N° 5 a cheminé le 
plus rapidement, tandis que la marche des autres a été de 
plus en plus ralentie. Il faut remarquer, en outre, que le mou- 
vement a été proportionnellement beaucoup plus considé- 
rable pendant ces 57 jours que pendant les 289 jours qui 
se sont écoulés depuis le # septembre 1842 , jusqu'au 20 
juin 1843 ; car si la proportion avait été la même pendant 
toute l’année , le mouvement annuel aurait dû être de près 
d'un tiers plus considérable. 

On peut dés-lors conclure de ces données, 1° que le gla- 
cier, contrairement à ce que prétendent certains physiciens , 
avance beaucoup plus rapidement dans les régions supé- 
rieures que dans les régions inférieures, et 2° que ie mou- 
vement est beaucoup plus accéléré en été qu’en hiver. 


— UN 

Cette communication est accompagnée de dessins gra- 
phiques. 

M. Agassiz rapporte ensuite les expériences qu'il a faites 
pour connaître l'influence de l'inclinaison du sol sur le mou- 
vement de la glace. Ces expériences lui ont été suggérées 
par la communication d'expériences semblables faites par 
M. Hopkins, pendant l'hiver précédent. M. Hopkins, de Cam- 
bridge , avait réuni des fragmens de glace dans des caisses 
défoncées , de manière à ce que la glace débordât les bords 
de la caisse ; les ayant placées sur des surfaces diversement 
inclinées, il avait constaté un mouvement continu et très-sen- 
sible sur des pentes très-faibles (jusqu’à 1°). M. Hopkins 
s’autorisant de cette expérience, en avait conclu que les gla- 
ciers dégagés de leur adhérence avec le sol par l'effet de la 
chaleur propre de la terre, devaient pouvoir cheminer de la 
même manière, et il avait fait valoir cette expérience à l’ap- 
pui de la théorie du glissement. M. Agassiz a répété ces ex- 
périences au glacier de l’Aar; mais au lieu de se servir de 
fragmens de glace, il détacha du glacier des blocs de glace 
d’une seule pièce, du poids de cinquante à cent livres. Ces 
blocs de glace placés sur des dalles de granit et des surfaces 
gazonnées d’une inclinaison variable, subirent effectivement 
un déplacement très-appréciable et uniforme, pendant les 
premières heures. Mais au bout de quelque temps le mou- 
vement cessa complètement, et le fond continuait à fondre 
sans déterminer aucune progression. M. Agassiz conclut de 
cette expérience que le mouvement qu'on aperçoit pendant 
les premières heures, ne dure qu'aussi long-temps que la 


OR 

surface inférieure qui repose sur le plan incliné, présente 
quelques aspérités ; mais il pense que dès que la glace s’est 
moulée par suite de la fonte , sur la surface qu’elle recouvre, 
le mouvement doit cesser. Or, comme M. Hopkins opérait 
avec des fragmens de glace qui devaient nécessairement se 
déplacer par l'effet de la fonte, il est naturel que ce déplace- 
ment continuel devait empêcher la masse entière de prendre 
son assiette, et par conséquent permettre un mouvement plus 
prolongé. Mais comme le glacier n’est point une masse in- 
cohérente , il en conclut que l'expérience de M. Hopkins ne 
saurait être un argument en faveur du glissement. Du reste 
la quantité de glace qui devrait fondre pour déterminer de 
cette manière un avancement du glacier égal au mouvement 
annuel qu'on lui connaît , serait telle que le glacier tout en- 
tier aurait disparu en peu d'années ; car dans toutes les ex— 
périences faites par M. Agassiz, l'épaisseur de la couche fon- 
due à la face inférieure des blocs de glace qu’il observait, 
excédait la longueur du chemin qu'ils avaient parcouru. 

Une discussion s'engage sur ce sujet entre plusieurs mem- 
bres de la société. 

M. Guyot fait remarquer que la progression qui résulte de 
l'expérience de M. Agassiz, ne peut point être envisagée 
comme un glissement, puisqu'un glissement suppose toujours 
une accélération proportionnelle ; il envisage plutôt comme 
une chüte dans la perpendiculaire sur un plan incliné, chûte 
qui résulte de la disparition successive de la couche infé- 
rieure par l'effet de la fonte. 


M. Desor rend compte d’une course qu'il a faite dans les 


=. 4 = 
régions supérieures du glacier de Rosenlaui, pour y recon- 
naître de quelle manière le glacier de Rosenlaui se lie à ce- 
lui de Gauli. Il a remonté le glacier de Rosenlaui jusqu’au 
col d'Urbach où se trouve la limite entre le gneiss et le cal- 
caire. Remontant de là l’arête du Tosenhorn, il s’est élevé 
jusqu’au sommet de ce pic dont la hauteur est d'environ 
11,000 pieds. De ce point élevé on domine un vaste névé, 
qui des flancs des Wetterhôürner descend au Nord et se 
déverse d’une part dans le glacier de Rosenlaui , et de l’autre 
dans celui de Renfer. Le Wetterhorn qui, vu de la plaine, 
se présente comme une large pyramide, est composé de 
quatre cimes orientées du N. O. au S. E. et dont la première 
ou la plus occidentale, qui domine la grande Scheideck, est 
la moins élevée. C’est entre la première et la seconde que 
passe la limite du calcaire. Le Tosenhorn qui s'élève comme 
une île au milieu de cette mer de glace, ne communique pas 
avec l’arête du Renferhorn et du Hangendhorn, qu'on voit 
depuis Im-Grund, bien qu'il forme la séparation entre le gla- 
cier de Rosenlaui de celui de Renfer. C’est une arête pres- 
que tranchante, composée de gneiss qui se délite en larges 
dalles. Au milieu du gneiss se trouve, près du sommet, un lit 
de calcaire d’une épaisseur de quelques pieds, qui est trans- 
formé en marbre blanc, et qui paraît être le dernier prolon- 
gement des couches calcaires de même nature qu'on voit sur 
les flancs de la vallée d'Urbach. M. Desor pense que cette al- 
tération du banc de calcaire ne peut guère s'expliquer que 
par l’action de la roche cristalline dans laquelle il est en 


fermé ; mais il ne s'ensuit pas que partout où le gneiss est 


CET Te 

en contact avec le calcaire, ce dernier doive nécessairement 
être altéré; car il a vu tout prés de là, dans le prolonge- 
ment de la même arête , un endroit où le calcaire repose en 
stratification concordante sur le gneiss , sans qu’il y ait trace 
d’altération au point de contact. On ne rencontre pas de ro- 
ches polies, dans ces régions ; elles ne reparaissent que dans 
le voisinage des premiers chalets sur le revers du Gestelli- 
horn du côté d’'Urbach. 


À. Guyor, secrétaire. 


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No 2. 


7 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DE NEVCEISTER. 


Séance du 23 novembre 1843. 


Présidence de M. L. Coulon. 


M. Guyot expose à la société le résultat de ses recherches 
pendant l'été dernier sur la dispersion du terrain erratique 
alpin entre les Alpes et le Jura. Il rappelle qu'après avoir 
déterminé, dans les années précédentes, les limites respectives 
des bassins erratiques de la Linth, de la Reuss et de l'Aar, 
et celles du bassin du Valais le long du Jura, jusqu’à la Perte 
du Rhône (), il lui restait encore à explorer la ligne de contact 
de ce dernier bassin avec celui de l’Arve , et à poursuivre l’un 
et l’autre jusqu'aux limites extrêmes de leur extension hori- 
zontale. 

Ce problème paraissait d'autant plus intéressant à résoudre 
que M. Guyot avait trouvé les blocs valaisans , que l’on avait 
cru atteindre la plaine près de Nyon, répandus en grand 
nombre au-delà du fort de l'Ecluse, jusqu'à une hauteur 


(*) Voir le Compte-Rendu des séances de la Société Helvétique des sciences 
naturelles à Altorf. 1842, pag. 132. 


2 


— 10 — 

absolue de 2700’, environ {860/ sur le Rhône, élévation 
qui autorisait à croire qu'ils devaient s'étendre beaucoup plus 
loin encore. Il fallait enfin déterminer le mode de répartition 
du terrain erratique et les limites supérieures qu'il atteint 
sur les flancs mêmes des Alpes et au débouché des nombreuses 
vallées qui en descendent. C'est dans ce double but que 
M. Guyot explora les chaînes extérieures des Alpes, depuis 
Berne jusqu’à Chambéry et Montmeillan, dans la vallée de 
l'Isère, c'est-à-dire jusqu’au point de jonction des Alpes et 
du Jura: puis remontant cette dernière chaîne jusqu’à la 
Perte-du-Rhône , il relia ses observations nouvelles aux pré- 
cédentes. 

La détermination des limites supérieures du terrain erra— 
tique, sur les flancs des Alpes, dit M. Guyot, présente de 
nombreuses difficultés qui ne se rencontrent qu'à un faible 
degré sur les flancs uniformes et peu coupés du Jura et qui 
pourraient causer de graves erreurs. Les nombreuses vallées 
alpines secondaires qui débouchent dans la plaine, amènent 
chacune quelques débris qui leur sont propres ; ceux-ci pren- 
nent bientôt part au mouvement général, et se déposent en 
aval de la grande coulée. Pressés le long des flancs des mon- 
tagnes , ils ont dû occuper, au moment de leur dépôt, la 
partie supérieure de la ligne et ont ainsi déprimé pour un mo- 
ment l'erratique alpin primitif, jusqu’à ce qu’ils fussent ab- 
sorbés dans la masse principale. C’est là la cause qui , avec 
la grande irrégularité des reliefs, donne à cette ligne une 
apparence coupée et ondulée qu’elle n’a pas dans le Jura. 

La limite entre les bassins de l’Aar et du Rhône, à l'issue 


= M = 
et sur le flanc gauche de la vallée de l'Aar, est assez bien ex- 
primée par M. Studer dans la carte de M. de Charpentier, 
sauf une singulière anfractuosité autour du Guggershorn, à 
l'est duquel on retrouve les schistes lie-de-vin de Foully, jus- 
qu’au Schwarzwasser. Le Gurnigel est couvert de blocs de 
l’Aar, dont on retrouve de rares fragmens jusqu’à la source 
supérieure, environ 3800 de hauteur absolue. Depuis la Sin- 
gine, près de Planfayon, les roches valaisannes couvrent tout 
le pays de la molasse et les flancs des Alpes, jusques assez haut 
sur la Berra. Plus loin la limite semble déprimée par les dé- 
bris descendus de la vallée de la Sarine , dont on retrouve des 
traces jusqu’à plus de 4000!/. Les derniers gros blocs du Va- 
lais, au débouché de cette vallée, se voient à la Tour-de- 
Trême. Ils ne sont nombreux sur le Moleson que jusqu’au 
couvent de la Part-Dieu. Plus haut on ne rencontre que des 
blocs secondaires jusqu'à près de 3700 à 4000!. Si ce co- 
losse est dépourvu de blocs primitifs, c’est que la chaîne avan- 
cée qui domine Semsales et toute la route de Châtel-St-De- 
nis à Bulle les a arrêtés sur ses flancs. En avant dans la 
plaine, le Gibloux est couvert de blocs jusqu’à son sommet 
( 3700”). A l'angle du Valais, au dessus de Vevey, la mon- 
tagne de la Playau en montre également jusqu’à son faîte. 
Ces blocs sont les schistes et conglomérats lie-de-vin de 
Foully, qui ne s'éloignent guère des flancs des Alpes et leur 
sont immédiatement appliqués , formant en majorité la limite 
supérieure. Puis viennent avec eux et au-dessous d’eux les 
poudingues de Valorsine, en une seconde bande, qui va s'é- 
largissant de manière à couvrir la plaine entière au milieu de 


se T4: 
laquelle s'élève le Gibloux , toutes les collines qui s'étendent à 
l'est, jusqu'au lac de Neuchâtel et, à l'ouest, une bonne partie 
du Jorat. Les granites et les gneiss n’atteignent le flanc des 
Alpes que dans la région de Prazroman, au pied de la Berra. 
Cette distribution des espèces de roches en bandes parallèles , 
et ce mélange tardif et incomplet sont tout-à-fait analogues à 
ce qui s'observe, entre autres, dans les moraines latérales du 
glacier de l’Aar. 

C'est à l'extrême obligeance de M. de Charpentier que je 
dois d'avoir vu de mes yeux les masses erratiques répan- 
dues en si grande abondance dans les environs des salines 
des Devens, et entre autres ce formidable rocher calcaire , 
descendu de la vallée de l'Avançcon jusque sur la colline 
gypseuse du, Montet, auquel M. de Charpentier a donné le 
nom bien mérité de Bloc-monstre. Muni de ses précieuses 
instructions , je traversai la vallée du Rhône pour me rendre 
à Monthey et reprendre le cours de mes explorations. 

On sait que le fond même de la vallée du Rhône est dé- 
garni de gros blocs. Ils ont été entraînés par les eaux du 
Rhône, ou enterrés dans ses alluvions. Mais à peine on ar- 
rive au pied des pentes qu'on les voit reparaître. 

Les descriptions de MM. De Luc et Charpentier ont rendu 
célébre cette belle zône de blocs monstrueux, d’une seule 
espèce de roche, qui domine les villages de Monthey et de 
Colombey. Au-dessus de cette ceinture de granite , qui est si- 
tuée à 400 pieds au dessus du Rhône, les blocs plutoniques 
de toutes sortes s’élévent à plusieurs milliers de pieds sur 
les flancs de la montagne qui forme l'angle occidental du Val 


—_— Je ee 
d'Illiers. lei, comme dans d'autres localités que j'ai déjà 
citées , la zène des roches plutoniques , granites, chlorites , 
micaschistes, etc., est surmontée d’une seconde zône erra- 
tique assez considérable , qui ne se compose que de blocs 
secondaires descendus sans doute du Val d'Illiers, 

Plus loin , vers St Gingolf, les montagnes présentent des 
pentes si abruptes et si déchirées que le terrain erratique ne 
sy montre que d'une manière très-sporadique. Mais les 
blocs de toute espèce reparaissent en abondance dans la 
gorge de Novelle, dans laquelle ils ne montent cependant pas 
fort haut et cessent lout-à-coup. Au-delà des rochers de 
Meillerie, on connaît cette formidable digue diluvienne dont 
la base s'appuie sur le flanc des rochers de Mémise, au pied 
des dents d'Oche et qui, courant le long de la rive du lac, 
s'abaisse en pentes uniformes jusque vers Thonon où elle se 
confond dans la plaine. Cette digue, que M. Necker de Saus- 
sure a décrite avec détail, ferme, comme un immense bar- 
rage , l'issue des quatre vallées des Dranses, dont les tor- 
rens réunis se creusent un lit profond au travers de cette 
énorme masse diluvienne. Cependant les accumulations de 
galets n’atteignent guère une hauteur absolue de 3000 et 
pe pénètrent que peu ou point dans l’intérieur des vallées. 
Dans la vallée d'Abondance, elles cessent à une demi-lieue au 
dessus de Vacheresse , là où la vallée se resserre ; elles s’ar- 
rêtent à l'entrée même de celles du Biot et de Bellevaux et ne 
remplissent qu'en partie le fond de la vallée ouverte de Lullin. 
Mais il n'en est pas de même des blocs sporadiques. On en 
trouve au dessus de Bernex, sur les flancs des dents d'Oche, 


LR 

jusqu’à une élévation de plus de 4000’, dans la vallée d'Abon- 
dance, jusque tout près de l'Abbaye ; dans la vallée centrale, 
jusqu’au Biot et même à Marzine; dans celle de Bellevaux, 
jusqu’au dessus du village de ce nom. Et ce ne sont point de 
simples fragments; quelques uns de ces blocs, quoique rares, 
appartiennent aux plus gros que fournisse cette lisière. un 
bloc de protogine , entre autres , situé un peu au dessous du 
Biot, mesure de 6 à 7 mètres de long ; un second, au des- 
sous de Bellevaux, est plus massif encore. 

La vallée de Lullin offre une de ces singulières dispositions 
du terrain erratique dont j'ai déjà cité plus d’un exemple. 
Les montagnes du flanc droit qui séparent cette vallée de 
celle de Bellevaux, sont complètement dépourvues de ro- 
ches étrangères , pendant que , sur la rive gauche, la chaîne 
de Raivroz et d'Armone , qui la sépare du bas Chablais , en 
est couverte jusqu’à l'énorme hauteur de plus de 4000. 

La limite du dépôt erratique coupe en biais la vallée, sans 
égard pour le relief du sol, et, remontant du niveau de la 
rivière jusqu'au faîte de la chaîne, passe au pied septentrio- 
nal des Fourches d'Habère, sans que le fond de la vallée, 
qui est cependant largement ouvert de toutes parts, pré- 
sente aucune trace de roches plutoniques Elle suit de là le 
faite des montagnes extérieures qui dominent la plaine , jus- 
qu’au dessous du couvent des Voirons ; mais les blocs ne pé- 
nètrent nulle part dans la vallée de Boëge, pas même par 
les cols dont la hauteur est bien inférieure à celle qu'ils at- 
teignent eux-mêmes. 

Sur le flanc occidental des Voirons , qui fait face à Genève, 


BH ME US 
la limite des roches valaisannes descend rapidement ; elle n’est 
plus qu'à quelques centaines de pieds au dessus de la plaine, 
dans le voisinage de St Cergues. En s’avançant au Sud, vers 
le promontoire que la chaîne envoie dans la plaine entre 
St Cergues et Lucinge, on trouve les premières pentes encore 
couvertes d’une profusion de serpentines mêlées d’euphoti- 
des, de taleschistes , de granits talqueux et surtout de chlo- 
rites de Bagnes dans toutes leurs variétés, en blocs qui at- 
teignent jusqu'à # et 5 mètres. Mais bientôt toute trace de 
roches erratiques disparaît, et ce n’est qu'à une petite demi- 
lieue , que l’on rentre dans une région erratique d'un carac- 
tère tout différent. lei plus de serpentines ni d'euphotides , 
plus de ces chlorites si caractéristiques pour tout le bassin 
occidental du Rhône; mais en fait de galets, des calcaires, 
quelques diorites, des gneiss d’une teinte sale, et d’é- 
normes blocs de protogine du Mont-Blanc, dispersés en 
nombre considérable sur l'extrémité méridionale des Voirons 
et sur les pentes douces qui, du pied de la montagne, s’abais- 
sent vers Lucinge, Bonne et les plaines de la Menoge et de 
l’Arve. Dans ce dernier espace, j'en ai compté plus d’une di- 
zaine qui mesurent entre # et 7 mètres en tous sens. 

Ici donc se rencontrent les deux bassins de l’Arve et du 
Rhône. Ici, comme ailleurs, la limite est tranchée ; point de 
mélange de leurs roches. La chaîne des Voirons est le grand 
pilier angulaire au pied duquel sont venus se réunir , sans se 
confondre les flots de débris descendus par les routes diverses 
des sommets du Mont-Rose, et des cimes du Mont-Blanc. 

A partir de ce point, la ligne de contact suit les collines 


— 16 — 
de Lucinge et de Monthoux , atteint le pied Nord de Saléve, 
s'élève à mi-hauteur sur ses pentes septentrionales, sur les- 
quelles M. And. Deluc a signalé les groupes de blocs de pro- 
togine les plus remarquables, passe au village de Châble et 
longe les pentes orientales du mont de Sion, entre les routes 
d'Annecy et de Frangy, sans en atteindre jamais le sommet. 

Les sommités du mont de Sion sont couvertes dans tout 
cet espace de débris de roches provenant exclusivement de la 
vallée de l'Arve. La colline qui domine à l’est d'un côté le col 
de Frangy et de l’autre le village de Vers est surmontée de 
l'un des plus beaux groupes de blocs de protogine qui existent 
dans ce bassin. Il a été décrit par M. Deluc. On n'y ren- 
contre aucune trace des roches valaisannes, mais en descen- 
dant vers la grande route et avant d'arriver au bas de la pente, 
on voit tout-à-coup reparaître, sans transition, les chlorites de 
Bagnes en blocs de 3 à 5 mêtres, les granites talqueux, les 
serpentines et toutes les roches qui caractérisent le bassin du 
Rhône. Ce sont ces mêmes roches qui composent les blocs 
nombreux et puissans qui couvrent la partie occidentale du 
mont de Sion jusqu’à sa jonction avec le Vouache. Cette der- 
nière chaîne en est couverte jusque près de son sommet, mais 
nulle part ils ne l’ont dépassé. La coupure du fort de l'Ecluse 
est la seule issue par laquelle ils ont pénétré au delà de cette 
limite; mais là même, d'un côté, ils sont tenus à distance de 
la chaîne opposée du Jura par les débris jurassiques descen- 
dus par la vallée de la Valserine, et de l’autre, ils sont re- 
poussés par un terrain erratique appartenant à un nouveau 
bassin, ensorte qu'ils ne s'étendent guère au-delà de Belle- 


ES SR 

garde et des plateaux molassiques de Billiat et d'Eloise. Sur 
le versant méridional de la partie du mont de Sion qui avoi- 
sine le Vouache, les blocs valaisans sont encore nombreux 
et considérables , mais ils vont bientôt se perdre vers l’extré- 
mité méridionale du Vouache et on ne les trouve plus guère 
que roulés , et sur un court espace, dans le lit du torrent que 
longe la route de Frangi. 

Là se termine donc cet immense dépôt erratique du bassin 
du Rhône qui, à partir de la vallée centrale d'où il sort, 
s'étend au S. O. sur un espace égal à celui qu'il occupe 
au N. E, Il finit encore plus brusquement à cette extrémité 
qu'à l’autre ; car ici ses blocs sont encore suspendus à 15 ou 
1800’ au dessus de la plaine ouverte devant eux , comme si 
nn obstacle invisible ou une parole magique avait suspendu 
tout-à-coup leur épanchement au-delà de ces limites. 

Le bassin de l'Arve. Les blocs et les galets descendus par 
la vallée de l’Arve sont essentiellement des protogines du 
Mont-Blanc, des gneiss plus ou moins compactes, d’une cou- 
leur grisâtre, ou jaune sale, plus ou moins obscure, des mi- 
caschistes à mica très-brun , des grés-verts de la Roche-des- 
Fis, quelques diorites assez peu abondans et d’autres roches 
moins caractérisées. Comme le bassin du Rhône renferme 
aussi de nombreux granits tout-à-fait analogues, si ce n’est 
identiques avec ceux du bassin de l’Arve, il pourrait pa- 
raître difficile de distinguer l’une de l’autre ces deux régions 
erratiques ; mais , d'un autre côté, l'absence complète de 
toutes ces roches si variées du bassin du Rhône, si nette- 


ment caractérisées par leur aspect minéralogique comme par 


leur origine, est à elle seule suffisante pour lever tous les 
doutes. 

Le bassin erratique de l’Arve porte tous les caractères d’un 
bassin secondaire ; il débouche à angle droit contre celui du 
Rhône, qui continue sa marche majestueuse sans fléchir un 
instant sa route. Le terrain erratique de l’Arve repoussé par 
cet obstacle se rejette tout entier sur les plateaux molassiques 
qui remplissent l’espace compris entre Salève et les Alpes. Au 
milieu de la vallée principale, s'élève, comnie une île circu- 
laire, la haute pyramide du Môle. Je ne sais par quelle cause 
ses flancs sont presque complètement dépourvus de débris 
erratiques, tandis que ceux de la vallée en supportent des 
groupes nombreux. À peine en trouve-t-on une zône clair- 
semée entre Marigni, St-Joire et St-Jean de Tholomme ; encore 
ne s'élèvent-ils guère qu'à 5 ou 600’ au-dessus de la plaine. 
Cependant j'ai eu la chance de trouver sur la face opposée 
au défilé de Cluses , à la hauteur de plus de 4700, un bloc 
de protogine qui semble destiné à indiquer la limite supé- 
rieure qu'atteint, dans ce point de la vallée, le phénomène 
erratique. Depuis St Joire, les blocs, d’abord peu nombreux, 
deviennent plus fréquens à mesure qu'on descend la vallée. 
Ils pénètrent dans la vallée de la Menoge jusqu’au dessus de 
Boëge , et recouvrent, comme je l'ai dit, jusqu'à une hau- 
teur notable , l'extrémité méridionale de la chaîne des Voi- 
rons, au pied de laquelle ils rencontrent les blocs du Rhône. 
C'est ici seulement que les granites se montrent en abon- 
dance; plus haut, entre Bonne et St-Joire , les erratiques 
des Fis prédominaient. 


LL FAR ous 

Le long des Alpes, sur le flanc gauche de la vallée, les 
débris descendus par la vallée du Grand-Bornand, troublent 
ou effacent en partie la limite supérieure du terrain errati- 
que. Cependant des blocs et des fragmens plutoniques nom- 
breux s'élèvent jusque sur le plateau des Bornes, et plus 
haut encore sur les pentes des montagnes qui dominent la 
vallée de Thorens ; mais ils semblent presque recouverts par 
les débris calcaires tombés du haut de la montagne. La val- 
lée de Thorens elle-même n’en contient plus qu'un petit 
nombre. Les roches de l'Arve quittent les Alpes et traversent 
les plateaux jusqu'à Cruseilles, à l'extrémité occidentale du 
Salève , d'où leur limite va rejoindre les protogines du mont 
de Sion et les blocs du Valais , se mêlant encore sur un petit 
espace avec les roches d'un troisième bassin erratique, dont 
je parlerai tout-à-l'heure. Tout l'intervalle entre les Alpes 
et le Salève est couvert d'une quantité innombrable de ces 
mêmes débris provenant de la vallée de l’Arve. On sait qu'ils 
remontent presque jusqu'au sommet de cette dernière chaîne, 
à plus de 4000’, et que nulle part le Salève n’élève sa crète 
au dessus de la limite supérieure du terrain erratique. Nous 
avons vu comment les blocs passent même cette chaîne et 
se déversent sur ses pentes septentrionales jusqu’au contact 
des roches du Rhône. 

Le phénomène sans contredit le plus remarquable de ce 
bassin est cet immense dépôt de débris calcaires sans mé- 
lange d'aucune autre roche, connu dans le pays sous le nom 
des Rocailles, et dont M. Deluc a donné la description. Ce 
dépôt s'étend au bord de la plaine gauche de l’Arve, sur les 


se 180 2 

premières pentes qui montent au plateau de Rambod. Par- 
tant du débouché de la vallée des Bornands, au devant de 
laquelle il forme une sorte de barrage, il passe par la petite 
ville de La Roche, par Cornier, et se termine au village de 
Regnier et au pont de Bellecombe. C'est une bande allongée, 
d'abord fort étroite et qui atteint à son extrémité une lar- 
geur de 25 minutes. Sur tout cet espace, qui est de près de 
deux lieues, on marche au milieu d’un labyrinthe de blocs 
et de rochers calcaires groupés souvent en véritables colli- 
nes, et dont plusieurs servent de base à des constructions 
considérables. La vieille tour de Bellecombe, la tour du 
Cornier et celle de La Roche sont construites sur ces ro 
chers calcaires qui reposent sur un sol de molasse. Malgré 
ce désordre apparent, il est facile de voir que ces débris ont 
une tendance à se disposer en séries linéaires et parallèles 
qui laissent entre elles de petites vallées marécageuses. Ces 
digues se recourbent en demi-cintre en approchant de l’Arve, 
mais elles ne dépassent que fort peu le lit de la rivière. Près 
du pont de Bellecombe, on observe à l’intérieur un bourrelet 
concentrique à la digue calcaire qui ne porte que de gros 
blocs de granite. L'absence de mélange des roches n’est com- 
plète que dans le centre de ce dépôt ; sur les bords , et surtout 
sur le bord interne , les blocs granitiques se trouvent mêlés 
aux blocs calcaires, quoique toujours sur un espace assez 
restreint. 

Le Bassin de l'Isère. Au-delà du Vouache, derrière le 
mont de Sion , au pied occidental du Salève, au-delà de Cru- 
- seilles et au pont de la Caille, sur le faîte du col d'Avierne 


RE RE 
entre Thorens et Annecy, le terrain erratique change de 
caractère. De nouvelles roches se substituent presque sans 
transition aux précédentes et annoncent une autre région 
erratique. Parmi ces roches , je citerai surtout comme carac- 
téristique un granit blanchâtre , à grain moyen et égal, con- 
tenant dans cette pâte uniforme de gros cristaux étroits et 
allongés, nettement dessinés, ayant jusqu'à deux pouces de 
long sur quelques lignes de large. Je l'appellerai granit por- 
phyroïde ; puis un grès cristallin d'un blanc verdâtre rosé, 
contenant des grains de sable et parfois de petits galets d’un 
beau rouge ; quelques euphotides différentes de celles de Saas, 
et plusieurs variétés de roches amphiboliques qui toutes ont 
leur gîte primitif dans les montagnes du bassin de l'Isère. 
Ces débris erratiques, d’abord peu nombreux le long des 
Alpes, à l'est du lac d'Annecy, deviennent très-abondans 
soit dans les environs de ce lac, soit dans les régions si- 
tuées dans la direction de la vallée qu'il occupe. Cette vallée 
semble avoir été le canal par lequel la vallée de l'Isère a versé 
cette grande abondance de roches qui couvrent toute cette 
partie de la Savoie jusqu'au bord du Jura. Elle est en effet 
dans le prolongement de la vallée transversale où coule l'I- 
sère entre Moutier et Conflans , et communique par la plaine 
de Faverges avec les affluens supérieurs de cette rivière. Ce 
terrain erratique monte sur les flancs du Semenoz jusqu'à 
la hauteur de 4000’, et sporadiquement jusqu'à 4500/. La 
variété des espèces de roches qui le composent augmente en- 
core au-delà de la vallée du Cheran, et il recouvre jusqu'à 


une grande hauteur les flancs de la montagne d’Azy, ainsi 


ei 

que les environs d'Aix. J'ai retrouvé ces mêmes roches à 
l'état erratique dans la vallée du Grand-Désert entre la 
chaîne de Nivolet et le Margéria. Elles sont surtout très- 
abondantes dans la partie moyenne et inférieure de la val- 
lée, aux environs de Thoiry, et je les ai suivies comme à 
la piste par le col de la Thuile, jusque dans la vallée de 
l'Isère, à Montmeillan. Je me suis convaincu que la large 
vallée transversale dont Chambéry occupe la partie la plus 
étroite, et qui se prolonge par le lac du Bourget jusqu’en 
Chautagne, donne passage à son tour à une masse considé- 
rable de débris erratiques qui ont couvert en partie les flancs 
du Mont-du-Chat, et se sont déversés, avec ceux des autres 
vallées, par la large ouverture taillée entre cette dernière 
montagne et la chaîne du Grand-Colombier. C’est par cette 
route, qui est encore aujourd hui celle du Rhône, que les 
plaines de la large vallée jurassique où sont situés Belley 
et Champagne, ont été remplies de ces mêmes débris. Dans 
les environs de Chambéry, des roches moutonnées et sillon- 
nées ; près du village de Culles et au-dessous de Seyssel, des 
roches polies avec des stries dont la direction est concor- 
dante, indiquent suffisamment la direction qu’a suivie le phé- 
nomèêne. 

Le long de la chaîne du Grand-Colombier, entre le lac 
du Bourget et la Perte-du-Rhône , on ne voit nulle part le 
terrain erratique alpin s'élever sur les pentes du Jura. Il ne 
quitte guère les plateaux dans lesquels le Rhône s'est creusé 
ses berges; encore les galets alpins y sont-ils rares. Ici, 
comme près de la Perte-du-Rhône , un obstacle, qui n’existe 


23 — 

plus aujourd'hui, l'a empêché d'atteindre sa véritable hau- 
‘Leur; car sur la rive orientale du Rhône, on le retrouve 
beaucoup plus haut sur la chaîne de la Chautagne. Le long 
du Jura, sur toute cette lisière, on rencontre des accumula- 
tions considérables de galets et de blocs jurassiques mal rou- 
lés, accompagnés d'un limon de même nature, et parfois de 
fort belles roches polies. Ce dépôt se mélange peu à peu de 
quelques galets et de fragmens alpins, dont le nombre aug- 
mente à mesure qu'on s'approche du Rhône. 

Ce bassin latéral de l'Isère, ignoré jusqu'ici, est donc ce- 
lui qui remplit tout l'espace compris entre le Jura et les Al- 
pes, depuis la Perte-du-Rhône jusqu’au-delà de Chambéry, 
et depuis Chambéry jusqu’au pied du Salève et du Vouache. 
Il est l'obstacle qui a posé des limites à l'extension des bas- 
sins de l’Arve et du Rhône. La ligne de contact avec ces 
deux derniers bassins a été indiquée ; elle passe par Avierne, 
Cruseilles, le revers méridional du Mont-de-Sion ; d’où elle 
va rejoindre le mont de Musiège et le Vouache. Il faut re- 
marquer cependant que l’espace compris entre le mont de 
Sion , la chaîne du Vouache avec le mont de Musiège et la 
vallée des Usses, est une région où les blocs des trois bassins 
se mélangent. Dans la moitié orientale de ce petit triangle, 
les galets, les accumulations diluviennes et la majorité des 
blocs appartiennent aux roches de l'Isère ; mais on rencontre 
çà et là de gros blocs anguleux de protogine du Mont-Blanc 
de plusieurs mètres , et j'ai même observé quelques blocs 
métriques de granit talqueux du Valais jusqu’au delà des 
Usses. Dans la moitié occidentale du triangle, entre la route 


de Frangy et le Vouache, ce sont les roches du Rhône qui 
dominent , mais il sy mêle de nombreux blocs de l’Isére et 
de l’Arve. Le lit de la petite rivière qui va se jeter dans les 
Usses à Frangy, est rempli de blocs appartenant aux trois 
bassins. 

Le bassin de l'Isère nous offre l'exemple d’un dépôt cal- 
caire en tout semblable à celui des Rocailles du bassin de 
J'Arve. Il commence un peu au-dessous du débouché de la 
vallée du Cheran, entre les villages de Cusy et de St-Of- 
fenge. Cette traînée de blocs court parallèlement au pied 
des Alpes, dont elle reste cependant éloignée de près d’une 
lieue, et occupe un espace d'une petite demi-lieue de lon- 
gueur sur dix à quinze minutes de largeur. On l'appelle, 
dans la contrée les Rapilles de Cusy. On retrouve ici tous 
les phénomènes de la plaine des Rocailles; même roche, 
même groupement par grandes masses délitées, même ten- 
dance à former des séries linéaires entrecoupées de flaques 
d'eau et de marécages ; l'identité semble complète. Seule 
ment la décomposition des masses semble plus avancée, les 
blocs moins gros. Il faut en chercher la cause dans la na- 
ture plus friable de la roche des Rapilles, qui est un calcaire 
crétacé blanc et jaunâtre, très-fendillé et cassant, tout pa- 
reil à celui qui forme en bonne partie les chaînes voisines 
des Bauges. Cependant la distance considérable qui sépare 
les Rapilles du pied des montagnes, comme leur disposition, 
ne permet pas de les considérer comme un éboulement. 

Je dois, en terminant, signaler un caractère bien tranché 
du bassin erratique de l'Isère; c’est l'absence de blocs an— 


guleux. Tous les blocs, comme les galets, ont une apparence 
fortement roulée. Nulle part non plus on ne rencontre de 
ces blocs monstrueux qui nous étonnent dans les autres 
bassins. Je ne citerai qu'une seule exception un peu nota- 
ble, ce sont les blocs anguleux, pour la plupart granitiques , 
du Mont-du-Chat , au dessus de la Motte et du Bourget. 

De ce bref exposé on peut tirer les résultats suivans : 

Dans toute la moitié sud-ouest de la grande vallée com- 
prise entre les Alpes et le Jura , le terrain erratique présente 
des régions distinctes les unes des autres , dont les roches se 
touchent sur de longs espaces sans se confondre , et qui cor- 
respondent chacune au bassin d'une des grandes vallées al- 
pines qui s'ouvrent dans la plaine. C'est ce que mes recher- 
ches précédentes avaient constaté déjà pour la moitié nord- 
ouest de la Basse Suisse. 

Entre Berne, Neuchâtel et Chambéry, ces régions sont 
au nombre de trois, celles du Rhône, de l'Arve et de l'I- 
sère. Le bassin erratique du Rhône est de beaucoup le plus 
considérable ; il couvre la plaine entière jusqu’au mont de 
Sion. Puis vient, au second rang, celui de l'Isère, et enfin le 
bassin de l'Arve qui, resserré entre les deux premiers, ne 
joue qu'un rôle secondaire. 

Le bassin du Rhône et le bassin de l’Arve se terminent 
brusquement. Leur extrémité, au contact du bassin de l’'I- 
sère, est marquée par une réunion de gros blocs dont le plus 
grand nombre mesurent plusieurs mètres, tandis que dans 
l'intérieur des bassins , les blocs de cette dimension sont gé- 
néralement plus dispersés. 


— 20 — 

Le bassin de l'Isère semble n'être qu'un émissaire latéral 
de la vallée principale. Contrairement à ce qui a lieu dans 
les autres bassins, ses roches arrivent dans la plaine par 
deux issues assez distantes l'une de l'autre , et, s'échappant 
par le chemin du Rhône, elles se répandent hors de l'en- 
ceinte du Jura jusqu'à une distance encore indéterminée. 
Cette anomalie servira peut-être à expliquer les caractères 
particuliers qui le distinguent des autres. 

Telle est la distribution générale du terrain ercatique al- 
pin dans les limites que je m'étais prescrites et que la na- 
ture elle-même semblait imposer à mes recherches. Dans 
une prochaine réunion, j'espère faire part à la Société de 
mes remarques sur la distribution des diverses espèces de 
roches dans l'intérieur de chaque bassin , spécialement dans 
ceux du Rhône et de la Reuss. Après avoir ainsi considéré 
la répartition des roches erratiques dans le plan horizontal , 
il ne me restera plus qu'à résumer devant vous la partie 
hypsométrique de mon travail, à vous indiquer les niveaux 
auxquels s'élèvent ces mêmes roches dans chaque bassin, et 
les lignes de pente qui en résultent, pour compléter l'en 
semble des élémens principaux dont pourront se déduire les 
lois générales de ce grand phénomène. Ces lois une fois con- 
nues et bien établies, et seulement alors, nous pourrons 
passer à la recherche des causes et de l'agent qui ont été en 
jeu dans le transport des masses puissantes de roches étran- 
gères qui couvrent notre sol, et avancer peut-être d'un pas 
la solution de l'un des problèmes les plus intéressans de la 
géologie. 


A. Guyor, secrétaire. 


BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


IDE MEUCRAISTER. 


mme O0 


Séance du 6 décembre 18h53. 


Présidence de M. L. Coulon. 


M. Ladame rend compte de l'ouvrage de M. Saigey, inti- 
tulé : Petite physique du globe. Après avoir fait remarquer 
la clarté, la simplicité et l'originalité de plusieurs des théo- 
ries nouvelles que cet ouvrage renferme, il arrête plus par- 
ticuliérement l'attention de la société sur les trois objets sui- 
vants : 

1° Sur les conditions d'équilibre de l'atmosphère. 

2° Sur la température de l’espace. 

3° Sur une explication des queues des comètes que 
M. Saigey considère comme étant dues à la concentration de 
la lumière solaire, dans une série de foyers, résultant de 
l'action de l'atmosphère des comêtes que l’on peut envisager 
comme une lentille dont la densité va croissant vers le 
centre. 

M. Ladame fait remarquer l’inexactiude de la proposition 
que pose M. Saigey, savoir : que la hauteur totale d'une at- 
mosphère ne dépend nullement de la quantité de gaz qu la con- 


PR D 

situe, lorsque l’on admet que les gaz ont une limite de force 
élastique qui les rend semblables aux liquides. En effet, dans 
cette manière de voir, toute atmosphère est terminée par 
une couche d’une épaisseur considérable qui a la même den- 
sité dans toute sa hauteur, savoir la densité minimum du gaz. 

Calculons maintenant de combien la hauteur de l’atmos- 
phère diminuerait, si la quantité d'air devenait moitié de ce 
qu’elle est, en supposant que sa température soit partout de 
0°, et que sa limite d'élasticité soit égale à une colonne de 
mercure de { mm.: Dans cette hypothèse, l’atmosphère se- 
rait composée d’une couche de densité variable, dont la hau- 
teur serait de 13 et demie lieues (de 4000 mèt.), puis de la 
couche d'égale densité égale 2 lieues, d'où hauteur totale 
15 lieues et demie. 

Si nous réduisons la quantité d’air à moitié, la couche qui 
avait tout à l'heure 2 millim. de force élastique , n'aura plus 
que { millim., et la hauteur totale de l’atmosphère aura di- 
minué de toute la hauteur de l'épaisseur de la couche atmos- 
phérique comprise entre 2 millim. et { millim. de force élas- 
tique , soit d'environ 1 et trois huitième lieues. 

Si la limite d’élasticité était inférieure à celle que nous 
avons choisie, le caleul nous donnerait un nombre différent 
pour la hauteur totale de l'atmosphère ; mais la couche d'é- 
gale densité serait toujours de 2 lieues et la réduction de la 
quantité d'air à moitié donnerait encore { “/: lieue pour la 
diminution de la hauteur totale de l'atmosphère. 

M. Saigey fixe par onze moyens différens la température 


de l’espace à-629 C. M. Ladame observe que ce nombre ne 


— 29 — 
différe pas beaucoup de celui qu'avait indiqué Fourrier, 
mais qu'il diffère, en échange, d’une quantité notable de 
celui de-14#0° que M. Pouillet a cru pouvoir tirer de ses ob- 
servations qui sont rapportées dans sa physique. Sur ce point, 
M. Ladame pense que les calculs de M. Pouillet ne sont pas 
à l'abri de toute objection, car la formule d’où est déduit ce 
nombre contient deux constantes relatives à la puissance 
absorbante que l'atmosphère exerce sur la chaleur qui pro- 
vient de l’espace et sur celle qui émane de la terre. Or, 
M. Pouillet admet que la première est plus faible que la 
seconde, ce qui ne paraît pas probable, d’après les lois de Ja 
chaleur rayonnante. En admettant leur égalité on retombe- 
rait sur un nombre qui ne différerait pas sensiblement de 
—400 C. 
A. GUYoT, secrétaire. 


M. Agassiz annonce qu'il a examiné avec M. Coulon une par- 
tie des fossiles envoyés du Pérou à M. Coulon, par M. Tschudi. 
Une grande partie des espèces sont nouvelles, mais il y en 
a aussi qui sont identiques avec des espèces bien connues des 
terrains d'Europe. M. Agassiz a reconnu parmi les Oursins, 
plusieurs exemplaires très-bien caractérisés de son Toxaster 
complanatus ( Spatangus complanatus ou retusus des auteurs ), 
cette espèce si commune dans le néocomien de Neuchâtel. Il y 
a également retrouvé le Diadema Bourqueti Ag., autre Our- 
sin , de la famille des Cidarides , qui est fréquent dans nos 
marnes: D'après cela , il paraît évident que le terrain néoco- 


mien, que l'on osait à peine, il y a quelques années, signaler 


= = 
comme un dépôt particulier adossé sur les flancs du Jura neu- 
châtelois , recouvre de vastes étendues , non-seulement dans 
l’ancien continent, mais même sur les flancs des Andes. 
M. Agassiz signale en outre, parmi les fossiles de M. Tschudi, 
une espèce encore inédite de Toxaster qui, en Europe, est 
propre au grès-vert, le Toxaster dilatatus. En revanche, il n'a 
reconnu aucune espèce jurassique parmi ces fossiles. L'absence 
de toute cette formation dans l'Amérique du sud paraît done 
être un phénomène général, ainsi que l’a annoncé il y a long- 
temps M. de Buch , tandis que la présence du néocomien 
prouve que ce terrain n'est point lié d'une manière aussi in- 
üme aux terrains jurassiques qu'on le croyait antérieure- 


ment. 
E. Desor, secrétaire. 


Séance du 20 décembre 1843. 


Présidence de M. L. Coulon. 


M. Desor communique une analyse de l'ouvrage de M. d'Or- 
bigny, sur la géologie de l'Amérique du sud , d’après le rap- 
port qu’en a fait M. Elie de Beaumont à l'Académie des 
sciences de Paris. Il insiste particulièrement sur les obser- 
vations de M. d'Orbigny, relativement aux terrains tertiaires 
de cette moitié du nouveau continent. Les terrains ter- 
tiaires ne sont pas de petits dépôts isolés comme en Europe ; 
ils s'étendent sur de vastes espaces et ont une puis- 
sance considérable , ce qui conduit à penser que l'influence 
sous laquelle ces terrains se sont déposés a été générale. 


NPC T DES 
D'après cela, les terrains tertiaires auraient, même sous le 
rapport purement géognostique , comme élément constitutif 
de notre globe , une bien plus grande importance qu'on ne se 


le figure généralement en Europe. 


E. Desor, secrétaire. 


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BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DS MESUCERATEL. 


— 


Section de la Chaux-de-Fonds. 
Séance du 2 décembre 1843. 
Présidence de M. Wurflein. 


M. le Dr Jrlet présente à l'assemblée un monstre humain bi- 
femelle, né cette année à la Chaux-de-Fonds d’une femme 
primipare. Ce monstre , appartenant à l'ordre des diplogé- 
nèses monocéphales, a une tête, un tronc, se bifurquant 
au haut des hanches avec quatre extrémités supérieures et 
inférieures. 

M. C. Nicolet met sous les yeux de la Société plusieurs touffes 
de blé multicaule (froment et seigle), qui lui ont été en- 
voyées par M. Louvel, de Montbéliard, qui a découvert ce 
mode de culture, et qui le livrera prochainement à la pu- 
blicité. Par ce procédé, chaque grain confié à la terre donne 
naissance à une plante multicaule ; chaque touffe renferme 
de 25 à 100 épis au plus; l'examen des touffes permet de 
constater que chacune d’elles est le produit d'un seul grain 
de semence. C’est par des expériences répétées pendant plus 


de sept années consécutives que M. Louvel est arrivé à ces 
4 


FAO TEEN 
résultats qui peuvent avoir une grande influence sur l'agri- 
culture. 

M. C. Nicolet communique l'extrait d'une note sur la gi- 
rafe fossile d'Issoudun, lue le 27 novembre 1842 à l'Aca- 
démie des sciences, par M. Duvernoy. Ce géologue dit en- 
tre autres que les ossemens d’Issoudun ne sont pas la seule 
trace de ce grand mammifère, en Europe, dans les temps 
antédiluviens ; que M. Agassiz lui a montré, lors de son pas- 
sage à Neuchâtel, au mois de septembre dernier, le moule 
en plâtre d’une incisive externe de cet animal, dont l'ori- 
ginal fait partie de la collection paléontologique de M: Ni 
colet, pharmacien, à la Chaux-de-Fonds. M. Nicolet a ef- 
fectivement découvert, en 1838, dans le terrain d'eau douce 
de la Chaux-de-Fonds, une incisive d’un grand mammifére. 
Elle ressemble à l’incisive externe de la girafe par un sillon 
et une échancrure, qui paraissent la diviser en deux, et par 
la présence d’une saillie interne. Le bord interne est forte- 
ment usé; le grand lobe est externe, le petit lobe est in- 
terne; c’est par conséquent le contraire de ce qui s’observe 
dans l'incisive externe de la girafe. En comparant récemment 
cette dent avec les fossiles du Jardin des Plantes de Paris, 
M. Nicolet s’est assuré qu’elle correspond à l'incisive médiane 
supérieur du Lophiodon de Lartet, découvert en 1838, par 
Lartet, à Simorre, dans le département du Gers. 

M. le Dr Pury lit une notice sur une chute de grêle qu'il a 
observée au mois d'août dernier au bord du Doubs. Des grelons 
observés par lui, les uns étaient elliptiques , formés de couches 


concentriques alternativement opaques et transparentes ; les 


— 35 — 

autres étaient sphériques, ou à peu près, composés de noyaux 
opaques soudés par de la glace transparente. M. Pury pense 
qu'on pourrait expliquer la formation des premiers, qu'il 
appelle elliptiques où concentriques , par leur passage à tra- 
vers des nuages alternativement électrisés positivement et 
négativement , et leur forme elliptique, par l'action simulta- 
née de la pesanteur et d'un vent constant, qui aurait fa- 
cilité la condensation autour du noyau. Les autres grelons, 
appelés par M. Pury grelons agglomerés ou sphériques , pré- 
sentaient une forme arrondie et étaient formés par la sou— 
dure des grelons primitifs. Il les attribue à l'effet d’un tour- 
billon, qui arrondissait le grelon, en même temps que 
celui-ci s'accroissait aux dépens des plus petits grelons qu'il 
rencontrait dans sa chute. Ces deux espèces de grelons, dont 
quelques-uns dépassaient trois centimètres de diamètre, tom- 
bérent pendant quelques instans chacune séparément. 

M. le D' Droz remarque que, d'après les observations qu'il 
a recueillies, aucune des deux espèces de grelons com- 
plexes n’est tombée au haut de la Côte, élevée d'environ 
1300 pieds au dessus du niveau du Doubs, mais que les 
seuls grelons qu'on y ait observés , étaient simples. 

M. le D' DuBois communique le fait pathologique sui- 
vant : Une jeune fille qui était convalescente de la fièvre 
typhoïde, eut une parotide s'étendant des deux côtés de la 
mâchoire, à la suite de laquelle se développa un trismus 
très-intense , qui l'empêcha d'ouvrir la bouche pendant une 
huitaine de jours. Lorsqu'elle commença à mieux aller, 
elle rejeta, le 30 novembre, une portion de chair de quatre à 


A 

six lignes de diamètre, que M. DuBois ne savait comment 
expliquer. Le lendemain, ayant pu parvenir à ouvrir la 
bouche de cette jeune fille, il s'aperçut qu'une portion du 
voile du palais du côté droit, avec la luette, avait été dé- 
tachés des parties avoisinantes, par une suppuration gan- 
gréneuse critique, et que le morceau de chair qu'il avait 
observé la veille, coïncidait parfaitement avec le manque 
de substance qu'il avait alors sous les yeux. Deux jours 
après cette communication, cette jeune fille rejeta de nou- 
veau une masse de chair qui paraît s'être séparée de la 
même manière que la première et appartenir à la muqueuse 
des fosses nasales. La voix, qui était très-nasillarde avant 
ces rejections , l’est encore bien davantage actuellement. 


D' Pury, secrétaire. 


Séance du 18 décembre 1845. 
Présidence de M. Wurflein. 


M. le D' Pury présente plusieurs exemplaires de la 
Dentaria heptaphyllos L. trouvés par lui au haut du chemin 
blanc (Chaux-de-Fonds). Il fait remarquer que le nombre 
sept des folioles est bien loin d'être aussi général qu'on le 
pense. Leur nombre varie de 5 à 9; aucun des exem- 
plaires qu'il a réunis, et qu'il n’a nullement choisis, n'a 
toutes ses feuilles pourvues de sept folioles ; les feuilles radi- 
cales dépassent ordinairement ce nombre , et les supérieures 
ne l'atteignent pas; par conséquent l'épithète de pnnata, 
que Lamarck a donnée à cette plante, et que M. Godet lui a 


conservée dans son énumération des plantes du canton de 
Neuchätel, est bien mieux appropriée que celle de heptaphyl- 
los L. 

M. le Dr Pury lit une notice sur le traitement des fractures 
de la clavicule. Après avoir esquissé les causes et le diag- 
nostic de cette fracture, et après avoir passé en revue les 
bandages ou appareils les plus connus qu'on a employés 
pour contenir cette fracture et en particulier ceux de Dessault, 
Boyer et de M. Mayor qu'il considère comme le plus simple 
et le plus universellement employé à l'heure qu’il est ; après 
avoir rappelé les inconvéniens de ces bandages, dont les 
principaux sont les escarres de mauvaise nature qui se for- 
ment quelquefois sous l’aisselle, la compression de la poi- 
trine et l'impossibilité de fixer l'appareil sans qu'il se desserre, 
M. de Pury passe à la description d'un bandage inventé par 
M. le Dr Droz, en 1820, à l’ocasion d'une escarre profonde 
qui s'était formée sous l’aisselle d’un jeune homme dont la 
clavicule était fracturée, et auquel il avait appliqué l’appa- 
reil de Dessault. Cet appareil exécuté par M. Florian Ducom- 
mun, mécanicien, père du blessé, et qu'il a perfectionné 
plus tard lui-même, d’après les conseils de M. Droz, est 
formé d'une tringle ou attelle en bois composée de deux 
pièces superposées, longues de 12 à 13 pouces, pouvant 
s’allonger en glissant l’une sur l’autre, et se fixer l’une 
contre l’autre au moyen de vis. Aux extrémités de cette 
tringle s’adapte par le milieu et à angle droit une pièce de fer 
longue de 6 à 7 pouces, qui supporte à ses deux bouts un 
tube également en fer. De longues broches à tête plate s’im- 


plantent à vis dans ces tubes, et servent à fixer à l'appareil 
des pièces de fer courbées dans le milieu et plates aux ex- 
trémités. Pour fixer l'appareil convenablement , on donne à 
la tringle une longueur en rapport avec la longueur du dos 
du blessé. On place chaque épaule entre les deux tubes cor- 
respondans , garnis extérieurement de peau, pour éviter les 
lésions. La pièce de fer, courbée dans le milieu , est vissée 
alors au moyen de broches sur chaque épaule , qui se trouve 
garantie des lésions par des coussins carrés. Un long cous- 
sin cunéiforme se place également entre l'épaule et l’épine 
dorsale, sur laquelle s'appuie tout l'appareil. En vissant les 
broches dans les cylindres , on ramène les deux épaules en 
haut et en arrière, et on peut ainsi facilement maintenir en 
contact les deux fragmens. 

M. Pury présente un dessin géométrique de l'appareil, exé- 
cuté par M. Favre, et l'appareil lui-même, tel que M. Du- 
commun le lui a fait connaître. Il termine cet exposé en in- 
diqaant les avantages que cet appareil a à priori sur les 
autres ( ne l'ayant jamais lui-même appliqué), et qui sont : 
liberté complète des mouvemens de la poitrine, de ceux 
de l’avant-bras et d’une partie de ceux du bras ; immobi- 
lité des épaules et de l'appareil composé de pièces solides ; 
moins de points en contact avec l’appareil (ici il n’y a que 
la partie antérieure de chaque épaule et l'épine dorsale qui 
soient soumises à une pression ); point de compression à 
l’aisselle , et une extension de l’épaule plus grande que pour 
aucun autre appareil. 


“ 


D' Pury, secrétaire. 


— 39 — 


Séance du 11 janvier 1844. 
Présidence de M. Wurflein. 


M. Pury, D", lit une notice sur les ruminans humains ét 
particulièrement sur la conformation singulière de l'estomac 
d'un individu affecté de ce vice, qu'il a disséqué à Zurich, 
et que M. Arnold a décrit dans le premier cahier de son 
ouvrage intitulé «Bemerkungen über den Bau des Hirns und 
Rückenmarks, etc. Zurich, 1838». 

M. Dubois, D', dit à cet occasion qu'il a vu et disséqué à 
Bicètre un homme dont l'estomac était en partie dans le sac 
. d’une hernie inguinale, et qu'en faisant avaler de l'eau au 
malade, le bruit que cette eau causait en tombant dans l’es- 
tomac assurait le diagnostic de la tumeur du sac. 

M. Droz, D’, ajoute qu'étant chirurgien-major du 5° dé- 
parlement, il avait dû réformer un homme dont l'estomac 
sortait par une hernie de la ligne blanche, au-dessous de 


l’appendice xyphoïde. Dr Pury, secrétaire. 


Séance du 25 janvier 1844. 
Présidence de M. Wurflein. 


M. le Dr Droz lit un mémoire d'un intérêt tout particu— 
lier pour les membres de la section et pour les habitans de 
la Chaux-de-Fonds, sur l’insalubrité des eaux de cette lo- 
calité et sur les moyens d'y remédier. 

Après avoir rappelé que l’hygiène de notre ville a déjà 
éprouvé une grande amélioration, par l'éloignement des abat- 


me or 
toirs, M. Droz dit qu'il en reste de plus grandes à faire , en 
assainissant nos rues étroites, nos maisons hautes et mal aé- 
rées, en imprimant un autre cours aux eaux des égouts, 
mais surtout en nous procurant une eau saine et légère, à 
la place des eaux malsaines, chargées d’immondices, que 
nos puits fournissent, et à la réparation desquels on con- 
sacre chaque année des sommes considérables , tandis qu'il 
serait bien moins coûteux de faire arriver des eaux lim— 
pides et saines. Tous Les observateurs peuvent se convaincre 
de l'insuffisance des puits et des citernes pour fournir de la 
bonne eau; en effet, ces eaux sont stagnantes dans des 
réservoirs mal propres, mal construits, qui laissent fil- 
trer les immondices des canaux voisins ; elles ne provien- 
nent pas de sources, mais sont l'expression des eaux de la 
vallée , qui entraînent avec elles toutes les matières animales 
qu’elles dissolvent ou tiennent en suspension. Dans les ei 
ternes mêmes qui reçoivent l’eau des toits, combien de ma- 
tiéres animales et végétales n’y voit-on pas? Quand on les 
cure, on trouve souvent un dépôt d'immondices de deux ou 
trois pieds d'épaisseur , qui couvre le fond. La santé des per- 
sonnes qui s'abreuvent de pareilles eaux devait nécessaire 
ment en souffrir ; aussi a-t-on vu que les habitans de la rue 
du Soleil et des rues environnantes , qui buvaient l’eau des 
puits les plus infectés , dans lesquels la présence des matières 
animales et végétales en putréfaction était plus que suffisam- 
ment prouvée par la coloration opaline de l'eau, par le dépôt 
grisâtre qui se faisait lorsqu'on laissait l’eau dans un verre 
pendant quelques heures, par la pellicule grise qui se for- 


lue Nr 
mait dans le verre , lorsqu'elle y séjournait quelques jours, 
par une décomposition analogue à la fermentation qui se for- 
mait également au bout de quelques jours , sans compter les 
réactifs chimiques, qui tous décelaient la présence abondante 
de ces matières; on a vu, dit-il, que ces habitans ont été la 
proie d'une épidémie de fièvre typhoïde , qui a sévi au prin- 
temps de l’année dernière , et qui a fait un grand nombre de 
victimes. Cette épidémie, caractérisée par des tremblemens 
dans les membres, des alternatives de chaud et de froid , un 
pouls petit et très-fréquent, une vive douleur dans l’épigastre, 
des petéchies sur le ventre et sur la poitrine, une langue 
sèche et noire, des délires, commençait presque toujours 
par des diarrhées de mauvaise nature , qui devenaient plus 
tard sanguinolentes et ichoreuses, et qui, dans le commence- 
ment, cessaient ou revenaient, suivant que les malades faisaient 
usage d'eau de fontaine ou de l’eau du puits qui était à leur 
proximité , et dont l’eau , analysée par M. C. Nicolet, et plus 
tard par M. Ladame, contenait une énorme proportion de ma- 
tières animales en putréfaction. M. Droz cite une preuve de 
cette assertion dans les maisons Soguel et Béguin , dont les 
habitans, quoique dans le foyer de l'épidémie, n’en furent 
pas alteints, et cela parce qu'ils faisaient usage exclusive- 
ment de l’eau d'un autre puits. Parent-Dachâtelet dans son 
ouvrage sur l'hygiène, dit qu'il fut surpris de la quantité 
dè malades qu'avait toujours la prison St Lazare: il attri- 
bue cette cause à la mauvaise qnalité de l’eau que buvaient 
les détenus , et qui venait d’une citerne, de Belleville et des 
Près St Gervais, où elle se chargeait également d’une quan- 


— 12 

tité de matières animales. Il dit en outre que Schwilgué et 
Pinet avaient déjà reconnu cette cause vingt ans auparavant. 

La cause du mal une fois reconnue, il-s'agit d'y porter 
un remède efficace? Sera-ce en affectant des sommes énor- 
mes à l’écurement et à la bonification des puits? Cela ne fe- 
rait que pallier le mal sans le guérir. Quoique la vallée de 
la Chaux-de-Fonds ne soit pas dominée par de hautes mon- 
tagnes, il y a cependant de bonnes sources dans le voisi- 
nage, dont on en aménerait facilement l’eau au moyen de 
tuyaux en bois ou en fer fondu. Des puits artésiens pour- 
raient aussi être creusés dans le pré qui appartient à la fa- 
miile de M. Droz, près de celui de M. Wurflein, près de 
la Combe-Gruerin ou dans telle autre localité déterminée 
par la géologie. Quant à l'eau de la Ronde, qu'on pourrait | 
faire remonter par une machine quelconque , M. Droz est 
persuadé qu'elle n’est ; comme celle des puits , que l'expres- 
sion de la vallée; d’ailleurs le prix élevé des machines 
serait une raison pour faire rejeter ce moyen, lors même 
que celte eau serait pure. On pourrait peut-être amener les 
eaux depuis le contour de Suze ou depuis Boinod, mais 1l | 
faudrait pour cela une galerie qui viendrait aboutir aux Pe- 
tites Crosettes ; on aurait affaire alors à un projet si dis- 
pendieux qu’on ne pourrait l'exécuter qu’en faisant passer 
par celle galerie une route pour le Val de St-Imier. Il y a 
une troisième alternative, c’est d'amener à la Chaux-de- 
Fonds les sources des Crosettes de la Sagne et des Roulets , 
projet que toutes les personnes sensées adopteront. quand 
on saura que M. d'Osterwald a trouvé depuis la place de la 


OR 0 Ed | 


PM, : Dee 

Chaux-de-Fonds au Cernil-Bourquin , sur une longueur de 
3477 mètres, une pente de 118" 23, qui est plus que sufli- 
sante pour faire arriver les eaux aux endroits les plus élevés 
de la Chaux-de-Fonds, et que, d'un autre côté, les experts 
garantissent une quantité d'eau suffisante dans ces localités 
pour alimenter douze fontaines , soit pour livrer 12,000 pots 
par heure. Il s'agirait seulement pour ramasser ces eaux de 
faire aux sources des Roulets un fossé d’une dizaine de mé- 
tres de profondeur, sur 200 de longueur, et de réunir ces 
eaux aux belles sources des Crosettes. M. Tanninger, fontai- 
uier vaudois, a fait, à la demande de M. Robert-Jeanre- 
naud, des recherches à ce sujet. M. Droz termine son 
mémoire en annonçant que les nivellemens fournis par M. d'Os- 
terwald sont à la disposition de toutes les personnes qui vou- 
dront les consulter. 

M. Dubois et quelques autres personnes indiquent comme 
causes secondaires de l'épidémie qui a sévi à la Chaux-de- 
Fonds , le peu de pente du centre du village, qui fait que 
les immondices restent trop long-temps dans les canaux, 
les boues éternelles des rues, le brouillard d'été qui vient 
de l'étang de la Ronde, la stagnation des eaux de cet étang 
qui est le réceptacle des immondices de la localité , la proxi- 
mité des terrains marécageux qu’on remue souvent, la mau- 
vaise distribution des conduits d’égoûts, les maisons hautes 
et les rues étroites, souvent si malsaines que le soleil n'y 
pénètre jamais, et surtout l’avidité des entrepreneurs qui li- 
vrent les maisons aux locataires quelques semaines après 
qu'on en a bâti les fondemens , sans que les murs et le bois 
aient eu le temps de sécher. Dr Pury, Secrétaire. 


SLT. Mg 


Séance du 8 février 1844. 
Présidence de M. Wurflein. 


M. le Docteur Pury lit une note sur une amputation guérie 
naturellement sur un chevreuil. L’amputation qui avait eu 
lieu un peu au dessous de l’articulation carpo-métacarpienne 
droite, s'était guérie d'elle-même avec une cicatrice triangu- 
laire. Les nerfs atrophiés se terminaient en s’aplatissant et en 
s’élargissant dans le tissu cellulaire nouveau qui entourait le 
moignon ; les vaisseaux également atrophiés ne montraient 
que fort peu d’anastomoses ; les tendons avaient contracté pour 
la plupart des adhérences avec le tissu cellulaire de nouvelle 
formation, d’autres se terminaient brusquement dans leurs 
gaines, sans avoir contracté d’adhérences , et les os se ter- 
minaient par des saillies arrondies, imperméables au scalpel. 

M. C. Nicolet lit une notice sur les oiseaux européens de 
Macao. Sur cent vingt-quatre oiseaux appartenant à soixante- 
dix-huit espèces tous tués et préparés par notre compa- 
triote M. Henri Racine, à Macao, pendant les hostilités 
entre l'Angleterre et le Céleste-Empire, en 1839 et 1840 , 
et dont il a fait don au musée de l'Union , se trouvent vingt- 
cinq espèces identiques avec celles d'Europe. Macao, situé 
par le 22° 1%! 4%’! latitude nord et par le 111° 15° 07 lon- 
gitude orientale, s'étend avec quelques jardins et une petite 
forêt, sur une presqu'ile séparée de l’île de Hiang-Chan, par 
une muraille que les Européens n’osent franchir. L'archipel 
dont l'ile de Hiang-chan fait partie, situé entre le Japon, 
les Philippines, les îles de la Sonde et les Moluques, est fré- 


HAT" Due 
quenté par les oiseaux erratiques de ces grandes îles et par 
quelques-uns de la Nouvelle-Hollande ; les oiseaux séden- 
laires du continent chinois s'y trouvent aussi. Parmi ces oi- 
seaux, il y en a qui sont tellement ressemblans à ceux 
d'Europe, que l'examen le plus minutieux ne permet pas de 
les en distinguer, malgré les différences de climat, de lati- 
tude et de hauteur au-dessus de la mer. 

Quelques naturalistes ont déjà constaté ce fait. Sonnerat 
a trouvé en Chine la pie et plusieurs autres oiseaux d'Eu- 
rope. Mauduyt observe dans son ouvrage que certains oi- 
seaux sédentaires diurnes se trouvent sous les zones tempé- 
rées, à de grandes distances, dans l’ancien et le nouveau 
monde, presque sous le même parallèle, quoiqu'on ne les 
trouve pas dans les régions intermédiaires. Il cite en Chine 
le martin-pêcheur commun, le grimpereau de muraille, la 
pie, le gros bec commun, le friquet , le troglodite commun , 
la pie-griéche grise, le jaseur, les corbeaux , le roitelet 
commun , la petite poule d'eau, le canard à longue queue, 
le chipeau, le souchet, le garrot, la bernache, le cigne, 
plusieurs autres canards, quelques harles, le pélican, etc. 
MM. de Siebold et Bürger, tous deux Hollandais, ont mis 
hors de doute la coexistence d'un grand nombre d'oiseaux 
en Europe, dans le Japon et dans la presqu'ile de Corée. 
Temminck en donne la liste montant à cent neuf espèces et 
cinq variétés. M. Callery, naturaliste français , qui a accueilli 
avec bienveillance M. Racine et lui a rendu de grands ser- 
vices sous le rapport de la taxidermie ; signale aussi la pré- 
sence d'oiseaux européens dans l'archipel de Tchu-San. 


=. MD) E 

Parmi les oiseaux d'Europe collectés par M. Racine, à 
Macao, il en est plusieurs qui n’ont pas encore été cités dans 
ces parages , outre le martin-pêcheur pie ( Alcedo rudis L. ) 
qui se trouve à Macao et accidentellement dans les îles de 
la Grèce, le martin-pécheur ordinaire, très-commun en 
Chine, quiest, d’après Temminck, le martin-pêcheur du 
Bengale. 

Voici la liste des oiseaux envoyés de Chine par M. Racine, 
et qui se retrouvent dans l'Europe centrale : 

Hibou brachyote (Strix brachyotus Lath.) 

Pie {Corvus Pica Linn.) 

Merle bleu {Turdus cyanus Gmelin.) 

Bergeronnette grise (Motacilla alba Lino.) 

Pipit des buissons (Anthus arboreus Bechst.) 

Gros-bec friquet (Fringilla montana Linn.) 

Pic épeiche (Picus major Linn.) 

Colombe tourterelle {Columba turtur Linn.) 

Glaréole à collier (Glareola torquata Meyer). 

Pluvier doré {Charadrius pluvialis Linn.) 

Pluvier à collier interrompu { Charadrèus cantianus Lath.) 

Vanneau huppé {Vanellus cristatus Meyer.) 

Héron garzette (Ardea garzetta Linn.) 

Héron bihoreau à manteau noir (Ardea nychicorax Linn.) 

Héron grand-butor (Ardea stellaris Linn.) 

Héron blongios (Ardea minuta Linn.) 

Bécasseau canut ou maubéche (Tringa cinerea L.) 

Chevalier gambette {Totanus calidris Bechst.) 

Chevalier sylvain {Totanus glareola Temm.) 


DC DT: 
Chevalier aboyeur {Totanus glottis Bechst.) 
Bécassine ordinaire {Scolopax gallinago Linn.) 
Grèbe castagneux {Podiceps minor Lath.) 
Canard siffleur {Anas Penelope Linn.) 
Canard souchet {Anas clypeata Linn.) 
Canard sarcelle d'hyver {Anas crecca Linn.) 


M le docteur Pury lit un mémoire intitulé : Quelques ré- 
fleæions sur la police médicale du canton de Neuchâtel. H vou- 
drait 1° que les pharmaciens fussent tenus de refuser toutes 
les ordonnances dans lesquelles on emploierait d’autres dé-— 
nominations que celles en usage dans la pharmacopée prus- 
sienne, ou dans le code français, qui peut être regardé 
comme semi-officiel. 

29 Que pour éviter des malheurs, les médecins se con- 
formassent à la prescription de la pharmacopée prussienne 
pour les remèdes dangereux , en ajoutant le signe convenu 
(!), toutes les fois qu'ils prescrivent un médicament à une 
dose plus forte que celle que cette même pharmacopée a 
prescrite. 

Dans la seconde partie de son mémoire, M. Pury s’atta- 
que à la masse d'empiriques des deux sexes qu'on voit sur- 
gir de tout côté dans le pays. Il envisage le règlement sani- 
taire comme insuffisant, et pense qu'il devrait comprendre 
des clauses pénales. 

Dr Pury, secrétaire. 


No 


© 


BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DE NEUCERAIATEL. 


Séance du 10 janvier 184%. 
Présidence de M. L. Coulon. 


M. Agassiz annonce à la Société qu'il vient de terminer 
son ouvrage sur les Poissons fossiles. A cette occasion il fait 
remarquer combien les progrès ont été rapides dans cette 
branche de l'histoire naturelle depuis que l'attention des géo- 
logues a été dirigée de ce côté. Il y a dix ans, M. Agassiz con- 
najssait cinq cents espèces de poissons fossiles. Aujourd’hui ce 
nombre est plus que triplé, et celles qu'il a décrites ou énu- 
mérées dans son ouvrage ne s'élèvent pas à moins de douze 
cents. M. Agassiz signale comme un des résultats importans 
de ces recherches le fait que sur ce nombre il n’y a pas une 
espèce qui se trouve à la fois dans deux formations différentes. 
Ce résultat est d'autant plus significatif que les poissons ne 
sont pas, comme les vertébrés supérieurs, limités aux couches 
superficielles de l'écorce du globe, mais qu'ils se trouvent 
Jjusques dans les plus anciennes couches fossiliféres , où ils 
sont associés à des Trilobites , des Mollusques , des Echino- 
dermes et des Polypes. Durant cette longue période de temps, 


” 


2 


OT Here 
le type des poissons a subi des modifications nombreuses , 
dont la plus importante de toutes doit être placée, suivant 
M. Agassiz, à la fin de l’époque jurassique. Tous les poissons 
antérieurs à la craie ont une physionomie particulière et ap- 
partiennent en général à des familles qui n’ont plus de re- 
présentans dans l'époque actuelle. Les poissons des époques 
plus récentes sont bien plus-semblables à ceux qui vivent au- 
jourd’hui dans nos mers et nos rivières ; et un grand nombre 
d’entre eux rentrent dans les mêmes familles et les mêmes 
genres, tout en étant cependant spécifiquement distincts. 
M. Agassiz a cherché à exprimer ces rapports des différentes 
familles entre elles dans un tableau graphique qui accom- 
pagne la dernière livraison de son ouvrage et qu'il met sous 
les yeux de la Société, en y joignant quelques explications. 


E. Desor, secrétaire. 
L 


Séance du 2% janvier 1844. 
Présidence M. L. Coulon. 


M. Agassiz présente quelques réflexions sur l'importance 
des divers embranchemens du règne animal , sous le point 
de vue biologique. Passant en revue les différentes époques 


géologiques, il arrive à ce résultat, qu'il n'y a que les ani- 


maux vertébrés qui présentent un développement gradué. 


dans la série des temps. Il est démontré que l'embranche- 
ment des vertébrés n’est représenté dans les terrains de tran- 
sition que par une seule classe, la plus inférieure de toutes, 
celle des poissons, Les poissons dominent en quelque sorte la 


FN VO 
création dans ces premières époques , que M. Agassiz voudrait 
appeler le Règne des Poissons. Plus tard, quand ces premiers 
habitans de la terre ont disparu, nous voyons apparaître dans 
une autre création ( à l'époque secondaire ), à côté des pois- 
sons, des animaux d’une organisation plus parfaite, de grands 
Sauriens , qui prennent à leur tour la prééminence; c’est le 
Règne des Reptiles. Plus tard encore , les oiseaux et les mam- 
mifères viennent s’adjoindre aux représentans des deux autres 
classes ; c'est alors le Règne des Mammifères, et ce n’est qu'en 
dernier lieu qu’apparaît l’homme. Considérée sous ce point 
de vue, il est évident que la classe des poissons, malgré son 
infériorité relative, est d’un haut intérêt pour l'étude de l'his- 
toire de la terre, puisqu'elle est la souche de tout ce grand 
embranchement des vertébrés dont se sont successivement 
détronquées les autres classes. Dans les animaux sans ver- 
tèbres , rien de semblable n'a lieu. Il y a eu dés la première 
manifestation de la vie à la surface du globe, des représentans 
de leurs trois embranchemens ; et l’on peut même sans trop de 
témérité admettre que la première création comptait déjà des 
animaux des neuf classes d’invertébrés ; car si les plus anciens 
insectes connus ne remontent pas au-delà dela houille, et siles 
seules traces connues d’Acalèphes, se trouvent dansles schistes 
de Solenhofen (Jura supérieur } , on doit sans doute en cher- 
cher la cause dans l’organisation même de ces animaux qui 
n'est nullement propre à la fossilisation. Or, il est constant 
que depuis ces premières époques jusqu’à nos jours , aucun 
perfectionnement réel ne s’est opéré dans aucune de ces neuf 
classes. Les Mollusques et les Polypes de l’époque de transi- 


tion sont aussi parfaits que ceux de nos jours ; et si la série 
des vertébrés indique seule un perfectionnement graduel , 
c’est parce qu'elle était destinée à venir aboutir à l’homme, 
non par filiation directe, puisque toutes les espèces sont dif- 
férentes d'une époque géologique à l’autre, mais par une suc- 
cession génitique dont la liaison se trouve dans le plan pri- 
mitif du Créateur. 
E. Desor, secrétaire. 


M. d'Osterwald lit une note sur les observations baromé- 
triques qu'il a faites conjointement avec M. Ott, dans la Suisse 
orientale. Pour le canton de Glaris, il n’a qu’une vingtaine 
d'observations ; mais dans le canton des Grisons il en a fait 
un beaucoup plus grand nombre. Il était important pour ces 
dernières de fixer la hauteur de Coire, qui devait servir de 
point de départ à ces nivellemens. M. d'Osterwald a réuni 
toutes les observations qui ont été faites pour la déterminer. 

La hauteur de Coire, ramenée au pont de la Plessoure , à 
la sortie de cette ville, a été déterminée par des opérations 
trigonométriques de M. Buchwalder qui donne pour la hau- 
teur, de ce/point.i5tis at de rar 298m89 

Les travaux des ingénieurs suis- 
ses chargés de la triangulation se- 
condaire donnent pour lemême point 595%, 70 moy. 595,80 


Le colonel La Nicca a nivelé la 
route depuis le lac de Vallenstadt 
au pont de la Plessoure qui est plus 
eleve de PMP, Les y ror PTT 29 


Eye. Pile 


Le lac de Vallenstadt est au- 


dessus de celui de Zurich de . , 15", 62 
Celui de Zurich est au-dessus de 
là mer-delws> crosust fe - : 408, 78 moy. 597,69 


L'ingénieur italien qui a cons- 
truit la route du Splügen et qui a 
fait ce nivellement en partant de 
Fltalie, a obtenu pour la hauteur 
CORÉEN DÉS 
Mais son point de départ, comme 
celui de son arrivée, ne sont pas 
suffisamment connus. 


1% observations barométriques 
faites par MM. d'Osterwald et Ott, 
ont donné pour moyenne . . . 999%, 75 


120 observations barométriques de M. Mayer, professeur 
à Coire, et calculées par M. Ott d’après Zurich, donnent à 
2 ou 3 " près le même résultat. 

La moyenne adoptée par M. d'Osterwald, pour servir de 
base aux hauteurs observées dans les diverses vallées des 
Grisons, est de 597 M au-dessus de la mer. Elle pourra re- 
cevoir une légère modification lorsque quelques mesures de 
détail qui sont demandées à Coire seront connues. 

Ces résultats, ajoute M. d'Osterwald, présentent de l'inté- 
rêt à cause de leur coïncidence , qui prouve singuliérement 
en faveur des diverses méthodes de nivellement employées en 
géodésie. Toutes ces observations sont mises à la disposition 


Le, RE 
de la Société pour être publiées comme elle le jugera conve- 
nable, ainsi qu'un certain nombre d’autres qu'il a détermi- 


nées dans le canton de Fribourg. 


A. Guvor, secrétaire. 


Séance du T février 1844. 
Présidence de M. L. Coulon. 


M. Vogt fait voir l'organe électrique d’une raie non-élec- 
trique , la Raïe ronce (Raja Rubus Lin.) Cet organe , décou- 
vert récemment par M. Mayer, n'est qu'à l'état rudimentaire, 
comme dans toutes les raies non-électriques, et se trouve 
placé entre le cartilage pectoral et le cartilage de la tête ; il 
est composé de cylindres creux ou tubes juxta-posés, aux- 
quels viennent aboutir de nombreux filets nerveux. Il diffère 
de l'organe électrique de la torpille, en ce que les tubes ne 
sont pas divisés en cellules cloisonnées. 

M. Vogt présente une analyse succincte de l'ouvrage de 
M. Külliker sur le développement embryonique des Cépha- 
lopodes. Il insiste sur l'importance de pareils travaux pour 
l'étude de la zoologie et de l'anatomie comparée, 

M. Desor communique les observations qu'il a faites sur 
les accumulations de blocs que l’on rencontre au sommet des 
montagnes, dans les Alpes et dans plusieurs autres chaînes 
de montagnes. Ces accumulations de rochers, connus dans 
la Forêt-Noire, sous le nom de Felsenmeere (mers de rochers), 
et dans le Harz, sous celui de Teufelsmühlen (moulins du 
diable), ont de tout temps fort embarrassé les géologues. 


— 


Qt 


— 
Dans les Alpes bernoises, on cite comme un exemple de ce 
phénomène, le Siedelhorn , dont les flancs sont arrondis 
et déblayés, tandis que le sommet est un cône composé uni- 
quement de blocs disloqués. La limite où les roches polies 
cessent, et où commence l’amas détrique , est très-tranchée ; 
elle se trouve, d’après les mesures de M. Agassiz, à 2438 
mètres, et 1l suffit d'avoir vu la localité pour s'assurer que 
ces blocs ne sont pas transportés, mais qu'ils sont en place, 
car ils sont de même nature que la roche qui compose le 
massif de la montagne, sans aucun mélange de blocs étran- 
gers. Or cette conformation particulière des sommets, qui 
est si exceptionnelle dans les chaînes moins élevées, devient 
toujours plus fréquente à mesure que l'on approche des 
hautes cîmes de la chaîne, et il y a une région où l’on 
ne retrouve plus que des pics et des arêtes tranchantes et 
disloquées, témoins la Jungfrau , le Schreckhorn, l'Ewig- 
schneehorn , le Finsteraarhorn , ete., dont les sommets sont 
profondément délités, à partir d'une certaine limite. Cette 
limite, qui à une inclinaison déterminée (de 1° environ) 
n'est autre que la limite supérieure des roches polies. Or si 
du glacier de l’Aar ou de quelque sommité adjacente, on 
poursuit cette limite dans la direction du Siedelhorn , qui 
est situé en face du glacier, on verra qu’elle rencontre ce 
sommet précisément à l'endroit où commence l’accumula- 
tion des blocs disloqués. M. Desor conclut de cette coïnci- 
dence, que si la région inférieure à cette limite est dégar- 
nie de blocs, c’est parce qu’elle a été envahie par l'agent 
erratique qui, tout en façonnant et polissant ses flancs , en a 


do + AS Ka 

enlevé les rochers détachés , tandis que ceux-ci sont restés en 
place sur le sommet qui surgisssait au-dessus des glaces. Il y a 
par conséquent concordance entre la limite supérieure des 
roches polies et la limite inférieure des sommités disloquées, 
ou plutôt ces deux lignes sont identiques. Ce fait une fois 
constaté, permettra aux observateurs de compléter à l'avenir 
l'étude de l’un des phénomènes par l’autre. Non-seulement 
les champs de blocs faciliteront la recherche des roches po- 
lies, mais ils permettront encore de tracer la limite supérieure 
des anciens glaciers, là même où les roches polies auraient été 
oblitérées par les agens atmosphériques, par conséquent de 
connaître leur épaisseur sur un point donné et, jusqu'à un 
certain point , leur étendue horizontale, d'après l’inclinaison 
de cette même ligne. En tous cas, M. Desor ne pense pas 
qu'on puisse envisager comme fondée l’opinion qui attribue 
à des secousses locales ces champs de blocs éboulés, car s’il- 
en était ainsi, on ne concevrait pas pourquoi ces secousses 
auraient affecté de préférence les sommets et auraient épar- 
gné les flancs des montagnes. 

M. Agassiz cite à l'appui de cette explication quelques 
phénomènes qu'il a observés en Ecosse. Là, tous les blocs 
erratiques ainsi que les galets sont arrondis et rayés , ce qui 
prouve qu'ils ont été transportés sous la glace. Toutes les 
montagnes d'Écosse sont également arrondies , mammelon— 
nées et même polies jusqu'à leur sommet, entre autres 
Shehallion. Il n’y a que les deux plus hautes sommités Ben- 
Nevis et Ben-Wivis qui lui aient paru être dentelées et dislo- 
quées à leur sommet. 


ANT He 

M. Agassiz présente une figure du Mylodon, grand Edenté 

fossile du Brésil , décrit par M. Owen. Il entre dans quelques 

détails sur la nature et les caractères de ce singulier animal. 
| E. Desor, secrétaire. 


Séance du 21 février 184%. 


Présidence de M. L. Coulon. 


A l'occasion du mémoire de M. Droz, sur les eaux de la 
Chaux-de-Fonds, dont le procès-verbal de la section de la 
Chaux-de-Fonds contient l'analyse, M. de Castella fait la re- 
marque qu'à Neuchâtel les parties basses de la ville sont 
plus sujettes aux épidémies que la partie élevée. Il a surtout 
constaté une certaine périodicité des épidémies dans la rue 
de la Poste, qui est très-humide. Il insiste sur l'importance 
de bien entretenir les égoûts. 

M. le Président pense qu’il faut attribuer cette influence 
fâcheuse en grande partie aux puits perdus, qui étaient 
autrefois autorisés, mais qui tendent à disparaître de plus 
en plus. 

M: Agassiz annonce à la Société que M. Robert Pourtalès 
vient d'envoyer au Musée un fort beau chamois des Pyré- 
nées, qu'ila tiré lui-même. Cet animal connu sousle nom d'/- 
sar, estde même taille que le chamois des Alpes ; il se distingue 
parun pelage plus clair, d’un jaune fauve, qui est surtout 
marqué sur les épaules, de manière à y former deux épaulettes. 
On remarque en outre sur les côtés du cou deux bandes noires 
qui ont paru caractéristiques à M: Agassiz ; mais comme l'a- 
nimal a été tué à l'époque de la mue, il est assez difficile 


a GR ee 
d'apprécier la valeur des différences relatives à la coloration. 
Les cornes présentent aussi quelques différences dans les 
anneaux de leur base et dans leur courbure qui est moins 
évasée ; le crochet est aussi plus serré. M. Agassiz se 
propose de revenir sur ce sujet, quand il aura comparé 
attentivement les différentes espèces entre elles. En atten- 
dant , il est disposé à envisager l’Isar comme une espèce 
différente. A cette occasion , il fait ressortir l'importance des 
recherches de cette nature pour l'étude de la répartition des 
espèces animales à la surface du globe. Les anciens natura- 
listes ont en général assigné un trop grand rayon aux es- 
pèces ; aussi les recherches des modernes tendent-elles à Je 
restreindre toujours plus. Il n’y a pas jusques aux oiseaux les 
plus favorisés sous le rapport de la locomotion, qui aient 
un rayon bien limité. C’est ainsi qu’on a long-temps cru le 
Lämmergeier identique dans toutes les stations où on le ren- 
contre. Aujourd'hui nous savons que l'espèce du midi de 
l'Afrique est différente de celle d'Europe. En revanche, il pa- 
raît que celui des Alpes est le même que celui de l'Himalaya. 
Cette ubiquité, qui n’a rien d'étonnant pour un animal 
comme le Lämmergeier , se concevrait bien moins pour le 
chamois, qui pour se transplanter des Alpes dans les Pyré- 
nées aurait dû traverser d'immenses plaines , qui ne sont 
nullement appropriées à son caractère. D'après cela, l’on 
doit s'attendre à trouver des caractères différentiels constans 
entre ces deux animaux, d'autant plus que le bouquetin des 
Pyrénées est aussi différent de celui des Alpes. 
E. Desor , secrétaire. 


N° 6. 


BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DE NEUTCHEATER. 


Séance du 6 mars 1844. 


Présidence de M. L. CouLox. 


M. Agassiz annonce son intention de présenter à la So- 
ciété une série de tableaux sur la distribution géographique 
des animaux, afin de montrer que cette distribution est 
beaucoup plus précise et plus intimement liée aux condi- 
tions de sol et de climat qu'on ne l’a cru jusqu’à présent. 
L'ordre des Quadrumanes , qui se présente en premier lieu, 
mérite une attention toute particulière à cause de la position 
élevée que ces animaux occupent dans l’échelle animale, 
et des caractères précis qui distinguent les divisions de cet 
ordre. Une première remarque à faire, c’est que tous les 
Catharins ou Singes à cloisons nasales étroites ayant ££ 
molaires, des ongles plats, jamais crochus, et qui for- 
ment par conséquent une famille très-nettement circons- 
crite, sont propres à l’ancien continent et aux îles qui en dé- 
pendent. La seconde famille, celle des Platyrrhins ou Singes 
à cloisons nasales larges, ayant £'£ molaires et pour la plu- 


part une queue prenante, appartiennent tous au Nouveau- 
| 6 


ce MED ee 

Monde. La troisième famille, celle des Ouistitis, qui a des 
cloisons nasales larges, ?£ molaires à tubereules saillans , et 
des ongles plats seulement aux pouces, est également pro- 
pre au nouveau continent. La quatrième famille enfin , celle 
des Lémuriens, qui ont les doigts pourvus d'ongles plats, 
à l'exception du premier doigt de derrière, est propre aux 
grandes îles du continent africain. 

En Amérique, les quadrumanes en général remontent à 
des latitudes plus élevées dans l'hémisphère austral, où on 
les trouve jusqu’au 27° de latitude, que dans l'hémisphère 
boréal, où ils n’atteignent que le 23°. Dans l'ancien monde, 
les limites boréales des Quadrumanes sont par le 35° et 36° 
de latitude N., et les limites australes par le 37° de lati- 
tude S. Il est digne de remarque que cette répartition coïn- 
cide avec celle des Palmiers , qui, comme l’on sait, fournis- 
sent la nourriture essentielle de ces animaux. 

Dans l’ancien continent, la délimitation s'étend d’une ma- 
nière précise non-seulement aux familles, mais même aux 
subdivisions de famille. C’est ainsi que parmi les Catharins 
sans queue , les Orangs sont limités aux îles de la Sonde; 
les Chimpansés sont propres au continent africain , et ici 1] 
n'est pas sans intérêt de constater la singulière coïncidence 
qui existe entre la couleur du pelage des singes et le teint 
des races humaines de ces différentes régions. L'orang rap- 
pelle, par son pelage rouge ou fauve, les Malais; et le 
Chimpansé, par son pelage noir, le teint noir des Nègres. 
Les Gibbons se trouvent dans les îles de la Sonde et dans 
l'Asie méridionale. Les Guenons, les Macaques , les Magots, 


es US 
les Semnopithèques, ont également chacun leur rayon ; mais 
il est plus vague que ceux des genres précédens. 

Les Ouistitis se montrent à-peu-près dans les mêmes ré- 
gions que les Platyrrhins. 

Les Lémuriens ont peut-être l'habitat le plus rigoureuse- 
ment circonscrit ; car ils sont non-seulement propres à cer- 
taines îles du continent africain, mais ces mêmes îles ne 
renferment aucune autre espèce de Quadrumanes. C'est 
ainsi que nous trouvons à Madagascar les Makis et les 
Indris, et à Ceylan le genre Lori, de même que les Tarsiers 
sont propres à Amboine , les Galago-au Sénégal et les Galéo- 
pithèques aux îles de l'Océanie. Ces lois de répartition géo- 
graphique ne s'observent pas seulement dans la création 
actuelle ; elles ont régi également, à ce qu'il paraît, les 
époques antérieures. On a trouvé un singe fossile voisin 
des Gibbons, à Sansan, près d'Auch; une espèce voisine des 
Semnopithèques , dans les collines sub-himalaïennes ; une 
espèce de Catharin en Grèce et une autre dans le crag d’An- 
gleterre. Et si le nombre des Singes fossiles est encore très- 
restreint, nous voyons du moins que tous ceux qu'on a 
trouvés dans l’ancien continent appartiennent à la même 
- grande division qui est encore aujourd’hui propre à ce con- 
tinent. Au Brésil, au contraire, M. Lund a trouvé un Singe 
fossile du groupe des Platyrrhins. 

Il paraît étrange au premier abord que des Singes aient 
vécu autrefois dans nos régions , mais nous savons qu'à cette 
époque le climat de l'Europe était plus chaud , et il n’est pas 
sans intérêt de faire remarquer que partout où l'on a trouvé 


RQ DU 

jusqu’à présent des Singes fossiles, on a reconnu aussi la 
présence de palmiers pétrifiés, d'où 1l faut conclure que les 
Singes de cette époque avaient probablement les mêmes 
mœurs que ceux de nos jours, et s’il en est ainsi, nous de- 
vons croire que les différens types de cette famille sont au- 
tochthones dans les régions qu'ils habitent, et qu'ils l'ont 
également été jadis dans les localités où on en a trouvé des 
débris fossiles. 

M. Ladame fait voir à la société la machine de Bonijol, 
dont le cabinet de physique a fait dernièrement l'acquisition. 
Cette machine, construite d’après les directions de M. de la 
Rive, est destinée à mettre en évidence, par trois moyens 
différens, les courans électriques d'induction de Faraday. 
M. Ladame , après avoir rappelé les découvertes importantes 
faites ces dernières années dans le domaine de l'électricité, 
et spécialement celles que la machine sert à démontrer d’une 
manière si ingénieuse , passe aux expériences , et en explique 
le mécanisme et l'usage. 

E. DEsor, secrétaire. 


Séance du 20 mars 1844. 


Présidence de M. L. COULON. 


M. Vogt entretient la Société des recherches de MM. Henie 
et Külliker, sur les corps de Pacini. Il rappelle à cette occa- 
sion , que déjà Pacini avait découvert sur les nerfs de la main 
de très-petits boutons formés de membranes emboitées et 
séparées par un liquide gélatineux. MM. Henle et Külliker 


— 63 — 

ont poursuivi les recherches du savant italien et ont reconnu 
qu'il existe de pareils petits boutons sur les nerfs de la paume 
de la main, de la plante des pieds et de l’épigastre chez 
l'homme et chez tous les mammifères. Le rapporteur décrit 
la structure intime de ces boutons, appelés par MM. Henle 
et Külliker, corps de Pacini, dont l’organisation rappelle 
celle des organes électriques de la torpille. Il insiste sur la 
singulière coïncidence de ces petits corps avec le siège du 
magnétisme animal, qui, comme l'on sait, se trouve surtout 
dans les mains et dans l’épigastre. 

M. Vogt rend ensuite compte des travaux de M. de Sie- 
bold, sur le sens de l’ouie chez les insectes. Après avoir 
rappelé les tentatives infructueuses faites par les anatomistes 
pour trouver le siége de l’ouie dans la tête des insectes , il 
annonce que M. de Siebold vient enfin de découvrir un or- 
gane tout-à-fait analogue à une oreille d'embryon ; dans la 
jambe des sauterelles et un organe semblable dans la poitrine 
du grillet. M. Vogt ne doute pas que ces organes dont il fait 
voir les dessins, ne soient réellement de véritables oreilles. 

M. Agassiz continue son exposé sur la distribution géo- 
graphique des animaux. 

La famille des Chiroptères offre sous ce rapport quel- 
ques faits intéressans. Le premier groupe qui se présente 
est celui des Roussettes , qui par leurs caractères bizarres 
forment en quelque sorte le passage aux Lémuriens , et qui 
se distinguent entre toutes les autres Chauves-Souris par ce 
caractère important d'être frugivores. Or, les Roussettes ont 


un rayon géographique très-neltement circonserit. Le genre 


Pteropus se trouve aux îles de l'Océan Pacifique et sur les 
côtes des continens avoisinans. On les retrouve dans le sud 
de l'Asie, à Madagascar et sur quelques points de la côte 
orientale d'Afrique ; mais il manque à l'Amérique. 

Les Phyllostomes, les Sténodermes , les Glossophages, sont 
exclusivement propres à l'Amérique du sud. Leurs mœurs 
sont tout-à-fait l'opposé de celles des Roussettes ; ce sont des 
animaux sanguinaires , qui non-seulement se nourrissent de 
petits animaux , mais sucent aussi le sang des grands mam- 
mifères. 

Les Fer-à-cheval , les Mégadermes et les Rhinolophes sont de 
nouveau propres à l’ancien continent et particulièrement à 
l'Afrique et à l'Asie méridionale , où ils représentent les Phyl- 
lostomes de l'Amérique, avec lesquels ils ont une assez grande 
ressemblance extérieure. 

Les Chauves-Souris proprement dites ( Vespertilio ) sont 
ubiquistes dans la zône tempérée et dans la zône tropicale , 
et cette ubiquité s'explique en quelque sorte par leur genre 
de vie qui les astreint à poursuivre une proie excessivement 
fugace ; car ce sont des animaux essentiellement insectivores. 
Cependant on remarque que les Nyctilions sont plus particu- 
lièrement propres à l'Amérique, et les Vespertilions à l'ancien 
monde. Sous les tropiques, ces animaux voltigent toute l’an- 
née, tandis que dans nos régions ils s’engourdissent pendant 
l'hiver. 

Les débris fossiles de Chiroptères sont encore fort rares ; 
cependant on en a trouvé des restes dans les platrières de 
Montmartre, dans les schistes d'OEningen , dans les brêches 


ent es D  S  . 


0 

osseuses de Nice et dans les cavernes de Liège et de Tor- 
quai. Or, tous ces débris appartiennent sans exception à la 
tribu des vrais Vespertilions, qui, comme nous l'avons vu ci- 
dessus , sont plus particulièrement propres à l’ancien conti- 
nent. Nous retrouvons par conséquent ici la même loi que 
M. Agassiz a signalée à l'égard des quadrumanes fossiles , à 
savoir qu'aux époques où ces animaux vivaient, la réparti 
tion des différens types était déjà soumise à des lois précises 
et à une circonscription déterminée. ] 

Il est fait lecture d’un mémoire de M. C. Nicolet , sur les 
oiseaux européens qu'on trouve à Macao (Voir le procès-ver-— 
bal de la section de la Chaux-de-Fonds, du 8 février 1844 ). 
A l’occasion de cette notice qui soulève une grave question 
d'histoire naturelle, M, Agassiz fait remarquer que la plupart 
des espèces signalées par M. Nicolet, comme étant ubiquistes 
en Chine et en Europe, ne sont pas des oiseaux sédentaires. Il 
pense dès-lors qu'avant de tirer des conclusions générales 
de ces faits, il faudrait rechercher quel est le rayon de ces 
espèces et jusqu'où elles s'étendent dans les différentes direc- 
tions. 

M. le Président rappelle qu'en général les oiseaux aquati- 
ques émigrent beaucoup plus que les oiseaux terrestres. Le 
Pluvier va jusqu’au Brésil et l'Huitrier entreprend des voyages 
non moins considérables. Enfin toutes les années on observe 
sur les côtes d'Angleterre et d'Irlande des oiseaux de l'Amé- 
rique du Nord qu’on n'avait jamais vus auparavant et qui 
selon toute apparence suivent les navires qui sillonnent ces 
parages. 


“US 

A l’occasion de la notice de M. Nicolet, M. Desor fait ob- 
server que M. Nicolet s'applique avec un soin tout particulier 
à recueillir non-seulement les oiseaux, mais encore tous les 
animaux propres au Jura. M. Agassiz fait ressortir l’impor- 
tance de pareilles collections , qui outre leur valeur intrin- 
sèque ont encore l'avantage d'exprimer d'une manière fidèle 
les faunes locales. Il pense que la collection de la Chaux-de- 
Fonds est destinée à devenir l'expression complète de la faune 


jurassienne. 
E. Desor, secrétaire. 


N°: 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 
DS NEUCEATER. 


Séance du 5 avril 1844. 


Présidence de M. L. CouLox. 


M. le docteur Bovet lit un rapport sur un mémoire du 
docteur Pury, intitulé : Considérations sur la police médicale 
du canton de Neuchâtel. Ce mémoire a été inspiré à M. Pury 
par la relation d'un cas d'empoisonnement produit par le 
€cyanure de potassium, administré au lieu du cyanure de 
potassium et de fer. Ce dernier médicament était souvent 
prescrit par les médecins sous la dénomination abréviative 
de cyanure de potassium. Depuis l'introduction dans la ma- 
üère médicale du véritable cyanure de potassium, qui est 
un médicament dangereux, que l'on n'emploie guère que 
par fractions de grains , il devenait très-important de spéci- 
_ fier dans les ordonnances celui de ces deux médicamens que 
l'on entendait employer. C’est faute de cette précaution qu’eut 
lieu l'accident rapporté dans le Journal de médecine légale 
de Henke, et cité par M. Pury. L'auteur signale à cette oc- 
casion les inconvéniens de la pratique illégale de la médecine 
dans notre pays; il voudrait que notre règlement sanitaire 


EN ge 
contint une sanction pénale contre les mièges qui abusent de 
la crédulité publique. 

M. le docteur Junod donne quelques détails sur divers ef- 
fets du nouveau mode de traitement par les grandes ven-— 
touses, dont il est l'inventeur. Les appareils du D' Junod 
donnent la faculté de déplacer dans une partie du corps quel- 
conque #, 6 ou même 8 livres de sang, sans douleur ni 
danger; ils deviennent ainsi un puissant moyen thérapeu- 
tique dans un grand nombre de maladies. L’utilité de leur 
application dans les congestions locales de toute espèce et 
les inflammations, est démontrée par l'expérience. Elles 
agissent encore efficacément dans toutes les maladies ner- 
veuses dans lesquelles on peut soupçonner qu'un trouble 
dans la circulation du sang et des humeurs prend quelque 
part. L'hypochondre en est souvent soulagé. M. Junod a 
obtenu la guérison complète d’un tic douloureux opiniâtre. 

L'utilité des grandes ventouses en chirurgie n'est pas 
moins évidente. Elles rendent possibles ou faciles de grandes 
opérations qu'on n'oserait tenter soit à cause de l'état du 
malade, soit par crainte d’une perte de sang trop considé- 
rable, si l'on n'avait en sa puissance un moyen dérivauf à 
la fois aussi puissant et aussi instantané. Elles paralysent les 
accidens qui pourraient survenir à leur suite en atténuant 
* J'inflammation. C’est par la même raison qu’on l’emploie 
très-utilement dans des opérations délicates, comme celles 
des yeux, etc. 

M. Junod ajoute quelques détails sur les sensations que 
l’on éprouve sous l’action de ses appareils. Le pouls diminue 


ras 


=: D 
graduellement de force et de volume, tout en devenant plus 
accéléré ; l'appétit augmente, mais non la soif; souvent la 
défaillance survient, surtout pendant les premières opéra- 
tions que l’on a faites au malade. Il ajoute, comme un phé- 
nomène remarquable, que si la température dans l'appareil 
n'est pas un peu élevée, l'effet est nul, quoique l’on agisse 
au même degré, tandis que l’on obtient de grands effets 
avec une température plus haute. M. Junod en conclut que 
l’action de la grande ventouse n’est pas purement mécanique. 

M. Vogt explique ce phénomène par la grande contracti- 
bilité des vaisseaux capillaires qui peuvent être facilement 
réduits aux deux tiers de leur volume ordinaire par une 
température plus froide. 

M. Agassiz rend compte de ses recherches sur le genre de 
Mollusques auquel Lamarck, en l’établissant, a donné le 
nom de Pyrula, à cause de leur forme qui rappelle celle 
d'une poire. Peu à peu le nombre des espèces s’est considé- 
rablement accru, et le besoin de nouvelles coupes ne tarda 
pas à se faire sentir. Déjà Sowerby proposa quelques modi- 
fications. Plus tard Pusch sépara sous le nom de Melongena 
les espèces analogues au Pyrula melongena. Mais c'est 
Swainson qui a opéré les modifications les plus importantes 
dans ce genre. Cet auteur divise les Pyrules de Lamarck en 
sept genres qui représentent autant de types distincts que 
M. Agassiz croit devoir adopter et qu'il caractérise de la ma- 
nière suivante : 

1) Ficula Swains. (Pyrula Lam). Coquille pyriforme uni- 
formément bombée. Spire très-courte, aplatie. Canal respi- 
raloire large et alongé. Type: Pyrula fieus Lam. 


Le ON A 

2) Rapella Swains. Coquille trés-renflée, à ouverture fort 
ample. Spire très-courte. Columelle ombiliquée. Type: Py- 
rula RapaLa m. | 

3) Myristica Swains. (Melongena Pusch). Coquille très- 
renflée, tuberculée, à canal respiratoire court. Columelle 
aplatie. Type : Pyrula melongena Lam. 

%) Pyrula Lam. Swains. Spire courte. Tours de spire an- 
guleux et tuberculeux du côté de la spire. Dernier tour s’at- 
ténuant en un long canal respiratoire plus ou moins coudé. 
Type : Pyrula vespertilio, sprrata, etc. 

5) Pyrella Swains. Coquille à spire plate. Tours extérieurs 
de la spire anguleux. Un long canal respiratoire plus ou 
moins coudé : Type: Murex Sprillus L. 

6) Leiostoma Swains. Coquille lisse et fusiforme. Spire sail- 
lante. Bord de l’ouverture entier. Type: Fusus bulbiformis Lam. 

7) Strepsidura Swains. Mêmes caractères. Coquille réticulée. 
Canal respiratoire fortement coudé. Type: Fusus ficulneus Sow. 

Parmi ces coquilles se trouvent plusieurs espèces fossiles 
qu’on a confondues à tort avec des vivantes. C’est ainsi que 
le Myristica cornuta Ag. de Bordeaux n’est nullement iden-— 
tique avec le Myr. melongena, comme on l'a prétendu. 
M. Agassiz insiste à cette occasion sur l'importance de re- 
- cherches minutieuses dans l'examen de cette question. L'ou- 
vrage récent de M. Philippi sur les Mollusques de Sicile, qui 
admet de nombreuses identités , lui paraît destiné à donner 
lieu à des controverses qui ne manqueront pas de jeter un 
nouveau jour sur cet important problème. 


E. Desor, secrétaire. 


in A 


Séance du 17 avril 1844. 


Présidence de M. L. CouLow. 


M. Godet lit une notice sur la collection des mousses du 
canton de Neuchâtel, dont M. Leo Lesquereux vient de faire 
don au Musée. Cette collection, fruit de courses nombreuses 
et souvent répétées pendant plusieurs années, dans toutes 
les parties du canton, a outre son intérêt scientifique un intérêt 
particulier , en ce qu’elle forme une page importante de l’his- 
toire de nos tourbières, au moins pour ce qui concerne les 
mousses qui entrent dans la composition de la tourbe juras- 
sique. Elle se compose d'environ 271 espèces, et d’un grand 
nombre de variétés, nombre très-grand comparativement, 
puisque la Flore française de Duby n'en énumère que 
300 espèces environ ‘pour tout le domaine de la Flore de 
France. Notre canton contient donc à-peu-près les neuf- 
dixièmes des mousses qui croissent en France. 

Le genre Hypnum, le plus nombreux en espèces, qui est 
représenté en France par 71 espèces, l’est chez nous par 60. 
Le genre Orthotrichum compte en France 16 à 17 espèces, 
chez nous 22 ; le genre Dicranum compte en France 21 es- 
pèces, et 16 dans notre canton, etc. — Un des genres les 
plus intéressants est celui des Sphagnum , qui contribue le 
plus à la formation de la tourbe du Jura et en fait le fond. 
Toutes les espèces connues en Europe ont été constatées par 
M. Lesquereux dans nos tourbières, avec les nombreuses 
modifications inhérentes aux plantes aquatiques dont le tissu 
plus mou et plus aqueux est plus susceptible de subir les 


anse EX ce 

influences locales. Ces variétés, élevées par beaucoup d’au- 
teurs au rang d'espèces, ont été analysées avec soin par 
M. Lesquereux et rapprochées de leur type avec beaucoup 
de sagacité. M. Lesquereux a ainsi souvent constaté dans la 
même espèce les formes les plus diverses et en apparence 
les plus distinctes, depuis les plus lâches et les plus alongées 
jusqu'aux plus compactes, et il a pu suivre pour ainsi dire 
pas à pas toutes ces modifications par une succession infinie 
de formes intermédiaires. Parmi les végétaux phanérogames, 
ajoute le rapporteur, on remarque quelque chose de sem-— 
blable dans le genre aquatique des Potamogeton qui peuple 
nos lacs, nos rivières et nos ruisseaux (!) — Le genre si 
élégant des Encalypta, remarquable par la coëffe en forme 
d'éteignoir régulier qui couvre les capsules, est représenté 
chez nous par 8 espèces, tandis qu’il n’en compte que # en 
France. 

Ne possédant aucune énumération des espèces de mousses 
“qui croissent en Suisse, M. Godet n’a pu établir leur propor- 
tion avec les nôtres. Il se borne à faire ressortir quelques-uns 
des genres rares, qui ne se trouvent point partout, et quelques 
espèces que nous pouvons compter parmi les citoyennes de 
notre canton. Ainsi nous possédons le Buxbawmia indusiata , 
trouvé à la Poëta-Raisse et au fond du Creux-du-Vent, par 
M. Lesquereux, le Diphyscium foliosum, le Mnium orthorhyn- 


(*) M. Lesquereux a constaté que tous les Sphagnum ont les capsules axil- 
laires ; quoique se développant quelquefois en apparence au sommet des tiges : 
ce phénomène ne peut donc auloriser établissement d'espèces, comme quel- 
ques Bryologues Pont fait, faute d’avoir observé suffisamment ce genre en 
grand et dans la nature. 


Luc RE 

chum, nouvelle espèce établie par MM. Bruch et Schimper, le 
Timmia megapolitana , le Paludella squarrosa, les Bartramia 
marchica et ityphylla , Neckera cladorhizans, Hypnum jula- 
ceum, incurvatum , Grimmia spirahis Br. et Sch., Dryptodon 
funalis et Grimmia tichophylla, sur les blocs granitiques du 
Val-de-Travers, blocs remarquables comme phénomène g60- 
logique , mais qui le sont aussi en ce que , même au milieu 
de nos roches calcaires, ils conservent une végétation parti- 
culière. Enfin on peut encore citer les Meesia fugax et cir- 
rhata, Trichostomum glaucescens, Orthotrichum pallens, Lyellir, 
Hutshinsiæ, etc. 

Un fait curieux, sous le point de vue physiologique, et qui 
n'a pas encore été expliqué jusqu'ici, c'est que plusieurs 
espèces de mousses qui fructifient abondamment dans le 
nord, restent chez nous constamment sans fructification -: 
tels sont les Racomitrum maicroscopum , Dicranum glaucum 
et surtout le Paludella squarrosa; tandis que d’autres, qui 
chez nous fructifient abondamment en certaines localités, 
comme la Meesia longiseta, sont stériles dans beaucoup de 
contrées. 

Quelques espèces de mousses sont curieuses par leur per- 
sévérance à croître dans certaines localités ou sur certains 
arbres , abstraction faite d’autres qui semblent devoir leur 
convenir tout aussi bien. Ainsi le Dicranum cerviculatum 
s'est emparé presque exclusivement, avec le Viola palustris et 
le Pinguicula vulgaris, des coupes perpendieulaires provenant 
de l'exploitation des tourbières, le Funaria hygrometrica se 
plaît particulièrement sur les fours à charbon abandonnés ; 


ER ee 

le Splanchnum ampullaceum, moins délicat encore, choisit son 
siége de prédilection sur les excrémens des vaches, laissés 
sur nos tourbières. Parmi les Orthotrichum , les uns aiment 
les écorces des arbres, les autres affectionnent le peuplier, 


d’autres le saule, ou le hêtre, ou l’érable, d’autres encore se 


plaisent indifféremment sur tous les arbres de nos forêts. Nos 


granits roulés ont leurs hôtes particuliers, dont j'ai déjà cité 
quelques-uns. Enfin le sable, la terre humide, les troncs 
pourris, les rochers secs ou humides ombragés ou exposés 
au soleil ont chacun dans cette intéressante famille, des amis 
qui leur sont exclusivement attachés. 

Si le Jura ne contient aucune espèce de plantes phanéro- 
games qui lui appartienne exclusivement, il ne semble pas 
plus favorisé par rapport aux mousses, et aucune espèce 
strictement nouvelle n’a été déterminée sur des exemplaires 
de notre Jura. Ce fait n’a rien d'étonnant : il serait au con- 
traire curieux qu'il en fût autrement, car en général les 
végétaux d’un ordre inférieur occupent un domaine bien 
moins restreint que les végétaux supérieurs, et ce domaine 
s'étend d'autant plus que nous descendons plus bas dans 
l'échelle de l’organisation végétale: ainsi, tandis que les 
champignons, par exemple, comptent plusieurs espèces com- 
munes aux contrées équinoxiales d'Amérique et aux Alpes 
de la Suisse et de l’Europe, il ne se trouve pas un végétal 
d’un ordre supérieur commun aux deux continens sous des 
latitudes si différentes, à moins qu'ils n'aient été transportés et 
acclimatés par des agents extérieurs et qu'ils n'aient acquis 
de cette manière leur droit de bourgeoisie. Les mousses, sous 


haie 


= (N; : ie 

ce rapport, semblent tenir un juste-milieu, sinon pour les 
espèces, du moins pour les genres, dont plus de la moitié 
se retrouvent les mêmes sur presque toute la surface du 
globe. | 

Si M. Lesquereux n’a pas précisément découvert de nou- 
velles espèces de mousses propres à notre Jura, il en a dé- 
terminé plusieurs espèces d’une manière plus précise qu'on 
ne l’avait fait jusqu’à présent. Ainsi le Sphagnum cuspidatum 
est caractérisé par des feuilles ondulées, plus allongées et plus 
étroites que le Sphagn. capillifolium. Quoique presque toujours 
flottante, cette mousse n'offre pas de formes intermédiaires. Le 
Dicranum Schreberi diffère du D. varium par des feuilles à base 
amplexicaule, très-dilatées, concaves, terminées subitement 
en pointe subulée entière, et par la capsule ovale. Le Meesia 
tristicha, souvent confondu jusqu’à présent avec le M. longi- 
seta, en diffère notamment par une inflorescence dioïque, par 
ses feuilles exactement tristiques ou sur trois rangs et par sa 
capsule plus grosse. — De nombreuses variétés de l'Hypnum 
fluitans, dont les auteurs avaient fait des espèces, ont été 
rapportées heureusement à leur type, par l'observation de 
plusieurs formes intermédiaires qui en démontrent la pa- 
renté. Ainsi l'Hypnum aduncum des auteurs ne peut plus 
être regardé que comme une forme de cette espèce, l’une des 
plus variables qu'on connaisse. Nous avons aussi chez nous le 
véritable Æ. aduncum de Linné. L'Hypnum scorpioides, espèce 
très-rare, a été trouvée par M. Lesquereux aux environs du 
lac d’Etalières, et tous les échantillons de la mousse qui porte 
ce nom dans l’herbier de M. Chaillet, appartiennent à une 

7 


ZE: 

mousse beaucoup pluscommune, l'Hypn. lycoperdioides Hedw. 
L'Hypn. fallax Brid. est la forme flottante de l’'H. palustre, 
dont les feuilles s’allongent et deviennent capillaires, à mesure 
que la tige est de plus en plus immergée, ce qui arrive à un 
grand nombre de mousses aquatiques, dont on a fait des 
espèces , faute de les avoir observées dans leurs transforma- 
tions graduelles et sur la nature vivante. Une observation 
intéressante à faire à cette occasion, c’est que les formes 
flottantes ne fructifient jamais, mais seulement celles qui 
croissent sur les pierres humides. — L'Hypn. glareosum, es- 
pèce nouvelle, que MM. Bruch et Schimper ont établie sur des 
exemplaires de l’herbier de M. Lesquereux, n’est, suivant ce 
dernier, qu’une forme de l’A. lutescens, à laquelle elle vient se 
joindre par des transitions inappréciables. Ce sont des variétés 
locales, si l’on veut, mais qui se confondent dans les mêmes 
localités, et qu’il est impossible de distinguer, quand elles 
sont fraîches, les capsules se courbant plus ou moins, suivant 
la constitution plus ou moins sèche de l'atmosphère, consti- 
tution hygrométrique dont les mousses subissent plus parti- 
culièrement l'influence. Le Barbula aciphylla de MM. Bruch et 
Schimper n’est admise par M. Lesquereux que comme variété 
du B. muralis, qui est à poils blancs ou rouges , épineux ou 
lisses, suivant les localités. Il n’y a que l'observation sur de 
nombreux échantillons qui puisse conduire à ces résultats. 
La détermination des espèces d’après des herbiers sera tou- 
jours hasardée et incomplète. 

"Les mousses, comme les végétaux supérieurs, ne sont 
point étrangères aux monstruosités produites par la piqûre 


=. PF. = 
d'insectes, comme le Bédiguar des rosiers, etc. Une sem- 
blable monstruosité a été signalée par M. Lesquereux, sur 
le Leucodon sciuroïdes et n’est point rare sur les érables du 
haut Jura, aux Sagnettes , à la Joux du Plane, etc. 

M. Desor communique à la Société quelques observations 
qu'il a faites récemment sur les bonds de Bierre, dans le can- 
ton de Vaud. On donne le nom de bond à des trous d’une 
grande profondeur, à parois verticales , creusés dans le ter- 
rain diluvien de la plaine de Bierre. Leur nombre est de 
onze, dont neuf situés au bord inférieur de la plaine, près 
du torrent de l’Aubonne, et deux au-dessus du camp de 
Bierre, non loin des sources du Toleure. Leurs dimensions 
sont très-variables ; il ÿ en a qui ont plus de cinquante pieds 
de diamètre; les plus grands sont entourés d’une haie de 
broussailles pour empêcher le bétail d'y tomber. Ordinaire- 
ment les bonds sont remplis d’une eau trouble et-argileuse 
dont le niveau varie suivant les saisons ; mais ce qu'il y a de 
curieux, c'est qu'à certaines époques ces bonds entrent en 
mouvement et vomissent autour d'eux des torrens d’eau char- 
gés d'argile. De là vient que les abords de chaque bond sont 
couverts d'un enduit argileux qui contraste avec la teinte 
roussàtre ordinaire de la plaine. M. le général Laharpe, qui 
a précédemment décrit les bonds, les compare pour cette 
raison à des volcans de boue. M. le docteur Nicati , d'Au- 
bonne , et M. Necker ont plus tard réfuté cette opinion , en 
remarquant que les bonds sont en rapport direct avec la fonte 
des neiges sur le Jura, et que l'époque de la fonte est toujours 
marquée par un exhaussement sensible de leur niveau. M. De- 


Rs 

sor a visité, en société de MM. Nicati et Blanchet, les bonds 
inférieurs et a pu se convaincre de la justesse de ces observa- 
tions. Deux de ces bonds, les plus rapprochés de l'Aubonne, 
sont situés dans le domaine d’un fermier qui les exploite pour 
la fabrication des tuiles et de la poterie, en enlevant l'argile 
à mesure qu’elle se dépose au bord du bond, ce qui arrive 
toujours à l’époque de la fonte des neiges. Ce fermier prétend 
avoir découvert un moyen d'obtenir une plus grande quan- 
tité d'argile, en jetant en automne des masses-de pierres et 
de graviers dans les bonds où ils s’enfouissent pour ne plus 
reparaître. Pendant l’hiver ce remblais se tasse, et quant ar- 
rive le printemps, toute cette masse se crevasse et l’on voit 
sourdre des crevasses une argile très-fine, répandant une lé- 
gère odeur d'hydrogène sulfuré ; en même temps le remblais 
s'enfonce et finit par disparaître complètement. L'un des 
bonds était dans cet état, lorsque M. Desor le visita le 6 avril 
dernier. Quelquefois l’éruption est très- violente et les bonds 
rejettent alors de nombreux fragmens de bois qui sont gisant 
tout à l’entour. Ces morceaux qui ont jusqu'à un pied d'é- 
paisseur sont des fragmens de troncs coupés transversale 
ment ; leur fibre est ordinairement conservée, mais ils ont 
perdu toute substance résineuse, sont légers comme de l’ama- 
dou et portent toutes les traces d’une forte pression. M. Desor 
remarque en outre, que les bonds ne sont point un phéno- 
mène accidentel , puisqu’alors même qu'ils se dessèchent pé- 
riodiquement, ils reparaissent toujours aux mêmes endroits. 
Leurs parois sont très-imperméables , ce qui le prouve, c'est 
que le fermier que nous avons mentionné ci-dessus, ayant un 


— 04. 7° la 

jour sondé le plus petit des bonds et ayant rencontré l'argile à 
91 pieds de profondeur, avait creusé à côté un trou de la 
même profondeur de 15 pieds de diamètre , dans l'espoir d’en 
retirer également de l'argile. Il fut complètement déçu dans 
son attente ; à l’époque de la fonte des neiges , le véritable 
bond entra réellement en activité (poussa d’après l'expression 
locale), tandis que le trou à côté se remplit d'eau claire. On 
a retiré de ce bond artificiel un tronc de chêne qui diffère 
des fragmens de bois vomis par les véritables bonds, en ce 
qu'il est parfaitement conservé et tellement dur que l'on en 
a fait toutes sortes d’ustensiles. M. Desor en conclut , avec 
M. Nicati, que les bonds sont des puits artésiens naturels, 
communiquant avec une couche imperméable dans l'intérieur 
ou au-dessous du grand dépôt de gravier. C’est ce qui résulte 
évidemment de la coïncidence de la fonte des neiges sur le 
Jura, avec l'irruption des bonds, qui indique en quelque 
sorte le trop plein des canaux intérieurs. Il reste encore à 
expliquer d'où proviennent les morceaux de bois qui sont 
ainsi rejetés par les bonds. 

M. Desor dépose sur le bureau un morceau de ce bois. 
M. Godet pense que c’est probablement du hêtre. M. le Prési- 
dent ne pense pas que ce bois provienne des sommités du Jura ; 
il serait plutôt disposé à croire qu’il est fourni par une couche 
de tourbe sous-jacente au dépôt de gravier, attendu que le 
bois des tourbières a tout-à-fait le même aspect. Espérons que 
les géologues vaudois nous donneront un jour la solution de 
cet intéressant problème. 


RS ce 

M. le Président de la Société communique une lettre de 
M. le docteur Tschudi, par laquelle ce dernier annonce, 
qu'après avoir comparé avec les collections du Musée de Ber- 
lin la plupart des oiseaux qu'il a rapportés du Pérou, il 
a trouvé que le plus grand nombre des espèces qu'il croyait 
au premier aspect identiques avec les espèces déjà connues , 
sont nouvelles ; tels sont, entre autres , le Penelope rufiven- 
tris, qui est voisin du Pen. marail, le Pen. adspersa , voisin 
du squamata. Il en est de même de plusieurs autres, tels 
que le Thinocorus Inga, le Crypturus Kleei, les Odontopho- 
rus speciosus, Charadrius Winterfeldii, resplendens, Crex facia- 
lis et femoralis, Fulica ardesiaca , Sterna acutirostris et eæilis, 
et de beaucoup d’autres. Ainsi ce voyage aura contribué à 
augmenter de beaucoup le nombre des espèces d'oiseaux et 
même de mammiféres de l'Amérique du sud, tout en nous 
apprenant que la Faune du Pérou diffère beaucoup , non-seu- 
lement de celle du Brésil, mais même de celle du Chili, dé- 
erite par M. d'Orbigny. 


E. Desor, secrétaire. 


N° 8. 


= 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 
DS MEUCRHATER 


Séance du 1° mar 1844. 


Présidence de M. L. CouLox. 


M. le docteur de Castella lit un mémoire sur le mouve- 
ment de l'hôpital Pourtalès, pendant l'année 1843. 
L'hôpital contenait le 1° janvier 1843, 


23 malades, dont 15 hom., 8 fem. 
Il en a été admis pen- 


dant l’année . . . 331 dont 228 hommes et 103 fem. 
Ensemble . . . 354 mal. 243 hommes et 111 fem. 
dont 163 Neuchâtelois, soit 100 hommes et 63 femmes. 
20 Vaudois 13 » 7 » 
68 Bernois 43 » 25 » 
38 Suisses desautres cantons30  » 8 » 
65 étrangers 57 » su. $ 
304 malades 243 hommes 111 femmes. 


245 sont sortis guéris. 
56 améliorés ou soulagés. 
8 incurables. 
21 sont morts. 
2% sont restés à l'hôpital au 31 décembre 1843. 


Nr TS 

Ces 354 malades ont séjourné ensemble 12,506 journées 
à l'hôpital ; en moyenne le séjour d'un malade a été de 35 
journées (35 "’6/354). 

On a eu chaque jour en moyenne 34 malades (34 %/365). 

La mortalité calculée sur les sorties et décès , a été de 1 
sur 16 (15 **/21). - 

Sur les 21 individus qui sont morts; 1 est mort en arri- 
vant à l'hôpital sur le brancard sur lequel on le portait : 
4 sont morts du premier au troisième jour de leur entrée, 2 
étaient des vieillards qui ont succombé au marasme sénile , 
le 3° à plusieurs fractures comminutives, et le 4° à une pneu- 
monie négligée. 2 individus ont succombé à l’antéro-périto- 
nite aiguë, qui a amené la gangrène et la perforation des 
intestins , avec épanchement des matières dans la cavité du 
péritoine ; 3 à la fièvre typhoïde; 3 à la phthysie; 2 à l'hydro- 
pisie ; { à une fracture compliquée du bassin ; 1 à l’apoplexie 
ou hémorragie cérébrale ; 1 à l'hydrencéphale aiguë ; 1 à la 
fracture du col et 1 à celle du corps du fémur, chez des vieil 
lards et { au marasme scorbutique. 

Cinq opérations ont été pratiquées pendant le courant de 
l'année , savoir, 1 opération de cataracte faite avec succès par 
abaissement ; { amputation de la cuisse pour une carie au 
genou ; le malade, âgé de 37 ans, est parti guéri de son am- 
putation, mais la phthysie se développait chez lui; 1 hydro- 
cèle guéri par injection ; { excision de la caroncule lacry- 
male cancéreuse, { amputation du doigt indicateur dans son 
articulation métacarpienne pour la carie des phalanges, suite 
d'un panaris traité par les onguents d'une bonne femme. 


Les maladies qui ont été traitées pendant l'année, sont les 
suivantes : 

9 inflammations diverses produites par des coups, chu- 
tes, etc. 

7 érysipelles. 

4 gangrènes. 

15 abcès, dont 5 panaris. 

19 plaies. 

32 ulcères. 

1 entorse. 

3 fractures. 

2 nevroses. 

1 corps fibro-cartilagineux flottant dans l'articulation du 
genou. 

15 tumeurs blanches , dont sept avec carie des grandes ar- 
ticulations. 

1 fungus cancéreux de la caroncule lacrymale, extirpé 
avec succés. 

20 ophthalmies , la plupart scrophuleuses. 

1 cataracte opérée avec succès par abaissement. 

2 amauroses améliorées par des vomitifs et surtout par la 
cautérisation frontale , à l’aide de la pommade de Gondray, 
et l'application de la strychnine dans la plaie. 

3 hernies. 

1 hydrocèle guéri par injection. 

1 fistule urinaire compliquée d'infiltrations urineuses. 


SN Ds 


MALADIES INTERNES. 


36 affections rhumatismales. 
1 fièvre catarrhale. 
27 fièvres typhoïdes , dont trois sont devenues mortelles. 
3 dyssenteries guéries par le calomel et l’opium. 
2 fièvres lentes. 
3 fièvres intermittentes. 
{ urticaire. 
5 hydropisies. 
2 inflammations cérébrales. 
1 hémorrhagie cérébrale. 
9 esquinancies. 
39 inflammations des organes de la respiration. 
10 phthysies. 
36 inflammations gastro-intestinales. 
1 hypertrophie tuberculeuse du foie. 
1 colique saturnine guérie par la limonade sulfurique. 
% métrities. 
6 scrophules. 
2 aménorhées. 
8 tremblemens mercuriels. 
2 paralysies. 
2 marasmes séniles. 
354 


En moyenne, pendant 26 ans, on a eu à l'hôpital 30 
malades par jour ; actuellement on en a 34. Le séjour de cha- 


= 
que malade était de 37 !/: journées ; l'année dermière , il a été 
de 34 /2 journées. La mortalité était de 1 sur 15 ‘}2 ; elle a 
été de 4 sur 16 à-peu-près (15 ‘*/21) l’année dernière. 

M. de Castella ajoute à cette énumération quelques observa- 
tions sur le traitement suivi par lui dans les différens cas. A 
l'égard de la fièvre typhoïde en particulier, M. de Castella con- 
tinue de traiter cette maladie par le calomel à petite dose de 1 
à 2 grains par jour, le chlorure de soude (1 gros dans une 
pinte de décoction de racine de guimauve ) et les lotions 
froides. «Nous surveillons, dit-il, l'état de la poitrine, afin de 
nous opposer à l'hépatisation du poumon. Cette hépatisation 
arrive ordinairement vers le second ou troisième septenaire ; 
elle se manifeste le plus ordinairement, d'après nos obser- 
vations, sur le lobe moyen du poumon droit. La percussion 
et l’auscultation de la poitrine la font reconnaître facilement. 
Un son mou, l'absence du bruit respiratoire ou un râle cré- 
pitant, de la toux et une expectoration sanguinolente plus 
ou moins foncée l’indiquent. Les symptômes les plus graves 
de la fièvre typhoïde, précèdent ou accompagnent cette hépa- 
tisation : les rêveries, la surdité , l'injection violacée des yeux 
et des joues , les fuliginosités de la bouche, quelquefois des 
hémorragies nasales, les taches lenticulaires ou les pétéchies, 
les décubites, sont autant de signes qui surviennent et qui 
indiquent la stase du sang dans les vaisseaux capillaires; et 
cette stase dépend évidemment de l'adynamie et surtout de 
la faiblesse des contractions du cœur ; l'asphyxie en est la 
suite et un grand nombre de victimes de la fièvre typhoïde 
succombent à cette asphyxie. » 


= 4 = 

Pour la prévenir, M. de Castella a promptement recours 
aux ventouses sèches ou quelquefois scarifiées , si la pléthore 
veineuse est considérable, mais surtout aux sinapismes ap- 
pliqués sur les parois de la poitrine et sur la région du cœur, 
et aux vésicatoires. Il ordonne à l’intérieur, sans disconti- 
nuer, du calomel et des lotions salées et vinaigrées, l’oxide 
blanc d’antimoine à la dose d’un gros dans un looch gom- 
meux , ou ce qui réussit mieux, quand l’adynamie est très— 
prononcée , une infusion de vingt grains d'ipécacuanha avec 
un gros de racine de polygala senega , dans six onces d'eau 
bouillante , à laquelle il ajoute quelquefois six grains de cam- 
phre, à prendre par cuillerées de deux en deux heures. 

A l’occasion de l’hépatisation, M. de Castella cite l'opinion 
de M. Amussat et celle de M. le docteur Huss , qui pensent 
également que la faiblesse du cœur est la principale cause de 
l’hépatisation pulmonaire dans la fièvre typhoïde. Il pense 
dès-lors que les médecins qui l’envisagent comme une suite 
de l’inflammation pulmonaire, sont dans une grande erreur, 
et que cette erreur ne peut manquer de devenir funeste s'ils 
ont recours à un traitement débilitant surtout aux émissions 
sanguines. 

Quant à lui, il est porté à croire que ces prétendues in 
flammations locales ne sont que le résultat d’engouemens et 
d’engorgemens locaux , qui ont lieu pendant la période ady- 
namique de la fièvre typhoïde ; il peut en résulter la déchi- 
rure des vaisseaux capillaires , ce qui amène une extravasa- 
tion du sang. Les furoncles , les dépôts, les abcès soi-disant 
critiques, qui surviennent si souvent dans différentes parties 


Re 

du corps après des fiévres graves, ne reconnaissent proba- 
blement pas d'autre cause. Ce sont des matières dont la na- 
ture cherche à se débarrasser. 

Un des individus qui a succombé, est mort subitement en 
prenant une tasse de bouillon sur sa table de nuit , lorsque 
déjà on le croyait en pleine convalescence. A l'autopsie, 
M. de Castella n'a rien trouvé qui pût expliquer sa mort 
subite, sinon un état exsangue du cœur et des gros vais- 
seaux : le cœur était d’une päleur et d’une mollesse remar- 
quables ; on le déchirait facilement avec les doigts. Les ul- 
cérations intestinales étaient à-peu-près cicatrisées. Le ma- 
lade a probablement succombé à une syncope. Ces morts 
subites ne sont pas rares pendant la convalescence des fièvres 
typhoïdes , l’inanition et l’émacition qui en est la suite sont si 
grandes, qu'il est prudent de faire prendre aux malades fré- 
quemment quelque nourriture légère et d'éviter tout effort 
et toute émotion capables d'amener la syncope. 

Sept malades de la fièvre typhoïde sont venus de la ville 
de Neuchâtel dans les mois de janvier et mars ; 9 sont venus 
de la Chaux-de-Fonds et du Locle dans les mois d'avril, mai, 
juin et juillet ; 1 de Cortaillod en juin ; 2 de Neuchâtel en juin 
et novembre ; { du Locle en juillet et 4 de la Chaux-de-Fonds 
en septembre , octobre et novembre. D'où il résulte que les 
saisons les plus favorables au développement de cette cruelle 
maladie , sont le printemps et l'automne ; mars pour la ville 
de Neuchâtel et avril pour la Chaux-de-Fonds, ce qui re- 
lativement à ces deux localités, correspond à-peu-près aux 
mêmes conditions atmosphériques, Tous les malades, à l’ex- 


Sn COR 

ception d'un seul, étaient étrangers aux pays. Deux étaient 

âgés de 15 à 20 ans, 20 de 20 à 50 ans, 5 de 30 à 40 ans. 
L'âge le plus favorable, comme nous l'avons déjà vu en 

1840, est de 20 à 30 ans. 


E. DEsor, secrétære. 


M. G. de Pury, mgénieur, rend compte d'un éboulement 
de terrain qui s'opère lentement près du village de Gorgier. 

Entre le village et le château de Gorgier, se trouve une 
vallée où la formation des marnes bleues du néocomien est 
recouverte d'une couche de terre végétale très-fertile et ar- 
rosée par un grand nombre de sources auxquelles on peut 
attribuer le curieux phénomène géologique qui s'y est passé 
pendant les deux dernières années.—Au printemps de 1842, 
l’eau s'étant fait jour entre la terre végétale et la couche de 
marne, rendit glissante cette dernière , et la terre végétale 
tendit à se mouvoir suivant la pente de la marne. Ce mou- 
vement de translation causa les phénomènes les plus bi- 
zarres, car tandis que certaines parties du terrain s’avan-— 
çaient de plus de 6 pieds, d’autres ne bougeaient pas dans 
le sens horizontal, mais subissaient une dépression de # à 5 
pieds dans le sens vertical. Par suite de ces divers mouve- 
mens , les maisons situées dans cette localité subirent des dé- 
gradations inquiétantes pour leur solidité : lune a perdu son 
aplomb ; les jambages des portes et des fenêtres ne sont plus 
parallèles ; le carrelage de la cuisine qui était de niveau, 
tend à se bomber et à s'élever, et les murs intérieurs et ex- 


térieurs sont sensiblement lézardés. C’est le résultat d'un 


ee 


FOUR = 
tassement inégal du terrain. Le bâtiment du moulin, au con- 
traire, tend à se partager en deux parties et en même temps 
à s’enfoncer : les murs sont restés verticaux , mais sur les 
façades en vent et en bise , il s’est formé une fente , dont la 
largeur dépasse 5 pouces, le mur d'uberre tendant à s’éloi- 
gner de celui qui est en joran. 

Un mur de soutènement ayant menacé de s'écrouler, on a 
dû y mettre des appuis , et depuis qu'ils y sont, on remarque 
qu’au lieu de pencher davantage, la partie inférieure qui 
n'est pas appuyée tend à s’enfoncer en terre, landis que la 
partie supérieure reste en l'air soutenue par les appuis. 

L’étendue du terrain sur lequel se sont manifestés ces di- 
vers phénomènes est d'environ 600,000 pieds carrés : elle 
est presque entièrement circonserite par une crevasse large 
de quelques pouces, mais dont la profondeur va jusqu’à 5 
pieds : d’autres crevasses sillonnent ce terrain dans le sens 
transversal, mais elles sont en général moins profondes. 

La cause de ce phénomène est sans doute l'infiltration de 
l’eau des sources, entre la couche de marne et celle de terre 
végétale; ce qui le fait présumer, c'est que cette année sur- 
tout , quoique la fonte des neiges füt considérable , le volume 
des sources n'a presque pas augmenté , il a même sensible- 
ment diminué pour quelques-unes, mais l’eau est devenue 
trouble. La terre végétale en glissant sur la marne a produit 
des craquemens qui ont été pris pour des tremblemens de terre 
pendant les années 1842, 1843 et 1844. 

M. de Rougemont ajoute que depuis deux ou trois ans 
les environs de St.-Aubin et Gorgier ont été réellement af- 


ER 
fectés à plusieurs reprises par des tremblemens de terre dont 
on ne parlait point avant cette époque. Il y a deux ans entre 
autres , que le 12 septembre , un tremblement de terre fut 
accompagné d’un bruit souterrain si fort, que les habitans ef- 
frayés sortirent précipitamment de leurs maisons. 

M. de Pury dit que les habitans de Gorgier confirment ces 
faits, et assurent même que les fentes du terrain se sont élar- 
gies à chaque secousse nouvelle. 

M. Desor cite le cas d’un éboulement pareil à celui de Gor- 
gier, qui a eu lieu ce printemps dans les gorges de l’Areuse , 
au-dessus de Trois-Rods, par le ramolissement des marnes 
bleues, et qui a entraîné dans la rivière une masse considé-— 
rable de ces marnes et détaché plusieurs rochers restés sans 
appui. Au-dessus de l’éboulement se voient de larges cre- 
vasses dans Je calcaire jaune ( néocomien supérieur) qui re- 
couvre la marne. 

M. Guyot croit que c’est à cette même cause agissant plus 
en grand , que sont dàs le grand cirque néocomien et les dé- 
bris considérables que l’on voit au-dessous du vallon de Vèére, 
et au-dessus de l’éboulement de cette année. 

M. d'Osterwald fait un rapport verbal sur un nouveau com- 
pas de proportion, dont M. Piaget-Guinand, l'inventeur, a en- 
voyé les dessins à la Société de la Chaux-de-Fonds. L'ancien 
compas de proportion, qui était autrefois fort employé dans 
l'horlogerie était devenu sans usage, depuis l'invention des 
montres Lépine. M. Piaget a cherché à donner à cet instru- 
ment une forme nouvelle qui pût suffire aux besoins nou- 
veaux, et il semble y avoir réussi, puisqu'il en a fait lui-même 


— 91 —. 


usage pour sa propre fabrication. Ce même instrument a été 
soumis à l'examen d'experts qui l'ont trouvé parfaitement 
approprié à son but. Son exactitude est telle, qu'on peut me- 
surer directement ‘/1:00 de ligne. M. Favre , auteur d’un mé- 
moire explicatif qui accompagne ces dessins , ne fait qu'une 
légère critique , c'est que la mesure a lieu sur un are de 
cercle et non sur la ligne droite , comme cela devrait être , ce 
qui donne lieu à une erreur égale à la différence proportion- 
nelle entre l'arc et la corde. Cependant, comme ces mesures 
ont lieu sur de très-faibles longueurs , cette différence semble 
presque nulle en pratique. 

M. Guyot, à l’occasion d'un mémoire de M. Daussy, sur 
les découvertes dans les terres australes , présente quelques 
considérations sur les deux calottes polaires de glace et de 
terre, et sur l'idée qu'il croit erronnée de l'existence d’un 


continent austral. 
A. Guyor, secrétaire. 


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N° 9. 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 
DS NEUCHAITEL. 


Séance du 15 mai. 
Présidence de M. L. Courox. 


M. de Rougemont lit un mémoire sur les grands change- 
_ mens qu'a dû subir la surface de la terre, à trois époques 
distinctes , pendant la période géologique et historique ac- 
tuelle. La réalité de ces changemens résulte de l'accord de 
trois genres de preuves. 

Les unes sont historiques ; ce sont ou des témoignages po- 
sitifs des écrivains anciens , ou des traditions plus ou moins 
précises, où enfin des mythes comprenant sous une enve- 
loppe bizarre le vague souvenir des révolutions les plus an- 
ciennes. 

D'autres preuves sont empruntées à la géologie. Cette 
science atteste par des observations directes les révolutions : 
locales dont fait mention l'histoire; elle en fait connaître 
d’autres dont le souvenir s’est perdu. Et si de nos jours la 
Suède, le Chili et les îles Chiloë, toutes les terres océaniques, 
d'Otahiti à Madagascar, s'élèvent ou s’affaissent , si dans les 
siècles derniers on a vu des îles nouvelles apparaître au sein 
des mers et des montagnes se former dans les contrées vol- 


TR 

caniques , 1l n'est point impossible que des phénomènes ana- 
logues aient eu lieu sur une plus grande échelle, dans les 
premiers temps de cette même période. 

Le troisième ordre de preuves est tiré de la présence ou de 
l'absence de certains mammifères dans les îles ; et ici quatre 
cas sont possibles. Ou l’île ne nourrit aucun des mammifères 
terrestres qui peuplent le continent le plus voisin, et l'on 
peut en conclure qu’elle n’a jamais tenu à la terre ferme de- 
puis le commencement de l’époque géologique actuelle. C’est 
le cas de toutes les îles océaniques, telles que les Bermudes, 
les Acores , Madère, les îles du Cap-Vert , les Amirantes , où 
les premiers navigateurs européens des 15° et 16€ siècles, ne 
trouvérent que des nuées d'oiseaux. C’est le cas des Maldives 
et de tous les archipels de la Polynésie , ainsi que de la Nou- 
velle Guinée, et des îles qui sont situées entre cette dernière 
et la Nouvelle-Zélande; c’est le cas des Antilles, où Christophe 
Colomb ne trouva que quatre à cinq espèces de quadru- 
pèdes , de fort petite taille, domestiques ou faciles à appri- 
voiser, et dont la chair était très-recherchée des indigènes. 
C'est le cas de la Terre-de-Feu. L'ile de Terre-Neuve, le 
Groënland , l'Islande, le Spitzberg , auront reçu leurs qua- 

 drupédes du Labrador par les glaces, Faute de renseignemens 
suffisans, M. de Rougemont ne parle ni de la Crète, ni de la 
Sardaigne et de la Corse, ni de l'Irlande. 

Ou bien l'ile est peuplée des mêmes quadrupèdes que le 
continent voisin dont elle aura donc fait partie primitive- 
ment; ainsi la Grande-Bretagne. Selon les traditions indi- 


gènes, les Kymris y auraient trouvé, lorsqu'ils y abordèrent 


6 = 

pour la première fois, des ours, des loups , des castors et 
des bisons , et l’on sait la date à laquelle ces divers animaux 
ont disparu de l'ile. Ainsi encore, si les renseignemens sont 
exacts, les îles de Fionie et de Seeland. Ainsi, en Asie, Cey- 
lan , avec ses éléphans, ses rhinocéros, ses singes, etc.; Haï- 
nan et Formose , avec leurs tigres, leurs rhinocéros , leurs 
singes , etc. ; les îles Lieou-Kieou , qui auraient eu jadis, 
d’après Klaproth , des ours , des loups et des chacals. 

Dans le troisième cas, l’île aura une faune spéciale, entière- 
ment différente de celle des terres voisines, dont elle n'aura 
donc jamais fait partie; ainsi Madagascar, si tant est toute- 
fois qu'on ne retrouve pas un jour dans les contrées presque 
inconnues de l'Afrique orientale, ses mammifères caractéris- 
tiques, entre autres ses makis et ses écureuils noirs qu'on 
dit exister en Abyssinie. La Nouvelle-Hollande forme sem- 
blablement un monde à part, dont les animaux ne se re- 
trouvent, à un très-petit nombre d'exceptions près, ni dans 
les îles de la Sonde , ni dans la Nouvelle-Guinée , ni dans la 
Nouvelle-Zélande. 

Enfin , la faune d’une île peut se composer d'animaux in- 
digènes et propres , et d'animaux qui existent sur le conti- 
nent voisin. L'hypothèse la plus probable est celle d’une an- 
cienne communication qui aurait été rompue plus tard. Ce 
cas est celui de l’Archipel indien et du Japon. 

Il faut d’ailleurs être fort prudent dans les inductions à 
tirer de la présence ou de l'absence de certains animaux dans 
les îles. Les singes et les cerfs de l'île de France et de l’île 
Bourbon , y ont été apportés, dit-on, par des navigateurs 


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hollandais ; les chacals des îles dalmatiennes , par un vais- 
seau venu du Levant. Les babiroussas traversent à la nage les 
détroits de l’Archipel indien , et l'on prétend qu’en Corse une 
foule de sangliers épouvantés par un grand incendie de forêts, 
se sont jetés à la mer, et ont abordé en Toscane et à Antibes. 
Quelque glace flottante aura porté de la Patagonie aux Ma- 
louines le loup renard, unique quadrupède de ces îles. Puis 
aussi, dans les îles dès long-temps habitées, l’homme a pu 
détruire de nombreuses espèces de grands mammifères , et 
cette destruction aura été d'autant plus prompte que l'île a 
moins d’étendue. 

M. de Rougemont passe après cela en revue les princi- 
pales contrées de la terre, comparant aux renseignemens 
fournis par la géologie et par la faune, les traditions relatives 
à des révolutions physiques, et les classant d’après leur ordre 
chronologique, qu'il déduit des époques diverses (époque des 
dieux, époque des héros, époque historique) auxquelles elles 
se rapportent, et il termine en traçant un tableau de la sur- 
face de la terre aux temps qui ont suivi le grand déluge de Noé 
( Xisuthrus, Satyavatra, Coxcox, etc.) 

Les contours des continens et des mers étaient alors dans 
leurs traits généraux, ce qu'ils sont aujourd'hui. L'Aus- 
tralie, la Nouvelle-Guinée , la Polynésie , Madagascar, les 
Antilles étaient aux terres voisines dans les mêmes rapports 
qu'ils sont présentement. 

Le Japon, Formose, Haïnan, les Lieou-Kieou tenaient 
au continent. Dans la méditerranée formée par cette guir- 
lande de terres, était l’île Mauri, l’'Atlantide orientale, célèbre 


— NN 
plus tard par sa terre de porcelaine et par la corruption de ses 
habitans. La mer Jaune s’étendait au loin dans les terres, et 
le Hoang-ho suivait dans la plaine basse un tout autre cours. 
Les hautes vallées et les plaines des plateaux mongols for- 
maient de vastes lacs.— L’Archipel indien faisait comme un 
immense appendice à l’Indo-Chine et à la Chine méridionale. 
Ceylan, beaucoup plus considérable qu'elle ne l'est aujour- 
d’hui , tenait à la côte de Coromandel. Le Malabar n'avait 
point sa forme actuelle , et peut-être la mer occupait ce qui 
forme maintenant les basses terres du Gange et de l’Indus. 
Cachemire et sans doute d’autres vallées encore de l'Hima- 
laya , étaient des lacs alpestres. — L'intérieur du plateau de 
l'Iran n'était point occupé, comme il l’est maintenant, par de 
vastes déserts de sable, et en Arabie le désert El-Ahkaf n’exis- 
tait pas. La mer Rouge était séparée de l'océan indien par 
une large terre et probablement unie à la Méditerranée. 
Le Delta du Nil, ainsi que celui de l'Euphrate et du Tigre, 
formait un golfe ; Le Nil envoyait un bras à l'occident vers les 
Syrtes , et le désert Libyen était peut-être encore recouvert 
par les eaux de l'Océan, ainsi qu’une partie du Sahara orien- 
tal. La petite Syrte et le lac Triton, alors unis, s’étendaient au 
“loin dans les terres. — Ce qui est la partie méridionale de la 
mer Morte, était alors la magnifique plaine de Siddim. — 
Chypre et Crête existaient, mais non Rhodes, ni Delos, ni 
Anaphé, ni Thera. Le golfe de Corinthe était un bassin ex- 
térieur, fermé à ses deux extrémités par des isthmes. La val- 
lée de Tempé ne livrait point encore un passage aux eaux de 
la Thessalie. L'Eubée tenait, comme Lesbos , au continent 


ee OUR 


voisin, et au nord del'Hellespont et de la Propontide, était un 
isthme qui unissait l'Asie à l’Europe et isolait le Pont-Euxin 
de la Méditerranée. Le Pont, c'est-à-dire la mer par excel- 
lence, communiquait avec la mer Caspienne; la Tauride était 
une île, les Palus-Meotides avaient une très-grande exten— 
sion ; des lacs prenaient la place des marais actuels de la Li- 
thuanie. Les flots de l'océan ( mer Caspienne ) recouvraient 
les déserts actuels du Turkestan vers le S. E., et baignaient 
au N. O. les collines qui sont à l'O. de la Sarpa et l'Obstschey- 
Syrt. Cette vaste mer qui s’étendait des monts de la Transyl- 
vanie à ceux de la Sogdiane , communiquait, par un détroit 
entre l’Oural et l'Ulutau , avec l’océan boréal. L'Oural était 
baigné de trois côtés au moins par la mer. La Finlande était 
une île ainsi que la Scandinavie. La Grande-Bretagne tenait 
au continent ; l'archipel des Orcades n'existait pas. — Le 
détroit de Gibraltar était un isthme , tout aussi bien que ce- 
lui de Messine. L'île Er ythie occupait une place plus ou moins 
grande dans le golfe compris entre l'Espagne et l'Atlas, et 
dans l'océan s'élevait la mystérieuse Atlantide, plaine basse 
entourée à sa circonférence de hautes montagnes. 

Il serait facile de tracer, d’après ces données, une carte de 
l'ancien monde aux temps postdiluviens , et l’on verrait alors 
combien l’histoire primitive des nations et de leurs migrations 
prendrait un aspect nouveau. E 

Dans les siècles qui suivirent immédiatement le déluge, 
eurent lieu les révolutions locales les plus considérables. La 
terre était comme barattée dans l’océan, disent les Indiens, et 
elle se serait abimée, si Vischnou ne l’eût soutenue en prenant 


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= 49 — 

la forme d’une tortue. Elle s’enfonçait vers l'occident, selon les 
Javanais. Elle reçut une brèche, une fente au S. E., disent 
les Chinois. Traduites dans le langage de l’histoire , ces tra- 
ditions signifient que l'isthme qui unissait Ceylan au Décan , 
se brise ; que l’Archipel indien , déjà-habité par ses Negritos 
qu'on trouve dans l’intérieur des grandes îles, se forme par la 
rupture de cent isthmes , par la destruction de vastes con- 
trées ; et qu'au S. E. de la Chine la terre s’affaisse et occa- 
sionne ainsi les îles chinoises et japonaises. Les anciennes 
limites du continent se reconnaissent encore aux guirlandes 
d'îles qui bordent la côte orientale de l'Asie , depuis Bornéo 
au Kamtchatka. Cependant Kasyapa , le petit-fils de Brahma, 
dessèche le lac de Cachemire; et les lacs des hautes terres chi- 
noises et mongoles produisent en brisant leurs digues deux 
déluges : lors de celui de Konkong ou de Fohi, « le ciel tomba 
au N. O., et la terre reçut une brèche au S. E. , et Niuwa la 
remit en équilibre avec les pieds d’une tortue (tortue de 
Vischnou dans le mythe de l’Amrita) » ; et le déluge d'Yao, 
quieut lieu au temps d'Abraham, est décrit comme une inon- 
dation des plaines basses, par les eaux débordées du Hoang- 
ho et de l’'Yang-tse-Kiang. 

A l’autre extrémité de l’ancien monde, la Grande-Bre- 
tagne se détache du continent avant l’arrivée des premiers 
Kymris, qui y abordérent, d’après leurs traditions. Wight, 
Man et l'Orcade existaient alors déjà, mais ils ont été témoins 
des révolutions qui ont séparé de la terre ferme Anglesey 
et diverses portions de l’Ecosse, et qui ont brisé l'Orcade en 
un petit archipel. C'est peut-être à ces révolutions qu'il 


— 100 — 

faut rapporter ce que les traditions de ces mêmes Kymris 
disent de cette seconde calamité, postérieure. au déluge, 
qu'elles décrivent en ces termes : «Ce fut le tremblement du 
torrent de feu (un tremblement universel de la terre avec un 
déluge de feu), lorsque la terre fut déchirée et entraînée 
dans le grand abiîme , de telle sorte que la plus grande partie 
de toute vie fut détruite. » 

A cette même époque primitive, les contrées centrales de l’an- 
cien monde étaient pareillement agitées, quoiqu’elles n'aient 
point subi d'aussi grandes révolutions que les régions océani- 
ques du S.-E. et N.-0. Les forces volcaniques (Typhon et Zo- 
hak) s’éveillent et commencent une lutte étrange avec les 
cieux (Jupiter) : Typhon foudroyé se cache sous la terre qu'il 
sillonne, et fait jaillir les sources de l’Oronte. Près de là, la 
terre s’enflamme sous les villes de la plaine, et la mer Morte 
recouvre les ruines de Sodome. Au temps du patriarche 
Heber , les crimes des Adites amenèrent la ruine de leur belle 
patrie, qui est devenue l’affreux désert el Ahkaf, et des 
tremblemens de terre chassent des bords du golfe Persique 
le peuple des Phéniciens. — Le Demawend devient la pri- 
son de Zohak, comme l'Etna de Typhon. L’Asie mineure 
est en plusieurs endroits le théâtre des luttes de ce dernier, 
et Rhodes sort du sein des eaux pour être le lot d’Apollon, 
Delos pour servir d'asyle à Latone. 

Cette première époque de catastrophes géologiques pa- 
raît avoir été suivie de cinq siècles de repos, après les- 
quels la terre s’agite de nouveau et prend en plusieurs con- 
trées une face nouvelle. Cette seconde époque a lieu dans les 


— 101 — 
temps historiques, c'est celle de Deucalion et de Moïse, avant 
et après l'an 1500. Le siége principal des révolutions était 
alors, dirait-on, ces mêmes régions centrales qui avaient été 
les plus tranquilles pendant la précédente époque. 

Le passage de la mer Rouge par les Hébreux indique 
quelque révolution physique survenue dans la mer Rouge, 
et certains détails du récit de Moïse font penser à un soulé- 
vement momentané du fond de la mer. Des phénomènes vol- 
caniques accompagnent la promulgation de la Loi sur Sinaï. 
Le désert s'entr'ouvre sous Coré. Les eaux du Jourdain re- 
fluent au loin en arrière peu de jours avant le tremblement 
de terre qui renversa les murs de Jéricho; et dans ce même 
temps la terre suspend un jour entier sa rotation, tandis qu'une 
pluie prodigieuse de pierres (aërolithes) tombe sur une con- 
trée de Canaan. — À cette même époque se rapporterait 
la formation du détroit de Bab-el-Mandeb, que la tradition 
place, non au temps des Dieux ou des héros, mais sous un 
roi de l’Yemen , et: qui est antérieure à l'expédition mari- 
time de Sésostris, qui put bien sortir de la mer Rouge, 
mais qui füt arrêté dans l'Océan par des écueils et des bas- 
fonds. Ces bas-fonds n'existent plus, et le détroit de la mer 
Rouge se sera de siècle en siècle approfondi et élargi, comme 
ça été le cas de celui de Gibraltar. 

En Grèce a lieu le déluge thessalien ou de Deucalion, 
Deucalion est contemporain de Dardanus, sous lequel eut 
lieu la formation du Bosphore de Thrace, dont les consé- 

quences ont été l’abaissement du Pont-Euxin à son niveau 
actuel, l'inondation des basses-terres de la mer Egée et 


— 102 — 
même du Delta égyptien et de la Cyrénaïque, la transfor- 
mation de l’île Tauride en une presqu'île, une moindre éten- 
due de la mer Noire et de la mer d'Asow , et leur séparation 
de la mer Caspienne. — Plus tard, Anaphé et selon quel- 
ques-uns Thera (Santorin) sortent des eaux au temps des 
Argonautes. 

En Italie, des éruptions de l'Etna chassent les Sicanes de 
l'Est de la Sicile vers l'Ouest , et c'est au temps de Deucalion 
qu'on à placé d’après la tradition la formation du détroit de 
Messine. Les volcans du centre de l'Italie entrent dans une 
activité telle que les Pélasges abandonnent l’Etrurie. Hercule 
combat contre Cacus, fils de Vulcain, et produit le lac de 
Cimini. 

La tradition varie sur le temps auquel fut formé le détroit 
de Gibraltar ; et la destruction de l’Atlantide, antérieure à 
Phaëton, doit avoir eu lieu avant le 16° siècle. 

En Amérique, les Florides sont inondées par le lac Theomi 
pendant une nuit de 24 heures (qui correspond au jour de 
2% heures de la bataille de Gabaon). 

A la seconde époque peuvent également se rapporter : 
le soulèvement de la côte de Malabar à l'ordre de Parasu- 
Rama, sixième incarnation de Vischnou, et les phénomènes 
volcaniques des monts Vindhyas au temps des fils de Pan- 
dou , ainsi que la destruction de l’île Mauri sous son roi Pey- 
ruun. 

La seconde époque, dont les catastrophes ont été beau- 
coup moins considérables que celles de la première, a été 


suivie de près de mille ans de repos ; et la troisième et der- 


— 103 — 
nière est signalée par des faits d'une importance bien moindre 
encore. Elle comprend les quatre siècles avant et le premier 
siècle après Jésus-Christ. 

Vers les extrémités N.-0. de l’ancien monde, l'inondation 
cimbrique, qui est antérieure à Alexandre-le-Grand, dé- 
place une partie des nations demeurant sur les côtes germa- 
niques de la mer du Nord. 

Vers les extrémités S.—E. de l'Ancien-Monde, postérieu- 
rement à 362, la mer engloutit au nord de Ceylan neuf 
îles et plusieurs milliers de villages , et l'an 72 (ou 115) de 
notre ère , d'après les traditions Javanaises , Sumatra et Java 
se séparent par la formation du détroit de la Sonde.— Vers 
284 avant Jésus-Christ un tremblement de terre donne nais- 
sance dans le Japon à un grand lac et à l'une des principales 
montagnes de l'île. Trois siècles plus tard une île considé- 
rable sort de la mer à l’est de Kiu-Siu. 

Dans la Méditerranée plusieurs iles nouvelles se forment 
par des causes diverses : en 425, l'ile Atalante par la rupture 
de l'isthme qui la liait à la Locride ; en 327, Thérasia sort de 
la mer, ou Thora se divise en deux; en 197, apparaît prés 
de Thora l'île Hiera; en 188, une île (peut-être Vulcanello) 
prés de la Sicile ; en 128, une autre dans le golfe de Tos- 
cave ; en 87, Thia ; et en 47 après Jésus-Christ, une autre ile 
près de Santorin, en 60, une ile près de la Crête. 

Depuis le premier siècle de notre ère jusques aux temps 
modernes aucune île nouvelle n'apparaît dans la Méditerra- 
née; et à l'est de l'Asie, le seul fait de ce genre qui ait eu 
lieu pendant ce même espace de temps est la formation de 


— 104 — 

trois îles près du Japon, en 76%. La terre aux premiers 
temps de l'ére chrétienne est rentrée dans une période de 
repos relatif, et l’histoire ne mentionne plus de ces grandes 
inondations qui font époque dans l’histoire des nations. Ce- 
pendant on doit noter la formation, par déchirement, de l'ile 
Bali en 120%; et, près de Sumbawa, de Giling-Travangan, 
en 1260; et Solo-Pinang, en 1280 ; tandis que dans le 
même siècle, à l’autre extrémité de l'Ancien-Monde , la mer 
donnait naïssance, par l’irruption de ses flots, au Jahde, vers 
1218 ; aux iles du Sleswig, en 1240 ; au Dollart, de 1278 
à 1287 , et au Zuydersee, vers 1282. — On ne peut déter- 
miner l’époque où le lac Aral s'est séparé de la mer Cas- 
pienne , ni celle ou l'Océan Boréal est rentré dans ses limites 
actuelles. Les livres chinois citent à 62° de L. N. des mesures 
de gnomon prises sur le bord de cet Océan, et ils décrivent 
en 581 après Jésus-Christ un peuple nommé Katoumey, 
pirate et montant de grands navires. Strabon parle d’un dé- 
troit de 1500 stades de longueur, qui unissait la mer Cas- 
pienne à l'Océan. Au temps de Ptolomée l'Iaxarte recevait 
sur sa rive droite deux grands affluens qui n'existent plus ; 
eten 1660, un des bras de l'Oxus se jetait encore dans la 
mer Caspienne. 

A ces révolutions géologiques que la terre a subies dans 
la période actuelle, viennent s'ajouter les changemens at- 
mosphériques tels qu'ils résultent des traditions, de la géo- 
logie et de l'histoire : le climat s’est considérablement refroidi 
(Zendavesta), et le feu est quatorze fois moins abondant dans 
la nature pendant l'époque actuelle que dans la précédente 


— 105 — 

( Inde ) ; les déserts de l'Egypte et de la Nubie , ainsi que de 
l'Arabie , aujourd’hui entièrement arides, portent dans leurs 
vallées les traces incontestables de pluies équatoriales, et 
à quelque distance du Caire se voient, vitrifiées, des forêts 
d'arbres des tropiques ; les orages ( d’après Arago ) n’ont plus 
dans les contrées européennes de la Méditerranée l’inten- 
sité qu'ils avaient aux temps anciens d’après les auteurs grecs 
et latins, et les grottes des oracles n’exhalent plus leurs va- 
peurs enivrantes. 

La terre a donc changé pendant la période actuelle et ces 
révolutions physiques ont probablement exercé une grande 


influence sur les destinées des nations. 


A. Guyor, secrétaire. 


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N° 40. 


BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DB NEUVCEATEL. 


Séance du 29 mai 1844. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. Agassiz présente une série de nouvelles études sur les 
prétendues identités que l'on admet généralement entre les 
espèces vivantes et les fossiles de certains terrains. Après 
avoir esquissé la marche du développement de la Paléonto- 
logie , depuis son origine jusqu’à nos jours, et montré com- 
ment, après avoir d'abord envisagé les fossiles en général 
comme les ancêtres des espèces vivantes , on a peu-à-peu ré- 
duit le nombre de ces prétendues identités à mesure qu’on 
les soumettait à un examen approfondi; M. Agassiz arrive 
à ce résultat, qu'il n'existe point d’identités entre les espèces 
fossiles et les vivantes, et que toutes celles que l’on admet 
encore de nos jours reposent sur de fausses déterminations. 
M. Agassiz met sous les yeux de la Société plusieurs exemples 
qu'il a choisis parmi ces prétendues identités : telles sont, 
entre autres : 1° le Cytherea ( Arthemis) concentrica ; au pre- 
mier abord l'espèce fossile de l’Astesan ressemble en effet 
beaucoup à l'espèce vivante de l'Atlantique, mais si on les 

9 


— 108 — 

compare attentivement , on trouve cependant entre elles des 
différences notables. Ainsi la coquille fossile est plus bombée 
et presque ronde ; les stries concentriques sont plus fines ; 
le sinus palléal est plus profond et plus étroit, enfin la char- 
nière présente aussi des différences sensibles. 2° Les Lucina 
columbella et divaricata, sont cités parmi les fossiles caractéris- 
tiques de Bordeaux. Or, le L. columbella fossile a de beaucoup 
plus gros plis ; le sillon transversal du bord antérieur est plus 
profond et la charnière tout-à-fait différente. Le L. divaricata 
fossile , au contraire a des stries plus fines et une charnière 
également différente. Le L. divaricata du calcaire grossier de 
Paris est encore une autre espèce. 3° Le So/en vagina fossile 
différe de l’espèce vivante par un profond sillon le long de 
la troncature du bord antérieur, sillon qui n'existe pas dans 
l'espèce vivante. 4° Le Solen strigilatus fossile est plus allongé 
que le vivant, et son bord inférieur est évasé au milieu. 5° Le 
Solecurtus coarctatus fossile diffère du vivant par l’absence 
d'une profonde échancrure au bord inférieur. M. Agassiz, a 
en outre reconnu parmi les Solen du Musée de Neuchâtel une 
espèce nouvelle de la molasse et une autre vivante. 

Il en est de même de la plupart des autres identités que 
quelques géologues persistent à vouloir admettre. M. Agas- 
siz en conclut qu'il n’existe point de liaison directe au point 
de vue zoologique entre les différentes époques géologiques 
et que chaque époque a eu sa faune propre. 


É. Desor, secrétaire. 


— 109 — 

M. le secrétaire donne lecture de la notice suivante, adres- 
sée par M. C. Nicolet, de la Chaux-de-Fonds, et contenant le 
résumé de ses observations sur la neige pendant l'hiver der- 
nier. 

L’eau s'échappe du dépôt lorsque celui-ci en est complète- 

ment saturé à la base; il se sépare alors en deux couches, 
l’une supérieure composée de neige humide , l’autre infé- 
rieure composée de neige détrempée ; par la congélation noc- 
turne, la première devient neige saccharoïde, la seconde glace 
glaciaire. Plusieurs alternatives de fusion et de congélation 
augmentent le dépôt de glace, la neige change alors de forme, 
elle passe à l’état de névé; la glace adhère au sol et les filets 
d’eau s'échappent de la couche détrempée, ou çà et là de la 
_ base congelée, 
Sous l'influence du vent d'ouest et par une température 
de + 2 +3, les petits cristaux des couches superficielles se ré- 
solvent en eau, celle-ci est absorbée par les couches infé- 
rieures, elle perd sa propriété dissolvante par le fait seul de 
sa température. Dans cet état, l’eau est absorbée et retenue par 
les cristaux de neige en vertu de la capillarité ; l'affaissement 
et la contraction qu’on observe sont donc dus, d'une part, 
à l’eau qui tasse et détrempe la neige, et d'autre part, au 
. changement d'état de la neige et de la glace ; l’eau occupe 
plus de place à l’état solide qu’à l'état liquide, et plus de place 
encore à l’état de neige qu'à l'état de glace. 

C'est à ce changement d'état, ou plutôt à la contraction qui 
résulte du changement d'état, que j'attribue la formation du 
névé. Pendant nos belles journées d'hiver, par un vent du 


— 110 — 

N. N. E. E., les petits cristaux de la neige superficielle se 
fondent , les cristaux voisins retiennent les gouttelettes , un 
vide s'opère par le changement d'état, le froid de la nuit con- 
gèle les gouttelettes ; les jours suivans, le même phénomène 
se reproduit, les cristaux augmentent insensiblement , mais 
sans prendre un gros volume. Cetteexplication peut s'appliquer 
aussi au névé de nos voies d'hiver, mais celui-ci sans cesse dé- 
placé par les piétons, prend un volume plus considérable dû 
au renouvellement des surfaces ; il est aussi plus régulier. : 

J'ai à plusieurs reprises arrosé très-légérement la neige 
avec de l’eau à 0°, quelques minutes avant la disparition du 
soleil de notre horizon , et j'ai constamment obtenu un névé 
assez régulier : mais lorsque j'inondais la neige , toujours 
avec de l’eau à 0°, celle-ci ne s’arrêtait pas dans les inters- 
tices des couches superficielles , elle emportait les petits eris- 
taux et tendait à se répartir partout ; elle s’accumulait en- 
suite à la base du dépôt ou elle détrempait la neige ; par la 
congélation nocturne, j'obtenais de la glace qui détruisait tout 
et cristaux et névé. 

Ainsi le névé ne résulte pas de la congélation de l’eau con- 
tenue dans les interstices de la neige, puisque cette neige est 
constamment absorbée et qu’elle gagne le fond du dépôt. 

Lorsque j'arrosais la neige avec de l’eau de fontaine à + 8, 
j obtenais divers accidens , tantôt des tubes de glace disposés 
comme des tuyaux d'orgue, ou une masse congelée ayant 
une surface chargée d’aspérités et présentant çà et là des ca- 
vités assez régulières , ou encore une glace poreuse compo- 


sée de groupes soudés les uns aux autres. 


— ii — 

. Je n'ai jamais pu convertir la masse entière de neige en 
névé ; le névé, la neige et la glace qui résulte de la neige 
détrempée , voilà l'ordre de stratification et les trois formes 
de nos grands dépôts. La neige ne conserve pas sa forme pri- 
mitive pendant la durée de l'hiver, elle devient plus ou moins 
poreuse et grenue ( névé). Par névé j'entends la transfor- 
mation de la neige à cristaux réguliers en glace grenue et 
amorphe ; le névé de nos dépôts diffère de celui des Alpes par 
le petitvolume de ses grains. La neige cependant conserve long- 
temps sa forme primitive dans le centre des grands dépôts. 

Pendant l'hiver de 1843 à 184%, dit M. Nicolet, la neige 
pulvérulente est tombée, avec quelques interruptions , depuis 
le 17 janvier jusqu’au 13 février ; elle s’est élevée à la hau- 
teur de trois pieds. Les alternatives de journées pures et de 
journées neigeuses , ont donné naissance à des strates nom- 
breux très-visibles , principalement sur les murs de souténe- 
ment des terrasses et sur les bords des toits ; le vent d'ouest 
accumulait des masses énormes de neige sur le pignon 
tronqué N, E. des maisons situées dans la direction de la 
vallée (N. E., S. O.) ; les couches récentes, plus ou moins 
puissantes , surplombaient les anciennes et se recourbaient à 
l'extrémité, de telle façon que la tranche des couches formait 
un plafond au-dessus de la muraille. La masse entière, puis- 
sante , feuilletée comme nos roches schisteuses , surplombait 
les édifices , se maintenait suspendue dans les airs à la faveur 
de l’action solaire et de la congélation nocturne et menacait 
incessamment notre insouciante population. 

Les formes que la neige affectait étaient le grésil, les houpes 


— 112 — 
cristallines ou petits flocons, les aiguilles plumeuses irrégu- 
lièrement disposées , les aiguilles groupées d’après les lois qui 
régissent les cristaux de glace et les étoiles. 

Jusqu'à la mi-février la croûte superficielle ne prit pas de 
consistance et le névé ne put se former qu’en très-petite quan- 
üité; la neige resta pulvérulente ou farineuse, obéissant à 
toutes les vicissitudes de la température et passant avec assez 
de rapidité de 0 à—25° centigrades. 

Vers la fin de février, sous l'influence d'un vent humide | 
et violent du S. O. et par une température de + #, la neige 
absorba une grande quantité d’eau; elle s’affaissa partout 
d'un pied environ. Une nouvelle neige ( neige à gros flocons) 
tomba abondamment pendant le courant de mars; elle aug- 
menta de trois pieds l’ancien dépôt et disparut insensible- : 
ment pendant la première quinzaine d'avril. 

Pendant le courant de l'hiver j'ai observé deux phéno- 
mènes , celui de la dépression ou contraction de la neige, et 
son passage au névé. 

Sous l'influence d’un vent actif du S. O., par une tempé- 
rature de + 2 ou + 3, ou sous l'influence d’un brouillard et 
par la même température , la neige se déprime ou s’affaisse 
tout-à-coup ; elle se détache des parois verticales des rochers, 
des murs de clôture et se contracte des bords au centre, s’af- 
faisse de la surface à la base ; les couches superficielles obéis- 
sent plus grandement au mouvement de contraction ; un vide 
ou biaisement se forme entre la roche ou la muraille et le 
dépôt. La neige devient humide ou pâteuse de sèche ou sac- 
charoïde qu'elle était primitivement ; par la pression on en 


— 113 — 

retire une assez grande quantité d'eau. La fusion de la neige 
s'observe partout, mais à cette première période de la réso- 
lution de la neige en eau, cette dernière ne s'échappe pas 
encore du dépôt ; les murs sortent pour ainsi dire de la neige 
par le seul effet de la contraction , et malgré la puissance de 
quelques dépôts qui surpassent d’un ou deux pieds le mur, 
le phénomène se produit , la neige montre à l'observateur sa 
tranche composée de strates nombreux. Ce phénomène de 
contraction se produit de nuit ou de jour, sous un ciel cou- 
vert ; le biaisement ne peut donc pas être attribué aux ré- 
flexions solaires. La contraction de la neige sans écoulement 
de l’eau s’observe fort bien sur de la neige convenablement 
disposée dans un panier, une caisse, ou dans tout autre ap- 
pareil. 


M. Guyot présente une carte du lac de Neuchâtel, sur la- 
quelle il a tracé plusieurs coupes transversales, résultat de 
quelques centaines de sondages qu'il a faits l'été dernier dans 
la partie orientale du lac , et d’un grand nombre d’autres qui 
ont élé exécutés à sa prière dans la partie occidentale, par 
les soins de M. le comte Henri de Pourtalès-Gorgier. Ces 
. mesures font connaître avec précision la structure de cette 
vallée sous-lacustre. D'abord unique dans les eaux de Neu- 
châtel , et en forme de berceau, cette vallée présente depuis 
la hauteur du village d’Auvernier une colline qui s'élève , au 
milieu même du lac à près de 400 pieds de hauteur au-dessus 
du fond , et dont le point culminant , près de son extrémité 
orientale ; arrive jusqu'à 30 pieds au-dessous de la surface. 


— 114 — 
Cette colline, aplatie à son sommet, mais aux pentes assez 
abruptes, divise tout le bassin en deux vallées, de longueur et 
de profondeur inégales. La principale suit le pied du Jura, en 
conservant long-temps 400 à 438 pieds de profondeur. La se- 
conde, qui lui est parallèle, court le long du Vuilly. D'abord, 
presque égale en profondeur à la vallée principale , elle se 
relève insensiblement vers l'ouest, pendant que la colline elle- 
même s’'abaisse. Le sommet de la colline et le fond de la vallée 
se trouvent ainsi bientôt au même niveau, formant un plateau 
qui, à la hauteur de St.-Aubin, n’est plus qu'à 480 pieds 
au-dessous de la surface et paraît comme élevé d'un étage 
au-dessus de la grande vallée, dont la profondeur est restée 
la même. Vers l’ouest, ce trait de relief s’efface toujours da- 
vantage et va mourir au-delà d’Yvonan. Ici le lac se rétrécit 
de moitié , et la vallée principale conserve seule une profon- 
deur qui donne lieu au prolongement rétréci occidental du 
lac, qu'on pourrait appeler lac d'Yverdon , tout comme, à 
l'extrémité opposée, le prolongement de la petite vallée forme 
le goulot par lequel s'échappe la Thielle. La côte sud, ou du 
Vuilly, présente sur toute sa longueur un bas-fonds, qui s'é- 
tend d'une manière uniforme, parallèlement à la côte sur une 
largeur de 10 à 20 minutes à partir des bords, sans atteindre 
nulle part plus de 6 à 8 pieds de profondeur. C’est ce que les 
pêcheurs appellent le blanc-fond, en opposition à la noire- 
eau, qui commence avec la profondeur. Au-delà de cette 
ligne seulement, commence brusquement, par des pentes 
très-fortes , la vallée qui forme le véritable bassin du lac. 
M. Guyot, expose les raisons qui lui font croire que ce sont 


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— 115 — 
là les anciennes limites du lac, dont les vagues ont succes- 
sivement rongé la colline marneuse et molassique du Vuilly, 
et escarpé, sur tout cet espace, les falaises élevées qui bordent 
la côte. 

Le fond du lac n'est ni plat, ni parfaitement nivelé, comme 
ceux de quelques lacs alpins; sauf dans les bords, il est 
uniformément recouvert d'une vase fine, onctueuse, blan- 
châtre ou légèrement jaunâtre, d’une profondeur inconnue, 
mais dans laquelle la sonde s'enfonce souvent à un demi pied. 
Près des bords molassiques , partout où le mouvement de la 
vague peut se faire sentir, il n’y a pas de vase, mais un 
sable d'autant plus grossier que l’on approche plus du rivage. 
La rive même offre sur tout le pourtour, du gravier en ma- 
jorité alpin et des galets de toute grosseur. Le blanc-fond 
du Vuilly, là où il est lavé par la vague, est formé par des 
couches presque horizontales de molasse solide, continuation 
de celles du Vuilly, sur lesquelles reposent çà et là quelques 
gros blocs alpins. 

A. Guyor, secrétaire. 


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N° 44. 


BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DE MEUCEISTFTEL. 


Section de la Chaux-de-Fonds. 


Séance du 22 février 1844. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


M. Nicolet présente un exemplaire de la variété noirâtre 
de la Corneille mantelée , qui a été tuée aux moulins de la 
Chaux-de-Fonds, vers la fin de janvier. 

Il donne ensuite la liste des oiseaux sédentaires et des oi- 
seaux de passage, qui passent l'hiver dans le district de la 
Chaux-de-Fonds : ce sont l’autour ( Falco palumbarius L.) ; 
l'épervier (Falco nisus L.); la buse (Falco buteo L.); la chouette 
Tengmalm (Strix Tengmalmi) ; le hibou brachyote (St. bra- 
chyotos Lath.) ; le hibou grand-duc (St. bubo L.); le corbeau 
noir (Corvus corax L.) ; la corneille noire (C. corone L.) très- 
commune ; la corneille mantelée (C. cornix L.) très-rare ; la 
pie (C. pica L.) très-commune:; le geai (C. glandarius L.). Pen- 
dant l'hiver, faute de faines , le geai se nourrit de bayes et de 
petits oiseaux ; la draine (Turdus viscivorus) ; le litorne (T. pi- 
laris L.); le merle noir (T. merula L.). Ces trois oiseaux se 
nourrissent de sorbes et d’alises, et disparaissent avec ces 


— 118 — 

fruits ; le cincle plongeur (Cinclus aquaticus Bechst.), côtes du 
Doubs; le roitelet ordinaire (Sylvia regulus Lath.); le troglo- 
dite ordinaire (Syl. troglodites Lath.); la mésange charbon- 
nière (Parus major L.) ; la mésange petite charbonnière ( P. 
ater L.) ; la mésange hupée (P. cristatus L.). Ces trois espèces 
sont trés-communes dans nos forêts ; le bruant jaune (Em- 
beriza citrinella L.) , rare à la Chaux-de-Fonds, très-commun 
aux côtes du Doubs et aux Converts :; le bec croisé des sa- 
pins (Loæia pytiopsittacus Bechst.) ; le bec croisé des pins (L. 
curvirostra L.); le bouvreuil commun (Pyrrhula vulgaris L.) ; 
le gros-bec (Fringilla coccothraustes Temm.); le gros-bec moi- 
neau (Fr. domestica L.); le gros-bec des Ardennes (Fr. mon- 
tifringilla L.) , le gros-bec pinson (Fr. coelebs L.). Ces deux 
pinsons passent accidentellement l'hiver dans le jardin de 
M. A. Courvoisier ; le gros-bec tarin (Fr. spinus L. ); le pic 
noir (Picus martius L.) ; le pic vert (P. viridis L.); le pic 
épeiche (P. major L.) ; la sitelle torchepot (Sitta europaea L.); 
le grimpereau familier (Certhia familiaris L.); le tichodrome 
échelette (Tichodroma phænicoptera Temm.); aux côtes du 
Doubs et aux Converts ; le martin-pêcheur alcyon (Alcedo 
Ispida L.); aux côtes du Doubs et Converts , le tetras auer- 
han (Tetrao urogallus L.). D' Pury, secrétaire. 


Séance du 14 mars 1844. 
Présidence de M. WURFLEIN. 
M. Piaget-Guinand, déjà connu honorablement par plu- 
sieurs découvertes en horlogerie , présente un instrument 


qu'il appelle compas de proportion. Ce compas peut donner 


— 119 — 
mathématiquement le diamêtre et la hauteur de toutes les 
piéces de la montre, et mesurer exactement toutes les gran- 
deurs, depuis 1 pied à ‘/1728 de ligne. Une commission, com- 
posée de MM. Eug. Savoye, L.-C. Ducommun , Just. Billon, 
Genseli et Favre, est chargée d'examiner cet instrument , 
et d'en faire l’objet d'un rapport. 

M. le D" DuBois présente à l'assemblée une pièce patho- 
logique consistant en un cancer siégeant au tiers inférieur 
de l'œsophage d’un homme mort d'inanition , après avoir été 
soixante-et-dix jours sans manger. Ce cancer, long de trois 
pouces et demi, remplissait complétement le diamètre de 
l'œsophage. La seule communication qui existât entre la 
partie supérieure et la partie inférieure de ce tube, était 
formée par le ramolissement d'un lubereule. Cet homme, 
qui n'avait jamais voulu appeler de médecin à son secours, 
était dans un état d'émaciation extrême; il ne se plaignait 
pas tant de la faim que d'une soif dévorante, qu'il ne pou- 
vait appaiser. Hormis les poumons ramollis à leur base , tous 
les viscères, bien que sains, étaient tellement atrophiés, 
qu'on distinguait parfaitement les vertèbres dorsales à travers 


les parois de l'abdomen. 
| D' Pury, secrétaire. 


Séance du 20 mars 1844. 


Présidence de M. WURFLEIN. 
M. Dubois, D', lit un mémoire sur la dissection du fœtus 


humain présenté à l'assemblée au mois de décembre 1843, 


(voir N° 4 de ce Bulletin). Après avoir rappelé les différentes 


— 120 — 

méthodes d'après lesquelles les médecins ont successivement 
divisé les monstres, depuis Fortunio Liceti, qui publia son 
ouvrage De monstris au commencement du XVII siècle, jus- 
qu'à nos Jours , M. DuBois passe à la description du monstre 
qu'il a étudié. Ce monstre appartient au genre des monocé- 
phales à corps double, et a reçu le nom d'Iniops par Isidore 
Geoffroy-St.-Hilaire. Extrêmement rare dans l'espèce hu- 
maine , il consiste dans la fusion de deux têtes par leurs 
parties latérales, et de deux corps par leur face antérieure. 
La fusion du corps à lieu jusqu’au nombril, qui est unique, 
ainsi que le cordon ombilical. Les deux corps sont de sexe 
féminin , et leur développement ne le cède guère à celui du 
fœtus à terme. 

Pour expliquer le mode de formation de ce monstre, 
M. DuBois rappelle qu'il y a eu fusion de deux individus ; 
mais cette fusion existe dans certaines parties du corps 
beaucoup plus intimément que dans d'autres. Ainsi nous 
trouvons un simple cerveau et deux cervelets, un intestin 
simple dans une partie de son cours, et plus tard double, 
un estomac, deux foies , deux cœurs; il est vrai, que de ces 
derniers organes, ceux qui appartiennent au plan postérieur 
sont beaucoup plus petits que ceux du plan antérieur, et 
semblent prouver, avec l’état cartilagineux des côtes et du 
sternum du plan postérieur, que la fusion n'a pas été origi- 
nelle. Il résulte des faits énoncés par M. DuBois, que tan- 
dis que la fusion des deux têtes s'est faite latéralement , il y 
a eu plus qu’accollement de deux corps par leur face anté- 
rieure; il y à eu juxta-susception, si l'on osait créer ce terme 


— 121 — 

pour le mode d'union qui a dù présider à la réunion des deux 
poitrines et des deux abdomens. La persistance de deux cer- 
velets coïncidant avec celle de quatre extrémités inférieures 
et supérieures , parait corroborer l'opinion des auteurs, qui 
pensent que le cervelet préside à la coordination des mouve- 


mens des extrémités. 
Dr Pury, secrétaire. 


Séance du 11 avril 1844. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


M. Favre lit un rapport sur le compas de proportion à 
l'usage de l'horloger, présenté à la Société par M. Piaget- 
Guinand, horloger à la Chaux-de-Fonds. 

Le rapporteur fait l’histoire et la description du compas 
de proportion ordinaire, inventé à la fin tu XVE siècle, par 
Josse Byrse, astronome à Hesse-Cassel , et perfectionné plus 
tard par Galilée. Puis il passe aux compas de proportion dont 
on a fait usage jusqu’à présent dans notre fabrication d’hor- 
logerie. Ils sont au nombre de deux : le premier a été inventé 
en 1773, par M. Louis Baptiste Preud’homme, horloger, 
membre du Comité de la Société des arts de Genève; le se- 
cond a été introduit dans notre pays vers 1831, par M. Oli- 
vier Quartier, du Locle, qui l’a rapporté d'Angleterre; il a été 
reproduit avec un léger changement par M. Francois Du- 
commun , de la Chaux-de-Fonds. 

Le compas de M. Preud'homme a été construit en ‘vue de 
faciliter la fabrication des montres à roue de rencontre; 
maintenant que l’on n'établit presque plus que des montres 


Lépine dans notre localité, ses principales propriétés devien- 
nent entièrement inutiles. 

Quant au compas anglais, importé par M. Quarter, il 
ne sert qu'à donner le diamètre d’un pignon qui doit engre- 
ner avec une roue dont on connaît le diamètre et le nombre 
des dents. 

Le compas, présenté à la Société par M. Piaget-Guinand, 
résumant toutes les données nécessaires à l’établissage d’une 
montre Lépine à échappement à cylindre ou à ancre, répond 
aux besoins du moment, et vient combler les lacunes aux- 
quelles ont donné lieu , dans le compas de M. Preud' homme, 
les changemens survenus dans les produits de l'horlogerie. 
Il a l’avantage d'être d’une construction facile, d'un prix 
peu élevé, d’un usage simple et commode, et à la portée de 
chacun. 

Ce compas donne instantanément , et avec une précision 
rigoureuse, les diamètres des pièces suivantes, pour une 
montre d’une grandeur quelconque. 

du barillet. 

du couvercle du barillet. 

du vide du barillet. ; 

du balancier. 

de la roue de grande moyenne. 

de la roue de petite moyenne. 

de la roue de champ. 

du spiral. 

des roues de cylindre et d'ancre. 

de la roue à canon. 


— 123 — 
de la roue de minuterie. 
du cylindre. 
la largeur des dents de la roue de cylindre. 
les diamètres de tous les pignons. 
et l'épaisseur de la lame du ressort de barillet. 
Il donne de même les hauteurs des pièces suivantes : 
de l'axe du balancier. 
du pivotage de la roue d’ancre. 
» de la roue de champ. 
» de la petite moyenne. 
» de la grande moyenne. 
» de la roue de cylindre. 
du pignon de la roue de petite moyenne. 
» de champ 
» de la grande moyenne. 
» d'échappement. 
» d'ancre. 
» de minuterie. 
du barillet. 
du couvercle du barillet. 
de la retranche du barillet. 
du ressort de barillet. 
de la platine. 
de tous les ponts. 
de la burette de faux cadran. 
de la roue de cylindre pour monture. 
de l'arrêtage. 
de la roue de cylindre ordinaire. 
10 


—. 124 — 

du balancier. 

de la roue de grande moyenne. 

de la roue de petite moyenne: 

de la roue de champ. 

de la roue à canon. 

de la roue de minuterie. 

de la roue d’ancre. 

Le compas de M. Piaget indique de Me la position de 
tous les mobiles ou l’engrenage , avec une grande précision, 
la grosseur des pivots , ainsi que le poids du balancier pour 
un ressort de barillet donné. 

M. Favre met sous les yeux de la Société des épures faites 
par lui-même , représentant en grandeur naturelle tous les 
compas dont il est fait mention dans son rapport. 


L. FAVRE, secrétaire. 


Séance du 25 avril 1844. 


Présidence de M. WURFLEIN- 


M. Maicolet met sous les yeux de la Société des ossemens 
fossiles, provenant des marnes nymphéennes de la Chaux- 
de-Fonds, ainsi que les dessins qui les représentent et qui sont 
dus au beau crayon de M. Favre. Ces fossiles appartiennent 
à deux espèces de mammifères communs à notre terrain la- 
custre et aux terrains tertiaires sub-pyrénéens du département 
du Gers ; l’une est le dicrocère trapu de M. Lartet, l'autre 
est un Lophiodon découvert en 1838, par M. Lartet, à Si- 
morre (Gers). Les ossemens fossiles de notre bassin tertiaire, 
sont dispersés çà et là dans les couches tourbeuses et mar- 


— 125 — 

neuses , ou dans les galets tertiaires de l'étage supérieur du 
calcaire lacustre , qui occupe le centre de la vallée. Ces os- 
semens auront été probablement entraînés au fond de la val- 

lée par les eaux alluviales. Les os longs et ceux du crâne 
sont plus ou moins altérés , broyés ou fracturés ; les maxil- 
laires manquent, les os courts, ceux du carpe et du tarse de 
plusieurs mammifères sont intacts. Les os du dépôt tourbeux 
sont teints d’une couleur noirâtre, ceux du dépôt marneux 
sont blanchâtres. Les dents sont peu ou pas altérées. Ces os- 
semens offrent de l'intérêt sous le double rapport de la z00- 
logie géographique, et de l’âge géologique des terrains ter- 
tiaires. 

Les ossemens qui appartiennent au dicrocère trapu , sont 
la quatrième molaire droite supérieure ; la seconde molaire 
droite supérieure; la quatrième molaire gauche inférieure ; 
la seconde molaire droite inférieure ; deux astragales et un 
doigt. | 

Les molaires de notre Lophiodon vont en diminuant de 
longueur depuis la dernière jusqu’à la première. Ce carac- 
tère appartient à tous les Lophiodons décrits par Cuvier. Des 
trois collines de l'arrière molaire inférieure, les deux pre- 
miéres sont bien séparées, transverses, tranchantes; une arête 
part de chacun des côtés externes des collines, et descend 
obliquement en dedans. Ces caractères appartiennent à l’es- 
pèce moyenne et à la grande espèce d'Issel, à l'espèce moyenne 
et à la très-petite d'Argenton, à la grande espèce de Buchs- 
weiler. Les incisives ont une grande analogie avec celles 


du sanglier, les deux incisives médianes et supérieures 


— 426 — 

sont très-larges , obliques , crénelées , divisées en deux lobes 
inégaux par up sillon. Le bord libre des incisives de la mà- 
choire inférieure est usé. La couronne des quatre incisives 
moyennes est quadrilatère, comprimée d'avant en arrière , 
large vers son bord libre, elle se rétrécit vers la racine et 
présente en avant de petits sillons longitudinaux , en arrière 
une arête saillante et des sillons longitudinaux. Les incisives 
médianes, sont plus petites et plus étroites que les suivantes 
qui sont larges ; les côtés de celles-ci sont légèrement créne- 
lés. Les deux incisives externes sont plus petites, mais plus 
larges que les deux médianes ; elles présentent en avant un 
sillon longitudinal, en arrière une arête saillante. 

M. le Dr Pury présente quelques considérations sur le 
danger des saignées répétées dans la fièvre typhoïde, lors 
même qu'elle est compliquée de pneumonie. Il s'appuie sur 
la décomposition qu'éprouve alors le sang, décomposition 
qui est analogue à celle qu'on observe dans la chlorose, et 
sur l'état d'épuisement consécutif de celte même fièvre, qui 


rend les phthysies galopantes si fréquentes alors. 


Dr Pury, secrétaire. 


TABLE 


DES MATIÈRES. 


PHYSIQUE. 


Objection à la théorie de M. Saigey, sur les conditions d’é- 
quilibre de l'atmosphère , par M. LADAME. 
Sur la machine de Bonijol par M. LADAME. 


MECANIQUE. 


Rapport sur le nouveau compas de pl de M. Piaget- 
Guinand , par M. D'OSTERWALD. 3 Lg Le 

Description du compas de proportion de M. | Paretdnan 
par M. FAVRE. 


PHYSIQUE DU GLOBE. 


Sur le mouvement du glacier de l’Aar, par M. AGAssiz. 

Influence de l’inclinaison du sol sur le mouvement de la glace, 
par M. AGASSIZ. vs : 

Observation de M. re sur Fe même Lui 

Sur une chute de grêle au bord du Doubs , par M. PurY. 

Résultats d’une série d'observations barométriques , faites 
dans la Suisse orientale , par M. D’OSTERWALD. 

Sur les changemens qu’a subis la surface de la terre nn 
la période actuelle, par M. de ROUGEMONT. 

Sur les transformations que la neige subit pra ï pète : 
par M. C. NICOLET. 4 s : ; 
Sur le relief du fond du lac ii Neuchâtel, par M. HAN 


27 
62 


— 128 — 


GEÉOLOGIE. 


Structure géologique des régions HRérre. du glacier du 
Rosenlaui , par M. DESOR. : : 

Sur la dispersion du terrain er Sa do entre ds sise et 
le Jura , par M: GUYOT . , 

Analyse de l’ouvrage de M. domigny s sur La régie de ra 
mérique du sud, par M. DESOR. : 

Sur une dent fossile de Lophiodon, par M. C. NICOLET. 

Sur les accumulations de blocs au sommet des montagnes , 
par M. DEsOR . l u ! 

Observations sur le même np. par M. FRE 

Sur les bonds de Bierre, par M. DESOR. 

Observations sur ce sujet, par M. L. COULON. | 

Sur un éboulement de terrain près du su de Gorgier, 
par M. G. de PurY ses mOTs:0k das 

Observations sur le même sujet, par MM. de ROUGEMONT, 
DESOR et GUYOT ahiagye ds 2 

Sur les ossemens Du, des marnes EL HA la 
Chaux-de-Fonds, par M. C. NICOLET . 


BOTANIQUE. 


Sur lé nombre de folioles du Dentaria heptaphyllos, par 
M. PurY. ; 

Rapport sur les mousses san canton dé Neuchâtel, } par M. Go 
DET . 


ZOOLOGIE. 


Sur les fossiles rapportés du Pérou par M. TSscHUDI; par 
M. AGASSIZ, Fe 5 auf 

Sur les oiseaux européens dé an. par M. C. NICOLET 

Sur les progrès de l'étude de l’ichthyologie, par M. AGASssIz 


56 


123 


36 


74 


20 
44 
A9 


CES NT OP TTSR 


— 129 — 


Sur l'importance des divers embranchemens du règne ani- 
mal , sous le point de vue biologique, par M. AGAssIz 
Sur l’Isar des Pyrénées , comparé au chamois des Alpes , par 
M. AGASSIZ - ‘ L 
Sur la distr ation neribtique dé Dan par 
M. AGASSIZ $ to 
Sur la distribution géeraihiiue des Ghiroptères; par 
M. AGASSIZ SR M TL, 2 TAN SNEC TE 
Sur les migrations dé oiseaux aquatiques , par M. L. soie 
Sur la collection zoologique de la Chaux-de-Fonds, par 
M: DESOR . .:. : SR NE EE FORT 
Sur le genre Prrulé ” aise par M. AGASSIZ 
Sur les oiseaux du Pérou rapportés par M. TscHuDI, par 
M. L. COULON 4 22). 9h. 
Sur les prétendues sdentitést que es bé sn 
entre les espèces vivantes et les fossiles de certains terrains , par 
M. AGASsIz 4 PE PT : 
Enumération des oiseaux états et He oiseaux de pas- 
sage , qui passent l'hiver dans le district de la Chaux-de-Fonds, 
par M. C. NICOLET 


ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. 


Sur l'organe électrique des raies non électriques, par M. Vogr 
Sur les corps de Pacini, par M. Voer. 
Sur le sens de l’ouie chez les insectes, par M. .. 


MEDECINE. 


Sur un monstre humain bi-femelle , par M. IRLET. 

Sur un trismus, suivi d’une One gangreneuse , par 
M. DuBois . Nr 

Sur le traitement sa fr actures RE la Nue, par M. PURY. 

Sur les ruminans humains, par M. PURY 


50 


57 


108 


117 


— 130 — 


Observations sur le même sujet, par MM. DuBois et DROZ 

Sur l’insalubrité des eaux de la Chaux-de-Fonds, par M. DRoz 

Observations sur le même sujet, par M. DuBois 

Sur une amputation Sa naturellement chez un chevreuil, 
par M. PURY 

Sur la police médicale de canton de Neuchâtel, par M. PURY 

Rapport sur un mémoire de M. Pury, sur la police médi- 
cale, par M. BOVET DCR RL à 

Sur la périodicité des épidémies à Neuchâtel, par M.CASTELLA 

Sur les effets du traitement par les grandes ventouses, par 
M. JuNop ME LA AE E 

Observations sur le même sujet, par M. Vogr . ; 

Mouvement de l'hopital Pourtalès, pendant l’année 1843, 
par M. de CASTELLA . ; ner 

Sur un cancer de l’ésophage, par M. buis ; 

Description d’un fœtus humain du genre Iniops, par M. Du- 
Bois AR RS ED PH NE = © 
Sur le deu de saignées répétées dans les bin ty- 
phoïdes, par M. PURY 


119 


N° 42. 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DS NEVCHATER. 


— te © OO m—— 


Séance de rentrée du 6 novembre 1844. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le président propose à la Société d'élire désormais 
le bureau dans la première séance de rentrée et non pas 
au commencement de l’année civile, comme cela a eu 
lieu jusqu'ici. La Société ayant été unanime à reconnaître 
l'opportunité de ce changement, il est adopté, et on pro- 
cède immédiatement au renouvellement du bureau. 

Tous les membres en ont été confirmés , ensorte que 
le bureau pour 1845 se compose de : 

M. L. CouLon, président. 

M. L. AGassiz, vice-président. 

M. À. Guxor, secrétaire de la section de physique et 
chimie. 

M. E. Desor, secrétaire des sections d'histoire natu- 
relle et de médecine. 


M. d'Ostervald annonce, de la part de M. Nicolet, 
maire du Locle, qu'il va être posé au Locle une lunette 


méridienne, ainsi qu'un thermomètre et un baromètre 
publics. 


11 


— 132 — 


M. Guyot rend compte du travail de M. Hopkins sur 
l’état de la matière à l'intérieur du globe et sur les appli- 
cations que cet auteur fait de sa théorie aux phénomènes 
volcaniques. 

Les conclusions de ce mémoire sont contraires à l’hy- 
pothèse si généralement et si commodément admise de la 
fluidité ignée de l’intérieur du globe et du peu d'épaisseur 
de la croûte solide. M. Guyot appuye sur la nécessité de 
revoir avec plus de soin et de scrupule toutes les bases 
de cette hypothèse, que Poisson a attaquée au nom de la 
physique mathématique; Népomucène Fuchs au nom de 
la chimie et de la minéralogie; tous les disciples de Wer- 
ner au nom de la géognosie, et Hopkins enfin au nom 
de l'astronomie et des lois de l'attraction. 

M. Ladame fait quelques remarques sur la valeur des 
objections de Poisson et de Hopkins contre l’idée de la 
fluidité ignée de l’intérieur du globe. Selon lui, les objec- 
tions de Poisson reposent essentiellement sur deux asser- 
tions qui ne sont rien moins que prouvées : la première, 
que les corps liquides deviennent solides sous une forte 
pression; la seconde, que la haute température de l'in 
térieur devrait, dans cette hypothèse, volatiliser tous les 
corps et exercer sur la croûte extérieure une pression 
suffisante pour la briser. Or, jusqu'ici aucune expérience 
ne nous a appris qu’en soumettant un corps solide à une 
pression plus grande celui-ci se liquéfiait à une température 
plus basse; ainsi, par exemple, la glace fond sur les 
montagnes à la même température que dans la plaine ; 
d'un autre côté, plusieurs corps tels que les métaux, le 
fer, le cuivre, la platine, le sable, etc., ne donnent pas 
de vapeurs sensibles à des températures de plusieurs 
milliers de degrés. 


— 133 — 

Quant au mémoire de Hopkins, sans contester le mérite 
de ce travail dont il ne connaît point encore les détails, 
il ajoute qu’on ne peut être trop sur ses gardes dans 
l'application des mathématiques aux questions d'hydros- 
tatique; puisque dans tous les calculs on part toujours 
de la mobilité parfaite des liquides et qu'on ne sait pas 
encore tenir compte de leur viscosité ; cette propriété s’op- 
pose aux inconvéniens intérieurs des liquides, et atténue 
ainsi à un haut degré les effets qui résultent d'un chan- 


gement dans leur forme ou dans les pressions qu'ils 
exercent. 


M. Desor rend compte de l'ascension du Wetterhorn 
qu'il a exécutée le 28 août en société de MM. Dollfuss, 
Dupasquier et Stengel. Partis du glacier de l’Aar la veille 
de l'ascension , ils traversèrent le glacier de Gauli à côté 
de l’'Ewigschneehorn et allèrent coucher aux chalets su— 
périeurs sur la rive gauche du glacier de Gauli. Le len- 
demain matin ils s’acheminèrent vers le fond du cirque 
de Gauli, en contournant le Hangendhorn. Ce cirque est 
limité au nord par un escarpement très-raide que les car- 
tes représentent comme une arête, mais qui n'est autre 
chose que le bord d’un plateau couvert de neiges éternel- 
les. C’est sur ce plateau que sont assises les trois cîmes 
des Wetterhürner auxquelles M. Desor a appliqué des 
noms particuliers, appelant la première Rosenhorn, la 
seconde Müittelhorn et conservant à la troisième, qui est 
la plus occidentale, le nom de Wetterhorn proprement dit. 
Ce fut le Rosenhorn que nos voyageurs choisirent pour 
point de mire; ils trouvèrent le côté septentrional du pic 
trop abrupt pour pouvoir être escaladé; ils se dirigérent 


— 134 — 

par conséquent vers le flanc méridional qu'ils supposaient 
moins escarpé, en suivant un embranchement très- 
large des champs de neige entre le Berglistock et le Ro- 
senhorn. Cette partie du plateau n’est figurée sur aucune 
carte. Après avoir cheminé environ une heure et demie 
dans cette direction, nos voyageurs virent surgir de l’au- 
tre côté les cimes de la Jungfrau, de l'Eiger et du Mônch. 
Ils étaient au point de partage entre les glaciers qui des- 
cendent au nord et le glacier supérieur du Grindelwald qui 
descend à l’ouest. Ils ne trouvèrent non plus ici aucune 
arête; la pente était même si faible des deux côtés qu'en 
plusieurs endroits il semblait que les masses de neige hé- 
sitassent sur la direction dans laquelle elles allaient se dé- 
verser. De-là au sommet du pic il n’y a guëre que mille 
pieds environ. Le sommet a la forme d’une coupole qu’on 
aurait partagée verticalement par le milieu. La roche qui 
compose la montagne est du gneiss, le même qui forme 
aussi les pics environnans du Tosenhorn, du Schreckhorn, 
du Mittelhorn, etc. La limite du calcaire passe entre le 
Mittelhorn et le Wetterhorn proprement dit, et ce der- 
nier est tout-à-fait calcaire. Au lieu de redescendre par 
le même chemin , M. Desor et ses compagnons prirent la 
direction de Meyringen par le glacier Renfen, et ce fut 
en traversant l’arête du Tosenhorn qui sépare ce glacier 
de celui de Rosenlaui, qu'ils rencontrérent les seuls pas- 
sages vraiment difficiles. 

Cette expédition entreprise dans un but purement to 
pographique eut ainsi pour résultat de rectifier plusieurs 
erreurs de nos cartes sur le relief de cette partie des Al- 
pes. M. Desor rappelle à ce sujet qu’on s’exagère en gé— 
néral trop l'importance des arêtes relativement aux pla- 


— 135 — 
teaux de neige. Il en voit la cause dans le fait que l’on 
a transféré aux régions supérieures les proportions des 
régions inférieures des glaciers. Là, en effet, les massifs 
qui séparent les glaciers sont d'ordinaire beaucoup plus 
considérables que ces derniers; dans les régions supé- 
rieures, au contraire , les arêtes ne sont que l'accessoire; 
ce sont des ilots au milieu d’un grand océan. Si les car- 
tes ont en général une tendance à exagérer et à multi 
plier les arêtes, cela provient, selon M. Desor, de ce 
que ceux qui ont levé les plans de ces contrées ne sont 
pas montés dans les hautes régions , mais se sont con- 
tentés de dessiner les contours de bas en haut. Ils ont 
ainsi pris l'escarpement du plateau pour des arêtes et 
ont figuré des séparations là où il n’en existe point dans la 
nature, comme, par exemple, à l'origine du glacier su— 
périeur du Grindelwald, à l'origine du glacier du Gauli, etc- 
Il est digne de remarque que le plateau ou le soulève- 
ment de la masse n’ascende nulle part aussi haut qu'aux 
environs du Wetterhorn. Si donc les Wetterhürner comp- 
tent parmi les grandes cîimes, ce n’est pas au pic pro- 
prement dit qu'ils le doivent, mais uniquement à l’exhaus- 
sement de leur base. M. Desor joint à cette communication 
une carte des environs des Wetterhôner , dessinée par 
M. Stengel, qui représente les reliefs vrais de cette contrée. 


A. Guvyor, secrétaire. 
Séance du 20 novembre 1844. 
Présidence de M. L. CouLox. 


M. le docteur Borel commence la lecture d'un mémoire 
hygiénique sur la dorure au feu des pièces de montres, 


— 136 — 

dans les montagnes du canton de Neuchâtel. Ce mémoire 
contient le résultat de l'enquête hygiénique sur cette 
branche importante d'industrie, dont le conseil d'Etat 
l'avait chargé, conjointement avec MM. le professeur La- 
dame et Olivier Quartier, du Locle. Dans la tournée qu'ils 
ont faite dans ce but dans nos montagnes, les commissai- 
res du gouvernement ont eu connaissance de 63 ateliers 
de dorure au feu, répartis comme suit : 


30 dans la juridiction de la Chaux-de-Fonds, 
28 dans celle du Locle, 

3 aux Ponts, 

2 aux Brenets. 
63 () 

Le comité d'enquête n’en a visité que 61, à cause de 
l'absence de deux propriétaires d'ateliers. Dans tous ces 
ateliers, on s’occupait exclusivement de la dorure des pièces 
de montre; il n’y en avait que deux où l’on fit la dorure 
au mat, et où l’on donnât aux objets dorés la teinte d’or 
rouge, d'or moulu (**), etc. Après avoir rappelé en peu 
de mots les différentes opérations dont se compose la do- 
rure au feu, savoir, le recuit, le dérochage ou décapage, 
l'application de l'amalgame d'or et de mercure, la mise en 
couleur et le grattebossage, auteur du mémoire fait con- 
naître la manière dont la plupart des doreurs de nos 
montagnes procèdent à ces diverses opérations, et fait 


(*) Depuis leurs courses dans nos montagnes, les commissaires du gou- 
vernement ont été informés qu’en sus des ateliers de dorure indiqués ci- 
dessus , il y en avait encore deux aux Planchettes et un à la Sagne. : 

(**) Il existe à la Chaux-de-Fonds un atelier dont le comité n’a pas eu 
connaissance, où l’on dore des ornemens de pendule et d’autres bronzes 
volumineux. 


— 137 — 


mention des influences plus ou moins nuisibles, que 
chacune d'elles exercent sur la santé. 

Pour le recuit, les doreurs de notre pays placent les 
pièces, les uns sur des charbons ardens, les autres sim- 
plement sur des braises couvertes de cendres. Plusieurs 
doreurs ne recuisent pas les trés-petites pièces de montre, 
telles que les balanciers , d'autres ne leur donnent qu'un 
léger recuit. Cette opération, qui peut exercer une in- 
fluence délétère sur les organes de la respiration , est en- 
visagée sans raison, par plusieurs doreurs, comme n'of- 
frant aucun danger pour la santé. Elle doit toujours se 
faire sous un appareil préservateur, qui mette l’ouvrier 
à l'abri des émanations auxquelles elle donne lieu. Cette 
précaution était prise dans 36 ateliers, où le recuit se 
pratiquait sans hotte vitrée de l'appareil à passer au feu. 
De ces ateliers, il y en avait 18 au Locle, 47 à la Chaux- 
de-Fonds et un aux Brenets. Dans les autres ateliers, 
cette opération se fait sous le manteau de la cheminée 
de la cuisine, et même, sans aucune précaution, dans 
des chambres où l’on couchait et où l’on prenait les repas. 

Le décapage se fait avec l'acide nitrique du commerce, 
mais seulement pour les grosses pièces, telles que pla- 
tines, cuvettes, etc.: dans la plupart des ateliers, on 
se contente de traiter les pièces plus petites, simplement 
par le nitrate acide de mercure. L'opération du décapage, 
à laquelle nos doreurs donnent le nom d'avivage, est 
très-nuisible à la santé, à cause de la grande quantité de 
vapeurs nitreuses qui se dégagent pendant qu’on l’effec— 
tue. Si ces vapeurs étaient respirées, elles porteraient une 
grave atteinte aux organes respiratoires. Tous les doreurs 
connaissent le danger auquel le décapage les expose; 


— 138 — 


aussi dans tous les ateliers munis d'appareil à hotte vi 
trée pour passer au feu, cette opération se pratique- 
t-elle sous cet appareil préservateur. 

Dans la plupart des ateliers on prépare le nitrate acide 
de mercure, en mettant une once de mercure dans une 
fiole, et en faisant agir sur lui, à froid, deux onces d'acide 
nitrique, ou d’eau forte du commerce; quelques doreurs 
emploient des proportions différentes d'acide et de mer- 
cure. L'auteur du mémoire donne à ces industriels le con- 
seil d'adopter les proportions indiquées par M. Darcet (‘) 
et de suivre pour la préparation de leur liqueur mercu- 
rielle les sages conseils donnés par ce savant. L'action de 
l'acide nitrique sur le mercure donne lieu à un dégage- 
ment très-considérable de vapeurs nitreuses extrêmement 
nuisibles aux organes de la respiration. Les doreurs en- 
visagent, avec raison, cette préparation du nitrate acide 
de mercure, comme une des plus dangereuses de leur 
profession. Il n’y en a aucun qui ne prenne des précau- 
tions pour l’exécuter. La plupart d’entre eux la font au 
foyer de leur appareil, hotte vitrée ou lanterne comme 
ils l'appellent; quelques-uns y procèdent à l'air libre; 
dans un très-petit nombre d'ateliers, elle se fait sous le 
manteau de la cheminée de la cuisine. 

L'application du nitrate acide de mercure convenable- 
ment préparé par le procédé de Darcet, sur les pièces à 
dorer, n’a presque aucun inconvénient pour la santé, 
parce qu'il ne donne lieu qu'à un dégagement très-peu 


(*) Ces proportions sont : 11 parties d’acide nitrique pur à 56°, sur 
10 parties de mercure purifié; on ajoute au mélange 50 à 56 parties 
d’eau distillée ou d’eau de pluie, lorsque l’action de l’acide sur le métal 
est terminée. ] 


— 139 — 


considérable de vapeurs nitreuses. Cette manière de dé- 
caper, à laquelle nos doreurs donnent le nom de blanchir, 
se fait dans nos montagnes, soit en plongeant les pièces 
de laiton dans la liqueur mercurielle étendue d’eau, soit 
en les frottant avec un pinceau trempé dans cette liqueur. 
Dans la plupart des ateliers, cette préparation s'exécute 
sous la hotte vitrée de l’appareil où l’on passe au feu. La 
préparation de l’amalgame d’or et de mercure se fait en 
combinant le plus ordinairement l'or d’un ducat de Hol- 
lande, avec une once de mercure (une partie d’or à-peu- 
près pour huit de mercure), dans un creuset, sur des 
charbons ardens. Pendant que la combinaison des deux 
métaux s'effectue, il se volatilise, par l'action de la cha- 
leur, une grande quantité de mercure, qui s'échappe sous 
forme des vapeurs invisibles, lesquelles ont l’influence la 
plus pernicieuse sur la santé des doreurs , et donne lieu 
au tremblement convulsif et à d’autres accidens, lorsque 
cette combinaison ne se fait pas avec les précautions 
convenables , et sous un appareil à hotte d’un fort tirage. 
Il doit être sévèrement interdit aux doreurs de faire cette 
préparation sous une cheminée communiquant avec d’au- 
tres conduits, ni sous le manteau de leur cuisine. Dans 
35 ateliers de dorure de nos montagnes, elle s’exécutait 
sous la hotte vitrée de l'appareil à passer au feu. Elle 
avait lieu dans 15 autres sous le manteau de la cheminée 
de la cuisine du ménage; dans 6 autres ateliers, on y pro- 
cédait sous des cheminées exclusivement destinées à cet 
usage, mais sans appareil préservateur ; dans un seul 
atelier la combinaison d’or et de mercure se préparait à 
l'air libre. 

Dans la plupart des ateliers, les ouvriers se servent du 


— 140 — 


nitrate acide de mercure, et non d'acide nitrique pour 
délayer l’amalgame d’or et pour en faciliter l'application. 
En étendant celui-ci sur les pièces à dorer, le contact du 
mercure avec les doigts de la main peut donner lieu et 
donne lieu quelquefois à des accidens fâcheux qu'il serait 
facile de prévenir par l'usage de gants en peau de vessie, 
ou en taffetas gommé, ou autre tissu souple et aussi im- 
perméable que possible. Malheureusement il n’y a qu’un 
trés-petit nombre de doreurs qui aient recours à cet utile 
moyen de préservation. 

Le passage au feu est de toutes les opérations de la do- 
rure, celle qui compromet le jlus la santé des doreurs. 
L'auteur du mémoire décrit la manière dont elle se pra- 
tique le plus généralement dans nos montagnes. Il 
fait ressortir les effets désastreux des vapeurs mer- 
curielles, tels que le tremblement convulsif et la sto- 
matite avec salivation. Il fait ensuite l'historique des 
principaux moyens proposés sucessivement, depuis la 
seconde moitié du siècle passé, pour préserver les 
doreurs contre l'action du mercure volatilisé par la 
chaleur, et donne la préférence à l'appareil Darcet sur 
tous les autres. L'auteur décrit brièvement cet appareil, 
et fait connaître les conditions qu’il doit réunir pour pré- 
server convenablement les doreurs; la principale est, 
selon lui, que le tirage en soit fort, qu'il puisse être 
activé au besoin, et maintenu constamment bon. L’appa- 
reil le plus généralement employé par nos doreurs, et 
auquel ceux-ci donnent le nom de lanterne, n’est autre 
chose que celui imaginé par le savant dont nous venons 
de parler, avec de très-légères modifications. C'est à 
M. Olivier Quartier qu'on en doit l'introduction au Locle 


— 14 — 

et aux Brenets, il y a quinze à vingt ans. L'auteur du 
mémoire en donne une courte description accompa- 
gnée d'une figure faite par M. le professeur Ladame. 
Les lanternes dont nos doreurs font usage, les préserve- 
raient suffisamment contre les vapeurs mercurielles, si 
ces appareils étaient bien confectionnés, s'ils étaient 
maintenus en bon état, et que le tirage en fût bon et sus- 
ceptible d’être conservé tel. Mais il s’en faut de beaucoup 
qu'il en soit ainsi. Le comité d'enquête a essayé le tirage 
de la presque totalité de ces appareils ; quelques-uns ont 
été trouvés d’un excellent tirage ; le mouvement d'as— 
cension de l'air était médiocre dans beaucoup d’ re 
et mauvais dans le reste. 

Le docteur Borel indique d’une manière générale, les 
moyens les plus propres à établir un bon tirage dans les 
conduits d’évaporation du mercure. Un des plus effica- 
ces consiste à échauffer l'air de l’intérieur de ces conduits 
au moyen de la flamme d’un quinquet. Dans les grands 
ateliers, où dans un même local on employe en même 
temps plusieurs appareils à passer au feu, le moyen, 
par excellence, et qu'il est quelquefois nécessaire d'em— 
ployer , consiste à établir un petit fourneau d’appel, dont 
la cheminée aboutit dans le canal où les différens conduits 
d'évaporation vont s'ouvrir. 


M. Agassiz annonce qu'il areçu de M. Albert de Pour- 
talés une collection de coquilles d'Orient, composée d’en- 
viron quatre-vingts espèces en nombreux et beaux échan- 
tillons, appartenant aux genres Conus, Cypræa, Arca, 
Pectunculus, etc.; parmi le nombre il se trouve plusieurs 
espèces fort-rares, et quelques-unes qui paraissent être 


— 142 — 
nouvelles. M. Agassiz a surtout remarqué un Argonaute 
qui lui a semblé être différent de celui de la Méditer- 
rannée. La même collection de coquilles compte aussi 
plusieurs espèces du lac de Tibériade, entre autres des 
Mélanopsides et des Néritines. 


M. le docteur Castella, pour prouver qu'il ne faut pas 
se fier aux apparences extérieures dans la détermination 
des vers intestinaux, cite le cas suivant : Un de ses mala- 
des rejeta récemment un corps vermiforme qu’on avait 
pris pour un Trichocéphale et qui ayant été examiné 
attentivement, s’est trouvé n'être qu'un fil de coton. 

M. Agassiz cite un autre exemple d’une grappe de müre 
incomplètement digérée dont on avait fait un genre par- 
ticulier dans l’'Helminthologie. Il pense que de nos jours 
de pareilles erreurs seraient faciles à éviter, si, avant 
de déterminer ces corps, on avait soin de les examiner 
au microscope. 

M. le docteur Borel, M. de Castella et M. Agassiz , ci- 
tent encore plusieurs autres exemples du même genre. 


E. DEsor, secrétaire. 


N° 145. 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DES NEVCERSTEL. 


—— 00 0 ——— 


Séance du % décembre 1844. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le docteur Borel continue la lecture de son mémoire 
hygiénique sur la dorure au feu des pièces de montres, 
dans les montagnes de notre pays. Il décrit brièvement 
la manière dont la mise en couleur se fait dans la plu- 
part des ateliers. 

Les pièces qu’on vient de passer au feu, et qu'on sè— 
che sur des cendres chaudes, pour leur donner la cou— 
leur, contiennent encore une quantité notable de mercure 
et blanchissent lorsqu'on les plonge dans de l’acide étendu 
d'eau. En plaçant au-dessus d'elles une lame d’or pen- 
dant l'opération, on voit celle-ci également blanchir. Le 
mercure qui se volatilise par l’action de la chaleur, peut 
donner lieu, et donne lieu en effet, aux mêmes accidens 
que ceux auxquels les doreurs sont exposés dans l'opération 
du passage au feu, quoique à un plus faible degré. Pour 
prévenir les accidens ilest nécessaire que la mise en cou- 
leur s'exécute sous un appareil à hotte d’un bon tirage, 
ou sous tout autre appareil semblable. Malheureusement, 
beaucoup de doreurs s’imaginent à tort, que l'opération 


Ai tee 


dont ils’agit ne les expose à aucun danger. Le comité 
d'enquête n’a trouvé que 28 ateliers, où l’on fit usage 
d'appareils préservateurs, pour donner la couleur aux 
pièces qui ont passé au feu. Sur ce nombre, 20 em- 
ployaient à cet effet la hotte vitrée de l'appareil à passer, 
et huit se servaient d’une sorte de caisse vitrée , dont l’au- 
teur du mémoire donne une description succincte accom- 
pagnée d’une figure due à M. le professeur Ladame. 
Dans 14 ateliers, on mettait en couleur dans des cham- 
bres à coucher et à manger. 

Aprés avoir été mises en couleur, les pièces dorées sont 
plongées dans de l’acide nitrique étendu considérablement 
d'eau, puis on les frotte avec une sorte de pinceau en fil 
de laiton (on lui donne le nom de grattebosse) trempé dans 
de l'eau de marron d'Inde. Cette dernière opération , à 
laquelle on donne le nom de grattebossage, termine la sé- 
rie des manipulations de la dorure. C'est de toutes celles 
qu'exécutent les doreurs, la moins nuisible: car elle ne 
donne lieu qu'à un dégagement de vapeurs nitreuses, 
beaucoup trop peu abondantes pour avoir une influence 
bien marquée sur la santé. 

Depuis l'introduction des appareïls à hotte vitrée dans 
les montagnes de notre pays, l'état de santé de nos doreurs 
a éprouvé une amélioration notable. Toutefois, cette amé- 
lioration n’est ni aussi générale, ni aussi grande qu’elle de- 
vrait être. Le nombre des doreurs, ouvriers et apprentis 
compris, dont les commissaires du gouvernement ont eu 
connaissance était de 16%, dont 99 du sexe féminin et 62 
du sexe masculin. On a pu apprécier d’une manière assez 
exacte l’état de santé de 1#8 d’entre eux; il y en avait 90 
seulement qui jouissaient d’une bonne santé, et qui n'a- 


— 145 — 


vaient jamais été affectés d'intoxication mercurielle, sa 
voir, »2 du sexe féminin et 38 du sexe masculin. Trente— 
huit (28 du sexe féminin et 10 du sexe masculin) avaient 
été atteints du tremblement convulsif ou de salivation, à 
des époques plus ou moins éloignées; onze (7 femmes et 
4 hommes) s’en ressentaient encore, lorsqu'ils ont été vi- 
sités par le comité d'enquête. Les 20 doreurs restans 
(11 du sexe féminin et 9 du sexe masculin), sans avoir 
jamais éprouvé ni tremblement mercuriel, ni affection 
de la bouche, jouissaient tous d’une santé chancelante. 
Dans deux familles de doreurs , les commissaires du gou- 
vernement ont vu des enfans en bas-âge, participer d’une 
manière frappante au triste état de santé des auteurs de 
leurs jours. 

Les causes de la fréquence encore trop grande de l’in- 
toxication mercurielle et du délabrement de la santé des 
doreurs de nos montagnes, peuvent suivant le doc- 
teur Borel, être rapportées : 1° au manque d'appareils 
préservateurs dans un très-petit nombre d'ateliers (*); 
2° aux vices de construction, au mauvais tirage, et au 
défaut de soin d'entretien des appareils à hotte vitrée; 3° à 
ce que toutes les opérations dangereuses de la dorure au 
feu ne se font pas sous la hotte de l'appareil avec les 
précautions nécessaires; 4° enfin, au défaut d'intelligence, 
à la malpropreté, à l'incurie et même au manque de so- 
briété de quelques doreurs. 

L'auteur du mémoire croit, que par des mesures de 
police médicales bien combinées, il est possible de remé- 


(*) Le comité d'enquête n’a trouvé que six ateliers qui en fussent dé- 
pourvus, sur soixante-un qu'il a visités. 


— 146 — 


dier aux trois premiers ordres de causes qui viennent 
d'être énumérés. Les mesures qu’il envisage comme les 
plus efficaces pour remplir le but désiré, sont les sui- 
vantes : 1° Exiger que tout individu, qui veut établir 
un atelier de dorure au feu, en avertisse l'autorité com- 
pétente; afin que celle-ci fasse examiner par des experts, 
si cet atelier réunit toutes les conditions de salubrité né- 
cessaires. 2° Obliger tout propriétaire d'atelier, d’être 
muni d'un ou plusieurs appareils à hotte vitrée, dont le 
tirage puisse être bien établi, et lui imposer l'obligation 
de passer au feu sous cet appareil, aprés s'être préala- 
blement assuré que le tirage en est bon. 3° Faire défense 
aux doreurs de faire entrer les conduits de déduction 
des vapeurs du mercure dans des cheminées où abou- 
tissent d’autres canaux et dans des cheminées des cuisi- 
nes. 4° Leur donner l’ordre de pratiquer toutes les opé- 
rations dangereuses de la dorure (le recuit, le décapage, 
le passage au feu, la mise en couleur) sous un appareil à 
hotte d’un bon tirage. Les astreindre aussi aux mêmes 
précautions pour la préparation de l'amalgame d'or et 
celle de l'acide de mercure. 5° Défendre sévèrement aux 
chefs d'ateliers de faire coucher leurs ouvriers dans les 
chambres où se font les opérations nuisibles de leur 
profession, et les obliger à prendre leur repos à l'abri 
de toute émanation dangereuse. 6° Enfin créer deux 
comités de surveillance des ateliers de dorure, composés 
de trois experts, parmi lesquels un médecin; un de ces 
comités siégeant au Locle, pour les juridictions du Locle, 
des Ponts et des Brenets; l’autre à la Chaux-de-Fonds, 
pour cette juridiction et celle de la Sagne. — Les me- 
sures qui viennent d'être indiquées ont été proposées au 


— 147 — 
gouvernement par les commissaires de l'enquête hygiéni- 
que, et ont été adoptées par lui; elles forment la base de 
l'ordonnance de police sur la dorure au feu, qui a été 
promulguée au mois d'avril de l’année passée. 

Quant à la dernière des causes d'insalubrité mention- 
nées par l'auteur du mémoire, il est bien difficile, si non 
impossible , de la faire cesser complètement. Le moyen, 
en effet, de faire adopter à des ouvriers peu intelligens 
ou négligens, toutes les mesures d'hygiène privée néces- 
saires pour atteindre le but désiré! Aussi le docteur 
Borel craint-il que , sous ce rapport, il n'y ait toujours 
une lacune qu'on ne pourra combler, et que, malgré les 
améliorations incontestables de salubrité qu'une police 
médicale éclairée peut apporter à la profession de la 
dorure au feu, cette branche d'industrie ne continue à 
offrir des dangers pour la santé de plusieurs de ceux qui 
l'exercent. Cette considération doit faire vivement dési-— 
rer que le procédé nouveau de dorure électro-chimique, 
qui commence à s’introduire dans nos montagnes, se per- 
fectionne assez pour remplacer la dorure au mercure, 


et pour être universellement adopté par les doreurs de 
notre pays. 


M. Agassiz annonce à la Société qu'il a entrepris l'é- 
tude comparative du cerveau des poissons, étude qu'il se 
propose de poursuivre dans toutes les familles et les gen- 
res de cette classe. Les faits qu'il a recueillis jusqu'à 
présent lui ont donné la certitude que le cerveau pré- 
sente des caractères constans dans toutes les familles. 
M. Agassiz ne doute pas que convenablement étudié, le 
cerveau ne fournisse à la zoologie des caractères pré- 


12 


— 148 — 
cieux, et que peut-être il ne devienne la base de la clas- 
- sification. C’est ainsi que l’on a remarqué depuis long- 
temps dans la famille des Cyprins des particularités de 
forme et de contours dans les renflemens situés der- 
rière le cervelet. D'un autre côté, M. Agassiz montre que 
les genres d’une même famille ont le cerveau conformé 
de la même manière, quel que soit le caractère général 
du type auquel ils appartiennent, et cite à l'appui de 
cette assertion les nombreux démembremens des Cyprins 
et des Salmones. Rien n’est plus surprenant à ses yeux 
que l'identité absolue de l’encéphale des voraces Salmo, 
et des inoffensifs Coregonus. Ce fait nous prouve jusqu’à 
l'évidence 1° que le naturel d’un animal ne dépend pas 
de différences appréciables dans les formes du cerveau, 
et 2° que la forme du cerveau est l'expression d'un type 
d'organisation, bien plutôt que des dispositions naturelles 
des fonctions intellectuelles. Passant ensuite à l’étude des 
modifications principales de la masse cérébrale qui cons- 
tituent les caractères distinctifs des familles, M. Agassiz 
fait voir que c'est en général dans la conformation de 
l'épencéphale et dans les proportions et les rapports des 
différens lobes du cerveau entre eux, qu'il faut cher- 
cher les caractères essentiels des différens types de la 
classe des poissons. 
: E. DEsor, secrétaire. 


M. d'Osterwald lit une note destinée à être placée en 
tête d'un catalogue des principaux points de notre pays, 
dont il a déterminé la hauteur. Il rend compte des cau- 
ses qui ont fait varier les indications de la hauteur du 
Môle de Neuchâtel au-dessus de la mer, point fonda- 


— 149 — 

mental auquel il a rapporté toutes les mesures. Ces va- 
riantes sont dues aux corrections successives adoptées par 
le bureau de la guerre de Paris, pour la hauteur des 
points du Jura qui ont servi à M. d'Osterwald pour la dé- 
termination du Môle de Neuchâtel. Ainsi l'altitude de 
Chasseral fixée d'abord par Strasbourg , en 1807, à 
1611, fut portée à 1610%,5% dans la Description géo- 
métrique de la France. L’altitude de Strasbourg , déter- 
minée d'abord par une série d'observations barométriques, 
l'ayant été plus tard par une succession de distances zéni- 
thales de Brest à Strasbourg, la correction qui en fut la 
conséquence réduisit la hauteur de Chasseral à 1608",6. 
Une seconde opération analogue, le long du parallèle de 
Bourges, partant de l'Ile de Noirmoutiers, donna pour 
Chasseral 1609",1. On en conclut enfin la moyenne de 
16082,8 qui fut définitivement adoptée. 

Une série analogue de corrections modifia les hauteurs 
de Chasseron et du Moléson, qui sont, avec Chasseral, 
les points de départ adoptés par M. d'Osterwald. L’alti- 
tude définitive du Môle conclue par ces trois points est 
ainsi devenue 434,7, chiffre que l’on peut regarder 
comme aussi rigoureusement déterminé que la science 
actuelle peut le faire. 

M. Guyot commence un exposé de ses recherches sur 
la dispersion du terrain erratique et notamment sur la 
provenance et la distribution des diverses espèces de ro- 
ches que contient le bassin du Rhône. (Voir plus bas 
séance du 17 mai 1845). 

A. GuyoT, secrétaire. 


js AOËD -— 


Séance du 18 décembre 1844. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. le docteur de Castella lit la note suivante sur les 
doreurs affectés de salivation et de tremblemens mercu- 
riels traités à l'hôpital Pourtalès, depuis le 17 janvier 
1813 jusqu'au 18 décembre 1844. 

« En 1813, l'hôpital Pourtalès a recu les deux pre- 
miers malades qui s’y sont présentés atteints de tremble- 
ment mercuriel; en 1817 quatre autres y ont été admis. 
Dès-lors toutes les années il y en a eu plus ou moins; 
les années 1835, 1836 et 1842 ont été celles où 
il y en a eu le plus, c'est-à-dire huit, dix et douze; 
en 1843 il n'y en a eu que cinq et en 1844 trois. Les 
précautions indiquées par la commission du gouverne- 
ment auraient-elles déjà exercé leur salutaire influence ? 

» Le nombre total des malades traités dans l’espace de 
vingt-neuf ans, a été de 129, soit 35 hommes et 94 fem- 
mes; 8 étaient âgés de 10 à 12 ans , 52 de 20 à 30 ans 
et 68 de 30 à 60 ans. Parmi ces derniers, plusieurs ont 
eu des récidives, parce qu'ils ont repris leur métier sans 
précautions. 

» Ces 129 malades ont séjourné à l'hôpital 5042 ; jours, 
ce qui fait en moyenne 39 jours ‘/129 pour un malade. 
Les deux extrêmes du séjour ont été 11 jours et 147 
jours. Aucun malade n’est mort; {ous ont été ou guéris 
ou améliorés. 54 sont venus de la Chaux-de-Fonds, 
4% du Locle, 6 de la Sagne, # des Brenets, 5 de la 
Brévine , { des Ponts, 7 du Val-de-Ruz (les Loges et 
Cernier), 3 du Val-de-Travers ( Fleurier ), 5 de Besan- 


— 151 — 
çon et 1 de Renan. Ces derniers étaient des Neuchâte- 
lois, qui, malades, venaient réclamer leur patrie. 

» Les malades que nous avons observés à l'hôpital 
Pourtalès peuvent être divisés en 3 classes : 1° ceux at- 
fectés uniquement de salivation; 2° ceux qui outre la 
salivation ou sans salivation éprouvaient des tremblemens, 
que la volonté pouvait encore maîtriser; 3° ceux dont 
tout le corps était affecté et qui ne pouvaient plus ni 
marcher ni porter leurs alimens à la bouche. Chez tous 
ces malades, nous avons remarqué de la langueur dans 
toutes les fonctions, un air de tristesse et d’abattement, 
un teint plombé , une respiration lente, quelquefois sus- 
pirieuse, le pouls petit plus ou moins fréquent, la peau 
froide et un grand besoin de repos. 

Premier degré de salivation. L'auteur signale les symp- 
tômes suivans observés chez un jeune homme de 29 ans, 
qui était atteint de salivation depuis six semaines lorsqu'il 
entra à l'hôpital. « Son teint était pâle, ses yeux ternes 
et fatigués , une profonde tristesse régnait sur sa figure, 
ses lèvres étaient tuméfiées et pendantes, un liquide clair 
et filant sortait continuellement de sa bouche; ses dents 
étaient ébranlées et recouvertes d'un enduit blanchâtre 
qui s'étendait sur les gencives et sur la langue ; ces par- 
ties étaient tuméfiées, recouvertes de phlictème etulcérées; 
l'haleine était fétide , la parole était gênée et altérée et le 
malade éprouvait du dégoût pour les alimens; la masti- 
cation était impossible ; il ne pouvait avaler que des liqui- 
des ; il éprouvait de la soif et de la constipation ; les urines 
étaient rares. La respiration et les fonctions intellectuel- 
les étaient dans leur état normal. Quand le malade vou- 
lait se livrer un peu au sommeil, il s’enveloppait la tête 


— 152 — 
avec des serviettes, pour ne pas inonder son lit. Il avait 
maigri considérablement. 

Second degré. Salivation et tremblemens. Aux symptômes 
ci-dessus, qui souvent existent à un faible degré, nous 
devons joindre des mouvemens désordonnés et involon- 
taires de tous les muscles du corps ou seulement d’une 
partie. La démarche est chancelante, la parole tremblante, 
la voix cassée, le corps amaigri et les traits tirés; chez 
ces malades, les dents sont décharnées, et chez quelques 
uns noires et comme corrodées. 

Troisième degré. Mouvemens involontaires de tout le 
corps, impossibilité de se tenir debout et de porter les 
alimens à la bouche. La tête se meut involontairement 
dans tous les sens, la parole est très-gênée; quand le 
malade veut parler, il sort la langue avant d’articuler 
les sons, puis il bégaye; les mains, les jambes sont agi- 
gitées de mouvemens convulsifs, nous en avons vu qui 
étaient jetés comme par des ressorts hors de leur lit. Dans 
cet état, la bouche est décharnée, les dents sont noires, 
le teint est plombé; les traits expriment la plus profonde 
tristesse; le marasme est quelquefois porté très-loin et 
le malade est épuisé. Des hémorrhagies , la phthysie 
pulmonaire, la phthysie laryngée, une espèce d’idiotisme 
et des tremblemens incurables, surtout chez les ivrognes 
et les buveurs d’eau-de-vie, ont été, chez nos malades, 
les tristes suites du dorage au mercure, pratiqué sans 
précaution, le plus souvent par de pauvres ouvriers, 
dans leur chambre sur des réchauds ouverts. 

« Notre traitement, dit M. de Castella, a consisté prin- 
cipalement dans l'emploi presque empirique du soufre, 
des bains hydro-sulfureux, des bains de vapeurs, des su- 


— 153 — 

dorifiques, de quelques purgatifs et à la fin de quelques 
antispasmodiques. Contre la salivation mereurielle , nous 
donnons le soufre en poudre à la dose d’un gros par jour; 
nous y joignons un purgatif salin , comme le sulfate de 
soude, des lotions froides sur la face, des gargarismes 
astringens et alumineux. La salivaison cesse pour l’or- 
dinaire promptement et les malades quittent l'hôpital du 
15° au 30€ jour. 

: «Le tremblement mercuriel exige un traitement beau- 
coup plus long ; les bains hydro-sulfureux, les bains de 
vapeur, les bains sudorifiques sont mis en usage. Le 
soufre à l'intérieur produit souvent des coliques assez 
violentes dès le quatrième ou cinquième jour de la pur- 
gation. De ce moment le tremblement commence à dimi- 
puer. Une alimentation douce et nutritive, le lait surtout, 
les farineux , les bons bouillons ; des promenades à l'air 
libre, dès que les malades peuvent s’y livrer ; des fric- 
tions sèches et surtout la plus grande propreté dans les 
vêtemens et les lits sont les moyens accessoires de notre 
traitement. 

« Nous n'avons jamais eu recours aux émissions san— 
guines, parce que nous avons toujours vu nos malades 
dans un état d'atonie plutôt qu'avec un excès de force. Le 
marasme dans lequel ils se trouvent pour la plupart, 
surtout ceux qui sont gravement atteints, prolonge leur 
traitement; chez plusieurs , il a duré au-delà de cent 
jours. L'opium , la valériane et les autres antispasmodi- 
ques deviennent quelquefois nécessaires. Les bains froids, 
particulièrement ceux du lac, dans la saison favorable 
ont été utiles. » 


— 154 — 

M. Chapuis donne plusieurs renseignemens sur les con- 
séquences fâcheuses de l'emploi du bioxide de mercure 
appelé vulgairement le précipité rouge, dont l'usage est 
très-répandu dans nos campagnes où on l’emploie tous les 
jours contre la gale et autres maladies cutanées. IL si- 
gnale les nombreux accidens causés par ce médicament 
ainsi que par l’onguent citrin de la pharmacopée de 
Prusse, qu'il envisage comme non moins dangereux que 
le précipité rouge, lorsqu'on en abandonne l'emploi au 
peuple. L'auteur signale également les fâcheux effets du 
mercure métallique dissous dans l'acide azotique, puis 
étendu d’eau , tel qu'il est employé par les ouvriers qui 
travaillent dans nos fabriques de toiles peintes. Il a vu 
un jeune jardinier qui avait perdu toutes ses dents, l'épi- 
derme de tout son corps et qui faillit périr , pour avoir 
fait usage de ce remède. Enfin l’auteur attire l'attention 
de la Société sur la fâcheuse pratique des fondeurs d’é- 
tain ambulans, qui ont l'habitude de mêler à ce métal 
fondu une certaine quantité de soi-disant cobalt ou ter- 
re-aux-mouches, qui ne contient pas moins de 60 à 70 
pour cent d'arsenic. 

Ces faits, et beaucoup d’autres, font désirer à M. Cha- 
puis que le réglement de pharmacie relatif à la vente des 
poisons, spécifie d’une manière plus complète les subs- 
tances qui doivent être interdites au publie sans la pres- 
cription du médecin. 


M. Guyot continue son exposé sur la répartition du 
terrain erratique ( Voir séance du 7 mai 1845.) 


E. DEsor, secrétaire. 


nb. nn en he 26e n 


N° 14. 


BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DS MEVCEATEL. 


Séance du 8 janvier 184%. 


Présidence de M. L. CouLox. 


M. de Castella, à l'occasion de la lecture qui est faite 
d’une note de M. le docteur DuBois sur une affection 
des nerfs de la main, insérée dans le procès-verbal de la 
Chaux-de-Fonds, fait remarquer qu'il a vu plusieurs 
exemples de spasme des écrivains. Il a remarqué que 
cette maladie agissait d’une manière fàâcheuse sur le mo- 
ral des personnes qui en étaient atteintes. 


M. Agassis dépose sur le bureau des échantillons de 
guano. Après avoir rappelé en peu de mots l’histoire de 
celte matière, aujourd'hui si fort en vogue, il observe 
qu'elle n’est pas composée, comme on l’a eru dans l'ori- 
gine, exclusivement d’excrémens d'oiseaux, mais que les 
cadavres des oiseaux côtiers et ceux des phoques qui 
meurent sur le rivage y contribuent pour une bonne part. 

M. Desor ajoute quelques observations sur la répartition 
géographique du guano, et il rappelle qu'on vient d'en 
découvrir des dépôts considérables sur quelques pe- 


— 156 — 
tites îles de la côte occidentale d'Afrique, non loin de 
l'embouchure de la Gambie. L’épaisseur de la couche va 
jusqu’à 20 pieds. 


M. Agassiz entretient la Société des recherches et des 
découvertes récentes qui ont été faites sur les métamor- 
phoses que subissent les animaux des classes inférieures. 
Les résultats de ces recherches ne tendent à rien moins 
qu’à établir, que dans certains groupes d'animaux, les 
générations qui se succèdent ne se ressemblent pas d’une 
génération à l’autre, mais que la troisième génération 
seulement, est de nouveau semblable à la première et 
ainsi de suite. Cette loi qui avait déjà été entrevue par 
Chamisso, a reçu une pleine confirmation par les belles 
recherches de MM. Sars et Steenstrupp. Ainsi les Salpes 
simples produisent des Salpes agrégées et celles-ci de 
nouveau des Salpes simples. Mais les exemples les plus 
frappans de ce singulier mode de reproduction sont 
fournis par les Méduses, qui ne présentent pas moins 
de quatre états différens, avant de revenir au point 
de départ, et malheureusement pour nos ouvrages des- 
criptifs toutes ces diverses formes ont été prises pour 
des animaux particuliers. Ainsi MM. Sars et Steens-— 
trupp ont démontré que les genres Scyphistoma et 
Strobila, que l’on avait pris pour des Polypes ne sont 
autre chose que le jeune âge de la Medusa aurita qui, 
avant d'arriver au terme de son développement, passe 
encore par une troisiéme phase à laquelle on a donné le 
nom générique d'Ephyra. Chacune de ces phases du dé- 
veloppement se montre à une époque déterminée de l'an- 
née, pendant laquelle les autres ne sont d'ordinaire pas 


— 157 — 
visibles. Ce n’est pas l’animal parfait seul qui est capa— 
ble de se multiplier : les formes intermédiaires procréent 
aussi, mais il n'appartient jamais qu'à une seule d’entre 
elles de produire des individus qui reviennent au point 
de départ du cycle. Le mode de développement de ces 
animaux aux différentes phases est également très-diffé- 
rent. Ainsi la Méduse parfaite produit seule des œufs qui, 
après avoir nagé librement dans l’eau, sous la forme d’in- 
fusoire, poussent à leur sommet des bras semblables à 
ceux des Polypiers ; ce sont alors des Scyphistoma ; 
peu-à-peu leur tige s’étrangle et donne lieu à une série 
d’anneaux empilés, comme des soucoupes, les unes dans 
les autres, ce sont les Strobila, enfin arrive un moment où 
tous ces anneaux se détachent, chaque soucoupe de- 
vient alors un animal propre, une Ephyra, qui se méta- 
morphose en Méduse ordinaire, tandis que le sommet 
de l'animal avec ses tentacules périt. 

On a observé un cycle de métamorphoses semblables 
dans les Campanulaires, qui passent également par plu- 
sieurs états très-différens doués chacun d’une organisa- 
tion particulière, qu’on chercherait en vain dans les autres 
phases. Ainsi les jeunes des Campanulaires nagent libre- 
ment dans l'eau et ce n’est que longtemps après qu'ils se 
fixent. Puis, après s'être fixés, ils poussent des bour- 
geons de nature très-diverse ; les premiers sont termi- 
nés par des Polypes stériles, puis viennent des Polypes 
axillaires qui en produisent d’une troisième sorte , et ce 
sont ces derniers qui pondent les œufs. 

Enfin, M. Steenstrupp a aussi observé des faits sem- 
blables dans les vers intestinaux. Les Distomes, par 
exemple, si abondants sur les Lymnées, à certaines épo- 


— 158 — 


ques de l’année, ne sont autre chose qu'un état particu- 
lier de cet autre type d'animaux, que nous appelons 
du nom de Cercaire. Vers l’automne, les Cercaires se 
mettent en chrysalide dans la peau des Lymnées, après 
s'être préalablement dépouillées de leur queue. Plus tard 
ces chrysalides se transforment en une génération de 
vers intestinaux de forme particulière; à celle-ci succède 
une autre forme de vers , puis une troisième, dans l'in 
térieur desquels on aperçoit enfin de véritables Cercaires 
qui finissent par se transformer en Distomes. 

M. Agassiz pense que maintenant que l'étude est dirigée 
vers ces singulières métamorphoses, on peut s'attendre à 
découvrir encore bien d’autres exemples de semblables 
phénomènes. Ainsi il serait porté à croire que ces singu- 
liers êtres, qu’on a décrits sous le nom de Stéphanomies, 
ne sont autre chose que des états particuliers d'animaux 
connus de la classe des Méduses. Les Polypiers pierreux 
pourraient aussi n'être, selon lui, qu’une dernière forme 
d'une série de métamorphoses dont il faudrait chercher les 
représentans dans cette innombrable quantité d'animaux 
mous qui peuplent les eaux de la mer. Ces études au- 
ront pour conséquence, non seulement d'ouvrir upe 
voie toute nouvelle à l'étude de la zoologie, mais encore 
de modifier à bien des égards la nomenclature systéma- 
tique, en supprimant une quantité de noms génériques 
et spécifiques qui rentreront les uns dans les autres. 

Quant au fait que dans certains groupes cycliques, la 
ressemblance ne se retrouve complète qu'après quelques 
générations , M. Agassiz pense qu'on pourrait peut-être 
en voir un vague reflet dans le fait, que chez l'homme et 
les animaux supérieurs, il arrive fréquemment qu'une 


— 159 — 
génération a moins de ressemblance avec ses parens 
qu'avec ses ayeux. 

M. de Castella ajoute qu'il n’est pas rare non plus de 
voir dans certaines familles des maladies sauter une géné- 
ration, et reparaître chez les petits enfans, après avoir 
sévi chez les grands-parens. 


M. Desor rend compte des observations qu'il a faites 
de concert avec M. Dolfuss pendant l'été dernier pour 
mesurer les eaux de l’Aar à leur sortie du glacier. Le 
torrent se trouvait cette année dans des conditions très- 
favorables pour des expériences de jeaugeage. Il coulait 
en ligne droite sur une longueur de 50 mètres, dans un 
lit de gravier dont la largeur était uniforme (12 m.). 
Cette partie du torrent fut choisie pour les expériences. 
La profondeur fut mesurée sur cinq sections éloignées de 
10 mètres l’une de l’autre. Pour effectuer ces mesures, 
un homme robuste fut chargé de traverser la rivière 
sur cinq lignes et au moyen d’un bâton gradué dont il 
était muni, il mesurait la profondeur du torrent de mètre 
en mètre. Cette expérience répétée sur les cinq sta- 
tions, donna la profondeur du torrent sur 60 points. 
La moyenne de ces 60 points se trouva être de 33 cen- 
imètres. Cette opération faite, il suffisait de multiplier à 
chaque observation ce chiffre de 33 centimètres avec la 
vitesse de parcours et la hauteur de l’eau , pour connai- 
tre le volume d'eau qui s’échappait dans un temps donné. 
Il résulte des calculs de M. Dolfuss que du 9 au 12 août 
le volume d’eau n’a pas varié d’une manière sensible , 
du 16 au 21 il a diminué de deux tiers, et du 25 au 
27 de moitié, si bien que l’Aar a écoulé en 24 heures : 


— 160 — 

du 9 au 16 août 2,000,000 mêtres eubes d'eau. 

du 16 au 21 » 630,000  » » » 

du 25 au 27 » 328,000  » » » 
En comparant ces chiffres avec les variations du thermo- 
mètre dans ces différentes périodes, on trouve une corré- 
lation très-frappante entre l’état atmosphérique et le vo- 
lume d’eau écoulé par le glacier. En effet, il résulte des 
tableaux météorologiques rédigés par M. Desor, que Jjus- 
qu’au 12 août, le temps fut doux et la fonte rapide, 
mais à partir du 13, il y eut d’abondantes chutes de 
neige; le 16, entre autres, il neigea tout le jour et le 
soir il n'y avait pas moins de 60 centimètres de neige 
sur le glacier. Pendant ce temps, la température ne 
s'éleva pas de beaucoup au-dessus de zéro (maximum 
+. 4°), en sorte que la fonte fut à-peu-près nulle. Or, 
malgré cela l’Aar ne discontinua pas de couler ; elle 
n’atteignit pas même son niveau le plus bas, puisque 
le 17 et 18 elle fournissait encore 680,000 mètres cubes 
d’eau en 24 heures. Ce fait, dit M. Desor, est de la plus 
haute importance pour la théorie des glaciers, en ce qu'il 
fournit la preuve que l’eau de fonte qui pénètre dans 
le glacier ne le traverse pas comme ferait de l’eau cou- 
lant dans de larges canaux, mais qu’elle y séjourne plus 
ou moins longtemps, arrêtée par des obstacles nombreux 
qui retardent sa marche. Ces obstacles ce sont les fissu- 
res capillaires du glacier, que l’eau est obligée de traverser. 
En effet, en prenant pour base le maximum de vitesse de 
l’Aar à sa sortie, et en tenant compte du volume de l’eau, 
il suffirait de quelques heures au plus pour qu'un ruis- 
seau de l’Abschwung gagnât l'extrémité du glacier. Or, 
puisque l’Aar a pu continuer de couler pendant au moins 


— 161 — 


48 heures, tandis que le glacier était couvert de neige, 
et que pendant ce laps de temps elle a fourni, sans recevoir 
aucun tribut de la fonte superficielle, un volume d’eau de 
1,360,000 mètres cubes d’eau, il faut bien que cette 
masse d’eau ait été en réserve dans l'intérieur du glacier; 
car les sources qui viennent sourdre sous le glacier, ne 
sont pas assez importantes pour qu'on puisse en tenir 
compte. 

Le glacier, sous ce rapport, peut se comparer à une 
immense éponge imbibée, qui reçoit et fournit continuel- 
lement de l’eau. Que la source qui l'alimente vienne à 
tarir momentanément, l'éponge n’en continuera pas moins 
à fournir de l'eau, par l'effet du mouvement propre du 
liquide qui tend à s'échapper, mais qui s'écoule d'autant 
plas lentement, que les canaux qu'il a à parcourir sont 
plus fins. Par la même raison, si après avoir intercepté 
la source, vous la ramenez de nouveau sur l'éponge, 
l'effet n'en sera pas non plus instantané ; l’eau sera d’a- 
bord employée à réparer les pertes que l'éponge avait 
éprouvées dans l'intervalle; le ruisseau qu’elle alimente 
n'en éprouvera qu'un accroissement très-graduel, et ce 
n’est que lorsque l'éponge sera complètement imbibée 
que le ruisselet reprendra son volume primitif. Il est à 
présumer que les choses se passent à-peu-près de la même 
manière dans l’intérieur du glacier. Les fins tubes de l’é- 
ponge, ce sont les mille petites fissures du glacier. Si 
donc le glacier a continué de fournir de l’eau, alors même 
qu'il avait cessé d'en recevoir à sa surface depuis plu- 
sieurs jours, c'est parce que ce réservoir de fines rami- 
fications ne laisse échapper l’eau que lentement. Par la 
même raison, le niveau ne s’est relevé qu’insensiblement. 


— 162 — 
La neige n’a fait qu'ajouter au retard, en empêchant 
l'équilibre de se rétablir plus tôt. Le fait que l’Aar con- 
üinue de couler pendant la nuit sans changement nota- 
ble, n’est, suivant, M. Desor, qu’un effet de la même loi. 
D'après la lenteur avec laquelle l’eau circule dans l'in 
térieur, on peut prévoir que les variations que pourrait 
produire l’absence de fonte pendant la nuit ne doivent 
se faire sentir que le lendemain, et c’est en effet dans la 
matinée que les eaux sont les plus basses. Plus un gla- 
cier est long, moins il y a de chances que ces variations 


diurnes soient sensibles. 
E. DEsor, secrétaire. 


Séance du 22 janvier 1845. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. Agassiz présente à la Société une série de considé- 
rations sur la distribution géographique des animaux et 
de l’homme. Quelle que soit, dit-il, la théorie à laquelle 
on s'arrête sur la division du genre humain, soit qu'on 
l'envisage comme composé de nombreuses espèces , ou 
que l’on n’en admette qu'une seule avec différentes races 
ou variétés , il n’en est pas moins vrai qu'il existe des dif- 
férences entre ces types, et que ces différences sont assez 
marquées pour qu'il soit possible de retrouver leurs li- 
mites naturelles partout où des causes extérieures n’ont 
pas déplacé les populations. M. Agassiz croit pouvoir 
établir, que ces différences correspondent généralement 
à la circonscription des différentes faunes qu'il a dis- 
tinguées à la surface du globe, aussi loin du moins 
que leurs limites ont pu être déterminées. Il est certai- 


— 163 — 

nes régions où cette coïncidence est des plus frappantes. 
C'est ainsi que la race polaire du nord, qui s'étend sur 
les trois continens comprenant les Samoyèdes en Asie, 
les Lapons en Europe et les Esquimaux en Amérique, 
correspond exactement, par sa distribution, à la faune 
arctique qui, comme l'on sait, est identique sur les trois 
continens. La limite méridionale de ces différentes peu- 
plades commence par de-là la région boisée; c’est là 
aussi que commence la patrie des animaux les plus ca- 
ractéristiques de la faune boréale, tels que le renne qui 
prend la place de l'élan et de nos cerfs; l'ours blanc qui 
remplace l'ours brun; le renard bleu du nord qui remplace 
le nôtre, ete. Cettte répartition des races humaines et des 
faunes zoologiques coïncidant avec les grandes limites de 
la végétation, doit entraîner à sa suite des usages et un 
genre de vie particuliers qui contribuent encore à augmen- 
ter les différences primitives. C’est ainsi que les peuples 
boréaux sont, comme leurs carnassiers et leurs oiseaux de 
proie, à-peu-près tous ichthyophages. Il ne résulte ce- 
pendant pas de là qu’on doive conclure de ces rapports 
entre la nature des pays boréaux et leurs habitans, un 
isolement complet- des peuples arctiques. Il existe au 
contraire des passages de la race du nord à celle de la 
zône tempérée. C'est ainsi que les Esquimaux passent 
insensiblement aux Indiens des prairies, et les Samoyèdes 
par les Kamtschadales aux Mongoles. 

M. Agassiz signale des coïncidences non moins curieuses 
entre la distribution des races humaines et celle des 
faunes terrestres dans l'hémisphère austral. Les différences 
paraissent surtout nettes et tranchées dans la Polynésie. 
M. Agassiz rappelle à ce sujet qu'il faut distinguer trois 


15 


— 164 — 

races dans les îles de l'Océan pacifique, savoir : deux 
races jaunes, l’une comprenant les Malais qui habitent 
les îles de la Sonde et les côtes des continens. Une seconde 
race jaune, celle des Polynésiens, qui occupe les îles Ma- 
rianes, les îles Sandwich, celles des Amis, et tout l’archi- 
pel des petites îles à l’est de la Nouvelle-Hollande, jus- 
qu’en Amérique. La nouvelle Zélande paraît aussi lui ap- 
partenir. Enfin Ja race Papoue, la plus laide et la plus 
ignoble de toutes, reconnaissable à ses membres grèles, 
sa bouche grande, son front bas et son air stupide, occupe 
la nouvelle Guinée et toutes les îles qui entourent immé- 
diatement la Nouvelle Hollande à l'Est, jusqu'à la Nou- 
velle Zélande, qu’elle n’atteint cependant pas. Or, cha- 
- cune de ces circonscriptions humaines correspond à une 
faune particulière qui est caractérisée par quelques ani- 
maux qui lui sont propres. C'est ainsi que les Orangs 
accompagnent la race malaise proprement dite. La ga- 
léopithèque ou écureuil volant, se trouve dans les régions 
habitées par les Polynésiens jaunes, et la nouvelle Gui- 
née qui est le principal siège de la race Papoue, a aussi 
ses animaux propres, entre autres des Phalangers. 

Quant aux caractères qui doivent servir de base à la 
délimitation des races humaines, il faut, en Polyné- 
sie plus que partout ailleurs, en éliminer avec soin la 
couleur, puisque, d’après les recherches de M. Quoy, on 
voit les Polynésiens jaunes passer par toutes les nuances 
du brun jusqu'au noir, sans perdre aucun de leurs-ca- 
ractères essentiels et sans que la beauté et l'harmonie de 
leur forme en souffrent en aucune façon. D'un autre côté, 
nous voyons aussi les Papous perdre dans certaines lo- 
calités leurs teintes foncées et s'approcher par la couleur 


— 165 — 
des vrais Polynésiens; mais ils n’en restent pas moins 
pour cela les derniers des hommes. 

Passant à l’Afrique, M. Agassiz rappelle que l’extré- 
mité méridionale de ce continent habitée aujourd’hui par 
des Européens, était autrefois le siége d’une race à part 
différente de la race nègre. Or, 1l est démontré par les 
recherches récentes des voyageurs, que la faune de cette 
région est complètement différente de celle du centre du 
continent, et il paraîtrait que cette limite correspond avec 
les limites de l'ancienne race Hottentote. 

Le nord de l'Afrique nous offre un exemple encore 
plus frappant de cette coïncidence des races et des faunes. 
Le Sahara n’est pas seulement la limite de la race nègre, 
il est aussi celle de la faune africaine proprement dite, 
et de même que les habitans du nord de l'Afrique sur 
les deux versans de l'Atlas sont de race caucasique , de 
même aussi la faune de cette région est identique avec 
celle de l'Europe méridionale. Les recherches des natu- 
ralistes modernes tendent à rendre ces limites toujours 
plus précises, du moins pour les animaux. C’est ainsi que 
la présence simultanée du lion en Barbarie et au Sénégal, 
qui pouvait paraître un obstacle à une séparation de la 
faune européenne d'avec la faune africaine » n'en est 
plus un maintenant que l’on a démontré que le lion de 
Barbarie, à large crinière, s'étendant Jusqu'au de là des 
épaules, n'est pas le même que celui du Sénégal, dont la 
crinière est limitée aux épaules et dont la queue n'est 
point terminée par un pinceau de poils. 

M. Agassiz conclut de ces faits, que l'ubiquité du genre 
humain à la surface du globe est un caractère qui lui est 
propre et qui le distingue des animaux qui ont tous une 


— 166 — 

patrie déterminée. À cet égard, comme à tant d'autres 
encore , il faut donc appliquer à l’homme une autre me- 
sure dans l'appréciation des différences que présentent 
ses races. Néanmoins cette circonscription des variétés 
de la race humaine dans les limites de certaines faunes 
zoologiques, semble, selon M. Agassiz, mdiquer une ré- 
partition primitive simultanée de ces types divers au mi- 
lieu des créations qui les accompagnent. 

A la suite de cette communication s'engage une dis- 
cussion à laquelle prennent part M. Guyot et M. de Rou- 
gemont. 


M. L. Coulon, président , rend compte d’une observa- 
tion remarquable qui prouve que dans certaines condi- 
tions, l'écorce des troncs de sapins coupés continue à 
croître sous forme de gros bourrelets ; on a vu de ces 
bourrelets qui montraient 45 cercles d'accroissement. Ce 
qui a lieu surtout d'étonner, c'est que des troncs pareils 
puissent continuer de vivre en étant dépourvus de feuil- 
les, puisqu'il est généralement admis que les feuilles sont 
les organes dans lesquels s'effectue la transformation des 
substances destinées à l’alimentation de la plante. Or, 
M. Gœppert, à qui l’on doit des observations suivies sur 
ce sujet, a prouvé que les racines des troncs qui conser- 
vent ainsi leur vie, sont toujours greffées par approche 
sur les racines des sapins qui les environnent, et dont 
ils sont en quelque sorte les nourissons. 


E. DEsor, secrétaire. 


N° 15. 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DE MNEVCEAIATEL. 


—-—— 000 =— — 


Séance du 5 février 1845. 
Présidence de M. L, Couon. 


M. Gressly présente un aperçu succincet de la constitu- 
tion géologique de l’Argovie. Les terrains qn’il a recon- 
nus dans cette partie du Jura Suisse, sont de bas en haut : 
le granit et le gneis qui ne se rencontrent que sur un seul 
point , aux environs de Laufenbourg. Ils sont recouverts 
par un conglomérat appartenant au grès bigarré. Cette 
formation, dont l'épaisseur est de 600 pieds au moins, se 
compose en outre de schistes, d'anhydrite et d’une cou- 
che particulière de calcaire connue sous le nom de Wel- 
lenkalk. Sur ce calcaire est étendue la couche de sel gemme 
de Bâle-campagne, dont l'épaisseur maximum est de 25 
pieds. Des gypses, des argiles et des marnes superposés 
au sel gemme , rattachent la formation du grès bigarré 
à celle du conchylien. Dans cette dernière formation, 
M. Gressly a reconnu les calcaires ordinaires du Mus- 
chelkalk. atteignant une épaisseur de 200 pieds; des 
dolomies très-riches en fossiles et identiques avec ceux de 
Friederichshall. Le Keupérien ne présente non plus au- 
cune différence d'avec celui de Wurtemberg. La formation 


— 168 — 

jurassique est représentée en Argovie par les étages sui 
vans : {° Lelias, qui est comme partout très-riche en 
fossiles, indiquant un dépôt littoral. 2° L’oolite inférieure, 
composée de l’oolite ferrugineuse, du Marly-sandstone 
et des marnes à Ostrea acuminata. 3° L'oxfordien qui est 
surtout remarquable par une couche de sable rouge, 
tout-à-fait semblable au gault de la Perte-du-Rhône. Ce 
qui mérite surtout de fixer l'attention des géologues, 
c'est la présence de Hamites dans ce terrain. Les étages 
supérieurs de l'oxfordien manquent. Le portlandien 
n'existe que dans les environs d’Aarau, où il se confond 
avec le corallien. Enfin les plateaux sont recouverts, 
dans nombre de localités, par des terrains tertiaires, dans 
lesquels on distingue surtout une couche de conglomé- 
rats rouges composés de débris de l’oxfordien et de l’oo- 
lite et caractérisés par la présence de l'Helix rubra, si 
commune aux environs de la Chaux-de-Fonds. Les cal- 
caires superposés à ce conglomérat sont d’une pâte très- 
fine et souvent si semblables au Portlandien , que sans 
les fossiles on pourrait courir le risque de les confondre. 
Les plateaux recouverts d’un dépôt tertiaire sont en gé- 
néral fertiles; quelques-uns sont marécageux ; ceux du 
conchylien et de l’oolite, en revanche, sont très-arides. 

M. Gressly n’a constaté la présence de soulévemens 
qu'aux environs d'Olten. Ce sont des voûtes conchylien- 
nes. Quelques-unes sont crevées, et on a même des exem- 
ples où l’un des revêtemens est renversé de manière à re- 
couvrir l’oolite, ce qui a jadis donné lieu à la théorie de 
la répétition des terrains de M. Rengger. | 

Le terrain erratique est représenté par des blocs d'ori- 
gine alpine, entr'autres à la Schafmatte, 


fl: 
Cette communication est suivie d’une discussion sur la 


répartition du terrain erratique à laquelle prennent part 
MM. Guyot et Desor. 


M. Schauss dépose sur le bureau un fruit de la famille 
des Bignonacées, trouvé dans des broussailles des envi- 
rons de Neuchâtel. M. Agassiz le détermine comme ap- 
partenant au genre Martinia; l'espèce est probablement 
le M. proboscidea. Comme cette plante habite les bords du 
Mississipi, il est évident qu'il faut attribuer au hasard sa 
présence dans les broussailles de Neuchâtel. 


M. Desor présente quelques considérations sur les rap- 
ports qui existent entre la répartition des glaciers et les 
reliefs généraux des Alpes. Il constate par l'examen com- 
paratif des cartes du Mont-Blanc et de l'Oberland bernois, 
que les grands glaciers de chacun de ces deux massifs 
suivent une direction analogue, du moins dans leur cours 
supérieur, direction qui est perpendiculaire à celle des 
couches. Chaque grand glacier a à son origine un élar- 
gissement en forme d'hémi-cycle dans lequel s’entassent 
les provisions de neige et de glace qui servent à son en- 
tretien. Plus ces élargissemens, connus sous le nom de 
cirques, sont grands, plus aussi la longueur du glacier est 
considérable. Tous les glaciers qui n’ont pas d’élargisse- 
ment pareil à leur origine ont un cours très-limité. D’un 
autre côté, M. Desor conclut de l'étude comparative des 
glaciers sur les deux versans, que leur position à l'égard 
du soleil n'a pas une influence aussi grande qu'on est 
porté à le supposer d’abord. 

En effet, s'il en était ainsi, les plus grands glaciers 


— 170 — 

devraient être du côté septentrional, qui est le plus froid; 
or, au lieu de cela, nous voyons que dans les Alpes ber- 
noises, les plus grands glaciers sont tous du côté du sud ou 
du sud-est; tels sont les glaciers de l'Aar, d'Aletsch, de 
Viesch, etc. Le versant septentrional, au contraire, n’a 
que les deux glaciers de Grindelwald et celui de Rosen- 
laui; encore sont-ils loin d'atteindre l'étendue de ceux 
du versant opposé. Cette différence s'explique tout natu- 
rellement, quand on considère les champs de neige dont 
ils découlent. Si le glacier d’Aletsch est le plus grand 
e la Suisse, c’est qu'il l'emporte sur tous les autres par 
ses névés. La même comparaison peut se faire à l'égard 
des glaciers de l’Aar et de Viesch ; et quant aux glaciers 
de Grindelwald ,:la différence entre le glacier supérieur 
et le glacier inférieur n’est pas plus grande qu’elle ne 
l'est entre les névés d’où ils découlent. 

Au Mont-Blanc, les rapports se trouvent complète- 
ment changés ; là les plus grands glaciers sont du côté 
nord-ouest, tandis que ceux du sud-est ont un cours 
comparativement plus borné. Ici aussi, cette différence 
s'explique par la forme des reliefs. Les grands cirques 
sont au nord de l’arête et se déversent dans la vallée de 
Chamouny; mais comme la distance du sommet de l’'arête 
au fond de la vallée de Chamouny est à-peu-près double 
de celle du sommet de cette même arête au fond de lAI- 
lée-Blanche, il en résulte que les glaciers du versant sep- 
tentrional , sont moins escarpés que ceux du versant 
méridional, c’est-à-dire tout le contraire de ce qui a lieu 
dans les Alpes bernoises. 

M. Desor conclut de ces faits, que l'existence des 
grands glaciers dans les Alpes n'est pas un simple phé- 


— 171 — 

nomène de climatologie, mais que leur forme et leur éten- 
due dépendent à bien des égards de la configuration du 
sol et particulièrement de la forme des vallées. ILest pro- 
bable que si au lieu de commencer par de larges cirques 
servant de magasin aux neiges de l'hiver, les vallées 
alpines n'étaient, à leur origine, que des rigoles étroites et 
peu profondes , les glaciers seraient bien moins puissans 
et resteraient pour la plupart limités aux flancs des 
hautes cimes; en d'autres termes il n'y aurait que des 
glaciers de second ordre. 

M. Agassiz ajoute quelques observations sur la distri- 
bution des anciennes moraines de l’Allée-Blanche et du 
Val-Ferret. Il a été frappé surtout de la belle conserva- 
tion de la moraine du glacier d'Ornex , qui quoique à 
une assez grande distance du glacier actuel, semble n'être 
que d'hier. Il paraît en effet qu'au siècle dernier il se fit 
un grand éboulement au fond de la vallée et que cet ébou- 
lement recouvrit toute la surface du glacier, qui, ainsi 
protégé, prit un accroissement considérable et déposa ces 
débris sous la forme de moraine frontale, dans les lieux 
où on les voit maintenant. 

Cette explication est accompagnée de coupes et de 
dessins destinés à en faciliter l'intelligence. 


M. de Castella dépose sur le bureau un petit corps os- 
seux rejeté par un malade après avoir séjourné deux ans 
dans l'ésophage; il pense que c’est un os de poisson. 


E. DEsor, secrétaire. 


— 172 — 


Séance du 19 février 1845. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. Agassiz, à l’occasion de l'importance attribuée par 
M. Desor dans la précédente séance, aux cirques des gla- 
ciers , cite l'exemple du glacier de Zmutt, l’un des plus 
grands de la chaîne du Mont-Rose, lequel a aussi un très- 
grand cirque à son origine; et ce qui prouve que la 
position à l'égard du soleil n’exerce qu’une influence su 
bordonnée, c’est que ce glacier ne court ni au nord, 
comme ceux de la vallée de Chamouny, ni au sud, comme 
les grands glaciers de l'Oberland bernois, mais d'ouest 
en est. 

M. Agassiz rappelle à cette occasion que les seuls en- 
droits où l’on a trouvé des trâces de glaciers dans le Jura 
sont également dans le voisinage de cirques semblables, 
par exemple, St.-Cergues, en face du cirque de la Dôle, 
au pied de la Dent de Vaulion, etc. Il en conclut que lors- 
que la plaine suisse était recouverte de glaciers, ces cir- 
ques étaient, comme ceux des Alpes de nos jours, le siège 
de glaciers propres, qui débouchaïent de ces grands amphi- 
théâtres pour regagner la plaine, en suivant la direction 
qu'indiquent les stries auxquelles ils ont donné naissance. 


M: Desor prend occasion d'émettre à ce sujet son opi- 
nion sur la formation des cirques dans les Alpes. Il pense 
qu'on peut inférer de la verticalité de leurs parois et de 
leur position latérale sur les parois des massifs, qu’ils ne 
sont point l'effet d’une brisure ou d’une éruption, en 
d'autres termes que ce ne sont point des caractères de sou- 
lèvement. On peut encore moins les attribuer à des éro- 


— 17 — 

sions. L’explication qui lui paraît la plus vraisemblable, 
c’est qu’ils ont été occasionnés par des affaissemens surve- 
nus à l’origine des vallées alpines. Les cirques situés dans 
des massifs à couches horizontales, tels que ceux de Gie- 
bel et du Monte-Leone dans la chaîne jdu Simplon, et le 
fait que les cirques de deux versans ne sont quelquefois 
séparés que par un col très-étroit, sont autant d'indices 
qui font présumer que la cause qui les a produits est in- 
timement liée à l’histoire des reliefs alpins. En théorie, rien 
ne paraît plus simple que la solution d’un pareil problème; 
car, il est évident que si les cirques sont des affaissemens, 
les mêmes couches qui forment le sommet de la muraille 
sur leur pourtour , devront se trouver au fond dans son 
intérieur. Mais pour qu’une pareille expérience puisse se 
faire, il est nécessaire avant tout que les cirques soient 
stratifiés horizontalement; or, l’on sait que le plus sou- 
vent les couches des massifs alpins sont verticales. Il faut 
en outre qu'il existe des variations minéralogiques dans 
l'épaisseur des massifs, afin de pouvoir constater l'é- 
tendue des déplacemens, s'ils ont réellement eu lieu : 
Enfin il ne faut pas oublier que les localités où de pa- 
reilles observations peuvent se faire, sont situées dans 
des contrées généralement peu accessibles, et qu’en outre 
le fond des cirques est souvent couvert de neige et de 
glace. Malgré ces difficultés, M. Desor ne doute pas que 
l’on n'arrive quelque jour à démêler l’origine des cirques, 
et à démontrer que les affaissemens ont joué un plus 
grand rôle dans l’histoire des Alpes qu'on ne le pense 
communément. 

A la suite de cette communication une discussion s’en- 
gage entre M. Desor et M. Guyot. 


— 174 — 

M. Guyot pense qu’il faut attribuer la formation des 
cirques à une action plus générale. Les cirques des Alpes 
ne lui paraissent pas différer, quant à leur origine, de 
ceux du Jura et des autres systèmes de montagnes, car 
les uns et les autres ont un caractère commun, celui de 
se rencontrer à l'extrémité de longues fentes pratiquées 
dans la masse des chaînes de montagnes , que ces fentes 
soient transversales, comme dans les Alpes et les Pyré- 
nées, ou longitudinales, comme dans les voûtes crevées 
des chaînes jurassiques. Dans ce dernier cas, en parti- 
culier, il y a simple écartement et non affaissement, 
comme le prouve la position correspondante des couches 
et la nature du fond même de ces cirques et de leurs 
vallées. C’est pourquoi l'hypothèse de M. Desor qui voit 
dans les cirques l'effet d’un affaissement, lui paraît m- 
suffisante. 

M. Desor combat l’analogie que M. Guyot voudrait 
établir entre les cirques du Jura et ceux des Alpes, par 
la raison que ces derniers étant invariablement situés à 
l’origine des vallées se trouvent placés sur les versans 
du soulèvement et sont par conséquent perpendiculaires 
à ce dernier, tandis que les cirques du Jura sont au con- 
traire situés au sommet des voûtes, c’est-à-dire, dans 
le plan même du soulèvement. Si l’analogie réclamée 
par M. Guyot existait réellement, ce serait à l’origine 
des ruz jurassiques que devraient se trouver les cirques 
du Jura. Or, c'est ce qui n’a pas lieu. 

À. GuyorT, secrétaire. 


M. de Castella lit une notice intitulée: Observations sur 
une hernie étranglée très-volumineuse opérée avec succès. 


— 175 — 

« Les hernies, dit-il, ont exercé le génie des chirur- 
giens de tous les temps et de tous les pays. Sans contredit 
la hernie étranglée est un des accidens les plus dangereux, 
puisque si le malade n’est pas secouru , il succombe 
presque toujours. 

«En alléguant le danger de l'opération de la hernie 
étranglée, et fondé sur des faits, M. Amussat a établi 
dans un mémoire lu à l’Académie des sciences, le 6 mai 
184%, et déjà précédemment, le taxis forcé et prolongé 
comme une règle générale à adopter dans le traitement 
des hernies étranglées. 

« Celui qui a pratiqué longtemps la chirurgie au milieu 
d'une population vigoureuse et exposée à faire des efforts 
violens, a pu se convaincre du danger et de la fausse sé- 
curité qu'entraîne cette méthode de traitement, à laquelle 
ont facilement confiance les jeunes chirurgiens, qui re- 
doutent de faire une opération dangereuse, plutôt par le 
relard qu'on met à la faire que par l'opération elle-même. 

«Outre plusieurs faits que nous avons observés, le sui- 
vant prouvera que le taxis forcé et prolongé aurait été 
inutile et funeste, tandis que l'opération pratiquée de 
suite a sauvé le malade. 

«Observation. Antoine Wetzel, âgé de 38 ans, d'Hesch, 
canton de Bäle-Campagne, voiturier, d’une forte consti- 
tution , reçut dans le milieu de l'été 1844, un coup de 
pied de cheval, dans la région inguinale gauche, à la 
suite duquel il se forma une tumeur volumineuse, sur 
le trajet du cordon spermatique qui resta irréductible et 
pour laquelle le malade ne consulta aucun chirurgien. 

« Le 31 janvier 1845, en soulevant une grosse bouteille, 
remplie d'acide sulfurique, à Boudry, il sentit une violente 


— 176 — 
secousse dans sa tumeur, comme si quelque chose se 
déchirait. Celle-ci doubla tout-à-coup de volume et ne 
put être réduite par le chirurgien appelé auprès de lui. 

«Envoyé à l’hôpital Pourtalès le 4 février, le malade 
présenta l’état suivant : Face très-colorée, peau chaude, 
pouls plein, ventre un peu météorisé, mais souple et peu 
douloureux , vomissemens fréquens, léger hoquet, consti- 
pation opiniâtre, depuis le moment de l'accident; tumeur 
herniaire située dans le scrotum du côté gauche, s’éten- 
dant depuis l’anneau inguinal jusqu’au fond de ce sac, 
recouvrant la verge, déjettée à droite, et ayant le vo- 
lume de la tête d’un enfant; point de changement de 
couleur à la peau ; la tumeur était pesante et élastique. 
Une tentative de réduction fut inutile. 

« Considérant que la hernie était étranglée depuis qua- 
tre jours, que des tentatives de réduction avaient déjà 
été faites par un chirurgien habile, à Boudry, M. le doc- 
teur Bœger, que le ventre était souple, le pouls bon, la 
peau chaude, les vomissemens fréquens, je me décidai à 
opérer le malade sur-le-champ, à cinq heures du soir. 
Une incision intéressant la peau, fut pratiquée depuis la 
partie supérieure de l'anneau inguinal jusqu’à la partie 
inférieure du scrotum; cette incision avait environ 12 
pouces de longueur. Au milieu de cette incision, je 
fis peu-à-peu l'ouverture du sac herniaire ; le cremas- 
tère était hypertrophié, ses fibres très-développées ; l'issue 
d'une petite quantité de sérosité brunâtre, m'annonça 
que j'étais parvenu dans le sac, celui-ci fut incisé dans 
toute sa longueur de dedans en dehors, un jet considé- 
rable de sérosité s’échappa de son intérieur. Une anse 
volumineuse d'intestin grèle se trouva à nu. Les parois 


— 1717 — 

fortement distendues par des gaz, étaient d'un rouge 
foncé, très-injectées ; deux ou trois plaques noires s'y 
faisaient remarquer, celles-ci étaient élastiques comme 
le reste de l'intestin. Derrière cette anse intestinale, j'a 
perçus une anse du colon, longue d'environ six pouces, 
reconnaissable à son volume et à ses bandelettes longitu- 
dinales. La couleur de cet intestin était à peine diffé- 
rente de son état naturel ; sur quelques points on voyait 
une couleur rosée. Trois appendices graisseux, longs 
d'environ deux pouces et du volume d'un petit doigt, 
fixaient solidement cet anse du gros intestin au sac her- 
niaire. L'anneau inguinal fut débridé directement en haut, 
dans l'étendue de six à huit lignes, à la méthode de Scarpo. 
Ce débridement ayant été trouvé insuffisant, le bistouri fut 
de nouveau porté en haut et en dehors et l’anneau incisé 
dans l'étendue de quelques lignes. Après ce débridement, 
qui ne fut suivi d'aucune hémorrhagie, je procédai à la 
réduction. Eprouvant de la difficulté à faire rentrer d’abord 
l'intestin grèle, qui était au devant, et instruit par l’expé- 
rience, que quand il y a plusieurs anses intestinales à ré- 
duire, la postérieure, qui est dans une ligne plus directe 
avec le canal inguinal, rentre plus facilement, je cherchai 
à réduire le colon ; à cet effet, je détruisis avec le doigt 
l’adhérence des appendices graisseux avec le sac herniaire 
et la réduction s’opéra ensuite facilement; celle de l'in 
testin grèle devint alors très-facile. Les taches noires qui 
étaient sur ces intestins me firent hésiter un moment sur 
cette réduction, comme elles étaient chaudes et élastiques, 
je m'y décidai heureusement. 

«Après la réduction, je rapprochai les parois du sac et 
les lèvres de la plaie, et les maintins rapprochées par 


— 178 — 


deux points de suture. Une compresse fenêtrée, de Ja 
charpie, des compresses et un bandage en T complé- 
tèrent le pansement. Une boisson adoucissante, une potion 
huileuse et des fomentations émoliantes sur l'abdomen 
furent prescrites. Le malade passa une nuit tranquille, 
il rendit beaucoup de vents par l'anus, les vomissemens 
cessérent. 

«Le 5 février les évacuations se rétablirent, deux selles 
topieuses eurent lieu, accompagnées de beaucoup de 
vents , le ventre s’affaissa. 

«Les jours suivans n'offrirent rien de remarquable. 
Le 9, levée du premier appareil; le scrotum et la verge 
sontinfiltrés, la plaie commence à suppurer ; en soulevant 
la tumeur qui est volumineuse, une certaine quantité de 
sérosité brunätre s'échappe du sac herniaire, entre les 
points de suture, qu'on juge convenable de couper : les 
évacuations alvines sont régulières. 

« Le 11 et le 12, des portions du sac herniaire s’ex-. 
folient, une sérosité brunâtre et un peu fétide tache l'ap- 
pareil. 

« Le 15, la suppuration est de bonne nature, l'infiltra- 
tion du scrotum et de la verge diminue (*). » 

Dans le cas rapporté ci-dessus, le taxis forcé et pro- 
longé à la méthode de M. Amussat, aurait-il été conve- 
nable ? Nous ne l'avons pas jugé ainsi et nous nous en 
félicitons. Le volume de la hernie, le grand développe- 


(*) Jusqu'au 1°" mars rien de particulier ; la plaie s’est beaucoup rétré- 
cie; les évacuations alvines sont régulières ; le malade mange le quart de 
portion. Aujourd’hui la plaie n’a plus que quatre pouces de longueur sur 
trois à quâtre lignes de largeur ; le malade voudrait se lever : le scrotum 
est encore un peu infiltré; la verge ne lest plus; tout annonce une 
prompte guérison. 


— 179 — 

ment de l'intestin grêle, les taches noires qu'on y re- 
marquait déjà , les adhérences du colon avec le sac 
herniaire par les appendices graisseux qu'on a déchiré 
avec peine , la grande étendue du débridement qu'on a 
dù opérer sur l'anneau inguinal, sont autant de raisons 
qui nous portent à croire que le taxis aurait été inutile 
et funeste. La gangrène était imminente, des manipu- 
lations violentes sur la tumeur et le moindre retard dans 
l'opération l'aurait infailliblement occasionnée. 

« Des taches noires sur les parois intestinales quoique 
circonscrites, mais encore élastiques, ne doivent pas em- 
pêcher la réduction de l'intestin. 

« Nous ajouterons que le taxis forcé et prolongé comme 
règle générale, peut avoir les suites les plus funestes. 
Notre pratique, qui dans l'espace de trente-cinq ans, 
nous a fait observer bien des cas de hernie, nous porte 
à penser, comme le pensaient déjà Desault et Boyer, qu'il 
vaut infiniment mieux opérer dans les premiers jours 
une hernie étranglée, que d'attendre que la gangréne ou 
la péritonite aient eu le temps de se développer (*). » 


(*) L'observation suivante , que nous avons faite tout récemment, nous 
fournit encore un exemple des conséquences fàcheuses que peut entrai- 
ner le retard de l'opération 

« Marguerite Russillon , âgée de 51 ans, de Bémont , canton de Vaud, 
servante à Neuchâtel, d’une forte constitution, portait depuis plusieurs 
années une hernie crurale du côté gauche. La tumeur peu volumineuse 
rentrait facilement , jamais elle n’avait été maintenue par un bandage. 

Le 2 avril, à la suite d’une indigestion , la hernie ne put pas être ré- 
duite par la malade, je la vis pour la première fois le 3 ; elle n’avait 
point de fièvre, point de vomissements ni de hoquet , le ventre était 
souple sans douleur, la tumeur avait le volume d’une petite pomme, elle 
était globuleuse et renitente; j’essayai, mais inutilement, de la faire 
rentrer par le taxis prolongé, pendant une demi heure; un bain et des 
applications émollientes furent conseillées, 

14 


— 180 — 


M. Agassiz rend compte des recherches récentes de 
M. Milne Edwards sur la circulation du sang chez les 
mollusques gastéropodes, d'où il résulie que, chez un 


Le 4 la hernie n’était pas rentrée, j’engageai la malade à entrer à l’hô- 
pital Pourtalès et à se soumettre à l’opération que je jugeai indispensable; 
une nouvelle tentative de réduction fut inutile, il n’y avait toujours point 
de vomissements ni aucun symptôme inflammatoire du côté de l’abdomen. 
La malade et sa maitresse ne voulurent pas entendre parler de lhôpital 
et encore moins de l’opération ; je prescrivis un lavement avec une infu- 
sion de feuilles de Belladone et des fomentations avec la même infusion ; 
le soir la hernie était dans le même état , la malade avait quelques nau- 
sées et le ventre était un peu douloureux. Je réitérai mes instances pour 
l'opération et pour l’hôpital. La malade voulut consulter son frère qui 
était à Boudry. Je fis réitérer un lavement avec la Belladone et appliquer 
de la glace sur la tumeur ; pendant la nuit, la malade eut des révasseries 
que j’attribuai à la Belladone, les pupilles étaient dilatées, la gorge sèche. 

Le 5 au matin, d’après le conseil de son frère , la malade se décida à 
l'opération et à entrer à l'hôpital, où elle fut admise et opérée de suite. 
On trouva dans le sac herniaire une anse intestinale globuleuse du volume 
d’une petite pomme, élastique, mais déjà d’un brun foncé , sans taches 
grisètres. Quelques fausses membranes minces se faisaient remarquer à 
la surface, une sérorité brunâtre s’était écoulée à l’ouverture du sac. 
Celui-ci ayant été tiré en dehors, on reconnut que l’étranglement était 
formé par son col; une sonde cannelée fut introduite avec difficulté 
au travers de celui-ci, qu’on incisa avec un bistouri boutonné : Deux ou 
trois petites incisions furent pratiquées sur l’arcade crurale. L’intestin 
m’étant nullement affaissé sur lui-même et partout élastique, fut réduit 
avec facilité et la plaie réunie immédiatement. 

La journée qui suivit l’opération fut calme , la malade rendit des vents 
par l’anus; un lavement émollient amena trois selles, la nuit suivante 
fut assez bonne, sommeil de plusieurs heures. 

Le 6, le ventre devint sensible à la pression, le pouls petit et fré- 
quent, un léger hoquet et des vomissements se manifestèrent, une 
saignée, des frictions mercurielles et des fomentations émollientes fu- 
rent mises en usage. 

Le 7, les symptômes s’aggravèrent , la peau devint froide, le pouls petit 
et insensible , les vomissements de matières verdàtres furent continuels ; 
le ventre devint très-sensible et ballonné , enfin, la malade succomba 
pendant la nuit, le sixième jour de l’étranglement. 


— 181 — 


grand nombre de ces animaux, la circulation n’a pas tou- 
jours lieu dans des vaisseaux ou tubes fermés ; mais qu'il 
y a de fréquentes interruptions dans le système vascu- 
laire, à tel point que chez quelques-uns de ces animaux 
les intestins nagent dans le sang veineux, qui, dans son 
trajet ultérieur, n’a d'autre impulsion que celle qui lui est 
communiquée par le mouvement des organes qu'il baigne. 

M. Agassiz rend également compte des recherches de 


Autopsie. L’abdomen est météorisé, bosselé ; la plaie crurale n’est pas 
réunie ; une suppuration sanieuse en recouvre les bords ; le péritoine est 
rouge et enflammé , les intestins sont métcorisés , d’un rouge intense, re- 
couverts de fausses membranes ; lorifice interne du canal crural est libre; 
un épanchement peu considérable, séro-purulent , occupe le fond du petit 
bassin; les portions d’intestin qui avoisinent l’orifice interne du canal 
crural, offrent rien de particulier, sinon qu’elles sont plus enflammées 
et que les fausses membranes qui les recouvrent sont plus étendues que 
sur la totalité du paquet intestinal ; en développant celui-ci, pour trouver 
la portion qui avait été étranglée, nous trouvames au-dessous de la ré- 
gion ombilicale , une partie de l’Ileon, longue de trois ou quatre pouces, 
noire, flétrie, faiblement adhérente à l’intestin voisin; en la séparant, 
nous découyrimes deux perforations larges de trois à quatres lignes ré- 
pondant au collet du sac herniaire. Ces perforations étaient obstruées par 
Padhérence de leur pourtour à l’intestin, sur lequel elles reposaient, de 
manière à ce qu'aucun épanchement n’a pu avoir lieu; lanse intestinale 
étranglée n’oceupait pas tout-à-fait tout le diamètre de l'intestin, un 
espace de quelques lignes de celui-ci, près de son attache au mésentère, 
était sain et n’avait pas été étranglé. Est-ce à cette circonstance que l’on 
doit attribuer le peu d’iutensité des symptômes de l’étranglement observé 
dans ce cas? 

La mort a été causée par la gangrène de la portion d’intestin herniée, 
l’élasticité et l’absence de taches grisètres semblaient indiquer que la vie 
existait au moment de l’opération , ce qui nous a empéché d’en faire l’ex- 
cision surtout en nous rappelant l’état analogue de l’intestin chez l’indi- 
vidu de notre précédente observation. L’étranglement violent occasionné 
par le collet du sac herniaire a rendu le taxis inutile et dangereux. Le 
retard de lopération a surtout été funeste ; si elle eut été pratiquée vingt- 
quatre heures plutôt, comme nous le proposions, il est probable que la 
malade ent été sauvée. » 


— 182 — 

M. de Quatrefages, sur la forme du canal alimentaire chez 
un certain nombre d’articulés et de mollusques. Ce ca- 
nal se ramifie en une foule de tubes qui portent direc- 
tement les sucs nutritifs aux différentes parties du corps, 
sans passer par l'intermédiaire des vaisseaux. M. de Qua- 
trefages à désigné cette singulière structure sous le nom 
de phlébenthérisme. 

M. Coulon père cite un exemple qui prouve jusqu'à 
quel point les Diptères possèdent la faculté d'élargir et 
de retrécir à leur gré le volume des différentes parties de 
leur corps. Il avait placé dans une phiole une douzaine de 
petites mouches, et avait eu soin de boucher la phiole 
avec un bouchon de laine de coton. Le lendemain n'ayant 
plus trouvé que la moitié de ses mouches, il fat curieux 
de voir comment elles s’y étaient prises pour s'échapper. 
Il les observa à cet effet et il vit qu'elles commençaient 
par insinuer leur tête, très-amincie, entre la phiole et le 
coton; puis gonflant considérablement leur tête, elles 
comprimaient les fibres du coton, de manière à frayer un 
passage au reste du corps. Ce manëge plusieurs fois ré- 
_ pété leur permettait de sortir de la phiole. 

E. Desor, secrétaire. 


N° 16. 
BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DB NEVCELATER 


em OA € em— 


Séance du 5 mars 1845. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. de Castella fait voir une série de modèles représen- 
tant des préparations pathologiques confectionnées par le 
docteur Thiebert, à Paris. M. le docteur de Castella en 
a fait don au Musée. 


M. Agassiz rapporte un fait de superposition de roches 
qui a été observé dans le nord de l'Ecosse par M. Ro- 
bertson, et qui ne semble pouvoir s'expliquer que par la 
théorie des glaciers. Dans toute la contrée, le Till ou 
terrain glaciaire recouvre immédiatement le vieux grès 
rouge, dont la surface est ondulée et bosselée; mais il 
est une localité dans le Murrayshire, où une coupe de 
terrain présente la disposition suivante de haut en bas: 

a) Graviers stratifiés. 

b) Till avec galets arrondis. 

c) Terrain jurassique, #0 pieds d'épaisseur. 
d) Till avec galets striés. 

e) Vieux grès rouge. 


— 184 — 

Voici comment M. Robertson, qui a fait une étude dé- 
taillée du terrain erratique d'Ecosse, s’est rendu compte 
de cette superposition. « On sait que les anciens glaciers 
» ont envahi les anses de la mer sur nombre de points 
» des côtes de la Grande-Bretagne, si bien qu'on voit 
» encore aujourd'hui sous l’eau les sillons qu'ils y ont 
» tracés. Le banc de calcaire jurassique qui se trouve ici 
» enveloppé dans le Till était sans doute un éperon ou 
» un petit promontoire de la côte. Or, en supposant que 
» le glacier, de concert avec les agens atmosphériques, 
» ait miné et enlevé la couche d'argile weldienne sur la 
» laquelle il reposait, cet éperon se sera détaché, et, une 
» fois tombé sur le glacier, il aura été transporté par lui 
» loin de son origine, et déposé lors de la fonte des glaces 
» au milieu des terrains de transports auxquels a donné 
» lieu cette même fonte. » 


M. Guyot annonce que l'étude du terrain erratique 
continue a faire des progrès non moins satisfaisans sur 
le continent. Il signale en particulier les recherches de 
M. Scipion Gras, sur l’erratique du Dauphiné et annonce 
en outre que depuis que l'attention des géologues de Savoie 
a été fixée sur ce point par la réunion de la Société géo- 
logique de France à Chambéry, M. le chanoine Carrel 
a trouvé des roches polies et striées aux environs d'Aoste. 


M. Desor signale le fait paléontologique suivant, qui 
lui a été communiqué par M. Gressly : Il y a vingt ans 
à-peu-près , M. Hugi envoya à Cuvier des dents fos- 
siles trouvées par lui dans le calcaire portlandien de 
Soleure ; ces dents furent déterminées par Cuvier comme 


— 185 — 

appartenant à des Paleotherium. Cependant la présence 
de ces mammifères au milieu de terrains beaucoup plus 
anciens que ceux dans lesquels on les trouve ordinai- 
rement semblait étrange, et l'on se contenta de les men- 
tionner comme un de ces faits exceptionnels, dont la liaison 
avec le reste de la nature nous échappe. Or, voici que 
l’on vient de découvrir dans les carrières d'Obergæsgen, 
entre les assises du même terrain portlandien , des dents 
semblables à celles de Soleure, accompagnées de galets 
et de graviers alpins. M. Gressly fut curieux de voir 
comment ils étaient arrivés là, et en examinant attenti- 
vement la disposition des masses, il vit que les bancs de 
calcaires affleuraient à quelques distances des carrières 
dans une petite dépression remplie de terrain diluvien, 
et put ainsi s'assurer que c'était par-là que les dents aussi 
bien que les galets avaient pénétrés entre les assises. En 
faisant ainsi rentrer un fait en apparence exceptionnel 
dans les lois générales de la distribution des animaux 
fossiles , cette découverte témoigne à la fois, et de la 
fixité des lois de l’organisation, et de la sagacité du grand 
naturaliste, puisque malgré l’anomalie de gisement, Cuvier 
pe craignit pas d'annoncer que les fossiles dont il s’agit 
étaient identiques avec ceux des terrains tertiaires. 


M. de Castella cite un cas de spasme tonique chez une 
jeune fille qui, après avoir duré quatre mois, a fini par 
se guérir de lui même: tous les médicamens prescrits 
ayant été sans effet. 

M. le docteur Borel signale comme très-fréquent chez 
les jeunes filles des contractions des muscles fléchisseurs 
du pouce. Il cite un autre cas d'un homme de #5 ans, 


— 186 — 
chez lequel le spasme ne demeurait pas local, mais se 
portait d’une partie du corps dans l’autre. Ce même in- 
dividu a été atteint plus tard d'épilepsie. 
E. Desor, secrétaire. 


Séance du 19 mars 1845. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. Ladame lit un mémoire de M. Auguste Olivier 
Matthey, sur l'application des métaux par voie galva— 
nique. Ce mémoire renferme la deseription de quelques- 
uns des résultats industriels obtenus dans cette branche 
importante de l'électro-chimie : 

a) Des dorages gravés avec reliefs polis. 

b) Des dorages avec gravures dorées et reliefs argen- 
tés grénés mat. 

c) De l’argenture matte. 

d) Du blanchiment des cadrans de montres. 

e) De la dorure matte. 

f) De la mise en couleur. 

g) De la dorure sur acier, par l'intermédiaire du ni- 
trate de mercure. 

h) De la gravure par le moyen de l'électricité. 

t) De la galvanoplastie et des épargnes, le vernis Da- 
mart, l'huile d’asphalte, la cire blanche, la cire à ca- 
cheter, etc. j 

k) Préparation de la poudre d'argent pour le grenage. 

?) Préparation du cyanure potassique et des dissolutions 
d'or, d'argent, de cuivre, dont on se sert pour donner à 
la dorure une couleur convenable. 


— 187 — 

m) Description d'un appareil, pour reproduire un grand 
nombre de médailles , peu volumineux et facile à diriger, 
en ce que chaque médaille est indépendante et peut 
être enlevée à volonté. Cet appareil consiste en une caisse 
de terre vernie extérieurement, de forme rectangulaire, 
longue de 18 à 24 pouces, large de 6 pouces; cette 
caisse est divisée intérieurement en compartimens par 
des diaphragmes poreux en terre, à trois pouces l’un de 
l’autre; ces compartimens forment autant d’auges à dé- 
composition, dans lesquelles on met alternativement 
dans une case du sulfate de cuivre et dans la suivante de 
l'eau salée ; dans celle-ci plonge une plaque de zinc amal- 
gamée, à laquelle on adapte le fil conducteur qui sou- 
tient la médaille plongée dans la dissolution de sulfate 
de cuivre. 

A. GuxoT, secrétaire. 


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- 89} De-ts dorère qur boire, qur Y'imtermébdiaires denis 

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N° A7. 


Se TT 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 
DS MEUVCHATEL. 


——— 0 00 


Séance du 5 avril 1845. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. Agassiz rend compte des travaux de M. J. Müller 
sur les poissons. Il rappelle les importantes découvertes 
de ce savant anatomiste sur différents caractères négli- 
gés jusqu'ici dans l'Ichthyologie, et dont l'application à 
la classification a si puissamment contribué à rectifier 
la circonscription de plusieurs familles naturelles. Il fait 
également connaître les détails nouveaux que M. Muller 
a recueillis sur l’ensemble de l’organisation des poissons, 
et sur lesquels il a basé l'essai d’une nouvelle classifica- 
tion qui est exposée dans les Archives d'histoire natu- 
relle d'Erichson. 

A cette occasion, M. Agassiz rappelle l’importance qu'il 
y a pour l'histoire naturelle à étudier toutes les classes, 
non-seulement dans leur état actuel, mais aussi dans 
les traces qu'elles ont laissées de leur existence à des 
époques antérieures à la nôtre. Le rapporteur insiste sur- 
tout sur ce fait, qui ressort évidemment d'une compa- 
raison de la distribution géographique des espèces fos- 
siles et des espèces vivantes, c’est que toutes les forma- 


— 190 — 
tions géologiques, prises même dans le sens le plus 
restreint, peuvent dès à présent être considérées comme 
le tombeau d'autant de créations indépendantes, entre les- 
quelles il existe cependant un lien génétique, mais dans 
la pensée du créateur seulement, et non point dans la liai- 
son matérielle des espèces. 


Séance du 16 avril 1845. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. Gustave de Pury annonce avoir observé, dans la 
mine d’asphalte du Val-de-Travers, au milieu de bancs 
imprégnés de bitume, un filon croiseur, dont il décrit la 
disposition. La roche asphaltée est composée en cet en 
droit de banes compactes de calcaire qui viennent affleu- 
rer immédiatement au-dessous de la terre végétale. Au- 
dessous de ces premiers bancs se trouve une couche 
d'argile, à laquelle succèdent de nouveau plusieurs bancs 
de calcaire compacte. Mais les deux couches d’argiles ne 
sont pas dans le même plan, l’une est sensiblement plus 
basse que l’autre. Le filon traverse verticalement ces 
bancs alternatifs ; il est composé d'une roche très-dure et 
fortement imprégnée. Les parois qui l’entourent sont lis- 
sées et striées. 

M. Agassiz fait ressortir l'importance de ce phénomène, 
qui pourra peut-être servir à résoudre la question en- 
core contestée de l'origine de l'asphalte, que les uns 
attribuent à une décomposition de parties organiques 
provenant d'animaux qui auraient été ensevelis au sein 
même de ces couches, tandis que d’autres l’expliquent 
par une imprégnation de matières charbonneuses venant 


— 191 — 

de bas en haut. Au premier abord, la présence de ce 
filon , et le fait que les parois qui l'entourent sont striées, 
semblent faire pencher la balance en faveur de cette der- 
nière opinion, mais il ne faut pas oublier que lesexemples 
de roches de frottement ne sont pas rares dans les failles 
du Jura; il se pourrait par conséquent que le filon dont 
il est ici question, loin d'avoir été injecté de bas en haut, 
ne fût que le remplissage d'une faille de haut en bas. Il 
importerait de savoir si les parois du filon lui-même pré- 
sentent les mêmes traces de frottement que l’éponte. 


M. Desor rend compte des observations de M. Hom- 
maire de Hell sur la salure des lacs qui entourent la Cas- 
pienne et des discussions auxquelles ces observations ont 
donné lieu au sein de la Société géologique de France. 
Le but de M. Hommaire de Hell était de rechercher si 
la salure de ces lacs périodiques est entretenue et renou- 
velée par des sources salées, ou bien si la vase contient 
une provision suffisante de parties salines, pour suffire à 
la déposition de nouvelles couches de sel cristallisé toutes 
les années. Prenant pour terme de comparaison le lac 
Dopminskoï, celui d'où l'on retire le plus de sel, l’au- 
teur du mémoire est remonté à l’origine de l'exploitation, 
et en combinant la quantité de sel qui en a été extraite 
depuis que cette industrie existe, avec l'étendue du lac et 
son degré de salure, il est arrivé à ce résultat, que l’ex- 
ploitation du lac Dopminskoï, qui fournit aujourd'hui 
20,000,000 de kilogr. de sel par an, pourrait encore être 
continué dans les mêmes proportions pendant 18 siècles, 
avant que le lac soit épuisé. L'auteur a ainsi été conduit 
à examiner de nouveau Ja question des anciens niveaux 


— 192 — 


de la mer Caspienne. On sait que la présence des petits 
lacs qui bordent la Caspienne avait déjà été invoquée par 
Pallas comme une preuve de l’ancienne extension de 
cette mer, et ce savant envisageait les lacs salans, qui 
l'entourent, comme autant de résidus de l'ancienne plage. 
En montrant d’une part que la salure des lacs est suffi 
sante pour entretenir une forte déposition de sel cristal- 
lisé, et d'autre part en établissant qu'il ne peut pas 
exister de sources salines dans ces régions, M. Hommaire 
de Hell a pleinement confirmé l'opinion de l'illustre 
Pallas. 

A cette question s’en rattache une autre plus impor- 
tante. Le bassin de la mer Caspienne est-il dû à une dé- 
pression du sol; ou bien son niveau , qui est au-dessous 
de celui de l'Océan, n'est-il que la conséquence d’une 
diminution insensible de hauteur dans ses eaux? L'’as- 
pect des contrées basses, marécageuses et couvertes de 
lacs salés, qui s'étendent depuis Astracan jusqu’au Terek, 
sur une largeur de quatre myriamètres, et dont l’élé- 
vation au-dessus du niveau de la mer est à peine de 
quelques pouces, peut être envisagée comme une pre- 
mière preuve d'une diminution lente, que M. Hommaire 
de Hell attribue aux pertes considérables qu'ont faites 
dans les temps modermes les eaux du Volga, de l'Oural 
et de l'Emba. Il rappelle également que du temps de 
Pierre-le-Grand, on construisait à Casan des bâtimens 
de guerre, et que de nos jours de pareils travaux ne 
pourraient plus s’y effectuer. De ces faits et de plusieurs 
autres, M. Hommaire de Hell conclut que l’ahaissement 
du niveau de la Caspienne, loin d’être dû à une dépres- 
sion du sol, n’est que le résultat de l'équilibre rompu 


— 193 — 

entre les eaux enlevées par l’évaporation et celles ame- 
nées par les fleuves et les pluies. L'auteur pense même 
qu'on peut aujourd'hui démontrer que la mer Cas- 
pienne était autrefois réunie à la mer Noire, au moyen 
d'un bras de mer passant par les bassins du Manitsch et 
de la Kouma, et il ajoute que si par une influence quel- 
conque , le Bosphore venait à se fermer, la jonction entre 
ces deux mers ne tarderait pas à s'effectuer, uniquement 
par suite des eaux excédentes, qui aujourd'hui se déver- 
sent de la mer Noire dans la Méditerranée. 

D'autres géologues ont cherché à mettre ces résultats 
d'accord avec des phénomènes analogues observés dans 
d’autres localités, tels par exemple que les petits étangs 
du département des Bouches-du-Rhône, qui à l'époque 
de Marius étaient réunis à la Méditerrannée , et qui au- 
jourd'hui sont à 8 et 10 mètres au-dessous de cette mer, 
et dont la salure va jusqu’à 23°. Ils citent également les 
lacs amers d'Egypte qui sont à 8 mètres au-dessous de la 
Méditerrannée, et à 1760 au-dessous de la mer Rouge; 
tandis que les anciennes rives contenant des coquillages, 
sont exactement à la hauteur de la mer Rouge. Enfin 
ils citent aussi la mer Morte, qui depuis les observations 
de M. de Bertou, est à 4263 au-dessous de la Méditer- 
rannée, et dont la salure est en quelque sorte en rap- 
port avec cet abaissement de niveau, puisque 100 par- 
ties d'eau contiennent, d'après M. Gay Lussac, 26,24 
parties de matières salines. Se basant sur ces faits, M. An- 
gelot en conclut une diminution générale des eaux à la 
surface du globe, à la suite de laquelle les continens au- 
raient cessé d’être isolés. Poussant ces conséquences jus- 
qu’à leur limite extrême, il pense que la Caspienne, la 


— 194 — 


mer Noire, la Méditerrannée , les Lacs amers, la Mer- 
Rouge let même la Mer-Morte, ne formaient qu'une 
seule et même mer. Pour justifier cette communication 
générale des bassins entre eux et en particulier de la mer 
Morte avec la mer Rouge, M. Angelot s'appuie sur ce 
fait, que l’on a découvert sur la plage de la Mer-Morte 
un polypier madréporien (Porites elongata Lam.), dont 
l'espèce est vivante de nos jours dans la mer Rouge, d'où 
il conclut que la communication des deux mers à cessé à 
une époque où le règne animal actuel existait déjà. Enfin, 
comme dernière preuve de l’ancienne extension des niers 
et de leur diminution lente, M. Angelot insiste sur ce 
fait, que tous les lacs situés au-dessous du niveau de la 
mer, sont des lacs salins, et par conséquent sont autant 
de résidus de l’ancienne mer. 

M. Agassiz objecte à ces conclusions que l'ubiquité 
de certaines espèces dans différens bassins ne saurait être 
invoquée ni pour ni contre l’idée d’une ancienne commu- 
nication. Il cite à cet effet différens exemples de poissons 
d'eau douce qui se trouvent dans des bassins qui n'ont 
jamais été en communication, ni pendant l’époque ac- 
tuelle, ni même pendant l’époque tertiaire. C’est ainsi 
que la Perche de notre lac se trouve à la fois dans le 
Rhin et dans le Rhône. Il en est de même du Brochet et 
de plusieurs espèces de Cyprins, tandis que d'autres ha- 
bitent exclusivement dans un seul bassin. 

M. Guyot ne peut admettre une communication de la 
Mer-Rouge avec la Mer-Morte, par la raison que ces 
deux bassins sont séparés par un renflement considérable 
du sol qui s'élève jusqu’à plusieurs centaines de mètres. 
En tous cas, s'il s’est opéré une séparation des deux mers 


— 195 — 


à une époque quelconque, cette séparation ne peut pas 
être l'effet d'une diminution lente des eaux; elle ne pour- 
rait s’expliquer que par un soulèvement. 


M. Ladame présente un résumé -succint des expé- 
riences de MM. Villefranche et Barreswil, qui prouvent 
que l'acidité du suc gastrique est due à l'acide lactique et 
à l'acide phosphorique, et non point aux acides chlor- 
hydrique, acétique, ni au biphosphate de chaux. 

2° Un rapport sur la digestion des alimens féculens 
et sucrés, d’après les expériences de MM. Bouchardat et 
Sandras, d'où il résulte que les fécules deviennent so— 
lubles dans les intestins, et que dans cet état elles sunt 
absorbées par les expansions des rameaux de la veine 
porte, et portées au foie. 

Le foie peut être considéré comme un appareil réduc- 
teur, qui transforme les fécules en substances grasses, et 
les rend ainsi propres à être brülées dans le poumon. 


E. DEsor, secrétaire. 


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N° 18 


BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DB MEUCEISTEL, 


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Séance du 7 mai 1845. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. Ladame présente quelques observations sur l'épui- 
sement des sols par la culture. «Plusieurs agriculteurs 
dit-il, ont remarqué une diminution notable dans les pro- - 
duits de la vigne, en comparant les récoltes actuelles 
avec celles que l’on faisait il y a un siècle. C’est surtout 
dans les terres légères et peu profondes que cette réduc- 
tion s’est montrée la plus grande. 

» L'Italie et la Sicile, ce grenier de l'Italie, ne produi- 
sent presque plus de blé ; le sol de la Virginie qui a pro- 
duit letabac pendantsi longtemps et en si grande quantité, 
ne répond plus à l'attente du cultivateur; il est épuisé. L'é- 
puisement des sols résultant de la culture constante d’une 
même plante dans le même lieu , est un fait bien constaté, 
et c'est pour cette raison que plusieurs pratiques se sont 
introduites en agriculture; telles sont : la jachère, les 
assolemens, les amendemens, les engrais, etc. 

» Si le fait de l'épuisement des sols est positif et démon- 
tré par l'expérience, il n’en est pas de même de son ex- 
plication scientifique, qui n’est pas encore donnée d'une 
manière pleinement satisfaisante. 


— 198 — 

» L'étude des causes qui amènent un résultat si fâcheux 
est de la plus haute importance; car on ne pourra y ap- 
porter un remède efficace, que lorsqu'elles seront suffi- 
samment connues. 

» Un sol présente deux ordres de propriétés ; des pro- 
priétés mécaniques et des propriétés chimiques. En vertu 
des premières, le sol sert de support aux plantes, il per- 
met le développement des racines , retient les eaux et les 
laisse écouler et protège les végétaux contre les in- 
fluences trop énergiques de l'atmosphère et de la chaleur. 
Les agriculteurs ont toujours attaché une haute valeur 
aux propriétés mécaniques, et plusieurs d’entr'eux les ont 
considérées comme les seules auxquelles on doit avoir 
égard, pour juger des qualités du sol, dans ses rapports 
avec les plantes qu'il produit. 

» Les propriétés chimiques d’un terrain résultent de 
sa composition et de la nécessité de fournir aux plantes 
des alimens qu'elles ne peuvent puiser dans l'atmosphère; 
jusqu'ici le terreau, ou les débris organiques en éréma- 
causie (combustion lente) ou en fermentation, ont été 
considérés comme les seules substances importantes au 
point de vue chimique ; de là, la valeur des engrais. Mais il 
existe d’autres élémens qui ont été envisagés par la plu- 
part des physiologistes comme accidentels dans les plantes, 
et que par des faits nombreux on doit regarder comme 
nécessaires au développement normal ei complet de la plante; 
ce sont les substances minérales , la chaux, la silice, les 
phosphates, la soude, la potasse, etc. 

» Dés que l’on admet que les substances minérales sont 
nécessaires aux plantes, de la même manière que les 
phosphates le sont pour la fermation des os dans l'en- 


à 
| 
f 
( 


— 199 — 

fant , le fait de l'épuisement des sols s'explique d'une 
manière très-simple. Ainsi, chaque année, une cer- 
laine quantité de potasse à l’état de crême de tartre est en- 
levée des terres plantées de vignes, et il est évident, que 
comme le sol ne contient de cette substance qu'une quan- 
tité limitée, il doit arriver une époque où le sol n’en 
contiendra plus qu'une quantité si faible, qu'elle sera in- 
suflisante à la formation du raisin. On verra alors la vi- 
gne bien fumée présenter beaucoup de bois, de feuilles 
et même de fleurs, mais le fruit ne parviendra pas à mâ- 
turité, et les plus légères circonstances atmosphériques 
arrêteront son développement. 

» Un fait singulier tiré du règne animal, nous don- 
nera une idée plus précise et plus claire de ce qui vient 

‘être dit. Les vaches et les moutons, auxquels on donne 
du sel en abondance, résistent mieux aux influences fà- 
cheuses, que ceux auxquels on en donne peu ou point. 
Ces derniers sont sensibles aux variations atmosphériques, 
et le plus léger refroidissement, par exemple, ou une 
nourriture moins abondante et moins délicate altère leur 
santé, ce qu'on ne remarque pas chez les premiers. 

» De la même manière, la plante qui croît dans un 
sol où elle ne trouve pas les alimens minéraux suffisans, 
n'a qu'une existence chétive, et ne donne plus que des 
fruits en petit nombre, et d'une mauvaise qualité. 

» Si telle est la cause de l'épuisement des sols, il suffira 
de leur rendre les produits qu'on leur a enlevés, pour les 
rétablir dans leur fertilité primitive. Mais ici nous devons 
faire une observation importante; c’est qu'il ne suffit 
pas de reporter sur le sol les substances minérales que 
les récoltes successives lui ont prises; il faut de plus, que 


— 200 — 

ces substances soient dans un tel état d’agrégation que 
la plante ne puisse les recevoir que peu-à-peu et lente- 
ment, et par conséquent il faut que ces corps soient en- 
gagés dans des combinaisons qui, sous l'influence de l’air et 
de l’eau, se désagrègent avec le temps, et se disposent dans 
l'état propre à l'assimilation. Ainsi posée , la question ne 
peut bien se résoudre que par des expériences, et il est 
à désirer que la Société d’émulation patriotique mette celte 
question au concours, et fournisse au besoin les moyens 
de faire ces expériences. » 

C'est, pénétré de la haute importance que présente 
la solution de cette question pour notre vignoble, que 
M. Ladame propose à la Société des sciences naturelles, 
d'appeler attention de la Société d'Emulation patriotique 
sur cet objet. 

» Il existe une autre théorie sur l'épuisement des sols, 
qui, si elle était vraie, diminuerait beaucoup la gravité 
des considérations qui viénnent d'être présentées. Elle est 
fondée sur le fait admis que les plantes rejettent par 
leurs racines, dans le sol, des excrétions qui sont véné- 
neuses pour la plante elle-même, mais qui peuvent être 
utiles comme alimens de plantes différentes. Dans ce 
point de vue, un sol est épuisé lorsqu'il est saturé des ex- 
crétions de la plante qu'il porte ; mais comme ces excré- 
tions sont organiques etse détruisent sous l’action du temps, 
une jachère suffisamment prolongée ou un système d’assole- 
mens convenablement suivi, seraittoujours propreärendre 
au sol sa premiére fertilité. Des considérations et des 
faits nombreux et variés ne permettent pas d'admettre 
cette explication ; du reste M. Ladame se propose de re- 
venir ultérieurement sur ce sujet. 


M. Guyot continue son exposé sur la répartition des 
blocs erratiques dans la plaine suisse (*). 
A. Guyor, secrétaire. 


Séance du 21 mai 1845. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le doyen Guillebert présente quelques considérations 
sur les araignées et leur manière de vivre. Après avoir 
esquissé les traits principaux des araignées en général, 
l’auteur passe à l'examen de leurs mœurs. Il trouve que 
«le nom allemand de l’araignée (Spinne) est on ne peut 
mieux approprié; car c’est comme fileuse qu’elle est sur- 
tout remarquable. La toile horizontale de celle qu'on 
appelle domestique est surtout intéressante. Ce filet res 
semble beaucoup à celui que nos pêcheurs appellent le 
loup, ayant les mailles très-serrées dans la partie infé— 
rieure et très-làches dans la partie supérieure ; il est sur- 
monté d'un certain nombre de fils, flottant comme au 
hasard, qui sont comme un premier piége. L’insecte qui 
les rencontre dans son vol, s’y empêtre, et fait pour 
s'échapper des efforts qui d'ordinaire n’aboutissent qu’à 
le précipiter étourdi dans la nasse. Mais quelque re- 
marquable que soit cette toile, elle n’est rien encore en 
comparaison de celle de l’araignée des jardins (Aranea Dia- 
dema L.), appelée par d’autres naturalistes araignée porte- 
croix. Sa toile n’est pas horizontale, comme celle de l’a- 
raignée domestique, mais jamais, ou presque jamais 
non plus tout-à-fait verticale : elle s'éloigne d'ordinaire 


(*) Voir à Ja fin de ce volume. 


— 202 — 

d'un ou deux degrés de la perpendiculaire, sa partie su- 
périeure plus rapprochée du corps solide auquel elle est 
attachée, et son centre rentre un peu du côté de ce 
corps, auquel l’araignée tourne le dos quand elle est au 
milieu de sa toile. Les fils qui soutiennent et assujet- 
tissent la toile, et que j'appelle cables, sont les plus forts, 
composés de cinq ou six fils collés les uns aux autres, et 
ces fils simples dont sont composés les cables, le sont 
eux-mêmes, si l’on en croit Réaumur, d'à-peu-près 
quatre mille. Chacun des cinq ou six fils, dont se com- 
pose le cable, s’épanouit à l'endroit où il est collé, ce 
qui l’attache plus fortement, et au moment où ils vont 
trouver leur point d'attache, ils se séparent les uns des 
autres, s'étalent en éventail ou en queue d'aronde, ce 
qui augmente les appuis. Pour les augmenter davantage 
encore, les fils sont prolongés sous un angle plus ou 
moins obtus, au-delà des premiers points d'attache, à- 
peu-près comme les principaux cables des ponts de fils 
de fer, qui font un coude sur la tête du pont, pour s’a- 
marrer plus loin. Les fils qui appartiennent au système 
d'amarrage sont placés irrégulièrement, formant tantôt 
des angles, tantôt des hexagones, tantôt d’autres poly- 
gones, mais toujours de manière à épargner le plus pos- 
sible le fil et à assujettir le mieux que possible la toile. 
Elle est placée quelquefois à dix ou quinze pieds au des- 
sus du sol; si les rayons inférieurs, au lieu de trouver 
tout près un cable très-solide et fortement tendu , auquel 
ils peuvent s'attacher, étaient obligés de se prolonger 
jusqu’au sol même, à combien plus de chocs ils seraient 
exposés, et combien de toises de plus il en faudrait! 

» La régularité de la toile circulaire à rayons est admi- 


— 203 — 

rable; telle irrégularité qu'elle présente quelquefois peut 
être plus admirable encore, étant motivée et justifiée par 
des circonstances exceptionnelles impérieuses. Quand 
par exemple l’araignée n’a pas, d'un des côtés où elle 
tend sa toile, autant de place à sa disposition que de 
l’autre, en filant ses lignes spirales, elle les rapproche 
les unes des autres proportionnellement au petit espace 
qu'il ne dépend pas d’elle d'agrandir. 

«La toile régulière ressemble assez à une roue : elle a 
communément vingt ou vingt-un rais ou rayons : le plus 
grand fil concentrique pourrait figurer la jante de la 
roue, la plus petite le moyeu, et le trou qui est au 
centre, le creux du moyeu dans lequel entre l’essieu. 
Les fils à rayons sont rangés avec une grande symétrie, 
et bien plus encore les fils circulaires qui forment , dans 
une proportion constante, des mailles un peu plus ser— 
rées, à mesure qu'ils s’approchent du centre. 

» Tous les grands fils en spirale sont comme des colliers 
de perles, de perles visibles à l'œil nu, mais surtout 
à l'œil armé d’une loupe. Il n’en est pas ainsi des autres 
fils qui sont lisses, plus transparens, assez semblables à 
ceux que les pêcheurs mettent à l'extrémité de leur ligne 
et que nous nommons mortalpéche. Xl est bien facile de 
constater cette différence entre les fils de la toile : ap- 
puyez la lame d’un couteau contre un de ces fils à col- 
liers, il suivra la lame, en s’y attachant; appuyez-là 
contre un des autres, il demeurera à sa place. Sans faire 
cette expérience et sans examiner de bien près ces fils, 
on peut constater aisément la différence et de leur na- 
ture et de leur usage. Les fils perlés font seuls l'office de 
gluaux, à moins qu'ils n’en engluent tel autre par un 


— 204 — 

contact accidentel. Il m'est arrivé de compter approxi- 
mativement mille et quelques cents pucerons pris aux 
grands fils circulaires d’une toile; et il n’y en avait pas 
un seul sur la portion des rayons où la spirale s'arrête, 
non plus que sur les petits fils circulaires du moyeu. 
Une autre différence entre les fils, est que les gluaux 
peuvent s'étendre de manière à acquérir une longueur 
triple, quadruple de celle qu'ils ont dans le plan de la 
toile, tandis que les autres fils sont résistans. Ceux-ci 
sont donc des soutiens et non pas ceux-là, qui cèdent à 
l'insecte pour mieux le retenir. Cette extensibilité des fils 
gluaux a en outre l'avantage de permettre à l'insecte at- 
trapé une certaine locomotion qui le fera prendre à plu- 
sieurs fils en même temps. 

» En supposant par impossible que l’araignée vint à se 
tromper de fils en filant sa toile, à faire sa spirale avec 
des fils résistans, et les rayons ainsi que les cables avec 
des fils à gluaux, l'ouvrage ne subsisterait pas cinq mi- 
nutes. à 

» Nous avons dit que les petits fils circulaires étaient de 
même nature et de même solidité que les rayons : cela 
devait être, car ils ont pour l'ouvrage entier l'utilité de 
la clef de la voûte, et de plus doivent soutenir le poids 
de l’araignée, qui s’y tient fréquemment en embuscade, 
en même temps qu'ils servent de point d'appui à un 
petit pont dont nous n'avons pas encore parlé, et de sus- 
pensoir au fil le long duquel se roule l’araignée quand 
elle se précipite au bas de sa toile. Il y a encore une 
autre différence entre ces fils circulaires et les plus grands 
fils. Ceux-ci en traversant les rayons n’y ont qu'un 
point d'intersection, ceux-là y en ont deux; toujours sans 
doute pour avoir plus de solidité. 


— 205 — 


» La toile de l’araignée est admirable même par ce qui 
y manque. Entre les fils circulaires englués et ceux qui 
ne le sont pas, il y a un assez grand vide. Lister dans 
sa monograghie de areneis, parlant du moment où les 
araignées coupent court à leur spirale, dit : «ab isto 
opere tanquam supervacuo prorsus desistant. » Non seu- 
lement une prolongation de la spirale au-delà du point 
où elle s'arrête serait inutile; mais encore elle aurait di- 
vers inconvéniens, entre autres de gêner les mouvemens 
de l’araignée , soit quand elle remonte à son hamac cen- 
tral, soit quand elle en sort, soit quand elle s’y agite en 
tout sens, soit quand elle y étend ses jambes de tout 
leur long. Si elle y trouvait tout près et tout autour 
d'elle des fils gluans, ce serait pour elle une incommo- 
dité et une gène perpétuelle. Elle profite d'ailleurs assez 
souvent de ces places vides pour y tourner et retourner 
commodément sa proie. 

» Sa toile a une telle régularité que si vous apercevez 
un rayon qui n'est pas symétrique aux autres, vous pou- 
vez être assuré qu'il n’est pas dans le plan de la toile : 
cest ce petit pont dont nous avons dit un mot tout à 
l'heure et que nous voulons appeler ici une passerelle. I 
est assez ordinairement formé de deux ou plusieurs fils 
parallèles, et sert à l’araignée de moyens de commu- 
nication entre la toile et son charnier , petite loge qu’elle 
se construit à quelque distance; mais qu'on ne croie pas 
que ces fils-là n'aient que cet usage, ils sont encore pour 
cet insecte de proie comme un cordon de sonnette au- 
quel il a constamment la main, et qui l’avertit si bien de 
tout ce qui se passe dans sa toile, qu’elle semble être 
une prolongation de ses organes. Aussi Pope a-t-il pu 


dire : 
Sur ses piéges tendus, sans cesse vigilante, 
Dans chacun de ses fils elle paraît vivante. 

» Comment l’araignée s’y prend-elle donc pour faire son 
admirable filet? Elle assujettit d'abord un des bouts du 
câble supérieur au moyen d’une colle relativement plus 
forte que notre colle forte; car la sienne tient ferme sur 
les surfaces les plus polies, telles que le verre. Mais com- 
ment parvient-elle à fixer l’autre bout du câble à une cer- 
taine distance, et même quelquefois au travers d’un ruis- 
seau ? Les uns disent que c’est en se suspendant à son fil 
jusqu'à ce que le vent l'emporte à l'endroit convenable ; 
d'autres, que c’est en laissant flotter son fil si léger que 
le moindre souffle suffit pour le transporter aussi loin que 
cela est nécessaire, et si gluant qu’il s'attache au pre- 
mier corps qu'il vient à toucher. D’après plusieurs expé- 
riences et plusieurs réflexions, j'ai lieu de croire que 
l’araignée emploie l’un et l’autre de ces moyens. Le pre- 
mier câble posé, elle en pose successivement d’autres, 
s'occupant avant tout des ouvrages extérieurs. Ces ou— 
vrages terminés , elle file un diamètre du milieu duquel 
elle tire les rayons de sa roue. C’est là comme la chaîne 
de sa toile ; il s’agit maintenant d'en faire la trame. Elle 
se met d'abord à fabriquer les petits fils concentriques, 
en pivotant autour d'elle-même. Ces premiers fils cireu- 
laires achevés, elle en jette rapidement deux ou trois qui 
sont à une plus grande distance l’un de l’autre et que les 
premiers, et que ceux qu'elle filera plus tard. Elle com- 
mence les grands fils circulaires par ceux qui sont le plus 
éloignés du centre. Comme elle a besoin, pour les filer, 
de se rapprocher à uu certain degré du centre, elle a 
besoin de trouver divers points d'appui ; c'est à quoi ser- 


vent en partie ces fils dont je viens de dire qu'elle en 
jette rapidement deux ou trois, et qui ont sans doute 
aussi pour but d'assujettir l'ouvrage non encore achevé. 
Quand la fileuse s'approche en filant des plus petits fils 
circulaires et qu’elle n'a plus besoin des autres, elle les 
déchire avec une rapidité incroyable et les avale avec une 
voracité inouïe. Il ne lui reste plus maintenant qu’une 
seule opération à faire ; elle s'élance avec la vivacité d’un 
ouvrier qui sent qu'il va finir sa tâche, au milieu de sa 
toile ; elle en coupe, avec ses pinces en tenailles, la por- 
tion la plus centrale qu'elle dévore en même temps qu'une 
petite houpe ou un petit flocon cotonné qu'elle y avait 
précédemment placé. Aussitôt le trou pratiqué, elle s’y 
place, mais ne s’y tient bien tranquille (du moins cela 
arrive quelquefois) qu'après avoir essayé, en tirant à elle 
plusieurs fils de rayons, pour s'assurer si l'ouvrage achevé 
est bien solide. 

» Ces fils inutiles que l’araignée remet avec tant de soin 
comme à la fonte ou comme au pilon, sont certainement 
quelque chose d’unique dans la nature: on peut les com- 
parer aux échaffaudages employés par les hommes pour 
faciliter une construction, et qu'ils détruisent quand la 
construction est terminée. » 

M. Guillebert ne pense pas que les araignées naissent 
avec toute leur industrie : «la jeune abeille, dit-il, cons- 
truit ses alvéoles tout aussi bien que la plus vieille ; mais 
quant à l'araignée de jardin , il paraît, d'après plusieurs 
observations , qu'elle commence à filer irrégulièrement 
avant de faire sa toile régulière. » 

L'auteur du mémoire termine en observant que sil 
s'est appliqué à cette étude, ce n’est pas assurément par 


un simple motif de curiosité. «Schwammendam a composé 
un grand ouvrage très-bien intitulé : Biblia naturæ. Les 
insectes peuvent être envisagés comme le sujet d'un des 
principaux chapitres de ce livre, et les araignées comme 
celui d’un des principaux paragraphes de ce chapitre. On 
est saisi d'autant d'admiration en voyant une araignée 
décrire en une minute un de ses orbes aussi réguliers 
que ceux des planètes, qu’en pensant au gigantesque Sa- 
turne qui, éloigné du soleil de trois cent vingt-huit mil- 
lions de lieues, fait en vingt-neuf ans sa révolution au— 
tour de cet astre. Dans les justes proportions de toutes 
les parties de l'ouvrage de ce petit insecte, je vois le 
compas de Celui que Platon a appelé l'Eternel géomètre, 
et comme Bonnet, derrière la toile l’Ariste suprême. » 


M. le Président donne lecture d'une lettre de M. Aug. 
Vouga, de Cortaillod, contenant quelques observations 
nouvelles sur les caractères des Becs-fins de ces contrées. 
« En 1839, dit M. Vouga, lors de la réunion de la Société 
helvétique à Berne, je communiquai à la section de 
zoologie quelques remarques très-brèves à l'égard des 
becs-fins cariceti et aquatique de Naumann, envisageant 
ces deux espèces comme n’en formant réellement qu'une 
seule, le premier étant l'oiseau adulte, et le second le 
jeune de l’année. Ayant eu de nouveau l'occasion d'exa- 
miner ces oiseaux dans les marais qu'ils habitent, je puis 
aujourd'hui pleinement confirmer cette opinion. J'ai pris 
dans mes chasses au moins quarante individus du bec-fin 
cariceti et autant de l’aquatique ; à la fin d'avril, époque 
à laquelle ils arrivent, tous, sans exception, portent la 
livrée du bec-fin, figuré dans Naumann sous le nom de 


— 209 — 

Sylvia cariceti, c'est-à-dire que la poitrine est couverte de 
petites taches longitudinales, et que les flancs portent de 
longues mèches d'un brun foncé ; le dos est brun foncé, 
chaque plume bordée de gris, les scapulaires et les pennes 
caudales sont alors parfaitement intactes et nullement 
usées. En automne, ces deux espèces arrivent ensemble 
dans les mêmes localités, le cariceti absolument avec le 
même plumage qu'au printemps, mais les scapulaires et 
les pennes de la queue sont usées, surtout chez les fe— 
melles qui ont couvé ; l'ovaire et les parties sexuelles 
chez le mâle sont encore bien visibles. Le bec-fin aqua- 
tique figuré dans Naumann ne porte ni taches sur la 
poitrine, ni mèches brunes sur les flancs, mais on en 
aperçoit quelques-unes, du plus au moins sur les sujets en 
nature. Je possède upe suite de ces oiseaux dont les dif 
férentes mues arrivent par gradations à celle du bec-fin 
cariceti; en automne, tous les individus de Sylura aquatica 
ont les scapulaires et les pennes caudales parfaitement in- 
tactes et sans aucune usure; les parties sexuelles invisi- 
bles à l'œil nu, ou au moins bien difficiles à distinguer, 
d'où je conclus que ce sont des jeunes de l’année. Si cet 
oiseau était une espèce particulière, pourquoi ne le ver- 
rait-on pas au printemps dans les mêmes localités qu'il 
fréquente l’automne avec le bec-fin cariceti? Ces raisons 
me paraissent prouver que ces deux espèces de Naumann 
n'en forment qu'une seule, ce que Temmink admet, puis- 
qu'il donne la figure du bec-fin cariceti (de Naumann) 
comme l'adulte de son bec-fin aquatique. » 

M. Vouga ajoute qu'il a aussi eu récemment l'occasion 
de confirmer l'opinion de Temmink, qui pense, avec le 
docteur Michahelles, que les Motacilla Feldeggii et melano- 


— 210 — 


cephala ne sont que des variétés de la Motacilla flava. 
«Ayant rencontré, dit-il, un vol de ces oiseaux composé 
de quelques centaines d'individus, je les ai suivis pendant 
plusieurs heures ; comme ils se laissaient approcher d’as- 
sez près pour pouvoir distinguer les nuances plus ou 
moins foncées de la tête, je me suis procuré une dizaine 
de sujets qui arrivent successivement à la mue de la Mo- 
tacilla Feldeggi et melanocephala, que je tiens d'Italie. 
Les mâles en particulier ont la tête noire ; les vieilles fe— 
melles différent aussi des jeunes. Il paraît que c’est l'âge 
qui amène ces changements de mue, les individus qui 
ont la tête noire sont plus forts de taille que ceux à tête 
grise. » 
E. Desor, secrétaire. 


N° 19. 


D 


BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 
DB NEVEBIEBR, 


—0s © © © m—- 


Séance du 4 juin 1845. 


Présidence de M. L. CouLox. 


M. Desor présente un résumé de ses études sur les 
Crinoïdes fossiles de la Suisse. 

Les plus anciens représentans de cette famille dans le 
sol helvétique sont les vraies Encrines du Muschelkalk ; 
car comme les terrains de transition n'affleurent sur au- 
cun point de la confédération , il ne faut pas s'attendre à 
y rencontrer des débris de ces types curieux des terrains 
paléozoïques, qui peuvent être considérés comme la sou- 
che de ce groupe d'animaux, tels que les Rhodocrines, les 
Mellocrines, les Cupressocrines, les Potériocrines, non 
plus que de ceux qui constituent la famille des Cystidées 
de M. de Buch, ni le type non moins remarquable des 
Pentremites, ni enfin celui, encore plus intéressant, des 
Echinocrines , qui constituent deux autres familles. 


MUSCHELKALK. 


L'Encrinus liliformis, si commun dans le Muschelkalk 
de l'Allemagne , se retrouve aussi dans les cantons de Bâle 
et d’Argovie ; mais ce sont pour la plupart des anneaux 
de tiges. M. Desor ne connaît qu’un seul calice bien con- 
servé, au musée de Bâle, provenant de Rauch-Eptingen, 


— 212 — 


dans le canton de Bâle. Il est probable qu'il n'existe en 
général qu'une seule espèce de ce type, et que les deux 
espèces que M. Quensted a décrites sous les noms d'Encri- 
nites Schlotheimir et E. dubius ne sont, la premiére, 
qu'une monstruosité, la seconde, qu'une simple variété 
de VE. hihiformis. 


FORMATION JURASSIQUE. 


Autant les terrains triasiques sont pauvres en Cri- 
noïdes, autant ce type abonde dans les terrains jurassi- 
ques. Le type des vraies Encrines a disparu; mais nous 
le voyons remplacé par une quantité considérable de 
genres nouveaux, qu'on a même tenté de grouper en plu- 
sieurs familles, tant il y a de variété dans les formes 
qu'ils affectent. Les principaux d’entre ces types sont le 
groupe des Pentacrinidées, celui des Apiocrinidées et 
celui des Eugéniacrinidées. Ce qui porte à croire que ces 
trois groupes constituent réellement des familles dis- 
tinctes, c’est que chacun d'eux semble avoir prédominé 
dans une époque, les Pentacrines dans le Lias, les Apio- 
crines dans le Jura moyen, et les Eugéniacrines dans le 
Jura supérieur. Voici quelle est leur distribution selon 
les étages. 


Lias. 


Le lias, d'ordinaire si riche en animaux d'espèces 
et de genres nouveaux, étrangers aux époques anté— 
rieures (témoins ses nombreuses coquilies et surtout ses 
reptiles et ses poissons), le lias ne montre point la 
même exhubérance à l'égard des Echinodermes. En effet, 
il ne renferme que quelques espèces peu nombreuses d'E- 


— 213 — 


chinites de la famille des Cidarides, et en fait de Cri- 
noïdes, on n’y a encore trouvé que des Pentacrines, 
mais ceux-là, il faut l’avouer, y jouent un rôle immense. 
IL suffit de rappeler cette quantité de P. bryareus qui se 
trouvent dans les schistes du lias d'Angleterre et d’Alle- 
magne. 

Nous possédons en Suisse le Pentacrinus subangularis, 
le P. basaltiformis, et une espèce nouvelle propre au cal- 
aire à gryphées, que M. Desor nomme P. crassus, parce 
qu'elle diffère du P. basaltiformis par sa tige plus massive 
et plus obtuse; mais ces espèces n'ont guère conservé que 
leurs tiges ; les calices sont fort rares. 


Oolite inférieure. 


Le type le plus remarquable de cet étage, est un 
petit Crinoïde que Andreæ a déjà décrit et figuré dans ses 
lettres, et dont l’on conserve plusieurs fragmens au Mu- 
sée de Bâle. C’est une espèce nouvelle du type, dont 
M. Hermann de Meyer a fait son genre Isocrinus. M. De- 
sor propose d'appeler l'espèce I. Andreæ. Le calice n’a 
guère que deux lignes de diamètre; mais les bras sont fort 
longs ; la tige paraît être ronde. 

On rencontre aussi dans les couches supérieures de cet 
étage, et particulièrement dans celles que MM. Thur- 
mann et Gressly ont appelées dalle nacrée, une quantité 
considérable d’anneaux de Pentacrines, appartenant à une 
ou même peut-être à plusieurs espèces nouvelles. L'au- 
teur propose d'appeler la plus grande, qui est en même 
temps la plus commune, Pentacrinus Nicoleti. 


— 9214 — 
Jura moyen. 


Après les terrains de transition, les étages du Jura 
moyen, l’oxfordien et ses annexes sont le principal gîte 
des Echinodermes. On connaît la quantité extraordinaire 
d'Oursins que ces terrains recèlent, et l’on sait que dans 
le nombre , il y a beaucoup de types nouveaux étrangers 
aux époques antérieures et postérieures. Ce qui est vrai 
des Oursins, l’est à bien plus forte raison des Crinoïdes. 
Ce ne sont plus seulement quelques genres et quelques 
espèces qui se montrent. Des groupes entiers apparais- 
sent comme par enchantement, témoins les Apiocrines, 
les Millericrines, avec leurs nombreuses espèces, les Cé- 
riocrines et les Pentacrines, dont M. d'Orbigny a fait sa 
famille des Apiocrinidées. Le type des Eugéniacrines s’y 
montre aussi pour la première fois. Enfin la famille des 
Pentacrinidées s’y enrichit aussi d'un type entièrement 
nouveau, celui des Pentacrines ayant la face articulaire 
des anneaux de la tige crénelée sur son pourtour. Jus- 
qu'ici on ne connaissait que des fragmens de tiges de ce 
type. On en avait même distingué plusieurs espèces, les 
Pentacrinus subteres Munst et P. pentagonalis Gldf. ; mais 
on n'avait aucune idée des calices. M. Agassiz vient de 
découvrir, parmi les Crinoïdes du Musée de Bâle, un 
calice en forme de gland, dont la base présente une ar- 
üculation tout-à-fait semblable à celle du Pentacrinus 
subteres. Ce savant en à fait un genre à part, sous le 
nom de Balanocrinus, et il pense qu’on devra lui associer 
toutes les tiges qui présentent ce mode d’articulation. Ce- 
pendant, au lieu d'appartenir à la famille des Pentacri- 


— 215 — 


nidées, comme on l’a pensé jusqu'ici, ces espèces devront 
être reportées dans la famille des Apiocrinidées, 

Le groupe le plus important au point de vue géolo- 
gique, cest la famille des Apiocrinidées. Le premier 
genre de cette famille et le plus anciennement connu est 
le genre Apiocrine, dans lequel M. Desor range, avec 
M. d'Orbigny, toutes les espèces ayant une tige ronde et 
un calice plus ou moins cylindrique, composé d'au moins 
quatre anneaux, savoir l'anneau basal (bassin des au- 
teurs), les deux anneaux intermédiaires (les pièces cos- 
tales des auteurs), et l'anneau supérieur (l'omoplate des 
auteurs). Il élimine par conséquent du genre Apiocrine 
toutes les espèces qui n'ont que deux anneaux au calice, 
avec cinq surfaces d'attache seulement, Ce sont ces es- 
pèces dont M. d'Orbigny a formé son genre Millericrine. 
Cependant le genre Millericrine, ainsi circonscrit, n’est 
pas aussi homogène qu'il semblerait devoir l'être, d’après 
la diagnose de l'auteur; c’est ce que M. Kônig a fort bien 
senti, lorsqu'il a établi dans ses Zcones fossilium sectiles ses 
genres Ceriocrènus et Pomatocrinus, basés non plus seu- 
lement sur le nombre des pièces du calice, mais sur la 
forme et les dimensions relatives de ces mêmes pièces 
qui, dans l’un des types, donnent lieu à un calice très- 
large , peu élevé, à base plate et à côtés verticaux : c’est 
alors le genre Ceriocrinus, ayant pour type l’Apriocrinus 
Milleri des auteurs. Lorsque, au contraire, les pièces se 
combinent de manière à former un calice globuleux, 
comme c'est par exemple le cas dans l’Aprocrinus mespi- 
hiformis des auteurs, M. Künig en fait son genre Poma- 
tocrinus. On est surpris que M. d'Orbigny n'ait pas tenu 
compte de cette distinction , qui a cependant de beaucoup 


— 216 — 


l’antériorité sur la sienne. Se fondant uniquement sur le 
nombre des pièces et le mode d’articulation des bras, il a 
confondu les deux genres de M. Künig dans son genre 
Millericrine; et pourtant il suffit d’avoir comparé des 
exemplaires de ces différens types, ou seulement des 
figures comme celles de M. d'Orbigny et de Goldfuss, 
pour demeurer convaincu que les Cériocrines et les Po- 
matocrines sont réellement deux bons genres bien diffé- 
rens de toutes les autres Apiocrinidées à deux anneaux 
seulement, tels que l'A. rosaceus et ses analogues. Il est 
évident, en effet, que l'A. rosaceus, malgré ses deux 
anneaux de pièces au calice, a bien plus d’affinité avec 
l'A. rotundus, qui en a quatre, qu'avec l'A. Müilleri (Ce- 
riocrinus) et l'A. mespiliformis (Pomatocrinus), qui n’en 
ont comme lui que deux. 

En conséquence, au lieu de quatre genres, M. Desor 
en admet six dans la famille des Apiocrinidées , qui sont 
les suivans : Apiocrinus Mill., Ceriocrinus Kônig, Poma- 
tocrinus Kônig, Müllericrinus d'Orb., du Jura moyen et 
supérieur, et les deux genres Guettardicrinus d'Orb. et 
Bourguetticrinus d'Orb., qui sont propres aux terrains 
crétacés. 

Les espèces des quatre premiers genres qu'on trouve 
dans l’oxfordien de Suisse sont : 

L’Apiocrinus rotundus Mill. (A. Parkinson Schl. et 
d'Orb.). Il est moins fréquent en Suisse qu’en Angleterre 
et en France. Si on le cite fréquemment dans nos terrains 
jurassiques, c’est parce qu'on le confond d'ordinaire avec 
A. Meriani du Portlandien, dont il sera question plus 
bas. L’A. Roissyanus d'Orb. manque complètement. 

Ceriocrinus Miller: Kônig (Apiocrinus Milleri Goldf. , 


— 217 — 


Millericrinus Milleri d'Orb.). C'est la seule espèce da 
genre; elle est assez fréquente dans le terrain à chailles 
de Delémont. Les calices y sont souvent fort beaux, mais 
on n'a pas encore trouvé d'exemplaires où les bras fus 
sent conservés. En comparant la base d’une série de ca- 
lices avec les faces articulaires d’une grande quantité dé 
tiges, M. Desor est arrivé à reconnaître la véritable tige 
du C. Milleri. Ce n’est ni celle que lui attribue Gold- 
fuss, ni celle que d'Orbigny a figurée, mais une espèce 
particulière, reconnaissable à ses anneaux très-inégaux. 
C'est la tige que M. d'Orbigny a figurée sous les noms de 
Millericrinus alternatus et M. Richardianus. On pourrait 
être tenté de distinguer deux espèces parmi les calices 
qu'on rapporte au C. Milleri, à cause des différences que 
présentent parfois les dessins de l'articulation à la base 
des tiges; elles forment tantôt une étoile à cinq lobes, 
tantôt une simple guirlande de crénelures; mais on peut 
démontrer que ces différences résultent uniquement de 
l'intercallation d'anneaux accessoires, dont le dessin est 
différent de celui des anneaux principaux. 

Pomatocrinus mespiliformis Künig (Apiocrinus mespihi= 
formis Goldf.). On n’a signalé jusqu'ici que des débris im- 
parfaits de cette espèce dans l’évéché de Bâle: 

Millericrinus rosaceus d'Orb. (Apiocrinus rosaceus Schl.). 
Cette espèce a été instituée par Schlotheim : mais commé 
le dessin qu'il en donne est très-défectueux, il est difficile 
de la reconnaître aujourd’hui. D'un autre côté, il est 
évident que Goldfuss a confondu plusieurs espèces sous 
cette dénomination. Déjà M. d'Orbigny en à séparé les 
calices alongés, campanuliformes, dont il fait une es- 
pèce à part, sous le nom de M. Münsterianus. M. Desor 


— 218 — 


propose en conséquence de conserver le nom de rosaceus 
aux calices de forme évasée, tels que celui de PL:56, 
fig. 3 c, d, de l'ouvrage de Goldfuss. Comme cette es- 
pèce est la plus fréquente dans l’oxfordien suisse, il lui 
rapporte les tiges à surface lisse et à anneaux égaux, 
assez distans, qu'on trouve en grande quantité dans le 
terrain à chailles, ainsi que cette quantité de troncs et 
de racines provenant du terrain à chailles de Pfeffingen 
et dont il existe de si beaux échantillons au Musée de 
Bâle, et dans la collection de M. Gressly. 

Millericrinus Münsterianus d'Orb. (Apiocrinus rosaceus 
Goldf. PI. 56, fig. 3 a , b). Cette espèce ne se trouve que 
dans le terrain à chailles siliceux , où elle est assez 
rare. On la distingue aisément à sa forme alongée et à un 
anneau renflé à la base du calice. 

Millericrinus  Beaumontii d'Orb. ( Apiocrinus  Beau- 
montii Voltz). C’est l'espèce la plus fréquente. Elle est de 
petite taille et se reconnaît facilement à son calice cam- 
panuliforme et à sa tige pentagonale. 

Millericrinus Goldfussii d'Orb. (Apiocrinus Goldfussi 
Voltz). Cette espèce est plus-grande que la précédente, et 
se distingue par des bras plus alongés. Sa tige est ronde, 
à anneaux réguliers. 

Millericrinus Nodotianus d'Orb. Espèce voisine de la 
précédente, mais à calice plus évasé. La tige est obtusé- 
ment carrée près du calice. Se trouve par—ci par-là dans 
le terrain à chailles de l'évêché de Bâle. 

Millericrinus polycyphus Des. On ne connaît encore 
que des tiges et des racines de cette espèce. Elles sont 
trés-grosses el aisément reconnaissables à leurs anneaux 
très-serrés. On les trouve déjà figurés dans Bruckner 


— 219 — 
(Merkwurd Tab. 20, fig. 36), et dans Knorr (Petref. II, 
Part. Il, Tab. G. IE, fig. 1, et G. IE, fig. 1 et 2). M. Gold- 
fuss en a aussi représenté un échantillon (Tab.56, fig. 30), 
qu'il attribue à tort à l'A. rosaceus. 

Millericrinus echinatus d'Orb. On ne connaît de cette 
espèce que la tige, qui est extrêmement fréquente dans 
l'oxfordien de la Suisse. Elle est ronde, composée de 
larges anneaux qui portent une ou plusieurs rangées de 
tubercules. La forme, la disposition et le nombre de 
ces tubercules sont soumis à des variations considérables. 
Il est évident que M. d'Orbigny a accordé une trop grande 
importance à ces variations de forme. M. Desor est porté 
à croire que les M. aculeatus, tuberculatus, Richardianus et 
subechinatus de cet auteur, qui tous se trouvent dans le 
terrain à chailles suisse, ne sont autre chose que des va- 
riétés du M. echinatus, dont le calice est encore inconnu. 
La forme plus ou moins anguleuse de la tige ne saurait 
non plus être envisagée comme un caractère spécifique , 
car il peut arriver que le même tronc porte des tiges car- 
rées et des liges rondes, comme on en voit un exemple 
sur un tronc de la collection de M. Gressly. 

La famille des Pentacrines est représentée par les es- 
pèces suivantes : 

Pentacrinus scalaris Goldf. C’est une espèce très-fré- 
quente dans le terrain à chailles de l'évêché de Bäle. On 
n'en connaît cependant que les tiges que l’on confond 
quelquefois avec celles du P. basaltiformis. 

Pentacrinus tubereulatus Merian. C’est une espèce bien 
plus rare, très-voisine du P. scalaris,, mais qui en dif- 
fère en ce que la surface de la tige est garnie de fins 
tubercules irrégulièrement répartis. C’est probablement 
la var. a, b, c du P. scalaris Goldf. 


— 220 — 


Pentacrinus cylindricus Des. M. Desor appelle ainsi une 
petite espèce de tige cylindrique, qui se distingue par un 
caractère particulier, c'est que les anneaux de la tige 
sont aussi hauts que larges, ce qui n’a lieu dans aucune 
autre espèce. L'espèce doit être très-rare; elle provient 
selon toute apparence de l’oxfordien. 

Les Pentacrines de la seconde section, ceux à dente- 
lures marginales sont exclusivement propres à l’oxfor- 
dien. On trouve en Suisse le Balanocrinus (Pentacrinus) 
subteres qui est même assez fréquent dans certaines loca- 
lités. Il se pourrait que le P. pentagonalis Goldf. et le 
P. subteres Münst., ne fussent qu’une seule et même es- 
pèce, et que le calice mentionné plus haut dût lui être 
rapporté. Cependant nous n'avons aucune certitude à cet 
égard. 

Le type des Eugéniacrines est représenté par une es- 
pèce très-curieuse, découverte par M. Mousson, dans 
l'oxfordien de Birmansdorf. C’est une espèce nouvelle, à 
laquelle M. Desor donne le nom de Eug. Moussoni; 
elle est plus grande qu'aucune de celles du Jura supé- 
rieur. Le calice est en forme de capuchon comme celui 
de l’Eug. Hoferi. Les facettes articulaires sont au nombre 
de cinq; leurs angles sont extrêmement saillans, et font 
ainsi paraître la cavité du calice plus profonde que dans 
les autres espèces. 


Jura supérieur. 


Les étages supérieurs de la formation jurassique sont 
bien moins importans au point de vue du développement 
des Crinoïdes et des Echinodermes en général, que les 
étages moyens. Non-seulement les espèces sont moins 


PAL. à l'an mme Lars © il CU SSS 


— 221 — 


nombréuses, mais une partie des types manque complé- 
tement , entr’autres les Cériocrines , les Pomatocrines, les 
Millericrmes et les Balanocrines, et quant aux autres, 
leurs espèces sont en général peu abondantes, à l'excep- 
tion de quelques-unes qu'on trouve dans les bancs à po- 
lypiers. En Suisse, il n’y a guère que le portlandien qui 
ait de l’importance. Les espèces qu’on y a recueillies sont 
les suivantes (*) : 

Apiocrinus Meriani Des. Il est extrêmement difficile, 
dit M. Desor, de distinguer cette espèce de l’Apocr. rotun- 
dus, d'autant plus que Goldfuss a évidemment figuré 
comme identiques des exemplaires de ces deux espèces. 
Il lui a paru que l’A. Meriani était d'ordinaire beaucoup 
plus grand que l’À. rotundus. Les anneaux de la base du 
calice sont nombreux et serrés, et comme il existe aussi 
deux sortes de tiges, il rapporte à l'A. Meriani celles dont 
les anneaux sont serrés, et réserve pour l'espèce suivante 
celles dont les anneaux sont plus éloignés. En consé- 
quence il croit aussi pouvoir rapporter à cette espèce les 
figures B de PL 55 de l’onvrage de Goldfuss. 

Apiocrinus simulis Des. Cette espèce diffère de la précé- 
dente en ce que les anneaux de la base du calice sont 
bien moins nombreux. Il n’y en a guère que cinq ou six 
depuis l'endroit où la tige commence à se renfler jus- 
qu'aux plaques basales. Les anneaux de la tige, si tou- 
tefois ils appartiennent à ce calice, sont espacés dans la 
même proportion. Parmi les figures de Goldfuss , il n’en 
est aucune que l'on puisse rapporter avec certitude à 
cette espèce. 


(*) L’étage du corallien blanc qui se trouve sur quelques points de la 
Suisse , entr’autres à Zwingen et à Soleure, n’a fourni jusqu'ici qu’une 
seule espèce encore indéterminée d’Apiocrine. 


— 222 — 


Les Eugéniacrines sont les plus fréquens de tous les 
Crinoïdes portlandiens. Nous avons en Suisse les quatre 
espèces jurassiques décrites et figurées par Goldfuss, 
savoir les : Eugeniacrinus caryophyllatus Goldf. au Randen. 
Eug. nutans Goldf. au Randen. Eug. compressus Goldf. au 
Randen, au Laegern et dans le calcaire de St-Triphon (‘). 
Eug. Hoferi Goldf. au Laegern. 

Les Pentacrines sont représentés par une seule espèce 
dont on ne connaît encore que des fragmens de tige, pro- 
venant du portlandien de Raedersdorf, Ces fragmens res- 
semblent fort à ceux du P. scalaris. 


NÉOCOMIEN. 


On n'a signalé jusqu'ici que des anneaux de Penta- 
crines dans ce terrain. Ils appartiennent à une espèce as- 
sez voisine du Pentacrinus basaltiformis, maïs plus petite 
et fortement cannelée. On pourrait l’appeler Pentacrinus 
neocomensis. 

La molasse parait être complètement dépourvue de 
Crinoïdes. Du moins n’en a-t-on signalé jusqu'ici aucune 
trace. Les Asterides n'ont fourni qu'une espèce indéter— 
minable. Les Oursins y sont aussi fort rares. On ne con- 
naît jusqu'ici que quelques espèces de Spatangoïdes et 
deux ou trois espèces d'Echinus et de Cidaris. 

E. Desor, secrétaire. 


(*) La présence de cette espèce dans le calcaire de St.-Triphon est un 
fait important à signaler, car comme elle est exclusivement propre au 
portlandien , il est démontré par-là que ce terrain n’est point, comme cer- 
tains géologues l’ont prétendu (avec une assurance que leurs études locales 
ne justifient nullement), du muschelkalk, mais qu’il appartient aux étages 
supérieurs de la formation jurassique. Il y a d’autant moins de doutes 
à cet égard que l’espèce est, de toutes les Eugéniacrines , la plus facile- 
ment reconnaissable. 


N° 20. 


BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DS NEVCHATER 


Section de la Chaux-de-Fonds. 


Séance du 1% novembre 1844. 
Présidence de M. WURFLEIN. 


M. le Président ouvre la séance en rendant la section 
attentive au but constant que ses membres doivent avoir 
présent à l'esprit, qui est leur instruction mutuelle et la 
propagation des lumières dans notre ville et dans le reste 
du pays. 

Il est ensuite fait lecture du réglement tel qu'il a été 
adopté dans la séance du 18 décembre de l'année der- 
nière. 

A la suite de cette lecture on procède à la nomination 
du bureau, l'assemblée réélit successivement MM. Wür- 
flein, président ; Nicolet, vice-président; Pury D'et Favre, 
secrétaires. 

Le D' Pury commence la lecture de son mémoire sur 
l'huile de foie de morue. Cette partie du mémoire ne con- 
tient à-peu-près que la description des différens Gadoïdes 
dont le foie est usagé pour la préparation de cette huile. 
M. Pury admet, d'après de Jongh, trois espèces d'huile, 
la blonde, la brune-blonde, et la brune, qui provien- 
nent toutes des mêmes poissons, mais dont la différence 


— 22% — 


provient du degré de putréfaction des foies et du degré 
de chaleur employé ‘pour l'extraire. Une quatrième es- 
pêce, signalée par Sobernheim, est une huile de la cou- 
leur de Fhuile d'olive, et n’est qu'une huile brune, 
de mauvaise qualité, décolorée par du chlore et autres 
substances. 

D' Pury, secrétaire. 


«Séance. du 28 novembre 1844. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


Le D' Pury continue la lecture de son mémoire sur 
l'huile de foie de morue. Après avoir donné, d’après de 
Jongh, une analyse comparative des trois espèces d'huile 
de foie de morue, il passe aux réactifs employés jus= 
qu'ici pour constater la pureté de cette huile. Le seul 
qu'on ait jusqu'à présent, celui que M. Heydenreich, 
pharmacien à Strasbourg a proposé (l'acide sulfurique), 
est incomplet, puisqu'il ne permet pas de discerner la 
falsification partielle de cette huile et son blanchiment 
par le chlore; le goût et l’odorat sont jusqu’à présent les 
meilleurs agens pour reconnaître cette huile. M. Pury 
entre ensuite dans le détail des maladies contre lesquelles 
on a employé avec succès l'huile de foie de morue. Ces 
maladies forment trois grands groupes, qui sont les 
rhumatismes chroniques, les scrophules et la phthysie tu- 
berculeuse. Il cite des cas où ce médicament lui a réussi, 
là où tout faisait présager une phthysie commençante, 
mais où la percussion et l’auscultation ne fournissaient 
aucune donnée {certaine sur l'existence du mal; d'un 
autre côté, M. Pury n’a pas été aussi heureux dans plu- 


— 225 — 


sieurs cas de phthysie avancée. Là l'huile de foie de mo- 
rue lui a paru n'avoir aucun effet, pas même comme 
palliatif. Il cite ensuite les expériences comparatives de 
de, Jongh sur les trois espèces d'huile, mais les essais 
ont été trop peu nombreux et trop insuffisans pour per- 
mettre de porter un jugement sur la plus grande effica- 
cité d’une espèce d'huile relativement aux autres. M. Pury, 
après avoir examiné le mode d'action sur les trois grands 
groupes de maladies des huiles grasses, de l’iode, du 
chlore et de ses composés, et lui avoir comparé celui de 
l'huile en question, conclut à une action complexe de 
l'huile de foie de morue sur ces maladies; cette action, 
qui est la résultante des principes qui composent cette 
huile, se voit trés-clairement dans la phthysie commen- 
çante, où elle est à la fois calmante et absorbante. 

M. Pury passe ensuite à l'examen des différens moyens 
employés pour corriger le goût de cette huile. L'eau de 
menthe poivrée, le sirop d’écorces d’oranges, le bicarbo- 
mate de potasse ont été employés avec succès; mais il 
est des cas où ce médicament cause une telle répugnance 
aux malades, qu'on ne peut le leur faire avaler. M. Pury 
propose alors l'emploi de capsules gélatineuses , ou, ce 
qui lui a réussi souvent, un mélange d'hydriodate de po- 
tasse et d'extrait de jusquiame, ou d’autres calmans sous 
forme de pillules. 

Après la lecture de ce mémoire, M. Micolet fait observer 
que le blanchiment de l'huile brune par le chlore, que 
le commerce employe, ne peut pas être appelé falsifica- 
tion, vu que le chlore ne détruit pas l’iode, ni les subs- 
tances animales qui entrent dans la composition de l'huile 
de foie de morue, mais que cette opération a unique 


— 226 — 


ment pour but de donner plus de limpidité à l'huile, qu'on 
employe comme huile à brûler, quand les huiles de colzat 
et d'olives sont trop chères. M. DuBois, sans nier les 
bons résultats de l'huile de foie de morue, croit qu’on 
élève beaucoup trop aux nues la vertu de ce médicament; 
il dit aussi que les guérisons de rhumatisme chronique 
et de scrophules qu'on a obtenues dans les hôpitaux au 
moyen de l'huile de foie de morue, doivent être attri- 
buées en partie à de meilleurs soins et surtout à une 
meilleure alimentation que celles que les malades n’a- 
vaient chez eux. 
D' Pury, secrétarre. 


Séance du 12 décembre 1844. 


Présidence de M. Nicozer, vice-président. 


M. le D' DuBois, entre dans quelques considérations 
sur un état spasmodique des doigts, qu'on trouve chez 
les graveurs et les finisseuses d’aiguilles, dont il croit 
qu'aucun auteur ne donne la description, et qu'il a eu 
occasion d'observer assez fréquemment ici. Il pense que 
cet état spasmodique doit être analogue à la maladie 
nommée par les auteurs allemands morbus scriptorius , 
mais dont il n’a pu cependant trouver nulle part la des- 
cription. 

Cet état spasmodique se développe chez les individus 
assujettis à de petits travaux manuels, qui n’'exercent 
qu'un certain nombre de muscles. Les personnes qui en 
sont atteintes ont d'abord quelques fourmillemens dans 
la paume de la main et dans les doigts, surtout dans l'an- 
nulaire et l'auriculaire. Ces fourmillemens augmentant 


— 227 — 


elles sont obligées d'interrompre souvent leur ouvrage, et 
d'étendre la main fréquemment pour diminuer la tension 
et la gène qu'elles éprouvent. 

Au bout de quelque temps des contractions spasmo - 
diques se manifestent dans l'éminence thénar, dans les 
muscles lombricaux, avec un engourdissement des doigts, 
surtout du côté cubital; l’auriculaire et l’annulaire en- 
gourdis deviennent le siége d'une douleur spasmodique, 
qui va en augmentant, et qu'on ne doit pas confondre avec 
une névralgie de ces doigts. Les spasmes et les douleurs 
augmentent dans toutes les parties de la main déjà indi- 
quées, et amènent à sa seconde période la maladie qui 
se termine par l’atrophie des muscles de la paume de la 
main et des muscles propres du petit doigt. 

La cause de cette maladie est dans le défaut d'antago- 
nisme des muscles exercés ; ordinairement les extenseurs, 
qui reçoivent leurs rameaux nerveux de certains nerfs, 
sont exercés aussi bien que les fléchisseurs, qui dépen- 
dent d’autres troncs nerveux; mais ici tous les muscles 
en activité reçoivent leurs rameaux du nerf cubital et du 
médian, qui sont ainsi beaucoup plus irrités que ne l’est 
le radial. La position des ‘graveurs, qui doivent s’ap- 
puyer sur leurs coudes, contribue beaucoup à cet état, 
par la compression que cette position fait subir au nerf 
cubital dans le sillon olécranien. 

Cette cause de tension et cette compression de nerfs 
n'ont point été remarqués dans la névralgie. L'acrodynie 
diffère également de la maladie dont nous nous occu- 
pons, par son siége qui est dans les orteils ; l’ergotisme 
convulsif a quelque analogie avec cette maladie; mais le 
commémoratif et les causes qui ont amené ce spasme 

17 


— 228 — 


ainsi que leur durée, l'état général et le mode de termi- 
naison suffiront pour empêcher qu'on ne les confonde. 

Quant au traitement, M. DuBois pense qu'il peut être 
jusqu’à un certain point prophylactique, et qu'on peut 
prévenir l’engourdissement des deux doigts en évitant la 
compression du nerf cubital. Beaucoup d'ouvriers y remé- 
dient instinctivement en mettant des torches creuses au 
milieu, sous leurs coudes. Les graveurs, employant un bu- 
rin à manche elliptique très-court, pourraient en employer 
un autre à manche plus long, moins large, et s'expose- 
raient ainsi moins à comprimer le nerf médian. Quant au 
traitement de la maladie, M. Dubois pense que le meil- 
leur est la morphine appliquée sur le trajet du nerf eubi- 
tal, par la méthode endermique. Sept à huit applications, 
d'un grain chaque , suffisent. Pour être sûr que la mor- 
phine a agi, il faut que les grandes transpirations qu'oc- 
casionne cette substance aient paru. Les frictions irri- 
tantes, comme l’ammoniaque, les spiritueux rendent 
aussi de bons services comme palliatif, mais ne gué- 
rissent pas le mal radicalement. 

M. le D' Droz, qui a eu occasion d'observer aussi plu- 
sieurs de ces spasmes, a vu chez des polisseuses et des 
fabricans de ressorts des tremblemens des extrémités su- 
périeures , qu’il attribue à la même cause. Les individus 
affectés de ces tremblemens veulent avoir toujours les 
extrémités en mouvement , c’est leur seul repos. M. Droz 
cite une dame qu’il a traitée long-temps, chez laquelle ve 
désir de mouvement était tellement fort, qu'elle avait 
pris une jeune fille à son service pour lui remuer jour et 
nuit les bras et les mains. Romberg qui, dans son traité 
des maladies des nerfs {Lehrbuch der Nervenkrankheiten 


— 229 — 


des Menschen v. Mor. H. Romberg. Berlin, 1842-3), à 
décrit ces tremblemens sous le nom de paralysis agitans, 
ne fait pas mention de ce besoin de mouvement qui existe 
cependant toujours. 

M. DuBois pense que dans cette paralysie agitante, 
les spasmes sont cloniques ou dus à un tic, et ont leur 
siége dans l’état maladif du cerveau, tandis que dans la 
maladie dont il vient de nous esquisser les principaux ca- 
ractères, les spasmes sont de nature tonique, et que l'af- 
fection nerveuse est purement locale. 

Dr Pury, secrétaire. 


Séance du 26 décembre 1844. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


M. le D' Dubois signale le nombre toujours croissant 
d'empoisonnemens qui ont lieu chaque année en automne 
dans nos montagnes par la Belladone. Après avoir ex- 
posé les symptômes de cet empoisonnement, qui est quel- 
quefois mortel , et qui sont des hallucinations, une grande 
disposition à l’hilarité, la dilatation de la pupille, une 
grande fréquence du pouls, l'inflammation et quelque- 
fois la gangrène des intestins, etc., avait parlé en passant 
des contrepoisons, qui sont en premier lieu les évacuans 
(tartrate acide d’antimoine et de potasse), et ensuite l’o— 
pium, que les médecins italiens ont conseillé les pre- 
miers, probablement en se fondant sur l’action contrac- 
tante des sucs opiacés sur la pupille. Il demande que la 
société s'occupe l'été prochain de rassembler et de dessé- 
cher un nombre suffisant d'exemplaires de Belladone, 
pour en mettre encadrés dans toutes les écoles de cette 


— 230 — 


ville et des environs. Cette proposition est adoptée. La 
Société charge encore M. le D' Dubois de préparer un 
avertissement populaire sur la Belladone et les dangers 
qu'elle présente, qu'on fera imprimer dans la feuille 
d'annonces. 


M. Nicolet met sous les yeux de la Société un nombre 
considérable d'exemplaires de la linaire des Alpes (Lina- 
ria alpina), tous différens par la couleur des fleurs, va- 
riant depuis un bleu intense au violet et au blanc com- 
plet. Les fleurs blanches ont le palais velouté bleu ou 
blanc avec deux taches orangées, plusieurs sont mar- 
quées de stries bleues. Ces exemplaires appartenant tous 
à la variété 6. stricta ont été trouvés à la roche des Cros 
(Roche des Corbeaux), sur le talus d’éboulement, et pro- 
viennent d’un semis, fait par M. Junod il y a 25 ans. 
M. Pury, D', fait remarquer que beaucoup de plantes 
varient considérablement les couleurs de leurs fleurs, 
lorsqu'on les sème dans des endroits autres que ceux où 
elles croissent naturellement. I] manifeste aussi le vœu 
que la société recueille et mette dans ses archives toutes 
les plantes qui ont été introduites dans nos environs par 
Gagnebin, Junod et les frères Gentil, persuadé que cela 
sera d'un grand intérêt pour les botanistes futurs, car 
certaines de ces plantes, ainsi que d’autres qui croissent 
naturellement ici (comme l'Ophrys myodes, qui était 
assez abondant dans quelques -uns de nos Ruz, en- 
tr'autres à la Combe-Girard), tendent à disparaître de 
chez nous, et seront cherchées vainement plus tard. 


M. le Dr Pury ajoute quelques mots sur une chute de 


— 231 — 


grêle qu’il a observée, le 18 septembre de cette année, à 
la Chaux-de-Fonds. Les grelons observés, dont quelques- 
uns pesaient jusqu'à trois et même quatre onces, pré- 
sentaient absolument la même conformation que ceux 
qu'il observa l’année dernière à la Maison Monsieur. 
Comme ces derniers, ils étaient ou concentriques (c’étaient 
les plus nombreux) ou agglomérés. Leur apparition cor- 
robore complètement l'opinion de M. Pury sur leur for- 
mation (v. Bulletin de la Société de Neuchâtel, 1843-44, 
p. 34). 


M. le D' DuBois dit avoir observé, il y a quelques 
joure, chez une primipare un accouchement de deux ju- 
meaux, dont le premier présentait une position de l’é- 
paule , et le second, arrivé quelques heures après , une 
position occipitale, et qui nés à terme, vivans ne pe- 
saient chacun que trois livres, et ont pris le sein avec 
grand appétit, comme des enfans ordinaires, quelques 


heures après leur naissance. 
Dr Pury, secrétaire. 


Séance du 9 janvier 1845. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


Le Dr Pury lit une note sur un phénomène apparte- 
nant à l’ordre des halos, qu’il a observé ici le 31 juillet 
184% à dix et demi heures du soir. Le ciel était légère 
ment nuageux, l'air était passablement froid pour la sai- 
son. Il se forma autour de la lune, voilée légérement 
par un nuage presque diaphane, un arc-en-ciel, très- 
petit, assez vif de couleur, et dont les deux bouts se re- 


— 232 — 


dressaient en se terminant au bord du nuage. L'arc se 
ferma et donna naissance à un cercle entier, auquel 
étaient tangeans deux arcs semblables au premier, dont 
les centres se trouvaient sur la même perpendiculaire à 
l'horizon que celui du cercle. Un cercle et deux arcs plus 
grands et plus pâles, concentriques aux premiers, se 
formèrent également; les ares du haut disparurent alors, 
ainsi que le grand du bas, et l'arc primitif inférieur s’a- 
grandit considérablement; après quoi le nuage étant de- 
venu plus épais, ne laissa plus pénétrer que la pâle 
lumière de la lune. Toute cette phantasmagorie avait 
à peine duré deux minutes. M. Pury présente après cette 
lecture les dessins des différentes phases du phénomène, 
exécutés par M. Favre. 


Le D' Pury lit, pour compléter ce qu'avait dit il y a 
quelques jours M. le D' DuBois sur le spasme des gra- 
veurs, un extrait du livre de Romberg : Handbuch der 
Nervenkrankheiten, sur le spasme des écrivains, (morbus 
serèptorius , Schreibekrampf). Cette maladie, entièrement 
analogue au spasme des graveurs, a pour siége le pouce, 
l'index et le medius, dont les filets nerveux proviennent 
des nerfs radial et médian, à l'exclusion du cubital; pour 
signes, des mouvemens involontaires des doigts qui font 
aller la plume de haut en bas, et de bas en haut, sans 
qu’il soit possible au malade de former une lettre, avec 
un sentiment de crispation et de serrement de la main 
et des douleurs qui s'étendent souvent jusqu'au coude 
et même jusqu'à l'épaule. Ce spasme cesse dès que le 
malade renonce à écrire; aussitôt après il peut exécuter, 
avec sa main malade, les travaux les plus délicats, 


L 


— 233 — 


pourvu qu'ils exigent d'autres mouvemens. M. Romberg 
ne propose aucun traitement que la ténotomie, exécutée 
une fois par Strohmeyer avec succès, et plusieurs fois sans 
réussite par M. Dieffenbach. M. Pury pense que la guérison, 
dans le cas cité par Strohmeyer, n'aura pas été de durée, à 
cause de l’inervation qui se rétablit dés que les deux bouts 
des nerfs auront été resoudés. Il pense que si cette maladie 
est plus commune en Allemagne qu'en France, cela tient 
à la différence que l'écriture allemande a avec la française, 
la première étant alongée et les liaisons étant toutes 
faites avec des angles très-aigus 

M. le D' Dubois fait observer, puisque Romberg n'in- 
dique pas de traitement, que la morphine appliquée en- 
dermiquement sur le trajet du nerf lui paraît devoir 
rendre les mêmes services que dans les spasmes des gra- 
veurs, où il‘en a constaté le succès encore derniérement. 

D' Pury, secrétaire. 


Séance du 23 janvier 1845. 
Présidence de M. WURFLEIN. 


M. Nicolet met sous les yeux de la société deux cal- 
culs rénaux. L'un de cheval, composé de plusieurs piéces, 
occupait le bassinet, et remplaçait même presque com 
plètement le rein, dont il ne restait qu’une espèce de 
kyste. Ce calcul se dissout avec effervescence dans l’a- 
cide hydrochlorique; chauffé seul sur le charbon, il 
noircit en donnant une odeur animale empyreumatique, 
puis il blanchit sans perdre sa forme primitive. Le résidu 
se comporte comme la chaux vive. 100 parties de ce 
calcul contiennent : 


— 234 — 


matière animale 9, 
carbonate de chaux 91, 
carbonate de magnésie, des traces. 
L'autre calcul rénal très-volumineux provient d’une 
vache; ce calcul se dissout sans effervescence dans l’a- 
cide hydrochlorique; chauffé seul sur le charbon, il noir- 
cit en donnant une odeur animale empyreumatique, 
puis il blanchit sans apparence de fusion. 100 parties de 
ce calcul contiennent : 
27 de matière animale. 
64 de phosphate de chaux. 
3 de phosphate ammoniaco-magnésien. 
6 de carbonate de chaux. 

A l'occasion de cette présentation le DT Pury demande 
qu'il soit fait ici une collection anatomique et patholo-— 
gique qui serait placée sous le patronage de la société. 
MM. les D'S présens à l'assemblée appuyent cette propo- 
sition en ajoutant qu'ils sont prêts à contribuer à cette 
œuvre autant qu'ils le pourront. 


M. le Dr Pury lit un extrait de Romberg, surle trismus 
ou spasme de la mâchoire inférieure. Cette maladie a 
pour cause une irritation soit médiate , soit immédiate de 
la cinquième paire de nerfs, ainsi que l'ont prouvé les 
expériences de Bell et Valentin, sur des animaux fraîche- 
ment tués et encore irritables. Ce spasme peut être to- 
nique ou clonique et affecter les différens muscles de la 
mâchoire. Le cas qui se présente le plus souvent est le 
spasme tonique des muscles masséters et temporaux, et 
alors aucune force ne peut ouvrir la bouche; dans le 
spasme clonique de ces mêmes museles, il y a grince- 


— 235 — 


ment de dents et mouvement convulsif masticatoire. Les 
adducteurs latéraux ou ptérygoïdiens sontmoins fréquem- 
ment atteints du spasme qui est alors toujours clonique et 
fait produire à la mâchoire des mouvemens latéraux con- 
vulsifs de va et vient. Quant aux abducteurs (le mylo— 
hyoïdien et le digastrique ) qui sont atteints le plus ra- 
rement, les exemples de spasme que les auteurs ont 
cités ont tous la forme tonique, et alors le malade est dans 
l'impossibilité de fermer la bouche. Le diagnostic est fa 
cile, mais cependant Bright a signalé un cas d’ankylose des 
deux articulations de la mâchoire avec ulcération des ar- 
ticulations des deux premières vertèbres cervicales qui 
simulait parfaitement certains accidens trismiques et té- 
taniques. — L’extirpation d'une dent, la sensation du 
froid peuvent amener le trismus ou l’irritation du rameau 
moteur de la cinquième paire. Romberg en cite plusieurs 
cas. L'autopsie faite après des trismus de longue durée 
décèle dans quelques cas un ramollissement de la petite ra- 
cine de la cinquième paire. — Le pronostic diffère sui- 
vant les causes qui ont amené la maladie, selon que le 
trismus est simple ou combiné avec le tétanos. La gué- 
rison est facile lorsque le tétanos a pour causes l'hysté- 
rie, l'helminthiasis, certains abcès; dans ces cas-là, la 
maladie primitive étant guérie, les accidens trismiques 
disparaissent instantanément ; lorsque le trismus est idio- 
pathique ou suite d'une extraction de dents, des appli- 
cations endermiques de morphine, ou du laudanum versé 
dans les alvéoles des dents arrachées suffisent pour le 
faire cesser. 

M. le D' Droz fait à ce sujet l’histoire de la mort de 
M. H., qui s'étant déchiré en tombant les ligamens de la 


— 236 — 
rotule, le dimanche 12 janvier, avait continué de travail- 
ler pendant toute la semaine sans consulter un homme 
de l’art, et s'était endormi samedi soir dans une chambre 
froide près de la fenêtre, après avoir travaillé jusqu'a 10 
heures. Le lundi 20 sur le soir, un trismus intense l'em- 
pêchait d'ouvrir la bouche, des accidens tétaniques com- 
mençaient à se manifester, son genou lui faisait endurer 
de vives souffrances ; 1l se décida alors à appeler M. Droz, 
qui lui fit une large saignée, et posa vingt sangsues au 
cou, mais sans pouvoir lui ouvrir la bouche. Mardi à 8 heu- 
res du matin, M. Droz appela en consultation ses con- 
frères MM. DuBois , Irlet et Pury. Outre le trismus il y 
avait rigidité tétanique de la colonne vertébrale et gan- 
grène au genou. Il fut résolu, mais sans espoir de succès, 
de faire des applications endermiques de morphine sur les 
masséters , et de donner au malade des lavemens anti- 
spasmodiques d’Assa fætida et de laudanum. À midi la pom- 
made de Gondret qu’on avait appliquée pour enlever l'é- 
piderme n'avait produit aucun effet et à midi un quart 
M. H. n'était plus qu'un cadavre. 
D' Pury, secrétaire, 


Séance du 13 février 1845. 
Présidence de M. WURFLEIN. 


Il est fait lecture des procès-verbaux de la société de 
Neuchâtel des 6 et 20 novembre, et du 4 décembre. 


M. le D' Pury et M. Isac-Charles Ducommun, à l'oc- 
casion du mémoire de M. le docteur Borel , s'élèvent 
contre l'opinion de M. de Castella, qui croit, contraire- 


— 931 — 


ment aux idées de MM. Borel et Ladame, que le ni- 
trate acide de mercure employé par les ouvriers a une 
grande part dans la production des tremblemens mercu- 
riels, car dans notre fabrique, la plupart des doreurs n'em-— 
ployent pour décaper les pièces de laiton à dorer que de 
l'acide nitrique étendu d’eau , et ne se servent nullement 
du nitrate acide de mercure. 

M. Isac-Charles Ducommun, qui a souvent observé que 
dans les cas d'empoisonnement mercuriel, les malades 
blanchissent les pièces d’or lorsqu'elles sont mises dans 
leur bouche, ou tenues dans leurs mains, dit que ce fait 
lai a fourni l’idée de créer un appareil qui permit de re- 
connaître la pureté de l’air des ateliers de doreur. Il a en- 
gagé souvent les ouvriers à placer dans leur atelier des 
lames d’or ou de cuivre doré qui, à cause de l’affinité du 
mercure pour l'or, devraient blanchir lorsque quelques 
parcelles mercurielles se trouveraient contenues dans l’air: 
Il suppose que cet appareil {hydrargyroscope) serait d’une 
grande utilité non-seulement pour les doreurs, mais en- 
core pour les personnes chargées de l'examen des ateliers, 
et leur permettrait de s'assurer de leur salubrité. L'as- 
semblée décide que cette communication sera consignée 
dans nos procès-verbaux et qu'avant de recommander l’u- 
sage de cet appareil on en fera l'essai dans quelques ate- 
liers. Dr Pury, secrétaire. 


Séance du 27 février 1845. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


M. D: DuBois expose un fait d'empoisonnement mercu- 
riel grave qu'il a actuellement en traitement. Un horloger 


— 238 — 


et sa femme qui avaient leur appartement au dessus de celui 
d’un doreur, le firent appeler il y a quelques jours pour une 
stomatite avec ulcération des gencives et salivation abon- 
dante qu'ils avaient tous les deux ; la femme surtout pré- 
sentait ces phénomènes à un haut degré ; une sœur de 
cette dernière était également attaquée, mais beaucoup 
moins que sa sœur et son beau-frère. M. DuBois recon- 
nut de suite que ces symptômes étaient ceux d’une intoxi- 
cation mercurielle : il chercha à s’enquérir des circonstan- 
ces qui avaient pu l'occasionner. Aucun médicament 
mercuriel n'avait été pris ni par l'un ni par l’autre des 
malades ; ils n'employaient pas de mercure dans leur pro- 
fession ; l’intoxication provenait évidemment de vapeurs 
mercurielles arrivées de la chambre inférieure où le do- 
reur avait au mépris du réglement de police posé l'amalgame 
et même passé au feu. M. Dubois avait averti de ce fait 
l'autorité qui ordonna une enquête. Le Dr Pury qui, en sa 
qualité de membre de la commission de surveillance des 
ateliers de dorage au feu, avait dû examiner ces malades 
et la chambre du doreur, confirme en plein le rapport de 
son collègue; il ajoute que le doreur avait aussi passé au 
feu sur son foyer, et que cet individu et sa femme qui 
avaient des tremblemens mercuriels depuis long-temps, les 
avaient augmentés à tel point par leur désobéissance au 
réglement des doreurs, que ni l’un ni l’autre n'étaient en 
état de préparer leurs alimens et même de manger seuls 
et qu'ils avaient dû chercher un refuge à l'hôpital Pour- 
talés. 


MM. les D'S Droz et DuBots à l'occasion du rapport de 
M. le D' de Castella, sur les cas de tremblemens mer- 


— 239 — 


curiels qui se sont présentés à l'hôpital Pourtalés, font re- 
marquer que la couleur noire observée par M. de Cas- 
tella, sur les dents de quelques doreurs, provient de 
l’acétate de plomb que l’on prescrit souvent dans les garga- 
rismes employés comme remèdes dans cette intoxication, 
et que cet état ne constitue pas la carie noire des dents 
qui est due à toute autre cause, et que pour cette raison 
ils ne peuvent se ranger à l'opinion de M. de Castella qui 
suppose qu'une grande partie des empoisonnemens mer- 
cureils observés chez les doreurs, a pour cause le nitrate 
acide de mercure que ces ouvriers employent. 


M. Nicolet, vice-président, annonce à la société que 
dix-neuf chasseurs de la Chaux-de-Fonds et des Epla- 
tures offrent à titre de don, à la section de la Chaux-de- 
Fonds, un jeune loup {Canis Lupus) qu’ils ont tué le 14 


février à Pouillerel. 
D' Pury, secrétaire. 


er Séance du 13 mars 1845. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


Le D' Pury lit une note de M. Gænseli, sur un moyen 
qu'il croit propre à examiner la pureté de l’air dans les 
ateliers de doreurs. Ce moyen consiste dans un grand 
entonnoir de { à 2 pieds de diamèêtre en verre coloré, ter- 
miné par un tube capillaire. M. Gænseli estime que cet 
entonnoir rempli d'eau que l'on rechangera plusieurs fois 
par jour, suffira pour condenser le mercure contenu dans 
la colonne d'air susjacente, qui se précipitera au fond de 
l'entonnoir dans le tube capillaire. Cette colonne d'air 


— 240 — 


réfroidie, sera en vertu de la loi de la pesanteur des gaz 
remplacée par une autre, qui en se refroidissant laissera 
tomber dans l’entonnoir le mercure qu’elle contenait ; 
par ce moyen on pourra en quelques heures, suivant 
M. Gænseli, épurer l'atelier des vapeurs mercurielles qu’il 
contenait et apprécier la quantité de mercure en vapeur 
contenu dans l'atelier. Il s'engage à la suite de cette com- 
munication une discussion sur la valeur de ce moyen, 
qui bien que reposant sur des bases parfaitement justes 
paraît à plusieurs personnes inférieur à celui proposé 
par M. Isac-Charles Ducommun. L’appréciation de la va- 
leur comparative de ces deux procédés est renvoyée à une 
commission , composée de MM. Nicolet, vice-président, 
Olivier Matthey, Isac-Charles Ducommun, Gænseli et 
Pury Dr. 


La pénurie de l’eau a été si grande cet hiver, elle préoc- 
cupe si vivement l'attention publique que M. Nicolet, vice- 
président, croit devoir, en attendant que l’on donne suite 
à la proposition de M. le D' Droz, relative à l’accroisse- 
ment du volume d’eau de notre fontaine et à l'établissement 
de nouvelles, fixer l'attention des membres de la section 
sur le parti que l’on pourrait tirer de la masse d'eau sou- 
terraine qui existe à la base du dépôt tertiaire nymphéen 
de notre vallée. A cet effet il met sous les yeux de la so- 
ciété un plan de la Chaux-de-Fonds, sur lequel les cou- 
ches perméables et imperméables du dépôt tertiaire ont 
été rigoureusement indiquées. Les couches du dépôt ter- 
tiaire sont fortement redressées et affectent véritablement 
la forme d’un bassin, il est en grande partie occupé par 
les couches disloquées et fracturées du calcaire lacustre ; 


— 2H — 


les eaux pluviales, celles qui résultent de la fonte des nei- 
ges filtrent à travers les couches perméables du dépôt la- 
eustre et s'arrêtent sur la couche imperméable où elles 
s'accumulent et forment la nappe d’eau souterraine qui ali- 
mente tous les puits du terrain lacustre, et dont le trop 
plein forme la source de la Ronde. Il est facile de se con- 
vaincre de l’existence de cette nappe d'eau souterraine ; 
la Ronde sourde à la partie la plus déclive du dépôt lacus- 
tre et à la limite des deux dépôts. Les puits du dépôt la- 
eustre atteignent le niveau de la Ronde et sont à-peu- 
près inépuisables comme cette source. Les puits qui ont 
été creusés dans la marne supérieure à la molasse sont 
alimentés par de petits filets d'eau plus ou moins puante, 
que l’on peut considérer comme étant l'expression du ter- 
rain environnant ; Us sont souvent à sec. Pour plusieurs 
de ces puits les travaux ont été poussés à 30 ou 40 pieds 
au dessous du niveau de la Ronde; à cette profondeur on 
n'a pas rencontré de nappe souterraine, voire même à une 
très-petite distance de la Ronde. M. Nicolet pense qu'il 
serait facile de remédier à la disette d'eau qui se re- 
nouvelle toutes les années en été et en hiver, en creusant 
trois à quatre puits dans le dépôt tertiaire lacustre; qu’en 
poussant les travaux au dessous du niveau des eaux de 
la Ronde, on aurait des réservoirs inépuisables, et que 
par le moyen d'une corroi de marne, on pourrait les pré- 
server des matières putrides qui proviennent de la filtra- 
tion des puisards , des égouts et des fosses d’aisance. 


M. Hercule Nicolet communique à l'assemblée le des- 
sin de trois Podurelles qu’il a découvertes postérieurement 
à la publication de son mémoire sur ces insectes, et dans 


— 242 — 


lequel il a décrit quarante-deux espèces. Ces trois espèces 
d'aptères Desoria modesta H. Nic., Smynthurus fuliginosus 
H. Nic., et Smynthurus Lusser: H. Nic., sont caractéri- 
sées comme suit par M. Nicolet. 


DesortA MODESTA H. Nic. 

Corps velu, d’un gris verdâtre moins foncé près du bord 
inférieur de chaque segment, avec trois bandes longitu-— 
dinales de taches triangulaires et presque noires sur le 
dos ; la bande médiane offrant des taches plus larges que 
les bandes latérales; dessous du corps plus päle que le 
dessus et sans taches. 

Tête d’un gris foncé presque noir, avec deux taches 
fauves entourant les yeux, ces derniers noirs. Antennes 
annelées de noir et de fauve; pattes et pièces basilaires 
de la queue brunes, filets blancs, poils noirs. 

Cette jolie podurelle, longue d'environ deux millimé- 
tres et qui paraît assez rare, a été trouvée à Cortaillod 
sous une pierre. 


SMYNTHURUS FULIGINOSUS H. Nic. 


Corps bistre tres-foncé avec les pattes, les antennes, 
la tête et plusieurs taches sur le corps d’un bistre beau- 
coup plus clair, yeux et une large tache ‘sur le sommet 
de la tête noirs. 

Dessous du corps un peu plus clair avec quelques ta- 
ches fauves. 

Ce Smynthure long d'environ un et demi millimètre, 
a été trouvé sous une pierre au bord du lac près Co- 
lombier. 

Suynraurus Lussert H. Nic. 


Corps d’un brun rougeâtre en dessus, plus pâle en 


— 243 — 


dessous, irrégulièrement varié de jaune et de brun foncé ; 
un peu alongé surtout vers la partie postérieure et cou- 
vert de points enfoncés ronds , bruns ou noirs. Du cen- 
tre de chaque point part un poil pâle et assez long , ce 
qui rend cet insecte très-velu. 

Tête également pointillée et velue mais plus pâle que 
le corps. Plaques oculaires noires; protubérances inter- 
oculaires d’un blanc légèrement bleuâtre. 

Pattes, antennes et queue d'un blanc sale, parsemées 
de points noirs et velus. 

Ce beau Smynthure remarquable surtout par les points 
enfoncés qui couvrent toute la surface, paraît assez com- 
mun dans les forêts qui avoisinent Altorf, où on le trouve 
sous les pierres ; sa longueur est d'environ trois milli- 
mètres. 

D' Pury, secrétaire. 


Séance du 27 mars 1845. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


Le D' Pury fait lecture d’un mémoire intitulé : Exa- 
men des idées du professeur Schünlein sur les fièvres ty- 
phoïdes. M. Schünlein n'ayant pas écrit lui-même, on est 
obligé de s'en tenir à ses leçons qui ont été publiées soit 
incomplètement sans sa volonté, et à diverses époques 
dans les ouvrages suivans : Al/gemeine und specielle Pa- 
thologie und Therapie von Prof. D' Schünlein. Herisau et 
Saint-Gall. — D" J. L. Schünlein's Prof. in Zürich, Neue 
Ansichten über die Typhen. Zurich, 1840, qui malgré 
leurs nombreuses fautes ont été réimprimés plusieurs fois, 
soit d'une façon beaucoup plus complète par le D' Güter- 


18 


— 244 — 


bock, avec l'autorisation de M. Schünlein, dans l'ouvrage : 
Schünleins klinische Vorträge in dem Charüékranken- 
hause zu Berlin. Berlin, 1843. M. Schônlein insiste beau- 
coup dans ses leçons, {° sur la division de la maladie en 
périodes ou stades a) période d'irritation , b) période ner- 
veuse , c) période des crises, 2° sur la durée septenaire de 
ces périodes, 3° sur les jours critiques qui séparent une 
période de la suivante, 4° sur la corrélation de cette ma- 
ladie avec les fièvres intermittentes, 5° sur la décompo- 
sition que le sang éprouve dans cette maladie : il perd 
alors son albumime et l’hématoglobuline. L’albumine se 
retrouve dans les selles diarrhéiques , dans les urines et 
dans les sueurs visqueuses des malades. C’est à sa perte 
qu'il faut attribuer principalement le prompt amaigrisse- 
ment des malades, ainsi que ce qu'on a appelé marasme 
typhoïde qui attaque les convalescens de cette fièvre. 
Ce marasme a aussi pour cause, suivant M. Schôünlein , la 
disparition des papilles intestinales des surfaces que la 
maladie avait ulcérées. En conséquence des change- 
mens opérés dans la masse du sang, M. Schôünlein se dé- 
clare contre le traitement à la Broussais, et veut qu'on 
restreigne l’emploi de la saignée dans les cas où des com- 
plications de pneumonie la rendent indispensable; 6° sur 
l'efficacité du calomel pour combattre les selles diarrhéi- 
ques dans le commencement de la maladie; 7° sur le 
mauvais effet des vomitifs et des purgatifs salins. 8° Parmi 
les causes de cette maladie on doit compter comme une 
des plus puissantes l’ingestion d’alimens ou de boissons 
contenant des matières animales ou végétales en putré- 
faction. 9° L’urine des malades offre un point de diagnos- 
tic trop négligé jusqu'ici; elle est acide dans la première 


ut : Que 


période et très-foncée, elle devient alcaline dans la crise 
et dans la seconde période, et forme des précipités de phos- 
phates terreux ; dans la convalescence elle devient de nou- 
veau acide et pàle; 10° sur la grande attention que doit 
porter le médecin dans la dernière période à l’état de la 
voix. Lorsqu'elle est rauque on peut craindre une ulcéra- 
tion avec phthysie du larynx, ou un œædème de la glotte 
également fàcheux. 

Après avoir passé en revue les différens points sail- 


lans de la doctrine du célèbre professeur de Berlin sur 


les fièvres typhoïdes, le D' Pury passe à la critique de 
ces points. Suivant lui les périodes de la fièvre typhoïde 
ne sont pas, au moins dans nos montagnes, aussi régu- 
lières que le prétend M. Schônlein; les médecins qui ob- 
servent depuis long-temps les fièvres typhoïdes dans 
notre localité n’ont jamais rien observé de semblable: la 
rareté des fièvres intermittentes dans nos contrées est 
peut-être une des principales causes de cette différence, 
La même observation s'applique aux jours critiques dont 
on n'observe non plus aucune trace chez nous. Dans nos 
climats froids, le calomel ne pouvant être donné pendant 
plusieurs jours sans qu'il n’y ait à craindre une intoxi- 
cation mercurielle, il faut recourir aux émélo-cathar- 
tiques et aux sels neutres, supportés bien mieux dans 
nos montagnes que partout ailleurs, à cause peut-être 
de l'habitude de notre population qui sale beaucoup ses 
aliments, et aussi et principalement parce que les affec- 
tions bilieuses sont très-fréquentes et compliquent toutes 
les maladies aigües qui surviennent chez nous, comme la 
pneumonie, le rhumatisme inflammatoire et surtout la 
fièvre typhoïde. 


— 246 — 


MM. les D'S Droz et Depierre déclarent ensuite que 
les différentes épidémies de fièvre typhoïde, qu'ils ont 
observées dans le cours de leur longue pratique, ne 
leur ont jamais offert la périodicité des crises que M. Schôn- 
lein veut voir; ils ont eu souvent des malades en délire 
pendant une quinzaine de jours sans interruption, sans 
que la moindre crise parût dans l'intervalle. Les sels 
neutres et le tartre stibié leur ont rendu des services 
immenses, que ne pourrait pas leur rendre ici le ca- 


lomel. 
D' Pury, secrétaire. 


Séance du 10 avril 1845. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


Le D' Pury lit un petit mémoire ayant pour titre : De 
la déviation de la colonne vertébrale chez les jeunes filles , 
extrait d’un rapport de M. le Prof. Demme, fait au nom 
de la Faculté de médecine de Berne au Conseil d’éduca- 
tion de la république, et inséré dans la gazette de Berne 
(Schweixzerische Zeitschrift für Medizin, Chirurgie und Ge- 
burishülfe. 184%, p. 1 et suiv.). 


MM. Nicolet, vice-président, et Pury, D', parlent de 
différentes chutes de grésil à gros grains qu'ils ont eu 
occasion d'observer depuis la dernière réunion de la so- 
ciété. Ce grésil qui tombait toujours à la même tempéra- 
ture (+2 à 3° cent.), a tantôt la forme d'un cône ou 
d'un secteur sphérique, tantôt celle d’une pyramide à 
base hexagonale régulière. Malheureusement la ténuité 
de ces corps, jointe à leur grande fusibilité, n’a pas per- 


— 247 — 


mis à ces MM. d'en examiner la composition intime ; 
ils espérent le faire plus tard, vu que cette forme de 
grésil paraît tomber assez communément dans nos mon- 
tagnes. 


M. Jeanneret, pasteur, rend la société attentive au 
danger qu'il y a d'habiter des maisons trop fraîchement 
bâties ; il envisage cette habitude comme une des princi- 
pales causes des épidémies de fièvre typhoïde qui sévissent 
dans notre Jura. Une discussion s'engage ensuite sur 


cette matière. 
Dr Pur, secrétaire. 


Séance du 24 avril 1845. 


Présidence de M. Nrcoer, vice-président. 


M, Nicolet, vice-président, présente à la section deux 
coupes géologiques réprésentant les couches renversées 
de notre vallée à la Grognerie et aux Cornes-Morel. 

A la Grognerie, les couches du calcaire portlandien 
plongent en apparence vers l’ouest, direction opposée à 
celle des couches des terrains oxfordien et corallien voi- 
sins ; les couches du portlandien plongent sous un angle 
de 30° et recouvrent la molasse. 

Aux Cornes-Morel, non-seulement les couches du cal- 
caire portlandien, mais encore celles du néocomien et 
de la molasse sont renversées. La molasse plonge en ap- 
parence vers l’est sous un angle de 20°, et le dépôt des 
marnes rouges paraît plonger sous les couches de la mo- 
lasse. Dans l’un et l’autre cas, le dépôt tertiaire paraît 
être inférieur aux terrains jurassiques. Après celte ex- 


— 248 — 


position, M. Nicolet entre dans quelques détails sur l’opi- 
nion de la répétition des formations jurassiques, détails 
qu'il accompagne d'explications graphiques. 


M. Watthey présente ensuite à l'assemblée une machine 
électro-galvanique, à induction, de Bonijol, qu’il a cons- 
truite lui-même d'après celle qui existe au cabinet de 
physique de Neuchâtel, mais sur une plus grande échelle 
et avec un multiplicateur beaucoup plus fort. M. Mat- 
they, avant de faire des expériences avec cette machine, 
en explique le mécanisme et la théorie des courans d'in- 
duction, ainsi que quelques autres phénomènes électro— 
magnétiques. 

D' Pury, secrétaire. 


Séance du 8 mai 1845. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


M. le D' Deprerre présente un petit mémoire sur deux 
plantes rares de notre Jura, dont la première Typha me- 
dia de Reichenbach (Typha intermedia DC; Typha an- 
gustifolia L.), indiquée par Haller, d’après Gagnebin, 
à la Ferrière et aux environs de St.-Imier, a été trouvée 
par lui en abondance dans une petite mare, au-dessus du 
Crêt du Locle, et par M. Nicolet dans les marais de 
Pouillerel, et doit être considérée comme indigène du 
canton, vu qu'on la trouve abondamment dans ces lo- 
calités. Si elle a échappé jusqu'ici aux recherches des bo- 
tanistes, c'est qu’elle se trouve dans des endroits peu 
fréquentés. 


— 249 — 


« La seconde de ces plantes, » dit M. Depierre, « que 
lon me permettra d'appeler provisoirement Depierrea , 
du nom de celui qui l’a découverte, en attendant que les 
botanistes lui ayent assigné le rang qu'elle doit occu- 
per, et le nom sous lequel elle devra être connue, a 
été trouvée par mon fils en juillet 1842, près des Bre- 
nets, à l'extrême frontière du canton, et parait être in- 
connue, non-seulement aux botanistes neuchâtelois, aux- 
quels j'en ai adressé des échantillons, mais encore aux 
botanistes étrangers, qui, à ma connaissance, n’en ont 
fait aucune mention. 

» Cette plante, qui appartient évidemment à la famille 
des Campanulacées, paraît devoir prendre rang entre les 
genres Campanula et Phyteuma, avec lesquels elle a de 
nombreux rapports. Sa tige, d’abord couchée à sa base, 
se redresse et atteint douze à quatorze pouces de hauteur; 
elle est cylindrique, grèle , légèrement duvetée, surtout 
quand Ja plante est jeune. Ses feuilles radicales, qui 
sont au nombre d'une ou deux, et qui disparaissent de 
bonne heure, sont cordiformes, pointues, denticulées, 
comme crispées sur leur bord et portées sur un long pé- 
tiole; celles de la tige sont pétiolées, linéaires, longue- 
ment lancéolées, étroites , très-aigues, éparses, ainsi que 
celles du sommet qui sont filiformes; la tige est termi- 
née par un épi lâche de 4 à 6 fleurs. Celles-ci se compo- 
sent d'un calice conique, cannelé, à cinq segmens 
linéaires , effilés, très-aigus; d’une corolle monopétale, 
divisée jusqu'à sa base en cinq laniéres lancéolées, 
linéaires et d’une ligne de largeur environ; de cinq éta- 
mines à filets un peu dilatés à la base , et chargés à leur 
sommet d'une anthère ovale, aigue; et enfin d'un style 


— 250 — 


filiforme, à stigmate trifide. Je n’ai pas encore pu obser- 
ver bien précisément la capsule ; mais elle m’a paru être 
à deux loges, et renfermer des semences petites et nom- 
breuses. 

» Au début de la floraison, les segmens de la corolle 
sont voûtés ou courbés, et écartés les uns des autres 
dans toute leur longueur, excepté vers leur sommet, où 
ils sont connivens ; d’après cette disposition , ils figurent 
un grillage à travers lequel on distingue les étamines et 
le pistil. À mesure que le développement de la fleur s’o- 
père, les segmens se séparent, s'étalent en roue, et 
laissent saillir au dehors les organes de la fécondation. 

»Cette plante qui demande à être encore étudiée, et qui 
pourrait bien n'être qu'une hybride d’une campanule et 
d'une phyteuma, malgré l'opinion contraire d’un de nos 
botanistes les plus distingués, paraît vouloir se multiplier 
dans son endroit natal. Les échantillons que j'ai trans- 
plantés au Locle l’année dernière, afin de m'assurer si 
la culture n’apporterait chez eux aucun changement, se 
trouvent dans un état prospère, et me donnent l’espé- 
rance que je serai à même d'en fournir aux botanistes qui 
désireraient examiner eux-mêmes ce végétal. » 

D' Pury, secrétaire. 


Séance du 22 mari 1845. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


M. le Dr Basswitz présente un jeune homme âgé de 
16 ans, auquel il a fait l'opération de la staphyloraphie, 
il y a bientôt trois mois. La difformité était congénitale, 
et intéressait non-seulement le voile du palais dans 


— 251 — 


toute son étendue, mais encore dans une longueur de 
trois lignes les os du palais, qui n'avaient au reste que 
les deux tiers de leur longueur habituelle. 

L'opération présenta les circonstances suivantes : Elle 
fut faite par rafraîchissement de substance dans les bords 
du voile du palais, trois ligatures furent placées à l’aide 
du porte-aiguille ordinaire. La seconde aiguille, proba- 
blement mal trempée et fortement serrée par le porte- 
aiguille, se brisa dans l'opération, mais l'opérateur fut 
assez heureux de pouvoir la ressaisir avant qu'elle tombât 
dans le pharynx ou dans le larynx. Le troisième jour de 
l'opération la ligature qui était le plus en avant tomba, 
il s'en suivit un léger écartement des deux lévres de la 
plaie; la chute de la seconde ligature arriva au cin- 
quième jour, et produisit un nouvel écartement, qui parut 
annuler les chances de réussite de l'opération. La troi- 
sième ligature tomba le huitième jour : la réunion avait eu 
lieu dans ce point, d’où la cicatrice, partant et marchant 
d’arrière en avant, réunit toutes les parties précédemment 
avivées par le bistouri au bout de trois semaines. 

La luette, qui est partagée en deux parties, n'ayant 
pas été comprise dans la première opération, dans la 
erainte d'augmenter la tension produite par trois liga- 
tures , sera opérée plus tard. 

Il existe une petite fente dans les os, en avant des 
points nouvellement réunis; elle n’a pas trois quarts de 
ligne de longueur; on y rémédiera par une opération 
plastique. 

L'opéré parle beaucoup mieux qu'avant l'opération; 
les liquides, qui lui revenaient en partie par le nez, à 
mesure qu'il avalait, passent actuellement facilement. 


— 952 — 


M. Gerbel expose dans un petit mémoire les dangers 
du procédé de dorage au mercure, et le peu de solidité 
des dorages au galvanisme. En effet, l'or ne peut s’ap- 
pliquer sur le laiton par ce procédé, que lorsqu'on a 
appliqué précédemment sur le métal une couche d’ar- 
gent, au moyen de poudre d'argent mêlée de sels. Cette 
couche donne aussi le grenage particulier aux pièces do- 
rées avec le mercure. Mais elle est souvent recouverte, lors- 
que les ouvriers ne sont pas consciencieux , d’une quan- 
tité d’or tellement minime, que quelques coups de brosse 
suffisent pour faire reparaître la couche d'argent, qui 
elle-même agit aussi comme corps étranger, et empêche 
la couche d’or d'adhérer à la pièce qu'on veut dorer. 
M. Gerbel, parvenu à force d'essais à fixer l’or directe- 
ment sur le laiton, et à pouvoir fournir des pièces dorées 
aussi solidement que par le dorage au mereure, à un 
prix égal, et qui depuis près de trois mois livre une 
quantité notable de pièces dorées par ce procédé, à plu- 
sieurs maisons d'ici, soumet à l'assemblée plusieurs mou- 
vemens de montre dorés de cette manière. 


M. le D' Depierre présente également un mouvement 
doré par M. Boucher du Locle , sans mercure, et par un 
procédé autre que l’électro-galvanisme. La Société renvoie 
l'examen de la valeur de ces procédés à une commission 
composée des mêmes personnes que celle qui a été nom- 
mée pour examiner le meilleur procédé à employer pour 
connaître la salubrité des ateliers de dorage au feu: 
(MM. Nicolet, vice-président, Ol. Matthey, L.-C. Du- 
commun ,  Gænsli et Pury, D',) et de MM. Julien Hu- 
guenin et Bovy. 


sie 


2: 


— 253 — 


M. le D' Basswitz présente une série de tranches fines 
des dents de l’homme, du chien, du veau, du renard, 
de la martre et du cochon, et il en explique la structure 
à l’aide du microscope simple et composé. Plusieurs de 
ces tranches n'étaient pas bornées à la dent seule, mais 
comprenaient le périoste et le maxillaire. Une de ces 
coupes, faite très-artistement, comprenait toutes les dents 
et la mâchoire inférieure d’une martre, et une autre 
celle d'un renard. 

Quant à la structure intime des dents, M. le D' Bass- 
witz en parlera plus longuement daus une prochaine 
réunion, lorsqu'il nous lira son mémoire déjà commencé 
sur le développement des tissus des dents des mammi- 


fères. 
Dr Puy, secrétaire. 


— 254 — 


ADDITION À LA SÉANCE DU 4 JUIN 1845. 
(page 222.) 


M. Guyot communique quelques ohservations sur la 
formation et la direction des crevasses des glaciers. 

On sait que les glaciers présentent, à divers endroits 
de leur cours, et particulièrement à chaque change- 
ment de niveau un peu brusque, de nombreuses et 
larges crevasses d’une étendue très-variable, qui en 
forment l’un des accidens les plus marqués, et qui con- 
tribuent plus que tout autre à en varier la physionomie. 
La direction de ces crevasses est d'ordinaire transversale, 
cependant on en voit aussi d'obliques; d’autres encore 
sont longitudinales ; souvent même des crevasses de di- 
rections discordantes ou opposées se croisent dans une 
même partie du glacier. Les causes de ces divers phéno- 
mèênes n'ont point été encore suffisamment éclaircies. 

La formation des crevasses, comme le montre l’obser- 
vation, est essentiellement liée aux accidens du sol qui, en 
donnant lieu à des pentes plus fortes, déterminent une 
accélération dans la marche du glacier. D'autre part l’en- 
semble des mouvemens des glaciers prouve que leurs 
glaces se comportent comme une masse plastique, bien 
qu'à un très-faible degré. Or on peut dire : que les cre- 
vasses se forment partout où la vitesse de marche des glaces 
devient relativement trop grande et cesse d’être en proportion 
avec leur plasticité. 

La conséquence nécessaire d’une pareille disproportion 
est, en effet, la naissance de ces solutions de continuité, qui 
disparaissent aussitôt qu'une pente moins forte ralentit la 


— 255 — 


marche du glacier et rétablit l'équilibre entre ces deux 
facteurs. 

Ce principe suffit pour se rendre compte, dans presque 
tous les cas, de la formation des crevasses dans les lieux 
où on les observe, surtout si l’on se souvient que la vi- 
tesse du mouvement d'un glacier est le résultat de trois 
facteurs, dont chacun est très-variable, et qui sont, de 
plus , très-diversement combinés : la pente, la masse des 
glaces , et la quantité d'eau d'infiltration. 

Dans un glacier de premier ordre et à grande épais- 
seur, la masse des glaces est telle qu'il suffit d'une pente 
peu considérable, 10° à 20°, et moins encore, pour dé- 
terminer une accélération de mouvement assez forte pour 
donner lieu à de nombreuses crevasses. 

Dans un glacier de second ordre et à petite épaisseur, 
les glaces se meuvent souvent sur des pentes de 30° et 
plus, telles qu'un grand glacier y serait en cascade, sans 
que cependant il s'y forme des crevasses ; c’est qu'alors 
la masse des glaciers est trop faible et reste incapable de 
produire une accélération suffisante pour surmonter leur 
cohérence. 

Dans une partie donnée d’un glacier et sur une même 
pente, on trouve en été des crevasses là où il n’en existe 
point dans d’autres saisons. L’abondance de l’eau d'infil- 
tration , pendant cette saison, donnant aux glaces une 
mobilité plus grande, agit à son tour pour accélérer le 
mouvement et occasionner des crevasses. 

Quant à la direction des crevasses, des observations 
antérieures , et spécialement l'examen attentif, à ce point 
de vue, du glacier de Gorner, le principal d’entre ceux 
du Mont-Rose , font croire à M. Guyot que, sauf peut- 


— 256 —- 


être quelques cas exceptionnels, on peut cependant ra- 
mener toutes ces divergences à un principe unique, qui 
est celui-ci : La direction des crevasses , au moment de leur 
formation, est perpendiculaire à l'axe du mouvement de la 
partie du glacier dans laquelle elles s'opèrent. 

Les anomalies apparentes que semblent subir cette 
règle tiennent essentiellement à deux causes : 

1° Aux changemens de plans de pente, qui sont l'effet 
de la structure même de la vallée, et du relief du fond 
sur lequel se meut le glacier. 

29 A la persistance des crevasses dans des lieux où 
elles ne se sont point formées, mais où elles ont été ame- 
nées par le mouvement propre du glacier. 

Dans le premier cas, chaque plan de pente donne nais- 
sance à un système de crevasses parallèles qui lui est 
propre et qui se distingue nettement de tel autre système 
situé au dessus, au dessous ou à côté de lui. 

Dans le second cas, les différentes parties d'un même 
glacier ne se mouvant pas avec une vitesse égale, soit 
en vertu de la progression plus rapide de la partie. cen- 
trale comparée à celle des bords, soit par suite du mou- 
vement propre que conservent, long-temps après leur 
réunion en une seule masse, les affluens principaux dont 
est formé un glacier composé, comme celui de Gorner, 
il résulte de cette inégalité de mouvement, que les cre- 
vasses, tout en cheminant avec le glacier, subissent né- 
cessairement une notable déviation de leur direction 
primitive, attendu que l’une des extrémités est entraînée 
plus rapidement que l’autre. De transversales qu'elles 
étaient, elles peuvent devenir obliques ou même presque 
longitudinales. 


| 


— 257 — 


C’est d’après ces principes que M. Guyot croit pouvoir 
expliquer facilement le réseau compliqué de crevasses 
que présente la moitié inférieure du glacier de Gorner. 

La vallée qui contient ce grand glacier tourne pres- 
que en demi cercle autour du massif du Riffel. La partie 
supérieure, entre le Riffel et la chaîne des grands pics 
du Gornerhorn, du Mont-Rose et du Breithorn, n’a 
qu'une pente de 3° à 4°; sa surface est unie et ne pré- 
sente que peu ou point de crevasses ; la vallée est longi- 

_tudinale ; mais à l'angle occidental du Riffel, elle tourne 
de l’ouest au nord, devient transversale; la pente très- 
forte est presque une chute; les crevasses apparaissent 
aussitôt; le glacier est comme en cascade. Les mouve- 
mens qui se sont opérés dans la masse plastique du gla- 
cier, en passant par ce défilé resserré, sont tels que les 
bords sont relevés sur les flancs de la vallée, et que le 
centre présente une dépression sensible. Aussi distingue- 
t-on nettement deux systèmes de crevasses, l’un trans- 
versal, perpendiculaire au mouvement normal du gla- 
cier d'amont en aval, l’autre longitudinal, partant des 
deux rives, perpendiculaire aux plans de pente dirigés 
transversalement vers le centre. Le second est le résultat 
de la tendance des masses relevées un moment contre les 
bords par l’étranglement, à reprendre leur niveau; il est 
surtout très-marqué sur la rive droite. Un peu plus bas 
les crevasses transversales tendent à s’arquer en aval, 
par suite du mouvement accéléré du centre ; puis la pente 
devenant plus douce, elles se referment, et le glacier 
paraît presque uni. Mais arrivé à l’angle nord-ouest du 
Rüiflel, le glacier tourne encore une fois subitement, et 
se dirige vers le nord-est avec une pente de 27° à 30°, 


— 258 — 


qu'il conserve jusqu'à son extrémité inférieure. Le ni- 
veau de ses deux rives aussi n’est plus le même. Les 
masses de la rive droite, soutenues par le promontoire 
du Riffel, se trouvent beaucoup plus élevées que celles 
de la rive gauche. Il résulte de ces dispositions que le 
glacier se couvre aussitôt d’une multitude de crevasses 
qui affectent des directions très-différentes les unes des 
autres, et qui, vues d’en bas, ou d’un endroit mal choisi, 
semblent former un dédale inextricable. Cependant quand 
on les examine dans leur ensemble , d’une hauteur con- 
venable et successivement de plusieurs points de vue 
différens, on peut se convaincre que ces directions se ré- 
duisent à trois, et c'est aussi le nombre des plans de pente 
que présente ici la surface du glacier. En effet, un pre- 
mier plan de pente, dirigé vers le nord, est donné par 
le thalweg de la vallée transversale, au-dessus du grand 
coude ; un second, dirigé au nord-est, est celui du même 
thalweg de la vallée au-dessous du coude; un troisième 
incliné à l’ouest est transversal à la direction de la vallée ; 
il a pour cause l'avancement du promontoire du Riffel 
qui se prolonge probablement sous le glacier, dans le 
fond de la vallée. Le glacier passant sur cet obstacle, se 
trouve un moment comme suspendu, ensorte qu'à l’en- 
droit même du contour le glacier, à sa surface, présente 
une forte pente de la rive droite vers la rive gauche, selon 
la ligne qui passerait de l'intérieur du coude, c'est-à-dire 
de l’angle du Riffel, à sa convexité extérieure. Or les trois 
systèmes de crevasses sont précisément perpendiculaires 
à ces trois plars de pente, et l'on distingue facilement : 

1° Le système de crevasses transversales, qui sont 
dues au mouvement normal du glacier dans le lit de la 
vallée au dessus du contour. 


— 259 — 


2° Le système également transversal du second plan 
de pente au dessous du coude. 

30 Le système de crevasses longitudinales, qui sont 
l'effet de la chute des masses suspendues sur le promon- 
toire du Riffel vers le côté opposé de la vallée. Les deux 
premiers systèmes se croisent à l'angle même du Rif- 
fel, et forment un véritable grillage qui disloque la masse 
des glaces et qui donne lieu à cette multitude d’aiguilles 
que figurent tous les dessins, même les plus imparfaits, 
qu'on a donnés de ce glacier. 

On voit ainsi que chaque système est dù à une cause 
qui lui est propre, mais que les crevasses d’un système 
empiêtent parfois sur celles d’un système voisin. On con- 
çoit encore, d'après ce qui a été dit, que la disposition 
primitive de ces crevasses ne se conserve pas telle, mais 
qu'elle subit des modifications nombreuses, à mesure que 
le glacier chemine. Les crevasses tendent à disparaître 
avec les accidens qui leur ont donné naissance; tel sys- 
tème de crevasses s’oblitère, ses crevasses dévient de leur 
direction normale ou se referment ; tel autre système de- 
vient prédominant, de secondaire qu'il était, ensorte qu'il 
est souvent difficile de rapporter les nombreuses crevasses 
qui accidentent une partie donnée d’un glacier chacune à 
sa cause primitive. Néanmoins M. Guyot pense que le 
principe qu’il a posé suffira toujours à l'observateur at 
tentif pour débrouiller ce cahos apparent (‘). 


A. Guyor, secrétaire. 


(*) Cette communication était accompagnée de dessins que les limites 
du Bulletin ne nous permettent pas de reproduire. 


19 


AVIS. 


M. Guyot, voulant donner à ses communications sur le 
terrain erratique toute l'étendue que réclame un sujet aussi 
intéressant, a été conduit à de longues recherches qui en 
ont retardé la rédaction. Afin de ne pas ajourner davan— 
tage la publication de ce Bulletin, ces communications pa- 
raîtront, sous forme d’appendice, avec les numéros de 
l’année prochaine. 

Octobre 1845. 
LE PRÉSIDENT. 


— 261 — 


TABLE DES MATIÈRES. 


PHYSIQUE. 


Sur un Mémoire de M. Auguste Olivier, sur l'application 
des métaux par voie galvanique, par M. LADAME. 

Sur une machine électro-galvanique, par M. MATTHEY. 

Sur le peu de solidité du pe au RER ES par 
M. GERBEL. . 

Sur un mouvement doré sans mercure, par M. Dr 
PIERRE. 


PHYSIQUE DU GLOBE. 


Sur le travail de M. Hopkins , sur l’état de la matière 
à l’intérieur du globe, par M. Guyor. 

Observations sur le même sujet, par M. L'ADANE. 

L’ascension de Wetterhorn, par M. DESOR. 

Sur la hauteur des principaux points du pays. par 
M. d'OSTERVALD. 

Sur la quantité d’eau qui s ‘échappe du ge inf leur 
de l’Aar, par M. DESOR. à 

Sur les rapports qui existent entre la 2 tition Mes él: 
ciers et les reliefs généraux des Alpes, par M. DESOR. 

Observations sur le même sujet, par M. AGAssIz. 

Sur une chute de grêle, par M. PuRY. ; 

Sur un phénomène atmosphérique , par M. PURY. 

Sur différentes chutes de or à gros grains par 
MM. NICOLET et PURY. jose 

Sur les crevasses des glaciers , par M. Guvor 


186 
248 


252 


252 


132 
132 
133 


148 
159 


169 
472 
250 
231 
246 
254 


GÉOLOGIE. 


Sur la constitution géologique delArgovie, par M. GRESSLY. 

Sur la distribution des anciennes moraines de l’Allée 
Blanche et du Val Ferret, par M. AGassiz. 

Sur la formation des cirques dans les Alpes, par M. De 
SORA Ie DAME A x ns 

Discussion relative à ce . par MM. GuyoT et DESOR. 

Sur un fait de superposition de roches observé en Ecosse 
par M. Robertson, par M. AGAssIz. | . 

Sur les progrès de l'étude du terrain er ratiqub par 
M. Guxor. 

Sur un filon croiseur d'aéphalte! par M. 6. PURS. 

Observation sur le même sujet, par M. AGAssiz. 

Sur les observations de M. Hommaire de Hell, sur la 
salure des lacs qui entourent la Caspienne, par M. DE- 
SORA Le F0: 0/0 NL 0U6e 910) MSMOTION 1e 
Observations sur le même sujet, par MM. AGassiz et 
GUYOT. : 

Sur deux coupes adolosiquess EU M. NICOLET. 

Sür le terrain erratique (Appendice), par M. GuYoT . 


PALÉONTOLOGIE. 


Sur des dents de Paléotherium, par M. DEsor. 

Sur limportance de l'étude des animaux fossiles par 
M. AGASSsIZ. . 

Sur les Crinoides faites de la See ! gai M. DrSOR. 


BOTANIQUE. 


Sur la linaire des Alpes, par M. NICOLET. : 
Sur deux plantes rares du Jura, par M. DEPIERRE. ; 


ZOOLOGIE. 


Sur une collection de coquilles de M. Albert Pourtalès , 
par M. AGAssiz. 


141 


— 263 — 


Sur les vers intestinaux , par M. CASTELLA. . 

Observations sur le même sujet, par M. AGASsIZ. 

Sur les métamorphoses des animaux des classes infé- 
rieures , par M. AGASSIZ. ; 

Sur la distribution géderaphique. dés animaux et de 
l'homme, par M. AGASSIZ. 

Sur les Diptères, par M. COULON , pète: 

Sur les Araignées, par M. GUILLEBERT. 

Sur les Becs fins et les Ber : (Motacilla), par 
M. A. VouGA. ! 
Sur un jeune loup ds à la codés! bé M. Nicesxn, 

Sur trois nouvelles espèces de Podurelles, par M. H. Ni- 
COLET. 


ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. 


Sur le cerveau des Poissons, par M. AGASsIZ. 

Sur les recherches récentes de M. Milne Edwards sur la 
circulation du sang chez les RSA gant es ; 
par M. AGassiz . 

Sur les recherches de M. de astra ages, sur lé PE 
du canal alimentaire chez un certain nombre d’articu- 
lés et de mollusques , par M. AGASSIZ. 

Travaux de J. Müller sur les Poissons , par M. déassiz) 

Sur la structure des dents, par M. BASSWITZ. 


CHIMIE ORGANIQUE. 


Résumé des expériences de MM. Villefranche et Barres- 
wil, sur l'acidité du suc gastrique, par M. LADAME. 
Sur la digestion des alimens féculens et sucrés d’après 


lesexpériences de MM. Bouchardat et Sandras, par M. LA- 
DAME 


142 
142 


156 
162 
182 
201 


208 
239 


241 


147 


180 


182 
189 
253 


195 


HYGIÈNE, PATHOLOGIE, MÉDECINE ET CHIRURGIE. 


Sur l'influence fâcheuse de la dorure au feu, sur l’orga- 


nisme ; par M. BOREL. : 4 1, 0,0, . 435 et443 


er us 


Sur les doreurs affectés de salivation et de tremblemens 
mercuriels, par M. CASTELLA. 

Observation à ce sujet, par MM. Dao: et DUBoIs, 

Remarque au sujet de la communication de M. AGAssiz, 
sur les métamorphoses des animaux des classes inférieu- 
res , par M. CASTELLA. 

Sur le séjour prulogé d'un os so el ten 
M. CASTELLA. . . 3 2 AY. AISSTERE RÉ 

Sur une hernie avanglée piénée avec succès par M. Cas- 
TELLA. : 

Sur un cas de space tsliqués ph M. Casreni.a: 

Observation sur le même sujet, par M. BOREL. 

Sur l’huile de foie de morue , par M. PuRY. . 

Sur un état spasmodique des doigts, par M. DuBois. 

Observation sur le même sujet , par M. DROZ. 

Remarque de M. DuBois. 

Remarque de M. CASTELLA. 

Sur les empoisonnemens occasionnés * Fr Sclado 
par M. DuBors. 

Sur un accouchement 7 Es AA par M. DuBois. 

Sur le spasme des écrivains (extrait), par M. PURY. 

Remarque à ce sujet, par M. DuBors. 

Sur deux calculs rénaux, par M. NICOLET. 

Remarque à ce sujet, par M. PURY. 

Sur le trismus (extrait), par M. PURY. 

Observation à ce sujet, par M. DROZ. 

Réfutation de l'opinion de M. Castella, RE à 
la cause à laquelle il faut attribuer les tremblemens mer- 
curiels , par MM. PuRY et DUCOMMUN. 

Sur un appareil appelé 7 telnet PM ais M. Du 
COMMUN. : 

Sur un cas d'empoisonnement mercur sël, due M. DuBois. 

Sur un moyen d’examiner la pureté de l'air dans les 
ateliers de dorure, extrait d’une note de M. Gænsli, par 
M. PuRY. F'AE 

Sur les fièvres Had par M. PURY. CT 


150 
238 


4159 


A71 


174 
185 
185 
223 
226 
228 
229 
155 


229 
231 
232 
233 
233 
234 
234 
235 


256 
237 
237 


239 
243 


Æ, US 


Observation sur le même sujet, par MM. DROZ et DE- 
PIERRE. 

Sur une opération Fille \E saphir isS: jar M. Bis 
WITZ. 16 ARTE 


ÉCONOMIE RURALE ET DOMESTIQUE. 


Sur l'épuisement des sols par la culture, par M. La- 
DAME. : 
Sur le guano, par N. AGASSIZ. 

Observation sur le même sujet, par M. DESOR. à 

Sur l’écorce des troncs de sapins coupés, par L. Cou- 
D US Ne 
Sur le moyen de faire arriver une plus grande quantité 
d’eau à la Chaux-de-Fonds , par M. NICOLET. 

Sur le danger d’habiter des maisons fraichement bâties, 
par M. JEANNERET. . 


196 
156 
155 
166 
240 


247 


FAUTES A CORRIGER. 


Page 154, lisez : Séance du 8 janvier 1845. 
» 485, ligne 14, au lieu de sur la laquelle : lisez : sur laquelle. 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DB NEVGCERITER. 


APPENDICE. 


——"> 0 00 æ— - 


OBSERVATIONS SUR LE PASSAGE DE LA NEIGE FARINEUSE A 
LA NEIGE GRENUE ET DE CELLE-CI A LA GLACE COM-— 
PACTE , SUIVIES D'APPLICATIONS A LA THÉORIE DES 


GLACIERS (°). 
PAR 


H. LADAME. 


Les observations qui font le sujet de cette note ont été 
faites pendant l’hiver 1841 à 1842. 

Notre lac est bordé, à l’est du gymnase, par une ran- 
gée de forts piquets, dont le pied n’est point baigné par 
les eaux ; après une nuit où il tomba beaucoup de neige, 
tous ces piquets étaient recouverts d’un chapeau épais de 
neige qui surplombait sur les côtés. Le temps se rétablit 
au beau, et la neige disparut bientôt de la campagne, 
mais les piquets restèrent couverts de neige qui présen- 
tait les caractères suivans: 

1° La partie supérieure et horizontale était formée de 
neige grenue dépassant les bords du piquet, et tenant 
suspendus, à son pourtour, des glacons coniques de dit- 


(*) Présentées à la Société des Sciences naturelles de Neuchâtel, le 17 mai 
1845. 


20 


— 268 — 
férentes longueurs , dont plusieurs avaient près de 0,8 
de longueur. 

29 De l'extrémité de ces cônes il tombait fréquemment 
des gouttes d'eau; le glaçon tout entier était humide et 
pénétré d’eau. Plusieurs de ces glaçons étaient soudés les 
uns aux autres et constituaient ainsi des faisceaux plus 
massifs, qui n’adhéraient au piquet que dans leur partie 
supérieure. 

30 La partie supérieure de ces cônes était formée de 
neige grenue friable et peu tenace. La friabilité de la glace 
diminuait et sa tenacité augmentait graduellement de 
haut en bas jusqu'à son extrémité inférieure près de la- 
quelle la glace était compacte et translacide. 

4° Les glaçons recouverts par d’autres étaient plus 
friables et moins tenaces que ceux qui étaient exposés à 
l'action des rayons solaires. 

D'après la description qui vient d’être faite de ces cô- 
nes suspendus, on comprend qu'un effort très-faible de- 
vait les détacher aisément du piquet ; leur poids seul dé- 
terminait leur chute, lorsque par le progrès de la fonte, 
la partie supérieure n'avait plus une tenacité suffisante. 

5° La structure intérieure de ces stalactites glacés of- 
frait à l'examen de la cassure, une série de pyramides 
ayant leur sommet dans le voisinage de l'axe du cône et 
leur base à l’extérieur. Les faces de ces pyramides étaient 
conchoïdales: leurs bases, des portions de surfaces an-, 
nulaires, ce qui donnait à la surface extérieure du gla- 
con l’aspect d'un chapelet à grains inégaux; gros dans la 
partie supérieure du glaçon, ils diminuaient peu-à-peu 
de dimension jusqu'à l'extrémité inférieure. 

60 La neige grenue du chapeau se prolongeait dans 


— 269 — 
l'axe du stalactite, où elle paraissait logée dans un four- 
reau de glace; cette structure rayonnée et arrondie, n’est 
pas particulière aux cônes glacés, on l’a déjà observée 
dans les gros grains de grêle. 

L'analogie de ces faits avec ceux que produit le terrage 
du sucre est remarquable. On sait que cette opération 
consiste à verser, sur la base d'un pain de sucre contenu 
dans sa forme, un sirop concentré ou une boue argileuse. 
L'eau s'introduit peu-à-peu dans la masse, dissout sur— 
tout le sucre incristallisable et porte en même temps dans 
les parties inférieures le sucre cristallisable ; ainsi tandis 
que le sucre est grenu près de sa base, il est dur et so— 
nore au sommet. 

Pour expliquer les faits dont je viens de parler, nous 
poserons d’abord les deux lemmes suivans : 

1° Lorsqu'on dissout, ou qu'on fond une masse cris- 
talline quelconque, les petits cristaux disparaissent les 
premiers; c'est un fait d'expérience, que justifie d’ail- 
leurs cette remarque, que les petits cristaux ont pro- 
portionnellement une plus grande surface que les gros. 
Car la surface croit comme le quarré des dimensions du 
cristal, tandis que le volume ou la masse croît comme 
le cube de ses dimensions. 

2° Lorsqu'une cristallisation s'opère et qu'il existe de 
petits et de gros cristaux, ces derniers croissent plus 
rapidement que les petits, souvent même ce sont les seuls 
qui augmentent de volume. 

Appliquons maintenant ces principes. 

Pendant l'observation des faits cités, le ciel était clair, 
les nuits froides et les jours chauds. Déès-lors, nous 
comprendrons que la fonte, commençant par les par- 


— 2170 — 

parties les plus fines de la neige, l'eau qui provenait de 
cette fonte descendait dans le glacon réfroidi par l’action 
de la nuit et se congelait autour des gros cristaux ; ceux-ci 
grossissaient donc rapidement, ils se soudaient les uns aux 
autres, et donnaient naissance à la glace compacte. Il est 
manifeste que la formation de cette glace compacte devait 
être d'autant plus prompte que la température du glaçon 
élait tombée plus bas, ou que les alternatives de chaud 
et de froid étaient plus fréquentes : ainsi les parties exté- 
rieures , et celles qui étaient le plus exposées au rayon- 
nement nocturne, et aux ablutions d'eau, devaient pas- 
ser plus rapidement que les autres à l’état de glace com- 
pacte. 

Ces considérations expliquent par conséquent d’une 
manière satisfaisante les faits indiqués dans les paragra- 
phes 1,2,3et 4. 

Essayons maintenant de nous rendre compte des for- 
mes étoilées et arrondies décrites dans les Ç 5 et 6; à 
cet effet rappelons quelques principes. 

1° La forme cristalline de la glace est celle de pris- 
mes hexagonaux, qui se soudent les uns aux autres sous” 
des angles de 30, 60 ou 120°, ils prennent par-là la 
disposition étoilée , rayonnant autour d’un centre. 

29 La disposition en forme arrondie résulte d’une obli- 
tération des cristaux; peu de mots sufliront pour le 
faire comprendre. Une même substance peut présenter 
des formes cristallines fort diverses; les unes régulières 
et les autres irrégulières. Les premières peuvent être ra- 
menées , en vertu des lois de symétrie, à une forme simple 
élémentaire qu'on appelle forme primitive , type. 

Les causes qui déterminent la grande variété des for- 


— 271 — 
mes cristallines régulières d’un corps sont encore peu 
connues, M. Beudant indique (!) : 

19 Le mélange mécanique de matières étrangères 
qu'un corps entraîne en cristallisant. 

29 La nature du liquide au milieu duquel la cristalli- 
sation a lieu. 

30 Les combinaisons en proportions variables que 
peut faire telle ou telle substance avec celle qui cris- 
tallise. 

Quant aux formes irrégulières qui sont extrêmement 
nombreuses et parmi lesquelles on compte les formes arron- 
dies, M. Beudantles considère commele produit « des grou- 
« pemens irréguliers , de certains mouvemens imprimés 
« aux liquides chargés de particules matérielles, ou à la 
« matière même réduite à l’état pâteux, de la résistance 
« des milieux où les matières se consolident, de l’aggluti- 
« nation des matières meubles, des solutions chargées 
« de diverses substances, des incrustations sur des corps 
« étrangers, du moulage des matières dans des cavités 
« préexistantes; enfin des décompositions chimiques en 
« vertu desquelles une matière se substitue à une ou à 
« plusieurs autres » (?). 

Dans ces paroles de M. Beudant , nous trouvons l’in- 


dication de plusieurs causes qui ont pu agir pour donner 
la forme arrondie à nos stalactites, mais dans le cas par- 


ticulier qui nous occupe, il existe une autre circonstance 
qui favorise singulièrement l’oblitération des cristaux. 
Ce fait qu’on observe fréquemment dans les laboratoires, 


(*) Minéralogie de Beudant , tome 1, page 16—189. 
(*) Minéralogie de Beudant, tome 1, page 155. 


— 272 — 

est celui de la variation de température; si, par exemple, 
on place dans un endroit où la température soit inva- 
riable, une dissolution convenablement concentrée de 
sulfate sodique, on obtient de grands et beaux cristaux, 
mais si on la place dans un lieu où il y ait de nom- 
breuses variations de température, les cristaux sont 
courts, ils présentent beaucoup de facettes et prennent 
ainsi la forme arrondie. Nous concluons de cette expé- 
rience que les successions de fonte et de solidification dé- 
terminent dans les cristaux une oblitération qui les ar- 
rondit. Ce sont précisément là les circonstances dans les- 
quelles se trouvait la neige de nos stalactites glacés. 

Nous dirons donc pour expliquer leur formation que, 
pendant la nuit et une partie du jour, le glaçon avait une 
température plus basse que zéro, mais dés le lever du soleil 
la fonte commençait dans la partie supérieure; l'eau qui 
provenait de cette fonte, descendait dans la glace froide, 
augmentait le volume des gros cristaux, et par la cha- 
leur latente qu’elle dégageait, la température se relevait 
à zéro; à mesure que de nouvelles quantités d’eau arri- 
vaient, elles descendaient plus bas que les points où la 
température était zéro, puis elle se congelait comme la 
première. Les choses se passaient ainsi successivement, 
et de proche en proche jusqu'à l'extrémité du glaçon ; 
alors il arrivait en entier à zéro, et l’eau le traversant 
de part en part tombait goutte à goutte de son extrémité, 
mais le froid de la nuit survenant, l’eau dont le glacon 
était pénétré se gelait, la température s’abaissait au-des- 
sous de 0°. Le lendemain matin les phénomènes de la 
veille se reproduisaient; c’est ainsi que peu-à-peu la 
neige, changeait d’aspect et que par suite de sa forme 


— 9273 — 
cristalline, de ses congélations et fontes successives, elle 
devait présenter la forme étoilée et arrondie. 

Aprés avoir fait l'observation précédente et m'être 
rendu compte des différens élémens qu’elle renfermait, 
je me rappelai un autre fait bien connu des habitans des 
montagnes. 

À l'époque du printemps, lorsque la neige disparaît, 


qu'elle fond par le beau temps, et qu’il ne reste plus que 


quelques taches neigeuses sur le sol des campagnes, ces 
petits amas de neige, qui ont à peine quelques pouces 
d'épaisseur , présentent la constitution suivante : 

La surface est formée de neige grenue et friable; au- 
dessous se trouve encore de la neige grenue, mais elle 
offre déjà une certaine tenacité et elle adhère avec force 
à une troisième couche qui n’est autre chose que de la 
glace, dont l'épaisseur a souvent à peine quelques li- 
gnes. La résistance que cette mince couche de glace op- 
pose à la rupture, est parfois si faible que le poids d’un 
homme qui marche est suffisant pour la briser. Ce second 
fait me paraît susceptible de recevoir la même explica- 
tion que celui des stalactites. 

Plusieurs corps solides peuvent changer de forme 
cristalline, ou prendre une autre constitution molécu- 
laire sans passer par l'état fluide. Les molécules éprou- 
vent un déplacement lent; elles roulent les unes autour 
des autres et se groupent d’une autre manière; c’est ainsi 
que le sucre d'orge passe à l’état grenu et que l'arrago- 
nite change de forme cristalline, et se transforme peut-être 
en spath, par une simple élévation de température (‘). 


(*) Beudant, minéralogie, tome 1, page 207. 


— 274 — 

Nous voyons aussi dans les phénomènes de la trempe 
et du recuit, que plusieurs corps tels que l'acier, le 
verre, le bronze, sont modifiés dans leur structure in- 
time. La neige a-t-elle aussi cette propriété, c’est-à-dire, 
les cristaux neigeux subissent-ils par le seul fait d’une 
variation de température des changemens dans leurs for- 
mes? c'est ce qu'on ne sait pas; mais il me semble que 
les deux faits que je viens de rapporter, indiquent que 
ces changemens de forme cristalline, proviennent d'une 
oblitération des cristaux, due à des fusions et congéla- 
tions successives. Quelques observations faites sur les 
transformations du givre nous en fourniront une nou- 
velle preuve. 

Le givre, comme on le sait , se fixe sur les branches 
d'arbres et les objets déliés en cristaux fibreux, placés sui- 
vant des plans quelconques qui dépendent en général de 
la direction du vent qui règne (!) pendant que le brouil- 
lard le dépose. Son poids n’en détermine pas la chute, 
parce que les parties de la neige adhérent entre elles et 
avec l’objet qui les portent: mais ce qui est fort remar- 
quable, c’est que le givre ainsi suspendu subit, par les va- 
riations de température voisine de zéro, des modifica- 
tions de structure en vertu desquelles il passe de l'état de 
neige fibreuse à celui de neige grenue, et enfin il se 
transforme en glace parfaitement limpide et transparente. 

J'ai fait ces observations à la fin de cet hiver, pendant 
lequel les brouillards qui ont régné si longtemps, ont 
laissé sur tous les objets terrestres une abondante couche 


(‘)Le dépôt de givre se fait toujours sur le côté des objets, frappé par le 
vent, et non pas sur le côté abrité. Voir mes notes dans les Actes de la So- 
ciété Helvétique des Sciences Naturelles, 4842 p. 205 et 1843, p. 291. 


— 215 — 

de givre. Dans l’origine le givre se présentait en lames 
soyeuses ; plus tard il est devenu grenu et grossier; il 
avait alors un aspect d'un gris sale, il se brisait aisé— 
ment entre les doigts et se détachait facilement des ob- 
jets qui le portaient. Plus tard enfin, à mesure que la 
température s’est relevée, que les brouillards se sont re- 
tirés et sont restés suspendus sur le flanc des montagnes, 
le givre a disparu dans les parties basses, le long des 
bords du lac, mais lorsqu'on s'élevait sur le côteau on le 
retrouvait à l’état de lames glacées qui avaient conservé 
la même position que le givre neigeux d'où elles prove- 
naient. En recevant la lumière du soleil, elles brillaient 
de mille couleurs; c'était d’un effet merveilleux. 

Le givre avait subi ces diverses transformations sans 
changer de place et sans se détacher des objets qui lui ser- 
vaient de support; il n'avait pas cédé à l’action de son 
poids; les lames glacées avaient cependant un volume 
moins considérable, et moins de largeur que les lames pri- 
mitives de neige. Cet état particulier du givre ne régnait 
que dans une région étroite, au-dessus de laquelle le givre 
avait encore son aspect grenu. À une hauteur plus 
grande on retrouvait le givre dans son état primitif. 

Cette position du givre glacé et grenu , à la limitedu 
givre neigeux nous montre de la manière la plus évi- 
dente, que la neige ne prend la forme grenue ou de 
glace compacte , que près de son point de fusion, et que 
la neige possède dans cette circonstance une propriété 
cristallographique ou moléculaire fort remarquable, qui, 
si je ne me trompe, n’a pas encore été remarquée au 
même degré dans d’autres corps. 

Il résulte des observations ci-dessus, celle des stalac- 


— 276 — 


tites, celle des taches neigeuses et celle du givre glacé: 

1° Que dans certains cas la neige farineuse passe à 
l'état de neige grenue et de ce dernier état à celui de 
glace compacte. 

29 Que ces transformations s’opérent sous l’influence 
de variations de température dans le voisinage de la 
glace fondante, de manière qu'il y ait successivement li-' 
quéfaction partielle et congélation. 

Quand la fonte de la neige a lieu par un dégel, sous 
l'action d’une température constamment au-dessus de 
zéro, ou sous celle de pluies chaudes, la neige disparaît 
sans passer par ces diverses formes. 

Une conséquence importante qu'on peut tirer de ces faits, 
c'est que partout où nous trouvons de la neige grenue 
ou de la glace provenant d’une masse de neige, il faut 
en conclure qu’à l’époque où la transformation a eu lieu, 
la température de la masse glacée s’est élevée et qu'au 
terme de ces transformations , la température est zéro. 

Les observations précédentes s'appliquent de la ma- 
nière la plus évidente, au grand phénomène des glaciers 
dont la structure rappelle celle des stalactites, des taches 
neigeuses et du givre grenu passant à l'état de glace com- 
pacte. Cependant, dans l'application que nous allons faire à 
leur théorie des principes auxquels nous sommes arrivés 
tout à l'heure, nous n'oublions pas qu'ici les phénomènes 
se passent en grand et sous l'influence de circonstances 
très-variées. Nous sentons que nous devons être très- 
prudent dans les déductions et nous voudrions que l'on. 
considerât les conséquences que nous allons tirer comme 
des prévisions de la théorie plutôt que comme l’expres- 
sion rigoureuse des faits. 


| 


— 2711 — 

Dans les considérations qui suivent, nous donnerons 
d’une manière générale, le nom de glacier à toutes les masses 
glacées qui résultent de la transformation de la neige. Ainsi 
le névé aussi bien que la glace plus ou moins compacte 
sera pour nous un glacier. 

On trouve dans la partie supérieure des glaciers la 
neige grenue ou le névé, et la glace plus ou moins com- 
pacte dans leur partie inférieure. 

L'étude des glaciers nous apprend qu'ils sont le ré- 
sultat de la transformation de la neige en névé, et du 
névé en glace plus ou moins compacte. Nous en conclu- 
rons immédiatement qu'ils se produisent sous l'influence 
d’une température voisine de zéro, et que tous les chan- 
 gemens qu'ils subissent s’accomplissent, en totalité, pen- 
dant la saison chaude, à l’époque de la fonte. La chaleur 
est donc la cause principale de la formation des glaciers 
et la source des faits nombreux qu'ils présentent. 

Dés-lors la connaissance des propriétés calorifiques de 
l'eau , dans ses divers états solide, liquide, gazeux, est 
de la plus haute importance pour la théorie des glaciers. 
Lorsqu'on s'occupe des glaciers en les considérant dans 
leur masse, il suffit de tenir compte des propriétés de 
l'eau solide et liquide. Pour les phénomènes superficiels , 
il faut, de plus, avoir égard aux lois de son état élastique. 

L'eau liquide se solidifie généralement à zéro, mais 
quand elle est pure, en repos, et qu’elle est renfermée dans 
des vases à surface polie, elle reste liquide bien au-des- 
sous de cette température. 

La glace fond toujours au même degré de chaleur; 
c'est le point de glace fondante, le zéro de nos thermomé- 
| tres: la température de la glace n’est par conséquent ja- 
| mais supérieure à zéro, mais elle peut comme dans tous 


Il 


— 218 — 


les autres corps s'abaisser à un degré quelconque au- 
dessous. 

Nous prendrons 0,9 (‘) pour la densité de la glace et 
79, (©) pour sa chaleur latente ; sa conducibilité et sa dia- 
thermanéité, qui sont certainement srès-faibles, sont in- 
connues. Nous admettons que sa capacité, qu'aucune ex- 
périence n’a fixée, est égale à celle de l’eau. 

Cela posé, nous examinerons le glacier dans deux cir- 
constances différentes, celle où il a une température in- 
férieure à la température du milieu ambiant, et celle où 
sa température est supérieure. 

Prenver cas: la masse du glacier a une température 
inférieure à celle de l'air. 

Il existe alors trois causes de réchauffement pour le 
glacier. 
= {0 La conducibilité ; la couche d'air en contact avec la 
surface glacée lui donne sa chaleur et celle-ci se transmet 
peu-à-peu dans l'intérieur. 

20 La diathermanëéité ; la chaleur extérieure, sous 
forme rayonnante, pénètre à une certaine profondeur 
dans la glace. 

Ces deux modes de réchauffement appartiennent à 
tous les corps solides, ils ne produisent d'effets sensibles 
que près de la surface, ce n’est qu'après un temps consi- 
dérable, qu'ils peuvent avoir de l'influence à une pro- 
fondeur notable. On peut juger de leur peu d'action en 
remarquant que pour notre lâtitude, il ne faut pas moins 
de six mois pour que le froid de l'hiver, ou la chaleur 


({) Annuaire du bureau des longitudes. 
(?) D’après MM. de la Provostaye et Desains. Annales chimique et phy- 
sique , 3° série, tome VIII, page 5, et Regnault, ibid., page 19. 


F4 


— 279 — 


de l'été se fassent sentir à la profondeur de vingt-quatre 
pieds, et qu’à quatre-vingts pieds, les variations annuelles 
de température sont tout-à-fait insensibles. Remarquons 
néanmoins que dans ce cas, la diathermanéité du sol ne 
joue aucun rôle, puisque la terre ne possède pas cette 
propriété. 

3° La seule cause de réchauffement du glacier réelle- 
ment énergique, résulte de l'introduction de l’eau dans 
sa masse, ce qui a lieu lorsque la température extérieure 
est au-dessus de zéro; car alors il y a fonte à la surface 
du glacier. 

Un exemple mettra en pleine évidence , l'efficacité de 
ce moyen de réchauffement. 

Supposons un glacier couvert -d’eau, cette eau sera 
nécessairement à zéro, ainsi que la surface de la glace, 
à mesure que l’eau descendra dans l’intérieur du glacier, 
elle se congélera dans les points où la température est 
au-dessous de zéro. Cette congélation, marquera un 
nouveau degré dans le développement du glacier: s’il 
est à l'origine de sa formation , et qu’il ne consiste encore 
qu'en une masse neigeuse, la neige passera à l’état de 
névé ; s'il est déjà arrivé à ce dernier état, le névé de- 
viendra de la glace plus ou moins compacte. Dans tous 
les cas, le glacier augmente de poids et de volume. Ces 
transformations se poursuivront ainsi de proche en proche 
dans toute l'étendue du glacier, jusqu'à ce que par une 
conséquence de ces congélations successives, la masse 
entière du glacier soit arrivée à zéro , alors, l’eau l'im- 
bibera en totalité et sortira enfin par sa partie inférieure. 

La chaleur latente, dégagée par un mètre cube d’eau 
qui se congèle est égale à 79000 calories ; elle est suf- 


— 280 — 
fisante pour élever de un degré quatre-vingt-huit mètres 
cubes de glace. 

Ce qui caractérise ce mode de réchauffement, c’est 
son action sur l'intérieur même du glacier à des pro- 
fondeurs quelconques, tandis que les deux premières 
causes cilées ne se font sentir qu'à la surface et n’agissent 
que peu ou même pas du tout dans la profondeur. 

Second cas : le glacier a une température supérieure à 
celle du milieu ambiant. 

Puisque le glacier n’a jamais une température supé- 
rieure à la glace fondante, l’air sera nécessairement au— 
dessous de zéro. Dans cette circonstance le glacier ne 
peut que se refroidir. Nous remarquerons qu'il existe 
deux cau:es de refroidissement, correspondant aux deux | 
premières causes de réchauffement qui ont été indiquées 
dans le cas précédent, ce sont la conducibilité et le rayon- 
nement intérieur ou la diathermanéité ; mais comme on 
l'a dit, ces causes sont très-peu puissantes, et la tempé- 
rature du glacier restera constante à une faible profon- 
deur , à moins que le temps pendant lequel s'exerce l'ac-. 
tion refroidissante ne soit extrêmement long (*). i 


() Depuis la rédaction de ce mémoire, j'ai reconnu , en réfléchissant 
sur les causes des variations de température de l’intérieur des gla- 
ciers, que l'introduction de l’air dans le glacier devait agir , aussi 
pour modifier sa température. Lorsque le glacier n’est pas plein d’eau 
et qu’il est poreux, il existe un mouvement de l'air qui le porte soit 
de l'intérieur à l’extérieur, quand le baromètre descend; soit de 
Pextérieur à l’intérieur, quand le baromètre monte. De plus, quand 
le glacier a une grande étendue et qu’il occupe des niveaux très-dif= 
férents , il s’établit des courants d’air tantôt descendants, tantôt ascen= 
dants; or ces courants, qui sont dus à des différences de pression at 
mosphérique, peuvent aussi s’établir, quoique très-faiblement, dans lin 


— 281 — 


Pour résumer cette discussion nous dirons, qu'il existe, 
quant à l'intérieur du glacier, trois causes de variations 
de température, dont deux agissent tantôt dans un sens 
tantôt dans l’autre ; ce sont la conducibilité et la diather- 
manéité, la troisième, est due à la chaleur latente que dé- 
gage l'eau en se congélant. Cette dernière agit toujours dans 
le sens du réchauffement ; elle diffère encore des autres 
en ce que son action s'étend à toute la masse du glacier 
et jusqu'aux plus grandes profondeurs, tandis que les 
deux premières n'ont qu’une action superficielle, et sont 
peu énergiques. 

Nous conclurons de ces faits les propositions suivantes : 

1° Lorsqune masse de glace ou de neige est placée 
sous des conditions climatériques telles que la tempéra- 
ture superficielle s'élève par intervalles au point de fu- 
sion, les causes de rechauffement du glacier sont plus 
actives que les causes de refroidissement. 


térieur du glacier. Pour que ce mouvement ait lieu, les pores du gla- 
cier doivent être vides, (comme je l’ai dit tout à l’heure) ce qui n’ar- 
rive qu’en hiver et par les temps froids; d’où il résulte que cette 
cause de variation de température pour l’intérieur du glacier, est en 
général une cause de refroidissement. Cependant cette action est très- 
faible; car prenant les conditions les plus favorables; supposons le 
glacier à zéro et l’air à 20°, la capacité de l'air pour la chaleur 
étant égale à 0,27, il faudrait 155 mètres cubes d’air à 760" de force 
élastique, pour abaisser de 1° un seul mètre cube de glace. 

Si nous considérons la grande quantité d’air qui serait nécessaire pour 
refroidir le glacier d’une manière sensible , la résistance que le glacier 
oppose au mouvement de l’air dans son inférieur, et enfin la grandeur 
des variations de la pression atmosphérique, qui, à cette hauteur, est tou- 
jours plus petite que dans la plaine, on en intérera sans aucun doute, 
que cette cause refroidissante est très-limitée dans son action, et qu’elle 
| sera surtout très-faible pour ne pas dire nulle, dans les parties les plus 
compactes du glacier, c’est-à-dire dans les régions inférieures. 


— 282 — 

20 Les parties d’un glacier pénétrées d'eau à une grande 
profondeur sont à zéro, et se maintiennent à cette tempé- 
rature pendant toute l'année. Le froid de l'hiver, congèle 
le glacier dans tous les points de son pourtour extérieur 
et la glace acquérant par le froid une grande dureté ('), 
l'intérieur est contenu dans une enveloppe résistante, 
qui soude au sol le glacier par ses bords, et ne laisse à 
la masse entière qu’un mouvement très-faible de dilata- 
tion superficielle, due à la congélation lente de l'eau. Le 
glacier , à cette époque, est fermé. 

3° Dans ces mêmes points , le mouvement du glacier 
pendant l'été n'est point dû à la congélation de l’eau , (car 
elle ne peut avoir lieu, puisque nous admettons que le 
glacier est rempli d'eau, et par conséquent qu'il est à 
zéro) mais bien à l’action de la gravité qui fait descendre 
le long des pentes la masse spongieuse et pleine d’eau 
du glacier. 

4° Lorsque le glacier est ainsi arrivé à zéro dans sa 
masse , les froids intenses et prolongés des hivers longs 
et rigoureux n'abaissent pas sensiblement la tempéra- 
ture du glacier, qui d’ailleurs, pendant cette saison, est 
recouvert d'une couche préservatrice de neige; dès-lors, 
la chaleur de l’été sera presque exclusivement employée 
à fondre la glace, et à faire disparaître le glacier. 

L'étendue des glaciers, et leur prolongement dans les 


(!) On construisit à Saint-Pétersbourg, en 1740, des canons de 
quatre pouces d’épaisseur et des mortiers en glace d’un calibre égal 
à ceux de bronze; on chargea les canons de douze onces de poudre 
chacun; l’explosion fut très-fortes le boulet de l’un d’eux perça une 
planche épaisse de deux pouces, et aucun de ces canons ne creva. 
Près de zéro la glace est tendre, friable et poreuse. 


— 283 — 


vallées dépend de plusieurs conditions, mais les réflexions 
précédentes nous font voir que la limite inférieure des 
glaciers peut être placée dans des points dont la tempé- 
rature moyenne diffère notablement de zéro; car, ainsi 
que je viens de le dire, le froid de l'hiver qui abaisse 
beaucoup la température moyenne, n’a que peu d’in- 
fluence sur les glaciers. Dans les pays où les hivers sont 
longs et froids, la limite inférieure des neiges éternel- 
les (1) correspond à des points qui ont une température 
moyenne beaucoup plus basse, que dans les localités où 
cette circonstance ne se présente pas. C’est ainsi que nous 
expliquerons ce fait fourni par l'observation, que, dans 
les hautes latitudes , les neiges éternelles se terminent en 
des points où la température est de 2°, 30, 40, 50, et 
même 6° au-dessous de zéro, Réciproquement, si les hi- 
vers, quoique longs, ont une température près de zéro 
et que l'atmosphère soit humide, (ce qui arrive fréquem- 
ment dans nos climats) les neiges sont abondantes et ne 
disparaissent pas en totalité par les chaleurs de l'été, à 
moins qu'elles ne soient intenses et prolongées. Les gla- 
ciers se maintiennent alors dans des points dont la tem- 


_pérature moyenne est de plusieurs degrés au - dessus 


de la glace fondante. On comprend également que la 
configuration du sol, aussi bien que les circonstances 
météorologiques, sont plus ou moins favorables à la pro- 
longation ou au retrait des glaciers. Je reviendrai bientôt 
sur ce sujet. 

Les observations diverses que nous venons de faire, 


(*) Cette limite n’est pas la même que celle des glaciers; mais il 
existe une liaison entre ces deux limites, qui fait que lorsque l’une 
s'élève , il en est en général de même de l’autre. 

24 


— 284 — 

sont relatives à la partie du glacier qui est à zéro. Dans 
cet état, le glacier ne subit pas d’autres modifications 
que celles qui résultent de son mouvement; il ne s’accroit 
plus, si ce n'est près de la surface par la congélation de 
l'eau. Il est arrivé à la fin de son développement, 1l ne 
peut que fondre. Les glaciers disparaîtraient par consé- 
quent bientôt, s'il n’y avait pas une cause constante de 
leur production, dans les neiges qui s'accumulent en 
grande quantité dans les parties supérieures des mon-— 
tagnes et dans les vallées. Ces neiges ont généralement 
une température très-basse, et à mesure que l’eau, résul- 
tant de la fonte superficielle descend dans l'intérieur, 
elle se congèle en donnant naissance au névé et à la 
glace. 

Les phénomènes qui ont lieu dans cette fpartie du 
glacier sont beaucoup plus complexes que ceux que nous 
avons analysés précédemment, car il est évident que la 
formation et la constitution des glaciers dépendent d’un 
grand nombre de circonstances. La quantité de neige tom- 
bée, sa température, la durée plus ou moins grande des 
causes refroidissantes et réchauffantes, leur intensité, les 
alternatives plus ou moins nombreuses de chaleur et de 
froid, la sécheresse et l'humidité de l'air, la latitude, la 
hauteur au-dessus de la mer, la puissance des chaînes de 
montagnes, leur élévation, leur configuration, les vents 
régnans et l’époque à laquelle ils soufflent : tous ces élé- 
mens et plusieurs autres, sans doute, ont de l'importance 
dans cette question, et agissent sur la formation, l'étendue 
et même la structure des glaciers. Si la neige, par exemple, 
a une température voisine de zéro, le glacier sera beaucoup 
moins compacte; il sera friable et présentera peu de soli- 


— 285 — 

dité; car l’eau qui pénètrera dans la masse neigeuse, élé- 
vera sa température à zéro, avant que les grains de névé 
se soient soudés les uns aux autres pour former de la 
glace compacte. C'est peut-être le cas des glaciers équa- 
toriaux ; si la neige a au contraire une température très- 
basse, la surface du glacier se consolidera rapidement, 
l'eau ne s'introduira que lentement et avec peine dans 
l'intérieur, le glacier sera moins homogène; ce sera le 
cas des hautes latitudes. 

Ce sont donc les latitudes moyennes, les zônes tempé- 
rées, qui me paraissent le plus avantageuses au dévelop- 
pement des glaciers. Remarquons enfin, que la neige ne 
tombe en grande quantité que par des températures voi- 
sines de zéro ; à 10° et au-dessous, l'atmosphère contient 
si peu d’eau, que les froids, même les plus intenses, n’en 
séparent que quelques particules glacées. Des brouillards 
sont souvent alors le seul effet qui résulte du froid, c’est 
le phénomène que nous présentent les zônes glaciales. 
D'autre part, la quantité d'eau contenue dans l'atmosphère 
diminue rapidement avec la hauteur ; à des hauteurs con- 
sidérables, il ne tombe plus ni eau ni neige. Dans la zône 
torride, les neiges éternelles sont à une grande élévation ; 
ce qui est aussi une condition défavorable pour la forma- 
tion des glaciers. Nous concluons encore de ces considé— 
rations, que les zônes tempérées renferment le plus grand 
nombre de conditions favorables à l'existence des glaciers. 
Il en est de même des climats humides et maritimes, comme 
nous l’avons déjà dit et comme le prouvent les glaces po- 
laires de l’hémisphère austral. 

L'étude des glaciers a pris un intérêt bien grand, de- 
puis que, par les recherches faites sur le grand phéno- 


— 286 — 
méne erratique, on est arrivé à penser que les glaciers 
ont eu, à une certaine époque, une étendue prodigieuse. 
Quelles sont les conditions climatériques qui ont été 
réunies pour amener ce résultat? Telle est la question 
que la connaissance des conditions d'existence des gla- 
ciers est appelée à résoudre. 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DB MEDIA UESERL 


te 0 © © em—— 


Mémoire hygiénique sur la dorure au feu des pièces de mon- 
tres dans le canton de Neuchâtel; par le D' Borel, M. 


D. P., lu dans les séances du 20 novembre et du 4 dé- 
cembre 1844. 


Notre gouvernement a été informé , que des cas graves 
de tremblement mercuriel avaient eu lieu assez fréquem- 
ment en 1841 et 1842 dans plusieurs ateliers de dorure 
au feu des montagnes de notre pays. Cette circonstance 
l'a engagé à consulter à ce sujet la commission de santé 
attachée au département de l'intérieur, et sur la propo- 
sition de celle-ci, il a nommé un comité de trois membres 
pour faire une enquête hygiénique sur l'industrie de la 
dorure au feu appliquée à la fabrique d'horlogerie de nos 
Montagnes. bri9 

Ce,comité composé de Messieurs Ladame, professeur 
de physique et chimie à Neuchâtel , Olivier Quartier, 
négociant en horlogerie au Locle, et Borel D' en mé- 
decine, médecin du Roi et rapporteur, a été particulié- 
rement chargé : 1° De visiter tous les ateliers de dorure 
au mercure actuellement existant dans les juridictions 


29 


— 288 — 


du Locle, de la Chaux-de-Fonds, des Ponts et des Bre- 
nets. De s'assurer notamment : a) Si l'appareil imaginé 
par. M. Darcet (ou tout autre appareil construit d’après 
les principes de ce savant, y était en usage ou non. b) Si 
le canal d'évaporation des vapeurs mercurielles était isolé, 
ou s'il était commun avec d’autres conduits de chambre 
ou de cuisine. c) Si les ouvriers mangeaient ou cou- 
chaïent dans les chambres-où se font les différentes opé- 
rations de la dorure. d) Depuis combien de temps cha- 
cun des ouvriers exerçait la profession de doreur..e) Enfin, 
quel était leur état de santé. 2° De faire un rapport au 
conseil d'Etat sur cette enquête. 3° De soumettre à sa 
sanction un règlement, pour prévenir autant que pos- 
sible, les dangers de la dorure, et auquel tous les do- 
reurs seraient tenus de se conformer. Le comité d’en- 
quête a consacré cinq jours à visiter les ateliers de dorure 
dans les juridictions de nos montagnes. Les notes que 
nous avons recueillies touchant les observations faites 
directement par nous-mêmes, et sur les renseignemens qui 
nous ont êté fournis par les doreurs, ont été prises dans 
les ateliers. mêmes et transcrites sur place dans un re- 
gistre, d'après un plan que nous nous étions tracé d’a- 
vance, afin de n'omettre aucun objet important. 

J'ai pensé que notre société des sciences naturelles en- 
tendrait peut-être avec intérêt les résultats de l'enquête 
dont il s’agit, et dont les détails ont été soumis au Con- 
seil. d'Etat. Le comité d'enquête a eu connaissance de 
63 ateliers répartis comme suit : 


Cu 


28 dans la juridiction du Locle. 
30 dans celle de la Chaux-de-Fonds. 
3 dans celle des Ponts. 
2 dans celle des Brenets. 
763 (). De ce nombre d'ateliers, nous n'avons pu en vi- 
siter que 61 , à cause de l'absence des propriétaires. 


Tous ces ateliers étaient exclusivement occupés à la 


dorure des petites pièces en laiton destinées aux montres. 


Dans aucun on ne dorait de grandes pièces en bronze, 
comme ornemens de pendule ou autres objets de ce genre, 
La dorure au mat n'avait lieu que dans deux ateliers de 


la Chaux-de-Fonds, ateliers où l’on donnait aussi aux 


objets dorés les teintes d'or moulu, d'or rouge, etc (?).° 
La dorure au feu se compose en général d'une suite 
d'opérations qu'il est nécessaire de rappeler ici, en peu 
de mots, pour la parfaite intelligence de ce qui va suivre. 
Pour dorer le laïton ou le bronze au feu , au moyen du 
mercure , les doreurs commencent par exposer à l’action 
de la chaleur les pièces destinées à la dorure; cest ce 
qu'on appelle l'opération du recuit. Ces pièces ainsi re- 
cuites, sont ensuite soumises à l’action des acides sulfu- 
rique et nitrique; par celte opération, qui a reçu le nom 
de dérochage ou décapage , on leur enlève la légère couche 
d'oxide métallique dont elles se sont recouvertes par la 
première opération. Cela fait, on applique sur elles Ya- 
malgame d'or et de mercure, après les avoir préalable- 


. () Nous avons appris depuis, qu’il existait un ateliér de doreur peu con- 


-sidérable x la Sagne et deux aux Planchettes. ! 


(©) Depuis notre visite des ateliers, nous avons été inférmés qu’il yayait 
à la Chaux-de-Fonds un individu qui s’occupait à la dorure des grandes 
pièces , des bronzes, etc. 


: — 290 — 

ment enduites d'une solution de nitrate acide de mercure, 
ou en délayant l'amalgame avec cette liqueur mercurielle. 
Les pièces recouvertes d'amalgame, sont ensuite expo- 
sées à l’action du feu, qui fait volatiliser le mercure ; c’est 
ce que les doreurs appellent passer au feu. Après cela, 
elles sont mises en couleur ; quand la mise en couleur a eu 
lieu, on les lave, puis on les frotte avec un pinceau en 
fil de laiton, auquel on donne le nom de gratte-bosse, 
trempé dans de l’eau acidulée d'acide nitrique ou de vi- 
naigre, ou d'eau dans laquelle ont macéré ou euit des 
marons d'Inde räâpés, ou d’autres substances encore. Cette 
dernière manipulation, qui s'appelle le gratte-bossage, ter- 
mine les différentes opérations de la dorure au feu. 

Voici quelle est en général la manière dont les doreurs 
de nos montagnes procèdent à ces diverses opérations, 
autant que nous en avons pu juger, par Ce que nous avons 
observé nous-mêmes, et par les renseignemens. qu'ils 
nous ont donnés. 

Du recuit. 


Pour cette opération, à laquelle plusieurs d’entr'eux 
donnent le nom d'opération de détendre, nos doreurs pla- 
cent les pièces de laiton, les uns sur des charbons allu- 
més, les autres simplement sur des braises couvertes de 
cendres. Au bout d'un temps plus ou moins long, ils les 
retirent du feu, au moyen de longues pinces qui avaient 
déjà servi à les y placer. Puis, quand les pièces recuites 
sont refroidies, ils les mettent dans l’eau et les séchent 
ensuite, ou les essuyent avec des chiffons. Les très-pe- 
tites pièces de montres, telles que les balanciers, ne sont 
pas soumises à l'opération du recuit par plusieurs do- 


— 291 — 
reurs; les autres doreurs ne leur donnent qu'un très-lé- 
ger recuit. 

Dans. l'opération dont il s'agit, lorsque le laiton est 
porté à une haute température, une partie de l'alliage 
s'oxide à sa surface, et il se volatilise des oxides de cuivre 
et de zinc. Ces émanations jointes aux gas qui résultent 
de la combustion du charbon, peuvent avoir une in- 
fluence très-nuisible sur la santé , en portant une impres- 
sion délétère sur les organes de la respiration, si elles ne 
sont pas entraînées promptement au dehors par un fort 
courant d'air. Aussi, le recuit devrait-il toujours être pra- 
tiqué au foyer de la hotte vitrée des appareils à passer 
au feu. Cette mesure de précaution est mise en usage 
par un assez grand nombre de doreurs de nos monta— 
gnes. Elle est en vigueur dans 36 ateliers dont 18 au 
Locle, 17 à la Chaux-de-Fonds et 1 aux Ponts. (Voy. 
le tableau C annexé à ce mémoire). Elle devrait être obli- 
gatoire pour tous les doreurs, et elle l’est devenue derniè- 
rement par l'ordonnance de police rendue par notre gou- 
vernement. Dans les 23 autres ateliers où cette opération 
se fait, on la pratique au foyer de la cuisine et même 
dans des chambres où l’on couche et où l’on prend les 
repas; beaucoup de doreurs s’imaginant sans raison qu'elle 
n'a aucune influence fàcheuse sur la santé. 


Opération du dérochage ou décapage. 


Le dérachage ou décapage des pièces à dorer ne se fait 
actuellement, d’une manière générale, que dans un petit 
nombre d'ateliers de nos montagnes. Cette opération, qui 
était autrefois très en usage, ne paraît pas indispensable 
pour la dorure de toutes les petites pièces des montres. 


— 292 — 
Beaucoup de doreurs n’y ont recours que pour les pièces 
de laiton un peu grandes, comme les cuvettes et les plaz 
tinies, se bornant à décaper les petites pièces avéc le nitrate 
acide de mercure après le recuit, à les blanchir comme îls 
disent. Nos doreurs donnent à l'opération dent il s’agit le 
nom d'avivage. Dans aucun de leurs ateliers, on n’em— 
ploie l'acide sulfurique pour cette opération. Elle se fait 
en plongeant dans l’eau forte du commercé un peu af- 
faiblie d’eau, les pièces qui ont été recuites, ou bien en les 
frottant avec un pinceau imbibé de cet acide (1). 
L'opération du décapage par l'acide nitrique est très- 
dangereuse pour la santé. Elle donne lieu à un dégage— 
ment considérable de vapeurs nitreuses , lesquelles affec- 
tent fortement les poumons lorsqu'elle est faite sans pré- 
caution, et qui ont à la longue l'influence la plus 
pernicieuse sur ces organes, et favorisent singulièrement 
le développement de la phthisie pulmonaire. Nos doreurs 
connaissent fort bien les dangers qui accompagnent cette 
opération ; aussi, dans presque tous les ateliers où elle 
se fait, ont-ils la précaution de la pratiquer sous la hotte 
vitrée de l'appareil où ils passent au feu. Lorsque le cou- 
rant ascendant y est très-bon, et que les vapeurs ni- 
treuses sont ainsi promptement entraînées au dehors par 
le canal d'évaporation, l'opération cesse d’avoir des in- 
convéniens pour la santé. 


(*) Dans les ateliers de notre pays, pour soumettre les petites pièces des 
montres aux différentes opérations de la dorure, on en fixe un certain 
nombre sur de petites plaques carrées en laiton, percées de trous assez 
rapprochés , afin d’opérer sur une certaine quantité de ces pièces à la fois, 
et d'accélérer ainsi le travail. Dans un atelier que jai visité à Genève! et 
où l’on tenait à dorer avec beaucoup de soin, toutes les pièces, mème les plus 
petites , étaient manutentées isolément, et l’on ne s’y servait pas du petit 
appareil dont il s’agit. 


— 293 — 


Préparation du nitrate acide de mercure vulgairement appelé 
GAZ par les doreurs, et de son application. 


Les doreurs de notre pays préparent leur nitrate acide 
de mercure à froid. Ils mettent le plus ordinairement dans 
une phiole, deux onces environ d'acide nitrique du com- 
merce et une once de mercure ; lorsque l’action de l'acide 
sur le métal est terminée, ils étendent la liqueur d’eau de 
pluie. Nos doreurs auraient une liqueur mercurielle beau- 
coup meilleure, et moins susceptible de donner lieu au 
dégagement de vapeurs nitreuses, s'ils la préparaient 
suivant les sages conseils que leur a donnés Darcet. Les 
proportions d'acide et de mercure indiquées par ce savant 
sont celles-ci : 

Acide nitrique pur à 36° 41 parties. 

Mercure purifié  . . 10 parties. 

On ajoute à la dissolution lorsqu'elle est terminée 50 à 
96 parties d'eau distillée ou d’eau de pluie (Darcet. Art 
de dorer le bronze. p. 36). 

La préparation du nitrate acide de mercure donne lieu 
à un dégagement considérable de vapeurs nitreuses , qui 
portent de graves atteintes aux organes de la respira- 
tion, lorsqu'elles sont respirées. Tous les doreurs con- 
naissent les inconvéniens attachés à cette opération, qu'ils 
regardent avec raison comme une des plus dangereuses 
de leur profession. La plupart d'entr'eux font cette pré- 
paration sous la hotte vitrée et au foyer de leur appareil 
à passer au feu; quelques-uns la font à l'air libre sans 
appareil préservateur ; dans le plus petit nombre des ate- 
hers, elle a lieu sous le manteau de la cheminée de la 
cuisine, ou d'une cheminée adhoc, sans appareil préser- 
valeur. 


— 294 — 

L'application du nitrate acide de mercure sur les pe- 
ites pièces des montres, précède toujours celle de l’amal- 
game d'or et de mercure. Les doreurs de notre pays lui 
donnent le nom d'opération de blanchir, sans doute à cause 
de la couleur que prennent les pièces qui y sont sou- 
mises. Elle ne se fait pas de la même manière dans tous 
les ateliers. Dans les uns, on blanchit (c’est l'expression 
consacrée par les doreurs), on blanchit les pièces à do- 
rer, en les plongeant dans le nitrate acide de mercure 
étendu d’eau de pluie; dans les autres, on les frotte avec 
un pinceau imbibé de cette liqueur. Dans quelques ate- 
liers, et surtout à la Chaux-de-Fonds, nous avons vu 
appliquer la liqueur mercurielle avec l'instrument en cuivre 
amalgamé, dont on se sert pour l'application de l'amal- 
game d'or et de mercure. — L'opération de blanchir ‘est 
infiniment moins nuisible à la santé que celle du déca- 
page par l'acide nitrique, en ce qu’elle ne donne lieu 
qu'à un dégagement très-peu considérable de vapeurs ni- 
treuses, lorsque le nitrate acide de mercure est bien pré- 
paré, suivant le procédé de Darcet; mais, si cette liqueur 
est mal préparée, avec une dose trop faible de mercure 
et avec de l'acide nitrique impur et contenant beaucoup 
d'acide sulfurique ou d'acide hydrochlorique, son emploi 
est presque aussi dangereux que celui de l'acide nitrique. 
Cependant, lors même qu’elle est bien préparée, elle peut 
avoir à la longue une influence fâcheuse sur les organes 
de la respiration , lorsque l'opération de blanchir est faite 
sans précaution, comme nous l'avons vu exécuter dans 
un atelier de la Chaux-de-Fonds. La plupart de nos do- 
reurs font cette opération sous la hotte vitrée de leur lan- 
terne; de cette manière, elle ne peut en aucune façon 
compromettre la santé. 


De la préparation de l'amalgame d'or et de mercure et de 
son application. 


La préparation de l’amalgame d'or et de mercure se 
fait en mêlant, dans ün creuset chauffé au rouge, et 
placé sur des charbons ardens, une certaine quantité 
d'or laminé coupé en petits morceaux, et de mercure. 
Nos doreurs font ordinairement ce mélange dans la pro- 
portion de l'or d’un ducat de Hollande pour une once de 
mercure coulant; c'est-à-dire qu'ils emploient à peu près 
une partie d'or et 8 de mercure. Cette quantité d'amal- 
game sert à couvrir les pièces de 6 à 18 montres, sui— 
vant l’épaisseur de la couche d'or qu'on leur destine. 
Lorsque la combinaison est opérée, on verse l’amalgame 
dans de l’eau, et on le lave en exprimant le mercure ex- 
cédant qui peut s’en séparer (!). Pendant que les deux 


métaux se combinent dans le creuset, l’action de la cha- 


leur donne lieu à une évaporation considérable de mer- 
cure, ce qui rend cette préparalion très-nuisible à la santé. 
Lorsque ces vapeurs mercurielles sont respirées, ou lors- 
qu'elles sont simplement en contact avec la surface du 
corps, elles produisent les plus fàâcheux effets, et donnent 
lieu très souvent au tremblement convulsif et aux autres 


Symptômes de l’intoxication mercurielle. Pour prévenir 


ces graves accidens, il est nécessaire que la dissolution 
» . . 
de l'or dans le mercure se fasse sous un appareil à hotte 


(”) Pour éviter toute perte de mercure et toute cause d’insalubrité , Tin- 
gry a proposé de préparer l’amalgame d’or dans une phiole ou dans un petit 
matras (Mém. de la soc. établie à Genève pour Fencouragement des 


arts T. 1). 


— 296 — 


vitrée, dont le tirage soit trés-bon, et assez fort pour 
entraîner promptement et en totalité les vapeurs mercu- 
rielles par le canal qui doit leur donner issue, de ma- 
nière qu'il ne puisse pas s’en répandre dans l'air que les 
ouvriers respirent. On conçoit par ce qui vient d'être dit, 
les dangers attachés à la préparation de l'amalgame d'or 
et de mercure, lorsqu'elle se fait sous le manteau d’une 
cheminée de cuisine. Exécutée sous des. conduits com- 
muniquant avec d’autres cheminées de la maison, cette 
préparation n'offre pas moins de dangers. Les Annales 
d'hygiène publique et de médecine légale ont fait connaître 
un fait remarquable rapporté par Darcet, où toute une 
famille d'artisans fut affectée d'intoxication mercurielle 
très-grave , causée par les vapeurs mercurielles échappées 
de l'atelier d’un doreur, par un conduit s’ouvrant dans 
la cheminée où aboutissait le canal du poële qui servait 
à chauffer la chambre de l'artisan ('). 

La préparation dont il s’agit, faite à l'air libre, sans 
précaution et trop près des lieux habités, peut égale- 
ment avoir des effets fâcheux. 

Le tableau D, annexé à ce mémoire, fait connaître les 
endroits où les doreurs de nos montagnes préparaient leur 
amalgame lorsque nous avons visité leurs ateliers. Dans 
35 ateliers, cette préparation s’exécutait au foyer de l’ap- 
pareil à passer au feu, sous la hotte vitrée; dans 15 ate- 
liers, elle se faisait sous le manteau de la cheminée de la 
cuisine du ménage; dans 6 autres, on y procédait sans 
appareil préservateur, sous des cheminées qui ne servaient 


(‘) Annales d'Hygiène publique et de Médecine légale (1836). Tom. 16, 


p. 54. 


— 297 — 
+ qu'à cet usage; enfin dans un seul atelier, cette combi- 
naïson avait lieu à l'air libre. — Un grand nombre des 


doreurs de notre pays, sinou tous, mêlent à leur or dissout 

» dans le mercure, une petite quantité d'une composition, 
que M. le professeur Ladame qui l’a analysée, a trouvée 
être un simple amalgame de cuivre. Ils emploient deux 

. amalgames de cuivre, qui ne paraissent presque pas 

_ différer entre eux, et auxquels ils donnent les noms d’a- 
malgame rouge et d’amalgame jaune. La plupart des 
ouvriers nous ont annoncé, que la quantité d'amalgame 
de cuivre qu'ils ajoutaient à leur or dissout, n'excédait 
pas la grosseur d’une lentille pour une once de celui-ci. 
L'application de l’amalgame d’or et de mercure sur les 
pièces qui viennent d’être blanchies, se fait dans les ate- 
liers de dorure de nos montagnes au moyen d'un petit 
instrument en cuivre rouge enduit de mercure, avec le- 
quel l’ouvrier prend l’amalgame et l’étend sur les pièces 
à dorer, en le délayant quelquelois dans la liqueur mer— 
curielle. 

La plupart de nos doreurs ne se servant que du nitrate 
acide de mercure, et non d'acide nitrique, pour faciliter 
l'application de l’amalgame d'or et de mercure, ils ne 
sont dans cette opération exposés à l'action d'aucun gaz 
délétére, pourvu toutefois, comme nous l'avons déjà dit, 
que la préparation de la liqueur mercurielle” soit bien 
faite. Le seul danger auquel ils soient exposés , est celui 
qui résulte du contact de leurs mains avec l'amalgame et 
avec la liqueur mercurielle. Les inconvéniens très-réels 
qui en résultent, et qui peuvent donner lieu à tous les 
symptômes de l’intoxication mercurielle, seraient consi- 

. dérablement diminués, et pour ainsi dire amihilés, si les 


doreurs faisaient usage de gants en peau de daim, ou 
mieux encore en taffetas gommé ou en peau de vessie: 
conseil que Tingry leur avait déjà donné, il y a plus de 
60 ans. Des gants en tissa imperméable pourraient aussi 
être employés avec succès. Malheureusement, il n’y a 
qu'un très-petit nombre de doreurs qui aient cette pré- 
caution, laquelle est également très-utile lorsqu'on com- . 
prime l’amalgame pour en séparer l'excédant de mercure, 
toutes les fois qu'on ne se sert pas pour cet effet d’une 
peau de daim, comme il serait à désirer que cela se fit 
toujours. 


Volatilisation du mercure, ou opération de passer au feu. 


On passe au feu de la manière suivante : Le doreur 
assis en fasse de son appareil, place avec des pinces al- 
longées la pièce ou l’ensemble de petites pièces couvertes 
d'amalgame d'or et de mercure, quelquefois sur des char- 
bons ardens, mais le plus habituellement sur des braises 
couvertes de cendres. Il l'échauffe graduellement, au de- 
gré de chaleur convenable, la retire du feu, la tourne et 
la retourne ; il la met ensuite dans la main gauche, la- 
quelle est munie d’un gant matelassé ('), d’un coussinet ou 
d’une étoffe de laine pliée en plusieurs doubles; puis, de 
la main droite, il frappe à petits coups , avec une brosse 
à poils plus ou moins longs, sur la pièce, afin d'y étendre 
uniformément l’amalgame. Il replace ensuite cette pièce 
sur le feu, la reprend encore et exécute ces différens 


(‘) Le petit matelas, qui sert à cet usage, devrait être doublé de taffetas 
gommé ou de peau de vessié, ce qui empécherait le mercure de pénétrer 
dans l’intérieur, et ne génerait en rien l’ouvrier. 


— 299 — 
mouvemens jusqu'à ce qu'elle ait acquis une couleur d'un 
jaune pâle, à laquelle le doreur reconnaît qu'elle a été 
suffisamment exposée au feu ; elle est alors mise à part 
pour subir d’autres opérations. 

Le passage au feu est de toutes les opérations de la 
dorure, celle qui altère le plus la santé des ouvriers, lors- 
qu’elle n’est pas faite avec des précautions suffisantes, pour 
que le mercure volatilisé par l’action de la chaleur, s’é- 
chappe promptement et en totalité par le canal qui doit 
lui donner issue, et lorsqu'il s’en répand dans l'air de 
V'atelier. L'usage de gants bien faits et aussi imperméa- 
bles que possible, est ici nécessaire pour prémunir la 
peau des mains contre l’action du mercure volatilisé. Les 
wapeurs mercurielles agissant sur la surface de la peau, 
et sur la membrane qui tapisse l’intérieur de la bouche 
et des organes pulmonaires, donnent lieu à la longue à 
des, accidens trés-graves. — Au bout d'un temps plus 
ou moins long, et en général subordonné à l’âge, à la 
constitution individuelle, et surtout à l'intensité des va- 
peurs mercurielles, les doreurs voient leur santé s’alté- 
rer; ils perdent leur coloration naturelle et prennent un 
teint blafard ou tirant sur le jaune. Cela leur arrive 
quelquefois après avoir passé au feu pendant quelques 
mois seulement. Par le progrès du temps, s'ils restent 
soumis à la même influence délétère, les mouvemens de 
leurs membres deviennent moins assurés et vacillans ; ils 


_y'éprouvent de l'agitation, puis ils sont pris d’un trem— 


blement plus. ou moins intense et plus où moins sou- 
tenu. Quelquelois, mais plus rarement, le tremblement 
mereuriel survient brusquement et sans symptômes pré- 
curseurs. Lorsque les doreurs ne cessent pas de passer 


— 300 — 


au feu dès qu'ils sont pris de tremblement, et qu'ils con- 
tinuent leur travail, le tremblement d’abord borné aux 
membres, ne tarde pas à devenir général et comme con- 
vulsif. La plupart des fonctions qui dépendent de l’ac- 
tion musculaire, ne s’exécutent alors que d’une manière 
imparfaite. Les malades ne peuvent ni marcher, ni se 
servir de leurs mains avec assurance. S'ils veulent porter 
un liquide à la bouche, il leur arrive parfois de ne pas 
y réussir, sans renverser le vase qu'ils tiennent; quel- 
quefois, ils ne parviennent pas mieux à porter directe- 
ment à la bouche les alimens solides, incapables qu'ils 
sont de diriger les mouvemens de leurs mains , en sorte 
qu'il arrive, qu'on est parfois obligé de leur donner à 
manger comme aux petits enfans; le mal continuant à 
faire des progrès, les doreurs perdent l'appétit, la masti- 
cation des alimens ne s'opère plus que d'une maniére in- 
complète, et les malades sont souvent pris d'aphonie. A 
une période plus avancée, l’action des vapeurs mercu- 
rielles continuant à agir sur ces malheureux, ils sont pris 
de défaillances momentanées, ils perdent le sommeil, 
leur. cerveau s’affecte, le délire s'empare d'eux, et ils 
peuvent succomber à leurs maux; ce qui cependant ar- 
rive très-raremement. — Le tremblement mercuriel se 
guérit en général assez facilement , par l'usage d’un trai- 
tement convenable, sur lequel il n'entre pas dans nos 
vues de nous arrêter. Il suffit quelquefois pour en être 
débarrassés ; qué les doreurs quittent pour un temps plus 
ou moins long les travaux de leur profession, et qu'ils 
abandonnent leur atelier. Mais une fois qu’ils en ont été 
atteints, ils conservent une très-grande disposition à con- 
tracter de nouveau cette maladie: plusieurs d’entr'eux 


— 301 — | 

sont obligés pour cette raison de renoncer totalement à 
l'exercice de leur profession. Il est aussi un petit nombre 
de doreurs, qui, une fois atteints de tremblement mercu- 
riel, s'en ressentent toute leur vie, et qui, après avoir 
cessé d'être exposés aux vapeurs du mercure , conservent 
néanmoins la disposition à être pris de tremblement, dès 
qu'ils se livrent à quelque fatigue de corps, où lorsqu'ils 
éprouvent des émotions de l'âme. — Nous avons eu pen- 
dant long-temps à l'hôpital de cette ville, en qualité 
-d'infirmière; une doreuse qui avait été atteinte du trem- 
blement convulsif:à différentes reprises, et qui avait dû 
quitter pour ce moûif l'exercice de sa profession: Cette 
femme, alors âgée d'une cinquantaine d'années, bien que 
guérie en apparence de son infirmité, était momentané— 
ment reprise de tremblement des membres et de la tête, 
dès qu'elle éprouvait quelque affection de l'âme, ou lors- 
qu'elle avait quelque fatigue corporelle à essuyer. Depuis 
plus de douze ans qu’elle a quitté le service de l'hôpital, 
-celte fächeuse disposition n’a fait qu'augmenter par le 
“progrès de l'âge, et actuellement cette femme ne peut 
‘presque se livrer à aucun travail manuel. Une autre 

femme, âgée de 75 ans est entrée l'année passée (1843) 
‘au même hôpital, pour une tumeur cancéreuse du foie. 
Comme elle était souvent prise de tremblement convulsif 
de tout le corps, et en particulier du bras droit, je m'in- 
formai si elle avait été doreuse. Elle m'apprit que dans 
sa jeunesse , elle avait exercé cette profession à la Chaux- 
de-Fonds, avant l'incendie qui détruisit presque entière- 
“ent cette ville, et qu'elle avait été alors très-fortement 
"affectée de tremblement mercuriel; elle paraissait com- 
"plètement guérie, lorsqu'elle renonça à l'exercice de sa 


— 302 — 

profession, et vint se fixer à St.-Blaise, où elle se maria, 
et où elle jouit d'une santé non interrompue jusque dans 
ces dernières années. À cette époque, il y a environ sept 
ans, elle vit reparaître le tremblement convulsif dont 
elle avait été atteinte 40 ans auparavant. D'abord peu 
notables, les mouvemens convulsifs des membres, surtout 
du bras droit, étaient devenus insensiblement plus in- 
tenses, et ils menacaient de devenir habituels, de mo- 
mentanés qu'ils avaient été à leur réapparition. 

Le tremblement convulsif est, sans contredit, le plus 
redoutable des accidens auxquels le mercure expose les 
doreurs au feu; mais il n’est pas le seul. Le contact ré- 
pété de ce métal et les vapeurs auxquelles il donne lieu, 
affectent assez souvent les glandes salivaires, et occa- 
sionnent une salivation plus ou moins abondante, accom- 
pagnée d'ulcération à la langue, aux gencives et aux 
autres parties de la bouche, et d’ébranlement des dents, 
qui noircissent quelquefois et tombent prématurément. 

Ces effets du mercure, quoique en général moins fà- 
cheux que le tremblement convulsif, exigent quelquefois 
un long traitement et des ménagemens prolongés; ce qui 
oblige les doreurs qui en sont atteints, à discontinuer 


les travaux de leur profession pendant un temps plus ou 
moins long. 


Moyens employés pour prévenir les effets des vapeurs 
mercurvelles. 


Dans la seconde moitié du siècle dernier, de savans 
physiciens, frappés des accidens redoutables causés par 
les vapeurs mercurielles, avaient cherché les moyens d'en 


— 303 — 
préserver les doreurs. Foureroy, dans sa traduction de 
l'ouvrage de Ramazzini sur les maladies des artisans, 
leur avait donné des conseils utiles, mais insuffisans pour 
s'en garantir complètement ('). Après lui, plusieurs savans 
de Genève se sont particulièrement occupés de cet objet. 
L'année même où parut la traduction française de l'ou- 
vrage du médecin de Modène, Tingry, pharmacien à Ge- 
nève, fit connaître un petit appareil auquel il a donné le 
nom de préservateur, et qu'il avait imaginé pour empê- 
cher les vapeurs de mercure de pénétrer dans l'atelier des 
doreurs de pièces de montres, et pour leur donner une 
prompte issue au dehors. Cet appareil, qui se trouve dé- 
crit et figuré dans le journal de l'abbé Rosier pour le 
mois de novembre de l’année 1777, était d’une utilité 
réelle, mais toutefois beaucoup moins efficace que celui 
qui, plus tard, a été imaginé par M. Darcet, parce qu'on 
ne peut pas en diriger, en activer et en soutenir le tirage 
comme dans ce dernier. Albert Gosse, pharmacien à 
Genève, dans un mémoire couronné par l'académie des 
sciences en 1783, sur la question qui nous occupe (Dé- 
termèner la nature et les causes auxquelles sont exposés les 
doreurs au feu ou sur métaux , et la meilleure manière de les 
préserver de ces maladies, soit par des moyens physiques, 
soët par des moyens chimiques), avait proposé entr’autres 


(!) Essai sur les maladies des artisans, traduit du latir de Ramazzini, avec 
des notes et des additions; par M. de Fourcroy, in-19°. Paris 1777, 
page 37. Fourcroy recommandait en particulier aux doreurs , de placer 
au-dessus du fourneau où ils passent au feu , un tuyau de tôle, dont l’ex- 
trémité inférieure évasée en pavillon fût assez grande pour contenir ce 
fourneau , et dont l’autre extrémité recourbée allât s’ouvrir dans un canal 
de cheminée, ou en dehors, en passant par un carreau de fenêtre. 


25 


— 304 — 
moyens l'emploi d'un fourneau semblable au préserva- 
teur de Tingry. M. Robert Guedin , également de Genève 
et doreur lui-même, avait construit dans son atelier un 
appareil auquel on peut faire relativement au courant 
d'air, le même reproche qu’au préservateur de Tingry ('). 
Des moyens d’un autre genre ont aussi été proposés, pour 
empêcher que les doreurs respirassent les vapeurs du mer- 
cure volatilisé par l’action de la chaleur. Albert Gosse, 
dans ses expériences sur les améliorations hygiéniques 
qu'il cherchait à introduire dans l'art du chapelier, s'était 
servi d’une éponge mouillée placée au devant des voies 
aériennes, afin que l'air ne parvint aux poumons que ta- 
misé pour ainsi dire. Le D' Gosse, mon savant ami, met- 
tant à profit l’idée de son père, a fait construire un petit 
appareil, qui, depuis sa publication, a été décrit et 
gravé dans le premier volume des Annales d'hygiène pu- 
blique et de médecine légale (*). Cet appareil se compose 
d'une éponge d'un tissu fin et serré, d’une forme coni- 
que, et qui est assez large pour recouvrir le nez, la 
bouche et le menton. Afin d'empêcher toute communi- 
cation directe de l'air extérieur à la bouche par les yeux 
de l'éponge, tous ceux-ci sont cousus, et au devant de 
l'éponge sont superposées des tranches d’autres éponges 
coupées avec un rasoir et tellement disposées, que les 


(!) L'appareil de M. Robert Guedin se trouve décrit et gravé dans le Bul- 
letin de la Société d’encouragement ; 15%° année, Mars 1814. 

(2) L’hygiène des professions insalubres, par M. L. A. Gosse D. M. (Biblio- 
thèque universelle. Sciences T. 4.) et Mémoire sur un moyen mécanique 
proposé pour respirer impunément les gaz délétères; extrait d’un rapport 
fait à M. le préfet de police; par MM. Darcet, Gauthier de Claubry et Pa- 
rent du Châtelet. (Annales d'hygiène publique et de Médecine légale ; juillet 
4829, page 435 , planche 5 fig. 5 et 6). 


2 


— 305 — 

ouvertures d'une tranche répondent à une partie pleine 
d'une autre; avant de coudre chaque lame , il faut avoir 
soin d'en coudre les yeux trop grands et ceux qui laissent 
passer la lumière. De celte manière, on donne à cet en- 
semble d'éponges la forme qu'on veut; un ruban fixé 
tout autour du masque, soutient des cordons destinés à 
l'assujettir autour de la tête. Muni de cet appareil d'é- 
ponge humide, auquel, pour se préserver les yeux de l’ac- 
tion des gaz irritans , il avait ajouté des lunettes formées 
par des verres de grand diamètre enchassés dans une éponge 
mouillée semblable à celle de son masque , le D' Gosse 
s'est livré à plusieurs essais assez périlleux, dont je me 
bornerai à rapporter celui qui a un rapport direct avec 
l'objet dont nous nous occupons. Ainsi, il mit une livre 
de mercure en ébullition dans un creuset, et resta pen- 
dant cing minutes exposé aux vapeurs abondantes qui 
s'en dégageaient. Mais celles-ci ne lui produisirent au- 
cune sensation. Deux lames d'or battu, qu'il avait dis- 
posées derrière son masque, au devant de la bouche et 
de ses narines, ne blanchirent pas, et conservèrent leur 
éclat métallique ; en pressant l'éponge , on en faisait sortir 
des gouttelettes de mercure qui s’y étaient condensées. 
Quoique le moyen préservatif qui vient d’être décrit, soit 
d'une efficacité incontestable, pour empêcher que la santé 
_ne souffre de la respiration d'un air contenant des ma- 
tières nuisibles, cependant les doreurs ne l'ont pas adopté: 
ce qui s'explique aisément par la gène, très-grande et 

l'embarras qu'il doit causer, | 
C'est surtout à Darcet qu'on est redevable des perfec- 
tionnemens les plus utiles à la santé des doreurs. L'ap- 
pareil que ce savant, dont on doit déplorer la mort ré 


— 306 — 

cente, a imaginé pour la dorure des piéces de montres, 
et en général pour la dorure des petits objets, remplit 
d'une manière beaucoup plus efficace que ceux qui vien- 
nent d'être décrits, le but de préservation qu'il se pro- 
pose; aussi mérite-t-il d'être universellement adopté. Il 
se compose, en général, d'une hoîte en tôle, munie sur 
le devant d'une hotte vitrée, sous laquelle les doreurs 
engagent leurs mains et font les opérations dangereuses 
de leur profession. Cette boîte est surmontée d’un tuyau 
également en tôle, destiné à donner issue aux produits 
gazeux de la combustion et aux vapeurs mercurielles, et 
s’ouvrant par un coude vertical, soit directement au de- 
hors, par un carreau de la fenêtre, soit dans un canal 
de cheminée (). Lorsque le courant d’air est bien établi 
dans ce petit appareil, les vapeurs mercurielles et les 
autres émanations dangereuses s'échappent au dehors en 
totalité, sans qu'il s’en répande dans l'atelier, et les do- 
reurs sont ainsi mis à l'abri de leur contact. — Les dan- 
gers auxquels les émanations du mercure les exposent, 
ne sont ignorés d'aucun des doreurs de notre pays. 
Aussi, ont-ils, pour la plupart, adopté successivement 
les appareils préservateurs construits sur les principes de 
Darcet, que M. Olivier Quartier a le premier introduits 
au Locle et aux Brenets, il y a-environ quinze ans. 

Nous n'avons trouvé, dans notre visite des doreurs, 
que six ateliers qui ne fissent pas usage des appareils dont 
il s’agit (voyez tableau A). Les propriétaires de deux de 
ces ateliers, établis à la Chaux-de-Fonds, et qui sont les 


() Mémoire sur l’art de dorer le bronze , ouvrage qui a remporté le prix 
fondé par M. Ravrio et proposé par l’académie royale des Sciences, in-8°. 
Paris 1818, page 165, planches 5 et 6. 


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plus cousidérables de nos montagnes, ont à grands frais 
employé un autre moyen pour mettre les doreurs à l'abri 
des vapeurs mercurielles, mais que les commissaires du 
gouvernement ont envisagé comme beaucoup moins effi- 
caces que l'appareil de Darcet. Les industriels dont il s’a- 
git, ont fait établir dans l'atelier où les ouvriers passent 
au feu, des loges vitrées, dans lesquelles les doreurs 
sont assis, en face d’un fourneau surmonté d’un chapi- 
teau et d'un canal d’évaporation en tôle, qui s'ouvre 
dans une cheminée; c’est sur les braises de ce fourneau 
que se placent les pièces couvertes d’amalgame d'or et de 
mercure. Ces loges qui sont en bois, communiquent 
avec l'air du dehors, au moyen d’un canal également en 
bois, qui s'ouvre au haut de la loge. On entre dans celle- 
ci depuis l'atelier, par une petite porte. La moitié supé- 
rieure de la face de ces loges, qui regarde le fourneau 
où l’on passe au feu, est munie d’un vitrage; la moitié 
inférieure est fermée par un tablier en cuir garni de man- 
ches, dans lesquelles les ouvriers engagent leurs bras. 
Les doreurs placés dans ces loges y éprouvent une cha- 
leur considérable, qui doit à la longue avoir une in— 
fluence fâcheuse sur leur santé. L’air qu'ils y respirent 
se renouvelle mal, et il y a tout lieu de croire que ce 
n'est pas exclusivement par le moyen de l'air du dehors 
que ce renouvellement se fait, mais que cela a lieu sou- 
vent par l'air de l'atelier. Les commissaires du gouver- 
nement se sont assurés que les choses se passaient ainsi 
dans l’un de ces deux ateliers. Ayant appliqué la flamme 
d'une chandelle à l'ouverture extérieure du canal en bois, 
qui, de l'extérieur, communique avec une de ces loges, 
nous avons vu la flamme au lieu d’être infléchie vers le 


— 308 — 

canal, en être très-notablement repoussée. Dans l’ate- 
lier dont 1l s'agit, lorsqu'on passe au feu, il y a une 
abondance de mercure en évaporation. En supposant 
que les ouvriers occupés à cette opération dans les loges, 
fussent complètement à l'abri de ces vapeurs mercu- 
rielles , ce qui n’a pas lieu, suivant nous, elles n’en nui- 
ralent pas moins à la santé des personnes qui entrent 
dans l'atelier, et surtout à celles qui ont l’imprudence 
d'y séjourner. — Dans une visite que je fis en septembre 
1842 de l'atelier dont il vient d'être question, j'y trou- 
vai une jeune fille assise à côté d’une des loges, occu- 
pée à blanchir les pièces de montres, et à les couvrir 
d'amalgame d'or et de mercure. Cette jeune personne. 
agée de 20 ans, avait alors toutes les apparences de la 
santé ; quelques mois après , elle a été prise d’un tremble- 
ment convulsif intense, qui l'a obligée a cesser pendant 
assez long-temps les travaux de sa profession. Les com-— 
missaires du gouvernement, en visitant l'atelier de M. Bra- 
bant à la Chaux-de-Fonds, ‘à la fin du mois d'Août, y 
ont rencontré cette jeune fille, alors assez bien remise 
de son tremblement mereuriel ; e’est elle qui nous raconta 
dans cette occasion ce qui lui était arrivé ("). 

L'atelier à loges vitrées, dont il vient d’être parlé, est 
celui des montagnes où le plus grand nombre d'ouvriers 
ont ressenti les fâcheux effets des vapeurs mercurielles. 
Sur 38 doreurs atteints d'intoxication mercurielle, dont il 
sera parlé plus bas, cinq en avaient été affectés dans cet 
atelier; mais il est vrai de dire , que c’est un des ateliers 


(!) Elle s’appelail Kohler (Marie) et s’occupait de la dorure au feu depuis 
deux ans et demi, 


— 309 — 
de dorure les plus considérables des montagnes de notre 
pays. 

Le second des ateliers à loges vitrées existant à la 
Chaux-de-Fonds, est beaucoup plus salubre que le pré- 
cédent. Il doit cette salubrité à une cheminée construite 
au milieu de l'atelier où l’on passe au feu, et qui fait les 
fonctions d’un fourneau d'appel. Les conduits en tôle des 
fourneaux où se fait cette opération, s'ouvrent par un 
coude vertical dans cette cheminée ; de sorte, qu’on peut 
établir dans tous ces conduits un très-fort tirage, pour 
entraîner au dehors les vapeurs du mercure. L'atelier 
dont il s’agit laisserait très-peu de chose à désirer sous le 
rapport de la salubrité, si au lieu des loges vitrées et des 
fourneaux qui s’y trouvent, on y établissait autant d’ap- 
pareils à hotte vitrée, dont les conduits d'évaporation 
vinssent s'ouvrir dans la cheminée dont il vient d’être fait 
mention. L'autre atelier à loges, dont nous avons parlé 
ei-dessus , ne sera, nous le croyons, complètement as- 
saini et délivré de ses causes d’insalubrité, que lorsque 
les loges du local peu spacieux, où l’on y passé au feu, 
seront remplacées par des appareils à hotte vitrée, et 
lorsqu'on aura la précaution d'en faire entrer les conduits 
d'évaporation de la fumée et du mercure, dans un canal 
de cheminée dont le tirage soit fortement établi, et puisse 
être maintenu constant par le moyen d’un petit fourneau 
d'appel. 

Les doreurs de nos montagnes donnent le nom de /an- 
ternes aux appareils à hotte vitrée dont ils font usage pour 
passer au feu. La plupart de ces lanternes sont compo- 
sées d’une boîte en tôle, dans laquelle est placée une pe- 
lite caisse également en tôle, contenant les braises cou- 


— 310 — 

vertes de cendres, ou les charbons ardens sur lesquels se 
fait la volatilisation du mercure. Cette boîte est surmon- 
tée d'un tuyau en tôle, muni d’une bascule mue par une 
clef; ce tuyau s'ouvre au dehors par un coude vertical, 
ou bien il aboutit de la même manière dans un canal de 
cheminée. Au devant de la boîte, est adaptée une petite 
hotte vitrée, sous laquelle le doreur passe les bras. .et 
exécute son travail. Construites sur le principe de l’ap- 
pareil de Darcet, les lanternes de nos doreurs en différent 
un peu, par la forme de la boîte en tôle où se place la pe- 
tite caisse destinée à contenir les braises, à laquelle les do- 
reurs donnent vulgairement le nom de casse. Nous n’a- 
vons vu que très-peu de ces boîtes qui eussent la forme 
d'un chapiteau comme dans l'appareil Darcet; il ne s’en 
est trouvé qu'une seule, qui fût munie dans le haut, 
comme dans ce dernier, d’une fente transversale destinée 
à donner issue aux vapeurs mercurielles, qui, n'ayant 
pas passé par la porte de la fournaise, peuvent se trouver 
en stagnation dans la partie supérieure de la hotte vitrée 
de l'appareil. Dans quelques ateliers, les appareils à pas- 
ser au feu, se composent simplement d'une petite caisse 
ayant la forme d’un parallélipipède rectangle peu élevé, 
où l’on place les braises, et d’une hotte vitrée surmontée 
d'un tuyau d'évaporation en tôle. Dans quelques-uns des 
ateliers où cette disposition de l'appareil à passer au feu 
existe, la hotte sous laquelle le travail s'effectue a la forme 
d'une cloche. 

Les conduits en tôle des appareils à passer au feu , des- 
tinés à donner issue à la fumée, aux gaz résultans de la 
combustion et aux vapeurs du mercure, s'ouvrent direc— 
tement au dehors, dans la plupart des ateliers de dorure 


e 


— 311 — 

de nos montagnes, en passant par un carreau de fenêtre, 
et en formant un coude vertical. Nous avons trouvé cette 
disposition dans 51 ateliers, savoir : dans 3 aux Ponts, 
21 au Locle, 2 aux Brenets et 25 à la Chaux-de-Fonds. 
Dans 4 ateliers du Locle, les’conduits d’évaporation s'ou- 
vraient dans des cheminées de cuisine ; à la Chaux-de- 
Fonds, il n'y avait qu'un seul atelier où cela eût lieu. 
Ces conduits allaient aboutir dans une cheminée de les- 
siverie, dans un atelier du Locle et dans un atelier de la 
Chaux-de-Fonds. — Il y a un danger réel à introduire 
les tuyaux d’évaporation du mercure dans les cheminées 
de cuisine, ou dans d’autres conduits en communication 
avec une ou plusieurs chambres d'une maison. Daus cer- 
tains cas, il peut se faire un appel capable de faire pé- 
nêtrer dans les pièces où, cette communication existe, le 
mercure volatilisé par l’action du feu. Nous avons cité 
plus haut un fait de ce genre, où toute une famille d’arti- 
sans fut gravement affectée d'intoxication mercurielle. 
Aussi est-il du devoir d'une bonne police, de défendre 
que les conduits d'évaporation, dont il s’agit, s'ouvrent 
dans des cheminées communiquant avec des chambres, ou 
dans les cheminées des cuisines. 

Le ramonage des cheminées où aboutissent des con- 
duits qui donnent issue au mercure vaporisé par l'action 
du feu, ne se fait pas toujours sans danger. Un jeune 
homme de 16 ans, ouvrier ramoneur à la Chaux-de- 
Fonds, a été pris de salivation mercurielle à différentes 
reprises, et chaque fois qu'il ramonait la cheminée, où 
aboutissaient les tuyaux d’évaporation du mercure, dans 
un des ateliers à loges vitrées dont nous avons parlé ei- 
dessus. On voit par là, qu'il est nécessaire d’user de cer— 


— 312 — 


taines précautions pour le ramonage des cheminées dont 
il s’agit. Le mercure volatilisé par le feu ; se trouve mêlé 
avec la suie de la cheminée où il aboutit, à toutes les 
hauteurs de ce canal. Beaucoup plus abondant au bas 
de celui-ci, comme l’ont démontré les recherches faites 
par Darcet ('), ce métal est toutefois porté par le courant 
d'air jusqu'au haut de la cheminée. Nous avons constaté 
ce fait dans un atelier des Brenets, où le canal en tôle, 
donnant issue aux vapeurs mercurielles, avait 40 pieds de 
hauteur; on trouvait des globules de mercure à sa partie 
la plus élevée. 

Quelle que soit la diversité de forme des appareils 
à hotte employés par les doreurs de nos montagnes, 
sous le nom de Zanternes, ils seraient suffisans pour les 
préserver contre les vapeurs mercurielles, si le courant 
d'air ascendant y était fortement établi et constant, et 
qu'il pût être activé dans certaines circonstances ; pourvu 
toutefois que les appareils dont nous parlons fussent con- 
fectionnés avec soin, maintenus dans un grand état de pro- 
preté, et qu'entre les différentes pièces de la hotte vitrée, 
il n’y eût aucune ouverture qui permit au mercure vola- 
tilisé de se répandre dans l'atelier. La chose importante 
est que le courant d'air des appareils soit bon; sans cette 
condition ils n’ont aucune efficacité. 

Dans la visite que nous avons faite des ateliers de do- 
rure, nous avons essayé le tirage de presque tous les 
appareils dont il s’agit. Nous avons trouvé plusieurs lan- 
ternes dont le courant ascendant était très-fort ; il était mé- 
diocre dans beaucoup d’autres, et mauvais dans le reste. 
Les lanternes, dont le canal d'évaporation était d’un gros 


(*) Mémoire sur l’art de dorer le bronze , page 120. 


| 


— 313 — 

calibre relativement au reste de l'appareil, avaient toutes 
un bon tirage. Dans deux ateliers, le tirage était mau- 
vais, parce que les tuyaux en tôle qui donnaient issue 
à la fumée et aux vapeurs mercurielles, étaient do- 
minés par les maisons du voisinage. Le peu d'éléva- 
tion du tuyau d'évaporation était la cause du mauvais 
tirage dans un autre atelier. Un doreur de la Chaux- 
de-Fonds, M. L'E., dont le comité d'enquête a trouvé 
l'appareil d’un fort bon tirage, se sert d'un excellent 
moyen de l'activer, lorsque par l'effet du vent ou de 
toute autre cause, le courant d'air ascendant ne se fait 
pas aussi bien que d'ordinaire; ce moyen consiste à di- 
later l'air intérieur du tuyau d’évaporation, en plaçant 
au-dessous la flamme d’un quinquet; ce moyen bien connu 
depuis long-temps, aurait une efficacité encore plus 
grande, si cet industriel introduisait le haut de la che- 
minée du quinquet dans le tuyau même, par une ouver- 
ture qui y serait ménagée, comme Darcet le conseille. 

Les moyens d'établir dans les appareils à hotte un 
courant d'air fortement ascendant et constant, sont assez 
multipliés, et doivent être variés suivant les circons- 
tances. Les doreurs ne sauraient trop-se pénétrer des ex- 
cellens préceptes donnés à ce sujet par le savant dont 
nous venons de parler, dans son Mémoire sur l'art de dorer 
le bronze. On peut obtenir ce résultat, indépendamment 
des moyens ordinaires, tantôt en augmentant le diamêtre 
du tuyau en tôle, tantôt en lui donnant plus de hauteur, 
pour qu'il ne soit pas dominé par les maisons voisines. 
Il est ordinairement nécessaire d'établir un vasistas à 
l’une des fenêtres de l'atelier, afin que l’air qui s'échappe 
par le canal d’évaporation soit facilement remplacé par 


— 314 — 

celui du dehors, sans qu’il soit nécessaire pour cela de 
tenir ouverte la porte ou la fenêtre de l'atelier. Quand le 
canal de déduction du mercure est placé dans une che- 
minée, on peut en assurer le tirage en bouchant exacte- 
ment le bas de celle-ci. Dans tous les cas, un des moyens 
les plus efficaces pour activer le tirage et pour le rendre 
constant, consiste à engager le haut de la cheminée en 
verre d'un quinquet allumé, dans une ouverture prati- 
quée à la paroi inférieure du tuyau en tôle de l'appareil 
à passer au feu. 

Dans les ateliers considérables, où dans un même local 
on emploie à la fois plusieurs appareils à passer au feu, 
le moyen par excellence de rendre le tirage fort et cons- 
tamment bon, serait d'établir un petit fourneau d'appel 
pour dilater l’air de la cheminée où ces conduits vont 
aboutir. — Dans la visite que nous avons faite dans les 
ateliers de dorure de notre pays, nous avons vu passer 
au feu le matin et dans l'après midi; mais d’après les 
renseignemens qui nous ont été donnés, il paraît que cette 
opération se fait principalement la matinée dans la plu- 
part des ateliers de dorure. — A la Chaux-de-Fonds un 
assez grand nombre de doreurs passent au feu dans des 
maisonnettes composées d'une petite chambre à plein pied, 
où se trouve une forge placée sous une cheminée destinée 
à donner issue aux produits de la combustion, au mercure 
volatilisé et aux autres vapeurs dangereuses. Dans cette 
même ville, et aux Ponts, d’autres doreurs font la même 
opération dans des loges en bois, où est placé l'appareil 
dont le canal de déduction des vapeurs s'ouvre au dehors 
en passant par un carreau de fenêtre. Dans une de ces 
loges, qui était plutôt une, guérite fermée, il n y avait pas 


— 315 — 

de canal de déduction. Plusieurs des maisonnettes dont il 
s'agit sont en bon état, et les'doreurs peuvent y passer au 
feu commodément et sans inconvénient, lorsque la forge 
est munie d’une bonne hotte vitrée. Mais les loges en bois 
sont extrêmement chaudes en été, et doivent être très 
froides en hiver, si toutefois on peut y travailler dans 
cette dernière saison. Nous sommes entrés dans plusieurs 
pendant qu'on y passait au feu, mais nous y avons été 
fortement incommodés par la chaleur, à la fin d'Aoùt. 

Depuis la lecture de ce mémoire, un doreur de la Chaux- 
de-Fonds, forcé par la rigueur du froid de quitter la 
maisonnette qui lui servait d'atelier dans l'hiver de 1845, 
eut l'imprudence de passer au feu, sans aucune précau- 
tion ; dans la chambre qu'il habitait avec sa femme, do- 
reuse comme lui. L'un et l’autre qui avaient été atteints à 
différentes reprises de l'intoxication mercurielle, furent 
pris de nouveau et trés-gravement du tremblement con- 
vulsif, pour lequel ils ont été reçus à l'hôpital Pourtalès; 
la femme qui était attente de la maladie au plus haut 
degré, fut prise de délire, et suecomba avec tous les 
signes d’une congestion cérébrale, dont l'existence a été 
constatée à l'ouverture de son corps. Au-dessus de la 
chambre, où ces deux doreurs passaient au feu si impru- 
demment, se trouvait une chambre habitée par un hor- 
loger avec sa femme et sa sœur. Ces trois personnes fu 
rent toutes affectées d’une salivation abondante, avec 
stomatite ulcéreuse de l'intérieur de la bouche, pour la- 
quelle elles ont eu recours aux soins éclairés du Dr Georges 
Dubois. Il fut constaté par l'enquête juridique qui eut 
lieu à ce sujet, que les vapeurs mercurielles dégagées 
dans la chambre du doreur avaient pénétré de là dans 
l'appartement de l'horloger placé au-dessus. 


— 316 — 

Chez le plus grand nombre des doreurs, on passe au 
feu dans un local qui n'est pas affecté aux usages domes- 
tiques, et qui ne sert ni de chambre à manger, ni de 
chambre à coucher. Il serait fort à désirer que cette pré- 
caution d'hygiène, indispensable pour la conservation de 
la santé des doreurs, füt observée dans tous les ateliers. 
Le comité, dans sa tournée, a trouvé six ateliers où elle 
est tout-à-fait négligée, et où les doreurs eux-mêmes, ou 
d’autres personnes, couchaient et mangeaient dans le local 
où se faisait l'évaporation du mercure; cinq de ces ate— 
liers appartenaient au Locle et un aux Brenets. Il est 
d'une sage police de faire cesser un ordre de chose aussi 
préjudiciable à la santé. 


De l'opération de mettre en couleur. 


+ 


Après que les pièces couvertes d'amalgame d'or et de 
mercure ont été soumises à l’action de la chaleur , et que 
la plus grande partie de ce dernier métal a été volatilisée, 
les doreurs de nos Montagnes plongent ces mêmes pièces 
dans de l'acide nitrique étendu d’une assez grande quan- 
tité d'eau, puis ils les exposent sur des braises couvertes 
de cendres, afin de dissiper complètement le mercure 
qu’elles contiennent encore. Les doreurs renouvellent cette 
opération, si le besoin l'exige, une, deux ou trois fois, 
jusqu’à ce que la pièce ait pris une belle couleur jaune, 
et qu'elle ne blanchisse plus du tout, lorsqu'on la frotte 
avec l’eau seconde. 

L'ensemble des opérations qui viennent d'être décrites, 
constituent ce que nos doreurs appellent donner la cou- 


— 317 — 


leur. Le procédé ci-dessus est généralement suivi par la 
presque totalité des doreurs des montagnes de notre pays. 
L'application de la cire à dorer et des autres composi- 
tions propres à donner à la dorure différentes teintes, 
comme celle de l'or rouge, de l'or moulu, etc., qui cons- 
titue la véritable mise en couleur, n’a lieu que dans deux 
ateliers, où l’on s'occupe aussi à dorer au mat ('). L'opé- 
ration de mettre en couleur, telle qu'elle est générale- 
ment pratiquée par les doreurs de notre pays, quoique 
infiniment moins dangereuse que celle de passer au feu, 
ne laisse pas d'offrir de graves inconvéniens pour la santé, 
lorsqu'elle est faite sans aucune précaution. Les pièces 
lavées à l'eau seconde puis exposées à l’action de la cha- 
leur, donnent lieu à un dégagement de vapeurs nitreuses 
très-peu considérables, et qui par cette raison ne sau- 
raient avoir une influence bien marquée sur la santé : 
mais il se volatilise en même temps une quantité notable 
de mercure, dont les effets peuvent être nuisibles. — On 
peut s'assurer que les pièces qui ont passé au feu et qu’on 
met en couleur contiennent encore du mercure, en ex- 
posant au-dessus d'elles, lorsqu'elles sont exposées à la 
chaleur, un morceau d'or laminé ; on voit prendre alors 
à cette lame d'or une teinte blanche, qui décèle la pré- 
sence du mercure. Nous avons fait cette expérience dans 
plusieurs ateliers. et en présence des doreurs, auxquels 
nous en avons fait voir les résultats. En examinant l'in- 
térieur des espèces de boîtes vitrées, dont quelques do- 


(!) I faut toutefois faire exception de la petite quantité d’amalgame de 
cuivre que beaucoup de doreurs introduisent dans leur amalgame d’or et 
de mercure, comme il a été dit ci-dessus. 


— 318 — 
reurs de la Chaux-de-Fonds se servent pour mettre en 
couleur, le comité d'enquête a reconnu la présence de 
globules de mercure plus ou moins abondants sur leurs 
parois intérieures, et en frottant celles-ci avec une la 
melle d'or, nous nous sommes assurés qu'elle prenait 
une teinte blanche très-prononcée. Nous avons vu à la 
Chaux-de-Fonds un propriétaire d'atelier qui ne passait 
jamais au feu, mais qui s’occupait uniquement à mettre 
en couleur; cet individu, pour n'avoir pris aucune pré- 
caution pendant son travail, qu'il exécutait sans appa- 
reil préservateur, à été gravement atteint du tremble- 
ment convulsif. On ne saurait donc douter des dangers 
attachés à la mise en couleur ; malheureusement un grand 
nombre de doreurs s'imaginent que cette opération n’a 
aucun inconvénient pour la santé, et la pratiquent non- 
seulement sans appareil préservateur, mais même dans 
des chambres à manger et à coucher. Parmi les ateliers 
de dorure en activité dans nos montagnes au mois d'août 
1843, il y en avait 28 où la mise en couleur se faisait 
sous des appareils préservateurs propres à mettre à l'abri 
du mercure volatilisé; dans tous les autres ateliers , cette 
opération s’exécutait sans précaution suffisante (*). Dans 


(!) En visitant un atelier de la juridiction du Locle, nous sommes arri- 
vés au moment où la femme d’un doreur s’apprêtait à mettre en couleur 
quelques pièces qui ayaient passé au feu. Cette femme, (que nous enga- 
geâmes à continuer son travail en notre présence) ne se faisait pas illusion 
sur les dangers auxquels cette opération l’exposait ; mais le moyen qu’elle 
mettait en usage pour s’en préserver était insuffisant. En commencant son 
ouvrage, elle se couvrit à demi la bouche et les narines d’un mouchoir, 
qu’elle s’attacha derrière la tête. Cela fait, elle plongea dans l’acide ni- 
trique étendu d’eau (eau seconde) les pièces qui avaient passé au feu , et 
les placa ensuite sur des braises couvertes de cendres contenues dans une 


— 319 — 

20 ateliers sur les 28 dont il s’agit, la mise en couleur 
se faisait sous la hotte vitrée de l'appareil à passer au feu; 
dans les 8 autres, on se servait d'un appareil un peu dif- 
férent, mais propre à remplir le même but. C'était une 
sorte de caisse en tôle munie de vitres et surmontée d’un 
chapiteau, auquel s’adaptait un tuyau d'évaporation en 
tôle, s'ouvrant par un coude vertical, soit au dehors, en 
passant par un carreau de fenêtre, soit dans un canal de 
cheminée. — Au moment où le comité visitait les doreurs 
de nos montagnes, il y avait 14 ateliers où la mise en 
couleur avait lieu dans des chambres à manger ou à cou- 
cher (v. le tabl. C.). On ne saurait douter que cet état de 
chose n'offre des inconvéniens graves pour la santé, et 
qu'il ne soit urgent de le faire cesser. 

Les dangers attachés à l'opération de la mise en couleur 
sont beaucoup plus grands, lorsque les doreurs dorent 
au mat, et que pour donner des teintes variées à la do- 
rure, ils se servent de cire à dorer ou d'autres composi- 
tions. Il n’y a que deux ateliers dans nos montagnes où 
l’on dore au mat, où l’on fasse des brunis et où l’on donne 
à la dorure les teintes d'or moulu, d’or rouge , etc. — Ce 
genre particulier de dorure ne s'applique pas aux petites 
pièces de l'intérieur des montres, mais seulement aux 
cadrans et aux boîtes de montres, qu'on veut orner pour 
satisfaire aux fantaisies de la mode des différens pays ; ce 
qui explique pourquoi il n'y a qu'un petit nombre d'ate- 


petite caisse en tôle, qu’elle tenait sur ses genoux. Nous avons fortement 
engagé cette doreuse à se servir d’un appareil à hotte pour y faire cette 
opération. L’effroi qu’elle a témoigné lorsqu'elle a vu blanchir le morceau 
d’or laminé que nous exposämes au-dessus des pièces qu’elle séchait sur 
les cendres chaudes, nous fait espérer que cette recommandation n’aura 


pas été sans effet. 
21 


— 320 — 
liers qui sen occupent actuellement dans nos monta- 
gnes("). Aussi, ne nous arrêterons-nous pas longuement 


(!). Voici la manière dont on procède à la dorure au mat. La pièce qui a 
passé au feu, et dont la presque totalité du meréure est volatilisée, est re- 
couverte d’un mélange de sel marin, de nitre et d’alun liquéfiés dans leur 
eau de cristallisation (cette composition que les doreurs appellent le mat 
et qu’on leur vend toute préparée, a été analysée plusieurs fois par Darcet 
qui y a ordinairement trouvé : salpêtre 40 p., alun 25, sel marin 55). 
Cette pièce est ensuite reportée au feu, et on la chauffe jusqu’à ce que la 
couche satine qui la recouvre devienne homogène , presque transparente 
et qu’elle entre en une véritable fusion. On la retire alors du feu, et on 
la plonge subitement dans de l’eau froide, qui en sépare la couche saline ; 
on passe alors la pièce dans de l’acide nitrique étendu de beaucoup d’eau, 
on la lave et on la fait sécher. Il se forme et il se dégage dans cette opéra- 
tion, des vapeurs qui seraient extrêmement nuisibles à la santé, si elles 
étaient respirées par les doreurs ; il suffit de savoir que parmi les sels 
mercuriels qui se forment, il y a du sublimé corrosif, pour donner une 
idée du danger qu’elle fait courir aux ouvriers, et de la nécessité de la 
faire sous des appareils préservateurs dont le tirage soit très fort. 

Pour donner à la pièce la couleur d’or moulu, on la recouvre avec un 
pinceau d’un mélange composé de pierre sanguine (hematite-rouge, fer 
oxydé , ou fer oligiste concrétionné de Haüy) d’alun et de sel marin; on la 
met ensuite sur des charbons ardens. 

La couleur d’or rouge se donne , en trempant la pièce qui a passé au feu 
dans la composition connue sous le nom de cire à dorer, dans laquelle 
entrent la cire jaune, l’ocre rouge, le vert de gris et lalun. On la place 
ensuite sur des charbons allumés eton la fait chauffer fortement. 

On fait le bruni en frottant la pièce avec un instrument muni d’héma- 
tite ou pierre sanguine. On trempe ce brunissoir dans de l’eau vinaigrée 
et on frotte la pièce toujours dans le même sens, jusqu'à ce qu’elle pré- 
sente un beau poli et tout l’éclat métallique. Lorsqu’une pièce doit avoir 
des parties brunies et d’autres mises au mat, on couvre les premières avec 
un mélange de blanc d’Espagne , de cassonnade et de gomme délayée dans 
l’eau ; c’est ce qu’on appelle épargner. Les brunis ainsi épargnés, on sèche 
la pièce et on la porte à un degré de chaleur suffisant pour chasser le peu 
de mercure qui y reste encore, ce qui est indiqué et par la couleur de la 
pièce et par la teinte noirâtre que la cassonade et la gomme qui com- 
mencent à se charbonner donnent à l’épargne. La pièce est alors retirée du 
feu on la laisse un peu refroidir , et on procéde à l'application du mat. 


— 321 — 

sur le détail des procédés dont il s’agit; qu'il nous suffise 
de dire, que les émanations qui s'élèvent alors de la mise 
en couleur, sont des plus nuisibles à la santé. Pour pré- 
venir l'effet de ces vapeurs délétères, il est absolument 
nécessaire que les doreurs fassent leur mise en couleur 
sous un appareil à hotte dont le tirage soit très-bon, afin 
qu'elles soient promptement entraînées, et en totalité, 
par le canal d'évaporation , et qu'il n'en pénètre pas dans 
l'atelier (*). 


Du gratte-bossage. 


Lorsque la mise en couleur est terminée, les pièces 
dorées sont plongées dans de l’acide nitrique étendu de 
beaucoup d’eau; puis ensuite, les doreurs les frottent 
en tout sens avec la gratte-bosse, sorte de pinceau en fil 
de laiton, qu'on trempe dans de l’eau où l’on a fait 
bouillir, infuser, ou simplement macérer des marons 
d'Inde dépouillés de leur enveloppe corticale. Après 
quoi, lorsque les pièces dorées ont pris la belle couleur 
jaune qu'elles doivent avoir, on les jette dans un vase 
plein d’eau, puis on les essuie avec des chiffons de linge 
ou on les fait sécher. L'opération de la dorure est alors 
complétement terminée. 

Quelques doreurs de nos montagnes, au lieu d’eau de 


(!) Un des doreurs qui s’occupe à dorer au mat, et qui fait usage de cire 

_ à dorer , a été à différentes reprises très gravement affecté de tremblement 

mercuriel, ainsi que sa femme, avant de se servir d’un appareil à hotte. 

Depuis qu’ils ont adapté une hotte vitrée à la cheminée de la maisonnette 

où ils passent au feu et où ‘ils mettent en couleur, leur santé s’est nota- 

blement améliorée et ils n’ont pas eu depuis de retour d'intoxication mer- 
curielle. 


— 322 — 

marons, se servent pour gratte-bosser d'eau où l'on fait 
cuire ou infuser de la racine de réglise, un très petit 
nombre se servent d’eau vinaigrée. Le gratte-bossage 
n'expose la santé à aucun danger bien sérieux. Il donne 
lieu au dégagement d’une très petite quantité de vapeurs 
nitreuses , trop faibles pour être nuisibles. Lorsque par 
la négligence des doreurs, l’eau de maron n'est pas con- 
venablement renouvelée, elle peut s'aigrir par un com- 
mencement de fermentation, prendre une odeur désa-— 
gréable , el devenir de cette manière nuisible à la santé. 
Dans quelques ateliers, le gratte-bossage se fait, soit 
dans un local séparé et consacré à cette opération, soit 
dans l'endroit où l’on passe au feu, ou dans celui où l'on 
met en couleur. Mais, chez le plus grand nombre des 
doreurs de nos Montagnes, elle se pratique dans des 
chambres à l'usage du ménage, et où le plus souvent on 
mange, ou qui servent de chambres à coucher. 

Il n’y a dans notre pays, qu'un très petit nombre d'a- 
teliers où toutes les différentes opérations de la dorure 
se fassent dans un local consacré exclusivement à ces 
travaux , et séparé des autres pièces de la maison, Dans 
les deux principaux ateliers de la Chaux-de-fonds, un 
bâtiment entier est exclusivement affecté aux diverses 
opérations de la dorure au feu. Cette mesure d'hygiène 
est excellente; mais , il ne sera jamais possible d'obtenir 
que tous les doreurs s'y conforment. La plupart d'en 
tr'eux sont loin d’être dans un état d’aisance, et il ÿ en a 
beaucoup que leur peu de ressources pécuniaires obli- 
gent à se loger à l'étroit. On aurait beaucoup gagné, si 
l’on parvenait à faire en sorte qu'ils s’abstinssent com- 
plétement de pratiquer les opérations dangereuses de leur 


— 323 — 
profession (telles que le recuit, le passage au feu, la mise 
en couleur, la préparation du nitrate acide de mercure, 
son application, et celle de l’'amalgame d'or et de mer- 
cure) dans les chambres où l’on mange et où l’on couche, 
el en général dans toutes les pièces qui sont à l'usage de 
leur ménage. 
e 


Etat de santé des doreurs de notre pays. 


Depuis que l'emploi des appareils à hotte vitrée est de- 
venu commun dans nos montagnes, la santé des doreurs 
y a éprouvé une notable amélioration. C’est ce qui ré- 
sulte des rapports de Messieurs les chefs des juridictions 
du Locle, de la Chaux-de-Fonds et des Brenets adressés 
à ce sujet à notre gouvernement au printemps de 1842, 
rapports qui, dans le temps, ont été communiqués à la 
commission de santé de l'Etat. Le comité chargé de l’en- 
quête qui a eu lieu l'année dernière, s’est assuré de la 
réalité de ce fait, tant par ses propres observations, que 
par les renseignements qui lui ont été fournis. Toutefois, 
quelque amélioration qu'il soit survenu dans la santé de 
nos doreurs depuis l'adoption du moyen préservateur 
dont il s’agit, cette amélioration n'est ni aussi générale, 
ni. aussi grande qu'elle devrait l'être, Il est facile de se 
convaincre de ce que j'avance ici, en consultant le ta- 


- bleau H annexé à ce mémoire, et en considérant que 
- chaque année on reçoit encore à l'hôpital Pourtalès un 


certain nombre de doreurs pour cause d'intoxication mer- 
curielle. À la vérité, dans l’année 1843, ce nombre a 
été très petit, puisque trois doreurs seulement. y ont été 
admis. — Le peu de temps que le comité d'enquête à 


— 32% — 

pu consacrer à la visite des ateliers de dorure de notre 
pays (nous avons employé cinq jours à cette visite et 
dix heures entières de la journée), ne nous a pas permis 
d'examiner assez longuement et avec assez de soin cha- 
cun des doreurs, pour donner une description détaillée 
de son état de santé et des maladies qu'il a éprouvées du- 
rant l'exercice.de sa profession. Pour cette raison, nous 
avons dû nous borner à une indication sommaire, mais 
aussi exacte que possible, de l’état de santé de chacun 
d'eux. — Les doreurs, ouvriers et apprentifs compris , 
dont nous avons eu connaissance , étaient au nombre de 
161, savoir : 62 du sexe masculin, et 99 du sexe fémi- 
nin (©. Tableau E). Sur 148 doreurs, maîtres, ouvriers 
et apprentis compris, dont nous avons pu apprécier l’état 
de santé d’une manière générale, il s’en trouvait 90 seu- 
lement, qui fussent bien portants , savoir 38 hommes 
et 52 femmes. Les vapeurs du mercure avaient produit 
leurs fâcheux effets sur 38 individus (10 hommes et 
28 femmes), dont 11 (4 hommes et 7 femmes) s’en res- 
sentaient encore au moment où nous les avons visités.— 
Les 20 autres doreurs (9 hommes et 11 femmes), sans 
avoir éprouvé ni tremblement convulsivif, ni affection de 
la bouche et des glandes salivaires, étaient tous maigres 
défaits , et jouissaient d’une santé chancelante. 

Dans deux familles de doreurs, nous avons vu les en- 
fans en bas âge participer au triste état de santé des au- 
teurs de leurs jours. Chez l’une d’elle, la mère était at- 
teinte de phthisie pulmonaire, et des deux enfans qu'elle 
avait, l’un âgé de quatre ans était petit, pâle, malingre, 
il bavait presque continuellement et n’articulait encore 
aucune parole: il ressemblait parfaitement à un idiot; 


— 325 — 

l’autre enfant âgé de vingt-deux mois était languissant 
et ne pouvait pas encore se tenir sur les pieds. Dans la 
seconde famille, le père et la mère avaient été gravement 
atteints d'intoxication mercurielle, dont ils se ressen— 
taient encore au moment de notre visite; ils avaient 
aussi deux enfants en bas âge ; l'aîné, qui n'avait pas 
plus de deux ans et demi, était päle et défait; il avait les 
membres grêles, le ventre dur et tuméfié ; il ne marchait 
pas encore et ne pouvait pas même se tenir debout ; le 
second de ces enfans était blème et languissant; il n'avait 
que 9 mois. 

Il résulte des recherches de la commission d'enquête, 
que quelques doreurs ont été affectés de tremblement 
mercuriel dès la première année de l'exercice de leur 
profession ; d’autres l'ont été seulement dans la seconde 
année; d’autres dans la troisième, et d’autres encore au 
bout d'un temps plus long. Plusieurs d’entr'eux en ont 
été atteints à différentes reprises. Nous avons déjà fait ci- 
dessus la remarque, que les doreurs, qui avaient été une 
fois affectés de tremblement convulsif, conservaient une 
disposition très grande à en être saisis de nouveau, lors- 
qu'ils étaient exposés de rechef à l’action des vapeurs du 
mercure. ” 

Tous les doreurs n’ont pas la même disposition à res- 
sentir les effets de ce métal. Si nous en avons trouvé qui 
ont été promptement atteints d'intoxication mercurielle, 
il s’en est rencontré d’autres, qui, dans des circonstances 
à peu près semblables, ont résisté longtemps, et qui exer- 
caient leur profession depuis dix, quinze, vingt, vingt- 
cinq et même trente ans, sans avoir jamais été pris de 
tremblement convulsif, bien qu'ils n’eussent pas observé 


— 326 — 

davantage de précautions que les autres doreurs, et même 
sans en avoir pris aucune. Tel était le cas d’un individu 
qui exerçait sa profession depuis vingt-cinq ans, et pas- 
sait au feu dans sa cuisine, sans aucun appareil préser- 
vateur. Mais il faut observer, que ce doreur qui habite 
les environs du Locle, menait à la campagne une vie ac- 
tive, alternant les travaux de sa profession, avec les tra- 
vaux de l’agriculture. C’est très probablement à ce genre 
de vie, qu'il a dû de n'avoir jamais été atteint de trem- 
blement mercuriel; joignez à cela, que ses occupations 
de doreur n’ont jamais été très considérables. Au surplus, 
si cet homme avait échappé à l'intoxication mercurielle, 
sa constitution était délabrée et sa santé chancelante; 1l 
était pâle, maigre, et quoique âgé de quarante-neuf ans, 
il portait sur lui les marques d’une vieillesse anticipée. 
Ceux des doreurs, qui à la Chaux-de-fonds passaient au 
feu sans hotte vitrée et sans précaution , avaient tous été 
atteints d'intoxication mercurielle, dont deux d’entr'eux 
se ressenlaient encore lorsque nous les avons visités. 


Des ouvriers doreurs et des apprentis. 


Le nombre des ouvriers et des apprentis employés à 
la dorure au feu dans les Montagnes de notre pays, 
éprouve des variations plus ou moins grandes. À l'époque 
de notre. visite, nous en avons trouvé 67, dont 17 du 
sexe masculin et 50 du sexe féminin (v. le Tableau F). 
Le moins âgé avait treize ans ; c'était un jeune garçon, 
qui était entré en apprentissage trois ans auparavant; le 
plus âgé, qui était une femme, avait quarante-sept ans. 
Le plus grand nombre des apprentis et ouvriers se trou 


— 327 — 
yaient entre l’âge de quinze à trente ans; il y en avait 
cinquante-six pour cette période de la vie, sur le nombre 
total. L’apprenti le plus novice que nous ayons vu, était 
entré depuis dix jours seulement chez son maître ; l'ou- 
vrier Je plus ancien», qui était une femme, exerçait sa 
profession depuis vingt-cinq ans. 

La plupart d’entr'eux logent et prennent leurs repas 
chez leurs maîtres ou maîtresses ; le plus grand nombre 
mangent et couchent dans des endroits où ils sont à l'abri 
des vapeurs du mercure et de toute émanation dangereuse 
à la santé. Cette mesure d'hygiène est, grace à l'ordon- 
pance rendue cette année par notre gouvernement, deve- 
nue obligatoire pour tous les doreurs qui ont des appren- 
lis ou des ouvriers. 

Plusieurs de ces derniers prennent leurs repas, et 
passent la nuit dans le local où l’on gratte-bosse les pièces 
de montres dorées, Lorsqu'il n’y a que l'opération du 

. gratte-bossage qui se fasse dans les chambres à manger 
ou à coucher, les inconvéniens qui en résultent pour la 
santé ne doivent pas être bien grands, pourvu que les 
phioles qui contiennent l'acide nitrique soient bien fer- 
mées, avec des bouchons en verre usés à l’émeri et que 
pour la nuit, on place ailleurs le liquide qu’on emploie 
pour gratte-bosser. La très petite quantité de vapeurs 
nitreuses qui se dégage dans cette dernière opération, ne 
Saurait nuire beaucoup aux organes de la respiration. — 
“11 serait mieux assurément ,. de s’en tenir aux préceptes 
rigoureux de l'hygiène, et que tous les doreurs fissent le 
gratte-bossage comme les autres opérations de la dorure, 
dans un local séparé et qui ne servit pas aux usages do— 
mestiques, Mais , nous avons indiqué plus haut la diffi- 


— 9328 — 
culté très grande d'obtenir de tous les doreurs qu'ils se 
soumissent à cette prescription, et la convenance qu'il y 
a à n'exiger d'eux que ce qui est absolument nécessaire 
sous le rapport hygiénique. 

Sur 62 ouvriers et apprentis dont nous avons pu re- 
connaître assez exactement l'état de santé, lorsque nous 
les avons visités, il s'en trouvait 44 qui jouissaient d'une 
santé plus ou moins forte, et qui n'avaient jamais été 
notablement incommodés par l'exercice de leur profes- 
sion. De ce nombre, il y avait 1# individus du sexe mas- 
eulin et 30 du sexe féminin. Huit du nombre total des 
ouvriers et apprentis , (2 hommes et 6 femmes) étaient 
grêles, délicats et jouissaient d’une santé chancelante, 
sans avoir jamais éprouvé ni tremblement convulsif, ni 
salivation mercurielle. Les dix autres, qui étaient tous 
du sexe féminin, avaient été atteints d'intoxication mer- 
curielle à des époques variées ; deux de ces ouvrières en 
étaient encore affectées lorsque nous les avons visitées. 
On trouve ici une grande disproportion, entre le nombre 
des doreuses ouvrières qui ont été atteintes de tremble- 
ment convulsif et de salivation, et celui des apprentis et 
ouvriers doreurs, dont aucun de ceux que nous avons 
visités n’en avait été affecté. Nous avons vu plus haut, 
que le nombre des doreurs propriétaires d'atelier qui, à 
des époques variées avaient ressenti les fâcheux effets du 
mercure, était aussi relativement beaucoup moins considé- 
rable que celui des doreuses qui ne sont pas dans la caté- 
gorie des simples ouvrières (10 hommes sur 28 femmes). 
À quoi tient cette fréquence relative de l’intoxication mer- 
curielle, beaucoup plus grande chez les femmes que chez 
les hommes qui s'occupent à la dorure ? Faut-il en cher- 


— 329 — 

cher la cause dans la délicatesse plus grande de la cons- 
titution de la femme , et dans sa mobilité nerveuse, qui 
doivent l’exposer à ressentir plus facilement les effets des 
vapeurs mercurielles ? Ou bien , la différence dont il s’a- 
git, tiendrait-elle uniquement à ce que les doreuses pas- 
sent plus souvent au feu que les doreurs? Nous n'avons 
pas eu l'occasion de faire des observations assez suivies 
pour résoudre cette question ; il est toutefois assez vrai 
semblable , que l’une et l'autre des causes indiquées con- 
courent simultanément à produire ce résultat. Le comité 
d'enquête n’a eu connaissance d'aucun cas d'intoxication 
mercurielle chez les ouvriers doreurs, qui fût survenue 
dans la première année de l’exercice de leur profession. 
De la première à la seconde année, il y avait eu # do- 
reuses d’atteintes; de la deuxième année à la troisième 
une doreuse; deux de la troisième. à la quatrième ; une 
de la quatrième à la cinquième , et deux. seulement de- 
puis la cinquième à la dixième année de l’exercice de 
leur profession. Relativement à l'âge de la vie où ces ou- 
vrières, ont été atteintes de tremblement. convulsif et de 
salivation mercurielle, 4 l'ont été de dix-huit à dix-neuf 
ans; une de dix-neuf à vingt ans; une de vingt à vingt-un 
ans; une de vingt-deux à vingt-trois; une de vingt-cinq 
à vingt-six ans et 2 de vingt-sept à vingt-huit ans. Des 
deux ouvrières qui se ressentaient encore de l’intoxica- 
tion mercurielle au moment de notre visite, l’une était 
âgée de vingt-un ans et l’autre de vingt-deux ans, 


— 330 — 


Causes de la fréquence, encore assez grande de l'intoxication 
mercurielle et des autres accidens de la dorure au feu dans 
les ateliers de nos montagnes ; et moyens de les prévenir. 


Les détails dans lesquels nous sommes entrés ci-des- 
sus , touchant la manière dont les doreurs de notre pays 
procèdent aux différentes opérations de la dorure au feu, 
conduisent naturellement à la connaissance des causes 
qui rendent les cas d'intoxication mercurielle encore assez 
fréquens parmi eux , et des raisons pour lesquelles l’état 
de santé de ces industriels n’a pas éprouvé toute l'amé- 

-_ lioration dont il est susceptible. 

Ces causes doivent être rapportées : 

1° Au manque d'appareil préservateur pour passer 
au feu, qui existe encore dans quelques ateliers de do- 
rure de notre pays; ces ateliers sont à la vérité en très 
petit nombre, puisque nous n’en avons trouvé que quatre 
qui en fussent complétement dépourvus. 

29 Aux vices de construction, au mauvais tirage, et 
au défaut de soins d'entretien d’un grand nombre des ap- 
pareils à hotte vitrée; d’où il résulte que dans l'opération 
de passer au feu, le mercure volatilisé par la chaleur ne 
s'échappe pas en totalité par le canal destiné à lui don- 
ner issue, mais qu'une quantité plus ou moins grande 
des vapeurs de ce métal pénètrent dans l'intérieur des 
ateliers, et se mêlent à l'air qu’on y respire. 

3° À ce que plusieurs des opérations dangereuses de 
la dorure au feu, telles que le recuit, la préparation de 
l'amalgame d'or et de mercure, son application et la mise 
en couleur ne se font pas avec les précautions indispen- 


; — 331 — 
sables pour que la santé n'en éprouve aucun dommage. 
4° Au défaut d'intelligence, à la malpropreté, à l'in- 
curie et quelquefois même au manque de sobriété de 
plusieurs doreurs. 

On peut espérer de remédier aux trois premières causes 
qui viennent d'être énumérées, et de rendre beaucoup 
moins insalubre l'exercice de cette profession, en astrei- 
gnant les individus qui l’exercent à observer toutes les 
précautions indispensables pour empêcher que leur 
propre santé, celle de leur famille et des ouvriers ou ap- 
prentis qu’ils emploient, n'en recoive de fâcheuses at- 
teintes, et pour que la salubrité publique ne soit pas 
compromise. Tel a été le but du réglement dont la co- 
_mité d'enquête a proposé l'adoption au gouvernement. 

Dans une profession qui expose à de si grands dan- 
gers ceux qui l’exercent, et qui peut devenir incom- 
mode et dangereuse pour le public, il est indubitable 
que l'autorité supérieure a le droit de prescrire les me- 
sures de police reconnues propres à prévenir ces dan- 
gers; c'est même pour elle un devoir impérieux de le 
faire. Aussi, notre gouvernement n'a-t-il pas hésité d’a- 
dopter, dans l'intérêt général, le projet de réglement 
que lui a présenté la commission d'enquête nommée par 
lui. Le réglement dont il s’agit, impose aux maîtres 
doreurs les obligations suivantes: 1° Toute personne qui 
voudra dorénavant se livrer à l'exercice de la dorure au 
feu, sera tenue d'en faire part au chef de la juridiction 
où.elle a son domicile, afin qu'il puisse faire examiner 
si le nouvel atelier réunit toutes les conditions de salu 
brité exigées pour que cette industrie y soit exercée sans 
danger pour la santé des ouvriers et du public. 1° Chaque 


— 332 — 
atelier devra être muni d'un ou plusieurs appareils à 
hotte vitrée, dont le tirage puisse être bien établi. L’o— 
pération de passer au feu devra toujours se faire sous cet 
appareil, et avant d'y procéder le doreur aura soin de 
s'assurer si le courant d'air ascendant s'y fait bien. 3° Les 
conduits destinés à donner issue aux vapeurs du mer- 
cure, devront s'ouvrir directement au dehors de la mai- 
son, ou dans un canal de cheminée exclusivement des- 
tiné à cet usage, et n'ayant aucune communication avec 
d’autres conduits. 4° Toutes les opérations dangereuses 
de la dorure au feu , telles que le recuit, le décapage, soit 
avec l'acide nitrique , soit avec le nitrate acide de mer- 
cure et la mise en couleur, seront faites sous un appareil 
à hotte d’un fort tirage, soit sous la hotte de l'appareil 
où l'on passe au feu, ou sous tout autre appareil préser- 
vateur de ce genre. Il est expressément interdit de faire 
ces opérations sous le manteau d'une cheminée de ewi- 
sine. 9° La préparation de l’amalgame d’or et de mer- 
cure, et celle du nitrate acide de mercure devront être 
faites sous un appareil à hotte vitrée d'un fort tirage. 
Lorsqu'on exécutera ces préparations à l'air libre, elles 
devront être faites à une distance assez grande des habi- 
tations, pour qu’elles ne causent aucun dommage et n’in- 
commodent personne. 6° Le local où se font les opérations 
dangereuses, du recuit, du passage au feu, de la mise en 
couleur, etc. nedevra jamais servir de chambre à manger 


ou à coucher pour les ouvriers. 7° Le ramonage des che-. 


minées des ateliers considérables , où plusieurs conduits 
d'évaporation du mercure aboutissent dans un même ca- 
nal, se fera avec des précautions suffisantes, pour que le 


ramoneur ne soit exposé à aucun danger d'intoxication” 


— 333 — 

mereurielle, Les précautions à prendre, et les ateliers 
où elles devront être prises, seront indiquées par des com- 
missions d'experts. 8° Les propriétaires d'ateliers veille- 
ront à ce que leurs ouvriers observent les soins de pro- 
preté, et les engageront à ne pas s’écarter des habitudes 
de sobriété. Ils feront en sorte qu’ils se servent de gants 
de taffetas ciré, ou de vessie pour passer au feu, et pour 
appliquer l'amalgame d'or et de mercure. En quittant le 
travail, les ouvriers devraient toujours se laver les mains 
avec de l'eau pure ou de l’eau de savon, et se rincer la 
bouche. — Ce réglement n'aurait que peu d'efficacité, 
sans la création de commissions d'experts chargés d’en 
surveiller l'exécution, et d'inspecter de temps en temps 
les ateliers des doreurs. Le comité d'enquête a, dans ce 
but, proposé l'établissement de deux commissions de 
surveillance, une pour le Locle, les Ponts et les Brenets, 
et une pour la Chaux-de-Fonds, la Sagne et les Plan- 
chettes; chacune d'elles composées de trois membres 
parmi lesquels se trouve un médecin. Notre gouverne- 
ment a adopté les vues de son comité d'enquête, et il a 
fait promulguer dans nos Montagnes une ordonnance de 
police, que le Constitutionnel neuchâtelois a publiée dans 
une de ses feuilles du mois d'avril 184%. 

Ce sont là, ce nous semble, toutes les mesures effi- 
caces de police médicale qu'il soit renièle de prendre à 
l'égard de la dorure au feu. 

Quant à la dernière des causes que nous avons indi- 
quée comme contribuant à l'insalubrité de cette profes- 
sion dans notre pays, il est bien difficile d'y porter re- 
mède par l'intervention de la police médicale. Les soins 
de propreté sont dans l'exercice de la dorure au feu, de 


— 334 — 

la plus haute importance pour le maintien de la santé. 
Indépendamment des moyens de préservation que nous 
avons déjà indiqués, on ne saurait trop recommander à 
ceux qui passent au feu et qui font l'application de l’a 
malgame, la précaution de se laver soigneusement les 
mains et la bouche en quittant leur ouvrage. Il serait 
aussi à désirer qu'ils eussent pour leur travail un vête- 
ment particulier, exclusivement affecté à cet usage, et 
qu'ils le maintinsent dans un grand état de propreté. 
Mais, comment parvenir à faire adopter à ceux des do- 
reurs qui sont négligens ou peu intelligens , les mesures 
d'hygiène privée nécessaires pour obtenir le but qu’on se 
propose ? IL est fort à craindre , que sous ce rapport, il 
ne reste toujours une lacune impossible à combler, et 
que malgré toutes les améliorations de salubrité qu’une 
police médicale éclairée puisse apporter à l’industrie de 
la dorure au feu, celle-ci ne continue à offrir des dan- 
gers pour la santé de plusieurs de ceux qui exercent 
celte profession. Cette dernière considération doit faire 
vivement désirer, que le procédé de dorure électro-chi- 
mique qui s’est introduit depuis quelque temps dans nos 
Montagnes ait du succès, et qu'il puisse être adopté dé- 
finitivement par tous les doreurs de notre pays. 

La société d'émulation patriotique, appréciatrice éclai- 
rée de tout ce qui se fait d’utile chez nous , désirant en- 
courager les travaux qui ont pour but l'amélioration du 
sort des doreurs, et le perfectionnement de la branche 
d'industrie qu'ils exercent, vient de récompenser par une 
médaille d’or, les efforts tentés par MM. Olivier Matthey 
et Jeanneret du Locle, pour rendre plus parfaits les résul- 
tats du nouveau mode de dorure, et le zèle et le désinté- 


— 335 — 

ressement qu’ils ont mis à publier leurs recherches et à 
répandre dans nos Montagnes le procédé dont nous par- 
lons. Si les espérances que l’on a conçues à cet égard 
viennent à se réaliser , comme on a raison de le croire, 
et que la dorure par le galvanisme réussisse à réunir la 
solidité à ses autres avantages, nul doute que de son 
adoption, il ne résulte un très grand bien pour la santé 
des doreurs de notre pays. Car le procédé galvanique 
n’entraîne par lui-même, aucun inconvénient grave pour 
la santé de ceux qui l’exercent, et il ne serait probable- 
ment pas difficile de prévenir, par de bonnes mesures de 
police, les accidens qui pourraient résulter de la prépara- 
tion des cyanures et des autres dissolutions salines dont il 
exige l'emploi. 

Les commissaires de notre gouvernement ayant été 
uniquement chargés d’une enquête hygiénique sur la do- 
rure au feu des pièces de montres dans notre canton, ils 
se sont abstenus de toute recherche touchant les améliora- 
tions qu'il y aurait à apporter à cette branche d'industrie, 

pour en rendre les procédés plus parfaits et moins dis- 
pendieux. Toutefois, nous ne saurions taire l'étonnement 
où nous avons été, en voyant que les doreurs de nos 
montagnes ne s'occupaient pas à recueillir une portion 
du mercure volatilisé par l’action de la chaleur. 
- Un seul d’entr'eux met en pratique cette mesure d’éco- 
nomie, tout en employant dans ce but un procédé très 
imparfait. Les moyens de condenser et de recueillir le 
- mercure ainsi réduit à l’état de vapeur, sont cependant 
bien connus et usités ailleurs depuis longtemps. Il suffit 
de jeter un coup d'œil sur les figures qui représentent les 
appareils préservateurs de Tingry et de Darcet, pour 
S'assurer combien ils sont simples et de facile exécution. 


25 


ANNEXE 


CONTENANT DIFFÉRENS TABLEAUX RELATIFS A L'INDUSTRIE 


DE LA 


DORGRE AD FEU 


Dans les Montagnes de Neuchâtel, et aux doreurs qui l'exerçaient au mois d'août 1843. 


A. 


TABLEAU DES ATELIERS DE DORURE AU FEU DANS LES 
MONTAGNES DE NOTRE PAYS AU MOIS D'AOUT 1843. 


Ateliers dont le comité d'enquête hygiénique a eu connaissance. 


Mairie des Ponts . . . . . . 5 
Mairie du Locle . . . . . . 28 
Mairie des Brenets . . . . . 2 
Mairie de la Chaux-de-Fonds . . 50 

TOP 0 77 09 

Atellers qui ont été visités par le comité d'enquête hygiénique. 

MOITIÉ GES PONS 24e ele 9 
Mairie du Locle . . . . . . 926 
Mairie des Brenets . . . . . 2 
Mairie de la Chaux-de-Fonds . . 30 

Total . . 61 


APPAREILS A PASSER AU FEU. 


Ateliers où, pour passer au feu, on fait usage d'appareils 


préservateurs. 
Mairie des Ponts . . . . . . 35 
Mairie du Locle . . . . . . 25 
Mairie des Brenets . . . . . 92 
Mairie de la Chaux-de-Fonds . . 27 


Total . . 57 (Suite.) 


(Suite du tableau A.) 


Ateliers où l’on ne fait usage d'aucun appareil préservateur 
pour passer au feu. 
Mairie du Locle . . ep leg | 
Mairie de la Chaux-de- Fonds sadrnk ls" 
4 


Total 
GENRES D'APPAREIL EMPLOYÉS POUR PASSER AU FEU. 
Ateliers où l’on emploie des appareils à hotte vitrée semblables à celut 


imaginé par Darcet, où des LANTERNES , Suivant l’expression consa- 
crée dans nos Montagnes. 


Mairie des Ponts . . . . . . 3 
Mairie du Locle . + . . . . 95 
Mairie des Brenets . . LATE 


Mairie de la Chaux-de-Fonds s :51128 
Total : . 52 


Ateliers où l’on se sert: d'appareils à hotte en tôle (cloches), 


ou en bois. 
Mairie de la Chaux-de-Fonds . . 3 
Ateliers où l'on se sert de loges vitrées où se placent ceux qui 
passent au feu. 
Mairie de la Chaux-de-Fonds, , 2 


Ateliers où l’on passe au feu dans un local où l’on prend les 
repas et où l’on passe la nuit. 
Mairie du Locle 
Mairie des Brenets 


> © 


Total . 6 


B. 


TABLEAU INDIQUANT LA DISPOSITION DES CONDUITS D'ÉVAPO- 
RATION DU MERCURE DANS LES ATELIERS DE DORURE VISI- 
TÉS PAR LE COMITÉ D'ENQUÊTE. 


Ateliers où les conduits d’évaporation du mercure s'ousrent 
à l'air libre. 


Mairie des Ponts ... . . . . .. 5 
Mairie du Locle . . . . . ... 21 
Mairie des Brenets +. . savnateor 2 
Mairie de la Chaux-de-Fonds TU ETES 

Total... . 51 


Ateliers où les conduits d’évaporation du mercure s'ouvrent dans des 
conduits de cheminée. 

Conduits s’ouvrant dans ( Au Locle : LL 

les cheminées de cuisine. | A la Chaux-de-Fonds 1 
Total . . 5 

Conduits s’ouvrant dans les che- { Au Locle . 1 

minéesréservées pour les lessives. | AlaCh.-de-Fonds 1 
Total 2 

Conduits s’ouvrant dans une 


cheminée destinée exclusive- 
ment à cet usage . ‘. . . A la Chaux-de-Fonds , #4 


Atelier dans lequel les vapeurs mercurielles s'échappent sans 
conduit d’évaporation. 


Mairie de la Chaux de Fonds . . . . 1 


C. 
opéRATION bu RECUIT Er pe LA MISE EN COULEUR. 


Opération du recuit. 


PONS LES LE à 
Ateliers où le recuit se fait. . . à Locle . . . . . 25 
Brenefs .20N, «1,9 


Chaux-de-Fonds . . 29 
Total . . 59 


$ nie : Éotle =". SAR 1 
liers où il n° il : 

| 7, made pu Chaux-de-Fonds RE | 

Total. . . 2 

Ateliers où il se fait sans l'appareil à 28 NL RP Ts 

Locle.7%10% 2: 10 7048 


à hotte . . 
{ Chaux-de-Fonds . 17 


Total . . 36 


Locle A4, 5 
Ateliers où il se fait au “pe de ) Brenets . . Pr 
la cuisine étant de Fonds . 
Total . . 12 
Ateliers où il a lieu sous la chemi- 
née de maisonnettes ou sous ? Chaux-de-Fonds . . 7 
une cheminée ad hoc 
Ateliers où le recuit a lieu dans { Ponts g 
des chambres à pur où à « Locle Res | 
coucher . Brent are ne PURE 
Total l 
Opération de la mise en couleur. 
Ateliers où pour cette opération { Ponts . . . . . 1 
on se sert d'appareils préser- { Locle . . . . . 12 
valeurs . Chaux-de-Fonds  . 15 


Total . . 28 (Suite) 


(Suite du tableau C.) 


Li 


Ateliers où lon n’emploie pas 
d'appareil préservateur. 


Ateliers où la mise en couleur 
a lieu sous la hotte vitrée de 
l'appareil à hotte. 


Ateliers où lon emploie des 
appareils particuliers. 


Ateliers où eette opération se 
fait dans des chambres à 
manger ou à coucher. 


Ateliers où pour mettre en cou- 
leur on ne se sert, ni de cire 
à dorer, ni d’autre composi- 
tion. . 


Ateliers où l’on se sert de cire à 
dorer et d’autres compositions. 


Ponts... 7, 
Locle 13 
Brenets … . . . 2 
Chaux-de-Fonds . 45 
Total 02 
PRE 5 « 4e ER 
Locle sûre DEA 
Chaux-de-Fonds . 8 
Total . 20 
À Pi (E) (OR SRPORA S PE D | 
Chaux-de-Fonds . 7 
Total . . 8 
Ponts 2 
Locle L 
Brenets 1 
Chaux-de-Fonds 7 
Total 14 
Mairie des Ponts . 3 
Mairie du Locle . 26 
Mairie des Brenets . 2 
Mairie de la Chaux-de- 
Fonds 98 
Total 59 
Mairie dela Chaux-de- 
Fonds. .,. . .: 2 


D. 


PRÉPARATIONS DU NITRATE ACIDE DE MERCURE ET DE 
L'AMALGAME D'OR ET DE MERCURE. 


Préparation du nitrate acide de Mercure. 


/ 
: , : , POS UE. MR 
Ateliers où la liqueur mercurielle \ Lodig108 est dsolédgs 


se prépare au foyer de l’appa- Brenets LEE 
reil à hotte. . PARLE Chaux-de-Fonds . 18 
Total _. 220.55 55 


Ponts. at eto at 
Ateliers où cette liqueur se- pré- \ Epcle. 2° 2 2 A 
pare à Pair libre. . . . . . | Brent." "1 
Chaux-de-Fonds . . A 

Total . . 16 16 


au foyer de la cuisine du ménage. de-Fonds 


Ateliers où elle a lieu sous une ( Mairie de la Chaux- 
cheminée adhoc. de-Fonds 
Cas non déterminés 


Ateliers où cette préparation se fait % airie de la Chaux- 


Total à géhéral TOUTE 


Préparation de l’amalgame d’or et de mercure. 


Ateliers où il se prépare au foyer Al or HAE Fa 
de V il ‘ sr7à P 
Dr 07 Chaux-de-Fonds . . 48 
Total . . 37 37 
Locle PTT 
Ateliers où il se prépare au foyer ) Brenets . . . .. 2 
de la cuisine du ménage. Chaux de fond Énnes 
| Total . . 45 15 


Ateliers où il se‘prépare sous une \ 
cheminée adhoc sans appareil | Chaux-de-Fonds 

préservateur. . . RS 

Ateliers où cette préparation a veu sb 
à l’air libre. 

Cas indéterminés 


Mairie des Ponts . 


Total 1 général NE D 61 


E. 


TABLEAU GÉNÉRAL DES DOREURS AU FEU EXISTANT AU MOIS 
D'AOUT 1843 DANS NOS MONTAGNES. 


Tableau des doreurs, ouvriers et apprentis compris. 


\ Sexe mas-| Sexe fé- | Total. 
culin. minin: 

Mairie des Ponts . . . . . . . . . I 2 6 

Mairie duLocle. ser - 52e à 20 28 L8 

Mairie des Brenets . . . . . . . . 2 2 [71 

Mairie de la Chaux-de-Fonds . . . . . 56 67 103 

Total général . . 62 99 161 


Tableau des apprentis et des ouvriers doreurs. 


Sexe Sex e fé- Total. 
masculin.| minin. 


Mairie des Ponts. 7... , : 1. 2 — 2 
Mairie du Locle;eus #5 0 Gus, ) oo Li 5 8 11 
Mairie des Brenets DD. han Là — 1 1 
Mairie de la Chaux-de-Fonds . . . . . D) L 55 

Total général . . 17 50 67 


Totalité des doreurs , apprentis et ouvriers compris, classés 
d'après l’âge. 


Sexe Sexe fé- | Total. 
masculin.| minin. 
De10 à 45ans. 2buct-ahsemeds. ? ET 1 2 5 
De 15 à 20 ans RAR er à PQ es 5 21 26 
DEMO IANS SE PR ER AS EEE CE APS 10 28 38 
De 95 à 50 ans Ve VON COPA Le 12 15 97 
De 30 à 55 ans RE | DNS. 7 5 6 11 
Do 35 à 40 ans 6 10 16 
De 40 à 45 ans 8 6 18 
DEN ATDO ANS ENEMRP PES ME PR 5 7 12 
De 50455 ans eut ti cure 9 1 5 
De 55 à 60 ans ‘ 0) Æ 2 
Age indéterminé B mn 9 
Total général . . 61 100 | 161 


(Suite) 


(Suite du tableau E) 


Apprentis el ouvriers doreurs distribués suivant l'âge. 


Sexe Sexe fé- Total. 
masculin.| minin. 

De 10 à 15 ans 1 2 5 
De 15 à 20 ans L 5 19 24 
De 20 à 25 ans | 5 16 19 
De 25 à 50 ans 5 8 15 
De 50 à 55 ans 1 1 9 
De 55 à 40 ans 1 dei 1 
De 40 à 45 ans 1 1 2 
De 45 à 50 ans Li 1 1 
Age indéterminé 1 n 9 

Total général . . 18 49 67 


Totalité des doreurs, apprentis et ouvriers, classés d’après le laps de . 
temps écoulé depuis qu’ils ont commencé leur profession. 


LU 


Sexe Sexe fé- | Total. 
masculin. minin. 

Depuis 10 jours à 6 mois . . . . .. 11 15 24 
De 6 mois à 1 an 5 11 14 
D'un an à 18 mois 2 5 7 
De 18 mois à 2 ans 2 2 ke 
De 2 ans 2'/; ans 2° 2 2 
Le2'}; à5ans . m1 10 14 
De 5 à 4 ans n 6 10 
De 4 à 5 ans 9 3 b) 
De 5 à 6 ans 6 r' 15 
De 6 à 7 ans 5 1 le 
De 7 à 8 ans 2 2 4 
De 8 à 9 ans 2 k 6 
9 à 10 ans 1 1 2 

10 à 15 ans 2 9 11 

De 15 à 20 ans 3 6 9 
De 20 à 95 ans 3 7 10 
DA ians. . . . . . 9 7 6 
Laps de temps non déterminé. 9 7 16 
É * Total général . . 61 100 | 161 


(Suite) 


(Suite du tableau E.) 


Apprentis et ouvriers doreurs distribués d'après le laps de temps 
écoulé depuis qu’ils ont commencé leur profession. 


Depuis un jour à 6 mois . 
De 6 mois à 1 an 

D'un an à 18 mois . 

De 18 mois à 2 ans 

De 2 à 2'/: ans. 

De 2'/, ans à 5 ans 
Desàk ans 

De 4 à 5 ans 

De 5 à 6 ans 

De 6 à 10 ans 

De 10 à 15 ans . 

De 15 à 20 ans . 

De 20 à 95 ans . 

Laps de temps non déte 


Total général 


Sexe Sexe fé- | Total. 

masculiu.] minin. 

10 9 19 
3 9 12 
1 ni \75 
+ 2 RE. 
Æ 2 3 
d 6 214 
1 nn b] 
— 2 2 
— b) 6) 
— 1 1 
— 1 1 
1 — 1 
— 1 1 
2 2 l 
19 L8 67 


F. 


OUVRIERS POREURS ET APPRENTIS DISTRIBUÉS SOUS LE 
RAPPORT DU LOGEMENT ET DES ENDROITS OÙ ILS 
PRENAIENT LEURS REPAS. 


Sexe Sexe fé- Total. 
masculin.| minin. 


Ouvriers qui couchent chez leurs maîtres 


dans le local où l’on passe au feu . . . —_ 1 1 
Ouvyriers qui couchent dans le local où l’on 
mehen Couleur . 7 #5 15 ue - an 6 6 


Ouvriers qui passent la nuit dans des en- 

droits où l’on ne passe pas au feu et où 

l'on ne fait pas la mise en couleur . . 17 42 59 
Cas non déterminé . . : : : . . . — — 1 


Ouvriers prenant leurs repas dans le local 
où l’on passe au feu, 
avec appareil préservateur . . = 1 1 
sans appareil préservateur . . e = ÉE 
Ouvriers prenant leurs repas dans le local 
- où l’on met en couleur, 
avec appareil préservateur . . l 2 


sans appareil préservateur 1 — 1 
Ouvriers couchant dans le local où l’on 
grattebosse . 5 pu 10 


Ouvriers prenant leurs repas dans lé local 
où l’on grattebosse _. . . . . . 7 4 11 


G. 


TABLEAU DE L'ÉTAT DE SANTÉ DES DOREURS AU FEU DE 
NOS. MONTAGNES, A LA FIN DU MOIS D'AOUT 1843. 


Totalité des doreurs, apprentis et ouvriers compris (*). 


Sexe Sexe fé-- 
masculin. | minin. 


Total. 
Doreurs jouissant de la plénitude de leur 

santé, et n'ayant jamais été affectés de 

tremblement convulsif, ni d’autres symp- 

tômes d'intoxication mercurielle . . . 58 b2 90 
Doreurs dont la santé est peu forte, et qui 

sont d’une constitution grèle et délicate, 

mais n’ayant jamais été atteints d’intoxi- 

cation mercurielle . . . . ; 5 9 11 20 
Doreurs qui ont été atteints d'intoxication 

mercurielle à des époques plus ou moins 

éloignées , mais qui en sont actuellement 


guéris . . . 6 21 27 
Doreurs tucllement atteints de A TSEE 
MentiCONVUISIÉ. + 2: M; . . ." + l 7 11 


Apprentis et ouvriers doreurs (?). 


Ouvriers doreurs jouissant de la plénitude 
de la santé, et n’ayant jamais été atteints 
d'intoxication mercurielle 

Ouvriers dont la santé est peu forte, ét qui 
sont doués d’une constitution grèle et dé- 
licate, mais n’ayant jamais été atteints 
d'intoxication mercurielle . . . . 2 6 8 

Ouvriers qui ont été atteints d'ittoxication 
mercurielle, dont ils sont actuellement 


DUERS 0% — 8 8 
Ouvriers eine affectés dlescation 


RMPLCLPICIIE er ee DR TAC à — 2 2 


() Sur le nombre total de 161 doreurs, il y en a 13 dont on n’a pas pu constater l’état de 
santé. 

(2) Sur les 6; apprentis et ouvriers doreurs, il yena 5 dont il n'a pas été possible de con- 
stater l’élat de sante. 


H 


Totalité des doreurs, apprentis et ouvriers compris, qui ont été at- 
teints d'intoxication mercurielle, dont ils sont actuellement guéris, 
distribués suivant les localités où ils exercent leur profession. 


Sexe Sexe fé- 


| masculin,|. minin. Total. 
RD Con à 20 7 ohne — 1 1 
- Au Locle . 1 5 6 
- Aux Brenets RE Cie ee — 1 1 
A la Chaux-de-Fonds AU 0 TAN 5 | 14 19 
ne 
a QE PR ME ER ET 27 


Doreurs atteints actuellement d'intoxi- 
cation mercurielle. 
Au Locle . . MAL EE ARR 1 1 2 
A la Chaux- de Fbudé | | 6 9 


Total: 5 SN en € 11 


Totalité des doreurs qui ont été affectés d'intoxication mercurielle 58 ; 
savoir : hommes 10, femmes 928. 


Ouvriers atteints d'intoxication mercurielle à une époque 
antérieure , et actuellement guéris. 


\" 


Sexe Sexe fé- 
masculin.| minin. Total 
MAP ODES 5 ne Ve NTI SUR — — — 
MOUrIC MED DIE re BAUER... .æ, — 2 2 
“ Aux Brenets . . smont-foncils de — 6 6 
Ala Chaux-de-Fonds . SEP REF ATEN — _ — 
Total 8 


: Ouvriers actuellement atteints d’intoxi- 
cation mercurielle 

Au Locle. . . . TAC: LOT — | — 

A la + APE a 


Totalité des ouvriers doreurs qui ont été atteints d'intoxication 
mercurielle 10; tous du sexe féminin. 


(Suite) 


(Suite du tableau H.) 


Tableau des ousrières qui, à des époques plus ou moins éloignées, ont 
été atteintes d'intoxication mercurielle, classées suivant l’époque de 
l'exercice de leur profession où elles ont été atteintes. 


Dans la 1"° année 

De la 4° à la 9° année . 
De la 2° à la 5° année 
De la 5° à la 4° année . 
De la 4° à la 5° année 
De la 5° à la 6° année 
De la 6° à la 8° année 
De la 8° à la 9° année . — 
De la 9° à la 10° année. . . . 1 


Total . .., ,: 10 


| pate hours En | 


Ouvrières qui ont été atteintes de tremblement convulsif, ou d'autre 
symptôme d'intoxication mercurielle, classées suivant l’âge de la vie 
où elles en ont été affectées. 


De 18 à 19 ans ll 
De19à 20ans . . 1 
De20à21ans . , 1 
De 292 à 95 ans . 1 
De 95 à 26 ans 1 
De aa ans En, 2 

Total 1: Rue. M0 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DB NEVGESTER. ‘ 


Séance du 5 novembre 1845. 


Président, M. L. CouLox. 


M. Dollfuss-Ausset, de Mulhouse, présent à la séance, 
est invité par la société à donner quelques détails sur 
un instrument hygrométrique, qu’il substitue avec avan- 
tage selon lui, aux hygromètres ordinaires, et qu'il 
nomme roséomêtre. Les principes sur lesquels repose la 
valeur de cet instrument sont les mêmes que dans l'hy- 
gromètre de Daniell. Il s’agit de fixer la différence qui 
existe entre la température à laquelle a lieu le point de 
rosée et la température de l'air, afin d'en déduire la 
quantité relative ou absolue de vapeur d'eau contenue 
daus l'atmosphère ambiante, | 

Au lieu de l'instrument fragile de Daniell, M. Dollfuss 
prend un vase quelconque de cuivre doré, le remplit 
- d’eau qu'il réfroidit par de la glace, et en prend la tem- 
pérature au moyen d'un bon thermomètre gradué sur 
verre , qu'il agite dans son sein, afin d'obtenir dans toute 
la masse une température uniforme. Le moment où la 
rosée commence à se déposer sur les parois du vase est 
très-facile à saisir en raison de sa grandeur, et comme 
le thermomètre peut avoir également une graduation à 


— 350 — 

grande échelle, les erreurs de lecture deviennent bien 
moins faciles et moins grandes que dans l’hygromètre de 
Daniell. De plus, la température de l'eau contenue dans 
le vase variant aussi moins vite que celle que l’on obtient 
au moyen de l’éther sulfurique, comme dans l’hygro- 
mètre de Daniell, M. Dollfuss pense que l'indication de 
la température du point de rosée est plus sûre. Enfin le 
roséoméêtre a l'immense avantage d'être très-transpor- 
table, puisque la seule partie cassante en sont les deux 
thermomètres , qui peuvent même être réduits à un seul, 
si l’on opère successivement. 

Ce sont ces avantages qui ont déterminé M. Dollfuss 
à employer son roséomètre dans les observations qu’il a 
faites au glacier de l’Aar pendant cet êté, conjointement 
avec M. Desor. Les comparaisons qu'il a faites de cet ins- 
trument avec les autres hygromètres et le psychromètre 
l'ont assuré que sa marche était tout aussi régulière. 

Lorsqu'il n’a pas de glace à sa disposition, M. Dollfuss 
substitue un mélange réfrigérant quelconque, comme celui 
que l’on obtient au moyen du sulfate de soude et de l’a- 
cide hydrochlorique , ou tout autre connu. 

Une discussion s'engage sur cet objet, et MM. Desor, 
Guyot y prennent surtout part. 


M. Guyot complète, par quelques nouveaux faits qu'il 
a recueillis récemment, la communication qu'il avait 
faite sur la répartition des espèces de roches dans l'intérieur 
du bassin erratique du Rhône. (Voir à la fin du volume), 


ARNOLD GUYOT, secrétaire. 


— 351 — 


Séance du 19 novembre 1845. 
Président, M. L. Courox. 


M. Ladame présente verbalement quelques observations 
sur une méthode destinée à apprécier la région de l'at- 
mosphère dans laquelle agissent les causes qui détermi- 
nent les variations de hauteur du baromètre. Le principe 
qui sert de base à cette méthode est celui-ci : 

Supposons une rupture d'équilibre dans une atmos- 
phère en repos; si la cause qui a produit cette rupture 
agit simultanément dans toute l'étendue de l'atmosphère, 
on obtiendra un quotient constant, en divisant la course 
barométrique par la hauteur primitive; mais si celte cause 
n'agit que dans une étendue limitée, le quotient ne sera 
| pas le même partout, sa plus grande valeur existera dans 

les points où la cause agit avec le plus d'énergie. 

En comparant pour l’année 1812 les courses baromé- 
triques mensuelles et annuelles pour Cornaux, la Chaux- 
-de-Fonds, les Ponts et la Brévine avec la hauteur moyenne 
du baromètre dans ces localités, on arrive à ces résultats : 

1° Le quotient de la course barométrique par la hau- 
teur moyenne est toujours plus faible dans les points plus 
élevés que dans les points inférieurs. 

29 La différence entre ces quotients est plus grande pen- 
dant l'été que pendant l'hiver: d’où l’on conclut que les 
causes des variations barométriques ont leur source dans 
les régions inférieures de l'atmosphère, et que pendant 

- l'hiver leur action s'exerce dans une plus grande éten- 
due de l'atmosphère que pendant l'été. 

IL est important de remarquer que les conséquences 


26 


— 392 — 

précédentes sont tirées d'observations faites dans des lieux 
très-peu distants dans le sens horizontal, et qui peuvent 
être considérés comme placés sur la même verticale. 
Cette circonstance rend ces observations particulièrement 
intéressantes, quoique la différence de niveau entre les 
points extrêmes soit seulement d'environ 650 mètres. 

La dernière conséquence indiquée permet d'expliquer 
pourquoi les variations barométriques sont plus nom-— 
breuses et ont une plus grande amplitude en hiver qu'en 
été ; en effet si les mouvemens du baromètre résultent de 
causes qui agissent sur une portion considérable de l'at- 
mosphère, une faible variation dans leur intensité pourra 
déterminer des oscillations barométriques très-fortes dans 
tel lieu donné. Un exemple rendra ceci plus sensible. 

Les marées sont dues, comme on le sait, aux actions 
combinées de la lune et du soleil ; elles ont une grandeur 
qui dépend de l'intensité de ces actions et de la position 
relative des côtes sur lesquelles on observe ce phénomène; 
car dans le cas où la mer est resserrée entre deux côtes 
rapprochées, les marées atteignent une hauteur bien su- 
périeure à celle qu'elles ont en plein océan ou sur des 
côtes ouvertes. Une faible variation dans l'intensité de 
l'action luni-solaire produira des effets d'autant plus ap- 


parens que la mer sera plus resserrée entre des côtes voi- 
sines. 


M. Desor présente quelques considérations sur les en- 
vahissemens des glaciers dans ces dernières années. On 
peut citer comme exemple le glacier de Gauli, dans la 
vallée d'Urbach, le glacier de Zermatt, où l’on a été obligé 
d'enlever les chalets qui existaient de mémoire d'homme, 


— 393 — 
plusieurs glaciers du Tyrol, et enfin le glacier de l'Aar, 
qui a empiété en moyenne de 20 pieds par an, depuis 
1842. Les envahissemens de ces dernières années lui 
paraissent avoir pour cause principale les étés froids et 
neigeux de 1843 et 18%%. L'effet des eaux atmosphé- 
riques sur les glaciers est très-différent, suivant qu’elles 
tombent sous la forme de pluie ou sous la forme de neige. 
Dans le premier cas, elles ne font aucun tort à l'ablation 
qui peut continuer malgré la pluie. Si au contraire elles 
tombent en neige, l’ablation non-seulement est interrom- 
pue pendant la chute; mais encore les jours suivans, pen- 
dant lesquels la chaleur atmosphérique est employée à 
transformer la neige en névé. En attendant, le glacier ne 
subit aucune ablation, jusqu'à ce qu'il soit de nouveau 
dégarni. Pour peu que la neige persiste deux jours, voilà 
l’équivalent de deux jours d’'ablation, c'est-à-dire en 
moyenne six centimètres de glace qui sont conservés au 
glacier, pare seul fait que les eaux atmosphériques sont 
tombées en neige, au lieu de tomber en pluie. Que de 
pareilles chutes de neige se renouvellent seulement trois 
ou quatre fois par été, et l’on aura une épaisseur de glace 
d'environ un pied, qui se trouve acquise au glacier. Le 
chiffre en a certainement été plus considérable pendant les 
. étés de 1843, 1844; de là leurs envahissemens si frappans. 
Cependant ces empiètemens ne sont pas aussi rares qu’on 
pourrait le croire. M. Desor, après avoir comparé les do- 
eumens relatifs à l'histoire des glaciers dans les temps his- 
- loriques, a trouvé que ceux qui attestent un agrandisse- 
ment sont beaucoup plus positifs que ceux que l’on invoque 
en faveur de leur retrait, Ce sont tantôt de vieilles chartes 
constatant des droits de passage en des lieux que les 


— 354 — 
glaces ont envahis; ailleurs ce sont des chemins pavés 
qu'on retrouve sous le glacier lui-même, comme par 
exemple au Monte-Moro et au glacier d'Aletsch. Cepen- 
dant il n’est guère possible de calculer d’après des docu- 
mens pareils la quantité dont le glacier à avancé dans 
un temps donné. M. Desor vient de découvrir un docu- 
ment qui, sous ce rapport, est plus significatif. C’est une 
carte des glaciers de l’Aar, dessinée, dans la première 
moilié du siècle dernier, par un médecin de Lucerne, 
nommé Kappeler, et publiée par Altmann, dans son ou- 
vrage sur les montagnes de glace de la Suisse ('). A cette 
époque le glacier se terminait en amont des grottes aux 
cristaux. D’après l'échelle qui accompagne cette carte, la 
distance de l'extrémité du glacier au torrent de l'Ober-Aar 
aurait été de deux tiers de lieue, c'est-à-dire de plus de 
3000 mètres, tandis qu'à présent le talus terminal n’en 
est plus qu’à 90 mètres. L'auteur de la carte dit positi- 
vement, dans sa lettre à Altmannn, qu'à cette époque le 
glacier avançait beaucoup, et qu'on ne se souvenait pas 
de l'avoir vu aussi bas dans la vallée. Si l’on considère, 
ajoute M. Desor, que le glacier de l'Aar, de tous les gla- 
ciers, est celui qui charrie le plus de débris rocheux, n’a 
pas de moraine frontale, et qu'il n’en existe aucune trace 
dans tout le fond plat du Grimsel, on peut en inférer 
que le glacier n’a jamais subi de retrait; car dans ce cas 
il aurait laissé devant lui une quantité notable de débris. 
On ne peut pas non plus supposer qu'il ait subi ancien- 
nement des oscillations, car il aurait poussé devant lui 


(*) Versuch einer historischen und physischen Beschreibung der helve- 
tischen Eisbergen. Zurich, 1751. 


— 359 — 

ces mêmes débris, toutes les fois qu'il aurait été en crue, 
et 1l en serait résulté de puissantes digues, dont on de- 
vrait retrouver les traces. Or l'absence de pareilles digues 
combinée avec l'envahissement considérable que cons 
tate la carte ci-dessus mentionnée, sont une preuve que 
le glacier est toujours allé en augmentant, et par consé- 
quent que la température des Alpes s'est détériorée dans les 
temps historiques. 

M. Desor développe ensuite quelques considérations 
sur l'évaporation et la condensation des glaciers dans les 
hautes Alpes. Il résulte des observations qu'il a faites, 
que , pendant la belle saison, le glacier condense pres- 
que continuellement, tandis que les cas où il évapore 
sont très-rares. Au premier abord ce résultat a lieu de 
surprendre, surtout si l'on songe à la sécheresse de l’air, 
que la plupart des voyageurs représentent comme un 
trait dominant de l'atmosphére dans les hautes régions. 
Cette sécheresse est en effet très-grande, à tel point que, 
passé une certaine limite (10,000 pieds environ), la trans- 
pivalion s'évapore instantanément lorsque le ciel est serein. 
Il n’en est pas de même des glaciers qui, par cela même 
qu'ils ne s'élèvent jamais au dessus de 0°, se trouvent 
dans des conditions tout-à-fait différentes. En effet pour 
- qu'il y ait évaporation , la première condition, c'est que 
le corps qu'on veut faire évaporer soit à une température 
supérieure au point de rosée. Si la température est in- 
- férieure, il y aura au contraire toujours condensation. 
Qu'on place l'un à côté de l’autre, dans un appartement 
dont la température est à + 10° et l'air à peu près à 
saturation , deux vases remplis d'eau, lun à + 20° et 
Vautre à 09, le premier évaporera tant qu'il conservera 


— 326 — 

une lempérature supérieure à 10°, le second, au con- 
traire, condensera aussi longtemps qu'il n'aura pas at- 
teint cette même température. D'un autre côté, l'évapo- 
ration est d'autant plus active que la différence entre le 
terme de la saturation (le point de rosée) et la tempéra- 
ture du corps évaporant est plus grande. Comme l'air 
contient alors une quantité de vapeur d’eau très-faible, 
comparativement à celle qu'il peut tenir en suspension, 
il en emprunte avec avidité à tous les corps humides en- 
vironnans, et l'évaporation est presque instantanée. Le 
glacier, au contraire, est à l'abri de cette évaporation; 
il condense, pour peu que le point de saturation soit au- 
dessus de 0°. C’est à ces circonstances qu'il faut attribuer 
les effets de l’air des hautes Alpes sur la peau qui se flétrit 
et se desséche sous l'influence de cette absorption. L’habi- 
tude des montagnards de s'envelopper le visage d'un voile, 
lorsqu'ils montent dans les hautes régions, quoiqu'elle 
soit chez eux une affaire d'expérience , est en soi tout à 
fait rationnelle. Ils se préservent ainsi de l’évaporation, 
parce qu'au moyen de la respiration, ils entretiennent 
autour d'eux une atmosphère plus saturée d'humidité. 

On s'explique ainsi tout naturellement comment il 
peut y avoir simultanément évaporation et condensation 
sur différens corps. Le glacier condense parce qu'il est 
à une température très-basse; notre corps évapore, au 
contraire, parce qu'il est à une température élevée. 


ARNOLD GUYOT, secrétaire. 


di rr  n Esiée 


Séance du 4 décembre 1845. 
Président , M. L. CouLon. 


M. Agassiz communique quelques observations sur la 
distribution géographique des êtres organisés ; il rappelle 
d'abord les travaux de M. de Humboldt, qui, le premier a 
fait connaître les grandes lois qui régissent la répartition 
des végétaux à la surface du globe ; il fait voir ensuite 
de quelle manière ces idées fondamentales ont été appli- 
quées en détail. Après avoir montré comment la végé- 
tation se développe des régions froides et tempérées vers 
les régions tropicales, et comment elle s’apauvrit de la 
même manière, à mesure qu'on s'élève au-dessus du 
niveau de la mer, M. de Humboldt insiste sur le mode 
d'association des plantes diverses, comme caractère des 
faunes locales. Schouw, dans sa géographie des plantes, 
a tracé des cartes où les régions botaniques sont limi- 
tées d'après la prépondérance de telle ou telle famille 
plutôt que d’après le mode d'assemblage de familles 
diverses, d'où il est résulté des limites moins natu- 
relles que celles que M. de Humboldt a tracées dans ses 
tableaux de la nature. Le principe de Schouw a quelque 
chose de vrai, mais son application exclusive conduit à 
des résultats que l'aspect de la nature dément. C’est ainsi 
que la limite de la végétation des arbres indique, selon 
M. Agassiz, une différence bien plus grande, dans les 
flores du nord, que ne le fait la prépondérance des saxi- 
frages et des mousses adoptée par Schouw pour caracté- 
riser une zône qui empiète d'une manière indéterminée 
sur la zône des arbres. Du reste cette limite des arbres ne 


— 358 — 

coïncide pas rigoureusement avec les isothermes, puis- 
qu'elle s’avance jusque vers le 70° de latitude nord, à 
l’ouest, près de l'embouchure du Coppermine, dans l'A- 
mérique du nord, où les isothermes sont très-déprimées, 
et qu'elle s’abaisse jusqu'au 61° sur la côte orientale du 
Kamtschatka, où les isothermes se relèvent vers le détroit 
de Behring. Il est donc très-vraisemblable que cette limite 
est le résultat de phénomènes compliqués, dépendant 
moins de la température moyenne, que de l'exposition de 
ces contrées et du mode de répartition de la chaleur pen- 
dant l’année. | 

L'uniformité de la végétation dans les trois continents 
qui convergent vers le pôle est un fait incontestable, 
néanmoins, M. de Martius, dans une esquisse des limites 
des flores qui accompagne son histoire des palmiers, dis- 
tingue cinq flores septentrionales, dont les parties arcti- 
ques sont composées d'espèces en grande partie identiques. 
C'est ainsi qu'il admet encore, dans l'Amérique du sud, 
trois flores Andiennes qui occupent toutes trois des ré- 
gions dont la végétation présente les mêmes caractères 
naturels. Ces divisions étant essentiellement géogra- 
phiques, ne peuvent avoir aucune valeur pour la con- 
naissance des flores naturelles ; car s’il n’y a pas de doute 
que la forme et la position du continent exercent une 
grande influence sur la distribution géographique des 
êtres organisés, il ne faut pas oublier non plus que la 
tâche de la physique du globe est d'emprunter à l'étude 
des êtres vivants les lois de leur distribution, bien plutôt 
que d’énumérer les animaux et les plantes qu'on observe 
dans telle ou telle division géographique. 

En recherchant d'après quelles considérations on pour- 


DE 


— 359 — 

rait arriver à une délimitation naturelle, M. Agassiz croit 
en avoir trouvé le principe dans l'extension des familles 
naturelles elles-mêmes, tant dans le règne animal que dans 
le règne végélal. En effet , il est certaines familles de vé- 
gélaux, par exemple, qui sont répandues sur toute la 
surface du globe ; ce sont celles qui servent en quelque 
sorte de lien à toutes les autres ; ce sont en même temps 
celles qui fournissent la nourriture la plus ordinaire des 
animaux herbivores : telles sont les graminées, les légumi- 
neuses, les composées. D'autres sont plus particulière 
ment propres aux régions tropicales; telles sont, parmi 
les plantes, les palmiers, et parmi les animaux, les singes 
et les pachydermes. D’autres sont plutôt répandues dans 
| les régions froides et tempérées ; telles sont parmi les 
plantes, les conifères et les crucifères; tels sont parmi 
les animaux, les cétacés, les palmipèdes et les gadoïdes, ete. 
D'autres familles enfin sont circonscrites dans des contrées 
particulières ; soit dans les régions tropicales, soit dans 
les régions tempérées ; tels sont les cactus dans l'Améri- 
que du sud, les bruyéres en Europe, sur les pourtours 
de la Méditerranée, les marsupiaux de la Nouvelle-Hol- 
lande, et les édentés de l'Amérique du sud. 

Si maintenant, dit M. Agassiz, nous appliquons ces 
principes à la délimitation des faunes et des flores, il 
nous sera facile de reconnaître que certaines familles étant 
essentiellement tropicales, tandis que d’autres occupent 
des zônes tempérées, ces divisions astronomiques coïn-— 
cident en général avec les traits les plus saillants de la dis- 
“ribution des êtres organisés. Seulement les limites or- 
ganiques présentent des contours moins réguliers, car 
ils sont accidentés, suivant des influences climatologi- 


— 360 — 
ques. Notre région arctique ne sera donc pas circonserite 
par les cercles aretiques, mais par la ligne qui indique 
la limite de la végétation des arbres. Notre région tem- 
pérée s'étendra de là jusqu'aux confins de la végétation 
des palmiers, et notre région tropicale embrassera l’éten- 
due occupée par ces derniers. 

Quant à la délimitation des faunes et des flores en par- 
ticulier, il est évident que le principe d'association des 
types, posé par M. de Humboldt comme caractéristique 
des faunes particulières, est le seul vrai; mais pour ne 
pas tomber dans l'arbitraire en l’appliquant, je pense qu'il 
faut emprunter leurs limites à celles de familles localisées 
qui se combinent dans différentes contrées. On peut dés 
lors poser en principe que pour établir les grandes zônes « 
de végétation et de la distribution des animaux, il faut se « 
diriger d'après les limites des grands groupes de végétaux 1 
et d'animaux, tandis que c’est d’après certaines familles w 
de plantes et d'animaux localisés qu’on peut établir les » 
faunes et les flores particulières. 

Pour montrer les avantages de ces principes, M. Agas- « 
siz fait voir comment on peut diviser les vastes étendues w 
d'eau qui recouvrent une si grande portion de notre 
globe, en faunes maritimes très-naturelles ; seulement « 
il fait remarquer que les limites de la distribution des” 
animaux aquatiques ne coïncident pas complétement, « 
dans leur circonscription naturelle, avec les limites des 
flores et des faunes terrestres. C'est ainsi que sur less 
côtes de la Norwège et du Groënland la faune maritime ; 
arctique s'étend plus au sud que la limite des arbres; mais” 
elle descend encore plus au sud, sur les côtes américaines 
que sur les côtes européennes, et ici les limites de ré 


— 361 — 
partition sont conformes aux inflexions des isothermes. Il 
suffit de comparer la faune du Massachussets avec celle 
du nord de l'Europe pour s'en convaincre. 

A cette occasion, M. Agassiz met sous les yeux de la 
Société un grand nombre de cartes sur lesquelles il a 
transcerit les limites de distribution des principales familles 
de poissons, et il fait voir comment, au moyen du mode 
de répartition des familles les plus répandues et des fa- 
milles localisées, il est parvenu à tracer les contours des 
faunes maritimes avec autant de précision que ceux des 
faunes terrestres. Il rappelle en même temps quelle in- 
fluence les formes des continents, l'orientation des côtes 
et la direction des courants exercent sur ces distributions. 
Les faunes qu'il a distinguées sont les suivantes : la faune 
arctique; la faune européenne, y compris les parages de 
la Méditerranée et des Canaries, qui se terminent en 
pointe sur les côtes septentrionales des Etats-Unis; la 
faune caraïbe qui s'étend du Rio-de-la-Plata jusqu'aux 
environs de New—York ; la faune de Guinée; la faune du 
Cap; la faune Madécasse, avec les Séchelles et les Iles 
de France et de Bourbon; la faune Indo-Chinoise, com- 
prenant les parages du Décan, de l'Indo-Chine, des Mo- 
luques et des Philippines ; la faune de la Nouvelle-Hol- 
lande; la faune japonaise; la faune polynésienne; la faune 
californienne ; la faune chilienne et la faune antarcti- 
que. Si quelques-unes de ces faunes ont un grand nombre 
d'espèces communes, il n’en est pas moins vrai que toutes 


ont leurs types particuliers. 


Ces études sont d'autant plus intéressantes qu'elles 
offrent des applications immédiates à l’étude des fos- 
siles et de la distribution de leurs espèces dans les ter- 


— 362 — 
rains. Il n'y a peut-être pas de classe qui présente des 
faits de distribution géographique circonscrits dans des 
limites plus étroites que la classe des poissons. Ce résul- 
tat est complètement opposé à l'opinion qui attribue en 
général aux poissons une distribution géographique très- 
étendue. M. Agassiz ne nie pas le fait de la dispersion 
de certaines espèces sur de vastes aires; il affirme seule- 
ment que ces faits sont peu nombreux et qu’en général 
les poissons ont une répartition restreinte; il cite surtout 
à l'appui de cette proposition les poissons d'eau douce en 
général, et plus particulièrement ceux des familles des 
Characins, des Chromides, etc. En général les animaux 
ont des aires de répartition plus circonserites que les 
plantes, et cela se comprend aisément lorsqu'on songe à 
la dépendance où sont un grand nombre d'animaux de 
l'existence de certaines plantes. Enfin M. Agassiz signale 
la coïncidence remarquable qui existe entre les limites 
de distribution de certaines familles d'animaux et de plan- 
tes, par exemple, des palmiers et des singes. 
F. Sacc, secrétaire. 


M. le professeur Sacc communique une note sur l'acide 
succinique. 

Il existe, dit-il, dans plusieurs parties du globe et sur- 
tout sur les bords de la Baltique, une substance m'né- 
rale qui paraît cependant avoir une origine organique ; 
c'est le succin ou ambre jaune. Lorsqu'on distille ce com- 
posé, il passe une huile particulière douée d’une odeur 
repoussante, et un acide particulier, volatilisable sans dé- 
composition. Ce corps, qu'on appelle acide succinique, - 
est d'un brun plus ou moins foncé et très-difficile à ob=. 


— 363 — 
tenir blanc par les procédés ordinaires; aussi celui qui 
est bien pur est-il très-cher, ce qui en empêche l'usage 
général dans les laboratoires , où il est trés-utile pour sé- 
. parer le fer d'avec le manganèse. Nous venons de décou- 
vrir un moyen facile de préparer à bon marché cet acide 
et de l'avoir plus pur que par tout autre moyen. Après 
avoir recueilli l'acide succinique, produit brut de la 
. distillation, et l'avoir desséché aussi bien que possible 
entre des doubles de papier Joseph, on le dissout jusqu'à 
refus dans de l'acide nitrique concentré du commerce, 
chauffé au bain d'eau jusqu'à 100°. Dès que cette disso- 
. lution est saturée, qu'il ne s'en dégage plus de vapeurs 
nitreuses, produit de l’oxidation de l'huile empyreuma- 
tique qui salissait l'acide brut, on l’ôte du feu. Par le 
refroidissement toute la capsule se remplit de belles co- 
 lonnes cannelées , analogues aux cristaux du salpêtre, et 
out aussi longues qu'eux. On jette cet acide, qui est de 
- la plus grande pureté, sur un filtre dont on a préalable- 
“ ment bouché le bec avec quelques fragmens de verre. On 
brise les cristaux contre les parois de l'entonnoir avec 
: une baguette de verre et on le couvre avec une plaque 
de la même substance pour empêcher qu'il n’y tombe de la 
poussière. On laisse égoutter pendant quelques heures, 
‘pour séparer autant que possible tout l'acide nitrique. En- 
Suite on jette ces cristaux dans un grand vase à précipités, 
“où on les agite fortement avec six ou dix fois leur volume 
_ d'êther hydrique qu'on décante brusquement, afin qu’il 
“dissolve le moins possible d'acide succinique. On jette 
“ensuite l'acide succinique ainsi purifié sur un filtre de 
papier, où on le laisse se dessécher à une douce chaleur. 
— Préparé de cette manière, l'acide succinique retient en- 


— 964 — 

core des traces d'acide nitrique, ce qui n’a pas d'incon- 
vénient lorsqu'on emploie cet acide à la séparation du 
manganèse d'avec le fer. Nous avons essayé d'appliquer 
à l'acide benzoïque ce même mode de purification, et 
nous n'avons pas réussi, Lant parce qu'il se forme alors 
une substance jaune , que retient avec opiniâtreté l'acide 
benzoïque, que parce que les larges lames de cet acide em- 
prisonnent l'acide nitrique, avec assez de force pour qu'il 
soit impossible de l'en extraire autrement, que par la 
sublimation. 

M. Sacc fait lecture d'une seconde note sur la sépara- 
tion de l'acide benzoïque d'avec l'acide cinnamique. 

Comme on extrait du baume du Pérou presque tout 
l'acide cinnamique dont on a besoin dans les labora- 
toires, et qu'il est facilement souillé par des traces d'a- 
cide benzoïque , on apprendra sans doute avec plaisir une 
nouvelle méthode de le purifier , méthode dont nous n’a- 
vons étudié que la valeur pratique, sans nous inquiêter 
de sa valeur en analyse. On sature le mélange des acides 
cmnamique et benzoïque avec de l’'ammoniaque, et on 
en verse la dissolution dans un mélange fait en dissolvant 
du chlorure barytique dans l'alcool, et en ajoutant à la 
liqueur de l’'ammoniaque caustique en excès. Le précipité 
que l’on obtient alors est formé de cinnamate barytique 
seul, tandis que tout le benzoate reste en dissolution. » 

A la fin de la séance M. Sacc prend la parole à propos « 
de l'introduction projetée des alpacas dans le canton des 
Grisons. Il présente à la société des échantillons de laine 
_de ces animaux, et rappelle qu'il a publié dans le nu 
méro de décembre 41841, du Journal d'Agriculture prati- 
que, des considérations relatives à l'utilité qu'il y aurait 
à introduire ces utiles animaux sur les sommités les plus 


— 365 — 
élevées des chaînes de montagnes de l'Europe centrale. 
M. Sacc observe que la laine des alpacas est d’une force 
telle que les habits qu'on en confectionnerait n'auraient 
pour ainsi dire pas de fin. La laine des alpacas présente 
la même variété de teintes que celle des moutons; elle 
est plus longue et plus lustrée que cette dernière. Un seul 
alpaca porte jusqu'à quatorze livres de laine. L'éduca- 
tion de ces animaux est facile, puisqu'ils supportent sans 
danger les froids les plus violents, qu'ils sont sobres et 
très-doux. De plus, comme les alpacas sont de vigou- 
reux animaux, on pourrait les utiliser comme on le fai- 
sait jadis au Pérou, et comme on le fait encore au Chili, 
pour le transport des effets et des voyageurs, sur les 
hautes montagnes. La chair des alpacas est saine et bonne. 
Toutes ces considérations font vivement désirer à l’auteur 
de cette note, que l'exemple donné par le canton des 
Grisons soit imité par toute la Suisse. 
M. le professeur Agassiz observe que la naturalisation 
des alpacas n'est plus un problème, et qu'il a vu il y a 
. plusieurs années déjà un beau troupeau de ces animaux 
- en Ecosse, où ils se portaient fort bien, et multipliaient 
- tout aussi abondamment que dans leur pays natal. 


F. Sacc, secrétaire. 


… M. Guyot rend compte du mémoire de M. Linant de 

“Bellefonds , sur la découverte définitive de l emplacement 
“du lac Moeris, dans le Fayoum, ainsi que des limites, des 

“dimensions et des usages de ce prodigieux monument 

- des arts hydrauliques de l'antique Egypte. Il met sous 

les yeux de la Société les cartes dessinées par M. Linant, 
pour l'intelligence de son mémoire. 


— 366 — 


Séance du 18 décembre 1845. 
Président, M. L. CouLon. 


M. Agassiz expose le résultat de ses observations:sur 
les rapports qui existent entre Îles faits relatifs à l’appari- 
tion successive des êtres organisés à la surface du globe, 
et la distribution géographique des différens types actuels 
d'animaux. Tout le monde sait que certains fossiles des 
régions tempérées et froides de l’époque actuelle ont leurs 
analogues vivans dans les régions tropicales. Mais ce que 
l'on n'a pas remarqué, c'est qu'il existe une relation 
constante entre ces différences dans la distribution géo— 
graphique et la gradation zoologique de l’organisation 
de ces types. C’est ainsi qu’en thèse générale les espèces 
des types supérieurs actuels des classes d'animaux sont 
plus abondantes dans les régions tropicales que dans les 
régions tempérées, et à plus forte raison que dans Îles 
régions froides ; les singes, par exemple, qui occupent 
le plus haut rang parmi les mammifères sont entièrement 
circonscrits dans la zône tropicale, tandis que les cétacés 
sont proportionnellement plus nombreux dans les régions 
polaires; d'autres familles intermédiaires sont cosmo- 
polites. Cependant il est aussi des types d'une organi- 
sation inférieure, qui de nos jours sont essentiellement 
répartis dans les régions tropicales et paraissent former 
une exception à cette règle; tels sont, par exemple, les 
pachydermes. Mais ce fait lient sans doute à d'autres in- 
fluences el paraît devoir être considéré comme une ré- 
miniscence d’un ordre de choses antérieur. En effet, les 
pachydermes ont été pendant longtemps, durant l'époque | 


— 367 — 


tertiaire, la famille prédominante. On peut dés-lors les 
considérer en quelque sorte comme la souche primitive 
de la classe des mammifères, et comme ces animaux ont 
vécu dès leur origine dans des conditions climatologiques 
analogues à celles de la zône tropicale actuelle, il n’est 
» point surprenant que leurs représentans modernes, mal- 
gré leur infériorité d'organisation, habitent de nos jours 
les régions les plus chaudes du globe. M. Agassiz cite 
* encore de nombreux exemples, empruntés à d’autres 
classes, qui prouvent tous que les faunes tropicales se 
composent d’un côté des types supérieurs modernes de 
chaque classe et des représentans modernes des familles 
- de ces mêmes classes qui ont dominé dans les temps plus 
“ anciens; sans compter les types cosmopolites. 

M. Agassiz énumère une série d’autres faits de distri 
“bution géographique qui montrent, qu'indépendamment 
des familles dont on peut suivre directement la généalo- 
“gie, ilen est qui ont entièrement disparu de la surface 
“du globe, et qui ne se rattachent qu’indirectement aux 
faunes actuelles, et d’autres enfin dont les représentans 
odernes très-peu nombreux sont répartis de nos jours à 
a surface du globe, de telle sorte qu'il n’est pas encore 
possible de se rendre un compte très-exact de leur liaison 
vec les nombreux représentans que leurs familles ont eus 
is. C’est à cette dernière catégorie qu’appartiennent les 
épidostées et les Polyptérus, dont les premiers habitent 
‘grands fleuves de l'Amérique du Nord, et les seconds 
le Nil et le Sénégal, et qui sont les seuls représentans 
tuels de cet ordre des Ganoïdes si nombreux dans l’é- 
ue secondaire et dès les premiers développemens de la 
sur la terre. Quant aux représentans de la première 


o= 
21 


catégorie, l'intelligence de leurs rapports génétiques et 
géographiques dépend de la connaissance de faits encore 
trop peu étudiés pour être généralement appréciés; ce- 
pendant M. Agassiz fait remarquer une liaison intime 
entre la répartition géographique de certains types ac 
tuels et leurs affinités avec des Lypes entièrement éteints. 
Si l'on se bornait, par exemple, à étudier les esturgeons 
et les silures en Europe, on serait loin de se douter de 
l’étroite affinité qui existe entre ces familles, tant ils pa- 
raissent différer à tous égards. Dans l’ancien monde les 
esturgeons sont limités aux régions lempérées de l'Eu- 
rope et de l'Asie, tandis que les Silures caractérisent les 
eaux des contrées tropicales, à la seule exception de quel- 
ques vrais Silures qui vivent dans les eaux douces des 
régions tempérées. Mais si l'on étend ces études à l'Amé- 
rique, on trouve, dans les contrées septentrionales de ce 
continent, de vrais esturgeons et des silures tout aussi 
différens entr'eux que ceux de l’ancien monde, et dans 
l'Amérique méridionale, outre de nombreux silures, une 
famille entièrement propre à cette partie du monde, les 
Goniodontes. Or les Goniodontes et les Siluroïdes sont 
étroitement unis, au point de vue zoologique, et ce qu'il 
ÿ a de plus instructif encore, c’est que certains genres 
d'Accipensérides de l'Amérique du nord, les Scaphirhyn- 
chus, par exemple, très-semblables aux Loricaires, vien 
nent former une sorte de transition aux Silures, si bien 
qu'en Amérique les familles des Siluroïdes et des Estur- 
geons, unies par les Goniodontes, forment un groupe très- 
naturel, dont on ne pouvait saisir l'affinité dans l'ancien 
monde où les Goniodontes manquent. 

Ce fait déjà trés-important eh lui-même tire un 


ss ri td 


SE Le nn Rd RE, 


EL | 


NA. 


— 369 — 


nouvel intérêt de cet autre fait que les Silures, les Go— 
niodontes et les Esturgeons, dans leur réunion, peuvent 
être considérés comme l'équivalent zoologique moderne 
des anciennes familles de Ganoïdes qui ont peuplé si ri- 
chement les mers d'autrelois. 

Il résulte donc de là que, non seulement il existe des 
associations d'espèces localisées dans certaines contrées, 
qui peuvent être considérées comme des équivalens z00— 
logiques d'autres associations d'espèces analogues habi- 
tant d'autres localités; mais encore que des familles en- 
tières en cessant d'exister dans certaines époques géolo- 
giques pendant lesquelles elles ont eu une distribution 
géographique déterminée, peuvent être remplacées à des 
époques plus récentes par d’autres familles affectant , il 
est vrai, une distribution géographique nouvelle, mais 
n'en formant pas moins cependant des équivalens zoolo- 
giques successifs, en opposition aux équivalens z0ologi- 
ques contemporains d'une époque déterminée, 


F. Sacc, secrétaire. 


M. Desor fait une communication verbale sur la glace 
des hauts sommets des Alpes. Il est reconnu, dit-il, que la 
glace est à son maximum de compacité et de transparence 
à l'extrémité des glaciers, et qu'elle devient toujours plus 
terne et plus légère à mesure qu'on remonte vers leur 
origine, où elle passe insensiblement à la forme grenue 
et désagrégée du névé. Cette gradation semble toute 
naturelle, quand on songe que la glace est le résultat 
d'une transformation successive de la neige au moyen de 
l'eau ; car comme l'eau est plus abondante, et l'imbibi- 
lion par conséquent plus complète dans les régions infé- 


— 310 — 
rieures, il en résulte que la glace doit y être à un état 
plus avancé. Se fondant sur cette gradation, on a admis 
qu'il ne pouvait pas exister de glace au-delà d’une cer- 
taine limite, et que les hauts sommets des Alpes n'étaient 
couverts que de neige. Ce qui confirmait surtout cette 
supposition, c'est le fait que la plupart des voyageurs, qui 
ont fait des ascensions sur les hautes sommités des Alpes, 
y ont trouvé une température inférieure à zéro. Saussure 


avait trouvé au sommet du Mont-Blanc — 2 à - 3° R. 


à l'ombre. M. de Tilly y trouva - 14°, M. Agassiz et 
M. Desor observèrent au sommet de la Jungfrau — 39. 
Et cependant le sommet de la Jungfrau est couvert d’une 
calotte de glace de glacier; des parois de glaces sem- 
blables tapissent les flancs du Schreckhorn et du Finster- 
aarhorn, jusque prés de l'extrême sommet. Comme on 
n'admettait pas qu'il pût exister à pareille hauteur de 
l’eau liquide capable de cimenter la neige et de la transfor- 
mer en glace, on eut recours à une foule de suppositions 
plus ou moins ingénieuses pour expliquer la présence de 
cette glace. On supposa en particulier qu'elle était l'effet 
d'une condensation très-active, favorisée par les vents 
chauds qui soufflent souvent dans les hautes régions. Le 
fait est que si la température se maintient souvent au-des- 
sous de zéro, même pendant l'été, il est cependant des 
moments où elle s'élève à plusieurs degrés. C'est ainsi 
que M. Desor trouva au moins d'août, au sommet du 
Schreckhorn , une température qui oscillait entre + 2,5 
et + 3,6, et qui déterminait une fonte très-abondante à 
la surface des neiges et des glaces environnantes. Or il 
n'en faut pas davantage pour opérer la transformation de 
la neige en glace. 


een San nd fo 


— 311 — 

Une autre question est celle de savoir pourquoi la glace 
des hauts sommets qui ne reçoit que très-peu d'eau, est 
cependant beaucoup plus compacte que la neige des 
névés, et pourquoi cette dernière, qui est à une hau- 
teur bien inférieure, où la fonte a lieu presque tous 
les jours en été, reste cependant à l’état grenu et incohé- 
rent. La solution de ce problème doit être cherchée, selon 
M. Desor, dans l'épaisseur relative des masses. Qu'on 
suppose deux couches de névé placées dans des conditions 
tout-à-fait semblables, dont l’une aurait 20 centimètres 
et l’autre 10 centimètres d'épaisseur. A mesure que la 
fonte aura lieu à la surface, l’eau qui en résultera imbi- 
bera la masse entière, et quand celle-ci en sera complé- 
tement saturée, le névé se cimentera en une glace terne 
et grenue de bas en haut. Supposons que la fonte enlève 
journellement un centimètre de névé à la surface, et qu’en 
même temps la couche de glace terne augmente d’un 
centimètre par jour, il en résultera qu'au bout de cinq 
jours les deux couches se trouveront dans des circons- 
tances tout-à-fait différentes. La couche de 10 centi- 
mètres aura diminué de moitié , et les 5 centimètres qui 
restent seront de la glace. La couche de 20 centimètres 
au contraire sera réduite à 15 centimètres, dont 10 se- 
ront à l’état de névé, tandis que les cinq centimètres in- 
férieurs seront seuls à l’état de glace. Les choses se pas- 
sent à-peu-près de la même manière dans les Alpes; mais 
dans des proportions bien autrement grandes. La couche 
de 10 centimètres d'épaisseur représente la neige des 
hautes régions, celle de 20 centimètres la masse de neige 
entassée dans les cirques. Seulement l'épaisseur de la 
masse des cirques , au lieu d'être double, est presque dé- 


— 3172 — 
cuple, d'où 1l résulte que quelque minime que soit la 
fonte des hautes régions, la masse qu’elle imbibe doit, 
à raison de sa faible épaisseur, arriver plus tôt à une sa- 
turation complète que la couche trés-épaisse des grands 
cirques malgré une température très-élevée et une fonte 
beaucoup plus abondante. 

Les glaciers latéraux qui viennent aboutir au-dessus 
des grands cirques, et dont la glace est plus compacte 
que celle de ces derniers, doivent être jugés du même 
point de vue. 

Cette communication est accompagnée de dessins pour 
en faciliter l'intelligence. 


M. Guyot fait, d'après M. de Buch (*), un rapport sur 
une zône volcanique remarquable, constatée dans Pile 
septentrionale de la Nouvelle-Zélande, par le Dr Dief- 
fenbach. 


Il y a peu d'années, dit M. de Buch, que nous étions 
dans une ignorance à-peu-près complète sur l'intérieur 
de la Nouvelle-Zélande. IL était réservé à un observateur 
aussi courageux et aussi attentif que M. Dieffenbach de 
nous initier, pour la première fois, à la connaissance de 
l'intérieur de ce pays, si neuf encore pour nous. 

Au lieu de la seule petite île fumante de ithe-Island, 
nous voyons surgir dans ces contrées une foule de phéno- 
mèénes volcaniques qui se présentent dans une connexion 
que nous ne pouvions prévoir. 

Il résulte des observations de Dieffenbach qu'à tra- 


(*) Monatsberichte, etc. Bulletin de la Société de géographie de Berlin, 
11,275. 


— 313 — 

vers la Nouvelle-Zélande {/New-Ulster), du sud-ouest au 
nord-est, exactement comme en Islande, s'étend une 
bande trachytique dans laquelle seule se manifestent les 
phénomènes volcaniques. C'est, dit Dieffenbach lui-même 
(1, 337), une grande fente qui traverse l'île du cap Eg- 
mont jusqu'au nord du Cap-Ést, et qui, imparfaitement 
recouvérte, donne issue aux éruptions de toute espèce. 
Pas même à Saint-Miguel des Açores, on ne trouve une 
quantité de ruisseaux d’eau bouillante aussi incroyable 
que celle qu'offre cette contrée. On les voit sortir de 
cette fente avec impétuosité et se précipiter en cascades 
qui disparaissent presque sous les tourbillons d’une va- 
peur brülante. Presqu’au milieu s'élève le volcan encore 
actif de Tongartro à une hauteur de 6200 pieds anglais, 
couronné par un cratère sans fond, d'un quart de mille 
anglais de diamètre et rempli d'épais nuages de vapeur. 
Des courans de lave descendent le long de ses flancs, 
ainsi que d'épais torrens de boue, formés par de fréquentes 
érüptions aqueuses, comme à Java, où tant de villages, 
sur bien des lieues carrées d’étendue, ont été déjà englou- 
tis par de pareils courans boueux. Les vapeurs brülantes 
pénètrent la roche qui compose la montagne , la désor- 
ganisent et des pans entiers du volcan se mettent à couler 
sous la forme de masses boueuses. Les eaux, les ruis- 
seaux bouillants, qui, sur les bords du lac Taïpo, sifflent 
et mugissent comme autant de machines à vapeur, dé- 
posent partout de la chalcédoine: c’est la silice qui, dis- 
soute dans l'eau chaude, comme au Geyser et dans toutes 
les eaux thermales, s'élève avec les vapeurs et se dépose, 
comme à Carlsbad, dans les fentes des rochers sous forme 
de hornstein et de chalcédoine. 


— 314 — 

Tout à l’entour, partout où les vapeurs n'ont pas en- 
tiérement décomposé la roche en une argile blanchâtre, 
_ le sol est formé de couches de pierre ponce ; toutefois seu- 
lement sur la fente même. Au bord des fleuves /Z/aïkato 
et Waïpa, la ponce disparaît bientôt et son absence 
marque les limites de la fente. Or la ponce est un signe 
aussi certain que précis de la présence du trachyte du 
quel elle se forme; car on peut tenir pour avéré ce fait 
constaté par de nombreuses observations qui s'étendent 
sur la terre entière. Mais toute scorie poreuse n’est pas 
de la ponce. 

M. Dieffenbach a vu le trachyte solide en place dans le 
voisinage de New-Plymouth, à l'extrémité ouest de la 
grande fente, et le haut pic d'Egmont, de 8840 pieds an- 
glais, dont M. Dieffenbach a fait l'ascension, est composé 
probablement de trachyte, quoique d’un trachyte de cou- 
leur foncée et semblable au basalte. Cette haute montagne 
n'a point de cratère à son sommet. L’extrémité orientale 
de la grande fente est marquée par l'ile Pouhia à Wa- 
kari où White-Island. Cette île est le premier volcan qui 
fut reconnu dans la Nouvelle-Zélande; et ce sont les do- 
cumens officiels publiés par Hay qui nous en ont donné 
connaissance. Dumont-d'Urville a également vu ce vol- 
can, et nous apprend qu'il fut monté par le missionnaire 
Williams et le botaniste Cuningham. Des vapeurs sou- 
frées les empêchérent d'atteindre le sommet. Depuis lors 
une quantité considérable de soufre est annuellement em- 
portée de cette île en Europe. 

Une seconde zône volcanique plus petite traverse Ne:w- 
Ulster dans la même direction ; elle brise un plateau ba- 
salfique près de la ville d’Auckland et dans le golfe de 


— 315 — 
Shoharrie. Ici se montrent alignés plusieurs petits cônes 
d'éruption. Dans l'ile de Ranguaïtoto, toute formée de 
scories, un cône volcanique de 920 pieds offre à son 
sommet un cratère de 150 pieds de profondeur, et au cap 
Barrière, vis-à-vis du cap Colville, Dumont-d'Urville vit 
encore des cônes pareils. 


M. Sacc présente à la Société trois échantillons d'acide 
valérianique, de valérianate zincique et de valérianate 
quinique, après quoi il indique la préparation de chacun 
de ces corps. 

Jusqu'ici, dit M. Saac, on n’obtenait l'acide valéria- 
nique qu’accidentellement, par la distillation avec de 
l'eau , des racines de la valériane officinale. En opérant 
de cette manière, on n’avait souvent que de l’essence de 
valériane seule, et lorsqu'on obtenait ainsi de l'acide, il 
était presque toujours souillé par une très forte proportion 
d'essence. Une observation attentive des faits amena à dé- 
couvrir que les racines de valériane donnaient d'autant 
plus d'acide et d'autant moins d'essence qu'elles étaient 
plus vieilles ; il n’y avait qu'un pas de là, à l'idée que la 
fermentation produirait le même effet que le temps et que 
l'action de tous les deux, s'exerçant sur l'essence de valé- 
riane, ils la transformaient en acide. Partant de celte idée- 
là, un habile chimiste, M. Gerhardt, crut pouvoir méta- 
- morphoser l'essence de valériane en acide , en la traitant 

- directement à chaud, par l'hydrate potassique et prétendit 
avoir réussi. Nous n'avons pas été aussi heureux que lui, 
et quoique nous ayons varié de bien des manières le mode 
d'opérer, jamais en traitant l'essence de valériane par 
l'hydrate potassique , nous n'avons obtenu de l'acide va- 


— 316 — 
lérianique, mais bien et seulement de la bornéène ou 
camphre liquide de Bornéo. 

Pour obtenir l'acide valérianique on choisit des racines 
de valériane recueillies en automne; on les coupe en pe- 
lits morceaux et on les met dans un tonneau en forme 
de cône renversé, muni d’un robinet à sa partie inférieure 
et ouvert par en haut. On opère à la fois sur 25 kilog. 
de racines, sur lesquels on verse assez d’eau pour qu'elle 
les surnage de deux ou trois centimètres environ. L’expé- 
rience apprend bien vite combien d'eau exige chaque 
opération. On doit dissoudre dans l’eau qu’on emploie 
pour la macération des racines une certaine quantité de 
carbonate sodique cristallisé (à peu près 2 à 400 grammes) 
pour saturer l'acide valérianique à mesure qu'il se forme. 
On abandonne le tonneau qui contient les racines dans 
un endroit chauffé entre 25° et 30° C où on le laisse jus- 
qu'à ce que la fermentation d'abord assez vive paraisse 
se calmer. Alors, en ouvrant le robinet du vase on sou- 
tire toute la solution de valérianate sodique, qu’on enlève 
totalement en lavant les racines, à deux ou trois reprises, 
avec quelques litres d’eau chaude, On réunit la dissolution 
avec les eaux de lavage, on les verse dans un alambic, 
on y ajoute une quantité d'acide sulfurique suffisante pour 
décomposer tout le carbonate sodique employé et on dis- 
tille. On recueille seulement les dix premiers litres qui 
passent à la distillation, parce qu'ils contiennent presque 
tout l'acide formé et on les porte dans une capsule d'argent 
où on les sursature d’hydrate’zincique en gelée; on filtre 
pour séparer l’excès d’hydrate zincique et on évapore la 
solution aussi rapidement que possible en ayant soin d'en- 
lever avec une écumoire d'argent le valérianate zincique 


, in lie | 


= QU = 


qui se dépose au fond du vase à mesure qu'il se forme. 


Il n’y a plus ensuite qu’à dessécher ce sel sans le compri- 
mer pour ne pas lui ôter cette légèreté caractéristique que 
le commerce veut trouver en lui. 

Le valérianate quinique se prépare d’une manière ana- 
logue; mais, par évaporation spontanée , il est très diffi- 
cile de l'obtenir en cristaux aussi beaux que ceux que 
M. Sacc fait voir à la société. 

Pour obtenir l'acide valérianique on sature le produit 
de la distillation des racines de valériane par du carbo— 
nate sodique et on évapore à sec cette solution. On trouve 
dans le résidu du valérianate sodique qu'on introduit dans 
une petite cornue où on le chauffe après l'avoir décom— 
posé avec une quantité suffisante d'acide sulfurique, ou, 
mieux, de bisulfate potassique. Ce qui distille est un mé- 
lange d’acide valérianique et d’eau, duquel il est facile 
d'extraire l'acide valérianique pur. 

A. Guyor, secrétaire. 


Séance du 8 janvier 1846. 
Présidence de M. L. Cour.ox. 


M. le président fait lecture d’un mémoire de M. Mar- 
cou sur le Jura salinois, dont l’auteur fait hommage à la 
Société (1). 


M. Ladame remarque que l'observation de M. Marcou, 
qui constate, dans le Jura Salinois, un rapport direct entre 
la puissance des terrains de sédiment et le développement 


4 A = J n « = = 

(") Ce mémoire devant paraitre prochainement en entier dans le 3" yo- 
lume des Mémoires de la Société , il devient superflu d’en donner ici l’ana- 
lyse. 


— 318 — 

des êtres organisés, s'explique de la manière la plus heu- 
reuse, quand on cherche dans les êtres organisés la cause 
de la formation des masses sédimentaires; tandis qu'on 
ne comprend plus la liaison de ces deux faits lorsque 
l’on considère la sédimentation simplement comme un 
fait terrestre, résultant des éruptions volcaniques et des 
soulèvemens, ou que l’on veut en trouver la cause dans 
des actions extérieures à la terre qui auraient donné lieu 
à des précipités. 

M. Ladame rappelle ensuite les conclusions qu'a énon- 
cées M. Desor dans la dernière séance sur la marche 
constamment progressive des glaciers et la détérioration 
de notre climat qu'elle semblerait indiquer. Il remarque 
que ce fait paraît contraire à celui de l'élévation de tem- 
pérature de 0,23 cent., que l’on a observée dans les caves 
de l'observatoire de Paris depuis 1817, où elle était de 
11°, 67 jusqu'en 1835 où elle a atteint 11°, 97. La si- 
multanéité de ces deux faits prouve clairement que les 
conditions d'existence et de formation des glaciers, ne dé- 
pendent pas uniquement de la température moyenne, ou 
de la quantité de chaleur que le soleil envoie annuelle- 


ment à la terre. 
À. Guyot, secrétaire. 


M. de Castellu demande quelle explication on peut don- 
ner de ce fait que chez les personnes atteintes d’intoxica- 
tion mercurielle, chez les doreurs, les dents deviennent 
noires comme l’ébène lorsqu'elles se gargarisent avec une 
dissolution d'acétate plombique ? On répond que cela tient 
peut-être à un composé sulfuré, et que ce fait d’ailleurs 
n’est probablement pas lié avec celui de l'empoisonnement 
dû au mercure. F. SAC, secrétaire. 


— 319 — 
Séance du 22 janvier 1846. 
Président, M. L. CouLrox. 


M. Desor rend compte de quelques observations qu'il 
a recueillies dans une course qu'il -vient de faire avec 
M. Dollfuss, au glacier de l’Aar. Les conditions de tem- 
pérature à cette saison lui ont offert des particularités 
dignes de remarque. 

Partis de Berne le 8 janvier par un temps superbe, nos 
voyageurs ont trouvé la température toujours plus chaude 
à mesure qu'ils approchaient des montagnes. Sur les lacs 
de Thoune et de Brienz, le thermomètre marquait — 2° 
à—30 à l’air, (tandis que l’eau avait+#°, 5. Le minimum 
dela nuit à Brienz fut de —-5°, tandis qu'il descendit à 
Berne à—-11°. On remarqua une différence sensible entre 
les lieux élevés et les fonds de vallées. Au Kirchet, en 
amont de Meyringen, la température se trouva être de 4° 
plus chaude que dans le fond d'Im-Grund, qui n’en est 
éloigné que de quelques cents mètres, ce qu'il faut sans 
doute attribuer à la réverbération des rochers, qui, sur le 
Kirchet , étaient dégarnis de neige, tandis que le fond 
d'Im-Grund était tout couvert de neige et incapable de 
s'échauffer. La même différence fut observée sur le 
monticule qui domine Im-Grund du côté d'amont : là 
. aussi la température était de — 4°, tandis qu'elle était 
de — 8° dans le fond de la vallée. La température d’une 
source située sur ce second monticule indiquait 6°, 5. 
L'air était parfaitement calme. Ce fut depuis le rocher ap- 
. pelé la Gresprengte-flue, que l'on ressentit les premiers 
souffles du Foehn. Instantanément le thermomètre monta 


— 380 — 

de — 3° à +40, indiquant par conséquent une différence 
de 7°. À mesure que l'on remontait, le Foehn deve- 
nait plus fort, et chaque coup de vent avait en quelque 
sorle une température propre, de manière que le ther- 
momètre oscillait constamment entre -E # et 6°. Mais 
lorsque le vent cessait par intervalles, le thermomètre 
descendait à plusieurs degrés au-dessous de zéro. La 
plus haute température observée fut de 2 7° près du 
chalet de la Handeck, le 10 janvier à dix heures et demie 
du matin. L'air était à la même heure à - 9° à Berne. A 
mesure qu'on approchait du Grimsel, le Foehn diminua 
et la température baissa sensiblement. Pendant les trois 
jours que ces messieurs séjournèrent à l'hospice, le maxi- 
mum n’excéda cependant pas zéro. Le point le plus bas 
fut de — 8°, le 12 à 6 heures du matin. Le point de ro- 
sée oscille entre - 15° et — 17° indiquant par consé- 
quent une très grande sécheresse, malgré le vent du sud. 
La température la plus basse de l’année eut lieu le 3 jan- 
vier à 9 heures du matin; elle fut de — 19°, 5. 

La température de la neige offre des circonstances 
encore plus extraordinaires. Trois thermomètres enfoncés, 
l'un à 4", 60 centimètres dans la neige, de maniére à 
toucher le sol, l’autre à 1 mêtre et le troisième à 3 cen- 
timêtres, de manière à n’avoir que la boule dans la neige, 
ont indiqué avec de très légères variations : 

le premier — 3°. 

le second - 7°. 

le troisième — 13°. 

Les mêmes rapports ont été observés sur le glacier 
près de l'Hôtel-des-Neuchâtelois, à une hauteur de 2480 
mètres : la température de l'air y était, le 11 à midi, de 


— 381 — 
- 4°, 8 à l'ombre, derrière un gros bloc, et elle os- 
cillait entre — 2° et + 2° au soleil, suivant que le Foehn 
soufflait ou qu'il faisait calme. 

Les observations sur le mouvement du glacier, but 
principal de cette expédition, ont donné les résultats sui- 
Vans : 

Des signaux capables de résister à la tourmente 
avaient été élevés l'automne dernier par MM. Agassiz 
et Desor sur plusieurs points du glacier de l'Aar, afin 
de servir à l'observation du mouvement d'hiver. Un 
observateur chargé par M. Dollfuss de recueillir les ob— 
servations thermométriques du Grimsel , avait continué 
de mesurer l'avancement, sur trois stations différentes, 
à l'Hôtel-des-Neuchâtelois, au Pavillon et à l'extrémité 
du glacier. Ce sont ces observations qu'il s'agissait de 
vérifier, en combinant les données recueillies dans l'in 
tervalle , avec celles qui allaient être faites. Il résulte de 
ces observations, que depuis le mois de septembre le 
mouvement du glacier est allé en diminuant aux deux 
stations de l'Hôtel-des-Neuchâtelois et du Pavillon. Mais 
ce ralentissement est beaucoup plus sensible à l'Hôtel-des- 
Neuchätelois qu'au Pavillon. La moyenne de l'été depuis 
le 2{ juillet jusqu'au 16 août avait été à 

l'Hôtel-des-Neuchätelois de . . 0, 2226 
au Pavillonc:b seuss £brodorcals &9 109"496 

La moyenne actuelle du 19 décembre au 

11 janvier, est au contraire 
à l'Hôtel-des-Neuchâtelois. . . 0, 1326 
au Pavillon . . . . . . . 0, 1883 

En calculant la moyenne de l'avancement d'après 

l'ensemble des observations faites, depuis la mi-juillet 


— 382 — 

1845, jusqu'au 11 janvier 1846, on trouve qu'elle est 

à l'Hôtel-des-Neuchätelois de  . 0, 1810 
par conséquent inférieure de #{ millim. à la moyenne du 
mouvement de l’été et de 31 millim. inférieure à celle du 
mouvement annuel, calculé d’après les trois années de 
1842 à 1845 ; la même comparaison donne une différence 
de 17 millim. d'avec le mouvement annuel. Par consé- 
quent pour arriver au chiffre du mouvement annuel , ïl 
faut pour combler le déficit de trois centimètres en 
moyenne, qu'il survienne, avant la mi-juillet prochain, 
un accroissement considérable qui excède de six centi- 
mètres la moyenne du mois de juillet à ce jour. Jl est 
probable que cette accélération qui compense le mouve- 
ment d'hiver, a lieu au printems, et M. Desor annonce 
que toutes les mesures sont prises pour que les observa- 
tions se continuent jusqu'à la belle saison. 

Une discussion prolongée s'engage au sujet de cette 
communication, discussion à laquelle prennent part sur- 
tout MM. Desor, Agassiz, Guyot et Ladame. A propos 
des inversions de l’ordre des températures rapportées par 
M. Desor et observées aussi ailleurs, M. Ladame rappelle 
qu’elles sont très fréquentes dans notre pays, et qu'il ar- 
rive souvent que la montagne a une température supé- 
rieure de plusieurs degrés à celle des bords du lac. I croit 
qu’on doit en chercher la cause dans la distribution et l’ac- 
tion des vents. Des séries d'observations comprenant plu- 
sieurs années, montrent que, pendant qu'à Neuchâtel il 
souffle cinquante vents d'ouest pour cinquante bises, il 
souffle soixante-six vents d'ouest à la Chaux-de-Fonds. 
Cette prédominance des vents chauds du sud-ouest, sur 
les hauteurs, nous montre qu'il y aura un bon nombre de 


— 383 — 

fois où le vent chaud du sud-ouest, souffle à la Chaux- 
de-Fonds par exemple, pendant que le vent froid du N. 
Nord-Est souffle à Neuchâtel. Ces différences s’observent 
toujours plus fréquemment en hiver et au printemps, 
c'est-à-dire à la saison de la fonte des neiges qu'en 
d’autres temps. M. Desor pense que le foehn est un phé- 
nomène différent, et en quelque sorte exceptionnel; c’est 
non-seulement un vent chaud; mais aussi sec, comme 
l'indiquent les observations du roséomètre, et non point 
humide comme l’alisé de S.-0. Le tems, quand il souflle, 
est toujours serein, et l'air, à la montagne, est plus chaud 
que dans la plaine. 


M. Sacc présente à la Société de fort beaux cristaux 
d'acide succinique, obtenus par la méthode qu'il a décrite 
dans l’une des séances précédentes. 

Le même offre deux mémoires dont il est l'auteur, le 
premier, sur les propriétés physiques et chimiques de 
l'huile de lin; le second a pour titre: Expériences sur les 
parties constituantes de la nourriture qui se fixent dans le 
corps des animaux. I y ajoute une troisième notice sur 
les eaux minérales de Soulzbach , dans le Haut-Rhin, 
par M. Kirschleger et lui. 

A. Guyot, secrétaire. 


Sur la demande de M. le président, M. le docteur de 
Castella rend compte des faits qu'il vient d'observer sur 
un bûcheron tombé d'une hauteur de 50 pieds à peu 
près et mort au bout de 36 heures de souffrances. Le 
médiastin antérieur était ecchymosé, ainsi que la partie 
antérieure de la colonne vertébrale. Il y avait du sang 


28 


— 384 — 

répandu dans la cavité gauche de la plévre. Le foie était 
déchiré à quatre places ; l’une de ces déchirures avait en- 
viron deux à trois pouces de profondeur et contenait un 
caillot de sang. Le foie tout entier était ramolli. Un des 
reins était gorgé de sang. L'épaule droite était fracassée 
et la tête de l'humérus, littéralement réduite en bouillie. 

Le malade avait uriné beaucoup de sang. Malgré toute 
la gravité de ces désordres matériels, le malade n’en a 
pas moins conservé toute sa présence d'esprit jusqu’au 
dernier moment. 

F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 5 février 1846. 


Présidence de M. L. CouLow. 


M. Guyot rend compte d'un mémoire de M. Redfield, 
sur les glaces flottantes de l'Atlantique, et les cou- 
rans qui les transportent. Il ajoute quelques considéra- 
tions sur l'influence qu'ont probablement la présence et 
la direction de ces glaces et des eaux froides qui les ac- 
compagnent sur le climat de l'Amérique septentrionale. 


M. Alfred Berthoud fait voir à la société l'ouvrage de 
M. Debret sur les races humaines du Brésil. 


M. Sacc communique verbalement à la société quel- 
ques réflexions sur l'usage du calomel. Avant d'entrer 
en matière, il jette un coup d'œil sur les remèdes mi- 
néraux les plus dangereux en usage dans la thérapeu- 
tique actuelle, et il rappelle qu'à raison de leur action 
si visiblement délétère, on n’administre jamais qu'à pe- 


— 389 — 


tites doses et avec précaution le sublimé corrosif (chlo- 
rure mercurique), l'iode et les préparations arsenicales. 
Relativement à ces dernières, il rappelle l'opinion an- 
cienne déjà de beaucoup de sages praticiens, qui aflir- 
ment que l'usage des remèdes arsenicaux est en général 
toujours suivi des mêmes symptômes capables d'amener 
ou bien seulement d'accélérer la mort du patient. M. Sacc 
explique cet effet en admettant que l’arsenic se combine 
aux tissus d’une manière tellement complète, qu'il les 
mortifie, les empêche par conséquent de continuér leurs 
fonctions , et amène ainsi un trouble plus ou moins grand 
dans tout l'organisme. Les remèdes qu'on vient de passer 
rapidement en revue ne sont toutefois pas fort à redouter, 
parce que connaissant leurs effets, on ne les administre 
jamais qu'avec réserve; il en est tout autrement du Ca- 
lomel, connu aussi sous le nom de mercure doux, et 
appelé par les chimistes chlorure mercureux. Ce composé, 
qui ne diffère du chlorure mercurique, qu'en ce qu'il 
contient un équivalent de chlore de moins que ce der- 
nier, est administré sans la moindre crainte par beaucoup 
de praticiens, qui ne connaissant pas son étroite parenté 
avec le sublimé corrosif, le font prendre souvent à haute 
dose. La chimie nous apprend que le chlorure mercureux 
est un composé si instable, qu'il se détruit en présence 
de presque tous les corps, surtout des substances orga- 
niques, des acides et des bases fortes, et qu’en consé- 
quence il est probable que son action doit varier beau- 
coup suivant l'état alcalin ou acide de l'estomac du 
malade, ainsi que suivant la nature des drogues avec 
lesquelles on le mélange, et suivant l’âge de ces prépa- 
rations. Des faits confirment ces données: tous les prati- 


— 386 — 


ciens savent que peu de purgatifs sont aussi infidéles que 
le calomel, dont l'effet souvent nul, est d’autres fois d’une 
violence si excessive, qu'elle ressemble à un empoison- 
nement. Un coup d'œil jeté sur les propriétés chimiques 
du calomel aurait donné la solution du problème. Beau- 
coup de praticiens prescrivent le chlorure mercureux 
sans indiquer de régime approprié; deux exemples suf- 
firont pour prouver tout le danger qu’entraine après elle 
cette manière de faire : un fiévreux reçut dans une pe- 
tite ville du grand-duché de Baden du calomel; puis, 
ayant une soif excessive, son médecin lui prescrivit une 
limonade acidulée avec du chloride hydrique: le malade 
mourut deux ou trois heures après, avec des coliques 
épouvantables et tous les symptômes de l'empoisonuement 
par le chlorure mercurique. Un autre malade auquel on 
avait aussi fait prendre du calomel, reçut un peu plus 
tard un lavement de sel de cuisine. Ce second malade 
mourut de là même manière que le premier. 

Faut-il s'étonner de ces empoisonnemens par le su— 
blimé corrosif quand on administre le calomel? pas du 
tout; il y a bien plutôt lieu d'être surpris que ces em- 
poisonnemens ne soient pas de beaucoup plus nombreux. 
En effet, comment agit le chlorure mercureux? jamais 
comme tel; car tout le monde sait que les matières in- 
solubles n'exercent en général aucune espèce d'action sur 
l'organisme ; comment agit donc le calomel? comme su- 
blimé corrosif, voilà la réponse donnée par la chimie et 
appuyée par les deux cas d’empoisonnement que nous 
venons de rapporter. Le calomel arrive non altéré dans 
l'estomac, où il se trouve non pas seulement en présence 
de matières organiques, mais aussi d'acides, ou de leurs 


— 387 — 

sels alcalins, suivant l’état du suc gastrique ; placé dans 
l’une ou l’autre de ces conditions, qui sont d’ordi- 
naire réunies toutes trois dans le tube intestinal, le ca- 
lomel abandonne la moitié de son mercure, dont le chlore 
se porte sur l'autre moitié, avec laquelle il forme du su- 
blimé corrosif, dont l’action se dénote par une violente 
sécrétion de bile qui colore les selles en vert, et par 
des coliques, si la transformation du calomel en sublimé 
a été trop grande. Il est heureux qu'à raison de son in- 
solubilité le calomel ne se transforme jamais totalement, 
ni rapidement en sublimé ; car, si c'était Je cas, l'empoi- 
sonnement serait l'effet régulier et inévitable de ce re- 
mêde. On sait que le calomel préparé à la vapeur, ou 
par voie humide, est rejeté par la plus grande partie des 
praliciens, qui trouvent son action peu sûre, et en tous 
cas trop énergique ; ce fait appuie encore ceux qu'on 
vient de présenter, et qui tous se réunissent pour prouver 
que le calomel n’agit sur le tube digestif qu'à l’état de 
sublimé. 

M: Sacc conclut en disant que, comme chimiste, il 
demande qu'on n'administre plus le chlorure mercureux 
qu'avec la plus grande précaution, à très-petite dose, et 
toujours seul, puisqu'en donnant ce remède on expose 
dans tous les cas les malades, sinon à un empoisonne- 
ment, du moins, à l’effet délétére ou tout au moins dé- 
sagréable du sublimé corrosif. 

Cette communication soulève des débats auxquels pren- 
nent part surtout MM. les D'° de Castella et Borel, qui 
croient que l’usage du calomel n’est pas aussi dangereux 
que le dit M. Sacc, et s'appuient sur leur longue et cons- 
ciencieuse pratique pour en être fermement convaincus. 


— 388 — 
Tous les deux n'administrent d'ailleurs jamais ce remède 


qu'à fort petite dose. 
A. Guyot, secrétaire. 


M. Agassiz fait ensuite un rapport sur un mémoire de 
M: J. Muller, professeur d'anatomie à Berlin. Ce mé- 
moire présente une série de faits relatifs au larynx in- 
férieur des oiseaux que Cuvier avait cru être un carac- 
tère distinctif de tous les oiseaux chanteurs. Cest en 
s'appuyant sur l'existence du larynx inférieur chez les 
oiseaux chanteurs, que Cuvier s'était décidé à les sépa- 
rer d'avec les Coraciens et les Grimpeurs ; eh bien, M. Mul- 
ler vient de découvrir et de prouver que ce caractère n’a 
aucune espèce de valeur, puisqu'il est dépendant de cir- 
constances toutes locales ; ainsi, par exemple, on aurait 
trouvé le larynx inférieur fort développé chez tous les Mus- 
cicapa d'Europe, et voici que cet organe n'existe pas chez 
les espèces américaines de cette famille; de même encore 
certains Corvus de l'Amérique possèdent le larynx infé- 
rieur, qui manque aux Corvidées d'Europe, à l'inverse de 
ce qui arrive aux Muscicapa. Il y a plus, c’est que beau- 
coup d'oiseaux grimpeurs, tels que les Perroquets, ont 
un larynx inférieur beaucoup mieux développé que celui 
des Becs-fins, qui sont les chanteurs par excellence. 

Ces faits prouvent que la division établie par Cuvier 
pour les oiseaux, et basée sur la présence ou l'absence 
du larynx inférieur, est à revoir, puisqu'elle s’appuie sur 
une erreur. Cette division aurait d'ailleurs eu à subir de 
nombreuses modifications, lors même qu'on l’auraitmain- 
tenue, parce que le larynx inférieur est conformé diffé 
remment chez les divers oiseaux qui possèdent cet organe. 


— 389 — 

M. Hollard, professeur, s'étonne de ce qu'on ait con- 
servé aussi longtemps une division des espèces basée sur 
un caractère unique, comme celle que Cuvier avait établie, 
en en prenant pour base l'existence du larynx inférieur. 
M. Hollard fait sentir toute la nécessité qu'il y a à n'a- 
dopter pour les classifications que des cadres larges et 
basés sur des caractères généraux et bien saillans. Pour 
établir des groupes parmi les oiseaux chanteurs , c'est le 
larynx supérieur qu'il faut étudier, parce que c’est lui 
qui modifie la voix, que le larynx inférieur ne fait que 
lui envoyer. 

À la fin de la séance M. le professeur Agassiz fait voir 
le bel ouvrage ornithologique que M. des Murs publie 
maintenant sous le nom de Planches Peintes. Cette ma- 
gnifique iconographie des oiseaux rares appartient à 
M: LS Coulon, père, qui a bien voulu la communiquer 
à la Société. 

F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 19 février 1846. 
Présidence de M. L. CouLo. 


M. le secrétaire donne lecture des procès-verbaux de 
la section de la Chaux-de-Fonds. A propos de la com- 
munication de M. Nicolet, sur les ossemens trouvés 
dans les cavernes de Mancenens et de Vaucluse, dans le 
Jura, M. Guyot attire l’atiention sur quelques observa- 
tions qu'il serait utile de constater au sujet des cavernes 
à ossemens. 

1° On prétend que les cavernes ossifères ne se ren- 
contrent que dans une certaine zône de niveau, supé- 


— 390 — 

rieure au fond des vallées et inférieure aux sommets ; 
au-dessus et au-dessous , les cavernes, d’ailleurs abon- 
dantes, sont dépourvues d’ossemens. Il serait donc es- 
sentiel de déterminer exactement le niveau relatif et ab- 
solu de ces cavernes, ainsi que les autres circonstances 
physiques dans lesquelles elles se trouvent. Si cette cir- 
constance est exacte, elle pourrait nous conduire à quel- 
ques conclusions importantes sur la cause du phénomène 
et le mode d'action de l'agent auquel on doit attribuer 
l'extinction de ces animaux et la réunion de leurs osse- 
mens dans ces cavernes. 

2° Les animaux enfouis dans les deux cavernes citées 
par M: Nicolet, semblent confirmer le fait que les osse- 
mens des cavernes appartiennent à des animaux, qui pour 
la plupart supposent, par leurs analogues, un climat plus 
froid. On a trouvé dans les cavernes du Jura l'Elan, le 
Renne même. L'époque de l'existence de ces animaux se- 
rait donc, non l’époque tertiaire, plus chaude, mais bien 
l'époque diluvienne et spécialement peut-être celle des 
grandes glaces. 

M. Guyot présente à la société la carte des pays où 
se trouvent les sources du Nil, de Zimmermann; il fait 
un rapport verbal sur les progrès des découvertes, depuis 
1840, dans ces régions si inconnues et sur la topogra- 
phie de cette partie de l’Afrique, telle que nous permet de 
la construire l’état actuel de nos connaissances. 

À. Guyor, secrétaire. 


M. le Dr Borel fait une communication relative à un 
cas de rage, qui s’est présenté au commencement de l'an- 
née, dans une maison isolée, sise au Pont près de, la 


— 391 — 
Brévine. La malade est une femme qui fut mordue en 
novembre 1845 par un chat qu'elle avait perdu depuis 
quelques jours, et qu'elle retrouva tapi au fond d'une 
remise. Voulant le faire sortir de force de sa cachette, 
elle le frappa; au moment même le chat s'élanca et la 
mordit très-fortement au bras. Le chat périt quelques 
jours après. La plaie du sujet observé saigna beaucoup, 
et le bras enfla fortement. Au dixième jour le bras parut 
tout à fait guéri. Sept semaines après l'accident, dans 
la soirée du 3 au # janvier de cette année, la malade 
éprouva des douleurs vives dans la main et dans l'épaule ; 
puis elle eut des frissons, éprouva du serrement à la gorge 
et de l'anxiété. Le surlendemain survint de la gêne dans 
la déglutition et une envie de boire, que la malade ne 
pouvait satisfaire, parce que la vue seule de l’eau lui don- 
nait des étouffemens, et qu’elle avait une grande hor- 
reur pour tous les liquides. La sensibilité nerveuse était 
telle que le moindre mouvement dans l'air était excessi- 
vement pénible à la malade. Le 6 janvier la malade se 
trouvant mieux, put avaler un peu de liquide et même 
manger; dans la soirée, les symptômes s’aggravèrent 
beaucoup; le délire survint. Le 7 janvier l'horreur pour 
les liquides s’accrut encore, ainsi que la sensibilité ner— 
veuse , il survint des crachottemens, et la malade suc- 
comba enfin, 72 heures après l'apparition des premiers 
symptômes. Des préjugés bien ridicules s'étant opposés 
à ce qu'on fit l’autopsie du cadavre, on ne put lui de- 
mander la confirmation de la réalité de ce cas de rage, 
bien établi d’ailleurs par le procès-verbal que fit dresser 
immédiatement l'autorité. Le maire de la commune eut 
la sage précaution de faire tuer sur-le-champ tous les 


g — 392 — 
chiens et les chats appartenant à la maison où venait de 
sévir si cruellement cette horrible maladie. 


M. Sacc rapporte ensuite quelques observations sur 
le danger qu'il y a à se servir d'eaux corrompues. Il y 
a quelques années déjà, que M. le D' de Castella a ap- 
pelé sérieusement l’attention du conseil de santé sur le 
danger qu'il y a à laisser subsister des puits perdus dans 
les parties basses de la ville de Neuchâtel, dont ils infec- 
taient les eaux, au point qu’on pouvait attribuer à l’u- 
sage de ces eaux putréfées, l’activité avec laquelle la 
fièvre typhoïde sévissait dans cette partie de la ville. 
L'effet nuisible des eaux croupissantes a été constaté tant 
sur les hommes que sur les animaux; c’est à elle qu'on 
doit presque toujours attribuer le charbon des bêtes à 
cornes. Comment agissent les eaux de cette nature? pro- 
bablement en communiquant aux êtres organisés le 
mouvement de décomposition qui se passe dans leur 
sein, ainsi que l’admet M. Liebig. Sans nous inquiéter 
de la cause qui donne aux eaux corrompues leur pro- 
priétés délétères, nous ajouterons un seul fait à tous ceux 
qui prouvent combien elles sont nuisibles. La partie 
haute de la ville de Strasbourg est entourée d’un fossé 
plein d’eau qui en recoit toutes les immondices, en sorte 
que cette eau basse et stagnante est infecte en été. Les 
eaux de ce canal s'élèvent au printemps et en automne 
par suite des pluies et pénètrent alors dans les puits 
qui alimentent toute cette partie de la ville ; l'eau qu’on en 
tire a une saveur fade, une odeur nauséabonde; expo- 
sée au contact de l'air, elle laisse déposer un limon ver- 
dâtre et infect, qui est composé de petites conferves et 


— 393 — 

de matières mucilagineuses abondantes. Eh bien, l'épidé- 
mie de fièvre typhoïde qui désole ce quartier correspond 
justement aux époques de l’année où les eaux des puits se 
gâtent; ne peut-on pas en conclure qu'elles sont la cause 
de cette maladie? Revenant à l'application de ces prin- 
cipes à la ville de Neuchâtel, M. Sacc pense qu'on pour- 
rait empêcher totalement l'infection des eaux potables du 
bas de la ville, en supprimant les puits perdus, qui pa- 
raissent y subsister encore, et surtout en substituant aux 
fosses d'aisance actuelles, des fosses mobiles qu'on enlè- 
verait chaque jour, après en avoir désinfecté le contenu 
avec des terres charbonneuses, ou mieux, avec du sulfate 
ferreux. On conserverait de cette manière un engrais ex- 
trêmement précieux, qu’on jette actuellement comme une 
matière dépourvue de toute espèce de valeur. 

M. le D' Borel ne pense pas que l'usage d'eaux cor- 
rompues soit la cause unique du développement de la 
fièvre typhoïde, parce qu'il a vu des cas de cette maladie 
dans les parties hautes de la ville, dont les habitans ne 
boivent que de l’eau parfaitement pure. Quant à ce qui 
est de la suppression des puits perdus, il dit qu’elle a été 
effectuée {ôt après la communication de son rapport au 
Conseil de ville, ensorte que ces foyers d'infection n’exis- 
tent plus. 


M. Guyot présente à la société, de la part de M. le 
pasteur de Gélieu, un numéro de la Brenen Zeitung, 
Gazette des abeilles, qui se publie maintenant en’Alle- 
magne, et qui ne traite absolument que de la culture de 
ces insectes. M. de Gélieu désirant répandre autant que 
possible la connaissance de cet utile journal, demande que 


— 394 — 

la société veuille bien faire un rapport sur lui, ou tout 
au moins en faire connaître l'existence à toutes les per- 
sonnes qu'elle peut intéresser. Plusieurs propositions ten- 
dant à remplir le but de M. de Gélieu sont faites et reje- 
tées; on décide enfin, sur la proposition de M. Desor, 
qu'on imprimera le prospectus de cette gazette sur le ré— 
vers de la couverture des Bulletins de la société. 


Sur l'invitation de M. le président, M. le Dr de Castella 
rend compte de deux observations médicales envoyées par 
la section de la Chaux-de-Fonds; l’une de M. le Dr Du- 
Bois et l'autre de M. le Dr de Pury. 

La première est relative à un individu affecté d’angine 
de poitrine, qui a succombé subitement. 


Après avoir retracé brièvement l'historique de l’angine. 


de poitrine, le D" DuBois rapporte le fait qu'il a observé. 
Son malade a eu pendant environ un an des accès , qui 
au début de la maladie consistaient uniquement dans des 
étourdissemens, que la saignée et les exutoires n'ont point 
soulagé : plus tard. lorsque l'accès le prenait, il avait 
une douleur très-vive dans la région du cœur, et au bras 
gauche jusqu’au coude; son pouls était très-irrégulier 
et intermittent dans les paroxismes : il mourut subitement 
dans un accès. 

A l’autopsie faite 24 heures après la mort, M. DuBois 
a trouvé le corps dans un état de putréfaction très-avan- 
cée; toute la peau œdémateuse; le cœur était énorme, 
tout-à-fait blanc; il avait passé presque complètement à 
l'état gras, et ressemblait à une masse de suif; les val- 
vulves et les artères coronaires étaient dans l’état normal. 

Si ce cas peut être rangé parmi ceux d'angine de poi- 


— 395 — 
trine, il prouve, comme tant d’autres, que cette maladie 
dépend d'un vice organique du cœur. 

Dans la seconde observation, M. le D' de Pury, après 
avoir décrit l'asthme thymique et cité les auteurs qui ont 
fait de cette affection une maladie particulière, rapporte 
le cas d'un enfant âgé de cinq mois, qui, depuis sa nais- 
sance, avait la respiration habituellement gênée et sif- 
flante, devint sujet à des accès de suffocation, et suc- 

_comba subitement pendant la nuit à un de ces accès. 

A l’autopsie, M. le D' de Pury a trouvé le thymus du 
volume d'un gros œuf de poule. Il attribue à ce dévelop- 
pement du thymus la mort de l'enfant. M. le D' DubBois, 
dans la discussion qui a eu lieu sur ce fait dans la sec 
tion de la Chaux-de-Fonds, séance du 27 décembre 
dernier, l’attribue plutôt à des convulsions. 

A l’occasion des deux observations rapportées ci-des- 
sus, M. le D' de Castella communique à la société deux 
cas d'angine de poitrine qu'il a eu occasion d'observer, 
et cite des cas de croup récens qui constituent une véritable 
épidémie croupale existant à Neuchâtel actuellement. 

17e Observation d'angine de poitrine. 

Micosss , âgé de 72 ans, d’un tempérament bilioso— 
nerveux, sujet à la goutte et à la gravelle, ayant eu 
dans.sa jeunesse des affections syphilitiques, éprouva pour 
la première fois en juin 18## une violente oppression 
accompagnée d'une douleur vive derrière le sternum, qui 
s'élendait à la partie moyenne des bras, son pouls était 
fort et plein. Une forte saignée et quelques antispasmo— 
diques firent cesser cet accès. En mars 1845, l'oppres- 
sion se manifesta de nouveau subitement, et toujours 


— 396 — 


accompagnée d’une pression douloureuse derrière le ster- 
num, qui s'élendait sur les côtés de la poitrine, au dos 
et aux bras; alors un mouvement de terreur s'emparait 
du malade, qui croyait élouffer à tout moment ; le pouls 
quoique plein était peu accéléré, et la respiration n'était 
pas bruyante, il n'y avait point de toux. Pendant huit 
jours les accès se sont répétés fréquemment le jour et la 
nuit, et le malade a succombé dans le désespoir, malgré 
la saignée, les ventouses et les antispasmodiques, même 
l'opium. 

A l’autopsie on à trouvé une légère hypertrophie du 
ventricule gauche du cœur sans ossification des valvules, 
ni de l'aorte. Cette artère était dilatée, mais d'une ma- 
nière uniforme ; elle avait deux fois son calibre ordinaire, 
et offrait à sa face interne des ulcérations et des cicatrices 
nombreuses qui s'étendaient, depuis son origine, jusqu'au 
delà de sa courbure : ces ulcérations avaient deux, ou 
trois lignes de diamètre; leurs bords étaient, les uns fran- 
gés, les autres coupés à pic et pénétraient jusqu'à la 
membrane cellulaire de l'artère ; les cicatrices qu'on re- 
marquait dans l'intervalle des ulcérations étaient d'un 
blanc mat ; elles s'étendaient sur l’orifice des troncs 
artériels qui partent de l'aorte; l’orifice des artères coro- 
naires en était entouré. 

Cette altération de l'aorte a très-probablement été la 
cause de l'angine de poitrine dont le malade à été at- 
teint. 

Le second cas rapporté par M. le Dr de Castella est celui 
de M. Roy le père, négociant très-estimé à Neuchâtel, 
âgé de 6 ans, d'une forte constitution, qui, en février 
1821, a succombé, en neuf jours, à des accès d'angine 


— 397 — 

de poitrine, qui le prenaient subitement, et ne duraient 
que quelques minutes. Une vive douleur se faisait sentir 
dans la région sternale, s'étendait aux bras, surtout au 
gauche; la respiration était comme suspendue pendant 
quelques instans, et le malade éprouvait beaucoup d’an- 
goisse. Il mourut subitement au milieu de la nuit, dans 
un accès. | 

A l'autopsie on ne trouva aucun vice organique ; si 
non, une rougeur foncée très-vive de la membrane in- 
terne des bronches et de la trachée-artère, rougeur qui 
se faisait aussi remarquer sur la membrane interne de 
l'aorte. 

M. Roy venait d'établir une machine à décatirles draps ; 
il allait passer une partie de la journée dans le local 
où cette machine fonctionnait; la température en était 
très-élevée ; peu de jours après, il fut pris du premier 
accès d'angine de poitrine, en montant dans son galetas, 
où il ne put arriver; dès lors les accès se succédérent 
jusqu'à sa mort. Son fils et son commis, qui comme lui 
avaient séjourné dans le même local et s'étaient occupés 
du décatissage des draps, offrirent aussi assez longtemps 
des accès d'angine de poitrine, mais ils ont été guéris. 

Les symplômes d'angine de poitrine, qui ont caracté- 
risé la maladie de M. Roy, celle de son fils et de son 
commis (le commis a été observé par M. le D' Borel, 
qui a assisté à l’autopsie du père Roy et soigné son fils, de 
concert avec M. le D' de Castella), doivent-ils être attri- 
bués à une affection nerveuse des poumons et du cœur, 
produite par la haute température dans laquelle ils ont 
séjourné pour décatir leurs draps? La rougeur foncée de 
la membrane interne des bronches et de l'aorte ne prou- 


— 398 — 

verait-elle pas qu'il y a eu stase du sang noir dans les 
capillaires, et que l’oxigénation du sang n'a pas pu se 
faire, ce qui a produit l’asphyxie, la paralysie du cœur et 
la mort. Jurine a observé le même symptôme, et il pense 
que le défaut d'oxigénation du sang est la cause des ac- 
cès d'angine de poitrine; aussi conseille-t-il de faire 
respirer aux malades un air chargé d'oxigène. Dans les 
nombreuses observations citées dans son mémoire, on 
trouve presque toujours à l'ouverture des cadavres un 
sang noir et fluide. 

Jusqu'ici on n’a pas envisagé l'emphysème pulmonaire 
comme pouvant déterminer l’angine de poitrine. M: Bo- 
nino l’envisage comme cause de l'asthme héréditaire (voir 
la Gazette médicale, année 1845, page 489), et porté à 
un haut point, il dit qu'il détermine l'asphyxie. M. le 
D' de C.... a trouvé dernièrement un emphysème inter 
lobulaire considérable, chez un enfant de six ans mort du 
croup, et sur lequel il avait pratiqué la trachéotomie, qui 
a prolongé encore trois jours et demi la vie de l'enfant 
menacé de périr de suffocation au moment de l'opéra- 
tion. Plusieurs fausses membranes avaient été expulsées 
par la canule de M. Trousseau, la respiration était rede- 
venue libre. L'emphysème à l'intérieur de la poitrine 
s'étendait jusqu'aux fausses côtes; à l'extérieur, il occu- 
pait le médiastin et pénétrait dans le tissu pulmonaire ; 
en passant avec le manche du scapel à la surface du pou- 
mon, on ramassait de grosses bulles d'air, qui se dé- 
plaçaient facilement sous la plèvre ; la muqueuse des 
bronches et de la trachée-artère était d'un rouge foncé, 
comme chez M. Roy; il n'y avait ni fausses membranes 
ni mucosités purulentes dans les bronches. Pendant les 


— 399 — 
trois jours et demi qui ont succédé à la trachéotomie, l'en- 
fant a eu, vers le soir surtout, des accès de suffocation 
très-prononcés : à la fin la respiration s’est affaiblie, ce 
qui a amené la mort. M. le D' de Castella pense que, dans 
ce cas, l'emphysème pulmonaire a eôntribué pour beau- 
coup à la mort de l'enfant, et a empêché le succès de la 
trachéotomie, que l'on avait espéré un moment. 
F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 5 mars 1846. 


Présidence de M. L. CouLox. 


M. Guyot fait voir à la société l’atlas de la Grèce an- 
cienne de Kiepert, et donne quelques renseignemens sur 
ce bel ouvrage, ainsi que sur les autres travaux de ce 
géographe. 


M. Guyot analyse verbalement un mémoire de M. Mahl- 
mann sur le climat et la végétation du Xhanat de Bou- 
khara, tel qu'il résulte des observations du major Cha- 
nikoff. Ces observations climatologiques, tout incomplètes 

qu'elles sont encore, tirent un grand intérêt du défaut 
_presque absolu dans lequel nous sommes d'observations 
- positives sur le climat des latitudes moyennes de l'Asie 
au sud de la Sibérie. Elles nous donnent de plus, de 
nouvelles lumières sur la distribution géographique des 
plantes propres à ces contrées, d’ailleurs peu visitées par 
les Européens. C’est ainsi que les observateurs russes qui, 
dans l’espace de peu d'années, ont livré de si importans 
matériaux pour la climatologie de la Sibérie méridiopale, 
augmentent de jour en jour nos connaissances sur les par- 


ties de l'Asie les moins connues sous ce rapport. C'est 
29 


— 100 — 
à eux encore que la science doit les premières observa- 
tions continues et dignes de foi qui aient été faites sur la 
côte orientale de l'Asie, à Pékin et même dans l’Asie cen- 
trale. 

Il résulte des ren$eignemens donnés par M. Chanikoff 
que le climat de Boukhara quoique chaud, l’est moins 
cependant qu’on ne pourrait l’attendre d’une contrée située 
sous le 39° 46/ latitude nord, et à 1100 pieds d’éléva- 
tion au-dessus de l'Océan. Il porte à un haut degré le 
caractère continental. L'hiver y est rude, l'été brülant. 
. Les extrêmes (min.-18,6 Réaum. max. + 31° R.) sont 
très-distans et les variations brusques ; les vents du nord 
y sont presque constans; les plus violens cependant souf- 
flent du nord-est. L'air y est d’une grande sécheresse, 
malgré des irrigations artificielles assez nombreuses dans 
les régions cultivées. Le ciel, habituellement d'une grande 
pureté , favorise singulièrement les observations astrono— 
miques. 

Les premières gelées ont lieu à la fin de novembre; 
la neige y tombe, mais atteint rarement un pied, à un 
pied et demi de profondeur. La gelée nocturne dure pres- 
que jusqu’à la fin d'avril. La pluie est rare, et tombe 
plutôt au printemps. Les arbres se revêtent de leurs 
feuilles à la fin de mars, dans la dernière décade, et dans 
la première quinzaine d'avril. 

Néanmoins ce climat nourrit dans les jardins de Bou- 
khara les plus beaux fruits du midi : le mûrier, le figuier, 
le grenadier, la vigne, des melons célébres, le coton, le 
riz, la pistache, les abricots, on ajoute même des dattes. 
Le tigre du Bengale se montre parfois dans ces régions. 

Si l'on compare ce climat tel qu'il est de nos jours 


— 01 — 
avec la peinture que nous en ont laissée les Arabes, en 
particulier Ebn Haukal, qui dans le cours de ses longs 
voyages avait pu le comparer à beaucoup d'autres, il 
semblerait que ce climat a subi quelque détérioration, car 
ils nomment celte contrée le plus beau des quatre Paradis 
de l'Islam : louange qui doit aujourd'hui nous paraître 
singulièrement exagérée. 
A. GuYoT, secrétaire. 


M. Théremin présente à la société deux diamans qu'il 
a rapportés du Brésil ; l’un d’eux est encore dans sa 
gangue, appelée cascalho; l'autre, qui est libre et cris- 
tallisé en cube, présente le phénomène bien remarquable 
d'un cristal enchâssé dans un autre, de manière à ce 
que les angles du premier sortent par le milieu des faces 
du second , ensorte que leurs arêtes figurent une espèce 
de croix de St.-André. 

A l’occasion de la communication de M. Théremin, 
M. Sacc fait part à la Société des réflexions suivantes sur 
le carbone : 

La nature offre le carbone pur cristallisé sous forme de 
diamant et de graphite; amorphe, sous forme d’anthra- 
cite; impur, à l’état de houille et de lignites. Il n’y a pas 
de corps simple qui s'offre sous des aspects plus divers, et 
avec des propriétés plus opposées que le carbone. Cristal- 
lisé, il constitue dans le diamant un corps incolore ou 
fort peu coloré, réfractant fortement la lumière, et n'ayant 
aucune espèce d'action sur les fluides colorés ou odorans, 
non plus que sur les gaz. Amorphe et très-divisé, comme 
on l’obtient, par exemple, en calcinant des bois, il absorbe 
avec force les rayons lumineux et calorifiques, les gaz , les 


— 402 — 
matières colorantes', et la plupart des substances odo- 
rantes. Le diamant L'e brûle qu'avec peine, et seulement 
dans l’oxigène pur; le carbone amorphe alimente la 
flamme de nos foyers et celle de tous les hauts-fourneaux. 
En présence de ces singulières propriétés du carbone, on 
se demande si ce n’est pas à la faculté que le carbone 
possède de changer de forme, qu'il doit de pouvoir pro- 
duire, en s’unissant avec l'hydrogène, l’oxigène et l'azote, 
ces composés organiques, qui, quoique formés d’élémens 
identiques , se manifestent à nos sens avec des propriétés 
très-diverses et sont en si énorme quantité, que l’imagi- 
nation la plus hardie en est effrayée. 

Les diamans n’ont été trouvés jusqu'ici que dans des 
terrains d’alluvion, où on les rencontre avec des zir- 
cons, des éméraudes et d’autres pierres précieuses , qui 
caractérisent les roches anciennes, et semblent prouver 
que le diamant a la même origine qu'elles. Il y a deux 
ans, un Prussien, qui voyageait au Brésil, découvrit des 
diamans enchässés dans une roche d’itacolumite , qui est 
formée par l’agglomération de grains d’une espèce de silice 
assez hydratée. On crut alors que tous les diamans s’é- 
taient formés dans l’itacolumite ; mais cette erreur ne put 
durer longtemps, parce que cette roche doit être une 
formation assez récente, comme toutes les roches sili- 
ceuses hydratées, ensorte qu'il est impossible d'admettre 
que les diamans et les autres pierres précieuses qu’elle 
renferme , se soient formées dans son sein ; il est beau 

coup plus probable qu’à mesure qu'elle s’est formée, l'i- 
tacolumite les a entraînés et retenus mécaniquement. 

Le diamant paraît avoir été formé par la solidification 
lente du carbone gazeux, ou liquide, qui peut avoir existé 


— 403 — 

lors de la formation du monde, et avoir échappé, sous d’é- 
paisses couches de roches fondues, à l’action oxidante de 
l'oxigène de l'air, qui a transformé aussitôt en acide carbo- 
nique, tout le carbone qui entrait directement en contact 
avec lui. Il paraît que le refroidissement des diamans a été 
plus rapide pour les uns que pour les autres, puisqu'on 
en trouve dont la cristallisation a été confuse; elle s’est 
donc opérée, pour ces derniers, sous l'influence d’un re- 
froidissement trop rapide pour que toutes les parties de 
ce minéral aient eu le temps de se disposer les unes à 
côté des autres assez régulièrement pour permettre le cli- 
vage. On brise ces diamans dans de petits mortiers d'acier, 
et on prépare ainsi une poudre appelée égrisée; elle sert 
à polir le diamant et en général toutes les pierres pré- 
cieuses dures. 

On appelle diamans en rose, ceux qui n’ont qu’un 
côté taillé en facettes et l’autre plat, et diamans en bril- 
lans, ou brillans, ceux qui sont taillés des deux côtés; 
ils sont, de tous les plus recherchés. On distingue dans les 
brillans trois parties : le pavillon ou partie supérieure, la 
culasse ou partie inférieure, et le bord:qui se trouve 
entre ces deux parties. Lorsqu'on achète des diamans 
de prix, il faut toujours les démonter pour s'assurer 
qu'ils sont d'une seule pièce , afin d'éviter d'être trompé ; 
car on a vu des brillans dont le pavillon était une rose et 
la culasse, une pièce faite avec du quartz brillant, connu 
sous le nom de caillou du Rhin. 

Les diamans taillés ont une valeur double de celle 
qu'ils auraient à l'état brut. On pèse ces pierres pré— 
cieuses avec des poids spéciaux appelés carats, du nom 
des graines d’une plante (Erythrina) qui servent à peser 


— 04 — 

les diamans dans les pays chauds. Le carat vaut à-peu- 
près quatre grains, soit grains 0,20654. On paie, en 
général, les diamans d’un carat #8 francs de France; 
au-delà, leur valeur se calcule en élevant leur poids au 
carré, ensorle qu'un diamant de deux carats vaut déjà 
192 francs de France; aussi le prix des diamans un peu 
gros est-il vraiment fabuleux. 

Le graphite est du carbone cristallisé en paillettes; 1l 
est noir et fort dur, quoiqu'il le soit moins que le dia- 
mant; on l’emploie à la préparation des crayons de mine 
de plomb et des creusets réfractaires , dits de plombagine. 
Il se forme quelquefois dans l'intérieur du bâtis en briques 
des hauts-fourneaux. 

Les houilles sont sans doute produites par la décompo- 
sition lente, ou la putréfaction, sous l'influence de l’eau 
salée, de grands amas de plantes celluleuses, telles que 
les varecs et les fucus. 

Les lignites proviennent de l'enfouissement spontané 
de forêts entières. 

L’anthracite paraît être due à une décomposition assez 
avancée des lignites, pour que toutes leurs parties hydro- 
génées aient disparu, de manière à ne laisser que du 
charbon presque pur. 

Ces trois espèces de charbon sont loin d’être pures; les 
deux premières contiennent des substances formées de 
carbone, d'hydrogène et d'azote, avec plus ou moins 
d'oxigène ; toutes les trois laissent, quand on les eg" 
une forte proportion de cendres. 

Il est facile de distinguer les houilles d'avec les lignites 
et l’anthracite quand on les soumet à la distillation ; les 
houilles donnent alors beaucoup de carbure hydrique, qui 


— 405 — 
brûle avec une belle flamme rouge; les lignites ne pro- 
duisent guère que de l'oxide carbonique, qui brûle avec 
une flamme bleue, et l'anthracite ne donne pas de gaz, 
parce qu'il est formé presque tout entier de carbone pur. 

M. Sacc présente ensuite le tableau des principales 
formes cristallines du diamant. Ce tableau fait partie de 
‘excellent Traité de Minéralogie, par M. Dufrenoy. 

À la suite de ce mémoire, M. Ladame parle de l’allo- 
tropie, et soulève plusieurs questions fort graves sur quel- 
ques parties de la théorie chimique, et en particulier sur 
la nature des corps qu’on regarde actuellement comme 
simples. M. Sacc ne partageant pas dans toute son éten- 
due cette manière de voir, il s'élève une discussion, que 
M. Ladame termine en promettant un mémoire étendu 
sur ces questions. F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 19 mars 1846. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. Sacc fait hommage à la société, au nom de M. le 
Prof. Will, du mémoire que ce savant vient de publier 
sur l’huile essentielle de moutarde: 

Sur l'invitation de M. le président, M. Sacc fait lec- 
ture d’un rapport dans lequel M. Favre analyse, sur 
la demande de la section de la Chaux-de-Fonds, un mé- 
moire de M. Robert sur un moyen de découvrir immé- 
diatement le lieu où sont les incendies de nuit. M. Ladame, 
ainsi que M. d'Osterwald , approuvent beaucoup la sage 
critique qu'a faite M. Favre de ce mémoire. Les plans 
relatifs au projet de M. Robert sont mis sous les yeux de 
la société (*). 


(*) Voir plus bas Bulletin des séances de la section de la Chaux-de-Fonds, 


— 406 — 

M. d'Osterwald offre à la société de publier dans ses mé- 
moires les observations barométriques faites l’année der— 
nière au Mont-Blanc, par MM. Martins et Bravais : obser- 
vations que ces savans lui ont remis avec plein-pouvoir 
d'en faire ce qu’il jugerait bon. Ges observations présen- 
tent entre elles des différences assez grandes pour néces- 
siter des révisions que M. d'Osterwald se charge de 
faire de concert avec MM. Guyot et Ladame. 


M. Sacc présente une note critique sur le mémoire que 
vient de publier M. le Prof. Gobley sur l'analyse du jaune 
d'œuf. 

Il y a quelques semaines que M. Gobley, Prof. agrégé 
à l’école de pharmacie de Paris, a présenté à l’académie 
un travail fort intéressant sur l'analyse du jaune d'œuf 
qu'il a trouvé composé de : 


Eau DOECL EME CE ND SMIC 51,486 
Vitellme 9 & 4 ob senobiént … 19,100 
Margarine et oléine . . . . 21,304 
Cholestérine . . . . ,. . 0,438 
Acides oléïque et margarique . 7,226 
Acide phosphoglycérique _ . . 1,206 
Chlorure ammonique. . . 0,034 
Chlorures sodiqué, potassique et 

sulfate potassique . . . . 0,277 
Phosphates calcique et magné- 

SR RE Re red 2 Le USA 
Extrait de viande . 12: 7. 0,400 


Ammoniaque, matière azotée, 

matière colorante, traces d’a- 
cide lactique, de fer, etc. . 0,853 
100,000 


EE LT 

Deux choses frappent quand on lit le mémoire de M. Go- 
bley: c'est d’abord qu’il admet dans le jaune d'œuf l'exis- 
tence d’un acide, et ensuite qu'il ne s'est pas occupé de 
la composition de l’albumine des œufs qu'il analysait, non 
plus que de la nourriture des poules qui lui fournissaient 
les œufs nécessaires à son travail. Bien plus, il ne dit 
pas quel était l’âge des œufs dont il s’est servi, et paraît 
ignorer s'ils ont été fécondés ou non. M. le Prof. Gobley 
termine son mémoire en disant qu’il va s'occuper d'étu- 
dier les modifications qu'éprouvent, sous l'influence de la 
vie, les divers principes qui constituent l'œuf. 

Avant de passer à l'analyse de ce mémoire, nous pré- 
senterons une pelite note sur le dosage de quelques-unes 
des parties de l'œuf de poule; cette note fait partie 
d'un trayail étendu que nous espérons avoir l'honneur de 
communiquer bientôt à la société. 

Deux œufs d’une poule de la variété naine, dite an- 
glaise ou pattue, pondus, l'un le 2, l’autre le 3 mai, ont 
êté cuits le 4; ils pesaient alors: l’un gr. 31,5627, l’autre 
gr. .32,8816; en moyenne 32,2221. La poule pesait 
gr. 672,1550; en représentant son poids par 100, on voit 
que celui de l'œuf doit l'être, par 5 parties, et celui du 
jaune d'œuf par une. 

Les jaunes de ces deux œufs pesaient ensemble : 
gr. 19,8850:; après avoir été traités par l'éther, ils ne 
contenaient plus que gr. 3,6614 d’albumine, et d'autres 
matières insolubles dans l'éther. Dans la solution se trouve 
une substance grasse, qu'on a obtenue en évaporant la 
liqueur dans un courant d'acide carbonique, afin que 
Vhuile ne s’oxidât pas. Le résidu est formé de deux 
graisses, dont l’une est beaucoup plus fluide que l’autre; 


—  À408 — 

ce résidu pèse gr. 6,8798. Obtenue de cette manière, 
l'huile d'œuf est d’un beau jaune orangé; elle absorbe 
l'oxigène de l'air avec une rapidité extraordinaire et en 
se résiniliant. Elle a une forte odeur de phosphure hy- 
drique, ce qui donne à croire qu’elle contient une assez 
grande quantité de phosphore libre ou combiné. L'eau 
dosée directement et par perte pesait gr. 9,3438. 

En conséquence des faits établis par cette analyse, un 
jaune d'œuf pesant gr. 9,9425 contient : 


Matières insolubles dans l’éther gr. 1,8307 
Matières solubles dans l’éther  » 3,4399 


Fans FO, 99 D JETILAS | » 4,6719 

gr. 9,9425 

Soit en centièmes : Rapport. 
Matières insolubles . . 18,4128——9 
Matières solubles . . . 34,9979—— 7% 
PAR SM 46,9893——5 

100,0000 


Les œufs qui font le sujet de cette note provenaient 
d'une nourriture composée exclusivement d'orge, depuis 
quatre mois; ils ont donc été faits avec ce grain. M. le 
Prof. Gobley admet l'existence d’un acide dans le jaune 
d'œuf, quoiqu'il dise lui-même que ce corps n'a pas la 
moindre action sur les papiers réactifs. Quand on chauffe 
le jaune d'œuf au contact de l’eau, il s’acidifie, voilà la 
raison pour laquelle M. Gobley admet dans le jaune 
l'existence d'un acide qui ne s’y trouve pas, et qui ne 
peut pas exister, parce que, s’il s’y formait, il serait aus- 
sitôt neutralisé par les alcalis que contient en grande 
abondance l’albumine. L'erreur commise par M. Gobley 


— 409 — 
est grave, puisqu'elle tend à infirmer ce fait établi pour 
tous les êtres organisés, c’est que la vie ne se développe 
jamais dans un milieu acide, tandis qu’au contraire la 
présence des alcalis en petite quantité est favorable à son 
développement. 

Il est probable que si M. Gobley avait fait des analyses 
avec des œufs provenant de différentes basses-cours, il n'au- . 
rait pas obtenu des résultats aussi concordants que ceux 
qu'il expose dans son analyse, et je suis certain que sil 
répète jamais ses recherches, il n'arrivera jamais à trou- 
ver des nombres semblables à ceux qu'il vient de publier. 
Il n’a pas tenu compte de l’âge des œufs dont il s'est 
servi, et cela aurait été fort nécessaire; car l'évaporation 
leur fait perdre beaucoup de leur poids, surtout quand 
on les laisse dans une chambre chaude. M. Gobley ter- 
mine son mémoire en promettant d'étudier les métamor- 
phoses des principes constituans du jaune d'œuf, sous 
l'influence de la vie, et j'affirme qu'il ne parviendra à 
aucune espèce de résultats, s’il ne s'occupe pas de l'ana- 
lyse de l'œuf tout entier; car pendant l'incubation, le 
poulet, qui se développe dans le jaune, absorbe toute l’al- 
bumine, qu’il transforme en fibrine; l'étude de ces deux 
principes de l'œuf ne peut donc point être séparée. 

M. Gobley a trouvé dans le jaune d'œuf un acide qui 
se produit quand on le chauffe au contact de l'air; puis 
un peu plus loin , il paraît tout surpris de découvrir en 
core de l'acide phosphoglycérique, et des acides oléïque et 
margarique. La réponse précède ici la question; elle se 
trouve justement dans cette acidification du jaune d'œuf, 
au contact de l'air, lorqu'on admet avec nous, que le 
phosphore se trouve dans le jaune dissous dans l'huile, 


— MO — 

soùs forme de sulfide, qui, en s'oxidant, produit de l'acide 
phosphorique et du soufre. Mais, au moment où il se 
forme, cet acide phosphorique, se trouvant en présence 
de la margarine et de l’oléine, les décompose et leur 
enlève leur glycérine, avec laquelle il produit de l'acide 
phosphoglycérique, et met alors en liberté ces acides 
. oléique et margarique, qui n'existent point dans le jaune 
de l'œuf frais; mais qui s'y produisent quand on en fait 
l'analyse, comme M. Gobley, au contact de l'air. 

Pour apprendre de quelle manière les principes du 
jaune d'œuf sont groupés dans son sein, il faut opérer 
à l'abri du contact de l'air ; c'est ce qui rend cette étude 
si difficile; c'est aussi ce qui amène des différences si 
grandes entre les chiffres fournis par les nombreux au- 
teurs qui se sont occupés de ce genre d'analyse. Il est à 
regretter que M. Gobley n'ait pas tenu compte des con- 
ditions dans lesquelles il a fait cette analyse, qu'il a con- 
duite avec tant de zèle et de patience, et qui l’a amené 
à la connaissance de quelques faits très-curieux. 

A. Guxor, secrétaire. 


Séance du 2 avril 1846. 


M. le secrétaire donne lecture d’une circulaire adres- 
sée à la société par M. O. Heer, par laquelle il invite, 
au nom de la société helvétique, la société neuchâteloise 
à provoquer des observations sur les phénomènes pério- 
diques de la nature, d’après les instructions de Quetelet. 
Il prie la société de faire traduire en français, d'impri- 
mer ce document, et de le communiquer aux sociétés 
de Genève et de Lausanne. 


— Mi — 

M. Coulon, père, fait la remarque que quelques déve- 
loppemens pourraient être ajoutés à ces instructions. On 
demande, par exemple, l'époque de l’arrivée des hiron- 
delles; or on confond souvent trois espèces qui n’arri- 
vent que successivement : le martinet , qui arrive le pre- 
mier; l'hirondelle qui vient ensuite; enfin le cul-blane, 
qui paraît le dernier. Il importe de mettre dans toutes ces 
observations le plus de précision possible. 

M. de Castella désirerait y voir entrer en outre des 
renseignemens sur les épidémies, qui probablement ne 
sont pas sans rapport avec l'état des phénomènes météo- 
rologiques. Des observations de ce genre pourraient du 
moins servir à constater ou à nier l'existence d’une rela- 
tion entre ces deux ordres de faits. 


Le secrétaire commence la lecture d’un mémoire de 
M. Lesquereux sur les tourbières du Nord, qui contient 
les résultats généraux des observations faites par ce savant 
dans le voyage qu'il vient d'accomplir aux frais du roi(*). 


M. Sacc présente à la société quelques monnaies an- 
ciennes, parmi lesquelles on distingue une monnaie de 
Charles-Quint et quelques monnaies brésiliennes. 


M. Guyot signale, d'après M. Kolenati, l'existence de 
vrais glaciers du premier ordre dans le Caucase. Dans la 
relation de son ascension du Kasbek, le 27 août 1844, 
dont le bulletin de la société de Géographie de Berlin 
donne un extrait, ce savant déerit sa marche à travers 
plusieurs glaciers {qu'il nomme très-improprement La- 
wines), qui présentent absolument tous les caractères que 


(*) Voir l’appendice , à la fin de ce volume. 


— 19 — 
nous sommes habitués à rencontrer dans les glaciers 
des Alpes. Ils remplissent de vastes cavités situées au— 
dessous du sommet le plus élevé de la montagne. 

Les moraines latérales et médianes, souvent multi- 
ples, y sont distinctement décrites. Ces dernières se pré- 
sentent, ainsi que dans les glaciers des Alpes, comme 
des remparts élevés sur le dos du glacier, et forment 
des traînées continues de blocs et de fragmens de roches. 
Les crevasses s'y rencontrent également, nombreuses, 
larges et profondes. Plusieurs ont été mesurées. Dans la 
partie supérieure du plus élevé des deux principaux 
glaciers, Kolenati décrit même une large crevasse conti- 
nue, qui rappelle la Rimaye ou le Bergschrund de nos 
hauts-névés. Tous les phénomènes sont identiques. Seu- 
lement les glaciers, comme la ligne des neiges éternelles, 
sont plus élevés; le premier a été traversé par Kolenati, 
à une hauteur de plus de 9000 pieds, élévation qui dans 
nos Alpes marque déjà les champs de neige. Le second 
semble plus élevé encore. 

A. Guyor, secrétaire. 


M. Sacc donne verbalement quelques détails sur les 
avantages qu'offre pour notre agriculture la multiplication 
de la consoude à feuilles rudes (Symphytum asperrimum) 
pour les prés humides, et celle du Bromus Grossus pour 
les prairies sèches. La culture de la consoude est analogue 
à celle de la luzerne, dont elle a plusieurs des propriétés, 
tandis que celle du Brome est l’analogue de la culture du 
sainfoin, dont elle diffère cependant très-sensiblement, en 
ce qu'elle est plus épuisante, parce qu’elle laisse sur le sol 
beaucoup moins de débris organiques, et que ses racines 


— M3 — 
ne s'enfonçant pas sous terre, effritent sa surface. M. Sacc 
engage beaucoup les membres de la société à essayer la 
culture de ces deux plantes, dont sept années d'expé- 
rience lui ont appris à connaître toute l'utilité comme 
fourrage artificiel. F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 16 avril 1846. 


M. Guyot présente de la part de l’auteur, M. Sismonda, 
de Turin, un mémoire considérable, avec cartes et pro- 
fils, qui a pour titre : Notizie et schiarimenti etc. Notices 
el éclaircissemens sur la constitution des Alpes piémontaises. 


Le même fait voir à la société la Carte du fond des 
lacs de Neuchâtel et de Morat, dessinée d'après les sondages 
de M. Guyot et les siens propres, par M. Henri de 
Pourtalès-Gorgier. M joint quelques éclaircissements sur 
ce travail qui va être livré au public dans le prochain 
volume des mémoires de la société. 


Le secrétaire donne lecture de la seconde moitié du 
mémoire de M. Léo Lesquereux sur les tourbières du 
Nord (*). 

Après la lecture du mémoire, M. Coulon, père, fait re- 
marquer qu'il est étonnant que M. Lesquereux annonce 
qu'on trouve des troncs de chênes au fond des tourbes 
des Verrières, tandis que le chêne ne croît pas même au 
Val-de-Travers. 

M. Coulon, fils, répond que cependant le chêne monte 
sur Chaumont jusqu’à 3000 pieds ; mais, il est vrai, sur le 
flanc méridional. 


(*) Voir plus bas Pappendice à la fin du volume. 


— 14 — 


M. Ladame rapporte les expériences de Faraday et 
Becquerel sur la quantité d'électricité qui tient les par- 
licules des corps en équilibre, et qui se manifeste dans 
les actions chimiques. Il cherche à donner une idée de 
cet ordre de phénomènes, en rappelant que, d’après ces 
auteurs, la quantité d'électricité qui se développe dans la 
décomposition d’un gramme d'eau, est telle, qu’elle serait 
capable de charger à saturation 20 millions de batteries 
électriques d’un mètre carré de surface ; or une seule de 
ces batteries est assez forte pour tuer un animal de la 
grosseur d'un chat. Ce qui a retardé cette découverte 
importante, c'est qu'on ne peut recueillir cette électricité 
que difficilement, vu que les deux électricités se dévelop- 
pant simultanément, se neutralisent et restent inaperçues. 
Si on pouvait les recueillir séparément, on aurait en sa 

uissance une force véritablement énorme. 


M. Ladame fait une communication verbale sur quel- 
ques points de la théorie des vapeurs applicable à lat- 
mosphère. Cette communication, qui fait partie d’un 
travail plus étendu sur l’histoire météorique de l'air, a 
pour but de faire voir : 

1° Que la hauteur des nuages et la distance qui sé- 
pare leurs couches successives à diverses élévations, peu- 
vent être déduites,-par le caleul, d'expériences hygromé- 


triques et thermométriques faites dans les régions infé- 


rieures de l’atmosphère. 

29 Qu'il est possible de conclure la hauteur des nuages 
de la mesure de leur vitesse angulaire prise depuis deux 
stations ayant une différence de niveau. La formule per- 
met également de s’assurer si les nuages ont dans toute 


# 


— M5 — 
l'étendue de l'horison visible la même hauteur et la même 
vitesse absolue. 

3° Que les considérations précédentes ne sont pas ri- 
goureusement applicables à l'atmosphère, parce qu'elles 
sont fondées sur son état statique, et qu'en conséquence 
elles ne peuvent être vraies qu’autant que l’état dynami- 
que de l’atmosphère a peu d'influence ; ce que nous igno- 
rons. 

Dans le but de savoir jusqu'à quel point on pouvait 
tenir compte des perturbations résultant des mouvemens 
de l'atmosphère pour atténuer et même pour renverser 
tout-à-fait les déductions du calcul, M. Ladame a dé- 
terminé à priori la hauteur des nuages, dans 80 con- 
ditions différentes de température et d'humidité. La 
comparaison entre les nombres ainsi obtenus, et ceux 
que fournit l'observation, démontre clairement, que l’é- 
tat dynamique de l'atmosphère n’a pas une influence 
aussi grande qu'on pourrait le croire, et que les résultats 
que donnent ces deux méthodes, offrent un accord re- 
marquable, quand on les prend dans leur ensemble. 

M. Coulon, père, remarque que la hauteur des nuages 
doit dépendre aussi de l’état électrique de l'atmosphère, 
du moins d’après les indications contenues dans un mé- 
moire lu à la Société de l'association britannique pour 
l'avancement des sciences. 

M. Ladame fait observer que cela a lieu en effet; mais 
quil n'a pas tenu compte de cet élément dans les calculs 
. qu'il a présentés, parce qu'il n’est pas susceptible, dans 
l'état actuel de la science, d’être apprécié numérique- 
ment. À. Guxor, secrétaire. 


— M6 — 


Séance du 6 mai 1846. 
Présidence dé M. L. CouLon. 


M. le Président dépose sur le bureau le Bulletin de la 
Société de Berne jusqu'au mois d'avril. 

Le même présente à la Société des échantillons polis du 
calcaire portlandien qu'on exploite depuis peu de tems 
dans les environs de Neuchâtel, sous le nom de marbre 
de Fahy. M. Chapuis assure que, d’après ses essais, 
l’oxfordien de Chambrelien prend aussi bien le poli que 
le portlandien de Neuchâtel. 


M. Guyot expose les résultats d'une exploration ré- 
cente de l’isthme de Panama et du Darien, exécutée par 
M. Hellert, et insiste sur l'intérêt que présente la décou- 
verte qu'a faite ce voyageur d’une localité plus favorable 
que toutes celles indiquées jusqu'ici pour le percement 
de l’isthme et l'établissement d’une communication mari- 
time entre les deux océans. M. Hellert signale l'existence 
de couches de houille, qui affleurent à la surface du sol. 

M. Sacc rapporte qu’un des membres de la société, 
M. Fritz Favarger, qui a traversé récemment ces mêmes 
régions, avait déjà constaté ce gisement de houilles, qui 
peuvent devenir si importantes pour l'avenir industriel 
de ces contrées. 


M. Théremin communique la notice suivante sur une | 
pluie de manne observée en Asie-Mineure, extraite de 
l'Observateur autrichien du 28 janvier 18%6 : 

Selon des nouvelles concordantes, un phénomène rare 


— MT — 
et très-remarquable s’est vu dans les districts de Jenit- 
cher, Siwrihissar, Eskitschehr et Sidi-Gazi en Asie-Mi- 
neure. Il y est tombé de la manne du ciel! Le Courrier 
de Constantinople du 24 janvier 1846, contient à cet égard 
l’article suivant : 

« Des lettres de Jenitchebr disent que depuis plusieurs 
jours il tombe du ciel, d'instans à autres, de la manne, 
qui sert de nourriture aux habitans. Elle tombe de la 
grandeur d’une aveline et en quantité considérable; on 
la vend dans le pays à douze piastres le killow, (mesure 
contenant 172% pouces cubes français). Les habitans la 
pulvérisent et en font cuire du pain, qui n'est pas in- 
férieur à celui que l'on mange d'ordinaire. » 

Le Journal de Constantinople du 26 janvier 1846 porte 
sur le même sujet, ce qui suit : 

« Le même phénomène qui a été observé au printems 
de 1841 à Van, s'est renouvelé dans le district de 
Jenitschehr, avec des circonstances toutes pareilles et 
extraordinaires. Il résulte de lettres écrites par des per- 
sonnes de toute confiance, habitant le chef-lieu, qu'a- 
près une disette sensible -de vivres, uné quantité éton- 
uante d’une substance grisâtre est tombée du ciel; elle 
est de la grandeur d'une aveline, ressemblant à la 
manne en larmes et ayant un goût assez agréable. Cette 
substance est tombée en si grande abondance, qu'elle 
couvre la terre à une épaisseur de trois pouces et suffit 
pour plusieurs jours à la subsistance des habitans. La 
farine que l’on en obtient est blanche, mais le pain que 
Von en cuit est, malgré sa beauté, sans saveur. » 


Le méme donne lecture de la note suivante relative à 
l’abaissement du tarif du sel : 


— M8 — . 

Neuchâtel, par suite de traités avec la France en tire 
le sel nécessaire à sa consommation dont il fixe la quan- 
tité et le prix. 

En France une loi vient d'être mise à exécution, par 
laquelle le prix du sel est réduit de 5 centimes par kilo- 
gramme, lorsqu'il est destiné à l'alimentation des bes- 
tiaux. Pour s'assurer que le sel est réellement destiné à 
cet usage et non à la cuisine, ou à un but industriel, 
le gouvernement français exige du consommateur rural, 
qui veut acheter aux dépôts au prix réduit, qu'il fasse 
mélanger ce sel de substances étrangères nutritives : 
mélange qu'il laisse, jusqu'à un certain point, au choix 
de l'acheteur et qui se fait à ses frais. Le choix est laissé 
entre les mélanges suivans : 

Sur 5 kilog. de sel en poudre: 5 litres d’eau et 2 hecto- 
litres ou 40 kilog. de son ordinaire ou mêlé de recoupe. 

Sur 10 kilog. de sel en poudre : 10 litres d’eau # kilog. 
de farine de tourteaux de graines oléagineuses, et 2 hecto- 
litres ou 40 kilog. de son ordinaire, ou mêlé de recoupe. 

Comme le sel est de première nécessité pour l'hygiène 
des bestiaux, il serait utile de faire jouir nos nourris- 
seurs de bestiaux et nos vachers de cette diminution con- 
sidérable sur le prix du sel; si le gouvernement de la 
Principauté n'avait pas déjà fait des démarches dans ce 


but, peut-être serait-il convenable que la Société cher- 


chàt à l'y rendre attentif. 
A. Guyor, secrétaire. 


M. le Président donne lecture d’une lettre de M. Au- 
guste Vouga dans laquelle il annonce avoir vu tout ré- 
cemment à Cortaillod une muscicapa parva, oiseau fort 


Rae Es 


— M9 — 
rare, même dans sa patrie, qui est la Hongrie. Il y a peu 
d'années que le même ornithologiste a tué un oiseau du 
Bengale , la Limosa terek, au milieu d'un vol de bécas- 
sines. 


M. Hollard met sous les yeux de la société un œuf 
. fort gros qu’il a trouvé dans la cavité abdominale d’une 
jeune poule qui n'avait pas encore pondu. Il fait remar- 
quer que cet œuf peut être tombé dans le péritoine sous 
forme de jaune, tel qu'il se détache de l'ovaire, et que 
ce serait alors dans la cavité abdominale qu'il se serait 
revêtu d’albumine et de la membrane qui entoure le 
blanc. Ici se présente la question de savoir comment s’est 
formée cette membrane du blanc. M. Hollard se demande 
si ce serait peut-être par le dédoublement de la membrane 
qui enveloppe le jaune. Ce qui semble appuyer cette 
manière de voir, c'est la mobilité du jaune dans l'intérieur 
de l'œuf, mobilité qui est beaucoup plus grande-que celle 
du jaune dans un œuf bien conformé. 

M. Sacc s'étant aperçu que le jaune semble nager dans 
l'intérieur de l'œuf, comme s’il était parfaitement libre, 
émet l'opinion que la membrane extérieure de cet œuf 
n'est probablement pas autre chose que la membrane vi- 
telline et que la substance translucide que l’on voit dans 
son intérieur et qui a l'aspect d'albumine, n’est que de 
l'eau chargée de mucus, qui y a pénétré par endosmose. 


M. Sacc présente à la société une branche de l'arbre à 
thé et lui annonce qu'il vient d'offrir à la société d’hor- 
ticulture un fort beau pied de cette plante. A ce sujet il 
donne quelques détails sur la culture, l’acclimatation en 


— 420 — 
Europe et la préparation qu'on fait subir aux feuilles du 
thé. IL expose la méthode d'extraction du principe actif 
des feuilles du thé et fait observer qu'il est chimiquement 
le même que celui du café et du Guarana. Passant en- 
suite à l'étude physiologique du thé et du café, et exa- 
minant leur action sur l’estomac et le cerveau, M. Sacc 
la compare à celle du vin rouge et se demande si la théine 
agit directement sur le cerveau. M. Hollard pense que 
la théine est absorbée par le sang et qu’elle agit directe- 
ment sur le cerveau, mais d’une manière bien différente 
du vin, puisque le thé tend à éclaircir et à faciliter les 
fonetions du cerveau, tandis que le vin, pris même en 
petite quantité, les entrave. 
F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 28 mat 1846. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le Président fait part de l'invitation que lui adresse 
le président du congrès scientifique de Gênes, de faire 
représenter la Société de Neuchâtel à cette réunion par 
quelques-uns de ses membres. 

Le même présente à la société les mémoires de l’Acadé- 
mie royale de Liège dont fait partie le 1°" volume de 
l’ouvrage que M. Lacordaire publie sur les insectes phy- 
tophages. Ces mémoires sont accompagnés d’une lettre 
dans laquelle l'académie de Liège demande les mémoires 
de la société en échange des siens. 

IL dépose encore sur le bureau les procès-verbaux de 
_ la société des sciences naturelles de Lausanne. 


— 421 — 

M. le Président annonce avoir reçu un Plongeon Lumme 
femelle et adulte en plumage de printems. Cet individu 
est le premier adulte de l'espèce qui ait été tué dans notre 
pays ; tous les autres étaient des jeunes. 


M. Hollard ayant ouvert, de concert avec M. Sacc, l'œuf 
anomal dont il a été question dans la précédente séance, 
annonce avoir acquis la conviction que cet œuf, après 
avoir séjourné dans l’oviducte, avait rétrogradé probable- 
ment sous l'influence de violentes contractions muscu- 
laires, et qu'après avoir remonté dans les trompes il 
était tombé de là dans la cavité abdominale. M. Hollard 
admet en conséquence que ce n’est pas le jaune qui est 
entré dans la cavité abdominale, mais bien l’œuf tout en- 
tier, auquel il ne manquait que la coque. Il fait remarquer 
d'abord que cet œuf était bien conformé, qu'il avait un 
gros et un petit bout, tandis que si son enveloppe exté- 
rieure avait été formée par la pellicule vitelline, il aurait 
été sphérique, et non point ovoïde. Si l'œuf était si énor- 
mément gonflé, c'est parce qu'il s'est chargé de liquide ab- 
sorbé par endosmose pendant son séjour dans l’abdomen. 
L'étude microscopique des enveloppes de l'œuf a confirmé 
en tous points les prévisions de M. Hollard, en prou- 
vant que l'enveloppe extérieure de l'œuf possède exacte- 
ment la même structure que la membrane coquillière des 
œufs venus à terme. L’'albumine existait dans cet œuf; 
la membrane vitelline avait disparu , ainsi que les cha- 
lazes ; une partie du jaune s'était dissoute dans la liqueur 
albumineuse qui le baignait, tandis que l’autre s'était 
solidifiée et prise en masse. Cette observation est fort 
importante puisqu'elle peut nous mettre sur la voie de 


— À422 — 
la cause qui produit beaucoup de grossesses extra-utérines, 
en nous prouvant que l’œuf, après avoir séjourné pendant 
quelque temps dans les trompes , peut revenir au point 
d'où il est parti et tomber de là dans la cavité abdomi- 
nale, où il continue à se développer encore pendant quel- 
que temps (*). 

A la suite de la communication de M. Hollard, M. le 
D' Borel rappelle que le professeur Lallemant a observé 
un cas de grossesse extra-utérine dont la cause pro- 
bable avait été une vive frayeur, au moment de la 
conception. 


M. le Dr de Castella rappelle qu'il a déposé au mu- 
sée de la ville, les débris d'un fœtus provenant d’une 
grossesse extra-utérine et extraits par lui, à l’aide de l’o- 
pération césarienne. La conception extra-utérine durait 
depuis deux ans et paraissait avoir commencé au septième 
mois de la grossesse, à en juger par le développement 
des membres de l'enfant. La cause de cette grossesse 
 anomale peut bien avoir été aussi une frayeur, le mari 
de la femme observée étant épileptique. La plaie formée 
par l'opération resta longtemps fistuleuse et comme les 
règles s’écoulaient à la fois, par elle, et par la vulve, il 
fut tenté aussi de croire, avec M. le Dr Borel, que cette. 
grosseur était tubaire et non pas abdominale. 

M. le professeur Hollard dit qu'il ne croit pas que 
l'œuf puisse tomber directement de l'ovaire dans la ca- 
vité abdominale, en échappant aux trompes; il pense que 
l'œuf passe toujours dans les trompes et que c'est de là, 


(*) Voir la notice de M, Hollard sur le même sujet, à la fin du volume. 


— 4923 — 

‘que, sous l'influence de causes qui, comme une violente 
frayeur, doivent décider une contraction de cet organe, 
il est repoussé en arrière et va tomber dans la cavité ab- 
dominale. 


M. le Dr de Castella revenant sur les dangers si- 
gnalés par M. Sacc dans l'emploi du calomel , annonce 
avoir lu avec un vif plaisir le mémoire de M. Bussy dans 
lequel ce savant annonce que le meilleur contrepoison 
du sublimé corrosif est la magnésie. Il en conclut qu'en 
administrant le chlorure mercureux avec la magnésie, il 
n'y a plus du tout à craindre d'effet toxique de la part 
de cet utile médicament. 


M. Sacc présente à la Société les belles planches dont 
M. Natalis Guillot a accompagné son intéressant mémoire 
sur les organes de la respiration des oiseaux. 


M. de Castella annonce qu’il vient de trouver dans l’u- 
rine de l’un des malades de l’hôpital Pourtalès, les petits 
cylindres observés par le professeur Henle dans la ma- 
ladie de Bright. L’urine de l'individu affecté de cette 
grave maladie est très-albumineuse ; M. de Castella lui a 
donné en vain l'acide nitrique, dans le but de le soulager. 

M. Hollard croit que les cylindres microscopiques qu’on 
observe dans l'urine des personnes affectées de la ma- 
ladie de Bright pourraient bien n’être que les cellules épi- 
théliales cylindriques dont M. Henle a signalé l’existence. 

M. le D' Borel rapporte avoir observé un diabé- 
. tique dont l’urine excessivement abondante et d’une cou- 
. leur de petit lait, était tellement chargée de sucre qu’elle 


—. 2% — 
passait presque immédiatement à la fermentation vineuse. 
et ne présentait point du tout l'odeur habituelle de l’u— 
rine, mais bien celle du moût récent. Elle précipitait 


abondamment en rouge les sels cuivriques additionnés 
de potasse. 


M. Sacc engage beaucoup les membres de la société à 
aller visiter le jardin de la société horticole, dans la serre 
chaude duquel se trouve à présent en pleine fleur un cac- 
tus analogue au Cereus flagelliformis, et obtenu’ de grai- 
nes par M€ Lardy-DuBois d’Auvernier. Ce Cereus pa- 
raît être un hybride nouveau obtenu par la fécondation 
accidentelle de l'ovaire d’un Cereus flagelliforme par le 
pollen d’un Cereus speciosissimus, puisque la forme et la 
coloration de ses fleurs rappellent à la fois celles des deux 
cierges dont nous venons de parler. Les tiges de cet hy- 
bride sont près de trois fois plus grosses que celles du 
Cereus flagelliformis; elles sont d’un vert beaucoup plus 
foncé et garnies d’épines brunes moins nombreuses, mais 
plus fortes que les siennes. Cette belle variété diffère to- 
talement par sa fleur du Cereus flagelliformis dont elle se 
rapproche par la forme de ses tiges. 

M. le Président clot les séances de la société jusqu’à 
l'automne prochain. 


F. Sacc, secrétaire. 


BULLETIN 


DE LA SOCIÈTE DES SCIENCES NATURELLES 


DB NEUCEIATER. 


Section de la Chaux-de-Fonds. 
Séance du 13 novembre 1845. 


Présidence de M. WURFLEIN, 


M. le Président ouvre cette séance, qui est la première 
de la troisième année depuis l'existence de la section, par 
un discours dans lequel, jetant un regard sur ce qu’elle 
a fait, et sur ce qui lui reste à faire, il engage les 
sociétaires à redoubler de zèle et de persévérance pour 
atteindre le but modeste qu'ils se sont proposé, l’avance- 
ment de l'instruction dans nos montagnes. 


M. Nicolet dépose sur le bureau, les bulletins de la 
société industrielle de Mulhouse, que cette société nous 
envoie en échange des nôtres. 


Le D° Pury dépose également sur le bureau plu- 
sieurs brochures offertes à la société par MM. Combe, 
pasteur; Agassiz, Desor, Coulon et Pury, docteur, ainsi 
qu'un timbre pour la société gravé par M. L. Bovy, qui 
lui en fait hommage. 


— 426 — 

M. le D' Basswitz présente à l'assemblée la machine 
électro-médicale de MM. Breton frères, pour la gué- 
rison des paralysies. Cette machine qui est employée 
actuellement dans tous les hôpitaux de Paris, ressemble 
assez à la machine de Bonijol, elle en diffère entr'autres 
par une bobine graduée qui permet de varier à volonté 
les secousses galvaniques que l’on veut donner. 


Séance du 27 Novembre 1845. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


M. le D" Pury lit une note statistique sur les doreurs 
au feu de la juridiction de la Chaux-de-Fonds. Il y a 
maintenant dans la juridiction 43 ateliers occupant 
120 ouvriers. Dans ces #3 ateliers , on en compte 27 où 
les prescriptions du Conseil d'Etat sont exécutées ; dans 
les 16 autres, la hotte vitrée ou lanterne n'existe pas, ou 
bien les} doreurs ne prennent pas les précautions re- 
quises. 


M. C. Nicolet lit une note de M. Justin Billon, sur un 
arc-en-ciel lunaire observé le 8 octobre de l’année cou- 
rante. 

Le 8 octobre dernier, dit M. Billon, à sept heures 
trente-cinq minutes du soir, on a pu observer à la Chaux- 
de-Fonds un phénomène très-rare dans nos contrées: un 
arc-en-ciel lunaire. 

Au sud-ouest, et dans son premier quart, la lune 
brillait sur un ciel légèrement vaporeux. Au nord-ouest, 
un nuage se résolvait en pluie assez abondante; l’arc-en- 
ciel était complètement semi-circulaire et plus lumineux 


— 427 — 


à ses extrémités qu'à son sommet. D'une nuance extré- 
mement pâle, il ne paraissait pas offrir les couleurs de 
l'iris; cependant il se détachait admirablement du nuage 
noir sur lequel il se dessinait. Ce phénomène n’a duré 
que sept à huit minutes, la lune ayant été bientôt cou- 
verte de nuages, chassés par un fort vent d'ouest. Il a 
été suivi de mauvais (ems ; le ciel est resté couvert et le 
même vent a continué de souffler avec violence pendant 
toute la nuit et la journée du lendemain. 

Après cette lecture, M. J.-C. Ducommun ajoute qu'il 
a observé un arc-en-ciel semblable et dans les mêmes 
circonstances il y a quelques années à la Chaux-de-Fonds, 
et M. le secrétaire Huguenin ajoute qu'il y a un certain 
nombre d'années , il fut témoin, au Locle, d’un arc-en- 
ciel lunaire, qui présenta les mêmes phénomènes que 
celui observé par M. Billon, avec cette différence que la 
lune était alors dans son plein. 

M. Dubois, docteur , fait l'histoire de l’angine de poi- 
trine en général, et d’un cas de cette maladie qui a offert 
des circonstances particulières. 

L’angine de poitrine, introduite dans les cadres noso- 
logiques à la seconde moitié du 48 siècle, fut d’abord 
décrite par Sauvages , sous le nom de Cardiogmus cordis 
sinstri, en 1763 , et par Heberden, en 1768, sous le 
nom de Angina pectoris. Elle a pour symptômes une 
constriction spasmodique très - douloureuse avec an- 
goisses que le malade éprouve subitement. Les malades, 
au moment de la crise, croyent toujours qu’ils vont expi- 
. rer de suffocation, c’est ce qui a fait appeler cette mala- 
die par Swediaur Pnrigophobia (de rviyos suffocation et 


— 428 — 
908c la peur). La douleur, dans la crise, se fait sentir au 
sternum, dans les épaules et dans les bras, surtout dans 
l'épaule et le bras gauche. Ces accès de suffocation ont été - 
attribués par la plupart des auteurs à l'ossification des 
artères coronaires (Jenner, Wall, Crellius , etc.). Ils ex- 
pliquent l’accès par un afflux de sang, arrivant au cœur 
devenu rigide par l’ossification des artères coronaires, et 
qui détermine une compression des nerfs cardiaques, com- 
pression qui peut suspendre tout d’un coup les mouve- 
mens du cœur et amener promptement la mort; d’autres 
auteurs l’attribuent à l’ossification des valvules aortiques, 
à la dilatation de l’aorte; d’autres à une lésion organi- 
que du cœur, qui passe en totalité ou partiellement à l’é- 
tat adipeux; toutes ces lésions ayant été trouvées sur 
des cadavres; enfin, d’autres pathologistes (Desportes, 
Jurine, etc.) ont vu la cause de cette maladie dans une 
affection nerveuse des poumons, qui gène les fonctions 
de ces organes. Les sujets atteints de cette maladie ont 
en général dépassé l’âge de 50 ans, le premier accès les 
prend ordinairement lorsqu'ils montent un terrain diffi- 
cile ; souvent le malade, que l'intensité des douleurs force 
à s'arrêter dans sa marche, peut cependant inspirer l'air 
et l’expulser. Au début, les paroxismes sont plusieurs 
semaines sans revenir, mais à la fin, ils saisissent le ma- 
lade jusqu’à sept ou huit fois par jour, et augmentent 
d'intensité jusqu'à ce qu'enfin ils déterminent la mort du 
malade. Entre les accès, les individus atteints de ce mal 
paraissent être en pleine santé. Le pouls, quoiqu'un peu 
rapide pendant les paroxismes, n’est presque jamais. in- 
termittent. Le sexe exerce une influence sur cette mala- 
die; les hommes en étant plus souvent atteints que les 


femmes. Sir John Forbes avait compté sur 88 malades, 
80 hommes et 8 femmes. L'indication prophylactique 
est nulle, il faut attendre pour en donner une, que l’on 
soit fixé sur les causes de la maladie. Tout ce qu'on peut 
faire actuellement est de songer, une fois la maladie dé 
clarée, à prévenir le retour des accès et à en abréger la 
durée. L'air de la campagne, un régime sévère, l'exer- 
cice, les bains froids et surtout les opiacés, l’eau de lau- 
rier-cerise , l'éther, l’ammoniaque, l’eau de menthe poi- 
vrée, sont très-utiles, d'après la plupart des auteurs, 
ainsi que l'emploi des révulsifs, pediluves sinapisés, si 
napismes et vésicatoires sur la poitrine, exutoires aux 
jambes, etc. Les anti-goutteux ont été préconisés par 
ceux qui voient dans cette maladie une affection arthri- 
tique. Les aloëtiques et les purgatifs salins, ainsi que les 
saignées ont été employés par les médecins, pour les- 
quels la cause de la maladie est dans un afflux de sang. 

Après cette exposition, M. DuBois fait l’histoire du cas 
qu'il a eu l’occasion d'observer. Cet homme âgé de qua- 
rante ans, avait ressenti les premiers symptômes de la 
maladie il y a environ un an, dans une promenade qu'il 
faisait; les premières crises consistèrent uniquement dans 
des étourdissemens; on essaya sans succès les saignées 
et les exutoires (vésicatoires sur la poitrine). Les accès 
ne revenalent qu'à de longs intervalles, et le prenaient 
ordinairement après ses repas. Il essaya au printemps 
de prendre les eaux du Gournigel, qui furent loin d’ap- 
porter un soulagement à ses maux. Ce fut äson retour 
qu'il consulta M. DuBois. Lorsque l'accès le prenait, il 
avait une douleur très-vive dans la région du cœur, qui 
s'irradiait au sternum, à l'épaule gauche et au bras 


— 430 — 


gauche; d'autrefois il ressentait seulement une vive dou- 
leur dans le bras gauche; son pouls était très-irrégulier 
et intermittent durant les paroxysmes, qui présentaient 
d’ailleurs les phénomènes décrits plus haut. M. DuBois 
pensant qu'un épanchement pleurétique avait existé seul 
au début de la maladie, fit appliquer des vésicatoires sur 
le devant de la poitrine pour combattre l’épanchement ; 
plus tard, à la fin de la maladie , il prescrivit les opiacés. 
Le malade mourut subitement dans un accès plus fort 
que les autres. 

A l'autopsie , faite vingt-quatre heures après la mort, 
M. Dubois trouva le corps dans un état de putréfaction 
très-avancé, toute la peau était œdémateuse ; les poumons 
ne présentaient aucune altération, à part une adhérence 
ancienne, et non considérable, du côté droit. Le cœur 
était énorme, totalement blanc; il avait passé presque 
complétement à l’état gras, et ressemblait à une masse 
de suif. Le rétrécissement des valvules aortiques n'exis- 
tait pas ; elles étaient dans leur état normal, ainsi que 
les artères coronaires, qui ne présentaient pas la moindre 
trace d’ossification. La matière grasse, bien qu'elle. se 
présentät généralement, n'avait pas envahi la totalité de 
l'épaisseur du cœur, plusieurs des fibres charnues du ven- 
tricule gauche étaient saines. — M. Dubois termine cette 
dissertation en montrant le cœur de cet homme aux 
membres de la société. 


Séance du 11 décembre 1845. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


M. le Dr Pury lit une note sur deux variétés de ma- 
ladies, causées par le mercure, et qui ont passé jus- 


— 31 — 
qu'à présent inapereçues ; ce sont les serophules et l’amé- 
norrhée mercurielles. 

Les serophules mercurielles dont il a observé quelques 
cas, se distinguent des autres essentiellement par une 
marche beaucoup plus rapide. Des individus robustes 
soumis aux émanations du mercure.en vapeur, perdent 
le coloris de leur teint ; leur face se bouffit quelquelois, 
ou maigrit d'autrefois considérablement, mais devient 
toujours livide, terreuse ; leurs yeux sont enfoncés dans 
leurs orbites; les glandes lymphatiques s'engorgent; leur 
sang perd sa plasticité et sa force de cohésion en perdant 
son albumine, sa fibrine et sa matière colorante. So- 
bernheiïm et Simon, dans leur traité de Toxicologie, signa- 
lent cette action du mercure sur le sang. Aussi voit-on 
chez les malheureux atteints de cette variété de scro- 
phules , la moindre solution de continuité à la peau se 
terminer par un ulcère dégoûtant. Ces symplômes vont 
toujours en s’aggravant , sans que le malade ait la con- 
science de son état; ce n’est que lorsque des tremblemens 
mercuriels viennent s'ajouter à cette série de maux que 
ces pauvres ouvriers se décident à consulter un médecin. 
Ces serophules n'épargnent ni le sexe ni l’âge. Des en- 
fans qui vivaient dans des chambres où l’on dorait ne 
présentaient qu'une masse informe toute recouverte d’ul- 
cères et d'abcès. Si l’on néglige les remèdes convenables 
et qu'on laisse ces malheureux respirer les vapeurs mer- 
curielles, les scrophules peuvent s’aggraver au point de 
réagir d'une manière très fâcheuse sur l'intelligence de ces 
individus, et d'en faire de véritables crétins, ou d'une fa- 
on lout aussi déplorable sur leur physique, et leur causer 
des phthisies qui les mènent promptement au tombeau. 


- 51 


— 432 — 

Heureusement lorsqu'on s'y prend à temps, qu'on éloigne 
les malades de ces miasmes mercuriels, qu'on leur fait res- 
pirer l'air pur de la montagne , qu'on leur administre les 
remèdes convenables , entr'autres l'huile de foie de mo- 
rue, qui a dans ces cas là une intensité d'action qu'elle 
n'a pas dans d’autres, ces malades sont bientôt rétablis, 
beaucoup plus vite même que dans les scrophules ordi- 
naires. 

Quant à l’aménorrhée mercurielle, dont les cas sont 
assez fréquents, sa cause est comme celle des scrophules 
mercurielles, l’action délétère du mercure sur le sang. 
L'aménorrhée mercurielle peut exister comme les scro- 
phules mercurielles sans tremblemens mercuriels ; mais 
cette maladie-ci arrivée à un certain point détermine Ja 
cessation des menstrues. Des occupations en plein air, la 
cessation du dorage, quelques légers sudorifiques, comme 
la fleur de soufre, combinés avec quelques ferrugineux , 
suffisent ordinairement pour rétablir les malades en peu 
. de temps. q 

Il s'engage après la lecture de ce mémoire, une dis- 
cussion sur cette matière; M. Nicolet cite à l'appui de la 
guérison des maladies mercurielles par le soufre quelques 
expériences relatives à l’action du mercure sur la wie 
végétale, consignées dans les Annales de chimie, tome vingt- 
deuxième, par Deiman, Paats, Van-Troostwick et Lau- 
werenburgh. Ces observateurs Hollandais, placèrent sous 
une cloche posée sur l’eau une plante de fève de marais 
et à côté de cette plante une bouteille remplie de mer- 
cure. Une plante de menthe frisée, mise dans l’eau, fut 
de même placée sous une cloche avec du mercure. Un 
drageon de Spiræa salicifolia, attaché à la racine-mère 


- 


— 433 — 

fut soumis au même traitement. Les feuilles et les tiges 
de ces plantes furent couvertes dès le troisième jour de 
taches noires, et le quatrième et au plus tard le sixième 
jour entièrement noires ; le drageon de spirée, quoique 
attaché à la plante-mère n’a pu se remettre de tout l'été. 
Les plantes meurent si complètement, que souvent au 
moment où l’on soulève la cloche, les feuilles tombent et 
la tige s'affaisse. 

Ils constatèrent par plusieurs expériences, que l’ac- 
tion du mercure sur les végétaux est nulle, lorsqu'on 
recouvre ce métal d’un peu d’eau, lorsqu'il est mêlé avec 
la terre, ou mis en contact avec la racine des plantes. 

Ils répétèrent la seconde expérience et fixérent un peu 
de soufre aux parois intérieures de la cloche ; sous l'in- 
fluence du soufre la plante est restée intacte, ce qui 
prouve selon ces observateurs, que le soufre neutralise 
les mauvais effets du mercure. 

M. Depierre, docteur, tout en déclarant avoir vu dans 
sa pratique, plusieurs cas de scrophules et d'aménorrhée 
mercurielles, pense que la maladie des plantes signalée 
par M. Nicolet, correspond à la gangrène que causent 
quelquefois les préparations mercurielles , tandis que les 
scrophules sont l'équivalent de l'étiolement des plantes ; 
la couleur noire que l’on observe dans la gangrène et 
dans cette maladie des végétaux, et la perte de matiëre 
colorante des sucs, dans les deux derniers cas, autorisent 
suffisamment cette comparaison. 

M. Droz, docteur , ajoute qu'il avait vu de nombreux 
cas de scrophules mercurielles, et qu'il avait observé en 
dernier lieu, chez des doreurs aux Eplatures, le cas d'un 
enfant alteint de scrophules mercurielles, qui avait une 


— 434 — 
fracture. Malgré un laps de temps considérable, cette 
fracture ne put être consolidée que lorsqu'on eut fait 
prendre au malade pendant assez long-temps le soufre 
et l'huile de foie de morue. 


M. Favre fait ensuite lecture de la lettre adressée par 
le comité de la lunette méridienne, au bureau de con- 
trôle, pour le prier de doter notre localité d’un régula- 
lateur, d’un compteur, d'un baromètre et d’un thermo-— 
mêtre exacts; les fonds souscrits pour la lunette ne 
suffisant pas à l'achat de ces objets d’une nécessité abso- 
lue pour notre industrie. L'assemblée décide que cette 
lettre sera envoyée au bureau de contrôle avec un devis 
des prix de ces objets. 


M. Droz, docteur, qui travaille à un mémoire sur la 
constitution médicale de nos montagnes, et sur les causes 
des maladies endémiques et épidémiques qu’on y observe, 
appelle, en attendant qu'il puisse le publier , l'attention 
de la société sur la fréquence des épidémies bilieuses de 
tout genre (pleuro-pneumonie bilieuse, métrite bilieuse, 
catarrhe bilieux , fièvre bilieuse , fièvre typhoïde). Il cite 
une maison au Versoix dont les habitans sont entassés 
les uns sur les autres, et boivent de l’eau d’un puits qui 
est malsain. Il est sorti de cette maison depuis Pâques 
pour entrer à l'hôpital de la Chaux-de-Fonds 19 malades, 
dont 3 sont morts, outre un nombre peut-être aussi con- 
sidérable de malades qui se sont fait soigner chez eux 
et dont quelques-uns aussi sont morts. 


Dr Pury, secrétaire. 


— 435 — 


Séance du 15 janvier 1846. 
Présidence de M. WURFLEIN. 


M. Nicolet présente à la société plusieurs ossemens de 
mammifères antédiluviens provenant des grottes de Man- 
cenens et de Vaucluse, situées dans le canton de Maiche, 
partie frontière du département du Doubs. Il expose à la 
société la formation géologique des grottes à ossemens, 
leurs formes, leurs accidens intérieurs, leur origine, celle 
de l'argile déposée sur leur fond, celle des restes orga- 
niques qu'elles renferment, la cause à laquelle on doit sui- 
vant lui la conservation des os d'animaux antédiluviens; 
il passe ensuite à la description des grottes qu’il a visitées 
l'année passée avec M. J.-B. Carteron de la Grand Gombe 
des Bois. | 

L'ouverture principale de la Baume de l'Ermutage de 
Mancenens, se trouve sur le versant d'un escarpement 
qui porte le nom de Côte-de-Valory; elle est à peu de 
distance d’un ermitage construit en 162%, par l’ermite 
Jean Regnaud Lallemand, sous l’invocation de Saint- 
Antoine, abbé. La chapelle, aujourd'hui en ruines, était 
un lieu de pélérinage pour les habitans de Mancenens, 
qui la dotèrent dès sa fondation; et de curiosité par sa 
situation dans le voisinage de la Baume. 

Cette grotte offre de l'intérêt par ses brillantes stalactites, 
par sa profondeur, ses bassins, etsurtout par les ossemens 
d'animaux antédiluviens, qui y ont été découverts en 1840 
par M. J.-Baptiste Carteron. Elle est creusée dans les 
couches horizontales d’un calcaire compacte qui appar- 
tient à l’étage supérieur du terrain jurassique, et consiste 


— 436 — 

en un couloir bifurqué long d'environ 250 mètres, qui se 
dirige du sud-est au nord-ouest, et se termine à son ex- 
trémité par une fissure, près de laquelle on observe une 
chambre cireulaire; chaque branche de la bifurcation se, 
termine par une ouverture. La voûte offre dans toute son 
étendue des stalactites qui rappellent les clefs pendantes 
des voütes gothiques ; plusieurs descendent jusqu’au ‘sol 
et forment des colonnes massives qui ont jusqu'à huit dé- 
cimètres de diamètre. Dans deux endroits les stalactites 
réduisent le diamètre de la grotte à six décimétres.: Le sol 
est inchiné de l'extrémité aux ouvertures; il est couvert 
de stalagmites qui ont une puissance de trois centimètres 
à trois décimètres; en plusieurs endroits elles sont en 
saillie de quatre à six décimètres. Cette grotte paraît à 
M. Nicolet, résulter d’une fissure produite par l’écartement 
de plusieurs couches comprises entre deux couches in- . 
tactes; le plafond horizontal des ouvertures et la fissure 
terminale autorisent cette conjecture. 

Les: parois de la grotte offrent ça et là, sur les bancs 
qui sont en saillie, des surfaces polies, sans stries ni sil- 
lons, parallèles au plancher; les angles de ces bancs sont 
plus ou moins arrondis; ces parois sont en outre, en plu- 
sieurs endroits perforées. Ces érosions que présente une 
roche dure et compacte, sont assez généralement attri- 
buées à l’action de l'eau saturée d'acide carbonique. Le 
poli ne peut guère être attribué qu’au torrent qui s'échap- 
pait de cette grotte dans les temps anciens ; l'existence 
de ce torrent est suffisamment démontrée par le dépôt 
tufacé de la Côte de Valory. Plusieurs filets d’eau s'échap- 
pent-encore ça et là de la voûte et alimentent quelques 
bassins. : 


— 437 — 

Les stalagmites recouvrent totalement un dépôt allu- 
vial ossifère, composé d'une argile jaune ou rougeûtre 
onctueuse au toucher, entremêlée de pierres calcaires ar- 
rondies, semblables à la roche qui forme les parois de 
la grotte et de fragmens de stalagmites. Ce dépôt a envi- 
ron cinq décimètres de profondeur ; il est plus puissant 
dans les fissures et dépressions du fond de la grotte. Les 
ossemens sont disséminés dans cette argile depuis le fond, 
jusqu'à la bifurcation de la grotte : ils ne sont pas tous 
recouverts par le dépôt alluvial; plusieurs sont dissémi- 
nés sur l'argile même, d’autres reposent sur le calcaire; 
ces derniers sont plus ou moins empâtés dans la stalag- 
mite. 

Les ossemens que la grotte de Mancenens renferme 
appartiénnent à l'ours des cavernes (Ursus spelœus Cuv.). 
On'y a trouvé le quatrième métatarsien droit et un cal- 
caneum droit du Felis spelæu Goldf. 

Grotte de Vaucluse. Cette grotte se trouve au-dessus 
de la route de Vaucluse à Belleherbe, à peu de distance 
du premier village. Elle est creusée dans uh calcaire de 
l'étage jurassique supérieur; sa plus grande longueur est 
d'environ deux-cents mètres. Une fissure la termine. On 
observe au tiers antérieur de la grotte une autre fissure 
très profonde. La hauteur de la grotte est de deux à dix 
mètres, sa largeur de deux à sept. Le sol est incliné de 
l'ouverture à l'extrémité. La voûte est dépourvue de sta- 
lactites; par conséquent le sol-est privé de stalagmites et 
est très sec. C'est encore à M. J.-B. Carteron qu'on doit 
la découverte.des ossemens que cette grotte renferme. Ils 
gisent. dans une terte noirâtre avec des pierres arrondies 
et des-blocs d’un calcaire semblable à celui qui constitue 


— 438 — 
les parois de la grotte. Au-dessous du dépôt ossifère se 
trouve une couche d'argile jaunâtre qui ne contient ni 
pierres roulées, ni ossemens; la puissance de cette couche 
est de un décimètre à un mètre. 

Les ossemens de la grotte de Vaucluse, appartiennent 
en grande partie à l'ours des cavernes; ils sont mêlés à 
des ossemens d'espèces éteintes et vivantes. On y a trouvé 
un humérus droit de la Hyæna spelæa Gold. ; des phalanges 
du felis spelæa Goldf.; des ossemens de loup, dé renard, 
de blaireau, de cheval et de cerf. 


Le Dr Pury lit ensuite la traduction du mémoire de 
M. le professeur Heer, présenté à la Société helvétique 
des sciences naturelles à Coire, relatif aux observations 
à faire sur l'apparition annuelle des différens phénomènes 
périodiques des règnes végétal et animal. Cette lecture, 
qui intéresse à un haut point les membres de la société, 
leur fait désirer qu’à la Chaux-de-Fonds aussi, l’on s’oc- 
cupe de ces observations. C’est pourquoi la société charge 
le secrétaire de lui procurer des tabelles, avec l'indication 
de la manière dont on devrait les remplir. 

D' Pury, secrétaire. 


Séance du 12 février 1846. 


M. le D' Droz lit un mémoire sur le mouvement de 
l'hôpital de la Chaux-de-Fonds {Chambre de secours) du 
1e janvier au 31 décembre 1845, 

Déduction faite de 5 à 6 malades qui étaient à l'Hos- 
pice au {27 janvier 1845, on à admis, depuis le 1° jan- 
vier au 31 décembre 1845, 1 {4 malades, dont 76 hommes 
et 38 femmes. Ces malades étaient originaires des pays 
suivans : 


— 439 — 
7 de la Chaux-de-Fonds, 3 hommes et 4 femmes. 
25 du reste du pays. . 11  »  » 14 » 
43. de Berne ‘ 27 » » 16 -» 


» Zurich 

» Bâle. 

» Argovie . 
» Lucerne . 
» Vaud. 

» Tessin 
Glaris 

» Uri . 

» St-Gall » et 1 femme. 
welriboureios cotes tenons 5 

» Thurgovie . . . 1 homme 

» Tyrol nm tesunimornS » 

» Piémont . nie est » 

» différentes contrées 

| d'Allemagne. ,. 8  » 

4% Français. .*. 3» et 1 femme. 
: 

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85 sont sortis guéris, 
10 améliorés ou soulagés, 
3 incurables, 
14 morts, 
5 sont restés à l'Hospice au 31 décembre. 

Ces 114 malades ont séjourné, ensemble 2246 jour- 
| nées, ce qui établit une moyenne de 19 jours par ma- 
lade (19 S0/11:). 

On a eu, en moyenne, 6 malades *‘/:65 chaque jour. 

La mortalité, calculée sur l'ensemble des sorties et 
décès, a été de 1 sur 8 ‘}. Sur les 14 qui sont morts, 
_Tont succombé à la fièvre typhoïde ; mais il est à re- 


— AO — 


marquer que ces 7 individus sont entrés à l'Hospice de 
10 à 15 jours après l'invasion de la maladie; et après 
avoir reçu un commencement de traitement chez eux; les 
six premiers sont des hommes, et ia séptième.est une 
femme, déjà traitée dans le mois d'avril pour une péri- 
pueumonie bilieuse. 

Un à une phthisie tuberculeuse ancienne. 

Un à un érysipèle phlegmoneux général, avec chüte 
d’escarres de plusieurs pieds de diamètre, qui se déta- 
chaient de différentes parties du dos, des lombes, du 
serotum, des cuisse et jambe gauches. 

Un à une pleuropneumonie droite avec épanchement. 

Un à la résorption purulente, après une amputation 
de cuisse pour arthrite traumatique du genou. Si, comme 
chirurgien, on peut avoir quelques regrets dans’ ce cas- 
ci, c'est d'avoir trop tardé à pratiquer l’'amputation. 

: Un à un régorgement desang, par suite de récrudes- 
cence de pneumonie droite. 

Une à un anasarque général , suite d’hypertrophie du 
cœur, quatre jours après son entrée à la chambre de-se- 
cours. 

Un, spontanément après 19 jours de séjour, pour une 
ancienne diarrhée, et cela au moment où ce malade al- 
lait sortir de la maison. 

Deux amputations de cuisse ont été pratiquées par 
M. Dubois, et avec le concours de MM. Irlet, de Pury 
et Droz. 

Un abcès douteux près de l'articulation fémoro-tibiale 
ouvert, a constaté la présence d’une nécrose, chez une 
jeune personne chlorotique: 

Une amputation de deux orteils , coupés à moitié par 
un coup de hache. 


— ii — 

Les maladies traitées pendant l’année sont les sui- 
vantes ; 

Une inflammation générale, par suite de contusion, 

Dix inflammations, dont sept érysipélateuses sympto- 
matiques, et'trois phlegmoneuses, avec escarres gan— 
gréneuses, plus ou moins considérables. 

Cinq abcès, dont un par congestion, deux serofuleux, 
et les autres dans la main ou les doigts. 

Huit plaies ou solutions de continuité, dans lesquelles 
il y a eu trois arthrites traumatiques des articulations fé- 
moro-tibiales ; deux d’entr’elles ont nécessité l’'amputation, 
et la troisième a cédé à un traitement trés-actif, suivi 
sans succès dans les deux autres cas (frictions mercu- 
rielles, puis larges vésicatoires sur toute l'articulation). 

Six ulcères, dont cinq atoniques et un psorique. 

Cing fractures. Quatre simples ; deux de cuisse; une 
de jambe; une de clavicule; et une consécutive du tibia 
et péroné avec plaie. 

Deux tumeurs blanches fémoro-tibiales, dont l’une a 
été traitée avantageusement par le feu, l’autre est sortie 
incurable. 

Trois affections rhumatismales articulaires, aiguës, 
traitées avec les antimoniaux et les salins. 

Deux affections rhumatismales chroniques. 

Sept inflammations catarrhales bilieuses des organes 
de la respiration. 

Cing péripneumonies bilieuses intenses, dont deux 
ont succombé. 

Cing'pleurodynies bilieuses. 

Deux embarras gastriques simples. 

Quatorze fièvres bilieuses plus ou moins intenses. 


— 1492 — 


Quinze fièvres ataxiques, dont six ont succombé. IL 
est à observer que dans nos montagnes, toutes les fiévres 
bilieuses qui deviennent nerveuses, se terminent à-peu- 
près d’une manière fâcheuse , lorsque l’on a fait des émis- 
sions sanguines lors de l'invasion de la maladie. 

Deux duodénites avec ictére. 

Trois diarrhées dissentériques. 

Une phthisie tuberculeuse. 

Une esquinancie. 

Deux catalepsies bilieuses et congestions cérébrales. 

Une aliénation mentale, avec accès hystériques. 

Un ramollissement du cerveau, mort quelques mois 
après la sortie de l'Hôpital. 

Une mélancolie suicide, chez lequel les drastiques ont 
fait le meilleur effet. 

Un delirium tremens, qui s’est bien trouvé des éva- 
cuans et de l'opium. 

Deux hydropisies générales. 

Quatre métrites suite de fausses couches. 

Une hypertrophie du cœur. 

Deux chloroses. 

Une fièvre tierce , ramassée au Cul-des-Roches, par un 
ouvrier couchant sur le sol humide. 

Une variole confluente 


M. Nicolet lit un extrait d'une lettre de M. Desor, re- 
lative à sa course au glacier de l'Aar, en janvier 1846. 

M. Nicolet présente le tableau suivant, indiquant l’é- 
tat thermométrique moyen de l'air observé à la Chaux- 
de-Fonds pendant les premiers jours de janvier 1846. 


— 443 — 


Le 1 0 centig. 
DA mr D 
3 27 /607( » 
4 —- 13 » 
6) - 14 » 
6 - 19 » 
7 - 12 » 
8 — 7 » 
9 — 7 » 
10 — 6 » 


Le thermomètre à minima est tombé le 3 à — 9, le # 
à — 16, le 5 à — 20, le 6 à — 23, le 7 à — 20, etc. 

Le froid que l’on a observé depuis le 3 janvier au 40 
du même mois, est dû aux vents du N., N.-E.etE., qui 
soufflaient constamment; à la pureté du ciel pendant le 
jour, et à sa grande pureté pendant les brillantes nuits 
qui succédèrent à ces froides journées. Les nuits calmes 
et sereines de janvier favorisent singulièrement le rayon- 
nement de la neige, et causent le froid intense qne nous 
observons toutes les années à la même époque. 


D' Pury, secrétaire. 
Séance du 26 février 1846. 


M. le D' Pury lit l'extrait d’une lettre que M. le pro- 
fesseur Herr lui a adressée touchant les observations à 


faire sur les phénomènes périodiques de la nature (‘). 


N (*) Le cadre des observations à faire, accompagné des instructions, à 
été publié en français à Neuchâtel, par les soins de la Société et distribué 
aux divers observateurs. 


— 444 — 

M. Léon Robert présente à la société un mémoire sur 
le moyen de déterminer la position d’un foyer d'incendie. 
L'examen de cette proposition est renvoyé à une commis- 
sion composée de MM. Favre, Julien Huguenin, Is.-Ch. 
Ducommun, Eugène Savoye, Barbezat et Roulet-Lory. 


M. Pury lit le commencement d’un mémoire intitulé 
Sur le Crétirisme, d'après les sources les plus récentes. Après 
l'exposition du sujet, M. Pury dit que c'est au XIX® siècle 
qu’il était réservé de tenter les premiers pas pour l'amé- 
lioration physique et morale de ces êtres ; que c'est dans 
notre patrie, déjà favorisée sous tant d’autres rapports, 
que des hommes dévoués à l'humanité ont employé avec 
succès toutes leurs facultés pour rendre à ces hommes, 
qui avaient moins d'intelligence que la brute, moins de 
sensations et moins de langage que la plante, tout ce 
qui leur manquait pour être des hommes, et que c'est 
aux Sociétés Suisses d'utilité publique et des sciences na- 
turelles qu'est dévolu l'honneur d’avoir proposé les moyens 
à employer pour cette œuvre si difficile, et d'avoir songé 
à les exécuter. 

Le crétinisme est connu dans les vallées suisses de- 
puis bien des siècles; les plus anciens chroniqueurs de 
notre pays en font déjà mention (*). 

On trouve des crétins dans toutes les hautes vallées 
resserrées par des masses de rochers, où l'air ne peut pas 
circuler librement. Le Valais a eu, pendant longtemps, 
la triste renommée de fournir la masse la plus considé- 
rable de ces êtres; les cantons de Glaris, des Grisons, 


(*) Le chroniqueur Tschudy rapporte qu’en l’an 1575, les trois enfans 
crétins du bailli Ginsing perdirent la vie dans un incendie. * 


— 445 — 

l'Oberland. bernois, la Gruyère, etc., viennent après ; 
presqu'aucun canton n'en est totalement exempt. Le can- 
ton de Neuchâtel en a aussi quelques-uns au Val-de-Tra- 
vers. On rencontre encore des crétins ailleurs que dans 
des hautes vallées resserrées par des montagnes; dans 
les villes de Berne, de Fribourg et de Bäle, et autres, 
il yen a, ou il y en avait autrefois une certaine quan- 
tité. Le crétinisme n’est point limité à la Suisse. Certaines 
vallées du Tyrol, du Salzbourg, du Piémont (entr'autres 
le Val d'Aoste), des: Alpes du Dauphiné, des Pyrénées, 
de la Haute-Bavière et du Haut-Würtemberg, rivalisent 
avec le Valais sous le rapport du nombre des crétins. 

Depuis quelques années, les crétins disparaissent de 
certaines localités. Dans le village de la Battiaz, prés 
Martigny, village renommé autrefois par le nombre de 
ses crétins, 1l n'en existe plus, non plus qu'à l’Auge, ou 
Basse-ville de Fribourg, et dans certaines localités des 
cantons de Glaris et des Grisons, ou le crétinisme était 
endémique. 

Jusque dans ces derniers temps, c'eût été tenter Dieu 
que de songer à sortir ces pauvres créatures de leur état 
d'abrutissement. Les monlagnards les regardaient comme 
protégées spécialement par la Divinité. Créatures de Dieu, 
âmes de Dieu, en patois fribourgeois, crétira de Du , 
armé de Diu, où seulement crétira (créatures), tels sont les 
noms qu'on leur donnait. C'est de ce mot crétira que pro- 
bablement on a dérivé celui de crétin. 

M. Pury divise, avec la plupart des auteurs, les crétins 
en-crétins complets et crétins incomplets; ou demi-crétins. 

Les crétins complets, remarquables par la petitesse 
de leur taille (4 m, 10 cent., en moyenne), ont une tête 


— A6 — 


démésurément grosse, couverte de cheveux rudes et cré- 
pus; un goître énorme; le nez épaté; la bouche très-grande, 
constamment ouverte, et de laquelle suinte sans inter- 
mission un liquide sanieux; des lèvres grosses, bouffes, 
l'inférieure pendante; une musculature très-faible ; des 
extrémités grèles, ne pouvant supporter le poids du corps. 
Ces êtres sont insensibles à toutes les sensations; le froid, 
le chaud, la douleur, la faim, la soif ne peuvent les for- 
cer à bouger de la place ; ils laissent aller sous eux leurs 
excrémens, dans lesquels ils se vautrent, semble-t-il, 
avec plaisir. 

Les demis-crétins partagent les tristes qualités cor- 
porelles et psychiques des crétins complets, mais à un 
moindre degré; ils sont susceptibles de quelques sen- 
sations. La colère et, plus rarement, la reconnaissance 
envers leurs bienfaiteurs effleurent leurs âmes. Quelques- 
uns d'entr'eux sont susceptibles d'exécuter certains tra- 
vaux mécaniques, mais c'est sans conviction, sans but; 
la plupart d’entr'eux sont entêtés, tracassiers, quelque- 
fois même très-méchans. Quelques-uns ont un penchant 
inné pour le feu et l'incendie (pyromanie); d’autres sont 
plus apathiques, et sont indifférens au bien comme au 
mal; seulement ils ont un penchant décidé pour la men- 
dicité. 

D'autres encore un peu moins maltraités par la na- 
ture, sont, contrairement aux précédens, en général 
d'un bon caractère, et montrent de la reconnaissance en- 
vers ceux qui les soignent. 

La plupart des crétins et des demi-crétins s’adonnent à 
l'onanisme. 

+. Si l'anatomie des crétins n'a pas été poussée très-loin 


DEV AS, CTTPSE 


— ANT — 

jusqu'ici, la résistance des parens en est la cause prin- 
cipale. Leur crâne est ordinairement d’une épaisseur très- 
grande, asymétrique, mal conformé, plat au sommet et 
sur les tempes; mais quelquefois il ne se distingue en rien 
de celui des hommes les mieux doués. Le D' Cerise a 
décrit le crâne d’un crétin des Pyrénées qu'il avait appelé 
Lord Byron, à cause de la magnifique conformation de 
sa tête, qui rappelait celle de cet homme célèbre. Ce pra- 
ticien a aussi remarqué chez les crétins, une déformation 
prèsque constante du crâne que personne n'avait signalée 
avant lui; c'est une dépression sur-orbitaire ou fronto- 
temporale plus ou moins prononcée. Le D' Bich, méde- 
cin de l’hôpital de la cité d'Aoste, a observé que les trous 
qui servent de passage aux grandes artères élaient presque 
oblitérés, et qu'un ramollissement très-considérable du 
cerveau existait chez presque tous les crétins dont il a fait 
l’autopsie. Le D' Cerise a fait la même observation sur 
un crétin des Pyrénées. M. Guggenbühl a trouvé dans le 
cerveau d'un crétin dont il a fait l’autopsie, certaines dis- 
positions qui rappellent tout-à-fait le cerveau d'un fœtus. 
D'autres observateurs qui ont fait également l’autopsie 
de quelques crétins, n’ont pas trouvé ces diflormités. : 

Après cette communication, M. Droz prend la parole 
pour dire qu'il a observé un fongus du cerveau, chez un 
crétin du Locle, et M. le D' Schafter, pour donner des 
détails sur les crétins du Pont-de-Vaux (Val-de-Travers). 

M. le D' Schafter présente à la section un lombric 
qu'un homme de 72 ans, du Locle, avait rendu par l’u- 
rêtre. Il s'engage ensuite une discussion sur la manière 
dont ce lombric s'était introduit dans la vessie ; quelques 


membres pensent que ces vers peuvent percer les intestins 
52 


— 448 — 

et la vessie. Le Dr Pury dit qu'il vient de lire dans l'4- 
beille médicale (février 1846) un rapport de M. Arlaud, au 
sujet de plusieurs helminthes, appartenant à l'espèce du 
strongle géant {Stronglus gigas) voisine des Lombrics, 
dont l’un mesurait 22 centimètres, qu’une fille de 26 ans 
avait rendus à divers intervalles par l’urêtre. Ce qu'il 
y a de remarquable, c’est que pendant tout le temps que 
ces vers ont été expulsés, la menstruation avait été in- 
terrompue. D' Pury, secrétaire. 


Séance du 12 mars 1846. 


Le Dr Pury continue la lecture de son mémoire sur 
le crétinisme. 

Le goître est de tous les épiphénomènes du crétinisme 
celui qui l'accompagne le plus souvent. Cependant il n’est 
pas lié intimement à cette maladie, car plusieurs indi- 
vidus crétins à un haut degré ne présentent pas de got- 
tres, tandis que des hommes parfaitement sains du reste, 
en ont d'énormes. On attribue généralement leur exis- 
tence à la nature de l'eau; le D' Pury pense que l’eau 
n’est pas la seule cause de leur production, mais que 
toutes les causes du crétinisme réunies sont en même 
temps celles qui produisent le goître, et que l'hérédité 
surtout y joue un très-grand rôle; car les enfans qui 
deviendront plus tard des crétins, ne présentent le plus 
souvent à leur naissance aucun autre symptôme de ce 
mal qu’une tuméfaction de la glande thyroïde du volume 
d’une grosse noix. 

Le crétinisme ne commence ordinairement à se déve- 
lopper que dans la seconde année de la vie; l'âge de 39 


— 449 — 
à 40 ans semble être le terme de la vie des crétins ; beau- 
coup d’entre eux n'atteignent pas cette limite, qui n’est 
dépassée que par quelques-uns. 

Avant de traiter des causes du crétinisme, que le 
D' Pury divise en causes locales et individuelles , il pré- 
sente une description topographique du canton de Glaris, 
extraite d'un mémoire du D' Trümpy. Cette description 
donne la clé de plusieurs causes ; car, tandis que certains 
villages ont très-peu ou point de crétins, d’autres situés 
à côté d'eux en ont beaucoup; soit que les habitans de 
ces derniers vivent chétivement, soit que les habitations 
soient mal construites, malpropres, mal aérées, non ex- 
posées au soleil, ou qu'il y ait en jeu d’autres causes que 
l’auteur examinera plus tard. 


M. L. Favre lit le rapport suivant sur la communica- 
tion faite par M. Léon Robert dans la séance précédente, 
et qui avait été renvoyée à l'examen d'une commission. 

« Lorsqu'un incendie éclate dans les localités qui envi- 
ronnent notre vallée, la configuration du sol, les mon- 
tagnes qui nous entourent, empêchent la vue de se por- 
ter sur le foyer même du désastre, et nous ne pouvons 
en apercevoir que la réverbération dans le ciel. Cette lueur 
souvent mal définie est insuffisante pour donner de prime- 
abord des inductions satisfaisantes sur le lieu de l'incen- 
die, c'est pourquoi toute la population est en proie à 
l'anxiété de l'incertitude, jusqu'au moment où les védettes 
apportent les premières nouvelles. 

« Le but de la communication de M. Léon Robert est 
d'offrir le moyen de découvrir le lieu précis d’un incendie, 
lors même que l’on n’en voit que la réflexion dans l’at- 


— 450 — 
mosphère, et de l'appliquer à l'usage de la commission 
des incendies de la Chaux-de-Fonds. 

Le principe sur lequel repose son procédé, est le même 
que celui qui sert de fondement aux opérations de géo- 
désie , par lesquelles on exécute une triangulation sur le 
terrain. Il consiste à trouver la longueur de deux côtés 
d'un triangle, dont les sommets s'appuient sur trois dif- 
férens points d'une contrée, et dont on connaît la gran- 
deur d’un côté, et les deux angles adjacens à ce côté. 

M. Robert propose de mesurer une base de 4000 pieds 
qui s'appuierait d'une part au clocher du village et de 
l'autre à un point élevé de la vallée, d'où la vue puisse 
s'étendre au loin. Cette base serait dirigée de façon à être 
perpendiculaire à la ligne, suivant laquelle on aurait le 
plus souvent des secours à donner. À chacune de ses ex- 
trémités, on placerait un demi-cercle gradué, muni 
d'une pinnule, et qui pourrait servir en le retournant à 
mesurer des angles dans toutes les directions. Aussitôt 
qu'une lueur se montrerait dans le ciel, deux observa- 
teurs se hâteraient de mesurer l'angle que la direction du 
feu fait avec la base. Ces deux observations étant faites, 
on prendrait une carte de notre canton, sur laquelle on 
aurait tracé d'avance la ligne de base en grandeur et en 
direction ; par les deux extrémités de cette base, on fe- 
rait passer deux règles, faisant avec la base des angles 
égaux à ceux que l’on vient de mesurer; le point de la 
carte où les règles se couperaient serait évidemment le 
lieu du pays dans lequel l'incendie a éclaté. » 

La commission fait sur ce projet Îles observations sui- 
vantes : 

Elle croit que le moyen proposé par M. Léon Robert 


— À51 — 

serait d'une application utile en pays de plaine ou dans 
une localité où l'étendue de l’horizon permettrait de viser 
directement la flamme de l'incendie; mais dans une val- 
lée dominée de toutes parts comme la nôtre, l'emploi 
de cet instrument entraînerait dans de graves erreurs, 
et ne pourrait fournir que des données vagues et incer- 
taines. Car la lueur n’est pas toujours assez bien détermi- 
née pour que l’on puisse en prendre le centre avec certi- 
tude; le plus souvent, elle est si vaporeuse, si insaisis- 
sable, que les personnes chargées du soin de l’observa- 
tion, se trouveraient dans un grand embarras, et que 
des erreurs de quelques degrés seraient inévitables. 

De plus, on peut dire d'avance, qu’à moins d’un ha- 
sard extraordinaire, il n’arrivera jamais aux deux obser- 
vateurs de viser le même point, car il est impossible que 
deux hommes placés vis-à-vis d’une lueur immense , cou- 
vrant quelquefois de sa lueur indécise plus du quart du 
ciel, dirigent leur instrument absolument sur le même 
lieu. Cependant le moindre écart à droite ou à gauche, 
donnerait naissance à des erreurs d’autant plus considé- 
rables, que le théâtre de l'incendie serait plus éloigné. 
Ainsi pour la Chaux-du-Milieu une différence de 2° pro- 
duirait une erreur de plus d’une lieue dans la détermi- 
nation de la distance. 

Malgré toute la célérité apportée dans l'exécution des 
observations , il s’écoulerait toujours 20 ou 30 minutes 
jusqu'au moment où le résultat serait connu. Pendant ce 
temps, les pompes seraient déjà parties avec une grande 
partie de la population , et quelle que fût l'exactitude des 


déterminations, elles deviendraient ainsi à-peu-près inu- 
tiles. 


— 452 — 

Enfin, la base de 4000 pieds serait trop courte, lors- 
qu'il s'agirait de distances un peu considérables, car pour 
peu que la direction. du feu fût oblique par rapport à 
cette base, l’angle qui lui serait opposé, ou l'angle du 
feu, deviendrait extrêmement petit, ce qui serait une 
nouvelle source d'erreurs. Si d'autre part on fait la base 
plus longue, les déplacemens des observateurs et le temps 
employé pour la détermination, seront augmentés en 
proportion. » 

Après la lecture de ce rapport, M. le secrétaire Huguenin 
du Locle, tout en louant ce qu’il trouve d'ingénieux dans 
le procédé de M. Léon Robert, observe que dans des cas 
d'incendie, il faut employer les moyens les plus prompts 
et les plus expéditifs. Ce qui lui ferait rejeter le procédé 
dont il est question, c’est Ja nécessité de se mettre en sta- 
tion aux extrémités d'une base fort longue, et par con- 
séquent d’occasionner des déplacemens et une perte de 
temps considérables. Il indique ensuite le moyen dont il 
fait usage au Locle, lorsqu'il est appelé par ses fonctions 
à déterminer le lieu d'un incendie dont on voit. la réver- 
bération. Il prend la carte de notre canton levée par 
M. d'Osterwald, il l’oriente avec une boussole, et vise le 
long d’une règle couchée sur la carte, le centre de la 
lueur; il obtient ainsi la direction du feu. Pour la dis- 
tance , il croit ne pas s'écarter beancoup de la vérité en 
la fixant à une lieue, lorsque le point culminant de la 
lueur est à une élévation de 45°; elle est plus grande en 
proportion , lorsque ce point est plus rapproché de l'ho- 
rizon. 

M. le président lit une lettre du bureau de contrôle qui 
annonce à la société qu'il tient un crédit ouvert jusqu'à 


. 
| 
| 


— 453 — 
concurrence de 3000 fr. de France, pour l'établissement 
de plusieurs instramens d'utilité publique. Le soin de l’a- 
chat.et de la construction de ces divers appareils est 
laissé à la commission nommée pour cet objet. 

Il est décidé que le régulateur qui sera placé à l’hôtel- 
de-ville, sera construit à la Chaux-de-Fonds par les ar- 
üistes jugés capables d'exécuter un pareil travail, et que 
l'on fera ensorte que le baromètre et le thermomètre qui 
seront acquis au moyen des fonds fouruis par l’adminis- 
{ration du contrôle, soient placés dans un endroit conve- 
nable de l'Hôtel-des-Postes que le gouvernement se pro- 
pose de bâtir. LS FAYRE secrétaire. 


Séance du 26 mars 1846. 


Le D' Pury reprend la lecture de son mémoire sur le 
crétinisme. 

Les causes locales sont : 

1° L'exposition des habitations à l'ombre. L'absence du 
soleil empêche l'air de se changer; car la chaleur que le 
soleil communique à l'air produit, en le dilatant, des cou- 
rans d'air qui sont suflisans pour le renouveler. Les vil- 
lages glaronnais de Rüti et de Schwanden, situés dans 
une vallée étroite, et auxquels les rochers avoisinans 
ferment l'accès des rayons du soleil, sont remplis de cré- 
üns. Dans le village de la Battiaz, près de Martigny, où 
autrefois pullulaient les crétins, en n’en voit plus actuelle- 
ment, parce que des forêts qui empêchaient l'accès du 
soleil et le renouvellement d'air salubre, ont été abattues. 

2° L'humidité de l'air produite soit par de hautes mon- 
tagnes qui empêchent l'accès du soleil, soit par des habita- 


—  ÀA54 — 

tions basses, souterraines, soit par le voisinage de l’eau, là où 
n'y a point de courans d'air. La quantité de crétins, ob- 
servés dans les parties basses des villes de Berne, de 
Bâle, à Klein-Huningen, en est une preuve suffisante. 
Dans certaines vallées étroites, où l'air humide ne peut 
se renouveler , tous les animaux domestiques qui y sont 
amenés, languissent et périssent promptement. Dans une 
vallée des environs de Zirknitz (district de Klagenfurth en 
Carniole), les habitans , qui sont en majorité crétins, ne 
peuvent pas élever une seule pièce de bétail; celui dont 
ils ont besoin doit être acheté par eux à l’état adulte. 

3° La nature du sol. Le sol molassique, schisteux et 
argileux prédispose au crétinisme, soit à cause de l’hu- 
midité du sol, par lequel les eaux ne peuvent pas être 
absorbées comme par les terrains calcaires, soit à cause 
des parties siliceuses et lumineuses que tiennent en sus- 
pension les eaux potables fournies par ces terrains. M. le 
conseiller d'état D' Schneider, de Berne, chargé par son 
gouvernement de faire un recensement des crétins du can- 
ton de Berne, les trouve répartis de la manière suivante : 

Dans la formation molassique , 

1033 crétins sur 279,103 habitans, soit 1 sur 271. 

Dans la formation jurassique, 

119 crétins sur 73,147 habitans, soit 1 sur 614. 

Dans la formation alpine, 

154 crétins sur 55,673 habitans, soit 1 sur 351. 

Les villages grisons où le crétinisme exerce ses ravages 
(Trimmis, Igis et Zizers) sont bâtis sur le schiste appelé 
par M. Studer Bündiner-Schiefer. 

4° L'eau dont s’abreuvent les habitans des villages où 
règne le crétinisme , si cette eau tient en suspension des 


— 455 — 

particules siliceuses et alumineuses. L'eau chargée de 
carbonate calcique n’est pas à beaucoup près aussi dan- 
gereuse. La mauvaise qualité de l’eau n’a pas cependant 
l'influence délétère qu’on lui attribue. Quelques villages 
glaronnais, par exemple, où la qualité de l’eau est ex- 
cellente, regorgent de crétins, tandis que d’autres, où l’eau 
est bien moins bonne , en ont peu ou point. 

5° L'élévation au-dessus de la mer. L'expérience a dé- 
montré que le crétinisme ne sévissait pas dans les endroits 
dont l'élévation atteint 3000 pieds au-dessus du niveau 
de la mer. 

6° Le voisinage d’une eau stagnante, qui rend l'air hu- 
mide, et qui produit encore d’autres émanations. Quant 
aux lacs, leur voisinage au lieu d’être nuisible, est salu- 
taire par les courans d’air qu’ils déterminent. Les petits 
ruisseaux rendent l'air humide, et par conséquent mal- 
sain dans les vallées étroites où le soleil ne pénètre pas. 
Les grands cours d’eau ayant d'habitude un thalweg assez 
large, parcouru par des courans d’air, ne sont pas une 
cause de crétinisme. L'exemple du Petit-Huningue ne peut 
pas faire admettre le contraire , car c’est au sol argileux 
et humide de cette commune qu’elle doit d’avoir un si 
grand nombre de crétins et de goîtres. 

Les principales causes individuelles sont : 

10 Les scrophules. L’affinité de cette maladie avec le 
crétinisme est actuellement démontrée. L'auteur a déjà eu 
occasion de rapporter que des doreurs atteints de scro- 
phules mercurielles à un haut degré, avaient procréé des 
enfans presqu’entièrement crétins, et cela à la Chaux-de- 
Fonds que son élévation au-dessus de la mer (3070/) 
semblait défendre du crétinisme. 


— 456 — 

29 Les mariages trop rapprochés. Les unions qui se font 
toujours entre les mêmes familles sont une cause puis- 
sante d’abâtardissement des races. La noble famille des 
Weissenfluh, demeurant près de Meyringen, qui s'était 
distinguée sous bien des rapports dans le moyen-âge, a 
pour dernier rejeton un crétin au dernier degré. Le vil- 
lage de Näfels, célèbre par ses crétins, a absolument la 
même position que Mollis qui n’en a pas et n'en a jamais 
eu, parce que ses habitans, tous catholiques, redoutant de 
se marier avec les réformés des villages voisins, sont 
obligés de se marier entr'eux. 

30 L'ivresse habituelle des parens. L'ivresse, et surtout 
l'ivresse produite par de l’eau-de-vie, a des conséquences 
terribles pour les enfans conçus pendant que les parens 
sont dans cet état. 

4° Le défaut de propreté chez les parens. 

5° Les habitations malsaines, basses et humides. Ces deux 
causes n’ont pas besoin de commentaires. 

6° La mauvaise nourriture. Les habitans des villages 
glaronnais où le crétinisme est endémique, ne se nour- 
rissent presqu'exclusivement que de pommes de terre, 
de mauvais café ou plutôt d’infusion de chicorée et d'eau- 
de-vie. L'usage exclusif des pommes de terre prédispose 
aux scrophules, qui sont, comme on l'a vu, le premier 
degré du crétinisme; et celui du café de chicorée produit 
le même effet en détériorant la masse du sang. 

70 Le défaut d'éducation et de connaissance du monde 
extérieur. Les enfans crétins ou prédisposés au crétinisme, 
toujours enfermés dans des réduits obscurs, bas et bu- 
mides, où ils voient toujours les mêmes objets, où rien 
ne vient les distraire, finissent par perdre également l'u- 


NT" R- 


La. fn dé 


— 451 — 

sage de leurs facultés physiques et intellectuelles; car 
‘âme est comme le corps, ses facultés se perdent, si 
elles ne sont pas exercées. Le défaut complet d'instruc-— 
tion dans quelques villages retirés, perpétue le créti- 
nisme dans ces vallées. M. le D' Eblin, de Coire, fait à ce 
sujet une comparaison curieuse avec l'enfant du Bohé- 
mien. Lui aussi ne recoit aucune instruction, mais les 
ressorts de son âme sont continuellement mis en jeu par 
la diversité des objets qu'il rencontre dans sa vie vaga- 
bonde. 11 n’y a jamais eu de crétins parmi ces nomades. 
Le génie de leurs enfans se développe tous les jours, tan- 
dis que les facultés que le crétin avait reçues à sa nais- 
sance, meurent et disparaissent l'une après l’autre. L’Auge, 
ou quartier inférieur de la ville de Fribourg, était jadis 
célèbre par ses crétins ; ce quartier n'avait aucune re- 
lation avec la haute-ville, dont il était en outre séparé 
par le langage. Eh bien! depuis une cinquantaine d'an— 
nées que les communications sont devenues fréquentes, 
qu'on y a établi de bonnes écoles, et qu'on a accordé aux 
pauvres familles qui habitent ce quartier, sur les hauteurs 


- qui environnent la ville, des coins de terre que les femmes, 


accompagnées de leurs enfans, vont cultiver, le crétinisme 
en a disparu comme par enchantement. 

8° La mauvaise impression que la vue des crétins produit 
sur les femmes enceintes. On n’ignore pas l'influence que la 
vue de certains monstres produit sur les femmes enceintes 
et leurs fruits. C’est pour éviter les conséquences qui se- 
raient la suite de cette vue, que les habitans de Sion en- 
voyent leurs femmes enceintes sur les Mayens ou mé- 
tairies élevées des environs de la ville. 

90 L'hérédité. Xci, comme dans presque toutes les ma- 


— 458 — 

ladies, son rôle est immense. Des individus complètement 
crétins, s'ils viennent à se marier ensemble, produisent 
des individus qui leur ressemblent ; un demi-crétin qui 
se marie avec une demi-crétine, aura pour rejeton égale- 
ment des crétins complets. L’hérédité du père, suivant 
M. Guggenbühl, paraît avoir une plus grande influence 
que celle de la mère. Il a vu le cas d’un homme parfai- 
tement sain, qui, marié avec une crétine, procréa des 
enfans qui n'étaient nullement crétins. Fodéré dit au con- 
traire que si un homme demi-crétin épouse une femme 
bien constituée , les enfans qui naîtront de cette union ne 
seront que fort peu crétins. Dr Pury, secrétaire. 


Séance du 9 avril 1846. 


Le D' Pury termine la lecture de son mémoire sur le 
crétinisme. 

Le fléau est guérissable, surtout lorqu’on s'y prend de 
bonne heure. Le D' Odet, de Sion, raconte dans sa dis- 
sertalion inaugurale, comment il a été, ainsi que son jeune 
frère, guéri de ce mal. Pour guérir les enfans crétins, il 
faut les soustraire aux causes du mal, et chercher, à force 
de patience et de soins, à mettre leur jeune âme en com- 
munication avec le monde extérieur. Mais ce à quoi les 
philanthropes et les gouvernemens doivent surtout vi- 
ser, c'est à prévenir le retour du crétinisme dans les loca- 
lités où il est endémique, en procurant des courans d’air 
et l’accès du soleil, si cela est possible, comme cela a eu lieu 
à la Battiaz par une coupe de forêt bien dirigée. Dans des 
localités où le soleil peut pénétrer, mais où d’autres causes 
perpétuent le crétinisme, il faut songer à donner à la po- 


+ HI = 


pulation un autre genre d’occupations qui développe da- 
vantage les facultés physiques et morales, comme on 
l'a fait dans la partie basse de la ville de Fribourg , où 
de bonnes écoles ont été instituées, et où l’on a donné 
aux pauvres familles qui l'habitaient, des terrains que les 
femmes et les enfans vont cultiver. Dans quelques autres 
endroits où le crétinisme a disparu, la civilisation a 
vaincu la routine aveugle, et des habitations propres, 
bien aérées ont pris la place de chenils insalubres et mal- 
propres. Le D' Pury estime que c'est aux gouverne- 
mens à instruire le peuple des campagnes; à faire rem— 
placer, moyennant indemnité, les masures malsaines par 
des maisons aérées, bien bâties; à proscrire, dans l’inté- 
rêt de l'humanité, les mariages entre crétins; à engager 
les habitans des villages, où le soleil ne pénètre pas, à 
faire comme les Sionnais, c'est-à-dire à transporter les 
enfans sur les hautes montagnes pendant l'été. 

Quant à la réunion d’une masse d’enfans sur la même 
montagne , l’auteur ne pense pas que ce soit une mesure 
bien utile, parce que l'intelligence des jeunes crétins ne 
peut être développée suffisamment, lorsque ces jeunes 
êtres ont loujours devant les yeux des créatures aussi dé- 
gradées qu'eux. Cependant l'institut de l’Abendberg fait 
exception ; mais d’un côté, il n'y a qu'une quinzaine de 

sujets dans cet hospice , et de l’autre, les soins empressés 

du D' Guggenbühl et du personnel attaché à l’établisse- 
ment, contrebalancent, et au delà, le mal qui pourrait 
résulter de cette agglomération. 

C’est à l’an 1813 que remontent les premières démar- 
ches des gouvernemens pour anéantir le crétinisme. Ce 
fut alors que les médecins du Valais, alors département 


— 460 — 

du Simplon, furent chargés par le ministre de l'intérieur 
de l'empire, de lui transmettre leurs idées sur l’origine 
et la possibilité d’éteindre le crétinisme. Les bouleverse- 
mens politiques qui suivirent, firent que cette affaire n'eut 
aucune suite. Le gouvernement du Valais ne s'en occupa 
de rechef qu'après 1830, si l’auteur du mémoire est bien 
informé. 

Dans l'hiver de 1839, ou au printemps 1840, le 
D' Guggenbühl, encouragé par les résultats obtenus par 
les Sionnais, s’adressa à la Société suisse d'utilité publique, 
pour lui demander son appui pour l'œuvre qu'il allait 
tenter. Cette société demanda un rapport sur ce sujet à la 
Société Helvétique des Siences Naturelles, qui s'en oc 
cupa dans sa session de 1840, sous la présidence du 
vénérable père Girard, qui avait déjà rassemblé un 
grand nombre de faits sur cette matière. La Société des 
Sciences Naturelles fit un rapport excellent à la Société 
d'utilité publique, et grâces aux souscriptions de cette 
dernière, de plusieurs gouvernemens et particuliers, un 
hospice fut construit sur l'Abendberg, et a reçu jusqu’à ce 
moment une quarantaine ou cinquantaine d'enfans cré- 
tins, dont la position s’est bien améliorée, et le serait 
bien davantage, si les parens ne se hâtaient pas trop 
d'en retirer leurs enfans, lorsqu'ils ont appris à pronon- 
cer quelques mots. Le D' Guggenbühl ne leur donne 
pour remède, que de l'huile de foie de morue; mais l'air 
pur de la montagne, le soleil, l’aident efficacément à 
améliorer leur état physique. Pour développer leurs fa-— 
cultés intellectuelles, le D'° Guggenbühl leur fait ap- 
prendre à distinguer les objets qui les entourent, les dif- 
férentes parties de leur corps, et à les nommer. Leur 


— 461 — 
physique et leur moral se développent ainsi à la fois, et 
le succès est venu couronner l’œuvre du Dr Guggen- 
bühl (*). 

Le D' Pury présente après cette lecture l'estomac et la 
partie inférieure de l'intestin grèle d’une jeune fille de 
19 ans, morte à la chambre de secours, le quatrième ou 
le cinquième jour après l'invasion de la fièvre typhoïde, et 
qui avait eu des délires furibonds pendant les trente-six 
heures qui précédèrent sa mort. 

L'estomac était remarquable par l'épaisseur de ses 
parois, surtout par celle de la muqueuse qui présentait 
des plis longitudinaux nombreux. Ces plis, de six milli- 
mètres de diamètre, étaient au moment de l’autopsie, 
faite 48 heures après la mort, tous d’une couleur jaune 
d'ocre très-foncée, tandis que les entre-deux et tout le 
reste de la membrane muqueuse étaient d’un blane mat. 
À part ces renflemens, toutes les parois de l'estomac 
présentaient un engorgement et un épaississement consi- 
dérable. La muqueuse était celle des membranes qui pré- 
sentait ces phénomènes au plus haut degré. Dans le frag- 
ment d'intestin grèle présenté, les glandes de Peyer 
étaient très-engorgées, et avaient la forme d’un bourrelet 
ressortant de { à 2 millimètres; les cryptes muqueuses 
étaient également considérablement engorgées et blanches; 
elles avaient l'aspect de petits tubercules où ganglions de 
2 à 5 millimètres de hauteur, et étaient dures au toucher. 
L'intestin grèle était généralement rouge-brun, au moins 


(!) Voir Actes de la Société helvétique des Sciences naturelles, 1840 et 
années suivantes; plusieurs mémoires de MM. Trümpy et Guggenbühl et 
autres, dans la Gazette médicale suisse ; l’article Idiotie du Compendium 
de médecine pratique. 


— 462 — 
dans la partie rapprochée du cœcum ; l’inflammation qui 
n'était pas autant développée dans la partie supérieure 
de ce viscère, se dénotait cependant partout par des ar- 
borisations très-prononcées. D' Pury, secrétaire. 


Séance du 23 avril 1846. 


Le Dr Pury présente de la part de M. le D' Deprerre : 
le plan d’une voiture que l’on se propose de construire 
au Locle pour transporter les malades à l'hôpital Pourta- 
lés. D’après le vœu de M. Depierre, on renvoie l'examen 
de ce plan à une commission composée de M. Favre, 
Gœnseli, et de MM. Dubois et Droz, docteurs. 


M. Nicolet présente à la société des dessins de l'Aga- 
ricus deliciosus, fort bien exécutés par M. Favre. Il com- 
munique ensuite une note sur l’analyse qu'il a faite du 
suc de ce champignon, et sur la matière qui le colore. 

Ce champignon est commun dans nos forêts de sapins 
depuis août jusqu'en novembre; son pédicule est jaune, 
ferme, plein, plus tard creux, couvert souvent de taches 
rouges ; son chapeau est orbiculaire, ombiliqué et réfléchi 
sur les bords, muqueux, jaune-orange dans le jeune âge, 
passant ensuite au vert en vieillissant, marqué de zones 
jaunâtres; son suc est gluant, de couleur rouge-orange, 
d’une saveur un peu piquante, mais non désagréable. 
Ce champignon est souvent déformé par un parasite (Sphæ- 
ria lateritia F), qui s'empare des parties de la fructifica- 
tion, et fait disparaître complètement les feuillets. 

Tous lesagarics laiteux sont réputés nuisibles; aussi plu- 
sieurs personnes, même des naturalistes , se défient-ils de 


— 463 — 

l’agaric délicieux, parce que toutes les parties de la plante 
émettent, lorsqu'on les entame, un suc laiteux. D'autres 
personnes, sans considérer ce champignon comme dan- 
gereux, croient qu'il ne mérite pas l'épithète de délicieux, 
qui lui a été donnée, et le tiennent pour indigeste. Ce- 
pendant nos amateurs de champignons le considèrent 
comme une espèce bonne à manger, et, lorsqu'il est 
jeune, ils en font impunément une grande consomma- 
tion; ils savent que tous les champignons comestibles, 
pris en grande quantité, sont, de leur nature, difficiles 
à digérer. 

Ce champignon communique une couleur cramoisie à 
l'huile de pétrole et à l'essence de térébenthine; une cou- 
leur rouge-orange à l'essence de lavande; une couleur 
orange à l'huile d'amandes douces, à l’axonge, à l'alcool 
et à l’éther sulfurique : il ne colore pas sensiblement l'eau 
et le vinaigre. L’éther sulfurique dissout très-prompte- 
ment le suc de l’agaric délicieux qui, séparé de son dis 
solvant par l’évaporation, se prend par le refroidissement 
en une masse un peu molle, grasse au toucher, et con- 
fusément cristalline. L’acide nitrique le colore en vert- 
brun. 

En épuisant à froid cette matière par l'alcool, puis en 
traitant le résidu par l'alcool bouillant, M. Nicolet a ob- 
tenu trois produits; une matière colorante de couleur 
rouge-orange, une matière grasse cristalline, et une ma- 
tière de couleur jaune-brunâtre. 

La matière colorante de l’agaric délicieux est une huile 
d'un rouge-orange vif, sa saveur est piquante, un peu 
amère, et laisse sur la langue une saveur assez désa- 
gréable. Elle est soluble dans l'alcool, l'éther sulfurique, 

35 


— 64 — 
les huiles grasses et volatiles; elle répand, lorsqu'on la 
chauffe, une forte odeur de champignon. L’acide nitrique 
la colore en vert. 

La matière grasse cristalline est soluble dans l'alcool 
bouillant; elle s’en sépare, par le refroidissement, sous 
la forme de pellicules blanches, qui recouvrent la surface 
du liquide, et de flocons. Cette matière est de couleur 
blanche-jaunâtre ; son toucher est gras; elle est fusible à 
une basse température; et par le refroidissement, elle se - 
prend en une masse cristalline et radiée; elle est soluble 
à chaud dans les huiles essentielles, et par le refroidisse- 
ment le mélange se prend en une masse molle et cris- 
talline. Cette matière paraît à M. Nicolet êire celle qui a 
été reconnue et décrite sous le nom d'adipocire, par Bra- 
connot; ce chimiste la compare au blanc de baleine. 

La matière jaune-brunâtre est grasse et visqueuse au 
toucher, sa consistance est molle, sa saveur un peu âcre 
et désagréable; elle se fond à une basse température, et 
par le refroidissement elle se prend en une masse con- 
crête, non cristalline: elle est soluble dans l’alcool bouil- 
lant et dans les huiles grasses et volatiles. 

Dr Pury, secrétaire. 


M. le Président clot les séances jusqu’à l'hiver pro- 
chain. 


— 465 — 


APPENDICES. 


118 
Séance du 28 mari 1846. 


Utilité des produits de la distillation sèche pour la classifi- 
cation des substances organiques. 


Par M. F. Sacc. 


Tout le monde sait qu'en distillant des matières qui 
proviennent des végétaux on obtient en général des pro- 
duits acides, tandis qu’en distillant celles qui sont fabri- 
quées par les animaux, on obtient presque toujours des 
substances fortement alcalines. Rien de plus facile que 
de reconnaître une graisse non saponifiée, à cause de la 
grande masse de substance âcre, d’acroleïne, qu'elle dé- 
gage quand on la distille; tandis que les acides gras ne 
donnent, lorsqu'on les soumet au même traitement, que 
de l'acide margarique, ou quelqu'autre de ses congénères 
à odeur fade. Ces deux exemples suffisent déjà pour faire 
sentir avec quelle facilité, avec quelle rapidité, l'étude 
des produits de la distillation sèche des corps nés de la 
vie, peut amener souvent à des conclusions positives sur 
leur origine et leur nature. 

Partant de cette manière de voir, nous avons de- 
mandé à la distillation sèche un procédé simple et facile 
pour reconnaître tous ces corps que M. Gerhardt appelle 
saccharigènes ; je veux parler des bois, des fécules, des 
gommes et ‘des sucres. Ces substances sont douées de 


— 466 — 

propriétés si différentes , que la plupart des chimistes en 
ont fait aussi des espèces toutes spéciales, dont chacune 
d'elles est le type; mais peut-on admettre une division 
parmi des substances qui passent si facilement de l’une 
à l’autre? On ne peut que les réunir lorsqu'on sait qu’a- 
vec le bois on prépare de la gomme et du sucre, et 
qu'avec la fécule et la gomme, il est facile aussi de re- 
produire du sucre. 

Parmi les sucres se trouve un corps doué de la saveur 
qui Jeur est commune, mais à un faible degré; en échange, 
il cristallise avec la plus grande facilité; je veux parler 
du principe doux, du sucre qu’on trouve dans le lait. 
Les propriétés de cette substance sont assez extraordi- 
naires et le différencient assez des sucres, pour que quel- 
ques chimistes en aient fait une espèce spéciale, sous 
le nom de lactine. Ce qui établissait autrefois une diffé- 
rence chimique bien grave entre ce sucre et les autres 
espèces du même nom, c'était la faculté qu'il possède de 
se transformer en acide lactique. Depuis que les beaux 
travaux de M. Pelouze ont prouvé que tous les sucres 
peuvent se transformer en acide lactique, cette diffé 
rence a disparu, ensorte que le travail entrepris par nous 
ne fait que fournir une preuve de plus à l'appui de l’a 
nalogie parfaite qui existe entre les propriétés chimiques 
du sucre de lait et celles de tous les autres corps de la 
série du ligneux, des fécules, des gommes et des 
sucres. 

Quand on distille du bois, on obtient dans le récipient 
essentiellement! de l'acide acétique et de l'acétone en 
quantité d'autant plus grande que le bois est plus pur. 
Il est possible qu'on obtienne d'autant plus d'acétone que 


— 67 — 

la distillation a eu lieu à une température plus élevée, 
puisqu'on la produit en soumettant l'acide acétique à 
une haute température; mais nous ne pensons pas que 
ce principe ait été produit, dans nos expériences, par le 
contact de l'acide acétique avec les parois brülantes de la 
cornue; nous pensons plutôt qu’elle est née après l'acide 
acétique; c'est-à-dire que ce dernier a été produit par la 
décomposition de la partie de la substance organique qui 
se détruit sous l'influence d’une faible chaleur, tandis 
que l’acétone est née de l’action d’un feu assez violent 
pour décomposer celles de ces parties constituantes dont 
une chaleur peu élevée ne suffit pas pour désagréger les 
élémens. 

Nous avons opéré d'une part sur l’amidon de grains, 
de l’autre sur le sucre de lait. Chacune de ces substances 
a été réduite en poudre fine et desséchée au bain-marie, 
après quoi on l’a introduite dans une cornue de verre, 
qu’on a chauffée doucement au bain de sable, et on n'a 
cessé d'élever la température, que lorsque le fond de la 
cornue est devenu rouge-brun. Dans l’un et l’autre cas 
les produits étaient formés d'acide acétique, d’acétone, 
d'acide carbonique, d'eau, et de charbon qui restait dans 
la cornue. 

Pour séparer ces divers produits, je me suis servi de 
carbonate potassique en excès, qui retenait l’eau et l’a- 
cide acétique. En distillant le mélange au bain d’eau, 
l'acétone passe seule; en reprenant le résidu par l’al- 
cool , on dissout l’acétate potassique. 

Il suffit de jeter un coup d’æil sur la formule de l’a- 
midon et sur celle du sucre de lait, pour voir avec quelle 
facilité elles expliquent la formation des produits pyro- 
génés dont nous venons de parler. 


— 468 — 
L'amidon ou fécule formée de : 
{C3 H: O acétone, 
C: H3 O3 acide acétique, 
CH! 0" produit GC O2 acide carbonique, 
Ê (HO) eau, 
\Cs charbon. 


Tandis que le sucre de lait formé de : 
! C3 H O acétone, 
C: Hs Os acide acétique, 
C12 Hi2 Os produit C Oz acide carbonique, 
6(H O) eau, 
Ca charbon. 

On voit par là que les produits de la distillation sèche 
de l'amidon et du sucre de lait se ressemblent en tous 
points, sauf pour la quantité d’eau, qui est d’un tiers plus 
forte, pour le sucre de lait; ainsi que sa formule devait 
le faire prévoir. 


— 69 — 


[LE A 
Nouvelle classification des substances organiques. 
Par M. F. Sacc. 


Frappé de la difficulté qu'offre l'étude de la chimie or- 
ganique', lorsqu'on lui applique un des systèmes de 
classification à la mode, systèmes qui, comme celui des 
radicaux organiques, ne s'appliquent point à tous les corps 
connus, ou bien qui, comme celui du savant Prof. de 
Montpellier, M. Gerhardt, placent tout près les uns des 
autres, des corps doués de propriétés chimiques assez dif- 
férentes, je me suis décidé à diviser les substances orga- 
niques de la manière suivante : 


I. IL 
Substances azotées. Substances non azotées, 
a. Acides. a. Acides. 
b. Basiques. b. Basiques. 
c. Neutres. c. Neutres. 


Chacune des subdivisions de ces deux grandes classes 
de corps se sous-divise encore en 


dc 2. 
Corps solides Corps liquides 
à la température or- à la température or- 
dinaire — 15° C. dinaire—1 5° C. 
3. 


Corps gazeux. 
Chacun de ces nouveaux groupes peut être partagé en 
trois, suivant que les corps qui leur appartiennent sont 
insolubles ou solubles. 


— 10 — 
a b c ‘d 
Dans l'eau. Dans l'alcool. Dans l’éther.  Insoluble 
dans ces trois 
fluides. 

Pour éviter les doubles emplois que produisent les corps 
solubles à la fois, dans deux ou trois de ces menstrues, 
on rangera ces corps toujours sous la lettre la moins 
avancée à laquelle ils appartiennent, en en tenant compte 
dans les autres, seulement pour mémoire. 

Lorsqu'il le faut, on peut faire intervenir pour les 
subdivisions ultérieures l'usage des alcalis caustiques, 
dont l'application est très-utile pour séparer les huiles 
grasses d'avec les huiles essentielles et les alcools, et les 
savons véritables d'avec ceux de résine, parce que les 
premiers sont précipités par le chlorure sodique, tandis 
que les savons de résine restent en dissolution. 


LLE 


Séances du 2 et du 16 avril 1846. 


M. Léo Lesquereux a envoyé à la Société un rapport 
sur un voyage qu'il a fait dans le nord de l'Europe pour 
l'étude des dépôts tourbeux. Nous en extrayons les faits 
principaux. 

La géographie botanique, observée comparative- 
ment dans les Vosges, les montagnes du Rhôün et le 
Hartz, offre des caractères assez semblables pour les 
plantes phanérogames. Les Vosges, par la variété des ac- 
cidens géologiques, et surtout par les stations si nom- 
breuses que cette chaîne présente, sont d'une grande 
richesse, comparée au Rhon surtout, qui presque entié- 
rement basaltique, nourrit les plantes du sol calcaire de 
moyenne élévation. Dans les Vosges et le Hartz, les hauts 
sommets sont couverts de la plupart des plantes alpines, 
qui caractérisent les sommités du Jura. On rencontre 
même les anémones au point culminant du Rhôn, le 
Kreutzberg. Il faudrait énumérer une longue série de 
plantes pour établir positivement les caractères distinctifs 
des flores locales. Au reste, ces caractères tiennent peu 
à la nature même du sol. Il en est autrement quand on 
en vient à l'étude des plantes cryptogames. Les granits, 
les basaltes, les calcaires, ont une physionomie parfaite- 
ment distincte pour les mousses et les lichens qu’ils nour- 
rissent, et dans l'examen de ces petits végétaux, la géo- 
graphie botanique peut s'élever à des considérations 
tellement sévères et précises que suivant l’auteur, il suffit 


= Ne 
de connaître quelques-uns des cryptogames attachés au 
rocher pour déterminer la nature du sol lui-même. 

Dans l'étude des bassins, on doit établir la même dis- 
tinction. Il est certain que la géographie botanique ne 
peut être traitée complètement d'une autre manière, 
c’est-à-dire qu'il ne suffit pas d'isoler les groupes suivant 
des délimitations politiques. Mais la marche de la dissé- 
mination dans les phanérogames est, chose curieuse, plus 
difficile à constater que pour les cryptogames, surtout 
pour les mousses. Sur l'inspection d'un seul exemplaire 
trouvé au bord d’un ruisseau dans la plaine, il est arrivé 
à l'auteur d'indiquer la présence de cette même espèce 
dans une localité plus élevée, où elle s’est rencontrée en 
effet. Cela n’aurait certes rien d'étonnant s’il s'agissait de 
l’une de ces mousses aquatiques végétant au fond des ruis- 
seaux, mais le Bryum uliginosum croît dans les sables hu- 
mides et tout-à-fait en dehors de l'influence continuelle 
d’un cours d’eau. De ces observations sur la dissémination 
des espèces végétales, l’auteur arrive à expliquer la pré- 
sence de certaines tourbières dans le voisinage de plu- 
sieurs ruisseaux, quand au contraire on n'en rencontre 
parfois aucune trace ailleurs dans les mêmes circonstances 
hygrométriques. 

Les formations tourbeuses sont divisées en deux classes 
bien distinctes, comme cela a été établi dans les Recherches 
sur les dépôts tourbeux ('} : formations immergées par l’en- 
tassement des plantes aquatiques, comme les roseaux et 
les carex: formation émergée par le secours du sphaigne. 


(*) Léo Lesquereux. Recherches sur les Dépôts tourbeux en général. Mé- 
inoïres de la Société des Sciences naturelles de Neuchâtel, tome HT. 


— #13 — 

Dans les Vosges et le Hartz, comme dans les terrains 
granitiques en général, moins perméables à l'humidité 
que le calcaire, les tourbières émergées se présentent 
assez fréquemment sur des pentes fort inclinées. Elles 
montent même jusqu'au point culminant du Brocken. 
Ce fait important prouve que leur présence n'est due ni 
à un acide particulier ni à tel autre agent préparé d'a- 
vance. C’est une des preuves les plus positives qu'il soit 
possible de fournir de l’action hygroscopique du sphaigne, 
autant pour effectuer l'absorption de l’eau que pour favo- 
riser la conservation du ligneux dans les touffes imbi- 
bées de liquide. 

Les grandes tourbières des plaines du Nord de l’Alle- 
magne , celles de Neumünster, près de Kiel, par exemple, 
ont pour caractère de présenter les deux formations super- 
posées. La tourbe a cru d’abord dans un bassin de plu-— 
sieurs pieds de profondeur, et dès que le niveau de l'eau 
a été atteint, la croissance émergée a commencé, de 
sorte qu'on constate facilement, et par la qualité du 
combustible et par les plantes qu’on y trouve, ces deux 
natures fort différentes. 

Un troisième mode de croissance a été observé dans 
quelques parties des Vosges, mais surtout en Scanie et 
én Danemarck, dans les bassins profonds et peu étendus, 
où la végétation tourbeuse a commencé à la surface de 
l'eau. C’est par l’immersion du tapis flottant, constam— 
ment épaissi par l'apparition de nouvelles plantes, que 
ces bassins se sont comblés. On comprend que l'accès 
des abîmes, ainsi cachés sous la verdure, ait été quel- 
quefois fort dangereux ; aussi ces tourbières du nord 
sont-elles remplies d’une grande quantité d'ossemens et 


— 474 — 
d'instrumens divers, tant anciens que modernes, qui peu- 
vent aider à constater les diverses époques de la formation 
de ces divers dépôts tourbeux. 

Plusieurs questions fort intéressantes ont été étudiées 
d’ailleurs par M. Lesquereux en dehors de celle de la for- 
mation de la tourbe. Celle, par exemple, de la culture 
des tourbières dans les grands marais de Giffhorn, au 
milieu des Bruyères d'Oldenbourg, où sont depuis long- 
temps établies des colonies fort intéressantes sous ce rap- 
port. Le sol tourbeux est peu fertile; il nécessite un la- 
bour fréquent, des engrais souvent renouvelés, et ne 
produit jamais des récoltes d’une grande abondance, s’il 
n’est pour ainsi dire lotalement changé par le mélange 
de l’argile. 

La question de la reproduction de la tourbe, dont l’au- 
teur a vu des exemples fréquens dans les environs de 
Brème et de Hambourg, et qui n'est maintenant plus 
mise en doute par personne. 

Le rapport entre les combustibles minéraux, la houille, 
les lignites et la tourbe se trouve établi, suivant l’auteur, 
par l'inspection des dépôts de lignites du Rhün et de 
la Thuringe et par les couches de houille d'flmenau. Les 
lignites de Bischoffsheim, empâtés dans les basaltes, sont 
des amas de bois semi-carbonisés, et qu'on exploite à la 
hache. Les couches d'argile sur lesquelles ils reposent, et 
qui les recouvrent, présentent fréquemment des em-— 
preintes de feuilles d’orme, de bouleau, de saule, etc. 
Les lignites de Mächsterstädt sont mêlées d’une immense 
quantité de cônes de pin. Ceux de Lützen, qu’on appel- 
lerait plutôt du nom de tourbe, sont couverts d'une 
couche de sable et de gravier d’une trentaine de pieds 


— #15 — 
d'épaisseur. La matière combustible est noire et cassante, 
on y reconnaît encore quelques débris de mousses aqua- 
tiques, et elle est assise sur des troncs dont le bois, ab- 
solument noirei, est réduit à l’état de pâte molle comme 
l'argile. C'est un état de décomposition transitoire entre 
la tourbe proprement dite et les lignites ou les houilles. 
Ce ramollissement des plus grands végétaux explique 
parfaitement l’aplatissement de tous les restes de plantes 
qu'on peut reconnaître dans les combustibles minéraux. 

Nous dirons encore un mot des observations curieuses 
faites sur le grand âge de certaines tourbières dans les 
environs d'Helsingôr, où l'exploitation a mis à découvert 
trois forêts superposées el séparées par des bancs de 
tourbe d’une épaisseur considérable. L'auteur explique ce 
curieux phénomène par des enfoncemens successifs d’une 
surface surchargée, et renouvelée par la croissance de la 
tourbe. 

Mais ces formations n’ont pu se faire que dans un es- 
pace de temps fort considérable, puisque de ces trois 
forêts d'arbres de diverses espèces, l’une, celle des chênes, 
présente des troncs qui n'ont pas moins de deux à trois 
pieds de diamètre. 

En terminant son mémoire, l’auteur affirme n'avoir 
jamais pu observer de dépôts tourbeux vraiment marins. 
Sur le bord de la Baltique et de l'Océan, les lagunes sont 
comblées par la tourbe, au moyen des mêmes plantes 
aquatiques que celles qui végètent sur les bord de nos 
lacs. Nulle part il n’a rencontré de tourbières composées 
de fucus. La Zostera marine, rejetée parfois sur le ri- 
vage en grandes masses, reste pendant des temps indé- 
finis exposés à toutes les variations atmosphériques , sans 


— 4716 — 
que sa nature et ses formes soient modifiées. Mais ce ne 
sont pas là des formations, et il est impossible de com- 
parer ces accidens aux travaux lents et continus que la 


nature emploie pour la composition des dépôts tour- 
beux ('). 


(‘) Voir, pour des développements plus étendus, les divers articles pu- 
bliés par la Repue Suisse et la Monographie des tourbières d'Europe, que 
lPauleur termine en ce moment et qui va être livrée à la presse. 


IV. 


Sur la distribution des espèces de roches dans le bassin 
erratique du Rhône (*). 


Par M. À. Guyor. 


On sait maintenant, et mes précédentes communica- 
tions ont démontré, je crois, que le terrain erratique al- 
pin est divisé en un certain nombre de groupes de roches 
ou en bassins erratiques, dont les limites respectives 
restent parfaitement distinctes. Mais quant à la question 
de savoir si dans l'intérieur de chaque bassin pareil on 
peut constater un certain ordre dans la répartition des 
roches diverses qui s’y rencontrent, elle est plus difficile 
à résoudre; aussi à peine peut-on dire qu'elle ait été 
abordée. Parmi les auteurs peu nombreux qui se sont 
réellement occupés de l'étude du terrain erratique, 
M. J.-A. Deluc énumère une multitude de faits soi- 
gneusement enregistrés, sans chercher à en déduire un 
‘argument pour ou contre l'existence d'une loi de distri- 
bution. MM. de Buch et de Charpentier ont légèrement 
touché la question relativement au bassin du Rhône; le 
premier semble y répondre affirmativement quant aux 
granits du Mont-Blanc et aux poudingues de Valorsine ; 
le second, qui admet une loi de distribution pour les 
roches erratiques dans l’intérieur de la vallée du Rhône, 
paraît nier toute régularité dans la répartition des mêmes 


(*) Nous réunissons ici en un même compte-rendu , la substance de 
plusieurs communications faites par M. Guyot sur ce sujet, spécialement 
dans les séances du 4 décembre 1844 et du 5 novembre 1845. 


— 478 — 
espèces qui couvrent la plaine ; M. Studer, au contraire, 
croit en trouver une dans le bassin de l’Aar, précisé 
ment dans l’espace qui est en dehors des hautes Alpes. 
Les faits que j'ai observés dans tous les bassins errati- 
ques, et spécialement dans ceux du Rhin, de la Reuss et 
du Rhône, me forcent à reconnaître : 

1° Que la répartition des espèces de roches erratiques 
dans l'ntérieur de chaque bassin est soumise à une loi qui 
a valeur pour la plaine comme pour les vallées. 

2 Que celte lot est la même pour tous les bassins. 

Mais c’est du dernier seulement des bassins que je viens 
de nommer que je désire entretenir la Société. 

La variété de roches différentes d'aspect autant que 
de nature minéralogique, que présente le bassin du 
Rhône, et la grandeur de l'échelle sur laquelle le phé- 
nomèéne se développe, rendent ce bassin très-propre à ce 
genre d'étude; d'autre part cependant son double dé- 
versement, sa double issue, à l’est et à l’ouest, com- 
plique la question d'un élément qui ne se trouve point 
dans les bassins voisins, et dont il faut avoir grand soin 
de tenir compte. Je vais d'abord passer en revue som— 
mairement les principales espèces de roches qui distin- 
guent le bassin du Rhône, puis j'examinerai quel est le 
mode d'association et de répartition qui est propre à cha- 
cune d'elles. 

Espèces caractéristiques. Les roches que je considère 
comme vraiment caractéristiques pour ce bassin, sans 
appartenir à des espèces bien franches , forment néan- 
moins des groupes partout identiques à eux-mêmes et 
parfaitement reconnaissables. Ce sont essentiellement les 
suivantes : | 


— 19 — 

1° Une espèce de granite ou, si l'on’ veut , deÿsyénite 
talqueuse, de couleur jaune-verdätre, composée d’une 
masse talqueuse et chloriteuse le plus souvent schistoïde, 
intercalée de nombreux cristaux de quartz, de feldspath 
et d’amphibole et parsemée ça et là de très-petits cristaux 
de sphène. Elle affecte tout aussi fréquemment la struc- 
ture gneissique et même schisteuse ; dans ce dernier cas 
le quartz et l’amphibole et même le feldspath disparais- 
sent peu à peu, et la roche passe à une sorte de schiste 
chloriteux. Cette roche est le granite talqueux de M. de 
Charpentier, la roche à sphènes de M. de Buch; je la 
nommerai d’un seul mot Arkésine, nom que M. Jurine 
a imposé à une roche très-analogue dont j'ai trouvé quel- 
ques échantillons dans sa collection déposée au musée de 
Genève. : | 

29 Une espèce de gneiss très-riche en feldspath blanc 
imparfaitement cristallisé, à feuillets chloriteux, brisés 
ou ondulés, d'un beau vert-clair, semés de particules 
très-scintillantes, et à cristaux de quartz rares et irré- 
guliérement distribués. Par la disparition du quartz, qui 
manque très-souvent, cette roche passe à une sorte de 
leptinite chloritée ; par la diminution du feldspath jus- 
qu'à une très-petite dose et la prédominance de la chlo- 
rite, elle se rapproche d’un simple schiste chloriteux. Je 
l'appelerai gneiss chloriteux. 

3° Des chlorites d’un vert-bleuâtre clair ou foncé, ordi- 
nairement schistoïdes, comme piquées régulièrement d’un 
grand nombre de granules de feldspath blanc ou jaunâtre, 
- dont la grosseur est très-variable. Ce sont ces chlorites 
- que j'ai appelés jusqu'ici roches de Bagnes, parce qu'elles 
constituent en bonne partie les grandes chaînes qui tra- 


34 


— 480 — 
versent la partie supérieure de cette vallée et ses envi- 
rons. 

Ces trois espèces se trouvent trop constamment en— 
semble dans toute l'étendue du bassin du Rhône, pour 
n'avoir pas appartenu primitivement aux mêmes locali- 
tés. Elles forment un groupe à part que j'appellerai par 
excellence les roches pennines; car j'ai enfin acquis la 
certitude que c’est dans les plus hauts sommets des Alpes 
pennines qu'elles ont leur gîte primitif. 

M. de Charpentier avait annoncé, sur ouï-dire, que 
l'arkésine, ou granite talqueux, provenait de la vallée 
de Binnen, dans le Haut-Valais , et spécialement de la 
chaîne qui sépare cette vallée du Val-Antigorio; j'ai par- 
couru cette vallée et le col de l'Albrun qui mène à Anti- 
gorio, sans y rencontrer même un fragment qui rappe- 
lât cette roche si caractéristique. MM. Studer , Escher et 
Desor ont traversé les deux chaînes qui bordent cette 
vallée, depuis le Valais jusqu’au Val-Divedro, sans y en 
trouver davantage. J'ignorais donc, en partant-pour ma 
dernière excursion dans les Alpes, où il fallait aller la 
chercher. Guidé par la loi de distribution que j'avais re- 
connue dans la plaine, ét par l'association constante de 
cette roche avec celles du Mont-Rose, je dirigeai mes pas 
vers le fond des vallées de cet énorme massif, et c’est là, 
au-dessus du glacier de Zmutt, que je l'ai trouvée enfin en 
grande abondance, formant une vaste moraine sur le 
flanc gauche de la vallée, à la limite même des roches 
polies, à 9,000 pieds de hauteur. Cette traînée, que j'ai 
suivie l’espace d’une lieue, venait évidemment des régions 
très-rapprochées de la Dent-Blanche et de la Dent- 
d'Erin. 


Le 
4 


— 481- ee 


J'ai retrouvé l’arkésine dans le val d'Erin même tout 
aussi abondamment. Les deux seuls exemplaires de cette 
roche qui se trouvent dans la riche collection de Berne, 
proviennent l’un de ces mêmes régions de la Dent-d’Erin, 
où il a été recueilli par M. Forbes, l’autre du fond de 
la vallée de Bagnes, du glacier de Chermontane, d’où il 
a été rapporté par M. Studer. Au glacier de Zmutt, 
comme au val d'Erin, le gneiss chlorité, avec toutes 


- ses variétés, accompagne l’arkésine. On peut donc affir- 


mer que ces roches appartiennent à la grande chaîne mé- 

‘tamorphique qui, selon M. Studer, constitue la plupart 
des énormes massifs des Alpes pennines depuis le fond 
des vallées de Bagnes et d'Entremont jusqu'à celle de 
Viège et au-delà (*). 

Quant aux chlorites granuleuses, ou roches de Bagnes, 
leur gite est constaté depuis long-temps. Quoique dé- 
bouchant en plus grande abondance par les vallées de 
Bagnes et d'Entremont , elles se trouvent dans toute l’é- 
tendue que je viens d'indiquer, tout en variant beaucoup. 
Elles passent par divers degrés à des schistes plus ou 
moins talqueux, à structure souvent filandreuse, et elles 


(*) Ces conclusions ont été pleinement justifiées et mises hors de doute 
par mes explorations de l’été dernier (1846). J’ai parcouru toute la haute 
chaine des Alpes pennines si peu connues encore, depuis ie Mont-Blanc 
jusqu’au Mont-Rose. J’ai atteint ou traversé son faite sur cinq points dif 
férens ; j'ai examiné le fond de toutes les vallées qui en sillonnent le flanc 
septentrional, depuis la vallée de Bagnes jusqu’à celle de Saas, ainsi 
qu’une partie de celles du revers méridional, et j’ai eu la satisfaction bien 
grande de découvrir enfin dans ces cimes presque inabordables le gite pré- 
cis de toutes les roches caractéristiques du bassin erratique du Rhône qui 
sont énumérées ici et de les recueillir en place. Je rendrai compte ailleurs 
du résultat de ces recherches qui complètent la série de mes études sur le 


… terrain erralique suisse, 


— 482 — 
se trouvent sous ces formes diverses dans la chaîne mé— 
ridionale jusques dans le Haut-Valais. L’arkésine au 
contraire et le gneiss chloriteux ne se montrent jamais 
plus haut que la vallée de Viège, encore ne les voit-on 
point sur le flanc droit de cette vallée, qui est occupé 
par les roches descendues de la vallée de Saas. 

On peut joindre à ce groupe des roches pennines pro- 
prement dites, celui des roches du Mont-Rose, qui com- 
prend également trois espèces particulièrement caracté-— 
ristiques. 

4° Les euphotides de Saas se placent ici au premier 
rang. Cette belle roche, dont les variétés plus ou moins 
riches en saussurite, en smaragdite, et en talc jaune ou 
blanc sont très-nombreuses, se distingue des rares eupho- 
tides ou des granitones des bassins de l'Isère et du Rhin. 
Elle est répandue sur la surface presque entière du bassin 
du Rhône et provient cependant, comme l'on sait, de la 
seule vallée de Saas. Elle descend des hautes arêtes du 
Saasgrat par une route unique, le glacier d'Alalein, en 
amont duquel je n'ai pu en apercevoir même un seul 
fragment. Cette provenance exclusive, jointe à sa grande 
extension, la rend très-précieuse pour séparer le bassin 
du Rhône d'avec les bassins contigus. 

5° Les éclogites, compagnes fidèles des euphotides, et 
non moins caractéristiques, proviennent exclusivement 
aussi des mêmes localités. Cette roche semble avoir pour 
base une sorte d’amphibolite grenue; d’un vert-grisâtre, 
imparfaitement schistoïde, parsemée régulièrement de 
petits grenats d’un à quatre millimètres de diamètre, tel- 
lement nombreux qu'ils forment une partie essentielle 
de la roche, et de brillantes paillettes de mica argentin, 


— 183 — 


tout aussi nombreuses, volontiers de même grandeur et 
remarquables par leur distribution régulière et leur 
forme généralement arrondie. Cette roche , aussi répan- 
due que l’euphotide sous forme de galet et de petits blocs, 
ne se trouve guère en blocs volumineux. Quoiqu’elle des- 
.cende surtout, comme l’euphotide, par le glacier d’Ala- 
lein , je l’ai découverte aussi à l'ouest du Saasgrat dans 
les moraines du glacier de Finnelen. 

6° Les serpentines compactes et schisteuses du massif 
du Mont-Rose peuvent être rangées au nombre des roches 
caractéristiques de cette grande chaîne pennine et du bas- 
sin du Rhône. Car, quoique l’on puisse objecter qu’il s’en 
trouve également quelques-unes dans les bassins voisins 
de l'Arve et de l'Isère, elles parleront toujours par leurs 
variétés particulières , leur abondance, et par leur asso- 
ciation avec des roches d'une origine plus incontestable 
encore. 

Les deux groupes précédens représentent dans la plaine 
la grande chaîne centrale ou pennine; les espèces sui- 
vantes représentent essentiellement les massifs latéraux du 
Mont-Blanc et de l'Oberland bernois. 

7° Les granites du bassin du Rhône formant les blocs 
gigantesques épars sur les pentes du Jura, qui les pre- 
miers ont attiré l'attention du monde savant, il est natu- 
rel qu’on les ait considérés comme la roche principale et 
la plus caractéristique de ce bassin. Cependant il n’en 
est point ainsi, car non-seulement ils n’y sont pas aussi 
généralement répandus que les roches pennines, mais, 
de plus, les uns lui sont communs avec le bassin de 


l’Arve, les autres sont très-analogues à ceux du bassin 
de l’Aar. 


— À84x — 

Ces granites sont essentiellement de deux sortes : 

Les uns à base de feldspath blanc, parfois très-légère- 
ment rosé, en gros cristaux parallélipipèdes, souvent mâ- 
clés; à quartz faiblement violacé ; l’'amphibole et une 
substance chloriteuse y remplacent d'ordinaire le mica 
qui y est rare, et forment cà et là des amas d’un vert noi- 
râtre, dont la grosseur varie depuis un pouce jusqu’à un 
pied et plus. On dirait alors un fragment de roche étran- 
gère empâté dans la masse du granite. Enfin une subs- 
tance talqueuse d’un vert-clair, d’une apparence terreuse, 
communique sa couleur à une partie de la masse. Ce sont 
les protogines de la chaîne du Mont-Blanc dont il existe 
plusieurs variétés qui sont dues à des différences dans le 
développement des cristaux, dans la structure, et dans 
l'abondance des parties talqueuses. Quoique ces variétés 
semblent se retrouver simultanément dans plusieurs par- 
ties de la chaîne, on peut dire en général que les proto- 
gines qui se distinguent par la grosseur disproportionnée 
de leurs cristaux de feldspath et leur structure gneissique, 
appartiennent aux aiguilles de Chamounix, au revers 
nord-ouest de la chaîne; celles du val Ferret, sur les 
pentes nord-est, ont le grain plus égal, quoique les cri- 
taux soient encore très-développés. Les protogines à pe- 
tits grains et pauvres en parties talqueuses ou passant à 
un vrai gneiss, se trouvent plutôt dans l'extrémité nord, 
entre Saint-Maurice et Martigny , comme dans le Mont- 
Catogne. 

La seconde sorte de granite diffère des précédens par 
plusieurs caractères ; les cristaux ne dépassent pas une 
grandeur moyenne ; ils sont aussi plus confusément eris- 
tallisés; ne sont jamais mâclés. Le mica, ou ses rempla- 


— 485 — 

çans, est plus disséminé et d’un vert plus clair. Rarement 
ces granites contiennent de ces amas noirâtres empâtés dans 
la masse; encore sont-ils alors peu considérables et moins 
nettement limités. Les parties talqueuses sont souvent 
peu abondantes et l'aspect de la roche généralement plus 
blanc. Ces granites sont ceux qui proviennent du glacier 
du Rhône et du massif de l’Oberland bernois, descen- 
dent par les glaciers de Viesch et d’Aletsch, et suivent la 
rive droite du Valais ; de là leur analogie avec ceux qui 
sortent du même massif par la vallée de l’Aar. 

7° Les poudingues de Valorsine, que les belles obser- 
vations de Saussure ont rendus célèbres, sont encore l’une 
des roches les plus distinctives du bassin du Rhône. Ils 
se composent d'un grès souvent schisteux, d’un beau gris, 
très-micacé, parsemé çà et là de taches schisteuses plus 
ou moins larges, d’un noir mat et foncé, intercalées 
entre les feuillets; ce grès contient des galets et des frag- 
ments de quartz , de gneiss et d’autres roches primitives 
dont le volume varie depuis la grosseur d’un gravier fin 
jusqu’à celle de la tête. Ces galets sont d'ordinaire si 
nombreux que la structure schisteuse disparaît, et ils 
sont si intimément cimentés que le marteau ne peut les 
détacher sans briser la matrice, et qu’à la cassure ils 
paraissent comme des taches dont les bords ne sont pas 
toujours nettement accusés. Le tout forme une roche 
d'une grande dureté. Leur gîte primitif n’est pas seule 
ment la vallée de Valorsine; cette roche est encore en 
place sur la rive droite du Rhône, au-dessus d'Outre- 
Rhône, près de la dent de Morcles, à la montagne de 
Foully, etc. Dans les deux localités elle est accompagnée 
de conglomérats et de schistes rouges lie-de-vin, qui 


—  À86 — 

appartiennent à la même formation. C’est de la dernière, 
c’est-à-dire de la rive droite de la vallée, que semblent 
avoir été détachés la plupart des nombreux blocs de cette 
espèce qui sont à l’état erratique dans le bassin du Rhône. 

8° -I1 faut enfin signaler comme un caractère du bas- 
sin du Rhône qu'aucun autre bassin voisin ne partage 
avec lui, du moins au même degré, l'abondance remar- 
quable de galets de toute grosseur, d'un quartz ordimai- 
rement jaunâtre, qui sont répandus sur sa surface entière 
et dont la présence, aux abords de ce bassin, annonce 
invariablement la proximité des autres roches erratiques. 

Répartition des espèces. La répartition dans la plaine 
des espèces que je viens de nommer n’est point acciden— 
telle. Ici non plus il n’y a point désordre, point mélange 
absolu, mais bien un ordre et un triage qui a lieu sui- 
vant certaines lois. Sans doute il ne faut point cher- 
cher ici des limites de distribution tranchées comme le 
sont celles qui séparent les différens bassins; mais on 
peut affirmer les propositions suivantes : 

1° Telle espèce abonde dans une région du bassin et 
ne se trouve que rarement ou pas du tout dans: une 
autre. 

20 Les blocs des diverses espèces, à partir du lieu de 
leur origine, tendent à former des séries parallèles, et 
quand arrivés dans la plaine, ils s’étalent considérable- 
ment, ils n’en conservent pas moins une disposition res- 
pective analogue à celle qu'ils avaient dans leurs gites 
primitifs. Les blocs du flanc droit de la vallée occupent 
dans la plaine la rive droite du bassin; ceux du flanc 
gauche, la rive gauche; ceux des vallées les plus cen- 
trales en couvrent les régions eentrales. 


— ST — 

3° Des groupes composés chacun d’une seule espèce de 
roche à l'exclusion de toute autre, se rencontrent çà et 
là au milieu de roches d'espèces variées, en restant 
toutefois dans les conditions de la règle précédente. 

Un mot sur la distribution de chacune des espèces que 
je viens de décrire suffira pour en donner la preuve. 

Les roches pennines, l'arkésine, le gneiss chlorité ét 
les chlorites granuleuses sont de beaucoup les plus répan- 
dues ; elles couvrent les trois quarts de la surface du bas- 
sin. Nous avons dit qu'elles marchent toujours ensemble 
et qu’elles forment un groupe qui se comporte presque 
comme une seule espèce. Si nous les prenons à leur point 
de départ depuis le débouché de la vallée de Viège et du 
val d'Erin, nous les voyons suivre le flanc gauche de 
la vallée du Rhône sans jamais passer sur la rive oppo- 
sée. À l'issue des vallées d'Entremont et de Trient elles 
se recrutent des granites du Mont-Blanc qui les accom-— 
pagnent en formant la lisière extérieure. Au sortir de la 
vallée du Rhône, elles s’étalent dans la plaine en un vaste 
éventail, et remplissent le bassin du Léman et celui des lacs 
de Neuchâtel et de Bienne. On les trouve à la fois le long 
des pentes. extérieures des chaînes du Chablais , au pied 
du Salève, dans toute la plaine de Genève ; elles couron- 
nent de blocs prodigieux le Mont de Sion. Elles consti- 
tuent la grande majorité des grands blocs suspendus sur 
le revers du Jura depuis le fort de l'Ecluse jusqu’au pied 
de la Dôle, ainsi que les blocs moins nombreux qui sont 
épars dans les plaines du pays de Gex et sur les hauteurs 
de la Côte jusque dans les environs de Lausanne. Plus à 
l'Est, ces mêmes roches, mais en blocs moins volumi- 
neux et relativement moins fréquens, jonchent les pentes 


— 488 — 

” du Jura et forment avec les granites du Mont-Blanc la 
limite supérieure de l’erratique. Dans la plaine où les gra- 
nites paraissent à peine, elles dominent de nouveau et 
couvrent de leurs débris toute la plaine de l'Aar, les col- 
lines molassiques entre Soleure et Berne, et s'étendent 
jusque dans les environs de Zoffingen et d’Arbourg où 
des blocs métriques de chlorites peuvent être considérés 
comme les derniers représentans des roches pennines , et 
marquent la limite extrême de l’extension du bassin du 
Rhône. 

Bien plus encore, cés mêmes roches sont les seules qui 
pénètrent dans l’intérieur des hautes vallées du Jura. Au- 
delà de la limite supérieure de l’erratique, marquée dans 
le Jura neuchâtelois et vaudois par les grands blocs de 
granite et l'existence des roches polies, par delà les deux 
ou trois premières chaînes et plus loin encore, on ren- 
contre , dans le fond des hautes vallées, jusqu’à plus de 
8,500 pieds de hauteur, un terrain erratique qui se com- 
pose de fragmens et de blocs dont les plus volumineux 
atteignent rarement un mètre, accompagnés de nombreux 
galets de quartz. 

Ces fragmens sont ordinairement très-anguleux et por- 
tent cependant je ne sais quel caractère de vétusté; la 
roche semble profondément altérée. Ils paraissent avoir 
séjourné plus ou moins longtemps sous terre, où ils se 
trouvent encore pour la plupart. Eh bien; les roches qui 
composent ce terrain erratique pour ainsi dire isolé, et 
distinct du reste du bassin , sont encore exclusivement les 
roches pennines. Jamais un granite du Mont-Blanc, ou un 
poudingue de Valorsine ne pénètrent dans cette enceinte 
défendue par les hautes chaînes du Jura. Les vallées ou- 


— 489 — 

| vertes vers la plaine, comme celles de Vallorbe, du Val- 
de-Travers, du Val-de-Ruz, sont les seules du Jura où 
pénètrent ces derniers. Les quartz seuls, en galets nom- 
breux et de toute grosseur, accompagnent dans l'intérieur 
du Jura les roches pennines et ils sont ainsi, avec elles, 
les derniers et les plus lointains représentans des roches 
alpines sur toute cette lisière. 

Mais quoique ces trois espèces de roches jouent ainsi 
un rôle commun, on peut néanmoins signaler une diffé- 
rence dans leur distribution qui confirme la loi que j'ai 
indiquée. | 

Les chlorites granuleuses, qui viennent en plus grande 
abondance de la partie inférieure de la vallée du Rhône, 
tendent à conserver leur position extérieure le long de la 
rive gauche du bassin. Elles sont plus fréquentes et en 
blocs plus considérables dans la partie occidentale du bas- 
sin. Elles remontent très-haut sur les chaînes du Cha- 

_blais, sans atteindre toutefois la hauteur des granites, 
mais laissant au-dessous d'elles les arkésines qui n’occu- 
pent guère que le pied de ces hauteurs. Elles sont encore 
en blocs de plusieurs mètres au Mont-de-Sion. Au-dessus 
du Pays de Gex sur les confins du Jura vaudois et du Jura 
neuchätelois, sur le Suchet et le Chasseron, elles reparais- 
sent plus fréquentes et en gros blocs. Mais plus à l'Est, 
les blocs sont plus petits, moins nombreux, et des varié- 
tés plus talqueuses, où disparaît peu à peu toute granula- 
tion, se substituent aux vraies chlorites granuleuses. 

Le gneiss chloriteux, quoique abondant, ne forme que 
rarement de très-gros blocs ; sa présence est liée plus in- 
timément à celle de l’arkésine et on peut considérer comme 
lui étant applicable ce que nous allons dire de la distribu- 

tion de cette dernière roche, 


— 490 — 

L'arkésine, avec ses analogues, est la plus répandue 
de ces trois roches ; son vrai domaine est la partie Sud- 
Ouest du bassin. On la trouve le long de la rive savoyarde 
du lac de Genève ; elle forme la grande majorité des blocs 
du Mont de Sion, du Vouache et du Pays de Gex. Plus 
à l'Est elle accompagne en blocs nombreux encore mais 
beaucoup moins gros, les granites du Jura. Dans la plaine 
on la retrouve abondante entre Neuchâtel, Fribourg et 
Berne ; elle forme presque à elle seule , à quelques lieues 
de Soleure, les plus gros blocs connus, non-seulement 
du bassin du Rhône mais de la Suisse entière : le grand 
bloc du Steinhof et tout auprès ceux du Steinberg. 

Ainsi donc les roches pennines se trouvent presque 
dans toute l’étendue du bassin. Aucune région n’en est 
exempte, si ce n’est la rive droite de la vallée du Rhône 
et hors des Alpes, les contrées situées au pied des mon- 
tagnes de la Gruyère. Toutefois les chlorites abondent 
surtout sur la rive gauche du lac de Genève, tandis que 
les arkésines, unies aux gneiss chloriteux, dominent dans 
la partie centrale du bassin, spécialement d’une part au 
Mont-de-Sion et dans le Pays de Gex, de l’autre, à l’ex- 
trémité Nord-Est, dans la plaine au Sud de Soleure. La 
situation respective des régions ou prédomine l’une ou 
l’autre de ces trois espèces erratiques, est ainsi, hors des 
Alpes, la même que celle qui existe entre les vallées al- 
pines d'où elles tirent leur origine. 

Les roches du Mont-Rose se comportent également 
comme une seule espèce. Elles suivent à-peu-près les 
allures des roches pennines, et les accompagnent pres- 
que partout à l'état de galets; mais ne les suivent pas 
dans les plus grandes hauteurs auxquelles elles semblent 


— A9 — 

préférer la plaine ou les coteaux inférieurs. Les blocs un 
peu volumineux de ces roches ne se trouvent guère que 
dans la partie occidentale du bassin. La plaine de Genève 
et les coteaux qui la bordent, le Pays de Gex, et surtout 
les environs de Nyon, voilà leur véritable domaine. Là 
seulement on rencontre des blocs d'euphotide de deux à 
cinq mètres de longueur, des masses de serpentine plus 
grosses encore. Au-delà de cette limite, dans la partie 
orientale du pays de Vaud et plus loin vers l'Est, les blocs 
d'euphotide deviennent d’une grande rareté ; les plus loin- 
tains que j'aie rencontrés sur les flanes du Jura, se trou- 
vent au-dessus de Neuchâtel et de la Neuveville et attei- 
gnent à peine un mètre. On peut en dire autant des 
serpentines. Les unes et les autres, et les serpentines en 
particulier, reparaissent cependant en abondance et en 
grands blocs entre Berne et Bourgdorf, où elles font 
caractère pour toute une région du bassin. Quant aux 
éclogites je n’en connais point de gros blocs. On les trouve . 
d'ordinaire en blocs de petit volume, à peine métriques, 
et le plus souvent en galets de grosseur très-variable. 

On voit que les deux régions dans lesquelles les roches 
du Mont-Rose sont le plus abondantes, sont l’une et 
l'autre sur la droite de celles où dominent les roches pen- 
nines ; ici encore nous retrouvons dans la plaine une dis- 
position des roches erratiques qui rappelle la situation 
relative des vallées d'où elles sont descendues. 

La répartition des granites du Mont-Blanc offre des ca- 
ractères remarquables. On les trouve à la fois à la limite 
supérieure de tout l’erratique, le long de la rive gauche 
du bassin, sur les hauteurs de Chablais, et le long des pentes 
opposées du Jura. Cette dernière localité paraît même 


— 492 — 

être, contre toute attente, le domaine spécial de cette 
roche. Depuis la Dôle jusqu’au delà de Soleure, dans les 
environs de Niederbipp et d'Aarwangen, non-seulement 
les blocs de granite dominent par leur nombre et leur 
volume, mais ils sont disposés en bandes continues, à 
limites tranchées , et qui excluent même parfois toute 
autre espèce de roche. C'est ce qui a lieu surtout dans le 
Jura neuchätelois où cette disposition est plus clairement 
exprimée que partout ailleurs. 

Sur les flancs de la chaîne de Chaumont , en effet, la 
limite supérieure du terrain erratique est formée par une 
zône de blocs de granite dont le plus gros mesure jusqu'à 
dix mètres. Cette zône se prolonge, en s’abaissant toujours 
du côté de l'Est, sur les hauteurs de Chaumont, au pied 
du Chasseral, près de Nods et Lignières, puis par les 
vallées d'Orvins et de Vauffelin. Elle est mélangée de 
blocs nombreux, mais relativement peu volumineux des 
roches pennines. Au-dessous de cette première zône est 
un intervalle de plus de mille pieds de hauteur tout-à-fait 
dégarni de gros blocs ; à peine y trouve-t-on cà et là quel- 
ques représentans des roches pennines. Mais bientôt on 
rencontre une seconde zône de près de vingt minutes de 
large, qui couvre les plateaux de Pierre-à-Bot d’une quan- 
tité de blocs tout aussi gros et plus nombreux que ceux 
de la zône précédente. C’est à cette zne qu'appartient le 
grand bloc de Pierre-à-Bot de dix-huit mètres et un 
grand nombre d’autres presque aussi considérables. Cette 
bande se prolonge à l'Est et à l'Ouest dans tout le pays de 
Neuchätel et forme un peu au-dessus de Boujean, près 
de Bienne, un des plus beaux dépôts de ce genre que l’on 
rencontre sur les pentes du Jura. 


— 493 — 

Deux seules espèces de roches forment cette traînée de 
gros blocs, c'est la protogine du Mont-Blanc à très-gros 
cristaux de feldspath, provenant des aiguilles de Chamouni 
et en général du revers occidental de Ja chaîne, accom- 
pagnée d’une sorte de gneiss gris ou de mica-schiste très- 
dur, dont je retrouve les identiques dans la chaîne des 
Aiguilles rouges de Chamouni. La limite inférieure de 
cette zûne, qui, dans les environs de Neuchâtel, se trouve 
à cinq cents pieds au-dessus de la plaine, est nettement 
tracée. Dès qu'on la dépasse, on voit reparaître aussitôt 
les arkésines , les chlorites, les euphotides, etc. 

Ces deux zônes se laissent poursuivre au loin, à l'Est 
et à l'Ouest, mais elles ne sont pas partout aussi dis- 
tinctes. La zône supérieure forme partout la limite supé- 
rieure de l’erratique; elle contourne Chaumont, entre 
dans le Val-de-Ruz, au fond duquel elle est marquée par 
les gros blocs accumulés près du village du Pasquier, suit 
les hauteurs des Planches , le pied du pic de Tête-de- 
Rang, les hautes prairies des Champs-devant, passe dans 
le Val-de-Travers où elle forme sur tout le pourtour de 
la vallée, et jusqu’à la tour de St-Sulpice, une couronne de 
blocs à même niveau. Les granites arrivent jusqu’à l’en- 
trée de la vallée des Verrières , sans y pénétrer, et finis- 
sent brusquement au-dessous de la Côte-aux-Fées sans 
monter sur le plateau , tandis que ces deux vallées con- 
tiennent d'assez nombreux fragmens des roches pennines 
altérées. 

La zône de granite écharpe ensuite la montagne de 
Boudry, dessine une courbe semi-cireulaire au fond du 
couloir de Provence, dont les Prises et les hauts pâtu- 
rages sont comme inondés de blocs immenses , malgré les 


— 49% — 

efforts continuels de l’agriculteur pour les détruire ou les 
enterrer. Dans cette anfractuosité, l'intervalle entre les 
deux zônes disparaît, mais leur position est encore in- 
diquée par une plus grande abondance des gros blocs 
granitiques au sommet et au pied de la côte. Cette double 
ceinture continue à se dessiner avec des phénomènes 
analogues sur les flancs du Mont-Aubert ; les granites 
montent au village de Mont-Borgeais près duquel le grand 
bloc de la Pidouse marque à-peu-près la limite supé- 
rieure. Celle-ci atteint son maximum de hauteur au pla- 
teau des Bullets, d'où elle descend lentement par Sainte- 
Croix sur les pentes orientales de l’Aiguille de Beaumes. 
De là, les gros blocs du Suchet, ceux des Granges de 
Valorbe, qui mesurent jusqu’à vingt mêtres, les nom— 
breux blocs du plateau de Premier, les blocs de Mont-la- 
Ville, célèbres par leur grande taille, et enfin ceux que 
recèlent en si grand nombre les forêts de Mont-Richer, 
marquent partout la permanence de cette belle cein- 
ture de granites qui va s’abaissant et se mélangeant tou- 
jours davantage. Plus loin, vers l'Ouest, ces mêmes 
granites ne cessent pas, mais depuis la Dôle surtout , les 
blocs sont moins nombreux, beaucoup moins volumineux 
et cèdent la prépondérance aux roches pennines. On les 
trouve encore, il est vrai, dans toute l'étendue de la plaine 
de Gex et de Genève, mais sporadiques, mêlés, et non 
point en zône de gros blocs comme celle que nous venons 
de décrire. . 

Dans cette ceinture de gros blocs du Jura , ce sont les 
variétés qui ont dû sortir par la vallée de Trient , qui do- 
minent. Celles du val Ferret y sont plus rares et se trou- 
vent plutôt au-dessous des deux zônes vers la plaine. Cette 


= ON 5 
disposition et le fait que la limite inférieure de la zône des 
gros blocs est tranchée, même au milieu des forêts et des 
rochers incultes, empêche qu'on ne puisse attribuer, ainsi 
qu’on l’a fait, l'absence des grands blocs dans la plaine 
uniquement à l'exploitation par la main des hommes et à 
la culture. 

Les granites du Haut-Valais, ou du flanc droit de la 
vallée jouent un rôle très-secondaire dans la plaine. Assez 
nombreux en Valais sur la rive droite du Rhône, dans la 
plaine ils sont repoussés par les poudingues de Valorsine 
vers l'intérieur du bassin. Ils suivent volontiers une courbe 
qui passe sur le Jorat entre Lausanne et Vevey, tourne 
lentement à l’est sur les plateaux qui environnent Mou- 
don, puis suivant les hauteurs au Nord de Romont, vient 
rejoindre les Alpes de Fribourg au pied de la Berra. La 
plupart des granits qui sont disséminés en petit nombre au 
nord de cette ligne jusque dans le voisinage de Neuchâtel, 
de Fribourg et de Berne, semblent avoir cette origine. 

D'autre part, je crois pouvoir ranger dans cette classe 
un bon nombre des blocs de granite, souvent considérables, 
que l'on rencontre sur les plateaux qui dominent Morges, 
près du village de Bussy et jusqu’à Aubonne et aux plai- 
nes de Bière. Ces blocs formeraient une seconde zône cou- 
rant d'est en ouest sur les hauteurs du Jorat parallèle 
ment aux rives du lac, comme pour rejoindre le Jura. 

Les poudingues de Valorsine, avec les conglomérats 
rouges ou lie-de-vin, ont un domaine plus distinct que 
toute autre roche. Ils occupent à eux seuls la rive droite 
du bassin, depuis le débouché de la vallée du Rhône, 
couvrent le plateau du Jorat jusqu'aux environs de Lau- 
sanne. Les conglomérats rouges se tiennent presque ex- 


35 


— 496 — 

clusivement à la limite supérieure de l’erratique, le long 
de l'extrême rive droite sur les hauteurs de la chaîne qui 
domine Semsale, sur le Moléson et la Berra. On les re- 
trouve jusqu'au-delà du Gouggisberg. Les blocs de Valor- 
sine proprement dits occupent, à l'exclusion de toute autre 
roche, ou peu s'en faut, les hauteurs qui dominent Ve- 
vey. Ils forment une large zône qui, au sortir de la vallée 
s'infléchit au nord-est, et couvre tout le pays entre les 
Alpes d’une part, et les hauteurs au nord de Rue et de 
Romont jusque dans les environs de Fribourg et du 
Gouggisberg. On les trouve encore très-nombreux et même 
dominans, mais mêlés aux roches pennines et aux gra- 
nits sur tout le plateau entre Lausanne et Yverdon, et sur 
toute la rive méridionale du lac de Neuchâtel. Ils sont 
rares sur la rive septentrionale de ce lac et au pied du 
Jorat, où ils montent rarement dans la hauteur. On peut 
citer comme un phénomène un bloc de cette roche de 
deux à trois mètres situé à 400 pieds au-dessus du lac de 
Neuchâtel, dans le vallon de Vert, près de Boudry. À l’est 
de Berne et d'Aarberg , les Valorsines sont très clair-se- 
més. 

La partie occidentale du bassin n’en est point non plus 
entiérement dépourvue; on en trouve à l’ouest de Lau- 
sanne et d'Yverdon, jusqu’au-delà d'Aubonne et près du 
Jura. Quelques-uns se montrent çà et là dans la plaine 
de Genève; mais ceux là proviennent sans nul doute de 
la rive gauche, de la vallée de Valorsine et du Trient. Nulle 
part dans ces régions, ils ne sont assez abondants pour 
faire caractère et la grosseur des blocs n’est jamais très- 
remarquable. 

Galets de quartz. Si j'ai donné une place aux galets de 


St. SP 


— 497 —? 

quartz parmi les roches les plus caractéristiques ;‘ c’est 
qu'il est peu de roches qui y soient aussi généralement et 
aussi uniformément répandues dans le bassin du Rhône. 
Les quartzites paraissent cependant accompagner plus 
volontiers les roches pennines. Au-delà des limites des 
blocs , sur le Jura, quand toute autre roche a déjà dis- 
paru, on retrouve encore çà et là un galet de quartz jus- 
qu'à près de 4000 pieds de hauteur, comme au sommet 
de la chaîne du Creux-du-Vent entre Provence et Môtiers, 
au faîte de la chaîne de Tête-de-Rang entre le Val-de- 
Ruz et la vallée de la Sagne , sur les hauteurs de Péry et 
du Monto, sur la chaîne qui sépare la vallée de Langen- 
bruck d'OEsingen et ailleurs. 

Les galets de quartz sont ainsi la seule trace erratique 
qui relie la région des blocs extérieurs au Jura avec le 
terrain erratique que l’on trouve isolé dans le fond des 
hautes vallées de cette chaîne. Ici, ils sont associés aux 
roches pennines , comme de coutume, mais ils sont pro- 
portionnellement plus abondants. Enfin nulle roche ne se 
montre en fragments plus nombreux, ni aussi loin des 
Alpes. Quand placé en dehors du bassin erratique du 
Rhône, on s'approche des régions qu’il occupe, en Savoie, 
dans le Jura, comme en Argovie, partout on rencontre, 
aux abords, les galets de quartz comme premiers avant- 
coureurs des roches alpines. C’est ainsi qu’à l'extrémité 
orientale du bassin, la plus éloignée des gîtes primitifs, 
dans les environs de Urkheim et de Zofingen, non loin 
des roches erratiques de la Reuss dont on quitte le do- 
maine, une grande abondance de galets de quartz an- 
nonce subitement l’approche du bassin du Rhône. Ils sont 
seuls d'abord, mais quelques centaines de mètres plus loin, 


— 498 — 

se montrent quelques chlorites granuleuses; les taleschistes 
et les granites succèdent enfin et ne laissent plus de doute: 
on est en plein bassin du Rhône. Cette abondance de ga- 
lets de quartz est d'autant plus remarquable que les blocs 
de cette roche sont rares et de petit volume. Peut-être 
leur nombre est-il dù à leur nature peu destructible, 
et l'absence de gros blocs à leur provenance de filons in- 
tercalés plutôt que de roches en masse. 

Pour résumer la distribution des espèces de roches dans 
le bassin du Rhône, coupons transversalement le bassin 
à l'est d’abord, puis à l’ouest de l'issue de la vallée dont 
elles sortent, partant chaque fois des Alpes pour aboutir 
au Jura; chacune de ces coupes nous montrera claire- 
ment l'ordre de succession qu'elles observent. Je tire la 
première des environs de Bulle au mont de Boudry , près 
de Neuchâtel, la seconde des Fourches d’Aberre, en Cha- 
blais, au Marchairu. 

En partant des Alpes au-dessus de Bulle nous trouvons 
dans la hauteur les conglomérats lie-de-vin qui forment 
la limite supérieure de l’erratique et l'extrême rive droite 
du bassin. Avec eux commence la région des blocs de 
Valorsine. Au-delà de Romont et de la vallée de la Glane, 
sur les hauteurs qui séparent cette vallée de celle de la 
Broye, quelques granits blanchâtres du Haut-Valais se 
mêlent aux poudingues de Valorsine, puis on voit paraître 
des blocs d’euphotides de Saas, accompagnés de chlorites 
talqueuses et de serpentines du Mont-Rose. Dans l’espace 
compris entre la Broye et les bords du lac de Neuchâtel 
se joignent aux roches précédentes les arkésines et les 
gneiss chloriteux. Sur la rive septentrionale, au-delà du 
lac, ces derniéres et les chlorites deviennent dominantes; 


— 99 — 
les roches de Valorsine ont presque disparu. En remon- 
tant les pentes du Jura, de cinq ou six cents pieds de hau- 
teur jusqu'à mille pieds au-dessus du lac, et seulement 
alors, se montrent les granits du Mont-Blanc. C’est la zône 
inférieure des grands blocs. 

Enfin , au-dessus d’un espace de près de mille pieds en 
hauteur, dans lequel disparaissent presque toutes les ro- 
ches alpines, la zône supérieure des grands blocs du Mont- 
Blanc, auxquels se mêlent les roches pennines , forme la 
limite la plus élevée du terrain erratique. | 

IL faut donc distinguer sur cette coupe trois régions 
principales : celle des poudingues de Valorsine le long des 
Alpes ; celle des blocs du Mont-Blanc le long du Jura ; et 
celles des roches pennines précédées de quelques granites 
du Haut-Valais et de roches du Mont-Rose, au centre. 

La coupe à travers la partie occidentale nous donne 
une série analogue. 

Les hauteurs du Chablais dans les environs du débou- 
ehé les Dranses, nous montrent les granites du Mont- 
Blanc, moins nombreux cependant qu'on eût pu s’y at- 
tendre , dans la partie supérieure ; et alliés aux chlorites 
qui montent presque au même niveau. Plus bas viennent 
s'ajouter les arkésines et les gneiss chloriteux sur les 
pentes qui dominent Thonon, Evian et la Tour-Ronde ; 
mais les euphotides et les serpentines sont encore rares. 
Au-delà du Léman au sud d’Aubonne et près de Nyon 
les roches du Mont-Rose sont très-abondantes. Enfin, 
plus loin, vers le Jura, on rencontre mêlés aux roches 
précédentes, mais dominants des granites blancs du Haut- 


Valais, des poudingues de Valorsine et des granites du 
Mont-Blanc. 


— 500 — 

Ici encore nous voyons les roches se succéder dans le 
même ordre que dans la coupe précédente, et cet ordre 
est celui dans lequel ces mêmes roches viennent affluer 
de bas en haut dans la vallée principale. D'abord les gra- 
nites de la rive gauche et de la partie inférieure de la val- 
lée ; puis les chlorites de Bagnes, les arkésines et les 
gneiss chloriteux du Val-d'Erin, les serpentines du 
Mont-Rose et les euphotides de Saas, enfin pêle-mêle les 
roches de la rive droite avec des granites du Mont-Blanc, 
qui appartiennent comme nous le verrons plus bas, à 
l'épanchement de la partie orientale. 

Il est donc vrai de dire, ainsi que je l'ai fait en com- 
mençant, que la répartition des espèces de roches errati- 
ques est soumise à une loi, selon laquelle les traînées de 
roches de même espèce conservent dans la plaine une po- 
sition déterminée , qui leur est assignée par la situation 
respeclive des vallées d'où elles sortent. Les roches qui 
sortent des vallées latérales les plus rapprochés du débou- 
ché de la vallée principale gardent les bords sur l’une et 
l'autre rive; celles qui proviennent des affluents les plus 
reculés tiennent le centre. 

Cette loi de distribution, je l’ai reconnue également 
dans le bassin du Rhin, et plus nettement encore dans 
celui de la Reuss qui est plus simple que les deux autres; 
mais une circonstance qui est particulière au bassin du 
Rhône, c'est le double déversement dont j'ai parlé. On a 
pu voir que chacune des deux branches, orientale et oc- 
cidentale, représente, dans leur ordre, la totalité des ro- 
ches de la vallée du Rhône. Or, cette disposition nous 
force à admettre deux périodes de déversement. Pendant 
la première l'écoulement n’a eu lieu que du côté nord- 


— 501 — 
est, c'est-à-dire, du côté le plus ouvert de la grande val- 
lée comprise entre les Alpes et le Jura. Dans une seconde 
époque l'épanchement a dù se faire par le bassin plus 
étroit du Léman , vers la plaine de Genève et du pays de 
Gex. 

L'analogie que présente cette distribution avec celle des 
moraines d'un glacier est évidente et doit frapper tous les 
yeux. La disposition en séries linéaires qu'affectent les 
moraines superficielles, la constance de leur situation res- 
pective qu’elles gardent malgré tous les angles et les con- 
tours de la vallée, leur élargissement et leur mélange 
graduel mais toujours incomplet, dans la partie inférieure 
où le glacier s'étale, tous ces phénomènes, si nettement 
tracés à la surface de chacun de nos glaciers actuels, sont 
précisément ceux que présente , mais sur une gigantesque 
échelle, la surface du bassin erratique du Rhône. Sup- 
posons pour un moment l'existence de ce vaste glacier du 
Rhône, et prenons-le au moment où, par suite de sa pro- 
gression, il a amené les roches des Alpes jusqu’à l'extrême 
limite où nous les trouvons aujourd'hui et voyons quelle 
serait, selon Les lois reconnues du mécanisme des glaciers, 
là répartition des moraines superficielles que nous trou- 
verions à sa surface. 

A une première époque, celle de sa plus grande exten- 
sion, tout l’espace compris dans l'angle aigu formé, au 
sud-ouest, par la réunion des Alpes et du Jura, est en- 
combré par des masses de glace alimentées par les vallées 
de l'Isère, de l’Arve, de la Dranse et du Rhône ; les is- 
sues sont insuffisantes ; l'écoulement par ce côté est pres- 
que impossible du moins pour les glaces de la vallée du 
Rhône. Le déversement a donc lieu par le nord-ouest, où 


— 502 —. 

la plaine s'ouvre et prend plus de largeur par l'écartement 
graduel des deux chaînes. La masse principale du glacier 
s'appuie contre le Jura qui la refoule vers la plaine dans 
laquelle les glaces s’étalent plus à l’aise et semblent même 
refluer légèrement vers les Alpes. Ici elles rencontrent un 
nouvel obstacle, c’est le glacier sorti de la vallée de l’Aar 
qui se presse contre le glacier du Rhône et le resserre, 
sans toutefois arrêter sa marche. Enfin les glaces du Va- 
lais, s’'amaigrissant de plus en plus, vont se terminer non 
loin d’Aarwangen et de Zofingue. Tel est alors le prodi- 
gieux glacier du Rhône. 

Les moraines que nous distinguons sur ce glacier sont 
d’abord : 1° la moraine latérale droite, composée presque 
exclusivement de nombreux blocs de poudingues de 
Valorsine, détachés de leur gîte principal des pentes 
de la dent de Morcles ; elle s'étend le long des Alpes de 
Fribourg jusqu’à la Singine. 2° La moraine du Haut-Va- 
lais, caractérisée par les granites blancs du revers sud de 
lOberland bernois et du Galenstock. 3° La moraine du 
Mont-Rose avec ses euphotides et ses serpentines, aux— 
quelles se mélent déjà quelques roches pennines. 4° La 
moraine des Alpes pennines jusqu'au pied du Jura, 5° puis 
enfin la moraine latérale gauche formée par les granites 
du Mont-Blanc qui, les derniers , sont venus se joindre, 
par Martigny et la vallée de Salvan, aux autres roches du 
bassin. 

Cette dernière moraine l'emporte de beaucoup en lon- 
gueur sur la moraine latérale droite. Cette circonstance, 
ainsi que l’inflexion générale des moraines intérieures ou 
superficielles, est la conséquence nécessaire du mouve- 
ment imprimé aux glaces par la configuration du réser- 


— 503 — 
voir dans lequel se meut le glacier ; nous l'avons vu plus 
haut. 

La ligne qui part du pied des Alpes du Guggisberg , 
forme la limite du bassin du Rhône au contact de celui de 
V’'Aar, et s'étend plus loin jusqu’au delà d’Aarwangen, 
n’est point, malgré les apparences, la suite de la moraine 
latérale droite, mais bien la frontale, qu'au premier 
abord on eût été disposé à chercher au côté opposé, 
sur le Jura même. Ce n’est pas qu'ici on trouve , plus 
qu'ailleurs , une accumulation qui rappelle les moraines 
frontales de plusieurs des glaciers actuels; mais c'est sur 
cette ligne que viennent aboutir de front toutes les mo- 
raines que nous avons nommées. Au lieu de ne trouver 
sur cette limite que des roches de la rive droite, comme 
cela serait si elle n’était que la prolongation de la moraine 
latérale, on retrouve, en la parcourant, et dans l’ordre 
indiqué, les roches de toutes les autres : les Valorsines au 
Guggisberg ; les granites du Haut-Valais entre Schwar- 
zenbourg et Koniz ; les euphotides et les serpentines dans 
les environs de Berne et de Bourgdorf ; les arkésines et 
leurs compagnes à Seeberg et au Steinhof; les granites 
du Mont-Blanc près d'Arwangen. 

À une époque postérieure, l'écoulement des glaces se fit 
peu à peu au sud-ouest par le bassin du lac de Genève, 
et les mêmes phénomènes s’y répètent. Ici, comme dans 
la partie orientale, les blocs du Mont-Blanc, descendus par 
Salvan et Martigny, forment la moraine latérale gauche. En 
Valais, dans le Chablais, les chlorites s’y mêlent, devien- 
nent bientôt dominantes et forment la limite au pied des 
Voirons au revers nord du Salève et jusqu’au Mont-de-Sion. 
Les roches pennines forment une large moraine centrale, 


— 0 — 

abimée en partie dans les eaux du lac, et qui couvre la 
plaine de Genève et du Pays-de-Gex jusqu’au Mont-de- 
Sion et au Jura. La moraine du Mont-Rose, marquée par 
une plus grande abondance d'euphotides , de serpentines 
et de roches secondaires du même groupe, passe par les 
environs de Nyon et de Coppet, se dirigeant vers l’ouest 
jusqu’au pied même de la chaîne. La moraine du Haut- 
Valais, déterminée par de nombreux et volumineux blocs 
de granite blanc, commence la latérale droite, passant par 
Morges, Bussy, Aubonne et Bière. Enfin les Valorsines, 
nombreux surtout aux environs de Lausanne et de Cos- 
sonay, forment, souvent avec des calcaires, l'extrême la- 
térale droite. Les granites du Mont-Blanc qui se trouvent 
dans ces dernières régions et jusques sur le Jura, appar- 
tenaient sans doute à la moraine latérale gauche pendant 
l'époque du premier déversement, et doivent avoir été en- 
traînés vers l’ouest au moment où s’est opéré le change- 
ment de direction dans l'écoulement du glaciers 

Dans cette partie du glacier, on peut considérer comme 
moraine frontale, les blocs accumulés à l'extrême limite 
du bassin, sur le sommet du Mont-de-Sion depuis la route 
de Frangy, le long des pentes du Vouache et du Jura, 
jusque dans ke voisinage de la Faucille et de Divonne; 
car dans tout cet espace, on ne rencontre guère que les 
roches pennines et celles du Mont-Rose. 

Ici encore, comme dans la partie orientale, la mbraine 
latérale gauche est plus étendue qne la moraine latérale 
droite ; mais la disproportion est loin d’être aussi forte, 
circonstance dont le relief du bassin rend parfaitement 
compte. 

C'est ainsi que s PTE par cet écoulement succes- 


2e 


— 505 — 

sif du glacier dans deux directions opposées , la réparti- 
tion compliquée et cependant normale des espèces de 
roches erratiques du bassin du Rhône. L'ordre de 
succession me paraît fixé non-seulement par la nature 
des reliefs, comme je l'ai exposé plus haut, mais encore 
par celle des roches elles-mêmes. Quoique les roches ca- 
ractéristiques soient les mêmes dans la partie orientale 
que dans la partie occidentale du bassin, cependant on 
ne trouve guère dans la première que les espèces qui pro- 
viennent des plus hautes sommités des Alpes, tandis que 
dans la seconde ces mêmes roches sont accompagnées 
d’une bien plus grande variété de roches que j'appelle 
secondaires et qui proviennent généralement de la partie 
des montagnes inférieures aux plus hauts sommets. On 
doit en conclure que les roches de la partie orientale se 
sont détachées au moment où les plus hauts sommets 
seuls surgissaient du sein des glaces, tandis que les roches 
de la partie occidentale sont tombées sur le glacier au 
moment où les rochers inférieurs étaient déjà découverts et 
lui fournissaient un, contingent de roches très variées. Or 
tout le mode de dépôt du terrain erratique, et des blocs 
anguleux qu’il renferme, se présentant comme un phé- 
nomène de retrait continu depuis l'époque de la plus 
grande extension des glaces diluviennes, il s'ensuit que 
les dépôts Ge la partie orientale du bassin représentent le 
commencement, ceux de la partie occidentale la fin de 
cette longue période erratique. 

Conclusions. Les faits qui viennent d'être exposés nous 
autorisent, je crois, à affirmer 

1° Que la répartition des espèces de roches dans l'in- 
térieur du bassin du Rhône est soumise à une loi. 


— 506 — 

29 Que cette loi est en tous points conforme à celle 
qui préside à l’arrangement des moraines sur un glacier 
actuel composé de plusieurs affluens. 

3° Que le grand glacier que supposent l'extension et 
l’arrangement des débris alpins qui constituent le bassin 
erratique du Rhône, avait sa tête dans ce prodigieux 
massif des Alpes pennines et du Mont-Rose, le plus élevé, 
le plus large, le plus riche en cîmes neigées et en vallées 
profondes, le plus colossal en un mot de tous ceux que 
apportent leur tribut à la vallée du Rhône : vaste récep- 
tacle de neiges et de glaces éternelles qui, aujourd'hui 
encore, ne connaît pas de rival dans les Alpes ; de telle 
sorte que le Haut-Valais tout entier, d’une part, et les 
vallées qui descendent du Mont-Blanc d'autre part, se 
comportent comme de simples affluens. 

Ainsi s'expliquent le groupement des espèces de roches 
en zônes parallèles et linéaires, leur répartition dans des 
localités spéciales, leur situation respective toujours con- 
forme à la position des vallées d’où elles sont sorties. 
Ainsi au moyen de la loi des moraines centrales ou mé- 
dianes, nous nous rendons compte de ce fait si remar- 
quable que les blocs qui proviennent des vallées les plus 
reculées, et des cimes les plus élevées, comme les roches 
pennines, sont aussi ceux qui, malgré leur volume sou- 
vent énorme , s’égarent le plus loin de leur gîte primitif. 
Dans cette hypothèse la conservation des blocs , leurs 
formes anguleuses , ou leurs surfaces striées , leur passage 
au travers des lacs, leur position élevée sur les flancs des 
montagnes dont aucune autre hypothèse ne rend compte 
d’une manière quelque peu vraisemblable, les phénomènes 
erratiques en un mot, ne sont plus pour nous un mystère 
impénétrable. 


Note 


sur le Bassin erratique du Rhin. 


Par A. Guyot. 


M. Guyot donne le résultat de ses dernières explora- 
tions sur le terrain erratique du bassin du Rhin, pen- 
dant l'automne 184% et l'été 1845. 

Ce bassin, dont jusqu'à présent on ne connaissait que 
fort peu de chose, pour ne pas dire rien du tout, est ce- 
pendant le plus considérable après celui du Rhône. Il 
n'a point comme ce dernier, un double déversement dans 
deux directions opposées. Au sortir de la vallée du Rhin, 
à l’origine du lac de Constance, il s'étend sur une lar- 
geur de 20 à 25 lieues, et une longueur, égale dans la 
direction du nord-ouest et de l’ouest, qui est celle du 
lac et va mourir sur les pentes du Jura Wurtembergeois, 
ou Rauhalp, qu'il ne dépasse nulle part. On peut donc 
affirmer aujourd'hui que la ligne du Jura a servi de bar- 
rière sur toute sa longueur au terrain erratique alpin; 
que ce terrrain ne l’a point franchie , pas même dans la 
région du confluent de l’Aar et du Rhin, où cette chaîne 
présente cependant un abaissement si considérable qu’on 
pourrait presque l'appeler une lacune. 

Limites. Les roches erratiques du bassin du Rhin pro- 
viennent essentiellement des trois vallées du Rhin an- 


— 508 

térieur, du Rhin moyen et de l’Albula, dont les deux 
dernières se réunissent dans le Domleschg pour se joindre, 
au-dessus de Coire, à celle du Rhin antérieur. Plus bas 
la vallée du Prættigau, et surtout la grande vallée de 
Montafun , sur la rive droite, fournissent à ce bassin un 
contingent de roches proportionnellement très-considé- 
rable. 

Le bassin du Rhin présente dès son origine une bi- 
furcation três-remarquable; le terrain erratique se dé- 
verse non-seulement par la vallée transversale que suit 
le Rhin depuis Meyenfeld et le Luciensteig, mais aussi 
par le lac de Wallenstadt et la vallée du Gaster où il 
rencontre les blocs de la vallée de la Limmat dans le 
voisinage de Wesen et Schænnis. Là, il est peu-à-peu 
refoulé par l’erratique plus puissant de la Linth ; il l’ac- 
compagne et se mêle avec lui, et ne paraît plus bientôt 
qu'en blocs isolés le long de la lisière orientale du bas- 
sin de la Linth. Aux environs du château de Kybourg et 
- de Winterthour, les roches du Rhin retrouvent leurs con- 
génères descendues par la vallée principale en tournant 
le massif des monts d’Appenzell. 

La branche principale suit la vallée du Rhin. Sur la 
rive gauche la limite longe le massif du Sentis, contourne 
les monts d'Appenzell, atteignant le sommet des pas- 
sages sans laisser échapper à l'intérieur du pays d’autres 
débris que quelques petits blocs ou quelques galets roulés, 
passe sur les hauteurs qui dominent Rheinach et Ror- 
chach, tourne au sud-ouest par les collines situées au sud 
de St-Gall, atteint presque Hérisau, passe à Tegerschen, 
traverse le plateau de Magdenau, coupe transversalement 
la vallée de la Thour, près de Jonschwyl, puis reprenant 


— 509 — 

_ la direction normale vers le nord-ouest, elle se dirige par 
Bichelsee, le Schauenberg sur Schlatt et Winterthour. Plus 
loin, elle suit la vallée de Tæss, et passant le Rhin près 
d'Eglisau, elle atteint les hauteurs voisines de Neuenkirch 
et du Randen, à l’ouest de Schaffhouse. 

La limite orientale, ou de la rive droite, effacée d’a- 
bord par d'immenses éboulis calcaires dans le voisinage 
du Luciensteig et de Balzers, s'élève bientôt à une hau- 
teur considérable sur le Frastensersand au-dessus de 
Feldlkireh. Sur le versant oriental de cette même chaîne, 
on trouve, à plusieurs centaines de pieds plus haut en- 
core, l'erratique de la longue vallée de Montafun. Au 
nord de Feldkirch elle longe les hauteurs du Voralberg 
au-dessus de Embs, de Dornbirn et du Sulzherg, passe 
à Holzleuten dans le voisinage de Stauffen, puis par les 
hauteurs de Ebrazthofen et Isny. Plus au nord les points 
de Schellenberg et de Pfullendorf que je dois, le premier 
à M. de Buch, le second au professeur Walchner, fixe- 
ront à-peu-près les limites extrêmes du bassin. Les 
roches des Alpes Rhétiennes, remontent, on le voit, jus- 
qu'au sommet des plateaux de la Souabe et empiètent 
même sur le domaine du Danube. Du côté de l’orient 
et du nord la limite est difficile à tracer; les blocs sont 
rares et petits, pour la plupart roulés, perdus sous terre 
ou dans des accumulations de galets ou de fragments 
émoussés , en très-grande majorité calcaires, fortement 
striés et accompagnés , comme d'ordinaire, d’un limon 
plus ou moins abondant. 

Du reste le bassin du Rhin ne présente point comme 
celui du Rhône ou du Gothard de ces blocs énormes qui 
surprennent le géologue et reçoivent des habitants du 


— 510 — 

pays, des noms particuliers. Les blocs roulés très émous- 
sés y sont très nombreux , surtout le long des rives 
et aux limites extrêmes. Les blocs calcaires qui sont en 
grande abondance, surtout le long de la rive gauche, sont 
arrondis et striés. Les blocs anguleux et d’un certain vo- 
lume se trouvent plutôt en longues traînées dans le centre 
du bassin. Les bords mêmes du lac de Constance sont dé- 
pourvus de gros blocs et de blocs anguleux jusqu'à plu- 
sieurs centaines de pieds au-dessus de son niveau; mais 
les accumulations des galets des mêmes espèces y sont nom- 
breuses et puissantes. 

L'espace compris entre les deux branches du bassin er- 
ratique du Rhin , occupé par la masse centrale du Haut- 
Sentis et limité au sud par la chaîne des Kurfürsten , est 
dépourvu des fragments erratiques du Rhin, qui semblent 
n'avoir pas même dépassé le col de Wildhaus, malgré sa 
faible hauteur de 3,600 pieds. Les premiers fragments se 
voient au-dessous de Wildhaus sur la route du Rhein- 
thal à une hauteur d'environ 3,200 pieds. Mais les mo- 
lasses et les nagelfluhe de toute cette région , et en parti- 
culier de la vallée du Toggenbourg, sont couverts de blocs 
calcaires nombreux, souvent très-anguleux, par fois rou- 
lés , accompagnés de dépôts considérables de galets de 
calcaire et de grès. Ces débris constituent un terrain er- 
ratique très-caractérisé, descendu sans doute des hauts . 
sommets et des vallées du Sentis et des Kurfürsten ; car on 
remarque souvent dans les blocs, des fossiles qui caracté- 
risentles couches coquillières des chaînes voisines. Le mou- 
vement général du transport paraît avoir été dirigé au 
nord. L’épanchement de ces masses a sans doute été arrêté 
ou troublé par la rencontre des roches erratiques du 


. 


—  à11 — 
Rhin, mais l'influence de ce bassin du Sentis se fait sentir 
encore bien au-delà de ses limites apparentes par l'extrême 
abondance des blocs et des débris calcaires, dont le nombre 
dépasse ici de beaucoup celui des roches cristallines de la 
vallée du Rhin. Une remarque importante, c'est que du 
moment où ces calcaires entrent en contact avec les roches 
du Rhin, les blocs anguleux disparaissent mais les nom- 
breux blocs roulés qui les remplacent sont presque tous 
fortement sillonnés et striés. Cette circonstance semble 
indiquer que les blocs calcaires avaient pris déjà posses- 
sion de ces contrées quand les roches erratiques du Rhin 
y parvinrent, et que c’est à l'agent qui les transporta 
dans ces lieux qu'est dù ce changement dans leur manière 
être. 

L'existence de cette région erratique nouvelle prouve 
que du haut de ces sommités calcaires aussi , est descendu 
un terrain de transport dont les caractères sont absolu- 
ment les mêmes que ceux des bassins erratiques à roches 
primitives , et qui doit sans doute sa dispersion à des 
causes tout-à-fait analogues. L’isolement de cette région 
érratique au milieu du bassin du Rhin , son éloignement 
des chaînes centrales des Alpes et la nature calcaire de ses 
débris, sont une preuve que le phénomène erratique n’est 
pas nécessairement lié à la présence des roches cristal- 
lines, comme on l'a prétendu, non plus qu’à la plus ou 
moins grande profondeur à laquelle les vallées d’où sont 
descendus ces débris, pénètrent dans les chaînes centrales, 
mais qu'il dépend plutôt de conditions de hauteur qui peu- 
vent se rencontrer hors de la masse principale des Alpes, 
aussi bien que sur leur faite. Tout massif orographique 
suffisamment élevé pour devenir, st sa structure le per- 


56 


— 512 — 
met, un centre de glaciers, peut devenir aussi le centre 
et le point de départ d'un terrain erralique particulier. Il 
semble que des faits de ce genre sont destinés à restreindre 
beaucoup le champ des hypothèses au moyen desquelles 
on peut rendre compte des phénomènes erratiques. 

La distribution des espèces de roches dans le bassin er- 
ratique du Rhin sans être aussi compliquée que celle des 
espèces du bassin du Rhône , n’est pas moins intéressante 
par sa régularité. Elle est soumise à une loi qui est la 
même que celle que nous avons reconnue dans les autres 
bassins. 

Parmi les roches variées descendues du haut des Alpes 
rhétiennes par la vallée du Khin , il en est trois que nous 
pouvons nommer comme spécialement caractéristiques 
pour ce bassin. Ce:sont les granites porphyroïdes de Pon- 
telja, ou de Trons, les granites verts du Juliers et les 
gneiss bruns de Montafun, trois espèces dont chacune 
correspond à l’un des affluents principaux de la vallée 
du Rhin que nous avons nommés plus haut. 

Les granites porphyroïdes sont une espèce de protogine 
qui se distingue au premier coup-d'œil par des cristaux 
rectangulaires étroits et allongés de feldspath blanc, or- 
dinairement mâclés, de la longueur de quelques lignes 
jusqu’à un pouce et plus, et qui se dessinent nettement 
dans la masse granitique. Le quartz est en grains assez 
nombreux , mais de petit volume; le mica vert-foncé est 
disséminé en paillettes ou en amas; une substance tal- 
queuse, comme dans les protogines du Mont-Blanc, teint 
en vert-tendre une partie de la masse, sans jamais altérer 
cependant la blancheur des grands cristaux mâclés ; de 
petits cristaux linéaires d'amphibole noire se montrent 


— 513 — 

-mombreux dans quelques échantillons, très-rares dans 
d'autres ; enfin, dans presque tous on aperçoit çà et là 
quelques très-petits cristaux de sphène jaune. 

Ces granites porphyoïdes proviennent, d’après les ob- 
servations de M. Arnold Escher , du ravin de Ponteljas, 
creusé dans le massif sud du Dœdi, au-dessus de Trons, 
dans la vallée du Rhin antérieur. Cette localité semble 
être la seule qui les produise, et en effet je n'en ai trouvé 
aucun fragment dans cette vallée en amont de Trons, 
ni dans aucune autre des Grisons. ’ 

Les granites du Julier se distinguent des précédens par 
l’absence des gros cristaux mâclés de feldspath, par l'a- 
bondance et la grosseur des cristaux de quartz, mais sur- 
tout par la prédominance et la vivacité de couleur de 
la substance verte lalqueuse qui colore la masse presque 
entière du feldspath et communique à la roche un aspect 
vert que n'ont point les granites de Ponteljas. On les re- 
connaît encore au premier coup de marteau à une té- 
nacité très-grande que n’ont point les derniers. Ces gra- 
nites appartiennent non-seulement au Julier, mais à une 
bonne partie de la chaîne septentrionale de l'Engadine. 

Les gneiss de Montafun ont leur origine dans les masses 
de roches cristallines dans lesquelles s'étend le fond de cette 
grande vallée. Cette roche, d'une structure grossière, est 
remarquable par une grande abondance de mica d'un 
brun sale, qui donne à la masse sa couleur générale, 
distribué en larges paillettes brillantes, et en amas plus 
obscurs, ou en lits assez étendus; elle est moins riche 
en feldspath qu'en quartz , qui y forme souvent de gros 
cristaux irréguliers, dont la masse trouble la régularité 
des feuillets de la roche. 


— 514 — 

On peut ajouter aux trois espèces précédentes, comme 
une roche qui accompagne d'ordinaire les deux premières, 
des talcschistes et des conglomérats rosés et verdâtres qui 
sont détachés des hauteurs qui bordent la rive gauche 
de la vallée du Rhin antérieur, et qui semblent appar- 
tenir à la formation qui domine dans le massif du Sernf- 
thal. La marche de ces diverses espèces est la suivante. 

Les granites de Ponteljas descendent de la vallée du 
Rhin antérieur qu'ils représentent dans la plaine, occu- 
pant toujours la rive gauche conjointement avec les talc- 
schistes roses et verts. Ils passent le col de Tamins et la 
vallée de la Tamina, quoique en petit nombre. La masse 
principale suit les flancs du Galanda, entre dans la val- 
lée du lac de Wallenstadt dont elle couvre les pentes au- 
dessus de Flams, sur la rive gauche, comme au-dessus 
de Wallenstadt et de Ammon sur la rive droite. Près de 
Wesen , ils sont repoussés par les conglomérats rouges 
du Sernfthal qui sortent de la vallée de la Linth, suivent, 
toujours moins nombreux, toujours plus isolés, la limite 
du bassin du Rhin, le long des hauteurs que nous avons 
indiquées plus haut. J'en ai rencontré quelques blocs 
encore jusque sur les hauteurs du château de Kybourg 
et dans les environs de Winterthour. Mais ils ne remplis- 
sent pas cette branche du bassin du Rhin seulement, on 
les rencontre encore, quoique beaucoup plus rares et mé- 
lés aux granites de Julier, sur la rive droite du Rhein- 
thal le long des flancs du Sentis au-dessous de Wild- 
haus et sur les hauteurs du Stüss. Ils sont encore fré- 
quents sur les hauteurs qui entourent St.-Gall et le long 
de la rive gauche du bassin jusque dans les environs de 
Winterthour et des environs de la colline de l’Irchel, où 


— 915 — 
ils viennent rencontrer ceux qui ont suivi la première 
route par la vallée de Wallenstadt et le Gaster. 

Les granites du Julier descendent dans la large vallée 
d'Oberhalbstein, n’entrent point dans le Churwalden, 
qui serait cependant la ligne directe, et qui semble ou- 
vert à leur épanchement, mais suivent le cours de l’Al- 
bula pour entrer dans le Domleschg, sans qu'un seul 
fragment passe sur le flanc gauche de cette derniére val- 
lée. On les retrouve, mêlés déjà aux granites porphy- 
roïdes, au pied du Galanda , et comme nous l'avons dit, 
le long des bords du Rheinthal. Arrivés au lac de Cons- 
tance, ils deviennent la roche caractéristique dans tout 
l'espace situé entre la rive méridionale du lac de Cons- 
tance et la limite méridionale du bassin en St-Gall et en 
Thurgovie, ils passent même sur la rive opposée où j'en 
ai rencontré dans le voisinage de Mersbourg et jusqu'au 
delà de Ittendorf, sur la route de Ravensbourg. Plus 
loin encore, du côté du nord et de l’est, on les trouve 
fréquemment, non pas à l’état de blocs , mais de galets. 

Les gneiss de Montafun descendent de la vallée de ce 
nom, où des blocs nombreux et de très-gros volume 
couvrent les flancs des montagnes jusqu'à une bauteur 
considérable. Ils occupent tout le reste du bassin, où ils 
deviennent dominants, se dirigent au nord en fléchis- 
sant légèrement à l’est, comme les roches précédentes. 
C'est dans la direction de Lindau et de Ravensbourg ; 
mais surtout dans le voisinage du château de la Wald- 
bourg qu’on les rencontre nombreux et sous leur forme 

anguleuse. Plus à l’est les blocs sont plutôt roulés et d’es- 
_ pèces plus variées. Je n’ai point trouvé de blocs de gneiss 
de Montafun sur la rive gauche du lac de Constance. 


— 516 — 

Ainsi done, on le voit, la loi de distribution est ici la 
même que dans les bassins du Rhône et de la Reuss. 
Les granites de Ponteljas, qui proviennent de la vallée 
du Rhin antérieur, gardent partout la rive gauche, les 
gneiss de Montafun, la rive droite ; les granites du Julier, 
le centre. Une coupe transversale à travers la partie 
principale du bassin, de Jonschwyl sur la Thour au chä- 
teau de Waldbourg, nous montre successivement les 
granites porphyroïdes sur les bords, les granites du Ju- 
lier jusqu’au lac ; au-delà du lac, les gneiss de Montafun. 
La situation respective de ces espèces est la même que 
celle des vallées où elles ont pris leur origine. 

Toutes les conclusions que nous avons tirées de cette 
loi de distribution des espèces et des autres circonstances 
qui accompagnent, ici comme ailleurs, le phénomène er- 
ratique, en parlant du bassin du Rhône, sont applicables 
au bassin du Rhin. L'identité des phénomènes généraux 
est complète. Ici encore, c’est la loi des moraines qui peut 
nous rendre compte de cette distribution qui se montre 
régulière malgré le mélange absolu des espèces que l’on 
aurait dû attendre dans une vallée aussi compliquée et 
aussi accidentée que celle du Rhin. 


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a FES OL 


TABLE 


DES MATIÈRES 


PHYSIQUE. 


Objection à la théorie de M. Saigey, sur les condi- 
tions d'équilibre de l'atmosphère , par M. Ladame. 

Description de la machine D de M. Bonijol, 
par M. Ladame. 

Mémoire sur se Fe métaux à Plate du 
galvanisme , par M. Aug.-OI. Matthey. 

Machine électrogalvanique, par M. Aug.-Ol. Mat. 


ReY-Momioriont + rl 
Note sur le peu de solidité du duiaoe airnique 
par M. Gerbel: j5 ,. 


Note sur:un mouyement de nr eat sans, mer- 
cure, par M. Depierre. 

Nouvel hygromètre, par M. Dollfus. Mise. 

Exposition des expériences de MM. Faraday et Bec- 
vquerel sur la quantité d'électricité qui tient les parti: 
cules.des corps en: équilibre, et qui se manifeste dans 
les actions chimiques , par M. Ladame. 

Mémoire, sur un moyen de découvrir à Ja Chaux. se 
Fonds où sont les incendies nocturnes, par M. Léon 
RODrB Le once 


27 


62 


186 


248 


252 


252 
349 


, 444 


444. 


Rapport sur le rent mémoire pe M. Fue 105 et 449 


La 


TABLE DES MATIÈRES. 


Note sur quelques points de la théorie des vapeurs, 
applicable à la constitution de us à par M. La- 


CS ARE . SL a: 7, A AE L TIR 


__ Observation sur re même sujet, . M. Coulon ,. 
père. 


MÉCANIQUE. 


Rapport sur le nouveau compas de proportion de 
M. Piaget-Guinand, par M. d'Ostervald. 

Description du compas de proportion de M. Piaget- 
Guinand, par M. Favre. 


TECHNOLOGIE. 


Statistique des doreurs au feu de la juridiction de 
Ja Chaux-de-Fonds, par M. de Pury. 


GÉOLGGIE ET GÉOGRAPHIE. 


Mouvement du glacier de l’Aar, par M. Agassiz. 

Influence de l'inclinaison du sol sur le mouvement 
de la glace, par M. Agassiz. 

Observation sur le même de par M. | Gufté 

Note sur les changements qu’a subis la surface de 


la terre pendant la période actuelle, par M. de À Los 


mont. 5 

Note sur les ui Mate mé subit la fete sg 

dant l'hiver, par M. C. Nicolet. : : 
Note sur le relief du fond du lac de Neuchâtel, dr 

M. Guyot. : Éql re Hr. 
Structure géologique ie AU supérieures du gla- 

cier de Rosenlaui, par M. Desor. ; 
Note sur la dispersion du terrain ne api 

entre les Alpes et te Jura, par M. Guyot. 


A5 


426 


TABLE DES MATIÈRES. 


Analyse de l'ouvrage de M. d'Orbigny sur la géo- 


logie de l'Amérique du sud, par M. Desor. . . Page 30 


Note sur l'accumulation des blocs au sommet des 
montagnes, par M. Desor. ; 

Observations sur le même sujet, par M. TRES 

Note sur les bonds de Bierre, par M. Desor. 

Observations sur le même sujet, par M. Louis Cou- 

Note sur un éboulement de terrain prés du village 
de Gorgier, par M. G. de Pury. 

Observations sur le même sujet, par MM. du Row: 
gemont, Desor et Guyot. 

Examen du mémoire de M. Héphiser sur r état de la 
matière à l'intérieur du globe, par M. Guyot. 

Observations sur le même sujet, par M. Ladame. 

Ascension du Wetterhorn, par M. Desor. 

Hauteur des principaux points du pays, par M. d° Os- 
tervald. 

Quantité d'eau qui s pes ile di scies tnférièur de 
l’Aar, par M. Desor. ! ACT TQTE 

Rapports existants entre la répartiidi ai glaciers 
et le relief général des Alpes, par M. Desor. 

Observations sur le même sujet, par M. Agassiz. 

Note sur les crevasses des glaciers , par M. Guyot. 

Constitution gone. de RE , par M. 
Gressly. 29,9 

Distribution des anciennes moraines de l Allée blan- 
che, et du val Ferret, par M. Apassiz. AN 

Formation des cirques dans les Alpes, par M. Desor. 

Discussion relative à ce sujet entre MM. Desor et 
Guyot. 

Rapport d'un fait da dapér dati Ace 200h6E que 
M. Robertson a observé en Ecosse, par M. Agassiz. 


TABLE DES MATIÈRES, 


Note sur les onu de l'étude du terrain erratique, 


par M. Guyot. +. : Dh snnioeai fé 4184 


Note sur un filon croiseur d spa par M. G. de 
Pury. 3 . 
Observation sur Ko même AL par M. pre, À 

Rapport sur les observations faites par. M. Hom- 
maire de Hell sur la salure des lacs qui entourent la 
mer Caspienne, par M. Desor. 

Observations sur le même sujet, par MM. FR 
et Guyot. aus 

Deux coupes géologique présentées ? 2e M. Ni 
+ SRE sE) "ho de 

Mémoire sur leu terrain er par M. mp 
({ Voy. l’Appendice). 

Mémoire sur la transformation de la neige en glace, 
et application à la théorie des vies par M. La- 
dame. i 

Note sur la ré des Hair 4 dre dans 
l’intérieur du bassin erratique du Rhône, par M. Guyot. 

Envahissement des glaciers dans ces dernières an- 
nées, par M. Desor. 

Raiboens sur la découverte gs M. FR + Belle- 
fonds sur l'emplacement du lac Mæris, par M. Guyot. 

Notesur la glace des sommités élevées des Alpes, 
par M. Desor. 

Rapport sur une zône ete de Ë Nouvelle Zé- 
lande, par M. Guyot. SG 

Mémoire sur le Jura salinois, par M. Mu 

Observations sur le PS mémoire, par M. La- 
dame, 

Obéerfations ta en Her sur le Abuer de L'Aar, 
par MM. Desor et Dollfuss-Ausset. 

Rapport sur les glaces flottantes de l’ og 2 
M. Guyot. 


190 
490 
194 
194 


247 


267 
350 
352 
365 
369 


372 
377 


377 


379 


. 384 


TABLE DES MATIÈRES. 


Carte du-pays où se trouvent les sources du Nil, 
dressée par Zimmermann, et présentée par M. Guyot. 

Atlas de la Grèce ancienne , par M. abs pré- 
senté par M. Guyot. £ 

Analyse du mémoire de M. Mablmaun, sur le climar 
et la végétation du Khanat de Bokhara, par M. Guyot. 

Note sur la découverte de es dans le Caucase, 
pan M. Guyot. _. . * 

Mémoire sur la constitution sien ile te RG 
par M. de Sismonda, et carte du fond des lacs de Neu- 
châtel et Morat, dessinée par M. H. de Pourtalès, pré- 
sentés par M. Guyot. . . 

Rapport sur une nouvelle Aer ve les. me. de 
Panama et de Darien, par M. Guyot. 

Découverte des houilles de l’isthme de Past, Ex 
M. Favarger, antérieure à celle de M. Hellert. 

Lettre de M. Desor à M. Nicolet sur sa course hiber- 
nale au glacier. 


Diamants dans leur DenEn oi srérentés ne M. The. 


remin. 
Note sur le RL et sur ses eue : pr 
M. Sacc. : 
Oxfordien de Neuchâtel FE et Lonties comme 
marbre. 


MÉTÉOROLOGIE. 


Note sur une chute de grêle au bord du Doubs, par 
M. de Pury. . 

Résultats d’une série d iobétirvations Bétoméirues 
faites dans la Suisse orientale, par M. d'Ostervald. 

Note sur une chute de gréle, par M. de Pury. . 

Note sur une espèce de halo, par M. de Pury. . 


Page 


390 
399 
399 


AAA 


413 
416 
416 
442 
401 
401 


416 


34 


52 
230 
231 


TABLE DES MATIÈRES. 


Note sur différentes chutes de grésil à gros grains, 


par MM. Nicolet et de Pury. : . :. . .  Page26 


Observations barométriques faites sur le Mont-Blanc 
par MM. Martins et Bravais, et Eros par 
M. d'Ostervald. ! 

Note sur quelques points de la dis db vapeurs 
applicables à la constitution de |” ND par M.La- 
dame. s 
Obsanation sur le même détfes) par M. Coulon Brel 

* Rapport sur une pluie de manne observée en Armé- 
nie, par M. Theremin. 

Arc-en-ciel lunaire observé, De M. 3. Billon. 

Observations sur le même sujet, par MM. Ducom- 
mun et Huguenin. 

Chaleur de l’ ui déphË ré de la Gus: dons ob: 
servée-en janvier 4846, par M. Nicolet. 

Nouvel hygromètre, par M. Dollfuss-Ausset. 

Moyens de déterminer les régions de l'atmosphère 
où agissent les causes du mouvement du baromètre, 
par M. Ladame. 


PALÉONTOLOGIE. 


Note sur une dent fossile de Lophiodon, par M. C. 
Nicolet. RE T  . 
Note sur les ossements M F marnes nym- 
phéennes de la Chaux-de-Fonds, par M. C. Nicolet. . 
Rapport sur les fossiles que M. Tschudi à trouvés 
au Pérou, par M. Agassiz. ‘ 
Note sur la prétendue identité que Von aéhiet géné- 
ralement entre les espèces vivantes et les fossiles de 
certains terrains, par M. Agassiz. ; 
Note sur des dents de Paléothérium, par M, era) 


406 


&14 


415 


416 
426 


427 
442 


349 


3541 


34 


124 


29 


107 
184. 


nl ris Le | 


= 


TABLE DES MATIÈRES. 


Note sur l'importance de l'étude des animaux fossi- 


les, par M. Agassiz. . . Hnoslonsidens #80ge 189 


Note sur les Crinoïdes bsiles de la Suisse, par 


M. Desor. 211 
Mémoire sur des ossements ati trouvés Être les 
cavernes de Mancenens et de V'aueluse, par M. Nicolet. 435 
Observation sur le même sujet, par M. Guyot. . 389 
BOTANIQUE ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 
Note sur le nombre de folioles du Dentaria EL 
phylos, par M. de Pury. ? 36 
Rapport sur les mousses du canton db Neuchâtel , 
par M. Godet. 71 
Note sur la linaire des AE. par M. “Nicolet 230 
Note sur deux plantes rares du Jura, par M. De- 
pierre. à Dot: 248 
Note sur la Hendbas il l'é écorce dei rs coupés, 
par M. L. Coulon. ÿ . 466 
Mémoire sur les tourbières du Nobd à par M. Fr de 
quereux. .… . dote sob nil RES 
Observations sur le même bib , par MM. Coulon, 
père et fils. A3 
Note sur un hybride dé cereus sfépdllitonis et He 
ciosissimus , par M. Sacc. 5 424 
Note sur l’agaricus deliciosus, par M. Nicolet. 462 
ZOGLOGIE ET PHYSIOLOGIE ANIMALE. 
Note sur les oiseaux européens de Macao, par M. C. 
Nicolet. 4% 
Note sur les AE del kde de 1 Lars #e 
M. Agassiz. MT 


TABLE DES MATIÈRES. 


Note sur l'importance au point de vue biologique 
des divers embranchements du se animal, par M. 


Agassiil : °eei! JO, 281 11 Mage 50 


L’Isard des Preuess COMRALE au Ce des CE 
par M. Agassiz. l 

Distribution écographique des Quadrumants; a 
M. Agassiz. 

Distribution nntite de s Cheroptères , par 
M. Agassiz. . HU TGS 

Note sur les on Lt se oiseaux MAUR par 
M. Coùlon. » 

Rapport sur la collection ARE NNEE dé la Cha: dé: 
Fonds, par M. Desor. 

Note sur le genre Pyrula de Ce, de M. Agas 
SE 1 0. 
Rapport sur es Het que M. Tschudi a doutes 
au Pérou, par M. L. Coulon. 

Note sur la prétendue identité Senereene ads 
entre les espèces vivantes et fossiles de certains ter- 
rains, par M. Agassiz. é 

Enumération des oiseaux déndires: et des oiseaux 
de passage qui restent pendant l'hiver à la Chaux-de- 
Fonds, par M. C. Nicolet. 

Rapirl sur la collection dé chduittés dé M. A. de 
Pourtalès, par M. Agassiz. 

Note sur les vers intestinaux, par M. dé Gastella. 

Observations sur le même sujet, par M. Agassiz. 

Note sur les métamorphoses des animaux des classes 
inférieures, par M. Agassiz. 

Note sur la distribution géogr. MAN FE animaux 
et de l’homme, par M. Agassiz. : 

Note sur les Diptères , par M. Coulon ere 

Note sur les araignées, par M. Guillebert. 


57 


59 


63 


65 


66 


69 


80 


107 


117 


qal 
142 
142 


156 
4162 


182 
201 


TABLE DES .MATIÈRES. 


Note sur les Becs fins et les nn par M. 


BA Vougano" :1": MN 1 PNY FORCNEROS 
Jeune loup offert à tré société. . . 239 
Note sur trois nouvelles espèces de Phduréltes! fa 

BRUIT: Nicolet. :: . : . :. 244 
Exposé des nouvelles réchétenès de M. Milne Ed- 

wards sur la circulation du sang chez les Mollusques 

Gastéropodes, par M. Agassiz. . . . DEN, HE, HEBE 
Distribution “tte des êtres ARTE , par 

M. Agassiz. ., . . 367 


Rapports existants entre té faits fab à à bo 
tion successive des êtres organisés à la surface du globe, 
_et la distribution géographique des divers types ac- 


tuels d'animaux, par M. Agassiz. . . . . . 366 
Ouvrage de M. Debret sur la race humaine du Bré- 
sil, présenté par M. Alfred Berthoud. . . . . 384 
Planches peintes de M. Des Murs, relatives à fée 
. mithologie et présentées par M. Agassiz. . . 389 
Muscicapa parva vu à Cortaillod par M. due 
Mouga. .. . 418 
Note sur un ue tombé du 1 cavité ab omiptie 
d'une poule, par M. Hollard. . . . . . 419 et 424 
Observation sur le même sujet, par M. Sacc. . . 419 
Note sur un plongeon lumme adulte tué à Neuchä- 
tel, par M. L. Coulon. . . . EL vi | 


Planches du mémoire de M. Nat. Guillot sur Fibs or- 
. ganesrespiratoires des oiseaux, présentées par M, Sacc. 423 


ANATOMIE HUMAINE, ANATOMIE COMPARÉE 
S ET TERATOLOGIE. 


Note sur l'organe électrique des Raïes non électri- 
CPE CORRE ONE SE 


# 


TABLE DES MATIÈRES. 


Note sur les corps de Pacini, par M. Vost. 
Du sens de l'ouie chez les insectes, par M. Vost. 
Note sur un monstre humain bi-femelle, par M. Irlet. 
Description d'un fœtus humain du genre Iniops, par 
M. DuBois. 
Note sur le cerveau “Er A se M. Lai 
Exposé des travaux de M. de Quatrefages sur la 
forme du canal alimentaire chez un certain nombre 
d’Articulés et de Mollusques, par M. Agassiz. 
Exposé des travaux de M. J. Müller sur les poissons, 
par M. Agassiz. ; 
Etudes sur la structure ne FINE par M. AIR Le 
Rapport fait sur un mémoire de M. Muller relatif au 
larynx inférieur des oiseaux, par M. Agassiz. 
Observation sur le même sujet, par M. Hollard. 


CHIRURGIE ET MÉDECINE. 


Note sur un trismus suivi de nue gangre- 
neuse, par M. DuBois. 


Traitement des fractures de la Doro à. M. : 
Pury. 

Note sur les ruminants et par M. de Du 

Observations sur le même sujet, par MM. Duboiset 
Droz. à à 

Note sur aseluts ité des eaux de la Clans de- Fondé 
par M. Droz. 

Observations sur le même ee D M. Dion. 

Note sur une amputation guérie naturellement chez 
un chevreuil, par M. de Pury. . 

Mémoire sur la police médicale du canton de NaË 
châtel, par M. de Pury. à 10 NE 

Ronbote sur le-mémoire D den par M. Bovet. 


62 
63 
33 
449 
4147 
181 


189 
253 


388 
389 


- 43 


TABLE DES MATIÈRES. 


Périodicité des apr: à Neuchâtel, par M. de 


_ Castella, $ * FE M0 67 
Effets du traitement par 1eb grandes ventouses , par 
M. Junod. ; 68 
Observation sur le même sis, par M. Wops: 69 
Mouvement de l'hôpital Pourtalès ee l'année 
1843, par M. de Castella. 81 
Note sur un cancer de l'æsophage, par M. DuBois. 119 
Danger des saignées répétées dans les fièvres ty- 
phoïdes, par M. de Pury. . 426 
Influence facheuse de la dérares au fou sur Mars 
| nisme, parM."Borel .00 pt et oiaigo Kb. 43 6réb443 
Note sur les doreurs affectés de salivation et de trem- 
blements mercuriels, par M. de Castella. . . 150 
‘Observations sur le même Fa @ , par MM. Droz et 
Dubois. 238 
Observation sur ue communication es M. RATE au 
sujet des métamorphoses des animaux des classes infé- 
rieures , par M. de Castella, 152489 
Note: sur le séjour prolongé d'un os dans l° usaphage 
par M. de Castella. 174 
Hernie étranglée opérée avec succès, sé M. de 
Castella. . 174 
Note sur un cas de spisioe iquésd par M. bd Gas: 

_ tella. 185 
Observation sur es méme sujéti sis M. pot. 135 
Mémoire sur l'huile de foie de morue, par M. de 

d Pur 223 
- Note sur un état sasnodique dus doigts nai M. Du: 

Bois. : 226 

_ Observation sur ei même suites phé M. Drô: 228 
Observation sur le même sujet, par M. Dubois. 229 

” Observation sur le même sujet, par M. de Castella. 155 


TABLE DES MATIÈRES. 


Note sur les empoisonnements occasionnés par la Bel- 


ladone, par M. Dubois. . . . LA RE 
Note sur un accouchement de He jumeaux, par 

M Dubois. es. . boon3t 
Extrait d'un mémoire sur Le spasme des écrivains , 

par Mode Püryebane. 26 115232 
Observation sur le même ses par M. Lib. . 233 
Note sur deux calculs rénaux, par M. Nicolet. . . 233 
Observation sur le même sujet, par M. de Pury. . 234 
Extrait d’un mémoire sur le trismus, par M. de Pury. 234 
Observation sur le même sujet, par M. Droz. . . 235 


Réfutation de l'opinion de M. de Castella sur la 
cause du tremblement mercuriel , par MM. de Rien el 


Ducommun. . . salé «+ … 236 
Note sur l’ LMD mes par M. Ducommun. . 237 
Observation sur un cas d’empoisonnement mercu- 

riel, par M. DuBois. . . 237 


Extrait d’une note de M. Gonalu sur fes Ne dd 
s'assurer de la pureté de l’air dans les ateliers de do- 
rure, par M. de Pury. . . . 239 
Note sur les fièvres Are _ M. dé Rp . 243 
Observations sur le même sujet, par MM. Droz et 


MEMErLE.. =. 21. 246 
Opération de bob exécutée par r M. ue 

RL. | ë . . . 250 
Note sur le dise d bios 7: maisons récemment 

bâties, par M. Jeanneret. . . 247 4 
Considérations hygiéniques sur la PT au . due ï 

le canton de Neuchâtel, par M. Borel. . . .-. . 287 
Note sur la coloration noire des dents, lors de l'in- ; 

toxication mercurielle, par M. de Gastella. . . . 378 
Autopsie d’un homme mort à la suite d’une chute, 

par M'de.Gastella.i! sr. alien +1 1.7 roc MRat8 es 


Lo ann dec UPPER 


TABLE DES MATIÈRES. 


Dangers que présente l'usage du calomel et de quel- 
ques autres remèdes minéraux à la mode, par M. Sacc. 384 
Observations sur le même ne par MM. de Cas- 


tella et Borel. Hate : es 0188 
Un cas de rage observé par M. Borel. aus norte 
Danger que présente l'usage des eaux corrompues, 

par M. Sacc. . . . de: 
Observation sur le même ae 4e M. Borel. ruée. 008 


Rapport sur les observations faites par MM. DuBois 
et de Pury, sur l'asthme thymique et Fe de poi- 


trine, par M. de Castella. . . . . 394 
Note sur l’angine de poitrine et sur une déni 

croupale, par M. de Castella. . . . . 395 
Note sur l’oxide magnésique FAP comme anti- 

dote du sublimé corrosif, par M. de Castella. . . . 423 
Note sur la maladie de Bright, par MM. de Castella 

et Hold. cote go à ce 101423 
Un cas de diabétès ra se M. Hi ets 1420428 
Machine électro-médicale de MM. Breton, présentée 

par M. Basswitz. . . . 106 , 426 


Note sur l’angine de part à M. DuBois. . 427 
Mémoire sur les scrophules et l’aménorrhée mercu- 


rielle, par M. de Pury. . . . . 430 
Ohcnidte sur le même sujet, . “MM. Nicolet, 

Depierre et Droz. . . . 432 
Note sur la fréquence des POTTER ES ché 

nos montagnes, par M. Droz. . . .. . 4354 


Mouvement de l'hôpital de la hu de onde] . 438 
Mémoire sur le crétinisme, par M. de Pury 444, 
AS, 453 et 458 
Observations sur le précédent mémoire , par MM. 
Droz et Schafter. . . . éobreoqrta7 
Note sur un lombric ride #2 r urètre, par M. 
D OMS... Li. re 


TABLE DES MATIÈRES. 


Autopsie d'une malade morte de la fièvre typhoïde, 
par M. de Pury. 

Voiture pour transporter les crbldes : Fat M. Des 
pierre. RO 
Discussion sur LES seb cest extra-utérines, entre 
MM. Hollard, de Castella et Borel. 


ÉCONOMIE RURALE ET DOMESTIQUE. 


Note sur Ja culture du blé multicaule, par M. Ni- 
(13) Le APE CE LUS DEL OEIL ST 

Conan sur r épuisement des sols par la cul- 
ture, par M. Ladame. ; 

Note sur le guano, par MM. kéxesis et Hesär: 

Considérations sur les moyens de procurer de l'eau 
à la Chaux-de-Fonds, par M. Nicolet. : 

Note sur l'introduction des Alpacas en Suisse, par 
M. Sacc. } 40189 

Ün numéro de la Pin) Zita héaimis à la so- 
ciété, par M. de Gélieu. , 


» 


Note sur le $2 ymphytum arabe et sur le bré- | 


mus qrossus envisagés comme plantes eq 
par M. Sacc. 

Noterelative à l’ dÉnsement du se a sa en F rance, 
par M. Theremin. : 

L'arbre à thé, sa culture, et ses dés pr M. Sacc: 


Observation sur la nrécédenns communication, par 
M. Hollard. 


CHIMIE ET PHARMACIE. 


Exposé des expériences de MM. Villefranche et Bar- 
reswil, sur l'acidité du suc gastrique, par M. Ladame. 


- 461 


462 


42? 


33 


196 
455 


240 
364 


393 


412 


417 
419 


420 


195 


TABLE DES MATIÈRES. 


Exposé des expériences de MM. Bouchardat et San. 
dras sur la digestion des aliments féculents et sucrés, 


par M. Ladame. . . . . 495 
Séparation de l'acide bsoiqe a: avec el PR cinna- 

mique , par M. Sacc. . . 364 
Note sur l’acide succinique, par M. Sace. 6 362 et 383 
Note sur l'acide valérianique, par M. Sacc. . . 375 


Mémoires imprimés donnés à la Société, par M. Sacc. 383 
Considérations sur les dangers qu'offre l'usage du 
chlorure mercureux et de quelques autres remèdes mi- 


néraux à la mode, par M. Sacc. . . . 354 
Observations sur le même sujet, par M. de Castella 
PuBorek:s. … . 387 
Note sur le tata etses Re Re M. Le 401 
Note sur l’Allotropie, par M. Ladame. . . . 405 
: Mémoire de M. Will, sur l’essence de moutarde, 
présenté par M. Sace. . . . 405 
Critique du mémoire de M. Gobley sur "l'a 
du jaune d'œuf, par M. Sacc. . . . 06 
Note sur l’oxide magnésique PARU comme anti- 
dote du chlorure mercurique , par M. de Castella. . 423 


MISCELLANÉES, CORRESPONDANCE ET DONS 
OFFERTS A LA SOCIÉTÉ. 


Notices offertes par M. Sacc. . . . 383. 
Circulaire de la Société Helvétique des Seiëncés Na- 


_ tnrelles, relative à l'observation des Mn mi natu- 


rels périodiques. . . AS TES DRE 
Observation sur cette Enbhte , par MM. Coulon 
Dide Castel." "77". 1. HAT 


Envoi du bulletin de la Société dés SL Ni: 
0e RL ne TR R  . à NE CAR 


TABLE DES MATIÈRES. 


Invitation pour le congrès scientifique de Gênes. . 420 
Envoi des mémoires de l’Académie royale de Liège, 
et des procès-verbaux de la Société des Sciences Natu- 


relles de Lausanne. . . . 420 
Envoi des procès-verbaux de la section Per la (Che. 

de-Fonds. CIRE AUIME DIE 1380 ét 67h 
Envoi à la dite section de, girèse mémoires et d'un 

timbre. LR SE 9425 


Demande de ère instruments °nétéorelénéé 
adressée au bureau de contrôle par le comité de la lu- 


nette méridienne. . . . 434 
Lettre du bureau de cube tal la récente 
dénande, ss. 2, chien. be. et ES ÉCRRRS 


Traduction du mémoire S'ub M. Heer, sur l'observa- 
tion des phénomènes ets de la nature, par M. 


de PV tre Luette, Je ONE 
Monnaies étrangères er . M. Baie 11 5100 
Mémoire sur l'essence de dt PEN offert par M. le 
professeur Will. . :. . . $ 405 
Lettre de M. Heer adressée sur le NT set 
CA EN Le EE dteq titent # Dec MN ind en à: : 
Anis 


[. Utilité des produits de la distillation sèche pour 
la classification des substances organiques, par M. Sace 465 
IT. Nouvelle classification des substances organiques 


Par M ace in Le 469 
IL. Sur un voyage ds le Nord . l étude te 
dépôts tourbeux, par M. Léo Lesquereux . . . 471 


IV. Sur la dr des espèces de roches Re 
le bassin erratique du Rhône, par M. Guyot . . . 477 
Note sur le bassin erratique du Rhin, par M. Guyot 507 


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MORTE ES 2 


JA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLE 


0 i AT es 


DE NEUCHATEL. 


oui. Wire A PARU cab ICI 3 VOLUMES. 


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10 Un mémoire sur les tourbières, de M. Léo Lesquereux. 

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© des Saumons, avec 14 planches in-folio, par MM. Agassiz et 
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BULLETIN 


DE LA 


SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


1 


DS NSUDGHAMBELS 


187 à 1852. 


Yome deuxième. 


NEUCHATEL. 
IMPRIMERTE DE HENRI WOLFRATH. 


S, /24/.A 
BULLETIN 


DE LA 


SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DE NAUCHATBL. 


NEUCHATEL., 


IMPRIMERIE DE HENRI WOLFRATH. 


1846-1817. 


Sec k-422 nr Date. 4 L0 pre 


FAR 


PR 


NURE - 134 ANUS 


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BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DS MEVTEAEEM 


Séance du 12 novembre 1846. 


Présidence de M. Coulon. 


M. le président annonce que la Société Senkenber- 
gienne de Francfort, a envoyé la continuation de ses 
Mémoires, ainsi que la Société d'agriculture d'Autriche. 

M. Sacc offre à la Société sa traduction du Traité de 
chimie quantitative de Frésénius ; ainsi que son Mémoire 
sur la Théorie de la fabrication des toiles peintes garan- 
cées. 

M. le président dépose sur le bureau le troisième vo- 
lume de Mémoires de la Société Neuchâteloise, qui a 
paru, et annonce qu'il en a été fait l'envoi aux diverses 
Académies et aux Sociétés savantes qui nous communi- 
quent leurs publications. 

L'ordre du jour est la nomination du bureau pour l'an- 
née qui s'ouvre. 

En conséquence on procède à l'élection du bureau qui 
donne le résultat suivant : 

Président : M. Louis Coulon. 

Vice-président : M. le comte Louis-A. de Pourtalés. 

Secrétaire de la section de physique et chimie: M. Ar- 
* nold Guyot. 


PEER AL À 

Secrétaire de la section d'histoire naturelle: M. F. Sace. 

Trésorier : M. Coulon père. 

M. Ladame, après avoir rappelé la découverte des deux 
planètes, Astrée et Océanus ou LeVerrier, aperçues pour 
la première fois cette année, fait part à la Société de quel- 
ques remarques que lui suggèrent ces faits nouveaux. 

Parmi les quatre Astéroïdes, découverts depuis la fin 
du siècle dernier , ces deux derniers l'ont été en vertu 
de l'hypothèse qui considère les petites planètes comme 
les fragmens d’une seule planète plus grande qui se se- 
rait brisée. Si l'hypothèse est fondée , les lois de l’attrac- 
tion solaire exigent que les orbites de ces diverses petites 
planètes se coupent en un point, qui serait le lieu même 
de l'explosion. A 

Or les quatre Astéroïdes connus précédemment remplis- 
sent à peu prés cette condition, et Astrée elle-mêmerentrant 
également dans cette loi, vient donner une nouvelle force à 
cette supposition. On peut done, avec Olfers et Lagrange, 
regarder comme très-probable en effet que le brisement, 
par une cause inconnue, d’une grande planète située entre 
Mars et Jupiter, a donné naissance à ces cinq petites pla- 
nètes restées si longtemps inaperçues. Quant à Océanus, 
M. Ladame fait remarquer que cette planète, située à 
l'extrême limite connue du système solaire , est soumise 


comme toutes les autres à la loi de Bode, ou des distances’ 


proportionnelles des planètes entre elles. IL pense que 
cette loi, qui recoit par là une nouvelle confirmation, 
est réelle, et qu’on pourrait peut-être en chercher la cause 
jusqu'ici ignorée, dans la concentration de l'atmosphère 
solaire par zônes successives et selon une loi régulière, 
A. GuvorT, secrétaire. 


FR ce dr meme, 


—. {0 -— 


M. Sacc présente à la Société un lubercule de Lathyrus 
tuberosus qu'il voudrait voir employé comme suecédané 
de la pomme de terre, attendu que cette plante possède 
tous les caractères du précieux tubercule qui est devenu 
si rare. La réussite de cette plante, dans nos climats. 
n'est plus un problème; il y a bien des années déjà qu'on 
la cultive dans les jardins de Nancy , et elle se vend sur 
les marchés de cette ville et ailleurs comme légume de 
luxe. 

Le même donne communication de la note suivante 
contenant quelques considérations sur les moyens de re- 
médier à la disette résultant de la maladie des pommes de 
terre. 

La cherté toujours croissante des vivres, dit M. Sacc ; 
doit nous engager à chercher tous les moyens possibles 
de venir au secours de l'humanité souffrante, et quoique 
la famine ne soit pas à craindre, la disette est grande et 
le pauvre que nous devons soulager est dans la misère. 

La récolte des grains a été peu abondante ; celle des 
pommes de terre a presque entièrement manqué; les foins 
en échange ont donné beaucoup; de là, la cherté de la 
viande, en sorte que les ressources du pauvre sont aussi 
limitées de ce côté-ci que de l’autre. Considérée au point 
de vue chimique, l'alimentation de l’homme exige des 
substances très-carbonées et hydrogénées qui servent à 
entretenir par leur combustion la chaleur du corps; puis, 
avec elles des matières azotées qui servent à remplacer 
toutes les parties de l'organisme, qui, obéissant à la loi 
de destruction qui accompagne partout la vie, ne cessent 
de disparaître et de se reformer aussitôt aux dépens de 
ces alimens azotés qui sont la base de la formation de la 
chair. L'alimentation humaine ne peut donc pas être ex— 


= HG 

clusivement composée de matières carbonées ou de ma- 
tières azotées: elles doivent toujours s'associer dans de 
certaines proportions. Les matières carbonées et hydro- 
génées sont les diverses espèces de sucres, de gommes, de 
graines et fécules, ainsi que peut-être aussi la gélatine 
d'après de nouvelles observations dues à M. Boussingault; 
les matières azotées sont : la viande, le fromage, les œufs 
et le lait; de plus le café et le thé, qui agissent probable- 
ment comme elles. Les légumes sont des substances es - 
sentiellement carbonées, qui cependant renferment toutes 
un peu d'azote qui s'y trouve en général sous forme de 
blanc d'œuf, ou albumine. 

Les substances carbonées manquent; les blés ont peu 
rendu; les pommes de terre sont presque totalement dé- 
+ruites ; 1l faut les remplacer: du dehors nous pouvons 
recevoir du riz qui jouit absolument des mêmes proprié- 
tés que les pommes de terre; notre sol nous fournit des . 
légumes avec assez d’abondance. Si le riz est cher on peut 
lui substituer le maïs dont la farine cuite à l’eau, assai- 
sonnée au lait et au beurre fait un aliment très-nourris- 
sant et fort usité chez nos voisins du Jura français, qui se 
trouvent à merveille de ce régime. Pour augmenter la 
masse de carbone et d'hydrogène que renferment le riz et 
le maïs, on devrait y introduire autant de graisse que 
possible; on pourrait se servir dans ce but de beurre, de 
saindoux , de lard, ou même d'huile de grains, au goût 
de laquelle on s’habitue bien vite. Mais les substances 
carbonées seules ne suffisent pas, il faut qu'elles soient 
accompagnées par des matières azotées, et ce n’est que 
sous l'influence d’une juste proportion entre elles qu'une 
nutrition normale peut avoir lieu ; c’est ce qu'en général 
on ne comprend pas. L'usage des pommes de terre , ali- 


— = 
ment carboné par excellence, était sous ce rapport devenu 
abusif; de là, dérangement des fonctions digestives et 
apparition de maladies de la peau et des os, développe- 
ment des scrofules, dont les accidens ne disparaissent que 
sous l'action réparatrice d’un régime fortifiant composé 
d’alimens azotés. L'abus des pommes de terre a donc 
amené avec lui un long cortége de maladies, et il est temps 
de le rappeler, maintenant qu'un grave accident interdit 
l'usage du précieux tubercule dont nous parlons. Les pay- 
sans ne mangeaient plus que des pommes de terre, et si, 
grâces à l'habitude qu'ils ont du café, ils n’y avaient pas 
associé le lait, qui est un aliment azoté, il y a longtemps 
déjà que leur santé se serait ressentie de l'effet de ce dé- 
plorable régime. La table du pauvre üoit être fournie de 
viande: voyons s’il y a moyen de lui fournir bon marché 
ce plat, dont le prix l’effraie au point que souvent des se- 
maines se passent sans qu'il dépose dans sa marmite un 
morceau de cette viande destinée cependant à réparer ses 
forces et à soutenir sa santé. Grâces à l'abondance des 
foins la question est facile à résoudre cette année; car le 
lait, qui est une véritable dissolution de viande compa- 
rable au bouillon le plus riche est à bon marché; les 
œufs ne-sont pas chers non plus, et ils sont cependant 
tout aussi nourrissans que la chair des bœufs ; enfin, le 
fromage, qui est deux fois aussi nutritif que la viande, est 
à la portée de tous. 11 faudrait donc tächer de mettre à la 
disposition des indigens du lait, des œufs, et surtout du 
fromage; précieuse ressource à laquelle on a trop rare- 
ment recours. Disons d’abord qu'il y a certainement une 
grande différence entre les fromages vieux et les jeunes, 
relativement à leur force nutritive, et que les premiers 
favorisent quelquefois même la digestion, en raison de 


LTÉE 

l'acide gras à saveur trés-forte qu'ils contiennent, en 
sorte qu'on fera bien de les préférer, toutes choses égales 
d’ailleurs, aux fromages doux de l’année. Il est bien à 
regretter que les pauvres ne fassent pas usage de la res- 
source qu'ils trouvent dans l'éducation des volailles et des 
lapins surtout, qui leur fournissent à peu de frais une 
nourriture saine et abondante. Au vil prix où est le foin 
cette année , une garenne ne coûlerait que fort peu de 
chose et pourrait nourrir plus d’une famille; j'en dirai tout 
autant dans les années où le grain est abondant, d'un 
poulaillier et d’un colombier, qui ne sont le plus souvent 
regardés , à grand tort, que comme des objets de luxe. 
Pour cette année, il est trop tard; le mal est fait, et on 
ne peut remédier à la pénurie de viande que par d'abon- 
dans approvisionnemens de fromage dont la consomma- 
tion, accompagnée de celle du riz et des bouillies de fro- 
ment et de maïs, ainsi que de celle des légumes verts, 
permettra à toute la population d'attendre la bonne 
saison. 

Nous nous tromperions étrangement, Messieurs, si nous 
croyions trouver la solution du problême de la nutri- 
tion la plus rationelle dans l'union de l'aliment le plus 
carboné avec le plus azoté sous le plus petit volume 
possible. L'estomac de l'homme a besoin, comme celui 
de tous les autres animaux, d’être distendu par une cer- 
taine quantité de nourriture ; il faut donc que les alimens 
qu'on lui donne aient un volume assez grand ; c’est pour 
répondre à cette singulière exigence de la nature qu'on 
fera bien de préférer des mets peu nutritifs, mais d'un 
fort volume, tels que ceux qu'on obtiendra en faisant des 
empois avec de la fécule, ou des gelées avec de la colle, 
pour les associer avec les autres substances alimentaires, 


. 

M 
, 

h 


= OU) 
qui, comme le fromage ou la viande , nourrissent beau— 
coup et n'ont qu'un très-pelit volume. 

Quand nous avons dit que la consommation de la 
pomme de terre était devenue abusive, nous n'avons tou- 
tefois pas voulu nous aveugler sur la gravité du mal; 
nous risquerons de voir l’usage de la pomme de terre se 
restreindre beaucoup, et c'est elle seule cependant, qui 
nous garantissait de la famine. Malgré tout le poids de l'o- 
pinion de quelques hommes distingués , et surtout du sa- 
vant directeur de notre Ecole d'Horticulture, nous ne pen- 
sons point que le précieux tubercule américain soit perdu; 
d’ailleurs, rien ne le prouve : non ! jamais la nature n’a 
mis un terme semblable à sa libéralité. Il en est de la 
pomme de terre comme du seigle avant qu’on eût appris 
à le chauler; alors le charbon ravageait des champs en- 
tiers et tous les grains qui n'étaient pas atteints par ce 
fléau dévastateur , ne pouvaient être employés à faire du 
pain, qu'un seul grain charboneux transformait en un 
énergique poison : on perdait alors des champs de seigle, 
comme nous perdons maintenant des champs de pommes 
de terre. Nous pensons donc qu'il y a possibilité de mettre 
un terme à la maladie des pommes de terre comme à l’er- 
got du seigle, et nous pensons même avec un savant bryo- 
logue que nous venons d’avoir le malheur de perdre, 
M. le docteur Mühlenbeck, qu'elle est due à la même 
cause, c'est-à-dire à une espèce de champignon. Comme 
le tubercule est charnu et aqueux, il n’y a pas moyen de 
songer à le préserver du fléau, parce qu’à peine tombées 
à sa surface les sporules destinées à reproduire le parasite 
s'enfoncent sous un épiderme où l’on ne saurait aller le 
chercher qu’en détruisant avec lui les germes de la plante 
qu'il est destiné à protéger. C’est sur les graines qu'il faut 


és 0 

détruire le parasite, en les faisant baigner dans une solu- 
tion de sulfate cuivrique ou bien de soude, ou de chaux 
caustique, avant de les semer. À ces précautions on devra 
en joindre d’autres, qui sont peut-être tout aussi impor- 
tantes; elles consistent à détruire par le feu toutes les fanes 
etles pommes de terre malades provenant des récoltes pré- 
cédentes, parce qu'une seule d’entre elles, semblable au 
levain qui communique son mouvement à toute une masse 
de pâte, pourrait bien infecter la nouvelle génération 
saine destinée à détruire toutes nos sinistres appréhen- 
sions. Les nouveaux champs de pommes de terre devront 
être éloignés autant que possible des anciens et n'être en- 
graissés qu'avec des fumiers sur lesquels on n'aura jeté ni 
fanes , ni tubercules de pommes de terre attaquées par la 
maladie. Voilà, Messieurs, notre manière d'envisager l’a 
venir de la pomme de terre que nous croyons appelée à 
rendre encore de grands services à l'humanité; aussi ap- 
pliquerons-nous, dès le printemps prochain, notre pro- 
cédé de chaulage des grains à ce tubercule que nous sé- 
merons dans le jardin du laboratoire de chimie, où l’on 
n’a jamais cultivé de pommes de terre, et où nous ne les 
fumerons pas afin de n'avoir négligé aucun moyen de les 
préserver de la contagion. Nous vous avons dit aussi com- 
ment nous pensions qu’on devait aviser aux moyens de 
diminuer les tristes effets de la cherté du pain et du man- 
que de pommes de terre ; c'est à vous, Messieurs, à ap 
précier la portée de ces observations et à leur donner telle 
suite que bon vous semblera. 

F. Sacc, secrétaire. 


nt tie on di LÉ os, - Oh 


=. EM — 


Séance du 26 Novembre 1846. 
Présidence de M. L. Coucox. 


M. Guyot donne lecture de deux lettres de M. Desor, 
qui contiennent plusieurs détails sur les phénomènes er- 
ratiques de la Scandinavie , tels qu'ils résultent des ob— 
servations que ce savant a faites et recueillies sur les lieux 
mêmes pendant un voyage de quinze jours. 

M. Desor considère la Scandinavie tout entière , par— 
ticulièrement la Norwège, comme un immense fond de 
glacier. 

Les phénomènes qui caractérisent en Suisse le terrain 
erratique se retrouvent en Suède , et surtout en Norwège, 
identiques jusques dans les moindres détails. Ces pays 
leur doivent leur configuration , et jusqu'aux formes ca- 
ractéristiques de leur topographie. 

Les Scheren Scandinaves ne sont que les points culmi- 
nans des roches moutonnées dont la base plonge dans les eaux 
de la mer. 

M. Desor a observé dans plusieurs endroits, signalés 
déjà en partie, des dépôts de coquilles glaciaires super- 
posés aux roches moutonnées, polies et striées, et cela 
jusqu'à un niveau de 170-200 pieds au-dessus de la mer 
actuelle; d'où il conclut qu'un mouvement de bascule 
aurait eu lieu postérieurement à la disparition des glaces. 

Ce qui prouve encore ce dernier fait, c'est la nature 
des Oesars, qui sont bien des digues sous-marines, comme 
le veulent Forchammer et d’autres géologues, et non des 
moraines; car les Oesars sont stratifiés, contiennent des co- 
quilles qui actuellement vivent sur les côtes de la Baltique. 


5, MERE 

M: Desor rappelle à ce sujet un fait connu, c'est qu'on 
a trouvé dans les dépôts inférieurs d’un Oesar une bar- 
que et des traces d’une habitation humaine. Actuellement 
encore il se forme le long des côtes, sous les flots de la 
mer, de pareilles digues, nommées Watten par les Scan- 
dinaves. 

Un fait capital signalé par M. Desor d'après Keilhau, 
est l'existence d’une limite supérieure des polis, que ce 
géologue a constatée dans le voisinage de Drontheim , et 
que d’autres observateurs aussi ont signalée sur les mon- 
tagnes de Suède. 

Enfin M. Desor rend compte des observations de Sten- 
strupp sur la superposition des diverses couches de 
tourbes, qui, selon ce savant, contiennent successivement 
de bas en haut des feuilles de bouleau du Nord, des dards 
et des cônes de pins tels qu'on les trouve dans la région 


moyenne de la Scandinavie, puis des feuilles de chênes, 


et enfin de hêtres dans la partie supérieure. Cette succes- 
sion remarquable de ces arbres, dans l’ordre où on les 
rencontre aujourd'hui du Nord au Sud , fait croire à M. 
Stenstrupp que le climat de ces régions s’est amélioré 
graduellement. 

À. GuYoT, secrétaire. 


M. Sacc indique brièvement quels sont les procédés de 
dorage actuellement en usage ; il en fait ressortir les im- 
perfections, et cherche à établir que le dorage chimico- 
physique, récemment proposé par M. Barral, doit être le 
plus avantageux de tous. M. Sacc décrit ce procédé de 
dorage , et présente à la Société une pincette de fer doré 
de cette manière. L'opération n’a pas fort bien réussi, ce 
que M. Sacc n'attribue point au procédé, mais unique- 


M 


CT tn le D ne RS Sd 


“ 


Fe 


10} 2 
ment à ce qu'il n'avait, pour faire cet essai, qu’une fort 
petite quantité de chlorure aurique ; un fait assez curieux, 
c'est qu'à l'inverse de ce qui devait avoir lieu dans ce cas 
ci, le plomb avec lequel le fer était en contact s’est beau- 
coup mieux et plus fortement doré que ce dernier. 


M. Ladame prouve ensuite à l’aide d'un galvanomètre 
très-sensible construit par M. Bonijol, que lorsqu'on 
plonge dans une dissolution d'or deux métaux différents, 
comme l'a fait M. Sacc, l'aiguille du galvanomètre 
marche toujours en sens contraire du métal attaqué, ce 
qui permet de juger facilement du moment où la direc- 
tion du courant change, et où la dorure ne s'effectue, 
par conséquent, plus sur le même métal, mais a lieu sur 
l’autre métal, qui plonge dans la dissolution. Des causes 
extrêmement légères modifient la direction du courant ; 
telles sont, entr'autres, l'agitation et la caléfaction de la 
liqueur. La dorure galvanique est tombée en défaveur , 
parce qu'on ne peut pas juger de la quantité d’or qui 
s'est déposée sur le métal à dorer , et que la couche de ce 
métal qu'appliquent les doreurs est tellement mince qu’elle 
s'enlève avec assez de facilité. M. Ladame n’en persiste 
pas moins à croire que la dorure galvanique a un avenir 
réel, et que les perfectionnements dont elle est susceptible 
feront disparaitre les inconvéniens qui ont été signalés. 

F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 10 Décembre 1846. 


El 
à Présidence de M. L. CouLox. 


M. Théremin présente à la Société l'ouvrage de Borbs- 
tædt : Allgemeine geographische und statistische Verhält- 


— 14 — | 
nisse, etc. Rapports généraux de géograplue et de statis- 
tique représentés graphiquement, Berlin, 1846. IL ajoute 
quelques détails sur cet ouvrage, et fait ressortir les 


avantages réels que présente cette nouvelle méthode d’ex- 
position. 


M. Guyot commence l'exposé du résultat de ses voyages 
dans les Alpes Pennines pendant l'été dernier, et donne 
surtout une description de la grande mer de glace d'O- 
temma, au fond du val de Bagnes, qu'il a le premier 
visitée (*). 


M. le président Coulon fait voir à la Société une serpe 
et une hache romaines, ainsi que diverses pièces de même 
origine, trouvées aux Hauts-Geneveys. 


M. Theremin apprend à la Société que M. le baron 
‘de Hackewitz a fondé à Berlin, sous la protection spé- 
ciale du Roi, un atelier de galvanoplastique, dans le- 
quel il prépare, à l’aide de cette nouvelle application de 
l'électricité , des statues tout entières, ainsi que des enve- 
loppes de cuivre autour des canons de fonte de fer , afin 
de les empêcher d’éclater. Le même industriel vend des 
théières et autres ustensiles de ménage parfaitement bien 
argentés. 

A. GuxoT, secrétaire. 

M. Schauss, pharmacien, présente à la Société divers 

échantillons de coton-poudre. Il rappelle que ce composé 


fut préparé, tôt après la découverte de M. Schænbein, 


(‘) Voir plas bas séance du 7 Janvier 4847. 


cast HMS 

par M. Otto , de Braunschweig , qui le faisait avec de l'a- 
cide nitrique fumant. Ce fulmi-coton est excellent, mais 
beaucoup trop cher ; c'est dans le but de préparer plus 
facilement, et à moins de frais, cet intéressant composé 
organique , que M. Schauss a exécuté les essais suivans : 
en plongeant le coton bien cardé, pendant quinze mi- 
nutes, dans un mélange fait avec une partie d'acide ni- 
trique du commerce, pour deux d'acide sulfurique, il a 
obtenu un produit parfait sous tous les rapports ; un peu 
cher il est vrai, car pendant sa transformation, le coton 
absorbe assez d'acide nitrique, pour que son poids aug- 
mente d'un tiers. Le fulmi-coton préparé avec trois par- 
ties d'acide sulfurique, pour une d'acide nitrique, est 
meilleur marché que le précédent , parce qu'on peut uti- 
liser ce bain à plusieurs reprises ; mais la poudre qu’on 
obtient alors laisse un résidu de charbon d’autant plus 
abondant, que la liqueur est plus près d'être épuisée. 
Quand on prépare le coton avec un mélange fait de par— 
ties égales d'acides sulfurique et nitrique, on obtient un 
produit feutré, auquel les autres mélanges ne donnent 
jamais naissance. Le coton-poudre qu'a préparé M. Schauss 
détonne par la percussion seule, et encore mieux, lors 
qu'il a été mélangé avec de la poudre. Il ne se décompose 
pas, même par l’ébullition très-prolongée dans l'eau. 
On peut préparer ainsi du fulmi-coton avec des étoupes 
et de la sciure de bois. Obtenu par ce procédé, il brûle 
bien, mais en laissant un résidu de charbon. Pour cette 
préparation, il faut se servir de sciure de bois de sapin; 
celle de noyer ne vaut rien, parce qu'elle s'oxide et se 
détruit de suite, tandis qu'il n’y a jamais oxidation avec 
aucune des autres substances employées. 

M. le docteur Bovet observe que les éléments du coton- 


OT 
poudre sont si intimement liés entre eux, qu'on peut le 
laver avec de l’'ammoniaque sans qu'il se détruise. 

F. Sacc, secrétiare. 


Séance du 24 Décembre 1846. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le président fait lecture d'une lettre qu'il a reçue 
du Roi, dans laquelle le Roi remercie la Société de l’en- 
voi du volume qu’elle vient d'imprimer, et qui a été 
porté à Berlin par M. Guyot. 

M. le secrétaire donne lecture d’une lettre de M. Favre, 
sur un halo solaire à double cercle, qu'il a observé à la 
Chaux-de-Fonds, le 19 mai 1846 (!). 


M. Ladame fait voir à la Société un instrument d’op- 
tique qui a pour but de déterminer, par une seule obser- 
vation, la portée de la vue, et d'indiquer de suite le nu- 
méro de verres concaves ou convexes que réclame l’œil 
de l’observateur. M. Ladame indique le principe sur le- 
quel il est fondé, et en décrit la construction. Cet ‘instru- 
ment, inventé et construit à Vienne, a été vendu au ca- 
binet de physique par les opticiens Bloch de Strasbourg. 
-— Plusieurs discussions particulières s'engagent sur di- 
vers sujets. A. Guvor, secrétaire. 


M. Sacc présente à la Société le numéro des An- 
nales des Sciences Naturelles qui contient un mémoire 
de M. Harting sur la maladie des pommes de terre ; 
il l'analyse, et conclut en disant qu'il persiste dans sa 
manière de voir ; qu'il continue à regarder la maladie des 
pommes de terre comme contagieuse, comme un chancere 


(*) Voir plus bas, Bulletin des séances de la Chaux-de-Fonds. 


= {pp — 
analogue à celui des ormes, ou une affection semblable 
à l’ergot du seigle, et qu’il croît qu'on n'y remédiera qu’en 
brûlant tous les produits venant des pommes de terre 
malades, et en ne multipliant plus, pendant quelques an- 
nées cette solanée, qu'à l'aide de ses graines préalable- 
ment chaulées. 

M. Coulon objecte aux conclusions de M. Sacc:qu’une 
personne de sa connaissance ayant planté des pommes de 
terre en pot, dans de la bonne terre de jardin, elle les 
trouva malgré cela, toutes gâtées. M. Sacc répond que 
cela peut venir, ou de ce que la terre dont on s’est servi 

contenait des débris de pommes de terre malades, ou de 
ce qu'on a planté dans ces pots des tubercules déjà peut- 
être gangrenés, au lieu d'y semer des graines et surtout 
des graines chaulées. 

M. Berthoud-Coulon rappelle que la maladie des 
pommes de terre, après avoir sévi pendant quatre ans 
dans l'Amérique du Nord, en a disparu, et M. Coulon 
remarque que la maladie des pommes de terre ne s’est 
manifestée nulle part dans les pays chauds, Il ajoute que 
si les pommes de terre atlaquées se couvrent de crypto 
games , c'est qu'elles sont déjà alors réellement malades, 
puisqu'on ne voit ces parasites que sur des plantes faibles, 
et jamais sur des végétaux bien portans. 


= M. Ladame fait une communication sur le dorage gal- 
vanique , dans laquelle il signale plusieurs des causes qui 
peuvent s'opposer à la réussite complète de ce genre de 
dorage, ainsi que les moyens de remédier aux inconvé- 


miens qu'elle a présentés jusqu'ici. 
| il. 


EE A 

Les procédés de dorure, dit M. Ladame , dans l'ordre 
de leur ancienneté sont : 

1° La dorure au mercure par voie sèche. 

2° La dorure par immersion ou dorure chimique, qui, 
il y a peu d'années, a recu de M. Elkington une amélio- 
ration importante par l'emploi des dissolutions alcalines. 

3° La dorure par voie galvanique, due à M. De la Rive, 
et perfectionnée par M. Ruolz. 

4° La dorure par application mécanique de la poudre 
d'or, ou de l'or en feuille. Ce procédé parait être celui 
de M. Gerbel, indiqué dans nos bulletins page 254. 

On connaît les graves inconvéniens de la dorure au 
mercure pour la santé des ouvriers. Le procédé par im— 
mersion, donne une dorure trop mince, qui dans le plus 
grand nombre des cas est insuffisante ; enfin la dorure 
par application est encore mal connue et paraît exiger 
une main-d'œuvre considérable qui en augmente beau-— 
coup le prix. Reste la dorure galvanique que M. Ladame 
regarde comme pleine d'avenir. ; 

Ce procédé consiste soit dans l'emploi d’une pile à plu- 
sieurs élémens , soit dans l'emploi d’un seul couple sans 
diaphragme. Ce second mode appelé aussi dorure électro- 
.chimique, a été étudié d'une manière particulière par 
M. Frankenstein, et en dernier lieu par M. Barral, qui 
pour dorer le fer et l'argent, a substitué le plomb au zinc 
qu'employait M. Frankenstein. 

Ce procédé électro-chimique est aussi employé dans 
nos montagnes, en particulier par M. Daumont. Il exige 
que les liqueurs soient portées à l’ébullition, ou du moins 
qu’elles soient chaudes. On ne dore pas plus rapidement 
qu'on ne le fait par l’action de plusieurs couples, et on 


. 0 = 

ne peut dorer simultanément et avec facilité un grand 
nombre de mouvemens de montre, ou, en général, de pe- 
tites pièces. D'autre part, si la solidité de la dorure élec- 
tro-chimique a paru plus considérable que celle qui est 
obtenue au moyen de la pile, cela tient sans doute à l'im- 
perfection des piles employées dans cette dernière mé- 
thode, et au peu d'or que l’on applique. 

La bonne qualité d’ane dorure exige que la couche 
d'or soit trés-adhérente à la pièce et que l'or présente lui- 
même une grande cohésion de ses parties. Ces conditions 
indiquent que les pièces doivent être bien décapées, et 
que l'or doit se déposer avec lenteur dans un état de di- 
vision extrême, pour ainsi dire atomique, et avec la plus 
grande égalité possible. Or ces conditions sont remplies 
par un courant trés-faible, constant dans son intensité et des 
dissolutions d'or d'une composition et d'une concentration 
convenable. 

Quand un courant électrique traverse un électrolyte, 
c'est-à-dire un liquide susceptible d'être décomposé par 
le courant , les acides et les corps négatifs se portent sur 
le corps par lequel le courant débouche dans le liquide, 
tandis que les bases et les corps positifs se portent sur le 
corps par lequel le courant sort du liquide. Cette action 
du courant sépare le liquide en deux portions opposées 
de propriétés, qui, par leur réaction l’une sur l’autre, 
donnent lieu à un courant en sens contraire du premier. 
C'est là le phénomène qu'on a appelé polarisation des élec- 
trodes. 

La marche d'un courant au travers d’un liquide donne 
donc naissance à un contre-courant, qui affaiblit le cou: 
rant principal et parvient quelquefois à l'annuler. 


== 6 = 

C'est à la polarisation des élémens qui constituent les 
anciennes piles qu'est due la rapide diminution de leur 
puissance, qui finit même par arriver à zéro. 

Il n’y a que peu d'années qu'on a réussi à éliminer cette 
polarisation des élémens de la pile et qu'on a par là ob- 
tenu des piles à courant constant : ce sont les piles cloi- 
sonnées de Becquerel, Daniell, Bunsen, Grove, etc. 

Les piles que les doreurs de nos montagnes emploient 
sont des piles de Daniel, montées au zine, plongeant dans 
l'eau salée et au cuivre plongeant dans la dissolution de 
sulfate cuivrique; le diaphragme est un vase en terre cuite 
non verni. Lorsque la pile est-montée depuis un certain 
temps, la dissolution d’eau salée se concentre par l'action 
qu’elle exerce sur le zinc qu'elle dissout, et d'autre part 
la dissolution de sulfate cuivrique s’appauvrit de son cui- 
vre qui se dépose en masse, ayant souvent l'apparence 
cristalline ; à cette époque l’action des deux liquides sur 
les métaux qu'ils exercent l'un sur l'autre au travers du 
diaphragme, donne lieu à un courant en sens contraire 
du courant primitif, et les doreurs sont surpris de voir 
que l'or ne s'applique pas comme de coutume, et que 
même des objets dorés perdent leur dorure. Quelques- 
uns attribuent ces effets à des actions météorologiques; 
le vent, un ciel couvert ou serein, un temps chaud ou 
froid sont regardés comme des causes influentes ; tandis 
que l’origine de toutes ces variations est, sans contredit, 
dans l’état même de la pile. L'état constant de la pile, 
est un point sur lequel les doreurs doivent veiller avec la 
plus grande attention, et il paraît que jusqu'ici, ils n'ont 
pas tous senti l’importance de cette circonstance ; de là, 
une des principales causes de l'inégalité de la dorure gal- 
vanique et des critiques dont elle est l’objet. 


“ Se Le ms à D Cp dé v 


Te AE 


sie DRE - le 

L'énergie du courant ne dépend pas seulement de la 
pile qui produit l'électricité, mais elle dépend encore des 
résistances que le courant est obligé de vaincre en de- 
hors de la pile. Dans la dorure galvanique, le bain d'or 
dans lequel sont plongés les objets à dorer, présente une 
résistance qui est variable par le fait même des progrès 
de la dorure et de l’appauvrissement du bain. Il est très- 
important d’affaiblir autant que possible Finfluence de 
cette circonstance , afin de conserver au courant une : 
grande égalité dans son énergie. On parvient à ce résul- 
tat en tenant compte du principe suivant tiré des lois de 


. la pile : 


Un courant s'affaibhit d'autant moins, en traversant un 
obstacle, que le courant a déjà triomphé de résistances plus 


mombreuses et plus énergiques. 


Dès lors si nous voulons avoir un courant qui ne soit 
pas influencé d’une manière notable dans son énergie par 
l’action d’une résistance variable. Nous devons employer 
un courant qui a vaincu déjà de nombreux et grands 
obstacles. 

Les différens couples d’une pile hydro-électrique, et sur- 
tout le liquide qui les baigne, offrent une grande résis- 
tance au mouvement de l'électricité; nous employerons 
donc des piles de cette espèce et nous les prendrons à 
élémens nombreux. Mais comme, dans ce cas, la pile de- 
vient trop forte, ensorte que l'or se dépose en poudre 
noire et n’adhère pas, nous devrons affaiblir le courant, 
en lui opposant des obstacles qui, en vertu de l’origine 
hydro-électrique du courant, n’agiront pas sensiblement 
sur la faculté qu’il possède de se transmettre. On parviente 
à ce résultat en faisant passer le courant par un fil de fer 


QT 
très-fin, dont on augmente la longueur jusqu'au moment 
où le courant a atteint la force nécessaire. 

La disposition suivante a été adoptée dans quelques 
expériences faites pendant le courant de l'été dernier. 

Sur une planche de sapin de dix-huit pouces de lon- 
gueur et d’un pied de largeur, près des bords opposés, 
on a planté deux rangées parallèles de cloux rapprochés, 
puis on a passé le fil de fer en zig-zag en le contournant 
autour de chaque clou. Le courant entrait par le premier 
clou de la planche, passait au travers du fil de fer, et on 
posait le conducteur sur un autre clou à une distance du 
premier d'autant plus grande que l'on voulait faire par— 
courir au courant une plus grande longueur de fil. On 
- a pu dorer de cette manière, sous l'action d’une marche 
parfaitement réguliére, une douzaine de mouvements de 
montre avec une pile de six couples, dont chaque élément 
zinc amalgamé était formé par un cylindre de ce métal 
pris en feuille, ayant environ un et demi pouce de dia- 
mètre sur trois de hauteur. 

Le fil de fer est un corps très-convenable pour régler 
le courant, parce que le fer ne conduit pas l'électricité 
aussi bien que les autres métaux, et qu'on peut l'avoir 
dans le commerce en fil très-fin. La faible conductibilité 
et la ténuité des fils concourent toutes deux à affaiblir le 
courant ; en sorte que quelques pieds de fil de fer, sont 
très-suffisants pour modérer le courant d’une pile de plu- 
sieurs couples. 

F. Sacc, secrétaire. 


= fo = 


Séance du T janvier 1847. 
Présidence de M. L. CouLox. 


M. de Pury, ingénieur, rend compte d'un mémoire 
de M. Villarceaux sur la théorie des voûtes. 


M. Sacc communique à la Société un résultat curieux 
qu'il vient d'obtenir, celui de la transformation du bois 
en gomme au moyen du traitement par l'acide nitrique. 
Il présente divers échantillons à l’appui de cette commu- 
nication sur laquelle il se propose de revenir plus tard. 


M. Guyot achève l'exposé de quelques résultats d'un 
voyage qu'il a fait l’été dernier dans la partie la plus 
élevée et la moins connue des Alpes pennines, et dont 
le but principal était la recherche des gîtes primitifs des 
roches erratiques du bassin du Rhône. 

Il fait remarquer d’abord que la partie des Alpes com- 
prise entre le Mont-Blanc et le Mont-Rose, ou mieux 
entre le col du Saint-Bernard et celui du Simplon, cons- 
ütue le massif le plus élevé, le plus continu, le plus 
gigantesque des Hautes-Alpes. La largeur énorme de sa 
base, l'élévation moyenne de ses cels et de ses crêtes, la 
hauteur et le nombre de ses pics et de ses aiguilles dé- 
passent tout ce que peuvent offrir dans ce genre les massifs 
célèbres de l'Oberland bernois, de l'Orteler, des Oetzthaler- 
Ferner et du Mont-Blanc lui-même. 

Le groupe du Mont-Rose en particulier , formé des 
trois chaînes du Mont-Rose, du Saasgrat, du Weisshorn, 
et au centre duquel est creusée la vallée de Zermatt, ras- 


LS SNS 

semble dans un espace resserré plus de vingt à trente pics, 
qui mesurent tous de douze à quatorze mille pieds. Le 
faîte même de cette partie des Alpes ne présente que de 
vastes champs de neige d'où découlent de nombreux 
glaciers; 1l n’est que difficilement abordable et les val- 
lées sauvages qui y mènent offrent si peu de confort au 
voyageur, que ces régions placées au centre même de 
l'Europe, sont restées jusqu'ici presque inconnues. Les 
meilleures cartes de Suisse que nous en possédions, quoique 
rectifiées dans les dernières années sur quelques points, 
n’en offrent encore qu’une image grossière et souvent 
tout-à-fait fautive. 

Après avoir remonté la vallée de Salvan et constaté 
de nouveau dans cette vallée classique la présence des 
roches moutonnées, sillonnées et striées, qui témoignent 
du passage dans ces lieux des anciens glaciers, M. Guyot, 
remontant le col de Balme, alla recueillir encore une fois 
les diverses variétés de granite qui descendent des nom- 
breuses aiguilles du Mont-Blanc par les glaciers du Tour, 
d'Argentière et des Bois. 

L'identité complète de ces variétés avec celles qui com- 
posent la majorité des blocs répandus sur les flancs du 
Jura, acheva de le convaincre de la vérité de ce qu'il avait 
avancé précédemment, c'est que c’est de ce revers occi- 
dental de la chaîne du Mont-Blanc que proviennent la 
plupart de nos blocs du Jura, tandis que les variétés 
moins talqueuses et à grain plus égal proviennent surtout 
du val Ferret ou du revers oriental. En repassant par 
le Val-Orsine et la Tête-noire, il visita les gîtes des fa- 
meux poudingues qui sont l’une des roches caractéristi- 
ques du bassin du Rhône, et signale au sommet du col ce 


TC 


En Me. = 


la Forclaz de nombreux blocs de protogine, qui témoi- 


gnent de la hauteur à laquelle s’éleva jadis le glacier de 
Trient. 

C’est par la vallée de Bagnes que M. Guyot pénétra dans 
le cœur des Alpes pennines. Il décrit les divers bassins 
étagés dont se compose la vallée et les glaciers nom— 
breux qui couronnent le fond sauvage de cette contrée, 
Il arrive enfin au chalet de Champriond, au pied du grand 
glacier de Chermontane. Ce glacier n’est que la partie 
inférieure d'une vaste mer de glace qui tourne subitement 
au N.-E., et monte par une pente légère, presque insen- 
sible, jusqu’au faîte de la chaîne; c’est la mer de glace du 
grand Otemma, qui tire son nom de la cime occidentale 
qui la domine. Cette vaste nappe de glace que nourris- 
sent huit glaciers latéraux qui descendent de la chaîne 


orientale qui le borde et quatre glaciers affluents qui sont 


suspendus aux flancs du grand Otemma, porte à sa sur- 
face un système régulier de moraines dont chacune se 
laisse suivre facilement jusqu’à son origine. Ces moraines 
apportent aux pieds du voyageur les roches de chacune 
des sommités qui sont devant ses yeux. La mer de glace 
d'Otemma s'étend sur le revers N. où elle se lie, au dire 
des chasseurs de chamois de la contrée, aux grands gla- 
ciers qui descendent au fond des vallées septentrionales. 
Une rangée de hautes cimes qui appartiennent au versant 
Net qui commencent à quelque distance du faite, la sé- 
pare en deux branches dont l’une va rejoindre, dit-on, 
du côté de l'E. le grand glacier d’Arolla, et l’autre plus 
au N. se confond avec les masses de glace qui descen- 
dent des flancs septentrionaux du Som de Giètroz, pour 
former la masse du grand glacier de Lénaret au fond de 


— 6. 
la vallée d'Hermence. Du côté du S., presque dans la 
même direction, un glacier semblable à une vallée nei- 
geuse, descend du S. au N. du col de Crestasetz pour 
mêler ses glaces à celles de Chermontane. Le glacier et 
le col de Fenêtre, qui est séparé du précédent par la 
masse imposante du mont Gelé, est à-peu-près parallèle, 
mais plus à l’ouest. Il offre un passage facile, quoique 
couvert de glaces, en Piémont par la profonde vallée d’Ol- 
lomont et la partie inférieure du val Pelline, tandis que 
par le col de Crestasetz, que traversa M. Guyot, on descend 
à travers les ruines des montagnes voisines, sans aucune 
trace de sentier, un peu plus à l’'E., sur les chalets élevés 
et le village de Bionnaz, au milieu du val Pelline. Après 
avoir remonté cette profonde et sauvage vallée jusqu'au der- 
nier chalet, celui de Prarayé, il explora le fond de la val- 
lée qui est occupé par le grand glacier de la Lisette. Ce 


glacier tourne subitement au N., traverse, entre de hautes 
sommités, le faîte de la chaîne et se confond ici dans les 


” plateaux supérieurs, avec le grand glacier de Ferpécle. 
Revenant sur ses pas. M. Guyot traversa le col glacé du 
Mont-Collon, du sommet duquel des plateaux de neige 
s'étendent sans interruption jusqu’au glacier supérieur de 
Ferpècle. Trois heures d’une descente rapide sur le gla- 
cier d'Arolla le conduisirent jusqu’à son extrémité infé- 
rieure. Ce glacier suit une ligne sinueuse et tourne à 
l'O. autour de la base du Mont-Collon, recoit ici un 
affluent du grand glacier d'Otemma et reprend sa direc-— 
tion vers le N. avant d'arriver aux premiers chalets. 
M. Guyot remarque combien sont fautives et insuffisantes 
pour guider le voyageur les meilleures cartes que nous 
possédions de ces hautes sommités. La seule carte d'Oster- 


7 


A 


=, YU = 

wald, qui n’a point encore paru, mais dont M. Guyot avait 
emporté une épreuve, en donne un tracé moins imparfait. 

Non loin du col de Collon, mais à quelque distance du 
faîte de la chaîne, commence, avec la dent des Bouquetins, 
un chaînon qui descend vers le N.et sépare en deux vallées 
le fond du val d'Erin. A l'O. est la vallée d’Arolla avecle gla- 
cier du même nom, à l'E. l’origine même du val d'Erin, avec 
le double glacier de Ferpècle et du Mont-Miné. Après avoir 
descendu la première de ces vallées, M. Guyot remonta 
la seconde jusqu’au plateau supérieur d'où descend en 
cascades immenses le grand glacier de Ferpècle. Ces pla- 
teaux forment ici de vastes champs de neige de dix à 
onze mille pieds de hauteur, qui s’étenderit entre les hautes 
sommités de la Dent-Blanche au N., la dent d'Erin, au 
Midi, et un grand nombre de cîmes vers l'O. qui sur- 
gissent çà et là du sein des plateaux, le long du faîte de 
la chaîne ou des chaînons septentrionaux. Ces plateaux 
se terminent vers l'E. par une paroi abrupte de rochers 
presque verticaux, au pied desquels s’allonge le glacier 
de Zmutt dans une profondeur vertigineuse. Cette arête 
de rochers, qui unit la masse de la Dent-Blanche à la 
Dent-d'Erin, présente du côté du $. une sorte d’entaille 
ou de pente moins raide, au pied de la Dent-d'Erin, par 
laquelle s’écoulent les glaces vers la profonde vallée de 
Zmutt : c'est là le col d'Erin et l'origine du glacier de 
Zmutt. Un peu au N. du col s'élève une éminence arrondie 
que Forbes décrit à tort sous le nom de Stockhorn, qui 
est une sommité située plus au $. et un peu plus élevée 
encore. M. Guyot a gravi également la première et lui a 
a donné le nom de Tête-Blanche d'Erin. De ce point cen- 


. tral, élevé de onze mille pieds au-dessus de la mer, se dé- 


= AR: 

roule aux yeux le panoroma le plus admirable. Du côté 
de l'E. les regards s'étendent sur les chaînes gigantesques 
du Cervin, du Mont-Rose et du Saasgrat, au N. et au 
N. E. sur celles de la Dent-Blanche et du Weisshorn. 
A l'O. la vue atteint, au delà des vastes plateaux de neige 
qui sont à vos pieds, jusqu’au Mont-Collon et au Combin; 
ensorte que d'un coup d'œil on embrasse toute cette 
vaste chaîne des Alpes pennines. 

On peut voir par ce qui précède qu'un des traits ca- 
ractéristiques de cette haute chaîne sont les plateaux éten- 
dus qui en couronnent le faîte. Rarement les plus hautes 
sommités se touchent de manière à former une série inin- 


terrompue ; çà et là dés lacunes considérables unissent 
les deux versants et forment ces cols à pentes insensibles, 


qui, comme la mer de glace d'Otemma , ressemblent plu- 
tôt à de larges vallées à fond plat qu’à des cols qui traver- 
sent le faîte de l’une des chaînes des Alpes les plus élevées- 
Sur le versant N. en particulier, les chaînons septentrio- 
naux prennent leur origine au sein même des plateaux 
et non point sur le faite même, ensorte qu'ils semblent 
manquer d'un point d'attache. 

A ces détails M. Guyot en ajoute d’autres sur le fond 
des vallées de Torrent et de Zinal, qui, réunies, forment 
la profonde vallée des Anniviers. Il indique plusieurs rec- 
tifications à faire dans la topographie et la nomenclature 
des pies que Frübel a donnée de ces régions. Il décrit 
l'aspect de la vallée supérieure de Tourtemagne et des 
glaciers du Weisshorn qui en occupent le fond, puis pas- 
sant le col pénible et élevé de Joung , il remonte la vallée 
de Saint-Nicolas et de Zermatt dont il examine de nou- 
veau les glaciers et les roches, parcourt celle de Saas, 


Fer. | ittostlgiet 


== 90! — 

où il constate le gite précis des euphotides et entre par le 
Monte-Moro, dans la vallée piémontaise de Macugnaga. 
De là, traversant le Turlo , il parcourt successivement 
toutes les vallées méridionales du Mont-Rose qu'il exa- 
mine surtout au point de vue du terrain erratique et des 
roches qu'elles fournissent. 

La vallée d'Aoste surtout lui paraît à cet égard du plus 
haut intérêt. 

Du haut du col de Joux ou d'Amaï, par lequel M. Guyot 
aborda cette large et belle vallée, on embrasse d’un seul 
coup-d'œil la plus grande partie de sonétendue. A celte vue, 


-on conçoit à l'avance le rôle qu'à dû jouer à l’époque des 


grandes glaces, ce vaste réservoir compris entre les hauts 
massifs des Alpes pennines , la chaîne élevée et multiple 


_ des montagnes de Cogne, ayant en tête la chaîne du Mont- 


Blanc, sur lequel la vue s'arrête en face, à l'horizon. La 
confirmation de ce pressentiment ne se fit point attendre. 
Déjà en descendant du col vers les bains de Saint-Vincent, 
on voit des amas considérables de terrain erratique, de 
blocs et de galets de serpentine et de chlorite, mêlés au 
limon glaciaire. Ces masses suspendues sur les flancs dé- 
chirés et abruptes de la montagne à plus de 1500 pieds 
au-dessus de la vallée, annoncent la présence, à une autre 
époque, et l'épaisseur des anciens glaciers. Plus bas dans 
la région des vignes, les blocs deviennent plus fréquens et 
plus volumineux. Depuis Saint-Vincent jusqu’à Ivrée, il 
n'est guère de rocher, parmi ceux qui bordent la route, et 
jusqu’à une hauteur considérable, qui ne soit moutonné, 


_cannelé, strié de la facon la plus caractéristique. Toutes 


les collines sont taillées en coupole. Déjà un peu au-des- 
sous de Saint-Vincent, on aperçoit au milieu de la vallée 


CRE pe 

un rocher isolé qui semble sortir de dessous le glacier. Plus 
loin, les hauteurs que couronne le vieux fort de Mont- 
Jovet , la colline sur laquelle est assise l'imprenable fort 
de Bard, et tous les rochers voisins, sont également mou- 
tonnés et sillonés de la manière la plus admirable. Au 
débouché de la vallée, dans les environs d'Ivrée, toutes 
les collines, y compris celles de diorite des environs de 
cette ville, portent au plus haut degré ces caractères. On 
peut dire que partout où le roc est à nu, il montre 
les traces corrosives de l'agent erratique. Nulle part ce- 
pendant, elles ne sont aussi marquées qu'aux étrangle- 
ments de la vallée, spécialement au-dessous de Saint-Vin- 
cent, au Mont-Jovet, au fort de Bard et l’on peut observer, 
ici, comme ailleurs dans les mêmes circonstances, la ten- 
dance des sillons à remonter dans le sens contraire à la 
pente de la vallée. 

Au-delà d'Ivrée, les phénomènes erratiques se présen- 
tent sous une forme aussi grandiose que nouvelle. ATE. 
de cette ville l’horison est borné par une colline allongée, 
escarpée, composée tout entière de galets, de limon et de 
blocs erratiques; c’est la colline de la Serra qui prend 
naissance sur les flancs du Mont Saint-Angélo, aux deux 
tiers de sa hauteur, et descend en une ligne inclinée et 
réguliére vers la plaine-en tournant sa face abrupte à 
l'O. ; véritable moraine analogue à la grande barre erra- 
tique qui s'étend des rochers de Mémise jusqu'à Thonon, 
sur la rive gauche du lac de Genève, mais mieux Ccarac— 
térisée encore. M. Studer déjà l'avait signalée comme 
telle à l'attention des géologues. Vers le S. dans l'axe 
d'ouverture de la vallée, sur la route d'Ivrée à Chivasso, 
on rencontre plusieurs amas de débris erratiques sous 


BÉLARE ONEL 

forme de bandes cintrées, vraies moraines terminales du 
grand glacier d'Aoste. La premiére se montre à Stram- 
bino, la seconde à Candia, la troisième à Calusso; au delà 
de ce dernier village commence la plaine nivelée et le 
diluvium ancien de la Lombardie. Ici comme dans la 
Brianza , au débouché du lac de Côme, et aux abords 
du lac Majeur et du lac d'Orta, on distingue nettement 
les caractères et la superposition des deux terrains. 

Ces faits si parlants ne sont pas les seuls de ce genre 
observés dans cette vallée; M. le chanoine Carrel a cons- 
taté l'existence, sur une grande échelle, de tous ces mêmes 
phénomènes dans les environs de la Cité d'Aoste : 
M. Guyot a signalé il y a plusieurs années déjà, la pré- 
sence de fort belles roches polies au pied même du Mont- 
Blanc, au-dessus de Courmayeur, où elles ont été vues 
également par MM. Agassiz et Forbes. Cet ensemble 
de faits, pense M. Guyot, autorise à considérer la vailée 
d'Aoste, au point de vue du développement des phéno- 
mènes erraliques, comme l'analogue de la vallée du Rhône. 
Elle est pour le versant méridional de la chaîne Pennine, 
et le revers italien du Mont-Blanc, ce qu'est le Valais 
pour le versant septentrional de ces deux chaînes ; elle est 
même supérieure à ce dernier par le nombre et l'évidence 
des roches polies et moutonnées, et, à cet égard, elle ne 


le cède pas même à la classique vallée de l’Aar. 


Quant au but essentiel que se proposait M. Guyot dans 
cette exploration, celui de reconnaître le gîte précis de 
celles des espèces de roches du bassin erratique du Rhône 
dont l’origine n’était pas encore suffisamment éclaircie, 
il a été complétement atteint. 

Il s'agissait surtout de recueillir en place le gneiss chlo- 


— Mo 
riteux et l'arkésine répandus en si grande abondance dans 
la plaine. Personne n’y avait encore réussi. M. Guyot avait 
seulement indiqué comme limites extrêmes de leur exten- 
sion le fond de la vallée de Bagnes et la vallée de Viège, 
où ces roches avaient été recueillies à l’état erratique par 
lui-même et précédemment par M. Studer et Forbés(t). 
Il se convainquit bientôt que ces roches et leurs variétés, 
accompagnées de diverses roches amphiboliques, cons- 
üituent une grande partie du massif central et des plus 
hautes sommités de la chaîne pennine. Au fond de la val- 
lée de Bagnes, après avoir passé la région des chlorites, 
on trouve immédiatement le gneiss chloriteux et l'arké- 
sine en grande abondance au glacier de Brena, au pied 
occidental de Champriond, où ces roches forment pres- 
que à elles seules les belles moraines frontales qu'a lais- 
sées ce glacier. Le glacier de Chermontane et la mer de 
glace du grand Otemma ne montrent guère dans leurs 
nombreuses moraines que des variétés très-diverses de ces 
mêmes roches, généralement de couleur mate, parmi les- 
quelles on en distingue plusieurs qui sont riches en épi- 
dote. La montagne du grand Otemma elle-même est en 
grande partie formée de gneiss chloriteux. Celte roche perd 
de plus en plus sa forme schisteuse à mesure que l'on 
avance vers le faîte de la chaîne, près duquel elle prend la 
forme d'un granite à larges cristaux de feldspath vague- 
ment limités et d’une couleur légèrement rosée. La chaîne 
opposée, qui comprend le massif de la Trumma de Boue, et 
qui se prolonge par le col de Crestasetz jusqu'en Valpelli- 
ne, est encore composée de gneiss chloriteux dans lequel la 


(*) Voir plus haut. Bulletin, vol. 4, p. 479. 


proportion des parties constituantes se montré très-va- 
riable suivant les localités. Dans cette dernière vallée cette 
roche semble même passer à une vraie syénite par des 
transitions presque insensibles. Les gneiss chloriteux, 
mais non pas l'arkésine, se trouvent encore fréquemment 
dans le Val-Pelline où, en remontant la vallée, on les 
voit alterner avec les syénites et d’autres roches moins 
caractérisées. Vers le fond de cette vallée jusqu’au glacier 
de la Lisette, succèdent des roches amphiboliques et des 
calcaires talqueux ou cipolins, qui présentent ici des for- 
mes pétrographiques du plus grand intérêt pour la théorie 
du mélamorphisme. Au col de Collon, et le long du 
glacier d’Arolla, on voit reparaître les gneiss chloriteux 
et les arkésines, mais sous des formes moins normales. 
La proportion des roches amphiboliques, des syénites et 
d'espèces que l’on peut rattacher plus directement au gra- 
nile vert, augmente notablement. On peut dire qu'elles 
sont dominantes jusqu’à l'affluent du grand Otemma, qui 
amène des échantillons dont les formes se rapprochent de 
plus en plus des types des deux roches en question. Mais 
la véritable arkésine granitoïde et le gneiss chloriteux à 
particules scintillantes, tels qu'on les trouve habituelle 
ment dans la plaine, reparaissent dans les massifs qui 
entourent le glacier de Ferpècle. Les glaciers affluens-qui 
descendent de la Dent-Blanche en particulier, ne char- 


. rient presque que des arkésines, qui se distinguent en 


partie de celles d'Otemma et de Chermontane , par des 
formes plus cristallines et une teinte générale plus jau- 
nâtre. Le Mont-Miné livre aussi des gneiss chloriteux, 
mais ce sont plutôt des syénites et diverses roches riches 
en sinphihôlé, qui y dominent. 


Qt 


… M 2 

Plus à l'Est l'arkésine et les gneiss chloriteux dispa- 
raissent et semblent manquer à la chaîne du Weisshorn. 
Du moins M. Guyot n'en a que peu ou point rencontré 
dans les vallées d'Anniviers et de Tourtemagne qui des- 
cendent de cette haute chaine, et les blocs nombreux de 
ces deux espèces qu'il a signalés sur le glacier de Zmuit 
et dans les hauteurs qui en dominent la rive gauche, 
proviennent évidemment de la Dent-Blanche. 

On le voit done, les chlorites, les gneiss chloriteux et 
les arkésines appartiennent, avec les granites verts, les 
syénites et d'autres roches amphiboliques, à la partie la 
plus centrale, la plus élevée, en un mot à l'axe de cette 
haute chaîne des Alpes Pennines située entre le fond du 
val de Bagnes et le col d'Erin. C'est dans ces cimes pres- 
que inabordables et au sein des glaciers qui en découlent, , 
qu'il fallait aller chercher les rocs d'où ont été détachées 
les masses erratiques à la fois les plus nombreuses, les 
plus colossales et les plus répandues à la surface du bas- 
sin du Rhône. Comment s'étonner que leur gîte primitif 
ait été si longtemps ignoré? | 

A celte haute chaîne correspond ainsi le groupe d'es- 
pèces erraliques auquel M. Guyot a donné, à bon droit, 
le nom de roches Pennines. Ces roches en sont sorlies 
par deux routés principales seulement: la vallée d'Erin 
et celle de Bagnes. La vallée de Viège n’en a fourni. qu'un 
pelit nombre, car pour ces roches cette issue est pour 
ainsi dire accidentelle, tandis qu'elle est le canal prinei- 
pal, le canal unique, par lequel les roches du Mont-Rose 
se sont déversées dans la vallée du Rhône. 

Le groupe des roches du Mont-Rose ne contient que des 
espèces dont le lieu d'origine était déjà approximativement 


= OT — 
constaté. Le gîte principal des serpentines est la région 
comprise entre le grand Cervin et le Lyskamm. On peut 
considérer comme dépendante de cette partie de l’arête 
centrale, la chaîne du Riffel également composée de ser- 
pentines, qui se prolongent plus à l'E jusques dans le 
Saasgrat. Le glacier de Schwarzwald, au pied du Monte- 
Moro, près du lac Matmark, amène du fond de la vallée 
supérieure de Saas des blocs nombreux de serpentine, 
parmi lesquels se font remarquer deux masses énormes 
laissées, depuis peu d'années, au bord du sentier par le 
glacier, et dont la plus considérable passe pour le plus 
gros des blocs erratiques connus. Quelques autres gîtes 
situés plus en aval jusques près de Viège, ont moins d'im- 


porlance. 


Quant aux euphotides, M. Guyot ajoute à ce qu'il a 
dit précédemment sur leur gisement qu'il s’est convaincu 
que leur point de départ sont les rochers qui dominent la 
partie supérieure du glacier d'Alalein, particulièrement sur 
la rive gauche et un peu au-dessous des plus hautes ci- 
mes. Les éclogites, moins spécialement localisées, passent 
sur le versant occidental et descendent par les moraines 
du glacier de Finelen, dans lesquelles M. Guyot en a 
recueilli plusieurs variétés. 

La plupart des débris de serpentines sont donc des- 
cendus par la vallée de Saint-Nicolas, quelques-uns seu- 
lement par celle de Saas. C'est l'inverse pour les éclogites. 

. Les euphotides proviennent exclusivement de la vallée 
de Saas. 

$ … M. Guyot termine sa communication par quelques con- 

… sidérations pétrographiques sur ces deux groupes des ro- 

. ches Pennines et des roches du Mont-Rose. Une fréquente 


comparaison de ces diverses espèces et de leurs nombreu- 
ses variétés, ainsi que l'inspection de leurs gisemens res- 
pectifs, lui font penser que leur association en deux groupes 
distincts n’est pas seulement un fait géographique, comme 
le pourrait faire croire les noms qu'il a donnés à chacun 
d'eux; mais qu’elle est justifiée par leur nature même. 
IL est porté à admettre que ces groupes forment réellement 
deux séries métamorphiques, et annonce qu'il possède dans 
sa collection de nombreux échantillons qui constatent la 
transition presque insensible des espèces de chacun des 
deux groupes les unes aux autres. Il dépose en outre 
sur le bureau plusieurs échantillons pris en place de cha- 
cune de ces espèces représentées par leurs types les plus 
répandus, et met en regard des échantillons recueillis à l’état 
erratique dans les diverses parties du bassin du Rhône, 
dont l'identité compiète avec ies premiers est sensible aux 
yeux les moins exercès. 


Séance du 21 janvier 1847. 


Présidence de M. L. CouLox. 


M. le secrétaire donne lecture de quelques extraits 
d’une lettre de M. Agassiz relatifs à ses travaux scientifi- 
ques en Amérique. 


Il est donné connaissance de la note suivante de M. Desor, 


Sur les rapports qui existent entre le phènomène erratique 
du Nord et les soulèvements de la Scandinaue, 


Il est un côté du phénomène erratique que l'on n’a pas 


abordé jusqu'à présent et dont l'étude me paraît de nature 


al de ln 4 nn - to RS NS 


VD = 


à jeter un grand jour sur la question qui nous occupe , 
c'est l'analyse des rapports qui existent entre le phéno- 
mène erratique du Nord et les changements de niveau du 
sol de la Scandinavie. Ces rapports sont d'autant plus im- 
portants, qu'ils rendent admirablement compte de cer— 
taines particularités qui sont propres au phénomène er- 
ratique du Nord et dont on n’a pas d'exemple en Suisse. 

Voici d’abord quelles sont ces particularités : 1° la pré- 
sence de surfaces polies et striées plongeant sous le niveau 
actuel des eaux, 2° la présence de coquilles marines, fixées 
sur les roches polies à une hauteur bien supérieure au ni- 
veau actuel de la mer, 3° la présence de coquilles marines 
dans l'intérieur du diluvium jusqu’à une hauteur de 800 
pieds, 4° enfin les œsars, ou chaussées de Géants, qui ren- 
ferment des coquilles de la Baltique. 

Parmi ces phénomènes qui sont autant de preuves de 
l'instabilité du sol de la Scandinavie , il en est qui témoi- 
gnent d'un relèvement du sol et d’autres qui attestent au 
contraire un abaissement. Ainsi on ne saurait imaginer 
une preuve moins équivoque d'un relèvement du ‘sol que 
la présence, à de grandes hauteurs et à une distance con- 
sidérable des côtes, de coquilles appartenant à des espèces 
vivant aujourd hui dans les mêmes parages, et dont l'état 
parfait de conservation ne permet pas de douter qu'elles 
n'aient vécu sur place. Aussi bien, si elles avaient été 
transportées par un courant ou quelque autre agent vio- 


: . . SÉRe ‘ : 
+ lent, elles seraient, sinon brisées du moins roulées en 


grande partie. Mais à supposer qu'on voulüt néanmoins 
nièr leur autochthonéité, on ne pourrait en aucune manière 
récuser le témoignage des serpules de Christiania et des 
balanes d'Uddevalla, dont les tests sont encore aujourd’hui 
adhérents aux rochers. 


— 38 — à 

D'un autre côté, le fait que les cannelures et les stries 
se prolongent sous les eaux de la mer, atteste d’une ma- 
nière non moins évidente qu'à une certaine époque le sol 
a dù être plus élevé qu'il ne l'est maintenant. En effet, 
c’est un point sur lequel les partisans des différentes 
théories sont à-peu-près d'accord, que le phénomène er- 
ratique a dù s'effectuer sur un sol émergé. Les glaciers en 
particulier ne peuvent avancer qu'à la condition de repo- 
ser sur le sol, et nous savons par les observations de 
MM. Martins (!) que même les glaciers du Spitzherg ne se 
prolongent pas sous la mer; car, comme la mer est en été 
à une température supérieure à zéro , elle les fond à leur 
base par son contact, si bien qu’à la marée basse le gla- 
cier est séparé de la surface de l'eau par un espace qui 
correspond à la hauteur des marées (?). 

Or si, comme je crois l'avoir suffisamment prouvé, les 
polis du Nord ont été occasionnés par d'immenses glaciers 
qui ont transporté au loin les blocs erratiques de la Scan- 
dinavie et fourni les matériaux du diluvium et des œsars, 
il en résulte que toutes les contrées qui contiennent des 
traces de sulcature doivent avoir été exondées , lorsque 
les glaciers ont façonné leurs reliefs et y ont gravé les 
stries et les sillons que nous y voyons. Si les stries s’arrê- 


(*) Bibliothèque Universelle de Genève, juillet 4840. 


(?) Pour que les glaciers puissent avancer sur le fond de la mer, il fau- 
drait que la température de l’eau fût, pendant toute l’année, inférieure à 
zéro. Or, un climat pareil rendrait impossible,la formation de glaciers. Ce 
qu’il faut aux glaciers, ce n’est pas une température excessive, mais afant 
tout un climat humide. Or, de pareilles condifions sont incompatibles avec 
une température de la mer qui se maintiendrait constamment au-dessous 
de zéro. 


ENT TT 7 


— 39 — 

taient exactement au bord de la mer, on pourrait suppo- 
ser que la hauteur relative de la mer et de la côte était 
alors ce qu'elle est aujourd'hui, Mais nous avons vu qu’en 
une foule de points de la côte Scandinave , les stries s’en- 
foncent sous Les eaux, d'où il faut conclure, conformément 
au principe que nous avons posé , que le sol de la Scan- 
dinavie était à cette époque plus haut que maintenant, 
de toute la quantité dont les stries plongent dans la mer. 

Ces résultats quoique opposés ne sont pas contradic- 
toires, comme on pourrait le croire au premier abord, et 
c'est ici que l'observation des coquilles vient compléter 
l'étude des phénomènes erratiques proprement dits, en 


- nous montrant l'ordre chronologique de ces événements. 


En effet, si les balanes d'Uddevalla et les serpules de 
Christiania qui se trouvent, les unes à 200 pieds, les 
autres à 170 pieds au-dessus de la mer, démontrent d'une 
manière indubitable que la côte s'est abaissée en ces 
points, le fait que ces animaux sont adhérents à des ro- 
chers striés, prouve d'une manière non moins certaine que 
ces roches avaient déjà été à sec avant la venue de ces 
animaux , d'où je tire cette double conclusion : 1° que le 
büurinage des rochers est antérieur à l'époque des balanes 
ét des serpules, 2° que pour recevoir ces animaux, les 
côtes d'Uddevalla et de Christiania ont dû s’abaisser d’une 
quantité équivalant pour le moins à la hauteur actuelle 
de ces coquilles. | 
+ Mais les balanes et les serpules ne sont pas les seuls 
témoins de cet affaissement ; il existe des coquilles super- 
posées aux roches polies et striées à une bien plus grande 
hauteur dans l'intérieur du diluvium, .etcomme les espèces 
sont en grande partie indigènes, et probablement contem- 


ah CU 
poraines des serpules et des balanes, on est en droit d’en 
conclure que l'abaissement a été plus considérable, et qu’il 
a égalé au moins la hauteur des gîtes les plus élevés de 
coquilles diluviennes ( 800 pieds ). 

Cet abaissement a par conséquent eu lieu entre l’épo- 
que du burinage et celle de la stratification du diluvium. 
A cette époque, les glaciers ayant quitté la plaine pour 
se retirer dans l'intérieur des montagnes, les eaux de la 
mer.envahirent toutes les terres basses de la Scandinavie, 
formant autour du massif des monts scandinaves un vaste 
océan, dont on pourra quelque jour fixer les limites , au 
moins approximatives, quand on connaîtra la circons- 
criplion des coquilles diluviennes. En attendant, l’ana— 
logie des phénomènes erratiques de la Finlande avec ceux 
de la Scandinavie, permet de supposer qu'à cette époque 
le golfe de Bothnie n’était pas séparé de la mer du Nord. 

Nous n'avons aucun moyen de déterminer la durée du 


temps qui s’est écoulé entre le retrait des glaciers et cet 


abaissement du sol, qui a amené l'invasion de la mer. 
Cependant il est un fait qui semble prouver que cette pé- 
riode n’a pas été bien longue, c'est la belle conservation 
des polis sous le diluvium. Nulle part les cannelures et 
les stries ne sont plus distinctes que là où l’on vient de 
dégager le rocher de sa couverture diluvienne. D'ordi- 
naire elles forment un contraste frappant avec les roches 
moutonnées dont la surface est à déconvert et qui ont subi 
de tout temps l'influence des agents atmosphériques (‘). 

(4) I est permis de croire que, si, par un nouveai cataclysme; les sur- 
faces moutonnées qui sont aujourd’hui à nu se trouvaient recouvertes de 
gravier , les géologues des âges futurs auraient beaucoup plus de peine à 
déchiffrer les causes qui ont produit ces formes que nous n’en avons aujour- 


hui, aidés que nous sommes par l’état de conservation souvent admirable, 
des polis, des cannelures et des plus fines stries. 


2 l'E LE 

Or, comme nous n'avons nulle raison de supposer que 
l'action des agents atmosphériques ait été autrefois moins 
énergique qu'elle ne l’est de nos jours, je suis porté à 
croire que si les surfaces polies sont si bien conservées 
sous le diluvium , c’est parce qu’elles n’ont pas été long- 
temps exposées à leur action. Il est même probable que 
l'envahissement de la mer a été l'une des causes qui ont 
activé, sinon déterminé la destruction des grands glaciers. 
On: explique en même temps par là le caractère plus bo- 
réal de la faune du diluvium, attendu qu'une masse de 
glace aussi considérable n'a pu se fondre sans refroidir 
considérablement les eaux qui la baignaient. Plus tard 
ce foyer de froid ayant disparu, la température s’est ré- 
chauffée et la faune des mers a pris peu-à-peu le carac- 
tère plus tempéré qui la distingue aujourd'hui. 

C'est à cette époque de l’envahissement de la Scandi- 
navie par les eaux qu'il faut faire remonter la disposition 
en couches irrégulières du limon , du sable, du gravier et 
de tous ces matériaux du diluvium , que le grand glacier 
avait laissés en place, comme autant de témoins de son 
ancienne extension. L'action de la vague en venant re- 
manier ce sol meuble y a entassé et enterré les débris des 
corps marins morts sur la plage, lesquels se sont ainsi 
trouvés mêlés aux blocs et aux galets rayés. Si telle est 
réellement l'origine de ces dépôts , il ne faut pas s'étonner 


que les galets rayés y soient si peu nombreux. La vague 


en les, frottant les uns contre les autres les a plus ou 
moins lusés, et si les blocs d’un certain volume ont géné- 
ralement mieux conservé leur burinage que les galets, 
cest parce qu'étant plus lourds, ils étaient moins exposés 
à être remaniés et roulés. Il est tout naturel dès-lors 


ns : UE VE 
qu’en Suisse, où l'action des eaux a été moins sensible, 
et en tout cas moins prolongée , les cailloux striés soient 
plus nombreux. Aussi n’y rencontre-t-on qu’accidentel- 
lement des couches bien distinctes dans les terrains vrai- 
ment glaciaires. Celles qu'on connaît se trouvent ordi- 
pairement dans le voisinage des torrents (). 

Après cette époque d'immersion dont il est impossible 
pour le moment de connaître la durée, même approxima- 
tive, le sol scandinave a de nouveau été émergé. Les 
plages voisines du massif central , les plaines de la Suède 
et de la Finlande sont sorties successivement du sein des 
eaux, ramenant avec elles à la surface, ce même limon 

et ce même gravier diluvien qu'avaient déposé les gla- 
ciers et qui n'avait subi d'autre changement dans l'inter- 
valle, que de s'être irrégulièrement stratifié et mélangé de 
coquilles. Les dépressions du sol sont seules restées cou- 
vertes d’eau et ont formé les lacs de Ja Suède et de la Fin- 
lande ainsi que le golfe de Bothnie. Ce dernier isolé de 
l'Océan par l'exhaussement des terres intermédiaires , a 
perdu peu-à-peu de: sa salure, ce qui explique le ca- 
ractère de sa faune qui est plutôt une faune saumâtre 
qu’une faune marine. De leur côté les lacs intérieurs se 
sont transformés complètement en lacs d’eau douce, ce 
qui n'empêche pas qu'on ne retrouve çà et là des traces 
dedeur ancienne condition. Il paraîtrait que certains pois- 
sons en particulier ont résisté à ces changements de l'eau, 
et d'après les recherches des zoologistes scandinaves , la 
truite des lacs suédois (Salmo Trutta L.) ne serait pot 
une espèce propre , mais seulement une variété du sau-— 


(t) Voy. Rod. Blanchet. Terrain erratique alluvien du bassin du Léman. 


ot ob CS Sd S c té 


dde dsl 


2. gta 


Ne |: Me 

mon commun (Salmo Salar L.). Or, comme le saumon 
des côtes ne remonte pas dans ces lacs, on est tout natu- 
rellement conduit à en conclure que ce poisson a résisté 
aux modifications survenues dans le milieu qu'il habite. 

L'émersion des terres n'a pas dû se faire d'un seul coup, 
et les belles observations de MM. Keiïlhau et Bravais sar 
les anciennes lignes de niveau de la mer scandinave, nous 
apprennent qu'il n'a pas non plus été uniforme partout. 
Enfin s'il est vrai que les œsars, qu'on poursuit jusqu'à 
une grande distance dans l'intérieur des terres, et dont 
nous avons exposé plus haut le mode de formation, indi- 
quent autant de rivages successifs , il faut que le golfe de 
Bothnie ait été dans l’origine beaucoup plus large qu'il ne 
l'est maintenant. Une large zône de rivage , aujourd'hui 
cultivée, était alors sous les eaux et ne s’est exondée que 
successivement. 

Ce retrait successif des eaux s’est opéré en grande par- 
tie. pendant l'époque actuelle , puisqu'on a trouvé dans 
l'intérieur des œsars des traces irrécusables de l'homme ('). 
IL est probable que c’est pendant cette période d'émersion 
lente.que vivait en Scandinavie ce peuple primitif, dont 
les caractères ostéologiques indiquent une race tout-à-fait 
diflérente de La race Scandinave et dont on trouve les 
squelettes au milieu des tourbières entassés pêle-mêle 
avec des débris d'animaux dont les uns ont complète- 
ment disparu de la surface de la terre, tel que le Bos urus 
et dont les autres ne se trouvent plus dans ces mêmes con- 
trées , tel que le Renne (°). 


(!) Voir Lyell. Sur les preuves d’une élévation graduelle du sol dans 
certaines parties de la Suède. 


(2) Jé renvoie, pour ces détails, aux beaux travaux de MM. Nilson et 


Eschricht. 


PR. 


Conclusion. 


Il résulte des considérations qui précèdent que si les 
soulèvements de la Scandinavie sont d'une grande impor- 
tance pour l'étude du phénomène erratique, celui-ci nous 
fournit à son tour de précieux renseignements sur l’épo- 
que et la valeur géologique de ces soulévements. J'ai 
montré que ces soulèvements ne sont pas limités à l'épo- 
que historique, mais qu'ils remontent au-delà du dilu- 
vium. D'un autre côté, il résulte de ces mêmes études que 
les soulèvements n’ont pas été continus, qu'il y a eu au 
contraire des intermittences et des bascules, puisque le 
sol s’est successivement abaissé et exhaussé. Nous avons 
distingué sous ce rapport trois moments principaux : 
1° une époque où le sol était plus élevé que maintenant, 
l'époque des glaces; 2° un affaissement général du sol 
entraînant à sa suite l’envahissement des plaines de la 
Scandinavie par la mer, et 3° le soulèvement de ces mêmes 
plaines qui se continue encore sous nos yeux, l'époque des 
œsars. 

Chacune de ces périodes a dù être d’une certaine du- 
rée. On conçoit, en effet, que pour qu'un agent se mou- 
vant aussi lentement qu'un glacier, ait pu transporter à 
la distance de plusieurs centaines de lieues , des blocs et 
tout un terrain arraché aux montagnes de la Norwège, 
il ait fallu uu temps fort long dont le minimum serait de 
plusieurs milliers d'années, si l'on prenait pour base le 
mouvement des glaciers les plus accélérés de notre épo- 
que, 

La seconde période a été au moins aussi longue, si l’on 
considère le temps qu'il faut pour qu’une faune loute en- 


| 


tt, TE 
tière puisse vivre, se propager et laisser des dépouilles 
nombreuses sur un sol autrefois exondé. 

Enfin la troisième période, comprend l’époque histo— 
rique depuis la prise en possession de ce sol par les po- 
pulations de race étrangère dont nous trouvons des débris 
au fond des tourbières du Nord. 

D'où il résulte que l’époque glaciaire n’est point un 
simple accident dans l’histoire de notre globe, mais qu'elle 
comprend une longue période d'autant plus importante 
pour les géologues qu'elle fait le passage des époques an- 
tédiluviennes aux temps historiques. 

A l’occasion de cette dernière communication, il s'enga- 
ge une discussion à laquelle prennent part MM. Hollard, 


DuBois de Montpéreux et Guyot. Ces deux derniers ajou- 


tent quelques renseignements sur l'existence de longues 
traînées , ou digues de blocs entassés dans les plaines du 
Brandebourg, de la Lithuanie et de la Courlande, qui 


semblent difficiles à expliquer autrement que par l'inter- 


vention des glaces, ou de moraines déposées par des gla- 
ciers flottans. M. DuBois signale le fait que plus on ap- 
proche de la Baltique, plus les phénomènes erratiques 
deviennent nombreux et caractérisés. Dans les environs 
de Riga, par exemple, ce ne sont plus des blocs épars 
seulement, mais des collines de plusieurs lieues d'étendue 
composées de terrains de transport, de graviers et de blocs 
érratiques, en forme de remparts qui ici, comme ailleurs, 


sont nommés chaussées des Géants. 


M. Sacc expose les procédés de fabrication de la porce- 
laine en usage en France et à Berlin, et présente des 
échantillons des différentes phases de cette fabrication. Ces 
échantillons proviennent de la manufacture royale de 
Berlin. A. Guvor, secrétatre. 


100 — 


Séance du % Février 1847. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. le Président annonce que la Société de Zurich sem- 
ble reprendre un nouvel élan. Elle va publier le bulletin 
de ses séances, à l'exemple des Sociétés de Vaud, Neuchäà- 
tel, Berne et Bâle. La Société de Zurich propose d'échan- 
ger cent exemplaires de leurs bulletins contre un pareil 
nombre des nôtres. à 

Cette proposition est acceptée avec empressement par 
la Société. 


M. Hollard présente un microscope d'Oberhäuser qui 
redresse les objets au moyen d'un double objectif, et qui 
donne des grossissements divers au moyen d'une simple 
vis de rappel. 

M. Ladame expose la théorie de cet instrument. 


M. Sacc communique de la part de M. Théremin la 
note suivante tirée des bulletins de la Société de Géogra- 
phie de Berlin, sur les pluies torrentielles du 18 Décem- 
bre dans le midi et le centre de la France. 

» Si l’on compare les relations sur les inondations de 
la France, ilen résulte que l'intempérie qui occasionna 
cette crue d’eau a été l'œuvre du vent des déserts de l'A- 
frique, d'un Samum. Ce vent sec et chaud du Sud, pas- 
sant par dessus la Méditerranée, pénétra en France le, 16 
Décembre 1847. Son souffle ardent et tout africain y 
rencontra des couches atmosphériques abondamment 
chargées de vapeurs d’eau, comme c'est l'ordinaire en 
automne dans ces régions. De là le terrible orage, qui, 
. dans la nuit du 18, ravagea tout le midi de la France. 


| 
: 
L 
v 
L 
: 


— NT — 

Le thermomètre monta de 7°, le baromètre descendit à 
tempête, et une chaleur étouffante règna jusqu'après mi- 
nuit. Alors, tout-à-coup, l'orage se manifesta par une 
pluie diluvienne, qui descendit véritablement en torrens, 
tant à Grenoble qu'à Valence. La pluie y était si forte, 
si dense, qu'en peu d'heures les rues furent transformées 
en torrents, que l’eau pénétra dans les maisons et les em- 
porta. Plus haut, vers le Nord, nommément dans la vallée 
de la Loire, il n'y eut point d'orage, mais seulement une 
pluie tellement abondante, que le matin du 18 déjà tous 
les ruisseaux étaient devenus des rivières torrentielles et 
qu'il n’y avait pour les habitants d'autre moyen de salut 
que la fuite la plus prompte. Les contrées des Alpes situées 
plus à l'Est éprouvérent le même phénomène: l’inondation 
du val d'Urseren dans la haute Suisse, près du St-Gothard, 
nous en donne la preuve. Elle fut simultanée avec celle 
de France. Ce vent africain si ardent, ce sirocco pénétra 
même plus loin ; il arriva jusqu’au nord de l'Allemagne, 
on le sentit à Leipzig Breslau , à Berlin, si bien qu’il en 
fut fait mention dans les journaux. On n’en eut ici que 
le côté agréable, ce fut une soirée d'été délicieuse, d'un 
air chaud et par un ciel serein. Mais plus au Nord, vers 
les côtes de la Baltique, ce souffle tiède fut la cause d’une 
forte tempête qui occasionna de grands dégâts. Il y a 
deux ans, qu'un beau jour au milieu de l'été, l'influence 
du désert de l'Afrique sur l'état atmosphérique de l'Eu- 
rope, s'est manifestée dela même manière et de la façon la 
plus évidente; et il est surtout intéressant de remarquer 
la promptitude avec laquelle cette influence s'est propagée, 
car il n'a pas fallu vingt-quatre heures pour qu'elle se fit 
sentir dans toute l'Europe. 


« 


— 8 — : 

» La prétendue pluie de sang qui fut observée alors, 
dans le département de la Drôme, n'est pas un fait moins 
intéressant, l'analyse prouva que sa couleur provenait de 
parcelles d'une argile rougeâtre qui y était mêlée. Comme 
il se trouve dans la contrée même des couches d’unerar- 
gile rougeàtre, on crut dans la localité qu'une trombe 
avait attiré de l'eau qui s'en trouvait chargée , et que la 
pluie n’avait fait que précipiter-de nouveau ces parcelles 
vers la terre. Cette explication paraît toutefois inadmis- 
sible et l'on doit se persuader, au contraire, que ces par- 
celles terreuses sont d'origine- africaine. Le Samum les 
portait avee lui et au moment de l'orage elles furent pré- 
cipitées sur la terre. 

» Si un heureux hazard pouvait procurer à M. le pro- 
fesseur Ehrenberg, à Berlin, un seul échantillon de ces 
taches sanguines , il y découvrirait sans doute des cara- 
paces d'infusoires du monde primitif; car il nous a prouvé 
la présence de ces débris organiques dans la poussière qui 
tomba sans pluie dans l'Atlantique, sur le pont des na- 
vires, et dont il a prouvé l'origine africaine. » 


À l’occasion de la pluie de sang dont il est fait mention 
dans celte communication, phénomène que l’auteur semble 
attribuer au sable du Sahara tenu en suspension dans ce 
vent africain etprécipité avec les eaux pluviales, M. Coulon 
père rappelle un fait signalé par Russegger, c'est que par- 
fois les pluies d'orage qui tombent sur les bords du désert 
entraînent une telle quantité de ces matières poudreuses 
suspendues dans l'atmosphère, que ce sont de vraies pluies 
de boue. 

M. F. Favarger cite à l'appui de ce transport par les 
vents de matières poadreuses, des faits dont il a été témoin 


=) AN = 

à Buenos-Ayres. Les vents des Pampas desséchés pendant 
l'été, amènent quelquefois vers la mer à Buenos-Ayres, 
de tels nuages de poussière que l'air en est obseurci et 
que la nuit s'établit au milieu même de la journée. Ces 
nuages atteignent Buenos-Ayres et passent au dessus pour 
aller s’abattre plus loin en mer. Ils entraînent souvent 
des masses énormes d'insectes qui tombent en véritable 
pluie, et qui du jour au lendemain disparaissent sans laisser 
de traces. 


M. Guyot donne quelques détails sur le puits artésien 
foré à Montdorf en Luxembourg, qui semble le plus pro- 
fond qui ait été creusé jusqu’à présent. Il s’abaisse de 
671,2 mètres au dessous de la surface, et le thermomètre 
plongé à cette profondeur accuse une température de 34° 
centigrades. Ce qui donne une progression d'environ 
29,6 mètres par 1° centigrade. Cette progression un peu 
plus forte que la moyenne, pourrait bien être dûe, selon 
M. Guyot, au voisinage des terrains volcaniques du pla- 
teau du Bas-Rhin. 


M. le prof. Sacc présente à la Société, un fort bel 
échantillon de sélénium pur, et fondu, qu'il doit à l’o- 
bligeance de M. le prof. Mitscherlich. Ce culot de sélé- 
._ nium provient des mines de Silésie. 

Le Même dit ensuite, que lorsqu'on part de la formule 

« de l'acide oxalique doublée, il est facile de se rendre 

. compte de la formation de deux des acides organiques 

les plus répandus dans les plantes : les acides malique 

et citrique, en admettant que l’oxigène de l'acide oxa- 

lique disparaît, équivalent après équivalent, étant chaque 
11. A 


5000 
fois remplacé par une quantité correspondante d'hydro- 
gène, ainsi que l’expliquent les formules suivantes : 
2 C2 03 ou C: 06; soit, deux équivalents d'acide oxa- 
lique — 02 + H2— C1 H2 04; soit, un équivalent d’a- 
cide malique, ou de son isomère, l'acide citrique. M. Sacc 
admet avec M. Liebig, que dans certains cas, l'acide 
carbonique n’est pas totalement réduit par les plantes ; 
qu'il ne perd d’abord que le quart de son oxigène, pas- 
sant ainsi à l’état d'acide oxalique capable de se méta- 
morphoser ensuite en acide malique, ainsi qu'on vient 
de le voir. Les acides organiques végétaux sont encore, 
malgré toute la haute importance de leur étude, si mal 
connus , que chaque travail qui s’en occupe, présente 
un intérêt tout particulier; à bien plus forte raison quand 
ce travail est fait avec autant d’habileté et de science que 
celui que vient de publier M. Plantamour de Genève, à 
Foccasion de l’action qu'exerce le chlore sur l'acide ei- 
trique. Ce jeune savant a fait agir ce métalloïde sur une 
solution de citrate sodique et d'acide citrique. Dans le 
premier cas, il a obtenu du tricitrate sodique insoluble 
dans l’eau, du chlorofome, et une huile lourde, ainsi 
qu'un acide volatil. Dans le second cas, il a obtenu les 
mêmes produits; moins le sel sodique; plus, un acide 
excessivement volatil, et si facilement décomposable, qu’il 
lui a été impossible de l’examiner. Reprenant l'analyse 
de ces produits, M. Sacc cherche à prouver que chloro- 
fome C2 H, Cl: est du chlorhydrate bicarbonique CI H, 
Cl: C2 formé par la substitution du chlore à l’oxigène 
qui existe dans l’acide formique. L’acide organique obtenu 
en même temps que l'huile lourde, ayant pour formule 
C+ H2 03, qui est aussi celle de l’acide succinique, il est 


SN: de 
un nouvel et frappant exemple de cette isomérie, de cette 
force mystérieuse, que la nature emploie pour produire 
des composés aussi différents que possible les uns des 
autres, et formés cependant des mêmes parties consti- 
tuantes prises dans les mêmes proportions. Le nouvel 
acide en question n'étant pas de l'acide succinique, on 
devait chercher à expliquer sa constitution; c'est ce qu’a 
fait M. Plantamour , en lui assignant la formule C2 03, 
C2 H2 qui en fait un oxalate bibasique de carbure hy- 
drique ou hydrogène bicarboné; reste à prouver, que 
cette constitution est bien celle du nouvel acide. Quant à 
l'huile lourde qui se forme en même temps que l'acide 
précédent , auquel on donne le nom d'Elayloxalique, et 
qui attaque très-fortement les organes de la respiration 
et de la vue, elle a pour formule brute Cio H Cls 03, 
que M. Plantamour dédouble de cette manière : 

C 2Cl2 + C2 03 acide bichloroxalique, 

Cs Cl: chloride oxalique, 

C2 Cl; H chlorofome, 
en se basant sur la décomposition que subit cette huile, 
quand on la traite par la solution alcoolique de potasse. 
M. Sacc propose d'appeler l'acide bichloroxalique : oxa- 
late bichlorocarbonique, et le chloride oxalique : chloro- 
carbonate carbonique Cl: C, CI C. M. Plantamour croit 
. que cette huile lourde est formée par le mélange de deux 
- huiles différentes, qu'il n’est pas parvenu à isoler; car, 
l'huile lourde qu'il a obtenue en faisant agir le chlore sur 
… l'acide citrique avait pour formule Cs Cls 03, et lui don- 
nait néanmoins, quand il la traitait par la potasse en dis- 
solution dans l'alcool , les mêmes produits que la précé- 
-dente; au chlorhydrate bichlorocarbonique près, qui au- 


22 — 


rait été le produit de l’altération de l'huile non isolée ; 
l'huile lourde pure, serait donc formée d'acide oxalique , 
de deux équivalents de chlorure carbonique, et de deux 
équivalents de chlorocarbonate carbonique. De tout ce 
beau et difficile travail, il est impossible de tirer à pré- 
sent, des conclusions appliquables à la théorie de la cons- 


titution de l’acide citrique. 
F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 18 février 1847. 
Présidence de M. le comte L. de Pourtalès, vice-président. 


M. le Vice-président dépose sur le bureau : 

1° Les deux premiers n°5 du Bulletin de la Société des 
Sciences naturelles de Zurich qui viennent d’être adressés 
à la Société. 

29 De la part de l’auteur une brochure qui contient 
l'analyse chimique des eaux thermales de Weissenbourg, 
par le professeur Fellenberg de Lausanne. 


M. le professeur Ladame fait une communication 


Sur les phénomènes électriques de l'air pendant certains états 
particuliers de l'atmosphère, et sur l'influence qu'exerce cet 
état sur le jeu des machines électriques. 


a E 


M. Ladame, après avoir rappelé les jours de mauvais 
temps et de vents d'Ouest violents qui ont régné depuis 
le soir du 6 Février, et qui ont continué sans interruption 
jusqu'au {1 inclusivement, fait un rapprochement entre 
cet état de l'atmosphère et celui des appareils électriques 


En 


dés 2. 


RP NS" 

le 6 Février, avant l'apparition du vent et de la neige. 
Ce jour-là le vent était au Nord-Est, le ciel était couvert 
de quelques nuages, il faisait beau temps ; il paraissait 
donc que les circonstances étaient favorables aux expé- 
riences d'électricité de tension. Cependant la machine ne 
donnait que de courtes étincelles; une bouteille de Leyde 
ne put être chargée que très-faiblement; jamais les ap- 
pareils électriques ne marchèrent aussi mal. Malgré le 
renouvellement de l’amalgame sur les coussins et le des- 
sèchement des tiges de verres qui soutiennent les con— 
ducteurs de la machine, on dut renoncer, pour ce jour-là, 
aux expériences. Dès le soir même, le ciel se couvrit 
uniformément; la température, qui le matin était à 
—990, 2, était à zéro le soir, et le lendemain matin elle 
s'éleva à + 2°, 5 cent., avec l’arrivée d’un fort vent 
d'Ouest accompagné d’une chute de neige et de pluie. 

Le but de cette note est de faire voir que la faible ten- 
sion de l'électricité sur les machines paraît trouver l’ex- 
plication la plus heureuse dans l’état électrique de l'air, 
si l'on admet pour cause de l'électricité atmosphérique, 
ainsi que le fait M. le professeur A. de la Rive, la distri- 
tribution de la chaleur dans l'atmosphère. M. de la Rive 
a formulé cette hypothèse à l'occasion d’un mémoire de 
M. Lecoq sur la formation de la grêle ('). 

L'air s'échauffe surtout par son contact avec le sol, 
car les rayons solaires traversent l'atmosphère sans l’é- 
chauffer sensiblement, et arrivent ainsi au sol. La tem— 
pérature du sol en s’élevant échauffe l'air à son tour. 


(?) Bibliothèq. Univer., Juin 1836, v. II p. 240. — Archives des sciences 
Physig., de Genève, 1846, v. II p. 592. — Annales de chimie et de phy- 
sique, t. LXI, 1856, p. 202. 


=. AR 

Rappelons maintenant que les expériences thermo- 
électriques nous apprennent que, lorsqu'un corps donne 
de la chaleur, il se charge d'électricité négative, tandis 
que celui qui en reçoit prend l'électricité positive. Dès- 
lors l'air placé au contact du sol chaud recevant de la 
chaleur, il deviendra positif, mais à mesure qu'il s'é- 
chauffe et qu’il donne lui-même de sa chaleur aux cou- 
ches supérieures de l'atmosphère, celles-ci deviennent 
positives à leur tour, tandis que les parties inférieures 
tendent par ce fait à devenir négatives. 

Aiïnsi donc les couches de l’atmosphère voisines du sol 
tendent d’une part à devenir positives sous l'influence du 
sol, et négatives sous l'influence des couches supérieures. 
Elles seront positives, si l’action du sol l'emporte; néga- 
gatives, si l’action des couches supérieures est plus forte; 
elles seront à l’état naturel, si les deux actions se balan- 
cent. Or l'intensité de ces actions dépendant des diffé- 
rences de température, il en résulte qu’en définitive l’état 

électrique des couches atmosphériques dépend de la répar- 
tition de la chaleur. 

Telle est l'hypothèse de M. de la Rive. Elle a de grandes 
probabilités en sa faveur. Il n’en est pas de même des 
autres sources d'électricité qui ont été admises par divers 
physiciens, savoir l’évaporation des mers et la végétation ; 
car les expériences contradictoires de MM. de Saussure, 
Pouillet, Reich et Reiss, font naître bien des doutes sur 
la réalité de ces sources d'électricité. 

Cette hypothèse de M. de la Rive est très-féconde en 
conséquences. L’illustre physicien de Genève en a déjà : 
présenté quelques-unes, surtout celles qui sont relatives 
à la formation et à la théorie de la grêle. Je vais essayer 


225 EN Eur 
d'en indiquer quelques autres encore non moins impor- 
tantes. 

Pendant l'été, il existe une grande différence de tem- 
pérature entre les couches inférieures de l'atmosphère et 
les couches supérieures. Le mouvement de la chaleur 

s'opère toujours dans le même sens, c'est-à-dire de bas 
en haut. Le décroissement de la chaleur est en général 
très-rapide, mais il l’est surtout dans les couches inférieu- 
res ; c'est donc particulièrement dans celles-ci que l’élec- 
tricité se développe. En conséquence la terre est négative, 
dès que l'air, jusques dans ses plus hautes régions, est 
positif. Comme l'air est peu conducteur de l'électricité, et 
que la pression qu'il exerce dans les régions inférieures 
est considérable, l'électricité se manifeste sous la forme 
d'une tension qui acquiert une grande puissance; de là les 
éclairs et les orages de la saison chaude ('). Ces effets 
seront d'autant plus intenses que l'air sera plus calme 
et que, par l'absence des courans horizontaux ou verti- 
caux, l'air froid des couches supérieures ne se mélera pas 


(*) Pour qu’il y ait orage, il ne suffit pas que l’électricité ait atteint une 
forte tension , il faut encore des conditions d'humidité et de chaleur telles 
que les nuages se forment ; alors ceux-ci recueillent l'électricité et la foudre 
apparaît. Lorsque les nuages mexistent pas, l'électricité de tension peut 
donner lieu à des éclairs larges et étendus , qui constituent ce que l’on ap- 
pelle les éclairs de chaleur, qui paraissent après les jours chauds. Plusieurs 
physiciens admettent que ces éclairs sont dûs à des orages très-éloignés et 
placés sous l'horizon. On apercoit ordinairement ces éclairs par un ciel 
parfaitement pur et rien ne s’oppose à l’explication que nous donnons 
ici. Nous devons néanmoins rappeler que M. le colonel de Bosset s’était 
établi en séjour pendant plusieurs étés successifs sur Chaumont (élevé 
de 1472 mètres au-dessus de la mer) pour étudier ce phénomène, et il 
rapporte que quand ces éclairs avaient lieu , il apercevait des nuages ora- 
geux dans les profondes vallées des Alpes. 


= 1% = 

avec l’air chaud des couches inférieures. Ce sera donc 
après des journées calmes et chaudes que les chances 
d’orages seront les plus nombreuses, et l'époque la plus 
favorable pour la production de l'orage, sera non pas 
le moment où la différence des températures entre les 
couches supérieures et inférieures sera le plus grande, mais 
le moment d’après, attendu qu'il faut un certain temps à 
la chaleur pour se transmettre. Une seconde condition 
non moins importante, c'est que le refroidissement des 
couches supérieures dû au rayonnement, soit assez con- 
sidérable pour qu’il y ait précipitation de la vapeur d'eau. 
Ces deux conditions indiquent que les orages devront 
éclater dans l'après-midi, vers le soir, et même, quoique 
plus rarement, pendant la nuit. 

Lorsque le temps est au beau stable, et qu'il ne règne 
pas de grands courants atmosphériques, l'orage éclate 
chaque jour à la même heure, il se forme toujours dans 
les mêmes points, et suit sensiblement le même déve- 
loppement, par la raison que les configurations du sol 
ont une grande influence sur la répartition de la chaleur ; 
or, ces causes étant constantes, entraînent les mêmes effets. 
Nous expliquerons dés-lors sans effort cette périodicité 
régulière des orages dans la zône torride, et les effets 
analogues qui se présentent dans les latitudes plus élevées 
pendant l'été. Volta, qui avait déjà signalé cette pério- 
dicité diurne et cette localisation des orages, admettait 
qu'il existait dans les points où ils se manifestent, comme 
un levain résultant de l’action de la veille. 

Les considérations qui précèdent expliquent d'une ma- 
nière non moins heureuse les faits suivants, dont la con- 
stance frappe les personnes les moins attentives. 


PURE: DE 

Les habitants du pied du Jura observent très-souvent 
des nuages menaçants le long des sommités de la chaîne. 
On les voit se mouvoir avec rapidité vers la plaine, le 
tonnerre éclate avec force ; mais il s'élève parfois un vent 
violent, une brise de montagne que nous appelons le Jo- 
ran. Dans ce cas on peut être sans crainte, l'orage n'ar- 
rive pas. On dit alors que le Joran chasse l'orage; ce 
qui peut paraître d'autant plus singulier que ce vent souf- 
Île précisément des régions d’où nous viennent les nuages 
orageux. Ces faits résultent tout simplement de ce que le 
courant froid qui descend de la montagne, amenant dans 
les couches inférieures l'air des régions supérieures, l'é- 
quilibre de température et d'électricité se rétablit dans 
toute l'étendue de l'atmosphère occupée par ce vent. Or 
la cause qui détermine la formation de l'électricité, savoir 
la grande inégalité de température, venant ainsi à cesser, 
le développement de l'orage se trouve arrêté. 

Le Joran s'étend peu dans la plaine suisse, et à quelques 
lieues de la chaîne il n’est guère sensible, lors même qu'au 
pied de la montagne, il a parfois une force tellement 
grande, que des arbres se brisent , et que tous fléchissent 
et se courbent sous sa puissante action. 

La plaine suisse n'est donc pas sous l'influence de cette 
brise, et dès-lors les conditions du dégagement de l’élec- 
tricité persistent. Aussi nous la voyons fréquemment at- 
teinte par de violents orages, tandis que, placés au pied 
du Jura, nous en sommes à l'abri. 

On peut expliquer d'une manière tout aussi satisfai— 
sante les variations que l’on observe dans la hauteur des 
orages. On sait que les orages éclatent à des hauteurs très- 
diverses, et que parfois ils sont si bas, que du sommet de 
montagnes d’ailleurs peu élevées, on les voit à ses pieds. 


Ces faits résultent de la distribution de la vapeur dans 
l'atmosphère, et des circonstances de température qui ont 
précédé l’arrivée de l'orage; mais on manque d’observa- 
tions bien faites sur ce sujet, et on ne trouve pas d'indica- 
tions suffisantes dans les éphémérides météorologiques (!). 
Aussi est-ce une recherche sur laquelle nous nous pro- 
posons de revenir plus tard. 

Pendant l'hiver le sol est froid ; l’abaissement de tem- 
pérature, à mesure que l'on s'élève, est peu rapide ; sou- 
vent même il y a inversion dans l’ordre ordinaire des tem- 
pératures; ce n’est qu'à une grande hauteur que les 
différences de température deviennent considérables. 
L’électricité se produit par conséquent dans les hautes ré- 
gions de l'air, et dès-lors sous une faible pression. Dans 
ces circonstances, l'électricité ne se développe pas sous 
sa forme de tension, ou du moins sa tension n'’atteint 
que peu d'intensité avant de triompher du faible obsta- 
cle que l'air lui oppose, et elle s'établit sous forme de 
courans lumineux pour constituer les aurores boréales. 

Quant à l’état électrique des régions inférieures de 
l'atmosphère, il doit être négatif ainsi que le sol, puisque 


(*) Depuis cette communication, nous avons eu, au mois de mai de cette 
année 1847, plusieurs orages très-élevés ; or ils ont eu lieu après des jours 
très-chauds pendant lesquels la chaleur était, au milieu du jour, aussi forte 
à la Chaux-de-Fonds qu’à Neuchâtel ( la différence de niveau de ces deux 
points est de 562 mètres ). Lorsque la température est élevée, et qu’elle 
est sensiblement la même jusqu’à une grande hauteur, l'électricité ne se 
développe que dans les hautes régions: voilà pourquoi ces orages ont été 
élevés. Les saisons, la transparence plus ou moins grande de l’air, un 
ciel plus ou moins nuageux, sont des circonstances qui sont favorables 
ou défavorables aux différences de température des montagnes et de la 
plaine, et qui déterminent ainsi la hauteur plus ou moins grande des 
nuages orageux. 


se 0500.-——- 
l'humidité habituelle de l'air pendant cette saison le rend 
conducteur, et qu’il reçoit l'électricité négative de cou- 
ches supérieures; mais cette électricité ne se manifestera 
pas avec une grande tension, par suite de la conductibi- 
lité de l'air et des vents violents qui règnent presque 
constamment. 

Il est évident que l'espèce d'électricité contenue dans 
l'air doit avoir une influence sur les appareils électriques 
que l’on met en jeu dans les cabinets de physique, et que 
‘état de ces appareils est lié avec celui de l'atmosphère, 
en tant que celui-ci dépend de ces circonstances de chaleur 
et d'électricité. Ils peuvent donc servir de pronostic du 
temps, et présenter des indications utiles. Nous sommes 
maintenant ainsi en mesure de nous rendre compte des 
faits énoncés au commencement de cette notice. Nous avons 
dit que dans l'après-midi du 6 Février, quoique le temps 
fût beau, les expériences d'électricité durent être aban- 
données, parce que la machine ne donnait presque point 
d’électricté. D’après la théorie que nous avons présentée 
dans les pages précédentes, les couches supérieures de 
l'atmosphère devaient être plus chaudes que de coutume, 
et l'abaissement de température devait être faible dans 
les couches inférieures. C’est dans ce but que nous avons 
comparé les observations météorologiques de la Chaux- 
de-Fonds, station élevée de 562 mètres au - dessus de 
Neuchâtel, avec celles de cette dernière localité. Quoique 
la différence de hauteur ne soit pas considérable, la 
comparaison de ces observations montre avec une pleine 
évidence, la justesse de la théorie que nous avons expo- 
sée. Les voici: 


NEUCHATEL.  CHAUX-DE-FONDS. 

Æ | | Différence 
Février 
5 (9h. mat. 

midi 
3 h. soir. 
9 h. soir. 
9 h. mat. 
midi 
5 h. soir.| cal. 
9 h.soir. 
9 h. mat. 
midi. 
3 h. soir. 
9 h. soir. 
9 h. mat. 
midi 
5 h.soir. 
9 h. soir. 
9h. mat. 
midi 
3 h. soir. 
9 h. soir. 


Heure. 


5,5 


y ko 
C3 


5 
2 
25 
8 


(24 


FT et ee 


OF © © OI OI x © 
‘@t 


ss 


C2] 


OOMCOUUU OO SOON 
DODODO00000002722227 


Nous voyons par ce tableau, que la plus faible diffé 
rence de température a eu lieu depuis l'après-midi du 6 
jusqu’au soir du 7 : c'est précisément l'époque à laquelle 
se manifestait l’affaiblissement des appareils électriques. 
Remarquons aussi que le vent d'Ouest a commencé à 
souffler à la montagne avant de se faire sentir dans la 
plaine. 

Cette perturbation des rapports ordinaires devait avoir 
pour effet d'établir un flux constant d'électricité négative 
venant des régions supérieures, et la conséquence de cet 
état de l'atmosphère, devait être que l'électricité positive 
tendait à disparaître avec rapidité au fur et à mesure de M 
sa production dans la machine; ce qui explique la faible. 
tension et la perte considérable de l'électricité. 


sont CM 

L'hypothèse de M. de la Rive sur l’origine de l'électri- 
cité atmosphérique nous a conduit ainsi à diverses consé- 
quences qui nous ont permis d'expliquer les faits suivans : 

1° La fréquence des orages en été, les causes qui les 
produisent ou qui les font disparaître, la hauteur à la- 
quelle ils ont lieu, et enfin leur distribution à la surface 
du globe dont les recherches de Berghaus montrent la 
liaison avec la répartition des eaux et des terres et avec 
les accidens du sol. 

2° L'absence des orages en hiver et leur remplacement 
par des aurores boréales. 

3° La liaison qui existe entre la distribution de la cha- 
leur dans l'atmosphère, et l’état des appareils électriques à 
la surface de la terre, de telle sorte que ceux-ci peuvent 
fournir des indications sur la température des couches 
supérieures de l'atmosphère, et devenir ainsi un moyen 
de prévoir le temps. 

4° L'apparition d'aurores boréales étendues, jointes 
aux indications des appareils électriques, annonce une 
grande perturbation dans la distribution de la tempéra- 
ture atmosphérique Cette perturbation détermine une 
rupture d'équilibre dans l'atmosphère, qui, amenant l'air 
des couches supérieures dans les couches inférieures, peut 
avoir pour conséquence de grands froids, des vents vio- 
. lents et d’abondantes chutes d’eau ou de neige. 

Les conclusions qui précèdent auraient besoin d’être 
appuyées par des observations directes faites à différentes 
hauteurs dans l'atmosphère, pour être pleinement justi- 
fiées; cependant, envisagées dans leur ensemble, elles pré- 
sentent un haut degré de probabilité et elles appellent, 
l'attention sérieuse des météorologistes. 

A. Guyor, secrétaire. 


CE 

M. de Uastella présente un appareil construit à Lausanne 
par MM. Mayor et Dupertuis pour les inhalations d'éther. 
Il rappelle brièvement comment cette découverte faite en 
Amérique s’est répandue sur le continent, et passe en- 
suite à la description de l'appareil, qui est fort simple. 
L'action des vapeurs de l’éther a été étudiée à l'hôpital 
Pourtalès sur un individu qui avait une hernie étranglée. 
On s’est servi d'un appareil construit par M. Ch. Matthieu. 
MM. les D'S Bovet et Borel assistaient à l'expérience. 
Après avoir aspiré pendant trois minutes les vapeurs 
d'éther, le malade a repoussé l'appareil ; il a fallu re- 
commencer deux fois de suite; alors le pouls baissa , la 
respiration devint difficile et les yeux saillants. On com- 
mença l'opération, et le malade ne parut pas sentir les 
premiers coups de bistouri; mais il revint bientôt à lui, 
et souffrit beaucoup; le sang qui s'écoulait de la plaie 
était noir et peu abondant. M. de Castella passe ensuite 
en revue les avis si différents de tous les praticiens, sur 
la valeur de la découverte de cette nouvelle propriété des 
vapeurs d'éther , et il conclut en disant qu'elle a besoin 
d'être encore étudiée avec les plus grands soins. 

M. le D' Borel pense que si l’expérience faite à l'hôpi- 
tal Pourtalès n’a pas eu tout le succès qu'on devait en 
attendre, c'est que la vapeur d'éther arrivait en trop 
grande masse aux poumons du malade. Il signale alors 
tous les avantages de l’appareil de Charrière qui est muni 
d’un robinet à double effet, à l’aide duquel on fait arriver 
aux poumons la vapeur d’éther aussi étendue d'air qu'on 
peut le désirer. Du reste, il confirme en tous points les 
faits exposés plus haut par M. de Castella. 

M. le Dr Mercier observe que l’inhalation d'éther dans 
le cas spécial où elle a été appliquée à l'hôpital Pourta- 


ER NE 
lès, cas dans lequel il y avait déjà disposition à une in- 
flammation, pouvait être bien dangereuse; il pense en 
conséquence que le peu d'action de la vapeur d’éther sur 
l'état du malade en question peut bien être la suite de 
la nature de son affection. | 


M. Sacc entretient la société des fonctions du foie, qu'il 
envisage comme l'organe destiné à secréter du carbone 
solide, tandis que les poumons le rejettent à l’état gazeux. 
Au moment où les substances féculacées arrivent dans 
l'estomac, elles s’y transforment en acide lactique; or, 
si on soustrait de 8 équivalents de cet acide, soit 

C58 Ho 050, un équivalent de Cho- 
lestérine C36 H32 0, il reste 

C12 Hs 039, soit : douze équivalents 
d'acide carbonique, huit équivalents d’eau, et sept équi- 
valents d'oxigène. Ce dernier se porte sur les substances 
combustibles qui l'entourent, et opère une combustion 
lente, dans le sang lui-même. L'oxigène peut et doit donc 
se produire en assez grande quantité dans l'intérieur des 
animaux. La Cholestérine ainsi produite, arrive au foie, 
où, en présence de l’eau et des acalis, elle tend à passer 
à l'état d'acide ; elle s’'approprie un équivalent d’eau, et 
devient C36 H32 0, H 0 qui se décompose en produisant 
- C:5 Hs: O0 + C 0 qui se dégage. Ce nouveau corps est 
l'Aldéhyde de l'acide margarique; en s'emparant d’un 
équivalent et demi d'oxigène, il passe à l'état d'acide stéa- 
rique; en s'en appropriant deux, il se transforme en 
acide margarique. | 

On pourrait peut-être observer contre cette manière de 
voir, les nouveaux faits observés par M. Redtenbacher 


2 FO 

dans l'oxidation de la cholestérine. Il n'a pas obtenu alors, 
comme les anciens observateurs, un acide gras insoluble 
dans l’eau, soluble dans l’alcool et dans l’éther, mais bien 
de nouveaux corps; les acides choloïdanique C16 Hi2 0: 
et cholestérique Cs H4 04 qu'il avait préparés aussi en trai- 
tant directement la bile par l'acide nitrique. Le premier 
de ces acides, qui est insoluble dans l’eau, paraît être un 
mélange d'acide margarique non décomposé, et du second 
de ces acides. Quant à l'acide cholestérique, il est bien 
déterminé; sa formule Cs H4 04 peut se dédoubler en 
C: H2 02, qui est de l’aldéhyde formique, et C4 H2 O2 qui 
est l’oxide inférieur à l’acide succinique, ce qui devait être, 
puisque l’action de l’acide nitrique transforme l’acide mar- 
garique en acide succinique. 

Si la métamorphose de la cholestérine en acide mar— 
garique a échappé à M. Redtenbacher, c'est parce qu'il 
s’est servi d'acide nitrique concentré et bouillant qui atta- : 
que et décompose rapidement l'acide margarique. Ainsi 
s'explique à la fois, la cause qui rend nécessaire l'existence 
dans le corps, de cet acide lactique et de cette cholestérine, 
qui s'y trouvent si abondamment répandus, et dont on 
ignorait presque totalement les usages jusqu'ici. Dans 
l'acte de la digestion, les aliments féculacés se transfor- 
ment dans l'estomac en acide lactique, qui est immédia- 
tement absorbé par les divers vaisseaux qui rampent à 
la surface du canal digestif, puis, porté par eux vers le 
foie, où il se scinde en acide carbonique, eau, et oxigène 
qui sont emportés par le sang vers la périphérie du corps, | 
et en cholestérine absorbée par le foie, où elle s’oxide, 
passe à l'état d'acide stéarique ou margarique, et va de 
là probablement au travers des vaisseaux chylifères, se. 


— 65 — 
fixer dans les tissus destinés à conserver la graisse, il est 
. donc clair que la graisse ne se forme pas directement par 
l'altération des substances féculacées, ainsi que cela est 
généralement admis. 

M. le Dr Borel, ainsi que M. James Borel, citent, en 
opposition aux conclusions de M. Sacc, plusieurs cas 
dans lesquels, nonobstant un état de décomposition très- 
grand du foie, les fonctions végétatives ne paraissaient 
pas, suivant eux, avoir subi d’altération notable. Ces ob- 
servations ne changent en rien la manière de voir de 
M. Sacc, puisque tous les cas observés ont été suivis de 
mort ; d’ailleurs ces deux messieurs ont négligé de s'assurer 
si, malgré l’état maladif du foie, il n’y avait plus aucune 
sécrétion de bile. 


M. Sacc passe ensuite à la description d’un entonnoir 
au bain d’eau, très-simple et inventé par M. Ph. Planta- 
mour. Ce petit instrument est destiné, suivant lui, à 
passer dans toutes les officines. 

F. Sacc, secrétaire. 


Séance du À Mars 1847. 


Présidence de M. L. CouLox. 


… M. le Président annonce la réception de la fin du bul-- 
letin des séances de la Société des Sciences naturelles de 
Berne pour 1846. 

Le même donne lecture d’une lettre du Président de la 
Société de Vaud , par laquelle cette société propose, à 
Vexemple de celle de Zurich, l'échange de ses bulletins 


en un nombre d'exemplaires égal à celui des membres 
LL 


5 


me CG “Se 
respectifs des deux sociétés. La proposition de Lausanne 
est agréée par la Société. 


M. Guyot rend compte des travaux hypsométriques de 
M. de Wildenbruch, consul prussien à Beyrouth, sur la 
vallée du Jourdain , le lac de Tibériade et la mer Morte. 
Après avoir donné quelques détails sur la structure re- 
marquable de ces contrées, et rappelé les efforts qui ont 
êté faits pour en rectifier la topographie, le rapporteur 
signale les discordances singulières qui existent entre les 
différentes mesures faites par divers observateurs pendant 
les derniers dix ans, depuis Schubert jusqu'à Wilden- 
bruch, différences qui nous laissent encore en suspens sur 
la véritable valeur de tous ces chiffres. En effet : 


Pour le niveau du lac de Tibériade au dessous de celui 
de la Méditerranée : 


Schubert trouve, baromét. . . 535 pieds de Paris. 
Bertou id. ne SO à » 
Russegger id. manatt als r- » 
Symond trigonomét. . 307 » 
Wildenbruch,  baromét, . . 793 » 


moyenne 994 


Pour la mer Morte, au dessous de la Méditerranée : 


Bertou a trouvé baromét. ,. . 1248 pieds de Paris. 
Russegger id. . . . 13H » 
Symond trigonomét. . 1230 » 
Wildenbruch  baromét. . . 1351 » 


moyenne 1292 
Ces résultais , surtout ceux qui sont relatifs au lac 
de Tibériade, laissent encore beaucoup à désirer sous le” 
rapport de l'accord que l’on est en droit d'attendre de me- 


ME 
sures de cette nature. Néanmoins comme les mesures ba- 
rométriques de Wildenbruch ont eu l'avantage d’obser- 
vations correspondantes sur la Méditerranée , avantage 
qui a manqué à toutes les autres , elles peuvent être con- 
sidérées comme un contrôle utile et un élément précieux 
| pour concourir à la formation d’un nombre moyen qui se 
rapproche de la vérité. De plus, comme elles se rappro- 
chent davantage des autres pour le niveau du lac de Ti- 
bériade que celles du lieutenant Symond, on est en droit 
de soupçonner une erreur dans ces dernières qui différent 
d'une manière si notable de toutes les autres indications. 
À. Guyor, secrétaire. 


M. de Castella, rendant compte de la dernière séance 
de l'Académie de médecine, parle des heureux effets 
obtenus par M. Paul Dubois, de l'application de l’éther 
sur les femmes en couches. L'accouchement des femmes 
soumises à l’action de cette vapeur s’est effectué de la 
manière la plus normale et sans douleur ; les tissus étaient 
assez relâchés pour que le périnée n'ait jamais été déchiré, 
comme cela arrive ordinairement aux primipares. Un fait 
bien remarquable, mais normal, c’est que, dans ces con- 
ditions, la circulation du sang se ralentit chez l'enfant, 
absolument comme chez sa mère. M. Flourens, qui a 
- continué à faire agir la vapeur d’éther sur des animaux, 
- a trouvé, comme précédemment, qu’elle les tue, en agis- 
. sant sur la moelle épinière. 

M. le D' Borel dit qu’en faisant l’'amputation d’une 
cuisse à un sujet éthérisé, M. Roux a vu le sang artériel 
conserver sa teinte vermeille, et les fibres musculaires se 
contracter sous le bistouri. M. Serres ayant expérimenté 


sur des animaux avec de l’éther liquide, a trouvé que ce 
corps agit toujours sur le système nerveux. L’éther chlor- 
hydrique paraît avoir une action plus sensible encore que 
celle de l'éther hydrique, M. Borel croit que l’éther agit 
en produisant une véritable ivresse. M. le Dr de Castella 
qui partage cette manière de voir, rapporte qu’il y a quel- 
ques années, un scieur de bois s’étant couché dans un état 
d'ivresse complet sur un billot de bois, il fut atteint par 
la scie qui lui coupa la moitié du bras. Apporté dans cet 
état à l'hôpital Pourtalès, il subit l’amputation du bras 
sans témoigner de la douleur , et ne sortit de sa torpeur 
que le lendemain matin. Il fut atteint plus tard de déli- 
rium tremens que l’on guérit avec de l’opium. 

M. Borel, revenant sur ce sujet, dit qu'on guérit tou- 
jours le délire traumatique avec de l’opium, et que l'action 
de l'ivresse sur les museles était si bien connue des Val- 
dajoux, qu'ils avaient grand soin d'énivrer leurs patients 
toutes les fois qu'ils avaient de la peine à réduire une 
luxation ou une-fracture. 


. M. Sacc rappelant qu'il a toujours cru que l’heureux 
effet du calomel dans les fièvres typhoïdes était dû à sa 
transformation en sublimé corrosif, qui agissait. comme 
antiseptique, annonce qu’un fait est venu corroborer cette 
opinion; cest la guérison de plusieurs personnes très- 
gravement atteintes de la fièvre typhoïde, par une solu- 
tion, à un millième, de créosote, dont les propriétés anti- 
septiques sont incontestables. 


M. Sacc fait une communication verbale sur l'épuise- 
ment des sols. 


= 0 
+ Al est reconnu qu'aucune plante ne vient longtemps sur 
Je même terrain, quand elle n’est pas mise dans des con- 
ditions telles , que la nature du sol sur lequel elle végète, 
change d’une façon ou d’une autre. 

Ce changement peut s'effectuer par un apport de subs- 
tances nouvelles , ou par l'enlèvement d'une partie de 
celles qui s’y trouvaient déjà. Ce sont les eaux qui dans 
la nature se chargent de ces deux modifications de la sur- 
face du sol; l’agriculture a pour but d'aider et de régu- 
lariser l'effet des eaux. 

L'épuisement de la terre est d'autant plus rapide , que 
l'effet des eaux est moindre ; de là, l'épuisement si prompt 
des terrains élevés, ou en pente, tandis que les plaines 

conservent longtemps leur fertilité. Le sol refuse de por- 
ter plusieurs années de suite, une même espèce de plante 
annuelle ou à tige annuelle ; les arbres font exception, 
‘parce que les végétaux lui enlèvent ou lui donnent cer- 
tains principes ; les premiers utiles , les seconds nuisibles 
à leur développement. Toutes les plantes n’enlèvent pas 
au sol les mêmes principes ; les unes lui prennent essen- 
tiellement des alcalis, comme les fougères, les papilio- 
nacées ; les autres, des alcalis, de l’'ammoniaque et de 
. acide silicique , comme lés graminées ; d’autres enfin de 
‘la chaux, comme les papilionacées et les plantes grasses 
Len général. Mais, comme la quantité de substance miné- 
wrale qu’on trouve dans les végétaux est fort variable, on 
mpeut douter encore que ces matières soient indispensa— 
- bles à l'existence des plantes, et il devient dans tous les 
» cas impossible de prononcer avec certitude sur la plus 
ou moins grande utilité de chacune d'elles. Ce qu'il y a 
de positif, c’est qu'on a trouvé des substances minérales 


= MN 2 
dans toutes les plantes qu’on a étudiées jusqu’à présent. 
On a admis avec de Candolle, puis nié le fait des dé- 
jections par les racines des plantes ; j’adopte cette manière 
de voir de de Candolle et je la base sur le fait que la terre 
de mes orangers, qui ne contenait pas une quantité sensible 
d’acétate calcique, au moment où j'en ai rempli leurs 
caisses au mois de mai 1846, en est très-chargée aujour- 
d'hui. D'ailleurs, tout le monde sait que la partie des 
arbres la plus chargée d’alcalis, c'est leur feuillage ; eh 
bien, au moment où ils perdent cet ornement, on n’y ren- 
contre plus d’alcalis. Ces alcalis ne se retrouvent qu’en 
fort petite quantité dans le tronc ; où peuvent-ils avoir 
passé, si ce n’est dans le sol, auquel ils sont rendus cha- 
que automne, ce qui explique la possibilité de la végéta- 
tion prolongée des arbres sur le même point. 
F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 18 Mars 1847. 
Présidence de M. L. CouLon. 


A l’occasion de la communication faite dans la séance 
précédente par M. Sacc sur la théorie des assolements, 
M. Ladame rappelle qu'il a déjà présenté à la Société (!) 
des observations sur ce sujet, et il entre à cet égard dans 
quelques détails sur le rôle des substances minérales dans 
les végétaux, détails qui peuvent être considérés comme 
un développement de sa première communication. 

L’utilité d’une rotation dans la culture d’une certaine 


(!) Bulletin, t. 1, pag. 197. 1845. 


mes 


NT ge a 


RS 


di 


ÉRT om. 


= 2 
série de plantes sur un même sol, aussi bien que l'épui- 
sement des terres par la continuité d’une même produc- 
tion, sont des faits avérés et acceptés par tous les agri- 
culteurs. Il paraît à M. Ladame, qu'on peut réduire à trois 
les hypothèses qui ont été formulées pour les expliquer. 

La première hypothèse consiste à admettre que le sol 
contient certains sucs, ou matières extractives, qui favo- 
risent le développement des plantes. La nature de ces pro- 
duits fertilisans est inconnue, mais elle paraît résider sur- 
tout dans l’humus. Cette hypothèse extrêmement vague et 
élastique, ne peut être considérée comme une solution du 
problème ; on ne peut l’envisager que comme présentant 
le fait de l'épuisement des sols sous une autre forme; en 
un mot, c'est une paraphrase du mot épuisement. 

La seconde hypothèse, au lieu d'admettre que le soi 
épuisé a perdu des substances fertilisantes, pose que les 
végétaux rejettent dans la terre des matières excrémen- 
tielles, qui sont vénéneuses pour la plante qui les a pro- 
duites et par là même nuisibles aux plantes de même es- 
pèce qui leur succèdent. Cette hypothèse a d’abord été 
présentée par MM. Humboldt et Plenk, (*) puis développée 
par M. de Candolle (?), et appuyée d'expériences par 
M. Macaire (*). 

On doit cependant remarquer que M. de Candolle dis- 
- tingue l'épuisement du sol de son effritement. L'épuise- 
ment a’ lieu, d'après ce savant, lorsque le sol s'est appau- 


(*) Physiologie. 
(?) De Candolle, Physiologie, page 248-1474-1497 ; — Boussingault, 
Economie rurale, tome II, pag. 269. 


(5) Mémoires de la société de physique , etc., de Genève , tome V. 


De: Or 

vri de ses matières nutritives et qu'il a donné toute la 
partie extractive qu'il contient. L’effritement exprime 
l'action d’un certain végétal en culture qui a pour effet 
de rendre le sol stérile pour les individus de même es- 
pèce, de même genre, ou de même famille que lui, tan- 
dis qu'il le laisse fertile pour d’autres espèces de végé- 
taux ('). 

Cette hypothèse ne paraît pas suffisamment fondée. 
Elle repose sur deux faits : 1° sur l’excrétion des racines 
et les qualités nuisibles qu’on leur suppose : 2° sur la né- 
cessité de faire succéder certaines plantes à d'autres pour 
obtenir une végétation vigoureuse, et sur l'influence fà- 
cheuse ou utile que des plantes voisines exercent les unes 
sur les autres. 

Quant au premier fait, celui de l’excrétion des racines, 
quoique on puisse le considérer comme probable, on peut 
dire qu’il n’a pas été suffisamment constaté jusqu'ici. Les 
expériences de M. Macaire ont été sans résultat lorsqu'il 
a cherché à constater cette excrétion dans le sable où 
avaient vécu les plantes, et le même résultat négatif a été 
obtenu par MM. Braconnot (?) et Boussingault (°). 

Le fait cité par M. Sacc, de la présence de l’acétate 
de chaux dans les vases d'oranger , serait nouveau ; mais 
il ne paraît pas que l’analyse de la terre ait été faite avant 
la végétation de ces arbustes. D'ailleurs les vases sont 
exposés à l’action extérieure et ne sont point abrités ; dès- 
lors quand même on constaterait l'existence de cet acé- 
tale dans le sol, il faudrait encore justifier sa provenance 


(!) Physiologie , page 1496. 
(?) Ann. de chimie et de physig., tom. LXII, pag. 87. 
(5) Economie rurale ; tom. IT, pag. 268. 


+ has 
" 
' 


mes TD = 
des racines, et démontrer qu’il n’est pas le résultat de la 


décomposition spontanée des fécules, des sucres, ete., si 


répandus dans toutes les parties des plantes, des feuilles, 
des fruits et du bois, dont les débris tombent de l'arbre, 
ou sont déposés par le vent. 

L'excrétion des racines annoncée par M. Macaire, a eu 
lieu lorsque les plantes plongeaient dans de l’eau pure, 
renouvelée. Or, on sait que, dans ce cas , le phénomène 
d’endosmose doit jouer un grand rôle, puisque d'une 
part il a lieu avec d'autant plus d'énergie qu'il y a une plus 
grande différence de densité et de nature entre les liquides 
placés de différents côtés d'une membrane poreuse, et que 
de l’autre les spongioles des racines, par leur tissu délicat 
et poreux, sont éminemment favorables à cette action. De 
plus on a objecté, avec raison, que les plantes, dans cette 
circonstance, n’ont qu'une végétation faible et que la des- 
struction des racines, ou leur état maladif, permet à l'eau 


de pénétrer dans la plante et de la laver. Enfin ces expé- 


riences répétées par MM. Unger-Meyer et Walser ('}, 
n’ont donné que des résultats négatifs. 

D’autres raisons parlent encore contre cette manière de 
voir. 

Comment expliquera-t-on, dans cette hypothèse, la cul- 
ture continue de certaines plantes dans un même sol? Car 


d'après M. Boussingault (?), on cultive sur les plateaux 


des Andes des terres à blé, qui donnent annuellement, 
depuis plus de deux siècles, de bonnes récoltes de blés. 
Les environs de Naples sont dans le même cas (*). Le maïs 


(‘) Jussieu , Cours élémentaire d'histoire naturelle , 239. 
(!) Economie rurale, tom. 11, 270. 
() Liebig, Chimie appliquée à la physiologie végétale , 168. 


cs. «MR, Gus 

se reproduit continuellement sur le même sol sans le 
moindre inconvénient, soit dans le midi de l'Europe, soit 
sur une grande partie des côtes du Pérou, où la terre ne 

roduit pas autre chose depuis une époque bien antérieure 

la découverte de l'Amérique. La pomme de terre peut 
croître toujours sur le même sol; à Santa-Fé, à Quito, 
les cultures de ce tubercule se suivent souvent sans in- 
terruplion, et nulle part on n'obtient des produits de meil- 
leure qualité. L'indigo, la canne à sucre, le topinam- 
bour, la vigne, se rangent dans la même catégorie. Il en 
est de même, d’après M. Braconnot ('), du laurier-rose à 
fleurs doubles , et du papaver somniferum. 

Berzelius (?) dit qu’en 1817 il analysa une terre qui, 
depuis un temps immémorial, produit une abondante ré- 
colte en grains sans avoir jamais été fumée. Elle contenait 
de petits morceaux d'os qui fournissaient tout le phos- 
phore nécessaire pour constituer la graine. 

Enfin si l’on considère que les sécrétions supposées vé- 
néneuses que donnent les racines, sont des matières or- 
ganiques solubles dans l’eau , comment ne sont-elles pas 
emmenées par les pluies, et comment admettra-t-on que 
sous l'influence de l'air, de l’eau et de la chaleur, elles se 
conservent pendant des années, et qu’elles ne soient pas 
détruites rapidement par la fermentation, comme toutes 
les autres matières organiques placées dans de pareilles 
circonstances ? 

Ajoutons aux considérations précédentes, qui sont déjà 
si puissantes, que cette théorie, de l’aveu même de M. de 
Candolle (*) , ne s’applique pas au cas de l'épuisement dé- 


(*) Annales de chimie et de physique , tom. LXXII, pag. 27. 
(?) Chimie, 1833, tom. VII, pag. 485. 
(5) Physiologie, 1496. 


Le 0 y io MA A À do 


«4 de ÉCGE 7 


HR. DE 
finitif du sol, état dans lequel le sol se trouve épuisé pour 
toujours, sans qu’on puisse lui rendre sa fertilité pre- 
mière, si ce n’est par des amendements convenables et 
les engrais. En Virginie on ne peut plus cultiver sans en- 
grais, ni tabac, ni céréales (‘). 

En terminant cette discussion , nous rappellerons que 
l'hypothèse que nous exposons doit démontrer par l'ex- 
périence : 1° que l’excrétion des racines est un fait cer- 
tain ; 2° que ces excrétions sont vénéneuses pour la plante 
qui les a produites, et pour les plantes de lamême famille; 
les faits nombreux qui ont été cités font voir que cette 
hypothèse est loin d’avoir atteint ce but. 

La troisième hypothèse consiste à faire jouer un rôle 
important aux substances minérales que contiennent les 
végétaux. M. Saigey (2) est l’auteur de cette hypothèse qui 
avait déjà été mise en avant par M. Théodore de Saus- 
sure (*), et qui a été développée avec détail par M. Lie- 
big, dans son traité de chimie appliquée à la physiologie 
végétale et à l’agriculture, édition de 1844. 

En général les physiologistes et les chimistes s'accor- 
daiïent il y a peu d'années encore , à considérer les ma—- 
tières inorganiques que contiennent les végétaux comme 
accidentelles. On pensait qu’elles résultaient de la pro— 
priété qu'ont les racines, d’absorber par leurs spongioles 


l'eau et tout ce qu’elle tient en dissolution : l’eau arrivée 


dans la plante s’exhale par toute la surface extérieure du 


(!) Liebig , chimie appliquée ; ete., pages 167, 252. 

() Journal des sciences d’observations, vol. I, pag. 222. — De Candolle, 
Physiologie, pag. 379. 

() Recherches chimiques sur la végétation. — Liebig, Chimie appliquée» 
édition 1844, pag. 91. 


— 16 — 

végétal, et laisse en dépôt, comme un encroütement, les 
matières fines. On explique facilement, avec cette manière 
de voir, pourquoi les plantes ligneuses contiennent moins 
de matiére minérale que les plantes herbacéesi, le tronc 
moins que les branches et celles-ci moins que les feuilles, 
surtout quand elles sont jeunes ; pourquoi encore on en 
trouve moins dans le tronc que dans l’aubier, et moins 
dans celui-ci que dans l'écorce. On comprend aussi pour- 
quoi la même plante qui croît dans différents sols, ne con- 
tient pas les mêmes substances minérales, et pourquoi 
toutes les plantes d’un même sol renferment des subs- 
tances analogues (‘). 

On ne peut nier que cette manière de considérer les 
matières terreuses des plantes ne soit appuyée sur des faits 
nombreux ; mais elle est loin d'en embrasser toute la va- 
riété. Elle ne rend point compte de plusieurs circonstances 
importantes, et en faisant envisager les matières inorga- 
niques comme adventives dans les plantes, et comme n'y 
jouant aucun rôle utile , elle ne satisfait pas à cette pen- 

“sée si féconde, que l’étude approfondie des faits met tou- 


jours en évidence, savoir, qu'il n’y a rien d'inutile dans ! 
? 


la nature et que tout a son but. Si dans quelques cas nous 
‘sommes amenés à considérer tels faits comme accidentels, 
“cela tient à la faible portée de notre intelligence et à 
-T'examen superficiel et peu attentif auquel nous les avons 
soumis. | 
Mais il ne suffit pas pour rejeter une opinion, de faire 
voir qu’elle est peu philosophique, il faut encore démon- 
“trer qu'on ne peut en formuler aucune autre , et que nous 


(2) Théod. de Saussure, Recherches chimiques, eté. jèe£ 


Me DE: 

sommes obligés, du moins pour le moment, de nous en 
contenter. En est-il ainsi dans le cas qui nous occupe ? 
M: Ladame ne le pense pas, et voici quelques-uns des 
faits sur lesquels il s'appuie. 

+ 4° Les substances minérales ne sont pas réparties in- 
distinctement dans toutes les parties de la plante; elles 
y sont localisées. Nous trouvons la silice dans la paille 
des graminées qui doit avoir de la tenacité et de la force; 
nous la trouvons encore dans les feuilles , à leurs parties 
extérieures, dans la cuticule ; son rôle est alors de préser- 


“ver ces organes de l’action trop énergique et destructive 


des agents extérieurs. 

La chaux a surtout son siége dans le centre de la 
plante ; on la trouve dans le bois, mais en échange.on n’y 
trouve que peu ou point de silice. Dans toutes les graines 
nous rencontrons des phosphates. L'existence des phos- 
phates , dans ces parties si éminemment nutritivés des 
plantes, n’a-t-elle pas pour but l'alimentation des ani- 
maux auxquels ils sont nécessaires ? 

Comment l’évaporation de l’eau pourrait-elle avoir pour 
conséquence une semblable distribution ? | 

29 Cette localisation des substances minérales n 'est 
donc point arbitraire; mais rien n'en prouve mieux lé 
rôle physiologique que les recherches de M. Payen('), qui 
a conslaté que ces dépôts terreux ne se formaient pas et 
ne flottaient pas librement dans les cellules du végétal, 
mais qu'ilexistait un appareil particulier organisé, quiles 
produit et les contient. On les trouve rarement et en pe- 
tite quantité dans les méats ou intervalles cellulaires. 


(1) Développement des végétaux : in-4° avec planches. - 


Le us Le 

30 L'influence que les substances minérales exercent 
sur le développement des plantes, est une autre preuve 
de leur importance. Ici les faits abondent et on n’a que 
l'embarras du choix. 

Nous avons déjà cité précédemment l'influence des 
phosphates sur le développement des céréales d’après l’a- 
nalyse de Berzelius. Est-ce le hasard, comme le remarque 
M. Liebig (‘), qui fait que les Karpathes et le Jura, ter- 
rains calcaires, pauvres en alcalis, ne portent que des pins 
et des sapins qui n’en contiennent que peu ; tandis que 
la Bavière et les autres contrées de l’Allemagne, formées 
de gneiss, de micaschiste, de granit et basalte, portent 
des chênes et des arbres à larges feuilles, riches en alcalis 
comme les terres sur lesquelles ils croissent? 

Les jones et les équisétacées ne prospèrent que dans 
les lieux où les principes de l'argile sont tenus en dis- 
solution par le mouvement des eaux. La pariétaire, la 
bourrache, l'ortie, ne végètent bien que dans les terrains 
qui contiennent des nitrates. Les plantes marines, les sal- 
solas , les varecks, les fucus, ne poussent avec vigueur 
que dans les sols chargés de sels marins. 

Les expériences directes de MM. Théodore de Saussure, 
Wiegmann et Polstorff (*) et de plusieurs autres savants, 
appuient fortement cette opinion; nous cilerons quel- 
ques-uns des résultats obtenus. 

Les graines de vesces, de haricots, de pois et de cres- 
son germent dans le sable et dans la bourre humide. 


(t) Chimie appliquée, p. 169. 

(?) Ueber die unorganischen Bestandtheïle der Pflanzen ; mémoire cou- 
ronné à Gœttingue. —Rapport de Berzelius, 4843, —Liebig, Chimie appli- 
quée, etc,, 215, 216, 535. 


m1 = 

Elles s'y développent jusqu’à un certain point, mais dés 
que la substance minérale du sol ne suffit plus à leur ac- 
eroissement, la plante languit, elle fleurit bien alors quel- 
ques fois, mais ne porte jamais graine. L’orge, l’avoine, 
le tabac, les vesces semés dans du sable blanc lavé à l’a- 
cide hydro-chlorique bouillant, donnèrent des résultats 
analogues. L'orge et l’avoine n'eurent qu'un pied et demi 
de hauteur; il y eut des fleurs, mais point de graines. Les 
vesces atteignirent dix pouces, fleurirent et donnèrent 
des gousses sans grains. Le tabac n'arriva qu’à une hau- 
teur de cinq pouces. Les petites plantes n’eurent que des 
feuilles et point de tige. 

Ces mêmes expérimentateurs, en créant un sol artifi- 
ciel par une combinaison convenable de substances mi- 
nérales, obtinrent des résultats très-satisfaisants. Le tabac 
atteignit trois pieds, eut des fleurs et des graines; l’orge, 
l'avoine , le blé sarrasin et le trèfle poussérent avec vi- 
gueur, fleurirent et donnèrent des graines parfaitement 
müres. 

Sans multiplier les citations , ce qui serait facile, ne 
pouvons-nous pas conclure de cette relation entre les 
substances minérales du sol et le développement des vé- 
gétaux, que ces matières sont essentielles , nécessaires 
aux plantes, et que ce n’est pas accidentellement qu’elles 
s’y trouvent. 

Quant à l'explication de leurs fonctions, ceux des par- 
tisans de la seconde hypothèse, qui n’en ont pas entière- 


—…._ ment nié l'efficacité, admettent en général que ces subs- 


tances minérales agissent sur le végétal comme excitants, 
ainsi que le font les épices sur l’organisation animale (*). 


(*) Thénard , 5° volume. 


— 80 — 
M. Liebig leur assigne un rôle plus considérable. Il pense 
qu’elles ne sont pas étrangères aux phénomènes chimi- 
ques qui ont lieu dans les plantes et que les alcalis du 
moins, exercent une action importante sur les transfor- 
mations que subissent pendant la vie du végétal l'acide 
carbonique et l’eau. 

4° Une autre preuve de l'importance des substances 
terreuses, c’est la faculté élective que les plantes possèdent 
à leur égard. M. de Saussure a fait remarquer que les 
plantes qui croissent dans un même sol n’absorbent pas 
les mêmes substances. Les plantes marines enlèvent à l’eau 
de la mer l’iode qu’elle contient; elles fournissent des 
quantités d’iode telles que pour retirer de l’eau de la mer 
des quantités équivalentes, il faudrait en évaporer des 
masses énormes. Les plantes qui vivent dans les décom- 
bres en tirent les nitrates. Ce sont ces considérations qui 
ont engagé M. Liebig (') à diviser les plantes en plantes à 
silice: le froment, l'orge, le seigle; en plantes à chaux: 
le tabac, le trèfle ; en plantes à potasse: le maïs, les na- 
vets, la betterave , la pomme de terre ( tubercule). 

On pourra sans doute objecter à ces diverses preuves 
que la même plante ne contient pas toujours les mêmes 
principes minéraux , et que ces substances n'y sont pas 
dans les mêmes proportions ; il y a à cet égard trois ob- 
servations à faire. 

La première, c’est que le rôle de ces substances n'est pas 
encore assez connu pour qu'on puisse dire à quelle épo— 
que de la végétation et dans quels tissus elles agissent 
avec efficacité. Dès-lors, puisque dans l'analyse des plantes 


(*) Chimie appliquée, etc., page 221. 


: Mi tt 


— = 
et de leurs cendres, on n’a pas jusqu'ici tenu compte de 
cette circonstance, on comprend qu’on ait obtenu des dif- 
férences notables dans les résultats. Aïnsi, par exemple, 
supposons que l’on analyse les feuilles d’une plante, on 


+ ytrouvera d’autres corps et dans d'autres proportions, que 


Ai 


si l'on analyse les jeunes tiges. Les feuilles, prises seules, 
pourront donner des résultats différents, suivant qu’on les 
prend à telle époque de leur développement ou à telle au- 
tre; attendu que la composition des parties extérieures et 
des parties intérieures n’est pas la même, et qu’elle est 
également différente dans les portions du végétal dont le 
développement est achevé, de ce qu’elle est dans celles 
qui sont encore en voie d'un accroissement rapide. 

La seconde observation que nous ferons, c’est que 
nous ignorons si ces principes terreux ne sont pas em- 
menés et conduits dans le sol ou dans d’autres parties 


de la plante, après avoir rempli leur fonction dans l'acte 


de la végétation. C’est ce que semblent indiquer les faits 
suivants. Les terres où poussent les salsolas sont plus sa- 
lées que les autres (*). L'aubier qui contient plus de cen- 
dres que le bois, passe à son tour à l’état de bois. Enfin 
le fait signalé par M. Sacc, que les alcalis contenus dans 
les feuilles vivantes et en pleine végétation, disparaissent 
en automne et ne s’y retrouvent plus quand elles tombent, 
parlerait encore dans ce sens. On sait aussi que l'époque 


| _à laquelle on coupe les plantes pour en retirer le salin, 


a une influence sur le rendement (?). 
Comment dès-lors, n'obtiendrait-on pas des résultats 


(‘) De Candolle, Physiologie, 4949. 
*(?) De Candolle , Physiologie, 396, 597. 
Il 6 


— 82 — ; 
différents dans l'analyse des plantes , suivant l’époque de 
la végétation et sa plus ou moins grande énergie. 

La troisième observation porte sur la faculté que cer- 
tains principes minéraux paraissent avoir de se remplacer 
mutuellement, comme cela a lieu dans le règne minéral, 
lorsqu'il y a isomorphisme : tels sont la potasse, la soude, 
la chaux et peut-être la magnésie. C’est ‘ainsi que les 
mêmes espèces qui, quand elles croissent au bord de la 
mer, donnent de la soude, contiennent de la potasse lors- 
qu'elles croissent dans l'intérieur des continents (*). Ce- 
pendant, dans ce cas, ainsi que l’observe Duhamel , leur 
végétation n’est jamais aussi vigoureuse (?). 

Mais une remarque importante faite par M. Liebig, 
nous permet d'envisager ces fails comme fournissant un 
motif de plus en faveur du rèle des substances inorgani- 
ques, c'est que, lorsque cette substitution a lieu, les bases 
se remplacent équivalent à équivalent (*), de manière que 
la quantité d'oxigène unie aux différents métaux reste 
constante. 

Néanmoins, empressons-nous de le dire, cette loi si 
belle et si simple n’a été constatée que sur les cendres du 
pin des monts Breven et Lasalle, et sur celles du sapin 
de la Norwège, et d’Allevard, dans le département de 
l'Isère. Mais ne sera-t-on pas frappé de cette égalité dans 
le nombre des équivalents des bases , lorsqu'on considère 
la différence des terrains , celle des climats et la distance 
des lieux. 

Les preuves qu'on vient de présenter en faveur du rôle 


(*) De Candolle, Physiologie, 394. 
() Boussingault, Economie rurale, tom. E, p.142. 
(5) Liebig, Chimie appliquée, 2° édit, p. 97. 


des substances minérales sont directes, elles sont fortes : 
mais il existe un autre moyen de juger de la valeur d’une 
hypothèse, une circonstance qui nous engage fréquem- 
ment à l’'admettre quand même les preuves directes man- 
quent: c'est lorsque cette hypothèse est simple, vaste et 
féconde ; or c'est précisément le cas de celle qui nous oc- 
cupe: Les applications de cette hypothèse à l’agriculture 
sont nombreuses. En effet, elle explique facilement l’é- 
puisement des sols, leur effritement, la nécessité de la 
jachère ou d’un système d’assolement convenablement 
coordonné et celle des amendements. Tous ces faits, que 
nous a révélés la pratique de l’agriculture, sont des co- 
rollaires nécessaires du rôle des matières minérales ; mais 
pour les bien saisir il est bon d'ajouter une observation 
qui trouve sa place ici. 

Les plantes ont besoin de principes minéraux, mais il 
faut qu'ils lui soient donnés dans une certaine mesure ; 
admis en trop grande quantité dans la plante , ils produi- 
sent l'effet d’une nourriture trop abondante ou trop subs- 
tantielle que recevrait un animal; la plante souffre et 
même périt. Or c’est ici qu'on peut admirer les voies pré- 
voyantes de la nature. Tous les principes minéraux que 
les:plantes reçoivent dans leur sein, doivent lui être pré- 
sentés en dissolution dans l’eau ; mais le sol les contient 
à l'état de composés insolubles , et c’est sous l’action de 
larchaleur, de l'eau et de l’acide carbonique, jointe à la 
désagrégation du sol par les gelées, à l’écobuage ou à 
lameublissement, que ces composés insolubles sont len— 
tement décomposés , et fournissent leurs principes solu- 
bles, désormais assimilables par la plante. Les phosphates 
sont solubles dans l’eau chargée d'acide carbonique, 


me 1e 
les roches siliceuses, les sables, les argiles, abandon- 
nent leurs alcalis sous la même influence, et la silice 
mise en liberté par cette décomposition, se trouve à l’état 
gélatineux qui la rend soluble dans l'eau. Wiegmann 
et Polstorff (!) ayant fait passer un courant d'acide car- 
bonique, pendant un mois, dans de l’eau tenant en sus— 
pension du sable blanc épuisé par l’eau régale bouillante, 
trouvèrent que l'eau, après cette opération, tenait en 
dissolution de la silice et la faible quantité d’alcali que le 
sable renfermait; ainsi ce que n'avait pu faire l'eau ré- 
gale agissant dans un temps court, avait été obtenu par 
l'action prolongée d’un acide faible. 

Ces expériences nous présentent l'action de l’acide car- 
bonique en agriculture sous un jour tout-à-fait nou- 
veau; jusqu'ici on l’a toujours considéré comme servant 
à la nutrition de la plante par son charbon ; dans le cas 
qui nous occupe, son rôle s'agrandit, puisqu'il est ap- 
pelé à lui fournir aussi les substances minérales. L’'in- 
fluence des engrais et du terreau apparaît aussi sous une 
face nouvelle et importante, car ces matières organiques, 
en se décomposant, donnent des torrents d'acide carboni- 
que qui active la décomposition des terres. 

Nous tirerons de ces réflexions un enseignement qui 
doit nous diriger lorsque nous voulons amender un sol 
et remplacer les substances minérales enlevées par les 
végétaux ; c’est celui d'introduire dans ces sols non pas 
des substances solubles et facilement absorbables; mais 
bien plutôt des composés insolubles, altérables sous l’ac- 
tion du temps et des agents atmosphériques. C’est ainsi 


(®) Liebig, Chimie ppliqueée, 2° édit. p. 126. Berzelius, Rapport annuel, 
1843, p. 180, 


… (D: = 
que pour nos vignes, dont l'effritement se fait surtout sen- 
Air, à ce qu'il paraît, dans les terres légères, nous devons 
remplacer la potasse qu'elles perdent chaque année, non 
par des sels solubles de potasse, tels que des cendres, 
mais par des frites siliceuses et argileuses mêlées de sels 
potassiques ou de cendres. 
Tels sont, dans l'état actuel de la science, ajoute 
M. Ladame, les faits les plus remarquables relatifs à 
l’action du sol dans la culture des végétaux: Il est facile 
de voir que tout imparfaites et incomplètes que soient 
les considérations chimiques qui ont été présentées sur ce 
sujet, cette irruption si récente de la chimie dans le do- 
maine de l’agriculture, promet une vaste moisson de faits 
nouveaux et qu'ici, comme dans les autres arts, la chi- 
mie, cette science si féconde, deviendra la source de. 
nombreuses et utiles applications. 
Nous ne terminerons pas cette notice sans faire la re- 
_ marque que quelles que soient les conséquences ration- 
nelles d’une théorie, on ne peut les considérer comme 
acquises à la science, qu'autant que l'expérience est venue 
les sanctionner ; aussi nous pensons que le but de cette 
discussion serait atteint si elle avait pour résultat d'en 
gager les propriétaires à faire des expériences dans cette. 
direction et si, comme la Société l'avait déjà désiré anté- 
_rieurement , la Société d'Emulation patriotique voulait 
bien mettre cette question au nombre de celles qui atti- 
rent son attention. 
La communication de M. Ladame donne lieu à plusieurs 
observations. M. le Président cite, comme opposée à la ma- 


… nière de voir de M. Ladame sur l’action corrosive qu'exerce 


… Jecarbonate potassique sur les spongioles radiculaires, l'o- 


L 
{ 
L 


RE 

pinion de Bourmann. Ce dernier conseille l'emploi des cen- 
dres comme un excellent engrais pour les semis d'arbres ; 
M. Ladame répond qu'il ne met point en doute l'efficacité 
des cendres comme engrais, mais il en déconseille forte- 
ment l'emploi immodéré , et cite à cet égard , les expé- 
riences qu'ont faites à leurs dépens quelques propriétaires 
de vignes de notre pays. 


M. Hollard présente verbalement à la Société quelques 
considérations sur la classification des mammifères. Le 
plan qui a présidé à la création de ce groupe général ne 
s'est présenté jusqu’à ces derniers temps, aux zoologistes, 
que d’une manière assez confuse. Les caractères aux- 
quels on s'était principalement attaché , ceux entr'autres 
fournis par les dents et les doigts, avaient conduit à éta- 
blir un bon nombre de groupes naturels , des genres , des 
familles, quelques ordres qui demeureront. Toutefois, mal- 
gré les progrès dûs aux travaux de Frédéric et de Georges 
Cuvier, sur le système dentaire, et bien qu'ils en aient fait 
pour la caractéristique un emploi beaucoup plus heureux 
que Linné, Brisson , et la plupart des auteurs modernes, 
on avait déjà pu se convaincre depuis longtemps , que 
déjà pour l'établissement des ordres et pour leur coordi- 
nation générale , ni le système des dents pris dans son en- 
semble, ni le système des doigts et des ongles qui lesar- 
ment, ne pouvaient suffire. Les études faites sur le cér- 
veau avaient déjà indiqué des démembrements à faire dans 
plusieurs groupes de mammifères , et des associations plus 
légitimes que celles qui avaient été acceptées d'après la 
caractéristique en usage. C’est ainsi que les Cheiroptères 
et les Insectivores se détachent des Carnassiers et se rap- 


A — 
prochent des Rongeurs de la manière la plus évidente 
quand on consulte l'organisation cérébrale. En consultant 
avant tout les dents et les doigts, il faudrait répartir les 
Marsupiaux entre les Carnassiers et les Rongeurs, puis 
réunir, comme l’a fait Cuvier, les Monotrêmes (Ornithoryn- 
ques et Echidnés )} aux Edentés ; tandis que par le cer- 
veau, les Marsupiaux et les Monotrêmes se placent à part 
à la suite des autres mammiféres. Enfin un autre ordre 
d'études, celles dont le développement embryogénique a 
été l'objet depuis plusieurs années , a introduit l'emploi 
ét démontré la haute importance des caractères fournis 
par les phases successives de la période d'évolution. Déjà 
depuis plusieurs années M. de Blainville avait, en partant 
de ce point de vue, réparti tous les mammifères en trois 
“groupes sous-classiques. Les mammifères qui se dévelop- 
pent dans une poche unique, interne, et au moyen d'une 
sorte d'implantation aux parois de cette poche , formaient 
une première sous-classe sous le nom de Monodelphes. 
Ceux qui traversant, sans s’y fixer, la matrice interne, en 
ce cas trés-petite, viennent s'attacher au mamelon et y 
passer toute leur vie embryonnaire, ordinairement sous la 
protection d'une poche comparable à une matrice externe, 
les Marsupiaux en un mot, furent réunis sous la dénomi- 
nation de Didelphes, et placés, non, comme le proposait 


…. Cuvier, sur une ligne parallèle aux précédents, mais à la 


« Suite, vu l'infériorité évidente de ce mode de développe- 
_ ment, qui n’est déjà plus celui de l'homme, et annonce 
— déjà un peu l'oviparité; infériorité confirmée d’ailleurs par 
… celle du système cérébral. Enfin M. de Blainville propose 


… décomposer une dernière sous-classe des Ornithorynques 


_ et des Echidnés, en lui donnant le nom d’Ornithodelphes, 


=. VS 2 
qui indique une oviparité encore plus prononcée que celle 
des Didelphes; et ici encore, le cerveau confirme cette 
distribution hiérarchique de l’ensemble des mammifères. 
: Quelques zoologistes qui d’abord avaient accepté pour 
les Monodelphes et les Didelphes la distribution paralléli- 
que de Cuvier, fondée sur la répétition dans les deux sé- 
ries des mêmes caractères externes, de ceux fournis par 
les dents et les doigts, ont reconnu dans ces derniers temps, 
que ce serait exagérer l'importance de ces caractères que 
d'en déduire une position parallèle des deux groupes, 
tandis que l’histoire du développement et l'anatomie du 
cerveau indiquent une subordination. 

A la tête de ces zoologistes s’est placé M. Milne-Ed- 
vards, qui nous a donné dans les Annales des sciences 
naturelles, un mémoire du plus haut intérêt pour la clas- 
sification des animaux en général et pour celle des mam- 
mifères en particulier, indiquant à l'égard de ceux-ci, 
une application très-heureuse des principes développés 
dans la partie générale de son travail. 

M. Edvards fait remarquer que l'animal, dans la suite 
de ses évolutions, se détermine successivement sous des 
traits de plus en plus particuliers, correspondant à ceux 
qui caractérisent la classe, l'ordre, la famille , le genre, 
enfin, l'espèce dont il fait partie. Aux premiers moments 
d'un mammifère, c’est l'animal vertébré qui se dessine, 
puis apparaissent les traits du mammifére, puis ceux de 
l'ordre des Carnassiers, par exemple, si ce doit être un 
carnassier, enfin successivement tous les autres, et l’es— 
pèce ne se distingue des espèces voisines que la dernière, 
assez tard quelquefois. M. Edvards conclut avec raison 
que c’est le développement de l’animal qui nous fourhit 
la meilleure appréciation des caractères. | 


7: 


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LES Ne 
Appliquant ces considérations à la classification des 
mammifères, M. Edvards trouve que le placenta permet 


_de les grouper d'une manière plus heureuse qu'on ne l’a 
fait jusqu'ici, en consultant les dents et les doigts. Il y a 


d'abord à distinguer les mammiféres à placenta de ceux 
qui en sont privés. En mettant ceux-ci à part, l’auteur 
les réunit sous une seule catégorie , ce que nous ne sau- 
rions approuver, dit M. Hollard , attendu que c'est con- 
fondre deux états du produit , deux modes de génération 
tout-à-fait distincts, celui de l'Ornithorynque étant beau- 
coup plus prés de l'oviparité que celui des Didelphes. 

Quant aux mammifères qui possèdent un placenta, ils 
différent entr'eux par la constitution ou mieux, par les 
formes et le développement de cet organe transitoire ; et 
ces différences se ramènent à trois principales qui donnent 
trois groupes, savoir : 

1° les mammifères à placenta discoïide : Quadrumanes, 


 Chéiroptères, Insectivores, Rongeurs. 


Ici se trouvent justifiés les sentiments des personnes 
qui prévoyaient que tôt ou tard on devrait ramener les 
Rongeurs près des Insectivores, distinguer ceux-ci des 
Chéiroptères, mais surtout les éloigner des Carnassiers. 

29 les mammifères à placenta zônaire. 

C'est-à-dire moins complexe que dans le cas précédent, 
puisque le disque s'évide à son centre. Ici se trouvent les 
Carnassiers. 

83° enfin les mammifères à placenta diffus , comprenant 


les Edentés, les Eléphants et Lamantins, les vrais Pachy- 


dermes, les Ruminants , les Cétacés. 
Une question se présente ici. Quelle est la relation de 
ces trois groupes de Monodelphes? Représente-t-elle un 


développement ascensionnel, ou des collections d'espèces 
avec des points de contact nombreux, variés et croisés en 
différents sens ? M. Edvards se prononce pour cette der— 
nière formule , et indique avec soin les principaux pas- 
sages qu'il aperçoit entre les genres ;, ou les familles, ou 
les ordres de chacun des groupes généraux établis sur la 
considération du placenta. M. Hollard pense au contraire 
qu'il faut s'attacher au fait principal sur lequel repose la 
distinction de ces groupes, et que si ce fait indique un 
rapport hiérarchique, il faut admettre et poser en principe 
ce rapport comme dominant tous les autres. Les carac- 
tères par lesquels un mammifère à placenta discoïde sem- 
ble se lier à un mammifére à placenta zônaire, par exem- 
ple, sera toujours d’une valeur secondaire qui n’entame 
pas celle du caractère principal. M. Hollard prend occa- 
sion du travail de M. Edvards, non-seulement pour adhé- 
rer aux réformes qu'il apporte dans la classification des 
mammifères, mais pour insister sur la distinction à faire 
des caractères hiérarchiques et de ceux qui ne sont que 
d’accommodation à des circonstances de régime, de sé- 
jour, etc.; ceux-ci peuvent se répéter dans plusieurs grou- 
pes d’ailleurs fort différents, mais ne changent rien au 
vrai rapport de ces groupes. Chaque groupe naturel re- 
présente une idée type et c’est là seulement qu'il faut 
chercher la relation des groupes de même valeur. Oren 
procédant ainsi, on arrive presque toujours à des relations 
de supériorité et d'infériorité, qui ne cessent que pour 
les familles ou les genres, parce qu'ici la valeur des diffé- 
rences est déterminée le plus souvent par un but d'accom- 
modation plutôt que de développement. 


M. de Castella entretient la Société d’un cas d'anatomie 


M 

_ pathologique observé à l'hôpital Pourtalès chez un indi- 
vidu âgé de 36 ans, admis dans l'hôpital pour une pleu- 
résie. L’extrémité interne de la clavicule du côté droit 
manquait tout-à-fait et cependant le bras droit con- 


. servait tous ses mouvements et le malade avait dans ce 


bras autant de force que dans l’autre. Il y a cinq ans qu'on 
lui a fait à l'hôpital de l'Ile à Berne, la résection de l’ex- 
trémité interne de la clavicule pour une carie qui s’y était 
manifestée. Aujourd'hui une large cicatrice qui s'enfonce 
sur la première côte, marque la place qu'occupait la por- 
tion de la clavicule enlevée. L’extrémité libre de la cla- 
vicule se meut dans tous les sens; ses mouvements sont 
bornés par les muscles et par les ligaments qui s’y ratta- 
chent ; l'extrémité interne de la clavicule très-mobile est 


…_ retenue par le ligament costo-claviculaire et le musele 


… sous-clavier quand le bras se porte en bas. Il est retenu 
—…. par les mêmes muscles quand le bras se porte en avant. 
— Quand le bras se porte en haut et en avant, il y a anta- 

| gonisme entre le cléido-mastoïdien et le sous-clavier 


pour fixer la pointe de la clavicule sur la facette articu- 
laire du sternum ; dans le mouvement du bras derrière 
le dos, la pointe de la-clavicule s'éloigne d'environ deux 
pouces en dehors de cette facette, et les muscles et Les li- 
+ gaments qui l'y attachent la retiennent en formant des 
cordes tendues et saillantes sous la peau. 


27) 


.” M: Ch. Matthieu après avoir rendu compte à la Société 
… de la découverte (dûe à M: Walchner ) de l'arsenie dans 


— presque toutes les sources ferrugineuses, dans quelques 


… dépôts ochreux , dans le fer oligiste, rapporte que dé- 
— sirant savoir si la quantité d’arsenic était toujours cor- 


Le 
1B 


« 


= 

respondante à la quantité d'oxide ferrique dans les dé- 
pôts ochreux, il a entrepris, pendant son séjour à Giessen, 
trois analyses de trois différents dépôts ochreux des sources 
de Wiesbaden et qu'il y a trouvé une quantité d’arsenie 
presque correspondante à la quantité d’oxide de fer, savoir, 
entre deux et trois d’arsenic pour cent d’oxide de fer. Il 
aurait désiré faire l'analyse de la seule source sulfureuse 
connue dans le canton de Neuchâtel ; mais vu le peu de 
dépôt ochreux qu'il avait entre les mains, dépôt qui pro- 
venait des sources de la Brévine , il a dù se borner à \ 
constater la présence d’arsenic dont il fait voir deux 
échantillons, et regrette de n’avoir pu prouver dans quel 
état il s’y trouvait. 

M. de Castella dit qu'il attribue à l'arsenic que con- 
tiennent les sources ferrugineuses, le mauvais effet que 
produisent les cures d'eaux ferrugineuses dans quelques 
affections. 


M. Sacc lit la lettre suivante de M. le docteur C.-R. 
Frésénius, professeur de chimie à l'institut agricole grand- 
ducal de Wiesbaden, sur le moyen de guérir la pourri- 
ture-des pommes de terres. 

La cherté actuelle des vivres fait que de tous les côtés, 
on cherche des moyens de rendre le pain meilleur: mar- 
ché, en lui adjoignant toutes sortes de substances, et on 
fait bien ; mais il vaudrait mieux encore s'occuper avec 
le plus grand zèle de la culture des pommes de terre et 
s'attacher à en éviter la pourriture qu’il est impossible 
d'arrêter dès qu'elle s’est une fois déclarée. 

Toutes les expériences faites jusqu'ici ont incontesta- 
ment prouvé que c'est dans les sols fortement fumés avec 


+ 


2 4 
" OT 


… des engrais animaux, qu'il y a eu le plus de pommes de 
. terre attaquées, en sorte que je suis convaincu qu’en 
donnant à cette plante un fumier trop fort et trop chargé 
d'ammoniaque, on en a tellement favorisé le développe- 
ment qu’elle est arrivée à dégénérer. Dans presque tous 
« les assolements, on trouve la pomme de terre plantée 
- immédiatement après la fumure , donc mise dans les con- 
ditions les plus favorables au développement de la pour- 
riture. En continuant à cultiver les pommes de terre de 
cette manière, qui ne leur convient évidemment pas du 
» tout, ilest clair que nous nous exposons à la voir con 
» tinuellement en proie à la maladie qui sévit sur elle de- 
» puis quelques années. C’est dans le but d'engager à chan- 
. ger la culture de cette plante, que nous allons rapporter 
une expérience faite sous notre direction à l'institut agri- 
cole grand-ducal de Nassau. Cette expérience ayant eu 
— Le succès le plus complet, vient très-fortement à l'appui de 
… notre manière de voir. 
« Un morgen () de champ qui n'avait pas êté fumé depuis 
- plusieurs années, fut planté avec des pommes de terre de 
L Virginie et fumé avec un engrais purement minéral. 
… Voici le rapport qu'a fait de cet essai le n° 52 de la feuille 
É hebdomadaire du grand-duché de Nassau , à l’article du 
« compte rendu des expériences agricoles faites par la So- 


rciété d'agriculture. 

… … « L'effet de cette culture fut, que le champ rapporta à 
E » peu de chose près autant et d'aussi bonnes pommes de 
“> terre, que dans une année ordinaire; on n'y trouva pas 
« » un seul tubercule malade. » 


—. (!) 4 morgen font 1 hectare, 1 ‘/, morgen font { pose de Neuchàtel. 


è 


Mt Qi” 

Ajoutons à ce rapport que beaucoup des champs qui 
l'entouraient, et qui avaient été traités comme d'habitude, 
étaienttrès-fortement atteints par la pourriture des pommes 
de terre ('). Nous pouvons donc adopter en toute. con- 
fiance ce nouveau mode de fumure des pommes de terre. 

L’engrais en question peut être préparé partout et à 
fort peu de frais ; il en faut cent livres pour un morgen. 
On le fait en mélangeant de la façon la plus intime vingt 
livres de cendres de hêtre, quinze livres d'os brûlés et 
moulus, dix livres de gypse, quinze livres de sel de cui- 
sine ou de carbonate sodique sec, et quarante livres de 
chaux vive éteinte. 

Quand on veut planter les pommes de terre, on fait 
d’abord les trous dans lesquels on compte les placer ; puis, 
divisant le poids du quintal d'engrais par le nombre de 
trous, on obtient facilement pour quotient la quantité 
qu'on doit en mettre dans chaque trou; on pèse alors 
cette quantité à l’aide de laquelle on fait une petite me- 
sure qu'on emploie pour mesurer la quantité d'engrais à 
mettre: dans tout le champ. On recouvre l’engrais d’un 
peu de terre sur laquelle on dépose la pomme de terre 
comme à l'ordinaire. Le reste de la culture n'a rien de 


particulier. 
Waesbaden , 27 février 1847. 


M. Théremin remet une note dans laquelle il donne 
quelques détails sur la cassave ou manioc et sa prépara- 
tion. 

Le même communique une note sur un voyage d'ex- … 


4) Voyez n° 410 du même journal. Gé ! 
y 


=. Os — 
ploration du docteur Leichardt dans le nord de la Nou- 
velle-Hollande. Ce hardi voyageur avait accompli en no- 
vembre 18%5 le grand voyage de Moreton-Bay à Port-Es- 
 sington. 


| D LS A 


M. le Président lit la description d’un cas d'empoison- 
* nement par le camphre, inséré par M. le docteur DuBois 
. au procès-verbal de la section de la Chaux-de-Fonds. 


M. Schauss présente à la Société la nouvelle pharma- 
* copée de Prusse qui entrera en vigueur dés le premier 
» avril 1847. Comme elle sert de règle pour tous les apo- 
- thicaires du pays de Neuchâtel en vertu d'ordonnances 
antérieures, et que cette édition nouvelle présente plu- 
» sieurs changements considérables , il croit qu'il est utile 
| que MM. les docteurs et la Commission de Santé en soient 
\ 


informés. 
F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 8 avril 1847. 


A Présidence de M. L. CouLox. 
1 
4 M. le Président présente un volume envoyé par l’au- 
È teur, M. de Hauer, sur les Céphalopodes de la collection 

“du prince Metternich, publié aux frais et offert à la So- 
e au nom du prince. 


dé 
« 


da hé 


| à M. Guyot donne, d'après le bulletin de la Société 
royale de géographie de Londres, quelques détails sur le 
voyage de M. Leichardt depuis Moreton-Bay jusqu’à Port- 
Essington dans la Nouvelle-Hollande. Cette traversée de 


= A 

plus de 800 lieues a été accomplie par cet intrépide sa— 
vant avec un rare bonheur. Parti de la ville de Brisbane, 
dans le district de Moreton-Bay, il suivit la côte Nord-Est 
jusqu'ici inconnue , en se tenant à vingt ou trente lieues 
de la mer, remonta la presqu'île d'York, entre le golfe de 
Carpentarie et la mer de Corail, puis contournant le fond 
du golfe de Carpentarie le long de ses bords, il entra dans 
la presqu'île de Cockburn à l’ouest de ce golfe, arriva aux 
établissemens anglais de Port-Essington et entra à Vic- 
toria au moment où les provisions de l'expédition étaient 
épuisées, en novembre 1845, après treize mois de voyage. 

M. Guyot fait remarquer que la description que le doc- 
teur Leichardt donne du relief du terrain de cette partie 
Jusqu'ici inconnue de la Nouvelle-Hollande, confirme 
complètement la loi générale des reliefs de ce continent, 
qui consiste en ce que les reliefs principaux se trouvent 
tous situés le long de la côte Est, où ils forment comme 
un long bourrelet qui s'oppose à ce que l'alizé puisse porter 
à l’intérieur les vapeurs de la mer. M. Guyot pense que 
c’est à cette circonstance, ainsi qu'à la nature perméable 
de son sol, que la Nouvelle-Hollande doit sa nature sèche 
et aride. Le docteur Leichardt décrit toute cette côte comme 
composée de plateaux de deux à trois milles pieds d'élé- 
vation s’abaissant vers l’intérieur et au Nord et formant 
partout la ligne de partage des eaux. 

Il est donc à croire que l’intérieur de la Nouvelle-Hol- 
lande n’importera jamais beaucoup à la colonisation euro- 
péenne et qu’on peut le regarder avec probabilité comme 
un grand désert tout pareil au Sahara. M. Guyot rapporte » 
à ce sujet les remarques de M. Eyre qui appuie cette con- 
jecture par trois raisons très-judicieuses. 


ia, sos 


PNR cr 

io Les vents chauds et secs qui viennent de cet inté- 
rieur et désolent toute la partie méridionale de la Nou- 
velle-Hollande, sont de véritables vents de déserts, pareils 
au chamsin ou au harmattan du Sahara. 

20 Les naturels qui habitent la limite de l'intérieur, 
annoncent qu'il n’y a dans cette étendue ni mers, ni mon- 
tagnes, mais un désert qu'ils ont l'habitude de traverser. 

3° Les coutumes et les apparences physiques des abo- 
rigènes habitant au Nord et au Sud sont les mêmes, tan- 
dis qu’elles sont différentes de celles des habitants de la 
côte Est. Cette similitude prouve que rien de semblable à 


| une mer ou à un système de montagnes ne sépare les 


premiers les uns des autres. 

M. Coulon rappelle, au sujet de celte communication, 
les résultats du travail de M. Strzelecki sur la distribution 
et la direction des vents de la partie Sud-Est de la Nou- 
velle-Hollande, et sur les déviations que subit l’alizé à 
sa rencontre avec ce continent. 

À. Guxor, secrétaire. 


M. le D' Valentin lit un rapport sur un cas extrême- 
ment rare, observé à l'hôpital Pourtalès chez la femme 
Veuve, âgée de 45 ans. 

Cette femme, mère de sept enfants, remarqua, il y a six 
ou sept ans, au niveau de la protubérance occipitale, deux 


 Joupes indolentes, qui, grossissant peu-à-peu, finirent par 


ne plus former qu'une seule tumeur rougeâtre dépour- 


— mue de poils. Cette tumeur ayant atteint Ja grosseur d’une 


noix, causa à la malade des douleurs si vives, qu’elle 

essaya de la vider en la comprimant assez fortement ; il 

en sortit une malière grasse qu'elle compara à du suif. 
Il 


PR. de 

Ce n'est qu'il y a trois ans, époque de sa dernière gros- 
sesse, que la tumeur, sécrétant une matière plus dense, 
prit tous les caractères d’une corne et augmenta de sen- 
sibilité. La malade craignant que le cas ne devint sérieux, 
consulta un médecin. Celui-ci en lui coupant la forma 
tion cornée au niveau du chevelu , développa un léger 
saignement de la plaie et la cautérisa avec du nitrate 
d'argent. Des cautérisations fréquentes , des opérations 
subséquentes entreprises par le mari de la dite femme ne 
firent qu'augmenter la force de recrudescence de la corne, 
ce qui décida la malade à entrer à l'hôpital au mois de 
Mars. Lorsqu'elle y entra, il y avait six semaines que la 
tumeur n'avait été coupée, elle avait atteint une longueur 
d’un pouce sur la largeur d’un petit doigt ; elle était re- 
courhée à sa partie supérieure et pointue à son extrémité; 
la surface en était lisse, jaunâtre ; la base était entourée 
d’un bourrelet d'une peau rougeàtre, mince, plissée par 
places ; le cuir chevelu en était parfaitement sain. La 
corne elle-même était insensible, mais le moindre attou- 
chement à l'extrémité se faisait sentir à la base. M. de 
Castella en fit l'opération au moyen d'une taille elliptique 
comprenant la base de la production cornée et une partie 
du cuir chevelu. L'opération ne causa aucune douleur à 
Ja malade , grâce à l’application de l’éther. 

La production cornée, que M. Valentini présente à la 
Société, ressemble à du savon jaune ordinaire, tant sous 
le rapport de la densité que sous celui de la couleur. 
L'ongle peut en entamer la surface extérieure ; le bistouri 
la fend aisément ; la masse interne est disposée dans le 
sens longitudinal ; on y observe ça et là une disposition 
striée; l’intérieur en est creux et garni d’une substance 


ee OS à 

analogue à la moisissure. Une forte pression exercée sur 
la partie libre l’avait détachée de sa base déjà pendant 
+ l'opération et on avait observé des papilles blanches, alon- 

gées, molles, faciles à détruire et semblables à l'organe 
- sécrétoire des ongles. Immédiatement après l'opération, 
MM. les docteurs Castella et Valentini soumirent une 
. partie de la formation cornée à la macération dans l'eau, 
Pendant les premières vingt-quatre heures cette opéra- 
tion détacha une partie de la matière qui ne montrait 
pas la disposition striée ; cette matière se sépara encore 
. plus complètement pendant les jours suivants avec une 
odeur de putréfaction. La trame resta seule; elle présente 
des couches et des lamelles concentriques, blanches , qui 
ne sont pas assez cohérentes pour résister à l’action d’un 
tiraillement assez fort. L'aspect de cette formation rap- 
pelle à M. Valentini celui du derme macéré. M. Valen- 
Uni cite ensuite l'ouvrage d'anatomie pathologique de 
M. Cruveilhier, dans lequel sont rapportés plusieurs cas 
semblables observés pendant les siècles passés, et ajoute 
que la moitié des cas connus ont été observés aux jambes 
et aux cuisses des femmes du peuple d’un âge avancé, 
L'auteur attribue cette prédisposition aux formations cor- 
… nées, à l'abus de la chaufferette, et reconnaît pour cause 
| occasionnelle, une irritation locale et répétée. Il en attri- 
— bue la cause essentielle à un développement anormal des 
… papilles du derme qui, destinées dans l’état normal à la 
F production de l’épiderme, dégénèrent par une action lo— 
“cale, et sécrétent en surabondance des matières qui par 
leur composition ne différent que très-peu de la corne. 
Ces raisons et plusieurs autres engagent M. Cruveilhier 
à classer ces productions cornées entre le pus et le mucus 


de OU 
desséché, ce que les remarques de M. Valentini semblent 
confirmer pleinement. 

M. Valentini fait voir, à la suite de sa communication, 
les planches de l'ouvrage anatomique ci-dessus mentionné, 
qui représentent quelques cas analogues à celui qu'il vient 
de soumettre à l'attention de la Société. 

M. de Castella rappelle au sujet de ces excroissances, 
qu'il a opéré, il y a déjà une vingtaine d'années, une eui- 
sinière âgée de 45 ans, qui portait, depuis son enfance, 
des végétations insolites situées à la partie interne et ex- 
terne de la cuisse droite. L’externe était une tumeur 
implantée par un pédicule de deux pouces ‘de diamêtre 
au pli de la fesse; ce pédicule, allongé de toute la longueur 
de la cuisse, supportait une tumeur du volume de deux 
poings, ulcérée à son sommet, d’une fétidité très-grande. 
Quand la malade voulait s'asseoir, elle la passait sur son 
genou. En marchant elle pendait le long du genou.fL’in- 
terne avait la même longueur; elle s’implantait sur la 
grande lèvre, son pédoncule était beaucoup plus étroit et 
son extrémité inférieure d’une apparence violacée comme 
les tumeurs, et garnie de poils; elle était comme Adigitée, 
molle, et sans ulcération. L’excision des pédicules à leurs 
implantations sur la cuisse et à la grande lèvre suffit pour 
enlever ces végétations, remarquables par le "volume 
qu'elles avaient acquis. 


M. Coulon, président, pour confirmer une observation 
de M. Flourens lue à la séance de l’Académie des Sciences 
de Paris, le 8 février dernier, présente à la Société la bases 
d'une défense d’éléphant que possède le musée, dans la- 
quelle se trouve une balle de plomb , laquelle avait pro-" 


nt ee. St es ne SO à 2 1 


Labs dt ct D 


ARE Li. ns 
“ 


CHR ZE 


— 101 — 
bablement aussi pénétré à travers l'os maxiliaire dans 
la cavité du cône dentaire et formé une exostose qui n’a 
point nui à l'accroissement de la dent. 


M. de Castella rappelle à cette occasion la théorie 
Duhamel sur la régénération des os par le périoste, 
appuyée par des expériences du plus grand intérêt par 
M. Flourens. Il cite une opération faite dernièrement à 
l'Hôtel-Dieu de Paris, par M. Blandin. Cet habile chi- 
rurgien a enlevé la totalité de la clavicule affectée de carie, 
en ménageant le périoste au moyen duquel la clavicule 
a -élé reproduite aussi solide qu'auparavant, puisque le 
malade a repris toute la force de son bras du côté opéré. 

M. de Castella a enlevé chez un enfant scrophuleux 
le corps du tibia nécrosé. La jambe a été maintenue 
dans un appareil convenable , le tibia s’est reproduit 
et l'enfant a pu marcher au bout de quelques mois très- 
librement et très-solidement. Il a déjà publié dans la ga- 
zelte médicale de Paris l'observation d’un cas de frac- 
ture compliquée du péroné, dans lequel l'extrémité infé- 
rieure du tibia se trouvait nécrosée, et faisait une saillie de 
quelques pouces en dedans du pied renversé en dehors. 
Des abcès gangreneux s'étendaient jusqu'au creux du 
jarret sur la partie interne de la jambe. La portion nécro- 
sée du tibia fut enlevée d’un coup de scie, le pied ra- 


mené en dedans et maintenu à l’aide du bandage Dupuy- 


tren. Le vide formé par la portion du tibia enlevée, s’est 


… rempli peu à peu, les abcès se sont taris, et le malade a 


recouvré l'usage complet de sa jambe, puisqu'il'a pu quit- 
ter l'hôpital marchant à l’aide d’une canne. 
Ces faits prouvent qu'on peut, comme l’a dit Flourens, 


— 102 — 
{ dans sa théorie expérimentale de la formation des os, 
2e édition pag. 60) enlever au périoste une portion d'os, 
el 1l rend cette portion d'os; on peut lui enlever une tête 
d'os et il rend cette têle d'os ; on peut lui enlever un os 
entier, et il rend cet os entier. Le périoste reproduit donc 
et rend toutes les portions d'os qu’on lui ôte. A la page 71 
de son ouvrage, ce célèbre physiologiste dit : « Me sera- 
t-il défendu d’espérer que cette merveilleuse puissance de 
reproduction des os par le périoste sera bientôt un ressort 
nouveau entre les mains de la chirurgie? Oh! non sans 
doute. Je m'adresse aux chirurgiens qui observent, qui 
pensent, qui ne voient pas dans la chirurgie un simple 
métier de routine, mais une science , une grande science, 
et qui au dessus de cette science même voient l'huma- 


nité ! » Les faits rapportés ci-dessus , répondent aux vœux 


de M. Flourens. 
F. Sacc, secrétaire. 


Séance du 22 Avril 1847. 
Présidence de M. L. CouLon. 


Il est fait lecture d’une communication de M. Thére- 
min sur une méthode de semer les pommes de terre sans 
employer la partie de la pomme de terre qui sert à la 
nourriture. Il s’agit de planter seulement ce que l'on ap- 
pelle les yeux de la pomme de terre qu’on enlève avec la 
pelure, et qui plantés comme on l'aurait fait du tubercule, 
donnent une récolte tout aussi belle et tout aussi abon- 
dante. Ce procédé est employé avec un plein succès depuis 
nombre d'années par le docteur Schultz dans un grand 
domaine de la Prusse, et cet agronome distingué le re— 


— 103 — 
commande surtout pour les années de mauvaises ré- 
coltes. 


M. Guyot rend compte des remarques de M. F. Werne 
sur la prétendue découverte des sources du Nil-Blanc ou 
Babr-el-Abiad par M. d’Abbadie. Il en résulte que, d’après 
lopinion de M. Werne, compagnon de voyage de 
MM. d'Arnaud , Sabatier et Thibaud pendant l'expédition 
égyptienne dirigée vers les sources du Nil, M. d’Abbadie 
n'aurait aperçu dans les plateaux au sud de l’Abyssinie 
que les sources de quelques affluents du grand fleuve Gos- 
chop, et non point celles du Nil-Blanc. Selon M. Werne 


qui tire ses renseignements de Lakono roi de Baré, dont 


le témoignage fut confirmé par toute sa suite, le lieu où 
le Nil-Blanc, nommé ici Tubirih, se forme de la réu- 
nion de quatre sources , est situé à trente journées au sud 
du point le plus méridional que l'expédition d'Egypte a 
atteint, et non pas à trente lieues comme le dit le rapport 
de M. d'Arnaud. Le pays d’où il sort porte le nom d’An- 


|_ jan. Ces renseignements reculent ainsi encore de 300 


lieues vers le sud, c’est-à-dire de 122 de latitude et trans- 
portent ce point de réunion des premiéres sources du Nil 
vers le 10° latitude sud. Ils justifient complétement, à notre 


- étonnement, les indications de Ptolémée; car on sait que 
le célèbre géographe d'Alexandrie plaçait les sources du 


Nil vers le 12° latitude sud. Ils donnent également quel- 


- que probabilité aux prévisions exprimées au sein de la 
Société, il y a quelques années, par M. de Rougemont , 
- que les sources du Nil pourraient bien être en conjonction 


avec le fabuleux lac Maravi. Enfin, s'il en est ainsi, le 
Nil se présente à nous comme un fleuve de plus de 1000 


— 40% — 


lieues de longueur, à ne compter que la distance directe 
de ses sources à son embouchure, rival, sous ce rapport 
du moins, des plus grands fleuves de la terre. Le cours 
de ce fleuve semble confirmer encore l'existence d’ane 
dépression centrale dans la Haute-Afrique, creusée entre 
deux bourrelets élevés et continus, qui bordent les deux 
côtes du triangle méridional de ce continent, et dont les 
versants intérieurs alimentent cette prodigieuse rivière. 
La longueur du cours du Nil dans les régions tropicales 
explique suffisamment l'abondance des eaux qui donnent 
lieu à ses crues périodiques. 


M. Guyot rend compte des travaux de M. de Strzelecki 
sur l’orographie de l’île de Van-Diemen. 


M. Ladame donne lecture d’un rapport de M. Favre 
sur les résultats obtenus par la commission des enquêtes 
sur le dorage au moyen de la poudre d'or. Une discus- 
sion prolongée s'engage sur ce sujet ('). 


M. Ch. Matthieu rend compte des analyses des eaux 
minérales de Wiesbaden, faites par M. Figuier, dont le 
travail est inséré dans le Journal de chimie médicale, de 
pharmacie et de toxicologie de février 1847, et s'attache 
à réfuter quelques passages du même auteur qui dit : 
« qu'il est probable que l’arsenic se trouve dans ces eaux 
à l’état d’arsénite de soude et par conséquent sous forme so- 
luble ; que par le fait de l'évaporation spontanée au contact 


(1) Voir plus bas le Bullelin des séances de la section de la Chaux-de- 
Fonds, 


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— 105 — 
de l'air, l'oxide de fer contenu dans l'eau minérale pas- 
sant à un degré supérieur d'oxidation et se précipitant 
au sein de la liqueur, change l'équilibre du mélange et 
provoque la précipitation de l'acide arsénieux à l’état d’ar- 
sénite de soude. » M. Matthieu oppose à ces conclusions 
les raisons suivantes : 

1° L'auteur n’a pas constaté du tout dans les eaux la 
présence de l’arsénite de soude soluble. 

2° L’arsénite de soude ne peut exister en présence 
d’un sel de fer soluble qui en entraînera immédiatement 
la décomposition ; il y aura forsAto d’arsénite de fer et 
d'un sel de soude soluble. 

30 L'auteur n’a pas tenu compte de la solubilité de 
l’arsénite de fer insoluble dans l’acide carbonique dis- 
sout dans les eaux minérales, puisqu'il attribue au chan- 
gement d'équilibre survenu dans la liqueur par la préci- 
pitation de l’oxide de fer , la décomposition de l’arsénite 
de soude et la précipitation de l’arsénite ferreux, tandis 
qu'on doit la rapporter uniquement, selon M. Matthieu, 
à la perte d’acide carbonique dissout dans l’eau minérale 


- qui tenait l’arsénite de fer en dissolution, 


M. Ladame lit la note suivante sur l'influence de la 
rotation de la terre sur la direction des vents. 

Au nombre des causes qui ont été indiquées pour ex- 
pliquer la direction et l'intensité des vents, on a mis, depuis 


F Hadley, la rotation de la terre sur son axe. On rendcompte, 
- par ce moyen, de la direction des alizés et des vents gé- 


néraux de lazône tempérée. Cependänt les nombreuses ex- 


. ceptions qu'on est obligé d'admettre, ont engagé plusieurs 


» physiciens à diminuer beaucoup la part que l’ou accorde 


— 106 — 

à celte influence, et même à la contester tout-à- fait. 
Ces physiciens pensent que les différences de température 
entre des lieux voisins ou éloignés, la formation et la pré- 
cipitation des vapeurs , la répartition des terres et des 
eaux , la configuration des continents dans le sens hori- 
zontal et vertical, l'état électrique de l’atmosphère et du 
sol, sont des causes d’une telle énergie, qu’elles l'em- 
portent considérablement sur l’action de la rotation ter 
restre, et qu’elles sont tout-à- fait suffisantes pour expliquer 
d'une manière satisfaisante et complète les mouvements 
de l'atmosphère, soit dans leur direction soit dans leur 
intensité. Néanmoins , fout en reconnaissant que ces 
causes sont prédominantes , et que ce sont elles qui don- 
nent aux mouvements atmosphériques leur caractère, on 
ne peut rationnellement nier l'influence de la rotation de 
la terre, et dès lors la question qui se présente n’est pas 
de savoir si la rotation terrestre a ou n’a pas une in- 
fluence, mais si cette influence a une valeur assez grande 
pour qu'on doive en tenir compte. 

La question ainsi posée peut être résolue par deux sé- 
ries d'observations différentes : 

{° En notant la direction des vents dans des localités 
convenablement choisies, de manière à suivre les vents 
dans toute l'étendue de leurs cours; puis tenant compte 
de toutes les causes qui peuvent agir sur la direction du 
vent, et les appréciant à leur valeur, on conclut par ce 
mode d'élimination, quelle est l'influence du mouvement 
de la terre. 

Cette méthode est jusqu'ici la seule qui ait été suivie ; 
elle n’a pas conduit à un résultat positif et incontestable. 
Son défaut capital réside dans l'impossibilité où l’on est, 


Y 
’ 
{ 
+ 
. 


— 107 — 

d'après l'état de nos connaissances actuelles , d'apprécier 
numériquement , soit en direction soit en intensité, l’ac- 
tion des diverses causes indiquées. En conséquence , sui- 
vant l'importance hypothétique plus ou moins grande 
que les physiciens ont donnée à telle ou telle cause, ils 
sont arrivés à accorder à la rotation terrestre une in- 
fluence grande ou petite. C’est ainsi que les uns ont vu 
dans la direction des vents généraux des zônes tempérées 
et torride, la preuve de la rotation terrestre, et que pour 
les vents locaux ou plus circonserits dans leurs cours ; ils 
ont invoqué les circonstances atmosphériques et terrestres, 
tandis que les autres ont étendu l’action de ces dernières 
causes jusqu’à l'explication des vents généraux et qu'ils 
n’ont point trouvé nécessaire de faire intervenir l'action 
de la rotation de la terre. 

La discussion à laquelle on a soumis les observations 
météorologiques sur les vents, consiste à mettre en évi- 
dence l’action de la rotation de la terre d’une manière 
indirecte, en procédant par voie d'élimination, comme je 
viens de le dire. Ce mode d’argumentation pris dans sa 
rigueur, suppose qu'on a énuméré toutes les causes qui 
agissent sur la direction des vents, et qu'on en a appré- 
cié la valeur. Cette méthode, que J. Herschell a appelé 
méthode des résidus, est utile et féconde ; elle a eu, sûr- 
tout en astronomie, des résultats remarquables. C'est elle 
qui a conduit dernièrement à la découverte de la planète 


Leverrier. Mais cette méthode pour être bonne et sûre, 
» doit se combiner avec une autre que nous allons indiquer. 


29 Lorsqu'on veut constater l'existence d'une cause 

, . , . . « » Q 
d'action et son énergie, il faut chercher à déterminer le 
caractère essentiel de la cause que l’on suppose, savoir en 


— 108 — 
quoi elle’se sépare et se distingue nettement de toutes les 
autres; puis il faut examiner Îles faits sous ce point de 


vue, ce qui décide si elle existe ou non, et dans le pre- 


mier cas, qu’elle est sa valeur. Dans la question qui nous 
occupe, examinons quels sont les caractères de l’influence 
terrestre. Le premier résulte de la différence de vitesse des 
divers parallèles de latitudes. Ces différences ont pour ef- 
fet de faire tourner à l’est les vents compris dans la demi- 
circonférence O.-N.-E., et à l’ouest les vents compris dans 
la demi-circonférence E.-S.-0. La grandeur de cette rota- 
tion des vents varie avec la latitude et avec la distance du 
point de départ du vent. C’est ainsi que les vents du nord 
doivent toujours tourner de plus en plus vers l’est, à me- 
sure qu’on s'approche de l'équateur, et que ceux du sud 
doivent tourner de plus en plus à l’ouest, à mesure que 
l’on s'approche des pôles. 

Ce caractère de l’action de la rotation de la terre a 
été invoqué surtout dans la discussion des observations. 
Nous avons vu qu'il n'avait pas fourni des preuves in- 
contestables de l'influence supposée. Un autre caractère 
de l’action de la rotation de la terre, c’est d'établir une re- 
lation mathématique entre la direction du vent et sa force, 


de telle manière, que plus les vents compris dans la demi- : 


circonférence E.-N.-O. sont violents, plus aussi ils s'é- 
loignent de l’est pour se rapprocher de l’ouest, tandis 
que les vents compris dans la demi-circonférence E.-S.-0: 
se rapprochent d'autant plus de la direction E.-0. qu'ils 
sont plus intenses. 

On n’a pas tiré parti jusqu'ici de ce caractère pour ap- 
précier!l'influence”de la rotation terrestre, la cause en est 
sans doute le ‘petit nombre d'observations météorologi- 


4 


— 109 — 
ques qui indiquent la direction et la force du vent.i Il 
est fort désirable pour la solution de la question qui nous 
occupe maintenant, qu'on introduise la donnée de la force 
du vent dans les tableaux d'observations ; mais comme 


… les changements qui surviennent dans la direction du 


. vent, lorsqu'il varie d'intensité , sont peu considérables, 


il est nécessaire d'indiquer la direction du vent avec plus 
de précision, et, si cela était possible, de noter l’angle de 
direction en degrés. 

Cette méthode permet de tirer parti des observations 
faites dans une seule localité: elle n’a pas encore été em- 
ployée. Il faudrait soumettre les faits à un nouvel examen 
sous ce rapport, et peut-être donnera-t-elle des résultats 
plus précis que ceux que l'on a obtenus en se fondant sur 


» les différences de vitesse des parallèles. 


Il est très-important de remarquer que la discussion 
des observations à ce nouveau point de vue, doit porter 
exclusivement sur les vents réguliers qui ont une même 
direction pendant plusieurs jours consécutifs ; car lorsque 
les vents sont variables et changent à tout instant de di- 
rection en partant successivement des divers points de l’ho- 
rizon , on ne peut, comme on le comprend, tirer aucune 
conclusion relative à l’action de la rotation terrestre. Il 
est évident que des vents si variables ont une origine en 
général trop rapprochée des points où ils soufflent, pour 
que l’action de la rotation terrestre soit sensible. 

Les vents constants qui règnent en hiver et au prin- 
temps, m'ont permis de mettre à l'épreuve les idées que je : 
viens de présenter; mais comme nous ne possédons pas 
de girouettes convenablement établies, je n’ai pu appré- 
cier les changements de direction du vent dans leur gran- 


— 110 — 

deur réelle. Cependant les observations faites au moyen 
de l'indicateur ( un coq ) placé au sommet de la flèche du 
clocher de la cathédrale, dont la position élevée et indé- . 
pendante de toute influence latérale est très-favorable , 

ont donné des résultats conformes à ces idées théoriques. 

Car chaque fois que le vent du nord-est, la bise, augmen- 

tait de force, l'indicateur tournait vers le nord, tandis que 

quand c'était le vent du sud-ouest qui soufflait ét que sa 

force s’accroissait, le vent tournait vers le sud. Je jugeais 

de la force du vent par l'agitation du lac et par la puis- 

sance des vagues. 

Les tableaux des observations météorologiques faites à 
l'observatoire de Genève, contiennent, depuis le {°r jan- 
vier 1846 , l'indication de la force du vent. Cette force est 
caractérisée au moyen des chiffres 0, 1, 2, 3. Je n'ai pas 
encore terminé le dépouillement de ces observations, 
mais les résultats que j'ai obtenus pour les mois de jan 
vier, février et mars 1846, conduisent en général au 
même résultat que mes propres observations , savoir que 
les vents forts se rapprochent du méridien soit nord, soit 
sud, lorsqu'ils soufflent dans les cadrans E.-N. et O.-S. 

Pour s’assurer que ces effets sont bien dûs à la rota- 
tion de la terre, il faut se convaincre que ces change- 
ments dans la direction du vent s’observent dans tous les 
cadrans , et si l'observation démontrait que les vents des 
cadrans O.-N. et E.-S. se rapprochent du méridien au 
lieu de s’en éloigner quand leur intensité augmente, 1l 
faudrait chercher une autre cause à ces mouvements. 

Les observations de Genève ne donnent la direction des M 
vents que sous les angles de un quart droit, il est dés 
lors possible que les changements de direction du vent 


— tit — 
ne soient pas suffisamment appréciés, pour mettre en 
évidence l'influence de la rotation terrestre. En effet une 
différence considérable dans la force du vent ne change 
sa direction que d’un petit nombre de degrés. 

Indépendamment des causes nombreuses autres que 
l’action de la rotation de la terre, qui déterminent la di- 
rection des vents et qui ont pour effet de masquer cette 
action ; 1l est un fait qui tend à la détruire, c'est le 
frottement que l'air éprouve pendant son mouvement, 
soit par son contact avec le sol et ses nombreuses aspé- 
rités, soit par le voisinage de courants d'air voisins qui 
n'ont pas la même direction. Ce frottement a une puis- 
sante influence, car il est facile de faire voir que sans lui, 
les vents atteindraient à l'équateur et dans les hautes lati- 
tudes une violence inouïe et bien supérieure à ce qu’elle 
est dans l’état actuel des choses. 

IL sera bon de soumettre au calcul l’influence de la ro- 
tation de la terre en tenant compte de cette circonstance, 
c'est un travail dont je m'occupe; je reviendrai plus tard 
sur ce sujet. 

Le frottement n’a pas sans doute la même valeur pour 
les vents rasants du nord que pour les vents plongeants du 
sud. La hauteur du lieu d'observation au-dessus de la mer 
doit aussi avoir une action. C’est dans le but de constater 
cette influence locale que j'ai prié M. Favre, instituteur 
de première classe à la Chaux-de-Fonds, de bien vouloir 
faire des observations régulières sur la direction et la vio- 
lence du vent. Cet observateur intelligent et exact s’en est 
chargé et j'espère aussi que nous ne tarderons pas à avoir 
à Neuchâtel des observations météorologiques assez ré- 
gulières et assez précises pour pouvoir soumettre d’une 


_— 119 — 
manière plus complète à l’autorité des faits, les consé- 
quences théoriques présentées dans cette note. 
: À, Guyor, secrétaire. 


Séance du 6 Mai 1847. 


Présidence de M. L. Courox. 


M. Ladame prend la parole au sujet du rapport de 
M. Favre lu dans la précédente séance, qui rend compte | 
du procédé de dorage par la poudre d’or. Il conçoit 
quelques doutes sur la possibilité d'obtenir un dorage 
solide par les procédés décrits dans le rapport des com- 
missaires , et il se demande si MM. les commissaires ont 
été témoins de toutes les opérations. M. Ladame suppose 
que c’est au moyen de l’arsenic, qu’emploie, dit-on, l'in- 
venteur du procédé que la couche de poudre d'or est ren- 
due fusible de manière à ce qu’elle puisse adhérer au mé- 
tal sur lequel on la pose. S'il en est ainsi, cette méthode 
aurait l'inconvénient grave d'être encore plus insalubre 
que celle du mercure à laquelle on voudrait la substituer. 


r à 
M. Ladame rend compte des expériences de M. Persoz 
sur les engrais de la vigne, et sur le mode le plus favo- 
rable de leur application. 


M. Sace communique la lettre suivante de M. Gerhardt, 
professeur à Montpellier et membre honoraire de la Société, 
sur la formation et la composition de l’alun de Rome. 

Les expériences que j'ai l'honneur de soumettre à la 
Société, dit M. Gerhardt, font partie d’un travail plus” 


— 113 — 

étendu dont je m'occupe en ce moment, et qui a pour 
objet la recherche des principes de la composition des 
sels. Mon but serait d'arriver à des notions précises sur 
les conditions qui font d'un acide un composé unibasi- 
que , bibasique ou tribasique ; je voudrais aussi mieux 
définir qu'on ne l’a fait le rôle de l'eau contenue dans 
les sels, et trouver les caractères qui distinguent l'eau 
dite de combinaison de l’eau de cristallisation. 

J'ai porté lout d'abord mon attention sur une nom-— 
breuse classe de sels que les chimistes ont traité pour ainsi 
dire avec un certain dédain et sur lesquels on n’a pas en- 
core publié de travail d'ensemble : je veux parler des sous- 
sels ou sels dits basiques. Je me suis appliqué à étudier 
. les circonstances de leur formation et les moyens de les 

obtenir sous une forme définie. Ces recherches sont en- 
core loin d'être terminées, cependant les résultats aux- 
quels je suis déjà parvenu, me permettent d'affirmer que 
la composition des sous-sels n’est pas aussi compliquée 
que le supposent les formules qu’on a publiées. Au lieu de 
cinq ou six sous-sels qui ont été quelquefois obtenus avec 
le même sel neutre, je n’en obtins qu'un seul ou deux 
tout au plus, et la composition de ces sous-sels présente 
avec celle du sel neutre une relation tout aussi simple 
que celle qui existe entre ce dernier et les sels acides. De 
même , l'eau joue dans les sous-sels un rôle entièrement 
- semblable à celui de l’eau contenue dans les sels acides. 
Un exemple me fera mieux comprendre. Il existe, 
comme on sait, un bioxalate et un quadroxalate de po- 
tasse. Voici la composition de ces sels exprimée d’après 
la notation Berzélius : 


— 114 — 
Oxalate neutre C?O*,KO + aq. 


(CO*'K O0)... 
Bioxalate (C20°.H20 (+ 2 aq. 
C°0*,KO \ 
20*,H? | 
Quadroxalate | a 


J'ai désigné par ag. l’eau dite de cristallisation qui se 
dégage bien avant H°0 ou eau de combinaison. 

Or, de même que nous avons ici un bi-sur-sel 'et un 
quadri-sur-sel, il existe des bi-sous-sels et des quadri-sous- 
sels avec la même eau de combinaison. Ainsi pour le ni- 


trate de plomb, je ne trouve que deux sous-sels parfaite- 
ment définis et cristallisables : 


Nitrate neutre  N?0°,PbO 

Bi-sous-sel N°0*,PbO 

HO, PbO 

N°0°,PbO 

Quadri-sous-sel HO, PhO 

H°0, PbO 

HO, PbO 
Tous les autres sous-nitrates de plomb qu'on trouve 
indiqués par M. Berzélius et par d’autres chimistes, ne 
sont que des mélanges des précédents. H°O ne s'en va 
dans ces sels qu’à une température bien supérieure à 200° 
et même, dans certains sous-nitrates, comme par exemple, 

dans celui de cuivre. 

N°0 ,CuO 

H°0 ,Cu0 

HO ,CuO 

\H?20 ,CuO 


— 115 — 
l'eau ne peut pas être expulsée sans la destruction totale 
du composé. : 

Lorsqu'un sous-sel renferme plus d'eau qu'il ne cor- 
respond aux rapports précédents , on trouve que cet ex- 
cédant se comporte comme l’eau de cristallisation (aq.) 
dans les sels acides. Ainsi, j'ai trouvé que le sous-sulfate 
quadricuivrique ( je l'ai obtenu cristallisé ) renferme 

!:SO* ,CuO\ 
\H20,Cu0 
}H20,Cu0 
\H°0,Cu0 

Or, les # aq. s’en vont entre 120 et 130°, tandis que 
les 3 H°0 y restent même à 200°. Le sous-chromate qua- 
dri cuivrique a la même conscription que le sous-sulfate ; 
c'est une circonstance assez remarquable puisque les sul- 
fates neutres sont isomorphes avec les chromates neutres 
correspondans. 

Mais je me réserve de développer davantage ces faits 
quand j'aurai complété toutes les expériences qui s’y rat- 
 tachent. : 

Je ne parlerai aujourd'hui que de l’alun de Rome dont 
j'ai aussi établi la composition. 

D'après les indications de Leblanc et de Darcet, on 
- considère l’alun de Rome comme un alun plus aluminé 
que l’alun ordinaire, c’est-à-dire comme un sous-sulfate 
» de potasse et d'alumine. Leblanc avait remarqué en effet 
qu'en faisant bouillir de l’alun et de l’alumine, on obtient 
un magma soluble en partie dans l’eaa froide et donnant 
des cristaux cubiques par l’évapuration spontanée. Sieffet 
avait déjà remarqué, en 1780, la production de l’alun 
cubique par l'alun ordinaire et la chaux. Enfin, selon 


2 


D 


| 


+ 4 aq. 


— 116 — 


Darcet l'alun cubique se décomposera par l’eau bouillante 
en sous-sulfate insoluble et en alun octaédrique. 

Cette cristallisation, dans la même forme primitive . 
d'un sel neutre et de son sel basique, m'avait toujours 
paru bien extraordinaire. Je résolus de vérifier le fait. 
On obtient très-vite de l’alun cubique par le procédé sui- 
vant: on se procure une solution saturée d’alun ordi- 
naire, et l'on y ajoute, goutte à goutte et à froid, de la 
potasse caustique, en agitant vivement avec une baguette. 
Le précipité se redissout dans un excès d'alun; quand il com- 
mence à devenir persistant, ce qui arrive bientôt, on filtre 
et l'on abandonne à l'évaporation spontanée. Quelque- 
fois, si l'addition de la potasse n’a pas été suffisante et 
que la solution avait été trop étendue , les premiers cris- 
taux sont encore des octaëdres ; peu à peu, on les voit se 
modifier par les faces du cube, et au bout d’un ou de deux 
jours , si l’on a décanté le liquide surnageant, il ne s'y 
forme même plus des cubo-octaëdres, mais on n'obtient 
que des cubes, sans aucune modification. Ces derniers 
sont parfaitement limpides, se dissolvent dans l’eau sans 
résidu ; la solution peut-être bouillie sans donner lieu à 
aucun précipité, et donne par le refroidissement, non pas 
des cubes, mais des octaèdres. Les cubes que j'ai analy- 
sés avaient exactement la composition des octaëdres 
avec 45,5 p°}, d'eau de cristallisation. Ils sont donc 
parfaitement identiques à l’alun ordinaire. 

Le liquide où ces premiers cubes se sont déposés, en 
donne de nouvelles portions. Cependant au bout de.quel- 
ques jours, quand le liquide est très-concentré, on le voit 
devenir opalin ; les cubes qui s’y déposent alors ne sont 
plus limpides , mais louches comme l’alun de Rome. 


— 117 — 

Quand on chauffe le liquide restant à 60 ou 70°, il se 
coagule comme da blanc d'œuf, et si bien qu'on peut ren- 
verser le vase sans qu’il en tombe une seule goutte de li- 
quide. Ces cristaux louches présentent alors le phénomène 
décrit par Darcet. 

On voit, d'après cela, que l’alun cubique à l'état de 
pureté, n’est pas un sous-sel. Les cristaux troubles, comme 
ceux que présentent le commerce, sont un produit impur 


souillé par le mélange d’une petite quantité de sous-sel. 


C'est ce dernier qui est décomposé par l’ébullition ; au 
reste, quand on fait bouillir le premier liquide provenant 
de l'alun, traité comme nous l'avons dit plus haut, il 
donne immédiatement un précipité, et celui-ci se redis- 
sout complètement dans le liquide après 24 ou 48 heures 
de contact. 

La formation de l’alun cubique est donc un phénomène 
semblable à ceux qui ont été signalés par M. Beudant, 
quand on fait cristalliser certains sels en présence d’autres 
sels avec lesquels les premiers ne se combinent pas. On 
sait, par exemple, qu'il suffit de la présence d’une petite 
quantité d'alun pour que le sel marin ne se cristallise plus 
en cubes mais en octaèdres. 


M. Ladame expose les deux hypothèses principales 
que les physiciens ont faites sur la nature de la lu- 
mière ; celle de l'émission et celle des ondulations. Il 
passe en revue les différents phénomènes de l’optique 
et indique les explications que chaque hypothèse en 


_ donne. Ces explications exigent dans l’une et dans l’autre 


hypothèse un certain nombre de postulat, qui dans 


leur ensemble constituent et formulent l'hypothèse. C’est 


— 118 — 
ainsi que dans l'hypothèse de l'émission , la lumière est 
considérée comme formée de particules inègales en masse 
et animées d'une grande vitesse. Ces particules jouissent 
de propriétés polaires, en vertu desquelles elles sont re- 
poussées ou attirées par les corps suivant le pôle qu'elles 
leur présentent. 

La répulsion explique la réflexion de la lumière ; l'at- 
traction explique la réfraction. 

La diversité des couleurs, jointe au phénomène de la 
dispersion, qui consiste en ce que les rayons de diverses 
couleurs n’éprouvent pas la même réfraction , et à celui 
du pouvoir dispersif des corps, obligent à admettre que 
les particules lumineuses n'ont pas toutes la même vitesse 
et qu’elles sont attirées par les milieux , suivant des lois 
diverses et spéciales pour chacun d'eux. 

Les anneaux colorés donnent à nos particules un mou- 
vement oscillatoire dans leur marche, mouvement dont 
la durée est dans un rapport déterminé avec la vitesse de 
translation. 

Il faut pour les phénomènes de polarisation douer ces 
particules de mouvements rotatoires. 

Il est enfin nécessaire d'admettre, que les particules 
lumineuses qui se rencontrent sous des angles très-petits 
peuvent , suivant le chemin quelles ont parcouru , se dé- 
truire et donner de l'obscurité, ou bien s'ajouter en don- 
nant un éclat total égal à la somme des deux rayons lumi- 
peux ou à une portion de cette somme. Ce dernier postulat 
n'est certainement pas simple, et ne présente pas à l'es- 
prit une idée nette et d’une aussi facile conception que les 
autres postulat sur le mouvement des particules lumi- 
neuses et sur les forces qui les régissent. 


PE 


— 119 — 

L'hypothèse des ondes exige, comme postulat, l'exis- 
tence d’un flaide éminemment élastique d'une très-faible 
densité (l’éther). Ce fluide remplit l'immensité; il pénètre 
tous les corps, et ceux-ci le renferment sous des densi- 
tés et des élasticités diverses, et en général d'autant plus 
faibles que les corps sont eux-mêmes plus denses; ainsi 
l'éther du verre est moins élastique que celui de l'eau, 
celui-ci moins que celui de l'air, et ce dernier moins que 
celui du vide. 

Dans les corps cristallisés ou comprimés, l'élasticité «et 
la densité de l’éther n’ont pas la même valeur dans les 
différentes directions. 

Les corps lumineux sont des corps vibrans, mais ces 
vibrations ne sont pas dues, comme celles des corps so- 
nores, à des alternatives de condensation et de dilatation ; 
le corps lumineux éprouve des mouvemens oscillatoires 
de rotation sur lui-même, tantôt dans un sens, tantôt 
dans un autre. Dans les vibrations sonores, chaque par- 
ticule matérielle se meut sur la ligne que suit le rayon 
sonore. Dans les vibrations lumineuses, chaque parti- 
cule éthérée se meut suivant une ligne susceptible de 
faire un angle quelconque avec la direction du rayon lu- 
mineux; et en général, ces deux directions sont perpen- 
diculaires entr'elles. 

Les actions moléculaires qui déterminent la commu 
nication des ondes sonores s'étendent à des distances 
très-petites, et négligeables quand on les compare aux 
longueurs des ondes; il n’en est pas de même pour les 
ondes lumineuses, où le rayon de la sphère d'activité des 
particules éthérées est comparable aux longueurs d'ondes. 
Ce postulat permet d'expliquer complètement le phéno- 


— 120 — 
mène de la dispersion ou de l'inégalité de vitesse des di- 
verses ondes lumineuses dans un milieu homogène. Ceci 
n’a point lieu pour le son, et tous les sons se meuvent 
dans le même milieu avec une égale vitesse, quelles que 
soient leur élévation dans l'échelle musicale et leur force. 

Lorque les hypothèses ont formulé leurs postulat, il 
résulte de ceux-ci certaines conséquences que l'expé- 
rience doit vérifier si l'hypothèse est vraie et les postu- 
lat bien posés. On possède ainsi un moyen de choi- 
sir entre les hypothèses et de les juger. Pour décider 
entre deux hypothèses avec exactitude, il faut eher- 
cher parmi les conséquences qu’elles fournissent , celles 
de ces conséquences qui sont en opposition directe l’une 
avec l’autre , et qui ne peuvent en aucune manière se con- 
cilier avec les postulat posés par les deux hypothèses. 

Dans le cas qui nous occupe, nous avons un fait de 
cette nature, qui, constaté par l'expérience, décidera dé- 
finitivement la question ; le voici. 

L'une des conséquences inévitables du système de lé 
mission , est que la vitesse de la lumière varie dans cha- 
que milieu, en raison inverse de l'indice de réfraction ; 
tandis que dans le système des ondes, une conséquence 
non moins inévitable, et en opposition directe avec la con- 
séquence précédente, c'est que la vitesse de la lumière , 
dans chaque milieu , est en raison directe de l'indice de 
réfraction : ainsi la vitesse de la lumière dans le vide étant 
de 69,244 lieues ; 
si l'hypothèse de l'émission est vraie, cette vitesse sera 

de 92,325 lieues par 1// dans l’eau, 
de 403,866 » . ..... le verre, indice = 1,5, 
etde 116,191  » ‘dans le sulfide carbonique; 


__ 


RS in SO ot. tn ah dé SR ES 


— 121 — 
si l'hypothèse des ondes est vraie, la vitesse de la lu— 
mière sera 
dans l’eau de 51,829 lieues par 1/! 
dans le verre de 46,163 » 
dans le sulfide carbonique de 41,266 » 
Pour trancher entre les deux hypothèses, sur la na- 


‘ture de la lumière, il suffit donc de déterminer expéri- 


mentalement la vitesse de la lumière dans un des corps 
ci-dessus , ou dans tel autre dont l'indice de réfraction soit 
connu. 

Pour éviter toute objection, il faut que l'expérience 
soit directe. Ainsi, nous mettrons de côté l'expérience qui 
nous apprend que les franges que l’on observe dans les 
phénomènes de diffraction et d’interférence , se déplacent 
d'une quantité mesurable , lorsqu'on interpose une lame 
transparente sur le trajet de l’un des groupes des rayons 
interférents. Ce déplacement et le sens dans lequel il à 
lieu ; est une conséquence naturelle du système ondula- 
toire, et semble en opposition avec celui de l'émission ; 
mais comme le fait des franges constitue pour ce dernier 
système un nouveau postulat qu’on pourra peut-être for- 
muler ( ce qui n’est pas encore fait) de maniére à satis- 
faire à l’exigence de ce phénomène , nous n’en tiendrons 
pas compte. 

Jusqu'ici aucune expérience n’a été faite pour mesurer 


. directement la vitesse de la lumière dans un milieu donné. 


M. Arago a proposé dernièrement un appareil très-in- 
génieux pour atteindre ce but. Cet appareil est fondé sur 
le changement de direction qu’éprouvent les rayons lu- 
mineux réfléchis par un miroir qui tourne sur lui-même ; 


Si nous supposons que deux rayons de lumière partent 


— 122 — 


au même instant d'une même source et atteignent un mi- 
roir sur une ligne parallèle à l’axe autour duquel il tourne 
après avoir traversé, l’un, une colonne d’eau ou de sulfide 
carbonique , et l’autre, une colonne d’air de même lon- 
gueur ; suivant le rayon qui arrivera le premier au mi- 
roir, la question des vitesses sera tranchée et par consé- 
quent aussi celle des systèmes. 

Dans le système de l'émission , le rayon venu par le 
liquide, arrivera le premier sur le miroir, il se réfléchira 
donc plus tôt que le rayon venu par l'air et en consé- 
quence du mouvement du miroir, ces rayons seront pro- 
jetés dans une direction différente. Les résultats seront 
opposés si c'est le système des ondes qui est vrai : le rayon 
venu par le liquide tombera le dernier sur le miroir, et 
dés lors , réfléchi, sa position par rapport au rayon venu 
par l'air sera l'inverse de ce qu’elle serait dans le système 
de l'émission. Des phénomènes de coloration se présen- 
teront aussi sur le miroir, à l'égard du rayon qui traverse 
le liquide, puisque les rayons des diverses couleurs n'ont 
pas la même vitesse , et les couleurs seront disposées dans 
un ordre inverse, suivant que ce sera l’un ou l’autre 
système qui sera vrai. 

Ces expériences n’ont point encore été faites , et ilest 
fort désirable qu’elles soient exécutées prochainement 
et surtout par des mains aussi habiles que celles de 
M. Arago. 

Après l'exposition qui précède, M. Ladame propose un 
autre moyen de déterminer la vitesse de la lumière dans 
différents milieux. Ce moyen repose sur l'examen des 
procédés employés pour mesurer la vitesse de la lu- 
mière. 


— 123 — 

Ces procédés sont de deux espèces : le prenner est fondé 
sur les époques de retour des éclipses des satellites de 
. Jupiter; on mesure ainsi la vitesse de la lumière dans l’é- 
… tendue de l'orbite terrestre, et par conséquent dans le vide. 
+ Le second procédé repose sur la vitesse de déplacement 
dela terre, comparée à la vitesse de la lumière, ou sur 
l'aberration des étoiles. Il est facile de voir qu'on obtient 
dans ce cas la vitesse de la lumière non plus dans les es- 
paces célestes, mais dans la lunette même qui sert à trou- 
ver la valeur de l'aberration. En effet, une fois que la lu- 
- mière est entrée dans la lunette, il faut que celle-ci soit 
. inclinée sur les rayons lumineux d’une quantité telle, que 
+ pendant le mouvement de la lunette les rayons de lumière 

restent dans l’axe de la lunette. Dés lors, si la lumière va 
- lentement, il faudra incliner beaucoup la lunette, puis- 
- que sans cela la lumière étant en retard, elle viendrait 
« frapper la paroi de la lunette et sortirait du champ de 
l'oculaire. Si, au contraire, la lumière marche vite, la 
“ lunette devra être peu inclinée sur la direction du rayon 
- lumineux ; il arriverait même que si la vitesse de la lu- 
mière était infiniment grande, par rapport à la vitesse de 
translation de la lunette, la direction de celle-ci serait 
. exactement celle de la lumière, et il n’y aurait plus d’a- 
… berration. L 

Il a été dit précédemment que la vitesse de la lumière 
— dans un milieu donné dépendait de l'indice de réfraction, 
( plaçons donc dans l'axe de la lunette une substance trans- 
— parente douée d’un fort indice; si l'hypothèse des ondes 
ÿ est vraie , la lumière marchera lentement dans la lunette, 
. on devra donc incliner beaucoup celle-ci sur la direction 
… des rayons lumineux, l’aberration sera forte. Si c’est l'hy- 


— 124 — 

pothèse de l'émission qui est vraie, la lumière marchant 
rapidement dans la lunette, on devra incliner peu celle- 
ci sur la direction des rayons lumineux, l'aberration sera 
faible. Reste à savoir si la valeur de l’aberration , déter- 
minée dans ces expériences, présentera des différences 
appréciables. C’est là ce que justifient les observations 
suivantes : 

L’aberration des étoiles est donné par un angle dont la 
tangente est égale à la vitesse de translation de la lunette, 
divisée par la vitesse de la lumière ( lorsque la direction 
du mouvement de la lunette est perpendiculaire à la di- 
rection du rayon lumineux }. Comme l'angle qui exprime 
l'aberration est très-petit, on peut prendre cet angle ou 
l'arc qui le mesure pour sa tangente, d’où il résulte que 
l'aberration est égale à la vitesse de la terre, divisée par 
celle de la lumière, ou autrement dit que l’aberration mul- 
tipliée par la vitesse de la lumière est égale à la vitesse 
de la terre, qu’on peut regarder comme constante; dès 
lors l’aberration est en raison inverse de la vitesse de la 
lumière. Mais la vitesse de la lumière, pour un milieu 
donné, est en raison inverse de l'indice de réfraction, dans 
le système des ondes, et en raison directe de cet indice, 
dans celui de l'émission. Nous concluons de là que l'a- 
berration est en raison directe de l'indice dans le système 
des ondes, et en raison inverse de ce même indice dans 
celui de l'émission. | 

En vertu de l’aberration, et dans les circonstances or- 
dinaires , les étoiles paraissent décrire dans le ciel des el- 
lipses dont le grand axe, soutend un angle d'environ 40/. 


L'indice de réfraction de l’eau — 1,336, 
celui du verre = 1,53, 
celui du sulfide carbonique — 1,678, 


_— 125 — 

Si la lunette au moyen de laquelle on fait les obser- 
valions était successivement remplie d'eau, de verre, ou 
de sulfide carbonique, les valeurs de l'aberration seraient 
différentes ; on obtiendrait, si le système des ondes est 
vrai : 
aberration p- la lunette pleine d’eau = 40/>1,336—53"/ 4 


» » » Série 40! 1,53 —61//2 
» » » . sulf. car.— 40/'>x41,678—67//,1 


Si le système de l’émission est vrai : 


l'aberration sera p. la lunette pleine d’eau —40 // : 1,336—29 '/,9 
» » » verre —40/! :1,53 —26//,1 
” » »  sulf, carb. —40/!:1,678—23//,8 
Les différences entre les valeurs de l'aberration pour 
un même corps, sont : 


pour l’eau — 534,4 — 2919 — 93/15 
» verre — 64/92 — 96/1 — 35/11 
» _sulfide carb. — 67/1 — 23/8 — 43/3 


Certainement ces nombres sont assez grands pour être 
sensjbles à l'expérience; il est vrai qu'ils reposent sur la 
supposition que l’intérieur de la lunette est rempli d’eau, 
de verre ou de sulfide carbonique , dans toute l'étendue 
de sa longueur ; mais ils conserveraient encore une va- 
leur suffisante, lors même qu'on ne remplirait la lunette 
de ces substances que sur la moitié de sa longueur. 

Il paraît donc possible et très-facile d'arriver expéri- 
mentalement à un résultat appréciable et décisif, puis- 
-qu'il suffit de placer dans l'axe de la lunette et sur la route 
des rayons lumineux un tube mobile, rempli de sulfide 
carbonique, par exemple, les astres se rapprocheront de 
“eur position réelle si l'hypothèse de l'émission est vrai, 
ils s'en éloigneront si c'est celle des ondes. 


—— 126 — 

Nous avons dit précédemment que la vitesse de la lu- 
mière pouvait aussi être délerminée par le moyen des 
éclipses des satellites de Jupiter, et qu'on obtenait ainsi 
la vitesse de la lumiére dans le vide. La vitesse que l'on 
a déterminé au moyen de l’aberration des étoiles, donne la 
vitesse de la lumière dans l'air où la lunette est plongée, 
on doit donc obtenir une différence entre les nombres qui 
résultent de ces deux méthodes. La grandeur de cette diffé- 
rence est dépendante de l'indice de réfraction de l'air, 
qui égale 1,000294. Ce nombre est si faible qu'il ne peut 
agir sur la grandeur de l’aberration, de manière à ce 
qu'on puisse en tenir compte dans les observations ; néan- 
moins, il est remarquable que les deux méthodes em- 
ployées pour calculer la vitesse de la lumière, n’ont pas 
conduit au même résultat, on a trouvé (!) par les éclipses 
192,500 milles anglais (310,000,000 mêt.) par se- 
conde, et par l'aberration 191,515 milles anglais 
(308,000,000 mèt.) | 

Si on considère que la lumière qui traverse une lu- 
nette, se meut en partie dans des masses de verre qui 
changent sa vitesse, il est curieux de déterminer quelle 
épaisseur il faut supposer aux lentilles pour obtenir la 
différence de vitesse que l'observation donne, et qui se 
trouve précisément dans le sens favorable à l'hypothèse 
ondulatoire. Ce calcul est facile, et indique qu'il suffit que 
la somme des épaisseurs des lentilles soit égale à la ‘/100 
partie de la longueur de la lunette, pour expliquer la 


(') Je n’ai pas eu en main les documents nécessaires pour vérifier les 
nombres ci-dessus, ils sont tirés du traité de la lumière de J. Herschell, 
traduit de l'anglais par M. Werhulst, et annoté par M. Quetelet, directeur 
de l’observatoire de Bruxelles. 


— 127 — 

différence que fournissent les expériences. Si ce rapport 
entre l'épaisseur des lentilles et la longueur de la lunette 
est celui que présentaient des lunettes au moyen des- 
quelles on a déterminé l'aberration, nous aurions une 
preuve directe en faveur du système des ondes, puisqu'il 
serait démontré par l'expérience, que la lumière se meut 
moins vite dans l'air et le verre que dans le vide. 


Séance du 20 Mai 1847. 
Présidence de M. L. Courox. 


M. Guyot dépose sur le bureau les nouvelles études 
et expériences sur les glaciers actuels, de M. Agassiz, 
1 vol. in-8° avec atlas. 

Le même présente de la part de M. Sonrel lithographe, 
une planche, spécimen gravée sur pierre par des pro- 
cédés qui lui sont propres et par lesquels il a appli- 
qué à la lithographie, le procédé Colas pour la repro- 
duction des médailles et de tous les objets en relief. On 
admire la netteté et le fini de ce travail. 

M. L.-A. de Pourtalès dépose sur le bureau l’ou- 
vrage dont il est l'auteur, et qui a pour titre : Des 


- quantités positives el négatives en géométrie. Il en fait hom- 
. mage à la Société et communique l'analyse suivante de 


son travail. 
. La notion des quantités positives et négatives s'applique 


en géométrie principalement aux lignes. Jusqu'à présent 
- les auteurs ont cru reconnaître le caractère positif ou né- 
… gatif des lignes comptées sur un axe ou sur une courbe, 


dans leur position par rapport à un point fixe (origine) 


pris sur cet axe ou sur une courbe. Ce point de vue me 


paraît trop restreint; car toutes les lignes situées sur un 
axe ne se comptent pas à partir d'un seul point de cet 
axe. Selon ma manière de voir, toute distance AB tracée 
sur l’axe est positive lorsqu'un point mobile, allant de A 
vers B, marche dans le sens qu'on a pris pour positif, et 
au contraire la distance BA est dans ce cas négative. 

De ce principe découle le théorème suivant: si un point 
mobile parcourt sur une droite différentes distances, les 
unes dans le sens positif, les autres dans le sens négatif, 
la distance entre le point de départ et le point d'arrivée 
est égale à la somme algébrique des distances parcourues. 

Ce théorème conduit à celui-ci : 

Si un point mobile parcourt successivement et dans le 
même sens les côtés d’une portion de polygone, comprise 
ou non dans un même plan, et que l’on imagine que ce 
point se projette continuellement sur un axe, la somme 
algébrique des distances parcourues par cette projection 
(qui est elle-même un point mobile) est égale à la projec- - 
tion de la droite qui ferme le polygone et que l’on nomme : 
la résultante du polygone. 

IL faut remarquer ici que cette résultante est censée 
décrite en allant du point de départ du mobile au point 
d'arrivée. Ce dernier théorème, qui est bien connu, doit, 
pour être utile, être énoncé comme ci-dessus. Il sert alors 
de base à la démonstration d’un grand nombre de théo- 
rèmes importans et rend évidente la généralité des formu- 
les ainsi démontrées. Je me bornerai à citer pour exem- 
ples les formules qui donnent le sinus et le cosinus de la 
somme algébrique de deux arcs et celle qui donne le co- 
sinus de l'angle de deux droites en fonction des cosinus 
des angles que chacune d'elles fait avec trois axes rectan-. 
gulaires. 


— 129 — 

Ce théorème offre même le moyen de donner une si- 
gnification géométrique fort simple aux formules diffé— . 
rentielles relatives à la rotation d'un corps, comme on 
le verra dans le dernier chapitre de mon ouvrage. 

La notion des quantités positives et négatives s'appli- 
que aux secteurs décrits dans un même plan, autour 
» d'un point, par un rayon vecteur, lesquels secteurs sont 
positifs ou négatifs selon le sens dans lequelils sont décrits. 
- Je renvoie à cet égard, au numéro 36, où je pars de ce 
» point de vue pour donner une démonstration générale. 
de la formule qui exprime la différentielle du secteur en 
fonction de l’abscisse et de l’ordonnée du point extrême 
. du rayon vecteur qui termine ce secteur et de leurs dif- 
_ férentielles. 

. Les abscisses et les droites qui leur sont parallèles se 
« rapportent, comme on sait, à un axe nommé axe des +. 
… De même les ordonnées se rapportent à l'axe des y: Il 
- ma paru quil serait ulile de rapporter les rayons vec- 
* teurs à un axe mobile autour de l’origine et que j'ai 
nommé l'axe tournant des r. Sa direction est déterminée 
par l’angle que sa branche positive fait avec la branche 
positive de l'axe des æ. Cet angle se compte positive- 
ment en allant des æ positives vers les y positives , et 
négativement dans le sens contraire. On nomme arc 
directeur l'arc qui mesure cet angle et que l’on exprime 
ordinairement en degrés et quelquefois en parties du 
| rayon pris pour unité. Un point qui, partant de l’origine, 
“marcherait sur l'axe des r vers l'extrémité de l'arc direc- 
“teur, irait dans le sens positif des r, et par conséquent 
|Mioute distance ab, décrite sur l'axe des r ou parallèle- 


| $ 


| se à cet axe, sera positive si l’on va de a en b dans 
9 


— 130 — 
le sens que nous venons d'indiquer et au contraire ba 
sera”négalive. 

Remarquons, en passant, que l'axe des r déterminé 
de position par un arc directeur ç, coïncide avec celui qui 
répond à l'arc directeur 9 + 1802 ; mais les distances qui 
sont positives par rapport au premier, sont négatives 
par rapport au second et vice versà. C’est ce qui a lieu, 
par exemple, pour sec 6 et sec (o+ 1800). 

Il est quelquefois utile de considérer un second axe 
tournant perpendiculaire à celui des r et que je nomme 
l'axe tournant des s. Son arc directeur est toujours 9 + 90° 
lorsque 8 est celui de l'axe des r qui lui est conjugué. 

Dans la géométrie à trois dimensions , l’axe tournant 
des r est considéré comme contenu dans un plan mobile 
autour de l’axe des z. Sa position dans ce plan est dé- 
terminée par l'angle que sa branche positive fait avec la 
branche positive de l'axe des z, et la position du plan 
tournant: est déterminée par l'angle dièdre qu'il forme 
avec le plan des xz. Les arcs qui mesurent ces angles 
sont les arcs directeurs de l'axe des r. Le sens positif 
sur cet axe est celui du mouvement d'un point qui irait 
de l'origine vers l'extrémité du premier de ces arcs. 

Les forces parallèles sont aussi des quantités positives 
ou négatives selon qu'elles agissent dans un sens ou dans 
le sens contraire. Je renvoie à cet égard au N° 40. 

Quant aux forces qui ont des directions quelconques 
dans l’espace on détermine la direction de chacune d'elles 
au moyen des trois angles qu'elle fait avec les côtés po- 
sitifs des trois axes coordonnés. Ces angles ne se comp 
tent alors que de 0° à 180° et toujours positivement, 
de part et d'autre de Ja direction positive des axes coor- 


— 131 — 
donnés. Chaque force se trouve ainsi dirigée dans le sens 
positif du rayon vecteur déterminé par ces trois angles 
| directeurs; mais ses projections sur les axes coordonnés 
. peuvent être positives ou négatives. 
- Enfin la notion des quantités positives ou négatives 
s'applique aux rotations; car une rotalion autour d'un 
axe peut se faire soit dans un sens soit dans le sens 
contraire. à 

IL sera plus commode de rattacher à la théorie des 
couples ce que j'ai à dire sur ce sujet. M. Poinsot, dans 
ses élémens de statique, a nommé couplele système de 
deux forces parallèles, égales et contraires, mais non 
directement opposées. 

L'intensité d’un couple se mesure par le produit de la 
valeur commune des forces et de leur distance qu'on 
. nomme le bras de levier du couple. L'effet d'un couple 
- sur un corps dépend {° de la direction de son plan, 2° 
de son intensité, 3° du sens dans lequel il agit; mais cet 
effet est indépendant de la position absolue du couple, 
ensorte qu'un couple peut être tourné et déplacé dans 
[« son plan et transporté dans un plan parallèle sans que 
son effet soit changé, pourvu que ses forces continuent 
à agir sur le corps. 

Au lieu de déterminer la direction d'un couple par 
son plan, il est beaucoup plus commode de se servir de 
la perpendiculaire menée à ce plan. La position absolue 
“de cette perpendiculaire est arbitraire. L'intensité du 
ouple se représentera par une portion AB de cette per— 
pendiculaire égale à un nombre d'unités linéaires ex- 
primé par le produit de la valeur commune des deux 
forces et de leur bras de levier. Il reste à indiquer le 
Sens dans lequel le couple agit autour de son axe. Pour 


— 132 — 
cet effet j'ai proposé un style de rotation qui sera, si l’on 
veut, un crayon taillé en pointe à l’une de ses extrémités 
et autour duquel on tracera une flèche courbe dans un 
sens invariable. Cela étant, quand je dis que l'axe du 
couple est AB, il est entendu que le sens de ce couple 
coïncide avec le sens de la flèche, lorsqu'on place la 
pointe du style en À et que l’on couche le style sur AB. 

J'ai adopté pour le sens invariable de la flèche du style, 
celui qui s'accorde avec la manière la plus usitée de dis- 
poser les côtés positifs des axes coordonnés et d'écrire les 
formules qui donnent les projections, sur les plans coor- 
donnés, du moment d’une force par rapport à l’origine. 
En conséquence, si l'on place le style parallèlement à 
l'axe de la terre, la pointe étant tournée vers le sud, la 
flèche indiquera une rotation d'orient en occident. De 
même, si l’on place le style sur le côté positif de l'axe 
des z, la pointe étant à l’origine, la flèche indiquera une 
rotation allant des æ positives vers les y positives. 

Pour faire voir par un exemple très-simple l'utilité du 
style de rotation, soit proposé de déterminer le couple 
résultant de deux couples donnés. 

Par un point quelconque À je mène deux droites AB 
AC, respectivement parallèles et égales aux axes de 
ces couples et de même sens que ces axes. (J'entends » 
par le sens d'un axe, dans sa longueur, celui qui va 
de la pointe du style vers son autre extrémité, lorsqu'on 
a placé convenablement le style sur cet axe ). Ces deux. 
droites pourront être prises pour les axes eux-mêmes 
puisque leur position absolue est arbitraire. Le sens dem 
rotation de ces couples est indiqué par le style dont la. 
pointe serait en A et que l’on coucherait successivement. 
sur À B et sur À C. Maintenant si l’on achève le parallé- 


KEr2 PE CAC 


r Duels Fe PONT 


— 133 — 
logramme sur ces droites et que l’on mène la diagonale 
A D, cette diagonale sera l'axe du couple résultant et le 


- sens de ce couple sera indiqué par le style couché sur 
. AD, la pointe en A. 


La loi de continuité est bien observée ici, car si l'on 
suppose que l’un des couples composans, celui dont À C 
est l'axe par exemple, diminue graduellement d'intensité 
jusqu’à devenir nul , l'axe A D du couple résultant vien- 
dra se coucher sur A B en lui devenant égal. Or, dans 
ce cas, le sens du style qui était placé sur A D doit s’ac- 
corder avec le sens du style placé sur A B, la pointe tou- 


. jours en À , et c'est ce qui a lieu en effet. 


Si l’on projette l'axe d'un couple sur les axes coor- 


» donnés, on aura les axes de trois couples qui peuvent 
» les remplacer et dont il est le couple résultant. Il faut 


remarquer qu’il en est ici comme des forces qui ont des , 
directions quelconques dans l’espace , c’est-à-dire qu'un 
couple dont l'axe a une direction quelconque par rap- 
port aux axes coordonnés, est essentiellement positif, 
tandis que ses projections autour de ces axes, peuvent 
être positives ou négalives. Par exemple la projection 
d'un couple autour de l’axe des x est positive, si l'axe 
de ce couple fait avec lecôté positif des z un angle aigu, 
et dans ce cas le sens de ce couple projeté est indiqué 
par le style couché sur le côté positif des z , la pointe à 
l'origine. Si, au contraire, l'axe du couple donné faisait 
avec les z positives un angle obtus, sa projection serait 


négative et le sens de cette projection serait indiqué par 


… 


le style couché sur les x négatives, la pointe toujours à 


_ l'origine. 


On peut voir, dans mon ouvrage, combien l'usage du 


- style de rotation donne de précision au théorème du 


— 134 — 
plan du maximum des aires. Je me suis déjà trop étendu 
ici sur ce sujet. 

Pour me résumer , je dirai que dans l'ouvrage que je 
présente à la Société des sciences naturelles, j'ai cherché 
à donner des notions exactes sur les quantités positives 
et négatives dans les diverses branches de l'application 
de l’algébre à la géométrie. J'ai fait voir en même temps 
comment la règle des signes est vérifiée à l'égard de ces 
quantités et je crois être entré à cet égard dans tous les 
détails désirables. 

Mon but définitif a été de donner aux formules de la 
géométrie analytique , considérées dans toute leur géné- 
ralité, un degré d’évidence qui paraissait leur manquer. 

M. Ladame ajoute qu'il lui paraît que le mérite capital 
de cet ouvrage est d’avoir introduit en géométrie un mode 
nouveau de génération des quantités positives et néga- 
tives, en les considérant comme produit par un mouve- 
ment qui s'opère dans un sens pour les quantités positives, 
et dans le sens opposé pour les quantités négatives. Il en 
résulte la. possibilité de poser avec beaucoup de netteté et 
de clarté, la nature des quantités positives ou négatives. 
M. de Pourtalès a appliqué avec bonheur ses principes 
aux divers domaines'de la'géométrie. Grâce à la simpli- 
cité et à l'élégance de ses formules, il sera possible désor- 
mais de résoudre avec facilité bien des problèmes dont la 
discussion présente des difficultés. M. Ladame pense que, 
malgré la répugnance qu'ont les géomètres à faire usage 
de notions mécaniques en géométrie analytique, le travail 
de M. de Pourtalès prouve combien l’enseignement élé- 
mentaire gagnerait à introduire ces notions dans ses mé- 
thodes. 

À. Guyor, secrétaire. 


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BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


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Scction de la Chaux-de-Fonds. 


Séance du 12 novembre 1846.  - 
Présidence de M. WURFLEIN. 


Après le renouvellement du bureau, et l'examen des 
comptes, l'assemblée vote aux collections scientifiques de 
la Chaux-de-Fonds et du Locle une allocation qui aura 
. lieu toutes les années, et devra se répartir entre ces deux 
collections proportionnellement aux membres habitant 
l'une et l’autre des deux localités. 


M. Nicolet entretient la Société de la nouvelle substance 
explosive découverte par M. Schænbein, dont l'importance 
est si grande qu'elle soulève des réclamations de priorité 
en faveur de M. Braconnot pour la xyloïdine, décou- 
verte en 1833, et de M. Pelouze, pour le papier inflam- 
mable, découvert en 1838. Il présente du coton-poudre 
qu'il a préparé en faisant tremper à froid pendant une 
heure du coton cardé dans un mélange composé d'acide 
sulfurique et d'acide nitrique. La proportion en poids des 
acides peut varier: ainsi en faisant tremper du cotonidans 
les mélanges composés 


de 2 parties d’acide sulfurique, et de 1 partie d’acide nitrique 
3 id. 2 id. 

et 5 id. 4 id. 
IL 10 


— 136 — 
après l'avoir lavé et fait sécher à une température de 50°, 
il a obtenu trois échantillons qui ne différaient pas sen 
siblement entre eux sous le rapport des résultats. 

Le mélange des deux acides a lieu avec dégagement 
de beaucoup de chaleur, sous l'influence de laquelle l’a 
cide nitrique attaque avec violence le coton et le décom- 
pose; c’est pourquoi on ne doit procéder à l'immersion 
du coton qu'après le complet refroidissement des acides. 

La force explosive de cette nouvelle substance a été 
essayée séance tenante; une boulette de quatre grains 
introduite dans un pistolet de tir a suffi pour chasser une 
balle et lui faire traverser une planche de deux pouces. 
Une petite boulette introduite dans un rouleau de papier, 
fortement comprimé par la torsion des extrémités du rou- 
leau et placée au-dessus de la flamme d’une bougie, a 
donné lieu à une forte détonation. 

L'ammoniaque qui est sans action sur la xyloïdine , 
n’altère pas non plus la propriété explosive du fulmi-co- 
ton. M. J. Huguenin en a fait l'essai ; il s'est servi avec 
succés d’ammoniaque pour enlever les dernières traces 
d'acide que le fulmi-coton retient lorsque les lavages n'ont 
pas été faits avec soin. 


M. Favre lit ensuite les observations suivantes qu'il a 
faites sur un halo solaire. 

Le 19 mai dernier, j’eus l’occasion d'observer un phé- 
nomène très-curieux assez rare dans nos contrées, et qui 
malheureusement n’a été vu que par un petit nombre de 
personnes ; je veux parler d’un halo formé-de deux cercles # 
dont l’un était concentrique au soleil et l'autre excentri- 
que , et qui fut visible dans le ciel pendant plus d'une 
heure. 


— 137 — 

Dans la matinée de ce jour le temps était couvert, le 
vent du sud-ouest soufflait avec violence et il tomba de 
la pluie; à sept heures du matin le thermomètre indi- 
“ quait + 7° cent. Après dix heures les nuages cumu- 
* Jus se résorbèrent peu à peu et furent remplacés par une 
» vapeur vague répandue uniformément dans le ciel et qui 
- Jui donnait une couleur blanche et mate; çà et là des 
cirrus se montraient épars. À midi le thermomètre mar- 
quait +129 cent, et le vent continuait à régner avec la 
même intensité. 

Etant sorti vers une heure , je fus frappé de la päleur 
des ombres et je levai machinalement les yeux vers le so- 
- leil pour observer la diminution de son éclat. Alors je fus 
« témoin d'un des plus beaux spectacles que le ciel m'ait 
« jamais offerts. Un anneau immense de 30° à 40° de dia- 
à mètre apparent entourait le soleil dont la lumière était 
« fort affaiblie; et un second anneau de même diamètre , 
… situé au nord-est du premier le coupait de façon à passer 
L dans le voisinage du soleil. 
+. Le premier anneau, dont l'éclat était presque aussi vif 
: que celui de l’astre, présentait très-distinctement les cou- 
* leurs du spectre solaire, le rouge au centre et le violet 

au bord extérieur ; l’espace compris entre le soleil et l’an- 
“neau était plus foncé que le reste du ciel. Lorsque je fis 
cette dernière remarque, je crus d’abord que c'était un 
“effet de contraste, mais ayant masqué le soleil au moyen 
d'un objet opaque, la différence de teinte entre l'étendue 
“du ciel et l'intérieur de l'anneau était encore évidente. 
Quant au second anneau il était beaucoup plus pâle 
que le premier, et je ne pus y découvrir la moindre ap- 
parence de coloration; il se détachait en bianc sur la cou- 


»T 


— 158 — 
leur mate du ciel, mais ne se prolongeait pas dans l'es- 
pace foncé qui occupait le centre du premier anneau. Au 
point d’intersection des deux cercles je n’ai pu saisir 
qu'une très-faible augmentation de lumière qui même a 
disparu vers la fin du phénomène. 

La ligne droite sur laquelle les centres des deux cercles 
étaient situés, me sembla suivre la direction du vent; 
comme je n'avais pas de boussole, je ne pus en fixer exac- 
tement la position par rapport aux points cardinaux. 

Vers une heure et trente minutes, la partie occiden- 
tale du premier anneau offrait seule une belle coloration, 
la partie orientale avait considérablement päli ; l’espace 
compris dans l'intérieur continuait à rester foncé, mais 
avait pris une teinte roussâtre. On apercevait à peine le 
second anneau. À deux heures la partie occidentale du 
premier anneau était seule visible. 

La violence du vent m'empêcha de continuer mes ob- 
servations et je rentrai chez moi sans avoir pu suivre le 
phénomène jusqu’à sa complète disparition. Pendant l'a- 
près-midi le ciel s’éclaircit peu à peu, et devint presque 
entièrement pur. Le lendemain le temps était clair, le 
vent soufflait du sud sud-ouest et la température fat tout 
le jour de 4° plus élevée que le jour précédent ; le surlen- 
demain il tomba un peu de pluie, mais elle ne dura pas. 

Je regrette de n'avoir eu à ma disposition aucun ins- 
trument propre à mesurer la grandeur des cercles et à 
fixer leur orientation ; les mesures que j'en ai données 
précédemment sont assurément fort inexactes, mais jen 
puis assurer cependant qu’à la simple vue, les anneaux” 
m'ont paru circulaires et non elliptiques comme ils ap= 
paraissent quelquefois , et que le soleil semblait placé au 


— 139 — 
centre du premier anneau, car s'il en avait élé à une 
. distance appréciable j'aurais été frappé de ce fait. 
Dr Pury, secrétaire. 


. Séance du 26 novembre 1846. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


Le Dr Pury fait l'histoire d'un cas de mort arrivé su- 
bitement , ensuite de convulsions épileptiformes, provo— 
quées probablement par un coup de tonnerre, chez un 
individu convalescent de fièvre typhoïde. L'autopsie qui 
ne fut pas complète , le cerveau n'ayant pas été examiné 
faute de temps, révéla un cœur passé partiellement à 
l'état adipeux, des adhérences anciennes de la plèvre cos- 
tale et des pétéchies nombreuses sur la poitrine et l'ab— 
domen. La cause à laquelle on doit attribuer cette mort 
subite, soulève une discussion à laquelle prennent part 
MM. les D'S Dubois, Basswitz et Pury. 


La discussion s'établit de nouveau sur le coton-poudre. 
M. O. Jacot rend compte des expériences qu'il à faites 
à ce sujet. Il a essayé du coton-poudre préparé par 
M. Nicolet à l'éprouvette de . ... La poudre de Berne 
“n° {, marquant 6° à cette éprouvette , le coton-poudre 
première expérience) marqua 9° ; une seconde expé- 
ence faite avec le même coton, indiqua seulement 1°, 
t une troisième 3°. Dans les deux dernières expé- 
| riences, une certaine partie du coton fut projetée à une 
“assez grande distance. Ces expériences corroborent celles 
qui ont été faites avec des armes à feu , et montrent que 


— 140 — 
jusqu'à présent, l'on n’est pas parvenu à donner au fulmi- 
coton toute l'homogénéité désirable. 

MM. O. Jacot et E. Savoye pensent aussi et démon- 
trent par une expérience faite séance tenante, qu'on 
pourra peut-être employer la force explosive du coton- 
poudre, pour remplacer avec succès la vapeur, au moyen 
d'un appareil qui laisserait tomber à intervalles égaux 
une petite quantité de fulmi-coton, sur un certain point 
d'un corps de pompe, qui aurait assez de chaleur pour 
allumer le coton-poudre. Cet essai qui avait été tenté 
avec de la poudre ordinaire, n'avait pas réussi à cause 
de la grande quantité de fumée produite. ‘ 

M. J.-ChS Ducommun rend compte des expériences 
qu'il a faites avec le coton-poudre de M. Nicolet. Voulant 
savoir si le frottement ou la percussion pouvaient allu- 
mer cette substance ou la faire détonner , il en mit sur 
une enclume et la forgea violemment; il y eut alors une 
série de petites explosions qui coïncidaient avec les coups 
de son marteau; ensorte qu'il était obligé de frapper 
plusieurs eoups de marteau pour brûler tout le coton 
qu'il avait placé sur l’enclume, quelque petite qu’en fût 
la quantité. 

Après cette discussion M. Nicolet présente à la société 
un exemplaire de l’Accenteur des Alpes (Accentor al- 
pinus....), tué à la fin d'octobre sur les rochers de Mo- 
ron et qui avait été donné à nos collections par M. Perret, 
qui l'avait tiré. C’est la première fois que nos chasseurs 
ont aperçu cet oiseau sur nos montagnes. ÿ 


Dr Puory, secrétaire. 


— 141 — 


Séance du 10 décembre 1846. 
Présidence de M. Wurflein. 


Il est fait lecture du procès-verbal de Neuchâtel du 
12 novembre. Dans la discussion qui suivit et qui roula 
surtout sur le mémoire de M. Sacc sur la maladie des 
pommes-de-terre, M. Eugène Savoye cite le fait suivant. 
Un particulier des Planchettes avait planté au printemps 
dernier un champ de pommes-de-terre. Dans une des 
moiliés de ce champ, il n’avait mis aucun fumier, mais 
avait planté les pommes-de-terre sur le sol écobué. Dans 
l'autre moitié du champ plantée avec les mêmes pommes- 
de-terre, mais fumée, toutes les pommes-de-terre re- 
cueillies étaient gâtées tandis qu'elles étaient toutes 
bonnes dans la moitié du champ fertilisée par l'écobuage. 
Quelques personnes citèrent encore des faits semblables 
recueillis dans diverses parties du pays et des contrées 
voisines , et celui que tout récemment on avait pu lire 
dans quelques journaux français, d'un champ de pom- 
mes-de-terre fumé avec de la poudre de charbon, dont 
tous les tubercules étaient sains à la récolte, tandis que 
les propriétaires voisins qui avaient engraissé leur champ 
avec du fumier , avaient vu leurs récoltes détruites. 


Le D: Pury lit une note sur un Calcul des fosses nazales, 


… déterminé par la présence dans celle cavité, d’un noyau de 


cerise. 
Le 15 juin 1846, il fut appelé chez un particulier des 
environs de la Chaux-de-Fonds, pour sa tante, vieille 


femme de 72 ans, qui se plaignait depuis plusieurs an- 


— 142 — 

nées de douleurs très-vives dans la région nasale et de- 
puis quinze jours à trois semaines d’une impossibilité 
complète de respirer par la narine droite. Le nez parais- 
sait énorme; une distension considérable à droite lui don- 
nait une forme très-irrégulière; une rougeur intense 
colorait les tégumens de l'aile droite. En sondant, il ren- 
contra, à un centimètre ou un centimètre et demi de l’ou- 
verture nasale un corps dur, rude au toucher qui fermait 
complétement le canal nasal. L’écartement de la narine 
lui permit également d’apercevoir un corps noirâtre au 
fond de cette cavité. Il se décida à l'enlever ; mais avant 
de recourir à l'emploi du bistouri , qui lui paraissait iné- 
vitable , il opéra quelques tractions sur ce corps avec 
une pince à dissection; et il eut la satisfaction de parve- 
nir à force de temps et de patience à l'amener au dehors 
de la narine. Quelques gouttes d'un pus corrompu et 
très-fétide, mêlé de sang suivirent l’extraction de ce 
corps. 

De retour chez lui, M. Pury procéda à l'examen de 
ce singulier corps. Il était noir, parsemé de taches grises; 
sa consistance élait dure, semblable à celle d'un os, sa 
forme était celle d’une espèce de croissant irrégulier ; sa 
plus grande longueur était de 38 millimètres; sa hau- 
teur était de 25 environ, et sa largeur de 20. Il était 
passablement épais au milieu, mais il diminuait de hau- 
teur et de largeur vers un des bouts du croissant, tandis « 
que ces dimensions étaient sensiblement les mêmes à 
l’autre bout qu'à la moitié. Ses deux faces principales 
correspondaient aux deux bords du croissant; la supé- 
rieure était convexe et l’inférieure concave. D'un bout à 
l’autre de la face concave, s'élevait une espèce de crète 


L 


AL lo SEE 


“ 


D 


— 143 — 


peu saillante au milieu et qui diminuait encore de hau- 
teur et disparaissait en s'approchant d’une des extrémités 
pour se relever vers l’autre, où elle se continuait avec 
une autre crête peu saillante partant du tiers environ de 


la face supérieure. La première*crète divisait la face in- 


férieure en deux moitiés irrégulières. La face supérieure 
convexe et les deux faces latérales étaient irrégulière 
ment bosselées, remplies d'aspérités et de dépressions. 

Le poids total du corps, desséché suffisamment, était 
de 7 grammes, 67 centigrammes. 

Croyant qu'il avait affaire à un os nécrosé et hyper- 
trophié, le D' Pury compara ce corps à tous les os de la 
face qui présentaient quelques rapports avec lui et qui 
auraient pu sortir par la narine, mais il n’en trouva au- 


 cun qui püt lui être comparé. Plusieurs de ses collègues 


auxquels il le montra, ne purent, ainsi que lui, rapporter 
ce produit à aucun os normal; mais ils étaient persuadés 
comme il l'était lui-même, que ce corps si bizarre était 
un produit de l’hypertrophie et de la nécrose. 

Pour s'assurer si la composition chimique de ce corps 
différait beaucoup de la composition normale des os, le 
Dr Pury pria M. Nicolet d'en faire l'analyse; mais, avant 
de le livrer à l'investigation de cet ami, il demanda à 
M. Favre d'en exécuter le dessin sous différentes faces. 
Le D' Pury fit ensuite scier ce corps en deux moitiés 
longitudinales ; la scie qui avait de la peine à l’entamer 
tant il était dur, vint à rencontrer un obstacle, et le corps 
se brisa en morceaux. Il fut surpris de trouver au centre 
un noyeau de cerise, autour duquel la matière s'était 
déposée en couches concentriques alternativement blan- 
châtres et foncés. L'analyse démontre que les couches blan- 


— 144 — 
châtres étaient uniquement composées de phosphate et 
de car onate calciques avec quelques particules de ma- 
tière animale, tandis que les couches brunes étaient for- 
mées avec un peu de phosphate calcique d’une matière 
animale soluble dans l’eau, et les acides étendus , d’une 
autre matière animale répandant une forte odeur, et so— 
luble dans l’éther et d'une matière noire pulvérulente, 
insoluble dans l’eau et les acides étendus, qui ne pouvait 
guéres être autre chose que du tabac, dont cette femme 
prenait une grande quantité. Aux extrémités du caleul, 
on remarquait cette poudre noire groupée autour de pe- 
tites cavités, ou agglomérée irrégulièrement. 
M. Nicolet trouva dans cent parties : 


Matière animale soluble dans l'eau. . . .: 3,75 
» » » dans l’éther . . . 1,25 
» noire pulvérulente, insoluble dans 


l’eau, l'alcool, l’éther et les acides étendus. . 7,30 
Phosphate calcique. :. . . . . . . 85,00 
Carbonate calcique. . . A4. Lin 
Après cette exposition le Dr AN entra dans quelques 

considérations générales sur les calculs, leur formation 

et leur division ; ensuite il montra à la société les restes 
du calcul et les dessins du calcul et de quelques-uns de 
ses fragmens, faits par M. Favre. 

Le D' Pury termine sa communication en disant que 
depuis l'extraction de ce singulier calcul, il a visité plu- 
sieurs fois la femme chez laquelle il s'était développé, et 
qu'elle se trouve toujours parfaitement bien, sans res-— 
sentir la moindre douleur, ni incommodité quelconque. 


M. Paul Courvoisier prend la parole pour faire part à ' 


[A 


#. 


tentes SE TE césar S 


je fe 


— 145 — 
l'assemblée des éclairs qu'il avait vus dans la soirée du 
8 décembre, et pour demander si l'on était d'accord sur 
la cause de ce phénomène , si rare dans nos contrées. 
Quelques sociétaires, tout en reconnaissant qu'on n'a 
pas pu jusqu’à présent déterminer pourquoi l'atmosphère 
est souvent à cette époque de l’année chargée d'électri- 
cité, signalent d’autres jours où ce phénomène a eu lieu, 
entr'autres le 29 novembre et le # décembre, sans qu'il 
ait été suivi d'accidens extraordinaires. 
Dr Pury, secrétaire 


Séance du 29 décembre 1846. 


Présidence de M. Wurflein. 


Il est donné lecture des procès-verbaux de Neuchâtel 
en date du 26 novembre, et en particulier d'un mémoire 
du professeur Ladame sur le dorage galvanique d'un 
. intérêt tout-à-fait spécial pour la section. Quelques mem- 
. bres présents qui s'occupent de la fabrication de l'horlo- 
. gerie, tout en rendant hommage au travail de M. La- 
dame croient cependant que la dorure par le galvanisme 
nest pas encore arrivée au point de pouvoir remplacer 
entièrement la dorure au mercure. 

Louis FAVRE, secrétaire. 


Séance du 14 janvier 1847. 
Présidence de M. Wurflein. 


M. Nicolet dépose sur le bureau deux mémoires qu'il 
“offree n don à la société. Ce sont : 
Etude des vallées d’érosion du dépt du Doubs, par 


— 146 — 


feu M. J.-Bapt. Renaud-Comte. Besançon, 1846. Br. 40. 

Tableau de la hauteur au-dessus de la mer des prin- 
cipaux points de la principauté de Neuchâtel , par M. d'Os- 
tervald. Neuchâtel, 1845. (Extrait du 3e volume des 
mém. de la société des sciences naturelles de Neuchâtel.) 


M. Nicolet lit la note suivante sur les animaux fossiles 
trouvés dans lé terrain tertiaire d'Egerkinden (Soleure), 
par M. Gressly. 


Note sur les ossements fossiles trouvés par M. À. Gressly 
dans le bohnerz d'Egerkinden. 


Les ossements de mammifères que j'ai l'honneur de 
metre sous les yeux de la société ont été trouvés par 
notre collègue. M. A. Gressly, dans un dépôt de bohn- 
erz où ils se présentent sous la forme de brèche osseuse; 
ce dépôt est à peu de distance d'Egerkinden, village so- 
leurois. 

Ces ossements sont tous dans un mauvais état de con- 
servation, très-petits, usés ou brisés et plus ou moins al- 
térés ; les parties solides et les dents ont pu résister aux 
cours d’eau qui les ont charriés; ces fossiles ont été pré- 
servés de toute altération ultérieure par le dépôt dans 
lequel ils gisent. 

Les fragments déterminables appartiennent, suivant 
M. Hermann von Meyer qui les a examinés, à un grand 
carnassier dont l'espèce n’a pu être rigoureusement dé— 
terminée, par l'examen d’un fragment de phalange, aux 
Palæotherium magnum, Cuvier, Palæotherium medium 
Cuv., Anoplotherium commune, Cuv., à un nouveau 
mammifére représenté seulement par une dent, et auquel 
M. Hermann von Meyer a donné le nom de Tapirodon 


UE 


1 


se” 


— 147 — 
Gresslyi, au Lophiodon medium, Cuv. Deux fragments sont 
rapportés avec doute par M. H. von Meyer au Lophiodon, 
cinquième espèce d'Argenton, Cuv., et au Lophoidon Is- 
selense, Cuv. 

Le genre Tapirodon est voisin de l’Anoplotherium , il 
en différé ainsi que de ses sous-genres Dichobune et X1- 
phodon (‘). Les dents du Dichobune cervina et du Xipho- 
don, animaux à-peu-près de la même grandeur que le 
Tapirodon d'Egerkinden, se rapprochent autant des ru- 
minants , que le dernier s’en éloigne et se rapproche des 
pachydermes. 

Des cinq espèces non douteuses dont M. Gressly a 
trouvé les restes dans le dépôt de bohnerz d'Egerkinden, 
aucune ne se retrouve dans le terrain nymphéen de la 
vallée de la Chaux-de-Fonds; ce terrain appartient à la 
formation tertiaire supérieure ; la faune de l'étage supé- 
rieur différe beaucoup de celle des terrains inférieurs de 
la période tertiaire , les Palæotheriums, les Anoplothe- 
riums, sont aussi inconnus dans notre vallée que les Pa- 
læomeryx et les rhinocéros le sont à Egerkinden. Les 
analogues de notre bassin se retrouvent en grande partie 
dans les terrains supérieurs de la molasse suisse, dans les 
terrains tertiaires sub-pyrénéens du département du Gers, 
et dans d’autres localités de la France et de l'Allemagne. 

Trois espèces, savoir, les Palæotherium magnum, Pal. 
medium, Anoplotherium commune, sont communes au dé- 
pôt d'Egerkinden et aux gypses de Montmartre : dans 
cette dernière localité ces espèces sont associées avec le 
= Xiphodonte et les Dichobunes ; ces mammifères caractéri- 


(*) Le sous-genre Dichobune a été supprimé en partie depuis la création 
… du sous-genre Microtherium. 


a 


— 148 — 


sent les dépôts anciens de la période tertiaire. Les Lophio- 
don medium, Lophiodon Isselense et le Lophiodon cin- 
quième espèce d’Argenton, caractérisent l'époquemoyenne 
de la période tertiaire. Suivant quelques auteurs ces ani- 
maux se rattachent intimement aux Palæotheriums. 

D'après M. Hermann von Meyer, il existe une grande 
analogie entre le Bohnerz d'Egerkinden et le Bohnerz 
de Neuhausen dans le district wurtembergeois de Tutt- 
lingen ; les espèces qui ont été trouvées dans ces deux 
localités sont en partie les mêmes , entre autres les Pa- 
lœotherium magnum, Pal. medium, Anoplotherium com- 
mune. 

Voici l'énumération des ossements qui ont été recueil- 
lis dans le dépôt d'Egerkinden. 

19 Palæotherium magnum, Cuv. ; fragment d'une dent 
molaire supérieure. 

929 Palæotherium medium, Cuv.; molaire de la mà- 
choire inférieure gauche , molaire de la mâchoire supé- 
rieure droite et astragale gauche. 

30 Anoplotherium commune, Cuv.; pénultième molaire 
de la mâchoire inférieure gauche. 

4° Tapirodon Gresslyi, H. von Meyer; dernière mo- 
laire de la mâchoire inférieure droite. 

5° Lophiodon medium, Cuv. ; molaire de la mâchoire 
supérieure gauche. 


6° Lophiodon Isselense (?). Cuv.; molaire de la mà- | 


choire inférieure. 


1° Lophiodon, cinquième espèce d'Argenton? Cuv.; M 


fragment d’une molaire de la mâchoire supérieure. 


Le D' Pury fait lecture de la traduction de la note ï 


rte 


! — 149 — 
| que MM. Schünbein et Bôttger ont publié dans la Ga- 
» zette universelle d'Augsbourg du 3 janvier 1847 sur le 
* fulmi-coton, sa composition chimique et ses propriétés 
comparées avec celles de la xyloidine de M. Braconnot. 
Le Dr Pury rapporte quelques circonstances de la tour- 
née officielle qu'il a faite chez les doreurs au feu de la 
: Juridiction en 1846. Les ateliers de ces industriels ont 
diminué considérablement depuis l’année 1845. 
En 1845, on comptait dans la Juridiction 43 ateliers, 
. occupant 120 ouvriers. 
En 1846, on comptait 33 ateliers , occupant 89 ou- 
vriers. 
IL entre ensuite dans le détail des expériences faites 
à l'instigation de quelques sociétaires, par un doreur 
au feu. Ces expériences trouveront place dans le rapport 
Ë que la commission nommée pour examiner la manière 
j la plus convenable pour les ouvriers de se préserver des 
1 émanations mercurielles, se propose de présenter à la 
section. 


| M. DuBois D', après quelques considérations générales 
sur les polypes des fosses nasales, rapporte qu'il fut con- 
sulté , il y a peu de jours, par une jeune fille qui en 
avait plusieurs. Il en enleva une certaine quantité par le 
… procédé ordinaire; mais ayant reconnu une de ces ex- 
“croissances énorme et dont la racine était placée très- 
E arrière et en haut dans les fosses nasales , et qui at- 
- leignait par son extrémité inférieure le pharynx, et ayant 
“essayé vainement de le saisir par la bouche, il se décida 
“à la lier par le procédé de Dubois. En conséquence, il 
| Pénétra dans la cavité nasale avec une sonde de Belloc 


— 150 — 

munie d'un fil et eut le bonheur de saisir le polype et de 
le détacher par une forte constriction. IL met après ce 
rapport sous les yeux de la société ce polype qu'il avait 
extirpé dans la journée. Ce corps était muqueux, de 
forme ovoïde, d'une longueur de 52 millimS, et d'une 
largeur de 30 millimS environ; le pédicule en était plat; 
consistant et long de 30 millimS. A l'endroit où le polype 
était implanté sur le pédicule, il y avait deux excrois- 
sances de même nature que le polype, arrondies et pou- 
vant avoir de 8—10 millim$ de diamètre. 

À cette occasion le D' Droz dit que peu de jours au— 
paravant, il avait vu, à la Sagne, chez un enfant, qui 
en tombant s'était fracturé les os du nez, un emphysème 
de la muqueuse nasale tellement considérable, qu'il avait 
cru au premier abord avoir affaire à un polype, et qu'il 
avait traité avec succès cette affection par les astringens. 

D' Pury, secrétaire. 


Séance du 28 janvier 1847. 
Présidence de M. Nicolet, vice-président. 


MM. Micolet et Cave montrent à la société plusieurs 
pièces de montre dorées par M. Cave sans intermédiaire 
de poudre d'argent ou de mercure. M. Cave assure qu'il 
peut avec ce procédé donner à l'or toute espèce de cou- 
leur et il ajoute que dans ces pièces traitées par les acides 
concentrés, la couche d’or restera intacte quelque long 
que soit leur séjour dans les acides. 

L'examen de ce mode de dorage est renvoyée à la 
commission déjà nommée pour examiner le procédé Ger- 
bel. M. Nicolet demande qu'un concurrent et un membre 


— 151 — 


de la commission absent soient remplacés par MM. Fa- 
_ yre et Oscar Jacot. L'assemblée adopte cette proposition, 


M. Droz D", fait, au nom de la commission qui avait 
. été chargée d'examiner le plan de la voiture destinée à 
transporter les malades du Locle à l'hôpital Pourtalés, 
un rapport très favorable sur ce véhicule. Les conelu- 
sions en sont adoptées par l'assemblée, qui témoigne ce- 
pendant le désir que la caisse de la voiture soit assez large 
pour qu'on puisse y admettre au besoin deux malades. 


Le D' Pury dépose sur le bureau le mémoire que la 
. société zuricoise des sciences naturelles vient de publier 
sur son histoire, à l’occasion de son jubilé séculaire. 

Le D' Pury lit ensuite un résumé de ce mémoire. 


Le D' Pury lit le rapport suivant sur le mouvement 
des malades de la chambre de secours (hôpital de la 
Chaux-de-Fonds) pendant l’année 1846. 


- Mouvement de la Chambre de secours pendant l'année 18%6. 


Il y avait à la Chambre de secours le 127 janvier{ 846 : 
o malades 5 hommes 0 femmes. 
Ilen est entré pen- 
dant le cours de l’an- 
née 1846 114 » 78 » 36 » 


Total. 119 » 83: 0»22#136:. L » 
Il y aurait eu sans aucun doute plus de malades si 
l'humidité du local n’avait pas rendu nécessaire pendant 
deux mois, la fermeture de la chambre principale, con- 
tenant 6 lits. 


BULLET. SC. NAT. {. II, LE 


— 1492 — 
De ces 119 malades, 
a) 29 dont 13 h. et 16 f. étaient du canton de Neuchâtel. 


b)61 » 425» et19» desautrescantonssuisses. 

c) 29 » 28»et 1» Etrangers. 
Parmi les Suisses d’autres cantons, 
Berne avait fourni 24 hommes, 13 femmes. Tot. 37. 
Lucerne  » D..70ÿ 0 » AL 
Zurich » 3 » 0 » » AUGR 
Schaffouse » 0 » 1 » MM 
Fribourg  » 1 » 0 » D UE 
Vaud » 1 » 9 néte » 3. 
Genève » | » 1 » pr 118. 
Soleure » | » 1 » D'IASY. 
Uri » 2 » 0 »  QAL 3 
Argovie » 1 » 1 » D AO 
St-Gall » 2 » 0 » pren® 
Thurgovie » 1 » 0 » wie L- 

Total. . 42 » 19 » » 61... 


Parmi les étrangers, 
2 étaient de Russie et Pologne 2 h. 0 f. Total 2. 


5 » Français 5 » O0» oo» 5. 
s def Savoyard 1 »: 05. 00 
21.» Allemands 20 » 1 » » 21. 
Se subdivisant en 
1 de Hanovre 1 homme O0 femme. 

2 » Hesse-Darmstadt 2 » O0  » 
4 » Bade 4 » 0 » 
4 » Mecklenbg. Schwerin 1 » 0 » 
% » Lichtenstein L'RRRE) 0 » 
2 » Autriche 2 » 0 » 


— 153 — 


4 » Wurtemberg 3 hommes 1 femme 
1 » Nassau L'éubmout TRES 
2 » Sigmaringen 26,1.» 0. 0-2 


Ces 119 malades ont occupé 2,448 journées , ce qui 
établit une moyenne de 20 */119 journées par malade. 
Si à ce nombre de journées, on ajoute celui qu'avaient 
passé à l'hôpital les 5 individus qui y étaient au 1° jan- 
vier 1846, et qu'on en défalque les journées de sé- 
jour des individus dont le traitement n'était pas achevé 
au 31 décembre, on aura pour moyenne 22 °/112 jour- 
nées. 

- Îl ya eu en moyenne par jour 6 2/26; malades, 


De ces 119 malades : 


95 sont sortis guéris 67 h. 28 f. 
1 soulagé 1» O0» 
2 même état 2» O0» 

14 sont morts Tp 1:75» 


7 étaient encore en traitement au 31 déc. 6 » 1» 


Il y a eu parmi ces malades : a) maladies chirurgicales. 
3h. 0 f.atteints defracture du fémur. 


3 » 0» »  gangrène des pieds ensuite de con- 
gélation. 
1» O» » hémorrhagie ensuite de solution 
| de continuité. 
5» 1» » plaies contuses et contusions. - 
"4: 0 » » plaies par instruments tranchans, 
2» 0» » ulcères. 
1» O0» »  nécrose du tibia. 
RD 1% »  hygroma rotulier. 
2 » O0» »  luxation de l'épaule, 


— 154 — 
4 h. 0 f. atteints de chute et déchirement des vis- 
cères intestinaux. 


Ln« 0 » affection carcinomateuse de la 
bouche. 

0» {» »  abcès phlegmoneux. 

2 » O0» »  abcès tuberculeux, 


b) maladies internes (!). 


16 » 10 » atteints de fièvre typhoïde. 


16 » 7» » fièvre bilieuse. 

DU nn »  embarras gastrique simple ou com- 

pliqué de points pleurétiques. 

8» 35» »  rhumatismes aigus et chroniques. 
2» O0» » points pleurétiques. 

CARE »  pleuropneumonie bilieuse. 

4 « 0» »  érisipèles. 

199,5 » entérites (?). 

1» 0» » d'œdème des extrémités et du 

scrotum. 
0» 1» » _ictère et hépatite. 


0 » 1» »  hydropisie générale. 


(!) Un médecin de la Chaux-de-Fonds m’a envoyé comme affecté d’en- 
docardite un individu qui n’avait qu’un simple embarras gastrique guéri au 
bout de 5 jours; un autre a envoyé à l'hôpital un individu qw’il déclarait 
atteint d’érisipèle, de rhumatisme, de points pleurétiques et de catarrhe 
et qui n'avait absolument qu’un simple embarras gastrique provenant d’i- 
vresse, guéri en un jour par un simple purgatif. Un autre embarras gas- 
trique était compliqué d’orchite provenant de suites de voyage et peut-être 
aussi de blénorrhagie antérieure, guérie par la compression jointe à l’ap- 
plication d’emplâtre de Vigo eum Mercurio. 

(2 Parmi ces entérites , une d’entr’elles, chez une femme était due à 


une heïnie crurale, qui exigea plusieurs manipulations avant d’être ré- 
duite. j 


— 155 — 
O h. 1 f. atteints de oophorite chronique. 
1» O0» » phtysie tuberculeuse, (annoncée 
comme embarras gastrique; mort 
en janvier 18#7.) 


Chez 3 malades dont 2 avaient une fièvre bilieuse et 
l’autre une fièvre typhoïde, la variole s'est manifestée, 
sans qu'aucun autre malade ou personne de la maison en 
ait été atteint après eux, et chez un autre malade at- 
teint de fièvre bilieuse , il s’est déclaré une intermittente 
quotidienne, dont les accès ont été promptement coupés 
par le sulfate de quinine. 

Quant aux fièvres typhoïdes au nombre de 26, il y en 


a eu en: Janvier 1 O0 hommes 1 femmes. 
; Avril 3 0 » 3 » 
Mai RE D T0 » 
Juin Le ; th » 
Juillet dr » 0 » 
Août di d » 0 » 
Septembre 3 3 De 2 <N 
Octobre 3 2 » 1. » 
Novembre 1 1 AL à » 
Décembre 4 1 » A) » 


et aux fièvres bilieuses simples, ou compliquées de 
douleurs rhumatismales ou pleurétiques, il y en a eu : 


Janvier 2 1 hommes 1 femmes. 


Mars 2, 1 » { » 
_ Avril her ei danireti@nosrnx 
Mai MIN, » 2 » 
Juillet 4 3 » il » 
Août 3: 9 » 0 » 


— 156 — 
Septembre 1 1 homme 0 femme 
Octobre 1 1 » 0 » 
Novembre 1 1 » 0 » 


Il faut remarquer ici, comme on l’a déjà dit plus haut 
que pendant les mois d'août, de septembre et d'octobre, 
l'humidité du local et les fentes qui s’y manifestérent , 
ont dù faire évacuer la salle principale contenant 6 lits, 
que les hommes ont été placés dans la chambre des fem- 
mes , et que pendant cette époque, on n’admit, p. a. d, 
pas de femmes (la chambre supérieure de 2 lits étant oc- 
cupée tantôt par des hommes et tantôt par des femmes. 


Des 14 morts : 


9 (dont # hommes et 5 femmes) ont succombé à la 
fièvre typhoïde. 

Chez un des fiévreux, la mort est survenue lorsqu'il 
était en pleine convalescence, ensuite de convul- 
sions déterminées par la violence de coups de ton- 
nerre. Un autre mort de fièvre typhoïde a pré- 
senté à l’autopsie un cryptorchisme complet; 
{mon confrère le D' Landry en conserve les 
pièces.) 

1 homme à une variole confluente compliquée de fièvre 
typhoïde. 

{ homme à une déchirure du poumon et du foie,en- 
suite de chute. 

1 homme au tétanos, ensuite de gangrène des or- 
teils par congélation. 

1 femme à une pleuropneumonie typhoïde, apportée 
mourante à l’hôpital. 

{ femme à une hydropisie générale. 


— 157 — 
Le chiffre des morts qui est exactement le même que 
celui de l’année 1845, pour le même nombre de malades 
. doit paraître petit lorsqu'on réfléchit que : 

4° plusieurs ont été apportés presque mourants à la 
Chambre de secours. 

2° l'humidité et la mauvaise situation de la maison 
dont les chambres sont placées immédiatement sur le sol 
sont de nature à amener la mort d’un grand nombre de 
de malades. 

3° l’année 1846 a été pour la Chaux-de-Fonds bien 
plus meurtrière que les autres, car on y a compté 
60 morts de plus qu'en 1845. 

En 1845 il y a eu dans cette localité 294 décès. 

1846 » » 354 5» 

Les catholiques enterrés aux Bois, et les morts-nés 
ne sont pas compris dans ces chiffres. 

Les fièvres bilieuses et toutes les complications bi- 
lieuses ont été traitées avec succès par les sels antimo- 
niaux neutres ; les fièvres typhoïdes lorsqu'elles se pré- 
sentaient à leur début, étaient traitées également par 
l'émétique et les purgatifs salins, plus tard par le calo- 
mel employé ordinairement à petite dose (gr. jv. par jour 
en 2 fs), allié avec le camphre et la magnésie, et par 
Vassa fœtida en lavemens. M. Pury emploie aussi le calomel 
à des doses plus considérables de 8 à 12 grains par jour, 
sans que les effets en aient paru varier. Une fois les symp- 
tômes typhoïdes calmés, il s’est bien trouvé de l'emploi 
de la poudre de Dower, et des amers; quelquefois, sur- 
out chez les femmes, il administra l’aloës en petite quan- 

 tité. 
À part l’ouverture de quelques abcès, l’ablation de 


— 158 — 


quelques fragmens d'os cariés , la seule opération faite, 
a été l'enlèvement de 3 orteils, affectés de gangrène par 
congélation. 


Dr Pury secrétaire. 


Le D' Pury dit qu'ayant lu il y a 2 mois dans l’Abeille 
médicale que M. le professeur Piorry avait employé des 
vésicatoires appliqués sur la face, comme moyen abortif 
de la variole, il s’en était servi deux fois avec un plein 
succès. Dans un des cas, le malade, enfant de 12 ans, 
non vacciné avait une variole confluente, au commen- 
cement de la période pustuleuse , un pouls petit et fili- 
forme , des délires, les paupières complétement fermées. 
Un large vésicatoire fut appliqué sur la joue gauche. Le 
lendemain les pustules qui avaient été recouvertes par le 
vésicatoire avaient disparu , le pouls était normal, les 
paupières étaient libres, et les autres parties de la face 
étaient en voie de dessication , tandis que celles du corps 
ne commencèrent à se dessécher que 2 jours après. 

Le second cas est relatif à un homme de 40 ans, vac- 
ciné dans son jeune âge, mais chez lequel les accidens 
de la période éruptive de la variole se montraient avec 
force; une masse de boutons rouges recouvrait la figure; 
un vésicatoire de 2#4/! carrés (6/! sur #/!) fut appliqué 
sur le front; les boutons avortèrent non-seulement sur le 
front mais sur toute la face et n’arrivèrent pas à l'état w 
pustuleux tandis qu’ils parcoururent toutes leurs phases » 


sur le reste du corps. 
Dr Pury, secrétaire. 


— 159 — 


Séance du 10 février 18#7. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


M. Nicokt présente de la part de M. le D' Baswitz l'ou- 
vrage suivant dont il fait don à la bibliothèque de la sec- 


tion : Joh.-Frèd. Meckel M. D., Tractatus anatomico-phy- 
- siologicus de quinto pare nervorum cerebri, duab. figurar. 


tabul. illustratus. Gottingæ, 1748, in-4°. 


Le Dr Pury lit un mémoire intitulé : Considérations sur 
les classifications des mammifères et sur une nouvelle division 
de ce groupe de vertébrés. 

Après l'exposition du sujet, M. Pury esquisse en quel- 
ques traits les principales classifications qui ont été faites 
pour les mammiféres depuis celles d’Aristote jusqu'à nos 


jours. 


Dr Pury, secrétaire. 


Séance du 25 février 1847. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


Il est fait lecture des procès-verbaux de la société de 
Neuchâtel du 21 janvier et du mémoire de M. Desor sur 
le soulèvement de la Scandinavie et sur la période à la- 
quelle on doit attribuer la formation des æsars, la sub- 
mersion et l'exondation de la péninsule Scandinave (°). 


M. le D'° DuBois rend compte d’un empoisonnement 
par le camphre qu'il a été appelé à soigner l’un des jours 
de la semaine précédente. 


_(!) Voir Bulletin de la Société de Neuchâtel, page 36. 


— 160 — 

Un horloger d'ici qui avait une grande confiance dans 
le système Raspail, avait fait pulvériser par son ap- 
prenti une certaine quantité de cette soi-disant pana- 
cée. Celui-ci, séduit par le goût et l'odeur que le camphre 
exhalait, en avala à une heure après midi une certaine 
quantité, équivalente d’après ce qu'il assura à la grosseur 
de deux noix, soit environ une once (30 grammes). 
Entre 4 et 5 heures de l'après-midi, cet apprenti âgé 
de 15 ou 16 ans, se sentit pris subitement de suffoca- 
tions, et d’une angoisse invincible, qui lui faisait regar- 
der la mort comme imminente. Le D' DuBois, appelé sur 
ces entrefaites, constata que cet individu, à part l’an- 
goisse et l'horreur de la mort qu’il manifestait à chaque 
instant par ses cris et les hallucinations qu'il avait (il 
croyait voir des hommes à côté de lui), ne présentait au- 
cun autre symptôme. La pupille était dans son état nor- 
mal , sans être contractée ni dilatée ; son pouls n’était ni 
accéléré, ni ralenti; au contraire, l'intervalle et le choc 
des pulsations étaient parfaitement normaux, et rien au 
monde dans les traits du malade ne trahissait cette an- 
goisse, qui continua toute la nuit, malgré les prescrip- 
tions du D' DuBois (du café noir et des lavemens purgatifs) 
et qui ne cessa qu’au matin à 8 heures, après l’adminis- 
tration d'un purgatif salin. 

Une discussion s’engagea ensuite sur les effets que le 
campbre produit sur le système nerveux: plusieurs mem- « 
bres de l'assemblée l’envisagent comme un excitant et M 
d'autres comme un calmant:; chacun citant des faits et 
des auteurs pour appuyer sa manière de voir. Le D' Droz M 
cite à cette occasion l’histoire d’une jeune fille hystérique \ 
qu'il avait eue en traitement et qui avalait chaque matin 


— 161 — 
une certaine quantité de camphre, ce qui lui donnait des 
extases analogues à celles que l’opium produit sur ceux 
qui le fument. 


M. Micolet présente deux appareils à inhalation d’éther, 
dont l’un est un flacon à deux tubulures et l'autre qui a 
été fait par lui sur le plan de celui qui est représenté dans 
Wlllustration de Londres { The illustrated London-News. 
Febr. 6, 1847) ('). 

MM. les docteurs DuBois et Landry rendent compte 
des principales expériences faites sur ces inhalations en 
France et en Suisse. Le reste de la séance est remplie par 
des expériences analogues auxquelles quelques sociétaires 
ont voulu se prêter. La machine anglaise paraît de beau- 
coup supérieure à celle du flacon à deux tubulures , et à 
celle de Charrière dont le dessin est présenté. 

Dr Evry, secrétaire. 


Séance du 13 mars 1847. 


Présidence de M. Wurflein. 


M. le Dr Pury présente tant en son nom qu'en celui 
de M. le D' Landry les pièces pathologiques d'un mdi- 
vidu âgé de 22 ans, affecté de cryptorchisme , qui était 
mort à la Chambre de secours, de la fièvre typhoïde. Le 


(!) Cette machine qui est en tôle est très-ingénieuse. Par son moyen, 
n peut graduer parfaitement linhalation. La machine présentée par 
M: Nicolet diffère de celle publiée par l’IT. London News, en ce qu’elle 
offre pas de chambre pour l’eau chaude destinée à vaporiser Péther et 
par deux soupapes adaptées par M. Julien Huguenin au tube inhalateur 
1 et dont l’effet est d'empêcher l’air atmosphérique de se mêler à l’air ethé- 


L 7 


_h et l’air exhalé par les poumons de rentrer dans la machine. 


— 162 — 

testicule et l'épididyme, gros ensemble comme une fève, 
étaient restés dans le canal inguinal près de son orifice in- 
terne. Le cordon spermatique présentait quelques circon- 
volutions, mais était atrophié dans le sens de son dia- 
mêtre qui n'aväit guëres que ‘/; ou ‘/2 ligne; la vésicule 
spermatique également atrophiée était entourée d’un tissu 
graisseux ; la verge était petite, longue de deux centi- 
mètres, et avait un diamètre de 6 à 7 millimètres ; le 
scrotum était réduit à deux petits appendices adipeux ! 
d’un centimètre environ de longueur; les poils de la ré- 
gion pubienne manquaient presque totalement, et ceux 
qui existaient étaient petits et minces; il n'y avait aucune 
trace de barbe; la voix était grèle; le cartilage thyroïde 
était peu développé, et l'angle pubien était arrondi. Outre 
ces’ difformités le sujet en question présentait un sternum 
large de 4 à 5 centimètres et long de 1Q à 11 centi- 
mètres ; l’'appendice xiphoïde rentrait en dedans et for- 
mait un angle à-peu-près droit avec le corps du sternum; 
la poitrine bombée extrêmement présentait également une 
hauteur très-peu considérable. Cet individu, charpentier 
de son état, était cependant malgré ses difformités d’une 
force considérable. Il employait tous ses soins à cacher 
ses difformités , et malgré les délires intenses où il était 
les derniers jours de sa vie, on ne pouvait lever la cou- 
verture de son lit, sans qu’aussitôt il ne prit sa chemise 
pour couvrir sa nudité. 


M. Favre présente une collection de champignons hy- 
ménomycètes de nos montagnes qu’il a dessinée pendant 
l'été et l'automne derniers. Cette collection composée d’en- 
viron 130 espèces dessinées avec une précision rare, a 


— 163 — 
été déterminée par M. Trog. Dans ces champignons se 
trouvent 57 espèces du genre agaricus. 
Genre hygrophorus 7 espèces. 

» cortinarius 

»  coprinus 

»  russula 

» marasmius 

»  paxillus 

»  Jactarius 

» merulus 

» hydnum 

»  polyporus 

» Jlenzites 

»  Jleotia 

» clavaria 

» spathularia 

»  bovista 

» peziza 

»  lycoperdon 

»  bulgaria 

»  nidularia . 

» licea 

»  boletus 

»  guepinia 
M. Favre fait ensuite la description des genres et des 
sous-genres dont il possède des espèces, et annonce qu'il 
se propose de compléter sa collection en dessinant tous 
es hyménomycètes de nos montagnes. 


RO > > pe & 10 me me OÙ me mt O9 C9 me GO mb p9 O1 À 4 


» 


M. Nicolet présente à la société plusieurs dons faits par 


- Charles Jacot-Guillarmod à nos collections. Ces dons 
consistent en : 


— 164 — 

1° Une collection d'insectes, en grande partie de l’ordre 
des coléoptères , provenant du Mexique. 

20 Une dite de coquilles terrestres et fluviatiles du 
même pays. 

30 Une dite de roches également du même pays. 

4° Divers autres objets d'histoire naturelle et entr'au— 
tres quelques branches de l’Avocatier. (Persœa gratissima 
Gærin) et d’une espèce de chêne, avec la singulière dé- 
formation produite par un arbuste parasite. 

5° Une divinité Mexicaine. L 

6° Plusieurs vases et instruments Mexicains. 

Ces derniers objets ont été trouvés en 1845 avec des 
crânes et d’autres ossements humains qui sont tombés en 
poussière au contact de l’air, et des instrumens de musique 
que les ouvriers employés à la fouille ont brisés mala- 
droitement , dans un tombeau situé dans la propriété de 
St-Jean Tetla sur la pente orientale du volcan appelé 
TIxtlasihuatl (ce mot signifie en idiôme mexicain, femme 
à la chevelure blanche) contigu à celui de Popocatepetl 
dans le département de Puebla (Mexique). Le tombeau 
dans lequel on a trouvé ces objets était construit en pierres 
taillées et ciselées avec une grande élégance, au milieu 
d'une forêt de vieux et majestueux sapins et chênes. 

M. Nicolet accompagne cette présentation de déclara- 
tions à l'appui. 

D' Puory, secrétaire. 


Séance du 25 mars 1845. 
Présidence de M. Wurflein 


M. Favre lit au nom de la commission chargée d’exa- 
miner divers procédés de dorage , le rapport suivant : 


— 165 — 


Rapport de la commussion nommée par la Société des sciences 
… naturelles de la Chaux-de-Fonds, pour examiner diffé- 
rents procédés de dorure. 


Chacun sait qu'il est d'usage dans la fabrication de 
l'horlogerie de recouvrir certaines parties des montres 
d’une légère couche d'or destinée à les préserver de l’oxi- 
dation. 
On a employé jusqu'à ces dernières années, pour dorer 
les pièces de laiton, l’amalgame d’or qui convenablement 
» chauffé laisse évaporer le mercure tandis que l'or reste 
étendu sur la surface de la pièce en couche mince et 
égale. Ce procédé réunit toutes les conditions de solidité 
et de beauté désirables ; les dorages ainsi obtenus présen- 
tent les qualités suivantes : 

Quoique fort légers, ils sont capables de protéger les 
+ pièces qu'ils recouvrent; d’ailleurs, à la simple vue on peut 
reconnaître si un semblable dorage est bon ou mauvais. 

Les acides, quelque énergiques qu'ils soient, répandus 
sur la surface dorée ne l’attaquent en aucune facon. La 
couche d’or frottée avec une brosse chargée de pierre 
ponce en poudre s’use, mais ne s’enlève pas par lambeaux, 
il en est de même quand on la frotte avec un brunissoir, 
car alors elle se polit et aucune parcelle, même très-lé- 
gère , ne peut en être détachée. 
: Quand on fait un trou dans une plaque de laiton dorée 
au mercure et qu'on la plonge dans l'acide nitrique, le 
laiton se dissout par l’action de l’acide et il ne reste que 
la mince couche d'or qui en recouvrait la surface. Quand 
on fait subir cette opération aux cuvettes de montres do- 
È rées sur leurs deux faces, on obtient une feuille d’or 


— 166 —- 

double qui présente tout-à-fait l’aspect extérieur de la cu- 
vette avec tous les accidents de sa surface, ainsi que les 
gravures que l’on y a tracées ; on croirait voir la cu— 
vette entière, mais ces feuilles sont si déliées que le plus 
léger soufle les soulève et les emporte. Du reste, mal- 
gré leur ténuité elles ne présentent aucune ouverture, 
aucune crevasse ; en un mot, aucune solution de conti- 
nuité; c'est précisément pour cela qu’elles préservent le 
laiton de l’action des acides qui n’attaquant pas l'or, ne 
peuvent arriver jusqu’à lui. 

D'après ce qu'on vient de dire, on voit qu’au bout de 
longues années , les pièces d’une montre dorées au mer- 
cure seront encore aussi belles, aussi bien protégées, que 
le premier jour et ne présenteront aucune trace d’altéra- 
tion. 

En face de pareils avantages , il serait ridicule de cher- 
cher à appliquer l'or par un autre moyen, qui, peut-être 
n’aménerait pas à d'aussi beaux résultats. Mais depuis 
longtemps, les fàächeux effets des vapeurs mercurielles sur 
la santé des ouvriers sont suffisamment connus, et l’on 
ne peut qu'applaudir aux généreux efforts qui ont été 
tentés dans le but de remplacer par des procédés dépour- 
vus de tout danger, cette dorure au mercure qui a fait 
tant de victimes. 

On a souvent essayé de dorer par des procédés méca- 
niques qui dispensent de l'emploi du mercure, au moyen 
de l'application de l’or en poudre ou en feuilles très- 
minces; on à aussi employé des solutions ethérées d'or 
qu'on étend sur les métaux, c’est ainsi en particulier qu'on 
a doré longtemps le fer et l'acier. Enfin, on a fait des ten- 
tatives pour dorer le laiton en le plongeant dans des dis- 


| 
| 
| 


— 167 — 
solutions d'or rendues aussi neutres que possible. Mais 
ces procédés ne donnent pas des dorages comparables à 


‘ceux qu'on obtient avec le mercure. 


En 1838, on commença à employer en Angleterre 
une dissolution d'oxide d'or dans la potasse, pour la do- 
rure, au lieu du procédé par l’amalgame. Pour cela on 
plonge la pièce d'argent, de cuivre ou de laiton dans un 
bain bouillant préparé en dissolvant du chlorure d’or dans 
cent trente fois son poids d'eau à laquelle on ajoute une 
quantité de bicarbonate de potasse égale à sept fois le 
poids du chlorure d'or. Mais on emploie avec l'argent le 
contact d'un fil de fer poli pour le rendre électro-négatif 
et pour faire précipiter l'or à l’état métallique (‘) ; ce der- 
nier procédé est encore en usage dans notre fabrique pour 
dorer des boîtes d'argent. 

M. De la Rive est le premier qui a eu l’idée d'employer 
les courants électriques pour l’application de l'or ; il pen- 
sait que le courant décomposant une solution d'or amè- 
nerait l'or métallique molécules par molécules, sur le 
métal qui servirait de pôle négatif, et pourrait ainsi le 
dorer, en faisant pénétrer intérieurement l'or dans sa sur- 
face. Il fit ses premiers essais en 1825 , mais ils ne furent 
pas couronnés de-.résultats bien satisfaisants puisqu'il ne 


réussit à dorer que du platine. Quant au laiton et à l’ar- 


gent, ils refusèrent constamment de recevoir les moindres 


parcelles de dorure. Plus tard il renouvela ses essais, 


… mais au lieu d'employer une pile à plusieurs éléments, 
: 


il se borna à employer un seul couple formé d’un mor- 


(1) Voir la note de M. De La Rive sur un procédé électro-chmique pour 
dorer l'argent et le laiton. 


BUILET. SC. NAT: t. HI. 12 


— 168 — 

ceau de zine communiquant par un fil métallique avec 
l'objet à dorer qui joue le rôle de métal négatif ; ce der- 
nier est plongé dans une dissolution d’or contenue dans 
une membrane très-mince, et le zinc est immergé dans de 
l'eau acidulée qui l'attaque légèrement. Par ce moyen 
il réussit à dorer avec succès des objets d'argent et de 
laiton. 

Aussitôt que le procédé de M. De la Rive fut connu 
dans nos Montagnes, on chercha à l'appliquer à l'horlo- 
gerie pour dorer certaines parties des montres qui ne de- 
mandent qu'une couche d’or légère et polie, comme les 
cadrans , les cuvettes, les boîtes, etc.; plusieurs personnes 
s'en occupèrent avec assez de succès ; mais il y avait loin 
des dorages exécutés de la sorte, à ceux produits par le 
mercure , aussi paraissait-il peu probable qu'on püt ar- 
river jamais à remplacer ce dernier procédé, et l’on se bor- 
nait à former des vœux et des souhaits. Cependant l'u- 
sage fit trouver dans ce nouveau moyen plusieurs défauts 
qu'il aurait été important de modifier, car on ne peut do- 
rer que des objets plats, de petite dimension , sans an- 
fractuosités où un linge ou une brosse ne puisse pénétrer ; 
la couleur n’est pas celle que le commerce exige , elle a 
toujours quelque chose de noirâtre; il est difficile et coù- 
teux de se procurer une dissolution de chlorure d’or com- 
plètement neutre, et il est évident qu’à chaque molécule 
d'or qui se dépose, la partie de chlore qui tenait cet or en 
dissolution devenant libre, attaque les points non encore 
dorés et les noircit ; enfin l'emploi des membranes déli- ” 
cates que prescrit M. De la Rive ne peut manquer de cau- 
ser de grands mécomptes, par la difficulté de les établir. 


| 


ste. = 


— 169 — 

et par les infiltrations que la moindre lésion peut provo- 
quer (!). | 

MM. de Ruolz et Elkington proposérent en 1840 une 
importante modification du procédé de dorure galva- 
nique basée sur la décomposition à l’aide d’une forte pile 
à courant constant, du cyanure d’or dissous dans le cya- 
nure de potassium , liquide qui ne peut attaquer le métal 
à dorer, comme le fait le chlorure d'or du procédé de 
M. De la Rive. Cette découverte eut un grand retentisse- 
ment, les journaux la publiérent et peu-à-peu on cher- 
cha à l'employer chez nous. C’est alors qu'on vit pour la 
première fois, nos feuilles d'avis annoncer la vente de 
piles à force constante, qui continuèrent à faire irruption 
chez nous vers 1842, et c'est alors aussi, que commen- 
cèrent des tentatives sérieuses pour appliquer la dorure 
au galvanisme à toutes les exigences de notre fabrique 
d'horlogerie. 
+ Quels que fussent les avantages des procédés dont nous 


venons de parler, ils ne répondaient pas encore à tous les 


besoins de notre industrie. La dorure au mercure présente 
un aspect mat et vermiculé fort agréable à la vue, que l'on 
nomme le grainé; les ouvriers l’obtiennent en frappant 
avec une brosse la pièce de laiton sur laquelle ils vien- 


- nent d'étendre l’'amalgame. Or c’est une chose reçue dans 
- le commerce, que certaines pièces de la montre, comme 
… les ponts, les barrettes, les platines reçoivent cette do— 


rure si riche et si éclatante, et tant que les procédés gal- 
yaniques ne fournissaient pas les moyens de l'obtenir, il 
restait une large lacune qui ne pouvait être comblée que 


2 (!) Voir un rapport sur ce sujet, fait à l’Académie par M. Becquerel, 


— 170 — 
par l'emploi du mercure. C’est dans nos montagnes, que 
l'on devait inventer les procédés au moyen desquels on 
peut obtenir la dorure vermiculée ou le grainé sans le 
secours de l’'amalgame. Mais ce n'est qu'après de longs 
travaux et des essais de toute espèce, que l’on est par- 
venu à opérer ce genre de dorure ; on ne peut imaginer 
les nombreuses. expériences, les essais renouvelés , les 
efforts opiniâtres qui ont été tentés dans ce but dès l’ori- 
gine de la dorure au galvanisme, et l’on ne peut qu'ap- 
plaudir au zèle et à la persévérance de ceux qui ont vu 
dans cette découverte, tout un avenir ouvert devant eux. 

On crut d’abord pouvoir grainer la surface du laiton 
par l'action corrodante d’un acide étendu quelconque, 
avant d'appliquer la dorure ; mais, lors même qu'on au- 
rait pu obtenir de beaux dorages par ce procédé, certaines 
parties de la montre n'auraient pu subir cette action sans 
être plus ou moins dégradées. On crut aussi parvenir à 
résoudre la difficulté en employant à la brosse la poudre 
d'émeri ou de pierre ponce. Mais, tous ces moyens furent 
abandonnés aussitôt. 

Les premiers résultats satisfaisants furent obtenus par 
MM. Olivier Matthey et Jeanneret du Locle, qui eurent 
l'idée de grainer la surface du laiton, comme on le fait 
pour l'argent. Ayant réussi à se procurer le procédé de 
grainage qu’emploient depuis longtemps les fabricants de 
cadrans d'argent, ils l’appliquèrent au laiton et couvri- 
rent la surface décapée de ce dernier métal d’une couche 
de poudre d’argent étendue à la brosse, puis précipitant 
à l’aide de la pile une masse d'or plus ou moins grande 
sur celle surface ainsi préparée , il en résulta une dorure 
d'un beau grain et plus régulière que celle obtenue par 


— 171 — 
le mercure. Ce procédé fut l'objet d'un rapport fait à la 
Société d'émulation patriotique de notre pays, et valut à 
chacun des deux inventeurs une mention très-honorable 
et une médaille d'or. 

En général les procédés nouveaux qui prennent nais- 
sance au milieu de notre population industrielle, trou- 
vent toujours un grand nombre d'adeptes, qui se jettent 
dans les routes récemment ouvertes , avec la ferme con- 
viction de faire fortune. Cette fois les choses se passèrent 


-de même; en peu de temps on vit se former une cohorte 


de doreurs au galvanisme, qui livrèrent bientôt au com- 
merce une grande quantité de dorages auxquels on fit 
d'abord un assez bon accueil. Quant aux artistes qui con- 
tinuaient à dorer au mercure, ils commencèrent à crain- 
dre une concurrence fatale ; quelques-uns mêmes épou- 
vantés par cette révolution laissèrent l’amalgame, pour 
la pile. 

Cette application de grainage à l'argent qui fit grand 
bruit à sa naissance, ne tarda pas à être jugée ; ce n'est 
pas au sortir des mains du doreur que l’on peut appré- 
cier la bonté d'un dorage , mais seulement au bout d'un 
certain temps et quand les montres ont été soumises à 
des influences diverses, que l’on peut voir comment il se 
conduit. On reconnut bientôt la grande infériorité de ces 


… produits comparés à ceux fournis par le mercure. Le 


grand inconvénient provient surtout, de la couche inter- 


. médiaire d'argent et du peu d’adhérence de la pellicule 
… d'or que l’action galvanique précipite dessus. Le moindre 


frottement exercé à sa surface enlève rapidement l'or et 


meltant la couche d'argent à nu, produit un effet désa- 
gréable à la vue et inadmissible dans le commerce. Ces 


— 172 — 
défauts , joints à plusieurs autres ont failli compromettré 
le succès des procédés autres que ceux par l’amalgame. 

C'est au moment où les inconvénients de la dorure au 
galvanisme se présentaient dans tout leur jour et où elle 
tombait en discrédit, que M. Gerbel annonça par un mé- 
moire présenté à la Société des sciences naturelles de la 
Chaux-de-Fonds , le 22 mai 1845, qu'il venait de décou- 
vrir un procédé au moyen duquel il pouvait dorer le 
grainé sur les pièces d'horlogerie qui demandent ce genre 
de dorure, sans le secours du mercure, sans couche: in- 
termédiaire d'argent et au prix adopté pour ce genre d'ou- 
vrage ; 1] assura de plus que ses résultats étaient d’une 
belle apparence et d’une solidité suffisante. 

Cette communication était importante, aussi la Société 
nomma de suite une commission pour examiner cette af- 
faire ; si elle a tardé jusqu’à présent de faire son rapport, 
ce n'est pas que le procèdé de M. Gerbel n’en valut pas 
la peine, mais comme il était encore dans sa naissance, 
et qu'il paraissait avoir de grandes chances de perfection- 
nement, on pouvait penser que des modifications ne se 
feraient pas attendre. D'ailleurs une chose importante 
était faite, c’est l'établissement de la priorité de M. Gerbel 


dans une découverte belle et utile, qui sera pournosmon- 


tagnes un titre d'honneur et pour son inventeur un droit 
à la reconnaissance de l'humanité. 

La commission s’est occupée de l'examen des diffé 
rentes: pièces dorées mises sous ses yeux par M. Gerbel, 
et elle a été unanime pour décerner à cet artiste les justes 
remerciements dus à son travail et à ses efforts ; ces do— 
rages offraient une surface également vermiculée ou grai- 
née d’une belle apparence: soumis à l’action de l'acide 


D és nm: dé SSL AE 2 Li 


CR né Éd 


— 173 — 

pitrique ils ont fini par être attaqués el ont pris une cou- 
leur violacée , la feuille d’or formant la dorure se déta— 
chait avant l'entière dissolution de la pièce de laiton ; du 
reste, le cabron couvert de rouge, la brosse avec la poudre 
de chaux n’altéraient en rien la surface dorée et n’en en- 
levaient aucune parcelle comme cela serait indubitable- 
ment arrivé avec des dorages au galvanisme. Ainsi ces 
dorages laissaient encore à désirer sous le rapport de leur 
solidité comparée à celle des dorages au mercure que 
l'on doit toujours prendre comme point de comparaison. 

Le procédé de M. Gerbel consiste à appliquer directe- 
ment et par le moyen d’une brosse le mélange à dorer 
sur les pièces qui doivent le recevoir, après que ces pièces 
ont été convenablement décapées. Cette opération se fait 
en les plongeant dans un mélange d’un tiers acide sulfu- 
rique, deux tiers acide nitrique et une petite quantité de 
sel de cuisine, Quand la couche d'or est étendue, on avive 
le grainé et on lui communique ce riche brillant qui donne 
tant d'éclat à cette dorure, en le frottant pendant un cer- 
tain temps avecune brosse de fils de laiton nommée gratte- 
bosse. Il n’est pas nécessaire de faire remarquer ici, que 
ce procédé n'a rien de commun avec l’ancienne dorure à 
froid par frottement dite au pouce, obtenue avec l'or en 
chiffons appliqué au moyen d'un bouchon sur des pié- 
ces de cuivre ou d'argent et qui donne une dorure sus- 
ceptible d'un bel éclat lorsqu'elle est passée à la sanguine 
ou au brunissoir. 

Depuis deux ans que, la dorure à la brosse est employée 


dans notre industrie et qu’on l’applique à un nombre con- 
»sidérable de montres, aucun reproche de nature à la com- 
promettre ne lui a été adressé par les fabricants d’horlo- 


— 174 — 
gerie et par les consommateurs. On a remarqué cependant 
que la couche d'or n'ayant pas ordinairement la teinte 
que réclame le commerce, on est obligé de la lui donner 
par un bain ou par l’action de la pile, qui étend sur la 
dorure une espèce de vernis assez éphémère pour qu'un 
léger frottement suffise à l’enlever. 

Aucune communication nouvelle de M. Gerbel n'étant 
survenue, la commission n'en restait pas moins dans l’at- 
tente, lorsque le 28 janvier dernier, il fut présenté à la 
Société des sciences naturelles plusieurs cuvettes dorées 
par le procédé Gerbel, perfectionné par M. Cave. Ces 
dorages étaient fort beaux et présentaient une variété 
dans le vermiculé, que M. Cave déclara obtenir à volonté ; * 
les uns étaient très-fins et miroitants, d’autres de grains 
de plus en plus gros, sans que leur aspect en fût cepen- 
dant désagréable à la vue. 

Cette présentation décida enfin M. Gerbel à faire pas- 
ser sous les yeux de la commission des échantillons de 
ses travaux, qui, examinés avec soin, présentèrent une 
supériorité marquée sur ce que l’on connaissait depuis sa 
première communication. Quant aux cuvettes de M. Cave, 
les acides n’exercèrent sur leur surface aucune action 
quelconque , pas plus que le cabron-et les brosses char- 
gées de chaux ; chauffées à différents degrés, ces pièces se 
conduisent aussi bien que des dorages au mercure; enfin, 
percées de trous pour livrer un passage à l’action des 
acides , elles furent attaquées intérieurement , le laiton 
fut dissous, et il ne resta que les deux feuilles d’or parfai- 
tement intactes et absolument dans le même état que celles 
qui résultent de dorages par l’amalgame. Nous devons 
remarquer ici que des cuveltes sortant des ateliers de 


| — 175 — 

L MM. Gerbel et Bovy, couvertes de magnifiques dorages 

_se sont comportées de même. 

* La commission eut l'avantage de voir opérer devant 

elle M. Cave qui s’en tire avec une merveilleuse habileté 
etune promptitude étonnante; elle put se convaincre de la 
vérité de ce qu’il avait annoncé , que sa dorure s ‘applique 
sur des pièces non décapées, aussi bien que sur celles qui 
l'ont été avec le plus de soin, et en peu de minutes, une 
platine adoucie depuis quelque temps , et déjà un peu oxi- 

 dée fut dorée, gratte-bossée et présenta sous la main exer- 

cée de cet artiste, le plus riche aspect, là où naguère se 

- montraient les traces de l’action de l’oxigène. 

M. Cave fait remarquer que certaines parties des pièces, 
comme les bords ou la tranche, ne recevant pas la couche 
d'or par l’action de la brosse, il est obligé de les dorer au 
galvanisme ; mais les procédés qu’il emploie sont si per- 
 fectionnés que la pellicule déposée adhère suffisamment. 
“ Autrefois ses batteries déterminaient un courant si éner- 
“gique, que la précipitation de l'or se faisait tumultueuse- 
ment et avec trop de rapidité, ce qui lui ôtait de son ad- 
- hérence ; mais il doit à l'obligeance désintéressée de M. le 
professeur Ladame, la construction d’un appareil fort in- 
L génieux destiné à modérer à volonté l’action du courant 
galvanique ; de sorte, qu'il peut obtenir maintenant une 
précipitation toujours égale, et des dorages fort adhérents. 
Après avoir examiné tout ce qui est relatif au nouveau 
procédé de M. Gerbel , et aux perfectionnements appor— 
“tés par M. Cave, la commission a été unanime pour dé- 
larer, que si on pouvait avoir l'assurance que tous les 
“orages livrés au commerce ont les qualités de ceux qui 
miennent de lui être présentés, elle ne craindrait pas de 


— 176 — 

dire que la dorure au mercure est remplacée ; mais, les 
dorages qu'elle a passés en revue ayant été préparés en 
vue de subir un examen, on peut croire qu'ils ont été 
l'objet de soins particuliers, et que la couche d’or dont on 
les a recouverts est plus riche que celle de ceux qui sor- 
tent tous les jours des ateliers de doreurs. Car il reste à 
faire une observation très-importante, c’est qu'avec ce 
nouveau procédé on n'a aucun moyen de reconnaître la 
qualité de la dorure ; le simple coup-d’œil ne peut don- 
ner aucune induction sur sa richesse ou sa solidité, comme 
pour la dorure au mercure, et c’est par là que cette der- 
nière conserve une supériorité que rien jusqu’à présent 
n'a pu lui enlever. Pour compléter ces découvertes siutiles, 
si intéressantes, il est à désirer que l’on découvre un 
moyen prompt et facile de distinguer le bon ouvrage du 
mauvais, sans être obligé d’avoir recours à l'analyse chi- 
mique qui nécessite une perte de temps et la destruction 
d’une pièce que l’on est contraint de sacrifier. 

On voit par ce qui précède le point où est arrivée la 
dorure dans nos montagnes ; d'une part le procédé au 
mercure considéré comme le plus parfait, mais entraî- 
nant à sa suite d'affreuses maladies et des accidents sans 
nombre ; et de l’autre les procédés que nous venons d’é- 
numérer, qui ont pris naissance au milieu de nous, qui 
peuvent être exercés en toute sécurité, qui fournissent 
des dorages beaux et solides, au même prix, dans un 
temps infiniment plus court et dans un local quelconque. 
Si nous jetons un regard dans l'avenir, nous pouvons pré- 
sumer que cette industrie, qui est dans son berceau, fera 
encore de grands progrès et qu'elle finira par remplacer 
le procédé meurtrier, depuis longtemps frappé d’une si 


— AT — 


» juste réprobation. Les doreurs au mereure paraissent sen- 
* tir eux-mêmes la position où ils se trouvent, et loin de 
- s'attacher follement à un métier qui les tue, on en voit 
qui cherchent dans d’autres branches de notre industrie, 
les ressources qui sont prêtes à leur échapper. Les recen- 
» sements et les visites officielles ont démontré qu'il y avait 
en 1845 dans la juridiction de la Chaux-de-Fonds qua- 
 rante-trois ateliers de doreurs à l’amalgame , occupant 
» cent-vingi individus, tandis qu'en 1846 il n’y avait plus 
que trente-trois ateliers occupant quatre-vingt-neuf per- 
.sonnes. 
Nous devons nous estimer heureux d’avoir vu luire le 
jour où l’on peut se dire : la dorure au mercure est sus- 
ceptible d'être remplacée; mais à qui le devons-nous? C'est 
aux artistes infatigables dont nous avons cité les noms, et 
en, particulier à M. Gerbel ; c'est à eux que nous devons 
-xouer notre reconnaissance, et si nous pouvons former 
un souhait en finissant ce rapport, c'est que la Société 
d'émulation patriotique prenne en considération leurs tra- 
waux couronnés de succès véritables. 
Le L. FAvRE, secrétaire de la commission. 
Chaux-de-Fonds, 25 mars 1847. 
Les membres de la commission, MM. Nicolet, Julien 
Huguenin, J.-Ch. Ducommun et Pury, D', présens à l'as- 
semblée, sont unanimes pour remercier M. Favre de son 
lapport et pour en adopter les conclusions. MM. Oscar 
WJacot et Gænseli, membres de la commission , sont ab- 
ents. L'assemblée toute entière se joint à la commission 
our exprimer ses remerciemens à M. Favre et pour ap- 
sui les conclusions du rapport. Elle décide aussi 
“qu'il en sera fait au conseil d'état et à la société d’ému- 


t 
lation patriotique , une communication officieuse. 


— 178 — 

Le D' Pury ht la note suivante sur M. Mathias Mayor 
et les innovations qu’il a proposées pour la chirurgie. 

« Le canton de Vaud et la Suisse tout entière viennent 
de faire une grande perte dans la personne de M. Ma- 
thias Mayor , docteur en médecine et chirurgie. Laissant 
à ses nombreux amis de sa ville natale le soin de faire 
sa biographie, de parler de son beau caractère, des soins 
assidus et dévoués qu'il donnait à ses malades, des en- 
couragemens qu'il donnait aux jeunes adeptes de la mé- 
decine, nous ne nous occuperons dans cet article que 
des progrès qu'il a fait faire à la chirurgie et qu'il a con- 
signés dans plusieurs ouvrages tels que : Nouveau sys 
tème de déligation chirurgicale. —La Chirurgie simplifiée, 
etc. etc., et dans nombre d'opuscules, qu'il serait trop 
long de mentionner ici. 

» Le grand but que s’est proposé M. Mayor, c'est de gué- 
rir en peu de temps, et de donner la plus grande sim-— 
plicité possible aux appareils de chirurgie. Toutes les fa- 
cultés de son âme semblaient s'être concentrées dans ce 
mot, simplicité. Les pansemens faits avec un morceau de 
linge pliè en triangle remplacent avec succès ceux que 
l'on faisait avec de longues bandes, souvent difficiles à 
se procurer, au moment où l’on en avait besoin; quel- 
ques morceaux de fil de fer, garnis de coton, s’adaptant 
avec la plus grande facilité au contour des membres, 
peuvent remplir avantageusement le rôle que l'on faisait 
jouer aux attelles en bois solide qui n'étaient tangeantes 
au membre fracturé que par un point de leur surface ; 
son marteau, plongé dans l’eau bouillante est plus simple 
et loin d’être aussi effrayant pour le malade que le moxa, 
et remplit le même but. 


ELA 


— 179 — 

» Toutes ses innovations , en un mot, sont marquées 
au coin du génie simplificateur ; toutes, même celles qui 
paraissent au premier abord les plus hardies et qui lui 
ont attiré les invectives de quelques-uns de ses confrères, 
placés au sommet de l'échelle médicale, se résument par 
ces mots: Semphfication dans l'appareil et le procédé 
chirurgical ; par conséquent plus de süreté dans la main 
de l’opérateur, et moins de douleur chez l'opéré. 

»Nous devons mentionner ici son cathétérisme forcé, ou 
avec des sondes de gros calibre, lequel, (ceci semble para- 
doxal) se fait plus facilement et caüse beaucoup moins 
de douleur que le procédé ordinaire. 

» En effet, lorsqu'on emploie de grosses sondes, on est 
beaucoup moins exposé à faire de fausses routes, que 
lorsqu'on tente le cathétérisme avéc de petites sondes, qui 
ne remplissant pas le canal de l’urètre, vont tantôt à 
droite, tantôt à gauche, tantôt en haut, tantôt en bas, 
sans que la main de l'opérateur puisse sentir ces dévia- 
tions. Dans son Traitement accéléré des ankyloses, il veut 
confier aux soins d'une chirurgie et d’une mécanique ra- 
tionnelles, des opérations abandonnées à des charlatans, 
qui, sans autre secours que la force de leurs bras, réus- 
sissaient quelquefois, là où des chirurgiens n'avaient pas 
osé faire l'opération. Au reste, nous ne nous prononce- 
rons pas sur la valeur de cette opération que l'expérience 
n'a pas encore suffisamment pesée. 

» Pour être justes, nous devons convenir que son ta- 
chytome , ou instrument destiné aux amputations , et dis- 
posé comme une guillotine, est une grande exagération 
de la simplification qu'il voulait apporter dans toutes 
choses. Cet instrument, qui peut convenir tout au plus 


— 180 — 

pour des réseclions de phalanges, qui seraient aussi bien 
faites dans les articulations d'après la méthode ordinaire, 
ne vaut rien s'il s’agit d'amputations de membres. En 
effet si l'on employait ce tachytome à des amputations de 
cuisse, quel moyen aurait-on? La rétraction des chairs 
est telle, qu'on laisserait l'os à découvert d'au moins deux 
ou trois pouces, et que pour obtenir une cicatrisation, 
il faudrait faire jouer l'appareil à deux ou trois reprises 
différentes. 

» Nous laisserons à nos auditeurs le soin de juger l'an- 
thropotaxidermie de M. Mayor , ou son procédé pour con- 
server les traits d'une personne morte, procédé qui n'est 
autre que celui qu'on emploie pour empailler des ani- 
maux. Nous ne voulons pas juger davantage son mémoire 
sur l’'Hippophagie et celui qu'il a publié sur le dessin 
Hnéaire. Suivant M. Mayor, il suffirait de quelques fils 
de fer pliés de différentes manières pour apprendre à 
dessiner. Nous conviendgons cependant que cette mamère 
de faire. saisir les contours des objets, peut être utile 
dans certains cas, par exemple : pour faire comprendre 
à des élèves en accouchemens, certaines positions de l’en- 
fant et la mauvaise conformation de certains bassins. 

»Mais de tous les services rendus à la science et à l'hu- 
manité par M. Mayor, le plus grand , sans contredit est 
d'avoir prouvé l’innocuité du coton sur les plaies et les 
avantages considérables que l'on peut tirer de l'emploi de 
ce végétal pour toute espèce de pansement. Il ÿ a quel- 
ques années, lorsqu'après une bataille, un siége, l’on 
manquait de charpie, on avait recours à de la paille, à 
du foin, pour appliquer sur les plaies des malheureux 
blessés. 


— 181 — 

» M. Mayor ne s'est jamais lassé de répandre ses doc- 
trines. Partout, dans toutes les réunions scientifiques, 
suisses et étrangères, il a préconisé le cathétérisme forcé, 
emploi du coton et de linges pliés en triangle pour les 
pansemens , et il a forcé quelques-uns de ses détracteurs 
à se ranger de son côté. Ses écrits qu'il envoyait libéra- 
lement à toutes les sommités de la science, comme aux 
pauvres médecins de campagne, et aux étudians en mé- 
decine, ont gagné bien des esprits à ses idées ; et les 
_incrédules, nouveaux Thomas, qui voulaient absolument 
plonger leurs doigts dans les plaies, ont pu aller voir 
les résultats de ses innovations à l'hôpital de Lausanne, 
dont il a été le directeur pendant bien des années. 

» Sans doute, on ne peut le nier, M. Mayor s’est sou- 
vent exagéré à lui-même les inconvéniens de l’ancien 
système de déligation, et les avantages de ses nouveaux 
procédés; mais, il faut en convenir, il a rendu de grands 
services à la science. L'expérience montrera ce qu'il faut 
conserver de ses doctrines, et ce qu'il faut en rejeter. » 


M. le Dr Jrlet annonce qu'il s'est servi avec un plein 
succès de la machine présentée dans l’avant-dernière 
séance par M. Nicolet pour l’éthérisation d’un homme 
auquel il voulait appliquer le cautère actuel, dans une 
étendue de 9 à 10 pouces des deux côtés de la colonne 
vertébrale. Le sujet, endormi complétement au bout de 
%à 5 minutes, ne manifesta pas le moindre sentiment 
de douleur pendant l'opération, qui comme l’on sait est 
des plus sensibles. Lorsqu'il fut complétement revenu à 
Jui, au bout de 3 à #4 heures de temps, il céclara qu'il 
n'avait absolument rien senti, si ce n’est une sensation 


— 182 — 
de chaleur derrière le dos qui ne lui produisit aucun sen- 
timent pénible. M. le D'Irlet annonce ensuite qn'il se 
propose de faire dans quelques jours l’'amputation de la 
cuisse à un homme auquel il fera préalablement respirer 
de l'éther, et qu'il rendra compte de la réussite de cette 
opération à la section. 
D' Pury, secrétaire. 


Séance du 8 avril 1847. 
Présidence de M. Nicolet, vice-président. 


Le Dr Pury expose les opinions qui se sont pronon- 
cées sur la soi-disant existence simultanée de mêmes 
animaux dans différentes époques géologiques. L'opinion 
de la simultanéité, soutenue par MM. de Blainville et 
Deshayes, a été combattue par presque tous les paléon- 
tologistes modernes , entr'autres par M. Agassiz pour les 
poissons et les coquilles, par M. Herrmann de Meyer pour 
les vertébrés supérieurs, et par M. Alex. Braun pour les 
végélaux. M. Agassiz a fait encore ressortir contre cette 
opinion des preuves d'un genre différent, c’est celle de 
bouleversemens semblables à l'époque glaciaire qui ont 
existé entre deux époques géologiques consécutives. 

Les fragmens d'insectes fossiles extrêmement rares 
n'avaient pas encore été jusqu’à présent assez étudiés pour 
qu'on pût soutenir ou combattre leur simultanéité dans 
deux époques différentes. M. le prof. Heer vient de com- 
bler cette lacune : il a étudié les débris d'insectes fossiles, 
que nous présentaient les schistes nymphéens d'OEnigen, 
il a déterminé 10{ espèces dont aucune n'appartient à la 
création actuelle (V. Bulletin de la société de Zurich, 
18#7 n° 2). 


— 183 — 
Le D' Pury rapporte diverses expériences comparati- 
ves, faites sur différentes espèces d’éther tant en France 
qu’en Allemagne. 


M. Nicolet, vice-président, présente à la. société pour 
pour être offerts à nos collections de la part de M. Numa 
Girard quelques fossiles et des dents des squales Oxyrhina 
Xiphodon, Agass., Carcharodon productus, Agass., et 
Carcharodon megalodon, Agass., qui ont été recueillies 
par M. Girard dans le dépôt tertiaire de l'ile de Malte ; 
ce gisement des dents du C. megalodon dans le terrain 
tertiaire Maltais était mis en doute par plusieurs natu- 
ralistes ; cependant ces dents sont assez abondantes dans 
la molasse de cette île, et même dans la ville de la Va— 
lette, pour permettre aux Maltais qui en font le commerce 
de les vendre à vil prix. 


M. Favre ayant appris par M. Cave qu'il s'était servi 
pour ses piles d'un perfectionnement qui lui avait été in- 
diqué par M. le prof. Ladame demande à la société de 
pouvoir intercaler ce fait dans son rapport, ce qui lui 
est accordé à l'unanimité. 

D' Pury, secrétaire. 


Séance du 22 avril 1847. 
Présidence de M. Nicolet, vice-président. 


Le Dr Pury donne un extrait du mémoire de M. le 
prof. Mousson sur l'électricité que développe la vapeur 
d’eau dans le moment où elle se forme (V. Bulletin de la 
société de Zurich, n° 1). 

D'Pury, secrétaire. 


lt. 15 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DB NIVILOATER 


Séance du 25 novembre 1847. 


Présidence de M. Louis Coulon. 


M. le Prof. Sacc annonce que continuant ses essais 
sur le dorage chimique, il a essayé le procédé Roseleur, 
qui consiste à plonger au-dessous de 100° C., les ob- 
jets en cuivre, bien décapés, dans un bain fait avec gr. 
4 de chlorure d’or, pour gr. 170 de pyrophosphate so- 
dique et gr. 1500 d’eau ; il a obtenu d’exéellents résul- 
tats, en opérant sur le cuivre ; la dorure sur le fer a été 
bien plus difficile et moins belle ; sur le zinc, elle a été 
tout-à-fait impossible, parce que ce métal précipite l'or, 
sous forme d’une poudre noire, qui n’adhère pas sur lui; 
ce qui vient de ce qu’en présence du pyrophosphate so— 
dique et de l’eau chaude, le zinc se dissout en décompo- 
sant l’eau, probablement, pour fournir au pyrophosphate 
son oxyde comme troisième équivalent de base. Pour que 
la dorure se fasse bien , on doit apporter la plus grande 
attention à ce que la quantité d’eau du baïn reste cons- 
tamment la même ; dès qu’elle diminue et que, par con- 
séquent , le bain se concentre, la dorure ne s'effectue 
plus bien et peut même cesser d’avoir lieu, M. Sacc 
expose ensuite les propriétés singulières que M. Persoz a 

IL. 14 


— 186 — 


découvertes dans les pyrophosphates, et tout spéciale 
ment celle de masquer le fer ; ce qui donne à la théra- 
peutique un précieux moyen d'administrer ce métal aux 
malades les plus délicats. 


M. Ch. Matthieu ayant demandé si la dorure au py- 
rophosphate était solide, et M. Sace ayant répondu affir- 
malivement à sa question, M. le Prof. Ladame dit 
qu'il regarde la solidité des dorures en général, comme 
en relation directe avec l’épaisseur de la couche d'or, en- 
sorte qu’il ne pense pas qu’on puisse donner le nom de 
dorures solides à celles qu’on obtient maintenant par voie 
chimique, puisque les objets dorés ne sont recouverts que 
par une couche d’or excessivement mince. Il ne croit pas 
que le dorage au pyrophosphate puisse être substitué 
dans nos montagnes au dorage par le mercure, parce 
qu’il ne peut pas donner aux pièces, comme ce dernier, 
l'aspect connu sous le nom de grainé. Pour que la dorure 
soit solide , il faut que l'or soit combiné avec le métal 
placé au-dessous de lui, ainsi que cela arrive dans le do- 
rage au mercure , et qu'il ne lui soit pas simplement su- 
perposé, comme c'est le cas avec les autres procédés de 
dorage. 


M. le Prof. Sace expose ensuite le procédé de prépara- 
tion des cuirs qu’il a découvert cette année, et qui con- 
siste à dépiler les peaux vertes avec le polysulfure cal- 
cique , à les tanner avec le chlorure zincique , et à les 
assouplir avec un sel déliquescent. 


Séance du 9 décembre 1847. 
Présidence de M. L. CouLon. 
-M. le Président dépose sur le bureau deux lettres. La 
premiére, des directeurs de la bibliothèque d’Albany, 


D De à à 


ÉD CREER 


— 187 — 


qui remercie la Société neuchäteloise pour le don de ses 
mémoires. La seconde lettre, du gouvernement de New- 
York, annonce, en échange de nos mémoires, l’envoi de 
13 volumes ainsi que d'une carte géographique , ayant 
trait à l’histoire naturelle de l'Etat de New-York, et pro- 
met qu'il nous enverra, à mesure qu'ils seront publiés, 
tous les autres volumes de cet important ouvrage. 

Ces deux lettres sont accompagnées par une troisième 
de notre illustre collègue, M. Agassiz, dont M. le pré- 
sident lit à la Société quelques fragments qui l'intéres- 
sent au plus haut degré. Les travaux de M. Agassiz por- 
tent essentiellement dans ce moment sur l'étude des 
animaux marins; il appelle d'une façon toute spéciale 
l'attention des naturalistes sur l'étude comparative des 
êtres vivants des classes inférieures, qui accompagnent 
l'homme en Europe et en Amérique, parce qu'il les croit 
différents en réalité, quoiqu'ils aient beaucoup de points 
de ressemblance. 


Extrait de la lettre de M. Agassiz. 


« Je vous serais infiniment obligé si vous vouliez 
» bien collecter pour moi tous les animaux qui vivent 
» en société de l’homme, ou dans les cultures et sur les 
» plantes, que l’on peut: considérer plus ou moins comme 
» domestiques. Je désire pouvoir les comparer avec les 
»,mêmes espèces de ce pays. Vous savez qu'il y a un as- 
» sez grand nombre de plantes et d'animaux qui passent 
».pour identiques dans les deux hémisphères. Je me suis 
».assuré, à plusieurs reprises, aulant qu'on peut faire 
»de pareilles comparaisons de mémoire, ou que les 


. » collections que j'ai sous la main, me permettaient de 


— 188 — 


» le reconnaître, qu'il y a réellement identité; mais, 
» toutes les fois que je suis arrivé à ce résultat, je suis 
» resté sous l'impression que les espèces en question pou- 
vaient bien être des espèces européennes introduites, 
accidentellement ou avec intention, par les premiers 
» émigrants. Par exemple, les mouches, les vers de terre, 
» les limaces des légumes, introduites avec des arbres, 
» ou des plantons de choux. Ce sont de ces animaux-là 
» que je n'ai pas songé à apporter avec moi, et que je 
» voudrais avoir en bon état, afin de pouvoir faire de 
» nouvelles comparaisons; puis, les parasites de l’homme, 
> des animaux, et certains insectes avec leurs larves. Il 
» n'y a pas de doute, je crois, que les papillons cardui, 
v atalanta, et antiopa, qu’on trouve ici, ne soient les 
> mêmes qu'en Europe; mais, comme on ne les rencontre 
» que dans le voisinage des établissements européens, je 
» présume que leurs œufs auront été transportés avec les 
» plantes sur lesquelles ils vivent, ou même linsecte par 
» fait, qui a fort bien pu s’abriter sur quelque vaisseau 
» et passer la mer; ce doit être le cas surtout, des indi- 
> vidus qui se seraient défendus contre les frimas, en se 
» cachant dans l’intérieur des bâtiments à l'ancre, puis 
> auraient trouvé de ce côté de l'Océan les plantes dont 
> leurs chenilles se nourrissent, et qui ont été importées 
» et répandues partout, avec les cultures d'outre-mer. Ce 
» qu'il y a de certain, c’est qu'on ne trouve d'identité, 
» parmi les insectes, que pour les espèces dont les larves 
» se nourrissent de plantes qui ont été introduites dans 
» ce pays. Désirant beaucoup faire une nouvelle compa- 
raison de ces espèces, je vous prie de m'en procurer 
» des œufs, si possible, les chenilles, les chrysalides et 


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— 189 — 


» des exemplaires parfaits, mâles et femelles. Ne laissez 
» point passer le printemps sans y songer. Faites-moi 
» aussi le plaisir de publier cette observation, afin de 
» rendre les entomologistes européens attentifs aux er- 
» reurs qu'ils peuvent commettre en décrivant comme es- 
» pèces identiques à celles d'Europe, des espèces d'in- 
» sectes recueillies dans ce pays qui ne sont pas du tout 
» américaines d'origine, mais qui ont-été introduites dans 
» ce pays, où elles se sont considérablement multipliées. 
» J'ai déjà recueilli des documents très intéressans sur 
» les limites qu'occupent les nombreuses espèces de 
» plantes qui passent pour indigènes et identiques dans 
» les deux continents, et j'espère prouver que la plu- 
» part du moins, faute de documents pour oser dire toutes, 
» sont des plantes d'Europe introduites en Amérique, et 
» qui se répandent et finissent par couvrir le sol, enva- 
» hissant le terrain occupé jadis par des plantes indigènes, 
» et les faisant successivement disparaître, à peu près de 
» la même manière et dans les mêmes proportions que 
» la race indienne cède le pas à l'homme blanc, et dispa- 
» raît devant la civilisation qui s'implante sur la terre 
» des peaux rouges. Quel étrange spectacle, quel phéno- 
» mêne inintelligible pour nous dans ce moment! Serions- 
» nous arrivés à l'époque de la disparition des races de 
» couleur, et allons-nous voir se répéter, dans le genre 
» humain, les phases qui ont caractérisé la succession 

» des types du règne animal dans les âges géologiques ? 
» C’est une impression dont je ne puis plus me défendre, 
» depuis que j'ai vu de près les Indiens et les nègres. » 


M. Sacc, persuadé que, dans le corps des animaux , il 
s'effectue une métamorphose des huiles contenues dans 


— 190 — 


leur nourriture, en corps gras solides ou suifs, a com- 
mencé une série d'expériences sur les graisses, qui l'ont 
amené à la conviction qu'il est impossible de transformer 
l'acide oléique en acide margarique, par l’action de l'acide 
nitrique. Comme la formule de l'acide oléique C36 H33 Os 
ne diffère de celle de l'acide margarique C3: H:3 O3, que 
par deux équivalents de carbone en plus, rien ne semble 
plus aisé que d'obtenir ce dernier en oxydant le premier 
pour en séparer son carbone; mais cela est impossible avec 
l'acide nitrique dont l’action est si énergique qu’elle mé- 
tamorphose d'emblée l'acide oléique en une résine brune, 
qui plus tard produit de l’acide subérique. On employa 
alors, dans le but de solidifier l'acide oléique, différents au- 
tres agents, dont deux amenérent à des résultats remar- 
quables ; savoir : que l’eau régale élève le point de fusion 
du suif, et le transforme en une matière jaune clair, plus 
dure que le suif, et que l’acide sulfurique, employé à dose 
peu élevée, donne au suif la propriété de s'emparer de 
beaucoup d’eau avec laquelle il forme une masse blanche 
et amorphe, qui se dessèche à l'air en se fendillant comme 
de l'argile. Un fait curieux est que toutes les chandelles 
faites avec des suifs oxydés par l'acide nitrique seul, ou 
uni à l’acide sulfurique, avaient une teinte jaune, un point 
de fusion plus bas que celui du suif pur, et fumaient 
comme si elles contenaient de la résine. Une chandelle 
faite avec 3 parties de suif pour une de colophane, donne 
une belle flamme rouge et brillante mais très fuligineuse. 
Le üissu adipeax de bœuf contient, sur 100 parties: 
suif 82, eau 11, tissu cellulaire 7; celui de mouton ren- 
ferme : suif 77, eau 16, tissu cellulaire 7. La grande 
quantité d'eau qui existe dans ce dernier, vient sans 


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— 191 — 


doute de ce qu'il s’y trouvait plusieurs hydatides, dont le 
volume variait depuis celui d’une noix à celui d'un œuf 
de poule. Le point de fusion de ces deux suifs était le 
même pour Ja partie qui en avait êlé préparée à 1000 C,, 
et pour celle qu'on avait extraite à feu nu. 

M. Sacc présente le dessin d'un cas d’hermaphrodisme 
remarquable observé sur deux pieds de maïs, dont les 
fleurs mâles portaient entre elles plusieurs graines bien 
conformées. Cette métamorphose des fleurs mâles du 
maïs a été observée dans plusieurs parties du pays, et 
dans des conditions si différentes qu'il est difficile de re- 
monter à sa cause. 


Le même fait voir le dessin d’une bouture de Rhipsalis 
Swarzii dont les jeunes feuilles portaient à leur base cha- 
cune trois écailles, derrière lesquelles se trouvait un fais- 
ceau d’étamines plus ou moins nombreuses qui se sont 
desséchées sans se faner, après avoir vécu près de six se- 
maines. Ces bourgeons ne présentaient d'ailleurs pas de 
traces d'autres parties de la fleur. 


Séance du 23 décembre 1847. 


Présidence de M. L,. CouLon. 


M. DuBois de Montpéreux offre, au nom de M. A. de 
Nordmann , une notice sur la découverte qu'il vient de 
faire d’un riche gisement d'os fossiles dans la Russie Mé- 
ridionale et dans le terrain de récente formation. Dans 


- une lettre à M. DuBois, M. de Nordmann lui dit, qu'il 


croit que les ossements d'ours qu'il a découverts, et qu'il 
rapporte à une centaine d'individus, doivent provenir de 
deux espèces. M. de Nordmann a découvert aussi beau- 


— 192 — 


coup d'ossements fossiles sur la montagne de Mitbridate, 
à Kertsch, où M. DuBois avait déjà trouvé des coquillages 
fossiles. En 1829, M. DuBois a découvert près de Kami- 
niek et dans des terrains d’alluvion appartenant au ter- 
tiaire moderne, et par conséquent dans les mêmes cir- 
constances que M. de Nordmann, beaucoup d'os fossiles, 
entre autres des dents de carnassiers qu'il a laissés au 
musée de Berlin. Il paraît que ces gisements-là appar- 
tiennent à toute la Russie méridionale. 

M. Ch. Matthieu présente du chloroforme parfaitement 

pur, dont il indique la préparation ainsi que les proprié- 
és. Il fait connaître un moyen facile de s'assurer de la 
pureté de ce produit ; pur, le chloroforme ne s’enflamme 
pas au contact d’un corps en ignilion ; mais il brûle fa- 
cilement lorsqu'il est mélangé avec de l'alcool, et surtout 
avec de l’éther. 

M. de Castella est d'autant pat disposé à substituer le 
chloroforme à l’éther, pour obtenir l'insensibilité, qu'il 
vient de voir ce dernier produire des accidents graves, 
tels que suffocation chez une femme à laquelle il voulait 
extirper une loupe. 

M. G. de Pury, exposant les moyens d’amorcer les . 
mines employées à faire sauter les rochers , fait ressortir 
les dangers de chacun d'eux, et développe ensuite tous les 
avantages qu'il y aurait à se servir des nouvelles amorces 
anglaises récemment introduites en France. Ces amorces 
sont des cordes au centre desquelles se trouve une traînée 
de poudre à canon, qu'on y introduit en les tissant à l’aide 
d'un mécanisme fort ingénieux. Ces amorces sont entou- 
rées d'une légère couche de goudron, qu'on augmente 
beaucoup lorsqu'elles doivent servir à enflammer des mi- 


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— 193 — 


nes sous l’eau. Leur action est parfaitement sûre, puis- 
qu'on sait qu'un pied et demi de ces amorces brûle à l'air 
en une minute, tandis qu'il faut dans la mine, et pour la 
même longueur, une minute et demie ou deux minutes au 
plus. Comme ces mêches sont fort solides , elles évitent 
l'emploi des épinglettes, ce qui les rend très-économiques. 
M. de Pury résumant tous les avantages de ces nouvelles 
amorces, croit qu'on ne peut rien avoir de mieux pour 
enflammer les mines; mais, M. le prof. Ladame admet 
que l’étincelle électrique vaut encore mieux, à cause de 
l'instantanéité de son action. 

A la suite de cette communication, s'élève une discus- 
sion à laquelle prennent part MM. DuBois-Bovet, de 
Pourtalés et de Castella, d’où il ressort que l'usage des 
aiguillettes de plomb et de cuivre est admis dans ce pays, 
au lieu des aiguillettes de fer ; qu'on peut charger les 
mines avec du sable et de la terre sans les bourrer , et, 
enfin, qu'il est fort désirable que la sollicitude du Gou- 
vernement se porte sur les moyens d'éviter les nombreux 
accidents auxquels donne lieu chaque année l'explosion 
des mines exploitées dans notre pays par l’ancien procédé. 
M. de Pury annonce à la société, qui l’apprend avec sa- 
tisfaction que, il y a plusieurs années déjà, le Conseil d'É- 
tat avait demandé à son prédécesseur, M. Junod, s’il n'y 
aurait pas moyen d'éviter les graves accidents qu'occa- 
sionne l'explosion des mines, et qu’en conséquence il va 


! ’ » je . ce . 
. Soccuper de rédiger un rapport circonstancié sur cet objet. 


M. le Prof. Succ, en s’aidant des belles planches de l'I- 
conographie physiologique de R. Wagner, fait connaître 
à la Société la manière dont se forme l'œuf de poule, et 
dont il se développe sous l'influence de la chaleur produite 
par l'incubation. 


— 194 — 


Séance du 6 janvier 1848. 
Présidence de M. Coulon. 


M. le Président annonce qu’on a vu , dans la nuit du 
17 au 18 décembre dernier, une belle aurore boréale. 


M. le Prof. Sacc fait hommage de son Mémoire sur la 
formation et le développement de l'œuf de poule, qui a 
obtenu une mention honorable au concours pour le dé- 
veloppement de l'œuf, en avril 1847. 


Le secrétaire fait lecture des procès-verbaux de la sec- 
tion de la Chaux-de-Fonds. 


M. Ladame fait une communication sur les consé- 
quences que l’on peut tirer des phénomènes optiques de 
l'atmosphère, relatifs aux différens états de l’eau dans 
l'atmosphère. L'eau peut être : 1° à l’état solide, glacée; 
2° à l'état liquide, en gouttes pleines plus ou moins gros- 
ses, ou en vésicules à parois plus ou moins épaisses ; 
3° à l’état élastique, invisible; 4° dans un état intermé- 
diaire entre ces deux derniers, au moment où d’élastique 
elle'devient nuageuse, 

La présence de l’eau à l’état de solide flottant en cris- 
taux, dans l'atmosphère, se démontre pour les nuages 
par les phénomènes des halos, des couronnes, etc. , dont 
l'explication ne peut se donner sans la supposition de 
cristaux neigeux. Quant aux brouillards qui se traînent 
au niveau du sol, brouillards qui accompagnent si sou- 
vent nos hivers pendant plusieurs semaines , et même 
pendant des mois, surtout dans les hautes latitudes, deux 
circonstances démontrent qu'ils contiennent aussi l’eau à 


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_ l’état solide, quoique souvent les cristaux neigeux flot- 
tans soient si petits qu'ils sont invisibles à l'œil : c’est, en 
- premier lieu , la température de ces brouillards qui est 
. toujours au-dessous de 0 (quoique ordinairement d’un 
 très-petit nombre de degrés); or nous ne pouvons admet- 
_ tre que l’eau puisse dans ce cas être liquide au dessous 
de zéro. 

La seconde circonstance qui indique que l’eau flotte à 
l'état solide dans ces brouillards, c’est la formation du 
givre , qui se dépose en avant de tous les objets que ren- 
* contre sur sa route le courant d'air toujours faible qui 
porte le brouillard. 

Les objets déliés, quelle que soit leur nature, brins 
d'herbes, tiges minces d'arbre, poils, cheveux, arêtes vives 
de pierre, etc., se couvrent de givre en raison de la libre 
irculation de l'air autour de ces objets, de façon que l’a- 
bondance du dépôt de givre est en rapport avec cette 
“libre circulation de l’air. 

- L'observation de la distribution du givre sur les ob- 
jets terrestres fait voir que, partout où l'air est gêné ou 
“ralenti dans son mouvement, le givre ne se dépose pas; 
“ainsi le givre que dépose le brouillard ne se présente pas 
“sur le plan des murs, ni sur les gros troncs d'arbres , ni 
dans les lieux abrités. M. Ladame avait assimilé précé- 

“demment la précipitation du givre sur les objets déliés à 
à précipitation des cristaux qui se forment dans les dis- 
solutions salines et qui vont se fixer sur les parties ra 
_ boteuses et anguleuses des vases ; sans exclure iei cette 
-niluence, l'explication qu'il présente aujourd'hui lui pa- 
it plus simple, moins obscure dans sa cause et suffi- 


_re 


— 196 — 


L'eau à l’état liquide, en gouttes pleines de différentes 
dimensions ou en vésicules creuses à enveloppe d'épais- 
seur variable , existe aussi dans l’atmosphère, ce qu'on 
démontre, soit par l'observation directe au moyen du mi- 
croscope, soit par le phénomène des halos et des arcs-en- 
ciel de diverses espèces, tels que l’arc-en-ciel ordinaire, 
les arcs surnuméraires, l’arc-en-ciel blanc, etc. 

L'arc-en-ciel blanc a été récemment l’objet d'un tra- 
vail de M. Bravais, qui en trouve l'explication dans l’é- 
paisseur de la couche d’eau qui forme l'enveloppe des vé- 
sicules nuageuses. 

Quant aux arcs surnuméraires, on doit remarquer 
qu'il est inexact d'admettre que ces arcs n'existent que 
dans la partie supérieure des ares-en-ciel ordinaires 
qu'ils accompagnent quelquefois ; ils paraissent aussi au- 
dessous, et alors ils sont surtout développés et pronon- 
cés prés de l'horizon ; comme cela résulte d’une observa- 
tion faite par M. Ladame, pendant le courant de l'été de 
4847, où les arcs surnuméraires ainsi que l'arc ordi- 
naire s’arrêtaient brusquement tous deux à environ 20° 
au-dessus de l'horizon, sans atteindre ni l’un ni l’autre le 
sol ; cette observation a déjà été faite par d’autres per- 
sonnes. (Voyez Comptes-Rendus). M. Ladame en donne 
l'explication suivante : Les arcs surnuméraires étant dus 
à des gouttes d’eau de petites dimensions, ils peuvent se 
présenter aussi bien dans la partie extérieure et élevée 
de l’arc-en-ciel que dans les parties intérieures et basses: 
Car les gouttes d’eau, après s'être formées à une certainé 
hauteur , peuvent augmenter de grandeur en descendant 
et passer successivement par des états qui donnent lieu: 
4° aux arcs surnuméraires et 2° à l’arc-en-ciel ordi- 


— 197 — 


. 
; aire : mais les gouttes d’eau en continuant de tomber 
arrivent dans les régions inférieures de l'atmosphère qui, 
si elles sont éliaüdes et sèches, comme cela arrive en été, 
déterminent l’é évaporation des gouttes d'eau, qui ainsi, 
contrairement à ce qui leur est arrivé plus haut, dimi- 
nuent de grosseur en descendant. Elles atteignent ainsi 
* de nouveau les dimensions convenables pour la formation 
des arcs surnuméraires. On peut donc dire que, dans cer 
. tains cas donnés, il ne pleut que dans une région de l’at- 
mosphère d’une certaine hauteur et d’une certaine épais- 
- seur. Dès-lors, si le phénomène des arcs surnuméraires 
Le était complet, on les verrait entourer l'arc-en-ciel ordi- 
naire, savoir : dans sa partie extérieure et supérieure, et 
dans sa partie intérieure et près de l'horizon où les uns 
| et les autres devraient se terminer brusquement, comme 
l'indique l'observation citée. - 
| Quant à l’état que présente l'eau au moment où elle 
passe de l’état gazeux invisible à l’état nuageux , M. La- 
- dame, après avoir rappelé les observations de M. Forbes, 
- qui a rattaché à cet état intermédiaire de la vapeur d’eau, 
- l'explication des colorations rouges des crépuscules, dit 
» qu'il avait observé accidentellement ce fait en 1832, en 
- plongeant une bougie allumée dans un grand flacon qui, 
* rempli d'eau chaude venait d’être vidé. La coloration était 
- si remarquable, que souvent dès-lors il a exposé dans 
_ses cours cette opinion, mais toujours cependant sous 
| une forme dubitative , car il n’a jamais pu reproduire le 
- fait qui l'avait frappé, et dès-lors il craignait que quelque 
. circonstance autre que la présence de l’eau ne fût la cause 
. du phénomène observé. 


M. le Prof. Sacc cherche à mettre en évidence tous les 
avantages qu'il y aurait à stimuler le zèle de nos indus- 


— 198 — 


triels, en fondant, de concert avec la Société d'Emulation 
Patriotique, une exposition des produits de l’industrie du 
pays ; destinée à leur fournir de nouveaux débouchés et 
à en favoriser le perfectionnement par des récompenses. 


Répondant à cette question, M. DuBois-Bovet informe 
la Société que l'utilité d'une semblable exposition a été 
discutée déjà dans le sein du conseil d'Etat et dans celui 
de la Société d'Emulation Patriotique, et trouvée bien 
faible tant en raison de la rivalité des Montagnes et du 
Vignoble, qu'à cause de celle qui règne entre les hommes 
cultivant une même branche d'industrie, et qui ont tout 
intérêt à cacher à leurs concurrents les progrès qu'ils lui 
font faire, parce qu’ils ne peuvent pas, en Suisse, s’as- 
surer la propriété de leurs découvertes par des brevets 
d'invention. 


M. Ladame demande si quelque personne de la section 
statistique ne pourrait pas continuer à présent les ta- 
bleaux du mouvement de la population du pays qu'avait 
commencés , il y a quelques années, feu M. le trésorier- 
géneral de Montmollin, et dont l'utilité est si grande sous 
tous les rapports. M. DuBois-Bovet répond que rien n'est 
plus facile et qu'il suffit de prendre connaissance du re- 
levé de la population des communes du pays que le gou- 
vernement fait faire chaque année. 


M. le D' Borel, après avoir fait l’histoire de l’applica- 
tion du chloroforme et avoir décrit les avantages qu'il a 
sur l’éther, décrit une opération dans laquelle il vient 
d'employer avec succès cet agent. Le sujet de l’observa- 
tion est un homme fort, d'une quarantaine d'années, au- 
quel on voulait appliquer sur la cuisse un cautère lunu- 


| 
| 


— 199 — 


laire de neuf lignes de diamètre, pendant vingt secondes. 
On introduisit le chloroforme dans la cavité d’une éponge 
qu'on plaça sous le nez du patient dont on couvrit la tête 
avec une serviette. Au bout de 3 à 3 minutes et demie, 
le malade, qui n'avait éprouvé d'autres symptômes de 
l’action du chloroforme qu’une accélération du pouls, fut 
pris de crispations dans les mains , auxquelles succéda 
aussitôt une insensibilité si complète , que l'opération se 
fit sans la moindre douleur. Le malade n'avait aspiré 
que un à un et demi gros de chloroforme. D’après cette 
expérience on pourrait croire qu'avant de détruire la sen- 
sibilité , le chloroforme surexite puissamment le système 
musculaire, absolument de même que l'éther le fait chez 
les hommes , tandis que chez les femmes l’éther abat les 
force d'une manière continue et si totale, que M. Borel a 
pu enlever une tumeur cancéreuse située à la base du nez 
d'une personne âgée, avec tout autant de facilité que s’il 
avait opéré sur un cadavre. La communication de M. Bo- 
rel en appelle deux autres, l’une de M. Ch. Matthieu, qui 
apprend que M. le D' de Castella , en rendant l'appareil 
inhalatoire du chloroforme aussi parfait que possible, a 
produit, au bout d'une seule minute, une insensibilité qui 
a duré cinq minutes ; l’autre est de M. Ladame qui rap- 
pelle qu'on n’a pas encore épuisé la liste des corps capa- 


» bles de produire l’insensibilité ; il se borne à signaler 


parmi eux, l'hydrogène, qui, d'après les expériences de 
Pilatre des Roziers, endort rapidement les animaux qu'on 
y plonge, lorsqu'on le substitue au nitrogène de l'air. 


— Répondant ensuite à une observation de M. le D' Borel, 
— qui a vu le chloroforme venir quelquefois à la surface de 
— l'eau quoiqu'il soit beaucoup plus lourd qu’elle, il attribu : 


— 200 — 


ce phénomène à ce que le chloroforme n'étant pas mouillé 
par l’eau, la légère couche d’air qui l'entoure en diminue 
._ assez le poids spécifique, pour lui permettre de surnager 
l'eau. 

Rendant compte du beau travail de M. Lorry, sur la 
physiologie des orobanches, le Prof. Sacc s'attache à faire 
ressortir combien est anormale l’action que ces curieux 
végétaux exercent sur l'air, puisqu'elle est identiquement 
la même que celle des animaux. Les orobanches consti- 
tuent dans le règne végétal, relativement à son action sur 
l'air atmosphérique, une anomalie correspondant sous 
tous les rapports à celle que produisent les infusoires dans 
le règne animal. 


Séance du 20 Janvier 1848. 


Présidence de M. L. CouLox. 


Le Secrétaire lit le procès-verbal de la séance du 30 
décembre 1847 de la section de la Chaux-de-Fonds. 


M. le Prof. Sacc indique la composition du minérai 
de fer exploité actuellement dans l'Etat de New-York 
par M. Suchard. Cette analyse a été exécutée avec le 
plus grand soin, dans son laboratoire, par M. A. Forel, 
de Morges, qui a trouvé dans ce minérai : 

acide silicique . 10,46 
oxyde ferrique . ‘74,21 
oxyde calcique . 9,46 
oxyde magnésique 0,54 
acide carbonique . 5,33 

100,00 


— 201 — 


Ce minerai appartient donc aux plus riches de ce 
genre. Cette analyse appelle une communication fort 
intéressante de M. DuBois-Bovet, sur la nature et l’ex- 
ploitation des célèbres minerais de fer de l'île d'Elbe. 


M. le Prof. Sacc offre ensuite aux membres de la So- 
ciété des graines de maïs quarantain, dont il présente 
deux épis pris dans sa récolte de l’année derniére. Ce 


* maïs offre sur l'espèce commune l'avantage d’effriter 


moins le sol, et de résister sans peine à l'effort des vents, 
à cause de sa taille peu élevée. La végétation de cette 
jolie et utile plante s’est effectuée juste en 3 mois, 


Passant en revue les belles expériences faites par Fa- 
raday pour s'assurer de l’action qu'exerce le magnétisme 
sur tous les corps, M. le Prof. Ladame rappelle que ce 
savant a pu partager à l’aide de l’aimant tous les corps 
connus, en trois classes. A la première classe appartien- 
nent les corps, qui, comme le fer, mis entre les pôles de 
l'aimant, s'y placent parallèlement à son axe; à la se- 
conde, ceux qui le coupent à angle droit ; et, à la troi- 
sième, ceux qui le coupent aussi à angle droit, mais 
qui sont repoussés par l'un et par l’autre des pôles. De 
là vient qu’en saupoudrant une feuille de papier placée 
sur le pôle circulaire d'un aimant avec de la limaille de 
fer, elle se porte toute entière à sa. périphérie; tandis 
que la limaille de bismuth, appartenant à la seconde 
classe semble la fuir et se rend toute entière en deçà, 
vers le centre du pôle, ou au delà de sa périphérie, qui 
exerce sur elle une force répulsive. A la 3% classe ap- 


… partiennent tous les liquides, les gaz et les matières vé- 


gétales et animales. 


BULL. DES SC. NATUR. TOM, II, 15 


— 202 — 


M. le Prof. Sacc expose les caractères des calcaires 
hydrauliques, la manière de les essayer, de les cuire et 
de se servir des chaux qu’on en extrait ; il décrit encore 
la manière de fabriquer les chaux hydrauliques artifi- 
cielles, avec de la chaux grasse et de la poudre de brique. 
Il est fort à désirer que les mortiers hydrauliqnes soient 
plus employés qu'ils ne l'ont été jusqu'ici dans notre pays, 
dont le climat humide fait trop souvent sentir toute l’im- 
perfection de nos mortiers ordinaires. 

Le même insiste sur tous les avantages qu’on trouverait 
à durcir les enduits de plâtre en les badigeonnant avec 
use solution d’alun, de savon, ou de verre soluble. 


M. Coulon, père, observe que le mortier des Romains 
ne contient pas de poudre de briques, mais des frag- 
ments de cette malière qui paraissent remplir le même 
rôle que le sable de nos mortiers ordinaires. Il a vu aussi 
près de Manchester les restes d’un camp romain dont le 
ciment contient des morceaux de bois très-bien conser- 
vés. Plusieurs membres de la société rappellent que, 
quoique le mortier obtenu en gachant la chaux avec de 
la sciure de bois, au lieu de sable, reste très-friable, 1l 
est fréquemment employé pour défendre les maisons 
contre la pluie, à laquelle il résiste mieux que le mortier 
fait avec du sable. 


S'éance du 3 février 1848. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. G. de Pury présente à la Société les deux espèces 
de mèches qu’il a proposées précédemment pour mettre 
le feu aux mines ; l’une est destinée aux terrains secs, 
l’autre à ceux qui sont fort humides. 


nl Lésnttnani nid nette dd 


— 203 — 


M. le Dr de Castella décrit une nouvelle opération qu'il 
vient de faire avec succès, en enlevant la douleur à l’aide 
du chloroforme. Il s'agit d’un jeune homme qui s'était 
brisé le col du radius en tombant à terre; la fracture 
fut pansée par un miége, qui appliqua sur le membre 
malade un bandage assez serré pour y faire naître Ja 
gangrène qui gagna tout le bras, dont elle nécessita 
l'amputation. Soumis à l’inhalation du chloroforme, le 
malade perdit tout sentiment après 11/2 à 2 minutes, 
après avoir absorbé environ 1 gros de ce liquide; mais, 
on dut bientôt lui rendre de l'air, parce que sa bouche 
pleine d'écume semblait annoncer une asphyxie immi- 
nente , qui, heureusement, n'eut pas lieu. Le sang qui 
coula pendant l’opération était bien vermeil ; le malade 
ne donna aucun signe de douleur , si ce n’est à la fin de 
l'opération , au moment où on traversa la peau avec une 
aiguille pour la ramener sur les chairs. Mr de Castella 


s'élève, à l’occasion de ce nouveau malheur, contre la 


dangereuse tolérance accordée par le gouvernement à 
tous les miéges, sous prétexte que chacun est responsable 
de ses actes ; en effet, quel dédommagement l’auteur du 
mal pourrait-il offrir au pauvre amputé ! 


M. le Prof. Sacc, étudiant ensuite les causes d’altéra- 
tion des eaux de puits du bas de la ville, les trouve 
sans cesse agissantes dans la décomposition lente des 
substances organiques que les puisards amènent au des 
sous de la surface du sol. Cet empoisonnement des eaux 
na pas seulement lieu pour celles qui sont les plus rap- 
prochées des foyers d'infection, elle peut s'étendre fort 
loin toutes les fois que les puits prennent leur eau dans 


— 204 — 


une seule et même nappe de liquide, comme c’est le cas 
pour la plupart des puits du bas de la ville, qui sont 
alimentés, presque (ous, par les seules eaux du lac. Quoi- 
que le mal soit déjà fort grand, il s’aggravera encore 
avec les années, et l'on ne pourra s'opposer aux ravages 
qu'il ne peut manquer de causer dans la santé publique, 
qu'en assainissant ces eaux par la filtration à travers le 
charbon pilé et l’exposition subséquente à l'air, afin de 
leur rendre Foxygène qu'elles doivent tenir en dissolution, 
pour que leur digestion soit facile. 

Cette communication amène une discussion à laquelle 
prennent part plusieurs membres, et qui se termine par 
l'avis que donne à la Société M. Carbonnier, président de 
la commission des travaux publics, que la Ville va faire 
établir des fontaines alimentées par les sources de l’Ecluse 
dans toutes les rues où il n’y en a pas encore. 

M. le Président annonce à la Société qu’il a reçu deux 
jaseurs de Bohême pris au lacet par M. de Merveilleux. 
C'était une paire qu’il prétend avoir vue déjà en au- 
tomne. 

Le même lit ensuite quelques fragments de la Revue 
Zoologique , d’où il résulte que les mœurs du pingouin 
royal (aptenodytes patagonica) différent beaucoup de celles 
des autres espèces de ce genre, surtout en ce qu'au lieu 
de couver ses œufs dans un nid, ce pingouin, qui ne pond 
qu’un seul œuf, le porte, pendant toute la durée de l'in- 
cubation, dans un repli de la peau à la surface interne 
des cuisses. Ce pli s’efface aussitôt qu'on en a sorti 
l'œuf. Cet exemple est encore le seul connu d'incubation 
sur le corps des oiseaux; il y en a par contre plusieurs 
de transport des œufs. 


M 


A 


‘la = 4 = 
Séance du 17 février 1848. 


Présidence de M. Louis Coulon. 


M. le Président annonce qu'il a passé une très-grande 
quantité de jaseurs de Bohème dans toutes les gorges du 
Doubs, où on n’en avait pas vu depuis 1806. 

Le même lit un passage d’une lettre de M. Aug. Vouga 
dans laquelle il dit qu'on doit ranger dans notre faune les 
Emberyza nivalis et hortulana, puisqu'il a tué une paire 
adulte de chacune de ces deux espêces : la première en 
Janvier de cette année, et la seconde au mois d'Avril de 
l'année derniére. 11 ajoute avoir déjà trouvé, sur notre 
marché , l'Emberyza nivalis, mais il venait de F ribourg. 

M. le Président dit avoir reçu de M. Guébhard un beau 
castor pris récemment sur ses terres, dans une ile du 
Rhône où on trouve quelquefois cet animal. Le castoreurn 
qu'on en a extrait était magnifique. 

M. le prof. Ladame présente au nom de M. Favre une 
collection de champignons peints par lui-même avec une 
rare perfection, et recueillis presque tous dans es envi- 
rons de la Chaux-de-Fonds. La plupart d'entr'eux sont 
reproduits dans leur position naturelle , puis renversés 
et en coupe ; leurs noms sont bien exacts puisque tous 
ont été déterminés par M. Trog. Comme M. Favre soumet 
son (ravail à l'examen de la Société, M. Coulon, père, 
tout en lui donnant les éloges qu'il mérite, aurait désiré 
Voir reproduire sous un grossissement assez fort les ca- 
ractères botaniques des petites espèces. Il insiste sur l’u- 
lilité que présente une semblable iconographie en géné- 
ral, puisqu'on ne peut pas conserver les champignons, et, 
en particulier pour notre pays qui est peut-être le plus 


— 206 — 


riche d'Europe en végétaux de cette classe. M. Coulon, 
fils, désire que M. Favre joigne à chaque espèce l’indica- 
tion de la localité où 1l l’a trouvée. 

Les belles planches peintes de M. Favre représentent: 
71 espèces d'agaricus , 6 de coprinus, 6 de cortinarius, 
1 de paxillus, 7 d'hygrophorus ,.10 de lactarius, 8 de 
russula, { de cantharellus, # de marasmius, 1 de panus, 
1 de schyzophyllum , 2 de lenzites, 7 de boletus, 6 de 
polyporus, 2 de dœdalea, 2 de merulius, 3 d'hydnum, 
3 de craterellus, 2 de stéreum, 1 d’auricularia, { de gué- 
pinia, 7 de clavaria, 1 de calocera, 1 de spatularia, 2 de 
tremella, { de dacrymyces, 2 de morchella, 3 d'helvella, 
10 de peziza, 2 de leotia, 1 de bulgaria, 3 de sphæria, 
1 de nœmaspora, 3 de nidularia, 1 de geaster, { de bo- 
vista, 4 de lycoperdon, 1 de lycogala, 1 de licea, { de 
sclérotinus, et 4 de xyloma, ensemble 192 espèces, dont 
M. Favre a figuré 2 ou même 3 individus de chaque 
espèce, toutes les fois qu’ils présentaient entr'eux d'inté- 
ressantes variétés. 

M. Ladame continue l'exposition de la théorie de la 
formation de la rosée telle que l’a développée M. Melloni 
dans ses derniers travaux. 


Séance du 6 Avril 1848. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. Th. de Meuron dit quelques mots d'un travail qu'il 
prépare et dans lequel il cherche à fixer quelle étendue 
de forêts on doit exploiter pour fournir au vignoble la 
quantité d'échalas qu'il consomme annuellement. Cette 
communication, en signalant une cause très-puissante de 
destruction des bois suisses , en appelle deux autres de 


— 207 — 


MM. de Castella et Louis Coulon, qui voient dans les 
genèts et certaines petites espèces de saules de véritables 
obstacles au développement des forêts du canton de Fri- 
bourg et de plusieurs autres parties des Alpes. Cette ob- 
servation est fortement appuyée par M. Th. de Meuron 
qui a vu dans le grand-duché de Baden les genêts s’em- 
parer de toutes les coupes de bois aussitôt après l'abattis. 
M. Louis Coulon croit que le moyen d'empêcher le dé- 
veloppement si rapide de ces arbustes consisterait à favo- 
riser celui des arbres forestiers en mettant sur les racines 
de ceux que l'on plante des cendres de gazon. 
Après avoir décrit les applications et le procédé de fa- 
brication de la soude artificielle, M. le Prof. Sacc dit 
qu'il est fautif, en ce qu'il fait employer en pure perte 
des masses vraiment énormes de soufre. Cherchant à le 
remplacer par un autre plus simple et capable de faire 
retrouver le soufre employé, il l'a trouvé dans le mé- 
lange d’un équivalent de chlorure sodique avec cinq 
équivalents d'oxyde plombique et assez d’eau pour faire 
du tout une pâte épaisse. Dans ces circonstances, il se, 
forme pour chaque équivalent de soude caustique abso- 
lument pure, un équivalent de chloroxyde plombique 
CLPb, 4 O Ph qui, calciné, produit un magnifique jaune 
de Naples. Ce composé, traité par cinq équivalents d'a- 
cide sulfurique, produit un équivalent de chloride hydri- 
que et cinq équivalents de sulfate plombique, qui, calcinés 
avec cinq équivalents de sulfure plombique, produisent 
10 équivalents de plomb métallique, et dix équivalents 
d'acide sulfureux, qui peut être employé directement à la 
fabrication de l'acide sulfurique, ensorte que ce procédé 
permet de faire rentrer constamment dans la fabrication 


— 208 — 


le même soufre; malheureusement le prix élevé de la 
litharge s'oppose encore à son application en grand. 

Le même communique à la Société les intéressantes 
observations faites par M. le D' Martins sur l’Arvicola 
nivalis, charmante espèce de souris herbivore qui habite 
les Hautes Alpes et ne s'engourdit pas durant l'hiver. 
Cet animal ne descend point dans la plaine parce qu'il y. 
fait trop froid; la température deson terrier ne s’abaisse 
jamais au-dessous de + 4° à+ 59°; à 0° il meurt ; ensorte 
que s’il n'habite que les Hautes Alpes, c'est qu'il est plus 
frileux que ses congénères. 

M. le D' de Castella fait part à la Société des réflexions 
que lui ont suggéré le mémoire lu derniérement par M. le 
Pr. Bouillaud à l'académie de médecine de Paris. Ce savant 
a cherché dans les séances des 22 février et 7 mars dernier, 
à prouver que le sens du langage articulé, et le principe 
coordinateur des mouvements de la parole résident dans 
les lobes antérieurs du cerveau. À l'appui de son opi- 
nion, il cite plusieurs observations. M. Rochoux combat- 
tit l'opinion de M. Bouillaud et cita plusieurs cas dans 
lesquels il a vu les lobes antérieurs du cerveau profon- 
dément altérés, sans que la faculté de la parole en eût 
souffert ; tout récemment, nous avons observé un abcès 
enkysté du lobe antérieur du cerveau du côté gauche, 
qui a produit la cécité sans ôter la parole. Marguerite 
Knopp, âgée de 18 ans et d’une bonne constitution, a eu, 
au mois de Septembre dernier, un érisypèle de la face, 
qui l’a forcée de quitter son service de femme-de-chambre 
à Besançon. Admise à l'hôpital de cette ville, elle y a 
été soignée et renvoyée comme convalescente , quoique 
conservant une violente céphalalgie et un peu de bouffis- 


ee D 2 ss cé di né run, | 


es 


— 209 — s 


sure à la face. Revenue chez ses parents à Neuchâtel, elle 


_a continué à éprouver de la céphalalgie ; des crises ner- 


veuses se sont manifestées ; la vue s’est affaiblie et elle fut 
obligée de garder le lit. Admise à l'hôpital Pourtalés, le 
12 Décembre 1847, elle a offert les symptômes suivans: 
face bouffie un peu injectée, vue affaiblie de l'œil gauche, 
pupille un peu dilatée, l’œil droit est à-peu-près dans l’état 
normal ; céphalalgie, particulièrement au front et à l’oc- 
ciput ; fonctions intellectuelles dans une intégrité parfaite, 
réponses exactes et nul embarras dans la parole; peu de 
sommeil , encore est-il interrompu par des rèves ; il n’y a 
point de paralysie, mais la malade a de la peine à se tenir 
debout ; le toucher est obtus, et il y a des fourmillemens 
au bout des doigts; la respiration est libre, le pouls est 
à 90 ; les fonctions digestives sont affaiblies ; la constipa- 
tion habituelle, et les règles n’ont pas reparu depuis l’é- 
risypéle. Des crises nerveuses se manifestent fréquem- 
ment, mais irréguliérement ; la tête se porte tout-à-coup 
en arrière ; il y a immobilité de tout le corps et perte to- 
tale de connaissance. Cet état cataleptique ne dure que 
quelques minutes. Un traitement dérivatif, des sangsues 
derrière les oreilles, des ventouses aux reins et aux 
cuisses, de légers purgatifs, un séton à la nuque, ont di- 
minué pendant un moment la céphalalgie et éloigné les 
crises nerveuses. Le 45 janvier 1848, la vue était com- 
plètement perdue de l'œil gauche; l'œil droit s’affaiblis- 
sait considérablement; la parole était toujours libre, ainsi 
que les facultés intellectuelles, mais les crises cataleptiques 


redevenaient plus fréquentes ; la malade ne pouvait plus 


rester dans son lit; on opéra alors, mais sans succès, la 
cautérisation frontale avec la pommade de Goudret. Dans 


— 210 — 


les premiers jours de février, un état comateux se mani- 
festa ; le #, la parole et l’entendement sont tout-à-fait 
anéantis, et la malade succombe le 5, dans la matinée. 

Autopsie. Méninges injectées, cerveau ramolli; à la 
partie antérieure de l'hémisphère gauche se trouve un 
abcès enkysté, du volume d’un œuf de poule, rempli d'un 
pus verdâtre qui s’est écoulé en grande abondance lors- 
qu'on eut enlevé les méninges. Le kyste a une ligne d’é- 
paisseur, et résiste assez fortement partout, excepté à sa 
partie supérieure où il était plus mince et où il s’est dé- 
chiré. On l’a séparé avec facilité de la substance du cer- 
veau ; il comprimait les nerfs optiques et avait fait 
perdre la vue à la malade, tandis que la parole n'avait 
point été altérée jusqu'aux derniers jours de la vie, où 
l'inflammation et le ramollissement du cerveau ont 
éteint à la fois toutes les fonctions vitales. 


Séance du 27 Avril 1848. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le président dit qu’une lettre de M. Agassiz, datée 
de Cambridge, près de Boston, annonce l’arrivée de deux 
envois d'animaux, destinés aux musées de Neuchâtel et 
de Berlin, et qu'il fera lui-même la part de chacun de 
ces deux établissements. 


M. le Prof. Guyot communique quelques lettres de M. 
Desor, contenant des détails sur le système glaciaire de 
l'Amérique du Nord. 


M. le Prof. Ladame lit le rapport suivant , contenant 
l'exposé des recherches que le Gouvernement lui a de- 
mandées sur l’asphalte du Val-de-Travers. L'exploitation, 


CPE 


PTS 
LI 


nds int tb bé es à fn ps 


12 ‘ 


Dr. Mdr À : 


a C0 SC A LD 


— 211 — 


qu’on faisait jadis sur la rive gauche de la Reuse, se 
poursuit actuellement sur la rive droite. On y trouve 
deux bancs d’asphalte séparés par une couche non as- 
phaltée. Pour utiliser cet asphalte, on le moud sous des 
meules verticales mues à l’aide d'une machine à vapeur. 
Après l'avoir desséché, on le mêle avec 3'/2 0/, de gou- 
dron minéral qui brûle sans laisser presque de résidu. 
On fait bouillir le mélange pendant 6 heures, en le re- 
muant sans cesse, puis on le coule dans des formes où 
on le laisse refroidir pendant 24 heures. Dans cette opé- 
ration, on perd 4°}, de la substance, puisque 100 de 
roche en poudre et 3'/2 de goudron donnent un peu plus 
de 96 de mastic. Les produits volatils , qui se dégagent 
de l’asphalte lorsqu'on le chauffe, varient avec le degré 
de chaleur qu'on lui applique ; c’est une espèce de naphte. 

La roche asphaltée a été analysée : 

1° en la chauffant assez pour dégager la totalité de la 
substance organique, sans toutefois décomposer le carbo- 
nale calcique avec lequel elle est mélangée. 

2° En la traïiant à froid par l'essence de térében— 
thine, qui enlève en demi heure au minéral la totalité 
de l'asphalte; ce qui prouve, suivant M. Ladame, que 
la matière noire qui colore l’asphalte n’est pas due à du 
charbon en nature. Les morceaux riches et desséchés à 
l'air donnent 15 ‘/2 °/, de matière organique, la roche 
commune rend de 7 à 9°}. | 

On extrait de la mine d’asphalte, non seulement une 
huile essentielle volatile qui dissout encore mieux l'as 
phalte que l'essence de thérébenthine, mais aussi un 
goudron noir, tenace et compacte, qui pourra sans doute 
bientôt affranchir la fabrique de l'achat de goudron. On 


— 212 — 

a voulu aussi en faire du gaz d'éclairage, mais comme le 
produit est faible, que les frais sont considérables, puis- 
qu'il faut chauffer une grande masse de matière inerte, 
savoir la roche, et que le gaz est impur et très odorant, il 
contient du sulfhydrate ammonique, on ne donnera sans 
doute pas suite à cette idée. 

M. Ladame croit que l’asphalte est formé par la vola- 
Ailisation de substances végétales placées au dessous des 
bancs où existe ce minéral. L’ammoniaque et les sul- 
fates contenus dans l’asphalte ne suffisent point pour 
faire admettre que des matières animales ont pris part à 
la formation de cette substance ; il faudrait, pour en être 
sûr, y avoir découvert des principes phosphorés. 


M. le Dr de Castella annonce qu'il vient de réduire 
avec le plus grand succès, et sans aucune douleur , une 
hernie étranglée, après avoir mis le malade ‘sous l'in- 
fluence du chloroforme. 


Séance du 11 Mar 1848. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. leProf. Sacc, pour prouver toute l'utilité qu'on peut 
retirer de l'étude des sciences naturelles, surtout dans 
les temps de troubles, lit les belles pages écrites sur ce 
sujet par Fourcroy, dans l’introduction à son système 
des connaissances chimiques. 

Le même présente un échantillon d’un nouveau produit 
de l'industrie alsacienne; c’est de la ouate comprimée 
jusqu’à l'épaisseur d’une feuille de papier , puis gommée 

“et imprimée de manière à simuler la toile peinte, et à 
pouvoir lui être substituée dans certains cas. 


71". 


DD CRC af. tn daté 


ON SE ns ne € D 


2-3 MP Sp, © RME 


EL. 


— 213 — 


M. le Prof. Ladame développe les considérations sui- 
vantes sur la philosophie des mathématiques. 

Les sciences se divisent en différens embranchemens, 
d'après les divers points de vue sous lesquels on peut en- 
visager les objets qui constituent le domaine de l'inves- 
tigation de l'homme. Prenons par exemple un ahimal : 
nous pouvons rechercher quels sont les caractères qui le 
distinguent de tous les autres êtres du monde matériel, 
la science qui s'occupe de cette recherche est la zoologie; 
si nous examinons ensuite la disposition de toutes les 
parties qui le composent, nous aurons l'anatomie ; lé 
tude des fonctions de ces parties nous donne la physiolo- 
gie, celle des altérations de composition que ces parties 
subissent sous l'influence de la vie, nous conduit à la 
chimie, etc. 

Les mathématiques ont aussi un point de vue parti- 
culier, celui de /a quantité, de la grandeur. L'indication 
de ce point de vue, donne la définition de cette branche 
d'étude qu’on peut énoncer en disant: les mathématiques 
s'occupent de toutés les questions relatives aux quantités 
ou de tout ce qui est susceptible d'augmentation ou de 
diminution. 

La quantité peut être considérée dans sa nature comme 
quand on dit 3 mètres T kilogrammes, on dit alors que la 
quantité est concrête. DIET 

* La quantité peut aussi être considérée d’une manière 
abstraite, sans désigner son espèce, comme quand on 
dit 3, 7, 1°, etc. , la quantité est alors abstraite. 

‘Il résulte de là deux classes de sciences mathémati- 
ques : | | 

1° Celles qui n’envisagent que les quantités abstraites, 
ce sont les mathématiques pures ; 


— 214 — 


.2° Celles qui s'occupent des quantités concrètes, ce 
sont les mathématiques appliquées ou mixtes, qui se di- 
visent naturellement en autant de branches qu'il y a d’es- 
pèces de quantités. 

Les mathématiques pures comprennent 3 parties, sa- 
voir : arithmétique, l'algébre et le calcul infinitésimal. 
Cette division se justifie par les considérations suivantes. 

Nous ne nous formons une idée exacte de la grandeur 
des quantités que par la comparaison, cette comparaison 
s'appelle mesurer. Le résultat de cette comparaison s'ap- 
pelle un nombre. 

Les quantités sont infinies dans la variété de leur 
grandeur : il y a donc une infinité de nombres, s’il avait 
fallu les nommer tous avec des noms différens et les écrire 
avec des caractères particuliers , on n’y serait pas par- 
venu ; de là la nécessité d'une méthode pour nommer et 
écrire les nombres. L'ensemble des conventions faites pour 
parler et écrire les nombres constitue la numération, qui 
se divise par conséquent en numéralion parlée et en nu- 
mération écrite. Ces conventions sont d'une admirable 
simplicité ; on peut les exposer en quelques lignes. 

La numération parlée est la même pour tous les peu- 
ples. Elle comprend deux espèces de mots : 1° Des mots 
pour énoncer l’espèce et la grandeur des quantités prises 
pour termes de comparaison (unités): tels sont mètre, 
litre, kilogramme, hieue, franc, calorie, dyname, elc., pour 
l'espèce d'unité, et dix, cent, mille, million, etc., pour la 
grandeur relative des unités. Le nombre de ces mots 
n'est pas limité, il est subordonné aux besoins. 

20 Des mots pour énoncer la réunion des unités de 
même grandeur: ce sont un, deux, trois, quatre, cinq, 
six, sept, huit, neuf; ils sont au nombre de neuf. 


4 


LL LT À  Éh. S 


EU, Le otth é un ND dS 


— 215 — 


La numération écrite devait faire deux choses, savoir 
indiquer par des caractères appelés chiffres, 

1° La grandeur des unités ; 

2° La réunion des unités de même grandeur. 

Tous les peuples n’ont pas résolu le problème de la 
même manière. Les uns comme les Romains, Grecs, etc., 
avaient des caractères qui n’indiquaient que la grandeur 
des unités, ce sont I, X, C, M; lorsqu'ils voulaient mar- 
quer la réunion des unités de même grandeur , ils ré- 
pétaient le même caractère autant de fois que cela était 
nécessaire: ainsi pour trois cen(s ils mettaient trois C à 
a suite l’un de l’autre. Cependant les chiffres V, L, D, 
ndiquaient la réunion d'unités de même grandeur, mais 
ls avaient comme les autres chiffres un sens absolu: ils 
ne désignaient pas autre chose que des réunions d'unités 
‘ondamentales de dizaines ou de centaines. 

Cette numération a été suivie en Europe pendant long- 
temps, c'était un héritage du monde romain ; mais elle 
a disparu peu-à-peu et ce n'est plus que rarement qu’on 
s’en sert pour indiquer par exemple le millésime des an- 
nées. Elle a été remplacée par une autre numération 
bien autrement commode et féconde : c’est la numération 
indo-arabe. Dans celle-ci les caractères indiquent seule- 
ment la réunion des unités de même grandeur, et comme 
nous avons vu qu'il y avait neuf mots pour cela, on n’a 
eu besoin que de neuf caractères qui sont : 1,2, 3,4, 
5,6,7,8,9. 

Pour marquer ensuite la grandeur des unités, on s’est 
servi de dénominateurs : 

Les dénominateurs sont de trois espèces : 

a) L'espèce d'unité a été indiquée par un mot écrit en 
toutes lettres , comme 3 pieds, 8 pouces, 5 lignes. 


— 216: — 


b) La dénomination de la grandeur des unités a été 
marquée par lé rang des chiffres ; en convenant qu'un 
chiffre placé à la gauche d’un autre indiquait des unités 
dix fois plus grandes. Ce second mode a nécessité l’intro- 
duction d’un nouveau chiffre, le 0, et de la virgule, le zéro 
pour conserver à chaque chiffre son rang quand des uni- 
tés de quelques ordres manquaient, la virgule se place 
à la droite du chiffre qui marque les unités fondamen- 
tales, ou de départ. 

c) Le troisième mode de dénomination s'applique seu- 
lement aux unités plus petites que l’unité fondamentale, 
on indique la grandeur de ces unités par un nombre qui 
fait connaître combien ces unités entrent de fois dans l’u- 
nité fondamentale ; ce nombre se place dessous ou à 
droite du nombre qui marque la réunion de ces "unités; 
on sépare ces deux nombres par une barre. 

La numération écrite une fois inventée, on a appelé 
arithmétique, ou arithmologie, cette partie des mathé- 
maliques qui s'occupe des opérations à faire sur les nom-— 
bres , en tenant compte des conventions faites pour les écrire. 

L’arithmétique romaine était donc autre chose que l'a- 
rithmétique moderne. Les conventions des Romains n'é- 
taient point fécondes ; on peut dire que les anciens n’a- 
vaient pas d'arithmétique, car ils n'avaient point de 
méthodes simples et faciles pour multiplier, diviser , ex- 
traire les racines, etc. L’arithmétique est donc toute 
moderne. C’est une pensée qu'il faut bien faire ressortir 
car toutes les opérations arithmétiques sont une consé- 
quence et un corollaire de l’idée fondamentale qui pré- 
side à la numération écrite. 

Les quantités soutiennent entr'elles des relations nom- | 
breuses et souvent très-compliquées ; c'est ainsi que l’in- 


— 917 — 


térêt d'un capital est proportionnel à la grandeur du ca- 
pital ; la surface d’une figure dépend de sa longueur et 
de sa largeur; le poids d’un corps est une conséquence 
de la quantité de matière qu'il contient et de l'intensité 
de la pesanteur. La température d’un point de l'espace 
dépend de la distance des corps chauds, de leurs dimen- 
sions, de la quantité de chaleur qu'ils envoient, de la 
plus ou moins grande transparence ou conducibilité des 
corps intermédiaires, et enfin de la faculté qu'il a de re- 
-  cevoir la chaleur , etc. 
, L'algèbre qui est la seconde partie des mathématiques 
pures, s'occupe des moyens d'écrire les relations que les 
quantités soutiennent les unes avec les autres et des trans- 
formations que peuvent subir ces relations écrites (for- 
mules). 

Les quantités ne sont point constantes dans leurs gran- 
deurs ; mais en vertu de leurs dépendances, un change- 
ment qui survient dans l'une d'elles se répercute ou se 
fait sentir dans les autres; c’est ainsi que la température 
d'un point de l'espace change, si celle d’un seul des corps 
qui l'entoure vient à varier. 

Il y a une branche des sciences mathématiques qui 
s'occupe de la recherche des rapports de variations entre 
les quantités quand on connaît les relations mêmes ; c’est 
le calcul différentiel: et réciproquement de trouver les rela- 
lations qui existent entre les quantités lorsqu'on connaît 
les rapports de leurs variations, c'est le caleul intégral. 
. Ces deux calculs, le différentiel et l'intégral, sont com- 
pris sous une même dénomination, celle de calcul infini 
“ tésimal ou des fluxions. 


4 ; 16 


ee Je 


On comprend que ce calcul soit d’une application fré- 
quente dans les sciences physiques : car le monde ma- 
tériel nous présente des variations continuelles. Dans le 
plus grand nombre des cas, nous n’apprécions que les 
changemens qui surviennent dans la grandeur des quan- 
liés, et nous devons en déduire les relations qui subsis- 
tent entre les quantités elles-mêmes. 

Si les sciences mathématiques rendent d'éminents ser - 
vices aux sciences physiques, celles-ci à leur tour con- 
tribuent puissamment au développement des premières ; 
car quelle que soit la fécondité de l'esprit humain, il 
n'arrive pas à formuler toutes les relations que peuvent 
soutenir entr'elles des quantités données, la nature nous 
en fournit toujours de nouvelles, et on a vu frêquem- 
ment tel travail important de mathématiques, être la eon- 
séquence d'observations de physique ; les mouvemens 
des corps célestes , l’état vibratoire des corps sonores, la 
chaleur , l'électricité, la lumière, ont depuis long-temps, 
mais surtout depuis Newion, exercé la sagacité des ma- 
thématiciens du premier ordre. 

Une circonstance remarquable c’est celle queles formules 
auxquelles nous conduisent les phénomènes du monde 
physique, sont ordinairement chargées d'incommensu- 
rables de toutes espèces d'ordres. Ces incommensurables 
obligent à des calculs extrêmement laborieux que les ma- 
thématiciens ont cherché à abréger en construisant des 
tables volamineuses ; ce travail n’est fait que pour trois 
ordres d’incommensurables, savoir : les exponentielles ou 
logarithmes, les fonctions circulaires ou lignes trigono- 
métriques , et enfin les fonctions elliptiques, ce sont les 
fonctions qui se présentent le plus souvent, mais il y en 


Us 
* 


» 


— 219 — 


a une multitude d'autres, car le nombre des incommen- 
surables est innombrable. 

Les quantités commensurables, quoique sans limite 
dans leur nombre, doivent néanmoins être considérées 
comme une partie infiniment petite des quanutés : elles 
sont l'exception, et les incommensurables la règle ; on 
ne doit donc point être surpris d'être conduit constam- 
ment à des incommensurables dans les applications que 
l’on fait des mathématiques au monde physique. 

Les mathématiques mixtes se subdivisent naturelle- 
ment en autant de branches qu'il y a d'espèces de quan- 
tités ; telles sont la géométrie, la mécanique , etc.; ces 
subdivisions reçoivent leur définition de la nature même 
des quantités dont elles s'occupent; je prendrai pour 
exemple la géométrie. 

On définit ordinairement la géométrie, d'après Le- 
gendre, en disant qu’elle a pour but la mesure de l'éten- 
due, cette définition n’est point complète. La suivante me 
paraît beaucoup plus rationnelle. 

La géométrie est une branche des mathématiques ap- 
pliquées qui considère la quantité dans l'étendue. 

Remarquons aussi que d'après les idées reçues, la géo- 
métrie est placée dans les mathématiques pures;: c'est 
une erreur qu'il importe de relever, car les définitions 
bonnes et justes nous placent au centre des objets que 


nous avons à étudier, elles nous permettent d'en juger 


l'ensemble d’un coup-d'œil, nous en font voir le contour 
et les détails, et nous tracent la marche que nous devons 
suivre. 

L'absence de considérations générales et centrales en 
mathématiques me paraît un grand défaut de plusieurs 


— 220 — 


ouyrages destinés à l’enseignement, c'est dans le but de 
faire ressortir les avantages de ces considérations que je 
vais entrer dans quelques détails à l'égard de la géométrie. 

La géométrie s’occupant des quantités de l'étendue, la 
première question que nous devons nous adresser est 
celle-ci : Y a-t-il plusieurs espèces de quantités dans l’é- 
tendue ? 

Nous en trouvons trois : {° des lignes , 2° des sur- 
faces , 3° des volumes. 

1° Les lignes sont très-nombreuses dans leurs variétés ; 
on en distingue de droites et de courbes: circonférence, 
ellipse, parabole, hyperbole, spirale, hélice, etc. Nous 
commencerons par l’étude des lignes droites puis nous 
passerons à celle des lignes courbes en prenant d'abord 
les plus simples, enfin nous réunirons dans un dernier 
chapitre les propriétés générales communes à toutes espè- 
ces de courbes. 

Au point de vue élémentaire, on n'étudie que deux es- 
pèces de lignes , savoir : a) les lignes droites tracées dans 
un plan: c'est le premier livre de Legendre ; b) la ligne 
circonférence : c'est le second livre du même auteur. 

29 La géométrie des surfaces se subdivisera d'après 
les mêmes principes; nous distinguons les surfaces planes 
et courbes sphériques, cylindriques , coniques, de révo- 
lution, réglées, etc. 

Dans les éléments on ne s'occupe que des surfaces 
planes et des surfaces courbes les plus simples, savoir de 
celles qu’on appelle les corps ronds. 

Nous aurons dès-lors à considérer : | 

a) Les surfaces planes terminées par des lignes droites 
ou polygone : c’est le troisième livre de Legendre; 


— 221 — 


b) Les surfaces planes terminées par des lignes circon- 
férences, le cercle : c'est le quatrième livre du même au- 
teur ; 

c} Les surfaces planes indéfinies ou les plans, dont l'é- 
tude forme le cinquième livre de Legendre ; 

d) Les surfaces courbes:et d’abord la sphère: c'est le 
septième livre de Legendre et une partie du huitième ; 

e) Les surfaces du cylindre et du cône, que Legendre a 
placées dans une autre partie du huitième livre de sa 
géométrie. 

- 39, La géométrie des solides, qui comprend : 

a) Les solides terminés par des surfaces planes, les 
polyèdres: c'est le septième livre de Legendre ; 

- b)-Les solides terminés par les surfaces des trois corps 
ronds, qui constituent le reste du huitième livre de la géo- 
métrie de Legendre. 

+ En poursuivant la méthode que je présente, nous se- 
rions conduits par des subdivisions tout-à-fait naturelles 
jusque dans les plus petits détails. 

Cette méthode a plusieurs avantages, parmi lesquels 
nous signalons en premier lieu la certitude qu'on ne né- 
glige aucun fait essentiel, ce qui donne de la sécurité et 
du repos à l'esprit ; en second lieu la généralité des ob- 
servalions, circonscrit complètement l'étude et en marque 
l'étendue. 

L'élève est ainsi soutenu dans son travail, il en voit 
leterme. En troisième lieu, l'établissement d’un lienentre 
toutes les parties de l'enseignement plaît à l'esprit et di- 
minue ce que peut avoir de sec et d’aride l'étude des dé- 
tails; l'imagination est mise de la partie: cette faculté 
qui est la source de si grandes jouissances pour l'esprit 


— 222 — 


humain a été généralement mise de côté dans l’enseigne- 
ment des mathématiques, ce qui me paraît une des prin- 
cipales causes de la faiblesse des élèves et du peu de goût 
que l’on rencontre chez eux pour cette branche d'étude. 

Nous avons dit que les mathématiques appliquées se 
divisaient en plusieurs parties d’après la nature des quan- 
tités qu’elles envisagent ; je suis entré dans quelques dé- 
tails sur-la géométrie; on pourrait faire la même chose 
pour les autres branches. En mécanique nous aurions à 
considérer la quantité dans le mouvement des corps et 
dans les forces, et de même dans les applications du cal- 
cul, aux questions que soulèvent la chaleur, la lumière , 
l'électricité, ete. 

Je terminerai ces réflexions générales par une obser- 
valion qu’il ne faut pas perdre de vue dans l'application 
des mathématiques aux quantités concrètes. 

Les quantités concrètes sont par leur nature limitées 
dans leurs conditions d'existence: dès-lors les solutions 
analytiques des questions posées, peuvent être exactes 
quand on prend la quantité dans son sens abstrait ; mais 
elles seront souvent impossibles dans l'application ; ainsi 
le produit de 2 ou 3 lignes a un sens en géométrie comme 
surface ou comme volume; ce produit de # ou d'un plus 
grand nombre de lignes n’a aucun sens. 

Telle question concrète exige une solution en nombre 
entier, par exemple lorsqu'il s’agit de trouver un nombre 
d'hommes; dans ce cas les valeurs fractionnaires doivent 
être éliminées. 

Les mathématiques appliquées ont par conséquent une 
généralité moins grande que les mathématiques pures, 
elles sont aussi astreintes aux conditions d'homogénéité 


| 
| 
à 


cé dE US SC dd, tt mens dti us à 


3 p° PRÉ 


— dé = 


des formules ; on tomberait donc dans des erreurs graves 
ou dans des difficultés considérables et qu'on ne pourrait 
pas lever si on ne tenait pas compte des conditions d'exis- 
tence des quantités concrètes. 


Examinant la communication faite par M. le D" de 
Castella, dans la séance du 6 avril, M. le D' Borel pense 
que l'exemple cité par lui n'infirme pas l'opinion de 
M. Bouillaud parce qu'il ne lui est pas applicable, puisque 
M. Borel admet que la parole disparaît lorsqu'il y a un 
double épanchement de sang dans les lobes antérieurs, et 
que cet épanchement se fait brusquement, comme cela 
arrive dans l’apoplexie; rien de semblable n’a eu lieu 
dans le cas précité où la lésion du cerveau est arrivée 
très lentement et n’occupait pas les deux lobes ; or, il 
est bien avéré que lorsque les lésions cérébrales survien- 
nent lentement, elles peuvent devenir fort étendues sans 
que les fonctions vitales soient très sensiblement déran- 
gées. La loi de M. Bouillaud doit d’ailleurs être restreinte 
au cas où l'individu malade, conservant l'intégrité de sa 
raison, perd la faculté de s'exprimer. L'hôpital de la ville 
offre à l'heure qu'il est un cas semblable dans le nommé 
Henriod, qui, quoique n'ayant jamais joui d’une intelli- 
gence très grande, a cependant gagné son pain comme 
ouvrier jusqu’à il y a un an où il eut une attaque d’apo- 
plexie, depuis laquelle il ne parle plus. Cet homme, âgé 
de 65 ans présente un cas fort intéressant ; son autopsie 
devra sans aucun doute infirmer ou confirmer d’une ma- 
nière éclatante la loi de M. Bouillaud. 

Le Même présente à la société deux calculs salivaires 
qu'il vient d'extraire du canal de Wharton, chez une jeune 
personne du reste en parfaite santé et qui éprouvait de- 


29 


= gr 


puis quelques mois une légère douleur dans le côté droit 
de la mâchoire, et une gêne assez grande dans le mou- 
vement de la langue ; ce qu’elle attribuait à une tumeur 
placée de ce côté de la bouche. L'examen de la cavité 
buccale démontra la présence d'un petit calcul dans l'o- 
rilice même du canal de Wharton, et d’un plus gros 
placé au-dessous et dans le canal lui-même. L’enléve- 
ment de ces deux calculs qui eut lieu , celui du premier 
avec des pincettes seulement, et celui du second à l’aide 
d’une incision, fut suivie d’une abondante sécrétion de sa- 
live à la suite de laquelle la douleur et la pression ces- 
sérent aussitôt. 


M. le Prof. Sacc ayant été amené à examiner le chlo- 
ride liquide et brun qui accompagne toujours le chloride 
sélénieux, l'a préparé en assez grande quantité pour pou- 
voir l’analyser par deux méthodes différentes, qui l'ont 
amené à confirmer pour ce singulier composé, la formule 
que lui avait assignée M. Berzélius ; il explique sa dé- 
composition en présence de l’eau par l'équation suivante 
CL Se: + 20H—Se, CIH, H, O2 Se, qui prouve que, 
bien que le chloride bisélénieux corresponde au chloride 
bisulfureux , il différe cependant de ce dernier, puisqu’en 
se décomposant en présence de l’eau, il ne produit point 
de l’acide hyposélénieux OSe, qui paraît ne pouvoir pas 
exister, mais passe immédiatement à l’état d'acide sélé- 
nieux en décomposant un équivalent d'eau dont il met 
l'hydrogène en liberté. | 

À une température un peu élevée, le chloride bisélé- 
nieux volalilise avec lui un peu de sélénium qu’il dépose 
au bout d'un certain temps sous forme de petits cristaux 
bien définis. 


té) 2 à di. 


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— 225 — 


M. le Prof. Sacc, dans le but d'empêcher la falcification 
toujours croissante de l’opium, propose de l’analyser de 
la manière suivante : On coupe l'opium en trés petites 
lames qu’on fait digérer avec dix fois leur poids d’eau, 
et on filtre sur une toile ; puis on neutralise exactement 
la solution avec de l'ammoniaque et on y verse un excès 
de chlorure calcique ; on recueille sur un filtre le préci- 
pité de méconate calcique. Dans la liqueur filtrée on verse 
de l'ammoniaque en excès avec laquelle on la fait bouil- 
lir et on filtre ; ce qui reste sur le papier est de la mor— 
phine brute dont le poids indique facilement la valeur 
de l’opium. On traite ensuite les eaux mères de la mor- 
phine par le carbonate ammonique en excès qui en 
précipite toute la chaux ; on fait bouillir et filtrer. Cette 
solution évaporée à consistance sirupeuse et traitée par 
l'alcool absolu, laisse un résidu insoluble formé de gomme 
et de caoutchouc, et dissout toute la narcéïne dans les 
eaux mères de laquelle se trouve quelquefois la méco- 
nine. Quant au résidu que laisse l'opium traité par l'eau, 
on le fait bouillir avec de l'alcool qui dissout toute la 
narcotine sans attaquer le caoutchouc et la fibre ligneuse 
qui en constituent la presque totalité. 

Le même présente ensuite à la société un échantillon 
de vin de gentiane préparé en faisant fermenter les ra- 
cines de la gentiana lutea. Cette solution, douée d’une 
amertume excessive, présente à sa surface la teinte opa- 
line des solutions de quinine : sa couleur est orangée ; 
elle est parfaitement limpide et douée d'une odeur agréa- 
ble: M. Sacc, frappé des rapports de la solution de gentiane 
ainsi obtenue avec celle des sels quiniques, voudrait que 
les médecins l’essayassent comme fébrifuge et répétassent 


— 226 — 


avec elle lès mêmes essais qu'on a faits jusqu'ici avec 
d'autres préparations de cette racine. Sila gentiane pou- 
vait être utilisée même sur une fort petite échelle, elle 
présenterait l'avantage de fournir à (rès-bon compte un 
reméde doublement précieux , puisqu'ilest tiré de notre 
sol. 


M. le Président après avoir rappelé combien il'est dif- 
ficile de trouver des arbres qui croissent dans les terrains 
arides de nos côteaux, dit qu’on emploie habituellement 
dans ce but l’acer pseudoplatanus qui croît fort bien au- 
dessus de Pierre-à—Bot, mais pas au-dessous, et qu'il 
vient de le remplacer avec succès dans ces terrains-là 
par l’acer opulifolium, bel arbre de seconde grandeur, 
assez commun dans notre pays, mais rare ailleurs. Hl 
est fort à regretter que cet arbre soit tellement diffcile à 
obtenir de semis, parce qu’il n’en léve qu'un fort petit 
nombre. 

M. Coulon, père, ajoute aux précédentes observations, 
que l’acer opulifolium mérite d’être cultivé comme arbre 
d'ornement, tant à cause de la beauté de son port que 
parce qu'il est un des premiers arbres qui verdit au prin- 
temps et un des derniers qui perd son feuillage en au- 
tomne. 


Séance du 25 Mai 1848. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. le Prof. Sacc ayant examiné les deux calculs sa- 
livaires que lui a remis M. Borel dans la précédente 
séance, les a trouvés composés d’albumine coagulée unie 
à de la chaux et du phosphate calcique ; ce dernier en 
formait la majeure partie. 


— 221 — 

Le même dit qu'ayant distillé le vin de gentiane dont 
il a parlé dans la précédente séance, il a retiré de cinq 
livres de racines, 14 grammes d’alcool absolu d'un fort 
bon goût et doué d’une odeur de fruit fort agréable. 

Cette communication amène une discussion sur le dé- 
veloppement des racines charnues, de laquelle il résulte, 
au dire de M. L. Coulon, que lorsqu'on plante de pe- 
tites pommes-de-terre, on obtient, toutes choses égales 
d’ailleurs, beaucoup moins de gros tubereules que lors- 
qu'on se sert de ces derniers coupés en morceaux ; il at- 


_tribue cette différence à ce que les bourgeons de ces der- 


niers sont beaucoup mieux développés que dans les pre- 
miers. 

M. le Prof. Guyot dit que M. Gruithuisen, en se ba- 
sant sur le changement d’aspect que présente régulière-_ 
ment chaque année l'atmosphère lunaire, il en a conclu 
qu'à certaines époques la végétation se développe sur 
cette planète pour disparaître ensuite. 

Le même, analysant un mémoire de M. Aymard publié 
dans le Bulletin de la Société géologique de France, sou- 
tient, en s'appuyant sur lui, ainsi que sur plusieurs autres 
données encore, qu'il est impossible de distinguer d’une 
facon bien tranchée les différentes couches géologiques 
à l'aide des fossiles qu'on y trouve, puisqu'on les voit 
très souvent mélangés, comme c'est tout spécialement le 
cas, au Puy-du-Dôme, avec les ossements des animaux 
actuellement existants; cette manière de voir est aussi 
celle de M. Hermann de Meyer. M. Aymard ayant trouvé 
dans les brèches volcaniques du Puy des os appartenant 
à des animaux des pays chauds avec d’autres provenant 
d'animaux des pays froids il en conclut que l'hypothèse 


— 228 — 

des glaciers ne peut pas être appliquée à ce cas ti. 
M: Guyot croit qu'il se trompe, et ne voit pas pourquoi 
les faits observés au Puy empêchent d'admettre que la 
présence d'un climat plus chaud, ou aussi chaud quele 
nôtre, ait été suivie de l'apparition d'un climat très froid. 
Il semble ressortir des faits observés par M. Aymard, que 
l'homme a vécu en même temps que les grands animaux 
de l'époque antédiluvienne; on sait que les recherches 
de M. Desor sur les ossements fossiles des Etats-Unis, 
l'ont convaincu que l’homme avait existé avant déjà, et 
dans tous les cas, en même temps que l'énorme masto— 
donte. M. Guyot regrette que des observations de cette 
nature ne puissent pas être poursuivies dans notre patrie 
dont le sol est tellement couvert par l’erratique qu'on ne 
peut point arriver jusqu'aux fossiles, qui sont excessive- 
ment rares ; il cite comme des exceptions les ossements 
découverts à Matenien par M. Pictet et deux dents d'élé- 
phant trouvées à Genève et à Fribourg, auxquelles 
M. Coulon ajoute celle qu’on a découverte à Fahy, der- 
riére Neuchâtel. 

M. le Prof. Guyot examinant ensuite un mémoire de 
M. Le Coq, dans lequel il cherche à prouver que les gla- 
ciers ont dû se former sous l'influence d'une température 
plus élevée que la nôtre, puisque, pour former d'aussi 
énormes masses de glace, il fallait que l'air contint beau- 
coup plus d’eau que cela n’est possible maintenant à 
cause de sa température peu élevée, il s'attache à prou- 
ver que cette manière de voir n’est vraie que jusqu'à un 
certain point, puisque, pour former de la glace, il faut, 
non seulement de l’eau, mais aussi du froid. L'idée de 
M. Le Coq a néanmoins quelque chose de très vrai, et 


— 229 — 


M. Guyot croit qu'on verrait reparaître l'époque glaciaire 
si des vents humides venaient à souffler vers l’intérieur 
des terres de manière à faire tomber sur elles, en hiver, 
une telle masse de neige que les chaleurs de l'été suivant 
ne pussent pas la fondre. ‘ 

| F. Sacc, secrétaire. 


300 — 


BULLETIN 
DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES 


DE MEUTEATEM 


Section de la Chaux-de-Fonds. 


Séance du 30 Décembre 1847. 


Présidence de M. WuURFIEIN. 


M. le Président donne lecture d'une lettre de M. Oli- 
vier Mathey, relative au rapport fait par la commission 
des dorages et inséré dans le Bulletin de l’année der- 
nière. Dans cette lettre M. Mathey réclame la priorité du 
procédé de M. Gerbel en faveur de M. Bouché, et indique 
plusieurs procédés de dorage ainsi que la composition de 
plusieurs poudres dont se servent les doreurs pour fixer 
l'or et pour la mise en couleur. M. Mathey à jjoint à 
cette lettre un envoi de pièces de montre dorées par les 
différens procédés qu'il a indiqués. — Ces dorages et la 
lettre de M. Mathey sont renvoyées à la commission déjà 
nommée. 

M. Favre fait part à la société d’un fait météorologique 
qui lui a été communiqué dernièrement. Un chasseur de 
la Chaux-de-Fonds étant à son poste le 9 octobre, pen- 
dant l’éclipse, remarqua que le givre qui couvrait un 
rocher voisin exposé aux rayons du soleil, avait fondu 
complètement, jusqu'au moment où l’éclipse devint to— 
tale ; mais dans ce moment il vit le givre se reformer 


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— 231 — 


lentement pour fondre de nouveau quand la chaleur s0- 
laire fut suffisante. 


Séance du 13 Janvier 1848. 


Présidence de M. WURFLEIN. 


M. Olivier Mathey lit un mèmoire sur la télégraphie 
électrique, dans lequel, après avoir fait l'histoire des ap- 
pareils employés jusqu'à présent , il expose la construc- 
tion d’un télégraphe de son invention qu'il présente à la 
société et fait fonctionner sous ses yeux. Dans cet ins- 
trument l'interruption du courant est déterminée, comme 
dans la machine d’induction de M. Bonijol, par une roue 
à cliquet dont les intervalles des dents sont formés par 
un corps non conducteur; quand le cliquet appuie sur 
une dent métallique le circuit est fermé, mais quand il 
repose dans un intervalle non métallique, le courant est 
interrompu. L’axe de cette roue porte une aiguille que 
l’on fait tourner par un bouton sur le cadran où se trou- 
vent les lettres, les chiffres et les signes nécessaires à la 
transmission des dépêches ; chaque fois que l'aiguille 
quitte une lettre de l'alphabet pour arriver sur une autre, 
une dent de la roue passe sous le cliquet , le courant est 
interrompu, puis fermé, de scrte que par l'effet de l'ap- 
pareil placé à l’autre station, les mêmes mouvemens sont 
reproduits par une aiguille marchant sur un cadran ana- 
logue. 

Son télégraphe, qui est du reste d’un fort beau travail, 
est en outre muni d'un réveil que l'action galvanique fait 
jouer d’une station à l’autre, pour avertir quand une dé- 


| pêche va être donnée. 


— 232 — 


M. le D' DuBorïs après avoir rappelé très sommaire- 
ment les principales causes d’étranglement du canal di- 
gestif et les immenses différences que leur siége amène 
dans ses dérangements fonctionnels, trace l'historique 
d'un de ces étranglements, dont la cause qui ne pouvait 
pas même être supposée pendant la vie, a été révélée par 
l'autopsie. IL s’agit d’un cas où l’épiploon, beaucoup plus 
étendu en longueur que dans l’état normal, descendait 
dans l’excavation du petit bassin où il avait contracté par 
son extrémité inférieure de très fortes adhérences avec le 
bord supérieur du corps de la matrice. La pièce anato— 
mique mise sous les yeux de la société fait voir une forte 
bride longue d'environ trois pouces, très-solidement at- 
tachée à cet organe et qui, par son bord latéral gauche, 
comprime tellement le rectum sur le point du détroit su- 
périeur où il plonge dans le petit bassin, que cet intestin 
très-dilaté au-dessus ne laissait pénétrer aucun des Jave- 
mens que l'on avait, à réitérées fois, cherché à faire entrer. 

En raison du siége de la lésion, les ‘accidens d’étran- 
glement ont suivi une marche très-lente. La constipation 
a persisié jusqu'au bout; mais les vomissemens et le ho- 
quet ont cessé les derniers jours. Le pouls n’a pas non 
plus présenté les caractères qu’il offre dans un étrangle- 
ment d'une partie moins inférieure du tube digestif, et 
des symptômes (yphoïdes ont fermé le cortège des accidens 
qui ont causé la mort vers le 15% jour. 


Séance du 27 Janvier 1848. 
Présidence de M. WuRFLEIN. 
Le D' Pury lit une note sur la maladie causée par les 


émanations du phosphore chez les fabricans d’'allumettes 
chimiques. 


| 1990 


— 233 — 


M. le Dr Irlet entretient la section d’un cas d’herma- 
phrodisme féminin chez un enfant âgé de sept semaines. 
Cet enfant avait le clitoris très-développé; on sent dans 
les grandes lèvres une espèce de glande ovoïde, les pe- 
tites lèvres n'existent pas ; le méat urinaire est placé der- 
rière le clitoris. 

Après cette communication, M. le D' Irlet fait l’histoire 
de deux opérations où il a employé le chloroforme comme 
moyen anésthésique. Ces deux opérations, l'une , l’exci- 
sion de plusieurs tumeurs graisseuses sur la tête, et 
l’autre l’'amputation d’un doigt, ont été faites sans que les 
opérés en aient eu la moindre conscience. Dans le pre- 
mier cas seulement, M. Irlet ayant trop approché le chlo- 


roforme du nez du malade, il en est résulté une colora- 


tion blanchâtre de la peau qui a persisté pendant quelque 
temps. 

M. Nicolet présente des aiguilles et des balanciers de 
montre en cuivre pur ou allié avec divers métaux, aux- 
quels il a donné une brillante couleur rouge-pourpre par 
le moyen de l'oxidation ; le procédé de M. Nicolet con- 
siste à déterminer sur la surface polie du métal la forma- 
tion d'une pellicule très-mince d'oxide en procédant 
comme pour le recuit de l'acier par le moyen d'une cha- 
leur modérée maintenue au même degré; en élévant gra- 
duellement la température on varie la couleur des cou- 
ches d'oxide, car celles-ci jouissent des propriétés des 
lames minces et présentent le phénomène des anneaux 
colorés ; la couche d’oxide n'altère nullement le poli de 
la surface métallique. M. Nicolet croit que ce procédé 
simple, peu coùteux et d'une rapide exécution. pourra 
être utilisé dans notre fabrique d’horlogerie pour la co- 


BULL, DES SC. NATUR. TOM. II. 17 


— 234 — 


loration de plusieurs pièces de la montre ; cependant il 
observe que par le procédé de M. Becquerel, qui consiste 
à déposer des couches très-minces de péroxide de plomb 
sur certains métaux par le moyen de la pile, on obtient 
des couches colorées plus solides. 


Gnnet du 10 Février 1848. 


Présidence de M. WuRFLEIN. 


M. Nicolet présente plusieurs jaseurs de Bohême (Bom- 
bréilla garrula Temm) qui ont été tués la semaine dernière 
dans les environs de la Chaux-d’Abel : un vol de ces oi 
seaux s'était abattu sur des sorbiers et en mangeait les 
baies lorsque les chasseurs les aperçurent. 

M. Favre présente les figures de 82 espèces de cham- 
pignons appartenant aux diverses classes qu'il a peints 
l'été dernier et qui ont été déterminés par M. Trog de 
Thun. L'année 1847 n’a pas présenté, suivant les ob- 
servations de M. Favre, la même abondance de ces cryp- 
togames que l’année précédente, elle a été pauvre tant 
pour le nombre des individus que pour la variété des 
espèces. 

Il lit ensuite quelques remarques sur le mycologie en 
général, sur les collections de champignons, sur l'ac- 
croissement de ces végétaux, sur l’intermittence de leurs 
apparitions et le rôle que joue sous ce rapport le myce- 
l'um. 


Séance du 24 Février 1848. 


Présidence de M. WURELEIN. 


Le procès-verbal de la précédente séance est lu et 
adopté. 


| 


ur MB se 

M. L. Favre continue la lecture de son (rava 
champignons de noire pays. Il établit les différ 
lui paraissent exis{er entre Ja 
« des bords du lac, et précise les 
* se montrent de préférence, 11 
“ gnons comme aliments, indique les caractères propres à 
- distinguer les vénéneux, et Passe en revue, avec détail, 
‘ vingt espèces comestibles dont il Peut recommander J'y 
«Sage en ayant fait l'essai lui-même. 
Genre AGarrcus. 


: 

. Ag. Procerus, SCop. agaric élevé. Bois d 
8 Pays. Creux-des_Olives près de la 
| forêts entre Coffrane et Corcelles, 


dry, Jolimont. Aoùût-Octobre, 
à 


il sur les 


Lie 


ences qui 
flore des Montagnes et celle 


époques où certains genres 
étudie ensuite les champi- 


PRES 


€ Sapins de tout Je 
Chaux-de_p onds, 
Montagne de Bou- 


g- Petaloides, Bull. 


Chaux-de-Fonds ; Août-Septembre. 
A Prunulus, Scop. ag. mo 

Printemps et automne. 
2e Campestris, Lin. champignon de couche. 
« partout. Été, automne, 
8: Gambosus, Fr. Pâturages de Pouillere]. 
» Genre Corrnus. 
Op: Comatus Schœff. 
Septembre, 


Dans les prés, 


Mai. 


Genre CANTHARELLUS. 

Canth. Cibarius Fr. la chanterelle. Très-abondant dans 
toutes nos forêts depuis Juillet à Novembre; apparaît 
dans les montagnes à la fin d'Août. 

Genre BOoLETus. 

Bol. edulis, Bull. bolec comestible, bolet, ceps. Bois de Pouil- 
lerel, montagne de Boudry, Jolimont. Juillet-Octobre. 
Genre Hypnum. 

H. Imbricatum L. hydne écailleux. Forèts voisines de la 
Chaux-de-Fonds. Septembre-Octobre. 

H. Repandum L. hylne commun. Forêts de tout le pays. 
Septembre, Octobre. 

H. Coralloides Scop. h. corail. Sur les vieux troncs de 
sapins. Bas-Monsieur. Septembre. 


Genre GUEPINIA. 

G. HelvelloidesFr. Lisière des bois : Endroits Chaux-de 
Fonds. Août, Septembre. 
Genre CLAVARIA. 

CL. Aurea Schæff. clavaire dorée. Chevrette vulgaire. Fo 
rêts de toutle pays. Sept. Octobre. 
Genre MorCHELLA. 

M. Conica Pers. morille conique. Forêts de sapin. Avr 
Mai. 

M. esculenta $ vulgaris Pers. Bords du lac. Avril. 
Genre HELVELLA. 

H. Gigas, appelée dans les montagnes oreillarde. Répa 
due çà et là sur les vieux trones. Fort abondante d 
puis quelques années au pied d'un tilleul où on a 
tassé du menu bois, à Clermont près du Bas-Monsieu 


— 237 — 
Un exemplaire mesurait quatorze pouces de diamétre. 
Avril, Mai. 
Genre PEz1zA. 
P. Repanda Pers. Sur terre, dans le voisinage des vieux 
troncs, prend quelquefois un développement qui la fait 
ressembler un peu à l'oreille humaine. Avril, Mai. 


Genre LYCOPERDON. 

L. Cœlatum Bull. Dans les prés. Septemb. Octobre. N'est 
comestible que jeune. 

M. Olivier Maithey présente plusieurs SR de mon- 
tre, en or, colorées par l'oxide de plomb précipité de sa 
solution alcaline au moyen d’un courant électrique. Ces 
aiguilles, d'un travail admirable et d’un fini précieux, ont 
été confectionnées par M. Henri-Louis Jacot, du Locle, 
auquel M. Matthey à fourni l’idée d'employer les procédés 
de M. Becquerel. 

M. L. Favre annonce à la Société que de grands vols 
de Sizerins ou Linottes boréales (Fringilla borealis Temm 
Linaria canescens) ont été aperçus dans les environs de 
la Chaux-de-Fonds. Leur apparition a coïncidé avec celle 
des Jaseurs de Bohême ; ils étaient si peu défiants qu’on 
en a pris beaucoup dans les pièges les plus grossiers. 

Les secrétaires : 
Dr Purv. — Louis Favre. 


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APPENDICE. 


Lettres de M. DEson sur les phénomenes glaciaires observés 


dans l’Amérique du Nord. 


I. 
- M. Desor à M. Guyot. 


Boston ce 14 juillet 4847. 


er ds tte dé 


Eh bien mon cher, permettez-moi de vous dire que 
vous avez eu tort de renoncer à votre projet de visiter la 

» Scandinavie. Vous y auriez pris une idée du grand phé- 
nomène glaciaire avec lequel il est difficile de se familia-. 
riser si l'on a pas été sur les lieux. Mieux vaudrait en- 
core que vous vinssiez ici où tout est encore bien plus 
grandiose et bien plus distinct. L'Amérique du nord est 
+ après tout le théâtre de l’action glaciaire par excellence. 
- Je reviens d'une course au Niagara et aux Montagnes 
… Blanches et veux essayer de vous donner un apercu des 
principaux résultats auxquels nous sommes arrivés. Je 
suppose que vous êtes au courant des faits généraux qui 
»sont acquis par les recherches des géologues américains, 
or la dispersion des blocs par dessus toute la Nou- 
“ velle-Angleterre et une partie des états de l'ouest. La 
présence des stries dans les mêmes limites jusqu’au som- 
met des montagnes au moins 5000’, courant en général 
du N.-N.-0. au S.-S.—E. avec quelques exceptions où 


dsl tit 


a ee AS PT RP Y 


BULL, DES SC. NATUR. TOM, II, 13 


— 240 — 


la direction est du Nord au sud ou bien du N.-N.-E. au 
S.-S.-0., comme sur les bords du lac Ontario: le fait 
que les blocs sont en général arrondis et que les plus gros 
se trouvent placés de préférence sur le sommet des émi- 
nences. Voici maintenant quelques autres faits qui vous 
sont peut-être moins familiers et que j'envisage comme 
non moins importans. Vous savez que les géologues amé- 
ricains ont distingué le diluvium en deux étages : 1° le 
drift proprement dit composé d’un mélange de galets rayés 
de toutes grosseurs, sans stratification et 2°, les argiles et 
sables stratifiés du diluvium, qui portent aussi chez 
quelques-uns le nom de terrain tertiaire. Ces messieurs 
ne savent pas encore positivement si le drift est constam- 
ment inférieur ou si dans certains cas il peut être supé- 
rieur aux argiles, mais c'est là plutôt une question locale. 
Maintenant voici ce qu'on voit dans le Vermont qui est un 
pays de pâturages tout couvert de collines (magnifique 
pays par parenthèse, qui m'a vivement rappelé tes belles 
parties de la Forêt-Noire). Le niveau moyen du drift, 
avec gros blocs comme à Granges près Bienne et à Diéze, 
est entre 1500 à 2000 pieds, et à cette hauteur il ne 
montre aucune trace de stratification. Plus bas il est sou- 
vent dénudé et il n’est resté en place que les gros blocs 
qui jonchent le sol, comme si on les y avait semés, 
de manière qu'en beaucoup d'endroits, surtout dans le 
New-Hampsbhire, la culture est rendue impossible par là. 
Enfin c’est dans le fond des vallées que se trouvent les 
argiles et les sables stratifiés sur les bords du beau lac 
Champlain, le long du Hudson et surtout dans la vallée 
du Saint-Laurent, où on les trouve jusqu'à 600 pieds 
de hauteur. Ge sont des argiles supérieures au drift qui 


contiennent les fossiles marins (*) que l'on trouve en 
grand nombre à Barlington sur les bords du lac Cham- 
plain (j'en ai recueilli moi-même un grand nombre) et 
qui ont été signalés jusqu'à 500 pieds de hauteur dans 
la vallée du Saint-Laurent près de Montréal. Ce sont 
surtout des Tellines (Tellina groenlandica) et des Saxi- 
caves, ainsi que quelques Nucules. 

L'explication de cette disposition ne me paraît pas bien 
difficile. Entre 1500/ et 2500! le drift est tel qu'il a été 
déposé par les anciens glaciers, les blocs arrondis et striés 
de toutes dimensions sont épars pêle-mêle au milieu du 
limon glaciaire. Plus bas, entre 500 / et 1500, les parties 
menues ont été balayées et il n’est resté en place que les 
gros blocs qui reposent sur la roche polie. Enfin l'argile 
et les sables stratifiés au fond des vallées sont le résidu 
de ce balayage qui a été déposé dans les dépressions pen- 
dant que celles-ci étaient occupées par les eaux de la 
mer. (La mer à cette époque communiquait avec le lac 
Champlain , avec le Hudson et, probablement par le lac 
Michigan, avec le Mississipi). 

Maintenant n'êtes-vous pas frappé de l’analogie de 
cette disposition avec ce que l’on observe en Suisse. Ce 
drift du sommet ne vous rappelle-t-il pas celui qui se 
trouve au sommet de Chaumont et sur les différentes 
terrasses de la montagne. D'un autre côté n'avez-vous pas 


(*) 1 existe aussi sur quelques points du littoral des débris de coquilles 
dans le véritable drift, au-dessous des sables et des argiles. Nous en ayons 
trouvé de fort beaux échantillons dans les collines de drift près de New- 
York. Cette découverte a excité d’autant plus d'intérêt que les géolognes 
d'ici avaient déclaré que le drift ne contenait pas de coquilles au sud da 
ac Champlain. Ce sont toutes des espèces vivantes. 


= bot — 


quelque chose d'analogue aux argiles dans les dépôts stra- 
tifiés de la plaine (l'alluvion ancienne)? Il est vrai qu'il y 
a cette grande différence, c'est que les argiles ici sont évi- 
demment marines, tandis qu'il n’y a aucune trace d’ani- 
maux marins en Suisse. Mais vous avez en Suisse des 
éléphants dans votre alluvion ancienne. Or savez-vous 
que ces éléphants auxquels on n’a pas accordé assez d'im- 
portance sont le fait capital, et voici pourquoi : des dents 
d'éléphant tout-à-fait semblables et que M. Owen iden- 
tifie avec le Mammouth de Sibérie ont été trouvées dans 
ce pays-ci avec des os de Mastodons qui, vous le savez, 
sont excessivement abondants dans toute l'Amérique. 
Maintenant quel est le gisement de ces ossemens ; c’est la 
grande question. Eh bien, je crois qu’on peut démontrer 
qu'il est plus récent, non seulement que le drift, mais 
aussi que les argiles. Le plus souvent ces os se trouvent 
dans des tourbières ou dans du gravier superficiel, avec 
des coquilles terrestres et fluviatiles , toutes d'espèces qui 
vivent actuellement dans les environs : des Hélices, des 
Limnées, des Mélanies. On a trouvé ces mêmes os de 
Mastodons dans la vallée du Saint-Laurent reposant sur 
les argiles diluviennes. Par conséquent, non seulement les 
Mastodons n'ont pas été tués par le froid, mais ils n’exis- 
taient pas à cette époque. Ils n’ont même été créés qu'a- 
près que les eaux de la mer se furent retirées des terres 
basses du continent pour faire place à une faune de co- 
quilles terrestres et fluviatiles qui est la nôtre. Par con- 
séquent les Mastodons et les éléphants sont contemporains 
de l’homme comme les élans, les sangliers et le bos pris- 
cus qu'on trouve dans les tourbières de la Scanie et du 
Danemark, associés à des os humains, et le fait que des 


— 243 — 


ossements d'Indiens ont été trouvés avec des os de Mas- 
todons à Natchez sur les bords du Mississipi n’a dés lors 
rien de bien extraordinaire à mes yeux, bien que le fait 
spécial ait besoin de vérification. Je me suis donc demandé 
si l’alluvion ancienne de Suisse, qu’on déclare, je ne sais 
trop pour quel motif, être antérieure aux blocs errati- 
ques, si, dis-je, cette alluvion avec ses éléphants ne serait 
pas en partie contemporaine de la couche à Mastodons et 
à éléphants de ce pays-ci. Je vous soumets cette suppo— 
sition avec toute la réserve qu’exige l'importance du sujet. 
Vous êtes le juge naturel de cette question (inutile de dire 
le plus compétent). C'est à vous de voir et de décider. 


II. 


M. Desor à M. Guyot. 


Lewistown sur les bords de l’Anderscoggin, 
ce 13 sept. 1847. 

Quoique vous soyez certainement l’un des plus habiles 
géographes de l'époque, je parie que vous ne connaissez 
pas Lewistown. C'est à peine si vous avez entendu parler 
de l'Anderscoggin qui coule sous mes fenêtres. Et ce- 
pendant c’est une rivière au moins aussi grande que le 
Rhin à Strasbourg ; il paraît même que c’est de toutes les 
rivières de la Nouvelle-Angleterre, celle qui charrie le 
plus d'eau, plus que le Connecticut, plus que le Pen- 
nobscut et plus que le Kennebee. La ville de Lewistown 
s'êtend sur les deux rives du fleuve, au pied des cas- 
cades dont j'aperçois d'ici les tourbillons de brouillard 
malgré le mauvais temps ; je voudrais pouvoir vous trans- 


= OU 


porter ici pour un moment, pour un quart-d'heure seu- 
lement, et au bruit de cette magnifique cascade vous 
causer des phénomènes géologiques qui s'y rattachent. 
En voyant ces mamelons de granit moutonné par dessus 
lesquels l'eau se précipite, ces terrasses de gravier et 
d'argile diluvienne dans lesquelles le fleuve s’est creusé 
son lit au dessous de la cascade, en apercevant ces grands 
blocs erratiques qui sont éparpillés sur les hauteurs qui 
dominent la ville, je vois toute l’histoire de cette longue 
période diluvienne se dérouler à mes yeux. Je vois la 
calotte de glace laissant les matériaux du drift entassés 
pêle-mèêle sur le sol. Je vois ensuite le sol de l'Amérique 
du nord s’affaisser. La mer envahir cette surface cahoti- 
que, la vague travailler cet amas détritique , balayer le 
limon des parties saillantes et le déposer sous forme d’ar- 
gile et de limon dans les dépressions du sol par dessus le 
drift glaciaire. Je vois apparaître sur cette plage nouvelle 
toute une faune d'animaux marins, se composant des mé- 
mes espèces que celles qui vivent aujourd'hui dans le port 
de Boston et dont j'ai recueilli avant-hier une magnifi- 
que collection sur les bords du Kennebee, à 70 pieds 
au dessus des hautes marées ; elles sont magnifiques, la 
plupart ont même conservé leurs couleurs. M. Agassiz 
n'en croira pas ses yeux quand il les verra. Ces mêmes 
espèces se trouvent sur les bords du Saint-Laurent, près 
de Montréal à 500 pieds au dessus de la mer. Or comme 
ce sont des espèces essentiellement littorales (Tellina 
grœlandica, Saxicava rugosa etc.), il est évident qu’elles 
n’ont pas vécu simultanément à 70 pieds sur les bords 
du Kennebee et à 500 pieds sur les bords du Saint-Lau- 
rent. fl faut par conséquent que tous les points intermé- 


dot Le : 


diaires où l'on trouve de semblables coquilles aient été 
successivement à la limite des marées lorsque vivaient 
les coquilles qui s’y trouvent enfouies. J'assiste en esprit 
aux oscillations séculaires de tout ce vaste continent, je 
vois des populations marines tout entières disparaître et: 
d'autres se développer sous l'influence des déplacements 
et des mouvemens divers de la mer. Après cette période 
qui a dù être fort longue si j'en juge par la quantité des 
fossiles et l'épaisseur des couches fossilifères, je vois le sol 
des Etats-Unis se soulever de nouveau, les eaux de l'O- 
céan rentrer graduellement dans leurs anciennes limites, 
formant en se retirant les oesars ou digues sous-marines, 
tandis que les glaces flottantes déposent sur ces digues 
stratifiées, les blocs erratiques dont leur sommet est cou- 
ronné. (Je crois vous avoir dit dans une précédente lettre 
que les oesars sont aussi nombreux dans ce pays qu’en 
Scandinavie). Cependant les eaux des grands lacs n'étant 
plus en communication avec l'Océan, perdent peu à peu 
leur salure, les rivières commencent à se creuser de 
nouveaux lits dans les terrains meubles déposés et rema- 
piés par la mer, et pendant que la terre se prépare ainsi 
à recevoir celui qui est destiné à régner sur elle, je suis 
surpris de voir tout à coup apparaître au milieu de ces 
vastes plaines des animaux terrestres aux formes colos- 
sales. C’est le Mastodon qui se promène dans les vallées 
eñcore humides de l'Ohio et du Mississipi. D’où vient-il? 
Je n'en sais rien. Mais il est évident qu’il n’y était pas 
tout à l'heure lorsque la mer venait battre le pied des 
Montagnes Rocheuses, Aussi bien ses débris ne se trou- 
vent-ils que dans les limons superficiels qui recouvrent 
les sables et les argiles diluviennes. Voilà à-peu-prés le 


"— 246 —., 


résumé piltoresque de nos études sur le drift de ce pays. 
Quelque imparfaites qu’elles soient (car nous n'avons pu 
y consacrer que peu de temps) vous voyez qu'il y a loin 
de cela à l’idée que l’on se faisait il n’y a pas bien long- 
temps des phénomènes diluviens , lorsqu'on se les repré- 
sentait comme l’effet d’un cataclysme subit et violent ou 
même lorsque l’on croyait que les animaux dont la race 
s'est perdue, avaient été anéantis par les glaces. Ces ré- 
sultats se lisent de la manière la plus intelligible dans 
presque toute l'étendue de la Nouvelle-Angleterre, et d’a- 
près ce que j'ai appris de la composition des dépôts su- 
perficiels dans les états de l’ouest, je ne doute pas que les 
prairies du Mississipi ne confirment nos vues. J'espère 
m'en assurer sous peu et je me réjouis d'avance de vous 
en écrire des bords du Mississipi, peut-être dans un mois 
d'ici. Mais voici le temps qui semble se remettre et ma 
page qui finit. Je m'en vais faire le’tour de la cascade, 
pendant que vous gravissez peut-être quelque pic des 
Alpes. | 


IL. 


M. Desor à M. Collomb. 


Boston , ce16 décembre 1847. 


Votre lettre du 3 octobre nous a fait le plus grand 
plaisir, d'abord parce qu'elle nous donne de bonnes nou- 
velles de vous et de nos amis, et ensuite parce qu’elle nous 
apprend que la question des glaciers est toujours à l’ordre 
du jour, qu'elle progresse et s’embellit. C'est ce que vous 
pouviez nous apprendre de plus rèjouissant. | 


— 241 — 


Mais vous avez rencontré des difficultés à ce qu'il pa- 
rait, quelques moraines réfractaires, indisciplinables, 
auxquelles il faut absolument de l'eau. Soit, si le fait 
existe, comme je n'en doute pas, nous devons l’accepter 
en toute humilité, dût-il nous enlever nos plus jolies 
combinaisons, nos théories les plus choyées. Mais avant 
d'en faire le sacrifice sur l’autel du progrès, voyons un 
peu si les indices de stratification qu'on rencontre dans 
l'intérieur des moraines sont réellement incompatibles 
avec la théorie des glaciers. Je ne le pense pas et vous 
allez voir pourquoi. Ù 

Une chose dont nous devons bien nous pénétrer et qu'il 
ne faut jamais perdre de vue lorsqu'on étudie les dépôts 
erratiques , c’est le fait qu'après le polissage et le buri- 
nage des‘rochers, le sol de l'hémisphère boréal tout entier 
s’est affaissé sous la mer, au point qu'il a pu se former 
par dessus les polis, des dépôts stratifiés qui ont jusqu'à 
1000 pieds de hauteur en Norvège et plus de 800 pieds 
sur les bords des lacs du Canada. La mer ayant une 
profondeur pareille ne pouvait pas être limitée au Canada 
et à la Scandinavie. Aussi voyons-nous les mêmes dé- 
pôts divuliens se prolonger avec une épaisseur décrois- 
sante, jusqu'au 40° de latitude dans ce continent-ci , 
tandis qu'en Europe on les poursuit plus loin au sud, 
jusqu’en Pologne et en Poméranie. Aux environs de 
Hambourg la mer diluvienne (ou pleistocène comme on 
l'appelle maintenant) devait encore avoir une certaine 
profondeur pour former des dépôts qui atteignent une 
épaisseur de plusieurs centaines de pieds dans les collines 
de Blankensese sur les bords de l’Elbe. Une immersion 
aussi considérable de tout le nord de l'Europe n'a pas 


—— 9h80 — 


pu avoir lieu sans que les régions plus méridionales s’en 
ressentissent, et si les environs des Vosges et des Alpes 
n'étaient pas eux-mêmes envahis par la mer, il est pro- 
bable du moins que les dépressions et les grandes vallées 
devaient être recouvertes d'eaux douces ou saumâtres 
(alimentées peut-être par la fonte des grands glaciers). 
Je serais tenté de rapporter à cette époque non seulement 
le Lœæss du Rhin, mais encore le Lehm de la Vettéravie 
et l’alluvion ancienne de la Suisse qu’on a jusqu'ici, je 
ne sais trop pourquoi, envisagée comme plus ancienne 
que les blocs erratiques. Il n’y aurait dès-lors rien d’é- 
tonnant que vous trouviez des traces de l’action des eaux 
dans l'intérieur des Vosges, sans que cela portât d'au 
cune façon préjudice à la théorie glaciaire. 

Maintenant vos barrières des Vosges sont-elles des di- 
gues de cette époque d'immersion, ou bien de vraies mo- 
raines de l'époque glaciaire précédente, ou bien sont-elles 
l'effet des deux causes combinées, c'est-à-dire des morai- 
nes modifiées par l’action subséquente des eaux? D'après 
l'impression qu’elles m'ont laissée , il me semble qu’elles 
ont plus de rapport avec des moraines qu'avec des œsars. 
Le fait que leur convexité est tournée en aval me paraît 
surtout significatif. S'en suit-il que si ce sont réellement 
des moraines, elles doivent être nécessairement et tou- 
jours dépourvues de stratification ? Pour ma part je crois 
qu’en parlant de moraine, on songe en général d'une 
manière trop exclusive à ces remparts composés de dé- 
bris anguleux qui tombent de la surface du glacier, telles 
que les moraines frontales du glacier de l’Aar ou du gla- 
cier de Zmutt. Celles-là, j'en conviens, ne sauraient 
guère être stratifiées. Mais en est-il de même des mo- 


— 00! — 


raines composées de débris sous-jacents au glacier et préa- 
lablement statifiées par les eaux qui circulent sous le 
glacier ? Il y aurait un moyen bien simple de résoudre 
la question, ce serait d'aller passer quelques jours au 
glacier du Rhône, et d'étudier la pioche à la main les 
: moraines concentriques qui sont au devant du glacier et 
qui, quoiqu'on en dise, ont la plus grande analogie avec 
_ vos remparts de la vallée de Wesserling. Je vous engage 
. beaucoup à ne pas négliger de faire ces recherches l’été 
prochain. Ce sera un joli appendice à ajouter à votre 
livre, en remplacement du mouvement uniforme que vous 
supprimerez j'espère, dans la seconde édition. 

Je ne comprends rien au rôle que vous faites jouer aux 
filets d’eau qui circulent sur les glaciers et dans leur in- 
térieur. Voulez-vous simplement montrer par là qu'il n'y 
a rien d'étonnant à ce que la couche de gravier et de 

boue qu’on trouve sous tous les glaciers soit parfois stra- 
tifiée? Mais il n’est pas nécessaire pour cela de recourir 
aux filets d’eau de la surface. Les torrents qui circulent 
sous le glacier sont des agents de stratification bien plus 
efficaces, et le mouvement du glacier en frottant les 
cailloux contre le sol et en les usant les uns contre les 
autres produit plus de menu sable que n'en amènent tous 
les ruisselets de la surface, qui, cependant, je n'en dis- 
conviens pas, apportent aussi leur contingent à la cou- 
che de boue. Au reste il ne s’agit pas ici de possibilité ni 
“de probabilité. Allez au glacier de l’Aar, et examinez le 
“lit du torrent à l'endroit où il s’échappe de la voûte, et 
vous verrez que le gravier y est fréquemment disposé en 
strates ou assises, composées de matériaux plus ou moins 
grossiers. Que si maintenant ce sol stratifié était refoulé 


— 250 — 


en avant ou sur les côtés par le mouvement du glacier, 
on concevrait que la stratification put se maintenir en 
donnant lieu à des couches onduleuses et plissées. Je 
conçois aussi, qu'il puisse se former dans certains cas de 
nouvelles couches. Examinez la moraine la plus récente 
du glacier du Rhône, vous verrez qu’elle forme une di- 
gue que le torrent, en sortant de la voûte de glace, est 
obligé de longer et de contourner. Or, qu’y a-t-il d’éton- 
nant qu'en longeant le rempart morainique, le torrent 
dépose des couches de sable et de gravier contre le talus ? 
Et si cela a lieu maintenant, pourquoi la même chose 
n'aurait-elle pas eu lieu jadis dans les Vosges ? 

Quant à vos moraines par obstacle, j'avoue que je 
partage jusqu'à un certain point les doutes de Martins 
et de Hogard , en ce qui concerne leur origine glaciaire. 
Je n'ai rien vu de pareil dans les glaciers actuels, ce qui 
s'en rapproche le plus, c’est un rempart morainique. 
adossé contre le Kirchet près d’Im-Grund dans la vallée 
de Hassli. (Il est surtout distinct près du petit ruisseau 
qu'on traverse en descendant le monticule du Kirchet 
d’où l’on domine le village et la vallée d'Im-Grund). Vous 
feriez bien de donner un coup de pioche en passant, 
pour voir s’il y a là des indices de stratification. Enfin je 
vous engage aussi à aller voir ce qui se passe au glacier 
de Rosenlaui, là où il se divise en deux bras près de son 
extrémité. (C'est plus prés que le jardin du glacier des 
Bois). Je crois me rappeler avoir vu là entre le rocher et 
la glace quelques amas de galets qui pourraient peut- 
être avoir quelque analogie avec vos moraines par obs- 
tacle. Vous ne me dites pas si vos moraines par obstacle 
sont stratifiées ? 


\ 


— 9251 — 


Nous attendons avec impatience, M. Agassiz et moi, 
le compte-rendu des travaux de la Société réunie à Epi- 
mal. Je suis surtout curieux de connaître les motifs qui 
vous ont engagé à admettre une calotte de glace par des- 
sus tout le système des Vosges. II me semble que vous 
ne faites par là que compliquer la question ; car si vous 
admettez cette calotte pour les Vosges, vous devez aussi 
l'admettre pour la Forêt-Noire qui est en face. Or, com- 


ment conciliez-vous l’idée d’une calotte avec les Hers de 
» rochers qui se voient sur les hauts sommets de ia Forêt- 
» Noire? Vous ne supposez pas, j'espère, comme M. de Buch, 


que ces débris sont l'effet d’une secousse locale qui n’au- 
rait affecté que les sommets, tandis que les flancs des 
montagnes en auraient été préservés. Mais alors il faut 
qu'ils soient l'effet d’une désagrégation générale antérieure 
au polissage des rochers. Or de ce qu'ils se trouvent de 
"préférence sur les plus hautes sommités, j'en avais con- 
clu que les glaciers n’avaient pas dù s'élever jusque là. 
Vous verrez par une lettre que j'ai écrite dernièrement 

à M. de Verneuil et qui paraîtra prochainement dans le 
Bulletin de la Société géologique, que [nous avons aussi 
de notre côté établi quelques faits qui ne sont pas sans 

importance au point de vue géologique. Il résulte de nos 

recherches que l’époque erratique ne renferme pas seu— 

lement plusieurs périodes distinctes, mais que la faune 
de cette époque a aussi subi des modifications impor- 

tantes depuis sa première apparition. On peut envisager 

“comme démontré que les animaux terrestres et d’eau 
douce du nord de l'Amérique et de la Scandinavie, ainsi 

que les animaux saumâtres de la Baltique, sont d'une 

époque plus récente que les animaux marins. Il est évi- 


— 252 — 


dent en effet que, lorsque la mer recouvrait la Scandi- 
navie d'une couche d’eau salée de plusieurs centaines de 
mètres de profondeur, les lacs d’eau douce de la Suède 
n'existaient pas, non plus que ceux du Canada. Il a fallu 
que les eaux se retirassent par suite d'un nouvel exhaus- 
sement du continent, pour que les faunes terrestres et 
fluviatiles pussent s’y établir. C'est alors que sont apparus 
les Mastodons d'Amérique. 

Sous le rapport de la succession des périodes , le pa- 
rallélisme est complet entre l'Amérique et la Scandinavie. 
Reste maintenant à le tracer pour les Alpes et les Vosges. 
C’est là votre tâche et celle de M. Guyot. Quant aux blocs 
erratiques et aux roches polies, l’analogie est incontes- 
table. Après avoir observé attentivement les polis sous 
les glaciers des Alpes, sur les flancs du Jura, dans les 
Vosges, en Norvège, en Suède, dans les Iles du Dane- 
marck et dans les différentes parties des Etats-Unis, je 
puis affirmer qu'elles sont semblables et je n'ai aucun 
doute qu’elles ne soient l'effet d’une seule et même cause, 
les glaciers. — Le même parallélisme peut se tracer entre 
la Scandinavie et l'Amérique, pour la période d’immer- 
sion qui a succédé à la période des glaces; et si, comme 
je l'ai supposé plus tôt, le Lüss est le dépôt contemporain 
de cette époque en Allemagne, et l’alluvion ancienne en 
Suisse, il n'y a pas de raison pour qu'on ne trouve pas 
aussi des traces de cette époque dans les vallées des Vosges 
et dans les plaines de la Haute-ltalie. 

Mais nous avons constaté en Amérique une troisième 
période, celle de l'apparition des animaux terrestres et des 
coquilles fluviatiles qu’on trouve dans les anciennes ter- 
rasses des fleuves d'Amérique, ainsi que dans les limons 


0 EE © 


* 


— 253 — 


les plus superficiels. Je crois qu'il faut rapporter à cette 
époque les anciennes tourbières de la Scandinavie, loù 
l'on trouve aussi des carcasses d'animaux qui n'existent 
plus, entre autres le Bos priscus, avec des armes en pierre 
à feu et des squelettes humains de race Touranienne. 


Quelle est analogue de cette époque dans les Vosges et 


en Suisse? C’est encore à vous, ami Collomb, et à notre 
ami Guyot que s'adresse cette question. Déjà nous possé- 
dons quelques faits qui semblent significatifs , ce sont les 
débris d’éléphants qu’on a trouvés en Suisse dans les dé- 
pôts les plus superficiels, par exemple dans les graviers 
des Combettes près de la Chaux-de-Fonds, dans les gra- 
viers de la vallée de la Sarine près de Fribourg et enfin 
les défenses d'éléphants trouvées près de Genève et que 
M. Necker a malencontreusement rapportées à l’expé- 
dition d'Annibal. Sans doute ces fossiles ne sont pas 
les mêmes que ceux d'Amérique, mais n'est-il pas re- 
marquable que nous trouvions dans les terrains les 
plus superficiels de la Suisse, comme dans ceux d’Amé- 
rique, des restes de grands animaux dont la race s’est 
perdue, tandis que ces débris ne se retrouvent jamais 
dans les dépôts diluviens marins qui sont sous-jacents. 
Quelle immense époque que cette époque diluvienne, 
dont on rapportait naguëre tous les phénomènes à une 
action momentanée. Ces gîtes à éléphants en Suisse mé- 
ritent d'être étudiés avec le plus grand soin. Sont-ils 
contemporains et identiques avec l’alluvion ancienne. IL 
ne paraîtrait pas, puisque M. Necker, qui rapporte les dé- 


- fenses d’éléphants de Genève à l’armée d’Annibal, envi- 


sage au contraire l’alluvion ancienne comme antérieure 
aux blocs erratiques. 


IVe 


M. Desor à M. Guyot. 


Boston , 14 janvier 1848. 


... Je vous engage à ne pas envisager la question 
comme vidée ni dans les Vosges ni dans les Alpes. Il faut 
absolument que vous repreniez la question de l’alluvion 
ancienne ab ovo. C'est une tâche ardue , je le sais, mais 
cest précisément pour cela qu’elle vous revient de droit. 
Les blocs erratiques sont devenus entre vos mains des 
signaux authentiques à l’aide desquels vous avez tracé 
le domaine exact d’un grand phénomène. Mais mainte- 
nant que nous connaissons l'étendue de cette terra jadis 
incognita , il nous reste à en étudier l’histoire, au point 
de vue organique, comme au point de vue physi- 
que. C'est là qu'est le grand problême. Si je pouvais 
au moins vous donner un faible aperçu de ce que l’étu- 
de du phénomène erratique dans ce pays nous a révélé 
de ces grandes époques qui ont succédé à la période 
glaciaire ! Mais il faudrait pour cela vous écrire un vo- 
lume ou tout au moins un long mémoire. J'ai adressé 
récemment une longue lettre à M. de Verneuil, que vous 
verrez probablement dans le Bulletin de la Société géo- 
graphique. J'ai surtout insisté sur la diversité des formes 
qu’affecte le terrain diluvien d'Amérique. Dans ce moment 
je rédige un mémoire que je destine à mon ami Lovén 
de Stockholm, et où nous nous appliquons à faire res- 
sortir l’identité des phases du phénomêne américain avec 
celles qu’on peut tracer dans le nord de l'Europe, en in- 
sistant sur le caractère particulier des faunes des deux 


continents à ces différentes époques. Vous verrez proba- 
blement dans une couple de mois ce mémoire dans les 
annales de Poggendorf. Nous avons aussi essayé, M. Agas- 
siz et moi, de tracer sur des cartes l’étendue et les limites 
de chacune de ces phases, qu’on peut rapporter à deux 
grandes époques , l’époque maritime et l’époque d'émersion. 
Comment pourrait-on vous faire passer un copie de ces 
cartes ? Pourquoi faut-il qu'un océan nous sépare ! Que 
de choses nous aurions à nous dire, que d'aperçus sur- 
giraient si nous pouvions discuter ces questions ensemble. 
Je ne veux aujourd'hui vous poser qu’une seule question: 
croyez-vous qu'une époque comme celle du Pleistocène 
ou drift stratifié, pendant laquelle la mer recouvrait tout 
l'hémisphère boréal jusqu’au 52° de latitude en Europe 
+ ctjusqu'au 40° dans ce continent-ci, (M. Agassiz a même 
» tout récemment retrouvé le diluvien stratifié jusqu’en 
Caroline), croyez- vous dis-je, qu'une époque pareille ait 
pu ne pas laisser des traces de sa présence en Suisse et 
ailleurs ? Or je me trompe fort ou l’alluvion ancienne 
ainsi que le Læss du Rhin sont les produits de cette épo- 
que. Je vois dans les plaines du Rhin et de la Vetteravie 
une immense baie, ou plutôt un sol marécageux couvert 
de lacs comme le sont de nos jours les régions des sources 
du Mississipi, et dans les graviers superficiels de la Plaine 
suisse, renfermant des ossements d’éléphans, je vois l’ana- 
logue de notre époque des Mastodontes. Je ne sais si je me 
_ trompe, mais l’idée de Studer et de Necker, que l’alluvion 
stratifiée de la Plaine suisse avec ses stratifications torren- 
tielles pût être antérieure à l'époque glaciaire me paraît 
tous les jours plus insoutenable. Examinez-donc un peu 
cette question et dites-nous votre sentiment, faites-nous 


— 256 — 

part des difficultés que vous y voyez, causez-nous en un 
mot du phénomène erratique. Vous vous souvenez que 
vous nous avez souvent recommandé de porter notre at- 
tention sur les caractères organiques des époques dilu— 
viennes. Vous voyez que nous avons suivi votre conseil. 
Nous n'avons maintenant plus qu'un vœu à faire, c’est 
que vous vous décidiez quelque jour à venir nous faire 
une petite visite. De grâce, ne repoussez pas cette idée ; 
je vous dis, que vous viendrez nous voir, parce qu'il 
faut que vous voyiez l'Amérique. Pensez-donc que nous 
demeurons sur le drift avec cailloux et blocs striés. 


BULLETIN 


DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES. 


DE NEVCLATEL. 


Séance du 30 Novembre 18248. 


Présidence de M. L. CouLon. 


x M. le professeur Sacc lit le Mémoire suivant intitulé : 


: Des fonctions de l'acide pectique dans le développement des 
-  végélaux. 


{ 


Toutes les matières destinées à former les êtres doués 
de la vie, sont d'autant plus aqueuses, instables et amor- 
phes, que leur importance est plus grande, que leurs usages 
sont plus multipliés; de là vient que les propriétés de 
l'acide pectique, point de départ de toutes les matières 
végétales, sont aussi mal connues que celles de l’albumine 
dont la fluidité offre à la nature l’état sous lequel la 
matière se plie le plus facilement à toutes espèces de mé- 
tamorphoses. 


BUL. DES SC. NATUR. T. Il. 19 


— 258 — 


En voyant l'acide pectique exister partout où un organe 
végétal se développe, puis disparaître dès qu’il est formé, 
on ne peut se refuser à admettre qu'il a servi à le consti- 
tuer ; depuis long-temps déjà, les botanistes nous ont fait 
assister, le microscope et le scalpel en main, à la trans- 
formation de cet acide en fibre ligneuse, tant dans les 
noyaux des fruits à enveloppe dure, que dans les jeunes 
tiges des plantes. 

Dans la sève de tous les végétaux, on rencontre l’acide 
pectique seul, ou associé au sucre de canne; et sur tous 
les points où ces deux substances disparaissent, on voit 
se déposer de la fécule, du ligneux, de la bassorine ou 
de l’inuline ; la bassorine et l’inuline établissent une tran- 
sition non interrompue, de l'acide pectique à la fécule. 
Aucune expérience chimique n'était venue prouver que 
le sucre de canne peut se changer en fécule, à moins, 
peut-être, que sa transformation en bassorine dans la 
préparation de l’acide lactique d’après le procédé de M. 
Pelouze; nous nous bornerons, pour soutenir cette manière 
de voir, à dire qu’en étudiant le développement des pois, 
nous avons vu que le sucre de canne et l’albumine con- 
tenus dans le liquide qui baigne les cotylédons de ces 
graines tant qu'ils sont encore petits et verts, disparais- 
sent à mesure qu'ils mürissent, en se remplissant de fécule 
et de légumine. Laissons donc les métamorphoses du 
sucre de canne, pour nous occuper seulement de celles 
de son inséparable, l'acide pectique. 

Nous n’insisterons pas davantage non plus, sur la for- 
mation de la fécule aux dépens de l'acide pectique, puis- 
qu'il est impossible de la prouver directement, quoique 


— 259 — 


l'interposition de la bassorine et de l'inuline entre ces 
deux substances, la rende plus que probable, presque 
certaine. C'est à la transformation de l’acide pectique en 
ligneux, et du ligneux en acide pectique, que nous nous 
arrêterons. 

En voyant avec quelle profusion la nature a répandu 
le ligneux dans les végétaux; en reconnaissant qu'il ne 
manque dans aucune plante, qu'il constitue la majeure 
partie de la plupart d’entre elles, on prévoit pour lui 
une de ces grandes destinations par lesquelles le Créateur 
pare à la destruction des espèces. Le bois n’est pas seu- 
lement destiné à soutenir le corps des végétaux, à nourrir 
des insectes, protéger et chauffer les maîtres du monde; 
il doit aussi entretenir la vie végétale, lorsque l’aridité 
du sol ne lui offre plus d'aliments. Il y a long-temps, 
d’ailleurs, que les botanistes ont prouvé que les arbres 
transplantés d'un bon terrain dans un mauvais, maigris- 
sent et meurent, absolument de même qu’un animal qu’on 
affame; Haller l’a démontré par le peuplier, la balance 
à la main, et pendant trois années consécutives. Mais 
habitué à considérer le ligneux comme le caput mortuum 
de la végétation, comme le principe destiné à rendre, par 
l'intermédiaire de l'humus, la matière organisée au règne 
minéral, le chimiste n’a point suivi le botaniste dans ses 
investigations, et il n’a point saisi l’analogie absolue qu'il 
yaentre le bois des végétaux, et la chair musculaire des 
animaux. En effet, les physiologistes, de concert avec 
les chimistes , ont prouvé que l’albumine se change en 
fibre musculaire, et que celle-ci, dans une foule de eir- 
constances, peut reproduire de l’albumine; les botanistes 


— 260 — 


ont démontré que l'acide pectique peut, en s’organisant, 
former de la fibre ligneuse; c'est aux chimistes qu’il était 
réservé de prouver que l'inverse a lieu aussi, et que, 
sous l'influence de l'acide nitrique, le ligneux passe à 
l'état d'acide pectique. La nature possède, sans doute, 
pour effectuer cette métamorphose, un agent spécial ana- 
logue à cette singulière diastase qui opère si facilement 
la transformation de la fécule en sucre de raisin; tandis 
que, pour arriver au même but, l’homme est forcé d’em- 
ployer un de ses agents chimiques les plus énergiques. 
C’est encore un agent, sans doute tout semblable à la 
diastase, qui change rapidement, et sans cause chimique 
connue, en gomme arabique, le bois des arbres fruitiers 
atteints par la maladie connue sous le nom de gomme, 
tandis que nous n'opérons cette métamorphose qu’en 
traitant le ligneux par l'acide sulfurique concentré. La 
force vitale des végétaux possède donc deux agents de 
dissolution du ligneux ; l'un le change en acide pectique 
propre à nourrir la plante; l’autre en gomme arabique 
qui, au contraire, en amène rapidement la fin; il y a 
entre l'acide pectique et la gomme arabique, le même 
rapport qu'entre le pus de bonne nature et celui qui 
annonce que le malade ne survivra point à ses blessures. 
La transformation du ligneux en acide pectique n'est 
donc pas normale; aussi n’a-t-elle lieu que dans le cas 
où la végétation ne trouve pas dans le sol une nourriture 
suffisante, et ne se présente-t-elle jamais lorsque la plante 
en pleine vigueur reçoit une nourriture en rapport avec 
sa force assimilatrice. Dans nos climats, toutes les plantes 
à tiges vivaces, quelle que soit la nature du terrain sur 


— 261 — 


lequel on les cultive, présentent cependant cette singu- 
lière métamorphose du ligneux à deux époques de l’année, 
succédant l'une et l'autre à un véritable arrêt dans la 
marche de la végétation ; nous voulons parler du déve- 
loppement des bourgeons, au printemps et au mois d'Août; 
dans le premier cas, la plante utilise une partie du ligneux 
déposé par la végétation d'Août, et dans le second, une 
partie de celui qu'a produit la végétation du printemps ; 
seulement, cette absorption est beaucoup moins grande 
au mois d'Août qu'au printemps, parce que la plante 
toute feuillée peut se nourrir, en partie du moins, aux 
dépens de l'air et du sol, tandis qu'au printemps le vé- 
gélal, privé de feuilles et de radicelles, est réduit à se 
nourrir à ses propres dépens. Aussi suffit-il d'enlever 
dans cette saison, deux ou trois fois de suite les feuilles 
des arbres les plus vigoureux pour les faire périr tout 
aussi sûrement qu'un animal qu'on épuiserait par des 
saignées répétées. Le ligneux, qui est un corps très-com- 
plexe, peut, d'après les belles recherches de M. Payen et 
du célèbre Mulder, être envisagé comme formé essentiel- 
lement de cellulose constituant des espèces de fibres 
allongées, remplies ou incrustées de substances étrangè- 
res (lignose), donnant aux diverses espèces de bois leurs 
propriétés caractéristiques; ce qu’on ne peut point appli- 
quer à la cellulose, puisqu'elle présente dans tous les 
végétaux, et dans chacune de leurs parties, les mêmes 
propriétés et la même construction quand elle a été con- 
venablement séparée d'avec la lignose. Les expériences 
des chimistes ayant prouvé que la lignose est infiniment 
plus altérable que la cellulose, et celles des botanistes 


— 262 — 


ayant appris que la lignose ne se forme qu'après la cel- 
lulose , il devenait évident que la cellulose est la partie 
essentiellement utile des bois, et que c'était elle qu'il 
fallait étudier pour découvrir leur mode de formation et 
apprendre à connaître leurs métamorphoses. Les bois les 
plus légers étant les plus pauvres en lignose, les moins 
altérables par les réactifs.chimiques, ils devaient fournir 
facilement de la cellulose pure; telle est la raison qui 
nous a engagé à prendre les bois blancs pour sujet de ces 
recherches, et si nous avons donné parmi eux la préfé- 
rence au bois de sapin blanc (abies pectinata), c’est à 
cause de la grande diffusion de ce végétal, appartenant 
d’ailleurs à la puissante famille des conifères qui a des 
représentants dans toutes les parties du monde, dans 
chaque espèce de terrain, de manière à rendre possible à 
tous les membres l'application des faits chimiques décou- 
verts pour l’un d’entre eux. 

Le bois que nous avons employé, provient de plusieurs 
arbres de moyenne grandeur ; tous avaient crû dans une 
bonne terre placée sur du néocomien, versant sud-est du 
Jura, un peu au-dessous du village de Rochefort. On 
réunit la sciure provenant de ces arbres abattus en au- 
tomne et sciés en Février, on la mélangea aussi intimé- 
ment que possible, en ayant soin d’écarter les morceaux 
d'écorce, et on l’employa d’abord à la détermination des 
cendres de ces végétaux. L’incinération en fut facile; les 
cendres sont d’un blanc légèrement gris. Quatre dosages 
ont fourni les nombres suivants, calculés pour le ligneux 
desséché à 1000; la sciure qu'on a employée contenait 
en moyenne : ligneux . . 61»9926 

eau . . . 38»0074 


100»0000 


— 263 — 
L_ gr.0,6782 de ligneux anhydre donnent : cendres gr. 0,0040, 


IL. » 1,0618 » : F »  » 0,0050, 
III. » 0,9026 À o » »  » 0,0060, 
IV. » 1,8983 $ ; » nn 0,0093, 


En centièmes : 


I. I. III. IV. Moyenne. 
0,5897. 0,4708. 0,6647. 0,4899. 0,5538. 


Lorsqu'on fait digérer le ligneux avec du chloride hy- 
drique du commerce, étendu de moitié son poids d’eau, 
qu'on le lave ensuite à l’eau distillée, le dessèche à 100 ° 


et le calcine, on obtient en cendres parfaitement blan- 
ches : 


L.__gr.0,9143 de ligneux anhydre donnent: cendres gr. 0,0005, 


IE » 2,0575 » » » » » 0,0018, 
En centièmes : 
I. Il. Moyenne. 
0,0546. 0,0874. 0,0710. 


Analyse des cendres de bois brut. 
IL. Grammes 2,9535 de cendre. 


I. » 7,2229 » 
HI. » 4,9053 » 
IV. » 3,3915 » 
Y. » 2,7201 » 
VI. » 4,5026 » 
VIL. » 1,6729 » 


VIE. ».  18,3286 » 


» 


264 


‘ITA 


99800 | S980‘0 |" © ‘ ‘|: 
41160 | 79680 |" * * : 


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* enbropeo « 
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"tt": 'xXnuegueu « 
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°°: * “enbuogdsogd « 

* enbrangms « 
° "+ onbomis apoy 


auneqd 39 onbissejod aumaoqq) 
‘7 * * ‘SUIUOI S9amo[y) 
° © © * * enboyes oyeuoque) 
* onbisouSeu ayeydsoydorÂq 
"XNOUCSUEUOIUESUEU 9PIXQ 
** * * * onbruez ayeydsoyaq 
° * +: “onbnuogae aanaopg) 
tt: + enbnÂaeq opens 

°° 27" enbrouis epoy 


— 265 — 


La composition de ces cendres peut donc être repré- 
sentée de la manière suivante : 


Acide silicique 10,8667. 
»__ sulfurique 1.2844. 
»  phosphorique  3,5569. 
Chlore 0,1229. 
Oxide ferrique 2,6018. 
» manganeux  2,6498. 
»  magnésique  3,9873. 
»  Calcique 58,6475. 
»  potassique 2,3076. 
»  sodique 13,9751. 


100,0000. 


Avant de passer à la combustion du bois brut, disons 
que la forte proportion de nitrogène qui se dégage alors, 
nous fait regarder le bois de sapin comme trés-riche en 
matières nitrogénées, qui sont probablement la cause de 
la grande altérabilité de ce bois, ainsi que de l’avidité 
avec laquelle une foule d'insectes le dévorent, de préfé- 
rence à tous les autres. 


I. Grammes 0,4544 de ligneux donnent, correction faite des 


cendres : 
Acide carbonique, gr. 0,7676. 
Eau, » 0,2561. 


Il. Grammes 0,3281 donnent: 
Acide carbonique, gr. 0,5740. 
Eau, »_ 0,2005. 
JIL Grammes 0,4250 donnent: 
Acide carbonique, gr. 0,7508. 
Eau, » 0,2519. 


— 266 — 


En centièmes : 


I. IL. III. IV. 
Carbone, A6,32 47,96 48,45 47,58 
Hydrogène, 6,28 6,80 6,60 6,56 


Oxigène et nitrogène, 47,40 45,24 44,95 45,86 
100,00 400,00 400,00 100,00 


La formule C:1 Hi Ou: donne en centièmes : 
Carbone, 47,94. 
Hydrogène, 6,46. 
Oxigène, 45,63. 


100,00. 


Lorsqu'on fait bouillir doucement, dans une vaste cor- 
nue, gr. 200 de cette même sciure desséchée à 1002 C, 
avec gr. 400 d’eau, et 2 kilog. d'acide nitrique du com- 
merce, il se dégage d’abord d’abondantes vapeurs nitreu- 
ses qui finissent par disparaître totalement; on cohobe 
fréquemment, et au bout de quelques heures, le bois 
change d’aspect; il devient très-blanc, semble pâteux, et 
s'attache quelque peu au fond de la cornue; on jette 
alors le tout sur un entonnoir dont le tube est bouché 
avec quelques fragments de verre; la solution qui passe 
contient Gr. 15,3187 d'acide oxalique correspondant à 
environ trois fois le même poids de cellulose, si, comme 
tout semble l'indiquer, elle est douée des propriétés de la 
fécule. 

Le résidu qui se trouve sur le filtre, est lavé à l'eau 
distillée et par décantation, dans un vase à précipiter ; à 
mesure que l'acide qui l'imprègne disparaît, ce résidu 
qui conserve encore l’aspect de la fibre ligneuse, se dépose 


— 267 — 


de plus en plus difficilement ; lorsque, même au bout de 
douze heures, l’eau qui le surnage est encore louche, et 
que d’ailleurs elle est tout-à-fait neutre, on jette la sub- 
stance sur une toile, on l’exprime et on la dessèche au 
bain d’eau. De blanche et satinée qu'elle était d’abord, 
elle perd toute espèce de structure, et devient légère et 
grise ; elle retient l'eau avec une grande tenacité, et de- 
vient très-facile à réduire en poudre, aussitôt qu’elle est 
parfaitement sèche. 

La substance blanche examinée avant d’être desséchée, 
tout en conservant la structure du bois, a quelque chose 
de pâteux ; elle contient 92,596% d’eau pour 7,4036 de 
matière solide; jetée dans une grande quantité d’eau, 
elle ne s’y dissout point; mais, si après l'avoir mélangée 
avec trois ou quatre fois son volume de ce liquide, on y 
ajoute un très-léger excès d'ammoniaque, on voit aussi- 
tôt cette matière blanche et opaque devenir transparente ; 
puis se gonfler et se dissoudre en produisant une solution 
d'où les acides les plus faibles la précipitent en totalité, 
sous forme de gelée incolore , translucide et si épaisse, 
qu’on peut retourner le vase dans lequel on opère, sans 
qu'une goutte de liquide en sorte. 

L’acide pectique obtenu avec Gr. 200 de bois et des- 
séché à 100 ° C., pèse Gr. 35,6714, en sorte que, ce qui 
est peu probable, s'il représente la totalité de la cellulose 
du bois de sapin, ce dernier serait composé de 


Cellulose, 17,8357. 
Lignose,  82,1643. 


100,0000. 


— 268 — 


L’acide pectique incinéré laisse quelque peu de cendres 
bien blanches, formées essentiellement d'acide silicique 
avec des traces de carbonate calcique, provenant sans 
doute d’un peu d'oxalate calcique. 


I. G. 0,8003 d’acide pectique sec, laissent cendres g. 0,0052. 


IL G.0,7045 » » » » g. 0,0038. 
En centièmes : 
t IL. Moyenne. 
0,65. 0,54. 0,595. 


La combustion de cet acide, opérée par le chrômate 
plombique de même que celle du bois, a fourni les résul- 
tats suivants : 


L. G. 0,6161 d'acide pectique donnent, correction faite des 
cendres: 


Acide carbonique, gr. 0,9170. 

Eau, » 0,3231. 
Il. G. 0,3754 donnent : 

Acide carbonique, gr. 0,5760. 

Eau, 2" » 0,2020. 
HI. G. 0,5165 donnent : 

Acide carbonique, gr. 0,8070. 


Eau, » 0,2742. Soit 
en centièmes : 
I. I. IL. Moyenne. 
Carbone 10,83 42,10 42,86 41,93 
Hydrogène 5,86 6,00 5,94 5,93 
Oxigène 53,31 51 ,90 51 ,20 52,14 


100,00 100,00 100,00 100,00 


— 269 — 


Cet acide pectique était exempt de composés hydro- 
génés ou oxigénés du nitrogène, puisqu'avec la chaux 
sodée, il ne dégageait pas d'ammoniaque, et que, chauffé 
dans un tube fermé, il se carbonisait tranquillement, sans 
déflagrer. Chauffé doucement au contact illimité de Y'air, 
l'acide pectique répand l'odeur de caramel, et laisse un 
charbon demi-fondu, comme celui du sucre. 

La formule déduite des analyses qu'on vient d'expo- 
ser, est : C14 Hi2 O1: donnant en centièmes : 


Carbone, A2. 
Hydrogène 6. 
Oxigène, 52. 

100. 


Qui permet d'expliquer facilement la transformation 
du bois en acide pectique, et celle de ce dernier en cel- 
lulose, amidon ou tel autre de ses isoméres. La formule 
du bois de sapin étant 

C21 Hi: O5, lorsqu'on en soustrait celle de l’acide pec- 

tique 

C14 Hi2 O3, il reste 

C: H; O2 qui, doublé, oxidé et hydraté, et on sait 
avec quelle facilité ces deux actions se passent dans Îles 
plantes, produit un nouvel équivalent d’acide pectique, 
puisque : 

C- Hs O2 X 2 — C14 Hio O4 qui, en absorbant : O 
et 2 HO — Ci Hi2 Os, en sorte que deux équivalents 
de bois de sapin forment trois équivalents d'acide pectique, 
lorsqu'ils fixent sept équivalents d’oxigène et deux d'eau. 

IL est bien remarquable que l'acide pectique, une fois 
qu'il a été desséché, soit totalement insoluble dans l’eau, 


— 210 — 


même additionnée d'ammoniaque, en sorte qu'il pourrait 
bien se faire que l'acide pectique extrait du bois par 
l'acide nitrique, y ait été formé aux dépens du composé 
C7 Hs O>, et que ce soit l'acide pectique insoluble, for- 
mant le corps du bois, qui ait fourni l'acide oxalique; on 
se rendrait compte ainsi de la raison pour laquelle le bois 
traité par l'acide nitrique fournit si peu d’acide pectique, 
et on comprendrait aussi pourquoi, lorsque les arbres 
maigrissent, par défaut d'aliments, les anneaux ligneux 
annuels diminuent en diamètre, mais ne disparaissent 
jamais en totalité. L’acide pectique du bois serait donc à 
l'acide pectique hydraté dans le même rapport que l'al- 
bumine coagulée à l’albumine liquide. 
Quant à la transformation de l’acide pectique’en cellu- 
lose C12 H10 Oo, ou en l’un de ses isomères, elle permet 
d'expliquer nettement pourquoi les jeunes organes végé- 
taux, ainsi que les graines, ont une saveur sensiblement 
sucrée, lorsque la fibre ligneuse ou la fécule s’y dévelop- 
pe; il suffit pour s’en convaincre, de multiplier par 
huit l’équivalent de l'acide pectique, et d'en soustraire 
huit équivalents de cellulose; on obtient alors un résidu 
composé d'un équivalent de sucre de canne, de cinq équi- 
valents d’eau, et de quatre d'acide carbonique : 


8 X C14 Huz Ous = Case Ho O104 acide pectique, 
8 X Cie H1o O10 — Co Hso Oso cellulose. 


Ci6 Hi6 024 différence. 

Cie Hu O1 sucre de canne. 
A X C O:= C4 Os acide carbonique, 
HEOH 01 Hs O5 eau. 


— 211 — 


Conclusions. 

1° Le bois de sapin est formé d'acide pectique et d'une 
autre substance qui est probablement la lignose, et qui 
en s’oxidant et s’hydratant, produit aussi de l'acide pec- 
tique. 

2° Le bois de sapin se transforme partiellement en 
acide pectique lorsqu'on le traite par l'acide nitrique. 

3° L’acide pectique, lorsqu'il se change en cellulose, 
ou en une autre matière féculacée, dans le sein des plan- 
tes, forme en même temps du sucre de canne , et dégage 
de l’acide carbonique, ainsi que de l’eau. 

4° L’acide pectique produisant les matières féculacées, 
est le point de départ de toutes les matières végétales. 

5° La formule réelle de l'acide pectique est C14 H12 Os. 


M. le président lit la lettre suivante de M. Couleru, de 
la Neuveville : 

« Assis un jour au haut de l'escalier d’une maison de 
la Neuveville par un temps calme et serein, je vis vers 
l'angle sud-ouest de la place du marché un objet blan- 
châtre qui se dirigeait de mon côté. Il vint se poser sur 
la balustrade de l'escalier, et je vis alors que c'était une 
araignée à cheval sur un globule de fils enchevêtrés 
qui lui servait de navire aërien. Je voulus m'approcher 
pour l'examiner; mais aussitôt elle s’envola et disparut 
en passant au-dessus d’une maison voisine. Contrarié 
par cette brusque disparition, je résolus de faire voler 
des araignées, comme celle que je venais de voir. Je me 
rendis aussitôt dans une vigne voisine où je pris trois 
araignées, dont une ressemblait beaucoup à celle que je 
venais d'observer. Pour la contraindre à exécuter une 


— 272 — 
ascension, je pris un très-grand plat que je remplis d’eau, 
au milieu de laquelle je plaçai un morceau de terre glaise. 
J'y fixai un chaume, au milieu duquel j'attachai une petite 
rondelle de carton sur laquelle je déposai l’araignée. Elle 
parcourut vivement toutes les parties sèches de son île, 
montant au haut du brin de paille, puis redescendant 
pour parcourir les bords du carton dont elle essayait de 
s'éloigner en posant ses pattes dans l’eau et les retirant 
aussitôt. Fatiguée de ces exercices qui duraient depuis 
plus d’un quart d'heure, je cessai de surveiller exacte— 
ment l’insecte. Depuis un moment, l’araignée était fort 
tranquille, lorsque je la vis tout-à-coup arriver à l’aide 
d'un fil, sur le bord du plat. Désirant savoir comment 
elle s’y était prise pour fabriquer ce pont aussi lestement, 
je la repris, la plaçai de nouveau sur l’île et ne la perdis 
pas un instant de vue. Elle fut long-temps à répéter ses 
anciennes courses, puis s'arrêta et devint tranquille comme 
la première fois; la surveillant alors avec une forte loupe, 
j'aperçus un fil assez fort qui paraissait sortir de sa bou- 
che, et qu’elle dirigeait avec les deux pattes de devant 
non plus contre les bords du plat, mais vers le col d'une 
bouteille placée à plus de deux pieds et demi de distance. 
Ce fil offrait un mouvement giratoire perceptible sur 
1'}2 à 2 pouces de son extrémité; ayant atteint le col de 
la bouteille, le fil s'y appliqua, et l’araignée s’élançant 
dessus s’échappa. Je la repris, et la plaçai pour la troi- 
sième fois sur son île où elle renonça à ses courses ac— 
coutumées et chercha à lancer un nouveau fil, que je 
rompis. Alors elle essaya plusieurs fois inutilement de 
passer l'eau, et se promena ensuite lentement en s’arrêé- 
tant quelquefois, comme pour réfléchir. Tout-à-coup 


— 273 — 


elle descend sur le carton et commence à tourner sur 
elle-même avec rapidité, ayant l'air de corder quelque 
chose sous elle ; je l'examinai avec attention, et vis qu’elle 
fabriquait un coussin semblable à celui qui servait à 
transporter l’araignée que J'avais vue une heure aupara- 
vant; au bout d'une minute elle s’éleva dans l'air sans 
que je pusse voir comment, et s'envola par la fenêtre. 

» En 1842, je remarquai près de Belfort au commen- 
cement d'Août une araignée volante que j'observai avec 
soin. 

» En 1845, voulant répéter ma précédente observation 
faite en 1838, je me procurai plusieurs araignées, dont 
l’une était remarquable par sa belle couleur blanche 
striée de rose foncé : c'était la plus stupide de toutes. 
Aucune d'elles ne voulut filer, ni même faire de pont 
pour passer l'eau, à l'exception d’une seule qui ayant 
jeté son fil, que je rompis, entra bravement dans l’eau, 
et parvint à l’autre bord en marchant au fond du plat. » 

M. Couleru indique encore dans la même lettre qu'il 
existe un incecte particulier qui détruit les chenilles : c’est 
un ver blanc, long de 4-5 pouces, de la grosseur d’un 
fil à coudre; il suce les chrysalides en s'insinuant entre 
leurs anneaux. Ce ver se trouve en Mai sur l’érable 
(acer campestris) et se multiplie si facilement dans la 
terre de bruyère qu'il emploie pour élever ses chenilles, 
qu'il en a trouvé jusqu’à sept dans un seul pot. 

Les espèces capsulaires, telles que Cucubali, Compta, 
Camprincola, etc., ont encore une autre espèce d'ennemi, 
qui est une larve apode d'un blanc sale, qui se métamor- 
phose en un petit coléoptère. Cette larve vit dans les 
capsules du Cucubali, ainsi que dans celles des œillets. 


RUL, DES SC, NATUR. T. IL 20 


Le professeur Sacc dépose sur le bureau divers échan- 
tillons de pommes de terre qu'il a obtenues de semis ; les 
plus intéressantes sont de belles pommes de terre blan- 
ches provenant de graines de bleues; ces graines recueil- 
lies par lui-même, n'ont donné absolument que cette 
seule variété qui paraît devoir être bonne. 


Séance du 1% Décembre 1848. 
Présidence de M. L. CouLon. 

M. le prof. Ladame observe, à propos du Mémoire pré- 
senté par le prof. Sacc dans la dernière séance, que la 
quantité d’oxigène trouvée par lui dans le bois, est plus 
forte que celle qu’on y a admise jusqu'ici ; puis il regrette 
que M. Sacc n'ait pas vérifié sur les cendres de sapin la 
loi de M. Liebig, d'après laquelle il existe un certain rap- 
port entre l'équivalent des diverses bases qui les consti- 
tuent. 

M. Sacc répond à la première observation, que la 
différence observée dans la quantité d'oxigène du bois, 
vient de ce qu’il a analysé du bois brut, qui contenait par 
conséquent beaucoup de nitrogène , dont le poids est 
venu s’ajouter à celui de l’oxigène ; et, à la seconde, que 
s’il n'a pas essayé de vérifier la loi de M. Liebig, c'est 
qu'il est persuadé qu'elle repose sur un jeu de chiffres et 
que d’ailleurs, lors même qu'elle serait vraie, elle n’amé- 
perait toutefois pas à des résultats utiles, puisque parmi 
les substances minérales fixées dans les tissus des êtres 
doués de la vie, il y en a qui sont chimiquement combi- 
nées avec eux, tandis que d'autres s’y attachent d'une 
façon toute mécanique, et qu'on n’a pas encore trouvé le 
moyen d'isoler les premières d'avec les secondes. 


— 215 — 


M. l'ingénieur G. de Pury développe la méthode em- 
ployée pour soumettre au calcul l'écoulement de l’eau 
dans les tuyaux des fontaines. En 1828, M. Bélanger, 
dans son Essar sur le mouvement des eaux courantes, avait 
le premier soumis ces questions au calcul; la formule la 
plus générale à laquelle il était arrivée, était la suivante : 


Q= CVID; 
dans laquelle : Q représente le volume à écouler. 
D » le diamêtre du tuyau. 
C » un coefficient variable. 
J » la pente par mètre de lon- 


gueur de conduite. 

Malheureusement, cette formule n’est applicable que 
par voie de tatonnement, et la longueur des calculs aux- 
quels elle conduit est souvent la source de graves erreurs. 

C'est pour éviter ces inconvénients, que M. Mary, 
ingénieur des ponts et chaussées, chargé du service des 
fontaines de Paris, a cherché un moyen plus simple et plus 
prompt de résoudre ce problème, et il y est parvenu en 
calculant des tables qui établissent pour chacun des dia- 
mètres les plus usités dans la pratique, le rapport entre 
le volume d’eau écoulé par seconde, la hauteur d'eau 
nécessaire pour vaincre le frottement dans un tuyau d'un 
mètre de longueur, et la vitesse obtenue par seconde. 

Dans ces tables, les volumes à débiter par seconde 
sont indiqués en pouces fontainiers et en fractions de 
mètres cubes, depuis !/10 de pouce jusqu'à 1200 pouces. 
Le diamètre des tuyaux varie depuis m. 0,06, soit deux 
pouces, jusqu'à m. 0,60, soit deux pieds. 

En divisant les volumes exprimés en mètres cubes par 
les nombres indiquant la section transversale des tuyaux, 
on a obtenu les vitesses. 


— 2716 — 


Connaissant la vitesse, on a recherché dans les tables 
de M. de Prony la valeur de !/4 DJ, laquelle étant divisée 
par ‘/« D, a donné celle de J, ou la charge dépensée par 
mètre linéaire pour vaincre les frottements. 

Les vitesses V et les charges dépensées J forment pour 
chaque volume d’eau, et pour chaque diamètre de tuyau, 
l’objet d'une colonne du tabieau qui est distribué comme 
ci-dessous : 


Diamètres. 
0",081 | 0,108 


Volume d’eau à débiter 


exprimé 


en mètres|en pouces charge  |vitesse|| charge |vitesse|| charge |vilesse| etc. 


0,00007 1/10 0,00000106|0,0078 |lo,ooov03 |0,0043 |0,000001|0,0024 | etc. 


Au moyen de ce tableau, le problème d'une distribu- 
tion d’eau, telle qu’elle se présente dans les cas les plus 
ordinaires, se résout assez facilement, lorsqu'on connaît : 

1° Le volume d’eau à débiter; 

20 Le niveau de l’eau à la source; 

30 Le niveau de chaque orifice d'écoulement ; 

4° La longueur de toutes les parties du système. 

L'inconnue la plus ordinaire est le diamètre des tuyaux 
à employer; mais cette partie du problème peut être 
résolue d’une infinité de manières, puisque tous les dia 
mètres de tuyaux qui ne nécessitent pas une vitesse plus 
grande que trois mêtres par seconde, peuvent être em— 
ployés dans la pratique; mais les tuyaux les plus petits 
ont l'inconvénient de nécessiter une grande vitesse, et 
par conséquent d'absorber une charge plus considérable 
pour vaincre le frottement. Les tuyaux les plus grands 
ont au contraire l'inconvénient d’un plus haut prix; mais 


— 271 — 


le frottement est moindre, ensorte qu'ils doivent être em- 
ployés dans le cas où on n’a pas à sa disposition une 
charge d’eau bien considérable. 

Lorsqu'on veut résoudre le problème, on fait un tà- 
tonnement qui consiste à en chercher la solution en se 
donnant un diamètre de tuyau et en calculant la hauteur 
à laquelle l’eau s’éléverait à chacun des orifices d’écou- 
lement, si le niveau obtenu dépasse celui des orifices, le 
problème est résolu; si au contraire l’eau n’atteint pas 
le niveau des orifices, les luyaux supposés auraient un 
diamètre trop petit et il faut recommencer le calcul en 
employant des diamètres plus forts, afin de diminuer les 
frottements. Quand on a l'habitude de ce genre de cal- 
cul, les tâtonnements ne sont pas longs. 

M. de Pury présente ensuite à la Société l'ouvrage de 
M. Arthur Morin, intitulé : Aide mémoire de mécanique 
pratique, dans lequel on trouve des tables du genre de 
celles dont on se sert pour faire ces calculs ; mais les 
volumes d’eau, au lieu d’être indiqués en pouces fontai- 
niers, le sont en litres, et les diamètres des tuyaux, au 
lieu d'être en pouces de France, comme ceux qu'on em- 
ploie dans le commerce, sont indiqués en centimètres, et 
plusieurs d’entr'eux n’existent pas dans la pratique. 

M. de Pury détaille ensuite les avantages que présente 
l'ouvrage de M. Morin, dans lequel on trouve une quan- 
lité de formules et le résultat de beaucoup d'expériences 
qu'on ne trouve pas ailleurs, ou qui sont disséminées dans 
des ouvrages très-volumineux. 

M. le professeur Ladame, après avoir fait ressortir l'in- 
térèt d'actualité qu'offre pour la ville, dans ce moment, 
le travail de M. de Pury, conclut en disant que le 


— 278 — 


problème de la distribution des eaux, bien que résolu 
pour la pratique, ne l’est pas encore au point de vue 
scientifique. Il ajoute, que quoique l'ouvrage de M. Mo- 
rin soit fort bon dans son genre, on en a publié dés 
lors de beaucoup plus complets sur le même sujet. 


M. le professeur Sacc présente ensuite à la Société un 
culot de cuivre absolument pur, qu'il a obtenu en rédui- 
sant par l'hydrogène, l’oxide cuivrique provenant de la 
calcination du nitrate. Le métal poreux obtenu de cette 
manière, a été fondu ensuite sous une couche de borax, 
dans un creuset de porcelaine placé dans un fourneau à 
vent qu'on a laissé refroidir très-lentement, ce qui a 
permis au métal de cristalliser confusément, ainsi que le 
prouvent les mailles polygonales empreintes à sa face 
supérieure. 


M. le Dr Borel communique les observations suivantes 
sur les plaies faites par les armes à feu. On sait que 
l'ouverture d’entrée des balles qui traversent de part en 
part une partie du corps, est suivant l'opinion générale 
plus petite que l'ouverture de sortie. Toutefois il n’en est 
pas toujours ainsi; il arrive quelquefois que les deux 
ouvertures dont il s’agit sont de même grandeur ; d'autres 
fois, mais plus rarement, l'ouverture de sortie se trouve 
être plus petite. Cette différence peut être due à des 
causes très-variées, dont les principales sont le volume 
et la forme du projectile, sa vitesse, la direction oblique 
ou perpendiculaire suivant laquelle il frappe le corps, la 
déformation qu’il éprouve par la résistance des parties 
dures, telles que les os, etc. L'observation communiquée 
par M. Borel se rapporte à cette dernière cause. Il y est 


= 


question d'un homme de 28 ans qui fut atteint d’un coup de 
fusil de munition, au moment où il se trouvait près d’une 
fenêtre au second étage d’une maison de la rue des Cha- 
vannes de cette ville, dans la nuit du 12 Mars de la pré- 
sente année. La balle entra au niveau du tiers interne 
de la clavicule gauche, sortit à la hauteur de l'apophyse 
épineuse de la cinquième vertébre cervicale du même 
côté et vint s'implanter dans le plancher supérieur de la 
chambre, à 25 pouces environ de distance de la partie 
la plus élevée de la fenêtre. L'ouverture par laquelle la 
balle était entrée, était ronde et avait huit lignes de dia- 
mètre; la peau de son pourtour était refoulée en dedans 
de la plaie, c’est-à-dire d'avant en arriére. Le doigt 
indicateur introduit par cette ouverture, pénétrait dans 
une espèce de canal dirigé obliquement de bas en haut 
et d'avant en arrière, dans lequel on rencontrait des frag- 
ments osseux formés par les débris de la clavicule percée 
et fracturée en esquilles dans cet endroit; ce canal se 
continuait profondément dans la direction indiquée et 
venait aboutir en dehors de la lame gauche de l'apo- 
physe épineuse de la cinquième vertébre cervicale, au 
niveau de œætte apophyse où se trouvait l'ouverture de 
sortie. Celle-ci, plus petite que l'ouverture d’entrée, était 
déchirée irrégulièrement, quadrilataire, et formait deux 
dentelures ou petits lambeaux triangulaires, lesquels 
étaient renversés en dehors de la plaie et dirigés en ar- 
rière. Le plus grand diamètre de cette ouverture avait 
7'/2 lignes d'étendue et son plus petit diamètre de 51/2 
lignes. Dans le trajet parcouru par la balle, outre la 
fracture comminutive de la clavicule, la première côte et 
la seconde avaient été brisées en esquilles prés de leurs 


— 280 — 


arüculations vertébrales; les apophyses traversées des 
deux dernières vertèbres du cou, étaient fracturées, la 
veine sous-claviére gauche était largement ouverte dans 
deux endroits de sa face extérieure; l'artère du même 
nom avait été complètement déchirée ainsi que plusieurs 
gros troncs des nerfs du plexus brachial. Des lésions aussi 
considérables avaient été suivies d’une mort presque ins- 
tantanée. 

La balle retirée du plancher supérieur où elle avait 
pénétré était du calibre d'ordonnance; elle était un peu 
allongée et aplatie dans un quart de son diamètre à-peu- 
prés. 

De l'observation qui vient d'être rapportée, il suit que 
dans le cas où les balles traversent de part en part quel- 
que portion du corps , la grandeur relative des deux 
ouvertures auxquelles elles donnent lieu, ne doit pas être 
considérée comme une preuve certaine de la direction 
dans laquelle le coup de feu a été tiré, mais qu'il faut 
dans le cas dont il s’agit tenir compte de tous les indices 
qui peuvent conduire à la découverte de la vérité. On 
sent toute l'importance que des faits de ce genre doivent 
avoir dans les questions de médecine légale qui s'élèvent 
quelquefois devant les tribunaux à l’occasion des bles- 
sures par armes à feu. 

M. le D' Borel cite ensuite deux cas d’excroissances 
anormales de la boîte cranienne correspondant à des accès 
épileptiques, dont il pense qu’elles pouvaient bien être la 
cause, quoiqu'il reconnaisse que dans la plupart des cas 
l'épilepsie n’est point caractérisée par des lésions anato- 
miques et qu'elle est produite par des causes fort diffé- 
rentes, telles que la frayeur, l'irritation involontaire et 
la présence des vers dans le canal intestinal. 


QE 


— 981 — 


A l’occasion de la dernière cause prédisposan'e de l’é- 
pilepsie signalée par M. le D' Borel, M. le prof. Sacc 
annonce la découverte faite par M. Schimper de trois 
nouveaux vermifuges employés avec succès en Abyssinie 
contre le tœnia, qui est tellement endémique dans ce pays 
que ses habitants sont obligés de s’en débarrasser au 
moins une fois par mois. Comme l'extrême diffusion de 
ce parasite vient de ce que les Abyssiniens se nourrissent 
de chair crue, M. S. pense pouvoir attribuer à l'usage 
des poissons mal cuits, la multiplication du tœnia chez 
toutes les populations voisines des lacs, des étangs, des 
rivières et des autres courants d’eau douce, dont tous les 
poissons sont remplis de ces vers. 


Séance du 28 Décembre 1848. 


Présidence de M. L. Couzon. 


M. le professeur Sacc ayant recu tout récemment à 
analyser un alliage qui présentait tous les caractères d’un 
mélange d’or et de cuivre, l’a trouvé formé de : 

Or 31,32 
Argent 11,32 
Cuivre 47,86 


Zinc 9,18 
Fer —,32 
100,00 


La proportion de fer existant dans l’alliage est si faible 
qu'elle doit être accidentelle et provenir de l'impureté 
des métaux employés ou de parcelles de ce métal enlevées 
à la baguette de fer avec laquelle on a sans doute remué 
cet alliage. 


— 9282 — 


Continuant ses essais de dorage par des procédés moins 
dangereux que celui au mercure, M. Sacc a essayé sans 
succès d'employer des alliages d’or et de métaux volatils, 
tels que le cadmium, le zinc et l’antimoine ; l’or qui reste 
après la volatilisation de ces métaux n'étant pas sous 
forme de couche continue, mais bien sous celle de masse 
spongieuse. Il croit avoir atteint le but à l’aide du dorage 
aux cyanures, et de la galvanoplastie; le premier devant 
déposer d’abord une couche mince d’or, à laquelle la se- 
conde communiquerait l'épaisseur voulue. Il espère qu’on 
pourra dorer avec des alliages au titre voulu, en se ser- 
vant du procédé actuellement en usage pour couvrir tous 
les métaux de laiton ou de bronze. 

Cette communication provoque une observation de 
M. le prof. Ladame qui annonce que les procédés dont 
parle M. Sacc, sont déjà appliqués dans nos montagnes, 
et dit que, suivant M. Becquerel, il suffit, pour déposer 
sur un corps des alliages métalliques, d'employer dans de 
certaines proportions les solutions des métaux qui entrent 
dans leur composition. Il ajoute que non seulement on 
dépose galvaniquement des métaux, mais aussi des oxi- 
des doués de toutes les couleurs possibles dans les teintes 
les plus vives et les plus riches. M, Ladame persiste à 
croire que les dorures galvanique et chimique ne sont 
pas aussi solides que celles qui sont faites au mercure, 
parce que l’union de l’or n’est, dans le premier cas, que 
superficielle, tandis que dans le second elle est plus pro- 
fonde et comme moléculaire. 

M. le prof. Sacc combat les conclusions de M. Ladame; 
il n’admet pas qu'une dorure ne soit solide qu'autant 
qu'elle pénètre dans les pores du métal sur lequel on 


— 283 — 


l’applique, et pense qu'on peut la regarder comme telle 
dès qu’elle résiste, comme la dorure aux cyanures dont 
il présente des échantillons, aux frottements les plus vio- 
lents. Pour soutenir son assertion, M. Sacc compare la 
dorure galvanique et chimique à la soudure des glaces 
polies qui, lorsqu'on les glisse l’une sur l’autre, s’unis- 
sent si intimement que nulle puissance n'est capable de 
les séparer; il n’y a certes pas dans ce cas union molé- 
culaire, puisqu'il n’y a que simple superposition et ce- 
pendant les deux glaces n’en faisant plus qu’une, on ne 
peut pas demander une union plus complète. 


M. le prof. Sacc, après avoir exposé les procédés ac- 
tuellement en usage pour la purification des huiles, et 
prouvé que les uns sont peu employables en petit, et que 
les autres altèrent l'huile, en propose un nouveau qui 
consiste à mélanger les huiles troubles avec la solution 
d’une livre de tan sec, dans dix livres d’eau bouillante, 
pour chaque quintal d'huile à purifier ; on remue bien le 
tout qui se prend en pâte claire et se partage au bout de 
quelque temps en deux couches formées : la supérieure, 
d'huile limpide; l'inférieure, de toutes les impuretés con- 
tenues dans le corps gras. Quand le temps est froid, il 
faut chauffer doucement le mélange au-dessous de 160° 
C., soit directement, soit à l’aide d’un courant de vapeur 
d’eau. Ce procédé a l'inconvénient de colorer un peu les 
huiles en brun, lorsqu'on a laissé là dissolution du tan 
exposée au contact de l’air qui la teint en rouge foncé, 
ensorle qu'on fait bien de la préparer dans des vases clos, 
et de l’employer aussitôt qu’elle est achevée. 


— 284 — 


M. le prof. Sacc décrit ensuite l'appareil proposé par 
M. Violette pour la dessication et la carbonisation des 
bois, la dessication des viandes et la cuisson du pain; 
il propose de mesurer la température de l'appareil à l’aide 
de la dilatation d’une lame de cuivre fixée par un bout, 
et en relation par l’autre avec un index marchant sur un 
arc de cercle graduë. 

M. le prof. Ladame observe que ce procédé de dessi- 
cation des bois est employé déjà depuis quelques mois 
par un menuisier de la ville qui en retire de fort bons 
services pour les bois colorés, mais ne peut l’'employer 
pour les bois blancs, parce qu'ils se colorent. 

Il s'engage alors entre MM. Ladame et Sacc une dis- 
cussion d'où il résulte que l’appareil dont parle M. La- 
dame est monté sur un tout autre système que celui de 
M. Violette, ensorte que ses observations ne sont point 
applicables au procédé découvert par lui. 

M. le docteur Ernest de Castella ayant demandé quelle 
est la cause du durcissement des bois qu’on laisse séjour- 
ner au-dessous de la surface des eaux courantes, et M. 
le prof. Sacc lui ayant répondu en lui exposant les prin- 
cipes de la combustion lente des bois placés dans ces 
conditions qui les font passer insensiblement à l'état de 
charbon presque pur ; M. le prof. Ladame avance que le 
principe qui cause la destruction des bois est une espèce 
de ferment qu'il suffit d'enlever à l’aide de l’eau, ou d’a- 
néantir au moyen de certaines dissolutions métalliques, 
pour les rendre imputrescibles. C’est sur ce principe qu'est 
basé l'appareil Boucherie qu'il décrit ensuite. Il pense 
que les eaux agissent sur les bois qu'on y plonge, d'a- 
bord en dissolvant leur principe fermentescible , puis, en 
oxidant le bois lui-même. 


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— 285 — 


A l’occasion de la présentation de son Mémoire sur les 
abnormités congéniales des yeux, M. le D' Ed. Cornaz 
présente le dessin des cas dont il s’occupe dans cet opus- 
cule et d'une observation toute récente dans laquelle la 
pupille était réduite d'une facon extraordinaire. 

M. le Dr de Castella qui a lu avec intérêt le travail de 
M. Ed. Cornaz, ajoute à ses observations quelques-unes 
de celles qui lui sont propres ; l’une d’elles porte sur une 
jeune personne dont les yeux complètement privés d'iris 
l'obligent à un clignotement perpétuel. 

M le prof. Ladame fait l'observation que lorsqu'on 
empêche la lumière d'arriver à un œil, la pupille de 
l’autre se dilate aussitôt considérablement, M. le Dr Cor- 
naz attribue ce fait à la nécessité où se trouve l’œil actif 
de recevoir à lui seul le volume de lumière nécessaire à 
tous les deux. 


M. le président lit la lettre suivante de M. Couleru 
dans laquelle il donne des détails fort intéressants sur les 
mœurs des serpents. 

« Au mois d'août 1832 je me trouvais à onze heures 
du matin, à-peu-près, sur le chemin qui va de l’an- 
cienne place des cibles de Saint-Blaise au domaine du 
Roc. Marchant lentement, et sans bruit, je me trouvai 
tout-à-coup en face d’une très-grande couleuvre, longue 
de 6’ 11/°, qui, roulée sur elle-même, dormait paisible- 
ment au soleil. J'allai couper une longue et forte tige 
d'érable au bout de laquelle j'attachai un nœud coulant ; - 
puis revenant doucement auprès du reptile, je le touchai 
légèrement; il se déroula en élevant un peu la tête au- 
tour de laquelle je fis descendre le nœud coulant; puis 


— 286 — 


relevant vivement le bâton, il fut pris par le cou. La 
_couleuvre se débattait avec une grande violence, cher- 
chant à m'atteindre avec le bout de sa queue: j'attendis 
patiemment qu'elle eût épuisé ses forces, et l’attachai 
alors en spirale avec des ficelles autour du bâton, ce qui 
me permit de l'emporter facilement. 

« Aprés avoir erré de côté et d'autre, je fus surpris à 
cinq heures du soir dans le chemin de Combes au Lan- 
deron par une forte averse qui m'obligea à me réfugier 
sous un arbre. Il y avait huit à dix minutes qu'appuyé 
contre l'arbre, et mon serpent sous le bras, j'avais les 
yeux fixés sur le Landeron, quand je fus pris d'un ma- 
laise fort singulier; c'était une espèce d'étourdissement, 
une angoisse indéfinissable, j'étais anéanti; regardant par 
hasard mon serpent, je le vis le cou tendu et gonflé, la 
gueule entr'ouverte, les yeux brillants, qui me fixait. Je 
le jetai aussitôt à terre où il se débattit, cherchant à se 
débarrasser de ses liens; me tournant contre le vent, je 
respirai un air pur qui me rétablit bientôt. J'eus alors 
l'idée que c'était mon reptile qui avait causé le malaise 
que je venais d'éprouver, et pour m'en assurer, je le re- 
pris et le plaçai dans la même position qu'auparavant. 
Je surveillais la couleuvre du coin de l'œil; elle fut 
à-peu-près immobile pendant quelque temps; à la fin elle 
se tourna tout doucement contre moi, me regarda fixe- 
ment, allongea son cou qu’elle courba en demi cercle, 
ses yeux devinrent brillants et animés ; un frémissement 
agita sa peau ; aussitôt un air infecté s'exhala du reptile. 
Ma respiration devint pénible, haletante, mon cœur bat- 
tait avec violence et la sueur commençait à mouiller mon 
front ; bref, je me sentais défaillir; malgré ces alarmants 


— 287 — 


symplômes, je tenais bon, et regardais tranquillement le 
replile qui s’efforçait de m'empoisonner. Ce ne fut qu'au 
bout de 4 à 5 minutes que , sentant mes jambes faiblir 
sous moi, je le jetai à terre et fus assez long-temps avant 
d'être tout-à-fait remis. 

» Une autre fois, en 1830, pendant la matinée, j'étais 
dans un verger aux environs de la Neuveville, lorsque 
j'entendis un oiseau pousser des cris plaintifs; cherchant 
à le découvrir, je vis sur un pommier un pinson qui, les 
plumes hérissées, tout tremblant, pouvait à peine se tenir 
sur une branche. En regardant attentivement autour de 
la pauvre victime, je vis un serpent qui , le cou tendu, 
fixait l'oiseau. Je lui lançai aussitôt une pierre et ne l’at- 
teignis pas; la secousse fut néanmoins assez forte pour 
que l'oiseau tombât à terre comme une pierre. Aussitôt 


Je serpent se hâta de descendre, et il arriva aux dernières 


bifurcations des branches, d’où il se laissa tomber à terre 
où je l’écrasai. Le pauvre pinson tout tremblant se cachait 
sous l'herbe ; il fit un effort pour s'envoler, mais retomba 
à deux pas, ce ne fut qu'au bout de quelques minutes 
qu'il put reprendre son vol.» M. Couleru ajoute à cette 
observation que les zoologistes se trompent lorsqu'ils 
n'assignent aux vipères que 14 à 18 pouces de longueur; 
car il a tué près de Souaillon une vipère rouge, femelle, 
qui mesurait 37 pouces de longueur. 

Il se trouvait un jour pendant la matinée avec un 
jeune homme sur la colline derrière la ville et vit une 
petite vipère rouge, longue d'environ 10 pouces et de Ja 
grosseur d'une plume de cygne. I] la poursuivit aussitôt, 
mais elle se réfugia entre les racines d'un petit sapin 
qu'il arracha; aussitôt la vipère qui était dans le creux 


formé par l'enlèvement de l'arbre, se roula, revint sur 
elle-même et s’élança avec la rapidité d’une flèche par 
dessus la tête du jeune homme qui l’accompagnait, bien 
qu'il eût une taille élevée. IT ajoute que les vipères voya- 
gent la nuit comme le jour, et qu'il en a tué une cette 
année à neuf heures du soir. C'était une femelle pleine 
qui se dirigeait avec une grande vivacité contre lui; elle 
avait deux pieds de long. 

Une discussion s'engage alors entre MM. Coulon père et 
fils et M. Sacc sur le pouvoir fascinateur des serpents et 
l'utilité de l'odeur empoisonnée qu’ils répandent autour 
d'eux ; M. le prof. Sacc a vu en plein jour une souris 
venir se jeter, en poussant des cris de détresse, dans la 
gueule d'une couleuvre qui la fixait et qui était à six pieds 
d'elle. M. Coulon père ne croit pas à la fascination, mais 
bien à la paralysie causée par la peur, et surtout à l’in- 
fluence de l’affreuse odeur que les serpents ont la faculté 
de répandre autour d'eux; l'ayant ressentie à plusieurs 
reprises, 1l est persuadé qu’elle peut étourdir rapidement 
de petits animaux. Il ne pense pas non plus aue les ser- 
pents fassent toujours usage de leur haleine empoisonnée 
pour endormir leur proie, et il cite pour le prouver, le 
fait suivant qui s’est passé sous ses yeux. Ayant enfermé 
une petite couleuvre dans une cuisse dont il avait garni 
le fond avec de la mousse, M. Coulon lui donna pour 
nourriture une grosse grenouille ; aussitôt se glissant sous 
la mousse, la couleuvre reparut au-devant de la gre- 
nouille qui s’élança de côté en donnant des signes de 
grande frayeur; la couleuvre recommencça son manége 
jusqu'à ce qu’elle parvint à sortir de la mousse en arrière 
de la grenouille qu’elle saisit par la partie postérieure du 


fé cmnssett. us ut fie bouée dées | À LS AS se à LR a 2 


RL D nd fn dé pb oss  iie dés 


— 289 — 


corps ; la grenouille étendit aussitôt les jambes, mais inu- 
tilement, car la couleuvre avançant lentement d’abord la 
mâchoire supérieure, puis l'inférieure, finit malgré sa 
petitesse par engloutir la grenouille toute entière. La 
secouant vivement alors, la couleuvre fit descendre la 
grenouille dans sa cavité abdominale. La grenouille n’é- 
tait cependant pas morte, car M. Coulon ayant pendu 
la couleuvre par la queue, il la vit se secouer, distendre 
énormément ses mâchoires et laisser tomber à terre la 
grenouille qui s’éloigna en sautant. Pendant tout le 
temps où il l'observa, il ne perçut aucune espèce d’odeur, 
ensorte qu'il ne peut pas admettre que les serpents atta- 
quent toujours leur proie en la stupéfiant d’abord par 
leur fétide haleine. 

. M. Coulon père fait ensuite observer que les vipères ne 
sautent jamais dans leurs marches les plus rapides, elles 
ne quittent jamais la terre, et si par hasard elles trouvent 
un point d'appui, formant à l’aide de leur queue un an- 
neau aulour de ce point, elles peuvent se dresser sur 
leur queue et se balancer à volonté dans tous les sens. 


Les séances après avoir été interrompues à cause des événemens 
politiques , ont recommencé. 


Séance du 11 Janvier 1849. 
Présidence de M. L. Couron. 


Après la lecture du procès-verbal de la séance du 28 
Décembre 1848, M. Coulon père, à l'appui de l'opinion 
qu'il avait émise, fait observer que, comme les vipères 
ne sautent jamais, et qu'elles ne peuvent que ramper ou 
se dresser , il est probable que, dans plusieurs des cas 


BULL. DE LA SOC. DES SC. NAT. T. I. 21 


— 290 — 


observés par M. Couleru, il s'agissait, non pas de la vi- 
père, mais de la couleuvre vipérine ou couleuvre lisse de 
Razoumovsky, qui lui ressemble beaucoup. Il ajoute que, 
contrairement à l'opinion reçue, il a vu une fois une vi- 
père mâle se mordre accidentellement et éprouver aussitôt 
les effets de son poison , jusqu’à cessation de tout mou- 
vement. 

M. le D' de Castella a vu une femme, qui avait été 
mordue au pied droit par une vipère, conserver pendant 
une quinzaine de jours, de nombreuses échymoses sur 
tout le côté droit. 

Il rend ensuite compte de l'extraction d’une portion 
nécrosée de l’omoplate, qu'il a pratiquée sur un enfant 
de huit ans, après l'avoir soumis à l’action du chloroforme. 
L'enfant perdit rapidement connaissance, cria beaucoup 
pendant l'opération, et l’on eut de la peine à le réveiller. 
Il dit n'avoir rien senti, mais avoir eu un rève fort pé- 
nible durant lequel il croyait se noyer. M. de Castella 
insiste de nouveau sur les dangers que présente l'emploi 
du chloroforme, en rappelant qu’il y a déjà huit cas de 
mort causés par l'emploi de cet anesthésique. 


M. le prof. Sacc communique à la Société le nouveau 
procédé de culture de la vigne, décrit par M. Persoz dans 
une brochure qui vient de paraître. Cette communication 
provoque une discussion sur la valeur des engrais, entre 
MM. Coulon père, le D' de Castella et M. le prof. Sacc. 


Séance du 22 Avril 1849. 


Présidence de M. L. Courow, 


M. le président dépose sur le bureau au nom de M. le 
Dr Cornaz , les ouvrages suivants : 


2 


— 291 — 

19 Essai sur les effets des eaux manérales de Wissembourg, 
par M. le D' Jonquière. 

20 Observations sur la nomenclature et le classement des 
Roses. 

39 Concours et distribution de prix, par la Société d’hor- 
ticulture de Paris, en 1831. 

49 - Mémoire sur la culture de l'oranger en pleine terre et aux 
environs de Paris, par Pottiaz. 

5° Au nom de l’auteur, un Mémoire italien sur de nou- 
velles méthodes curatives de quelques maladies, par 
M. Fattorius, chirurgien à Livourne. 


M. de Castella lit un Mémoire sur le mouvement de 
l'hôpital Pourtalès, pendant les années 1846 et 1847. 


L'hôpital contenait le 127 Janvier 1846 : 


29 malades: 15 homm., 14 femm. 
Admis pend' l'année 1846: 491  » 327.» 4164 » 


——————— 


520 » JADE UD 178 » 
Le {er Janvier 1847 : 
30 malades: 15 homm., 15 femm. 
Admis pend' l’année 4847 : 444  » 310 » 434 » 


474 » 5 PAT 149 » 


Total des malades pendant les deux années: 994: 
667 hommes, 327 femmes, 


dont 378 Neuchâtelois, 220 hommes, 158 femmes. 
258 Bernois, 163 ” 95 » 
55 Vaudois , 32 ” 23 ° 
131 Suisses d’autres cantons, 104 » 27 » 
172 étrangers, 148 » 24 » 


994 667 » 327 ” 


— 292 — 
De ce nombre 662 sont sortis guéris, 
175 améliorés ou soulagés, 
54 incurables ou renvoyés, 
68 sont morts, 
35 restaient à l'hôpital au 31 Déc. 1848. 
994 
Le nombre total des journées de séjour à l'hôpital, a 
été pour ces 994 malades, de 31771. 
En moyenne, le séjour d'un malade a été de 32 j. "°/054. 
On a eu chaque jour, 42 malades 7/63. 
La mortalité, calculée sur les sorties et les décès, a été 
de 1 sur 13°/6s. 
Vingt-neuf opérations ont été pratiquées pendant les 
deux années. 
Les maladies se répartissent comme suit : 
44 inflammations traumatiques 105 gastro-entero-hepatites. 


diverses. 34 rhumatismes aigus. 
37 abcès. | 23 rhumatismes chroniques. 
5 panaris. 46 fièvres bilieuses. 
60 plaies. 90 fièvres typhoïdes dont 61 
54 ulcèresatoniques variq. etc. en 46 et 29 en 47. 
57 fractures. 1 morbus maculosus. 
8 luxations. | A dissenterie. 
14 entorses. 15 fièvres lentes. 
37 tumeurs blanches, caries 7 fièvres intermittentes. 
ou nécroses. 12 inflammations cérébrales. 
65 ophtalmies. 38 bronchites. 
3 cataractes. A1 pleuropneumonies. 
7 hernies. 20 phtisies. 
4 fistule de l’anus. 17 scrophules. 
3 hydrocèles. 8 hypertrophies du cœur. 
A loupe graisseuse. 9 hydropisies. 
20 érésypèles. 1 phlebite puerpérale. 
& esquinancies. 7 metro-peritonites. 


A inflammation chronique de 3 hémorragies guéries par 
l'œsophage. l’ergotine. 


— 293 — 


3 catharres de la vessie. 14 myellites, chorées et irrita- 

3 apoplexies ou paralysies. tions spinales. 

Après avoir énuméré les cas les plus intéressants rap- 
portés dans son Mémoire, M. le D' de Castella fait quel- 
ques réflexions sur l’altération du sang produite par la 
fièvre typhoïde, altération qu'il croit provoquée par un 
virus qui, empêchant l’oxigénation du sang, détermine 
un excédant de carbone, qui entraîne à sa suite les acci- 
dents putrides et ataxiques. 


M. le Président appelle ensuite l'attention des membres 
de la Société, sur un cas remarquable d'amélioration pro- 
duite chez un fou furieux, par le simple changement de 
domicile. Le nommé Martin, pendant un séjour de plu- 
sieurs mois à l'hôpital de la ville, était en proie à de tels 
accès de furie, que son gardien même n'osait l’approcher. 
Pour le transporter à l'hospice de Préfargier, il fallut le 
garotter, et malgré cette précaution on eut beaucoup de 
. peine à le conduire à sa destination. Deux jours après 
son arrivée à l’hospice, son état s'était déjà tellement 
amélioré, qu'on put lui faire prendre un bain. Quelques 
jours après, il travaillait dans les jardins de l’établisse- 
ment et se montrait très-doux et parfaitement traitable. 


Séance du 6 Décembre 1849. 
Présidence de M. L. CouLox. 

M. le Président dépose sur le bureau plusieurs ouvrages 

reçus pendant l'année. S 
1° Litterarische Sympathien oder industrielle Buchmacherer, 
par M. le Dr Fleigel consul suisse aux États-Unis. 
20 Mémoire de la Société de Physique et d'Histoire natu- 

relle de Genève; tome XII, premiére partie. 


— 4 = 


3° Observations astronomiques faites à l'Observatoire de 
Genève; 2m supplément au tome XIT des Mémoires « 
de la Société de physique et d'histoire naturelle. 

49 Mémoire sur le déboisement des montagnes, adressé à 
la Direction de l'Intérieur du canton de Berne, par 
M. C. Marthand. 

5° Coup-d'œil sur les travaux de la Société jurassienne 
d'Émulation ; 1849. 

M. le D' Borel, tout en attendant la fin de l'épidémie 
de fièvre typhoïde, pour en faire le sujet d'un rapport 
détaillé, fait part à la Société de l'envoi d’un médecin au 
Val-de-Ruz, aux frais du gouvernement; du nombre des 
décès qui a été de huit à Dombresson , pendant les mois 
d'Août, Septembre et Octobre, et de sept à Savagnier, 
tandis qu’il n'avait été que de trois dans le premier de 
ces villages pendant le méme nombre de mois en 1845. . 
Il donne ensuite communication des démarches faites au- 
près du gouvernement par le conseil de santé, pour l’en- 
gager à faire cesser les causes d'insalubrité existantes 
dans le village, causes auxquelles on ne peut sans doute 
attribuer l'épidémie, mais qui ne laissent pas de l'aggra- 
ver et de la propager. 

Le conseil de santé a rangé parmi ces causes d'insalu- 
brité : 

1° L'existence du cimetière au milieu du village. 

20 Le peu de profondeur des fosses morluaires , qui, 
dans la plupart des cas, n’ont que 3 à 3°/2 pieds, au lieu 
d'en avoir 5 de France. 

30 L'adossement aux maisons de réservoirs d'eaux 
ménagères, qui, en y croupissant, développent des gaz 
iétides par la fermentation. 


— 295 — 


4° L'existence le long du cours du Seyon dans le vil- 
lage, de baquets contenant des eaux de lavage. 

5° Le fait qu'il existe au bord du Seyon des bassins 
et étangs à sec ou contenant du limon et des eaux crou- 
pissantes. 

6° Les eaux de puits qui ne sont pas limpides. 

7° Des flaques d'eau fétide, indépendamment des 
mares qui entourent les tas de fumier. 

8° Les inhumations différées, des morts conservés 
pendant cinq jours dans des chambres habitées. 

99 Les habitations malsaines dans lesquelles l'étage 
inférieur se trouve souvent au-dessous du niveau du sol 
et qui sont par conséquent humides. 


Séance du 20 Décembre 1849. 


Présidence de M. L, CouLox. 


M. le Président dépose sur le bureau deux volumes des 
Mémoires de la Société d'histoire naturelle de Hambourg ; 
il propose de lui envoyer en échange les trois volumes 
de nos Mémoires : l'envoi est voté à l'unanimité. 


M. le Dr de Castella parle de l'efficacité des eaux de la 
Brévine dans les affections des voies urinaires. Il cite 
plusieurs cas de personnes atteintes de strangurie, de 
catharres de vessie et de gravelle, qui ont été guéries ou 
soulagées par l'usage de ces eaux, et rappelle en même 
temps leurs bons effets dans les cas de chlorose. 

M. le D' Borel est parfaitement d'accord avec M. de 
Castella, quant à ce qui concerne l'efficacité de ces eaux 
dans les cas de chlorose et dans les affections chroniques 
de la vessie qui ne sont pas accompagnées d'irritation. 


— 296 — 


Il envisage , au contraire , que leur effet est pernicieux 
dans tous les cas où ces affections sont accompagnées 
d'irritation à un haut degré, et il cite le cas d’un individu 
atteint de strangurie, dont l'état s’est aggravé par suite 
de l'usage de ces eaux. 

M. Nicolet mentionne la grande célébrité dont ont joui 
ces eaux dans le milieu du siècle passé, et le fait que 
toutes les eaux qui ont traversé les marais tourbeux ren- 
ferment du soufre et du fer ; il cite, comme exemple, les 
sources des Ponts, de la Combe-Girard et de la Brévine. 

M. le prof, Ladame entre, à ce sujet, dans quelques 
détails sur l’action désoxidante exercée sur les sels par 
les végétaux en décomposition lente, et sur la provenance 
du fer dans les eaux qui s’écoulent de marais tourbeux. 

M. le Président exprime le désir de voir une fois ces 
eaux soumises à une analyse exacte. | 


Séance du 7 Février 1850. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le Président dépose sur le bureau un volume des 
Mémoires de la Société d'Édimbourg , ainsi que les Bul- 
letins de la même Société; il communique ensuite une 
lettre de M. Lesquereux, renfermant des détails fort in- 
téressants sur la végétation américaine. 


M. le prof. Favre présente une fourchette de coq frac- 
turée, dont la fracture s’est consolidée naturellement ; puis 
les dessins de quelques champignons qu'il a peints et que 
sa collection ne renfermait pas encore. Les suivants ont 
été récoltés dans les bois qui avoisinent la Chaux-de- 
Fonds, ce sont : 


— 297 — 


Polyporus lucidus Fr., des bois de Chaumont et Pouil- 
lerel. 

Agaricus violaceofulvus Batsch. 

Peziza tuberosa Bull. 

Agaricus carcharias Pers., avec une variété blanche. 
» : radicosus Bull., près de St-Jean et au Chanet. 
»  serinus. 
»  vaxinus Pers. 

Polyporus pinnicola. 

Leotia circinans. 

Tremella lutescens. 

Stereum purpureum. 

Sclerotium varium Pers. 

Polyporus subpileatus. 

Morschella esculenta ; vulgaris Pers. 

Elaphomyces granulatus. 

Agaricus radicosus. 

Polyporus lucidus. 

Il a observé, pendant l'année 1845, une nid abon- 
dance de certaines espèces de champignons. La morille 
conique a produit énormément, mais les conditions de 
température et d'humidité qui favorisaient la végétation 
de ce cryptogame, n’ont pu déterminer l’apparition des 
Helvelles géantes , quelquefois très-abondantes dans cer- 
taines localités de nos montagnes. Pendant les mois de 
Septembre et d'Octobre, les bois qui entourent la Chaux- 
de-Fonds étaient jonchés de Lactarius deliciosus et d'Hy- 
groforus glutinifer, qui, depuis plusieurs années, ne 
paraissaient plus, d'Agaricus melleus et fascicularis et de 
hydnum imbricatum. La chanterelle, que l'on récolte avec 
soin et qui depuis plusieurs années est devenue un aliment 


— 298 — 


très-recherché par une foule de personnes de la Chaux- 
de-Fonds , a presque entièrement manqué à cause de la 
sécheresse du mois de Septembre. 


Séance du 27 Février 1850. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le Président dépose sur le bureau les Bulletins de 
la Société des sciences naturelles de Philadelphie. 

M. Nicolet fait mention d’un nouveau procédé en usage 
pour constater la présence de l’ozône dans l’air atmos- 
phérique. Ce procédé consiste dans l'emploi de bandelettes 
de papier plongées, en premier lieu, dans une solution 
d'iodure de potassium, puis dans une dissolution d’amidon. 
L'iode est mis en liberté par l’ozône et colore l'amidon en 
bleu. M. Nicolet a observé que ce papier préparé, se co- 
lorait en jaune par les vents du Nord et de l'Est, en bleu 
et en noir par les vents du Sud et du Sud-Ouest. La 
fréquence des rhumes et des catharres étant plus grande, 
pendant que ces vents du Sud et Sud-Ouest règnent, 
qu'en tout autre temps, M. Nicolet serait porté à envi- 
sager la présence de l’ozône dans l’air comme une des 
causes de ces affections. 


Séance du 21 Mars 1850. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le Président dépose sur le bureau, de la part de 
M. Schimper , membre correspondant, un ouvrage inti- 
tulé : Recherches anatomiques et embryologiques sur les 
mousses. 


f 
b: 
Ç 


— 299 — 

M. Coulon père communique des observations qu'a 
faites M. Gould, pendant un voyage en Australie, sur 
les mœurs des animaux de ces contrées. 

Ce naturaliste raconte qu'un oiseau appartenant au 


_groupe des gallinacées (Lupoa ocellata), choisit, pour 


construire son nid, un fourré épais sur un terrain sa- 
blonneux. Il fait disparaître au centre, sur un diamêtre 
de 15 à 20 pieds, les broussailles qui peuvent s'y trouver 
et creuse le sol à un pied et demi de profondeur; puis 
après avoir rempli cette cavité de toute espèce de débris 
végélaux, qu'il élève en amas à un pied au-dessus du 
sol, il recouvre le tout de sable. Cet oiseau ayant l’ha- 
bitude de revenir nicher au même endroit, il résulte de 
ces accumulations successives, des tertres ou tumulus qui 
atteignent 15 pieds de hauteur sur 70 pieds de circonfé- 
rence. Quand la femelle veut pondre, elle creuse le sable 
jusqu’à quelques pouces de distance de l’accumulation des 
débris végétaux, et place symétriquement ses œufs au 
fond de ces cavités, en en tournant toujours la pointe 
vers le sol; elle les recouvre ensuite de sable. 

Les végétaux ainsi recouverts entrent en fermentation; 
la chaleur développée par cette action peut s'élever à 80° 
centigrades, et elle se communique aux œufs, les fait 
éclore, et les petits qui en sortent, trouvent dans les ter- 
mites qui habitent les murailles du tumulus, une abon- 
dante pâture. 

M. Gould rapporte que les habitations des colons si- 
tuées près des rivières, sont quelquefois détruites par des 
crues subites, provenant de pluies torrentielles qui ont ” 
lieu ensuite d'orages dans des montagnes souvent éloi- 
gnées de plus de 100 lieues. Ces eaux, en s’infiltrant à 


— 300 — 


travers les sables, s'accumulent dans les dépressions du 
terrain et y forment des lacs qui, au bout de peu de jours, 
se trouvent peuplés de gros poissons, de crabes, d’écre- 
visses, et de coquillages. Peu à peu ces lacs se dessèchent 
et leurs habitants suivent le retrait des eaux jusqu’à des 
profondeurs considérables, où ils séjournent jusqu’à la 
formation de nouveaux lacs. 


Séance du 1% Novembre 1850. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. le président fait lecture d’une lettre de M. Charles 
Girard, sur l'embryogénie des Planaires. Nous la trans- 
crivons en entier. 

I 


« Les faunes de l'Amérique du nord ne mentionnent 
encore aucune planaire, bien que le prof. Haldeman en 
ait décrit une il y a près de dix ans, commune dans les 
eaux douces de l'Est de la Pensylvanie. . 

» Les planaires habitent à la fois les eaux marines, 
douces et saumâtres, avec des formes et des caractères 
divers dans chacun de ces milieux. 

» Élaborant en ce moment un travail d'ensemble sur 
ces animaux, que je me propose de publier incessamment, 
je me bornerai aujourd’hui à exposer les résultats géné- 
raux de mes recherches embryogéniques, faites sur l’une 
des espèces marines. 

» Elle appartient au genre Planocera de Blainville, et 
l'espèce étant nouvelle, je la désignerai sous le nom de 
PL. elliptica, pour en rappeler la forme si régulièrement 
elliptique. Elle habite les rivages du Massachussetts. 


— 301 — 
IL 


» Dés le mois de Décembre, on observe dans l’intérieur 
du corps, entre les réseaux gastro-vasculaires , de petites 
sphères semi-transparentes réparties sur toutes les ré- 
gions, depuis le pourtour des yeux jusqu’à la région pos- 
térieure : ce sont les œufs en voie de formation. La vési- 
cule germinative est déjà très-distincte ainsi que la tache 
germinative. La première est proportionnellement grande; 
la seconde ordinairement trés-petite. La substance vitel- 
laire est clairsemée, mais elle est répartie uniformément 
sur tout l’espace que circonscrit la membrane vitellaire. 
J'insiste sur ce fait, parce qu’on a prétendu que la sub- 
stance vitellaire se groupait, dans l'origine, autour de la 
vésicule germinative, sous l'empire d’une force qu'on na 
pas dédaigné de comparer à l'attraction Newtonnienne, 
cherchant ainsi une cause identique dans la formation 
des êtres organisés et des corps célestes, d'après la théo- 
rie des nébuleuses. C était étendre le domaine de l'incer- 
titude. 

» Ce vitellus est en apparence homogène et se compose 
de petites cellules dont la structure se distingue à peine 
de la substance cellulaire et nutritive du corps ; on remar- 
que seulement qu'elles sont plus petites. 


HI 


» La ponte a lieu durant les mois de Mai et de Juin. 
. Quelque temps avant la ponte, l'œuf est déjà devenu 
très-opaque par l'accumulation de la substance vitellaire 
qui s'est multipliée à mesure que l'œuf grandissait, et 
masque maintenant la vésicule germinative qui ne se 
manifeste plus que sous la pression. La tache germina- 
tive a déjà disparu. 


— 302 — 


IV 


» Lorsque l'animal pond, il fixe ses œufs sur une 
surface lisse, au moyen d'une mince couche de muscosité 
qui se durcit au contact de l’eau. Les œufs sont disposés 
en bandes droites ou sinueuses, d’un quart de pouce de 
largeur ; leur longueur varie selon la quantité d'œufs 
pondus dans le même acte: car le même individu pond 
à plusieurs reprises et construit chaque fois une ou plu- 
sieurs de ces bandes. Les œufs y sont disposés régulié- 
rement en lignes longitudinales et transversales. 


V 


» Lorsque l'œuf est pondu , il possède une enveloppe 
externe, laquelle laisse un petit espace entre elle et la 
sphère vitellaire. Celle-ci est complètement opaque; très- 
rarement on aperçoit encore de la surface une petite tache 
transparente : c'est la vésicule germinative qui en occupe 
le centre et qui est sur le point de disparaître aussi. A 
cette époque, la structure da vitellus est finement cellu- 
laire ; chaque petite cellule renferme un noyau de gran- 
deur variable. 


VI 


» À peu prés douze heures après la ponte, l'œuf entre 
dans une phase nouvelle, celle du fractionnement, dont 
la durée est d'environ vingt-quatre heures. Voici com- 
ment ce phénomène s'opère : la sphère vitellaire s'allonge 
et devient oblongue; sur le milieu de sa longueur, un 
étranglement , d’abord très-peu sensible, se manifeste, 
puis il se prononce de plus en plus jusqu’à la séparation 
complète. La sphère primitive se trouve ainsi divisée en 
deux sphères d’égale grandeur, au centre desquelles se 


— 303 — 


voit un espace transparent qui n’a rien de commun avec 
la tache germinative, ainsi que le démontre une obser- 
vation de M. Agassiz sur l'œuf d’une Némerte, et que 
j'ai eu moi-même occasion de vérifier plusieurs fois de- 
puis. 

» Tôt aprés, deux autres sphères apparaissent à l'op- 
posite l’une de l’autre, sur les côtés et entre les deux 
premières. D'abord très-petites, elles grandissent rapi- 
dement jusqu’à ce que la substance soit divisée en quatre 
parties égales, en quatre sphères indépendantes l’une de 
l’autre, mais très-intimément groupées, ayant chacune 
leur espace transparent propre. Je me suis assuré direc- 
tement de l'indépendance des sphères de division en les 
isolant par la pression sans les rompre. On peut les isoler 
alors qu’elles sont en grand nombre, comme aussi lors- 
qu'il n’y en a que deux. Ce fait semble militer en faveur 
de l'existence d’une membrane autour de chaque sphère 
de fractionnement. 

» À ce moment la structure du vitellus est hétérogène. 
Il y a de grandes et de petites cellules renfermant un ou 
plusieurs noyaux de grandeurs diverses, tantôt opaques, 
tantôt avec un point central transparent. 

» Après quatre sphères, il s’en forme quatre nouvelles 
qui alternent avec les premières, puis huit autres qui 
alternent à leur tour avec les huit précédentes, et ainsi de 
suite. La loi de fractionnement par le multiple du nombre 
antérieur est connue des embryologistes. L'arrangement 
respectif des sphères de division, paraît être soumis à une 
autre loi, celle que je viens de rappeler, laquelle fut en- 
trevue par M. Agassiz sur les œufs de la Planaire qui 
nous occupe, et que j'ai vérifiée après lui. 


— 304 — 


» Au-delà de seize sphères, cette régularité est moins 
apparente; à trente—deux et à soixante-quatre, on ne 
peut plus la suivre, puis vient l'état appelé corps de mûre, 
dernier degré du fractionnement, qui ramène à la sphère 
primitive, avec une structure du vitellus à peu près sem- 
blable à ce qu’il était avant le fractionnement. 


VII 


» Un fait ressort clairement de ces observations : c'est 
que durant chacune des phases que l'œuf parcourt, la 
substance vitellaire est sous la puissance d’un travail très- 
intime qui transforme sa masse, la pétrit et la repétrit en 
quelque sorte à l’entrée de chaque phase nouvelle. La 
substance embryonaire se multiplie ou, en d’autres ter- 
mes, s'accroît par le procédé si simple de l'accroissement 
des noyaux, procédé entrevu par M. Barry et étendu 
maintenant à la multiplication des cellules en général en 
opposition -à la théorie jusqu'ici admise de MM. Schwaon 
et Schleiden. 

VIII 


» Le fractionnement une fois opéré , l’œuf reste dans 
un état de repos de quatre à cinq jours, pendant lesquels 
sa masse s’éclaircit en même temps que son centre devient 
creux. Puis au bout de ce temps, il se met en mouvement. 
Dès ce moment l’œuf est devenu embryon, sans changer 
de forme. 

ë IX 

» Le mouvement n’est pas uniforme pour tous : chez 
les uns il est très-rapide, d'environ quarante tours de 
rotation en une minute; chez d’autres il est modéré, de 
quatorze tours seulement; chez d’autres encore il est très- 


ét és me. 


— (4905 -—æ 


lent et à peine perceptible. Mais ceux qui sont soumis à 
un mouvement lent, peuvent l'instant après se mouvoir 
rapidement, et vice versa ceux qui se meuvent rapidement 
peuvent se ralentir: en un mot, les différentes vitesses 
se succèdent chez le même individu. 

» Le mouvement ne s'opêre pas dans le même sens : 
chez les uns il est de gauche à droite, chez d’autres de 
droite à gauche dans le plan horizontal, chez d'autres 
encore il s'effectue dans le plan vertical, parfois unifor- 
mément, d’autres fois comme par bonds. 

» J'ai vu l’un et l’autre de ces mouvements changer de 
direction ; c’est-à-dire ,» de gauche à droite qu'il était, 
devenir de droite à gauche dans le plan horizontal ; et le 
même phénomène avait lieu par rapport au plan verti- 
cal {*). 

X 


» De grandes cellules vitellaires, indépendantes de la 
masse principale, cellules que M. Alex. Nordmann a dé- 
crités comme un animal parasite du Tergipes Edwardsx, 
sous le nom générique de Cosmella, cireulaient librement 
dans l’espace compris entre le vitellus et la membrane 
extérieure de l'œuf. Elles étaient immobiles pendant la 
période d'immobilité de l'œuf ; elles Pivotaient autour de 
l'embryon dés que celui-ci se mettait en mouvement. 


(*) Le plan horizontal et le plan vertical n’ont d'autre sehs ici que re- 
lativement à l'observateur, L’axe de rotation de la sphère vitellaire pou- 
Yant se déplacer et revêtir l’un et Pautre de ces plans, C’est sans doute au 
passage de l’un de ces plans à l’autre, qu’il faut attribuer le mouvement 
irrégulier de certaines sphères qui semblaient tourbillonner et se mouvoir 


 €n spirale, 


BULL. DE LA SOC. DES SC. NAT. T. II. 22 


XI 


» C'était un spectacle que l'œil ne se lassait pas de con- 
templer, que l'esprit ne se fatiguait pas de sonder. Quelle 
mystérieuse grandeur, dans un petit amas sphérique 
de cellules jouissant d’une pareille activité, sans organe 
quelconque : un petit globe de matière sous l'impulsion 
de la vie qui dorénavant va le gouverner , le maîtriser 
en quelque sorte, lui imprimer les formes, lui donner les 
organes qu’une pensée maîtresse a marqués à l'avance. 
Je ne connais pas de sujets en histoire naturelle plus 
émouvants que les phases primitives que parcourent les 
êtres animés, avant leur apparition sur la scène du monde. 


XII 


Cet amas sphérique de cellules, c'était donc déjà l'em- 
bryon. Douze heures plus tard, le centre de cet embryon 
se compose de grandes cellules transparentes, dont le 
contenu est nébuleux, tandis qu’à la périphérie se trou- 
vent des cellules vitellaires ordinaires. Alors la surface 
extérieure se montre entourée de cils vibratiles. Puis, 
douze heures plus tard encore, la sphère embryonnaire 
perd sa forme primitive. Elle commence par s’aplatir à 
l'un des pôles, et de cette surface plane s'élévent quelques 
mamelons entre lesquels se pratique une entaille qui ou- 
vre la sphère. À partir de ce moment, l’animal est symé- 
trique, ce que l’on voit parfaitement par l'apparition des 
pigments visuels. Mais à ce moment, l'animal étant en- 
core renfermé dans l'œuf, ses mouvements sont limités 
par l'enveloppe externe ; aussi les dirait-on mal à l'aise, 
tant ils sont saccadés et irréguliers. 


XIII 


» Enfin les embryons rompent leur enveloppe et s’é- 
lancent dans le milieu ambiant, avec des mouvements des 
plus variés et sous les formes les plus diverses. La di- 
rection générale est en avant, mais de temps en temps 
l'animal pivote sur son axe, roule ou oscille. Sa forme 
est tantôt régulière et symétrique, tantôt assymétrique, 
polymorphe et difforme. La forme change ainsi que la 
direction ; le corps paraît doué d’une plastique élasticité, 
il passe d’une forme à l’autre, les revêt successivement 
toutes sans s'arrêter pour cela, bien que chaque nouvelle 
forme entraîne une modification dans le mode de pro- 
gression. 

» Dans cet état, les larves de Planaires ont été décrites 
comme des infusoires. Le Xo/pode cuculus Ehr. est du 


nombre. 
XIV 


» Ces formes si diverses, soumises à des mouvements 
si variés, par lesquelles les jeunes planaires viennent de 
passer, se résument, au bout de huit à dix jours, en une 
espèce de chrysalide complètement immobile, de forme 
cylindrique, légèrement arquée, sur laquelle on distingue 
trois régions : le tiers antérieur et le tiers postérieur qui 
sont opaques, et le centre qui reste transparent. 

» Les larves que j'avais élevées étant demeurées en 
trop petit nombre, je n'ai pas été à même de pousser plus 
loin mes observations. D'abord j'avais pensé que cet état 
de chrysalide était un état anormal, une mort lente des 
larves tenues, en captivité; mais j'ai eu l’occasion de les 
observer dans ce même état, retirées directement de Ja 


— 308 — 


baie de Boston au moyen de la drague et à la même épo- 
que, c'est-à-dire à la fin du mois de Juin. 

» Je ne conserve, par conséquent, aucun doute sur le 
fait qu'il y a une période de chrysalide chez la Planaire 
qui fait le sujet de ces recherches; une période dont j'i- 
gnore encore la durée. Il reste aussi à savoir si de cette 
chrysalide naîtra définitivement la Planaire, ou bien si 
elle a encore d’autres phases intermédiaires à parcourir.» 


Séance du 28 Novembre 1850. 


Présidence de M. L. GouLonx. 


M. le présidentidépose sur le bureau : 

1° Deux volumes des Transactions de la Société royale 
d'Édimbourg. 

29 Un rapport sur les observations faites à l'observa- 
toire de Makerstrowm. 

3° Le tome VI® des Mémoires de la Société belge des 
sciences de Liège. 

4° Une lettre de M. Brossi qui engage la Société des 
sciences naturelles de Neuchâtel, à coopérer à l'ouvrage 
d'éntomologie suisse, publié par la Société helvétique. 


M. le prof. Ladame communique une observation sur 
les différences de coloration présentées par le plafond 
gypsé d’une pièce où pénètre de la fumée. La teinte des 
parties correspondantes aux poutres et aux litteaux qui 
les joignent et sont enduits de plâtre, est moins foncée 
que celle des espaces correspondants à leurs intervalles. 
Il s'engage entre plusieurs des membres présents, une 
discussion sur les causes probables de ce phénomène. 


— 309 — 


M. le président donne lecture d’une lettre de M. Guyot, 
dont nous présentons ici quelques passages. 

» Je fis une course d'exploration dans les montagnes 
Blanches, situées dans le New-Hampshire, à environ 
60 lieues au nord de Boston. Ce groupe de montagnes, 
le plus élevé à peu près des États-Unis en deçà des mon- 
tagnes Rocheuses, m'a offert beaucoup d'intérét au point 
de vue des zônes successives de végétation, dont j'ai dé- 
terminé la hauteur avec M. Agassiz, ainsi qu'à cause des 
immenses dépôts erratiques qui l'entourent et couvrent 
ses flancs jusque près de son sommet. 

» Toutefois, l'étendue des espaces à explorer, et la dif- 
ficulté d'observation ne me permettent pas d'exprimer à 
première vue une opinion bien positive à ce sujet. Ces 
montagnes et leurs abords sont couverts d’une immense 
forêt vierge continue, n’offrant aucune trace de sentier, 
hors des deux ou trois routes qui les traversent. Le sol 
est entièrement caché par les débris morts ou vivants de 
la végétation, ensorte qu’il est même souvent fort difficile 
de savoir sur quelle espèce de roche on pose le pied, et 
si les blocs sont erratiques ou appartiennent à une roche 
en place. 

» La question qui se pose pour moi est celle-ci : 

» Ces montagnes, qui forment un groupe considérable 
et jusqu’à un certain point isolé au milieu de terrains 
relativement bas, ont-elles été, à une époque quelcon- 
que de la période erratique, un centre de dispersion à la 
manière de nos Alpes ; ou bien, le grand courant erra- 
tique venant du Nord ou Nord-Est, qui a laissé ses traces 
sur toute la surface de l'Amérique du Nord, depuis le 
Labrador jusqu’au Sud de New-—Yorck, a-t-il passé sur 


— 310 — 


ces hauteurs et dominé de façon à ce que la disposition 
du terrain erratique doive être attribuée à son influence ? 

» Les géologues américains admettent le dernier cas ; 
pour moi, je penche un peu pour le premier; mais ce qui 
me paraît le plus certain, c'est que des études sérieuses 
sont à faire avant tout, et que les observations faites jus- 
qu’à présent sont infiniment trop pauvres et trop peu 
exactes pour jeter une véritable lumière sur la question. 
En général , les questions érratiques sont ici fort com- 
pliquées, et les faits, quoique étudiés sur certains points, 
sont si peu liés, qu’exprimer une opinion me paraîtrait 
une grande présomption. 

» Du reste, le but de mon voyage était bien plutôt.de 
mesurer les hauteurs de ce groupe célèbre, et de me for- 
mer une idée de ses caractères topographiques qu'aucune 
carte ne rend même d’une manière approchée : sous ce 
rapport je crois avoir fait un bon travail. Ayant placé 
mon neveu Ernest Sandoz au pied des montagnes, pour 
me faire des observations correspondantes, dans un point 
dont la hauteur a été déterminée par des levés de che- 
mins de fer. J'ai déterminé une trentaine de points choisis 
parmi les plus remarquables. 

» La chaîne principale est formée de 6 à 7 pics dont 
la hauteur varie de 4500! à 6000’ anglais. 

» Le sommet le plus élevé, le mont Washington a, 
selon ma mesure, 6400" pieds anglais, c’est un peu plus 
haut que ne le font les mesures actuelles. L'aspect général 
de ces montagnes rappelle celui de nos Basses-Alpes, mais 
elles sont moins déchirées , les vallées sont plus larges, 
plus adoucies, moins pittoresques que les nôtres; les 
torrents sont plus paisibles, les chutes d’eau moins. fré- 


— 311 — 


quentes ; l'absence presque totale de lacs , de pâturages, 
de culture et de bétail, le silence du désert qu'une mai- 
sonnette ne vient jamais égayer , tout les rend bien infé- 
rieures à nos chères montagnes suisses. 

» Je vous enverrai, du reste, mon mémoire sur ces 
hauteurs , dès qu’il sera imprimé. » 


Es 


Séance du 12 Décembre 1851. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. le président présente à la Société la 17° livraison du 
4me vol. des Mémoires de la Société du Muséum d'histoire 
naturelle de Strasbourg. 


M. le D' de Castella lit une observation très-intéressante 
sur un cas d'imperforation de l'hymen chez une jeune fille 
de 19 ans, qui présentait des symptômes qu'on attribuait 
à une grossesse. L'incision de l’hymen a permis l’écoule- 
ment de 17'/: onces d’un sang poisseux, brunâtre et 
inodore. Après l'opération, la matrice est revenne promp- 
tement à son état normal, et la jeune fille a été parfaite- 
ment guérie. 


M. le prof. Ladame rend compte à la Société des ob- 
servations météorologiques faites depuis plusieurs années 
dans le pays. La Société décide qu’elles seront continuées, 
et vote les fonds nécessaires pour un nouveau tirage de 
tabelles. 


M. Charles Mathieu parle des étangs à sangsues et des 
causes qui nuisent à la reproduction de ces annelides : il 
cite entre autres une petite espèce de crevette qui paraît 
causer la perte d'une quantité de jeunes sangsues. 


— 312 


Il vient aussi de vérifier un nouveau procédé pour re- 
connaître la présence de l'acide nitrique au moyen de 
l'acide sulfurique, de l’iodure de potassium et de l’amidon. 


Séance du 23 Janvier 1851. 
Présidence de M. L. CouLoN. 


M. le président dépose sur le bureau un nouveau 
compte-rendu des séances de la Société d'histoire naturelle 
de Philadelphie, ainsi qu’un Mémoire intitulé : Coup-d'œil 
sur les travaux de la Société jurassienne d'émulation, pen- 
dant l’année 1850. 

M. le président communique quelques détails, tirés 
d'un Mémoire allemand, sur les mœurs et en particulier 
le sommeil d'hiver des loirs et des muscardins. 


M. le Dr Cornaz lit un travail sur les diverses maladies 
dont ont été atteints plusieurs personnages célébres de 
l'antiquité. 


Séance du 6 Février 1851. 
Présidence de M. L. Couron. 


M. le D' Cornaz lit des documents très-intéressants sur 
l'histoire de l’autoplastie et de l'héteroplastie, documents 
tirés d’un ouvrage de M. le professeur Rigaud de Stras- 
bourg, et de la thèse de M. le professeur Blandin. 

Il en résulte 1° qu'un chirurgien, de Lausanne, nommé 
Griffon, ayant eu l’occasion de voir une jeune personne 
portant un nez restauré par la méthode Tagliacozzi, 
conçul l’idée de se servir de la même méthode, pour re- 
faire le nez d'une jeune fille, et que son opération réussit 
parfaitement, 


— 313 — 


2° Que Franco, professeur de médecine à Fribourg en 
Suisse, qui vivait au temps d'Ambroise Paré, réussit au 
moyen d'une opération de genioplastie, à combler une 
lacune qui existait à la joue d’un Neuchâtelois, et qui 
était si considérable qu'on pouvait y faire passer un œuf 
d'oie dans le sens de son long diamètre. 


Séance du 20 Février 1851. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le Dr Vouga entretient la Société d'une figure re- 
marquable qu'il a observée sur la surface glacée d'un 
étang près de Cortaillod. 

Cette figure, formée par des alternances de glace bul- 
beuse blanche et de glace transparente laissant voir en 
noir le fond obscur de l'étang, est mathématiquement la 
projection horizontale des contours des marches d'un 
escalier de pierre descendant de la surface vers le fond 
de l'étang. Les lignes transparentes et obscures corres- 
pondent aux arêtes des marches, tandis que les surfaces 
blanches et bulbeuses correspondent aux surfaces de ces 
mêmes marches. M. Vouga croit avoir trouvé l'explication 
de la formation de cette figure, dans le développement 
inégal des bulles de gaz hydrogène carboné provenant de 
la décomposition des matières végétales contenues dans 
la vase qui recouvre le fond de l'étang et les surfaces des 
marches de l'escalier qui y descend. Ces bulles s’élevant 
sans cesse du fond de l'étang perpendiculairement à la 
surface de cette eau parfaitement stagnante, sont retenues 
par la couche de glace mince en voie de formation à la 
surface et s'y disséminent en la colorant plus ou moins 


— JE — 


en blanc, selon qu'elles arrivent en nombre plus ou moins 
grand en un point donné de cette surface : ainsi s’expli- 
que: 1° le fait de la transparence de la glace dans les 
lignes correspondant aux arêtes des marches sur lesquel- 
les les matières vaseuses en décomposition ne sont pas 
déposées ; 2° le fait de la bullosité maximum des parties 
de la couche glacée correspondant au fond de l’étang où 
la vase atteint son maximum d'épaisseur ; 3° le fait de la 
bullosité variable des parties correspondantes au plan des 
marches, bullosité qui augmente pour la projection de 
chaque marche inférieure, par le fait que la couche va- 
seuse augmente aussi d'épaisseur sur chaque marche in- 
férieure. 

M. Vouga croit que dans certains cas donnés , la bul- 
losité d'une couche de glace formée à la surface d'une 
eau stagnanle, pourrait ainsi servir à apprécier les iné- 
galités de relief du fond. 


M. le président parle ensuite d’une disposition singu- 


lière qu'a présentée Je givre sur le toit de la maison des 
orphelins, disposition qui a aussi frappé M. le prof. Favre. 
La surface givrée n’existe pas sur toute la surface du toit, 
mais forme des bandes parallèles dirigées perpendiculai- 
rement au faîte et correspondantes aux poutres parallèles 
qui soutiennent la toiture. 

M. Matthieu et M. Favre seraient disposés à admettre 
que des courants d'air chaud provenant de l’intérieur 
chauffé du bâtiment et venant par leur ascension ré- 
chauffer la surface intérieure du toit dans l'intervalle des 
poutres , auraient empêché la formation du givre sur les 
parties extérieures correspondantes. 


his étroé on 


— 315 — 


M. le président croit plutôt que le givre, qui, comme 
on le remarque, se forme toujours sur les corps qui font 
saillie sur une surface, aurait pris sur ce toit cette dispo- 
sition particulière en vertu des saillies légères que doivent 
faire les tuiles sur les parties du toit correspondantes aux 
chevrons , et cette manière de voir se trouve corroborée 
par la même disposition du givre observée sur le toit du 
temple du bas, dont la température ne peut varier loca- 
lement puisqu'elle reste constante à l'intérieur. 


M. le D° Vouga communique quelques faits tirés d'un 
article de la Revue britannique, sur les mœurs singulières 
de deux oiseaux de la Nouvelle-Hollande. Il s’agit du 
Telegalla ou dindon à grosse queue, et du Mégapodius 
tumulus, qui ensevelissent leurs œufs dans une couche de 
terreau formée de substances végétales accumulées par 
l'animal. La fermentation ne tarde pas à s’y établir et 
détermine un développement de chaleur suffisant pour 
l'éclosion des œufs. 

M. Coulon père, qui a puisé ces faits dans l'ouvrage 
original de M. Gould , et qui en a déjà entretenu la So- 
ciété anciennement, entre dans quelques détails nouveaux 
sur la disposition régulière des œufs dans l'intérieur du 
tumulus. 


M. le président communique à la Société une coupe du 
terrain à Nummulites de la Presta, au Val-de-Travers, 
terrain dans lequel existe l'exploitation de la couche im- 
prégnée de bitume de laquelle on extrait l’asphalte. Cette 
coupe lui a été communiquée par M. Chopard, géologue 
à Morteau , et est annexée au protocole. 


— 316 — 


Séance du 22 Juin 1851. 
Présidence de M. L. Couon. 


M. le président dépose sur le bureau la 2€ partie du 
tome XIT des Mémoires de la Société de physique de Ge- 
nêèvye. 


M. le D' Vouga rend compte d’une opération d’imper- 
foration de l'anus, entreprise dernièrement avec succès 
par M. le D' Mercier, de Boudry, sur un enfant de trois 
jours. - 

Les personnes chargées du soin de l'enfant, n'ayant 
pas introduit régulièrement les mèches destinées à dilater 
l'ouverture artificielle et à en prévenir le rétrécissement, 
il devint nécessaire au bout de quinze jours de recou- 
rir à une nouvelle incision. Dès-lors l'évacuation des 
excréments s'est toujours maintenue et l'enfant se porte 
bien. 


M. le président Coulon annonce qu'il a obtenu pour le 
musée une ote minor (anser minutus seu Teminckü), espèce 
rare de la taille d’un canard et différente de l’anser .albi- 
frons. Cet oiseau a été tué sur le lac de Morat. 


M. le prof. Favre fait passer sous les yeux des membres 
de la Société, plusieurs de ses aquarelles très-bien exé- 
cutées et représentant diverses espèces de champignons. 
L'une d'elles, qui reproduit deux agaricus cristalus dé- 
veloppés l’un sur l’autre, est surtout remarquable. 


M. le Dr de Castella fait lecture du Mémoire suivant, 
sur le mouvement de Fhôpital Pourtalès, pendant l’année 
1850. 


— 317 — 
L'hôpital renfermait, le 127 Janvier 1850 : 


33 malades: 20 homm., 413 femm. 


admis pendant l’année  : 525 » 358 » 167 » 
558  » 378 » 180 » 
dont 208 Neuchâtelois, 130 hommes, 78 femmes. 
129 Bernois, 83 » 46 -» 
40 Vaudois, 29 » A1 » 
96 Suisses d’autres cantons, 70 » 26 » 
85 étrangers, 66 » 49 » 
558 malades, 378 » 180 » 


De ce nombre 404 sont sortis guéris, 
54 améliorés ou soulagés, 
17 incurables ou renvoyés, 
40 sont morts, 26 hommes, 14 femmes, 
43 ont été inscrits à nouveau: 27 hom., 16 fem. 
558 


Ee nombre total des journées de malades a été de 
16675. 


En moyenne, le séjour de chaque malade a été de 
29 “3 /565. 


Chaque jour l'hôpital renfermait en moyenne #5 ma- 
lades ?°°/365. 

La mortalité calculée sur les sorties et décès a été de 
1 sur 12 */60. 

Quatorze opérations graves, dont # amputations, ont 
été exécutées. 

Les affections traitées pendant l’année se répartissent 
comme suit : 


33 inflammations externes diverses. 
31 abcès. 


33 plaies, dont ? d’armes à feu et 2 suite de congélation des pieds. 


— 318 — 


27 ulcères, dont l’un, scrophuleux rongeant du nez et de la lèvre 
supérieure, a été guéri par l'emploi du chlorure d’or et de 
l'huile de foie de morue, au bout de 175 j. de traitement. 

19 fractures, dont une de la crête de l'os iliaque gauche. 

A entorses. 

1 luxation de l’humerus. réduite à l’aide du chloroforme. 

29 tumeurs blanches, caries et nécroses. 

4 fistule lacrymale opérée avec succès. 

25 ophtalmies, la plupart scrophuleuses. 

À cataracte. 

7 amblyopies amaurotiques , chez des chlorotiqués et des hor- 
logers dont les yeux étaient fatigués par un travail nocturne 
trop assidu et avec l'usage du globe. 

A rétention d'urine, suite de paralysie momentanée de la vessie, 

7 cancers, dont 3 constitutionnels, renvoyés comme imcurables, 
deux du foie et un de l'estomac. 

1 loupe à l'épaule. 

9 éresypèles. 

48 rhumatismes , dont 36 aigus et 12 chroniques ; plusieurs ont 
été compliqués d’affections du cœur , et guéris par l'emploi 
du nitre et de l’aconit. 

A esquinancie. 

58 affections des voies digestives : 

19 gastroenterites, 
10 enteropéritonites, 
7 gastralgies, 

22 fièvres bilieuses. 

3 fièvres catharrales. 

70 fièvres typhoïdes, dont 13 ont provoqué la mort. 

5 fièvres intermittentes, dont une quotidienne et quatre tierces, 
dans l’un de ces cas, une infusion de graine de moutarde à 
promptement dissipé une anasarque consécutive à la fièvre 
intermittente. 

6 fièvres lentes. 

16 affections du cerveau , dont 4 devenues mortelles. 


ebRoEzEo 


— 319 — 


A tétanos traumatique , devenu mortel malgré l'emploi répété 
des inhalations de chloroforme , celui de l’opium à baute 
dose et les frictions d’onguent mercuriel belladoné. 


51 inflammations des voies respiratoires : 


dont 3 laryngites , 
22 bronchites , 
26 pleuropneumomies. 
phtysies pulmonaires. 
hyperthophies du cœur. 
métrite. 
métropentonites. 
prolapsus de la matrice. 
imperforation de l'hymen. 
metrorrbagie périodique. 
1 hématurie. 
14 chloroses. 
1 hystérie. 
4 chorées guéries par le valérianate de zinc. 
1 tremblement mercuriel invétéré, amélioré par les sudorifiques. 
9 névralgies dont 7 sciatiques. 
1 mélancohe maniaque. 
44 scrophules. 


= 


Séance du 13 Novembre 1851. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. le président dépose sur le bureau les ouvrages sui- 
vants : le tome XI° de la deuxième série des Mémoires de 
l'académie de Turin, trois exemplaires des Bulletins de la 
Société d'Édimbourg , un exemplaire des Bulletins de la 
Société de Bâle 1848-1850 , le vingt-troisième Bulletin 
de la Société vaudoise. 

Un Mémoire imprimé de M. Charles Girard, sur les 


poissons appartenant au groupe des Cottoïdes. 


— 320 — 


M. le président annonce que l'académie francaise vient 
de nommer üne commission pour examiner les propriétés 
d'une graine du Pérou, dont l’emploi interne et externe a 
été préconisé contre les morsures des serpents venimeux. 


Seance du 28 Novembre 1851. 


Présidence de M. L. CouLox. 


M. le président fait part d’une communication sur la 
bisexualité du sarcoptère de la gale. M. de Castella entre 
dans quelques détails sur les divers traitements employés 
contre cette affection. 

M. le président annonce la découverte dans le Rhin 
d'une nouvelle espèce d’écrevisse, différant essentielle- 
ment de l'espèce vulgaire par la taille plus considérable 
de ses pinces et la briéveté de son rostre. 

M. le Df Cornaz communique les résultats obtenus par 
M. Belinghéri, en comparant les poids des viscères de 
plusieurs espèces de poissons, à diverses époques de l'an- 
née. 

Il fait part ensuite d’un cas singulier d'affection ner- 
veuse observé par M. Jung. 

À ce propos, M. le D' de Castella parle du peu de succès 
de la section des nerfs affectés dans le cas de tic doulou- 
reux, et des rapports intimes qu’il reconnaît exister entre 
les manifestations du fluide nerveux et du fluide électri- 
que, ce qui le porte à les identifier; à propos de la con- 
tagiosité du choléra admise par M. Jung , M. le docteur 
de Castella développe son opinion sur les anomalies et les 
défauts dans l’oxigénation du sang, qu'il croit être la cause 
de plusieurs maladies épidémiques et en particulier du 
typhus. 


Séance du 12 Décembre 1851. 


Présidence de M. EL. CouLon. 


M. le professeur Ladame lit un mémoire sur les divers 
systèmes employés actuellement pour chauffer de grands 
bâtiments. Il passe successivement en revue les avantages 
et les inconvénients des modes de chauffage suivants : 
Ancien système des poêles ou fourneaux de faïence, et 
fourneaux de fer, chauffage à l’air chaud, à la vapeur, à 
l’eau chaude à basse pression, et chauffage à l’eau chaude 
à haute pression {système Perkins). Ce dernier système 
sera appliqué à quelques salles du nouveau bâtiment de 
l'école des filles. 


M. le D' Vouga présente à la société un brochet d’en- 
viron une demi-livre, remarquable par la brièveté de sa 
queue. La nageoire caudale, la dorsale et l’anale sont 
bien conformées, mais l'extrémité de ces deux dernières 
est à peine éloignée de 5 lignes de l’origine du premier 
rayon inférieur et supérieur de la caudale, tandis que 
chez un brochet de même taille normalement conformé, 
cette distance aurait été d'au moins 16 lignes. Le corps 
de ce brochet conserve ses proportions ordinaires jusqu’à 
la hauteur de l'anus, où il est légèrement renflé, puis 
s'atténue brusquement en arrière du milieu des nageoires 
dorsale et anale. A l'examen superficiel , il semble que 
celte déformation provient d’une morsure d'un autre 
poisson, qui aurait alteint l'extrémité caudale de celui 
qui nous occupe ; mais l'inspection de la peau démontre 
qu'il n’y existe aucune trace de cicatrice, comme cela à 
toujours lieu chez les poissons dont les téguments ont été 


BULL. DE LA SOC. DES SC, NAT. T. II, 25 


— 322 — 


lésés par les machoires de leurs congénères. — “La dis- 
section nous a prouvé que la cause de ce raccourcisse- 
ment caudal devait être attribuée à un arrêt dans le dé- 
veloppement des corps des dernières vertèbres caudales. 
Les vertèbres caudales sont au nombre de 19 chez le bro- 
chet; les 5 dernières sont modifiées; leurs apophyses 
épineuses inférieures et supérieures sont comprimées la- 
téralement et inclinées en arrière, de manière à former 
la grande vertèbre terminale et flabelliforme qui sert de 
soutien aux rayons de la nageoire caudale. 

Chez notre individu , la grande vertèbre est normale, 
mais les 12 vertèbres suivantes, au lieu d’être complète- 
ment développées , ont leurs corps amincis et soudés de 
façon à ce que la partie de la colonne vertébrale, formée 
par ces 12 corps de vertèbres , atteint à peine une lon- 
gueur de 8 lignes; à partir de la 17€ vertèbre l’anomalie 
cesse, et les corps vertébraux reprennent leur longueur 
normale de 2 lignes à-peu-près. Malgré cette réunion 
intime des vertèbres caudales, le canal vertébral supé- 
rieur et le canal vertébral inférieur formés par la su- 
ture des ares des vertèbres, existent, et les apophyses 
supérieures et inférieures ont leur longueur normale, 
seulement leur direction a changé, et elles irradient les 
antérieures en avant, les postérieures en arrière. Les apo- 
physes correspondantes aux vertèbres, qui sont au centre 
de la ligne de suture, ont seules conservé leur direction 
normale perpendiculaire à l’axe du corps. 

En calculant à 1°/4 ligne la longueur moyenne et nor- 
male de chacune des vertèbres soudées, nous obtiendrons 
une longueur de 21 lignes qui n'est représentée sur notre 
exemplaire que par 5 lignes; de sorte que la diminution 


pe cé EE EEE CS 


LME 


— 323 — 


totale de la longueur de la queue peut être évaluée à 16 
lignes. Cet arrêt de développement des vertèbres cau- 
dales paraît exister quelquefois chez les brochets, car 
le musée d'anatomie comparée de Heidelberg renferme 
un poisson de cette espèce, chez lequel la portion cau- 
dale est encore plus raccourcie que chez notre individu. 


Seance du 26 Décembre 1851. 


Présidence de M, L, CouLon. 


M. le Dr Borel lit un rapport plein d'intérêt sur un cas 
de médecine légale qu'il a été appelé à voir dernière- 
ment en compagnie d'un de ses confrères. Il s'agissait de 
décider par l'inspection du cadavre, si un enfant mort en 
naissant, soumis à leur examen, avait respiré après sa 
naissance , et en outre s'il éfait viable. Ces deux condi- 
tions étaient de la dernière importance pour assurer à 
la mère, veuve depuis peu de temps, une part dans la 
succession de son mari. 

Cet enfant, qui était du sexe féminin, était bien con- 
formé de tous ses membres, et ne présentait aucune trace 
de décomposition putride ; son poids était de 5 livres une 
once de Neuchâtel; la longueur totale du corps était de 
18 pouces 9 lignes de Neuchâtel. Sa peau était consis- 


tante, plutôt pâle que de couleur rosée; elle était recou- 


verte d'un enduit caséiforme abondant surtout au cuir 
chevelu, aux bras, aux plis des aines et à la partie posté- 
rieure du dos ; aux oreilles et à la partie postérieure de 
la tête et du cou, elle avait une teinte violacée très-fon- 
cée. Les cheveux (d’une couleur châtain clair) avaient 9 
lignes de longueur; les ongles étaient consistants et bien 
formés; aux mains ils dépassaient la pulpe des doigts, 


— 324 — 


et aux pieds , ils s’étendaient jusque près de l'extrême 
bord des orteils. La membrane pupillaire dite de Wa- 
chendorff n'existait plus aux deux yeux. Les pavillons 
des oreilles étaient bien formés, consistants et cartilagi- 
neux. Plusieurs incisions pratiquées perpendiculairement 
à l'axe du corps dans les cartilages qui forment les ex- 
trémités inférieures des os des cuisses, ont fait reconnaître 
qu'il existait au centre de ces cartilages un commence- 
ment d'ossification, peu considérable encore; le noyau 
osseux n'ayant guère au-delà d'une demi-ligne de dia- 
mètre. On ne remarquait à la surface extérieure du corps 
de l'enfant aucune trace de lésion. 

Cavité du crâne. Il n’y avait aucune ecchymose au-des- 
sous des tégumens du crâne. Les os de la voûte cranienne 
parfaitement intacts, étaient dans un état d'ossification 
avancée; ils offraient une teinte violacée très-intense, pro- 
noncée surtout au niveau des bosses pariétales. La dure- 
mére ne présentait aucune lésion. Les vaisseaux des lobes 
postérieurs du cerveau étaient gorgés de sang et parti- 
culiérement les veines des circonvolutions cérébrales. La 
pie-mère était fortement injectée de sang ; de sorte que 
cette membrane avait une couleur d’un rouge extrême- 
ment foncé. Le cerveau, de même que le cervelet, n’offrait 
aucune altération. | 

Cavité de la poitrine. Le poumon droit occupait toute 
la partie latérale droite de la cavité de la poitrine, et à 
l'ouverture de cette cavité, il se présentait amplement 
aux regards. IL était d'une couleur rosée dans la plus 
grande partie de son étendue; en arrière une pelite par- 
tie de la substance avait une teinte un peu plus foncée 
et tirant sur le rouge-brun. 


— 325 — 


Le poumon gauche était refoulé dans la cavité gauche 
de la poitrine et ne s’offrait pas aux regards d'une ma- 
nière aussi évidente que le poumon droit. D'une teinte 
rosée dans une petite partie de sa face antérieure, le pou- 
mon gauche avait une couleur rouge-brun dans tout le 
reste de son étendue. 

Les poumons, le cœur et le thymus ayant été séparés 
du corps, après la ligature des gros vaisseaux et placés 
à la surface de l’eau froide de fontaine qui remplissait un 
baquet dans la profondeur de 9 pouces, ces organes, at- 
tenants entre eux, sont restés à la surface du liquide, où 
ils surnageaient de façon toutefois qu'une portion du 
poumon gauche s’enfonçait plus profondément dans l’eau 
que les autres organes. Déprimée au fond du liquide, la 
masse des poumons, du cœur et du thymus remontait 
rapidement au haut de l’eau dès qu’elle était abandonnée 
à elle-même. 

Les deux poumons réunis pesaient 3 onces et 47 gr. 
Ce qui donne pour le poids de ces organes comparé au 
poids total du corps de l'enfant, le rapport de 1:27 en- 
viron. 

Ces organes ayant été détachés du thymus et du cœur, 
ont continué à rester à la surface de l’eau et à surnager. 

Le poumon droit, séparé du gauche et placé seul à la 
surface liquide , a constamment surnagé et revenait 
promptement au haut du liquide après avoir été déprimé 
au fond du vase puis abandonné à lui-même. — Ce 
même poumon ayant été divisé à l'endroit d'union de ses 
3 lobes, chacun de ceux-ci a surnagé et s’est comporté 
dans l’eau comme l’organe entier. Partagé en 14 por- 
tions, toutes celles-ci, à part une seule, ont continué à 


— 326 — 


surnager et à revenir promplement au haut du liquide 
après leur dépression. En comprimant fortement entre 
les doigts, au-dessous du niveau de l’eau, les 13 por- 
tions du poumon droit qui surnageaient, on donna lieu 
à un dégagement de fines bulles d'air, qui formaient une 
sorte d’écume à la surface du liquide. Toutes ces mêmes 
portions du poumon replacées sur l'eau après avoir été 
soumises à la pression, se sont comportées avec le liquide 
de la même manière qu'auparavant. Il en a été de même 
lorsqu'on les a placées dans l’eau chaude à la tempéra- 
ture d'environ + 40° R. Les différentes sections ‘faites 
dans ce poumon avec l'instrument tranchant ont toutes 
donné lieu à un bruit de crépitation très-prononcé. Cette 
crépitation avait également lieu à la pression des doigts. 

Le poumon gauche, mis isolément au haut de l’eau, est 
descendu avec lenteur dans ce liquide, et a gagné le fond 
du vase sans s’y aplatir, une de ses extrémités continuant 
à flotter librement sous l'eau. — Les deux lobes de ce 
poumon, ayant été séparés l’un de l'autre, ils se sont 
comportés ainsi : le lobe supérieur a gagné lentement le 
fond du vase, le lobe inférieur a surnagé. Le lobe su- 
périeur ayant été partagé en 7 parties, six d’entre elles 
sont descendues au fond du vase, et une seule a surnagé, 
dans l’eau chaude comme dans l’eau froide; les 6 pre- 
mières portions de ce lobe du poumon ayant été fortement 
comprimées sous l’eau, il ne s’en est dégagé aucune bulle 
d'air. Le lobe inférieur du poumon gauche ayant été di- 
visé en 10 fragments, il a donné des signes manifestes 
de crépitation sous l'instrument tranchant et à la pres- 
sion. De ces 10 fragments de poumon, 8 ont gagné le 
fond de l’eau et deux ont surnagé dans l’eau froide et 


— 3217 — 
dans l’eau chaude, même après avoir été fortement com- 
primés. 

Le thymus avait une teinte rouge-brun foncée, et pe- 
sait deux gros et 18 grains. 

Le cœur était parfaitement sain. La valvule qui se 
trouve entre les deux oreillettes ne fermait pas compléte- 
ment la communication entre elles, ensorte qu'il restait 
du trou de Botal une ouverture qui donnait passage à 
l'extrémité d'une sonde de femme. Le canal artériel était 
amplement ouvert. 

Tous les organes contenus dans la cavité de l'abdomen 
étaient bien conformés. 

La manière dont les poumons se sont comportés dans 
l’eau, soit pendant qu'ils étaient attenant au cœur et au 
thymus, soit après avoir élé séparés de ces organes, in- 
dique que l'enfant a respiré après sa naissance. Il n’y a 
rien ici qui puisse infirmer les résultats de l'épreuve pul- 
monaire. Mais, d’un autre côté, on doit conclure aussi 
de la précipitation du poumon gauche au fond de l’eau, et 
de l’ensemble des expériences auquelles cet organe a été 
soumis, que si, comme il est prouvé, la respiration a eu 
lieu chez la petite fille dont il s’agit, cette respiration a 
été de courte durée, le poumon gauche n’ayant été péné- 
tré d'air que dans une partie de sa substance. 

Il résulte du poids de l'enfant, des dimensions de sa 
têle, de la bonne formation des ongles, de l’ossification 
avancée des os du crâne, que cet enfant était dans un 
état de maturité assez grande pour vivre de sa propre 
vie hors du sein de sa mère, et que s’il n’est pas arrivé 
complétement à la fin du 9° mois de la vie intra-utérine, 
il est né à une époque qui en était fort rapprochée. Sa 


— 328 — 


bonne conformation et l'absence de toute lésion organique, 
jointes à son degré de maturité, doivent faire conclure 
à sa viabilité. 

Il y a tout lieu de présumer , que la congestion san- 
guine qui existait au cerveau et qui a été indiquée plus 
haut, a été la cause de la mort de l'enfant dont il s’agit. 
Cette congestion cérébrale a été déterminée très-proba- 
blement par le trouble survenu dans la circulation fœtale, 
pendant la durée du travail de l'accouchement. Le mé- 
decin qui a assisté à la naissance de l'enfant, a fait con- 
naître qu'il s'était présenté dans la position des fesses, 
et qu'il avait fallu chercher les pieds pour terminer l’ac- 
couchement. 

M. le D' Borel ajoute quelques explications relatives 
à un fait mentionné dans son rapport, c'est que le pou- 
mon droit se trouvait pénétré d'une plus grande quantité 
d'air que le gauche; cette différence est due aux dimen- 
sions de la bronche gauche qui est plus longue et plus 
étroite que la droite et oppose par conséquent une plus 
grande résistance à l'introduction de l'air. 


M. le Dr Cornaz donne quelques détails sur la maladie 
nommée Hématophilie ou Diathèse hémorrhagique hé- 
réditaire. Ceux qui sont atteints de cette singulière affec- 
tion, et que les Allemands appellent Bluter, peuvent jouir 
de la meilleure santé et être très-robustes, mais aussitôt 
qu'on leur fait subir la moindre opération de nature à 
atteindre les vaisseaux, le sang coule avec une telle per- 
sistance que pendant des jours et des semaines tous les 
secours sont insuffisants pour arrêter l’hémorrhagie. La 
plus légère coupure, une application de sangsues ou de 
ventouses, l'extraction d’une dent, peuvent occasionner la 


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— 329 — 


mort. Cette maladie qui est plus fréquente en Allemagne 
que dans nos contrées, paraît se transmettre du père aux 
enfants, sans cependant atteindre les femmes. 

M. le D' Borel cite quelques personnes de notre pays 
qui ont été atteintes de cette maladie, entre autres une 
famille Valler, autrefois domiciliée à Auvernier. Plusieurs 
enfants appartenant à cette famille, et qui ont reçu les 
soms de M. Ferd. Dubois, ont fourni à ce médecin le su- 
jet d’un mémoire qu'il a publié il y a quelques années 
dans la Gazette médicale de Paris. 


Séance du 9 Janvier 1852. 


Présidence de M. L. CouLoN. 


M. le professeur ÆXopp fait une communication sur les 
télégraphes électriques; il fait d’abord l’histoire de la 
télégraphie, puis donne des détails sur la construction 
des télégraphes actuellement employés. 

La première idée du télégraphe électrique paraît re- 
monter à l'an 1636. On trouve dans un ouvrage de cette 
époque, intitulé : Deliciæ physicomathematicæ, un chapitre 
portant pour titre : « Comment deux individus peuvent 
communiquer l’un avec l’autre à distance au moyen de 
l'aiguille aimantée, » 

L'histoire des télégraphes se partage en cinq périodes, 
Dans la première, de 1774 à 1800, on emploie l’élec- 
tricité développée par le frottement et dégagée par des 
bouteilles de Leyde : le signal est donné par la déviation 
de l’électromètre d'ivoire. — Dans la seconde période, 
de 1800 à 1820, on emploie la pile à colonne de Volta 
pour produire l'électricité; le moyen indicateur est la 
décomposition de l’eau. Il faut autant de fils conducteurs 


— 330 — 


que de signes. — Dans la troisième période, de 1820 à 
1830, on substitue à la décomposition chimique, la dé- 
viation de l'aiguille aimantée par le courant. — Dans la 
quatrième période, de 1830 à 1837, le courant est pro- 
duit par des appareils d'induction : les signes sont tou- 
jours produits par l’action directe du courant sur l’aiguille 
aimantée. — Enfin dans la cinquième période, le courant 
n’agit plus directement, comme force motrice. Wheastone 
prend en 1837 son brevet d'invention du télégraphe élec- . 
trique en Angleterre. Son télégraphe a les défauts de ceux 
construits avant lui; mais le fait capital de l'invention 
consiste dans le mode de communication du mouvement 
qui met en jeu l'alarme. Le courant aimante par son 
passage un morceau de fer doux : cet aimant attire un 
autre morceau de fer qui empêchait l'action d’un ressort 
permanent. L’échappement devenu libre, un mouvement 
d’horlogerie met en mouvement le marteau qui frappe le 
timbre d'alarme aussi long-temps que le courant n’est pas 
interrompu. 

En 1840, Wheastone applique au télégraphe lui- 
même le principe si simple de son réveil. IL n'y a plus 
qu'un seul fil, le retour du courant se fait par la terre. 
Les signes ou lettres sont marqués sur un cadran. L'ap- 
pareil se compose d’une roue dont chaque dent porte une 
lettre et qui envoie autant de fois un courant d'induction 
sur la ligne qu'il passe de lettres devant l'employé en- 
voyant la dépêche. Chaque fois que le courant arrive au 
poste de réception, l'électro-aimant sur lequel s’enroule le 
fil de la ligne attire un morceau de fer doux; ce fer dé- 
gage l’échappement d’un mouvement d’horlogerie qui fait 
mouvoir une roue portant les lettres de l'alphabet. Autant 


Re 2 Sd 


— 331 — 


de lettres qui passent devant l'employé envoyant la dé- 
pêche, autant de lettres passeront devant l'ouverture du 
cadran du poste de réception, et la lettre qui reste fixe 
devant l'employé à la station d'envoi, restera fixe aussi 
sur le cadran de la station de réception, 

Toutes les modifications ultérieures faites au télégra- 
phe électrique, ne portent que sur la modification plus 
avantageuse du mécanisme et sur la substitution aux 
courants induits des courants produits par des fils à cou- 
rant constant. 

En décembre 1851 , M. Gloesener a proposé de sup- 


primer le mouvement d’horlogerie afin de rendre au cou- 


rant son effet dynamique. Il fait passer le courant alter- 
pativement sur deux bobines s’enroulant sur deux élec- 
tro-aimants qui seraient donc alternativement inertes et 
agissants. La plaque de fer doux est remplacée par un 
aimant repoussé par l'électro-aimant, momentanément 
aimanté et attiré par celui qui n’est pas aimanté dans ce 
même instant. Les mouvements de l'aimant permanent 
doivent avoir par ce moyen une régularité assez parfaite 
pour servir directement d'indicateurs, de signaux et de 
moteurs de l'appareil récepteur. Ce système est en essai 
en Belgique , la pratique pourra seule décider de son 
avantage. 

En France, les télégraphes sont la propriété de l’état. 
Le système employé est celui de Foy et Breguet à deux 
fils et à signaux dits télégraphiques, c'est-à-dire, sembla- 
bles à ceux des télégraphes aériens. Les lignes sont éta- 
blies le long des chemins de fer et les fils sont supportés 
par des poteaux. 

En Angleterre, le système établi est celui de Wheas- 
tone, à double aiguille; la vitesse est de 20 mots par 


— 332 — 


minute. Le service est fait par une entreprise particulière 
mise librement en rapport avec: le public. Les lignes 
aboutissant à Londres ont une étendue de 917 lieues. 

Aux Etats-Unis, tantôt les lignes suivent les chemins 
de fer, tantôt elles sont tracées à travers champs. Les 
fils sont supportés par des poteaux ou par des arbres ; 
souvent les fils revêtus de gutta-percha, traversent les 
rivières et l’eau salée sur d'assez grandes étendues. 

En Prusse, la plupart des fils sont enfouis sous terre 
le long des routes. 

Dans le système de Foy et Breguet, employé en France, 
le télégraphe d’une station (A) se compose de deux ap- 
pareils distincts. L'appareil récepteur qui reçoit les signes 
télégraphiques envoyés par la station B, et l'appareil ma- 
nipulateur qui envoie le signes à la station B. 

En France, les lignes sont établies le long des chemins 
de fer et les fils qui vont d’une station à l’autre sont por- 
tés par des poteaux de 3 à 4 mètres de hauteur à la dis- 
tance de 10 mètres les uns des autres. Ils sont fixés à 
ces poteaux par des supports isolant (ordinairement une 
clochette en faïence fixée au poteau par deux ailes laté- 
rales en faïence. Dans l’intérieur de la clochette, est fixé 
au sommet ou incrusté un fil se terminant par un petit 
anneau à travers lequel passe le fil de la ligne. A chaque 
distance d’un kilomètre se trouve fixé à un poteau un 
appareil tracteur qui permet de tendre le fil dans l’éten- 
due de ce kilomètre. 

Chaque télégraphe se composant de deux télégraphes 
distincts fonctionnant en même temps, il faut deux fils, 
et chaque fil avec ses appareils récepteurs et manipula- 
teurs posés aux stations À et B, forme un télégraphe 


— 333 — 


complet. Les deux télégraphes, l’un pour ainsi dire éta- 
bli pour l'œil droit et la main droite de l'employé, l’aatre 
pour son œil gauche et sa main gauche, fonctionnent 
ensemble et permettent d'obtenir une vitesse dans la 
transmission des signaux, presque double de celle qu'on 
obtient avec un seul télégraphe. 

Cette amélioration de vitesse est assez importante pour 
qu'en Angleterre on ne se serve plus que de l'appareil à 
double aiguille et à deux fils de Wheastone, de préfé- 
rence à son appareil à cadran et à fil uniques. 

L'appareil récepteur est renfermé dans une petite boîte 
en acajou, de deux décimètres de largeur sur autant de 
hauteur , portée solidement sur une table à écrire. 

Sur sa face antérieure est incrustée une plaque d'acier 
au milieu de laquelle est fixé un petit télégraphe dont la 
tige horizontale est fixe et les deux ailes mobiles, coloré 
en noir, et semblable aux télégraphes aériens. 

Chacune de ces ailes peut prendre huit positions diffé- 
rentes en se portant, après coïncidence avec la tige hori- 
zontale fixe, à une inclinaison de 459, à la position ver- 
ticale , à une inclinaison de 135°, de 1802, de 225°, de 
270° et 3609, ou à sa position initiale. 

L'aile de droite se meut de gauche à droite, celle de gau- 
che de droite à gauche. Les différentes positions des deux 
ailes donnent 48 signes, plus que suffisants pour tous 
les besoins de la correspondance. Chaque aile est mue 
par un mécanisme à part et desservie par son fil. Le fil 
de la ligne s’enroule sur une bobine entourant un élec- 


_tro-aimant en fer doux, qui par le courant acquiert Ja 


propriété d'attirer une petite plaque de fer doux écartée 
de l'aimant par un ressort, et qui dans la position ver- 


— 334 — 


ticale arrête l’échappement d’un mouvement d’horlogerie 
mue par un ressort. | 

Cette horloge porte au lieu d'aiguille, l'aile du télégra- 
phe qui se meut d'une manière uniforme, quand l'échap- 
pement est libre, comme l’aiguille d’une montre. Chaque 
fois que le courant passe dans la bobine, l'échappement 
devient libre et l'aile du télégraphe passe d’une position 
à la position suivante. 

Si donc on veut donner à l'aile de la station À une 
position déterminée, l'employé de la station B fera passer 
autant de fois le courant, que l'aiguille doit parcourir de 
positions intermédiaires pour arriver à la position finale. 
Cet envoi du courant se fait par l'appareil manipulateur. 
Devant la petite boîte enfermant l'aimant et le mouve- 
ment d’horlogerie du récepteur, un peu de côté pour ne 
pas gêner la vue pour l'observation des signaux à rece- 
voir, se trouvent placées deux petites colonnes en laiton 
portées par des supports isolants et solidement fixées à la 
table. Chaque colonne est un appareil distinct commu- 
niquant avec l'appareil récepteur de l’autre station, l'un 
servant à mouvoir l’aile gauche, l'autre l'aile droite. Les 
deux appareils sont identiques, seulement celui de gau- 
che se meut de droite à gauche, et celui de droite de 
gauche à droite. La colonne porte un tube de métal ho- 
rizontal terminé, dans sa partie faisant face à l'employé, 
par un plateau de cuivre jaune portant huit entailles cor-, 
respondant aux huit positions de l’aile du télégraphe ré- 
cepteur. Le tube horizontal est traversé par un cylindre 
massif qu'on fait mouvoir au moyen d'une manivelle en 
métal terminée par un manche isolant et s'appliquant au 
moyen d'un ressort contre la plaque entaillée. Elle porte 


— 339 — 


à la hauteur des entailles une dent unique qui sert par 
son introduction dans les entailles à fixer momentané- 
ment, d'une manière précise, la position de la manivelle. 
A l’autre extrémité du cylindre massif, est fixé un petit 
disque de métal entaillé dans sa surface par un canal 
courant autour du centre du disque, en courbe continue, 
sinusoïde ou serpentante, à une petite distance de ce cen- 
tre. Dans celte courbe est placé un bouton portant une 
tige verticale articulée avec lui. Cette tige porte dans son 
milieu une seconde articulation d'un hauteur invariable 
et fixé à la colonne par une petite barre parallèle au 
cylindre massif. Quand la manivelle tourne, le disque 
tourne avec elle, le bouton glissant dans le canal mu par 
le disque, est tantôt forcé de se rapprocher du centre du 
disque, tantôt forcé de s’en éloigner; ce mouvement d’as- 
cension et de descente de la première articulation de la 
tige verticale est transformé par la deuxième articula- 
tion en un mouvement de gauche à droite de l'extrémité 
inférieure de la tige, qui va de cette façon butter alterna- 
tivement en glissant sur une plaque d'ivoire contre deux 
plaques métalliques incrustées dans le pied de la colonne 
et que j'appellerai a et b. Le courant de la pile de la 
station s'introduit par une communication métallique 
dans le pied du manipulateur, parcourt cet appareil et 
se rend dans la tige articulée ; quand celle-ci butte con- 
tre la plaque a à laquelle est attaché le fil de la ligne, le 
courant est {ransmis sur la ligne; dans toute autre posi- 
tion, le courant est interrompu sur la ligne; quand la tige 
verticale butte contre la plaque b , le courant passe du 
premier manipulateur à celui de gauche, d'où il est en- 
voyé soit sur la ligne par le deuxième fil par une plaque 
a, soit en terre par une plaque b. 


— 336 — 


On comprendra d'après cela comment avec utie seule 
pile il est possible d'alimenter les deux manipulateurs 
d’une même station et comment les indications des mani- 
pulateurs sont traduites par le récepteur de la station B. 
Les courbures du eanal de la station À sont telles que 
toutes les fois que la dent de la manivelle passe ou s’ar- 
rête devant une des entailles ou dans l’une d'elles, le 
courant passe sur la ligne. Si donc ia manivelle de la 
station A et l'aile du télégraphe de la station B ont la 
même position, les positions subséquentes de l’une en- 
trainera celles de l’autre. Il faut remarquer que l'employé 
envoyant une dépêche, a devant lui le tableau des signes 
à transmettre. Au moyen de ces deux manivelles, ilimite 
ce signe, les deux manivelles figurent les deux ailes du 
télégraphe; il fait sauter ainsi la manivelle d’une entaille 
dans une autre entaille quelconque de la plaque du ma- 
nipulateur, en passant devant les entailles intermédiai- 
res pour s'arrêter un petit instant sur la position donnant 
le signal. Cet instant est très-court, car les signes se 
succèdent rapidement, toutefois là où un spectateur étran- 
ger à la manipulation du télégraphe ne peut apercevoir 
aucun temps d'arrêt, l'employé habitué à cette observa- 
üon l’apercçoit. 

Ayant eu l’occasion de profiter de l’obligeance de quel- 
ques habiles employés d’un télégraphe français pour voir 
souvent fonctionner la machine, je ne suis jamais par- 
venu à distinguer le signe donné des positions intermé- 
diaires que prenait l'aile pour passer d'une position à 
une autre. Pour montrer à des visiteurs le jeu de l’appa- 
reil, les employés sont forcés de ralentir considérablement 
la vitesse des communications en laissant séjourner pen- 


— 337 — 
dant un instant suffisamment long la manivelle dans l'en- 
taille qui doit produire le signe. 

Pour que les signaux soient certains, il faut que l'ap- 
pareil manipulateur de la station À ait la même position 
que l'aile de l'appareil du manipulateur de la station B; 
on y arrive en partant toujours du fermé réglementaire, 
c.-à-d., de la position des ailes ou manivelles repliées 
sur la ligne horizontale vers l’intérieur de l’appareï. Cette 
position indique la fin d’une dépèche et elle est par con- 
sèquent le point de départ de la dépèche suivante. 

Les dépêches sont transmises pas dizaines de signes, 
après chacune desquelles y a un fermé. Si par distrac- 
tion ou par trop grande vitesse de transmission, l’'em- 
ployé recevant les signes n’a pas bien pu lire un signal, 
il tourne immédiatement ses manivelles avec une grande 
vitesse ; il profite ainsi d’un intervalle pendant lequel le 
courant venant de À est interrompu, pour transmettre à 
l'appareil récepteur de la station A, le courant de sa pro- 
pre pile. Les ailes de l'appareil récepteur de A tournent 
aussitôt avec rapidité. L’employé de la station A arrête 
sa manipulation en produisant le fermé, pour attendre 
‘la demande ou l'avertissement de son collègue de la sta- 
tion B. Celui-ci lui dit d'aller moins vite ou de répéter 
la dernière dizaine, et enfin donne les renseignements 
nécessaires pour que la transmission se fasse régulière - 
ment. 

Mais avant que cela puisse se faire, il faut que les ap- 
pareils récepteurs de part et d'autre arrivent de nouveau 
au fermé. Les employés les y ramënent avec la main en 
faisant aller une pédale, c'est-à-dire, un petit fil rigide 
attaché à la plaque de fer doux arrêtant l’échappement 


PUL. DES SC. NATUR, T HI. 24 


— 338 — 


de l'horloge qui fait mouvoir l’aile de l'appareil récepteur. 
Ils produisent ainsi sous l’aide du courant, lemouyement 
de cette aile et la ramènent à la position de fermé règle- 
mentaire. 

M. Kopp donne ensuite des détails curieux sur l’édu- 
cation des employés et sur le degré remarquable de per- 
fectionnement et d'habileté auquel ils arrivent par une 
longue pratique. 


Séance du 23 Janvier 1852. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. le président dépose sur le bureau les ouvrages 

.suivants, qu'il a reçus d'Amérique : 

Notices historiques et statistiques sur l’histoire, la situation 
présente et l’avenir des peuplades sauvages des Etats- 
Unis de l'Amérique, recueillies par le bureau des af- 
faires relatives aux Indiens indigènes, et publiées par 
l'ordre du congrès du 3 mars 1837, par Hi Schoorl- 
craft, L. L. D., avec planches col. Part. 1r°. Phila- 
delphie 1851.— 1 vol. in-#°. 

Smithsonian Contributions to Knowledge. Tom. 2. in-4°. 
Washington 1851. Et Appendix I. IL IE — 1 vol. 
in-40, 

Annual Message et accomp. Docs. — 1849 à 1850. Part. 
L. IL LL. Cartes et planches. Communications (messa- 
ges) du président des Etats-Unis aux deux chambres 
du congrès au commencement de la {session du 

. 81° congrès. — De 1849 à 1850. — 3 vol. in-8°. 

Annual report of the commissioner of patents for the year 
1848. Rapport du commissionnaire des patentes, pour 
l’année 18#8. PI. — 1 vol. in-8°. 


— 339 — 


Rapport de Foster et Whitney sur la géologie et la to- 
pographie du Lac supérieur, 1850. 1'° part. Copper 
Lands. Avec fig. — 1 vol. in-8°. 

Proceedings of the american Association Proc. de l’associa- 
lion américaine pour l'avancement des sciences ; 4° 
réunion tenue à New-Haven en août 1850. Washing- 
ton 1851. — 1 vol. in-80. 

Rapports de la Société Smithsoniemne. Notice sur les biblio- 
thèques publiques des Etats-Unis de l'Amérique, par 
CS Jewett. Washington 1851. — Brochure in-8°, 

Quatrième rapport annuel des régents de la soc. Smithso- 
nienne, pour 1849. — Brochure in-8°. 

Rapport de T. Butler King sur la Californie. Washington 

-1850: — Brochure in-8°. 

Rapport par Benj. Apthorp Gould jun. sur la découverte 
de la planète Neptune. 1850. — Brochure in-8°. 

Essai sur la classification des némertes et des planaires, 
par CbS Girard. 1845. Tiré des Ann. des sc. naturel- 
les, 8° série, — Brochure in-8°. 

Rapport du secrétaire de la: guerre au sénat. Journal de 
marche du bataillon d'infanterie commandé par le 
lieutenant-colonel P. St-George Cook, de Santa-Fé, 
Nouveau-Mexique, à San-Diego, Californie. — D'oc- 
tobre 1846 au 30 janvier 48#7. — Brochure in-8°. 

Rapport du secrétaire de la guerre, sur une exploration 
du territoire de Minnesota, contrée située entre le Mis- 
sissipi et Sainte-Croix, par le cap. Pope, avec une 
carte. Mars 1850. — Brochure in-8°, 

FRapport du rev. R. R. Gurley, chargé par le gouv. d'ob- 
tenir des informations sur. Liberia, colonie fondée au 
cap Palmas sur les côtes occidentales de l'Afrique. 
Sept. 1850. Avec carte et planches. — Brochure 8°, 


— 340 — 


Bulletins de l'académie des sciences naturelles ; pag. 117 
à 200. Avec 6 pl. col. d'oiseaux de l'Amérique du 
Nord. — 3 livraisons in-8°. 

Rapport du secrétaire de la guerre sur une reconnais- 
sance des routes depuis Sant-Antonio à El Paso. 
Washington 1850. Avec planches et cartes. — 1 vol, 
in-8°. 

Appendix au vol. THIS des Smithsonian Contributions to 
Kuowledge. Contenant les éphémides de la planète 
Neptune, par C. Walker, pour l'année 1852. — Bro- 
chure in-4. 

Deux cartes du Lac supérieur. 


M. le Dr de Castella communique une lettre que lui a 
adressée M. le Dr Rabn, et par laquelle il est prié de ré- 
pondre aux questions suivantes : 

1° Quel est l’âge ordinaire où l’un et l’autre des deux 
sexes se marient dans votre canton ? 

20 Dans quelles proportions sont à la population les 
mariages, naissances et décès ? 

30 Les mères nourrissent-elles elles-mêmes dans votre 
canton, sinon par quel genre de nourriture remplace-t-on 
le lait maternel? 

4° À quel âge les enfants sont-ils ordinairement se— 
vrés ? 

5° Dans quelle proportion les enfants illégitimes.sont- 
ils au légitimes ? 

6° Y a-t-il beaucoup de femmes qui soient enceintes 
au moment de leurs noces? 

7° Quel est environ le nombre des enfants issus d’un 


mariage ? 


— 341 — 


8° Des pratiques sont-elles employées dans votre can- 
ton pour diminuer la fécondité ? 

La Société pense que la réponse à une partie de ces 
demandes existe dans les tableaux indiquant le mouve- 
ment de la population du pays de Neuchâtel, publiés par 
M. de Montmollin père, dans le 12° volume des mémoires 
de la Société ; pour obtenir des documents plus récents, il 
faudrait s'adresser à la direction de l'intérieur; et quant 
aux questions qui sont du domaine de la médecine pro- 
prement dite, la Société pense que MM. les médecins sont 
seuls compétents pour y répondre. 


M. le D'Cornaz lit un mémoire du D'W.-White Cooper 
sur l’opération de la cataracte, entreprise avec succès sur 
des ours du jardin zoologique de Londres, après les avoir 

soumis à l’action du chloroforme. — A cette occasion, 
MM. de Castella et Borel indiquent plusieurs cas où le 
cristallin engagé dans la chambre antérieure de l'œil a 
été complètement résorbé au bout de six mois. 


M. Borel rapporte, que chez une femme qui, un grand 
nombre d'années avant sa mort, avait subit l'opération 
de la cataracte, il retrouva à l'autopsie le cristallin im— 
parfaitement reproduit. 


M, Cornaz lit une note sur le nombre considérable 
d’aliénés qui se présentent dans les établissements de ré- 
clusion du système cellulaire. 


M: le président présente à la Société un morceau de 
papier jaune qui servait de couverture aux nombreuses 
livraisons d'un ouvrage scientifique , et qui brûle avec 
déflagration, mais sans flamme, dès qu'une étincelle l'a 
atteint. 


— 342 — 


M. Cornaz entretient la Société des relations qui exis- 
tent entre certaines maladies du cœur et des reins, et 
diverses affections amaurotiques des yeux. — M. Lan- 
douzy a signalé déjà la coexistence de la maladie de 
Bright, et d’un état d'amaurose ou d'amblyopie : M. Bou- 
chardat n’a pas observé cet affaiblissement de la vue au 
début de la glucosurie ou diabète sucré, mais seulement 
lorsque l’économie entière était déjà fortement débilitée, 
et le considère plutôt comme un fait exceptionnel. Il l'a 
vu aussi se manifester dans deux cas d’hippurie et un 
cas de benzurie. Les auteurs anglais ont observé le même 
fait dans un cas d'oxalurie. M. Bouchardat chercherait 
la cause de ces affections dans le système nerveux, tandis 
qu’en général on voit dans l’albuminurie et le diabète 
sucré une affection générale de l'organisme. Le fait pra- 
tique, c’est que tout affaiblissement de la vue doit attirer 
l'attention du médecin sur la composition chimique des 
urines, 


Séance du 5 Février 1852. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. Vouga annonce qu'il y a lieu d'espérer qu’une des 
questions les plus importantes de la géologie et de la pa- 
léontologie ne tardera pas, si ce n’est à être résolue 
complétement, du moins à être éclairée. En effet, l'aca- 
démie des sciences de Paris décernera en 1853 un prix 
de 3000 fr. à l’auteur du meilleur mémoire sur la ques- 
tion suivante : L'apparition des espèces animales à la 
surface du globe a-t-elle été successive ou contempo- 
raine? En d’autres termes : Y a-t-il eu à différentes re- 


— 343 — 


prises à la surface du globe destruction totale de la vie, 
et apparition de nouveaux êtres organisés différents des 
types détruits : ou bien, les animaux actuels descendent- 
ils par voie de filiation directe des animaux antérieurs 
qui se seraient modifiés. 


M. Vouga annonce que les recherches modernes sur le 
développemennt des Helminthes ont démontré à plusieurs 
observateurs que ces parasites paraissent avoir des géné- 
rations alternantes, Selon M. van Beneden de Bruxelles, 
_ les types décrits comme des Cystoïdes ou Hydatides ne 
seraient que le jeune âge d'espèces qui plus tard se mo- 
difient et deviennent des Ténioïdes. Le même membre rap- 
porte que MM. Delafond et Gruby qui, depuis long-temps 
s’occupent des Helminthes vivant dans le sang des ani- 
maux, ont trouvé dans les gros vaisseaux du chien des 
filaires de 14 à 21 centimètres de longueur, indépendam- 
ment de cellés qui sont microscopiques et répandues dans 
tous les vaisseaux. Ces observateurs ont reconnu que 
cette propriété vermineuse du sang existait en général 
chez un chien sur 25, et qu’elle était susceptible d’être 
transmise aux descendants , soit par le mâle, soit par la 
femelle. Dans le premier cas, les mâles seuls sont vermi- 
neux, dans le second, les femelles seules le sont. 


Cette communication amène M. Coulon pére à parler 
des figures qui se présentent sur le champ de la vision 
chez l’homme. Il fait passer le dessin d’une de ces figures 
qu’il voit, depuis plusieurs années, dans certaines circon- 
stances, et sans qu’elle paraisse changer de forme. M. 
Maunoir, qu'il a consulté à ce sujet, l’attribue à l'exis— 
tence d'un lambeau vasculaire dont l'extrémité flotte dans 


— 344 — 
l'intérieur de son œil. Cette communication provoque 
une discussion entre les membres présents sur l’origine 


des mouches volantes, scotômes, nuages et autres formes 
qui se manifestent dans le champ visuel. 


M. le professeur Ladame présente une petite fiole qui 
lui a été envoyée de Morat, remplie d’une huile transpa- 
rente incolore et presque inodore. L'inventeur de ce li- 
quide prétend qu'il ne peut se figer, qu'il n’attaque en 
aucune façon le laiton, et que des montres dont le mé— 
canisme en a été imbibé 5 ans auparavant, marchent 
encore parfaitement. M. Ladame propose d'envoyer au 
nom de la Société quelque peu de cette huile à quelques 
horlogers distingués des Montagnes , afin qu'ils vérifient 
ces propriétés, qui, si elles existent, en feront une sub- 
stance très-précieuse pour l'horlogerie. 


M. Wald décrit une nouvelle machine à fabriquer les 
eaux gazeuses qu'il a vu fonctionner à l'exposition de 
Londres et qu'il vient de recevoir de M. Savaresse à Paris. 
Cette machine présente de notables avantages sur toutes 
les pompes à gaz encore en usage pour la fabrication des 
eaux gazeuses, surtout au point de vue de l’économie de 
force et de la pureté du gaz acide carbonique qu’elle est 
destinée à faire dissoudre dans l’eau. M. Wald peut en 
deux heures, avec un seul ouvrier, livrer 40 bouteilles 
d'eau gazeuse en employant 4 livres d'acide sulfurique et 
4 livres de blanc de Troyes. 

Cette machine ce compose : 1° d'un grand vase en 
cuivre doublé en plomb de la forme d'une bouteille à fond 
rond. Ce vase a trois ouvertures, l’une supérieure desti- 
née à l'introduction de la craie pulvérisée et renfermée 


— 345 — 


dans des cartouches de papier, la seconde latérale permet 
l'introduction de l’eau acidulée, et la troisième inférieure 
l'expulsion du sulfate de chaux produit pendant l'opéra- 
tion. Toutes ces ouvertures peuvent être hermétiquement 
fermées au moyen de vis ou écroux. Un agitateur est 
contenu dans ce vase, et le mouvement qu'on lui imprime 
de l’extérieur, règle la quantité de craie qui entre en 
contact avec l’eau acidulée, et par conséquent la quantité 
de gaz qui peut se dégager dans un instant donné. Ce 
vase générateur du gaz communique par un tube d’un 
calibre intérieur très-fin, avec un premier vase latéral 
plus petit et de forme cylindrique; à la suite de ce pre- 
mier vase laveur, dans lequel on introduit du carbo- 
nate de soude en dissolution, il en existe un second sur- 
monté d'un manomètre indiquant la pression du gaz à 
l'intérieur de l'appareil. — Ce n'est qu'après avoir tra- 
versé ces deux vases laveurs que le gaz peut arriver en 
contact avec l'eau qui doit le dissoudre. Cette eau est 
contenue dans un long cylindre de cuivre pouvant oscil- 
ler sur deux bras, à la manière d’un canon sur son affüt. 
Les mouvements d'ostillation imprimés à ce cylindre 
à-peu-près rempli d'eau, forcent le gaz, qui y arrive par 
un canal très-fin percé dans un des bras et muni d'une 
soupape, à traverser plusieurs fois la masse d’eau entière 
et à s’y dissoudre. L'eau chargée de gaz peut s'échapper 
par un canal creusé dans le second bras du cylindre, et 
arriver par un tube fin dans la bouteille qui doit la re 
cevoir. Une disposition très-ingénieuse de la machine à 
boucher, permet d'introduire et comprimer le bouchon 
sans perte aucune de gaz ou du liquide. — Toutes les 
parties de l'appareil peuvent être mises en communica- 


— 346 — 

tion au moyen de robinets, qui, ouverts, permettent le 
passage du gaz, et, fermés, l’interceptent. La pression 
dans l’intérieur de l'appareil peut être élevée à 15 at- 
mosphères au maximum. Il est du reste fort peu volumi- 
veux, et présente de nombreuses dispositions accessoires 
qui en favorisent le jeu et le nettoyage; il n’exige qu'un 
seul ouvrier qui peut alternativement charger l'appareil, 
le surveiller, imprimer le mouvement oscillatoire et en- 
suite boucher les bouteilles. — Les avantages de cette 
machine sur les anciennes sont évidents et considérables. 
Les produits sont excellents et le gaz, très bien dissous 
dans l'eau, ne lui communique pas ce goût désagréable 
et acide, inhérent aux eaux gazeuses préparées au moyen 
de gaz mal lavé, qui entraîne toujours de l'acide sulfu- 
rique. 


Séance du 19 Février 1852. 
Présidence de M. L, CouLow. 


M. le président dépose sur le bureau le 7€ volume des 
mémoires de l’académie de Liège. 

Un exemplaire des Bulletins de la société de Berne. 

M. le président lit une lettre de M. Chapuis, pharma- 
cien à Boudry, par laquelle il annonce dans les environs 
de Troiroz, l'existence de plusieurs grottes qui paraissent 
renfermer des ossements, et qu’il se propose d'étudier. 


M.Wald fait en présence de la Société une expérience 
intéressante sur le collodium. En ajoutant à une petite 
quantité de ce liquide de l’eau bouillante, l’éther qui te- 
nait en dissolution le fulmi-coton se vaporise très-rapi- 
dement en abandonnant une masse blanche composée 


— 347 — 


de fibres très- déliées et entrecroisées. Desséchée cette 
substance a l'apparence du fulmi-coton avant sa dis- 
solution dans l’éther. Examinées au microscope par 
M. Vouga, ces fibres ne lui ont présenté aucune trace 
de structure, aucun des caractères de celles du coton- 
poudre, dans l’intérieur desquelles on découvre l’exis- 
tence d’un canal rempli d'une masse granulée et opâque. 


M. le professeur Kopp annonce qu'il a reconnu que 
la décomposition spontanée de l’acide hydriodique peut 
être facilement empêchée par l'introduction d’une parcelle 
de phosphore dans le vase qui le contient. Cet acide qui, 
sous l'influence de l’oxigène de l'air, se colore en violet 
par la séparation d'iode qui se dissout dans la liqueur, 
reste complétement incolore après l'addition du phos- 
phore. 


M. Coulon père présente à la Société la traduction 

qu’il a faite d’un mémoire publié en anglais par M. Agas- 
siz dans le 48€ volume des Mélanges religieux. L'auteur 
y traite la question de la distribution géographique ac- 
tuelle des animaux à la surface du globe, et en tire des 
* conséquences sur leur mode d'apparition. — La Société 
en demande la lecture, et l'écoute avec beaucoup d’inté- 
rêt, — Nous présentons très-sommairement ici les prin- 
cipaux faits qui y sont rapportés et les conclusions que 
l’auteur en tire. 
Les animaux et les plantes sont répartis dans des pro- 
— vinces zoologiques, complétement séparées et caractérisées 
chacune par des types différents; certaines espèces sont 
même renfermées dans des limites très-étroites et ne se 
retrouvent nulle part aïlleurs. 


— 348. — 


L'idée d'un centre unique de création, qu'on prétend 
appuyer de l'autorité de la Bible, ne rend pas compte de 
ce qui existe. Moïse n'a jamais voulu dire que l’homme 
et les animaux eussent été créés sur un seul et même 
point, et que les animaux actuels, de même que tous les 
hommes, provinssent d'une paire primitive unique. 

L'étude des animaux fossiles et des faunes qui se sont 
succédées à la surface du globe, ne nous porte, pas plus 
que l'étude de la faune actuelle, à admettre qu'à chaque 
époque géologique il y ait eu un centre unique de créa- 
tion et de distribution des animaux, et surtout que ces 
animaux provinssent d’une seule paire. | 

Nous trouvons dans les époques géologiques anciennes, 
que la localisation des animaux était beaucoup moins 
spéciale que dans les époques récentes, et les fossiles an- 
ciens présentent la plus grande uniformité dans leurs 
formes, quelle que soit leur provenance. 

Les influences physiques, les circonstances extérieures, 
les climats, ne peuvent avoir une influence modificatrice 
profonde sur les types; et ce que sont les animaux ac- 
tuels, au point de vue de leurs caractères, mœurs, ete., 
ils l'ont toujours été; de sorte qu'il est inadmissible qu'une 
première paire de carnivores ait pu exister simultanément 
avec une première paire d'herbivores, d'où 1l suit que 
lors de l'apparition des carnivores les herbivores devaient 
être déjà très-nombreux. 

La distribution géographique des poissons d'eau douce 
surtout prouve que les espèces ont été créées primitive- 
ment dans toute l'étendue des régions où nous les trou- 
vons maintenant, et qu'il y a eu création multiple de la 
même espèce dans des bassins différents, vu l'impossibilité 
de l’émigration de l’un dans l'autre. 


— 349 — 


Tous les animaux, quels que soient du reste leurs 
moyens de locomotion, tendent à rester dans les endroits 
où ils sont nés et non pas à s'en éloigner beaucoup; 
ceux même que leur instinct porte à changer de climat 
selon les saisons, reviennent aux lieux d’où ils sont 
partis. 

L'homme et les animaux domestiques qu'il entraîne 
à sa suite, font seuls exceplion et sont cosmopolites. 
Cette limitation des régions habitables pour telle ou telle 
espèce, s'applique aussi aux genres, aux familles et même 
aux ordres. 

Au point de vue de la supériorité relative des êtres, 
nous observons divers faits très-importants : 1° c’est que 
les plus imparfaits dans chaque groupe, sont ceux qui 
sont destinés à vivre dans l’eau; 2° qu'ils sont d'autant 
plus imparfaits qu'ils habitent des profondeurs plus con- 
sidérables; 3° que parmi les animaux aériens, les plus 
élevés sont ceux qui habitent les régions chaudes ou tes 
bas fonds, tandis que les moins parfaits sont ceux qui 
habitent les montagnes élevées et les hautes latitudes. 

Il existe à la surface du globe des faunes ou provinces 
zoologiques parfaitement caractérisées, renfermant. des 
espèces propres qu'on ne retrouve nulle part ailleurs. 
Les limites de ces faunes correspondent assez exactement, 
soit qu'on parte des mammifères, des oiseaux, des rep 
tiles et même des poissons, pour les caractériser. — Les 
faunes septentrionales opposées aux faunes tropicales, 
sont surtout caractérisées par le petit nombre des types 
spécifiques, l’uniformité et le grand nombre des indivi- 
dus de chaque espèce; tandis que dans les dernières, 
nous trouvons les types beaucoup plus diversifiés et les 
individus de chacun d'eux moins nombreux. 


— 9330 — 


Les mammifères fossiles de la Nouvelle - Hollande 
étaient déjà en partie des Marsupiaux, type caractéristi= 
que de la faune actuelle de cette immense île; de même 
que les terrains tertiaires du Brésil renferment déjà des 
Edentés, qui caractérisent dans la création actuelle la 
faune brésilienne; ainsi la localisation de ces types est 
restée la même dans des époques géologiques succes- 
sives. 

La distribution des races humaines à la surface du 
globe, est en rapport avec les faunes, et ce fait corrobore 
encore l’idée d’une création simultanée de plusieurs paires 
dans le genre humain. 


Séance du 5 Mars 1852. 


Présidence de M. L. CouLow. 


M. le professeur Kopp rend compte d'un travail-très- 
étendu de M. Wertheim, consigné dans les Annales de 
chimie et physique, année, 1851. 

Ce physicien a étudié les lois de la propagation du 
mouvement dans les corps; il a de nouveau constaté qu'il 
y.a deux espèces d'ondes : des ondes longitudinales.et des 
ondes transversales. Poisson avait démontré que le rap- 
port des vitesses de propagation des premières, à celles 
des secondes était de V3. M. Wertheim, en s'appuyant 
sur les recherches récentes qui ont été faites, sur les va- 
riations de dimension des fils et des barres métalliques 
produites par des poids et des tensions, démontre que pour 
faire accorder les formules théoriques avec les résultats 
de l'expérience , le rapport de Poisson devra être porté 
de V3 à 2. 


— 351 — 


Dans un second mémoire , le même physicien recher- 
cheles lois générales des vibrations de l’air dans un espace 
limité. Ses expériences ont été faites sur un grand nom- 
bre de tuyaux, boites et sphères de verre, de gutta-percha, 
de divers métaux et de bois, avec des embouchures de 
natures diverses. 

IL arrive aux conclusions suivantes : 

Soient L la longueur, L£ la largeur, H la hauteur d’un 
tuyau partiellement fermé à ses extrémités, S sa section 
droite, S1 S2 les sections des ouvertures, V la vitesse de 
son, n le nombre des vibrations, on a 


V Ve /S: 
DL EG+EG Ge (Len) 1 — ss 


C:=C (LE+H) | E4À) 


Pour des tuyaux ouverts la constante C — 0,187. 

Pour des tuyaux fermés la constante varie avec la sub- 
stance du couvercle. Cette formule embrasse comme cas 
particuliers les tuyaux d'orgue, soit ouverts soit fermés; 
en s'en servant , les constructeurs d’orgues peuvent sans 
tâtonnements, déterminer les dimensions des tuyaux et 
des ouvertures nécessaires pour obtenir un ton déterminé. 
D'après cette formule, le son doit baisser indéfiniment à 
mesure que l'on rétrécit les ouvertures, mais en réalité 
cela n'arrive que pour les tuyaux ayant une ouverture à 
leur centre. Outre le son longitudinal ordinaire, on en- 
tend souvent un son plus grave d’un timbre particulier. 
Si l'on rétrécit l'ouverture , les deux sons baissent à la 
fois. Ces deux sons ne sont pas harmoniques, leur in- 
tervalle est compris entre 1,41 et 1,46. 


— 352 — 


La loi des volumes semblables est une conséquence de 
la formule citée. Les autres lois énoncées par divers au- 
teurs ne paraissent être qu'approximalives. 


M. Æopp fait la remarque suivante sur les approximä- 
tions en arithmétique. Dans les calculs relatifs à la phy- 
sique, l’'approximation du résultat est importante à déter- 
miner. Or la question de calculer une quantité, à moins 


d’une unité d’un certain ordre décimal près, peut s’en- 


tendre de deux manières : ou bien on demande d’assignér 
deux nombres décimaux consécutifs qui comprennent 
entre eux la quantité proposée, ou bien on demande deux 
nombres quelconques décimaux ou fractionnaires qui ne 
différent que d'une unité de l’ordre déterminé et com- 
prennent entre eux cette même quantité. Dans le premier 
cas, on ne peut dire d'avance jusqu'où il faut pousser le 
caleul ; il peut arriver qu’en s’arrélant aux millièmes, 
par exemple, on n'ait pas une approximation à un mil- 
lième près; dans le second cas seulement, on peut fixer 
à l’avance les opérations qui conduisent au but. Un 
exemple rendra la chose plus claire. 
Soit À calculer à ‘/10 près la somme 
= VU+HVB EVE 
on à 10 z — 40 VAI + 40 V3 + 10 VA5 

el pour avoir 10 x à une unité près, on calculera cha- 
cune des parties à ‘}3 près; 

or 40 VA4 — V3100:; 1100 x 9 — 9900; V 9900 à une unité 

près — 99. 
done 40 V1 = + #, « étant <7‘/: 


10 VAR +6 2 OV = +75 Ban Ch 


— 393 — 


108 +116 323 
PES pe a+ Br 


Si l'on n’exige pas quele résultatsoit sous forme décimale, 
323 
750 
ne ru pas si cette condition est nes car on aurait 
10 +2 ST us T et l’on ne sait pas si 2 a +p +yest 
encore A A. 
Ces deux communications provoquent quelques obser- 
vations de la part de M. le prof. Ladame. 


ainsi 40% = 


22 est la valeur à un 10% près; mais le calcul précédent 


M. Cornaz lit un mémoire de M. Paul Guébhard, dans 
lequel l’auteur rend compte de la méthode employée par 
deux pêcheurs de la Bresse, dans les Vosges, MM. Gé- 
hin etRémy, pour repeupler de truites les rivières. Quoi- 
que plusieurs auteurs anciens et modernes , tels que Gol- 
stein en 1758, Jacobi, de Ham, Spallanzani, Rusani, 
Agassiz et Vogt (1842), eussent étudié déjà le mode de 
reproduction des poissons, et reconnu que leurs œufs ar- 
tificiellement fécondés , c'est-à-dire, mis en contact avec 
ja laitance du mâle, sont aptes à se développer, aucun 
cependant n'avait, avant MM. Géhin et Rémy, expéri- 
menté en grand et obtenu des résultats aussi importants. 
Ces messieurs, quoique ignorant ce qui avait été fait 
avant eux dans cette direction, frappés de la diminution 
progressive de la truite dans le ruisseau de la Bresse, 
étudièrent avec sagacité et persévérance les manœuvres 
de ce poisson à l’époque du frai, le mode de déposition 
de ses œufs, les précautions qu'il prend pour les empé- 
cher d’être entraînés par les hautes eaux, etc.; si bien 
qu'ils arrivèrent aux résultats suivants. 
BULL. DE LA SOC. DES SC. NAT. T. I. 


Lea 
[54 


— 304 — 

La truite de rivière (salmo fario) fraie en novembre, 
dans les endroits des rivières où le fond est graveleux et 
le courant modéré. On voit alors les femelles, appliquées 
au fond et presque immobiles, repousser le gravier de 
côté et creuser une espèce de bassin ou de trou qui peut 
avoir deux et trois pieds de diamètre et un demi-pied 
de profondeur. Cela fait, plusieurs femelles déposent leurs 
œufs dans les anfractuosités du fond, où ils s’attachent 
par une espèce de mucosité qui les recouvre. Les mâles 
s’approchent alors et répandent sur les œufs leur laitance, 
les fécondent, puis aident aux femelles à recouvrir le 
trou , en rejetant le gravier accumulé sur les côtés. Les 
truiles paraissent n'obéir dans cet acte qu’à un instinct 
aveugle, et ne pas discerner les endroits qu’un abaisse 
ment des eaux mettra à sec, ou dont une crue subite en- 
lèvera le gravier, de sorte qu'une grande partie de leur 
frai se trouve ainsi détruite ou entraînée avant l’éclosion. 
Espérant parer à cette destruction des- œufs, MM. Géhin 
et Rémy prennent les femelles et les mâles à l'époque du 
frai, compriment légèrement le ventre des femelles, en 
font sortir les œufs au nombre de 800 environ par fe- 
melle, et les reçoivent dans un vase rempli d'eau. Ces 
œufs sont alors d’une couleur rougeûtre, et comme ma- 
culés de sang. La laitance des mâles, exprimée de la même 
manière, est alors mise en contact avec les œufs en agi- 
tant le mélange dans le vase : sous son influence les œufs 
deviennent opalins. On renferme alors ces œufs fécondés 
dans des boites de fer-blanc de 15 à 20 centimètres de 
diamètre, dont le fond est recouvert de gravier, et les pa- 
rois percées de trous assez fins pour que, lors de l’éclosion, 
le petit poisson ne s’y engage pas; on les introduit dans 


— 399 — 


un trou creusé dans le gravier du ruisseau en un en- 
droit propice, et on les recouvre d’une couche de gravier. 
M. Guébhard propose, pour éviter encore mieux l'entrée 
de la vase dans la boite contenant les œufs, de renfermer 
celle-ci dans une seconde de dimension plus forte, et de 
remplir l'intervalle de gravier fin. Ces boites ne doivent 
être ensevelies qu’à quelques pouces au dessous du fond, 
car il faut que l’eau puisse se renouveler dans l’intérieur. 
Le développement de l'œuf dure quatre mois, et l’éclo- 
sion a lieu en mars ou avril. On ouvre alors les boites 
et on lâche, dans les endroits calmes et peu profonds, 
l’alevin, qui porte encore pendant six semaines sa vési- 
cule vitelline; à mesure qu'il s'accroît et devient plus 
fort, il descend et pénètre dans les endroits plus profonds 
et où le courant est plus fort, et se nourrit alors des pe- 
tits crustacés, gamarres ou crevettes, si abondants dans 
les ruisseaux. 


M. Guëébhard rapporte dans son travail plusieurs faits 
intéressants tirés d’un mémoire de M. Lamiral, publié 
en août 1851 dans les bulletins de la Société d'Emula- 
tion, sur le transport possible des œufs fécondés de 
saumon à de grandes distances, et sur celui des petites 
anguilles de montée prises à l'embouchure des rivières, 
et qu’on peut facilement transporter vivantes dans des 
tonneaux avec de la mousse humide, et enfin sur l’avan- 
tage qu'il y aurait à empoissonner d'espèces marines les 
rivières d'eau douce; car l'expérience a prouvé que l’on 
peut faire vivre dans l’eau douce l’alose, l’éperlan, le ca- 
bliau, le congre, le carlet, le hareng et la sardine; 
M. Bottsching de Hammerschmidt y a même naturalisé, à 


— 356 — 


l'aide de précautions convénables, la sole, la limande, le 
turbot, les moules, les huîtres, ‘etc. 


M. Nicolet présent à la séance, annonce que M. son frère 
a répété avec succès les expériences des pêcheurs de la 
Bresse, dans la Suze, et a obtenu des résultats favorables ; 
il dit un mot de l’empoissonnement des étangs de nos 
hautes vallées, pratiqué déjà par les moines de Mont- 
Benoit, et répété avec succès dans ces derniers temps 
dans les étangs des Crosettes et de la Chaux-d’Abel, où 
50 tanches et 50 carpes se multiplièrent considérable- 
ment en quelques années. 


M. Vouga voudrait voir les gouvernements riverains 
prendre des mesures propres à empêcher la destruction 
de la traite saumonée dans notre lac, où elle devient de 
plus en plus rare. Il attribue cette diminution à la quan- 
tité de truites que l’on prend annuellement dans les pé- 
cheries de l’Areuse, et surtout de l’Arnon, où on les 
arrête à la montée avant qu’elles aient pu frayer. 

A l’époquedes travaux de M. Agassiz sur le dévelop- 
pement de l’œuf du poisson, le gouvernement de Neu-— 
châtel avait engagé les fermiers de la pêche à exprimer 
les œufs des femelles, et à les rejeter à l’eau après les 
avoir agités dans un vase avec les laitances des mâles, 
mais jamais les fermiers ne voulurent s’y astreindre, et 
eussent-ils même pris ces précautions, les œufs fécon- 
dés, abandonnés au courant, dans des conditions si dif- 
férentes de celles sous l'influence desquelles ils se déve- 
Joppent naturellement, auraient été en majeure partie 
‘détruits ou rendus inféconds. Il y aurait un moyen d'ar- 
rêter cette destruction de la truite saumonée : ce serait 


— 391 — 
d'abolir pour quelques années les pêcheries de l'Areuse 
et surtout de l’Arnon, dont le produit réuni est presque 
insignifiant , et n’atteint pas même deux mille francs par 
an. On ne devrait en tout cas permettre la capture du 
poisson qu'après la terminaison complète de l'acte du 
frai. Il serait très-intéressant aussi de répéter les expé- 
riences de MM. Géhin et Rémy, sur les œufs de cette es- 
pèce de grande taille (salmo trutta). 

M. Vouga décrit ensuite les étangs de Wolfsbrunnen, 
près de Heidelberg, où le propriétaire élève les truites 
de rivière prises dans les ruisseaux voisins. Il y a quatre 
étangs renfermant chacun des truites de même taille à- 
peu-près, et alimentés par un petit ruisseau qui descend 
du Kaiserstuhl. On nourrit les truites de poissons blancs, 
qu'on amène morts du Necker. Les grenouilles, très- 
nombreuses dans le voisinage des étangs, leur servent 
aussi de pâture. Les truites de plus forte taille renfer- 
mées dans l'étang supérieur atteignent le poids de cinq à 
six livres. 


M. Cornaz annonce que M. Chatin a découvert dans 

l'atmosphère de l'iode normal, 4000 litres en renferment 
*/500 de milligramme. L'air en passant dans le poumon 
y abandonne “/5 de son contenu en iode, de sorte qu’en 
admettant que 8000 litres d'air traversent en 24 heures 
le poumon d'un adulte, nous absorberions par cette voie 
1/250 de milligramme diode, c'est-à-dire autant qu'il 
en est contenu dans 2 litres d’eau iodée. 
Le même membre rend compte de l'effet comparé de 
l’oxide, du citrate et du sulfate de magnésie, et annonce 
l'emploi de la résine de scammonium comme drastique 
aux doses de 56 centigrammes à un gramme. 


— 358 — 


Séance du 19 mars 1852. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le Dr Borel lit un rapport médico-légal au sujet d’un 
accouchement clandestin sur les lieux d’aisance, suivi de 
la chute de l'enfant dans la fosse, d’où il a été retiré 
privé de vie. 

De l’ensemble des faits rapportés, M, le D' Borel con- 
elut ; 

19 Que l'enfant trouvé dans la fosse d’aisance est bien 
celui dont la fille B. est accouchée, qu'il est né à terme 
ou du moins à une époque très-rapprochée du terme de 
la grossesse. 

20 Que l'enfant a respiré après sa naissance, mais que 
cette respiration a été imparfaite et de courte durée, l'air 
n'ayant pénétré que dans le lobe moyen et dans une 
faible portion du lobe inférieur du poumon droit. 

3° Les petites échymoses observées dans l épaisseur du 
cuir chevelu tendent à confirmer le fait que l'enfant a 
vécu quelques instants après sa naissance. Leur peu d'é- 
tendue, leur forme et leur position, doivent faire pré- 
sumer qu'elles n’ont pas été le fait du travail de l’accou- 
chement, mais bien le résultat d’une contusion due selon 
toute probabilité au choc de la tête contre des corps 
durs, pendant la chute de l’enfant dans le canal des lieux 
d’aisance, chute qui donne une explication toute simple 
de sa mort, soit qu’elle ait été causée par l’ébranlement 
qui a accompagné cette chute, soit que le nouveau-né ait 
été asphyxié dans le liquide où on l’a trouvé submergé. 

L'absence de tuméfaction et d'échymoses considérables 
aux téguments de la tête, doit faire présumer que l’ac- 
couchement à pu être rapide. 


— 9359 — 


M. le D' Cornaz annonce qu'une plante d'Asie-Mi- 
neure, le T'eucrium polium, a été employée avec succès, 
par un agriculteur de Brousse, contre le choléra. Des 
expériences sur l'efficacité de ce remède ont été faites à 
Constantinople et à Paris: son emploi, en infusion de 
16 gr. sur 500, paraît n'avoir été suivi de succès que 
dans les cas de choléra peu avancés. 


Le même membre rapporte que M. le D' Van der Kor- 
rut s'est servi avec succès du Lepnuous lanatus ou Balotte 
citronneuse, à la dose de 15 gr. dans 250 gr. d’eau bouil- 
lante, dans des cas d’arthrite aiguë. L'emploi de cette 
substance paraît rendre les urines foncées et déterminer 
des démangeaisons de tout le corps, accompagnées d'’é- 
ruptions miliaires et sueurs abondantes. Ce remède pour- 
rait être utile dans les cas de rhumatisme aigu si fré- 
quents dans notre pays. 


M. Cornaz annonce qu'on se sert maintenant en An- 
gleterre et en Amérique d’un nouveau purgatif, l'huile 
d'anda, tirée de l’anda Gomeztt, plante appartenant à la 
famille des Euphorbiacées : 50 gouttes prises sur un mor- 
ceau de sucre déterminent des évacuations abondantes, 
sans causer de vomissements et de coliques. Selon M. Hur, 
20 gouttes suffisent, et l'effet se manifeste après deux 
heures. 


M. le D' Borel donne quelques détails sur l’action 
thérapeutique d'eaux minérales dans lesquelles la chimie 
n'est pas encore parvenue à découvrir des principes dont 
l'action puisse expliquer l'effet thérapeutique souvent 
très-énergique de ces eaux. M. Borel croit que celle ac- 
tion tient à des Principes minéraux très-actifs, non en- 


— 360 — 
core isolés, plutôt. qu'à cette électricité natarelle que cér- 
tains médecins font intervenir dans l'explication de l’ef- 
fet de ces sources. 


M. le président Coulon communique une note de M. Loi- 
seau, sur un moyen de greffer en fente ou en couronné 
depuis le printemps jusqu’au mois de septembre. 

Cette méthode consiste à se servir, pour greffer en 
fente ou en couronne, en avril, mai et juin, des yeux 
qui ne se sont pas développés à la base des bourgeons 
ou rameaux de l’année précédente à partir de la fin juin. 
Lorsque les jeunes bourgeons ont pris un peu de consis- 
tance, il suffit d'en couper les feuilles et de greffer avec 
ce bourgeon comme on le ferait avec ces mêmes rameaux 
au printemps suivant. S'il est encore trop tendre, il est 
bon de le vernir avec la poix qui sert à greffer. 

M. Loiseau a greffé de cette maniëre, depuis le mois 
de mai jusqu’au mois de septembre, plus de 150 sujets 
tant à pepin qu’à noyau, et n'en a pas manqué plus 
d'un cinquième, quoique ses expériences aient été faites 
dans un sol très-aride. Il a même greffé l'abricot en 
fente en juillet. 

Il remarque qu’un arbre greffé en fente en mai, juin 
et même au commencement de juillet, rattrape; à très- 
peu de chose près celui qui a été greffé au printemps, et 
qu'à la fin de l’année il en diffère très-peu. La greffe en 
fente, pratiquée en été, commence à pousser dès le hui- 
tième jour, tandis que l'écusson ne commence à pousser 
que le quinzième. 


M. Coulon rend compte d’un fait de téralologie curieux, 
rapporté dans les comptes-rendus de l’Académie de Paris, 
par M. Bouchacourt, de Lyon. 


— 361 — 


Une jeune fille de cinq ans et demi, très - anémi- 
que, vit son ventre se développer considérablement, et 
fut atteinte d’une constipation opiniâtre qui ne cédait 
qu’à des lavements souvent répétés et à des cataplasmes 
émollients sur le ventre. Elle avait repris des forces sous 
l'influence d’une médication tonique, lorsque, sans phé- 
nomènes précurseurs , elle rendit par l'anus une grande 
_ quantité de pus. Ce liquide coula pendant sept mois, 
mêlé à des mucosités albumineuses très-fétides. La cons- 
titution de l'enfant fut fortement atteinte; il y eut amai- 
grissement, quoique l'appétit se maintint et que la 
digestion ne fût pas altérée. Quinze jours après le com- 
mencement de la suppuration, on vit sortir de l'anus une 
mèche de cheveux d’un châtain clair, lisses et luisants, elle 
fut rejetée en même temps que plusieurs {ouffes cireu— 
laires, aplaties, très-serrées et d’un diamètre égal à ce- 
lui d’une pièce de cinq francs. La suppuration tarit en 
mars 1850, et on ne remarqua rien de nouveau jus- 
qu'au 17 avril, ce jour, après une marche assez prolon- 
gée, il sortit par l’anus un peu de sang, et sous l'in 
fluence d'efforts continuels de défécation, on vit appa- 
raître à l’orifice anal une tumeur rougeâtre qui faisait 
parfois une saillie de plusieurs centimètres, et rentrait 
quand les efforts avaient cessé. 

Le toucher anal fit reconnaître une tumeur se prolon- 
geant dans le rectum à la portion postérieure duquel elle 
ädhérait par sa partie supérieure : molle dans quelques 
points, dure dans d’autres, lisse dans certaines parties 
de sa surface, inégale dans d’autres, et couverte en par- 
tie de cheveux. Elle fut considérée comme formée par 
les débris d’un fœtus, et constituant un de ces cas rares 
connus sous le nom de monstruosités par inclusion. 


— 362 — 


Quelque temps après, ensuite d'efforts de défécation, la 
tumeur sortit presque en entier, et n'était plus retenue 
que par un pédicule qui ne renfermait pas d’artères as- 
sez volumineuses pour donner lieu à des pulsations sen- 
sibles, et n'était ni creux ni assez large pour qu’on pût 
craindre d'y rencontrer une partion d'intestin renversé. 
Ce pédicule fut entouré d'une double ligature, et la tu- 
meur détachée au-dessous au moyen de ciseaux. Quel- 
ques gouttes de sang seulement s’écoulèrent. Peu de jours 
après l'enfant était complètement guéri. 

La tumeur pèse 70 grammes, a 9 centimètres de lon- 
gueur et 11 de circonférence, et est couverte de tégu- 
ments rosés et épais, parfaitement semblables à la peau 
d'un enfant; d'un côté elle présente des cheveux serrés, 
dont les plus longs ont 10 centimètres, de l’autre quel- 
ques poils rares, courts et presque blancs. La face dé- 
pourvue de poils, présente, à 15 millimètres d'une des 
extrémités, une fente transversale de deux centimètres 
de long et d'un centimètre de profondeur, terminée par 
un cul-de-sac ; la lèvre supérieure porte, sur un tubercule, 
une dent incisive très-bien conformée; la lèvre inférieure 
présente deux tubercules durs, portant l’un une mo- 
laire, l’autre une canine, solidement fixées dans leurs 
alvéoles. La tumeur a un contenu fibro-graisseux, ren- 
ferme un os arrondi revêtu de son périoste el portant 
les deux dents inférieures, présente près de l’une d'elles 
üne dépression occupée par une vésicule dentaire. La dent 
incisive est libre de toute adhérence à cet os. Les deux 
autres sont évidemment implantées dans des alvéoles. Un 
second os plus petit, aigu à l’une des extrémités, arrondi 
à l’autre, existe au-dessous du précédent, et enfin un troi- 


— 363 — 


_sième noyau cartilagineux, de la forme et de la grosseur 
d’une noisette allongée, termine ce squelette incomplet, 
sans qu’on puisse trouver autre part d'autres noyaux 0s- 
seux ou cartilagineux. 

Cette communication provoque de la part de M. le 

D Borel quelques détaits sur les autres cas connus de 
monstruosités par inclusion complète ou partielle. 


Séance du 2 avril 1852. 
Présidence de M. L. CouLon. 


M. le prof. Kopp lit un extrait d'un mémoire publié en 
langue allemande dans les Annales de Poggendorf, en 
1851, par M. H. Schlagintweit, sur la distribution des 
températures moyennes dans les Alpes. 

L'auteur de ce mémoire a fait lui-même des observa- 
tions avec des thermomètres à air, très-sensibles. Il a 
confié des instruments à différentes personnes capables, 
chargées de faire des observations suivies dans les sta— 
tions les plus importantes, Il a profité des tables de Dove, 
publiées en 1848, des indications données par Schow 
dans des tableaux du climat de l'Italie, et d'un mémoire 
de M. Mahlmann, inséré dans le Répertoire de physique 
de Dove. 

Les stations sont réparties de la manière suivante : 
9 dans les Alpes orientales, 12 dans les Alpes septentrio- 
nales, 13 dans les Alpes centrales, 10 dans les Alpes 
occidentales, 14 dans les Alpes méridionales. Les obser- 
vations sont réunies dans une série de tableaux. 

Le 1°" tableau contient les températures moyennes 
pour chaque saison de l’année ; le 24, les abaissements 


— 364 — 


de température observés dans les stations situées à des 
hauteurs depuis O jusqu’à 3000 pieds ; le 3%, les abais- 
sements de température observés dans les stations situées 
à des hauteurs au delà de 3000 pieds; le 4me, les hau- 
teurs isothermes. 

Les faits principaux contenus dans ce travail sont les 
suivants : À hauteur égale, les températures vont, dans 
les Alpes, en croissant du nord au sud, et plus encore 
du nord-est au sud-ouest, phénomène qui s'accorde 
avec la forme générale des lignes isothermes des contrées 
environnantes. 

‘élévation moyenne pour un abaissement de 1° C. 
est de 540 pieds ou 166 mètres cette moyenne signifie 
que si l'on veut déduire de la température moyenne d'un 
endroit celle d’un autre lieu, il suffira d'augmenter la 
première d'autant de degrés qu’il y a de fois une diffé- 
rence de 166 mètres, dans les hauteurs des deux stations, 
si toutefois leurs différences de latitude et de longitude 
ne sont pas très-grandes. 

Pour les lieux peu élevés, les influences locales sont 
si considérables, que l'emploi de la moyenne serait fau- 
tif; il en est de même pour les endroits trop élevés où 
l'abaissement a une marche trop rapide comme dans l'at- 
mosphère libre. 

En tenant compte de toutes les observations, on trouve 
pour moyenne 165,9 pour les Alpes septentrionales, 

» 165,65 » centrales, 
» 171®,15 pour le groupe du Mont-Blanc. 

M. Kopp présente une carte de lignes isothermes tra- 
cées sur une coupe idéale des Alpes. Il résulte de l'ins- 
pection de cette carte qui accompagne le mémoire: 


— 365 — 


1° Que les plus grandes inflexions et irrégularités des 
lignes isothermes se trouvent dans les régions les plus 
basses. 


20 Les lignes descendent du sud vers le nord; au mi- 
liéu des groupes considérables les lignes sont convexes, 
pendant que dans les groupes moindres et vers les limites 
des chaînes il y a abaïssement. 


3° Les différences de distances verticales de deux lignes 
isothermes ont leur maximum dans le voisinage de la 
base des Alpes; elles atteignent plus haut un minimum, 
et croissent de nouveau à partir de ce dernier. 


4° Moyennes mensuelles et climat. 


Le mois de janvier est, en général, le mois le plus 
froid , juillet le plus chaud. 

Dans les hautes régions, les maxima de froïd et de 
Chaud tombent en février et en août. 

Les vallées étroites ont des hivers plus rudes et des étés 
plus chauds que les contrées voisines; la moyenne de 
température de l’année n’en diffère cependant pas. 

L’abaissement de température avec la hauteur est plus 
‘rapide en été qu’en hiver : par exemple entre 0 et 12000 
pieds de Paris, il y a pour janvier 17 lignes isothermes, 
et l'élévation pour une différence de 1° est de 710 pieds, 
pendant que pour le mois de juin il y a 27,5 lignes iso- 
thermes et 440 pieds d’élévation pour 1°. 

Cette différence résulte de ce que dans les régions 
basses la variation des températures relatives aux diffé- 
rents mois est plus considérable que pour les contrées 
élevées : 


— 366 — 


ainsi à 10100 p. la temp. du mois de janvier est de — 15° 
» » » juin cp 
différence . 15° 

à 0 p. la température du mois de janvier est de 0° 
» » » juin . +21,5 
différence 21,5 

Un résultat remarquable est la distance relative des 
lignes isothermes mensuelles de 0° et de la ligne de la 
limite des neiges éternelles dans les différents mois. En 
janvier, elles se superposent à la base des Alpes. À partir 
de janvier, la ligne isotherme de 0° s'élève plus rapide- 
ment jusqu’en juillet et août; mais plus tard elle descend 
plus vite que la limite des neiges pour coïncider de nou- 
veau avec elle en janvier. 

La limite des neiges éternelles telle qu'on la considère 
ordinairement, est la limite des neiges au fort de l'été; 
elle coïncide à-peu-près avec l’isotherme annuelle —#0. 
Elle n’est pas la moyenne des lignes limites relatives aux 
différents mois. 

Les minima de température diffèrent peu entre les 
points bas et les points élevés, mais les maxima différent 
beaucoup, ainsi : 


minimum. maximum. 
Iospruck . . —31,2 . .  +37,5 
Berne. . . —30 5 e5re Re 
Saint-Gothard — 30 lol SES 
Saint-Bernard — 32,2 . . +19,7 


Les plus hautes cimes des Alpes correspondent, quant à 
la température moyenne, à des lieux situés vers les lati- 
tudes boréales de près de 700. 


DRE at à = dé L 


— 367 — 


M. Xopp présente un résumé des observations météoro- 
logiques faites au Gymnase de Neuchâtel pendant la der- 
nière moitié de 1851 et les trois premiers mois de 1852. 
Le chiffre de 100,15 qu'il trouve pour la moyenne 
de température en se servant des observations du jour, 
lui paraît trop élevé. Il demande pour obtenir des résul- 
tats plus exacts, qu'on ajoute une observation à neuf 
heures du soir. 

Une discussion s'engage à ce sujet, et on convient, pour 
donner dans notre ville une impulsion nouvelle aux ob- 
servalions météorologiques, de nommer une commission 
composée de MM. Kopp, professeur, Gustave Borel, et 
Louis Favre, instituteurs, sous la présidence de M. le 
professeur Ladame. 


M. Wald, pharmacien, communique un fait curieux 
qu'il a observé en fabriquant des eaux gazeuses avec sa 
machine nouvelle de Savaresse. Lorsqu'il fait écouler le 
gaz acide carbonique resté dans le récipient après la mise 
en bouteilles, ce gaz, qui a encore une force élastique de 
plusieurs atmosphères, sort avec une telle violence, qu'un 
froid sensible se produit dans l'appartement ; et lors- 
qu'on applique un linge mouillé sur l'orifice par où le 
gaz s'échappe, on y trouve un morceau de glace qui s’est 
formé dans un temps excessivement court. M. Savaresse, 
qui le premier à remarqué ce fait, en avait fait part à 
M. Wald il y a quelque temps, et ce dernier a réussi à 
obtenir le même résultat. Le morceau de glace qui se 
forme dans cette circonstance , atteint quelquefois le vo- 
lume d’une noix, et contient une assez grande quantité 
d'acide carbonique, que l'on peut dégager en jetant le 
fragment de glace dans l’eau. 


— 368 — 
Séance du 6 Mari 1852. 


Présidence de M. L. CouLox. 


M. G. Borel communique un tableau des températures 
moyennes des 7 années 184% et suivantes jusqu'à 1850 
inclusivement, d’après les observations faites par le con- 
cierge du collège. Ces moyennes ne sont qu'approxima- 
tives, puisqu'elles ne sont fondées que sur-une seule ob- 
servation, savoir celle de neuf heures du matin, laquelle, 
il est vrai, s'écarte peu de la vraie moyenne : d'après ces 
observations, les températures des années indiquées se- 
raient les suivantes : 

1844, +8,77 
1845, +8,85 
1846, + 10,05 
1847, +8,53 
1848, +8,26 
1849, +8,50 
1850. +8,04 


moyenne +8,71 


Moyennes des divers mois de l’année. 


Janvier, — 0,75 Juillet, +18,15 
Février, +1,40 Aoùt, +16,79 
Mars, + 3,20 Septembre, +13,99 
Avril, +8,13 Octobre. +8,94 
Mai, +13,58 Novembre, +4,50 
Juin, + 16,97 Décembre, +0,54 


M. L. Favre décrit un halo qu'il a observé le jeudi - 
99 avril, et dont la durée, depuis 9 heures du matin 
à 4 heure après midi, a été remarquablement longue. 


— 369 — 

M. le D' Vouga communique à la Société la découverte 
récente d’une espèce de quadrumane, sur laquelle on ne 
possédait encore que des données extrêmement obscures, 
et dont l'existence était niée par les naturalistes mo- 
dernes. Le musée de Paris vient de recevoir du poste du 
Gabon, sur la côte occidentale d'Afrique, deux exem- 
plaires de ce grand Chimpanzé, conservés dans l'alcool. 
Ce géant des quadrumanes, appelé dans le pays Engiena, 
a été signalé d'abord par le missionnaire Savage, et a reçu 
de M. Oven le nom de Troglodytes Savagei, ou Troglo- 
dytes Gorilla. Sa taille surpasse beaucoup celle du Chim- 
panzé ou Troglodytes niger, et atteint chez l'adulte 1,57. 
Les dimensions de son thorax sont surtout considé- 
rables. Il vit solitaire dans les forêts, où son naturel 
farouche, sa force et son audace le rendent très-redou- 
table aux chasseurs indigènes. C’est sans aucun doute 
à cetté espèce qu'appartenaient les individus femelles, 
tués par les Carthaginois de Hannon, lors du célèbre 
voyage entrepris par ce chef au delà des Colonnes d'Her- 
cule. 


M. Wald fait circuler plusieurs exemplaires de soufre 
natif déposé sur du sulfate de chaux , et provenant d'une 
carrière de gypse, des bords du lac de Thoune. 


M. de Castella annonce avoir employé avec beaucoup 
de succès l’eau de Wildegg, à la dose d'une cuiller à 
soupe par jour, contre une affection strumeuse grave, 
accompagnée de troubles dans la circulation. Il a reconnu 
que cette eau a une action résolvante très-énergique, 
mais peut provoquer des accidents inflammatoires de 
l'estomac. 


RUL, DES SC. NATUR, TI. 26 


— 310 — 


M. le D' Borel l'a aussi employée avec succès ancien- 
nement, mais il à trouvé dans l'iode incorporé à l'axonge 
un remède plus sûr contre ces affections. 


M. Wald, à propos du Collodium cantharidal, annonce 
qu'on s'est fréquemment plaint dans ces derniers temps 
de l’inefficacité de l'emplâtre vésicatoire aux cantharides : 
on vient de reconnaître à Paris que les caisses de can- 
tharides, arrivées d'Italie et de Hongrie, renfermaient 
des insectes dont la plus grande partie avait déjà servi 
à la préparation de la cantharidine, et avait été épuisée 
par l’éther. Cette fraude est d'autant plus difficile à 
découvrir, que ces cantharides épuisées ne peuvent être 
discernées et séparées des autres avec lesquelles elles sont 
mélangées. 

M. le D' Vouga lit la première partie d’un travail 
étendu, sur la faune ornithologique du pays de Neuchà- 
tel; un extrait de ce travail sera annexé aux bulletins 
et publié sous forme de catalogue d'espèces. 


Séance du 21 Mai 1852. 


Présidence de M. L. CouLon. 


M. le président présente le quatrième volume des mé- 
moires de la Société viennoise des amis des sciences et le 
septième volume de ses bulletins. 


M. le professeur Kopp dépose le calendrier de 1853, 
caleulé pour la position astronomique de Neuchâtel, et 
donnant exactement lheure des levers et couchers du s0- 
leil et de la lune. 


M. Desor entretient la Société de ses recherches sur 
l'action glaciaire en Scandinavie et dans l'Amérique du 


— 311 — 


nord, recherches déjà publiées en partie dans les Bulle= 
tins de la Société géologique de France, et dans le Rap- 
port de la Commission géologique américaine au sénat. 

C’est en Suisse qu'est née la théorie glaciaire, et c’est 
dans les Alpes qu'elle a trouvé ses premiers défenseurs 
et ses premières applications. La question n’est pas ici 
douteuse, les glaciers usent et polissent les flancs et le 
fond des vallées qui les renferment, et charrient à leur 
surface les débris éboulés des montagnes qui les domi- 
nent, blocs anguleux que le glacier, en se fondant len- 
tement ou subitement, dépose immédiatement sur la roche 
polie. Il n’est guère possible de nier que les moraines et 
roches polies, signalées partout dans les Alpes jusqu’à 
l'embouchure des vallées dans la plaine, ne doivent leur 
origine à une ancienne extension des glaciers qui exis- 
tent encore dans les parties centrales des chaînes. 

M. Necker, de Genève, ayant étudié le terrain de trans- 
port des environs de Genève, le nomma terrain d’allu- 
vion ancienne, sa partie supérieure, qu'il appela terrain 
cataclystique, fut regardée plus tard comme devant son 
origine aux glaciers. La question est donc de savoir s’il 
existe de la roche polie sous cette alluvion ancienne, dont 
la puissance est souvent de plusieurs centaines de pieds. 
M. Rodolphe Blanchet a déjà fait des recherches à ce su- 
jet. En Suède, les roches polies et striées avaient déjà 
été observées et décrites par M. Strôm, et leur origine 
attribuée à des courants. D'autres observateurs crurent y 
reconnaître des traces de l’action glaciaire et des mo- 
raines. Ces soi-disant moraines sont des coteaux allongés 
dont la direction est régulière et en général parallèle aux 
bords de la mer. On les nomme , dans le pays, Osars : 


— 3172 — 


leurs pentes en général égales des deux côtés, varient 
de 20 à 30°, et sur leur sommet, souvent fort étroit, 
existent les chaussées qui traversent le pays, et qu’on 
nomme chaussées des géants; à la surface et au sommet 
de ces monticules se trouvent les blocs erratiques. L’ob- 
servatoire de Stokholm est construit sur une colline de 
cette espèce, qui a déjà été étudiée par M. Lyell. M. De- 
sor a reconnu en plusieurs localités que ces collines 
étaient formées de couches de gravier et de sable nette— 
ment stratifiées, et fortement et irrégulièrement inélinées, 
en un mot qu'elles présentaient cette stratification qu'on 
nomme torrentielle. Il existe dans ce terrain, près d'Up- 
sal, une couche argileuse renfermant des coquilles ma- 
rines très-bien conservées, qui ne paraissent pas avoir 
été transportées, mais avoir vécu sur place, ce qui indi- 
que que la formation de ce terrain, qui constitue les 
osars, a été lente, et a eu lieu sous les eaux de la mer. 
Dans plusieurs localités ces coquilles ont été trouvées au- 
dessus de la roche polie, à plus de 800/ au-dessus de la 
mer. Près de Gothenbourg, des balanes sont fixées à la 
surface polie à plus de 170/, et près de Christiana, 
M. Desor y a observé des serpules. 

M. Desor, après avoir pris connaissance de ces faits, 
ne put admettre que les moraines et les osars fussent 
dus à la même cause, de sorte qu'en Scandinavie, l’a- 
gent qui a posé! la roche et celui qui a transporté les 
blocs, doivent avoir été différens et avoir agi à des épo- 
ques fort éloignées, séparées par celle pendant laquelle 
il se déposait dans une mer des terrains marins stratifiés 
qui ont été ensuite élevés au-dessus du niveau de la mer 
actuelle. Le ‘1! des géologues anglais, terrain envisagé 


— 313 — 


jusqu'ici comme morainique, contient aussi des couches 
argileuses, stratifiées, qui renferment des coquilles, et 
paraît devoir être rapproché de ces terrains de Scandi- 
pavie. 

M. Hillekock, qui avait déjà décrit dans la Nouvelle- 
Angleterre les roches polies, leur hauteur, la direction 
de leurs sillons, s’empara de la théorie glaciaire pour ex- 
pliquer leur formation. Depuis lui, on reconnut dans les 
vallées et sur les plateaux, des dépôts qui renfermaient 
des fossiles marins, et portaient les blocs à leur partie 
supérieure. Ces fossiles marins (Tellines) n'avaient encore 
été signalés que sur les bords du lac Champlain et du 
Saint-Laurent, lorsque M. Desor découvrit dans les en- 
virons de New-York, des buccins parfaitement conservés, 
des vénus, des mactres, des pattes d’écrevisses, renfermés 
dans un terrain stratifié, et associés à des cailloux striés, 
qu’on considérait jusqu'alors comme criterium du terrain 
glaciaire; ces fossiles furent reconnus être identiques à 
ceux des argiles des environs du lac Champlain. 

On savait depuis long-temps que tout le terrain à plus 
de 500 lieues à l’ouest du lac Champlain était de nature 
erratique, et que les blocs dioritiques et porphyriques 
de l'Ohio et de l’Indiana provenaient du dos métallifère 
qui sépare le lac Supérieur du lac Michigan, lorsque 
M. Desor reconnut, à 1630 pieds au dessus de la mer, soit 
1000 pieds au-dessus du lac Supérieur, des blocs polis 
et striés de cuivre natif de plusieurs mètres cubes, repo- 
sant sur des terrains quaternaires sans fossiles, qui con- 
sistent en argiles et en graviers recouvrant la roche po- 
lie. Ces terrains, dont la déposition a dû, à en juger 
: d'après leur puissance , exiger une période considérable, 


— 314 — 

sont regardés comme marins. M. Desor trouva leur li- 
mite orientale à 20 lieues du lac Ontario et à 320! de 
hauteur, il y recueillit de nombreux fossiles marins, et les 
poursuivit jusque près des cataractes du Niagara. Ce ter- 
rain marin reçut le nom de terrain Laurentien. Dès lors 
des hélicines et des planorbes et plus tard des cyclades, 
furent signalés dans les terrains quaternaires limoneux 
des environs du lac Erié, sur une surface considérable : 
ces terrains d’eau douce recurent le nom de terrain A/- 
gonkin, du nom d’une peuplade puissante d’Indiens qui 
habitaient les régions où ils sont surtout développés. Ils 
paraissent avoir été déposés dans’une immense mer d'eau 
douce, dont les lacs actuels seraient les résidus. 

L'existence d'assises quaternaires puissantes au-dessus 
de la roche polie et au-dessous des blocs, est donc dé- 
montrée dans l'Amérique du nord comme en Scandina- 
vie, et indique, après l’action de l'agent qui a strié et 
râpé cette immense surface, une phase considérable de 
l'histoire de notre planète caractérisée par une faune 
particulière. 

On a trouvé, dit M. Desor, dans les tourbières de 
plusieurs localités, des squelettes entiers de Mastodontes 
parfaitement conservés, dont les os contiennent encore 
40 °/o de matière animale. Ces animaux paraissent s’y 
être enfoncés dans la vase, car leurs squelettes sont dans 
la position de la station. Entre les collines d’émail de 
leurs dents, de même que dans l’espace intercostal, on a 
reconnu des traces de folioles d’une espèce de pin (pinus 
canadensis), qui a dû leur servir de nourriture, et qu'on 
retrouve encore vivante dans les mêmes localités. — 
L'existence de ces animaux doit avoir été antérieure à 


— 375 — 

l'apparition de la race rouge, car nulle part on n'a 
découvert dans les tumulus indiens, parmi tant d'ob- 
jets représentant en terre de pipe les figures des animaux 
actuels du pays, rien qui rappelle la forme du masto- 
donte. L’alluvion ancienne de Genève renferme des os- 
sements de la même espèce, l'elephas primigenius, qui 
ont été décrits par Deluc et attribués à tort, par M. Nec- 
ker, aux éléphants qui accompagnaient l’armée d'Anni- 
bal, et qui moururent en route; M. Coulon possède 
une dent de cette même espèce, trouvée dans une terre 
blanchâtre superficielle des environs de la ville; de sorte 
que cet éléphant aurait habité l'Europe tempérée et l’A- 
mérique du nord, à deux époques fort différentes : en 
Suisse, avant l’époque glaciaire, en Amérique très-long- 
temps après, en admettant toujours que l’alluvion an- 
cienne est antérieure à l’action glaciaire. Ce fait pourrait 
nous en faire douter, et il importerait de savoir si ces 
assises de graviers vaguement stratifiés ne reposent nulle 
part le long de notre Jura sur la roche polie, pour oser 
trancher la question. 


M. Cornaz présente un travail sur les Lichens du Jura, 
spécialement du canton de Neuchâtel, avec l'indication 
des localités où on les rencontre. 


Le catalogue des espèces sera annexé à la fin de ce 
volume. 


Séance du 4 Juin 1852. 


Présidence de M. L. CouLow. 


M. Desor entretient la Société des richesses métalliques 
du sol américain, L'or, la houille, le plomb, le fer, et 


— 316 — 


surtout le cuivre natif, y existent dans des proportions gi- 
gantesques , car les filons de cuivre natif pur ont sou- 
vent plus d’un pied et demi de puissance. Le fer existe 
partout à l’état de carbonate d'oxide hydraté, et surtout 
de fer olégiste et magnétique , identique à celui de Suëde, 
dont les Anglais fabriquent l'acier. Il en existe des mon- 
tagnes entières. Le plomb sulfuré se trouve renfermé à 
l'état de pureté parfaite dans des poches calcaires, c’est 
le minerai le plus productif. A ces faits connus, M: Desor 
ajoute quelques détails nouveaux, résultat de ses obser- 
vations propres, sans prétendre que les faits qu’il a ob- 
servés soient généraux et s'appliquent à tous les pays. 
Il a trouvé dans les roches les plus anciennes, schistes 
talqueux, quartz et granits de la partie méridionale du 
lac Supérieur, le gisement principal du fer olégiste, qui : 
renferme 50 à 60 °)o de fer pur, et forme des montagnes 
de plus de 200/ de hauteur et de plusieurs milles de 
longueur. 

Des voyageurs du Missouri avaient déjà signalé sur les 
bords limoneux du Mississipi une grande montagne de 
fer, qui fut explorée plus tard par des ingénieurs, et re- 
connue comme faisant partie des dépôts les plus anciens. 
Dans le Texas, on a découvert des montagnes identiques 
dans les terrains les plus anciens, de même qu'au Mexi- 
que. On peut donc admettre que ces oxides de fer se 
sont formés lors de la première solidification de l'écorce 
terrestre. 

Les masses de fer sont adossées au granit et recouvertes 
de grès anciens nullement ferrugineux et en stratification 
discordante. Ceci est tellement général que la commis- 
sion géologique a proposé de nommer ces terrains an- 


— 311 — 


ciens : étage ferrifère. Ces dépôts de grès sont à la base 
du Schercer ; après avoir été horizontaux, ils se relè- 
vent et présentent des renflements formés de trapps 
éruptifs, dans lesquels on trouve le cuivre natif qui 
n'existe dans aucun autre terrain. Ces trapps éruptifs 
forment une longue bande enclavée dans ces grès et con- 
glomérats anciens. Ce cuivre est pur, et on peut facile- 
ment par l'analyse, s'assurer que les ornements trouvés 
dans les anciens tombeaux indiens appartiennent à ce 
cuivre du lac Supérieur, et non pas à un cuivre d'ori- 
gine européenne qui est toujours impur : ce cuivre se 
trouve pétri d'argent natif en morceaux anguleux de la 
grosseur d'une noix, sans y être allié. Ce fait est miné- 
ralogiquement inexplicable, car ces deux métaux sont 
fusibles à des températures différentes. Cet argent n’est 
que fort peu exploité. Dans plusieurs localités, de l’oxide 
noir de cuivre, qui ne contient que #0 à 50 °)o de cuivre 
pur, a été découvert, et est même plus profitable à ex- 
ploiter que le cuivre natif, qui existe en lames épaisses 
dans les trapps. Car on a besoin d'immenses quantités de 
poudre pour dégager ces lames de cuivre qui se plient 
et qu'on coupe au ciseau en blocs plus petits. On ne peut 
employer dans ce but la scie circulaire, car ce cuivre 
contient souvent des géodes remplies de cristaux de quartz 
qui émoussent la scie. On peut ainsi amener des blocs 
de 5 tonneaux (10000 livres) à la surface de l'exploitation, 
où on les taille en blocs plus petits. Tous ces travaux 
rendent le prix de revient beaucoup plus considérable 
que celui du cuivre obtenu par réduction de l’oxide; et, 
sans aucun doute, si on parvient à trouver un moyen 
plus facile de tailler ces blocs et d'exploiter ces lames 


— 3183 — 


immenses, le prix du cuivre ne tardera pas à diminuer 
notablement dans tous les pays. 

Le cuivre se trouve souvent en banes horizontaux, tra- 
versés par un filon ascendant, que les mineurs nomment 
filon nourrisseur. Lorsque le trapp, qui renferme le cuivre 
est ou vésiculaire ou amygdaloïde, le filon est riche. 
Lorsque le trapp devient compact, le filon s'appauvrit 
et finit par disparaître. 

Cette puissance variable du filon, uniquement dépen- 
dant de la nature minéralogique de la roche qui le ren- 
ferme, ne peut être expliquée par la théorie généralement 
admise de la formation des filons par infusion de ma— 
tières fondues dans des fissures préexistantes. La sé— 
paration du cuivre, sa condensation dans certains points, 
ont dû avoir leur origine dans des actions chimiques 
particulières, dépendant de la nature de la roche environ- 
nante, et différentes, selon que la masse primitive a été 
transformée en roche compacte ou en roche amygda- 
loïde. Les mineurs, qui exploitent ces filons de cuivre, 
connaissent parfaitement ce gisement, car dès que les 
trapps deviennent compacts, ils cessent les travaux, et 
recommencent dans des conditions plus favorables. 

A ces trapps viennent s’adosser les calcaires magné- 
siens inférieurs stratifiés, de plusieurs mille pieds de puis- 
sance, qui renferment des poches évasées à la base ou 
au sommet, dans lesquelles la galerie est contenue. C’est 
surtout le long du Mississipi supérieur que ces terrains 
sont développés. Les plombs sulfurés n'ont été que fort 
peu répandus ailleurs. 

Ainsi le fer se trouve dans les terrains les plus an 
siens, formation azoïque ou ferrifère, ne contenant pas 


— 319 — 


de fossiles ; puis le cuivre dans les trapps, qui ont sou- 
levé les grès siluriens inférieurs, et enfin le plomb dans 
les premières grandes masses de calcaire, 

Quant à l'or, il paraît exister en Californie, associé à 
des filons de quartz traversant des roches talqueuses très- 
anciennes. Ce fait serait opposé aux résultats obtenus 
par M. Murchison, dans ses recherches sur les mines d'or 
de l’Oural ; car il croit que l'or a été injecté très-posté- 
rieurement dans des roches préexistantes. On a ouvert 
des mines à 600 milles de San—Francisco, dans des 
masses de quartz, entre les schistes amphiboliques et les 
gneiss. L'or existe surtout en petites écailles très-fines et 
presque invisibles dans la masse de ces quartz. 


M. Kopp fait remarquer la coïncidence singulièreentre 
la découverte du dorage au galvanisme, et celle de ces 
immenses amas d'or. 


M. Ladame fait voir que ce sont les composés de fer 
naturels les plus stables qui se sont formés les premiers, 
absolument comme les roches siliceuses les plus stables 
sont les plus anciennes. Il croit que la formation de ces 
filons n’a pas eu lieu par injection, mais par un mouve- 
ment d'agrégation lent de molécules similaires au milieu 
d'une masse solide ou pâteuse. 

Les fins filons de gypse renfermés dans les marnes ter- 
tiaires de Boudry lui paraissent s'être formés ainsi par 
l'attraction des molécules de gypse qui se trouvaient dans 
la masse boueuse et se rassemblaient sous. forme de cris 
taux. 

Il s'engage à ce sujet une discussion sur les mouve- 
mens moléculaires en général, et les changemens de pro- 


— 380 — 
priétés physiques qu'éprouvent avec le temps les essieux 
de locomotives et les fils des télégraphes électriques. 
M. le D' de Castella fait lecture de son rapport sur le 
mouvement de l'hôpital Pourtalès pendant l’année 1851. 
L'hôpital contenait le 127 janvier 1851 : 
43 malades : 28 homm., 45 femm. 


admis pendant l’année : 460  » 292 » 168 » 
503 320 183 
dont 174 Neuchâtelois, 100 hommes, 74 femmes. 
Ami Bernois, 89 » 52 » 
38 Vaudois, 25 » 13 » 
90 Suisses d’autres cantons, 57 » 212. 
60 étrangers, 49 » A2 
503 malades, 320 » , 109 2» 


307 sont sortis guéris, 
100 améliorés, 
19 incurables, 
39 sont morts, dont 28 hommes et 11 femmes, 
38 ont été portés à nouveau au 1°" janvier 1852. 
503 

Le nombre des journées de séjour à l'hôpital a été de 
16348. 

La moyenne du séjour de chaque malade a été de 
932 !/2 journées. 

On a eu en moyenne ## %/« (2165) malades par jour. 

La mortalité a été de { sur 13. 

Huit opérations graves ont été pratiquées : trois am- 
putations, deux hernies étranglées, un cathétérisme forcé, 
une cataracte; et une extirpation de fongus carcino- 
mateux à la mâchoire inférieure. Ces opérations ont été 
suivies de succès, sauf celle d’une hernie étranglée opé- 
rée tardivement immédiatement après l'entrée du malade 
à l'hôpital. 


— 381 — 


Les maladies traitées à l'hôpital pendant l'année ont 
été : 

36 inflammations traumatiques externes. 

14 abcès, dont plusieurs très-considérables, guéris par la com- 
pression méthodique. | 

&A plaies , dont une brûlure très-étendue; une plaie de la face 
du thorax et des bras, avec arrachement de l'œil gauche, 
guérie après 136 jours, et suite de l’explosion d’une mine sur 
Jaquelle avait soufflé un mineur ; trois plaies pénétrantes de 
l'abdomen , l’une d’arme à feu, la seconde due à un coup de 
sabre, la troisième à un coup de couteau : les deux premières 
sont devenues mortelles; deux plaies pénétrantes de Parti- 
culation du genou chez des charpentiers. 

50 ulcères atoniques, variqueux, dartreux et syphilitiques ; 
plusieurs ulcères atoniques anciens et étendus ont été guéris 
par les cataplasmes de farine de graine de lin laissés à de- 
meure pendant plusieurs jours. 

25 fractures, dont une de la colonne vertébrale, 2 de la clavi- 
cule, 3 des côtes, 2 de l’humérus, 1 des os de l’avant- 
bras, 4 des phalanges, une du col du fémur guérie sans 
raccourcissement à l’aide du double plan incliné de Dupuy- 
tren, 3 du tibia, une du péroné, 10 des deux os de Ja 
jambe, dont deux comminutives très-graves ont été parfai- 
tement guéries. 

7 entorses. 

2 luxations de l’humérus, réduites très-facilement à l’aide du 
chloroforme. 

4 ankylose du coude améliorée par la rupture forcée et les bains 
émolients. 

13 tumeurs blanches articulaires, dont 7 de l'articulation coxo- 
fémorale et 2 du genou; ces dernières guéries par l'usage de 
la pommade au tartre stibié. 

14 caries ou nécroses. 

24 ophthalmies , la plupart scrofuleuses. 

4 fistule lacrymale guérie par l'introduction d’une sonde can- 
nelée dans le canal nasal, un traitement antiscrofuleux et 
des injections iodées. 


— 382 — 


A cataractes , dont deux survenues à la suite d’inflammations du 
bulbe de l’œil , provoquées par des coups violens. 

2 amblyopies amaurotiques améliorées par la cautérisation fron- 
tale et la strychnine. 

5 hernies étranglées : 3 inguinales, dont deux réduites par le 
taxis ; 2 crurales, dont l’une a été opérée avec succès, l’autre 
déjà gangrénée, lors de l'entrée de la malade, s’est termi- 
née par un anus artificiel, qui s’est oblitéré peu à peu. 

1 rétention d'urine complète, provoquée par un rétrécissement 
de l’urètre qui a été détruit promptement par le cathétérisme 
forcé à l’aide du chloroforme. 

1 hydrocèle. 

10 érésypèles. 

3 varioloïdes bénignes. 

35 rhumatismes, dont 26 aigus et 9 chroniques; tous, sauf un 
seul, guéris par le nitre et l’aconit. 

À esquinancie. 

52 inflammations ou affections des organes digestifs. 
22 fièvres typhoïdes, dont 4, amenées tardivement, sont devenues 
mortelles. 

3 fièvres intermittentes (perees) 

7 fièvres lentes. 

10 affections du cerveau et de la moelle épinière. 
A tétanos chez un enfant. 
À otite grave. 
40 inflammations des voies respiratoires, dont 44 bronchites, 
7 pleurésies, 17 pleuropneumonies et 2 pleurodynies. 
9 phthisies. 
10 hydropisies. 

À anévrisme de la crosse de l’aorte. Le malade est mort subite- 
ment en se promenant dans la salle. L’aorte était dilatée et 
déchirée à un pouce de son origine et le sang épanché dans 
le péricarde. 

2 métrites. 

A phlébite suite de métroperitonite, devenue mortelle. 

22 chloroses. 

3 chorées. 


— 383 — 


À tremblement mercuriel chez un individu qui avait doré au 
mercure sans lanterne. 

8 névralgies, dont 7 sciatiques. 

9 gastralgies. 

7 scrophules. 

3 cancers. - 

4 morbus maculosus de Werlof. 

1 grossesse qu’une jeune fille cherchait à dissimuler. 

La moyenne des malades, admis à l'hôpital Pourtalés 
pendant les 9 premières années de son existence avait été 
de 276 ‘/o, celle des journées de séjour de 10637 “/e. En 
1851, l'hôpital en a recu 503, qui y ont séjourné 
16348 journées. Ces chiffres indiquent déjà à eux seuls 
le développement qu'a pris cet utile et bel établissement, 
et les services qu'il rend aux malades indigents, tant neu- 
châtelois qu'étrangers. Cette année encore, le président 
actuel de la direction, M. le comte L.-A. de Pourtalés, 
a profité des nouveaux tuyaux de conduite établis par 
l'administration de la ville pour alimenter les fontaines 
jusqu'à l'extrémité du faubourg, et a doté l’établissement 
d'une belle fontaine jaillissante, qui s'élève au milieu de 
son enceinte, et qui remplacera avantageusement un puits 
dont les eaux s’altéraient quelquefois. 

Vouca D", secrétaire. 


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APPENDICE. 


ÉNUMÉRATION 


DES 


LICHENS JURASSIQUES 


ET PLUS SPÉCIALEMENT 


DE CEUX DU CANTON DE NEUCHATEL. 
Par M. le D' CORNAZ. 


Tandis que les recherches nombreuses auxquelles ont donné lieu les 
plantes vasculaires de la chaine du Jura, ont été utilisées dans de nom- 
breux ouvrages locaux, et dans des travaux destinés spécialement à l'en- 
semble de cette région : BABEY, Flore jurassienne, — J. THURMANN, Essai 
de phytostatique , — CH.-H. GODET, Énuméralion des végétaux vasculaires 
du Jura suisse et francuis, plus spécialement du canton de Neuchâtel, et Flore 
du Jura; l'étude des végétaux cellulaires a été assez négligée parmi nous: 
récemment, il est vrai, M. LÉO LESQUEREUX a inséré dans les Mémoires de 
la Société des sciences naturelles de Neuchâtel, un catalogue des mousses de 
la Suisse, dans lequel celles du Jura occupent de beaucoup la première 
place ; et, grâce à ce savant infatigable, les collections de notre ville con- 
tiennent un recueil spécial de mousses neuchâteloises; les Hépatiques du 
même herbier, déterminées et classées par M. Lesquereux, pourraient 
être employées à établir, provisoirement du moins, l’énumération des 


espèces de ce canton. Mais, autant du moins que nous le sayons, les 


Lichens , les Champignons et les Algues du Jura n'ont encore été traités 
dans aucun ouvrage ou mémoire spécial. 

Pour former ce catalogue des Lichens jurassiques, j'ai utilisé les sources 
suivantes : 

1° Diverses publications de Haller, De Candolle, Duby, Mougeot et Nes- 
tler, et surtout de M. Schaerer, pasteur à Bclp, dont nous donnerons plus 
bas la liste. 

2 Le Calalogue des plantes qui croissent naturellement dans la Souserai- 
nelé de Neufchâtel et Vallangin, dressé en 1746 après vingt années d’her- 
borisation, par le D° d’Irernois, médecin du Roi ; nous ayons consulté une 

SOC. DES SC. NAT. T. II. 27 


— 386 — s 


copie dressée par M. Chaillet et augmentée par lui de notes et d'articles 
supplémentaires, laquelle est déposée à l’herbier de la ville de Neuchâtel, 
dont la Bibliothèque possède les deux éditions originales de ce manuscrit. 

5° Le Catalogue et l’herbier de feu le capitaine Chaillet, chevalier du 
mérite militaire, faisant; actuellement partie des mêmes collections pu- 
bliques ; ils sont très-riches en espèces neuchâteloises, désignées le plus 
souvent par les abréviations N. ou Neuf. ; j'ai dû éliminer quelques espèces 
dont la détermination me paraissait évidemment fausse ou très-douteuse. 
On verra combien cette source m’a fourni de matériaux. 

4° L’herbier de notre ville possède encore d’autres collections :. celle 
du professeur Agassiz m’a fourni quelques notes, surtout sur les environs 
de Vallorbes ; le manque de localités de la plupart des autres Lichens qui 
y sont conservés, fera comprendre que je n’aie pu y trouver que peu ou 
point d'indications. 

5° Mes herborisations lichénologiques ont eu lieu surtout dans les en- 
virons de Neuchâtel, ef dans les localités vaudoises de l’Isle près Cossonay, 
et de Coinsins au-dessus de Nyon; j'ai aussi récolté quelques espèces de 
Lichens sur d’autres points du Jura, tels que Fleurier et le Chasseron, 
Yverdon, la vallée du lac de Joux, Diesse et le Chasseral, etc. Ces recher- 
ches ont eu lieu de 4842 à 1848 et peuvent offrir une certaine valeur, 
M. le pasteur Schaerer ayant eu l’extrême obligeance de revoir toutes mes 
déterminations. Mon herbier contient aussi un petit nombre de Lichens 
jurassiques que m’ont communiqué divers botanistes. 

On comprendra par ce que je viens de dire, que cette énumération ne 
peut être complète quant au nombre des espèces et des variétés, quoique 
j'aie utilisé tous les documents que j’avais à ma disposition ; on y {trouvera 
en effet des indications de MM. Agassiz, Benoît, Boissier, Chaillet, Curils, 
De Candolle, Duby, Frédéric de Fischer, Gagnebin (de la Ferrière), Godet, 
Haller, d'Ivernois D'M., Léo Lesquereux, Paul Morthier D'M., Preisswerk, 
Victor Ruffr, Schacrer, Seringe, Shuttleworlh, Staehelin, Trog père et celles 
qui me sont propres : elle renferme, à côté d’un très-grand nombre de lo- 
calités neuchâteloises, et d’une assez grande quantité d’indications du 
Jura vaudois, quelques données sur les espèces du Jura bernois (bords du 
lac de Bienne, ile de Saint-Pierre, Diesse, Chasseral et vallée de la Birse), 
et des environs de Genève, et enfin une ou deux notes sur des espèces 
observées dans le Jura soleurois et dans la France jurassique. Plus que 
personne je sens les lacunes de ce travail, que je n’eusse pas rédigé ac- 
tuellement , si arrivé à la pratique de la médecine, je n’avais été obligé 
de renoncer à me livrer à des recherches botaniques suivies; j'avais des 
matériaux assez nombreux, dont la plupart présentait des garanties suf- 
fisantes d’exactitude, et ai préféré ne pas les laisser non utilisés, désirant 
ardemment que ce premier jalon puisse encourager quelqu'un de plus 
capable à s’occuper d’un catalogue des Lichens de notre région. On com- 
prend qu’il sera nécessaire d’avoir dans ce but de nombreuses localités ; 


— 387 — 


les recherches offriront sans doute beaucoup de découvertes intéressantes: 
aussi ce champ doit-il sourir à nos botanistes , surtout à ceux dont les 
herbiers ne peuvent plus s'enrichir dans notre chaine de nouvelles espèces 
de phanérogames : en attendant la réalisation de ce vœu, je recevrai avec 
reconnaissance les indications de localités et les échantillons qu’on voudra 
bien m'adresser. 

L'étude des Lichens mérite l’attention des observateurs à bien des 
titres : en effet, ici le botaniste n’a plus de saison morte, car on peut en 
récolter en tout temps et en tout lieu, sur la terre, sur les mousses , sur 
les arbres, sur les murs, sur les rochers, parfois même sur des métaux 
exposés à l’air ; la dessiccation ne les altère presque pas, sauf le genre 
des Collema, qui reverdit de nouveau dès qu’on l’humecte ; le peu d’at- 
tention que la plupart des collecteurs accordent à cet embranchement des 
végétaux permet d’y faire des découvertes ; enfin, notre Jura en particu- 
lier est très-riche en Lichens, et cet essai de catalogue y en constate plus 
de 200 espèces, avec un nombre considérable de variétés et de sous- 
variétés considérées comme espèces par quelques auteurs. Au point de 
vue de l’utilité, on peut dire que ces plantes si méprisées ne le cèdent 
pas à d’autres: le Lichen d'Islande a été employé comme nourriture dans 
des années de disette, et la Cladonie des rennes sert d’aliment à ces ani- 
maux; la thérapeutique leur emprunte un certain nombre de médica- 
ments, c{ l’art du teinturier leur est plus redevable encore; aussi divers 
auteurs, tels que Linné, Amorcux , Hoffmann et Willemet, se sont-ils 
occupés spécialement de l'utilité de ces cryptogames. 

Il me reste à guider le lecteur dans cette Énumération classée d’après 
le dernier ouvrage de M. Schærer (Enumeratio crilica lichenum Europaeo- 
rum, Bernae 1850), auquel je renvoie pour les caractéristiques des Lichens 
que je mentionne , et dont je ne me suis écarté qu’en plaçant les Colle- 
macées entre les Ombilicariées etles Parméliacées, et en adoptant pour deux 
espèces des noms spécifiques antérieurs aux siens; j'ai élé sobre de syno- 
nymes, mais j'ai dù en indiquer pour que ceux mêmes qui ne possèdent 
pas les ouvrages du savant lichénographe bernois, puissent savoir à quelles 
espèces ils doivent rapporter les noms que j'adopte ; afin de ne pas al- 
longer trop ce catalogue par cette synonymie indiquée entre parenthèses, 
j'y ai indiqué par le signe - la répétition de l’épithète qui précède, et 
adopté les abréviations suivantes : B., Baeomyces; C., Collema; Ce., 
Calycium; CIl., Cladonia; E., Endocarpon; L., Lichen; Ld., Lecidea; 
Lr., Lecanora; O., Opegrapha; P., Parmelia; Pd., Peltidea; Pg., Peltigera; 
U., Urceolaria et V., Verrucaria ; en revanche, hors de la synonymie, les 
lettres indiquées sont la répétition du nom de genre , comme cela a lieu 
dans les ouvrages de botanique. 

L’habitation de chaque espèce est aussi désignée par les lettres suivan- 
tes: a., arbres vivants et écorces; b., bois mort, pourri ou travaillé ; 


— 388 — 


m., murs; r., roches ; {., terre. — Quant aux localités spéciales, on voudra 

bien se rappeler les signes et abréviations qui suivent : 

! après une localité, indique que M. Schærer a vérifié la détermina- 

. tion. 
espèce neuchâteloise, d’après le catalogue et l’herbier de Chaillet. 

3 » » indiquée par d’Ivernois et Chaillet. 

(] indication d’une localité en dehors de la flore jurassique. 

Ag.  Agassiz (d’après son herbier). 

Ch.  Chaillet. 

Cz Cornaz (mon herbier). 

d’Iv. d’Ivernois (d’après son catalogue). 

Moug. et Nestl. Mougeot et Nestler. 

S.  Schærer (abréviation que j'ai employée aussi dans la nomenclature 
botanique ! ) 

Bot. Botanicon gallicum, par Duby, 2° partie! Paris. 

cal. où catal. Catalogue. (de Chaillet ou de d’Ivernois). 

Enum. Enuwmeratio critica lichenum Europacorum ; par Schærer. Berne, 

1850. 

exs. Lichenes helvelici exsiccati, collection publiée par Schærer. 

Fi. fr. Flore française par de Lamarck et De Candolle. Paris; t, 6°!, par 
De Candolle. 

Helv. Enwmerutio methodica stirpium Helveliae indigenarum , par Haller, 
t. 1%, Gœttingue 1742. 

herb. ou hb. herbier, 

spic. Lichenum helveticorum spicilegium, par Schærer. Berne 4823-1842. 

stirp. Voyg.-Rhen. Stirpes Vogeso-Rhenanae , collection de cryptogames 
éditées par Mougeol'et Nestler. 

suppl. supplément au catalogue d’Ivernois, par Chaillet. 


Il m’eût été facile de remplacer dans plusieurs cas un certain nombre 
de localités par la désignation d'espèce commune; toutefois j'ai cru pré- 
férable de ne pas le faire, tant du moins qu’un si petit nombre de localités 
jurassiques a seul fourni son contingent de lichens. 

Puisse cette Énumération trouver un bienveillant accueil de ceux aux- 
quels elle parviendra ; toute imparfaite qu’elle soit, j'aime à croire qu’elle 
ne sera pas inutile, ne fût-ce qu’en engageant quelques botanistes à faire 
un travail plus complet sur les espèces du Jura, 

Neuchâtel (en Suisse), Juin 1852. 

D' ÉpouArD CORNAZ. 


LICHENS JURASSIQUES. 


1. LICHENES DISCOIDET. 


USNEACEES, 
USNEA Dill. 


U. barbata Fries. a. spécialement sur les conifères : au dessus de Neu- 


(rs 


2% > 


châtel! — à l'Isle! au Mont-d’Or près Vallorbes, Ag., etc. : nous 
avons les variétés suivantes : 

‘*a florida Fries. Du Chasseron au mont Aubert! 

‘b) hirla S. (L. hirtus Linn.). 

‘8 ceralina S. Sapins et mélèzes, au dessus de Neuchâtel ! et à Chau- 
mont! 

*d plicala Fr. Dans le Jura! S, spic. 507. — Environs de Neuchâtel! 

*£ dasopogu Ach. (L.barbatus Linn.). Dans le Jura! S. spic. 507. On 
trouve à la vallée du lac de Joux ! des formes intermédiaires entre 
la var. £ et celle-ci, S. spic. 507. 

‘1 arliculata Fr, S, ne l'indique pas en Suisse. 


CORNICULARIÉES. 
CORNICULARIA Schreb. 


. jJubala S. « bicolor S. (L.- Ehrh.) a. et r. 


*8 chalybeiformis S. (L.- Lino.) r. 

“7 prolixa S. (Alectoria jubata et prolixa Ach.) a. montagnes du Jura ! 
S. spic. 505 et Haller Hele. 70.— Poiriers sauvages au dessus de la 
Neuveville ! 


‘à cana S. (Alectoria jubala y cana Ach.) a. Jura! S. spic. 505. 


ochroleucu DC. y sarmentosa S. (L.- Ach.) a. canton de Neuchâtel, 
Curils dans l’herbier Ch. 


ROCCELLA DC. Ce genre, si précieux pour les teinturiers, nous 
manque complètement. 


RAMALINA Ach. 


. pollinaria Ach. a., b. et r.: à Neuchâtel! — à l'Isle ! — Cette espèce 


a un goût poivré désagréable qui empéchera de l’employer en mé- 
decine, comme on l’a fait de quelques espèces de Corniculariees. 


. farinacea Ach. a. commune, Ch. suppl. 
. tinctoria S. (L.- Web.; L. polymorphus Ach.) r. 
. fraxinea S. (L.- Linn.) a. daus diverses localités montagneuses 


du Jura, sur l’érable champêtre , le sorbier des oiseleurs, le frêne, 
les chênes, le mélèze, les sapins! etc. Nous avons trouvé à Chau- 
mont ! des passages très-intéressants entre nos trois variétés. Cette 
espèce renferme beaucoup de mucilage, et pourrait être employée 
en thérapeutique. 


— 390 — 


*« ampliata S.; forme type et la plus commune : forêts des montagnes 
du Jura, Gagnebin Helv. 72; — pied de Chaumont, Ch. cat. d’'Iv.; 
château de Chaumont, Jura neuchâtelois (montagnes) ! — l'Isle ! — 
Diesse! 

8 f'astigiata S. (L.- Pers.) assez rare. À Chaumont! Creux-du-Van, Ag. 
— Diesse ! 

‘y calicaris S. (L.- Linn.) assez rare. Chaumont ! — Diesse ! — Dans le 
cat. d’'Iv., Chaillet l’indique : « arboreus, rupestris »; cette seconde 
désignation paraît se rapporter à la Ramalina pollinaria Ach., à la- 
quelle convient aussi le synonyme de Lichen n° 4985 Haller. 


PHYSCIA Schreb. 


‘Ph. furfuracea DC. a. etr. Jura! S. spic. 486. — Commune au sommet 
des montagnes, d’Iv., catal. ; Chaumont ! — Mont-d’Or près Val- 
lorbes, Ag., etc. 

“Ph. ciliaris DC. a. et r. Neuchâtel! Chaumont ! Jura neuchâtelois (mon- 
tagnes) ! — Yverdon ; l'Isle! Coinsins! 

Ecrinalis S. (Borrera- Schl.). Rochers du Chasseron! Lesquereux 
Enum. 10. 

*"Ph. prunastri DC. a. et b. Neuchâtel! Chaumont! — Isle! (espèce mu- 

cilagineuse qui a été employée en médecine). 
‘b/ soredifera Ach. Chaumont ! 

“Ph. divaricata S. (L.- Linn.; Usnea flaccida Hoffm.) a. forêts épaisses 
du Jura!.S. spic. 492. — Au haut du bois-de Peseux 1790,° Ch. 
suppl. 


CÉTRARIACÉES, 
CETRARIA Ach. 


*C. glauca Ach. x pulgaris S, (L. glaucus Ehrh.) t., r. et a. 
.Efallax Ach. (L.- Web.) a. 
€, juniperina Ach. x terrestris S.(Squamaria juniperina Hoffm.). D’Iver- 
nois indique dans son caf. le Lichen n° 14977, Haller ; mais il faut 
très-probablement rapporter son indication à la var. suivante qu'il 
ne cite pas. k 
*B pinastri Ach. a. et b. demi-pourri : gorges du Seyon! Pertuis-du- 
Soc! marais des Ponts, Ch. suppl.; Tourne! — Vallée du lac de 
Joux! S. spic. 10 et Duby Bot. 613, Coinsins! — En montant de 
Diesse au Chasseral ! 
*C. cucullatu Ach. f. cant. de Neuchâtel, Benoît dans l’herb. Ch.; l’exem- 
plaire ne permet pas de doute. 

*C. sepincola Ach. « scutata S. (L.- Wulf.) «. canton de Neuchàtel, Curils 

dans l’herb. Ch. 
*8 chlorophylla S. (L.- Humb.) a. sur la Dôle! S. spic. 152. 

**C. Islandica Ach. x eulgaris S. type de l’espèce, t. et b. pourri: Neu- 
châtel! pâturages au-dessus du Plan, Ch. cal. d’Iv., Chaumont! 
Tourne!—Visle! Dent-de-Vaulion! Mont-d’Or près Vallorbes, Ag.: 
entre Apples et Pampigny ! — C’est la mousse d'Islande des phar- 
macies,. 

8 plalyna Kr. (Cetraria — Ach.) t. sommet du Chasseral ! 


Li LL LS den nus 


HFIPES ES AY 


— 391 — 


PELTIDEES. 
NEPHROMA Ach. 


*N. resupinatum Ach. « lomentosum S. (Pg.- Hoffm.; L. resupinatus E.B.) 
t., r. et a. canton de Neuchâtel, Curils dans l’hb. Ch., et Ch. ibid. 

(sous le nom impropre de Pd. scutata). 
*& soredialum S. (L. parilis Ach.) canton de Neuchâtel ! Ch. spic. 270. 


PELTIGERA Willd. 


*P. venosa Hoffm. t. et r. «En quittant le chemin de Corcelles à Rochefort, 
avant le Lois pour aller à la Prise-Mouchet , au-dessus de cette 
dernière, sur la gauche d’un chemin creux , sur la droite du véri- 
table, avril 1790 et novemb. 1791 » Ch. HE — Entre le Chasseron 
et le mont Aubert ! 


+ P. aphthosa Willd. {. «communis : au même endroit que le L. venosus» Ch. 


cat. d’Iv.; Creux-du-Van! Fritz de Fischer dans l’hb. Cz. 
P, canina Hoffm. t., r. et a. commune. Environs de Neuchâtel ! etc. 
“aulorrhiza S. (Pd.- FIk.; L. caninus Ehrh.) 
b) sorediula S. (Pd. limbata et sorediata Delise). Canton de Neuchàtel! 
Ch. spic. 265. 
8 membranacea S. (Pd. leucorrhiza FIk.). 
“y spuria Ach. (L.- Ach.). 
*P. polydactyla Hoffm. ct S. t. canton de Neuchâtel, Ch. suppl, 
*& microcarpa Ach. (Pg. polydactylon Hoffm.). 

*P. horizontalis Hoffm. f. et mousse des blocs erratiques : commune , Ch. 
suppl.; environs de Neuchâtel! par ex. à Fontaine-André! ne. 
neuchâtelois (montagnes) ! — lIsle ! 

*P. sylvalica Hoffm. t., r. et a. canton de Neuchätel! Ch. spic. 268. — 
Forêts au-dessous du sommet de Chasseron ! 


SOLORINA Ach. 


*S. saccala Ach. t. s'élève dans le Jura! S. spic. 45. — « Commune, se 
trouve dans les fentes de rochers humides, même sur le chemin du 
Mail en montant à droite » Ch. suppl.; au-dessus de Fleurier! Jura 
neuchâtelois (montagnes) ! — Sources de la Venoge (l'Isle)! 


OMBILICARIÉES, 


UMBILICARIA Hoffm. (Gyrophora Ach.). 
U. vellea Hoffm. & depressa Fr. (Umbilicaria — Schrad.) r. dans le Jura, 
Duby, Bot. 596. 

*U. pustulatu Hoffm. r. granitiques : pied du Jura! S. spic. 105. — Envi- 
rons de Neuchâtel! Ch. ibid.; « En abondance sur les rochers dans 
les pâturages au - dessus du Plan, avril et mai 4790» Ch. suppl.; 
Pertuis-du-Soc! et gorges du Seyon! (stérile). — [ J’en ai récolté 

- des exemplaires fertiles au petit Salève ! près Genève.] 
*U. polymorpha Schrad. y arclica S. (Gyrophora — Ach.) r. granitiques. 
“U. polyphylla Hoffm. « glabra S. (L.- Ach.) r. pied du Jura! Ch. spic. 92. 
8 flocculosa S, (L.- Wulf) « In saxis et rupibus Juræ » Duby Bot. 595. 


— 392 -- 


COLLÉMACÉES. 
COLLEMA Hill. 


. pannosum Hoffm, r. humides ; environs de Neuchâtel! Ch. spic. 518. 

*C. muscicola Acb. E, et r. 

-C. atro-cæruleum S. (L.- Hall.) x lacerum S. (L.- Sw.) sur des mousses, 
t., r, et a. à l’ile de Saint-Pierre (lac de Bienne)! S. spic. 549. 

*R pulvinatum S. (C.- Hoffm.) sur des mousses £., r. et a. 
+3 tenuissimum S. (L.- Dicks.) sur des mousses, £., r. et a. environs 
de Neuchàtel! Ch. spic. 519. 

-C. sinuatum Hoffm. (C. scotinum Ach.) mousses. 

C. minultissimum Fik. f. et b. pourri; canton de Neuchâtel! Ch. spic. 520 
et Enum. 251. 

*C, nigrescens Ach. & Vesperlilio S. (L.- Lightf.) a. canton de Neuchâtel ! 
S. spic. 526; — maronniers à Coinsins! — Chaillet indique aussi 
spécialement la forme furfuracée (°C. thysanœum Ach.). 

+8 fasciculare S. (L.- Linn., non Sm. EB.) «. Neuchâtel! —Chènes de 
l'ile de Saint-Pierre! S. spic. 526. 

+) conglomeratum S.(C.- Hoffm.) a. Montmirail! Curils spic. 526. 

-à microphyllum S. (C.- Ach.) a. — maronniers à Coinsins ! — noyers 
à Genève! Preisswerk spic. 526. s 

-C. rupestre S. « flaccidum S. (L.- Ach.) a. et r. humides du Jura! Moug. 
et Nestl., stirp. Vog.-Rhen. n° 1059, « Dans le Jura, sur les bords 
du Seyon, entre Neuchâtel et Valangin, sur des pierres. Ch. F1. fr. 
186 ct Bot. 607. 

+8 furvum S..(L.- Ach.) ».et a.: rochers humides du fura! S. spic. 
529, 

y fasciculare S: (L.- Sm. E.B., non Linn.) «a. et r. — châtaigniers de 
l’île de Saint-Pierre! S. spic. 529. 

«à verrucæforme S. (C. fureum B verrucæforme Ach.) a. etr. 

-C. granosum S. « auriculatum Hoffm. et S. (P. granosa culgaris S. spic. 
541 et P. mullifida « undulata S. spic. 351) r. dans le Jura! S. spic. 
541. — Neuchâtel! près du Locle! S. ibid.; et Creux-du-Van! 
S, ibid.; Chaillet en a trouvé de beaux exemplaires fertiles! S. ibid. 

+ dermatinum S. (C.- Ach.; P. granosa y pinnalifida S. spic. 54) r. 

C. mullifidum S. (L.- Scop.; C. melaenum Ach.) très-fréquent sur les 

rochers calcaires du Jura! S. spic. 5352. 

o complicalum S. (S: melaenun var.- Schl.) r. calcaires : montagnes 
du canton de Neuchâtel! S. spic. 553. 

*B marginale S. (L.- Huds.) r. calcaires. 

+ jacobaeazfolium S. (L.- Schrank) r. calcaires: canton de Neuchitel. 
a locis apricis! » S. spic. 553. — [Salève ! Seringe, ibid.] 

<C, cristatum Hoffm. r.calcaires : dans plusieurs localités du Jura! S. spic. 
533. — Gorges du Seyon! 

°C. myochroum S. (L.- Ehrh.) a. Saturninum S. (L.- Dicks) r. et a. (comme 

tilleul, maronnier, frêne, noyer, peuplier d'Italie, chêne et chà- 

faignier!): environs de Neuchâtel! S. spic. 555. Colombier ! — 

Fréquent dans le canton de Vaud! S. ibid., l'Isle! Coinsins! Ge- 

nollier ! — Ile de Saint-Pierre (lac de Bienne)! S. ibid. 


S60 


— 395 — 


à conglomeratum S. Châtaigniers de l'ile de Saint-Pierre! S. ibid. 
-C. crispum Hoffm. (L. pulposus Schrad.; L. marginalus Bernh.) €, m. et 
r.: Jura! Moug. et Nest. stirp. Vog.-Rkhen., n° 4056. 
C. intestiniforme S.! (C. prasinum Chaïllet! non Hoffm., nec Ach.; P. in- 
Lesliniformis S.\ spic. p.542) murs des environs de Nenchâtel ! Ch. 
spic. 542 et Enum. 258, seule localité suisse de cette espèce rare , 
trouvée dans le département de la Lozère! par Prost, et en Lom= 
bardie ! par Garoyaglio. 
*C. plicatile Ach. r. calcaires; près du lac de Neuchâtel! Ch. spic 344 et 
Enum. 258. 
*C. turgidum Ach. m. et r.; canton de Neuchâtel ! Ch. spie, 543. 
C. pulposum Ach. « vulgare S. type de l’espèce ; £., mousses, r. et m ; 
Jura, Moug. et Nestl., stirp. Fog.-Rhen., n° 1057, — Rochers des 
} bords du lac de Bienne! S. spic, 539. 
*C. stygium Delise « elveloideum S. (C.- « Ach.) r. calcaires du canton de 
Neuchâtel! Ch. spic. 545 et Enum. 260. 
“7 puleinalum S, r, près du lac de Neuchâtel! Ch. spic. 345. —#», cal- 
caires au bord du Jac de Bienne! S. exs. n° 435, 
à orbiculare S. (C. hydrocharum Schl.) abondante sur les r. calcaires 
au bord du lac de Bicnne! S. spic. 545 et exs. n° 454. 
*e incisum S. (C. elveloideum var.- Ach.) r. 


PARMELIACÉES. 


STICTA Schreb, 

‘St. pulmonaria Ach. (Pulmonaire des chênes, Thé des Vosges âes pharma- 
cies) a. : Lignières! D° Paul Morthier dans l’hb. Cz; Pouillerel! 
Dame-Ottenette, herb. de la ville de Neuchâtel (ex. fertiles); Jura 
neuchàâtelois Ag.; Fleurier! Creux-du-Van ! Fritz de Fischer dans 
l'herbier Cornaz. 

St. scrobiculala Ach. a.: cette espèce est indiquée comme neuchâteloise 
par d’Ivernois (cat.), ce que je mentionne d’autant plus, que ni 
Haller, ni Schærer, qui l’ont tous deux trouvée en Suisse, n'ont 
pu se rappeller d’où ils l'avaient, 

[St. fuliginosa Ach. r. et a. : Salève, près Genève! Seringe spic, 484. — 
Parait manquer dans le Jura]. 

PARMELIA Ach. $ 1. LoBartA Schreb. 

P. perlata Ach. «innocua Walir. a. ct ».: forêts du Jura, Stæhelin Hele. 
rire 

*P, caperata Ach. a., b. et r.: canton de Neuchâtel! 8. spic. 471. Envi- 
rons de Neuchâtel ! (blocs erratiques et pins). 

*B membranacea S. (L.- Dicks) r. humides. 

-P. Acetabulum Fr. a. 

PARMELIA Ach, $ 2. IMBRICARIA Schreb. 


*P. rubiginosa Ach. £ cœruleo-badia S. (L.- Schl.) r. et a.: Jura, De 
Caundolle, F1. fr. 187 ; — canton de Neuchätel! Ch. spic. 463. 


Soc. DES SC. NAT. T. II. 28 


— 39€ — 


*P..obseura Fr. & chloantha Fr. (P.-. Ach.) a.: Neuchâtel, 
‘€ cycloselis S. (L.- Ach.) a., b. et r. 
“b) ciliata S. (L.- Hoffm.) «., b.etr. 

*P. pulverulenta Fr. & allochrou S. (L.- Ehrh.) a.: Neuchâtel !—Coinsins! 
‘8 anguslula S. (L.- Hoffm.) a. 

“*P, stellaris Fr. & aipolia S. (L.- Ehrh.) «. et b.: Neuchâtel! — entre 
Coinsins et Genollier!—J’ai trouvé une forme intermédiaire entre 
« et 8 sur des frènes au bord du petit lac de Saint-Blaise ! 

‘8 ambigua S. (L.- Ehbrh.; L. stellaris Hoffm.) a. : — Coinsins! 

y hispida Fr. a. de Neuchâtel! à Valangin ! — Coinsins! 

“0 tenella S. (L.- Scop. et Ehrh.) «. et b.: Neuchâtel et environs !— 
Coinsins! . 

.< caerulescens S. (L.- Hag.; Lr. Hageni Ach.) a. et b. 

"P. pulchella S. (L.- Wulf.) « caesia S. (L.- Hoffm.) r., tuiles, b. et 
mousses. 

‘y semipinnata S. (Lobaria- Hoffm.) tuiles et b. 
P. propinqua S. spic. 436. r. calcaires du Jura! S. ibid. 

*"P. ceratophylia Wallr. x physodes S. (L.- Linn.) a. et r.: au dessus de 
Neuchâtel ! 

*B P. platyphylla S. (P. physodes, var.- Ach.). 

‘7 obscurata S. (P. physodes, var.- Ach.) «. 

"à vitlata S. (P. physodes, var. - Ach.) a.: — troncs pourris entre 
Apples et Pampigny! 

€ tubulosa S. Montagnes du Jura! S. spic. 460 et Enum. 42. 

*P. pertusa S. (L.- Schrank ; L. diatrypus Ach.) troncs de sapins. 

*P. quercifolia S. (L.- Wulf.) « filiacea S. a) munda, et b) fuliginea S. 
a.: chênes près de Neuchâtel! — Environs de Genève! S. spic. 449. 

8 convoluta S. a.: pins près de Neuchâtel! — châtaigniers à Coinsins! 
— Environs de Genève! S. ibid. ' 

“P. Aleurites Ach, a., b.etr, 

*P. saxalilis Fr. « leucochroa Wallr. &., b. et r.: commune dans le can- 
ton de Neuchâtel, Ch. cat. d’Iv. et suppl. 

*P. conspersa Ach. r. (blocs erratiques) : environs de Neuchätel ! gorges 
du Seyon! —entre l'Isle et Mont-la-ville! — D’après Chaïllet nous 
aurions les formes : ‘a) latior S., et *b) stenophylla Ach. 

*P. ambigua Fr. a. etb. pourri: —sur les hauteurs entre le Chasseron 
et le Mont-Aubert, par ex. près du chalet du grand Beauregard! 
Dôle! S. spic. 469 ; — Haasenmatt! S. ibid. (dans ces trois loca- 
lités les deux variétés!) 

*x diffusa S. (L.- Schrad.; P. ambigua x ochromatica S. spic. 468). 
*@ albescens S. (L. ambigquus & albescens Wahlenb.), 

- P. olivacea Ach. a., b. el r.: par ex. : «) munda S. sur des arbres près 
de Neuchâtel ! b) furfuracea S. sur des pins entre le Chanet et 
Peseux! 

P. denditrica Pers. (P. pulla Ach.) blocs erratiques : je ne saurais indi- 
quer de localités précises. 

*P, fahlunensis S. y trislis S. (L.- Linn. fil.) r. 


— 39 — 

“P. parietina Duf. « vulgaris S. (L. parielinus Ehrh. et Ach.) extrême- 
ment commun, r., fer!, b. et surtout a. (comparativement rare 
sur les conifères! et plus fréquent sur les promenades, dans les 
vergers et les jardins, que dans les forêts) — Neuchâtel! —Yverdon; 
Visle ! Coinsins ! 

: turgida S. sur du bois à Genève! Boissier, Enum. 50. 

"2. laciniosa Duf. a.: montagnes du Jura! S. spic. 479; — érable 
champêtre, orme et chênes à l’Isle! 

“y candelaria Fr. a.: sur des ormes à Neuchâtel! — sur le Pyrus aria 
à Coinsins! 

*o viridis S. (Lepra- S.; Lepra botrioides E. B.) a. 

:P, elegans Ach. r., tuiles et b. (plus rarement); commune dans les mon- 
tagnes du Jura! S. spic. 425. — Neuchâtel! — l'Isle ! 

.« orbicularis S. (L. elegans Sm.; P, elegans «x miniala et & fulva a.) 
S. spic. 425. 

*8 discrela S. (Psora miniala Hoffm.; P. elegans & fulea b.) S. spic. 
425. 


PARMELIA Ach. $ 3. SQUAMARIA Hoffm. 


[P. rubina S. x chrysoleuca S. (L.- Sm.) au pied du Salève, sur des 
granits, De Candolle F1. fr. t.2, p. 577]. 
P. amniocola Fr.; forme type: sur des mousses au Chasseron! S. Enum. 
54 et Cz. 
£ nimbosa S. (P.- Fr.) f.: au Chasseron! S. ibid. et Cz. 


LECANORINÉES. 


LECANORA Ach. $ 1. PsoRoOMA Ach. 


‘L. cervina Ach. £ caslanea S. (L.- Ram.; L. squamulosus E. B.; Lr, 
halophaea Ach.) r. (et tuiles S.): canton de Neuchâtel! Ch. spic. 
429 ; Pertuis-du-Soc Merveilleux ! 

L. crassa Ach. C’est très-probablement à cette espèce qu’il faut rapporter 
Lichen saxalilis, undulatus, albus Haller, indiqué comme neuchà- 
telois par le D' d’Ivernois (cat.) 

‘« lentigera S. (Li- Web.) £., mousses et r.: Jura! Moug. et Nestl. 
stirp. Vog.-Rhen. n° 1051.— Canton de Neuchâtel! Ch. et Godet, 
spic. 455 ; au Mail! à Fahy! au Plan, en avril, etc. Ch. suppl. 

“8 caespilosa S. (L.- Vill.) {. et mousses, J'ai trouvé sur des pierres 
calcaires, entre Saint-Blaise et Cornaux, un lichen qui serait, 
d’après Schærer, une forme avortée de cette variété. 

‘€ gypsacea S. (Lr.Smilhii Ach.) Dans les fentes des rochers : montagnes 
du Jura! S. spic. 435 et Enum. 59 ; — roches calcaires au dessus de 
Choaillon, herb. Ch. — Sommet du Chasseron! Dôle! S. spic. 433. 


LECANORA Ach. $ 2. PLacoprum Hill. 


L. Reuleri S. Enum. 59 (P. murina £ pulvinala S. spic. 448). Rochers 
calcaires du creux de Pranzioux, en montant au Reculet de Thoiry ! 
Reuter spic, et Enum. et S, Enum. 


— 596 — 


‘L. radiosa S. (L.- Hoffm.) « circinala S. (L.- Pers.) r, diverses : envi- 
rons de Neuchâtel! Ch. spic. 415 et Cz, — l'Isle! Coinsins! 
8 myrrhina Fr. r. 
-à pariabilis S. (L.- Pers.) r. calcaîres : environs de Neuchâtel! Ch. 
spic. 415 et Enum. 61. 
*L. callopisma Ach. r. diverses : canton de Neuchâtel! Ch. spic, 422. 
EL, murorum Ach. m., r..et tuiles : canton de Neuchâtel! Ch, spic. 423; 
à Neuchâtel! 
‘y£itrina S. (P.- Ach.) r. diverses. 
‘L. friabilis S. (L.- Vill.); « fulgens S. (L.- Sw.; L, cilrinus Ebrh.\ 
t. et mousses : autour de Neuchâtel, par ex. au Mail! au Plan, Ch. 
suppl. 
‘L. muralis S. (L.- Schreb.) « saæicola S. (Psora muralis Hoffm.) r. et 
b.; à Neuchâtel! (et « sine thallo »); —lisle! 
"8 diffracta S. (L.- Ach.) r. diverses. 
‘à albescens S. (Psora- Hoffm.) r. calcaires : pierres entre St-Blaise 
et Cornaux! 
“b) galactina S. (P.- Ach.) m.: à Marin! 


LECANORA Ach. $ 3 RiNODINA Ach. 


*L. sophodzs Ach. a.: Jura! S. spic. 596 ; — canton de Neuchâtel! Ch. ibid. 

L. rimosa S. (L.- Oed.) x sordida S. (L.- Pers.) r. et b.: canton de Neu- 
châtel! Ch. spic. 586. 

‘à) lactea S. (L.— Linn:) blocs erratiques au pied de Chaumont! 
*e) corallina S. (L.- Linn.; Isidium corallinum Acb.) 

‘f) deulbala S. (L.- Ach:; Fariolarig corallina FIk.) 

‘€ Swarzii S. (L.- Ach.) r. 

‘L. atra Ach. « vulgaris S. a. et r.: canton de Neuchâtel! Ch. spic. 388; 
Chaumont ! 

‘8 exigua S. (L.- Ach.) a. et r.: chênes et cerisiers du canton de 
Neuchâtel! Ch. spic. 595. 

L. subfusca Ach. « vulgaris S. a. divers: Neuchâtel! Chaumont !— l'Isle! 
C’est un des plus communs lichens. J’ai trouvé une forme inter- 
médiaire entre les var. « et @ sur un tilleul, entre Neuchâtel et 
Yalangin! 

‘8 distans Ach. a.: frènes à Valangin! 

‘7 glabrata Ach, a.: frênes à Valangin! 

‘à caleilea Ach. a. 

£ pinastri S. sur le pin sylvestre : Pertuis-du-Soc! 

"b) cinereo-sulphurea S: (Lepraria cinereo-sulphurea Fik.) conifères 
(pin sylvestre et mélèze!): canton de Neuchâtel! Ch. spic. 212 ; 


Neuchâtel! gorges du Seyon! du Chanet à Peseux ! — Coinsins! 
“£pulicaris Fr. (Patellaria- Pers.) a. et b.: cerisiers au Plan des 
bouchers ! ; 


# leucopis Ach. (L.- Ach.) r. granitiques : — Coinsins. 
‘& crenulata S. (L.-. Dicks) r. diverses. 
y hypnorum S. (L.- Wulf.; Lr. epibryon Ach.) mousses : Chasseron ! 
L. Agardhiana Ach. r. calcaires du Jura! S. spic. 594 et Enum. 76, r. 
néocomiennes à Neuchâtel! — m' Dôle ! S. spic. 594. 


— 397 — 


*L. coarctata Ach. y elacistu S. (P.- Ach.) r. calcaires du canton de Neu- 
châtel! Ch. spic. 395. 
-L. pallida S. (L.- Schreb.) «x albella S. (L.- Pers.) a. (frêne, chêne et 
orme!): Pertuis-du-Soc! Pierre-à-Bot! Valangin! 
‘8 augulosa S. (L.- Schreb.) a.: frênes à Valangin! 
7 cinerella S. (Lr.albella var.- FIk.) a.: jeunes chênes S.; mélèzes, 
à Chaumont! | 
*ê fuscella S. a.: peupliers S. 
- L, pallescens Fr. @ Upsaliensis Fr. (L.- Linn.) mousses : — sommet de 
Chasseron! 
*y tumidula S. (L.- Pers.) a.: —chènes au dessus de l’Isle! tilleuls 
au dessus de Genollier ! — Ile de Saint-Pierre! S, spic. 401. 
à albo-flavescens S. (L.— Wulf.) a.: montagnes du Jura! S. spic. 401. 
- — çanton de Neuchâtel! S. ibid. — sapins du m' Chatel! (près du 
Mont-Tendre); m‘ Dôle! S. ibid. 
*L. lartarea Ach. « saxorum S. var. type; r. 
-L. pilellina Ach. « areolata S. var. type; r., a. et b.: Neuchâtel ! — 
Coinsins ! l’Isle ! ; 
*£ citrina S. (Spiloma xanthostigma Ach.) r. et a. 
y aurella S. (V.- Hoffm.) {. et mousses : — terre du Chasseron ! 
*L. polytropa S. (L.- Ehrh.) à sulphurea S. (L.- Hoffm.) +. 
-L. varia Ach. x pallescens S. type de l’espèce ; a. et b.:—bois de sapin 
pourri à l'Isle! 
“à graniformis S. (L.- Hag.; P. corrugala S. $pic. 149) —sur de vieux 
chênes à l’ile de Saint-Pierre ! S. ibid. 
“£ maculiformis S. (V.= Hoffim.) a.: pin sylvestre au Pértuis-du-Soc ! 
“x âpochroea (Lr.- Ach.) a. et b. 
*L, ulmi mihi! (L.= Sw.; Palellaria rubra Hoffm.; Lr. rubra Ach. et S. 
Enum.; P. rubra Ach. et S. spic.) à.: chaine du Jura! S. spic. 405. 
— Sur l’orme des montagnes à l'Isle! et sur des chênes entre ce 
village et Montricher ! — Ile de Saint-Pierre! S. spic. 403, Je ne 
VPai jamais vu que sur de vieux arbres. J’ai repris le nom spécifique 
de Swartz comme le plus ancien, d'autant plus que cette espèce se 
trouve bien réellement sur l’orme. 


URCEOLARIA Ach. 


*U. Oederi Ach. r. micacées : au Val-de-Travers, herb. Ch. 

U. cinerea Ach. « vulgaris S. (U. ocellata F1.) r. diverses : blocs erra- 
tiques des environs de Neuchâtel , par ex. aux gorges du Seyon! 

‘8 alba 8. u) mullipunctala S. (Lr.- Ach.), et f) tigrina S. (U. cine- 
rea £ - Ach.) r. granitiques. 

*U: glaucopis 8: (U. calcaria 3 glaucopis Ach.) r. calcaires ; l’exemplaire 
de l’herb, Ch. porte le nom cité d’Acharius, avec la note: « selon 
Schærer. »—On y trouve aussi l'indication de l'U. cineréo-rufescens 
Ach., autre espèce des rochers des Alpes, qui est bien douteuse 
pour le Jura. 

*U. scruposa Ach. & vulgaris S. (L. scruposus Linn.) r. diverses et mousses 
des blocs erratiques ; environs de Neuéhâtel!, par ex. roches du 
Vauseyon Ch, suppl, et gorges du Seyon! 


“à bryophila Ach. (L.- Ehrh.) {., m., mousses et Cladonia! à Neuchà- 


tel! — à Coinsins! 
e crelacea S. (Gyalecta- Ach.) t. et r.: canton de Neuchâtel ! Ch. spic. 
76. 


"€ diacapsis S. (U.- Ach.) r. (assez douteuse). 
*U. ocellata DC. t. et r.: rochers calcaires près de Neuchâtel! 
**U. calcarea Ach. r. diverses, ». et tuiles: Neuchâtel! Peseux ! — Isle! 
Coinsins ! 
*« concreta S. type de l'espèce: r. calcaires du Jura! S. spic. 74. 
+8 contorta S. (V.- Fik.) r. calcaires du canton de Neuchâtel! Ch. 
spic. 74. 
U. verrucosa Ach. m.: — sommet du Chasseron ! 
*U° mutabilis Ach. a.: — chènes près de l’Isle ! tilleuls près de Genollier ! 
— Ile de Saint-Pierre! S. spic. 77. 


LECIDINÉES. 
GYALECTA Ach. 


*G. cupularis Fr. (L. marmoreus E.B.) r.: lieux ombragés du Jura! S. 
spic. 79, Ch. dans F1. fr. 182, et Duby 665 et 666 ; — Neuchâtel! 
Fleurier ! 


LECIDEA Ach. $ 1. PsorA Hall. 


*L. decipiens Ach. t.: environs de Neuchâtel, par ex. au pont du Vau- 
seyon, etc. Ch. suppl., Crèt-Taconnet ! 

“L. testacea Ach. t. et r.: rochers calcaires du Jura, Ch. dans FI. fr. 18h, 
Duby 658; — canton de Neuchètel, sur de la terre! S. et Ch. spic. 
117, roches néocomiennes de Fahy près Neuchâtel! Creux-du-Van! 
S. ibid. (Cette espèce n’a été observée en Suisse que dans notre 
pays et dans le Valais). 

L. atro-rufa Ach. t.: — Chasseron! S. Enum. 96. 

*L. lurida Ach. t. et fentes des r.: dans le Jura! Moug. et Nestl. stirp. 
Vog.-Rhen. n° 643 et S. spic. 109; terre des murs à Neuchâtel! 
gorges du Seyon! | 

r: globifera Ach. t. et fissures des r.: Jura neuchätelois (montagnes)! 
juin 1842. 

*L. triplophylla Ach. forme type; a.: canton de Neuchâtel! Ch. spic. 119; 
— chênes de l’ile de Saint-Pierre! S. ibid. 

B coronata S. (V.- Hoffm.) @., {. et m.: — pente du Chasseron ! 

*e corallinoïides S. (Stereocaulon- Hoffm.) r. et m.: roches calcaires du 
Jura! S. spic. 113 ; — Neuchâtel! Peseux ! 

É caesia S. (Ld.- Duf.; Lepraria- Ach.) r. calcaires humides du Jura! 
Ch. et S. Enum. 99. 

*L. squalida Ach. r. granitiques. 

“L. cœruleo-nigricans S. (L.- Lightf.; Lichen opuntioides Vill.; Patellaria 
gesicularis Hoffm.; Lichen paradoœus Ach.) t. et fentes des .: 
commun aux environs de Neuchâtel! entr’autres au Mail! — à la 
Dôle! S, spic. 121. — Chasseral! — Haasenmatt! S. ibid. 


—+ 399 — 


‘L. candida Ach. fréquent sur les roches du Jura! S. spic. 120. — Neu- 
châtel! par ex. au Crêt! et au Crèt-Taconnet! — l'Isle ! — rochers 
au-dessus de la promenade du Passgart, à Bienne! S, ibid, ; Chas- 
seral ! vallée de la Birse ! Moug. et Nestl. slirp. Vog.-Rhen. n° 642. 


LECIDEA Ach. $2, RHIZOCARPON Ramond (DC. FI, f.4. 2, p. 565), 

‘*L. geographica S. (L.- Linn.) r. diverses. 

‘x Contigua S. type de l'espèce ; Neuchâtel! — l'Isle! Coinsins. 

‘£ atrorirens S. (L.- Linn.) canton de Neuchâtel, Ch. 

"L. fumosa Ach. + nitida S. type de l’espèce; r. granitiques: canton de 
Neuchâtel! Ch. spic. 153 ; environs de Neuchâtel ! 

*L. confervoides S. (Rhizocarpon- DC.) y atro-alba S. (Ld.- Ach.}r, gra- 
nitiques : Neuchâtel! gorges du Seyon! d’Ivernois parait aussi 
l'indiquer comme neuchâtelois. — Entre l'Isle et Mont-la-ville ! 
Coinsins! 

"€ fusco-atra S. (V.- Hoffm.) r. granitiques. 

LECIDEA Ach. $ 3. CAricLARIA Ach. 

‘L. silacea Ach. r. micacées ; l’exemplaire de l’hb. Chaillet porte l’indi- 
cation : « selon Schærer »; toutefois l'espèce est-elle bien indigène ? 

"L. proluberans Ach. r. calcaires du Jura! S. spic. 161 et Enum 117 ; — 

m'Dôle! S. spic. 161 et dans l’herb. Ch. 

‘L. calcaria S. (L.- Weiss) 8 margarilacea S. (Ld.- Ach.; Lichen epipo- 

| lius Sm.) m. et r.: canton de Neuchâtel! S. spic. 159, 

L. albo-atra S. (L.- Hoffm.) montagnes du Jura! S. spic. 141 ; canton 
de Neuchâtel! Ch. ibid. 

.‘« amylacea S. (L.- Ehrh.) sur les chênes. 

‘8 corticola S. (Ld.- Ach.) a.: environs de Neuchâtel! — chênes de 
l'ile de Saint-Pierre ! S. exs. n° 445. 

‘à epipolia S. (L.- Ach.) r. calcaires du Jura! Ch. spic. 141. 

‘L. pelraca Ach. r. diverses et {.: Neuchâtel ! — Piste! 

L. jurana S. Enum. p. 125. Rochers calcaires au pied du Chasseron, au 
dessus de Fleurier! S. ibid. 

L. flavo-virescens T. ct B. « cilrinella S. (L.- Ach.) sur un mélèze à 
Chaumont! (Oct. 1844); M. Schærer a ajouté à sa détermination, 
qu'il n'avait jamais vu cette espèce lerreslre sur du bois. , 

‘L. abielina S., non FIk. (L.- Ehrh., non Sm.) sur nos deux espèces de 
sapins dans les régions montagneuses du canton de Neuchâtel! 

[L. leprosa S. Naturw. Anzeig. Aug. 1818, 10. Sur les roches arénacées 
près de Chiêtre au canton de Fribourg, au bord du lac de Neuch4- 
tel! S, spic. et 171 et Enum. 126.] 

‘’L. immersa Ach. r., principalement celles de nature calcaire. 

‘x calcivora S. a) leucoplaca S. (Lichen calcivorus Ehrh.) r. et m.: à - 
Neuchâtel! au dessus du Plan, Ch. dans le cat. d'Ivernois ; Mont- 
Mirail! b) rhodoplaca S. r. calcaires du Jura neuchâtelois! Ch. 
spic. 159 et Enum. 127. - 

‘7 Pruinosa S, (L.- Sm , E.B.) r. calcaires du Jura, entre autres dans 
le canton de Neuchätel! S. spic. 159; Neuchâtel (r. néocomiennes 
et jurassiques) ! 

à atro-sanguinea Flk. (Verrucaria punctala var.- Hoffim.) r, calcaires 
du Jura! S, spic. 139 ; Neuchâtel ! 


—  H00 — 


*L. cruslulata S. (Lichen parasema var.- Ach.) r. diverses. 

*L. enteroleuca Ach. a.: canton de Neuchàtel! Ch. spic. 455 et Enwm. 128. 

-L. punctata Fk. « parasema S. (L.- Ach.) b) limilala S. (L.- Scop.) a. 

-y microcarpa S. (Lecidea parasema var.- Ach.) hètres. 

+3 puncliformis S. (Lichen pinicola E.B.) a. et b. 

* rugulosa S. (Lecidea parasema var.— Ach.) a.: (maronnier, tilleul, 
cerisier, frêne , orme, pin et mélèze!) Neuchâtel! Chaumont! et 
Valangin! Val-de-Travers! S. exs. n°528. — J'en ai trouvé une 
« forma insolita! S.» sur des cerisiers à Chaumont! 

4 Saprophila S. (Lecidea parasema var.- Ach.) a. et b. pourri: — 
chênes à l'Isle! 

3 denudala S. (L.- Schrad.) b.: — sapins à demi-pourris à l'Isle! 

premnea Ach. (Lichen abillinus Sm., E. B., non Ehrh.) a.: très-dou- 
teux. 

-L. leucocephala S. (Sphaeria- Ehrh.) a.i —sur des chènes près de Ge- 

nève! Preisswerk, Enum. 131. 

L. sabulelorum Fik, « muscorum S. (L.- Wulf.) f. et mousses : —Chas- 
seron! Coinsins! 

*& Alpestris Sommf, {. — douteuse. 

-L. parasilica Flk. parasite sur divers lichens. 

-L. granulosa Ach. x decolorans S. (Verrucaria granulosa Hoffm.) {., b. 
et a.: — sur de vieux bois, en montant au Chasseron! Cz («forme 
très-intéressante » S. !) 

*L. Lighlfootii Sm. & commutata S. (Lr.- Ach.) sur les conifères. 

+L. anomala Ach.* cyrtella Ach. (Lecidea cyrtella Ach., non FIk.) a. et r. 

B Griffithü S. (L.- Sm.; Lecidea anomala FIKk.) a. et b.: — sur des 
aulnes, à la vallée du lac de Joux! S. spic. 170. 

-L, sphaeroïdes S. (L.- Dicks) & efusa S. (L.- Sm.) a. 

+ conglomerala S. (L.- Heyd.; in Hoffm. D. FI.) a. 

3 atro-purpuraea S. a. et f,: sur des sapins au Pertuis-du-Soc ! — 
l'Isle ! 

Emuscorum S. (L.- Sw., non Hoffm., nec E.B.) mousses sur la.terre, 
les murs et les arbres : — à la Dôle! S. spic. 167. 

-y vernalis S. (L.- Linn.; Bialora- Fr.) herbes mortes et f. 

% fusca S. (Ld.- Borr.){. et a.: — hètres à la vallée du lac de Joux! 
S. spic. 167. 

-, piridescens S. (L.- Schrad.; Lichen dubius T. et B. in E.B.) a. et 
b, pourri: canton de Neuchâtel! Ch. spic. 167. 

-L. pineti Ach. a. el b. pourri: canton de Neuchâtel! Ch. spic. 179. 

-L. rosella Ach. a. et principalement hêtres (très-rare en Suisse ! S.). 

:L. rubella S. (L.- Ebrh.) type de l'espèce; a.: canton de Neuchâtel! 
Ch. spic. 479 ; chênes entre le Chanet et Peseux ! — maronniers et 
noyers à Coinsins ! 

B atro-sanguinea S. Enum. 142. (Lecidea anomala & S. spic. 170 ; Le- 
cidea pulverea Borr.) a.: canton de Neuchâtel! Ch. spic. 479 ; — 
noyers à Coinsins! 

:L. aeruginosa S. (L.- Scop. a° 1760; Lichen elveloides Web., non Wulf.; 
Lichen icemadophilus Linn. suppl. a° 1761) b. pourri, mousses et 


5 


| 


t. tourbeuse : Jura, Haller, Hele, 82; — près de Ja Tourne! Creux- 
du-Van, Ch. cat. d’Iv,; au-dessus de Fleurier ! — Chasseron, Ch. 
ibid. — au-dessus de Diesse! Chasseral, Ch. ibid, — M'Haasen- 
matt! S,. spic. 177. ; 


‘L. ferruginea S. (L.- Huds.) x cinereo-fusca S. (L.- Web.) a., b. et r.; 


assez rare en Suisse. 

 lestiva S. (Ld. caesio-rufa, var. — Ach;) a) muscicola S. — sommet 
du Chasseron! b) suxicola S. — pierres schisteuses à Coinsins! 

-ê sinapisperma S. (Palellaria- DC.; Ld. ferruginea, var, leucoraea Ach.) 
mousses. 


. erythrocarpia Ach. « arenaria S. (L.- Pers.) m. et r.: Jura neuchà- 


telois! Trog. spic. 189. 


. Prevostii S. (Bialora- Fr., in Moug. et Nesil, exs. n° 848) r. calcaires: 


Jura! Moug. et Nestl. slirp. Vog.-Rhen. n° 848 (Bot. 179); Jura 
neuchâtelois! Ch, spic, 479 et Enum. 146. 


. rupestris Ach. « incruslans S. (Palellaria- DC.) r. calcaires: à Neu- 


châtel ! — à la Dôle! S. spic. 185. 

“8 calva S. (L.- Dicks.) r. calcaires de Fahy (à Neuchâtel)! 

“7 rufescens S. (V.- Hoffm.) pierres calcaires des environs de Neu- 
châtel! — Chasseral , herb. Ch. (var. « pyrithonia »). 


. lufeo-alba Ach. «x Persooniana S. (Gyalecta- Ach.; L. auraultiacus 


Ehrh.) a. divers, entr’autres : au Cret! — J’ai trouvé une forme 
intermédiaire entre cette espèce et la suivante, sur des chatai- 
gniers à Coinsins! 

‘7 holocarpa Ach. (L.- Ehrh.) b., a. et t. 


. cerina S. « Ehrharti S. (L. cerinus Ehrh.) a. divers, maronnier, til- 


leul, sorbier des oiseleurs, frène, orme champêtre, et pin sylvestre! 
et r. granitiq.! Entre Peseux et le Chanet! Neuchâtel! Chaumont ! 
Valangin ! — l'Isle}! 

“ cyanolepra S. (Palellaria cérina B- DC.; L. cerinus Schrad.) a. 


. auranliaca S. B ochracea S. (P. ochracea Fr.) r. calcaires dn Jura 


suisse! S. Enum. 149. 

“y flavo-virescens S. (L.- Wulf.; L. erylhrellus Ach.) r. 

*à rubescens S. Enum. 149. (Ld. erythrella y — S. spic. 185) r. diverses: 
— r. schisteuses à Coinsins! 


GRAPHIDÉES. 
OPEGRAPHA Humb. 


. scrîipla Ach. « limilata Ach. (0.- Pers.) a.: gorges du Seyon ! 
*8 recta S. (0.- Humb.; O. cerasi Pers. et Chev.) a., et principalement 
cerisier. 
* pulverulentæ (0.- et O. pruinata Pers.) a. 
“€ serpentina S. (L.- Ach,) a. divers : Neuchâtel! Pierre-à-Bot! 
. denditrica Ach. a.: douteuse. 
. atra Pers. a denigrata S. (L.- Ach.) écorces lisses; frênes au bord 
du petit lac de Saint-Blaise ! 
*8 bullala S, (0.- Pers. et DC.) écorces lisses. 
+ stenocarpa S. (0.- Ach.) «. 
Soc. DES SC. NAT. T. II. 2) 


— 02 — 


+ vulgata S. (L.- Ach.) sapins. 

-x dispersa S. (0.- Schrad.; A4rthonia- Duf.) «. 

-X radiala S. (0.- Pers.; O. aslroïdea E.B.) a. à 

-u astroidea S. (0.- Ach.) a.: frènes près de Valangin ! 

“y Swartziana S. (Arthonia- Ach.) a. 

-£ cinerascens S. (Arthonia Swartziana, b. cinerascens Ach.) a.: frênes 
au bord du petit lac de Saint-Blaise ! 

*o obscura S. (0.- Pers.) a. 

*O. herpetica Ach. « rubella S. (L.- Ach.; O. rubella Pers. et DC., et O. 

aeneu DC.) hètres et sapins. 

+) fuscata S. (0. denigrata, var.- Turn.; O. herpetica FIk.) a., spé- 
cialement frènes. 

*5 subocellata S. (0. rubella :- Ach.) peupliers, frênes et érables. 

-0. varia Pers. sur l’orme des montagnes, à l'Isle! 

+4 lichenoides S. (0.- Pers., L. nothus Ach.) a. 

+ pulicaris S. (L.- Hoffm.; O. pulvella Ach.; O. cymbiformis FIK.) a. 
et: 

“b) phaea S. (0.- Ach.) a. surtout frênes. 

*c) saxicola S. (0.- Ach.) r. diverses. 

+3 rimalis S. (0.- Pers.) «. 

*£ diaphora Fr. (L.- Ach.) a. [poiriers à Montet, près Cudrefin!] 

$ calcaria S. (0.- Turn.; O. grumulosa Duf.) r. calcaires de la Suisse 
jurassique ! Duby Bot. 644 et Ch. Enum. 158; canton de Neuchà- 
tel! Ch. spic. 551. 


NB. Les formes des Opegrapha, où je n'ai indiqué aucune localité pré- 
cise, sont assez répandues en Suisse; je suis persuadé qu’on en trouvera 
encore plusieurs autres dans le Jura. 


Il. LICHENES CAPITATI. 
CALICIOIDÉES. 


CALICIUM Pers. 
-C. turbinatum Pers., parasite sur la Pertusaria communs. 
*C. inquinans S. (L.- Sm. E.B.) a. et b.: au grand Beauregard (Chas- 
seron) ! 
+) saepincola S. (Schizoxylon- Pers.) b. 
*C, hyperellum Ach. « vulgare S. type de l'espèce ; a. et b.: — sapins du 
Pré de l’haut (Mont-Tendre)! 
3 aciculare S. (Cc.- Schl., non Ach., nec Sm.) a.: au grand Beaure- 
gard (Chasseron)! 
+5 salicinum S. (Ce.- Pers.; Cc. trachelinum Ach.) b. 
-C. adspersum Pers. « roscidum Fw. (Cc. claviculare B- Ach.) a. 
+ trabinellum Schl. b. écoreé ou pourri: canton de Neuchâtel! Ch. 
spic. 254. 
+C. lenticulare Ach. « quercinum S. (Ce.- Pers.) a. et b. mort: vieux 
chênes dans le canton de Neuchâtel! Ch. spic. 235. 
*8 cladoniscum S. (Cc.- Schl.) b. pourri. 
“€ sublile S. (Ce.- Pers.) b. pourri. 


< M 
°C. nigrum S. « sphaerocephalum S. (L.- Sw.) conifères. 
£ curtum S. (Ce.- T. et B.) pin sylvestre et b. pourri : au dessus de 
Fleurier ! 
y pusillum S. (Cc.- FIk.) b. pourri ; — pente du Chasseron! 
:C. chrysocephalum Ach. a. et b. 
*C. phacocephalum T. et B. « saepiculare S. (Cc.- Ach.). b. et a. 
*C. trichiale Ach. « validum S., dans nalurw Anzeig, Winlerm. 1821 ; a. 
et b.: chènes, ile de Saint-Pierre! S. spic. 5. 
C. stemoneum Ach. « aeruginosum S. a.: sur un mélèze , entre le Chanct 
et Peseux ! 


CONIOCYBE Ach. 


C. pusiola mihi (Cc.- Ach., Act. holm. a° 4817; Coniocybe nigricans ! Fr. 
Sched, cril. a° 1824, et S. Enum. p. 74)—sur le pin sylvestre à Coin- 
sins ! « rarissimum ! S.» [N’avait été indiqué en Suisse que sur les 
chênes de Rifferschwyl, canton de Zurich! Hegetschweïler.] — Jai 
repris le nom le plus ancien, que Schærer trouvait trop semblable 
à celui de Calicium pusillum , inconvénient qui d’ailleurs disparaît 
dès qu’on admet le genre Coniocybe. 

°C. pallida Fr. (Cc. stilbeum S. spic. 4; Cc. cantherellum E. B.) a. 
°C. furfuracea Ach. racines des a., t. et r.: forêts des environs de Neu- 
châtel! S, spic. 6. 


SPHÉROPHORÉES. 
SPHÆROPHORUS Pers, 


*S. coralloïdes Pers. a. et r.: les exemplaires de l’hb. Ch. sont stériles, 
ce qui laisse quelques doutes sur la détermination : la présence de 
cette espèce en Suisse n’a éfé mentionnée que par Schleicher. 


CLADONIACÉES, 

STEREOCAULON Schreb. 

‘St. corallinum Schreb. (L. paschalis Ehrh.) r. graniliques. 
BAEOMYCES Pers. 

‘B. roseus Pers. t. — entre l'Isle et Mont-la-ville! et entre Apples et 
Pampigny ! 

‘b) coccodes Fr. (Isidium dactylinum Ach.) t.: Epagnier, bb, Ch. 

*B. byssoides S. (L.- Linn. et E.B.; L. fungiformis Sibth.; L. rufus 
Huds.; B. rufus et rupestris DC.) £., b, et r. 
CLADONIA Hill. et Schreb. A) Scypnopaorus Vent. 


“CT. macilenta Hoffm. « bacillaris S. (B. bacillaris Ach.; L. filiformis Sm.) 
t. lourbeuse et b. pourri: gorges du Seyon! — montée du Chasse- 
ron! entre Apples et Pampigny.— Nous avons les deux formes : 
scyphosa et epiphylla S. 

CI. pleurota S. (Capitularia — FIk.) t. tourbières du Sentier (lac de 
Joux)! 


"Cl. extensa S. (Cl. coccinea var.- Hoffm.) {.: Ch. indique la forme scy- 
phosa $S, 


—  hO0h -- é 


‘Ci. deformis Hoffm. t{. tourbeuse et b. pourri du Jura! S. spic. 24 et Cz. 
(exemplaire du Jura suisse, dont j’ai oublié Ja localité). 

“C1. digitala Hoffm. « alba S. (L. digitutus Linn.) t. {ourbeuse et b. pourri: 
s'élève dans le Jura! S. spic. 23; au-dessus de Fleurier! pente du 
Chasseron ! Chaillet en indique les quatre formes mentionnées par 
Schærer. 

‘CL, bellidiflora S. Enum. 189 (L.- Ach.; Cl.- « polÿcephala Ch. spic. 284) 
r, humides. 

‘Cl. fimbriata Fr. {.: canton de Neuchâtel, herb. Ch. (scyphosa et cylin- 
drica); environs de Neuchâtel ! — Pente du Chasseron! entre Ap- 
ples et Pampigny ! 

“Cl. pyxidata Fr. t., r. et b. canton de Neuchâtel, herb. Ch. (scyphosa et 
cylindrica); Neuchâtel! Jura neuchâtelois (montagnes)! 

CT, chlorophaea FIk, J’en ai un exemplaire ! vaudois, récolté par M. Vic- 
tor Ruffy, juge cantonal à Lausanne , mais j'ignore s’il provient du 
Jura, où sa présence est douteuse. 

‘CT, neglecta FIk. t., m. et r.; Jura! S. spic. 294 ; — canton de Neuchâtel, 
herb. Ch. (scyphosa et cylindrica); gorges du Seyon! — pente du 
Chasseron ! 

"CI. degenerans Fr. « glabra S. type de l’espèce ; £.: canton de Neuchâtel 
(forma tubaeformis) herb. Ch. 

‘CI. alcicornis -FIk. (Cl. foliacea « alcicornis S. spic. 294) €. 

‘CT. endiviaefolia Fr. t.: autour de Neuchâtel! (stérile) — à Coinsins! 
(scyphosa et epiphylla) — à la Ferrière, cat. d’Iv. — [au petit Salève 
près de Genève!] 

"Cl. cervicornis S. Enum. 195. (L.- Ach.) {.: (douteuse). 

CI. gracilis FIk. « chordalis FIk. t.: — vallée du lac de Joux! S. spic. 
35. 

**8 turbinata S. (L.- Ach.) t.: Creux-du-Van! Hall. Helv. 66; cat. 
d’Iv. et Shuttleworth dans l’hb, Cz! — pente du Chasseron ! (forma 
subulala). 


CLADONIA Hill. et Schreb. B) CHASMARIA FIk. 


‘Cl. amaurocraea S. (Capitularia- FIk.) t.: espèce alpine, très-douteuse 
pour le Jura. 
‘CI. cenotea Fik. (B.- Ach.) « brachiata S. (C1.- Fr.) #. et b. pourri: 
Creux-du-Van! S. spic. 55. 
"CL. squamosa Hoffm. x microphylla S. t. et b. pourri. 
“7 decorticata S. (Cenomyce- Ach.) t. et b, pourri. 
“à parasilica S. (L.- Hoffm.) b. pourri. 
*€ fungiformis S. (Lichenoides- Dill.) £. 
CI. stellala S. « uncialis S. (L.- Linn.) f.: vallée du lac de Joux! S. 
spic. 43. 


CLADONIA Hill. et Schreb. C) vraies CLADONIA. 


:" CI. furcata S. « racemosa Fr. (CI.- Hoffm.) {.: Jura! S.spic. 41; canton 
de Neuchâtel (forma spinulosa et squamulosa) herb. Ch. 
*B recurva Hoffm. f. 
**) subulata Fr. (L.- Linn.) f. 


= 


LE 


ne 


YYN NN 


— 05 — 


*8 stricta Wallr. (var. subulata FIk.) t. 
*€ rangiformis Hoffm. t.: environs de Neuchâtel! — Coinsins ! 


“Cl. rangiferina Hoffm. « vulgaris S. type de l'espèce; £.: Jura! S,. spic. 


58; Creux-du-Van, Hall. Hele. 69 et cat. d’Ev. 

“y sylvatica Hoffm. t.: forêts près de Neuchâtel ! — entre Apples et 
Pampigny ! tourbières du Sentier (lac de Joux)! 

“€ alpestris S. (L. rangiferinus, var.- Linn.) £.: très-commune dans le 
Jura! S. spic. 58. 


CLADONIA® — E) THAMNOLIA Ach. 


Cl. vermicularis @ laurica DC. et S. spic. 44 (Thamnolia vermicularis £ — 


J’. 


S. Enum. 244). Je cite pour mémoire cette espèce, plus que dou- 
teuse pour notre Jura, d’Ivernois indiquant dans son catalogue le 
Lichen n°1905 var. £ Haller. 


III. LICHENES VERRUCARIOIDEIT. 


VERRUCARIÉES. 
PYRENULA Ach. 


submersa S. (V.- Borr.; P. mucosa Wahlenb., d’après Ch.) r. cal- 
caires du canton de Neuchâtel! Ch. spic. 534 et Enum. 209 et Borr.; 
ruisseau de la Prise, herb. Ch. 


. nigrescens Ach. r. diverses ; Neuchâtel! — l'Isle! 
. nitida Ach. « major S. (Sphaeria nitida Weig.) a. hêtre, etc. 


"8 nitidella S. (V. nitidella &- FIk.) a.: coudrier , etc. 
VERRUCARIA Wigg. 


macrostoma Duf, et DC. m. et r.: canton de Neuchâtel! S. Enum. 
244. — Valeyres! Boissier , ibid. 


. caerulea DC. (F. plumbea Ach.) commune sur les r. calcaires du Jura; 


De Candolle, F1. fr. 75, et Duby, Bot. 645, et Tete du 
canton de Neuchâtel ! Ch. spic. 54. 
B fusca S. r. calcaires du canton de Neuchâtel! Ch. Enum. 216. 
rupestris Schrad. « Schraderi S. (L.- Ach.) r. calcaires du canton de 
Neuchätel! Ch. spic. 55. 


:8 calciseda (V.- DC.) r. calcaires du canton de Neuchâtel! Ch. ibid. 
+ foveolula S. (V. Schraderi &- FIk.) r. id. id. 
*à purpurascens S. (V.- Hoffm.) r. calcaires du Jura! S. spic. 559 et 


Enum. 217 — à Neuchâtel ! — au bord du lac de Bienne! S. exs. 
n° 440. 


. Dufourii DC. (F. pyrenophora Ach.) r. calcaires du Jura ! Moug. et 


Nestl. stirp. Vog.-Rhen. n° 955. 


. epipolaea Ach. r. calcaires : à Neuchâtel! 

.muralis Ach. r. diverses. 

. alba Schrad. a. et plus rarement b.— Maronniers à Coinsins ! 
« epidermidis Ach. « sulgaris S. bouleaux — l'Isle! 

* Cerasi S. (V.- Schrad.) cerisiers. 


à albissima Ach. bouieaux. 


— 406 — 


*V.rhyponta Ach. a.: « M. Chaillet Pa trouvé au printemps sur une écorce 
qui paraît être celle du peuplier.» DeCandolle F1. fr. 472, et Duby 
Bot. 644 ; canton de Neuchâtel! Ch. spic. 543. 

+. puncliformis Pers. (type) a. et cônes des mélèzes : — frènes entre 
Coinsins et Genollier ! 

*7 atomaria S. (L.- Ach.) jeunes frênes au bord du pelit lac de Saint- 

Blaise ! 

-V. analepta Ach. a.: paraît avoir été trouvée dans le canton de Neuchâtel 
par Ch., cat. el herb.; cette espèce est assez répandue en Suisse. 

V. glabrala Ach. a.: gorges du Scyon! 


THROMBIUM Walir. 


*Th. epigaeum Wallr. {.: bois de Peseux, Avril, herb., Ch. 

- Th. byssaceum S. (Sphaeria- Weïg.) vieux chênes : — île de St-Pierre! 
S. spic. 341. 

* Th. corrugatüm S. (Ld.- Ach.) vieux chênes : — ile de Saint-Pierre! 
S. spic. 149. 


PERTUSARIÉES. 
+  THELOTREMA Ach. 


“Th. clausum Ach. (L. exanthematicus Sm.) r. calcaires du Jura! S. spic. 
68; à Neuchâtel! — vallée de la Birse! Moug. et Nestl,, stirp. Vog.- 
Rhen. n° 846. 


PERTUSARIA DC. 


"P, rupestris S. (P. communis B- DC.) forma isidioidea S. r. 

*P. sulfurea S. « corlicola S., forma isidioidea S. (Isidium lulescens T. et 
B.; Lepra- Hoffm.) chênes. 

*P. communis DC. a.: très-commune ; forma pertusa et forma variolosa S. 
— Neuchâtel! — l'Isle ! Coinsins! 

*P. lejoplaca S. (Porina- Ach.) a.: canton de Neuchâtel! Ch. spic. 66. 


ENDOCARPÉES. 


ENDOCARPON Hedw. 

*E. miniatum Ach. « umbilicatum S. type de l’espèce; r.: environs de 
Neuchätecl! S. spic. 60 , par ex. derrière le château ,jau-dessus de 
PEcluse! et pâturages au-dessus du Plan, Cb. suppl.; chemin de 
Verna à Colombier, herb. de la ville de Neuchâtel. 

‘8 complicatum S. (L.- Sw.) r.: — sur la Dôle! S. spic. 60; — sur 
le Chasseral! 

“à monstrosum S. (E. saxorum hb. Chaillet!) r. calcaires des environs 
de Neuchâtel! Ch. spic. 349 (avant 1815); spécialement: « au Crêt, 
côté du lac», hb. Ch. et Cz; — près d’Orbe! S. spic. 549. 

*E. pusillum Hedw. « Hedwigü S. (E.- Ach.; E. hepalicum DC. et E. squa- 
mulosum Acb.) f.: dans le Jura, Ch. F1. fr. 191; au-dessous du 
pont du Vauseyon, Ch. suppl.; gorges du Seyon !}— près de Pon-. 
tarlier, De Candolle F1, fr. 191. 

/pulidum S. (E.- Ach.) t. 


—  N07 — 


E. psoromoides Hook. (V.- Borr.) tilleuls: canton de Neuchàtel! Ch. spic. 
552 et Enum. 255; — remparts de Soleure! S. exs. n°599 et Enum. 
255. 


Appendice. 


NB. Il est un certain nombre de formes de lichens, qu’on n’a pu encore 
rapporter à leurs genres respectifs, faute de renseignements suffisants sur 
leur développement et sur leurs fructifications en particulier ; tantôt ce 
sont les premiers rudiments d’espèces diverses, tantôt un état maladif, etc. 
Voici la liste de quelques-unes de ces formes observées dans le Jura. 


“Lepra farinosa Ach. a. 

Lepra sulphurea Ehrh. a.: montagnes du Jura! S, spic. 241. 

*Lepra odorata Wigg. (Lepra Jolithus E.B.) a. 

“Lepra chlorina Ach. t.et r. 

‘Lepra candelaris Ehrh. (Byssus- Linn.) a.: sur le pin sylvestre aux gor- 
ges du Seyon! sur un mélèze entre le Chanet et Peseux ! 

Lepra citrina S. (Lepra candelaris, var.- v. Flot.) a.: mêmes localités! ! 

‘Lepra aeruginosa E.B. a., mousses et rhizôme du Polypode vulgaire ! 
Pertuis-du-Soc ! Fontaine-André! 

*£ latebrarum T. et B. (L.- Ach.) m. 

“Lepra virescens E. B. «. 

“Spiloma melaleucum Ach. sapins. 

.Spiloma olivaceum DC. pied des troncs de chènes de l’ile de Saint-Pierre! 
S. spic. 221. 

*Coniocarpon gregarium S. (Sphaeria- Weig.) a.: aulnes du canton de 
Neuchâtel, herb. et cat. Ch. 

*Arthonia ochracea Duf. (Spiloma elegans Ach.) a.: aulnes, canton de 
Neuchâtel, herb. et cat. Ch. 


Voici les espèces de Lichens de notre Flore qui ont été employés en 
thérapeutique, ainsi que les noms sous lesquels ils sont désignés dans les 
anciennes pharmacopées : 


Usnea barbata Fr. Museus albus querneus. 
Physcia furfuracea DC. 
Physcia prunastri DC. Muscus arboreus seu Acaciæ. 


Cetraria juniperina 4ch. 
Cetraria Islandica 4ch. Museus Islandicus s. catharticus. 


Peltigera venosa Hoffm. 

Peltigera aphthosa Wild. ; 

Peltigera canina Hoffn. Muscus caninus, Hepatica terrestris, Li 
chen cinereus terrestris. 


—  HO08 — 


Pelligera polydactyla Hojfm. 

Peltigera horizontalis Hoffm. 

Pelligera sylvatica Hoffm. 

Sticta pulmonaria Ach. Pulmonaria arborea, Pulmonaria arborea 


quercina. 
Parmelia saxatilis Fries. 
Parmelia parietina Duf. 
Parmelia elegans Ach. 
Stereocaulon corallinum Schreb. 
Cladonia coccifera auct. Herba ignis, Muscus cocciferus. 


(toutes les espèces de la 4'° section à fruct. rouge). 


Cladonia fimbriata Fries. 


Cladonia pyxidata Fries. Muscus pyxidatus. 
Cladonia rangiferina Hoffm. 
Cladonia vermicularis DC. Contrayerba blanca. 


Pertusaria communis DC. et presque toutes les formes désignées sous le 
nom générique de Variolaria. 


EXTRAIT DU MÉMOIRE 


SUR LA 


FAUNE ORNETHOLOGIQUE 


DU BASSIN DU LAC DE NEUCHATEL, 


PRÉSENTÉ A LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES DE NEUCHATEL 


par 


M. LE PROF. VOUGA. 


La majeure partie des observations consignées dans 
notre Mémoire, nous ont été communiquées par notre 
père, M. Auguste Vouga, de Cortaillod, dont la collec- 
tion ornithologique est depuis longtemps connue et ap- 
préciée des naturalistes suisses. À la fois chasseur ex- 
périmenté, observateur consciencieux et préparateur 
distingué, il est parvenu, après quarante ans de chasses 
et de recherches, à rassembler dans sa collection plus de 
270 espèces indigènes de provenance authentique. Nous 
avons aussi puisé de précieux renseignements dans la 
collection ornithologique du musée de notre ville. M. Ls 
Coulon, directeur de cet établissement qu'il a en grande 
partie créé par ses dons, par ses soins et par l'intérêt 
qu'il a su inspirer autour de lui pour cette institution, 
a toujours tenu à y faire figurer des individus tués dans 


BULL. DE LA SOC, DES SC. NAT. T. I. 350 


Le ARTE 


les environs de Neuchâtel. Un autre naturaliste neuchà- 
telois, M. Célestin Nicolet, de la Chaux-de-Fonds, a eu 
la bonté de nous communiquer le catalogue des espèces 
observées par lui dans la haute vallée qu'il habite. 

Nous croyons donc, en ajoutant à ces observations 
celles qui nous sont propres, posséder assez de matériaux 
pour oser présenter un tableau fidèle de la faune ornitho- 
logique du bassin du lac de Neuchâtel et spécialement 
de son versant nord-ouest, et nous désirons vivement 
que notre catalogue devienne un jalon utile dans le do- 
maine de la géographie des animaux. 

Nous avons adopté la classification et les dénomina- 
tions du manuel ornithologique de M. Temminck, comme 
étant le plus répandu et le plus usuel parmi les natura- 
listes et les amateurs d’ornithologie. Nous renvoyons à 
cet ouvrage la synonymie. 


PREMIER GROUPE. 
OISEAUX SÉDENTAIRES. 


Nous nommons sédentaires les espèces qui ne quittent 
jamais le district de quelques lieues carrées, sur lequel 
ont porté nos observations, et qui y sont représentées par 
un nombre d'individus qui ne varie, selon les saisons, que 
dans des limites étroites. 

Certains oiseaux vivant dans le voisinage des habita- 
tions et dans les vergers, tels que les moineaux, pinçons, 
troglodytes, mésanges charbonnières , grimpereaux, merles 
noirs, sont strictement sédentaires, c’est-à-dire, habitent 
toute l’année dans les mêmes localités et ne s’en éloignent 
que fort peu. Les mêmes individus restent sur les mêmes 
points, et n’en disparaissent pas pour y être remplacé 


— ii — 


par d’autres, à moins de circonstances exceptionnelles. 
Le cincle, le martin-pécheur et le cog de bruyère en sont 
encore des exemples. 

D’autres, dont l’espèce est sédentaire, parcourent le 
pays en troupes et s'arrêtent où ils trouvent une nourri- 
ture abondante; ils habitent les montagnes pendant l'été, 
et se rassemblent dans la plaine en hiver; en un mot 
leur fréquence apparente, c’est-à-dire, le nombre des 
individus concentrés sur un espace donné varie selon les 
saisons. Nous pouvons citer comme exemples les bou- 
vreuils, bruants jaunes, draines, pies : ce sont les Strich- 
vôgel de M. Naumann. 

En général, nous avons remarqué que c’est vers la fin 
de l'été que nos espèces sédentaires paraissent représen- 
tées par le plus grand nombre d'individus, et cela pro- 
vient soit de ce que les jeunes de l’année n’ont pas encore 
été décimés par des causes qui empêchent la propagation 
excessive des espèces, soit de ce qu'à cette époque de 
l’année un territoire d'un étendue donnée peut subvenir 
aux besoins d’un plus grand nombre d'individus. Si ce 
fait semble ne pas être évident pour certaines espèces, 
cela tient à ce que les individus qui les composent, quit- 
tent en hiver les grandes forêts qui couvrent les flancs 
de nos montagnes, viennent habiter la plaine et se con- 
centrer autour des villages où ils trouvent une nourriture 
plus abondante. Leur nombre paraît s'être augmenté 
d'individus étrangers, tandis que réellement il a plutôt 
diminué dans le district. 

Enfin, certaines espèces sédentaires sont aussi de pas- 
sage régulier ou irrégulier : il suffit de citer les corneilles 
noires, qui sont fréquentes en toute saison, et dont il 


— 112 — 


s'opère cependant de grands passages à l'approche de 
l'hiver. Les geais, oiseaux sédentaires par excellence dans 
les forêts, sont encore dans ce cas, et il n’est pas rare 
d'en observer des troupes nombreuses qui passent à une 
hauteur assez faible, sans s'arrêter ni changer leur di- 
rection de l’ouest à l’est. On a observé aussi, quoique 
beaucoup plus rarement, des passages considérables de 
perdrix grises. 


Oiseaux sédentaires. 


Falco buteo. 


Loxia curvirostra ? 


»  milvus. Pyrrhula vulgaris. 

»  peregrinus. Fringilla coccothraustes. 

»  tinnunculus. » domestica. 

»  nisus. » montana. 

»  palumbarius. » cœlebs. 
Strix bubo. » cannabina. 

» _aluco. » chloris. 

»  ofus. » spinus. 

» Tengmalmi. » carduelis. 

»  flammea. Picus marlius. 
Corvus corax. »  viridis. 

»  corone. »  Canus. 
Garrulus glandarius. » major. 

» picus. »  medius. 

Lanius excubitor. » Minor. 


Turdus merula. 

»  yviscivorus. 
Cinclus aquaticus. 
Sylvia rubecula. 
Regulus cristatus. 


Troglodytes vulgaris. 


Motacilla sulphurea. 
Parus major. 

mater. 

»  cœruleus. 

»  palustris. 

»  cristatus. 

»  caudatus. 
Emberiza citrinella, 


Sitta europæa. 
Certhia familiaris. 
Alcedo ispida. 
Tetrao urogallus. 
» bonasia. 
Perdix cinerea. 
Ardea stellaris. 

»  cinerea. 
Podiceps minor. 
Anas boschas. 
Mergus merganser. 
Larus ridibundus. 


Total: 


58. 


— M3 — 


Après ces espèces essentiellement sédentaires et excep- 
tionnellement de passage, on doit en ranger quelques-unes 
qu'on peut à la rigueur considérer comme sédentaires, 
en ce sens que pendant l'hiver elles sont encore repré— 
sentées par un petit nombre d'individus, de traînards qui 
n’ont pas suivi le gros de la troupe dans son émigration, 
surtout lorsque l'hiver n’est pas trés-rigoureux. Pendant 
l'été le nombre des individus qui nichent est plus consi- 
dérable encore que celui de ceux qui séjournent pendant 
l'hiver. La bécasse est le type de ce groupe, elle est de 
passage régulier au printemps et en automne, mais quel- 
ques individus isolés nichent chaque année dans les par- 
ties élevées de nos montagnes, et on en rencontre pen— 
dant tout l'hiver dans le voisinage de quelques sources 
qui ne gèlent pas. Les aloueltes nichent dans nos cam-— 
pagnes, la plupart se joignent à celles qui passent en 
automne et disparaissent avec elles, mais il en reste 
toujours un certain nombre pendant l'hiver. On peut en 
dire autant de la bergeronnelte grise, du râle, de la poule 
d'eau, etc. Ce qui caractérise ces espèces, c’est que la 
grande majorité des individus est de passage plus ou 
moins régulier, et qu'une petite minorité est sédentaire. 
Nous rangeons dans ce groupe : 


Falco subbuteo. 
Strix brachyotus. 


Vanellas cristatus. 
Scolopax rusticola. 


Alauda arvensis. | » gallinago. 
»  arborea. | Gallinula chloropus. 
Motacilla alba. | » porzana. 
Nucifraga caryocalactes. | » pusilla 
Accentor modularis. | » Bailloni. 
»  alpinus. Rallus aquatieus. 
Anthus aquaticus. Anas querquedula. 
»  pratensis. » , Crecca. 
arboreus. » fuligula. 


Slurnus vulgaris. Total: 25. 


— 414 — 


DEUXIÈME GROUPE. 


OISEAUX DE PASSAGE. 


Les espèces dont la nomenclature va suivre ne pas- 
sent dans notre pays que la saison chaude. Elles nous 
arrivent au printemps du bassin méditerranéen à une 
époque variable selon les années et les espèces, nichent 
dans nos contrées et disparaissent aux premiers froids. La 
plupart appartiennent à l’ordre des passereaux insecti- 


vores : l’hirondelle en est le type. 


Falco ater. 
»  rufus. 


»  brachydactylus. 


Oriolus galbula. 
Lanius collurio. 
»  rutilus. 
Muscicapa grisola. 
» luctuosa. 
Turdus torquatus. 
»  musicus. 
»  saxatilis. 
Sylvia turdoïdes. 
_»  arundinacea. 
» luscinia. 
» hortensis. 
» Cinerea. 
»  atricapilla. 
»  thytis. 
» phœænicurus. 
»  Sibitatrix. 
» trochylus. 
» rufa. 
»  nattereri. 
Regulus ignicapillus. 
Saxicola rubeltra. 


Saxicola rubicola. 
Emberiza cirlus. 


» cia. 
Fringilla serinus. 
n citrinella. 


Cuculus canorus. 
Junx torquilla. 
Upupa epops. 
Hirundo rustica. 
» urbica. 
» riparia. 
Cypselus alpinus. 

»  murarius. 
Caprimulgus Europæus. 
Columba palumbus. 

» turtur. 

Perdix coturnix. 
Totanus hypoleucus. 
» ochropus. 
Ardea minuta. 
Ciconia alba. 
Sterna nigra. 
»  hirundo. 
Toial 


: 18. 


— A5 — 


Les espèces suivantes n'ont été signalées que pendant 
l'hiver : 
Falco lagopus, dans les hivers rigoureux. 


Fringilla montifringilla ; et sur le lac les jeunes des Colymbus gla- 
cialis, arcticus et septentrionalis. Total : 5. 


Oiseaux de passage régulier au printemps et en automne. 


Ces oiseaux nous arrivent au printemps du bassin 
méditerranéen, passent sur les bords de notre lac sans y 
séjourner longtemps et continuent leur course vers le 
nord en suivant la ligne des eaux qui les conduit dans 
la vallée du Rhin, Chassés des régions septentrionales 
par les froids, ces espèces reprennent la même route et 
s'arrêtent à leur passage d'automne sur les bords du lac 
et surtout dans les marais de ses deux extrémités; ce 
sont essentiellement des becs-fins, des échassiers et des 
canards. 

Motacilla flava. Tringa subarquata. 

»  melanocephala (Bonap). »  variabilis. 


Sylvia aquatica. Machetes pugnax. 
»  phragmilis. Totanus fuscus. 


»  cariceli. p calidris. 
»  locustella. » glareola. 
»  suecica. » glottis. 


Muscicapa albicollis. 
Anthus rufescens. 
Emberiza schæniclus. 
Columba œnas. 
Calidris arenaria. 
Charadrius hiaticula. 

» minor. 

» pluvialis. 


Vanellus melanogaster. 


Numenius phæopus. 
Tringa minula. 
»  Temminki. 
»  Schinzii. 


Limosa rufa. 

»  melanura. 
Scolopax major. 
Grus cinerea. 
Ardea purpurea. 
Anser sejetum. 
Anas penelope. 

»  acula. 
»  clypeala. 
» strepera. 


»  Jleucophtalmos. 


Slerna leucoptera. 


— 416 — 


Les espèces suivantes sont de passage régulier au 
printemps et en automne, mais un certain nombre d'in- 
dividus restent en arrière et séjournent dans notre pays, 
les uns pendant l'été, les autres, et c'est le plus grand 
nombre, pendant l’hiver, surtout s'il n'est pas rigou- 
reux. 


Passant l'été. 


Falco haliætus. 
Gallinula erex. 


Sylvia curruca. 
Saxicola œnanthe. 


Total : 4. 
Passant l'hiver. 

Turdus pilaris. | Anas marila. 

»  iliacus. »  ferina. 
Corvus monedula. » clangula. 

»  COFnIX. Mergus albellus. 

»  frugilegus. » serrator. 
Scolopax gallinula. Podiceps cristatus. 
Numenius arquatus. Total : 13. 


Oiseaux de passage irrégulier au printemps et 
en aulomne. 

Nous faisons entrer dans ce groupe, des espèces moins 
fréquentes que les précédentes et dont la présence ne 
peut être signalée toutes les années, soit que leur pas- 
‘sage n’ait réellement pas lieu chaque année, soit qu'ils 
échappent à l'observation à cause de leur petit nombre. 
Il est fort probable que ces espèces émigrent régulière 
ment chaque année en suivant une route différente de 
celles qui suivent les espèces rangées parmi nos oiseaux 
de passage régulier au printemps et en automne, route 
dont ils peuvent s’écarter quelquefois, ce qui nous donne 
l'occasion de les observer après un petit nombre d'an- 
nées. Le fait que toutes ces espèces , excepté une, ‘ap- 


— AMM17T — 


partiennent au groupe des échassiers et des palmipèdes, 
oiseaux essentiellement émigrants, tend à confirmer cette 
hypothèse. On peut y ranger : 


Fringilla petronia. Anas nigra. 
Hæmatopus ostralegus. » rufina. 
Charadrius cantianus. Carbo cormoranus. 
Tringa platyrhyncha. Larus canus. 

» Cinerea. »  flavipes (les jeunes). 
Totanus stagnatilis. »  argentalus id. 
Ardea garzet{a. »  marinus id. 

»  ralloïdés. Lestris pomarinus. 
Nycticorax ardeola. »  parasitica. 
Ciconia nigra. ts Podiceps rubricollis. 
Ibis falcinellus. »  cornutus. 
Anser ferus. »  auritus. 
Anas fusca. Total: 25, 


Oiseaux de passage accidentel. 


On peut faire entrer dans ce groupe les nombreuses 
espèces qui appartiennent indistinctement à tous les or- 
dres, et qui ne s’égarent que rarement au nord des Alpes 
et à l’ouest du Jura. L'apparition de ces oiseaux étran- 
gers à la plaine suisse, semble être motivée par des eir- 
constances atmosphériques particulières, des hivers très- 
rigoureux ou très-doux, des étés très-chauds, des vents 
soufflant longtemps dans la même direction, des orages 
dans les pays voisins, ete. Les uns nous arrivent du bas- 
sin méditerranéen, d’autres des bords de l'Océan atlan- 
tique et un certain nombre des régions septentrionales 
de la Russie. Ces oiseaux dépaysés sont plus rares encore 
que ceux du groupe précédent, qu'on observe surtout aux 
époques des passages réguliers, le printemps et l’au- 
tomne : tandis que rien n’est fixe dans l’apparition acci- 
dentelle des espèces suivantes. Les plus rares seront 
affectées du signe ! 


Vultur fulvus ! 
Falco fulvus ! 


418 


Oedicnemus crepitans. 
Cursorius isabellinus ! 


» naevius! Glareola torquata. 

» albicilla! Charadrius morinellus. 

» apivorus. Strepsilas collaris. 

» aesalon. Limosa Meyeri. 

»  rufipes. »  Tereck! 

»  cyaneus. Recurvirostra avocetta. 

» cineraceus. Himantopus melanopterus. 
Strix passerina. Phalaropus hyperboreus ! 

» Scops! » platyrhynchus ! 


Ardea egretta ! 

Platalea leucorodia. 
Phænicopterus antiquorum ! 
Cygnus musicus! 

Anser albifrons. 


Lanius minor. 
Corracias garrula ! 
Ampelis garrulus. 
Merops apiaster. 
Muscicapa parva! 


Parus biarmicus! »  brachyrhynchus! 
Sylvia palustris. »  bernicla! 
»  icterina. Anas tadorna. 
Anthus Richardi ! »  purpureoviridis (Schinz) 
Emberiza miliaria. »  mollissima. 
p hortulana. » glacialis! 
» nivalis. Pelecanus onocrolalus* 
Fringilla nivalis. Sterna minuta. 
»  linaria. »  leucopareia! 
»  borealis. Larus minutus. 
Loxia pytiopsittacus ? » melanocephalus! 
Columba livia! »  tridactylus. 
Perdix rubra. »  leucopterus! 
Osis tarda ! Total : 60. 
» tetrax! 


En récapitulant, la faune neuchâteloise se compose de : 
58 espèces sédentaires et caractéristiques. 


23 » à la fois sédentaires et de passage régulier. 
u8 » qui n’habitent que l’été. 
5 » qui n’habitent que l'hiver. 
39 » de passage régulier au printemps et en automne. 


13 » du groupe précédent, mais dont un certain nombre de 
représentans n’abandonnent pas notre pays en hiver. 
[1 idem idem en élé. 
25 de passage irrégulier. 
60 de passage accidentel. 


—————— 


275 


— 


La faune helvétique publiée par M. le professeur 
Schinz en 1837, dans les nouveaux Mémoires de la So— 
ciété helvétique des sciences naturelles, indique 311 es- 
pêces signalées jusqu'alors en Suisse. Depuis cette publi- 
cation, # espèces mentionnées dans nos colonnes, savoir 
Tringella borealis. Anthus Richardi, Limosa Terck et Sterna 
leucopareia, ont été tuées dans le canton de Neuchâtel par 
M. Auguste Vouga, Otis houbara a été observée et abat- 
tue près de Zurich en 1839 et 1840. Enfin, Larus Leu- 
coplerus a été tué sur notre lac en 1849, et anser brachy- 
rhynchus en 1851 sur celui de Morat : de sorte qu’on peut 
évaluer à 319 le nombre des espèces qui fréquentent le 
sol helvétique, en y comprenant comme espèce distincte 
Limosa Meyeri, que M. Schinz regarde comme un jeune 
de Limosa rufa. 

Quarante-quatre espèces observées en Suisse, manque- 
raient par conséquent à la faune spéciale du bassin du 
lac de Neuchâtel : 9 de ces espèces ne quittent pas la 
région alpine; 13 n'ont été tuées que dans le bassin du 
Léman et le canton de Genève en particulier; une dou- 
zaine d'espèces n'ont été signalées qu’une seule et rare- 
ment deux fois ; les 10 espèces restantes paraissent pro- 
‘pres au canton du Valais et surtout du Tessin dont la 
faune revêt déjà les caractères de la faune méditerra- 
néenne. 

Tous les échassiers indiqués par la faune helvétique 
ont été observés sur les bords de notre lac, ce qui prouve, 
comme on pouvait le prévoir à priori, que la plaine 
suisse entière est visité par les mêmes espèces d'échas- 
siers, et que le lac de Neuchâtel se trouve sur une des 
grandes lignes que suivent les oiseaux de passage dans 


— 420 — 


leurs migrations alternatives du sud au nord et du sep- 
tentrion au midi. 

Nous terminons en attirant l'attention sur le rapport 
numérique suivant qui est très-remarquable. 

M. le prince de Canino cite 547 espèces dans son ca- 
talogue des oiseaux européens. Or il en existe 275 dans 
notre faune, c’est-à-dire, presque exactement la moitié 
du nombre total des espèces d'Europe. 

Ce rapport singulier n’est pas évident seulement entre 
ces deux nombres, mais on peut le poursuivre entre les 
nombres des représentants neuchâtelois et européens des 
sous-classes, des ordres et des principales familles, surtout 
si elles sont nombreuses en espèces. Les ordres des ra- 
paces et des passereaux se prêtent admirablement à ces 
rapprochements, comme on peut s’en assurer en exami- 
nant le tableau comparatif suivant, où nous avons indiqué 
le nombre des représentants neuchâtelois et européens 
des principales familles de ces deux ordres : 


Rapaces : Europ. Neuchätelois. 
Vuliumdes 2e. lo 0 Né _— 1 
Ealconides*." 85 ns, us — 20 
Sitgidés sujusient 2990489 0115 _ 8 

56 — 29 
Passereaux : 
Hirundinidés . . . . . . . 6 — 3 
PATES sf le tairnc advlé: nai — 7 
Motacillidés . . , . . . . 16 — 9 
Tone Re has ce dé el > 0175 — 39 
Landes paca per red mie) série vtt — li 
Corvidéss PME IAE AL X als — 9 
Fringillidés 4. . . . . . . 55 — 25 
Autres familles, ensemble . . 48 — 25 


254 — 121 


— MA — 


Europ. Neuchätelois. 
HaliMACRS EE UE UC _— 5 
PROS use ose CPL — h 
25 =: 9 

Ensemble : 

Rapacessyr. A:51. &l:. R20u 0878 56 — 29 
Passereauxi #0" . 58,193 — 121 
Gallinacées et Pigeons. . . . 25 _ 9 
315 — 159 


Pris isolément, les échassiers et les palmipèdes donnent 
un prono". moins rapproché, pris ensemble, il devient 
exact. 


ÉehSiers. 251727 LL ES 0H E 64 
ÉADNDEUES ES = 1e. os : IST us 52 
Ensemble. . . . 232 — 416 

515 . — 159 

547 — 275 


- Ce rapport singulier qui n'aurait aucune valeur, s’il 
existait uniquement entre les nombres totaux 547 et 
275, prend une certaine importance lorsqu'on le voit 
subsister entre le nombre des représentants des ordres et 
même de certaines familles nombreuses, et en prendra 
encore davantage lorsque les limites des faunes diverses 
seront mieux établies, et qu'on connaîtra plus exacte- 
ment le nombre des espèces propres à chacune d'elles. 

Il est évident, en effet, que les espèces n'ont pas été 
jetées au hazard à la surface du globe, mais qu’elles \ 
sont réparties suivant certaines lois complexes dont nous 
ne pouvons encore isoler tous les facteurs. Nous savons 
déjà que les faunes ornithologiques, mammalogiques, 
ichtiologiques et erpétologiques, sont caractérisées dans 
les régions froides et boréales par le petit nombre des 
types. spécifiques racheté par le grand nombre des indi- 


— 422 — 

vidus de chaque espèce. — Les faunes tropicales nous 
offrent un caractère opposé, c'est le grand nombre des 
espèces, la variété des types et relativement le petit nom- 
bre des individus de chaque espèce : la nature y a pro- 
duit à la fois ses créations les plus variées, les plus 
riches et les plus brillantes. — Les faunes tempérées pa- 
raissent sous ce point de vue n’avoir point de caractère 
bien tranché, et être les intermédiaires entre ces deux 
extrêmes. 

Il est à présumer que lorsque les diverses provinces 
zoologiques auront été bien limitées, et que l’on possè- 
dera des statistiques exactes des espèces qui les habitent, 
on parviendra, en comparant ces nombres, à saisir d’au- 
tres rapports numériques qui entreront comme éléments 
importants dans le problème de la distribution géogra- 
phique des espèces. Nous nous bornons pour le moment 
à avoir démontré que ces rapports peuvent exister, sans 
chercher à en approfondir la cause. 

Les seules familles européennes non représentées dans 
notre faune sont les suivantes : Pteroclidés, Procellaridés 
et Alcidés. Les deux dernières caractérisent à la fois les 
faunes océaniques et septentrionales. 


TABLE DES MATIÈRES. 


A. Travaux de la Société en général, et Miscellanées. 


Pages. 

Bulletins de l’année 1846-47, publiés en 4847, . . . . 1183 
» ». 1847-48, » 1848, . . . . 185-256 

» » 1848-49, » 1852,5 .1 10, 0257-293 

» » 1849-50, » » 0.7, 8109093-500 

» » 1850-51, » » . . . « 500-519 

» » 1851-52, » » 319-3584 
Travaux de la Section de Neuchâtel, p. 41-134; 188- 299 : et 259-384 
» » de la Chaux-de-Fonds, p. 135-185 et 250-237 


Lecture de procès - verbaux de ces deux sections, p. 141, 445, 159, 
194 et 200. 
Publications de la société ; leur envoi ; échanges avec celles d’autres 
sociétés, . . . . + . p.3, 16, 46, 65 et 186 
Ouvrages communiqués à à É Société, . . p.53, 15, 16, 52, 65, 95, 
127 (bis), 145 à 146, 151, 159, 194, 277, 285, 291, 295 à 294, 295, 
296, 298 (bis), 508, 511, 512, 358 à 340, 346 et 370. 
Nomination du bureau de Neuchâtel, pour l’année 1846-#7. . 5 
Commissions spéciales nommées par la Société . . . 150 et 567 
Allocation de la Section de la Chaux-de-Fonds aux collections 
scientifiques de cette localité et à celles du Locle . . . . 155 
Don d’objets d'histoire naturelle et d’antiquités du Mexique, 
fait par M. Jacot-Guillarmod aux collections de la Chaux- 
de-Fonds . . . . 165 
Animaux enyoyés d'Amérique : au musée ‘dé Neuchâtel; jar le 
profs 4908 tbe 2 HO ROM MTÈER :. MEMNERLO 


HOUR 


Pages. 
Antiquités trouvées aux de eren pe communication de 
M. L. Coulon fils . . . . , . 14 
Résumé d’un mémoire de la Société des sciences naturelles de 
Zurich, par le D' de Pury . . .” See dou 151 
Travaux ientties du prof. Ayosiise en ne Lis 36 
De l'utilité de l'étude des sciences naturelles dans les temps de 
trouble par Fourcroy, communication du prof. Sacc. . . 212 


B. Travaux des Sections. 
Are ect. — PINSIQUE, CHIMIE et MATHÉMATIQUES. 


PHYSIQUE. 

Sur les changements de propriétés physiques du fer CO 

par le prof. Ladame . . . 379 
Etudes de M. Wertheim sur les lois de propagation du mou- 

vement dans les corps ; communication du prof. Kopp : : 350 
Discussion sur les mouvements moléculaires . . . 379 
Comment on calcule l'écoulement de l’eau dans les Éayaux des 

fontaines , par M. Gustave de Pury, ingénieur . . . .:. 275 
Le problème de la distribution des eaux n’est pas encore ré- 

solu pour la science, par le prof: Ladame . . . 277 
Du froid intense que dégage l’appareil de Savaresse (v. D. su, 

par M. Wald, pharmacien . . 3067 


Figure observée à la surface gelée dan Etriss par M. 2 ie pr. 515 
Théorie de Melloni sur la formation de la rosée, communiquée 
par le prof. Ladame . . . 206 
Lois générales des vibrations de Yair dans un à espace his 
recherches de M. Wertheim communiq. par le prof. Kopp. 351 
Exposition des deux principales hypothèses sur la nature de la 


lumière, par le prof. Ladame . . . 117 
Instruments d'optique propre à déterminer la porléel de la tite, 
communiqué par le prof. Ladame . . . 16 


Présentation d’un microscope d’Oberhæuser, par le profs Hol- 
lard, et théorie de cet instrument Pa _e le sm La- 
dame... 1% 4G 

Classification des ce ee Paction qu’ exerce sur eux “dé 
magnétisme, par M. ire HR ES par le prof. 
Ladame ...... 201 

De l’électricité que prédit la vapeur des: au Moment! où élle | 
se forme, communication d’après M. Mousson, par le doc- 
ÉOLIEN 21 20 04: JON OIE RCD 


TE 1 
Pages. 
MATHÉMATIQUES. 
Sur la philosophie des mathématiques, par le prof. Ladame . 215 


Analyse de l'ouvrage: « Des quantités positives et négatives 
en géométrie » de M. L.-Aug. de Pourtalès, et remarques du 


prof. Ladame à ce sujet .-. . 19. LOT TOP SPP et 154 
Sur les approximations, par le prof. Kopp": 2 49 ET: I OA 
Rendu-compte d’un travail de M. Villarceaux sur la théorie 

des: voûtes , par MAGMEPPUTY. OR EN OR EN A RRRE 


MÉTÉOROLOGIE ET ASTRONOMIE. 


Nomination d’une commission météorologique -. . . . 867 
Calendrier de 1855, calculé pour Neuchätel, par le prof. K Op. 370 
Sur les observations météorologiques faites dans le pays de-_ : 
puis plusieurs années, par le prof. Ladame.  . . 511 
Observations météorologiques faites au gymnase de Neuchâtel 
pendant les deux derniers trimestres de 1851 el le premier 


de 1859, par le prof. Kopp . : . 567 
Température moyenne de Neuchâtel, perdit les sept: années 
1844-1850, par M. G. Borel-Favre … : … 368 


Sur la distribution des températures Pa dns est Alpes, 
Mém..de M. H. Schlagintweit, communiq. par le prof. Kopp 363 
Détails sur le puits artésien foré à Montdorf, en Luxembourg 
(température), par le prof. Guyot. :. .- ….. 49 
Sur les conséquences qu’on peut ie des à pr Ac ; 
. ques de l’atmosphère relativement aux différents états de 


l'eau qu’il renferme, par le prof. Ladame . . . dr 495 
Théorie de la formation de la rosée par nd communiquée 

par M. le prof. Ladame . . . 206 
Phénomènes présentés par le givre à pendant un “dire de so- 

leil, par M. L. Favre . . . 230 


Disposition singulière du givre sur un toit, et sxflienlinne: dt- 
verses de ce phénomène, par MM. L. Coulon fils, L. Favre 


et Ch Matthieu . … . . RDA: à Vi 
Sur des pluies torrentielles en France; "ae M. Théremin b «+ 146 
Sur des pluies de sang et de boue, par M. L. Coulon fils . . us 
Transport de matières poudreuses par le vent, communiqué 

par Æaearaertiss ire Ù Et indus À «28 
Pluies d’insectes , par M. F. Favarger . ... 48 
Note sur le travail de M. Strzlecki sur les vents de la Nou£ 

velle-Hollande, par M. L. Coulon fils. : 1... 4 . . ,. 97 


BUL. DE LA SOC. DES SC, NAT. * 51 


> ii 


Pages. 


De l'influence de la rotation de la terre sur la direction des 
vents, par le prof. Ladame . É 

Sur les phénomènes électriques de Pair ere Lee états 
particuliers de l'atmosphère, et sur l’influence de cet état sur 
le jeu des machines électriques, par le prof. Ladame 

Eclairs observés en novembre et décembre par M. Paul Cour- 
voisier 

Aurore boréale observée de W. L. “Couion fs. AT 

L’atmosphère lunaire indiquerait, d’après Gruithuisen, dés 
changements dans la végétation de cette planète, par le pro- 
fesseur Guyot ed 

Halo solaire à double cercle Gbsérvé à à Ia Chaux- de- Fonds, par 
M. L. Favre 

Observation sur un balo dire pér M. ÿ Favre. 

Halo solaire observé le 29 avril 1852, par M. L. Favre 

Sur la découverte des deux planètes Astrée et Océanus ou 
LeVerrier, et remarques à ce sujet, par le prof. Ladame. 


CHIMIE ET PHARMACIE. 


Nouveau procédé pour découvrir la présence de l’ozône dans 
l'air, par M. C. Nicolet, pharmacien : V: 

lode découvert dans Pair normal, par M. Chatiri, eommuni- 
qué par le D' Cornaz . 

Sélénium pur fondu, présenté par 1e prôf. Sace 

Vérification d'un nouveau procédé pour reconnaitre la fe é- 
sence de l'acide nitrique, par M. C4. Malthieu, pharmacien 

Emploi du phosphore pour empêcher la décomposition spon- 
tanée de l'acide hydriodique , par le prof. Kopp 

Analyse des chlorides sélénieux, par le prof. Sacr 

Nouveau procédé pour la RÉGION de la soude Ptiféellé, 
par le prof. Sacc à 

Sur la formation et la dosesiion de palhii de KoBies et siôte 
sur les sous-sels ou sels-basiques, par le ape Gerhardt Li 
Montpellier) . 

Sur les différences de colérätion produites par la funiee: sur és 
plafonds gypsés, par le prof. Ladame et discussion . 

Analyse d’un minérai de fer exploité dans l'Etat de New- Yorck 
par M. Suchard, faite par M. 4rmand Forel (de Morges), et 
communiquée par le prof. Sacc . 

Cu ot de cuivre pur obtenu en réduisant bal Mass l'oxide 
cuivrique provenant de la ealeination du nitrate, par le pro- 
fesseur Sacc. sam 


105 


278 


— 27 — 


Pages 

Analyse d'un alliage aurifère, par le prof, Sace . . . . . 284 
Sur divers acides organiques el sur leur formation, “sg pro- 

fesseur.Sacc = . . . + ont 

Chloroforme préparé par M. ch Matthieu, phare macien . 192 
Du coton-poudre du fulmi-coton, par MM: Schauss, pharma- 

cien et Bovet, docteur-médecin . . . 14 


Sur le colon-poudre de Schænbein, par M. €. Nicolet, plidres. 155 
Expériences sur le coton -poudre, par MM. 0. Jacot et J. Ch. Du- 


Commun : . . En. re 499'ét 16 
Le coton-poudre peutsil rotaplseer LE épais comme force mo- 

{rice, par MM. 0. Jacot et E. Savoie . . . .. 140 
Communication d’une note de MM. Schænbein et Boliger sur 

le fulmi-coton, par le D' de Pury. . 149 
Effet de l’eau bouillante sur le coliodion, se DUR Wald, phar- 

macien et Vouga, prof. : : . 546 
Expériences sur les graisses amiiales, pd le peu, Save. » 1490 
Cantbharides privées de leur cantharidine , comméniealion de 

M. Wald, pharmacien . . . sr 870 
De la transformation du bois en gééime Per Padde dlvrique, 

par le prof. Sace . . . Bt + @ be 25 
Sur la quantité d’oxigène ct loë bases contenues dans le bois; 

discussion entre les prof. Ladaïne et Sace. .. . . . . 274 


Sur les causes du durcissement du bois sous Peau : dÉséusston 
entre le D' Ernest de Castella (de ni le prof. Sacc et Je 


prof: Ladame. . "em .. 284 
Analyse de Fopium propre à s'assurer de ses falsif RÉNGËs par 
Jenprof"Sacc: : .". Morte 0° 


Vin de gentiane préparé, puis distillé par le prof. ‘Saëë*. 2925 et 227 
De l’action des végélanx en décomposition sur les sels, et sur 
la provenance du fer contenu dans les eaux venant des ter- 
rains tourbeux , par le prof. Ladame.  . . . 296 
Entonnoir au bain d'eau de M. Ph. Plantamour, décrit 7 le 
prof. Sac. . . 65 
Description de la tnéhiné de gavaressé Svo la Pbricaifon des 
eaux gazeuses, par M. F'ald, pharmacien . . . . 344 
NB. Pour les eaux minérales, voyez les travaux de la sebtion 
de médecine (Balnéologie). 


2me Kect. — HISTOIRE NATURELLE. 


GÉGGRAPHIE. c 
Rapport de M. Thér emin sur un ouvrage géographions -Statis- 
tique . . DANSE 
Sur le voyage d'exploration du p' Loïéh hardt daris la Nouvelle. 
Hollande, par M. Théremin . . . 94 
Note sur le même voyage et spécialement sur ce relief du tes- | 
rain, par le prof. Guyot . . . . apart 95 


Note sur la topographie, la géologie et les 2 zônes de véséiane 
des Montagnes-Blanches de. Hampshire), parle praieeeen 4 
Guyot. 20... à Ie 1644207809 

Travaux HypSomiétriquest be M. ‘de Hildenbruch sur d vallée de 
du Jourdain, le lac de Tibériade et la menaarte commet 


niqué par le prôf. Guyot. . . HO SARTHE ] 25 466 
Travaux de M. Sérzeiecki sur Porographie de l’île de Van-Dié- 
men, communiqués par le prof. Guyot . . . 4280010408 
Observation sur la prétendue découverte des sources du Nil- 
Blanc parle prof..Guyot. 2.102 ie HS HO! 
Lacs temporaires australiens et leur population; Dre A 
d’après Gould, par M. L. Coulon, père . . : + .-... 299 
Voyage dans les Alpes Pennines, et descriplion de la mer de 
glace d’Olemma, par le prof. Guyot. . . . . . . .1ket25 


. GÉOLOGIE, MINÉRALOGIE, PALÉONTOLOGIE. 


idées de M. Lecogq sur la formation des + a discutées par . k 
le prof. Guyot . . . né 15 dérhens 
Mer de glace d’Otemma (Alpes Pennines), par le Drof. Guyot m el 95 
Discussions sur les phénomènes erratiques au sud de la Balti- 
que, par les prof. ‘Hollarss DuBois de Montpéreux, et : 


Guÿals ae LS es MR PR Er Re er 
Lettre de M. Desor sur les a fhans suratiques : de la Scean- 
dinANIe MAÉ un moe à PT el | 


Sur les rapports qui existent entre les un es erratiques 
du Nord et les soulèvements de la Scandinavie, ‘par M. Desor 56 
Recherches de M. Desor sur l’action glaciaire.en Scandinavie et 


dans l'Amérique du nord, par M. Desor . . . . - 370 
Lettres de M. Desor sur les phénomènes erratiques pre 
dans l'Amérique du Nord (appendice). . .259, 245, 246 et 254 


Note sur la géologie, etc. des Montagnes - Blanches (New- 
Hampshire); par le prof. Guyot. “0,  : - 0 NN 


= mm — 


Sur le gisement des métaux dans l'Amérique du nord, par 
M. Desor . 

Sur l’âge comparatif ‘et a Prmation des filons de fer et 
d’autre substances minérales , par le prof. Ladame - 

Nature et exploitation du minerai de fer de l'ile d’Elbe , par 
M. DuBois-Bovet . 

Soufre natif sur du sulfate de aux dans Fr Oberlaïid Dern ; 
par M. Wald, pharmacien 

Recherches sur l’asphaite du Val-de- Travérs , Bar le prof. La 
dame 

Coupe de terrains ä nummulites de la Presta (Val-de-Travers) 
dans lequel s’exploite l’asphalte, communiquée, d’après 
M. Chopard, de Morteau, par M. L. Coulon fils . 

Gisements d’os fossiles dans des lerrains de récente formation, 
découverts en Russie par My A. de ne CEE et DuBois 
de Montpéreux 

Lettre de M. Chappuis, pharmacien’: à Boudry, sur les grôlies 
: à ossements des environs de Troirods . 

Note sur les ossements fossiles trouvés par M. 4. Gr este y dans 
le Bohnerz d'Egerkinden (Soleure), par M. C. Nicolet, phar- 
macien. 

Fossiles du dépôt tértiaire de l'ile dé Malte offerts aux évhec- 
tions de la Chaux-de-Fonds, par M. VNuma Girard. è 

Sur le mélange des fossiles de différentes couches géologiques 
communiqué, d'après M. Aymard, par le prof. Guyot . 

Sur la soi-disant existence simultanée de mêmes animaux fos- 
siles, et spécialement de mêmes insectes, dans différentes 
époques géologiques, par le D' de Pury . . 

L'apparition | de diverses espèces animales à la’ dürtse ab grobe 
a-t-elle été successive ou contemporaine; concours proposé 
par l'académie des sciences de Paris, me par le 
prof. Fouga . 

Sur la distributio vidé et le ivdé d'parton ac- 
. tuel des ire à à la surface du globe, Mémoire du profes- 
_seur Agassiz traduit par M. L. Coulon, père . 


As op ti BOTANIQUE. 


De l’action à l'acide pectique dans le SA irait des vé-" 


gélaux, par le prof. Sacc . 
De l’action exceptionnelle des obiadiés sur l'air, dr k ” 0- 
fesseur Sace A 


Pages. 


— D — 
Pages. 
De l'étude comparative des animaux inférieurs et des plantes 
qui accompagnent l’homme en PA et dans l'Amérique, 
par le prof. Agassiz . . . aux: 187 
Lettre sur la végélation américaine , nés M.  Lesquereux + .te296 
Note sur la topographie, la géologie et les zônes des végétaux 
des Montagnes-Blanches PER par le professout 


GUÜUYOE ave RD: 309 
Enuméralion des Heat rime) + re sobre de 

ceux du canton de Neuchâtel, par le D' Cornaz. . . 375et385 
Quelques mots sur la mycologie, par M. L. Favre. . . . . 254 


Note sur la flore mycologique de notre pays; el catalogue de 
ses principales espèces comestibles, par M. L. Favre . . 255 
Collection de FAR de notre pays, peints par M. L. Fa- 
FE :npitaR es . . . . 463, 205,234, 296.et 316 
Hermaphrodisme Fu sur le maïs, par le prof. SAC" x ste 0 
Rhipsalis Swarzii portant des rudiments floraux à la base des 


jeunes feuilles, par le prof. Sacc . + . 191 
Fait tératologique observé sur l’Agaricus cHstaluss ‘par M. . 
Farre-tnnlhiéisun er tronte sr IG AE IN OR 
ZOOLOGIE. 


Sur la distribution géographique actuelle et le mode de lappa- 
rilion actuelle des animaux à la surface du globe, mémoire 
du prof. 4gassiz, traduit par M. L. Coulon, père .- . . 547 
De l'étude comparalive des animaux inférieurs et des Dites S 
qui accompagnent l’homme en dus et dans l'Amérique, 
par le prof. 4gassiz . . 187 
Des élangs de sangsues et des: causes qui RAA à da (reproi 
duction de ces animaux, par M. Ch. Matthieu, pharmacien. 312 
Recherches modernes sur les générations alternantes des hel- 
minthes, et sur ceux de ces animaux qui vivent dans le sang, 


par le prof. Vouga. . . = RE 
Causes de la multiplication du Fr re le ne Sat se et CAO 
Invitation adressée à la Société, par M. Brossi , de collaborer 

à l’ouvrage d’entomologie suisse. . . 308 


Note sur les larves hostiles aux chenilles. x par! M. Couler His) 4e TA 
De la bi-sexualité du sarcopte de la gale, par M. L. Coulon 
fils . à 
Note sur la cobati dé dentitiies araignées, es M. Coutéu ur 274 
Nouvelle espèce d’écrevisse découverte dans le Rhin, commu- 
aicalion deML EL CoUIOR MIS. | 2, + . . ne «0 0 


= do) —= 

Pages. 

Mémoire manuserit de M. Paul Guébhard, sur la reproduction 
artificielle des poissons , communiqué par le D' Cornaz . . 555 

Remarques à ce sujet, par MM. C. Nicolet, sonne: à la 
Chaux-de-Fonds, et Fouga, prof. . . . . …. SORSA00S 
Note sur les mœurs des serpens, par M. Couleru RU TAB 
Observation sur un fait de ce mémoire, par M. L. Coulon père. 290 

Sur le pouvoir faseinateur à-iobii par MM. L. Coulon père 


LA 0 A UE 1) ORNE D MINISSES 
Sur la locomotion des vipères, par M. L. Cnil gère Ds CIN ES 
Sur une vipère qui mourut de son propre venin, par M. L. Cou- 

lonméresens "he & 290 
Travail sur la faune ornithologique du pays de Neuchâtel, ‘par 

le prof. Vouga ET 370 
Extrait du mémoire sur la fine ctnilhologiqué FA ARTE an 

lac de Neuchâtel, par le prof. Vouga. . . . . . . : 409 


Oiseaux rares pris ou observés dans nos environs : 
1) Accenteur des Alpes, tué par M. Perret sur les roches de 


Moron, el présenté par M. C. Nicolet, pharmacien. . . . 140 
2) Jaseur de Bohème . . . 52.1 11. 204,905 et234 
5) Deux nouvelles espèces d' Enbery 2a à à ajoutée à notre Faune, 

par M. 4. VFouga . . . ren Rens 
k) Vol de Sizerins dans les environs da és Chaus-dé: Fonds , 

communiqué par M. L. Favre . . 257 
5) Oie de Temminck tuée sur le lac de Morat el obtenue pour 

le musée de Neuchâtel. . . . . 516 
Singulière incubation du Pingouin foÿal, coiiiuniqué d'après 

la Repue zoologique, par M. L. Coulon fils. . . . . . 204 
Mœurs d’un gallinacée australien, pre d’après Gould, 

par M. L. Coulon père. . . . 299 
Incubalion singulière et mœurs de dvi oiseaux de la Nouvelle- 

Hollande, par MM. Vouga, prof. et L. Coulon père . . . 315 


Considérations sur la classification des mammifères, par le 
prof. Hollard à 

Considérations sur le même sujet ; et: sur une nobvelle déclin 
de ce groupe de vertébrés , par le D'de Pury . . . 159 

Castor pris dans une île du Rhône , par M. Frédéric Guébhard 

Observations du D' Martins sur PArvicola sg té communi- 
quées par le prof. Sacc à 

Communication sur les mœurs et en a particulier sur le som- 


meil d’hiver des loirs et des muscardins , par M. Z. Coulon 


fils . 512 


— 432 — 
Pages 
Découverte du Troglodyte de Savage, communiquée par le pro- 
fesseur VoUga, not sure re RCE 5560 


gne ect. — MÉDECINE. 


ANATOMIE, EMBRYOLOGIE ET TÉRATOLOGIE. 


Du poids-des viseères de divers ae M. Bellingeri 

comm. par le D' Cornaz . . . 48308 120 
Sur le développement de l'œuf de la poules par te p' Succ, 1953 et 194 
Sur l’embryogénie des planaires, par M. Ch‘ Girard. . : . 300 
Cas de tératologie humaine (monstruosité par inclusion) obs. 

par le D' Bouchacourt, de Lyon, comm. par M. L. Coulon 

fils, avec des remarques du D' Borel. . . . . . 360et 365 
Cas de tératologie (brièveté de la me observé chez un bro- 


chet, par le DER Vouga sur. serve 100 1 
Dessins d’abnormités congéniales des 1e et dun F2 pupille 

extraordinaire, comm. par le D’ Cornaz. . . . . . . 9285 
Cas d’iridérémie observé par le D' de Castella. . , . . . 285 


Imperforation de l’hymen et imperforation de l’anus (v. patho- 

logie chirurgicale). 
Hermaphrodisme féminin, obs. par le D'Arlet. + . . . . 935 
Anatomie pathologique d’un individu affecté de ceryptorchisme 

par les D" de Pury et Landry. Ce ONE ONE ns 1 


PHYSIOLOGIE. s 
Rapports intimes du fluide nerveux et du fluide RIRE SAS | 
le D’ de Castella 2. x LR 20 


Lobe enkysté du cerveau ay #8 Re la ne sans ôter la 
parole, fait opposé à la théorie du prof. Bouitiaud observé 
par le D' de Castella . . . . SR É TEE A0S 

Appréciation de ce fait, et obs. qui sas Prades ou confirmer 
la théorie en question, par le D' Borel . . . . . . . 9293 

Sur la dilatation que présente la pupille quand on n’ouvre me un 
œil,,par le prof. Ladameet.le.D'Cornaz=n.01:10 NME et 285 

Des fonctions du foie, par le prof. Sace .… . . . 2. . : 63 

Discussion à ce sujet entre le D’ Borel, de Neuchâtel, le D 
Jäümes Borrel, de Colombier, et le prof. Sace . = . . 65 

Sur les mouvements du bras d’un individu chez lequel'on a 
pratiqué précédemment la résection de la portion interne de 
la clayicule, par le.D' de Gastella, 2004000700 OR 0 


— 
Pages. 
La régénération des os par le périoste, prouvée par le D' de 
Castella au moyen d’une obs. du prof. Blandin et d’une qui 
lakéstpraprerst nié ina in Esites Métier: 101 


“HYGIÈNE PRIVÉE ET PUBLIQUE. 


Abus des pommes de terre et ses conséquences, par le P' Sacc 7 
Causes d’altéralion des puits du bas de notre ville, par le P' Sacc 203 
Nouvelles fontaines à établir à Neuchâtel, par M. P. Carbon- 


TAN E 204 
Sur les différens Sym de chatiisge Énployés Œns. tés 

grands bâtimens , par le prof. Ladame . . . 321 
Rapport sur différens procédés de dorure destinés à remplacer 

le dorage au mercure, par M. L. Favre . . . 165 
Du système cellulaire dans ses EH avec l aliénatioh men- 

tale, par le D' Cornaz . . . 341 
Danger de la tolérance accordée aux mièges, par le D dé Cüs- 

OU NT ER PEMEMeNERNINNS, LIBRE 20H00: 16140 

BALNÉOLOGIE. 

De l’action non encore expliquée de quelques eaux minérales 

sur l'organisme, par le D' Borel . . . 359 


De l’arsenic qui accompagne le fer, en Drbedlièr pen ee 
eaux minérales, par M, Ch‘ Matthieu, pharmacien, et de 
son effet probable sur l’organisme , par le D’ de Castella. M et 92 
Note critique sur l’analyse chimique des eaux de Wiesbaden 
de M. Figuier, par M. Ch Matthieu . . . 104 
Efficacité des .eaux de la Brévine dans les affections de or- 
ganes urinaires et dans la chlorose, par le D' de Castella. 295 
Contre-indication de ces eaux dans les maladies des organes 
urinaires accompagnées d'irrilation , par le D' Borel . . . 296 
Leur célébrité au siècle passé el influence des marais {our- 
beux sur leur composilion , par M. C. Nicolet, parmacien . 296 
Emploi de l’eau de Wildegg contre une affection strumeuse, 
par le D' de Castella, el remarque du D' Borelà ce su- 
ebnran lt ao ren tte he aan, 5694et 370 


TOXICOLOGIE. 


Observation d’une personne mordue par une Pa par 
le D' de Castella .- . … . . 290 
Sur une vipère qui mourut de son | propre venin, Éss w. L. 
COMORES ON NON OPEN SURS BAND SOU 14 


BUL. DE LA SOC. DES SC. NAT. 52 


— 43% — 


Pages. 


Observation d’un empoisonnement par le camphre, par le 
D' G. DuBois 

Sur les maladies causées Le Le SRE chez Le fut 
d’allumettes chimiques , par le D' de Pury . 


MATIÈRE MÉDICALE ET THÉRAPEUTIQUE. 


Nouvelle pharmacopée de Prusse, EPS par M. Schauss , 
pharmacien . . . À Fe 

Effet du camphre sur a sistème nerveux, lé Ghsertation du 
D" Droz 

Vin de gentiane Ron comme FRE pa le MÉDE Sacc. 

De l'emploi des ASF Din dans la fièvre Rap par le 
prof. Sacc . 


Emploi du teucrium polium dans le hole, comm. RE le 


D' Cornaz. : 
Emploi du leonurus HUE Éonire le Fee d'aprés le 
D' Van der Korput, communiqué par le D' Cornuz. 
Vésicatoires sur la face, employés d’après le prof. Piorry, 
comme moyen aborlif de la variole, par le D° de Pury. 
Des traitements employés contre la gale, par le D' de Castella 
Indication des lichens jurassiques qui ont été employés en thé- 
rapeutique, par le D' Cornaz = 
Comparaison de l'effet thérapeutique dés aivéraes préparations 
magnésiennes, par le D' Cornaz . . . UE 
Emploi de la résine de scammonium comme drastique, com- 
muniqué par le D' Cornaz . : 
Emploi de l’huile d’anda comme disques comvniqué 
le D' Cornaz É : 
Trois vermifuges nouveaux [48 ABS ss niques da 
près le D' Schimper, par le prof. Sacc . 
Sur une graine du Pérou préconisée contre la morsure eds ser- 
pens, communiqué par M. Z. Coulon fils . : 
NB. Pour l’éther et le chloroforme, voyez la rubrique : Patho- 
thologie chirurgicale et médecine opératoire, les travaux 
pharmaceutiques sont réunis à la chimie. 


MÉDECINE LÉGALE. 


Observations sur les plaies par armes à feu, par le D' Borel. 
Sur une différence entre les deux poumons, importante en 
médecine légale, par le D' Borel. + ON PER RE: 


159 


252 


95 


160 
225 


— 435 — 


Pages. 


Rapport médico-légal sur un enfant né viable et mort proba- 
blement pendant la durée de l'accouchement, par le doc- 
teur, Botelsmipiéinne se has 

Rapport médico-légal sur un “enfait trouvé ouel mt, ea 
fosses d’aisance, par le D' Borel . 


ANATOMIE PATHOLOGIQUE. 
Défense d’éléphant renfermant une balle, par M. L. Coulon , 


fils . 

Excroissances Re Et me ide les épique, s le 
D' Borel . : 

Observation de DA Le di CRE bee le D Borel. 


PATHOLOGIE MÉDICALE. 


Vices de l’oxigénation du sang cause de plusieurs maladies 
épidémiques, par le D' de Castella - 

Sur les causes de l’allération du sang He dé É déve 
{yphoïde , par le D" de Castellu. 

Epidémie de fièvre typhoïde au Val-de-Ruz ; causes qui pet: 
veut y avoir contribué , par le D' Borel . : 

Mort subite d’un convalescent de la fièvre typhoïde, at lé 
D' de Pury; discussion à ce sujet entre ce médecin et les 
D G. DuBois et Basswitz. : 

De l’hématophilie ou diathèse hémorragique, par les D Cor- 
naz et Borel. Sage 

De la co-existence de bee atisrahoes dés reins ou fs 
cœur et d’affections amaurotiques, par le D' Cornaz. 

Histoire d’an étranglement du canal digestif, par le D° G. Du- 
BOtSs- lacs: 

De lamélioration habite, sur un fou furiéüx par 1e ‘simple 
changement de domicile, par M. L. Coulon fils. 

Cas singulier d’affection nerveuse observé par le D' Jung, de 
Bâle, et communiqué par le D" Cornaz . 

Mouches volantes observées sur lui-même, par M. L. Chétoti 
père. 


PATHOLOGIE CHIRURGICALE ET MÉDECINE OPÉRATOIRE. 


Sur l’emploi de l’éther dans les opérations ; premier essai à 
l'hôpital Pourtalès ; appareils et contre-indicalions , ju les 
D'° de Castella, Borel et Mercier 

De l'emploi de léther dans les opéralions et RATER à ce 
- sujet entre les D'° Borel et de Castella. 


343 


62 


67 


— 136 — 


Pages. 


Histoire des principales expériences faites en France et en 
Suisse sur les inhalations éthérées , par les D G. DuBois 
et Landry, et expériences de os sociélaires de la 


Chaux-de-Fonds. . 461 
Expériences comparatives sur éirergest nées d’éther faites 

en France et en Allemagne 182 
Accidens que peut produire l’éther ; opportunités dy substi- 

tuer le chloroforme, par le D" de Castella. 192 
Danger que présente DELLE du chloroforme, par le p° de 

Castella = 290 
Appareils à éther ÉcÉsentE er M. c. “Nicolet, ARRET 161 
Application de l’éther aux accouchemens , par le prof. P. Du- 

bois, communiqué par le D' de Castella. 67 
Ethérisation employée pour des cautérisations, par le p' Irlet. 181 
Opération pratiquée au chloroforme par le D’ Borel, et remar- 

marques.de MM. Ch‘ Matthieu, pharm., et Ladame, prof. : 198 
Opération grave pratiquée par le D' de Castella sur un ma- 

lade soumis à leffet du chloroforme 203 
Hernie étranglée réduite par le D' de Castella au etre re 

chloroforme . 212 
Extraction d’une partie nécrosée de Pomoplate Re par 

le D' de Castella sur un malade soumis à l’influence du 

chloroforme - 290 
Opération de la cataracte nu sr p' William-White, 

Cooper, de Londres, sur des ours préalablement endormis au 

moyen du chloroforme, communiqué par le D° Cornaz. 541 
Peu de succès de la section des nerfs dans le tic douloureux, 

par le D' de Castella. - 320 
Tumeur cornée de la tête opérée par Fe D' F Castella, ne 

vation recueillie par le D' Falentini . 97 
Tumeurs analogues à la cuisse droite d’une femme. _. le 

D' de Castella . . 400 
Calculs salivaires extraits du nl de Mas é es je D Bo- 

rel, et analysés par le prof. Sacc . . . . . . . 2925 et 227 
Calculs des fosses nasales déterminés par la présence d’un 

noyau de cerise, par le D' de Pury ; . An 
Polypes des fosses nasales liées d’après le prétédé T pr. 

Dubois , par le D' G. DuBoïis . 149 


Observation d’une fracture des os du nez qui rodtiott un em- 
physème de la muqueuse D un polype, par le 
D' Droz È A. 2 


150 


— 437 — 


Pages. 


Fracture consolidée naturellement chez un coq, par M. L. Fa- 
pre . 

Fails pour servir à r histoire Fe umprete el & létéroplas 
tie en Suisse, par le D' Cornaz. . . NT 
Opération pour remédier à une mpérforatiof dé ÿ by men, pra: 

tiquée par le D' de Castella. 

Opération d’imperforation de Panus, Drstiquéé par le p' Mer- 
cier, de Boudry, et décrite par le prof Vouga. - 
Résorption de fragments de cristallin passés dans la ctianibfe 

antérieure, par les D'° de Castella et Borel. 


HOPITAUX ET MICELLANÉES MÉDICO-CHIRURGICALES. 


Mouvement de la chambre de secours ou hôpital de la Chaux- 
de-Fonds pendant l’année 1846, par le D’ de Pury 

Mouvement de l’hôpital Pourtalès en 1846 et 1847, par le D° de 
Castella : 

Mouvement de l'hôpital Pourtalèsie en 1850, pas le p' ja Castella 

Mouvement de l'hôpital Pourtalès en 1851, par le D’ de Castella 

Rapport du D' Droz sur un plan de voiture destinée à trans- 
porter les malades à l’hôpital Pourtalès . - . 

Note sur M. Matthias Mayor, de Lausanne, et sur Sd innoya- 
tions qu’il a proposées en chirurgie, par le D' de Pury . 

Sur les maladies de divers personnages illustres , par le 
D’ Cornaz 


4me Sect. — ÉCONOMIE RURALE, TECHNOLOGIE et STATISTIQUE. 


ÉCONOMIE RURALE ET DOMESTIQUE. 


Sur l’épuisement des sols et les assolements, par le P' Sacc . 

Sur les assolements el le rôle des substances minérales sur les 
végétaux, par le prof. Ladame . 

Discussion entre MM. L. Coulon père, de Castella D. M. et Sacc 
prof., sur la valeur des engrais . 
Discussion sur l'emploi des cendres comme as pour les 
semis d'arbres, entre MM. L. Coulon fils et Ladame prof. 
Expériences de M. Persoz sur les RP de la vigne, comm. 
par le prof. Ladame 

Procédé économique du D" Schulz out la NA OA des pou 
mes de terre, comm. par M. Théremin . 

Sur une particularité de la culture des pommes de de ré, Fe. 
M. L. Coulon fils é 

Pommes de terre obtenues de semis dar le prôf Sacc 


296 


512 


68 


68 


290 


85 


112 


102 


227 
271 


— 438 — 


Pages. 


De la nature de la maladie des pommes de terre d’après Har- 
ting, comm. par le prof. Sacc 

Communications à ce sujet et discussion situe MM. ne pa 
fils, Sacc prof., et Berthoud-Coulon . 

Moyen du D' C.-R. Fresenius pour guérir la malidié lès re 
mes de lerre, comm. par le prof. Sacc. Ë 

Discussion sur quelques moyens de remédier à la FA des 
pommes de terre, entre M. Eugène Savoye et d’autres so- 
ciétaires de la Chaux-de-Fonds. . . . . . . 

Note sur les moyens de remédier à la disette résultant de la 
maladie des pommes de terre, par le prof. Sace 

Tubercules du Lathyrus tuberosus, succédané de la pomme de 
terre, comm. du prof. Sacc . 

Maïs quarantain cultivé par le prof. Suce: ses stontdues 

Sur la préparation de la cassave ou manioc, par M. Théremin 

De l’opportunité de la culture de deux espèces d’érables sur 
les coteaux arides, et de l’une d’elles dans les jardins, par 
M. L. Coulon fils , 

De quelques arbustes nuisibles au abbé pyEment: dés forêts et 
des moyens d’y remédier, par le D° de Castella et MM. L. 
Coulon fils et Théodore de Meuron . . . re 

Sur la quantité de forêts nécessaires pour la consomation 
annuelle d’échallas de notre vignoble, par M. Th. de Meuron 

Nouveau procédé de culture de la vigne de M. pars comm. 
par le prof. Sacc. 5 : : 

Procédé Loïiseau pour la grefte en ent ou en couronne, comm. 
par M. L. Coulon fils . ... + 20 

Note sur l’appareil de M. Fiolette non É den cuisson 
ou carbonisation de divers corps. par le prof. Sace. 

Autre procédé déjà y à Neuchâtel, comm. par le prof. 
Ladame . . . ve 

Mémoire manuscrit “3 M. Paul CEDRare sur w her 
artificielle des poissons, comm. par le D" Cornaz . 3 

Remarques de MM. C. Nicolet, pharmac. à la Chaux-de- ronds 
et Fouga. prof., sur le même sujet 

Des élangs de sangsues et des causes qui nuisent à É 
duction de ces animaux, par M. CAS Malthieu, pharmacien. 


THECHNOLOGIE. 


Discussion entre le prof. Sace et M. DuBois-Bovet sur les ayan- 
fages qu'aurait une exposition des produits de industrie 


16 


17 


92 


141 


197 


— 439 — 


Pages. 
Sur la tournée officielle faite par le D' de Pury chez les doreurs 
au feu de la Juridiction de la Chaux-de-Fonds . . . . . 149 
Des procédés actuels de dorage et de la supériorité de celui de 
M. Barral, par le prof. Sacc. . . . 12 
De la dorure galvanique et de l'emploi di chvanomètié de 
M. Bonijol, par le prof. Ladame . . . 15 
Rapport de M. Théremin sur un atelier de gairanoplastique à 
LEVEL Der Er fe 284 14 


Du dorage et en par ticulier du FRE Yalvänique! de ses in- 
convénients et des moyens d'y remédier, par le P° Zadame 17 


Discussion sur cette communication à la Chaux-de-Fonds . . 1445 
Pièces de montre dorées par M. Cave, sans l'intermédiaire de 
poudre d’argent ou de mercure. . . . . . . . 150 et 183 


Modification subie par la commission nommée par la seclion 
de la Chaux-de-Fonds pour examiner différens ae de 


dorurersr 5e + 450 
Rapport de cette commission ; Ahtat \. Louts Faër CAGE 
Lecture de ce rapport à Neuchâtel et discussion à ce sujet. . 10% 
Remarques du prof. Ladame sur ce rapport . . . . 112 
Expériences faites par un doreur au feu, comm. par le p' de 

PUTY AE 149 


Procédé de Roseleur far le dor ae ‘chimique: pr té pr Suce 185 
Discussion sur les dorures entre MM. Ch‘ Matthieu, Va et 


Ladame, profs PS 851 04150 
Sur divers procédés de dorage, par N. Olivier Matthey. Er 5, 
Aiguilles de montre dorées par le es de M. RS Ne par 

M. Olivier Matthey. . . . 237 
Essais de dorage spécialement au moy en FA a anures et de la 

galvanoplastique, par le prof. Sacc. . . . 3 nus 28A 
Discussion à ce sujet entre les prof. Sacc et Ladame. > Étoitr:288 


Singulière coïncidence entre la découverte du dorage au galva- 
nisme et celle des vastes mines d’or de la Californie, si le 
prof. Ladame. . . . 579 

Procédé pour donner au cuivre de EPA Pres une RES sr 
pourpre au moyen de l’oxidation, par M. C. Nicolet, pharm. 933 

Sur une huile particulièrement adaplée à la conservation des 


rouages de montres, par le prof. Ladame . . . 544 
Nouveau procédé pour ir les huiles au moyen du bg! er 
JéprofsSacer. … . 283 


Procédé de préparation des « cuirs découvert par le prof. Saëc. #186 
Ouate simulant de la toile peinte, comm. par le prof. Sacc. . 9212 


— NO — 


rages. 
Planche-spécimen gravée sur pierre par des ous propres 
à M. Sonrel, lithographe . . . . . 127 
Fabrication de la porcelaine en France + à Hdi, _ " “ei 
SUCC- es egces- lon. 1e 15 
Sur les calcaires Édoiqhess par le prof. Sac lat ar 202 
Sur le mortier des Romains et sur du mortier contenant de la 
sciure de bois, par M. L. Coulon père. . . . rer 202 
Manière de durcir les enduits de plâtre. par le prof. Sace units 1202 
Noie sur l'appareil de M. Violette pour la dessication , cuisson . 
ou carbonisation de divers corps, par le prof. Sauce . . . 284 
Autre procédé déjà Fe à Neuchâtel, comm. par le prof. 
Ladame . . . 284 
Sur les différents Systèmes 4 SR rs us FF 
grands bâtiments, par le prof. Ladame . . . 321 
Avantages des nouvelles amorces anglaises pour rs sauter 
les roclies, par M. G. de Pury, ingénieur . . . . 192 


Mêche de M. Gustave de Pury pour mettre le feu aux mines . 202 
Discussion sur l’usage des aiguillettes et de l’étincelle électri- 
que dans le même but, par MM. Ladame P', DuBois-Bovet, 


de Castella D.-M., et G. de Pury, ingénieur .. . . 193 
Sur la télégraphie électrique et en particulier sur un ere 
qui lui est propre, par M. Olivier Matthey . . . . 251 
Notice historique sur les télégraphes électriques par le P' Kopp 529 
Avantage de l’aide-mémoire de mécanique pratique de M. 4r- 
thur Morin, comm. par M. G. de Pury . . . . . . . 275 
STATISTIQUE. 


Sur l'utilité de continuer des tableaux du mouvement de la po- 
pulation du canton de Neuchâtel, par MM. eo prof., et 
DuBois-Bovet. . . . 198 

Questions du D' Conrad Räh, de 2e) au De d Castella, 
sur diverses données statistiques à observer dans notre canton 340 

Statistique des ateliers de dorure au feu de la juridiction de la 


Chaux-de- FRnEs € en 1845 et 1846, pri le D' de Pury . . 149 
ERRATA. 
IL est resté dans ce volume un certain nombre d’erreurs typographiques; 
il est important de corriger les suivantes : 
Page 209, ligne dernière : au lieu de Goudret lisez Gondret. 
» 293, LA » myelliles »  myélites. 
» 297, » 28: »” Hygroforus »  Hygrophorus. 
ASIE. A NT » mélropenloniles »  meélro-périlonites 
» 320, » 17: » Belinghéri »  Bellingeri. 
») 359, .2-20: » van der Korrut » van der Korput, 
N et_de: Zepnuous »  Leonurus 
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WÉMOURRS 
DE LA NOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLE 


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DE NEUCHATEZ. 


La paru jusqu'ici 5 volumes ; 


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PRIX DU VOLUME : 20 FR. 


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