BULLETIN
DE LA
STATION BIOLOGIQUE
D'ARCACHON
TRAVAUX DES LABOIIATOIRES
UNIVERSITÉ DE BORDEAUX
ET SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE D'ARCACHON
BULLETIN
DE LA
STATION BIOLOGIQUE
D'ARCACHON
QUINZIÈME ANNÉE
(1913)
BORDEAUX ■
FERET & Fils, Libraires-Editeurs I
9 — Rue de Grassi — 9 -j
]
i
1913 ;
NOTE
SUR PAUr. BEllGON ET SES TRAVAUX DIATOMOLOGIQUES
La Dialomologie a fait en la personne de Paul Bergon une
perte considérable. J'allais écrire irréparable.
Chercheur passionné, observateur infatigable, esprit éclairé et
avisé, savant instruit et richement- documenté, il a enrichi les
branches les plus ardues de la Diatomologie de connaissances
d'autant plus précieuses que sa scrupuleuse conscience lui a
toujours interdit de publier quoi que ce soit, non seulement qui
ne fût ou ne lui parût exact et prouvé, mais encore qui ne se
rattachât d'une façon continue à une série de faits connexes,
également certains.
A la période actuelle où la science tend à devenir une profes-
sion, où le moindre fait nouveau fait l'objet d'un mémoire écrit
pour « prendre date», BERGONest resté dans la tradition ancienne.
Ses publications sont des documents. H y est resté aussi dans
ses procédés d'observation et c'est là le secret de ses décou-
vertes.
Sans négliger les procédés de coloration et de fixage qu'il a
au contraire poussés à un haut degré de perfectionnement, Bergon
a surtout interrogé la nature et la nature lui a répondu. Sa
méthode a toujours été celle de l'ilUislre Fabre. Examiner sans
relâche, patiemment, jour et nuit, les êtres vivants en poursui-
vant un but actuel bien défini, par exemple la sporulation d'une
Dialoniée, mais en conservant toute sa liberté d'esprit, notant
tout ce qui parait digne d'intérêt en dehors de ce but actuel,
dessiniint tout ce qui paraît nouveau, surtout incom[)réhcnsible,
mnis sans se laisser distraire hors de la mesure indispensable
du but actuel poursuivi, cela amène, sans (pi'on y pense, à
constituer des dossiers qui s'enrichissent peu à peu et qui un
0 BULLETKX DE LA STATION BIOLOGIQUE d'aRCACIION 1913 [2]
beau jour s'éclairent et conduisent à une piste nouvelle que l'on
suit à son tour.
C'est de tout cela que sont remplis les albums de Bergon et
souvent le second pas dans une voie nouvelle ne vient relier
les premiers et troisièmes que bien longtemps après et les
éclairer.
Parallèlement à cette étude des matériaux vivants, l'étude des
matériaux fixés et colorés progresse en se révélant [Kir compa-
raison juste ou fausse, utile ou nulle. C'est ainsi que BeuggiN est
arrivé à constater la grande fragilité de la cellule des Diatomées
pélagiques, à perfectionner à l'extrême ses méthodes de récolte
et à trouver les meilleurs moyens de fixage des récoltes suivant
les espèces qu'on y recherche. Car ce qui suffit avec l'une est
insuffisant avec l'aulrô et il faut arriver à distinguer si l'obser-
vation d'une Diatomée fixée révèle des détails intéressants d'une
structure réelle ou ne présente que l'aspect illusoire d'éléments
altérés ou déformés parle fixage lui-même.
Et puis comment décider si une spore est mobile, si on ne l'a
pas vu vivre et se mouvoir, et comment reconnaître si telle sphe-
rule est ou non une spore qui a été mobile, si on n'a pas suivi
les phénomènes de la vie et de la mort de cette spore ?
C'est pour rester fidèle à cette voie d'honnêteté scientifique
absolue que Bergon a laissé dans l'ombre et perdu ou risqué de
perdre bien des découvertes importantes.
Entre sa première découverte de la sporulation du Blddulphia
mobiliensis et sa première note à ce sujet, deux ans se sont
écoulés. Le phénomène bien constalé nous en avons, lui et moi,
reconnu la fréquence et pour ainsi dire la banalité. On peut
donc dire que sa découverte était entre les mains de quiconque
eût observé comme lui; mais qui se soucie d'examiner pendant
des heures et des jours des centaines de goultcs d'une récolle à
première vue banale de ce Biddulphia si commun, qui donc
sinon Bergon ! Aussi a-t-il pu attendre pour sa première noie
qu'il ait constitué un premier ensemble de faits permellant un
aperçu certain du phénomène.
Comme tout bon observateur, Bergon possédait une extrême
habileté manuelle. D'ailleurs, la fonction crée l'organe. Manier
des corpuscules microscopiques sous le microscope composé
n'était qu'un jeu pour lui et comme d'autres il eût pu faire ces
[3] NOTE SUR PAUL BERGON ET SES TRAVAUX DIATOMOLOGIQUES 7
« type plates » qui surprennent si vivement ceux qui les voient
pour la première fois. Il n'en a jamais fait, bien qu'il ait trié
tant de types isolés. Ce qu'il faisait couramment était bien plus
difficile que de manier des Diatomées à sec au bout d'un poil.
C'est dans leur milieu môme, dans l'eau de mer qu'il les dépla-
çait soit pour les isoler dans des gouttelettes du môme milieu
pour les ensemencer, soit pour les transporter dans des goutte-
lettes d'eau douce où elles mouraient en séchant, révélant au
moment même de leur dessiccation tous les détails des produc-
tions plastiques externes, poils, crôtes, etc., si peu connues et si
difficiles à colorer.
Outre l'observateur, il y avait chez Bergon un chercheur aussi
remarquable qu'infatigable. Gomme les meilleurs botanistes, il
avait ce don, cette intuition qui sur le terrain dirige le cher-
cheur vers l'endroit où se trouve ce qu'il cherche. Que d'hybri-
des d'Orchidées n'a-t-il pas découverts, que de riches récoltes
do Diatomées n'a-t-il pas faites en des lieux réputés infertiles !
Au début de sa longue période de cures à Arcachon, il avait
écrit à un des plus renommés préparateurs d'Allemagne et lui
avait demandé s'il désirait qu'il lui cherchât quelque chose. Le
micrographe allemand lui répondit :« Inutile de chercher des
Diatomées à Arcachon, j'ai fait cette station, il n'y a rien. »
Il y a trouvé de tout : Planktons merveilleux, epiphytes et
vasicoles de toute nature, argiles fossiles merveilleuses, jusqu'à
cette curieuse transition, encore en place, des espèces d'eau douce
actuelle aux espèces marines quaternaires qui, pour tout savant
impartial, résout le problème de l'origine marine des lacs litto-
raux de Gascogne, origine qui n'est plus contestée que par
quelques esprits systématiques qui ne peuvent abandonner leurs
idées anciennes et luttent contre l'évidence.
Gar il existe de ces esprits. Certes, une idée, une directive
est nécessaire à la conduite d'une série de recherches biologiques,
on ne peut observer avec fruit si l'on marche au hasard. Autant
que tout autre, peut-être plus, Bergon a marché sur des
théories, sur des idées préconçues. Il les défendait avec ardeur
et acharnement, mais il n'en était pas l'esclave et il cherchait
toujours, sinon un contradicteur, du moins une discussion,
non pour discuter mais pour s'éclairer et mettre en évidence
les points faibles de ses idées. C'est un rôle que j'ai joué bien
8 BULLETIN DE LA STATION BIOLOGIQUE d'aRCACHON 1913 [4]
souvent auprès de lui, mes approbations l'encourageaient, mes
objections le contrariaient tout d'abord, puis le faisaient réfléchir,
puis un jour ou l'autre, grâce à ses patientes observations, un
fait surgissait qui venait nous fixer. Ce fait s'il lui était con-
traire, mais s'il se présentait dans des conditions d'observation
certaines, réglait la question, il le subissait, ne le discutait pas,
ne cherchait pas à le plier à sa théorie; les idées contraires
qu'il s'était faites étaient purement et simplement abolies ; il
fallait orienter les recherches dans un autre sens, et voilà tout.
Chez Bergon, le dessinateur n'était cependant pas à hauteur
de l'observateur. Le dessin des structures ininutieuses des
Diatomées réclame, outre une grande habileté manuelle, qui est
un don spécial, une grande dose d'une patience toute particulière,
patience passive si l'on peut dire; celle de Bergon était surtout
une inlassable et active persévérance. Il a cependant énormé-
ment dessiné, il a dessiné tout ce qu'il a vu et qui lui a paru
intéressant, mais ses dessins sont plutôt de lumineux croquis
mettant en évidence des détails intéressants que des dessins
complets, bons à être reproduits tels quels. Aussi a-t-il dû,
lorsqu'il a publié ses ouvrages, avoir recours à des dessinateurs
professionnels avec lesquels il a eu d'interminables démêlés, car
s'il n'était pas minutieux, il était méticuleux. Les épreuves
corrigées et recorrigées de ses planches que je possède sont là
pour en faire foi.
Admirable et habile photographe, comme on le sait, sa pre-
mière idée a été de faire appel à l'objectif pour reproduire la
structure si délicate des Diatomées. Malgré tout ce que j'ai pu
lui dire à ce sujet, il a procédé ainsi pour ses dessins à' Entogonia.
Il a fait ou fait faire de magnifiques clichés qui ont donné de
déplorables images scientifiques. D'après ce que j'ai dit plus
haut de son caractère, cette expérience l'a éclairé, la cause a
été jugée, il n'y est plus revenu. S'il m'a demandé plus tard
quelque clichés, ce n'a été que pour constituer des documents
qui puissent au besoin être opposés à ses contradicteurs éven-
tuels, clichés dont il s'est bien gardé de publier des épreuves et
dont il n'a d'ailleurs pas eu a se servir, sa réputation étant établie
à ce moment (1).
1,1) Ce n'est que dans ses dernières années qu'il s'était adressé à mon fWre et à
>OTE SUR PAUL BERGON ET SES TRAVAUX DIATO.MOI.OGIQUES
Comment Bergon a-t-il été amené à étudier les Diatomées?
Je ne le sais pas au juste, mais je suppose que, comme la plupart
des diatomistes qui se sont fait un nom dans cette branche de
l'algologie si négligée jusqu'à ces derniers temps par les
« savants » professionnels, il y a été amené par la botanique.
En tous cas, il a débuté jeune dans cette étude. Je l'ai connu
à Nimes en 1886 ou 1887, lors d'un voyage qu'il fit dans le
Midi. Il était déjà au courant de la Diatomologie et nous allâmes
ensemble faire des récoltes pélagiques sur l'étang de Berre.
C'est à cette époque qu'il fit la connaissance des diatomologistes
de Montpellier, de Guinard entre autres. J'ai trouvé dans sa
collection des récoltes de 1885 à Yillefranche, de 1888 et 1889
sur la côte normande, toutes pélagiques; il a, selon toute vrai-
semblance, abordé l'étude des Diatomées vers sa vingtième
année.
Dès le moment où je fis sa connaissance, nous nous liâmes
d'une très profonde et très intime amitié, car tous nos goûts
scientifiques, artistiques et littéraires se trouvaient d'accord;
son caractère simple et charmant, son amour de la science, son
éducation raffinée le rendaient immédiatement sympathique et
je peux dire que pendant les vingt-six ans qu'ont duré nos
relations, aucun nuage, si léger qu'il fût, n'est venu voiler
l'intime éclat de notre amitié. A cette époque, il était plein de
santé, c'était un aimable et gai compagnon.
Jusqu'à son arrivée à Arcachon, en 1911, Bergon fut simple-
ment un collectionneur; il organisa et accrut sa riche collection
et étudia plutôt des frustules que des cellules, mais outre tous
les types rares qu'il acheta ou qu'il tria lui-même, il ne cessa
de récolter, de sorte que peu à peu il devint familier avec
l'aspect des cellules vivantes; d'un autre côté, ses récoltes se
moi pour ses dessins. Il a [lublié les dessins des phases de la sporulation des
BiiliUilp/iia mohiliensis que je lui avais faits. La mort ne lui a pas laissé le temps
de publier les beaux dessins de Debya et iVActiiio/Jlyr/tus que mon frère a faits pour
lui. Je les publierai avec son travail sur le rajeunissement des Actinoptycitus si je
retrouve son mémoire que je connais, mais qui a disparu de ses papiers. 11 doit
être chez quelque imprimeur.
10 BUI.LETIIN DE LA STATION BIOLOGIQUE d'arCACHON 1913 [0]
portèrent surtout sur le Plankton, récoltes faciles et propres,
donnant sans peine de belles préparations; mais, là encore, s'il
se familiarisait avec les procédés et les formes, il collectionnait
simplement.
En 1890, après la publication de mes Diatomées de Ville-
franche, je lui fis part de mon intention de publier quelques
monographies de genres intéressants et mal connus et lui
montrai la nécessité de travailler un peu pour le public et de
nous faire connaître dans une branche de la botanique où il y
avait encore tant à faire. L'idée le séduisit, il choisit un genre
difficile et mal connu et, en 1891, peu de temps après l'appari-
tion de ma monographie des Pleurosigma, il publia celle des
Enlogonia dans Le Diatom'isle de Tempère.
Cette magnifique monographie lui demanda beaucoup de
travail. Les Entogonia, comme on le sait, sont très rares ; il
en acheta tout ce qu'il put trouver chez les préparateurs de
profession et leur en fit rechercher pour son compte, il en tria
quelques-uns lui-même et réunit ainsi une centaine de prépa-
rations. C'était encore insuffisant ; il n'hésita pas à s'adresser
au British Museum oh. se trouvent les collections de Gréville
qui a institué presque toutes les espèces de ce genre. Il reçut du
grand établissement anglais le meilleur accueil. Tout ce qu'il
demanda lui fut communiqué sans réserve; il put ainsi publier
un travail complet sur ce sujet si difficile.
Son ouvrage fit sensation; les détails de structure qu'il révé-
lait chez ces formes compliquées parurent si surprenants et si
extraordinaires que de bons esprits doutèrent de leur exacti-
tude. Bergon, sentant ce doute, me montra ses préparations. Je
les possède, hélas! aujourd'hui; il n'a rien avancé qui ne fût
rigoureusement exact seulement on ne saisit bien ces détails
ou généralement les traces que l'altération de ces formes très
anciennes en laisse subsister que lorsqu'on en connaît l'existence;
pour la counaîlre, il fallait la découvrir et c'est celte découverte
qu'une observation patiente, la rencontre de quelques fragments
moins altérés, a permis à Bergon d'entrevoir d'abord et de
réaliser complètement lorsqu'il eut réussi à trouver quelques
très rares frustules entiers et intacts.
[7] NOTE SUR PAUL BERGON ET SES TRAVAUX DIATOMOLOGIQUES 11
Jusqu'en 1901, pendant t1ix ans, BkbgoiN semble s'être contenté
d'etiricliir ses collections et sa bibliothèque; du moins, je ne
trouve pas d'autres traces de son aciivilé diatomologi(ine : Des
préparations, des livres, ni [)ublicatioiis, ni manuscrits, ni
dessins.
Mais, pendant ce laps do temps, la Dialomologie avait fait
un progrès considérable; elle élait entrée définitivement dans
le courant des recherches scientifi(pies générales. Elle le devait
à rOcéanogra[)hie.
Les recherches océanogra[)hi(|ues avaient mis en lumière
l'existence et l'importance du Plankton; il devenait nécessaire
de reconnaître, de déterminer les Planlvtons et, comme ils sont
en majeure partie composés de Diatomées, il fallait bien que la
science se décidât à s'en occuper. jNIais les « savanis » (]ui le
firent n'étaient pas des diamolologistes au sens antérieur; ils
considérèrent ces organismes non plus comme de curieuses
coquilles, mais comme des algues et alors toule leur biologie fut
à l'ordre du jour et les questions de l'endochrome et celles des
spores devinrent des questions importantes, la classification de
ses algues prit ou plutôt sembla prendre une tournure nouvelle.
Les savants qui avaient débuté par l'élude des Diatomées du
Plankton, formes spéciales incomplètement connues, y décou-
vrent beaucoup de formes nouvelles et sont i)ris à leur tour i)ar
le charme des Diatomées et par tout l'inconnu que leur biologie
renferme encore ; ils étendent leurs recherches aux espèces du
fond, les étudient en biologistes qu'ils sont et alors une niîigni-
fique série de travaux voit le jour. li'endochrome est étudié de
tous côtés. La théorie de Pfiizer, généralisation trop hàlive de
recherches incomplètes, est battue en brèche. La structure de la
membrane et du noyau, la division cellulaire, la formation des
auxospores sont étudiées à nouveau par Grau, Karslen, Klehahii,
Mereschkowsky, iMiiller, Lemmerman, Schult et autres encore.
Les si)ores sur lesquelles il n'y avait encore que de vagues
données et des discussions académiques sans valeur sont recon-
nues; il allait appartenir à BerggiN de découvrir le processus
complet de leur formation et à Mangin de trouver la véritable
12 BULLETIN DE LA STATION BIOLOGIQUE u'aRCACIION 1913 [8]
nature de la mcaibraiic organique de la cellule sur laquelle
s'était généralisée dans les traités cette stupéfiante conception
d'une cellulose spéciale qui ne présentait aucune des réactions
de la cellulose !
En 1901, BEaGOA', atteint de la grave maladie qui devait lui
être fatale, fut envoyé à Arcaclion où il devait faire chaque
année de longs séjours jusqu'à sa mort. De mon côté, je vins
me fixer définitivement à Bordeaux, Je fus donc le témoin de
ses travaux et je l'y aidai en tout ce que je pus faire.
Dès le début, il se lança à fond dans la voie nouvelle et la
liste de ses travaux indique l'ordre et la marche de ses recher-
ches.
Tout d'abord, il observe sans but défini tout ce qui lui tombe
sous les yeux, notant et dessinant tout ce qu'il rencontre d'inté-
ressant (son premier album est de cette année).
H résulte do ces éludes un mémoire important paru en 1903
dans le Bulletin de la Société scienlific/ae cV Arcachon et inti-
tulé : « Eludes sur la flore dicilomique du Bassin cV Arcaclion et
des parages de l Atlantique voisins de cette station ».
Dans celte intéressante série d'études, Bergon étudie les
structures et les phénomènes biologiques les plus divers :
Structure de la membrane, productions coléodermiques externes,
division de la cellule, forme, mouvements et division des
chromatophorcs, endocytes, etc.
C'est sur la fin de ces études, lorsque son manuscrit était déjà
à l'impression, (jue BergoiN se trouva tout à coup en présence do
la sporulation du Biddulphia mobiliensis. Le 25 décembre 1902,
il constata la présence dans cerlaines cellules de deux spo-
ranges contenant 2, 4, 8 ou IG spores chacune avec son noyau,
vivantes et endocliromées. Là, plus de doute possible, les
noyaux étant très gros, bien visibles au naturel et facilement
colorables. Il m'appela immédiatement pour constater le fait
et c'est sur les récoltes fixées de cette époque que je fis les
dessins qu'il utilisa dans sa publication définitive. Les mômes
récoltes contenaient en abondance des cellules de BiddulpJiia
en formation d'auxosporos.
La sporulation des Diatomées était donc définitivement recon-
nue, les discussions antérieures recevaient leur solution; toute-
fois, l'origine et la fin du phénomène étaient encore à trouver.
[9] i\OTE SUK PAUL BERGON ET ,SES TRAVAUX DIATO.MOLOGIQUES 13
mais maintenant Bergon avait un but à poursuivre, bien défini
et du plus haut intérêt. Ces premières recherches parurent dans
le Bullelin de la Société scientifique d'Arcachon en 1903, dans
une note intitulée : a Note sur un mode de sporulation observé
chez le Biddulphia mobiliensis Bail. »
Dès son retour à Arcachon, fin 1903, Bergon reprit avec une
persévérance bien compréhensible ses recherches de l'année
précédente sur la sporulation du Biddulphia mobiliensis et
après de longues recherches, contrariées par le mauvais temps
persistant de cet hiver, il eut enfin la joie d'assister, au printemps
de 1904, à la mise en mouvement dans l'intérieur des sporanges
des spores dont chacune s'était munie de deux flagellums, de
voir ce mouvement s'accélérer, provoquer la dehiscence des spo-
ranges et l'émission des spores. Il avait, en outre, vu les débuts
du phénomène de la formation du sporange ainsi que la phase
de 32 spores (j'avais dessiné cette phase en 1902, mais Bergon
ne l'avait pas vue au naturel).
Dès lors, tout d'abord, le phénomène de la sporulation était
connu complètement, et comme on avait vu les spores en vie,
on pouvait identifier ces petites spherules que l'on observait si
souvent sans pouvoir les classer et qui n'étaient autre chose que
des spores de Biddulphia ayant terminé leur période d'activité
et perdu leurs flagellums, on pouvait espérer en suivre le déve-
loppement. Ces observations furent publiées en 1904 dans le
Bulletin de la Société scientifique d' Arcachon sous le titre de :
« Nouvelles recherches sur un mode de sporulation observé
chez le Biddulphia juobiliensis Bail. »
Disons, par anticipation, pour terminer ce qui a trait à cette
découverte sensationnelle, qu'elle causa un certain émoi dans
certains milieux, peu satisfaits de voir un a amateur » trouver
ce que les savants cherchaient avec tant de persistance depuis
si longtemps. Aussi quelques tentatives furent faites pour créer
une équivoque à ce sujet et rattacher à d'autres travaux tout à
fait incomplets l'honneur de la découverte de la sporulation des
Diatomées.
Ces tentatives furent très sensibles à l'àme si droite de Bergon,
mais, d'un autre côté, il répugnait à sa délicatesse de parler de
lui-même pour se défendre. Je n'avais pas à partager ces scru-
pules et je publiai, en 1905, dans le même recueil, un Mémoire
14 BULLETIN DE LA STATION BIOLOGIQUE d'aRCAGIION 1913 [10]
inlitulé : u Su?' la question des spores des Diatomées » où celle
question était mise au point et les droits de Bergo.n établis
d'une façon irréfutable.
En J90Î3, Bergon publia dans le Journal de Tempère, Le Micro-
graphe préparateur, une (.i Note sur certaines particularités remar-
quables observées chez quelques espèces de Diatomées du Bassin
d Arcachonny, qui est presque exclusivement réservée au Stepha-
nopyxis turgida et à sa membrane organique externe, d'une
structure si curieuse. Malheureusement, les descriptions de ces
structures, si détaillées qu'elles soient, sont absolument incom-
préhensibles sans figures. Bergon avait bien annoncé qu'il
publierait une note complète à ce sujet avec figures à l'appui,
mais il ne l'a pas fait. Ces figures existent cependant dans ses
albums, je les publierai et on verra alors combien ses descrip-
tions sont exactes et combien sa découverte est intéressante.
En 1907, il réunit toutes les observations qu'il avait faites
sur le Biddulphia mobiliensis dans un beau Mémoire intitulé :
« Division, rajeunissement et sporulation du Biddulphia mobi-
liensis y), qui parut dans le Bulletin de la Société botanique de
France. Si l'on ajoute à ce Mémoire celui que j'ai fait paraître
sur la division de la cellule et du noyau. Mémoire dont l'exis-
tence remonte en quelque sorte à Bergon, puisque mes recher-
ches ont été faites sur ses récoltes, on voit que le cycle
biologique du Bidd. mobiliensis est bien près d'être complet.
Sur les premières phases de la formation des auxospores, Bergon
n'émet qu'une supposition. C'est de la modestie de sa part; il
a vu ces phases, je les lui ai dessinées, mais tout cela sur des pré-
parations de récoltes fixées. Il voulait les voir sur le vivant avant
de les faire connaître, c'est dire que sa supposition est une
réalité. Chez le Bidd. mobiliensis, une cellule mère produit
normalement i/é?w^ auxospores par un processus tout à fait sem-
blable, sans être identique à celui du Bhabdonema arcuatum.
Il y a des conséquences très importantes à tirer de cette décou-
verte; je les développerai dans un prochain Mémoire avec des
figures détaillées de ces phases.
Ce qui manque donc actuellement encore pour boucler le
cercle, c'est la connaissance du développement des microspores
et le retour à l'espèce normale.
Bergon l'a ardemment cherché; il y a dans ses notes et des-
[IIJ KOTli SUR PAUL liEllGOiN KT SI'S TRAVAUX DIATOMOl.OGIQUES 15
sins de nombreuses observations qui semblent s'y rattacher,
mais malheureusement tout cela est trop incomplet pour pouvoir
fournir même un aperçu.
Après avoir passé à Arcachon presque la moitié de l'année
1911, de plus en plus souffrant, de plus en plus préoccupé, mais
travaillant toujours, il s'était un peu remis pendant l'été et
l'automne. Il se préparait à reprendre ses recherches, il avait
fait remettre à neuf son microscope d'étude, nettoyer ses objec-
tifs et s'apprêtait à revenir à Arcachon lorsque la mort est
venue le saisir subitement.
Les travaux véritablement scientifiques de Bergon n'avaient
pas détruit chez lui le curieux et le collectionneur, son esprit
était bien trop éclectique. C'est, en effet, pendant qu'il poursui-
vait à Arcachon ses belles recherches sur la sporulation des
Diatomées qu'il découvrait à Paris la mine si riche des débris et
raclures de coquilles exotiques chez les fabricants d'objets en
nacre de la capitale. Que d'espèces rares n'ont pas été trouvées
dans ces riches matériaux, dont le seul défaut consiste en ce
que leur provenance exacte n'est pas toujours connue avec cer-
titude. Tout cela est venu enrichir encore une collection si riche
déjà et qui à sa mort comprenait environ 15.000 préparations
de Diatomées.
Tous les amis de Paul Bergon le sentaient dans ces derniers
temps condamné à une fin prématurée, cependant nul ne croyait
que le dénouement du drame douloureux de ses dernières
années fût si prochain et si brusque ; il a été pour eux un coup
bien pénible.
La consolation qui leur reste est que les angoisses de la mort
lui ont été épargnées et que son nom lui survivra. Il lui survivra
dans la musique, dans l'art et dans la science. Ce nom a été
donné par ses amis à tant de Diatomées qu'il est bien difficile
qu'une liste de Planktons paraisse sans qu'on l'y retrouve. Nous
tous, qui l'avons connu, nous reverrons passer dans notre sou-
venir sa franche et noble figure, son gracieux accueil, sa char-
mante et délicate conversation. Ceux qui, comme moi, l'ont
connu pendant presque toute sa vie si remplie, penseront bien
souvent à sa joyeuse et vibrante jeunesse, plus souvent encore
aux douleurs et aux tristesses imméritées de ses dernières
années. H. Peragallo.
COMPTE RENDU
DE DRAGAGES EFFECTUÉS SUR LE BASSIN D'ARCACHON
Par M"^ C. HUE
Le chenal de Gousse
Le chenal de Gousse, de direction Nord-Sud, constitue un
passage assez étroit faisant communiquer au Nord : le chenal
de nie à l'Ouest et le chenal de Mouchtalette à l'Est; avec au
Sud : la large rade d'Eyrac à l'Ouest et le chenal de Teychan à
l'Est. C'est un véritable canal s'étendant de la pointe du Congre,
au Nord, à la pointe de la Humeyre, au Sud. Ses bords, com-
plètement submergés à marée haute, sont constitués, à marée
basse, au Nord-Ouest : par les parcs à huîtres longeant le bord Est
de l'He aux Oiseaux ; et au Sud-Ouest : parle crassat de Mapou-
chet qui s'étend en face la rade d'Eyrac près de la ville d'Arca-
chon. Son bord Est est entièrement constitué par des parcs à
huîtres qui sont successivement, du Nord au Sud, ceux de
Hagnous, de Macaque, de Grahud et de la Humeyre. Aussitôt
après son entrée Nord, rétrécie par la pointe du Congre, le che-
nal de Gousse s'élargit dans sa première moitié, il se rétrécit
ensuite, mais resterait largement ouvert au flux par la rade
d'Eyrac si son embouchure Sud n'était obstruée par le petit
crassat de Mapouchet, de forme allongée, et constitué par une
boue épaisse et noirâtre.
Les recherches dans ce chenal ont été effectuées, d'abord du
Nord au Sud, avec une seule drague, le bateau marchant à une
vitesse de 3 kilomètres à l'heure. Le premier coup, donné à
l'entrée Nord du chenal, entre la pointe du Congre et la pointe
des Moussettes, accusa 5 mètres de fond, il rapporta un grand
nombre de grosses coquilles, mêlées de Zostères (Zostcra nana,
2
IS BULLETIN' DE LA STATION BIOLOGIQUE d'arCACHOiX 1913 [2]
Roth.) ot poiivnnt faire affirmer la presence d'un fond coquillier.
La grande majorité de ces coquilles était composée de Avives
d'HuUrcs portugaises (Gryphea angulata. Link.) de quatre et
cincj ans, et de quelques Huîtres d'Arcachon f/>.sire« edulis, L.);
de valves de Pétoncles {Pecten) et de débris de Crabes. Sur ces
valves étaient fixées de toutes petites Huîtres d'Arcachon de
moins d'un an. Sur une valve d'Huître portugaise il a été trouvé
une colonie d'œufs de petits Gobies {Gobius minutus, Pali.)
prêts à éclore, puisqu'un simple effleurement de leur enveloppe
a suffi pour les rendre libres dans le milieu extérieur. Ces œufs
ont pu être rapportés vivants et fixés au laboratoire de la Société
par les soins du Préparateur. Parmi toutes ces coquilles, on a
pu récolter bon nombre de Pétoncles (Pecten varias, L.) d'un
joli rouge brique et d'une belle dimension (5 centimètres de
diamètre), des Ophiures (Ophiotrix fragilis, Milll.) et des Cra-
bes très petits du genre Xantho (Leacli). Le tout était maculé
d'une boue sombre, de teinte analogue au sol constituant les
bords du chenal, et que nous allons examiner maintenant.
Cette boue noirâtre et d'odeur fétide, examinée macroscopi-
quement, comprend deux parties :
Une première, formée de matières dures et irrégulières pou-
vant être facilement triées, et composée uniquement par des
tubes d'Hermelles (Ilermella. Savignij) cimentés entre eux et
sur lesquels sont fixés des tubes d'Hydroïdes; et une seconde,
semi-liquide, formée de 95 % de sable pour 5 % de vase,
et qui, par conséquent, se classe dans la catégorie des sables
vaseux.
A l'appareil de Lacaze-Duthiers le sable se révèle composé
de deux portions:
oO Vo tie grains de 1/2 centimètre de diamètre et 50 % de grains
de 1 a de diamètre. Les grains les plus gros comprennent 90 "/o
de grains siliceux d'un blanc pur qui, vus au microscope, sont
irréguliers et anguleux, et de 10 «/o de grains noirs qui se mon-
trent toujours polis et arrondis. La partie vaseuse est composée
de particules noirâtres extrêmement fines, mélangées à des débris
de coquilles et de tubes d'Hydroïdes plus ou moins remaniés.
On y trouve aussi des Annélides vivantes et beaucoup de petites
Algues, en particulier plusieurs espèces de Diatomées.
Le deuxième coup de drague fut donné, non plus à l'entrée
[3] C. IIUU : DHAGAGES HKFlîCTUKS SUU f.li BASSIN d'aRCACIIO.X 19
du chenal, mais un peu plus au Sud; il accusa (3 mèlres d'eau
et rapporta un très grand nombre de valves d'Huîtres portu-
gaises {Grijphi;a angulala, Lmk.) cimentées les unes aux autres
par des multitudes de tubes d'IIermelles (IJermella, Savigny) et
garnies d'Epongés dont nous avons pu déterminer deux sortes.
Dans cet ensemble, recouvert d'un dépôt de môme nature que
celui du premier dragage, s'agitaient des Cliones, des Ascidies
{Ascidiidi), des Bryozoaires et de jolies Ophiures (Ophiothrix
fragilis, MulL). L'ensemble contenait aussi de gros œufs de
Seiche {Sepia officinalis, Linné) encore vivants, fixés sur des
Zostères charriées par le courant.
La deuxième série des recherches fut faite au milieu du chenal,
c'est-à-dire à égale distance de son entrée Nord et de son entrée
Sud; le bateau traversa ol)li(]uement le passage, de sorte que
l'on put draguer une première fois près de la côte Ouest : on ne
ramassa que des valves d'Huîtres portugaises et d'Huîtres
d'Arcaclion, des Pétoncles {Pccten varius, L.) et une Anémone
(Anemonia sulcata, PennaiU) i'ixée; puis une seconde fois exac-
tement au milieu du chenal, à égale distance de la côte Ouest et
de la côte Est: ce fut le point le plus riche et le plus intéressant
aussi allons-nous l'étudier maintenant en détail. Les dragues,
disposées de chaque côté du bateau, rapportèrent une très
grande masse de débris au milieu desquels grouillaient un nombre
considérable d'animaux de toutes sortes.
Nous étudierons d'abord les coquilles. C'étaient de grosses
valves d'Huîtres portugaises (Gryphea angulala, Lmk.) presque
toutes entières, mais toutes percées par des Membranipores
(Membranlpora, de Blainville) et portant, soit des Ser[)ules
{Serpula, da Quatre f ages), soit des tubes (\ Itermelles. Sur une
de ces coquilles, en particulier, vivait une belle Anomie {Ano-
mia seritiopsis), sur d'autres des Ascidies (Mouascidies, Molgu-
lidi), et des Polynoïdiens (Polgnoe, Savigng).
Puis, en moins grand nombre, des valves d'Huîtres d'Arca-
clion (Ostrea edulis, L.) de deux à trois ans à peu près, portant
ce qu'on nomme dans le pays des bouquets, c'est-à-dire des
paquets de plantes marines; une ou deux valves de Couteaux
(Solen siliquosa, L.) sur lesquels étaient fixées des Actinies
(Actiniidi); deux ou trois coquilles de Corniailleaux, comme
les nomment les parqueurs d'huîtres, et qui ne sont autres que
20 BULLETI>' DE LA STATION BIOLOGIQUE d'aRCACHON 1913 [4]
des Murex (Murex erinaceus, L.) ; des valves de Lucines (Lucina,
Lamarck) et des coquilles de Yolvules (Volvula, Adams).
Il fut récolté un grand nombre d'animaux vivants, en parti-
culier des Crustacés, largement représentés par des Sténoryn-
(jues (Stenorhyiichus phalangium, Penn.), des Crabes du genre
Pilomnc (Pilumnus hirlellus, Penn.), et du genre Xanthe
(Xanlho, Leach), par des Pises (Pisa tetraoïJon, LeacJi) et des
Porcellanes (Porcellana longicoriiis, Pennant).
Les Echinodermes fournirent parmi les Astérides une quin-
zaine de magnifiques échantillons d'Etoiles de mer (Aslerias
rubens, L.) atteignant toutes de 20 à 25 centimètres de diamè-
tre; parmi les Ophiures, de superbes Ophiotrix (Ophiolri.x fra-
gilis, Mull.) et des OpJiiura lacertosa; parmi les Oursins, cinq
ou six Echinis miliari.'i (Lamarck).
Il ne fut trouvé aucune Huître vivante, mais, par contre, une
énorme quantité de Pétoncles (Pecten varias, L.) et quelques
Palourdes (Tapes decussatus. Lin.); enfin, dans les débris, il
fut reconnu des Volvules (Volvula, Adams), des petites Nasses
(Nassa, Lamarck) et un œuf de Raie lisse (Raia undulata.
Rond. Lacép.).
Le fond, en cet endroit du chenal, comporte toujours de gros
éléments constitués par des tubes d'Hermelles (Ilermella, Savi-
gmj) agglutinés et formant ainsi d'assez gros fragments isolés
et encore anguleux ; et une partie semi-liquide comprenant
cette fois-ci 98 "/o de sable et deux parties seulement de vase.
Le sable est presque entièrement composé de grains siliceux,
très irréguliers, d'un blanc pur, avec quelques grains d'un jaune
opaque, très anguleux et disséminés dans l'ensemble. Les grains
blancs et les grains jaunes forment 95 % de la masse totale du
sable, le reste est formé par des grains noirs et ovoïdes parfai-
tement lisses. La partie vaseuse n'est presque plus fétide, elle
est toujours constituée par de fines particules noirâtres mélan-
gées, en particulier, de débris de coquilles de Cérithes (Cerithium,
Adajison) et de valves de iMoules (Mglilus edulis, L.) réduites
en tout petits fragments, avec des débris de Balanes (Balanus,
Lamarck).
Enfin les dernières recherches effectuées, dans ce chenal, furent
faites du Sud au Nord ; les dragues furent traînées d'abord
parallèlement au crassat de INIapouchet, près des parcs à huîtres,
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22 BULLETIN DE LA STATION BIOLOGIQUE d'aRCACHOIV 1913 [6]
puis tout contre la pointe de la Iliimeyre. Près da crassat, c'est-
à-dire à rOuest, nous recueillîmes simplement des cocpiilles
d'Huîtres d'Arcachon et des Etoiles de mer (Asterias rubois, L.)
reposant sur un sable ne présentant plus que des traces de vase
et composé de gros grains de silice, d'un blanc pur, avec quel-
ques grains opaques, irréguliers et anguleux et, de-ci dc-là,
quelques rares grains noirâtres allongés.
Près de la pointe de la Humeyre, c'est-à-dire à l'Est, les dra-
gues rapportèrent, de 4'"o0 de profondeur, une grande quantité
d'Algues; des Pétoncles (Pecten varius, L.), des valves de Cou-
teaux (^^o/e/i mar</mr//^^.ç, Putney o\\ So len vagina, Linn. Pass.),
des coquilles de Nasses (Nassa, Lamarck) occupées par des
Bernards Thermite (Pagurus Bernhardus , L.) et portant, pour
quelques-unes seulement, des x\nomies (Anomia, Linné). La
nature du fond est sensiblement la môme : tous les grains de
sable sont très gros et, soit d'un blanc pur, soit d'un blanc
jaunâtre; ils sont mélangés de quelques rares grains noirs, très
allongés, mais anguleux eux aussi, cette fois, comme les grains
de silice.
En résumé, les recherches opérées dans le chenal de Gousse
nous montrent, au point de vue de la profondeur, qu'il existe
une dépression au niveau du tiers Nord du chenal et que le
fond se relève plus brusquement au Nord qu'il ne le fait au
Sud. C'est dans cette dépression que s'accumulent un nombre
considérable de volves d'Huitres provenant : soit des parcs
constituant les bords du chenal (Oslrea edulis, L.), soit de bancs
naturels mainlonant disparus (Gryphca angulata, Lmk.).
Au [)oint de vue de la faune, la présence, sur des valves
d'HuUros mortes actuellement, de pelites Huîtres d'Arcachon,
au Nord-Ouest du chenal, nous indique la présence d'une hui-
trière naturelle située non loin de la [)oinle du Congre. De plus,
il existe, sur la pente douce que forme le fond du chenal se rele-
vant ])eu à peu vers le Sud, un grand banc naturel de Péton-
cles (Pecten varius, L.) très riche et très étendu. Là vit aussi
un grand nombre de magnifiques Etoiles de mer (Asterias
rubens, L.) qui atteignent, dans cette région, des dimensions
remarquables.
Au point de vue de la nature du fond, les recherches nous
ont montré l'existence d'un sable vaseux au Nord du chenal; ce
[7] C. HUE : DRAGAGES EFFRCTUÉS SUR LE BASSIN d'aRCACHON 23
sable devient de plus en plus pur et se montre formé d'éléments
de plus en plus gros, à mesure que l'on s'avance vers l'entrée
Sud du passage.
Le chenal de l'Ile
Le chenal de l'Ile est à peu près perpendiculaire au chenal de
Gousse; il est orienté Nord-Ouest Sud-Est et fait communiquer :
d'une part, et au Nord-Ouest, le chenal de Piquey au Sud, et
le grand chenal d'Ares au Nord ; avec, d'autre part, et au Sud-
Est, le chenal de Gousse au Sud, avec le chenal de Mouchtalette
au Nord.
Il va de la pointe de Graoueyre à la pointe du Gongre et est
limité : au Nord, par les terres de Graoueyre et la côte Sud du
banc de Lahillon; et, au Sud, par les parcs à huîtres entourant
la côte Nord de l'Ile aux Oiseaux, c'est-à-dire : de l'Ouest à
l'Est, les parcs des Jalles, des Paysans, des Grastorbcs et du
Gongre.
Le flot arriverait largement dans ce passage par le chenal de
Piquey si celui-ci n'était obstrué par un certain nombre de bancs
de sable et, d'autre part, par le chenal de Gousse, dont l'entrée
Sud est presque fermée par le crassat de Mapouchet.
Les recherches furent effectuées de l'Est à l'Ouest, toujours
avec deux dragues disposées de chaque côté du bateau mar-
chant de 3 à 4 kilomètres à l'heure. Le premier coup, donné
dans le tiers Est du chenal, c'est-à-dire dans la partie commu-
niquant directement avec le chenal de Gousse, accusa (j"'oO
d'eau; ce fut le plus fructueux : au milieu d'un très grand nom-
bre d'Algues et surtout de débris de Zostères (Zostera nana,
Roth.) se trouvaient des Pétoncles (Pecten varius, L.), des
Bulles (Bulla, Linné), des Oursins (Echinus miliaris), des
Etoiles de mer ( Aster ias rubens, L.) de 10 à 15 centimètres de
diamètre, et quelques rares valves de Gouteaux {Solen siliquosa,
Linné) reposant sur un fond noir, dégageant une forte odeur
d'hydrogène sulfuré.
Ge dépôt noir est constitué par un très grand nombre d'Asci-
dies (Ciona intestinalis) de toutes dimensions (1 centimètre,
1 cent. 5, 2 centimètres de diamètre), soit vivantes, alors elles
[9] C. HUE : DRAGAGES EFFECTUÉS SUR LE BASSIN d'aRCACIION 25
sont fixées sur des tubes d'Hermelles (Hermella, Savigny) ou
des débris de coquilles ; soit mortes, alors elles sont plus ou
moins putréfiées au milieu de la boue.
Cette boue comprend 80 % de sable et 20 % d'une vase for-
mée presque exclusivement par des débris organiques. Le sable
est constitué par des grains très fins et arrondis comprenant
50 "/o de grains de Silice ou d'un blanc pur ou d'un jaune
vitreux, et 50 °/o de grains noirs de Magnetite (FE'O*).
Le deuxième coup de drague, donné plus à l'Ouest, vers le
chenal de Piquey, par 5 mètres de fond, rapporta quelques
rares valves d'Huîtres et un Hippocampe, vulgairement Cheval
de mer (Hippocampus gutlulatas, Ciivier). Le fond du chenal,
formé uniquement de sable et de petits débris de coquilles rema-
niées, est recouvert par une grande quantité de tubes d'Her-
melles (Hermella, Savigny) cimentés entre eux, en petits
nodules arrondis, et usés par le flot et le frottement les uns
contre les autres. Le sable est formé presque uniquement par
des grains de quartz anguleux, de grosseur moyenne; il ne
contient presque plus de grains noirs (Spinelle de fer).
Eu somme, les recherches qui ont été effectuées dans le chenal
de l'Ile nous montrent, au point de vue de la profondeur, que
le fond du chenal va en s'abaissaut graduellement de l'entrée
Ouest vers la partie Est.
Elles nous indiquent que c'est vers l'Est, à l'endroit le plus
profond, et au lieu où le courant se fait le moins sentir, que
vient se déposer la vase, alors que l'entrée Ouest du chenal
possède un fond sableux, recouvert de coquilles remaniées et
brassées par les flots.
Enfin elles nous montrent, vivant dans la vase, à son extré-
mité Est, une colonie d'Ascidies (Ciona intestinalis) actuelle-
ment en pleine vie.
Le chenal de Teychan
Le chenal de Teychan est le large bras de mer qui, depuis les
Passes, entoure la côte landaise, longe la ville d'Arcachon et la
rade d'Eyrac, pour se continuer à l'Est, au milieu des crassats.
C'est dans cette dernière portion seulement (pie nous l'étudié-
26 DULLETL\ DE LA STATION BIOLOGIQUE d'aRCACHON lOlîS [10]
rons, c'est d'ailleurs cette partie seule qui forme le chenal de
Teychan proprement dit.
Il s'étend de la pointe de la Humeyre et de la pointe du Tes,
à l'Ouest, à la pointe d'Essillat et au banc de Gompriant. De
direction Sud-Ouest Nord-Est il est très largement ouvert au
flux et est bordé, au Nord, et de l'Ouest à l'Est: par les parcs
de la Humeyre, du Navire brûlé et de Gaillac, par ceux du
Bourru et d'Essillat; au Sud, et toujours de l'Ouest à l'Est : par
les parcs à huîtres du Tes, ceux du Teich et de la Hillaire. Il
reçoit, toujours dans sa partie Est, au delà du chenal de Gousse :
le chenal de Courant et celui d'Essillat au Nord, le petit chenal
de la Hillaire au Sud. Il se termine en cul-de-sac, à son extré-
mité Est, par les chenaux de Lanton, do Gertes et de Gom-
prian. Le dragage a été fait au milieu du chenal, de l'Ouest à
l'Est, entre le banc du Navire brûlé et la pointe du Bournul, par
7 mètres 1/2 de profondeur à l'Ouest, puis 6 mètres à l'Est. Il ne
fut ramené que quelques valves d'Huîtres, surtout d'Huîtres
portugaises (Grijphea angulata, Lmk.), avec quelques rares
Huîtres d'Arcachon (Ostrea edulis, Linné); et, de-ci de-là, des
valves de Pétoncles (Per ten varias, Linné), aux contours usés
par le mouvement des eaux, et reposant sur un sable constitué
uniquement par de gros grains anguleux de quartz jaune ou
blanchâtre.
En somme, le chenal de Teychan, dont le fond s'élève à
mesure que l'on s'avance vers l'Est, est trop largement ouvert
au flux et au reflux pour permettre à la vase de s'accumuler et
aux animaux d'y coloniser. Il possède un fond sableux à gros
éléments et recouvert par les coquilles des animaux vivant
dans les chenaux qui l'avoisinent. Toutefois, la présence au
niveau des parcs du Navire brûlé de valves d'Huîtres portugaises
(Gri/phea angulata, La)narck) et de quelques Huîtres d'Arca-
chon (Ostreas edulis, Linné) vivantes, nous indique la présence
d'un tout petit banc naturel probablement en train de dispa-
raître.
BULLETIN DE LA STATIO.X BIOLOGIQUE u'aRCA:;HOI\ 1913 [12]
Le chenal de Gujan
Le chenal de Gujan a une direction parallèle à la côle, il est
francliement Ouest-Est et va de la rade d'Eyrac, à l'Ouest, au
chenal du ïeich, à l'Est. Il est limité, au Nord, en allant de
l'Ouest à l'Est : par les parcs à huîtres du Tes, les crassats de
Matelette et deMatelle; au Sud, toujours en allant de l'Ouest à
l'Est : par les crassats d'Arams, ceux de Lucarnan, de Maoureou,
d'Angoulins et de Gaillard. Il se continue à l'Est par le chenal
du Teich qui, en se ramifiant, se termine dans les crassats où
vient se perdre la Lcyre.
Les recherches furent faites de l'Ouest à l'Est, d'abord depuis
le débarcadère des Pêcheries à vapeur jusqu'à la pointe de
l'Aiguillon, au milieu du chenal, et bien en vue de la côte. La
drague, de 8"'a0 de profondeur, retira du courant, parmi les
Zostères (Zoslera nana, Rolh.) et les Algues (Fucus veslculosus,
Liwié) : quelques valves d'IIuitres portugaises (Gri/phea angu-
lala, Linné) et de Pétoncles (Pecten varius, Linné) ; des
coquilles de Lucines (Lucina, Lamarck), des Ascidies (Monasci-
clies, Molyulidi), des Oursins (Echinus niiliaris, Lamarck), de
jolies Ophiures (Ophiolrix fragilis, MiXlL), et un sable vaseux,
formant le fond à cette entrée du chenal, et constitué par 80 °/o
de sable et 13 «/o de vase.
Le sable, formé de parties extrèuiement irrégulières quant à
la grosseur, et quant à la forme, est constitué, presque unique-
ment, par des grains de Quarlz d'un jaune sale et par quelques
rares grains noirs irréguliers. La vase est composée de parti-
cules argileuses extrêmement fines qui donnent à l'ensemble
un aspect gluant et noirâtre. Le bateau continua ensuite ses
recherches du niveau de la pointe de l'Aiguillon à la pointe du
Traincat de Gentil; la drague fui traînée, parallèlement au bord
du crasssat d'Arams, par o mètres de profondeur, à une certaine
distance de la côte, très plate et vaseuse.
Elle rapporta: un nombre considérable de valves d'Huîtres
portugaises (Gryphea angulata, Lamarck) et d'Huîtres d'Arca-
chon (Ostrea eclulis, Linné) sur lesquelles étaient fixées quel-
ques toutes petites Huîtres couvertes de Serpules (Scrpula, de
[13]. c. HUE : diugagks effectués sur le bassin d'akcacho.n 29
Quatrcfagt's) ; des Crustacés très pelils du geure Xanlhe (Xan-
tho, Leach) et de magnifiques Crabes (Carcinus maenas, Luuié) ;
des Bernards l'hermile (Pagurus liernhardus, Litiné) et, au
milieu de Zostères (Zostera nana, Roth) un Cheval maria
(Hippocampus brevirostris, Cuvierj, et des o'ufs de Seiche
(Sepia officinalis, Linné) en longue grappe. Il fut récolté aussi
âes Oursins (Echinus niiliaris, Lamarck), des Ophiures (Ophiura
lacertosa, et Ophiolrix fragilis, Miïll.); des Murex. A^ulgaire-
ment Cormailleaux (Murex erinaceus, Linné); des Ascidies
(Monascidies, Molgulidi) et des Eponges.
Plus près de la côte, que l'on aperçoit plate et boueuse, main-
tenant que la mer s'est retirée, par 4"50 de profondeur, la drague
racle le fond vaseux. On a grand'peine à la retirer des flots, car
elle ramène une boue noire, très épaisse, qui recouvre toute la
récolte. Peu à peu les animaux s'agitent et émergent de ce
mastic gluant. Ce sont de magnifiques Crabes (Carcinus maenas,
Linné), de gros Fortunes (Portunus puber, Linné), des Xanthes
(Xantlio, Leach), des Pises (Pisa tetraodon, Leach). De longs
bras d'Ophiures s'agitent, ce sont des Ophiura lacertosa et des
Ophiolrix fragilis (Miïll.), mais nous ne récoltons aucune
Etoile de mer. Voici encore de magnifiques Oursins (Echinus
iniliaris, LMniarck). Enfin, la boue s'écoulant peu à peu, nous
pouvons voir une grande quantité d'Huitres portugaises (Grg-
phea angulata, Lamarck) et d'Huitres d'Arcachon (Oslrea edulis,
Linné) de trois et quatre ans. Puis des valves de ces mêmes
espèces, supportant une grande quantité d'autres Huîtres beau-
coup plus jeunes, se trouvent mélangées avec des valves de
Cardions (Cardium edule, Linné); de Couteaux (Solen margi-
natus, Putney; ou Solen vagina, LJnné, Pass.); de Pétoncles
(Pecten varias, Linné).
La boue, non fétide, se révèle composée de 70 "/„ de sable
et de 30 % de vase. Le sable, à la loupe, se montre composé
presque uniquement de grains de Quartz blanc ou jaunâtre
avec quelques rares grains d'un noir mat. Les grains quartzeux
présentent, pour la moitié de l'ensemble, un diamètre de 1 mil-
limètre à peu près, ils reposent au milieu d'une plage formée
d'éléments de même nature, mais beaucoup plus petits.
Tous les grains de Quartz, examinés au microscope, sont angu-
leux et irréguliers; ils sont tous plus ou moins transparents.
30 nULLKTIN DIÎ LA STATION BIOLOGIQUE u'AItCACIlOIN 1913 ,[14]
Les grains noirs, au contraire, sont opaques, qucl(|ucs-uus,
pourtant, ont des reflets d'un grenat sombre, ils sont polis et
arrondis : ce sont des grains de iMngnétite (comme on en trouve
si fréquemment dans le sable des Landes) dont les arêtes ont
disparu par frottement. La boue, d'un noir d'encre et très
gluante, est argileuse.
Le bateau continue à marcher en longeant de très près la rive
très déclive et couverte do Zostères (Zostcra nana. Roth.). Nous
longeons les pnrcs de Lucarnan dans une eau boueuse très sale près
du crnssat, ni;iis vcr(!àtre au milieu du chenal. Tout près des
collecteurs d'iluitres, et par 2'"50 de profondeur, la drague rap-
porta, juste devant la Hume, beaucoup d'Huîtres portugaises (Gnj-
p/iea angulala, Lamarck) et d'Huîtres d'Arcachon (Ostrea edulis,
Linné) de très belle dimension (0™12 X O""!» pour les Huîtres
portugaises), mais complètement revêtues par des tubes d'Hermel-
les (Jferniella, Saviynij}, des tubes d'Hydroïdes et des Serpules
(Serpula, de Qualrcfages). Quelques-unes sont, en outre, perfo-
rées par des Membranipores (Menibranipora, de lilainville).
Sur ces ensembles sont fixées de magnifiques Ascidies {Asci-
diidi) rouges, des Eponges de plusieurs espèces et quelques
petites Lucines (Lucina, Lainarck). De larges A^alves de Péton-
cles (Perten niaxi/nus, Linné et Peclen varias, Linné) se
présentent aussi sous le môme aspect, les rares valves de Cou-
teaux (Solen siliquosa; LJnné) disparaissent aussi sous les tubes
dllermelles (Hermella, Savifjny) et sous les Bryozoaires. La
boue, d'un aspect noir bleu, est composée de 50 % de sable et
de î)0 "/o de vase..
Le sable est formé de deux tiers de grains de Quartz, tous
anguleux, soient jaunâtres, soient blanchâtres, et présentant
des grains de petite grosseur, des grains moyens et des gros
grains en quantités à peu près égales. L'autre tiers est formé par
des grains de Magnetite, tous ovoïdes et polis par le frottement.
Quant à la vase, qui ne dégage aucune odeur, elle est consti-
tuée par de très fines particules argileuses.
En résumé, les recherches dans le canal de Gujan nous
montrent que le sol va en s'élevant graduellement depuis la
rade d'Eyrac jusqu'au fond du bassin. A mesure <pie ce fond
s'élève et que l'on s'avance vers l'Est au milieu des crassats, le
sable, d'abord à peu près pur, devient de plus en plus vaseux.
[15J c. HUE : dragages effectués sur le bassiiv d'arcachoin 31
Au point de vue de la l'amie, elles nous révèlent dans le chenal
et principalement sur la côte Sud, au Nord du crassat d'Arams,
la présence d'un grand banc d'Huîtres naturel en plein dévelop-
pement.
GONGLUSIOINS
Lorsqu'on compare, d'une part, le plan du Bassin d'Arcachon
indiquant l'emplacement des Huitrières naturelles en 1879 par
M. Dmochowski et, d'autre part, la carte du Bassin indiquant
les gisements de coquilles comestibles en juillet 1907, tracée par
M. Guérin-Ganivet, on est frappé, d'abord, par la différence de
profil des chenaux dont les contours changent sans cesse. Tel
crassat, celui de Mapouchet, par exemple, qui était jadis atte-
nant aux terres de Hosses et d'Estey-Neuf, et obstruait à peu
près complètement l'entrée Sud du chenal de Gousse, est main-
tenant isolé à l'Ouest par un chenal spécial : celui de Mapou-
chet. Si l'on vient à comparer les profondeurs diverses des
passages aux époques successives, on voit qu'en tel lieu, où il
existait auparavant une dépression, peut exister maintenant un
relief : c'est ainsi que l'entrée Est du chenal de l'Ile s'est nota-
blement abaissée depuis une soixantaine d'années environ. A
cause de ces différentes variations, la nature des sols sous-
marins se modifie; mais bien plus intéressante encore est l'his-
toire de la migration des animaux sur ces fonds. En effet, c'est
la formation de la dépression Est, dans le chenal de Gousse, qui
a entraîné l'existence, dans la vase qui s'y accumule, du banc
d'Ascidies que nous avons signalé. Gonsidérons, d'autre part,
la carte de M. Guérin-Ganivet et la carte que nous venons de
tracer : on s'aperçoit que le grand banc de Pétoncles, qui vivait
en 1907 à l'entrée du chenal de Gujan, n'existe plus aujourd'hui
et qu'il est remplacé par un banc d'Huitres provenant certaine-
ment de l'extension du petit banc d'Arams.
Le banc d'Huitres de la Pointe du Gongre, très étendu et très
florissant en juillet 1907, semble avoir considérablement dimi-
nué d'intensité de vie : d'ailleurs le nombre considérable de
v.dves d'Huitres déposées au fond du tiers Nord du clieuêd de
Gousse est certainement le témoignage de nombreuses vies
disparues.
32 BULLKÏIN DK LA STATION BIOLOGIQUK u'aRCACIIO.N lOlIi [16j
Le banc d'Huitres du Navire brûlé, dans le chenal de ïeychan,
semble avoir subi le même sort et avoir été beaucoup plus
importantqu'il ne l'est à l'heure actuelle.
Le Bassin d'Arcachon ne suit donc pas, au point de vue de
ses formes et de ses habitats, la loi générale de la Permanence
qui régit les fonds océaniques.
« Les fonds sous-marins, au point de vue de l'un quelconque
de leurs divers caractères : nature des minéraux constituants,
couleur des argiles, restes d'êtres vivants, se réunissent par
groupes topographiquement bien délimités », lisons-nous dans
les Annales de rinsliliit ()cè(UiO(jraphique de Monaco. Il est
soumis, au contraire, à la complexité des lois qui règlent la
formation des « Golfes et des Baies peu profondes qui sont le
siège de phénomènes particulièrement violents » (J. Tuouliît).
Il serait donc nécessaire de faire [)ériodi(juement des recher-
ches qui permettraient de retoucher les profils de rivage, les
aires de vie et les reliefs sous-marins du Bassin au fur et à
mesure de leurs variations.
Arcacho)i, le 15 aoiÏL l'JlS.
DoCCMEiMATIOiX
I806. — Carie du Bassin d'Arcachon, nu AIuséc-Aquariuui de la
'Sociélé scientifique d'Arcachon.
1860. — IMan du Bassin d'Arcachon avec l'indiccilion des Dépôts pcr-
niunents d Ihiîtrcs, au Musée-Aquarium.
1860. — Blan générai du Byssin d'Arcachon, dressé vers 1860 au
Musée-Aquarium.
1876. — I^lan en relief du Bassin d'Arcachon, d'après des sondages
faits en 187o par le service des Ponts-et-Chaussées.
1879. — Plan du Bassin d'Arcachon indiquant les Huitrières natu-
relles, par F. Dmochowski.
1886. — Arcachon et le Port de la Testc-de-Buch, dans l'Atlas des
Ports de France.
1894. — Carte du Bassin iudiquant les emplacements des Parcs à
Huîtres, dressée par M. Scliaerff.
1898. — La Magnetite des Dunes de Gascogne, par M. Ch. Duffart.
1907. — Carte des Gisements de Coquilles comestibles du I^assin
d'Arcachon, dressée par J. Guérin-Ganivetdansie /y?///r////
de /'/lis/ if Ht Océoiio(/ra/i/ii(///e de Muiiaco (1909).
1803-1913. — Faune conchyliologique maiine locale au Musée de la
Société scientifique d'Arcachon.
SUR LA DETERMINATION DE L'INTENSITE
DE LA PESANTEUR A ARCACHON
Par M. Ernest ESCLANGON
Professeur adjoint à la Facullé des Sciences de Bordeaux
L'inlcnsité de la pesanteur dans la région d'Arcnchon a été
déterminée pour la première fois en 1895, par M. Collet, pro-
fesseur à la Faculté des Sciences de Grenoble, dont les observa-
tions furent réalisées au phare du Gap-Ferret. La détermination
de M. Collet faisait partie d'un programme particulier ayant
pour objet l'étude de la distribution de la gravité sur le paral-
lèle de 45". A ce titre Bordeaux et Arcachon en constituaient les
stations extrêmes.
Nous avons été conduit nous-môme à reprendre la détermi-
nation de la pesanteur dans la même région, particulièrement
à Arcachon, qui constituait pour nous le terme d'un programme
très différent de celui de M. Collet, et ayant pour objet l'étude
systématique des anomalies dans le Sud-Ouest de la France,
anomalies que des mesures anciennes de Biot et Mathieu (1808)
et celles plus récentes de M. Collet (1894-1895), réalisées à
Bordeaux, pouvaient faire soupçonner.
D'accord avec le Service géographique de l'Armée, auquel
devaient être empruntés les instruments nécessaires, l'Observa-
toire de Bordeaux accepta la mission de procéder à de nouvel-
les mesures de haute précision, conduites systématiquement
dans un grand nombre de stations convenablement réparties
dans le Sud-Ouest de la France, et de mettre ainsi nettement en
évidence les anomalies soupçonnées, si elles existent réellement.
Chargé personnellement de diriger cet important travail dont
le début date de 1909, je m'attachai en premier lieu à la déter-
mination de la pesanteur en des stations relativement voisines
34 BULLETIN DE LA STATION BIOLOGIQUE d'aRCACIION 1913 [2]
de Bordeaux, ayant sensiblement ce point comme centre. Dans
ce premier programme figurait Arcachon, qui présentait un
double intérêt, d'abord à cause du voisinage immédiat de
l'Océan (1), ensuite en raison des mesures antérieures de M. Col-
let exécutées au Gap-Ferret (à 8 kilomètres d' Arcachon), mesu-
res qu'on pourrait ainsi comparer aisément aux nouvelles
déterminations.
En outre d'Arcachon et Bordeaux, le programme de 1909,
comprenait de nombreuses stations, telles que Coulras, Cavi-
ynac (Gironde), au nord-est de Bordeaux, Créon à l'est, hamjon
au sud, etc.
Une réduction approchée (2) et sommaire des observations
de 1909 nous montra que les anomalies soupçonnées n'exis-
taient pas, ou du tnoins étaient relativement peu importantes.
Seules quelques stations, Cavignac et Cqutras, accusaient un
défaut notable de la gravité; au contraire, Arcachon présentait
un excès sensible.
En 1910, je résolus d'élargir considérablement le champ de mes
investigations. Les légères anomalies constatées pouvaient être
l'indice d'anomalies plus importantes se poursuivant à plusgrande
distance de Bordeaux, et de nouvelles stations beaucoup plus
éloignées furent mises à l'étude. C'est ainsi que furent envisa-
gées les stations de Chalais et Jonzac au nord-est, et, sur les
bords de l'Océan, Soulac et Bayonne. Quant à Arcachon, il
devait figurer à nouveau dans le programme de 1910. Cette
station devenait, en effet, très importante à nos yeux. Les
observations de 1909" nous avaient montré une discordance
avec les mesures de M. Collet, obtenues au Cap-Ferret. Aussi
pour écarter tout doute nous- résolûmes de ne pas nous en
tenir aux résultats de 1909 et de contrôler ces derniers par
de nouvelles déterminations. En outre, la gravité s'y montrant
en excès, il devenait important de fixer d'une manière défini-
tive l'anomalie ainsi constatée. Enfin cette station, associée avec
(1) On sait que la pesanteur augmente lorsqu'on s'approche des bords des mers
ou des océans.
(2) Nous disons une réduction approchée, car la réduction définitive devant
s'appuyer sur l'ensemble de nos observations et notamment sur celles de 1910 et
1911, la conclusion des résultats n'est possible qu'une fois les expériences relatives
à l'ensemble de toutes les stations entièrement terminées.
[3] E. ESCLANGOîV : UKïKR^lllVATinK l)K l'iNTENSITÉ DE LA PESAIN'TErR 35
celles de Soulac et de Bayonne, et occupant parmi elles une
position en quehjue sorte centrale, devait nous éclairer définiti-
vement sur le rôle de la proximité de l'Océan, dans l'accroisse-
ment de la pesanteur généralement observé au voisinage des
côtes. Nos observations de 1911 devaient être uniquement des
observations de comparaison entre Bordeaux et Paris, observ^a-
tions très importantes, car sur elles reposaient la précision et
l'exactitude de tous les résultats obtenus dans l'ensemble des
stations examinées.
On vient de le voir, la station d'Arcachon présentait, eu égard"
aux déterminations de la pesanteur, une importance spéciale à
différents points de vue. Aussi nous sommes-nous attaché à
obtenir en ce point la valeur de la gravité avec toute la préci-
sion (pie peuvent comporter les observations modernes, nous
entourant, dans les multiples facteurs expérimentaux qui inter-
Aiennent dans ces mesures, des précautions les plus méticuleu-
ses, des soins les plus minutieux. Le choix du local d'obser-
vations jouant un rôle très important, notre attention a tout
d'abord porté sur ce point. Une température aussi constante que
possible est nécessaire: le local doit être, en outre, éloigné de
tout centre d'ébranlement du sol, tels que routes, lignes de
chemins de fer, etc.
A tous ces points de vue, les caves du Casino mauresque, dans
la Ville d'hiver, nous parurent réaliser au plus haut degré ces
multiples conditions. Très vastes, très sèches quoique souterrai-
nes (i), la température y est presque rigoureusement constante,
à (juelques dixièmes de degré près. L'épaisseur des murs est,
en outre, très favorable à l'installation des pendules de compa-
raison, notamment de l'horloge des coïncidences. Le seul incon-
vénient, d'ailleurs peu grave, est une obscurité complète, gênante
surtout pour le montage des appareils.
Après examen, nous demandâmes à la u)unicip;dilé d'Arca-
chon l'autorisition, qui nous fut gracieusement accordée, de pro-
céder dans ce local, si [)ropre à nos expériences, aux observa-
tions ipie nous avions en vue. M. Busquet, membre très distin-
(I) Le Casino mauresque est, en efl'el, bàli sur une dune de sable, ce qui explicuie,
par i'extrème perméabilité du sol, la parfaite sécheresse de ses caves.
36 BULLETIN DE LA STATION BIOLOGIQUE d'aUCACUON 1913 [4]
gué de la Société biologique d'Arcachoii et entrepreneur de
travaux, (jiii avait bien voulu nous éclnirer de sa conipélcnce
et de sa parfaite connaissance des ressources de la ville, nous
apporta un concours précieux dîins le inonl.ige et l'inslallation
des appareils auxcjuels il l'ut procédé eu septendjre 1001).
La tléterniination du temps, qui joue ici un rôle t'ondanienlcd,
(l'heure doit, en effet, être ol)tenue à quehjues centièmes de
seconde près), fut réalisée par l'échange de signaux téiéi)honi-
ques avec l'Observatoire de Bordeaux (1) et nous fut grandement
facilité grâce à Tobligeance de M. le Directeur des Postes de la
Gironde, qui nous fil accorder la priorité pour nos communica-
tions téléphoniques. Une longue atlenle eut, en effet, dans nos
réceptions horaires, compromis gravement la précision de nos
observations.
Nous n'entrerons pns davantage dans la technique fort com-
pliquée et fort délicate des expériences qui conduisent à la déter-
mination précise de l'inlensilé de la pesanteur.
Parmi toutes les mesures de la i)hysi(jue ou de l'astronomie, ce
sont peut-êlre celles qui demandent l'atlention la plus soute-
nue ; la moindre faute, le moindre oubli entraînent, en effet, des
erreurs irréi)arables et peuvent com[)romeltre non seulement
l'exactitude des mesures en cours d'exécution, mais toutes celles
réalisées jusque là et faisant partie d'un môme programme
d'expériences.
L'instrument employé par nous était un pendule de Deffor-
ges de 50 centimètres. Les qualités de cet instrument sont bien
connues et nous jugeons inutile de les énumérer ici.
Ainsi qu'il a été expliqué plus haut et pour les raisons déjà
indiquées, de nouvelles observations furent faites en 1910, en
août et septembre, dans le môme local que la Municipalité vou-
lut bien mettre à nouveau à notre dis[)osition. En raison de
l'importance de cette station, deux nouvelles déterminations
indépendantes y furent réalisées.
Tandis que la plupart des stations cpie nous avons examinées
dans le Sud-Ouest donnent pour la pesanteur des valeurs légè-
(I ) Nous n'avions pas encore à celle époiiue la ressource de la l'éception de l'heure
par lélégrapiiie sans fil, si commune aujourd'hui.
[Oj E. ESCLANGOIV I DETERMINATIO.N DE L INTENSITE PE LA PESANTEUR O/
rement en défaut. Arcachon fournit nu confraire une valeur
notablement en excès. Le nombre obtenu y"'80643 (au niveau
de la nier(l) 9'"80648), résultant de trois déterminations suc-
cessives, nous parait présenter les plus sérieuses garanties
d'exactitude.
Voici, en effet, la comparaison des résultats obtenus corres-
pondant aux trois déterminations indépendantes
A la station (altitude 24"'} Au niveau de la mer
Septembre 11)00. . g = 9"'80641 g = 0-80646
Juillet 1010 (/ = 0-80645 g = 0"'80650
Août 1010 </ = 0-80643 .// = 0-80648
Quant à la valeur normale au niveau de la mer, calculée à
partir de celle observée à Paris et regardée comme normale, elle
serait seulement égale à
g =■ O'"80635
11 y aurait donc un excès de (+ 0-00013). Voici d'ailleurs un
tableau comparatif des valeurs conclues de nos expériences et
concernant le Sud-Ouest de la France.
Long, ouest g g réduit à g normal Diftérence
Noms des stations Latitude de Pans Altitude observé 0'" d'altitude calculé obs— cale.
Floirac 44",J0' 7" 2-51' 37" 72" >J'"8062'.) i)'"80()4(j 9-80651 —0,00005
Cavignac 45.6.42 2.43.12 42 9,80652 9,80660 9,80676 -0,00016
Coutras 45.2.20 2.28.6 13 9,80648 9,8(l6.-)0 9,80670 —0,00020
Langon 44.32.42 2.35.30 25 9,80618 9,80623 9,80625 -0,00002
Créon 44.46.12 2.41.12 102 9,80616 9,80636 9,80645 —0,00009
Arcachon 44.39.36 3.30.36 24 9,80643 9,80648 9,80635 -f 0,00013
Jonzac 45.26.44 2.46.16 35 9,80704 9,80712 9,80706 -1-0,00000
Chalais 45.16.28 2.17.46 45 9,80680 9,80689 9,80691 -0,00002
Soulac 45.31.0 3.27.36 8 9,80712 9,80713 9,80713 0,00000
Rayonne 43.29.40 3.48.14 3 9,80532 9,80.532 9,80530 -^0,00002
Paris 48..5(l.ll 0.0.0 61 9,81002 9,81012 9,81012 0,000.0
On voit sur ce tableau que les stations de Soulac et de
Bayonne, situées comme Arcachon aux bords de la mer ou dans
son voisinage immédiat, fournissent des valeurs normales de la
pesanteur, seul Arcachon donne un excès notable. Les autres
(1 L'intensLlé de la pesanteur décroit avec l'altitude. La valeur observée doit être
corrigée de l'altitude (ici 24") pour obtenir la valeur correspondante au niveau de
la mer.
38 BLLLETIiN DE LA STATION BIOLOGIQUE D'aRCACHON 1913 [G]
stations, situées à rintérieurdes terres, conduisent au contraire
à des valeurs eu défaut, ce qui confirnie le fait de l'accroisse-
ment de la gravité au voisinnge des côtes. Arcachou, toutefois,
occupe par rapport à Soulac et Bayonne une situation un peu
exceptionnelle, puisque l'excès observé y devient relativement
beaucoup plus important.
Au Cap-Ferret, à 8 kilomètres à l'ouest d' Arcachou, M. Collet
avait trouvé en 1895 un fort excès (à G'" d'altitude 9'"800!)2 et
au niveau de la mer 9'"80693), ce qui, eu remarquant que la lati-
tude est la même, constitue par rapport à nos observations à
Arcachou un excès de 0"'00045 et un excès absolu, par rapport
à la valeur observée à Paris regardée comme normale, de
0"'00058. Une telle divergence de 0"'0004o dépasse de beaucoup
les erreurs habituelles d'observation; des expériences parfaites,
on effet, comportant seulement des erreurs de l'ordre de
0"'00001 . C'est cette divergence considérable qui nous avait
conduite reprendre nos expériences de 1909 et à procéder à de
nouvelles déterminations en 1910, pour détruire l'incertitude
qui aurait pu subsister relativement à la valeur de la gravité à
A reach on.
La divergence reste donc très grande, mais il faut dire ([u'elle
porte sur deux stations (Arcachou et le Cap-Ferret) qui, bien
que voisines, ne sont pas itlenli(]ues et présentent même des
caractères géographiques différents.
Taudis qu'Arcachon est déjà assez profondément retiré sur
les bords du Bassin, le Cap-Ferret occujjc une situation presque
insulaire, sur une langue de sable étroite et plate (largeur
1.500'", altitude moyenne 6'") prise entre l'Océan et les eaux du
Bassin.
Malgré cela, l<i divergence entre l'observation unique de
M. Collet au Cap-Ferret et nos trois observations concordantes
obtenues à Arcachou nous parait trop considérable pour devoir
être acce{)tée définitivement comme correspondant à la réalité.
Nous inclinerions à penser, malgré la possibilité d'une anomalie
particulière importante et très locale au Cap-Ferret, qu'une
erreur inaperçue, comme il est très difficile de n'en pas faire
dans des expériences si délicates, a pu se glisser, soit dans les
[7J E. ESCLAiNGO.N : DÉTERMIiNATIOiN DE l/liNTEiNSITE DE LA PESANTEUR 39
calculs de réduction soit dans le détail expérimental de l'obser-
vation de M. Collet. La seule manière de trancher définitivement
la question, en ce qui concerne le Gap Ferret, consisterait à
procéder en ce point à de nouvelles observations.
Des raisons de commodité d'installation et de facilité dans la
précision (J) des réceptions horaires nous avaient fait préférer
Arcachon. L'argument qui tient uniquement à la précision dans
la détermination du temps aurait actuellement moins d'impor-
tance en raison des commodités toutes particulières que présen-
tent aujourd'hui les réceptions par télégraphie sans fil, per-
mettant d'obtenir aisément l'heure dans les lieux les plus
éloignés de tout centre de population.
(i) 11 ne faut guère songer au transport de clironomèlres aussi parfaits soient-
ils; l'heure qu'ils fournissent est loin d'être assez précise pour épuiser la précision
que comportent les instruments destinés à la mesure de la i^esantenr.
QUELQUES MOTS SLR LA HAIE GL\ lEll
(RA/A CUVIERl; LACÉP.) :
DLSSEGTION DE LA RÉGION PEGÏORALE
Par M" G. MENIER
La Raie Guvier, comme on le sait, est celle variété de Haie
Bouclée (Raid Çlavata; Rond.) qui porte eu arrière de la tète
une nageoire dorsale enroulée en l'orme de cornet (de Lacépède,
t. V, p. 290, figure).
Nous avons pu nous procurer, cette année, un de ces curieux
animaux qui se font do plus en plus rares (Moreau, Histoire
nalurelk des Poissons, 1881, t. L p. 291) et voici rapidement
ce que nous a donné la dissection de la région pectorale sur
laquelle nous nous proposons, d'ailleurs, de revenir dans un
travail ultérieur.
Sous la peau et le fascia super/icialis s'étend un large mus-
cle, occupant toute la région, et formé par une multitude de
petits faisceaux, tous de môme largeur, placés les uns au-dessus
des aulres à leur extrémité interne, et les uns à côté des autres
à leur extrémité externe.
L'ensemble affecte assez bien la forme d'un éventail ouvert,
placé dans le sens longitudinal, dont le pivot serait représenté
par le mesopterygium et les rayons de soutien par le proptenj-
gium en avant et par le metapterygiuni en arrière. La partie
interne du muscle est enserrée par une gaine fibreuse, disposée
telle la main tenant l'éventail ouvert, mais là s'arrête notre
comparaison car le muscle, épais dans sa partie la plus étroite,
et très mince dans sa partie la plus large, présente son maxi-
mum d'épaisseur dans sa région centrale.
Les insertions des fibres musculaires se font : en avant, à l'ex-
42 BULLETIN DE LA STATION BIOLOGIQUE d'aRCACHON 1913 [2]
tréiiiilé proxiinale du propterijgiiun : en arrière: à rexlrémilé
dislale du nictaplerijgiwn.
Du côté inlerne, les fibres se fixent, pour la région céphali-
que : sur la face interne très haute du proptenjgiuin, sur la face
supérieure du même cartilage, et sur le bord externe de l'ex-
irémité proximale de la gaine fibreuse recouvrant le milieu du
corps; pour la région médiane : sur la face interne découpée en
W du mesopterijgium et sur la face inférieure de la gaine fibreuse
susnommée; pour la région caudale : sur la face externe et sur
le bord externe et supérieur du nietaplcrt/giuDi.
Du côté externe, toutes les fibres, devenant de plus en plus
minces, se terminent sur l'aponévrose recouvrant les extré-
mités externes des rayons de la nageoire.
Ce dispositif implique aux fibres proptérygiales une obliquité,
d'arrière en avant et de dedans en dehors, d'autant plus mar-
quée que l'on considère une région de plus en plus voisine de
la tète de l'animal. A mesure que l'on se rapproche, au con-
traire, de la queue, les fibres métaplérygiales sont de plus en
plus obliques d'arrière en avant et de dehors en dedans. Quant
aux fibres mésoptérygiales, elles sont toutes transversales ou
affectent plus ou moins la direction des fibres proptérygiales ou
celle des fibres metaptérigiales suivant le niveau que l'on con-
sidère.
La face supérieure du muscle est convexe dans le sens trans-
versal, ainsi que dans le sens longitudinal, puisque celui-ci pré-
sente son maximum d'épaisseur en son milieu; elle est sillonnée
de petits traits, disposés en éventail comme les paquets de
fibres qu'ils délimitent; elle entre en rapports avec le fascia
superficialis et la peau et avec la face inférieure de la gaine
fibreuse de la région médiane du corps.
La face inférieure plane est directement appliquée sur les
rayons de la nageoire. Son bord externe a la forme d'un angle
à sommet arrondi et correspond à peu près aux extrémités
externes des rayons de la nageoire. Son bord interne a la forme
d'une accolade dont les branches seraient concaves intérieure-
ment, il répond en txvani au propto-ggiuni, en arrière au ineta-
pterygiuni, dans sa région moyenne au mesopterygiiuti.
Ce muscle pectoral est innervé par un nerf spécial émergeant
entre la deuxième et la troisième vertèbre cervicale.
TABLE GEiNEUALE DES MATIERES
la" Annék (11M3)
Pages
H. Peragallo : Note sur Paul Bergon et ses travaux diatomolo-
giquos 5
€. IIuE (M"") : Compte rendu de dragages effectués sur le
Bassin d'Arcaclion 17
iMuest EscLAi>'GOiv : Sur la détermination de l'intensité de la
pesanteur à Arcachon 33
<j. Mëa'ier (M") : Quelques mots sur la Raie Cuvier (Raia
Citrieri; Lacép.) : Dissection de la région pectorale 41
UNIVERSITÉ DE BORDEAUX
ET SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE D'ARCACHON
BULLETIN
DE LA \
'j
STATION BIOLOGIQUE i
D'ARCACHON
QUINZIEME ANNEE
(1913)
BORDEAUX
FERET & Fils, Libraires-Editeurs
9 — Rue de Grassi — 9
1914.
UNIVERSITE DE BORDEAUX
ET SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE D'ARCACHON
BLJLLKTIN
STATION BIOLOGIQUE D'ARCACHON
(TRAVAUX DES LABORATOIRES)
FONDK PAR
Le D-^ F. JOLYET
• DIIiECTICUH DE I.A STATION BIOLOGIQVK
PROFKSSKIR A I.A FACULTÉ DE MÉDECINE
DK BOIIDEAIX
LE D-^ F. LALESQUE
MEDECINE
Les Mémoires doivent être adressés à M. le D^' J. SELLIER,
Secrétaire de - la Publication, Directeur adjoint de la Station
biologique (29, rue Tioudet, à Bordeaux). Ils sont soumis à
l'agrément d'un Comité de publication.
Les auteurs reçoivent gracieusement 50 exemplaires de leur
Mémoire. Ils peuvent en faire tirer un nombre plus considérable à
leurs frais au tarif ci-dessous; dans ce cas, ils devront lindicjuer
sur le manuscrit, en retournant les épreuves corrigées :
Un quart de feuille (4 pages :
Une demi-feuille (8 pages) . .
Une feuille entière (10 pages
oO
100
150
200
im
oOO
exemp .
exemp.
exemp.
exemp .
exemp .
exemp.
3
7
10
12
14
18
S
12
IG
18
20
2o
12
18
25
30
32
42
SOCIETl-: SCIEMIFIQLÎE D'ARCACHON
STATION BIOLOGIQUK
Pi'ésidents d'honneur
M. le RECTEUR de l'Université de Bordeaux ;
M. le DOYEN de la Faculté des Sciences de Bordeaux ;
M. le DOYEN de la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux ;
M. le PRÉFET de la Giromle ;
M. le MAIRE d'Arcaclion.
Président honoraire perpétuel
M. le D' Gustave HAMEAU (Arcachon) 7.
Président honoraire
M. le D"^ F. LALESQUE, membre correspondant de l'Académie de médecine
(Arcachon).
Directeur honoraire de la Station biologique
M. E. DURÈGNE, ingénieur :Bordeau\\
Administrateur honoraire
M. SABY (Arcachon).
Conseil d'administration
Président : D' A. HAMEAU (Arcachonj.
( G. SÉMIAC, pharmacien (Arcachon) ;
Vice-Présiik'uts : \ M. G. SAUVAGEAU, professeur à la Faculté des Sciences
( de Bordeaux, délégxu' de l'Université .
Secrétaire (jénérul : D' FESTAL (Arcachon).
Trésorier : M. Louis VALLEAU, banquier (Arcachon).
Bibliothécaire et Conservateur du Musée: M. PERAGALLO, commandant d'ar-
tillerie (Bordeaux).
D' DUPOUY, professeur à la Faculté de Médecine de
Bordeaux ;
,,..., , G. BUSQUET, entrep' de travaux publics (Arcachon) ;
Administrateurs : \ ,, ^,^,,t.n^t^^ . ..< . ,7^ , , ,.
M. ORMIEREb, ancien eleve de lEcole des Beaux-Arts,
architecte (Arcachon) ;
D^ CAZABAN (Arcachon).
Directeur de la Station biologique : D' JOLYET, professeur à la Faculté de
Médecine de Bordeaux (Arcachon).
Directeur adjoint de la Station biologique: D'' SELLIER, chargé de cours à
la Faculté de Médecine de Bordeaux.
/y^""^"^ Imprimerie Moderne
/ OQO
D A. OESTOUT Aine & C'
I 8, Kuc Paul-Ccit, 8
\V^^ BCRDKACX
liiH lizi h