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Full text of "Bulletin hispanique"

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T.TOtt  i/vj   1   ï;  -1^93 


ANNALES    DE    LA    FACULTÉ    DES    LETTRES    DE    BORDEAUX 


BULLETIN  llISPAlMOUE 


A  F B.,  IV*  StKiE.  —  Bull,  luspan.,  \.IV,  1912,  i. 


BORDEAUX.    —     IMPRIMERIE    G.    GOUNOUILHOU,    RUE    GUIRAUDE,    9 -11. 


Annales  de  la  Faculté  des  Lettres  de  Bordeaux 

et  des  Universités  du  Midi 

QUATRIÈME  SÉRIE 

Commuue  aux  l'uiversilés  d'Aix,  Bordeaux,  Montpellier,  Toulouse 

XXXIV»    ANNÉE 


BULLETIN  HISPANIUUE 

Paraissant  tous  les  trois  mois 


TOME   XIV 
1912 


.^^ 


Bordeaux  : 

FERET  &  FILS,  ÉDITEURS,   i5,  COURS  DE  L'INTENDANCE 

Lyon:  Henri  GEORG,  36-4-?,  passage  de  l'Hôtel-Dieu 

Marseille:  Paul  RUat,54,  rue  Paradis   Montpellier:  G.  GOULET, 5,  Grasd'Rue 

Toulouse  :    Edouard    PRIVAT,    i4,    rue    des    Arts 

Madrid  :  MURILLO,  Alcalâ,  7 

Paris  : 

Albert  FOINTEMOING,  4,  rue  Le  Goff 
Alphonse  picard  &  FILS,  82,  rue  Ro.naparte. 


^, 


Vol.  XIV.  Janvier-Mars  1912  N»  1 

SCULPTURES  DU  CERRO  DE  LOS  SANTOS 

(Planches  I  à  l\) 


Les  huit  sculptures  reproduites  dans  les  planches  I-IY 
proviennent  du  Cerro  de  los  Santos'.  Elles  sont  à  ajouter  à  la 
liste,  dressée  en  1901  par  M.  Paris%  des  sculptures  du  Cerro 
conservées  en  dehors  du  Musée  archéologique  de  Madrid  :  la 
seule  d'entre  elles  (n°  \  du  présent  article)  qui  soit  mentionnée 
dans  ce  catalogue  n'y  est  représentée  que  par  un  petit  croquis^  ; 
M.  Paris  n'avait  pu  voir  l'original.  Une  autre  (n"  8)  n'était 
connue  que  par  une  ancienne  photographie  reproduite  par 
M.  Paris  dans  son  Essai,  t.  1,  fig.  9.'.\?k  Enfin,  une  troisième 
(n°  5)  est  donnée  en  photogravure,  sans  commentaire,  dans 
V Annuaire  de  l'Institut  d'Etudes  catalanes,  1907,  p.  48o. 
Les  cinq  autres,  que  je  sache,  n'ont  été  jusqu'à  présent  ni 
reproduites  ni  signalées.  Il  m'a  semblé  qu'il  était  bon  de 
publier  tous  ces  morceaux  :  d'abord,  rien  n'est  négligeable  de 
ce  qui  contribue  à  faire  mieux  connaître  le  Cerro;  en  outre, 
deux  d'entre  eux  n'ont  pas  seulement  une  valeur  de  docu- 
ments :  ce  sont  de  belles  œuvres,  sur  lesquelles  il  convient 
d'appeler  l'attention. 

Les  n"'  I,  2,  3  et  4  appartiennent  à  don  Miguel  Marti  Esteve, 
de  Valence;  les  n'"'  5,  6,  7  et  8  sont,  depuis  1907,  au  Musée 
municipal  de  Barcelone  :  ils  font  partie  de  la  série  d'antiquités 
ibériques  réunie  sur  l'initiative  de  M.  Puig  y  Cadafalch.  alors 
président  de  la  Junta  de  Museos''.  M.  Marti  a  mis  une  extrême 

1.  Dans  les  notes  de  cet  article,  je  renverrai  par  l'indication  Paris  au  tome  I"  de 
VEssni  sur  l'art  et  l'industrie  de  V Espagne  primitive,  où  les  sculptures  du  Cerro  sont 
étudiées  aux  pages  162-279;  P^'"  l'indication  Mélida  au  travail  de  M.  Mélida,  Las  Es- 
culturas  del  Cerro  de  los  Snntos,  publié  d'abord  dans  la  Hevisla  de  Archivas,  puis  à 
part,  Madrid,  irjoO. 

2.  Bulletin  hispanique,  IIF,  p.  iia-iS^. 

3.  N*  G5,  p.  129,  iig.  17  ;  cf.  Paris,  fig.  284. 

It.  Cette  même  série  comprend  en  outre  la  tète  de  taureau,  du  Llano  de  la  Conso- 
laciôn,  qui  appartenait  à  M.  Vives  quand  M.  Paris  la  publia,  Essai.  I,  Ûg.  109. — 
C'est  en  signalant  dans  sa  Chronique  l'acquisition  de  ces  sculptures  que  l'institut 


3  BULLETIN    HISPANIQUE 

obligeance  à  me  montrer  les  objets  qu'il  possède  et  à  me 
laisser  prendre  les  photographies  et  les  notes  dont  j'avais 
besoin;  M.  Carlos  de  Bofarull,  directeur  du  Musée  de  Barce- 
lone, m'a  donné  toutes  les  facilités  désirables  pour  étudier  la 
belle  collection  dont  il  a  la  charge  et  pour  photographier  les 
pièces  qui  mïntéressaient.  J'adresse  à  l'un  et  à  l'autre  l'exprès 
sion  de  ma  vive  reconnaissance. 

Les  huit  monuments  sont  sculptés  dans  la  pierre  tendre  qui 
a  été  presque  exclusivement  employée  au  Gerro.  Il  nest  pas 
inutile  d'ajouter  qu'ils  sont  d'une  authenticité  à  l'abri  de  tout 
soupçon,  comme  on  s'en  assurera  au  premier  coup  d'oeil  jeté 
sur  les  planches. 

♦   » 

1.  Le  n"  I  (pi.  III,  à  gauche)  est  un  débris  de  tête  féminine.  Il 
est  haut  de  o"'i5.  La  femme  est  coiffée  d'un  voile  qui,  au-dessus 
du  front,  laisse  déborder  les  cheveux  ou  le  serre-tete,  et  qui 
retombe  à  droite  et  à  gauche  sans  cacher  les  oreilles  :  l'oreille 
droite  est  encore  visible'.  Le  morceau  est  trop  mutilé  pour 
qu'on  puisse  rien  en  dire  de  plus.  La  face  n'a  conservé  que  de 
vagues  traces  d'orbites  et  de  bouche.  Cette  léte  rentre  dans  une 
série  dont  les  diverses  variantes  ont  été  étudiées  par  M.  Paris ^ 

2.  Des  cinq  têtes  viriles  publiées  ici,  la  tête  n°  2  (pi.  I,  à 
gaucho),  haute  de  o"'i9,  est  la  seule  qui  se  rattache  à  ce  qu'on 
peut  appeler  le  style  libre  du  Cerro,  à  la  série  dans  laquelle  la 
chevelure,  au  lieu  d'être  stylisée,  est  traitée  avec  un  souci  de 
représentation  réaliste.  Les  cheveux  sont  traduits  par  des 
lignes  irrégulières,  assez  profondément  gravées,  réparties. en 
zones.  C'est  à  peu  près  le  même  procédé  qu'on  retrouve  sur 
deux  têtes  de  Madrid,  les  n"'  7526  et  7680  du  Musée  :  la  tête  de 
Valence  se  place,  pour  Ihabileté  du  travail,  entre  la  tête  7580^, 
plus  barbare,  et  la  tête  -7)9.6'',  plus  adroite. 

(l'Éludes  catalanes  fut  amené  à  (ioiiner  dans  son  Annuaire  la  reproduction,  men- 
tionnée plus  haut,  de  notre  n°  5. 

I.  Je  ne  suis  pas  absolument  certain  que  ce  que  je  prends  pour  une  oreille 
ne  soit  pas  le  reste  d'un  faisceau  de  pendelociues,  comme  eu  portent  souvent  les  tètes 
du  même  type;  cependant  l'oreille  me  puruit  probable. 

■j.   Pages  188-19/1,  lig.  1C3-17G. 

3.  Paris,  fig.  390. 
/».   Paris,  fig.  388. 


set  T.PTURES    m     CEKRO    DE    LOS    SAM'OS  3 

Dans  le  dessin  de  l'œil  semble  se  manifester  le  même  désir 
d'interpréter  exactement  la  nature.  L'oreille  est  mal  conservée  ; 
sur  tout  le  visage  la  surface  de  la  pierre  est  écaillée,  et  la 
partie  g-auche  est  en  très  mauvais  état;  le  nez  a  disparu. 

3.  La  tête  virile  n"  3  (pi.  Ill^  à  droite),  haute  de  <)"'25,  est 
réduite  à  la  moitié  gauche.  Cette  moitié  a  peu  d'épaisseur,  et 
il  n'est  pas  impossible  que  dès  l'origine  la  tête  ait  été  exécutée 
telle  qu'elle  nous  est  parvenue,  en  relief,  et  non  en  ronde- 
bosse,  ainsi  que  M.  Mélida  l'admet  pour  une  tête  analogue 
du  Musée  de  Madrid  ' . 

Le  nez  manque;  tout  le  morceau  est  comme  usé,  et  il  est 
d'autant  plus  difficile  d'en  étudier  les  détails  que  cette  tête  n'a 
jamais  dû  être  dun  travail  très  poussé. 

Elle  n'est  intéressante  que  par  la  coiffure.  A  première  vue, 
elle  semble  porter,  comme  d'autres  têtes  du  Cerro^,  une  sorte 
de  calotte  qui  se  termine,  en  bas,  en  faisant  sur  la  nuque  une 
saillie  très  prononcée.  Mais  de  petits  traits  gravés,  qui  ne 
peuvent  représenter  autre  chose  que  des  cheveux,  ne  s'aper- 
çoivent pas  seulement  sur  le  front,  où  la  coiffure  les  laisserait 
déborder  ;  il  y  en  a  aussi  sur  le  sommet  du  crâne,  à  un 
endroit  que  la  calotte  recouvrirait  si  elle  existait  vraiment-^.  Il 
faut  donc  admettre  que  la  tête  est  nue.  Le  sculpteur  a  com- 
mencé par  délimiter  par  une  forte  saillie  la  partie  que  devait 
occuper  la  chevelure  :  dans  l'exemplaire  que  je  décris,  cette 
ligne  de  démarcation  est  apparente  sur  la  nuque;  on  voit 
qu'elle  se  prolongeait  à  gauche  pour  entourer  aussi  l'oreille. 
Il  aurait  pu  ensuite  représenter  le  détail  de  la  chevelure  à 
l'intérieur  de  la  région  ainsi  déterminée,  mais  il  s'est  contenté 
de  quelques  traits  jetés  çà  et  là.  Peut  être  la  peinture  venait- 
elle,  dans  les  têtes  de  ce  type,  indiquer  les  détails  qui  man- 
quent aujourd'hui  ;  c'est  une  hypothèse  que  propose  M.  Paris 4. 

4.  La  tête  n°  /j  (pi.  I,  à  droite)  a  o'"2-  de  haut,  et  est  bien 


1.  Mélida,  p.  79,  n"  i'i2  :  c'est  la  tète  Teproduite  dans  Paris,  ûg.  îGS  et  pi.  XI,  à 
gauche. 

2.  Paris,  fig.  258-2C0. 

3.  La  ligne  horizontale  qu'on  voit  à  l'arrière  de  la  ti'te,  à  peu  près  à  la  hauteur  du 
nez,  est  une  rayure  accidentelle  de  la  pierre. 

4.  Page  289. 


tx  BriXETO    mSPVMQl'E 

conservée,  quoique  le  nez  et  le  menton  aient  souflert,  et  que 
la  partie  droite  du  visage  soit  en  moins  bon  état  que  la  partie 
gauclie.  M.  Paris  la  décrite,  autant  que  le  permettait  le  croquis 
qiiil  avait  à  sa  disposition,  dans  le  Bulletin  hispanique,  111, 
p.  129.  L'original  demande  une  étude  plus  minutieuse. 

Les  yeux  en  amande,  à  fleur  de  tête,  placés  bas  et  tout  près 
du  nez,  s'abaissent  nettement  vers  l'angle  intérieur;  les  coins 
de  la  bouche,  bien  modelée,  se  relèvent;  les  plis  qui  se 
creusent  aux  commissures  des  lèvres  et  à  côté  des  narines 
achèvent  do  donner  à  la  physionomie  une  expression  très 
accentuée  de  sourire  archaïque.  L'oreille,  très  longue  et  presque 
verticale,  est  stylisée  à  l'excès  :  le  lobe  forme  une  sorte 
d'appendice  rond  qu'on  est  d'abord  tenté  de  prendre  pour 
un  pendant  d'oreille;  il  n'est  pas  douteux  cependant  que  c'est 
l'oreille  sans  bijou  que  l'artiste  a  voulu  représenter. 

La  chevelure  stylisée  a  la  régularité  d'un  motif  ornemental. 
Elle  est  divisée  en  mèches  égales  e(  plates,  qui  dessinent  des 
chevrons  sur  le  crâne  et  se  terminent  sur  le  front  par  des 
enroulements  tournés  vers  le  milieu  du  visage.  Au  milieu 
du  front,  le  sommet  du  preiuior  chevron  de  droite  touche  le 
sommet  du  premier  chevron  de  gauche  :  les  pointes  ainsi 
réunies  ferment  par  en  bas  un  petit  espace  en  forme  de  cœur, 
strié  de  raies  parallèles,  isolé  au  milieu  des  mèches.  Derrière 
l'oreille  les  mèches  se  terminent  tout  droit,  sans  enroule- 
ments. 

La  régularité  de  cette  disposition  est  telle,  et  l'exécution  est 
si  nette,  qu'une  parure  métalli(|uo  couvrant  le  front  n'aurait 
pas  un  autre  aspect.  M.  lleuzey  a  fait  une  remarque  analogue 
sur  la  tête  de  femme  mitrée  qui  porte  au  Musée  de  Madrid 
le  n"  yjio'  :  «  Le  front  et  les  joues  sont  encadrés  de  trois  cotés 
par  des  ondulations  tellement  symétriques  qu'elles  ressemblent 
à  dos  oves  d'architecture...  On  ne  sait  au  premier  aspect  si 
celle  (loiilf'luio,  d'un  travail  d(''li(at  et  <N»mpliqué,  est  un 
compléiMont  i\c  la  paiure  ou  simpleiuonl  une  manière  conven- 
tionnelle de  représenter  leschcveux^  »  Mais  tandis  que  dans 

I.    l'aris,  j(l.  I\  ù  ^aurhe  et  X  à  droite;  Mélida,  p.  57,  n'  /|,  et  pi.  III,  a. 
3.   Heuzey,  f<evue  d'Anyriuloyin,  II.  p.  io.'j,  cite  par  l'aris,  p,  196. 


SCrLPTTHES    Dl     CRRRO    1>F,    LOS    SWTOS  ô 

la  tête  féminine  c'est  bien  une  parure  métallique  qui  encadre 
le  visage,  comme  le  prouve  l'examen  du  monument  et  comme 
l'a  confirmé  la  découverte  du  diadème  de  Juvea,  oii  se  recon- 
naissent les  mêmes  oves,  dans  la  tête  virile  que  nous  étudions 
c'est  la  chevelure  seule  qu'a  voulu  représenter  le  sculpteur, 
par  un  procédé  conventionnel  dont  il  a  su  tirer  un  efl'et 
décoratif. 

Il  faut  noter  enfin  la  forme  du  crâne,  telle  qu'on  peut  la 
constater  sur  Torio-inal  :  du  front  au  sommet  de  la  tête,  il 
n'yti  pas  une  courbe  continue,  mais  trois  plans  qui  se  raccor- 
dent suivant  des  angles  nettement  marqués. 

Celte  pièce  n'est  pas  isolée  dans  la  longue  collection  des 
têtes  viriles  du  Cerro.  Pour  l'impression  d'ensemble,  tout  ce 
qu'on  a  pu  dire  sur  les  alTinités  orientales  et  grecques  de  l'art 
du  Cerro  en  général  est  valable  pour  ce  monument-ci.  Si  l'on 
entre  dans  le  détail,  on  notera  des  particularités  communes 
à  cette  tête  et  à  d'autres  têtes  déjà  publiées. 

Ainsi,  l'étrange  impuissance  des  sculpteurs  du  Cerro 
à  représenter  une  oreille  est  un  des  traits  les  plus  constants 
de  leurs  productions'.  Il  y  a  de  nombreuses  têtes  viriles 
à  propos  desquelles  on  se  demande —  et  souvent  sans  pouvoir 
répondre  nettement  comme  nous  le  pouvons  ici  —  si  l'oreille 
se  termine  par  un  bijou  ou  par  le  lobe  maladroitement 
dessinée 

Pour  la  chevelure,  une  disposition  semblable  se  retrouve 
dans  la  tête  75/18  du  Musée  de  Madrid  (Paris,  tig.  28.))  :  dans 
celle-ci  aussi  les  mèches  se  terminent  sur  le  front  par  des 
enroulements;  seulement,  ces  enroulements  sont  tournés  vers 
l'oreille,  et  non  plus  vers  le  milieu  du  front.  Cette  tête  rappelle 

I.  Paris,  p.  aCâ;  Mélida,  p.   jf*. 

■j.  Parmi  les  têtes  de  Madrid,  celles  où  le  pendant  d'oreille  me  paraît  certain  sont 
les  tètes  7537  (Paris,  lig.  267),  7657  (Paris,  fig-.  255),  7075  (Paris,  fig.  aOo),  et  celle  qui 
est  reproduite  ibid.,  pi.  XI,  à  gauche.  Le  bijou  est  probable  dans  les  têtes  7005  (Paris, 
pi.  \l,  à  droite)  et  755o  (Mélida,  p.  77,  n"  gO),  douteux  dans  les  têtes  7.Ï.1G  (Paris, 
tig.  270),  73/18  (Paris,  fig.  283),  7362  (Mélida,  p.  78,  n"  ii5),  7080  (Paris,  tig.  aOS), 
7713  (Paris,  iig.  2G1),  771^  (Paris,  fig.  2O2),  et  dans  la  statuette  7G2G  (Mélida,  p.  70, 
n-  62,  fig.  8).  Dans  la  tète  753/4,  l'oreille,  traitée,  dit  M.  Mélida  (p.  7G,  n"  Sy),  «  cual 
verdadero  ornato  »,  est  très  semblable  à  celle  de  la  lète  étudiée  ici;  mais  elle  est 
placée  beaucoup  plus  obliquement.  Pour  les  sculptures  conservées  ailleurs  qu'à 
Madrid,  voir  Paris,  Bulletin  hispanique.,  loc.  cit.,  n"  3,  3,  5  (Yecla>,  Gi  (Bordeaux), 
69,  73,  75  (Louvre). 


O  BULLETIN    HISPAMQIE 

en  outre  la  tête  de  la  collection  Marti  par  le  dessin  de  loreille 
et  de  Toeil.  Mais  la  ressemblance  s'arrête  là  :  la  tête  de  Madrid, 
qui  est  de  style  médiocre,  n'est  nullement  comparable  à  celle 
de  Valence'. 

Je  rapprocherais  encore  de  la  tête  Martf  une  tête  du  Louvre, 
décrite  et  publiée  par  M.  Paris,  Essai,  p.  255  et  fig.  291^  : 
l'exécution  en  est  maladroite,  mais  la  figuration  de  la  chevelure 
par  a  une  série  do  longs  angles  emmanchés  les  uns  dans  les 
autres,  et  terminés  à  l'extrémité  de  l'un  des  côtés,  sur  le  front, 
par  une  série  de  boucles  en  accroche  cœur  »  permet  de 
reconnaître  dans  la  fête  du  Louvre  une  réplique  lointaine  du 
type  représenté  par  la  tête  Marti •^. 

Mais  tandis  que  la  tête  de  Madrid  et  celle  du  Louvre  sont 
des  travaux  de  praticiens  (juelconques,  il  y  a  peu  de  morceaux 
où  l'art  du  Cerro  manifeste  autant  de  force  et  d'originalité 
que  dans  la  tête  Marti.  La  fermeté  de  l'exécution  révèle  un 
artiste  conscient  de  ce  qu'il  veut  faire,  maître  de  sa  conception 
et  de  ses  moyens;  l'œuvre  a  une  espèce  d'allure  décidée  et 
volontaire,  et  surtout  un  caractère  de  vérité,  de  vie  et  de  jeu- 
nesse, qui  la  classent  parmi  les  plus  belles  qu'ait  produites  le 
Corro.  Parmi  les  plus  anciennes  aussi,  sans  doute,  si,  comme 
je  le  crois,  sur  aucune  des  têtes  du  Cerro  le  sourire  archaïque 

I.  La  tèlc  75/(8  a  o~i8  de  haut;  elle  est  mal  conservée. —  M.  Mélida  (p.  78,  ii"'  11^ 
et  1 15)  considère  les  deux  tètes  7r)'i8  cl  7r)62  comme  formant  un  groupe  à  part  ;  il  y 
remarque  la  forme  du  crâne,  «oblonf^a,  abultada  de  arriba  »,  et  reconnaît  «  el 
recuerdo  de  un  modelo  egipcio  hasla  en  el  perlil  occipital».  11  y  a  là  une  indication 
intéressante.  Au  même  type  se  rattache,  d'après  M.  Mèlida,  la  tète  de  la  statuette  7O2G 
(Mélida,  p.  70,  n°  Cz,  t\g.  H;  M.  Paris  reproduit  le  corps  de  la  statuette,  lig.  sjjîi,  mais 
c'est  postérieurement  à  son  ouvraj^e  que  la  tète,  inventoriée  d'abord  à  part,  a  été 
replacée  sur  le  corps  auquel  elle  appartient);  j'ai  noté  en  elTet  dans  la  coifTure  de 
cette  tel»;  des  mèches  ondulées,  enserrant  au  milieu  du  front  un  petit  espace  de  forme 
allongée,  comparable  à  l'espace  en  forme  de  cœur  que  j'ai  signalé  en  décrivant  la 
tète  Marti. 

9.  Cette  tète  est  déjà  reproduite  dans  le  Rapport  de  M.  Engel,  fig.  10  (p.  189),  et 
pi.  Il,  n*  3  :  la  disposition  de  la  chevelure  est  bien  visible  dans  la  planche  (héliogra- 
vure). 

3.  M.  Paris  a  bien  vu  le  rapport  entre  la  tète  75'iS  de  Madrid  et  le  croquis  par 
lequel  la  tète  Marti  lui  était  connue:  les  deux  tètes  se  suivent  dans  sa  classification 
des  têteg  viriles  du  Cerro,  p.  aSo.  Mais  la  stylisation  de  la  chevelure,  dans  la  tête 
Marti,  est  si  comj)lètf  que,  pour  ma  part,  je  reiranclierais  ces  deux  tètes  (et  avec  elles 
la  tète  du  Louvre)  de  la  série  ((  où  il  y  a  un  ctTort  plus  marqué  pour  reproduire  la 
lilierlé  de  la  nature  »,  suivant  les  expressions  de  M.  Paris  (p.  a.^xi);  et  je  les  rattache- 
rais à  la  série  des  tètes  où  les  cheveux  sont  rendus  par  un  procédé  conventionnel  :  elles 
constitueraient,  dans  cette  série,  un  troisième  groupe,  après  le  groupe  des  tètes  à 
«  dents  chaldéennes  »  et  le  groupe  des  tètes  à  pointes  imbriquées  (Paris,  p.  a^a). 


SCULPTURES    1)1     CERRO    DE    LOS    SWTOS  7 

n'est  aussi  franc  que  sur  celle-ci  :  même  sur  les  têtes  fémi- 
nines mitrées  dont  M.  Heuzey  et  M.  Paris  notent  les  rapports 
avec  le  style  éginétique',  il  est  indiqué  plus  discrètement. 
Quant  aux  têtes  viriles  dont  l'expression  est  souriante,  je  n'en 
connais  aucune  qui  sourie  à  la  fois  des  lèvres  et  des  yeux, 
comme  la  tête  Marti  ^ 

C'est  une  question  de  savoir  si  la  statue  de  femme  en  pied 
du  Musée  de  Madrid,  qui  reste  notre  document  le  plus  complet 
sur  l'art  du  Cerro'%  est  antérieure  à  la  dame  d'Elche,  comme 
le  croit  M.  Paris,  ou  postérieure,  comme  l'admet  M.  Mélida'; 
en  d'autres  termes,  si  la  dame  d'Elche  est  le  produit  d'un  art 
plus  avancé  et  plus  parfait,  donc  plus  tardif,  que  l'art  du 
Cerro,  ou  si  la  statue  du  Cerro,  dérivant  d'un  modèle  ana- 
logue à  la  dame  d'Elche,  est  un  commencement  de  dégénéres- 
cence, et  la  première  étape  d'une  longue  décadence  routinière. 
Mais  si  la  réponse  à  cette  question,  dans  l'état  de  nos  connais- 
sances, est  incertaine,  pour  la  tête  Marli  je  crois  qu'on  peut 
avec  assurance  la  déclarer  antérieure  et  à  la  dame  d'Elche  et 
à  la  grande  statue  féminine  de  Madrid. 


5.  La  plus  grande  et  la  plus  belle  des  deux  têtes  viriles  du 
Musée  de  Barcelone^  (pi.  11),  est  l'œuvre  d'un  archaïsme  plus 
avancé.  Elle  est  haute  de  o™2i;  le  nez  est  mal  conservé;  toute 
la  partie  gauche  de  la  figure  manque,  et  la  forme  de  la  cassure 
interdit  ici  de  songer  à  une  tête  exécutée  originairement  telle 
quelle  nous  est  parvenue,  comme  un  relief.  Dans  la  section 
du  cou,  on  voit  le  trou  rond  qui  devait  servir  à  raccorder  la 
tête  avec  le  buste. 

La  bouche,  finement  tracée,  est  vivante,  mais  ne  sourit  pas; 
l'œil,  placé  plus  haut  que  dans  la  tête  Marti,  et  de  forme  moins 
conventionnelle,  ne  se  relève  plus  vers  l'angle  extérieur;  il  est 

I.  Paris,  pi.  I>L  à  gauche  et  X  à  droite;  pi.  X  au  milieu  et  flg.  179. 

3.  Voir  Paris,  p.  277-278,  et  note  2  de  la  page  278. 

3.  Paris,  pi.  VII. 

'4.  Paris,  p.  3i3;  Mélida,  p.  4G-'(7. 

5.  Cf.  Anuari  de  l'Iustitut  d'Études  catalanes,  mcmvii,  p.  iSo, 


s  BLI.LETIN    HISPAMQt'E 

peu  saillant,  ci  la  paupière  inférieure  est  à  peine  indiquée. 
L'oreille  est  rendue  sommairement,  mais  sans  stylisation. 
Les  cheveux  forment  au-dessus  du  front  trois  rangées  de  ces 
c«  dents  chaldéennes  »  qui  sont  le  procédé  favori  de  l'école'; 
le  reste  de  la  tète  semble  couvert  d'une  calotte  étroite  qui  se 
termine  en  faisant  saillie  sur  la  nuque.  Ici  encore  il  est  pro- 
bable qu'il  ne  s'agit  pas  d'une  coifl'ure  réelle  :  par  simplifi- 
cation, le  sculpteur,  plutôt  que  de  continuer  la  représentation 
des  cheveux  sur  tout  le  crùne,  en  a  laissé  lisse  la  plus  grande 
parties 

Moins  originale  que  la  tête  Marti,  celle-ci  n'en  est  pas  moins 
un  très  bel  exemi)laiie  de  l'art  ibérique.  Si  le  type  qu'elle 
reproduit  est  déjà  connu  par  des  répliques  assez  nombieuses  '•. 
il  n'y  en  a  guère  qui  aient  le  même  mérite,  la  même  simplicité 
élégante.  Elle  va  de  pair-  avec  la  tète  7008  de  Madrid,  qui  fut 
choisie  par  M.  lïeuzey,  lors  de  ses  premiers  tiavaux  sur  les 
sculptures  du  Cerro,  comme  une  des  (l'uvres  les  plus  heureuses 
et  les  plus  caractéristiques  de  la  collection;  encore  la  tête  de 
Madrid,  dont  la  coitï'ure  est  exactement  semblable,  témoigne- 
t  elle,  dans  le  dessin  du  crâne,  d'un  art  moins  savant^. 

G.    La  seconde  tête  do    Barcelone   (pi.   \\)  se   rattache   à  la 


I.  Voir  Paris,  p.  r>Ci_). 

■j.  C'est  un  cas  dillerent  de  relui  dnnl  nous  avions  un  exemple  tout  à  l'heure, 
dans  notre  n"  }\  :  là  c'est  hi  tète  tout  enlirro  tpie  couvrait  la  pseudo-coillure,  et  peut- 
être  le  sculpteur  laissait-il  au  peintre  le  soin  de  détailler  les  cliexeux;  ici  le  sculp- 
teur s'attache  à  la  rcîprésentation  réf^ulière  et  uiênie  ininulieuse  d'une  partie  de  la 
clieveliin?;  mais  les  deux  proci'-dés  parlent  du  même  désir  de  simplilication.  Voir  des 
tètes  cnifl'ées  de  même,  par  boudes  stylisées  sur  le  Iront,  le  reste  du  <T;ine  éiatit  sou 
\ent  lisse,  dans  Paris,  fi^.  aCfj  el  suivantes.  J'ai  noté  en  particulier,  à  Madrid,  les  tètes 
7J07  (Paris,  li;,'.  2Û(]),  7507  (Mélida,  p.  75,  n*  78),  7083  (Mélida,  p.  7."),  n*  ■;?>),  -jïiSlt 
(Paris,  liff.  2^7),  qui  ont  trois  raufrées  de  boucles  stylisées,  comme  la  tète  de  Barce- 
lone; la  tète  7^87  (Paris,  lig.  26(1)  n'a  que  deux  rangées  de  boucles,  de  même  que 
deuv  lèles  d'Yecla  (Paris,  lig.  y.-jlt  et  270).  11  arrive  que  des  traits  soient  gravés  sur  le 
reste  du  crâne  (7r)07)  ou  sim|tlemcnt  sur  le  sommet  (7Ô8'|).  (]e  dernier  exemple 
>>emble  prouver  (pa'il  ne  s'agit  pas  d'une  coilTure  réelle,  d'un  «  gorro  »,  comme  le 
croit  M.  Mi'lida  (\>.  'j'y),  et  fpi'il  faut  se  ranger  à  l'opinion  de  M.  Paris  (p.  2.')7):  «...  le 
reste  du  cràno  est  lisse,  non  qu'il  soit  coillV'  d'une  calotte  du  genre  de  celle  de  nf>s 
enfants  de  chieur,  mais  parce  que  le  ciseau  s'est  fatigué  de  reproduire  indéfiniment 
Cl-  même  thèiiK!  enfantin.  »  Si  les  statues  ou  les  bustes  étaient  adossés  à  \in  mur,  el 
placés  plus  haut  (pie  les  spectaleurs,  il  ny  avait  pas  d'inconM'nienI  à  ne  n-présenter 
que  le-,  premières  rangées  de  boucles. 

.;.    N'oir  la  note  [irécédente;  Paris,  p.  2.'|.'>  sqi].;  Mélida,  p.  7'i-7.'>,  n"  71-8»!. 

'1.  I.a  tète  7  JoS  de  Madrid  est  reproiluite  deux  lois  par  M.  Paris,  pi.  \  liis  el  lig.  aG5  ; 
comparer  particulièrement  la  pi.  X  /x.s- avec  la  reproduction  de  I4  tête  de  Barcelone 
dans  l'Anuuri,  la  pose  étant  la  même  dans  les  deux  photographies. 


SCULl'lLRES    DLi    CEKKO    DE    LOS    SAMOS  (j 

même  série.  Elle  a  o^iS  de  haut'.  Les  cheveux  sont  repré- 
sentés, comme  dans  la  tète  précédente,  par  trois  rangées  de 
dents  chaldéennes,  le  reste  du  crâne  étant  lisse.  L'oreille,  le 
nez  et  le  menton  sont  en  mauvais  état.  L'œil  est  trop  large; 
la  face  est  sans  expression,  la  facture  banale  et  molle.  La 
comparaison  avec  la  tête  voisine  est  très  instructive  :  on  saisit 
sur  le  fait  le  passage  dun  art  intéressant  et  personnel  à  un 
métier  monotone  et  froid. 

7.  11  y  a  peu  de  chose  à  dire  du  premier  des  deux  torses 
conservés  à  Barcelone  (pi.  IV,  à  droite).  llauldeo"':'i4,  il  a  été  très 
maltraité  par  le  temps  :  il  est  réduit  à  un  bloc  presque  informe 
de  pierre  blanchâtre  et  très  friable.  11  provient  probablement 
d'une  figure  virile  dont  les  deux  bras  étaient  ramenés  sur  la 
poitrine;  le  personnage  devait  être  enveloppé  d'un  long  man- 
teau dont  on  devine  le  bord  supérieur,  qui  passait  sur  Tépaule 
gauche,  puis  revenait  par  derrière  sur  l'épaule  droite,  et  coupait 
obliquement  le  haut  de  la  poitrine.  L'espèce  d'excroissance 
qui  se  voit  en  arrière  et  à  gauche  du  corps  est  inexplicable. 

8.  Le  second  torse  (pi.  IV,  à  gauche),  haut  de  o"'5i,  est  mieux 
conservé  et  plus  intéressante  C'est  un  fragment  de  statue 
virile  :  le  personnage  est  vêtu  d'une  tunique  à  petits  plis,  visible 
sur  la  poitrine;  par-dessus  la  tunique  il  porte  un  grand  man 
teau.  Le  bras  gauche,  dissimulé  sous  le  manteau,  doit  pendre  le 
long  du  corps.  L'avant-bras  droit  est  ramené  sur  la  poitrine, 
et  la  main  droite  sort  du  manteau  pour  saisir  à  poignée  les 
plis  qui  remontent  vers  l'épaule  gauche.  La  même  attitude 
se  retrouve  sur  des  torses  du  Musée  de  Madrid^;  le  costume 
—  tunique  et  manteau  —  est  le  costume  courant  des  statues 
viriles  du  Cerro^;  mais  l'intérêt  du  torse  de  Barcelone  est  dans 
la  parure  que  l'ouverture  du  manteau  laisse  voir  sur  la 
tunique  :  c'est  un  collier,  formé  par  un  double  cordon,  auquel 
est  suspendue  une  bulle. 


I.  Comptés  à  partir  du  socle,  c'est-à-dire  en  y  comprenant  un  raccord  en  plâtre 
dans  lequel  est  noyée  la  partie  conservée  du  cou. 

j.  Voir  Paris,  fig.  aoS,  i  (ancienne  photographie),  et  p.  aaS  et  aSô;  M.  Paris  fait 
remarquer  la  présence  du  collier  et  de  la  bulle. 

3.  Paris,  fig.  2,11,  302,  33i. 

4.  Paris,  p.  32(3. 


lO  BDLLETIN    HISPANIQUE 

Cette  bulle  permet  d'attribuer  à  l'époque  romaine  le  torse 
sur  lequel  elle  figure.  C'est  le  même  ornement  que  présentent 
les  statues  do  jeunes  Romains,  comme  on  peut  en  voir,  par 
exemple,  à  ïarragone'  et  à  Sagonte^.  Les  statues  romaines 
sont  en  marbre,  et  de  grandeur  naturelle,  tandis  que  l'ex-voto 
du  Cerro  est  de  dimensions  réduites,  et  que  le  sculpteur 
indigène  est  resté  fidèle  à  la  pierre  tendre  :  mais  le  personnage 
dont  il  a  sculpté  l'image  est  bien  un  Togatns^^,  et  c'est  à  l'école 
des  marbriers  romains  qu'il  a  appris  ce  travail  facile  et  rond, 
très  différent  de  la  facture  sèche  qu'on  note  dans  les  torses 
de  Madrid.  On  n"a  jamais  nié  que  les  ateliers  du  Cerro  aient 
pu  rester  actifs  jusqu'à  l'époque  romaine  :  nous  avons  ici  un 
exemple  très  clair  de  ces  productions  attardées^. 


Ainsi,  dans  le  groupe  des  huit  sculptures  qui  viennent  d'être 
étudiées,  l'une,  le  n°  4,  doit  être  classée  parmi  les  productions 
les  plus  archaïques  du  Cerro.  Le  n"  5  appartient  à  une  époque 
plus  avancée,  mais  où  l'inllucnce  grecque  est  encore  direc- 
tement sentie.  Les  n""  2,  .')  et  G  sont  trois  spécimens  de  l'art 
industrialisé  qui  perpétua  pendant  de  nombreuses  générations 
les  traditions  et  les  formules  des  anciens  maîtres.  Le  n"  8  est 
contemporain  de  la  domination  romaine.  Enfin,  les  n"  i  et  7 
sont  trop  mutilés  pour  qu'aucune  chronologie,  absolue  ou 
relative,  puisse  s'y  appliquer. 

EuGÈMi  ALliEUTliM. 

Janvier  1911. 


I.  Musée  provincial,  n»  SSj. 

3.  Slatnc  conservée  au  llic.îlre,  —  monlionnéc  par  Iliihiicr,  Anl.  Bildircrke,  p.  390, 
et  reproduite  par  Cliabrot,  Uisloria  de  Sagiinto,  tome  II,  lig.  ,'j(j. 

3.  Cf.  Slrabon,  III,  '4,  y.o. 

'i.  Sur  la  persistance  de  la  production  au  Cerro  sous  la  domination  romaine,  et 
sur  1  inlluence  des  modes  romaines  dans  le  costume  masculin,  voir  Paris,  p.  ^og-Sio. 


LES  DECLAMATEURS  ESPAGNOLS 

AU  TEMPS  D'AUGUSTE  ET  DE  TIBÈRE 

{Suite') 


III 


Vie  de  Sénéque  le  père.—  Il  ne  mérite  en  rien  le  surnom  de  Séné- 
que  le  rhéteur.  —  Son  voyage  en  Espagne  où  il  se  marie.  —  Ses 
trois  fils.—  Son  œuvre  littéraire  et  historique. —  Son  caractère. 
—  Son  amour  pour  les  déclamations  de  l'école  ne  l'empêche  pas 
de  les  apprécier  avec  impartialité. 

Sénèque  ne  dit  rien  de  ses  succès  à  l'école  de  Marullus.  Il 
semble  avoir  aimé  ce  rôle  d'auditeur,  qui  déplaisait  tant  à 
Juvénal'.  Non  content  d'avoir  été  l'élève  de  Marullus,  il  se 
plaît  à  fréquenter  en  amateur  les  classes  des  rivaux  et  des 
successeurs  de  son  maître.  «  Tous  ceux  —  dit-iP  —  qui  ont 
laissé  un  grand  nom  dans  l'éloquence,  je  crois  les  avoir 
entendus.  »  Mais,  s'il  abonde  en  renseignements  sur  les  écoles 
où  il  a  écouté  et  applaudi,  il  ne  parle  jamais  de  celles  où  il 
aurait  déclamé. 

Cependant,  une  légende  s'est  constituée,  qui  impose  à 
Sénèque  le  surnom  de  rhéteur  en  parallèle  à  celui  de  son  fils, 
Sénèque  le  philosophe,  et  qui  veut  que  Seneca  rhetor  ait  dirigé 
à  Rome  une  école  de  déclamation.  M.  Bornecque  désigne 
encore  par  le  nom  de  u  Sénèque  le  rhéteur  »  l'auteur  des 
«  Controverses  et  Suasoires  »  dont  il  donne  une  savante  tra- 
duction. Pour  ne  citer  qu'un  ouvrage  estimable  publié  dans  la 
seconde   partie  da  xix^  siècle,  Y  Éloquence  sous  les  Césars,  de 


I.  Voir  le  Bull,  hisp.,  t.  XII,  1910,  n"  i. 

3.  Juvénal,  I,  v.  1  :  Semper  ego  auditor  tantum? 

3.  Sénèque,  Controv.,  l,  Praefat.,  11. 


13  BULLETIN    HISPAMQIE 

M.  Arniel,  fournissait,  en  i864,  des  renseignements  précis  sur 
l'école  de  déclamation  de  Sénèquc  qui  aurait  succédé  à  celle 
de  Latron:  «De  Latron,  le  sceptre  de  l'éloquence  échut  à 
Séncque  le  père...  Sénèquc  exerça  à  Rome,  non  sans  éclat,  la 
profession  de  rhéteur...  Ses  succès  comme  maître  durent  être 
rapides,  puisqu'il  amassa  en  peu  d'années  une  grande  fortune. 
...  La  fortune  d'un  côté,  l'âge  et  la  fatigue  de  l'autre,  l'enga- 
gèrent à  quitter  son  école.  Après  avoir  professé  la  rhétorique 
jusqu'à  l'âge  de  cinquante-deux  ans,  il  retourna  dans  sa  patrie 
et  s'y  maria  avec  llelvia...  De  retour  dans  la  capitale  de 
l'Empire,  le  rhéteur,  désormais  retiré  de  l'enseignement,  se 
lia  avec  Cassius  Severus,  Claudius  ïurrinus,  Monlanus,  avec 
les  hommes  les  plus  éclairés  du  temps,  dont  il  nous  a  laissé  la 
peinture  vivante  dans  ses  précieuses  Con/rovci'ses' .  » 

Cette  biogra])hie  traditionnelle  de  Sénèquc  le  père  ne  se 
fonde  sur  rien  ;  elle  ne  peut  se  recommander  des  rares  indi- 
cations (jue  nous  donnent  l'élève  lui-même  de  Marullus  et 
son  fils  le  philosophe.  Si,  dans  celles  de  ses  œuvres  qui  ont 
survécu,  le  philosophe  parle  peu  de  son  père,  c'est  qu'il  lui 
avait  consacré  une  biographie  dont  on  ne  connaît  guère  que  le 
titre-.  M.  Gucheval  regrette  que,  «  par  une  modestie  singulière, 
Sénèque  le  père  parle  à  [X'ine  de  lui-même  dans  ses  ouvrages  ))•'. 
Mais  M.  Bornecque  fait  remarquer  avec  raison  que,  si  Sénèque 
est  tellement  sobre  de  renseignements  sur  sa  vie,  c'est  «  parce 
que  son  livre  s'adressait  avant  tout  à  ses  enfants,  qui  étaient 
au  courant  de  détails  que  nous  serions  heureux  de  posséder»^. 

(Jn  ne  sait  rien  de  précis  sur  la  vie  de  Sénèque.  Voici  les 
faits  et  les  dates  qu'on  peut  conjecturer  avec  le  plus  de  vrai- 
semblance. 

L.  Annaeus  Seneca  est  né  à  Gordoue  entre  f>()i-fi3  et  (î^o-Gq; 
il  a  commencé  à  fréquenter  à  Home  lécole  de  Marullus  vers 
712-42.  Nous  ignorons  jusqu'à  quelle  date  il  a  suivi  l'enseignc- 


I.  Amif-I,  L'/Cloifiicnrc  sous  les  Césars,  Piiris,  iSIl'i,  pages  i53-i50. 

?..  L.  Annari  Senccac  o[)rra  'iiiae  siipcrsunl  (c«lil.  Kr.  Haasc),  vol.  III,  j).  /,,(C,,  Frmj- 
mcnla,  \\,  <jH:  Inciitil  rjusdrni  Aniuiri  Senccac  de  rila  jiulris... 

3.  V.  Ciichcval,  Uisloire  de  l' liluqucncc  romaine  dei/uis  la  inurl  de  Ciccron,  lomc  I, 
['aris,  1H93,  p.  3(13. 

'i.   Horiicrf|iic,  Les  hcrlaiiiiilinns,  [>.  y. 


LES    bÉCLAMATELRS    ESPAGNOLS  l5 

ment  de  son  maître.  Pendant  de  longues  années,  il  s'intéresse 
aux  exercices  de  déclamation  présidés  par  les  rhéteurs  en 
renom.  Il  entend,  entre  725-29  et  730-24,  le  jeune  Ovide  étu- 
diant déclamer  chez  ArelliusFuscus  une  controverse  remarquée 
sur  le  Sernienl  du  mari  et  de  la  femme,  sujet  déjà  traité  à 
récole  de  Marullus'.  11  assiste  encore  en  707-17  à  une  séance 
où  Porcins  Latro  déclame  en  présence  d'Auguste,  de  Mécène 
et  d'Agrippa  :  l'empereur  songeait  alors  à  adopter  ses  deux 
petits-fîls  Lucius  et  Caius,  nés  du  mariage  de  sa  fille,  la  fameuse 
Julie,  avec  M.  Vipsanius  Agrippa'. 

Après  l'an  707-17,  à  une  date  que  l'on  ne  peut  fixer,  il  part 
pour  l'Espagne.  On  ne  sait  quel  était  le  but  et  quelle  fut  la 
durée  de  ce  voyage.  Sénèque  appartenait  à  Tordre  équestre:  à 
la  fin  de  la  République,  les  chevaliers  s'occupaient  volontiers 
de  finances,  comme  fermiers  de  l'impôt;  dès  le  commencement 
de  l'Empire,  c'est  parmi  eux  que  se  recrutaient  les  procuralorcs 
Caesarum,  qui  remplissaient  dans  les  provinces  de  l'Empereur 
les  mêmes  fonctions  financières  que  les  questeurs  dans  les 
provinces  du  Sénat.  Les  deux  aïeuls  du  beau-père  de  Tacite, 
Agricola,  originaire  de  l'illustre  colonie  de  Fréjus,  comme 
Sénèque  était  originaire  de  l'illustre  colonie  de  Gordoue, 
avaient  obtenu,  l'un  et  l'autre,  la  charge  de  procurateurs 
d'Auguste  et  de  Tibère-^.  11  se  peut  que  Sénèque  soit  parti  pour 
l'Espagne,  qui  était  province  impériale,  comme  procuraloi' 
Caesaris.  Les  chevaliers  s'occupaient  aussi  de  commerce,  et 
Gordoue  était  un  centre  commercial  très  important'':  Sénèque 
allait  peut-être  y  tenir  un  comptoir.  Il  pouvait  aussi  revenir 
dans  sa  patrie  pour  gérer  ses  propriétés,  faire  valoir  ses  plan- 
tations d'oliviers  et  surveiller  l'élève  de  ses  troupeaux  de 
moutons. 

Quelles  qu'aient  été  les  occupations  de  Sénèque,  financier, 
commerçant  ou  propriétaire,  il  est  certain  qu'il  acquit  ou 
consolida  en  Espagne  une  fortune  qui,  d'après  le  témoignage 

1.  Sénèque,  Controv.,  II,  ii,  8  et  suiv. —  Voir  Bull,  hisp.,  igio,  n«  i,  p.  ii,  cl  moa 
livre,  La  Jeunesse  d'Ovide,  Paris,  Fonlemoiiig',  1906,  p.  g8-ioo. 
2-.  Sénèque,  Controv,,  H,  iv,  i2-i3. 
3.  Tacite,  Agricola,  iv. 
.'4.  Strabon,  III,  11,  1  ;  iv,  9. 

Bull.  Iiispan.  a 


l4  BULLETI?i    HISPANIQUE 

de  son  fils  le  philosophe,  était  considérable",  et  qui  ne  se 
serait  pas  accrue  à  Rome  dans  ses  loisirs  d'amateur  de  beau 
langage,  uniquement  soucieux  de  suivre  les  séances  des  écoles 
de  déclamation.  11  prolongea  son  séjour  en  Espagne  assez 
longtemps  :  son  amitié,  dit-il,  est  restée  intime  avec  Latron 
jusqu'au  dernier  jour  du  célèbre  déclamateur  ^.  Or,  d'après 
saint  Jérôme,  c'est  en  Espagne  que  Latron  se  tua  en  yôo-zi  ou 
en  7.")  1-3  pour  se  délivrer  des  souffrances  d'une  mauvaise 
fièvre  ^. 

Mais  Sénèque  était  rentré  à  Rome  dans  les  premières  années 
de  l'ère  chrétienne,  puisqu'il  dit  avoir  entendu  déclamer 
Asinius  PoUio,  d'abord  quand  celui-ci  était  dans  toute  la  force 
de  1  âge  et  ensuite  quand  il  était  parvenu  à  la  vieillesse  \ 
Pollion  avait  commencé  à  déclamer  vers  719,  après  s'être  retiré 
de  la  politique  :  c'est  alors  que,  rhéteur  dans  toute  la  force  de 
l'âge,  il  fut  pour  la  première  fois  entendu  par  Sénèque.  Il 
mourut,  âgé  de  quatre-vingts  uns,  en  709;  il  avait  déclamé 
jusqu'à  la  fin  de  sa  vie.  Sénèque  était  donc  à  Rome  avant 
l'an  709  —  l'an  6  de  l'ère  chrétienne  —  puisqu'il  entendit  de 
nouveau  Pollion  dans  sa  vieillesse. 

C'est  en  Espagne  que  Sénèque  s'était  marié;  la  date  de  ce 
mariage  est  inconnue  :  mais  on  peut  fixer  aux  environs 
de  l'ère  chrétienne  la  naissance  de  ses  trois  fils^,  Annaeus 
Novatus,  qui  prit  le  nom  de  L.  .lunius  Gallio  par  qui  il  avait 
été  adopté;  Annaeus  Seneca,  le  philosophe,  et  Annaeus  Mêla, 
qui  fut  le  père  du  poète  Lucain.  Les  doux  premiers  naquirent 
à  Cordoue;  c'est  peu  de  temps  après  la  naissance  de  Sénèfjue 
le  philosophe  que  ses  parents  revinrent  à  Rome  où  ils  ne 
[)ureiil  le  mener  avec  eux,  car  il  était  trop  faible  pour  supporter 
les  faligiK's  de  la  traversée.  La  su'ur  de  sa  mère  se  chargea  plus 
tard  de  conduire  en  Italie  le  petit  enfant  à  la  santé  délicate'^. 

I.  .Scnèquo  lo  philosophe,  Ad  Uelviam  rnatrem,  v,  /(. 

i.  Sr'nèqnc,  f'jml.roiK,  I,  Praefat.,  i3. 

3.  C.  Kr.  IlcrriiHiifi,  fJispulalio  de  scriploribus  iUuslribus  quorum  Icmpora  Ilirronymiis 
ad  Eusehii  chronica  annolavit,  Gollingae,  r8i8,  p.  î6.  —  Cf.  Borncc<|nc,  Lrs  Déclama- 
tions, p.  188-189. 

i.  Scncquc,  Conlrov.,  IV,  l'rarfal.,  3  :  Audivi  illum  cl  viridcm  cl  poslea  jain  scnem. 

5.  Bornccquc,  Lrs  Jji'clainalions,  p.  ii, 

6.  .'sûnL'ilUc  le  philoso|)hc,  Ad  llelviam  inalrcm,  xix,  a. 


LES    DÉCLAMATEURS    ESPAGNOLS  l5 

Sénèque  le  père  semble  ne  pas  avoir  demeure  constam- 
ment à  Rome  depuis  qu'il  y  était  rentré,  puisque  c'est  au 
cours  d'un  voyage  qu'il  avait  entrepris  que  sa  femme  reçut 
la  nouvelle  de  sa  mort  '. 

La  date  de  celte  mort  est  postérieure  à  l'an  ?>']  de  l'ère  chré- 
tienne. Tibère  mourut,  en  effet,  à  la  fin  du  mois  de  mars  87, 
le  16  ou  le  26  2;  et  Suétone  donne  sur  les  derniers  moments  de 
la  vie  de  Tibère  des  renseignements  empruntés  à  un  ouvrage 
historique  de  Sénèque  :  «  Sénèque  écrit  que,  se  rendant  compte 
de  ses  défaillances,  Tibère  enleva  son  anneau  comme  s'il 
avait  eu  l'intention  de  le  remettre  à  quelqu'un;  puis,  qu'il  le 
replaça  à  son  doigt  et  resta  longtemps  immobile,  la  main 
gauche  fortement  serrée  ;  enfin,  que,  tout  à  coup,  il  appela 
ses  serviteurs  et  que,  personne  ne  lui  ayant  répondu,  il  se 
leva,  mais  que,  les  forces  lui  ayant  manqué,  il  tomba  mort 
près  de  son  lit  ^.  »  Dans  le  fragment  De  vita  palris,  dont  il  a 
déjà  été  parlé'*,  Sénèque  le  philosophe  dit  que,  parmi  les 
nombreux  ouvrages  de  son  père,  se  trouvait  une  histoire 
contemporaine  qu'il  avait  conduite  jusqu'au  jour  de  sa  mort  : 
«  Si  j'avais  mis  aux  mains  du  public  tout  ce  que  mon  père 
a  composé,  tout  ce  qu'il  a  voulu  qu'on  fît  connaître,  il  s'était 
rendu  compte  lui-même  que  son  nom  serait  devenu  illustre... 
Quiconque  aurait  lu  ses  Histoires  du  commencement  des 
guerres  civiles...  au  jour  presque  de  sa  mort...^.  » 

C'est  peut-être  à  ces  Hisioriae  que  Lactance  fait  allusion 
dans  un  passage  bien  connu  des  Institutions  divines  : 

«  Ce  n'est  pas  sans  ingéniosité  que  Sénèque  a  divisé  en  Ages 
successifs  les  époques  de  la  ville  de  Rome.  Il  a  dit,  en  effet, 
qu'elle  avait  eu  sa  première  enfance  sous  le  roi  Romulus,  par 
qui  elle  fut  mise  au  monde  et  comme  nourrie;  que  son  enfance 
continua  ensuite  sous  les  autres  rois  qui  l'agrandirent  et  la 
formèrent  par  de  nombreuses  institutions  et  disciplines.  Mais 
que,  sous  le   règne  de  Tarquin,  alors  qu'elle   commençait   à 

I.  Sénèque  le  philosophe,  Ad  Helviam  matrem,  n,  5. 

j.  Tacite,  Annales,  VI,  l;  Dion  Cassius,  LVIH,  xxviii. 

3.  Suétone,  Tibère,  lxxiii. 

i.   Voir  plus  haut,  p.  892,  n.  a. 

5.  L.  Annaei  Senecae,  Fragmenta,  xv,  98. 


l6  fit  LLETIN    HISPAMQt.Ë 

devenir  adiilfo,  elle  ne  supj)oiia  pas  la  servitude;  el  que, 
rejetant  le  joug  d'une  domination  superbe,  elle  préféra  obéir 
à  des  lois  qu'à  des  rois.  Que  son  adolescence  se  prolongea 
jusqu'à  la  fin  de  la  Guerre  Punique  et  qu'alors,  ayant  acquis 
toute  sa  vigueur,  elle  entra  dans  la  jeunesse.  En  cfl'of.  qu'après 
avoir  fait  disparaître  Garthage,  qui  avait  été  longtemps  sa 
rivale  pour  l'empire  du  monde,  elle  étendit  ses  mains  sur 
lerre  et  sur  mer  jusqu'aux  limites  de  l'univers,  et  (|u'a\ant 
subjugué  tous  les  rois  et  toutes  les  nations,  toute  matière 
de  guerre  venant  à  lui  manquer,  elle  fit  un  mauvais  usage 
de  ses  forces  dont  elle  se  servit  pour  saccabicr.  Que  ce  fut 
le  commencemenl  de  sa  vieillesse;  que,  déchirée  par  les 
guerres  civiles,  tourmentée  par  un  mal  intérieur,  elle  retomba 
sous  le  gouvernement  d'un  pouvoir  unique,  comme  si  elle 
avait  été  ramenée  à  une  seconde  enfance.  Gar,  ayant 
perdu  la  liberté  qu'elle  avait  revendiquée  sur  l'initiative  et 
sous  la  direction  de  Brutus,  elle  vieillit  comme  si  elle  ne 
pouvait  se  soutenir  elle-même,  comme  si  elle  avait  besoin 
de  s'appuyer  sur  l'aide  de  ceux  qui  la  gouvernaient  '.  » 

Gc  développement  aurait  été  le  ^  discours  préliminaire  » 
de  l'ouvrage  où  Sénèque  faisait  l'histoire  des  guerres  civiles 
et  des  principals  d'Auguste  et  de  Tibère.  Il  n'est  pas  sans 
rapports  avec  le  Prowniiuni,  où,  au  commencement  de  son 
Histoire  romaine,  Florus  compare  Home  à  un  bomme  dont 
ïinfatdia  se  serait  passée  au  temps  des  rois,  dont  Vndolesrt'iiHa 
aurait  duré  du  consulat  de  Brutus  à  la  lin  de  la  conquête  de 
l'Italie  et  la  Jiirenla,  de  la  fin  de  la  conquête  de  l'Italie  à 
l'avènement  de  César  Auguste,  dont  la  senerlii.s  se  serait 
prolongée  pendant  deux  siècles  d'Empire.  Avec  Trajan  serait 
venu,  contre  l'attente  générale,  un  renouveau  de  cette  vieil- 
lesse de  Bome  :  itraeler  spern  omnium  seneclns  Imperii,  (juasi. 
nuhlild  jnvenluir  rrvirescil  ■.  De  ces  rapports  entre  le  fragment 
de  Sénèque  cité  par  Lactancc  et  le  début  de  l'ouvrage  de 
I  lorus.  on  a  prétendu  conclure  (\ur  \,\  Ibéorie  des  âges  de 
Bome  appartient  à   Morus. 

I.  l.acUncc,  Jnslit.  bii\,  VII,  w .  l'i. 
a.   Florus,  I,  i,  8. 


LES    DÉCr.AMATECRS    F.SPAONOt.S  I7 

«  Dans  un  passage  très  important —  dit  M.  Pichon'  —  Lac- 
tance  expose  la  théorie  des  quatre  âges  du  peuple  romain, 
et  la  met  sous  le  nom  de  Sénèque.  Pour  certains  commenta- 
teurs, Haase,  Mai,  Jahn,  Rossbach,  il  s'agit  de  Sénèque  le 
père  ;  pour  d'autres,  Vossius,  Fabricius,  ^^  esterburg,  du 
philosophe;  mais  il  est  bien  possible  aussi  que  le  véritable 
auteur  de  cette  théorie  soit  Florus,  dont  le  gentilice  Annaeus 
a  pu  causer  une  confusion.  »  M.  Pichon  donne,  à  l'appui 
de  cette  dernière  hypothèse,  les  opinions  de  Saumaise,  de 
Spengel  et  d'Unger.  Mais  rien  ne  prouve  que  Florus  soit  un 
Annaeus.  Dans  le  manuscrit  le  plus  sur,  le  Banibergensis,  qui 
est  du  IX*  siècle,  l'ouvrage  de  Florus  est  intitulé  :  Epitomu  Jnli 
Flnri.  C'est  d'après  le  .\a:arius  {Palalituis  894),  qui  est  aussi 
du  ix^  siècle  et  qui  a  pour  titre  Epilonia  L.  Annaei  Flori,  que 
les  manuscrits  plus  récents  attribuent  les  Epilomae  libri  II 
à  un  L.  Annaeus  Florus,  que  l'un  d'eux  même,  le  Palali/ins 
Heidelberge/isîs  lôôS,  contient  un  prologue  où  il  est  affirmé 
que  l'ouvrage  a  été  composé  par  un  membre  de  la  gens  Annaea. 

Mais  aucune  preuve  ne  démontre  que  V Epilome  qui  date  du 
temps  de  Trajan  soit  l'œuvre  d'un  Sénèque  ou  que  Florus  soit 
un  Sénèque.  Florus  reprend,  en  la  modifiant,  une  comparaison 
qui  appartient  à  un  Sénèque;  et,  comme  on  sait  que  Sénèque 
le  père  a  composé  une  histoire  de  son  temps,  il  est  très 
probable  que  Florus  lui  a  pris  celte  théorie  des  âges  de  Rome, 
qui  est  bien  une  seidenda  développée  à  la  manière  des  décla- 
ma leurs-. 

Le  seul  ouvrage  de  Sénèque  que  nous  possédions  est  un 
recueil  de  Controversiae  et  de  Suasoriae  publié  sous  le  titre  de 
Oraloruni  sententiae,  divlsiones,  colores.  Cet  ouvrage  ne  nous 
est  pas  parvenu  complet.  Les  manuscrits,  dont  les  meilleurs, 
le  Bruxellensis  9081,  et  VAntverpiensis  /|ii,  sont  du  x'  siècle, 
ne  donnent  avec  des  lacunes  que  les  livres  I  et  II  (sans  les 
Préfaces),  VII,  IX,  X  des  Controversiae  et  un  seul  livre  de 
Suasoriae.  Le   recueil  comprenait   au   moins   deux   livres   de 

1.  R.  Pichon,  Laclance,  Paris,  1901,  p,  23o. 

2.  Alfred  Klotz  a  soutenu,  dans  le  niieinisches  Muséum  (l.  LVI,  1901,  fasc.  3),  que 
l'ouvragfe  historique  de  Sénèque  n'a  pas  été  publié  par  son  fils,  qu'aucun  fragment 
ne  nous  en  est  parvenu  et  que  le  passage  cité  par  Lactance  ne  lui  appartient  pas. 


l8  BULLETIN    HISPAMQLE 

Saasoriae  et  probablement  plus  de  deux,  puisque,  dans  les 
manuscrits,  à  la  suite  des  sept  Saasoriae  qui  nous  restent, 
on  lit  :  primas  liber  explicil  ;  incipil  secandtis,  —  et  non  prior 
et  aller  qui  eussent  été  les  termes  propres,  si  les  Saasoriae 
n'avaient  compris  que  deux  livres. 

C'est  dans  la  partie  perdue  du  recueil  que  se  trouvait  le 
passage  auquel  Quintilien  fait  allusion  :  <(  On  use  fréquem- 
ment du  serment,  quoiqu'il  n'y  ait  pas  lieu  de  recourir  souvent 
à  ce  moyen.  Car  il  convient  peu  à  un  homme  sérieux  de  jurer, 
à  moins  que  cela  ne  soit  nécessaire,  et  Sénèque  dit  en  termes 
heureux  que  c'est  le  fait  non  des  défenseurs,  mais  des 
témoins'.  » 

Au  IV'  ou  au  \*  siècle,  on  fit,  assez  maladroitement  et  sans 
doule  à  l'usage  des  écoles,  un  extrait  des  Oratoram  el  rlie- 
torurn  sentenliac,  divisiones,  colores.  Ces  Excerpla,  qui  ne 
donnent  rien  des  Saasoriae,  permettent  de  se  faire  une  idée 
du  contenu  des  livres  III,  IV,  Y,  YI,  VIII,  et  ont  surtout  le 
mérite  de  nous  fournir  les  préfaces  des  livres  I,  II,  111,  IV 
(la  Préface  du  livre  VIII  manque). 

C'est  dans  sa  vieillesse,  au  moment  où  son  excellente  mémoire 
d'autrefois  commençait  à  lui  faire  défaut,  que,  pour  répondre 
aux  prières  de  ses  trois  fils,  Sénèque  entreprit  d'exposer  son 
sentiment  sur  les  déclamateurs  dont  il  avait  été  le  contem- 
porain et  de  rassembler  en  un  recueil  celles  de  leurs  paroles 
remarquables  qui  ne  s'étaient  pas  encore  échappées  de  son 
souvenirs  Ce  recueil  est,  en  somme,  une  histoire  de  la  décla- 
mation et  des  déclamateurs;  et  le  vieillard  est  capable  de  faire 
cette  histoire,  puisqu'il  a  suivi  les  progrès  de  la  déclamation 
depuis  son  berceau'^,  puisque,  à  partir  de  Cicéron  (pi'il  n'a  pu 
connaître,  il  lui  a  été  donné  d'entendre  tous  ceux  qui  ont  laissé 
un  grand  nom  comme  orateurs''. 

La  rédaction  des  (Jonlroversiae  précède  celle  des  Saasoriae. 
A  propos  d'une  conlrovrrsia,  il  fait  allusion  à  une  saasoria  de 
Latron  :  «  Ce  qu'il  a  dit,  je  l'exposerai  en  temps  et  lieu,  quand 

I.  Quintilien,  liislil.  Oral.,  IX,  ii,  98. 

■j.  S(':nèque,  Conlrov.,  I,  Praefal.,  i-a. 

3.  Sén(";quc,  Conlruv.,  I,  Praefal.,  12. 

'4.  Séuèque,  Conlrov.,  l,  Praefal.,  11. 


LES    DÉCLA^rATEURS    ESPAGNOLS  I9 

j'en  serai  venu  aux  saasoriae'.  »  Le  développement  annoncé 
ne  se  trouve  pas  dans  le  livre  des  Siiasoriae  que  nous  possé- 
dons. Ce  livre  a  été  rédigé  après  la  mort  de  Tibère;  Sénèque, 
en  effet,  y  parle  dû  successeur  d'Auguste  comme  de  quelqu'un 
qui  n'existe  plus.  Tibère,  dit-il,  n'aimait  pas  le  talent  de 
Nicélès\ 

«  L'œuvre  que  vous  me  demandez  m'est  plus  agréable  que 
facile,  »  dit  Sénèque  à  ses  fils  dans  la  Préface  de  son  recueil  de 
Controversiae^.  k  Vous  voulez  que  je  vous  expose  mon  senti- 
ment sur  les  déclamateurs  qui  ont  été  de  mon  époque,  que  je 
recueille  celles  de  leurs  paroles  qui  n'ont  pas  encore  échappé 
à  ma  mémoire,  pour  vous  permettre,  bien  que  vous  n'ayez  pas 
connu  ces  hommes,  de  pouvoir  les  juger,  au  lieu  d'en  être 
réduits  à  ajouter  foi  à  des  assertions  sur  leur  compte.  11  m'est 
agréable,  je  l'avoue,  de  revenir  à  mes  anciennes  études,  de 
jeter  un  regard  vers  des  années  meilleures,  et  puisque  vous 
vous  plaignez  de  n'avoir  pu  entendre  des  hommes  dont  on 
avait  une  telle  opinion,  de  les  soustraire  pour  vous  à  l'injure 
du  temps.  » 

11  est  probable  que  les  fils  de  Sénèque  —  tout  au  moins, 
deux  d'entre  eux,  Sénèque  le  philosophe  et  Novatus  —  s'in- 
quiétaient moins  de  connaître  les  anciens  déclamateurs  que 
de  flatter  la  manie  de  leur  vieux  père.  G.  Boissier  remarque 
avec  raison  qu'a  il  devait  y  avoir  un  désaccord  »  entre  les  fils, 
qui  «  voulaient  être  de  leur  temps  »,  et.  le  père,  o  morose, 
découragé,  qui  proclamait  que  tout  allait  plus  mal  qu'autre- 
fois»^. Les  confidences  du  philosophe,  le  seul  des  fils  de 
Sénèque  qui  ait  écrit,  le  seul  en  tout  cas  dont  nous  possé- 
dions les  ouvrages,  nous  laissent  deviner  ce  qu'était  Vanliquus 
rigor^  de  son  père. 

L'ancien  élève  de  Marullus  s'était  marié,  assez  tard,  en 
Espagne;  sa  femme  Helvia,  dont  la  famille  avait  apparemment 


1.  Sénèque,  Controv.,  II.  iv,  S. 

2.  Sénèque,  Siiasor.,  m,  7  :  Tiberitis...  offendfbatur  Nicetis  ingénia. 

3.  Sénèque,  Controv.,  I,  Praefat.,  i. 

[t.  Boissier,  Les  Écoles  de  déclamation  à  Ftome,  p.  210  (à  la  fin  du  volume  sur  Tacite), 
Paris,  Hachette,  igoS. 

5.  Sénèque  le  philosophe.  Ad  Helviam  malrem,  xvii,  3, 


20  Bl  LLETIN    HISPANIQUE 

pris  lo  (jt'/tliliciuni  de  M.  Ilelvius  Blasio,  édile  en  ôôG-iqH, 
préleur  eu  5J7-197,  puis  propréteur  de  VfJispania  Ulleriur,  où 
il  avait  vaincu  les  Celtibériens',  semble  avoir  été  beaucoup 
plus  intime  avec  ses  fils,  dont  elle  partageait  les  études  % 
qu'avec  son  vieux  mari,  «  le  meilleur  des  hommes,  mais  un 
homme  dont  la  sévérité,  digne  des  temps  antiques,  rempêchait 
d'approfondir  les  préceptes  de  la  philosophie,  les  doctes  ensei 
gnemenls  dont  elle  aimait  à  s'entretenir  avec  ses  fils,  plus 
volontiers  que  ne  fait  une  femme,  plus  familièrement  que 
ne  fait  une  mère  »  ^. 

Sénèque  traitait  aussi  rudement  ses  fils  que  sa  femme.  Il 
contrariait  le  penchant  qui  poussait  aux  éludes  philosophiques 
son  cadet,  qui  devait  être  Sénèque  le  philosophe.  «Mon  père, 
dit  1  auteur  des  Lettres  à  Lucilius,  était  très  indulgent,  mais 
il  détestait  la  philosophie^.  »  La  philosophie  était  à  la  mode, 
depuis  que  lEmpire  avait  pacifié  l'éloquence  politique.  Les  dis 
eussions  sur  les  problèmes  de  la  morale  remplaçaient  les  luttes 
oratoires  du  Forum  :  le  vieux  Sénèque  gène,  autant  qu'il  le 
peut,  les  études  philosophiques  de  son  fils.  Il  ne  comprend 
pas  que  la  jeunesse  s'occupe  d'une  autre  étude  (|ue  celle  de 
cette  éloquence  qui  avait  permis  à  Cicéron,  qu'il  admire  telle 
ment,  de  devenir  le  premier  citoyen  de  Rome.  Il  ne  veut  pas 
se  rendre  compte  que  la  parole,  de  qui  dépendait  au  temps  de 
la  Hépublique  le  peuple  maître  du  gouvernement  et  esclave 
des  orateurs  politiques,  a  été  annihilée  par  l'Empire  qui  lui  a 
enlevé  toute  autorité  dans  l'I^tat,  et  que  l'école  de  déclamalion 
ne  donne  qu  une  image  vaine,  une  puérile  parodie  des  grandes 
luttes  oratoires  du  Forum. 

Cet  homme  de  Cordoue  est  <>  bien  de  son  pays  »,  comme  le 
remarque  M.  Boissier;  «  le  tempérament  espagnol  se  trahit 
chez  lui  par  des  brusqueries,  des  e.iagéralions,  des  partis 
pris,  des  violences -^  »  Il  parle  à  ses  fils  comme  le  don  Diègue 
de  Corneille  parle  à  Kodrigue.  Mais  c'est  en   latin  qu'il  |)arle, 

I.  Tilc-Livc,  XWII,  xxviii,  ^;  XXXHI,  xxi,  7;  \\XI\  ,  x,  3. 

a.  Sénèque  \c.  pliih^sophc,  Ad  Ilelvtum  matrfm,  xv,  1. 

3.  .Sénèque  le  pliilosoplic.  Ad  llelinam  matrem,  iv,  i;  xvii,  3. 

U.  Sénèque  le  philoiioplic,  E[>iil.  ad  l.wiL,  lxwiii,  j  ;  cviii,  j'j. 

&.  Boissier,  ouvr.  cit.,  p.  309. 


LES    nrCI.AMATELRS    ESI'AOOr.S 


suivant  la  coutume  des  habitants  de  la  Bétique,  qui,  d'après  le 
témoignage  de  Strabon,  étaient  devenus  Romains  au  point 
d'oublier  leur  propre  langue  et  de  ne  plus  porter  que  la  toge'. 
Sans  rancune  pour  les  moqueries  dont  le  Pro  Archia  et  le  Pvo 
Plancio  accablaient  les  vers  latins  des  poètes  de  Cordoue  et  les 
harangues  latines  des  orateurs  de  la  Tarraconaise  ',  il  professe 
la  plus  respectueuse  admiration  à  Fendroit  de  Cicéron  dont  il 
vénère  le  génie,  le  seul,  dit-il,  dont  le  peuple  romain  puisse 
s'enorgueillir  comme  ayant  été  aussi  grand  que  son  empire 3. 

Mais  il  semble  être  entré  lui-même  dans  la  cité  romaine  au 
temps  et  sous  le  patronage  de  Caton  l'ancien,  le  vainqueur  et 
le  protecteur  à  Rome  des  Espagnols.  Ce  n'est  pas,  à  la  manière 
du  vieillard  d'Horace,  le  temps  de  sa  propre  jeunesse,  mais 
bien  le  temps  de  Caton  qu'il  loue  et  qu'il  regrette  sans  cesse; 
il  se  fait  un  dieu  du  rigide  censeur  dont  Cicéron  avait  l'ait  dans 
le  De  Senectute  un  sage  vieillard  plein  de  bienveillance  ;  il  voit 
dans  ses  paroles  autant  d'oracles  :  «Qu'est-ce  qu'un  oracle,  sinon 
la  volonté  divine  énoncée  par  la  bouche  d'un  homme?  Et  quel 
prêtre  plus  saint  que  Caton  la  Divinité  pouvait- elle  se  choisir 
pour  adresser  au  genre  humain,  non  un  précepte,  mais  un 
reproche ^.^  » 

Sénèque  a  sur  les  droits  du  paler  familias,  dont  le  nom 
«  contenait  jadis  en  lui,  non  pas  l'idée  de  paternité,  mais  celle 
de  puissance,  d'autorité,  de  justice,  de  dignité  majestueuse  »  ^, 
les  mêmes  idées  que  Caton  et  que  ceux  de  ses  contemporains 
qui  ne  voulaient  pas  permettre  aux  influences  grecques 
d'amollir  l'antique  discipline  romaine.  Il  appartient  à  l'école 
de  ces  pères  que  le  poète  comique  Gaecilius  mettait  en  scène 
et  que  Cicéron  accusait  d'avoir  des  cœurs  de  fer*^.  Il  ne  com- 
prend ni  la  tendresse  paternelle  du  Micion  de  Térence  pour 
son  fils  adoptif,  ni  le  désespoir  de  l'Egée  de  Catulle,  qui  se 
tue  quand  il  croit  que  son  fils  Thésée  a  succombé,  ni  la  douleur 


1.  Slrabon,  III,  ii,  i5. 

2.  Cicéron,  Pro  Archia,  x.  2G;  Pro  Plancio.  xxxiv,  8^. 

3.  Sénèque.  Controv.,  \,  Praefat..  11. 

4.  Sénèque,  Controv.,  1,  Praefal,  y. 

5.  Fustel  de  Coulanges,  La  Cité  antique,  édil.  de  1878,  p.  98. 

6.  Cicéron,  Pro  Hoscio  Amerino,  xvi.  46;  Pro  Caelio,  xvi,  37. 


23  liri.T.ETIN    HISPANIQUE 

de  rÉvandre  de  Virgile  qui  pleure  sans  vouloir  être  consolé, 
quand  il  apprend  la  mort  de  son  fils  Pallas.  Il  admire  Asinius 
Pollio.  qui  déclamait  quatre  jours  après  la  mort  de  son  fils 
et  qui  montrait  ainsi  la  grandeur  de  son  âme  capable  de  défier 
la  fortune:  et  il  s'indigne  contre  la  lâcheté  de  Q.  Ilaterius  : 
longtemps  après  avoir  éprouvé  le  même  malheur  quAsinius 
Pollio,  ayant  à  traiter  la  controverse  de  l'homme  qui,  arraché 
du  tombeau  de  ses  trois  fils,  intente  un  procès  pour  actes 
contraires  aux  lois,  ce  déclamateur  fut  forcé  par  ses  larmes 
d'interrompre  son  discours  ■.  Sénèque  veut  qu'on  respecte  les 
convenances.  Il  n'aurait  pas  admiré  Asinius  Pollio  déclamant 
le  jour  même  de  la  mort  de  son  fils  et  il  inflige  le  même 
blâme  à  deu\  rhéteurs  grecs  de  Mitylène,  ses  contemporains, 
Potamon  et  Lesboclès,  qui  avaient  l'un  et  l'autre  perdu  leur 
fils  à  peu  près  le  même  jour.  Lesboclès  licencia  son  école,  et 
on  ne  l'entendit  plus  déclamer.  \ussitê)l  après  les  funérailles 
de  son  fils,  Potamon  se  rendit  à  son  école  et  se  mit  à  déclamer  : 
l'un,  estime-t-il,  fit  preuve  d'une  insensibilité  peu  convenable 
à  un  père,  l'autre  d'une  mollesse  indigne  d'un  homme ^. 

D'ailleurs,  Sénèque  paraît  heureux  de  l'occasion  qui  lui  est 
offerte  de  critiquer  à  la  fois  deu\  déclamateurs  grecs.  Il  a  la 
même  haine  que  le  vieux  Caton  pour  l'hellénisme;  et  coiumc 
le  fera  au  commencement  du  V  siècle  le  Gaulois  Uulilius 
Namatianus,  l'Espagnol  de  Cordoue  se  montre  plus  Romain 
de  cœur  que  les  vrais  fils  de  Rome;  son  patriotisme  étroit 
n'admet  en  rien  l'infériorité  de  la  patrie  romaine  :  «  Je  ne  veux 
pas,  »  proclame-t-il,  «  que  les  Romains  aient  jamais  le 
dessous^.  »  Il  se  fuit  de  la  vertu  romaine  une  telle  idée  (|ue, 
d'après  lui,  cette  vertu  doit  surmonter  tous  les  obstacles; 
il  reproche  au  poète  Cornélius  Severus,  dont  il  loue  d'ailleurs 
les  beaux  hexamètres  consacrés  à  l'éloge  funèbre  de  Cicéron  '', 
quelques    vers    où    la   grandeur   de    l'âme   romaine  n'est   pas 

I.  Sénèque,  Controv.,  W ,  Praefat.,  f>. 

j.  Sénèfiue,  Suasor.,  ii,  i5.  —  Sénèque  le  philosophe  cite  les  exemples  fameux 
(les  pères  et  des  mères  qui  ont  supporté  avec  courage  la  mort  de  leurs  enfants  (Ad 
Marciam,  de  Consolatione,  x  i  v).  CI.  Valère  Maxime,  V,  x,  Dr  parentibus  qui  obitum 
tiherorum  forli  animo  lulerimt. 

3.  Sénèque,  Controv.,  \,  v,  a8. 

/(.  .Sénèque,  Suasor.,  vi,  jt). 


LES  DÉCLAMATEIRS  ESPAGNOLS  23 

sauvegardée  '.  Cette  grandeur  de  l'âme  et  du  génie  de  Rome 
se  personnifie  pour  lui  dans  l'âme  et  le  génie  de  Cicéron  que 
l'on  doit  mettre  au-dessus  de  tout  ce  que  l'insolente  Grèce 
a  pu  produire'.  Et  l'Espagnol,  champion  de  Rome,  montre 
pour  l'insolente  Grèce  autant  de  haine  et  de  mépris  que  Caton, 
Il  se  plaît  à  dénigrer  les  déclamateurs  grecs  incapables  de 
rivaliser  avec  les  Latins;  il  s'amuse  à  mettre  en  lumière  leurs 
défauts  ;  il  prétend  que  leurs  qualités  peuvent  sans  peine 
passer  en  latin.  11  s'excuse  presque  auprès  de  ses  fils  de  leur 
citer  quelques  sententiae  des  déclamateurs  grecs  :  <(  Si  je 
rapporte  ici  des  traits  grecs,  c'est  pour  vous  donner  le  moyen 
d'apprécier  d'abord  combien  il  est  facile  de  les  transporter  de 
l'éloquence  grecque  à  l'éloquence  latine,  ensuite  pour  vous 
permettre  de  comparer  les  génies  entre  eux  et  de  conclure  que 
la  langue  latine  n'a  pas  moins  de  ressources,  mais  s'autorise 
moins  de  licences  que  la  langue  grecque  »  ^. 

Ces  licences,  les  Grecs  se  les  permettent  toutes,  parce  qu'on 
leur  permet  tout  '■*  ;  les  sententiae  des  Grecs  sont  généra- 
lement remarquables  par  leur  faiblesse  ^.  Sont-elles  bonnes 
par  hasard,  c'est  qu'elles  viennent  du  latin  :  ainsi  Agroitas  de 
Marseille  déclame  en  grec;  mais  à  la  vigueur  de  ses  sententiae 
on  reconnaît  qu'il  a  étudié  avec  les  Romains*^.  Par  contre,  tout 
ce  qui  est  mauvais  en  latin  vient  du  grec  :  ainsi,  Triarius  a 
une  sententia  ridicule  :  rien  d'étonnant,  elle  est  traduite  du 
grec  ;  et,  en  grec,  elle  est  d'un  goût  encore  pire  ". 

Les  mœurs  de  la  Grèce  sont  aussi  mauvaises,  aussi  funestes 
pour  Rome  que  son  éloquence.  Horace  blâmait  la  mollesse  des 
jeunes  Romains  habitués  à  vivre  à  la  grecque"^  :  Sénèque  est 
convaincu  que  de  son  temps  tout  va  de  mal  en  pis,  et  il  est 
persuadé  que  la  Grèce  est  responsable  des  tendances  perverses 
qu'il  constate  et  qu'il  déplore.  Les  jeunes  hommes  ne  pensent 

1.  Sénèque,  Suasor,,  ii,  12. 

2.  Sénèque,  Controv.,  \,  Praefat.,  G. 

3.  Sénèque,  Controv.,  X,  iv,  28. 

4.  Sénèque,  Controv.,  l,  11,  22. 

5.  Sénèque,  Controv.,  I,  vi,  12. 

6.  Sénèque,  Controv.,  II,  vi,  12. 

7.  Sénèque,  Controv.,  VII,  1,  îS. 

8.  Horace,  Sat.,  Il,  11,  v,  11  :  ...  assuetum  graecari. 


a'i  rti  i.i.r.TiN   iiispamqie 

plus  qu'ù  se  friser  les  cheveiix,  à  se  déformer  la  voix  pour  faire 
assaut  de  gentillesses  avec  les  voix  des  chanteuses,  à  lutter 
avec  les  femmes  pour  la  grâce  des  attitudes;  leur  idéal,  c'est 
l'oisiveté  raffinée  '. 

Alors  que,  malgré  les  eiï'orls  d'Auguste,  les  Romains  ne  se 
soucient  plus  de  la  religion  de  leurs  ancêtres,  Sénèque  est  un 
dévot.  Il  confesse  sa  foi;  il  sait  que,  pour  être  souvent  tardive, 
la  vengeance  des  dieux  immortels  frappe  toujours  avec  sûreté 
le  coupable  qui  a  violé  leurs  lois  -.  C'est  parce  qu'il  est  fidèle 
à  la  religion  romaine  qu'il  méprise  et  qu'il  hait  la  philosophie 
grecque  qui  nie  ou  (jui  diminue  la  puissance  absolue  des 
dieux. 

On  peut  s'étonner  que  cet  homme  de  la  vieille  roche  n'ait 
pas  term  à  suivre  la  carrière  politique  à  l'exemple  de  son 
héros,  Caton  l'ancien,  qui  toute  sa  vie  a  servi  la  patrie 
romaine  dans  les  commandements  militaires  et  dans  les  fonc- 
tions civiles.  Il  donne  bien  à  entendre  qu'il  a  eu  quelque  envie 
de  s'avancer  dans  les  honneurs  :  s'il  a  renoncé  à  être  fonction 
naire,  c'est  probablement  parce  qu'il  s'est  aperçu  que  le  métier 
était  souvent  dangereux  et  n'était  pas  toujours  honorable-^;  ce 
n'est  pas  à  cause  de  ses  opinions  politiques.  Il  était  né  à 
Cordoue,  dans  un  milieu,  probablement  dans  une  famille  qui 
avait  des  sentiments  pomi)éiens.  La  fidélité  à  la  mémoire  du 
vaincu  de  Pharsalc  n'était  pas  une  cause  de  défaveur  sous  le 
principal  d'Auguste,  qui  honorait  de  son  amitié  l'historien 
Tile-Livc,  admirateur  cl  panégyriste  de  Pom])ée''.  D'ailleurs, 
Sénèque  était  loin  de  professer  un  culte  superstitieux  pour  le 
rival  de  César  :  il  s'étonne  de  voir  le  déclamateur  Labienus 
conserver  longtemps  après  les  guerres  civiles  une  âme  ardente 
de  pompéien  •'.  Quant  à  lui,  on  ne  voit  nulle  part  dans  ses  écrits 
que  ce  dévot  de  la  Home  d'autrefois  ait  ('lé  hostile  au  régime 

I.   Sénèqiio,  Conlrov.,  I,  Praefal.,  7-ij. 

u.  Sénùqiie,  Conlrov.,  \,  Praejat.,  0. 

y».  Sénèt|iio,  Conlrov.,  Il,  Praefal.,  It  :  lUjo  'itioiiur  ejus  ttlioiiui  /iroressnx  aridus  vd 
periculosae,  duin  lioneslae  modo  indusirine. 

.'1.  Tacilo,  Annal.,  IV,  xxxiv.  —  Séiirquo  cilf  (Suaxor..  VI,  uj)  le  ij;is»age  île  Tile- 
l.ive  où,  coniiiio  il  lo  iJit,  l'Iiistorion,  <|iii  apprécit'  avec  une  entière  franchise  les 
lirimcnes  d'un  noble  caractère,  rend  à  Gicéron  pleine  jiiNtico. 

j.   Sénèque,  Conlrov.,  \,  Pnirfal.,  j. 


LES    DECIAMATEIRS    ESPAGNOLS 


nouveau.  Il  constate  que  sous  le  divin  Auguste,  dont  il  loue 
la  clémence',  on  jouissait  d'une  très  grande  libertés  Peut  être 
na-t-il  pas  les  mêmes  sentiments  de  respect  dévoué  pour  le 
successeur  d'Auguste  :  le  blâme  qu'il  inflige  au  Grec  Potamon, 
qui,  en  revenant  des  funérailles  de  son  fils,  va  déclamer  à 
l'école  qu'il  dirige,  peut  s'adresser  indirectement  à  rempereur 
Tibère  qui.  Tan  776-23,  alors  que  son  fils  Drusus  venait  de 
mourir  et  n'était  pas  encore  enseveli,  entra  dans  la  Curie  pour 
arrêter  par  un  discours  les  larmes  ofTîeielles  des  sénat(^urs\ 
Mais  lors  de  l'avènement  de  Tibère,  Sénèque  avait  plus  de 
soixante-dix  ans;  il  eût  été  déjà  à  la  retraite,  s'il  avait  suivi  la 
carrière  administrative  ,  et  ce  n'est  pas  le  peu  d'estime  qu'il 
semble  montrer  pour  le  successeur  d'Auguste  qui  l'aurait  em- 
pêché d'entrer,  quarante  ans  auparavant,  au  service  d'un 
empereur  pour  lequel  il  témoigne  le  plus  vif  attachement  et  la 
plus  grande  vénération. 

On  ne  peut  donc  imputer  à  son  hostilité  pour  les  inslitu- 
tions  impériales  et  la  ])ersonne  de  l'empereur  le  parti  que  prit 
ce  bon  Romain  de  Cordoue  de  rester  éloigné  des  charges 
publiques;  c'est  plutôt  son  manque  de  confiance  dans  l'avenir 
de  Rome  dont  il  admire  avec  passion,  dont  il  regrette  la 
grandeur  passée,  qui  le  retient  loin  de  la  carrière  adminis- 
trative. 

II  se  rend  compte  de  la  décadence  où  Rome  se  précipite, 
depuis  que  toute  l'émulation  des  hommes  politiques  s'est 
détournée  vers  les  seules  occupations  qui  donnent,  souvent 
par  des  moyens  honteux,  honneurs  et  profits.  Il  proclame 
avec  tristesse  que  pour  le  monde  romain  le  moment  est  venu 
où  la  loi  de  la  fatalité  veut  que  tout  ce  qui  est  parvenu  au  faîte 
retombe  jusqu'en  bas  d'une  chute  plus  rapide  que  ne  fut  la 
montée^.  C'est  pourquoi  il  s'est  détourné  de  la  carrière  des 
honneurs  et  il  aurait  voulu  en  détourner  ses  fils.  Deux  d'entre 
eux  étaient  rebelles  aux  conseils  paternels  :  Sénèque  le  philo- 
sophe, dont  on  sait  la  fortune  au  palais  impérial  et  la  disgrâce, 

1.  sénèque,  Controv.,  1\  ,  Praefal.,  j. 

3.  Sénèque,  Controv.,  II,  iv,  i3. 

3.  Tacile,  Annal.,  IV,  viii. 

4.  Sénèque,  Cunlrov.,  I,  l'racfià.,  7. 


26  BULLETIN    HISPANIQUE 

Novatus  qui,  adopté  par  L.  Junius  Gallio,  deviendra  proconsul 
d'Achaïe  et  sera  forcé  de  se  donner  la  mort  en  même  temps 
que  l'ancien  précepteur  do  Néron.  Le  troisième,  Mêla,  qui 
devait  être  le  père  du  poète  Lucain,  se  montrait  plus  docile; 
c'était  le  fils  préféré  du  vieillard,  qui  lui  rendait  ce  témoignage 
dans  la  dédicace  du  deuxième  livre  des  Controversiae  où  il  lui 
parlait  du  philosophe  Papirius  Fabianus:  *(  J'ai  d'autant  plus 
de  plaisir  à  te  donner  ces  renseignements,  ô  Mêla,  mon  très 
cher  fils,  que  je  vois  l'horreur  que  toutes  les  charges  publiques 
t'inspirent  et  ton  éloignement  de  toute  ambition:  tu  n'as  qu'une 
seule  passion,  la  même  que  Fabianus.  Applique-toi  donc  à 
l'éloquence...  Suis  le  penchant  de  ton  esprit;  contente-toi  de 
rester  dans  l'ordre  équestre,  comme  ton  père;  dérobe  aux 
coups  de  la  fortune  une  grande  partie  de  toi-même.  Ton  génie 
naturel,  plus  vaste  sans  nul  doute  que  celui  de  tes  frères,  était 
capable  d'embrasser  toutes  les  études  libérales  :  la  preuve 
même  de  ta  supériorité  intellectuelle,  c'est  que  tu  ne  tes  pas 
laissé  séduire  par  l'excellence  de  tes  facultés  pour  en  mal  user. 
Mais,  puisque  tes  frères  ont  des  soucis  d'ambition,  puisqu'ils 
se  préparent  à  aborder  le  Forum  et  à  entrer  dans  ces  honneurs 
où  les  motifs  d'espérance  sont  en  même  temps  des  sujets  de 
crainte,  alors  que  deux  de  mes  fils  naviguent  en  pleine  mer. 
toi  je  te  reliens  dans  le  port'.  » 

Au  commencement  du  lirnlus,  qu'il  composait  en  708-/16, 
peu  de  temps  avant  la  bataille  de  Thapsus,Gicéron  se  plaignait 
d'avoir  dû  |)rcndre  part  au  funeste  conllit  qui  divisait  César  et 
Pompée,  à  un  âge  on  il  espérait,  après  avoir  exercé  les  plus 
hautes  fonctions  de  la  République,  pouvoir  rentrer  au  port, 
non  pour  y  rester  dans  l'oisiveté  et  dans  l'inaction,  mais  pour 
\  jouir  avec  mesure  d'un  repos  honorables  Au  moment  où  la 
tyrannie  de  César  pesait  lourdement  sur  Rome,  en  janvier  44, 
il  écrivait  à  son  ami  M^.  Curius  qu'il  n'aurait  pu  supporter  les 
malheurs  publics,  s'il  n'avait  trouvé  un  refuge  dans  le  port  de 
lii  pliilosrtpiiio  '.  11  <iliiil  encore  l'exemple  de  l'orateur  Antoine 

1.  Scncqiic,  Conlroi'.,  ||,  l'nitfitt.,  3-.'i. 

2.  Cicéron,  lirnlus,  ii,  s. 

3.  Cicéron,  Episl.  ail  Fainil.,  \  II,  xxx,  3 


LES    DECLAMATEIRS    ESPAGNOLS  37 

qui  espérait  pouvoir,  dans  sa  vieillesse,  se  réfugier  loin  du 
Forum,  en  une  laborieuse  solitude,  comme  en  un  port',  et  les 
paroles  du  célèbre  homme  d'État,  Scipion,  le  premier  Africain, 
qui  avait  coutume  de  répéter  qu'il  ne  se  voyait  jamais  moins 
oisif  que  lorsqu'il  était  libre  des  affaires  publiques,  jamais 
moins  seul  que  lorsqu'il  pouvait  se  mettre  à  l'abri  de  la  foule 
et  du  monde  dans  le  port  tranquille  de  la  solitudes 

Ce  port  de  relâche  ou  de  refuge,  où  l'on  abrite  le  navire 
entre  deux  voyages,  où  on  le  désarme  détinitivement,  quand 
il  ne  peut  plus  tenir  la  mer,  ce  port  où  les  grands  hommes  de 
la  République  venaient  prendre  un  repos  honorable  consacré 
aux  lettres  —  olium  cum  dignitate^  —  dans  l'intervalle  qui 
sépare  l'exercice  de  deux  magistratures,  les  luttes  de  deux 
campagnes  politiques,  ou  goûter  le  calme  d'une  retraite  défini- 
tive consacrée  aux  plaisirs  délicats  de  l'esprit  après  un  cursus 
honorum  normalement  rempli,  Sénèque  veut  que  son  très  cher 
fils  Mêla  n'en  quitte  jamais  l'abri  protecteur  pour  aller  se 
hasarder  dans  la  tempête  des  affaires  publiques.  Il  entend  par 
ce  port  l'école  de  rhétorique.  Le  père  attentif  a  reconnu  que 
les  exercices  de  déclamation  font  l'unique  objet  de  l'activité 
intellectuelle  de  son  fils  bien-aimé^;  il  l'engage  à  se  donner 
tout  entier  à  la  pratique  désintéressée  de  l'art  oratoire  sans 
penser  à  en  tirer  un  profit  professionnel  ou  à  y  chercher  un 
moyen  de  préparation  au  barreau. 

On  peut  remarquer  une  certaine  contradiction  entre  cette 
préoccupation  de  retenir  Mêla  dans  l'enceinte  de  l'école  et  les 
critiques  que  Sénèque  adresse  à  la  vanité  de  cette  discipline 
scolaire.  Elle  prépare  mal  aux  luttes  du  Forum  :  or,  dit-il,  un 
exercice  n'est  profitable  que  s'il  se  rapproche  du  but  auquel  il 
prétend  préparer^.  Quand  il  arrive  à  la  fin  de  l'ouvrage  où  il 
a  soigneusement  recueilli  les  senlenliae,  les  divisiones,  les  colores 
des  rhéteurs  qu'il  a  entendus,  l'historien  de  la  déclamation 
éprouve  un  sentiment  de  lassitude  et  d'ennui;  au  début,  il  se 

I.  Cicéron,  De  Oral.,  I.  lx,  255. 
1.  Cicéron,  De  Offic,  III,  i,  2. 

3.  Cf.  Cicéron,  De  Orat.,  I,  i,  i...  in  otio  cum  dignilale. 

4.  Sénèque,  Controv.,  il,  Praefat.,  4. 

5.  Sénccjue,  Controv.,  IX,  PraefaL,  4. 


38  RL(.r.ETlN    HtSPAMQlÉ 

réjouissait  à  l'idée  de  faire  revivre  la  meilleure  partie  de  sa 
vie;  à  mesure  qu'il  avançait  dans  son  travail,  il  sentait  bien 
qu'il  ne  faisait  rien  de  sérieux;  en  dernière  analyse,  il  caracté- 
risait avec  une  juste  sévérité  ces  petites  études  d'écoliers  :  qu'on 
y  louclie  d'une  main  légère,  on  y  trouve  du  charme;  qu'on  les 
serre  de  près,  qu'on  les  soumette  à  un  examen  rigoureux,  on 
s'en  dégoûte  aussitôt'.  11  semble  donc  que,  dans  son  désir 
ardent  d'éloigner  Mêla  de  cette  politique  où  ses  deux  frères 
s'étaient  lancés,  Sénèque  laisse  les  termes  de  sa  phrase  dépas- 
ser sa  pensée,  quand  il  engage  le  jeune  homme  épris  de  décla- 
mation à  se  confiner  pour  toujours  dans  les  exercices  de 
l'école.  Ailleurs,  citant  quelques  textes  des  historiens  Tite- 
Live,  Aufidius  Bassus  et  Cremutius  Cordus,  après  avoir 
rappelé  des  traits  de  déclamateurs,  il  dit  sa  vraie  pensée  sur 
toute  celte  rhétorique  :  «  J'espère,  jeunes  gens,  en  vous 
donnant  lecture  de  ces  pages  si  vigoureuses,  si  pleines  de  vérité, 
vous  détourner  des  déclamations  d'école".  »  On  n'attendait  pas 
moins  de  l'austère  admiiateur  de  Caton  et  de  Cicéron,  (jui  a, 
sans  doute,  occupé  ses  loisirs  d'amateur  de  beau  langage  à 
suivre  avec  assiduité  les  séances  des  écoles  où  il  lui  semblait 
trouver  quelques  vestiges  de  l'éloquence  cicéronienne,  mais 
qui  a  consacré  ses  veilles  laborieuses  à  écrire  une  histoire 
contemporaine  qu'il  faisait  commencer  aux  guerres  civiles  et 
qu'il  a  conduite  presque  jusqu'au  jour  de  sa  mort,  exactement 
comme  Caton  l'Ancien  écrivait,  à  la  fin  de  sa  vie,  le  récit  des 
événements  de  l'histoire  romaine  auxquels  il  avait  pris  une 
grande  part. 

Sénèque  dormait  à  cette  histoire  politique  oii  il  racontait  les 
guerres  civiles  et  les  principats  d'Auguste  et  de  l'ibère  un 
complément  naturel  en  rédigeant  ses  livres  d'histoire  liltéraiie 
sur  les  (Jonlrovcrsiae  et  sur  les  Siiasoriac,  où  il  s'occupait  d'un 
genre  nouveau  d'éloquence  qu'il  connaissait,  disait  il,  parfai- 
tement, l'aNanl  vu  naîlre\  où  il  traçait  les  portraits  des  décla- 
miifcuis  qui!   axait  tous  cnlciidus  cl  dont  plusieurs  étaient  de 


I.  Sérioque,  C.onlrov.,  \,  l'nirfal.,  i. 

3.  Scnèquc,  Siiasor.,  vi,  i(i. 

3.  ÎJrnrqiic,  Conirnv.,  I,  t'rnrfnl.,   13. 


LES    DÉCLAMATElRS    ESPAOOLS  29 

ses  amis.  Ses  fils,  dont  deux  se  souciaient  fort  peu  de  la  décla- 
mation et  de  son  histoire,  n'avaient  fait  que  prévenir  les  désirs 
secrets  du  vieillard  en  lui  demandant  de  rassembler  en  un 
recueil  les  développements  des  déclamateurs  célèbres;  ils 
n'avaient  pas  eu  besoin  de  grandes  prières  pour  décider  leur 
père  à  entreprendre  une  œuvre  qui  lui  était  agréable  :  «  Je  dois 
avouer,  leur  disait-il,  que  j'éprouve  un  grand  plaisir  à  revenir 
à  mes  anciennes  études^  à  jeter  un  regard  en  arrière  vers  des 
années  meilleures'.  » 

L'Espagnol  de  Cordoue  avait  des  raisons  particulières  de 
trouver  un  grand  plaisir  à  s'occuper  des  écoles  de  déclamation 
où  ses  compatriotes  réussissaient  si  bien.  Il  lui  était  facile  de 
démontrer  par  des  exemples  que  les  déclamateurs  d'Espagne 
n'avaient  aucun  des  défauts  qu'il  reprochait  si  durement  aux 
déclamateurs  de  Grèce.  L'un  des  maîtres  les  plus  illustres  de 
l'école  était  son  condisciple  et  son  ami  Porcius  Latro.  A  la  fin 
de  la  République  et  au  commencement  de  l'Empire,  l'opinion 
romaine  était  peu  favorable  aux  Espagnols;  comme  on  les 
avait  redoutés  pendant  les  guerres  civiles,  on  se  plaisait  à  tour- 
ner en  ridicule  ces  hommes  qui  avaient  vaincu  les  légats  de 
César,  à  railler  la  barbarie  dune  nation  qu'on  prétendait 
incapable  de  goûter  et  de  cultiver  les  lettres.  Il  plaisait  à 
Sénèque  d'établir  par  des  documents  et  de  proclamer  que 
l'Espagne  avait  aussi  bien  que  Rome  ses  écoles  de  déclama- 
lion,  et  qu'à  Rome  même  l'une  des  écoles  de  déclamation  les 
plus  prospères  était  dirigée  par  un  Espagnol. 

H.  DE  LA  MLLE  DE  MIRMONT. 
(A  suivre.) 

I.  Sénèque,  Conlrov.,  1,  Praefat.,  1. 


Bull,  kispan. 


UNE  CHROiMQUE  LATINE  INEDITE 

DES  ROIS  DE  GASTILLE 
(1236) 

(MS.    G     I     DE    LA    R.    ACADEMIA.    DE    LA    HiSTORIA.) 


La  chronique  dont  le  texte  suit  se  trouve  dans  un  manuscrit 
in-folio  relié  en  parchemin,  avec  ce  titre  au  dos  :  Chronica  B. 
Isidori  Um.  el  allorarn,  et  280  folios  de  parchemin  (233"""  X 
301™"')  répartis  en  cahiers  de  huit.  Ce  manuscrit'  appartient 
à  l'Academia  de  la  Historia,  et  porte  la  cote  G  1. 

L'écriture,  très  lisible,  est  la  même  d'un  bout  à  l'autre  du 
manuscrit.  G'est  celle  quon  appelle  vulgairement  et  impro- 
prement gothique.  Un  des  textes  transcrits  étant  YEpiloma  de 
reyibiis  Apulie  et  Sicille  de  Felinus  Sandeus,  précédée  d'une 
lettre  de  Michael  Fernus  à  Pomponius  Laetus  en  date  des 
ides  d'avril  (i3  avril  1/195)^  comme  on  verra  à  la  planche  YH, 
notre  manuscrit  date  donc  au  plus  tôt  des  dernières  années 
de  XV'  siècle.  VEpiloma  en  question  parut  sans  indication  de 
lieu  ni  d'année,  mais  probablement  l'année  même  marquée 
par  l'éditeur,  Michèle  Ferno,  dans  la  lettre  citée  ci  dessus. 
Notre  manuscrit  ne  contient  vraisemblablement  qu'une  copie 
de  l'édition. 

I.  Voir  Bulletin  hisp.,  tome  Mil,  p.  iMi  et  suiv.,  où  je  rappelle  les  mentions  qui 
on  ont  été  faites  jusqu'à  présent  à  ma  connaissance,  cl  où  j'ai  mis  en  regard  la  liste 
des  textes  qu'il  renferme  et  celle  des  textes  compris  dans  le  manuscrit  A  189  de  la 
même  Académie.  On  trouvera,  adjoint  au  même  fascicule,  un  fac-similé,  réduit  de 
plus  d'un  tiers,  du  folio  5.3  recto. 

J'expliqtic  au  nième  endroit  dans  (]uellcs  circonstances  j'ai  découvert  la  chronique 
que  je  publie  ici.  Mais  je  tiens  à  renouveler  l'expression  de  ma  reconnaissance  à 
M.  Ignacio  Olavide,  dont  le  nom  eût  dû,  en  toute  justice,  figurer  avec  el  avant  le 
mien  en  bas  du  présent  article.  La  part  qu'il  a  |>rise  à  la  découverte,  les  recherches 
minutieuses  el  acharnées  auxquelles  il  s'est  livré  pour  tirer  au  clair  toutes  les 
questions  qui  se  [)osaicnt  devant  nous,  la  patience  et  le  soin  qu'il  a  montrés  dans 
la  revision  des  épreuve^  (revues  par  moi  s\ir  des  photocopies  cl  par  nous  deux  en 
présence  du  manuscrit),  lui  donnaient,  lui  imposaient  le  droil  de  metlro  sa  signa- 
ture. C'est  la  seule  peine  qu'il  ait  refusé  de  prendre,  el  il  m'a  interdit  le  plaisir  de  la 
prendre  pour  lui. 


UNE    CHRONIQl  E    LATtlN'E    INÉDITE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  3l 

Les  litres  ef  les  dates  sont  en  couleur,  mais  les  lettres  ini- 
tiales manquent  au  début  des  paragraphes. 
En  voici  le  contenu  : 

A.  Les  mêmes  textes,  et  dans  le  même  ordre  que  dans  le 
manuscrit  A  189,  à  savoir  :  1°  la  Chronique  léonaise  (toi.  1-5/), 
sur  laquelle  on  pourra  voir  le  Bull,  hisp.,  tome  XI  (1909), 
p.  269-282,  et  tome  XIII  (1911),  p.  i33-i56,  38i-/i39;  —  2''l*Ilis- 
toire  de  Wamba  par  Julien  de  Tolède  (fol.  58-68),  comme  dans 
VEspana  sagrada  :  «  In  nomine  diïi.  Incipit  liber  de  istoria 
gallie.  que  temporibus  diuc  mcmorie  principis  bàbe  a  diïo, 
iuliano  toletane  sedis  epo.  édita  est:  —  In  nomine  sancte  trini- 
tatis...  (Florez,  n"  i)  [Sjolet  uirlus  esse  presidio...  (n"  2). 
AfFuit  enim  in  diebus  nostris  clarissimus  bimba...»  Termine 
«  ...et  qui  iam  cecidit  in  horum  se  bis  semper  proscriptionibus 
recognoscat.  finit  de  paulo.  »,  c'est-à-dire  avec  le  n°3o  de  Florez, 
où  manquent  ces  trois  derniers  mots  ;  manque  le  Judiclani 
in  iyrannorum  perfîdia  qui  suit  dans  Florez,  et  que  l'on  trouve 
également  jusqu'aux  premiers  mots  inclus  du  n"  37  dans 
Luc  de  Tuy  tel  que  l'a  édité  Schott  {Hisp.  illuslrala,  tome  IV, 
p.  67,  1.  I,  à  p.  68,  I.  41);  —  3°  la  Chronique  latine  du  Cid 
(fol.  69-86')  :  «  Incipiunt  gesta  roderici  campi  docti  (également 
dans  A  189,  mais  pas  dans  Risco).  [Qjuoniam  rerum  tempo- 
ralium  gesta...  monaslerio  collalis  honorifice  sepeliuit  »  '  ; 
k"  les  Généalogies  des  rois  de  Navarre,  des  comtes  de  Pailliars, 
de  Toulouse  et  de  Gascogne  (fol.  87-88'),  dont  il  est  question 
dans  l'article  du  Bail.  hisp.  cité  plus  haut  (particulièrement 
tome  XIII,  p.  137,  1/47,  et  pour  le  texte  même  p.  /i33). 

B.  Chronique  des  rois  de  Castille  (fol.  89-122).  C'est  le  texte 
inédit  qu'on  trouvera  plus  loin. 

C.  VEpitoma  de  reg/io  Apulie  et  Sicilie  de  Felino  Sandei,  avec 
le  prologue  :  «Ad  lectorem.  Michael.  Parthenopes  uarias  qui 
nescis  ordine  clades...  »  Au  fol.  1 24,1a  lettre  de  c  Michael  Fernus 
mediolanus  pomponio  leto  lilterarum  principi.  s.  Quid  agas 
in  Quirinali  tuo  ..  (fol.  i25)  id.  apr.  M.CCCC.XCV.  »  Au  fol. 
120'^,  dédicace  «  Alexandro  VI  pontifici  maximo.   Dum   paulo 

1.  Sur  l'édition  que  M.  Boniila  vient  de  donner  de  celle  chronique  d'après  A.  189 
et  G.  I,  voir  Bull,  hisp.,  t.  XIII,  p.  438. 


33  BILLETIN    HISPAMQIE 

ante  desvderassel  a  me...  ",puis  le  texte:  <(  Ciuitas  neopolitana 
paulo  ultra...  (fol.  lôiM  Carolus  antea  fuerat  uocatus  ex 
hungaria  contra  tramam  primam  quam  inlerfecit  ».  Enfin 
(ib.)  K  Michael  Fernus  Mediolanensis  ad  Felinum  Sandeum... 
accusationis  depiecaturum.  Audio  siiccense  te  mihi...  i,  et, 
fol.  i5p.,  ((  .\d  1).  meum  D.  felinum  Michael  idem.  Queque 
Selon,  et  que  Gesar  sanxere  periti...  Fata  ego  que  uates  cerla 
futura  cano.  F'inis  ». 

D.  Paralipnmrnon  IJispanjc  de  Jnan  de  Margarit  (fol.  i53- 
280).  Commence  comme  dans  Bcalc,  Jienini  hispaidcarum,  t.  I, 
p.  1,  avec  la  dédicace  «  |Q]uum  descripsissem  libris  decem 
obliterata  hispanic...  »,  puis  (fol.  i54)  le  prologue  «  [Q|uuni 
inlcr  rerum  maximas  hispanie  ubertales...  »  (Beale,  p.  2); 
enfin  (fol.  lôô')  <(  Incipit  liber  primus.  Europe  diuisio.  Caput 
primum.  Hispania  Europe  prouincia  est  >»  (Beale  :  «  Europa 
prouincia  est  »;,  p.  3,  par  erreur  sans  doute).  Finit  comme 
dans  Beale  «  El  si  qui  plurcs  addunt  annos  errant  uehemcnter. 
Finis  »  (fol.  278).  Suit  lindex  des  dix  livres  (fol.  •.>78'-28o''). 
Voir  mon  travail  sur  Les  Uisloires  (jénéndcs  d Espwjne,  p.  ^|8. 


Ce  manuscrit  fait  partie  de  la  bibliothèque  du  grand  généa- 
logiste D.  Luis  de  Salazar  y  Castro,  nommé  par  Charles  II 
chroniqueur  de  Castille  en  i()85,  et  eroidsla  mayor  de  Indias 
en  1691.  Toute  sa  vie,  qui  fut  longue,  puisqu'il  atteignit  l'âge 
de  soixante-seize  ans,  Sala/ar  la  consacra  à  l'étude  et  à  la  pro 
duction  de  nombreuses  œuvres,  principalement  généalogiques  • , 
en  vue  desquelles  il  forma  peu  à  peu  et  à  force  de  persévé- 
rance une  riche  collection  de  manuscrits  et  de  documents,  en 
partie  grâce  à  la  généiosité  du  roi,  qui  fit  de  lui  le  hiblio 
thccaire  de  sa  Real  Cdiimni.  D'autres  lui  vinrent  des  ero/dstas 
ses  prédécesseurs.  H  en  acquit  enfin  dans  les  ventes,  el  tel  fut 
le  cas  pour  ceux  du  fameux  cronisla  Pcllicer  y  Tovar  (ero/dshi 

I.  Sur  Luis  de  Salazar  el  ses  nianuscrils  géiicalo;,M(|ues,  vi^ir  Morcl-Falio,  ilaiK 
Bull,  hisp.,  l.  VI,  p.  3Gï. 


r>E    CHRONIQUE    LATINF,    T?iÉDlTF.    DES    ROIS    DE    CASTILI.E  ."^S 

mayor  d'Aragon  depuis  i64o',  mort  en  1679),  ainsi  que  pour 
une  partie  de  ceux  de  Juan  Lucas  Cortés,  dont  Salazar  dit  : 
u  Fallecio  pobre  y  lleno  de  honor  â  3i  de  agosto  de  1701,  sin 
dejar  a  sus  herederos  mas  bien  que  una  excelente  librerîa.  » 
Le  noyau  de  cette  collection  considérable  et  variée  était  formé 
par  les  pièces  généalogiques,  de  la  richesse  desquelles  l'œuvre 
principale  de  leur  possesseur,  YHistoria  genealôgica  de  la  casa 
de  Lara  (1696  97).  peut  donner  une  idée. 

Craignant  la  dispersion  de  sa  bibliothèque,  Salazar  l'avait 
déposée  de  son  vivant  au  monastère  des  bénédictins  de  Mon 
serrate,  à  Madrid,  et  la  leur  légua  à  sa  mort(i73/l).  Il  voulut 
être  enterré  dans  leur  église  et  fonda  une  chapellenie  de  deux 
cents  ducats  par  an  pour  le  moine  chargé  des  fonctions  de 
bibliothécaire,  fonctions  pour  lesquelles  il  avait  désigné  son 
ami  intime,  le  P.  Diego  Mecolaeta.  Connaissant  mieux  que  per 
sonne  la  valeur  de  ses  manuscrits  et  sachant  par  expérience 
les  dangers  auxquels  le  prêt  les  exposait,  il  dicta  un  règlement 
sévère  à  cet  égard;  mais  les  bons  moines  ne  surent  pas 
toujours  résister  aux  prières  appuyées  de  puissantes  recom 
mandations  :  si  bien  qu'il  se  produisit  de  lamentables  dispa- 
ritions et  de  sacrilèges  mutilations. 

Lors  de  la  suppression  des  ordres  religieux,  dont  les  biens 
devinrent  propriété  de  l'État,  la  bibliothèque  de  Monserrate 
fut  remise  à  la  Bibliothèque  nationale,  puis  aux  Gortes.  Les 
bibliothécaires  Patifio  et  Gallardo  constatèrent  alors  de  nom 
breux  manques  ;  et  on  en  constata  d'autres  lorsque  le  Congreso 
(25  juin  i85o)  remit  la  même  bibliothèque  à  l'Académie  de  l'His- 
toire, qui  l'avait  réclamée  comme  héritière  de  Salazar  y  Castro 
dans  les  emplois  officiels  de  u  Cronista  Mayor  de  los  Reinos  de 
Espana  é  Indias  ». 


Nous  savons  donc  que  ce  précieux  manuscrit  fît  partie  de  la 
bibliothèque  de  D.  Luis  de  Salazar.  Mais  qui  le  rédigea  ou  le  fit 

I.  k  Ayer  lunes  8  de!  corriente  (=  8  octobre  iG^o),  Don  Josef  Pellicer  de  Tobar 
juré  su  oficio  de  Chronista  mayor  de  los  Reynos  de  la  Corona  de  Aragon,  las  dos 
Sicilias  y  Jerusalen.  »  (Avisos  histôricos  de  D.José  Pellicer  y  Tobar,  dans  Seinanario 
erudito,  t.  XXXI,  p.  a?5),  Voir  la  notice  d'Antonio  dans  la  Bibl.  hisp.  nova. 


34  BULLETIN    HISPANtQlE 

rédiger?  Quel  en  fut  le  premier  possesseur?  A  première  vue, 
il  paraît  bien  difficile  de  répondre,  puisqu'on  n'y  trouve 
aucupe  mention  de  nature  à  nous  renseigner. 

Cependant,  l'Académie  de  l'Histoire  possède  un  autre 
manuscrit  en  parchemin  coté  G  2,  identique  comme  dimen- 
sion et  comme  aspect,  si  bien  que  Ton  peut  les  considérer 
comme  deux  jumeaux.  S'ils  ne  sont  pas  de  la  main  du  même 
calligraphc  (on  en  jugera  par  les  fac-similés  ci-joints,  pl.Y-VIII), 
ils  présentent  tout  au  moins  des  écritures  extrêmement  voi- 
sines, la  même  distribution  des  couleurs  bleue  et  rouge  dans 
les  titres  et  dates,  la  même  répartition  en  cahiers  de  huit  folios 
avec  réclames  pour  chaque  cahier.  La  seule  différence  consiste 
dans  le  nombre  de  lignes.  Il  y  en  a  36  à  la  page  dans  le  G  r, et 

35  seulement  dans  le  G  2.  Tout,  jusqu'à  la  couverture,  accuse 
l'intention  de  faire  de  ces  deux  recueils  les  deux  tomes  d'une 
seule  collection,  et  le  contenu  confirme  cette  impression. 

En  effet,  le  G  2,  qui  compte  3o3  folios  et  porte  au  dos  : 
Chronicoram  B.  Isidori  et  Hislor'm  Roderici  Sancii,  contient 
deux  œuvres,  qui  sont  :  i"  Chronlcon  Mundi  a  Liica  Tudensi 
diacono  (fol.  1-127);  2"  Compendiosn  historia  hispanica  a  Rode- 
rico  SaiicUo  episcopo  PalenUno  (fol.  i28-3o3').  On  voit  que  le 
G  2  est  bien  le  complément  du  G  i. 

De  même  que,  dans  G  i ,  le  texte  de  VEpiloma  de  regno  Apulie 
el  Sirilie  a  été  copié  sur  l'édition  imprimée,  celui  de  Vllisloria 
hispa/iicd,  dans  G  2,  est  une  transcription  de  l'édition  parue 
ù  Rome  vers  1/470  par  les  soins  d'Udalricus  Gallus  (voir  Les 
Ilisloires  fjénérales  d'Espagne,  p.  10),  y  compris  le  colophon 
((  De  mandato  R.  P.  D.  Roderici  Episcopi  Palentini  auctoris 
buius  libri.  Ego  Vdalricus  Gallus  sine  calamo  aut  pennis  eûdem 
librum  impressi  »,  qu'on  trouve  dans  les  trois  exemplaires 
de  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris  et  dans  l'exemplaire  de 
Ricardo  Heredia  ■. 

Or,  au  chapilrc  XXWl  de  la  quatrième  partie  de  son 
ouvrage,  Rodrigo  Sanchez,  parlant  du  mariage  de  Henri  IV 
avec  Jeanne  de  Portugal,  et  commettant  une  erreur  volontaire 
ou  non.  écrit  ceci  (fol.  2(S2  du  ms.  G  2)  :  «  Deinde  Ilërricus  ex 

I.  <!ataliiijueUe  la  Hthlii)lliriiufi  (If  M.   fiicurdo  Heredia.  n»  SogS. 


INE    CHRONIQUE    T.ATllNE    INÉDITE    DES    ROIS    DE    C\STII.I,E  35 

eadem  Johaïïa  regina  inclitam  filiam  Eli(fol.  282  y.)sabeth  : 
quam  cuncli  regni  status  in  primogenitam  iurarùt  simul  et 
receperunt  »  (même  texte  dans  Beale,  t.  I,  p.  4^5,  1.  43).  Dans 
le  manuscrit,  en  marge,  d'une  écriture  toute  semblable  à  celle 
du  texte,  quoique  un  peu  plus  menue  (à  cause  du  peu 
d'espace  laissé  libre  sans  doute),  on  trouve  une  note  que  voici 
(voir  pi.  VIll'): 

Aditio.  ffallitur  uehementer  auctor  complacere  cupiens  pocius 
henrrico  quam  ueritati  Nam  hec  non  Elisabet.  Sed  Johana  henrrici 
huius  exposita  uel  inposita  filia  fuit,  uulgo  beltraneja  nuncupata  que 
fuit  jurata.  adulatorie  uel  adultérine  ut  régi  'et  regine  côpiacerent 
jurantes  Neque  misterio  vacat  Elisabet  pro  Johanna  hic  nuncupata 
adulterina  filia  deo  agente  sublata  nomine  :  sicut  fuit  priuata  succe- 
sione  :  uera  légitima  quia  Johannis  régis  filia  elisabet  nominata  sic 
deo  annuente  fuit  prolata  in  regnorum  sucesione  z  fe...  sime  uidimus 
régnasse.  Caruajal. 

Quel  que  soit  le  sens  exact  de  la  seconde  partie,  d'ailleurs  peu 
lisible,  de  cette  note,  ce  qui  nous  intéresse,  c'est  la  signature 
Garvajal,  accompagnée  d'un  paraphe.  11  est  assez  naturel  de 
penser  tout  de  suite  au  célèbre  Lorenzo  Galindez  de  Garvajal, 
dont  on  connaît  le  rôle  sous  les  rois  catholiques  et  la  place 
dans  l'historiographie  espagnole  (voir  au  tome  XX  de  la 
Coleccion  de  Documentos  inédilos  l'étude  que  lui  a  consacrée 
Floranes,  et  Les  Histoires  générales  d'Espagne,  p.  116).  Tel  fut 
l'avis  d'Abella,  qui,  dans  une  Noticia  y  plan  de  un  viaje  para 
reconocer  y  forniar  la  Coleccion  diplomâlica  de  Espaàa,  déclare, 
à  propos  du  G  2,  que 

Este  codice  fue  de  Garvajal,  corne  se  déjà  ver  por  su  Arma  original  puesta 
al  fin  de  una  adicion  marginal  de  la  misma  lelra,  aun  que  mas  menuda  que 
la  del  codice. 

La  signature  est-elle  de  la  même  main  que  la  note  ?  Ce  n'est 
pas  absolument  sijr,  car  on  y  trouve  une  forme  d'r  qui  est 
sans  exemple  dans  la  note  elle-même  et  dans   le  texte.    En  ce 


I.  Je  n'ai  malheureusement  pu  obtenir  une  photographie  bien  convenable  de 
celte  page  du  manuscrit  et  le  bas  de  la  note  avec  la  signature  n'a  pu  venir  dans  la 
simili  comme  il  eijt  fallu. 


30  BrM.F.Tt>'    HISPAMQIE 

cas,  on  peut  supposer  que  le  copiste  aura  transcrit  sous  la 
dictée  et  Garvajal  aurait  signé.  Il  est  possible  aussi  que 
le  copiste  ait  simplement  transcrit  une  note  marginale  ologra- 
phe qu'il  trouvait  sur  l'exemplaire  imprimé  à  copier,  et  qu'il 
ait  cherché  à  imiter  la  signature. 

Parmi  les  manuscrits  de  l'Escorial,  Ewald  {\eues  Arc/iiv, 
t.  VI,  p.  2/17)  en  décrit  un,  sous  la  cote  f.  I  18,  en  papier,  fol. 
xv^  siècle,  qui  contient  les  deux  mêmes  textes  que  nous  trou- 
vons dans  G  I,  à  savoir: 

r  Luc  do  Tuy,  avec  cette  note  marginale:  «  Hinc  incipit 
prologus  et  historia  diaconi  Lucae  Tudensis  extrada  sub  cura 
Pétri  Ponce  episcopi  Placcntini  ex  libro  vetusto  membranis 
conscripto  reperto  in  bibliotheca  doctoris  Laurentii  Galindez 
de  Garvajal  a  consilio  iusticiae  et  a  secretis  régis  et  imperatoris 
Gharoli  quinti  ». 

2"  L'IIisloria  hispanica  de  Rodrigo  Sanchez,  avec  le  colophon 
de  l'édition  d'Ldalricus  Galliis  tel  que  nous  l'avons  lianscrit 
plus  haut. 

Gest  évidemment  xvi*",  et  non  xv*"  siècle,  qu'EAvald  a  voulu 
dire,  car  Pedro  Ponce  de  Léon,  évêqne  de  Plasencia  de  lôôi)  à 
1073,  année  de  sa  mort,  est  sans  nul  doute  le  personnage 
nommé  dans  la  note  marginale.  Plusieurs  Garvajal  l'ont 
précédé  sur  ce  siège,  entre  autres  Bernardino  Garvajal,  mort 
en  1023,  et  Gutierrc  Vargas  de  Garvajal,  son  prédécesseur 
immédiat,  mort  en  iBSg.  C'est  peut-être  ce  dernier  qui  avait 
hérité  de  la  bibliolhèfiuc  de  Lorenzo,  né  à  Plasencia  et  mort 
dans  la  même  ville  avant  i53o  (Floranes,  p.  4f>3). 

Dans  le  «  libro  vetusto  membranis  conscripto  »  d'où  Pedro 
Ponce  fit  tirer  la  copie  de  l'Escorial,  devons-nous  recotniaître 
le  G  2;'.  11  est  fort  possible  que  ce  dernier  manuscrit,  (jui, 
comme  le  G  i,  paraît  à  première  vue  beaucoup  plus  ancien 
qu'il  n'est,  tant  à  cause  de  l'éeritnrc  (jue  du  parchemin,  ail  fait 
le  même  elfct  à  l'évêque  de  Plasencia,  on  à  l'auteur  de  la  note. 
Il  y  a  dans  le  contenu  des  deux  manuscrits  une  co'incidence 
qui  rend  dilficile  l'hypothèse  d'un  Luc  séparé  ayant  appartenu 
à  Galîndez  et  retrouvé  par  Ponce.  On  est  bien  tenté  de  croire 
que  le   marjuserit   de   Galînde/    contenant  le  Luc  comprenait 


UNE    CHROMOLF.    LATINE    INEDITE    DES    ROIS    DE    C  VSTII.I.E  07 

aussi  la  copie  du  Sânchez  ou  était  joint  à  l'édition  qui  le 
contenait.  Et  de  deux  choses  l'une  :  ou  la  signature  dont  il 
a  été  question  est  authentique,  et  c'est  le  G  2  qui  a  servi  de 
modèle  au  manuscrit  de  l'Escorial  ;  ou  elle  n'est  qu'imitée,  et 
le  G  2,  comme  le  manuscrit  de  l'Escorial,  serait  une  copie  d'un 
recueil  formé  par  Galindez^  aujourd'hui  perdu.  De  toute  façon, 
la  collection  constituée  par  le  G  i  et  le  G  2  remonte  à  ce  célèbre 
érudit.  Et  rien  n'empêche  d'admettre  au  surplus  que  ces  deux 
manuscrits  ont  été  exécutés  sur  son  ordre. 

Ce  ne  seraient  pas  les  seuls.  Deux  autres,  de  même  format  et 
de  même  aspect,  contenant  l'un  la  première  et  la  deuxième 
Décades  d'Alphonse  de  Palencia,  l'autre  la  troisième,  ont  fait 
partie  de  la  bibliothèque  de  Salazar  tant  qu'elle  fut  à  Monse- 
rrate,  mais  avaient  déjà  disparu  quand  elle  passa  au  Congreso, 
et  par  conséquent  ne  figurent  pas  dans  le  fonds  de  l'Académie 
de  l'Histoire.  D.  Juan  Iriarte  les  décrivait  ainsi  en  i~og: 

Estân  ambos  escritos  en  pergamino,  con  titulos  é  iniciales  coloradas  y 
azules.  Estân  como  acabados  de  escribir.  Parecen  de  la  misma  mano  que  los 
dos  que  acabamos  de  describir  (c'est-à-dire  G  i  et  G  2),  como  se  conoce  de  la 
letra  y  calidad  del  pergamino:  del  tamaùo,  etc  ,  aunque  estos  dos  liltimos 
tienen  la  letra  y  renglones  un  poco  mas  metidos... 

La  supposition  est  des  plus  vraisemblables.  Quoi  qu'en  dise 
Floranes  (p.  899),  parmi  les  rédactions  castillanes  plus  ou 
moins  fidèles  des  Décades  d'Alphonse  de  Palencia,  il  y  en  a 
une,  la  moins  connue,  qui  a  pour  auteur  notre  Galîndez  (voir 
Bull,  hisp.,  t.  XI,  1909,  p.  44 1)-  Il  est  assez  naturel  que  celui-ci 
ait  voulu  recueillir  dans  sa  collection  l'œuvre  latine. 

Cette  collection,  ce  n'était  pas  par  bibliomanie  que  Galindez 
l'avait  constituée.  Nous  savons  par  Morales  [Discurso  de  los 
privilégias,  t.  VII,  p.xvni  de  Téd.  de  la  Coronica  par  Cano)  que 
l'érudit  professeur  de  Salamanque  avait  projeté  d'écrire  une 
Histoire  de  Castille.  Il  avait  également  recueilli  un  grand 
nombre  de  privilèges  pour  la  documenter  ibid.).  Et,  d'autre 
part,  il  avait  formé  un  recueil  des  lois  du  royaume  dont  les 
Cortes  de  Valladolid  en  i5'i4  demandèrent  en  vain  l'impres- 
sion, et  dont  il  reste  trois  tomes  à  l'Escorial,  selon  Floranes 
(p.  346  8).  Un  tel  ensemble  accuse  un  effort  vraiment  considé- 


38 


BULLETIN    HISPAMOUE 


Table,  malheureusement  inutile,  puisque  l'auteur  ne  publia 
rien  do  sa  double  collection  (dont  probablement  ne  faisaient 
pas  partie  la  Chronique  de  Jean  II  et  les  Generaciones,  qu'il 
édita  en  iSiy).  Pour  ne  parler  que  des  textes  historiques,  la 
Chronique  latine  du  Cid  fut  publiée  seulement  262  ans  après 
la  mort  de  Galindez,  et  d'après  un  autre  manuscrit;  la  Chroni- 
que latine  des  rois  de  Castille  ne  voit  le  jour  qu'à  présent;  la 
Chronique  léonaise  ne  l'a  vu  que  depuis  peu;  les  Décades 
d'Alphonse  de  Palencia  viennent  seulement  de  paraître,  mais 
dans  une  traduction,  œuvre  méritoire  de  M.  Paz  y  Mélia.  Luc 
n'attendit  que  jusque  1608;  et  Jean  de  Girone,  i5/i5;  mais 
il  est  douteux  que  les  copies  de  notre  érudit  aient  été 
utilisées. 


* 
*    * 


Nous  avons  vu  que  Juan  Iriarte,  bibliothécaire  du  roi,  avait 
connu  et  décrit  les  deux  manuscrits  G  1  et  G  2  alors  qu'ils 
étaient  à  Monserrate.  Il  avait  en  effet  passé  une  année,  de  1738 
à  1739,  à  étudier  la  collection  laissée  par  Salazar.  Et  pourtant, 
chose  à  peine  croyable,  il  ne  sut  pas  distinguer  les  textes  que 
renferme  le  G  i,  puisque  dans  la  note  qu'il  lui  consacre  il  fait 
un  seul  ouvrage  de  l'Histoire  de  Wamba  par  Julien,  de  la 
Gesta  Roderki,  des  Généalogies  des  rois  de  Navarre,  etc.,  et 
enfin  de  notre  chronique.  11  les  délimite  en  effet  en  bloc  : 
«  Incipit  liber  de  hisloria  Gallie...  a  domino  Iuliano...  Desinit: 
quam  cito  potuit  equitare  Toletum...  burgis  advenit»,  der- 
niers mots  de  ce  dernier  texte. 

C'est  seulement  un  demi-siècle  après  qu'un  érudit  plus 
ciirienx  se  rendit  compte  de  l'existence,  dans  ce  même 
manuscrit,  d'une  chronique  inédite  des  rois  de  Castille. 
Il  s'agit  de  1' \ragonais  Manuel  Abella,  né  à  Pedrola  en  1763 
(voir  Latassa  y  Gomcz  Uriel,  liiUiolccas  nitt'ujna  y  niicva  de 
escritores  aiutç/oneses),  un  homme  trop  oublié,  qui  a  peu 
iriipi  iini',  mais  dont  le  labeur  énorme,  représenté  par  de  nom- 
breux volumes  manuscrits,  constitue  une  des  richesses  de 
l'Académie  de  l'Histoire.    L'article  que    lui    consacre    Gomez 


UNE    CHnOMQlE    LATINE    INÉDITE    DES    IlOIS    DE    CASTILLE  .S9 

Uriel  en  donnera  une  idée.  Ayant  reçu  du  roi  en  lygSla  mission 
de  réunir  les  textes  contemporains  de  l'histoire  d'Espagne 
et  de  former  une  collection  diplomatique  aussi  complète  que 
possible,  avec  l'autorisation  de  travailler  dans  toutes  les 
archives  et  bibliothèques  du  royaume,  il  fouilla  d'abord, 
entre  autres,  celle  de  Monserrate  à  laquelle  il  emprunta,  cette 
même  année,  sur  reçu,  les  deux  manuscrits  G  i  et  G  2. 
L'importance  de  la  Chronique  latine  des  rois  de  Caslille  ne  lui 
avait  pas  échappé.  Voici  en  effet  la  longue  notice  que  nous 
trouvons  dans  sa  collection  manuscrite  d'Escritores  coetcîneos 
de  la  Hisloria  de  Espana,  parmi  les  textes  du  xin*  siècle. 
Malgré  les  erreurs  quelle  contient,  il  y  a  intérêt  à  la  citer, 
quand  ce  ne  serait  que  pour  laisser  à  cet  érudit  l'honneur 
de  sa  découverte. 

La  crônica  de  Castilla  que  lie  copiado  se  halla  como  he  dicho  arriba  â  la 
hoja  89  despues  de  la  Genealogia  de  los  Reyes  de  Navarra.  No  liene  litulo 
alguno  y  empieza  sin  la  letra  inicial  :  [D]  efundo  comité  fernando,  etc.  Faltan 
las  letras  iniciales  en  todas  las  palabras  en  que  empiezan  los  apartés,  que  es 
la  linica  division  que  tiene  la  obra.  No  consta  quien  sea  su  autor,  y  solo  se 
conoce  fue  coetâneo  a  los  heclios  que  refiere,  por  varias  expresiones  y  chiu- 
sulas  que  aqui  copiaré.  Hablando  de  la  eleccion  del  Patriarca  de  Gonstanli- 
nopla,  dice  asi  :  Eligitur  in  Palriarcham  quidam  Venetiis,  quem  ego  vidi  consc' 
crari  Romae  in  ecdesia  Sancti  Pétri  per  manum  domini  Inocenlii  llll.  Este 
Patriarca  fue  PantaleonJustiniano,  a  quien  eligiô  Inocencio  TIII  elano  laSS  '. 
De  aqui  se  infierequeel  autor  de  la  crônica  estuvoen  Roma,pues  dice  vio  la 
consagraciôn  de  este  Patriarca.  Prosigue  diciendo  :  Ex  illo  tempore  Lalini 
obtinuerunt  Constantinopolitam  et  ecdesia  constaniipolilana  obedil  Ecdesiae 
Romanae,  cuius  Patriarcham,  non  praedidum  sed  successorem  eias  uidi  ego  in 
Concilio  Lateranensi  convocato  sub  Innocentio  lll.  Qiiod  Conciliiim  celebratum 
est  anno  revoluto  post  mortem  gloriosi  régis,  in  que  interfuerunt  CCCC'XX 
Episcopi  et  LXMl  Archiepiscopi  et  Patriarcha  Constantinopolitanus  et  leroso- 
limitanas  et  Aqiiilensis  et  Grandensis.  Abbatum  vero  et  Prioruni  et  aliis  dignita- 
tibus  fulgentium  non  erat  numerus.  Hoc  autemfuit  in  festo  omnium  sanclorum. 
et  idus  mensis  lulii  sequentis  Dominus  Innocentius  tertius,  vir  bonus,  cuius  J'acta 
prosperauit  Deus,  ingressus  est  viam  universae  carnis.  Este  Concilio  fue 
el  Lateranense  IV,celebrado  bajo  Inocencio  III  en  el  ano  i2i5,al  cual  parece 

i.  Abellase  trompe,  et  de  son  erreur  il  a  tiré  des  conséquences  erronées.  Il  aurait 
dû  voir  que  le  copiste  a  mis  un  trait  de  trop  au  numéro  d'ordre  du  pape,  et  qu'il  laut 
lire  Inocenlii  lll  et  non  ////.  Après  avoir  parlé  de  la  prise  de  Constantinople  par  les 
croisés  (laoi),  le  ctironiqueur  dit  :  «  Eligitur  in  iniperatorem  baldouinus  cornes... 
flandrensis...  Eligitur  in  patriarcham  quidam  venetus»  etc.  (phrase  citée  par  Abella). 
En  effet,  Bcaudoin  I",  comte  de  Flandre,  fut  couronné  empereur  de  Constantinople 
à  Sainte-Sophie  le  iG  mai  \20'a,  et  Innocent  consacra  patriarche,  à  Saint-Pierre,  le 
samedi  5  mars  i2o5,  le  vénitien  Thomas  Morosini,  élu  par  le  chapitre  constantino 
politain. 


^|0  m  I.t.FTIX    mSPAMQlE 

sasislioel  aulor  de  la  ciônica.couio  da  ;i  enlendeicuando  dice  liaber  vlslo  en 
él  al  Patriarca  de  Gonstantinopla.  anlecesor  '  del  veneciano  Pantaleon 
Jusliniano. 

llablando  del  Rey  D.  Alfonso  Vlll  de  Caslilla,  dice  asi  :  Anlequam  rex 
iret  in  Vasconiain,  filiam  suam  piiellam,  Blancam  nomine.  quae  nunc  est 
coronata  regina  Francorum,  tradidit  nuptii  Liulovico.  filio  Filippi  régis  Fran- 
corum.  qui  nunc  régnât  in  Francin  pro  pâtre  suo.  Luis  Vlli,  hijo  de  Felipe 
Auguslo.  casô  con  D"  Blanca,  y  einpezô  à  reinar  en  el  ano  1320  hastael  laaG. 
en  que  se  muriô.  De  aqui  es  que  el  autor  de  la  crônica  padece  equivocacion 
en  decir  que  reinaba  Luis  cuando  escribia  su  historia,  porque  refiriendo  en 
ella  sucesos  muy  posteriores  al  ano  laaG  en  que.  segun  queda  diclio,  niuriu 
aquel  Rey,  no  podia  decir  con  verdad  que  reinaba  entonces  ^. 

Tralando  del  Legado  del  Papa  Gregorio  1\,  Juan  Abbisvilla,  que  entrô  en 
Espana  el  ano  1228,  dice  haberle  comunicado  el  mismo  Legado  las  causas 
que  liabian  movido  al  Papa  para  su  misiôn. 

De  les  sucesos  que  refiere  el  autor  de  la  crônica,  se  puede  entendcr  que 
era  persona  constituida  en  dignidad.  y  aun  sospechar  que  fuese  obispo. 
Porque  en  aquellos  tiempos  no  se  hacian  viajes  fuera  de  Espana  ni  se  iba 
â  Roma  sino  por  algunos  negocios  de  estado.  Nuestro  autor  dice  haber  visto 
en  aquelle  corte  la  consagraciôn  del  Patriarca  de  Gonstantinopla  y  â  su 
antecesor3  en  el  Concilio  Lateranense,  y  tambien  refiere  la  conversacion 
tenida  con  el  Legado  del  Papa  Gregorio  IX.  Todas  estas  circunstancias 
prestan  bastante  fundamento  para  afianzar  mi  sospeclia  de  que  el  autor  delà 
crônica  fue  persona  de  elevado  carâcter. 

La  crônica  da  principio  desde  la  muerte  de  Fernân  Gonzalez,  primer 
conde  de  Castilla,  y  concluye  en  el  ano  1286  y  mes  de  noviembre  de  este  ano, 
en  el  cual  el  santo  rey  D.  Fernando,  despues  de  la  toma  de  Côrdoba,  oida 
la  muerte  del  noble  y  valeroso  Lope  Diaz,  ocurrida  en  el  dia  18  de  octubre, 
saliô  con  su  madré  de  Toledo  y  fue  â  Burgos. 

Kl  autor  refiere  los  sucesos  de  Castilla  y  concurrentes  de  Aragon,  Navarra. 
con  bastante  novedad  y  buen  crilerioen  la  mayor  parte.  Pero  en  los  reinados 
de  \>.  Alonso  \  III  y  de  su  hija  D'  Berenguela  y  I).  Fernando  III  el  Santo  se 
detiene  a  historiar  los  sucesos  con  mayor  individualidad,  y  los  heclios  de  este 
liltimo  rey  los  cuenta  muy  por  menor,  como  que  ténia  noticia  dt  ellos  por 
suceder  en  el  mismo  tiempo  en  que  escribia. 

Su  estilo  es  copioso  y  abundante,  y  usa  frecuentcmente  de  apôstrofes, 
exclamaciones  y  sentencias  de  la  Escritura.  Nueva  prueba  para  créer  que  el 
autor  era  persona  eclesiâstica.  —  M.  Abella. 

Peu  après  sa  drcouverle,  Abella  avait  eu  Toccasion  d'en  tirer 
parti  (Jans  le  Uiccionario  geogrâfico-hislôrico  de  Espana  por  la 

1.  Erreur  qui  est  la  conséquence  de  la  précédente.  Abella  a  cru  qu'il  fallait 
corriger  sucressorem  en  anlecessorem.  F.n  fait,  il  s'agit  du  successeur  de  Morosini, 
•  ierNaiso,  élu  en  novembre  ui.'),  mort  le  8  novembre  1Î19. 

2.  Aiilri-  conséquence  erronée.  Il  n'\  a  rien  d'Impossible  à  ce  que  l'auteur  ait  écrit 
celle  partie  de  sa  chronique  avant  la  mort  de  Louis  Vlll  (la-jG).  La  date  la  plus 
récente  marquée  par  lui  est  celle  de  la  prise  de  Cordoue,  avec  laquelle  il  termine  (ia3C). 
Mai-*  Abella  croyait  <jue  l'auteur  avait  été  à  Home  en  ij!i3  et  écrivait  après  celte 
date  11  aurait  dû  au  moins  se  demander  pourquoi  la  clironique  s'arrêtait  avec  la  prise 
de  Cordoue,  au  lieu  de  continuer  jusqu'à  b  jjrise  de  Sévllle  (la'i»). 

j.   Kecorriger  en  iucesor 


LiNE    CHRONIQUE    LATINE    INÉDITE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  A  I 

Real  Academin  paru  en  1802,  à  l'article  Guîpuzcoa,  signé 
A(bella),  p.  34 1-  Les  renseigneme.ils  qu'il  y  donne  ne  font  que 
confirmer  ce  que  nous  savons  déjà  ;  mais  il  cite  un  passage 
relatif  à  la  conquête  de  \  itoria,  de  l'Alava  et  du  Guipuzcoa 
par  Alphonse  VIII,  et  que  l'on  trouvera  au  §  16  de  notre  édition  '. 
Après  plusieurs  années  d'explorations  à  travers  les  biblio- 
thèques et  les  archives,  le  22  juin  i8o/i,  Abella,  académicien 
de  iinmero  depuis  1797,  remettait  à  l'Académie  de  l'Histoire 
plusieurs  tomes  de  documents  relatifs  au  règne  d'Alphonse  VIll  ; 
et  la  commission  de  diplomatique,  reconnaissant  que  celte 
collection  était  «  laudable  por  su  objeto,  método  y  observa- 
ciones  »,  déclara  qu'il  y  aurait  intérêt  à  imprimer  quelques- 
unes  des  œuvres  inédites  qui  y  étaient  comprises,  et  entre 
autres  «  la  apreciable  historia  latina  del  cilado  rey  y  su  hijo 
D.  Enrique,  que  fue  escrita  por  uno  que  assistio  al  concilio 
lateranense,  como  apéndice  de  las  memorias  del  marqués  de 
Mondéjar,  impresas  por  nuestro  académico  D.  Francisco 
Gerdâ.  »  La  réunion  de  cette  commission  avait  eu  lieu  le 
10  août  i8o4;  et  le  28  septembre  Abella  remporta  le  tout,  ainsi 
qu'il  résulte  d'un  reçu  de  lui,  v  para  continuar  la  coleccion 
de  documenlos  y  no  repelir  las  copias  de  los  que  ya  estân 
en  estos  tomos,  y  arreglar  cronologicamente  los  que  vaya 
aumentando  d.  Quand,  après  la  guerre  de  l'Indépendance, 
en  novembre  i8i5,  il  remit  à  l'Académie  sa  collection  telle 
qu'elle   est  à    présent,   la    copie  de  la  chronique  n'y   existait 

I.  «  Coetâneo  [d|el  arzobispo  D.  Rodrigo,  y  iiiuclio  mas  puntual  y  exàcto  que  este 
en  referir  los  sucesos  de  D.  Alonso  VJII,  es  el  autor  anùnimo  de  una  preciosa 
crônica  de  los  reyes  de  Caslilla,  inédita  y  desconocida  liasta  ahora,  que  tengo  en  mi 
coleccion  copiada  de  un  excelente  ci'idice  escrito  en  vitela,  que  se  guarda  en  el 
archivo  de!  nionasterio  de  Monscrrate  de  Madrid  entre  las  papeles  (jue  fuéron  de 
D.  Lixis  de  Salazar.  Habla  de  las  gloriosas  acciones  y  con<niistas  de  D.  Alonso  Vlll 
con  la  mayor  indi\idualidad,  y  cucnla  entre  ellas  la  loma  de  Viloria,  Ala\a  y  Gui- 
puzcoa, cviyas  palabras,  por  ser  \\nx\  decisivas  para  nvieslro  asunto,  copiarénios  como 
se  hallan  en  el  original.  Gloriosus  vero  rex  Castellac  non  oblilus  maloruiii,  quae  rex 
Xavarrae  intulerat  sihi,  et  regno' suo.  lempore  angusiiae  suae,  intravit  in  regno  suo.  el 
cepit  ipsum  vastare.  Rex  Navarrae  videns,  quod  non  paierai  ei  resistere,  derelklo  regno 
confugit  ad  regeni  Marroquilanam,  et  ivll  ad  c'wilalem  Marrocos  iinplorans  ipsius  auxiliuni 
et  supplicans,  ut  ei  subvenire  dignaretur.  Intérim  vero  rex  Caslellue  obsedit  Virtoriani,  el 
duni  diiraret  obsedio,  castra  omnia  circuniadiacentia  acquisivit,  scilicet  Trivinio.  Argancon, 
Sancta  Cruz,  Alclio:ro:a,  Victorian  vetereni,  Eslucia,  terram  quae  dicitur  Ipuzcaia, 
Sanctnin  Sebastianum  insuper,  Maranon,  Sanclum  Vincentium,  ei  quœdam  alia.  Tandem 
redita  est  ei  Victoria,  el  sir  habuit  lolam  Alavam,  el  terras  circaniadiacenles,  et  sic  cum 
Virtoria  reversas  est  in  Castellam.  » 


^3  BULLETIN    HISPANIQUE 

probablement  plus;  en  tout  cas,  seule  la  couverture  où  elle 
^  se  trouvait  figure  au  tome  VIII  de  la  collection. 

Abella  mourut  le  29  avril  1817;  c'est  donc  de  son  vivant 
que  remise  fut  faite  de  ses  papiers  à  l'Académie.  Sa  copie  de 
la  Chronique  latine  des  rois  de  Castille  fut-elle  enlevée  du 
recueil  pour  être  remise  à  l'imprimeur,  en  vue  de  la  publica- 
tion, malheureusement  jamais  effectuée,  au  tome  II  des  Memo- 
rias  histôricas  de  la  Mda  y  acciones  del  Rey  D.  Alonso  el  Noble? 
Va  le  Fuero  de  Cuenca,  qui  manque  également  à  la  collection, 
a-l-il  eu  le  même  sorl?  Ou  bien  Abella,  voyant  sans  beaucoup 
de  plaisir  que  la  décision  de  l'Académie  condamnait  cette 
chronique  trouvée  par  lui  à  paraître  obscurément  paimi  les 
appendices  d'une  publication  faite  par  un  autre  que  lui, 
pensa-t-il  la  publier  lui-même  à  part,  après  avoir  élucidé  la 
question  de  paternité,  et  avec  les  notes  nécessaires?  et  eut-il, 
à  cause  de  cela,  la  précaution  de  la  séparer  de  sa  collection?  Il 
est  difficile  de  répondre  d'une  façon  péremptoire.  En  tout  cas, 
la  lenlalion  est  grande  de  reconnaître  la  copie  d'Abella  dans 
la  «  Gronica  latina  de  Alonso  YIll,  del  monasterio  de  Mont- 
serrat;  ilustrada  con  notas.  118  pâgs.  de  letra  mui  clara 
aunque  pequena  »  comprise  dans  la  d  Miseehinea  hi.sfôi'ica  de 
papeles  manuscritos  perlenecientcs  a  la  historia  de  l^spafia, 
rccogidos  en  su  mayor  parle  por  D.  Eugenio  Llaguno  y  Ami- 
rola  »  décrite  par  Salvà  (n"  3o6o)  comme  formée  de  plusieurs 
volumes,  cahiers  et  feuilles  séparées,  et  renfermée  en  cinq 
grands  cartons.  Celte  Mîscelanea  passa  dans  la  bibliothèque  de 
Ricardo  Ileredia,  cl  figure  au  n"  3io5  de  son  Catalogue,  paru 
en  189.').  Où  est-elle  à  présent? 

Une  copie  de  la  copie  d'Abella  se  trouve  au  British  Muséum 
(cf.  Cayangos,  (jdalogae  0/  Ihe  Spanisli  Mannscripls...  in  Ihe 
Brili.sh  Muséum,  t.  1,  p.  203).  Elle  a  la  cote  Egerton,  H23.  Sur 
le  dos,  on  lit  :  anonimo  |  cronicon  de  alonso  vni.  mus.  uiut.  bibl. 
E(;i;itiON.  ir.).')  i'i,ui.  dxi\.  f.  Elle  contient9f  folios  utilisés.  Sur 
le  premier  folio  de  garde,  on  lit  :  «  Purchascd  of  St.  Bohn 
i/i  june  i8'i").  » 

Au  folio  I,  dune  autre  main  (pie  le  texte  :  «  Cro/iico/i  del  rey 
d".  Mfonso  \  l/l  de  fjisliUa  escriln  en  el  shjlo  \in  ropiado  del  q' 


UNE    CHRONIQUE    LATINE    INEDITE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  l\Ô 

copia  d"  Manuel  Abclla  en  el  mnnns/erio  de  Mnnserrafe  de  Madrid. 
Suit  le  texte  :  «  Defuncto  comité...  »  A  la  fin  :  «  ...  Laus  tibi 
Ghriste.  —  Comprovada  Madrid  2^  de  Setiembre  de  1795. 
M.  Abello  »  (sic).  Le  copiste  a  tout  copié,  jusqu'au  nom 
d'Abella,  qu'il  a  transcrit  de  travers. 

Le  système  employé  pour  la  transcription  dans  cette  copie, 
et  par  conséquent  aussi  dans  celle  d'Abella,  est  jusqu'à  un 
certain  point  analogue  à  celui  qui  sera  ici  même  employé, 
c'est-à-dire  que  l'original  (le  nlanuscrit  de  l'Academia,  indubi- 
tablement) est  reproduit  avec  ses  fautes;  les  corrections  (de  la 
même  main  que  le  texte  dans  cette  copie  du  British  Muséum) 
sont  mises  en  marge.  Ainsi,  Iciiuin  (fol.  89)',  air  (fol.  91')  dans 
le  texte;  tenait,  /dsi  en  marge.  Pourtant,  on  lit  caediani  pour 
cedum  (fol.  91),  frigide  pour  frigida  (fol.  f)^),  olAitas  pour 
ohlictas  (fol.  96),  scriplo  pour  scripla,  qui  pouvait  subsister 
(fol.  118'),  receperat  pour  reuerat  (fol.  90).  Ces  corrections  ont 
peut-être  été  faites  inconsciemment,  ou  bien  le  copiste  (le  pre- 
mier ou  le  second,  ou  l'un  comme  l'autre)  aura  faibli  dans  son 
système. 

Les  abréviations  sont  presque  toujours  résolues  dans  le  texte 
même,  sauf  une  fois  :  ..S.  (en  marge  :  Sancias).  Les  a  sont 
remplacés  par  des  v;  les  ae,  restitués  à  la  place  des  e  ordinaires 
dans  les  manuscrits  du  moyen  âge.  L'orthographe  du  manus- 
crit n'est  pas  toujours  respectée  :  tolias,  pour  tocias  (fol.  91'). 
Les  initiales  qui  manquent  dans  l'original  sont  suppléées  sans 
signe  particulier.  Les  mots  considérés  comme  fautifs  par  le 
correcteur  sont  soulignés.  Ils  l'étaient  déjà  sans  doute  dans 
la  copie  d'Abella.  Les  noms  propres  sont  mis  avec  majuscule. 

Il  y  a  au  surplus  dassez  nombreuses  erreurs  :  Garsae  pour 
Garsie  (fol.  91');  misseruat  pour  niiseru/tt  (fol.  100');  renteafeni 
pour  re/dtenfem  fïol.  98).  Voici  des  bévues  assez  plaisantes. 
Au  folio  90"  de  l'original,  il  manque  un  mot  entre  faeraf  et 
indicabat  :  la  copie  du  British  Muséum  porte  faerat  deesl  indi- 
cabat.  Au  folio  98,  il  y  a  un  blanc;  sur  la  copie  on  lit  :  slupo- 

I.  Les  folios  indiques  sont  ceux  du  ms.  G  i. 


44  BILLETIN    HISPANIQUE 

rem  Incus  mendosiis  et  mulilus  hostilnis.  On  devine  sans  peine 
que  les  notes  d'Âbella  onl  été  incorporées  au  texte,  ce  qui  ne 
prouve  pas  l'intelligence  de  notre  copiste. 

Les  abréviations  ne  sont  pas  toujours  bien  résolues:  prevenU 
pour  nuciiil  avec  /)  barré  (fol.  92).  La  phrase  0  quod  dominus 
suus  rex.  s.  j,doriosus  baeciam  que  iam  rehedificata  erat  » 
(fol.  101),  déjà  tronquée  dans  le  manuscrit  de  l'Academia, 
porte  deux  fautes  dans  celui  du  British  Muséum:  Healiam  et 
recdifîcaU'.  «  Aduersus  eos  iam  preualebant  »  (fol.  100)  est 
devenu  «  advcrsus  ewm»,  etc.,  ce  que  Abella  corrige  en  marge: 
«  forte  eos  ».  ^  enecias  (écrit  nenecias)  (fol.  io3)  devient  Venc- 
linni.  ((  Regni  curam  ijrvcret  »  (fol.  io4)  est  transcrit  «  regni 
curam  regercl  »,  qu'Âbella  corrige  en  marge,  comme  il  con- 
vient, en  (jererel.  Le  mot  consilio  est  omis  dans  la  phrase  i<  Rex 
igitur  legionensis  acquieuit  comitis  consilio  »  (fol.  io5);  le  mot 
cor  dans  cette  autre:  «  Rex  cuius  cor  sps  dni  accenderat  ». 
Abella  les  supplée;  mais  dans  cette  dernière  phrase  la  copie  a 
mis  spes  pour  sps  (spiritus),  et  ne  porte  en  marge  aucune 
correction.  Nous  y  lisons  souvent  vir  là  où  l'original  commet 
la  même  sottise;  mais  aussi  vix  (fol.  io5),  alors  qu'il  y  a  bien 
nettement  dans  celui-ci  uir;  le  copiste  a  peut-être  voulu  cor- 
riger, mais  il  la  fait  de  travers:  il  fallait  nisi.  H  transforme 
'fcessilur  (fol.  io())  en  cessUur,  quWbella  corrige  en  ccssil. 

Ces  fautes  ne  sont  généralement  pas  imputables  à  l'auteur 
de  la  co])ie  du  l>ritish  Muséum,  (jui  n"a  guère  fait  que  trans- 
crire ce  qu'il  voyait,  mais  à  celui  de  la  copie  d'Abella, 
qu'Abella  avait  sans  doute  corrigée  et  signée  de  sa  main,  mais 
non  copiée  lui  même.  S'il  l'eût  copiée  lui-même,  on  ne  lirait 
pas  sur  le  manuscrit  du  Britisli  Muséum  des  erreurs  que  lui 
même  amende  dune  favon  dubitative,  en  revenant  tout  sim- 
plement au  texte  du  manuscrit  de  l'Academia;  ni  encore  iaris 
prudenlihus  (fol.  9.')  du  manuscril  de  l'Academia)  avec  cette 
correction  en  marge:  «forte  viri.s  prudenlihus  n .,  ni  cnslrnin 
videnruin  (fol.  9.5)  amendé  en  marge  «  forte  Judeornni  ».  Abella 
eût  transcrit  imiriédiatement  uiris  et  Jndeoruin.  qu'il  C(jnsidé 
rait  à  bon  droit  comme  la  bonne  lecture,  car  il  est  impossible 
de  ciistiii^^Micr  ///  <l(!  ///,  v[  il  (aul  lire  suivant  le  sens. 


L.NE    CHROMQLE    LATLMi    INEDITE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  45 

Notons  enfin  que  la  copie  du  British  Muséum  ne  comporte 
dalinéas  qu'aux  endroits  où  il  y  en  a  sur  l'original. 

On  trouve  en  marge,  outre  les  corrections,  des  renvois  à  des 
notes:  nota  2",  etc.  Mais  les  notes  manquent.  Ces  renvois  se 
trouvent  aux  mois  procurai um  est  (fol.  91);  recuperauil  (fol.  92); 
eodem  tenipore  niouU  exercilum  (ibid.). 

Cette  copie  du  British  Muséum  n'étant  qu'une  transcription 
mauvaise  et  médiate  du  manuscrit  de  l'Academia,  ne  pouvait 
nous  être  utile  que  pour  les  corrections  marquées  en  marge. 
Elles  sont  généralement  bonnes.  Tout  au  plus  y  en  a-t-il 
quelqu'une  de  contestable  :  par  exemple,  quand  Abella  veut  lire 
«  Ipse  vir  nobilis  »  au  lieu  de  «  Ipse  uero  nobilis  »  (fol.  io'\).  11 
aurait  pu  en  faire  qu'il  n'a  pas  faites,  par  exemple  quand  il 
accepte  la  lecture  «  Proposuerant  tamen  reddere  terram  suam 
régi  vix  tune  aliter  cum  comité  Alvaro  componere  potuissent  », 
où  le  manuscrit  du  British  Muséum  a  iiix,  qu'il  faut  recons- 
tituer en  n'  (nisi)  (fol.  loô).  H  lui  suffisait  d'avancer  une  virgule 
pour  comprendre  un  passage  qu'il  trouve  mendosuin,  ponctué 
comme  il  l'est  dans  sa  copie:  «  discordia  et  capitales  inimi- 
citiae  inter  mauros  sectae,  et  rixae  de  novo  exortae  »  (fol.  109). 

En  tout  cas,  toutes  les  fois  que  ses  corrections  (c'est-à-dire 
presque  toujours)  méritaient  d'être  adoptées,  il  n'était  qu'hon- 
nête de  marquer  son  nom,  même  quand  elles  s'étaient  présen- 
tées toutes  seules  à  notre  esprit  déjà  avant  l'examen  de  la 
copie  qui  nous  les  a  transmises. 


Nous  aurons  à  examiner  la  question  de  paternité,  et  à  sou- 
ligner ce  que  ce  nouveau  texte  apporte  de  nouveau  à  l'histoire 
des  rois  de  Castille  jusqu'à  la  prise  de  Cordoue.  Mais  il 
convient  auparavant  de  le  mettre  sous  les  yeux  du  lecteur. 
Les  notes  que  l'on  trouvera  en  bas  des  pages  ont  paru  néces- 
saires, soit  pour  permettre  une  comparaison  de  détail  avec 
les  textes  déjà  connus,  soit  encoie  pour  résoudre  quelques 
difficultés.  Elles  prépareront  les  conclusions.  Quant  au  texte 
lui-même,  il  eut  été  plus  commode  pour  le  lecteur  de  le  lui 

Bull,  hispan.  !i 


46  BULLETIN    HISPANIQUE 

présenter  expurgé  des  innombrables  fautes  du  manuscrit.  Mais 
alors,  de  deux  choses  lune  :  ou  il  fallait  procéder  à  une 
reconstitution  orthographique  complète,  chose  délicate  sinon 
impossible,  ou  il  fallait  reproduire  le  manuscrit  tel  qu'il  était. 
C'est  ce  dernier  système  qui  a  été  employé  pour  la  Chronique 
léonaise.  Il  n'est  pas  à  l'abri  de  tout  reproche,  mais  il  a  du 
bon,  surtout  quand  le  manuscrit  est  unique.  L'imprimé  devient 
alors  l'équivalent  du  manuscrit,  à  condition  que  la  copie  en 
soit  aussi  fidèle  que  possible  matériellement.  On  trouvera  donc 
ici  les  fautes  même  les  plus  grossières  et,  la  plupart  du  temps, 
les  abréviations  du  manuscrit  G  i .  Si  l'on  vient  à  découvrir 
une  autre  copie  indépendante,  il  suffira  d'en  relever  les 
variantes.  .Notre  édition  fournira  au  moins  une  base  sûre,  et 
non  un  texte  plus  ou  moins  conjectural. 

(A  sLiirre.)  G.  CIROT. 


LA  COLOCACION  DEL  VERBO  EN  EL  POEMA  DEL  CID 


El  orden  regular  de  las  parles  de  la  proposicion  es  «  siijeto, 
complemenlo,  verho  »  en  latin  (Romidus  fratrem  occidit)  y 
«  sujeto,  verho,  complemenlo  »  en  romance  (Romulo  mato  a  su 
hermano).  Sobre  la  causa  de  esta  Irasformacion,  hay  diferentes 
pareceres.  Véase  ïhurneysen,  Zeilschrifl  XVI  28g,  Meyer- 
Liibke,  Romanische  Grammalik  III  798,  Richter,  Romanische 
Worislellnng  45.  La  opinion  que  me  he  formado  yo,  es  la  que 
voy  a  explicar. 

Wundt,  Vôlkerpsychologie  I  2  (190/1),  p-  oô-,  advierte  que 
son  posibles,  en  latin,  seis  combinaciones'. 

1.  Romulus  Romani  condidit. 

2.  Romulus  condidit  Romam. 

3.  Romam  Romulus  condidit. 

4.  Romam  condidit  Romulus. 

5.  Condidit  Romam  Romulus. 

6.  Condidit  Romulus  Romam. 

Guando  preguntamos  por  el  sujeto,  las  conlestaciones  ade 
cuadas  son  las  que  principian  por  Romulus.  Cuando  pregun- 
tamos por  el  objeto,  las  contestaciones  adecuadas  son  las  que 
principian  por  Romam.  Cuando  preguntamos  por  el  verbo,  las 
contestaciones  adecuadas  son  las  que  principian  por  condidit. 

Ahora,  comparando  el  castellano  moderno  con  el  latin, 
vemos  que  todavîa  la  proposicion  piiede  principiar  por  el 
sujeto,  por  el  complemenlo  y  por  el  verbo  :  Romulo  fundô  d 
Roma,  A  Roma  fundô  Romulo,  Fundô  Romulo  à  Roma.  De  los 
seis  tipos  mencionados  por  Wundt,  se  conservan  cuatro 
(2,  4,  5,  6).  Han  desaparecido  dos  (i  y  3).  èPor  que  ha  suce- 
dido  eso?  La  contestacion,  a  mi  ver,  es  bastante  sencilla. 

I,  He  allerado  el  orJen  de  las  combinaciones. 


48  BLLLElIN    HISPANIQUE 

Schinalz,  Laleinischc  Gramnudik,  Mùnchen  1910,  p.  6'ii, 
déclara  que,  ordinariamente,  en  latin  el  sujelo  précède  al 
verbo.  Los  modilicalivos  del  siijeto  se  le  agregan  a  él;  los 
modificativos  del  verbo  preceden  al  verbo.  «  Asî  résulta,  dice 
Schmalz,  una  frase  bien  proporcionada,  la  que,  a  pesar  de  su 
formaciou  bipartida,  constituye  una  unidad  armoniosa,  por 
ejemplo  Àppius  iriler  patres  lectus  \\  huad  ita  miiKo  jmst  in  prin- 
cipum  dignationem  pervenil.  » 

Este  es  el  punto  principal.  El  latin  concède  mayor  indepen- 
dencia  a  las  parles  de  la  proposici<'jn  (jue  el  romance.  Particu 
larmente,  le  agrada  al  romano  la  biparticion,  mientras  que  la 
proposicién  normal  de  las  lenguas  neolatinas  es  unitaria.  El 
verbo  es  la  c(  côpula  »»  de  la  proposicién.  Se  puede  combinar 
con  el  sujeto  y  con  el  complemento.  Por  este  molivo,  liornukis 
condidit  Romain  puede  formar  una  unidad  indivisa.  Pero 
Romains  Romam  condidil  se  divide  necesarianiente  en  dos  parles 
porque  cl  sujeto  y  el  complemento  son  como  dos  'polos 
opuestos.  Las  frases  que  el  caslcllano  modcrno  recliaza  perle- 
necen  a  las  que  se  prestan  para  la  biparliciôn  :  Romains 
4-  Romam  condidil,  Romam  -+-  Romnlus  condidil. 

Muy  amenudo,  la  proposicion  lalina  se  divide  en  dos  parles, 
formando  el  sujelo  el  cenlro  de  una  y  cl  verbo  el  ccntro  de 
olra  :  Al  Alcibiades,  viclis  Alhrniensibas,  non  salis  Inla  eadcm 
loca  sihi  arbitratus,  penilas  in  Thraciam  se  aupra  Proponlidem 
abdidil.  En  otros  casos,  queda  aparté  el  complemento  y  el 
sujelo  se  combina  con  el  verbo  :  Pisidas  cum  ils  (/nos  secnm 
habebal,  ad  resislendam  Aspis  comparai.  La  partici(')n  es  posible 
también  en  aquellas  proposiciones  que  intercalan  el  verbo 
entre  el  sujeto  y  el  complemento  :  Paler  eius  (jnniss<n'es,  (juod 
el  manu  forlis  el  bello  strenuus  el  régi  mullis  locis  Jidelis  eral 
reperlns,  habuil  provinciam  parlent  Ciliciae  jn.rla  (jippadociam 
quam  incolanl  Leucosyri.  La  divcrgcncia  del  latin  y  del  romance 
es  notiihle  parlicularmenle  en  el  caso  cuando  un  [)ro!Hunbrc 
Personal  es  snjel(j.  Tradi'izcase  al  frnncés  ô  al  caslellano  la 
fiase  Tu  vrlim  a  me  a/iimam  paramper  averfas  y  se  verâ  (pu;  cl 
pir)nombrc  ///,  que  en  latin  contrapesa  el  verbo,  se  convicrtc 
en    un    rlcmento    casi    proclîlico.    Compârese   Meycr-Liibkc, 


LA  COLOCACIÔN  DEL  VERBO  EN  EL  POE  MA  DEL  CID         AQ 

Zeilschrift  XXI  33i,  Influye  la  extension  de  la  proposicion. 
Los  periodos  largos  se  prestan  naturalmente  para  la  subdi- 
vision. En  las  proposiciones  cortas,  esta  tendencia  se  nota 
también,  pero  no  se  nota  en  el  mismo  grado. 

La  diferencia  entre  latin  y  romance  no  es  absoluta  en  esta 
cuestion,  sino  relativa.  También  en  latin,  se  hallan  proposi- 
ciones de  carâcter  unitario  y,  todavia  boy  en  dia,  el  castellano 
puede  dividir  la  proposicion  en  dos  clâusulas  ritmicas.  Ame- 
nudo  se  aparta  el  complemento:  A  mi  hermuno  mayov,  no  lo  he 
Visio  desde  liace  très  dias,  A  su  marido,  nada  quiso  décide 
(Caballero,  Cuadros  de  Costumbres,  Leipzig  1882,  p.  i64). 
A  veces,  también  el  sujeto  se  considéra  como  miembro  suelto: 
Los  mas  opuestos  senlimienlos,  pintnbanse  en  aqîiellos  rosiros 
hurarios  y  altivos(0\ayarria,  Tradiciones  deTolodo,  Madrid  1880, 
p.  57).  El  caso  complemcntario  pospuesto  al  verbo  indica  que 
la  proposicion  se  dividc  rilmicamente  en  dos  hemistiquios. 

Pero  estos  casos  son  excepcionales.  Generalmente,  la  propo- 
sicion castellana  moderna  es  unitaria  y  el  verbo  enlaza  el 
sujeto  con  el  complemento;  Napoléon  pasô  los  Alpes,  Los  Alpes 
pasô  Napoléon.  Solamenle  cuando  el  verbo  ocupa  el  primer 
lugar,  no  es  posiblc  que  enlace  el  sujeto  con  el  complemento, 
y  en  este  caso  se  conserva  la  libertad  que  concède  la  sintaxis 
latina.  Se  puede  decir  Pasô  Napoléon  los  Alpes  y  también  Pasô 
los  Alpes  Napoléon. 

Podemos  considerar  todo  el  movimiento  por  el  cual  se  ha 
alterado  el  orden  de  palabras  como  consecuencia  de  la  ten- 
dencia de  unificar  la  proposicion'.  Todavia  es  libre  la  coloca- 
cion  de  elementos  adverbiales  de  carâcter  independiente  :  En 
ese  liempo,  mi  Ko  adminislraba  la  provincia:  Mi  Ho  adminislraba, 
en  ese  liempo,  la  provincia:  Mi  Uo,  en  ese  liempo,  adminislraba 
la  provincia;  Mi  Uo  adminislraba  la  provincia  en  ese  liempo.  La 
frase  en  ese  liempo  puede  intcrrumpir  la  proposicion,  pero  no 
destruye  su  unidad,  lo  que  sucederia  si  se  concediera  la  misma 
licencia  al  sujeto  6  al  complemento  direclo. 

I.  Gontribuye  para  la  uni(icaci«')n  y  concenlraciôn  de  la  proposicion  neolatina, 
la  conversion  de  algunas  palabras  que  en  latin  son  independientes  (pronombres, 
negaciôn,  verbos  auxiliares)  en  elementos  procliticos  6  encliticos. 


OO  BULLETIN    HISPANIQUE 

En  el  Poema  del  Gid,  el  desenvol vimiento  sobre  el  cual 
estamos  hablando  lia  principiado,  pero  no  ha  llegado  û  su 
termine,  y  el  esludio  de  la  coiocacion  del  verbo  en  este  monu- 
menlo  literario  es  de  particular  iiiterés  porque  hay  indicios  de 
que  existen  relaciones  entre  la  constitucion  ritmica  de  la  frase 
y  el  orden  de  palabras. 

Antes  de  entrar  a  hablar  de  las  seis  combinaciones  que 
arriba  estan  indicadas,  conviene  tratar  de  la  coiocacion  del 
verbo  auxiliar.  Sobre  este  tema,  he  escrito  en  los  Problemas  de 
Sintaxb  publicados  en  los  Anales  de  la  Universldad  de  Chile  en 
1907.  He  probado  que  hay  notable  diferencia  entre  el  Poema 
del  Gid  y  las  poesfas  de  Berceo.  En  el  Poema,  no  es  costumbre 
dar  al  verbo  auxiliar  el  primer  lugar  en  la  proposicion.  iMien- 
tras  tanto,  en  las  poesias  de  Berceo,  son  frecuentes  las  frases 
de  la  siguiente  forma:  As  lu  sacado  e/ide  pobreza  e  contienda 
S.  Dom.  2/^2  d,  Fueron  de  laies  omnes  mâchas  carias  escriplas 
S.  Dom.  63  G,  Eran  li  eslas  nuehas  al  dlablo  pesadas  S.  Dom. 
17  d. 

Sobre  el  hecho  mismo,  no  puede  baber  discusion.  Lo  reco- 
nocen  Menéndez,  Cantar  de  Mio  Gid  1,  p.  4 12,  y  Slaaff, 
Revue  de  Dialectologie  II  /|32. 

Muy  importantes  advertencias  relativas  al  tema  Irae  Slaalï 
en  el  lugar  indicado.  iMe  es  grato  poder  decir  que  convengo 
con  él  en  considerar  la  régla  gramatical  como  dependiente  del 
ritmo  y  acepto  las  indicaciones  que  da  sobre  la  manera  como 
se  deben  ponderar  las  excepciones. 

Al  principio  del  verso  se  pospone  el  auxiliar.  Numerosos 
ejemplos  comprueban  la  régla.  Hé  aqui  unos  pocos: 

Poblado  ha  myo  Cid  el  puerlo  de  A.lucant  1087. 
Atoi},'ado  lo  han  esto  los  ylfantes  de  (;arrion  afiSS. 
\  enidos  son  a  CasHella  aquestos  ospedados  zaGt). 
Nonbrados  son  los  que  yran  en  el  algara  ftïift. 
Alto  es  el  poyo,  maravilloso  e  grantSG/}. 
Apres  son  de  Valençia  a  Ires  léguas  conladas  1559. 

La  misina  icgl;i  valc  para  la  ccsura: 

Mesnadas  de  niyo  (Ad  rrobado  an  cl  canpo  lySC. 
Los  nioros  de  las  llcrras  ganado  se  an  \  algo  1779. 


LA    COLOCACION    ItEL    VERBO    EN    EL    POEMA    DEL    CID  01 

Passada  es  la  noche,  venida  es  la  manana  i5:io. 

A  tercer  dia,  dados  fueron  sin  falla  ;j23. 

Los  avères  que  tenemos  grandes  son  et  sobeianos  254i. 

Pues  adellant  yran  Iras  nos,  aqui  sea  la  batalla  990  ' . 

El  «exordio»  (Thurneysen,  Zeitschrift  XVI,  pâg.  289)  puede 
ir  combinado  con  una  palabra  proclitica  : 

E  dexada  a  Saragoça  et  a  las  tierras  duca  1088. 

Que  presa  es  Valençia,  que  non  gela  enparan  laaS. 

Ca  acusado  sere  de  lo  que  vos  he  servido  73. 

Quando  senoras  son  sus  fijas  de  Navarra  et  de  Aragon  3728. 

Es  dia  es  passado,  et  entrada  es  la  noch  2061. 

Luego  legaron  los  sos,  ca  fecha  es  el  arrancada  609. 

La  cofia  de  rançal  que  blanca  era  commo  el  sol  S^gS. 

E  vos  a  el  lo  gradid,  quando  vivas  somos  nos  2861, 

Hé  aqui  los  versos  donde  los  auxiliares  ser  y  arer  ocupan  el 
primer  lugar  en  uno  de  los  dos  hemistiquios  :  79,  i55,  201, 
3iô,  491,  793,  810,  825,  834,  io38,  1074,  1210,  i4ii,  1760, 
i84o,  1845,  1903,  1924,  1962,  20^6,  2i38,  2162,  2193,  2454, 
2^71,  2032,  2794  (?),  3oo5,  3ii8,  3275,  3472,  3553.  Su  numéro 
es  reducido  en  comparacion  con  los  versos  que  afirman  la  régla 
y  su  fuerza  disminuye  cuando  tomamos  en  cuenta  las  circuns- 
tancias  especiales  que  a  continuacion  detallamos. 

Staaff  déclara,  en  la  Revue  de  Dialectologie  :  «  Ces  exemples 
paraissent  montrer  que,  du  moins  lorsque  le  sujet  était  un 
pronom  sous-entendu,  la  forme  verbale  avait  assez  de  poids 
pour  pouvoir  commencer  la  phrase.  »  Efectivamente,  en  la 
gran  mayorîa  de  los  casos  irregulares  el  sujeto  esta  callado  : 

Sed  membrados  commo  lo  devedes  far  3i5  ^. 
Oyd,  Minaya,  sodés  myo  diestro  braço  810. 

Es  natural  que  el  verbo  que  va  solo  tenga  mas  peso  que  el 
que  se  combina  con  el  sujeto.  ïambién  puede  influir  la  ana- 
logîa,  porque  el  verbo  ocupa  amenudo  el  primer  lugar  cuando 
no  se  expresa  el  sujeto. 

1.  La  posposiciôn  del  auxiliar  es  posible  también  en  medio  de  un  hemisliquio; 
pero  entooces  supone  la  existencia  de  una  incision  secundaria: 

Ayrolo  el  rrey  Alfonsso,  de  tierra  echado  lo  ha  629. 
Es  dia  es  salido,  et  la  noch  entrada  es  1699. 
Antes  fu  minguado,  agora  rrico  so  2^94. 

2.  En  los  l*roblemas  de  Sintaxis,  supongo  que  se  exceptûe  el  imperativo. 


03  BULLETIN    HISPANIQUE 

La  forma  que  le  da  el  senor  Staalî  û  esta  régla  présenta  la 
gran  ventaja  de  que  la  podemos  aplicar,  al  inismo  tiempo, 
a  la  Grônica  General  del  Hey  Alfonso  \,  sobre  la  cual  digo  en 
mis  Problemas  de  Sinlaxis  que  la  ley  esta  abolida  para  la 
copula.  pero  se  conserva  para  los  tiempos  compuestos  del 
verbo.  Los  ejemplos  que  alego  en  favor  de  esta  idea,  y  otros 
mas  que  conservo  en  mis  apuntes,  prueban  que  el  sujeto  esta 
callado  en  los  casos  que  présentai!  el  auxiliar  al  principio  de 
la  proposiciôn. 

Ademâs,  se  pueden  tomar  en  cuenla  algunas  circunstancias 
de  importancia  secundaria.  En  frases  como  Seremos  a  las  bodas 
de  los  y  fautes  de  Car  r  ion  2162,  Fucro/t  en  Valeur  ia  nmy  bien 
arreados  2^71,  no  considero  el  verbo  como  auxiliar  porque 
envuelve  la  idea  de  «  estar  en  alguna  parte  ».  Lo  mismo  sucede 
en  Sean  las  vislas  destas  Ires  semanas  1962,  Sea  la  lid  o  manda- 
redes  vos  3 '172,  donde  el  verbo  se  puede  interpretar  por  «  tener 
lugar  ». 

En  otros  casos,  las  causas  de  la  acentuacicjn  del  auxiliar 
pueden  ser  de  caracter  fonético  :  )'a  don  Rachelel  Vidas,  aredes 
me  olbidado  lôj,  Quando  lai  balalla  avemos  arrancado  790,  Si  vo 
alijun  dia  ris(/uier,  scrvos  lian  doblados  i~)\,  Fncssede^  my  haes - 
Ijed,  si  vos  plocjuiesse^  senor  ao^G.  Se  entiende  que  una  conibi- 
nacion  como  servos  han  difîcilmente  se  puede  considerar  como 
inacentuada.  loutre  los  versos  que  arriba  cstân  indicados,  se 
encuentran  2G  que  contienen  formas  disilâbicas  ô  trisilâbicas 
de  los  auxiliares,  y  solamente  siete  veces  el  auxiliar  es  mono- 
silâbico  (3ir>,  Hjo.'i,  192/1,  '^i93,  2454,  3ii8,  327Ô). 

llaN  très  casos  cuva  explicaci(jn  es  mas  difîcil.  En  2'|5'i,  tal 
vez  convenga  escribir  moros  ha  malado  en  lugar  de  ha  nioros 
malado.  VA  segundo  caso  se  présenta  en  192/1.  Parecc  (pie  abi 
la  frase  es  parjado  se  pronunciaba  con  énfasis  porque  asi  lo 
exijen  las  palabras  que  precedeh  :  ^;  Commo  son  las  salades 
de  AlJ'o/isso  r/iyo  senor,  Si  es  jxnjadtf  o  rreribio  el  don  ?  Dixo 
Mynaya  :  Dabna  et  de  coraro/i  Es  iKojaih),  el  dauos  su  amor. 
El  lercer  caso  se  lia  Ha  en  2193:  To(bj  h)  (/iw  vos  feches  es  de 
buena  ynisa. 

En  gênerai    y    pailicularmcnte  con    relacion  al  verso   2193, 


LA    COLOCACIÙN    DEL    VERBO    EN    EL    POEMA    DEL    CID  53 

se  puede  decir  que  la  observacion  de  la  régla  es  mas  rigurosa 
en  la  primera  parte  del  verso  que  en  la  segunda.  Se  puede 
comparar  la  régla  que  excluye  los  casos  proclilicos  de  los 
pronombres  del  primer  lugar  de  la  proposicion.  También  ésia 
se  observa  con  mas  exactitud  en  la  primera  parte  del  verso  que 
en  la  segunda. 

Estos  son  los  puntos  principales  de  la  ley  que  rige  con 
relacion  al  verbo  auxiliar.  Por  mas  destalles  comparese  mi 
artîculo  que  arriba  esta  citado  y  Menéndez,  Cantar  de  Mlo  Cid, 
p.  4 12.  A  continuacion,  enlramos  a  examinar  el  uso  de  las 
seis  combinaciones  que  nombra  Wundt. 

I.  Sujeto,  Complemento,  Verbo. 

Esta  es  la  combinacion  que  prevalece  en  latîn.  En  la  prosa 
moderna,  casi  no  existe.  En  el  Cid,  se  conserva,  peio  ya  le 
corresponde  un  papol  secundario. 

En  la  mayori'a  de  los  casos,  el  sujeto  con  sus  modificativos 
llena  el  primer  hemistiquio  y  al  complemento  con  el  verbo 
le  corresponde  el  segundo  : 

-Myo  Cid  Ruy  Diaz  por  Burgos  entrava  i."». 

Uios  que  no^*  dio  las  aimas,  conseio  nos  dara  382. 

Entre  los  casos  restantes,  hay  algunos  en  los  cuales  la  pro- 
posicion  abarca  mas  de  un  solo  verso  (17Ô8,  1759).  Es  irre 
gular,   por  ejemplo,  el   verso  •2'io\  :  Myo  Cid  por  sos  yeriios 
demanda  el  no  los  f allô. 

Raras  veces,  un  solo  hemistiquio  encierra  toda   la   combi 
nacion  :    Yo  desso  nie  pago    i/|i.   La  escasez  de  los  ejemplos 
de  esta  clase  indica  que  la  combinacion   le  agrada  al  poeta 
particularmente  cuando  la  puede  distribuir  entre  dos  clausulas 
ritmicas. 

11.  Sujeto,  Verbo,  Complemento. 

Numéricamente,  esta  combinacion  no  sobrepuja  notable- 
mente  la  que  acabamos  de  estudiar.  La  preponderancia  incon- 
trastable  que  le  concède  el    castellano    moderno,    no    existe 


54  BII.LETIN    HlSPANIQl'E 

lodavia  en  el  lenguaje  del  Poema  del  Gid.  La  combinacion  1 
se  encuentra  de  preferencia  en  las  proposiciones  que  ocupan 
dos  clausulas.  La  combinacitm  II  se  présenta  con  frecuencia 
en  las  que  estun  encerradas  en  un  solo  hemistiquio  :  El  uno  es 
en  parayso,  eu  el  olro  non  entvo  ala  35o,  Hyn  lo  vere  con  el  Çid, 
si  Dios  me  lieva  ala  iA35,  El  unojinco  con  ellos  el  el  olro  lorno  a 
Albarfanez  i497,  Eos  monles  son  allos,  las  rramns  puian  con  las 
nues  2698,  etc.  Véase  el  cuadro  que  signe  : 

La  combinacion  I  ocupa  i  hemistiquio  3o  veces. 
La  combinacion  I  ocupa  2  hemistiquios  1C6  veces. 
La  combinacion  II  ocupa  i  hemistiquio  i4i  veces. 
La  combinacion  II  ocupa  2  hemistiquios  loi  veces. 

Asî  llegamos  a  sospechar  que  la  generalizacion  de  la  com- 
binacion II  haya  principiado  por  las  proposiciones  cortas.  Sin 
embargo,  las  proposiciones  largas  no  la  rechazan  tampoco  y 
hay,  entre  ellas,  varias  que  ritmicamente  se  dividen  en  dos 
clausulas.  Très  veces,  el  sujelo  con  sus  modifîcativos  ocupan 
el  primer  hemistiquio  y  el  segundo  principia  por  un  participio 
combinado  con  el  verbo  auxiliar  : 

Mesnadas  de  myo  Çid  rrobado  an  el  canpo  173G. 
Los  inoros  de  las  tierras  ganado  se  an  y  algo  1779. 
Chicos  et  grandes  vestidos  son  de  colores  1990. 

También  los  casos  complementarios  pospuestos  son  indicios 
de  la  division  ■  :  El  Campeador  dexar  las  ha  en  vuestra  mano  117, 
Moros  e  moras  lomaronse  a  quexnr  802,  Essora  el  Campeador 
prisos  a  la  harha  .3280.  Los  ejemplos  son  numçrosos,  pero  es 
posible  también  la  anticipacion  del  pronombre  :  Très  rreyes  de 
Arabia  te  vinieron  adorar  336,  Pues  que  laies  mal  calçados  me 
vençieron  de  halalla  io23.  Véase  StaafF,  Romanische  For- 
schunçjen  XXIII  627. 

Pre-valecen  los  versos  que  reservan  al  sujelo  el  primer 
hemistiquio,  pero  se  encuentra  también  la  division  sujelo  y 
verbo  -h  cornplernrnlo  :  Aquesle  consscio  los  yjanles  de  Carrion 
2999,  etc. 

I.  StaafT,  Kom.  Forsckungen  XXIIi  Oxf»,  dice  :  «Je  regarde  ces  exemples  comme 
une  pic'tive  de  rexisleiico  d'une  côsure  iiilciitionncllc  dans  les  \crs  du  Cid.  » 


LA    COLOCAGIÔN    DEL    VERBO    EX    EL    POEVLV    DEL    CID  55 

Es  de  iiso  freciiente  la  forma  sajeto,  complenien/o,  verbo, 
complemenlo.  Esta  se  puede  considerar  como  mezcla  de  las 
combinaciones  I  y  II  : 

Martin  Antolinez  un  colpe  dio  a  Galve  765. 
Fuerças  de  Marruecos  Valençia  vienen  çercar  2812. 

III.  Complemento,  Sujeto,  Verbo. 

Esta  combinacion  es  de  menos  uso  que  las  anteriores,  pero 
siempre  se  encuentra  con  alguna  frecuencia  Son  ejemplos  los 
siguientes  : 

Alen  de  Teruel  don  Rodrigo  passava  91 1. 

Esta  batalla  el  Criador  la  fera  2862. 

Estas  apreçiaduras  myo  Çid  presas  las  ha  325o. 

Por  régla  gênerai,  el  complemento  ocupa  el  primer  hemi- 
stiquio  y  el  sujeto  conel  verbo  se  encuentra  en  el  segundo.  Son 
pocos  los  ejemplos  que  presentan  toda  la  combinacion  en  un 
solo  hemistiquio  :  Esta  la  ni/la  dixo  ^9,  2608,  Estas  yo  las 
gane  3i5/i,  3 160. 

A  veces,  se  intercala  otro  complemento  y  résulta  la  combi- 
nacion complemento,  sujeto,  complemento,  verbo  : 

Sobrel  so  cavallo  Bavieca  myo  Çid  salto  dava  2127. 
A  las  fijas  del  Çid  el  moro  sus  donas  dio  2654. 

Otras  veces,  se  agrega  un  complemento  al  fin  y  résulta  la 
combinaci()n  complemento,  sujeto,  verbo,  complemento  : 

A  la  sierra  de  Miedes  ellos  y  van  posar  4i5. 

Por  mis  fijas  quem  dexaron  yo  non  he  desonor  Si^g. 

Sobre  la  disminuciôn  del  uso  de  esta  combinacion  en  los 
textos  posteriores,  traen  noticias  Staafî,  Les  pronoms  abrégés, 
p.  lo/i,  y  Menéndez,  Cantar  de  Mio  Cid  1,  p.  4oo. 

IV.  Complemento,  Verbo,  Sujeto. 

Esta  combinacion  es  de  uso  frecuente.  Se  halla  amenudo  en 
proposiciones  cortas  que  ocupan  un  solo  hemistiquio  : 
«  Plazme  »   dixo  el   Cid   180,    Apriessa   cantan    los    gallos  235, 


56  BUI.LETUN    HISPANIQUE 

Xuestra  es  la  ganancia  098,  Verdad  vos  digo  yo  i335,  Miedo  a  su 
mugier  1660,   Vermeio  salio  el  asiil  3687,  etc. 

Las  proposiciones  laigas  que  ocupan  dos  hemistiquios  6 
mas,  estân  en  minoria.  Se  encuentra  el  verbo  alternativamente 
en  el  primer  hemistiquio  6  en  el  segundo  : 

Grande  duelo  avien  las  yentes  christianas  29. 
Daqueste  acorro  fablara  toda  Espana  4-^>3. 
Derccha  viene  la  sena  de  Minaya  48a. 
Fata  Valençia  duro  ol  segudar  1 148. 
Bibdas  rremandran  fijasdel  Campeador  aSaS. 
ïaii  a  grant  duelo  fablava  doua  Sol  2796. 

Eslos  ejemplos  \  olras  mas  que  existen,  atestiguan  que  la 
division  complcmento  y  verbo  +  siijeto  es  tan  usual  como 
complemenlo  -\-  verho  y  sujelo  y  demuestran  el  carâcter  unitario 
de  la  combinacion. 

Se  puede  agiegar  otro  complcmento  y  résulta  entonces  la 
combinaci<m  complemenlo,  verho,  sujelo,  complemenlo  : 

Hya  salien  les  yfantes  de  Valençia  la  clara  a6ii. 
Linpia  salie  la  sangre  sobre  los  ciclatones  2739. 

También   se  pucde  intercalai-  otro  complcmento  y  résulta  la 
combinacion  complemenlo,  verbo,  complemenlo,  sujelo  : 

Grant  tue  el  dia  la  coït  del  Campeador  a'j7/i- 
Essora  se  levo  en  pie  el  buen  rrey  Alfonsso  3127. 

V.  Verbo,  Complemenlo,  Sujeto. 

Casi  siempre  el  verbo  con  el  coinplemento  ocupan  el  primer 
liemisli(|uio  y  al  sujelo  lo  corresponde  cl  segundo  : 

Kxien  l(t  ver  niugieres  e  varones  it». 
Non  l'ueroii  en  cuenla  los  avères  monedados  -rj^-j  '. 
E  son  ni  vos  yernos  yfantes  de  Carrion  a '190. 
Atorgado  lo  han  esto  los  yll'antes  de  Carrion  a583. 
Besaron  las  manos  las  (ijas  al  padre  a89'). 

Excepciones  casi  no  existen.  A  veces,  no  se  sabe  con  segu 

I.  Considero  la  negacion  romo  parte  intégrante  del  verbo  y  tampoco  tomo  en 
cuenta  las  coujunciunes. 


LA  COLOCACIO>'  DEL  VERBO  EN"  Er,  POEMA  DEL  CID         07 

ridad  donde  esta  la  cesura  (lool,  2177).  Una  vez  tenemos  la 
combinacion  verho,  complemenlo  -\-  coniplemcnlo,  sujelo  : 

t  Non  te  viene  en  mien  te  en  Valençia  lo  del  leon  ?  333o. 


VI.  Verbo,  Sujeto,  Complemento. 

Ordinariamente,  el  verbo  con  el  sujelo  ocupan  el  primer 
hemistiquio  y  al  complemento  le  corresponde  el  segundo  : 

Fablo  myo  Cid  bien  et  tan  mesurado  7. 
Dixo  el  Campeador  :  a  mi  guisa  fablastes  677. 
Gavalgo  Minaya  el  espada  en  la  mano  756. 
Poblado  a  myo  Cid  el  puerto  de  Alucant  1087. 

Pocas  veces,  las  très  partes  de  la  combinacion  se  cncuentran 
en  un  solo  hemistiquio  :  Meçio  myo  Çid  los  ombras  i3,  Dixo  el 
rrey  al  conde  i348,  Prendol  yo  los  pecados  1700,  Scdien  los  fie  les 
de  medio  36ii.  A  veces  la  proposicion  abarca  mas  de  un  verso. 
Sucede  también  que  el  verbo  llena  todo  el  primer  hemisti- 
quio (261). 

Las  sels  combinaciohes  que  hemos  estudiado  se  dividen  en 
dos  clases.  Son  de  caracter-  unitario  las  combinaciones  2  y  4. 
Se  preslan  para  la  biparlicion  las  combinaciones  i,  3,  5,  6. 

En  las  frases  cortas,  el  poeta  decididamente  da  la  prefe- 
rencia  â  las  combinaciones  2  y  /i-  Poi"  este  molivo  supongo 
que  la  trasformacion  del  orden  de  palabras  que  se  usa  en  latin 
debe  de  haber  principiado  por  las  frases  de  poca  extensirjn. 

Puede  ser  que  la  posposicion  del  verbo  auxiliar  sea  la 
primera  manifestacion  de  esta  lendencia.  Tomando  en 
cuenta  las  observaciones  de  Staafï  podemos  decir  que  la 
régla  que  excluye  el  auxiliar  del  primei-  lugar  de  la  pro- 
posicion rige  propiamenlc  para  aquellos  casos  en  los  cuales 
se  combina  con  el  sujeto.  Ahora  la  frase  laudatus  esl  miles 
es  inàs  cohérente  que  est  landnlns  miles.  Ya  en  el  latin 
clâsico,  se  da  la  preferencia  a  laudatus  non  est  6  también  non 
esl  laudatus  y  se  évita  non  laudatus  est  (Schmalz,  Lateinische 
Grammatik,    19 10,   p.    6^6)  y  esto  sucede,  al  parecer,  por  la 


58  BULLETIN    HISPANIQUE 

inisma  raz<3n'.  Publico  esta   hipotesis  sin  pretender  que  sea 
preferible  a  la  que  da  Thurneysen,  Zeilschrift  XVI,  p.  3oo. 

En  cuanto  a  la  frecuencia  del  uso  de  las  seis  combinaciones, 
puedo  dar  los  siguientes  datos.  En  los  versos  i-iooo,  se  emplea 

la  combinaciôn  I  69  veces 
la  combinaciôn  II  90  veces 
la  combinaciôn  III  30  veces 
la  combinaciôn  IV  86  veces  ^ 
la  combinaciôn  V  6  veces 
la  combinaciôn  VI  l\ô  veces 

VII     Las  Combinaciones  binarias. 

Estas  no  son  de  interés  parlicular  para  los  fines  que  persigue 
el  présente  artîculo.  Se  pueden  distinguir  cuatro  formas  fun- 
damenlales  :  a)  sujeto  -f  vcrho;  h)  verho  -{-  sujeto;  c)  complenienlo 
-f-  verho;  d)  verbo  +  complenienlo.  Véanse  los  siguientes  ejem- 
plos  : 

a)  Eilos  lo  temen  a5oi. 

b)  Sano  el  rrey  Fariz  8/ji. 

c)  A  Dios  vos  hacomendamos  2628. 

d)  Ensiellan  le  a  Bavieca  1580. 

Guando  el  verbo  liene  dos  complementos,  puede  précéder 
el  uno  y  seguir  el  olro:  fin  mono  prenden  las  rinelias  2728, 
A  Mynaya  Alharfanez,  nialaron  le  el  cavallo  7/i/i. 

La  proposicion  puede  dividirse  en  dos  clausulas  ritmicas: 

Los  de  Vaiençia  çercados  nos  han  1 1 19. 

Los  avères  ([ue  teneinos  grandes  son  et  sobeianos  254 1. 

Los  VI  dias  de  pla/o  passados  los  an  3o0. 

A  caballeros  et  a  peones  fechos  los  ha  rricos  848. 

Comparese  lo  que  dicen  Slaafl,  Ronmnischc  Forscimngen 
XXlll  62/i,  y  Menéndez,  Canlar  de  Mio  Cid  I,  p.  'joo. 

I.  Mlles  laudalns  est  so  conserva  (vcasc  mis  fijas  vengadas  son  37i'i),  pcro  siipoiic  la 
cxislfMicia  de  iiiia  incision  y  esa  se  évita  entre  palabras  c>lrcclianionte  ligadas  como 
non  j  IditdnUis  sum. 

1.  Ile  conlado  en  esta  calcgon'a  el  predicado  (|ue  se  lialla  al  principio  de  la  propo- 
sicion, pcro  no  lie  contado  cl  participio  conibinado  coti  avcr  y  srr. 


LA    COLOCACIÔN    DliL    VEKBO    EN    EL    l'OEMA    DEL    GID  Sq 


VIII.   Proposiciones  encabezadas  por  el  pronombre  relativo. 

El  pronombre  relativo  y  los  adverbios  relatives  se  pueden 
considerar  como  partes  independientes  de  la  proposicion  : 

Dios  que  nos  dio  las  aimas  882. 

Eslos  dozientos  cavallos  qucm  enbia  mjo  Cid  1868. 

Que  non  soplesse  ninguno  esta  su  poridad  680. 

Quando  desperto  el  Cid  4 10. 

Don  lo  ovo  a  oio  2016. 

Pero  también  se  puede  combinar  el  relativo  n  el  adverbio 
relativo  en  calidad  de  palabra  proclitica  con  una  palabra  de 
mâs  peso: 

Las  arobdas  que  los  nioros  sacan  658. 
Legaron  a  Valençia  la  que  myo  Cid  a  conquista  lOSo. 
Que  myo  Cid  Ru  y  Diaz  lid  campai  a  vençida  784. 
Quando  myo  Cid  el  casliello  quiso  quitar  85 1. 
Legan  a  Valençia  do  el  rrey  Alfonso  estava  1837. 

En  casos  como  que  los  moros  sacan  no  se  puede  decir  que  el 
orden  de  palabras  sea  complemento,  sujelo,  verho,  porque  esta 
combinacion  no  se  emplea  en  castellano  moderno  y,  sin  em- 
bargo, todavia  estan  en  uso  las  frases  de  esa   configuraciôn. 

Compârese  Spanische  Granimaiik  §  87,  6. 

Federico  HANSSEN. 


DOMINIQUE   SOTO 


ET    LA 


SCOLASTIQUE  PAKISIENNE 

(  Suite  K) 


XVIII 


Gomment  Nicole  Oresme  a  établi  la  loi  du  ^mouvement 
uniformément  varié. 

TNon  seulement  Nicole  Oresme  a  devancé  Copernic  en  soute- 
nant contre  la  Physique  péripatéticienne  la  possibilité  du 
mouvement  diurne  de  la  Terre;  non  seulement  il  a  précédé 
Descartes  en  faisant  usage  de  représentations  géométriques 
obtenues  à  l'aide  de  coordonnées  rectangulaires  à  deux  ou 
à  trois  dimensions,  et  en  établissant  l'équation  de  l;i  ligne 
droite;  il  a  encore  fait  une  découverte  que  l'on  attribue 
communément  à  Galilée:  il  a  reconnu  la  loi  suivant  laquelle 
croît,  avec  le  temps,  la  longueur  parcourue  par  un  mobile 
qu'entraîne  un  mouvement  uniformément  varié;  c'est  cette 
dernière  partie  de  son  o'uvrc  qui  va  maintenant  retenir  notre 
attention. 

L;i  seconde  partie  du  Traclalus  de  di(Jonnilat<'  ijanHluluni  a 
pour  titre  :  De  fujundione  el  polenllariim  sacccs.sivnrnm  nni/nr- 
milale  cl  di/Jonnildle.  C'est  à  l'élude  des  vitesses  que  cette  partie 
du  traité  est  spécialement  consacrée. 

Les  principes  de  Cinématique  dont  Oresme  se  réclame  ne 
dînèrent  pas  de  ceux  qnAlIxirt  de  Saxe  a  posés  en  son  Trarlu/ns 

I.    Voir  Hull.  /us//.,  t.  Ml,  p.  27.'),  S.57  ;  l.  XIII,  p.  1.5;,  af)i,  'l'io. 


DOMIIVIQI  E    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQtE    PARISIENNE  6l 

proporlio/iuni  cl  en  ses  QaœsUoncs  ht  libvos  de  Cœlo  cl  Mundo, 
deux  ouvrages  qui,  sûrement,  furent  à  peu  près  contemporains 
du  Traclatus  de  difforniilalc  qaaidalam,  soit  qu'ils  l'eussent 
précédé,  soit  qu'ils  l'eussent  suivi. 

Après  VValter  Burlev,  et  presque  exactement  dans  les  termes 
qu'a  employés  Albert  de  Saxe,  Oresme  nous  apprend  '  que  le 
mouvement  a  deux  sortes  d'extensions,  dont  l'une  dépend  de 
la  distribution  de  la  vitesse  aux  divers  points  du  sujet,  c'est  à- 
dire  du  mobile,  et  l'autre  du  changement  de  la  vitesse  au 
cours  du  temps.  Gomme  Albert  de  Saxe,  il  voudrait  que  les 
épithètes  :  uniforme,  difforme,  servissent  exclusivement  à 
caractériser  la  distribution  qu'affecte  la  vitesse  au  sein  du 
sujet,  tandis  que  les  qualificatifs  :  régulier,  irrégulier,  indi- 
queraient de  quelle  manière  les  valeurs  de  la  vitesse  se 
succèdent  dans  le  temps.  Mais  il  observe  qu'il  est  d'usage 
d'employer  les  mots  uniforme  et  difforme  même  pour  dési- 
gner la  régularité  et  l'irrégularité  dans  le  temps,  et  il  déclare 
qu'il  se  conformera  à  cet  usage. 

Notre  auteur  se  demande  ensuite  ^  de  quelle  manière  on 
doit,  en  chaque  espèce  de  mouvement,  définir  la  grandeur  de 
la  vitesse;  la  vitesse  du  mouvement  local,  la  vitesse  angulaire 
de  rotation,  la  vitesse  de  descente,  la  vitesse  de  dilatation  ou  de 
contraction,  la  vitesse  d'altération  sont  successivement  consi- 
dérées et  déterminées  exactement  comme  elles  le  sont  au 
Traclalus  proporlionum  d'Albert  de  Saxe  ;  ici  et  là,  les  mêmes 
pensées  se  trouvent  proposées,  et  éclaircies  au  moyen  des 
mêmes  exemples. 

Sans  nous  attarder  à  reproduire  des  considérations  qui  nous 
sont  déjà  connues,  indiquons  seulement  une  précision  intro- 
duite par  Oresme  en  la  définition  de  la  vitesse  du  mouvement 
local. 

Il  dit  d'abord 3,  comme  Albert  de  Saxe  :  «  Dans  le  mouve- 
ment local,  un  degré  de  mouvement  (inotas)  ou  de  vitesse  (velo- 
citas)  est  d'autant  plus  grand  on  plus  intense  que  le  mobile 

I.  Oresme,  Op.  tout/.,  Pars  11,  cap.  I  :  Do  diffonnilale  motus.  Ms.  cit.,  loi.  aott  r". 
■1.  Oresme,  Op.   laud.,   Pars  II,  cap.  Hl  :  De  quantilate  velocitatis;  cap.  IV:  De 
divcrsis  modis  velocitatis.  Ms.  cit.,  loi.  287  r°  et  fol.  288  r°. 
3.  Oresme,  Op.  laud.,  Pars  11,  cap.  III.  Ms.  cit.,  fol.  287  r°. 

Bull.  Iiispan.  5 


62  BULLETIN    HISPAMQIE 

parcourt  un  plus  grand  espace  ou  une  plus  grande  dislance 
en  un  temps  égal.  »  Mais  celte  définition  devient  insulFisanle 
pour  déterminer  ce  que  l'on  doit  appeler  vitesse  à  chaque 
iiistariL  en  un  mouvement  dont  la  vitesse  change  d'un  instant 
à  laulre;  il  convient  alors  de  la  compléter  en  ajoutant  ce 
membre  de  phrase  :  En  supposant  que,  pendant  tout  ce 
temps,  le  mobile  continue  à  se  mouvoir  avec  la  vitesse  qu'il 
avait  à  cet  instant.  Cette  addition,  notre  auteur  ne  la  formule 
pas  en  général;  mais  elle  est  bien  dans  sa  pensée,  et  il  lui 
arrive  de  l'expliciter  :  «  Le  degré  de  la  vitesse  de  descente,  » 
dit-il'  «  est  d'autant  plus  grand  qu'en  un  temps  égal,  le  sujet 
mobile  descend  davantage  ou  qu'il  descendrait  davantage 
si  le  niouveineul  coiili/iuait  si/npletnenl  (magls  descendu  vcl  des- 
cenderet  si  cunliniiarelar  simplicilcr).  » 

Ce  qu'Oresme  ajoute  à  la  Cinématique  d'Albert  de  Saxe,  c'est 
l'emploi  des  coordonnées.  Comment  les  coordonnées  rectan- 
gulaires devront  être  emplo\ées  en  une  telle  étude,  il  le  dit 
avec  son  habituelle  clarté,  au  début  de  la  seconde  partie  de 
son  traité^  : 

«  On  peut  imaginer  les  deux  extensions  à  la  façon  de  deux 
droites  qui  se  couperaient  orthogonalement,  en  sorte  que 
l'extension  relative  au  sujet  serait  appelée  latitude;  l'intensité 
du  mouvement  pourrait  alors  être  nommée  altitude  en  un 
point  (alliludo  localis)  du  mouvement  (moins)  ou  de  la  vitesse 
(velociins). 

»  Mais  selon  ce  qui  a  été  dit  au  troisième  chapitre  de  la  pre- 
mière partie,  la  vitesse  considérée  dans  le  temps  est  commu- 
nément appelée  latitude;  alors  chacune  des  deux  extensions, 
lorsqu'on  la  comparera  avec  l'intensité,  pourra  être  nommée 
longitude;  ainsi,  la  vitesse  aura  une  double  longitude  comme 
elle  a  une  double  extension, 

»  En  chacune  de  ces  deux  extensions,  l'intensité  de  la  vitesse 
pourra  varier  selon  des  modes  multiples;  comme  la  difformité 
naît  do  ce  (jue  l'intensité  peut  se  distribuer  de  manière  variée 
suivant  l'extension,  il  en  résulte  que  le  mouvement  ou  vitesse 

I.  Orcsinc,  Op.  Innd.,  Pars  II,  cap.  IV.  Ms.  cit.,  fol.  ^87  \°. 

a.  Oresrne,  Op.  laud.,  l'ars  II,  cap.  1  :  De  diirormilatc  motus.  Ms.  cit.,  fol.  j'iù  r*. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQUE    PARISIENNE  63 

peut  présenter  deux  sortes  de  ditïbrmités  et  aussi  deux  sortes 
d'uniformités.  » 

Il  est  clair,  dès  lors,  qu'à  chacune  des  deux  sortes  de 
diftbrmités  dont  la  vitesse  est  susceptible,  on  pourra  appliquer' 
toutes  les  dénominations,  tous  les  procédés  de  classification 
dont  on  a  usé,  d'une  manière  générale,  pour  des  intensités 
quelconques;  aussi  bien  par  rapport  à  la  durée  que  par  rapport 
à  l'extension,  la  vitesse  pourra  être  uniformément  diflbrme 
ou  dilïormémenl  difforme;  elle  pourra  commencer  ou  non  au 
degré  nul. 

En  une  qualité  quelconque,  aussi  bien  qu'en  un  mouve- 
ment, Oresme  ne  se  borne  pas  à  considérer  l'extension,  figurée 
par  la  longitude,  et  l'intensité,  figurée  par  la  latitude;  il  étudie, 
en  outre,  ce  qu'il  nomme  la  quantité  totale  (qiiaiitUds  tolalis)' 
ou  la  mesure  (nieiisuraj.  Cette  mesure  est  l'un  des  principaux 
sujets  de  la  troisième  partie  du  traité,  partie  qui  a  pour  titre  : 
De  acqaisUlone  et  niensura  qaalilatis  cl  velocUalis. 

«  D'une  manière  universelle,  »  dit  Oresme 3,  «  la  mesure  ou 
le  rapport  de  deux  qualités,  ou  bien  encore  de  deux  vitesses, 
est  égal  au  rapport  des  deux  figures,  comparables  entre  elles 
(ad  invicem  comparalœ),  par  lesquelles  elles  sont  représentées. 
Je  dis  :  comparables  entre  elles,  à  cause  d'une  remarque  qui 
a  été  faite  au  chapitre  septième  de  la  première  partie.  »  Cette 
remarque,  que  nous  avons  analysée  en  son  temps,  nous 
montre  ce  qu'Oresme  entend  par  figures  comparables;  ce  sont 
des  figures  où  des  intensités  égales  d'une  qualité  de  même 
espèce  sont  représentées  par  une  même  longueur. 

Le  contexte  se  charge  également  de  nous  apprendre  ce  que 
l'on  doit  entendre  par  rapport  de  deux  figures  ;  c'est  le  rapport 
des  aires  de  ces  deux  figures  si  elles  sont  planes,  de  leurs 
volumes  si  elles  sont  solides. 

De  la  définition  qui.  vient  d'être  donnée,  se  tire  immédia- 
tement le  corollaire  suivant  :  Les   mesures  de  deux  qualités 

1.  Oresme,  Op  laud.,  Pars  II,  cap.  VI  :  De  di(rorinitate  velocilatis  per  partes  quan- 
titativas.  Ms.  oit  ,  fol.  208  v°. 

2.  Oresme,  Op.  laïuL,  Pars  11,  cap.  111  :  De  quanlitate  ^elocitalis.  Ms.  cit.,  loi.  337  r". 

3.  Oresme,  Op.  laud  ,  Pars  III,  cap.  V:  De  merisura  qualilatum  uniformarum  et 
velocitalum.  Ms.  cit.,  fol.  261  r°. 


(^!x  m  Ml,  UN    HISPAMQIK 

uniformes  ont  pour  rapport  le  produit  du  rapport  des  exten- 
sions par  le  rapport  des  intensités.  «  En  la  susdite  mesure,  il 
faut  toujours  prendre  Textension  totale  de  la  qualité,  que  cette 
qualité  soit  linéaire,  superficielle  ou  même  corporelle.  Il  en 
faut  dire  autant  de  la  mesure  de  la  vitesse,  si  ce  n  est  que, 
par  extension,  il  faut  alors  entendre  le  temps  pendant 
lequel  dure  cette  vitesse,  et  |)ar  intensité,  le  degré  de  vitesse... 
Par  exemple,  une  vitesse  uniforme  qui  dure  pendant  trois 
jours  est  égale  à  une  vitesse  trois  fois  plus  intense  qui  dure 
pendant  un  seul  jour.  » 

En  ce  cas  où  la  vitesse  est  uniforme,  la  mesure  ou  quantité 
de  la  vitesse,  telle  qu'Oresme  vient  de  la  définir,  se  confond 
évidemment  avec  la  longueur  que  le  point  mobile  a  parcourue 
pendant  le  temps  qui  remplace  ici  l'extension.  La  vérité  de 
la  même  proposition  se  manifeste  non  moins  clairement  à 
notre  auteur  en  d'autres  cas  où  le  mouvement,  sans  être  uni- 
forme, est  une  succession  de  mouvements  uniformes.  C'est 
ce  qui  a  lieu  dans  un  problème  qu'il  résout  par  une  démons- 
tration géométrique  fort  élégante  '. 

Prenons  la  longitude  d'une  ligure  ({ui  représente  une  (jualité 
linéaire  et,  selon  le  langage  usité  au  Moyen -Age,  divisons -la 
en  iKirlics  propnvIioaneUps.  Pour  cela,  nous  la  partageons 
d'abord  en  deux  moitiés,  la  seconde  moitié  est  ensuite  tlivisée 
en  deux  quarts,  le  dernier  (juart  en  deux  huitièmes  et  ainsi 
de  suite.  La  longitude  .se  trouve  formée  d'une  suite  de  seg- 
ments mis  bout  à  bout,  et  les  longueurs  de  ces  segments 
forment  une  progiession  géométri(jue  de  raison  7  Ce  sont  les 
parlies  projjorlioiuielles  de  la  longitude. 

On  suppose  que  la  première  partie  proportionnelle  est 
alTectée  par  une  qualité  uniforme  d'une  certaine  intensité;  (jue 
la  seconde  partie  proportionnelle  est  alï'ectée  d'une  (jualité 
uniforme  de  même  espèce  et  d'intensité  double;  que  la  troi- 
sième est  alï'ectée  dune  qualité  uniforme  trois  lois  plus  intense 
(pic  la  première,  etc.  Les  intensités  des  qualités  uniformes  (pii 


I.  Orcsnic,  Oj).  Inud.,  Pars  Ml,  cap.N  I  ;  Adlnic  ilc  ««xlciii.  Ms.  cit.,  fol.  jtU  v". 
■j.  Oresmc,  Oii.laml.,  Pars  III,  cap.  VIII  :    De   rrmiisiira  cl  oxlcnsiotu!  in  inlitiiliiri) 
iiuaruiidam  (|ualilaliiiii.  Ms.  cil.,  loi.  j^Và  v"  et  fol.  a(')3  r». 


DOMINIQUE    SOTO    ET    I.A    SCOLASTIQIE    PARISIENNE  65 

alleclent  les  parties  proportionnelles  successives  sont  entre 
elles  comme  les  divers  nombres  entiers. 

La  figure  représentative  est  formée  par  une  suite  de  rectan- 
gles de  plus  en  plus  étroits  et  de  plus  en  plus  élevés.  Bien  que 
les  hauteurs  de  ces  rectangles  croissent  au  delà  de  toute  limite, 
la  somme  de  leurs  aires  demeure  limitée;  elle  est  quadruple 
de  l'aire  du  premier  de  ces  rectangles. 

Oresme  applique  aussitôt  ce  théorème  au  cas  où  la  qualité 
est  remplacée  par  une  vitesse:  c  Si  un  certain  temps  avait  été 
ainsi  divisé  en  parties  proportionnelles  ;  qu'en  la  première 
partie  de  ce  temps,  un  certain  mobile  se  miit  avec  une  certaine 
vitesse;  qu'en  la  seconde,  il  se  mût  deux  fois  plus  vite,  en  la 
troisième  trois  fois  plus  vite,  et  ainsi  de  suite,  la  vitesse 
croissant  toujours  de  môme,  cette  vitesse  serait  exactement 
quadruple  de  la  hauteur  de  la  première  partie;  en  sorte  qu'en 
l'heure  entière,  ce  mobile  parcourrait  un  chemin  quadruple 
exactement  de  celui  qu'il  a  parcouru  en  la  première  partie 
proportionnelle,  c'est-à-dire  en  la  première  demi-heure;  si, 
par  exemple,  en  cette  première  partie  proportionnelle,  il  a 
parcouru  une  longueur  d'un  pied,  pendant  le  reste  du  temps, 
il  parcourra  trois  pieds,  et  pendant  la  durée  tout  entière,  il 
parcourra  quatre  pieds.  » 

En  ce  cas,  la  définition  qu'Oresme  donnait  de  l'intensité  de 
la  vitesse  suffisait  à  lui  prouver  que  l'aire  de  la  figure  repré- 
sentative mesurait  la  longueur  décrite  par  le  point  mobile. 
Savait-il  qu'il  en  est  de  même  en  général?  Pour  qu'il  le  pût 
démontrer,  il  eût  fallu  qu'il  possédât  une  définition  précise  de 
la  vitesse  instantanée,  qu'il  eût  acquis  les  notions  de  dérivée 
et  d'intégrale.  Assurément,  une  telle  démonstration  passait  de 
beaucoup  les  moyens  que  lui  fournissait  sa  connaissance  très 
rudimentaire  des  Mathématiques.  Mais  incapable  de  démontrer 
une  telle  proposition,  en  avait-il  intuitivement  reconnu  la 
vérité?  Nous  ne  trouvons,  en  son  traité,  aucune  phrase  qui 
l'affirme  explicitement.  11  semble,  toutefois,  que  ce  silence 
résulte  non  pas  d'un  doute  où  l'auteur  serait  demeuré,  mais 
bien  d'une  parfaite  assurance  en  l'exactitude  de  la  proposition 
qu'il  sous-entend.  11  ne  dit  pas  que  l'aire  de  la  figure  représen- 


66  BULLETIN    HISPAMQIE 

tative  mesure,  eu  toutes  circonstances,  le  chemin  parcouru  par 
le  mobile  parce  qu'il  pense  que  cela  va  de  soi.  Nous  trouverons, 
d'ailleurs,  dans  un  instant,  un  passage  qui  suppose  clairement 
cette  interprétation.  Nous  verrons,  aussi,  que  beaucoup  des 
disciples  d'Oresme  et  de  ses  commentateurs  ont  interprété  de 
la  sorte  la  pensée  du  maître,  et  sans  songer  même  que  l'on  pût 
l'interpréter  autrement. 

Il  importail  que  cette  interprétation  fùl  signalée,  car  elle 
donne  toute  sa  valeur  au  passage  que  nous  allons  maintenant 
traduire'  : 

«  Toute  qualité  uniformément  diflorme  a  même  quantité  que 
si  elle  informait  uniformément  le  même  sujet  selon  le  degré 
du  point  milieu  ^Omnis  qiialUns,  si  fneril  iiniforniiler  dijjormis, 
secnndiim  gradum  piincti  medii  ipsa  est  lanta  quanta  <jaalilas 
ejusdem  subjecti).  En  disant:  selon  le  degré  du  point  milieu,  je 
sous-entends  :  si  la  qualité  est  linéaire;  si  elle  est  superficielle, 

il  faudra  dire:  selon  le  degré  de  la  ligne  moyenne 

1)  Nous  démontrerons  cette  proposition  pour  une  qualité 
linéaire. 

»  Soit  donc  une  qualité  qui  puisse  être  représentée  par  un 
triangle  ABC  (fiy.  1);  c'est  une  qualité  uniformément  difforme 
qui,  au  point  B,  se  termine  au  degré  nul;  soit  D  le  point 
milieu  de  la  ligne  qui  représente  le  sujet  (suhjectiva  linea); 
le  degré  ou  l'intensité  qui  alï'ecte  ce  point  est  figuré  par  la 
ligne  DE.  La  qualité  qui  aurait  partout  le  degré  ainsi  désigné 

est  représon table  par  le  quadri- 
latère \b'(iB,  ainsi  qu'il  résulte 
du  chapitre  \  de  la  première 
partie.  Mais  par  la  XXVI''  propo- 
sition du  premier  livre  d'Euclide, 
les  deux  triangles  EEG  et  E(jB 
sont  égaux.  Le  triangle  qui  repré- 
sente la  qualité  uniformément  dilTorme  et  le  (piadrilalère  AFG  B 
qui  représente  la  qualité  uniforme  scion  le  degré  du  point 
moyen  sont  donc  égaux  entre  eux;  les  deux  qualités  qui  sont 


\^ 


I.  Oresme,  dp.  laiid.,  Pars  III,  cap    \  Il  :    Df  nionsura  <iii;ilitatiim  et  vciocilatnm 
dilTorriiarum.   Vis.  cit.,  fol.  aCa  r*  cl  v". 


nOMTXTQrE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQUE    PARISIENNE  67 

imaginables  lune  par  le  triangle  et  l'autre  par  le  quadrilatère 
sont  aussi  égales  entre  elles  ;  et  c'est  ce  qu'on  se  proposait  de 
démontrer. 

»  On  raisonne  de  la  même  manière  au  sujet  d'une  qualité 
uniformément  dilforme  qui,  de  part  et  d'autre,  se  termine  à 
un  certain  degré 

»  Au  sujet  de  la  vitesse,  on  peut  dire  exactement  la  même 
chose  que  d'une  qualité  linéaire,  seulement,  au  lieu  de  dire: 
point  milieu,  il  faut  dire:  instant  milieu  du  temps  pendant 
lequel  dure  cette  vitesse. 

»  Il  est  donc  évident  qu'une  qualité  ou  une  vitesse  unifor- 
mément difforme  quelconque  se  trouve  égalée  à  une  qualité  ou 
à  une  vitesse  uniforme.  » 

Si,  comme  nous  le  pensons,  la  quantité  ou  mesure  d'une 
vitesse  s'identifie,  dans  l'esprit  d'Oresme,  avec  l'espace  linéaire 
que  le  point  mobile  parcourt,  le  résultat  auquel  notre  auteur 
vient  d'atteindre  est  singulièrement  grave  ;  il  peut,  en  effet,  se 
formuler  ainsi  :  Lorsqu'un  mobile  se  meut,  pendant  un  certain 
temps,  d'un  mouvement  uniformément  varié,  le  chemin  qu'il 
parcourt  est  égal  à  celui  qu'il  parcourrait  en  un  mouvement 
uniforme,  de  même  durée,  dont  la  vitesse  serait  égale  à  celle 
qui  est  prise  en  l'instant  moyen  du  premier  mouvement. 

Que  ce  soit  bien  là  la  proposition  qu'Oresme  entendait,  nous 
en  aurons  l'assurance  par  la  lecture  de  l'un  des  problèmes  que 
traite  notre  auteur. 

Comme  il  l'a  fait  en  un  précédent  problème,  Oresme  prend' 
une  certaine  longitude  qu'il  divise  en  parties  proportionnelles 
de  raison  -^  ;  mais,  en  chacune  de  ces  parties  proportion- 
nelles, il  ne  suppose  plus  que  la  longitude  soit  uniforme; 
il  la  suppose  seulement  uniforme  dans  les  parties  de  rang 
impair  et  uniformément  difibrme  dans  les  parties  de  rang  pair. 
H  admet  donc  qu'en  la  première  partie,  la  longitude  garde 
uniformément  un  certain  degré;  qu'en  la  seconde,  elle  croisse 
uniformément  de  ce  degré  au  degré  double:  qu'en  la  troisième, 
elle  garde  uniformément  ce  degré  double;  qu'en  la  quatrième, 

i.  Oresme,  Op.  laud..  Pars  III,  rap.  \  :  Ouocldam  aliud  exemplum.  Ms.  cit., 
fol.  2  6i  r"  et  v°. 


68  BULLETIN    HISPANIQUE 

elle  croisse  uniformément  de  ce  degré  double  au  degré  qua- 
druple, et  ainsi  de  suite.  Il  énonce  alors  ce  théorème  :  La 
mesure  totale  de  la  qualité  est  dans  le  rapport  ^  ^  '^  mesure 
de  la  qualité  qui  afïecte  la  première  partie.  Pour  démontrer  ce 
théorème,  il  se  sert,  bien  entendu,  de  la  règle  qu'il  a  posée  au 
sujet  de  la  mesure  d'une  qualité  uniformément  difforme. 

Une  fois  ce  théorème  démontré,  Oresme  ajoute  :  u  On  peut 
prouver  une  proposition  semblable  au  sujet  de  la  vitesse,  et 
l'appliquer  à  la  vitesse  comme  on  l'a  fait  au  chapitre  pré- 
cédent. »  Or,  au  neuvième  chapitre,  Oresme  avait  appliqué 
à  la  vitesse  le  théorème  qu'il  avait  démontré,  et  cette  appli- 
cation supposait  essentiellement  que  la  mesiin'  de  la  vitesse 
pendant  un  temps  donné  fût  l'espace  qu'elle  fait  parcourir  au 
mobile  pendant  ce  temps.  Il  est  donc  clair  qu'il  admet  la 
même  supposition  en  son  deuxième  chapitre,  qu'il  l'admet 
aussi  en  la  règle  de  laquelle  dépend  la  solution  que  ce  chapitre 
expose.  Il  entend  que  l'espace  parcouru  en  un  mouvement 
uniformément  varié  soit  égal  à  celui  qui  serait  parcoum  en 
un  mouvement  uniforme  de  même  durée,  ayant  pour  vitesse 
la  vitesse  qu'atteint  le  premier  à  son  instant  moyen. 

Or,  celte  loi  est  celle  dont  on  a  coutume  de  faire  l'un  des 
titres  de  gloire  de  Galilée. 

Comment  Oresme  a-t-il  été  amené  à  concevoii"  cette  féconde 
pensée?  On  peut,  je  crois,  le  deviner. 

Il  lui  arrive  d'insister  sur  cette  idée  que  la  vitesse  a  deux  sortes 
d'extensions,  l'extension  selon  le  sujet  et  l'extension  selon  la 
durée;  que  chacune  de  ces  deux  extensions  peut  olre  traitée  de 
la  même  manière  que  l'autre:  (piil  y  a,  j)ar  exemple,  des 
vitesses  uniformes,  uniformément  dillormes  selon  le  sujet, 
comme  il  y  a  des  vitesses  uruformcs.  uniformément  dilTormcs 
dans  le  temps. 

Or,  veut  il  donner  un  exemple  de  vitesse  uniformément 
(lilVoriiic  par-  rapport  au  sujet,  et  (tOTuniciicaiit  an  de^té  nul. 
il  cite  la  \itessc  d'un  riiNoii  (pii  toninc  autour  du  centre  du 
cercle. 

I.  Oresme,  Op.  laud.,  Pars  II,  cap.  Vil:  De  i|iiu(laiii  JifTerentia  iiiter  inotum 
localem  et  alteratioiiern.   Vis.  rit.,  fnl.  289  r". 


DOMINIQUE    SOTO    KT    LA    SCOLASTIQUE    PARISIEiSNE  Og 

C'est  de  cette  vitesse  que  traitait  le  petit  écrit  :  De  proporlione 
motimm  et  magnlladinum  dont  le  texte  était  déjà  connu  au 
\in^  siècle.  L'auteur  anonyme  de  ce  traité  montrait  qu'un  rayon 
ou  une  portion  de  rayon  qui  tourne  autour  du  centre  du 
cercle  balaye  un  espace  égal  à  celui  que  cette  même  ligne 
balayerait  en  une  translation  qui  aurait  pour  vitesse  la  vitesse 
de  son  point  moyen  ;  la  démonstration  qu'il  donnait,  fort 
analogue  à  celle  que  nous  venons  de  trouver  sous  la  plume 
d'Oresme,  le  conduisait  à  regarder  la  vitesse  du  rayon,  variable 
d'un  point  à  l'autre,  comme  équivalente  à  la  vitesse  du  point 
moyen;  en  résumé,  il  formulait,  pour  la  vitesse  uniformément 
diftorme  par  rapport  au  sujet,  la  règle  qu'Oresme  devait  for- 
muler pour  la  vitesse  uniformément  difforme  par  rapport 
au  temps. 

Très  certainement  connu  de  Bradwardine,  très  probablement 
connu  d'Albert  de  Saxe,  le  traité  De  proporlione  moiuum  el 
magnUadinum  ne  fut,  sans  doute,  pas  ignoré  d'Oresme  ;  lors 
même  que  ce  livre  ne  lui  fût  pas  venu  entre  les  mains, 
les  idées  qu'il  contenait,  résumées  dans  les  Traclatas  propor- 
lionum  de  Bradwardine  et  d'Albert  de  Saxe,  étaient  assuré- 
ment courantes  à  Paris  au  temps  où  le  traité  De  difformilaU' 
qiinlilalum  fut  rédigé.  Directement  ou  indirectement,  donc,  le 
petit  écrit  De  proporlione  nioluuni  el  magniludinuni  a  pu  inspirer 
au  grand  maître  du  Collège  de  Navarre  la  règle  que  nous  lui 
avons  entendu  formuler  et  que,  désormais,  nous  nommerons 
Règle  d'Oresme.  Par  ce  nom,  d'ailleurs,  nous  n'entendons  pas 
affirmer  qu'Oresme  ait  eu,  le  premier,  connaissance  de  cette 
règle  ;  ce  que  nous  dirons  au  paragraphe  XXIII  montrera 
que  cette  affirmation  ne  serait  nullement  assurée. 

En  i368,  Albert  de  Saxe  rédigeait  ses  Qusesiiones  in  libros  de 
Caelo  el  Miindo;  en  iSyi,  Nicole  Oresme  regardait  déjà  comme 
ancien  son  traité  De  difforndlale  qualitatum.  Avant  l'an  i.'îyo, 
donc,  deux  grandes  vérités  avaient  été  Tune  entrevue,  l'autre 
découverte;  on  avait  émis  l'hypothèse  que  la  chute  des  graves 
était  un  mouvement  uniformément  accéléré;  on  avait  formulé 
la  loi  qui,  en  un  tel  mouvement,  lie  l'espace  parcouru  au 
temps  employé  à  le  parcourir.  11  suffisait  de  donner  la  pre- 


70  BULLETIN    HISPAMQIE 

mière  proposition  comme  assurée  et  de  la  comparer  à  la 
'seconde  pour  que  les  deux  lois  essentielles  de  la  chute  des 
corps  se  trouvassent  formulées.  Le  fruit,  semble-t-il,  était 
mûr;  le  plus  léger  attouchement  allait  suffire  à  le  détacher. 

Or,  en  dépit  de  cette  prévision,  plus  dun  siècle  et  demi 
va  s'écouler  avant  que  ce  fruit  soit  cueilli  ;  c'est  seulement 
dans  les  écrits  de  Dominique  Soto  que  la  supposition  d'Albert 
de  Saxe  d'une  part,  que  la  découverte  dOresme  d'autre  part, 
se  compléteront  en  se  rejoignant;  jusqu'au  jour  oii  elles  seront 
réunies  par  le  savant  dominicain,  ces  deux  idées  vont  se 
transmettre  d'âge  en  âge  et  d'école  en  école,  mais  en  demeurant 
séparées  l'une  de  l'autre.  Ce  sont  les  péripéties  diverses  par 
lesquelles  cette  longue  tradition  s'est  maintenue  qu'il  nous 
faut  maintenant  retracer. 


XIX 


L'influence  de  Nicole  Oresaie  a  l'Université  de  Paris.  — 
Le  traité  De  latitudinibus  formarum.  Albert  de  Saxe. 
Marsile  d'Inghen. 

Le  texte  manuscrit  que  nous  avons  étudié  aux  deux  paragra- 
phes précédents  porte  en  titre:  Trarfalusdefiguralionepolenliarum 
el  ntensiirarum  dijforinituium.  Mais  une  main,  moins  ancienne 
que  celle  du  copiste,  lui  a  attribué  cet  autre  titre  :  De  hililudi- 
nibus  Jovmavnm  ah  Oresmr. 

Ce  dernier  litre  est  celui  d'un  autre  ouvrage,  dont  Maximi- 
lian  Gurtze  a  retrouvé  un  texte,  datant  probablement  de  la  tin 
du  XIV'  siècle,  en  un  manuscrit  de  la  bibliothèque  du  Gymnase 
Royal  de  Thorii  '. 

Cet  écrit  a  été  imprimé,  à  plusieurs  reprises,  à  la  fin  du 
XV'  siècle  et  nu  commencement  du  xvi*"  siècle 2. 

I.  Maxiiiiilian  Ciirl/o,  I  cher  die  llamlxrhrift  U.  '/*.  1'.  l'nililnnalum  lAuUdis  exftli- 
calio  der  koniijl.  fiymnaaiiiUiililiiilliek  :n  Tliorn  (Zeitschrift  fiir  Mulhviuiiltk  nnd  l'Ityaili, 
Xlll"'  .lalirgan^c,  iHOS.  Snpplt'menl,  p|).  ()s-i)7). 

a.  I*  Inrifiit  ftrrulilts  trartatiix  île  Idliliidinihiis  formarum  secundum  lieverendum 
doctorem  mmjistnim    Mcliolaeum  llore.n.    Die   deciiua    laiiuaiij    —     (au    fol.     ii    r») 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQtE    PARISIENNE  7I 

L'édition  de  i5o5  semble  attribuer  ce  traité  à  Oresme  lui- 
même  ;  mais  l'édition  de  1^86  se  borne  à  dire  qu'il  est  composé 
secundum  Nicholaum  Horen,  et  l'édition  de  i5i5  marque,  plus 
explicitement,  qu'il  a  été  écrit  secundum  doclrinam  Mngisiri 
Nicolai  Horem.  Il  est  certain,  en  effet,  que  nous  n'y  trouvons 
pas  un  ouvrage  original  du  grand  maître  du  Collège  de 
Navarre,  mais  bien  un  résumé,  composé  par  quelque  disciple, 
du  traité  De  difformiiate  qualilalum. 

Réduit  presque  exclusivement  à  des  définitions  et  à  des 
énoncés  de  propositions  qu'aucun  raisonnement  n'accom- 
pagne, ce  sec  compendium  ne  donne  qu'une  bien  pauvre  idée 
de  l'œuvre  qui  l'a  inspiré;  telle  est  cependant  la  puissance 
de  cette  œuvre  qu'on  en  peut  encore  deviner  quelque  chose 
en  la  médiocre  imitation  qu'en  donne  le  traité  De  lalUudinihus 
formarum;  Maximilian  Curtze  et  M.  Maurice  Cantor'  qui  n'ont 
connu  la  pensée  d'Oresme  que  par  le  petit  écrit  de  son  disciple, 
n'ont  pas  hésité,  cependant,  à  regarder  le  futur  évêque  de 
Lisieux  comme  le  précurseur  de  Descartes. 

Traclat\is  de  lalîtudinibus  formarum  a  venerabili  doctore  magistro  Nicolao  horen 
editus  fuit  foeliciter.  Impressus  ac  diligenti  cura  eraendatus  padiie  per  magisirum 
Matheum  cerdonis  de  vuindisgrech.  Anno  domini  ii80.  Die  vero  i8  mensis  Februarij. 
—  (au  fol.  12  r°)  [ncipiunt  questiones  super  trac  ta  tu  de  laliludinibus  formarum  determi- 
nate per  venerandum  doctorem  magisirum  blasium  de  parma  de  pelicanis.  —  (fol.  19,  r°) 
Expliciunt  questiones  super  tractatum  de  latitudinibus  formarum  magistri 
lohannis  (sic)  Horen  determinate  per  venerandum  doctorem  artiuni  :  magisirum 
Blasium  de  parma  de  pelicanis.  Impressum  Padue  Die:  mense  et  anno  supradictis. 
In  laude  dei  summi. 

2°  Questio  de  modalihus  Bassani  Politi.  --  Tractatus  proportionum  iiitroductorius  ad 
calculationes  Suisel. —  Tractatus  proportionum  Thiime  Braduardini.—  Tractatus  propor- 
tionum Nicholai  Horen.  —  Tractatus  de  latitudinibus  formarum  ejusdem  Nicholai.  —  Trac- 
tatus de  latitudinibus  formarum  Blasii  de  Parma.  —  Auctorsex  inconvenientibu's.  —  Questio 
sublilis  doctoris  Johannis  de  Casali  de  velocitate  motus  alterationis.  —  Questio  Blasii  de 
Parma  de  lacla  corporum  durorum.  Colophon  :  Venetiis  mandalo  et  sumptibus 
heredum  quondam  nobilis  Viri  D.  Oclaviani  scoti  Civis  Modoetiensis  per  Bonetum 
locatellum  bergomensem  presbyterum  Kal.  Seplembris  i5o5. 

3°  Contenta  in  hoc  libello.  Arilhmelica  commuais.  —  Proportiones  brèves.  —  De  latitu- 
dinibus formarum.  —  Algorithmus  M.  Georgii  Peurbachii  in  integris.  ■—  Algorithmus 
Magistri  Joanis  de  Gmunden  d/'.  minuciis  p/j/sjci.s.  Colophon  :  Impressum  Viennie  per 
Joannem  Singrenium  Expensis  vero  Leonardi  et  Luca'  Alantse  fratrum  .Anno 
domini  MGCCGCW.  Decimonono  die  Maii. 

Dans  le  corps  du  volume,  les  trois  premiers  traités  sont  ainsi  intitulés: 

Incipit  Arilhmelica  commuais  ex  divi  Severini  Boetii  Arithmetica  per  M.  .loannem  de 
mûris  compendiose  excerpla. 

Tractatus  brevis  proportionum  :  abbraviatus  e.v  libro  de  Proportionibus  D.  Thome 
Braguardiiii   Anglici. 

Tractatus  de  latitudinibus  formarum  secundum  doclrinam  magistri  Nicolai  Horem. 
I.  Moritz  Gatitor,  Vorlesungen  i'iber  die  (ieschichte  der  Mathematik.  Bd.  11,  von  1200- 
1GC8,  2"  Au  11.,  Leipzig,  1900  ;  pp.  1  29- 13 1 . 


-ja  RILLETIN    HISP.WfQUE 

Ils  neussenl  pu,  en  loul  cas,  le  saluer  du  litrede  précurseurde 
Galilée;  la  proposition  que  nous  avons  convenu  d'appeler  règf/e 
cVOresme  est  passée  sous  silence  au  traité  De  laliludinibas  forma- 
riini;  nous  n'y  trouvons  qu'une  indication  rapide  sur  la  propor- 
tionnalité entre  les  qua/ilités  de  deux  qualités  de  même  espèce 
et  les  aires  des  figures  qui  représentent  ces  qualités  :  «  Eadem 
est  proporlio  formœ  adjormam  qiue  est  Jigurœ  adjujurinn.  » 

Qu'un  semblable  manuel  ait  été  rédigé,  et  cela,  semble  t-il, 
avant  lu  fin  du  xiv*"  siècle,  c'est,  pour  nous,  la  preuve  manifeste 
que  les  métliodes  d'Oresme,  que  l'emploi  de  la  latitude  et  de 
la  longitude,  c'est-à-dire  des  coordonnées  rectangulaires,  pour 
figurer  les  variation^  des  diverses  propriétés  mesurables  se 
sont  très   vite  répandus  dans  les   écoles,  du   moins   à   Paris. 

De  cette  rapide  ditVusion  des  doctrines  proposées  par  le 
grand  maître  du  Collège  de  Navarre,  nous  allons  trouver  deux 
témoins  contemporains  :  Albert  de  Saxe  et  Marsile  d'inghen. 

En  l'une  de  ses  (Jneslions  sur  la  P/iysùjue,  Albert  de  Saxe 
écrit  ce  qui  suit'  : 

((  Soit  une  ligne  sur  laquelle  on  décrive  un  demi-cercle. 
Supposons  que  chaque  point  marqué  sur  cette  ligne  soit  blanc, 
et  que  les  blancbeurs  de  deux  quelconques  de  ces  points  soient 
entre  elles  comme  les  lignes  menées  de  ces  j)oints  à  la  cir 
conférence;  la  dilVormité  de  cette  blancbeur  sera  semblable  au 
demi-cercle;  ce  demi-cercle,  décrit  sur  la  ligne  [qu'afl'ecte  celte 
blancheur],  définit  causal  le  rayon  qui  peut  représenter 
l'intensité  de  la  blancheur  au  point  milieu  de  cette  ligne.  » 

Il  est  clair  qu'Albert  de  Saxe  em|)loie  ici  les  coordonnées 
rectangulaires  selon  les  principes  posés  par  Oresme;  la  der- 
nière phrase  s'inspire  visiblement  de  cette  pensée  sur  laquelle 
le  grand  maître  du  Collège  de  Navarre  avait  insisté  :  Une 
qu.ilité.  figurée  par  un  demi-cercle  lorsque  l'on  choisit  d'une 
cerlaine  manière  la  longueui'  <pii  doit  représenter  l'unité 
(I  inlensih''  de  la  (pialilé\  cessera  d'rlre  figurée  de  la  sorte  si 
Ton  change  (•cWc  longueur". 


I.  /Icij^iStV/iff  0(//'.s'/ii)«cs  .s'ii/«7  //7/r((.s  (/f  /'/ly.sirri  «u.sTiW/(j/io;if  iib  Allu'tio  de  Saxonia 
édite...  Venetiis  <iiim|itilius  liPrcilnrii  q.  I).  Oclaviani  Senti  Mmliiftieiisis:  at  Sociorum. 
2  1  Aiigiisti  I  ji(J.  Lilj.  \  II,  qini'?^l.  VI,  fol.  7.'|,  col.  <i. 


OOMIMQLE    SOTO    El     L\    SCOL.VSTIQLE    PARISIENNE  78 

L'ouvrage  imprimé  où  l'on  a  réuni'  les  écrits  de  Gilles  de 
Rome,  d'Albert  de  Saxe  et  de  Marsile  d'inghen  sur  le  De  gene- 
ratione  et  corruiiUone  se  termine  par  une  table  des  questions 
traitées  par  ces  divers  auteurs;  cette  table  porte  la  date 
suivante  :  io85,  die  i3  [prilis;  cette  date  est  évidemment  celle 
du  manuscrit  que  l'imprimeur  a  reproduit. 

Donc,  avant  l'an  1082,  011  la  mort  ravit  l'évèquc  de  Lisieux, 
ou,  au  plus  tard,  dans  le  temps  qui  suivit  immédiatement  cette 
mort,  Marsile  d'inghen  avait  rédigé  ses  Quœslioncs  in  Ubros  de 
generatione  el  corruplione.  Or,  en  ces  Questions,  il  est  fait  de  la 
longitude  et  de  la  latitude  un  emploi  qui  est  imité  de  Mcolc 
Oresme. 

Indiquons  en  deux  mots  la  théorie  au  sujet  de  laquelle  cet 
emploi  se  trouve  être  fait. 

Cette  théorie,  assez  singulière,  avait  été  imaginée  par  Jean 
Buridan  ', 

Concevons  un  certain  sujet  inégalement  chaud  en  ses  divers 
points.  Buridan  supposait  que  chaque  point  était  à  la  fois 
chaud  et  froid,  que  l'intensité  du  froid  en  un  point,  ajoutée 
à  l'intensité  de  la  chaleur  au  même  point,  donnait  partout  la 
iTième  somme,  que  notre  auteur  désignait  comme  étant  le 
gradiis  sununas  raloris. 

Cette  opinion  qu'il  n'eùl  pas  fallu  modifier  beaucoup  pour 
la  transformer  en  celle-ci  :  L'intensité  du  froid  n'est  que 
l'intensité  de  la  chaleur  changée  de  signe,  cette  opinion,  disons- 
nous,  attira   vivement  l'attention   des   scolastiques   de   Paris. 

Albert  de  Saxe  expose-^  avec  soin  cette  opinion  et,  aussitôt 
après,  l'opinion   contraire,  selon  laquelle,  aux  divers   points 

1.  Egidius  cum  marsilio  el  alberlo  de  generatione.  Commentaria  Jidelissimi  expasi- 
loris  D.  Egidii  Romani  in  libros  de  generatione  el  corruidiune  Aristotelis  ciun  texlu 
inlercluso  singulis  locis.  —  Questiuncs  item  subtilissime  ciusdein  docluris  super  primo  Uliro 
de  generatione  :  niinc  quidem  printum  in  puhlicum  prodeuntes.  —  Questioiies  quoquc  claris- 
siini  docloris  Marsilii  Inguem  in  prefatos  libros  de  generatione.  —  Item  questiones  suhti- 
lissitne  magistri  Alljcrii  de  saxonia  in  eosdem  libros  de  gène,  nusguam  alias  inipresse.  — 
Omnia  aciuralissinie  revisa  :  algue  castigata  :  ac  guantum  ars  enili  poluit  Fideliter  impressa. 
Colophon  :  linpressum  venetiis  inandalo  cl  cx.pcnsis  Nobilis  viri  Liiceanloiiii  de 
giunta  llorcnlini.  Anno  domini  i5i8.  die  12  meiisis  Februarii. 

2.  Magistri  Joannis  Buridam  Quœstiones  super  octo  Physicorum  libros;  lil).  III. 
qu;pst.  III. 

3.  Alberli  de  Saxonia  tjiuivstiones  in  libros  Pliysicoruni  ;  li|j.  V,  quirsl.  I\  ;  éd.  cit., 
fol.  (J2,  coll.  a  et  b. 


•j4  BULLETIN    HISPANIQUE 

d'un  sujet  inégalement  chaud,  existent  seulement  des  chaleurs 
inégalement  intenses,  sans  aucun  mélange  de  froid;  puis  il 
ajoute,  en  manière  de  conclusion  :  «  Je  crois  que  celte  seconde 
opinion  est  plus  exacte,  mais  la  première  est  plus  répandue.  » 

Entre  ces  deux  opinions,  Oresme  ne  veut  pas  discuter  où  se 
trouve  la  doctrine  véritable';  il  se  propose  seulement  de 
montrer  comment  sa  méthode  permet  de  représenter  géomé- 
triquement la  théorie  de  Buridan, 

Il  suppose  que  le  sujet  échauffé  se  réduise  à  une  ligne  droite. 
En  chaque  point  de  cette  droite,  il  élève  une  latitude  propor- 
tionnelle à  l'intensité  de  chaleur  en  ce  point;  il  prolonge  celte 
droite  d'une  longueur  proportionnelle  à  l'intensité  de  froid 
au  même  point;  la  latitude  totale  ainsi  obtenue  a,  en  tout 
point,  la  même  longueur.  On  se  trouve  ainsi  avoir  dressé,  sur 
la  longitude  qui  représente  l'extension,  une  figure  rectan- 
gulaire; une  ligne  divise  ce  rectangle  en  deux  parties  qui 
représentent  respectivement  les  deux  qualités  contraires 
associées  lune  à  l'autre  au  sein  du  sujet. 

«  Cette  opinion,  »  dit  Marsile  d'inghen  %  «  m'apparait  proba- 
ble ;  je  ne  sais  si  cela  vient  de  ce  que  je  me  suis  pris  de  passion 
pour  l'opinion  de  mon  Maître  Jean  Buridan,  qui  l'a  proposée.» 
C'est  au  moyen  de  la  représentation  géométrique  imaginée 
par  Oresme  que  Marsile  expose  la  théorie  qui  lui  j)laîl  si  fort-^. 

Marsile  d'inghen  ne  se  contente  pas  de  faire  usage  des 
coordonnées  rectangulaires,  de  la  longitude  et  de  la  latitude; 
il  connaît  également  et  emploie  la  règle  d'Oresme  ;  il  la  cilc 
comme  une  vérité  incontestée,  d'usage  courant,  que  l'on 
invoque  à  litre  d'argument  pour  ou  contre  une  proposition 
soumise  à  la  discussion.  C'est  ainsi  (|ue  cette  règle  se  trouve 
rappelée  ''  en  une  question  sur  le  De  (jeiicralione  cl  rorniplinne; 
((  S'il  n'en  était  pas  ainsi,  »  lisons  nous  en  une  argumentation, 

[ .  Maf,M8lri  Nirliolai  Orcsmf  Tractalus  de  difforinilalc  qnnlHalitm  ;  Pars  I,  CHp.  \  l\  : 
l)e  ligiiralionc  coiilrariorum  ;  iris,  cil.,  fol.  aj.'j,  v",  cl  loi.  aaG,  r". 

a.  Onesliones  clarUsimi  filiilosophi  Marsilii  iii<rucii  super  lihris  de  <ieneralione  et 
corruplione.  Lil».  II.  qiia>l.  VI  ;  éd.  cil.,  fol.  io(J,  coll.  c  cl  d,  el  fol.  107,  col.  a. 

3.  Marsile  se  sert  encore,  ru  un  atilrceridr.iil  «lu  incine  Irailé,  de  la  rcpréscnlalion 
par  coordonn«';c8  reclangiilaircs  (Vlarsilii  ln;;ncn,  Op.  latid.,  lib.  I,  <|iiii'bt.  Wlll; 
éd.  cil.,  fol.  77.  col.  c). 

'1.   Marsile  d'inghen,  Op.  laud.,  lib.  I,  «luiisl.  \\  ;  éd.  cil.,  fol.  y",  col.  c. 


DOMINIQUE    StjTO    ET    l,A    SCOLASTIQI  E    PARISIENNE  -,") 

«  une  latitude  uiiiformémenl  dilîorine  ne  correspondruit  pas 
à  son  degré  moyen.  » 

L'Abrégé  du  livre  des  Physhjues  a  certainement  été  composé 
par  Marsile  d'Inghen  à  Paris,  partant  avant  l'année  i386,  où 
l'auteur  était  recteur  de  Heidelberg.  Or,  nous  y  trouvons 
plusieurs  allusions  à  la  règle  de  Nicole  Oresme. 

En  cet  abrégé,  par  exemple,  nous  lisons,  sur  les  vitesses  des 
divers  mouvements,  des  considérations  qui  sont,  pour  la  plu- 
part, empruntées  au  Tractatus  proporlio/uim  d'Albert  de  Saxe. 
Elles  en  diftèrent  cependant  en  un  point;  contre  Bradwardine  et 
Albertutius,  Marsile  reprend  l'opinion  soutenue  au  traité  Oepor- 
tionalilule  motuum  et  magfiiiudinam;  il  admet  qu'en  un  corps 
dont  les  diverses  parties  se  meuvent  inégalement,  la  vitesse  doit 
être  mesurée  par  la  longueur  que  décrit  un  point  moyen  ;  or,  à 
l'appui  de  cette  opinion,  l'auteur  invoque  ■  la  raison  que  voici  : 

((  Une  latitude  difl'orme  ne  doit  pas  être  dénommée  par  le 
point  le  plus  intense,  mais  bien  plutôt  par  le  point  moyen.  » 

Ailleurs,  Marsile  se  demande  comment  il  l'aut  entendre  la 
proportionnalité,  admise  par  la  Dynamique  péripatéticienne, 
entre  la  puissance  qui  meut  un  corps  et  la  vitesse  de  ce  corps, 
dans  le  cas  où  la  puissance  varie  d'un  instant  à  l'autre;  il 
répond  en  ces  termes  ^  : 

((  En  ce  cas,  il  n'y  a  pas  de  puissance -^  uniforme  qui  demeure 
toujours  la  même,  mais  il  y  a  une  puissance  difl'orme  constam- 
ment la  même,  dénommée  par  son  degré  moyen  ;  de  même, 
il  n'y  a  pas  une  vitesse  qui  demeure  uniforme,  mais  une 
vitesse  difl'orme,  dénommée  par  son  degré  moyen,  ou  par  un 
autre  degré  si  elle  n'est  pas  uniformément  difl'orme.  » 

En  ses  Questions  sur  la  Physique,  Marsile  d'Inghen  revient 
à  l'opinion  de  BradAvardine  et  d'Albert  de  Saxe;  il  veut  que 
la  vitesse  d'un  corps  soit  la  vitesse  du  point  qui  se  meut  le 
plus  rapidement.  La  règle  d'Oresme  ne  peut  plus  lui  servir 
d'argument  en  faveur  d'une  telle  opinion;  mais,  à  l'encontre 

1.  lncii)iunl  subtiles  doctrinaque  lAene  abbrevialiones  libri  phisicorum  édile  a  preslan- 
tissimo  philosophe)  Marsilio  inguen  doclore  pirisiensi  (s.  1.  n.  d.)  (Pavia,  Autoiiiiis  de 
Carcano,  ca.  liyo),  3«  fol.  (non  paginé)  après  lo  fol.  signé  g  h,  col.  d. 

2.  Marsile  d'Inghen,  Op.  laiid.,  fol.  signé  i  3,  col.   b. 

.").  Le  le.vlc   au  lieu  de  puissance  (polenliw),  dit  proportion  (proporlio). 


"6  BL^LLETIN    HISPANIQUE 

de  cet  avis,  elle  devient  une  objection  qu'il  faul  examiner. 
'Marsile  a  soin  de  formuler  '  cette  objection  :  «  La  blancbeur 
uniforménient  difforme  n'est  pas  plus  intense  que  son  degré 
moyen.  »  Cette  objection  sommairement  écartée,  la  question 
traitée  par  notre  auteur  se  trouve  extrêmement  semljlable, 
par  le  fond  comme  par  la  forme,  au  Tracddus  proporlionum 
d'Albert  de  Saxe. 

Les  diverses  indications  que  nous  venons  de  recueillir  nous 
montrent  qu'au  temps  où  Nicole  Oresme,  évéquc  de  Lisieux, 
vivait  ses  derniers  jours,  l'usage  des  coordonnées  rectan- 
gulaires, qu'il  avait  imaginé  et  recommandé,  s'était  répandu 
dans  les  écoles  de  Paris;  en  particulier,  la  règle  relative  aux 
latitudes  uniformément  difformes,  que  justifiait  l'emploi  de  ces 
coordonnées,  était  couramment  invoquée  dans  les  discussions 
de  Physique. 

Vers  le  même  temps,  cette  règle  n'était  point  ignorée  à 
l'Université  d'Oxford;  peut-être  môme  l'y  connaissait- on 
avant  que  Mcole  Oresme  l'eût  exposée  à  Paris  ;  les  Jean  de 
Dumbleton,  les  Swineshead,  les  Guillaume  Heytesbury  l'invo- 
quaient en  leurs  captieux  sophismala,  en  leurs  épineuses  calcula- 
liones.  Avec  la  subtile  Logique  d'Oxford,  elle  pénétra  en  l'Italie 
du  (hmUroceido  et  fut  fréquemment  commentée  et  discutée 
dans  les  chaires  de  Bologne  et  de  Padoue.  Mais  nous  ne  pou- 
vons ici  retracer  les  formes  variées  que  la  doctrine  de  la  latitude 
des  formes,  que  la  loi  du  mouvement  uniformément  dill'orme 
ont  reçues  des  maîtres  anglais  et  italiens;  nous  ne  pouvons 
rappeler  les  réflexions  que  ces  théories  ont  suggérées  à  Léonard 
de  Vinci.  Nous  ne  suivrons  donc  pas  à  Oxford,  à  Bologne  et  à 
Padoue  l'étude  du  mouvement  uniformément  varié  '.  D'emblée, 
nous  allons  rechercher  ce  qu'elle  était  devenue  en  l'Université 
de  Paris  un  peu  avant  le  temps  où  Dominique  Solo  viendrait 

s'asseoir  sur  les  bancs  de  cette  Université. 

P.  DUllKM. 

(A  suivre.) 

I.  Qucsliones  suhlilissimc  J<jlianiiis  Marcilii  In^'ucii;  suiirr  orlo  libros  l'kysiconiin 
sccundum  noininalium  viuin.  Lib.  VI,  qiiirsl.  V  :  Ulniin  vclorilas  moins  sil  allcmloiida 
pênes  spaliiim  in  taiilo  Icniporc  pcrlraiisiluni. 

1.  L'histoire  «le  la  <li>ctrinc  de  la  latitude  «les  lumies  à  Oxford  et  en  Italie  est 
l'objet  d'un  article,  intitule  :  La  Dialectique  d'O.rfnnl  et  In  Snilasliquc  itidirniic,  qni 
sera  prochainement  insiTe  au  HuUelin  italirii. 


INVENTAIRE  DE  LA  (lOLLECTION  EDflLARD  FAVRE 

(Suite  '.; 


Vol.  LXVIII. 

Recueil  de  pièces  relatives  à  la  réforme  des  Franciscains  d'Anda- 
lousie. 15-6-1577. 

Les  pièces  dont  se  compose  ce  recueil,  des  lettres  autographes  en 
général,  sont  adressées  à  Nicolas  Ormaneto,  évêque  de  Padoue  et 
nonce  du  pape  en  Espagne,  par  des  religieux  ou  des  couvents  fran- 
ciscains d'Andalousie.  Les  lettres  ont  surtout  trait  au  conilit  entre 
Fr.Juan  Navarro,  ancien  provincial  d'Andalousie,  commissaire  général 
de  l'ordre  pour  l'Espagne,  d'une  part,  et,  d'autre  part,  Fr.  Diego  de 
Bonventura,  récollet,  commissaire  du  nonce  apostolique,  et  le  licencié 
Juan  de  Padilla. 

(379  feuillets;  ^20  sur  240  millimètres.) 

Vol.  LXIX. 

Recueil  de  pièces  diverses  relatives  à  différentes  affaires  religieuses 
ou  ecclésiastiques  des  v\//«  et  xviir  siècles. 

Fol.  I .  Mémoire  d'un  religieux  de  la  compagnie  de  Jésus  sur  les 
idées  de  Pedro  Gonzalez  Galindo,  membre  de  cette  compagnie;  Madrid, 
27  décembre  i6l\3. 

Fol.  28.  ((  Valores  de  las  rentas  del  obispado  de  Cordova  para  las 
pagas  del  ex'°  que  se  an  de  hazer  a  Su  Mag'  este  aiïo  de  1646.  » 

Fol.  39.  Lettie  de  Buenaventura  Fusler  de  Ribera  au  [\  II  ]  duc  de 
Sessa  [D.  Antonio  Fernândez  de  Cûrdova],  ambassadeur  d'Espagne 
à  Rome,  relative  à  la  canonisation  de  Fr.  Thomas  de  Nillaimeva; 
Madrid,  27  août  i652.  —  Original. 

I.   Voir  Bull,  tdsij.,  t.  \.l,  [).  295;  \I(,  p.  4y,  i4<J,  017;  Xlll,  p.  Gi,  lyi,  So;. 
Butl.  htspuii.  0 


78  BULLETIN    HISPANIQUE 

Fol.  l\i.  ((  Origen  de  las  religiones,  sucession  de  ellas...  desde  Adan 
hasta  nuestros  tiempos  »  ;  i652,  —  Pièce  imprimée. 

Fol.  ^3.  Mémoire  contre  les  statuts  promulgués  dans  un  grand 
nombre  d'églises  d'Espagne  qui  interdisent  l'accès  aux  dignités  ecclé- 
siastiques à  tout  homme  ayant  du  sang  juif  ou  sarrasin;  s.l.n.d.  — 
En  latin. 

Fol.  88.  K  Copia  de  una  carta  del  canonigo  Giginta  al  conde  de 
Chinchon  :  relacion  de  como  el  S  '  San  Lorenzo  fue  cardenal  »>  : 
s.l.n.d. 

Fol.  94.  Écrits  divers  envoyés  [au  comte  d'AltamiraPj  par  Johannes 
Libertus  Hennebel,  relatifs  au  jansénisme  et  au  formulaire  d'Alexan- 
dre Vil  :  Mémoire  du  cardinal  Lauraea  sur  le  formulaire  de  l'arche- 
vêque de  Malines  [Humbert-G.  Frecipiano] ;  en  latin;  —  Réponse  de 
J.  Libertus  Hennebel  aux  objections  de  l'archevêque  de  Malines;  en 
latin;  — Mémoire  présenté  au  pape  pour  protester  contre  une  nouvelle 
constitution  qui  confirmerait  simplement  celles  d'Innocent  X  et 
d'Alexandre  Vil;  en  italien;  —  Diverses  mesures  prises  contre  les 
jansénistes  par  le  duc  de  Bavière,  Maximilien  Emmanuel,  gouver- 
neur des  Pays-Bas;  en  italien;  —  Deux  requêtes  adressées  au  pape 
par  J.  Libertus  Hennebel;  en  italien;  —  Lettre  des  évêques  des  Pays- 
Bas  espagnols  au  pape  pour  demander  de  nouvelles  déclarations  sur 
le  formulaire  d'Alexandre  VII  ;  en  latin  ;  —  Mémoire  adressé  par  les 
mêmes  au  duc  de  Bavière;  en  latin  ;  —  Deux  mémoires  de  J.  Libertus 
Hennebel;  en  latin.  —  1694  «<397. 

Fol.  196.  «  Relacion,  copias  de  cartas  y  subcesos  de  Fr.  Carlos 
de  Austria,  novicio  de  este  convento  de  S.  Lorenzo  el  Real  »  ; 
I 663 -1664. 

Fol.  228.  Lettres  et  pièces  diverses  relatives  à  l'intervention  du 
comte  d'Altamira  [D.  Antonio  Osorio  y  Moscoso,  marquis  d'AstorgaJ 
dans  le  différend  pendant  entre  le  Collège  des  jésuites  et  le  chapitre 
de  l'Eglise  métropolitaine  de  Santiago  de  Compostella;  août  1721. 

Fol.  33i.  Mémoire  de  Francisco  de  Ortega,  de  l'ordre  de  St.  Augus- 
tin, sur  la  possibilité  d'envoyer  un  ambassadeur  au  roi  de  Chine  et 
d'évangéliser  les  Chinois;  s.  I.  n.d. 

Fol.  341.  Requête  de  Pedro  Fernandez  de  Quiros  au  roi  pour 
obtenir  certaines  facilités  en  vue  d'un  voyage  missionnaire  au  Pérou  ; 
s.  l.  n.  d. 

Fol.  3/|3.  «Lista  de  los  prebcndados  (|ue  tiencn  ascenso  y  de  los 
demas  sugctos  que  se  han  mostrado  pretendicntes  a  dos  canongias 
vacantes  en  la  santa  yglesia  catedral  de  Guadalaxara  »  ;  s.  l.  n.d. 

Fol.  359.  Lettres  el  pièces  diverses  relatives  à  la  nouvelle  chapelle 
de  N.-D.  des  Augustins,  au  Buen  Reliro,  et  à  l'autorisation  d'y  admi- 
nistrer les  saints  sacrements;  1723. 

(5i7  feuillets;  3i5  sur  2/10  millimètres.) 


INVENTAIRE    DE    LA.    COLLECTION    EDOUARD    FAVRE  79 

Vol.  LXX. 

Copie  de  l'acte  de  fondation,  par  Philippe  11,  du  monastère  de  «  S.  Lo- 
renzo  et  Real  »,  de  l'ordre  de  SI  Jérôme,  et  des  approbations  données 
à  cette  Jondalion  par  le  Chapitre  général  de  l'ordre  de  St  Jérôme  et 
par  le  pape  Pie  V,  1567 . 

(Parchemin;  45  feuillets;  3io  sur  210  millimètres.) 

Vol.  LXXI. 

Recueil  de  pièces  diverses  relatives  à  la  maison  royale  d'Espagne: 
—  à  l'administration  et  aux  finances  du  royaume  ;  —  à  l'armée  et  à  la 
/lotte  ;  —  à  l'administration  du  duché  de  Sessa  et  à  diverses  affaires 
particulières,  wr-wiir  siècles. 

Fol.  I.  Sommaire  des  conditions  du  mariage  de  Philippe  II  et  de 
Marie  d'Angleterre;  [i553].  —  En  italien. 

Fol.  3.  «  Forma  de  la  enlrada  que  se  ha  de  observar  quando  Su 
Mag'  la  haze  en  algun  lugar,  a  cavallo  »  ;  26  novembre  1659. 

Fol.  6.  Copie  d'un  bref  de  Grégoire  XllI  à  la  reine  Anne  d'Espagne, 
par  lequel  il  lui  annonce  l'envoi  d'une  rose  d'or  bénie  ;  Rome,  18  mars 
1577.  —  En  latin. 

Fol.  9.  Lettre  de  Philippe  111  au  marquis  de  Poza  pour  lui  annon- 
cer que  la  reine  est  heureusement  accouchée  d'un  fils  [Ferdinand]; 
Valladolid,  i3  avril  1609.  —  Original. 

Fol.  10.  Relation  du  transport  des  corps  des  rois  catholiques  dans  le 
Panthéon  élevé  par  Philippe  IV;  s.  1.  n.  d. 

Fol.  i4.  Cinq' pièces  diverses  relatives  au  service  de  la  chapelle 
royale  et  au  traitement  des  artistes  qui  y  chantent;  s.  1.  n.  d. 

Fol.  2/4.  «  Asiento  de  las  minas  [del  reyno]  por  tiempo  de  diez 
annos,  i554asta  i563.  » 

Fol.  36.  «  Copia  de  un  asiento  que  se  tomo  con  Agustin  y  Lorenzo 
Spinola  sobre  la  administracion  de  los  naipes,  en  9  de  jullio  i566.  » 

Fol.  48.  Avis  donné  par  la  junte  du  patrimoine  royal  sur  les  droits 
fiscaux  aliénés  en  fiefs  par  le  roi;  23  août  i58o. 

Fol.  5o.  Mémoire  sur  le  droit  qu'a  le  roi  de  prélever  des  impôts  sur 
les  biens  de  ses  vassaux  ;  s.  l.  n.  d. 

Fol.  52.  ((  Copia  de  las  nuevas  ordenes  para  el  consejo  real  »  ; 
Madrid,  février  1598. 

Fol.  56.  «  Summario  de  los  cinco  puntos...  que  son  causa  que  las 
cosas  del  govierno  de  la  monarchia  de  Su  Mag'  no  vayan  como  dcsea, 
y  de  los  medios  convenientes  para  el  remedio  de  cada  uno  »  [par  Gas- 
par  de  Pons]  ;  s.  1.  n.  d.  —  Pièce  imprimée. 


8o  BULLETIN    HISPANIQUE 

Fol.  70.  Autorisation  accordée  par  le  Conseil  du  roi  à  la  ville  de 
Madrid  de  prélever  un  impôt  poiu  couvrir  les  frais  occasionnés  par 
l'aménagement  du  palais  de  la  reine;  ai  octobre  1608. 

Fol.  -2.  «  Ordenan(.as  reaies  para  la  nueva  lorniacion  de  la  junta 
del  Atarazanal  »  ;    iG33-i65(j.  —  Copies. 

Fol.  85.  ('  Discurso  del  comle  Joan  BaplislaBrembalo  al  duque  de 
Sessa  [D.  (lonzalo  Fernândez  de  Côrdova]  tocante  a  la  milicia  del 
inar  »  ;  s.  d. 

Fol.  95.  Notes  sur  les  états  de  service  dun  certain  nombre  d'offi- 
ciers (D.  Roque  de  Mella,  D.  Francisco  de  la  Pena,  D.Pedro  de  Men- 
doza,  Luis  Sanchez  Pereira,  etc.),  s.  d. 

Fol.  97.  u  Kelacion  del  dinero  que  montara  en  cada  uno  ano  cl  gasto 
de  una  armada  de  3o  navios  y  dos  pataches,  y  la  gente  de  guerra  y 
inar  que  sera  necessario  para  armarlos  »>  ;  iCaS. 

Fol.  100.  «  Relacion  de  lo  que  a  montado  la  compania  ticl  capilan  D. 
Francisco  de  Vargas  »,  signée  par  llernando  de  Sandoval  ;  s.  1.  n.  d. 

Fol.  100.  «  Koole  des  archiers  de  corps  de  Sa  iMajesté  pour  les  mois 
de  may,  juing,  juillel  et  aoust  de  lOoo.  » 

Fol.  109.  «  Discurso  do  Herrera,  cura  de  \  ayona,  sobre  la  milicia  »  ; 
s.  1.  n.  d. 

Fol.  1 15.  Note  sur  l'approvisiomiement  en  armes  ou  en  elTels  d'équi- 
pement de  certaines  places  ;    iGSa. 

Fol.  117.  <(  Sobre  lo  que  Sevastian  de  Oleaga  obro  con  9^,000  duca- 
dos  que  se  le  remitieron  a  Santander,  el  ano  passado  de  i()3i,  para  el 
apresto  del  armada  y  demas  cmbarcaciones  que  esluvicron  a  su  cargo 
en  aquel  puerlo.  » 

Fol.  1 19.  c(  Relacion  do  lo  (pio  sera  necesario  embarcar  para  cl  ser- 
vicio  de  seis  mcdios  caiiones  de  artillera  »  :   [i632  ou  i633J. 

Fol.  123.  «  Relacion  de  los  navios  do  que  se  a  de  conponer  la 
armada  que  Su  Mag'  a  mandado  se  aprosle  para  el  mes  de  mayo  deste 
ano  de  i()33.  »> 

Fol.  i-io.  0  Memoria  de  los  navios  que  se  aprestan  en  Cadiz  para  el 
socorro  del  Hrasil  »  ;    i5  septembre  i633. 

Fol.  127.  Avis  sur  les  mesures  à  prendre  en  vnc  do  l'expédition  du 
Brésil  et  du  siège  de  Pernambuc;  |  il)33]. 

Fol.  i3i.  «  Relacion  del  estado  de  las  cosas  del  armada  »;  i(S  juil- 
let i033. 

Fol.  i33.  Infoi  ination  sur  l'occupalicn  de  Ciuaçao  pai-  les  Hollan- 
dais; 22  octobre  i63^. 

l'ol.  139.  «  Rolacion  de  los  navios  que  Su  Mag'  tienc  en  la  armada 
del  mar  O.cano  )>  ;  s.  d 

Fol.  l 'i  I .  "  Kelacion  do  l'artilleiia  (pio  ay  en  Terragona  »  ; 
avril  i<)/|i. 

l'"ol.  143.  «  FI  ostado  de  los  navios  qtie  se  provienon  011  (^adiz  »  ;  s.  d. 


INVENTAIRE    DE    LA    COr.r.ECTION    Él)Ol  ARD    FAVRE  8l 

Fol.  1^5.  «  Titulo  de  D.  Fadrique  de  Toledo  de  capitan  gênerai  do 
la  armada  del  mar  Ozean  )>:  21  mai  161 7. 

Fol.  1/19.  «  Gente  que  se  a  de  ordenar  para  la  batalla  »;  s.  1.  n.  d. 

Fol.  i5i.  «  Cunto  de  li  pecori  donali  per  li  citalini  de  Andri  alla 
duchessa  de  Sessa  »  ;  s.  1.  n.  d.  —  En  italien. 

Fol.  i53.  Extrait  d'une  lettre  du  comte  de  Sessa  [D.  Gonzalo  Fei- 
nândez  de  Gôrdova],  au  président  de  Grenade;  16  mai  1570. 

Fol.  i54.  Inventaire  des  pièces  déposées  par  Assensio  Lopez,  le 
10  avril  i58'i,  relatives  au  procès  du  duc  de  Sessa  contre  les  héritiers 
de  Carlo  y  Antonio  de  Sangro  à  propos  de  l'état  de  u  Torre  Mayor  ». 

Fol.  i56.  Lettre  du  duc  de  Médina  Sidonia  [Alfonso  Ferez  de 
Guzman]  à  la  duchesse  de  Sessa  [D'  Francisca  Fernândez  de  Gôrdova 
y  de  La  Cerda]  pour  lui  dire  d'envoyer  à  Jerez,  le  plus  vile  possible, 
les  troupes  qu'elle  a  offertes  à  Philippe  11;  8  juin   iôSq.  —  Original. 

Fol.  160.  Copie  d'une  lettre  de  Philippe  III  au  duc  de  Sessa  [Luis 
Fernândez  de  Gôrdova],  et  à  Ruy  Diaz  de  Rojas  y  Manrique.  gouver- 
neur des  états  de  Baena;  Hi  juin  1(307. 

Fol.  162.  Copies  de  deux  lettres  du  duc  Médina  Sidonia  fAlfonso 
Perez  de  Guzman]  au  duc  de  Sessa;  20  juin  et  9  juillet  1607. 

Fol.  i6fi.  «  Orden  de  Ruy  Dias  de  Rojas  y  Manrique,  gobernador 
gênerai  de  los  estados  de  Baena  y  Cabra,  a  los  consejeros  de  este 
estado  para  que  levanten  la  gente  de  ynfanteria  que  a  cada  uno  tocare  »; 
Baena,  i"  juillet  1607;  —  Copie. 

Fol.  168.  Lettre  du  duc  de  Sessa  [Luis  Fernândez  de  Gôrdova | 
relative  à  l'administration  du  duché  de  Baena;  Baena,  3  février  1G21. 

—  Copie. 

Fol.  170.  Lettres  du  même  à  D.  Juan  Angel  de  Andrada  (i62/i-i()20, 
10  L),  à  Simon  de  Otanes  (i6a/|,  2  1.),  et  à  la  Junta  de  Baena  (162/1). 

—  Copies. 

Fol.  202.  Deux  lettres  de  D.  Juan  Angel  de  Andrada  au  duc  de 
Sessa  «sobre  el  negocio  de  Fernândez  de  Velasco  »  ;  12  mars  et 
3  avril  1625.  —  Originaux. 

Fol.  206.  Mémoire  du  même  sur  la  situation  du  duché  de  Baena; 
Baena,  4  novembre  i63i.  —  Original. 

Fol.  2i4.  Avis  au  comte  de  Cabra  [Antonio  Fernândez  de  Gôrdova 
y  Cardona]  de  sa  nomination  au  poste  de  commandant  de  la  place  de 
Garthagène;  février  i636. 

Fol.  218.  Lettre  de  Pedro  de  Moscoso  au  duc  de  Sessa  (Luis  Fer- 
nândez de  Gôrdova]  ce  sobre  el  sueldo  de  gran  almirante  de  Napoles  »  ; 
Madrid,  8  juillet  i638.  —  Original. 

Fol,  22G.  Lettre  de  Philippe  IV  au  comte  de  Penaranda  relative  aux 
droits  de  succession  dus  par  le  duc  de  Sessa  [Francisco  Fernândez  de 
Gôrdova,  Cardona  y  Aragon]  ;  Madrid,  27  juillet  iGôg.  —  (lopie. 

Fol.    228.   Lettre  de  la  reine   Marie-Anne  d'Autriche  au   cardinal 


Sa  BILLETIX    HISPANIQUE 

Panziaticho  pour  lui  recommander  le  duc  de  Sessa  [D.  Félix  Fer- 
nândez  de  Côrdova];  21  décembre  1694.  —  Copie. 

Fol.  aSo.  Lettre  du  cardinal  del  Giudize  au  duc  de  Sessa;  Rome, 
i5  juillet  1G96.  —  Original. 

Fol.  aSi.  Lettre  de  D.  M.  Lopez  Carreno  au  même;  Rome, 
21  avril  1697.  —  Original. 

Fol.  233.  Lettre  de  l'archevêque  de  Thessalonique  au  même  ; 
9  juin  1697.  —  Original,  en  italien,  avec  la  minute  de  la  réponse  du 
duc  de  Sessa. 

Fol.  235.  Lettre  du  duc  de  Sessa  au  pape  [Innocent  XIlj  ;  Madrid, 
37  juin  1O97.  —  Minute. 

Fol.  287.  Minutes  de  cinq  lettres  du  même  sans  adresse;  1697. 

Fol.  2^3.  «  Panegirico  en  accion  de  gracias  por  la  venida  a  su  estado 
del  duque  de  Sessa,  por  D.  Francisco  Santaella  »  ;   1706.  —  Original. 

Fol.  262.  Lettre  du  duc  de  Sessa  à  D.  Bartolome  de  Miranda; 
4  mars  170G. 

Fol.  254.  Titre  de  «  corrector  de  los  libros  »  accordé  par  Philippe  11 
à  Juan  Yazquez  del  Marmol,  en  remplacement  du  lie'"  Hurtado; 
Madrid,  20  septembre  1572.  —  Copie. 

Fol.  256.  Deu.\  pièces  relatives  au  mariage  du  grand-duc  de  Toscane 
[F. -M.  de  Médicis]  et  de  Blanca  Capello,  de  Venise;  1579.  —  Copies, 
en  italien. 

Fol.  2G0.  Lettre  de  recommandation  du  cardinal  Ascanio  Colonna 
en  faveur  de  Jean-Baptiste  Capra  de  Montalboda;  5  septembre  i588. 
—  Copie,  en  latin. 

Fol.  2G2.  Douze  pièces  relatives  au  testament  et  à  la  succession  de 
D.  Juan  de  Zûniga;  i588-i592  et  s.  d. 

Fol.  292.  Lettre  de  Philippe  111  au  cardinal  Aldobrandino  pour  le 
charger  de  demander  au  pape  les  dispenses  dàge  nécessaires  au 
mariage  de  1).  Francisca  de  Sandoval,  fille  du  duc  de  Lerme,  avec 
D.  Diego  de  Çûiïiga  Baçan  y  Avellaneda,  fils  unicpie  du  cnmte  de 
Miranda;  Madrid,  18  décembre  iGoo.  —  Original. 

Fol.  29/1.  Enquête  faite  par  D.  Juan  de  Silva  sur  l'origine  de  la 
marquise  d'FIchc;  s.  1.  n.  d. 

Fol.  29G.  ((  Motibos  que  se  dan  para  que  Su  Mag'  sea  servido  dar 
licencia  a  la  princessa  de  Estillano  para  (jue  se  casse  con  uno  de  su 
familia  Carrafa  »  ;  s.  1.  n.  d. 

Toi.  298.  ((  Relacion  del  negocio  de  Ilcnrifpie  Stella,  archero  de  Su 
Mag'  »  ;  i6o3.  —  Trois  pièces. 

Fol.  3o/».  Confirmation  par  Philippe  111  du  titre  d"  n  Alcayde  de  los 
Donzeles  »  en  faveur  de  D.  Enrrique  de  Ci'»r(lova  y  Aragtm,  marquis  de 
Comares;  Valladolid,  12  février  iGo3.  —  Copie. 

Fol  3i2.  Fragment  d'une  relation  de  voyage  de  Milan  à  Miranda  ; 
1629-1632. 


INVENTAIRE    DE    LA    COLLECTION    ÉDOt  ARD    FAVRE  83 

Fol.  3i6.  Copie  des  pouvoirs  accordés  par  Philippe  IV  à  D.  Anto- 
nio de  Contreras,  D.  Luys  de  Paredes,  D.  Fernando  Piçarro  et  D.  Se- 
bastien Cambrana,  membres  du  Conseil  de  Castille,  pour  terminer  le 
procès  relatif  à  la  succession  de  Dénia  (royaume  de  Valence);  Madrid, 
26  octobre  i638. 

Fol.  3 18.  «  Copia  de  una  caria  del  rey  de  Francia  [Louis  XIIl]  a  los 
jurados  y  consejo  gênerai  de  Lerida  »  ;  Paris,  28  mai  164^.  —  Traduc- 
tion en  catalan. 

Fol.  320.  Lettre  de  pardon  accordée  à  la  ville  de  Barcelone  par 
D.  Juan  d'Autriche  pour  tous  les  délits  et  excès  commis  en  Catalogne 
depuis  1640;  Barcelone,  11  octobre  1602.  —  Copie. 

Fol.  332.  Mémoire  du  duc  de  Médina  de  las  Torres  [Ramiro  Nufiez 
de  Guzman]  sur  son  mariage  avec  Anne  Carafïa,  princesse  de  Stigliano  ; 
1637. 

Fol.  328.  ((  Nuevas  armas  que  el  rey  D.  Alonso  dio  a  los  duques 
de  Médina  »  ;  Tolède,  juin  1/167.  —  Copie  du  xvii"  siècle. 

Fol.  332.  H  Memoria  de  los  mayorazgos  de  D.  Geronimo  de  Rojas  »  ; 
s.  d. 

(333  feuillets;  3ôo  sur  23o  millimètres.) 

Vol.  LXXIL 

«  Escrilura  de  un  zenso  de  un  millon  de  /?*  V""  otorgada  por  parte  del 
g^mo  gor  ^Yicenle  Osorio  de  Moscoso  y  Guzman  Fernande:  de  Cordova 
Folch  de  Cardona  Anglesola  y  Requesens]  marques  de  Astorga,  conde 
de  AUamira,  duque  de  Sessa,  en  22  de  septiemhre  de  1778,  a  favor  del 
supremo  consejo  de  la  santa  y  gênerai  Ynquisirion  unie  Josef  Ferez 
Tonielarne,  escribano  del  rey.  » 

(70  feuillets;  3io  sur  210  millimètres.) 

Vol.  LXXIII. 

Copies  de  lettres  et  de  pièces  diverses  provenant  de  D.  Luis  Guillen 
de  Moncada,  V/I"  duc  de  Monialto,  vice -roi  de  Sardaigne,  relatives 
à  la  Sardaigne.  —  16^^6-16^jS. 

Fol.  t.  Instructions  remises  par  le  duc  de  Montalto  au  doyen  d'Ales, 
D.  Jayme  Capay,  pour  traiter,  avec  les  conseils  du  roi  à  Madrid, 
diverses  affaires  relatives  au  royaume  de  Sardaigne;  i3  décembre 
i6/,6. 

Fol.  i3.  Mémoire  du  duc  de  Montalto  relatif  à  la  situation  du 
royaume  de  Sardaigne  [16/iG  ou  1647]. 

Fol.  20-78,  84-88  et  91-92.  Lettres  écrites  par  le  roi  d'Espagne  au 


o'i  BUI.T.ETIN    HISPAMQl  E 

dvic  de  Montalto,  par  le  dur  de  Montalto  au  roi,  au  conseil  du  Patri- 
rtioine,  au  doyen  d'Ales,  à  D.  Gaspar  y  Juan  Francisco,  au  duc 
d'Arcos.  au  vice-chancelier  d'Aragon,  au  comte  duc  d'Olivares,  au 
comte  de  Lumiares,  à  D.  Luis  de  Ilaro,  relatives  aux  affaires  de 
Sardaigne,  1 646- 1647. 

Fol.  79-83.  Lettres  du  marquis  de  los  Vêlez  au  roi  et  au  duc  de 
Montalto  relatives  aux  troubles  de  Palerme;  aS  mai  et  T' juin  1647. 

Fol.  89.  Lettre  du  duc  de  Bracciano  au  duc  de  Montalto  et  réponse 
de  ce  dernier;  10  août  et  18  octobre  1647. 

{i)2  feuillets;  a85  sur  212  millimètres.) 

Vol.  LXXIV. 

Recueil   de  pièces    diverses   (instructions,    mémoires,    comptes,   etc.) 
relatives  aux  ambassadeurs  d'Espagne  à  Rome,  wr-xvii'  siècles. 

Fol.  i.  (I  Lo  que  se  offrece  que  advertir  para  el  adverlimiento  que 
Domingo  de  Çavala  hizo  para  lo  de  las  quentas  de  la  embaxada  de 
Roma  »  ;  juillet  1076. 

Fol.  7.  ((  Relacion  de  las  cartas  de  Su  Mag',  en  virtud  de  las  quales 
se  han  heclio  algunos  gastos  en  los  negocios  de  Roma  »  ;  septeriibre 
1576. 

Fol.  i5.  «  Instrucion  para  Pedro  do  Solchaga  para  lo  de  las  (juentas 
de  la  embaxada  [de  Roma]  »;  septembre  1576. 

Fol.  23.  «  Lo  que  paresce  se  deve  hazer  para  dar  la  cueula  de  la 
embaxada  [de  Roma]  »;  septembre  1576. 

Fol.  28.  «  Lin  adbertimiento  sobre  las  quentas  de  la  endjaxada  [de 
l\oma]  »  ;  septembre  1576. 

Fol.  3o.  «  Norma  de  escrivir  à  Su  S'  »>  ;  s.  d. 

Fol.  33.  «  Relacion  de  la  embajada  de  Roma  y  inslruclion  al  emba- 
jador  »  ;  s.  d. 

Fol.  49-  *'  Relacion  del  estado  de  los  negocios  do  Roma,  (pie  se 
ombio  a  D.  Antonio  Ronquillo  »  ;  [1647I. 

Fol.  65.  «  Computo  de  las  carroças  que  se  pneden  disponer  para  ol 
embaxador  de  Espana  |en  Roma],  hecho  por  Pedro  Paolo  »  ;  s.  d. 

Fol.  67.  (f  <^)uenla  de  las  carrozas  que  se  pueden  disponer  para  el 
embaxador  de  Espana  liecha  por  Chrisloforo  »  ;  24  r<'Mrier  1697.  — 
En  italien. 

Fol.  85.  ((  Computo  en  liquido  i\v  las  carro/as  hcclio  por  Cliristo- 
foro  ».  —  Trois  pièces  on  italien. 

Fol.  ICI.  ((Nota  distincta  de  las  carrozas  que  se  nccossilan  para 
servicio  de  la  embaxada  de  Su  Mag'  catholica  en  Roma,  con  el  gasto 
por  menor  <\ue  londia  cada  una  do  ollas,  liccha  por  .losepli  ^'alle, 
sillero  i». 


INVENTAIRE    DE    LA    COLLECTION    ÉDOUAHD    FAVHE  85 

Fol.  109.  ((  Nota  de  las  raciones  que  daba  en  Roma  a  su  famiglia  el 
duque  de  Medinaceli  »,  D.  Luis  Francisco  de  La  Cerda  y  Aragon:  vers 
1690. 

Fol.  ii5.  «  Memoria  de  la  familia  que  tubo  el  marques  de  Astorga 
[D.  Antonio  Pedro  Gomez  Davila  Alvarez  Osorio  yToledo]  en  Roma  »  ; 
[vers  1671]. 

Fol.  119.  «  Relacion  de  la  familia  que  tuvo  1).  Pedro  de  Aragon 
estando  en  Roma  »,  vers  i665. 

Fol.  125.  ((Memoria  de  la  librea  de  verano  para  la  familia  del 
conde  de  Altamira  [Luis  de  Moscoso  Osorio],  hecha  por  Juan  Homano  « , 
vers  1690. 

Fol.  i3i.  ((  Nota  de  la  familia  que  necesita  el  embaxador  de  Espana 
en  Roma  ».  —  Deux  pièces. 

Fol.  i35.  ((  Nota  que  dio  el  judio  de  la  forma  en  que  se  necesita 
alajar  el  palacio  [del  embaxador  de  Espaiîa  en  Roma]  »  ;  s.  d. 

Fol.  139.  ((  Ajuste  que  ténia  hecha  Claudio  La  Busiera  para  el  gasto 
ordinario  de  la  messa  del  duque  de  Medinaceli  en  Roma  »  vers  1C90. 

Fol.  143.  ((  Nota  de  las  raziones  y  modo  con  que  el  conde  de  Mar 
tinitz,  embaxador  de  Su  Mag'  Cessarea  en  Roma,  paga  a  su  familia  ». 
—  Quatre  pièces. 

(i5(i  feuillets;  3i5  sur  235  millimètres.) 

Vol.  LXXV. 

Recueil  de  lettres  diverses,  xv-ww  siècles. 

Fol.  I.  Lettre  de  Gomez  Rojas  au  maréchal  de  Caslille,  D.  Diego 
de  Côrdova  ;  fin  du  xv"  siècle.  —  Original. 

Fol,  2.  Deux  lettres  du  duc  d'Albe  au  marquis  de  Velada:  s.  d.  — 
Originaux. 

Fol.  6.  Copie  d'une  lettre  du  duc  d'Albe  au  Sacré  Collège,  dans 
laquelle  il  se  plaint  des  mauvaises  dispositions  du  pape  à  l'égard  du 
roi  d'Espagne;  Naples,  21  août  i556. 

Fol.  8.  Lettre,  sans  adresse,  de  [D.  Fadrique  de  Toledo],  dans 
laquelle  il  expose  son  projet  d'épouser  D"  Maria  de  Toledo  malgré 
l'ordre  de  Philippe  II  qui  voudrait  lui  faire  épouser  D"  Madalena  de 
Guzman;  1674  ou  1575. 

Fol.  10.  Copie  d'une  lettre  non  signée  au  cardinal  Espinosa;  1570. 

Fol.  II.  Copie  d'une  lettre,  non  signée  et  sans  adresse,  relative  à  la 
nomination  du  grand  commandeur  D.  Luis  de  Requesens  à  Milan; 
3  novembre  1571. 

Fol.    i5.  Extrait  d'une  lettre  de  Philippe  II  à  D.  Juan;  1570. 

Fol.  17.  Lettre  du  cardinal  de  Côme  [Ptolomeo  Gallo|,  sans  adresse; 
Rome,  5  septembre  1373.  — Copie  en  italien. 


86  BUM.ETIN    HISPAMQUE 

Fol.  19.  Lettre  de  Pedro  de  Paz  à  Domingo  de  Çavala  ;  La  Haye, 
17  juin  157/1.  —  Original. 

Fol.  21.  Copie  d'une  lettre,  non  signée,  au  grand-duc  de  Toscane, 
et  de  la  réponse  de  ce  dernier;  22  mars  et  22  avril  1576.  —  En  italien. 

Fol.  28.  Copie  d'une  lettre  de  l'évêque  de  Valence  [Jean  de  Monlluc] 
au  roi  de  France,  relative  à  la  lutte  contre  les  huguenots  ;  28  février 
1577.  —  En  italien. 

Fol.  25.  Copie  d'une  lettre  du  cardinal  Madruzzo,  sans  adresse, 
relative  à  l'archiduc  Matthias;  1578.  — En  italien. 

Fol.  27.  Copie  d'une  lettre  de  Gaspar  de  Mendoça  et  de  Pedro  de 
Solchaga,  sans  adresse,  relative  aux  moyens  de  payer  la  somme  de 
cent  mille  ducats  due  par  D"  Luisa  de  la  Cerda  ;  Madrid,  8  octobre 
1078. 

Fol.  29.  Extrait  d'une  lettre  écrite  d'Alexandrie,  en  Egypte,  le 
12  novembre  1578. 

Fol.  3i.  Lettre  de  D.  Pedro  de  Velasco  à  Diego  a  Ponte  «  alcayde  de 
la  encomienda  mayor  de  Castilla  0  ;  25  avril  1579  —  Original. 

Fol.  33.  Lettre  de  Ottavio  Gnnzagn  au  marquis  de  Mnndejar,  vice- 
roi  de  Naples;  Maestricht,  i5  novembre  1579.  —  Original. 

Fol.  35.  Extrait  d'une  lettre  du  cardinal  Granvelle  à  Gabriel  Çayas 
relatif  à  l'ofRce  de  u  présidente  de  la  consciencia  »  ;  i58(?). 

Fol.  3<).  Copie  d'une  lettre  du  duc  d'Albe  à  D.  .luan  de  Silva; 
Uzeda,  2/4  janvier  i58o. 

Fol.  38.  Copie  d'une  lettre  du  duc  |Jeanj  de  Bragance  au  cardinal 
Gambara;  Almeria,  février  i58o. 

Fol.  /|0.  Extraits  de  lettres  de  Macinghi  des  25  mars  et  12  mai  i58o. 

Fol  li'6.  Lettre  de  Mateo  Vasquez  à  [Antonio  Mauricio  de  Pazos], 
évêque  tl'Avila;  iiadajoz,  22  mai  i58o.  —  Original. 

Fol.  45.  Copie  d'une  lettre  de  la  reine  de  Suède,  Catherine,  à 
Camillo  Capihipi;  Stockholm,  10  juillet  i58o.  —  En  latin. 

Fol.  /j7.  Lettre  de  1).  Alvaro  de  Bazan  à  llernando  de  Torres, 
relative  à  l'expédition  de  Portugal;  17  juillet  i58o.  —  Original. 

Foi.  l\ç).  Lettres  de  Paolo  Bellarditi  et  du  cardinal  Sforza  au  même; 
2O  et  3o  août  i58o.  —  Originaux,  en  italien. 

Fol.  53.  Lettre  du  nonce  (Pliilippe  Sega|,  évêque  de  Plaisance,  au 
cardinal  Granvelle,  relative  à  un  projet  d'expédition  en  Angleterre; 
Madrid,  i5  septembre  i58o.— Copie  (hifTrée  et  transcription  en 
latin. 

Fol.  57.  Copie  dune  lettre  «le  G.  Martin  Angrisano,  sans  adresse; 
Varsovie,  17  septembre  i58o.  —  En  italien. 

Fol.  59.  Lettre  de  D  Luis  de  Toledo,  Mutio  Surgentes,  F.  Kull'»»  et 
F.  San  Felice,  etc.,  à  llernando  de  Torres,  relative  au  projet  d'union 
des  monastères  de  S.  Pelito  et  de  S.  Arcangelo;  Naples,  17  sep- 
tembre i58o.  —  Original,  en  italien. 


INVENTAIRE  DE  L\    COLLECTION  EDOUARD  FAVRE  87 

Fol.  61.  Extraits  d'une  lettre  de  Melchior  Maldonado,  relatifs,  entre 
autres,  à  la  santé  du  roi  Philippe  11;  Séville,  i"  octobre  i58o. 

Fol.  62.  Lettre  de  Juan  Francisco  Moresini  à  Antonio  Tiepolo,  à 
Venise;  Madrid,  12  décembre  i58o.  —  Original,  en  italien. 

Fol.  64.  Lettre  du  cardinal  Golonna  à  Hernando  de  Torres; 
6  mars  i58i.  —  Original,  on  italien. 

Fol.  66.  Lettre  de  Joseph  Hooghemberghe  h  Fabio  Luschini, 
à  Rome;  Saint-Maur-des-Fossés,  9  juillet  i58i.—  Original,  en  italien. 

Fol.  68.  Copie  d'une  lettre  à  Juan  de  Idiaquoz;  1"  août  i58i. 

Fol.  69.  Lettre  de  Pedro  Trevino  à  Gabriel  de  Çayas  avec  un 
mémoire  sur  les  degrés  de  longitude;  Naplcs,  4  juillet  1682.  — 
Original. 

Fol.  77.  Lettre  du  roi  Philippe  III  au  duc  de  Maqueda  y  Najera, 
vice-roi  de  Sicile,  par  laquelle  il  exprime  le  désir  que  le  duc  de 
Savoie  remette  au  roi  de  France  le  marquisat  de  Saluées;  Madrid, 
i3  septembre  1600.  —  Original. 

Fol.  79.  Lettre  de  Fr.  Hieronimo  Battista  de  La  Nuza  à  Philippe  III, 
relatant  son  projet  de  lui  envoyer  une  relique  de  saint  Hamon  de 
Peîïafort,  et  l'opposition  faite  à  ce  sujet  par  les  conseillers  de  Barce- 
lone;  1*'  août  1601.  — Original. 

Fol.  81.  Lettre,  incomplète  de  la  fin,  relative  à  la  paix  conclue  entre 
le  duc  de  Savoie  et  le  roi  de  France  ;  26  janvier  1603.  —  Copie (?). 

Fol.  83.  Lettre  de  Juan  Père/  Valda  à  Ximenez  de  Murillo,  relative 
aux  événements  des  Pays-Bas;  Anvers,  i5  août  i6o3.  — Original. 

Fol.  85.  Lettre  de  Fr.  Domingo  de  Mendoça,  sans  adresse;  S.  Bar- 
tholome,  26  décembre  1609.  —  Original. 

Fol.  87.  Lettre  de  D.  Antonio  Davila  de  Bibero  à  son  cousin 
D.  Antonio  Davila;  Madrid,  décembre  1610.  —  Original. 

Fol.  89.  Copie  d'une  lettre  de  D.  Sancho  de  Luna  au  marquis  de 
Bedmar;  Milan,  14  octobre  i6i5. 

Fol.  91.  Copie  d'une  lettre  du  même  au  roi  Philippe  III,  dans 
laquelle  il  se  plaint  du  marquis  de  La  Hinojosa  [Juan  de  Mendoza]  ; 
Milan,  27  décembre  i6i5. 

Fol.  95.  Lettre  de  Francisco  de  Molina  Zeballos  relative  à  la  situa- 
tion des  agriculteurs  du  royaume  d'Andalousie;  Ximena,  24  février 
.1621. 

Fol.  97.  Copie  d'une  lettre  du  marquis  de  Spinola  à  son  fils  «  sobre 
los  negocios  del  marques  de  Los  Balbases  »  ;  Madrid,  6  mai  1628. 

Fol.  99.  Copie  d'une  lettre  du  roi  [Philippe  IV]  au  pape,  relative 
aux  affaires  d'Italie  et  aux  moyens  d'éviter  la  guerre;  Madrid,  2  sep- 
tembre 1629. 

Fol.  101.  Lettre  du  cardinal  de  La  Cueva  à  Pedro  de  S.  Juan, 
secrétaire  du  cardinal  Infant  en  Flandre;  Milan,  16  février  i633.  — 
Original  chiffré  et  transcription!?) 


88  Bll.l  FTIN    TIISPAMOIT. 

Fol.  io5.  Lettre  de au  même;  Naples,  8  février  i633.  — Original. 

Fol.  107.  Lettre  d'André  Doria  au  marquis  de  Po/a  ;  Gènes, 
i.")  mars   i64a.  —  Original. 

Fol.  109.  Lettre  du  marquis  de  Tavara  au  marquis  de  Leganés; 
Zamora.  20  juillet  i655.  —  Original. 

Fol.  III.  Lettre  du  duc  de  Gelves,  sans  adresse;  Milan,  28  dé- 
cembre i65G.  —  Original. 

Fol.  II 3.  Copie  d'une  lettre  du  marquis  de  Velada  à  D.  Blasco  de 
Loyola;  ^  avril  i(i6().  —  Réponse  de  ce  dernier;  même  date.  Original. 

Fol.  1 17.  Lettre  du  roi  [Charles  11]  au  ix'  comte  d'.\ltamira  [Luis  de 
Moscoso  Ossorio  Mendo/.a  y  Hojas|,  lieutenant  et  capitaine  général  du 
royaume  de  Sardaigne;  Madrid,  4  août  1G93.  —  Original. 
(117  feuillets;  280  sur  220  millimètres.) 

Vol.   LXXVI. 

Recueil  de  lettres  et  de  pièces  diverses  des  \'\  i/r  et  v/V  siècles. 

Fol.  I.  Décret  de  Philippe  V  par  lequel  est  accordé  au  lieu  de 
l'uente  cl  Monge  le  titre  de  très  fidèle  et  loyal  («  titulo  de  fidelissimo 
\  muy  leal  o):  Madrid,  12  décembre  1708.  —  Copie. 

Fol.  3.  Lettre  de  Sanchez  à  (Francisco  Xavier  Fernande?,  de  C('»rdova 
y  Cardona,  I\']  duc  de  Sessa  ;  Alcalâ,  2a  décembre  1709. 

Fol.  ô.  Copie  d'une  lettre  adressée  à  la  comtesse  de  Teba,  relative 
au  mariage  du  comte  de  \  illada  avec  D'  Catalina  de  Portugal;  1709. 

Fol.  7.  Lettres  adressées  à  D.  Bartholome  de  Miranda  y  Zûniga  par 
D.  Diego  de  Pineda  y  de  las  Infantas  (1710);  Margarila  Zenalvo  y 
Ma/.uelo  (  1710);  —  Francisco  de  la  Chica  (1710):  —  Juan  de  Figueroa 
(2  1.,  171 1);  —  Zeferino  Joseph  Amo  Polanio  (1711);  —  Francisco 
Lorenzo  Perry  y?  [nom  illisible|  (1713). —  Originaux. 

Fol.  16.  Copie  d'une  lettre  adressée  à  D-'  Maria  Antonia  Loyola  et 
à  la  comtesse  de  Lemos  relative  au  mariage  du  comte  de  Villada  avec 
D'  Maria  Antonia  de  Toledo,  fille  du  marquis  de  Villafranca  ;  Madrid, 
sept.  1719. 

Fol.  20.  Lettre  du  marquis  de?  [nom  illisible|  à  Joseph  Rodrigo; 
7  mars  1720.  —  Original. 

l'ol.  r>2.  .\cte  par  lequel  le  cardinal  Luis  Relluga  authenti<iue  les 
reli(|U('S  conservées  dans  la  maison  de  Monfemar;  Rome,  2/1  janvier 
173.").  —  Kn  latin. 

Fol.  j\.  Relation  de  la  mort  de  la  reine  Marianne  de  Neuhourg,  de 
ses  funérailles  et  de  l'ouverture  de  son  testaiiienl  ;  juillet  i7'|0-  ilneoni- 
plète  de 'J  Jf.  ) 

Fol.  /|G.   «  Mis  pensaniientos  )),  travail  rédigé  en  i7r)3. 

Fol    7(j.   Dérision  prise  par  les  habitants  de  la  ville  d'Ayamonte  de 


IMVEMAIKE    DE    LA    COLLEGTIO?!    EDOUARD    FAVRE  89 

placer  leur  Église  sous  le  co-patronage  de  la  Vierge  et  de  saint  Joseph, 
sans  porter  préjudice  au  palrf»nage  de  saint  Diego  de  Alcalâ  auquel 
elle  est  dédiée;  1 1  janvier  1756.  —  Pièce  imprimée. 

Fol.  83.  ('  Nota  de  la  carga  (juc  condtijeron  de  \era-Crnz  y  la 
Havana  los  dos  navios  de  guerra  cl  Tridenle  y  el  Astulo...  que... 
Uegaron...  a  Cadiz  en  a.j  de  agoslo  de  17G0  d. 

Fol.  84.  Description  de  la  colonie  de  Sierra  Moiena  en  Es[)agne, 
dans  le  cours  de  Tannée  1778.  —  En  français. 

Fol.  96.  Autorisation  accordée  par  Philippe  Berlran,  inquisiteur- 
général,  à  Vincent  Joachiiii  Osorio  de  Moscoso,  Guzman,  l'ernande/ 
de  Côrdova,  d'avoir,  dans  sa  bibliothèque,  un  certain  nombre  d'ou- 
vrages défendus;  Madrid,  5  février  1785. 

Fol.  98.  Requête  adressée  à  la  princesse  des  Asturies  par  Salvador 
Heus  pour  obtenir  le  titre  de  «  sari,^ento  graduado  »;  1780. 

Fol.  100.  «  Carta  en  la  que  D"  Maria  Vsidora  Gu/man  y  la  Cerda  da 
la  enhorabuena  al  marques  de  S''  Cruz,  director  de  la  Academia  espa- 
nola,  con  el  motivo  de  haveile  nombradi»  nuestro  calholico  monarcha 
Carlos  III,  su  mayordomo  niayor,  y  nonibramiento  deaquella  S'",  para 
dirigir  con  la  marquesa  de  Penafiel,  una  escuela  de  ninas.  Keglamento 
de  esta  escuela;  1787  .» 

Fol.  132.  «(>artas  escritas  por  varios  sujetos  al  rey  D.  Carlos  1\  y  a 
su  familia  por  los  condutos  del  conde  de  Altamira  y  del  conde  de 
Florida  Blanca:  Damian  Antonio  Pardo.  1788; —  Ranion  Abal  y  Pitta, 
1788;  —  Juan  Alvarez,  1789;  —  Joseph  Hodrigucz,  1789;  —  José 
Maria  Cowley,  1789;  —  Félix  Fernando  de  Pineda,  1789;  —  Francisco 
Josef  Carratalan,  1789;  —  Joseph  Perez  Cobos,  1789;  —  \  eçinos  del 
lugar  y  partido  de  la  liera  alta,  jiuisdicion  de  la  ciudad  de  Murcia, 
1789;  —  Pedro  Augustin  Echeverria,  Hurlado  de  Mendoza,  1789;  — 
Christobal  Garcia  Montalban,  1789;  —  Grabriel  Ignacio  Hodriguez, 
1789;  —  Ignacio  Sanchez,  1790;  —  Francisco  Hurlado  y  Hurtado, 
1790;  —  Maria  Martinez  Garrido,  1790;  —  Josef  Antonio  Nufiez  del 
Prado,  1790;  —  Pedro  Jacome  Brignardelli,  1700;  —  Francisco 
Antonio  Correa,  1792:  —  Maria  Andréa  Doze,  1792;  —  Antonio 
Azurin,  1792;  —  Josef  Santiago  Perez,  1792;  —  La  priora,  claveras  y 
demas  comunidad  del  convento  de  N''  S"^-' S' '  Maria  el  real,  1792;  — 
Francisco  del  Castillo  y  Pasqual,  1792:  —  Francisco  Brunet,  1792;  — 
Isidro  Rico,  1792  »).  (Ces  personnages  sont,  pour  la  plupart,  des  soldats.) 

Fol.  210.  Sept  pièces  relatives  au  théâtre  de  «  Los  Cànos  del  Peral»; 

1796-1799- 
Fol.  228.  Quatre  lettres  adressées  au   marquis   d'Astorga,    comte 

d'Altamira;  i8o^-i8o5.  —  Originaux. 

Fol.  a35.  Lettre  de  François  de  Beauharnais,  ambassadeur  de  l'em- 
pereur Napoléon,  ministre  plénipotentiaire  du  roi  d'Italie,  au  même, 
avec  la  réponse  de  ce  dernier;  Ti  et  20  février  t8o8c  —  Copies. 


90  BULLETIN    HISPANIQUE 

Fol.  a4i-  u  Elhimologia,  origen  o  denominazion  del  nombre  del 
reyno  de  Espana...  por  D.  \thanasio  Francisco  de  ^  illalovos  »  ;  s.  d. 
(Incomplet). 

Fol.  209.  Chronologie  des  papes  et  des  rois  d'Espagne  jusqu'en  iSSa. 

Fol.  267.  Liste  alphabétique  des  saints  du  calendrier  de  Castille, 
avec  la  date  de  leurs  fêtes;  i8^G. 

Fol.  273.  Bulle  d'indulgence  accordée  par  D.  Francisco  Variez 
Bahamonde,  «  co.nmissario  gênerai  de  la  sanla  cruzada  »,  à  Maria 
Moreno;  Madrid,  i"  mai  i8i4.  —  Pièce  imprimée. 

Fol.  374.   «  Hieroglifico  sacro  del  mysterio  de  la  immaculada  con- 
cepcion  de  la  virgen  Maria  »  :  s.  d.  —  Placard  imprimé. 
(274  feuillets;  280  sur  220  millimètres.) 

Vol.  LXXVII. 

Recueil  de  comédies  inlilulées: 

Fol.  I.       «  No  ai  fuerza  contra  el  gusto, 
«  Contra  la  hermosura  armas, 
«  Hesislencia  contra  amor, 
«  Ni  amor  contra  la  palabra.  » 
Fol.  63.     «  Lanzes  de  Amistad,  honor  y  zelos.  » 
F'ol.  i3i.   «  El  majico  Andronio.  » 

Fol.  [9.5.   «  Lanzes  de  amistad,  honor  y  celos.  »  (a^  copie.) 
Fol.  3i3.   i(  Yo  no  soi  mio  y  lo  que  es  la  mujer  Zelosa.  » 
Fol.  383.  Octaves    composées   à   l'occasion   de   la    représentation, 
chez  la  marquise  d'Aslorga,  de  la  comédie  intilulcc  :   Qaicn  es  (/nieii 
premia  el  Amor? 

(390  feuillets;  220  sui'  rOf)  millimètres.) 

Vol.   LXXVIII. 

liecucil  de  comédies  inlitulces  : 

Fol.  I.       ((  Aun  fingido  cl  cscarmicnio 

(I  labra  el  mas  viziado  genio.  « 
Fol.  71.     «  Satisfaccioncs  de  amor  olensas  de  sangre  borran.  » 
Fol.  139.   ('  Lo  que  son  duendes  del  miindo.  » 
Fnj.  -Ao-.   «  Obligado  de  1res  damas, 

<(  pur  nu  ofender  a  nitiguna 

«  a  lodas  très  cnganai  las.  » 
Fol.  263.  «  La  maxica  de  Ceilan.  » 
Fol.  33 1.   «  Pncma  cpicf».  » 

^354  feuillets  ;  22U  sur  it>ô  millimètres.) 


INVENTAIRE    DE    LA    COLLECTION    EDOUARD    FAVRE  (Jl 

Vol.  LXXIX  et  LXXX. 

Recueils  de  pièces  de  vers,  imprimées  ou  manuscrites  (poèmes, 
sonnets,  dédicaces,  n  seguidiltasn,  i<  dezimas  »,  etc.),  pour  la  plupart 
pièces  de  circonstance,  \\ W-wiir  siècles. 

(896  et  i48  feuillets;   226  sur  i55  et  3i5  sur  220  millimètres.) 

Vol.  LXXXI. 

Traités  relatifs  à  l'organisation  et  à  i administration  d'un  état. 

Fol.  I.  ((  Discurso  de  estado.  » 

Fol.  107.  ((  De  las  causas  de  la  grandeza  y  manificenzia  de  las 
ciudades.  » 

Ces  traités  semblent  avoir  été  composés  pour  l'instruction  d'un 
prince  (peut-être  par  le  11'  marquis  de  Velada  pour  Philippe  lll), 
à  la  fin  du  \\\'  siècle. 

(242  feuillets;  020  sur  280  millimètres.) 

Vol.  LXXXII. 
Suppléments 

Fol.  I.  Donation  par  Domingo  Munoz  et  sa  femme,  D'  Gila, 
au  doyen  et  au  chapitre  de  N.-D.  de  Cordoue,  d'un  moulin  sis  au  gué 
de  «  Martos  »  ;  18  juillet  1297.  —  Copie  du  xm'  siècle. 

Fol.  3.  Lettre  du  roi  de  Castillc,  Ferdinand  IV,  à  Alfonso  Ferrandez 
portant  ordre  de  restituer  à  D.  llayn  les  biens  qui  lui  ont  été 
confisqués;  Roa,  22  décembre  1298.  —  Copie  du  wi"  siècle. 

Fol.  4.  Lettre  du  pape  Clément  Vil  aux  commandants  des  trirèmes 
de  l'Ordre  de  Saint-Jean  pour  les  engager  à  demeurer  fidèles  au 
Saint-Siège;  Rome,  1 5  juin  1626.  —  Copie. 

Fol.  5.  «  Mémorial  o  instruction  de  la  forma  que  paresce  se  deve 
tener  en  la  reformacion  de  los  monasterios  de  frayles  y  monjas  de  las 
Ordenes  de  la  Sanctissima  ïrinidad,  y  de  nuestra  Sefiora  del  Carmen 
y  de  la  Merced,  en  cumplimiento  de  lo  que  nuestro  padre  Pio  papa 
quinto  ha  proveydo  y  mandado  »  ;  Madrid,  3o  août  1007,  —  Pièce 
imprimée. 

I.  Ce  recueil  a  été  formé  après  le  classement  de  la  collection;  la  plupart  des 
pièces  dont  il  se  compose  auraient  pu  être  placées  dans  les  volumes  précédemment 
décrits. 

Un  certain  nombre  de  pièces  incomplètes  ou  non  identifiées,  réunies  dans  un 
portefeuille  qui  porte  le  numéro  LX.-\.\11I,  n'uiit  pas  été  inventoriées. 


Ç)3  BULLETIN    HISPANIQUE 

Fol.  7.  Lettre  du  duc  de  Sessa  aux  autorités  de  la  ville  de  Baeça 
pour  faire  transnictlie  aux  capitaines  venant  de  Castille  l'ordre  de 
rallier  l'armée  de  D.  Juan;  T'  mars  1570.  —  Original. 

Fol.  8.  «  Avisos  de  Granada  »  ;  33  août  1570. 

Fol.  10.  Attestation  de  la  levée  de  l'excommunication  encourue  par 
le  Grand  Commandeur  de  Castille  [D.  Luis  de  KequesensJ  ;  cette 
attestation  est  signée  par  le  marquis  d'Ayamonte  et  Domingo  de 
Çavala.  4  octobre  i.'')73.  —  En  italien. 

Fol.  12.  Réponse  du  pape  à  une  demande  du  Grand  Conmiandcur 
de  Castille  relative  à  l'exportation  des  reliques  de  Flandre;  s.  d. 

Fol.  i3.  Bref  du  ])ape  Grégoire  \111  pour  protester  contre  une 
décision  prise  par  le  Collatéral;  Home,  2  mai  1077.  — Copie,  en  latin. 

Fol.  i5.  Copie  du  rapport  envoyé  au  roi  Philippe  11  sur  la  cons- 
truction de  l'hùpilal  des  Siciliens  à  Côme;  Rome,  "21  novembre  1677. 
—  En  italien. 

Fol.  16.  ((  Sumario  de  los  puntos  \  cabos  que  se  han  adjudicado 
a  ambas  parles  en  la  causa  de  Coregio,  en  la  sentencia  que  se  dio 
a  los  11  de  seticmbre  1079,  por  Su  Mag'  Cesarea.  » 

Fol.  18.  <(  Reverendissimorum  ...  dominorum,  ad  ncgocium  Helgicac 
pacificationis,  per  Caesareain  majeslatcm  dcputatorum  commissa- 
riorum  recessus,  régis  llis])aniarum  calliolici  mandalario,  duci  de 
Terranova,  et  ordinum  Belgii  legatis,  13  mensis  novenib.  anno  1571) 
publicatus.  »  —  Pièce  imprimée. 

Fol.  24.  Requête  adressée  à  l'archiduc  Ferdinand  d'Autriche  par 
les  frères  et  sœurs  des  frères  défunts  Laurent  et  Georges  llaimb, 
aux  lins  d'obtenir  la  succession  de  ce  dernier;  4  février  i58o.  — 
En  allemand. 

Fol.  26.  (I  Bando  sopra  i  quatlrini  »  ;  Rome,  3  juin  i58i.  —  Pièce 
imprimée,  en  italien. 

Fol.  27.  Avis  d'Ormu/,  contenant  des  nouvelles  d'Ormu/,,  des  Indes 
et  de  Ceylan  ;  29  juillet  i58i. 

Fol.  28.  Acte  constatant  l'identité  du  bandit  Vntonio  iVliralla; 
I'  juin  i582.  —  En  italien. 

Fol.  3o.  '<  Copia  de  un  mémorial  dcl  maestro  Perez  de  las  cossas 
que  se  an  de  suplicar  a  Su  Mag'  y  a  Su  S'  y  consullar  a  la  congre- 
gacion  de  los  cardinales  »  ;  22  janvier  i583. 

Fol.  34.  «  Reliicion  del  sucesso  que  se  tuvo  en  la  ysia  de  (^anaria, 
en  el  acomctimiento  (|ue  a  ella  hizo  el  armada  vnglessa  en  que  venian 
por  générales  .luan  Ades  y  Francisco  Draque  »;  ibgà. 

Fol.  30.  "  Memoria  de  las  escripturas  que  se  han  de  sacar  de  poder 
de  Martin  de  \  illanucva  »  ;  1 1  novendjie  i()o3(?). 

Fol.  37.  Commission  donnée  par  Philippe  111  au  licencié  Martin 
Fernande/,  Portocarrero  pour  régler  la  succession  du  duc  de  .Medinaceli 
[D.  .luan  de  La  Cerda  >  de  Aragon];   ly  avril  i()o8.  —  Copie. 


INVENTAIRE    DE    LA    COLLECTION    EDOUARD    FAVRE  98 

Fol.  39.  Autorisation  accordée  par  Philippe  III  à  Ru  y  Gomez  de 
Silva,  duc  de  Pastrana,  de  contracter  un  emprunt  sur  son  majorât  de 
Pastrana  ;  5  juin  1612.  —  Copie. 

Fol.  l\i.  «  Relacion...  delà  tradicion  de  la  Santa  Veroniça  a  la  ciudad 
de  Jaen...  Por  Juan  Pardo  Villegas  de  Cora  »  ;  1632.  —  Pièce  imprimée. 

Fol.  (43.  Protestation  du  comte  de  La  Roca  contre  la  décision  prise 
par  Le  duc  de  Savoie  Victor- Amédée  1"'  de  donner  la  préséance  à 
l'ambassadeur  de  France  sur  l'ambassadeur  d  Espagne  ;  Turin, 
lo  juin    i632. 

Fol.  4Ô.  <f  Copia  de  la  cedula  que  D.  Martin  de  Harnedo  lienc  para 
sacar  las  melizias  de  los  lugares  reserbados  »  ;  i64o. 

F'ol.  47.  Déclaration  d'Alonso  Perez  de  Guzman,  duc  de  Médina 
Sidonia,  à  propos  du  duc  de  Bragance  [Jean  IV];  9  septembre  i64i- 

Fol.  5o.  Note  sur  les  soulèvements  de  la  Catalogne  d'après  les 
Annales  de  Zurita. 

Fol.  03 .  Proclamation  des  pouvoirs  donnes  par  le  roi  d'Espagne 
à  D.  Martin  Vnignez  Arnedo  pour  faciliter  el  pour  hâter,  en  Andalousie, 
les  préparatifs  de  l'expédition  de  Catalogne:  Gordoue,  avril  1643.  — 
Pièce  imprimée. 

Fol,  54.  ÏNote  sur  les  événements  de  Catalogne  (prise  de  Rosas,  etc.  ); 
[vers  i64a]. 

Fol,  55.  «  Relacion  del  buen  sucesso  que  liizo  el  senor  D.  Juan  de 
Austria  en  Cataluiia  »  ;  [vers  i652]. 

Fol.  57,  «  Gacette  d,  nouvelles  de  Catalogne,  de  Barcelone,  de 
Naples,  de  Sicile,  etc.;  17  mars  1648. 

Fol,  58.  «  Manifieslo  que  hizieron  los  maestros  de  campu  irlandeses 
que  estan  sirviendo  a  Su  Mg'  en  el  principado  de  Catalufia  »  ;  29  août 
i653.  —  Pièce  imprimée. 

Fol.  60.  Copie  du  traité  de  Munsler  entre  le  roi  d'Espagne  et  les 
États  Généraux  des  Provinces-Unies  des  Pays-Bas;  7  juin  1647. 

Fol.  106.  Relation  du  voyage  fait  en  Andalousie  par  D.  Luis 
[Mendez|  âe  Haro  [Sûloma\or  y  (iu/man.  II'  comle-duc  d'OlivaresJ; 
[entre  iG45  et  1649J.  —  Pièce  imprimée. 

Fol.  108.  «  \ovedades  en  Madrid,  liasla  13  de  ma\o  de  1648. 
Gacetta.  » 

Fol.  1 10,  Observations  sur  une  comète;  18  décembre   iG52. 

Fol.  113.  «  Relacion  diaria  de  la  presteza  con  que  se  previno  la 
armada  real  de  Espana,  a  cargo  del  gênerai  D.  Pablo  Fernândez  de 
Contreras,  y  lo  que  le  ha  sucedido  desde  i5  de  agosto...  de  i655... 
hasta  22  de  octubre  del  dicho  ano  ».  —  Pièce  imprimée. 

Fol.  116.  ((  Noticias  del  viaje  >  sucesso  que  ha  tenido  el  capitan 
Marcos  del  Puerto  con  los  navios  de  su  cargo,  aiîo  i656.  » 

Fol.  118.  '<  Salisfaçion  que  piden  los  Olandesses  para  mantener  la 
paz  »  ;   i663. 

Bull,  kisfian.  7 


q4  BLLLE1IN    HISFAMQIE 

Fol.  I30.  «Los  nombres  de  los  nobles  honbres  de  Escocia  que 
estuvieron  en  la  batalla  de  Barvyc  con  el  rev  d'Escocia,  de  los  quales 
no  se  sabe  que  aya  escapado,  syno  el  chanbelan  del  rey  d'Escocia  »  ; 
s.  d. 

Fol.  12  1.  «  Helacion  de  lo  ({110  conlienen  dos  menioriales  que  Juan 
Gomez  de  Bedoya  a  dado,  contradiciendo  la  concession  que  hesta  hecha 
de  3o  millones  pagados  en  20  afios,  y  dando  la  recompensa  en  olras 
cossas  que  en  ellos  se  acussan  »;  s.  d. 

Fol.  135.  «  Puntos  que  se  abian  de  lener  en  cuenta  para  el  cntierro 
de  la  Infanta  D'  Maria  »  ;  s.  d. 

Fol.  137.  Requête  adressée  au  pape  par  André  \iniencz  en  vue 
d'obtenir  les  dispenses  nécessaires  à  son  mariage  avec  Maria  \imenez, 
sa  nièce;  s.  d.  —  Copie. 

Fol.  139.  Lettre  d'Angelo  Bibiena,  sans  adresse,  dans  hupielle  il 
demande  à  son  correspondant  de  le  recommander  à  l'empereur;  s.  d. 
—  Copie,  en  italien. 

Fol.  i3o.  Avis  sur  les  moyens  de  porter  secours  à  la  place  de 
Brissac  et  de  la  ravitailler;  s.  d. 

Fol.  i33.  Avis  du  marquis  de  Velada  et  de  D.  Alonso  de  Occa  sur 
le  traitement  dû  à  l'  «  Alguazil  mayor  »  pour  ses  fonctions  au  Conseil 
des  Indes;  s.  d. 

Fol.  i34.  Relation  du  manjuis  de  Cassano  sur  l'assassinat  du  doc- 
teur Marchiano;  s.  d.  —  En  italien. 

Fol.  i36.  «  Puntos  sobre  el  sustento  del  exercito  de  Milan.  » 

Fol.  i38.  Copie  d'un  manifeste  du  prince  de  Ligne  [Claude  Lamoral], 
gouverneur  du  Milanais;  s.  d.  —  En  italien. 

Fol.  i/io.  K  La  prigionia  del  principe  Guglielmo  di  Fursteniberg 
giuslificata  )>  ;  s.  d.  —  Pièce  imprimée,  en  italien. 

Fol.  i4().  «  Novedades  publicas  en  Logrono  »>  (relation  de  la  mauvaise 
conduite  de  (pielques  religieuses);  s.  d. 

Fol.  i/j8.  Mémoire  sur  le  droit  de  présentation  exercé  par  le  roi 
d'Espagne  pour  les  églises  de  Sicile;  s.  d.  —  En  italien. 

Fol.  iGo.  «  Relacion  de  los  jue/.es  de  la  gran  corte,  Platamon  y 
Palmula,  sobre  la  alargation  de  carzel  al  avogado  fiscal  D.  Pedro  del 
Ferro  »  ;  s.  d.  —  En  italien. 

Fol.  164.  Extrait  des  instructions  données  à  D.  Francisco  de  Bena- 
vides;  s.  d. 

Fol.  iG5.  Épître  adressée  à  un  vice-roi  de  Valence  à  l'occasion  de 
son  installation;  s.  d. 

Fol.  171.  ('  Discurso  del  capitan  Pedro  Ximenez  Destellas  y  Cabrera 
sobre  el  exercito  »  ;  s.  d. 

Fol.  173.  .Note  relative  à  l'expédition  contre  Rayonne;  s,  d. 

Fol.  \-'i.  Deux  rcfpjêtes  adressées  au  roi  d'Espagne  par  Nicolas 
Mclegari,  consul  d'Espagne  à  Gènes,  l'une  afin  d'obtenir  le  rembour- 


ilNVE.NTAIRi;    DE    LA    GOLLECTIO.N    EDOUARD    FAVRE  QO 

sèment  des  dépenses  qu'il  a  faites  pour  assurer  pendant  plus  de  six 
ans  un  service  de  bateaux  entre  l'Espagne  et  l'Italie,  l'autre  afin 
d'obtenir  que  sa  charge  de  consul  soit  transmise  à  son  fils;  s.  d. 

Fol.  178.  Trois  mémoires  sur  les  moyens  d'améliorer  le  commerce, 
adressés  à  la  reine  d'Espagne  par  Juan  Cano;  s.  d.  ^Pièces  im- 
primées. 

Fol.  i85.  Mémoire  de  Luis  de  Cordova  relatif  au  rendement  de  la 
soie  dans  la  ville  de  Grenade  ;  s.  d,  —  Pièce  imprimée. 

Fol.  187.  «  Dubium  spirituale  »,  sans  nom  d'auteur. 

Fol.  194.  «  Kespuesla  brève  al  mémorial  dilatado,  que  se  dio  por 
parte  de  Domingo  de  Piiîa  y  Balthasar  de  Los  Reyes,  vezinos  desta 
ciudad,  al  cabildo  délia,  prelendiendo  su  proteccion  para  ensenar  sin 
titulo  ni  examen  el  scientifico  arte  matematico,  y  philosophica  destreza 
de  las  armas.  »  —  Pièce  imprimée,  avec  notes  manuscrites. 

Fol.  198.  ((  Tabula  praeliguratae  tetrapolis  urbis  Calaris.  »  (Plan  de 
la  ville  de  Cagliari,  d'après  la  Cosnwg rapide  universelle,  avec  mémoire 
explicatif).  —  Pièce  imprimée. 

(200  feuillets;  32Ô  sur  226  millimètres.) 

Léopold  MICHELI. 


VARIÉTÉS 


El  dor-tor  Barlolome  Hidalgo  de  Agiiero,  renombrado  el  Pareo 
Espanol.  Brèves  Noticias  de  su  vida  y  obras. 

Kl  5  de  Enero  de  1Ô97,  ;'i  lus  (Hi  anos,  luoria  pobic,  hunradct  y 
fainoso,  en  su  ciiidad  natal,  Sevilla,  el  doclor  Barlolome  Hidalgo  de 
Agiiero.  iNada  se  sabe  de  sus  |)rimeros  anos,  sino  es  su  noble  origen, 
coino  declaran  sus  apellidos,  y  sus  estudios  cou  los  doclores  Jiian  de 
la  Cueva  y  Alfonso  Cuadra  T»  de  la  Ciiadra;  mas  fueion  luego  lan 
cxcelentes  los  recursus  de  su  aile  y  lan.  liberalmenle  piodigados  eu 
lavor  d(;  sus  conciudadanos,  que  sin  diula  île  él  [Judo  repelirse  (jue 
viviô  de  modo  r/ue  d  sa  miierle  lodos  Uora/Hin  y  el  solo  reia,  por  (»j)usi- 
(•i(')n  à  su  nacimienU)  (fuc  cl  solo  lloraixi,  en  binlo  los  dénias  reinn; 
.Necesilàbas<'  uiuclia  liiz  en  el  enlendimienlo  ('»  l'érica  \ulunlad  en  la 
aplicaciun  (')  génial  inspiraci<'m  en  el  aile,  para  (|ue  un  liombre  se 
hiciera  nolable  en  el  eminenle  siglo  \vi  y  maxime  en  la  <iran  Sevilla, 
lioina  trian/ante  en  dninio  y  ri(juc:a.  Muclios  y  merccidos  elogios  se 
lian  liecho  del  siglo  que  iluslraron  Cervanles,  Lupe  de  Vega,  Fray 
Luis  de  (îranada,  Sla.  Teresa  de  Jesûs,  el  Greco,  Panloja  de  la  Cru/,, 
Arias  Moulano,  \  ailes  el  divinu,  Vlercadu,  l)a(;a  Cbacûn  y  ulros.  Nu 
lie  de  anadir  uno  mâs,  que  resuUai'ia  corlu  aiuKpie  le  dedicara  lodas 
las  paginas  (pie  amablemenle  me  ofrecen  l(js  direclores  tiel  Bidlelin 
llisjxiniqae.  Tampoeu  lie  de  delenerme  à  ponderar  la  exubérante 
actividad  de  Sevilla  en  la  seguiida  milad  del  misiiio  siglo;  el  (jue 
(pliera  conocer  â  ciencia  cierla  el  lorbellino  vilal  de  la  ciudad  del  Helis 
en  aquella  época,  Ica  y  relea,  la  inlroducciôn  que  en  su  estudio 
ciilico  de  <i  Rincoiiele  y  (^orladilk)  »  escribio  el  insigne  académicu 
\  cervanlisia  I).  h'rancisco  Kodriguez  Marin  \  bien  lierlo  (isloy  de  que 
cpiien  siga  mi  consejo  me  qucdarâ  agradecidu  porque  saborearâ 
(leli<;ida  \  amena  lileraluia  (^onlempoiânea  (pie  pareee  escrila  por 
iina  de  las  primeras  plumas  del  siglo  île  Oro.  Para  salislacii'tn  de  mis 
aliciones  cervânlicas  y  punlo  de  alcncion  en  l;i  Imcna  sombra  de 
Sevilla  en  la  lillima  de(;ena  del  lantas  vcces  alabadu  siglo,  me  baslarâ 
decir  (jue  conlaba  enlre  sus  vecinos  â  Cervanles  >  (jue  por  dos  de 
ellos  se  engendi.iroii,  (oii  pocos  afios  de  inlervalo,  Diego  Velâ/que/ 
y  \;\  piimerji  [)ail<;  del  Ingenioso  Hidalgo  I).  Onijole  de  la   Mani^ha. 


VARIETES  97 

En  la  época  en  que  declinaba  y  mon'a  el  Dr.  Agiiero  probablemenle 
tomaba  notas  Miguel  de  Cervantes  para  componer  sus  novelas  ejem- 
plares  sevillanas,  singularmente  «  El  Celoso  Extremeno  »  y  «  Rin- 
conete  y  Cortadillo  »  ;  y  seguramonte  liabia  acumuladas  en  su  memoria 
muchas  felices  observaciones  que  iluslraron  mâs  tarde  las  aventuras 
del  héroe  manchego.  f-Conociô  Cervantes  â  Agiiero?  Nadie  dejaba  de 
conocerle  en  Sevilla,  pues  su  fama,  â  la  sazôn  rebasaba  la  ciudad  his- 
palense  y  se  estendia  por  toda  Espana  y  la  Europa  sabia;  pero  conocerle 
de  trato  parece  que  no,  al  uienos  no  iiay  de  este  conocimiento  indicio 
positivo,  Cervantes  era  i()  aùos  menor  que  Agiiero  y  no  pudo  coin- 
cidir  con  él  en  los  estudios  que  hizo  en  su  primera  cstancia,  de  niùo, 
en  Sevilla,  y  aunque  liijo  de  cirujano.  su  padre,  Rodrigo  de  Cervantes, 
lo  fué  de  la  mâs  modesia  calegori'a,  pobre  ministrante  sin  arraigo  ni 
relaciones  en  la  gran  urbe  andalu/a.  Pero  si  indicios  positivos  l'altan 
para  probar  relaciones  de  trato  y  afeclo  entre  Cervantes  y  Agiiero,  son 
suficientes  los  negativos  para  no  hacer  cuenla  de  semcjante  supuesta 
relaciôn,  va  que  en  ningiin  pasaje  de  las  obras  cervantinas  se  nombra 
ô  alude  al  célèbre  cirujano.  El  doctor  Pero  Recio  de  Agiiero,  natural 
de  Tirteat'uera,  nada  tiene  que  ver  con  el  Pareo  sevillano. 

Por  aquel  entonces  pululaban  en  Sevilla  los  pi'caros,  jaques,  rufos, 
rateros  y  demâs  geutes  de  mal  vivir  y  era  ri  las  cârceles  lugares  en 
donde  fermentaban  todos  los  vicios  y  lacerîas:  con  semejante  hampa, 
corriendo  el  oro  y  el  vino,  insuficiente  la  policîa  y  con  las  galeras  en 
el  puerto  para  hurlar  el  cuerpo  â  la  justicia,  era  la  ciudad  de  la 
Giralda  campo  continuo  de  contiendas  y  ocasiôn  perenne  para  que 
los  cirujanos  se  cansaran  de  curar  heridos.  Por  esta  abundancia  pudo 
decir  un  discipulo  de  Aguero,  Pedro  Ponce  de  Leôn,  que  en  cuatro 
afios  que  practicô  con  él  habfa  curado  mâs  de  très  mil  heridos,  cilVa 
tan  alla  que  por  ella  discurriù  un  cn'tico  que  D.  Baltasar  habia  practi- 
cado  como  cirujano  castrense,  pues  en  efecto,  no  se  comprende 
semejante  carniceria  sin  batallas,  al  menos  de  suponer,  como  era 
verdad,  que  la  picardia  sevillana  las  movîa  âcualesquieras  horas  y  que 
por  los  mâs  futiles  pretextos  salîan  â  lelucir  y  visitaban  las  entranas, 
espadas,  punales,  dagas,  cuchillos  y  herramientas  de  todas  clases. 
Y  quizâ  no  fuera  solo  la  falla  de  temor  al  castigo,  la  causa  de  tanla 
crueldad,  que  â  ella  debiô  contribuir  la  esperanza  en  la  cura,  pues 
cosidos  â  puûaladas  y  con  los  intestinos  eventrados,  aquellos  duros 
matones,  como  no  exhalaran  el  l'iltimo  suspiro  sobre  el  campo  de  la 
contienda,  confiaban  en  la  pericia  del  sabio  y  bondadosisimo  cirujano 
y  por  esto  exclamaban  al  dar  6  recibir  las  cuchilladas  :  [â  Dios  me 
encomiendo  y  al  doctor  Hidalgo  de  Agiiero!  y  para  que  mâs  se  esti- 
mara  esta  providencia,  es  de  advertir  que  vino  â  remediar  una  época 
quirùrgicamente  aciaga,  pues  si  el  doctor  Hidalgo,  cosiendo  por  aquî 
y  con^ervando  por  alla,  salvaba  todos  6  los  mâs  de  sus  heridos,  â  su 


98  BULLETIN    HISPAMOIE 

antecesor  y  maestro  el  doctor  Ciievas,  se  le  morîan  los  25  de  cada  3o, 
'porque  los  cirujanos  antecesores  â  Daça  Chacôn  y  â  Hidalgo,  creian 
ô  practicaban  en  el  concepto  de  que  toda  herida,  maxime  si  era  do 
bala,  danaba  los  lejidos  al  punto  de  impedir  la  cicatrizaciôn,  y  para 
acudir  al  yerro  traumâtico  acudîan  aquellos  con  sus  hierros,  con  lo 
cual  el  pobre  herido  sufn'a  el  doble  error  de  la  teori'a  y  de  la  inter- 
vcnciôn.  Espanta  imaginar  la  situacicm  del  paciente,  sometido  â 
sangre  fn'a  y  sin  anestesia,  al  reconocimienlo  con  tientas  y  hierros 
de  varias  clases,  sufriendo  después  dilataciones  y  contraverturas 
cuando  no  verdaderos  destrozos  en  busca  del  proyectil.  Con  el  calor 
de  la  lucha  se  disinuilaba  el  dolor  de  la  herida,  al  tiempo  de  recibirla, 
y  los  atroces  sufrimientos  vonîan  después,  cuando  al  curarla,  el 
prâctico  de  la  via  coniun,  maltrataba  los  labios  sangrientos,  inflamados 
y  doloridos  y  anadi'a  el  traumalisiuo  quirûrgico  al  causado  por  el 
arma  agresora.  El  enfermo,  con  toda  la  alenciôn  puesta  en  la  mani- 
obra,  no  se  ahorraba  sufrimiento  alguno,  antes  al  contrario,  experi- 
mentaba  el  dolor  en  todo  su  amargo  desarroUo  y  seguramenle  â  mâs 
de  algûn  herido  debiô  ocurrirle,  que  salva  la  intencii')n,  eran  mâs 
piadosos  los  matones  que  los  cirujanos.  Suslituir  la  dulzura,  la  lem- 
plan/a,  y  la  limpieza  y  la  oclusiôn  de  la  herida  â  los  atroces  y 
cruontos  procedimientos  antes  mentados,  taies  fueron  en  lo  arlislico, 
los  relevantes  méritos  de  la  via  parlicalar,  opuesla  por  el  doctor 
Hidalgo  (le  A^iiero  d  la  via  comûn,  cuyos  estragos  le  escarmentaron 
en  cabeza  do  sus  maestros,  Precisamenle  en  esta  defensa  de  la  herida 
esta  el  loque  de  la  via  particular  preconizada  por  Agiiero  :  sus  pre- 
ceplos  que  se  diluyen  on  los  5i  Avisos  de  su  primero  y  principal 
tratalo  ((  |)o  la  verdadera  ciruji'a  »  pueden  sintetizarse  en  dos  capitales 
preceptos  :  apartar  de  la  herida  todo  cuanto  pueda  estorbar  la  cicatri- 
zaci('m,  incluso  la  sangre  extravasada  y  manicnor  reunidos  los  labios 
para  facilitar  la  obra  de  la  naturaleza.  l'onpie  el  Dr.  Hidalgo  adivint) 
por  inspiraciôn  la  verdad  que  boy  todos  sabemos,  que  son  los  tojidos, 
los  que  se  defienden  y  restauran  y  que  todo  el  cuidado  del  tratamiento 
esta  en  evitar  que  se  malogre  ô  relrase  la  cura  natuial  por  agentes 
extranos  ô  desacertadas  intorvenciones.  Ignorantes  de  la  infecciôn 
y  sus  remediùs,  los  cirujanos  de  antafio,  es  maravilloso  el  acierto  de 
Aguero  al  oponer  la  scquedad  â  los  menjurges  que  aplicados  â  la 
herida  servian  de  cullivos  â  los  microbios  infectantes,  si  es  <pie  ollos 
mismos  no  estaban  ya  infectados.  El  aire  scco,  no  os  propiamonte 
antiséptico;  pero  al  concrentar  las  secreciones,  aglulina  con  allas, 
itnrnoviliza  y  aniila  los  microbios  y  las  (-(tstras,  sirvon  lambién  como 
ap<')>-ilos  naturalos  de  las  heridns.  Siompro  he  iiotado  con  salisraccii'm 
en  las  obras  de  Daça  Chacôn,  Francisco  Diaz  y  Agiiero,  el  sano  buen 
sentido  que  eu  todo  tiempo  lia  sido  patrimonio  d(;  los  cirujanos  y 
médicos   espiinoles.    Los   dos    ûllimos    cirujanos,    arriba    mentados. 


VARIKTES  99 

convienen  en  la  cura  de  las  estrecheces  de  la  uretra,  con  el  suave 
y  â  la  postre  seguro  tratamiento  de  la  dilataciôn  graduai.  Cuando 
leîa  sus  préceptes  en  aquellas  obras,  impresas  â  fines  del  siglo  xvi 
6  principios  del  xvii,  recordaba  las  magnificas  lecciones  que  sobre 
el  mismo  tema  oî  â  mi  maestro  de  ciruji'a,  el  eximio  profesor 
D.  Eduardo  Garcia  Duarte,  y  no  podîa  menos  de  ocurrirme  que  mâs 
estragos  debié  causar  Marte  con  sus  metâlicas  algâlias  que  ^'enus 
con  sus  traidores  contagios. 

El  Dr.  Hidalgo  de  Agiiero  ensenaba  curando  y  sus  notas  en  forma 
de  tratados  no  se  publicaron  liasta  después  de  su  muerte  ;  un  cirujano, 
quizâ  el  mâs  autorizado  de  la  época,  Daça  Ghacon,  los  elogia  sin 
réserva;  otro  cirujano,  también  con  autoridad,  Fragoso,  los  discute; 
la  posteridad  falla  en  pro  del  profesor  quinirgico  de  Sevilla  y  los 
ha  sancionado  concediéndole  el  sobrenombre  de  Pareo  espaiîol. 
En  la  dicha  ciudad  de  Sevilla,  se  imprimieron  por  primera  vez  en  iGo^ 
los  diversos  tratados  ô  capitulos  de  la  obra  de  Agùero  en  un  tomo 
en  folio;  la  ediciôn  va  ilustrada  con  el  retrato  del  autor  y  lleva  una 
loa  de  su  yerno,  el  doctor  Ximénez  Guillén,  â  quien  piadosamente 
puede  atribuirse  la  diligencia  de  la  publicacion,  pues  por  aquel 
entonces  y  mucho  tiempo  después,  los  libres  de  ciencia  no  daban 
dinero,  ni  aunque  contubieran  los  avisos  prâcticos  que  avaloran  el  de 
Agiiero  :  este,  â  lo  que  cntiendo,  si  muriô  rico  de  honra,  no  debio 
dejar  hacienda  para  costear  la  impresiôn  de  sus  obras  ;  pues  su 
pobreza,  si  no  recuerdo  mal,  se  déclara  en  su  testamento  exhumado, 
como  tantos  otros  papeles  preciosos,  del  fondo  de  los  archives, 
por  la  sagaz  diligencia  de  mi  ya  citado  amige  D.  Francisco  Rodriguez 
Marin.  En  una  nota  del  Loaisa  del  «  Gélose  extremefio  »,  publicado 
por  este  académico  en  1901,  se  da  neticia  del  testamento  de  Agiiero 
y  de  la  pobreza  del  testader. 

He  examinado  la  ediciôn  principe  en  la  biblioteca  de  la  Facultad 
de  Medicina  de  Madrid  y  he  reparado  en  el  retrato  del  autor;  le 
représenta  viejo,  descarnado  de  rostre,  las  barbas  de  piata,  les  ojos 
inquisitivos  y  la  actitud  como  la  del  que  explica.  Para  demostrar 
su  nobleza  y  profesiôn,  aparecen,  de  una  parte  los  cuarteles  herâl- 
dices  de  la  familia  ;  y  de  etra,  una  calavera  en  la  que  el  Doctor  apoya 
la  siniestra  mano. 

Pesée  la  misma  biblioteca,  etra  ediciôn  de  las  obras  de  Agiiero 
que  es  la  tercera,  impresa  en  Valencia  en  i654,  en  un  volumen 
in  folio  :  aparece  ilustrada  su  portada,  con  los  santosGosme  y  Damiân 
y  como  las  etras  ediciones  esta  favorablemente  censurada  por  el 
licenciado  Daça  Ghacôn.  La  licencia  para  la  impresiôn  la  etorga  el 
entonces  Arzebispe  y  Capitân  General  de  la  ciudad  y  reine  de 
Valencia,  Fray  Pedro  de  Urbina. 

Adeniâs  de  estas  dos  ediciones,  citan  los  biôgrafos  y  panegiristas 


lOO  Bl  LI.ETIN    HISPANIQUE 

del  Dr.  Vgiiero  (Hcrnândez  Morejôn,  de  la  Plata  y  Marcos,  Memorias 
presentadas  al  concurso  de  premios  de  la  Real  Academia  de  Medicina 
de  Madrid  de  1866)  una  segunda  ediciùn  dedicada  al  Doctor  Diego 
Hexarch  é  impresa  en  Barcelona,  en  1624,  en  un  tomo  en  cuarto. 

No  séria  oportuna  la  enumeraciôn,  al  pormenor,  de  las  noticias 
contenidas  en  los  catorce  tratados  que  comprenden  las  obras  del 
doctor  Agiiero;  â  él  le  ocurria,  poco  mâs  6  menos,  lo  que  û 
D.  Quijote.  y  en  sus  textos  salta  â  la  vista  la  desproporciôn  entre  los 
propôsitos  y  los  medios  para  lograrlos.  Ya  lie  advertido  que  la 
orientaciôn  del  prâctico  sevillano  la  suscribiria  un  cirujano  del 
siglo  w,  con  la  diferencia  que  este  acierla  por  ciencia  y  aquél  adivino 
por  inspiraciôn  ;  mas  tocante  à  los  medios,  fuera  del  agua  y  del  vino 
y  del  aire  seco  y  de  las  suturas  y  de  la  réunion  de  los  labios  de  la 
herida  con  aglutinantes,  lo  demâs  era  perteneciente  â  la  misma  extra- 
vagante farmacia  que  surtîa  las  recelas  de  los  médicos  del  siglo  \vi 
y  de  los  posteriores.  \  véase,  en  prueba  de  ello,  la  composiciôn  de 
la  lamosa  ((  coloradilla  »  en  la  que  lanto  confiaba  el  gran  cirujano 
hispalense.  Entraban  como  factores  de  la  misma  el  incienso,  la  sangre 
de  drago,  el  bolo  armenico,  el  sândalo  rojo,  el  sarco-cola,  el  acibar 
y  el  albin.  A  cstos  simples,  reducidos  â  polvo,  se  anadia  el  aceite  bene- 
diclo  y  con  la  me/cla  se  liacia  la  cura.  No  son  necesarias  muchas  noti- 
cias acerca  de  los  ungiientos,  bâlsamos,  triacas,  mixturas  y  cocimien- 
tos,  usados  en  aquella  época  para  com[)render  que  no  era  de  las  mâs 
complicadas,  la  recela  de  la  coloradilla  aunque  sin  embargo,  excède 
por  la  calidad  y  numéro  de  sus  coniponentes,  al  fanioso  bâlsaino  de 
Jlerahrds  recomendado  por  D.  Quijote. 

()ue  diria  el  Doctor  Agiiero  si  alcanzase  la  quîmica  lisiolôgica 
moderna  que  con  ra/.ôn  apellida  de  impondérable,  de  inumerable 
y  de  inestable,  mi  sabioamigo  el  ptofesor  Cli.  Kichet;  mas  doblemos 
la  h»»ja,  que  â  los  lectores  del  Bullelin  Hispanique  no  les  interesa,  por 
aliora,  estas  maravillas  de  cantidad  y  calidad  que  vamos  sacando 
ahora  en  los  laboralorios  de  fisiologia,  diluyendo  los  agentes  y  sir- 
viéndonos  de  los  animales  â  guisa  de  réactives. 

El  arte,  por  lo  que  tiene  de  inspiraciiSn,  no  espéra  â  la  cioncia  sino 
que  se  adelanta  â  ella  y  presla  itiapreciables  beneficios  â  la  humanidad. 
Dlganlo  las  vidas  salvadas  por  el  doctor  Barlholomé  Hidalgo  en  pleno 
siglo  \vi,  sin  qm'mica,  con  una  anatomia  rudimenlaria  y  con  liigi(Uie 
tan  atrasada  (pie  se  crei'a  posible  prev(;nir  la  peste  con  sahumcrios  : 
cierto  que  anadian  el  sabio,  aunque  egdista  conseju,  de  irse  luego 
y  vol  ver  tarde. 

El  arte  no  solo  endulza  y  embellece  l.i  vida:  lambiéii  la  alarga. 

DocroH  J.  GOMEZ  OC  AN  A, 
de  la  Heal  .\cademia  de  Medicina  de  Madrid. 


UNIVERSITES  ET  ENSEIGNEMENT 


L'Intercambio  avec  le  Portugal. 

La  mort  de  M.  Consiglieri  Pedroso,  survenue  peu  de  temps  après 
la  visite  des  universitaires  bordelais  à  Lisbonne  (voir  Bu//.  Iiisp.,  1910, 
p.  339),  autant  que  les  événements  politiques,  avait  jusqu'ici  em- 
pêché la  Société  de  Géographie  de  Lisbonne,  dont  il  était  le  président 
et  l'âme,  de  nous  rendre  notre  visite  par  l'envoi  de  conférenciers. 
M.  Consiglieri  Pedroso  s'était  proposé  de  venir  lui-même  avec  M.  le 
comte  de  Penha  Garcia,  membre  de  la  Société,  qui  aurait  donc  eu 
deux  représentants;  et  il  eût  représenté  en  outre  le  Curso  Superior 
de  Leiras,  dont  il  était  directeur. 

M.  le  comte  de  Penha  Garcia  est  venu  seul.  Ancien  ministre  des 
finances,  ancien  président  de  la  Chambre  des  Députés,  il  nous  était 
envoyé  officiellement  par  la  Société  de  Géographie  de  Lisbonne  i  il 
a  été  reçu  officiellement  par  la  Société  de  Géographie  et  par  l'Univer- 
sité de  Bordeaux.  Devant  une  assistance  sympathique  pour  laquelle 
l'immense  salle  de  l'Athénée  de  Bordeaux  était  tout  juste  assez  grande 
(18  décembre),  il  a  parlé  de  l'œuvre  coloniale  du  Portugal  pendant 
les  trente  dernières  années.  11  l'a  fait  dans  un  français  non  seulement 
facile,  correct  et  élégant,  mais  agréable,  avec  charme  et  simplicité, 
sobrement  —  et  efficacement,  car  il  a  bien  atteint  son  but,  qui  était  de 
montrer  que  le  Portugal,  dans  ce  que  les  événements  lui  ont  laissé  des 
domaines  immenses  découverts  par  lui,  a  su  et  sait  encore  être  à  la 
hauteur  de  sa  mission.  Des  vues  et  des  graphiques  drtcumenlaient 
l'exposé. 

M.  Radet,  doyen  de  la  Faculté  des  Lettres  et  vice-président  de 
l'Université,  en  l'absence  du  recteur,  avait  été  prié  par  la  Société  de 
Géographie  de  Bordeaux  de  présenter  l'éminent  conférencier,  et  de  le 
remercier.  11  s'est  acquitté  de  sa  double  tâche  avec  une  autorité  que 
doublait  sa  foi  dans  l'utilité  de  pareils  échanges.  Il  a  montré  ce  que 
représentait  la  personnalité  du  conférencier,  qui,  ancien  élève  de 
notre  École  des  Sciences  politiques,  était  arrivé  tout  jeune  à  l'une 
des  plus  hautes  situations  politiques  de  son  pays,  et  continuait  à  le 
servir  par  ses  publications,  par  ses  conférences,  enfin  par  son  rôle 
à  la  Cour  d'arbitrage  de  la  Haye,  dont  il  est  membre. 


BULLETIN    HISl'AMQUE 


Nous  espérons  que  M.  le  comte  de  Penha  (îarcia,  que  de  fréquents 
jîassages  à  Bordeaux  avaient  déjà  presque  t'ait  Tun  des  nôtres,  se 
souviendra  qu'il  a  acquis  le  droit  de  cité  parmi  nous.  Nous  ne  lui 
avons  pas  dit  adieu,  mais  u  au  revoir  ».  G.  G. 


Diplôme  d'études  supérieures  d'espagnol. 

M.  Lhéritier  candidat  à  l'agrégation  d'histoire  ot  déjà  pourvu  du 
diplôme  d'histoire  et  géograpliie,  a  présenté  en  juillet  dernier  à  la 
Faculté  des  lettres  de  Bordeaux  un  mémoire  sur  «  l'œuvre  de  Gadalso 
comme  document  historique»,  étude  intelligente  qui  atteste  une  ini- 
tiation déjà  sérieuse  à  l'histoire  de  la  société  espagnole  au  xviir  siècle. 
—  Il  y  a  là  un  exemple  à  imiter  pour  les  étudiants  d'histoire  et  même 
de  philosophie,  sans  parler  de  ceux  des  lettres.  Gombien  de  sujets 
impossibles  à  traiter  sans  une  préparation  technique  et  qui  par  consé- 
quent échappent  à  la  compétence  des  simples  espagnolisants,  et  ne 
sont  accessiblv-^s  pourtant  qu'à  la  condition  de  connaître  la  langue 
et  la  littérature  historique,  pliilosophique,  scientitique  de  l'Espagne! 
G'est  pour  permettre  des  travaux  de  ce  genre  qu'à  été  créée  l'École 
française  de  Madrid.  11  est  à  souliaiter  qu'ils  soient  encouragés  dans 
les  Facultés,  et  surtout  dans  les  Facultés  méridionales.  G.   G. 

—  M.  Gapmartin  a  soutenu,  à  la  Faculté  des  lettres  de  Toulouse,  le 
i"^  juillet,  un  mémoire  pour  le  diplôme  d'Études  supérieures  d'espa- 
gnol sur  le  sujet  suivant  :  «  La  femme  et  les  caractères  de  femmes 
dans  le  Libro  de  biicn  amor,  de  l'archiprêtre  de  Hita.  »  Dans  une  pre- 
mière partie,  l'auteur  a  fait  un  exposé  dos  opinions  courantes  sur  la 
femme  dans  le  moyen  Age  espagnol.  La  deuxième  partie  était  consa- 
crée à  l'analyse  des  différents  types  de  femmes  dans  le  poème  de  Juan 
Ruiz.  Dans  le  résumé  de  la  querelle  des  féministes  et  des  antifémi- 
nistes, il  était  difficile  de  trouver  des  indications  vraiment  nouvelles, 
après  l'abondante  littérature  que  cette  querelle  a  provoquée,  et  l'auteur 
n'y  pouvait  réussir.  L'étude  des  caraclères  de  femmes  dans  l'œuvre  de 
Juan  Ruiz  se  prêtait  mieux  à  des  recherches  originales  et  à  des  conclu- 
sions précises.  M.  Gapmartin  a  passé  en  revue,  dans  un  espagnol 
élégant  et  agréable,  la  galerie  des  portraits  réunis  par  le  galant  archi- 
prêlre,  mais  ces  portraits  répondent-ils  à  la  réalité?  L'auteur  ne  s'est 
pas  sérieusement  demandé  si  toutes  les  aventures  complaisaninient 
ra|)portées  par  le  protagoniste  ont  un  fondement  historique,  biogra- 
phi(pie,  ou,  au  contraire,  si  la  part  de  l'imagination  et  de  la  fantaisie 
n'\  est  |jas  pré()()ndéranto.  Il  a  tout  accepte  coiiiine  réel,  même  les 
Serrunas,  malgrt'  les  invraisemblances  ou  les  impossibilités  malériclles, 
et  c'est  ce  qui  a  (piehpie  peu  compromis  la  solidité  des  conclusions  de 
la  thèse,  dont  le  jury  s'est  plu  tr;iilleurs  à  reconnaître  les  qualités 
de  stvie.  H.  M. 


BIBLIOGRAPHIE 


Collecçâo  de  manuscriptos  ineditos  agorn  dados  a  eslampa. 
I.  0  livra  da  Corle  Impérial.  II.  0  livra  da  virtuasa  bemj'eiloria 
da  Infante  Dam  Pedra.  III.  Fa.stiyimia  par  Thamé  Pinheira 
da  Veiga  Turpin).  Porlo,  1 910- 191 1,  in- 4",  27^,  -"^oS, 
3-4  pages;  introductions  non  paginées. 

Cette  série  de  publications  entreprises  par  la  Bibliothèque  publique 
de  Porto,  est  destinée  à  mettre  dans  le  domaine  commun  les  manus- 
crits conservés  par  cet  établissement,  et  dont  quelques-uns  seulement 
avaient  été  édités  soit  par  l'Académie  des  Sciences,  soit  par  Herculano, 
le  baron  do  Castello  da  Paiva,  Kopke,  C.  Aureliano  da  Silva  e  Souza, 
J.  A.  da  Graça  Barreto.  Les  trois  textes  publiés  cette  fois,  et  si  près 
les  uns  des  autres,  sont  précédés  d'introductions  signées  par  le 
directeur  de  la  Bibliothèque,  M.  José  Pereira  de  Sampaio. 

Du  Livro  da  Corle  impérial,  M.  Pereira  nous  dit  peu  de  chose. 
Il  se  contente  de  reproduire  deux  affirmations  de  Theophilo  Braga, 
à  savoir  que  le  titre,  E.*ile  livro  he  chamado  Corte  enperial  0  quai  he 
dafonso  Uaasqiie:  de  Calvos  morador  na  Cidade  do  Porlo,  en  indique 
non  l'auteur,  mais  le  possesseur,  qui  était  au  service  du  duc  de 
Bragance  en  lA^a;  et  que,  par  ce  livre,  on  peut  savoir  ce  que  l'on 
connaissait  des  livres  arabes  à  une  époque  où  on  les  ignorait  dans  les 
pays  les  plus  civihsés  de  l'Europe.  Quelle  époque?  C'est  ce  qu'on  ne 
nous  dit  pas  ici.  M.  Pereira  rappelle  seulement  que  le  litre  de  ce  livre 
figure  parmi  la  liste  de  ceux  que  possédait  le  roi  Duarte,  liste  publiée 
plusieurs  fois,  entre  autre  par  l'abbé  Roquette  dans  son  édition  du  Leal 
Conselhero  (Paris,  18/12).  Le  sous-titre,  ou,  pour  mieux  dire,  le 
véritable  titre,  indique  assez  explicitement  la  nature  de  l'ouvrage  : 
Este  livro  he  chamado  Corte  enperial  em  que  he  dispulada  a  ffe  crislna 
coni  os  ientyos  e  iudeos  e  mouros...  L'auteur  nous  montre  Jésus-Christ 
présidant  les  Corles  célestes  avec  deux  reines  à  ses  côtés,  l'Église 
triomphante  et  l'Église  militante.  C'est  l'Église  militante  qui  tient  le 
rôle  d'orateur;  elle  dispute  tour  à  tour  avec  les  gentils,  les  juifs  et  les 
maures,  sans  oublier  les  grecs,  représentés  par  un  évêque  à  la  barbe 
chenue.  Et  c'est  dans  ses  répliques  à  Valfaqui  des  maures,  vers  la  fin 
de  cette  longue  séance,  qu'elle  cite   plusieurs  livres  arabes,   qui   se 


T04  Rt  LI.ETIN    HISPANIQUE 

réduisent  au  Coran  (p.  2^8  et  ss.j,  an  (lahiU-el-Bokhàri  {hucary, 
p.  3^8),  au  Bourda  {biirat,  p.  269),  au  Kilàh-el-Mowata  (moafa,  ib.)- 
Du  moins  je  n'en  ai  pas  rencontré  dautres.  En  tout  cas  les  derniers 
chapitres,  où  est  institué  un  parallèle  entre  la  morale  chrétienne  et  la 
morale  musulmane,  ne  manquent  pas  d'attrait. 

0  livra  de  virtuosa  bemfeitoria  de  l'infant  Dom  Pedro,  dédié  par 
celui-ci  à  son  frère,  Dom  Duarte.  alors  prince  héritier,  par  conséquent 
avant  i^^S,  se  trouve,  avec  une  traduction  du  De  officiis  de  Cicéron 
due,  semble-t-il,  au  même  Dom  Pedro,  dans  un  manuscrit  du 
\v'  siècle,  en  parchemin,  conservé  à  l'Académie  de  l'Histoire  de 
Madrid;  mais  une  copie  complète,  prise  directement  sur  le  manuscrit 
de  Madrid,  et  deux  autres  incomplètes  existent  à  la  Bibliothèque  de 
Porto;  l'Académie  des  Sciences  de  Lisbonne  en  possède  une  copie 
datée  de  t8i3;  et  ces  trois  dernières  paraissent  dériver  de  la  copie 
complète  de  Porto.  M.  Pereira,  grâce  à  l'intelligente  munificence  de 
la  municipalité  de  Porto,  a  pu  comparer  les  cinq  manuscrits  et 
publier  ce  texte  oublié,  doublement  intéressant  comme  oMivre  litté- 
raire et  comme  document  philologique. 

Du  troisième  ouvrage  publié  par  l'actif  bibliothécaire  de  Porto  il 
existe  plusieurs  manuscrits,  dont  un  lui  appartient  en  propre  et  deux 
à  la  Bibliothèque  même  de  Porto.  Le  titre  en  est  des  plus  bizarres  : 
Fasiigimia,  ou  Fa.stos  geniaes,  iirados  da  liimba  de  Merlim,  cô  a 
demanda  do  Santo  Grial  pelo  Arcebispo  D.  Tiirpin.  Descubertos,  e 
Iirados  a  luz,  pelo  famoso  lusitano  Fr.  Pantaliào  de  Aiieiro,  q  os 
sachou  em  hii  Mosteiro  de  f'alouros.  cô  u  seii  ilinirario.  Sub  signo 
cornucopiae  Cornuaria  in  fora  Boario.  Excudebal  Cornélius  Corneles 
ex  (jenere  Corneliorum;  a  cusla  de  Taim.es  de  Tempe,  côprador  de 
liuros  de  canalnria.  Ce  litre  est  une  plaisanterie  de  l'auteur,  (jui,  bien 
que  peu  connu  en  somme,  a  du  moins  la  réputation  d'un  facétieux. 
Le  Proemio  de  Guevara  (jui  suit  ce  tilr(>  est,  on  le  devine,  un  pastiche, 
un  assez  joli  pastiche,  du  célèbre  épislolier;  c'est  même  mieux  que 
du  Guevara, car  c'est  court.  Suit  une  préface  enjouée,  signée  «  Turpini. 
Thomr  Pinheyro  da  Veiga»,  (]u\  a  donc  malgré  tout  voulu  se  faire 
connaître.  On  est  un  peu  étonné  après  de  tels  préambules  de  trouver 
une  relation  des  incidents  de  la  vie  de  raulcur  et  de  la  vie  de  la  cour 
à  \alladolid  après  la  naissance  du  futur  Philippe  IV  (8  avril  HJoô), 
durant  les  mois  d'avril -juillet.  Cette  relation  est  divisée  en  deux 
parties,  intitulées  l'une  Pliilipslren,  chronique  courtisane,  et  l'autre. 
Segunda  piirlr  giit'  tracta  da  Pratica  do  Prado  e  Baratilho  t/uoti- 
ilianii,  (•hmni(iMe  s(;andaleuse  des  amusements  du  Prado  après  le 
dépail  du  r<»i  chez  le  duc  de  Lerme,  juscpiau  départ  de  railleur  pour 
Lisbonne.  Une  Pinrigraphia  ou  Descriprào  e  liistoria  natural  e  moral 
de  \'al hadolid  con&lilue  une  troisième  partie,  description  de  la  ville  et 
observations  sur  les  mœurs.  Ce  Turpin  (puisque  l'auteur  tient  à  se 


BIBLIOGRAPHIE  1 OO 

donner  ce  nom)  n'aimait  pas  seulement  les  facéties,  mais  aussi  les 
histoires  salées,  et  il  n'en  manque  pas  dans  son  livre.  Mais  tout 
Turpin  qu'il  soit,  il  n'a  jamais  l'air  d'être  un  taux  historien.  11  valait 
certainement  la  peine  de  publier  son  œuvre,  d'autant  que  le  style  en 
est  des  plus  alertes,  et  qu'on  n'y  trouve  pas  une  page  ennuyeuse. 

G.  CIROT. 

Cenlenario  do  nascimenlo  de  Alexandre  Hercalano,  lypographia 
daAcademia.  Lisboa,  fqoS;  in-8",  102  p.ages. 

Cette  brochure,  qui  renferme  trois  discours  académiques  prononcés 
par  MM.  Teixeira  de  Oueiroz,  Consiglicri  Pedroso  et  Christovam  Ayres 
dans  la  séance  du  28  mars  lyto,  n'apporte  aucun  document  de  nature 
à  moditier  les  idées  reçues,  mais  elle  permet  de  mesurer  ce  qui  survit, 
au  regard  de  la  critique  moderne,  de  la  réputation  d'Herculano, 
envisagé  sous  le  triple  aspect  du  romancier,  de  l'historien  et  du  poêle. 
C'est  une  grande  ligure,  et  vraiment  représentative,  que  celle  du 
solitaire  de  Val  de  Lobos.  Entraîne  malgré  lui  dans  le  courant  de 
l'émigration  libérale,  il  avait  joué  un  rôle  actif  en  1802  et  contribué 
au  triomphe  de  la  Charte  pour  se  retourner  ensuite,  comme  les 
romantiques  espagnols  de  la  même  génération,  contre  les  excès  de 
la  fraction  avancée.  Aucune  vie,  néanmoins,  ne  fut  plus  étrangère  aux 
compromissions  que  celle  d'Herculano,  l'écrivain  austère  et  incor- 
ruptible qui  apparut  aux  yeux  des  contemporains  comme  une 
incarnation  de  l'idéal  mystique  et  belliqueux  du  Moyen-Age  el  que 
M.  Christovam  Ayres  n'hésite  pas  à  comparer, pour  la  belle  intégrité 
de  son  caractère  et  la  ferveur  de  sa  foi  démocratique,  au  fondateur  du 
tiers  ordre,  saint  François  d'  Vssise.  Une  bonne  partie  de  son  œuvre, 
on  le  voit,  ne  saurait  être  détachée  des  polémiques  du  moment.  Les 
représentants  des  classes  privilégiées  out  parfois  un  rcMe  odieux  dans 
ses  romans,  imités  pourlani  de  Waller  Scott.  Les  poésies  du  «  volon- 
taire de  la  reine  »>  célèbrent  l'expédition  des  libéraux  à  lîle  'l'eiceira, 
leur  débarquement  à  Mandello  et  les  soullrances  endurées  pendant  un 
hiver  rigoureux  dans  les  tranchées  de  Porto.  On  comprend  qu'il  n'ait 
pas  toujours  pu  atteindre,  quand  il  aborda  l'histoire  proprement  dite, 
à  la  sérénité  d'un  juge  impassible,  qu'il  ait  maudit  l'Inquisition  et 
qu'il  se  soit  déchaîné  contre  les  ullramontains  qui  lui  déclaraient  la 
guerre  pour  avoir  osé  révoquer  en  doute  l'authenticité  du  miracle 
d'Ourique.  Il  serait  injuste,  néanmoins,  de  prétendre  que  la  passion 
étoulTe  chez  lui  l'esprit  critique.  M.  Consiglieri  Pedroso,  avec  une 
autorité  indiscutable,  nous  prouve  qu'il  n'ignorait,  au  moment  d'abor- 
der sa  tâche  patriotique,  aucun  des  travaux  essentiels  de  Rancke,  de 
Wilken,  de  Kaumer,  d'Eichhorn,  de  Phsler,  de  Savigny,  de  Schaefer 
et  qu'il  a  su   l'aire  le  départ,  mieux  qu'Augustin  Thierry,  entre  les 


Io6  BLLLETI.X    HISPANIQUE 

documenls  de  provenance  littéraire  et  les  sources  authentiques,  réser- 
vant une  place  importante,  sans  éliminer  d'ailleurs  l'élément  narratif, 
aux  institutions,  au  régime  municipal,  aux  privilèges  locaux  ou  foraes. 
Mais  l'œuvre  qui  le  désigne  aujourd'hui  mieux  que  jamais  au  respect 
des  érudits,  ce  sont  les  Portugaliac  Moimmenta  Historica,  lesquels 
devaient  rivaliser  avec  les  Monumenta  Gerrnaniae  dans  la  pensée  de 
leur  auteur  qui  assuma  courageusement,  sans  collaborateurs,  tout  le 
travail  préalable  de  la  documentation.  11  a  donc  sa  place  marquée  au 
premier  rang  dans  un  genre  qui  demeure,  suivant  M.  Consiglieri 
Pedroso,  le  plus  riche  de  la  littérature  portugaise  depuis  l'apparition 
des  grands  historiens  des  Indes,  Joào  de  Barros,  DiogodeCouto,  Lopes 
de  Castanheda,  Gaspar  Corrêa,  etc.  Né  en  1810  et  mort  en  1877, 
llerculano,  leur  glorieux  continuateur,  représente  ce  qu'il  y  a  de 
moins  cITéminé  dans  le  romantisme  citait  pressentir  l'avènement  d'une 
méthode  rigoureusement  objective. 

G.  LE  GENTIL. 


Alfonso    Reyes,   Cuesliones   estélicas,   1    vol.  in-16.  Paris,  Paul 
OMeiidorf,  292  pages,  s.  d.  (ir)!!). 

L'auteur  de  ce  recueil  d'essais  et  d'articles  de  critique  n'a  pas 
encore  vingt  ans,  ainsi  qu'il  appert  du  court  prologue  de  D.  Francisco 
Garcia  Caldcrôn.  Il  appartient  à  ce  petit  cénacle  mexicain,  (pii,  au 
milieu  des  révolutions  et  des  pronanciarnientos ,  poursuit  paisiblement 
l'étude  des  problèmes  de  la  philosophie,  de  l'esthétique,  de  la  litté- 
rature, avec  un  esprit  toujours  ouvert  à  tout  ce  qui  sollicite  la 
curiosité  des  penseurs  des  deux  mondes,  et  une  sympathie  manifeste 
pour  toutes  les  tentatives  nouvelles  et  originales.  On  retrouvera  l'écho 
et  comme  le  contre-coup  de  toutes  les  controverses  et  théories  qui 
préoccupent  la  pensée  contemporaine  dans  ce  recueil  d'articles  du 
((Benjamin»  de  l'Académie  mexicaine  Les  sujets  les  plus  variés 
y  sont  abordés.  Les  trois  Électres  du  théâtre  athénien,  la  symétrie 
dans   l'esthétique   de    (id-llie.    le    Procédé   idéologique   de   Stéphane 


1.  L'Aleneu  de  la  Juveitlud,  ^\e  Mexico,  fsl  un  rentre  liltérairc,  philosophique  cl 
artistique  où  se  réunit  un  groupe  de  jeunes  gens  pour  mettre  en  commun  leurs 
pensées,  leurs  efTorls  ol  leurs  essais.  Nous  avons  sous  les  yeux  le  volume  publié 
en  l'jio  ((JonferenrAas  del  Aleneo  Juventud,  Mexico,  Lacaud),  pour  céléhrcr  le  premier 
centenaire  <ic  l'indépendance  mexicaine.  II  comprend  six  conlV-rencos,  fort  intéres- 
santes, qui  toutes  ont  rapport  à  la  littérature  et  au  mouvement  intellectuel  de  la 
;,'ratiiJe  Héi)iil)li(|ue  de  l'.Vmérique  Centrale,  lui  voici  rémunération  : 

Antonio  Gaso,  La  Jilosofia  mornl  de  Don  Kngcnio  M.  de  Hostos. 

\lff>nso  Ueycs,  Los  poernas  nistiros  de  Manuel  ./usé  Otkon. 

l'edrn  llenriquez  Lrena,  La  ohra  de  José  Enriijuc  llodû. 

flarlos  (lon/.Hlcz  l'cna,  El  pensndur  Me.ricano  (J,  .1.  Fcrnândez  de  Lizardi)  y  su  licnii>o. 

José  Kscofet,  Sor  Juana  Inès  de  la  C'uz. 

José  \  asconcelos,  Don  Gabino  Barreda  y  lus  ideas  conlenquiràncas. 


BIBLIOGKAPHIE  IO7 

Mallarmé,  les  Blutes  Byzaniines  d'Auguslo  de  iVriiias,  el  une  Ibulc 
d'autres  d  opiniones  »  et  «  intenciones  »  témoignent  de  l'activité  intel- 
lectuelle du  jeune  critique  et  de  son  groupe.  Nous  appellerons  ici 
l'allention  sur  les  deux  études  se  rattachant  spécialement  à  la  litté- 
rature espagnole.  A  propos  de  la  Cdrcet  de  Amor  de  Diego  de  San 
Pedro,  M.  Reyes,  aprrs  Menéndez  Pelayo,  analyse  avec  un  enthou- 
siasme communicatif  les  éléments  nouveaux  d'intérêt  introduits  dans 
la  littérature  d'imagination  par  ce  roman,  qu'il  n'hésite  pas  à  qualilier 
de  ((  novela  perfecla  »  ce  qui  est  peut-être  beaucoup  dire.  L'essai  sur 
V Esthétique  de  Gônyora,  a  été  lu,  le  26  janvier  (910,  à  V Athénée  de  In 
Jeunesse,  lors  de  la  visite  à  Mexico  de  Don  Rafaël  Altamira.  Je  ne  crois 
pas  que  la  question  si  embrouillée  du  Gongorisme  soit  définitivement 
résolue  dans  les  pages  que  lui  consacre  M.  Reyes,  mais  ces  dernières, 
méritent  cependant  d'être  lues,  d'abord  parce  qu'elles  montrent  la 
place  prépondérante  que  la  «  couleur  n  et  la  «  musique  »  occupent 
dans  l'art  de  Gôngora,  et  ensuite  parce  qu'elles  prétendent  établir  que 
«  les  défauts  du  Polyphème  ou  des  Solitudes  sont  le  couronnement 
et  le  point  d'aboutissement  naturel  des  qualités(?)  qui  depuis  long- 
temps se  montraient  chez  le  poète,  et  constituent  non  point  une 
déviation  et  une  contradiction,  mais  le  développement  d'une  faculté 
débordée  et  torrentielle.  »  —  Et  la  thèse  peut  en  effet  se  soutenir,  quoi 
qu'il  ne  manque  pas  non  plus  de  bons  arguments  pour  soutenir  la 
thèse  contraire,  à  savoir  qu'à  un  certain  moment  (vers  iGioj,  et  sous 
l'empire  de  causes  accidentelles,  Gôngora  se  décide  entre  deux  ten- 
dances entre  lesquelles  il  semble  partagé  jusque-là.  Mais,  réduit  à  ces 
termes,  le  problème  est  un  peu  trop  simplifié  :  ce  qui  mériterait  d'être 
tiré  au  clair,  ce  sont  les  rayions  de  cette  brusque  transformation,  et 
l'explication  de  la  coexistence  dans  le  même  esprit  de  qualités  et  de 
défauts  si  contradictoires.  La  psychologie  de  Gôngora,  d'ailleurs 
troublée  peut-être  par  l'irruption  subite  de  phénomènes  morbides, 
reste  toujours  obscure,  et  d'autre  part  les  raisons  historiques  et 
sociales  qui  ont  rendu  possible  le  triomphe  de  la  secte  cultiste  ne  sau- 
raient être  négligées  dans  une  recherche  de  cette  nature. 

E.  M. 


CHRONIQUE 


—  Nous  devons  signaler  tout  spécialement  deux  nouveaux  articles 
publiés  dans  les  Anales  de  In  Vniversidad  de  Ckile  (1911)  par  notre 
collaborateur  M.  F'.  Hanssen.  L'un,  sous  le  litre  de  Espicilejio  grama- 
ticaly  comprend  diverses  notes  sur  gelés,  sos  (pour  os),  ive  (—  ibi), 
aragon  Inde  (même  sens),  le  groupement  adverbial /<7/«fltw/?/i<  c  mnl- 
vada:  sandio,  arropea,  entregnr.  tanda:  xe  cl  se  dans  la  Cancioneiro 
de  Ajuda:  per  dans  l'ancien  léonais.  L'autre  est  intitulé  !\olas  al 
Poenm  dcl  Cid  et  comprend:  r  im  compte  rendu  critique  du  livre  de 
M.  Mcnétidcz  l*idal  Canlar  de  tn'io  Cid;  a"  un  examen  de  la  théorie  de 
M.  Menéndez  Pelayo  sur  la  versification  du  Poème  du  Cid;  3"  une 
élude  sur  la  proposition  por  dans  le  même  poème. 

M.  Hanssen  vient  également  de  faire  paraître  dans  Homanischen 
Forschungcn  (Band  WIX,  191 1)  un  travail  intitulé  Das  spanische 
l'assiv,  qui  apporte  une  riche  contribution  à  la  difficile  histoire  de 
ser  et  d\'slar. 

—  Il  y  a  dans  Casi  criticas  de  Luis  Bonafoux  des  satires  (jui  rap- 
pellent Larra,  par  exemple  Ih'l  periodisrno  en  Madrid,  et  d'autres  qui 
ne  rai)pellent  que  Bonafoux.  Parmi  ces  dernières  (juelques-unes, 
d'ailleurs,  sont  assez  bien  allilées  :  telle,  celle  qui  est  intitulée  Las 
Carias  de  D.  Juan  (Paris,  Ollendorf,  s.d.). 

—  (i.  Manzella  Krontini.  La  tozana  Andaluza  (Catania,  Mugla, 
1910.  101  p.)-  L'auteur  I appelle  ce  qu'on  sait  de  Francisco  Delicado 
(OU  Delgado),  et  montre  que  les  Irails  de  mœurs  italiennes  qu'on 
trouve  dans  sa  nouvelle,  lielralo  de  la  lozana  Andaluza,  supposent  un 
long  séjour  antérieur  en  Italie.  Il  fait  ressortir  l'intérêt  et  l'originalité 
de  l'œuvre  et  en  quoi  elle  dilTère  de  la  Gélestine,  à  laquelle  on  l'a 
comparée,  et  comment  du  reste,  ainsi  que  dans  celle-ci,  on  y  voit 
mêlés  le  romanesque  et  le  réalisme  le  plus  naturaliste  ;  le  souci  de 
la  vérité  y  va  jusqu'à  l'emploi  d'italianismes  et  même  de  phrases 
entières  en  italien,  procédé  si  courant  aujomd'hui:  bref,  c'est  un  petit 
chef-d'œuvie  du  genre  pornographique. 

'—  Juste  pour  nos  étrennes,  nous  recevons  les  tomes  11  et  111  du 
Canlar  de  Mio  Cid  de  M.  Uamùn  Menéndez  Pidal  (Madrid,  Bailly- 
Baillière,   1911).    Le   mot  «  adnnrable  »    peut  seul  (pialilier   une   lellc 

«puvrc. 

G.  C. 
a  Janvier  rjl2. 

LA  RÉDACTION  :  K.   MKIUMI.K.  A     MOHKI,  KATIO,  V.   PARIf-. 

II.  (AhOl.  spcrcliurc  :  (i.   Hk\)V,'i\  litrerleur-iieraïu. 


BOHDEAUX.  —  IMPKIMERIF.  C.  GOUNOL  ll.HOU,  HUE  nUIRAUDE,  9- I  I . 


Vol.  XIV.  Avril- Juin  1912  N»  2, 

CHROMQLE  LATLXK  DES  ROIS  DE  CASTILLE 

JUSQU'EN    1236' 


[I.  Des  comtes  de  Castille  à  la  mort  de  Sanche  III  **J. 

1.  (Fol.  89)  [DJefuncto  comilc  fernando  gundissaliii  qui  primus 
lenum"  comitatum  in  castella  post  subuersionem  populi  x'ani.  lemporc 
roderici  régis  gotorum  factam  in  yspaniis  sucessit  ei  filius  cius  cornes 
garsias  fernandi.  cui  successit  filius  cornes  sancius.  cuius  filius  garsias 
infans  interfectus  fuit  apud  legionem  cum  iuisset  ut  duceret  in  uxorem 
filiani  régis  uel  cuiusdam  comitisi.  f'  quosdam  légion' 2.  Kelicla  uero 

aj  tenuit. —  bj  ser  (lire  per).  Abella  :  «  locus  mendis  scatens  ».  —  c)  tegionenses 

*  Voir  Bull,  hisp.,  t.  XIV,  p.  3o.  Reproduisant  le  texte  tel  qu'il  est  dans  le 
manuscrit  G.  I,  je  laisse  souvent  les  abréviations  sans  les  résoudre,  et  en  les  repré- 
sentant de  mon  mieux,  quitte  à  les  résoudre  en  bas  de  page.  Pour  plus  de  commo- 
dité, je  rappellerai  ici  que  le  Chronicon  Buryense,  le  Chronicon  Compostellanuin,  les 
Annales  Coinplutenses,  le  Chronicon  Conimbrlcense,  les  Anales  Toledanos  I,  Il  et  ///,  les 
Annales  Compostellani  et  le  Chronicon  de  Cardeha  se  trouvent  au  tome  XXII I  de 
VEspaha  sagrada;  le  Chronicon  Cerratense  au  tome  11  ;  la  Chronique  de  Silos  au  tome 
XVU  ;  VHistoria  Coinposlellana  au  tome  XX,  et  la  Chronica  Adefonsi  imperutoris  au 
tome  XXI  ;  que  le  Chronicon  lAisilanum  est  au  tome  XIV,  et  se  trouve  aussi,  avec 
le  Conimbrlcense,  dans  le  tome  1  des  Portugaliae  Monunienta  historica,  Scriptores 
(Olisipone,  i856),  qui  contient  en  outre  le  Chronicon  Lamecense,  et  que,  malheu- 
reusement, je  n'ai  eu  à  ma  portée  que  par  intervalles.  Les  Généalogies  du  Liber 
Regam  sont  au  tome  I  des  Fteynas  Calholicas  de  Florez  (3*  éd.,  p.  ^92  et  suiv.);  la 
Chronique  de  .San  Juan  de  la  Pena,  dans  la  Biblioteca  de  Escritores  aragoneses 
(Seccion  hislôrico-doctrinal,  t.  I,  187C).  C'est,  d'après  l'édition  de  Beale,  la  seconde 
(1579),  que  je  cite  Rodrigue  de  Tolède,  mais  je  liens  compte  de  celles  de  Schott  et  de 
Lorenzana  ;  quant  à  Luc,  il  n'a  eu  qu'une  édition,  due  à  Mariana  et  à  Schott,  dans  le 
tome  IV  de  Vflispania  illustrata  (1G08).  Outre  la  Primera  Crônica  gênerai  éditée  par 
M.  Menéndez  Pidal,  il  y  a  intérêt  à  consulter  la  Esloria  de  los  Godos  éditée  par  M.  Paz 
y  Mélia  au  tome  LXXXVIII  de  la  (Jolecciûn  de  Documentos  inéditos.  et  la  Crônica  de 
Espana  publiée  aux  tomes  CV  et  CV' I  de  la  même  collection,  toutes  deux  traductions 
libres  de  l'œuvre  de  Rodrigue  de  Tolède  (cf.  mes  Histoires  générales  d'Espagne  entre 
Alphonse  X  et  Philippe  II.  p.  78).  C'est  d'après  l'édition  en  quinze  tomes  que  je  cite 
Lal'uente,  Historia  gênerai  de  Espana.  Je  désignerai  par  l'abréviation  Salazar,  Lara, 
l'œuvre  fondamentale  de  Luis  de  Salazar  y  Castro,  Historia  genealôgica  de  la  Casa  de 
Lara,  k  tomes,  Madrid,  1696-97  et  169^. 

"*  On  peut  diviser  celte  chronique  en  trois  parties  :  1°  la  partie  préliminaire,  des 
comtes  de  Castille  à  la  mort  de  Sanche  III  ;  -r  le  règne  d'.\lphonsc  VllI;  3"  les  règnes 
de  Henri  I  et  de  Ferdinand  III.  C'est  surtout  pour  le  règne  d'Alphonse  Mil  et  celui  de 
Ferdinand  111  (à  partir  de  l'écrasement  des  Laras)  qu'elle  complète  les  textes  connus. 

I.  I.  La  Chronique  léonaise  (II,  92)  est  tout  à  fait  affirmative  :  c'était  la  sœur  de 
Bermudo  111,  la  fille  d'Alphonse  V,  Sancha.  Notre  auteur  n'est  pas  toujours  bien 
informé  pour  ce  qui  s'est  passé  avant  son  époque. -Il  résume  de  mémoire  sans  doute. 

I.  2.  Cf.  Chronique  léonaise,  H,  92,  note  2.  D'après  Rodrigue,  le  meurtrier 
fut  Ruy  Vélaz,  secondé  par  ses  frères  Diego  et  Inigo;  mais  la  Chronique  générale 
{%  788)  relate  aussi  «  la  estoria  del  Romanz  w,  qui  ajoute  un  autre  acteur,  Fernand 

AFB.  W  SÉRIE.  —  Bull,  hispan.,  XIV,  191 3,  2.  8 


IIO  BULLEÏl?!    HlSl'AMQLÈ 

doiniia  iiiaior  filia  iam  dicti  comitis  sancii  tradita  luit  nuplii'  régi 
nauarrc.  et  naiare.  s/  sanctio  nepoti  de  sancho  auarca.  de  qua  maiorc 
dictus.  s.'  rex  habuit  duos  tîlios.  s.  garsiam  et  fe'randum-'  qui  pugna- 
uerunt  iuxta  ataporcami.  ^  bi  inlerfeclus  est  rex  garsias.  Tune  igitur 
rex  fernandus  habuit  regnum  suum  et  regnum  fratris»  et  regnum 
légion  rône''  uxoris  qa*  duxerat  filiani  régis  légion  vermudii  :  — 

3.  [Mjortuo  uero  rege  fe'rnando  qui  cognominatus  est  pinguis  '  qui 
liberauit  conimbriam  de  manibus  mauroruni  successerunl  ei  1res 
lilii  sui  in  regno.  Rex  sancius  in  castll'a.  Rex  alfonsus  in  legionc  et 
asluriis  et  gallecia.  Rex  garsias  in  naiera  et  in  nauarra^  Rex  uero 
sancius  tanquam  uir  slrenuus  et  bcllicosus  impatiens  consortis. 
in  regno  pris^^  iuxta  illud.  omnisque  polestas  inipaciens  consortis. 
ut  XXlli.  q.  \T1.  c.  qd'  aùt-'circa  principium  erit^.  regem  garsiam 

n  '  nuptu.  —  /'/  scilicel.  —  Cy  saiitius.  —  d)  ralionc.  —  c  (juia.  —  f)  patris—  g)  B.  M. 
(  =  lopie  du  British  Muséum)  :  autem. 

Llavnez.  Voir  R.  Menénrtez  Pidal,  Elelemenlo  hisU'irko  en  cl  c  rtonuiti:  dell  InJJ'itiil  (iarcia  » 
(dans  Studi  lellerari  e  Unguislici  dcdit-s  à  Pio  Hajna,  Kirenzc,  lyi  i). 

1.3.  Voici,  pour  plus  de  clarté,  un  tableau  généalogique  (reclilié  en  ce  <iui 
concern?  Doua  Sancha) : 

Kcruân  Gonzalez  (7  970)  îSancho  Abarca  (go.i-fiaô) 

j  .       ,  I  . 

Garcia  FcrnaDdcz  (970-995)  (^iarcia  Sàuchcz,  el  Teinblun  (((33-970) 

I 
Sancho  Garces  (995-1021) 


.   I   .  I       . 

Garcia  Sâucbez         iJoùa  Mayor,  éjiuusc  Sancho  Garcia,  el  .U'/jor  (970-1035) 

(1011-1039) 


fiance  à  D*  Sancha,  |  |  | 

Hllc  d'Alphonse  V  Garcia  Sanchcz         Fernando  1  (j   ioG5)         Raïuiro  1 

el  sœur  de  Berniudo  III  (y  io54)  (Caslille  et  Léon)  (bâtard) 

(Navarre)  épouse  D'  Sancha,         (Aragon) 

lille  d'Alphonse  V 
et  so!ur  de  Hermudo  111 
Voir  les  Généalogies  que  jai  publiées  à   la  suite  de  la  Chronifiue    léonaise  el 
l'inlroduclion  à  celle  même  clironi(]Uc.  D'après  ces  Généalogies  cl  la  (Chronique  léo- 
naise (III,  i),  la  fille  du  comle  Sancho,  Cenime  du  roi  Sancho,  s'appelail  l  rraai  el  non 
Mayor.  Il  csl  donc  probable  que  ces  deux  lexlcs  sont  restés  inconnus  à  noire  auteur. 
I.  .'i.  Atapuerca,  à  une  vingtaine  de  kilomètres  au  nord-est  de  Hurgos.  Cl.  Chro- 
nique de  Silos,  S  H!t. 

I,  5.  Selon  Rodrigue  (VI,  11)  Ferdinand  ne  garda  en  son  pouvoir  (juc  Niijera  el 
laissa  le  pays  entre  l'Kbre  el  les  Pyrénées  à  son  neveu  Sanclio  tiarcés  (el  de  Pchnlen), 
lils  aine  de  Garcia  Siinche/.  Luc  dit  pourlatit  qt|'il  étendit  sa  doininalion  u  ab  ultimis 
linibus  Gallecia-  usque  Tolo»am  »  (p   9.5,  I.  i3). 

3.1.  Je  n'ai  pas  rencontré  ailleurs  ce  r|uali()ca(il'  ap|ilii|ué  à  Ferdinand  1". 
■i.  1.  Erreur  manifeste  à  l'égard  des  lils  di:  Ferdinand  I".   La  (ihronique  léonaise 
présente  aussi,  dans  son  texte  primitif,  (|ue  nous  a  conserM'-  le  manuscrit  (_!.  1,  une 
grosse  inexactitude  puisqu'elle  fait  d'Alphonse  l'aîné  (voir  lUdl.  hUp.,  t.  Mil,  p.    ij'i 
cl  pi.  VII),  ce  qu'une  main  assez  ancienne  a  corrigé  dans  A.  169  («6.,  pi.  VI). 
j.  3.  Lucain,  I,  93  : 

...  omnisque  polestas 
Impatiens  consortis  eril... 
*^irrn  principium  s'entend  bien,  mais  non  ce  qui  précède,  cl  qui  doit  cire  une  réfé- 
rence. 


CHRONIQUE    LATIiNt:    DES    ROIS    DE    CASïILLÊ  1  I  I 

fratrem  suum  cepit  qui  no  longo  tempoie  post''  mortuus  est  in  eius 
captiuitatem  ".  Regem  alfonsum  fratrem  suum  expulit  de  regno.  qui 
expulsus  adiit  regem  maurorum  qui  tune  dominabatur  toleto.  Sed 
rex  sancius  nil  credens  actum  cum  quid  superesset  agendum  zamo- 
ram  obsedit  quam  tenebat  soror  sua  urraca.  ubi  et  interfectus  est  a 
quodam  satellite  sathane  prodiciose  sicut  fama  reffert  .s.  a  uellido 
adolfez.  Ipso  mortuo  predicta  soror  régis  misit  nuncios  suos  ad 
fratrem  suum  regem  alfonsum.  qui  ea  tempestate  apud  toletum 
morabatur.  Recepto  nunciopredictus  rex  in  continenti  reuersus  est  et 
disponente  deo  regnum  paternum  plene  adeptus  est.  Inspirauit  ei 
dominus  deus  consilium  salutare  ut  obsideret  toletum.  cuius  statum 
ad  plénum  nouerat  utpote  qui  eius  interiora  et  secretiora  duni  ubi  '' 
moram  faceret  non  perfunctorie  fuerat  perscrutatus.  Multis  igitur 
annis  eam  impugnauit  prudenler  singulis  annis  seietes'  uastando  et 
fructus  omnes  destruendo.  Tandem  uirtute  diuina  compulsi  mauri 
toUetani  tradiderunt  ciuitatem  suam  predicto  régi  alfonso  ipsum 
recipientes  honorifice  in  dominum  et  in  regem.  Adiecta  conditione 
quod  liceret  eis  remanere  in  ciuitale  retinere  domos  et  possessiones 
suas  et  quod  seruirent  ei  sicut  régi.  Capta  |  nobilissima  et  munitissima 
ciuitate  toleto.  cepit predictus  rex  totam  terram  que  dicitur  extremadura 
populare  castra  multa  et  uillas  alias  ultra  sorram^  per  virtutem  domini 
nostri  ihii  xpi.  tanquam  uir  sapiens  et  potens  eripiens  de  manibus 
sarracenorum.  Sic  igitur  predictus  rex  regno  mullipliciter  ampliato 
cum  filium  non  haberet  nam  unicus  quem  habuerat  nomine  sancius 
intertectus  fuerat  a  sarracenis  iuxta  uillam  que  dicitur  ucles.  cepit 
tractare  et  diligenter  inquirere  ciii  filiam  suam  nomine  urracam  quam 
de  légitima  uxore  susceperat  possetsaluo  suo  honore  matrinionialiter''. 

a)  sic.  —  b)  ibi.  —  c)  scgetes.  —  d)  Sic  (manque  le  verbe). 


•j.  l*.  Voir  Chronique  léonaise  (Bull,  hisp.,  1909,  p.  2O7,  §  3).  Mon  longo  lempurc  jwsl 
n'est  guère  d'accord  avec  les  vingl-tiiialre  années  d'emprisonnement  marqués  par  la 
dite  Chronique,  ni  avec  les  AA  annos  .f-  amplius  dont  parle  Pelage.  Ou  faut-il  sup- 
primer non?  11  est  à  noter  qu'ici  les  deu\  Chroniques  sont  d'accord  (et  avec  elles  le 
Liber  Regum)  pour  attribuer  à  Sancho  la  mise  de  Garsias  en  captivité,  tandis  que 
Pelage  et  la  Chronique  dite  de  .Silos  l'attribuent  à  Alphonse  (voir  Bull,  hisp.,  p.  207, 
note  2). 

■i.  .3.  Le  S  7  contient  un  passage  qui  montre  assez  bien  ce  qu'on  entendait 
alors  par  Extremadura  et  ullra  serram  :  «  Abulam  et  Segouiam  et  alias  uillas 
circumadiacentes  in  extremadura,  et  Toletum  et  omnia  que  sunt  ultra  serram 
versus  partes  illas.  »  Primitivement  VExlremadura  comprenait  les  pays  au  sud  du 
Duero  (cf.  j  02,33  et  (Ji),  avec  Soria  comme  limite  extrême  au  nord  (cf.  Madoz).  .Ségovie 
et  Avila  y  étaient  donc  incluses.  Quant  à  ultra  serram  c'est  l'équivalent  de  ce  qu'un 
document  de  116/1,  cité  par  Risco  (Esp.  sagr.,  t.  XXW,  p.  21G)  appelle  Traserra  : 
«  Fernando  régnante  Toleti,  &  in  tota  ïraserra,  &  in  Extrematura...  ».  C'est  le  pays 
situé  au  sud  des  sierras  de  Cuadarraïua  et  de  Gredos.  L'Extremadura  était  donc  au 
nord,  et  la  Traserra  au  sud  des  sierras.  On  sait  que  le  nom  d' Extremadura  a  été 
appliqué  successivement  ensuite  à  des  pays  de  plus  en  plus  au  sud. 


113  BLLLEri>    HISPANIQUE 

Veniin  cum  in  yspaniis  non  inueniret  talem  qui  uidcrclur  dignus  esse 
gêner  régis  aduocauil  de  burgundie  parlibus  que  sunl  iuxla  ararim 
qui  lluuius  uulgo  dicitur  saona  uiruni  nobilem  in  armis  strenuuni 
ualde  iamosum  bonis  moribus  ornatum  comitem.  s.  remondum  cui 
predictani  filiam  suani  urracam.  s.  in  matrinionio  copulauil.  Diclus 
cornes  non  longo  tempore  uixit  postea  cum  uxore  de  qua  suscepit 
tilium  allonsum  nominalum.  qui  postea  longo  tempore  regnauit  in 
liyspaniis  et  nominatus  est  iniperator.  Cum  predicto  comité  remondo 
uenil  quidam  consanguineus  suus  nomine  henricus  (}ui  et  cornes  eral 
cui  predictus  rex  alfonsus  ob  amorem  generi  sui  Iradidit  in  uxorem 
alteram  quam  lialjebal  non  de  legitimo  matrimonio'J.  de  qua  predictus 
comes  henricus  lilium  habuit.  s.  regem  aldct'onsum  portugalie.  qui 
fuit  pater  régis  sancii.  patris  régis  alfonsi 7  quorum  uterque  mortuus 
est  vicio  malanconie'^  laborans.  Viuente  ad  hue  rege  supradicto  qui 
tolelum  ceperat  mortuus  est  gêner  eius  comes  remondus.  et  rcmansit 
filius  eius  alfonsus.  s.  qui  postea  fuit  iniperator  puei-  tenellus.  qui  et 
in  gallecia  nutritus  est  :  — 

o.  [Mjortuo  uero  supradicto  regealfonso  qui  loletum  ceperat  tilia  eius 
urraca  regina  supradicta  ipsi  successit  in  legno.  quod  postea  pessime 
administrauit'.  \upsit  quidem  post  morlem  pris"  alfonso  régi 
aragonum  (ilio  régis  sancii  qui  obsedit  oscam  in  cuius  obsidione 
mortuus  est  cui  successil  filius  suus  potrus  in  regno  et  in  obsidione 
predicte  ville  (juam  cepil  per  gratiam  dei  uiclo  rege  cesaraguslano. 
et  multitudine  sarracenorum  superata  in  bello.  quod  fuil  factum  in 
canq)o  dalcoral  iuxla  oscam  '.  Cui  petro  legi  cum  prolem  non  reli- 
(piisset  superstilem  sucesit  in  regno  patris  predictus  alfonsus  rex 
aragonum  ^  cui  sicut  tetigi  supradicta  regina  urraca  nupsil.  Sed  ipso 
despeclo  et  derelicto  diucrtil  ad  alia  indigna  rolalu  :  — 

II)  patris. 

2.  tJ.  Cf.  Clironica  Adefunsi  Uni).,  j  2()  :  «  I[>sa  aiilciiiTarasia  eral  lilia  Uoj;is  Doiiiiiii 
Adefonsi,  sed  de  non  légitima,  valdc  tanien  a  Ucgc  dilecta,  noiniiic  Xiiiicna 
Mimioriis,  qiiaiii  \\v\  dilectionis  et  honoris  causa  dédit  niarilatani  Knrico  coniiti,  cl 
dotavit  eam  niai^iiifice,  dans  Porlutcalcnseni  lerramjure  liereditario.  » 

2.  •].   Alphonse  II  de  l'orlugai  (la  i  i-\i'>'.i). 

■À.  8.  Ce  harharisme,  esl  sans  donhï  di'i  à  la  |)ri>noU('ialii)n  |)oi)ul;nr('  dn  mol  dans 
le  castillan  d'alors. 

3.  I.  Pour  les  règnes  d'Urraca  el  de  son  lils  Alphonse  Vil,  voir  Sandoval,  llistuiiu 
de  los  reyes  de  Castilla  y  de  Léon...  (Cinco  reyes),  iCn.');  'j.'  éd.  iCi'i.  .le  me  sers  de 
l'éd.  Cano  (Madrid,  17(12,  en  deu\  tomes),  dans  la<|uille  les  règnes  d'Lrraca  cl 
d'Alphonse  \  Il  occnpent  h;  Lomé  11. 

3.  ï.  Campos  do  Alcoraz,  près  de  lluesca  (uxjG).  .Sur  ces  événemenls,  cf.  (llironi- 
<|uc  de  San  Juan  de  la  Pena,  p.  .j'i  et  suiv.  Voir  aussi  lltiesra  niiniuinental,  par  C.  .Soler 
(lluesca,  i8G'i).  P    1 1 5  el  suivantes;   Dozy,  Heclierrhes  ('.i'  ci\iUi>n),  t.  Il,  p.  s'i,'»- 

3.3.  Cf.  I.,uc,  p.  io3,  1.  8,  où  nous  trouvons  l'élrange  assertion,  tjuc  «  eral  lune 
lemporis  in  Aragonia  Uex  Pclrus  (jui  amore  IJrracii-  Uegin.p  fccit  se  uocari  Hcgcm 
Adcfrinsiim  ».  —  Sur  le  mariage  d'Urraca  a\ec  Alphonse  d'Aragon,  Kodrigue  ilonne 
plus  de  détail>  (VI,  .i'i).  (;f.  >  '1,  n.  'A.  Selon  lui,  l'est  avant  la  mort  d'Alphonse  VI  que 
ce  mariage  aurait  eu    lieu;    Sala/ar  (Lara,  t.  I,  p.  yi)  adopte  celte  opinion,  mais 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILT.E  Il3 

4.  (Fol.  90).  [E]a  igitur  tempestate  predictus  alfonsus  rexaragonuin 
tactus  animi  doloOL"'  intrinsecus  intrauit  in  castellam  cum  mullitu- 
dine  armatorum  et  multa  mala  intulit  regno  castelle'.  Multas  quidcm 
munitiones  et  castra  plurima  tenebant  honiines  eius  in  regno  castelle. 
que  iam  dicta  regina  tradiderat  eidem  régi  2.  Vnde  facta  est  tiirbatio 
magna  et  guerra  longo  tenipore  diirans  et  ualde  dampnosa  in  tolo 
regno  castelle.  Conuenientes  castellani  autem  ciim  comitte  gomicio 
qui  dictus  est  de  campo  spine  qui  niniis  familiaris  erat  regino  ultra 
quani  decuit  pugnauerunt  contra  sepedictutn  regem  alfonsum  iuxta 
sepuluegann  ubi  et  uicti  sunt  ab  eo.  et  predictus  cornes  interfectus  est3. 
Ipsa   uero  regina  recepit  comiteni    petrum    de  lara  patrem  comitis 

aj  doinrc. 

Ziirita  (Anales,  I,  87)  préfère  l'aulorité  de  Muùo  Alfonso,  c'est-à-dire  de  VHistoria 
CnmposteUana .  Celle-ci  pourtant  est  peu  explicite  (p.  98).  Notre  texte  l'est  tfiut  à  fait. 
Voici  quelle  était  la  parenté  d'Urraca  et  de  son  second  mari  : 

Sancho  el  Mayor 
I 

I  ,  I 

Uamiro  1  de  Aragon  Fernando  I  de  Castilla 

I  I 

Sancho  Ramirez  (loG.S-iogS)  Alfonso  YI 


Pedro  I  (1094.110/1)       Alfonso  I  (iioi-i  1.^4)  \  

el  de  Fraga,  épouse  Urraca 

veuve  de 

Raimond  de  Bourgogne 

I 
Alfonso  Vil 

Pour  ce  qui  suit,  cf.  Cliron.  de  San  Juan  de  la  Pena  (p.  08  et  ss.),  qui  indique 
la  parenté  d'Alphonse  I  avec  Urraca  «  in  tertio  gradii  consanguinilatis  ». —  On  voit, 
que  notre  auteur  donne  tous  les  torts  à  Urraca,  et  ne  dit  rien  des  violences  dont 
celle-ci  se  plaignait  (llist.  Compost.,  p.  i  ifi). 

4.  I.  Rodrigue  parait  d'un  autre  avis:  «  quam  vt  bonus  princeps  quiète  et  pacifiée 
occupauit —  et  regnum  Castellae  tanquam  proprium  undique  dilatauit»  (VII,  i). 
—  Notre  auteur  abrège  beaucoup  l'histoire  d'Alphonse  VII,  qui  n'est  pour  lui  (|u'un 
préambule.  Des  démêlés  du  roi  d'Aragon  avec  Urraca  et  le  jeune  roi,  nous  avons 
un  copieux  récit  dans  l'Historia  Compost ellnna,  suivie  de  près  par  Lafnente,  t.  H, 
p.  53^-549. 

t\.  2.  Il  en  avait  encore  un  grand  nombre  a[)rès  la  mort  d'Urraca  :  «  At  Rex 
Aragonensium  tenebat  Carrionem  ...  et  alia  oppida  et  Villas  vallatas  et  muratas, 
multas  per  circuitum,  quae  omnia  Regina?  Castelia"  bello,  et  timoré  abstulerat  )> 
(C/ir.  Adefonsi  iinp.,  S  3). 

II.  3.  Cf.  Luc,  p.  io3,  1.  i3,  où  le  comte  GiJmez  est  avec  les  Galiciens,  et  non  avec 
les  Castillans.  Rodrigue  dit  que  les  comtes  et  les  magnats  avaient  décidé  de  marier 
Urraca  «  comili  Gomezoni,  dicto  postea  de  Campo  Spinie  »  (VI.  3'i  ;  cf.  Chron.  de  San 
Juan  de  la  Pena,  p.  71),  mais  ([u'Alphonsc  VI  la  maria' avec  Alphonse  d'Aragon 
(cf.  Lafuente,  Hist.  gen.  de  Esp.,  t.  Il,  p.  53'i,  note).  11  nous  dit  aussi  (VII,  2),  de  même 
que  la  Chron.  de  San  Juan  de  la  Pena  (  [>.  72),  que  Pedro  (Gonzalez)  de  Lara  aban- 
donna le  champ  de  bataille  pour  aller  rejoindre  la  reine  à  Burgos.  —  Sepulvego  = 
Sepûlveda,  à  une  soixantaine  de  kil.  au  nord-est  de  Ségovie.  Le  nom  du  lieu  de  la 
bataille,  Campo  de  Espina,  resta  attaché  au  nom  du  comte  (n'>me/  (Gonzalez  SaJva- 
dores).  Sandoval  (Cinco  Reyes.,  t.  Il  de  l'éd.  Cano,  p.  i5)  croyait  que  c'était  le  nom  de 
sa  terre.  —  La  date  (Era  MGXLVIIII,  VIL  kal.  Nov.)  est  donnée  par  les  Ann.  Complut. 
et  Compostellani. 


J  I 'l  BLU.r.ETIN    HISPAMQUf: 

lualrici  cl  couiilis  nunii.  el  comitis  aluari  in  niniiain  laniiliarilateiu 
siiam.  et  ex  ea  dicitur  suscepisse  filiiim  nomine  ferrando  furtado^. 
Sepediclus  aiitem  alfonsiis  rex  aragonie  aragonum  intérim  per 
satellites  suos  et  per  se  ipsuni  quandoqne  in  regnuni  castelle 
cssabatur"  lotam  terram  miserabililer  deuastando.  utpote  destitulam 
légitime  defensore.  Filins  siquidem  predicle  regine  urrace  et  comitis 
reniondi.  s.  alfonsns  qui  post  ea  diclus  est  imperator  non  dum 
peruenerat  ad  annos  pubertatis.  sed  in  gallecia  nutriebalur"'.  Tandem 
uero  castellani  cum  gallecis  et  légion  inierunt  consilivmi  contra 
prediclimi  regem  aragon  et  educeutes  de  gallecia  predictum 
alfonsum  fdium  regine  urrace  iam  puberem  factum.  parauerunl  se 
ad  pugnam  contra  regem  aragonum  sepe  dictum.  Quod  uidens 
predictus  rex  et  intelligens  quia  non  haberet  in  stâ  CÎI5''  bclli  contra 
legitimnm  terre  dominum  relicto  regno  recessit  in  terram  suam"'". 
Erat  autem  rex  iste  uir  bellicosus  et  magnanimus  qui  prelia  multa 
comisit  et  in  eis  uictor  extitit.  et  multa  mala  intulitsarracenis.  Tandem 
obsedit  iiillam  ([\\c  dicitur  fraga  iuxta  iler  Dam.'  ubi  non  uirtute  sarra- 
cenorum.  sed  t'ratide  pociiis  corum  et  perniissione  dei  cum  ex  inspe- 
rato  multitudo  sarracenoruni  exisset  de  predicta  uilla  q  se  repat'' 
in  eadem  ignorante  rege  et  exercitu  eius  dicitur  a  niauris  fuisse 
interfeclus'  Aliorum  uero  luit  opinio  quia  tune  euaseral  de  infurtunio 
illo  maiori  parte  sui  exercitus  hostili   gladio  tune  consumpta.  sicut 

nj  crassabatur  pour  grassabalur  «  s'acharnait»,  bas  latin,  cl.  Uiicangi-,  —  lu  iustam 
causnm.—  c'  llerdani.  —  ili  que  se  recepcrat. 

U.  'i.  Cf.  Rodrigue  (\  II,  i),  d'après  lequel,  comme  d'après  la  Chron.  de 
San  Jiiati  de  la  Peila  (p.  71),  ce  Fernando  Kiirtado  serait  fils  de  Gômez  de  Campo- 
despina.  Luc  no  laisse  soupçonner  en  rien  la  conduite  d'Urraca;  et,  il'après  lui,  il 
semblerait  qu'Alphonse  d'Aragon  ai;issait  d'accord  avec  elle  :  ainsi,  c'est  sur  le  conseil 
de  celle-ci  (ju'il  aurait  volé  les  trésors  des  i'<çlises  et  en  particulier  de  Saint-Isidore 
(de  Léon),  profanation  dont  il  n'est  d'ailleurs  pas  parlé  exiiressémenl  ici.  D'autre 
pari,  ce  que  Luc  dit  (p.  lo.S,  I.  33),  et  non  notre  chroni(iue,  c'est  que  L  rraca  fut 
assiégée  par  son  fils  «in  turribus  Lej^iotiis  »  (in  illas  turres  Kra  MCLVII,  dans  les 
Ann.  Complut.,  cf.  Ann.  Toled.  I)  et  que  s'étani  rendue,  elle  fut  ensuite  traitée  par 
lui  avec  égards.  Cf.  Rodrigue,  VII,  3.  Mais  les  faits  sont  bien  plus  couipli(|ués  :  voir 
Vllist.  Composlellana.  —  VA.  Chronicon  Compostellanum  :  «(Lnaca)...  apud  castrum 
.Saidana  sexto  Idus  Martii  in  Era  MCLMIII  (iiaO)  in  partu  adulterini  filii  \itani 
infelicem  liniuit»;  et,  sur  cette  (juestion  de  la  conduite  d'Urruca,  Sandnv:d, '.'(Vko 
reyes,  t.  Il,  p.  8,  3^,  102  ;  Salazar,  Lfira,  t.  I,  1.  Il,  c.  12-1  3;  Flore/,  Iteyniis  Oitholira.'i, 
t.  I,  p.  2.">.'>-77  ;  enfin  la  note  au  t.  IV,  p.  5c),  do  l'éd.de  VHistoria  ijriï.  </<•  /?.</(.  do  Mariana 
par  Monforl,  1788. 

4.5.  Il  a\ait  été  confié  au  comte  Pedro  Froilaz  de  Trava.  (Ilixl.  Cuinfiii^^tctlana, 
p.()f(),  qui  fut  birau-père  du  conile  Pedro  (ion/.ide/.  de  Lara  (Salu/ar,  l.aia,  t,  I,  p.  i|i|). 
/i.  ft.  Rodrigue  (VII,  3)  et  la  Chron.  do  San  Juan  île  la  Pena  (p.  7'))  attribuenl 
cette  décision  à  une  démarche  déférente  d'Alphonse  de  Castillo.  Cf.  au  contraire  la 
Chron.  Adefnnsi  imprrtiloris,  S  7  :  «  ...  nequo  fui!  ausu-  pararo  faciem  suam  contra 
faciem  Régis  Lei,'ioni« 


descri 

P   y 


It.  7.   Le  i(|  juillet  ii34,  «dia  de  Santa  .lusla  y  Ruiina»  (An.  Tulrd.  /).  Voir  une 
criplioQ  de  Fraga  dans  José-Marîa  Quadradf>,  Espana,  Anuiint  (Harcelona,  i88ti). 


CHROMQLE    LATINE    DES    ROIS    nE    CASTILLE  110 

ossuum  niiiltitiido  testatur.  que  usque  hodie  in  quadani  ecc"  in 
predicta  nilla.  s.  fraga  occulis  intuencium  apparent.  Qui  post  multa 
annorum  curricula  temporibus  noslris.uenisse  dicebatur  in  aragoniam 
ubi  in  principio  aduentus  sui  honorifice  receptus  fuit  a  nobilibus  et  a 
rege  alfonso  filio  comitis  barcinone  tanquam  uere  cognitus  esset  ab 
eis  per  multa  |  signa  et  occulta  que  antiquis  hominibus  quibus  fueraf' 
indicabats.  Eadem  tempestate  surrexit  alius  in  castella  qui  se  finxit 
falso  tercium  regem  sancium  fîlium  imperatoris  patrem  illustrissimi 
régis  alfonsi  domini  nostri,  sed  tam  iste  in  castella  quam  ille  in 
aragonia.  miserabili  morte  uitam  finiuitfj.  Post  illam  miserabilem 
cedem  iuxta  fragam  et  post  mortem  ipsius  régis  si  tn  ibi  mortuus  est 
cum  nullam  prolem  reliquisset.  aragonenses  destituti  solatio  régis  et 
regimine  extraxerunt  de  monasterio  quemdam  ramirum  fratrem  ipsius 
régis  monachum  et  sacerdotem  ut  fama  reffert.  quem  compulerunt  ut 
uxorem  duceret.  quod  et  fecit.  de  qua  suscepit  filiam  quam  accepit 
postea  in  uxorem  comes  barcilon"''  unde  comitatus  ipse  unitus  est 
regno  aragonum  usque  in  presentem  diem.  Idem  uero  ramirus 
suscepta  ftlia  tamquam  inutilis  regni  regimini  reuersus  est  in  monas- 
terium  suum  'o.  Sed  hec  actenus  :  — 

5.  [Rjegis  alfonsi  qui  postea  dictus  est  imperator  filii  comitis  remondi 
et  regine  urrace  regni  principium  débile  fuit,  sed  melior  fortuna 
secuta  est.  fauente  siquidem  s'  "  diuina  gratia  in  cuius  manu 
sunt  omnium  potestates.  et  omnia  rura  regnorum  totam  galleciam  et 
asturias  et  terram  legioïs.  et  castellam  et  extrematuram  et  ultra 
serram  •  multis  temporibus.  in  pace  tenuit.  et  multa  mala  intulit  sarra- 
cenis  Cordubam  siquidem  cepit.  et  baeciam.  et  andujar.  et  niontor - 
et  alia  multa  in  partibus  illis.  castra  et  uillas  obtinuit.  Almariam 
insuper  cepit '^.  felix  siquidem  in  acquirendo.  sed  minus  discretus  in 
retinendo.  lerra  siluitet  quieuit  in  diebus  eius.  dilatum  et  amplialum 
est  regnum  eius.  Rex  nauarre'^  ramiri  filius  infantis  ramiri  (jui  fuit 
filius  sancii  infantis  de  quadam  dnn  filii  régis  garsie  qui  fuit  occisus 

a)  ecclesia.—  hj  Sic  (ajonler  cngnihis). —  c,'  si  tamen. —  ri)  bnrnloneiisi^  ou  barri- 
liiiiie.—  el  silii.—  f)  .4bella  :  «  Forte  deesl  Gnrsins  ». 

ti.  8.  «  Alii  dicunt  qnod  ad  lempus  venil  in  Aragfonia  et  loculus  fuit  nim  quibus- 
dam  qui  noverant  ejus  sorlem.  »  (Ctiron.  de  .San  .Juan  de  la  Pena,  p.  78.)  Hodrig^ue 
(VU,  3)  nous  dit  qu'il  fut  pendu  par  ordre  d'Alphonse  d'Aragon  (Alfonso  II). 

.'1.  9.  .le  ne  vois  pas  qu'il  soit  question  ailleurs  de  ce  faux  Sanche  III. 
'  /i.  10.  Cf.  Chron.  de  San  Juan  de  la  Pena,  ch.  W  ;  Chron.  Adefonsi  imper.,  %  2'|. 
Voir  Trtfggia,  Jlustracion  del  reynado  de  Don  fiamiro  II,  dans  le  t.  III  des  Memorias  dr 
la  R.  Acnd.  de  la  Ilist.,  p.  4^9  et  suiv.  ;  Lafuente,  Hist.  gen.  de  Esp.,  t.  II,  p.  370.  note; 
Longâs  y  Bartibâs,  Barniro  II  el  Monje  y  las  supuestas  cortes  de  Borja  y  Muii:t'iri 
en  1I3U.  .San  ton  a,  191 1. 

5.  I.  Cf.  S  2,  note  5. 

5.  2.  Baeza,  Andûjar,  Montoro.  Lur  écrit  également  Monter  (p.  io4,  1-8). 

5.  3.  Cf.  le  Carmen  sur  la  prise  d'Almeri'a  à  la  suite  de  la  Chr.  Adefonsi 
imperatoris. 


IlG  BULLETIN    HISPAMQUE 

iu\ta  ataporcam ''.  dicitur  fuisse  uasalus  eius  cum  coronam  adeptus 
fuit  imperii  et  per  uniuersum  orbem  nominalvis  est  imperator^.  Cornes 
et  barcinonie  cuius  sororem  berengariam.  s.  duxit  uxoreiu  predictus 
iniperalor  uasallus  fuit  imperatoris  pro  biis  que  circa  iberuni  fluuium 
in  regno  aragonie  sunt  constituta^''  :  — 

6.  [Cjirca  inicium  regni  imperatoris  predicti  surrexit  quidam  sarra- 
cenus  aventum  mert  nomine'  qui  iieniens  de  paitiljus  ciuitatis  nobilis 
et  famose.  s.  baldac».  ubi  longo  tempore  studuerat  predicauit  in  regno 
niarroquilano  quod  lune  tenebant  niauri.  qui  (fol.  91)  speciali  nomine 
dicebanlur  moabite'\  quos  uulgus  uocat  almorauedes  et  nomen  régis 
eorum  ali  ''.  Predicauit  igitur  specialiter  contra  superbiam  et  opres- 
sionem  moabitarum  quas  gentes  sibi  subditas  crudeliter  oprimebant. 
exactioncs  innioderatas  facientes  fréquenter  ut  liberalitalis  sue  imo 
pocius  prodigalilalis  uicium  quo  laborabanl.  et  in  quo  gloriabantur 
possent  pro  libitu  suo  exerce",  \sciuit  autem  sibi  gentes  innumeras 
que  libenter  ipsum  seqiiebantur  uolentes  excutere  de  ceruicibus  suis 
iugum  durissime  seruitutis  concilians  sibi  tanquam  uir  sapiens 
et  discretus  licet  infidelis  animos  hominum  promictens  eis  munus 
ineslimabile  libertatis.  Inter  illos  autem  qui  sequebantur  predictum 
aventn  mert  fuit  nir  discretus  largus.  et  bellicosus  nomine  abdel  nù^ 

a)  exercere. 

5.  It.  Garcia  Sûncliez,  el  de  Xâjera,  lui'  à  Atapuorca  (io54). 

I 
Infant  Saiicho,  lué.i  lluoda. 

I 
Infant  Ramiro. 

I 
Garcia  Ramirez. 

CollP  gcncalou:ie  n'est  pas  d'accord  avec  celle  de  la  Chronique  léonaise  (/>(;//.  hixp., 
t.  XI,  p.  î78)etelle  l'est  avec  le  lAher  lieguin  (p.  V.irO-  Voir  Keniandez  de  lîéthenroiirl, 
IJisl.  de  la  monarqui'a  esp.,  t.  I,  p.  380.  On  ne  voit  pas  bien  s'il  faut  conslniire  .<  (ilins 
Sancii  infantis  de  quadam  domina»  on  «Sancii  infantis  de  qnadani  domina  tilii 
régis  Garsie»;  en  d'autres  termes  si  cotte  domina  dési^jne  la  mère  de  l'infant  Ramiro 
ou  celle  de  l'infant  Saiictio.  On  sait  que  celui-ci  élait  iils  naturel,  maison  ne  nmnait 
pas  sa  mère. 

5.  5.  Cf.  Chron.  Adefonsi  imii.,  S  2.')  et  a8. 

5.  f..  Cf.  Chron.  Adefonsi  imp.,  S  '>  et  26;  Lnc,  p.  io4,  1.  3o.  11  s'agit  de  Ramôn 
Berenguel  IV  (1137-1162).  Voir  la  note  au  t.  IV,  p.  io3,  de  VJlist.  (jen.  de  /•;«//.  de 
Vlariana  par  Monfort. 

C.  1.  Aventumerth  dans  Rodrigue  (éd.  Heale),  VII,  m. 

G.  3.  Bagdad. 

r..  3.  Le  mot  Moabilae  est  employé  une  seule  fois  dans  la  Chronique  léonaise 
fil,  5  37),  et  pour  désigner  les  Maures  d'Afrique.  Il  l'est  souvent  dans  la  Clirun. 
Adefonsi  imp.  Lafoentc  le  rend  par  moraliitas.  Le  Cltniniron  iMsitnniim  (Aéra  1180) 
rend  par  Arabes,  comme  Ismnelilae  par  Endeluces  (Atidaluces). 

<■).  Ix.  .\liabou-llasan  l)en-Vou>()f  (1 107-1  i.'i3). 

(',.  f).  AI)d-al-moumin.  AI>delmori  dans  Rodrigue,  qui  dit  ipie  c'éluit  If  liU  iliin 
potier  (VII,  ut).  Rodrigue  ne  concorde  pas  avec  notre  auteur.  Il  fait  intervenir  trois 
principaux  personnages  :  Aventumertli,  un  savant  du  nf)m  il'Almohadi.el  Abdelmon, 
«  qui  regalia  exercebal  ».  Sandoval  (l.  Il,  p.  jfi'i)  le  suit. 


CHRONÎQUE    LATINE    PES    ROIS    DE    CASIILLE  II7 

cuius  ministerio  in  arduis  negociis  frequencius  ulebatur.  pugnanil 
autem  predictus  auentum  mert  et  fautores  sui  contra  regem  moabita- 
rum  siipradictum.  et  contra  genteni  et  sepe  uicti  ab  ipsis  moabitis 
tandem  ipsos  uicerunt  et  eos  de  regno  expellentes  ciuitatem  famosam 
.s.  marrocos  occnpauerunt.  Institutus  est  autem  rex  inpredicta  ciuitate 
et  in  regno  moabitarum  abdelmum  supradictus  per  manum  auenlnm 
mert.  qi  pph'e''  sui6.  Nominati  sunt  autem  illi  sic  qui  obtinuerunt 
regnum  predictum  almohades  hoc  est  uiuentos'' qa.  s.  unum  deum 
se  colère  fa tebantur.  quem  predicauerat  auentum  mert  sicut  in  libello 
quodam  quem  ipse  composuit  manifeste  declaratur.  De  predicto 
abdelmum  egressi  sunt  qui  regnum  marroquitai'  tenuerunt  usque 
in  presens  tempus.  quod  ex  timc  floruit  usque  nunc.  sed  modo  per 
uirtutem  domini  nosiri  ihu.  xpi.  mirabililer  incipit  desolari?.  filius 
predicti  abdelmum  fuit  auen  iacob  qui  moituus  est  in  portugalia 
quando  obsedit  uillam  nobilem  et  famosam.  s.  sanctaremS.  cuius' 
fuit  in  bello  de  allarcos  et  obtinuit  permissiono  dei  contra  xpianos 
et  cepit  calatraua  et  alarcos  et  alla  castra  circum  adiacencia.  et  mala- 
gon.  et  turrem  de  guadalferzaî).  De  quo  regeet  factis  eius  in  sequentibus 
dicetur.  Sed  bec  actenus  :  — 

7.  [F]iliam  eiusdem  imperatoris  sanciam  i  nomine.  Lodouicus  rex 
francorum  duxit  in  uxorem.  Binarius  fdiorum  eius  regnum  ei'dem' 
imperatoris  et  causa  fuit  multarum  cedum  et  midtorum  malorum 
que  in  yspaniis  acciderunt^.  Diuisit  siquidem  regnum  suum  per- 
mittente  deo  propter  peccata  hominum  duobusfiliissuis  adinstanciam 
fernandi  comitis  de  gallecia.  Sancio.  s.  primogenito  dédit  cas  |  tellam 

ai  Quasi  prophète.  —  bj  nnientes?  Cf.  Rodrigue,  VII,  10  :  uniios.  —  ci  Sic  (ajouter 
filins).  —  d)  eiusdetii  ?  L'i  ressemble  à  un  /.  AbelU  li(  de  même. 

0.  6.  Lafuente  (t.  Ilf,  p.  '18  et  suiv.),  qui  remplace  le  nom  Avenlumerlh  par  celui 
de  Abu-Abdallah,  expose  les  faits  d'une  faron  assez  dillerenle.  Abu-Abdallah  se  fait 
nommer  mahedi  (prophète);  Abdelniumcn  ne  devient  calife  et  ne  s'empare  de 
Marruecos  (Marrakech)  qu'après  la  mort  du  mahedi.  Tout  cela  est  conforme  a  Conde 
{fliat.  de  la  dominacion  de  los  Arabes  en  Espai'ia,  'i*  partie,  ch.  30-38,  30-31.33-3(1,  3f)-/io), 
qui  ajoute  que  le  mahedi  Abdala  était  fils  de  Tamurt  :  de  là  le  nom  Aben  Tuinert  (Ibn- 
Toumart).  Cf.  Asi'n,  Origen  y  ran'icler  de  la  revolucinn  almnhdde  {Rrv.  de  Aragon,  njolt). 

G.  7.  Allusion  aux  victoires  d'Alphonse  X'IIF. 

fi.  8.  Cf.  Dozy,  Recherches,  t.  II,  p.  yi3. 

C>.  9.  Cf.  §  12,  n.  4  ;  S  '8,  n.  7,  et  §  i3,  n.  '|. 

7.  I.  Elisabeth,  d'après  Luc  (p.  io3,  1.  '17  et  p.  loG,  1.  8)  et  Flodripuc  (VIT,  9),  qui 
racontent  à  ce  propos  le  voyage  en  Espagne  de  Louis  (Nil)  inquiet  des  bruits  qui 
couraient  sur  la  naissance  de  sa  femme.  Cf.  Flûrez  {Reynas,  t.  1,  p.  280),  qui  relève 
cinq  noms  différents  pour  les  deux  filles  d'Alfonse  Vil  et  de  Bérengère,  et  les  dis- 
tribue comme  il  peut,  identifiant  Isabelle  avec  Constance,  Sancha  avec  Beala  et 
Beatrix.  II  cite  sur  le  voyage  de  Louis  VII  la  chronique  de  Robert  de  Torigny.  .Sancha 
épousa  en  ii53  .Sancho  de  Navarre  (El  Sabio).  Une  autre  .Sancha,  fille  d'Alphonse  VII 
et  de  Rica,  épousa  Alphonse  II  d'Aragon  en  1 17^  {ibid.,  p.  aijO);  cf.  j  i5,  note  a. 

7.  2.  Allusion  à  l'anarchie  qui  marcjua  la  minorité  d'Alphonse  VIII,  et  aux 
guerres  de  Ferdinand  et  Alphonse  de  Léon  avec  Alphonse  Vlll  et  Ferdinand  III.  Le 
début  de  cette  phrase  doit  avoir  été  estropié  par  le  copiste,  car  on  ne  peut  l'inter- 
préter littéralement. 


IlS  BULLETIN    Ursi'AMQiK 

et  abulain.  et  segouiam  et  alias  uillas  circiimadiacentes  in  extrema 
dura  et  toUetum  et  omnia  que  sunt  ultra  serram  uersus  parles  illas. 
Terram  et  de  campis-î  usque  ad  sanctum  facundum''  etastinias  sancte 
iuliane^.  Residuum  uero  regni  sui  uersus  legionem  et  galleciani  tau- 
rum  et  camoram  et  salamanticam  cum  aliis  circumadiacentibus 
uillis  dédit  ferrando  minori  filio  suo.  Post  hanc  autem  infelicem  diui- 
sionem  cum  predictus  imperator  reuerlorelur  do  terra  sarracenoruni 
cum  exercitu  suo  mortuus  est  iuxta  portum  de  niuradal'"'  et  sepultus 
est  in  ecclesia  toUetana:. 

8.  Rex  uero  sancius  filius  eius  duxerat  in  uxorem  ante  mortem 
patris  dnâm  blancam  fdiam  ramiri  garsie"  çegis  nauarre  de  qua 
susceperat  filium  ante  mortem  imperatoris.  s.  alfonsum  s.  gloriosum 
et  famosum  dominum  nostrum  '.  Idem  rex  sancius  ardua  quedam  et 
mirabilia  aggressus  est  in  principio  regni  sui.  itaquc  omncs  qui 
nouerant  eum  sperabant  per  ea  que  ante  gesserat  et  per  ea  que  de 
nouo  agrediebatur  qnod  futurus  esset  rex  uirtuosus.  Sed  altissimus 
qui  ciincta  disponit  uno  anno  post  mortem  patris  ipsius  uilam 
liniiim''.   et  sepultus  est  iiixla  patrem  suum  in  ecclesia  tolletana  ^ 

G.  CI  ROT. 

(A  siiirrc.) 

ai  Abelln  c  forte  Ciirri'ir  Rntu  ri  ».  Cf.  Luc,  p.  lO.i,  1.  .^0.  —  lu   Sir, 

7.  3.   Tiorm  de  Campos  (pro\ .  de  Palericia  cl  de  \  allmiolid  ). 

7.  '^.  Saliagûn,  à  <'t;ale  distance  de  Paleiuia  et  de  Léon. 

7.5.  Asiiirias  de  Saiilillaiia. 

7.  ('>.  Cf.  Luc  (p.  io5,  1.  Ai):  «  ..  in  loco  (jui  dicilur  Fresneda  »  ;  An.  Toled.  l : 
«  Fiie  el  Kmperador  con  hiiest  a  lierra  de  Moios  c  tornose  ende  en  XXI  dias  de 
.\crûsto  al  piiorlo  de  Muradal,  e  miirio  y,  Kra  MdXCV»;  Chr.  de  CardeTxi  :  «  Rra 
MC\G\'..  en  el  piierlo  île  Muradal  ».  Cf.  Sandoxai,  Ciiico  lieyes,  l.  II  de  l'éd.  Gano, 
p.  339.  Voisin  du  dclili-  de  Despenaperros,  le  port  de  Muradal  est  un  des  passaj^es  )>ar 
où  lV)n  peul  francliir  la  Sierra  Morcna.  Voir  Gônie/  de  Arteche,  GeO(jr.  histùrici)- 
iiiililor,  p.  lia.")  de  redit,  de  1880.  Cf.  plus  loin,  js  ti,  18  et  22.  Ouanl  au  lieu  dit 
Fresneda,  il  y  en  avait  deux,  selon  Rodrigue  (\'II1,  i'>)  et  la  Chr.  générale  (p.  Cnj-],  1.  10). 

7.  7.  Dans  le  niaiiuscril,  il  n'y  a  d'alinéas  (|ue  \ers  le  début  el  vers  la  lin  ;  ils  y  sont 
terminés  par  deux  points  et  un  trait,  et  l'initiale  nian(|ue  régulièreineul  au  para- 
graphe suivant.  On  distinguera  donc  facilement  les  alinéas  du  manuscrit  de  ceux 
i|ue  j'ai  étalilis  moi-même. 

H.  I.  Mfonso  \ll  el  Kmperailor  (1 1  jO-i  ir>7) 

épouse  Herenguela 


I  I 

>ani  ho  III,  fl  Itesendu,  roi  de  (laslille  Fernando  II,  roi  de  Léon 

riif.7-iij8)  (ii.".7-i  iKS) 

épouse  h»  Blanca  de  Navarra  | 

tille  de  fiarcia  Hann'rez  (1  i.')i)  All'onso  IX  (  1  1S8-1  23o) 

1 
Alliin>.o  \  III,  (?f  de  laa  AV/w/s 

C  i.')8-i2i',) 

8.2.   Cf.   Kodrigue,    VII,    i2-i'i;    Luc,   p.    10.'»,  i.  âo ;  An.    l'ulril.  l:  «  Murio  el  Hey 

I).  Sancho  el  poslrimir  .lia  Uago^to,  V.v:\  MCXCN  I  ..  (iifiS). 


NOTES 

SUR  LES  RAPPORTS  DE  \AN TES  AVEC  L'ESPAGNE 


1 
Premières  relations  de  la  Bretagne  avec  l'Espagne. 

Les  populations  bretonnes  des  premiers  siècles  du  Moyen- 
Age  étaient  peu  industrieuses  et  commerçantes.  Guillaume 
de  Poitiers  et  Raoul  Glaber  dépeignent  la  Bretagne  comme 
un  repaire  de  sauvages  sans  industrie  et  sans  civilisation. 
Le  géographe  arabe  Edrisi,  parlant  des  Bretons,  dit  qu'ils  sont 
grossiers,  ignorants  et  insouciants.  Ces  expressions  sont  peut- 
être  exagérées,  mais  il  est  cependant  difficile  d'admettre  sur 
lintensité  du  commerce  breton  les  conclusions  trop  favorables 
du  savant  auteur  de  l'histoire  de  Bretagne,  M.  de  la  Borderie. 
Antérieurement  au  règne  de  Jean  IV,  il  y  eut  dans  les  havres 
et  les  villes  de  l'Armorique  un  commerce  assez  actif  peut 
être,  mais  celui-ci  était  presque  entièrement  fait  par  des 
étrangers  auxquels  les  habitants  de  la  Péninsule  armoricaine 
se  souciaient  peu  de  faire  concurrence  '. 

La  présence  des  étrangers  et  notamment  des  Espagnols  en 
Bretagne  nous  est  attestée  dès  le  xni"  siècle  par  un  assez  grand 
nombre  de  faits.  En  1379,  les  importantes  sécheries  de  poissons 
de  Saint-Mathieu  étaient  louées  à  des  Rayonnais';  en  129C, 
le  vicomte  d'Avranches,  ayant  été  chargé  de  faire  une  enquête 
économique,    ne    put   obtenir  de   renseignements  utiles    que 


1.  Bourde   de   la    Rouerie,   IiUriidnctioii   à    l'inveiUairc   des    Archives   du   Finutère. 
Série  B,  passim. 

•j.   be  la  Borderie,  fiecuvil  d'actes  iitédils  concernant  Chistoire  de  Brelaçjue. 


I20  BT  LI.ETIN    lIISPAMQt  E 

de  la  paii  d'étrangers  établis  dans  le  duché.  Au  début  du 
^iv'  siècle,  le  port  de  Redon  était  très  prospère,  mais  il  n'était 
fréquenté  que  par  des  Espagnols'.  A  la  même  époque,  Michel 
de  Fontarabie  commerçait  en  Bretagne^;  les  Magon,  origi- 
naires d'Espagne,  étaient  établis  à  Vitré  et  avaient  fondé  la 
plus  importante  maison  de  commerce  de  cette  ville •^.  Si  nous 
ouvrons  les  inventaires  dressés  à  la  mort  des  ducs  de  Bretagne, 
nous  constatons  que  les  monnaies  espagnoles  avaient  cours 
en  Bretagne  et  étaient  d'un  emploi  fréquent.  On  comptait  en 
henriquos  et  en  réaux.  Le  réal  même  était  d'un  usage  si 
courant  (juo  sa  dénomination  est  encore  demeurée  en  Bretagne 
comme  monnaie  de  compte.  Dans  certaines  régions,  dans 
le  Finistère  notamment,  le  réal  désigne  encore  la  somme  de 
vingt  cinq  centimes. 

Si  les  Espagnols  étaient  attirés  en  Bretagne  par  le  commerce 
qu'ils  y  pouvaient  faire,  les  Bretons  se  rendaient  fréquemment 
en  Espagne  pour  des  motifs  religieux.  Il  est  inutile  de  rappelei' 
la  réputation  dont  a  joui,  au  cours  du  Moyen  Age,  le  pèleri- 
nage de  Sainl-.lacques-de-Compostelle.  De  tous  les  pays  du 
monde  chrétien,  chaque  année,  les  tidèles  allluaient  en  dalice 
pour  vénérer  les  reliques  du  saint.  Les  Bretons  ont  fourni  leur 
important  contingent  de  pèlerins.  Les  uns  se  déplaçaient  par 
piété,  les  auties  par  obligation.  On  sait  quelle  était  alors  la 
dureté  des  confesseurs  pour  leiiis  pc'iiitents  et  maintes  fois  ils 
obligeaient  les  fidèles  à  se  rendre  à  Saint-Jacques  avant  de 
leur  accorder  la  remise  de  leurs  fautes,  l'ar  testament,  certaines 
personnes  léguaient  à  des  parents  les  sommes  suflisaiiles  jjour 
accomplir  le  pieux  voyage.  Le  chanoine  de  Nantes,  Pierre 
Dorenge,  par-  testament  en  date  de  i39'i,  ordonna  à  deux 
membres  de  sa  famille  de  partir  pour  Saint  Jaccpies  en  (Jalice''. 
De  nombreux  documents  attestent  la  fréquence  des  pèleri- 
nages bretons  en  Espagne.  Des  lettres  d'Yves  le  Breton 
indiquent    (\\it\    par    deux    lois,    il    lil    le    voyage   de   (Jalice^. 

I.  'l'n'védy,  l.r  l'art  de  ftedun.  Sainl-Hrioiic,  i()o3  (l)rocliiirc). 

■j.  \'ic  et  iiiirnrlex  de  suint  )vcx.  Dôposilion  dti  lao*  lémoin. 

'').  l'rain  de  lu  (iaulayrio,   /.es   Vitréens  et  le  Comiiierrr  intmatunuil.  \  ;innes,  iS()?<. 

U.  L.  Maiire,  Histoire  des  ItôiiilniiT  de  .\(intes,  [>.  jt;. 

;i.  t'inot,  Htiideri  sur  les  relations  cominerriales  entre  la  l'iuiidre  et  l' EiiiiKjne,  Paris,  i  Syg. 


NOTES  SUR  LES  RAPPOhiS  DE  NANTES  AVEC  i/esPAGNE      1  2  I 

Guillaume  de  Ricu,  fondateur  du  couvent  des  Cordeliers  de 
Nantes,  mourut  en  i3io  au  cours  de  son  pèlerinage  à  Saint 
Jacques'.  En  i4o5,  Jehan  de  l'Angle  reçut  de  Jean  V  un  don 
de  quinze  écus  pour  eftectuer  le  voyagea  En  i4i7,  Jean 
Moysen  de  Tréguier,  qui,  un  peu  avant  la  Toussaint,  était  allé  en 
pèlerinage  à  Saint-Jacques,  avec  plusieurs  compagnons,  sur  un 
sien  navire,  fut  attaqué  par  une  nef  armée  et  amené  àPlymouth. 
Jean  V  ne  se  rendit  pas  personnellement  en  Espagne^  mais  il 
fît  porter  à  Saint-Jacques  une  offrande  de  oo  écus  par  son 
ancien  valet  d'échansonnerie  Guillaume  le  Régnée^.  11  lui 
remit  21  écus  pour  ses  dépenses  et  frais  de  messes.  I/année 
suivante,  Guillaume  Vincent,  fermier  des  devoirs  du  vin, 
tomba  malade  à  son  retour  de  Saint  Jacques  en  Galice''. 

La  dévotion  des  Bretons  à  Saint-Jacques-de-Compostelle 
était  connue  des  religieux  espagnols.  En  1/107,  Jean  V  accorda 
des  lettres  de  sauvegarde  à  des  clercs  venus  de  Notre-Dame 
de  Roncevaux,  dans  le  but  de  faire  des  quêtes  nécessaires 
à  l'édification  d  un  hospice  destiné  à  héberger  les  pèlerins 
qui  s'arrêtaient  dans  cette  ville ^. 

Un  historien  du  commerce  des  Flandres  a  retracé  à  grands 
traits  rinlluence  que  les  pèlerinages  de  Saint-Jacques  de 
(^ompostelle  ont  eue  sur  les  relations  économiques  de  la 
Flandre  et  de  l'Espagne''.  11  est  possible,  probable  même,  que 
les  premiers  liens  qui  s'étaient  formés  en  Bretagne  entre 
Espagnols  et  Bretons  se  soient  resserrés  à  la  suite  de  la 
fréquence  des  pèlerinages  bretons  en  Espagne.  Souvent  les 
pieux  voyages  étaient  un  prétexte  à  quelques  opérations 
commerciales.  Des  Flamands  partaient  dans  les  régions  du 
Midi  en  emportant  des  marchandises  qu'ils  écoulaient  à  leur 
arrivée.  Des  habitants  de  FArmorique  ont  pu  agir  de  la  même 
manière  et  créer  un  courant  dallaires  qui  s'est  régularisé  pur 
la  suite. 

1.  Abbé  Durvillc,  liludcs  sur  le  vieux  \antes,  l.  I,  p.  2/17. 

2.  Blanchard,  Lettres  et  Mandements  de  Jean  V,  aclc  2ijO. 

3.  ibid  ,  acte  21^1. 

4.  Ibid.,  acte  2181. 

5.  Ibid..  acte  6^7  (noie). 

•  1.   Fiiiut,  Etude  sur  les  relations  commerciales  entre  la  Flandre  et  l'EsinKjnr,  Paris, 


lj-2  LilLLETl>'    HLSPAKIQUË 

Il  semble  résulter  d'un  passage  du  Livre  des  Manières,  écrit 
par  Etienne  de  Foug-ères  au  milieu  du  vu'  siècle,  que  des 
marchands  bretons  revenaient  d'Espagne  avec  des  produits 
de  ce  pays.  ((  Quand  il  (  le  marchand  |  revient  de  France  ou 
d'Espagne  avec  des  emplettes,  il  est  juste  qu'il  en  tire  prolit  et 
qu'il  en  vive;  mais  il  doit  éviter  toute  tricherie;  quil  se  garde 
donc  de  vendre  eau  pour  vin,  peau  de  lièvre  pour  lapin, 
fouine  pour  zibeline...  » 

Des  motifs  économiques  avaient  attiré  les  Espagnols  en 
Bretagne,  un  but  religieux  avait  le  plus  souvent  conduit  les 
Bretons  en  Espagne.  Sous  celte  double  influence,  des  relations 
assez  étroites  s'étaient  formées  entre  les  deux  peuples;  celles-ci 
devaient  se  resserrer  sous  l'influence  d'alliances  politiques  et 
commerciales. 

Dans  plusieurs  circonstances,  en  ellet,  les  [)artis  bretons 
firent  appel  au  concours  des  troupes  espagnoles.  Eu  i342, 
sous  le  commandement  de  Louis  d'Espagne,  les  soldats  de 
la  Péninsule  abordèrent  au  Collet,  au  fond  de  la  baie  de 
Bourgneuf.  Ils  venaient  dans  le  pays  de  Retz  en  alliés  de 
Charles  de  Blois.  Ils  séjournèrent  assez  longtemps  dans  la 
légion,  puisqu'on  fut  obligé  de  lever  une  taille  pour  subvenir 
aux  frais  de  l'occupation.  Les  soldats  espagnols  furent  traités 
aux  frais  de  la  population.  Les  comptes  des  receveurs  notent 
les  dépenses  en  vins  que  burent  les  Espaigimux,  en  pain  et  en 
poissons  qu'on  leur  fournit'.  Jean  IV  fit  également  appel  aux 
marins  espagnols  commandés  par-  François  de  les  Cases  '. 

Au  milieu  du  xi\'  siècle,  les  ducs  de  Bretagne  s'elTor- 
cèrent  de  régulariser  les  relations  cordiales  (pie  leurs  sujets 
entretenaient  avec  les  autres  pa>s  au  regard  du  (((innierce 
maritime. 

La  plus  ancienne  convention  commerciale  connue  en 
Bretagne  remonte  au  règne  de  Jean  IV.  C'est  un  traité  passé 
cnlre  le  due  et  les  villes  de  lii  liiscaxe  —  Verineo,  Bilbiio, 
Luquele  et  IMaisance. — Jean  1\  l'ut  le  premier  duc  de  lîretagne 
(pii  se  soit  intéressé  aux  (pieslions  commerciales.  Il  entie|)rit, 

I.   \i]iii\r\\ari],  Carttiliiirr  tirs  sirrs  (Ir  lliiys.  Iiilrnd  ,  |)|i.  \\\  et  \\\i. 
j.  Arcli.  de  la  Luire  lui'..  E.  ji'i. 


Notes  slr  les  kapi'okts  de  jjaîstes  avec  l  espag>e  ijo 

avec  le  concours  des  marchands  de  Nantes,  d'approfondir  le 
chenal  de  la  Loire  de  manière  à  permettre  aux  chalands  d'un 
tonnage  élevé  de  remonter  jusqu'au  port  de  cette  ville.  Il 
institua  le  convoi  composé  de  deux  escadres  armées  chargées 
de  protéger  contre  les  pirates  les  navires  de  commerce  qui,  au 
printemps  et  à  l'automne,  sortaient  des  ports  de  Bretagne  à 
destination  des  Flandres,  de  l'Angleterre  ou  de  l'Espagne. 

Son  successeur,  Jean  \  ,  fut  également  plein  de  zèle  pour 
développer  dans  son  duché  le  commerce  et  l'industrie.  Il 
attira  les  étrangers  en  leur  accordant  des  lettres  de  naluralilé, 
('  désirant  touz  honz  marchanz  estrangiers  attraire  à  ester  et 
demourcr  en  nostre  duché  ».  Il  appela  en  Bretagne  des 
normands  qui  s'établirent  à  Vitré,  Fougères,  Diuan,  Bennes  cl 
Nantes  et  y  fondèrent  des  industries  jusqu'alors  inconnues. 
Ll  régularisa  les  relations  commerciales  de  ses  sujets  avec  les 
peuples  étrangers,  et  en  i43o  et  1^35  il  signa  avec  les  rois  de 
Castille  et  de  Léon  deux  traités  intéressants  et  sur  lesquels 
nous  aurons  à  revenir  au  sujet  de  la  contruclalioii^ . 

.\u  cours  de  son  règne,  Pierre  II  exempta  de  la  taille  les 
ouvriers  étrangers  qui  désiraient  se  fixer  à  Vannes.  Etant  dans 
cette  ville,  au  mois  de  juin  i452,  ce  duc  reçut  le  boursier 
d'Espagne  qui  était  venu  pour  renouveler  les  traités  d'alliance 
entre  son  pays  et  la  Bretagne.  Ils  regardèrent  surtout,  rapporte  le 
chroniqueur,  la  sûreté  du  commerce  et  ils  signèrent  ensemble 
un  traité  qui  fut  renouvelé  à  Bedon  le  28  septembre  i456 '. 

F'rançois  II,  dès  le  début  de  son  règne,  envoya  en  Espagne 
Jean  Buffîer,  seigneur  du  Bois  et  Godelin,  afin  de  ratifier  avec 
la  cour  de  Madrid  les  traités  antérieurement  signés.  Le  8  sep 
tembre  i/iÔQ,  ses  ambassadeurs  traitèrent  avec  Don  Lopc  Bibas, 
évèque  de  Carthagène,  et  Don  Luis  de  Velasco,  évêquc  élu  de 
Léon. 

Pendant  que  cette  ambassade  bretonne  était  à  Madrid,  des 
envoyés  du  roi  de  Castille  venaient  à  Nantes  pour  saluer  le  duc 
François  IP.  Les  comptes  des  miseurs  de  cette  ville  signalent 


I.  Cf.  infra  :  La  coiitractation  de  Nantes. 

3.  Dom  Lobineau,  t.  1",  p.  G73,  et  t.  Ml,  p.  iihl,. 

o,   Arcli.  iiiuii.  de  Nanlcs,  CC.  i|i!. 


13^  BLLLET1>    HISPANIQUE 

en  effet  une  dépense  de  7  1.  7  s.  G  d.  faite  en  i^og  pour 
^i(  poisson,  vin,  ypocras,  espiceries  et  torches  »  fournis  aux 
ambassadeurs  espagnols. 

Plusieurs  autres  traités  de  commerce  furent  signés  entre 
l'Espagne  et  la  Bretagne  au  cours  du  règne  de  François  11. 
En  i4<J6,  une  procuration  à  fin  de  signer  un  accord  fut  donnée 
par  le  duc  au  sénéchal  de  Nantes  et  à  Vincent,  abbé  de  Bégar'. 
A  Victoria,  le  12  novembre  i483,  Ferdinand  et  Isabelle  rati- 
iîèrent  les  accords  nouveaux  intervenus  entre  leurs  ministres 
et  les  envoyés  du  duc  de  Bretagne. 

A  l'exemple  de  ses  prédécesseurs,  François  11  attira  en 
Bretagne  de  nombreux  étrangers.  Il  fit  venir  des  Anglais,  des 
Allemands  et  des  Flamands.  Les  livres  des  comptes  nous 
apprennent  qu'il  appela  à  Nantes  un  habile  orfèvre  espagnol, 
Fcrrando  de  Cordouc,  auquel  il  assigna  60  livres  de  gages 
annuels-. 

Les  bonnes  relations  de  la  Bretagne  avec  la  cour  d'Espagne 
ne  se  démentirent  pas  sous  le  règne  de  la  duchesse  Anne. 
-Mais  les  questions  politiques  primèrent  les  intérêts  com- 
merciaux. 

Dès  le  début  de  son  règne,  la  duchesse  Anne  reçut  une 
ambassade  qui  venait  la  saluer  de  la  part  de  Ferdinand 
le  Catliolique.  Cette  ambassade  débarqua  à  Nantes  et  y 
séjourna  pendant  neuf  jours.  H  subsiste  dans  les  comptes 
du  niiseur  de  l'année  1 18()  un  ordre  tie  payer  «pour  la 
despence  et  defï'roy  des  Ambassadeurs  d'Espaigne  qui  par 
neuf  jours  ont  été  en  eeste  ville  la  somme  de  118/  \os  pour 
lesquelz  ambassadeurs  qui  aloient  devers  la  duchesse  »-^. 
Au  moment  de  l'invasion  des  Français  en  Bretagne,  le  roi 
de  Castille  envoya  au  mois  de  mai  i'i8<)  un  secours  de 
•2000  hommes  à  la  duchesse.  Anne  de  Bretagne,  au  cours 
de  l'année  suivante,  signait  un  accord  avec  Ferdinand  le  Catlio- 
lique, mais  le  mariage  de  la  duchesse  a\ec  Cbai'les  VIll, 
en   scelliinl   la  picmière  union  de  la  Bretagne  et  de  la  l'rance, 


I.    \rcli.  I.oin-lnl..  It'i,  I"'  i.'Ui  cl  i .'). 
;;.    Ihid.,  ]■:.    Jl',. 

3.  ,\rcli.  iiiiiii.  «le  NiiiiUv-,  \.\i.  njii. 


Notes  sir  les  rapports  de  nantes  avec  l  espaoe  120 

rendait  inutiles   toutes  les  attentions    intéressées    du   roi    de 
Gastilie'. 

Anne  de  Bretagne  comptait  dans  sa  maison  plusieurs  Espa- 
gnols de  marque.  Son  conseiller  maître  d'hôtel  avait  nom 
Lopez  de  Gastillo;  son  écuyer  tranchant  Jehan  de  Gastillo 
et  sa  garde-robière  Alienor  de  Gastillo  étaient  sans  doute 
apparentés  à  Lopez.  Celui-ci  fut  toujours  dévoué  aux  intérêts 
de  la  reine  Anne.  Il  était  son  homme  de  confiance  et  était 
souvent  chargé  de  missions  intimes 2. 

Toute  cette  longue  suite  dalliances,  de  pactes  et  de  conven- 
tions passés  entre  la  Bretagne  et  les  royaumes  de  Gastille 
et  de  Léon  devenait  caduque  par  suite  du  mariage  d'Anne 
de  Bretagne.  Les  guerres  de  Gharles  VIII  avec  l'Espagne 
portèrent  un  coup  sensible  au  développement  du  commerce 
hispano-breton.  La  ville  de  Nantes  fut  particulièrement 
touchée. 

Son  port  fut  momentanément  délaissé  par  les  Espagnols. 
Lorsque  le  traité  de  Barcelone  eut  mis  fin  aux  luttes  de 
Charles  VIII  et  de  Ferdinand,  le  roi,  par  une  ordonnance 
du  29  décembre  i^go,  célèbre  dans  les  annales  de  la  ville 
de  Nantes,  restitua  aux  Espagnols  qui  y  commerçaient  tous  les 
privilèges  qu'ils  possédaient  antérieurement.  Quelques  années 
après,  il  transportait  de  Lyon  à  Nantes  la  foire  franche  dite 
de  YAparucion.  Enfin,  son  successeur,  Louis  \ll,  confirmant 
les  privilèges  des  marchands  de  Gastille  trafiquant  en  France, 
les  étendit  au  duché  de  Bretagne  et  au  comté  de  Nantes'. 

Depuis  la  fin  du  xiv  siècle  jusqu'au  début  du  xvi%  les  ducs 
de  Bretagne  et  les  deux  rois  de  France  qui  furent  succes- 
sivement les  époux  de  la  duchesse  Anne  suivirent  à  l'égard 
du  royaume  d'Espagne  une  même  politique  économique. 
Grâce  à  des  traités  d'alliance,  le  commerce  hispano-breton 
se  développa  constamment.  Les  villes  de  Saint-Malo,  Rennes, 
Morlaix,  Vitré,  Nantes  profitèrent  toutes  de  cette  activité 
commerciale.   Mais  il  est  à  noter  que  les  producteurs  et  les 

1.  De  la  Borderie,  Histoire  de  Bretagne  :  Anne  de  Bretagne. 

2.  Le  Roux  de  Lincy,  La  vie  d'Anne  de  Bretagne,  tome  III,  passim. 

3.  Ord.  Royales,  t.  \XI,  pp.  226  et  suiv. 

Bull,  hispan.  () 


126  HIM.LTIN    HlSl'AM(JL  !•; 

commerçants  bretons  attendirent  beaucoup  plu^  la  clientèle 
espagnole  qu'ils  n'allèrent  la  chercher.  Ils  se  déplaçaient  peu 
pour  leurs  aflaires.  Si  l'on  a  pu  citer  quelques  exemples 
de  Bretons  allant  à  l'étranger  pour  développer  leur  commerce, 
ceux-ci  sont  relativement  rares.  Il  faut  attendre  les  débuts 
du  \vi'  siècle  pour  constater  leur  présence  en  Espagne. 

Un  Vitréen  du  nom  de  Gholet  est  signalé  dans  ce  pays 
en  1019,  et  en  i53o  un  voyageur  de  commerce  de  Morlaix 
parcourut  le  Nord  de  la  Péninsule  ibérique  pour  y  vendre  des 
toiles  bretonnes.  Par  contre,  les  Espagnols  avaient  fondé  dans 
les  principales  villes  de  Bretagne  des  colonies  tlorissanlcs. 
Dans  certaines  régions  bretonnes,  les  Castillans  s'établirent  en 
si  grand  nombre  que  même  après  plusieurs  siècles  le  type 
espagnol  s'est  conservé  assez  pur.  Tandis  que  les  Bretons, 
entichés  de  leurs  préjugés,  abandonnaient  la  majeure  partie 
du  commerce  aux  étrangers,  les  Espagnols  réalisaient  chez  eux 
des  fortunes  considérables.  Souvent,  après  avoir  réussi  dans 
leurs  aflaires,  ils  abandonnaient  la  province,  mais  dans  bien 
des  cas  ils  demandaient  à  être  naturalisés  et  ils  demeuraient 
en  Bretagne  ou  en  France.  Ils  apportèrent  ainsi  à  notre  pays 
un  contingent  important  de  population.  Dans  les  pages  qui 
suivent,  nous  avons  étudié  l'histoire  et  le  rôle  de  la  colonie 
espagnole  de  Nantes  et  l'on  pourra  constater  qu'au  xm"  siècle 
notamment,  les  familles  originaires  d'Espagne  ont  été  à  la 
tète  de  ce  que  Ion  est  actuellement  convenu  d'appeler  les 
classes  dirigeantes. 

Jli,i:s  MAriJOHi:/. 
(A  suivre.) 


DOMINIQUE   SOTÔ 


ET    LA 


SCOLASTIQUE  PARISIENNE 

(Suite'.) 


XX 


L'ÉTUDE    DE    LA    LATITUDE    DES    FORMES 

A  l'Université  de  Paris,  au  début  du  xvi'  siècle. 
Jean  Majoris,  Jean  Dullaert  de  Gand. 

Nous  avons  délaissé  l'Université  de  Paris  au  moment  où 
Marsile  d'Inghen  la  quittait;  c'est  le  moment  où  les  querelles 
relatives  au  Grand  Schisme  vont  se  substituei'  aux  paisibles 
discussions  de  la  Logique  et  de  la  Physique,  et  amoindrir  le 
prestige,  jusqu'alors  incontesté,  de  VAlnia  Mater;  c'est  aussi  le 
moment  où  la  guerre  de  Cent  ans,  où  la  rivalité  des  Armagnacs 
et  des  Bourguignons,  où  les  épidémies  meurtrières  vont 
désoler  Paris  de  la  grande  pitié  qui  est  en  tout  le  royaume  de 
France.  Nous  avons  passé  la  mer  pour  nous  initier  aux 
doctrines  que  l'Université  d'Oxford  professait  au  xiv'  siècle; 
puis  nous  sommes  venus  suivre,  en  Italie,  la  fortune  que  les 
enseignements  de  France  et  d'Angleterre  y  ont  rencontrée 
pendant  la  durée  du  Quattrocento^  Il  est  temps  de  revenir 
à  Paris  et  de  nous  enquérir  du  sort  qu'y  ont  eu  les  vérités 
découvertes  au  xiv  siècle. 

1.  Les  résultais  que  nous  avons  recueillis  en  celte  excursion  au  travers  de  la 
Scolastique  anglaise  et  de  la  Scolaslique  italienne  sont  exposés  en  une  élude, 
intitulée  :  La  Dialectique  d'Oxford  et  la  Scolastique  italienne,  à  laquelle  le  Bulletin 
italien  veut  bien  accorder  fiiospilalilé. 


laS  HLLLETI>    HISPAMQÙË 

Des  débuis  du  Grand  Schisme  au  commencement  du 
vW^  siècle,  s'écoule  une  durée  plus  que  séculaire  pendant 
laquelle  la  vie  intellectuelle  de  l'Université  parisienne  nous 
est  fort  mal  connue;  les  documents  peu  nombreux  que  nous 
avons,  pu  consulter  ne  nous  ont  fourni  que  des  renseignements 
rares  et  insuffisants. 

La  moitié  du  xiv  siècle  était,  sans  doute,  déjà  écoulée 
lorsque  Maître  Jean  Ilennon,  bachelier  en  Théologie,  composa 
un  traité  de  Philosophie'  où  il  exposait  successivement  les 
questions  traitées  dans  les  ouvrages  suivants  d'Aristote  :  Les 
Physiques,  le  De  Cœlo  et  Mundo,  le  De  generatione  el  corrapliotic, 
les  Météores,  le  De  anima,  le  De  sensu  et  sensalo,  le  De  nieniofid 
et  venïudscentid,  le  De  sonino  et  vigitia,  le  De  caasis  tongitudinis 
et  l)revitatis  vitœ,  enfin  les  six  premiers  livres  de  la  Métaphysique. 

François  Fine,  élève  du  collège  de  Navarre  et  de  la  Faculté 
des  Arts,  qui  a  copié  cet  écrit  et  ingénieusement  enluminé  les 
titres  des  diverses  parties  dont  il  se  compose,  a  deux  fois  dalé 
son  ouvrage. 

A  la  fin  de  l'exposition  du  De  (udina\  il  a  écrit  :  «  Expticit 
tiber  3""  de  anima  per  me  fnmciscum  fine  die  prima  octohris  anno 
domiid  i^  (]'.>.  » 

Au  dernier  feuillet  du  U'\te  manuscrite  on  lit  :  »  Complétas 
est  presens  tilier  pJntosopliie  Aristolclis  in  (dîna  Parisius  univer- 
silate  conditus  ati  e.rimio  viro  doctissimo  magistro  Jolianne  hennon 
In  saera  pagina  pra  lune  lta<<<d(inreo\formato.  Scriptus  per  me 
franriscu/n  fine  in  preetara  arciu/n  facaltate  eo  tune  studentem 
in  colle gio  provinrie  mwarre  in  monte  Sanele  genonefe  virginis. 
<inno  doinini  /lostri  Jhesu  cliristi  mitlesimo  (JCCC"  I.XIU°.  Die 
vero  prima  octol>/-is.  In  fine  rujus  laudes  extoltc  terno  et  uni 
rivent i  in  seruta  seculoruin  amen.  » 

Ln  tout  débat  qui  relève  de  la  Mélaphysicjue,  Jean  Ilennon 
est  nettement  scotisle;  presque  toujours,  c'est  à  lopinion  du 
hoctor  Sul/titi.s  qu'il  iicquiescc. 

En  tout  ce  qui  concerne  la  Physique  et  la  Mécanique,  au 


I.   l:iililiolli>'<|iic  Nationale,  fonds  luliii,  rns.  n°  l'i^vjij. 
a.  Ms.  cit.,  fol.  2«i,  v°. 
3.  Ms,  cit.,  fol.  3j7,  r°. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA.    SCOLASTIQUE    PARISIENNE  I29 

contraire,  il  suit,  de  préférence,  l'opinion  des  Nominalistes 
parisiens  du  xiv  siècle;  il  semble,  surtout,  faire  grand  usage 
des  traités  d'Albert  de  Saxe,  dont  il  reproduit  presque  textuel- 
lement certaines  questions. 

En  particulier,  maître  Jean  llennon  admet  pleinement  la 
Dynamique  professée  par  Jean  Buridan  et  par  Albert  de  Saxe. 

A  la  fin  de  la  Physique,  par  exemple,  il  examine'  cette  diffi- 
culté :  Par  quoi  sont  mus  les  projectiles;»  Après  avoir  exposé 
et  discuté  l'opinion  péripatéticienne  qui  attribue  à  l'air  ébranlé 
la  continuation  du  mouvement  de  ces  corps,  il  poursuit  en 
ces  termes  : 

«  Une  seconde  opinion  dit  que  cette  première  explication 
est  fausse.  Cette  seconde  opinion  est  celle-ci  :  Celui  qui  lance 
le  projectile  lui  imprime  un  impetus  ou  une  vertu  impulsive 
qui  a  son  siège  en  ce  projectile;  à  cet  impetus  font  opposition 
la  gravité  du  mobile  et  la  résistance  du  milieu;  le  projectile 
se  meut  donc  continuellement  jusqu'à  ce  que  cet  impefus  soit 
corrompu. 

))  Et  en  effet,  comme  le  dit  cette  opinion,  il  semble  impos- 
sible que  le  sabot,  la  meule  du  forgeron  ou  tout  autre  mobile 
animé  d'un  mouvement  de  rotation  sur  place  soit  mû  par 
l'air  qui  l'entoure;  il  semble  impossible  que  la  flèclie  ou  la 
lourde  pierre  que  lance  une  machine  de  guerre  puisse  être 
mue  par  l'air  aussi  vivement  qu'elle  est  mue,  ni  qu'elle 
puisse  être  soutenue  si  longtemps  en  l'air,  si  ce  n'est  par  un 
tel  impetus.  » 

Jean  Hennon  n'ignore  pas,  d'ailleurs,  qu'en  se  rangeant 
à  cette  opinion,  il  va  directement  à  l'encontre  de  la  doctrine 
d'Aristote.  «  Quoique  cette  opinion  soit  probable,  dit-il,  elle  est 
simplement  et  manifestement  contraire  au  Philosophe  et 
fausse  selon  lui.  »  Il  n'en  réfute  pas  moins  les  objections  que 
les  Péripatéticiens  avaient  coutume  d'élever  contre  la  théorie 
de  V impetus. 


I.  Magistri  Johannis  Hennon  Op.  laud.;  Pliysicorum  lib.  Vlll,  qua;sl.  III: 
Outeritur  utrum  primus  motor  qui  simpliciler  est  immobilis  et  nullani  habet 
magnitudinem,  sit  infinita;  virtutis.  Difflcultas  secunda  :  A  quo  moventur  projecta 
post  recessum  a  primo  motore  projiciente?  Ms.  cit.,  fol.  1^6,  coll.  b  et  c. 


l3o  RLI.LETTN    HISPANIQl'E 

L'exposition  du  De  Cœlo  amène  notre  auteur  à  rechercher' 
pourquoi  le  mouvement  naturel  est  plus  rapide  à  la  fin  qu'au 
commencement.  Après  avoir  formulé  et  rejeté  toutes  les  autres 
explications  de  l'accélération  en  la  chute  des  graves,  il  pour 
suit  en  ces  termes  : 

«  Ils  disent  donc  que  ce  qui  cause  la  plus  grande  vitesse 
prise  vers  la  fin  par  le  mouvement  naturel,  c'est  Viinpt'his  qui 
se  trouve  acquis  au  sein  même  du  mobile;  en  sorte  que,  par 
son  mouvement,  le  grave  gagne  une  certaine  pesanteur  acci- 
dentelle qui  vient  en  aide  à  la  pesanteur  essentielle  et 
naturelle,  afin  de  mouvoir  plus  vite  ce  grave;  il  en  est 
semblablement  de  la  légèreté.  En  eiïet,  par  le  fait  même  que  le 
corps  se  meut  plus  longtemps,  il  acquiert  un  impeius  plus 
grand  et,  par  conséquent,  il  se  meut  continuellement  plus 
vite,  à  moins  qu'il  n'en  soit  empêché  par  une  résistance  qui 
croisse  plus  fortement  que  ïimpefus  acquis  par  le  mobile. 
Un  tel  impetus  est  une  qualité  de  la  deuxième  espèce;  la  forme 
substantielle  du  mobile,  par  l'intermédiaire  du  mouvement, 
engendre  cette  qualité;  cette  qualité  se  corrompt  par  l'absence 
de  ce  qui  l'a  engendrée,  c'est-à-dire  du  mouvement.  » 

Ces  deux  citations  nous  montrent  qu'au  xv  siècle,  le 
scotlste  Jean  llennon  garde  les  principes  essentiels  de  la 
Dynamique  formulée,  au  xvi'  siècle,  par  l'Kcole  nominaliste 
parisienne.  Mais  de  ce  que  cette  Ecole  et,  en  particulier, 
Nicole  Oresme  avaient  enseigné  touchant  la  latitude  des 
formes,  nous  ne  trouvons  pas  trace  au  traité  de  Philoso])hie 
que  nous  analysons;  peut-être  les  problèmes  sur  l'unifor- 
mément  dilTorme  étaient-ils  regardés  comme  trop  compliqués 
pour  qu'il  en  fût  fait  mention  en  un  ouvrage  aussi  élémentaire. 

Les  (Jomnicnliirii  in  Hbros  Philosophin'  iiulnrulis  el  Mela- 
physicœ  Arislolelis,  publiés  par  Pierre  Tataret,  et  dont  la 
|)remière  édition    |)arul    en    i^ig'i',    procèdent  exacleineni   du 


1.  Jolianriis  llcimoii  ()/).  lauil.,  \h-  Cm'Iu  cl  MuikId  lili.  Il,  Duhiuni  III  :  I  liiim 
omiiis  mollis  iiulurulis  sit  velocior  in  lino  (|iiaiii  in  iirincipio.  Ms.  ril.,  fol.  Hi.'t, 
coll.  a,  h  el  c. 

2.  Cltirissima  simiularisiiue  totiux  /iltilDSoiiliie  neriion  nielaiiliisicf  Arit^tolclis  :  mciiiislri 
F'elri  tatareli  e.r/iosilio.  (jolophon  :  KnicluoMiin  fadleiiue  (ipiis  intnxliicloiium  in 
lagicani  pliilnsoiilii.iin  nrcnciti  inrhiphisii  mih  ;iri>li>li'lis  (lo(■li^^imi  \ir\  nm^^'islri  pclri 


DOMIMQI  E    SOTO    ET    T,A    SCOLASTIQUE    PARISIENNE  K^  I 

même  esprit  que  le  traité  de  Jean  Hennon.  Soumis  à  rinfluence 
de  Duns  Scot  en  toutes  les  questions  que  nous  nommerions 
aujourd'hui  métaphysiques,  l'auteur  suit  les  opinions  des 
\ominalistes  toutes  les  fois  qu'il  débat  un  problème  que  nous 
attribuerions  à  la  Physique.  Comme  Jean  Hennon,  Pierre 
Tataret  s'inspire  volontiers  d'Albert  de  Saxe;  il  va  même 
jusqu'à  lui  emprunter  textuellement  des  pages  entières;  c'est 
par  un  emprunt  de  ce  genre  que  les  considérations  d'Alber- 
tutius  sur  la  loi  de  la  chute  accélérée  des  graves  ont,  nous 
l'avons  dit  au  paragraphe  XI,  passé  dans  le  traité  de  notre 
scotiste,  et  bénéficié  de  la  vogue  extrême  de  ce  traité. 

Mais  aux  Commentaires  de  Pierre  Tataret,  non  plus  qu'aux 
Commentaires  de  Jean  Hennon,  nous  ne  trouvons  rien  qui 
nous  rappelle  les  enseignements  d'un  Nicole  Oresme  sur  la 
difformité  des  qualités. 

A  côté  de  cette  École,  scotiste  en  Métaphysique,  mais  large- 
ment accueillante  à  la  Physique  nominahste,  dont  Hennon  et 
Tataret  sont  des  représentants,  l'Université  de  Paris  compte, 
au  xv^  siècle,  une  École  thomiste  dont  l'écrivain  le  plus  fécond 
semble  avoir  été  Johannes  Versoris',  qui  mourut  vers  i/|8o. 

Gomme  Hennon  et  comme  Tataret,  Versoris  a  commenté 
la  Physique  d'Aristote,  le  De  Cselo  et  Mundo,  le  De  générât ione 
et  corriiplione,  les  Météores,  le  De  anima,  les  Parva  naturalia  et 
la  Métaphysique;  comme  Tataret,  il  a  exposé  les  Summutœ  de 
Petrus  Hispanus;  mais  l'esprit  qui  le  guide  est  bien  différent 
de  celui  qui  anime  ses  émules  scotistes.  On  no  saurait,  en  into- 
lérante   étroitesse,    surpasser    son    Thomisme.    Des    progrès 

lalaret  diligentissime  castigatum  impcnsis  pnidentis  viri  lacobi  bezanceau  nierca- 
toris  pictavensis  consnmmatum  parisii  cura  pervigili  magislri  andree  bocai'd.  Anno 
domini  millesimo  CCCG  nonagesimo  quarto,  décima  die  februarij. 

1.  Et  non  Johannes  Verser,  comme  il  est  habituellement  appelé.  Une  édition 
des  :  Johannis  Versoris  Qasestioites  super  Metnphysiram  irestolelis,  publiée  à  Lyon, 
vers  i^go,  par  un  typographe  inconnu,  porte,  à  la  première  page,  une  épitaphe  de 
l'auteur;  en  cette  épitaphe  on  lit  : 

Parisee  jacet  hic  urbis  sludiique  Johannes 
Versoris  decus  eximium  doclissimus  omnium. 

Cet  epitajihium  est  précédé  d'une  exortatio  oii  on  lit  :  «  ...a  divo  preceplore  nostro 
Jùhanne  ]'ersoris.  » 

Cette  édition  de  la  Métaphysique  de  Johannes  Versoris  est  décrite  par  le  savant 
libraire,  M.  Joseph  Baer,  de  Francfort-siir-le-Mein,  sous  le  n°  C73,  en  son  Layerca- 
talog  OS.l  (Incuntihilia  xylo(jraphira  et  typoyraphica,  ii55-i5oo). 


l32  BlLLETn    HISPAMQUE 

accomplis,  depuis  le  temps  de  l'Ange  de  l'Ecole,  en  maint 
qhapitre  de  la  Physique,  il  n'a  cure;  des  doctrines  comme 
celles  de  ïimpetas  n'obtiennent  même  pas  l'honneur  d'une 
mention.  Aveuglé  par  son  préjugé,  Versoris  croit  sans  doute 
qu'il  ressuscite  saint  Thomas  d'Aquin  ;  et,  en  elï'et,  il  le  fait 
sortir  de  son  tombeau,  mais  il  ne  lui  rend  pas  l'ame;  il  ne 
nous  présente  que  la  momie  desséchée  de  ce  génie  qui  eut  une 
vie  si  intense  et  si  belle. 

Assurément,  ce  n'est  pas  dans  les  Commentaires  de  A  ersoris, 
bien  dignes  de  disputer  le  prix  de  routine  aux  traités  des 
Averroïstes  italiens,,  que  nous  pourrons  relever  la  moindre 
trace  des  enseignements  d'un  Albert  de  Saxe  sur  la  loi  de  la 
chute  des  corps,  d'un  Nicole  Oresme  sur  la  difformité  des 
qualités. 

Ainsi,  au  cours  du  xv  siècle,  nous  n'avons  recueilli  aucune 
pensée,  émise  ou  reproduite  à  l'Université  de  Paris,  touchant 
les  latitudes  uniformément  difformes.  C'est  seulement  au 
début  du  wr  siècle  que  furent  composés  les  livres  que  nous 
allons  lire,  et  où  nous  entendrons  des  maîtres  parisiens  trai- 
ter, avec  grand  détail,  des  latitudes  et  des  problèmes  qui  s'y 
rapportent.  En  ces  traités,  les  noms  de  ceux  qui  enseignaient 
à  Paris  au  \i\''  siècle  seront  souvent  invoqués  ;  souvent  aussi 
seront  cités  lientisberus  et  le  Calculateur;  enfin,  les  auteurs 
auront  mainte  occasion  de  nommer  Paul  de  Venise,  Gaétan  de 
Tiène,  Jacques  de  Forli,  Ange  de  Fossombrone  ou  Bernard 
Torni  ;  mais  pas  une  fois,  en  leurs  écrits,  nous  ne  trouverons 
la  moindre  allusion  à  un  maître  parisien  plus  jeune  que  Mar- 
sile  d'inghcn.  Ainsi  donc,  tandis  que  l'Ecole  d'Oxford,  d'abord, 
que  les  Ecoles  italiennes,  ensuite,  se  passionnaient  pour  les 
méthodes,  Jiouvellement  découvertes,  qui  permettaient  de 
soumettre  au  calcul  les  latitudes  des  formes,  il  semble  que 
l'Université  de  Paris,  oubliant  la  tradition  d'Alberl  de  Saxe  et 
de  Nicole  Oresme,  ait  délaissé  ces  j)rol)lèmes  depuis  le  début 
du  Grand  Schisme  jusqu'à  la  fin  du  xv'  siècle. 

Au  début  du  \vi'  siècle,  au  contraire,  les  diatribes  d'I^rasme 
et  de  Vives  sufliraient  au  besoin  à  nous  l'apprendre,  les 
Facultés  et  les  CoUèjfes  de  Paris  devenaient  autant  d'académies 


DOMINIQUE    SOTO    ET    L\    SCOLASTIQUE    PARISIENNE  1 33 

d'escrime  dialectique  oii  les  calculationes^  imitées  d'Heytes- 
bury,  de  Suiseth  et  de  Jacques  de  Forli,  étaient  de  continuel 
usage  pour  l'attaque  comme  pour  la  riposte;  les  maîtres  espa- 
gnols se  montraient,  en  ces  duels,  particulièrement  acharnés 
ot  habiles.  Des  dires  de  Didier  Érasme  et  de  Louis  Vives,  de 
nombreux  documents  vont  nous  confirmer  l'exactitude. 

Rendons-nous  d'abord  à  ce  Collège  de  Montaigu  dont 
Érasme  a  été  le  pensionnaire,  dont  Vives  va  être  l'élève,  et 
qui  restera  un  objet  d'horreur  pour  ces  deux  humanistes. 
A  Montaigu,  au  début  du  xV^  siècle,  le  régent  le  plus  honoré 
est  le  théologien  écossais  Jean  Majoris. 

Jusqu'en  la  Théologie  de  Majoris,  nous  trouvons  des  consi- 
dérations sur  la  latitude  des  formes,  sur  les  formes  uniformé- 
ment difformes,  sur  leur  réduction  à  l'uniformité. 

En  son  commentaire  au  premier  livre  des  Sentences  de  Pierre 
Lombard  ',  le  Régent  écossais  est  amené  à  définir  la  latitude 
uniformément  ditïbrmc  ^  Il  pose  ensuite,  au  sujet  de  cette 
latitude,  diverses  conclusions  dont  voici  la  seconde  : 

«  L'intensité  d'une  qualité  uniformément  difforme  se  mesure 
par  le  degré  moyen  de  cette  intensité.  Par  exemple  :  Soit  une 
qualité  uniformément  difforme,  de  la  chaleur  si  vous  voulez, 
qui  est  répandue,  depuis  le  degré  o  jusqu'au  degré  8,  en  un 
sujet  A  long  de  deux  pieds.  Je  dis  que  A  a  une  chaleur  égale 
à  4.  Je  le  prouve.  Supposons  que  la  chaleur  dont  l'intensité 
est  comprise  entre  o  et  '\  augmente  d'intensité  jusqu'à  être 
uniformément  égale  à  /i  ;  à  la  fin  de  cette  opération,  la  moitié 
du  corps  où  se  trouve  cette  chaleur  se  trouve  uniformément 
échauffée  avi  degré  ^|.  Supposons  que,  pendant  ce  temps,  la 
chaleur  de  la  seconde  moitié  s'atténue  jusqu'à  ce  qu'elle  soit 
uniforme  et  égale  à  ^|.  A  la  fin,  le  corps  tout  entier  est  chaud 
au  degré  4;  or,  autant  il  a  acquis  de  chaleui-  en  une  moitié, 

i.  Joannes  Major  In  priinum  sententiariiin  ex  rerognitione  Jo.  Barfi/.  Veniindanlur 
apud  eundem  Badium.  Au  verso  du  litre,  Epistola  :  Joannes  Major  Georgio  llepbur 
i^Qsi.  Cette  lettre  est  datée  de  Montaigu  et  du  7  des  calendes  de  juin  lûog.  Elle  est 
suivie  de  ces  mots  :  Impressit  autem  jam  Hadius  anno  MDXIX.  Celte  édition  de  i5it) 
semble  donc  reproduire  une  précédente  édition  de  i5og,  que  nous  n'avons  pu 
consulter. 

a.  Jjaaanis  Majoris  Op.  laiid.,  éd.  cit.,  lib.  1,  dist.  WIl,  qutesl.  WUI,  fui.  L\XX, 
coll.  b,  c-et  d. 


l3'|  Bl  I.I.KTIN    IIISl'AMQrE 

autant  il  en  a  pei'du  en  l'autre;  la  chaleur  d'un  tel  corps 
équivalait  donc  à  \... 

.)  De  même,  lorsque  nos  maîtres  déposent  entre  les  mains 
du  chancelier,  au  sujet  des  candidats  à  la  licence,  des  notes 
qui  ne  sont  pas  uniformes,  il  les  faut  réduire  à  l'uniformité  ; 
une  moitié  des  notes  assignerait  à  Sortes  le  premier  rang; 
l'autre  moitié  lui  donnerait  le  troisième  rang;  il  y  a  alors 
autant  de  raison  pour  qu'il  occupe  le  premier  rang  que  le 
troisième;  on  le  réduit  au  second  rang.  » 

Jean  Majoris  devait  être  hahile  vulgarisateur;  à  des  étudiants 
en  Théologie,  probablement  peu  soucieux  de  Géométrie,  il 
sait  présenter  sous  forme  concrète  la  substance  du  raisonne- 
ment de  Nicole  Oresme. 

Parmi  les  objections  dressées  contre  la  règle  qu'il  vient  de 
fc^rmider,  Jean  Majoris  rencontre  celle-ci  :  La  vitesse  d'une 
roue,  c'est  la  vitesse  du  point  qui  se  meut  le  plus  vite.  Tel 
était,  nous  le  savons,  l'enseignement  de  Biadwardine,  d'Albert 
de  Saxe.  d'Iïeytesbury.  Cet  enseignement,  notre  théologien 
le  repousse  pour  s'en  tenir  .'i  ranticpie  opinion  du  Liber  de 
jjroporlionalitale  moiiium  cl  magnUiidinum  : 

i«  La  meule  du  forgeron,  »  dit-il,  «  se  meut  avec  la  même 
vitesse  que  le  point  qui  se  trouve  au  milieu  de  la  longueur  du 
rayon  de  la  circonférence;  et  il  en  est  de  même  tie  tout  corps 
entre  les  diverses  parties  duquel  le  mouvement  est  réparti 
d'une  manière  niiiformémcn!  dilVorme,  » 

Les  problèmes  Ihéologiqucs  ne  prêtaient  guère  à  di'battre 
longuement  les  propriétés  des  latitudes  uniformes  et  difformes; 
Maître  Jean  Majoris  en  devait  discourir  |)lus  à  plein  lorsqu'il 
traitait  de  la  Physique;  ce  qu'il  en  disait,  nous  le  saurons  sans 
doute  à  fort  peu  près  en  lisant  les  écrits  de  ses  disciples. 

L'tin  de  ses  élèves  les  plus  marcpiants  paraît  avoir  été  Jean 
Diillaeil  (le  (Jiind  (pii,  comme  son  maître  et  en  même  temps 
(jue  son  maître,  régenta  à  Montaigu.  Là,  Jean  Dullaert  aimait 
à  développer'  les  rdlcnhilinncs  de  Suiseth.  au  grand  ennui  de 
l'élève  Louis  \  ivès. 

Que  rargtimetilalion  de  .Icmm  Dullaert  soit  souvent  fasti- 
dieuse, on  raeecjrdera  xolonliers  ;'i  \i\ès  en  lisant  ]{'<■  Oiirslia/is 


DOMINIQUE    SOTO    ET    I. A     SCOF.ASTIQLE    PARTSIENNE  I  3.) 

sur  la  Physique  dWristote  que  le  maître  gantois  a  publiées 
en  i5o6'.  Ces  questions,  cependant,  vont  nous  apporter  de 
précieux  renseignements  au  sujet  des  leçons  qui  se  donnaient, 
à  Montaigu,  sur  les  latitudes  des  formes. 

Pour  commenter  ce  qu'Aristote,  au  troisième  livre  des 
Physiques,  dit  du  mouvement,  Duliaert  déclare  2  u  qu'il  faut 
examiner  diverses  questions.  Il  faut  examiner,  tout  d'abord,  si 
le  mouvement  est  une  entité  successive  réellement  distincte 
de  toute  chose  permanente  ;^  il  faut  chercher,  en  second  lieu, 
par  rapport  à  quoi  doit  être  évaluée  la  Aitessc  du  mouvement 
local;  en  troisième  lieu,  par  rapport  à  quoi  doit  être  évaluée 
la  vitesse  du  mouvement  d'augmentation;  en  quatrième  lieu, 
par  rapport  à  quoi  doit  être  évaluée  la  vitesse  du  mouvement 
d'altération  ». 

Laissons  de  coté  la  première  question  qui  n"a  pas  trait  à 
notre  sujet.  Les  trois  dernières  vont  constituer  un  Tracta/us 
de  tribus  prsedicamenlis,  un  traité  de  la  vitesse  dans  les  trois 
sortes  de  mouvements  que  reconnaît  la  Physique  péripatéti- 
cienne. Si  nous  ajoutons  que  ce  traité  est  précédé"^  d'une 
introduction  mathémathique  sur  les  rapports  et  proportions, 
nous  aurons  suffisamment  annoncé  qu'il  va  être  construit  sur 
le  même  plan  que  le  Traclatus  proportionum  d'Albert  de  Saxe. 

Des  divers  chapitres  qui  composent  le  petit  traité  de  Méca- 
nique écrit  par  Albertutius,  un  seul  n'a  point  ici  son  analo- 
gue ;  c'est  le  premier,  celui  qui  étudie  la  relation  du  mouve- 
ment avec  les  causes  qui  le  produisent:  Duliaert  réserve 
l'examen  de  cette  question  pour  le  commentaire  au  VIP  livre 
de  la  Physique. 

Si  l'influence  du  Tracluius  proportiouum  d'Albert  de  Saxe 
est  bien  reconnaissable  en  la  rédaction  de  notre  Philosophe 
gantois,  une  autre  influence  y  a,  plus  profondément  encore, 

1.  Johannis  Duillaert  quesliones  in  libros  fikisiconim  Aristolclis.  Colophon  :  Hic  finem 
accipiunt  questiones  phisicales  Magistri  ioliannis  duliaert  de  gandavo  quas  edidit  in 
cursu  arlium  regentando  parisius  in  collcgio  montisaciiU  impensis  lionesli  viri 
Oliverii  senant  solertia  vero  ac  caracteribus  Nicolai  depratis  viri  liujiis  artis  inipres- 
sorie  solertissimi  proiit  caractères  iiidicant  anno  domini  millesimo  quingentesinio 
sexto  vigesima  tertia  martii. 

2.  Johannis  Duliaert  Op.  laud.,  lib.  111,  quaest.  I,  fol.  sign.  f  j,  col.  c. 

3.  Johannis  Duliaert  Op.  laud.,  loc.  cit.,  fol.  sign.  gj.  col.  c. 


l36  BLLLETIN    HISPAMQUE 

imprimé  sa  marque:  c'est  celle  du  Tractatus  de  ti'ihns  pvsedi- 
ramenlis  de  Guillaume  Heytesburv;  le  nom  dllentisberus, 
d'ailleurs,  apparaît  souvent  dans  les  dicussions  menées  par 
Jean  Dullaerf  et,  parfois,  il  apparaît  tout  auprès  de  celui  d'Al- 
bertus  de  Saxonia'.  C'est  rinflucncc  d'Heytesbury,  cest  celle 
du  Calculateur,  dont  le  nom  est  également  prononcé-^,  qui  ont 
introduit,  en  largumentation  du  Uégent  de  Montaigu,  d'inces- 
sants sophisintdd  :  dressés  à  titre  d'objections  contre  cliacune 
des  opinions  entre  lesquelles 'il  y  a  lieu  de  clioisir,  ces 
sopbismes  et  les  solutions  qui  en  sont  données  mettent,  en 
l'examen  de  la  moindre  question,  une  inextricable  confusion; 
ce  sont  fagols  d'épines  qui  eniravent  l'esprit  désireux  de  courir 
à  la  rencontre  de  la  vérilé. 

Dullaert  examine  d'abord  les  problèmes  relatifs  à  la  distri- 
bution du  mouvement  au  sein  du  sujel.  Pour  lui,  comme 
pour  Mbert  de  Saxe,  cet  examen  se  réduit  à  l'étude  du 
mouvement  de  translation  et  à  l'élude  tlu  mouvement  de 
rotation. 

Pour  définir  la  vitesse  du  mouvement  de  rotation,  il  refuse 
de  se  mettre  du  parti  auquel  Jean  Majoris  s'était  rallié;  reve- 
nant à  l'opinion  de  Tbomas  Bradwardine  et  d'yVlbert  de  Saxe, 
il  veut  fpie  cette  vitesse  soit  celh»  du  point  qui  se  meut  le  plus 
vite  parmi  ceux  cpii  appartienncut  au  mobile.  »»  C'est,  »  dil-il', 
((  l'opinion  d'Ilenlisber,  et  presque  lous  les  calculateurs  la 
suivent  c<jmme  subtile.  »  Elle  a  surtout  donné  à  Ileytesbury 
l'occasion  d'inventer  et  de  résoudre  de  puérils  sophisiiutla  que 
notre  Gantois  se  délecte  à  reproduire.  11  est  plus  beureusement 
inspirt'  lorsqu'il  einprunle"'  à  Albert  de  Saxe  la  dislinelion 
entre  la  vitesse  des  parties  du  mobile  dans  le  mouvement  de 
rotation  et  la  vitesse  angulaire  de  rotation. 

Ce  qui  méiilc  le  mieux  de  retenir  notre  attention,  dans  le 
Ti-arldliis   de    Irihils  iinrdicdtiiridis   dont    Dullaert    e\j)ose    les 


I.  .loliatinis  Diillacrl  Ofi.  laiid.,  loc.  cit.,  fol.  sigii.  pfiij,  col.  Ii  cl  c;   Inl.  sig^ii.  iiij, 
col.  il  ;  toi.  siiiv  ,  col.  il. 

■j.  .ioli.-ionis  hiillaerl  O/.1.  /<;/!</.,  loc.  cil.,  loi.  si^ii.  ffiij,  col.  a. 
'i.  Joliaiiiiis  I)iillacrl  O/j.  loud.,  loc.  cil.,  fol.  si^ii.  iiij,  col.  d. 
/i.  Joliaiiriis  Dullaert  Op.  laud.,  loc.  cil.,  loi.  si^ii.  ^iij,  col.  c. 
S.  Johaniiis  Uiillaert  O/j.  laud.,  loc.  cil.,  fol.  précédanl  le  lof.  sigii    lij,  col  b. 


DOMIMQUE    SOTO    KT    \.\    SCOI. VSTIQDI^    PARISII^NMÎ  iS"] 

articles  successifs,  c'est  le  chapitre  consacré'  au  mouvement, 
rectiligne  ou  circulaire,  difforme  par  rapport  au  temps. 

Pour  représenter  les  diverses  sortes  de  diflbrmités  que  le 
mouvement  peut  présenter,  le  Régent  de  Montaigu  use  volon 
tiers  de  figures  géométriques  (juil  construit  en  employant  la 
longitude  et  la  latitude  comme  coordonnées;  mais  jamais  il  ne 
tire  parti  de  cette  représentation  comme  Oresme  a  conseillé  de 
le  faire;  jamais  il  n'en  use  pour  substituer  des  raisonnements 
géométriques  aux  raisonnements  arithmétiques  sur  les  degrés 
d'intensité  des  qualités;  en  son  livre,  comme  en  beaucoup  de 
textes,  manuscrits  ou  imprimés,  publiés  auparavant,  les  coor- 
données servent  à  construire  des  représentations  graphiques; 
elles  ne  servent  pas  à  établir  une  équivalence  entre  des  calculs 
algébriques  et  des  constructions  géométriques,  équivalence  qui 
est  l'essence  même  de  la  Géométrie  analytique. 

DuUaert  ne  fait  donc  pas  de  Géométrie  analytique. 

Cela  se  marque  clairement  lorsqu'il  se  propose-  d'établir 
«  quelques  règles  qui  sont  très  communes  auprès  de  tous  les 
calculateurs  ». 

La  première  de  ces  règles  est  ainsi  formulée  :  d  Toute  lati- 
tude uniformément  difforme,  soit  qu'elle  commence  à  un  cer- 
tain degré,  soit  qu'elle  commence  à  zéro  pour  se  terminer  à 
un  certain  degré,  correspond  à  son  degré  moyen.  » 

En  voici  la  démonstration  : 

((  Je  veux  dire  ceci  :  soient  deux  mobiles  A  et  B;  pendant  une 
heure,  A  se  meut  uniformément  d'un  mouvement  4,  tandis 
que  B  se  meut  d'un  mouvement  uniformément  difforme  qui 
croît  de  o  à  8.  Je  dis  que  ces  deux  mobiles  parcourront  des 
espaces  égaux,  bien  que,  pendant  toute  la  durée  de  la  seconde 
demi-heure,  B  se  meuve  plus  vite  que  A  ;  et  la  raison  en  est 
la  suivante  :  Autant  B  se  meut  plus  vite  que  A  en  cette  seconde 
demi-heure,  autant  A  s'était  mù  plus  vite  que  B  en  la  première.  » 

Sans  doute,  la  démonstration  d'Oresme  n'était  pas,  au  fond, 
plus  probante  que  celle-là;  mais  combien  elle  était  plus  claire. 


I.  Johaniiis  Dullaert  Op.   laud.,  loc.  cit.,  loi.   sign.  liij,  col.  a,  à  loi.  sign.  ilij, 
col.  c. 

3,  Joliannis  Dullaert  Op.  laud  ,  loc.  cil.,  loi.  siga.  hij,  col.  cl. 


lo8  BLLLlilirs    Hlï^PA.MQUË 

et  combien,  surtout,  mieux  orientée  vers  les  idées  qui  devaient, 
un  jour,  éclairer  toute  la  Cinématique! 

A  la  suite  de  ce  qui  vient  d'être  rapporté,  Dullaert  démontre 
longuement  diverses  règles  d'une  enfantine  facilité  ;  ce  sont 
autant  d'emprunts  presque  textuels  au  Traclalus  de  Iribus 
prœdicamentis  el  aux  Probationes  conclusionum  de  Guillaume 
lievtesbury. 

Bien  des  discussions  sophistiques  trouvent  également  place 
en  la  tin  des  considérations  de  Dullaert  sur  le  mouvement 
local:  en  ces  discussions,  imitées  du  chancelier  d'Oxford,  le 
mouvement  uniformément  difforme  est  toujours  désigné 
comme  le  mouvement  u  qui  unifor/nilcr  intcndilur  vcl  uiiifov- 
milcr  reniillilur  »;  imj)licitcment,  donc,  il  est  admis  que  ce 
mouvement  est  identique  au  mouvement  uniformément 
accéléré  ou  uniformément  relardé;  mais  de  l'argumentation 
compliquée  de  nolie  (ianlois,  nous  ne  voyons  pas  la  notion 
d'accélération  se  dégager,  comme  elle  se  dégageait  des  Regidx 
d'ilcylesbury,  comme  elle  s'est  précisée  par  les  commentaires 
italiens;  les  maîtres  italiens  ont  introduit  de  l'ordre  et  de  la 
clarté  dans  l'd'uvre  anglaise  qu'ils  ont  analysée;  Dullaert  en 
a  plutôt  accru  l'obscurité  et  la  confusion. 

Et  cependant,  Dullaert  avait  lu  ces  commentaires  italiens 
ou,  tout  au  moins,  le  plus  récent  d'enire  eux,  celui  de  Bernard 
Torni  ;  nous  allons  en  avoir  la  preuve.  * 

((Nous  allons,  »  dit  notre  auteur',  «  insérer  ici  quelques 
conclusions  el,  en  premier  lieu,  quatre  conclusions  de  Nicole 
Oresme  (Orem),  dont  les  démonstrations  sont  très  belles  et  très 
ingénieuses.  » 

Il  s'agit  de  ces  problèmes  où,  pendant  des  temps  qui  se 
succèdent  en  progression  géométrique  décroissante,  le  mobile 
se  meut  avec  des  vitesses  qui  croissent  suivant  certaines  lois. 

Des  quatre  conclusions  que  Dullaert  attribue  à  [Nicole 
Oresme,  les  deux  premières  seules  sont  de  ce  maître;  les  deux 
autres  sont  celles  ([uc  Bernard  Torni  a  imaginées.  Même  pour 
celles  ([ui  sont  d'Oresmc,  les  démonstrations  présentées  par  le 
Gantois    ont    la    forme  arithmétique   dont    l'Italien    les    avait 

I.  JoliarmiK  Dullucrl  0/y.  UiuJ,,  loc.  cil.,  fol.  siiivaiil  le  fol.  si;,'ii.  Iiiij,  col.  J. 


bOMlMQLt:    SUTO    liT    !,\    SCOLASTlQlË    l'AhlSIÔNE  \S() 

revêtues,  non  la  forme  géométrique  proposée  par  rinverUcur. 
Nous  pouvons  donc  assurer  que  Dullaert  axait  lu  le  TrucUdus 
de  molli  locali  de  Bernard  Torni;  mais  nous  pouvons,  en  outre, 
affîrmer  qu'il  n'avait  pas  lu  le  De  diJJormUidc  qacdUaliua 
d'Oresme;  c'est  une  remarque  que  nous  nous  bornons  à 
indiquer  ici  pour  la  retrouver  en  son  temps. 

Après  qu'il  a  résolu  les  quatre  problèmes  empruntés  à 
Bernard  Torni,  <(  voilà,  »  écrit  Dullaert',  «  ces  quatre  conclu- 
sions de  Nicole  Oresme,  auxquelles  jen  vais  ajouter  quelques 
autres.  » 

Oresme  avait  considéré  des  «  parties  proportionnelles  »  dont 
les  durées  formaient  une  progression  géométrique  de  raison  1/2; 
Bernard  Torni  en  avait  pris  qui  eussent  pour  raison  soit  i/3, 
soit  2/3;  le  Régent  de  Montaigu  en  forme,  à  son  tour,  suivant 
des  progressions  géométriques  qui  aient  pour  laison  i//i,  i/5,  1/6; 
ce  ne  sont  pas  là  des  généralisations,  mais  de  nouveaux  cas 
particuliers,  tout  semblables  à  ceux  que  l'inventeur  avait  traités; 
la  satisfaction  que  Dullaert  semble  avoir  éprouvée  en  résolvant 
ces  problèmes  ne  nous  donne  pas  une  très  liante  idée  de  son 
génie  mathématique. 

Nous  allons  trouver  chez  un  maître  portugais  qui  enseignait 
à  Paris  en  même  temps  que  Dullaert,  chez  Alvarès  Tbomé, 
une  intelligence  plus  pénétrante  de  la  science  des  nombres. 

P.  DLllEM. 

(A  sawre.) 

I.  Johannis  Dullaert  (>/). /niid.,  loc.  cit..  second  fol.  après  le  fol.   sign.  hiij,  col.d. 


LE  (illA.Ml  SIKdi;  DU  (.IHIÎALTAIl  DE  1782 


\'L  PAR  UN  TEMOIN 


Le  mardi  iG  avril  1782,  alors  que  le  jour  n'avait  pas  encore 
paru,  on  put  voir  sortir  de  Valence  des  personnages  peu  habitués 
à  lia  nier  les  chemins  do  si  bonne  heure  :  une  voiture  emportait 
un  vieux  prêtre  et  trois  chanoines,  ses  amis,  auxquels  s'étaient 
joints  deux  laïques,  dont  l'un  était  trésorier  des  Rentes  royales 
du  royaume  de  ^  alence.  Au  bout  dune  lieue  environ,  les 
voyageurs  atteignirent  le  bourg  de  Catarroja  où  ils  s'arrê- 
tèrent :  là  attendaient  trois  cavaliers  avec  des  chevaux  et  des 
valets.  Le  vieux  prêtre  fit  ses  adieux  à  ses  compagnons  (|ui 
retournèrent  à  Valence.  ()uanl  à  lui,  il  enfourcha  bravement 
l'un  des  chevaux  et  s'en  fut  avec  sa  nouvelle  escorte  du  côté 
opposé.  Le  voyage  qui  eomineneait  là  devait  être  long  et 
pénible,  car  nos  gens  avaient  l'intention  de  parcourir  tout  le 
sud  de  l'Espagne  et  du  Porhigal  entre  Valence  et  Lisboiuie. 
A  cette  époque,  malgré  l'admirable  effort  du  gouvernement 
de  Charles  III,  les  routes  étaient  encore  rares  et  mal  entre- 
tenues, les  voitures  de  poste  peu  utilisées  en  dehors  des  grands 
parcours;  force  était  donc  d'avoir  reconrs  à  ces  petits  chevaux 
résistants  et  doux,  qui  sont  encore  aujourd'hui,  dans  les  cam- 
pagnes espagnoles,  le  moyen  de  transport  le  plus  général  et 
le  plus  sûr.  Il  fallait  craiiulre  anssi  le  soleil  qui,  au  prinlem|)s, 
ne  laisse  pas  d'être  quelque  peu  persécuteur  en  Andalousie, 
sans  compter  les  mauvaises  rencontres  et  les  mauvais  gîles. 
VA  pourtant  le  vieillard  qui  était  le  chef  de  celte  petite  expé- 
dition navail  |)as  craint  d"y  exposer  ses  soixante-dix  ans,  car 
il  était  un  savant,  et  il  s'agissait  d'une  (piestiou  scientifique. 


LE    GRA>D    SIÈGE    DE    GIBRALTAR    DE     I  782  •  1^1 

D.  Francisco  Ferez  Bayer  était  son  nom.  Il  nous  a  donné  lui 
même  les  détails  qui  précèdent  dans  un  journal  qu'il  a  laissé  de 
son  voyage  :  l'original,  incomplet,  se  trouve  à  la  bibliothèque 
de  l'Université  de  Valiencc,  une  copie,  qui  est  complète,  en 
existe  à  Madrid  au  département  des  manuscrits  de  la  Bibliotecn 
nacional,  ainsi  qu'im  résumé  à  la  bibliothèque  de  l'Académie 
de  l'Histoire  ^  D.  Francisco  naquit  à  Valence  le  ii  novembre 
17 II.  Il  était  sans  doute  de  famille  modeste,  car  il  avait  fait 
ses  études  comme  boursier;  une  fois  prêtre,  il  s'était  consacré 
à  l'érudition.  Il  avait  été  successivement  professeur  aux  uni- 
versités de  Valence  et  de  Salamanque,  chargé  de  missions  à 
Tolède  et  en  Italie,  et  avait  publié  divers  ouvrages  en  latin  et 
en  espagnol.  C'était  un  numismate  et  un  collectionneur  dis- 
tingué. Bref,  sa  réputation  était  déjà  assez  grande  comme  érudit 
lors  de  l'avènement  de  Charles  lll,  et  elle  lui  avait  déjà  procuré 
quelques  bénéfices.  Elle  lui  valut,  en  1762,  la  place  de  biblio- 
thécaire royal  à  l'Escorial.  Ce  fut  lui  qui  commença  à  dresser 
les  index  des  manuscrits  latins,  espagnols  et  hébraïques.  Puis 
il  devint  précepteur  des  Infants.  C'est  lui  qui  devait  donner 
en  1788  la  nouvelle  édition,  enrichie  de  notes,  de  la  Bibliotheca 
hispana  Vêtus  de  Nicolas  Antonio  (Madrid,  2  volumes).  Le  goùl 
de  l'érudition,  qui  s'était  répandu  peu  à  peu  dans  la  haute 
société  espagnole  comme  dans  la  haute  société  française,  avait 
fait  de  cet  humble  ecclésiastique  une  manière  de  personnage. 
II  avait  acquis  à  la  cour  beaucoup  de  relations. 

Depuis  1775  il  jouissait  de  la  dignité  d'archidiacre  de  la 
cathédrale  de  Valence,  depuis  1781,  de  celle  de  chanoine  La 
même  année  il  avait  publié  le  premier  volume  d'un  ouvrage 
considérable,  De  numis  hebraeo-samarikmis,  qui  ne  devait  être 
achevé  qu'en  1790.  Or,  un  de  ses  amis,  le  comte  del  Aguila, 
érudit  et  polygraphe  sévillan  dont  l'activité  fut  universelle,  lui 
avait  communiqué  des  copies  d'inscriptions  inconnues,  pour 
qu'il  les  publiât  dans  son  deuxième  volume.  Bien  longtemps 

I.  Bibliothèque  de  l'Université  de  Valence,  88  4-i3  (le  tome  II  seulement).  Biblin- 
leca  nacional  Q  Sao,  821  (Diario  del  viaje  que  hi:o  desde  Valencia  a  Andalucîa y  Portugal 
en  este  aiio  de  1782,  2  tomes).  Bibl.  de  l'Acad.  de  l'Histoire,  C  77,  12-25-4.  La  cote 
donnée  par  Muùoz  (Diccionario,  p.  lO;  et  par  Gallardo  (Ensayu,  t.  Il,  p.  136)  n'est 
plus  exacte.  Cf.  aussi  la  Bibliographie  de  Fouché-Delbosc,  p.  i3i, 

Bull,  hispun.  10 


(^2  BULLETIN    HISFA.MQLE 

avant  lui,  deux  érudits  du  \vi'  siècle,  DiejiO  Franco  et  Pedro 
Valera,  avaient  signalé  des  inscriptions  semblables  dans  plu- 
sieurs villes  d'Andalousie  et  d'ailleurs.  Tout  cela  obligeait 
notre  savant  à  étudier  les  choses  de  près  en  vue  de  son  livre. 
Convaincu  que  rien  ne  vaut  la  vue  directe  des  objets,  il  avait 
résolu  de  faire  le  voyage,  sans  avoir  égard  aux  diiricultés.  Et 
voilà  comment  il  se  trouvait,  le  i6  avril  de  grand  matin,  en 
compagnie  d'un  dessinateur  et  de  quelques  valets,  cheminant 
sur  les  grandes  routes  '. 

Mais  s'il  avait  l'œil  ouvert  sur  les  inscriptions  et  les  monu- 
ments antiques,  il  ne  le  fermait  pas  pour  cela  devant  le  reste. 
Sa  curiosité  s'étendait  à  tout,  et  c'est  ce  qui  fait  çà  et  là  Tinlérct 
de  sa  relation  pour  ceux  qui  ne  sont  pas  archéologues.  11  note 
avec  soin  tout  ce  qu'il  voit  et  tout  ce  qu'il  fait.  11  n'oublie 
jamais  de  consigner  avec  une  exactitude  parfois  monotone 
quand  il  dit  ou  entend  la  messe,  à  quelle  église  et  dans  quelles 
conditions;  il  décrit  de  quelle  façon  on  le  reçoit  et  son  manus- 
crit nous  apporte  l'écho  de  ces  politesses  minutieuses,  comme 
on  les  aime  en  Espagne,  et  comme  devait  en  recevoir  de  la 
part  d'érudils  de  village  un  homme  aussi  considérable  que 
Perez  Bayer.  C'est  grâce  à  cette  manie  de  tout  noter  que  notre 
archidiacre  s'est  trouvé  avoir  écrit  une  relation  assez  intéres- 
sante de  l'attaque  de  Gibraltar  par  le  duc  de  Crillon,  lors  du 
grand  siège  de  1782.  Comme  il  longeait  la  cote  depuis  Gandia, 
il  tomba  au  milieu  du  camp  franco-<'spagnol.  11  y  trouva  des 
amis,  des  compatriotes,  s'y  attarda,  alla  à  Cadix  et  en  revint 
au  moment  de  leflort  suprême.  11  nous  transmet  un  écho 
fidèle  des  opinions  courantes  dans  l'armée.  A  le  liic  on  revit 
toutes  les  phases  de  la  crise,  d'abord  l'espérance  du  début 
devant  les  batteries  flottantes,  puis  le  bombardement,  et  enfin 
l'échec,  qui  provoqua  chez  les  alliés  un  profond  décourage- 
ment  et  de  sourdes  récriminations.    L'absolue   sincérité  et  la 

I.  Voir  sur  la  biographie  cl  les  (ju>res  de  l'ère/,  bayer,  outre  l'iiitroductioii  assez 
courte  de  son  iJinrio,  le  (^'ir/tus  inscriplionuin  lutimiruin,  t.  II.  lnsciii)tiuiics  Hisixininc 
lalinae,  par  lliibner,  Hcrliii,  iSfJQ,  pracf.  p.  wiii.  Voir  CKaleiiieril  le  Dicriunariu  Encl- 
clopcdic'j  Uisixino-  Aincricano.  aux  mots  Père:  Buyer.  Voir  siirloiil  la  bonne  notice 
consacrée  à  l'en/.  Haycr  par  Fuster  dans  sa  Bibliolcca  Valencuma,  Valence,  i83(),  I.  \\, 
p.  l'ii  à  162. —  Ferez  Haycr  lut,  après  sou  voyage,  nommé  en  1788  directeur  de  la 
Hcal  Hiblioteca  de  Madrid.  Il  mourut  le  27  janvier  i7(>/i. 


LE    GRAND    SIEGE    DE    GIBRALTAK    DE    1 782  1^3 

scrupuleuse  conscience  de  Ferez  Bayer  donnent  à  son  témoi- 
gnage une  très  grande  valeur  et  le  rendent  digne  d'être  tiré 
de  l'oubli  '. 


Il  voyageait  assez  lentement,  examinant  en  chemin  tout  ce 
qu'il  rencontrait  d'antique.  Aussi  n'est-ce  que  le  lo  août  qu'il 
parvint  dans  le  voisinage  de  l'armée.  Ce  jour-là,  après  s'être 
reposée  dans  l'un  des  petits  postes  de  cavalerie  que  l'on  destinait 
à  assurer  la  transmission  des  dépêches  royales,  notre  expédi- 
tion archéologique  arriva  à  San  Roque.  C'était  une  petite  ville 
assez  moderne,  peuplée  après  la  prise  de  Gibraltar  en  1704 
par  des  Espagnols  émigrés.  Elle  était  alors  pleine  de  monde 
par  suite  de  la  proximité  du  camp  et  de  l'arrivée  imminente 
du  comte  d'Artois,  frère  du  roi  de  France.  D.  Francisco  eut 
beaucoup  de  mal  à  rencontrer  un  gîte  :  enfin,  grâce  à  une  lettre 
de  recommandation,  il  trouva  chez  un  notable  du  lieu  un  lit 
dans  une  chambre  qu'occupaient  déjà  deux  officiers.  Malgré 
l'incommodité  de  l'installation  et  une  attaque  d'influenza^  qui 


1.  Voici  les  autres  sources  qui  permettent  de  conlrùler  les  assertions  de  Ferez 
Bayer  ou  d'éclairer  son  récit  :  Description  historique  et  topographique  de  la  montagne,  de 
la  ville  et  des  fortifications  de  Gibraltar  avec  un  détail  de  la  baie  et  du  détroit  et  aussi  des 
endroits  qui  peuvent  contribuer  à  l'attaque  et  à  ladéfense  de  cette  place.  Paris,  1782,  in-S». 
Mémoire  pour  servir  à  l'histoire  du  siège  de  Gibraltar  [par  le  chexalier  Lemichaiid 
d'Ari;on],  Madrid,  1788,  in-S".  A  journal  of  the  late  and  important  blockade  and  siège  of 
Gibraltar  from  the  twelf'^  of  September  1779  lo  the  Ihird  day  of  february  1783,  by 
Samuel  Ancell,  3'-d  édition,  Edinburgh,  178C,  in-8.  A  history  of  the  late  siège  of  Gibraltar 
with  a  description  and  account  of  that  garrison  from  the  earliest  periods,  by  John  Drinkwater, 
London,  1786,  in-!i°.  J.  Baudry,  Étude  historique  et  biographique  sur  la  Bretagne  à  la 
veille  de  la  Révolution  à  propos  d'une  correspondance  inédite  (Î782-1790),  Paris  [i(jo5|, 
in-8°,  l.  I,  p.  55  et  suiv.  (Lettre  de  M.  de  Bélizal,  officier  français,  à  sa  femme. 
17  sept.  1782).  Mémoires  militaires  du  duc  de  Grillon,  Par-is,  1791.  Mémoires  du  duc  des 
Cars,  Paris,  1890.  —  On  trouvera  un  récit  complet  du  siège,  où  sont  utilisés  les 
documents  des  archives  espagnoles,  et  une  liste  des  brochures  du  temps  dans 
l'Armada  espahola  de  Fernandez  Duro,  t.  VII,  ch.  XVll  et  app.,  et  dans  le  Reinado  de 
Carlos  III  de  Danvila,  t.  V. 

2.  Cf.  Drinkwater,  p.  253  :  «  About  this  time  (august  1782)  a  species  of  inlluenza 
madc  its  appearance  on  board  tlie  frigates  in  the  mole,  and  soon  communicated 
with  the  garrison.  Its  gênerai  symptoms  were  suddenpains  accompanied  witli  a  diz- 
ziness  in  the  head;  though  others  were  alTected  in  a  différent  manner.  For  sevoral 
days  near  a  hundred  men  were  daily  takcn  to  the  Hospilal  ;  Ijut  bleeding.  and  a 
night'srest,  usually  removed  it.  It  was  attributed,  al  this  time,  to  the  cxtraordinary 
heat  of  the  atmosphère,  which  was  unusually  warm,  owing  lo  Ihe  prodigious  Hres 


1^^  BLLLETiN    HI>rAMO»E 

le  tourmentait  depuis  quelquesjouis,  il  dut  se  contenter  de  cela. 
Le  lendemain  il  alla  voir  au  camp  un  officier  de  son  pays, 
D.  Ventura  Caro,  qui  dans  la  suite  lui  facilita  grandement  son 
séjour.  Ce  fut  là  qu'il  eut  pour  la  première  fois  la  vue  de  la 
place: 

Vî  y  toqué  casi  con  la  mano  la  plaza.  \  i  les  reductos  y  baterias.  en 
el  antojo  aun  la  gente.  El  penon  \  ciudad  de  Gibraltar,  en  que  ho> 
cstan  puestos  todos  les  ojos  de  la  Europa,  es  el  objeto  mas  gralo  â  la 
vista  que  puede  figurarse;  pero  por  olro  lado  el  mas  espantable  y 
horrorozo,  al  ver  que  naturalo/a  y  arlc  parece  (jue  hayan  conspirado  â 
fortilîcarle  para  hacerle  theato  (sic)  de  grande  efusion  de  saiigre, 
sino  nos  mira  Dios  con  ojos  de  piedad,  lo  que  deve  ser  loda  nuestra 
contîanza.  Desde  la  tienda  del  sefior  Ventura,  que  esta  en  el  silio  que 
llaman  Bucna  lista'  contigua  â  la  casa  en  que  esta  alojado  el  chique 
de  Grillon,  se  ben  el  Pefion  y  la  Plaza  hacia  oriente  en  la  lîgura  que 
iiiuestra  el  papel  adjunlo  (manque  sur  la  copie).  Por  el  frenle  hacia 
el  niedio  dia  se  descubren  los  montes  de  \frica  y  la  Sierra  que  llaniaii 
de  Bullones  s  la  mas  elevada  de  toda  aquella  Cordillera,  la  plaza  de 
Zeuta  y  algo  hacia  Poniente  la  embocadura  del  Estrecho;  y  ûltima- 
niente  hacia  poniente  al  puohlo  de  \lgeciras,  dexando  al  parecer  al 
mar  cerrado  entre  los  montes  rcferidos  como  si  Tuera  un  estanque. 

D.  Ventura,  pour  lui  faire  les  honneurs  du  camp,  voulut  le 
présenter  au  duc  de  Grillon.  Ici  se  |)lace  une  assez  jolie 
anecdote  que  raconte  avec  une  naïve  bonhomie  Perez  Bayer: 

Me  di.KO  (|uc  \o  ih,t  liecho  un  luii;iiile.  (icmocia  yo  a  Su  Ex'desde 
Madrid  y  \v  hahia  \isto  y  hablado  \arias  \ccc<^  eu  Palacio.  Hespondi  â 
D.  Ventura  (pie  yi»  pur  la  luisoricordia  de  Dios  lenia  cou  (pic  haccimc 
un  vestido  biillanle  :  ([uo  no  iha  rol(.»  ni  nianchado,  pcio  que  quaienta 
anos  ha  via  (pie  no  usaba  de  seda,  y  que  un  eclesiâstico  no  dévia 
parecer  mal  por  ir  modesto..  Ke|)lic('Mnc  con  que  en  todas  partes  se 
juzgava  de  lo.s  sugetos  segun  la  evtcrioiidad  y  mas  los  Franceses;  que 
nianana  vendria  el  conde  de  Artois,  y  como  me  havia  yo  de  presentar 
;'i  la  hora  de  corle.'  Dexéine  pcrsuadir,  vino  cl  scnor  maestro  tailleur, 

Iliade  ()>'  llic  Spaiiiards  on  tliu  iioi^libuiiriii;,^  liiMs,  and  lIn'  ^ta^nunt  slalc  ul°  llic  air  : 
liiit  wc  lia\c  silice  leanied  Uial  il  was  iinivcrsal  over  Europe;  and  wc  liad  rcasoii,  at 
llial  lime,  lo  Ihink  Ihe  eneniy  werc  iiol  Icss  allerUd  hy  il.  •  Poru/.  Hayer  rapporta 
'|M'on  rroyait  colle  épidéiTiic  oriffinairc  de  Russie. 

1.  La  colline  de  Muena-Visla  est  située  au  fond  de  la  baie  d'AI;:éciras,  à  |)eii  près 
vers  le  milieu.  Elle  domine  assez  bien  Ions  les  (;in  irons. 

2.  Enorme  massil'  monlat,'noiix  f|iriiii  appelle  aussi  le  l)j<i)el  Moiisii  cl  <|iii  dcmiine 
les  environs  de  Coula. 


LE    GRAND    SIKCrE    DE    GIBRALTAR    DE     1  782  I '|  5 

tomôme  la  medida,  v  a  otro  dia  me  puso  romo  nuevo  y  nie  ensenô  a 
alarme  las  rodillas  con  las  que  se  llaman  charretaras,  cosa  que  no 
habia  usado  en  mi  vida.  Huvieron  para  eso  de  comprarse  hevillas  que 
yo  no  ténia,  médias  de  seda,  y  lo  que  se  llaman  cabos.  Si  no  huviera 
eslado  yo,  como  estaba,  enfermo,  buviera  consentido  en  que  me  bavia 
quitado  diez  aîîos  de  encima. 

Le  même  jour  après  le  repas  et  la  sieste,  il  alla  voir  l'atelier 
où  se  préparaient  les  matières  explosibles.  Voici  ce  qu'il  nous 
en  dit: 

Alli  vi  maravillas  del  ingenio  humanu  para  arruinar  y  destruir  â 
los  de  su  especie,  pôlvora  de  azufre,  alquilran,  betunes;  unos  que 
cnrgavan  bombas,  olros  granadas.  otros  que  disponian  materiales, 
repuestos  y  almacenes  en  gran  copia,  todos  tan  asquerosos  y  bediondos 
como  en  un  campo  y  en  taies  oficinas;  pero  todos  alegres  y  contentos. 
Vcompanôme  D.  N.  Ripoli,  capitan  agregado  o  destinado  â  aquel 
departamento,  natuial  de  Nâpoles,  el  que  ténia  alguna  nolicia  de  mi 
y  me  hizo  mil  bonras.  Disparôse  en  mi  presencia  una  espoleta  de 
bomba  y  se  hicieron  otras  pruevas. 

11  logeait  toujours  à  San  Roque,  et,  tous  les  matins,  il  se 
rendait  au  camp  pour  voir  ses  amis.  Les  opérations  militaires 
n'étaient  guère  actives,  car  on  attendait  l'arrivée  du  comte 
d'Artois  et  l'achèvement  des  batteries  tlottantes  pour  frapper 
le  grand  coup.  Des  heures,  des  journées  entières  passaient 
sans  qu'on  entendît  uji  coup  de  canon.  Le  lundi  lo,  Perez 
Bayer  note  la  capture  d'un  navire  anglais: 

Solo  â  lo  lejos  se  oyeron  tiros,  y  como  se  averiguô  despues,  fueron 
de  unos  barcos  del  patron  o  capitan  Badia  contra  un  bergantin  ynglés 
que  los  dias  antes  bavia  entrado  en  Gibraltar,  y  en  la  antécédente 
nocbe,  se  bavia  escapado  la  vuelta  de  Levante,  el  quai  ultiiiianienle 
[se]  rindio  y  apresô  delante  de  (►ran;  y  en  el  se  cogieron  pliegos  por 
donde  se  supo  que  el  governador  de  Gibraltar  y  la  guarnicion  estaban 
mu>  confîados  de  que  con  las  balas  rojas  incendiarian  nuestras 
baterias  dotantes,  suponiendolas  forradas  o  revestidas  de  corcbo,  y 
que  babia  el  governador  eclio  esperiencia  de  ello  y  le  bavia  salido  bien. 
Lo  que  se  oyô  este  dia  y  el  antécédente  en  la  plaza  con  gran  frequen- 
cia  lueron  barrenos,  y  los  \nteligentes  decian  que  eran  cuevas  que  se 
socavaban  pararesguardarse  de  las  bombas  y  bornillos  (fue  vohnan». 

I.  Ces  galeries, qui  existent  encore, sont  creusées  dans  la  paroi  de  rocher  à  pic  qui 
constitue  la  face  nord  du  rocher  de  Gibraltar. 


l/|6  Bir.I.ETIN    HISPANIQUE 

Bien  quil  fût  tous  les  jours  plus  faible  et  plus  malade,  la 
curiosité  l'emportait  toujours  chez  Ferez  Bayer.  C'est  ainsi 
qu'il  voulut  visiter  le  parc  d'artillerie  : 

Fui  despues  al  parque  de  artilleria  que  esta  entre  la  tienda  de 
D.  Ventura  Gare  y  la  lînea  '  un  quarto  de  légua  de  une  y  otro  extremo. 
Es  cosa  magnîfica.  Inmensa  canoneria,  morteros,  obuscs,  bombas, 
granadas,  sacos  de  tierra,  salcliichones  y  otras  m.'iquinas.  I^resentéme 
al  sefior  conde  Lasci  a  quien  conoci  y  traté,  antes  que  fuese  a  Suecia. 
en  el  quarto  del  sefior  D.  Ricardo  Wall.  Hi/.ome  mil  honores.  Dixome 
que  no  podia  acompafiarme,  pero  que  me  daria  sugeto  de  satisfaccion 
que  me  ensenase  sin  réserva  quanto  huviese  digno  de  verse.  Medio 
en  efecto  â  mi  paisano  y  muy  antiguo  amigo  D.  Antonio  de  Arboreda, 
teniente  coronel  creo  de  artilleria,  en  cuyo  cuerpo  se  criô  desde  que 
entro  desde  muchacho  en  el  servicio,  y  es  hombre  de  66  anos  y  de 
grande  inteligencia  y  prâctica.  Ensenôme  quanto  alli  havia  que  ver, 
y  lo  que  mas  estimé,  hablamos  solos  y  con  loda  contîanza.  Vi  que  la 
ténia  del  fcliz,  succeso  del  meditado  ataque  de  la  plaza,  si  no  lo  inter- 
rompia  la  armada  ynglesa;  lo  mismo  havia  manifestado  poco  antes 
ol  conde  Lasci  en  nuestra  conversacion,  aunque  non  tan  francamente. 
Uno  y  olro  me  consolô  mucho.  Mostrome  Arboreda  las  baterias  que 
el  enemigo  ténia  [en  la]  cresta  y  el  picacbo  del  monte  sobre  un  gran 
fuerte  que  Uaman  el  Pastel  a.  Vcianse  desde  alH  perfectamente  y  me 
dixo  :  «  Senor  paisano  todas  estas  baterias  al  segundo  dia  de  fuego  ya 
no  nos  responderan.  »  Y  anadia  :  «  V  no  digo  â  pocas  horas  de  fuego 
por  no  parecer  que  me  lisongeo.  »  Tuve  gran  gusto  en  oirle. 

Le  mercredi  i/i,  Ferez  Bayer  alla  visiter  le  logement  du  comte 
d'Artois.  Le  prince  arriva  le  i5. 

Este  dia  llegô  al  campo  el  conde  de  Artohis  (sic).  Antes  de  comer 
visilô  la  li'nea  :  comii)  alli  mismo,  digo  en  ol  campo,  en  la  casa  del 
gênerai  duque  de  Grillon.  A  las  cinco  y  média  de  la  tarde  se  volvii»  ;'i 
San  Roque.  \ada  mas  supe  de  este  dia  sino  que  en  su  noche  para  ol 
dia  i6  se  ompezaron  los  nuevos  trabnjos  de  la  Knoa,  proycctados  y 
mandados  para  la  noche  antécédente,  pero  suspondidos  con  motivo 
del  aviso  do  la  prôxima  venida  de  su  Alleza,  de  lo  (|ue  hablaré 
despues. 

I.  F>a  ligne  des  retranchements  franco-espasrnols  l>arrail  l'isllimc  de  sal)lo  qui 
rallactie  Gibraltar  à  la  terre  ferme,  à  peu  près  vers  le  milieu. 

j.  Les  Français  l'appelaient  le  Pu  lé  nu  la  Tour  ronde.  C'était  un  ouvrage  antérieur 
de  la  place  au  j)icd  «le  la  face  nord  du  roclier.  Il  en  sera  souvent  question  dans  le 
cours  du  récit  de  Ferez  Bayer,  car  c'était  le  principal  ouvrage  à  enlever  dans  une 
attaque  de  ti'rre.  Au-dessus  du  PAté,  sur  le  rocher  mémo,  s'étageaicnt  une  série  de 
redan^  et  d'ouvra(?es  destinés  à  l'appuyer  jusque  ver>-  le  milieu  de  la  ninritagne. 


LK    GRAND    SIÈGE    DE    GIBRALTAR    DE     1782  I '17 

L'arrivée  du  comte  d'Artois,  en  effet,  marque  une  recru- 
descence d'activité  dans  les  opérations  du  siège.  Le  i6  au 
matin,  en  arrivant  au  camp,  Ferez  Bayer  rencontra  l'un  des 
officiers  avec  lesquels  il  avait  dîné  chez  son  ami  D.  Ventura. 
Il  lui  dit  qu'on  avait  fait  pendant  la  nuit,  sans  avoir  été 
remarqué  de  la  place,  un  épaulement  de  760  pas  qui  permet- 
trait à  la  troupe  de  se  tenir  et  de  travailler  à  couvert.  Cet 
épaulement  achevait  de  couper  la  langue  de  terre  qui  unit  le 
rocher  de  Gibraltar  au  continent;  on  en  avait  déjà  construit 
une  grande  partie  du  côté  ouest,  et  c'était  là  qu'étaient  les 
batteries  chargées  de  canonner  la  place,  mais  il  restait  à 
continuer  l'ouvrage  vers  l'est  et  c'était  ce  qu'on  venait  de 
faire.  On  devait  établir  à  l'abri  de  cet  épaulement  une  ou 
deux  nouvelles  batteries  '.  A  la  suite  de  ce  coup  de  collier 
la  troupe  se  reposa  pendant  la  nuit  du  16  au  17,  mais  la  nuit 
suivante  on  recommença  à  travailler  pour  renforcer  les  nou- 
veaux ouvrages  et  y  mettre  des  revêtements.  Cette  fois  la  place 
fit  un  feu  continuel  contre  les  travailleurs,  ce  qui  fit  passer  à 
notre  archéologue  une  fort  mauvaise  nuit.  Il  écrit  à  la  date 
du  dimanche  18  août  : 

Como  dos  horas  antes  deamanecer  me  levante,  y  desde  un  corrcdor 
de  la  Ecelequia  que  mira  al  campo  y  al  Penon,  estuve  viendo  las 
luminarias  de  tires,  granadas  y  carcasas  que  arrojaba  la  plaza  sobre  el 
espaldon  nuevo.  Venia  primero  la  carcasa  (?)  para  dcscubrir  nuestra 
gente  :  seguian  los  canonazos  y  granadas;  objeto  sumamente  grato 
à  la  vista  sino  fuese  tant  fecondo  do  muertes  y  estragos,  y  los  temiese 
yo  en  nuestra  gente. 


I.  Drinkwaler  raconte  (p.  253)  que  les  Anglais  virent  le  i5  un  ofTicier  g-énérai, 
qu'ils  supposèrent  être  le  duc  de  Grillon,  qui  visitait  les  ouvrages  avancés.  Ils  suppo- 
sèrent plus  tard  que  c'était  pour  reconnaître  les  travaux  à  exécuter.  Ils  furent  en  effet 
très  étonnés  le  lendemain  de  voir  le  nouveau  retranchement.  11  comprenait  un  épau- 
lement d'environ  5oo  yards  et  un  chemin  couvert  d'environ  i,3oo  yards  qui,  traver- 
sant l'isthme  de  biais,  réunissait  le  nouvel  épaulement  situé  à  lest  et  l'entrée  des 
lignes  située  au  nord-ouest.  Le  chemin  était  protégé  par  des  gabions  et  des  fascines. 
L'épaulement  était  constitué  uniquement  de  sacs  de  sable  formant  un  abri  deioà 
1 1  pieds  de  haut.  Drinkwater  qualifie  ce  travail  de  «  a  most  stupendous  work  >■>  (cf.  aussi 
Ancell,  p.  207).  Les  Anglais  supposèrent  qu'on  avait  dû  y  employer  10,000  hommes, 
ce  qui  leur  fut  confirmé  dans  la  suite  par  des  officiers  espagnols.  Ce  qui  est  étonnant, 
c'est  que  les  10,000  hommes,  travaillant  à  800  yar.ls  de  la  garnison,  n'aient  pas  été 
soupçonnés.  La  nature  du  terrain  — du  sable  presque  ptir— explique  en  partie  ce 
fait. 


l/jS  BULLETIN    HISPAMQL'E 

Cependant  Ferez  Bayer  ne  voulait  pas  trop  s'attarder  à  San 
Roque.  Ce  même  dimanche  i8  août  il  partit  pour  Algeciras.  H 
se  trouva  là  en  face  de  Gibraltar,  qu'il  vit  sous  un  autre  aspect, 
et  il  resta  encore  quelque  temps  dans  ce  village,  où  il  eut  autant 
de  mal  à  trouver  un  gîte  qu'à  San  Roque.  Son  premier  soin 
fut  de  s'enquérir  des  effets  du  feu  de  la  nuit.  Il  rencontra 
justement  un  jeune  officier,  fils  d'un  de  ses  compatriotes,  qui 
revenait  de  la  ligne,  et  qui  lui  dit  qu'il  y  avait  quatre  morts  et 
sept  blessés.  Il  apprit  aussi  que  le  comte  d'Artois  devait  venir 
le  jour  même  vers  midi  visiter  les  batteries  flottantes  qu'on 
achevait  de  construire  à  Algeciras.  Voici  comment  il  décrit 
cette  visite  : 

En  efecto  como  â  las  diez  de  aquella  nianana,  se  embarc(')  S.  A.  en 
Puente-Mayorga  (que  es  un  pequefio  muelle  que  hay  frente  del  campoj. 
Desde  que  entri'i  en  el  mar  le  saiudô  con  21  lires  el  navio  San  Ysidro 
y  unas  fragalas  y  otros  buques  de  guerra  que  hav  allf  dando  i'ondo, 
y  successivamente  olros  barcos  esparcidos  por  toda  aquella  ribcia. 
Fuésc  acercando  ;'i  Algeciras.  y  le  hizo  el  niismo  saludo  la  fiagata 
coniandanle  que  monta  D.  Buenavenlura  Moreno  y  olra  tVagala  y  les 
javeques  y  varies  buques  armados  que  alli  liavia  y  l'iltimamente  una 
de  las  balerias  tlolantes,  e  navio  eiupalletado,  (pie  asi  le  llaman,  el 
quai  disparé  sus  veinte  y  un  lires  inmioble  (sic),  coine  si  fuese  un 
baluarte:  ebservélo  con  el  niayer  cuidado,  por  que  estava  en  un  mirador 
â  tire  de  fusil  del  lai  navio.  Llegé  a  el  Su  Alleza  y  entré,  y  dicen  lo 
visité  Iode  con  mucho  cuidado  y  que  le  parecié  bien,  y  de  alli  se  fue 
S.  A.  â  la  fiagata  comandanle  dende  cemié.  El  naNio,  quando  liize 
esta  maniebra,  eslaba  separado  de  les  demas  empallelados,  y, 
concluida,  se  incorporé  con  elles  cen  gran  desenibarazo,  come 
pudlera  cualquicia  être  navio.  A  las  cinco  de  la  larde  de  acpu^l  dia, 
b(tlvl('i  S  .\.  a  enibarcarsc  en  su  falua.  Saludaronlo  las  fragalas  y 
barcos  de  «guerre  con  sictc  lires  y  le  misme  les  que  bavia  en  la 
ribera,  y  (piando  llegé  â  Pnciile  Maierga  cl  navio  San  Vsidre  y 
demas  barcos  ([ue  cslan  alli  aposlados;  pore  esta  no  lue  triple,  sine 
simple  salva,  este  es  de  siel*-  lims.  Dicen  (pie  a(pi(;lla  noclic  (luiiiiii» 
S.  A.  <^'n  San  R<M|ue. 

l'erey.  Rayei-  avait  encore  roiicoiiti(''  des  amis  à  Algeciras,  un 
noiniiK'  1).  .Iiiaii  de  Lima  el  son  fils,  jeune  e(;('lésiasli(pie  qui 
lui  servit  de  guide;  le  jeune  mar(piis  de  la  Romaiia,  tils  d'un 
otïicier    tué    peu    de    temps    auparavant    dans    les    opérations 


Lli    GRAND   SIÈGE    DE    GlimAI/lAK    l>E     I  782  ï  AO 

contre  Alger,  et  dont  il  connaissait  beaucoup  la  famille'.  Le 
marqaesUo,  comme  il  Tappelle,  était  alors  sur  la  frégate  com- 
mandante et  devait  embarquer  sur  lune  des  batteries  flottantes 
lorsqu'elles  seraient  terminées.  Il  alla  le  voir  sur  sa  frégate 
avec  D.  Juan  de  Lima  et  son  fils,  et  le  marquis  les  emmena 
visiter  une  batterie  flottante.  Voici  ce  qu'il  écrivit  sur  cette 
visite  : 

Vimos  la  andana  o  bateria  alta  y  baja  niuy  â  nuestro  placer. 
Ambas  estan  muy  desembarazadas  y  bastante  allas  de  techo.  Medi  lo 
grueso  del  costado  por  la  parte  donde  esta  la  bateria  ;  tione  cinco 
palmes  y  algo  mas;  consta  de  \arios  palos  o  madères  cru/ados  entre 
si.  Suvimes  â  la  cubierta  que  es  manera  de  una  barraca  o  leme  de 
asne.  Esta  revestida  e  forrada  de  cueres  de  Aaca  crudos,  y  per  cima 
de  elles  cerren  â  lo  largo  del  buque,  come  de  très  en  très  palmes,  unes 
cables  muy  grueses  que  sugetan  les  cueres  contra  la  tablazon  de  la 
cuvierta,  y  al  mismo  liempo  sirbcu  de  escalera  para  subir  y  cerrer 
libremente  por  la  cubierta,  y  acudir  â  quanle  pueda  ocurrir,  y  dixeron 
que  para  atajar  les  incendies,  snbiera  centinuamente  agua  con  bombas, 
y  correra  por  un  canal  que  nos  enscnaron,  y  tambicn  les  veintola- 
teries  para  disipar  el  hume.  A  mi  me  parccié  que  havria  come  quatre 
o  cinco  de  aquellas  baterias  acabadas,  aunque  en  tedas,  y  aun  en  la 
misma  de  dende  salimes,  se  estaba  trabajando.  llei  demingo  primer 
dia  de  Seliembre,  en  que  esto  oscribo  en  Câdiz,  oigo  decir  que  el  dia 
28  de  Ageste  se  estavan  cencluiende  la  Begofia  y  la  Pastora  (que  es 
la  que  mandara  el  sefier  Morene  y  en  que  ira  cl  marquesite  de  la 
Remana)  y  que  son  las  ùnicas  que  t'altan.  De  vuelta  vîmes  de  i)ase 
las  barcas  caneneras  y  benvarderas,  invencien  del  Seîier  Barcele, 
adoptada  per  les  Yngleses  mismos,  que  ban  censtruide  algunas  â  su 
imitacien  para  su  defensa,  despues  de  baver  evperimentado  los  daùos 
que  les  causavan.  La  virtud  es  promie  de  si  misma 3. 


1.  1).  Pedro  Caro  y  Sureda,  marquis  de  la  Hoinana,  était  né  en  17G1,  k  Palma.  Il 
devait  s'illustrer  plus  tard  comme  olficier  de  terre  pendant  les  guerres  de  la  Révolu- 
tion et  de  l'Empire.  11  combattit  contre  la  France  sur  les  Pyrénées  de  1793  a  ly^â, 
puis  fut  commandant  général  en  Catalogne  en  1800,  et  commandait  en  j8o8  le 
contingent  espagnol  qui  a\aitété  envoyé  en  Poméranie,  Inrsqu'éclata  l'insurrection 
de  l'Espagne.  Ramené  dans  la  Péninsule  avec  ses  troupes  par  une  escadre  anglaise, 
il  fut  l'un  des  généraux  de  la  guerre  de  l'Indépendance.  Il  mourut  en  181 1. 

a.  Les  batteries  llottantes  étaient  constituées  par  do  vieux  vaisseaux  de  charge 
aménagés.  Extérieurement  elles  présentaient  du  cùlé  de  l'ennemi  l'aspect  d'une 
maison  tlottante  dont  le  toit  était  à  double  pente,  traversé  en  certains  endroits  par 
les  mâts,  et  dont  les  fenêtres  étaient  les  embrasures  des  cations.  I/autre  côté  était 
dépourvu  de  protection  (voir  la  gravure  dans  llrinkwaler).  D'après  leur  in>enteur 
le  chevalier  d'.\rçon,  ces  batteries  étaient  insubmersibles  et  incombustibles.  La  carène 
était  en  effet  cuirassée  par  une  telle  épaisseur  de  bois  que  les  plus  gros  canons  ne 


I.)0  BLI.I.rTlN    HISPANIQUE 

Le  mardi  20,  après  une  nuit  troublée  par  le  feu  continuel  de 
la  place.  Ferez  Bayer  partit  de  bonne  heure  pour  Tarifa  et 
Cadix.  11  régnait  un  brouillard  assez  épais  et  il  ne  put  voir  les 
lueurs  des  salves  d'artillerie.  Dans  tout  le  pays  entre  Algeciras 
et  Tarifa,  il  trouva  une  activité  énorme:  les  montagnes  étaient 
peuplées  de  bûcherons  et  de  charbonniers  employés  à  ravi- 
tailler l'armée  en  charbon  et  en  bois  de  construction  pour  les 
batteries  flottantes'.  Le  9.\  il  était  à  Cadix.  Là  il  put  enfin  se 
reposer  de  ses  fatigues  et  se  remettre  de  l'indisposition  qu'il 
avait  traînée  courageusement  sur  tant  de  chemins.  Pourtant 
la  ville  ne  lui  plut  guère:  elle  lui  parut  convenir  peu,  par  son 
luxe  et  la  cherté  de  la  vie,  à  un  ecclésiastique,  et  il  se  prépa- 
rait à  la  quitter,  quand  il  reçut  le  2  septembre  de  son  ami 
D.  Ventura  Caro  une  lettre  l'informant  que  toutes  les  batleries 
flotlantes  et  les  batteries  de  terre  étaient  terminées,  ainsi  que 
presque  toutes  les  canonnières.  11  lui  annonçait  l'attaque 
décisive  pour  le  8  septembre,  Jour  de  la  Nativité  de  la  Vierge, 
et  il  linvifait  à  revenir  au  camp  pour  assister  au  grandiose 
spectacle  de  la  chute  de  Gibraltar.  Ferez  Bayer  partit  donc  le 
5  septembre,  et  le  6  il  était  à  Algeciras,  où  il  logeait  chez 
D.  Juan  de  Lima.  Le  village  regorgeait  de  monde,  car  il  était 
venu  des  environs  et  de  toute  l'Andalousie  une  foule  énorme 


pouvaient  la  percer.  Gonlro  les  boulots  roug'os,  d'Arçon  avait  invontt'-  un  iJis|iosilif' 
ing:t''ni(Mi\  (pii  faisait  rirrulor  l'eau  par  le  moyen  (J<;  pompes  et  do  conduits  dans 
toutes  les  parties  cxpost'-cs  au  feu.  L'eau  devait  imbiber  le  bois  de  telle  façon  que  les 
boulets  roug;es  s'éteindraient  d'eux-mêmes.  Dos  matières  sjiongieuses  étaient  dispo- 
rées  entre  les  bonlages  po\ir  ommaj^asiner  l'humidité.  (D'Vrçon,  Mémoire...). 

I.  On  construisait  les  batteries  à  Algeciras  et  à  cette  date  on  activait  beaucoup  les 
travaux.  D'Arçon  rapporte  que  le  projet  des  batteries  llottantos  no  fut  adopté  qu'on 
février  1782,  et  qu'on  ne  commença  le  travail  qu'à  la  lin  de  mai,  |)ar  suite  do  la  dilti- 
culté  de  rassembler  des  bois.  Or,  lo  mois  de  s(^pt(>mbro  était  considéré  par  les  marins 
comme  le  meilleur  moment  pour  une  attaque  décisive.  Le  travail  se  ressentit  de  cette 
liiite.  Le  «7  septombn-,  date  fixée  pour  l'attaque,  il  y  avait  encore  trois  des  plus 
faraudes  batteries  inachevées;  les  autres  étaient  terminées  plutùt  en  apjiaronco  (iu'cmi 
réalité.  Moureusemont  le  \ent  se  leva  de  l'est,  ce  qui  empêcha  d'approcher  de  la 
place  et  donna  aux  ouvriers  le  temps  d'ache\or  en  gros  ce  qui  restait  à  faire.  Vers  la 
lin  d'août,  alors  qu'on  n'avait  pas  terminé  les  travaux,  on  chargeait  dé|à  les  muni 
lions  et  on  disposait  les  agrès.  Le  calfatage  était  d(''fectuoux,  et  lorsqu'on  toida  do 
faire  fonctionner  lo  ^y-;lème  do  circulation  de  l'eau,  l'humidit»'  transpira  vers  l'inlé 
rieur  et  mil  en  péril  les  poudres.  On  bou(^ha  donc  h's  conduits  intérieurs,  et  on 
résolut  do  se  boruiT,  pfiur  défondre  les  batteries  contre  les  boulots  rouges,  à  un 
arroiage  superliciid.  Ce  défaut  de  construction  fut  une  dos  causes  principales  de 
l'échec  des  ballerios  ilottanles.  (Jn  le  constata  ciiu|  jours  après  la  visite  du  comte 
d'.Vrtois. 


LE    r.RANn    SIÈGE    DE    GIBRALTAR    DE    I782  I  i)  I 

pourvoir  prendre  Gibraltar.  Le  lendemain  7,  veille  du  combat, 
il  alla  revoir  tous  ses  amis,  et  entre  autres  le  jeune  marquis  de 
la  Romana  à  bord  de  la  Junon  sa  frégate.  11  devait,  ainsi  que 
son  chef  D.  Buenaventura  Moreno  et  le  second  D.N.Orteffa,  com- 
battre à  bord  d'une  batterie  flottante.  Perez  Bayer  les  trouva 
très  calmes.  11  dit  à  la  Romana  qu'il  se  tiendrait  au  camp  dans 
la  tente  de  D.  Ventura  Garo  jusqu'à  la  fin  de  l'attaque;  s'il  avait 
besoin  de  lui,  il  pourrait  l'y  faire  chercher  à  n'importe  quelle 
heure  et  pour  n'importe  quel  motif.  Puis  il  se  sépara  de  lui 
avec  émotion.  Il  y  avait  encore  à  Algeciras  trois  batteries  flot- 
tantes qu'on  achevait  en  toute  hâte;  les  sept  autres  étaient 
déjà  à  leur  poste  à  Puente-Mayorga.  Après  une  dernière  visite 
à  l'une  d'elles  que  devait  monter  la  Romana,  la  compagnie  alla 
déjeuner  chez  D.  Barcelo'.  Pendant  le  repas,  les  commentaires 
allèrent  leur  train:  tout  le  monde  avait  confiance.  On  assurait 
que  l'escadre  franco-espagnole  était  à  Gadix,  et  que  l'après-midi 
ou  le  lendemain  elle  entrerait  dans  la  baie  d'Algeciras.  On 
disait  qu'on  avait  demandé  des  pilotes  pour  l'y  diriger.  On  ne 
doutait  pas  qu'un  cordon  de  /jo  navires  de  ligne,  joints  aux  9 
qui  étaient  en  face  de  Puente-Mayorga,  ne  décourageât  la  gar- 
nison de  la  place.  Barcelo  se  bornait  à  ajouter:  «  Si  les  vents 
nous  favorisent  ou  ne  nous  sont  pas  contraires,  o 

Nous  avons  résumé  jusqu'ici  les  notes  de  Perez  Bayer  en 
citant  textuellement  les  passages  les  plus  intéressants.  Il  y  a 
en  effet  beaucoup  de  longueurs  et  de  détails  inutiles  dont  la 
suppression  importe  peu.  Mais  à  partir  du  8  septembre,  jour 
prévu  tout  d'abord  pour  l'attaque  décisive  3,  les  opérations 
militaires  deviennent  véritablement  actives,  et  le  journal  de 
notre  voyageur  mérite  d'être  repioduit  en  entier.  Il  constitue 


1.  OfTicier  espagnol  qui  avait  eu  l'idée  de  fixer  sur  des  barques  des  canons  et  des 
bombardes  pour  aller  inqiiiéter  la  garnison  de  près  et  seconder  le  feu  des  batteries 
flottantes. 

2.  Dès  le  7,  Perez  Bayer  fut  informé  que  l'attaque  n'aurait  pas  lieu  dans  la  nuit 
du  7  au  8,  ni  même  dans  la  journée  du  9.  Cependant  cette  nuit-là  la  place  fit  un  feu 
incessant.  Perez  Hayer  nous  raconte  qu'étant  au  lit,  il  essayait  de  réciter  des  l'ater 
dans  les  intervalles  des  coups,  mais  il  n'arrivait  pas  à  les  finir  avant  la  détonation 
suivante.  Drinkwaler  (p.  209)  nous  donne  la  raison  de  ce  feu.  Les  Anglais  avaient  vu 
des  lumières  et  des  signaux  à  peu  de  dislance  d'une  des  deux  digues,  le  Vieux  Mole; 
ils  avaient  supposé  que  les  Espagnols  profitaient  de  la  nuit  pour  faire  des  sondages. 
La  manière  dont  s'exécuta  l'attaque  justifie  pleinement  cette  hypothèse. 


lOa  Hl'M.ETlN     HISPAMOIE 

un  récit  continu  de  la  grande  attaque  de  Gibraltar,  qui  devait 
mettre  fin  au  sicge  et  amener  la  prise  ou  la  capitulation  de 
la  ville.  L'échec  de  cet  efTort  considérable  eut  une  iniluence 
capitale  sur  l'issue  des  opérations,  et  prépaia  l'abandon  dune 
entreprise  où  l'Espagne  avait  mis  toutes  ses  espérances.  Voici 
textuellement  ce  que  dit  Ferez  Bayer  : 


Domingo  8,  ni\  nr.  i>a  Natividad  de  Niestra  Senora. 

llavia  yo  dorrnidt)  bien  poco  en  la  noclie  antes  deslc  dia  por  cl 
ostruondo  de  Ins  lires  a  que  estava  poco  acostumbrado  y  me  dispei- 
taban.  Por  la  mafiana  me  dormi  de  niuy  buena  gana,  pero  me 
disperlt't  un  l'urioso  eslriiendt)  de  canonazos.  Figuréme  que  podria 
ser  baver  las  e.*quadras  combinadas  llegado  â  Algeciras.  Levan- 
léme,  tonié  mi  capote,  abri  una  venlana  (serian  como  las  siete)  y  vi 
como  que  ardia  el  penon  de  (Jibraltar.  Disparava  â  un  liempo  las 
baterias  de  la  puerla  de  tierra,  los  muclles  nuevo  y  viejo,  el  l'aslol,  y 
loda  la  série  de  baterias  que  hay  colocadas  sobre,  como  por  escalerft, 
hasta  lo  alto  del  que  llaman  Picacho',  balas  rojas,  bombas,  carcasas 
incendiarias,  contra  el  espaldori  contiguo  de  iiuestra  b'nea  â  fin  de 
abrasarlo, 

Prosiguiô  el  fuego  con  igual  furia  bien  dos  boras  largas,  siii  que  de 
nuestras  lineas  se  les  respondicsc  '.  A  eso  de  las  ocho,  se  vieron  pasar 
hacia  ponienle  dos  buques  grandes,  y  huvo  quien  creM»  fuesen  el 
navio  de  gucrra  cl  'l'riunfanto  y  una  IVagata,  que  bavian  liido  hacia 
Toiiosa  y  pucrlo  de  Alfaques  â  conducir  un  comboy  de  (^alalufia  que 
Irae  bombas,  cafiones,  valas,  etc..  Yo  me  puse  â  rezar  mi  oficio  para 
liirme  â  de<ir  misa.  Fuimc  â  la  pequena  Yglesia  del  liospilal  (un 
(piarlo  de  légua  de  mi  alojamienlo,  y  por  mil  cucstas  y  barrancos)  cui- 
dada  por  padres  capuchinos.  'l'ralaronme  mucho  vien,  cediôme  su  vez 
cl  Kdigioso  (\uc  estava  en  luirio  para  dccir  misa,  anncpic  yo  le  di\e 
una  y  nlra  ncz  (juc  cspcraria,  (pic  no  ténia  prisa.  ObligfMue  corlcsana- 

I.  La  Porto  «lu  Terre,  commosoii  nom  riii(li((iie,  utivrail  sur  rislliim;  (|ui  rallaoliP 
au  nord  Giliraltar  à  la  terre  IVriiie.  F.e  Vieux  Mule  el  le  Mule  Neuf  sont  deux  di-^ucs 
(|ul  s'avaric<'iil  dans  la  baie,  et  situées  la  prcuiièri!  au  nordouesl,  la  seconde  au 
sud -ouest  de  la  place.  Les  batteries  dont  [tarie  ici  Perez  Bayer  sont  celbîs  (]ui 
s'échelonnaient  sur   tout*;  la   bauteurdu  rocber  au  nord  jtour  appuyer  le  Pair. 

a.  Dritikwater  dit  (|ue  le  silence;  des  Rspa^nols  dura  j>re.A  d'une  liriire  el  non  pas 
lieux  lieur(;s.  Les  Anglais  l'atlribuèrerit  à  ce  qui;  les  ouvra^^es  étaient  encombrés  |>ar 
iiu  matériel  ou  à  ce  que  les  munitions  ou  les  ordres  faisaient  ilél'aul.  (le  duel  d'artil- 
lerie dura  toute  la  journée:  deux  balleries  espafjnoles  el  une  frrande  paitie  île  la 
parallèle  furefil  brûlées  avant  la  unit.  Il  >  a  là-desMis  (piehiue  di\ei-;^en<  e  enln  l'irez 
Bayer  el  Drinkwater. 


l.E    GRAND    SlEGi:    tJE    GIBRALTAh    DE     1702  I OO 

mente  a  que  admiliese.  Dixe  mi  misa  :  combidaronme  â  lomai  ciioco- 
late  y  no  huvo  expresion  que  no  debiesc  â  eslos  bucnos  religiosos  à 
quienes  quedé  muy  agradecido. 

Volvîme  â  mi  alojamiento.  Proseguia  con  igual  furia  cl  fuego  de  la 
Plaza.  Veianse  rebentar  por  el  aire  algunas  bombas,  otras  caer  en  el 
mar;  de  io  que  nos  alegravamos  por  el  ningun  dailo  que  hacian. 
Quando  las  veiamos  caer  o  acercarse  â  la  linea,  nos  ponian  en  cuidado. 
Quando  liegué  â  mi  alojamiento  comenzaron  â  hacer  fuego  contra  la 
Plaza  las  baterias  viejas  de  nuestra  linea,  y  no  déjà  va  de  conocerse  u 
observarse  alguna  lentitud  en  las  de  la  Plaza,  especialmente  en  las 
que  estan  en  la  cresta  del  Picacho  sobre  el  Pastel.  El  objeto  del  gover- 
nador  Elliot  fue  incendiai  parte  de  nuestro  espaldon  con  las  bombas, 
carcasas  incendiarias  y  balas  rojas.  Logrôlo  en  parte,  pues  se  incen- 
diô  un  reducto  contiguo,  Uamado  de  Maon,  inûtil  por  su  construc- 
cion.  Durû  el  fuego  de  la  Plaza  todo  el  dia.  Huvo  en  el  de  nuestra 
parte  12  Franceses  muertos  y  82  heridos,  y  Espaùoles  3  muertos  y 
27  heridos.  Huvo  en  esto  alguna  variedad,  \  se  asegun'»  eran  algunos 
mas  los  muertos  de  ambas  naciones;  y  que  llegarân  en  todo  â  .^o  y  los 
heridos  â  66'.  Ln  soldado  ynglés  cayô  con  su  uniforme  y  armas  de 
io  alto  del  Picacho,  36o  y  mas  varas.  Esta  maûana  se  luvo  nolicia  de 
ha  ver  nuestros  barcos  apresado  una  fragata  ynglesa.  Las  gentes 
anaden  â  esta  noticia  cierta  que  venia  â  Gibraltar  con  très  mil  bombas 
y  que  es  de  parte  de  82  canones  :  la  segunda  y  tercera  parte  puedc 
tambien  ser  cierta,  pero  aun  no  se  ha  confirmado.  Dixeronme  sugetos 
inteligentes  que  se  habian  disparado  este  dia  de  una  y  otra  parte 
quatro  mil  tiros,  y  yo  Io  escribi  asi  ;'i  Valencia  ;  pero  hoy  se[haj 
hablado  sobre  mesa  con  mayor  rellexion  por  personas  de  grande  expe- 
riencia,  y  han  concordado  en  que  no  bajaron  de  seis  mil.  Desde  el 
anochecer  cesô  enteramente  el  fuego  de  la  Plaza.  Durante  la  noche 
desde  las  diez  hasta  cerca  del  amanecer,  de  quarto  en  quarto  de  hora, 
se  ha  ohido  un  caAonazo  :  yo,  que  [hej  estado  dispierto  casi  toda  alla, 
he  contado  hasta  veinte  y  quatro.  No  ha  ocurrido  mas  novedad. 


Llnes  y. 

Este  dia  â  las  cinco  y  média  de  la  maiîana,  rompi(')  el  fuego  de 
nuestras  baterias  antiguas  y  modernas  de  tierra.  Dispararon  primero 
cinquenla  y  seis  morteros  y  secruzaban  por  el  ayre  en  arco  las  bom- 
bas, Io  que  hacia  un  objeto  muy  agradable  â  la  vista.  Despues  ciento 
y  quince  canones.  Parecia  el  estruendo  un  trueno  continuado.  Cubriôse 
luego  la  plaza  y  el  penon  de  una  nube  muy  densa  de  humo.  Prosi- 

I.  Drinkwaler  donne  i^o  hunimes  lues  et  blessé--  de  la  brigade  l'ranraise.  d'après 
ce  que  les  Anglais  surent  plus  lard. 


104  IJLLLETiN    lIlbPAMQlE 

guiô  el  fuego  con  igual  furia  algunas  très  o  (lualro  lioras  sin  que  la 
Plaza  haya  disparado  ni  si  quieia  un  tiro.  Tambien  a  continuado  el 
fuego  todo  el  dia  y  aun  despues  de  haber  anochecido,  pero  no  con 
tanto  tesoni.  Ha  soplado  y  aun  continua  un  recio  Levante,  el  quai 
impedia  que  diez  nabios  que  havia  delantc  de  Algeciras  se  apostasen 
junlo  à  la  punta  de  Europa^,  y  hiciesen  por  aquella  parte  alguna 
dibercion;  hicieron  lus  navios  varias  tenlalibas,  y  despues  de  algunos 
bordos  tomaron  su  rumbo  liacia  dicha  punta.  llaviamos  visto  sefiales 
y  gallardetes  en  la  vigia  de  Levante  e  ignorâbamos  lo  que  signifi- 
carian.  Despues  bimos  que  el  mas  abanzado  de  los  diez  navios  mucho 
anles  de  Uegar  â  liro  de  la  Plaza  disparaba;  y  eso  nos  hizo  obseivar 
un  pcqueno  barco  que  se  esforzaba  â  entrai"  en  la  Plaza  y  estaba  ya 
lan  ccrca  de  ella  que  parecia  '  imposible  cortarle.  Dudôse  si  queria 
salir  V  huvo  algunos  que  lueron  de  ese  parecer;  y  anadian  que  hiria 
carf'ado  de  clectos  de  los  judios,  anliguos  vcciuos  de  Gibraltar,  para 
trasladarlos  a  Africa.  Pero  el  efecto  mostrû  que  venia  dirigido  â  la 
Plaza  y  que  ha  burlado  la  diligencia  de  los  encargados  de  ccrrar  cl 
paso,  en  lo  que,  si  oi  conlestar  â  los  ynteligentes,  es  que  el  barco 
procedia  de  la  parte  de  Levante,  por  que  si  viniera  de  Poniente  le 
luivieran  obserbado  y  perseguido  en  el  Estrecho  nuestros  barcos.  El 
de  que  hablamos  entraria  o  Uegaria  al  muelle  nuevo  de  la  Plaza  â  eso 
de  la  una  y  média. 

Comimos  y  los  navios  havian  tomado  su  altura  para  revolver  sobre 
la  punta  de  Europa,  como  lo  executaron;  pero  eslo  nccesitô  de  algun 
liempo.  (^)uando  yo  disperté  de  un  rato  de  siesta,  ya  estavan  forniados 
en  linea  ;  pero  decian  algunos  de  los  espectadores  que  se  liavian  colo- 
cado  â  dcniasiada  distancia.  Batieronse  por  mas  de  hora  y  média  con 
la  artilleria  de  los  Inertes  de  Punta  de  l'.uropa  :  y  entonces  bolbieron  â 
unirse  y  permanecieron  alli  hasta  que  con  la  espesa  niebla  se  ocul- 
taron.  Kntre  tanto  que  andaba  esto  en  la  Punta  de  Europa,  nueslras 
balerias  doblavan  sus  fiiegos  de  bombas  y  canonazos  contra  cl  Pastel 
y  las  baterias  superiores.  Del  Pastel  no  vi  responder,  sino  con  un 
canonazo,  y  poco  mas  hicieron  las  demas  baterias  :  senal  de  que  las 
liabria  maltralado  •  mucho  cl  fuego  de  la  manana  \  del  dia,  y  aun  se 
vi(')  arder  por  nmcho  tienq)u  uno  do  los  ramales  de  comunicacion 
contiguoal  picacho,  al  cual  incendii»  ntiadc  nuestras  bombas. 

Mientras  nueslros  navios  se  batian  con  l(is  fucrtes  de  Punta  de 
Europa,  vimos  salir  de  junto  â  Puentc  Mayorga  una  como  procesion  de 

I.  Dririkwatcr  iiolc  rpii'  la  taiiomiadc  liu  (>  lui  peu  nicuiliièrt;,saul  mt»  lo  nord  cl 
roucsloii  il  V  cul  un  peu  plus  de  perles.  Les  Iroupcs  s'élaiciil  prohableincnl  Icrrccs 
dans  les  casemates  :  r'csl  ce  qui  expli([uc  (pic  la  place  no  répondil  pas. 

■i.  La  poinlc  d'Kurf)[)e  se  trouve  à  l'extréniitc  sud  du  rociicr  de  Ciibrallar.  L'al- 
laipic  de  la  poinlc  d'Europe  par  les  vaisseaux  de  ligne  devail  appuyer  une  aUa(iuc 
des  chaloupes  canonnières  contre  la  place. 

3.   L'asscrli<jn  citée  plus  liaul  de  Drinkualer  détruit  celle  hypollièse. 


1,E    GRAND    SIÈGE    DE    GIBRALTAR    DE     I  78:^  l55 

pequenos  barcos,  uno  Iras  otro,  todos  uniformes.  Enderezaronse  â  la 
Plaza,  y  pusieronse  conio  â  trescientas  toesas  del  muelle  nuevo.  Eran 
estos  barcos  las  famosas  lanchas  canoneras,  invencion  del  senor 
D.  Antonio  Barcelo,  de  quien  hablé  no  lia  mucho,  adoplada  y  con 
grande  elogio  por  los  Yngleses  mismos.  Presentaronse  con  grande 
desembarazo  delante  del  muelle  y  murallas,  hizocada  uno  su  descarga 
por  1res,  quatro,  mas  vezes,  y  cada  vez  se  acercavan  mas.  Correspon- 
diôles  la  Plaza  con  muchos  tiros;  y  se  vehian  saltar  las  valas  por  el 
agua  â  doblada  distancia  de  la  en  que  estaban  de  ella  los  barcos.  A  mi 
me  espantava  el  ver  que  quatro  barquichuelos,  que  paiecian  unas 
sabandijas  en  el  mar,  pudiesen  ocupar  la  atencion,  y  aun  dar  cuidado, 
y  hacer  que  se  precabiesc  contra  ellos  una  plaza  de  las  mas  respelables 
de  Europa.  Durô  este  mutuo  saludo  larga  hora  y  média,  con  gran 
gusto  de  quanlos  lo  exlabamos  mirando.Suspendiôse  por  poco  licmpo 
el  l'uegoi,y  al  anochecer  se  volviô  olra  vez  â  el  con  igual  dclermina- 
cion  que  la  primera,  aunque  no  durô  tanto  tiempo  y  correspondiô 
ta  m  bien  la  Plaza. 

En  la  noche  de  este  dia  y  (en  que  esto  escribo)  hasta  ahoia  que  son 
las  diez,  nuestras  baterias  de  tierra  han  hecho  algun  iuego  contra  el 
Pastel  y  demas  baterias  inmedialas  â  nuestra  linea;  y  han  sido, 
aunque  muy  lentamentc,  correspondidas  de  las  de  el  Picacho  y  olras 
inmediatas.  Oiré  con  cuidado  lo  que  succédera  en  el  resto  de  la  noche 
y  lo  conlinuaré,  queriendo  Dios,  en  mi  diario  el 


Martes  io. 

En  la  noche  y  el  Lunes  para  el  Martes  lo  hicieron  nuestras  baterias 
de  tierra  un  fuego  conlinuo  de  canones  y  bombas  contra  el  Pastel  y 
demas  baterias  enemigas.  El  ruido  continuo  hacia  que  me  pareciese 
â  mi  (que  estava  en  la  cama)  unos  mazos  de  batan  o  martinete  de 
aiguna  fragua  o  herreria.  Al  amanecer,  vi  acordonados  nuestros 
navios  frente  de  la  Punta  de  Eùropa,  pero  no  disparaban.  Despues  se 
ocultaron  con  la  broma  y  con  estar  la  maùana  turvia.  A  las  8,  se 
supo  como  en  las  canoneras  que  ayer  tarde  se  presentaron  y  obraron 
contra  la  Plaza,  huvo  6  hombres  muertos,  très  en  la  del  numéro  4,  y 
otros  3  en  la  del  numéro  9,  y  entre  ambos  quatro  heridos.  A  las 
ocho  y  média,  vino  de  Algeciras  D.  Antonio  Barcelo,  llamado  segun 
dicen  del  gênerai  duque  de  Grillon,  lo  que  ha  dado  lugar  â  que  las 
gentes  discurran.  Como  â  las  nueve,  se  descubrieron  otravez  nuestros 
navios  (menos  uno  que  se  quedô  â  reparar  en  Algeciras);  â  las  nueve 
y  média  volvieron  â  disparar  contra  la  Punta  de  Europa  que  les  cor- 

I.  Drinkwater  assure  que  deux  canonnières  lurent  gravement  atteintes  et  que 
c'est  ce  qui  provociua  uu  niou\ement  de  retraite  en  grand  désordre. 


1Ô6  BULLETIN    HlSPAMQlÈ 

respondio  con  sus  l'iiegos.  Dinô  la  fiesta  poco  mas  de  una  hora  : 
despues  de  lo  quai  volvieron  â  incorporarsc  y  en  dcvcsar  (sic)  hacia 
Algeciias  '.  Esloy  viendo  esto  que  cscribiu  (sic)  desdc  mi  alojamiento 
cerca  del  medio  dia. 

Coiiiimos,  dormi  un  poco  de  siesta,  desocupémc  de  mi  oficio.  No 
huvo  esta  larde  novedad.  Los  navios  Ibndearun  en  i^uente  Mayorga  ; 
nuestras  baterias  de  tierra  hicieron  un  fuego  lento.  Aun  mas  la  Plaza, 
(|ue,  hasta  que  quiso  anochecer,  no  disparu  un  tiro  sicjuiera. Despues, 
muy  poco  hasta  esta  hora  (son  las  ocho).  Aseguran  todos  ser  grande 
el  estrago  que  ha  causado  nuestro  fuego  en  las  baterias  enemigas, 
espccialmente  en  las  del  Paster  de  Ulyses,  la  llerradura,  la  Carlota  o 
Carolina,  >  en  los  que  llaman  Einplazamientos  altos  y  baxos  que  estan 
por  bajo  del  Pastel  antes  de  llegar  a  la  Puerta  de  Tierra. 

Conte\lan  igualmente  que  el  vigia  de  la  Torre  Nueva  (desde  la  quai 
se  descubre  hasta  lo  mas  menudo  de  la  Plaza  por  su  grande  inme- 
diacion  y  mas  con  el  auxilio  de  la  oplica)  ha  dado  parte  al  gênerai 
duquc  de  Grillon  de  las  ruinas  de  las  baterias  ante  dichas,  y  que 
anadc  que  en  la  muralla  del  muelle  viejo  abrio  nuestro  l'uego  dos 
agujeros  capaz  cada  »mo  de  dos  hombres  â  la  par  :  lo  que  prueva  su 
debilitad  y  hace  creible  que  no  sea  mas  inerte  la  cortina  o  lienzo  de  la 
muralla  de  la  ciudad;  por  que  toda  es  una  fabrica  del  tiemp<»  de 
Carlos  Ouinto  :  lo  (|ue  da  grande  aliento  y  esporanza  â  la  tropa  y 
oficialidad. 

En  Pucnte  Maiorga  hay  ocho  baterias  llotantes  listas.  Otras  dos 
(juedan  tambien  ya  acavadas  en  Algeciras.  Kl  vienlo  Lovante  que 
reina  dos  dias  y  medio  bastantementc  recio,  impidc  que  se  juntcn  las 
diez,  y  retarda  con  eso  la  operacion.  El  mismo  viento  hace  que  no 
vcngan  las  esquadras  coinbinadas,  las  quales  se  mantienen  delante 
de  Cadiz  esperando  oportunidad  de  endiarcarse  en  el  Estrccho,  y  los 
prâcticos  de  Algeciras  la  estan  esperando  en  Tarifa  para  conducirla  sin 
riesgo  al  fondeadcro.  Los  prâcticos  do  este  campo  dan  csperanza  por 
su  experiencia  y  observaciones  de  que  maùana  uiiércolcs  reinarâ  vienlo 
de  Norte.  Quiera  Dios  que  asi'  sea  y  que  camine  todo  con  felicitad. 

Ahora,  que  sera  cerca  de  las  nueve  de  la  noche  es  muy  lento  cl 
fuego  de  nuestras  baterias,  y  aun  mcnos  ■  el  de  la  Plaza.  Si  algo 
ocurriese  se  alargarâ  despues. 

A  poco  de  averme  acoslado  se  dobli'i  el  fuego  de  nuestras  baterias 
y  prosiguiô  toda  la  nijche  con  lai  furia,  cpic  cl  conde  de  Lasci, 
gênerai  de  la  artilleria,  dixo  el  dia  siguicnte  en  la  mesa  se  havian 
echado  al  aire  mil  doscienlas  treinla  bombas. 


I.   l/aprcs  Driiikualcr,  la  rcIrHilc  soinlaiiic  dus  \aissraiix  du  la  pointe  d'I^liirope 
rUail  duc  à  une  avarie  laite  à  l'un  d'en\  par  un  lioiilol  rouge. 
'.   Passage  asi'cz  rnaléiril:   la  l();;iqiie  voudrait  r/(jn  mos. 


LE  GRAND  SIÈGE  DE  GIBRALTAR  DE  1 7S2  107 


MlERCOLES  II. 

Este  dia  hasta  muy  alto  ci  sol,  prosiguiô  cl  boinbardeo,  y  la  Plaza 
solo  rcspondiô  con  uno  u  olro  cailonazo  desdc  cl  i'icacho  y  otra 
baleria  inmediata. 

Advertimos  en  la  vigia  de  la  Torre  \ueva  barias  senales  que  de 
quando  en  quando  se  mudavan,  y  despues  se  repetian.  Ygnorabamos 
lo  que  anunciaban,  hasta  que  de  alli  â  poco  vimos  venir  por  la  parle 
de  Levante  un  gran  buque  que  nos  pareciô  de  guerra.  Poco  despues 
se  supo  que  le  seguian  olros  veinte  y  siete  barcos  :  discurriose  serian 
cl  navio  el  Triun/ante  y  la  fragata  la  CJara,  que  escoltavan  el  comboy 
que  se  esperaba  de  Cataluna.  Era  en  efecto  asi.  Havia  ya  cesado 
el  Levante  y  inclinaba  el  viento  hacia  medio  dia,  y,  fuesc  esto,  o  que 
el  navio  esperase  â  los  barcos  que  conducia,  tardô  niucho  en 
accrcarsc  a  la  Bahia,  y  por  la  tarde  se  perdio  de  bista,  y  segun  conge- 
turaron  los  peritos,  se  retiraria  â  Zeuta.  La  fragata  la  Clara  si  dicen 
que  llegô  â  Algeciras  con  el  aviso,  lluvo  quien  decia  que  este  no 
hera  el  comboy  de  Cataluna,  sino  otro  que  se  esperaba  de  Tolon;  pero 
se  disipô  la  duda  con  decir  uno  de  los  circumstantes  que  el  comboy 
de  Tolon  no  traîna  navio  que  le  escoltase.  El  tal  comboy  seguramentc 
no  llegô  este  dia  a  Algeciras. 

El  viento  comenzô  â  declararse  de  medio  dia,  y  se  templo  la 
manana,  pues  las  très  antécédentes  parecian  de  hibierno  ;  con  lo  que  las 
gentes  respiraron  y  con  la  llegada  del  comboy,  en  que  vienen  cantidad 
de  balas,  bombas,  pôlvora,  cafiones  y  otras  provisiones  de  guerra. 

Supose  tambien  este  dia  que  la  l'ragala  que  en  uno  de  los  pasados 
se  dixo  haberse  apresado  a  los  Yngleses,  hera  de  parte  de  26  canones, 
propia  de  un  corsario,  pero  mandada  por  un  olicial,  y  cargada  de 
cuenta  del  Rey  con  mil  quinlales  de  pôlbora,  dos  mil  bombas  y  1res 
mil  granadas. 

Vo  estaba  combidado  â  comer  con  el  conde  de  Lasci  :  llebôme  halla 
en  su  berlina  el  amigo  D.  Ventura  Caro,  séria  como  la  una  y  quarto. 
A  las  dos  nos  pusimos  â  comer.  Desde  mi  silla  estaba  yo  biendo  la 
Plaza,  que  parecia  poderse  tocar  con  la  mano,  y  via(5/cj  de  quando  en 
quando  rebentar  algunas  de  nuestras  bombas  sobre  las  baterias 
enemigas.   Comieron   con    nosotros   el    Principe    de   Nassau  •    y    el 

I.  iJharles-Hcnri-iNicolas  Uthoii  prince  de  Nassau-Siegen  était  né  en  1745.83  mère, 
Charlollc  de  Mailly,  ayant  abandonné  son  mari,  il  ne  fut  pas  reconnu  par  son  père. 
Jl  mena  une  existence  d'a\enturier  :  d'aljord  au  service  de  la  France,  il  accompagna 
Bougainville  dans  son  voyage  autour  du  monde,  puis  il  passa  au  service  de  l'Espagne 
où  nous  le  trouvons  en  1782.  Plus  tard,  il  devait,  en  qualité  d'amiral  russe,  com- 
battre les  Turcs  (1788),  puis  les  Suédois  (1789-1790).  11  mourut  à  Paris  en  i8o5. 
Cf.  D'Aragon,  Un  pal-idin  au  .\viil«  siècle.  Le  prince  Charles  de  Nassau-Siegen,  d'après 
sa  correspondance  (178'i-1 789).  Paris,  189."?. 

Bull,  hispan.  1 1 


l58  BLLLETIN    HISPAMQLE 

marques  de  Vaudrevili,  y  seriamos  de  inesa  como  catorce  o  quince  : 
hablôse  de  la  llegada  del  coniboy  como  de  asunlo  l'avorable,  y  aun 
mas  de  la  miidan/a  de  vieiito.  El  Principe,  luego  que  se  asegurô  de 
que  inclinaba  â  ponienle  se  lebantô  de  la  mesa  sin  espéra r  â  los 
poslres,  y  se  puso  â  cavallo  para  Puente  Mayorga  a  embarcarse  allî 
para  Algeciras,  y  tomar  el  mando  de  la  Vateria  flolante,  puesla  à  su 
cargo.  Âsi  se  dixo  publicamente  en  la  mesa. 

Algo  mas  de  las  très  me  voivi  con  el  amigo  D.  Nenlura  a  su 
bariaca,  dormi  un  poco  de  siesla.  Vino  ei  marquesilo  de  la  Komana 
à  visilar  â  su  lio.  Tuve  nmcho  guslo  de  verlo  y  de  saber  que,  ni  en 
la  funcion  de  anles  de  ayer  tarde,  ni  de  ayer  manana  contra  la  Punta 
de  Europa  {en  que  el  marques  se  hallô  con  su  gefe,  D.  Ventura  Moreno 
en  el  navio  comandante)  liuviese  esperimentado  desgracia,  ni  trabajo 
alguno.  Di  â  Dios  niuchas  gracias,  y  me  congratulé  muy  de  veras  con 
el  marques. 

La  mafiana  y  tarde  de  este  dia  no  ccsô  el  fuogo  de  nueslras  batcrias. 
aunquc  no  tan  vivo  como  por  las  noclics.  La  Plaza  correspondiô  con 
mucha  lenlitud,  disparandu  de  quando  on  quando  un  canonazo. 

A  las  ochu  y  média  de  la  nocho,  vimos  arder  la  estacada  del  enemigo 
ruas  cercana  â  nuestras  lincas  y  aviuizadas,  habicndola  incendiado  los 
nuestros  y  reliradose  inmedialamente  â  sus  puestos.  Los  Yngleses 
hicieron  gran  luego  de  fusileria  sobre  ellos  desde  varios  sitios  del 
tnonte,  dispersos  â  modo  de  MrK|uelctes.  Durô  el  luego  de  los  cnemi- 
gos  cornu  una  hora  ocerca,  el  del  incendio  de  la  estacada  nmcho  mas, 
hasla  (jue  se  consumiô.  Esta  empresa,  oi^^o  que  tiene  mas  de  boalo 
que  de  ulilidad.  Para  lo  que  pucde  conducir  dicen  es  para  l'acilitar  la 
discrcion  de  la  Plaza. 

A  esta  misma  ora  de  las  ocho  y  média,  llegô  al  campo  y  alojamienlo 
del  général  duque  de  Crillon  un  desertor  yngles,  el  quai  se  ^inoâ 
nado  y  no  Iraia  sobre  sus  carnes  sino  una  capa  que  le  prestû  un 
soldado.  Declarù  que  la  guarnicion  de  la  Plaza  esta  muy  bien  Iralada 
por  su  governador  M'  de  Elliol.  <jue  cada  sen)ana  se  les  dan  â  cada 
soldado  siete  libras  de  pan  y  una  libra  de  carne  salada  y  otros  admi- 
niculos,  pero  que  estaba  sumamente  disgustada  y  lastidiada  de  el 
largo  cncicrro  en  aquel  penon.  Dice  que  declararâ  en  que  partes  de  la 
muralla  de  mas  esta  lo  debil.  Eslo  oi  a  quien  se  lo  oyô  al  mismo 
desertor  déclarante.  .V  las  diez  y  média  de  la  noche  tome  chocolaté  y 
me  rocoji. 


I.  M  s'a^il  proijabloincdl  du  iiianiiiis  de  Vaiidrciiil.  Il  était  né  en  173c!  et  était 
entré  tout  jeune  dans  la  marine.  Il  avait  Tait  canipagiic  pendant  la  guerre  de  Sept 
ans,  V.n  177^^1  il  a^ail  commandé  un  vaisseau  au  combat  d'Oucssanl  et  l'année  sui- 
vante il  avait  conquis  le  Sénégal  el  lait  de  nombreuse*  prises  sur  les  Anglais.  Il 
■  levait  •■Ire  |)lus  lard  député  aux  Flats-(îénéraux  ;  puis  il  émipra,  revint  après  le 
18  Brumaire  el  mourut  en  1S02. 


LE  GRAND  SIEGE  DE  GIBRALTAR  DE  1 783  lOQ 


J LEVES  13. 

En  la  entrada  de  este  dia  12  a  la  fina  de  la  noche  un  gran  numéro 
de  lanchas  canoneras  y  algunas  bombarderas  se  acercaron  secreta- 
mente  â  la  Plaza  desde  el  muelle  nuevo  a  Punta  de  Europe,  y  hicieron 
sus  descargas.  La  Plaza  les  correspondiô.  Durô  el  fuego  cerca  de  très 
horas. 

Amancciô  con  vicnto  Poniente  suave  que  arreciô  algo  despues.  A 
esc  de  las  sietc  de  la  mafiana  vimos  asomar  dos  buques  grandes  por 
la  Punta  que  llaman  dcl  Carnero'.  Puso  la  vigia  que  hay  en  ella 
varias  senales.  Nos  hizo  cntrar  en  esperanza  de  que  podian  ser 
nuestras  esquadras.  Fueron  succesivamente  asomando  otros  buques. 
y  acabamos  de  persuadirnos  y  experimentar  que  era  asi.  Ahora  que 
son  las  once,  esta  la  mayor  parte  de  dichas  esquadras  va  dentro  de  la 
bahîa.  Ha  sido  y  es  grande  la  alegria  de  las  gentes,  y  otra  tanta  se 
crée  sera  la  consternacion  de  la  Plaza  â  vista  de  tan  gran  nab&  que  la 
amenaza  de  pronto. 

Por  la  tarde  todo  a  estado  tranquilo.  Solo  una  de  nuestras  baterias 
a  disparado  de  quando  en  quando  alguna  bomba,  â  que  el  Picacho  à 
respondido  con  uno  y  olro  canonazo.  El  conde  de  Artois  entré  â  bordu 
de  los  navios  franceses  que  estavan  empavesados  y  le  hicieron  los 
acostumbrados  saludos.  Yo  me  fuy  paseando  al  Puente  Mayorga  en 
compania  del  Coronel  D.  Juan  Sala 2,  pero  dexamos  prevenido  que 
nos  Uevasen  alla  los  cavallos  en  que  volvimos.  No  puede  ponderarsc 
el  concurso  de  gentes  y  la  bulla  que  havia  en  aquel  embarcadero.  El 
mar  parecia  una  selva  espesîsima. 

En  las  lanchas  canoneras  dicen  que  en  la  l'uncion  de  esta 
madrugada  tuvieron  un  muerto  y  très  o  quatro  heridos  ;  pero  ase- 
guran  que  se  pusieron  tan  cerca  de  la  muralla  que  una  de  allas  llegô 
a  varar. 

Este  ocurre  hasta  ahora  que  son  las  ocho  de  la  noche.  Las  gentes 
estan  en  expectacion  de  que  en  la  misma  o  en  la  madrugada  del  dia 
siguiente  se  pondra  en  execucion  la  idea  de  las  baterias  flotantes, 
otros  dicen  que  aun  tardarâ  dos  dias  lo  menos,  y  que  faltan  algunas 
cosas  muy  substanciales  que  prévenir  3, 

En  el  resto  de  la  noche  todo  estuvo  tranquilo. 


1.  Pointe    située    à    l'est  de   (Jibraltar,    au     sud   d'AIgéciras    et    à    l'entrée   du 
détroit. 

2.  D.  Juan   Sala  était  l'un  des  commensaux  de  D.    Ventura  Caro  et  de   Perez 
Bayer. 

3.  D'après  ce  que  dit  d'Arçon  dans  >ori  Mémoire,  cela  était  exact. 


i6o         -  BtLLErrs  hîspamqle 


s  .V[ER>'ES     lO. 

Este  dia  y  el  siguicntc  lo  sallaria  yo  de  buena  gana  y  pasaria  en 
silencio  por  cl  horror  y  sentimientô  que  me  causan  los  aconteciniientos 
do  el  '  : 

<^)uaeque  ipse  miserrima  vidi. 

Asta  eso  de  las  oclio  y  média  de  la  manana  no  huvo  movimienlo 
altruno.  La  gente  eslava  con  grande  inquielud  por  que  veia  quietas  las 
Rotantes.  Deciase  que  el  gênerai  duque  de  Grillon  se  havia  aquella 
noche  consumido  por  la  misnia  ra/.on,  que  ha\ia  enviado  varios 
recados  â  los  que  liavian  de  mandarlas,  y  especialmenle  al  comandante 
D.  Buenaventura  Moreno  para  que  comenzasen  la  maniobra  '. 


1.  Avant  d'fnt;iiiier  le  récif  de  l'altnque,  il  est  ln>n  de  domior  quehiiies  iiidicalioiis. 
Le  rocher  de  Gibraltar  pn'senle  vers  l'est  el  \ers  le  nord  une  pente  très  raide;  pour 
s'abaisser  en  pente  plus  douce  vers  l'uuesl  —  \ers  la  baie  —  et  vers  le  sud.  La  ville 
se  trouve  sur  la  baie.  Les  coniuiunications  a\ec  la  terre  ferme  se  font  par  le  riva|.'e 
ouest  de  l'isllinie,  car  à  col  endroit  le  roclier  s'abaisse  au  niveau  de  la  mer.  C'était  là 
qu'étaient  la  Porte  de  l'erre,  le  Faté  et  les  ou^rafrcs  avancés  anglais.  Ce  point  faible 
de  la  position  était  un  peu  protégé  par  une  lagune,  lui  suivant  le  rivage  de  la  baie 
vers  le  sud  on  trou\ait  le  bastion  .'^aint-l'aul,  fnrniant  l'angle  nord-ouest  de  la 
Place,  puis  le  Vieux  Môle,  défendu  ()ar  un  fort  carré,  puis  la  Porte  de  Mer,  puis, 
à  l'angle  sud-nuest  de  la  place,  le  bastion  du  Uosairc.  Elnlre  ces  différents  points 
d'ap[)ui  courait  une  muraille, ou  foH//iV/<%  assez  faible.  La  ville  se  terminait  au  bastion 
du  Rosaire  el  la  courtine  alors  s'éloignait  de  la  mer  vers  l'intérieur.  Cette  face  sud 
de  la  ville  était  traversée  par  la  Porte  Neuve  (|ui  était  forliliée.  Kn  coulinuant  vers  le 
sud,  dans  la  direction  de  la  Pointe  d'Lurope,  on  lrou\ail  une  autre  courtine  qui 
bordait  le  rivage  jusqu'au  Môle  Neuf  (jui  était  l'orlilii'.  .Après  le  MtMe  Neuf  le  rivage 
devenait  |)lus  e>car|)é  el  était  encore  couronné  d'une  muraille,  sauf  en  certains 
endroits  où  cela  avait  paru  inutile.  Sur  la  face  sud  du  rocher,  à  côté  de  la  Pointe 
d'Lurope,  l'escarpemetit  était  très  faible  el  on  avait  cru  bon  de  construire  une 
muraille.  Ln  résumi-,  Cibraliar  élail  dillicilemenl  attaquable  par  lerre  à  cause  de 
rélroilesse  du  terrain  et  des  ou\ rages  ennemis;  mais  par  mer  la  courtine  était  faible 
entre  le  N'ieux  Môle  el  le  bastion  du  Kosaiic.  La  face  >ud  de  la  place  était  assez  forte, 
mais  on  pouvait  prendr-'  pied  dans  la  presqu'île  en  dehors  de  la  place,  soif  à  la 
Pointe  d'Europe,  soit  entre  le  liaslion  du  Kosaire  el  le  MiMe  Neuf.  (Cf.  l.a  description 
lilslorique  el  tO[iOgritiihi(iiie...  [lassiin.) 

2.  Dans  les  conseils  qui  précédèrent  l'attaciue  l'indécision  fut  extrême.  i<  Cet  étal 
de  crise,  de  contratlictions,  d'ombrage  el  de  jalousie  ne  nous  a  [toint  quittés  [lendant 
les  derniers  jours.  »  (l)'.\rçon,  p.  i  r.)  D'.Arçon  était  en  coiitlit  avec  le  duc  de  Crillon; 
il  aurait  voulu  qu'on  fît  des  essais  à  boulets  rouget»  sur  les  batteries;  on  le  lui  refusa. 
Il  ne  dit  rien,  respectant  les  raison>  supc'-rieures  qu'on  avait  d'être  pressé,  et  ne 
voulant  pas  él)ranler  le  moral  des  troupes.  Comme  la  circulation  de  l'eau  était 
impossible,  les  batteries  présenlaient  moins  de  sécurilé;  aussi  d'.Xrçon  voulaif-il  leur 
permettre  di'  battre  en  retraite  jai'ilemenl,  si  cela  devenait  nécessaire.  Pour  cela  il 
no  fallait  pas  les  comluire  à  des  emplacements  où  il  y  eût  de  grands  fonds,  car  la 
manœuvre  se  faisait  en  mouillant  des  ancres  et  en  tirant  dessus.  De  phis,  il  jugeait 
avantageux  de  se  tenir  en  liaison  étroite  avec  rattacjue  de  terre.  Aus>i  était-il  d'avis 
d'attaquer  avec  les  batteries  du  Vieux  Môle,  en  face  duquel  la  profondeur  était 
faible,  et  qui,  se  trouvant  à  proximité  de  la  Porte  de  Terre,  recevrait  au>si  bien  les 
projectiles  lancés  de  l'isthme  que  ceux  des  biTlleries.  Il  soutint  très  énergi(jucmenl 


r,E    GRAND    SIÈGE    DE    GIBRALTAR    DE     178:^  I  fi  I 

En  etecto,  coino  â  las  nueve.  despuntô  una  de  las  notantes  del 
cuerpo  de  las  deiiias.  Esta  era  segun  se  dixo  la  Paslora  mandada  poi 
el  senor  Moreno;  siguiô  la  otra  llamada  Tag lia-Pied ra  a  cargo  del 
principe  de  Nassau. 

V  estas  fueron  sigiiiendo  las  ocho  restantes  a  distancia  unas  como 
â  un  tiro  de  fusil,  otras  de  dos  y  très.  Presentaronse  las  dos  primeras 
gallardamente  ante  la  Plaza  conjo  â  doscientas  toesas;  hicieron  sus 
descargas  y  fueron  correspondidas.  Jiinlaronse  las  demas  y  todas 
dispararon  contra  la  ninralla  con  el  mayor  vigor,  y  recibieron  con 
igual  constancia  los  liros  del  enemigo.  Dirigianse  nuestros  fuegos  â  la 
cortina  de  la  muralla  de  la  Plaza,  que  médian  entre  los  dos  muelles 
viejo  y  nuevo,  y  asi  tenian  que  siifrir  très  descargas  â  un  liempo.  Esta 
colocacion  de  nuestras  notantes  oi  yo  despues  censurar  â  sugetos 
inteligentes,  los  quales  decian  deberse  habcr  comenzado  la  operacion 
por  el  niuclle  viejo  y  asf  progro?i\amenlc '. 

El  proyecto,  segun  se  decia  vulgarmenle  en  las  conversaciones,  era 
que  al  mismo  tiempo  que  las  notantes  (»brasen  contra  la  muraya,  las 
barcas  canoneras  y  bombarderas,  y  que  los  nueve  o  diez  navios  que 
havia  en  la  bahia  antcs  df  Uegar  las  esquadras  combinadas,  hiciesen 
una  diversion  por  Punta  de  Europa;  y  que  contemporâneamente 
nuestras  batorias  de  tierra  de  ôfi  morteros  y  109  cafiones  biciesen  vivo 
fuego  contra  la  Plaza.  Lisongeabanse  con  eso  de  que  la  guarnicion  no 
podria  acudir  â  tantas  partes  y  que  la  fatiga  la  rendiria  y  la  haria 
rendir  la  Plaza.  Eso  es  lo  que  se  oia  en  qualquier  corrillo  aun  de  los 
mas  vulgares. 

No  sucedicj  asi.  Las  baterias  notantes  no  tuvieron  otro  auxilio  que 
el  de  las  de  tierra   que  dispararon  incesanlemente  lodo  aquel  dia  y 

son  avis  et  faillit  se  l'aire  exclure  du  Conseil  de  guerre.  Grillon  lui  dit  un  jour  en 
présence  du  comte  d'Artois  :  «  Lorsque  j'ai  demandé  que  l'on  vous  fît  venir  en 
Espagne,  car  c'est  moi  qui  vous  ai  demandi',  c'était  pour  exécuter  mon  projet,  car 
mon  projet  a  toujours  été  d'attaquer  Gibraltar  avec  des  batteries  lloltanles.  A  présent, 
Monsieur,  votre  commission  est  linie,  le  reste  m'appartient.  »  (D'Arçon,  p.  17.)  Une 
autre  fois,  le  duc  répliqua  à  une  obscr\alion  de  d'Arçon  (p.  i(():  «Vous  avez  des 
entrailles  de  père  pour  vos  batteries,  mais  j'ai  d'autres  vues,  et  si  l'encemi  voulait 
s'en  emparer,  je  les  ferais  brûlera  sa  barbe...»  Cependant,  le  la  au  soir,  d'Arçon 
obtint  que  l'attaque  serait  concentrée  sur  le  Vieux  Môle,  mais  on  prit  cette  résolulion 
tumultueusement.  Aucune  entente  n'existait  avec  la  Hotte,  ni  avec  les  canonnières  et 
les  bombardes.  Le  i.?,  à  deux  heures  du  malin.  Grillon  envoya  l'ordre  à  i).  Buena- 
ventura  Moreno,  commandant  général  des  batteries  flottantes,  d'attaquer  sous  peine 
d'être  destitué.  Grillon,  hostile  aux  batteries,  n'a  pas  dû  parler  comme  le  dit  d'Arçon. 
I.  D'Arçon  rapporte  que  la  manœuvre  s'exécuta  mal  :  on  s'éloigna  trop  du  \'ieux 
Môle  vers  le  sud,  ce  qui  compromit  la  liaison  avec  l'attaque  de  terre.  Les  batteries 
étaient,  en  outre,  trop  inégalement  réparties,  la  Paslora  et  la  Taglia-Piedra  ayant 
supporté  au  début  presque  tout  le  feu  de  l'ennemi.  Il  en  résulta  que  le  nombre  de 
canons  efficacement  mis  en  ligne  sur  les  batteries  fut  de  60  au  lieu  de  i52,  el  que 
l'artillerie  ennemie  fut  supérieure.  Bélizal,  dans  sa  lettre  du  17  septembre,  donne 
comme  chiffre  des  canons  jao  pièces  en  fonte  du  calibre  i'^.  11  confirme,  du  reste, 
que  seules  les  deux  batterie»  flottantes  commandées  par  Moreno  el  par  le  prince  de 
.Nassau  furent  à  portée  convenable. 


102  BlLr.ETIN    HISPANIQUE 

ocasiouarian  algiin  dano  a  la  guarnicion.  ^o  huvu  navios  au\iliares, 
sîn  embargo  de  estar  5o  a  la  vista.  ^o  se  viô  cafionera  ni  bombardera 
algiina,  por  que  havia  algo  de  marejada  y  se  dixo  que  no  podrian 
aguantar  la  mar'.  De  los  navios  se  que  pidieron  quatro  al  sefior 
Côrdova  para  la  proyectada  diversion  por  Punta  de  Europa^  y  que  este 
gênerai  se  nego  a  ello,  por  decir  que  esperaba  por  momentos  la  armada 
Ynglesa  y  no  podia  desmembrar  de  la  suya  ningun  navio.  Era  la 
verdad  que  se  esperaba  por  punlos  a  los  Yngleses  y  que  las  vigias  lo 
habian  anunciado  asî,  y  que  havian  pasado  ya  por  Cadiz  con  treinta  y 
siete  navios.  pero  se  enganaron  las  vigias,  y  el  tieinpo  lo  manifiestô 
asi,  y  pudo  el  engano  ser  nos  muy  perjudicial. 

Hallabame  yo  en  un  fuerte  que  Uaman  Punta  Mala^,  el  quai  apenas 
dislarâ  média  légua  de  Gibraltar,  y  esta  a  la  orilla  del  mar.  Veiamos 
desdeallicon  mucha  claridad  nuestros  tiros  y  los  de  la  Plaza  y  los  sitios 
donde  caian  y  rebentavan  las  bombas  de  nueslras  baterias  de  tierra. 
Serian  como  las  doce  del  dia,  quando  llegô  un  barco  de  las  flolantes 
con  aviso  al  gênerai  duque  de  Grillon  de  que  batian  perfectamente  en 
brecha  la  muralla  de  la  Plaza,  que  havia  ya  alguna  ruina;  que  las 
balas  incendiarias  se  apagaban  presto,  que  las  olras  no  penetravan  la 
lablazon,  y  en  suma  que  todo  iba  bien.  Gon  esta  noticia  el  gênerai 
duque  de  Grillon  despachô  posta  â  la  corte.  Vuelto  yo  â  mi  aloja- 
miento,  que  séria  algo  mas  de  la  una,  halle  â  toda  la  olicialidad 
imbuida  de  esta  noticia  y  muy  alegre\ 

Prosiguit»  el  fuego  de  las  diez  tlotantes  y  el  de  las  baterias  de 
tierra  toda  aquella  tarde;  pero  â  las  quatro  lioras  de  la  misma, 
ya  conocieron  las  primeras  que  no  podrian  desmontar  las  de  la 
Plaza  ni    permanecer  mucho  tiempo  en  el  sitio  en   «pie  se   havian 

1.  Le  rôle  des  canonnières  devait  être  de  tirer  sur  les  Iroiijies  etinemies, 
tandis  que  les  batteries  tlottantes  tireraient  sur  les  murailles  pour  y  faire  une  brè»  lie. 
Ainsi  les  positions  de  tir  des  artilleurs  anf^lais  auraient  été  intenables  et  ils  n'auraient 
pn  tirer  à  boulets  routes  sur  les  batteries  llottantes.  D'Arçon  conteste  que  la  ntor  ail 
été  trop  forte,  car  quelques  canonnières  coururent  Jusqu'au  détroit.  Les  bombardes 
devaient  agir  sur  les  ailes  et  en  ariière  des  batteries  llottantes,  en  exécutant  des  tirs 
plongeants.  A  défaut  de  ces  deux  moyens,  on  lit  demander  à  l'allaiiue  de  terre  de 
tirer  [tar  élévation  jjour  atteindre  par  derrière  les  canonniers  anglais  qui  bombar- 
daient les  llottantes.  On  ne  le  lit  pas.  L';dde  de  l'attaque  de  terre  fut  nulle,  d'aut;iiit 
plds  qu'à  un  certain  moment  les  munitions  lui   manquèrent. 

2.  Lieu  situé  sur  I(ï  boni  de  la  baie  en  deçà  des  lignes  esi)agnoles. 

.{.  Drinkw  ater  rapporte  en  elfel  (ju'au  <lébut  les  boulets  espagnols  passaient  trop 
liaul,  mais  que  \ers  midi  le  tir,  rectilié,  devint  etïlcace  Voici  ce  qu'il  dit  de  la  résis- 
tance d<;s  batteries  llottantes:  «  Our  beaviest  sliells  often  reboundcd  fi-om  Ibeir  tops 
wliilsl  the  'i-2  poiinds  sliot  seemed  incapable  of  making  any  xisible  impression  upon 
tbeir  liulls.  Frequently  \\n  llatlered  ourselves  tbe)  «ère  en  lire;  but  no  sooner  did 
tlie  smoke  appear,  Iban,  witb  Ibe  niosl  perse\eriiig  intrepidily  men  were  obser\ed 
upplying  water,  frnm  tbeir  engines  within,  to  tbo>es  places  wbi-nce  tlie  smoke 
issued.  Tlie.ses  circumslanccs,  willi  tlie  prodigious  caïuionade  wliicb  lliey  maintained, 
gave  us  reason  lo  imagine  tbal  tlic  atluck  would  nnt  be  so  soon  decided,  as,  from  our 
récent  success  againsl  tbeir  land  batteries,  \\r  lia  fondly  expecled.  »  DArçon  signale 
également  que  le  feu  anglais  ralentit  vers  midi. 


r.E    GRAND    SIÈGE    DE    GIBRALTAR    DE     I7f^3  \C)?i 

colocado  >.  Hicieron  senas  pidiendo  socorro,  y  se  les  eiiibiarou 
algunos  barcos,  pero  ninguno  de  guerra  ;  y  huvieran  sido  ociosos, 
por  que  ya  estaban  las  flotantes  en  el  momento  de  abandonarse  y 
quemarse  ;  y  asî  se  resolviô  por  los  générales  Grillon  y  Côrdova  que 
se  hiciese^.  Dixose  que  el  primero  se  viô  en  la  dura  précision  de 
despachar  un  alcanze,  para  detener  el  primer  correo  que  havia 
embiado  A  la  Corte,  y  dar  noticia  de  lo  que  iba  ocurriendo, 

Sobrevino  la  noche;  fue  creciendo  cl  fuego  enemigo  especialmente 
de  balas  incendiarias.  Ya  qucdava  poco  que  hacer.  Tuvieron  algunas 
flotantes  la  precaucion  de  arrojar  sus  repuestos  de  polvora  al  mar; 
otras  no.  Fueron  Uegando  barcos  para  rccoger  la  gente;  no  todos,  por 
que  muchos  de  elles  se  desviaron  recelosos  de  los  canonazos  que  se 
disparavan  y  de  los  de  la  Plaza,  y  aun  mas  de  que  se  volase  alguna 
Santa  Barbara.  Huvo  grandisima  confusion,  y  no  fallaron  desgracias, 
aunque  no  tantas  como  se  contaban  on  los  principios.  Muchos  llegaron 
â  nado  â  tomar  algunos  de  nuestros  barcos.  El  governador  Elliot 
ténia  sus  barcas  caùoneras  A  la  punla  del  muelle  nuevo,  pudo  observar 
el  conflicto  y  confusion  que  havia  en  el  recoger  de  nuestra  gente,  por 
que  hay  poca  distancia.  Hizolas  acercar  y  recogiô  con  mucha  humanidad 
hasta  trescientos  y  treinta  y  cinco,  muchos  de  los  quales  huvieran 
seguramente  perecido.  Havia  entre  elles  quatro  oficiales  y  très  capel- 
lanes;  pero  esto  fue  ya  al  amanecer  del  dia  siguiente^. 

I.  D'Arçon  dit  que  le  leu  des  Espagnols  fut  soutenu  jusqu'à  trois  heures  de 
l'après-midi.  A  ce  moment  un  boulet  rouge  s'est  enfoncé  dans  la  Taglia-Piedra  sans 
qu'on  puisse  l'éteindre,  et  il  continue  à  pénétrer  dans  le  bois.  L'inquiétude  que  cela 
provoque  amène  un  ralentissement  du  feu.  tandis  que  celui  des  Anglais  augmente. 
Les  autres  batteries  qui  n'étaient  pas  atteintes  diminuent  aussi  leur  feu.  A  trois 
lieurcs  sur  la  Taglia-Piedra,  on  noie  les  poudres  et  on  cesse  de  tirer.  La  fumée  s'étant 
dissipée  elle  devient  une  cible  excellente  pour  les  canonniers  anglais  :  c'est  alors  que 
d'Arçon  demanda  qu'on  la  ramenât  en  arrière  pour  permettre  d'éteindre  le  commen- 
cement d'incendie  cau.sé  par  le  boulet  rouge.  Cet  incendie  ne  fut  irrémédiable 
qu'après  minuit  et  en  tout  cas  les  autres  batteries  pouvaient,  à  son  avis,  rester  sur 
place.  Les  signaux  de  la  Taglia-Piedra  ne  furent  pas  compris. 

a.  D'après  Drinfcwater,  à  sept  heures  ou  huit  heures  du  soir  leTen  espagnol  avait 
presque  complètement  cessé,  sauf  sur  une  ou  deux  batteries  vers  le  nord,  plus 
éloignées  et  qui  avaient  moins  souffert.  Il  semble  y  avoir  eu  de  l'aiVolement  à  bord 
des  batteries  :  d'Arçon  rapporte  que  sur  la  Taglia-Piedra  on  ne  put  pas  rassembler 
assez  de  matelots  pour  aller  mouiller  des  ancres  en  arrière  et  assurer  la  retraite. 
Dans  les  autres  non  plus  on  ne  pensa  pas  à  la  retraite,  et  Grillon,  voyant  l'afTaire 
manquée,  décida  de  brûler  les  batteries  bien  qu'elles  ne  fussent  nullement  à  toute 
extrémité.  Cet  ordre  fut  exécuté  si  précipitamment  qu'on  oublia  parfois  de  faire 
évacuer  l'équipage  auparavant,  et  il  était  si  peu  justifié  qu'à  six  heures  du  niatiu  le 
lendemain  la  plupart  étaient  encore  debout  ayant  résisté  au  feu  des  Anglais  et  aux 
ellorts  des  Espagnols  pour  les  brûler.  Bélizal  écrit  :  «  Dans  la  nuit,  sur  le  rapport  de 
M.  de  Nassau,  le  duc  de  Crillon,  voyant  l'expédition  manquée,  envoya  l'ordre,  après 
avoir  sauvé  tout  le  monde  des  dites  batteries  flottantes,  de  les  brûler  ce  qui  tut 
exécuté.  »  Grillon  était  donc  informé  de  la  situation  des  batteries  et  c'est  en  connais- 
sance de  cause  qu'il  se  décida. 

3.  Les  Anglais  au  début  ne  crurent  pas  leur  victoire  si  complète.  Aussi  conti- 
nuèrent ils  à  tirer  toute  la  nuit.  Mais  vers  six  heures  du  malin,  leurs  artilleurs,  étant 
épuisés,  prirent  quelques  repos.  L'opération  de  sauvetage  à  laquelle  se  livrèrent  les 


l6/|  BULLETIN    HISPANIQUK 

Los  nuestros,  hasta  el  punto  de  haver  de  abandonar  las  baterias, 
dicen  que  hicieron  prodigios  de  valor,  pero  no  era  el  valor  contrario 
quien  les  vencia.  sino  su  suerte  dura  y  la  posicion  o  la  mayor  industria 
del  eneniigo.  De  Moreno,  del  Principe  de  Nassau,  del  sefior  (iravina 
(que  mandaba  la  bateria  San  Gristobal)  y  de  otros,  oî  que  se  havian 
portado  como  unos  Cesares  : 

Quis  cladem  illius  noctis. 


Sabadû   1/4. 

Serian  como  las  dos  de  la  madrugada  de  este  dia,  quando  ol  aniigo 
D.  \  enlura  Caro  me  dixo  desdc  su  cama  :  «  Amigo,  estamos  ya  en  el 
triste  lance  de  arder  por  todas  partes  nna  de  nuestras  baterias  (la 
Taglia-Piedra) ,  y  la  misma  fortuna  van  a  experinienlar  las  demas.  » 
Oîlo  con  dolor  que  dexa  considerarse.  De  alli  â  una  hora  se  «tyô  el 
estampido  de  la  Santa  Barbara,  y  la  claridad  de  la  Uama  iluminô 
loda  la  bahia.  El  misnio  curso  iban  liaciendo  las  demas  notantes, 
disparandose  sus  caûones  quando  llegaba  a  ellos  el  fuego.  Amaneci- 
mos  en  fin,  y  vimos  con  el  mayor  dolor  aquellas  funestas  luminarias, 
sin  alrevernos  a  niirar  unos  a  otros,  y,  por  concluir  brève,  todo  aquel 
dia  se  paso  en  este  triste  espectaculo  liasta  las  quatro  de  la  tarde,  (pie 
vimos  la  llamarada  y  oimos  el  estruendo  de  la  ultima  de  las  baterias 
que  no  havia  arrojado  la  polvora  al  mar.  Una  o  dos  que  no  tenian 
pôlvora  tardaron  mas  en  consumirse. 

Todo  este  dia  se  estuvo  en  el  campo  y  en  las  esquadras  esperando 
por  momenlos  la  esquadra  ynglesa,  sobre  el  engaùo  y  falso  aviso  de 
las  vigias  de  que  liablé  antes.  Con  la  misma  espectacion,  me  detuve 
este  dia  y  el  siguiente  en  el  campo,  sin  animo  ni  valor  para  tomar  la 
pluma  y  continuar  mi  diario,  hasta  hoi  17,  en  que  me  hc  esfor/ado 
â  voncer  esta  dilicultad,  por  estar  para  volverme  a  Algeciras  y  temer 
que  me  cargaba  demasiado  de  especies. 

Aii^^laix  eut  lieu  vcpn  tif)is  heures  du  matin.  A  ce  moment  deux  batteries  éliiienl  en 
llammes  depuis  onze  heures  du  soir,  les  autres  s'enllanimiMout  peu  à  jx-u.  Le  veut 
l'ianl  tombé,  le  brijfadier  Curtis  avec  les  canonnières  an;;laises  partit  ilu  MtMe  Neuf 
j)Our  prendre  de  tlanc  l'eiuiemi.  Au  lever  du  Jour,  quand  le  feu  de  la  place  cessa,  il 
s'avança  et  captura  deux  chaloupes.  Les  prisonniers  lui  apprirent  (|ue  des  hommes 
avaient  dû  être  laissés  à  bord  des  batteries;  il  \oulut  les  sauxer.  mais  (piehiues-uns 
de  ceux-ci  craif^nant  d'être  exécutés  par  les  Anglais —  on  le  leur  avait  l'ail  croire  — 
refusèrenl.  Apre-  fpielque.s  instants  ils  se  résignèrent  à  accepter.  Vers  cin(|  heures  du 
matin  deux  batteries  ayant  sauté,  Curlis  trouva  prudcid  de  revenir  vers  la  place; 
il  visita  en  chemin  deux  autres  batteries  où  il  recueillit  ilu  monde.  Le  total  de» 
prisonniers  s'éleva  à  y  officiers  espagnols,  2  prêtres,  33/i  soldats  et  marins;  i  ollicier 
el  1 1  soldats  français  avaient  été  retirés  de  l'eau  la  veille.  (Drinkwater.) 


LE    GKAND    SIÈGE    DE    GIBKALTAR    UE     1 7S2  i  G5 


Domingo   i5. 

Este  dia  octava  de  la  Natividad  de  Nuestra  Senora  y  fiesta  del  dulce 
nombre  de  Maria,  dixe  misa  en  una  capilleja  andante  del  regimiento 
de  Yoluntarios  de  Catalufia.  Ya  comenzô  a  disiparse  la  voz  de  la  venida 
de  la  armada  ynglesa,  y  las  gentes  se  fueron  desenganando.  Yo  me 
huviera  hido  el  mismo  dia,  pero  se  me  puso  un  cavallo  malo  y  lo  huve 
de  suspender.  Vino  al  medio  dia  y  comiô  con  nosotros  el  niarquesito 
de  la  Romana,  Tuve  gran  gusto  dî  verle,  por  que  corriô  aqui  y  en 
Algeciras  que  lo  havian  muerto,  aunque  quando  vino  ya  sabia- 
mos  que  era  falsa  la  voz.  Ofreciônos  a  su  lio  D.  Ventura  y  â  mî  que 
el  dia  siguiente  volveria  y  traeria  consigo  a  su  hermano,  D.  Joseph, 
que  esta  en  el  navio  la  S  "'"  Trinidad.  No  lo  pudo  cumplir,  segun  me 
dixo  despues  su  tio.  Esperamos  si  vendran  hoi.  A  todo  caso  yo  estoy 
en  ânimo  de  visitarle  â  bordo  en  Algeciras. 

En  la  tarde  de  este  dia  hicieion  las  esquadras  combinadas  salba  al 
conde  de  Artois,  que  estubo  â  bordo  del  dicho  navio  .S"""  Trinidad, 
y  no  se  si  comiô  alli.  Huvo  dos  descargas.  Sin  duda  se  dispararon 
mas  de  mil  caiîonazos  ;  pero  estava  muy  cahido  nueslio  animo  para 
que  nos  causasen  alegria,  como  ni  los  continuos  tiros  de  dia  y  de 
noche  de  nuestras  baterias  de  tierra  contra  la  Plaza,quo  no  sirven  sino 
de  ahuyentar  los  pâjaros  y  consumir  la  polvora  y  municiones.  Ni  los 
enemigos  responden  sino  muy  lentamente. 


LuiNES    16. 

De  este  dia  apenas  se  que  decir.  A  eso  de  las  dos  de  la  tarde,  saliô 
un  barco  parlamentario  de  la  Plaza.  Saliôle  al  encuentro  otro  de 
nuestra  parte.  Dixose  que  el  de  la  Plaza  traia  razon  de  los  Espanoles 
que  havian  sido  recogidos  por  M'  Elliot,  quando  se  abandonaron  las 
notantes.  Por  ella  se  supo  â  punto  fijo  su  numéro  y  calidad.  Ya  se 
dixo  ser  en  todo  335.  En  la  tarde  de  este  dia,  me  encontre  de  manos, 
como  dicen,  â  boca  con  el  gênerai  duque  de  Grillon.  Huve  de  presen- 
tarme  a  Su  Ex"  (por  que  me  conocîa),  excuséme  de  no  haberme  pre- 
sentado  la  vez  pasada  que  estuve  en  el  campo,  con  [que]  Su  Ex'  estuvo 
aquellos  dias  incomodado  en  su  salud,  como  era  la  verdad.  Estava 
Su  Ex'  con  varios  oficiales  générales,  entre  los  quales  solo  conoci  al 
marques  de  ïorre  Manzanar.  Yo  iba  con  el  coronel  D.  Juan  Sala  y  el 
comandador  de  San  Juan,  D.  Francisco  Zamora.  Llenôme  Su  Ex'  de 
honras;  combidôme  una  y  otra  bez  a  comer.  Excuséme  con  mi  inmi- 
nente   marcha.   Dixome  y  en  presencia  de  todos  que  era   un  infeliz 


!♦)(]  BTIJ.ETIN    HISPANIQUE 

obligado  a  llevar  adelante  un  proyecto  que  no  havia  comenzado  >. 
Contesté  a  Su  Ex"  como  major  pude,  y,  despues  de  un  ratito  de  con- 
bersacion  sobre  quien  es  quien  da  las  victorias,  pedî  el  permiso  a 
Su  Ex'  y  me  despedi. 

En  la  noche  de  este  dia  â  eso  de  la  nueve  y  quarto,  oimos  varios  tiros 
de  nuestras  esquadras  (como  un  centenar  de  ellos).  Dixeronme  que  en 
las  mismas  se  havian  disparado  cohetes;  y  ni  entonces,  ni  ahora  (que 
es  la  una  de  este  dia  17)  se  lia  podidodescubrir  â  punto  lîjo  el  molivo. 
Dicen  que  las  vigias  havian  descubierto  y  anunciado  embarcaciones 
enemigas.  Como  se  eslâ  con  el  cuidado  de  si  viene  o  no  la  esquadra 
ynglesa  al  socorro  de  la  Plaza,  se  avisa  al  menor  asomo  de  qualquiera 
barco  sospechoso. 

En  efecto  ayer  17  (escribo  ya  esto  miércoles  18)  pasaron  hacia 
Levante  varias  barcos  con  vêlas  quadras  y  latinas  ;  y  se  discurri('i  que 
podria  ser  el  comboy  que  Uebô  â  Londres  â  los  Yngleses  que  se  hicieron 
piisioneros  en  Mahon,  el  (|ual,  ejecutada  su  comision,  se  volvia  para 
{^atalufia  v  Mallorca. 


Martes  17. 

Tampoco  este  dia  ocurriô  novedad.  V  eso  de  las  diez  del  dia,  saliô  de 
la  IMaza  un  barco  parlamentario.  Occurriôle  otro  nueslro  y  dicen  se 
tratô  de  recoger  algunos  vestidos  y  ropa  de  nuestros  prisionoros  en  el 
abandono  y  quema  de  las  baterias  dotantes:  pues  M'  Elliot  pensaba 
en  end)iarnoslos. 

Este  dia  y  los  antécédentes  se  hizo  algun  fuego  de  nuestras  Kneas 
conlia  el  Pastel  y  los  inertes  y  baterias  que  le  dominan.  Dixose  que 
liabian  los  nuestros  observadoque  los  Yngleses  subian  fraguasa  dichas 
baterias  para  inoendiar  nuestras  Kneas  avanzadas  con  balas  rojas,  y 
(jue  se  pondria  gran  cuidado  de  nuestra  parte  para  impedirlo,  o 
deslruhir  los  fuegos  enemigos.  Vlgo  de  esto  insinuô  el  gênerai  duque 
de  Crillon,  pues  en  la  conversacion  que  yo  tuve  con  Su  Ex'  dixo,  en 
presencia  de  todos  los  circumsiantes,  (pie  Su  E\'  no  cpicria  provocar 
ni  ser  el  primeio  <pie  usase  de  las  balas  rojas  o  incendiarias,  por  no 
dar  este  mal  exemplo,  poro  (pie  lambicn  en  nueslio  e\('M-cito  liabia 
provision  de  este  mortil'ero  g(»nero,  y  (pie  le  ((irresponderia  con  la 
misma  moneda. 

^a  yo  este  dia  me  huviera  hido  A  Algeriras  j)ara  tomar  desde  alK 
mi  iiita  a  San  Lucaiy  a  las  riveras  del  (iuadahpiivir  liasla  Sevilla;  [)ero 
me  lo  impidi»!  el  continuai-  mi  cavallo  malo  y  el  liempo  llovioso,  y  la 
réflexion  de  rpio  si  en  otra  parle  (bubiera  de]  me  detener  un  jiar  de 

1 .  Crillon  axail  «lis  !<•  d«';l)iil  fail  Ijcaticniip  de  rt-sorvos  sur  le  projet  d'Arçon,  et  il 
avait  laissé  en  partant  de  Madrid  un  fili  cadielé  où   il  déclinait  toute  responsabilité. 


I,E    GRANM)    SIÈGE    DE    GIBRALTAR    DE    1 782  1 67 

tlias,  en  ninguna  parle  es  mejor  que  nie  delenga  que  aqui,  por  la 
suma  satisfaccion  y  libertad  que  logro  en  compania  delamigoD.  \'en- 
tura  y  de  los  ofîciales  de  su  regimiento  y  brigada,  que  lodos  â  una 
me  favorecen  lo  que  no  es  decible. 


iMlERCOLES   18. 

Este  dia,  fiesta  en  mi  pais  del  seàor  Santo  Thomas  de  Viila- 
nueva,  nada  occurriô  de  particular  en  el  campe  ni  en  la  Plaza.  Por 
la  noche,  madrugada  y  dia,  huvo  tiros  de  nuestras  li'neas  que,  en 
mijuicio,  sirben  poco  mas  que  de  azotar  el  aire.  La  Plaza  corres- 
pondiô  tambien  sin  dàno  nuestro,  de  suerte  que,  liaviendo  yo 
oido  varies  sugetos  inteligentes  lo  infructuoso  de  estas  descargas, 
pregunté  que  objeto  podian  tener  o  û  que  se  dirigian,  y  se  me  di\o 
que  cada  bateria  ténia  su  dotacion  diaria  de  pôlvora  y  municiones. 
Veinte  tiros  verbi  gracia  o  veinte  y  cinco  por  cada  canon,  y  que  esos 
se  disparavan  y  no  mas.  Gallé,  pero  interiormente  decia  que  esa  dota- 
cion diaria  podria  reservarse  para  quando  el  disparar  fuese  util  :  y 
mas,  habiendose  perdido  tantos  repuestos  de  pôlvora  en  las  baterias 
notantes,  y  haviendo  oido  decir  al  Conde  Lasci  que  no  havia  gran 
copia  de  este  genero. 

Este  dia  vinieron  el  marquesito  de  la  Ilomana  y  su  hermano  D.  Pope, 
alferez  de  fragala,  el  quai  va  en  el  navio  de  la  S"'""  Trinidad  (nuestro 
comandante),  â  comer  con  su  tio  D.  Ventura.  Yo  al  D.  Pepe  no  lo 
havia  visto  hace  mucho  tiempo.  Tuve  muchi'simo  gusto  en  verle  tan 
bello  y  tan  bien  dispueslo  (es  mas  alto  très  dedos  que  el  marques 
aunque  mas  cepceùo)  y  tan  despejado  y  marcial.  Hablô  proguntando 
lie  su  navegacion  tic  ciento  y  diez  y  nueve  dias  por  el  canal  de  \ngla- 
terra,  y  de  algunos  de  los  acontecimientos  que  ocurrieroii,  de  la 
calidad  de  los  navios  ynglesos  y  los  nuestros,  de  lo  poco  velero  de 
estos;  de  su  gran  defecto  en  no  estar  forrados  en  cobre.  Concluic't  con 
decir  que,  sino  fuese  por  alguna  casualidad  que  una  niebla  o  noche 
obscura  juntase  a  nuestras  esquadras  con  las  de  los  Vngleses  c  hiciese 
inévitable  un  combate,  no  pelearian  sino  quando  quisiesen,  y  no 
querrian  sino  con  manifiesta  ventaja  y  superioridad  de  fucrza. 

Tambien  este  dia  huvo  barcos  parlamentaiios.  Discurrese  tratan  de 
acavar  de  embiarnos  nuestros  prisioneros.  Algunos  han  vuello  ya  y 
no  acaban  de  hablar  de  la  humanidad  con  que  los  ha  tratado 
M"  EUiot,  lo  que  a  la  verdad  nos  obliga  mucho.  Pero  al  mismo 
tiempo  me  Uena  de  vergucnza  y  de  confusion  lo  que  este  babil  geneial 
haria  de  rellexiones,  viendo  que  entre  335  prisioneros  (que  sin  el 
socorro  de  los  barcos  yngleses  huvieran  los  mas  o  casi  todos  segura- 
mente  perecido  sumcrgidos  o  abrasados)  no  habia  sino  quatro  oficia- 


ir>8  BlM.EriN    HISPANIQUE 

les:  senaldeque  los  demas  havian  cuidado  de  si  con  liempo,  sallando 
en  los  barcos  y  abandonando  la  tropa  que  quedava  en  las  notantes. 
Oigo  (jue  esta  misma  retlexion  \  cargo  se  liizo  en  la  tertulia  o  sobre- 
mesa  del  duqiie  de  Grillon  a  algunos  ofîciales  (no  se  si  de  las  flotantes) 
y  que  â  todos  pareciô  muy  fundado». 

Veria  tambien  (y  lo  veianios  todos)  que  las  llotanles  hiban  sin  barcos 
que  sirbiesen  de  hospitales  para  los  heridos,  y  se  supo  que  estos  se 
bajaban  a  las  estivas  de  las  mismas,  y  aun  se  dixo  despues  que  no  por 
escaleras,  sino  por  traspasa,  de  que  naciô  despues  la  dificultad  de 
volverlos  â  subir  y  recogerla  (sic)  :  y  fue  causa  do  que  perecieran 
alH  miserablemente  muchos  :  cosa  digna  de  la  mayor  compasion. 

Veria  asi  mismo  que,  luego  que  se  resolviô  por  los  générales  duque 
de  Grillon  y  (Jôrdova  que,  pueslo  (jue  no  podian  soslenerse  las 
notantes,  se  las  dièse  luego,  se  puso  en  egecucion  la  orden  sin 
dar  antes  providencia  para  recoger  la  génie,  que  déviera  ser  lo  pri- 
mero.  Es  de  saver  que  quando  se  dio  la  orden  para  quemar  las 
notantes  se  einbiaron  por  el  gênerai  Gôrdova  las  lanchas  de  todos  los 
navios  para  que  se  embarcase  en  cllos  la  gentc  :  que  de  estas  solo 
Uegaron  â  las  notantes  las  que  biban  con  olicial  o  guardia-niarina  que 
las  mandase,  las  demas  no  Uegaron  y  se  dosviaron  de  proposito  del 
peligro.  Con  que  en  esta  parte  no  se  lalt('t  por  no  se  liaber  dado  provi- 
dencia, sino  por  no  se  haber  egecutado  conio  debia. 

Ilavian  tambien  venido  de  Cadiz  los  barcos  de  las  renias  que  llaman 
del  resguardo,  mandadas  pov  el  teniente-coronel  D,  Antonio  Galvez, 
comandante  de  la  baliia  de  Cadiz  en  el  ramo  de  renias,  para  servir  en 
lo  que  se  olVeciese.  Serian  como  veinfe  faluas  y  se  hallavan  en  el 
Fuente  Mayorga  â  la  vista  de  lodo,  y  no  mas  de  â  média  légua  de  dis- 
tancia  de  las  notantes.  Era  nalural  que  on  aquel  conniclo  mas  que 
nunca  (o  sino  para  que  eran  venidos)  ayudasen  a  recoger  la  gente  (pie 
por  la  escasez  de  barcos  se  motia  en  ellos  |)recipitadamente.  Vo  ignoro 
la  orden  que  lendrian  de  su  gcfo,  y  séria  sin  duda  (lue  se  acorcasen  de 
las  notantes;  y  en  efecto  salicron,  pcro  devicron  de  toniar  olro  rumbo, 
poco  acoslumbrados  A  liros  de  mayor  calibre  (pie  el  de  sus  Irabucos. 
Dicese  que  se  fueron  liacia  la  punta  del  C-arnero.  I.o  cierlo  es  que  no 
se  save  queoficial  ni  soldado  alguno  se  re(;ogiese  y  salvase  en  los  laies 
barcos.  Piidioion  scgiiramenle  liavor  sido  estos  barcos  do  mucbo 
auxilio  en  a((uel  conllicto,  y  salbado  la  vida  a  algunos  infelices,  pero 
antepusieron  a  lodo  el  no  poner  â  riesgo  la  suya. 

(  hiando  yo  volbia  de  Cadiz  para  este  campo,  el  dia  .S  dol  corriente 
por  la  tarde,  encontr(î  cpic  venia  una  gran  comiliba  de  guardias  de  ;'i 

I.  Il  y  avait  eu  réalité  ij  ofliciets,  mais  la  n'Ilexioii  de  Père/  l$ayer  est  exacte: 
(J'ajirès  l)rink\valor,  l'amiral  Momio  (|tiilta  la  l^usloru  un  peu  avaut  minuit;  dWrçou 
nous  dit  qu'il  alla  a  terre  à  minuit  cl  demi,  mais  les  An<;l:iis  avaient  \  ii  (Ji-k  oflicier» 
quitter  lis  batteries  |jcau(Oup  plus  tôt. 


LE    GRAND    SIÈGE    DE    GltiRALTAh    DE     I  782  169 

cavallo  hacia  Algeciras.  Serian  liasla  cienlo,  casi  todos  montados,  y 
muchos  en  cavallos  buenos,  traian  regularmcnlea  la  dcrecha  una  esco- 
peta,  que  la  faltaria  un  coto  para  llegar  al  suelo  ;  â  la  izquierda 
otra  mas  corta,  o  trabucode  bocaancha,  pislolas,  espada,etc....  llabian 
sesteado  en  Médina  Sidonia,  y  asi  por  la  tarde  venimos  casi  pareados 
hasia  unos  chozos  que  llanian  Casas  Viejas,  donde  pernotaron,  y  asi 
tuve  basiante  lugar  de  observarlos.  Vo  no  acabé  de  hacer  juicio  dei 
niérito  de  aquella  nueva  tropa,  ni  si  podria  en  alguna  ocasion  ser  de 
algun  probecho  o  utilidad  a  nuestro  exército  ;  pero  en  gênerai  me 
parecia  aquel  espectaculo  cavalleresco  y  conio  cosa  de  pavorada. 
Ygnoro  aun  si  persisten  en  Puente  Mayorga,  y  aunque  con  solo 
asomarme  pudiera  salir  de  la  duda  (porque  esloi  a  la  \isla)  no  he 
querido  sino  permanecer  en  ella,  porque  no  me  importa. 

Esté  donde  quisiere.  En  su  propio  deslino  seran  tropa  util;  la  guerra 
necesita  escuela,  y  es  arle  que  requière  tiempo  para  aprenderse.  No  se 
si  es  genio  maldiciente  mio,  o  lâstima  de  las  pasadas  desgracias 
lo  que  me  hace  prorrumpir  en  estas  espresiones.  A  todos  quisiera 
elogiar,  pero,  aun  â  los  que  nada  entendemos  de  guerra  ni  de  silios, 
nos  salian  de  ojo  y  nos  parccian  precipitadas  o  prematuras  algunas 
disposiciones  que  veiamos  practicar.  Basla  de  esto. 


JlEXES     K(. 

Esta  manana  quando  eslaba  para  proscguir  mi  ruta,  nie  han  dicho 
permaneceria  aun  mi  cavallo  malo,  y  que  séria  arriesgarlo  mucho  si 
me  ponia  con  el  en  marcha;  por  lo  que  a  sido  preciso  suspender  mi 
viage.  Espero  se  halle  manana  mejor,  Ya  no  me  hacen  fuerza  tiempos 
Trios  ni  llovias  :  llegare  a  Madrid  (juando  llegare  y  (luisiere  Dios.  El 
viaje  se  ha  de  concluir  como  haya  salud  segun  se  proyeclô.  Nada  me 
gusla  a  médias. 

A  las  once  de  la  mafiana  de  este  dia  saliô  de  la  Plaza  un  barco 
parlamenlario.  Dicen  tratô  con  el,  que  le  saliô  de  nueslra  parte  al 
cncuenlro,  de  la  restitucion  de  nueslros  prisioneros  de  las  ilotantes. 
Trajo  la  noticia  de  ha  ver  muerlo  en  la  Plaza  uno  de  nuestros  oficiales 
recogidos  y  heridos,  llamado  D.  N.  Amuleri,  theniente  de  navio 
natural  de  Carlagena,  sugeto  acreditado  y  de  valor;  y  haversele 
cnterrado  en  la  yglesia  de  los  caltolicos,  haviendo  antes  recibido  los 
santos  sacramentos  y  lenido  la  dévida  asistencia  espirilualy  corporal. 

Este  dia  hablé  largo  con  D.  Antonio  de  Guenca,  altérez  del  regi- 
miento  de  dragones  de  Numancia,  el  quai  el  dia  u  de  este  mismo  mes 
saliô  de  Porsmeuth  (sicj  \  en  la  dias  justos  llegô  a  este  acampamento. 
llabia  ido  hallâ  â  conducir  los  prisioneros  yngleses  hechos  en 
Mahon.  Gontôme  que  el  dia  que  el  saliô  de  Pon^nieutli  fsic).  eslaba 


1-0  BULLETIN    HISPANIQUE 

en  aquel  puerto  el  comboy  destinado  para  cl  socorro  de  Gibraltar, 
y  que  estaban  con  el,  esperando  tiempo  favorable,  treinta  y  siete  navios 
de  linea,  las  doce  de  très  puenles,  prontos  â  hacerse  â  la  vêla;  que  se 
decia  que  benian  resueltos  â  roniper  por  todo  y  pegar  con  las 
esquadras  combinadas,  y  con  quanto  pudiesse  embarazar  el  socorro 
de  la  Plaza;  que  el  pueblo  braveava  y  no  se  contenta  va  con  esto,  sino 
que  havia  de  queniar  y  deslruir  quanlo  se  le  pusiese  por  delanle. 
Anadia  este  oHcial  que  viô  el  numéro  y  calidad  de  sus  buques  y  que 
le  parecia  que  qualquiera  de  nuestros  navios  de  oclienta  cafïones  (sin 
conlar  los  sietc  que  hay  de  1res  puentes)  podria  balirse  con  uno  de  los 
doce  que  los  Yngleses  tienen  de  este  porte.  Esta  relacion  me  hizo  el 
citado  oficial.  cl  (}ual  me  pareciô  sugelo  de  juicio  (aunquc  joven), 
y  que  diria  verdad,  scgun  lo  que  pudo  baver  vislo  y  obscrvado. 

El  Senor,  hasta  ahora,  nos  lia  alligido  y  tocado  conio  a  Job  con  su 
dedo.  Que  sabemos  si  se  habrâ  ya  contentado,  y  si  nos  de  para  su 
misericordia  algun  lance  que  nos  consuele?  El  Hey  es  justo,  y  â  los 
justos  alterna  Dios  las  penas  y  las  salisi'acciones.  Quiera  el  Senor 
succda  asi,  y  que  los  que  justamenlc  somos  afligidos  por  nuesiros 
pecados,  respiremos  algun  tanlo  por  la  consolacion  de  la  divina  mise- 
ricordia. 

Yo  prolcsto  que  nada  enticndo  de  gucrra  ni  de  intcrcses  politicos, 
aun  de  los  nacionales  y  caseros.  Es  muy  divcrsa  mi  profesion.  La 
memoria  de  la  pasada  desgracia  en  las  llotantcs,  la  vista  de  la  Plaza  y 
la  dilicuUad  de  su  conquista.  la  situacion  dcl  Keino  y  la  del  cxércilo 
(que  de  cada  dia  se  disminuyej  y  otras  muclias  consideiacioncs,  me 
hacen  concluir  dentro  de  mi,  sin  mas  auxilios  ni  conocimienlos  que 
mi  corta  lûgica,  que  no  nos  queda  â  los  Espaiiolcs  otro  recurso  ni 
espcranza  de  tejas  abajo,  sino  la  de  aventurar  una  accion  con  los 
Yngleses.  A  mas  se  exponen  aun  ellos  que  nosolros  si  llcgamos  â  un 
combatc,  porque  eslan  lejos  de  sus  puerlos.  Nadic  mas  que  ellos  a 
rchusadu  cl  batirse  mientras  ban  podido,  y  esto  les  ha  sido  muy  facil, 
cslando  cercanos  y  â  la  vista  de  su  casa,  y  ahora  dentro  de  la  luieslra 
vienen  ;'i  provocar  â  los  mismos  que  mas  de  una  vez  les  han  tcnido 
bloqucados  en  Torbay  y  en  sus  mares.  Prueba  de  que  es  grande 
su  apuro.  Pues  yo,  atendidas  las  circunstancias  que  cxpresc  anles,  no 
conlemplo  que  sea  mcnor  el  nueslro,  \a  pues  (jue  lanto  se  arriesgan 
los  Yngleses  para  salir  de  el,  por  que  no  nos  hcmos  de  arriesgar 
nosotros  ?  Jacla  esto  aléa. 

Este  era  mi  interior  modo  de  discurrir  (|uc  nn  ha  mni;ho  me  resolvi 
â  comunicar  â  un  oficial  prâctico  y  esperimentado.  Hespondiômc  que 
los  Yngleses  jamas  pelcarian,  que  tcnian  cl  admitir  y  el  rchusar  cl 
combatc  por  lo  mas  velero  de  sus  buques;  y  que  jamas  lo  admitirian 
sino  leniendo  superioridad. 

En  obscquiii  de  la  vcidad  dire  lambicn   baver  nido  a  algunos  de  los 


LE    GRAND    SIEGE    DE    GIBRALIAR    DE    1 782  1^1 

marinos  mismos,  sugetos  de  conocimienlo  y  practica,  confesar  que  los 
Yngleses  tienen  otra  pericia  que  nosotros  en  todo  lo  que  es  marina,  la 
quai  pericia,  sobre  la  mayor  agilidad  de  sus  naves,  les  daba  duplicada 
venlaja.  l'areciame  al  oir  esto  que  leia  olra  vez  en  Thucidides,  o  en  la 
continuacion  de  su  liistoria  por  \enofonte,  el  suceso  de  Clearcho, 
embiado  por  los  Lacedemonios  a  Chalcedonia  y  Bizancio  con  quince 
galeras,  para  impedir  que  viniesen  de  aquclla  parle  socorros  de  Irigo 
a  Alhcnas;  las  quales  galeras,  dicc  el  autor  citado,  que  eran  mas  a 
propôsito  para  conducir  Iropa  (jue  para  pelear.  En  efecto  nueve  solo 
galeras  athcnicnses  que  guardaban  el  Eslrecho  de  Scsto,  echaron  Ires 
de  las  quince  â  fondo  y  obligaron  â  relirarse  â  las  «lemas. 

No  pienso  yo,  con  esta  desaventaja  de  nueslros  navios  y  de  nuestra 
pericia  naval  rcspecto  de  los  navios  y  pericia  de  lf»s  Yngleses,  aunque 
sea  preciso  confesarlo,  la  superioridad  que  les  dan  en  anibos  ramos 
los  que  hablan  con  plcno  conocimiento  de  causa,  ni  veo  lampoco 
exemplar  de  que  nueve  navios  yngleses  hayan  vencido,  ni  aun  atre- 
vidosc  â  pelear  con  quince  espanoles.  Tengan  en  hora  buena  los 
Yngleses  las  ventajas  (pie  dicen,  pero  no  sienipre  lian  de  poder  apro- 
vecharse  de  ellas.  Especialmenle  si  enlrasen  en  la  baliia  de  (Jibrallar 
donde  no  en  lodas  parles  hay  londo  baslanle  para  sus  buques,  y  donde 
no  seran  lan  faciles  las  evoluciones  como  en  plena  niar,  l'uera  de  que 
ei  inlroducir  el  coniboy  en  la  l'iaza,  que  es  su  primer  objelo,  les  ba 
de  ser  sumamenle  embarazoso,  y  que  les  excedemos  en  once  o  doce 
navios  todos  bien  Iripulados;  y  que  nueslras  lanchas  bombarderas 
y  caiioneras  (dicen  que  son  las  primeras  29  y  las  segundas  07)  les 
pueden  incomodar  mucho,  y  ùilimamcnle  algo  se  ha  de  arriesgar  con 
la  esperanza  de  resarcir  alguna  de  las  pasadas  pérdidas. 


Ici,  se  termine  le  récit  de  la  grande  attaque  du  i3  sep- 
tembre 1782.  J'ai  été  amené  à  citer  les  notes  des  jours  suivants 
parce  qu'elles  contiennent  des  détails  intéressants  connus 
après  coup,  ou  qu'elles  reflètent  l'état  desprit  des  olïiciers  et 
des  spectateurs  du  côté  des  assiégeants.  Avec  une  partialité 
toute  patriotique,  Ferez  Bayer,  pour  juger  les  forces  de  son 
pays  sur  mer,  se  laisse  encore  aller  à  l'optimisme  sur  les  seules 
impressions  d'un  jeune  officier  de  dragons  et  malgré  l'avis  de 
deux  ofRciers  de  marine.  Aussi  se  montre-t-il  partisan  d'actes 
énergiques,  qui  semblent  assez  loin  des  intentions  de  l'étal 
major  franco  espagnol  :  déjà   en  elïet   le  bruit  court  que  treize 


l~2  tîlLLETlX    HtSPAMQL'E 

navires  français  vont  quitter  Gibraltar  pour  aller  à  la  Jamaïque; 
on  attend  de  la  Cour  des  ordres,  demandés  à  la  suite  de  l'échec 
du  i3  septembre.  Tout  cela  n'indique  pas  un  parti  pris  très 
ferme  d'ofïensive,  et  en  réalité  une  telle  solution  eût  été  hasar- 
deuse. Pendant  ces  quelques  jours  dincertitude,  la  pensée  de 
Perez  Bayer  ne  pouvait  se  détacher  du  désastre  :  il  écrit  le 
19  qu'il  faut  l'attribuer  à  la  précipitation  avec  laquelle  on  a 
engagé  l'attaque  en  négligeant  les  précautions  nécessaires'. 
11  y  revient  plus  tard  avec  ses  amis;  c'est  ainsi  que  rencon- 
trant le  lundi  :?,),  à  Algéciras,  Barcelo,  l'inventeur  des  cha- 
loupes canonnières,  il  le  trouva  furieux  : 

llablava  con  el  ardor  que  pudiera  un  joven,  y  se  explayô  mucho 
conniigo...  Ilavia  pedido  las  lanchas  bombarderas  y  caùoneras  para 
hacer  una  diversion  por  Punta  de  Europa,  mientras  durara  la  accion 
y  empeno  de  las  notantes,  y  qiie  se  le  negô:  que  sin  embargo  fue  balla, 
por  ({ue  no  le  sufriô  olra  cosa  su  ânimo  :  que  viô  aquella  catastrofe, 
que  recogiô  â  los  que  pudo  y  les  condujo  â  Algéciras,  penelrado  de 
amargura  â  visla  de  lantas  desgracias  y  pérdidas.  Dixomc  aun  mas,  y, 
aunque  no  me  encargô  secreto  ni  reserba,  hay  cosas  que  la  Uevan 
consigo,  ni  yo  crehi  que  en  aquel  sugeto  fuesen  sino  mero  desaogo  de 
su  dolor. 

Après  le  grand  ellorl  du  10,  une  certaine  accalmie  avait 
succédé  aux  tempêtes  du  bombardement.  La  canonnade  avait 
d'ailleurs  provoqué  les  pluies  auxquelles  Perez  Bayer  fait 
allusion.  Le  20,  il  y  eut  une  alerte  vers  une  heure  du  matin  : 
on  entendit  des  coups  de  canon  vers  la  Punta  del  Carnero. 
Perez  Bayer  se  mit  à  la  fenêtre  croyant  voir  déboucher  la 
tlotte  anglaise  : 

ll.icia  poco  viento  ponicnlc  inclinado  â  norle,  y  veiamos  algunas 
que  nos  parecian  l)onibas  que  iban  liacia  Africa,  pero  en  la  realldad 
hcran  espoletas  separadas  de  las  bombas  que  llebaba  el  vienlo  hacia 
aquella  parle;  vimos  despues  rebentar  uiia  u  otra  bomba  en  cl  monte 
do  (iibrallar  y  en  la  Pla/a,  y  sacamos  que  cran  rmeslras  bombarderas 
(pie  liacian  aquella  diversion.  Sobrevino  poco  dospues  cl  marques  de 
Alos,  cl  (pial  venia  de  la  casa  del  gcricral  du(pic  de  Ctillon,  y  nos 
contiruK»  lo  rnisnio.  y  dixo  se  las  havia  dadd  ordcn  para  (|ue  salicsci). 

I.  C<->t  aussi  l'iivi^  de  irAnoii.  \\  csl  iiiU'-rcssHiil  de  le  Miir  tonliiinr  \>i\v  l'en/ 
ItaMT  i|iii  répf'lf  ici  ili-s  coiiMT^iilioiis  il'olTiciers. 


LE    GRAND    SIÈGE    DE    GIBRALTAR    DE     1 783  IJ^ 

Reparamos  que  muchas  de  las  bombas  perdian  en  el  camino  sus 
espolelas,  y  por  consiguiente  llegarian  a  la  Plaza  sin  disparar  y  que 
otro  dia  nos  las  volverian  los  Yngleses  mejor  dispuestas.  Duraria  el 
fuego  de  las  bombarderas  hasta  las  dos  y  média.  La  Plaza  no  corres- 
pondiô  ni  alcanzarian  alla  sus  tiros. 

Ce  jour-là  et  le  21  les  négociations  continuèrent  pour  la 
restitution  des  prisonniers  espagnols.  On  s'occupait  en  même 
temps  de  dresser  le  bilan  du  désastre.  Mais  les  chiffres  des 
tués  et  des  blessés  variaient  tellement  que  Ferez  Bayer  se 
refuse  à  en  donner  aucun'. 

Enfin,  le  mercredi  23,  à  trois  heures  de  l'après-midi,  il 
s'éloigna  d'Algéciras  et  de  sa  baie  désormais  tragique. 

Albert  GIRARD, 
Membre  de  l'École  des  Hautes  Études  hispaniques. 


I.  Drinkwater  écrit  que,  d'après  ce  que  les  Anglais  ont  vu  de  morts  sur  les 
batteries  et  d'après  les  dires  des  prisonniers,  on  peut  évaluer  les  pertes,  y  compris  les 
prisonniers,  à  environ  2,000  liommes;  les  Anglais  auraient  eu  16  tués  et  G8  blessés. 
D'après  d'Arçon,  les  batteries  perdirent  3oo  hommes  et  les  Anglais  80.  D'après  Bélizal, 
il  y  eut  8  ofliciers  tués  sur  la  Pastora,  lo  sur  la  TagliaPiedra,  et  pour  l'ensemble 
des  dix  batteries  900  hommes  tués,  blessés  ou  noyés.  Ces  deux  derniers  chiffres 
semblent  assez  près  de  la  vérité  et  ne  sont  pas  contradictoires,  car  d'Arçon  ne 
comprend  pas  les  blessés  dans  le  chiffre  des  pertes  et  il  n'est  pas  extraordinaire  de 
supposer  600  blessés  pour  3oo  tués.  La  Gaceta  de  Madrid  du  24  septembre  donna 
comme  perles  898  morts,  638  blessés,  18  contusions,  53  noyés,  335  prisonniers.  Ces 
perles  relativement  élevées  à  bord  des  batteries  étaient  toutes  ducs  au  canon,  aucune 
aux  bombes.  Les  Anglais,  nous  dit  en  effet  d'Arçon,  visaient  les  embrasures  et 
tiraient  avec  une  grande  précision.  Il  y  avait  sur  les  batteries  5,20o  hommes.  La 
garnison  de  la  place  d'après  Ancell  (op.  cit.,  p.  aSi)  s'élevait  à  5, 703  hommes. 


Bull,  hlspan. 


QLELQUES  PARTICULARITÉS  DE  LA  LANGUE  PARLÉE 

D'APRÈS  LE  THEATRE  DE  M.  JACINTO  BENAVENTE 


S'il  existe,  comme  l'assurent  certains  philologues,  une 
différence  capitale  entre  la  stylistique,  étude  générale  des 
phénomènes  d'expression,  et  le  style,  système  de  procédés 
individuels  coordonnés  en  vue  d'une  fin  esthétique,  on  ne 
saurait,  en  principe,  considérer  comme  document  authen- 
tique sur  la  langue  parlée  un  texte,  même  familier,  quand 
il  est  d'origine  littéraire.  C'est  du  moins  ce  que  prétend 
M.  Gh.  Bally  qui  annonce  l'intention  de  réagir  contre 
«  l'habitude  vingt  fois  séculaire  d'étudier  le  langage  à  travers 
la  littérature  »  :  «  On  a  dit  que  le  style  c'est  l'homme,  ajoute 
le  professeur  de  Genève,  et  cette  vérité  que  nous  ne  contestons 
pas,  pourrait  faire  croire  qu'en  étudiant  le  style  de  Balzac,  par 
exemple,  on  étudie  la  stylistique  individuelle  de  Balzac.  Ce  serait 
une  grossière  erreur.  Il  y  a  un  fossé  infranchissable  entre 
l'emploi  du  langage  par  un  individu  dans  les  circonstances 
générales  et  communes  imposées  à  tout  un  groupe  linguis- 
tique et  l'emploi  qu'en  fait  un  poète,  un  romancier,  un 
orateur'.  » 

Pourtant  M.  Ch.  Balh  admet  l'existence  de  cas  intermé- 
diaires. Or,  si  la  règle  formulée  plus  haut  soulïre  quelques 
exceptions,  c'est  assurément  en  ce  qui  regarde  les  romans 
dialogues  ou  les  œuvres  dramatiques.  Au  théâtre,  cl  surtout 
dans  la  comédie,  les  personnages  ne  vivent  que  dans  la 
mesure  où  ils  reflètent  les  sentiments  d'une  collectivité.  Le 
langage  qu'on  leur  prête  n'est  pas  toujours  celui  de  la  grande 
majorité  de  leurs  contemporains,  mais  il  doit  se  rapprocher 
assez  de   l'usage  courant  pour    permettre    au    spectateur   de 

I.  Ch.  Ually,  Traité  de  stylistique  franraisc,  l*;iri>,  Kliiicksicck,  l.  I,  p.  if). 


(QUELQUES    PAKTICULARITÉS    DE    LA    LANGUE    PARLÉE  l'O 

localiser  la  scène  immédiatement.  On  aura  donc  quelques 
chances,  dans  un  dialogue  qui  prétend  reproduire  l'actualité 
ou  peindre  un  milieu  social,  de  saisir  les  tendances  essen- 
tielles d'une  langue  en  voie  de  transformation. 

Mais  il  importe,  en  premier  lieu,  d'écarter  de  cette  enquête 
les  phénomènes  qui  trahissent  une  intention  esthétique  et  qui 
relèvent,  par  conséquent,  du  style  proprement  dit.  M.  Bena- 
vente  fait  à  1'  «  optique  théâtrale  »,  pour  reprendre  une 
formule  de  Victor  Hugo,  des  concessions  de  deux  sortes. 
Tantôt  il  vise  à  l'esprit,  tantôt  il  cherche  à  obtenir  un  efl'et  de 
pathétique.  Dans  le  premier  cas,  il  multiplie  les  alliances  de 
mots,  les  oppositions,  les  relraécanos,  les  calembours  (Ex.  :  El 
papel  hombre  ha  subido  mucho,  1,  8;  Tu  vida  es  asi,  toda 
verdad,  pero  una  verdad  cada  ora,  que  es  una  mentira  de  toda 
la  vida,  111,  170;  La  primogenitura  del  arte  vendida...  por 
menos  que  unas  lenlejas,  por  cl  brillo  de  unas  lentejuelas,  111, 
i38')-  Dans  le  second,  il  s'inspire  des  traditions  du  style 
oratoire.  On  sait  que  les  Romains,  habitués  à  relier  toutes 
leurs  phrases  au  moyen  de  conjonctions  ou  de  relatifs,  usaient 
parfois  de  l'asyndètc  ou  disjonction.  Cette  habitude  s'est 
conservée  en  espagnol.  On  peut  regarder  comme  tout  à  fait 
régulière  la  suppression  de  por  lo  menos  quand  il  s'agit  de 
rendre  l'idée  marquée  en  français  par  du  moins  ^.  11  est  plus 
rare  qu'on  omette  pero  ou  sino  que.  Cependant  M.  Benavente 
n'hésite  pas  à  le  faire  dès  que  le  ton  s'élève.  Ex.  :  «  llay 
palabras  irréparables,  no  las  que  se  dicen  sin  pensar,  por 
duras  que  sean,  —  las  que  revelan  que  se  han  pensado  antes 
muchas  veces  y  muy  despacio  »,  III,  180.  Cf.  V,  229  ;  VI,  49. 

Il  est  nécessaire,  d'autre  part,  de  tenir  compte  des  modi- 
fications linguistiques  imposées  par  la  peinture  d'un  milieu 
trop  spécial.  C'est  ainsi  que  dans  les  pièces  à  décor  champêtre, 
notamment  dans  Senora  ama,  où  il  met  en  scène  des  paysans 


1 .  Je  cite  l'édition  complète  (Madrid,  siiccsores  de  Hernando)  pour  tous  le» 
ouvrages  mentionnés,  sauf  pour  le  Tealro  Ràpido  qui  fait  partie  de  la  collection 
Diamanle. 

2.  «  Todavi'a  influye  eu  nosotros,  si  no  por  sus  libres,  apenas  leidos  y  a,  —  por  el 
jugo  y  la  médula  que  estos  libros  contenian  »  Menéndez  y  Pelayo;  cité  par  M°*  Pardo 
Bazân,  Lit.  francesa,  El  romanticismo,  p.  75. 


1-^6  BLLLETlN    HISPAMQL  E 

de  la  Nouvelle  Castille,  M.  Benavente  emploie  systéma- 
tiquement les  archaïsmes  de  syntaxe.  Par  exemple,  après  le 
gérondif  précédé  de  en,  il  répète  d'une  façon  pléonastique  le 
verbe  employé  à  un  mode  personnel  (En  Juntdndose  que  .se 
junlan  dos  mujcres,  ya  esta  el  infîerno.  XVII,  21').  II  fait 
suivre  de  la  préposition  de  un  certain  nombre  de  verbes  ou  de 
locutions  qui  ne  l'admettent  plus  aujourd'hui  devant  un 
infinitif  (No,  Feliciano,  que  yo  no  puedo  permitir  de  perder 
mi  honra,  XVII,  i^'i;  que  si  viejo  da  yloria  de  verlo,  que  no 
séria  cuando  era  mas  nuevo,  XVII,  i4^).  Enfin  il  renverse  à 
plaisir  l'ordre  des  pronoms,  soumis  aujourd'hui  à  des  règles 
fixes  (que  no  hay  como  que  le  deseen  a  uno  la  muerte,  pa  ano 
no  morirse  nunca,  XVIII,  211'^). 

On  doit  noter  enfin  que  beaucoup  d'individus,  principalement 
dans  les  milieux  populaires,  se  distinguent  de  leur  groupe  lin- 
guistique par  l'emploi  de  certaines  locutions  qu'ils  affectionnent 
et  qui  reviennent,  dès  qu'ils  prennent  la  parole,  comme  une 
sorte  de  leit-rnotiv.  Les  romanciers  ont  très  souvent  tiré  parti 
de  ces  midelillas,  utiles  surtout  pour  camper  des  grotesques^. 
On  remarquera  toutefois  que  les  tics  ne  correspondent  pas 
toujours  à  des  innovations  verbales.  D'ordinaire  l'originalité 
d'un  personnage  se  manifeste  moins  par  un  néologisme  de 
syntaxe  ou  de  vocabulaire  que  par  la  répétition  abusive  d'une 
formule  courante  (A'o  créa  usled,  IV,  19;  lîiase  usied,  XVIII,  91; 
Sabe  usted,  VI,  2i3).  Certains  verbes  d'emploi  trivial,  comme 


1.  Comparer  dans  Cervantes:  «  Dijo  lambi('-n  c('>ni()  >u  seTHir,  en  trayendo  que  le 
Irujese  buen  despacho  de  la  sefiora  Dulcinea  del  Toboso,  se  babi'a  de  poner  en  ramino 
â  procurar  ci')mo  ser  emperador  6  por  lo  menos  inonarca  »,  D.  Quijote,  Ed.  Dubois, 
r,arnier,  p.  2o(J. 

2.  Dans  son  Dicclonario  de  Galicisinos,  Harall  a  nionlr(''  <pie  cet  emploi  était  géné- 
ralisé au  w  II*  siècle. 

3.  De  même  dans  la  Crûnica  gênerai:  «  Senor,  grant  lucrto  séria  en  vos  yo  non 
servir)},  cité  par  M.  Menéndez  y  Pelavo.  Ant.  de  Poêlas  liricos,  I.  M,  p.  ?>ii\.  Dans  le 
I)ortuj^ais  qui  se  parle  aujourd'hui,  on  retrouverait,  à  côté  des  constructions  cal(|uées 
M\T  le  castillan  moderne,  une  foule  de  tournures  manifestement  archaïques  et  «pii 
font  double  em|)loi  avec  les  précédentes.  Ex.  :  poder-se-hia  dizer;  elle,  cm  verdade, 
era  o  culpado  de  me  terem  eleito;  aproveito  a  occasiào  para  llie  recomendar  niuito 
(yic,..;  depois  d'elln  <!star  na  sala,  etc. 

4.  M.  Pérez  Galdos  en  fait  un  emploi  constant.  Dans  Fortunata  y  Jacinla,  Casa 
Miitioz  répète  involucrar;  Torqucmada,  materialisino ;  le  prêtre,  esta  es  la  cosa;  une 
commerçante  qui  a  vécu  en  France,  por  «yempio ,"  Doua  Lupe,  en  loda  la  extension  de 
la  palabra. 


QUEJ.QUES  PARTICULARITES  DE  LA  LANGUE  PARLEE        1 77 

descolyarse,  pegar,  [jinlar,  nous  avertissent,  à  la  manière  d'une 
clé  musicale,  que  les  idées  sont  transposées  dans  le  mode 
vulgaire.  On  en  peut  dire  autant  de  l'accumulation  de  usled 
ou  de  uno  (dans  le  sens  de  on)  Ex.  :  «  Dejar  aquel  Madrid  con 
aquella  casa,  que  abre  usted  los  balcones  anochecido  y  tiene 
usled  que  cerrarlos;  y  ustedes  los  seiiores,  que  tienen  nsledes 
aquel  Recoletos  6  se  pasean  ustedes  en  tranvia  arriba  y  abajo, 
que  se  constipa  una  de  fresco  !  ;  Es  una  que  tiene  que  estar  al 
lado  del  fogon,  y  no  lo  cambio  por  este  poblacho!  jy  la  de 
bichos  que  le  pican  a  una  »  VI,  i86. 

Ces  réserves  faites,  dès  qu'on  élimine  les  artifices  de  style, 
les  tours  de  langage  destinés  à  peindre  un  milieu  restreint, 
les  tics  individuels,  il  reste  possible  de  circonscrire  les  phéno- 
mènes qui  relèvent  du  langage  inconscient  et  qui  trouvent 
leur  expression,  sous  des  formes  distinctes  suivant  le  degré  de 
culture  des  interlocuteurs  mais  non  contradictoires,  dans  la 
conversation  intermédiaire  entre  l'argot  semé  de  barbarismes 
et  la  prose  oratoire. 


Renouvellement  de  l'expression. 

Il  ne  serait  pas  juste  d'affirmer  que  la  langue  parlée  recher- 
che, d'une  manière  uniforme,  l'expression  intense.  Nous  avons 
montré  dans  un  article  précédent  qu'elle  atténue  parfois.  Au 
terme  propre  elle  substitue  volontiers  un  équivalent  de  sens 
plus  compréhensif.  Ex.  :  «  Son  cosas  incompatibles.  Pero  me 
quedo  con  el  tranvia  (prefiero),  VI,  182;  Gracias  a  que  cada 
ano  van  siendo  menos  »  (disminuyen),  XVIII,  37.  Ces  tournures 
analytiques  offrent  l'avantage  de  renfermer  des  mots  très 
familiers  et  par  suite  dépourvus  de  toute  affectation.  Il  n'en 
est  pas  moins  certain  que  les  phénomènes  d'intensification 
sont  fréquents  dans  la  conversation  banale.  Quelques  termes 
acquièrent,  par  leur  sonorité  même,  une  valeur  augmentative. 
Tels  sont  les  substantifs  terminés  en  ad  (preciosidad,  barba- 
ridad).  On  les  utilise  aussi  au  pluriel  (un  conjunto  de  poqne- 


1-8  BI  LLETIN    HISPANIQUE 

dades,  I,  89).  D'autres  passent  du  sens  restreint  au  sens  large' 
(ïodas  las  mananas  hace  que  me  traigan  una  porciôn  de  ellas, 
I,  37;  Y  mira  que  yo  te  he  visto  reces  enamorada,  II,  206).  Un 
mot  peut  se  trouver  renforcé  par  la  suppression  de  radjectif 
qui  l'accompagne  habituellement  (Yo  no  me  voy  sin  despe- 
dirme  de  la  senorita;  esas  no  son  formas  de  persona,  II,  271. 
Il  faut  sous-cntendre  décente).  Le  plus  souvent,  c'est  par  un 
procédé  de  transposition  que  l'importance  d'un  terme  se 
trouve  accrue:  passage  du  concret  à  l'abstrait  (pujan  por 
capricho  y  sube  todo  un  disparate,  II,  208.  De  même  on  dit: 
come  un  sentido);  emploi  d'un  singulier  dans  le  sens  d'un 
pluriel  (La  localidad  alta  amenaza  hundirse,  V,  [\i\  j  Ay  que 
bonito!  ;  Cuanto  torerol,  Y,  i6/i)  emploi  d'un  pluriel  dans  le 
sens  d'un  singulier  (Yo  hice  los  imposibles  para  reunir  una 
noche  a  la  semana  en  mi  casa  a  lo  mejor  de  Moraleda,  II,  107). 
Un  mot  incolore  peut  être  mis  en  relief  par  le  contexte,  au 
moyen  des  adjectifs  puro,  limpio,  maldito,  real,  sanlo,  murho 
(Es  mwr/io  jabonero  aquel  segundo,  V,  5/i  ;  ;  Si  no  bas  pensado 
nunca  mas  que  en  tu  real  persona!,  IV,  io3);  du  pronom  cada 
(Y  toma  cada  cocktail,  I,  i56.  Cf.  Y,  198,  209');  de  la  conjonc- 
tion (]ue  (Un  loco  hace  ciento  y  don  Espiritu,  como  yo  le 
llamo,  esta...  pero  que  de  remate,  II,  206).  Une  ressource 
dernière,  c'est  le  néologisme,  ramené  aux  procédés  usuels  de 
juxtaposition  {aguafiestas,  1,  44;  yernocracia,  II,  179)  ou  de 
dérivation  (mariposear,  I,  9;  plumeor,  I,  18^1;  matrimoniar,  Y, 
59  ;  novelatde,  lY,  99  ;  mieditis,  V,  i42).  Mais  il  est  incontestable 
que    le   gallicisme 2    intervient,   dans   le    renouvellement    de 


I.  Nous  retrouvons  quelques-uns  de  ces  procédés  en  français.  Ex.:  Suppression 
(l'un  mot  utile:  t  une  nouvelle  paire  de  lactées  aux  pâlies  »,  l,a\  edan.  Nouveau  jeu,  p.  ;^o  ; 
Pluriel  pour  un  singulier:  «  on  s'inquiète  de  la  f^randeur  de  ces  espaces,  de  ces  immobi- 
lités noires  cl  lisses  de  la  mer»,  ChovnWon,  Sanctuaires  et  paysages  d''Asie,p.  lo;  Adjec- 
lijs  emplialiques :  «  Dans  quel  sacré  de  sacré  de  pélrin  »,  Nouveau  Jeu,  p.  8/|  ;  Dérivation: 
<<  L'épagneul  grondaille  »,  ib.,  p.  io.3  «  Je  m'aphone  à  le  le  dire  »,  ib.,  iS;  Emploi  de  que 
erclamatif:  «  Tu  peux  y  complcr.  El  (/u'elles  ne  Iraîneraienl  pas  mes  respeclueuscs  ! 
(ju'cWus  l'arriveraionl  toutes  les  Irois,  bien  mignonnes,  à  la  (lie  indienne  »,  ib.,  i8. 

1.  Cr.  Pio  Baroja,  La  Busca:  «  A  mf  me  dan  cada  siislo  »  p.  id'i. 

2.  M.  Benavcnlc,  renouvelant  les  plaisanteries  de  Uretim,  s'esl  moqué  à  dilTérentes 
reprises,  notamment  dans  La  fuerza  l>ruta  el  Modas,  de  l'accent  de  nos  compalrioles 
qui  écorchent  l'espagnol.  Notons  sans  esprit  de  représailles  que  la  plupart  des  cita- 
tions franvaises  de  son  œuvre  sont  détlgurécs  par  des  fautes  d'impression  qu'il  serait 
facile  de  l'aire  disparaître  des  éditions  suivantes. 


QUELQUES  PARTICULARITES  DE  LA  LANGUE  PARLEE        1 79 

l'expression,  comme  un  facteur  important.  Négligeons  les 
termes  répondant  à  des  besoins  nouveaux  et  qu'on  nous 
emprunte  comme  nous  les  empruntons  nous-mêmes  aux 
Anglais  {neceser,  antuca,  chauffeur,  reportera).  On  s'explique 
moins  que  les  mots  chantage,  morgue,  parvenu  soient  inva- 
riablement cités  en  français'.  En  admettant  que  le  premier 
s'impose  par  suite  de  l'évolution  des  mœurs,  le  second  serait 
assez  bien  rendu  par  ceno"^  et  M.  Benavente  donne  lui-même 
une  traduction  du  troisième,  nobles  allegadlzos^,  à  laquelle  on 
pourrait  ajouter  les  termes  proposés  par  Baralt  :  hombre  de 
fortuna,  advenedizo,  hombre  de  ayer,  hombre  nuevo.  Même  si 
l'on  accorde  que  JJanear'*  n'a  pas  d'équivalent,  est- il  bien 
nécessaire  d'adopter  flirleo  quand  on  a  coquetear,  sport  quand 
on  a  déporte'^,  sandunch  quand  on  a  emparedado,  serre  quand 
on  dispose  de  trois  synonymes  <•,  estufa,  inverndculo,  inverna- 
dero.  A  Santa  Niluche  (XVII,  255),  Breton,  qui  ne  transigeait 
pas,  aurait  substitué  la  mosquita  muerta  ou  la  gatita  de  Mari- 
Ramos.  Toujours  est-il  que  le  gallicisme  calculé  (una  de  mis 
clientes  mas  distinguidas,  IV,  lo)  ou  involontaire  (con  que 
frescura  hace  el  arlfculo,  I,  m  ;  he  notado  que  haces  la  corte 
a  la  hija  de  Montes,  I,  192;  Sienten  la  provincia  de  una  légua 
IV,  18)  entre  mieux  que  jamais  dans  les  habitudes  de  la 
société  polie.  Nous  aurions  d'ailleurs  mauvaise  grâce  à  nous 
en  plaindre. 

1.  Benavente  XVII,  188:  «Todo  el  mundo  dice  que  se  trata  de  un  chanta(je,  que 
esas  cartas  no  pueden  ser  de  Don  Patricio  ».  De  même  Baroja,  Mala  hierba,  p.  i4i: 
«  El  chantage  en  manos  del  dircctor  del  peri(')dico  se  convertia  en  terrible  arma  de 
combate  ».  —  Benavente,  Figulinas,  167:  «  Bien  sabes  el  tono  de  aquella  corte.  Una 
morgue  insufrible  ».  —  Benavente  WII,  i58:  «  Dominan  \os  parvenus...  y  el  dinero  es 
insolente  ». 

2.  Larreta,  La  gloria  de  Don  Ramiro,  p.  79:  «Su  ceno  altivo,  asf  como  sus  ancbas 
espaldas  imponian,  à  todo  cl  que  hablaba  con  él,  un  trato  ceremonioso  ». 

3.  Benavente,  Figulinas,  p.  80:  «  Todos  estos  nobles  allegadizos  llevan  ti'tulos  de 
santost. 

Ix.  BenaAente,  FiguL,  99  :  *  Flaneo  solo  û  con  el  primer  amigo  que  encuentro  ». 

5.  C'est  du  moins  l'avis  d'un  philologue  américain,  M.  Juan  B.  Selva  :  «  Hay,  en 
America  como  en  Espana,  quienes  encuentran  mâs  propio  decir  6  escribir  block, 
confort,  briganle,  enquête,  sport,  réclame,  etc.,  sin  saber  que  el  habla  propia  ticne 
voces  que  significan  lo  mismo  (bloque,  conforte,  bergante,  encuesta,  déporte,  reclamo)  ». 
Reproduit  dans  La  Lectura,  février  191 1,  p.  aSi. 

C.  Pardo  Bazân,  La  Madré  naturaleza,  p.  8  :  «  Siendo  muy  bajo  el  sitio  é  impregnado 
del  agua  que  recogîa  como  tina  urna,  y  del  calor  que  almacenaba  en  su  recinto,  orien- 
tado  al  mediodia,encerraba  una  vegetaci(')n  de  inverndculo  )>,  Benavente,  1.  i^a  :  «  Acom- 
pâiïame  al  invernadero».  Ib.,  XVII,  i5S:  «La  distinciôn  es  llor  de  estufa  delicada  », 


l8o  BULLETIN    HISPANIQUE 


Tournures  exclamatives. 

Dans  le  dialogue  animé  les  phrases  régulièrement  agencées 
et  présentant  un  sens  complet  ne  sont  pas  les  plus  fréquentes. 
L'intonation  suffit,  d'ordinaire,  pour  éclairer  les  constructions 
elliptiques.  Mais  il  n'est  pas  toujours  facile  de  marquer  au 
moyen  des  signes  de  ponctuation  à  quelle  nuance  du  sentiment 
et  de  la  pensée  elle  correspond.  Pour  les  souhaits,  par  exemple, 
l'espagnol  emploie  des  tournures  faussement  interrogatives  ou 
faussement  dubitatives  ([Quién  supiera  escribir!  Campoamor 
—  ;  Si  se  hubieran  conocido  antesl)'.  De  même,  à  côté  des 
locutions  positives  formées  par  l'adjectif  précédé  de  mas  ou  de 
tan,  par  le  verbe  précédé  de  y  eso  que  ou  lo  que,  on  rencontre 
des  phrases  exclamatives  où  la  négation  sert  à  exprimer  l'évi- 
dence et  la  certitude  (iAo  he  de  acordarme  !  XVIIl,  'à^).  Celte 
exclamation  n'est  en  réalité  qu'une  interrogation  à  réponse 
prévue,  comparable  au  latin  nonne.  Il  est  d'autres  cas  où  la 
présence  de  la  négation  s'explique  par  une  sorte  de  raisonne- 
ment par  l'absurde  (Sin  dinero,  en  todas  partes  es  mala.  Pero 
con  la  mitad  del  dineral  que  gasta  una  en  este  extranjero, 
vamos,  que  no  viviria  una  en  Madrid  ricamente,  y  sobre  todo, 
luciria  una  con  los  amigos  y  daria  una  déniera  a  mus  de  cualro, 
III,  25o).  Toujours  est-il  que  l'emploi  de  la  négation  scst 
généralisé  après  les  interjections  (;  Setenla  afios  corriendo  por 
esos  mundos!  j  Lo  que  yo  no  baya  vistol,  V.  208).  On  peut 
justifier  cet  usage  de  deux  manières,  d'abord  en  montrant  que 
ces  exclamations  sont  des  interrogations  directes  ou  indirectes-, 
d'autre  part  en  rappelant  que  la  négation  est  souvent  explétive 
en  espagnol  après  les  comparatifs,  après  hasla,  apenas,  por 
poco,  etc.'^... 

1.  Palacio  Valdés.  El  Maeslranle,  p.  ii/i. 

2.  «  Il  est  préftrablc,  dit  M.  Mally,  de  supprimer  cotte  disliiiclioa  usuelle  entre 
deux  groupes  de  faits  d'iiilouation  (|ui  en  réalité  ne  sont  séparés  par  rien  d'essentiel. 
Disons  cjue  l'interrogation  qui  n'interroge  pas  appartient  au  langage  dit  exclaniatif  », 
Traité  de  stylistique  française,  l.  1,  p.  a6(j.  On  trouve  aussi  en  français  des  inlerroga- 
ticns  devenues  exclamatives.  Ex.:  «Vas-tu  assez  t'ennuyer,  mon  pau\re  vieux  In, 
Lavedan,  Le  nouveau  jeu,  p.  65. 

3.  Fortuiiata  y  Jacinta,  t.  Il,  p.  79:  «  Me  parecii'>  l»ien  no  decirtc  nada  Itastu  no 
tralarle  un  poco  ».  —  Baroja,  I.n  liusca,  p.  33:  «  Irène,  la  culpable  del  escrindalo  de  la 


QUELQUES  PARTICl  LVRITÉS  DE  LA  LANGUE  PARLEE        l8l 

Par  un  procédé  analogue,  dans  des  phrases  qui  n'ont  plus 
rien  de  dubitatif,  si  intervient  comme  une  affirmation,  avec  la 
valeur  du  français  puisque  (No  se  porqué  presiento  que  hemos 
de  ser  muy  buenas  amigas.  ,rTiene  usted  muchas?  jYa  lo  he 
visto  !  Yo  también  :  ;  Si  todas  las  muchachas  que  conozco  son 
amigas  mi'as,  I,  197).  Cet  emploi  n'est  pas  sans  rapport  avec 
la  syntaxe  des  propositions  conditionnelles.  En  effet,  la  con- 
jonction si  exprime  non  seulement  les  hypothèses  réalisables 
ou  irréalisables,  mais  encore  les  hypothèses  réalisées.  11  en  va 
de  même  pour  le  latin  siquidem,  qu'on  rend  quelquefois  par 
attendu  que.  Ajoutons  que  la  tournure  exclamative  est  souvent 
le  résultat  d'une  ellipse.  La  proposition  principale  a  disparu 
et  avec  elle  l'affirmation  qu'elle  contenait.  Il  ne  reste  plus  que 
l'argument  destiné  à  la  motiver  (Pero  si  me  pierdo,  que  no  me 
busquen  en  Madrid  ni  en  el  extranjero.  Si  en  Madrid  no  es 
posible  tratarse  con  nadie.  II,  98).  D'autre  part  les  constructions 
interrogatives,  par  un  processus  différent,  conduisent  aux 
exclamations  affirmatives.  On  voit  déjà  poindre  le  sens  inter- 
rogatif  dans  cette  phrase  conditionnelle  (Y  por  si  a  ti  te  ciegan 
antiguos  rencores  que  no  deben  subsistir  entre  nosotros, 
Maria  juzgara,  I,  19)'.  De  cet  emploi  on  passe  à  l'interrogation 
indirecte  proprement  dite  {En  cuanto  a  si  la  nina  sera  bien 
recibida  6  mal  recibida  ya  me  parece  que  exagéras,  I,  i53)2. 
Qu'une  ellipse  intervienne,  nous  aurons  une  interrogation 
directe  (Voy  a  la  Presidencia  del  Gonsejo...  dQue  si  me  dejarun 
entrar?  Lo  mismo  que  si  entrara  en  mi  propio  domicilio)^. 
Entre  le  si  interrogatif  et  le  si  exclamatif  la  transition  est  facile 
(jcuidado  si  estas  guapa  esta   noche!,  1,  i38;    ;0h!  si  es  un 

noche  anterior,  una  muchacha  de  quince  â  diez  y  seis  aùos,  de  cabeza  gorda,  manos 
y  pies  grandes,  cuerpo  sin  desarrollo  complelo  y  ademanes  pesados  y  lorpes,  no 
hablaba  apenas  ni  separaba  la  vista  del  plato  ».  —  76.,  p.  76:  «  Y  al  dia  siguieiîte  yo 
cogi  un  delantal  obscuro  de  mi  padre  y  lo  até  en  un  palo  y  fuimos  detrâs  de  los  que 
Uevabao  la  bandera  espaùola,  y  por  poco  no  se  la  quitamos  ». 

1.  Comparer  en  latin:  «  Aeneas  scopulum  interea  conscendit  et  omnem  |  prospec- 
lum  laie  pelago  petit,  Anthea  si  quem  |  jactalum  vento  videat  »,  Aen.,  I,  180-82. 

2.  Cf.  «  Ce  n'est  pas  à  moi  à  prononcer  sur  la  question  si  l'Espagne  ne  pouvant 
faire  le  commerce  des  Indes  par  elle-même,  il  ne  vaudrait  pas  mieux  qu'elle  le  rendit 
libre  au.t  étrangers»,  Esprit  des  Lois,  L.  XXI,  Cb.  XXIII. 

3.  Taboada,  Cursilones,  p.  76.  Nous  avons  bien  en  français  un  si  exclamatif,  mais 
surtout  dans  les  pbrases  négatives.  «  Si  ce  n'est  pas  une  calamité!  »,  Courteline,  Les 
ronds-de-cuir,  p.  8. 


I<52  BULLETIN    HISPANIQUE 

acontecimiento  que  vengan  cuatro  personas  de  la  familia  a 
almorzar,  IV,  72).  A  ces  deux  explications  il  en  faut  ajouter 
une  troisième:  si  peut  se  construire,  aussi  bien  que  no,  dune 
manière  explétive.  Dans  ce  dernier  cas  il  double  sans  utilité  la 
conjonction  que  (Ella  hasta  parece  que  se  alegra  si  alguién 
viene  y  le  dice  que  Feliciano  Ueva  a  sus  majas  como  unas 
reinas  y  </iie  si  lucen  y  que  si  triunfan,  XYIl,  66). 


Anacoluthe. 

On  a  constaté  maintes  fois  que  les  langues  ne  sont  pas  gou- 
vernées par  la  logique.  Souvent  les  déformations  inconscientes 
sont  régularisées  par  l'usage  et  ratifiées  par  les  grammairiens. 
Entre  les  incorrections  de  la  foule  ignorante  et  les  exceptions 
faisant  corps  avec  la  syntaxe,  la  distance  ne  paraît  pas  infran- 
chissable'. 

C'est  peut-être  en  ce  qui  regarde  la  syntaxe  d'accord  (ju'il 
règne,  dans  les  langues  romanes,  la  plus  grande  incertitude. 
Chez  les  illettrés,  la  syllepsc  est  naturellement  beaucoup  plus 
fréquente  que  dans  la  conversation  des  gens  du  monde  (Pero 
que  os  teniais  creîo,  que  nadie  estdbamos  enteraos?  XVII,  10; 
an  tes,  aquî  el  que  leniamos  un  carro  y  un  par  de  bueyes  o  de 
vacas,  nunca  le  faltaba  naa  y  siemprc  podfa  decirse  que  ténia 
dinero,  XVIII,  228).  Quittons  le  village,  élevons-nous  de  quel- 
ques degrés  dans  la  hiérarchie  sociale,  nous  retrouverons  des 
constructions  analogues  (quiero  ver  trajes  y  senoras  élégantes 
y  que  me  digas  (luiéii  son,  ahora  que  conoccs  a  tanta  gentc, 
lll,  i35).  On  peut  dire  que  ces  tournures  sont  essentiellement 
conformes  aux  tendances  de  l'espagnol  moderne.  Souvent 
dans  la  langue  écrite  un   singulier  sert  à  exprimer  une  idée 

I.  C'est  une  vérité  que  les  grammairiens  ne  contcstont  plus  aujnur<rhui  :<(Todosos 
fcnomenos  linguislicos  i(n-n\  sua  razào  de  scr,  e  mcTcrem  scr  cstudados,ainda  os  casos 
nionstruosos,  os  fcnomenos  leratoligicos.  R' o  que  fazcm  os  mostres  acluais  da  ciéncia 
da  linguaj(,'ni,  que  analisam,  espcculam  as  rausas,  determinam  as  condicôes  em  que 
os  factos  se  produziram,  nào  lanzam,  de  ânimn  lovo,  anatemas  sobre  palavras  e 
fxpressûes  e  cliegam  a  provar  que  as  iocurûcs  clianiadas  viciosas  nào  se  Ibrmaram 
por  procf'ssos  divcrsos  da(|uol('s  scgundoos  quais  se  coiistiluiram  os  termos  e  locu(,ô('s 
da  linj,'ua  classica.  x  Marii)  Hnrrcln,  Almanaqiie  lirftsili'iro,  n)ii,  p.  3GK. 


QUELQUES  PARTICULARITÉS  DE  LA  LANGUE  PARLEE        1 83 

collective  (Todo  el  que  se  proponga  obtener  el  dineio  consuetu- 
dinario...  debe  tener  en  cuenta  que  la  mayorîa  de  los  mortales 
esta  en  Babia').  Le  verbe  s'accorde  régulièrement  avec  un 
attribut  au  pluriel  quand  le  sujet  reste  au  singulier  (El  tiempo 
ha  demostrado  que  lo  nacional  en  Francia  son  Racine  y  Cor- 
neille =*).  Il  n'en  a  pas  toujours  été  ainsi.  Tandis  que  Cervantes 
écrivait  :  «  Y  el  primero  que  Maese  Nicolas  le  àiôfac  los  cualro 
de  Amadis  de  Gaula»,  M™"  de  Sévigné  disait  :  «  Sa  maladie 
sont  les  vapeurs^  ».  On  voit  que  les  deux  langues  ont  évolué 
dans  une  direction  opposée. 

L'espagnol  en  use  plus  librement  encore  avec  les  relatifs.  Dans 
la  bouche  des  ignorants  (jae  sufïit  à  exprimer  tous  les  rapports  de 
corrélation  et  de  subordination^  (Seis  pesetas  porun  cuartucho 
con  una  ventana  à  un  patio  y  una  cama  que  yo  sola  no  cojo, 
V,  i5.  Cojo  est  ici  un  barbarisme  pour  quepo).  On  retrouve  en 
français  les  mêmes  incorrections  :  «  Un  homme  que  j  ai  été  à 
sa  noce  »  (Moinaux)».  Elles  ont  même  été  ratifiées,  dans  certains 
cas,  par  la  langue  littéraire  :  a  Les  jours  qu'il  faisait  trop  chaud, 
ils  ne  sortaient  pas  »  (Flaubert)''.  On  ne  s'étonnera  donc  pas  de 
rencontrer  chez  M.  Benavente  des  phrases  comme  celles-ci  : 
«  Llevan  mucho  esos  trajes  que  me  gustan  tanto,  esos  que  dices 
tu  que  parecen  bizantinos,  III,  i35;  Visitas  y  compras  que  a 
cualquier  hora  y  cualquier  dia  da  lo  mismo  »,  1 ,  1 4 .  H  faut  noter 
cependant  que  les  rapports  de  subordination  sont  moins  nette- 
ment indiqués  en  espagnol  qu'en  français.  On  se  rappelle  que 
les  Latins  remplaçaient  par  un  démonstratif  un  relatif  qui 
arrivait  après  une  première  proposition, déjà  relative:  «  Omnes 
tum  fere  qui  nec  extra  urbem  banc  vixerant  nec  eos  aliqua 
barbaries  domestica    infuscaverat,  recte  loquebantur".  »  \oilà 


1.  Taboada,  Cursilones,  p.  i65. 

2.  Pardo  Bazân,  Lit.  francesa,  El  Romanticismo,  p.  190. 

3.  J'emprunte  ces  exemples  à  M.  Dubois,  qui  a  fait  la  même  remarque  dans  son 
édition  du  Don  Quijote,  p.  ;!i5. 

4.  Chez  les  classiques  que  équivaut  à  un  pronom  relatif  construit  avec  une  prépo- 
sition. Voir  à  ce  sujet  la  remarque  de  M.  Morel-Fatio  dans  son  étude  sur  «  Graciân 
interprété  par  Schopenhauer  »,  §  19S  Bulletin  hispanique,  octobre-décembre  1910. 

5.  Haas,  Neufranzusische  Syntax,  p.  2Cib. 

6.  ]bid.,  p,  33i. 

7.  Riemann,  Syntaxe  latine,  3'  éd.,  p.  /i3.  De  même  en  français  :  «  Ils  avaient  aussi 
des  boucliers  d'airain  (/a'ils  tiraient  tout  rouges  du  feu  et  les  remplissaient  de  sable 


l84  BULLETIIN    HISPANIQUE 

qui  justifie  certaines  constructions  du  castillan  moderne  ou 
ancien  (A ver  falleciô  D.  Fulano  de  Tal,  Alcalde  de  este  pueblo, 
que  era  un  solemne  bribon  y  no  babia  quien  le  sacara  una 
peseta').  La  seconde  proposition  est  plutôt  coordonnée  que 
subordonnée  (Se  que  ha  dispuesto  usted  una  visita  al  circulo 
de  que  soy  présidente  honorario  ,v  propietario  de  la  finca,  Y, 
109).  Cette  habitude  paraît  si  conforme  au  génie  de  la  langue 
espagnole,  qu'elle  trouve  son  application  même  dans  la 
syntaxe  des  prépositions,  où  nous  rencontrons  toutes  les 
formes  du  zeugma  et  de  la  brachylogie  (Ya  sabe  usted  que  don 
Teodoro  es  el  unico  que  sabe  escribir  comedias  â  la  medida  y 
paru  usted  sobre  todo,  I,  261;  Gierto  que,  si  cuando  nos 
sentamos  à  escribir  hubieramos  de  tomar  la  escopeta  y  el 
morral  y  echarnos  al  monte,  cada  y  cuando  que  nos  ocurre  el 
«  punto  de  vista  »  para  andar  à  caza  de  otra  frase,  ni  fiambrc- 
escribirîamos).  Il  y  a  vraisemblablement  une  intention  d'ar- 
chaïsme dans  la  dernière  des  phrases  que  nous  citons.  On 
retrouve  en  effet  cada  y  cuando  chez  Cervantes  3. 

D'autre  part,  c'est  en  vain  qu'on  chercherait  l'application 
d'une  logique  rigoureuse  dans  les  diilerentes  constructions  de 
l'infinitif.  On  le  rencontre  sans  sujet  ou  sans  complément 
(Salîa  Gucrra  de  alli  con  la  cabeza  medio  trastornada,  porque 
las  ideas  expuestas  con  tanto  donaire  y  sencillez  por  su  amiga 
le  seducîan  y  cautivaban  sin  nielerse  a  examinarlas  con  auxilio 
de  la  razon''; —  llay  palabras  irréparables,  no  las  que  se 
dicen  sin  pensar,  por  duras  que  scan,  III,  180).  Quand  deux 
infinitifs  se  suivent,  il  est  naturel  (jue  le  sujet  ou  le  complé- 
ment du  premier  ou  du  second  soient  sous-enlendus  (Ks  Mr. 
lilaw  uno  de  los  hombres  m;is  estimables  que  puedan  hallarsc 


embrase»  (\augolas)  Syntaxe  française  du  xvil'  siècle,  A.  Ilaasc,  Irad.  Olicrt,  Paris, 
i8f)8,  p.  iaâ. 

I.  Taboada,  Cnrsilones,  p.  5'|.  De  même:  «  ;  â  él â  {piicii  habi'a  qtic  sacar  las  pala- 
bras con  tirabiizôn  y  on  su  vida  babîa  praslado  la  nias  scncilla  chanza!»  l'alacio 
Valdés,  lU  Maeslranle,  j).  172. 

u.  Lcctura,  septiembre  l'ji  i,  p.  iji.  Article  tie  M.  Julio  Ccjador. 

3.  :  a  Dorotea  consolô  â  Santlio  l*an/.a,  «liciénilolo  (juo  radn  y  cuando  <iae  pareciese 
babcr  sido  vcrdad  que  su  amo  liul)icse  descabezado  al  fîi;,''anlc,  le  pronielia  eu  vién- 
dose  pacîlica  en  su  reino,  de  darle  el  mejor  condadu  que  en  él  bubiese.»  lui.  Dubois. 
p.  3G2. 

4.  Pérez  Galdc'is.  Anijel  Guerra,  II,  207. 


QLÊLQLJES    PARTÎCL  f.  VRITÉS    IlE    LA    t.\>GUE    PAKLÉK.  iS5 

y  d  quien  es  imposible  conocer  sin  amar^;  —  Pero  mire  usted, 
el  matrimonio  yo  creo  que  se  ha  hecho  para  completarse  y 
encontrar  cada  uno  lo  que  le  hace  falta,  XVIII,  91).  L'infinitif, 
comme  on  le  voit  par  ce  dernier  cas,  peut  se  construire  aussi 
d'une  manière  impersonnelle  (Senti  cierla  mortificacion  del 
amor  propio  por  no  haberse  contado  conmigo  para  formar 
parte  de  aquella  denodada  légion  2).  Si  l'on  ajoute  qu'il  s'em- 
ploie souvent  avec  la  valeur  d'un  substantif  et  qu'il  forme 
avec  la  proposition  sin  de  véritables  mots  composés  à  sens 
négatif  (Tenîamos  aquellos  terrenos  sin  cultivai-,  I,  108),  on 
comprendra  qu'il  s'émancipe  quelquefois  de  la  construction 
normale  pour  entrer  dans  des  locutions  vicieuses  et  irréduc- 
tibles à  l'analyse  (Le  puede  a  uno  enganar  su  mujer  y  ser  un 
buen  gobernador,  V,  49^).  Les  deux  infinitifs  sont  juxtaposés 
et  paraissent  jouer  le  même  rôle.  Cependant,  le  complément 
de  l'un  est  sujet  de  l'autre.  De  même  dans  l'exemple  suivant  : 
Telefonee  usted,  para  saher  lo  que  ocurre,  XVIII,  46,  le  sujet 
de  saber  n'est  pas  usted  comme  on  pourrait  le  supposer,  mais 
nosotros  sous-entendu,  ainsi  qu'il  résulte  du  contexte.  Quel- 
quefois, cette  construction  illogique  correspond  à  un  véritable 
renversement  des  valeurs  (  !  Que  no  vean  que  hcmos  Uorao  ! 
Buena  cara  tienes  pa  no  conocerlo'*,  XVII,  loô).  Celui  qui 
paraît  exercer  l'action  est  au  contraire  celui  qui  la  subit.  Le 
passage  du  sens  actif  au  sens  passif  ou  du  sens  passif  au  sens 
actif  n'a  du  reste  rien  de  contraire  au  génie  même  de  la 
langue  espagnole.  On  s'en  apercevra  pour  peu  qu'on  étudie  la 
valeur  du  participe  passé,  soit  dans  les  verbes  transitifs  (Noso- 
tros,  los  de  los  latiguillos,  estamos  mandados  retirar,  I,  262. 

I.  Z,ec<ura,  julio  191 1,  p.  333. 

3.  Pereda,  Penas  arriba,  p.  4oo. 

3.  Il  y  a  une  irrégularité  du  même  genre  dans  celte  phrase  de  Cervantos  :  «  llizo 
Sancho  costal  de  su  gabân,  y  rccogiendo  toJo  lo  que  pudo  y  cupo  en  cl  lalego,  cargo 
su  jumento.»  Ed.  Dubois,  p.  i35. 

i.  En  pareil  cas  les  Portugais  emploient  «  l'infînitir  personnel»  qui  supprime 
l'amphibologie.  Ex.  :  «  Fecha  bem  a  porta,  para  nào  te  roubarem  ».  Les  exemples  que 
nous  avons  relevés  dans  l'espagnol  moderne  paraissent  confirmer  cette  hypothèse  de 
M°*  Michaclis  de  V'asconcellos  :  «  Trotzdem  vermute  ich.  dass  auch  das  spanische 
Volk,  vor  grauen  Jahren,  Keime  des  personnlichen  Infinitivs  besessen,  dass  aber  die 
Gebildeten  sie  geknickt  haben».  Homanische  Forschungeii,  t.  VII,  p.  87.  Cependant  on 
trouve  dans  Molière  :  c  Rends-le  moi  sans  te  fouiller  (sans  que  je  te  fouille),  Syntaxe 
franraise  du  wir  siècle,  A.  Haase,  Paris,  1898,  p.  208. 


l86  BULLETIN    HISPANIQUE 

Cf.  en  laiinjussi;  No  seas  mal  pensada  mujer,  Y,  197;  Ya  esta 
consentida  en  veros,  YI,  12;  Esta  despierto,  pero  esta  muy 
callado,  XYIII,  210),  soit  dans  les  verbes  intransitifs  (Ninguna 
niiïa  déjà  de  casarse,  pues  las  salva,  aun  pasadas  de  los  treinta 
anos,  IV,  85;  acahadltos  de  coger,  XVIll,  229). 


Atténuation. 

Beaucoup  de  motifs,  dans  la  conversation,  empêchent  les 
interlocuteurs  de  donner  à  leur  pensée  une  expression  tran- 
chante. Certaines  atténuations  sont  dictées  par  le  besoin  de  ne 
pas  heurter  brutalement  l'opinion  d'autrui.  D'autres  ménage- 
ments correspondent  à  l'incertitude  de  celui  qui  parle,  aux 
différents  degrés  du  doute.  C'est  principalement  en  ce  qui 
regarde  la  syntaxe  des  propositions  conditionnelles  que  la 
langue  parlée  se  distingue  de  la  langue  écrite. 

11  est  bien  rare  qu'on  utilise  les  trois  imparfaits  du  subjonctif 
pour  rendre  l'idée  du  conditionnel,  sauf  dans  le  langage 
étudié,  prétentieux  et  pour  ainsi  dire  officiel  (Y  si  Inibiera 
llegado  a  Présidente  del  Consejo,  como  le  pronosticaba  un 
periôdico  que  él  dirigia,  entonces  me  hubiera  costado  una 
enfermedad,  XYll,  161).  En  revanche  l'emploi  de  l'indicatif 
présent  au  lieu  de  plus-que-parfait  du  subjonctif  correspond 
à  une  émotion  plus  vive  ou  témoigne  d'une  éducation  infé- 
rieure chez  celui  qui  parle  (A  Joseliyo  se  le  olvido  ponerlas  en 
la  maleta,  y  si  yo  no  doy  un  vistazo,  se  le  olvida  el  smoking, 
Y,  56).  Dans  tous  les  autres  cas,  c'est  l'imparfait  de  l'indicatif 
qui  s'impose'.  On  le  trouve  au  moins  dans  la  proposition 
principale  (No  creo  que  en  el  cielo  nadie  pueda  tener  disgustos; 
no  ocdia  la  pena  de  estar  en  el  cielo,  XYll,  176)  ou  dans  la 
proposition  subordonnée  dépendant  de  la  proposition  princi- 
pale au  conditionnel  (Yo  daria  la  vida  por  ti  y  no  diria  que 
riunplla  un  deber;  diria  que  coniplelaba  mi  fclicidad,  H,  2/jG). 
En  français  le  présent  de  l'indicatif  serait  ici  de  rigueur.  Avec 

1.  Do  même  en  l'raïK.ais  «Je  sentais  que  si  je  l'écoulais  seulement  une  niinule, 
yélais  pincé  o.  Le  .\ouvciiii  Jeu,  p.  [).'i. 


QUELQUES  PARTICULARITÉS  DE  LA  LANGUE  PARLÉE        187 

les  verbes  fréquemment  employés  comme  lener,  haber,  ser, 
deber,  poder,  ir,  hacer,  toute  construction  autre  que  l'imparfait 
de  l'indicatil  semblerait  déconcertante  (V  aunque  haciendo 
ustedes  Un  esfuerzo  pudieran  cambiar  de  vida  por  una  tempo- 
rada  ^que  adelantarîamos?,  si  después  era  inévitable  la  com- 
pensaciôn,  que  vendrfa  con  mayores  angustias,  XYllI,  loi). 
Aussi,  quand  le  sens  exige  un  plus-que-parfait  du  subjonctif, 
ce  n'est  pas  l'auxiliaire  qui  prend  la  marque  du  passé,  mais 
bien  Tinfinitif  suivant  (iNo  faltaba  mas!  Pero  podiais  haber 
avisado  antes,  IV,  72';  ya  hubiera  sido  yo  director  y  ministre 
y  habia  de  haber,  dado  mucho  que  hacer^;  y  ni  tan  siquiera 
respeta  lo  que  mas  leni'a  que  haber  respelado  siempre^  XVII,  02  ; 
jque  mi  hija  iba  d  haberle  conscnlido  lo  que  te  consiente  la 
Dominica,  XVII,  35)'^. 

Cette  règle  souffre  néanmoins  une  exception  :  Deber,  par 
une  survivance  de  la  syntaxe  latine,  exprime  l'irréel  au  moyen 
du  parfait  et  non  de  l'imparfait  de  l'indicatif  (Lo  que  no  debisle 
hacer,  es  marcharte  solo;  porque  conozco  tu  genio  y  te  opu- 
siste  con  energia,  no  insistî  en  acompafiarte,  pero  debi  hacerlo, 
I,  28).  Il  en  est  de  même  du  verbe  créer,  toutes  les  fois  que  la 
supposition  qu'il  implique  n'a  pas  été  confirmée  par  la  réalité 
(Yo  no  crei  que  volverias  tan  pronto,  1,  28;  Pero,  querido 
amigo,  yo  le  crei  a  usted  de  mas  caràcter,  XVIII,  i3).  Or,  la 
construction  de  ces  deux  verbes  tend  à  se  confondre  aujour- 
d'hui avec  celle  de  tener,  haber,  ser,  ir,  hacer,  poder,  etc.  Nous 
trouvons  d'abord  deber  employé  au  parfait  d'une  façon  pléo- 
nastique avec  un  infinitif  passé  (que  nunca  debimos  haber 
hecho  causa  nosotros  con  los  descargadores,  XVIII,  204).  Ce 
parfait  simple  se  résout  parfois  en  parfait  composé  (Y  no  solo 
he  podido  ser  Diputado,  sino  Director  de  Pénales  6  de  lo  que 

1 .  De  même  en  français  :  «  Je  devais  par  la  royautc  avoir  commencé  mon  ouvrage  t 
(La  Fontaine);  «  ce  qu'il  y  a  de  vrai  pourtant,  c'est  que  dans  les  règles  je  devais  avoir 
fait  il  y  a  longtemps  cette  note  que  je  fais  aujourd'hui  »  (Boileau).  Sy.fr.  du  W'il*  s., 
p.  173. 

2.  Frontaura,  Gente  de  Madrid,  c.  Diamante,  p.  29. 

3.  11  faut  distinguer  nettement  cet  emploi  de  l'exemple  suivant,  conforme  à 
l'usage  français:  «  Quedô  usted  viuda  muy  joven...  La  vida  no  podia  haber  terminado 
para  usted  »  XVII,  162.  Dans  la  langue  écrite  on  emploiepodri'a  haber  ou  hubiera  podido. 
Ex.  :  «  refiriéndose  al  iiltimo  adjetivo  de  esta  tiramira  de  ellos  dice  que  hubiera  podido 
omilirse  »,  Rodn'guez  Marin,  Ed.  du  Quijote,  t.  I,  p.  jgi. 


i 


t88  BtLLËTIN    HlSPAMQLÈ 

hubiera  querido)'.  Enfin  deber  se  construit  aussi  comme  les 
autres  auxiliaires,  à  l'imparfait  devant  un  infinitif  au  passé 
(Es  decir  que  empecé  a  vivir  cuando  debia  haberme  muerh,  el 
dia  en  que  perdi  à  mi  madré,  V,  807) 2.  La  confusion  qui 
s'établit  progressivement  entre  deber,  créer  et  les  verbes  tener, 
haber,  scr,  ir,  poder,  hacer,  etc.,  peut  s'expliquer  de  deux 
façons.  D'abord  l'imparfait  joue,  en  espagnol  comme  en 
français,  un  rôle  envahissant.  D'autre  part  il  n'est  pas  invrai- 
semblable que  le  parfait  simple  recule,  chez  nos  voisins  comme 
chez  nous,  devant  le  parfait  composé. 

Loi  du  moindre  effort. 

Les  phénomènes  du  langage,  conscients  au  moment  011  ils 
se  produisent,  finissent  par  tomber,  quand  ils  se  répètent, 
dans  le  domaine  de  l'inconscient.  Une  sorte  de  concurrence 
s'établit  entre  les  mots  fréquemment  employés.  Le  résultat  de 
celte  lutte  pour  la  vie,  c'est  Télimination  progressive  des 
formes  et  des  constructions  qui  ont  cessé  de  répondre  aux 
besoins  de  l'activité  mentale.  Nous  oublions  les  termes  dont 
l'utilité  n'est  plus  évidente.  Nous  les  sacrifions  à  d'autres,  à 
ceux  qui  permettent  d'éviter  les  règles  compliquées,  les  formes 
rares  de  conjugaison.  On  constate  à  chaque  instant  que  telle 
catégorie  grammaticale,  par  une  sorte  d'usurpation  mécanique, 
tend  à  empiéter  sur  la  catégorie  voisine. 

Article.  L'idée  de  possession  est  souvent  exprimée  par  un 
datif  éthique  (Esta  manana  entn')  en  ini  despacho  y  también 
me  dejo  caer  la  estatua  de  la  Filosofia,  1,  i/iO;  ,;Y  le  aceptan  la 
dimision?,  XVIIl^  2:1).  Môme  en  l'absence  du  pronom  personnel, 
l'article  garde  une  valeur  possessive  (Un  hombre  clevado  por 
los  propios  méritos,  I,  187)^. 

1.  Froiilaiira,  dente  de  Madrid,  p.  aij.  Do  incnic:  «En  cfccto:  cl  cstiidianle  (juicrc 
aprcndcr  en  iiiias  cuanlas  noches  lo  que  lia  dcbido  estudiar  en  sois  mescs  de  curso  », 
Taboada,  Cursilones,  p.  35. 

2.  \)c  même  en  portugais  ■<  Kra  vcnladc'  O  conscllieiro  devio-sc  ter  casadon  Kra  do 
Quciroz,  O  jiriino  Bnz'dio,  p.  .'187.  Il  va  sans  dire  (juc  deber  pont  être  employé  à 
rimparlaildans  le  sensd'un  potentiel:  «  Ai^ninas  personas  no  f/c^(Vjnmorirsc  nunca», 
Taboada,  Ciirsilones,  p.  û'i. 

3.  Dans  le  midi  de  la  France  on  répète  couramment  «prendre  le  pardessus» 
pour  ('  prendre  son  pardessus  ». 


QUELQUES  PARTICULAaiTÉS  DE  LA  LANGUE  PARLEE        1 89 

Substantif.  A  tous  les  verbes  fréquemment  employés  corres- 
pondent des  tournures  substantives,  dont  l'usage  se  généralise 
de  plus  en  plus  (por  eso  tuve  miedo  d  querer,  I,  25;  (hizo 
aprecio  del  libro  6  de  los  caballos?,  111,  ii).  Elles  ont  parfois 
une  valeur  augmentative,  le  substantif  pouvant  être  accom- 
pagné d'un  adjectif  qui  le  renforce  (Nosotras  no  podemos 
quejarnos.  Tuvimos  buen  acierlo,  1,  lo).  On  évite  ainsi  les 
propositions  infinitives  ou  relatives.  Ex.  :  «  Les  convido  a 
ustedes  en  celebridad  de  (para  celebrar)  tan  buenas  esperanzas  », 
Y,  /( 6;  Si  en  otro  tiempo  podia  derrumbarse  una  grandeza  en 
un  instante,  por  salisfacciôn  vengativa  6  caprichosa  de  un 
principe  (para  satisfacer),  Fig.,8fi  ;  «  Gracias  a  que  don  Rosendo 
sabe  el  niiino  que  tienes  (lo  miniada  que  estas)'  »;  V,  25.  Non 
seulement  le  substantif  usurpe  la  place  du  verbe,  mais  il  rem- 
place même  Tadjectif  (;  Que  egolsmo  de  hijo!,  XVlll,  8i  ;  j  Que 
ingratilud  de  hijo!,  XVlll,  io8)-.  Quelquefois  la  valeur  mal 
définie  du  suffixe  permet  d'enfermer  plusieurs  idées  dans  un 
seul  mot.  Ex.  :  «  Se  me  niega  el  cuniplimienlo  (los  medios  de 
cumplir)  de  mis  compromisos  ante  la  opinicjn,  ante  el  pais», 
XVlll,  i3.  Cette  abréviation  correspond  à  une  tendance  bien 
populaire,  le  désir  d'économie.  On  peut  se  demander  toutefois 
si  l'influence  de  la  presse,  des  ouvrages  techniques,  des  voca- 
bulaires spéciaux,  en  multipliant  les  néologismes,  n'est  pas 
venue  augmenter  l'importance  relative  de  la  catégorie  des 
substantifs  au  détriment  des  autres  formes  grammaticales  :  A 
mesure  que  diminue  le  nombre  des  illettrés,  la  langue  écrite 
réagirait  à  son  tour  sur  la  langue  parlée. 

Verbe.  L'emploi  envahissant  des  auxiliaires  permet  d'éviter 
les  principales  difficultés  de  la  conjugaison,  pierre  d'achoppe- 
ment des  ignorants.  Ils  sont,  en  effet,  suivis  d'infinitifs,  de 
gérondifs,   de  participes,    formes   qu'on    retient   sans    effort. 

1.  Cf.  «La  vision  entr'aperçue  d'une  journée  entière  de  paresse,  inévitabienient 
compliquée  d'un  lâchage  en  règle  du  bureau  »,  Courteline,  Les  ronds-de-ciiir,  p.  8; 
«  retenu  à  la  dernière  minute,  comme  il  allait  prendre  son  chapeau,  par  la  violence 
d'une  averse  et  la  tombée  inopinée,  en  son  appartement  de  garçon,  de  Gabrielle,  sa 
maîtresse»,  ib.,  p.  9. 

2.  Cette  habitude  se  retrouve  en  français,  mais  chez  les  écrivains  qui  visent  au 
pittoresque:  «Immense  est  ce  vide  éblouissant  du  ciel,  car  la  ville  s'étale  sur  la 
plalilade  du  delta  »,  Chevrilion,  Saiitluaircs  et  paysatjes  d'Asie,  p.  uoi. 

Bull,  kispun.  i3 


igo  nLLLETiN    HISPANIQUE 

Beaucoup  d'entre  eux  s'affaiblissent  par  suite  d'un  usage 
répété.  Aussi  l'on  tend  à  remplacer  haber,  ser,  eslar  par  des 
verbes  moins  ressassés,  tels  que  tcner,  traer,  ir,  venir  :  ceux-ci, 
en  usurpant  des  fonctions  nouvelles,  se  fatiguent  à  leur  tour 
et  se  vident  pour  ainsi  dire  de  leur  contenu  primitif.  La  vogue 
de  tener  s'explique  par  des  raisons  multiples.  On  sait  qu'il  était 
employé  concurremment  avec  hdbcr  dans  l'ancienne  langue. 
Cette  construction  s'est  perpétuée  dans  le  portugais  moderne 
et  dans  le  castillan  légèrement  archaïque  des  populations 
rurales'.  Teuev  a  l'avantage  d'exprimer,  sans  le  secours  d'un 
adjectif  ou  d'un  pronon,  l'idée  de  possession  (La  verdad  es 
que  te/tian  la  casa  muy  mal  distribuîda,  II,  263),  d'animer  le 
récit  par  l'intervention  d'un  interlocuteur  fictif  (y  hoy  la  tienes 
casada  con  un  senor  de  edad,  II,  256).  On  comprend  que  le 
peuple  finisse  par  l'employer  comme  un  équivalent  de  haber 
(He  trabajado  ya  por  los  pueblos  y  en  un  cine  y  me  tienen 
aplaudido,  XVIl,  202).  Quant  aux  verbes  Iraer  et  ir,  on  peut 
les  considérer  aujourd'hui  comme  de  simples  substituts  de 
tener  et  de  estar.  Il  serait  illusoire,  dans  les  exemples  suivants, 
de  tenir  compte  de  leur  valeur  originelle.  (La  condesa  Olivia  le 
frae  vuelto  el  juicio,  III,  18;  El  escudo  de  la  provincia,  todo 
de  flores,  que  va  en  el  centro  de  la  mesa.  Y,  90). 

La  distinction  entre  les  verbes  transitifs,  intransitifs,  réci- 
proques et  impersonnels  tend  à  s'alTaiblir  de  jour  en  jour  «. 
Olvidar,  l'un  des  spécimens  les  plus  caractéristiques  de  la 
conjugaison  espagnole,  peut  être  utilisé,  au  choix,  sous  les 
formes  olvido,  nie  olvido  de,  se  me  ha  olvidado.  La  vogue  de  la 
construction  impersonnelle  vient  de  ce  qu'elle  permet  de 
rapprocher  deux  pronoms  au  commencement  d'une  phrase, 
groupement  essentiellement  conforme  au  génie  de  la  langue. 
De  «  Se  lo suplico  à  usted,  IV,  i44  »,  on  passe  facilement,  bien 
qu'il  n'y  ait  aucun  rapport  logique  entre  les  deux  tournures,  à 
('  .se  me  résiste  llamarle  tu  marido,  XVII,  17^^^,  à  «  Yo  no  se 


I.  Voir  à  ce  point  de  \uc  Senora  amn,  tome  Wll. 

3.  De  même  en  français  :  "  Alors  un  matin,  tout  bêtement,  elle  m'arrivcra  au 
l)onl  du  pinceau,  et  je  te  sortirai  M"'  Costard,  non,  mais  ne  blague  pas)>.  Le  Nouveau 
Jeu,  p.  VJ. 


QUELQUES  PARTICULARITÉS  DE  LA  LANGUE  PARLEE        igl 

porqué  se  me  figura  que  Paris  no  habîa  de  gustarme,  VI,  180  ». 
L'abus,  maintes  fois  constaté,  des  verbes  faussement  récipro- 
ques mène  à  la  création  des  verbes  essentiellement  pronomi- 
naux (No  ves  que  ella  se  aconseja  de  mî,  V,  189  ;  No  hay  dama  de 
calidad  en  Paris  que  no  tenga  a  su  servicio  un  negro,  desde  que 
Madame  Du  Barry  se  acompatia  en  todas  partes  de  su  Medoro, 
VI,  I  I  ;  Es  que  tii  también  bas  ido  à  creerte  de  mas  de  cuatro, 
XVII,  II),  Il  est  plus  fréquent  de  voir  des  verbes  actifs  trans- 
formés en  verbes  neutres  {atravesar,  atravesar  por;  créer,  créer 
en;  resistir,  resislir  à)  ou  des  verbes  neutres  changés  en  verbes 
actifs  (La  gente  habla  horrores  del  matrimonio,  I,  i/jS;  Si  no 
podias  quererme  dporqué  mentir  curino'},  III,  i-ô;  Su  muchacha 
de  ustedes  que  vieneâ  avisarles  a  ustedes  que  el  nino  pequeno  se 
ha  despertado...  y  no  puede  callarle  con  nada,  XVIII,  120).  La 
complication  des  formes  verbales  n'est  qu'apparente.  En 
réalité,  l'espagnol  cherche  à  créer,  pour  chaque  idée,  trois 
systèmes  de  constructions.  Beaucoup  de  verbes  ne  sont  pas 
encore  parvenus,  ou  ne  parviendront  jamais  au  terme  de  cette 
évolution.  Ils  se  contenteront  de  deux  types,  pronominal- 
impersonnel,  transitif-intransitif.  Il  est  facile,  néanmoins,  de 
prévoir  dans  quel  sens  pourront  se  faire  les  innovations.  En 
tout  cas  la  tendance  à  l'uniformité  est  bien  visible  dans  la  sup- 
pression du  régime  indirect  devant  les  propositions  subor- 
données. Consentir  en  que  devient  consentir  que  (De  ningûn 
modo  podia  yo  consentir  que  fuese  declarado  en  quiebra,  I, 
28).  Bien  que  le  groupe  de  que  soit  l'un  des  plus  stables  de 
la  langue,  on  commence  à  dire  seguro  que  au  lieu  de  seguro 
de  que. 

Prépositions.  Comme  les  substantifs,  elles  ont  une  tendance 
marquée  à  empiéter  sur  les  autres  catégories  grammaticales. 
On  les  emploie  souvent  comme  adverbes  (Ya  es  hora  de  que 
le  eche  â  usted  la  vista  encima,  i,  276).  Mais  elles  aspirent  sur- 
tout ù  remplacer  les  conjonctions".  En  suivi  du  gérondif  cor- 
respond au  français  pourvu  que;  {;  â  la  gente  de  Madrid,  en  ddn- 
dola  de  comer  y  en  divirtiéndola!...,  I,  187).  De  tient  la  place 

I.  â,  de,  con,  por,  sobre  servent  à  former  aussi  des  propositions  infinitives  à  sens 
conditionnel,  teaiporel,  causal,  etc.. 


lya  BULLETO    HISPANIQUE 

d'une  proposition  temporelle  (al  teatro,  como  de  chicos,  I,  Sy, 
çPiensas  llevar  de  casado  la  misma  vida  que  de  soUero^  l,  io3); 
ou  bien  causale  (,;  Ustedes  por  aquî?  —  Si,  de  curiosos  y  de 
personas  de  gusto,  11,  190)  ou  même  finale  (Si,  ya  noto  que 
andàis  siempre  juntos...  de  conspiraciôii,  por  lo  visto,  i,  6i). 
Con  peut  exprimer  une  idée  de  condition  (debemos  alegrarnos 
de  que  se  case.  Porque  la  felicidad  de  nuestra  hija  corrîa 
peligro  con  elki  libre  y  cerca  de  Enrique,  1,  iô/|)  ou  de  temps 
(Gonde  del  Encinar,  por  cesion  que  le  hizo  su  padre  al  volver 
de  la  universidad  de  Deusto  con  su  carrera  de  leyes  lerminada, 
{Fig.,  116). 

Il  est  à  noter  d'autre  part  que  les  prépositions  de,  «,  en,  por, 
con  éliminent  progressivement  toutes  les  autres.  Sohre  a  de  la 
peine  à  se  maintenir  devant  em  ;  à  et  con  suffisent  à  exprimer 
tous  les  rapports  d'avantage,  de  désavantage,  de  réciprocité, 
réduisant  d'autant  le  domaine  de  para  et  de  contra.  Quelques 
exemples  nous  permettront  de  rendre  manifeste  ce  genre 
d'usurpation.  Ex.:  «  Esta  muy  quejosa  contigo  (de),  1,  102  »  ; 
Pregunté  porqué  tu  madré  esta  furiosa  conndgo  (contra),  I, 
191  »  ;  Tendra  injlucncias  con  el  partido  libéral  (en),  V,  168  ». 
Enfin  nous  avons  montré  ailleurs  que  sin  arrive  à  former  avec 
des  substantifs  et  des  infinitifs  de  véritables  mots  composés, 
ce  qui  étend  singulièrement  son  emploi. 

De  tout  ce  qui  précède,  il  résulte  qu'il  n'y  a  pas,  dans  la 
langue  parlée,  de  créations  ex  nihilo.  Si  des  intlucnccs  étran- 
gères s'exercent,  c'est  principalement  et  presque  exclusive- 
ment en  ce  qui  regarde  le  vocabulaire.  Mais  de  la  plupart  des 
innovations  de  la  syntaxe  on  peut  dire  ou  bien  qu'elles 
étaient  contenues  en  germe  dans  la  tradition  des  siècles  précé- 
dents ou  bien  qu'elles  ne  consistent  que  dans  l'application  à 
une  nouvelle  catégorie  de  mots  d'une  tendance  reconnue  et 
consacrée  par  les  prosateurs.  11  n'y  a  pas,  en  eflet,  de  solution 

I.  Il  est  assez  rare  qu'où  puisse  rendre  le  français  sur  par  sobrr.  Ex.  :  "  Se  i^luvo 
un  ralito  con  la  tnano  en  cl  f)icaporlrfl,  ForUmnln  y  Jacinln,  :!,  ttin;  "  apoyarJH  niojiiia 
en  ci  pufio  »,  ibid  ,  a,  li'ii  ;  «  lamliicii  Icnia  un  nianlijn  iicyro  por  los  lionit)ro.s  »,  ihid. 
3,  -^37;  «  frciile  ii  la  e^lacioii,  una  senora  subidu  â  uu  coclie  rojo.  peroraba  y  olrpcia 
un  un^iienlo  para  las  heri<las  »,  P.  liaroja,  La  Buscu,  p.  ïi5. 


QUELQUES    PARTICULARITÉS    DE    LA    LA\GUE    PARLEE  I  qS 

de  continuité  entre  le  présent  et  le  passé,  pas  plus  qu'entre  les 
incorrections  du  peuple  et  les  rafïînements  des  classes  cultivées. 
L'intérêt  d'une  étude  générale  sur  les  écrivains  de  la  dernière 
heure  serait  de  montrer  en  quoi  l'évolution  de  l'espagnol 
ressemble  à  celle  des  autres  langues  romanes  et  comment, 
d'autre  part,  le  langage  inconscient  reste  fidèle,  même  dans 
ses  plus  grandes  hardiesses,  à  certains  principes  immuables, 
au  génie  même  de  la  race. 

G.  LE  GENTIL. 


VARIÉTÉS 


Le  site  antique  de  Costig  die  de  Majorque). 

Dans  le  courant  de  mai  1896,  D.  Juan  Vallespir,  en  nivelant  un 
champ  de  sa  propriété  de  Son  Corrô  à  Costig,  découvrait,  au 
milieu  d'un  amas  mégalithique,  les  fameuses  têtes  de  taureaux  qui 
enrichissent  actuellement  le  musée  de  Madrid.  Comme  la  presque 
totalité  des  trouvailles  archéologiques  dues  au  hasard,  celle-ci 
échappait  à  toute  constatation  scientifique  quant  aux  circonstances 
qui  en  avaient  accompagné  la  mise  au  jour,  et  l'inventeur  ne 
notait  aucun  indice  qui  aurait  pu,  dans  la  suite,  éclairer  l'étude  de 
ces  pièces.  L'une  des  premières  personnes  qui  se  sont  préoccupées 
de  la  découverte,  M.  Bartolomé  Ferra,  y  consacre  à  peine  quelques 
lignes  dans  le  Buleiin  de  la  Sociedad  arqueolôgica  hitiana  •  et  encore  ne 
tire-t-il  aucune  conclusion  de  son  bref  communiqué.  Il  m'a  donc  paru 
intéressant  de  présenter  ime  courte  description  de  ce  site  devenu 
célèbre,  puisque  aucun  auteur  n'en  a  tenté  l'essai. 

J'ai  visité  Costig  en  1909,  après  avoir  étudié  et  relevé  les  plans 
d'environ  deux  cents  talayots  ou  enceintes,  épars  dans  l'île  de 
Majorque.  La  plupart  de  ces  groupements  m'avaient  laissé  l'impres- 
sion d'oeuvres  vastes  et  combinées  pour  les  besoins  de  la  défense, 
mais  aucune  ne  me  paraissait,  en  face  de  Costig,  avoir  retenu  aussi 
longtemps  la  préférence  de  ses  habitants. 

Le  village  est  construit,  entre  Inca  et  Sineu,  sur  un  plateau  peu 
élevé  qui  domine,  au  nord-est,  le  site  antique.  L'ensemble  des  talayots 
occupe  le  fond  de  la  vallée  et  les  coteaux  qui  l'enserrent.  A  l'est,  une 
chaîne  de  collines,  premiers  contreforts  des  montagnes  qui  séparent 
la  plaine  d'Inca  de  celle  de  Manacor;  au  sud  et  à  l'ouest,  une  série  de 
monticules  aux  flancs  escarpés  guident  le  cours  d'un  ruisseau  vers 
le  lit  du  rio  Garros.  On  rencontre  les  talayots,  tantôt  sur  les  plateaux 
du  sud,  tantôt  au  niveau  même  de  la  plaine;  ils  ne  sont  point  dissé- 
minés, mais  groupés  par  quatre  ou  cinq,  comme  s'ils  formaient  des 
nécropoles  distinctes.  Les  races  qui  les  ont  édifiés  et  terminés  n'ont 
point  compris  l'utilité  d'une  défense  supplémentaire,  puisque  les 
accidents  géologiques  présentaient,  par  eux-mcnies,  une  fortification 
naturelle.  En  elfet,  tous  ces  petits  plateaux,  isolés  les  uns  des  autres, 
sont  bordés  de  falaises  hautes  de  deux  à  cinq  cents  mètres  et  dillicilc- 
ment  accessibles.  Les  monuments  quadrangulaires  n'ollront,  ni  par 

1,   l'aima  de  Malinrca,  junio  de  1895. 


VARIETES  190 

leurs  dimensions,  ni  par  leur  orientation  des  caractères  techniques 
qui  pourraient  les  différencier  d'un  modèle  répandu  dans  Tîle  entière  ; 
ils  demeurent  sous  la  protection  d'un  ou  de  deux  talayots  ronds  qui 
s'élèvent  sur  la  colline  dont  le  front  domine  la  sortie  du  cirque.  Dans 
la  vallée,  quatre  constructions  quadrangulaires  paraissent  isolées,  c'est 
dans  l'une  d'elles  qu'ont  été  découvertes  les  têtes  de  taureaux. 


Le  site  de  Costig. 


11  apparaît  donc  que  l'antique  Costig,  abrité  des  vents,  alimenté  par 
une  source  abondante,  et  situé  presque  au  centre  de  l'île,  conditions 
que  ne  réunissent  ni  les  centres  d'Artâ  ou  de  Pollensa,  ni  ceux  de  Lluc 
Mayor,  devait  attirer,  de  fous  côtés,  les  peuplades  contemporaines,  et 
l'on  comprend  qu'on  ait  apporté  un  soin  particulier  à  l'architecture 
du  talayot  principal,  devenu,  avec  ses  magnifiques  ex-voto  un  lieu 
de  pèlerinage  renommé.  Aucune  donnée  n'en  permet  malheureuse- 
ment la  reconstitution  même  approximative,  mais  il  est  à  croire  que 
la  construction  primitive  avait  été  remaniée,  évidée,  et  que  les  piliers 
rudimentaires,  en  partie  retrouvés,  supportaient  une  couverture  modi- 
fiée. J'ai  étudié  ces  cas  de  remaniement  par  des  civilisations  succes- 
sives et  je  n'y  insisterai  point'.  Les  restes  de  cet  édifice  (A)  se 
distinguent  au  pied  de  l'un  des  plateaux,  au  long  de  rochers  abrupts 
où  les  blocs  d'un  mur  sont  superposés  suivant  les   règles  connues; 

I.  lievue  archéologique,  1909,  t.  XIV,  p.  333  :  Contribution  à  l'étude  des  monuments 
firimilifs  des  Baléares. 


19')  BULLETIN    HISPANIQUE 

parallèlement,  à  onze  mètres,  les  substructions  dune  muraille 
analogue  sont  encore  visibles  et  l'aspect  des  angles  autorise  à  penser 
que  ces  murs  étaient  reliés  en  équerre.  Nous  voici  en  présence  du  plan 
et  des  dimensions  d'un  talavot  quadrangulaire,  les  spécimens  voisins 
affectent,  du  reste,  la  même  forme  et  les  mêmes  mesures.  Primitive- 
ment aucune  recherche  de  style  ne  le  caractérisait,  ce  n'est  que  plus 
tard  que,  grâce  à  sa  position  spéciale  un  peu  au-dessus  de  la  plaine  et 
pas  encore  sur  le  plateau,  il  a  été  distingué  et  reconstruit.  Peut-être, 
à  cette  époque,  en  a-t-on  fait  un  temple  vénéré,  prêt  à  recevoir  des 
offrandes  importantes  et  riches.  Actuellement  les  fragments  do 
colonnes,  au  nombre  de  treize,  gisent  à  la  file  et  retiennent  de  leur 
masse  les  terres  du  champ.  M.  Ferra  les  a  vues  en  place,  mais  la 
disposition  irrégulière  dans  laquelle  elles  se  trouvent  sur  son  croquis 
permettent  déjuger  qu'elles  étaient  déjà  déplacées. 

En  l'état  actuel  de  la  science,  je  suis  donc  amené  à  supposer  que  les 
bronzes  ont  été  découverts  dans  un  talavot  commun,  adapté  par  des 
besoins  différents  à  un  nouvel  usage;  que  ce  monument  avait  perdu 
sa  destination  primitive  de  mausolée,  puisque  l'intérieur  en  était  acces- 
sible alors  que  les  plus  anciens  monuments  étaient  pleins  ;  que  la 
valeur  des  découvertes  qu'on  y  a  faites  était  le  signe  de  sa  réputation. 
Ce  cas  ne  doit  pas  être  isolé,  il  est  presque  certain,  que  des  fouilles 
conduites  scientifiquement  dans  un  grand  nombre  de  talayots  donne- 
raient des  résultats  analogues,  sinon  en  richesse,  du  moins  en  intérêt, 
et  apporteraient  un  contingent  réel  d'objets  précieux  à  l'élude  des 
civilisations  méditerranéennes.  ^  _ç;,j    WATELIN. 


Les  pointes  de  lances  représentées  sur  les  stèles  funéraires. 

M.  Juan  Cabré,  le  très  actif  explorateur  de  la  Celtibérie,  a  publié" 
plusieurs  stèles  funéraires  trouvées  dans  la  province  de  Toruel,  sur 
lesquelles  sont  représentées,  arrangées  en  plusieurs  zones  superposées, 
des  pointes  de  lances  ou  javelots.  Il  me  semble  qu'un  passage  d'Aris- 
tole  donne  le  commentaire  de  cette  curieuse  représentation.  Aristote 
dit  en  parlant  des  peuples  guerriers,  noXiTix-r;  VII  2-5  (p.  iSaZj  G)  :  |v  cà 
-clz'l^Tip'Zv/  IOv£i  TuoAsixiy.ô)  tojoûtO'jç  tôv  àp',0[J.cv  c^zKhy.O'j:  y.x-a.r^r^-^vdz'jzi 
r.zoX  Tbv  Taçov  otsuç  xv  o'.aa-Os'.pY;  Toiv  r.z\z\)Mù^.,  c'est-à-dire  :  «  Chez  les 
Ibères,  peuple  belliqueux,  on  fixe  autour  du  tombeau  tel  nombre  de 
pointes  de  lances  que  le  défunt  avait  tué  d'ennemis.  »  11  semble  bien 
que  ces  pointes  de  lances  représentées  sur  la  stèle  remplacent  les 
pointes  placées  autour  du  tombeau.  ^   SCHULTEN. 

I.  liolelin  de  lihloria  y  geografia  del  bajo  Aragnn,  1908.  Une  dos,  stèles  a  été 
reproduite  par  P.  Paris  dans  l'Arcluii)l.  An:eiger,  lyio,  p.  agi;  cl'.  Bulletin  hispanique, 
19(1,  p.  i5,  fig.  8. 


VARIETES 


Ï97 


Rochers  de  Penalba. 


Rapport  à  M.  le  Directeur  de  l'École  française  d'Espagne 
sur  une  mission  à  Penalba  (Teruel). 

Monsieur  le  Directeur, 

Sur  votre  proposition,  l'Université  de  Bordeaux  a  bien  voulu  me 
confier  la  mission  d'aller  examiner  les  gravures  rupestres  découvertes 
au  mont  de  Penalba,  près  de  Teruel,  par  M.  Juan  Cabré.  A  en  juger 
par  les  renseignements,  les  photographies  et  les  calques  qui  vous 
avaient  été  communiqués  par  M.  l'abbé  Breuil,  et  que  vous  m'aviez 
transmis,  il  y  avait  là  un  ensemble  de  documents  énigmaliques, 
d'époque  et  de  signification  incertaines,  dont  l'étude  directe  pouvait 
être  intéressante.  C'est  de  cette  mission  que  j'ai  maintenant  à  vous 
rendre  compte. 

Mon  premier  devoir  était  de  me  mettre  en  relation  avec  M.  Cabré, 
le  seul  archéologue  qui  connût  les  gravures  de  Penalba,  signalées  par 
lui  à  la  Academia  de  la  Historia  dès  le  12  novembre  1909  {Bol.  Acad. 
Hist.,  LV,  1909,  p.  5/j4).  Mais  ses  occupations,  au  moment  où  la 
mission  me  fut-confiée,  l'avaient  appelé  hors  de  la  province  de  Teruel, 
et  c'est  à  Madrid  que  je  pus  le  voir  et  m'entretenir  avec  lui  de  sa 
découverte.  Quel  que  fût  mon  désir  de  visiter  Penalba  en  sa  com- 
pagnie, je  dus  renoncer  à  le  réaliser,  et  M.  Cabré  n'était  pas  à  Teruel 
quand  j'y  allai,  au  mois  de  septembre  dernier.  Dans  l'intervalle,  il 
avait  publié  dans  le  Boletin  de  la  Academia  de  la  Historia  un  article, 
accompagné  de  nombreuses  illustrations,  sur  La  moniana  escrita  de 
Penalba  (L\\,  1910,  p.  241-208). 


198  BULLETI>'    HISPANIQUE 

En  l'absence  de  M.  Cabré,  un  de  ses  amis,  M.  Salvador  Gîsbert, 
secrétaire  de  la  Comisiôn  de  Monumentos  de  Teruel,  me  renseigna 
sur  le  chemin  à  suivre  pour  arriver  à  la  ((  montana  escrita  ».  Je  savais 
que  je  ne  trouverais  plus  en  place  toutes  les  gravures  observées  par 
M.  Cabré  :  depuis  que  les  recherches  de  M.  Cabré  avaient  attiré 
l'attention  sur  les  rochers  de  Penalba,  il  était  devenu  nécessaire  de 
protéger  les  gravures  contre  la  curiosité  des  gens  du  pays.  Les  pierres 
les  plus  intéressantes  avaient  été  sciées  et  détachées  de  la  roche,  pour 
être  mises  en  lieu  sûr  :  une  vingtaine  avaient  été  emportées  par 
M.  Cabré  à  Calaceite;  deux  pierres,  avec  de  petites  inscriptions, 
étaient  chez  M.  Gisbert,  qui  me  les  montra;  cinq  ou  six  étaient 
conservées  au  village  de  Villel,  à  quelques  kilomètres  de  Penalba. 
La  visite  de  Penalba  n'en  restait  pas  moins  indispensable,  autant  pour 
examiner  la  situation  des  rochers  que  pour  voir  les  gravures  restées 
en  place. 

Le  mont  de  Penalba  se  trouve  sur  le  territoire  de  la  commune  de 
Villastar,  à  quatre  kilomètres  environ  du  village,  qui  est  lui-même 
à  huit  kilomètres  de  Teruel.  La  route  de  Teruel  à  Villastar  descend 
la  rive  droite  du  Turia;  la  vallée  est  fertile  et  ne  manque  pas  d'arbres. 
Mais  dès  qu'on  a  quitté  la  route  pour  s'élever  vers  Penalba,  on  marche 
sur  un  sol  caillouteux  où  ne  pousse  qu'une  herbe  rare.  De  Penalba 
l'on  découvre  au  loin  le  pays,  et  le  contraste  est  frappant  entre  la 
gaieté  de  la  vallée  que  l'on  domine  et  l'aridité  morne  des  hauteurs. 

Les  rochers  de  Penalba  s'étendent  sur  une  longueur  d'environ 
3  kilomètres;  ils  forment,  immédiatement  au-dessous  du  sommet  de 
la  montagne,  un  escarpement  de  hauteur  variable,  et  c'est  sur  cette 
sorte  do  falaise  qu'ont  été  gravés  les  dessins  et  les  inscriptions. 
L'orientation  générale  est  du  nord-est  au  sud-ouest. 

Cotte  roche  est  un  calcaire  très  tendre,  facilement  rayable  à  l'ongle. 
Les  instruments  les  plus  rudimenlaires  suffisent  pour  y  graver  des 
traits  durables.  Les  bergers  et  les  chasseurs  qui  fréquentent  Penalba 
y  ont  inscrit  en  plus  d'un  endroit  leur  nom  et  leur  date  de  visite.  Je 
notai  (luelquesunos  de  ces  inscriptions,  les  unes  remontant  ù  une 
cinquantaine  d'années,  les  autres  toutes  récentes.  Je  reconnus  aussi 
plusieurs  dessins  d'origine  également  moderne,  surtout  des  silhouettes 
humaines  grossièrement  indiquées. 

Sur  d'autres  points,  je  retrouvai  les  gravures  beaucoup  plus 
anciennes  que  je  connaissais  déjà  par  les  calques  et  les  reproductions 
de  M.  Cabré  :  représentations  d'animaux,  cupules,  combinaisons 
diverses  de  lignes.  Mais,  ainsi  cjue  j'en  étais  averti,  les  figures  les 
plus  curieuses  avaient  été  enlevées,  et  des  surfaces  unies  et  blanches 
en  marquaient  l'emplacement. 

Par  terre,  au  pied  du  rocher,  je  ramassai  un  petit  fragment  de 
céramique   peinte,  (était  un   tesson  arabe.    M.   Cabré,  à  tjui  je  l'ai 


VARIETES 


199 


montré  par  la  suite,  m'a  dit  n'avoir  trouvé  aucun  autre  vestige  arabe 
à  Pefialba.  Mais  le  village  voisin  de  Villel  a  été  occupé  par  les  Arabes  : 
le  castillo  ruiné  qui  le  domine  date  en  partie  de  leur  époque. 

Après  avoir  suivi  l'escarpement  rocheux,  j'allai  jusqu'à  Villel.  11  me 
fut  impossible  de  voir  les  pierres  qui  y  sont  conservées.  La  personne 
qui  détenait  la  clef  du  local  où  elles  sont  déposées  était,  me  dit-on, 
absente  pour  plusieurs  jours. 

Je  pus  obtenir  des  renseignements  complémentaires  en  allant, 
quelques  semaines  plus  tard,  voir  M.  Cabré  à  Calaceite,  où  est  sa 


Fig.  I.  —  Falaise  couverte  de  dessos  et  i.><criptio>s. 


résidence  habituelle.  La  bourgade  de  Calaceite  est  dans  le  nord  de  la 
province  de  Teruel,  sans  communication  directe  avec  Teruel,  et  loin 
du  chemin  de  fer;  des  voitures  publiques  y  conduisent  de  la  gare 
d'Alcaniz  et  de  celle  de  Tortose.  —  M.  Cabré  me  montra  plusieurs  des 
pierres  provenant  de  Penalba  qu'il  conserve  chez  lui;  je  feuilletai  en 
outre  sa  collection  de  photographies,  de  calques  et  de  dessins. 

De  ces  diverses  observations,  voici  les  constatations  que  je  peux 
dégager  : 

Il  y  a  lieu  d'abord^  étant  données  la  nature  de  la  roche  et  la  faible 
profondeur  d'une  partie  des  gravures,  d'examiner  soigneusement 
chaque  dessin^  afin  de  ne  pas  confondre  les  rayures  accidentelles  de 
la  pierre  avec  les  traits  marqués  intentionnellement  ;  il  y  a  lieu  d'éli- 
miner en    outre  un  certain    nombre  de  gravures  d'origine  récente. 


200  BULLETIN    HISPANIQl  E 

parmi  les  figures  formées  de  lignes,  les  signes   cruciformes  el   les 
silhouettes  humaines. 
Ces  précautions  prises,  il  reste  à  étudier  un  ensemble  important  de 


fe^ 


Fiof.  3.  —  Chevaux. 


gravures  :  cupules,   lignes  diversement  disposées  et  groupées  {Bol., 
l.   /. ,    p.    2/18),    représentations   rudimentaires  d'animaux,    dont  les 


Fio;.  3.  —  U>  COQ. 


Fiof.  ''1.  SiLHOL'FTTFS  HUMAINFS. 


plus  nettes  sont  des  images  de  cerfs  (flg.  5),  de  chevaux  (fig.  2)  et 
d'oiseaux  (ftg.3)  (ihid.,   p.  350-252),   silhouettes  humaines  le  plus 


N 


f=^\ 


Fig.  5.  —  Cfrfs  ft  Inscriptions  latinfs. 


souvent  très  maladroites  ffîg.  U)  (ibid.,  p.  254),  inscriptions.  C'est 
parmi  les  représentations  animales  et  les  inscriptions  que  se  trouvent 
les  gravures  dont  l'aspect  est  le  plus  antique. 

De  ces  inscriptions  les  unes  sont  en  caractères  latins  cursifs,  et  l'on 


VARIETES 


y  reconnaît  des  lettres  ou  des  groupes  de  lettres  :  agilis  (p.  354, 
n"  i3),  turros,  turios  ou  turos  (p.  256  et  257,  n"  20),  cuandos  (p.  257, 
n'  17),  etc.  Sur  la  reproduction  publiée  par  M.  Cabré,  /.  /.,  p.  300  et 
267,  d'une  pierre  dont  je  n'ai  pas  vu  l'original,  je  reconnais  un  vers 
de  Virgile  {En.,  11,  268)  ffig.  5J  : 

tempus  eral  quo  prima  qiiies  morlalibus  aegris 

et,  plus  bas,  en  caractères  plus  grands  :  iiescio  qui.  Daulres  inscrip- 
tions semblent  se  composer  de  caractères  ibériques  plus  ou  moins 

V\g.  G.   —    InSCIUPTION    lBtRIQI,E(?) 

déformés  (p.  357,  n"  20;  (Jlg.  Oj.  D'autres  enfin  sont  une  réunion  de 
signes  que  je  ne  sais  à  quel  alphabet  rattacher  (p.  259)  (Jig.  7i. 
D'après  ce  que  m'a  dit  M.  Cabré,  le  P.  Fila  préparc  une  étude  sur 
tous  ces  textes  :  j'ignore  oii  en  est  ce  travail. 

Ce  qu'il  faut  noter,  c'est  qu'aucune  de  ces  incriptions  n'est  gravée 
en  caractères  réguliers  et  d'aspect  monumental  :  partout  les  signes 
sont  de  petite  taille  et  peu  profonds.  Les 
dessins  sont  aussi,  le  plus  souvent,  de  dimen- 
sions très  restreintes.  Inscriptions  et  dessins 
ne  sont  que  des  graffiti. 

Aucune  monnaie,  aucun  objet  n'a  été  trouvé  //  l< 


ti^^.i^^ 


au   voisinage  des   rochers;   le   tesson  arabe  /(   (/,  >  , 

mentionné  plus  haut  ne  prouve  pas  grand'-  /     1 /l  v 

chose.  ^  I 

En  résumé,  il  y  a  encore  beaucoup  d'in-  pj„ 

connues  à  résoudre  pour  éclaircir  le  sens  des         l-«scriptio>  kn  LA^GLE 
gravures  de  Penalba.  Ce  que  l'on  peut  dire  inconnue. 

dès    maintenant,    sans   trop   craindre   de    se 

tromper,  c'est  que  ces  rochers  étaient  fréquentés  à  l'époque  romaine, 
et  vraisemblablement  aussi  au  Moyen-Age,  comme  ils  sont  encore 
fréquentés  de  nos  jours,  par  des  gens  qui  y  passaient  mais  n'y  séjour- 
naient pas,  et  laissaient  en  graffiti  hâtifs  la  trace  de  leur  passage. 
Quant  à  tenter  une  explication  d'ensemble  des  dessins  qui  semblent 
les  plus  anciens,  comme  l'a  fait  M.  Cabré  dans  le  Boletin,  ce  ne 
peut  être  en  ce  moment  qu'une  recherche  extrêmement  conjecturale. 

Ces  conclusions,  Monsieur  le  Directeur,  comportent,  comme  vous 
le  voyez,  beaucoup  plus  de  réserves  que  d'affirmations  positives.  Je  me 


3Ô3  BULLETIN    HISPANIQUE 

félicite  du  moins  que  cette  mission  m'ait  amené  à  visiter  la  région  de 
Calaceite,  si  riche  en  vestiges  ibériques,  comme  vous  l'avez  indiqué 
dans  Y Archaologischer  Anzeiger.  M.  Cabré  m'a  fort  obligeamment 
guidé  dans  ces  stations  qu'il  connaît  très  bien  :  les  traces  d'une  occu- 
pation ancienne  sont  visibles  en  un  grand  nombre  d'endroits,  sur  les 
collines  incultes  ou  dans  les  champs  d'oliviers.  Les  restes  d'habi- 
tations, les  sépultures,  les  stèles,  la  céramique,  les  petits  bronzes 
fournissent  un  important  ensemble  de  renseignements  sur  la  civili- 
sation de  cette  contrée  à  l'époque  ibérique.  11  ne  serait  pas  étonnant 
que  les  plus  étranges  parmi  les  figures  gravées  à  Peiîalba  fussent 
éclaircies  un  jour  par  les  documents  que  M.  Cabré  continuera  à 
recueillir  autour  de  Calaceite. 

Veuillez  agréer.  Monsieur  le  Directeur,  l'expression  de  mon  respec- 
tueux dévouement. 

E.  ALBERTINI, 

M(Miibre  de  l'École  française 
d'Espagne. 


Serranillas  d'un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  royale 
de  Madrid. 

Le  manuscrit  2  F5  (olim  VII  A,  )  de  la  Bibliothèque  du  Palais,  à 
Madrid,  contient  une  dizaine  de  serranillas.  Quelques-unes,  celles 
qu'écrivirent  Bocanegra,  Diego  Hurtado  de  Mendoza  et  le  marquis  de 
Santillana,  sont  connues  grâce  à  Amador  de  los  Bios.  Les  autres,  au 
nombre  de  trois,  sont  encore  inédites.  Nous  avons  pensé  être  utile, 
en  les  publiant,  à  ceux  qu'intéresse  l'histoire  de  la  serranilla.  Nous 
les  publions,  d'ailleurs,  en  leur  laissant  scrupuleusement  l'ortho- 
graphe du  manuscrit,  et  sans  corriger  les  fautes  évidentes  qu'elles 
présentent. 

Serrana  el  comendador  de  Segura. 

De  Lozoya  a  Navafria 
acerca  de  un  colincnar 
tope  serrana  que  amar 
todombre  codicia  avria 

A  la  quai  desqne  llcgue 
■"   pregunte  siéra  casada 
respondio  no  ent)ucnafc 
nin  tan  poco  dcsposada 
que  a  un  oy  en  este  dia 
mi  padre  lo  va  fablar 
aqui  çerca  a  un  lugar 
con  fixo  de  .tohan  Garcia 

(fol.    13.) 


VARIETES  200 


Garcia  de  Pedraza. 


Serrana  si  vos  queredcs 
dexar  destos  su  consexa 
yo  fare  que  vos  casedes 
con  fixe  de  nyngo  vexa 
creet  que  grant  bien  séria 
quelo  fuesemos  iamar 
car  mas  vale  su  solar 
que  de  otros  gran  valia. 


Serrana  Mendo  de  Campo. 

Vy  una  serrana 
al  pie  duna  sierra 
epor  me  dar  guerra 
de  mores  mengana 

Vi  tal  graciossa 
serrana  estar 
que  nunca  su  par 
vy  ny  tan  fermossa 
gentil  et  geytossa 
que  desque  naçi 
nunca  yo  tal  vy 
por  ende  me  condana. 


(fol.  13  yt".) 


(fol.  t3  vto.) 


Au  folio  94  se  trouve  la  «  Respuesta  de  Goniez  Carzillo  Dagman  »  à 
la  serranilla  du  marquis  de  Sanlillana  qui  commence  par  le  vers 

Madrugando  en  Robledillo 

(fol.  93  vio.) 

Amador  de  los  Rios  n'ayant  pas  reproduit  cette  réponse,  écrite, 
selon  l'usage,  «  por  los  mismos  consonantes  »  nous  la  recopions 
ci-dessous. 

Respuesta  de  Gomez  Carzillo  Dagman, 

Senyor  yo  me  maravyllo 
siendo  vos  galan  onrrado 
este  fecho  tan  poquillo 
aver  vos  tan  agradado 


La  que  un  sentido  apanyé 
esto  no  tomes  por  glosa 


30^  BULLETIN'    HISPANIQUE 

que  no  biuen  loda  Espanya 
senyora  mas  generossa 
^  y  fermosa  cosastranya  ' 

si  alguna  desto  sensanya 
loela  su  namorado 


(fol.  r,4.) 


Signalons  enfin  que  l'on  peut  lire  au  folio  82,  avec  le  litre  de  «  Otro 
désir  de  Suero  de  Hibera  »,  le  «  villancico  »  du  marquis  de  Sanlillana 
('  â  unas  très  lijas  suyas  »  lAniador  de  los  Ki'os —  Obras,  page  ^61). 
Cette  poésie  n'étant  donnée  par  aucun  des  manuscrits  qui  contiennent 
les  œuvres  du  marquis  et  étant  attribuée  à  Suero  de  Ribera  par  un 
manuscrit  antérieur  à  i445  «  siendo  probable  que  fuese  uno  de  los 
libros  donde  el  marqués  hizo  buscar  las  canciones  é  decires  compues- 
tos  en  su  juventud  para  remitirlas  al  Condestable  de  Portugal» 
(Aniador  de  los  Rios  —  Obras,  page  CLXV),  il  y  a  lieu  de  penser  que 
c'est  Suero  de  Ribera  qui  l'a  composée. 

G.  MARTIN. 


La  Renaissance  eu  Espagne  et  en  Portugal. 

L'art  qui  a  llcuri  dans  la  Péninsule  ibérique,  depuis  le  milieu  du 
\\'  siècle  jusqu'au  milieu  du  xvi',  est,  comme  le  dit  son  plus  récent 
historien,  une  «  \égétation  merveilleusement  touffue  ».  Celui  qui 
arriverait  à  débroussailler  ce  maquis,  à  y  tracer  (juelques  avenues 
maîtresses  et  à  y  placer  quelques  tables  d'orientation,  serait  une 
manière  de  c  conquistador  »  rendant  accessible  un  nouveau  monde. 
C'est  à  cette  tâche  méritoire  que  s'est  employé  M.  Emile  Bertaux  dans 
le  livre  Mil  de  V Histoire  de  l'Arl,  publiée  sous  la  direction  de 
M.  André  Micheb. 

Son  étude  embrasse  deux  périodes  coïncidant  à  peu  près,  l'une, 
avec  le  règne  des  «  Rois  catholicpies  »,  Ferdinand  el  Isabelle  (1/17'»- 
i5i6),  l'autre  avec  le  règne  de  leur  pelit-fils  Charles-Ouinl(ir)i<)-i556). 
«  .\vant  la  Renaissance  »,  c'est  l'art  du  Nord,  en  particulier  celui  de 
la  l''landre,  qui  s'associe  aux  traditions  indigènes.  Puis,  vient  «  La 
Renaissance  »,  et  c'est  alors  de  ritalie  que  pari  le  souflle  de  transfor- 
mation. 

1.  Ln  arcliileclure,  la  prise  de  Grenade  (i4;).ij  ne  uiel  nullement  fin 
à  la  suprématie  artistique  exercée  par  les  Mores.  Le  style  «  mudéjar  » 
persiste;  mais  il  se  combine  avec  le  gothique  flamboyant.  Exemples 

I.   Le  sivièmo  vers  iJc  lii  dciixièiiio  str<)[)Iic  marKiiic. 

■j.    Tome  IV,  2*  i)arlic,  p.  Xi7-<j<ji.  Armand  Colin,  uililciii,  Paris,  l'jii. 


VARIETES»  2O0 

de  ces  créations  composites  :  le  palais  du  duc  de  l'Infanlado  à  Guada- 
lajara  ;  —  la  tour-lanterne  ou  «  cimborio  »  de  la  cathédrale  de  Burgos. 
Ici,  les  «  voûtes  arachnéennes  sont  de  la  dentelle  de  pierre.  Le  réseau 
des  dessins  rectangulaires  tendus  entre  les  nervures  répète  les  motifs 
mudéjars  des  toiles  espagnoles,  décorées  de  jours  de  fil  tiré  »  (p.  828); 
—  le  sanctuaire  de  San  Juan  de  los  Reyes,  à  Tolède,  avec  sa  phalange 
d'aigles  porte-écussons,  transportant  dans  leur  frise  héraldique  «  la  loi 
qui  régit  la  génération  des  polygones  sur  les  murailles  de  l'Alham- 
bra  »  (p,  842)  ;  —  le  tombeau  royal  de  l'église  de  Miraflores,  où  des 
figures  d'un  symbolisme  gothique  reposent  sur  une  étoile  à  huit 
pointes  de  tracé  mudéjar  (p.  845). 

Cet  art  des  Rois  catholiques,  dont  Juan  Gûas,  à  Tolède,  et  Gil  de 
Siloé,  à  Burgos,  sont  les  principaux  représentants,  n'a  pas  encore  de 
nom  dans  l'histoire.  M.  Emile  Berlaux  propose  de  lui  attribuer  celui 
de  la  reine  pour  le  compte  de  qui  s'opéra  le  plus  souvent  cette  union 
des  formes  de  l'Orient  et  de  l'Occident.  On  peut  l'appeler,  en  effet,  ((  le 
style  Isabelle  >^. 

Le  mudéjar  espagnol  a  pour  équivalent  portugais  le  moiirisco.  Mais, 
sous  Manuel-le-Fortuné,  qui  fut  un  impétueux  bâtisseur  (Capellas 
imperfeitas  de  Batalha,  tour  de  Bélem,  église  deThomar),  les  grandes 
découvertes  maritimes  intluent  à  leur  tour  sur  l'inspiration,  et  l'Orient 
arabe  se  double  monstrueusement  de  l'Orient  hindou.  Le  style 
«  manuélin  »  est  une  architecture  de  périple,  où  les  motifs  empruntés 
à  la  vie  pittoresque  des  ports  fusionnent  avec  tout  ce  qu'en  ses 
abîmes  l'Océan  renferme  d'algues,  de  monstres  et  de  coraux. 

On  sait  quelle  prédilection,  aux  temps  minoens  et  mycéniens,  les 
artistes  de  l'Argolide  et  de  la  Crète  manifestèrent  pour  les  thèmes  de 
décoration  que  leur  offraient  la  flore  et  la  faune  de  la  mer.  Pareille 
frénésie  marine  renaît,  quelque  vingt-cinq  siècles  plus  tard,  à  l'autre 
extrémité  du  monde  méditerranéen,  cliez  les  riverains  du  Tagc  : 
((  (^)uand  le  Portugal  se  fut  ouvert  sur  la  grande  lioule  les  chemins  des 
richesses  fabuleuses,  l'art  portugais  retrouva  sur  l'Océan  et  jusque 
dans  ses  profondeurs  des  formes  aussi  mystérieuses  que  celles 
qu'avaient  ramenées  dans  leurs  antiques  filets  les  premiers  peuples 
de  la  mer  »  (p.  869). 

En  sculpture,  qu'il  s'agisse  de  la  sculpture  sur  pierre  des  mausolées 
ou  de  la  sculpture  sur  bois  des  retables  et  des  stalles  d'éghses,  la 
collaboration  des  imagiers  du  Nord  et  des  «  entalladores  »  du  Midi 
couvre  la  Péninsule  d'œuvres  que  singularisent  les  mêmes  alliages 
luxuriants.  Deux  de  ces  compositions  méritent  une  mention  spéciale  : 
la  sUleria  de  Tolède  et  celle  de  Coïmbre.  «  A  Tolède,  les  histoires 
religieuses  font  place  à  des  scènes  de  bataille  et  de  camp,  à  des  sièges 
et  à  des  redditions  de  villes  ;  les  armures  se  mêlent  aux  turbans.  C'est 
toute  la  guerre  de  Grenade,  une  épopée  en  miniature,  détaillée  avec 

buU.  hispan.  i4 


2o6  BULLETIN   HISPANIQUE 

une  naïveté  pittoresque»  (p.  833-83A).  A  Coïmbre,  la  frise  qui 
surmonte  les  stalles  du  chœur  de  Santa  Cruz  «  déroule  un  long 
panorama  d'îles  et  de  villes  fabuleuses,  de  vagues  portant  sur  leurs 
dos  monstrueux  des  flottilles  dont  les  voiles  montrent  les  emblèmes 
de  la  sphère  et  de  la  croix  »  (p.  861).  En  Portugal,  l'Odyssée  des  navi- 
gateurs prend  la  place  de  l'Iliade  des  Rois  catholiques  figurée  sur  les 
stalles  de  la  cathédrale  de  Tolède. 

Pour  la  peinture,  malgré  la  suprématie  qu'exercent  les  écoles 
flamandes,  plus  d'un  artiste  indigène  se  fait  jour.  Tel,  à  Lisbonne, 
Nuno  Gonçalves,  que  Francisco  de  Hollanda  mentionnait  en  i54<j 
dans  son  «  Tableau  des  célèbres  peintres  que  l'on  nonjme  les  Aigles  ». 
Ce  maître  original,  évocateur  puissant  de  l'épopée  portugaise,  était 
depuis  longtemps  tombé  dans  l'oubli  et  l'on  attribuait  uniformément 
ses  œuvres,  comme  celles  de  tous  ses  contemporains,  à  ^'asco  Fcr- 
nandes,  surnommé  le  u  Grand  Vasco  »,  lorsque  M.  José  de  Figuciredo 
retrouva  son  monogramme  et  lui  rendit,  au  palais  du  Patriarche,  le 
triptvque  des  Princes.  Tel,  un  autre  méconnu,  qui  signe  Barlolomeus 
Riihciis  et  dont  on  faisait,  au  lendemain  dune  exposition  de  Primitifs, 
soit  un  ((  Meistcr  Koth  »,  soit  un  «  Maître  Houx»,  quand  M.  Ramôn 
Casellas,  se  fondant  sur  une  Pielà  de  1^90  conservée  <lans  la  salle 
capitulaire  de  la  cathédrale  de  Barcelone,  montra  que  la  traduction 
latine  du  mol  c<  Rouge  »  s'appliquait  à  un  artiste  espagnol  et  désignait 
Bartolomé  «  Vermejo  »  de  Cordoue. 

H.  L'ilalianisalion  de  la  Péninsule  ibérique  commence  avant 
Charles-Quint.  On  l'observe  à  Tolède  dès  le  temps  où  cette  ville  avait 
Ximénez  pour  archevêque  :  u  Si  l'on  voulait  trou\er  iin  nom  pour  le 
style  qui  a  rapproché  en  Espagne  l'Islam  et  l'Italie,  comme  le  style 
Isabelle  avait  rapproché  l'Islam  et  l'Europe  du  Nord,  on  pourrait 
prendre  le  nom  même  du  cardinal  qui  fut  le  roi  d'Espagne  après  la 
mort  de  Ferdinand  »  (p.  «)ô4j.  Au  «  style  Ximénez  »  succède  le  «  style 
Charles-Quint»,  dont  l'emphase  redondante  et  surchargée  triomphe 
dans  les  églises,  les  palais  et  les  collèges  de  Salamanque. 

Tandis  que  l'architecture  s'abandonnait  à  une  décoration  d'or- 
ic\  rerie  (plaleresco)^  d'où  vint  la  qualification  de  style  «  plateresque  »,  la 
sculpture  adoptait  de  son  côté  «les  modèles  ilalo-antiques,  mais  pour 
les  revêtir  bicnlûl  de  couleurs  et  de  dorures  dont  la  richesse  était 
à  demi  orientale,  ou  pour  perdre  statues  et  groupes  dans  des  ordon- 
nances de  tombeaux  et  de  retables  dont  la  masse  démesurée  n'avait 
plus  la  clarté  latine  »  (p.  90:^). 

On  peut  citer,  comme  spécimens  de  cet  art:  le  monument  commé- 
muratif  de  l'évèque  \lfonso  de  Madrigal  dans  la  cathédrale  d'Avila, 
par  Vasco  de  la  Zarza,  œuvre  somptueuse  que  le  marbrier  florentin 
Dumcnico  Fancelli  vint  expertiser  en  i5i8;  —  le  mausolée  du  cardinal 


VARIETES  207 

Ximénez  dans  l'église  magistrale  d'Alcalâ  de  Henares,  par  Barlolonic 
Ordônez;  —  l'Eve  de  la  sllleria  de  Tolède,  par  Alonso  Berruguele,  le 
premier  disciple  espagnol  de  Michel-Ange,  disciple  infidèle,  qui  attrista 
plus  d'une  fois  par  un  réalisme  funèbre  les  leçons  qu'il  avait  reçues  de 
l'idéaliste  lerrlhilUà  du  maître;  l'autel  d'albâtre  de  la  cathédrale  de 
Huesca,  par  Damiân  Forment,  composition  d'une  richesse  éclatante 
où  l'auteur  «  unissait  la  nouvelle  religion  de  l'Italie,  le  culte  de  la 
gloire,  à  sa  dévotion  pour  la  vierge  »  (p.  9/49). 

Les  peintres,  comme  les  sculpteurs,  subissent  l'ascendant  italien. 
Deux  disciples  de  Léonard  de  Vinci,  Ferrando  de  Llanos  et  Ferrando 
de  l'Almedina,  imitent  le  sourire  de  la  Joconde.  Moins  servilc,  Pedro 
Berruguete,  le  père  d' Alonso,  tout  en  cédant  à  l'élégance  florentine, 
sait  exprimer  l'ascétique  passion  de  la  foi  castillane  dans  le  Saint 
Pierre  Martyr  en  prière  et  dans  le  Saint  Dominique  présidant  un 
aato  de  fé  peints  à  la  demande  de  l'inquisiteur  général  Tomâs  de 
Torquemada. 

Il  y  a  lieu,  dans  cette  vie  artistique  de  l'Espagne  au  xvi'  siècle,  de 
mentionner  le  rôle  joué  par  une  pléiade  de  Français,  dont  les  plus 
notables  sont;  Juan  de  Borgoiîa,  venu  de  l'une  des  provinces  compo- 
sant les  anciens  États  de  Charles  le  Téméraire;  —  Léon  Picard,  qui 
fut,  à  Burgos,  le  peintre  du  connétable  D.  liîigo  de  Velasco,  comme 
Jean  de  Bourgogne  avait  été,  à  Tolède,  celui  du  cardinal  Ximénez;  — 
Philippe  Biguerny,  du  diocèse  de  Langres,  l'auteur  du  Portement  de 
croix  de  la  cathédrale  de  Burgos  et  du  grand  retable  de  la  chapelle 
royale  de  Grenade  (achevé  avant  tôaG);  —  un  autre  sculpteur,  Juan 
de  Juniou  Jean  de  Jony,  peut-être  originaire  de  Joigny  en  Bourgogne, 
qui  travailla  pour  les  cathédrales  de  Ségovie,  de  Leôn  et  de  Salaman- 
que.  La  plupart  de  ces  artistes,  malgré  la  tyrannie  de  leur  éducation 
italienne,  n'ont  pu  se  défendre  contre  une  invincible  hispanisation  : 
«  Un  Philippe  Biguerny,  sans  perdre  sa  gravité  et  sa  douceur,  avait 
pris  à  l'art  castillan  la  richesse  de  sa  polychromie  et  la  grandeur 
démesurée  de  ses  retables;  lorsqu'il  a  célébré  les  Rois  catholiques, 
dans  leur  chapelle  de  Grenade,  ce  Bourguignon  s'était  fait  une  âme 
espagnole  »  (p.  980-981). 

En  dehors  des  aperçus  que  nous  venons  de  grouper,  on  trouvera 
dans  les  cent  soixante-quinze  pages  du  travail  de  M.  Emile  Bertaux  un 
abondant  répertoire  de  noms  et  d'œuvres.  Peut-être  même  nous  a-t-il 
à  cet  égard  trop  libéralement  comblés.  On  se  fût  accommodé  volontiers 
d'un  certain  nombre  de  sacrifices  si,  par  compensation,  l'auteur, 
après  avoir  élagué  des  unités,  s'était  complu  davantage  à  caractériser 
des  ensembles,  besogne  dans  laquelle  il  excelle  et  qui  forme  le  complé- 
ment naturel  de  toute  classification.  D'ailleurs,  hâtons-nous  de  le 
reconnaître,  cet  effort  de  synthèse,  qui  est  comme  la  plastique  de  la 
critique  d'art,   lorsqu'il  cède  le  pas  dans  le  texte  à  lénumération. 


3o8  BLLLETl.N    HISPANIQUE 

prend  sa  revanche  avec  l'image.  Les  cent  trente  gravures  qu'a  choisies 
M.  Bertaux,  et  dont  beaucoup  reproduisent  des  photographies  prises 
par  lui-mcine',  constituent  un  magnifique  album,  ou  plutôt,  pour 
conserver  la  langue  de  notre  sujet,  une  frise  de  sUleria,  aussi  expres- 
sive que  celles  de  Coimbre  et  de  Tolède. 

Georges  KADET. 


Herculano  et  l'histoire  des  Arabes. 

Le  volume  III  du  Boletim  da  Segiinda  classe  de  l'Académie  des 
sciences  de  Lisbonne  (1910)  contient,  entre  autres  articles  consacrés 
pour  la  plupart  à  Herculano,  une  très  intéressante  élude  de  M.  David 
Lopes,  Os  arabes  nas  ohras  de  Alexandro  Herculano.  Cette  étude  est 
divisée  en  six  parties,  dont  nous  regrettons  de  ne  connaître  que  les 
quatre  premières,  les  fascicules  \-l\  nous  étant  seuls  parvenus. 
Dans  la  première,  l'auteur  examine  la  transcription  des  noms  arabes 
employée  par  Herculano,  qui,  ignorant  tout  de  l'arabe,  na  pas  pu 
y  apporter  beaucoup  de  régularité  ni  d'exactitude.  Dans  la  seconde, 
il  s'agit  des  sources  arabes  qu'il  a  utilisées,  moyennant  les  traduc- 
tions, bien  entendu,  quand  ce  n'est  pas  de  seconde  main  qu'il  les  cite, 
quand  ce  n'est  pas  à  Conde  qu'il  s'en  rapporte  (Conde,  que  l'on  veut 
réhabiliter  aujourd'hui  en  rabaissant  Dozy,  son  Aristarque),  ou  à 
l'Almacary  interpolé  par  Gayangos  (bataille  de  Calatanazor),  ou 
à  Casiri,  ou  à  Moura.  Dans  la  troisième  partie,  M.  David  Lopes 
examine  un  à  un  les  noms  arabes  dans  les  œuvres  d'Herculano,  qui 
s'est  surtout  servi  d'Edrisi,  traduit  par  Joubert.  Enfin,  dans  la 
quatrième,  il  s'attache  à  quelques  points  inexactement  exposés  par 
l'historien  national  :  i"  L'histoire  d'ibn  Caci,  inspirée  par  Conde; 
2"  celle  de  (Jiraldo  sein  pavor,  d'après  (iayangos.  Or,  Conde  et 
Gayangos  l'ont  induit  en  erreur.  M.  David  Lopes  rétablit  sur  ces  deux 
question  la  vérité  d'après  les  textes.  En  ce  qui  concerne  Giraldo, 
il  donne  la  traduction  d'un  passage  d'Ibn  Sahib  Açala,  avec  le  texte 
arabe  (planche)  et  d'un  passage  dlbn  Caldun.  M.  David  Lopes 
trouvera  dans  la  Chronicjue  latine  des  rois  de  Castille,  en  cours  de 
publication  dans  le  Ballelin  hispann/ue,  un  passage  qui  confirme 
le  texte  dlbn  Sahib  Arala  touchant  la  prise,  par  Giraldo,  de  Trujillo 
et  Montânchez,  attribuée  par  Herculano  à  AfTonso  llenriques. 

G.  C. 

1.  L'auteur,  grâce  à  la  bienveillance  du  Gouvernemcnl  espagnol,  a  pu  consulter 
en  manuscrit,  dans  les  arcliives  du  Ministère  de  l'Inslruclion  publi(jue  à  Madrid, 
une  S(5ric  de  »talisliquc.->  monunicnlalos,  acrompagnces  de  photographies  et  tle  doru- 
menl!>,  qui  lui  ont  fourni  beaucoup  d'inédit.  L'Kspagnc^  est  le  pays  d(;s  trésors.  Noire 
École  des  liantes  Études  hispaniques  contribuera  c-flicacement  à  leur  publication. 


UNIVERSITÉS  ET  ENSEIGNEMENT 


Rapport  sur  les  concours  d'agrégation  d'espagnol 

et  du  certificat  d'aptitude  à  l'enseignement  de  la  langue  espagnole 

dans  les  lycées  et  collèges  en  1911. 

Monsieur  le  Ministre, 

J'ai  l'honneur  de  vous  soumettre  le  rapport  suivant  sur  les  épreuves 
écrites  et  orales  des  concours  d'agrégation  d'espagnol  et  du  certificat 
d'aptitude  à  l'enseignement  de  la  langue  espagnole  dans  les  lycées  et 
collèges  pour  la  présente  année  191 1. 

I.  AGRÉGATION 

Sept  candidats  seulement  étaient  inscrits  cette  année.  L'un  d'eux 
a  abandonné  après  avoir  subi  les  deux  premières  épreuves  écrites. 
Six  candidats  donc  se  disputaient  l'unique  place  qui  avait  été 
annoncée. 

A.  Epreuves  écrites.  —  i .  Le  texte  du  thème  tiré  d'un  roman  de 
Jules  Sandeau  {Madeleine,  XI,  6)  ne  présentait  aucune  de  ces  difficultés 
d'interprétation  ou  de  vocabulaire  qui  peuvent  faire  hésiter  le  meilleur 
candidat.  Le  sens  en  était  clair  et  la  langue  courante.  Il  ne  s'agissait 
donc,  dans  la  traduction,  que  d'être  correct  et  d'éviter  le  gallicisme, 
tout  en  restant  fidèle  au  texte.  Un  seul  candidat  cependant  a  franche- 
ment dépassé  la  moyenne  et  deux  l'ont  atteinte  tout  juste.  Une  seule 
note,  il  est  vrai,  a  été  vraiment  inférieure  et  a  accusé  une  préparation 
générale  manifestement  insuffisante. 

2.  Le  texte  de  la  version,  emprunté  aux  Carias  de  Sébastian  de 
Miîïano,  ne  contenait  pas  non  plus  de  véritables  difficultés:  les  hispa- 
nismes  ou  idiotismes  que  l'on  peut  y  relever  doivent  être  familiers 
à  quiconque  connaît  la  langue  plus  que  superficiellement.  Mais  le 
jury  a  été  peu  satisfait,  dans  l'ensemble,  de  cette  épreuve,  et  son 
impression  sur  ce  point  a  fortifié  cette  année  celle  que  lui  avaient 
laissée  les  concours  précédents.  On  croit  avoir  assez  fait  lorsque  l'on 


310  BUT.T.ETIN    HISPAMQIE 

a  rendu  en  gros  la  pensée  du  texte;  on  ne  tient  point  compte  des 
nuances,  du  tour  particulier,  de  la  couleur  générale  du  style:  on 
montre  une  inexpérience,  une  absence  de  méthode  et  souvent  une 
gaucherie  qui  semblent  dénoter  un  manque  d'entraînement  fâcheux. 
L'ensemble  des  copies  était  médiocre  :  une  seule  a  dépassé  légèrement 
la  moyenne.  11  y  a  évidemment  bien  des  progrès  à  faire  en  ce  genre 
d'exercices. 

3.  La  dissertation  espagnole  se  rapportait  assez  directement  à  l'une 
des  questions  du  programme.  Le  sujet  était  le  suivant:  H(,Hasta  tjué 
punto  las  ideas  morales  se  modificaron  en  Espana  durante  el  reinado 
de  Isabel  II,  y  en  que  confianza  podemos  tener  d  tos  costumbrisias  en 
ciianto  d  las  causas  que  originaron  dicha  evolucion?»  —  On  ne  pouvait 
songer,  sans  risquer  de  tomber  dans  un  développement  vague  et 
superficiel,  à  tracer  un  tableau  général  de  la  société  espagnole 
sous  Isabelle  II.  C'est  pourtant  un  écueil  que  n'ont  pas  su  éviter  la 
plupart  des  candidats.  Le  sujet  devait  être  restreint  à  l'étude  des 
modifications  essentielles  que  subirent  les  idées  morales  pendant  un 
règne  où  se  manifeste,  de  si  curieuse  façon,  l'Espagne  moderne.  Les 
peintures  que  nous  en  tracent  les  humoristes  contemporains  sont-elles 
une  caricature  imitée  de  modèles  étrangers,  ou  bien,  au  contraire, 
répondent-elles  à  une  réalité  exactement  observée?  C'était  toute  la 
([uestion.  La  copie  classée  la  première  (27  sur  /|0)  avait  le  mérite  de 
n'en  point  sortir,  mais  toutes  les  autres,  plus  ou  moins,  s'en  sont 
écartées  trop  souvent  pour  développer  des  lieux  communs  sans  préci- 
sion. Sauf  dans  une  copie,  la  forme  est  en  général  assez  facile  et 
mrme  correcte,  malgré  des  distractions  peu  excusables,  mais  elle 
manque  de  couleur  et  de  mouvement.  Les  transitions  sont  lourdes 
et  maladroites. 

A.  Disserlation  en  français.  «  Quelles  sont,  parmi  les  satires  litté- 
raires (en  vers  ou  en  prose)  des  Aiv,  WU'  et  wiii'  siècles,  celles  ipii 
rous  paraissent  particulièrement  intéressantes  pour  la  connaissance 
lies  doctrines  et  des  goûts  littéraires  de  ces  diverses  époques?  »  —  Ce 
sujet  ne  pouvait  surprendre  les  candidats  bien  préparés  sur  les  ques- 
tions portées  au  programme  de  l'année,  mais  il  était  difficile  aux 
autres  d'y  répondre  avec  quelque  précision.  Il  faut  reconnaître 
d'ailleurs  qu'un  seul  des  candidats  paraît  s'être  trouvé  dans  ce  dernier 
cas.  Aussi  a-t-il  remplacé  les  faits  trop  vaguement  connus  par  des 
aperçus  fantaisistes  et  des  développements  dont  la  prétention  dissimule 
mal  les  grossières  erreurs.  C'est  ainsi  que  l'on  fait  Jean  II  [iostérieur 
à  if\^A  et  que  l'on  prend  la  Comedietade  l*onza\)0\iv  wnt  pièce  île  théâtre. 
On  trouve  moyen  de  parler  des  aviateurs,  mais  on  ignore  Barahona  de 
Solo  el  Forner.  On  ne  saurait  se  montrer  trop  sévère  pour  de  telles 
improvisations.  Les  autres  copies  heureusement  témoignaient  d'une 
préparation  plus  sérieuse  et  d'une  érudition  plus  solide.  Elles  prêtaient 


UNIVERSITES    ET    ENSEIGNEMENT  2  l  l 

toutes  à  des  critiques  assurément:  l'art  d'ordonner  ses  arguments,  de 
grouper  les  faits,  de  faire  ressortir  avec  netteté  les  conclusions  de 
chacune  des  parties  de  la  dissertation  ou  la  conclusion  générale  de  la 
dissertation  manque  trop  souvent  ;  il  y  a  bien  des  oublis^  bien  des 
méprises  sur  l'importance  relative  des  faits.  L'expression,  rarement 
incorrecte  ou  barbare,  laisse  cependant  parfois  trop  à  désirer.  Mais, 
dans  l'ensemble,  les  qualités  compensent  les  défauts  ou  parfois 
même  l'emportent  sur  ces  derniers  :  aussi  ces  copies  sont-elles 
toutes  notées  entre  20  et  24,  et  c'est  un  résultat  dont  le  jury  ne  peut 
que  se  féliciter. 

B.  Epreuves  orales.  —  Le  petit  nombre  des  candidats  ayant  fait 
toutes  les  épreuves  écrites,  et  une  coupure  assez  nette  entre  celui  (\m 
arrivait  en  seconde  ligne  et  le  troisième,  ont  décidé  le  jury  (le  nombre 
des  places  étant  seulement  d'une)  à  ne  faire  que  deux  admissibles. 
Les  épreuves  orales  ont  d'ailleurs  eu  lieu  selon  la  méthode  dos  années 
précédentes,  c'est-à-dire  que  les  candidats  ont  eu  les  mêmes  leçons 
à  faire,  les  mêmes  textes  à  expliquer.  Cette  méthode  facile  à  appliquer, 
vu  le  nombre  restreint  des  admissibles,  présente,  pour  les  candidats 
et  pour  les  membres  du  jury,  de  tels  avantages  d'équité  et  de  clarté  que, 
loin  d'y  renoncer,  il  faudrait  plutôt  l'étendre  et  l'appliquer  ailleurs 
dans  la  mesure  du  possible.  11  y  aurait  lieu  seulement  de  prendre 
pour  la  préparation  des  leçons  certaines  mesures  que  l'expérience 
de  cette  année  ont  montrées  nécessaires.  L'arrêté  du  3o  juillet  igoO 
(inséré  au  Bulletin  administratif  du  4  août  de  la  même  année)  sur 
l'Agrégation  des  langues  vivantes,  porte  à  l'article  i".  $S  a  et  b,  que 
«chacune  des  leçons  sera  faite  après  cinq  heures  de  préparation 
surveillée;  les  ouvrages  demandés  par  le  candidat  seront,  autant  que 
possible,  mis  à  sa  disposition».  Les  sujets,  dans  le  système  que  nous 
avons  adopté,  étant  les  mêmes  pour  tous  les  candidats,  ce  sont  aussi 
les  mêmes  ouvrages  qui  sont  généralement  demandés  par  eux.  11  en 
résulte  certaines  incommodités  auxquelles  plusieurs  candidats  ont 
cru  pouvoir  remédier  en  apportant  leurs  propres  livres,  dans  l'inten- 
tion, d'ailleurs  franchement  avouée,  de  s'en  servir  au  besoin  et  même 
de  les  mettre  à  la  disposition  de  leurs  concurrents.  Cette  pratique, 
sur  laquelle  l'attention  du  jury  n'avait  pas  été  appelée  jusqu'ici, 
présente  évidemment  des  inconvénients,  dont  les  principaux  sont, 
à  mon  avis,  les  suivants.  Les  Hvres  personnels  des  candidats  peuvent 
être  annotés  et  contenir  des  indications  manuscrites  dont  l'usage 
constitue  un  avantage  pour  cehii  qui  sait  où  les  trouver,  et  il  semble 
d'autre  part  peu  pratique  que  le  surveillant  désigné  par  l'Académie  de 
Paris,  ou  à  plus  forte  raison  l'un  des  membres  du  jury,  examine, 
séance  tenante,  tous  les  livres  ainsi  apportés  en  vue  de  la  préparation. 
En  second  lieu,  les  candidats  arrivent  à  la  salle  fixée  pour  cette  prépa- 


a  12  BULLETIN    HISPANIQUE 

ration  de  la  leçon  de  trois  quarts  d'heure  en  trois  quarts  d'heure 
(puisque  telle  est  la  durée  fixée  pour  la  leçon  elle-même).  Dans  ces 
conditions,  il  est  vraisemblable  que  tous  les  candidats  n'auront  pas 
toujours  les  mêmes  livres  et  seulement  ceux-là.  11  faut  donc,  croyons- 
nous,  s'en  tenir  exactement  à  la  lettre  du  règlement,  et  n'autoriser  que 
l'usage  des  livres  fournis,  sur  la  demande  des  candidats,  par  la 
Bibliothèque  universitaire,  en  invitant  les  concurrents  à  se  commu- 
niquer loyalement  les  ouvrages  que  cette  bibliothèque  ne  possède  pas 
en  plusieurs  exemplaires,  et  qui  seraient  réclamés  par  eux.  De  la 
sorte,  alors  même  qu'il  serait  impossible  de  fournir  aux  candidats  les 
ouvrages  qu'ils  estiment  utiles  ou  nécessaires  à  leur  préparation,  tous 
les  candidats  se  trouveront  du  moins  exactement  dans  les  mêmes 
conditions,  et  ce  n'est  qu'à  la  solidité  et  à  l'étendue  de  leur  préparation 
antérieure  qu'ils  devront  avoir  recours. 

1.  Epreuve  d'italien.  La  page  à  expliquer  était  tirée  d'un  article  de 
L.  F.  Benedetto  (Bulletin  italien,  \,  n"  3)  sur  «Le  osservazioni  inédite 
di  Gilles  Ménage  sopra  l'Aniinta  del  Tasso  ».  —  Aucune  des  deux 
explications  n'a  obtenu  la  moyenne,  et  l'une  d'elles  même  s'est 
à  peine  élevée  jusqu'à  la  note  4  (sur  20).  On  ignore  le  sens  de  mots 
courants,  et  l'on  se  tire  difficilement  de  phrases  fort  simples  cependant. 
La  conjugaison  est  mal  sue  et  les  fautes  d'accentuation  ou  de  pronon- 
ciation abondent.  Sans  doute,  beaucoup  de  candidats  sont  abandonnés 
à  eux-mêmes  pour  la  préparation  de  cette  épreuve:  tous  ne  peuvent 
profiter  des  avantages  qu'offrent  certaines  Universités.  Le  jury  admet 
bien  volontiers  toutes  les  circonstances  atténuantes,  mais  il  n'en  est 
pas  moins  obligé  de  constater  un  fait:  c'est  que  cette  épreuve  de 
langue  complémentaire,  dont  l'existence  peut  se  défendre  par  de 
bonnes  raisons,  n'a  point  produit  jusqu'ici,  sauf  d'honorables  excep- 
tions, tout  ce  qu'on  était  en  droit  d'en  attendre. 

2.  Thème  oral.  Il  s'agissait  de  traduire  une  page  de  Henri  Heine 
{Une  procession  à  Celte,  Lutèce,  1871,  p.  2/44)-  Sans  demander  à  une 
traduction  improvisée  une  élégance  et  une  sûreté  difficiles  parfois 
à  obtenir  même  à  tête  reposée,  on  pourrait  cependant  exiger, 
semble-t-il,  d'une  part,  que  les  intentions  littéraires  de  l'auteur 
fussent  mieux  respectées  et  rendues,  ce  dont  l'on  n'a  pas  généralement 
un  souci  suffisant,  et,  d'autre  part,  que  l'on  se  montrât  plus  scrupuleux 
dans  remploi  de  certaines  formes  qui  côtoient  le  barbarisme  ou 
même  qui  y  tombent  pleinement  (espinos  pour  espinas,  estigmatas 
pour  estigmns,  dignilarios  pour  dignatarios,  monadas  pour  monas, 
eshirras  pour  cshirros).  Aucun  des  deux  candidats  ne  savnit  (jue  le 
chapeau  d'un  cardinal  se  nomme  capelo  et  que  bordon  ou  baslon 
traduisent  fort  mal  la  boulette  (cayado).  Que  la  véritable  expression 
à  employer  ne  se  présente  pas  toujours  à  la  mémoire  et  que  poui-  y 
suppléfr  l'on   ait  recours  à  des  formes  douteuses  ou  manifestenicnl 


UNIVERSITES    ET    ENSEIGNEMENT  2IÔ 

inexactes,  nul  ne  songera  à  s'en  étonner,  mais  il  est  plus  difficile 
d'admettre  que  le  candidat  invité  à  corriger  lui-même  les  imperfections 
excusables  dans  toute  improvisation,  ne  sente  pas  les  points  faibles 
de  sa  première  traduction  et  ne  signale  point  spontanément,  en  tentant 
de  l'améliorer,  ce  que  celle-ci  présentait  d'inexact,  d'insuffisant  ou 
même  d'incorrect.  Il  est  rare  cependant  que  cette  critique  de  la 
traduction  par  le  traducteur  lui-même  ait  sérieusement  amélioré 
cette  dernière, 

3.  Leçon  en  français.  «  Comment  l'auto  religieux  primitif  est-il 
devenu  au  xvi'  siècle  l'auto  sacramental?  n 

L'auto  sacramenlal  est,  en  Espagne,  le  point  d'aboutissement 
naturel  du  drame  religieux  primitif.  Il  se  constitue,  au  \vi'  siècle,  en 
réunissant  les  divers  éléments  auxquels  Lope  de  Vega  et  Galderôn 
donneront  ensuite  leur  plein  et  entier  développement.  C'est  l'histoire 
de  cette  formation  dont  on  demandait  aux  candidats  de  tracer  les 
grandes  lignes.  L'un  d'entre  eux,  qui  n'a  vu  dans  Vaulo  sacramenlal 
qu'une  œuvre  de  combat,  a,  pour  donner  plus  de  force  à  sa  thèse, 
singulièrement  restreint  et  parfois  faussé  son  sujet.  L'autre,  frappé 
surtout  par  l'épanouissement  de  ce  genre  avec  Galderôn,  a  été  amené 
plus  d'une  fois  à  sortir  du  cadre  qui  lui  était  tracé.  Ni  l'un  ni  l'autre 
ne  se  sont  très  nettement  rendu  compte  des  diverses  phases  d'une 
évolution  qui  d'ailleurs  n'a  pas  été  étudiée  en  raison  de  son  importance. 
L'exposition,  plus  sèche  et  plus  correcte  chez  l'un,  plus  vive  et  plus 
facile  chez  l'autre,  manquait  chez  l'un  et  l'autre  de  relief  et  de  finesse. 
Les  notes  ont  été  22  et  20,70  sur  ^o. 

4.  Explications.  L'explication  de  deux  textes,  l'un  ancien,  l'autre 
plus  moderne,  doit  se  faire  après  une  préparation  d'une  heure,  sans 
autres  livres  qu'un  lexique.  La  première  doit  fournir  au  candidat 
l'occasion  de  montrer  ce  qu'il  sait  de  grammaire  historique.  Il  saisira 
donc  l'occasion  d'étudier  certaines  formes  intéressantes  et  d'expliquer, 
au  point  de  vue  de  la  morphologie  et  de  la  phonétique,  les  particula- 
rités les  plus  remarquables  du  texte  proposé.  La  seconde  explication 
dont  le  texte  peut  être  emprunté  à  la  période  classique  ou  à  la  littéra- 
ture contemporaine,  lui  permettra  de  montrer  ses  qualités  de  pro- 
fesseur, son  expérience  pédagogique,  et  il  doit  traiter  ce  texte  comme  il 
pourrait  le  faire  devant  des  élèves  déjà  assez  avancés,  en  mêlant  aux 
remarques  nécessaires  de  syntaxe  et  de  grammaire  les  observations 
littéraires  ou  historiques  qu'il  comporte. 

Les  deux  textes  choisis  celte  année  étaient:  rUn  fragment  d'une 
vingtaine  de  vers  de  l'Auto  de  Los  Reyes  Magos;  2"  Un  passage  de  la 
scène  II  de  la  Cena  del  Rey  Baltasar,  auto  sacramenlal  de  Galderôn. 
—  L'épreuve  a  montré  chez  l'un  des  candidats,  pour  le  texte  ancien, 
une  connaissance  un  peu  courte  des  questions  philologiques,  et,  pour 
le  texte  classique,  trop  peu  de  méfiance  à  l'égard  des  contresens.   Le 


2î4  BULLETIN    HISPAMQUE 

style  de  Calderôn,  il  est  vrai,  est  parfois  bien  recherché:  sa  pensée 
trop  chargée  de  métaphores,  est  difficile  à  suivre:  elle  l'était  particu- 
lièrement dans  ce  passage.  Cependant  une  connaissance  plus  familière 
de  ses  procédés  habituels  et  de  sa  manière  aurait  permis  aux  candidats 
de  dégager  plus  nettement  et  plus  fermement  la  pensée  de  l'auteur 
des  ornements  poétiques  qui  la  masquent  et  la  déguisent  trop  souvent. 
Celte  épreuve,  fort  importante  pour  de  futurs  professeurs,  n'a  point 
pleinement  satisfait  le  jury.  Les  candidats  n'y  pourront  réussir  qu'en 
s'y  exerçant  longtemps  à  l'avance  et  en  s'efforçant  d'acquérir  une 
bonne  méthode  d'interprétation  et  d'exposition. 

5.  Leçon  en  espagnol.  H^,Ciidles  fneron,  desde  el  piinto  de  visla  orn 
de  la  inspiracion  poélica,  ora  de  la  Jortna  rnétrica,  las  venlajas  y  los 
inconvenienles  de  la  iniroducciôn  dcl  italianismo  en  Espana  en  el 
siglo  \V[»,  y  cuâles  fueron  los  resullados  duraderos?))  —  Les  candidats 
ont  assez  bien  vu  (et  la  rédaction  même  de  la  question  posée  leui' 
facilitait  la  tache  sur  ce  point)  les  divisions  essentielles  de  ce  sujet  où 
il  convenait  d'exposer  ce  que  la  poésie  espagnole  avait  gagné  et  ce 
qu'elle  pouvait  avoir  perdu  par  suite  de  l'influence  prépondérante 
qu'exerça  sui-  elle  au  xvr  siècle  la  poésie  italienne,  el  de  dire,  en 
résumé,  ce  qui  élail  resté  de  cette  révolution  littéraire.  11  n'est  guère 
de  sujets  plus  importants  dans  l'histoire  dos  lettres  espagnoles;  ce 
n'esl  point  l'absence  do  documents,  mais  plutôt  leur  abondance  qui 
peut  ici  embarrasser.  L'un  et  l'autre  candidat  a  paru  d'ailleurs  avoir  à  sa 
disposition  les  renseignements  sullisants  pour  traiter  convenablement 
le  sujet,  mais  chez,  l'un,  dont  la  doctrine  était  plus  ferme  el  les  conclu- 
sions plus  nettes,  ce  grand  sujet  a  paru  quelque  peu  étriqué  et  exposé 
sous  une  forme  maigre  et  sèche,  quoique  généralement  corrode,  chez. 
l'autre  la  pensée  semblait  quelquefois  hésitante;  le  plan  n'avait  pas 
toute  la  netteté  désirable  ni  les  diverses  parties  les  justes  proportions 
qtie  réclamait  leur  importance  relative;  enlin  certaines  assertions  ne 
reposaient  point  sur  des  arguments  suffisamment  solides.  Les  deux 
candidats,  avec  des  qualités  d'ailleurs  très  dilléreutes,  s'exprimaient 
avec  aisance  en  espagnol,  et  leur  prononciation  a  été  jugée  correcte. 
L'ensemble  de  celte  épreuve,  sans  présenter  rien  de  particulièremont 
lemaïquable,  a  témoigné  chez  les  candidats  d'une  piéparation  suffi- 
samment sérieuse  el  d'une  aptitude  réelle  à  manier  avec  aisance  sa 
langue  espagnole. 

Le  candidat  classé  premier  a  réuni  un  total  général  de  i8i,5o  j)oints. 
Son  concurrent,  qui  le  suivait  de  près,  avait  obtenu  178  points. — 
Avant  la  cloluie  du  concrturs,  les  (Mudidals  ont  été  a\erlis  ipi'à  partir 
de  la  prochaine  année,  ils  auraient  à  traduire  un  texte  latin,  dont  la 
note  entrerail  pour  un  cincpiième  dans  le  coefficient  de  l'épreuve 
d'explication  orale. 


UNIVERSITES    ET    ENSEIGNEMENT 


II.   CERTIFICAT  D'APTITUDE 

Dix-huit  candidats  ont,  cette  année,  subi  les  çpreuves  écrites.  Le 
nombre  avait  été  de  vingt-quatre  l'an  dernier.  11  y  a  donc  eu  une  dimi- 
nution assez  sensible  dans  le  nombre  des  candidats. 

A.  Epreives  écrites. —  i.  Le  texte  de  la  composition  française 
éliminatoire  était  le  suivant:  ^^  En  mettant  à  profit  ce  que  vous  savez 
de  l'histoire  et  de  la  littérature  espagnole,  vous  discuterez  celle  ré/Iexion 
d'Angel  Ganivet:  Asicomo  creo  que  para  las  aventuras  de  la  dominaciôn 
material,  muchos  pueljlos  de  Europa  son  superiorcs  â  nosotros,  creo 
lambien  que  para  la  creaciôn  idéal  no  hay  ninguno  con  aptitudes 
naturales  tan  depuradas  como  las  nuestras.  »  —  Plus  encore  que  des 
connaissances  historiques  et  littéraires,  ce  sujet  demandait  de  la 
réflexion  et  une  juste  intelligence  des  termes  employés  par  l'auteur  et 
de  sa  pensée  générale.  La  majorité  des  douze  candidats  soumis  à  cette 
épreuve  paraît  avoir  été  surprise  et  même  un  peu  effrayée  par  ce 
sujet.  L'épreuve  a  été  médiocre.  Deux  candidats  seulement  sont  entrés 
dans  la  pensée  d'Angel  Ganivet,  mais  le  premier  finit  par  s'égarer 
dans  un  verbiage  grandiloquent  et  le  second  offense  trop  souvent 
notre  langue.  La  plupart  des  autres  copies  sont  maladroites  ou  super- 
ficielles. Elles  ne  révèlent  point  une  connaissance  sérieuse  de  l'histoire 
et  de  la  littérature  espagnoles,  ni  surtout  l'habitude  de  la  réflexion. 
La  composition  en  est  généralement  confuse  et  décous-ue.  La  forme 
se  laisse  aller  à  d'étranges  familiarités  et  elle  n'évite  la  prétention  que 
pour  tomber  dans  la  banalité.  Elle  est  enfin  assez  souvent  peu  correcte. 
Deux  copies  seulement  ont  obtenu  une  note  supérieure  à  lo:  quatre 
sont  restées  au-dessous  de  la  note  8.  La  conclusion,  c'est  que  les 
futurs  candidats  doivent  se  préparer  à  cette  épreuve  plus  sérieusement 
qu'ils  ne  paraissent  l'avoir  fait  jusqu'ici.  C'est  un  conseil  que  nous 
leur  avons  déjà  donné  les  années  antérieures  et  que  nous  sommes 
obligés  de  leur  renouveler  avec  plus  d'insistance,  en  leur  signalant 
une  fois  de  plus  le  danger  auquel  ils  s'exposent  en  ne  prêtant  pas 
à  cette  épreuve  une  attention  suffisante. 

2.  Thème.  Le  thème  non  plus  n'a  guère  été  satisfaisant.  Pris  dans 
le  Charles  XII  de  Voltaire,  il  pouvait  sans  doute,  comme  tout  autre, 
donner  lieu  à  des  solécismes  et  à  des  barbarismes  {ce  dont  on  ne 
s'est  pas  gardé  du  reste),  mais  non  à  des  contresens  ou  à  des  faux  sens; 
et  pourtant  on  en  a  commis.  Deux  copies  seulement  (sur  dix-huit)  ont 
dépassé  la  note  moyenne.  11  faut  donc  (et  ceci  encore  confirme  ce  que 
nous  venons  de  dire  au  sujet  de  la  composition  française),  il  faut 
donc  que  les  candidats  au  certificat  d'espagnol  commencent  par  se 


2l6  BULLETIN    HISPANIQUE 

fortifier  dans  la  connaissance  du  français,  connaissance  dont  le  défaut 
se  trahit  encore  plus  peut-être  dans  le  tht'me  ot  la  version  que  dans 
la  rédaction  en  français. 

3.  \'ersion.  Le  texte  à  traduire  était  une  page  de  la  Vida  del  Buscôn, 
de  Quevedo,  dans  laquelle  ce  dernier  nous  décrit,  avec  sa  verve 
familière,  comment  les  hidalgos  besogneux  résolvent  la  délicate 
question  du  costume.  11  offrait  quelques  difficultés  sérieuses  de  voca- 
bulaire. Il  demandait  surtout  un  effort  intelligent  pour  faire  passer 
en  français  les  nuances  de  l'humour  espagnol.  Les  candidats  classés 
les  premiers  ont  compris  le  sens  général;  trop  de  détails  leur  ont 
échappé.  Quelques-uns  se  sont  laissé  arrêter  par  des  mots  qu'ils 
n'avaient  pas  cependant  le  droit  d'ignorer.  D'autres  ont  été  dupes  de 
tournures  avec  lesquelles  ils  devraient  être  familiarisés.  Sauf  une  ou 
deux  copies,  où  apparaissent  quelque  vivacité  et  quelque  couleur, 
la.  traduction  est  le  plus  souvent  sèche,  lourde  et  maladroite. 

l\.  Composition  en  espagnol,  d  Caria  de  un  esludianle  madriletw 
leclor  de  espanol  en  un  eslablecimiento  de  Francia,  à  un  amigo  suyo 
participdndole  lo  que  mds  le  ha  llamado  la  atenciôn  en  la  poblaciôn  y  en 
el  colegio  en  que  vive.  »  —  Cette  épreuve  a  été,  dans  l'ensemble,  sensi- 
blement meilleure  que  les  autres.  Deux  copies  surtout  témoignaient 
dune  réelle  facilité  et  d'une  connaissance  familière  de  la  langue 
courante  espagnole,  et  même  des  mœurs  et  habitudes  de  ce  pays. 
L'abondance  même  du  développement,  malgré  le  temps  assez  restreint 
dont  disposent  les  candidats,  montrait  clairement  qu'ils  étaient 
habitués  à  penser  et  à  écrire  dans  cette  langue.  Quatre  autres  copies 
étaient  encore  fort  honorables.  Il  n'y  en  avait  que  trois  ou  quatre  tout 
à  fait  mauvaises  cl  pai  tro[)  inlerieuies  au  niveau  au-dessous  duquel 
il  n'est  point  permis  de  descendre  dans  ce  concours.  Faut-il  répéter 
encore  que  même  ici  les  candidats  seraient  bien  plus  à  l'aise  pour 
montrer  ce  (ju'ils  peuvent  faire  en  langue  étrangère,  s'ils  savaient 
clairement  ordonner  leurs  pensées  el  se  tracer  un  plan  logi(iue,  solide 
et  simple?  Trop  de  copies  donnent  encore  l'impression  d'une  impro- 
visation négligée  et  décousue. 

B.  Ei-uEi  viis  ouAi.Ks.  —  A  la  suilc  des  épreuves  écrites  le  jury  a 
décidé  (le  proposera  M.  le  Ministre  de  déclarer  sept  admissibles.  Vous 
avez  bien  voulu  y  consentir-. 

I.  Thème.  La  Fontaine,  Le  Loup  et  l'Agneau.  —  Quatre  traductions 
de  ce  texte,  en  somme  assez  facile,  ont  été  bonnes  ou  satisfaisantes: 
les  trois  autres  ont  paru  pénibles,  vagues,  lourdes,  pleines  d'hésita- 
tions, de  reprises  el  de  longs  silences.  Ici  encore,  il  faut  répéter  ce 
(|ne  nous  disions  pour  l'agrégation:  res|)ril  crilicpie  manque  trop:  on 
ne  sait  pas  se  corriger,  réparer,  à  la  réllexion,  les  insuffisances  dn 
premier  jel.  On  le  ferait  sans  doute  plus  lacilemenl  si  l'on  avait  un 


UNIVERSITES    ET    ENSEIGNEMENT  3  1 


plus  riche  vocabulaire  à  sa  disposition,  et  surtout  plus  d'habitude  de 
cet  exercice,  si  nécessaire  à  un  futur  professeur. 

3.  Version.  Le  texte  de  Larra  (^,Entre  que  génies  estamos?  depuis: 
Déjà  mi  criado  la  5e/ia/...  jusqu'à...  un  capricho  de  Goya)  ne  présen- 
tait quelque  délicatesse  que  dans  l'expression  et  la  syntaxe.  Certains 
mots  de  la  langue  courante  {birlocho,  eje,  macas,  etc.)  ont  amené 
cependant  des  hésitations  et  quelques  faux  sens.  Aucune  traduction 
n'a  été  vraiment  élégante  et  facile.  La  malice  de  Larra  est  générale- 
ment comprise;  elle  n'est  presque  jamais  rendue.  Le  jury  a  eu  plus 
d'une  fois  à  noter  de  fâcheuses  négligences  et  trop  de  facilité  à  se 
contenter  d'à  peu  près. 

3.  Commentaire  grammatical.  Les  candidats  avaient  à  faire  le  com- 
mentaire, au  point  de  vue  grammatical,  dune  scène  de  la  zarzuela 
de  Javier  de  Burgos,  Los  Valientes  (Escena  l'\[quiès  decirme...  por 
panoli).  Le  texte  offrait  un  certain  nombre  de  mots  ou  de  tournures 
de  la  langue  populaire  de  Madrid,  que  les  candidats  ont  dû  entendre 
souvent  pendant  leurs  séjours  en  Espagne,  ou  qui,  dans  tous  les  cas, 
auraient  dû  attirer  leur  attention  lors  de  la  préparation  de  cette 
comédie.  Ce  commentaire  cependant  n'a  vraiment  approché  de  ce 
qu'il  doit  être  que  dans  l'épreuve  d'un  candidat  sur  sept.  Les  autres 
ont  fourni  des  remarques  désordonnées  ou  superflues,  sans  voir 
toujours  que  dans  un  texte  comme  celui-là,  ce  qui  était  intéressant 
c'était  non  pas  l'étymologie  de  decir  ou  autres  choses  de  même  force, 
mais  des  remarques  sur  les  formes  populaires  {quiès,  abristes,  perdios, 
limond,  esaveniencias,  etc.)  ou  sur  les  modismes  (primaoera,  dans  le 
sens  de  tonto,  perder  la  chaveta,  etc.  )  employés  par  les  personnages 
de  ce  saynète.  Le  candidat  auquel  il  est  fait  allusion  dans  ce  qui 
précède  a  certainement  dû  son  succès  final  à  la  bonne  méthode  qu'il 
a  suivie  dans  cette  épreuve. 

4-  Lecture  expliquée.  La  page  de  la  Estafeta  romdntica,  de  Pérez 
Galdôs  (page  89:  A  Pepe  Zorrilla),  qui  était  proposée,  olVrait  aux 
candidats,  par  les  nombreuses  allusions  qu'elle  contient  à  la  littérature 
contemporaine,  une  excellente  occasion  de  montrer  leurs  connais- 
sances sur  ce  point,  et  d'enrichir  celles  de  leurs  élèves.  Tous  assuré- 
ment n'ont  point  su  (et  pour  cause)  saisir  cette  occasion,  mais 
cependant  cette  épreuve  a  certainement  été,  dans  l'ensemble,  la  plus 
satisfaisante  de  toutes.  Elle  en  est  aussi  la  plus  importante  puisque 
c'est  celle  qui  permet  le  mieux  au  jury  de  se  rendre  compte  de  la 
facilité  de  l'improvisation  et  de  la  connaissance  de  la  langue  courante 
que  possèdent  les  concurrents.  L'une  des  épreuves  a  été  de  tous  points 
satisfaisante.  Elle  a  obtenu  la  note  17  (sur  30),  et  elle  aurait  sans 
doute  obtenu  davantage  encore,  si  l'auteur  avait  mis  un  peu  plus 
d'ordre  dans  les  intéressantes  remarques  présentées  à  propos  de  ce 
texte.  Il  a  du  moins  montre  une  connaissance  peu  ordinaire  du  sujet 


2l8  BULLETIN    HISPAMQLE 

et  fait  preuve  de  véritables  qualités  d'expression.  Deux  autres  épreuves 
ont  encore,  mais  à  un  degré  moindre,  satisfait  le  jnrv,  l'une  d'abord 
un  peu  confuse,  par  la  correction  et  la  facilité  de  l'élocution,  l'autre, 
par  un  effort  très  méritoire  pour  mettre  de  l'ordre  dans  le  commen- 
taire et  par  une  égale  aisance  dans  l'expression.  Les  autres  épreuves 
ont  été  plus  ou  moins  au-dessous  de  la  moyenne.  On  ne  peut 
d'ailleurs  que  s'étonner  de  voir  certains  candidats,  que  l'on  écoute 
sans  fatigue  et  parfois  même*  avec  plaisir  dans  une  épreuve  de  ce 
genre,  montrer  tant  d'inexpérience,  de  sécheresse  ou  d'insuiïisance, 
quand  il  s'agit  de  traduire  en  langue  étrangère  un  texte  français  et 
d'en  justifier  leur  traduction.  C'est  sans  doute  qu'il  est  relativement 
facile,  à  qui  possède  une  certaine  habitude  de  la  langue,  de  discourir 
sur  un  texte  littéraire,  tandis  qu'une  traduction  précise,  exacte, 
intelligente  d'une  page  qu'il  faut  faire  passer  dans  une  langue  diffé- 
rente (thème  ou  version)  exige  une  méthode  et  demande  des  qualités 
qui  ne  s'improvisent  pas  et  que  l'on  ne  peut  acqiiérir  qu'au  prix  d'un 
entraînement  laborieux  et  suivi.  C'est  une  vérité  d'expérience  que  les 
futurs  candidats  feront  bien  de  ne  point  perdre  de  vue. 

A  la  suite  des  épreu\es  orales,  l'un  des  candidats,  qui  arrivait  facile- 
ment en  tète  de  la  liste,  a  déclaré  au  jury  qu'étant  espagnol  et  ne  se 
destinant  point  d'ailleurs  à  l'enseignement,  il  se  retirait  du  concours 
pour  ne  point  priver  ses  concurrents  de  l'une  des  trois  places  fixées. 
Vous  avez  bien  voulu,  Monsieur  le  Ministre,  autoriser  le  jury  à  rece- 
voir, à  titre  étranger,  ce  candidat  dont  la  conduite  était  inspirée  par 
un  sentiment  si  louable,  et,  par  suite,  à  ajouter  à  la  liste  des  admis  le 
candidat  primitivement  classé  en  (jualrièmc  ligne,  lequel,  au  surplus, 
n'était  séparé  de  celui  qui  le  précédait  que  par  un  quart  de  point. 

N'euillez  agréer.  Monsieur  le  Ministre,  l'expression  de  mes  senti- 
ments respectueusement  dévoués. 

Le  Président  du  Jury, 

E.  MÉRIMÉE. 


Institut  français  en  Espagne  (Union  des  Étudiants  français 
et  espagnols).   -  Cours  de  Pâques  à  Madrid  eu  1912. 

A.  (Juurs  d'esiHUjnoi.  —  Les  cours  de  langue  et  de  littérature  espa- 
gnoles pour  les  candidats  aux  divers  examens  (agrégation,  licence, 
certificats,  etc.)  et,  en  général,  pour  toutes  les  personnes  (jui  désirent 
se  perfectionner  dans  la  pratique  de  l'idiome  et  la  connaissance  de  la 
littérature,  commenceront  le  mardi  9  avril,  et  dureront  jusqu'au 
iï>  mai.  Ils  auront  lieu  au  Museo  Petlagôgico.  Tous  les  cours  sont 
gratuits. 

riiur  iti-criplidus  et  renseignements  s'adresser  à  M.   E.  Mérimée, 


UNIVERSITES    El    E>SEIG.NEMEM  2  KJ 

professeur  à  l'Université  de  Toulouse,  directeur  de  Vinion  des  Etu- 
diants, rue  des  Chalets,  54. 

B.  Cours  publics  de  liltérature  française,  d'histoire  et  d'histoire  de 
l'art.  —  Ces  cours  commenceront  le  mercredi  10  avril.  Ils  auronl 
lieu  à  l'Université  Centrale  et  seront  faits  par  : 

MM.  Bertaux,  professeur  à  l'Université  de  Lyon. 

Courteault,  professeur  à  l'Université  de  Bordeaux, 
Reynier,  maître  de  conférences  à  l'Université  de  Paris. 

Les  Conférences  pratiques  de  langue  et  littérature  françaises  seront 
données,  à  LUniversilé  Centrale,  par  MM.  Courteault,  Beynier 
et  E.  Mérimée. 

Un  programme  détaillé  des  cours  et  conférences  sera  ultérieu- 
rement distribué. 

Le  Directeur  de  C  Union, 

E.  MÉKIMÉE. 


Diplôme  d'études  supérieures. 

Le  i"  décembre  191 1,  M.  G.  Martin,  professeur  d'espagnol  au 
collège  de  Castelnaudary,  a  présenté,  à  la  Faculté  des  lettres  de 
Toulouse,  un  mémoire  pour  l'obtention  du  diplôme  d'études  supé- 
rieures sur  le  sujet  suivant  :  Origenes  y  evoluciôn  de  la  serranilla.  Les 
deux  textes  à  expliquer  étaient  :  F'r.  Luis  de  Leôn  :  La  Perjecta 
Casada,  et  V.  Blasco  Ibâilez,  Sangre  y  arena. 

Le  mémoire,  incomplet  sur  certains  points  et  sur  quelques  autres 
insuffisamment  approfondi,  a  été  en  somme  très  favorablement  appré- 
cié par  le  jury.  11  traçait  avec  netteté  les  lignes  essentielles  d'une  étude 
sur  ce  curieux  genre  littéraire,  en  indiquait  clairement  les  origines, 
autant  du  moins  que  les  documents  qui  nous  ont  été  conservés  per- 
mettent de  le  faire,  et  en  suivait  le  développement  jusqu'à  l'époque 
classique,  où  l'auteur  l'abandonnait,  un  peu  trop  tôt  sans  doute.  Le 
mémoire,  écrit  dans  un  espagnol  correct  et  ferme,  se  terminait  par  un 
certain  nombre  de  serranillas  jusqu'ici  inédites  et  empruntées  à 
un  cancionero  manuscrit  de  la  Bibliothèque  du  Palais,  de  Madrid. 
Ces  textes  nouveaux,  que  nous  publions  ci-dessus  (p.  ^o'j),  ajoutaient 
au  mémoire  un  mérite  trop  rare  dans  des  travaux  de  ce  genre. 

Après  la  soutenance,  M.  Martin  a  obtenu  le  diplôme  avec  la  mention 
bien. 


BIBLIOGRAPHIE 


R.  Menéndez  Pidal,  Canlar  de  inio  Cid,  tome  II  (pp.  ^23  904) 
et  tome  III  (pp.  907  à  1181).  Madrid.  Bailly-Baillièie,  1911. 

Le  Bidlelin  hispanique,  dans  son  dernier  numéro,  n'a  pu  consacrer 
(piun  seul  mot  aux  deux  volumes  dont  le  titre  précède,  mais  ce  mot: 
<(  Admirable  »>  sera  sans  doute  le  dernier  terme  el  la  conclusion  de 
tous  les  comptes  rendus  plus  détaillés.  C'est  qu'aucun  texte,  à  ma 
connaissance,  na  été  jusqu'ici,  en  Espagne,  l'objet  d'une  étude  plus 
complète,  plus  personnelle  et  plus  pénétrante,  et  que  l'ensemble  de 
ces  trois  volumes,  publiés  en  1908  et  191 1  (pour  ne  point  parler  de 
l'édition  du  Poema  del  Cid  de  1898),  constitue  un  monument  qui  lait 
le  plus  grand  honneur  à  l'érudition  espagnole.  Dans  ce  champ,  par- 
couru déjà  par  tant  de  chercheurs,  il  n'y  aura  plus  désormais  qu'à 
glaner.  Non  certes  que  toutes  les  questions  si  complexes  que  soulève 
l'étude  du  Canlar  soient  définitivement  résolues:  plusieurs  paraissent 
jusqu'à  nouvel  ordre  insolubles:  mais,  du  moins  dans  l'état  actuel  de 
nos  coimaissances,  tout  ce  que  la  critique  la  plus  attentive  a  fait  pour 
l'établissement  du  texte,  tout  ce  qu'elle  a  pu  réunir  de  renseignements 
et  de  rapprochements,  tout  ce  qu'elle  a  pu  tirer  de  ce  texte  pour  la 
connaissance  du  vocabulaire  et  delà  grammaire  du  castillan  archaïque, 
se  trouve  rassemblé  avec  une  méthode  et  exposé  avec  une  précision 
capables  de  satisfaire  les  plus  dilliciles. 

Nous  ne  pouvons  songer  à  entrer  dans  l'examen  détaillé  de  ces 
deux  nouveaux  volumes,  pleins  de  faits  et  d'observations  qui  par  leur 
nature  échappent  à  l'analyse.  Il  sutïîra  de  résumer  ici  leur  contenu, 
de  caractériser  la  méthode  et  de  signaler  les  conclusions  générales  les 
plus  importantes.  Rappelons  que  le  tome  prctnier,  préparé  dès  1892, 
couronné  en  1895  par  l'Académie  Espagnole  et  paru  en  1908,  contient, 
dans  une  première  partie,  la  crilicpie  du  texte  (étude  du  manuscrit, 
de  la  to|)ographie,  du  mètre  et  des  assonances,  des  relations  axoc  les 
Chroniques),  et  que  la  seconde  |)arlie  fornje  la  (îramrnaire  de  la 
langue  du  Cid.  Nous  avons  eu  l'occasion  de  résumer  les  résultats 
essentiels  de  cette  première  étude:  les  deux  volumes  actuels  fournis- 
sent les  éléments  ou  matériaux  en  même  temps  que  la  confirmation 
des  conclusions  formulées  dans  le  premier. 

Le  volume  second  renferme  en  elfet  le  vocabulaire  alphabétique. 
Tous  les  mots  importants  du  Canlar  y  sont  l'objet  d'un  article  séparé. 
Chaque  article  comprend:  le  renseignement  diplomalicpie  qui  permet 
de  lixcr  la  graphie,  toutes  les  fois  qu'elle  parait  douteuse,  le  sens  ou 


BIBLIOGRAPHIE  2  2  I 

les  sens  divers,  avec  renvoi  d'une  part  aux  vers  où  se  trouve  le  mot,  de 
l'autre  à  la  page  et  à  la  ligne  de  la  Grammaire  où  il  est  étudié,  des 
rapprochements  avec  d'autres  textes,  enfin  l'étymologie.  On  voit  déjà 
ce  qu'un  tel  programme  représente  de  travail,  et  aussi  quelle  en  est 
l'utilité.  La  statistique,  par  exemple,  des  emplois  divers  de  ser  et  de 
eslar  permet  seule  de  formuler  une  conclusion  qui,  pour  cette  période, 
prendra  la  valeur  d'une  règle,  si  elle  est  confirmée  par  d'autres  textes 
analogues.  L'exacte  et  complète  analyse  des  emplois  de  /e,  afé  n'est 
pas  sans  importance  pour  la  détermination  de  l'étymologie.  (M.  M.  Pidal 
se  prononce  pour  l'étymologie  arabej. 

Mais  le  Vocabulaire  contient  autre  chose  encore.  Ce  n'est  point  sur 
la  forme  seulement,  c'est  aussi  sur  la  chose  qu'il  fournit  les  détails  les 
plus  instructifs.  Aussi  ressemble-t-il  parfois  à  un  u  Dictionnaire  des 
antiquités  »,  ou  à  un  répertoire  des  mœurs  et  institutions  du  moyen- 
àge.  Ouvrons-le,  dès  les  premières  pages,  aux  mots  adtor,  aiiinla, 
alcatde,  algara,  almo/ar,  arma,  arras,  ave,  axuar,  etc.,  on  verra  tout 
ce  que  l'on  peut  retirer  d'un  lexique  ainsi  compris  pour  l'intelligence 
de  la  civilisation  à  celte  époque.  De  brèves  mais  substantielles  discus- 
sions (voyez  par  exemple  celle  sur  le  sens  de  campeador  =  vencedor 
de  batallas)  montrent  excellemment  la  manière  de  l'auteur.  Il  va  de 
soi  que  ce  dictionnaire  n'est  pas  moins  précieux  pour  l'histoire  et  la 
géographie.  [Voyez  les  mots  Albar  Fdnez,  Alfonsso,  Anrrich,  Bellrân, 
Carriôn,  Garcia  Ordônez,  Remond,  Sol  (doiïa)J.  L'article  sur  les 
Infants  de  Carriôn,  qui  comprend  vingt-quatre  pages  compactes,  plus 
un  tableau  généalogique  hors  texte,  est  un  véritable  traité  qui  prouve, 
sur  un  point  précis,  le  caractère  essentiellement  et  scrupuleusement 
historique  du  Cantar,  puisque  tous  les  détails  qu'il  fournit  sur  les 
infants  Diego  et  Fernân,  sur  Pedro  et  Gonzalo  Ansûrez  et  sur  la 
parenté  de  ces  derniers  avec  les  Vanigômez  se  trouvent  confirmés  par 
les  diplômes  ou  par  les  Chroniques. 

Quant  aux  renseignements  géographiques,  si  importants  pour 
l'intelligence  de  cette  Chronique  rimée  qui  se  tient  toujours  très 'près 
des  réalités  concrètes,  que  l'on  veuille  bien  se  reporter  aux  mots 
Burgos,  Montes  Claros,  Ovirna,  Pena  Cadiella,  San  Servan,  Tevar 
(dont  la  situation  est  déterminée  à  l'aide  d'un  diplôme  de  Pedro  II 
d'Aragon  du  3  avril  laog),  Valencia,  etc.  Une  carte  très  claire  de 
l'Espagne  des  vingt  dernières  années  du  xi"  siècle,  avec  les  divers 
itinéraires  du  Cantar,  et,  en  lettres  rouges,  tous  les  noms  de  lieux  cités 
dans  ce  dernier,  permet  de  s'orienter  aisément,  surtout  si  on  la 
complète  par  celle  insérée  entre  les  pages  72  et  73  du  tome  l".  Elle 
constitue  une  illustration  du  texte  qui  devrait  servir  de  modèle  pour 
d'autres  œuvres  historico-liltéraires  analogues. 

Ainsi  qu'il  l'avait  fait  déjà  au  tome  1"  pour  la  «  localisation  »  du 
Cantar,  M.  Pidal  a  soin  d'agrémenter  son  texte  de  vues  pittoresques, 
Bull,  kispan.  i5 


à33  BULLETIN    HISPANIQUE 

de  représentations  d'objets  et  d'œuvres  d'art,  comme  le  curieux  ivoire 
de  San  Millan  (déjà  publié,  si  je  ne  me  trompe,  par  M.  Sentenach 
dans  le  Bolelin  de  la  Sociedad  espaiwla  de  excursiones,  en  1908),  de 
reproductions  photographiques  des  monuments  contemporains, 
comme  l'église  de  San  Vicente  d'Avila  ou  le  cloître  de  S'*"  Domingo  de 
Silos,  ou  encore  des  enluminures  de  manuscrits,  comme  le  San  Beato, 
du  même  monastère.  Rien  de  plus  intéressant,  et  rien  aussi  de  plus 
reposant,  que  ce  commentaire  artistique,  dont  l'auteur  a  d'ailleurs  usé 
sobrement'. 

Le  tome  111'  contient  un  double  texte  du  Canlar.  Le  premier  est  la 
reproduction  paléographique  du  manuscrit,  avec  mention  et  discussion 
des  lectures  des  éditeurs  antérieurs,  Ulibarri  en  109(3,  Pellicer  1793, 
Sânchez  i779,Janer  186^,  VolmoUer  1879,  Huntington  1897.  La  partie 
délicate  de  cette  constitution  du  texte  est  la  distinction  des  diverses 
mains  des  correcteurs.  «Je  n'admettrai,  dit  M.  Pidal,  que  ce  qui  a  été 
écrit  de  la  main  de  Per  Abbat,  et  parfois  quelques-unes  des  corrections 
de  première  main,  «[uand  ces  corrections  paraissent  autorisées  par  un 
texte  écrit, ou  quand  elles  redressent  des  erreurs  manifestes  du  copiste». 
Les  corrections  postérieures  ne  sont  indiquées  que  lorsqu'elles  ont  été 
admises  par  d'autres  éditeurs,  sans  que  les  motifs  pour  les  adopter 
paraissent  sutïisants.  Ce  travail  patient  et  ingrat,  poursuivi  à  la  loupe 
et,  au  besoin,  à  l'aide  de  réactifs,  permet  de  se  rendre  compte  de 
l'état  du  manuscrit  mieux  peut-être  que  si  on  l'avait  lui-même  sous 
les  yeux,  car  l'éditeur  ne  le  montre  pas  seulement,  il  l'explique.  Si 
nous  comparons  ce  texte  de  191 1  à  celui  déjà  donné  par  M.  Pidal  on 
1898,  on  constatera  que  ce  dernier  a  été  amélioré,  soit  par  la  correc- 
tion de  quelques  fautes  d'impression  (p.  ex.  v.  3i:  adelino  et  non 
adelido),  soit  par  la  résolution  en  lettres  italiques  des  abréviations 
(vera  au  lieu  de  vera).  Ainsi  que  je  l'ai  indiqué,  l'annotation  a  pour 
but  de  préciser  certaines  particularités  matérielles  du  manuscrit,  de 
distinguer  les  diverses  mains  dans  les  retouciies  et  corrections  inter- 
linéarres  ou  de  noter,  en  les  discutant  souvent,  les  lectures  des  autres 
éditeurs.  Kn  résumé,  si  dans  un  travail  de  ce  genre  des  réserves  sont 
toujours  possibles  et  des  doutes  permis  sur  certains  points,  il  convient 
de  tenir  cette  reproduction  du  (]a/ilar  pour  la  plus  parfaite,  et,  selon 
nous,  pour  supérieure  même  à  une  reproduction  photographique:  elle 
restera  définitive  tant  (juun  manuscrit  meilleur  de  ce  texte  ne  sera 
point  décou\erl. 

I.  Au  mol  Cascovelcs,  aux  textes  allégués  pour  prouxer  l'iisage  des  grelots  cl 
>onnaillcs  (surtout  dans  le  hofurdo),  j'ajouterais  volontiers  le  Livre  de  la  Coiilréric  de 
^jantiago  de  Hurgos,  (pii  explique  l'emploi  et  fournil  par  les  miniatures  une  illustra- 
tion extrêmement  riche.  —  Au  mol  /uH^a,  j'aurais  bien  voulu  trouver  une  cxplicaliou, 
et  mieux  encore  une  rcf)ri:>ontation  de  la  lanza  de  ilos  hierros,  si  fréqurnlr-  dans  le 
Homanrrro,  et  puisque  l'auteur  (suh  voce)  allègue  des  textes  du  xvii*  siècle,  je  lui 
aurais  volontiers  pardonné  c<;l  anachronisme. 


BIBLIOGRAPHIE  a  3. H 

Toutes  les  fois  qu'il  sera  question  du  Cantar,  c'est  donc  de  ce  texte 
qu'il  faudra  partir.  Mais  il  est  clair  que  le  texte  de  Per  Abbat,  même 
restitué  dans  la  mesure  possible  à  sa  pureté,  à  son  authenticité  origi- 
nelle, est  défectueux.  D'abord,  il  est  incomplet,  ensuite,  en  bien  des 
passages,  il  est  manifestement  incorrect  et  erroné.  Aussi  Bello, 
Volmôller,  Baist,  Restori,  Milâ,  Cornu,  Nyrop,  Lidforss  ont-ils 
tenté  de  l'améliorer  en  proposant  des  corrections,  fondées  le  plus 
souvent  sur  la  métrique  et  les  assonances. 

Après  eux,  M.  Pidal,  utilisant  dans  leurs  travaux  les  matériaux  qui 
lui  paraissent  pouvoir  être  conservés,  tente  la  reconstruction  du  texte 
primitif,  en  une  édition  critique  distincte  de  la  paléographique.  Les 
principes  sur  lesquels  il  fonde  sa  méthode,  il  les  avait  exposés  déjà 
dans  la  première  partie  du  volume  I  :  ils  reposent  sur  la  théorie  de  la 
division  des  séries  métriques,  sur  sa  conception  du  mètre  original 
(très  différente  de  l'hypothèse  octosyllabique  de  Cornu),  sur  l'étude 
comparée  du  texte  et  des  Chroniques,  particulièrement  de  celle  dite 
des  Vingt  Rois  pour  la  suppression  des  lacunes. 

Sur  ce  point,  la  reconstitution  du  début  perdu  du  poème  attire  tout 
d'abord  sen  attention.  On  sait  combien  diffèrent  les  opinions  sur 
l'étendue  de  cette  lacune  initiale,  que  les  uns  réduiraient  à  un  seul 
vers  tandis  que  d'autres  retendraient  dans  des  proportions  considé- 
rables. M.  Pidal  montre,  comme  l'avaient  supposé  R.  Béer  et  G.  Baist, 
que  cette  lacune  ne  devait  pas  dépasser  une  page  d'une  cinquantaine 
de  vers  environ.  S'il  en  est  ainsi,  il  n'est  guère  possible  de  relier  au 
Cantar,  autrement  que  par  une  simple  allusion,  l'épisode  de  la  Jurti 
à  Santa  Gadea.  Ce  n'est  pas  que  cette  scène  ne  paraisse  en  effet  une 
préface  assez  naturelle  à  l'exil  de  Rodrigue.  Mais,  d'une  part,  il  y  a 
d'autres  raisons  pour  expliquer  cet  exil,  et  de  l'autre,  elle  se  rattache 
plus  logiquement  au  Canlar  du  Siège  de  Zamora  et  au  meurtre  de  don 
Sancho,  si,  comme  M.  J.  Puyol  paraît  bien  l'avoir  démontré',  ce 
Canlar  a  vraiment  existé.  Si  l'on  objecte  que  dans  cette  Geste  perdue, 
comme  dans  la  partie  correspondante  des  Chroniques,  le  rôle  du  Cid 
n'est  que  de  second  plan,  tandis  qu'il  devient  dans  la  scène  de  la 
Jura  le  personnage  principal,  avec  le  roi  Alphonse,  on  répondra 
qu'en  tout  état  de  cause  il  n'en  pouvait  être  autrement,  puisque  ce 
changement  du  lieu  de  la  scène  et  la  disparition  des  autres  person- 
nages ne  laissaient  plus  en  présence  que  le  roi  léonais  et  le  chef 
castillan.  Mais  répétons-le,  sans  exclure  absolument  cette  explication, 
l'exil  de  Rodrigue  pouvait  se  justifier  autrement.  L'histoire  latine  du 
Cid,  et  certaines  Chroniques  qui  s'en  sont  inspirées,  prêtent  au  Roi 
des  griefs  suffisants:  elles  s'accordent  à  attribuer  sa  jalousie  et  son 
ressentiment  aux  exploits  de  Rodrigue  contre  les  Maures,  soit  dans 
son  expédition  d'Andalousie  pour  le  recouvrement  du  tribut  ou  parias 

1,    Arrhivo  de  InvesHyaciones  historicas,  Arm  I,  tu'im,  i  (191  ij. 


324  BULLETIN    HISPANIQUE 

d'Almutamiz,  roi  de  Séville,  soit  dans  une  seconde  expédition,  en 
Castille  même,  pendant  l'absence  du  roi  Alphonse.  M.  Pidal  remarque 
que  sur  trois  détails  caractéristiques  le  Cantar  et  l'Histoire  latine 
coïncident:  le  tribut,  la  défaite  de  Garcia  Ordônez  à  Cabra,  les 
calomnies  des  envieux.  C'est  donc  dans  le  récit  de  la  Chronique  de 
Vingt  Rois,  qui  suit  l'Histoire  Latine,  que  l'on  a  chance  de  retrouver 
le  sens  général  de  la  lacune  du  début.  Les  quarante  ou  cinquante 
vers  qui  manquent  peuvent  être  approximativement  restitués  à  l'aide 
d'un  passage  de  cette  dernière  Chronique  (où  l'on  croit  d'ailleurs 
reconnaître  des  traces  d'assonances),  et  par  un  remaniement  de  la 
Geste  conservé  assez  fidèlement  dans  la  Chronique  de  Castille  et  dans 
la  Chronique  Particulière  du  Cid.  On  verra,  à  la  page  i025,  les  douze 
vers  ainsi  restitués  (assonance  a-o),  qui  auraient  immédiatement  pré- 
cédé le  premier  vers  actuel.  Quant  aux  deux  pages  qui  manquent, 
l'une  après  le  vers  a337,  l'autre  après  le  vers  35o7,  M.  Pidal  y  supplée 
par  le  texte  correspondant  de  cette  même  Chronique  des  Vingt  Rois, 
et  non,  comme  Lidforss,  par  celui  de  la  Troisième  Chronique. 

En  somme,  si  l'on  estime  à  cent  cinquante  environ  les  vers  que 
pouvaient  contenir  les  trois  pages  perdues,  et  si  l'on  tient  compte  des 
vers  épars  qui  ont  été  omis  çà  et  là,  le  nombre  total  des  vers  devait 
sensiblement  approcher  de  4ooo.  Ils  sont  actuellement  répartis  en 
132  laisses  d'étendue  très  diverse.  M.  Pidal  divise  la  Geste  entière  en 
trois  Cantares  :  celui  de  l'Exil  (i,o8G  vers);  celui  des  Noces  (1,191  v.); 
celui  de  Corpes  ( i, 463  v.),  divisions  d'ailleurs  nettement  indiquées 
par  le  texte  lui-même,  et  généralement  adoptées  par  les  divers  éditeurs 

Indépendamment  de  ces  trois  grandes  lacunes,  il  y  a,  dans  le  texte 
de  Per  Abbat  une  foule  d'autres  omissions  moins  graves  aux(juelles  il 
faut  remédier  dans  la  mesure  du  possible,  un  grand  nombre  aussi  de 
mauvaises  lectures  qu'il  faut  redresser,  de  substitutions  et  de  confu- 
sions de  mots,  de  gloses  vicieuses  introduites  dans  le  texte,  de  distrac- 
tions du  scribe,  d'assonances  irrégulières,  de  doubles  vers  fondus  en 
un  seul,  ou,  au  contraire,  de  vers  indûment  coupés  en  deux.  En 
réalité,  il  n'est  guère  de  vers  où  ne  se  pose  un  petit  problème,  (jne  le 
plus  souvent  l'éditeur  résout  avec  élégance,  ou  dont  tout  au  moins  il 
pose  les  termes  avec  plus  de  précision  qu'on  ne  l'avait  fait.  Sa  parfaite 
connaissance  des  (^hronicpies,  dont  il  a  débrouillé  la  filiation,  de  la 
langue  archaïtiuc  et  de  tous  les  travaux  critiques  dont  ce  texte  a  été 
l'objet  donnent  à  ce  commentaire  une  valeur  de  premier  ordre.  Ce 
travail  de  mosaïste  adroit  et  patient  aboutit  à  une  restauration  en 
son  état  premier  aussi  satisfaisante  que  possible  de  l'œuvre  antique,  et 
d'autre  part  —  résultat  dont  le  commun  des  lecteurs  lui  saura  gré,  — 
à  un  texte  plus  accessible  à  tous  et  icndu  plus  intelligible  encore  par 
une  (lithographe,  une  ponctuation  cl  une  accentuation   modernisées. 

Tfl  est,  dans  ses  lignes  essentielles,  l'ouvrage  de  M.  rid.il.  Ces  liois 


BIBLIOGRAPHIE  3  25 

volumes  semblent  épuiser  l'étude  objective  du  Cantar  de  mio  Ciel.  Ils 
la  dépassent  même  sensiblement,  en  ce  sens  qu'une  grammaire,  un 
vocabulaire  et  une  métrique,  conçus  et  exécutés  avec  cette  ampleur, 
servent  et  valent  non  seulement  pour  ce  texte  particulier,  mais  encore 
pour  toute  la  période  archaïque  de  la  littérature.  Ce  serait  là,  s'il  en 
était  besoin,  la  meilleure  réponse  à  ceux  qui  s'étonneraient  de  voir 
consacrer  tant  de  temps  et  d'efforts  à  l'illustration  d'une  œuvre  dont 
la  valeur  littéraire  ne  leur  apparaît  point  avec  évidence  comme  au- 
dessus  de  toute  discussion. 

Ce  mérite  intrinsèque,  même  après  ces  trois  volumes,  resterait  donc 
encore  à  démontrer,  la  démonstration  ne  rentrant  point  dans  le  plan 
que  l'auteur  s'était  tracé,  et  dont  délibérément  il  ne  voulait  pas  sortir. 
Il  a  fourni  avec  abondance  et  sûreté  tous  les  éléments  nécessaires  à  la 
complète  connaissance  du  poème  dans  son  état  actuel  et  dans  sa 
forme  probable  antérieure.  S'en  servira-t-il  lui-même  pour  nous  dire 
maintenant,  avec  une  autorité  si  bien  conquise,  ce  qu'il  faut  penser 
de  la  valeur  réelle  de  cette  épopée,  de  son  originalité,  de  ses  sources 
historiques  ou  littéraires,  de  la  conception  artistique  dont  elle 
témoigne,  de  l'orientation  intellectuelle  qu'elle  révèle,  enfin  des  juge- 
ments dont  elle  a  été  l'objet  et  de  l'influence  qu'elle  a  pu  exercer? 

Il  est  permis  de  penser  que,  même  après  tant  de  travaux  consacrés  à 
ce  sujet  et  peut  être  même  à  cause  de  l'abondance  et  de  la  diversité 
un  peu  confuse  de  ces  travaux,  des  conclusions  de  ce  genre  compléte- 
raient heureusement,  en  en  montrant  la  portée,  la  monographie  vrai- 
ment admirable  dont  il  vient  d'être  parlé.  e,  MÉRIMÉE. 

Spanish  Ballads  (romances  escogidos)  ediled  wi/h  inlroduclion, 
notes,  and  vacabulary  by  S.  Griswold  Morley.  New-York, 
Henry  Holt,  191 1;  226  pages. 

M.  Griswold  Morley  nous  offre  là  un  bon  petit  recueil  de  romances 
espagnols,  plus  tout  ce  qu'il  faut  pour  les  lire  et  les  comprendre, 
notes  explicatives,  grammaticales,  vocabulaire,  bibliographie,  quelque 
chose  comme  ce  qu'avait  donné  M.  Ducamin  dans  la  collection 
Mérimée,  mais  avec  tout  l'avantage  que  tant  de  textes  et  de  travaux 
publiés  depuis  pouvaient  assurer  à  un  éditeur  en  191 1.  Pour  montrer 
en  quoi  la  légende  a  déformé  l'histoire,  M.  Griswold  Morley  a  soin 
d'esquisser,  quand  il  y  a  lieu,  la  réalité  historique,  à  grands  traits 
bien  entendu,  car  il  est  bien  difficile,  dans  le  détail,  de  dégager  celle-ci 
de  la  légende  qui  la  recouvre  déjà  dans  les  textes  dits  historiques, 
même  relativement  anciens,  même  presque  contemporains.  Son 
travail  ne  peut  manquer  d'être  bien  accueilli  du  public  anglais  et 
américain,  qui  a  pu  prendre  goût  à  ces  romances  en  lisant  les  traduc- 
tions de  Lockhardt.  G,  C. 


CHRONIQUE 


— ~  Nous  avons  reçu  le  tome  II  du  Don  Qiiijofe  de  M.  Kodriguez 
Marin  (édition  des  CIdsicos  Castellanos  de  la  Lecliira).  Il  va 
du  chap.  \\  au  chap.  XXVI  inclusivement  de  la  première  partie. 
Lannotation  est  toujours  aussi  riche,  intéressante  et  ingénieuse  que 
dans  le  tome  premier.  Bien  des  passages  du  texte  reçoivent  une 
nouvelle  lumière,  parfois  mrme  une  nouvelle  interprétation,  grâce 
aux  rapprochements  présentés  par  le  savant  éditeur  et  à  la  ponctuation 
qu'il  adopte. 

—  La  Leclura  a  publié  le  i  '  tome  (El  liey  Lear)  d'une  traduction 
espagnole  des  œuvres  complètes  de  Shakespeare,  traduites  par  Jacinto 
Benavente.  Le  tome  II  contiendra  La  Tempes tad  (sous  presse). 

— -  M.  Rudolf  Schevill,  de  l'Université  de  Californie,  a  publié  en 
tirage  à  part  un  intéressant  article  paru  dans  le  Recueil  des  publica- 
tions de  philologie  moderne  de  cette  Université  (vol.  2,  n"  3,  pp.  i83- 
287),  sur  les  Questions  énigmatiques  et  ingénieuses  dans  la  littérature 
populaire.  Il  étudie  à  ce  point  de  vue  la  i4'  Palrana  de  Timoneda, 
en  recherche  les  origines,  les  formes  diverses  dans  toutes  les  littéra- 
tures, et  dresse,  en  appendice,  une  triple  liste,  des  types  mis  en  action 
dans  les  nombreux  remaniements  de  ce  conte,  des  différentes  questions 
ou  énigmes  dont  la  solution  est  proposée,  enfin  de  tous  les  contes 
reproduisant  la  même  anecdote.  Il  n'en  a  pas  trouvé  moins  de  70, 
qui,  de  près  ou  de  loin,  ont  quelque  rapport  avec  la  palrana  du  Roi, 
de  Vahbé  el  du  cuisinier  racontée  par  Timoneda.  Excellent  travail  de 
folk-lore  et  de  littérature  populaire  comparée. 

—  Nous  recevons  au  dernier  moment  le  tome  18'  de  la  Nueiui 
HibUoieca  de  Aulores  Espanoles,  éditée  par  M.  Bailly-Baillière.  11 
forme  le  second  volume  du  tome  premier  de  la  collection  d'Entre- 
meses,  Loas,  Halles,  etc.,  de  la  fin  du  xvi' au  milieu  du  wni"  siècle. 
Cette  abondante  collection,  mise  en  ordre  par  M.  Emilio  (^otarclo 
y  Mon',  si  compétent  en  matière  de  théâtre,  compte  déjà  un  premier 
volume,  dont  il  a  été  cpicstion  ici,  et  doit  réunir  la  Heur  de  l'énorme 
récolte  amassée  par  le  laborieux  collectionneur.  Le  présont  volume 
comprend  les  textes  suivants  :  1°  Les  34  loas  qui  se  trouvent  dans 
le  Viaje  enlrctenido  (iGo/i)  d'Agusti'n  de  Rojas.  —  2"  68  loas 
empruntées  à  d'autres  recueils  du  tem|)s.  —  3"  23  halles,  jdcaras 
et  mojigangas  de  différents  auteurs.  —  7i'  i/i2  enlremeses ,  halles,  etc., 
de  Luis  (Juinones  de  Benavente.  insérés  soit  dans  sa  Jocoseria  (  ii>\'^), 
soit  dans  d'autres  recueils.   L'éditeur  a  joint  à  ces  9;)-;  pièi-es  ilrama- 


f.HROMQt  E  2  2- 

tiques,  qui  forment,  avec  les  84  antérieurement  publiées,  une  matière 
d'étude  extrêmement  riche,  Veniremes  de  los  sordos,  attribué  à  Lope 
de  Vega,  et  publié  en  fac-similé  par  M.  A.  lluntington.  Grâce  à  cette 
publication,  toute  cette  littérature  des  genres  dramatiques  secon- 
daires, dont  la  valeur  littéraire  n'égale  pas  toujours  l'intérêt  documen- 
taire, pourra  être  consultée  plus  rapidement  et  plus  commodément. 

E.  M. 

—  M.  Morel-Fatio  a  publié  dans  le  tome  XXXIX  des  Mémoires  de 
l Académie  des  Inscriptions  el  Belles-Lettres  (1911),  sous  le  titre 
de  Une  histoire  inédite  de  Charles-Oaint  par  an  fourrier  de  sa  cour, 
une  élude,  avec  extraits,  d'un  manuscrit  acquis  récemment  par  la 
Bibliothèque  Nationale  de  Paris  grâce  à  la  libéralité  de  la  marquise 
Arconati  Visconti.  C'est  un  abrégé  des  Commenlarii  de  Jean  Sleidan, 
traduits  par  Robert  Le  Provost  (  1 507 ),•  auquel  Hugues  Cousin  (Hugues 
le  Vieux,  car  il  a  eu  un  frère  plus  jeune  du  même  prénom),  fourrier 
de  l'empereur,  a  ajouté  des  morceaux  de  son  cru  sur  des  événements 
auxquels  il  avait  été  mêlé,  et  sur  lesquels  l'historien  allemand 
n'insistait  pas  assez  à  son  gré. 

—  Algunas  relaciones  entre  las  leyendas  moriscas  y  las  crislianas, 
article  paru  dans  Studies  in  honor  of  A.  Marschall  Elliot,  t.  11,  et  tiré 
à  part,  s.d.).  M.  H.  Menéndez  Pidal  signale  trois  légendes  morisques 
qui  ont  leur  origine  dans  les  Vitae  Patrum  :  Jésus  et  la  Tête  de  mort; 
L'ermite  qui  se  brûle  la  main;  Le  santon  qui  apostasie  par  amour. 

—  L'étude  des  rapports  de  la  légende  avec  l'histoire,  des  œuvres 
poétiques  avec  les  textes  historiques,  préoccupe  de  plus  en  plus  les 
hispanisants,  â  commencer  par  M.  Ramûn  Menéndez  Pidal  lui-même, 
qui  vient  de  publier  dans  les  Sludi  lelterari  e  linguistici  dédiés  à 
Pio  Rajna  un  article  sur  El  elemento  histôrico  en  el  y>  Homanz  delt 
Inffant  Garcia  »  (tiré  à  pari,  Florence,  191 1). —  Suivant  l'exemple  si 
brillamment  donné  par  l'auteur  de  La  leyenda  de  los  Infantes  de  Lara, 
M.  Julio  Puyol  y  Alonso  a  su  démêler,  dans  la  prose  de  la  Chronique 
générale,  le  Cantar  de  gesta  de  Don  Sancho  II  de  Castilla  (Madrid, 
Suârez,  191 1).  Peut-être  M.  Puyol  y  Alonso  aurait-il  trouvé,  dans  le 
morceau  de  la  Chronique  léonaise  publié  dès  juillet  1909  ici-même, 
quelques  passages  intéressants  touchant  les  faits  ou  légendes  dont  il 
s'occupe.  Mais  à  vrai  dire,  que  ce  morceau  ait  été  publié  avant  l'appa- 
rition de  la  thèse  si  curieuse  de  M.  Puyol  y  Alonso,  cela  est  infiniment 
plus  regrettable  pour  l'éditeur  de  ladite  chronique.  La  malechance,  au 
surplus,  doit  le  poursuivre,  car  au  moment  où  il  faisait  paraître  le 
reste  de  cette  chronique  (fin  novembre  191 1),  il  recevait  le  beau  tra- 
vail de  M.  Menéndez  Pidal,  qu'il  aurait  eu  profit  à  connaître  pour  le 
commentaire  d'un  passage  relatif  à  l'Infant  Garcia  (pp.  427-428);  et 
lui-même  publiait  son  texte  trop  tard  pour  pouvoir  contribuer  à  la 
documentation  de  rcxccllent  érudit. 


3  30  BULLETIN    HlSPAMQL'E 

—  La  librairie  Karl  AV.  lliersemann  (Kônigstr.,  39,  Leipzig)  nous 
prie  de  signaler  son  dernier  catalogue  d'Hispanica  (1913,  n"  ^07). 

—  La  littérature  des  pèlerinages  à  Compostelle  n'est  pas  une  litté- 
rature morte:  à  preuve  la  plaquette  in  pèlerinage  à  Saint-Jac(pies  de 
Compostelle,  par  André  Rebsomen,  Bordeaux,  Feret,  191 1. 

— ^-  Les  cent  millors  poésies  de  la  Llengua  Catalana  triades  pcr 
Ernest  Moliné  y  Brases  (Barcelona,  Antoni  Lôpez)  forment  un  joli  petit 
volume  qui  a  le  mérite  de  ne  pas  tenir  de  place,  d'être  bien  imprimé, 
et  de  contenir  la  quintessence  de  toute  une  poésie.  Le  choix,  bien 
entendu,  est  affaire  de  goût.  Mais  le  lecteur  trouvera  bien  dans  le 
nombre  ses  préférences. 

—  Mcditando,  recueil  posthume  d'articles  par  lequel  la  maison 
Ollendorf  a  inauguré  sa  Biblioteca  Quisqueyana,  contient,  avec  une 
étude  sur  Ilamlet,  d'intéressantes  pages  d'Kugenio  Maria  de  Hostos 
(de  Puerto  Hico,  1839-1903)  sur  la  littérature  et  les  choses  améri- 
caines .  sur  le  poète  cubain  Gabriel  de  la  Concepciôn  Valdés  (Placido), 
le  poète  argentin  Carlos  Guido  Spano,  le  poète  chilien  Guillermo 
Matta,  la  poétesse  dominicaine  Salomé  Lrefia  de  Henrique/,  etc. 

—  Une  Académie  de  l'Histoire  a  été  constituée  officiellement  à  La 
Havane  en  19 10,  et  les  membres  en  sont  présentés  au  public  par 
M.  Carlos  de  Velasco  dans  uno  plaquette  avec  notices  et  poriraits 
i  Reoista  de  la  Biblioteca  nacional,  tirés  à  part.  La  Havane,  1910). 

—  La  Bibliotheca  Ronianica  (Heitz,   Strasbourg)  s'est  enrichie  d'un 

nouveau    volume,    qui    contient  la    Coniedia   de    Calislo   y   Melihea 

(n"'  i42-i/i5),  éditée  par  M.  Fritz  Holle.  Une  substantielle  introduction 

expose  l'état  de  la  question   relative  à  l'auteur,    ou  aux  auteurs,   et 

caractérise  brièvement    l'inspiration    de    l'œuvre.    Pour   établir   son 

texte,   M.  Holle  a   utilisé,  directement   ou    indirectement,   un  grand 

nombre  d'éditions,  qu'il  énumère  en  tête  et  marque  en  bas  de  pages. 

Il   a   employé  un    ingénieux   système  de    notes   qui   permet,    chose 

dilïicilc   autrement,  de  s'assurer  des   variantes   ortliographiques   de 

i5ot  et  de  i5i/j,  par  rapport  à  l'édition  de  1/199,  qu'il  suit  et  considère 

comme  la  princeps.  Le  travail  paraît  avoir  été  fait  avec  beaucoup 

de  soin. 

G.  C. 


25  mars  1912. 


LA  RÉDACTION  :  K.   MKFUMKE,  A.  MORKL  FATIO,  P.  PARlb, 

<i.  ('.\\{(y\\  srcrélnire ;  it.   WWiET,  dircclcur-géranl. 

Bordeaux.  —  Impr.  G.  Golsouilhou,  rue  Guiraude,  9-11. 


^rv 


Vol.  XIV.  Juillet -Septembre   1912.  N»  3. 

LES  DÉCLAMATEURS  ESPAGNOLS 

AU  TEMPS  D'AUGUSTE  ET  DE  TIBÈRE 

{Suite  '  ) 


IV 


Rapports  de  l'Espagne  avec  Rome  à  la  fin  de  la  République  et  au 
commencement  de  l'Empire.  —  Sentiments  pompéiens  des 
Espagnols.  —  La  guerre  civile.  —  Rataille  de  Munda  (17  mars 
709-45).  —  Sextus  Pompée  en  Espagne.  —  Longue  insurrection 
des  Astures  et  des  Cantabres  contre  l'empereur  Auguste  (de 
724-30  à  734-20). 

Quand  Sénèque  arriva  ù  Rome  en  712-/12,  il  y  trouva  l'opi- 
nion publique  fort  mal  disposée  pour  ses  compatriotes.  L'Italie, 
épuisée  par  les  guerres  civiles,  s'abandonnait  sans  résistance 
à  la  domination  nouvelle  des  triumvirs  par  qui  elle  espérait 
voir  garantir  cette  paix  dont  elle  avait  tant  besoin.  On  était 
hostile  aux  Pompéiens  qui  n'avaient  pas  désarmé  à  la  mort 
de  (lésar,  et  que  les  vainqueurs  de  Philippes  avaient  eu  grand' 
peine  à  réduire  à  l'impuissance. 

Or,  depuis  une  quinzaine  d'années,  l'Espagne  n'avait  cessé 
de  se  montrer  favorable  ù  Pompée;  entre  toutes  les  villes 
espagnoles,  Cordoue,  la  patrie  de  Sénèque,  s'était  distinguée 
par  son  loyalisme  pompéien. 

Pendant  l'hiver  de  698-06,  César,  Pompée  et  Crassus 
s'étaient  réunis  à  Luca,  sur  les  frontières  de  la  Ligurie,  pour 
renouveler  leur  pacte  de  l'an  6g4-6o.  A  la  suite  des  conférences 
qui  avaient  réglé  les  conditions  de  cette  nouvelle  coitio,  il 
avait  été  décidé  que  César  conserverait  les  Gaules,  que  Pompée 
aurait  l'Espagne  et  l'Afrique  et  Crassus  la  Syrie,  pendant  une 
période  de  cinq  années.  Grâce  à  une  pression  électorale  savam- 

I.  Voir  le  Bull,  hisp.,  t.  \II,  1910,  p.  i  ;  t.  XIV,  1912,  p.  1 1. 

A  FB.,  1V«  SÉRIE.  —  Bull,  hisp.,  XIV,  1912,  3.  16 


23o  BULLET1>    HISPANIQUE 

ment  organisée,  Pompée  et  Grassus,  qui  avaient  déjà  exerce  le 
consulat  ensemble  en  (38^-70,  étaient  consuls  pour  la  seconde 
fois  en  699-55  '. 

Ces  dispositions  qui  réglaient  le  sort  du  monde  romain  une 
fois  prises,  César  était  retourné  en  Gaule  où  il  continuait  la 
conquête.  Grassus  s'engageait  follement  dans  une  expédition 
contre  les  Parthes  où  il  était  tué  (701-53).  Pompée  restait  à 
Rome  durant  lout  son  quinquenniam  .  Il  invoquait  pour  se  dis- 
penser d'aller  dans  sa  province  le  texte  d'une  loi  de  697-57,  en 
vertu  de  laquelle  la  poteslas  rei  frumenlariue  ioio  orbe  per  quin- 
quennium  lui  avait  été  conférée  jusqu'en  702-52.  Il  prétendait 
que  ce  contrôle  des  approvisionnements  rendait  sa  présence 
nécessaire  à  Rome  où  il  tenait  à  rester  pour  soigner  sa  popu- 
larité 2.  Contrairement  aux  lois  et  à  tous  les  précédents,  le 
proconsul  d'Espagne  et  d'Afrique  faisait  gouverner  ses  pro- 
vinces par  des  legati^.  Pour  l'Espagne,  X'Hispdiiia  Cilerior  était 
confiée  à  L.  Âfranius,  ancien  légat  de  Pompée  en  Asie,  consul 
de  l'an  69/1-60  avec  Q.  Caecilius  Metellus  Geler;  la  Lusitania,  à 
M.  Petreius,  le  vainqueur  de  la  bataille  de  Pistoia  où  Catilina 
avait  été  tué  en  692-62;  YIHspatiia  UUerior,  à  M.  Terentius 
Varro,  le  lettre  éminent,  auteur  de  nombreux  ouvrages  dont 
il  nous  reste  une  partie  du  De  lingua  lalina  et  les  Berum  riisli- 
carum  libri  ires. 

Pompée  et  Varron  connaissaient  bien  l'Espagne.  De  677-77 
à  683-71,  Pompée  avait  dirigé  la  guerre  contre  Sertorius  avec 
Yarron  comme  proquesleur.  Le  général  romain  avait  compris 
que  si  Sertorius  était  parvenu  à  établir  si  solidement  son  auto- 
rité en  Espagne,  c'est  qu'il  avait  su  se  concilier  par  son  habi- 
leté et  sa  justice  les  indigènes  dont  il  faisait  les  égaux  des 
Romains,  admettant  les  plus  notables  d'entre  eux  à  côté  des 
proscrits  dans  un  sénat  de  trois  cents  membres,  faisant  élever 
les  enfants  de  bonne  famille  à  Osca,  dans  la  Tarraconaise, 
suivant  la  discipline  des  écoles  latines.  Pompée  avait  suivi  la 
politique    de    Sertorius    dans    les    régions    de    l'Espagne   qui 


I.  Epilome,  de  Titc-Livo,  GV;  Dion  (^as.tius,  \XXI\,  xxxiii. 

1.  Cicéron,  Efiisl.  ad  Allie,  IV,  i,  7;  iJion  f.assius,  XXXIX,  xxxix. 

3.  Ai)pii;n,  (iuirrrs  civilrs,  11,  xmii  ;  César,  De  Hrllo  civili,  I,  xxxviii. 


LES    DÉCL.VMATEURS    ESPAGNOLS  23 1 

n'étaient  pas  inféodées  au  chef  des  rebelles;  en  prodiguant  le 
droit  de  cité,  il  s'était  fait  de  nombreux  partisans  parmi  les 
nouveaux  citoyens  romains'. 

Il  est  probable  que,  conformément  aux  instructions  de  leur 
chef,  les  légats  du  consul  de  699-55,  Varron  surtout,  réus- 
sirent, par  une  administration  intelligente  et  bienveillante  à 
faire  de  l'Espagne  un  pays  absolument  pompéien,  puisque, 
dans  l'été  de  705^9,  dès  le  début  de  la  guerre  civile,  avant  de 
poursuivre  Pompée  en  Épire,  César  jugea  utile  d'aller  en  per- 
sonne soumettre  la  province  qu'il  savait  dévouée  à  son  adver- 
saire. Il  craignait  —  il  le  dit  lui-même  ^  —  que  les  vétérans  de 
Pompée  qui  servaient  dans  la  péninsule  hispanique  et  que  les 
habitants  des  deux  Espagnes  dont  l'une  surtout,  VHispania 
Ullerior,  avait  été  comblée  de  bienfaits  par  les  ordres  du  gou- 
verneur, ne  s'unissent  pour  prendre  l'offensive  et  pour  porter 
la  guerre  en  Italie.  La  campagne,  rapidement  conduite,  fut 
terminée  en  quarante  jours.  Le  2  août  705-49,  Afranius  et 
Petreius,  qui  avaient  concentré  leurs  deux  armées  dans  le 
nord  de  l'Espagne,  à  llerda,  furent  forcés  de  capituler  :  ils 
devaient  licencer  leurs  troupes  et  sortir  de  la  province^.  Aus- 
sitôt débarrassé  des  armées  de  la  Lusitania  et  de  VHispania 
Citerior,  César  passait  dans  VHispania  Ulterior  où  Yarron  se 
préparait  à  la  lutte  :  des  levées  de  troupes  avaient  été  faites 
dans  toute  la  province,  de  grandes  quantités  de  blé  et  d'argent 
réunies  à  Gadès,  que  l'on  fortifiait''.  Mais  César  établissait  son 
quartier  général  à  Cordoue;  il  y  convoquait  l'assemblée  géné- 
rale de  la  province.  Bientôt,  un  mouvement  de  sympathie  se 
produisait  partout  en  sa  faveur.  Les  magistrats,  les  délégués 
des  sénats  municipaux,  les  principaux  citoyens  des  villes  qui 
se  rendaient  au  convenlus,  se  souvenaient  que  César  avait  fait 
son  entrée  dans  les  charges  publiques  comme  questeur  de 
VHispania  Ullerior  en  686-68,  qu'il  y  était  revenu  comme  pro- 
préteur en  693-61,  que,  dans  ces  deux  fonctions,  il  s'était 
montré  administrateur  bienveillant;  on  oubliait  Pompée,  qui 

I.  Cicéron,  Pro  Balbo,  viii,  19;  xxii,  5o. 
a.  César,  De  Bellocivili,  I,  xxix,  3. 

3.  César,  De  Bello  civili,  1,  lxxxv,  12. 

4.  César,  De  Bello  civili,  II,  xviii. 


aSa  BULLETIN    HISPANIQUE 

était  loin:  on  ne  pensait  qu'à  César  qu'on  voyait  pour  la  troi- 
sième fois  dans  la  province  à  qui  il  disait  avoir  voué  dès  sa 
(juesture  une  affection  toute  particulière.  Les  portes  de  Cor- 
doue  se  fermèrent  devant  Yarron.  qui,  abandonné  par  ses 
troupes,  dut  faire  sa  soumission.  Cependant,  à  l'assemblée 
provinciale,  César  prodiguait  les  bonnes  paroles  et  les  récom- 
penses; il  pouvait  bientôt  quitter  Cordoue  et  retourner  devant 
Marseille  dont  ses  lieutenants  faisaient  le  siège,  laissant  les 
trois  provinces  de  l'Espagne  pacifiée  réunies  sous  le  gouver- 
nement du  tribun  de  la  plèbe  Q.  Cassius  Longinus2. 

Quelque  temps  après,  la  guerre  recommençait''.  La  présence 
de  César,  ses  bonnes  paroles,  le  souvenir  de  ses  bienfaits  et 
l'espoir  des  récompenses  qu'il  avait  promises  avaient  ébranlé 
la  fidélité  pompéienne  des  principaux  citoyens  des  villes  d'Es- 
pagne réunis  à  l'assemblée  provinciale  de  Cordoue.  Entraînés 
par  un  revirement  subit,  ceux-là  mêmes  qui  avaient  promis 
avec  sincérité  d'être  fidèles  à  César  redevenaient  pompéiens, 
quand  ils  apprenaient  la  mort  misérable  de  leur  ancien  bien- 
faiteur Pompée.  Désespérés  du  désastre  de  Thapsus,  les  cliefs 
du  parti  vaincu  réunis  à  Utique  reprenaient  courage  à  la  nou- 
velle que  l'Espagne  se  révoltait  contre  César  pour  embrasser 
la  cause  des  fils  de  Pompée-'.  On  décidait  d'abandonner 
l'Afrique;  et,  en  voyant  débarquer  dans  leur  pavs  Cnaeus  et 
Sextus,  les  liabitants  de  la  vieille  Bétique  accueillaient  avec 
enthousiasme  les  deux  fils  de  l'homme  qui  avait  acquis  une 
si  grande  popularité  en  Espagne.  Les  Espagnols  venaient  en 
foule  aux  fils  de  Pompée,  comme  leurs  pères  étaient  venus  à 
Scrtorius;  les  Celtibères  s'armaient;  les  habitants  de  la  partie 
la  plus  romaine  de  la  |)roviii(e  armaient  même  leurs  esclaves  •''; 
la  population  de  Cordoue  était  à  la  tète  du  mouvement  insur- 
rectionnel qui  réussit  presque  à  mettre  en  échec  la  fortune  de 
César. 

I.  Cf.  Pseudo-César,  De  Bello  Jlisii.,  mai  :  Cacsar...  cnmmcmoral  inilio  ijuncslurac 
Siinr  ram  provinciam  ex  omnihus  [>rovinriis  ^ihi  jïeciiliarein  rorislilnissr. 

a.   Césnr,  Ifr  lirllo  civili,  11,  \ix-xxi. 

3.  I.e  récit  de  celle  ^^ucrre  fjiil  rol)jet  du  De  licllo  Jlispnnu'itsi,  œu^^c  de  (luelquc 
lieutenaiil  ili;  César. 

II.  Plulan|ue,  (Mon  )l'l]H<inv,  i.ix,  'i. 
5.  Appicn,  Giicrrrs  civiles,  II,  cm. 


LES   DÉCLA.MA.TEURS    ESPAGNOLS  233 

La  bataille  définitive  fut  livrée  le  17  mars  709 -43  à  Munda. 
L'auteur  du  De  Bello  Hispaniensl  dit  simplement  que  l'impé- 
tuosité des  ennemis  fut  telle  que  les  soldats  de  César  désespé- 
raient de  la  victoire'.  Mais  la  tradition  a  amplifié  les  dangers 
d'une  lutte  oîi  les  Espagnols  qui  formaient  une  grande  partie 
de  l'armée  pompéienne  auraient  pu  infliger  à  Rome  un 
désastre  semblable  à  celui  de  l'Allia.  D'après  les  historiens 
grecs  et  romains  de  l'époque  impériale,  César,  contrairement 
à  sa  coutume,  paraissait  triste  avant  la  bataille,  car  il  lui  sem- 
blait que  sa  fortune  l'abandonnait;  pendant  l'action,  il  dut 
descendre  de  cheval,  se  jeter  en  face  de  ses  soldats  qui  lâchaient 
pied,  les  haranguer,  les  ramener  à  l'ennemi  ;  au  moment  le  plus 
critique,  il  pensa  même  à  se  tuer;  après  la  défaite  des  Pom- 
péiens, il  déclara  qu'il  venait  de  combattre  pour  la  vie,  lui  qui 
avait  toujours  combattu  pour  la  victoire  2.  Lucain  et  Silius  Ita- 
liens comparent  la  funeste  bataille  de  Munda  et  la  bataille 
maudite  de  Pharsale^. 

A  Rome,  oîi  l'insurrection  des  Espagnols  causait  de  profondes 
inquiétudes,  l'enthousiasme  fut  grand  quand  on  apprit,  le 
20  avril,  que  si  César  avait  eu  de  sérieuses  difficultés  pour 
vaincre,  sa  victoire  était  définitive.  Parmi  les  vétérans  de  Pom- 
pée, les  Espagnols  qui  avaient  rang  équestre,  les  volontaires 
des  villes  d'Espagne,  les  esclaves  enrôlés  par  ordre  de  leurs 
maîtres,  on  comptait  trente-trois  mille  morts;  dix-sept  officiers 
supérieurs  des  Pompéiens  avaient  été  faits  prisonniers;  les 
deux  principaux,  Labienus  et  Yarus,  étaient  tombés  sur  le 
champ  de  bataille^.  Le  Sénat  ordonna  cinquante  jours  de 
supplications;  il  décréta  que  César  triompherait,  qu'une  sta- 
tue lui  serait  élevée  dans  le  temple  de  Quirinus,  et  que  désor- 
mais, aux  fêtes  des  Palilia,  le  21  avril,  on  célébrerait  avec 
l'anniversaire  de  la  fondation  de  Rome  sa  seconde  naissance 
due  à  la  victoire  de  Munda.  Les  victoires  remportées  dans 
les  guerres  civiles  ne  méritaient  pas  le  triomphe  aux  vain- 

1.  Pseudo-César,  De  Bello  Uisp.,  xxxi. 

2.  Velleius  Paterculus,  II,  lv,  3  ;  Suétone,  César,  xxxvi  ;  Florus,  II,  xiii,  77  et  suiv.; 
Plutarque,  César,  lvi;  Appien,  Guerres  civiles,  II,  civ. 

3.  Lucain,  I,  v.  ^o;  Silius  Italicus,  III,  v.  ioo. 

4.  Pseudo-César,  De  Bello  Hisp.,  xxxi. 


234  BULLETIN    HISPANIQUE 

queurs',  car  on  estimait  qu'achetées  au  prix  du  sang  romain  et 
non  du  sang  étranger,  elles  étaient  un  sujet  de  deuil  '.  César  ne 
pouvait  triompher  des  Pompéiens  :  c'est  de  l'Espagne  seule  que 
le  dictateur  triompha  au  commencement  d'octobre  709-/15^. 

Mais,  au  moment  de  ce  triomphe,  la  guerre  était  loin  d'être 
finie.  Deux  mois  après  la  bataille  de  Munda,  en  mai  709 -4^, 
Gicéron  écrivait  à  Atticus  :  «  Une  lettre  d'Ilirtius  m'apprend 
que  Sextus  Pompée  est  sorti  de  Cordoue  et  s'est  réfugié  dans 
l'Espagne  Citérieure  et  que  Cnaeus  s'est  enfui  je  ne  sais  où  et 
je  ne  me  soucie  guère  de  le  savoir''.  » 

Cnaeus  s'était  échappé  de  Munda,  grièvement  blessé;  on  le 
portait  dans  une  litière,  il  fut  reconnu,  tué  aussitôt,  et  César 
lit  exposer  sa  tête  à  Hispalis  pour  montrer  à  tous  que  la  ruine 
des  Pompéiens  était  complète^.  Mais  Sextus,  qui  n'avait  pas 
assisté  à  la  bataille  ou  qui  avait  fait  retraite  avant  la  déroute, 
occupait  Cordoue.  11  n'y  attendit  pas  les  vainqueurs.  Laissant 
les  habitants  de  la  cité  pompéienne  s'opposer  inutilement  à 
l'entrée  de  César*^,  qui  s'emparait  de  presque  toutes  les  places 
de  la  province,  il  se  fortifiait  dans  Ursao,  ville  qui  était  déjà 
protégée  par  des  défenses  naturelles  capables  de  détourner 
l'ennemi  d'en  entreprendre  le  siège".  Malgré  la  force  de  la 
position  où  il  s'était  retranché,  Sextus  ne  se  jugeait  pas  en 
sûreté  au  milieu  d'une  province  dont  toutes  les  villes  capitu- 
laient devant  l'ennemi.  11  sortit  donc  d'Ursao  et  conduisit  dans 
V llispania  ('Àlerior  tous  ceux  de  aes  soldats  et  de  ses  fidèles 
Espagnols  qui  avaient  échappé  au  désastre  de  Munda.  Les 
légats  de  César  devaient  venir  l'y  poursuivre^,  après  le  départ 
du  dictateur  qui  allait  triompher  à  Rome  de  l'Espagne  dont  il 
n'avait  pacifié  (pic  la  partie  méridionale. 

Le  De  Bello  llisixinicfisi,  qui   nous  est   parvenu   incomplet, 

1.  Liicain,  I,  v.  12  :  lirlla...  nullns  iLahiliira  triuiiii>lios, 

2.  ValércVIaxime,  II,  viii,  7. 

'A.  Efiil'inifi  i\ii  Tilf!-I,ivc,  cxvi  ;  Vcllciiis  l'atcrculns.  II,  i.vi. 

'(.  (iicôron,  A7*i.s7.  ad  Allie,  \ll,  xxxvii,  4. 

.'».   l*sci](l(»Cr'sar,  l)r  licllo  llinf).,  wxvui- \xxix;  Appien.  (Uirrm  ririlrs.  11,  cv. 

lï.   Pseiido-Ccsar,  hr  liiUo  llisp.,  xxxii -xxxiv. 

7.  Psoiido-Crsar,  Ih;  Hflla  llisp.,  XLi.  --  On  idcntiCio  Ursao  a\cc  la  villt;  moderne 
(i'Ossuna. —  Voir  Muniicrt,  deofjrapliie  der  Cr.  und  lUim.,  Nnremlicrg,  178;',  Ilispanicn, 
p.  3«)S. 

K.  Api)iori,  Giirrres  cii'ilfS,  II,  cv,  cxxii. 


LES  DKCLAMATEURS  ESPAGNOLS  335 

s'arrele  au  moment  où  le  fils  de  Pompée  abandonne  Cordoue 
pour  se  rendre  à  Ursao.  La  guerre  que  Sextus  soutint  en 
Espagne  contre  les  légats  de  César  nous  est  mal  connue  par 
les  rares  renseignements  que  fournissent  des  historiens  hos- 
tiles au  parti  de  Pompée  :  Yelleius  Paterculus,  cet  ancien  légat 
de  l'empereur  Tibère,  très  dévoué  à  la  famille  impériale, 
ennemi  naturel  de  quiconque  a  pu  résister  à  Jules  César;  — 
Appien,  ce  Grec  d'Alexandrie,  procuraior  sous  Antonin  et  sous 
Marc  Aurèle,  admirateur  de  l'empire,  écrivain  dont  l'œuvre 
((  représente  une  tradition  césarienne  qui  arrange  doucement 
les  choses  conformément  à  ses  vues  en  évitant  les  partis  pris 
trop  évidents  »  '  ;  —  Dion  Cassius,  cet  autre  Grec,  qui  a  pour 
les  empereurs  «  les  sentiments  d'un  parfait  fonctionnaire  «^  et 
des  haines  violentes  contre  les  gens  en  qui  il  voit  des  ennemis 
de  l'empereur,  que  cet  empereur  soit  César  ou  Alexandre 
Sévère. 

Au  dire  d'Appien,  Sextus  était  réduit  à  se  cacher  et  à  vivre 
de  brigandages.  Velleius  Paterculus  fait  un  portrait  défavo- 
rable du  fils  de  Pompée,  qu'il  représente  comme  un  jeune 
homme^  sans  éducation,  à  la  parole  grossière,  à  la  valeur 
fougueuse,  prompt  à  l'action,  rapide  dans  ses  décisions,  très 
différent  de  son  père  sous  le  rapport  de  la  bonne  foi,  ayant 
l'air  d'être  l'affranchi  de  ses  affranchis  et  l'esclave  de  ses 
esclaves,  jaloux  des  personnes  distinguées,  très  docile  à  l'in- 
fluence des  gens  de  la  basse  classe''.  Cependant,  ce  jeune 
homme  de  médiocre  mérite,  réduit  à  se  cacher  et  à  vivre  de 
brigandages,  battait  les  armées  qu'on  envoyait  contre  lui.  La 
Fortune  —  dit  le  déclamateur  Florus'»  —  dérobait  jalousement 
Sextus  Pompée  à  ses  ennemis;  elle  le  gardait  au  fond  de  la 
Celtibérie,  le  réservant  pour  les  guerres  qui  devaient  suivre  la 
mort  de  César.  En  réalité,  Sextus  ne  se  cachait  pas;  il  sortait 
de  la  Celtibérie  pour  vaincre  les  Césariens  dans  toutes  les 
régions  de  la  péninsule;  deux  ans  après  la  bataille  de  Munda, 

1.  M.  Croiset,  Histoire  de  la  Littéraliire  grecque,  tome  V,  Paris,  1899,  p.  C77. 

2.  Boissier,  Tacite,  p.  122. 

3.  Né  en  75,  Sextus  Pompeius  Magnus  avait  alors  trente  ans. 
h.  Velleius  Paterculus,  11,  lxxii,  i. 

5.  Florus,  II,  XIII,  87. 


236  BULLETIN   HISPANIQUE 

le  pays  tout  entier  continuait  à  être  hostile  à  Antoine  qui  se 
prétendait  l'héritier  de  la  politique  césarienne.  Si  l'Espagne 
professait  cette  aversion  pour  le  parti  qui  se  recommandait  du 
nom  de  César,  c'est  qu'elle  avait  été  conquise  par  le  jeune 
Pompée,  si  docile,  d'après  Yelleius  Paterculus,  aux  influences 
des  gens  de  la  basse  classe,  c'est-à-dire  si  dévoué  aux  intérêts 
•des  Espagnols  dont  il  défendait  l'indépendance  contre  la 
tyrannie  de  Rome. 

Sextus  s'était  établi  en  Celtibérie,  dans  la  région  où,  trente 
ans  auparavant,  pendant  la  guerre  contre  Sertorius,  son  père 
avait  passé  l'hiver  de  yy--^,  d'après  Salluste  chez  les  Vascones 
au  sud  des  Pyrénées»,  d'après  Plutarque  chez  les  Yaccaei 
au  pied  des  monts  Gantabres-.  Les  souvenirs  laissés  par  le 
père  aidèrent  le  fils  à  s'assurer  dans  la  Tarraconaise  la  {popu- 
larité dont  il  jouissait  déjà  dans  la  province  de  Gordoue. 
Et,  grâce  aux  montagnards  de  Yllispania  Cilerior,  le  dernier 
chef  du  parti  écrasé  à  Munda  pouvait  résister  victorieusement 
aux  lieutenants  du  dictateur. 

Appien  est  bien  forcé  de  reconnaître  que  Sextus  Pompée 
était  très  puissant  grâce  aux  brigands  —  c'est  à  dire  aux  Espa- 
gnols patriotes  qni  s'étaient  groupés  autour  de  lui  et  qui 
lui  permettaient  de  parcourir  en  maître  toute  la  province.  11 
évitait  les  batailles  rangées  avec  les  légats  de  César.  On  com- 
prend que  les  «  guerrillas  »  harcelaient  et  fatiguaient  les 
légions  romaines.  II  fallut  envoyer  Garrinas  à  la  tête  d'une 
armée  importante.  Mais  les  Espagnols  continuaient  avec 
succès  la  guerre  de  partisans;  ils  attaquaient  le  légat  à  l'iin- 
proviste  et  se  trouvaient  déjà  bien  loin  quand  les  soldats  de 
Garrinas  se  décidaient  à  prendre  PolVensive  ;  les  villes,  grandes 
et  petites,  tombaient  au  pouvoir  de  Sextus.  Garrinas  était 
vaincu  par  cet  ennemi  insaisissable:  César  lui  donna  G.  Asi- 
nius  Pollio  pour  successeur-^. 

Créé  préteur  par  Gésar\  avec  (pii  il  avait  fait  campagne  en 
Afrique,   G.    Asinius    Pollio   sortait   de   charge    (jnaiid    il    fut 

1.  Salliisle,  Ilisl.,  II,  yS  («'•«lil.  Miiiireiibrccher). 

2.  Pliitarfuie,  Serloriiis,  xii,  f». 

3.  Appien,  Guerres  civiles,  IV,  lxxxiii-lixijv. 
U.  Dion  Cassius,  XLIII,  xlvii. 


LES    DÉCLAMATEURS  .ESPAGNOLS  287 

envoyé  comme  praetorius  en  Espagne.  Velleius  Paterculus 
prétend  qu'il  conduisit  la  guerre  d'une  manière  très  brillante  '  ; 
mais  de  ses  faits  d'armes  nous  ne  connaissons  qu'un  désastre 
raconté  par  Dion  Cassius.  Profitant  d'une  absence  de  Sextus 
Pompée,  Pollion  avait  pris  l'otTensive.  Mais  le  clief  des  Espa- 
gnols revient  à  l'improviste  et  met  en  fuite  l'armée  césarienne; 
pour  fuir  plus  facilement,  le  praetorius  se  dépouille  de  son 
manteau  de  général  en  chef  qui  tombe  aux  mains  des 
ennemis;  les  Romains  croient  leur  imperator  tué,  et,  dans  leur 
désespoir,  la  défaite  se  change  en  déroutes 

Après  la  mort  de  César,  les  meurtriers  du  dictateur  aussi 
bien  que  ses  amis  se  préoccupent  de  la  conduite  que  suivra 
Sextus  Pompée,  chef  d'un  parti  puissant  avec  lequel  les  uns 
et  les  autres  doivent  compter.  En  avril  710-44,  D.  Junius 
Brutus  écrit  aux  deux  libevatores  patriae,  Cassius  et  Brutus, 
pour  leur  exposer  ses  inquiétudes  :  que  fera  Sextus  Pompée, 
quand  il  aura  appris  le  meurtre  de  César^P  On  voit  par  la 
correspondance  de  Cicéron  l'intérêt  que  Rome  prenait  aux 
affaires  d'Espagne.  Dans  les  lettres  adressées  à  Atticus  du 
mois  d'avril  au  mois  de  juin  710-44,  il  n'est  question  que  de  ce 
que  font  ou  de  ce  que  feront  Sextus  et  les  Espagnols.  Le 
concours  de  l'Espagne  permet  à  Sextus  de  se  présenter  comme 
le  chef  d'un  tiers  parti  entre  Brutus  et  Antoine.  Il  a  appris 
la  mort  de  César  le  jour  même  où  il  s'était  emparé  de  la  ville 
de  Barea,  dans  VlUspania  Citerior,  mais  il  est  retourné  dans 
VHispania  Ullerior  où  il  possède  six  légions.  On  craint  qu'il 
ne  conduise  son  armée  en  Italie.  Au  mois  de  juillet,  il  envoie 
par  un  de  ses  affranchis  aux  consuls  Antoine  et  Dolabella  une 
lettre  très  digne  et  très  noble  où  le  purisme  de  Cicéron  ne 
trouve  à  reprendre  que  quelques  expressions  impropres^. 

Antoine  s'attirait  les  acclamations  et  se  conciliait  les  bonnes 
grâces  des  sénateurs,  qui  étaient  presque  tous  pompéiens,  en 


i.  Velleius  Paterculus,  II,  lxxiii,  i:  Hispaniu,  ubi  adversas  euin  [Ponipeium]  cla- 
nssimum  bellam  Pollio  Asinius  praetorius  gesseral. 

2.  Dion  Cassius,  XLV,  x. 

3.  Cicéron,  Epist.  ad  FamiL,  XI,  i,  i, 

A.  Cicéron,  Epist.  ad  Attic,  XIV,  i,  2;  iv,  i;  viii,  2;  xxii,  2  ;  XV,  xx,  3;  xxi,  3; 
XXII  ;  ixix,  I  ;  XVI,  i,  i  ;  iv, 


a38  BULLETIN    HISPANIQUE 

proposant  un  décret  par  lequel  Sextus  Pompée  était  remis 
en  possession  de  ses  biens  paternels  qui  avaient  été  confisqués 
et  devait  recevoir  une  indemnité  du  trésor  en  dédommagement 
de  ceux  qu'on  ne  pouvait  recouvrer;  le  même  décret  lui 
conférait  le  commandement  de  toutes  les  flottes  romaines  et 
l'empire  de  la  mer,  tel  qu'il  avait  été  donné  au  grand  Pompée 
par  la  lex  Gabinia.  au  temps  de  la  guerre  des  pirates'.  Ce 
décret  ne  semble  pas  avoir  été  suivi  d'efTet;  le  fils  de  Pompée, 
soutenu  par  les  Espagnols,  traitait  bien  d'égal  à  égal  avec 
Antoine,  mais  il  n'était  pas  appelé  au  commandement  de  la 
marine:  il  restait  en  Espagne  où  il  réduisait  à  l'impuissance 
le  pr.aelorius  qui  avait  reçu  mission  de  le  vainci  e.  A  la  fin  de 
710-44,  C.  Asinius  Pollio  avait  dû  faire  prendre  leurs  quartiers 
dbiver  à  ses  troupes  au  fond  de  la  Lusitanio,  bien  loin  de 
l'ennemi-.  Au  printemps,  il  était  à  Cordoue,  capitale  de  sa 
province,  mais  il  ne  pouvait  débarrasser  les  environs  de 
sa  capitale  des  soldats  de  Pompée  qui  tenaient  la  campagne. 
Le  16  mars  711-43,  il  écrivait  à  Cicéron  que  ses  courriers 
étaient  arrêtés  dans  les  montagnes  de  Castulo-^  :  les  bandes  de 
partisans  infestaient  tout  le  pays  et  il  n'y  avait  moyen  de 
recevoir  ni  d'envoyer  de  nouvelles  que  par  mer'';  au  mois 
de  juin,  il  se  vantait  comme  d'un  succès  d'avoir  pu  maintenir 
la  province  dans  la  paix  et  les  légions  sous  son  autorité^.  Le 
28  juillet  711-43,  Munatius  Plancus  écrivait  à  Cicéron  que 
l'Espagne  pompéienne  manifestait  des  sentiments  tout  à  fait 
défavorables  à  Antoine''.  Sextus  Pompée  ne  devait  quitter 
l'Espagne  qu'en  vainqueur,  rappelé  par  le  Sénat  pour  la 
défense  de  la  Hépublique. 

L'ancien  magister  eqiiihini  du  dictateur  César,  M.  Aemilius 
Lepidus,  cbargé  de  gouverner  la  Narbonnaise  et  le  nord  de 
l'Espagne,  n'avait  pas  encore  ])assé  les  Pyrénées':  il  attendait 

I.  Appien,  Guerres  civiles,  111,  i\. 

■j.  Cicôroii,  Kpisl.  ad  Fnmil.,  \,  wxiii,  3. 

.■?.   I,(!  saillis  Cnstiilonensis  (aujnunriiui,  la  sierra  Cazorla)  tiiail  >(>ii  nom  de  la  \illo 
do  Caslulo  (aujoiinl'IiiM  Cazorla),  ilaris  la  |)rovinc(î  de  Jaoïi. 
,'i.  Cicéron,  Kpisl.  ad  Fainil.,  X,  xxxi,  i. 
.'i.   Cicéron,  Episl.  ad  Faniil.,  X,  xxxii,  .j. 

II.  Cicéron,  Epist.  ad  Fainil.,  \,  xxiv,  (). 

7.  Vflk-ins  PalfTcnliis,  II,  i.xiii,  i.  —  Lépidc  a\ail  déjà  élé'  char/jfé  du  g-ouvcrno- 
nieid  di,'  rKspaffiio  en  4.S  (A|)pi<'n,  Giierrex  civiles.  II,xi.viii,  cvii). 


I 


LES    DÉCLAMATEURS    ESPAGNOLS  289 

en  Gaule  le  résultat  de  la  lutte  entre  Antoine  et  le  Sénat  dirigé 
par  Gicéron;  à  la  suite  de  longues  négociations,  il  arrivait 
à  éviter  tout  embarras  du  coté  de  l'Espagne,  en  traitant  avec 
Sextus  Pompée.  Dans  sa  cinquième  Philippique,  prononcée  au 
Capilole  le  i^'  janvier  71  i-'io,  Gicéron,  qui  comptait  assurer 
au  Sénat  l'appui  de  Lépide  et  de  Pompée,  demandait  qu'on 
élevât  une  statue  équestre  à  Viniperalor  qui  avait  rendu  à  la 
patrie  et  conservé  à  la  République  une  de  ses  gloires,  le  fils, 
si  semblable  à  son  père,  d'un  des  plus  illustres  citoyens  de 
Rome.  Gependant,  Antoine,  déclaré  ennemi  public,  assiégeait 
Modène.  Les  consuls  de  l'an  711-/^3,  G.  Vibius  Pansa  et 
A.  Hirtius,  marchaient  contre  lui  avec  le  concours  d'Octave, 
qui  semblait  dévoué  à  Gicéron  et  au  Sénat.  Au  mois  d'avril 
la  treizième  Philippique  demandait  l'exécution  du  décret  pro- 
posé par  Antoine  l'année  précédente  pour  remettre  Sextus 
Pompée  en  possession  des  biens  paternels,  et  l'adoption  d'un 
sénatus  consulte  accordant  des  louanges  à  ce  jeune  homme 
qui,  par  la  promesse  qu'il  faisait  au  Sénat  et  au  peuple  romain 
de  leur  donner  laide  de  son  armée,  avait  montré  pour  la 
République  le  même  zèle  que  ses  ancêtres  '.  Les  votes  du  Sénat 
rappelaient  Sextus  d'Espagne  et  lui  confiaient  la  garde  du 
littoral  de  la  Méditerranée  ^  ;  mais  le  fils  de  Pompée  ne  se 
hâtait  pas  de  sortir  de  l'Espagne,  et,  une  fois  en  Gaule,  il 
s'était  arrêté  pour  attendre  les  événements  à  Marseille,  ville 
qui  était  dévouée  à  son  parti.  Gependant,  Octave,  Antoine  et 
Lépide  se  reconciliaient;  h  la  fin  d'octobre  7ir-43,  ils  se  réu- 
nissaient près  de  Bologne,  dans  une  île  du  petit  fleuve  Reno  et 
formaient  le  second  triumvirat.  Les  triumviri  Piei  publicae 
constiluendae  faisaient  porter  par  le  consul  sujfectas  Q.  Pedius 
une  loi  de  proscription  contre  les  meurtriers  de  César  3. 
Gicéron  était  tué  le  7  décembre.  Sextus  Pompée,  qui  se  trouvait 
au  nombre  des  parricides  proscrits  par  la  lex  Pedia,  avait  une 
flotte  puissante;  depuis  la  guerre  des  pirates,  toute  la  marine 
était  fidèle  au  nom  de  Pompée;  les  mécontents,  les  proscrits, 

1.  Gicéron,  Pliilipp.,  V,  xiv.  89;  sv,  tu  ;  Mil,  iv,  8;  v,   10,  is;  vi,  i3;  xxi,  jo; 
Appien,  Guerres  civiles,  IV,  lxxiiv. 

2.  Vclleius  Paterculus,  H,  lxxiu,  i. 

3.  Vclleius  Paterculus,  II,  lxix,  5. 


aAO  BULLETIN    HISPANIQUE 

les  esclaves  fugitifs  venaient  se  grouper  autour  de  l'ennemi  des 
triumvirs  qui,  pour  s'assurer  d'un  point  d'appui,  occupait  la 
Sicile  dont  il  faisait  périr  le  propréteur,  U.  Pompeius  Bilhyni- 
cus  ' .  Il  se  maintenait  dans  ses  positions,  affamant  Rome,  détrui- 
sant les  flottes  envoyées  contre  lui,  pendant  que  les  triumvirs 
faisaient  en  Macédoine  contre  Brutus  et  Cassius  la  campagne 
qui  se  terminait  dans  l'automne  de  /|2  par  les  deux  batailles 
de  Philippes  et  la  ruine  définitive  du  parti  républicain. 

Au  moment  où  le  jeune  Sénèque  et  son  ami  Latron  venaient 
terminer  leurs  études  à  Rome  sous  la  direction  de  leur  compa- 
triote Marullus,  le  monde  romain  tout  entier  était  soumis. 
Seule,  la  Sicile  résistait  encore  aux  vainqueurs  de  Philippes. 
L'opinion,  généralement  favorable  aux  triumvirs,  faisait  res- 
ponsables de  cette  insurrection  d'une  île,  qui  seule  troublait  la 
paix  romaine,  les  Espagnols,  qui  suivant  l'expression  de 
Florus,  avaient  gardé  Sextus  Pompée  pour  cette  guerre  impie. 
Sans  le  secours  fidèle  de  l'Espagne,  la  carrière  du  fils  de  Pom- 
pée aurait  cessé  après  la  bataille  de  Munda,  et  la  paix  aurait 
été  définitivement  assurée  par  la  mort  de  Cassius  et  de  Brutus. 
C'est  seulement  en  35  que  Sextus  Pompée  fut  vaincu,  pris 
et  tué. 

Rome  était  à  peine  débarrassée  depuis  quelques  années  d'un 
ennemi  à  qui  le  concours  de  l'Espagne  avait  permis  d'entre- 
prendre une  guerre  qui  devait  durer  dix  ans,  quand  elle  fut 
inquiétée  par  une  révolte  de  quelques  peuplades  hispani(}ues 
qui,  cette  fois,  s'insurgeaient  sans  avoir  à  leur  tête  un  chef 
romain. 

La  région  montagneuse,  resserrée  entre  le  cours  supérieur 
de  l'Ebre,  la  mer  Cantabrique  et  l'Océan,  n'avait  jamais  été 
soumise  d'une  manière  définitive.  Les  Astures  et  les  Cantabres 
dont  les  nombreuses  tribus  habitaient  cette  région  s'insurgè- 
rent en  72^i-3o  et  réussirent  à  entraîner  quelques  peuplades 
voisines  dans  cette  révolte  que  Rome  ne  devait  pas  apaiser 
avant  73^20.  Cette  guerre  (pi'il  fallait  sans  cesse  recommencer 
alors  qu'on  la  croyait  terminée  à  la  suite  de  quelque  victoire, 

I     Ain)i('n,  Guerres  civiles,  IV,  nxxiv;  \,  i.ix. 


LES    DÉCLAMATEURS    ESPAGNOLS  a/jl 

entretint  de  longues  inquiétudes  en  Italie.  Yelleius  Paterculus' 
la  compare  aux  guerres  de  Sertorius  et  de  Viriathe  et  fait 
honneur  à  l'empereur  Auguste  d'avoir  enfin  pacifié  cette  terre 
féroce  qui  avait  été  le  tombeau  d'un  si  grand  nombre  de  per- 
sonnages consulaires  et  prétoriens.  Florus^  se  complaît  à  un 
tableau  dramatique  des  expéditions  fécondes  en  épisodes  san- 
glants que  l'empereur  et  ses  légats  conduisirent  dans  ce  pays 
de  sauvages. 

L'auteur  de  VEpilome  de  Tito  Livio  montre  Auguste,  qui 
dirige  en  personne  l'armée  romaine,  établissant  son  quartier 
général  à  Segisama%  où  il  s'occupe  de  cerner  de  toutes  parts, 
comme  des  bêtes  féroces  dont  on  entoure  le  repaire  de  filets, 
les  sauvages  Cantabres  qu'il  fait  attaquer  du  côté  de  l'Océan 
par  une  flotte  formidable.  Dans  une  bataille  livrée  sous  les 
murs  de  Bergida^,  il  met  en  fuite  les  révoltés  qui  se  réfugient 
sur  le  mont  Yindiusâ,  «  dont  le  sommet  est  si  élevé  qu'ils  pen- 
saient que  les  flots  de  l'Océan  y  monteraient  avant  les  armées 
romaines  ».  La  place  d'Aracelium*'  oppose  une  vive  résistance  : 
pour  s'en  emparer,  les  Romains  entourent  le  mont  Medullius' 
d'une  tranchée  de  dix-huit  mille  pieds  de  circuit.  Réduits  aux 
dernières  extrémités,  les  barbares  se  tuent  par  le  fer,  par  le 
feu,  par  le  poison,  pour  ne  pas  être  pris  vivants.  Quand 
Auguste,  qui  avait  établi  ses  quartiers  d'hiver  à  ïarraconae 
Maritimae^,  apprend  ces  succès  remportés  par  ses  légats  Antis- 
tius,  Furnius  et  Agrippa,  il  va  tout  régler  en  personne,  forçant 
certaines  peuplades  à  descendre  de  leurs  montagnes  pour 
s'établir  dans  la  plaine,  exigeant  de  celles-ci  des  otages,  vendant 
celles-là  en  bloc  à  l'encan,  suivant  le  droit  de  la  guerre.  Le 


1.  Velleius  Paterculus,  11,  \c,  !\. 

2.  Florus,  II,  xxiiii. 

3.  On  n'a  pas  identifié  Segisamo,  ville  des  Segisamojtenscs  ou  des  SegisfimajuUenses, 
peuples  qui  dépendront  l'un  et  l'autre  du  Conveittus  Clunicnsis  (Pline.  V.  //.,  III,  m, 
aG).  Clunia  est  aujourd'hui  Corufia  del  Conde,  à  l'est  d'Aranda. 

4.  Bergida  ou  Bergiduin,  dans  la  partie  la  plus  occidentale  de  la  région  des  Asturcs, 
entre  lirigantium  (Belanzos)  et  Asturia  (Astorga). 

5.  On  n'a  pas  identifié  le  mont  Vindius,  un  des  plus  hauls  de  la  chaîne  des  Can- 
tabres. 

6.  Capitale  des  Aracelitani  (Pline,  A.  H.,  III,  m,  ai),  aujourd'hui  Araquil,  petite 
ville  voisine  de  Pampelune. 

7.  Mont  de  la  chaîne  des  Cantabres,  qui  n'a  pas  été  identifié. 

8.  Capitale  de  la  Tarraconaise,  sur  la  mer  Méditerranée;  aujourd'hui  Tarragone. 


2^3  BULLETIN    HISPA>Î1QUE 

Sénat  voulait  récompenser  l'empereur  par  le  laurier  et  le  char 
triomphal.  «  Mais  César  était  déjà  assez  grand  pour  dédaigner 
les  honneurs  du  triomphe.  » 

Cependant,  tout  le  nord  de  lEspagne  n'était  pas  encore 
pacifié.  Divisés  eu  trois  corps  bien  disciplinés,  les  Aslures 
abandonnaient  les  sommets  neigeux  de  leurs  montagnes  et, 
ayant  pris  position  auprès  du  fleuve  Astura',  ils  se  préparaient 
à  attaquer  à  la  fois  les  trois  camps  romains.  Les  légions  redou- 
taient une  bataille  pénible  et  sanglante  qui  aurait  pu  leur  être 
funeste,  quand  la  trahison  des  Brigaecini^  permit  à  Carisius 
de  déconcerter  les  projets  des  Astures.  Le  combat  toutefois  fut 
acharné;  mais  les  barbares  vaincus  durent  se  réfugier  dans  la 
place  forte  de  Lancia •5.  Maîtres  de  cette  ville,  les  soldats  de 
Carisius  voulaient  la  détruire  :  le  légat  de  lempereur  leur  fit 
comprendre  que  Lancia  conservée  intacte  serait  un  monument 
éternel  de  leur  victoire,  i<  Tel  fut  à  la  fois  le  terme  des  exploits 
guerriers  d'Auguste  et  des  révoltes  de  l'Espagne.  » 

Strabon,  qui  fait  la  géographie  de  l'Espagne  au  commence- 
ment du  principat  de  Tibère,  rapporte  les  traditions  sur  la 
bravoure  et  la  férocité  des  habitants  de  la  région  septentrionale 
de  la  péninsule  Ibérique  que  les  soldats  romains,  revenus  de  la 
guerre  contre  les  Cantabres  et  contre  les  Astures,  avaient 
répandues  en  Italie.  On  racontait  que  des  mères  avaient  tué 
leurs  enfants,  pour  ne  pas  les  laisser  tomber  aux  mains  des 
vainqueurs;  qu'un  jeune  garçon  dont  le  père,  la  mère  et  les 
frères  étaient  enchaînés  les  égorgea  tous,  sur  l'ordre  du  chef 
de  la  famille,  à  l'aide  d'un  fer  qui  lui  était  tombé  sous  la 
main;  qu'un  prisonnier  s'était  précipité  volontairement  dans 
les  flammes  d'un  bûcher,  que  d'autres^  mis  en  croix,  entonnaient 
leur  chant  de  victoire''.  On  attribuait  à  l'héroïque  folie  des 
Cantabres  et  des  Astures  les  mômes  traits  que  Ton  citait  un 

1.  ].'Aslura  est  prolj.iblcnicril  l'I^sla,  qui  a  sa  source  dans  les  monts  Cantabres  et 
qui  se  jelti;  dans  lo  Doiiro. 

3.  Les  Brùjaccini  avaient  pour  ville  Urifraecum,  aujourd'hui  bcnavcntc,  dans  la 
province  de  Zamora,  entre  les  rivières  l'Orhigo  et  l'KsIa. 

3.  C'est  aux  environs  de  Ijincin  que  le  camp  de  la  Lc<]ii)  scplima  ijcmina  donna  plus 
tard  naissance  à  la  ville  appelée  Lcgio,  qui  est  aujourd'hui  l.i'on.  —  Voir,  Mannert. 
p.  3.'i8. 

.'i.  .Strabon,  111,  iv,  i';-i8. 


LES  DÉCLAMATEURS  ESPAGNOLS  3^3 

siècle  auparavant  des  défenseurs  de  Numance  qui,  en  62i-i33, 
pour  ne  pas  devenir  les  prisonniers  de  Scipion,  s'entre-luaient 
au  milieu  des  ruines  de  leur  ville  qu'ils  avaient  incendiée'. 
Longtemps  après  la  victoire  définitive  d'Auguste  sur  ces  peuples 
farouches  de  l'Espagne,  la  poésie  romaine  célébrait  les  Can- 
tabres  insensibles  au  froid  de  l'hiver,  à  la  chaleur  de  Télé,  à  la 
faim  et  à  la  soif,  incapables  de  vivre  loin  des  combats,  em- 
pressés à  se  tuer  dès  que  la  vieillesse  les  empêche  de  porter 
les  armes.  On  expliquait  le  noble  courage  dos  Aslures  en  leur 
donnant  pour  héros  éponyme  un  compagnon  d'armes  de 
Memnon,  fils  de  l'Aurore,  Aslyr,  qui,  après  la  guerre  de  Troie, 
aurait  émigré  au  fond  de  l'Espagne 2, 

H.  DE  LA  VILLE  DE  MIRMONT. 

(A  suivre.) 

1.  Cf.  Epitome  de  Tite-Livc,  LIX  ;   Florus,  1,  xxxiv;  Appien,  Guerres  d'Espagne, 
xcvin. 

2.  Silius  Italicus,  III,  v.  32G  et  suiv. 


CHROMUUE  LATIXE  DES  ROIS  DE  CASTILLE 

JUSQU'EN    1236 

(Suite*) 


[II.  Alphonse  VIII.  —  A.  —  Alarcos  et  Salvatierra.]** 
9.  Post  ipsius  mortem  remansit  filius  eius  gloriosus  alfonsus  infans 

"  Voir  Bull,  hisp.,  t.  XIV',  p.  3o  et  109. 

**  Pour  le  court  règne  deSanctie  III  et  celui  d'Alphonse  Vlll,nous  avons  un  livre  de 
bonne  critique  dans  Memorias  histôricas  de  la  vida  y  acciones  del  Rey  D.  Alonso  el  Aoble 
oclavo  del  nombre  recogidas  por  el  Marques  de  Mondexar  e  ilustradas  con  notas  y  apendices 
por  D.  Francisco  Cerdâ  y  Rico  (Madrid,  1783).  Mondéjar  y  refait  l'œuvre  d'Alonso 
Nûnez  <le  Castro,  Coronica  de  los  scfiores  reyes  de  Castilla,  Don  Sancho  cl  Deseado,  Don 
Alonso  Oclavo,  y  Don  Enrique  el  Primero  (Madrid,  lOGâ,  n°  3o83  de  Salvâ),  dont  il 
blâme  «  la  cortedad  y  desaliiio  »,  les  lacunes  et  la  négligence,  et  qu'il  attaque  avec 
une  animosité  que  Cerdâ  juge  exagérée.  En  appendice  à  ces  Memorias,  qu'il  a  illustrées 
de  nombreuses  notes,  Cerdâ  a  placé  les  textes  concernant  le  règne  d'Alphonse  VIII, 
entre  antres  cciix  qui  ont  trait  à  la  bataille  de  las  Navas  :  la  lettre  d'Alphonse  Mil  au 
pape  Innocent  III  (p.  xcviii-ciii),  celle  d'Arnaud  Amalrich,  archevêque  de  Narbonne 
(p.  ciii-cvii);  le  récit  d'Albéric,  abbé  des  Trois-Fontaines,  dans  son  Chronicon.  Voir 
note  initiale  de  II,  B.  Il  y  a  mis  également,  de  Rodrigue  de  Tolède,  les  chapitres  i5-3G 
du  livre  VII  et  i-ii  du  livre  VIII,  pour  lesfpiels  on  jiourra  donc  se  re])orter  aux 
Memorias,  d'autant  qu'on  y  trouve  (jnelcjucs  variantes  et  notules;  enfin  un  texte 
castillan  sur  la  bataille  de  las  Navas  (p.  cvm-cxxi),  qui  est  à  |)eu  près  littéralement 
identique  à  celui  des  ch.  CCII  (à  partir  de  A  cabo  de  un  aFio..)  à  CCXIII  de  la  soi- 
disant  Cronica  de  Espana  del  arzobispo  Don  liodrigo  Jiménez  de  Rada  publiée  au  t.  CV 
de  la  Colecciun  de  Documentos  inéditos  para  la  hist.  de  Espana,  en  réalité  quatrième 
rédaction  de  la  Chronique  générale,  d'après  M.  Menéndez  Pidal  (signalée  en  tète  de  ces 
notes). 

Le  texte  de  la  Chronique  générale  édité  à  Zamora  par  Florian  de  Ocampo,  en 
i54i,  sous  le  titre  do  Las  quatro  partes  enteras  de  la  Cronica  de  Espana  que  mnndo  com- 
poner  el  Serenissimo  rey  don  Alonso  llamado  cl  .Sa6iO,  dilTère  considérablement,  au 
moins  pour  les  règnes  d'Alphonse  VIII,  Henri  I  et  Ferdinand  III,  de  celui  qu'a  édité 
M.  Menéndez  Pidal.  Ce  texte  a  été  publié  de  nou\eau  en  iiKi/|,à  Valladolid.  Voir  là- 
dessus  U.  Menéndez  Pidal,  La  leyenda  de  los  Infantes  de  Lara,  p.  ')i,  etc.,  mes  Hist. 
générales  d'Esp.  entre  Alphonse  \  et  Philippe  II,  p.  1 1 1.  Ni  l'une  ni  l'autre  de  ces  deux 
éditions  n'étant  très  accessible,  j'ai  cru  bon  de  reproduire  en  note  les  passages,  si 
longs  fussent-ils,  qui  pouvaient  éclairer  notre  Chronique.  J'ai  de  plus  confronté 
avec  le  texte  d'Ocampo  celui  d'un  ms.  portugais  du  xv«  siècle,  conservé  (sans  cote)  à 
l'Académie  des  Sciences  de  Lisbonne,  qui  a  avec  lui  beaucoup  de  rapports  quant  an 
fond,  mais  contient  des  additions  intéressantes  et  importantes.  On  en  trouvera  la 
description,  a\cc  plusieurs  chapitres,  à  l'appendice.  L'Académie  des  Sciences  de  Lis- 
bonne possède  aussi  une  coi)ie  moderne  d'un  ms.  portugais  de  la  Chronique  générale 
qui  se  trouve  à  la  Biblifithèquc  Nationale  de  Paris  (11°  4  du  Catalogue  Morel-Fatio), 
et  «|ui  est  très  proche  parent  de  celui  de  Lisbonne,  .l'ai  noté  les  variantes  en  me 
servant  de  cette  copie,  qui  parait  avoir  été  faite  avec  soin,  et  qui  fut  publiée,  mais 


CHRONIQUE    LATINE    DES   HOIS    DE    CASTILLE  2^5 

tenellus  uix  Irium  annorum'  tantaque  turbatio  fuit  in  regno  castelle 
quanta  non  fuerat  a  longe  rétro  actis  temporibus.  Discordantibus 
siquidem  inter  se  regni  magnatibus  ferrandus  roderici  filius  roderici 
ferrandi  fratris  guterrii  fernando  de  caslro  et  fratres  sui^  et  alii  amici 
et  consanguinei  qui  sequebantur  eum  partem  fecerunt  uolentes 
effugere  persecutionem  et  oppressionem  fdiorum  comitis  pétri  delara. 
s.  comitis  malrici  et  comitis  nunnii"  aluari^.  et  tocius  parentele  sue. 

a)  Abella:  <■  forle  deest  et  comitis». 

assez  inutilemenl,  car  presque  tous  les  exemplaires  ont  été  détruits  :  il  n'en  existe 
plus,  m'a-t-on  dit,  que  deux  ou  trois.  Pour  les  passages  du  manuscrit  ancien  de  Lis- 
bonne que  Je  cite  en  note,  je  fais  précéder  de  la  lettre  P  les  variantes  du  manuscrit 
de  Paris.  J'ai  examiné  d'autre  part  un  manuscrit  galicien  conservé  à  la  Hiblioteca 
nacional  de  Madrid  et  décrit  par  M.  Menéndez  Pidal  dans  Leyenda  de  los  Infantes  de 
Lara,  p.  38i,  sous  la  lettre  A,  cote  X-Oi  (aujourd'liui  8817),  xi\'  siècle.  M.  Menénder 
Pidal  le  range  parmi  les  manuscrits  de  la  Première  Chronique  générale.  Mais  il 
se  rattache  nettement,  pour  la  partie  qui  nous  occupe,  à  ce  que  Térudit  espagnol 
appelle  la  Troisième  Chronique  générale,  puisqu'on  y  trou\e  les  additions  caracté- 
ristiques de  cette  rédaction,  dont  le  texte  d'Ocarapo  est  un  des  exemplaires.  J'en  dirai 
autant  du  manuscrit  i3!i7  ^ancien  F-ia),  en  castillan,  que  le  même  savant  désigne 
par  la  lettre  B  et  considère  aussi  comme  un  des  exemplaires  de  la  première  rédaction  : 
pour  toute  cette  partie,  on  y  retrouve  souvent  littéralement  le  texte  d'Ocampo,  ainsi 
qu'on  s'en  rendra  compte  par  les  variantes  que  j'en  ai  tirées  et  les  parties  que  j'en 
reproduis  en  note  ou  en  appendice.  11  résulte  de  tout  cela  que  le  classement  des 
manuscrits,  si  nombreux  et  si  divers,  de  ce  qu'on  peut  continuer  à  appeler,  comme 
d'un  nom  générique,  la  «Chronique  générale»,  ne  saurait  être  le  même  selon  que 
l'on  a  égard  à  une  partie  (par  evemple  le  récit  relatif  aux  Infants  de  Lara)  ou  à  une 
autre,  comme  les  règnes  d'Alphonse  V'Ill,  Henri  I  et  Ferdinand  111.  11  y  a  eu  des 
croisements,  dont  il  faut  tenir  compte,  mais  qui  s'enchevêtrent  d'une  façon  singu- 
lièrement compliquée.  —  Sur  les  mss.  portugais  et  galiciens  de  la  Chr.  gén.,  cf.  Leite 
de  Vasconcellos,  Texlos  archaicos  (njoS,  p.  !i?>).  —  Je  rends  les  y  ou  y  de  8817  par  y. 

Des  manuscrits  de  l'Escorial,  je  n'ai  pu  examiner  que  les  manuscrits  x-l-0(ancien 
106  1-6),  papier,  xv»  siècle  (J  de  Pidal),  assez  voisin  du  manuscrit  1347,  et  x-I-ia 
(ancien  106-I-12),  papier,  très  résumé  pour  les  règnes  d'Alphonse  Vlll  et  de  Ferdi- 
nand 111.  Je  ne  pouvais  songer  à  relever  toutes  les  variantes  de  tous  les  manusciils 
accessibles.  Je  ne  voulais  qu'illustrer  le  texte  de  la  présente  Chronique  par  celui,  ou 
plutôt  ceux  de  la  Chronique  générale,  et  montrer  combien  les  rédacteurs  successifs 
de  celle-ci  ont  parfois  transformé  et  augmenté  le  texte  primitif,  soit  par  des  correc- 
tions intéressées,  soit  par  des  bévues,  soit  enfin  par  l'insertion  de  morceaux  d'un 
caractère  spécial,  à  propos  desquels  peut  se  poser  cette  question  :  tradition  légen- 
daire.^ épopée  prosaïfiée  ?  ou  pseudo-histoire  consciente? 

g.  I.  «  -Nasci(')  el  Rey  D.  Alfonso  noche  de  San  Martin  (11  novembre),  e  fue  dia  de 
Tiernes,Era  MCXCIII  »  (An.  Toled.,  I).  Il  n'avait  donc  pas  trois  ans  à  la  mort  de  son  père. 

9.  a.  Rodrigo  Fernândez  de  Castro,  el  Calvo,  frère  de  Gutierre  Fernândez  de 
Castro  (tuteur  d'Alphonse  VIII),  eut  pour  fils  Fermln  Ruiz  el  Castellano  (beau-frère 
de  Ferdinand  11),  Gutierre  Ruiz  de  Castro,  Pedro  Ruiz  de  Castro,  et  Alvar  Ruiz  de 
Castro;  il  eut  une  fille,  Sancha,  mariée  à  Alvaro  Ruiz  de  Guzmân.  Cela  d'après 
Rodrigue  (VII,  i5),  qui  entre  dans  plus  de  détails  sur  ces  faits.  Cf.  Fernândez  de 
Béthencourt  (Hist.  genealôg.,  t.  IV,  p.  4o5  et  ss.),  qui  ajoute  une  autre  fille,  .\ldonza, 
sur  laquelle  voir  j  G5,  note  4  ;  et  le  Livra  das  Linhagens  do  conde  D.  Pedro  (dans  Porta- 
galiœ  Monumenla,  Scriptores,  vol.  I,  p.  209  et  368),  d'après  lequel  Fernân  Ruiz  serait 
le  plus  jeune  des  fils  de  Rodrigo  Fernândez,  et  qui  remplace  Sancha  par  Orraca 
(p.  265-2G6).  Fernân  Ruiz  fut,  comme  l'avait  été  son  père  pour  Alphonse  VII, 
alcaide  de  Tolède,  mais  pour  Ferdinand  de  Léon,  qui  s'en  était  emparé  (Salazar  de 
Mendoça,  Origen  de  las  dignidadcs  seglares  de  Castilla  y  Léon,  i6i8,  fol.  3ret  Sa'). 

9.  3.  Les  fils  de  Pedro  Gonzalez  de  Lara  furent  Manrique  Pérez  de  Lara,  Alvar 
Pércz  de  Lara,  Nufio  Pérez  de  Lara.  La  conjecture  d'Abella  s'impose.  Cf.  Rodrigue, 

Bull,  hispan.  17 


al\6  BLLLETIN    HISPANiQtJË 

Predictils  namquc  fernandus  roderici  et  fratres  sui  et  consanguinei. 
multa  castra  et  forcia  et  munita  tenebant  de  manu  régis  sancii  a  quo 
mandatum  receperant  tam  ipsi  quam  alii  potentes  in  regno  circa 
morlem  suam.  ne  terras  quas  tenebant  uel  castra  darent  alicui  uir" 
filio  suo.  sed  cum  ad  annum.  XV.  peruenisset.  Orta  igitur  discordia 
et  inexorabili  hodio  inter  predictas  partes  potentum  cornes  mahicus 
et  frater  eius  cornes  nunius  regeni  alfonsum  habuerunt^  et  tenuerunt 
longo  tempore.  regnum  qa  ''  totum  mediante  piiero  ad  honorem  ipsius 
et  utilitatem  sicut  dicebant  sibi  subicere  conabantur.  Procuratuni  est 
tune  sicut  creditur  ex  parte  aliorum  quod  rex  fernandus  fdius 
imperatoris  intraù'  in  regnum  castelle.  et  quia  propinquior  erat 
puero  uoluit  tutelarn  pueri  et  curam  regni  habere.  sed  im  (fol.  g-j) 
pedientibus  predictis  comitibus  tum  fraude  .S3.''  laudabili.  tum  ui. 
non  potuit  assequi  quod  uolebat».  Illa  tempestate  cèdes  innumerabiles 

a)  Abella  :  «  forte  nisin.  —  b)  quia  pour  (/uad.  —  c)  IntrauU  :  Abella  :  «  forte  liilrarrtiK 

—  d)  sed. 

qui  monlrc  le  rôle  joué  en  ces  circonstances  par  le  frère  utérin  des  Laras,  Garci 
Garciez  de  Aza,  et  qui  est  plein  d'éloges  pour  les  Laras  (VU,  15-17).  Voir  Salazar, 
Lara,  t.  I,  p.  loo,  109,  121  ;  le  Livra  das  Linkagens  do  conde  D.  Pedro,  dans  Porlugaliae 
Mon.,  Script.,  t.  I,  p.  2C3.  CI'.  §  3i,  note  G.  —  Contrairement  à  SaLizar,  Mondéjar 
(Memorias,  p.  26),  suivi  par  l'annotateur  de  Mariana  (t.  IV,  p.  iG3),  fait  de  Garci  Garciez 
de  Aza  le  frère  utérin  de  Gulierre  Fernândez.  —  Le  comte  Pedro  Gonzalez  était  mort 
en  n3o,  ou  peu  après  (Salazar,  J6.,p.  110).  •<  Don  Pedro  de  Lara,  llamado  comunmente 
el  Conde  dû  Mairie.  Casù  en  Francia  con  doua  Ermesenda,  liija  y  successora  de  Ayme- 
rico  Vizconde  de  Narhona...  y  por  esta  causa  el  Conde  fue  llamado  en  Latin  Aymé 
ricus,  y  en  Castellano  el  Conde  dû  Almeric  y  despues  conuirtiendo  la  L.  en  N.  se- 
llamô  Manrique.  Otros  le  Uaman  el  Conde  <lon  Manrique  Perez  de  Lara,  por  ser  hijo 
de  do  Pedro  Gonzalez  de  Lara.  Gozù  este  de  el  senorio  de  Molina  que  es  en  Caslilla,  a 
la  raya  de  Aragon.  Copetian  el  Emperador  do  Alonso,  y  el  Key  de  Aragon  don  Alùso 
segûdo,  sobre  este  senorio,  y  i)usieron  al  Code  por  juez  arbitro,  y  adjudicosele  a  si 
mismo:  sentencia  ([ne  coiisintieron  los  competidores.  En  algunos  privilégies  se  dize 
ténia  la  mitad  de  ïoledo,  que  es  dezir,  ténia  los  dos  Alcaçares  de  los  (juatro  que  ubo 
en  esta  ciudad.  En  olros  se  liama  de  Haeça,  porque  tuuo  su  guarda  y  dcfensa»  (Salazar 
de  Mendora,  Origen  de  las  dignidades  scglares  de  Caslilla  y  Léon,  fol.  !\Ct).  «  El  conde 
don  Nufio  Perez  de  Lara,  liijo  de  el  conde  do  Pedro,  el  (jue  defendio  a  los  hijos  dalgo 
de  el  tributo  de  los  cinco  maravedis  que  el  Uey  (juiso  cargar  a  cada  uno  (voir  à 
l'appendice),  parael  cerco  de  (^uenca.  Por  <!sto  dizen  (jue  los  Iiijos  dalgo  se  obligaron  a 
darle  un  yantar  cada  ano,  y  quedù  el  hablar  por  cllos  la  casa  de  Lara  en  las  Corles. .. 
En  Toledo  tuuo  un  [)alacio  cerca  de  el  Alcarar,  y  en  su  reyno  nuichos  beredamien- 
los...»  ((■(/.,  fol.  /|,S). 

.9.  It  D'après  Luc  (p.  loO,  1.  1),  c'est  Eerdinaiid  de  L/oii  qui  avait  eonlîé  le  jeune 
Alphonse  au  comte  Manrique. 

[).  .">.  Cf.  Luc,  [).  loCi,  I.  2  :  «Tune  regnauil  Fernandus  Ue\  in  loto  imperio  palrl-s 
sui,  undc  Rex  llispaniarum  fuit  vocalus.  Sed  concordantibus  comité  Maïuico. 
et  fratre  eius  comité  .Nunno,  cum  omnibus  qui  ad  regnum  Casteliae  pertinebaiil, 
Adcfonsum  filium  domini  sui  Régis  .Sancii  sibi  Regem  constituerunt.  Fredenandus 
aulcm  Re\,  vt  erat  plus  v't  bilaris  acceplauit  cpiod  feceranf  Casteliani.  »  Il  ne 
larcepta  pas  si  facilement,  à  ce  quo  dit  Rodrigue  (Vil,  iC),  (|ui  raconte  comment 
l'infant  fut   soustrait   à   son    oncle    «  fraude;    laudabili  ».   comme  dit  notre  auteur. 

—  Le  manuscrit  ancien  de  l'Acadi-mie  de  Lisbonne  ajoute  ceci  comme  épilogue  au 
récit  de  Chronique  générale,  texte  de  Pidal  (S  98g)  el  d'Ocampo:  v  ca  oepie  elle  fezera 
fora  por  liurar  scu  senhor  de  scruidon.  mas  que  elle  lomaisse  en  scu  corpo  (jual 
cmcnda   por  bcn   tcuessu.  FI   rrcy  pus  eslc  fcito  (P  :  esta)  e  conselho.  F  respoiid<(> 


Chronique  laîi.ne  des  rois  DE  castIlle  -j^x' 

infinité  rapine,  passim  et  indistënter"  in  cunctis  regni  partibus  exerce- 
bantur.  Illo  tempore  cornes  malricus  pugnauit  contra  fernandum 
roderici  cum  quo  erat  populus  obtensistJ.  Cornes  autem  secum  habebat 

a)  indiftanter? 

fernam  rodriguez  castelaâo  dizendo.  Senhor  non  o  p'odees  prcnder  adcreito.  nem  Ihc 
dizer  mal  por  esta  rrazon  (P  :  por  esto).  ca  elle  fez  ben  5  aguisado  (omis  dans  P)  c 
grande  lealdade.  Edaquy  adeante  non  tenhaaes  femOça  por  cobrar  elrrey.  caaiealdade 
dos  castelâaos  uollo  defendeo.  —  EntO  lodos  os  condes  e  Ricos  homOOs  que  hy  esla- 
uon  outorgaron  que  fernam  rrodriguez  dizia  uerdade.  s  por  esto  o  deu  elrrey  por 
quite  da  menagem  que  Ihe  fezera  ».  —  Le  manuscrit  8817  ^^  ^^  Bibl.  Nacional  de 
Madrid  contient  le  même  épilogue,  mais  la  lettre  est  différente:  «  ...Etoconde  disesse 
oq  tcuesse  por  bem.  maVs  el  q  liuraria  seu  senor  de  seruidûe  c  q  tomasse  êno  seu 
corpo  vingança  ql  teuesse  por  bem.  Et  el  Rey  demandou  consello  q  faria  en  tal  p'ylo. 
E  rrespondeulle  fernâ  rrujz  o  castelaO.  s  disse  senor  nOUj  podedes  de  dereyio  pndcr 
né  diz'  mal.  por  esta  rrazO  ao  conde  dO  amriq.  Ca  el  guardou  oq  deuia  z  nôlle  pode- 
des diz'  mal  por  esto  seno  q  fezo  bem  t  dereyto  c  lealdad.  e  oge  mays  nO  tenades 
inaTs  ollo.  por  el  Rey.  Ca  lealdad'  dos  Castelaos  uoloam  tollido.  Et  ento  todos.  os 
condes.  E  os  oîTis  onrrados  da  corte.  teuerô  q  dizia  muy  bem  dO  f.'  rrujz.  z  el  Rey 
por  esto  deo  por  q'to.  da  menagem  qllj  fezera»  (fol.  20G).  —  Le  manuscrit  i3'47  de  la 
Bibl.  Nacional  de  Madrid  est  conforme  au  manuscrit  8817  pour  le  sens  (fol.  388^): 
«  ...lo  q  touiesse  por  bien,  mas  q  el  libraria  a  su  senor  de  tributo  e  q  tomasse  ven- 
gaça  de  su  cuerpo  q"l  touiese  por  bien.  *  mas  el  q  nû  qdaria  ende  ni  su  senor  nî 
série  en  consejo  dello.  *  E  el  Rey  demando  consejo  t  q  farie  sobrello  r.  Respondiole 
ferran  Rui;  el  castellano  e  dixo  le  senor  non  le  podedes  prender  nin  de;ir  mal  por 
esta  Ra:on  1  q  el  conde  guardo  muy  biô  su  der°  e  lealtad  z  de  oy  mas  nû  tengadesojo 
por  el  que...  ».  La  suite  a  été  coupée  et  remplacée  par  ceci,  d'une  main  plus  récente  : 

•  aver  al  infante  E  lealtad  de  caslellanos  vos  han  tollido  z  desto  que  dixo  liô  fernan 
rruya  tovolo  toda  la  corte  por  muy  bien...  »  Texte  à  peu  près  semblable  dans  x-I-O. 

g.  0.  Huete,  à  5o  kil.  à  l'ouest  de  Cuenca.  Cette  bataille,  «jui  eut  lieu  en  ii6!i, 
n'est  signalée  ni  par  Luc  ni  par  Rodrigue.  Mondéjar  (Memorias,  p.  4o),  cite  la 
Chronique  générale,  mais  d'après  l'édition  d'Ocampo.  Le  texte  de  M.  Menéndez 
Ptdal  n'eu  parle  pas.  An.  Toled.  I  :  «  Mataron  al  Conde  Manrich  en  1\  dias  del  mes 
de  Julio,  Era  MCCII  ».  Cf.  Salazar,  p.  120.  Le  récit  de  la  bataille  de  Huete,  qui,  dans 
le  texte  d'Ocampo,  occupe  six  colonnes  de  l'édition  de  î5ii  (celle  dont  s'est  servi 
Mondt^jar),  fol.  cccLxxxiir-cccLxxxim',  est  résumé  ainsi  dans  le  manuscrit  i3i7 
(fol.  389)  :  «  Caiiit".  CCCXCVI  coTiio  malo  don  ferra  Biiy^  al  code  don  mOrriq  g  p'ndio  al 
conde  don  nuno  g:  le  solto  en  çiertas  côdiriones.  Cuenta  la  esloria  q  do  fernâ  Ruy:  de 
cast"  *  syntiendo  sse  mvicho  ap'miado  dl'os  cods  salio  a  ellos  al  câpo  z  lidio  conellos 

•  otro  sy  el  conde  dO  manrif7  des  q  ouo  ordenado  como  firiesen  del  Rey  e  fue  con  su 
poder  ql  estaua  atendiendo  e  lidiarO  en  vno  *  po  don  ferra  Ruyr  con  miedo  delà  lança 
del  conde  do  manrriq  q  flria  morlalmente  troco  las  armas  •  E  des  que  fue  meçclada 
la  lid  el  conde  dû  mârriq  nu  cato  por  otro  sy  no  por  el  q  ténia  las  armas  de  don  ferra 
Ruy;  *  E  dio  le  tal  lançada  q  nû  le  touo  pro  las  armas  e  dio  conel  muerto  en  trra 
^  E  di.to  a  grandes  bo:es  ferid  los  de  Re:io  q  muerto  es  don  ferra  Ruy;  '  E  dû  ferra 
Rui;  vino  de  trauiesso  z  dio  le  tan  grâd  lançada  qle  derribo  en  trra  z  ante  q  se 
leuâtase  ende  el  cûde  fue  muerto  *  E  ante  q  muriese  el  conde  dixo  a  don  ferra  Rui; 
artero  mas  nû  buê  cauall'o.  »  Tout  cela,  sauf  la  dernière  phrase,  se  trouve  traduit 
mot  à  mot  dans  le  manuscrit  8817  (fol.  306"^).  Ce  qui  suit  (fol.  SSg')  se  retrouve  dans 
le  8817  et  n'est  pas  dans  le  texte  d'Ocampo:  «e  fue  preso  el  conde  dû  nuno  *  E 
estonçes  gi«  g°s  (garcia  gonrale:  ?){SSf]  :  G'  Gon:  deçà)  fuese  conel  Rey  pa  çorila  fuyêdo 
z  dende  fuese  pa  auila  conel  '  E  los  de  auila  Reçibierû  lo  muy  bië  e  g"desçierû  gelo 
muy  mucho  por  q  y  vino  e  touierû  se  conel  por  pagados  (8817  :  z  os  da  vila  rreçeberO 
muy  bem  el  fiey  seu  senor.  g  achegOsse.  cO  elle  g  darou  y  bem  très  ahos)  '  E  des  q  el  Rey 
ouo  die;  aûos  enbio  por  sus  Ricos  oïïis  c  por  sus  vasallos  q  viniesen  y  *  E  fi;ierû  le 
andar  por  la  trra  a  cada  lug"r  z  fue  cobrando  lo  q  auia  tomado  su  tio  el  Rey  don  ferr° 
^  E  fuerà  conel  çiento  z  qnq^nta  cauall'os  qlo  ag"rdaua  z  andauâ  conel  *  E  don  fernâ 


248  BÙLLÉttN    itlSPAMQUÈ 

regem  puerum.  et  succubuit  in  bello.  et  interfectus  est  in  eodeni 
bello  :  — 

lo.  [C]Vm  uero  predictus  rex  gloriosus  peruenit  ad  annum  quintum 
decimum  predictus  ,f.  roderici  et  fratres  sui  et  amici  terras  quas 
tenebant  et  castra  régi  alfonso  iuxta  mandatum  patris  restituerunt  •• 

Ruy;  de  caslro  teniêdo  p'so  al  conde  don  nuiïo,  mouio  le  q  le  soltase  delà  psyon  t  q 
le  dexasse  yr  a  solerrar  a  su  hr°  el  conde  dô  mârriq.  ■  E  desq  fucse  soterrado  q  se 
tornaria  pa  su  psiô  r.  desto  q  le  faria  pl'itn  c  omenagc  el  r.  otros  con  el.  •  E  ferra 
Rui;  nO  se  cato  del  engano  touolo  por  hiO  r.  li;o  le  tal  omenag'e  el  c  otros  fijos  dalgo 
conel.  ■  E  sollole  delà  psio  c  leuo  dende  a  su  lir°  el  conde  don  mârriq  s  mica  lo  qso 
enterrar  por  non  tornar  al  onienaje  que  fiçicra  q  tal  ora  como  lo  enterrase  <J  tornasc 
a  su  psiô  •  E  por  esto  non  lo  soterro  r.  pusolo  en  vn  ataud  en  una  torre.  *  E  qndo  don 
ferra  Ruy;  bio  q  nô  venia  (phrase  tronquée  que  complète  lo  8817:  envioiiUe  di:'  ijsse 
veese  serw  qlli  enviaria  diz'  mal  por  ello.  Et  oconde)  enbio  le  dedr  q  non  era  tenudo  de 
venir  a  su  psion  fasta  q  solerrase  a  su  hr°  lo  (}  cl  non  ciiydaua  fa;er  ni  lornar  a  su 
psiû  *  E  q  si  soijre  esto  le  qsiese  deçir  mal  q  le  responderia  sobre  ello  cada  q  el  qsiose 
•  E  don  ferra  Kui;  touose  por  engafiado.  >>  Tout  différent  est  l'épilogue  de  la  bataille 
dans  Ocampo,  dont  le  texte  ne  laisse  même  pas  à  entendre  que  Don  Nufio  ait  été  fait 
alors  prisonnier:  «Sobre  este  fecho  el  conde  don  ^uûo  q  gran  pesar  auie  de  la 
niuerte  del  code  don  Malrriq  su  hermano,  estonçes  començo  a  reptar  a  don  Ferran 
ruyz,  E  deziale  mal  por  la  muerte  de  su  hermano  el  conde,  ca  le  ponia  que  lo 
matara  como  nO  deuie.  z  sobre  esto  ouicron  grandes  roydos  s  grandes  rebafes 
ô  grandes  asonadas  :  z  ouieran  de  lidiar,  mas  los  perlados  z  los  otros  omes  honrrados 
del  rcyno  vieron  que  en  tal  lid  como  esta  podrie  nasçer  tal  cnmistad  q  nadi  fuese 
efil  reyno  r\  de  la  vna  parte  z  de  la  olra  y  non  fuessen  :  z  C[  podrie  y  venir  al  rey 
perdida  z  dano  tal  que  podrie  porédepderel  reyno,  como  el  rey  do  don  (sic)  Ferrando 
Alfonso  su  tio  estaua  aparejando  z  auie  voluntad  defazerlo.  E  el  conde  don  Nufio 
estaua  cnl  rio  d'  (^auia  o  fuera  parada  la  lid  con  muy  gran  poder  q  fraye  consigo  d" 
muy  buena  caualieria  atrdiëdo  a  don  Ferra  ruyz.  E  do  Ferran  ruyz  otrosi  <j  estaua  cO 
su  caualieria  muy  buena  z  muy  grande  para  yr  olrosi  alla,  z  estoruaronlos  z  non  los 
dexaron,  z  partieron  los  asi  de  afjlla  vez  .  z  de  alli  adelante  lincaron  enmigos 
mortales  :  z  ouieron  siemprecôsejos  z  lydcs  z  grandes  ruydos  segû  la  estoria  lo  contara 
adelante»  (fol.  ccci.xxxv).  Le  manuscrit  x-I-O  a  également  une  version  différente 
(foi.  ii'i):  «  Pues  q  fue  vonçido  el  conde  don  manrriq  z  muerlo  el  conde  don  nuno 
z  garci  gonçales  su  hermano  fuerose  conel  Hey  t  metierose  en  çorita,  •  dcspues 
lleuaro  el  Key  para  avila...»  Uodn'gucz  de  Almclla,  dans  le  V  aie  rio  de  las  historias 
(lib.  VII,  lit.  III,  cap.  VII),  suit  la  version  des  manuscrits  1847  et  8817. 

10.  1.  Ce  ne  fut  pas  aussi  volontairement  (juc  le  dit  notre  auteur  (ainsi  que  la 
Chronique  ("lénérale,  texte  de  Pidal,  p,  G73,  1.  .'^7,  et  texte  d'Ocampo,  fol.  ccc\c). 
(^f.  Mondéjar,  Memorias,  p.  !,\  et  suivantes  ;  Pisa,  Descripcion  de  la  impérial  ciudad 
de  Toledo,  fol.  i-y.'.  Le  manuscrit  ancien  de  l'Académie  de  Lisbonne  remplace  ce 
qui  est  dit  au  début  du  §  gyi  du  texte  de  Pidal  (auquel  celui  d'Ocampo,  fol.  ccccx 
esta  quelques  mots  près  identique)  par  ceci:  «El  rrey  doni  afonso  de  Castcla  per 
enduzimento  (1*:  conselho)  dos  coudes  de  tara  lomou  a  terra  a  do  fernam  rodriguez 
decasfc  deitoulio  fora  do  rreyno.  E  elle  foisse  logo  j)a  os  mouros  z  ajuntou  gram 
poder  délies  pcra  hir  sobre  cidadc  rodrigo...  )i  Même  version,  sauf  l'allusion  aux 
Laras,  dans  le  manuscrit  8817  (fol.  208'):  <(  Conta  a  estoria  q  cl  rrey  don  afon  de 
castela.  ouue  sana  cont"  dô  f  rrnyz  de  cast"  t  tomoulli  at'ra  q  del  tijna  z  deytouo 
de  la...»  Le  marmscrit  x-I-O  donne  la  mémo  (fol.  iiO 'J:  «  Este  rey  do  alfon  de 
castilla  lomo  la  trra  a  don  ferrad  el  castellero  (sir)  r.  échoie  del  Reyno...»;  mais  le 
manuscrit  13^17  en  présente  une  autre  bien  différente  de  son  côté  (fol.  Sg't):  «  cap", 
cccc'ii.  como  fue  echado  d'I  Heyno  de  leo  don  fer  ni  Hiiy;  de  casl"  z  de  las  cossas  <j  fico 
Cuenta  la  estoria  q  el  Rey  de  leô  ovo  safia  con  don  ferra  Ruy;  de  cast"  •  E  tollio  de  la 
trrâ  q  del  ténia  z  échoie  délia  z  fuese  luego  pa  los  inoros  '  E  ayunlo  muy  gra  gcte 
de  moros  z  fue  sob"  çibdat  Rodgo...  ». 

F^n  voici   une  autre  du   manuscrit  de  Lisbonne  touchant  le   même  Fcrnan   Ruiz 
après  la  défense  de  Ciudad  Rodrigo  (très  résumée  dans  ce  manuscrit):  «Mas  doni 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS   DE    CASTILLE  2^9 

Grandiusculus  autem  factus  idem  rex  cepit  uiriliter  agere  et  confortari 
in  domino  et  exercere  iusticiam  quam  semper  dilexit  et  potenter  et 
sapienter  exercuit  usque  in  finem  uite  sue.  In  adolescentia  consti- 
tutus  obsedit  concama.  quam  longo  tempore  tenuit  obsessam.  et  per 

fernam  rodriguez  posesse  en  tal  logar  con  toda  sua  gente  que  se  nO  q's  uencer.  — 
(cf  §  990,  Pidal)  EIrrey  dom  Fernando  ue<"do  como  dom  fernam  rodriguez  era  muj 
nobre  fidalgo  s  de  gram  coraçô  z  que  andando  elle  c<3  os  mouros,  podiasse  delo 
seguir  grande  mal  aos  cristaâos,  moueolhe  preitesia  que  se  ueesse  pera  elle  e  que 
llie  daria  muy  boa  terra  que  del  teuesse.  E  dom  fernam  rodriguez  ficou  con 
elle.  —  Este  dom  fernam  rodriguez.  era  homen  de  forte  coraçon.  s  senliasse 
muito  do  mal  que  Ihe  buscaron  os  condes  de  tara,  moueo  sua  contenda  con 
elles.  E  lidou  (P:  pelleiou)  con  elles  en  campo  en  hûû  logar  que  chaman  lobrega. 
e  uenceuhos.  e  matou  seu  sogro  o  conde  dom  ossoryo  por  que  vijnha  contra 
elle.  E  matou  aluaro  goterrez  (P  ajoute  j>m««o  de  dom  Rodrigo  Goterrez ;  manus- 
crit 1347:  hr°  de  Ruy  grr's).  z  prendeo  o  conde  don  nuno  z  muitos  outros  caualeiros. 
E  dom  fernam  rodriguez  disse  ao  conde  don  nuno.  Certamente  (omis  dans  P) 
conde.  p'so  uos  tenho  agora,  nom  embargando  que  outra  uez  saistes  de  mlnha  prisô 
p  uossa  menagen  z  nû  quisestes  hy  tornar.  Eo  conde  Ihe  disse  que  nom  era  tehudo 
pois  non  soterrara  seu  yrmââri.  Dom  fernan  rodriguez  teendoo  en  pouco  s  queren- 
dosse  délie  hOrrar  disselhe.  Se  me  outra  uez  fezerdes  menagen.  que  acerto  dia 
tornees  amynlia  prison,  lexaruos  ey  hir  soterrar  uosso  yrmaao  aluaro  goterrez  z  pcnsar 
de  vossas  feridas.  Eo  conde  dom  nuno  pensou  que  Iho  dizia  descarnho  (P  :  por 
escarnho).  mas  dom  fernam  rodriguez  compriolhe  (P  :  fez)  o  q  disse  :  E  elle  fezlhe 
menagen.  k  entom  o  soltou.  z  o  conde  foisse  pa  castella.  Ouando  foy  o  dia  do  prazo 
aque  o  code  auya  de  tornar  aa  prison  (etc.,  à  peu  près  comme  p.  67^  %  1.  25,  de  Pidal). 
Le  fond  est  le  même  quoique  la  lettre  diffère  dans  le  manuscrit  8817  de  la  Bibl. 
Nac.  de  Madrid;  on  le  retrouve  très  evactement  dans  le  castillan  du  manuscrit  i.l'i7 
(fol.  394  ').  Mais,  dans  cette  rédaction,  l'histoire  devient  toute  différente  de  ce  qu'elle 
est  dans  les  textes  de  Pidal  et  d'Ûcampo  :  elle  forme  une  suite  à  ce  qui  est  raconté  aux 
folios  389"  du  manuscrit  13/17,  et  ^06"  du  manuscrit  8817,  comme  épilogue  de  la 
bataille  de  Huete  (cf.  note  précédente).  Enfin  le  manuscrit  x-l-6  présente  encore  les 
choses  autrement  (cf.  n.  G  du  §  9)  «...  c  lidio  con  los  condes  de  castilla  en  canpos  en 
vn  lugar  q  Uamauan  lobregal  z  vençiolos  z  mato  asu  suegro  el  conde  don  suero  que 
era  con  los  castellanos  z  a  alaar  gutierres  hermano  de  Buy  gutierres  t  mato  otros 
muchos  z  catiuo  dellos  e  siguio  los  otros  z  prendio  al  conde  dô  nuno  z  a  Ruy 
gutierres.  1  Mas  fideron  ellos  pl'ito  z  omenage  a  don  ferrâd  Ruys  q  les  dexase  yr 
entrar  (sic)  aaluar  gutierres  z  quando  le  oviesen  ent'rado  q  tornasen  luego  a  la 
prision  •  Mas  lluy  gutierres  que  lue  artero  metio  a  su  hermano  en  vn  athaut...  r, 
Dans  le  texte  de  Pidal,  Alvar  Royç  prend  la  place  d'Alvar  Gutierrez;  dans  les  autres 

textes,  Alvar  (iutierrez  devient  le  frère  du  comte  Nuno.   Enfin,  dans   la  Suma 

escrita  por  Fernan  Martinez  de  Burgos,  publiée  par  Mondéjar  à  l'ap.  XVI  de  ses 
Memorias,  l'auteur  déclare  ne  pas  savoir  son  nom.  mais  qu'il  était  «hermano  de 
madré  de  los  condes  de  Lara  ».  11  s'est  produit  de  bizarres  confusions,  qui  ont 
déformé  le  fait  initial,  historique  ou  légendaire;  et  il  serait  intéressant  de  recons- 
tituer la  version  primitive. 

10.  2.  Ann.  Toled.  1  (1177):  «  En  el  mes  de  octubre  priso  el  Rey  D.  Alfonso  a 
Cuenca,  Era  MCCXV.  »  Le  Chr.  Cerratense  marque  Era  MCCXIIII,  mais  le  Chr.  Burg. 
est  d'accord  avec  les  An.  Toi.  I.  Cf.  Rodrigue  (VII,  26),  qui  s'étend  davantage  sur 
ce  succès.  L'Académie  de  l'Histoire  possède  une  copie  d'une  Histoire  de  Cuenca 
et  de  sa  Conquête  par  Alphonse  VllI,  écrite  en  i2i2(.5),  et  sur  laquelle  voir  Munoz 
(Cuenca,  i).  Elle  comprend  deux  parties  :  la  conquête  d'Alphonse  VI  et  celle 
d'Alphonse  VIII.  On  trouvera  la  seconde  partie  p.  585-696  du  tome  I  de  VHistoria  de  la 
muy  N.  L.  e  I.  Ciudad  de  Cuenca  e  del  territorio  de  su  provincia  y  obispado  desde  lûs 
tiempos  primilivos  hasta  la  edad présente  por  el  presbitero  Dr.  D.  Trifon  Munoz  y  .Soliva 
(Cuenca,  i8GG,  2  tomes  in  8"),  qui  rejette  l'authenticité  de  ce  texte  pour  des  raisons 
qui  ne  sont  pas  toutes  justes:  mais  celles  qui  sont  justes  suffisent.  Comme  sa  copie 
présente  quelques  inexactitudes  et  n'est  pas  fidèle  à  l'orthographe  de  l'original, 
chose  pourtant  désirable  en  l'occurrence;  que  d'autre  part  la  première  partie  n'est 


2  00  BULLETIN    HISPAMQUE 

gfain  dei  cxpugnauil  eani  et  cepit.  quam  per  induslriam  suam 
dignilate  pontificali  decorauit.  et  est  hodie  una  de  nobilioribus  et 
luunitioribus  natura  et  arte  ciuitatibus  regni  castelle.  Recuperaû 
postea  lucronium^  et  alias  uillaset  castra  uersiis  nauarrain  que  auun- 
culus  eius  rex  sancius.  fraler  .s.  matris  sueMongo  tempore  detinuerat 
occupata.  Eodem  tempore  mouit  exercitum  grandem  et  fortem  contra 
patruum  suum  ferrandum  regem  légion,  et  recuperaû  terram  cjue 
dicilur  infantitum^.  Rex  ferrandus  predictus  duxerat  in  uxorem  urra- 

pas  dénuée  d'intérêt,  je  reproduis  le  tout  en  appendice  d'après  la  copie  de  l'Académie, 
à  titre  d'échantillon  de  la  pseiido-liistoire  espag^nole.  C'est  évidemment  une  coiitre- 
fac^on  assez  récente.  11  est  éloiuiant  que  Mondéjar  (jUemo/-ias,  p.  87)  ne  s'en  soit  pas  délié. 

La  Chronique  générale  mentionne  aussi  la  prise  de  Cuenca.  Cf.  le  texte  de  Pidal, 
«999.  Celui  d'Ocampo  (fol.  CCCXCIM)  est  très  différent:  «  E  este  rey  don  .\lfoiiso 
qndo  côprio  edad  d'  veynte  z  dos  anos  fuc  cercar  a  Cuéca  que  va  oysles,  e  yogo  sobre 
ella  luieve  meses  e  ganola.  E  estonçes  quito  al  rey  de  Aragon  cl  tributo  del  servi(,io 
que  le  auie  de  fazer  por  el  niucho  bien  s  ayuda  que  le  lizo  enesla  cerca  (cela  con- 
lirme  le  fait  que  Juan  Pablo  Martir  Rizo  allègue  dans  son  Historia  de  la  ciudad  de  Cuenca 
et  que  Mondéjar  accueille  avec  scepticisme  dans  ses  Memorias,  p.  88).  r.  d'si  gano 
Alarcû  (cf.  §  13,  note  1)  e  tomo  los  omes  de  la  Estreniadiira  c  fizolos  yr  pobrar  a 
Cuenca.  z  Alarcû  E  fizo  de  Cuêca  obispado  c  ouo  noljre  el  primero  obispo  don 
Yanes:  e  pobro  muy  bié  sus  fronteros  enderredor  e  anparo  lâbic  su  licrra  que  todos 
sus  vezinos  lo  dubdauan  e  lo  resçeleuan»  (à  peu  jirès  pareil  dans  i3.'i7  et  traduit 
dans  8817,  fol.  aiT).  Malgré  les  mots  «  que  ya  oystes  »  (8817:  Q  desuso  oystes;  omis 
dans  i-^i7),  je  ne  vois  pas  qu'il  soit  question  do  Cuenca  auparavant.  Peut-être  y  at-il 
une  confusion  avec  rorita.  Dans  le  manuscrit  8817,  conca  devient  con/o,-et  rorila, 
corica.  On  a  pu  prendre  l'un  [)0ur  l'autre. 

De  la  prise  de  Zurita,  notre  auteur  ne  dit  rien.  Le  texte  d'Ocampo  la  place 
(fol.  cccLWw)  avant  celle  de  Cuenca  et  la  raconte  longuement,  l.e  récit  se  trouve 
abrégé  dans  les  manuscrits  i3'i7  (fol.  Sijd)  et  8817  (fol.  20G).  Je  mets  à  l'appendice  cet 
abrégé  d'après  le  13/17,  ^^^^'  '<^*  variantes  du  8817.  On  trouvera  aussi  l'histoire  dans 
le  Valerio  de  las  Historias  de  Diego  Rodriguez  de  Almella  (Mb.  \  I,  lit.  VllI,  cap.  V). 

10.  3.  Logroilo.  Cf.  Rodrigue,  qui  énumère  les  \ilies  reprises  à  Sanrhe  (Vil,  r>(i). 
Le  texte  d'Ocam|)o  donne  des  villes  reprises  une  énumi'ration  dillérente  de  celle  (pii  se 
trouve  dans  Pidal  (j  91(9).  On  le  trouve  traduit  dans  le  manuscrit  8817  (fol.  2i2),<iue  je 
crois  intéressant  de  niproduirn  ici  de  préférence:  dCapitl'  ((  fala  delrey  don  al'ofi  de 
castella  Contu  a  estoria  ([  depojs  desto  qsse  alçou  o  Rey  de  Navarra.  nulle  conoçendo 
ne  huû  senorio.  e  el  Rey  do  afon  foy  sobr'  el  e  tomoulle  vijnte  e  çîco  enl"  vilas  e 
castolos  q  era  muy  boos.  Et  dcspoys  desto  vêeô  asna  mesura  conoçëdo  <(llj  errara. 
E  el  rey  dô  afoû  lornoulle  endc  qlorze.  e  releue  pa  sy  os  onze,  q  fo2r  esles.  font  rrabia 
E  a  uila  de  bitoyra  e  hupëi).  e  capeço  e  santa  cruz.  k  toda  alaua  e  toda  g'pozooa  e 
treueno  e  portilia  de  torre.s.  e  portela  d'yhuda.  Et  poblou  ento  cast°  de  orgaas  e  sam 
viçenle  de  barcjyra.  e  santandre.  e  g'taria  <.  laredo  e  nol'ço  c  toda  essa  cosleyra  do 
mar.  »  Ocanipo:  «...  Euete  rabia  .San  Sabiistia,  e  la  villa  d'  Vitoria,  Luenuena  (13/17  : 
hurueua),  t  Capeço,  e  Sata  cruz  e  toda  Alaua,  e  Lipuzca  (13/47  •  y/>"''"0«).  <:  estoçes 
pobro  a  Castro  de  ordiales  k  (Juitarya  e  Laredo  e  Molrico  (om.dans  i3'i7)  e  San  ander 
e  Sa  vicete  delà  bartiuera,  e  todo  eslo  enla  cosla  del  mar  »  (fol.  nccxcm'). 

10.  /|.  Sanciio  Giircés,  cl  Sabio  (i  i5o-i  ig'i),  frère  de  Doua  MIanca  de  Navarra,  mère 
d'Alphonse  VllI.  Cf.  <;  7,  note  1  ;  S  8,  note  1  ;  S  l'i,  note  (j;  Rodrigue,  VII,  u.  Il  était 
doublement  l'oncle  de  celui-ci,  puisqu'il  avait  épousé  Sancha,  fille  d'Alphonse  VU 
el  de  Hcrengère. 

10..^.  Infantazgo  de  Le<')n.  En  1180  ou  1181.  Cf.  note  '1  du  s  11.  la  Chr.  gén. 
(texte  de  Pidal,  [».  ^72,  I.  30)  y  fait  une  allusion  :  «  et  aun  el  Inllanlydgo,  que  era  en 
dubda  ciiyo  dévie  ser,  elle  le  tomo  yl  ouo  dalli  adelanl».  Le  texte  d'Ocampo  dit  seu- 
lement •  cobrando  todo  lo  suyo  c  algund  poco  mas  t  (fol.  ccci.xxwn').  Le  manuscrit 
i3'47  s'étend  ()articulièremcril  sur  les  reprises  du  roi  de  Castille  (fol.  391'):  «  E  el  rey 
fue  cresciendo  e  salio   de    bue   cnlendiml»  e  de   buenas  mai'ias   r.  fue  andando  por 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  25 1 

cani  filiam  alfonsi  régis  portugalie  que  tamen  non  poterat  esse  uxor 
légitima,  cum  atineret  ipsi  in  tercio  gradu.  f-"  computationem 
canonicam.  nam  imperator  et  dictus  rex.  portugale  atinebat  sibi  in 
secundo  gradu.  quia  rdii«J  erant  duarum  sororum  filiarum  régis  alfonsi 
qui  cepit  toletum.  Propter  predictam  coUigationem  impietatis  multa 
castra  sepe  dictus  rex  tradiderat  régi  portugalie  quepostea  recuperauit 
ab  eodem.  quando  fuit  captus  in  badaioz,  et  exhancatus  ita  quod 
postea  nunquam  potuit  equitare?.  Tune  et  captus  fuit  giraldus  qui 

a)  per. 

su  Reyno  a  todas  ptes  ^  E  cobro  las  villas  c  castillos  qle  auia  tomado  su  tio  el  Rey 
dô  ferr°  e  ovo  conel  muchas  façiendas  e  grâ  conlienda  •  E  despus  por  cOsejo  del  conde 
don  nufio  e  deot°s  oms  bu°sq  le  syruierO  biO  s  lealmente  *  maguerqdelas  villas  auian 
fecho  omenaje  al  Rey  de  leon  con  todo  esto  luego  que  vierO  al  Rey  su  ssefior  gelas 
dierô  e  Reçibiero  io  muy  biê  por  q  muchos  dellos  larrarù  despus  q  les  fl:o  el  Rey 
de  leô  mucho  mal  *  mas.  elles  antes  qriâ  scr  la;rados  q  nô  aleuosos  r  dessconosçi- 
dos  al  Rey  su  seiîor  '  E  el  Rey  despues  que  cob»  todo  lo  suyo  fi;o  ffol.  892)  grand 
guerra  al  Rey  de  leon  su  tio  veniendo  le  emientes  el  mal  que  del  Rescibiera  mientra 
era  nino  *  E  qria  gelo  acalofiar  miiy  crua  mente  asy  qlo  senliâ  enel  Reyno  de  leO  z 
pensauâ  enl  mal  q  fiàerâ  en  caslilla  z  pesaua  les  dello  '  E  despus  el  Rey  paro  biê 
su  Reyno  t  mado  aies  de  auila  q  se  fuesen  pa  alla  e  ténia  sse  por  bie  seruido  dellos  ' 
E  estonçes  vinierô  a  el  todos  los  Ricos  oms  c  dierù  le  la  tPfa  cada  vno  como  la  ténia 
ante  de  los  plaros  q  deuiâ  segû  q  el  Rey  don  Sancho  mandata.  » 

10.  G.  Alphonse  Vil  l'Empereur,  fils  d'Urraca,  et  Alphonse  de  Portugal,  fils  de 
ïeresa,  étaient  en  eflet  cousins  germains  : 

Alfonso  YI 


Urraca  Teresa  (illégitime) 

I  I 

Alfonso  VII  Affonso  I  de  Portugal 

I  ,  I 

Fernando  II,  épouse  Urraca 

Cf.  Luc,  p.  107,  1.  3i.  Rodrigue  dit  que  Ferdinand  divorça  après  l'expédition  de 
Santarem,  où  il  alla  au  secours  de  son  beau-père  (VII,  23);  cette  expédition  eut 
lieu  en  1171,  et  la  séparation  en  1175  (Flûrez,  Reynas,  t.  I,  p.  325).  Le  mariage  avait 
été  célébré  en  iiOô  (ibid.,  p.  322").  Voir  les  textes  cités  à  la  note  suivante;  Hercu- 
lano,  Hisloria  de  Portugal  (b'  édition),  t.  I.  p.  ^19,  427,  iili,  5^3.  Pour  ce  qui  concerne 
le-i  relations  des  rois  de  Léon  et  de  Castille  avec  ceux  de  Portugal,  l'ouvrage  d'Her- 
culano  est  une  base  sérieuse.  Son  ouvrage  est  d'ailleurs  bien  supérieur,  pour  la 
critique  comme  pour  l'exposé  des  faits,  à  VHistoria  de  Espaiïn  de  Lafuente.  Je  renvoie 
à  la  5' édition  (Bertrand,  Lisbonne)  parce  que  c'est  celle  que  j'ai  en  mains;  mais 
on  peut  se  servir  de  la  i»  ou  de  la  3'^,  la  dernière  qu'ait  préparée  et  revue  l'auteur. 
—  Selon  Rodolphe  de  Diceto,  Ferdinand  II  serait  allé  encore  au  secours  de  Sanche  de 
Portugal  lors  du  deuxième  sièga  de  Santarem  en  ii8i  (Herculano,  t.  I,  p.  469  et 
l.  II,  p.  16). 

10.  7.  Cf.  Luc,  p.  107,  1.  9-18,  et  Rodrigue,  VII,  23.  Noter  que  Luc  emploie  à  peu 
près  les  mêmes  mots:  «  ...  quod  de  cetero  non  potuit  equitare  ».  Le  fait  eut  lieu 
en  11G9  eit  non  ii68,  comme  marque  le  Chr.  Lusit.;  cf.  p.  358  de  l'article  signalé  à 
la  note  qui  suit.  Voir  Chron.  gén.,  p.  ^-ô',  1.  Z12;  Flôrez,  Esp.  sagr.,  t.  XXII,  p.  96; 
Herculano,  Hisl.  de  Portugal,  t.  I,  p.  434.  Cet  accident  dont  fut  victime  Affonso 
Henriques,  sa  mère  Teresa  le  lui  avait  prédit,  à  ce  que  raconte  le  Livro  dos  Linhagens 
do  conde  L>.  Pedro,  p  jbb.  — •  D'après  notre  texte,  les  places  que  Ferdinand  reprit 
à  son  beau-père  après  l'affaire  de  Badajoz,  «  lierra  de  Limia  el  Turon»  (Chr.  gén., 
p.  G75,  1.  3-3),  il  les  lui  avait  données  en  épousant  Urraca.  Ce  n'est  pas  d'arras,  de 
douaire  qu'il  s'agit  là.  11  semble  donc  que  le  mariage  avait  été,  avec  la  cession  de  ces 
places  fortes,  une  des  conditions  de  la  paix  à  un   moment  où  Ferdinand  avait  le  des- 


202  BULLETIN   HISPANIQUE 

dicebatur  sine  pavore^  et  traditus  in  manus  roderici  fernandi  castel- 

sous  et  où,  comme  le  conjecture  Herculano  (p.  419),  il  avait  besoin  d'un  appui  dans 
ses  desseins  sur  la  Castille.  —  Herculano  explique  aussi  bien  que  possible,  surtout 
p.  433,  ce  que  fut  ensuite  la  situation  politique  du  gendre  et  du  beau-père  respecli- 
vement. 

Le  manuscrit  ancien  de  l'Académie  de  Lisbonne  présente  cette  affaire  de  Badajoz 
d'une  manière  toute  différente  de  ce  qu'on  trouve  dans  la  Chron.  trénér.  (§  991'),  et 
fol.  cccxcr  du  texte  d'Ocampo,  à  peu  près  identique):  «  Depois  desto,  ouue  elrrey 
dom  fernâdo  hùa  batalha  con  elrrey  dom  afonso  de  portugal.  porque  elrrey  dom 
afonso  con  pesar  que  ouue  por  quanto  elrrey  dom  fernando  pobrara  cidade  rodrigo 
donde  Ihe  vijnlia  muyto  dampno.  c  especialmente  por  ([ue  llie  leixara  sua  fillia  :  foy 
cercar  badalhouçe  que  era  da  conquista  delrrey  dom  fernâdo.  E  foy  elrrey  dom 
afonso  preso  en  essa  batalha.  z.  fez  menagem  aelrrey  dom  fernâdo  (jue  tanto  que 
caualgasse  en  besta  que  se  tornasse  a  sua  prison,  e  el  nunca  depois  quis  caualgar 
por  non  aver  razon  de  tornar  aella.  E  cobrou  elrrey  dom  fernando  a  villa  ■<:  depois 
aperdeu.  E  sabendo  os  mouros  como  elrrey  dom  afonso  de  polUugal  nô  caualgaua 
en  caualo.  o  ueherô  cercar  a  santarem.  E  este  Rey  dom  fernâdo  foy  con  sua  hoste  pa 
o  decercar  e  os  mouros  fugiron.  —  Depois  de  todas  estas  cousa.s.  as  quaacs  uos  conta- 
remos  côpridamente  quando  falarmos  das  estorias  dos  lleis  de  portugal.  por  que  ia 
era  morta  arrainha  dona  orraca  filtia  delrrey  de  portugal  que  el  leixara.  casou  este 
rrey  dom  fernando  con  doiïa  tareyia  lilha  do  conile  dom  fernando  de  Iraua  que  fora 
molher  do  conde  don  nuno  de  lara...»  On  voit  que  l'auteur  a  fortement  déformé  les 
faits.  Le  manuscrit  de  Paris  a  ici  un  autre  texte  (ch.  a'xxv,  n°  455):  «  El  rrey  dom 
fernando  de  leon  foy  contra  elrrey  dom  affon  de  portugal.  c  achouo  en  badalhouçe. 
(lue  elle  entom  tomara  aos  mouros.  c  prendeo  per  desauentura  segundo  he  contado 
na  cronica  do  primeiro  Rey  dom  affom  de  portugal  Despois  que  o  prendeo  sayrom 
os  mouros  do  castello.  z  conhoceronlhe  sefiorio  e  fezeronlhe  preito  <;  menagem.  E  elle 
leixou  hi  por  alcalde  hiui  mouro  que  auya  nome  abuhabud  (même  fond  que  dans 
Pidal,  p.  ù-]i)',  1.  10)...  Depois  desto  os  mouros  sabendo  como  elrrey  de  portugal  non 
caualgaua  en  besta.  juntou  se  grande  poder  t  entraronlhe  pella  terra  fazeudo  grande 
dampno,  c  cercaronno  en  santarem.  Elrrey  dom  fernando  logo  que  o  soube.  juntou 
grande  tioste  e  foisse  pera  santarem  por  o  descercar.  elrrey  de  portugal  quando  o 
soube  pesoullie  porque  non  sabla  como  vijntia.  E  quando  os  mouros  forom  certos  da 
vijnda  delrrey  de  leon,  dcscercaron  santarem,  z  fugirom.  Muyto  Ihe  gradeceo  elrrey 
de  portugal  porque  o  veera  descercar.  E  despois  que  elrrey  dom  fernando  soube  como 
fugirom  os  mouros.  tornouse  pera  sua  terra.  E  porque  ia  era  morta  a  rreynha  dona 
orraca  filha  delrrey  de  portugal.  casou  el  rey  dom  fernando,  etc.  ».  —  Le  maïuiscrit 
8817  de  la  Bibl.  Nac.  de  Madrid,  conforme  pour  le  sens  avec  le  manuscrit  i3'i7,  se 
rapproche  des  textes  de  Pidal  et  d'Ocampo,  mais  ajoute  ceci  (fol.  aog'^):  «  Et  el  rrey 
do  r...  ouue  avijnça  cô  elle  (|llj  desse  oq  tiina  tomado  en  galira.  r.  qo  leixassc  yr  a 
sua  trâ.  guarer'  da  i)na.  z  logo  coïïïo  fosse  sâo  tal  ora  coïïïo  caualgasse  qsse  verria  as\i 
p'iom  ([irisom).  Et  el  Uey  do  f  soltoo  r.  el  fezollc  tal  menagr.  z  foysse  aseii  rreyno  r. 
mandoulli  ent'gar  o([llj  tomara  en  Galiza  e  el  punou  de  guareç'  ([nlo  mays  pode 
(<<  £  el  punou...  pode»  omis  dans  1347).  z  dcsq  foy  sao  nuca  ia  majs  q'so  caualgar 
en  besta  por  no  viir  amenagem  q  fezera  <[  tal  ora.  corïîo  caualgasse  en  besta  qsse 
verria  asua  p'Iom  delrrey  (i3/i7  :  al  omena(je  asu  poder  dcl  Ficy  don  ferr°)  Et  daly 
adeafil  semp  andou  en  andas  en  colos  de  oïîïs  ala  q  lliiou...  desy  os  mouros  souberô 
coïïïo  cl  Uey  de  portugal  nô  caualgaua  eu  besta  por  razo  da  pna  r.  ajùlarosse  muy  grâ 
poder  délies...  Desy  tornouse  (fernando)  j)a  sua  t'ra.  Et  por  q  era  la  el  partido  (i347  : 
E  era  ya  <llo  de  su  muger)  da  lleyiia  dona  tareyia  filla  delrrey  (i3.'i7  ajoute  :  por  q  ei a 
ssu  cormana)  casou  cO  dona  tareyia  11  lia  do  conde.  dom  f.  r[  fora  moll'r  do  conde  do 
m*...  »  (Jn  voit  que  les  manuscrits  de  Lisbonne  el  de  Paris  ont  résumé  le  récit  tlu 
manuscrit  de  Madrid  au  point  de  le  défigurer;  mais  Ils  ont  gardé  le  fait  du  serment 
du  roi  Afonso  el  de  sa  ruse,  f|ui  rappelle  l'histoire  de  Fcrnan  Hulz  et  du  comte 
Nufio.  Noter  aussi  la  variante  morta  i^nur  partido,  qui  transforme  bien  les  choses. 

10.  8.  Glraldo,  surnommé  Sempavor,  conquérant  d'IOvora.  (^f.  (^hron.  Lusitaiium  : 
t  Aéra  iao4.  Civllas  Elbora  capta...  a  Glraldo  cognomlnato  sine  pauore...»  Il  est 
question  de  son  rôle  à  liadajoz  dans  le  Clir.  Lameeense  :  a  Gcraldus  alcayde  Intrault 
badalloucium    VI    nonas    mail.    Era   M*.  CC"  VII"  ».   Cf.  Clir.  Conimbricrnse  l  :   u  In 


CHRO:?IOUE   LATINE    DES    ROIS    DE   CASTILLE  253 

lani.  cui  pro  liberatione  sua  dédit  idem  giraldus  montanges.  Trujellum. 
Sancta  crux.  monfrao.  que  idem  giraldus  acquisierat  a  sarracenis. 
Depaupertatus  autem  et  destitutus  omni  auxilio  transtulit  se  ad 
sarracenos  quibus  multa  dampna  intulerat.  a  quibus  nacta  qdam" 
occasiuncula  in  partibus  marroquitanis.  capite  truncatus  est  'o. 

II.  De  predictaurracarexferrandussuscepiîlium  .s.  alfonsum  regem 
Icgiori  qui  nunc  pro  pie  régnât'.  Mortuo  uero  rege  ferrando  filius 

a)  Abella  :  «  nacta  quaedam,  locus  mendosus.  Forte  nata  quadam  ».  Mais  nous  trourons 
d'autres  exemples  de  cl  pour  /;  et  le  7  porte  noo  un  simple  trait,  mais  le  signe  abrévlalif 
de  a,  qu'on  peut  représenter  pjr  ••.  C'est  donc  ou  nacta  ou  uala  quadam. 

Era  MCCVI  quinto  nonas  maii  interiit  Alcaide  GeralJus  Badalouci  »,  où  la  correction  de 
interiit  en  intravit  est  tout  indiquée.  Voir  dans  le  Boletim  da  Segunda  Clase  de  l'Aca- 
démie  des  Sciences  de  Lisbonne,  volume  III,  avril  1910,  un  article  de  M.  David  Lopes 
(signalé  dans  le  Bail,  liisp.,  t.  XIV,  p.  208),  qui  donne  un  texte  inédit  d'ibn  Sahib 
Açala  et  un  d'Ibn  Caldoun  sur  ce  personnage,  et  conclut  avec  raison  que  «  elle  foi  urn 
verdadeiro  heroe  nào  de  romança,  mas  de  epopeia  »  (p.  327).  Le  premier  de  ces 
textes  contient  un  passage  curieux  sur  la  manière  de  Giraldo,  et  que  M.  David  Lopes 
traduit  ainsi:  «  ...elle  avançava,  sem  ser  apercebido,  na  noite  chuvosa,  escura,  tene- 
brosa,  e  (insensivel)  ao  vento  e  â  neve,  ia  contra  as  cidades  (inimigas).  Para  isso 
levava  escadas  de  madeira  de  grande  comprimcnto,  de  modo  que  com  ellas  subisse 
acima  das  muralhas  da  cidade  que  elle  procurava  surprebender;  e  quando  a  vigia 
muçulmana  dormia,  encostava  as  escadas  â  muralha  e  era  o  primeiro  a  subir  ao 
castello,  e  empolgando  a  vigia,  dizia-lhe  :  «  Grita  como  tens  por  costume  de  noite, 
que  nào  ha  novidade.  »  E  entào  os  seus  homens  d'armas  subiam  acima  dos  muros 
da  cidade...  »  Le  Chr.  Lusilanurn  indique  bien  qu'Evora  fut  prise  d'une  façon  ana- 
logue. Voici  maintenant  le  passage  qui  confirme,  en  le  complétant,  celui  de  notre 
auteur  :  «  Quanlo  a  Giraldo  —  o  maldito  de  Deus!  —  elle  tomou  por  surpreza  varias 
cidades,  Trujillo  foi  a  primeira,  no  mes  de  «  jumada  2°  »,  do  anno  50o;  e  depois  as 
seguintes  :  Evora,  no  mes  de  «  dulcada  »  do  anno  de  5Go,  povoando-a  de  chrislàos; 
Ciiceres,  no  mes  de  «  sâfar  »  de  061  ;  castello  de  Montânchez,  em  «jumada  1°  »  de 
061  ;  castello  de  Serpa,  no  fim  de  k  jumada  1°  »,  tambem  de  5Gi  ;  castello  de  Juro- 
menha,  perto  de  Badajoz,  e  ahi  se  conservou  com  toda  a  sua  gente  execranda,  comba- 
tendo  e  incommodando  constantemente  os  muçulmanos  de  Badajoz,  —  mas  Deus 
havia  de  dar  a  vantagem  aos  subditos  do  principe  dos  crentes...;  e  (inalmente  a 
cidade  de  Badajoz  (em  5G/i).  »  D'après  la  table  de  concordance  des  dates  établie  par 
M.  David  Lopes,  les  villes  de  Trujillo,  Evora,  Câceres  furent  prises  par  Giraldo, 
respectivement  en  avril,  septembre  et  décembre  ii(j5;  celles  de  Montânchez,  Serpa 
(à  l'est  de  Beja),  et  Juromenha  (sur  le  Guadiana,  frontière  du  Portugal,  sud-ouest  de 
Badajoz),  en  mars  1 166;  celle  de  Badajoz  en  i  iG8.  Cet  excellent  article,  dont  l'auteur 
a  bien  voulu  nous  envoyer  un  tiré  à  part,  met  au  point  l'exposé  d'Herculano  (Hist.  de 
Portugal,  t.  I,*p.  42.3  et  ss.),  qui  paraissait  peu  disposé  à  croire  à  l'authenticité  des 
exploits  de  Giraldo,  et  n'identifiait  que  d'une  façon  dubitative  ou  inexacte  les  noms 
arabes  des  trois  places  fortes  de  Montânchez,  Serpa  et  Juromenha.  —  Aux  villes 
indiquées  par  Ibn-Saliib,  comme  ayant  été  prises  par  Giraldo,  notre  chronique  en 
ajoute  deux,  Santa  Cruz  et  Monfra  (cf.  la  note  suivante). 

10.  9.  Montânchez,  Trujillo,  Santa  Cruz  de  la  Sierra  et  Monfra,  dans  la  province 
de  Câceres  (sud-est).  —  Je  suppose  qu'il  faut  lire  a  fernandi  roderici  castellani  ». 

10.  10.  Détails  inédits.  On  comprend  alors  comment  Juromenha  et  Badajoz,  et 
d'autres  places  aussi  sans  doute,  retombèrent  entre  les  mains  des  Arabes  (Herculano, 
t.  Il,  p.  28). 

11.  I.  Cette  partie  de  la  Chronique  a  donc  été  rédigée  avant  1280,  date  de  la  mort 
d'Alphonse  de  Léon.  La  biographie  d'Alphonse  de  Léon  par  Gil  de  Zamora,  publiée 
par  le  P.  Fita  au  tome  XIll  du  Bol.  de  la  R.  Acad,  de  la  Hist.  (1888),  p.  291-296,  n'est 
guère,  ainsi  que  l'observe  l'éditeur,  qu'une  compilation  de  Rodrigue  et  de  Luc  (sauf 
au  5  8), 


254  ~  BULLETIN    HISPANIQUE 

eius  qui   tune  adolescens  erat  tiniuit  priuari  regno  per   potenciam 

domini  .a.  gloriosi  régis  castelle  |  cuius  laus  et  fama  magnam  parlem 

orbis  iam  impleuerat  qui  tune  terribilis  erat.  et  timendus  omnibus 

regibus  uicinis.   tam  sarracenis  quam  xpianis.  Traclatum  igitur  fuit 

et  prouissum   ut   dieto   alfonso   régi   légion    desponsaretur   una   de 

lîliabus  régis  eastelle^.  contra  deum  et  eanonieas  sentiones".  nani  idem 

reges  sibi  acjinebant  in  secundo  gradu  sieut  filii  duorum  fratrum''. 

Fuit  preterea  positum  et  firmalum  ut  idem  rex  legioiî  fieret  miles  a 

predicto  rege  castelle.  et  tune  oseularetur  manum  eius  quod  et  factum 

est.  Celebrata  namque  curia  famosa  et  nobili  apud  carrionem''  idem 

a)  sic. 

11.2.  On  ne  nous  dit  pas  laquelle,  mais  ce  ne  devait  pas  être  Bérengèrc,  puisque 
l'on  ajoute  ensuite  que,  deux  mois  plus  tard,  .\lpiionse  le  Noble  fiançait  celle-ci, 
âgée  de  huit  ans,  à  Conrad,  fils  de  rcnipereur  Frédéric  (Harberousse).  11  n'est  pas 
parlé  ailleurs  de  ces  premières  liaiii-ailles  d'Alphonse  de  Léon  avec  une  tille  d'AI- 
|)iionse  VIII,  mais  Rodrigue  semble  bien  y  faire  allusion  quand  il  dit  que  le  mariage 
suhséquent  du  Léonais  avec  Thérèse  de  Portugal  fut  fait  «  in  odium  Régis  Castellae  » 
(VII,  2.'i).  l.'Estoria  de  los  Godos  (Doc.  iitéd.,  t.  LWWlll,  p.  147)  semble  dire  que  le 
roi  de  Léon  fut  fiancé  à  Bérengère  après  Conrad,  mais  a\ant  son  mariage  avec  'l'hérèsc. 
Quant  au  mariage  d'.\lphonse  de  Léon  avec  sa  cousine-germaine  Thérèse,  fille  de 
Sancho  I  de  Portugal,  célébré  en  iiyi  (Ilerculano,  Hist.  de  Portugal,  t.  Il,  p.  O7), 
notre  auteur  n'y  fait  aucune  allusion.  Ce  n'est  qu'après  la  mort  de  ce  roi  qu'il  parle 
de  cette  reine  et  de  ses  filles  {i  Go). 

Affonso  I  de  Portugal 


I  I 

Fernando  II  de  Léon,  épouse  D»  Urraca  Sancho  I 

I  I 

Alfonso  I\  D»  Theresa 

Cf.  s  18,  note  2.  Ce  mariage  fut  rompu  en  1 190  ou  i  ujCi  (Herculano,  t.  H,  p.  7a). 

II.  3.  Alfonso  Vil 


I  I 

.Sancho  m  de  Castilla  (■;  ii:)8)  Fernando  H  de  Leôii  (•'•  1188) 

I  I 

.\lfonsoVHi  Alfonso  IX 

1 1.  '|.  (^arriôn  de  los  Condes  (à  'io  kilomètres  au  nord  de  l'alencia)  .Sur  ces  cortes 
de  Carri('jn,  cf.  Rodrigue,  Vil,  ■>',.  Mondéjar,  Memorias,  cap.  LVT  et  ap.  II,  oi'i  se 
trouve  le  texte  des  capitulations  d'après  les  éditions  do  Francisco  de  .Sola  et  d'Antonio 
Siiiirez  de  .\larc('>n,  et  la  coi)ie  (sincère  à  ce  qu'il  parait)  du  faussaire  Antonio  Liipiân 
'/M\):ild;  Colmc'xro,  Corles  de  los  anliguos  reinos  de  Léon  y  de  Castilln,  publiées  par  la 
R.  Acad.  delà  ilistoria,  t.  I  de  Vlntrodiicciôn,  p.  13,  1.'),  jg,  iSç).  Noter  que  le  mot  em- 
|)loyé  ici  et  au  S  '■*<>  est  curia.  Le  manuscrit  8817  porte  que  c<  Kt  vei-o  y  el  Rey  de  Por- 
tugal r.  ficaron  ambos  (lui  et  le  roi  de  Léon)  por  sens  va.salos  k  beyiarolle  amâô  » 
(fol.  '.«lo).  Cela  est  aussi  dans  le  x-I-G  de  l'Kscorial  (fol.  118'):  <(  F  vino  y  el  Rey  de 
Portugal  t  lincaron  amos  por  sus  vasallos  r.  bcsaronio  la  mano  ».  Le  même  manus- 
crit 8817  fait  allusion  à  d'autres  chevaliers  armés  à  Cordoua  (loi.  ai  C),  mais  il  y  a  là 
une  mauvais  lecture  d'un  passage  du  texte  d'Ocampo  (fol.  cccxci'):  «Codes  ;.  altos 
ornes  otrosi  resçibierO  caiialleria  d' I  de  i\  ante  d'uiera  colar  la  estoria,  coiuo  del 
code  du  Remo  tlaçada  de  Tolosa,  r.  do  Liiys  code  d'  (Chartes  a  <j  este  rey  dr>  Alfonso 
de  Castclla  en  Cuellar  armo  c  fizo  cauaU'os  ..  »  (cf.  au  loi.  cccxiii). 

Qu'AIfonsc  VMI,  aux  cortes  de  Carrion  ait  fiancé  au  moins  deux  de  ses  filles, 
c'est  ce  qirindi(pienl  les  Ann.  Comijosteltuid  :  a  Era  MCCWNI.  Desponsavit  Rex 
Aldephonsiis  iilias  suas  ».  Et  ces  Cortcjs  eurent  lieu  en  ellet  en  1 1K8  (cf.  Fl(')rez,  lieynus, 
t.  I.  p.  .3,îo).  Pour  Rérengère,  le  contrat  fut  signé  le  aï  avril  (ibid.).  A  cette  date, 
d'après    notre  auteur,  elle   avait  à    peine    huit  ans.  Elle   serait  donc  née  après  le 


CHRONIQUE    LATINE    DF.S    ROIS    DE    GASTILLE  255 

rcx  légion  accitus  est  gladio  a  prediclo  rege  castelle  in  ecclesia  sancli 
zoili  et  osculatus  est  manum  régis  castelle  presenlibus  gallecet  légion 
et  castellanis.  Interiecto  modico  intervalo  uix  duorum  niensium 
conradus  filius  froderici  romanomm  imperaloris  in  eadem  uilla  .s. 
carrione  celebrata  iteiuni  magnifica  cuiia  factus  est  miles  a  sepedicto 
rege  castelle  cui  desponsauit  filiam  suam  dnam  beren.  que  uix  erat 
octo  annorum.  et  fecit  sibi  fieri  omagium  de  toto  rcgno.  ut  idem 
conradus  regnaret  post  eum  si  contingeret  ipsum  decedere  sine  lîlio. 
Tnncenim  non  habebat  lilium  rcx  gloriosus  donus  .A.  sed.  filias^, 

a.'?  avril  1180,  et  non  en  1171  comme  Mondéjar  (.UeAnor/as,  p.  GG)  et  Fli'>rez  (Heyrias, 
t.  I,  p.  'io3)le  déduisent  d'une  cliarlo  publiée  par  Manrique  (Ann.  Cisterc,  année  1171, 
2/1  août),  reproduite  par  Nûfiez  de  Castro  dans  sa  Coronica  de  los  senores  de  Castilla, 
p.  87.  Cette  cliarte  est  fausse  ou  mal  datée.  Loonor  était  née  en  iiGo,  d'après 
Robert  de  Torigny  qui  fut  présent  à  son  baptême;  elle  fut  mariée  en  septembre  1 170 
(VIondéjar,  ch.  X\;  Fl<'irez,  p.  SyS-Sç)!))  :  on  ne  peut  admettre  que  le  mariage  ait  été 
consommé  à  ce  moment  (son  mari  n'avait  même  pas  quinze  ans),  et  qu'elle  ait  été 
mère  déjà  en  août  1171,  à  l'âge  de  onze  ans.  <^u'en  juin  1 173,  à  l'âge  de  treize  ans, 
elle  soit  mère  d'un  fils  (Mondéjar,  p.  05;  Flôrez,  p.  io.")),  c'est  moins  improb.ible, 
quoique  bien  extraordinaire.  Notre  texte  est  le  seul  explicite  sur  celte  question,  et  il 
a  pour  lui  la  vraisemblance.  Noter  qu'on  ne  cite  pas  d'autre  charte  où  soit  nommée 
lîérengcre,  avant  celle  de  1181,  que  connaissait  Colmenares.  Celui-ci  induisait 
(pie  la  princesse  avait  dû  naître  peu  auparavant.  11  semble  bien  avoir  eu  raison.  Ce 
qu'il  y  a  de  plaisant,  c'est  que  Flôrez  tirait  argument  du  jeune  âge  de  Léonor  en  1171 
pour  conclure  que  Bérengèrc  était  sûrement  l'aînée  de  Blanche.  L'argument,  en 
effet,  était  péremptoire.  Trop,  peut-être.  Et  ce  qui  est  sûr,  c'est  le  jeune  âge  de 
Mérengcre  en  ii88,  ce  qui  du  reste  ne  [)ouvait  empêcher  de  l'accorder,  ou  plutôt  de 
la  promettre  en  mariage. 

Le  texte  d'Ocampo  fixe  le  mariage  d'.\l[)honse  V'III  et  de  Leonor  en  iiGo 
(fol.  GCCLXxvii).  Il  y  a  là  une  erreur  évidente.  Quant  aux  manuscrits  1347,8817  et  x-l-Ci, 
ils  confirment  ce  que  je  dis  plus  haut  touchant  l'âge  respectif  d'Alphonse  Vlll  et  de 
Léonor  lors  de  leur  mariage.  Voici  le  texte  du  manuscrit  88 17  (fol.  208)  traduit  mot  pour 
mot  du  13^7  (fol.  3ç)2)  :  <(  Capitolo  <]  fala  do  casamenlo  delrey  don  afonso.  Agora  con- 
tarem?  como  foy  casado  ci  Rcy  dom  al'on.  mandou  faz'  suas  cortes  en  burgos.  c  forO 
y  ajûlados  todos  os  oTTïs  de  seu  scnorio  k  os  plados  s  oïïïes  boos  dos  conçellos 
c  ouuerO  todos  seu  acordo  en  hnu  q  poys  (j  el  Rey  auia  doze  anos  q  asaz  era  temp»  pa 
casar  c  en  viarollj  pedir  doua  leonor  lilla  del  Rey  de  Ingla  Ira  q  era  nina  de  IX  afios  . 
t  forn  mesegeyros  dous  obpos.  c  dous  rricos  ouïs.  0  el  Rey  de  Ingla  tra.  deulla  muy 
degrado.  s  fezollis  muyto  bem  r.  moyla  onrra.  z  ellos  vôêrOssc  cona  Infant  i)a  burg?. 
de  hu  forô  muy  bem  rreçebudos.  z  el  Rey  fezo  logo  y  suas  vodas.  muy  rricas  e  muy 
nobles,  de  todos  compli...intos.  Et  forO  y  moy las  gèles  de  caslela...  »  Le  i"  mai  1181 
(era  MCC,XV[IIf,  kal.maiij  u  anno  quinto  ex  quo  serenissimus  Rex  prefatus  A.  Con- 
chani  lidei  xptiane  subiugauit,  anno  primo  quo  Infanlalium  à  Rege  Ferrando  patruo 
suo  recuperavit  (cf.  note  suivante),  vice>simo  octavo  die  post  quam  natus  est  Burgis 
Rex  sancius...  >',  Alphonse  VIU  acconlait  une  terre  à  la  nourrice  de  Bérengère  el  à 
son  mari  (Memorias  para  la  vida  del  Santo  fiey  Don  Fernando  III  dadas  â  luz  por 
D.  Miguel  de  Manuel  Rodriguez,  Madrid,  1800,  p.  aig).  On  peut  admettre  sans  diffi- 
culté que  l'infante  avait  alors  de  dix  à  douze  mois  (dix  au  moins  puis(pie  son  frère 
Sancho  en  avait  un),  que  l'allailemcnt  était  terminé,  et  que  la  nourrice  retournait 
chez  elle.  La^nourrice  de  D'  Blanca  obtint  un  privilège  semblable  (|uinze  ou  dix-huit 
mois  après  la  naissance  de  la  princesse  (cf.  Bull.  Iiisp.,  t.  V,  1903,  p.  5);  celle  de 
Bérengère  fut  peut-être  plus  pressée. 

II.  â.  Berenguela,  Urraca  et  Blanca,  qui  naquit  le  4  mars  1188,  selon  Flôrez, 
lieynas,  t.  1,  p.  liii.  Sur  l'assertion  de  Mariana  qui  faisait  de  Blanche  l'aînée,  voir 
mon  Mariana  liislorien,  p.  20G  et  270.  Cf.  §  33,  note  2.  Flôrez  établit  aussi  qu'avant 
1189,  année  de  la  naissance  de  l'infant  Fernando  dont  il  est  question  aux  §§  i8-'>o, 
tous  les   fils  qu'Alphonse  VHI  avait  eus  de  Léonor  étaient  morts  (ibid.,  p.  iio). 


206  BULLETIN   HISPANIQUE 

12.  lam  tune  edificauerat  ciuitatem  famosani  et  opulentam  .s. 
plasenciam.  et  castrum  munitissimum  quod  dicitur  alarcô.  [...]Ac- 
quisierat  a  sarracenis'.  Incepit  autem  hedificare  uillam  que  dicitur 
alarcos2.  et  muro  nondum  consumato.  et  eiusdém  populatoribus  loci 
nondum  radicatis  mouit  guerram  régi  marroquitano,  cuius  regnum 

1 3.  I .  Anales  Toled.  I  (i  i84)  :  «  El  rey  D.  Alfonso  prendiô  Alarcon,  Era  MCCXXII.  » 
Cf.  j  10,  n.  '  ;  Rodrigue,  Vil,  27.  Pour  Plasencia,  voir  aussi  Rodrigue,  VII,  28.  Alarcon 
est  entre  Ciienca  et  Albacete.  —  Le  ms.  F.  iG3  de  la  Bibl.  Nac.  de  Madrid  (—  12  >3) 
contient,  entre  autres  écrits  d'Ambrosio  de  Morales,  un  article  intitulé  Fundacion  de 
Ptdsencia  (t  170),  sur  lequel  cf.  Barrantes,  Aparato  para  la  hisloria  de  Extremadura, 
t.  III,  p.  23.  Morales  y  a  copié  une  partie  du  privilège  do  fondation  inclus  dans 
un  privilège  d'Alphonse  X  le  confirmant.  D'autre  part,  ce  dernier  a  été  copié  intégra- 
lement par  Ascencio  de  Morales  dans  son  Inuenlario  gênerai  de  los  privilégias,  bulas... 
de  la  ciudad  de  Palencia,  formant  le  tome  VII  de  la  Coleccion  de  Privilégias,  bulas,  dana- 
clones  de  las  Iglesias  de  Espana  (cf.  Barrantes,  ib.,  p.  87),  conservé  à  l'Académie  de 
l'Histoire  et  portant  la  cote  C.  7,  est.  5,  gr.  i'.  On  trouvera  le  tout  p.  9  de  VHistoria 
y  Anales  de  la  ciudad  y  obispado  de  Plasencia.  jiaT  Fray  Alonso  Fernandez  (Madrid,  1627, 
folio),  d'où  il  a  été  reproduit  dans  les  Memorias  de  Mondéjar  (ap.  Vlll).  Les  copies 
d'Ambrosio  de  Morales  et  d'Ascencio  de  Morales  présentent  toutes  deux  quelques 
variantes  sans  importance  par  rapport  au  texte  publié.  Ascencio  avait  trouvé  le 
privilège  dans  l'Archivo  de  Plasencia.  11  note  que  «  es  este  Privilegio  original  escrito 
en  Pergamino.  Tiene  un  signo  rodado  pintado  de  los  colores  de  los  lilos  de  Plomo 
pendiente,  con  una  cruz  en  su  centro,  y  por  orla  estos  letreros  en  sus  circonfcrencias... 
Lo  que  va  rayado  por  vajo  (il  s'agit  des  mots  vnde...  aniniarum  et  sicut  diuidil  per 
illum  vadum  de  Alay:  (Mondéjar  Alar:a}  quad  est  in  Tagos  sicut  ilur  in  directum)  falta 
en  el  original,  roto,  y  \orrado  eu  muchos  partes,  y  se  ha  suplido  de  otra  copia  aulho- 
rizada  del  mismo  ■). 

12.  2.  Sur  la  rive  gauche  du  Guadiana,  à  une  lieue  à  l'ouest  de  Giudad-Rcal, 
selon  Madoz,  qui  fait  observer  :  1"  ([u'il  s'agit  là  d'une  reconstruction,  la  ville 
ayant  existé  antérieurement;  a°  qu'elle  n'existe  plus;  un  sanctuaire  qui  en  mar- 
quait l'emplacement  fut  détruit  lors  de  l'invasion  napoléonienne.  Voir  Gômez  de 
Arteche,  Geagrafia  histûrica-militar,  p.  GSg.  Rodrigue  écrit  Alarcuris  et  non  Alarcos  : 
il  l'identitiait  avec  la  Larcuris  de  Ptolémée.  Le  Bn'deker  signale  (p.  44'Jj  éd.  de  1908), 
une  église  de  Xueslrn  Scnara  de  Alarcos,  lieu  de  pèlerinage,  à  11  kil.  à  l'ouest  de 
Ciudad-Real  et  occupant  la  \  ille  d'Alarcos  détruite  en  1 1((.").  11  y  a,  en  cITet,  plutôt  deux 
lieues  qu'une:  voir  le  Mapa  itineraria  mililar  de  Espana  publié  par  le  Depôsilo  de  la 
guerra  (feuille  G5). —  Le  texte  d'Ocampo  (fol.  cccxcur)  diffère  beaucoup  de  celui 
de  Pidal  (S  1000)  touchant  les  mesures  prises  contre  les  Maures  (suite  du  passage  cité 
à  la  note  3  du  S  «o  ;  je  mets  entre  <  >  ce  qui  manque  dans  i3'i7):  «  r.  pobro  Aguilar 
de  Gampo  :  t  <  en  la  Estramadura  >  pobro  Bejar  r.  Plazençia  <  i-  Mon  ferrado 
c  Mirabel  e  Segura.  E  entre  tanto  por  no  qucdar  de  fazer  mal  a  los  moros  >  este  rey 
refizo  (i3't7  ■  Jho)  la  ordc  de  Satiago  t  dioles  jior  cabcva  la  villa  de  Ucles  c  dioles 
a  Ocana  t  a  otros  logares  de  ribera  de  Tajo  r.  dioles  Orcja  1;  Mora  c  otros  hereda- 
mientos  muy  buenos.  E  dio  a  la  ordc  d'Galatraua  Goryla  k  Macjda  o.Cogolludo  r.  otros 
heredamiëtos  muchos  por  (f  les  saco  de  pobreza  en  q  estauan.  i)0  q  enel  su  tiempo 
perdieron  a  (Jalatrava,  k  d'spues  la  cobro  este  mesmo  rey  por  guarda  de  su  tierra. 
c  fizoles  el  casticllo  de  \larcf>s.  »  Gomparcr  la  traduction  qu'en  donne  le  manuscrit 
8817  :  «  Et  poblou  aguillar  do  c;ipo.  c  plazença  r.  mOnt  fern.  ;.  murabel  r.  seg'a.  E 
ent*  tanto  non  «[dou  fazendo  muylo  mal  aos  ntouros.  Et  este  rrcs  J'ezo  a  ordem  d'San- 
liago  c  deulli  por  cabeça  a  vila  d'ocles.  r.  deullis  çorica  r  oufs  lugarcs  mojtos  on 
rribeyra  d'teio.  Et  deullis  out's  lugares.  r.  out°sy  orreya  c  moura  c  oufs  muytos 
h'daîTitos  p  qos  sacou  de  pobleza  en<j  eslauâ.  j)0  <[  eno  seu  lcmi)0  jxlcni  calatraua.  c 
d'poys  a  cobrou  este  rroy  mecsmo.  Kt  por  guardar  sua  frontoyra  fezo  laurar  o  casielo 
de  larcos  <>  (fol.  ^17).  La  phrase  «  E  dio  a  la  f>rden  de  (^alatrava...  >>  a  été  supprimée, 
ce  qui  transforme  toute  la  suite.  Remarquer  les  variantes  refizo,  d'une  j)art,  //';o  et 
fezo  de  l'autre.  Le  manuscrit  x-l-C,  pfiurtant  plus  voisin  ici  du  texte  d'Ocampo,  a 
aussi /i;ù  (fol.  120). 


CHRONIQUE    LAtllSE   DES   ROIS    DE    CASTlLLE  2  57 

tune  florebat  et  in  iiirtute  et  gloria  maxima  a  uicinis  regibus  tinnebatur. 
Misit  autem  dnus  rex  castelle  archiepiscopum  toletanum  dnum 
m'num"  felicis  recordationis.  nirum  discretum  benignum  et  largum 
qui  adeo  ab  omnibus  diligebatur.  riuod  pater  omnium  putaretur. 
Duxit  autem  idem  archiepiscopus  secum  uiros  generosos  et  strenuos. 
et  multitudine''  militum  et  peditum  cum  quibus  uastauit  magnam 
partem  terre  maurorum  cismarine  spolians  eam  multis  diuiciis  et 
infinita  multitudine  vacarum  peccorum  et  iumentorum^.  Quo  audito 
rex  marroquitanus  tercius  .s.  ab  abdelmun  de  quo  supra ^  facta  est 
mentio  ingemuit  tactus  dolore  cordis  intrinsecus  et  statim  exium" 
marrocos.  et  congregata  infinita  multitudine  militum  et  peditum  mare 
transium''  cordubam  adiit  et  portum  de  muradal  transiens  cum 
magna  festinancia  in  planiciem  castri  quod  nunc  dicitur  salua  tierra  J 
se  extendit.  Gloriosus  autem  rex  dônus  alfonsus  audito  aduentu 
predicti  mauri  .s.  almira  momilim.  sic  enim  nominabantur  reges 
marroquitani.  mandauit  uassallis  suis,  ut  ipsum  cum  omni  festi 
(fol.93)nancia  sequerentur.  Ipse  uero  tanquam  leo^  fremens  etrugiens 
ad  predam  precedebat  suos.  et  cum  nimia  celeritate  peruenit  usque 
toletum.  Vbi  diebus  aliquantis  moram  fecit  expectando  magnâtes  terre 
et  nobiles  uasallos  et  multitudinem  populorum  qui  eum  sequebantur. 
Inde  castramouit  uersus  alarcos  et  ibidem  castrametatus  est  firmis- 

0  1  Abella  :  Martinum  [Lopez  de  Pisuerga,  archevêque  de  Tolède  de  lllU  à  1208"; 
cf.  Vallejo,  Memorias  i  dtsertactottes  para  la  historla  de  Totedo  (ms.  de  la  Real  .\cademia). 
La  dale  de  llil't  marquée  par  Garas  est  erronée,  —hj  Sic.  —  ri  eriiiit.  —  d)  transiuit. 

12.  3.  Dans  Rodrigue  (V^ll,  28)  et  la  Chronique  générale,  qui  le  traduit  (S  looi), 
on  trouve  un  éloge  de  cet  archevêque  et  un  exposé  de  son  expédition,  mais  dans  un 
style  tout  oriental  et  qui  se  retrouve  d'ailleurs  dans  les  chapitres  2G-27  et  29  de 
Rodrigue.  Celui-ci  doit  avoir  eu  pour  ces  faits  une  source  toute  spéciale,  à  moins 
qu'il  n'ait  eu  recours  à  ce  pathos  quand  il  voulait  être  sublime:  il  a  su  pourtant 
l'être,  sans  cela,  dans  son  récit  de  la  bataille  de  las  Navas  de  Tolosa.  Salazar  de 
Mendo<;a,  dans  Origen  de  las  dignidades  seglares,  nous  dit  que  ce  fe  don  Martin  Lopez 
de  Pisuerga,  Uamado  el  Magno,  Arçobispo  de  Toledo  »  fut  nommé  chancelier  en  i  -'.où, 
du  vivant  de  Diego  Garcia,  qui  l'était  et  qui  devait  le  rester  toute  sa  vie:  l'archevêque 
n'avait  que  l'expectative,  et  il  mourut  avant  celui  auquel  il  devait  succéder.  Le 
successeur  de  Diego  Garcia  fut  Juan,  évèque  d'Osma  (cf.  S  65  et  73). 

12.  i-  Cf.  §  G.  A  Abd-el-Moumin,  qui  s'empara  du  Maroc  en  n46,  avait  succédé 
son  fils  Abou-Yacoub-Yousof  (i  iG3),  qui  prit  Guenca  et  mourut  à  la  suite  du  second 
siège  de  Sanlarem  (ti8i).  Celui-ci  eut  pour  successeur  son  fils  Abou-Vousof-Yacoub 
.\l-Mançour,  le  vainqueur  d'Alarcos  (ii()5).  D'après  Rodrigue,  celui-ci  était  frère 
d'Abou-Yacoub.  Cf.  §  18,  note  7.  Mais,  selon  Dozy,  c'était  son  fils  (^Recherches,  t.  11, 
p.  452,  4Gi).  Lafuente  ne  précise  nulle  part,  mais  il  a  dû  accepter  l'opinion  de  Rodri- 
gue, puisqu'il  fait  d'Abdelmumen  Vahuelo  du  vaincu  de  las  Navas  (t.  111,  p.  119)-  Le 
Chron,  Lusit.  (sub  fine)  fait  bien  du  reste  de  Jacob  Abenjuceph  le  fils  de  Juceph  Abenjacob, 
et  il  paraît  fort  renseigné  sur  les  princes  arabes,  quoique  dans  l'addition  finale  on 
confonde  ce  Jacob  avec  le  vaincu  de  las  Navas. 

12.  5.  Salvatierra,  près  de  Calatrava  la  Nueva  :  siège  principal  de  l'ordre  de  Cala- 
Irava  après  la  défaite  d'Alarcos.  Noire  auteur  ne  dit  pas  un  mot  des  origines  de  cet 
ordre,  sur  lesquelles  voir  Rodrigue,  Vil,  li. 

12.  6.  Même  expression  dans  Luc,  p.  loS,  1.  i,  à  propos  d'Alphonse  Vlll  de 
Castille,  et  p.  109,  1.  i,  à  propos  d'Alphonse  de  Léon. 


358  BULLEtlN    HiSPAMQlE 

simum  tenens  propositum  quod  ex  post  facto  conipaniit.  congredi 
cum  almiramolï  supradiclo  si  transiret  locum  qui  dicitur  el  congoslo: 
iiersus  alarcos.  iibi  uidebatur  principium  regni  caslellc.  Malcbat 
etenim  iiltam  suam  et  regnum  exponere  tanto  discrimini.  et  mittere 
iioluntali  dei  pugnando  contra  supra  dictum  regem  mauronmi  qui 
potentior  et  dicior  sarracenis  omnibus  habebatur.  quam  suslinere 
quod  idem  rex  regnum  eius  intraret.  per  spacium  quantumcumque. 
Propler  hoc  et  idem  gloriosus  rex  castelle  noluit  expectare  regem 
legionenscm  qui  ibatin  auxilium  eius.  agens  iam  in  parlibus  lalauereS 
licet  hoc  consultum  fuisset  ei.  a  quibusdam  uiris  prudentibus.  et 
rerum  bellicarum  expertis.  Démens  igitur  dictus  maurus.  s.  almira- 
momelim  ad  locum  qui  dicitur  congosto  inter  castrum  quod  dicitur 
salua  tierra  et  alarcos  ibidem  castra  melatus  est. 

i3.  Ouod  audiens  gloriosus  rex  castelle  mandauit  omnibus  homi- 
nibus  suis  ut  summo  mane  in  campum  prodirent  armati  contra  sepe 
dictum  regem  maurorum  pugnaturus".  Credidit  siquidem  quod  idem 
rex  maurorum  eadem  die  uenturus  esset  ad  prelium.  Mane  igitur 
facto  in  campum  prodeunt  castellà''  pugnare  i)arali  si  hoslis  esset 
in  quem  tela  uibrarent.  Mauri  uero  quieuerunt  illa  die  se  ad  diem 
alteram  préparantes  uolentes  et  hostes  suos  sic  eludere  ut  illa  die 
fatigali  armorum  pondère  et  siti  in  die  altéra  minus  apti  bello  reperi- 
rentur.  Quod  et  factum  est.  Predictus  namque  gloriosus  rex  castelle  et 
exercilus  eius  cxpectantes  hostem  in  campo  a  summo  mane  usque 
post  meridiem  pressi  pondère  armorum  et  siti  reuersi  sunt  in  castra, 
credentcs  quod  rex  maurorum  non  auderet  pugnare  cum  eis.  Idem 
uero  rex  maurorum  preccpit  suis  ut  circa  mediam  noctcm  se  pararent 
ad  bellum  et  summo  mane  in  campo  in  quo  rex  castelle  precedenti 
die  steterat.  subito  comparuerunt.  (Tactus  est  tumultus  in  caslris 
xpianorum.  et  quod  solet  fréquenter  accidere.   iuiprouissa  stuporem 

[ I  hostibus  pariter  et  timorem.  Exeuntes  igitur  de  castris  subito 

et  minus  ordinale  in  campum  prodeunt.  congrcdiuntur  cum  mauris 
in  prima  xpianorum  acie  magni  uiri  ceciderunt.  Ordonius  garsias 
de  roda  et  fralres  sui.  Petrus  roderici  de  guzman.  et  rodericus 
sancii  gêner  eius  et  alii  qm  pres"^'.  Yagabanlur  arabes  in  perniciem 

a)  Sic.  —  bi  cnstellanl.  —  c,  quidam  plurvs?  H.\I  .  (/uam  plurcs. 

n.  7.  L'itiiicrairo  du  roi  maure  est  donc  parfaitement  indiqué:  Cordonc,  le 
port  de  Muradal,  Salvatierra,  Kl  Con^rosto,  tandis  (lu'Alphonse  venait  l'attendre  à 
Alarcos.  .Selon  [.afiicnte  (t.  III,  p.  lOi),  Al-Mançour,  pour  arriver  devant  Salvatierra, 
aurait  traversé  la  cordillère  de  Soniosicrra  ;  mais  la  cordillère  de  Somosierra  fait 
partie  île  la  Sierra  de  (Juadarrama  et  non  de  li  .Sierra  Morena.  —  lit  Congosto,  entre 
.Salvatierra  et  Alarcos  (comme  il  est  dit  plus  loin). 

lî.  8.  CJ.  Luc  (p.  loS,  I.  i(j),  qui  dit  :  «  licet  Rex  legionensis...  iam  esset  Toliîli.  f 

i3.  I.   Le  Chr.  flunimbriçcnse  cum|)te,  parmi   le?   inorls,  «  Ires  Episci.)pi,  videlicet 

Abilensis,  Sccf>biensis,  &  Scgonlinus,  vV  Magister  Gon/.  Vcnegas,!.^;  Ilodcricus  Sancii  ». 

Ce  dernier,  comme  on  voit,  est  aussi  nommé  dans  notre   Chronique.    Ilcrciilano 


CHROMQLE    LAT1>E    DES    ROIS    DE    CAStiLLE  sÔQ 

populi  xpiani.  |  sagitarum  infinita  mullitudo  de  faretris  parcorum 
evlracta  uolat  per  aéra  et  in  incerlum  misse  sagile  cerla  infligunl 
vtilnera  xî5ianis.  Piignalur  ulrlque  potenter  liumani  sanguinis  dies 
prodiga  mauros  miltit  ad  carlhara"  xpianos  Iransmiltit  ad  eterna 
palacia.  Kex  nobiiis  et  gloiiosus  uidens  suos  in  bello  sucumbere 
processil  in  antea  et  in  medios  hosles  prorumpens  uiriliter  multos 
mauros  dexlra  leuaque  cum  iliis  qui  ei  assistebant  prosternit. 
Videntes  autem  sui  qui  ei  familiarius  assistebant  quod  infinitam 
multitudinem  maurorum  sustinere  non  possent  cum  iam  multi  de 
suis  occubuissent  in  bello.  Durauerat  enim  bellum  longo  tempore  et 
incaluerat  sol  in  meridie  in  feslo  sancle  marine  supplicauerunt  ci  ut 
exiret  et  uitam  suam  seruaret.  Quum  iratus  uidebatur  dîTs  deus 
populo  xpiano.  Noiens  autem  eos  audire  malebat  gloriosa  morte 
uitam  finire  quam  uictus  de  bello  recedere.  Sui  iiero  intelligentes 
periculum  Iminere  toti  ispanie  ipsum  de  prelio  quasi  inuictum''  et 
renitentemeduxeruntz.  Venitergo  toletum  cum  paucis  militibus  dolens 
et  gemens  de  tanto  infortunio  quod  acciderat.  Didacus  lupi  de  uizcaya 
nobiiis  uasallus  eius  recepit"^  in  Castro  de  alarcos  ubi  obsessus  fuit  a 
mauris.  scd  per  gratiam  dei  qui  eum  ad  grandia  reseruabat  datis 
quibusdam  obsidibus  euasit  et  sccutus  regem  post  aliquantos  dies 
toletum  aduenit^.  Prediclus  rex  maurorum  expolia  diripuit.   castra 

a'  larlhara.  —  In  cl  liés,  mais  le  sens  veiil  évidemment  iiiHituin.  —  cj  Abel  a:  «defsl 
forle  se  ». 

l'identifie  avec  Valcaide  de  Silves  (t.  il,  p.  54,  08,  7O;  à  l'app.  M,  auquel  il  renvoie, 
il  a  fait  des  modifications  dans  sa  'A'  édition,  et  le  nom  de  U.  Sanchez  n'y  ligure  plus), 
peut-être  un  bâtard  de  .Sanche  de  Portugal  {ib.,  p.  gS);  en  tout  cas,  d'après  notre 
texte,  le  gendre  de  Pedro  Rodriguez  de  Guzmân.  Celui-ci,  neveu  de  Fernân  Ruizde 
Castro  (voir  le  Livra  das  Linhagens  do  conde  D.  Pedro,  p.  36O  et  272),  fut  encore, 
d'après  notre  Chronique,  le  père  de  Thibaut  de  Hlazon,  qui  vint  du  Poitou  pour 
prendre  part  à  la  croisade  contre  les  Maures,  en  1312,  et  fut  un  des  rares  ultramon- 
tains  qui  restèrent  jusqu'au  bout  avec  Alphonse  \  III.  —  (^)uant  à  Ordoiiô  (iarci'ez  de 
Roda,  je  ne  le  vois  pas  nommé  ailleurs.  «  Roda,  que  es  Roa,  pueblo  bien  conocido  a 
una  Jornada  de  Segovia,  silo  a  los  faldas  deSomosierra....  ))(Nûriez  de  Castro,  Coronica 
de  los  S''^"  Reyes  de  Caslilla,  p.  190).  —  Le  «  magister  Gonzalo  »  nommé  par  le  Chr. 
Conimbricense  est  Gonzalo  V'iegas,  grand-maître  de  l'ordre  d'Evora  (Herculano,  t.  Il, 
p.  70).  Les  Portugais  ne  s'étaient  pas  désintéressés  de  cette  croisade. 

l'S.  2.  Cf.  Rodrigue  (VII,  29),  où  une  phraséologie  ampoulée  remplace  la  descrip- 
tion de  la  bataille.  On  y  voit  pourtant  que  le  roi  fut  emmené  de  force  par  les  siens 
hors  de  la  mêlée.  Luc  dit  simplement  :  «  Cesserunt  nostri  pugnœ  »,et  que  le  Mirama- 
molin  avait  avec  lui  Pedro  Fernândez  de  Castilla  (p.  108,  I.  20).  La  Chronique  géné- 
rale traduit  simplement  Rodrigue  (<l  1002).  Pour  la  date  de  celte  bataille  Rodrigue 
marque  :  <<  XV  Kalendas  .\ugusti  »,  soit  le  18  juillet  (i  19.")),  qui  est  bien  le  jour  de 
Sainte  Marine,  indiqué  par  notre  auteur. 

i.î.  3.  Ni  Luc, ni  Rodrigue,  ni  les  textes  de  Pidal  et  d'Ocampo  ne  signalent  le  rôle 
de  Diego  Lôpez  en  celte  circonstance.  L'épisode  se  trouve  raconté  avec  plus  de  détails 
dans  l'Historia  kisfjanica  de  Ruy  .Sânchez  (III,  3^;  et  le  Valerio  de  las  Historias  de  Diego 
Rodriguez  de  Almella  (lib.  v'i,  tit.  VI,  cap.  IV;  cf.  lib.  VII,  lit.  VI,  cap.  Vl).  Ces 
deux  auteurs  se  sont  inspirés  d'un  chapitre  qu'on  trouve  dans  la  rédaction  de  la 
Chronique  générale  que  représentent  le  manuscrit  portugais  de  l'Académie  des 
Sciences  de  Lisbonne  et  celui  de  Paris.   Voir  l'appendice.  Si  l'on  en  croit  le  texte  de 


260  BULLETIN   HISPANIQUE 

quedam   cepit.    s.    lurrem    de  guadalferza.    Malagon.    Beneuentum 
Calatrana.  Alarcos.  caracuel.  et  sic  in  terrani  suam  reuersus  est  4. 

i4-  Rexuerolegioiî  qui  ibatinauxiliuni  régis  castelle  ucnit  toletum  et 
consilio  quorumdam  satcUitum  sathane.  conuersus  est  in  arcum 
puu^"'  querens  occasiones  quibus  discederet  ab  amico.  et  de  amico 
factus  est  crudelissimus  ininicus''  nempe  manebat  alta  mente  repos- 
titum'^a  quod  ei  contigerat  in  curia  de  qua  supra  facta  est  mentio  in 
carrione  celebrata.  Recessit  igilur  de  toleto  a  rege  glorioso  indignans 
quia  quedam  castra  que  petierat  ei  dare  noluerat^.  graculabundus'  et 
gaudens  de  infortunio  quod  accidcrat  castellanis.  Confederatus  est 
statim  régi  marroquitano.  et  accepta  pecunia  ab  eodem  et  mullitudine 
militum  armatorum  guerram  mouit  régi  castelle.  ita  quod*^  anno 
sequenti  eo  tempore  quo  reges  soient  ad  bella  procedere  cum  almira- 
momelim  terram  que  est  ultra  serram  uastart.  et  to(fol.  94)letum 
ciuitatem  diebus  multis  quasi  obsessam  tenêf*.  idem  rex  legioifi 
intrau  in  regnum  castelle.  per  terram  de  campis  cum  maurorum  mul- 

aj  prauum.  —  b/  Sic.  —  cj  Sic.  —  dj  Sic.  —  ej  Abella  «forle  itaque.  »  :  mais  celle  correc- 
tion proode  de  préjugés  puristes. 

la  Chron.  gén.  édité  par  Ocampo,  Diego  Lôpez  aurait,  dans  la  bataille  même, 
combattu  assez  mollement:  «Edô  Diego  seiior  de  Bizcaya  e  los  lijos  dalgo  no  cstanan 
pagados  del  rcy  porque  dixera  que  tan  buenos  eran  los  cauall'ros  enlas  villas  d'ia 
Estreniadura  como  los  fijos  dalgo  e  ta  bien  caualgâtes  :  q  fazic  tan  bio  armas  como 
cllos  z  porOJe  non  le  ayudarO  en  aqlla  lid  como  deuien,  ca  non  eran  sus  coraçones 
dellos  conel  rey,  porq  touieron  q  les  dixera  gran  desonrra»  (fol.  cccxciii).  Même 
fond  dans  les  manuscrits  8817  et  1367  (fol.  ho\).  11  y  a  peut-être  un  souvenir  et  une 
contrepartie  de  cette  maladresse  royale  dans  les  llatteries  que,  selon  le  texte  de 
Pidal,  p.  693,  Alplionse  Vlll  adressait  séparément  à  ses  diverses  troupes  avant  la 
bataille  de  las  .Navas.  —  Cf.  S  s'i,  note  3.  Sur  Diego  Lôpez  de  Haro,  voir  le  Livro  das 
Linhagens  do  conde  D.  Pedro.  Fils  de  don  Lope  de  Biscaya,  «  o  que  chamarom  de 
Nagera  »  et  de  doua  Aldonza  Uodriguez,  fille  de  llodrigo  de  Castro  (cf.  §  9,  note  2, 
et  S  65,  note  4j,  le  Livro  l'appelle  Diego  Lopez  de  Fenar,  «  o  que;  chamarom  despois 
Diego  Lopez  o  boo:  e  o  porque  Ihe  chaniaron  de  Fenar  foy  por{iue  lidou  lii  com  os 
mouros  e  foy  comtra  elles  muy  beadamte.  Este  dnm  Diego  o  boo  foy  casado  com 
dona  Maria  Manrriquoz,  fillia  do  condc  dom  Manrriqucz  de  Lara...  »  (p.  269).  <<  Don 
Diego  Lopez  de  Haro,  decimo  senor  de  Vizcaya,  llamado  el  Bueno,  Alferez  mayor  de 
el  lley  (.\lfonso  el  Noble).  Tuuo  en  feudo  de  honor  la  ciudad  de  Nagera,  y  toda  la 
lUoja;  las  tierras,  y  lugares  de  Bureua,  Trasmiera,  Asturias  de  Santillana,  la  ciudad 
de  Soda,  y  la  mitad  de  Burgos...  »  (Salazar  de  Mendo^a,  fol.  /i7^). 

i3.  .'(.  H  y  a  déjà  une  allusion  à  ces  faits  à  la  lin  du  s  0.  —  C.uadalerza,  près  de 
Castillejo;  MalagiJn,  à  20  kilomètres  au  nord,  Benavente,  à  i,j  kilomètres  à  l'ouest,  et 
Caracuel,  à  20  kilomètres  au  sud  ouest  de  Ciudad  Beal.  Madoz  signale  les  restes  du 
château  fort  de  Caracuel,  ainsi  que  celui  de  Guadalcrza. 

l'i.  I.  Psaume  LXXVII,  v.  h-]  :  «  conversi  sunt  in  arcum  pravum.  » 

li.  2.  Enéide,  I,  v.  2')  : 

...  manet  alla  mente  repostum... 
Cf.  S  18,  note  /|. 

li.  3.  Luc  n'indique  pas  le  motif  de  la  querelle,  non  plus  (juc  Kodrigue  (Vil,  3o). 
—  Selon  Rodrigue,  Alphonse  de  Léon  n'avait  joué  (ju'une  comédie  en  faisant  sem- 
blant de  \onir  au  secours  de  son  cousin.  Notre  auteur  ne  va  pas  si  loin,  mais  il  est 
d'accord  avec  Rodrigue  pour  dire  que  le  roi  de  Li'on  se  lit  l'allié  des  Maures. 

l'i.  '1.  Cf.  Rodrigue,  \  II,  3o.  Luc  fait  à  peine  allusion  à  celle  agression  (p.  108, 
1.  3'i;,  et  ni  lui  ni  Rodrigue  ne  disent  (|u'Al{ihotise  de  Léon  prit  part  au  blocus  de 
Tolède.  Sur  l'expédition  d',\l-.Man(;our  cette  année-là  (119(3),  cf.  i  i5,  noie  7. 


i 


CHRONIQUE    LATIME    DES    ROIS    DE    CASTILLE  261 

titudine  supradicla.  Qui  uelud  inimici  crucis  xi  multa  enormia 
contiimeliam  et  dedecus  xpiane  religionis  in  ecclesiis  et  eccle- 
siastica  si-  lectile"  comitebant.  peruenit  autem  usque  carrionem  ubi 
uisus  fuit  purgarc  dedecus  quod  sibi  credebat  illatum  quando 
manum  régis  castelle  fuit  osculatus».  Eadem  tempestate  rex  nauarre 
sancius  qui  régi  castelle  altinebat  in  secundo  gradu  consanguinitatis  ex 
ulraque  parte'j  hedificauit  castrum  quoddam  iuxta  uineas  de  locronio 
quod  uocauit  coruû:  Regnum  et  castelle  cepit  ex  illa  parte  uastare. 
cuni  ullam  iustam  causam  belli  crederetur  habere.  Sic  igitur 
xpiani  cum  mauris  colligati  colligatione  impietalis  in  désola lionem 
régis  castelle  conspirasse  uidebanlur  mala  quecumque  poterant 
atrociter  tolo  regno  undique  inferentes  adeo  quod  nusquam  in  toto 
regno  ul' angel' ''  unus  inueniri  posset.  in  quo  quisquam  securus  esset. 
Ignis  ascensus  uidebatur  in  furore  domini  et  elationem  animi  si 
quam  conceperat  rex  nobilis  ex  gloria  précèdent!  deprimere  uidebatur. 
ut  intelligeret  rex  prudens  et  nobilis  quani  regnum  filiorum  homi- 
num  in  manu  dei  est.  et  cuicumque  uoluerit  dabit  illud. 

i5.  Rex  autem  gloriosusutpote  qui  non  multumfrangebaturaduersis 
nec  nimis  extollebatur  in  prosperis  accinxit  se  iiiriliter  ad  defenden- 
dum  regnum  suum.  ponens  spem  suam  et  fidiiciam  in  uirtute  domini 
nostri  ihù.  x'.  cuius  fîdem  semper  firmissime  credidit  et  tenuit.  et 
contra  omnem  hereticam  prauitatem  défende'.  Ea  tempestate  sancia 
regina  aragon  amica'' eiusdem  régis  castelle  fdium  suum  petrum 
regem  aragonum  adulescentulum  et  regnum  eius  tenebat  in  manu 
sua.  Post  bellum  siquidem  de  alarcos  non  multo  tpr.  Alfonsus 
rex  aragonum  filius  comitis  barcinonie  paler  predicti  régis  pétri 
uiam  ingressus  est  uniuerse  carnis  '.  de  quo  supplicabantur'  homines 

a)  supclleclile.  —  bj  uel  angellus.  —  cj  défendit.  —  cl)  aimia.  —  ej  Abella  :  «  forte  5i(5- 
picabanturo. 

l'A.  5.  Cf.  §  II. 

li.  6.  Sancho  Sânchez,  el  F//er/e  (iigi-iaSi),  était  fils  de  Sancho  el  Sabio  (qui 
était  frère  de  Blanche  de  Navarre,  mère  d'Alphonse  V  III)  et  de  Sancha,  fille  d'Al- 
phonse VII  et  de  Bérengère  (cf.  >  8,  note  i,  et  S  10,  note  4): 

Garcia  Ramirez  de  Navarra  (i  i34  - 1  i5o) 


D*  Blanca  de  Navarra,  Sancho  el  Sabio, 

épouse  Sancho  III  de  Castilla  (i  t5i).  épouse  Sancha,  sœur  de  Sancho  III 

I  de  Castilla  (i  i53). 

Alfonso  VIII.  I 

Sancho  el  Fuerle  . 
14.7.  J'ignore  quel  est  ce  château  bâti  près  des  vignobles  de  Logrofio  et  appelé 
Corvo  (ou  Ciiervo.^).  Il  n'en  est  ciueslîon  ni  dans  Madoz,  ni  dans  le  Dicc.  geogr.-hist. 
de  Espaha,  por  la  R.  Acad.  de  la  Ilist.,  t.  III  (Rioja  et  Logrono,  par  Govanles),  et  il  ne 
figure  pas  sur  Y  Atlas  do  Coello.  Rodrigue  (VII,  3o)  dit  que  Sanche  dévasta  Soria  et 
Almazân. 

i5.  I.  ft  Muriô  el  Rey  D.  Alfonso  de  Aragon  en   abril,  Era  MCCXXXIV  »  (Anales 
Toledanos  Ij. 

Bull,  hispan.  t8 


262  BULLETIN   HISPANIQUE 

quod  malum  quantumcumque  poterat  machinabatur  in  dampnum 
régis  regni  castelle.  Predicta  uero  regina  diligebat  regem  castelle 
super  omnes  homines  et  in  uitam  mariti  sui.  ita  quod  propter  hoc 
eidem  uiro  suo  erat  non  modicum  odiosa.  Nata  igitur  opportunitale 
ignis  amoris  qui  aliquantuluni  latuerat  in  pectore  rcgine  in  uita  uiri 
sui  propter  metuin  eiusdem  erupit  in  flammam  manifestam  et  filium 
suum  confederauit  firmissime  régi  castelle  procurans  tanquam 
prudens  abigail  qualiter  et  potenter  régi  castelle".  Vt  autem  expe- 
dicius  rex  aragonum  posset  subuenire  régi  castelle  quum  paupertate 
laborauerat  aliquanta  multam  sumam  pecunie  donc  recepit  a  rege 
castelle'^.  Predictus  igitur  rex  petrus  iam  adolescens  factus  consilio 
prudentis  |  matris  comitatus  nobilibus  uassallis  suis  uenit  ad  regem 
castelle  et  eidem  inseparabiliter  adhesit  quamdiu  guerra  durai! . 
habito  igitur  prudenti  consilio  regcs  castra  metati  sunt  iuxta  auilam 
in  loco  sanissimo  et  frigida''.  in  estate  média  qui  uulgo  palomera3. 
unde  si  opus  esset  commode  subuenire  possent  suis  qui  erant  ultra 
serram  et  defendebant  uillas  et  castra  contra  regem  marroquitanum 
et  illis  qui  erant  in  terra  de  campis.  Sic  et  in  medio  constituti 
timebantur  ab  hostibus  utrinque.  nec  iicebat  eis  uagari  passim 
sicut  uellent.  Comperlo  uero  quod  rex  marroquitanus  reuertebalur 
in  terram  sua  m.  mouerunt  castra  uersus  regem  legioîï  premitentes 
uirum  nobilem.  prudentem  et  strenuum.  fernandum  roderici  de 
aluerrazim''  cum  multitudine  militum  qui  detincrent  regem  legioii. 

a)  Manque  un  verbe.  —  h)  f'riyidu;  siippriiner  le   point   qui   suit. 

i5.  2.  Luc  ne  dit  rien  de  celle  alliance  de  Pierre  d'Aragon  avec  Alplionse  VIII.  Ni  Un 
ni  Rodrigue  (Vil,  ?>o),  qui  la  mentionne  :  «  ...  fd'derato  sibi  fideli  amico  Petro 
Rege...»,  ne  font  allusion  à  l'atreclion  qu'Alphonse  avait  inspirée  à  sa  tante.  Je  crois 
qu'il  faut  l)ien  corriger  plus  haut  ainica  en  ainita  :  Sancha  était  lille  d'Alphonse  VII 
et  de  Rica  (Fkjrez,  lieynas,  t.  I,  p.  29O;  cf.  Anales  Toled.,  année  i'>o8,  et  Chron.  de  San 
Juan  do  la  Pena,  p.  iji.i),  tante  par  conséquent  d'Alphonse  \  III.  L'afl'ection  qu'elle 
portait  à  son  neveu  était-elle  coui)able.'' C'est  ce  que  paraît  bien  dire  notre  auteur. 
Elle  aurait  donc  été  à  la  fois  amita  cl  arnica.  Alphonse  était  né  le  1 1  nov.  1  i.ï5  (cf.  la 
note  I  du  S  9);  son  grand  père  avait  épousé  Rica  en  1  iSa  {ibid.,  p.  294).  Le  neveu  pou- 
vait donc  avoir  à  peu  près  le  même  âge  que  la  tante;  il  était  peut-être  plus  Agé 
qu'elle,  puisqu'elle  ne  fut  mariée  (pi'en  janvier  117!  (ibid.,  p.  2<)(')),  et  elle  dut  l'être 
dès  qu'elle  fut  nubile.  Il  avait  alors,  lui,  dix-huit  ans.  C'est  lui  qui  la  conduisit  en 
Aragon  lorsqu'elle  épous;i  Alphonse  II.  11  est  bien  possible  que  ce  roman  étrange, 
auquel  aucun  autre  texte  ne  fait  allusion,  à  ma  connaissance,  soit  une  fabh;  dans  le 
genre  de  celle  des  amours  d'Alphonse  VIIL  avec  la  juive  de  Tolède,  fable  dont  il  n'y 
a  rien  dans  notre  chroni(|ue,  et  contre  laquelle  se  sont  élevés  Mondéjar  (Mcniorias, 
p.  68),  Flôrcz  {Reynas,  t.  I,  p.  /|23),  et  tout  récemment  le  P.  Kita  (art.  cité  au  §  17, 
note  2).—  On  sait  (|ue  Pedro  ne  s'entendait  guère  avec  sa  mère  (Cf.  Garibay,  \II,  27). 

10.  3.  Cf.  Rodrigue  (VII,  .'.o)  :  «  ...  Rex  Castcllac  et  Rex  Aragonum  iuxta  Abulam 
in  monte  Palumbaria  morabantur.  »  Chron.  générale,*;  ioo3  :  "  çcrca  Auila,  en  cl 
mont  de  la  Palonicra.  »  Madoz  cite  une  localité  appelée  Palomarcjo,  à  l'ouest  il'.Vviia 
(Avila,  p.  1O8,  et  Marli  Herrerof  ;  la  même  sans  doute  que  le  Pnloinar  qui  figure  sur 
l'Atlas  de  Coello  (Aviln),  à  7  ou  8  kil.  à  l'ouest  de  cette  ville. 

1.^.  .'1.  II  y'esl  question,  ni  dans  Luc  ni  dans  Rodrigue,  de  Fornan  Ruiz  ou  Hernân 
Rodrigue7.(dcA/.agra)dcuxièmcscigncurd'AII)arracin, sur  lequel  voir  Madoz,  1. 1,  p.  .loi. 
Mais  VEstoria  de   los  Codas  {Duc.  incd  ,  t.  LWVVlll,  p.  i5(.)dit  à    propos  des  villes 


CHRODIQUE    LATINE    DES   ROIS    DE   GASTILLE  263 

et  exercitum  eius  in  regno  castelle  ne  libère  possent  ad  propria 
remearc.  Presciuit  autem  hoc  rex  legionensis  et  cum  nimia  feslinancia 
reuersus  est  in  terram  suam.  ita  quod  dictus  uir  nobilis.  f.  roderici 
non  potuit  eum  consequi  in  regno  castelle.  sed  tamen  persécutas 
est  eum  usque  in  regnuni  suum.  Insecuti  uero  reges  cum  exercilu 
suo  milites  quos  premiserant  intrauerunt  in  regnum  légion,  uastantes 
undique  totam  terram,  utpote  que  non  habebat  defensorem.  Expu- 
gnauerunt  et  ui  ceperunt  opidum  quod  dicitur  castrum  uiride. 
ubi  captus  fuit  comes  fernandus  de  cabrera,  et  aluarus  pelagii  uir 
nobilis  et  petrus  ouarii.  et  alfonsus  armillez.  portugalen  quidam 
nobilis.  cum  omnibus  militibus  suis 5.  Dein  procedentes  ulterius 
apropinquauerunt  beneuento  ubi  erat  rex  legioiî  cum  mauris 
et  xpianis  uasallis  suis,  et  peruenerunt  usque  astoricaz".  quidam 
et  usque  rauanal.  Alii  uero  usque  in  ingressum  terre  que  dicitur 
bereso.  Sic  igitur  uastantes  regiones  circuadiacentes  reuersi  sunt 
legionem  et  obsidenles  castrum  iudeorum  ui  ceperunt  illud  et 
munientes  retinuerunt  et  sic  cum  honore  magno  et  preda  multa 
reuersi  sunt  in  regno  castelle 6.  Anno  sequenti.  s.  tercio  post  bellum 

aj  astoricam  [s  pour  5). 

assiégées  par  le  roi  maure  en  1 196  :  «  En  todas  estas  cercas  fue  dentro  Ferrand  Ruiz, 
sennor  de  Albarazin,  non  por  su  uasallo,  mas  por  ruego  de  su  muger  donna  Teresa, 
que  era  de  Caslilla,  con.  c  c.  caualleros  â  su  costa  et  â  su  mision.  »  Les  seigneurs 
d'Azagra  ne  reconnaissaient  d'autres  suzerains  que  la  Vierge  Marie,  à  laquelle  était 
dédiée  l'église  cathédrale  d'Albarracfn,  et  dont  l'image  figurait  au  revers  de  leur  sceau 
(cf.  Ferrân  de  Sagarra,  Segells  del  temps  de  Jaunie  I,  Barcelona,  191 2,  p-  27  :  sceau  de 
Pero  Fernândez  de  Azagra,  i-îiC).  Cf.  Salazar  de  Mendoça,  fol.  /jg^'.  Zurita  (Anales,  II, 
32,  et  Indices,  p.  78)  place  dans  l'année  1172  une  alliance  d'Alphonse  \  111  et  du  roi 
Alphonse  d'Aragon  contre  Pedro  Ruiz,  premier  seigneur  d'Albarracin  et  frère  de 
Fernân  Ruiz;  cette  alliance  paraît  a\oir  dégénéré  en  brouille,  et  manqué  son  objet. 
Elle  aurait  été  renouvelée  en  118C  (Zurita,  Anales,  11,  ii,  et  Indices,  p.  82).  On  voit 
par  notre  Chronique  que  le  successeur  de  Pedro  Ruiz  devint  l'allié  du  même 
Alphonse  VIII  et  de  Pierre  d'Aragon;  mais  lui-même,  en  11 79,  se  serait  en  fait 
reconnu  vassal  du  roi  de  Castille,  d'après  un  document  allégué  par  le  P.  Moret 
{Anales  de  Navarra,  XIX,  7)  et  reproduit  par  Mondéjar  (Memorias,  p.  1 17). 

i5.  5.  11  n'est  pas  davantage  question  de  ces  personnages  dans  Luc  ni  Rodrigue, 
ni  dans  la  Chronique  générale.  Fernan  Rodn'guez  de  Cabrera,  selon  le  Livro  das 
Linhagens  do  conde  D.  Pedro  (p.  267),  descendait  d'un  fils  que  le  roi  Uamiro  III  de 
Léon  aurait  eu  de  sa  sœur  consanguine,  Ermesinda.  C'est  le  père  de  Ruy  Fermindez 
el  Feo,  dont  il  est  question  au  j  60.  Je  ne  puis  identiiler  VAlvarus  Pelagii  (Alvar  Pelaez) 
vir  nobilis,  non  plus  que  V Alfonsus  Armillez.  Quant  à  Pelrus  Ouarii  (Pedro  Ouarez?). 
il  fut  prieur  de  l'Hôpital;  il  est  encore  question  de  lui  au  §  io.  —  De  quel  côté  com- 
battaient ces  personnages?  Sans  doute,  d'après  le  contexte,  du  côté  du  roi  de  Léon. 
Alfonso  Armillez  était  portugais,  et  le  roi  de  Portugal  était  en  guerre  en  ce  moment 
avec  son  ex-gendre  (cf.  Herculano,  t.  II,  p.  82);  mais  cela  n'a  rien  d'extraordinaire. 

i5.  6.  1,3  prise  de  Castrum  viride  (Caslroverde  de  Campos,  à  l'est  de  Benavente,  sur 
le  Valderaduey)  est  aussi  mentionnée  par  Luc  (p.  108,  1.  30),  et  par  Rodrigue,  lequel 
distingue  assez  nettement  deux  campagnes,  qui  n'en  font  qu'une  dans  Luc.  D'après 
celui-ci,  Alphonse  de  Castille  prit  en  outre  Caslrum  Ardon  (Ardon  au  sud  de  Léon, 
Coyancam  (voir  plus  loin),  Castrum  Judaeorum  iaxta  ipsam  civitatem  [Legionensem] 
(sur  les  bords  du  Torio,  cf.  Kisco,  Esp.  sagr.,  t.  XXXV,  p.  269),  Castrum  quod  dicitur 
Alba  (voir  plus  loin),  et  il  ajoute:  «  Obsedit  eliam  Astoricam,  sed  non  cepit  eam  » 
(p.  108,  1.  38).  De  son  côté,  Rodrigue  écrit  :  «...  obtinuit  plura  castra,  scilicet  Boi- 


26Zi 


liULLETi>'    HISPAMQUÈ 


de  alarcos  rex  marroquitanus  iterum  uenit  ad  terrain  que  est 
ultra  serram.  et  obsedit  uillam  que  dicitur  niadrit  et  tenuit  obsessam 
multis  diebus.  quaiu  protexit  uirtus  diuina  per  ministerium  didaci 
lupi  et  aliorum  nobiliuni  et  populoruni  qui  erant  in  ipsa  uiila. 
ïunc  rex  predictus  recedens  ab  obsi(fol.  9Ô)dione  iuit  uersus  ucles 
et  obte  et  concam  et  sic  reuersus  est  in  terram  suaui:.  Eodem  tem- 


?anos  (Chr.  gén.,  p.  682',  1.  20  :  Bolaùos),  Vallein  Arearuin  (Valderas),  Castruin  viride, 
Coiancam,  quae  mulato  nomine  Valencia  nuncupatur  (Valencia  de  Don  Juan),  Car- 
pium  (VA  Carpio)  et  Paradinas  (de  San  Juan)  ».  Les  quatre  premières  villes  sont  près  les 
unes  des  autres,  et  les  deux  dernières  plus  au  sud.  C'est  dans  une  seconde  campagne 
qu"Alplionse  VIII  et  son  allié  auraient  pris  Castruin  Legionis  (Chron.  gén.,  ft  el  cas- 
tillo  ijLie  dizen  de  Léon  »  =  Caslrum  Judxorum)  Ardon,  Caslriim  (iundisalui  (Casirogon- 
zalo,  à  l'est  de  Hcnavcnte).  Castruin  terrer  (Castrotierra,  près  d'Aslorga),  Albain  de 
Aliste  (castillo  de  Alba,  sur  l'Aliste),  puis  a  ...  usquc  ad  Astoricam  ...  vastauerunt... 
et  Montem  regalein  (Chr.  gén.  :  Mont  lleal)  castrum  nobile  occupauerunt  »  (Vil,  3o). 
Ni  Luc  ni  Rodrigue  ne  mentionnent  Beneventiiin  (Henavente),  liavanai  (llal)anal  del 
Camino,  à  l'ouest  d'Astorga),  ni  Bereso  (t]l  Vierzo,  territoire  de  Ponfcrrada  et  de 
\  illafranca  del  \  ierzo),  jusqu'où  les  alliés  poussèrent  des  pointes  (évidemment  dans 
cette  seconde  campagne).  \  oir  Mondéjar  (Memorias,  p.  i()4  et  suiv.),  qui  place  la  pre- 
mière campagne  en  119G  et  la  seconde  en  1197-111)8.  La  prise  de  Castro  de  Leôn  ou 
Castro  de  los  Judios  eut  lieu  le  9  août  119O,  d'après  la  Chronique  de  Joseph  hen 
Zaddic,  de  Arévalo,  publiée  par  Ad.  Neubauer  et  citée  par  le  P.  Fila  dans  l'article 
mentionné  au  S  17,  note  2.  Les  deux  campagnes  avaient  donc  eu  lieu  la  même 
année  (i  196)  et  n'en  feraient  qu'une  en  deux  parties.  C'est  bien  ce  qui  semble  ressortir 
de  notre  texte,  comme  de  celui  de  Luc,  —  Notre  auteur  ne  dit  rien  des  hostilités  de 
Sancho  de  Portugal  contre  le  Léonais  à  la  même  époque  (Cf.  Ilerculano,  t.  11,  p.  82); 
c'est  qu'il  ne  s'occupe  du  royaume  de  Leôn  ([ue  dans  ses  rapports  avec  la  Castille. 

I.').  7.  Notre  chronique,  celle  de  Rodrigue  et  les  Anales  Toledanos  1  sont  d'accord 
pour  distinguer  deux  campagnes  du  roi  maure  en  1 19O  et  1 197  : 


Chr.  des  Rois  de  Castille 

119G  ....  ita  quod  anno 
sequenti,  cum  Almiranio- 
melim  terram  que  est 
ultra  serram  uastarct  et 
Toletum  ciuitatcm  diebus 
multis  (juasi  obsessam 
tenerel....  (S  i4). 


1197  Anno  sequenti  scilkct 
lerlio  [lost  iicllum  de  Alar- 
cos rex  marrofiuilanus 

obsedit  villam  (|uc  dicitur 
madrit ...  iuit  uersus  ucles 
cl  obte  (lluete)  et  concam 
(CuencaJ  et  sic  reuersus 
est  in  terram  suam. 


Anales  Toled.  I 

Priso  el  Uey  de  Mar- 
ruecos  à  Alontanches,  e 
Santa  Cruz,  e  Truxiello, 
c  Placencia,  e  vinicron 
por  Talavera,  e  corlaron 
el  Olivar,  e  Olmos,  santa 
Olalla,  e  Escalona  e  lidia- 
ron  Maqueda,  e  non  la 
[)risieron,  e  vinieron  cer- 
car  Toledo,  c  cortaron  las 
vinas,elos  arbolos,  e  ilura- 
ron  y  X  dias  en  cl  mes  de 
Junio,  Era  MCCXWIV. 

A  otro  aho  vino  el  Rey  de 
Marruecos  [)ara  Talavera,  e 
porMaqueda,cpor'i'<)ledi>, 
e  por  Madrit,  e  por  Alcahi, 
e  por  Orclla,  e  por  Uclés, 
e  por  lluete,  e  por  Cucnca, 
e  por  Alarcon,  cde  si  fues 
por  la  ira  de  Dios,  Era 
MCCXX.W. 


UODRKiUE 

Re\  Almohadum,dictus 
lucef,  anno  secundo  ohsviiW. 
Toletum,  dcinde  Maieri- 
tum,  ol  Alcalarn,  Optam, 
et  Concham,  et  Lclesiuru, 
et  (leindc  per  Alcarasium 
est  reuersus  (Vil,  3o). 


Tertio  autein  anno  Rex 
Almohadum  ...  iterum 
\eniens  obsedit  Toletum, 
Maqucdam  et  Talaueram, 
sed  nullam  carum  potuil 
oblinere  :  cvcrtit  latnon 
Sanctam  Eulaliam...  cepit 
i'iacenliam,  Sanctam  cru- 
com,  Monteni  aiigii,  et 
Turgellum,  cl  inde  cum 
faslu  et  supcrbia  est  re- 
uersus (ih.). 
Un  rcniar'iuera  que  c'est  entre  notre  chroni(jue  el  les  Anales  Toledanos  qu'il  y  a  le 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS   DE    C  VSTILLE  205 

pore  rex  legioîî  recuperauit  castrum  iudeorum  iuxta  legionem[.]  Rex 
uero  castelle  et  rex  aragonum  iterum  intrauerunt  in  regnum  legio- 
nense  et  multa  mala  légion  intuleriints.  Rex  légion  semel  iuit  ad 
regem  marroquitanum  quera  inuenil  apud  vspalim.  Tandem  treuguao 
facta  inter  regem  marroquitanum  et  regem  castelle.  ipso  reuerso 
in  sedem  regni  sui.  s.  marrocos  reformata  est  pax  inter  regem 
légion  et  regem  castelle.  que  non  potuit  aliter  reformari.  nisi  rex 
castelle  fîliam  suam  diiam  berengariam  régi  légion  copularet. 
in  matrimonio  de  fiicto.  quia  de  iure  non  poterat  cum  ipsi  reges 
attinerent  sibi  in  secundo  gradu  consanguinitatis  «o. 

i6.  Gloriosus  uero  rex  castelle  non  oblictus"  malorum  que  rex 
nauarre  intulerat  sibi  et  regno  suo  tempore  angustie  sue  intraû  in 
regno  suo.  et  cepit  ipsam  uastare.  Rex  nauarre  uidens  quod  non 
poterat  ei  resistere  derelicto  regno  confugit  ad  regem  marroquitanum. 
et  iuit  ad  ciuitatem  marrocos  implorans  ipsius  auxilium  et  supplicans 
ut  t''  subuenire  dignaretur.  Intérim  uero  rex  castelle  obsedit  uictoriam 
et  dum  duraret  obsedio  castra  omnia  circumadiacencia  acquisiuit. 

aj  oblittu!!,  ol/litui(cel  t  liés).—  b)  Abella  <•  forte  eiv. 

plus  de  concordance  et  aucune  contradiction.  Rodrigue  semble  avoir  interverti 
l'ordre  des  campagnes,  ainsi  que  l'a  remarqué  Herculano,  t.  II,  p.  8i. 

i5.  8.  Rodrigue  abrège  ici  l'histoire  des  luttes  entre  les  rois  de  Castille  et  de 
Léon.  Il  marque  comme  projetée  cette  nouvelle  expédition  d'Alphonse  VIII  et  de  son 
allié,  et  arrive  tout  de  suite  au  mariage  d'Alphonse  IX  avec  Béren  gère  (Vil,  3o  et  3i). 
Luc  parle  :  i°  d'une  paix  qui  suivit  l'expédition  dans  les  Asturies  et  qui  fut  ménagée 
par  Pedro  Fernândez  ((de  Castella  »  (=^  el  Castellano)  «qui  tune  erat  cum  Rege 
Legionensi  »  (p.  io8,  1.  Sg);  2'  d'une  reprise  des  hostilités  «  per  très  continuos 
annos  »,  au  cours  desquelles  «  tradente  Rege  Legionensi  Rex  Castelhe  castrum  de 
Pozolo  accepit,  qui  iam  acceperat  villam  Barxem  (Buraon?),  Caparios,  et  alia  plura 
ad  ecclesiam  beati  Isidori  spectantia  0  (1.  ia-Sg),  sans  doute  par  le  traité  de  1207 
(Esp.  sagr.,  t.  XXXVl,  p.  cxlv);  3°  de  nouvelles  discordes  suivies  d'une  paix  (p.  109, 
1.  9),  Alphonse  de  Léon  cédant  à  son  épouse  Bérengère  «  quae  tum  degebat  cum  paire 
suo  in  Castella  ...  Villarpandum  (Villalpando),  Ardon,  Rodam(Rueda),  Arbolium(?), 
Gordonem  (Gordon)  et  Lunam  (Luna).  »  Ce  dernier  accord  doit  être  celui  de  1209, 
{Esp.  sagr.,  ibid.,  p.  cxlvu)  où  l'on  voit  mentionnées  «  très  villas,  scilicel  Villarpando, 
et  Ardon,  et  Rueda.  »  Luna,  Argueyo  et  Gordon  le  sont  dans  le  traité  de  120G 
{ibid..  p.  cxxxiii)  comme  données  à  Ferdinand  par  son  père.  Cf.  Herculano,  t.  Il,  p.  84, 
note  3. 

i5.  9.  La  forme  treugua  est  habituelle  :  ex.  Esp.  sagr.,  t.  XXXVI,  p.  cxlviii. 
—  Rodrigue  (\'II,  3o)  signale  aussi  cette  trêve,  et  VEstoria  de  los  Godas  {Doc.  inéd., 
t.  LXXXVIII,  p.  i5o),  ajoute  qu'Alphonse  VIII  donna  en  otage  son  neveu  Semen 
Gômez,  fils  de  Gonzalo  Royz  de  Aça,  lequel  ne  revint  jamais. 

i5.  10.  Ainsi,  d'après  notre  auteur,  le  mariage  d'Alphonse  de  Léon  et  de  Béren- 
gère fut  conclu,  non  pas  tout  de  suite  après  la  campagne  de  1196,  comme  semble  le 
croire  le  P.  Fita,  dans  l'article  cité  au  §  17,  note  2,  mais  après  que  le  roi  léonais  eut 
repris  Castro  de  los  Judios  (1197,  semble-t-il),  et  alors  que  les  rois  de  Castille  et 
d'Aragon  revenaient  pour  une  nouvelle  expédition  contre  lui.  Il  eut  même  le  temps 
d'aller  à  .Séville;  et  le  roi  de  Castille,  celui  de  négocier  la  paix  avec  le  vainqueur 
d'Alarcos.  Au  surplus,  Rodrigue  marque  bien  que  c'est  au  moment  oîi  une  nouvelle 
invasion  du  royaume  de  Léon  commen(.ait,  qu'il  fut  question  de  mariage  et  de  paix. 
Il  est  étonnant  que  Luc  ne  mentionne  pas  le  mariage.  Fierez  (Reynas,  t.  I,  p.  352), 
le  place  avant  le  17  décembre  1 197.  Notre  chronique  n'y  contredit  pas. 


266  BULLETIN    HISPANIQUE 

S.  triuino.  Arganzon,  Sancta  cruz.  Alchorro/.a.  Victoriam  ucterem". 
Eslucia  '.  Terrain  que  dicitur  ipuzcaia^.  Sanclum  sebastianuni  insuper. 
Maranô.  Sanctum  uincentium^  et  quedam  alla.  Tandem  redita  est  ei 
uictoria.  et  sic  habuit  totam  alauam.  et  terras  circumadiacentes  et  sic 
cuni  uictoria '•  reuersus  est  castellam[.]  Rex  nauarre  destitutus  omni 
auxilio  recepta  quadam  summa  peccunie  et  quibusdani  reditibus  sibi 
assignatis  a  rege  marroquitano  in  ualencia»  ibi  multo  tempore  moram 
fecit.  Tiruga*  facta  est  inter  regem  castelle  et  eumdem  regem  nauarre. 
remanentibus  cunctis  castellis  et  uillis  que  acquisierat  rex  castelle  in 
regno  régis  nauarre.  in  potestale  re'  dem'  régis  castelle. 

17.  Post  istauerogloriosus  rex  castelle  cui  non  erat  quies  n'nunquani 
quiescere.  neque  delectatio.  nisi  labor  continuus  '.  laliorauit  ut  haberet 
totam  uasconiam  quam  sibi  credebat  de  iure  competere  tanquam  sibi 
promissam  ab  henrico  rege  angloruni  socero  suo.  Duxerat  quidem 
nobilis  rex  castelle  liliam  dicli  henrici  régis  dïïani  alienor  nobilis- 
simam  moribus  et  génère,  pudicam  et  ualde  prudentem  cum  qua 
sepe  dictus  rex  henricus  dicebatur  genero  suo  régi  castelle  uasconiam 
promisissea.  Ea  tempestate  regnum  anglie  lenebat  rex  iobannes  cogno- 
inento  sine  terra,  frater  predicte  regine  alienor.  Rexsiquidem  henricus 
quatuor  habebat  fdios.  s.  regem  iuuenem*^.  Comitem  britanie ''.  qui 

(tj  En  marge  (écriture  penchée)  :  Cnnquista  de  Vitovia  y  Alaha  par  l>.  Aliniso  el  S°.— 
ht  treiiga.  —  c)  einsdem  ? 

iii.  1.  11  n'est  pas  probable  que  Victoriam  veterem  désigne  ici  la  Villasiiso  de 
\  itoria  (cf.  Madoz,  t.  XVI,  p.  3'»3),  et  je  ne  puis  identifier  Alchorroza  {Arzorociam 
dans  Rodrigue,  VII,  Zi;  Lorenzana  indique  les  variantes  Ayzorociam,  Aicorroziam): 
Aizoroz  (cf.  Madoz),  dans  le  Guipûzcoa,  au  nord  de  Vitoria?  Toutefois  le  Crûnica 
de  Esp.  dit  «  Azcorrocia,  que  llaman  Victoria  la  vieja  »  {Doc.  inéd.,  t.  CV,  p.  /i.^g).  Les 
autres  localités  seraient  Trevifio,  Puebla  de  Arganzon,  Santa  Cruz  de  Campezo? 
(cf.  Dicc.  gcog.-hisl.de  Esp  ,  por  la  II.  Acad.  de  la  Ilist.),  Arliicea  ou  Aslucea  (MadozJ, 
toutes  au  sud-ouest  et  sud-est  de  Vitoria. 

ili.  1.  Guipûzcoa. 

iC.  3.  San  .Sébastian,  Maranôn  (près  d'Arlucea  et  de  Santa  Crviz),  San  Vicente(ù/.). 

iC.  4.  Calembour  sur  le  mot  Victoria,  analogue  à  celui  que  fait  l'auteur  sur 
Salvatierra  (>  i<j).  Sur  la  prise  de  cette  ville,  voir  le  Dicc.  géogr.-hisl.  de  Esp.,  t.  I, 
p.  35.  Tout  ce  passage  est  cité  par  .\bella  dans  le  Dicc.  géogr.-hisl.  de  Esp.,  t.  I,  p.  S'u 
(voir  mon  irjtroiiuction,  litill.  kisp  ,  t.  XIV,  p.  4i).  Luc  dit  seulement:  «  fines  Nauarrae 
inuadit,  et  bitoriam  (Ms.  llli.  98  et  ï-c-d)  cepit.  Ceperat  iam  l'ère  (mêmes  ms;  fere 
manque  dans  l'édition)  totam  terram  de  .\laua,  et  alla  plura  in  regno  suo  »  (p.  108, 
I.  3i).  Rodrigue  (\'II,  3j)  donne  beaucoup  de  détails,  en  particulier  sur  le  siège  et  la 
reddition  «le  Victoria. 

iC.  â.  Rodrigue  dit  bien  ([ue  Sanche  séjourna  chez  les  .\rabes,  mais  sans  préciser 
où.  Nous  voyons  qu'il  alla  d'abord  à  Marrakech,  puis  à  Valence.  Cf.  Mondéjar,  Mémo- 
rias,  cap.  LXVI-LXVII. 

17.  I.  Cf.  Luc  (p.  lOf),  1.  i3)  :  6  labori  cedcrc  nescius  ».  Luc  appiitjue  la  même 
expression  à  .\lphonse  VI  (p.  io;>,  1.  8). 

17.  î.  Voir  l'idel  Fita,  Elogio  de  la  reina  de  Caslilla  y  esposa  de  Alfonso  VIII, 
D'  Leonor  de  Inglaterra,  dans  Itolelin  de  la  H.  Acad.  de  la  Historia,  i()"S,  t.  LUI,  p.  4ri- 
^i3o.  —  Le  mariage  avait  eu  lieu  en  1170  (cf.  S  1 1,  note  h). 

17.  3.  On  sait  que  Henri  II,  de  son  vivant,  en  1170,  avait  fait  couronner  roi  son 
fils  aîné,  Henri  Court-Manlol,  qui  mourut  six  ans  avaril  lui.  en  1 183. 

17.  4.  GeolTroy,  duc  de  Bretagne,  mort  en  ii8r». 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  267 

ambo  I  ante  mortem  patris  mortui  sunt.  Ricardum  comitem  pitaueti^ 
qui  patri  successit  in  regno  qui  reuersus  de  ultra  marinis  par- 
libus  cum  obsedisset  castrum  quodam  in  terra  lemouicenG  uel 
prope  cum  sagita  letaiiter  uulneratus  uiam  ingressus  est  uniuerse 
carnis.  Quartum  iohannem  sine  terra  qui  fratri  ricardo  successit  in 
regno.  cum  idem  ricardus  sine  proie  decessisset.  Tempore  huius 
iohannis  régis  quem  filipus  rex  francorum  priuauerat  normania  et 
andegauia.  et  terra  turonensium.  et  ciuitate  famosa  pictaui.  s". 
rex  castelle  cum  quibusdam  de  uassallis  suis  intrauit  uasconiam  et 
fere  totam  occupuit  prêter  baioionam''  et  burdegalim.  habuit  et 
blayam.  et  bore'  que  sunt  ullra  garonam.  et  terram  que  est  inter  duo 

a)  scilicet.  —  II)  Sic. 

17.  5.  Comte  de  Poitou  et  duc  de  Bretagne;  il  succéda  à  son  père  en  1 189. 

17.  6,  Le  château  de  Ghalus,  en  Limousin  (i  199). 

17.  7.  Blaye  et  Bourg-sur-Gironde.  Le  texte  de  Pidal  (p.  686  i',  1.  18)  traduit  sin- 
plement  Rodrigue.  Le  texte  d'Ocampo  entre  ici  dans  plus  de  détails  (f  cccxciui);  on 
le  retrouve  à  peu  près  pareil  dans  le  manuscrit  i3l7,  et  en  partie  traduit  dans  le 
manuscrit  portugais  ancien  de  l'Académie  de  Lisbonne  :  «  Como  el  rrey  dont  Afonso 
foy  sobre  yasconlia  g  cercoii  logo  bayona.  Depois  que  elrrey  dom  Afonso  ouue  pobrada 
a  villa  da  maya,  ueolhe  en  mente  como  en  ont"  tempo  gasconha  fora  do  senhorio  de 
castelle.  s  que  por  esta  razon  deuia  de  seer  sua.  z  ajuntou  logo  sua  hoste  e  foy  cercar 
bayona.  E  teendo  cercados  os  que  dent"  jaziam.  preileiaron  con  elle  de  Ihe  pagar  a 
custa  <[ue  auia  feita  em  aquella  vijnda.  c  q  os  dccercasse  e  fosse  sobre  bordeos  r.  sobre  os 
outros  logares.  z  que  Ihe  faryam  menagem  que  tanto  q  ele  tomasse  bordeos.  Ihe  dessem 
bayona.  E  elrrey  teueo  porbem.  s  decercouhos  e  fuisse  sobre  bordeos.  zcorreocestragou 
toda  a  terra  de  gasconha.  E  os  da  villa  e  de  loda  a  terra  esso  meesmo.  vironse  en  grande 
perigo  por  que  non  sperauOacorrode  nemhfia  parte,  s  poresto  demouyâ  aelrrey  muy- 
tas  preitesias.  ca  Ihe  dauâ  muy  grande  au  (auer)  z  elle  non  qria  se  nû  a  villa.  E  conta 
aestoria  en  este  logar  que  estando  elrrey  en  csto  que  Ihe  chegou  recado  como  miraa- 
molin  de  marrocos  era  passado  aaque  mar.  e  vijnha  cô  gram  poder  por  Ihe  estragar 
atrra.  E  elle  quandoo  ouuya  pesoulhe  muyto  e  entom  preitciou  cô  os  de  bordeos 
que  Ihe  pagassem  acusta  q  auya  feita  z  q  os  descercaria.  E  elles  teueronno  por  bem 
s  derOlhe  muy  grande  auer  z  lornousse  pa  caslella.  ca  elle  pensaua  de  lydar  cô  os 
mouros.  z  depois  que  os  déliasse  da  terra  que  entô  tornaria  sobre  gasconha.  z  que 
se  iha  elrrey  dingraterra  non  defendesse  per  batalha  q  la  tomaria  toda.  Como  elrrey 
dom  afonso  mandou  seu  filho  0  jffanle  dO  fernando  carrer  a  terra  de  mouros.  Depois  que 
elrrey  dom  afOso  ueo  de  gasconha.  mandou  logo  seu  filho  o  jffanle  dom  fernando  con 
grande  hoste  correr  z  estragar  terra  de  mouros...  »  La  fin  est  un  peu  différente  du 
texte  d'Ocampo,  qui  est  ainsi  rédigé  :  «...  Enfonces  traxo  la  preytesia  con  los  d'  la 
villa  que  le  diesen  la  costa  q  auie  fecha  z  q  los  deçercarie  en  tal  manera,  q  yrie  côtra 
los  moros  z  lidiarie  con  ellos  o  los  echarie  de  la  tierra  :  c  si  le  dios  dexasse  tornar 
en  saluo  q  el  rey  d'Ynglaterra  q  le  viniesse  dar  guerra  en  el  canpo  en  tal  manera  que 
los  librase  por  batalla,  synon  que  llanamente  le  diesen  la  villa  z  la  tierra  z  fuesen 
sus  vasallos.  z  ellos  touieron  por  bié  esta  preytesia;  z  afirmaron  su  preyto  en  vno 
z  dierô  le  muy  gran  auer...  s  Le  manuscrit  8817  (fol.  21 3)  suit  de  plus  près  le  texte 
d'Ocampo.  Le  manuscrit  de  Paris  (d'après  la  copie  de  Lisbonne)  contient  seulement 
ceci  (fol.  4i6",  ch.  V  xxv,  n°  /|65)  :  «  E  despois  que  ouue  pobrada  a  villa  de  Maya  len- 
broulhe  como  gasconha  fora  do  senhorio  de  castela.  z  juntou  sua  hoste  t  foy  çercar 
bayona.  E  dhy  se  partio  com  preitesia  que  os  da  cidade  Ihe  pagassem  acusta  que 
fezera.  z  que  tomando  bordeeos  que  os  de  bayona  Iheobedeecessem.  Teendo  elrrey 
cercada  a  cidade  de  bordeeos  ueolhe  noua  como  miraamolim  era  passade  en  espanha 
com  grande  gente.  z  poren  aueosse  com  os  de  bordeeos  que  Ihe  pagassem  acusta  que 
auya  feita.  z  ueosse  pera  castela.  E  como  hi  foy.  mandou  seu  filho  o  iffante  dom  fer- 
nando correr  terra  de  mouros....  » 


368  BULLETIN    HISPANIQUE 

mariaS.  et  sic  reuersus  est  in  regnum  suum.  Ante  quam  iret  in 
uasconiam.  facta  fuerat  treugua  inter  ipsum  et  regem  légion.  De 
uasconia  uero  rediens  pacem  firmauit.  cum  codem  rege  recepitque 
dn5  didacum  lupi  qui  iam  diu  exulaueratg.   Causa  uero  discordie 


17.  8.  C'est  ce  qu'on  appelle,  en  effet,  l'Entre-deux-Mers,  rétrion  comprise  entre  les 
deux  neuves  de  la  Garonne  et  de  la  Dordogne,  jusqu'à  l'endroit  où  la  marée  (le  mas- 
caret) cesse  de  se  faire  sentir.  Luc,  de  son  côté  (p.  109,  1.  i/i),  nomme  ici  «  Sanctum 
Sebastianum,  Orles  (Orttiez),  Burgum  de  Ponte  (Bourg?)  Saluaterram  (Sauveterre, 
dans  l'Entre-deux-Mers),  Ciuitatem  Aquensem  (Dax,  anc.  Acqs).  Il  paraît  avoir 
confondu  la  campagne  contre  le  roi  de  Navarre  et  l'expédition  de  Gascogne.  La  prise 
de  Saint-Sébastien  date  de  la  première.  Rodrigue  ne  fait  qu'une  allusion  à  la  seconde  : 
«  Et  postquam  fere  totam  Vasconiam  pr.-ï-ter  Burdegalam,  Regulam  (La  Réole),  et 
Vaionam  sutesubdidcrat  ditioni...»  (VII,  3'i).  Ni  l'un  ni  l'autre  n'en  donne  les  motifs. 
Dom  Devienne  est  muet  sur  ces  événements.  Mais  Hierosme  Lopes  (L'Église  mélropo- 
litoine  et  primatiale  Saint-André  de  Bordeaux,  réédition  de  l'abbé  Callen,  t.  Il,  p.  219) 
note  que,  suivant  la  Chronique  de  Saint-Etienne  de  Limoges,  le  siège  fut  mis  devant 
Bordeaux  par  le  roi  de  Castille  en  l'année  1206,  et  il  ajoute  :  «  Il  y  a  de  quois'estonner 
que  ny  la  Chronique  de  Bourdeaux,  ny  nos  historiens  fraoçois,  ny  Mariana  dans 
l'Histoire  d'Espagne  n'en  ayent  pas  dit  im  mot.  J'ay  néanmoins  leu  la  mesme  chose, 
escriteà  la  fin  d'un  vieux  Bréviaire,  escrit  à  la  main  seize  ans  après  ce  siège,  lequel 
Bréviaire  a  esté  conservé  dans  l'église  Sainte-Colombe  de  cette  ville.  »  Et  en  note  : 
«  An.  1206,  obsessa  civitas  Burdeg.  à  Rege  Ilispano.  In  Breviario  manu  scriplo.  ad 
usum  Eccl.  S.  Columba»,  Rurdig.  » 

Mondéjar  (Memorias,  cap.  LXWVII  et  LXXXIX)  distinguait  deux  campagnes  en 
Gascogne,  et,  pour  placer  la  première  en  i2o'i,  se  basait  sur  un  privilège  accordé  par 
Alphonse  ^  111  à  l'évèque  de  Dax  cette  année-là;  et  il  déduisait  la  date  de  la  seconde, 
i2o5,  d'un  texte  publié  par  Pierre  de  Marca.  Notre  auteur,  de  même  que  les  diffé- 
rentes rédactions  de  la  Chronique  générale,  semble  bien  ne  connaître  qu'une  seule 
expédition,  (jui  se  termina  par  la  renonciation  du  roi  de  Castille  (cf.  plus  loin),  ce 
qu'ignorait  Mondéjar. 

17.  9.  Rodrigue  dit  bien  (VII,  33)  que  Diego  Lôpez  s'était  brouillé  avec  Alphonse 
le  Noble,  mais  il  ne  mentionne  pas  la  ri'conciliation.  Inversement  notre  auteur  ne 
nous  dit  rien  de  la  brouille  elle-même  ni  de  ses  suites  (siège  d'Estella).  Le  texte 
d'Ocampo  (fol.  cccxcn)  est  là -dessus  fort  différent  de  celui  de  Pidal  (§  looC)  : 
«  Desq  el  rey  don  Alfonso  ferrandez  d'  Leô  se  vie  sin  guerra  d'  Gastiella  touo  que 
podrie  deseredar  a  su  madrastra  la  reyna  doua  Urraca  Lopez  d'  las  arras  e  d'  la 
heredad  que  tenie  en  el  su  rey  no...  Pero  que  do  Diego  Lopez  d'haro  hermano  desta 
reyna  q  fue  d'  Leô  doua  Urraca  Lopez  fuera  a  ser  vasallo  del  rey  don  Ferrando  de 
Léon  t  su  alferez  s  mucho  su  priuado:  c  esta  reyna  le  pidio  q  tomasse  boz  cO  don 
Sâcho  ferrâdez  su  fijo  c  ql  dièse  el  pcdo  del  reyno  d'  LeO  por  ql  reynase  s  nô  don 
Alfonso  su  alnado  q  era  mayor  :  po  ([  do  Diego  nol  quiso  fazer  catado  lealta,  ca  era 
buen  fidalgo,  mas  prometiola  esta  reyna  su  hermana  d'  la  det'endcr  eiisu  heredad 
si  el  don  Alfonso  ferrandez  le  contrallasse  las  sus  arras,  c  fue  bien  asi  como  lo 
cuydara  don  Diego,  ca  el  rey  do  Alfonso  ferrandez  enbio  pedir  ayuda  a  su  suegro 
cl  rey  de  Castiella  para  çcrcar  los  castiellos  de  su  madrastra.  E  el  rey  de  Castiella 
embiojela  muy  de  grado.  t  estonces  <;crco  los  castiellos  de  Aguilar  c  de  mute  Agudo. 
t  por  esta  razo  se  partio  dcsauenido  do  Diego  lopez  del  rey  de  (Castiella  :  r.  fuesse 
para  Nauarra  c  comrro  d'  fazer  guerra  al  rey  de  Castiella.  E  el  rey  de  Leo  dexo  los 
castiellos  rercados  c  fuesse  para  el  rey  su  suegro,  t:  mouieron  luego  entlc  :  <■  fuerO 
sobre  don  Diego  q  cstaua  en  Estella...».  Deux  chapitres  d'un  contenu  é<iuivalcnt 
se  trouvent  dans  les  manuscrits  8817  et  18/17  '^'^  '*"  Biblioteca  Nacional  de  Madrid. 
Le  manuscrit  ancien  de  l'Académie  des  Sciences  contient  sur  la  réconciliation  de 
Diego  Lopez  avec  Alphonse  VIII  un  passage  qui  n'est  ni  dans  le  texte  d'Ocampo 
ni  dans  celui  de  Pidal.  Mais  cette  réconciliation  se  rattache  à  une  tout  autre  histoire, 
qui  se  trouve  tout  au  long  dans  ce  manuscrit:  Como  elrrey  dom  afonso  de  castella 
pedyu  apeita  aos  ftdalgos,  histoire  que  l'on  trouvera  en  appendice,  et  que  Rodriguez 
de  .\lmella  a  rcsuiuée  dans  son  Valerio  de  las  Uistorias  (1.  \l,  lit.  II,  c.  V). 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  369 

inter  gloriosum  regem  castelle  et  regem  legioiî  fuerat"  idem  rex 
légion  dimiserat  filiam  régis  castelle  reginam.  s.  dnam  bercn- 
gariam.  De  qua  idem  rex  legioiî  iam  susceperat  duos  fdios  et 
duas  filias  lo.  \obilis  igitur  rex  castelle  licet  tanquam  uir  sapiens  et 
discretus  intelligeret.  quod  laborare  in  acquisitione  uasconie  hoc 
esset  litus  arare  neccessitate  tamen  quadam  compulsas  non  poterat 
desistere  ab  incepto.  Paupertas  siquidem  terre  in  constancia''  liomi- 
num  in  quibus  rara  fides  inueniebatnr  terram  uasconie  ipsi  régi 
rediderant  odiosam.  sed  amor  coniugis.  et  ne  ipsam  conlristaret 
ipsum  cepto  pertinaciter  insistere  compellebat.  Videns  tandem  quod 
non  proficeret  uascones  ipsos  tam  nobiles  quam  populos  ciuitatum 
absoluit  a  iuramento  et  omagio  quo  ei  tenebantur  astricti.  felix  dies  et 
regni  castelle  semper  amabilis  qua  gloriosus  rex  pertinacie  cessit 
et  destitit  ab  incepto.  Auri  fontem  irriguum  dessicasset  uasconia  et 
nobilitatem  procerum  hausisset'i. 

18.  Ante  quam  rex  nobilis  iret  in  uasconiam  filiam  suam  puellam 
blancam  nomine  que  nunc  est  coronata  regina  francorum  tradidit 
nuptu  lodouico  filio  philipi  régis  francorum  qui  nunc  régnât  in  regno 
francie  pro  pâtre  suoi.  postquam  (fol.  96)  rediit  de  uasconia  alteram 
filiam  suam.  s.  urracam  tradidit  in  uxorem  alfonso  filio  sancii 
régis  portugalie  qui  postea  regnaù  pro  pâtre  suo  sancio  in  eodem 
regno  2.  Eodem  tempore  gloriosus  rex  duos  habebat  filios.  fernandum 
et  henricum,  fernandus  cum  peruenit  ad  annospubertatis  tante  libera- 
litatis  erat.  ne  dicam  prodigalitatis.  quod  cum  multa  daret  se  nicliil 

a)  Abella  :  "  forte  deest  quod  ».  —  b)  inconstantia. 

17.  10.  Il  est  assez  singulier  que  notre  auteur  explique  ces  démêlés  par  le  divorce  qui 
fut  imposé  à  Alphonse  de  Léon  par  le  pape.  Voir  Mondéjar  {Meinorias,  p,  aôg  et  suiv.), 
qui  cite  les  textes  relatifs  à  celte  affaire,  notamment  les  Actes  et  Lettres  d'Innocent  IIL 
Les  lettres  sont  à  Tappendice  \.  Cf.  aussi  Fierez,  Bejnas,  t.  f,  p.  36G. 

Luc  compte  cinq  enfants  d'Alphonse  de  Léon  et  de  Bérengère  ;  «  Fernandum, 
Adefonsum,  Alienor  {sic  mss.)  primogenitam,  Constantiam  et  Berengariam  » 
(p.  109,  1.  40).  Voir  Flôrez,  Reyuas,  t.  1,  p.  356  et  suiv.),  qui  note  (p.  365)  que  Leonor 
mourut  en  laoT,  par  conséquent  avant  la  séparation,  laquelle  eut  lieu  en  laol 
(p.  370). 

17.  II.  Ainsi,  d'après  notre  auteur,  c'est  la  reine  Léonor  qui  avait  poussé  le  roi  à 
faire  valoir  par  les  armes  ses  droits  ;  lui-même  était  assez  peu  enthousiaste  :  la 
pauvreté  du  pays  (aujourd'hui  peut-être  le  plus  riche  de  France)  et  l'inconstance  des 
Gascons  le  découragèrent  complètement.  Liltus  arare  :  l'expression  est  assez  heu- 
reuse, si  l'on  songe  à  ce  qu'est  une  partie  du  sol  de  la  Gascogne,  et  à  ce  qu'il  était 
alors  :  une  vaste  plage  de  sable. 

18.  I.  La  phrase  est  grammaticalement  ambiguë,  mais  puisqu'on  nous  dit  que 
Blanche  «  est  à  présent  reine  des  Francs  d,  l'antécédent  de  «  qui  nunc  régnât  »  est 
Lodouico  et  non  P/ij/ipi.  Cette  partie  de  la  Chronique  à  donc  été  rédigée  entre  laaS 
et  1226,  dates  de  Louis  VIII. 

18.  2.  Cf.  Luc,  p.  107,  1.  57.  Il  s'agit  d'Alphonse  II  (laii-iaaS),  fils  de  Sanche  I. 
Voir  Florez  {Reynas,  t.I,p.  4i-i),  qui  marque  les  dates  du  mariage,  1208  (c(.Esp.  sagr., 
t.  XXI,  p,  93),  et  de  la  mort  d'Urraca,  laao.  Cf.  Herculano,  tome  H,  page  m.  Il  est 
étonnant  que  notre  auteur  ne  signale  pas  la  parenté  dirimante  des  deux  époux,  la 


370  BULLET1>'    HISPAMQUE 

dédisse  credebat.  cum  adhuc  superessent.  qui  pelèrent  quorum 
cupiditati  explende  suffîcere  non  ualebat.  Ex  omni  parte  yspanie 
cateruatim  confluebant  ad  ipsum  nobiles  quos  omnes  uelud  notissi- 
mos.  recipiebat.  et  multis  muneribus  eorum  indigenciam  releuabat. 
Imberbis  iuuenis  tandem  custode  reuioto.  Gaudebat  equis  canibusque 
et  aprici  gramine  campi\  Ludebat  in  auibus  diuersi  generis.  Mores 
eius  supra  modum  a  quo  equalibus"  laudabatur.  ITactus  autem 
grandiusculus  circa  finem  adolescentie  prudenciam  induens  cum 
robore  iuuenilis  elatis  cepit  omnia  predicta  in  quibus  gloriabatur 
uilipendere  et  armorum  usui  cepit  unare  ''  libenter  adherens  illis  quos 
in  armis  strenuos  nouerat  et  rerum  bellicarum  expertos.  Adebat'' 
desiderio  guerre  sarracenorum.  lllam  tractans  cum  familiaribus  et 
eam  sepe  uoluens  in  animo  nec  ei  iam  studium  aliud  placere  poterat 
nisi  milicia  et  usus  armorum.  Videns  autem  rex  gloriosus  desiderium 
filii  et  pulcritudinem  eius.  erat  enim  ualde  pulcher.  et  robur  iuue- 
nilis elatis.  delectabatur  in  eo  gralias  agens  domino  qui  filium  talem 
dederat  ei  qui  possel  iam  quo  adiutor'  eius  existere  in  regni  regimine 
et  in  rébus  bellicis  uices  eius  supplere  possel  in  parle.  Manebal  in  alla 
mente  régis  positum^  quod  nunquam  de  ipsa  exciderat  infortunium 
quod  passus  fuerat  in  bello  de  alarcos.  Sepe  reuocabat  ad  animum 
diem  illam.  habens  desiderium  uicem  reddere  régi  marroquilano  et 
pro  hac  re  sepe  dnrrï  deprecabatur.  Allissimus  qui  paciens  redditor 

a)  a  coaequulibus.  —  lij  iuuarv.  —  c)  ardebat.  —  d)  Abella  :  «  forte  coadiutari. 

même  exactement  qui  devait  faire  obstacle  au  mariage  de  leurs  frère  et  sœur 
respectifs,  Enriqne  et  Mafalda  (cf.  §  Sa,  n.  3)  : 

Hamon  Berensruer  111 


D"  Hercngucia,  cp.  Alfonso  Vil  Ramûii  Ucrengucr  IV 

I  I 

Sancho  III  de  Castilla  D'  Dulcc, 

j  ép.  Sancho  I  de  Portugal  (117/i) 
Alfonso  VIII  I 

I \ 

I  II  I 

U' Urraca  lliiricjuo    AffonsoU  D"  Mafalda 

ép.  .Mfonso  II  épouse 

de  Portugal  D'  Mafalda 

Par  le  mot  regnavit,  comme  d'après  le  >>  î  {uterque  morluus  est  vicio  malanconir 
lahoram,  cf.  Ilerculano,  [»eu  explicite  sur  ce  genre  de  ma'adie,  commune  au  père  et 
au  lils.  t.  II,  p.  iri.  121,  iSq,  iùi  et  2G.')),  on  voit  encore  que  l'auteur  de  toute  celle 
première  partie  de  la  Chronique  écrivait  après  122.^,  ce  qui  contirme  l'obsorvation  de 
la  note  précédente. 

18.  3.   Horace,  Eftist.  ad  l'isones,  v.  i(ji-i(i'>  : 

Imberhus  iuuenis  tandem  custode  remoto 
Gaudet  equis  canibusque  et  aprici  gramine  campi... 
18.  'i.  Cf.  5  i4,  2.  Uodrigue  (VII,  33)  emploie  à  ce  même  propos  une  expression 
analogue  :  «  ...  bellum  de  Alarcuris  corde  allissimo  reponebat  ». 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  27 1 

est  uidens  desiderium  gloriosi  régis  inclinaû  aurem  suam  et  de 
excelso  solio  glorie  suc  orationem  eius  exaudiuit.  Irruit  igitur  domini 
spiritus  in  regem  gloriosum  et  induit  eum  uirtus  ex  alto  sicque  quod 
tam  longo  tempore  preconceperat  produxit  in  actum.  Mouit  igitur 
guerram  régi  marroquitanoS  confisus  de  niïa"  domni  nostri  ihu 
xpi  et  statim  intraû  cum  filio  suo  in  terram  predicti  régis,  uersus 
partes  murcie.  sed  quia  paucos  habuitde  uassallis  ..''s  non  multum 
nocere  potum'  niaurisC.  Sed  dum  ipse  ageret  in  partibus  illis.  Alfonsus 
telli.  et  rodericus  roderici  uassalli  eius  cum  quibusdam  tolletanis 
obsederunt  turrem  de  guadalferza.  |  et  machinis  apoîtis  eani  ui 
ceperunt.  Rex  uero  marroquitanus  quartus'  abdelimù  (ilius  eius  qui 
uenit  ad  alarcosT  audilo  quod  rex  castelle  mouerat  ei  guerram  indi- 
gnans  et  furore  repletus  tanquam  uir  strenuus  et  bellicosus  impaciens 
more  colecta  infinita  multitudine  militum  et  peditum  apertis  siqui- 
dem  thesauris  suis  stipendia  largissima  largitus  est  suis,  tune  enim 
florebat  regnum  marroquitanum  prudencia  et  diuiciis  et  multitudine 
bellatorum  transfretauit.  transitum  facit  per  yspalim.  et  cordubam 
transiens  portum  de  muradais.  obsedit  castrum  quod  dicitur  salua 
tierra.  tune  erat  caput  milicie  fratrum  de  calalraua  munitum  quidem 

a)  misericordia.  —  b)  une  lettre  peu  lisible:  peut-ftre  c  fcentumj  s  fscilicetj,  — 
c)  potuit.  —  dj  manque  ab  (cf.  g  12  :  tercius  ab  alidelmum). 

18.  5.  Alphonse  VIII  suscita  en  effet  l'occasion  d'une  guerre  en  peuplant  la  ville 
de  Mora,  selon  Luc  (p.  iio,  1.  Si).  Dans  Rodrigue  il  y  a  aussi  une  allusion  obscure 
à  ce  fait:  «  postquam  et  Moiam  populauerat »  (VII,  3i).  Les  niss.  de  Luc,  Hh  f)8 
de  la  Bibl.  Nacional  et  2-c-5  de  la  Bibl.  Real,  ont  Moa  et  non  Mora.  Mondéjar 
{Memorias,  p.  289)  corrige  avec  raison  en  Moya,  Cette  ville  est  sur  l'evtrème  frontière 
orientale  de  la  Castille,  à  l'est  de  Cuenca  et  de  Cafiete.Mora  est  en  .\ragon.  On  ne  peut 
penser  à  la  ville  de  ce  nom  qui  est  au  sud  de  Tolède,  puisque  la  frontière  était  gardée 
alors  de  ce  côté  pdr  Salvatierra,  Alarcos,  donc  plus  au  sud.  —  Il  est  fait  allusion,  dans 
un  document  de  laSo  (Mein.  para  la  Vida  del  Santo  liey  D.  Fernando,  p.  ôaS)  aux 
obligations  contractées,  sous  Alphonse  VIII,  par  le  concejo  de  Moya  vis-à-vis  de  l'ordre 
de  Santiago.  Cf.  §  ^6,  où  il  est  dit  que  le  roi  de  Valence  vint  à  Moya  reconnaître  la 
suzeraineté  de  Ferdinand  III. 

18.  0.  Les.4rt.  Toled.  l  parlent  d'une  expédition  d'Alphonse  et  du  prince  Ferdinand 
vers  Alaxarch  (El  Caroch?)  et  Jâtiva,  jusqu'à  la  mer,  en  mai  121 1.  C'est  probablement 
celle  dont  parle  notre  auteur.  Il  n'est  question  de  ceUe  pointe  vers  Murcie  ni  dans 
Luc  ni  dans  Rodrigue.  Celui-ci  (\I1I,  35)  parle  d'une  expédition  i(  in  terra  Beatiae 
(Baeza),  Endugari  (Andùjar),  et  Glemini  (Jaen)  ».  Ni  l'un  ni  l'autre  ne  parle  non 
plus  de  la  prise  de  Guadalerza  par  Alfonso  Tcllez  et  Rodrigo  Iluiz.  Sur  ces  deux 
personnages,  cf  §  82,  note  i  et  7.  Ils  étaient  beaux-frères. 

18.  7.  Abenjacob  (Luc,  p.  1 10,  I.  5);  Mahomat  (Rodrigue,  VII,  35):  Mohammed 
Abou-Yacoub,  (ngg-i'îiS),  fils  d'Al-Manrour.  Rodrigue  établit  ainsi  sa  généalogie: 
<< ...  Mortuo  Abdelmuno  lilius  Aueniacob  successit  in  regno,  qui  in  Hispanias  veniens 
a  quodam  Christiano  occisus  fuit  in  Portngali.  Cui  successit  fra ter  eius  Adueniucepli 
(lire  Aueniuceph),  qui  in  bello  Alarcuris  repulit  christianos,  et  hoc  mortuo  sucessit  ei 
filius  eius  Auenmahomath,  qui  in  Nauis  Tolosa^  ab  Aldephonso  Rege  nobili  fuit 
victus..  »  (VII,  10).  Cf.  S  12,  note  h-  Rodri'guez  de  Almella  (lib.  III.  lit.  IV,  cap.  V) 
simplifie  en  faisant  du  vainqueur  d'.\larcos  (Abuhamad)  le  fils  et  le  successeur  direct 
d'Abdelmumen,  qu'il  appelle  Abdemon. 

18.  8.  C'est  par  là  qu'était  passé  son  père  (cf,  j  12)  pour  pénétrer  dans  la  plaine 
de  Salvatierra. 


273  BULLETIN    HISPANIQUE 

mullis  armis  diuersi  generis  frumento  et  ordeo  et  multiplicis  generis 
legumine.  carnibus  et  uiris  strenuis  fratribus.  s.  et  aliis  nobi- 
libus  et  preclaiis  uiris.  firmata  est  obsessio  ceperuntque  castruin 
expugnare  cuni  inacbinis  mire  magnitudinis'.i  quod  alias  inexpugnabile 
uidebatur. 

19.  Rex  aulem  nobilis  hoc  audito  precepil  dôno  didaco  ut  cum 
uasallis  suis  et  quibusdam  aliis  magn'tibus  apud  toletum  morani 
faceret.  Ipse  uero  rex  discurrebat  per  uillas  et  caslella  que  sunt 
ultra  serram  1  confortans  animos  hominum  [.]  exercitus  autem  quem 
potuit  habere  manebat  in  serra  sancli  uincencii».  Pauca  nanique 
concilia  secuta  fuerant  ipsum  in  illo  tempore.  Post  duos  menses  et  eo 
amplius  de  mandato  gloriosi  régis  predictum  castrum.  s.  salua  tierra 
redditum  fuit  régi  marroquitano.  quia  iani  ipsum  defendcre  non 
ualebant.  salua  uita  illorum  qui  intus  erant.  et  saluis  rébus  mobilibus 
quas  secum  asportare  potuerunt.  0  quantus  luctus  hominum  nox  una 
mulierum  plangenlium  et  pertutiencium"  pectora  sua.  pro  amissione 
salue  Ire-^.  sed  luctus  ille  per  miam  et  uirtutem  dni  nostri  ihû.  xpi. 
qui  adiutor  est  suorum  in  oportunitatibus  in  tribulatione  anno  reuo- 
luto  in  gaudium  est  conuersus.  Yere  quidem  presagio  quodam  castrum 
predictum  nominatum  est  saluatierra.  saluauit  enim  terram  totam  per 
illud  castrum  di  dupliciter.  qui''  aduentus  régis  marroquitani  in 
nullo  alio  nocuit  terre  in  anno  illo.  cum  multa  dampna  inferre  potuis- 
set.    Preterea  captio    salue  tre   fuit   occasio   precipua   belli   gloriosi 

a)  peicutientium,  —  b)  quoniam. 

18.9.  Luc  (p.  1 10,  l.  4o)  et  Rodrigue  (VM,  35)  signalent  aussi  l'emploi  de 
machines  de  f^uerre  lors  de  ce  sit'ge.  De  même  Innocent  IH  dans  sa  lettre  CLV  Seno- 
nensi  Archiep.  (p.  xcv  des  Ap.  aux  Memorias  de  Mondéjar;  dans  la  Pair.  lat.  de  Mif^ne, 
t.  CCXVl,  col.  bi!i).  Sur  Salvatierra,  voir  §  13,  note  5. 

19.  I.  La  Sierra  de  Gnadarrama. 

19.2.  La  Sierra  de  San  Vicente.  <(  Circa  conlinia  ïalauerae»,  dit  Rodrigue 
(Vil,  35).  La  petite  armée  royal^  était  donc  campée  en  arrière  do.  Talavera,  en 
réserve,  et  dans  l'attente  de  temps  meilleurs.  Cf.  An.  Toled.  l,  année  121 1  ;  Cron.  de 
Espana  éditée  par  Ucampo  (f"  cccxi-iiii')  :  ><  temiose  que  vernie  el  moro  mas  adelante 
cô  sus  gentes  grades  que  traye:  e  el  mitenie  guisado  d'iydiarcûei  :  t  mando  aperrebir 
q  se  g\iardascn  t  el  sobiosc  enla  sierra  de  sant  Uirite  c  cstudo  alla  bien  vn  mes 
c  despucs  tfirnarose  los  muros  para  su  tierra  »  ;  texte  que  traduit  le  manuscrit  S817 
de  la  IJibl.  \ac.  de  Madrid:  «...  tcuesse.  <[  vetssem  ns  moiiros  mays  adcaùt  como  erà 
muy  grandes  gentes  r,  el  n<>n  tijna  logo  g'sado  pa  lidarcoej.  Mt  mandou  apclidar 
toda  at'ra  e  el  sobiosse  ala  serra  de  San  Viccnro  c  estcue  en  ela  bem  liuii  mes.  r.  os 
mouros  tornarôse  p  a  sua  t'ra  «  (fol.  ai3).  Le  manuscrit  i3'i7  présente  une  variante: 
"...  temio  q  venia  mas  adelante  c  mâdo  •[  se  gsasen.  •  K  el  subio  ala  sierra  de  sant 
barlolome  ^mauvaise  lecture  pour  saM»F*?)  r.  estouo  ay  vn  mess  c  los  moros  tornarôse 
pa  su  Irrâ  »  (fol.  4"3').  D'après  Luis  del  Marmol  Carvajal,  cité  par  Mondéjar 
(Memorias,  p.  296),  et  dontiant  jtour  toutes  références  «  los  .Marabes  que  tratan  de 
esta  guerra  0,  le  roi  de  Castille  aurait  été  retenu  de  ce  côté  par  les  (iallegos,  c'est  à- 
dire  par  les  troupes  d'Alplionse  IX. 

M),  3.  «  In  opprol>riurn  lidci  cliristianii- »,  déclare  Rodrigue  (Vil,  35),  qui,  comme 
notre  auteur,  mais  en  un  style  apocalypti<|U(',  développe  cette  idée  que  ce  castrum 
fut  le  castrum  salulis,  puisqu'il  fut  l'occasion  de  la  victoire  de  las  Navas. 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROtS    DE    CASTILLE  278 

qilod  comissuni  est  in  anno  seqvienti.  in  nauas  de  lolosa  in  quo  per 
uirtutem  crucis  xpi  uictus  est  rex  marroquitanus.  Taclus  namque 
dolore  cordis  intrinsecus  rex  gloriosiis  posuit  animara  suam  in 
manibus  suis  et  habito  tractatu  et  deliljcratione  cum  fdio  suo  et  cum 
dijno  didaco  et  cum  archiepiscopo  lolclano  et  aliis  magnatibus 
regni  firniatuni  est  ut  in  anno  sequen  (fol.  97)ti''  spem  suam  ponentes 
in  deo  pugnarent  contra  regem  marroquitanum.  nisi  per  eum  staret. 
Exiit  igitur  edictum  a  rege  glorioso  per  nniuersum  regnum  ut  inter- 
missa  constuctione  maurorum"  oui  omnes  insistebant  arma  bellica 
compararent  et  se  ad  bellum  futurum  prepararenti>. 

20.  Posthocelapsis  uix  XV"'".  diebuspredictusferrandusfdius régis, 
Flos  iuuenum  decus  regni.  patris  dextera  uile  sue  correptus  acuta  febre 
in  madrit  terminum  dédit  •.  Emarcuit  cor  régis  obstupuerunt  principes 
eius  et  nobiles  terre,  populi  ciuitalum  extabuerunt  sapientes  et  territi 
suntanimaduertentesquod  iradeietindignatiodecreueratlerramponere 
'  desolatam.  Nusquam  luctus  aberali''.  seniores  consperserunt  capita  sua 
cinere.  induti  sunt  omnes  saccis  et  cilicio.  uirgines  omnes  scalide*^  faciès 
terre  penitus  ïmutata  est.  Nobilissima  regina  aliéner  audita  morte  fdii 
mori  cum  eo  uoluit  et  intraù  lectum  in  quo  iacebat  fdius.  et  sup- 
ponens  os  ori.  et  manus  manibus  complicans  nitebatur  uel  eum 
uiuificare  uel  cum  eo  mori.  Sicut  asserunt  qui  uiderunt  nunquam 
dolor  illi  similis  uisus  fuit.  Exclamare  libet  cum  populo.  0  altitudo 
diuiciarum  sapïe  et  scié''  dei  quam  in  comprehensibilia  sunt 
îudicia  eius  et  inuestigabiles  uie  ipsius.  profunde  nimis  facte  sunt 
cogitationes  eius  et  nos  insensati  non  intelligimusa.  Que  uidebanlur 
inicia  dolorum  et  confirmatio  malorum.  ipsa  fuerunt  finis  malorum. 
et  inicinm  gaudii  et  consolationum.  Sepulto  namque  prediclo  filio 
régis,  in  monasterio  regali  quod  est  iuxta  burgis  -  situm  per  manum 

a)  constructirme  muronim.  —  b)  .\bella:  «forte  aberat».  —  cj  squnlide.  —  dj  sapientie 
et  scientie.  —  e)  Sic. 

ig.  4.  De  même  Rodrigue  (VII,  35). 

iij.  5.  Ce  fut  donc  une  mesure  générale.  Le  texte  d'Ocampo  la  limite  aux  murailles 
de  Maqueda  :  «  Este  fecho  vieno  el  rey  a  Maqueda  c  vio  como  labrauâ  el  castiello 
E  mâdo  que  lo  non  labrasen:  c  ouo  su  consejo  ou  prelados  z  con  los  omes  bucnos  de 
su  tierra  que  mas  valdrie  lydiar  con  los  moros  e  moryr  o  vençer  que  ver  de  cada  dia 
tantes  pesares  e  tanto  agrauamirlo  en  su  tierra  »  (fol.  ccc\ciiir),  texte  qui  est  à 
peu  près  identique  dans  le  manuscrit  iSiy  et  que  traduit  littéralement  le  8817. 

20.  I.  Luc  (p.  III,  1.  g)  dit  que  le  jeune  prince  haïssait  les  juifs  et  que  ceux-ci,  «  vt 
fertur»,  l'empoisonnèrent.  —  L'infant  était  né  le  jour  de  Saint-Saturnin  (29  nov.) 
de  1 189  (Fierez,  lieynas,  t.  I,  p.  4i5)  et  il  mourut  le  i4  octobre  121 1  (p.  417).  Cf.  Ann. 
Compost.:  «  Era  MCGXLIX,  idus  octobris  »;  yln.  To/ed. /.•«  dia  viernes  en  la  noche 
en  XIV  dias  doctober,  Era  MCCIL». 

20.  2. 'Ni  Rodrigue  ni  Luc  n'ont  trouvé  d'aussi  beaux  accents  pour  pleurer  le 
jeune  prince,  ni  pour  montrer  la  douleur  que  causa  sa  mort.  Il  y  a  là  une  belle  page, 
très  touchante,  d'où  ressort  l'héroïsme  d'Alphonse  le  Noble,  qui  resta  à  son  poste 
pendant  qu'on  enterrait  son  fils.  Albéric  (cf.  note  initiale  de  II,  B)  a  confondu  les 
deux  flls  d'Alphonse,  il  a  mis  Henricus  pour  Fernandus. 


2  74  BULLETIN    HISPANIQUE 

archiepiscopi  toletani.  présente  regina  dna  berengaria  et  lamentan- 
tibus  cunctis  qui  erant  in  castella''.  Rex  nanique  gloriosus  et  iixor  eius 
et  donus  didacus  remanserunt  ultra  serram.  Reuersus  est  archiepi- 
scopus  et  regia"  dna  berengaria  ad  regem  quem  inuenerunt  apud 
guadalfaiaraiu  i  Exinde  rodericus  archiepiscopus  toletanus  missus  est 
ad  regem  francie  et  ad  principes  et  alios  nobiles  iliarum  parcium  ut 
ostenderet  eis  angustlam  populi  xpi  et  discrimen  belli  futuri^.  Rex  uero 
nobilis  iuit  concam  uir''  colloquiuni  habuit  cum  amico  suo  petro  rege 
aragon.  et  iuraniento  sibi  eum  astrinxit  ut  octaua  die  fesli  pentc- 
costes  proximo  uenturus'  esset  apud  toletuui  cum  rege  castelle.  paratus 
ad  bellum  contra  regem  marroquitanumij.  Recesserunt  ab  inuicem 
coUoquio  babito.  et  rex  nobilis  indutus  uirtute  ex  alto  iuit  ad  castruni 
quod  dicilur  alarcon  et  ibidem  dimissis  uxore  et  fdia.  cum  paucis 
militibus  et  bominibus  quarumdam  uillarum  et  domesticis  suis  cepit 
infra  ,XV.  dies  nobile  castrum  de  xorqra  quod  inex  |  pugnabile 
uidebatur.  et  castrum  de  alcala.  et  las  cuevas  de  garanden.  queomnia 
muniu5''  armis  et  bominibus  et  sic  cum  gaudio  reuersus  est  in  terram 
suam7. 

Georges  CIROT. 
(A  suivre.) 

a)  Sic  —  b)  h/u' (erreur  de  Iransciiplion  de  u). —  c)  Xb^.Ua:  l'iorle proxime  venluri  »: 
proxivie  est  une  tonne  correction  si  on  en  fait  un  adjectif  (proximae)  :  mais  nenlurtis 
doit  subsister.  —  d)  tiiuniitit. 

20.  3.  «  In  monaslciio  sancla-  Mari.T»,  précisent  Luc  (p.  iii,  1.  10)  et  nodrijrue, 
qui  ajoute  «  a  Roderico  Toletauo  pontifice,  &  mullis  episcopis,  vS;  mag^natibus  s;ticula- 
ribiis  vS:  rclif^iosis.  »,  et  qui  place  ici  un  éloge  de  Bérengère  (Ml,  30). 

20.  'i.  (iuadalajara  i<  Dcsi  alos  quarenla  dias  acabados  tornuse  la  rcyna  para  su 
padre  que  era  en  Guadalfajara»  (texte  d'Ocampo,  fol.  i:(:(:\(;nii,  et  manuscrit  iS'i;, 
fol.  Ito'i).  Le  manuscrit  8817  dilTèreici:  <(  de»!  aos  X"  dias  acabados.  tornouse  pa 
Madrid  du  era  alteyna  sua  mad'.  <-  eslaua  y  scu  |)adrc  »  (fol.  j.io'). 

30.  5.  Luc  dit  que  Rodrigue  avait  l'autorisation  du  pape  Innocent  (111)  pour 
prèclier  cette  croisade  (p.  no,  1.  55).  Rodrigue  lui-même  ne  fait  qu'une  modeste 
allusion  à  son  propre  rôle  (VHI,  i). 

ao.  0.  Rodrigue  mentionne  aussi  celte  entrevue  de  Cucnca  cl  ajoute  que  Pierre 
arriva  au  jour  dit,  l'octave  de  la  Pentecôte,  comme  le  note  pl\is  loin  notre  auteur 
(Sa.). 

ao.  7.  Luc  ne  mentionne  pas  ces  succès  préliminaires.  Rodrigue  (Vil,  36)  les 
détaille:  /l/ca/<i  (del  Jûcar),  Surcariam  (Jor(iuera),  Garndem{?)  <j-  Cubas  (près  de  Jor- 
quera,  voir  Madoz,  Cubai).  La  (^hronic|uc  générale  précise  «  non  Alcala  la  que  dizen 
de  Sant  Yuste, sinon  cil  daquella  tierra  »  (p.  688",  1.  37),  cl  traduit  «  Garadem  v*t  Cubas  n 
par  «  (iradicn  et  a  Cubas».  Cf.  An.  Toled.  I  :  «  ..  S()r(iuera,  c  las  Cuevas,  c  Alcala, 
e  otros  casliellos,  Lra  MCCIL.  »  Texte  d'Ocampo  (fol.  CCCCVCIIII)  :  «  ...  r  las  cueuas 
de  .\lgarande  r  a  Cubas  ». 


DOMlMQLi:   SOTO 


ET    LA 


scolâstique  parisienne 

( Suite  ^.) 


XXI 


L'ÉTUDE    DE     L\     LA.TITUDE    DES     FORMES     A     l'UmVERSITÉ     DE 

Paris,    au    début   du    xvi'^   siècle    (suite).    —    Alvarès 
Thomé  de  Lisboxjne. 

Si  nous  en  croyons  Louis  Vives,  les  plus  subtils,  les  plus 
abstrus  disputeurs  de  l'Université  de  Paris,  au  début  du 
xvi^  siècle,  étaient  les  maîtres  venus  d'Espagne  ;  en  eux, 
la  Dialectique  combinée  à  Oxford  trouvait  ses  plus  fermes 
champions. 

Aux  minutieuses  chicanes  du  Calculateur,  les  Scolastiques 
portugais  ne  trouvaient  pas  moins  d'attrait  que  les  Scolastiques 
espagnols,  si  nous  en  jugeons  par  Maître  Alvarès  Thomé  ou 
Alvarus  Thomas  de  Lisbonne. 

Ce  maître  était,  au  début  du  xvr  siècle,  régent  au  Collège, 
peu  connu,  de  Coqueret,  à  Paris.  Il  y  composa  un  traité  sur 
les  trois  mouvements  :  le  mouvement  local,  le  mouv-ement 
d'augmentation  et  le  mouvement  d'altération.  Dans  la  pensée 
de  l'auteur,  ce  Livre  du  triple  mouvement  avait  pour  principal 
objet  d'élucider  les  calculationes  de  celui  que  l'erreur  générale 
nommait  Suiseth;  et,  en  effet,  c'était  un  véritable  commentaire 

I.  Voir  IMU.  hisfi.,  t.  XU.  p.  276,  35-;  t.  XIII,  p.  107,  291,  l'io;!,  XIV,  p.  60,  137 


276  BtLLETÎN    lIlSPAMQt'E 

de  VOpus  aureuni  calcalationum.  Achevé  par  son  auteur  le 
II  février  lôog,  le  Livre  du  triple  mouvement  fut,  aussitôt  après 
sans  doute,  imprimé  à  Paris'.  Cent  soixante-deux  feuillets 
couverts,  sur  deux  colonnes,  d'un  texte  gothique  très  fin 
y  sont  consacrés  à  ces  calculationes  qui  avaient  le  don  de 
mettre  les  humanistes  en  fureur. 

Le  Tracta  tus  de  proportionibus  de  Thomas  Braduardine 
était,  en  réalité,  un  traité  du  mouvement  local-,  le  Tractatus 
proportionum  d'Albert  de  Saxe  était  un  traité  des  trois  mouve- 
ments, le  premier  que  nous  ayons  rencontré.  Chacun  de  ces 
deux  traités  de  Mécanique  était  précédé  d'une  introduction, 
purement  mathématique,  où  le  lecteur  trouvait  les  notions 
d'Arithmétique  utiles  pour  la  lecture  du  reste  de  l'ouvrage. 
Une  telle  introduction  manquait  au  livre  du  Calculateur; 
Riccardus  de  Ghlymi  Eshedi  supposait  que  son  disciple  eût 
appris  ailleurs  la  théorie  des  proportions,  par  exemple  en 
l'opuscule  de  Bradwardine,  auquel  il  renvoyait  explicitement. 

Certains  maîtres  jugèrent  que  VOpus  calcalationum  serait 
plus  parfait  s'il  était  précédé  d'une  introduction  arithmétique 
où  les  règles  des  rapports  et  proportions  seraient  établies, 
et  ils  entreprirent  de  composer  une  telle  introduction.  De  ce 
nombre  fut  un  certain  Bassanus  Politius;  son  Tractatus  pro- 
portionum i/ilroduclorius  ad  calculationes  Suisset  fut  imprimé 
à  Venise,  en  i5o5,  en  une  collections  qui  contenait  également 
les  Tractatus  proportionum  de  Thomas  Bradwardine  et  de 
Nicole  Oresme,  le  Tractatus  de  latitudinibus  formarum  ilaussemenl 
attribué  à  Oresme,  et  l'écrit  sur  le  même  sujet  qu'avait 
composé  Biaise  de  Parme. 

Maître  Alvarès  Thomé  ne  trouve  nullement  que  Bassanus 


I.  Liber  de  Iriplici  motii  proportionibus  annexis  magistri  Ahiari  Thome.  Ulix- 
boncnsis  philosophicas  Suiselk  calculationes  ex  parte  declarans.  Vciiundaiiliir  parrhisiiis 
el  a  ponceto  le  preux  eiusdciii  civilalis  bibliopola  ad  si^^'num  potli  staiinci  in  vico 
sancli  iacobi  propc  divi  yvonis  cdem  commoraiile.  —  l'remicr  colopboii,  à  la  fin 
du  texte  de  l'auteur:  Kx|)licit  lib(;r  de  triplici  niotu  compositus  pcr  Ma;;isfruin 
Aluarum  Thomam  ulixboiiciiscni  Uegentcni  Parrliisius  in  Collr;,MO  Coquorcli.  Anno 
domini  lâofj.  Die  Februarii  11.  —  Second  colophoii,  au  vcrs.0  du  dernier  feuillet: 
Impressum  parrisius  per  Guillernium  Anabat  commorantein  apud  parvuni  ponlem 
anle  hospiliurn  dei  prope  intersignium  Imperatoris  expensis  ponseti  le  preux  eius- 
dem  civilatis  bibliopole.  Oinnia  pro  meliori. 

a.  Nous  avons  décrit  celte  collection  au  S  XIX. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQUE   PARISIENNE  277 

Polilius  ait  réussi  en  son  entreprise  d'écrire  une  introduction 
aux  Calculationes  de  Suiseth  ;  à  cette  introduction,  il  adresse 
de  vives  critiques'.  «En  son  exorde,  »  dit-il,  «l'auteur  professe 
que  son  traité  des  proportions  est  introductoire  aux  calcu- 
kitions  Suiséthiques;  mais  au  sujet  de  la  proportionnalité  des 
rapports,  le  Calculateur  Suiseth  pense  tout  autrement  que  lui 
et  s'écarte  extrêmement  de  lui...  Il  na  donc  pas  compris 
l'intention  du  Calculateur;  son  traité,  bien  loin  de  nous 
introduire  en  l'intelligence  de  cet  auteur,  nous  en  éconduit 
plutôt.  » 

Cette  introduction  arithmétique  qu'il  reproche  à  Bassanus 
Politius  d'avoir  mal  faite,  Âlvarus  Thomas  tente,  à  son  tour, 
de  l'écrire,  et  il  y  consacre  les  deux  premières  parties  de  son 
livre.  Il  se  montre  fort  au  courant  des  divers  traités,  tant 
anciens  que  modernes,  sur  les  proportions;  il  cite  ceux  de 
Thomas  BradAvardine'  et  de  Nicole  Oresme,  qu'il  nomme 
Horen^;  il  use  des  Elemenla  Jordanie,  c'est-à-dire  de  l'Arithmé- 
tique de  Jordanus  Nemorarius,  alors  fort  à  la  mode,  et  que 
Lefèvre  d'Étaples  avait  fait  imprimer  à  Paris  en  i/jgG.  Même 
lorsqu'il  invoque  les  auteurs  de  l'Antiquité,  il  entend  s'adresser 
aux  bonnes  éditions.  «  Bemarquez,  »  dit-il^,  «que,  chaque  fois 
que  j'invoque  Euclide,  je  me  sers  de  la  nouvelle  traduction 
de  Bartholomaeus  Zambertus.  » 

L'étude  du  triple  mouvement  fait  l'objet  de  la  seule  troi- 
sième partie  du  livre;  cette  partie  est,  il  est  vrai,  de  beaucoup 
la  plus  étendue.  Destinée  surtout  à  commenter  l'œuvre  du 
Calculateur,  cette  étude  n'est  cependant  pas  construite  sur  le 
plan  du  traité  de  Biccardus  de  Ghlymi  Eshedi;  c'est  le  Trac- 
tutus  proporfionum  d'Albert  de  Saxe  qui  continue  à  marquer  à 
Maître  Alvarus  Thomas  l'ordre  qu'il  va  suivre,  comme  il  a 
marqué  l'ordre  suivi  par  Guillaume  Heytesbury  au  Tractatus 
de  tribus  prsedicamentis,   et,    plus   récemment,  l'ordre  adopté 

I.  Alvari  Thom.c  Op.  laud.,  parsl,  capitulum  quitiluni  in  quo  recitalur  paucis  et 
impugnatur  opinio  Basani  Polili  de  proportione  sive  commensurabililate  propor- 
lioQum;  fol.  sign.  diii,  col.  d;  fol.  sign.  diii,  recto  et  verso;  fol.  suivant,  col.  a. 

a.  Alvari  Thomae  Op.  laud.,  fol.  sign.  eii,  col.  a. 

3.  AIvrfri  ThomiE  Op.  laud.,  fol.  suivant  le  fol.  sign.  diii,  col.  d. 

4.  Alvari  Thomae  Op.  laud  ,  fol.  sign.  diii,  col.  c. 

5.  Alvari  Thomae  Op.  laud.,  fol,  suivant  le  fol.  sign.  diii,  col  b. 

Bull,  hispan.  19 


378  BULLETIN    HISPANIQUE 

par  Jean  Dullaert  en  son  étude  du  mouvement.  La  seconde 
partie  du  Liber  de  triplici  motu  est  donc  divisée  en  quatre 
traités  que  caractérisent  les  titres  suivants  : 

Tractatus     P*  :  De  motu  locali  quoad  causam. 
ÏRACTATUS    II°*  :  De  molli  locali  quoad  ejjechun. 
Tractatus  IIP*  :  De  mola  augmentationis. 
Tractatus  IV"  :  De  mola  alleralionis . 

Non  seulement  le  Maître  portugais  a  substitué  au  plan 
adopté  par  le  Calculateur  un  plan  plus  logiquement  conçu, 
mais  il  a  mis,  en  ses  discussions,  beaucoup  plus  de  clarté  que 
n'en  avait  introduit  le  logicien  d'Oxford;  sans  doute,  nous 
reprocherions  volontiers  à  beaucoup  de  ces  discussions  d'être 
encore  trop  chicanières  et  trop  compliquées;  bien  souvent, 
cependant,  on  les  peut  suivre  sans  éprouver  cette  impression 
de  mortel  ennui  que  cause  la  lecture  de  VOpiis  aureum  calcula- 
lionum. 

L'ordre  plus  logique  adopté  par  Alvarus  Thomas  lui  permet 
d'être  plus  complet  que  ne  l'a  été  le  Calculateur;  c'est  ainsi 
qu'en  son  quatrième  traité,  il  examine  le  problème  de 
l'intensité  et  de  la  rémission  des  formes  dune  tout  autre 
manière  que  Riccardus  de  Ghlymi  Eshedi  ne  l'avait  fait. 
Il  distingue'  trois  théories  :  celle  de  Saint  Thomas  d'Aquin, 
celle  de  Burley,  enfin  celle  qu'ont  développée  Duns  Scot  et 
des  Nominalistos,  celle  selon  laquelle  Tintensité  d'une  forme 
s'accroît  par  addition  de  degrés  nouveaux  à  des  degrés  de 
même  espèce. 

Lorsqu'il  se  propose  de  présenter  la  théorie  thomiste,  il 
invoque  non  seulement  l'autorité  de  l'Ange  de  l'Ecole,  mais 
encore  celle  de  son  commentateur  Du  Chevreul  (Capreolns  "■ . 
Son  érudition,  d'ailleurs,  se  montre  fort  étendue;  les  diverses 
discussions  relatives  au  mouvement  d'altération  lui  donnent 
occasion  de  citer  r«on  seulement  Saint  Thomas  d'Aquin,  Duns 
Scot,  Grégoire  de    Himini,  \V aller  Burley  et  Hobcrt  llolkot\ 

1.  Alvari  Thomic  Op.  laud.,  (liirs  III,  Iracl.  IV,  capiluhim  sciMindiim  in  quoagitur 
«le  iiilcDisionf;  et  rcmissioni!  forrnanirii. 

2.  Alvari  Thomas  Op.  laud.,  loc.  rit.,  fol.  siyn.  A.  1,  coll.  a  el  b. 

.'5.  Alvari  Thom;i'  Op.  laud.,  fol.  sign.  A  i.,  col.  a;  fol.  sij,Mi.  B  a,  col.  a. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SGOLASTIQUE    PARISIENNE  279 

non  seulement  le  Tracfatus  proportionum  d'Albert  de  Saxe>, 
les  Sophismala  d'Heytesbur\  ^  et  les  Calculationes  du  prétendu 
Suiselh,  mais  encore  le  De  f/eneraiione  et  corruptione  de 
Marsile  d'inghen^  et  la  Siiinma  phUosophue  de  Paul  de  Venise'', 
le  traité  que  Jacques  de  Forli  a  intitulé  De  inlensione  et 
remissione  formarum^  et  les  commentaires  qu'il  a  composés 
sur  les  Canons  d'Avicenne^'-,  l'opuscule  De  moiii  allerationis 
écrit  par  Jean  de  Casai"  et  le  livre  De  primo  et  uliimo  instanti 
de  Pierre  de  Mantoue^. 

Lorsqu'il  cite  soit  le  De  motu  locali^,  soit  les  Sophi^mata^^^ 
de  Guillaume  Heytesbury,  Alvarès  Thomé  dit  parfois  :  «  Henlis- 
berus  cum  suo  commentatore  o.  Le  commentateur  auquel  il  fait 
allusion,  il  lui  arrive  aussi  de  le  désigner  par  son  nom,  assez 
étrangement  déformé '•;  c'est  Gaétan  de  Tiène,  qu'il  appelle 
Gaythanus  de  Thebis. 

Quant  à  Nicole  Oresme,  nous  avons  vu  que  notre  auteur  le 
connaît  et  le  cite;  tout  à  l'heure  il  nous  dira  lui-même  ce 
qu'il  lui  doit. 

Cette  liste  d'auteurs  cités,  qu'il  serait  facile  d'allonger,  nous 
dit  assez  quelle  était  l'érudition  de  maître  Alvarus  Thomas  ;  son 
éclectisme  n'est  pas  moindre.  S'il  commente  le  Calculateur, 
ce  n'est  pas  pour  en  suivre  aveuglément  toutes  les  opinions; 
bien  au  contraire  ;  de  ces  opinions  il  en  est  be^iucoup  qu'il 
condamne,  et  sévèrement.  S'il  a  étudié  de  près  Heytesbury,  ce 
n'est  pas,  tant  s'en  faut,  pour  adopter  l'avis  du  logicien 
d'Oxford.  Enfin,  malgré  son  admiration  pour  Nicole  Oresme, 
lorsqu'il  rencontre,  en  lisant  cet  auteur,  une  démonstration 
qui  lui  semble  insulTisante,  il  signale  ce  défaut  et  le  corrige '2, 

1.  Alvari  Thom.'e  Op.  laad.,  premier  fol.  après  le  fol.  sign.  yii,  col.  b. 

2.  Alvari  Thomie  Op.  laud.,  fol.  sign.  B  i,  col.  a. 

3.  Alvari  Thom.'e  Op.  laud.,  fol.  sign.  C  i,  col.  b. 

4.  Alvari  Thom.-c  Op.  laud.,  premier  fol.  après  le  fol.  sign.  yii,  coll.  a  et  b. 

5.  Alvari  Thoma?  Op.  laud.,  premier  fol.  après  le  fol.  sign.  B.  3,  col.  d;  troisième 
fol.  après  B.  3,  col.  a. 

0.  Alvari  Thomie  Op.  laud.,  premier  fol.  après  yii,  col.  d;  fol.  sign.  G  i,  col.  a. 

7.  Alvari  Thom.n  Op.  laud.,  premier  fol.  après  le  fol.  sign.  z  3,  col.  d. 

8.  Alvari  Thom;e  Op.  laud.,  ihid.,  et  premier  fol.  après  le  fol.  sign.  A  i,  col.  h. 
f).  Alvari  Thomas  Op.  laud.,  fol.  sign.  x  2,  col.  d. 

10.  Alvari  Thomas  Op.  laud.,  fol.  sign.  B  i,  col.  a. 

11.  Alvari  Thomie  Op.  laud.,  fol.  sign.  gii,  col.  a. 

II.  Alvari  Thoma-  Op.  laud.,  premier  fol.  après  le  fol.  sign.  diii,  col.  d. 


:J8o  BULLETtN    HlSPAJJlQÙË 

Le  mouvement  est  capable  de  deux  sortes  d'uniformités  ou 
de  difformités;  l'une  a  trait  au  sujet  et  l'autre  au  temps.  Cette 
distinction  classique  trace  à  notre  Maître  ])ortugais  le  plan  de 
son  étude  du  mouvement  local  considéré  comme  effet;  c'est  la 
difformité  par  rapport  au  sujet  qui  l'occupe  tout  d'abord. 

Touchant  1q  mouvement  de  rotation,  une  définition  est 
commune  depuis  le  temps  où  Bradwardine  l'a  proposée:  La 
vitesse  du  corps  qui  tourne,  c'est  la  vitesse  du  point  qui  se 
meut  le  plus  rapidement.  Motre  auteur  connaît  et  expose  cette 
opinion  qu'il  nomme  opinion  de  Guillaume  Heytesbur\ '. 
Chose  digne  de  remarque,  il  la  rejette,  comme  Jean  Majoris  le 
faisait  au  même  temps,  pour  reprendre  la  théorie  soutenue  en 
ce  traité  De  proportionalitale  motaiim  et  mag/iitadinum  que  nous 
avons  rencontré  à  l'origine  même  de  la  Cinématique  '.  Lorsque 
le  rayon  d'un  cercle  ou  une  partie  de  ce  rayon  tourne  autour 
du  centre  du  cercle,  le  mouvement  de  ce  segment  de  droite 
est  uniformiter  dijformis  quoad  subjectuni;  «  la  vitesse ^  de  ce 
mouvement  uniformément  diflorme  par  rapport  au  sujet  doit 
être  regardée  comme  équivalente  en  mesure  (comme nsurari)  au 
degré  moyen  de  la  latitude  totale  de  ce  mouvement  unifor- 
mément difforme.  » 

Celte  conclusion  nous  laisse  entrevoir  en  quel  sens  Alvarcs 
Thomé,  abordant  l'étude  du  mouvement  difforme  par  rapport 
au  temps,  répondra  aux  questions  suivantes''  : 

((  Tout  mouvement  uniformément  difforme  par  rapport  au 
temps  doit  il  être  mesuré  par  le  degré  moyen?  Tout  mou- 
vement difformément  diiîorme  par  rapport  au  temps  doit-il 
être  mesuré  par  réduction  à  l'uniformité?  » 

Si  nous  en  croyons  notre  auteur,  la  discussion  de  ces 
questions  avait  pris,  à  l'Université  de  Paris,  une  grande 
ampleur  en  même  temps  qu'une  extrême  complication.  «  Nous 
examinerons,  »  dit-il^,   «  en  fonction  de  quoi  se  doit  mesurer 


I.  Alvari  Thom.T!  Op.  laud.,  fol.  suiv.  le  fol.  sign.  n  a,  col.  c. 
j.  Voir  S  VIII. 

3.  Alvari  Tlioin;r  Op.  laud.,  fol.  sign.  o  3,  col.  c. 
It.   Alvari  Tliom.i'  Op.  Inwl.,  fol.  sign.  o  3,  col.  d. 

.S.  Alvari  Ttionitr;  Op.  loud.,  premier  fol.  après  le  fol.  sign.  n  i,  col.  d;  fol.  suiv., 
col.  a. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA.    SGOLASTIQUE    PARISIENNE  28 1 

la  vitesse  du  mouvement  diflbrme  par  rapport  au  temps, 
aussi  bien  du  mouvement  uniformément  difforme  que  du 
mouvement  difïbrmément  diflbrme;  nous  discuterons  cette 
question  dans  la  limite  de  notre  faible  intelligence.  En  cette 
ré^on,  en  effet,  s'ouvre  un  gouffre  profond  ;  le  labyrinthe  qui 
enserre  cette  matière  est  inextricable  et  incompréhensible 
pour  une  raison  finie;  parmi  les  divers  cas  qui  seront  posés, 
on  verra  quelles  monstruosités  et  quelles  difformités  on  peut 
imaginer  en  des  mouvements  difformément  difformes,  o 

En  effet,  les  arguments  de  ceux  qui  veulent  rejeter  cette 
opinion  :  Le  mouvement  uniformément  diflbrme  est  mesuré 
par  son  degré  moyen,  se  dressent  en  une  longue  suite  de  sed 
contra;  c'est  une  belle  liste  de  sophismata,  propres  à  exercer  la 
sagacité  des  dialecticiens  désireux  de  les  résoudre;  il  suffît  de 
comparer  cette  discussion  épineuse  au  chapitre  si  simple  et  si 
clair  oîi  Oresme  avait  traité  le  même  sujet  pour  comprendre 
tout  le  mal  que  la  Logique  oxfordienne  a  fait  à  la  Logique 
parisienne. 

De  celle-ci,  cependant,  Alvarès  Thomé  retrouve  la  netteté 
lorsqu'il  s'agit  de  rejeter  la  multitude  de  ces  sed  contra  et 
d'aboutir  à  une  conclusion  :  «  A.  l'opposé  de  ces  objections,  » 
dit-il >,  «  est  l'opinion  commune  des  philosophes;  et,  en  cette 
partie,  cette  opinion  a  beaucoup  de  vigueur  et  de  force. 
En  outre,  en  la  durée  totale  d'un  tel  mouvement  diflbrme, 
quel  qu'il  soit,  un  certain  espace  est  franchi.  Ce  même  espace 
peut,  dans  le  même  temps,  être  franchi  à  l'aide  d'une  certaine 
vitesse  uniforme.  Cette  vitesse  uniforme  vaut  donc  autant  que 
la  vitesse  de  ce  mouvement  difforme,  puisquà  l'aide  de  ces 
deux  vitesses,  le  même  espace  est  franchi  dans  le  même 
temps;  cela  résulte  évidemment  de  la  définition  des  mouve- 
ments égaux  en  vitesse.  Donc,  tout  mouvement  diflbrme 
correspond  à  un  certain  mouvement  uniforme  auquel  il 
équivaut.  » 

Ce  passage  définit  d'une  manière  très  claire  ce  que  sera  la 
réduction  d'un  mouvement  difforme  quelconque  à  l'unifor- 
mité. 

I.  Alvari  Thomae  Op.  laud.,  troisième  fol.  après  le  fol.  sign.  o  3,  col.  b. 


28a  BULLETIN    HISPANIQUE 

Comment  se  fera  cette  réduction  dans  le  cas  du  mouvement 
uniformément  difforme? 

«  Le  mouvement  uniformément  difforme  peut  se  terminer  à 
zéro  en  l'une  de  ses  extrémités'  ou  bien  il  peut  être  terminé, 
de  part  et  d'autre,  à  un  certain  degré.  De  chacun  de  ces 
mouvements  uniformément  difformes,  on  dit  qu'il  correspond 
à  son  degré  moyen,  c'est-à-dire  au  degré  de  mouvement  qu'il 
a  au  milieu  de  sa  durée.  En  effet,  en  la  moitié  la  plus  intense 
du  mouvement,  le  mobile  mû  de  mouvement  uniformément 
difforme  se  meut  plus  vite  [que  ce  degré  moyen];  et  en  la 
moilié  moins  intense,  il  se  meut  moins  vite  d'une  quantité 
égale;  il  se  meut  donc  avec  la  même  vitesse  que  s'il  se  mouvait 
avec  ce  degré  moyen.  » 

C'est  là,  on  le  voit  sans  peine,  une  sorte  de  résumé  du 
raisonnement  de  Nicole  Oresme,  fort  semblable  à  celui  que 
Jean  Majoris  donnait  à  ses  élèves. 

Le  Maître  portugais  poursuit  en  énumérant,  du  mouvement 
uniformément  difforme,  diverses  propriétés  dont  il  emprunte 
les  énoncés  et  les  démonstrations  au  Traclatiis  de  mofii  locali 
et  aux  Probationes  conckisionum  de  Guillaume  lleytesbury. 
En  particulier,  Heytesbury  et  ses  commentateurs  italiens  lui 
suggèrent  la  remarque  suivante"^:  «  Autre  chose  est,  pour  la 
latitude  du  mouvement,  de  croître  ou  de  décroître  unifor- 
mément en  intensité,  autre  chose  est,  pour  le  mobile,  de  se 
mouvoir  uniformément.  Lorsqu'en  effet,  la  latitude  du  mou- 
vement croît  uniformément  en  intensité  depuis  zéro  ou  depuis 
un  certain  degré  jusqu'à  un  certain  autre  degré,  le  mobile 
se  meut  toujours  dun  mouvement  uniformément  dilTorme. 
Et  de  même,  quand  la  latitude  du  mouvement  se  relâche 
uniformément  depuis  un  certain  degré  jusqu'à  zéro  ou  jusqu'à 
un  certain  autre  degré,  le  mobile  se  meut  d'un  mouvement 
uniformément  difforme.  Il  reste  donc  que  tout  mouvement 
acquis  ou  perdu  d'une  manière  uniforme  est  un  mouvement 
uniformément  dilforme.  Vous  pouvez  étudier  plus  amplement 
cette  matière  en  recourant  au  premier  chapitre  du  Traité  du 

I.    \lvari  Tliom.iî  Op.  laud.,  fol.  cit.,  col.  c. 

a.   Al  va  ri  Thomii!  Op.  laud.,  f«l.  sigii.  p  -j,  col.  c, 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SGOLASTIQUE    PARISIENNE        -  283 

mouvement  local  d'Hentisber,  et  aux  commentaires  du  même 
Hentisber,  qui  se  trouvent  adjoints  à  la  fin  de  ce  traité'.  » 

Guidé  par  les  Proballones  coaclasionam  d'Heytesbury  et  par 
les  Calciilaiiones  du  Pseudo-Suiseth,  Alvarès  Thomé  formule 
et  établit  les  propositions  suivantes ^  : 

En  tout  mouvement  dont  l'intensité  croît  ou  décroît  d'une 
manière  uniforme,  la  vitesse  correspond  au  degré  moyen,  car 
un  tel  mouvement  est  uniformément  difforme. 

Tout  mouvement  dont  l'intensité  croît  de  plus  en  plus 
vite  correspond,  en  vitesse,  à  un  degré  moins  intense  que  le 
degré  moyen  entre  les  deux  intensités  extrêmes. 

Tout  mouvement  dont  l'intensité  croît  de  plus  en  plus 
lentement  correspond,  en  ce  qui  concerne  l'espace  parcouru, 
à  un  degré  plus  intense  que  la  moyenne  entre  les  deux 
intensités  extrêmes. 

Après  avoir  ainsi  développé  les  enseignements  d'Henlis- 
berus  et  du  Calculateur,  le  Régent  du  Collège  de  Coqueret 
va  tirer  parti  des  leçons  d'Oresme;  c'est  à  cet  auteur,  en 
particulier,  qu'il  emprunte  quatre  lemmes  au  sujet  desquels 
il  s'exprime  en  ces  termes  ^  :  «  Pour  ne  pas  paraître  triompher 
en  portant  des  dépouilles  qui  ne  sont  pas  nôtres,  nous  décla- 
rerons ceci  :  Ces  quatre  conclusions  sortent  de  la  fabrique 
et  proviennent  de  l'intelligence  perspicace  du  très  docte 
Maître  Nicole  Horen;  vous  les  trouverez  au  quatrième  chapitre 
de  son  Traité  des  proportions,  pourvues  de  tous  leurs  appuis 
et  de  leurs  démonstrations  mathématiques.  » 

Ces  lemmes,  d'ailleurs,  vont  servira  résoudre  des  problèmes 
dont  Oresme  a  donné  le  type'*  :  Une  heure  a  été  divisée  en 
parties  proportionnelles  successives  dont  les  durées  décroissent 
en  progression  géométrique  de  raison  1/2;  pendant  chacune 
de  ces  durées,  un  mobile  se  meut  de  mouvement  uniforme; 
les  vitesses  de  ces  mouvements  uniformes  successifs  sont 
entre  elles  comme  les  nombres  entiers  successifs;  quel  est 
l'espace  parcouru  par  le  mobile,  en  cette  heure? 

1.  C'est-à-dire  aux  Probationes  conclusionam. 

2.  Alvari  Thom.nR  Op.  laud.,  fol.  siga.  p  2,  coll.  c  et  d;  fol.  suiv.,  coll.  a,  b  et  c 

3.  Alvari  Thom.T  Op.  laud.,  second  fol.  après  le  fol.  sign.  p  2;  col  d. 
U.  Voir  S  XVIII. 


284  BULLETIN   HISPANIQUE 

A  ce  problème,  Oresme  en  avait  joint  un  autre  de  même 
sorte,  où  les  mouvements  uniformément  variés  alternaient 
avec  les  mouvements  uniformes;  Bernard  Torni  en  avait  traité 
quelques  uns  du  même  genre  et  Jean  DuUaert  en  avait  ajouté 
d'autres.  Alvarès  ïhomé  se  propose  de  résoudre  des  questions 
beaucoup  plus  générales  que  celles  qui  avaient  été  éludiées 
avant  lui;  soit  qu'il  laisse  une  entière  indétermination  à  la 
raison  de  la  progression  géométrique  suivant  laquelle  décrois- 
sent les  parties  proportionnelles  de  l'heure,  soit  qu'il  impose 
diverses  lois  à  Taccroissement  des  vitesses  successives,  il 
ne  cherche  plus  à  résoudre  des  problèmes  numériquement 
particularisés,  mais  à  établir  des  théorèmes  dont  chacun 
comprenne  une  infinité  de  telles  solutions. 

Les  problèmes  examinés  par  le  Maître  portugais  se  ramènent 
fréquemment  à  des  sommations  de  séries  très  simples  et 
apparentées  à  la  progression  géométrique;  il  sait  alors  mener 
la  solution  jusqu'au  bout,  démontrer  que  l'espace  franchi  est 
infini  ou,  s'il  est  fini,  en  donner  la  valeur. 

En  d'autres  cas,  il  rencontre  des  séries  qu'il  ne  sait  pas 
sommer,  celle  ci,  par  exemple,  qui  figure  en  sa  douzième 
conclusion  '  : 

1  2  3  /i  5 

2  22  2.2^  3,2^  fi.2^ 

Mais  il  remarque  que  la  somme  en  est  plus  grande  que  celle 
de  la  progression  géométrique 

I  I  I  I  I 


2  2  2  2^  2^' 

et  plus  petite  que  celle  de  la  série 

12345 

+  + 7-  +  ■ — 7-  + + =  2 

2  2»  2-*  2'*  2^ 

qui  a  été  évaluée  par  Oresme. 

D'autres    problèmes    seraient    moins    aisés    à    résoudre,   et 
notre  auteur  pense  qu'on  en  pourrait  composer  qui  excédas- 

I.  Alvari  Tliûm;i;  Op.  lauJ.,  second  fol.  après  le  fol.  sign.  q  3,  col.  d,  el  fol.  suiv. 
coll.  a  el  b. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    L\    SCOLASTIQUE    PARISIENNE  285 

sent  la  portée  d'une  intelligence  naturelle  de  capacité  finie. 
Il  ne  faut  point  se  hâter,  cependant,  de  déclarer  que  tel  cas 
particulier  est  insoluble.  «  Ici,  en  effet,  il  faut  remarquer'  que, 
parfois,  un  homme  pensera  qu'il  n'y  a  aucune  suite  ni  aucun 
ordre  de  proportions  en  un  cas  qui  lui  est  proposé;  néan- 
moins, s'il  mûrit  davantage  la  question,  il  pourra  se  faire  que 
cet  ordre  lui  saute  aux  yeux.  » 

Ces  sommations  de  séries  plus  ou  moins  compliquées  et  leur 
emploi  en  des  problèmes  de  Cinématique  n'étaient  nullement, 
au  temps  où  écrit  le  Régent  de  Coqueret,  des  exercices  réservés 
à  quelques  rares  mathématiciens;  les  problèmes  de  ce  genre 
se  proposaient  couramment,  en  ces  sortes  de  joules  dialectiques 
qui  trouvaient  si  grande  faveur  près  de  l'Université  de  Paris; 
nous  en  lisons  la  preuve  en  ces  conseils  qu'Alvarès  Thomé 
donner  à  celui  qu'embarrasserait  une  telle  question  : 

«  Mais,  me  direz-vous,  que  faut-il  riposter  au  calculateur 
qui  propose  de  tels  cas,  en  un  tournoi  littéraire  public,  par 
devant  une  nombreuse  assistance? 

»  Pour  répondre,  j'admets  une  certaine  proposition  qu'a 
admise  le  très  docte  auteur  qui  a  étudié  les  proportions. 
Maître  Nicole  Oresmc  :  Lorsqu'on  se  trouve  en  présence  d'un 
très  grand  nombre  de  grandeurs  et  que  les  valeurs  des  rapports 
de  ces  grandeurs  n'apparaissent  pas  aisément,  on  doit  penser 
que  beaucoup  de  ces  grandeurs  sont  incommensurables  entre 
elles^.  Ainsi,  les  espaces  parcourus  sont,  généralement,  incom- 
mensurables entre  eux.  Lors  donc  qu'on  vous  propose  un 
semblable  cas,  il  vous  faut  répondre  que  l'espace  parcouru  en 
l'heure  entière  est  incommensurable  avec  l'espace  parcouru 
en  la  première  partie  proportionnelle.  « 

En  affirmant  ainsi  que  la  somme  d'une  série  de  nombres 
commensurables  sera,  en  général,  un  nombre  incommen- 
surable, notre  Régent  du  Collège  de  Coqueret  fait  preuve 
d'une  divination  qu'il  est  permis  de  déclarer  fort  perspicace. 


I.  Alvari  Thomae  Op.  laud.,  troisième  fol.  après  le  fol.  sign.  3  q,  col.  d. 
s.  Alvari  Thoma;  Op.  laud.,  ibid. 

3.  Celte  proposition  est,  eii  effet,  le  fondement  du  Tractalus  de  proporlionaUtale 
motuum  cselestiunx  composé  par  Nicole  Oresme. 


286  BULLETIN    HISPANIQUE 

Il  prévoit  cependant  le  cas  où  la  réponse  qu'il  vient  de  dicter 
ne  satisferait  pas  le  calculateur  auquel  elle  serait  donnée, 

«  Mais,  me  direz-vous,  le  calculateur  va  insister  de  toutes 
ses  forces,  avec  aigreur  et  brutalité;  sa  bouche  distendue 
fera  rouler  les  paroles  à  grand  effet;  le  sourcil  relevé,  le 
front  plissé,  le  Visage  tragique,  il  affirmera  bruyamment  que 
son  argument  est  insoluble;  par  ses  clameurs  répétées,  il 
s'efforcera  de  démontrer  au  vulgaire  que  son  adversaire  est 
vaincu  et  défait. 

»  En  une  semblable  circonstance,  répondrai-je,  j'estime  qu'il 
vous  faut  user  de  deux  sortes  de  ruses. 

»  Première  ruse  :  Il  vous  faut  tourner  l'argument  de  l'adver- 
saire en  ridicule  et  en  dérision,  le  traiter  comme  question 
inutile  et  inintelligible;  demandez  que  l'on  vous  donne  une 
plume  et  un  encrier,  afin  qu'à  grand  renfort  de  multiplications 
et  d'algorithmes  de  toutes  sortes  il  vous  soit  possible  de 
calculer  l'intensité  de  la  vitesse  dans  le  cas  qu'il  vous  a 
proposé. 

»  Seconde  ruse  :  Répondez  brièvement  à  celui  qui  vous 
argumente  que  cette  vitesse  ne  se  peut  calculer  d'une  manière 
infaillible  et  précisément  exacte;  qu'il  en  est  de  même  d'une 
foule  d'autres  vitesses  difformes  que  l'on  ne  saurait,  d'une 
manière  naturelle,  réduire  à  l'uniformité.  Peut-être  va-t-il,  à 
grands  cris,  en  affirmant  le  contraire,  chercher  à  mettre  hors 
de  combat  celui  qui  lui  fait  cette  réponse.  Que  le  répondant, 
à  son  tour,  lui  propose  un  autre  cas  analogue  et  lui  dise 
d'évaluer  l'espace  parcouru  par  un  mobile  mù  de  telle  vitesse 
dilTormc.  S'il  dit  qu'il  n'est  pas  possible,  en  ce  cas,  de  trouver 
d'une  manière  naturelle  la  vitesse  équivalente,  le  répondant 
ajoutera  aussitôt  qu'il  en  est  de  même,  et  pour  la  même 
raison,  dans  le  cas  proposé  par  le  calculateur.  Si  celui-ci 
déclare,  au  contraire,  que  cet  espace  est  naturellement  assi- 
gnable mais  (ju'il  ne  le  veut  pas  assigner,  qu'on  lui  en  dise 
autant.  » 

(iràce  à  Maître  Alvarès  Tlioiné,  nous  venons,  pour  ainsi 
dire,  d'assister  à  une  de  ces  disputes  scolaires  pour  lesquelles 
les   humanistes  n'ont  trouvé    ni   assez  de   mépris   ni  assez  de 


DOMINIQUE    SOTO    ET    L\    SCOLASÏIQL'E    PARISIENNE  287 

colères.  A  n'en  regarder  que  la  mise  en  scène,  elles  étaient, 
il  faut  l'avouer,  du  dernier  ridicule;  ces  deux  maîtres-ès-arls 
qui  se  défient  de  sommer  une  série,  avec  les  altitudes  que 
prenaient  les  héros  d'Homère  pour  se  provoquer  au  combat, 
sont  faits  à  souhait  pour  fournir  des  personnages  à  la  comédie. 
Mais  combien  l'impression  change,  si  l'on  considère  les  ques- 
tions débattues  avec  tant  de  passion,  et  non  plus  la  manière 
de  les  débattre!  Les  problèmes  que  ces  maîtres  et  régents 
s'acharnent  à  résoudre,  dont  ils  entrevoient  parfois  la  solution, 
en  dépit  de  leurs  connaissances  rudimenlaires  en  Mathéma- 
tiques, ce  sont  les  deux  grands  problèmes  de  l'intégration  des 
fonctions  et  de  la  sommation  des  séries.  Et  l'on  se  demande 
alors  quels  résultats  ces  hommes  n'eussent  point  obtenus, 
quelle  promotion  ils  n'eussent  point  imprimée  aux  Mathé- 
matiques s'il  leur  eût  été  donné  de  lire  Archimède. 


XXII 

L'ÉTUDE    DE     LA     LATITUDE     DES     FORMES     A     l'UnIVERSITÉ     DE 

Paris,  au    début   du    xvi''  siècle  (fin).    —    Les    maîtres 
ESPAGNOLS.  Jean  de  Celaya.  Louis  Coronel. 

A  l'Université  de  Paris,  les  Espagnols  et  les  Portugais 
faisaient  partie  de  la  même  nation,  la  nation  berrichonne; 
entre  eux,  les  rapports  devaient  être  intimes  et  fréquents. 

Ainsi  l'espagnol  Jean  de  Celaya,  originaire  du  Royaume  de 
Valence,  est  régent  à  Sainte-Barbe;  son  plus  fidèle  disciple  est 
un  portugais,  Jean  Ribeyro,  de  Lisbonne. 

A  la  fin  de  YExposilion  de  la  Physique  de  Jean  de  Celaya',  on 

I  Exposilio  niagistri  ioaniiis  Je  Celaya  Valeritini  in  octn  libros  phisicoruni  Arislo- 
telis  :  ctim  questionibui  eiusdem,  secundum  Irlpllcem  viam  beali  Thome,  realium  et  nomi- 
nalium.  Venundatur  Parrhisiis  ab  llemundo  le  Feure  in  vico  sancti  Jacobi  propeedeni 
sancti  Benedicti  sub  intersi^^nio  crescenlis  lunecommorantis.Cum  gratiaet  Privilegio 
régis  amplissimo.  —  Coloplion  :  Explicit  in  iibros  phisicorum  Aristotelis  exposilio  a 
magistro  Joanne  de  Celaya  Hyspano  de  regno  Valentie  édita  :  diini  regeret  Parisiusin 
famatissimo  dive  Barbare  gymnasio  pro  cursu  secundo  anno  a  virgineo  partu  decimo- 
septimo  supf-a  millesimum  et  quingentesimum  \^I[  idus  Dccembris.  diligenter  im- 
pressa  arle  Johannis  de  pralo  et  Jacobi  le  messier  in  vico  purelarum  propccollegium 


288  BULLETIN    HISPANIQUE 

trouve  une  lettre  que  Jean  Ribeyro  adresse,  de  Paris,  à  son  frère 
Gonzalve.  Après  avoir  navigué  sur  les  côtes  de  l'Ethiopie  dans 
l'espoir  de  faire  fortune,  après  avoir  fort  mal  réussi  dans  ses 
affaires,  Jean  Ribeyro  sest  dirigé  vers  Paris  afin  d'y  rentrer  en 
grâce  auprès  des  belles-lettres.  Là,  il  s'est  attaché  aux  ensei- 
gnements de  Jean  de  Celaya  pour  lequel  il  professe  une  si 
grande  admiration  qu'il  regrette  de  ne  pas  voir  son  frère 
parmi  les  auditeurs  dun  tel  maître;  l'éloge  qu'il  en  fait  atteint 
aux  plus  hauts  sommets  du  dithyrambe. 

Jean  Ribeyro  devait  marquer,  plus  tard,  sa  piété  envers  Jean 
de  Celaya  en  publiant  et  annotant  les  Introductions  dialectiques, 
composées  par  celui-ci". 

L'attachement  de  Jean  Ribeyro  pour  Jean  de  Celaya  nous 
montre  quelles  intimes  relations  s'établissaient  parfois,  à 
Paris,  entre  maîtres  espagnols  et  maîtres  portugais.  Il  est 
permis  de  croire  que  le  régent  espagnol  du  Collège  Sainte- 
Barbe,  Jean  de  Celaya,  n'était  point  sans  connaître  le  régent 
portugais  du  Collège  de  Coqueret,  Alvarès  Thomé;  les  rap- 
prochements que  nous  aurons  à  faire  entre  les  écrits  de  ces 
deux  maîtres  n'auront  donc  rien  que  de  très  naturel. 

En  ses  Expositions  sur  les  P/iysirjues,  sur  le  De  Cœlo  et 
Mundo,  sur  le  De  generatione  et  corruplione,  Jean  de  Celaya 
suit,  en  général,  cet  ordre  :  11  donne  le  texte  d'Aristote,  il  en 
expose  le  commentaire  littéral,  puis,  sous  ce  titre  :  Setjuilur 
glosa,  il  discute  les  opinions  diverses  et  formule  celle  qui  lui 
est  propre.  11  agit  tout  autrement  au  troisième  livre  des  Physi- 
ques, après  qu'il  a  commenté  ce  qu'Aristote,  aux  trois  premiers 
chapitres  de  ce  livre,  dit  du  mouvement.  Le  litre  :  Sequilur 
traclatus  proportionum  annonce  %  entre  le  troisième  chapitre 
d'Aristote  et  le  quatrième,  l'insertion  d'un  écrit  qui  n'a  plus 

cluniacensc  coiiitiiorantium  :  SiimpUbns  vcro  lioncsti  viri  llcmuridi  le  feure  ii»  vico 
sancti  Jacobi  prope  edein  saricti  benedicti  Sub  iiitcrsignio  cresccntis  lune  moram 
Irabenlis.  Laus  deo. 

I.  iJialecUce  inlroduotiones  sive  Icrinini  MajJtislri  Joannis  de  celaya  Valenlini  :  cum 
nonnullis  (Ma^islri  Jobannis  ribeyro  Llyxl)Oiieiisis  siii  discipuli)  addilionibus  rccenter 
iinpresse  :  el  i>er  eundem  suc  inltujriidU  restitute.  Colopbon  :  Imprime  a  Caen  pour  Micbcl 
eKlirard  dict/  aubier,  et  Jacquet  berlbelot  libraires  Deiiieuraiis  audictlieii  a  leiiseigne 
du  mout-Saiiut  Micliel  Près  les  Cordeliers.  Et  a  este  aclieue  le.  xxviij.  iour  de 
juillet  MDWVIJ. 

».  Joannis  de  Celaya  Expositio  in  libros idiysicorum,  fol.  Ixi  ij,  col.  d. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQtE    PARISIENNE  289 

rien  dun  commentaire  à  l'œuvre  du  Stagirite,  et  qui  ne  rem- 
plit pas  moins  de  soixante-quatorze  feuillets'. 

«  Comme  nous  nous  proposons  de  traiter  la  triple  forme  du 

mouvement   îmolus   IriplicUalem    rinmlari »    C'est   en    ces 

ternies  que  débute  le  traité  des  proportions  de  Jean  de  Celaya. 
Ces  mots  évoquent  tout  aussitôt  à  notre  esprit  le  titre  du  Liber 
de  triplici  motii  composé  par  Alvarès  Thomé.  Et  en  effet,  le  traité 
que  le  Régent  espagnol  insère  en  son  Exposifio  in  libres  Physi- 
coriim  suit  exactement  le  même  plan  que  le  traité  publié,  peu 
d'années  auparavant,  par  son  collègue  portugais;  celui-là  ne 
diffère  guère  de  celui-ci  que  par  une  plus  grande  concision. 

La  documentation  de  Jean  de  Celaya  est  la  même  que  celle 
d'Alvarus  Thomas.  Le  nom  le  plus  souvent  cité  en  son  traité 
est  celui  du  Calculateur;  il  est  prononcé  un  douzaine  de  fois. 
Celui  de  Guillaume  Heyiesbury  est  prononcé  presque  aussi 
souvent.  Jacques  de  Forli  est  cité  deux  fois  ;  en  l'une  de  ces 
citations 2,  on  rappelle  qu'il  voulait  caractériser  une  latitude 
uniformément  difforme,  non  par  son  degré  moyen,  mais  par 
son  degré  le  plus  intense. 

Le  Régent  de  Sainte-Barbe  a  lu  les  commentateurs  italiens 
d'Heytesbury  ;  ici,  à  propos  d'un  sophisme  relatif  à  l'accélé- 
ration, il  citC'^  la  réplique  d'«  Àngehis  Forsempionensis,  com- 
menlalor  Entisberi  »  ;  là,  il  rappelle'  comment  Gaétan  de  ïiène 
démontre  une  conclusion  d'Heytesbury. 

Le  nom  de  Gaétan  de  ïiène  avait  été  cité  par  Alvarès  Thomé; 
celui  d'Ange  de  Fossombrone  ne  l'avait  pas  été  ;  le  Régent 
portugais  n'avait  pas  davantage  prononcé  le  nom  de  Bernard 
Torni  ;  nous  allons  le  trouver  sous  la  plume  de  Jean  de  Celaya, 
en  des  circonstances  qui  méritent  d'attirer  notre  attention. 

Un  chapitre  J  du  traité  de  Jean  de  Celaya  porte  ce  titre  : 
Sequuntur  conclusiones  Nicolai  Orem.  Il  commence  en  ces 
termes  : 

«  Ces  préliminaires  posés,  nous  allons   formuler  quelques 

1.  Joannis  de  Celaya  Op.  laud  ,  fol.  Ixi  ij,  col.  d,  à  fol.  cxvij,  col.  c. 

2.  Joannis  de  Celaya  Op.  laud.,  fol.  Ixxxiij,  col.  d. 

3.  Joannis  de  Celaya  Op.  laud.,  fol.  Ixxxv,  col.  a. 

4.  Joanrys  de  Celaya  Op.  laud.,  fol.  xcv, col.  a. 

5.  Joannis  de  Celaya  Op.  laud.,  fol.  Ixxxviij,  col.  b. 


390  BULLETIN    HISPANIQUE 

conclusions  que  Bernard  Torni  de  Florence,  commentateur 
d'ilenlisberus,  attribue  à  Nicole  Oresme.  » 

Jean  de  Celaya  ne  saurait  déclarer  plus  nettement  qu'il  n'a 
pas  vérifié  la  justesse  de  l'attribution  formulée  par  Bernard 
Torni  et,  donc,  qu'il  n'a  pas  lu  le  De  difformikde  qualilatam  de 
Nicole  Oresme. 

Alvarcs  Thomé  avait  donné  les  solutions  d'Oresme  et  de 
Torni  sans  faire  mention  d'aucun  nom  d'auteur,  et  cela  bien 
qu'il  eût  soigneusement  cité  le  nom  d'Oresme  cliaque  fois 
qu'il  empruntait  une  proposition  au  Tractalus  proportionum. 

Quant  à  Jean  DuUacrt,  il  avait  attribué  à  Oresme  quatre 
conclusions  dont  deux  étaient  de  cet  auteur  et  deux  de  Bernard 
Torni;  visiblement,  il  ne  connaissait  l'œuvre  du  Maitre  nor- 
mand que  par  le  traité  du  Maître  florentin. 

De  même,  Louis  Goronel  de  Ségovie,  en  ses  Perscrukdiones 
p/iysicœ  '  que  nous  allons  étudier  tout  à  l'heure,  donne  une 
démonstration  de  la  première  proposition  de  Nicole  Oresme; 
il  la  fait  suivre  de  ces  réflexions ^  : 

((  En  son  commentaire  au  traité  du  mouvement  local 
d'Heytesburv,  Bernard  Torni  prouve  cette  conclusion;  Nicole 
Horent  en  a  également  donné,  en  ses  Sop/iisrmda,  une  preuve 
que  Bernard  déclare  admirable;  c'est  une  belle  conclusion, 
dit-il,  et  la  démonstration  en  est  extrêmement  belle...  Le  Cal- 
culateur Suiset,  lui  aussi,  en  son  traité  De  dijjbrmibus,  formule 
cette  conclusion,  et  il  se  sert  dune  autre  démonstration  qui 
est  la  suivante...  » 

Les  diverses  remarques  que  nous  venons  de  produire 
conduisent  nécessairement  à  celte  conséquence  :  A  Paris,  au 
début  du  wi"  siècle,  tous  les  maîtres  lisent  couramment  le 
Trnclalas  de  moia  locali  de  Bernard  Torni;  aucun  d'entre  eux 
ne  lit  le  Tractalus  de  fujarallone  polcidianim  el  iticnsnrannn 

I.  l'Iiysice  perscrutaliones  magistri  Ludovici  Coroncl  llispani  Scj^oviensis.  Proslarit 
in  cdibiis  Joaiinis  Harhior  librarii  jurait  Parrliisionsis  académie  sut)  si^rio  citsis  in 
via  re;,'ia  ad  divinn  .lacohiun.  An  verso  du  [»reniier  feiiilh;!,  après  le  litre,  une  Icllre 
de  Simon  A;,'oberl  à  Jean  A;,'ol)erl  est  dal(';e  :  l'arrliisiis,  MDXI.  —  Une  anlre  édition 
de  cet  ouvrage  a  été  donnée,  en  ir».'<<),  l^n<;(luni,  in  e(lil)us  .1.  (liiinti;  elle  csl  inliln- 
iée  :  Physire  perscrutaliones  e'iregii  inlerprrlis  magislri  I.ndoviei  Ooroncl.  Nos  citations 
sont  toutes  tirées  de  la  première  édition. 
^  j.  Ludovici  Coronel  Op.  latid.,  lih.  III,  De  ditrormihus;  édil.  i5ii,  fol.  i,\ix, 
col.  d. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQUE    PARISIENNE  29 1 

dlfformitalum  de  Nicole  Oresme;  de  ce  dernier  ouvrage,  on  ne 
connaît  que  ce  qui  a  été  répelé  par  le  premier. 

De  ce  fait,  quelle  explication  peut-on  donner?  Celle-ci  et, 
semble  t-il,  celle-ci  seulement  :  Le  traité  de  Bernard  Torni 
était  irtiprimé;  celui  d'Oresme  était  demeuré  manuscrit. 

Si  Ion  parcourt,  en  effet,  la  liste  des  ouvrages  cités  par  Jean 
Dullaert,  par  Âlvarès  Thomé,  par  Jean  de  Celaya,  par  Louis 
Coronel,  on  constate  que  ce  sont  tous  livres  que  l'impri- 
merie naissante  avait  reproduits.  Le  Calculateur,  dont  le  traité 
compte  déjà  plusieurs  éditions,  est  l'auteur  le  plus  constam- 
ment lu.  La  collection  imprimée  à  Venise  en  1/194  fait 
connaître  Heytesbury  et  ses  commentateurs.  On  cite  les  traités 
des  proportions  de  Thomas  Bradwardine,  d'Albert  de  Saxe,  de 
Nicole  Oresme  parce  qu'ils  ont  tous  été  imprimés.  En  revanche, 
nul  ne  lit  le  De  dijjovmilaie  qualUalum  d'Oresme  qu'aucun 
imprimeur  n'a  édité;  le  même  oubli  atteint  le  De  primo  motore 
de  Swineshead  et  la  Samma  de  Jean  de  Dumbleton. 

Pendant  le  demi-siècle  qui  suivit  sa  naissance,  l'imprimerie 
assura  vogue  et  durée  à  une  foule  d'écrits  composés  au  Moyen- 
Âge  ;  mais,  en  même  temps,  elle  habitua  les  doctes  à  ne  plus  lire 
que  les  pages  transcrites  par  la  presse.  Tout  ce  qui,  pendant  ce 
demi-siècle,  n'eut  pas  le  bonheur  d'être  imprimé,  tomba  dans 
un  profond  oubli,  d'où  beaucoup  d'oeuvres  ne  sont  plus  jamais 
sorties. 

Or  le  hasard,  bien  plutôt  qu'un  choix  raisonné,  avait  désigné 
les  écrits  que  les  premiers  imprimeurs  devaient  publier.  Il 
advint  ainsi  que  l'invention  de  l'imprimerie  fut  l'occasion  de 
grandes  injustices.  En  reproduisant  en  foule  certains  livres  de 
seconde  main,  la  presse  leur  procura  une  renommée  imméritée, 
tandis  qu'elle  délaissait  l'œuvre  de  l'inventeur,  dont  les  rares 
exemplaires  manuscrits,  oubliés  des  lecteurs,  allaient  devenir 
la  proie  de  la  moisissure  et  des  vers.  VOpus  auream  calculalio- 
nuin,  fatras  ennuyeux,  sans  originalité,  sans  idée,  fut  avide- 
ment lu,  profondément  étudié,  ardemment  discuté  en  l'Uni- 
versité même  où  Nicole  Oresme  avait  enseigné;  et  nul,  pen- 
dant des  siècles,  ne  s'est  avisé  que  le  Traclatus  de  difformilate 
qualitatum  abondât  en  vues  géniales. 


aga  BULLETIN    HISPANIQUE 

Revenons  à  Maître  Jean  de  Celaya  et  aux  problèmes  qu'il 
emprunte  à  Oresme  par  l'intermédiaire  de  Bernard  Torni.  Ces 
problèmes,  il  les  généralise  de  telle  manière  que  chacun  des 
théorèmes  formulés  comporte  une  infinité  de  cas  particu- 
liers; ces  théorèmes  sont,  d'ailleurs,  presque  textuellement 
empruntés  à  Alvarès  Thomé  dont  linlluence  se  marque,  très 
reconnaissable,  en  maint  passage. 

Au  moment  où  il  annonce  ces  problèmes,  Celaya,  pour  en 
faire  valoir  l'importance,  tient  ce  curieux  langage'  :  «  Ces 
conclusions  peuvent  s'appliquer  non  seulement  à  la  Médecine, 
mais  encore  à  la  Théologie  sacrée;  il  suffît,  en  eftet,  d'y  rem- 
placer les  termes  :  se  mouvoir,  mouvement,  par  certains  de 
ceux-ci  :  avoir  la  fièvre,  fièvre,  ou  bien  :  mériter,  mérite.  » 

Nous  avons  là  un  exemple  de  cet  étrange  confiance  en  la 
portée  de  la  méthode  mathématique  que  nous  avions  déjà 
signalée^  en  étudiant  l'École  d'Oxford.  Forts  de  cette  confiance, 
les  Scolastiques  de  Paris,  au  début  du  xvi^  siècle,  n'hésitaient 
pas  à  considérer  non  seulement  des  intensités  de  fièvre,  mais 
encore  des  degrés  de  mérite  moral  qui  procédassent  suivant 
des  séries  convergentes  ou  divergentes  ;  non  contents  de  créer 
la  Mécanique  et  la  Physique  mathématiques,  ils  rêvaient  d'une 
Médecine  mathématique,  d'une  Morale  mathématique,  d'une 
Théologie  mathématique  ;  émerveillés  par  la  puissance  de 
l'instrument  qu'ils  s'essayaient  à  manier,  ils  ne  pensaient 
pas  qu'il  existât  aucune  œuvre  à  laquelle  cet  instrument  fût 
impropre.  Les  Humanistes  se  moquaient  de  cet  enthousiasme, 
et  les  rieurs  étaient  du  côté  des  Humanistes;  les  rieurs  persi- 
fleront toujours  l'inventeur,  car  entre  la  vérité  qu'il  entre- 
voit et  l'illusion  dont  le  séduisant  mirage  prolonge  celte  vérité 
jusqu'à  l'infini,  l'inventeur  ne  discerne  jamais  la  frontière. 

Des  quolibets  dont  la  Scolastique  parisienne  était  l'objet, 
l'écho  parvenait  assurément  aux  oreilles  de  Celaya.  Or,  en  celte 
Scolastique,  tout  semblait  bonne  aubaine  pour  les  moqueurs, 
faciles  à  réjouir  à  peu  de  frais.  Que  deux  mobiles  marchassent 


1.  Joannis  de  Cnlaya  Op.  laud.,  fol.  lixxviij,  col.  h. 

2.  Voir  le  S III  fie  notre  étude  sur  La  Diakctique  d'Oxford  et  la  Scolastique  italienne, 
publiée  dans  le  liullelin  italien. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQUE    PARISIENNE  398 

de  mouvements  différents,  que  deux  hommes  eussent  des 
fièvres  inégalement  fortes,  que  deux  chrétiens  péchassent  plus 
gravement  lun  que  Tautre,  ces  deux  mobiles,  ces  deux  hom- 
mes, ces  deux  chrétiens  s'appelaient  invariablement  Socrate  et 
Platon  ou,  plutôt,  Sortes  et  Plalo;  en  tous  les  sophismala,  en 
toutes  les  calculationes  qui  encombraient  la  Physique,  la 
Médecine,  la  Théologie,  on  voyait  réapparaître  l'inévitable 
Sortes;  aussi  les  calculatores  parisiens  recevaient-ils  de  leurs 
adversaires  les  sobriquets  imaginés  par  Nifo  :  captiunculatores, 
Sorticolse. 

Celaya  souffrait,  sans  doute,  de  sentendre  appeler  Sorticole  ; 
il  s'excuse  d'imposer  si  souvent  à  Sortes  des  mouvements  de 
difformité  variée.  «  Ne  vous  étonnez  pas,  dit-il  ',  si,  pour  établir 
ces  conclusions,  je  me  suis  servi  de  noms  ic\s  que  Sortes  et  Plato, 
et  non  pas  de  lettres  de  l'alphabet;  ces  lettres  mettent  beaucoup 
de  brouillard  en  l'intelligence  d'un  grand  nombre  d'écoliers  ; 
aussi,  dans  ce  qui  va  suivre,  je  n'en  userai  que  fort  peu.  » 

L'extrême  analogie  que  l'on  peut  reconnaître  entre  le  Liber 
de  triptici  mota  d'Alvarès  Thomé  et  le  traité  inséré  par  Jean  de 
Celaya  en  son  Expositio  in  oc  ta  libros  Physicorum  nous  engage 
à  ne  point  analyser  ce  dernier  traité;  indiquons  seulement,  en 
peu  de  mots,  ce  qu'il  dit  de  la  latitude  uniformément  difforme. 

Guillaume  Heytesbury,  Albert  de  Saxe  et  Paul  de  Venise 
ont  pensé  que  la  vitesse  d'une  roue  qui  tourne  était  la  vitesse 
du  point  qui  se  meut  le  plus  rapidement-  ;  contre  cette  opinion, 
on  peut  élever  une  foule  d'objections,  en  sorte  que  l'on  est 
amené  à  faire  intervenir  une  seconde  opinion,  soutenue  par 
d'autres  iSominales^;  selon  cette  opinion,  la  vitesse  d'un  mou- 
vement uniformément  difforme  par  rapport  au  sujet  doit  être 
évaluée  par  la  vitesse  du  point  moyen  ;  si  le  mouvement  est 
difformément  difforme,  cette  évaluation  doit  se  faire  par 
réduction  à  l'uniformité. 

Par  analogie  avec  la  première  de  ces  deux  opinions,  Jacques 
de  Forli  voulait^  que  la  vitesse  d'un  mouvement  difforme  fût 

1.  Joannis  de  Celaya  Op.  laud.,  fol.  Ixxviij,  col.  a. 

2.  Joaanis  de  Celaya  Op.  laud.,  fol.  Ixxxj,  col.  c. 

3.  Joannès  de  Celaya  Op.  laud.,  fol.  Ixxxij,  col.  c. 

4.  Joannis  de  Celaya  Op.  laud.^  fol.  Ixxxiij,  col.  d. 

Bull,  hispan.  20 


2g4  BULLETIN    HISPANIQUE 

la  vitesse  atteinte  au  moment  où  le  mouvement  est  le  plus 
intense.  «  Une  autre  opinion  est  celle  de  Guillaume  Heytesbury, 
du  Calculateur  et  de  presque  tous  les  autres  philosophes;  ils 
tiennent  qu'en  un  tel  mouvement  difforme  par  rapport  au 
temps,  les  diiTormités  doivent  être  réduites  à  runiformité,  et 
que  la  vitesse  doit  être  évaluée  par  le  degré  auquel  conduit 
cette  réduction. 

))  De  cette  opinion  découlent  quelques  corollaires.  Le  premier 
est  celui-ci:  Tout  mouvement  uniformément  difforme  com- 
mençant à  zéro  et  finissant  à  un  certain  degré,  ou  commençant 
à  un  certain  degré  et  finissant  à  un  certain  degré,  correspond 
au  degré  moyen  entre  zéro  et  le  degré  extrême,  ou  bien  entre 
les  deux  degrés  extrêmes...  » 

Cette  opinion  donne  lieu  à  une  longue  argumentation  où 
les  noms  d'Heytesbury  et  du  Calculateur  reviennent  sans 
cesse,  et  avec  justice,  car,  en  cette  théorie,  leur  influence  est 
incessante;  mais  l'influence  d'Alvarès  Thomé  n'est  ni  moins 
constante  ni  moins  reconnaissable,  bien  que  le  nom  du  Maître 
portugais  ne  soit  pas  prononcé. 

La  règle  qui  réduit  à  luniformité  un  mouvement  uniformé- 
ment difforme  est  fréquemment  appliquée  au  cours  de  cette 
argurnentation  ;  elle  ne  s'y  trouve  pas  démontrée.  Pour  en 
obtenir  une  démonstration,  il  nous  la  faudra  chercher  là  où 
Celaya  traite,  d'une  manière  générale,  des  qualités  difl'ormes. 

Dans  le  cas  général  d'une  qualité  difforme  quelconque, 
contrairement  ù  ce  que  soutiendra  Jacques  de  Forli,  «  le 
Calculateur'  défend  une  opinion  qui  est  communément  tenue 
comme  la  plus  probable.  L'intensité  d'une  forme  difforme  ne 
doit  pas  être  évaluée  par  la  partie  la  plus  intense  de  cette 
forme,  mais  par  réduction  des  difformités  à  l'uniformité.  » 

En  particulier,  ((  une  qualité  uniformément  difforme  entre 
zéro  et  un  certain  degré  est  aussi  intense  que  le  degré  moyen 
entre  zéro  et  ce  degré  extrême.  Si,  par  exemple,  une  ([ualité 
est  uniformément  difforme  entre  o  et  8,  elle  est  aussi  intense 
que  le  degré  4,  qui  est  le  degré  moyen  entre  o  et  8.  Ce  que  je 

I.  Joannis  de  Celaya  Op.  lawl.,  fol.  ciij,  coll.  c.  cl  d. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQUë    PARISlEMfE  290 

démontre  ainsi  :  Que  l'on  prenne  l'excès  par  lequel  la  moitié 
la  plus  intense  surpasse  k\  que  l'on  pose  cet  excès  sur  l'autre 
moitié  de  telle  manière  que  l'extrémité  la  plus  intense  de  cet 
excès  soit  posée  sur  l'extrémité  où  la  moitié  la  plus  faible 
atteint  le  degré  zéro,  et  que  l'extrémité  la  moins  intense  de  cet 
excès  soit  placée  du  côté  qui  regarde  la  moitié  la  plus  intense. 
La  qualité  ainsi  obtenue  sera  uniforme  et  de  degré  [\.  Or,  autant 
elle  a  perdu  en  une  de  ses  moitiés,  autant  elle  a  acquis  en 
l'autre.  Auparavant,  donc,  elle  correspondait  aussi  au  degré  k. 

»  Et  si  vous  demandez  ce  qu'est  cet  excès,  je  vous  dirai  que 
c'est  une  qualité  [uniformément  difforme]  commençant  à  o  et 
finissant  au  degré  4... 

))  Une  seconde  conclusion  est  celle-ci  :  Si  une  qualité  uni- 
formément difforme  commence  à  un  certain  degré  et  finit  à 
un  autre  degré,  elle  correspond  au  degré  moyen  entre  les 
deux  degrés  extrêmes...  Cette  conclusion  peut  se  prouver  de  la 
même  manière  que  la  précédente.  » 

Aucun  des  maîtres  anglais,  italiens  ou  parisiens  que  nous 
avons  cités  jusqu'ici  n'a  donné  à  cette  démonstration  une 
forme  plus  voisine  de  celle  qu'Oresme  avait  adoptée;  à  vrai 
dire,  c'est  ici  la  démonstration  même  d'Oresme;  il  n'y  manque 
que  la  figure,  qui  y  eût  mis  une  plus  grande  clarté. 

A  regarder  de  près,  il  y  manque  aussi  la  définition  de  la 
quantité  d'une  forme,  définition  qu'Oresme  seul  a  donnée 
explicitement. 

Les  quelques  extraits  du  livre  de  Gelaya,  donnés  en  ce  qui 
précède,  suffisent  à  montrer  que  le  Régent  de  Sainte-Barbe 
était  des  plus  versés  en  la  science  des  latitudes  difformes  et  de 
leur  réduction  à  l'uniformité;  l'intérêt  qu'il  portait  à  cette 
étude  se  remarque  même  en  d'autres  ouvrages  que  YExposilio 
in  libros  Physicorum.  Ainsi,  en  VExposUio  in  libros  de  Cœlo  el 
Miindo  qu'il  donna  un  au  plus  tard,  nous  l'entendons' 
rectifier  une  application  illégitime  de  la  règle  d'Oresme. 

t.  Exposilio  magistri  ioannis  de  Celaya  Valentini  in.  quator  libros  de  celo  et  mundo 
Aristotelis:  cum  questionibus  eiusdem.  Venundantur  inedibus  Hemundi  le  Feure  in  via 
divi  Jacobi  prope  edem  sancti  Benedicti  sub  signo  crescentis  Lune  moram  trahcntis. 
Cum  Gratia  et  Privilégie  régis  ainplissimo.  Colophon  :  Explicit  cxpositio  Magistri 
Joannis  de  Celaya  Valentini  in  quatuor  Libros  Aristotelis  de  Celô  et  Mundo,  cum 


296  BtLtEtlN    HiSPANiQUÈ 

Les  écrits  de  Jean  Dullaert  de  Gand,  d'Alvarès  Thoiné  de 
Lisbonne,"  de  Jean  de  Celaya  de  Valence  nous  ont  montré  quel 
développement  létude  mathématique  du  triple  mouvement, 
du  mouvement  local,  de  l'augmentation  et  de  l'altération, 
avait  pris,  à  Paris,  au  début  du  xvT  siècle. 

Les  Quœstiones  in  libros  physicorum  de  Dullaert  furent 
imprimées  en  i5o6;  le  Liber  de  tripliei  inotii  d'Alvarès  Thomé 
est  daté  de  1Ô09;  VExpositio  in  libros  physicorum  de  Celaya 
parut  en  1017;  c'est  donc  entre  ces  deux  derniers  écrits  que 
l'ordre  chronologique  place  les  Perscrutationes  physicse  com- 
posées par  un  régent  espagnol  du  Collège  de  Monlaigu, 
Louis  Coronel  de  Ségovie;  la  première  édition'  de  ces  Perscru- 
tationes porte,  en  effet,  la  date  de  i5ii. 

Comme  aux  Questions  de  Dullaert,  comme  en  ï Exposition  de 
Celaya,  c'est  le  troisième  livre  des  Physicse  perscrutationes  qui 
nous  apprendra  ce  que  l'on  doit  penser  des  trois  mouvements 
et  de  leurs  vitesses.  Louis  Coronel  divise,  en  effet,  ce  livre  en 
quatre  parties.  La  première  partie,  consacrée  au  mouvement 
local,  traite  de  la  nature  de  ce  mouvement  et,  en  particulier, 
du  mouvement  des  projectiles  et  de  Vimpetus.  La  seconde 
partie  a  pour  objet  le  mouvement  d'altération;  on  y  trouve 
non  seulement  la  discussion  des  diverses  doctrines  sur  l'in- 
tensité des  formes,  mais  aussi,  sous  le  titre  :  de  dijformibus, 
la  plupart  des  considérations  sur  les  latitudes  uniformes  et 
difformes  dont  nous  pailerons  ici.  La  troisième  partie,  très 
courte,  étudie  le  mouvement  d'augmentation.  Enfin  la  qua- 
trième recherche  comment  doit  être  évaluée  la  vitesse  en 
chacun  de  ces  trois  mouvements;  l'analogie  de  cette  quatrième 
partie  avec  le  Traité  des  proportions  d'Albert  de  Saxe  est 
visible  et,  d'ailleurs,  avouée  par  l'auteur.  «  L'étroilcsse  du 
temps,  »  écrit-il  en  la  terminant  ',  «  me  presse  d'avancer  avec 

questionibus  piusdcm,  novissime  cl  cum  maxima  vigilanlia  in  lucem  rcilacta  :  ac 
impressa  arlc  ac  artilicio  Joaiinis  du  pr<;  et  Jacobi  le  messicr.  Aiino  a  parla  vir^inoo 
Millcsimo,  Qiiingonlesimo  deciinoocla\o  die  yicesiinaprima  Mensis  Juuii  Sumptibus 
vero  Hcdinuudi  le  feiire  :  iii  vico  sancli  Jacobi  propc  edem  sancti  Beoedccli,  sub 
intersi;,'nio  crcscciilis  Lune  moram  trahenlis;  loi.  xix,  col.  c. 

I.  Nous  avons  décrit  plus  haut  cette  édition,  dont  toutes  nos  cilalions  seront 
tirées. 

a.  Lndovici  Coronel  Op.  laud.,  Mb.  III,  pars  IV;  éd.  i5ii,  fol.  Ixxx,  col.  b. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQLE    PARISIENNE  297 

rapidité;  je  ne  m'attarderai  donc  pas  plus  longtemps  en 
l'étude  de  la  vitesse.  Que  ceux  qui  voudraient  être  informés 
plus  à  plein  de  cette  matière  voient  ce  qu'Hentisberus  et  le 
Calculateur  ont  écrit  sur  le  mouvement  local,  et  ce  qu'Albert 
de  Saxe  en  a  dit  dans  le  petit  livre  Des  proportions.  » 

Ce  passage  nous  apprend,  à  la  fois,  de  quels  auteurs  Louis 
Coronel  s'est  inspiré,  et  quelle  forme  résumée  il  a  donnée  aux 
chapitres  suggérés  par  eux. 

Les  principales  sources  auxquelles  il  puise  sont,  en  effet, 
celles  qu'il  vient  de  nommer  :  Le  Tractatus  proportionum 
d'Albert  de  Saxe,  le  Tractatus  de  tribus  prœdicamentis  de 
Guillaume  Heytesbury,  enfin  le  traité  du  Calculateur.  Il  a  lu 
également,  et  cite  volontiers,  la  Sunima  philosophiœ  de  Paul  de 
Venise  et  le  De  intensione  et  remiss ione  formarum  de  Jacques  de 
Forli.  Enfin,  il  a  sûrement  étudié  les  commentateurs  italiens 
d'Heytesbury;  il  cite'  une  opinion  émise  «  par  Gaétan  en  son 
commentaire  au  traité  du  maximum  et  du  minimum  dHen- 
tisberus  »  ;  et  nous  avons  vu  qu'il  emprunte  à  Bernard  ïorni 
un  théorème  de  Nicole  Oresme. 

La  documentation  de  Louis  Coronel  est  donc  identique  à 
celle  d'Alvarès  Thomé  et  de  Jean  de  Celaya;  la  doctrine  qu'il 
en  extrait  est  aussi  toute  semblable  à  celle  qu'ils  en  avaient 
tirée;  mais  il  ne  lui  accorde  pas  l'ample  développement  que 
ses  collègues  de  Coqueref  et  de  Sainte-Barbe  lui  avaient  donné. 
De  cette  doctrine,  le  Régent  de  Montaigu  se  borne  à  formuler 
les  propositions  qui  lui  semblent  les  plus  importantes. 

Sur  quelques  problèmes  de  Nicole  Oresme  et  de  Bernard 
Torni,  Alvarès  Thomé  avait  greffé  une  théorie  mathématique 
assez  étendue,  ébauche  de  la  théorie  des  séries  ;  Jean  de  Celaya 
allait  reproduire  en  entier  cette  théorie.  Louis  Coronel  ne 
reprend  ni  les  quatre  problèmes  exposés  par  Bernard  Torni 
ni  même  les  deux  premiers,  qui  sont  d'Oresme;  il  se  borne 
à  résoudre  le  premier  de  ces  problèmes. 

En  traitant  de  dijformibus,  Coronel  énonce  '  la  règle  par 
laquelle  une  qualité  uniformément  difl'orme  correspond  à  son 

I.  Ludovici  Coronel  Op.  laud.,  lib.  II,  pars  III;  éd.  i5ii,  fol.  xl,  col.  a. 
3.  Ludovici  Coronel  Op.  laud.,  lib.  III,  pars  II;  éd.  i5i  i.  fol.  Irix,  col.  a. 


agS  BULLETIN    HISPANIQUE 

degré  moyen;    cette   règle,   il  n'en  produit  aucune  démons 
[ration;  il  se  borne  à  détruire  une  interprétation  erronée  que 
le  Calculateur  en  avait  donnée. 

Cette  règle,  il  l'invoque  encore  pour  réduire  à  l'uniformité 
une  vitesse  distribuée  d'une  manière  uniformément  difforme, 
soit  au  sein  du  sujet,  soit  au  cours  du  temps:  ce  qu'il  dit  de 
cette  réduction  se  termine  en  ces  termes  ■  : 

«  Si  l'un  de  ces  deux  mobiles  ou  tous  deux  se  meuvent  d'une 
manière  uniformément  difforme,  ou  bien  encore  si  la  vitesse 
est  difformément  difforme,  la  difformité  devra  être  réduite 
à  l'uniformité  selon  son  degré  moyen,  et  l'on  dira  que  le 
mobile  se  meut  d'une  manière  difforme  avec  ce  degré  de  mou- 
vement. Presque  tout  ce  qui  a  été  dit  des  qualités  diilbrmes 
peut  s'appliquer  au  mouvement  difforme;  aussi  n"insisté-je  pas 
davantage  sur  ces  considérations.  Que  l'on  consulte  les  règles 
données  par  lleytesbury  dans  le  Tractât  us  de  motii  iocali;  elles 
sont  assez  bonnes  et  faciles.  Quant  à  celui  qui  désire  user  son 
temps  en  pure  perte,  qu'il  voie  les  règles  de  Suiset;  car,  pour 
moi,  je  juge  inutile  d'insister  plus  longuement  sur  ces 
questions.  » 

Le  désir  d'être  bref  n'a  pas  seul,  semble-t-il,  dicté  ce  propos; 
on  y  devine  une  grande  lassitude  de  ces  minutieuses  chicanes 
auxquelles  se  complaisait  le  Calculateur.  Cette  lassitude,  que  les 
Humanistes  portaient  jusqu'au  dégoût  le  plus  profond,  on  en 
ressentait  les  premières  atteintes,  nous  le  savons  2,  jusqu'en 
l'entourage  de  Jean  Majoris;  au  gré  des  disciples  du  Maître 
écossais,  et  de  ce  maître  lui-même,  il  était  temps  d'imposer 
un  terme  aux  excès  dialectiques  que  rinflucnce  d'Oxford  avait 
misa  la  mode;  il  était  urgent  de  simplifier  la  Logique  et  la 
Physique.  Les  Perscrutationes  physicx  de  Louis  Coronel 
s'eflorcent,  dune  manière  visible,  à  celte  simplification.  Mal- 
heureusement, le  départ  entre  la  paille  inutile  et  encombrante 
qu'il  convenait  d'abandonner  et  le  grain  fécond  (ju'il  était  bon 
de  garder  n'est  pas,  on  ces  Pfrscriitdtionrs,  toujours  fait  avec 

I.  Ludovici  Coronel  Op.  Uiwi.,  Mit    Ml,  pars  I\  ;  éd.  i5ii,  foi.  Ixxix.  col.  b. 

a.  La  Iradilion  de  Jean  Burulan  et  la  Science  italienne  au  A  VV"  siècle,  IV  :  La  décadence 
de  la  Scolasliqiie  parisienne  après  la  niorl  de  Léonard  de  Vinci.  Les  attaques  de 
rilii tnanisrni'    hidier  l'Tastnc  et  Louis  N'ivès. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQl  E    PARISIENNE  299 

un  entier  discernement;  bien  des  «  broutilles  à  la  Suiseth  »  ont 
été  conservées,  tandis  que  l'auteur  rejette  certaines  théories 
dont  l'avenir  prouvera  la  fertilité  ;  pour  que  Louis  Coronel 
évitât  toute  méprise  de  ce  genre,  il  eût  fallu  qu'une  prophétique 
intuition  lui  découvrît  tout  le  progrès  futur  de  la  Science. 

Pierre  DUHEM. 

(A  suivre.) 


NUEVOS  DATOS 
ACERCA   DEL   HISTRIONISMO  ESPANOL 

EN     LOS     SIGLOS     XVI     Y     XVII 

{Seganda  série  ^) 

Siglo   XVII 

(Suite.) 


1638 

324.  —  Podcr  de  Pedro  Ortiz  de  Urbina,  tesorcro  de  la  cofradia  de 
N*  S'  de  la  Novena,  â  Juan  de  Nieva,  autor  de  comedias,  résidente 
al  présente  en  Valencia,  6  donde  estaviere,  para  cobrar  de  los  autores 
de  comedias  y  de  sus  companias  los  maravedises  que  hayan  allegado 
de  liniosnas  para  la  dicha  cofradia.  Madrid,  21  Enero  iC38. 

(Diego  de  Cepeda,  1687  à  42.) 

325.  —  Obligaciôn  de  Diego  Robledo  de  asistir  en  la  companfa  de 
Bartolomé  Romero,  autor  de  comedias,  desdc  Carnestolendas  de  lOSg, 
hacer  los  segandos  papeles,  y  cantar,  ganando  diez  reaies  de  raciôn  y 
20  por  representaciôn,  por  la  fiesta  de!  Corpus  /ioo  reaies,  y  très  cabal- 
lerias  para  los  viajes. 

Ademâs  le  ha  de  dar  de  présente  5, 000  reaies,  que  se  descontarûn 
de  las  representaciones  que  haya  después  del  Corpus.  Madrid, 
26  Enero  iG38. 

(Diego  de  Cepeda,  1687  à  /ja.) 

326.  —  Concierlos  de  Andrcs  de  la  Vega  con  algunos  représentantes 
que  le  han  de  ayudar  en  las  fiestas  y  oclavas  del  présente  ano: 

Jerônimo  Velâzquez  representarâ,  ganando  180  reaies  por  la  fiesta 
del  Corpus,  36  por  cada  fiesta  de  las  de  Agosto  ô  Septicmbre  y  2()  por 
cada  una  de  las  ordinarias. 

Juan  de  Trejo  ganarâ  80  reaies  por  el  Corpus,  2/»  por  las  fiestas 
de  Agosto  ô  Sepliembre  y  18  por  una  de  las  ordinarias.  Madrid, 
5  Febrero  i638. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  iG38,  f'  84.) 

I.  Voir  le  Bull,  hispan.,  190C,  p.  71,  i!tS,  303;  1907,  p.  36o;  1908,  p.  a43;  1910, 
p.  3o3;  191 1,  p.  47,  3o6. 


NUEVOS  DATOS  ACEKCA  DEL  HISTRIONISMO  ESPA>OL       3oi 

327.  —  Obligaciôn  de  Luis  Candau  y  Mariana  de  Velasco,  su  muger, 
de  pagar  â  Pedro  Ortiz  de  Urbina  3,200  reaies  que  les  ha  prestado 
para  desempenar  unas  ropas,  y  que  le  devolveran  dentro  de  un  ano, 
para  cuya  seguridad  hipotecan  unas  casas  que  tienen  en  la  calle  del 
Infante.  Madrid,  12  Febrero  i638. 

(Diego  de  Cepeda,  163-  à  42.) 

328.  —  Obligaciôn  de  Pedro  de  Ascanio,  autor  de  comedias,  y 
Antonia  Infanta,  su  muger,  de  pagar  a  Pedro  Ortiz  de  Urbina  2,200 
reaies  que  les  ha  prestado  para  socorrer  a  su  compaîiia  y  représen- 
tantes de  ella  tanto  de  raziones  como  de  préstamos.  Madrid,  8  Marzo 
i638. 

En  i3  de  Junio  pagaron  esta  cantidad  y  Pedro  Ortiz  de  Urbina  les 
devolvio  el  arca  que  le  habfan  entregado  conteniendo  varios  vestidos 
y  alhajas  de  plata. 

(Diego  de  Cepeda,  163;  à  42.) 

329.  —  Gonciertos  de  Pedro  de  Linares  con  los  représentantes  que 
han  de  asistir  en  la  compania  que  esta  formando. 

Jerônimo  de  Médina  harâ  los  segundos  graciosos  cuartos  papeles, 
y  tendra  6  1/2  reaies  de  parte. 

Isidro  Gil,  primer  miisico,  tendra  7  reaies  de  parte  y  una  caballeria 
para  los  viajes. 

Pedro  de  Carmona,  représentante,  tendra  11  reaies  de  parte  y 
2  caballerias. 

Pedro  de  Guzmân,  gracioso,  tendra  7  1/2  reaies  de  parte  y  una 
caballeria.  Madrid,  3  Marzo  i638. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i638.) 

330.  —  Gonciertos  de  Hernân  Sânchez  de  Vargas  para  las  Restas 
del  Corpus  fuera  de  Madrid. 

Manuel  Ruiz,  représentante,  ganarâ  por  la  fiesta  del  Corpus 
200  reaies,  por  las  demâs  fiestas,  si  las  hay,  lo  que  entre  ambos 
convengan. 

Hipôlito  de  Avilés,  mùsico  y  représentante,  con  las  mismas  condi- 
ciones. 

Francisco  Angel,  para  cantar  y  representar  durante  la  Octava  del 
Corpus,  ganando  3oo  reaies 

Gerônimo  Velâzquez,  représentante,  ganarâ  100  reaies.  Madrid, 
1 1  Marzo  i638. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1648,  f°  192.) 

331.  —  Obligaciôn  de  Bartolomé  Romero,  autor  de  comedias,  de 
hacer  la  mitad  de  la  fiesta  del  Corpus,  cobrando  800  ducados,  en  que 
entran  los  200  de  ayuda  de  costa,  por  la  representacion,  5o  de  la  mitad 
de  la  joya  y  100  ducados  por  si  representare  el  sâbado. 

Se  obliga  a  dar  los  Autos  y  los  Entremeses  dos  meses  antes  de  la 
fiesta.  Madrid,  26  Marzo  i638. 


3o3  BULLETIN    HISPANIQUE 

Otra  firmada  por  Antonio  de  Kueda  y  Pedro  Ascanio  en  igual  fecha 
y  con  las  mismas  condiciones. 
(Arch.  mun.,  clase  i6,  2-196-4/i.) 

332.  —  Concierto  de  Angela  Corbella,  niuger  de  Luis  Lôpez  Sus- 
taele,  autor  de  comedias,  con  Francisco  Garro  de  Alegri'a,  arrendador 
de  les  corrales  de  Madrid,  sobre  dejar  desembarazado  el  corral  del 
Principe  desde  el  17  del  présente  para  que  Luis  Lôpez  représente  en  él 
con  su  compania  durante  un  mes,  siendo  los  aprovechaniientos  por 
partes  iguales,  una  para  el  arrendador  y  otra  para  el  autor,  permi- 
tiendo  ademâs  â  este  que  pueda  salir  de  Madrid  y  hacer  alguna  fiesta 
que  tuviere  concertada.  Madrid,  4  Agosto  i638. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1648,  f"  543.) 

1639 

333.  —  Concierto  de  Maria  de  Côrdova,  muger  de  Andrés  de  la 
Vega,  autor  de  comedias,  en  virtud  del  poder  que  le  diô  en  19  de 
Abril  de  i63i  (y  que  no  le  esta  revocado)  ante  Juan  de  Salazar,  con 
Ana  Alvarez,  viuda,  para  asistir  esta  en  la  compania  de  Yega  desde 
hoy  hasta  fin  de  Diciembre  de  este  ano  cobrando  por  las  fiestas  del 
Corpus  33o  reaies,  por  cada  fiesta  de  N  '  S'^  â  5  ducados  y  por  las  ordi- 
narias  â  3  ducados.  Madrid,  i"'  Febrero  iôSq. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  iCSg,  f°  49) 

334.  —  Poder  de  Hernân  Sânchez  de  Vargas  â  Bartolomé  Manso 
para  concertar  fiestas  que  ha  de  hacer  con  su  compania.  Madrid. 
28  Febrero  1G39. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1639,  f"  99.) 

335.  —  Capitulaciones  matrimoniales  entre  Antonio  Ramos  de 
Villegas,  hijo  de  Antonio  Ramos  y  Eugenia  de  Villegas,  con  Francisca 
Manso,  hijo  de  Bartolomé  Manso  y  Angela  ïorrada,  représentantes. 

Durante  los  4  anos  primeros  después  de  celebrado  el  matrinionio 
andarân  juntos  las  4  partes  con  los  autores  de  comedias  que  Antonio 
Ramos  estuviese  concertado  6  en  la  compania  que  él  formare,  excep- 
tuando  las  fiestas  â  que  antes  de  esta  escritura  estân  comprome- 
tidos. 

Antonio  Ramos  le  ha  de  dotar  a  su  inuger  en  300  ducados.  Madrid, 
17  Marzo  i()'A[). 

(Juan  (îarcia  de  Albertos,  1639,  f"  120.) 

336.  —  (Jbligaciôn  de  Luis  Lôpez  Sustaete,  autor  de  comedias,  de 
pagar  al  tesorero  de  la  cofradia  de  N '  S'  de  la  Novena  3Go  reaies  que 
de  su  compania  se  dieron  de  limosna  de  las  representaciones  que  se 
hicieron  hasta  Carnestolendas  de  este  ano,  y  que  entregarâ  para  el 
r  de  Agosto  de  este  ano.  Madrid,  3o  Marzo  1G39. 

(Diego  de  Cepeda,  1G37  à  42.) 


KUEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    HISTRIONISMO    ESPA5iOL  3o3 

337.  —  Obligaciôn  de  Daniiân  de  Espinosa,  autor  de  comedias,  de 
pagar  â  Pedro  Orliz  de  Urbina,  mayordomo  y  lesorero  de  N'  S'  de  la 
Novena,  170  reaies  «  que  se  sacaron  de  limosna  en  la  compania  de 
Francisco  Solano,  autor  de  comedias,  el  ano  pasado  do  638  en  las 
represenlaciones  que  se  hicieron  en  ella.  que  el  susodicho  me  dio  y 
entrega  para  el  efecto  de  los  onlregar  en  esta  corte  el  dicho  Pedro  de 
Urbina  ». 

Los  entregarâ  para  el  di'a  del  Corpus  pn'jximo. 
Testigos:  Jusepe  Hurtado,  Antonio  de  Villalba  y  Barlolomé  Manso. 
Madrid,  3  Abril  1639. 

(Diego  de  Cepeda,  1637  à  /»2.) 

338.  —  Obligaciôn  de  Andrés  de  la  Vega,  autor  de  comedias,  de 
pagar  â  Pedro  Ortiz  de  Urbina,  lesorero  de  la  cofradîa  de  la  Novena, 
838  reaies;  4oo  que  le  entregô  en  Sevilla  Pedro  de  la  Rosa,  autor  de 
comedias,  para  entregar  â  la  dicha  cofradîa  y  eran  de  la  limosna  que 
procediô  de  su  compania,  y  238  reaies,  procedentes  de  las  limosnas 
de  las  represenlaciones  bêchas  por  la  compania  del  otorgante,  y  los 
200  restantes  que  le  ha  preslados  el  dicho  Pedro  Orliz  de  Urbina. 
Pagarâ  para  el  dia  del  Corpus.  Madrid,  5  Abril  lôSg. 

(Diego  de  Cepeda,  1637  â  42-) 

339. —  Caria  de  pago  de  Miguel  de  Rojo  y  Monzôn  en  favor  de  Luis 
Bernardo  de  Bovadilla,de  1,000  reaies  y  otros  1,000  y  lantos,â  cuenta 
de  los  5,000  y  tantos  que  le  debia  y  por  los  cuales  le  lenîa  ejecutado. 
Madrid,  ii  Abril  1639. 

(Juari  Garcia  de  Albertos,  1639,  f"  i53.) 

340.  —  Obligaciôn  de  Hernân  Sânchez  de  Vargas,  aulor  de  come- 
dias, de  ir  â  Navalcarnero  con  sus  hijas  Francisca  y  Maria  Luisa,  ha- 
ciendo  las  susodichas  represenlaciones  y  cobrando  1,000  reaies. 

No  harân  sus  hijas  papeles  de  hombre,  villana.  frayle,  monja  ni 
angel,  que  lian  de  ser  por  cuenta  de  los  comisarios  de  fiestas.  Madrid, 
23  Abril  1639. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1639,  f"  172.) 

341.  —  Cédula  de  erecciôn  de  la  Escribania  de  Prolecciôn  : 

((  Don  Felipe  por  la  gracia  de  Dios  ".  Por  hacer  bien  y  merced  a  vos 
Juan  Garcia  Albertos,  mi  escribano,  y  porque  para  las  ocasiones  que 
tengo  de  gastos  me  servis  con  docienlos  y  cinquenta  ducados  pagados 
en  diez  y  ocho  meses,  y  1res  pagas,  con  inlereses  de  ocho  por  ciento, 
de  que  con  inlervencion  del  Licenciado  José  Gonzalez,  del  mi  Consejo 
y  Camara,  olorgasleis  escrilura  de  obligaciôn  en  forma  anle 
Francisco  de  Yanguas,  mi  escribano,  mi  volunlad  es  que  anle  vos  y  no 
ante  olro  ningun  escribano,  pasen  y  se  hagan  lodas  las  escrituras  de 
asienlos  de  comediantes  de  las  companias  que  hubiere  en  mi  corle, 
y  de  los  de  la  Légua,  y  las  demas  escriluras  de  carruages,  fieslas  y 
alquileres  de  vestidos  para  allas,  con  calidad  de  que  podais  nombrar 


3o4  BULLETIN    HISPANIQUE 

perSona  que  use  del  dicho  oficio  en  vuestias  ausencias  y  enfer- 
medades,  siendo  la  que  asi  nombraredes,  mi  escribano,  o  aprobado 
por  los  del  mi  Consejo,  y  prohibe,  defiendo  y  mando  que  ahora  ni  en 
ningun  liempo  no  se  puedan  hacer,  ni  hagan  ante  otro  ningun 
escribano  las  dichas  escrituras  de  las  cosas  referidas,  y  si  por  algun 
accidente  se  mudare  mi  Corte  de  esta  villa  de  Madrid,  ha  de  pasar 
esta  ocupacion  y  oficio  donde  quiera  que  residiere.  Dada  en  Madrid 
a  29  de  Mayo  de  1689  aîîos  =  Yo  el  Rey.  » 

i         ••!....  .         12-2-5      ^ 

(Academia  de  la  liistoria, — .) 

342.  —  Certificaciôn  del  escribano  sobre  los  Autos  del  ano  1689. 

«  Los  quatro  Autos  de  esta  fiesta  hicieron  Manuel  Vallejo  y 
Antonio  de  Rueda,  autores  de  comedias,  que  fueron,  los  dos  que 
hizo  Manuel  Vallejo  intitulados  La  Carcet  del  miiwlo  que  le  escribio 
D.  Antonio  Coello,  y  el  otro  de  Hercules  que  le  escribio  D.  Francisco 
de  Roxas,  y  los  dos  de  Rueda,  se  intitula  uno  Santa  Maria  Egipciaca, 
y  el  otro  sacramental  se  intitula  El  mejor  huesped  de  Espana,  que  los 
escribio  D.  Pedro  Galderon.  Alargaronse  las  represenlaciones  hasta  el 
Domingo  por  la  que  se  hizo  a  la  seîiora  Princesa  de  Carignan,  que 
no  estuvo  con  Sus  Magestades  por  tener  su  hijo  con  viruelas,  y  no 
representarse  viernes  por  la  maùana  por  ser  dia  de  San  Juan.  » 
Madrid,  22  Junio  1639. 

(Arch.  mun.,  clase  16,  3-470-28.) 

343.  —  Obligaciûn  de  Andrés  de  la  Vega,  autor  de  comedias,  de  ir 
con  su  compafiîa,  â  la  villa  de  Ruitrago  y  representar  en  el  dia  del 
Rosario  y  el  siguiente  très  comedias  de  las  que  tiene  puestas  este  ano, 
cobrando  i,55o  reaies.  Madrid,  7  Julio  1689. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1689,  f"  279.) 

344.  —  Asiento  de  Salvador  de  Vega  con  llernân  Sânchez  de  Vargas 
sobre  asislirenla  compafifa  de  esta  autor  de  comedias  para  representar, 
danzar  y  bailar  desde  1°  de  Octubre  de  este  ano  hasta  fin  de  Septiembre 
de  1640,  ganando  por  la  fiesta  del  Corpus  26  ducados  y  un  vestido 
con  cabos,  por  los  fiestas  de  Agosto  y  Septiembre  â  6  ducados  cada 
una  y  por  las  demâs  ordinarias  à  4  ducados.  Madrid,  80  Agosto  1G89. 

(^Juan  Garcia  de  Albertos,  1689,  f"  349.) 

345.  —  Poder  de  llernân  Sânchez  de  Vargas,  autor  de  comedias,  â 
Salvador  de  Vega,  représentante  de  su  compania,  para  concertar  com- 
paneros  y  senalarles  sueldo.  Madrid,  3o  Agosto  1G89. 

fJuan  Garcia  de  Albertos,  1689,  f"  848.) 

346.  —  Poder  de  Maria  de  C;')rdoba  a  Matco  Tendero,  vecino  de 
Leôn,  «  para  que  en  su  nombre  pueda  parecer  y  parezca  ante  el  sefior 
Obispo  de  la  dicha  ciudad  y  Audiencia  eclesiastica  de  ella  y  pedir  y 
pida  se  le  dé  un  traslado  autentico  y  en  forma  de  la  sentencia  que  se 
diô  en  el  pleito  matrimonial  que  la  susodicha  tratû  con  Andres  de  la 


NUEVOS    DATOS    ACEIlCA    DEL    HlSTRlONlSMO    ESPANOL  3oÔ 

Vega,  su  marido,  por  las  causas  y  razonas  en  él  declarados,  que 
pendiô  en  la  dicha  Audiencia  eclesiastica  el  ano  pasado  de  mil  y 
seiscientos  y  veinte  y  siete.  »  Madrid,  i3  Noviembre  i63g. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1689,  f'/iGa.) 

347.  —  Carta  de  pago  de  los  arrendadorcs  del  aprovechamiento  de  los 
corrales  de  comedias  de  Madrid  de  120  ducados  por  4  ailos  del  arren- 
damiento  de  unaposento  û  3o  ducados  cada  afio.  Madrid,  21  noviem- 
bre 1639. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1689,  f"  l\6S.) 

1640 

348. —  Obligacion  de  Andrés  de  Vega,  autor  de  comedias,  de  ir  à 
la  villa  de  Fuentelencina  para  el  sâbado  y  domingo  infra  octava  del 
Corpus  de  este  aîioy  hacer  con  la  compania  que  hoy  tiene,  4  represen- 
taciones,  dos  autos  y  très  comedias  de  las  que  tiene  puestas  para  este 
dicho  ano,  cobrando  2,5oo  reaies.  Madrid,  1°  Febrero  i64o. 

(Juan  Garcia  de  Vlbertos,  i64o,  f"  35.) 

349.  —  Poder  de  Andrés  de  Vega,  autor  de  comedias,  a  Felipe 
Dominguez,  de  su  compania,  para  concertar  fiestas  y  asentar  repré- 
sentantes. Madrid,  9  Febrero  i64o. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64o.) 

350.  —  Obligacion  de  Juan  Pérez  de  asistir  durante  un  ano  en  la 
compania  de  Francisco  Vêlez  de  Guevara  para  represenlar  y  bailar, 
ganando  6  reaies  de  raciôn  y  7  por  representaciôn,  y  para  la  fiesta  del 
Corpus  se  le  han  de  dar  220  reaies,  dos  caballerias  y  llevarle  su  hato. 
Madrid,  28  Febrero  1640. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1640,  f"  63.) 

351.  —  Poder  de  Gabriel  Cintor  en  nombre  y  con  poder  de  los  de 
su  compaiîia  (Hernân  Sânchez  de  Vargas  ;  Francisca  Maria  Sânchez 
de  Vargas,  hija;  Luisa  Sânchez  de  Vargas,  hija;  Juan  de  Navia  ;  Luis 
Antonio;  Juan  de  Bustaniante;  Alonso  Maldonado;  Juan  de  Cogolludo 
y  Juan  Camacho)  â  Bartolomé  Manso  para  concertar  fiestas  en  su 
nombre.  Madrid,  2  Abril  i64o. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64o,  f"  102.) 

352.  —  Obligacion  de  Luis  Lôpez  Sustaete,  autor  de  comedias,  de 
ir  il  la  villa  de  Arganda  para  el  miércoles  infraoctava  del  Corpus  y  re- 
presentar  dos  comedias  6  autos  de  los  que  tienen  puestos,  cobrando 
1,600  reaies,  mas  los  carros  para  el  viaje,  camas  y  posadas  para  la 
compania.  Madrid,  20  Abril  iG4o. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64o,  f°  i25.) 

353.  —  Poder  de  Andrés  de  la  Vega,  autor  de  comedias,  por  S.  M., 
a  Felipe  Ordôiïez,  représentante,  que  esta  en  Côrdoba,  para  que  en 
su  nombre  gobierne  y  administre  la  compaiïia  que  tiene  y  haga  todos 


3o6  BL"M,ETIN    HISPANIQUE 

los  contratos  y  conciertos  necesarios  desde  lioy  hasta  Martes  de  Car- 
neslolendas  de  i64i.  Madrid,  2  Abril  iG/jo. 
(Juan  Garda  de  Albertos,  i64o,  f°  loi.) 

354.  —  Cerlificaciôn  del  escribano  mayor  del  Ayuntamienlo  de 
Madrid  sobre  los  Autos  del  Corpus  hechos  en  Madrid  el  ano  de  i64o. 

(i  Los  quatro  carros  que  se  representaron  este  ano  fueron  :  los  dos 
que  compuso  D.  Pedro  Calderon  :  Los  Misierios  de  la  Misa  y  El  Jiiicio 
final:  representôlos  la  compania  de  Luis  Lopez,  y  los  otros  dos  com- 
puso D.  Francisco  de  Rojas,que  fueron  El  Rico  avarienlo  y  Las  ferlas 
de  Madrid;  representôlos  Bartolomé  Romero. 

»  En  Madrid  a  8  de  Junio  de  iG^o.  Francisco  Mendez  Testa.  » 

(Arcli.  mun.,  clase  16,  [\-Zok-k-) 

355.  —  Carta  de  pago  de  Angela  de  Corbella,  muger  de  Luis  Lnpez 
Sustaele,  aulor  de  comedias,  de  1,000  reaies,  primera  paga  de  los 
2,000  en  que  esta  conceptada  la  fiesta  que  su  marido  ha  de  hacer  en  la 
villa  de  El  Barco  de  Avila  para  el  dia  de  N"  S'  del  Rosario.  Madrid, 
r6  Junio  lO/io. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  iG^o,  f"  i3o.) 

356.  —  Obligaciôn  y  concierto  de  Andrés  de  la  Vega,  autor  de 
comedias,  de  enviar  para  los  dîas  16  y  17  de  Septiembre  a  la  villa  de 
Hita  très  mugeres  que  hagan  los  papeles  que  se  les  repartan  de  dos 
comedias  que  se  han  de  hacer  para  la  fiesta  de  la  Santisima  Cruz  en 
dicha  villa  ,  siendo  una  de  las  comedias  la  de  El  primer  condenado,  y 
otra,  la  que  enviare  Andrés  de  la  Vega. 

Ira  ademâs  un  mûsico  y  un  bailarin  >  se  pagarâ  por  todo  gSo  reaies. 
Madrid,  i3  Agosto  lO/io. 
(Juan  Garcia  de  Albertos,  iGZio,  f°  26/».) 

357.  —  Concierto  de  Francisco  Vêlez  de  Guevara,  Pedro  de  Covaleda 
y  Francisco  Alvarez  de  Vitoria,  aiUores  los  très  de  una  compania, 
sobre  el  viaje  que  han  de  hacer  con  su  compania  a  la  ciudad  de 
Sevilla. 

Llevarân  21  mulas  con  4  mozos,  3  literas  con  2  mozos  cada  una,  y 
las  acemilas  necesarias  para  llevar  el  hato, 

Saldrân  el  dia  1 1  de  este  mes  y  llegaràn  â  Sevilla  el  dia  aS  del 
mismo. 

Pagarân  por  las  literas  1,740  reaies,  por  las  mulas  2,53o  reaies,  y 
10  reaies  por  cada  arroba  del  hato.  Madrid,  G  Diciembre  iG4o. 

(Juan  (Jarcia  de  Albertos,  i64o,  f°  330  ) 

358.  —  Obligaciôn  de  Antonio  Messia  de  rcpresentar  los  segundos 
papeles  y  bailar  en  l;i  compania  de  Juana  de  Espinosa,  viuda  de 
Tomas  Fernândcz  de  Cabredo,  desde  Carnestolcndas  de  iG'ji  â  las  de 
iG'ii,  cobrando  9  reaies  diarios  de  raciôn  y  it  por  cada  representa- 
ciûn  que  hicierc.  Madrid,  11  Diciembre  1640. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64o,  l"  338.) 


MJEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    HISTRIOMSMO    ESPA>OL  3o7 

359.  ~  Poder  de  Francisco  Vêlez  de  Guevara.  Pedro  de  Covaleda  y 
Francisco  Alvarez  de  Vitoria,  aiitores  de  comedias  por  S.  M.  y  lodos 
de  iina  companla,  â  Luis  Bernardo  de  Bovadilla  para  cobrar  «cinco 
parliculares  que  a  la  diclia  su  compania  se  le  quedaron  debiendo  de 
resto  de  los  hechos  en  el  aiîo  pasadn  de  633  y  en  este  présente  de  G^o 
y  por  ellos  mil  reaies  de  vellon,  segun  S.  M.  la  Reyna  N"  S"  los  manda 
pagar.  »  Madrid.  i3  Diciembre  i64o. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64o,  f'  Zkk-) 

1641 

360.  —  Concierto  de  Jaime  Salvador,  représentante,  con  Juana 
de  Spinosa,  viuda  de  Tomas  Fernândez  de  Cabredo,  autor  que  fué  de 
comedias,  de  asistir  durante  un  ano  en  su  compania  ganando  6  reaies 
de  raci(jn  y  8  de  cada  representaciim.  iMadrid,  -  Enero  i6Ai. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f°  k-) 

361.  —  Partida  de  defuncion  de  Antonio  de  Granados. 

((  Antonio  de  Granados  pobre  de  solemnidad  calle  de  (lantarranas 
murio  en  diez  de  Enero  de  i64i  anos,  enterrole  la  cofradia  de  Nuestra 
Senora  de  la  Novena,  fabrica  très  ducados 33.  »  lo  Enero  i64i. 

Es  probable  que  la  feclia  del  teslamento  de  Granados,  publicado 
en  la  primera  Série,  esté  equivocada,  y  sea  de  8  de  Junio  de  i64o. 

(San  Sébastian.) 

362.  —  Obligaciôn  de  Pedro  de  la  Rosa,  autor  de  comedias,  de 
pagar  dentro  de  24  boras  4,o3G  r/4  reaies  que  ban  importado  los  portes 
del  hato  de  su  compania  desde  Granada  â  Madrid.  Madrid,  i3  Enero 
i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  iG4i,  f°  i6.) 

363.  —  Obligaci('>n  de  Santiago  Valenciano,  como  padre  de  Antonia 
de  Santiago,  de  que  esta  asistirâ  en  la  compania  de  Juana  de  Espi- 
nosa,  autora  de  comedias,  durante  un  aiïo,  cobrando  8  reaies  de 
raciôn,  ocbo  por  representaciôn,  3oo  por  la  fiesla  del  Corpus, 
y  1,000  reaies  prestados  durante  la  Cuaresma.  Madrid,  i3  Enero  i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  iG4f,  f"  24.) 

364.  —  Conciertos  de  Juana  de  Espinosa,  autora  de  comedias,  para 
reforzar  su  compaiiia,  con  los  représentantes  siguientes: 

Esteban  Niïiïez  y  su  mujer  Josefa  deSalazar  asistirân  en  dicha  com- 
pania durante  un  afio  para  hacer  respeclivamente  los  terceros  galanes 
y  primeros  papeles  de  damas,  cobrando  para  ambos  i3  reaies  de 
racion,  20  de  cada  representaciôn,  5oo  reaies  y  cuatro  caballerias  para 
la  fiesta  del  Corpus  y  2,700  adelantados  en  calidad  de  préstamo. 

Josefa  Roman,  viuda,  harâ  los  terceros  papeles,  ganando  10  reaies 
de  racion,  i4  de  representaciôn,  5o  ducados  para  el  Corpus  y  3oo  de 
préstamo. 


3o8  BtLLEtlN    HlSPANlQtJË 

Francisco  Garcia,  para  representar,  canlar  y  bailar,  ganando  5  reaies 
de  raciôn,  7  de  cada  representaciôn,  oo  para  el  Corpus  y  5oo  de  prés- 
tamo. 

Juan  de  Leôn,  para  canlar  y  poner  la  mûsica,  ganando  6  reaies  de 
racion,  8  por  representaciôn,  200  para  el  Corpus  y  400  prestados. 

Juan  Mati'as  Lôpez,  para  cantar,  bailar  y  representar,  ganando 
7  reaies  de  raciôn,  10  por  representaciôn,  20  ducados  para  el  Corpus 
y  3oo  reaies  de  préstamo. 

Pedro  de  Cifuentes,  para  cantar,  bailar  y  representar,  ganando 
6  reaies  de  raciôn,  8  de  cada  representaciôn,  y  5oo  reaies  prestados. 

Bernardo  de  Medrano,  para  el  mlnisterio  de  la  graciosidad,  ganando 
9  reaies  de  raciôn,  i5  por  cada  representaciôn  y  para  el  Corpus 
aSo  reaies  y  très  caballerias.  Madrid,  19  Enero  i6Z|i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i(3/»i,  f"  25  y  siguientes.) 

365.  —  Conciertos  de  Pedro  de  la  Rosa,  autor  de  comedias,  con 
algunos  représentantes  que  han  de  entrar  en  su  companià. 

Pedro  de  Contreras  asistirâ  durante  un  ano  en  dicha  companià, 
harâ  los  cuartos  papeles  y  ganarâ  6  reaies  de  raciôn,  7  por  cada  repre- 
sentaciôn y  200  para  el  Corpus. 

Jerônimo  de  Ayala  y  Maria  Ximénez,  su  mujer,  para  representar, 
ganando  19  reaies  de  raciôn  y  representaciôn  para  ambos,  3oo  y  dos 
caballerias  para  la  fiesta  del  Corpus  y  5oo  prestandos  durante  la  Cua- 
resma. 

Antonio  de  Velasco,  mùsico,  ganarâ  5  reaies  de  raciôn,  l\  por  repre- 
sentaciôn y  para  el  Corpus  i5o  reaies  y  dos  caballerias.  Madrid, 
27  Enero  iGA'  • 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f°'  4i  à  44.) 

366.  —  Conciertos  de  Antonio  de  Rueda  con  algunos  représen- 
tantes para  reforzar  su  companià. 

Luis  Fernândez  se  obliga  â  que  su  hija  Isabel  Millân  asistirâ 
durante  un  aâo,  de  Carnestolendas  de  este  ano  â  las  del  642,  para 
representar  los  terceros  papeles  de  damas,  ganando  7  reaies  de  raciôn, 
8  por  cada  representaciôn,  4oo  por  la  fiesta  del  Corpus,  mâs  très  cabal- 
lerias, y  se  le  prestarân  600  reaies. 

Juan  de  Navia,  gracioso,  ganarâ  11  reaies  de  raciôn,  11  de  cada 
representaciôn,  3o  ducados  y  dos  caballerias  para  el  Corpus,  y 
5oo  reaies  de  préstamo. 

Francisca  de  Narvaez,  hija  de  Inigo  de  Narvaez,  harâ  los  segundos 
papeles,  ganando  con  su  padre,  que  también  representarâ,  i4  reaies 
de  raciôn,  i4  cada  representaciôn,  5o  ducados  para  cl  Corpus,  mâs 
4  caballerias  y  llevado  su  hato,  y  de  préstamo  2,000  reaies.  Madrid, 
39  Enero  i64'. 

(^Juan  Garcia  de  Albertos,  i64ij 

367.  —  Conciertos  de  Andrés  de  la  Vega  y  Felipe  Dominguez, 


NUEVOS    DATOS    ACERCA    DËL    UISTRIOI^ISMO    ESPA5iOL  SoQ 

autores  de  comedias,  con  los  représentantes  que  han  de  asistir  en  su 
compani'a  : 

Inès  de  la  Cruz,  para  representar  y  bailar,  ganando  i,ioo  reaies 
por  las  Restas  del  Corpus,  ii  ducados  por  cada  una  de  las  fiestas 
de  N"  S"  de  Agosto  6  Septiembre  y  7  ducados  por  cada  una  de  las 
ordinarias. 

Juan  de  Aldama,  para  representar  la  parte  de  graciosidad,  ganando 
3oo  reaies  por  las  fiestas  del  Corpus  y  5  ducados  por  cada  una  de  las 
fiestas  de  Agosto  ô  Septiembre  y  3  por  las  ordinarias. 

Josefa  Maria,  viuda,  representarâ  primeros  papeles  y  ganarâ  1,100 
peales  por  la  iiesta  del  Corpus,  11  ducados  por  cada  fiesla  de  las  de 
Agosto  6  Septiembre  mâs  5  reaies  de  racion  durante  los  viajes. 

Francisco  Sânchez  Ortiz  y  su  majer  Isabel  Ortiz,  ganarân  4oo  reaies 
por  la  fiesta  del  Corpus,  4  ducados  por  cada  Iiesta  de  las  de  Agosto 
ô  Septiembre  y  3  por  cada  una  de  las  ordinarias. 

Gabriel  Sedeiio,  para  cantar  y  poner  la  mûsica,  ganando  600  reaies 
por  el  Corpus,  8  ducados  por  las  fiestas  de  Agosto  ô  Septiembre  y 
6  por  cada  una  de  las  ordinarias. 

Salvador  de  Vega,  para  representar,  cantar  y  bailar,  ganando 
22  ducados  por  el  Corpus,  l\G  reaies  por  cada  fiesla  de  N"  S'  de  Agosto 
6  Septiembre  y  36  por  cada  una  de  las  ordinarias. 

Juan  Lôpez,  para  cantar,  bailar  y  representar,  ganando  i5o  reaies 
por  el  Corpus,  46  reaies  por  cada  fiesta  de  Agosto  ô  Septiembre  y 
36  por  cada  una  de  las  ordinarias. 

Francisco  de  Leôn,  para  representar  y  bailar,  ganando  16  vlucados 
por  el  Corpus,  34  reaies  por  cada  fiesta  de  Agosto  6  Septiembre 
y  26  por  las  ordinarias.  Madrid,  Enero  y  Febrero  de  i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64r). 

368.  —  Obligaciôn  de  Isabel  Maria,  mujer  soltera,  de  asistir  en  la 
compania  de  Antonio  de  Rueda  durante  un  aùo  para  hacer  los 
primeros  6  segundos  papeles  de  damas,  y  no  rnenos,  cobrando  7  reaies 
de  raciôn,  10  por  cada  representacion,  3  reaies  y  très  caballerîas  para 
la  fiesta  del  Corpus,  y  ademâs  i,5oo  reaies  de  préstamo.  Madrid, 
i3  Febrero  i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f"  76.) 

369.  —  Conciertos  de  Gabriel  Cintor  y  Antonio  de  Benavente  con 
los  représentantes  que  han  de  asistir  en  su  compania  hasta  Carnes- 
tolendas  del  aiio  1642. 

Francisco  Rodrîguez  y  su  mujer  Sebastiana  Mùiioz  representarân 
ambos  y  ganarân  18  reaies  de  raciôn  y  representacion,  3oo  reaies  y  dos 
caballerîas  y  llevado  su  hato  para  los  fiestas  del  Corpus  y  ademâs  les 
prestarân  25o  reaies  para  mediados  delà  Cuaresma. 

Blas  de  la  Cruz.  para  representar,  ganando  4  1/2  reaies  de  racion, 
5  1/2  de  representacion,  80  para  el  Corpus  y  i5o  de  préstamo. 

Bull,  hispan,  21 


3lO  BULLETIN    HISPANIQUE 

Josefa  Maria  harâ  primeras  damas,  ganando  7  reaies  de  racion, 
3  por  cada  representaciôn,  260  por  el  Corpus  y  i5o  prestados. 

Nicolas  de  Fonseca,  para  cantar  y  representar,  ganando  5  reaies  de 
racion,  6  por  cada  representaciôn,  i3o  por  el  Corpus  y  otros  i5o  de 
préstamo. 

Diego  Tomâs,  para  representar,  ganando  5  reaies  de  racion,  7  por 
representaciôn,  loo  para  el  Corpus  y  i5o  prestados. 

Toribio  Bustamante  y  Maria  de  los  Santos,  su  mujer,  para  repre- 
sentar, ganando  6  reaies  de  racion,  10  por  representaciôn,  260  por  el 
Corpus,  mas  dos  caballerias,  y  35o  de  préstamo, 

Juan  Gonzalez  y  Maria  Polonia,  su  mujer,  ganarân  1 1  reaies  de 
racion,  iG  por  cada  representaciôn,  5o  ducados  para  el  Corpus  y 
5oo  reaies  prestados. 

Pedro  de  Cifuentes  y  Teresa  de  Briones,  su  mujer,  ganarân  (5  reaies 
de  racion,  7  de  cada  representaciôn,  160  para  el  Corpus  y  80  de 
préstamo.  Madrid,  20  Febrero  idlti. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i04i.) 

370.  —  Poder  de  Bartolomé  Romero  û  su  mujer  Antonia  Manuela 
para  concertar  fiestas,  admitir  représentantes  en  su  compania,  cobrar 
y  hacer  escrituras  de  obligaciôn  en  su  nombre.  Toledo,  aa  Febrero 

(Juan  Garcia  de  Alberlos,  iG^i,  f°  i58.) 

371.  —  Obligaciôn  de  Andrés  de  la  Vega  y  Felipe  Dominguez  de  ir 
â  la  villa  de  Paracuellos  y  hacer  en  el  dia  del  S""  Sacramento  de  este 
aûo  dos  comedias  con  sus  bailes  y  entremeses  :  «  la  primera  por  la 
manana  que  ha  de  ser  la  de  San  Antonio  y  otra  por  la  tarde,  â  lo 
humano,  de  las  que  tienen  prestas  para  este  aûo  »,  por  precio  de 
3,250  reaies  y  ademâs  la  comida,  camas  y  posadas.  Madrid,  33  Fe- 
brero 16/41. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  iGZji,  f°  i3G.) 

372.  —  Concierto  de  Agustin  Coroiiel  y  Juan  Rodriguez  de 
Antriago,  aulores  de  comedias,  para  formar  una  compaîïia  de  racion 
y  representaciôn  durante  este  afio  hasta  Carnestolendas  del  prôximo, 
â  pérdidas  y  ganancias  igualcs,  salvo  8  realcs  de  cada  representaciôn 
y  100  reaies  de  la  fiesta  del  Corpus,  (jue  se  iian  de  sacar  para  Juana 
Bernabela,  mujer  de  Juan  Rodriguez  de  Antriago,  y  (pie  no  han  de 
entrar  en  las  pérdidas.  Madrid,  23  Febrero  16/1 1. 

(Juan  Garcia  de  Albcrtos,  i6/ji,  f"  i38.) 

373.  —  Obligaciôn  de  Pedro  de  la  Rosa  y  de  su  mujer  Catalina  de 
Nicolas  de  pagar  ;'i  liartolomé  Romero,  autor  de  comedias,  y  â  su 
mujer  Antonia  Manuela,  i,5oo  rcales  que  les  quedan  â  deber  de  rcsto 
de  3,000  «  que  los  susodichos  hubieron  de  haber  por  razon  de  très 
comedias  que  eran  suyas  y  nosotros  se  las  bicimos  con  nucstra 
compania,   por  cuya  razon  nos  convinimos  y   concertamos   en  que 


NUEVOS  DATOS  ACEUCA  DEL  HISTRIOMSMO  ESPA>OL        3ll 

los    hubiesemos    de    pagar    los   dichos   très  mil    reaies  ».   Madrid, 
2  Marzo  i64i. 
(Juan  Garcia  de  Albertos,  16A1,  f"  167.) 

374.  —  Obligaciôn  de  Diego  de  Robledo,  de  asislir  en  la  compania 
de  Bartolomé  Romero,  autor  de  comedias,  durante  un  ano  para  repre- 
sentar  y  cantar,  ganando  10  reaies  de  raciôn,  22  de  cada  representa- 
ciôn,  55o  reaies  por  la  fiesta  del  Corpus  y  ademâs  se  le  darân  adelan- 
tados  2,5oo  reaies.  Madrid,  2  Marzo  i6/ii. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f'  169.) 

375.  —  Concierto  de  Antonio  de  Sierra,  autor  de  comedias,  sobre 
formar  compania  con  los  siguientes  représentantes  : 

Alonso  Jiménez  y  su  mujér  Catalina  de  Padilla,  esta  para  los  pri- 
meros  papeles  de  damas  y  su  marido  para  representar;  han  de  haber 
i5  reaies  de  parte. 

Nicolas  de  Alzamora  y  su  mujer  Juana  \  erda,  ambos  para  segundos 
papeles;  i4  reaies. 

Juan  de  Abidamontes,  primeros  papeles,  y  su  mujer  Ana  Maria, 
tercera  papeles  ;  i5  reaies. 

Gregorio  de  Morales,  para  cantar,  Angela  Maria,  su  mujer,  para 
li"  papeles,  y  Maria  de  Morales,  su  hija,  para  representar  lo  que  el 
autor  le  ordene,  i5  reaies. 

Francisco  Tribino,  gracioso,  ganarâ  10  reaies. 

Juan  Maldonado,  barba,  cobrarâ  7  12  reaies. 

Jerônimo  Nùnez,  apuntador,  ganarâ  4  reaies. 

Pedro  Vâsquez,  cobrador,  ganarâ  5  reaies. 

Luis  Diaz,  cantor,  ganarâ  6  1/2  reaies. 

Antonio  Sierva,  autor,  representarâ  los  terceros  papeles,  y  Agueda 
Corveda,  su  mujer,  ayudarâ  â  cantar;  ganarân  10  reaies  de  parte. 

Se  seilala  caja  y  para  esta  8  reaies  de  parte  que  han  de  servir  para 
beneficio  de  la  compania  ;  para  misa  y  ?s^  S^  de  la  Xovena  se  sefialan 
4  reaies  que  retendra  el  autor  para  entregar  â  la  cofradia.  Madrid, 
a  Marzo  i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64r,  f°  173.) 

376.  —  Obligaciôn  de  Luis  Lôpez  Sustaete  de  ir  con  su  compania  â 
Alcalâ  de  Henares  ocho  dias  antes  de  Navidad  de  esie  ano  y  hacer 
20  representaciones  sucesivas  en  la  casa  de  comedias  de  dicha  villa, 
cobrando  todos  los  aprovechamientos  de  cinco  dias  â  su  elecciôn,  â 
excepciôn  del  aposento  del  Ayuntamiento.  Madrid,  3  Marzo  i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f"  178.) 

377.  —  Testamento  de  Gerônima  de  Burgos. 

«  In  Dei  nomine,  amen.  Sepan  quantos  esta  carta  de  testamento, 
ultima  y  postrimera  voluntad,  vieren  como  yo  Gerônima  de  Bur- 
gos, viuda  muger  que  fué  de  Pedro  de  Yaldes,  difunto,  estando 
enferma  en  la  cama  de  enfermedad  que  Dios  >uestro  Sefior  ha  sido 


3l2  BULLETIN    illSPA>iQUÈ 

servido  de  me  dar  y  en  mi  buen  juicio  y  enlendimiento  natural... 
ordeno  este  mi  testamento  en  la  manera  siguiente  : 

»  Primeramente  encomiendo  mi  aima  â  Dios  Niiestro  Senor  que  la 
criô  y  redimio  con  su  preciosa  sangre,  pasion  y  muerte,  y  el  cuerpo  à 
la  tierra  de  donde  fue  formado  =  Y  que  quando  su  divina  Magestad 
fuere  servido  de  me  llevar  desta  présente  vida,  mando  se  sepulle  mi 
cuerpo  en  la  parroquial  de  senor  San  Sébastian  desta  villa  en  la  sepul. 
tura  que  pareciere  â  mis  testamentarios,  y  que  el  dia  de  mi  falleci- 
miento,  si  fuere  liora,  se  me  diga  una  misa  cantada,  cuerpo  présente, 
vigilia  y  responso,  y  si  no  fuere  hora,  pase  al  dia  siguiente  y  que  se 
vista  mi  cuerpo  con  el  habito  de  San  Francisco. 

»  Item  declaro  que  soy  cofrada  de  la  cofradia  de  Nuestra  Senora  de 
la  Novena,  encargo  a  los  cofrades  de  la  dicha  cofradia  hagan  con  mi 
lo  que  tienen  obligacion. 

»  Mando  se  digan  por  mi  aima  cinquenta  misas  de  aima  en  altares 
de  privilegio.  » 

(Otras  5o  misas  por  el  aima  de  Ana  Garcia,  su  criado,  difunta.) 

(A  las  mandas  forzosas  dos  reaies.) 

(Que  se  venden  las  casas  que  tiene  en  Valladolid,  parroquia  de 
S.  Pedro,  y  que  pagadas  las  deudas,  se  aplique  el  rémanente  â  misas, 
sufragios  y  obras  pias  por  su  aima  y  la  de  Pedro  de  Valdés,  su 
marido.) 

(Que  se  tomen  dos  bulas  de  composiciùn  para  descargo  de  su  con- 
ciencia.) 

(Albaceas  :  Bernardino  Ordônez,  vecino  de  Toledo,  Pedro  Orbina 
y  Antonio  Vâzquez.) 

«  Dexo  y  instituyo  por  mi  unica  y  universal  heredera  a  mi  aima  y  al 
aima  del  dicho  Pedro  deValdes,  mi  marido,  para  que  tod(»  lo  (jue  fuere 
se  gaste  y  distribuya  en  misas  y  sufragios  por  cllas  y  en  obras  pias...» 

Madrid,  3  de  Marz<»  do  iG/ii. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  16/41,  f"  188,) 

378.  —  Obligacion  de  .luana  de  Espinosa  de  ir  con  su  com[)ania  â  la 
villa  de  Loechcs  para  el  lunes  infraoctavadel  Corpus  y  haccrdos  rcprc- 
sentaciones,por  la  manana  los  Autos  que  baya  bccho  en  Madrid  y  por 
la  larde  una  comedia,  en  precio  de  i,4oo  rcales.  Madrid,  3  Marzo  i6'ii. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i6/ii,  f°  '77-) 

379.  —  Oijligaciôn  de  Cipriano  Enn'ciuc/.  y  Krancisca  Maria,  su 
mujer,  de  asistir  él  como  guardarropa,  y  cUa  para  rcprcsrniar  los 
cuartos  p.ipclcs  en  la  compania  de  Juan  Kodrigucz  de  Aniriago, 
autor  de  comcdias,  ganando  8  rcales  de  racion,  8  de  cada  reprcscn- 
tacion,  ao  escudos  para  la  Resta  del  Corpus,  y  a5o  reaies  prcstados, 
([ue  se  les  darân  en  Toledo  para  descmpenar  varias  prcndas.  Madrid, 
Ix  Marzo  19/ii. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  lO^i,  f"  i83.) 


NUEVOS  DATOS  ACERCA  DEL  HISTRIOMSMO  ESPANOL       3l3 

380.  —  Obligaciôn  de  Antonio  Cintor  de  asistir  hasta  Carnesto- 
lendas  del  aîîo  prôximo  en  la  compafua  de  Antonio  de  Benavente  y 
Gabriel  Cintor,  autores  de  comedias,  para  cobrar  en  la  puerta  de  las 
mugeres,  ganando  5  reaies  de  racion,  5  de  cada  representaciôn,  mâs 
dos  caballeri'as  para  los  viajes  y  llevado  su  hato.  Madrid,  9  Marzo  16^1. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f"  2o5.) 

381.  —  Obligaciôn  de  Juan  Rodrîguez  de  Antriago,  autor  de 
comedias,  de  pagar  para  Abril  de  este  ano  â  Andrés  de  la  Vega,  autor 
de  comedias,  4/io  reaies  de  vellon,  «  los  quales  confieso  deberle  del 
precio  y  por  un  traslado  de  la  comedia  de  senor  San  Antonio  para 
poderla  representar  con  mi  compaûia,  de  cuya  comedia  me  doy  por 
entregado  â  toda  mi  voluntad  y  su  precio  le  confieso  por  justo..,  » 
Madrid,  9  Marzo  i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f^  199-) 

382.  —  Poder  de  Pedro  de  la  Rosa,  autor  de  comedias,  a  D.  Juan 
Gabanilles,  para  concertarle  con  el  administrador  de  la  casa  de 
comedias  de  Yalencia  sobre  ir  a  este  ciudad  y  hacer  5o  representa- 
ciones  sucesivas,  cobrando  los  aprovechamientosacostumbrados  y  con 
i4,ooo  reaies  de  préstamo.  Madrid,  i3  Marzo  i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f"  208.) 

383.  —  Obligaciôn  de  Juan  de  Navia,  de  asistir  hasta  Carnesto- 
lendas  de  1642  y  hacer  el  papel  de  la  graciosidad  en  la  compania 
de  partes  que  dirige  Laurencio  de  Prado  y  Péri,  autor  de  comedias, 
cuyos  compaiieros  son  : 

Gaspar  de  Segovia, 

José  de  Reynoso, 

Miguel  de  Aguirre, 

Jerônimo  de  Sandoval, 

Miguel  de  Miranda, 

Jerônimo  de  Médina 

y  Luis  Diaz, 
ganando  8  reaies  de  raciôn,  Sa  de  cada  representaciôn,  para  la  fiesta 
del  Corpus  20  ducados,  se  le  pagarân  las  raciones  de  Cuaresma  y 
25o  reaies  prestados.  Madrid,  i5  Marzo  1641. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64«,  f"  212.) 

384.  —  Concierto  de  varios  représentantes  para  former  compania 
para  este  ano  hajo  la  direcciôn  de  Laurencio  de  Prado  y  Péri,  autor  : 

Laurencio  de  Prado  harâ  primeros  y  segundos  papeles,  y  su  mujer 
Manuela  Morana  representarâ  terceras  damas,  y  tendrânambos  24  reaies 
de  parte. 

Gaspar  de  Segovia,  para  i""  y  2*'  galanes,  tendra  12  reaies  de  parte. 

Isabel  dç  Castro,  primera  dama,  tendra  12  reaies. 

Miguel  de  Aguirre,  para  3°'  papeles,  10  reaies. 

José  Reynoso,  barba,  tendra  8  reaies. 


3l4  BULLETIN    HISPANIQUE 

Miguel  de  Miranda,  cobrador,  y  Juana  Bautisla,  su  mujcr,  que  harâ 
a"'  damas,  tendrân  17  reaies. 

Jerùnimo  de  Médina,  segundo  gracioso,  6  reaies. 

Luis  Dîaz,  mùsico,  7  reaies. 

Jerùnimo  de  Sandoval,  apuntador,  6  reaies. 

Se  senalan  12  reaies  para  la  caja,  y  servirân  para  las  necesidades  de 
la  compani'a;  dos  reaies  para  ^'  S'  de  la  Novena.  Madrid,  i5  Marzo 
i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f"  216,) 

385.  —  Goncierlo  sobre  los  carruajes  y  caballerias  que  se  han  de 
dar  à  Francisco  de  Guzmân  y  Morales,  autor  de  comedias,  para 
Uevar  su  compania  desde  Madrid  â  la  ciudad  de  ^'alladolid.  Madrid, 
i5  Marzo  i64t. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1641,  f"  21 4.) 

386.  —  Obligacion  de  Laurencio  de  Prado  y  Péri,  autor  de  come- 
dias, de  ir  â  la  ciudad  de  Segovia  para  iiacer  los  Autos  Sacramentales 
de  la  fiesla  del  Santisimo,  enviando  ocho  para  que  se  elijan  los  dos  que 
haya  de  hacer, cobrando  6,600  reaies  por  todo.  Madrid,  16  Marzo  i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f"  318.) 

387.  —  Obligacion  de  llernân  Sânchez  de  Vargas,  autor  de  come- 
dias, de  ir  â  la  villa  de  Cifuentes  para  el  dia  del  Corpus  y  hacer  con 
sus  hijas  P'rancisca  Maria  y  Luisa  ires  representaciones,  cobrando 
800  reaies.  Madrid,  i3  Abril  1641. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64r,  f"  267.) 

388.  —  Conciertos  de  Laurencio  de  Prado  y  Péri,  autor  de  comedias, 
por  aigu  nos  représentantes  para  reforzar  su  compania  hasta  Carnesto- 
lendas  de  1642. 

Jacinto  Manuel  y  Petronila  de  Anaya,  su  muger,  el  r  para  cobrar  y 
la  2'  para  representar,  ganarân  10  reaies  de  raciôn,  12  por  represen- 
taciôn,  220  para  el  Corpus  y  très  caballerias. 

Maria  Antonio  y  su  hija  Maria  de  Vivas,  para  representar,  ganando 
10  reaies  de  raciôn,  10  por  representaciôn  y  200  para  la  fiesta  del 
Corpus. 

José  de  Heynoso,  barba,  ganarâ  4  rcales  de  raciôn,  6  cada  represen- 
taci(Jn  y  para  el  Corpus  i5o  reaies. 

Jerônimo  de  Sandoval,  apuntador,  ganarâ  3  reaies  de  raciôn,  4  por 
representaciôn  y  7  ducados  para  el  Corpus. 

Miguel  de  Aguirre,  para  representar,  tendra  (J  reaies  de  raciôn, 
7  por  represenlacii'tn  y  180  reaies  para  el  Corpus. 

Bartolomé  de  Hobles,  para  representar,  y  Alfonsa  de  Haro,  su 
muger,  para  hacer  segundas  y  terceras  damas,  ganarân  6  reaies  de 
raciôn,  8  por  cada  representaciôn  y  i5o  par  la  fiesta  del  Corpus. 

Gaspar  de  Segovia,  para  representar,  tendra  8  reaies  de  raciôn, 
I  i  por  cada  representaciôn  y  3oo  para  la  fiesta  del  Corpus. 


?fUEVOS    DATOS    ACERC.V    DEL    HISTRIOMSMO    ESPANOL  3t5 

Manuela  Infanta  representarâ,  ganando  6  reaies  de  raciôn,  6  decada 
representaciôn  y  4oo  reaies  prestados.  Madrid,  17  Abril  i64i. 
(Juan  Garcia  de  Albertos,  iG/ii,  f"  260  y  sig.) 

389.  —  Concierto  de  Pedro  de  la  Rosa,  autor  de  comedias,  con 
D.  Fernando  de  Ribera  Coronado,  agente  gênerai  del  Duque  de  Bejar, 
de  hacer  en  esta  villa  seis  representaciones  y  très  particulares,  para  la 
fiesta  de  San  Juan  de  este  ano. 

Ha  de  haber  9  comedias  a  elecciôn  del  Sr.  Duque. 

Por  todo  se  pagarân  i,o5o  ducados;  3, 000  reaies  en  el  acto,  3, 000 
al  salir  para  Bejar  y  los  restantes  al  terminar  la  l'iltima  representaciôn. 
Madrid,  24  Abril  i64i. 

(Juan  de  Pineda,  i64i,  f"  178.) 

390.  —  Concierto  de  Juana  de  Espinosa,  autora  de  comedias,  con 
Segundo  de  Morales  sobre  alquiler  de  varios  vestidos  de  représenter. 

Segundo  de  Morales  entregarâ  dichos  vestidos  la  vispera  del  dia  en 
que  se  baya  de  dar  â  la  villa  la  muestra  de  la  compania  para  los 
Autos  del  Corpus. 

Servirân  para  el  di'a  de  la  muestra,  Jueves  (dia  del  Corpus),  viernes, 
sàbado,  domingo  y  lunes  infraoctava  y  pagarâ  1,200  reaies  por  el 
alquiler  de  los  mismos. 

Si  los  ocupare  en  los  corrales  de  Madrid,  pagarâ  cada  dia  4o  reaies. 
Madrid,  10  Mayo  i6/ir. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  \6l\i ,  1°  340.) 

391.  —  Obligaciôn  de  Juana  de  Espinosa  de  ir  con  su  compania  â  la 
ciudad  de  Toledo  para  el  20  Junio  de  este  ano  y  hacer  4o  representa- 
ciones sucesivas,  3o  précisas  y  10  voluntarias,  cobrando  55  reaies  de 
ayuda  de  costa  por  cada  representaciôn  y  adelantândole  6,000  reaies. 

Es  condiciôn  que  si  de  la  ciudad  de  Valencia  la  llaman,  ha  de  ser 
obligada  â  concluir  los  representaciones  fijas;  pero  podrâ  dejar  de 
hacer  en  Toledo  las  voluntarias.  Madrid,  20  Mayo  i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i ,  f"  343.) 

392.  —  Carta  de  pago  de  Pedro  de  la  Rosa,  autor  de  comedias,  de 
4,000  reaies  que  le  entrega  Don  Fernando  de  Ribera  Coronado,  agenle 
gênerai  del  Duque  de  Béjar,  â  cuenta  de  los  i,o5o  ducados  que  ha  de 
haber  por  las  9  representaciones  que  ha  de  hacer  en  Béjar  el  dia  de 
San  Juan  de  este  ano  y  los  dos  dfas  siguientes.  Madrid  17  junio  i64i. 

(Juan  de  Pineda,  i64i,  f°  262.) 

393.  —  Escritura  de  ratificacion  del  concierto  hecho  por  Juana  de 
Espinosa  y  todos  los  de  su  compania  obligândose  â  ir  â  Valencia  y 
hacer  las  representaciones  convenidas.  Firman  : 

Juana  de  Espinosa,  autora. 

Ifiigo  de  Loaysa  por  si  y  por  su  muger  Maria  de  Jesûs. 
Santiago  Valenciano  por  si  y  por  su  hija  Antonia  Valenciano. 
Josefa  Roman,  viuda. 


3l6  BULLETIN   HISPANIQUE 

Bernardo  de  Medrano. 
Juan  de  Léon. 
Francisco  Garcia. 
'^    Juan  Mati'as. 
Antonio  Messia. 
Francisco  Antonio  Becerra. 
Jaime  Salvador.  Madrid,  22  de  Junio  i64i. 
(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f"  425. 

394.  Obligacion  de  Juana  Suârez,  viuda  de  Juan  Quadrado,  de 
asistir  en  la  companîa  de  Francisco  de  Guzmân,  autor  de  comedias, 
desde  hoy  hasta  Carnestolendas  de  1642  por  representar  los  terceros 
papeles  ganando  7  reaies  de  parte.  Madrid,  28  Junio  1641. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  P  428.) 

395.  —  El  Gonsejo  de  Castilla  propone  â  S.  M.  varios  puntos  y  entre 
ellos  que  conviene  mandar  que  no  se  hagan  representaciones  en  los 
conventos  de  religiosas  y  religiosos,  como  se  hace  en  Madrid  que  lo 
évita  el  Gobernador  del  Gonsejo,  Madrid,  8  Agosto  1641. 

(Arch.  hist.  —  Gonsejo,  Leg.  53,  n"  9.) 

396.  —  Obligacion  de  Alfonso  de  Osuna,  représentante,  résidente 
en  la  corte,  de  pagar  a  Francisco  Martine/  de  Uriarte  i,io4  reaies  que 
le  debe.  Madrid,  21  Agosto  i64i. 

(Juan  de  Pineda,  164 1,  f"  4o6.) 

397.  —  Poder  de  Antonio  Garcia  de  Prado  y  Péri,  autor  de  come- 
dias, y  de  su  mujer  Mariana  de  Morales  Vaca  â  Jeronimo  Povedano, 
vecino  de  Granada,  para  cobrar  de  Don  Alvaro  Nûnez  de  Lisboa,  dos 
sortijas  de  diamantes  que  tiene  en  su  poder,  y,  vendidas,  pagar  al 
mismo  la  cantidad  en  que  se  las  dejô  empeiîadas.  Madrid,  3o  Sep- 
tiembre  i64i. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f*  525.) 

398.  —  Poder  de  Andrés  de  la  Vega,  autor  de  comedias,  a  Pedro 
Ascanio  para  hacer  en  su  nombre  una  compania  de  représentantes  en 
la  forma  y  con  las  condiciones  que  le  parecieren  convenientes.  Madrid, 
24  Diciembre  i64i- 

En  virtud  de  este  poder  hizo  los  siguientes  conciertos  en  el  mismo 
dia. 

José  de  Garriôn,  barba,  servira  en  dicha  compania  desde  el  martes 
de  Carnestolendas  de  1642  â  igual  dia  de  ir)43,  ganando  9  reaies  de 
racion,  i5  de  cada  represenlaci('»n,  3oo  reaies  por  la  liesta  del  Corpus 
y  800  prestados  en  cl  acto. 

Pedro  Manuel  de  Castilla  representarâ  los  primeros  papeles, 
ganando  10  reaies  de  racion,  20  por  represenlaciùn,  Goo  y  très  cabal- 
lerias  para  la  fiesla  del  Cor|)us  y  se  le  dan'i  de  préstamo  lodo  lo  que 
quedare  debiendo  û  Antonio  de  Kueda  después  de  ajustadas  sus 
cuentas. 


NUEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    HISTRIONISMO    ESPA^ÏOL  817 

Diego  Osorio,  gracioso,  ganarâ  8  reaies  de  raciôn,  i5  por  represen- 
taciôn,  4oo  y  très  caballerîas  para  el  Corpus  y  600  de  préstamo. 

Juan  Morana,  mi'isico  y  cantor,  y  Josefa  Morana,  su  liija,  tercera 
dama,  ganarân  16  reaies  de  raciôn,  18  de  cada  representaciûn,  700  y 
cuatro  caballerîas  para  la  fiesta  del  Corpus  y  cômo  préstamo  1,000 
reaies. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64i,  f'ôiS  y  siguientes.) 

CRISTÔBAL  PÉREZ  PASTOR. 
(Continuard.) 


VARIÉTÉS 


Infante  =  Infanta. 

En  prononçant,  le  i"  septembre  iG83,  l'oraison  funèbre  de  Marie- 
Thérèse,  Bossuet  fut  naturellement  conduit  à  parler  de  la  jeunesse  de 
la  reine  et  du  temps  qu'elle  passa  à  la  cour  du  roi  Philippe  IV  son 
père.  11  imperte  peu  de  savoir  comment  il  se  documenta  sur  la 
période  espagnole  de  cette  existence,  ce  qu'il  en  dit  n'ayant  rien  (jue 
d'assez  banal  :  un  seul  détail  du  récit  mérite  d'être  noté,  car  il  fait 
allusion  à  un  usage  local  que  les  commentateurs  des  Oraisons  n'ont 
pas  su  expliquer. 

Ôa  la  regardait  en  Espagne  non  pas  comme  une  infante,  mais  comme  un 
infant;  car  c'est  ainsi  qu'on  y  appelle  la  princesse  qu'on  reconnaît  comme 
héritière  de  tant  de  royaumes. 

Là-dessus,  M.  P.  Jacquinet  pique  cette  note  :  «  On  la  regardait 
comme  un  infant.  A  cause  des  deuils  qui  frappaient  coup  sur  coup 
Philippe  IV  dans  sa  postérité  mâle.  (^)uatre  >  infants  languirent  et 
moururent  très  jeunes  avant  la  naissance  de  don  Carlos  (Charles  II) 
qui  arriva  en  i66i.  On  avait  donc  pu  croire  que  l'héritage  de  tant  de 
couronnes  tomberait  aux  mains  de  Marie-Thérèse.  »  La  note  en  ques- 
tion ne  rend  pas  compte  du  fait  précis  et  curieux  signalé  par  Bossuet 
qu'en  Espagne  on  nomme  infant  au  masculin  la  princesse  héritière. 
Pour  s'instruire  de  cette  particularité  espagnole,  Bossuet  n'eut  pas  à 
cherclipr  bien  loin  ;  il  la  trouva  dans  le  récit  de  l'ambassade  du  maré- 
chal de  Gramont,  qui  se  rendit  à  Madrid  en  i65f)  pour  demander,  au 
nom  de  Louis  \IV,  la  main  de  Marie-Thérèse,  c'est-à-dire  dans  le 
Journal  du  voyage  d'Espagne  de  Franc.ois  Bertaut,  imprime  à  Paris 
en  16G9,  on  on  lit  à  la  page  07  : 

Le  Jeudy  2,5  [octobre]  on  manda  le  Hoy  en  diligence,  à  cause  de  la  maladie 
du  petit  Infant,  car  l'aisné  on  l'appelle  El  Principe,  le  Prince,  et  les  autres 
Infantes.  Infants,  et  l'aînée  des  Infantes,  comme  par  exemple  uoslre  Heine 
future,  on  l'appelle  Infante  avec  un  e,  et  la  seconde,  on  l'appelle  Infanta  avec 
un  a. 

I.  Non  pas  quatre,  mais  (rois:  Balthasar,  mort  le  9  octobre  i64G;  Philippe,  mort 
le  i"  novembre  iGOi  ;  Ferdinand,  mort  le  a3  octobre  1659. 


VARIÉTÉS  3 19 

Le  même  renseignement  revient  dans  le  même  volume  (p.  279;  au 
chapitre  ((  De  la  cour  du  roy  d'Espagne  »  : 

Kt  l'on  m'a  dit  une  chose  assez  particulière,  qui  est  que  les  Princesses  se 
nomment  Infantes,  avec  cette  distinction  que,  quand  il  n'y  a  point  de 
Princes,  l'aisnée  se  nomme  Infante  comme  si  c'estoitun  garçon,  et  les  autres 
Infanlas  avec  un  a. 

Bertaut  recueillit-il  vraiment  sur  place  l'information  qu'il  a  insérée 
dans  son  récit,  et,  si  cela  est,  les  Espagnols  qu'il  vit  lui  donnèrent-ils 
un  renseignement  exact;'  A  la  première  question,  on  peut  sans  aucun 
doute  répondre  afTirmativement,  car  ce  détail  d'étiquelte  ne  pouvait 
être  appris  nulle  part  ailleurs  qu'en  Espagne.  Pour  répondre  à  la 
seconde,  il  faut  prendre  un  peu  plus  de  peine.  Une  anecdote  inédite  qui 
a  trait  à  une  autre  infante  d'Espagne,  destinée  elle  aussi  à  devenir  reine 
de  France,  j'entends  Anne  d'Autriche,  nous  fournit  déjà  un  premier 
témoignage  à  l'appui  de  ce  que  Bertaut  affirme  qu'on  lui  raconta 
en  1659.  Voici  cette  anecdote  telle  que  la  narra  à  son  sou\erain,  Phi- 
lippe 111,  l'ambassadeur  espagnol  Don  Inigo  de  Cârdenas,  dans  une 
lettre  datée  de  Paris,  27  janvier  1610. 

Après  dîner,  je  me  rendis  chez  la  Reine  et  en  entrant  je  vis,  sur  le  bureau 
où  elle  était  assise,  un  portrait  de  l'Infante  Doua  Ana,  madame...  «  Ambas- 
sadeur, Mie  dit-elle,  regardez  votre  infante  d'Espagne.  »  Je  m'approchai 
pour  regarder,  comme  il  convenait,  le  portrait,  et  je  dis  :  «  Il  est  très  bien 
et  ressemble  à  Son  Altesse.  »  Là-dessus  la  Reine  se  mit  à  rire  :  «  Eh  bien  ! 
apprenez  que  ce  polisson  de  Dauphin  disait  qu'elle  serait  très  bien  en  habit 
de  dame  française,  et  demandait  qu'on  la  peignit  ainsi.  »  Je  répondis  : 
«  Jésus!  Votre  Majesté  dit-elle  cela  sérieusement?  —  Mais  oui.  —  Que  votre 
Majesté  sache  alors  que  cet  habit  de  dame  française  lui  siéra  mal,  car  elle  est 
infant  et  non  infante.  —  Mais  un  infant  n'est  pas  une  femme!  —  Elle  se 
nomme  Doua  Ana,  mais  elle  est  i'infant  Doua  Ana,  et  cela  est  aussi  sûr 
que  je  le  dis  à  Votre  Majesté.  »  A  ces  mots,  la  Reine  devint  rouge  comme 
une  dinde  et  dit  :  «  Je  ne  sais;»  puis  elle  leva  les  épaules  et  se  tut  '. 

Pourquoi  la  reine  Marie  de  Médicis  rougit-elle  en  écoutant  les 
propos  do  Don  Inigo  de  Cârdenas,  et  qu'est-ce  qui  put  alarmer  sa 
pudeur  de  reine  et  de  femme  de  quarante  ans.^  On  ne  le  voit  pas. 

1.  («  Fui  despues  de  comer  a  la  Reyna,  y  en  entrando  vi  sobre  el  bufete  donde 
ostava  arrimada  un  relrato  de  la  ynfanta  Dona  Ana,  mi  senora  ..  «  Embaxador,  mira 
vuestra  ynfanta  de  Espana.  »  Holvi  haçiendo  lo  que  dévia  con  el  relrato  y  dise  : 
«Esta  muy  bueno  y  pareçe  a  Su  Alteza.  »  Bolvio  la  Reyna  riyendo  :  «  Pues  savé  quel 
vellaco  del  Delfin  deçia  estaria  muy  buena  en  avito  de  dama  françessa,  que  la  pin- 
lassen  ansî.  »  Respondi  :  «  Jésus  !  dizelo  de  veras  V.  M  !*  —  Si  os  prometo.  >'  —  Répli- 
qué :  «  Sepa  V.  M.  no  le  bendra  bien  avito  de  dama  françessa,  ques  ynfante  y  no 
ynfanta.  »  Replicô  :  «  Ynfante  no  es  muger.  »  Respondi  :  «  Lamasse  Dofia  Ana,pero 
es  el  ynfante  Dona  Ana,  y  esto  es  çierto  como  lo  digo  a  V.  M.  »  La  Reyna  se  puso 
colorada  como  una  pava.  Dixo  :  «  No  se.  »  Y  subiendo  los  ombres  calhi.  »  (Archives 
Nationales,  K  1/162,  n"  8.) 


030  BULLETIN    HISPANIQUE 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  récit  qu'on  vient  de  lire  nous  prouve  qu'en  1610, 
non  pas  l'héritière  présomptive  —  Anne  ne  l'était  plus  —  mais 
simplement  laînée  des  infantes  dEspagne  était  couramment  appelée 
Infante  au  lieu  d'infanta,  au  moins  dans  le  jargon  de  la  cour.  En  fait 
nous  pouvons  remonter  encore  plus  liaut  et  constater  que  cet  usage 
appartient  déjà  au  siècle  précédent.  Le  bon  chroniqueur  basque 
Estéban  de  Garibay,  après  avoir  relaté  dans  son  Compendio  historial 
(livre  XIX,  chapitre  VI),  la  mort  du  prince  Don  Juan,  fils  des  Rois 
Catholiques,  et  la  fausse-couche  de  sa  femme  Marguerite  d'Autriche, 
événements  qui  eurent  pour  conséquence  de  faire  passer  le  droit  de 
succession  au  trône  sur  la  tête  d'Isabelle,  infante  d'Espagne  et  reine  de 
Portugal,  s'en  prend  à  l'ignorance  des  gens  de  cour  qui,  pour  faire 
les  entendus,  ont  voulu,  du  temps  de  l'empereur  Charles-Quint,  appli- 
quer le  nom  d'infante,  au  masculin,  aux  infantes,  lesquelles  doivent, 
disent-ils,  être  nommées  ainsi  à  cause  de  leur  capacité  à  hériter  de  la 
couronne.  Absurde,  s'écrie  Garibay,  parce  que  contraire  aux  règles  de 
la  grammaire,  qui  établit  la  distinction  des  genres,  et  parce  qu'on  ne 
trouverait  dans  aucun  document  ancien,  castillan  ou  latin,  un  seul 
exemple  d'une  telle  confusion.  Au  surplus,  à  suivre  ces  novateurs,  il 
faudrait,  dit-il,  nommer  les  princesses  pnnces,  car  si  le  nom  masculin 
d'infante  doit  être  attribué  aux  infantes  qui  ne  possèdent  que  la  capacité 
d'hériter,  à  plus  forte  raison  doit-on  masculiniser  les  princesses 
royales  qui  sont  en  possession  d'un  droit.  Et  pourquoi  s'arrêter  en  si 
beau  chemin  et  ne  pas  nommer  les  reines  rois,  après  leur  avènement 
au  trône?  Toile  est  l'argumentation  de  Garibay,  que  je  crois  devoir 
transcrire  à  la  lettre  avant  de  la  discuter. 

En  este  lugar  no  puedo  dexar  de  notar  la  grande  ignorancia  de  algunas 
gantes,  especialmente  cortesanos,  que  despuntando  de  agudos.  han  querido 
introduzir  en  tiempo  d'el  Emperador  Don  Carlos  Maxime,  nombre  de 
infante  en  genero  masculino  a  las  infantas,  pareciendoles,  segun  su  enten- 
dimiento.  que  por  ser  capaces  para  la  ercncia  de  les  reynos,  deven  ser 
Uamadas  assi.  Esta  es  una  absurda  introduclon,  por  que  allende  de  ser  cosa 
contra  todos  los  preccptos  de  granunalicas  de  quales  quiera  lengnas,  en 
hazer  dicion  masculina  feminina,  no  liallanin  tal  nombre  en  ningun  grave 
auctor  anliguo,  ny  en  instrunienlos  viejos  de  los  arcliivos  d'cstos  reynos  en 
lengua  Lalina  ny  Caslellana,  pero  lo  contrario  en  todas  las  ocasiones,  hasta 
en  algunas  escripturas  muy  antiguas,  llamando  en  Latin  injantisa  a  la 
infanta.  D'esla  ignorancia  por  légitima  consequcncia,  se  avia  de  seguir,  que 
con  mejor  titulo,  a  las  Princesas  avian  de  Uaniar  l^rincipes,  por  que  quando 
las  inl'antas  hallandose  reniotas  de  la  sucession  Real  deven  gozar,  segun  su 
parecer,  d'el  nombre  masculino  de  infante,  por  ser  solo  capaces  a  la  erencia 
Real,  mas  ocasion  ay  para  ser  llarnadas  las  Princesas  Principes,  por  estar 
tan  propincos  y  conjuntos  a  la  corona  Real,  y  assi  segun  eslo  déviera  ser 
Uamada  Principe  la  nueva  Prlncesa  Dona  Ysabel,  Reyna  de  Portugal,  que  por 
la  nmerte  d'el  Principe  don  Juan  su  hermano,  venia  a  ser  légitima  y  forçosa 
eredera   de  los  reynos  de  Castilla  y  .\ragon  ;  pero  gracioso  sonido    lernia, 


Variétés  Sai 

dezir'por  muger  Principe  Doua  Ysabel?  De  lo  mesmo  resultaria  otro  mayor 
inconveniente,  que  las  Princesas  proprietarias  venidas  a  reynar,  con  mayor 
titulo  se  avian  de  llamar  Reyes  y  no  Reynas,  pues  los  reynos  son  suyos,  de 
donde  se  seguia  que  a  la  Reyna  Doua  Y^sabcl,  madré  de  la  Princesa,  avian 
de  llamar  Rey  Doua  Ysabel,  cosa  tan  absurda,  crassa  y  sin  fundamentoquerer 
hazei'  de  infanla  infante,  y  de  Princesa  Principe,  y  de  Reyna  Rey.  Exemplos 
podria  yo  referir  de  graves  y  doctissinios  varones  para  anular  esta  fragil 
inlroducion,  pero  porque  en  cosa  tan  clara  y  manifiesta  séria  superflue 
querer  gaslar  mas  liempo  en  confcrencias,  no  ay  para  que  mas  tralar  d'ello, 
deziendo  que  las  hembras  se  han  de  llamar  infanlas,  Princesas  y  Reynas,  y 
solos  los  varones  infante,  Principes  y  Reyes,  especialmentc  no  adquiriendo 
por  ello  derecho  alguno  para  la  succession  Real,  ny  para  otro  efîeto 
ninguno  '. 

L'argumentation  de  l'excellent  Guipuzxoain  soulève  plusieurs  objec- 
tions. D'abord,  la  question  grammaticale.  On  s'étonne  que  Garibay, 
si  versé  dans  la  connaissance  des  vieilles  chroniques  et  des  vieilles 
chartes,  puisse  dire  que  infante  ne  se  trouve  pas  employé  au  féminin 
en  ancien  castillan.  Or,  on  ne  trouve  que  cela!  Infante  ou  infant  est 
régulièrement  accolé  à  des  noms  féminins,  en  langue  vulgaire  ou  en 
latin,  depuis  le  plus  haut  Moyen-Age  jusque  vers  la  fin  du  xv"  siècle 
et  même  au  delà,  ce  qui  n'a  rien  que  de  très  naturel,  puisqu'il  s'agit 
(l'un  adjectif  ^enrm  communis,  qui  n'a  pris  qu'assez  tard  l'a  féminin 
par  assimilation  aux  adjectifs  à  deux  genres.  Si  donc  les  gens  de  cour 
prétendirent  appliquer  le  mot  infante  aux  infantes  sans  distinction, 
c'est-à-dire  à  toutes  les  filles  du  roi  qui  ont  en  etlet  toutes  la  capacité 
d'hériter,  il  n'y  avait  lieu  que  de  leur  reprocher  un  archaïsme  de  lan- 
gage j.  Mais  est-ce  bien  là  ce  qui  s'est  passé?  Je  ne  le  pense  pas.  A  mon 
sens,  les  cortesanos,  si  vertement  tancés  par  Garibay,  voulaient  réserver 
la  qualification  d'infante  aux  seules  infantes  qui,  à  défaut  de  mâle 
vivant,  acquéraient  le  droit  de  succession  à  la  couronne  :  à  celles-ci 
on  donna  aussi  le  nom  de  princesses  par  imitation  du  titre  de  prince 
(prince  des  Asturies)  de  l'héritier  mâle,  mais  seulement  quand  elles 
avaient  été  Jurées  par  les  cortes  '.  Au  xvii°  siècle,  ni  Anne  ni  Marie- 
Thérèse  n'ont  été  appelées  princesses,  même  pendant  le  laps  de  temps 
011  il  fut  possible  de  les  tenir  pour  héritières  présomptives  :  on  ne  les 
nomma  jamais  qu'infantes. 

Résumons  :  des  divers  textes  qui  viennent  d'être  produits  résulte 

1.  Compendio  hislorial  de  las  chronicas  y  universal  hisloria  de  todos  los  reynos  de 
Espana,  Anvers,  loyi,  livre  XIX,  ch.  VI. 

2.  C'est  ce  qu'a  commis,  par  exemple,  le  secrétaire  qui  a  tenu  la  plume  au  nom 
de  Marguerite  d'Autriche,  dans  une  lettre  de  cette  princesse  à  Ferdinand  le  Catho- 
lique, datée  de  Bruxellrs,  2b  novembre  1609,  où  on  lit  très  distinctement  :  «  la  infante 
dona  Ysabel...  las  olras  infantes...  la  infante  dona  Maria...  la  in/an<c  dofia  Leonor». 
La  lettre  en  question  se  trouve  au  fol.  82  du  ms.  Espagnol  3 18  de  la  Bibliothèque 
Nationale. 

3.  Voir  à  ce  sujet  D.  Manuel  Colmeiro,  Curso  de  derecho  politico,  Madrid,  1873, 
p.  307. 


33  2  BULLETIN    HISPANIQUE 

évidemment  que,  dès  le  xvi"  siècle,  l'usage  s'introduisit  à  la  cour 
d'Espagne,  et  se  continua  jusque  dans  la  seconde  moitié  du  xvii',  de 
dénommer  infante,  au  masculin,  les  infantes  ayant  des  droits  assez  pro- 
ches à  la  couronne  et  que  l'on  assimilait  ainsi  à  des  héritiers  mâles, 
mais  que  cet  usage  ne  reçut  jamais  de  consécration  officielle.  En  ce 
qui  concerne  Anne  d'Autriche,  l'appellation  d'injante  lui  aurait  même 
été  donnée,  d'après  l'ambassadeur  Cârdenas,  après  qu'elle  avait  perdu 
le  droit  d'hériter,  car  en  1610  elle  avait  un  frère  vivant,  le  futur 
Philippe  IV,  né  à  Valladolid  le  8  avril  i0o5:  mais  on  doit  croire 
qu'étant  venue  au  monde  le  premier  des  enfants  de  Philippe  lll,  en 
1601,  son  entourage  se  plut  à  lui  conserver  la  prérogative  du  titre 
d'infante. 

Ces  considérations  nous  ramènent  à  Bossuet.  Sachons  gré  au  grand 
panégyriste  d'avoir  su  mettre  dans  une  de  ses  plus  belles  oraisons 
funèbres  un  détail  de  bonne  couleur  locale  et  un  détail  exact,  comme 
il  faut  aussi  lui  savoir  gré  d'avoir,  dans  un  autre  de  ses  panégyriques, 
celui  de  Condé,  désigné  sous  son  vrai  nom  de  comte  de  Fontaine  l'un 
des  glorieux  vaincus  de  Rocroi,  alors  que  nos  historiens  du  xviir  siècle, 
Voltaire  en  tête,  ont  changé  ce  nom  en  comte  de  Fuentes,  erreur  qui 
traîne  encore  dans  bon  nombre  de  livres. 

A.  M. -F. 


UNIVERSITÉS  ET  ENSEIGNEMENT 


A  propos  du  livre  de  M.  Ernesto  Quesada, 
«La  enseiianza  de  la  historia  en  las  universidades  alemanas»  ■. 

Le  Conseil  académique  de  l'Université  de  la  Plata  (Facultad  de 
Cienclas  jarîdicas  y  sociales),  voulant  fonder  une  section  littéraire 
proprement  dite  (filosojia,  historia,  letras),  avait  chargé  un  poly- 
graphe  connu,  M.  Ernesto  (Quesada,  professeur  d'économie  politique, 
de  poursuivre  en  Europe  une  enquête  sur  la  méthodologie  et  la  péda- 
gogie de  l'histoire.  Le  gros  volume  où  celui-ci  a  consigné,  en  rentrant 
d'Allemagne,  le  résultat  de  ses  observations,  marque  dans  le  dévelop- 
pement des  universités  sud-américaines  une  date  importante.  On 
peut,  sans  exagération,  lui  attribuer  la  portée  d'un  manifeste.  Il  ne 
s'agit  plus,  en  effet,  de  répondre  aux  besoins  immédiats  d'un  pays 
en  voie  d'organisation.  Le  corps  enseignant  de  Buenos-Ayres  forme 
depuis  longtemps  des  avocats,  des  médecins  et  des  ingénieurs.  Mais 
il  est  permis  à  l'Argentine,  maintenant  qu'elle  possède  le  nécessaire, 
de  se  donner,  comme  les  nations  du  vieux  continent,  le  luxe  envié 
d'une  culture  désintéressée.  Ajoutons  que,  pour  un  Etat  qui  s'accroît 
par  l'apport  incessant  de  l'émigration,  où  les  étrangers,  notamment 
les  Basques  et  les  Italiens,  forment  des  groupements  homogènes,  le 
problème  de  l'assimilation  et  de  la  nationalisation  s'impose  aux 
classes  dirigeantes  qui  reconnaissent  le  besoin  de  constituer,  au  moyen 
de  manuels  scolaires  mieux  compris,  une  tradition  intellectuelle  repo- 
sant sur  la  connaissance  précise  et  directe  de  l'histoire  américaine. 
C'est  à  cette  tâche  que  vont  désormais  collaborer,  sans  sortir  de  leurs 
domaines  respectifs,  l'enseignement  secondaire  et  l'enseignement 
supérieur. 

On  peut  regretter  que  M.  Quesada  n'ait  pas  jugé  à  propos  de  se 
renseigner  chez  nous 2.  Comment  lui  en  faire  un  grief  lorsqu'il  s'ap- 
puie, pour  établir  la   supériorité  des  historiens  allemands,  sur  des 

1.  La  Plala,  1910,  in-8°,  iSiy  pages. 

2.  Sur  le  mèmesujetil  existe  un  livre  de  M.  RicarJo  Rojas  (La  Reslauraciàn  nacio. 
nalista.  Buenos  Aires,  njog),  qui  étudie  l'enseignement  de  l'iiistoire  en  France,  en 
Allemagne,  en  Espagne,  en  Italie,  aux  États-Unis.  Mais  comme  le  titre  même  l'in- 
dique, il  dépasse  les  proportions  d'une  enquête  universitaire.  L'auteur  se  propose 
avant  tout  de  combattre  les  forces  «  desargentinizantes  ». 


3a4  BULLËtlN    HISPANIQUE 

témoignages  français?  Très  bien  informé  d'ailleurs,  il  évite  les  écarts 
de  l'enthousiasme  irréfléchi.  Ancien  élève  du  gymnase  de  Dresde, 
ancien  étudiant  des  universités  de  Leipzig  et  de  Berlin,  il  se  donne 
ouvertement  comme  un  germanophile.  Mais  il  ne  cache  pas  que 
l'enseignement  de  l'histoire  est  subordonné,  dans  les  établissements 
secondaires  d'outre-Rhin,  à  la  glorification  des  Mohenzollern,  au 
devoir  officiellement  imposé  de  combattre  les  doctrines  socialistes, 
communistes  et  anarchistes.  Il  remarque,  d'autre  part,  que  les  univer- 
sités sacrifient  trop  souvent  la  pratique  (Kônnen)  à  la  spéculation  pure 
(W'issen).  Les  jeunes  gens,  mal  préparés  au  travail  scientifique,  se 
spécialisent  prématurément,  résignés  à  ne  connaître  à  la  fin  de  leurs 
études  qu'une  portion  d'un  chapitre  de  l'histoire  nationale.  Tout  en 
rendant  justice  aux  qualités  indéniables  qui  justifient  chez  nos  voi- 
sins le  prestige  de  l'enseignement  supérieur  (liberté  absolue  des 
étudiants  et  des  professeurs  affranchis  de  la  préparation  des  examens 
d'État,  concurrence  utile  entre  le  titulaire  et  le  privatdocent,  collabo- 
ration des  maîtres  et  des  élèves  dans  les  séminaires  où  l'on  apprend 
à  remonter  aux  sources,  échange  admirablement  organisé  entre  les 
bibliothèques  de  l'Empire),  M.  Quesada  reste  fidèle  aux  traditions  du 
génie  latin.  On  ne  voit  pas  que  la  méthode  qu'il  recommande  aux 
futurs  historiens  de  l'Argentine  puisse  les  détourner  de  la  culture 
française;  car  une  bonne  partie  de  l'Allemagne,  et  tout  d'abord  la 
Prusse,  hésite  à  se  rallier  aux  théories  de  M.  Lampreclit,  l'éminent 
professeur  de  Leipzig,  dont  le  séminaire  va  servir  d'archétype  au 
centre  d'études  supérieures  de  la  Plata.  Son  but  est  de  constituer 
l'histoire  de  la  civilisation  mondiale.  Dans  un  pays  où  la  spéciali- 
sation a  été  poussée  à  ses  dernières  conséquences,  il  fait  respecter  les 
idées  générales  et  démontre  l'utilité  des  grandes  synthèses.  Comme 
Auguste  Comte,  c'est  à  la  psychologie  des  groupes  et  des  masses  qu'il 
demande  l'explication  des  phénomènes  politiques  et  économiques. 
Et  pour  que  la  ressemblance  avec  le  positivisme  soit  plus  frappante 
encore,  rappelons  que  M.  Lamprecht  divise  l'histoire  de  la  civilisation 
en  séries,  nous  pourrions  dire  en  étapes,  dont  l'étude  comparée  nous 
conduit,  à  travers  des  périodes  d'intégration  et  de  dispersion  succes- 
sives, à  un  état  social  de  plus  en  plus  stable. 

Il  ne  nous  appartient  pas  de  discuter  la  thèse  de  la  Kiilturgeschichie. 
On  sait  qu'elle  soulève,  aujourd'hui  encore,  de  vives  contradictions. 
La  Bévue  de  synthèse  historique  a  reproduit  en  njoô  les  arguments  de 
M.  Lamprecht  et  ceux  de  M.  Bernlieim,  son  adversaire.  Bornons-nous 
à  constater  que  la  sociologie  sous  toutes  ses  formes,  ethnologie, 
folklorisme,  anthropogéographie,  est  fort  en  honneur,  depuis  un 
demi-siècle  environ,  dans  les  pays  de  langue  espagnole  et  surtout  de 
langue  portugaise.  Il  semble  bien,  sans  qu'on  puisse  en  indiquer  les 
origines  avec  précision,  que  cette  faveur  se  rattache  au  magnifique 


UNIVERSITES    ET    ENSEIGNEMENT  325 

épanouissement  de  l'École  de  Coïmbre,  qui  se  proposait  d'embrasser 
simultanément  et  successivement   l'histoire  sous   tous    ses  aspects  : 
«  Nous  commençâmes  à  aimer  l'humanité,    écrivait  Eça  de  Queiroz 
avec  une  nuance  de  persiflage,  comme  jadis,  au  temps  de  l'ultra- 
romanlisme  on  aimait  Elvire,  tout  de  blanc  vêtue  au  clair  de  lune.  »> 
Les  uns  penchèrent  vers  lélude  philologique  des  traditions  popu- 
laires :  «  Je  faisais  des  recherches  qui  duraient  des  semaines  et  des 
mois,  déclare  Capella,  pour  connaître  l'origine  et  la  signification  du 
rameau  de  laurier  suspendu  à  la  porte  des  tavernes.  »  D'autres,  et  nous 
parlons  des  plus  illustres,  inclinèrent  vers  la  philosophie.  Le  système 
d'Auguste   Comte,    introduit   dans  la  péninsule   par   des   ingénieurs 
formés  à  Paris,  par  des  médecins  qui  lisaient  les  ouvrages  de  Robin 
et  de  Blainville,  gagna  ^bientôt  l'Amérique.  On   se  rappelle  que  les 
positivistes  de  Rio-de-Janeiro  contribuèrent  puissamment  à  l'organi- 
sation du  centenaire  de  Camôes  en    i8So.   A    Buenos-Ayres  même, 
leur  doctrine  s'est  propagée.  M.  Ernesto  Quesada,  tout  en  penchant 
vers  l'école  de  Spencer,  ne  peut  refuser  au  conitisme  une  part  de  son 
attention.  11  faut  convenir  que  la  méthode  sociologique,  (ju'on  l'ap- 
pelle ou  non  Kullnrhisiorische  Méthode,  s'accorde  admirablement  avec 
le  programme  des  américanistes.  Jusqu'ici,  dans  l'histoire  universelle, 
on  avait  réservé  une  place  prépondérante,  pour  ne  pas  dire  exclusive, 
à  l'élément  indo-germanique.  Mais  l'heure  est  venue,  semble-t-il,  de 
réhabiliter  les  quatre  cinquièmes  de  l'humanité.  Déjà  M.  Lamprecht 
organise  line  vaste  enquête  sur  le  Japon.  Ses  disciples   américains 
n'oublieront  pas  qu'on  parle  encore  le  guarani  dans  la  province  de 
Corrientes,  le  quichua  dans  celle  de  Santiago  del  Estero,  l'araucanien 
à  Mendoza.  Au  lieu  de  s'appuyer  sur  le  témoignage  des  explorateurs 
et  des  missionnaires,  ils  voudront  connaître  de  visu  et  in  situ  ce  qui 
reste  des  civilisations  disparues.  Et  lorsqu'il  s'agira  de  peindre  les 
conflits  des  races,  plus  tard  la  rivalité  entre  la  métropole  et  ses  colo- 
nies, enfin  lorsqu'on  abordera  les  problèmes  soulevés  par  l'établisse- 
ment du  régime  parlementaire  et  de  nos  jours  par  l'immigration,  ce 
sera  encore,   et  toujours,   la   méthode  comparative  qui    s'imposera. 
M.  Quesada,  il  faut  le  reconnaître,  a  donc  raison  d'organiser  l'ensei- 
gnement argentin  u  con  amplio  criterio  sociologico  ». 

Beaucoup  de  professeurs  allemands,  historiens  et  géographes, 
s'intéressent  aux  questions  américaines.  Citons  au  hasard  MM.  Hettner 
à  Halle,  AVeule  à  Leipzig,  Ehrenreich  à  Berlin,  Leonhard  à  Breslau, 
Wagner  à  Goettingen,  Oestreich  à  Marburg,  Lie  à  Rostock,  etc..  Il  ne 
semble  pas  toutefois  qu'un  Français  doive  tirer  du  livre  de  M.  Quesada 
une  conclusion  décourageante.  Jamais  les  relations  intellectuelles 
entre  Paris  et  Buenos-Ayres  n'ont  été  aussi  étroites.  Les  ouvrages  de 
MM.  Clemenceau  et  lïuret  viennent  de  tourner  une  fois  de  plus  l'at- 
tention du  grand  public  vers  l'Argentine.  Nous  commençons  même 
Bull,  hispan.  aa 


326  BULLETIN    HISPANIQUE 

à  deviner  qu'il  existe  une  littérature  américaine.  On  a  traduit  deux 
romans,  tous  deux  historiques,  mais  d'inégale  valeur,  Des  larmes  et 
du  sang,  de  M.  C.  0.  Bunge,  La  gloire  de  Don  Raniire,  de  M.  Enrique 
Larreta.  Enfin  Vlntercambio  universitaire,  grâce  aux  conférences  de 
M.  Loriu  et  de  M.  Martinenche,  est  entré  dans  la  voie  des  réalisations 
pratiques.  Nous  espérons  que  les  disciples  argentins  de  M.  Lamprecht 
se  souviendront  que  l'école  sociologique  représentée  chez  nous  par 
M.  Durkheim  a  résolument  orienté  ses  recherches  dans  le  sens  de  la 
psychologie  sociale  des  races  primitives.  C'est  un  nouveau  terrain  sur 
lequel  Américains  du  Sud  et  Français  peuvent  ^e  rencontrer  pour 
faire  œuvre  commune. 

Georges  LE  GENTIL. 


L'Intercambio  à  Oviedo. 

Les  professeurs  chargés  de  représenter  l'Université  de  Bordeaux 
à  Oviedo  cette  année  ont  été  MM.  Bréhier  et  Dresch.  Le  premier, 
nommé  tout  récemment  professeur  de  philosophie  à  Bordeaux,  a  eu 
ainsi  tout  de  suite  l'occasion  de  se  rendre  compte  que  l'Université 
d'avant-garde  qui  a  pour  recteur  M.  Canella  était  résolument  et 
étroitement  attachée  à  la  culture  française  et  à  l'amitié  française. 
11  avait  pris  pour  sujet:  La  philosophie  d'Henri  Bergson,  et  ne  pouvait 
mieux  choisir  pour  contribuer  à  faire  connaître  notre  vie  intellectuelle. 
M.  Dresch,  professeur  adjoint  de  littérature  allemande,  a  parlé  sur 
Les  influences  lilléraires  de  l'Espagne,  en  se  limitant  à  celles  qui  se 
sont  exercées  sur  la  France  et  l'Allemagne. 

Ces  deux  conférences,  qui  ont  eu  lieu  les  20  et  26  mars,  ont  obtenu 
un  très  vif  succès. 


NECROLOGIE 


D.  Marceline  Menéndez  y  Pelayo. 

La  mort  de  Menéndez  y  Pelayo  a  été  pour  l'Espagne  un  véritable 
deuil  public  :  académies  et  sociétés,  revues  et  journaux  ont  célébré 
à  l'envi  ses  mérites  et  exprimé  éloquemment  leurs  regrets.  Ceux-là 
mêmes  que  les  choses  de  l'esprit  laissent  d'ordinaire  indifférents  sen- 
tirent qu'avec  lui  disparaissait  l'un  de  ceux  qui  font  encore  honneur 
à  l'Espagne  et  qui  ont  su  le  mieux  plaider  sa  cause,  protester  contre 
des  dédains  humiliants,  mettre  en  lumière  ses  titres  à  l'estime,  à 
l'admiration  et  parfois  à  la  reconnaissance.  Dans  un  pays  ou  la  répu- 
tation d'un  savant,  si  grand  soit-il,  n'a  guère  de  chances  de  balancer 
celle  d'un  politicien  ou  d'un  général,  son  nom  était  devenu  presque 
populaire.  Il  représentait  pour  le  grand  public,  comme  en  d'autres 
époques,  celui  d'im  Pic  de  la  Mirandole,  toute  la  science  humaine. 
La  légende  elle-même,  fondée  sans  doute  sur  son  extrême  précocité, 
sur  sa  merveilleuse  mémoire,  sur  l'abondance  de  son  œuvre,  s'était 
emparée  de  son  nom;  il  était  devenu,  à  l'égal  de  Lope  de  Vega  (et 
la  remarque  n'a  point  échappé  à  ses  biographes),  l'un  de  ces  types 
caractéristiques  et  représentatifs  pour  lesquels  on  créait  jadis  les 
épithctes  de  El  Monstruo.  el  Divino,  el  Fenix. 

Cette  admiration  que,  par  un  accord  rare  et  touchant,  toutes  les 
classes  de  la  société  espagnole  ont  exprimée  à  l'unisson,  sera  certaine- 
ment partagée,  hors  d'Espagne,  par  quiconque  connaît  l'œuvre  du 
critique  prématurément  disparu.  Lorsqu'il  y  a  treize  ans  on  résolut  de 
fêter  la  vingtième  année  de  professorat  de  Menéndez  y  Pelayo  à  l'Uni- 
versité de  Madrid,  de  tous  les  pays  du  monde  ses  amis,  célèbres  ou 
obscurs,  apportèrent  avec  un  égal  empressement  leur  pierre  au  monu- 
ment érigé  en  son  honneur  {Homenaje  d  M.  P.,  2  vol.,  Madrid,  1899). 
Depuis  cette  date  ses  œuvres  se  sont  multipliées,  son  talent  a  rayonné 
avec  un  éclat  de  jour  en  jour  plus  grand  :  il  est  devenu  sans  contesta- 
tion le  grand  maître  de  la  critique  espagnole. 

Nous  n'avons  pas  l'intention  de  résumer  ici,  encore  moins  celle  de 
juger  cette  œuvre  :  il  y  faudrait  plus  de  loisirs  que  nous  n'en  avons, 
plus  de  science  que  nous  n'en  possédons.  Nous  voudrions  simplement 
joindre  l'hommage  du  Bulletin  hispanique  (auquel  il  avait  souvent 


âaS  BULLËTtN    HISPANIQUE 

manifesté  sa  sympathie)  à  tous  ceux  que  sa  mémoire  a  déjà  reçus.  En 
dehors  des  spécialistes,  le  public  français  a  jusqu'ici  trop  imparfaite- 
ment connu,  me  semble-t-il,  les  travaux,  cependant  si  accessibles  à 
tous,  si  larges  d'inspiration,  et  d'une  lecture  si  attachante,  de  Menéndez 
y  Pelayo.  Que  n'ont-ils  été  rédigés  en  allemand!  ils  seraient  traduits 
depuis  longtemps.  Mais,  en  espagnol,  à  quoi  bon?  C'est  un  axiome 
que  -tout  le  monde  chez  nous  comprend  cette  langue,  sans  l'avoir 
apprise.  Bien  rares  aussi  sont  en  France  les  notices  sur  l'auteur. 
Quelques  critiques  cependant,  et,  en  particulier  M.  Boris  de  Tannen- 
berg,  dans  une  substantielle  étude,  aussi  bien  documentée  que  sage- 
ment pensée  et  agréablement  écrite  i,  l'ont  présenté  au  public.  Mais 
le  public  s'enthousiasme  d'autant  plus  difficilement  pour  un  savant 
que  les  sujets,  les  livres  ou  les  auteurs  dont  il  traite  lui  sont  moins 
familiers,  et  comme  au  temps  de  Montesquieu,  il  est  toujours  commode 
de  dire  que  ce  que  l'on  ne  connaît  pas  ne  vaut  pas  la  peine  d'être 
connu. 

Bornons -nous  donc  à  renvoyer  ceux  qui  voudraient  connaître 
l'homme  et  l'œuvre  aux  pages  très  consciencieuses  de  notre  collabora- 
teur, M.  de  Tannenbcrg,  et  essayons,  après  lui,  de  rappeler  rapide- 
ment quelques-uns  des  traits  les  plus  caractéristiques  de  l'érudit,  du 
lettré  et  de  l'homme. 

De  l'érudit  (quoiqu'il  n'ait  jamais  fait  de  l'érudition  proprement  dite 
le  but  dernier  et  exclusif  de  ses  travaux)  il  avait  certes  les  qualités 
essentielles  :  la  passion  du  document  patiemment  poursuivi  dans  les 
manuscrits  et  les  livres,  une  méthode  exacte  et  intelligente,  qui  ne 
consistait  pas  dans  l'amoncellement  indéfini  et  indiscret  des  fiches, 
mais  à  laquelle  présidait  un  goût  délicat,  un  sentiment  très  sur,  très  lin 
des  valeurs  relatives.  Dans  son  travail  de  recherche  et  de  préj)aralion 
il  était  aidé  par  l'une  des  plus  extraordinaires  mémoires  connues,  à  la 
fois  prompte  et  tenace,  qui  classait  sans  fatigue  faits,  dates  et  noms,  et 
qui  les  rendait  au  premier  aj)pel  avec  plus  de  sûreté  et  d'à-propos  que 
le  plus  perfectionné  des  classeurs  imaginés  pour  parer  aux  défaillances 
ordinaires.  Cette  inépuisable  réserve  lui  fournissait  spontanément  et 
comme  à  point  nommé,  avec  une  abondance  dont  il  a  cependant 
rarement  abusé,  les  détails  précis,  les  citations,  les  rapprochements, 
les  indications  bibliographiques.  Un  noni;  un  titre  sullisait,  sous  sa 
plume  comme  sur  ses  lèvres,  à  faire  jaillir  la  source  que  l'on  sentait 
chez  lui  toujours  prête  à  allleurer.  Cette  richesse  qui  s'épanchait  ainsi 
spontanément  donnait  à  sa  conversation  le  même  intérêt,  la  même 
vie  (ju'à  ses  écrits.  Heureux  celui  pour  qui  tout  livre  lu  est  un  livre  su 
et  qui  porte  toujours  en  lui-même  sa  bibliothè([ue!  En  quelque  langue 
qu'ils  fussent  écrits,  tous  les  ouvrages  qu'il  avait  lus  ou  simplement 

I.  Espwjne  liltéraire,  i"  s(';ri(.',  i'aris-Toulousc,  iijo'i,  y>i).  8ï)—jio, 


NÉCROLOGIE  829 

feuilletés  (car  par  un  privilège  qui  fut  aussi,  dit-on,  celui  de  Brune- 
tière,  il  semblait  avoir  des  yeux  au  bout  des  doigts),  avaient  enrichi 
cette  mémoire  qui  n'oubliait  plus. 

Aussi  avait-il  l'amour  du  livre.  Et  cela  apparaît  à  l'abondance  de  sa 
documentation  bibliographique,  qui  devient,  au  cours  de  son  œuvre, 
de  plus  en  plus  riche,  de  plus  en  plus  précise.  A  la  mort  de  Tamayo 
y  Baus,  on  le  nomma  Directeur  de  la  Bibliothèque  Nationale  :  il  en  fut 
très  heureux,  car  il  se  sentait  là  dans  son  vrai  milieu.  Mais  si  l'on 
s'était  imaginé  trouver  en  lui  l'administrateur  idéal,  le  réformateur 
après  lequel  on  soupire,  on  se  trompa  :  il  lut  la  Bibliothèque,  il  ne 
l'administra  pas,  —  et  il  ne  la  réforma  pas,  hélas!  Les  abus,  il  les 
voyait,  il  les  constatait  (il  n'avait  pas  grand  mérite  à  cela!);  il  en 
parlait,  dans  l'intimité,  avec  une  verve  amusante,  qui,  dans  cette 
bouche,  ne  manquait  point  de  saveur,  mais  il  se  sentait  sans  doute 
inhabile  à  les  corriger.  Bien  entendu,  la  Nationale  de  Madrid  ne 
suffisait  point  à  ce  terrible  lecteur.  Il  n'est  point  en  Espagne,  où  il  y 
en  a  cependant  plus  qu'on  n'imagine  communément,  de  dépôts  de 
livres,  de  collections  publiques  ou  privées,  d'archives  hermétiquement 
fermées  ou  chichement  entr 'ouvertes,  il  n'est  point  de  trésors  cachés 
où  il  n'ait  pénétré  (car  on  n'osait  guère  l'évincer),  ou  envoyé  ses 
émissaires.  Et  je  crois  bien  aussi  que  ses  rapides  voyages  à  l'étranger 
n'ont  guère  été  que  des  courses  au  livre  rare.  Une  correspondance 
extraordinairement  étendue  avec  les  savants  du  monde  entier  élar- 
gissait singulièrement  le  champ  de  ses  explorations.  Souhaitons  que 
cette  correspondance,  éparpillée  aux  quatre  coins  de  l'univers,  puisse 
un  jour  être  réunie  et  publiée.  Elle  ne  serait  ni  moins  instructive  ni 
moins  savovueuse  que  celle  des  grands  érudits  de  la  Benaissance  ou 
des  humanistes  du  xviiT  siècle,  des  Juste  Lipse  ou  des  Mayans.  Car  il 
ne  se  publiait  point  de  livre  sur  l'Espagne  qu'on  ne  lui  envoyât,  qu'il 
ne  lût  et  qu'il  ne  corrigeât,  pour  le  plus  grand  profit  des  auteurs, 
auxquels  il  communiquaiflibéralement  ses  notes  copieuses. 

Peu  à  peu  cependant  il  se  constituait,  pour  son  agrément  particulier, 
une  Bibliothèque  à  lui,  moins  précieuse  par  le  nombre  (respectable 
certes)  des  ouvrages  que  par  l'extraordinaire  rareté  ou  l'importance 
exceptionnelle  de  certains  manuscrits  ou  de  certaines  éditions.  Cette 
bibliothèque,  il  l'a  léguée  en  mourant  à  sa  chère  ville  natale  de  San- 
tander,  comme  son  ami  Serrano  Morales  avait  laissé  la  sienne  à 
Valencia.  Et  en  voilà  du  moins  deux  que  les  hispanisants  ne  seront 
pas  obligés  d'aller  consulter  à  Baltimore  ou  à  New- York  !  Ce  fut  là,  je 
crois,  la"  vraie  passion  de  sa  vie,  l'unique  Dame  de  ses  pensées:  c'est 
pour  elle  qu'il  soupirait  quand  il  en  était  loin  ;  c'est  à  elle  qu'il  appor- 
tait chaque  printemps,  dès  qu'il  pouvait  s'évader,  des  dons,  des  joyaux 
nouveaux,  qui  encombraient,  rangés  dans  des  caisses,  sa  cellule  de 
l'iVcadémie  de  l'Histoire,  où  il  avait  l'air  d'être  campé.  C'est  auprès 


33o  BULLETIN    HISPANIQUE 

d'elle  aussi  que  les  heures  passaient  plus  douces  et  plus  fécondes,  car 
de  ces  rendez-vous  prolongés  dans  le  tranquille  et  riant  sanctuaire 
élevé  au  fond  du  modeste  jardin  de  famille,  il  revenait  toujours  avec 
quelque  œuvre  nouvelle,  conçue  dans  la  jiaix  et  dans  la  joie,  comme 
il  convient  à  celles  qui  doivent  vivre. 

Plus  qu'un  érudit,  Menéndez  y  Pelayo  fut  un  historien  des  idées  et 
des  œuvres.  Il  les  jugeait  en  philosophe  tout  autant  qu'en  savant.  Par 
delà  les  faits  ce  qu'il  prétendait  atteindre,  c'était  la  pensée  et  c'est 
cette  préoccupation  qui  donne  à  l'ensemble  de  son  œuvre  toute  sa 
portée.  C'est  par  la  philosophie  qu'au  sortir  de  l'école  il  avait  été 
d'abord  séduit.  Avec  l'intrépidité  de  la  jeunesse  (et  l'on  sait  combien 
dans  le  domaine  des  idées  la  sienne  fut  fougueuse)  il  avait  projeté 
d'écrire  l'Histoire  de  la  philosophie  espagnole.  11  ne  l'a  point  fait, 
et  un  autre  s'est  chargé  de  ce  soin  ;  mais  toute  sa  vie  il  est  resté 
fidèle  à  ses  premières  études  et  ses  goûts  premiers  persistèrent,  alors 
même  que  les  recherches  littéraires  devinrent  sa  préoccupation 
dominante. 

11  y  a,  dans  son  œuvre  de  critique,  une  partie  essentiellement 
dogmatique,  où  s'affirme  avec  franchise  sa  double  foi  religieuse  et 
politique.  C'est  à  cette  lumière  qu'il  juge,  qu'il  approuve  ou  qu'il 
condamne.  Aussi  ne  faut-il  point  chercher  dans  ses  écrits,  surtout 
dans  ceux  de  sa  jeunesse,  ni  cette  indulgence,  fille  suspecte  de  l'indif- 
férence ou  de  la  tolérance,  ni  ces  complaisances  pleines  de  sou})lesse 
auxquelles  se  laisse  aller  trop  souvent  le  scepticisme  contemporain. 
Ce  qui  fait  son  originalité,  sa  force,  ce  qui  constitue  proprement  sa 
physionomie,  c'est  précisément  la  solidité,  l'intransigeance  de  sa  foi. 
Il  faut  le  prendre  tel  qu'il  est,  tel  qu'il  s'offre,  en  bloc  :  il  se  refuse, 
parce  que  la  conscience,  le  devoir  ne  lui  permettent  pas  d'en  faire, 
à  toute  concession.  «  A  ceux  qui  le  traitaient  de  néo-catholique,  dit 
fort  justement  M.  de  Tannenberg,  M.  Menéndez  y  Pelayo  répondit 
jadis  par  cette  déclaration  de  fière  allure  :  je  suis  catholique,  ni 
nouveau,  ni  vieux,  mais  catholique  d  mâcha  martilh,  comme  mes 
parents  et  mes  aïeux,  et  comme  toute  l'Espagne  historique,  fertile  en 
saints,  en  héros,  en  savants  un  peu  plus  que  l'Espagne  moderne.  » 
Ceux-là  mêmes  qui,  ne  partageant  point  ses  convictions,  auront  le 
plus  de  réserves  à  faire  sur  ses  conclusions,  ne  contesteront  pas  du 
moins  la  noblesse  de  cette  attitude.  Peut-être  y  auraient-ils  voulu 
parfois,  au  début  surtout,  un  peu  plus  de  discrétion  et  de  mesure, 
mais  nous  savons  de  reste  qu'en  Espagne,  (juand  il  s'agit  du  point 
d'honneur,  on  a  coutume  de  faire  bonne  mesure.  On  a  rappelé  souvent 
le  grand  signe  de  croix  qui  ouvrit  la  première  leçon  du  précoce 
candidat  dans  les  fameuses  oposiciones,  où  il  gagna  sa  chaire  à 
l'Université,  comme  Rodrigue  gagna  ses  éperons  en  pourfendant  les 
Maures.  (]e  geste  qui  marqua  son  entrée  dans  la  carrière,  accompagna 


! 


NÉCROLOGIE  33 I 

fidèlement  tous  les  actes  de  sa  vie  comme  il  devait  accompagner  son 
dernier  soupir. 

Intransigeant  dans  les  doctrines,  il  tempéra,  il  assouplit  toutefois, 
à  mesure  qu'il  avançait  dans  la  vie,  la  raideur  de  son  attitude  pre- 
mière. En  comparant  à  la  première  1  édition  récente  des  Hétérodoxes 
on  verra  ce  que  le  temps  et  l'expérience  avaient  apporté  d'adoucis- 
sement, non  point  certes  à  la  rigueur  de  la  doctrine,  mais  à  sa 
manière  de  la  défendre.  Son  intelligence  était  trop  pénétrante,  tout 
en  restant  inébranlablement  attachée  à  son  point  d'appui,  pour  ne 
point  percevoir  toute  la  complexité  de  la  pensée  humaine;  son  cœur 
était  trop  généreux  pour  ne  pas  rendre  hommage,  lorsqu'il  la 
rencontrait,  à  une  beauté  morale  qui  s'inspirait  d'autres  principes 
que  les  siens.  A  mesure  qu'il  montait  plus  haut,  son  point  de  vue 
s'élargissait:  il  découvrait  dans  des  tendances  bien  éloignées  des 
siennes  un  point  d'aboutissement  qui  rapprochait  les  unes  des  autres 
au-delà  de  l'horizon  trop  borné  des  regards  mortels.  On  a  comparé 
Menéndez  y  Pelayo  â  Joseph  de  Maistre,  on  pourrait  le  comparer 
avec  plus  de  justesse,  je  crois,  à  Louis  Veuillot,  dont  il  avait 
parfois  la  passion,  la  verve  et  la  puissante  ironie.  Avec  plus  de 
science  et  une  instruction  plus  vaste,  il  a  porté  comme  lui  dans  la 
défense  du  catholicisme  et  jusque  dans  l'apologie  de  l'Inquisition 
une  franchise  robuste,  une  chaleur  d'âme,  et,  quand  il  rencontre  les 
préjugés  ou  les  injures  vulgaires,  une  éloquence  savoureuse  et  prime- 
sautière,  qui  séduit,  et  qui  instruit,  même  lorsqu'elle  ne  convainc  pas. 
Il  était  d'ailleurs  mieux  armé  que  lui  pour  la  démonstration.  Les 
esprits  les  plus  libres  devront  certainement,  avant  de  proclamer 
l'insignifiance  de  la  pensée  philosophique  ou  la  ftiillite  de  la  science 
espagnole,  tenir  grand  compte  des  habiles  et  abondants  plaidoyers  de 
Menéndez  y  Pelayo,  soit  dans  cette  Histoire  des  Hétérodoxes ,  soit  dans 
les  trois  volumes  de  la  Science  Espagnole,  si  riches  de  faits  nouveaux, 
auxquels  ni  Picatoste  ni  Vallin  n'ont  pu  ajouter  grand'chose,  soit 
dans  sa  lettre  à  son  ami  et  coreligionnaire  Laverde  Ruiz,  soit  dans 
ses  Leçons  de  l'Ateneo  ou  ses  Discours  académiques,  soit  dans  ses 
Essais  de  critique  philosophique.  La  valeur  de  cette  brillante  apologie 
de  l'intellectualité  espagnole  devra  être  reconnue  même  par  ceux  qui 
se  refusent  à  le  suivre  jusqu'au  bout  de  ses  conclusions.  D.  Juan 
Valera  qui  fut,  par  certains  côtés,  tout  l'opposé  de  son  ami,  a  pu  dire 
avec  raison  «qu'en  philosophie  et  en  sciences  et  dans  toutes  les  matières 
spéculatives,  Menéndez  y  Pelayo  a  voulu  présenter  et  faire  valoir  nos 
titres  de  noblesse,  restaurer  nos  gloires  dans  l'esprit  des  hommes, 
revendiquer  nos  droits  méconnus  par  le  vulgaire.  Il  s'est  efforcé  en 
même  temps,  sans  rabaisser  les  autres  nations,  mais  en  les  jugeant 
sans  préjugés,  sans  jalousie,  avec  justice  et  même  avec  une  sympathie 
généreuse,  de  nous  rendre  notre  place,  non  pas  au-dessous,  ni  à  la 


333  BULLETIN    HISPANIQUE 

suite,  mais  au  niveau  et  à  côté  de  ces  nations,  et  son  verdict  est  vrai 
et  juste  »>. 

Les  critiques  que  peut  çà  et  là  soulever  cet  ample  plaidoyer  pour 
l'Espagne  religieuse  et  traditionnelle  n'ont  plus  grand'raison  d'être 
quand  il  s'agit  uniquement  d'histoire  littéraire.  Ici,  il  n'y  a  qu'à 
admirer  et  à  profiter.  Des  œuvres  telles  que  l'Histoire  des  Idées  esthé- 
tiques, tout  incomplète  et  bizarrement  ordonnée  qu'elle  soit,  son 
Horace  en  Espagne,  le  recueil  des  conférences  sur  Calderôn  et  son 
Théâtre,  les  préfaces  de  l'Anthologie  des  poètes  lyriques,  avec  son 
Traité  des  romances  et  la  u  note  »  sur  Juan  Boscân  qui  est  un  volume 
de  près  de  5oo  pages,  ses  Études  de  critique  littéraire,  ses  discours 
académiques  et  tant  d'autres  œuvres  que  j'oublie,  forment  la  plus 
riche  étude  d'histoire  littéraire  espagnole  qui  ait  jamais  été  écrite,  et, 
sans  contredit  aussi,  la  plus  ((  vivante  »  et  la  plus  ((  suggestive  »,  deux 
épithètes  qui  reviennent  forcément  sous  la  plume  ou  sur  les  lèvres 
quand  il  s'agit  de  Menéndez  y  Pclayo.  Non  pas  assurément  qu'ici 
encore  quelques  réserves  ne  soient  nécessaires.  La  composition  est 
parfois  flottante  et  lâche;  l'exposition  s'étend  indéfiniment  et  se 
complique  hors  de  toute  mesure  :  il  semble  que  ce  ne  soit  plus 
l'auteur  qui  conduise  son  sujet,  mais  le  sujet  qui  mène  l'auteur  où  il 
ne  voulait  pas  aller  tout  d'abord,  et  où  il  ne  devait  pas  aller.  Si  l'on  ne 
savait  avec  quelle  conscience  l'œuvre  est  préparée,  on  croirait  à  une 
improvisation  et  l'on  songerait  à  cette  pensée  de  Menéndez  y  Pelayo 
lui-même,  qui  s'applique  à  tant  d'auteurs  espagnols  depuis  Lull  et 
Lope  de  \  ega  jusqu'à  Gastelar  et  Zorilla  :  «  Ici,  en  Espagne,  la  force 
s'est  manifestée  toujours  par  l'abondance.  Tout  Espagnol,  dans  la 
science,  dans  les  arts  et  jusque  dans  la  vie  politique,  est  improvisateur.  » 
Lui-même  semble  parfois  obligé  de  s'arrêter  en  présence  des  pro- 
portions énormes  que  prend  l'œuvre  commencée  :  ni  les  Idées  esthé- 
tiques, ni  V Anthologie,  ni  les  Œuvres  de  Lope  de  Vega  ne  sont  achevées 
et  elles  ne  l'auraient  peut-être  été  jamais.  Mais  telles  qu'elles  sont,  elles 
restent  infiniment  précieuses  par  la  richesse  et  la  nouveauté  des 
points  de  vue.  par  la  valeur  du  commentaire,  par  l'agrément  d'une 
exposition  débordante  de  vie  et  de  mouvement. 

Ces  qualités  de  science  et  de  talent,  dont  l'union  est  toujours  rare, 
se  trouvaient  déjà  dans  les  premiers  écrits  de  Menéndez  y  l*elayo;  elles 
atteignent  leur  perfection  dans  ceux  de  l'âge  mur,  par  exemple,  dans 
ce  Traité  des  vieux  Romances,  où  se  trouve  habilement  fondu  tout  ce 
([ue  l'érudition  avait  accumulé  sur  ce  sujet  capital,  dans  le  Boscân, 
monographie  pleine  d'aperçus  originaux  sur  un  poète  plus  grand  par 
son  rôle  d'initiateur  que  par  ses  œuvres,  dans  les  Origines  du  Uoman, 
vaste  tableau  d'ensemble  dont  le  peintre  n'a  pu  terminer  quckpies 
parties.  Nul  n'a  parlé  avec  une  intelligence  plus  profonde,  un  sens 
plus  délicat,  une  chaleur  plus  sincère  des  grands   hommes  et  des 


NÉCROLOGIE  333 

œuvres  maîtresses,  de  Ramôn  Lull  par  exemple,  de  Juan  Ruiz  ou  de 
la  Célestine,  de  Luis  de  Leôn  ou  de  Luis  de  Granada,  de  Cervantes  ou 
de  Lope,  et  de  tant  d'autres  anciens  ou  modernes,  classiques  ou 
contemporains,  illustres  ou  trop  oubliés.  L'aisance  et  la  simplicité 
robuste  de  son  style  ne  cherchent  point  à  forcer  l'attention  par  des 
ornements  ambitieux.  Si  espagnol  par  tant  de  côtés,  M.  Menéndez 
y  Pelayo  a  échappé  cependant  à  la  tyiannie  de  cette  grandiloquence, 
de  cette  enflure  gongorique  et  de  cette  subtilité  conceptiste  qui  furent 
les  grands  écueils  des  écrivains  de  son  pays.  Sa  phrase,  ample  d'ordi- 
naire et  volontiers  périodique,  suit  sans  effort  les  tours  et  détours  de 
la  pensée;  çà  et  là  elle  se  colore  comme  celle  du  poète  (et  l'on  sait 
que,  comme  Sainte-Beuve  et  bien  d'autres,  ce  critique  a  été  poète); 
au  besoin,  elle  s'anime  comme  celle  de  l'orateur,  quoiqu'il  n'ait 
guère  atteint  à  la  véritable  éloquence  que  la  plume  à  la  main.  Rien  de 
plus  juste,  à  mon  avis,  que  cette  définition  du  style  de  Menéndez 
y  Pelayo  par  M.  de  Tannenberg  :  «  Une  prose  du  meilleur  aloi,  facile 
et  limpide,  à  laquelle  ne  manquent,  à  l'occasion,  ni  le  souille  oratoire 
ni  l'image  poétique,  mais  sans  les  défauts  souvent  signalés  de  la  prose 
castillane,  la  verbosité  oiseuse,  l'abus  des  clichés  et  des  épilhètes 
banales,  l'art  de  l'exposition  claire  et  attrayante;  une  faculté  d'assi- 
milation merveilleuse;  une  large  sympathie  pour  toutes  les  beautés 
littéraires;  une  intelligence  ouverte  à  toutes  les  idées,  voilà  les  rares 
mérites  par  lesquels  M.  Menéndez  y  Pelayo  se  place  au  premier  rang 
des  écrivains  de  son  pays  et  des  critiques  de  notre  temps.  » 

Quels  que  fussent  les  mérites  exceptionnels  du  savant,  du  lettré,  de 
l'écrivain,  l'homme  en  lui-même  valait  plus  encore.  Sa  sincérité,  sa 
simplicité,  son  dévouement  absolu  à  sa  tâche,  sa  fidélité  à  ses  amis, 
la  haute  idée  qu'il  se  faisait  de  la  dignité  de  l'écrivain  et  du  rôle  de  la 
critique,  son  incroyable  ardeur  au  travail  qui  le  suivit  jusqu'au  dernier 
soupir,  ses  vertus,  en  un  mot,  témoignent  de  sa  haute  valeur  morale. 
Le  récit  de  ses  derniers  moments,  alors  que  mourant  il  s'acharnait  à 
vouloir  lire  ses  livres  dont  les  lignes  se  brouillaient  à  ses  yeux  sans 
lumière,  alors  que  sa  main  défaillante  s'efforçait  de  noircir  les  der- 
nières ciiartillas,  ces  pleurs,  que  la  douleur  n'avait  pu  lui  arracher, 
mais  qui  s'échappèrent  quand  il  fallut  s'avouer  vaincu  et  quitter  à 
jamais  cette  bibliothèque  où  il  voulut  se  traîner  jusque  dans  son 
agonie,  tout  cela  forme  à  cette  vie  si  noblement  remplie  une  fin  vrai- 
ment digne  d'elle. 

11  laisse  derrière  lui  un  monument  qui  suffira  à  sa  gloire.  11  n'est 
pas  terminé  en  toutes  ses  parties,  mais  des  mains  pieuses  sont  là  qui 
pourront-  l'achever.  Le  26  mars  191 1,  à  la  fin  de  sa  réponse  au 
discours  de  réception  à  l'Académie  Espagnole  de  M.  Adolfo  Bonilla 
y  San  Martfn,  le  savant  auteur  du  Vives  et  de  l'Histoire  de  la  philo- 
sophie espagnole,  Menéndez  y  Pelayo,  dans  une  page  émue,  traversée 


334  BULLETIN    HISPANIQUE 

de  je  ne  sais  quels  pressentiments,  après  avoir  rendu  hommage  à  ses 
premiers  maîtres  depuis  longtemps  disparus,  à  Gumersindo  Laverde, 
0  homme  de  douce  mémoire  et  de  renommée  modeste,  de  pensée 
droite,  de  parole  élégante,  à  l'àme  suave,  candide,  pleine  de  vertu  et 
de  patriotisme  »,  après  avoir  rappelé  modestement  ce  qu'il  devait  au 
((  vénérable  et  austère  »  Milâ  y  Fontanals,  adressait  comme  un  appel 
à  ceuv  auxquels  il  songeait  peut-être  déjà^  transmettre  le  flambeau 
devenu  lourd  pour  ses  mains,  u  Pardonnez -moi,  disait-il,  s'il  y  a 
(juelque  immodestie  dans  l'affirmation  de  la  parenté  qui  nous  lie  tous 
dans  notre  œuvre  universitaire,  mais  quand  je  me  rappelle  qu'au 
pied  de  ma  chaire  j'ai  vu  D.  Kamôn  Menéndez  Pidal  et  D.  AdoUb 
Bonilla,  je  commence  à  croire  que  mon  passage  ici-bas  n'a  pas  été 
inutile,  et  j'ose  dire,  avec  le  Bermudo  du  Romance,  que  si  je  n'ai  point 
vaincu  les  rois  Maures,  j'ai  engendré  du  moins  ceux  qui  devaient 
les  vaincre. » 

Puisse  cet  appel  être  entendu  et  cette  prophétie  se  réaliser! 

E.  MÉRIMÉE. 


D.  Antonio  Rodriguez  Villa. 

La  mort  de  D.  Antonio  Rodriguez  Villa,  survenue  le  3  mai  dernier, 
causera  un  grand  vide  dans  les  éludes  historiques.  Auteur  d'un 
nombre  considérable  d'ouvrages  très  documentés  sur  l'Espagne 
des  \vi%  XVII'  et  x vin' siècles,  sa  perte  sera  vivement  ressentie  par  tous 
ceux  (jui  appréciaient  son  ardeur  au  travail,  sa  passion  pour  le 
document  inédit  qu'il  savait  si  bien  trouver  et  aussi  sa  très  grande 
serviabilité,  car  cet  érudit  modeste  et  affable  ne  travaillait  pas  que 
j)Our  lui,  il  travaillait  de  très  bonne  grâce  pour  les  autres.  Moi  qui  ai 
été  son  collaborateur  pour  quelques  publications  et  qui  l'ai  si  souvent 
mis  à  contribution,  je  le  sais  mieux  que  personne  et  tiens  à  le  dire 
pour  honorer  sa  mémoire. 

La  longue  liste  des  publications  de  Rodriguez  \  illa,  qui  atteste  une 
activité  de  plus  de  quarante  années,  se  trouve  reproduite  sur  la 
couverture  de  ses  derniers  écrits.  On  y  voit  l'extrême  variété  et  l'éten- 
due de  ses  connaissances. 

A.  M.-K. 


BIBLIOGRAPHIE 


Jean  Régné,  archiviste  de  l'Ardèche.  Catalogue  des  ailes  de 
Jaime  I" ,  Pedro  III  et  Alfonso  III,  roui  d'Arago/i,  concernant  tes 
Juifs  (1213-1291  ).  Tome  I",  deuxième  partie  :  Actes  de 
Jaime  I"  (1213-1270).  Extrait  de  la  Revue  des  Éludes  juives. 

M.  Régné,  ayant  reçu  mission  de  faire  des  recherches  dans  ce 
merveilleux  dépôt  que  sont  les  Archives  du  royaume  d'Aragon,  a 
choisi  un  sujet  d'un  indiscutable  intérêt  :  la  condition  des  Juifs 
au  xiii'  siècle.  Sans  doule,  l'étude  n'est  pas  absolument  neuve  et  bien 
des  documents  publiés  par  mon  jeune  confrère  ont  été  signalés  déjà. 
11  n'en  reste  pas  moins  que  son  travail  a  pour  résultat  de  mettre  au 
jour  un  ensemble  imposant  de  pièces  relatives  à  l'un  des  chapitres  les 
plus  curieux  de  l'histoire  sociale  du  Moyen-Âge. 

La  publication  donne  prise  à  un  certain  nombre  de  critiques  !  je  les 
formule,  en  exprimant  le  désir  qu'elles  contribuent  à  améliorer  les 
fascicules  suivants. 

M.  Régné  ne  donne  pas  le  texte  même  des  documents,  mais  une 
analyse.  Quelquefois,  il  rencontre  un  terme  intraduisible  et  il  le 
reproduit  entre  guillemets.  Rien  de  plus  normal,  surtout  lorsque  ce 
mot  est  accompagné  d'une  note  explicative.  11  arrive  que  M.  Régné 
traduit;  mais,  au  lieu  de  chercher  le  mot  français  dont  le  sens  se 
rapproche  le  plus  du  mot  catalan  ou  latin,  il  s'arrête  au  mot  français 
dont  la  forme  rappelle  le  catalan  ou  le  latin  :  queslia,  taille,  est  rendu 
par  quête;  porter,  huissier,  par  portier  ;  castelt,  village  fortifié,  et 
villa,  village  ouvert,  par  château  et  villa;  heretatge,  bien-fonds,  par 
héritage;  taula,  comptoir,  banque,  par  table.  Une  analyse  cite  les 
((  tailleurs  »  ;  je  me  demandais  pourquoi  les  tailleurs  plutôt  que  les 
cordonniers,  quand  je  m'aperçus  ([u'il  s'agissait  des  répartiteurs  de 
la  taille. 

Trop  souvent  aussi  l'auteur  forge  des  barbarismes  :  barater,  au  lieu 
de  troquer;  guidage,  au  lieu  de  sauvegarde; peite,  au  lieu  d'imposition 
ou  de  taille.  Et  ces  néologismes  en  engendrent  d'autres  :  peiter  est  issu 
Ae^ peite.  «  Barater  aux  chrétiens  »,  «  peiter  avec  l'aljama  »,  ((  emprunter 
par  albaran  »,  etc.;  ce  n'est  plus  du  catalan,  ce  n'est  pas  du  français. 
c'est  un  idiome  intermédiaire,  quelque  chose  comme  du  gavach. 


336  BULLETIN    HISPANIQUE 

D'autre  part.  M.  Régné  donne  aux  noms  des  personnages  un  traves- 
tissement castillan  qu'il  serait  difficile  de  justifier.  Dès  la  couverture 
il  est  question  de  Jaime,  de  Pedro,  d'Alfonso  :  pourquoi  ne  pas  dire 
Jacques,  Pierre  et  Alphonse?  Pourquoi  surtout  habiller  à  la  mode 
castillane  des  catalans?  Dans  «  J offre  de  Rocabertino  »,  c'est  le  nom 
de  famille  qui  est  défiguré  ;  dans  u  Raimundo  de  Penafort  »,  le  prénom 
est  castillan,  le  nom  n'appartient  à  aucune  langue.  11  eût  mieu.v  valu 
dire  tout  simplement  u  Raimond  de  Penyafort  ». 

Çà  et  là,  quelques  erreurs  dans  la  façon  de  distribuer  les  accents  : 
«  Alcala  de  Ilénarès  »  s'appelle  en  réalité  Alcalâ  de  Henares.  «  Adénan- 
tades  »,  représentants  de  la  communauté  juive,  ne  prend  pas  d'accent 
sur  la  seconde  syllabe.  M.  Régné,  qui  écrit  toujours  u  les  Juifs  »,  «  les 
Sarrasins  »,  avec  une  majuscule,  n'est  pas  logique  en  écrivant  systé- 
matiquement «  les  chrétiens  »  avec  une  minuscule. 

Enfin,  quelques  passages  semblent  indiquer  une  connaissance 
insufTisante  des  institutions  locales  :  je  ne  sais  ce  que  peuvent  être  des 
«  propriétaires  directs  »  ;  acapilare  ne  signifie  pas  prendre  à  bail,  mais 
prendre  à  cens;  la  fafica  n'est  pas  le  droit  de  mutation,  mais  le 
retrait. 

Ce  sont  des  imperfections  sans  gravité,  souvent  des  vétilles  :  elles 
rendent  fatigante  la  lecture  d'un  recueil  qui  est,  je  le  répète,  inté- 
ressant au  possible. 

Rien  n'est  étrange  comme  la  situation  de  ce  peuple  qui  vit,  en 
Aragon,  de  sa  vie  propre,  qui  conserve  ses  lois(n'"  1 13,  359,  '^^7»  etc.), 
qui  a  ses  autorités  particulières  (n""  aSi,  25/i,  ^/j6,  l\Gi,  etc.),  son  rôle 
social  :  le  commerce  et  le  prêt.  Il  est  inutile  de  dire  qu'il  se  produisait 
entre  les  trois  races.  Chrétiens,  Sarrasins,  Juifs,  des  conflits,  des 
heurts  douloureux  :  les  Juifs  ne  sortaient  pas  sans  danger  le  vendredi 
saint,  parce  qu'on  leur  jetait  des  pierres. 

Mais  je  ne  saurais  entreprendre  ici  de  mettre  en  œuvre  les 
657  documents  de  ce  premier  fascicule  :  M.  Régné  nous  annonce  qu'il 
donnera,  pour  terminer,  une  introduction  où  il  commentera  évidem- 
ment l'ensemble  do  ses  pièces.  Souhaitons  qu'il  ne  nous  fasse  pas  trop 
attendre  la  réalisation  de  cette  alléchante  promesse. 

J.-A.  R. 

Antonio   Garcia   Boiza,    Don  Dier/o  de  Torres    Villaroel,  ensayn 
hi(j(jr<îJico.  Sulaiiianca,  191 1  ;  20.'5  pages. 

Villaroel  est  l'un  des  types  les  |)Uis  curieux  et  les  plus  significatifs 
de  la  société  universitaire  espagnole  au  xviii' siècle.  Certains  chapitres 
de  sa  vie,  tels  qu'il  les  a  écrits  lui-même,  [)araissent  empruntés  à  la 
\'ida  del  liascnn:  plus  tard,  il  représente  la  science  espagnole  à  Sala- 
manqiie,  et  il  loiirnit  sur  l'état  des  études  officielles  des  renseignements 


I 


fitBLIOGRAPHlÊ  337 

aussi  abondants  que  singuliers.  Dans  ses  œuvres,  qui  forment 
quinze  volumes,  on  trouve  de  tout,  dans  un  pêle-mêle  qui  représente 
assez  fidèlement  sa  bizarre  personnalilc.  des  fantaisies  satirico-morales 
à  la  manière  de  Quevcdo,  son  modèle,  des  traités  plus  ou  moins 
scientifiques,  des  calendriers,  des  recolles  de  toute  'nature,  des 
pronostics  pour  chacune  des  années  de  1728  à  1753,  des  récits  de 
voyages,  des  satires,  des  biographies  pieuses,  des  poésies  et  enfin  son 
autobiographie. 

A  tous  les  points  de  vue  Villaroel  méritait  une  étude  plus  complète 
que  celles  qui  lui  ont  été  consacrées  jusqu'ici.  M.  Boiza  a  entrepris  la 
réhabilitation  du  jadis  illustre  et  depuis  si  oublié  professeur  salmantin, 
qui  lui  paraît  former  «avec  Feijôo,  Martînez,  Salafranca  et  le  P.  Isla, 
la  phalange  des  audacieux  réformateurs  »  au  xviu"  siècle.  Et  pour 
commencer,  il  étudie  sa  biographie  dans  cette  thèse  doctorale, 
laquelle,  avec  quelques  autres,  inaugure  un  renouvellement  et  un 
progrès  évident  dans  ce  genre  de  littérature  universitaire.  Les  dix-neuf 
chapitres  qui  la  composent,  et  les  appendices  empruntés  en  majeure 
partie  aux  registres  de  l'Université  de  Salamanque,  nous  introduisent 
agréablement  dans  l'intimité  de  ce  singulier  docteur  et  précisent  bien 
des  traits  de  cette  figure.  M.  Boiza  fixe  définitivement  la  date  de  sa 
naissance  (1693)  et  celle  de  sa  mort  (19  juin  1770),  fort  mal  connues 
jusqu'ici.  11  nous  donne  sur  sa  sépulture,  sur  sa  famille,  ses  amis, 
son  enseignement,  ses  rapports  avec  ses  collègues,  des  renseignements 
définitifs  et  il  publie  son  testament.  Nous  savons,  grâce  à  lui,  à  peu 
près  tout  ce  qu'il  importe  de  savoir  pour  pénétrer  utilement  dans 
l'étude  de  l'œuvre  au  seuil  de  laquelle  il  nous  abandonne,  non 
cependant  sans  avoir  jeté  sur  elle  un  premier  coup  d'œil  d'ensemble 
(chap.  XIX).  Lui-même  promet  de  nous  y  introduire  dans  une 
prochaine  Etude  critique  et  bibliographique.  Elle  sera  la  bienvenue  et 
contribuera  sans  nul  doute,  de  concert  avec  la  réédition  de  la  Vida 
del  Doctor  D.  Diego  Torres,  faite  par  la  Lectura,  à  redonner  quelque 
lustre  à  la  figure 

«  Del  gran  Torres  salmaniino, 
Por  sus  obras  adamado 
El  Quevedo  de  este  siglo.  » 

E.  M. 


CHRONIQUE 


—  L'ouvrage  de  D.  Gabriel  Maura  Gamazo,  intitulé  Carlos  II  y  su 
corte,  dont  le  tome  I",  consacré  aux  années  1661  à  1669,  a  paru  l'an 
dernier  (Madrid,  librerîade  F.  Beltrân,  191 1,  i  vol.  in-4°de  655  pages), 
réjouira  fort  les  amis  des  études  historiques.  Fruit  d'un  long  et  intel- 
ligent labeur,  ce  remarquable  écrit,  solidement  documenté  et  très 
soigné  pour  la  forme  et  pour  le  fond,  accroît  et  précise  beaucoup  notre 
connaissance  des  événements  politiques  et  sociaux  du  règne  de 
Charles  II.  M.  Maura  Gamazo,  loin  de  se  cantonner  dans  les  documents 
que  lui  offraient  les  archives  et  les  bibliothèques  de  son  pays,  a  étendu 
son  enqu«'te  au  dehors,  et,  sans  qu'on  puisse  dire  qu'il  ait  épuisé  les 
moyens  d'information,  en  ce  qui  concerne  par  exemple  les  archives 
diplomatiques,  on  constate  au  moins  qu'il  s'est  servi  de  tout  ce  qui  lui 
était  facilement  accessible.  Nous  attendons  avec  infiniment  d'intérêt  la 
fin  de  ce  beau  travail,  qui  marquera  une  date  dans  l'historiographie 
espagnole.  A.  M. -F. 

— -  Le  tome  IX  de  V Ilistoria  genealôgica  y  herdldica  de  la  monarquîa 
espanola  de  D.  Francisco  Fernande/,  de  Béthencourt,  qui  a  paru 
récemment  (Madrid,  1912,  i  vol.  in-fol.  de  644  pages)  contient  la  suite 
et  la  fin  de  la  maison  de  Côrdoha.  On  y  trouve  notamment  les 
généalogies  si  importantes  des  alcaides  de  los  Donccles  marquis  de 
Comares,  des  comtes  d'Alcaudete,  des  marquis  de  Gualdalcâzar  et  de 
bien  d'autres  lignées  de  cette  puissante  maison. 

L'exécution  de  ce  neuvième  volume  est  digne  des  précédents  et  fait 
grand  honneur  à  M.  de  Béthencourt,  dont  l'érudition  si  étendue  et  si 
précise  a  rendu  tant  de  services  à  l'histoire  d'Espagne,  qui  réclame 
depuis  longtemps  des  instruments  perfectionnés  tels  que  celui-ci. 

Un  avis  inséré  dans  ce  tome  1\  annonce  la  publication  très  prochaine 
d'un  index,  par  noms  de  famille  et  par  titres,  de  toutes  les  personnes 
mentionnées  dans  les  neuf  premiers  volumes  de  l'ouvrage.  Un  tel 
index  facilitera  singulièrement  l'utilisation  de  cette  masse  énorme  de 
données  historiques.  A.  M. -F. 

-—  Nous  ne  pouvons  aujourd'hui,  pressés  par  le  temps,  que  signa- 
ler ici  quelques  ouvrages  récemment  parus  et  envoyés  au  Bulletin 
fiispanit/uc.  Sur  plusieurs  d'entre  eux  nous  nous  proposons  de  revenir 
plus  à  loisir  dans  le  prochain  numéro. 


CHhONlQtJE  339 

Les  deux  thèses  pour  le  Doctorat  ès-lettres  de  M,  Aniédée  Pages, 
l'une,  la  principale,  sur  m  Aiizias  Mardi  et  ses  prédécesseurs  »,  [Paris, 
Champion,  4-0  p.],  l'autre,  imprimée  par  l'Institut  d'Études  Catalanes 
(Les  Obres  d'Auzias  Marchjy  sont  des  travaux  de  longue  haleine  et 
de  grande  valeur,  qui  feront  époque  dans  l'histoire  des  Lettres 
catalanes.  Elles  méritent  l'une  et  l'autre  une  étude  approfondie  que 
nous  nous  excusons  de  ne  pouvoir  leur  consacrer  aujourd'hui. 

Nous  devons  mentionner  en  second  lieu  l'édition  critique  de 
El  Casamienio  engaiîoso  et  du  Coloquio  de  los  perros,  de  Cervantes, 
avec  introduction  abondante  et  notes  non  moins  riches,  [Madrid, 
Bailly-Baillière,  7/14  p.]»  P^^  D.  Agustin  G.  de  Amezùa  y  Mayo. 
Cet  ouvrage  vient  de  recevoir  la  médaille  d'or  de  l'Académie  Espa- 
gnole. 

Azorin  (Marlinez  Ruîz)  a  publié,  sous  le  titre  de  Lecturas  Espanolas, 
un  original  et  suggestif  recueil  d'essa-is  sur  certains  auteurs  plus 
particulièrement  représentatifs  du  caractère  espagnol,  [Madrid, 
Imprenla  de  la  Revista  de  Archivos,  201  p.].  Le  même  auteur  a  donné 
une  seconde  édition  illustrée  de  sa  Riita  de  Don  Quijole,  si  favora- 
blement accueillie,  en  1905,  par  la  critique  et  les  lecteurs,  [Madrid, 
1913,  2o5  p.]. 

Le  Cancionero  Castellano  del  Siglo  X\\  tomo  /,  ordenado  por  R. 
Foiilclié-Detbosc,  forme  le  tome  dix-neuvième  de  la  Nueva  Bihlioleca 
de  Autores  Espatloles  {Madrid,  Bailly-Baillière,  1912,  771  p.). 

Misceldnea  VaUisotelana,  par  D.  Narciso  Alonso  Cortés,  [Valladolid, 
imprenta  del  Colegio  Santiago,  1912,  181  p.].  Série  d'études  sur  les 
sujets  suivants  :  El  hermano  de  Lope;  —  D.  Aguslln  de  Montiano;  — 
La  Milicia  nacional  en  Valladolid;  —  El  supuesto  aiilor  de  v  Fray 
Gerundio  n  ;  —  Un  poeta  suicida  (Vicente  Sâinz-Pardo);  —  Dos  escritos 
de  Quevedo;  —  El  «  le  n  y  el  «  la  »;  —  De  cômicos;  —  Las  ibonas;  — 
D.  Gabriel  de  Cor  rai. 

Historia  poUlica  de  los  Afrancesados  (con  algunas  cartas  y  docu- 
mentos  inéditos),  por  D.  Mario  Méndez  Bejarano  (Madrid,  Felipe 
Peiïa  Cruz,  1912,  43i  p.). 

La  perfecta  casada,  segùn  Fr.  Luis  de  Leôn,  conférence  par  D.  José 
Rogerio  Sânchez  (Madrid,  Hijos  de  Gômez  Fuentenebros,  191 2,  91  p.). 

Genova  nel  iealro  classico  di  Spagna,  Discorso  kilo...  il  giorno 
U  novembre  1911  dal  Doit.  Antonio  Reslori,  monographie  pleine  de 
faits  nouveaux  et  d'idées,  qui  donne  beaucoup  plus  que  l'on  n'atten- 
dait tout  d'abord  du  sujet  assez  restreint  annoncé  par  le  titre 
[Genova,  Societâ  tipo-litografica  Ligure  E.  Olivieri,  191 2,  45  p.]. 

Un  théâtre  d'idées  en  Espagne  —  Le  théâtre  de  José  Echegaray ,  étude 
analytique  par  Henri  de  Carton.  Extrait  de  la  Nouvelle  Revue.  [Paris, 
Fischbacher,  19 13,  i44  p.] 

Glanures  catalanes  et  hispano-romanes ,  2'  série,  par  M.  Oiva  Joh, 


34o  BULLETIN    HISPANIQUE 

Tallgren.  —  Tirage  à  part  des  Neaphilologischen  MittciUingen  d'IIel- 
singfors  (1912,  p.  i2-3Z|),  savantes  notes  d'élymologie  et  de  séman- 
tique, qui  font  suite  à  la  première  série,  publiée  sous  le  même  litre 
(et  en  français  également)  dans  le  même  recueil,  aux  pp.  151-74, 
en  I 9 I I . 

Nous  recevons  enfin,  au  dernier  moment,  le  premier  numéro  d'une 
revue  destinée  à  resserrer  les  liens  intellectuels  entre  l'Espagne  et  les 
républiques  américaines  :  La  Cultiira  hispano-americana,  organe  du 
Centre  hispano-américain  de  Madrid,  où  une  riche  série  de  conférences 
a  été  déjà  donnée.  Le  numéro  débute  par  un  appel  éloquent  de 
D'  Blanca  de  Los  Rîos,  laquelle  a  donné,  d'autre  part,  dans  la 
Collection  complète  de  ses  œuvres,  une  2"  édition  de  ses  poésies, 
Ksperanzas  y  Recuerdos,  et  un  recueil  de  nouvelles  Madrid  (ïoyesco. 

E.  M. 

—  La  Bibliotheca  Romanica  (Heitz,  Strasbourg)  ajoute  deux  nou- 
veaux volumes  à  sa  section  espagnole:  La  hija  de  Celcstina,  d'après 
l'édition  de  16 12,  avec  les  additions  de  161 4  (d'après  l'édition  de  1737), 
avec  notice,  par  M.  Fritz  Holle  (n"  i49-ï5o),  qui  a  déjà  donné  dans  la 
même  collection  la  Comedla  de  Calisto  y  Melibea  (cf.  Bull,  hisp.,  191 2, 
p.  328);  et  d'autre  pari  la  fin  de  la  Primera  Parte  du  Don  Quijote, 
publiée  par  M.  Wolfgang  von  Wurzbach  (n"'  i5i-i53;  cf.  Bidl.  hisp., 
191 1,  p.  5 10).  Chaque  numéro  est  compté  4©  pfennige.  Ce  sont  donc 
des  éditions  fort  économiques,  et  elles  sont  très  soignées.  Il  y  aurait 
seulement  à  amender  par  endroits  l'espagnol  d'une  ou  deux  notices. 

— ■  Sieben  spanische  dramalische  Eklogen,  mit  eincr  Einleitang  ilber 
die  Anfiinge  des  spanischen  Dramas,  Anmerkiingen  and  Glossar,  hgg. 
von  D'  Eugen  Kohler.  Dresde,  191 1  (t.  XXVll  de  la  (iesellschaft  J'iir 
romanische  Litcralur),  xiv  et  365  pages  gr.  in-8°.  Étude  consciencieuse 
et  agréablement  présentée  sur  l'ancienne  églogue  castillane  du 
XVI"  siècle,  celle  de  Juan  del  Encina,  de  Lucas  Fernande/,  do  Lôpcz 
de  Vanguas,  etc.  La  deuxième  partie  du  volume  est  occupée  par  la 
reproduction  de  sept  de  ces  églogues  qui  renferment  un  certain 
nombre  de  mots  rares  ou  inintelligibles  (quelques-uns  sans  doute 
altérés)  dont  l'auteur  a  fait  le  relevé. 


28  juin  1912. 


LA  RÉDACTION  :  E.  MÉRIMÉE,  A.  MORKL  KATIO,  P.  PARIS, 
(i.  CIROT,  secrétaire;  G.  RADET,  directeur-gérant. 

Bordeaux. —  Impr.  G.  Gounouilhou,  rue  Guiraude,  9-11. 


Vol.  XIV.  Octobre-Décembre  1912  N»  4. 

LES  DÉCLAMATEURS  ESPAGNOLS 

AU  TEMPS  D'AUGUSTE  ET  DE  TIBÈRE 

{Suile  ■  ) 


L'Espagne  et  l'opinion  romaine  au  temps  de  César  et  d  Auguste. 
—  Catulle  et  Horace  tournent  en  ridicule  la  barbarie  et  la 
grossièreté  des  Espagnols.  —  Quand  l'Espagne  est  enfin  pacifiée, 
on  fait  à  Rome  l'éloge  de  son  agriculture,  de  son  commerce  et 
de  son  industrie  ;  on  ne  dit  rien  de  son  activité  littéraire. 

Au  temps  de  la  jeunesse  de  Sénèque,  la  poésie  romaine 
s'occupait  déjà  des  Espagnols;  ce  n'était  pas  pour  leur  trouver 
des  ancêtres  dans  les  combattants  de  la  guerre  de  Troie,  mais 
pour  lancer  des  épigrammes  contre  ces  ennemis  dont  Home 
avait  éprouvé  le  courage  et  qu'elle  s'efforçait  de  tourner  en 
ridicule. 

L'élève  de  Marullus  avait  pu  lire  avec  indignation  les 
pièces  écrites  quelques  années  avant  son  arrivée  en  Italie  par 
Catulle',  qui  raillait  grossièrennent  les  fils  de  la  Celtibérie,  le 
pays  des  lapins,  ces  bellâtres  chevelus,  qui  n'avaient  pour  se 
recommander  que  leur  barbe  épaisse  et  leurs  dents  blanchies 
par  des  frictions  d'urine,  à  la  mode  de  leur  pays -5.  Vers  696-59, 
l'amant  de  Lesbie  s'était  brouillé  avec  sa  maîtresse;  il  lui 
reprochait  de  sèlre  éprise  d'un  Espagnol  nommé  Egnatius 
dont  elle  avait  fait  la  connaissance  dans  un  bouge,  de  s'être 
laissé  séduire   par  les  grâces   de  cet  imbécile  qui   riait  sans 

1.  Voir  le  Bull,  liisp.,  t.  Ml,  1910,  p.  i  ;  t.  XIV,  ly! :;,  p.  11,  229. 

2.  Catulle,  XXXVII  et  \x\ix. 

3.  Diodore  de  Sicile  (V,  xxxiii,  5)  et  Straboa  (III,  iv,  16)  attestent  l'emploi  que 
les  Espagnols  et  surtout  les  Cantabres  faisaient  de  cet  étrange  dentifrice  qui  rendait 
leurs  dents  blanches  et  leurs  gencives  rouges. 

AFB.  IV*  SÉRIE.  —  Bull,  kispan.,  \1V,  1912,  4.  aS 


3^2  BULLETIN    HISPAMQLE 

cesse,  à  tout  propos  et  hors  de  propos,  pour  montrer  ses  dents 
blanchies  et  ses  gencives  rougies  par  l'usage  de  l'urine  comme 
dentifrice.  Cet  Egnatius  rivalise  d'élégance  douteuse  avec  les 
jeunes  débauchés  de  la  suite  de  Gatilina  que  Gicéron  repré- 
sentait dédaigneusement  reluisants  de  parfums,  la  barbe  frisée, 
le  corps  enveloppé  dans  de  longues  tuniques  dont  les  man- 
ches recouvrent  les  mains  et  dont  les  pans  retombent  jusqu'aux 
talons  ■ .  Ce  nouvel  amant  de  Lesbie  n'est  pas  même  un  débauché 
de  Rome  :  c'est  un  Celtibère;  et,  comme  les  médailles  représen- 
tent l'Kspagne  sous  les  traits  d'une  jeune  femme  ayant  à  ses 
pieds  un  lapin-,  emblème  des  galeries  creusées  dans  les  mines^, 
Catulle  l'appelle  «fils  de  la  Geltibérie  abondante  en  lapins»''. 
Le  poète  reconnaît  d'ailleurs  que  les  bellâtres  et  les  lapins 
ne  sont  pas  les  seules  productions  de  l'Espagne  :  il  sait  que  le 
Tage  roule  de  l'or  et  n'ignore  point  que,  pendant  sa  propré- 
ture,  César  a  pillé  pour  lui  et  pour  ses  amis  beaucoup  de  l'or 
de  l'Espagne  '.  Alors  que  Pompée,  consul  en  Tan  (hjq-ô."),  faisait 
administrer  par  ses  légats  les  deux  Espagnes,  Cilérieure  et 
Lltérieurc,  et  la  Lusitanie,  quelques  amis  de  Catulle,  jeunes 
gens  de  l'ordre  équestre,  allaient  commencer  leur  carrière  en 
province  comme  attachés  aux  légats  d'Espagne;  deux  d'entre 
eux,  Veranius  et  Eabullus,  qui  faisaient  partie  de  la  coliors  de 
L.  Afranius,  envoyaient  à  leur  ami  les  fines  étofl'es  de  lin  que 
Ion  fabriquait  à  Saetabis,  ville  de  VHispania  Cilerior^.  Catulle 
attendait  avec  impatience  le  retour  de  Veranius,  qui  avait 
coutume  de  raconter  ses  voyages  avec  esprit  et  de  qui  il 
comptait  apprendre  ce  qu'étaient  les  Ibères,  leurs  nations, 
leur  pays  et  leurs  mœurs^.   11  est  probable  que  l'opinion  de 

I.  Ciccron,  Catil.,  Il,  x,  22. 

3.  Spanhcim,   Disscrlationes  de praeslantia  et  usu  nuinismatuin  antiquoniin,   llotne, 
i6G4.  Dissent,  iv,  p.  71J. 

3.  Le  mol  cuniculiis,  la[)in,  sif^iiific  aussi  Irou  de  lapin  cl,  par  suilc,  toiilo  ospî-cc  de 
souterrain. 

'i.  Caluilc,  wxvii,  \.  18:  Cuiiiculosae  Celliberiae Jîlius. 

5.  Calulle,  ixi\,  v.  içj-ao.  —  Cf.  Suétone,  César,  liv  ;  IMulaniuc,  César,  \ii. 
(j.  Catulle,    vu,    V.    i!i  ;    xxv,   v.    7.   —  Jativa,   raticicimc  Sactaljis,  clicl  lieu    de 
district  de  la  pro^iucc  de  Valence,  située  au  pied  du   mont  Bernisa  et  dominant  fa 
liurrla  de  Valencia,  possède  encore  des  Qlatures  de  lin  dont  les  produits  sont  estimés. 
7.  Catulle,  IX,  V.  G  : 

Visam  le  incolumem  audiamque  Hibcruin 
Narrantem  loca,  facto,  nationes, 
l't  nios  est  iuiis... 


LES    DÉCLAMATEIRS    ESPAGNOLS  S^S 

Veranius  était  défavorable  aux  Ibères,  puisque,  après  avoir 
écouté  ses  récits,  Catulle  ne  dit  jamais  rien  de  bon  au  sujet 
des  Espagnols. 

Sur  la  loi  de  Varron,  l'ancien  légat  de  Pompée  en  Espagne, 
qui  rapporte  que  les  Espagnols  de  Lusitanie  rendaient  par 
leurs  pillages  toute  exploitation  agricole  impossible',  Virgile, 
âme  candide  et  ignorante  de  toute  malveillance^,  fait  du  nom 
d'Espagnol  un  synonyme  de  voleur  de  troupeaux  :  <>  Si  tu  es 
gardé,  disent  les  Géorgiques,  par  des  chiens  vigoureux,  tu 
n'auras  pas  à  craindre  que  les  voleurs  et  les  loups  envahissent 
la  nuit  tes  étables,  ni  que  l'Espagnol  dont  les  pillages  ne 
s'arrêtent  jamais  t'attaque  par  derrière  quand  tu  marches  avec 
ton  Iroupeau''.  »  Il  est  bien  évidenl  que  les  Espagnols  ne 
viennent  pas  attaquer  en  Italie  les  paysans  italiens  auxquels 
le  poème  de  Virgile  s'adresse;  aussi,  dans  son  commentaire, 
Servius  explique  qu'Espagnol  signifie  voleur  de  troupeaux,  et 
il  ajoute  :  c  En  eflet,  presque  tous  les  Espagnols  sont  de  déter- 
minés voleurs  de  troupeaux''.  )> 


1.  Varron,  De  He  Huslica,  l,  xvi.  —  Les  Rerum  fiusticaruni  libri  1res  de  Varron, 
composés  en  717-37,  donnent  de  nombreux  renseignements  sur  l'agriculture  en 
Espagne:  on  y  trouve  une  vigne  d'espèce  rampante,  qui  n'a  pas  besoin  d'échalas 
(I,  viii);  lejugum  est  la  mesure  agraire  dans  l'Hispania  LUerior  (I,  \);  les  Espagnols 
font  en  pisé  la  clôture  de  leurs  champs  (1,  xiv);  les  habitants  de  VHispania  Cilerior 
usent  d'une  machine  appelée  p/os<e//um  Piinicum  pour  séparer  de  la  paille  le  grain  de 
blé  (I,  lu);  ils  conservent  le  blé  dans  des  puits  ou  d;ins  des  greniers  construits 
au-dessus  des  champs  (I,  lvii).  On  rencontre  des  chevaux  sauvages  dans  quelques 
contrées  de  VHispania  Cilerior  ;  dans  la  partie  maritime  de  la  Lusitanie,  près  de  la 
ville  d'Olisippo,  les  cavales  sont  fécondées  par  le  vent  (II,  \);  les  Bastules  et  les 
Turdules,  habitants  de  la  Bétique,  sont  impropres  aux  fonctions  de  pâtre  (il,  x)  ; 
dans  VHispania  Citerior  on  tond  les  brebis  deux  fois  par  an  (II,  xi)  ;  en  Espagne,  les 
lièvres  sont  de  taille  moyenne;  il  en  est  une  espèce  qui  se  nomment  cuniculi  à  cause 
des  terriers  où  ils  se  cachent  :  cuniculi  dicti  ah  eo  quod  sub  terra  cuniculos  ipsi  facere 
soleanKUl,  m);  Varron,  qui  est  resté  longtemps  en  Espagne,  s'y  est  procuré  de  ces 
cu/iicu/i  (lapins).  —  Abstraction  faite  de  sa  remarque  sur  les  pillages  des  Lusitaniens, 
Varron  ne  dit  rien  de  défa\orable  aux  Espagnols:  il  rend  hommage  à  la  véracité  et  à 
l'érudition  d'un  certain  Atilius,  Hispanieiisis  minime  mendax  et  mullarum  rerum  peritus 
in  doctrina  (II,  iv).  Dans  ceux  de  ses  ouvrages  que  nous  ne  possédons  pas,  Varron 
devait  fournir  d'utiles  indications  sur  le  pays  qu'il  connaissait  si  bien.  Au  dire  de 
Pline  (.V.  H.,  VIU,  wix,  loi),  il  rapportait  qu'une  Aille  d'Espagne  fut  détruite  par 
les  fouille?  des  lapins.  L'auteur  de  V Histoire  Naturelle  ne  nous  apprend  pas  de  «luelle 
ville  il  s'agit  et  dans  quel  ouvrage  \arron  en  parlait. 

2.  Cf.  Horace,  Sal.,  I,  v,  v.  ko  : 

...Varius...  Vergiliusque 
Occurrant,  animae  quales  neque  candidiores 
Terra  tulil... 

3.  Virgile,  Géorg.,  III,  v.  4o6-4o8. 

4.  Servius,  ad  Georg.,  III,  v.  407  :  Fere  enim  Hispani  omnes  acerrimi  abactores  sunt. 


34A  BULLETIN    HISPANIQUE 

Horace,  (jui  succède  à  Catulle  dans  la  poésie  lyrique,  reprend 
pour  son  compte  et  exagère  l'injuste  sévérité  dont  son  prédé- 
cesseur faisait  preuve  à  l'endroit  des  habitants  de  la  péninsule 
ibérique.  Fils  d'un  receveur  des  enchères  dans  les  ventes, 
affranchi  après  avoir  été  esclave  public,  le  poète  de  Venouse 
ne  possède  ni  ancêtres  ni  traditions  de  famille;  il  n'a  aucun 
regret  pour  la  République  où  ses  ancêtres  n'ont  rien  été, 
aucune  estime  pour  l'ancienne  poésie  romaine,  pour  ces 
comédies  de  Plante  qui  charmaient  encore  de  vieux  latins 
comme  Cicéron.  Il  vit  dans  le  présent;  ses  odes  civiques,  reli- 
gieuses et  morales  célèbrent  les  réformes  politiques  et  légales 
d'Auguste  et  la  gloire  militaire  des  lieutenants  qui  combattaient 
sous  les  auspices  de  l'empereur;  ses  satires  et  ses  épîtres  atta- 
quent tous  ceux  qui,  en  littérature,  en  philosophie,  en  politique, 
ont  l'audace  de  professer  des  théories,  de  manifester  des 
préférences  qui  ne  sont  pas  à  la  mode  dans  la  société  officielle 
et  mondaine  de  Rome.  Fidèle  interprète  des  opinions  et  des 
partisans  du  régime  nouveau  qui  voient  dans  Auguste  un 
homme  providentiel  et  qui  ne  veulent  rien  estimer,  rien 
connaître  en  dehors  de  la  Rome  impériale,  Horace  a  «  l'esprit 
romain  »  —  au  sens  où  Ion  dit  aujourd'hui  «  l'esprit  parisien  ». 
Le  Forum  et  les  villas  de  la  Sabine  sont  pour  lui  ce  que  sont 
de  nos  jours  pour  beaucoup  de  Parisiens  le  boulevard  et 
certaines  localités  où  il  est  de  bon  ton  d'aller  en  «  villégiature  »  ; 
le  reste  du  monde  —  qu'on  appelle  d'un  nom  général  et 
méprisant  «  la  province  »  —  n'existe  pas;  les  provinciaux,  les 
étrangers  sont  des  barbares  qui  ignorent  tout  de  la  vie  litté- 
raire et  polie. 

11  y  a  cinquante  ans,  icspril  piuisien  a  créé  le  «  rasta- 
quouère  »  ;  l'habilunt  de  l'Amérique  du  Sud,  le  Brésilien  en 
particulier,  est  devenu  avec  Meilhac  et  Halévy  un  des  types 
grotesques  du  vaudeville  et  de  l'opérclte.  H  y  a  plus  de  dix- 
neuf  cents  ans  qu'Horace  a  fait  de  l'Espagnol  un  «  rasla 
quouèrc  ».  Les  dents  blanches  et  la  belle  barbe  de  l'Egnatius 
de  Catulle  séduisaient  Lesbie  qui  se  laissait  séduire  sans  peine 
et  se  donnait  volontiers  à  tout  venant.  C'est  à  prix  d'or  que 
l'Espagnol    (riloiucc    triomphe    de    la   vertu    chancelante  des 


LES    DÉCLAMATEURS    ESPAGNOLS  3Z15 

matrones  romaines.  Le  riche  armateur  d'Espagne  est  arrivé 
sur  son  navire  chargé  de  marchandises;  quand  il  a  bien  vendu 
les  produits  renommés  de  son  pays,  —  les  cordes  et  les 
sparteries  fabriquées  avec  les  filaments  du  genêt  d'Espagne',  le 
(jarum,  saumure  très  appréciée  que  Ton  préparait  avec  les 
entrailles  marinées  des  scomhri  ^maquereaux)  péchés  sur  la 
côte  de  Garteia  dans  la  Bétique,  à  l'ouest  du  mont  Calpé',  le 
fer  des  rnines  d'Ibérie  et  le  cuir  de  Cordoue  dont  on  faisait  de 
solides  cuirasses -5,  —  il  peut  acheter  très  cher  le  déshonneur 
dune  jeune  femme.  Il  fait  son  choix;  et,  s'il  ne  se  donne  pas 
la  peine  de  venir  prendre  lui-même  livraison  de  la  marchan- 
dise achetée,  c'est  un  commis  qui  se  présente  dans  la  salle  du 
festin  :  en  présence  des  convives,  sous  les  yeux  de  son  mari 
complice,  la  jeune  épouse  se  lève  et  suit  l'agent  de  l'armateur^. 
Si  l'Espagnol  qui  vient  à  Rome  ne  s'occupe  que  de 
débauches,  celui  qui  reste  dans  son  pays  est  un  sauvage  : 
comme  les  Gelons  et  les  Scythes,  les  Goncaniens^  se  délectent 
à  boire  le  sang  de  leurs  chevaux''.  Quand  les  Astures  et  les 
Cantabres  se  révoltent,  Horace  s'indigne  que  ces  sauvages 
osent  entreprendre  contre  Rome  une  guerre  dont  il  ne 
comprend  pas  l'importance.  L'auteur  inconnu  d'un  pané- 
gyrique adressé  à  M.  ValeriusMessalla  à  l'occasion  du  consulat 
qu'il  venait  d'obtenir  pour  728-31,  cite  parmi  les  pays  où  le 
nouveau  consul  pourrait  continuer  le  cours  de  ses  exploits 
l'audacieuse  Espagne  aux  vastes  territoires''.  Deux  ans  après, 
en  725-29,  Horace  croit  que  l'audace  de  l'Espagne  est  à  jamais 
brisée.  Dans  une  ode  où  il  prie  Mécène  à  dîner  pour  le  jour 
des  calendes  de  mars  725-29,  le  poète  se  réjouit  de  la  paix 
générale  qui   permet  à    son  ami   d'oublier   les    soucis    de   la 

1.  Horace,  Epod.,  iv,  v.  3:  Hibericis...  funibus. 

2.  Horace,  Sat.,  II,  viii,  v.  46  :  ...  garo  de  sucis  piscis  Hiberi. 

3.  Horace,  Od.,  I,  xxi\,  v.  i5  :  loricis  Hiberis.  —  Le  fer  d'Espagne  était  très  estimé; 
mais,  comme  le  mot  lorica  (lorum)  désigne  la  cuirasse  de  cuir  par  opposition  au  mot 
thorax,  cuirasse  de  fer,  Horace  fait  sans  doute  allusion  aux  cuirasses  faites  en  cuir  de 
Cordoue. 

4.  Horace,  Od.,  III,  vi,  v.  29-32. 

5.  On  identifie  Concana,  ville  des  Concaniens,  soit  avec  Cuenca  de  Campos,  soit 
avec  Santillana,  soit  avec  Infiesto.  —  Voir  Manncrt,  p.  35o. 

6.  Horace,  Od.,  III,  iv,  v.  34.  —  Cf.  Silius  Italiens,  III,  v,  3Gi  :  Cornipedis  fusa 
satiaris,  Concane,  vena. 

7.  Tibulle,  IV,  i,  v.  i38  :  ...  latis  audax  llispania  terris. 


3^6  BULLETIN    HISPANIQUE 

politique  et  d'accepter,  comme  un  simple  f>articulier,  une 
invitation  en  ville  :  sur  les  rivages  de  l'Espagne,  le  vieil 
ennemi  de  Rome,  le  Cantabre,  est  enfin  dompté  et  lié  par  des 
chaînes  contre  lesquelles  il  s'est  longtemps  insurgé'.  Ces 
chaînes  qu'on  avait  eu  tellement  de  peine  à  lui  imposer 
n'étaient  pas  très  solides;  la  guerre  recommençait  bientôt. 
A  la  fin  de  728-26,  Horace  écrit  à  son  ami  Quinctius  Hirpinus 
de  ne  pas  s'inquiéter  des  desseins  hostiles  du  belliqueux 
Cantabre,  trop  éloigné  de  l'Italie  pour  que  Rome  ait  rien 
à  redoutera  Quant  à  lui,  il  n'a  aucune  intention  d'aller,  soit 
au  nord  de  l'Espagne  où  le  Cantabre  indocile  se  révolte  contre 
le  joug  romain,  soit  même  au  midi  dans  la  pacifique  ville 
de  Gadès  qui  lui  semble  au  bout  du  monde^.  Dans  ses  voyages  il 
ne  veut  pas  dépasser  Tibur  dont  les  vertes  olives  le  disputent 
aux  olives  renommées  du  mont  Vénafre,  en  Campanie;  tout 
au  plus  irait-il  jusqu'au  Galèse,  le  fleuve  cher  aux  bre!)is  de  la 
région  de  Tarenle  qu'on  enveloppe  de  peaux  pour  préserver 
leurs  toisons 't  :  il  ne  connaît  pas  et  il  ne  tient  pas  à  connaître 
les  oliviers  de  la  plaine  de  Cordoue  et  le  Bétis,  fleuve  cher  aux 
brebis  du  pays  des  Turdétans. 

Cependant,  l'empereur,  qui  jugeait  la  guerre  assez  sérieuse 
pour  en  prendre  lui-même  la  direction,  était  loin  de  Tibur  et 
de  Parente;  en  728-26,  il  commençait  son  huitième  consulat 
à  Tarragone  où,  après  une  campagne  contre  les  Cantabrcs, 
la  maladie  le  forçait  de  revenir  et  de  passer  l'hiver  de  729  25  5; 
en  730-24,  il  rentrait  en  Italie,  laissant  à  ses  légats  le  soin  de 
terminer  la  guerre.  Horace  chante  le  retour  heureux  d'Auguste 
qui,  après  avoir  conquis  le  laurier  qu'on  achète  souvent  au 
prix  de  la  vie,  vient  revoir  ses  dieux  Pénates,  victorieux  de 
l'Espagne,  setnblable  à  Hercule  qu\  a  traversé  jadis  en  vain- 
queur la  péninsule  ibérique*'. 

La  victoire  d'Auguste  était  bien  précaire.  En  784-20,  Agrippa 
devait    encore  partir   en    guerre  contre  les  Cantabres  et   les 

I.  Horace,  Od.,  III,  viii,  v.  ai-aa. 
s.   Horace,  Od.,  Il,  xi,  v.  i-:>.. 

3.  Horace,  Od.,  II,  vi,  v.  1-2.  —  Cf.  Od.,  Il,  t',  v.  10  :  ...  remotis  Gadibus. 

II.  Horace,  Od.,  Il,  vi,  v.  i5-iC,  v.  10-11. 
5.  Dion  Cassius,  Mil,  xxv. 

C.  Horace,  Od.,  III,  mv,  v.  i-V 


LES    DÉCLAMATEURS    ESPAGNOLS  347 

Astures.  Pendant  l'été  de  735-19,  au  moment  de  l'année 
où  se  doraient  les  moissons  de  l'Italie,  Horace,  dans  une  lettre 
où  il  donne  des  nouvelles  de  Rome  à  Iccius,  qui  administrait  en 
Sicile  les  domaines  d'Agrippa,  annonce  qu'on  vient  d'apprendre 
la  soumission  définitive  des  Cantabres'.  Agrippa  avait  réussi  à 
détruire  ou  à  désarmer  les  insurgés,  à  s'emparer  des  forteresses 
bâties  dans  les  montagnes  et  à  forcer  les  indigènes  à  sétablir 
dans  la  plaine.  Vers  la  même  date,  le  poète  rappelle  à  Lollius 
que  son  passé  lui  interdit  de  s'abandonnera  l'oisiveté.  Lollius 
n'a-t-il  pas  fait,  tout  jeune,  un  rude  apprentissage  de  la  guerre, 
lui  qui  a  combattu  en  728-36  les  féroces  Gantabres  sous  les 
ordres  de  Tibère  qui  faisait  ses  premières  armes  comme  tribun  2  ? 

Mais  la  pacification  complète  du  pays  vaincu  ne  pouvait 
être  l'œuvre  d'un  jour.  C'est  seulement  en  l'an  74i-i3,  au 
moment  où  Auguste  rentre  à  Rome  après  une  longue  absence 
pendant  laquelle  il  avait  rejeté  les  Germains  de  l'autre  coté 
du  Rhin  et  réorganisé  l'administration  de  la  Gaule  et  de 
l'Espagne^,  qu'Horace  proclame  qu'on  n'a  plus  désormais 
à  redouter  les  révoltes  de  la  farouche  Ibérie,  des  Gantabres, 
si  longtemps  indomptables,  dociles  maintenant  aux  ordres  de 
l'empereur  et  admirateurs  respectueux  de  sa  puissance'*. 

Cette  fois  le  poète  ne  se  trompait  pas:  c'est  à  l'an  7'ii-i3 
qu'Appien  termine  son  récit  des  guerres  d'Espagne^.  Velleius 
Paterculus,  qui  écrit  à  la  fin  du  principat  de  Tibère,  constate 
que,  grâce  à  la  paix  imposée  par  Auguste,  le  brigandage 
a  disparu  d'un  pays  qui  ne  cessait  d'être  le  théâtre  de  guerres 
considérables^.  Un  historien  gaulois  contemporain  d'Auguste, 
Trogus  Pompeius,  reconnaît  que  l'empereur  seul  a  réussi  à 
soumettre  définitivement  l'Espagne  et  à  faire  une  province 
réellement  romaine  de  ce  pays  barbare  que  ses  lois  ont  conquis 
à  la  civilisation'. 


1.  Horace,  Epîtr.,  I,  xii,  v.  26-29. 

2.  Horace,  Epîlr.,  I,  xvm,  v.  5^-50. 

3.  Dion  Cassius,  LR  ,  xix. 

!i.  Horace,  Od.,  IV,  v,  v.  27-28 :/(erae...  Hiberiae.  —  Od.,IV,  xiv,  v.  4i  :  Te  Cantaber 
non  anle  domabilis...  Miratur;  v.  49:  Te...  duraeque  tellus  audit  Hiberiae. 

5.  Appien,  Guerres  d'Espagne,  cii. 

6.  Velleius  Paterculus,  H,  \c,  [>. 

7.  Justin,  XLIV,  V,  8. 


3^8  BULLETIN    HISPANIQUE 

Les  villes  conquises  sollicitaient  l'honneur  de  recevoir  le 
nom  du  conquérant:  Olisippo,  la  moderne  Lisbonne,  devenait 
Felicilas  Julio  :  Ebora  (Evora),  IJbe r aidas  Jiilia;  Ituci,  près  de 
Castulo.  Virtus  Julia:  Ucubi,  près  de  Cordoue,  Clarilas  Julia; 
Osset,  sur  le  Bétis,  en  face  d'Hispalis,  Julia Constantia, eiLacini 
murgi,  Conslanlia  Julia;  Séria  (Jerez  de  los  Gaballeros),  P'ama 
Julia;  Nertobri^ia,  en  Bétique  (Valera  lavieja),  Concordia  Julia '. 
Beaucoup  de  villes  prenaient  le  cognonien  d'  1  ugusla,  entre  autres 
Emerita  (Merida),  qui  àexenaii  Emerila  Augusia;  \siigi&  (Ecija). 
Augusta  Firma;  Bilbilis  [cerro  de  Bambola  près  de  Calatayud), 
Bilbilis  A  ugusla:  Bracara  (Braga),  Bracaruni  Augusla:  ïucci 
(Martos,  dans  la  province  de  Jaen),  Augusla  Gemella;  une  ville 
des  Arevaci,  Augusla  Nova-.  L'antique  Gadès,  la  civitas  Gaditana 
de  Cicéron^,  s*a])pelait  désormais  Augusla  Julia  Gaditana'';  et 
Salduba  prenait  le  nom  de  Caesaraugusla  colonial,  d'où  vient 
le  nom  moderne  de  la  ville  de  Saragosse.  Beaucoup  de  peuples 
devenaient  })euples  d'Auguste,  Augustani.  Les  Astures  eux- 
mêmes  se  mettaient  au  nombre  des  Augustani'\  Ces  peuples 
farouches,  qui  avaient  fait  à  Bome  une  guerre  si  rude,  hono- 
raient maintenant  l'empereur  comme  un  Dieu.  L'Espagnol 
Pomponius  Mêla  rapporte  que  sur  un  promontoire  de  leurs 
côtes  ils  élevèrent  trois  autels  consacrés  au  culte  d'Auguste: 
ces  autels  s'appelaient  Seslia/iae  arae"' .  L'empereur  devenait  la 
divinité  tutélaire  du  pays  qu'il  avait  soumis.  «L'Espagne  ne 
voulut  plus  compter  que  par  l'ère  d'Auguste  qu'elle  conserva 
jusqu'à  la  fin  du  moyen  age^,  » 

Du  jour  où  l'Espagne  tout  entière  se  montre  complètement 
romaine,  dévouée  sans  réserve  à  l'empereur,  les  écrivains 
contemporains  d'Auguste  et  de  Tibère  s'empressent  de  vanter 

I.  Pline,  A.  H.,  IV,  xxi,  117;  III,  1,  12;   11,   i4. 

a.  Pline,  A^.  //.,  IV,  \ii,  117;  111,  i,  12  ;  ni,  27;  IV,  tx,  1 13. 

3.  CictTon,  Pro  Balbo,  vi,  i4. 

4.  Pline,  A^.  //.,  IV,  xxn,  119. 

5.  Pline,  A.  //.,  III,  m,  23. 
C.  Pline,  A^.  //.,  III,  m,  28. 

7.  Pomponius  Mêla,  III,  1,  i3. 

8.  Duruy,  llist.  des  Porn.,  t.  III,  Paris,  1877,  p.  a/|5.  —  Colle  ère  qui  commençait 
à  l'an  38  av.  J.-C,  se  conserva  en  Aragon  jusqu'en  i358,  en  Porlu<ïal  jus([u'en  i4i5. 
M.  Ch.-V.  Langlois  (article  Kre,  t.  XVI,  p.  170,  Grande  Encyclopédie)  atllrnie  que 
Vire  d'Es/-agne  n'a  pas  clé  inslituce  sous  Auguste;  mais  il  ncililpasà  quel  événement 
se  raltaclie  l'origine  de  cette  ère. 


LES    DÉCLAMATEURS    ESPAGNOLS  3^9 

la  richesse  de  son  sol,  la  variété  de  ses  produits,  l'activité  de 
son  industrie,  l'étendue  de  son  commerce.  L'Empire  fait  de  la 
péninsule  ibérique,  si  longtemps  barbare  et  indomptée,  dont 
la  soumission  terminait  enfin  les  guerres  d'Auguste  et  permettait 
à  la  paix  romaine  de  régner  dans  le  monde  entier,  le  même 
éloge  que  la  République  faisait  de  la  Sicile,  la  première  des 
nations  étrangères  qui  avait  porté  ce  nom  de  province,  si  hono 
rable  pour  Rome,  la  première  qui  avait  fait  connaître  aux 
Romains  la  gloire  d'établir  leur  pouvoir  hors  des  frontières  de 
l'Italie,  qui,  entrée  la  première  dans  l'alliance  de  Rome,  n'en 
était  jatnais  sortie,  et  n'avait  jamais  cessé  de  nouriir  l'Italie 
de  son  blé'. 

Trogus  Pompeius  fait  de  l'Espagne  un  éloge  semblable  à 
l'éloge  de  la  Sicile  qui  sert  d'exorde  à  la  seconde  Verrine  de 
Cicérone  II  détruit  les  légendes  qui  avaient  été  imaginées  alors 
que  le  pays  était  mal  connu  et  qui  se  perpétuaient  encore 
depuis  qu'il  était  devenu  romain.  On  prétendait  qu'en  Lusi- 
tanie,  sur  les  bords  du  Tage,  le  vent  féconde  les  cavales. 
Varron,  qui  avait  longtemps  vécu  en  Espagne,  l'affirmait^; 
Golumelle,  qui  est  Espagnol,  devait  le  répéter^;  Pline,  qui  se 
moque  de  la  crédulité  grecque  et  qui  remarque  fort  justement 
qu'il  n'est  pas  de  mensonge  si  impudent  qui  ne  soit  appuyé 
d'un  témoignage^,  Pline  lui-même  donnera  comme  un  fait 
certain  qu'en  Lusitanie  les  juments  se  tournent  du  côté  d'où 
vient  le  vent  d'ouest,  aspirent  son  souflle  fécondant  et  mettent 
bas  des  poulains  aussi  rapides  que  le  vent,  leur  père*^.  Trogus 
Pompeius  explique  l'origine  de  cette  légende  :  les  cavales  de  la 
Gallécie  et  de  la  Lusitanie  sont  si  fécondes,  leurs  poulains  si 
nombreux  et  si  rapides  à  la  course  qu'ils  semblent  être  les  fils 
des  vents  *^. 

Il  n'est  pas  nécessaire  d'inventer  des  fables  pour  louer  un 

1.  Cf.  Gicéron,  Verr.,(\\),  II,  i. 

2.  Le  livre  \LIV  de  Justin  est  consacré  tout  entier  à  l'Espagne;  comme  Justin  ne 
fait  qu'un  abrégé  des  Hisloriae  de  Trogus  Pompeius,  il  est  certain  que  l'ouvrage 
original  devait  donner  sur  l'Espagne  des  renseignements  beaucoup  plus  abondants. 

3.  Varron,  De  lie  Ruslica,  II,  i. 
l^.  Golumelle,  VI,  xwii,  3. 

5.  Pline,  A^.  //..  VIII,  xxii,82. 

6.  Pline,  N.  H.,  VllI,  xm,  i66. 

7.  Justin,  XLIV,  m,  i. 


35o  BULLETIN    HISPANIQUE 

pays  dont  les  productions  réelles  sont  si  admirables.  Située 
entre  l'Afrique  et  la  Gaule,  préservée  des  ardeurs  du  soleil  qui 
brûle  l'Afrique  et  des  violences  du  vent  qui  fatigue  la  Gaule, 
l'Espagne  tient  le  milieu  entre  ces  deux  régions;  elle  jouit 
d'un  climat  tempéré  par  des  pluies  douces  et  abondantes  qui 
lui  donnent  une  fécondité  capable  de  pourvoir  non  seulement 
à  ses  propres  besoins,  mais  à  ceux  de  l'Italie  où  elle  exporte 
les  produits  de  son  sol,  blé,  vin,  miel,  huile,  lin,  sparterie  ;  — 
de  son  sous-sol,  fer,  cuivre,  plomb;  —  de  ses  fleuves  qui 
abondent  en  poissons  et  qui  roulent  des  parcelles  d'or. 

Certaines  contrées  de  l'Espagne  sont  remarqual)les  par  leurs 
richesses  minières.  La  Gallaecki'  produit  en  abondance  le 
cuivre,  le  plomb  et  le  minium  d'où  le  fleuve  qui  arrose  le  pays 
a  tiré  son  nom 2,  l'or  si  abondant  que  le  soc  de  la  charrue  fend 
souvent  des  glèbes  aurifères.  Le  fer  du  nord  de  l'Espagne,  très 
dur  naturellement,  acquiert  une  solidité  remarquable  quand 
il  est  trempé  dans  la  rivière  qui  passe  à  Bilbilis"^,  ou  dans  le 
Chalybs,  dont  les  riverains  ont  reçu  le  nom  de  Chalybes''. 

Le  minium  d'Espagne,  très  réputé^  n'avait  d'autre  rival  que 
celui  qu'on  tirait  de  la  Cappadoce  et  dont  la  préparation  se 
faisait  et  le  marché  se  tenait  à  Éphèse^.  Dans  son  traité  De 
Archilecliira  qu'il  dédiait  à  Auguste  en  7/10-1^,  Vilruve  affirme 
que  l'Italie  n'est  plus  tributaire  des  usines  d'Éphèse  depuis 
qu'on  exploite  le  minium  en  Espagne  et  qu'on  l'importe 
directement  à  Rome  où  des  ouvriers  spéciaux  le  préparent  dans 
des  ateliers  situés  entre  le  temple  de  Flore  et  le  temple  de 

1.  La  Galice,  au  nord-est  de  la  péninsule,  entre  les  Astures,  l'Océan  et  le 
Portugal. 

2.  Justin,  XLIV,  111,4.  —  Le  minium  est  un  plomb  oxydé  rouge,  qui  se  présente 
à  l'état  naturel  en  niasses  pulvérulentes.  Le  fleuve  Minius  s'appelle  aujourd'hui  en 
Kspiigne,  où  il  prend  sa  source,  le  MiFto,  et  en  Portugal,  oi^i  il  a  son  emboucliure, 
le  Minfio. 

;^i.  Martial,  originaire  de  Uilliilis,  nous  apprend  dans  une  de  ses  IJpigranmies 
(X,  r.iv,  V.  G)  que  le  fleuve  qui  arrose  sa  ville  natale  s'appelle  le  Salo,  aujourd'hui 
le  Jalon.  On  identifie  la  colline  oîi  Bilbilis  était  bâtie  avec  le  cerro  de  Bainhola  au\ 
environs  de  Galatayud. 

'4.  Justin,  XLIV,  III,  9.  —  Les  (irecs  avaient  donné  le  nom  de  Chalyhes  (yâÀu'}/, 
acier)  à  un  peuple  des  bords  du  Pont-Euxin  (jui  était  habile  à  travailler  le  fer  et  qui 
passait  pour  avoir  inventé  l'acier.  Il  est  probable  que  les  Grecs  avaient  donné  le 
Uléma  nom  de  Ghalybes  aux  riverains  de  c|ucl(iue  torrent  d'Espagne  dont  les  eaux 
étaient  réputées  pour  la  trempe  de  l'acier.  Ce  torrent  est  peut-être  le  kalipos  de 
Pt«jléniée  (cf.  Mannerl,  p.  Sîi). 

5.  Slrabon,  XII,  ii,  lo. 


LES    DECLAMATEURS    ESPAG>'OLS 


35  I 


Quirinus'.  Dans  son  Histoire  Naturelle  qu'il  présentait  à  Titus 
en  83o-77,  Pline  dit  que  de  son  temps  Rome  ne  reçoit  plus  de 
minium  que  de  lEspagne,  surtout  des  mines  de  Sisapon  en 
Bétique^,  qui  fait  partie  du  domaine  de  l'État.  Le  minium, 
qu'on  n'a  pas  le  droit  de  travailler  sur  place,  est  envoyé  par 
lingots  marqués  d'un  cachet  à  Rome  où  on  le  prépare  et  où 
une  loi  en  fixe  le  prix  de  vente". 

Strabon  fait  une  description  détaillée  de  tous  les  produits 
qui  sont  exportés  de  l'Espagne,  en  particulier  de  cette  Turdé- 
tanie''  dont  la  richesse  dès  longtemps  proverbiale  permettait  à 
Plante^  qui  jouait  sur  les  mots,  de  dire  que  les  Turdétans 
étaient  gros  comme  des  grives 3.  La  Turdétanie  jouit,  en  effet, 
d'une  merveilleuse  fertilité  et  ses  fleuves  lui  permettent 
d'envoyer  à  Rome  en  abondance  du  blé,  du  vin,  de  l'huile 
excellente,  de  la  cire,  du  miel,  de  la  poix,  des  coques  de 
kermès,  du  minium,  de  l'or,  de  l'argent,  du  cuivre  et  du  fer 
que  son  sol  produit  à  l'état  natif  en  des  conditions  remarqua- 
bles de  pureté  ;  ses  mines  de  sel  lui  donnent  le  moyen  de  faire 
une  grande  quantité  d'excellentes  salaisons  avec  les  poissons 
que  Ton  pêche  dans  les  rivières  et  sur  le  littoral  de  la  Méditer- 
ranée'". D'autres  contrées  de  l'Espagne  exportent  des  chevaux 
qui  ont  beaucoup  de  vitesse  et  de  fond  et  qui  sont  dressés 
à  gravir  les  montagnes  et  à  fléchir  les  genoux".  Les  principales 
fabriques  où  l'on  tisse  le  lin  se  trouvent  à  Emporium,  dans  la 
Tarraconaise"^.  Les  vastes  plaines  de  cette  région  produisent 
l'espèce  de  sparte  qui  sert  à  faire  des  cordages  et  qu'on  exporte 
surtout  en  Italie^. 

Strabon,  qui  donne  d'abondants  renseignements  sur  l'agri- 
culture, le  commerce  et  l'industrie  de  l'Espagne,  constate  que 
les  habitants  de  la  Bétique  sont  si  bien  convertis  à  la  civi- 
lisation   latine    qu'ils    ont   renoncé    à   leur  idiome    national 

1.  Vitruve,  VII,  ix, 

2.  Almaden,  dans  la  province  de  Ciudad-Real. 

3.  Pline,  A'.  H.,  XXXIII,  vu,  ii8. 

II.  Le  pays  des  Turdetani  correspond  à  l'Andalousie. 

5.  Plaute  (Les  Captifs,  I,  ii,  v.  60)  fait  venir  Turdetani  de  tardas,  grive. 

6.  Strabon,  III,  11,  4,  6,  7,  8. 

7.  Strabon,  III,  iv,  i5. 

8.  Aujourd'hui,  Caslello  de  Ampurias.  Cf.  Mannert,  p.  4oi. 

9.  Strabon,  III,  tv,  9. 


302  BULLETIN    HISPANIQUE 

et  que  les  Geltibères  eux-mêmes  portent  la  toge  romaine'.  Il 
rappelle  que  les  divers  peuples  de  l'Espagne  avaient  dans 
leurs  dialectes  toute  une  littérature,  des  annales  des  anciens 
temps,  des  poèmes  remontant  à  une  haute  antiquité 2.  Mais  il 
ne  dit  pas  que,  depuis  que  les  habitants  de  la  Bétique  ont 
renoncé  à  leur  idiome  national  et  que  les  Celtibèies  portent 
la  toge,  les  peuples  de  ÏIHspania  Cilerior  et  de  VHispaiiia  Ulle- 
rior  cultivent  avec  succès  l'éloquence  et  la  poésie  latine. 

Au  temps  de  Sénèque,  les  auteurs  qui  vantent  le  plus  volon- 
tiers les  productions  agricoles  et  industrielles  de  l'Espagne  ne 
font  aucune  allusion  à  ses  productions  littéraires.  Les  poètes 
eux-mêmes  qui  citent  les  littérateurs  avec  lesquels  ils  entre- 
tiennent des  relations  d'amitié  ne  semblent  connaître  aucun 
Espagnol  qui  écrive  en  vers  ou  en  prose.  A  la  fin  de  sa  longue 
carrière,  le  vieillard  de  Cordoue  devait  s'indigner  de  l'oubli 
dédaigneux  011  Rome  s'obstinait  à  laisser  les  œuvres  de  ses 
compatriotes;  et,  dans  son  recueil  de  Controvcrsiue  et  de  Sua- 
soriae,  il  s'eilorce  de  prouver  que  l'Espagne  est  aussi  littéraire 
que  commerçante  et  induetrielle. 

II.  DE  LA  VILLE  DE  MIRMONT. 

('A  suivre.) 


I.  Strabon,  III.  ii,  i 
a.  Siraboii,  III,  i,  tj. 


CHRONIUUK  LATINE  DES  ROIS  DE  CASTILLE 

JUSQU'EN   1236 

(SuUe*) 


[II.  Alphonse  VIII.  —  B.  —  Las  Navas.J" 

•21.  Inicia  gaudii  hec  fuerunt.  Omnes  qui  in  captione  salue  iTe  et  in 
morte  filii  régis  pre  dolore  et  angustia  defecerant  animis.  confortati 
sunt  in  domino  et  in  potencia  bonitatis  eius.  adeo  quod  ex  tune 
omnium  tam  nobilium  quam  ignobilium  desiderium  summum  erat 
bello  lascessere  regem  marroquitanuni.  Yere  uirtus  dîïi  noslri  ih'u 
xpi  qui  uere  deus  est  et  homo  latenter  operabatur.  q  lam  subito 
corda  hominum  potuit  imulare.  de  timoré  in  audanciain.  de  despera- 
tione  in  confidenciam  sumani.  Archiepiscopus  autcni  toletanus  adiit 
regem  francie  cui  cum  exposuisset  cam"  uie  et  necessitatem  et 
angusliam  populi  xpiani  neque  uerbum  bonum  habere  pocuil''  ab  ore 
eius.  Cirtuiû'  totam  franciam  supplicans  magnatibus  et  multa  polli- 
cens  eis  ex  parte  régis  castelle  sed  nec  unum  ex  eis  moucre  potuit'. 

a)  causam.  —  b)  potuit.  —  ci  circuiuit. 

■    Voir  Hall,  /iis/».,  t.  \IV,  p.  3o,  109  cl  2^/4. 

•*  Sur  les  événements  (ini  sniveni,  jusqu'à  la  (in  de  la  campagne  de  las  Navas. 
nous  avons  les  récits  de  témoins  oculaires  et  même  actifs,  parmi  lesquels  il  ne  semble 
pas  qu'il  faille  compter  Luc,  quoicju'il  ne  s(jit  pas  en  désaccord  avec  les  autres.  C'est 
d'abord  Rodrigue  de  Tolède;  puis  Alphonse  Vlli,dans  sa  lettre  au  pape  lnn<jcenl  III, 
comprise  dans  le  livre  XV  des  lettres  de  ce  pape(édit.  Baluze,  reproduite  par  Migne. 
Patrol.  lai.,  t.  CCXVI,  col.  <J9ij-7o3)  et  mise  par  Gerdâ  en  appendice  aux  Memorias  de 
Mondéjar  (cf.  Il,  A,  note  '*);  enlin  Amalric  Arnaud,  archevêque  de  Narbonne,  dans  sa 
lettre  «  Arnoldo  abbati  cistercicnsi  cctcrisque  abbatibus  in  generali  capitulo  consli- 
lutis  »,  publiée  par  Ughelli,  d'après  un  manuscrit  du  monastère  cistercien  de  Flo- 
rence, dans  Vllalia  sacra;  par  les  frères  Sainte- Marthe,  et  par  Cerdà  (Memorias). 
Albéric,abbé  des  Trois-Fontaines,  dont  la  Chronique  s'arrête  en  i^'n,  et  qui  est  mort 
en  1202,  put  avoir  des  renseignements  de  témoins;  on  trouvera  son  récit  au  tome  Wlll 
du  Recueil  des  Hislorieiis  des  Gaules  (édition  Léopold  Uelisle,  p.  779);  également  dans 
Cerdâ.  Je  renverrai,  dans  les  notes  qui  suivent,  aux  pages  de  l'appendice  de  Cerdâ. 
Les  Anales  Toledanos  donnent  une  relation  brève,  mais  pleine  de  détails. 

21.  1.  Sur  l'accueil  que  lui  fit  le  roi  de  France,  Rodrigue  garde  le  mutisme  d'un 
diplomate.  Il  ne  nomme  à  vrai  dire  aucun  Français  parmi  ceux  qui  vinrent  au 
secours  d'Alphonse  Vlll.  Bordeaux,  Nantes,  Narbonne  n'étaient  pas  en  pays  français, 
mais,  comme  il  dit,  «  de  parlibus  Galliarum  ».  Luc  dit  pourtant  «  alluerunt  Portuga- 


354  BULLETIN    HISPANIQUE 

Misit  preterea  rex  nobilis  cuius  intencio  tota  et  studium  in  hoc  erat  in 
partes  pitauie  et  uasconie  uirum  industrium  magistrum  arnaldum 
fisicum  suuma  qui  concitaret  animos  potentum  multa  promictens  ex 
parte  régis  ad  bellum  futurum.  De  partibus  illis  muiti  nobiles  et 
magntes  cum  archiepiscopo  burdcgalen  uenerunt  in  auxilium 
régis  castelle.  in  estate  proxima  cum  iam  inmineret  tempus  belli. 
De  prouincie  uero  partibus  per  quas  transitum  fecerat  archicpiscopus 
predictus  uenit  archiepiscopus  narbonen  et  quidam  alii  de  prouincia 
uienensi3.  Girca  festum  igitur  penthecostes  ceperunt  undique  gentes 
contluere  ad  ciuitatem  toletum.  et  in  octaua  die  eiusdem  festi  petrus 
re\  aragoïï  supradiclus  intrauit  toletum  sicut  promiscrat  uno 
tantum  milite  cumitatus.  Secuti  sunt  eum  postea  uasalli  sui 
inulti  et  boni  et  ad  res  bellicas  expedicti^.  Dum  conuenirent  nobiles 

lenses  &  eliam  Franci  &  Gallœci  (ms.  2.  c.  5  :  Gallici)».  Mais  dans  la  lettre  d'Arnaud, 
archevêque  de  Narbonne,  sont  mentionnés  «  riuillelmus  Bnrdegalensis,  Archiepi- 
scopus, vV  alii  Ecclesiarum  Pnclati,  Barones  ([uoquc,ac  milites  ex  partibus  Pictaviac, 
&  Andeg.  ac  Brilan.  ^:  de  Lcmovic.  &  Piclagoric.  &  Santon.  iS:  Burdegalcnsis  diœcesi- 
bus  vV  aliqnot  de  aliis  partibus  ultramontanis  ».  11  n'est  pas  question  des  Franci.  Il 
faut  se  rappeler  ce  ([u'était  la  France  proprement  dite  au  début  du  règne  de  Plii- 
lippe-Auguste  pour  comprendre  ce  que  dit  notre  auteur,  et  l'accorder  avec  ce  que  dit 
Arnaud.  Luc  a  peut-être  pris  le  mot  Franci  dans  le  sens  large;  l'abbé  des  Trois- 
Fonlaines  (p.  \xii)  a  fait  de  même.  11  est  étonnant  que  notre  auteur  ne  dise  rien  des 
secours  venus  de  Portugal  (cf.  Ilerculano,  t.  il,  [>.  i05  et  s.).  Le  texte  d'Ocampo  nomme 
«  el  arçobispo  de  Burdeos,  s  el  abad  de  Cistel,  e  Jofre  rodel  d'Uaca,  s  Jofre  de 
Argento,  s  don  llicarte  de  la  poypeça,  z  Tilbato  de  blaçon,  s  el  vizcode  de  Copere,  e 
el  conde  de  Benaueto  r.  G<tol  île  Astaratc,  t  .Sancs  de  la  Marca  »  (fol.  cccxcv),  omis 
dans  le  manuscrit  io'i7.  Le  manuscrit  8817  (fol.  2ii)  énumùre  :  «  o  arçb'po  d'  bordel 
z  oarçb'po  de  Nari)ona.  El  oai)bade  Çistel.  c  Jolfre  da  carait  s  Jofre  deltoro.  c  obis- 
conde  de  castel  arce  <,  Jofre  dargo  i;  don  rinal  d'  [jiranca  t  libalt  d'blascO  e  o  cond'de 
lurena  e  vgo  dargulo  e  Jofre  d'  narrai,  e  onris  de  breo  z  vgo  d'  lofert.  E  oconde 
debena  neb<t  r.  sans  d'  la  barca.  » 

21.  2.  il  n'est  pas  parlé  ailleurs,  (lue  je  sache,  de  ce  maître  Arnaldo,  médecin 
d'Alphonse  le  iNoble. 

21.  3.  L'archevêque  de  Narbonne,  Arnaud,  est  nommé  par  Rodrigue,  qui  ra|)pelle 
son  rôle  dans  la  prédication  de  la  croisade  contre  les  Albigeois.  Ancien  abbé  de 
Poblet,  puis  de  Giteaux,  Amaliic  .Vrnaud  avait  été  élu  archevèrpie  de  Narbonne 
le  12  mars  1212.  Il  mourut  en  122.').  Dans  sa  lettre  il  déclare  êlre  arrivé  à  Tolède 
«tertio  die  Martii  {martis?  addition  marginale.^)  post  octavam  diem  Pentocostes  », 
c'est-à-dire  «le  surlendemain  (mardi)  de  l'octave  de  la  Pentecôte»,  soit  le  ■!2  mai. 
Il  était,  comme  on  voit,  depuis  peu  archevêque.  —  Aux  archevêques  de  Bordeaux  et 
de  Narbonne,  Rodrigue  (VIII,  2)el  Alphonse  VIII  dans  sa  lettre  à  lnnoc(!nt  III  ajoutent 
l'évêque  de  Nantes,  (jue  la  Ghron.  (iénérale  transforme  en  «  obispo  de  Na>  arrêt  »  ou 
('  Navarrcte»  (i  loii).  .Vrnaud  devient  Girailr  dans  le  texte  d'Ocampo  (fol.  cccxcv') 
el  Giruldi}  dans  le  manuscrit  iS'iy  (fol.  /ioG). 

31.  U,  Pierre  avait  dû  prendre  les  devants  pour  ne  pas  manquer  à  la  parole 
donnée.  Ge  détail  n'est  noté  nulle  part  ailleurs.  D'après  les  An.  Toled.  I, 
.\lphonsc  VllI  fit  son  entrée  le  même  jour  que  lui.  D'après  la  Chr.  géncr.  (texte  de 
Pidal,  p.  08<j',  1.  3;  texte  d'Ocampo,  fol.  cccxcv),  les  croisés  avaient  commencé  à 
arriver  en  février  (de  même  manuscrit  i3'i7,  fol.  /|O.V,  et  8817,  fol.  2i3).  —  Le  texte 
d'Ocampo  ne  nomme  [jas  les  nobles  aragonais  (jue  mentionne  celui  de  Pidal  (p.  (icjo'', 
I.  4o);  el,  de  la  liste  d'évêques  castillans  ou  aragonais  (p.  ijfji'',  1.  •>),  il  retranche  «don 
Rodrigo,  obispo  de  .Siguenza  »,  et  remplace  Mclcndo  par  Sancho,  Tarazona  par  l'ai  ra- 
ijona.  Aux  nobles  castillans  (l.  i.'i)  il  ajoute  Alvaro  Diaz  de  los  Gameros,  Garcia  Armil- 
dez  <(  prior  de  San  Juan  »,  il  retranche  «  cl  maestro  Roy  diaz  de  Calatraua  »  et  le 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  355 

et  populi  régis  castelle  et  régis  aragonum  cunctis  qui  uenerant  de 
pictauia  et.  de  uasconia  et  de  prouincia.  et  de  aliiz"  partibus.  et  ipsi 
régi  aragofî  expensas  us  nobilis  rex  castelle  sulFicienter  ministrabat. 
^  *  tanta  copia  aiiri  efFundebatur  cotidie  quam  uix  et  numeratores 
et  ponderatores  multitudinem  denarriorum  qui  neccessarii  erant  ad 
expensas  poterant  numerareâ.  Vniuersus  clerus  regni  castelle  ad 
peticionem  regni  medietatem  omnium  redituum  suorum  in  eodem 
anno  concesserant  (fol.  98)  dno  régi 6.  Prêter  stipendia  cotidiana 
régi  aragon  multam  sumam  pecunie  misit  antequam  ipse  de  regno 
suo  exiret.  pauper  enim  erat.  et  multis  debitis  obligatus.  nec  sin- 
adiutorio  régis  castelle  potuisset  militibus  suis  qui  eum  sequi  debe- 
bant  stipendia  necessaria  largiri?.  Ardentes  igitur  uniuersi  desiderio 
belli  futuri  festinabant  castra  mouere  sed  pictauini  et  alii  ultra 
montanis  nec  habebant  equos  aptos   ad  prelium   nec   iumenta   ad 

a)  Sic.  —  b)  Vbi.  —  c)  sine. 

prieur  de  l'ilôpilal,  Gulierr  Rauiirez;  cnliii,  au  lieu  de  «  GunraUio  lluiz  Girou  »,  il 
mel  «Diego  ruyz  Gyron».  Le  uiaiiuscrit  8817  nomme  «  don  iranbpod'  loledo.  du  telo 
obispo  de  palenca.  Don  Sancho  obpo  de  seguença.  Don  meei.do  obispo  dosma.  Don 
pcdro  bispodavila.  Et  do  lleyno  darango  obispo  d'  lardguna.  t  do  bcringuel  obispo 
d'  barçellona.  El  Ricos  oïïis  d' caslclla  don  dicgo  lopz  del  faro.  e  os  coudes  de  lara. 
Don  aluaro  «  dO  fernâdo  c  do  G»  s  lopo  diaz  c  lloy  diaz  de  los  cameros.  >■  aluar  diaz 
seu  yrmao.  Don  Gonraluo  Royz  giron  e  seus  yrmâos.  t  niuylos  ouTs  nobl's  orïîs 
q  séria  longa  cousa  d'  coutar.  Don  po  ares  maestro  d'  stiago.  Don  guari  arnaldez  p'or 
d'  san  loh'n.  Don  Roy  diaz  maeslre  de  calatraua.  du  goms  ramiis  meestre  do 
temple.  »  Le  manuscrit  iSi;  cite  les  mêmes  personnages  que  le  texte  de  Pidal,  sauf 
le  Rodrigo  évêque  de  Siguenza,  <iu'il  remplace  par  Sancho;  «  Aluar  dias  »  et  «do  gur 
por  de  saut  Jua  w,  qu'il  ajoute  comme  Ocampo.  11  résume  d'ailleurs  lortement,  ne 
nomme  pas  non  plus  les  nobles  aragonais,  mais  donne  un  chilTre  pour  les  contin- 
gents d'Aragon  :  ■<  mill  «  seyscientos  cauall'ros  »  (Ocampo  :  iiiill  z  seleçientos),  et  de 
Navarre  :  «  mill  e  trescientos  cauall'os  >•  (pas  de  chifTre  dans  Ocampo).  —  Il  est  éton- 
nant que  notre  auteur  ne  nous  dise  rien  des  secours  venus  de  Portugal  :  cf.  llcrcu- 
lano,  t.  Il,  p.  iG5  et  suiv. 

21.  5.  Cf.  Luc,  p.  III,  1.  20.  —  Rodrigue,  qui  fait  un  tableau  de  toute  cette 
multitude  vivant  aux  frais  du  roi  (VllI,  /i),  compte  dix  mille  cavaliers  et  cent  mille 
piétons,  et  dit  que  chaque  cavalier  recevait  par  jour  vingt  «  solidi  vsuales  »  («  W 
sueldos  de  los  burgaleses  »,  Chr.  Génér.,  p.  (jg/i*,  1.  i5),  et  chaque  piéton,  cinq,  sans 
compter  qu'on  n'oubliait  ni  les  femmes,  ni  les  enfants,  ni  les  infirmes.  Dans  sa  lettre 
à  Innocent,  Alphonse  note  qu'il  eut  à  fournir  des  chevaux  à  presque  tous  les 
cavaliers.  Les  An.  Toled.  I  parlent  amèrement  de  ce  séjour  des  croisés.  Voir  VEstoria 
de  los  Godas  {Doc.  inéd.,  t.  LWWllI,  p.  i53)  sur  la  façon  dont  on  les  flt  sortir 
de  Tolède.  Noter  que  beaucoup  étaient  arrivés  vers  la  Pentecôte  (i3  mai). 

21.6.  Je  ne  vois  pas  qu'il  soit  parlé  ailleurs  de  cette  concession  du  clergé 
castillan. 

21.  7.  Seul  notre  auteur  parle  du  dénuement  de  Pierre  d'Aragon  et  de  l'argent 
que  lui  avait  ensoyé  Alphonse. 

ji.  8.  11  faut  peut-être  l'aire  exception  pour  les  Provençaux:  cf.  Arnaud:  «Nos 
quippe  cum  comitatu  militum  ac  peditum  salis  honesto  et  bene  armato  de  Lugdu- 
nensis,  et  Vienensis,  et  Valentineiisis  diocœsibus  ...  »  (p.  civ). —  Quant  aux  bêtes 
de  somme,  Rodrigue  dit  qu'il  fallut  en  fournir  soixante  mille  et  plus  avec  leurs 
conducteurs  :  (C  cibariorum  véhicula  cum  cieteris  necessariis  sexaginta  millia 
summas  et  ultra  cum  summariis  erogavit  »  (VIII,  4).  La  Crônica  de  Espaha  (t.  CV 
des  Doc.  inéd.,  p.  ^67)  parle  de  «  nueve  mil  cargas  de  pan  para  talegas  con  nueve 
mil  acémilas  que  le  levasen  ». 


356  BULLETIN    HISPANIQUE 

ferendas  sartinas"  in  expedictione  neccias.  Quibus  omnibus  nobilis 
animus  principis  gloriosi  qui  auruni  uelud  aquam  efFu'ndebat  necc'' 
largissime  donaii. 

32.  Mouentes  igitur  castra  in  nomine  domini  ihû  x\  profecti  sunt 
uersus  malagon.  quod  in  momento  ot  uelud  in  ictu  oculi  rapuerunt 
de  manibus  mauiorum  concidentes  in  frust*'  q'  quot  ibi  reperti 
sunt'.  Dein  apropinquantibus  illis  ad  calatrauam  redita  est  eis  per 
manum  mauri  qui  dicebatur  auencalem  reseruata  uita  uiris  et 
mulieribus  qui  reperti  sunt  ibidem  3.  Ceperunt  tune  beneuentum 
alarcos  et  caracuel^.  Videntes  autem  ultra  montani  qui  solebant 
in  unib'3''  degere  in  temperatis  regionibus  estum  nimium  et 
feruorem  solis^  ceperunt  murmurare  dicentes  quod  ad  bellum  uene- 
ranl  contra  regem  marroquitanum  sicut  eis  fuerat  predicatum.  Quem 
cum  îî  inueniebanl^  uolebant  m°is  "^  omnibus  repatriare.  Quo 
audito  dolebant  omnes  xpiani  de  recessu  quem  parabant.  Erant 
etenim  feie  mile  milites  nobiles  in  armis  strenui  et  polentes.  et  fere 
sexaginta  millia  peditum  armatorumO  quorum  quasi  caputet  princeps 

a)  sarcinas.  —  b)  necessarium.  —  o  frusta,  «mellanl  en  pièces».  — d)  uniucrsum. 
—  e)  modis. 

1-i.  I.  C'est  la  première  opération  signalée  par  Luc  (p.  iii,  1.  2/1),  Rodrifriic 
(VIII,  5),  Alplionse  (p.  xcviii),  Arnaud  (p.  civ),  l'abbé  des  Trois-Fontaines  (p.  cxxi). 
Rodrigue,  Alplionse  et  Arnaud  sont  d'accord  pour  en  attribuer  le  succès  aux  seuls 
ultramontains ;  Luc  et  Ui>driguc,  pour  dire  que  tous  les  défenseurs  furent  mis  en 
pièces.  Arnaud,  qui  donne  plus  de  détails,  dit  qu'on  ne  lit  grâce  qu'au  chef  et  à  ses 
deux  (ils,  et  que  les  autres,  laissés  à  la  merci  des  peregrini,  furent  tous  tués,  «  prirter 
paucos».  —  On  était  jiarti  de  Tolède  «  duodccimo  kalendas  lulii  »,  le  20  juin,  selon 
Rodrigue  (VIII,  5),  uti  mardi,  selon  Arnaud  (le  nj),  ([ui  dit  en  outre  qu'on  arri\a 
à  «  Magalon  )i  le  dimanche,  jour  de  la  Saint-Jean  (2/1).  Le  trajet  est  d'erniron 
100  kilomètres. 

■•■2.  2.  Pour  plus  de  détails  voir  Rodrigue,  qui  nomme  aussi  Avcncaliz  (VIII,  G); 
Alphonse  ([).  xcix),  et  Arnaud  (|).  civ),  qui  signale  la  part  des  \  iennois  dans  celte 
action;  enfin  l'abbé  des  Trois-Fontaincs,  qui  raconte  que  ce  furent  les  «  Franci  «  qui 
prirent  la  i)Iace,  que  le  premier  qui  y  pémUra  fui  un  prêtre;  porteur  de  l'hostie, 
qu'il  reçut  i)lus  de  soixante  llcches  sur  son  aube,  et  que  le  départ  des  «  Franci  »  eut 
pour  cause  les  conditions  obtenues  secrètement  d'Alphonse  par  les  assiégés  (p.  cxx  11). 
La  i)rise  eut  lieu  le  tlimanclie  après  la  .Saint-Paul  (i"  juillet),  selon  Rodrigue  et 
Arnaud,  celui-ci  ajoute  qu'une  i)artie  du  château  avait  été  emportée  la  \cille. 

v.A.  ^.  Luc  ajoute  Pelruin  bonum  (p.  iii,  I.  2')).  Rodrigue  ne  nomme  (pic 
«  Alnn-iiris...  necnon  etcastella  alla  in  vicino  »  (VIII,  (j).  Alphonse  : /l/nrco.'?,  Cnracovia 
Bemivenluni  Petrahona  «  (p.  \i:i\).  L'abbé  des  Trois-Fontaincs  île  même  (mais 
Calnrhimia).  D'après  ers  trois  derniers,  le  dr'[)art  des  ultramontains  aurait  eu  lieu 
auparavant;  de  même,  d'a[)rès  le  texte  d'Ocampo,  (pii  cite  aussi  Aiarcos,  Beurle  et 
Caraciiri  (sic).  Les  An.  Toled.  I  citent  Mnlagou,  Calatrava.  Alarcos,  Benavent,  Piedra- 
huenn,  Cnracui'l  et  h'ernil  (cf.  S  aâ,  note  .">).  Pi(;drabuena  est  à  M)  kilomètres  k  l'ouest 
de  Ciudad  Real;  (^aracuel,  à  20  kilomètres  au  sud-ouest;  Henavenlc,  colline  à 
i.T  kilomètres  à  l'ouest.  Voir  le  Mai>(i  mililar  ilinerurio  de  Espana,  feuilles  O/i  et  65. 

32.  .'i.  C'est  à  la  même  raison  que  Luc  (p.  111,  I.  iO)  et  Alphonse  attribuent  leur 
défcclion  (p.  xci\). 

aa.  5.  Autre  raison,  ou  prétexte,  (jue  seul  indique  notre  auteur. 

aa.  (').  t  Ultra  rjuadraginta  millia  »,  selon  Arnaud  (p. ex);  <■  ad  duo  millia  miiitum 
cum  suis  armigeris,  et  usqiie  ad  decem  millia  serxientium  in  equis,  et  usque  ad 
quinquaginla  millia  servicntium  sine  equis  »,  selon  Alphonse  (p.  \cviii). 


CHRONIQUE   LATINE    DES    ROIS    DE   CASTILLE  867 

erat  archiepiscopus  burdegalenv.  Laboraû  rex  nobilis  cum  rege 
aragoïï  ut  eos  retineret.  sed  istud  niillatenus  effîcere  potuerunt. 
Licet  autem  consultum  fuisset  régi  nobili.  ut  eos  terreret  uerbis 
aspersil"  atque  minis.  quia  sua  consumpserant  et  ab  eo  munera  multa 
receperant.  noluit  tamen  acquiescere  predicto  consilio  sed  in  pace 
permisit  eos  abire.  donans  archiepiscopo  burdegaleiî  munera  et 
expensas.  Tune  autem  exercitus  régis  marroquitani  non  distabat  ab 
exercitu    xanorum  per  dietas  duasS.  Mirabilis  deus  in  sanctis  suis 

a  i  Abella  :  «  forte  asperis  ». 

22.  7.  L'archevêque  de  Bordeaux  était  Guillaume  Amanieu  ou  de  Genève,  ou  de 
Géhennes,  ou  de  Gebennis,  un  prélat  fougueux  qui  ne  craignit  pas  de  se  livrer  à  des 
voies  de  fait  sur  son  collègue  de  Bourges,  à  qui  il  disputait  la  primatie.  Voir  l'Histoire 
de  la  Villede  Bordeaux  {2'  partie,  p.  1x2  de  l'éd.  de  1862),  de  Dom  Devienne,  qui  nous 
dit  aussi  (p.  43)  que  ce  prélat  était  allé  oITrir  ses  services  à  «  Alphonse-le-Petit,  roi  de 
Castille,  qui  était  en  guerre  contre  les  Sarrazins.  La  paix  qui  se  fit  alors  ne  permit 
pas  à  Guillaume  de  donner  des  marques  plus  éclatantes  de  sa  hra\oure  ».  Ce  n'est 
pas  tout  à  fait  ce  que  disent  les  textes  contemporains.  Voir  d'autre  part  llierosme 
Lopes,  L'Église  ...  de  Sainct  André  de  Bourdeaux,  t.  1,  p.  276  de  la  réédition  de  Callen. 
On  y  trouxera  aussi  au  t.  H,  p.  221,  un  passage  dont  s'est  évidemment  inspiré  Dom 
Devienne:  «11  alla  l'an  1212.  au  secours  d'Alphonse,  surnommé  le  Petit  Roy  de 
Castille,  avec  plusieurs  des  plus  nobles  et  des  plus  \aillans  du  Royaume,  contre  les 
Sarrasins.  Mais  ce  Roy  ayant  fait  la  paix  a\ec  ses  ennemis,  sans  la  participation  des 
François,  ils  s'en  retournèrent  mescontents  ».  Celte  paix  est  probablement  l'accord 
secret  par  lequel,  suivant  l'abbé  des  Trois-Fontaines,  Alphonse  aurait  permis  aux 
défenseurs  de  Calatrava  de  s'échapper  à  l'insu  des  Français  (cf.  §  22,  note  2).  L'é\èque 
de  Nantes  accompagna  l'archevêque  de  Bordeaux  dans  sa  retraite  (Alphonse,  p.  cvix  ; 
Albéric,  p.  cxxin).  Le  texte  de  Pidal  (p.  OyC,  1.  3)  attribue  au  diable  la  décision  des 
étrangers.  Le  texte  d'Ocampo,  que  traduit  le  manuscrit  8817  (fol.  21 4'),  est  beaucoup 
plus  réaliste  :  a  Estâdo  en  este  (après  la  prise  de  Calatrava)  vinieron  a  d'zir  al  rey 
q  los  estrageros  cruzados  q  no  lenio  q  comer  estonçe  el  rey  partioles  mill  cargas 
d'  viâda  e  çinqueta  mill  marauedis  en  dineros,  e  co  todo  esto  non  los  pudo 
detener...  »  (même  fond  dans  i3/i7,  fol.  4o6).  Ils  trouvaient  donc  qu'on  ne  leur 
donnait  pas  assez  à  manger;  et  le  texte  de  Pidal  contient  là-dessus  un  aveu  (p.  097, 
1.  4*5)  touchant  «  la  mingua  que  era  de  las  \  iandas,  et  fuera  ante  de  la  couquista 
de  Calatrava  ».  L'étal  sanitaire,  de  plus,  était  mauvais  :  i<  z  por  verdad  assi  lue  que 
enfermaron  muchos  dellos  (les  chrétiens)  s  morieron,  ca  los  prouo  la  tierra  z  el  agua 
de  Guadiana»  (texte  d'Ocampo,  fol.  cccxcvi).  Mais  ((las  génies  de  allende  de  lo» 
puerlos  de  Aspa  »  avaient  aussi  sans  doute  un  autre  grief,  que  le  texte  d'Ocampo 
(fol.  cccxcv"),  confirmant  Albéric,  nous  permet  de  deviner  :  c'est  que  venus  pour 
massacrer  les  infidèles,  on  les  en  empêchât  dès  la  première,  ou  du  moins  dès  la 
seconde  occasion  :  «...  los  moros  (de  Calatrava)  vieronse  mal  trechos  z  sin  remedio, 
e  traxeron  preytesia  que  los  dexassen  salir  con  los  cuerpos  z  q  dari(j  la  villa  z  todo 
lo  al  q  teni(>,  mas  los  Frâceses  cruzados  z  los  otros  estrangeros  non  querie  sinij 
q  los  matasen  .  mas  los  reyes  touieronlo  por  bien  q  los  dexasen  yr  porq  erâ 
cavalleros  z  omes  honrrados:  z  asi  entraron  la  villa  .  s  los  moros  fuenjse  su  via  sin 
aueres  s  sin  armas,  z  don  Diego  lopez  d'Haro  pusoles  en  saluo  »  (à  peu  près 
identique  dans  i347,  et  traduit  dans  8817).  Or  Diego  Lcipez  était  précisément  le  chef 
des  étrangers  (Chr.  gén.,  p.  094'%  1.  40;  texte  d'Ocampo,  fol.  cccxcv')  :  on  comprend 
le  mécontentement  de  ses  subordonnés.  Quelque  chose  d'analogue  s'était  passé  au 
siège  de  Silves  en  1189  (cf.  Herculano,  t.  II,  p.  5i).  —  Dans  tout  cela,  il  y  a  une 
chose  certaine,  c'est  que,  au  rebours  des  carabiniers  d'Offenbach,  nos  méridionaux 
partirent  avant  la  bataille;  mais  fut-ce  par  excès  d'ardeur,  ou  par  suite  des  priva- 
tions endurées?  Pour  ces  deux  causes  peut-être. 

33.  8.  Même  expression  dans  Arnaud  :  «  per  dietas  duas  >>,  mais  depuis  Alarcos. 

Bail,  hispan.  24 


358  BULLETIN    HISPANIQUE 

qui  lani  mirabiliter  prouidit  yspanie  et  precipue  regno  castelle  ut 
recedentibus  ultra  montanis  gloria  uictorie  belli  famosi  yspanis  non 
ultra  montanis  atribueretur.  Illis  autem  abeuntibus  pauci  remanserunt 
cum  thcobaldo  de  blazon  filio  pelri  roderici  de  guzman.  et  cum 
archiepiscopo  narbonensi  qui  oriundus  fuerat  de  cataloniao.  Exhilarati 
autem  xpiani  contra  meditationem  qui  prius  fuerant  contristati'o 
castra  mouerunt  uersus  saluatrâ  uir"  et  castra  metati  suntu.  Sequenti 
uero  die  ibidem  remanserunt.  |  et  de  mandat©  regum  tam  nobiles 
quam  populi  armati  prodierunt  in  campum  quasi  iam  pugnaluri 
contra  hostes.  Terribiles  quidem  erant  castrorum  acies  ordinale, 
nunquam  tôt  et  talia  arma  ferrea  in  hispaniis  uisa  fuerunt.  Exhilarati 
reges  tam  dulci  et  tam  terribili  uisione  concipiunt  ingentes  animos  et 
robur  addide*  cunctorum  animis  et  corporibus  spes  uictorie  prccon- 
tepta' .  Mouentur  castra  céleri  ter  et  ilariter  uersus  portum  de  muradal  '^ 
cui  cum  appropinquarent  pro  certo  comperiunt  partem  exercitus 
régis  marroquitani.  tenere  portum  de  losa.  qua  nulli  prêter  corum 
eorum'  uoluntatem  transire  licebat.  In  cetum  abeunt  proceres  conue- 
niunt  in  temptorium  régis  castelle.  Rex  aragon  et  rex  nauarre  qui 
tune  iam  aderat  licetcum  paucis  militibus  aduenisset'3.  Archiepiscopi 
toletanus  et  narbon  nobilis  uassallus  régis  gloriosi  didacus  lupi 
et  alii  magnâtes  utriusque  regni  deliberaturi  quid  in  tanti'  necessitatc 
agende^^  cet.  Aliis  uisum  est  ut  rediret  ([\$"  in  terram  suam. 
quod  cum  honore  et  gloria  fieri  posset.  ex  quo  montes  nullo  modo 
transire  licebat.  Aliis  uero  uisum  est  qucrendum  esse  alium  portum. 
Sed  régi  glorioso  uisum  est  esse  turpe  referre  pcdem  •'•.  Discedunt  hora 

a)  saluaterram  ubi.  —  b)  addidit.  —  c).  preconccpta.  —  d)  Sic.  —  c)  lauta.  — 
f)  agendum.  —  g)  quilibet. 

32.  9.  llodrigue  (VIII,  G)  et  Alphonse  (p.  \ci\)  disent  bien  que  le  [loitcvin  Tlii 
haut  de  Blazon  par  son  ori;?ine  était  espagnol,  castillan  même,  mais  non  qu'il  était 
lils  de  Pedro  Kodriguez  de  Guzmân  (tué  à  Alarcos,  cf.  S  i3,  note  i).  VEsl.delos 
Gudos  {Doc.  incd.,  t.  LXXXVIII,  p.  i55)  dit  :  «  de  la  una  parte  castcUano  »  ;  Mariana  : 
((de  parte  de  su  madré  ».  Quant  à  Arnaud,  son  origine  catalane,  alTirmée  j)ar  notre 
chronique,  l'est  encore  par  les  Actas  de  Poblet  (cf.  Amal,  Memorias  para  un  dicc.  cril. 
de  los  Escritores  catalanes,  ]i.  i5). 

22.   10.  Je  ne  sais  à  quel  texte  l'auteur  fait  allusion. 

22.  II.  ((  ...  et  primo  die  castrametati  sunt  in  circnitu  Saluirtcrnc  »  (Uodriguc, 
VIII,  G).  La  revue  ({u'on  y  passa  le  lendemain  (dimanche)  est  aussi  mentionnée  par 
IWjdriguc  (ibid.J. 

22.  i:!.  Cf.  S7,  note  G;  S  18,  note  8.  Selon  Luc  (|).  m,  I.  3o),  il  y  aurait  eu  à 
ce  moment  un  premier  engagement.  C'est  prohahlcmcnt  celui  que  Rodrigue  (VIII,  7) 
place  à  l'entrée  du  port  de  Losa,  et  celui  dont  Arnaud  (p.  cv)  attribue  l'heureuse 
issue  aux  Viermois  et  aux  Poitevins;  à  moins  ([u'il  ne  s'agisse  de  la  prise  de  Ferrai 
(Chr.  gén.,  p.  G(j7''-0(j8';  texte  d'Ocampo,  fol.  cccxcvi). 

22.  i3.  «  ...  \ix  fuit  in  exercitu  de  suis  plusquam  ducentis  militibus  comitalus  » 
(Alphonse,  p.  xcix).  11  avait  rejoint  l'armée  à  Alarcos  (cf.  S  24,  note  i).  Voir  Garibay, 
Compendio,  \XIV,  uj. 

22.  I  'i.  llodrigue  et  Alphonse,  (jui  parlent  de  celte  délibération,  ne  nomment  pas 
ceux  (|ui  y  prirent  part,  et  ne  disent  pas  ([ue  quekiues-uus  aient  conseillé  d'aban- 
donner l'entreprise. 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILIE  SÔg 

uesperlina  nllm  consilium  inuenientes  quod  eis  placeret.  sed  dispo- 
nunt  implorare  diuinum  auxilium  iuxta  consilium  régis  iosaphat.  de 
quo  legitur  in  libro  regum.  ciim  ignoramus  quid  agere  debeamus 
hoc  solum  residuum  habemus  ut  occulos  ad  celum  leuemus'S. 

23.  Solus  garsias  ronierus  uir  nobilis  prudens  strenuus  et  fidelis 
uasallus  régis  aragon  reraanserat  cum  rege  glorioso  in  tentorio  suo'. 
tune  misit  deus  quendam  in  spé"  pastoris  qui  régi  glorioso  locutus 
est  secreto  promittens  se  indicaturum  cui  ipse  mandaret  locum  ualde 
propinquum  per  queni  totus  exercitus  sine  periculo  transire  posset 
montes  altissimos.  gauissus  rex  gaudio  magno  iussit  acersiri  dictum 
garsiam  romeruni  et  eidem  que  a  pastore  didicerat  indicauit.  Qui 
statim  exiens  de  mandato  régis  gloriosi  uocatis  militibus  suis  pastore 
duce  peruenit  ad  quendam  locum  sole  iam  occidente.  Vnde  aspexit 
occulis  quod  pastor  promiserat  nobili  régi.  Letus  et  ouans  ad  regem 
gloriosum  reuertilur  cum  festinancia  nuncians  ei  quod  ita  inuenerat 
sicut  pastor  dixerat  supradictus.  Creditur  ab  his  qui  recte  sapiunt. 
quia  non  purus  homo.  sed  aliqua  diuina  uirtus  extitit  qui  in  tanta 
angustia  subuenit  populo  xpiano.  cum  tôt  adaiides  tôt  paslores.  tôt 
fratres  de  calatraua  (fol.  99)  per  loca  illa  sepe  discurrerent.  nullus 
tamen  eorum  de  loco  illo  aliquid  sciret.  nec  idem  pastor  postea 
comparuita.  Siluerunt  illa  nocte.  summo  mane  diuulgatum  est  uerbum 

a)  specie. 

22.  i5.  La  réfûrence  est  fausse  et  la  citation  inexacte  quant  à  la  lettre.  L'auteur 
a  dû  citer  de  mémoire.  Le  passage  est  au  livre  II  des  Paralipomcnes,  ch.  XX,  v.  13  : 
«Cum  ignoremus  quid  agere  debeamus,  hoc  solum  habemus  residui,  ut  oculos 
nostros  dirigamus  ad  le». 

a3.  I.  Seul  notre  auteur  signale  ce  détail. 

23.  2.  Luc  mentionne  sommairement  cet  épisode  du  berger  (p.  m,  1.  34).  De 
même  Rodrigue  (VIII,  7)  et  Alphonse  (p.  c).  —  Albéric  (p.  wiii)  nous  décrit  ce  mys- 
térieux, personnage:  «  corio  cervino,  non  tannato,  vestitus  et  calceatus  ».  «  Paslor 
o  coneiero  »,  chasseur  de  lapins,  dit  VEstoria  de  los  Godos  (Doc.  inéd.,  t.  LXXXVllI, 
p.  i56).  Tous  croient  à  une  intervention  divine.  Mais  notre  auteur  seul  va  jusqu'à 
dire  que  ce  n'était  pas  un  purus  homo;  Albéric  ajoute  un  fait  quasi  miraculeux  : 
l'homme,  avec  une  bêche,  fait  jaillir  de  l'eau  en  abondance.  Flôrez  (Clave  historial, 
p.  253)  fait  allusion  à  la  croyance  que  le  pasteur  n'était  autre  que  San  Isidro  La^ 
brador,  ce  que  Nûnez  de  Castro  n'est  pas  loin  d'affirmer  dans  sa  Cor.  de  los  Serwres... 
(p.  23G).  Le  texte  de  Pidal  manifeste  bien  la  croyance  à  une  intervention  divine 
(p.  698,1.  i5),  mais  celui  d'Ocampo  (fol.  cccxcvi),  auquel  le  manuscrit  i3/i7  (fol.  407"') 
est  encore  ici  presque  identique,  opère  déjà  la  transformation  en  ange  :  «  ...llego 
vn  home  por  la  merçed  de  dios  a  semejança  de  pastor  que  demandaua  por  los  reycs 
a  muy  grand  priessa,  mas  como  quier  que  les  pastor  paresria  :  clerto  angel  mensa- 
gero  de  dios  deuie  ser.  E  estonces  fueron  con  el  ante  los  rcyes,  c  dixoles,  no  estedes 
en  este  cuydado,  ca  yo  vos  mostrare  muy  buen  logar  por  donde  passedes  syn  peligro 
d'ios  moros,  ca  muchas  vegadas  andude  por  aqui  cO  mio  ganado,  e  yo  vos  lleuare 
por  logar  onde  ayades  buenas  yeruas  s  muy  buenas  aguas  frias  e  sanas.  »  Dans  le 
manuscrit  13/47,  ^^  ®^nt  les  rois  qui  viennent  à  lui  :  ((  E  los  reyes  qundo  esto  oyerô 
fuerô  pa  el...  »  Arnaud  ne  parle  pas  du  pasteur  et  dit  simplement  qu'on  lit  «quasi 
circuitum  per  aliam  partem  »  p.  (cv).  —  De  même  les  An.  Toled.  I  :  «  derrompieron 
la  sierra, e  pasaron  ».  Selon  Rodrigue,  Diego  Lûpez  de  Haro  aurait  accompagné  Garci 
Romero  (ou  Garcia  Romeu)  dans  cette  exploration  (Mil,  8). 


3Go  BULLETIN    HISPANIQUE 

istud  in  castris.  replecti  sunt  omnes  gaudio  magno  et  mouentes 
castra,  transierunt  eadem  die  .s.  die  sabbati^  prerupta  montium  et 
concaua  iialium  et  descendentes  in  planicieni  castrametati  sunt  ex 
opposite  castrorum  régis  marroquitani.  Videntes  autem  mauri  castra 
xpianoruni  stupore  repleti  sunt  pariter  et  timoré^.  Mane  sequenti  die 
doniinice  mauri  prodeunt  in  canipum  pugnare  parati.  sed  xpiani 
quieuerunt  illa  die  defendentes  tentoria  ab  incursu  sarracenorum. 
Mauri  etenim  in  superbia  elati  c'cùq3'^  précipites  ferebanlur  usque 
ad  tentoria  xpianorum  peruenientes.  sed  intelligentes  quod  xpiani 
pugnare  nolebant  illa  die  reuersi  sunt  cum  rege  suo  tanquam 
uictores  in  locum  castrorum  suorumS.  Aurora  lucis  rutilât  precedens 
preclarissimam  et  felicissimam  diem.  qi''  quid  uel  obprobri  contra- 
xerat  rex  gloriosus  et  regnum  eius  in  bello  de  alarcos  purgandum 
erat  per  uirtutem  dni  nostri  ili'u.  xpi.  et  uictoriosissime  crucis.  In 
qua  blasfemauerat  ore  poluto  rex  supradictus  marroquitanus. 
Audito  namque  quod  rex  gloriosus  miserat  archiepiscopum  tole- 
tanum  et  legatos  suos  in  franciam  et  in  alias  regiones  x'anorum 
inuitare  populum  catolice  fidei  sectatorem  ad  bellum  futurum  fertur 
dixisse  rex  marroquitanus  quia  ipse  potens  erat  bellare  contra 
oinnes  qui  signiim  crucis  adorabant^.  Dïïe  ih'u.  xpe.  tu  deiecisti 
eum  dum  aleuaretur.  nam  taies  tolluntur  in  altum  effrenata  superbia 
ut  lapsu  grauiore  ruant. 

2/1.  Surgunt   igitur    xpiani   post    mediam    noctem  i  in    qua    hora 

aicircuinquaque.  —  b)  quasi?  pour  qua  si  (quid  labis  contraxerat). 

a3.  3.  De  même  Rodrigue  (VII[,  8),  Alphonse  (p.  c),  Arnaud  (p.  cv)  et  Albéric 
p.  cxxiii),  qui  donne  un  quantième  erroné  :  «  decimo  tertio  Kalendas  Augusti  » 
à  corriger  en  «  XVIll  kalendas  Augusti  »(?)  pour  le  mettre  d'accord  avec  Alplionse  et 
Rodrigue, ou  en  <(  \1X  K.  A.  »(?)  pour  le  mettre  d'accord  avec  Arnaud  et  les  An.  Toled.  I 
(cf.  S  -ifi,  n.  1).  <(  E  et  sabado  d'maùana  particron  de  Ferrai,  t  dexaru  el  casticllo 
derribado  o  mouieron  por  aquel  logar  por  do  fueron  los  ricos  omes,  que  dizc  agora 
la  Senda  del  emperador  »  (texte  d'Ocampo,  fol.  cccxcvr). 

a3.  'i.  Luc  (p.  III,  1.  35)  dit  que,  lorsqu'ils  aperçurent  l'armée  chrcticnnc,  les 
Maures,  profitant  de  la  direction  du  vent,  allumèrent  de  grands  feux  de  broussailles 
pour  qu'elle  fût  incommodée  par  la  fumée,  mais  que  le  vent  tourna  et  poussa  la 
fumée  de  leur  côté.  Selon  Rodrigue  (VIII,  8),  ils  se  mirent  dès  ce  jour-là  (samedi)  en 
bataille,  «  ab  hora  sexta  usque  ad  vcsperum  ».  Alphonse  dit  aussi  qu'il  y  eut  «quaedam 
praeludia  belli  in  modum  torneamenti  »,  mais  «  circa  serotinam  horam  ». 

23.  5.  Cf.  Luc  (p.  III,  1.  3()),  Rodrigue,  qui  donne  plus  de  détails  (VIII,  8), 
Alphonse  (p.  c),  Arnaud,  qui  parle  ici  d'une  sorte  de  tournoi  «non  more  Francorum 
sed...  cum  lanceis,  sivo  cannis»  (p.  cv).  —  Les  chrétiens  semblent  s'être  souvenus 
alors  de  la  tactique  des  Maures  à  Alarcos  (<,  i3),  et  avoir  voulu  à  leur  tour  les  fatiguer 
par  une  longue  attente, choisissant  leur  heure.  Noter  que  c'est  vers  minuit  (S  î.'))qu'ils 
se  lèveront  pour  la  bataille;  c'est  l'heure  où  les  Maures  s'étaient  préparés  pour 
l'attaque  à  Alarcos. 

33.  6.  Luc  rapporte  la  même  chose,  p.  11 1,  1.  17. 

■j'x.  I.  De  mémo  Rodrigue  (VIII,  9).  La  bataille  eut  lieu  le  lundi,  d'après  tous  les 
témoignages;  «  decimo  sexto  Kalendas  Augusti  »,  d<inc  17  juillet,  d'après  Rodrigue 
(VIII,  13  1,  la  Criinicit  de  IJsj).  (Doc.  inéd.,  t.  CV,  p.  ,'183)  et  ['Est.  de  los  Gudos  (hoc.  inéd., 
\.  LXXX  VIII,  p.  i()i).  La  Chronique  générale  (p.  70.^'',  I.  5)  précise  «  XVI  dias  antesde 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILI.E 


36i 


xps.  quem  collebant  uictor  surrexit  a  morte,  et  auditis  mis- 
sarum  solëpniis  recreati  uiuificis  sacramentis  corporis  et  sanguinis 
dei  nostri  ih'u.  xpi  munientes  se  signe  crucis  sumunt  celeriter 
arma  bellica  et  gaudentes  currunt  ad  prelium  tanquam  ad  epulas  3 
inuictati.  non  illos  retardant  fragosa  et  saxosa  loca.  non  concaua 
uallium  neque  prerupta  montium,  feruntur  in  hostem  parati  mori 
uel  uincere.  In  prima  acie  ex  parte  gloriosi  régis  erat  nobilis  uassallus 
eiu«  fîdelis  et  strenuus  didacus  lupi.  et  cum  eo  sancius  fernandi  filius 
fernandi  régis  légion  et  urrace  sororis  eius3  et  lupus  didaci  filius  eius 

las  Kalendas  del  mes  de  Agosto  esto  es  XVI  dias  por  andardel  mes  de  Julio»,  manière 
de  compter  qui  exclut  le  jour  même  des  calendes  (on  la  retrouve  ailleurs,  p.  GgAt», 
1.  Ai;  p.  708a,  1.  22),  et  qui  donne  le  i6  juillet.  C'est  la  véritable  date,  puisque 
le  17  tomba  un  mardi.  Arnaud,  d'accord  avec  les  Anales  Toledanos  I,  dit  en  effet 
«  XVIi  Kal.  Augusti.  II.  feria  ante  MagdalentR»  (le  lundi  avant  la  Sainte-Madeleine), 
donc  certainement  le  16  juillet,  date  adoptée  par  Mariana  (XI,  24),  Flôrez  {Esp- 
sagr.,  t.  XXIII,  p.  324),  Lafuente  (t.  III,  p.  124),  ainsi  que  par  la  tradition,  qui 
fête  ce  jour-là  le  triomphe  de  la  Croix  sur  les  infidèles.  Voici  un  tableau  qui  per- 
mettra de  se  rendre  compte  des  coïncidences  et  des  divergences  entre  Rodrigue, 
Arnaud  et  notre  Chronique  touchant  les  dates  des  opérations  depuis  le  3o  juin,  en 
retranchant  une  unité  aux  quantièmes  qui  résultent  du  texte  de  Rodrigue  : 


Rodrigue,    VIII,   6-7   (et 
Chr.  Géh.,  s  ioi5-ioi6). 


Arnaud. 


Chr.  lat.  dbs  rois  de 
Castille. 


Prise  partielle  de  Cala- 
trava  (samedi  30  juin). 
Comme  Rodrigue. 

Retraite  des  ultra-mon- 
tains  (mardi  3  juillet). 


Reddition  de  Calatrava 
(dimanche  1"  juillet). 

Retraite  des  ultra-mon- 
tains. 

Alarcos,  arrivée  du  roi 
de  Navarre. 

Salvatierra  (samedi  7). 

Revue  (dimanche  8j. 
—     (lundi  9). 

Fresneda, 

Autre  Fresneda. 

Le  Guadalfaiar,  au  pied 
du  Muradal  (jeudi  12). 

Arrivée  au  sommet  et 
prise  de  Ferrai  (rendredJ/3) 

Passage  avec  le  pasteur 
(samedi  14). 

Attente  (dimanche  lô). 

Bataille  (lundi  16). 

Les  divergences  entre  Rodrigue  et  Arnaud  peuvent  s'expliquer  par  le  fait  que  les 
ultra-montains  marchèrent  à  part. 

24.  2,  Même  expression  dans  Luc  à  propos  des  Franci  &.  Gallœci:  t  ad  praelium 
tanquam  ad  epulas  properabant  »  (p.  1 10,  1.  55). 

24.  3.  De  même  Luc  (p.  m,  1.  4i).  Rodrigue,  qui  indique  les  chefs  et  la  compo- 
sition des  quatre  actes  de  l'armée  d'.\lphonse,  mentionne  ici  Diego  Lc)pez,et  plus  loin 
son  fils,  mais  non  Sancho  Fernândez  (VIII,  9).  Ce  dernier  était  fils  de  Fernando  II  de 
Léon  et  d'L'rraca  Lôpez  de  Haro,  sœur  de  Diego  Lôpez.  Mepote,  dans  Luc,  doit  donc 
être  ici  traduit  par  «  neveu  ».  —  On  a  vu,  au  S  i3,  note  3,  quelle  altitude  le  texte 
d'Ocampo  attribue   à   Diego    Lôpez    lors   d'Alarcos.     Le    même   texte    apporte    ici 


Départ  de  Calatrava  (di- 
manche) et  arrivée  à  Alarcos 
en  même  temps  que  le  roi 
de  Navarre. 

«  Deinde  per  dictas  duas 
ad  radiées  montes  qui  di- 
citur  Portus  de  Muradal.  » 


Détour  (samedi  li). 
Comme  Rodrigue. 


Départ  des   ultra-mon- 
tains. 


Salvatierra. 

Revue  le  lendemain. 


«  Versus  portum  de  Mu- 
radal. » 


Comme  Rodrigue. 


363  BULLETIN    HISPANIQUE 

et  alii  consanguinei  ipsius  et  amici  et  uassalli.  Ex  parle  uero  régis 
aragon  aciem  primam  regebat.  Garsias  romerus.  uir  nobilis  strenuus 
et  fidelis  et  cum  eo  erant  alii  qm  pl'es"  aragonenses  nobiles 
et  potentes''.  Alie  uero  acies  disposite  sunt  dextra  leuaque  sicul  ordo 
bellorum  exigit.  Vltiinas  uero  acies  reges  |  dirigebant.  uterque  suam 
separatam  ab  altéra.  Rex  auteni  nauarre  in  parte  sua  tenebal  aciem. 
armis  et   uiris   nobiliter   instructis^.   et   sic  q'cq5''  coram  facie  sua 

a)  cf.  §  13.  —  b)  qiiicumque. 

(fol.  cccxcvi')  un  épilogue  à  la  fois  brutal  et  glorieux  :  «  E  estonçe  se  le  paro  Lope 
Diaz  de  Faro  delante  c  dixo  a  don  Diego  lopez  su  padre,  pido  vos  por  merçed  como 
a  padre  z  senor  que  pues  el  rey  vos  dio  la  delanlera  que  en  guisa  fagades  como  me 
non  llamen  Ojo  de  Iraydor;  e  mienbre  se  vos  el  buen  prez  que  perdistes  enla  de 
Alarcos  :  s  por  Dios  quered  lo  oy  cobrar,  ca  oy  en  este  dia  podredes  fazer  emienda 
a  dios  si  en  algii  yerro  le  caystes.  E  estnces  don  Diego  boluiose  contra  el  muy 
sanudo  e  dixol,  Uamar  vos  hâ  fijo  d'  puta  mas  nO  fijo  de  traydor,  ca  en  tal  guisa  fare 
yo  con  la  merçed  de  dios.  mas  yo  vere  oy  en  q"l  guisa  aguardaredes  a  vuestro  padre 
E  seùor  en  este  logar.  E  estnçes  fue  a  el  Lope  diez  z  besol  la  mano  z  dixol  senor  padre 
vos  seredes  aguardado  d'mi  como  nunca  fue  padre  de  lijo  :  z  enel  nonbre  de  dios 
entremos  en  labatalla  quâdo  qiierades.  »  Il  y  a  là,  semble-t-il,  un  thème épitiue.  —  Le 
même  texte  continueen  nommant  quelques-uns  des  compagnons  de  Diego  :  «  Don  Diego 
lopez  lomo  consigo  quinientos  caualleros  muy  bien  guisados  c  a  sus  fijos  Lope  diaz 
Pero  diaz  s  a  su  cormano  Vnigo  de  Mrdoza  z  a  sus  sobrinos  Sancho  Ferrâcfez  e  Martin 
muiloz  E  era  su  alferez  don  Pero  arias  de  ïoledo  que  touo  aquel  dia  su  pendu,  z  era 
con  el  côcejo  de  Madrid.  »  Les  deux  neveux  sont  appelés,  an  fol.  cccxcvi,  Sancho 
Ferrandez  de  Cafiamero  (cf.  §  S't,  n.  2)  et  Martin  Niifiez  de  Finojosa.  Tout  cela  se 
retrouve  à  peu  près  identique  dans  le  manuscrit  1.^/17  et  traduit  dans  le  8817;  mais  le 
l'-i'i'j  porte  :«...e  su  lijo  lope  diaz,  z  pero  diaz  su  hr»  z  don  ynigo  de  mendoça  z  sus  sobri- 
nos c  min  munos,  z  sancho  fens...  »  Le  manuscrit  x-l-C  a  aussi  cette  histoire  (fol.  12/1). 

24.  It.  De  même  Hodrigue  (\  III,  ij),  qui  indique  en  outre  la  composition  des 
quatre  acies  du  roi  d'Aragon. 

■i'i.  5.  Cf.  Hodrigue  «a  dextris  Régis  nol)ilis  procedebat».  Les  An.  Tuled.  1  indi- 
quent ainsi  l'ordre  de  marche  :  «  El  Uey  de  Navarra  era  la  costaiiera  diestra,  e  el  Rey 
de  Aragon  era  la  siniestra,  e  el  Rey  de  (Pastilla  ténia  la  zaga  con  todas  las  otras 
gientes  del  niundo».  Le  texte  de  PidaL  nomme  un  certain  nombre  de  ceux  (jui 
prirent  part  au  combat  (p.  700),  mais  le  texte  d'Ocampo,  à  peu  près  le  même  que 
celui  du  manuscrit  i3/)7,  en  nonune  beaucoup  plus,  en  dehors  des  compagnons  de 
Diego  Lôpez  (fol.  cccxcvii):  «  z  la  vna  coslanera  dio  el  rey  a  Ruy  Diaz  delos  cameros 
z  a  su  liermano  Aluar  diaz  z  cran  con  ellos  Gomoz  Perez  el  esturiano  z  don  (iarcia 
Ordonez  z  Juan  Gonzalez  de  vzcro  z  don  Gonçalo  (Jomez  (i3/i7,  au  lieu  de  ces  deux 
derniers:  don  (iil  Cornes)  z  los  conçejos  de  Soria  z  de  Almaçan  c  de  Atiença  z  de  san 
Esteuan  de  gormaz  (13/17  ^  l>erlanga,  au  lieu  de  ((  degormaz  »)  z  de  Ayllon  z  de  Médina 
çoli.  c  enla  otra  coslanera  yua  el  (1347  :  Ë  dio  el  Rey  la  otra  coslanera  al)  conde  don 
Gonçalo  z  eran  conel  las  ordenes  de  Santiago  z  de  san  Juan  z  de  Calatraua  (13/17: 
Akùlara)  z  la  orden  del  Tcnple  z  los  conçejos  de  Cuenca  z  de  Iluete  z  de  Alarcon 
z  todos  los  otros  conçejos  de  la  frotera  fasta  en  Toledo.  E  yua  el  rey  don  Alfonso  enla 
postrimera  haz  :  1.  yua  conel  cl  arçobispo  de  Toledo  z  don  Aluar  nunez  de  Lara  su 
alfere/  que  leuaua  la  su  sena,  que  gano  aquel  dia  buen  prez  conella,  z  el  coude  don 
Ferrando  z  don  (ionçalo  ruyz  giron  z  sus  liermanos  Nuno  royz  z  Rodrigo  rodriguez 
t  pero  ruyz  z  Aluar  Ruyz  z  don  Gil  mairrique  i3'i7  :  mirrique)  t  don  Gomcz  malrri- 
que  z  don  Alfonso  tellez  de  Mcneses  z  Ferra  Garcia  z  lluy  Garcia  todos  très  liermanos 
(i347  omet  Mencses...  liermanos  el  ajoute  z  don  tji"  lells)  z  don  Rodrigo  perez  de  Auila 
(i^lfj:  de  villalobos)  z  Guillen  gynes,  t  Gonçalo  yanez  (jue  fue  despucs  mestre  de 
Calatraua  z  do  Guille  perez  (omis  dans  1347)  t  Nuno  perez  d'  (luzmâ  z  Tyballe  de 
blasco  :  z  otros  muchos  ricos  ornes  q  aqui  non  son  conlados  enesta  parte,  c  los 
cOçejos  z  los  caualleros  d'  Toledo  z  de  Médina  (13/17:  e  los  caualleros  de  toledo  z  los 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  363 

gradiebantur  nec  reuertebantur  cum  nmbularent.  In  primis  acies" 
dispoîtiG  maures  inueniunt  paratos  ad  preliiim?.  Congrediuntur 
pugnatur  utrinque  cominus  lanceis  censibus''  et  clauis  nec  erat 
locus  sagittariis.  Insistant  xpiani  resistunt  mauri  fit  fragor  et  tumul- 
tus  amiorum.  Stat  bellum  neutri  uincunlur  licet  hii  quandoque 
procellant  hostes  quandoque»  ab  hostibus  repellantur.  Conclamatuni 
fuit  aliquando  a  quibusdam  perditis  xpianis  retrocedentibus  et  fugien- 
tibus  quod  succubuerant  xpiani 8.  Audito  feriali'  clamore  rex  castelle 
gloriosus  et  nobilis  qui  paratus  erat  magis  mori  quam  uincio  precepit 
illiqui  uexillum  eiusio  anteipsum  gestabatut  urgeret  equum  calcaribus 

a)  aciebus.  —  b)  ensibus.  —  c)  ferait. 

concejos  de  médina)  del  câpo  e  de  Ualladolid  de  Olmedo,  z  de  Areualo,  z  d'  toda  esa 
tierra  (iS!*'  :  areualo,  z  coca,  r.  de  cuellar  e  de  palença  z  de  bejar).  E  el  rey  dô  Sâclio 
de  \auarra  yua  delà  diestra  (iS^y  :  otra  siniestra)  parte,  z  cO  el  yuan  sus  ricos  ornes 
don  Almoraui,  c  don  pero  martinez  de  lerte,  z  dr>  Pero  Garcia  de  primiz,  z  don  Gomez 
garcia  dorgociello  (18/17,  ''"  'i^^  de  ((Almoraui...  dorgocicllo  »  :  p  ms  de  chinchel, 
E  dô  almenrriq,  z  po  g"ia  de  pernis  C?j  z  gonû  gta  di  agonrillo)  su  alferez  que  tcnie 
la  su  sena  z  con  el  los  côcejos  de  Segouia  z  de  Auila.  E  el  rey  don  Pedro  de  Aragon 
ouo  la  siniestra  parte  (18^7  :  yua  delà  otra  pte  diestra),  z  dio  la  su  delantera  a  don 
Garcia  romero  (13/17:  Ramiro);  z  de  la  vna  costanera  yua  don  Ximon  coroiiel  z  don 
Aznar  pardo.  z  enla  otra  costanera  yua  d(")  Artal  fo(-ez  (1847:  union  defoçes),  z  <lô  Pero 
maça  de  corella  (1347:  çarella).  z  ("-la  postrimera  haz  yua  ese  rey  cô  estos  ricos  ornes, 
don  Sancho  z  Nuno  sanchez  que  fue  aquel  dia  cauallero  nouel  (1847  supprime  ((  que 
nouai ...»)  z  el  conde  de  Ampurias  (1847  :  fipar)  z  don  Guillen  d'  Cardona  con  gran 
compana  de  fijos  z  de  parientes  z  don  Giiielk-  de  curuera  z  el  conde  de  Urgel  z  de  sant 
Pedro  de  la  barca  c  don  Gêtol  de  Astarad,  z  don  Guillen  de  caberta,  c  don  Miguel  de 
Inaysa  que  era  alferez  del  rey  que  touo  su  sena  z  don  Ximon  de  Aeuar  z  dû  Rodrigo 
de  Liçena  (1847,  au  ''^"^  ^^  ((  con  gran  compana...  Li(,'ena»):  z  el  conde  durgel,  z  don 
gilen  destrad,  z  don  gralte  de  cabrera,  z  don  guillen  de  lixa  q  era  mayordorno  del  Bey). 

Le  manuscrit  8817  (fol.  ai  G)  suit  le  texte  d'(Jcampo,  avec  des  variantes  :  u  alma(;an 
z  bellâga  z  santo  esteuoo  r.  médina  i.ele  z  aelbj  —  aluar/)S  de  lara  —  au  lieu  de  «  me- 
neses...  hermanos  »  :  c  dô  g"  telles  z  f  ga  z  abril  g",  z  Roy  g"  ts  yrmàos  —  vila  lobos,  au 
lieu  de  «  auila  »  —  gofns  au  lieu  de  «  gynes  »  —  Et  conçelos  ode  Médina  del  câpo.  z  ode 
valedolid'.  z  o  de  olonedo.  z  od'  cota,  z  o  de  lollar.  z  ode  plazença  z  o  de  beiar  —  Dom 
almeriq  z  dom  p°  nuh:  de  hecha  z  po  g'^  de  peynes  z  gorns  g",  de  angonziello  —  Xemen 
coronel.  z  dalo  de  fouzes  z  dô  arnal  pardo  —  «arlal  foçez»  manque  —  nouel  z  o  conde 
de  Pytôs  z  dom  g'IIem  de  Cordoua  —  dom  g'ilem  d'  r'ueyra  —  urgel  de  satâs  dl'a 
barca  —  g^ral  de  collera,  z  g'ilem.  miguel  de  leysa  —  xemen  ajunar  —  g'ilem  de 
çullêna  ». 

s!i.  G.  «  Ceux  qiii  étaient  dans  les  premières  lignes  ». 

24.  7.  Rodrigue  (V11I,())  explique  la  composition  et  la  disposition  de  l'armée  maure. 

a4.  8.  Selon  Rodrigue,  quelques-uns,  ((  non  tamen  de  magnis  »  (VIII,  10),  et  selon 
Arnaud,  d'abord  les  Serani  (serranos,  montagnards),  puis  tous  ceux  qui  étaient  de- 
vant la  dernière  ligne,  «  prœter  quosdam  nobiles  Hispanos  et  ultramontanos  »  firent 
mine  de  fuir.  II  y  a  dans  Almella  un  chapitre  curieux  au  sujet  des  gens  de  Madrid  et 
de  Médina  (lib.  VI,  tit.  V.  cap.  III)  ;  bien  qu'il  y  soit  question  de  Rodrigue  de  Tolède, 
il  n'est  emprunté  ni  au  texte  latin  de  celui-ci,  ni  aux  traductions  publiées  dans  les 
Documentas  inéditos  (t.  LXXXVIII  et  CV). 

24.  9.  Rodrigue  relate  ici  une  scène  sublime  qui  rappelle  la  Chanson  de  Roland  : 
à  deux  reprises,  le  roi  désespéré  lui  dit  qu'il  va  falloir  mourir  là,  et  l'archevêque  le 
réconforte. 

a4.  10.  Rodrigue  et  Alphonse  (p.  c)  disent  que  l'étendard  royal  portait  l'image 
de  la  Vierge.  D'après  Albéric  (p.  cxxiii),  cet  étendard  avait  été  envoyé  à  Alphonse 
par  la  Vierge  de  Rocam.adour. 


364  BULLETIN    HISPANIQUE 

et  properatet"  concito  montem  ubi  erat  impelus  belli  conscendere  quod 
et  statim  factum  est.  Quo  cum  ascenderunt  xpiani  uidentes  mauri  sibi 
quasi  nouas  acies  Iminere  cedunt  uirtute  dni  nostri  ih'u  \pi. 
superati.  Rex  autem  marroquitanus  qui  sedebat  in  medio  suorum 
stipatus  satellitibus  electis  ad  pugnain  surrexit.  equuni  uel  equam  " 
ascendit  terga  fuge  dédit  ceduntur  sui  ruuntque  cateruatim  et  locus 
castrorum  et  tentoria  maurorum  fîunt  sepulcra  occisorum.  Qui 
euaserunt  de  bello  dispersi  errabant  in  montibus  tanquani  oues  non 
habentes  pastorem  ubicumque  inueniebantur  trucidabantur. 

20.  Quot  millia  maurorum  ceciderunt  in  die  illa  et  in  profundum 
inferni  descenderunt.  quis  numerare  queatO  Ex  parte  uero  x'ano- 
rum  paucissimi  mortui  sunt  in  die  illa 2.  Cantare  potuerunt  xpiani. 
cum  psalmista  \  Dnus  dnus  deus  meus  qui  docet  manus  meas  ad 
bellum  et  digitos  meos  ad  prelium.  Mîa''  mea  et  refugium  meum 
susceptor  meus  et  liberator  meus  z  c.  Saciati  sanguinis  maurorum 
effusione  xpiani  et  lassati  armorum  pondère  et  estu  et  siti  nimia 
aduesperacente  iam  die  reuertuntur  in  castra  maurorum.  et  ibidem 
nocte  illa  quieuerunt  uir'  uictualia  quibus  indigebant  ad  habundan- 
ciam  repererunt^.  Consequenter  autem  mouentes  castra  processerunt 

a)  properaret.  —  b)  Misericordia.  —  c)  ubi. 

24.  II.  Hésitation  assez  plaisante.  Rodrigue  dit  :  «  iumento  varii  coloris  insi- 
dens  »  (VIll,  10);  la  Ghr,  génér.  :  «  en  una  beslia  de  muchos  colores  »  (p.  702*,  1.  4a). 
Selon  Mariana  (X.1,  24),  c'était  un  mulet;  et  selon  Julian  del  Castillo  (Hist.  dt-  los 
Heyes  Godos,  1G34,  p.  243),  une  jument,  yegua,  ce  qui  est  l'opinion  de  Lafuente 
(t.  IJI,  p.  122). 

25.  I.  Rodrigue:  c  circiter  bis  centum  millia»  (VIll,  10);  Alphonse  :  «  centum 
millia  armalorum  et  amplius  »  (p.  ci);  Arnaud  :  «  post  bellum  sunt  interfeeti 
sexaginta  millia...»  (p.  cvi,  passage  peu  clair);  Albéric  :  u centum  millia  »  (p.  cxxiii). 

25.  2.  Rodrigue  :  «vix  viginli  quinque» (VIII,  10);  Alphonse:  «  vix  viginti  quinque 
aut  triginta  »  (p.  ci);  .\rnaud  :  (i  non...  quinquaginta  »  (p.cvi);  Albéric  :  «  jam  plures 
ceciderant,  sed  post  demonstrationem  vexilli  vix  triginta...  »  (p.  \xiii).  Lafuente 
(t.  III,  p.  128)  interprète  Rodrigue  en  disant  20,000;  mais  il  est  obligé  de  recon- 
naître que  les  autres  textes  ne  se  prêtent  pas  à  semblable  correction.  Almella  (lib.  I, 
tit.  IV,  cap  VII)  marque  CL;  la  Chr.  générale,  comme  Rodrigue  (p.  70."?,  I.  12);  mais 
le  texte  d'Ocampo,  k  nô  mas  de  ciento  e  quinze  »  ffol.  cccxcvnr). 

25.  .'?.  Psaume  GXLIII,  v.  1-2.  Le  texte  est  cité  de  mémoire,  car  les  mots  bellum  et 
prelium  sont  intervertis  (du  moins  si  l'on  s'en  réfère  au  texte  de  la  \  ulgate). 

20.  4-  Il  est  étonnant  que,  non  plus  que  Rodrigue  (qui  le  fait,  il  est  vrai,  implici- 
tement, VIII,  7),  Alphonse  et  Albéric,  notre  auteur  ne  nomme  le  lieu  de  la  bataille. 
Las  Navas  de  Tolosa,  comme  fout  Luc  (p.  m,  I.  48)  et  Arnaud  (p.  cvii),  qui  voit  dans 
ce  nom  un  mauvais  augure  pour  les  Toulousains  hérétiques.  La  Chronique  de  San 
Juan  de  la  Peria  (p.  i4i),  qui  intervertit  cette  bataille  et  la  prise  d'Ubeda,  dit  «  ad 
locum  dictuin  saltus  Tholosic,  —  el  liigar  clamado  Lauds  de  Tolosa  ».  Quant  à  la 
Chronique  (îénérale,  elle  la  désigne  sous  le  nom  de  batalla  de  Hubeda,  tout  en  nom- 
mant l'endroit  «  Las  Navas  que  di/en  de  Tolosa  )>.  Las  Navas  de  Tolosa  se  trouvent  près 
de  Santa  Elena,  première  station  du  chemin  de  fer  au  sortir  du  défilé  de  Despeùape- 
rros.  C'est  sur  le  plateau  de  Santa  Kleiia  que  les  chrétiens  débouchèrent,  après  avoir 
passé  par  le  Puerto  del  Rey  ou  del  Emperador;  et  ils  trouvèrent  devant  eux  les 
Arabes  campés  dans  la  plaine  de  las  Navas  (Gômez  .\rteche.  Geografia  historico-militar, 
p.  G25).  Le  Puerto  del  Rey  est  le  passage  du  chemin  muletier  de  Viso  à  La  Carolina 
(id.,  p.  628).  Pisa  (Descripciôn'dc  Toledo,  fol.  177),  écrit  que  le  lieu  dit  Navas  de  Tolosa 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTII.LE  365 

in  antea  et  inuenientes  nobile  castrum.  s.  bilche  uacuum  et  dere- 
lictum  intrauerunt  et  munieriint  ilhid.  Vanos  insuper  retinuerunt 
et  tolosa  et  ferrât  ».  Dein  peruenientes  ad  ubedam  obsederunl  illam. 
uir"  inuenerunt  infinitam  multitudidem  maurorum  conclusam. 
Desertis  etenim  aiiis  ciuitatibus  sicut  baecia  quam  inuenerunt 
uacuamS  (fol.  loo)  et  aliis  uillis  uicinis  confluxerant  omnes  ad  ubedam. 
tamquam  ad  locum  munitiorem  et  eorum  defensioni  aptiorem. 
Sed  ipsa  multitudo  conclusa  sibi  grauis  erat  et  honerosa  et  pre 
nimia  pressura  fere  moriebanlur.  Videntes  autem  mauri  potenciarn 
xpianorum  qui  aduersus  eos  iam  preualebant  ipsos  uiriliter  expu- 
gnando  intelligentes  et  se  destitutos  omni  consilio  et  auxilio  quum 
rex  marroquitanus?  aufugerat  in  yspalin  nn''  et  transfertare'  dis- 
ponebat.  tradiderunt  se  in  manus  régis  gloriosi  et  régis  arago- 
num  tali  paclo  û''  conseruatas*  sibi  uita  preda  fièrent  hostibus  tam 
ipsi  quam  omnia  sua  8.  Sicut  referebant  aliqui  de  mauris  ipsis  qui 
tune  in  eadem  uilla  capti  fuerunt.  quibus  nns'^  inclusorum  notus 
esse  credebatur.  fuerunt  ibi  capti  fere  centum  millia  sarracenorum 
paruulis  et  mulieribus  cOnûatis^'g.  Omnia  mobilia  que  preciosa 
fuerunt  inuenta  data  fuerunt  régi  aragon  et  illis  qui  uenerant  cum  ipso 
ad  bellum  'o.  De  ma  ''  mauris  et  multos  secum  duxit  captiuos.  Dispersa 

aj  ubi.  —  bj  necnoii.  —  ci  Sic.  —  dj  ut.  —  ey  Sic.  —  fj  numerus.—  g)  connumeralis.— 
h)  Sic  (fin  de  ligne;. 

était  aussi  appelé  -\avas  de  la  Condesa.  Voir  le  récit  qu'il  fait  de  la  bataille,  en  parti- 
culier sur  les  trophées  conservés  à  Tolède  (fol.  i8o).  Le  Livro  das  Linhagens  do  conde 
D.  Pedro  dit,  p.  256  :  «  A  batalha  de  Muradal  ».  On  sait  que,  pour  les  Arabes,  ce  fut  la 
bataille  d'Alacab. 

25.  5.  De  même  Rodrigue  (VIII,  12);  Alphonse,  moins  Ferrai,  dont  il  mentionne 
la  première  prise  antérieurement  (p.  xcix  et  ci);  Luc  (p.  ni,  1.  i8),  moins  Tolosa.  — 
Les  An.  Toled.  I  :  Bahos,  Tolosa,  Ferrât,  Bilch.  Arnaud  seulement  Bilche  (p.  cvii) 
Rodrigue  et  la  Chron.  génér.  écrivent  Ferrai  =  t  Castro  Ferrai  à  la  parte  oriental 
de  las  Navas  »  (Lafuente,  t.  111,  p.  /ii6).  —  Bilche  =  Vilches;  Vanos  =  Banos  de  la 
Encina.  Cf.  Annal.  Compost,  et  Chr.  Conimbr.  III. 

25.  6.  Cf.  Rodrigue,  Vlll,  12. 

25.  7.  Voir  dans  Rodrigiie  (VIII,  10)  sa  réponse  aux  habitants  de  Baeza. 

25.  8.  Rodrigue  et  Arnaud  donnent  plus  de  détails,  et  insistent  sur  l'attitude 
(quelque  peu  étrange  pour  nous)  des  prélats,  qui  exigèrent  la  destruction  de  la  ville. 
Alphonse  et  Albéric  donnent  comme  raison  de  cette  mesure  qu'il  n'y  aurait  pas  eu 
assez  de  monde  pour  la  peupler.  Rodrigue  et  Arnaud  marquent  la  date  de  l'attaque  : 
huit  jours  après  la  bataille  de  Las  Navas,  un  lundi. 

20.  9.  «  Bene  perierunt  ibi  se\aginta  millia  Sarracenorum;  quorum  quosdam 
interfecimus,  quosdam  captivos  duximus...  »  (Alphonse,  p.  ci).  Arnaud  compte  que 
quarante  mille  Sarrasins  périrent  à  Lbeda  et  Baeza  (p.  cxxii). 

20.  10.  Détail  inédit.  Ce  n'était  d'ailleurs  que  justice,  puisque  les  Aragonais 
avaient  joué  un  rôle  important  dans  l'attaque,  selon  Rodrigue  (VIII,  12),  Arnaud 
(p.  cvii)  et  la  Chron.  do  San  Juan  de  la  Pena  (p.  lio).  —  Cf.  Gesta  comitum  Barcinonen- 
sium  (fragments  édités  par  Barrau-Dihigo,  dans  Bévue  hispanique,  p.  ^71,  1902)  : 
«  Multas  victorias  assecutus  est  a  Mauris,  inter  quas  fuit  illa  excellentissima  Ubed», 
in  quam  profeclus  fuit  cum  magno  exercitu  auxilio  régis  Gastellœ.  »  Mais  il  faut 
voir  là  plutôt  une  allusion  à  la  bataille  de  las  Navas,  que  la  Chronique  générale, 
la  Chronique  de  Cardena,  le  Chr.  Cerratense,  les  An.  Toled.  III  (et  aussi  Zurita, 
Anales,  11,  Oi)  désignent  sous  le  nom  de  bataille  d'Ubeda. 


366  BULLETIN    HISPANIQUE 

est  et  distributa  illa  multitudo  maledicta  que  inclusa  fuit  in  predicta 
uilla  per  omnes  regiones  xpianorum  cum  de  diuersis  mundi  partibus 
aliqui  pauci  interfuerunt  in  predicto  glorioso  et  triumphali  bello  [.] 
proposuerant  ulterius  procedere.  sed  deus  cuius  uoluntati  résistera 
nemo  potest  impediuisse  uidebatur.  Occulta  quidem  sunt  iudicia  dei. 
fTortase  aliquid  elationis  et  superbie  contraxerunt  xpiani  ex  uictoria 
supradicti  belli  cum  soli  soli"  deo  non  sibi  atribuere  debuissent.  Nam 
oum  aliqu"?''  diebus  moram  fecissent  in  obsidione  predicte  uille  tôt 
et  tantos  de  x'anis  inuasit  multiplex  infirmitatum  uarietas  et  pre- 
cipue  flu\us  uentrium  quod  pauci  remanserunt  sani.  qui  si  néces- 
sitas postularet  contra  hostes  se  defendere  possent.  Eadem  et 
tempestate  tanta  mortalitas  accidit  in  hiis  qui  remanserant  de  bello 
(pîantum  nô''  illo  magna  pars  maiorum  et  seniorum  in  uillis  et 
ciuitatibus  uite  tenninum  dederunt  1 1 .  Yidentes  igitur  reges  quod  nullo 
modo  poterant  ulterius  procedere  habito  tractatu  et  diligenti  délibé- 
ra tione  uisum  est  fere  omnibus  ut  redirent  in  terram  suam.  Diruptis 
ergo  pro  parte  mûris  sepedicte  uille  domibus  et  conglagratis  '' 
sucisis  arboribus  et  uineis^  quas  sucidere  potuerunt.  ponita/^  et 
baecia  in  desolatione  munientes  castra  supradicta  uiris  armis  et  aliis 
necessariis  reuersi  sunt  ad  propria  cum  uictoria  et  honore  et  cum 
multa  preda.  Tune  gloriosus  rex  régi  nauarrorum  qui  in  auxilium 
eius  uenerat  licet  cum  paucis  restituit  quedam  castra  de  hiis  que  ipse 
rex  nobihs  ceperat  de  regno  nauarre'2.  Uex  gloriosus  et  |  nobilis  hoste 
superbissimo  deuicto  et  prostrato  receptus  est  in  toleto  cum  exulta- 
tione  et  gaudio  ab  uniuersis  populis  clamantibus  et  dicentibus 
benedictus  qui  uenit  in  nomine  dni'3.  Tempore  supradicti  nobilis 
triumphi  dum  reges  catholici  et  eorum  uasalli  animas  exponerent  et 
régna  pro  exultatione  nominis  xpiani  rex  legioîï  guerram  mouit  régi 
castelle  sicut  fecerat  tempore  alterius  guerre.  Rex  autem  gloriosus  cum 
honore  et  gloria  cupiens  uilam  finire  in  guerra  maurorum  non  reuocafi 
ad  animum  quod  rex  légion  fecerat.  si'  uoluit  amicabilitcr  compo- 
nere  cum  eo  ut  sibi  inuicem  prestarenl  auxilium  contra  mauros'''. 
36.  Intérim  dum  de  pace  Iractarctur  circa  inicium  quadragessime 
proximo    secute    post    belluni'.    rex    gloriosus    cum    tota    intencio 

a)  Sic  (fin  de  ligne).—  b)  aliquod? pour  atiquot.  —  cj  Sic  fqxiinl  in  aulumnoj.—  di  cou- 
llagratis.  —  ej  nineis.  —  f'J  Sic.  —  g)  sed  ?  (si  pour  s;  ou  ss). 

20.  II.  Luc  (p.  III,  1.  5o)  et  Uodrigue  (VIII,  12),  l'ont  allusion  à  cette  ('•pidémie. 

23.  12.  Autre  détail  inédit. 

aâ.  i3.  Cf.  Rodrigue,  VIII,  12.  Les  An.  Toled.  I  marquent  une  reprise  des  liostilités 
en  septembre  1212. 

20.  i!).  Luc  (p.  m,  1.  5.'5)  donne  plus  de  détails  sur  ces  hostilités  et  ces  arran- 
gements. 

aC.  i.  En  12 13.  Hodrigue  :  «  code  m  anno,  mense  februario  »  (VIII,  i3).  Sur  cette 
manière  de  compter,  voir  F'iôrez  (Iteynas,  t.  I,  p.  acji)  :  «  No  de  Enero  â  Eiiero,  sino 
desde  el  dia  del  suceso  hasta  cumplir  el  afio», 


CJIHOMQl  E    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTIEI.E  'M^-j 

in  herat"  paucos  homines  secum  milites  cum  domesticis  suis  et  cum 
quibusdam  de  consiliis  de  ultra  scrram  iuit  ad  castellum  dnarum 
quod  nunc  dicitur  calalraua  nueua  et  cepit  ipsum  et  retinuit^.  Dein 
cepit  hecuauexoreS  qui  locus  nunc  dicitur  sanctus  iacobus  et  est 
castrum  fratrum  milicie  sancti  iacobi  iuxta  montiel.  Deinde  obsedit 
cum  illis  paucis  qui  cum  eo  erant  nobile  caslrum.  alcaraz  quod 
mirabile  fuit.  Superuenit  tamen  postea  dônus  didacus  et  quidam 
alii  magnâtes  et  firmata  est  obsidio.  Expugnatum  fuit  uiriliter 
et  potenter  cum  machinis  mirabilibus.  Tandem  per  gram  dei 
reditum  fuit  régi  glorioso  salua  uita  niaurorum  qui  tune  ibi  erant.  In 
die  ascensionis  receptus  fuit  rex  gloriosus  in  eadem  uilla  cum  proces- 
sionesolempniab  archiepiscopo  toletano  purgata  sp'''  maurorum  spur- 
cicia  recedentibus  ipsis  de  uilla  et  eadem  die  archiepiscopus  missam 
celebraii  ibidem^.  Tune  et  rex  nobilis  cepit  castrum  aliud  munitis- 
simum  nalura  quod  est  inter  securam  et  alcaraz  .s.  riopal»  et  sic 
cum  honore  et  gloria  circa  festum  pentecostes  reuersus  est  ad  parles 
de  guadalfaiara*^.  Exinde  uero  dirigens  iter  suum  in  partes  castelle 
cum  unicum  et  sumum  desiderium  esset  ci  claudere  diem  extremum 
contra  sarracenos  pro  exultatione  noîs  ih'u.  xpi.  uidens  quod  rex 
legioiî  prestaret  magnum  impedimentum  illi  tam  sancto  proponito'. 
tanquam  laudabili  stipendia  multa  dede'  nobilibus  et  munera  magna 
magnatibus.  conuocauitque  mullitudinem  populorum  innumerabilem 
ut  sallem  metu  perterritus  rex  legioiî  pacem  firmaret  cum  rege 
glorioso  et  si  nollet  iuuare  ipsum  contra  mauros  saltem  non  impe- 
dire".  ffirmata  igitur  lune  pace  inter  regcs  medianle  didaco  expulso  ' 
(fol.  loi)  et  pelro  fernandi  de  utroque  regno  rex  legioiî  debuit 
intrare  in  lerram  maurorum  ex  parte  sua  quod  factum  est.  Timens 
autem  rex  gloriosus  inconslanciam  régis  legioiî  dédit  ei  donum 
didacum  uassallum  suum  qui  seculus  est  eum  cum  sexcenlis  militibus 
ad  minus,   et  lune  expugnauerunt  alcanteram  et  ceperunl   eam   et 


aj  Sic  fin  hoc  erat  plutôt  que  inhererntK  —  b)  premières  lettres  tlu  mot  spurcicia 
écrites  par  erreur.  —  cj  Sic.  —  d,  (ledit.  —  ej  impediret.  —  fj  expulsa  se  rapporte  à 
{'etro. 


26.  2.  Duenas.  Rodrigue:  <i  Castrum  iJomiiiarum...  rcsliluit,  quorum  fueral,  fra- 
tribus  Calatrauœ  »  (VIII,  i.S). 

2G.  3.  An.  Toled.  I  :  n  priso  al  Gastiel  de  Dios  (Dfias  ?)  e  el  castiello  de  Avenxore, 
mediado  marzo».  Rodrigue  :  «  Eznauexore  »  ;  Chron.  générale  :  «  el  castiello  que 
dizen  Eznauexol»  (p.  705^,  1.  3G);  Cn'm.  de  Esp.  :  «  Asnavexer  »  (Doc-  inéd.,  t.  CV, 
p.  483)  :  Gastellarde  Santiago  de  la  Mata?  —  Cette  localité  avait  donc  déjà  changé  de 
nom  du  temps  de  l'auteur. 

26.  !t.  De  même  Rodrigue  (VIII,  i3). 

a6.  5.  Rodrigue  :  «  Riuus  Oppae  »  (VIII,  i3).  Aujourd'hui  Riopar,  entre  Alcaraz 
et  le  Segura.  —  An.  Toled.  I  :  «  cerco  Alcaraz  e  lidiola...  »  (i2i3). 

26.  G.  Cf.  Rodrigue  (VIII,  i3),  qui  ne  parle  pas  de  Guadalajara,  où  le  roi  se  trou- 
vait déjà  avant  la  guerre, 


368  BULLETIN    HISPANIQUE 

mutuentes  "  retinuerunt  illam  7.  Dein  moiierunl  castra  uersus  emeritam 
et  cum  ibi  per  dies  aliquot  moram  fecisset  rex  légion  8  tum''  exer- 
citu  suo  in'  reuersus  est  in  terram  suam.  resistente  sibi  dôno 
didaco  atque  contrarium  suadente.  Idem  uero  nobilis  uassallus 
gloriosi  régis  uidens  régis  legiorï  inconstanciam  et  pussillanimita- 
tem  audiens  et  quod  dns  suus  rex.  s.  gloriosus ''  baeciam  que 
iam  rehedificata  erat  et  mûri  reparati  nolum'"  sine  dïïo  redire  in 
terram  suam.  sed  per  déserta  montium  et  fragosa  loca  siluarum  transi- 
tum  faciens  inter  castella  maurorum  eis  inuictis''  et  renitentibus  per- 
uenit  ad  dnum  suum  gloriosum  regem  ad  supradictam  uillam  ubi 
obsidio  iam  firmata  erat.  Rex  nanque  gloriosus  et  nobilis  eo  tempore 
quo  rex  légion  ymmo  pocius  dOnus  didacuso  cepit  alcanteram  cum 
recenter  surrexisset  de  lecto  egritudinis  ex  qua  peruenerat  usque  ad 
portas  mortis.  licet  per  se  nuUo  modo  posset  equitare  sine  adminiculo 
alicuius  cui  inniteretur  uenit  usque  toletum  10  et  habens  propositum 
firmissimum  finire  uitam  suam  in  terra  maurorum.  tempore  guerre 
obsed'''  prediclam  uillam.  s.  baeciam.  cum  paucis  nobilibus  et 
cum  paucis  hominibus  de  populis  ciuitatum  et  aliarum  uillarum 
Hoc  autem  factum  est  in  principio  mensis  decembris  et  durauit 
obsidio  usque  post  festum  purificationis'i.  Deficientibus  autem  uictua- 
libus  exercitui  et  aliis  neccessariis  j^  coactus''  rex  nobilis  recedere  ab 
obsidione  et  redire  in  terram  suam.  Tanta  siquidem  fuit  penuria 
ciborum  in  expeditione  illa  quod  carnes  asinine.  et  caballine  charis- 
sime  uendebantur  in  macello.  lUo  nempe  anno  tanta  fuit  famés  in 
regno  castelle  presertim  ultra  serram  et  extremadura'  quanta  nun- 
quam  uisa  fuit  nec  audita  in  terris  illis  a  seculis  antiquis.  Moriebantur 
siquidem  homines  cateruatim  ita  quod  uix  erat  qui  sepelliret.  Tune 

aj  munieules.  —  bj  cmhi.  —  cj  inde.  —  d)  Abella  :  •  deest  forte  obsedissel  »■,  plutôt 
ohsideret  ;  mamiue  aussi  Alfhnsus  après  sïcilicet]  gloriosus.  —  e)  noluit. —  fj  iituitis.— 
yj  olisedit.  —  h/  Abella  :  «  forte  deest:  est,  vel  liiit  ».  —  ij  sic. 

ai).  7.  Cf.  Uodriyiio  (VIII,  i  3) ,  qui  ajoute  que  le  roi  de  Castille  rendit  au  roi  de 
l.éon  El  Garpio  et  Monlein  regalcin  (Mont  lieal,  Ghron.  génér.,  p.  70(1'',  1.  /|3),  et  que 
celui-ci  remit  Alcântara  aux  ctievaliers  do  la  (laiatrava,  mais  qui  ne  parle  pas  de  Pedro 
Feriiândcz,  donc  Luc  montre  le  rôle  auprès  d'Alphonse  de  Léon  (p.  108,  1.  20,  39; 
p.  1  1 1 ,  1.  53).  Luc  énumère  plus  en  détail  les  places  restituées  à  ce  dernier  (p.  1 1  a,  1.  G). 
(^1.  An.  Toted  I  :  «  ...  e  dio  el  Uey  I).  Alloiiso  al  Rey  de  Léon  Diago  Lop,  e  Lop  Diaz 
con  1)C  caballeros...  e  prisicron  Alcântara/). 

Itodrigue  (NUI,  i3)  dit  (|uo  Alphonse  IX  donna  ensuite  Alcântara  à  l'ordre  de 
Calatra»a,  ce  que  confirme  Uisco  (Hist.  de  Léon,  p.  37/1).  Voir  pourtant  la  note  do  la 
page  27Ô,  t.  IV  de  l'édition  de  Vliistoria.  gen.  de  Ksp.  de  Mariana  par  Monh^rt, 
Valence,  1788. 

■jC).  8.  Détail  inédit. 

■A).  I).  On  remarquera  les  tendances  léonophobes  de  notre  auteur. 

aC.  10.  Le  (S  des  kalendes  de  décembre  (a/i  n(jvembre)  i;!i3,  selon  Rodrigue,  qui 
ne  parle  pas  de  cette  maladie  du  rf)i  (\  III,  1/4). 

qO.  II.  C'est  aussi  la  date  (jui  ressort  du  texte  de  Rodrigue.  .In.  Tolcd.  I  :  0  e 
duraron  très  sodmanas  de  Jaiiero  subre  liaeza,  e  non  la  prisieron.  » 

■jC>.  12.  «  E  fuo  hora  que  custô  cl  almud  de  la  cevada  L\  soldes.» (/In.  Toled.I.) 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  869 

autem  firmata  fuit  treugua  inter  regem  marroqiiitanum  et  nobiiem 
regem  castelle.  Pauci  siquidem  equi  et  alia  pauca  iumenta  remanserant 
in  regno  castelle  et  hominum  pars  magna  famé  consumpta  perierat'S. 
Mauri  e  contrario  equis  frumento  ordeo  et  oleo  et  et  aliis  diuersis  gene- 
ribus  ciborum  multipliciter  habundabant.  Siluit  igitur  terra  et  rex 
quieuit  et  in  quadragessima  proxima  reuersus  est  in  castellam.  ubi 
moram  fecit  usque  ad  inicium  septembris  sequentis '''. 

27.  Eadem  tempestate  rex  aragon  petrus  |  exium"  de  terra  sua  cum 
multitudine  militum  et  profectus  est  in  partes  tolose  in  auxilium  comitis 
tolosani  senioris  qui  duxerat  sororem  eiusdem  régis  in  uxorem  et  filiam'' 
eiusdem  comitis  duxerat  alteram  sororem  régis  similiter  in  uxorem». 
ïunc  autem  franci  erant  in  partibus  tolosanis  et  tenebant  fere  tolum 
uice  comitatum  bit'rensem  et  maiorem  partem  comitatus  tolosani. 
Papa  siquide  romanus  innocencius  tercius  dederat  remissionem  gene- 
ralem  omnium  peccatorum  omnibus  illis  qui  uenirent  super  albigenses 
et  alios  hereticos  qui  erant  in  partibus  illis.  Pululauerant  namque 
hereses  diuerse  faciès  quidem  habentes  diuersas  et  caudas  colligalis', 
et  multiplicabantur  cotidie  adeo  quod  periculosum  erat  uniuersali 
eclesie  amplius  talia  dissimulare.  Catholici  ergo  de  diuersis  partibus 
et  precipue  de  regno  francie  uenientes  fere  totam  terram  illam  in 
modico  tempore  xpi  fidei  subiugauerunt  castra  multa  et  ciuitates 
munitissimas  q5''  inexpugnabiles  in  momento  lemporis  subuerlentes 
hereticos  ipsos  diuersas "^  pénis  aftligentes  et  uariis  mortibus  interi- 
mentes.  Operabatur  siquidem  manifeste  et  miraculose  uirtus  dni. 
ïï  ih'u.  xpi.  qui  est  rex  regum  et  dnus  dominancium  per  ministe- 
rium  illustrissimi  et  fidellissimi  comitis  simonis  montis  fortis  qui 
uelud  alter  iudas  macabeus  legem  dei  zelans  uiriliter  et  polenter 
bella  dïîi  preliabatur.  Predictum  comitem  symonem  monlis  fortis 
cum  quo  erant  fere  qngêti  milites  obsedit  rex  aragoiî  memoratus 
et  comes  tolosanus  et  alii  comités  cum  eis  et  bar[..o..Jnes  et  nobiles 
terre  et  populi  multi  in  quodam  Castro  fiduciam  habentes  firmam  quod 
possent  ipsum  capere.  Erat  autem  comes  symon  uir  strenuus  et  belli- 
cosus  et  cor  eius  habens  fiduciam  firmam  in  dno  ih'u.  xpo.  pro 
quo  cotidie  baborabat^  Videns  igitur  periculum  sibi  et  suis  imminere 
in  uirtute  dni  nostri  ih'u.  xpi.  exeuntes  de  Castro  obsesso  irruerunt 

a)  exiuit.  —  bj  Abella:  «forte  filius».  —  cj  coUigatas.  —  dj  quasi.  —  ej  diuersis.  — 
f)  laborabat. 

26.  i3.  Rodrigue  (VIII,  \'i)  parle  aussi  de  cette  disette  sans  oublier  les  services 
qu'il  rendit  alors  par  des  distributions  charitables.  An.  Toled.  I  :  «  duro  la  fambre  en 
el  regno  hasta  el  verano,  e  murieron  las  mas  de  las  gentes;  e  comieron  las  bestias, 
e  los  perros,  e  los  gatos,  e  los  mozos  que  podian.  » 

36.  14.  Cf.  S  28  et  S  45,  note  a. 

27.  I.  Leonor  et  Sancha,  sœurs  de  Pierre  H  d'Aragon,  avaient  épousé  respective- 
ment Raymond  VI,  comte  de  Toulouse,  et  le  fils  de  celui-ci,  Raymond  (Vil). 
Cf.  Chronique  de  San  Juan  de  la  Peila,  p.  i36;  Salazar,  Lara.  I,  p.  172. 


370  BULLETIN    HISPANIQUE 

in  castra  et  cos  per  uirtuteni  x'  uerlerunt.  in  fugam  et  ipsum  regem 
aragon  cum  multis  mililibus  interfecerunt^  lïelix  fuisset  rex  ille  si 
uitam  finisset  statim  post  nobile  triumphum  belli  ?missi"  in  nauasde 
tolosa  contra  rcgem  marroquitanum. 

28.  Gloriosus  auteni  et  nobilis  rex  castelle  circa  principium  mensis 
septembris  exium  burgis  et  cepit  proficisci  uersus  extremaduram. 
Proposuerat  siqnideni  habere  colloq'um  cum  rege  portugalie  genero 
suo  in  partibus  placentinis.  Igitur  cum  esset  apud  ualeni  olen '' 
uenit  nuncius  ex  insperato  qui  nunciauit  ei  morlem  (fol.  102) 
nobillissimi  et  fidcUissimi  uasalli  sui  dîîi  didaci  de  cuius  morte 
doluit  inconsolabilitcr  dibgebat  siquidem  eum  et  in  eo  super 
omnes  uiuenteS  confidebat  et  cum  iam  cerneret  sibi  mortes'', 
periculuin  iminere  quia  iam  ualde  debilis  erat  seneclute  contec- 
lus  et  laboribus  multis  et  doloribus  atrictus  proposuerat  regnum 
et  filium  impuberem  et  uxorem  et  tilias.  fidei  predicti  uasalli 
nobilis  et  fidclis  comictere  et  omnia  in  manu  cius  et  potestate 
dimictere  certam  gerens  fiduciam  quod  ipso''  cuncla  fideliler  minis- 
traret  et  omnia  débita  eius  quibus  multis  obligatus  tenebatur  soluere 
festinaret.  Tanta  igitur  spc  et  in  d'c*^  articulo  constitutus  frustratus 
rex  gloriosus  doluit  ultra  moduni.  Paucis  diebus  autë^  audierat 
mortuum  esse  petrum  fernandi  castellanum  in  partibus  de  marrocos 
quem  velud  inimicum  capitalem  rex  nobilis  persequebatur'.  Sic  igitur 
leta  tristibus  et  tristi'  lotis  alternatim  suscedunt'*  ut  nemo  gloriari 
possit  dum  est  in  uila  presenti  se  felicem  esse.  Resunlo  autem  spiritu 
rex  gloriosus  processit  in  antea.  et  cum  perucnisset  ad  quandam 
aldeam  intcr  areualo  et  auilam  que  dicitur'  ^  cepit  paulatim  delicere  et 

al  cnmmissi.  —  h)  uleti.  —  c)  ninrlis. —  dj  ipxr.—  ej  Sic  1  et  morlis?).  —  f)  antca.— 
g)  tristia. —  /(,/  Sic.—  i)  Abella  :  «  deesl  forle 'i'u//(Tft' JWhho^  ». 

27.  2.   Bataille  de  Muret  (l'.'i  sept.  lai^i.  CI',  (llironique  de  San  .luan  de  la  l'efia, 

p.    l43-l'|i. 

-.'S.  I.  Noire  auteur  ue  nous  dit  pas  pourquoi,  mais  Luc  nous  montre  en  Pedro 
P'ernândez  el  Caslcllano,  lils  de  Fernân  Huiz  de  Castro  el  llaslellano  (cf.  §  9,  note  a), 
le  bras  droit  d'Al|)honse  de  Léon  (cf.  S  3<'>,  note  7),  son  cousin.  A  un  moment  donné 
pourtant,  d'après  Luc  (p.  io8,  1.  Sg),  ce  personnage  avait  contril)ué  à  rétablir  la  paix 
entre  les  deux  rois  (cf.  S  lâ,  note  8).  Mais  il  acconiijagnait  le  roi  maure  à  Alarcos 
(l^uc,  p.  108,  1.  21).  Le  Livra  das  Liithagrns  do  londc  U.  l'rdru  relate  une  K'aticure  tenue 
I)ar  lui  contre  .Mphonse  \'\\\  (p.  aUl'»).  Voir  liétliencourt  (Hist.  ijem'aU'xj.,  l.  IV,  p.^nj), 
qui  place  sa  mort  d'une  faron  dubitative  en  i  2  1  .'1,  date  indiquée  par  les  Ann.  Compost. 
Notre  chroni(iue  précise  davantage  :  avant  celle  de  Diego  L<')pe/,  (jui  mourut  le 
iG  septendjre  (voir  même  paragraphe,  note  4);  les  An.  Toled.  I  précisent  tout  à 
fait  :  «  en  Marriiecos,cn  Wlll.  dias  de  Agoslo  Kra  MCCLII  ».  Uodriguo  ne  mentionne 
ni  la  mort  du  Pedro  Fernjndcz  ni  celle  de  Diego  Lôpez,  ce  que  fait  au  contraire  Luc 

(p.  «12,  1.  l'j)- 

28.  2.  Le  mot  qui  man<iue  a  été  suppléé  par  Abella  d'après  Rodrigue  «in  aldea 
(|uadam  Areuali,  qua;  dicitur  Guterrius  Muniouis  »  (VIII,  if»);  «  Cuticrr  Munoz, 
a  dos  léguas  de  .Vrévalo»  (Lafuenle,  t.  III,  p.  laS),  au  sud  de  cette  ville.  —  D'après 
le  Livro  das  Linhagcns  do  cundc  I).  l'edro,  Alphonse  VIII  serait  mort  de  colère  parce 
que  le  roi  de  Portugal  ue  voulut  pas  venir  au  rendez-vous  :  «  E  morreo  com  gran 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    GASTILLE  071 

circa  mediam  noctem  paucis  de  familiaribus  suis  sibi  assislentibus 
ingresus  est  uiam  uniuerse  carnis.  Nobilis  siquidem  uxor  eius  tune 
laborabat  quartana.  Noctem  illam  tenebrosus  turbo  possideat  non 
illustrent  eam  sidéra  celi  que  ausa  fuit  tanto  sole  mundum  priuare. 
fllos  regni  fuit,  decus  mundi  omni  morum  probitate  conspicuus. 
iustus.  prudens  strenuus.  largus  ex  nulla  parte  maculam  in  gloria 
sua  posuit.  Obiit  autem  octaua  die  post  festum  sancti  michaelis^. 
Dnus  didacus  obierat  circa  festum  exaltationis  sancte  crucis^. 
Causam  doloris  perpetui  quamdiu  mundus  iste  durauerit.  habet 
castella.  uno  et  eodem  tempore  tanto  dno  et  rege  tantoque  uiro  et 
tam  famoso  uasallo  ipsius  orbala.  Maturant  qui  cum  regc  erant  ipsa 
tempestate.  s.  uxor  régis  et  filia.  Archiepiscopus  toletanus  et  epi- 
scopus  palentinusâ  et  alii  nobiles  corpus  iam  uita  priuatum  déferre 
ad  monasterium  régale^  quod  idem  rex  de  nouo  construxerat  propriis 
suptibus''  uix*  burgis.  Concurrunt  undique  populi  ciuitatum  et  nobiles 
audita  morte  tanti  dni  et  uidentes  se  desolatos  tanto  rege  uersi 
sunt  in  stuporem  intra  se  pre  angustia  spiritus  gementes.  Omnes 
mulieres  sumpssere  lamenta  uiri  consperxerunt  puluere  capila  accinti 
ciliciis  induti  saccisT.  Omnis  gloria castelle  subitoet  uelud  in  ictu  occuli 
imutata  est.  Igitur  gloriosi  régis  corpore  j  magnifice  et  honorifice 
tradito  sépulture,  nobilis  uxor  eius  regina  dna  alenor  tanti  uiri 
solatio  deslituta  pre  dolore  et  angustia  spiritus  mortem   habens   in 

a)  Sic—  b)  iuxta. 

sanha  que  ouue  deirrey  de  Portugall  porque  nom  quis  hir  a  ssas  vislas,  teemdosse 
por  desdenhado  »  (p.  35o).  Il  est  difficile  de  dire  ce  qu'Alphonse  Vlll  voulait  deman- 
der à  son  gendre  (cf.  Herculano,  t.  Il,  p.  nj2). 

38.  3.  «  In  die  Fidis  virginis,  secunda  feria,  decimo  Kalendas  Oclobris,  »  selon 
Rodrigue  (Vlll,  i5).  De  même  les  An.  Toled.  III.  Cf.  la  Créa,  de  Esp.  (Doc.  inéd.,  t.  CV, 
p.  48(j),  qui  traduit  «lunes  veinte  e  très  dias  de  Setiembre  ».  11  faut  évidemment 
corriger  en  «II  Nonas  Oct.  »,  0  octobre,  jour  de  Sainte-Foi,  date  adoptée  par 
Lafuente  (cf.  plus  loin,  note  8).  Ce  serait  le  dimanche  5  octobre  »  por  la  noche  », 
d'après  les  An.  Toled.  I  et  les  Ann.  Compostellani ;  «  III  Nonas  Octobris  »  (C/ir.  Cerra- 
lense).  Cf.  Mondéjar,  Memorias,  p.  308. 

28.  4.  «  ...  Martes  en  XVI  dias  de  September  »  (An.  Toled.  /);  ^<  XVI  Kal.  Octob.  » 
{Ann.  Compostellani).  Risco,  dans  Historia  ...  de  Léon  (p.  370),  donne  les  épitaphes  de 
Diego  Lôpez  et  de  Pedro  Fernândez,  trouvé»  par  lui  dans  les  nécrologes  de  l'Archivo 
de  la  cathédrale  de  Léon:  les  dates  seraient  respectivement  18  septembre  1:214  et 
3  1  août  13  10.  H  faut  corriger  tout  au  moins  cette  dernière  date  en  1214  (cf.  S  28,  n.  i). 
Il  y  a  une  erreur  de  mois  dans  le  Livro  das  Linhagens  do  conde  D.  Pedro  :  «  \V1  dias 
doitubro  era  de  mill  CCLII  annos  »  (p.  259). 

a8.  5.  Rodrigo  Ximénez  de  Rada,  l'hislorien,  archevêque  de  Tolède,  cl  Tello, 
évêque  de  Palencia.  Rodrigue  nomme  aussi  Domingo,  évêque  de  Plasencia,  qui 
assista  à  la  mort,  ainsi  que  Rodrigo,  évêque  de  .Siguenza;  Menendo,  évêque  d'Osma, 
et  Giraldo,  évêque  de  Ségovie,  lesquels,  avec  Rodrigue  de  Tolède  et  Tello,  assistèrent 
aux  funérailles. 

28.  6.  Cf.  Rodrigue.  Luc  le  désigne  par  son  nom  :  <(  in  monasterio  de  Olgis  »,  las 
Huelgas  (p.  113,  1.  23). 

28.  7.  Rodrigue  dit  aussi  le  deuil  général  que  causa  la  mort  du  roi;  mais  les 
détails  qui  sont  ici  sont  intéressants  en  ce  qui  concerne  les  manifestations  publiques 
de  la  douleur  à  cette  époque. 


37a  BULLETIN    HISPANIQUE 

desidorio  incidit  continuo  ilectum"  egritudinis  et  in  uigilia  omnium 
sanctorum  circa  mediam  noctem  secuta  uirum  diem  claiisit  extre- 
mumS.  Sepulta  est  autem  iuxta  regem  in  monasterio  memorato.  Quos 
una  mens  iunxerat  et  morum  nobilitas  decorauerat  idem  locus  sépul- 
ture conseruat.  Infans  erat  fere  triuni  annorum  gloriosus  et  nobilis 
rex  cum  regnare  cepisset.  Regnauit  autem  fere  .L.  annis  et  ampliuso. 
Mortuus  est  autem  sub  era.  M.  CC.  LU. 

39.  Circa  tricessimum  annum  regni  eius'  capta  fuit  ciuitas  sancta 
ihrl'm  et  tota  terra  sancta  prêter  tyrum  qui  uulgariter  dicitur  sur  et 
prêter  tripolin  que  est  in  partibus  anthiocenis  Zaladinus  siquidem 
soldanus  damasci  et  babilonie  pugnauit  contra  regem  ihrl'mtanum  et 
fralres  liospital'  et  templi  et  permittente  diuina  iusticia  sfanit'"  eos  et 
multis  ex  eis  i.iterfectis  aliis  autem  captiuatis  totam  terram  cepit  prêter 
predictas  ciuitates  et  sanclam  crucem  dni  que  capta  fuit  in  ipso  bello 
duxit  captiuam.  Quo  audito  doluit  ultra  modum  uniuersus  populus 
xpianus.  et  papa  romanus  misit  predicatores  suos  ad  uniuersos  prin- 
cipes populi  xpiani  ut  inuitarent  eos  ad  liberationem  terre  sancte. 
fredericus  autem  romanorum  imperator  signum  crucis  suscepit  quem 
omnes  principes  germanie  secuti  sunt  et  cum  innumera  multitudine 
militum  et  aliorum  bellatorum  transium  per  unguariam.  Dein  per 
uulgariam.  postea  per  romaniam  et  peruenit  in  terram  soldani  yconii^ 
que  confinis  est  terre  principis  anthiochie  deuictis  omnibus  etconfectis 
qui  uoluerantei  et  exercitui  suo  resisterene  transiret.  Erat  autem  sicut 
fama  refTerebat  proponitum  '  firmum  babens  ire  prius  in  damascum  et 
in  babiloniam  et  destruere  totum  regnum  zaladini  et  subicere  xpianis. 
Deinde  uenire  in  terram  sanctam  et  ciuitatem  sanctam  ihrl'm  cum 
gloria  et  honore.  Istud  quidem  proposuit  imperator  terrenus.  sed 
aliter  disposuit  rex  rcgum  et  dominus  dominancium  in  cuius  manu 
sunt  omnes  potestates  et  onmia  iura  rcgnorum.  Nam  cum  esset  in 
finibus  ycomorum  uersus  antiochiam  cum  uellel  se  ualneare'  in 
quodam  modico  llumine ^  estns  quippe  erat  descendit  in  aquam  et 
ibidem  subito  suflbcatus  est.  Ecce  iudicia  dei  abissus  multa.  Pars 
exercitus  mortui  sunt  pars  autem  residua  coruicrtil  facicm  suam  ad 
loca  que  xpiani  tencbant  adhuc  inlra  terminos  terre  sancte. 

aj  m  lectum.  —  h)  supcrauit.  —  cj  Sic,  —  d)  halneare. 

28.  8.  «  Viemes  el  postrimer  dia  de  octubre»  (An.  Toled.  /),  t  II  Kal.  No>embris)) 
(Ann.  Compost.);  a  Fxplelis  posl  morlcni  viri  siii  vip^inti  septcin  diebiis  »  (Luc,  p.  112, 
1.  2tj).  Il  y  a  on  edel  viii;,'t  sept  jours  do  l'octave  »1(;  Saiiit-Micbel  (0  cet.)  à  la  Toussaint 
en  comprenant  eos  deux  jours  eux-mêmes.  Uodrigue  (l\,  1;  n'en  compte  que  vingt- 
cinq,  ce  (jui  esl  plus  exact,  puisque  la  reine  nuiurut  la  veille  de  la  'l'oussaint.  Notre 
auteur  nous  dil  (ju'elle  était  d<'ji)  nuilade  quand  son  mari  expira. 

a8.  <).  Cinquante-trois,  au  compte  de  Uodrij^ue  (VIII,  ib).  Cinquante-cinq,  selon 
Luc  (p.  113,  I.  aV)'  H>n  n'-alité,  un  peu  plus  de  cinquante-six. 

ag,  I.  En  1187,  2  octobre.  Alphonse  VIII  était  roi  depuis  le  .ii  août  ii58. 

3(j.  a.  Le  Soudan  d'Iconium. 

2(j.  Z.   I>e  Kalycadnus  ou  Selef  (  1 190). 


CHRONIQUE    LATINE    DES    ROIS    DE    CASTILLE  878 

3o.  Eodein  tempore  (fol.  ro3j  philipus  rex  francorum  et  ricardus 
rex  anglorum  ex  condicto  pace  inteer"  se  firmata  cum  ducibus  et  comi- 
tibus  et  aliis  baronibus  et  militibus  multis  mare  transierunt  et  apli- 
cuerunt  a^  acre  quam  tune  tenebant  sarraceni.  Obsederunt  eam  reges 
et  potenter  et  uiriliter  expugnantes  ui  ceperunt  ipsam.  Rex  autem 
ricardus  priusquam["Jibidunri''  ueniret  cepit  ciprum  insulametsibieam 
subiugauit.  Rex  autem  philipus  correptus  infirmitate  grauissima  ita 
quod  de  uita  eius  desperabatur  transfretaû  et  reuersus  est  in  terram 
suam.  Sed  rex  ricardus  strenuus  et  magnanimus  remansit  et  longo 
tempore  moram  fecit  in  partibus  illis.  defendens  que  tenebant  xpiani 
et  alia  de  nouo  acquirens.  Sed  audito  quod  rex  francie  uolebat  ei 
guerram  mouere  transfretanit.  et  dum  transitum  faceret  terram  ducis 
austrie  que  uulgo  dicitur  esterrichia  captus  est  ab  eodem  duce  et 
longo  tempore  detentus  in  captiuitate.  Tandem  pro  liberatione  sua 
solutis  centum  milibus  marcarum  ''  argenti  reuersus  in  terram 
suam  et  cum  obsedisset  quodam  castrum  sagitta  letaliler  uulneratus 
nature  debitum  soluit  sicut  supradictum  est'.  Girca  quadragesimum 
annum.  annum^^  regni  gloriosi  régis  comes  flandrensis  et  comes  ble- 
sensis  et  alii  barones  de  regno  francie  miserunt  in  italiam  pro  mar- 
chione  montis  ferrati  quem  sibi  profeceruntî'  et  promiserunt  firmiter 
quod  ei  tamquam  dno  obedirent.  Conduxerant  siquidem  inter  se 
quod  irent  ultra  mare  seruire  dno  ih'u.  xpo.  Conuenerunt  igitur 
omnes  apud  nenecias''  et'  ibidem  longam  moram  fecissent  propter 
inaliciam  et  fraudem  uenecorum  uenit  ad  eos  alexius  imperator  cons- 
tantinopolitanus  filius  ysaac  imperatoris  qui  interfecerat  andronicum 
proditorem  notissimum  sicut  fama  refert  qui  post  mortem  emanuel 
imperatoris  usurpauerat  sibi  per  uiolenciam  et  prodconem  imperium 
constantinopolilanum.  Dictus  autem  ysaac  imperator  fuit  auus  dne 
nostre  regine  beatricis^  pater.  s.'  matris  eius.  Venit  igitur  prcdictus 
alexius  miserabilem  querimoniam  deponens  de  subiectis  suis  qui 
eum  iniuste  priuauerant  imperio  suo  supplicansque  ipsis  humi- 
liter  ut  dignarentur  ipsum  iuuare  pietatis  intuitu.  Quod  si  forte 
per  eorum  auxilium  et  recuperare  posset  imperium  omnia  necc 
francis  et  lombardis  in  subsidium  terre  sancte  largissime  ministraret. 
Victi  ergo  pietate  et  paupertate  compulsi  secuti  sunt  illum  quo- 
rum timoré  constantinopolitani  repeperunt  dnum  suum.  simulantes 
fidem  exterius  cum  interiora  ipsorum  plena  essent  dolo.  Receden- 
tibus  igitur   francis    et    lombardis   et   nauigantibus    uersus    terram 

aj  Sic.  —  bj  Sic.  —  c)  un  blanc.  —  dj  Sic.  —  e)  Sic.  —  fj  Sic.  —  g/  pref'ecerunt.  — 
h)  uenecias.  —  i)  Abella  :  «  forte  deest  :  cum  *.  —  jj  scilicel . 

3o.  I.  Cf.  s  17,  note  6.  , 

3o.  3.  Beatrix,  femme  de  Ferdinand  111  (cf.  §  4o).  Celle  partie,  tout  au  moins,  de 
la  Chronique  est  donc  d'un  contemporain  de  Ferdinand  111,  sans  doute  du  même 
auteur  que  la  Vie  de  Ferdinand  qui  suit  (en  supposant  que  toute  la  Chrouique 
ne  soit  pas  d'un  seul  et  même  auteur). 

Bull,  hispan.  aô 


07a  BULLETIN    HISPANIQUE 

sanctam  conque  |  rebantur  autem  de  imperatore  alexio  quod  non  rcs- 

ponderet  eis   sec  "  promisa  conslantinopolitani    terga    uerterunt   ad 

dnum   suum  imperatorem   alexiiim   et    ipsum   subiectione    et  obe- 

diencia  promissa  et  débita  priuauerunt.  Videns  autem  alexius  nequi- 

ciam  subdictorum  misit  post  francos  et  lombardos  nuncios  suos  qui 

reuocarent   eos   quod   et   faclum   est.  ^'enientes   autem   aplicuerunt 

iuxta  ciuitatem.  s.  constantinopolim  erant  autem  paucissimi  respectu 

multitudinis    populi    conslantinopolitani.    Sed   potens   est   dnus   sic 

in  paucis  ut  in  multis  cum  uoluerit  triumphare.  Adiuti  ergo  diuina 

gra   sine  qua   nichil  possent  facere.   intrauerunt  per  uim  ciuitatem 

et  interficientes  dextera  leuaque   multos  de  habitatoribus  loci  obti- 

nuerunt  ciuitatem  et  spolia  eius  infinita  diripuerunt.  aurum  argentum 

lapides  preciosos.  pannos  sericos  diuersi  generis  ornamenta  quibus 

plus    omnibus  supra  omnes  ciuitates  que  in  mundo  erat  ''   constan- 

tinopolis.  haljundabat.    Eligitur   in  imperatorem  baldouinus   comes 

flandrensis.   Marchio  uero  montis  ferati  factus  est  rex  in  salonica. 

Eligitur  in  patriarcham  quidam  uenecus-    quem  ego  uidi  consecrari 

rome   in   ecclesia  sancti   pétri  per  manum  dni  Innocencii.  11113.  Ex 

illo  tempore  latini  obtinuerunt  constantinopolitan'  et  ecclesia  cons- 

tantinopolitana  obedit ecclesie romane  cuius  patriarcham  non  predictum 

sed  successorem'»  eius  uidi  ego  in  consilio  lateranen  conuocato  sub 

innocentio  tercio.  Quod  concilium  celebratum  est  anno  reuoluto  post 

mortem    gloriosi    régis    in  quo  interfuerunt.   CCCC'.  XX.  episcopi, 

et  Ixx  11.    archiepiscopi  et  patriarcha  constantinopolitanus  et  ilirli- 

mitanus  et  aquilen"  et  grandèsis^  Albatum'/  uero   et  prior''  et  aliis 

dignitatibus  fulgencium  non  erat  numerus».  Hoc  autem  fuit  in  festo 

omnium  sanctorum  et  idus'  mensis  iulii  sequentis  donus  innoccncius 

tercius  uir   bonus  cuius  facta   prosperaiî   deus   ingressus  est  uiam 

uniuerse  carnis^.  ^  ^,...^r., 

Georges  CI  ROT. 

(A  suivre.) 

U;  juillet  1912. 
7(XJ''  anniversaire  de  la  bataille  de  las  Navas 

aj  secundum  (la  phrase  conquerebantur...  promis[s]a  forme  parenthèse).—  b)  Sic  — 
C)  Sic.  —  d)  Abella  :  «forte  constantinopolim».  —  e)  Abella  :  «  forle  aquileiensiS'>.  — 
IJ  gradvHsis. —  g)  Abbanun.  —  h)  Abella  :  «  forte  piiorum«.  —  i)  Abella  :  «  forte  idibus  ». 

3o.  3.  Lire  Innocent  111.  Cf.  mon  iiitrotluction  (p.  89). 

3o.  4.  L'auteur  a  donc  vu  le  premier  patriarche  de  Conslanlinoplc,  Mauroccnus 
(Morosini,  mort  en  1211),  lors  de  sa  consécration  en  irîo5  à  Saint-Pierre  de  Rome; 
puis,  lors  du  concile  de  Latran  (1210),  son  successeur  Gervaisc,  élu  en  novembre 
niD  et  mort  en  1219  (cf.  Gams,  Séries  Episcopoi-um). 

3o.  5.  Luc  (p.  ii3,  1.  37)  parle  aussi  de  ce  concile,  qui  eut  lieu,  dit-il,  «  par  omne 
annum  antequam  Rex  Fernandus  rcgnare  inciperat  »,  et  auquel  assistèrent  407  évê- 
ques,  71  primats  et  métropolitains,  les  palriarclies  de  Constantinoplc  et  de  Jérusa- 
lem, les  vicaires  dfts  [)atriarches  d'.^nlioche  et  d'Alexandrie  ;  800  îibbés  ou  prieurs, 
un  nombre  incalculable  de  procureurs  d'évèques,  d'abbés,  d'empereurs,  de  rois  et 
de  princes.  Il  omet  les  patriarches  d'Aquilée  et  de  (irado  (sur  ces  deux  palriarchats, 
voir  Eni).  snçfr.,  t.  I,  p.  117). 

3o.  ti.  Innocent  III  mourut  le  iG  (non  le  i5)  juillet  laiG. 


DOMINIQUE   SOTO 


ET    LA 


scolâstique  parisienne 

{Suite'.) 


XXIII 


Dominique  Soto  et  les  lois  de  la  chute  des  graves. 

Il  est  difficile  de  lire  les  écrits  de  Jean  Dullaert,  d'Alvarès 
Thomé,  de  Louis  Goronel,  de  Jean  de  Celaya,  sans  faire  une 
remarque,  ni  de  faire  cette  remarque  sans  en  être  surpris. 
Tous  ces  auteurs,  à  la  suite  d'Heytesbury,  du  Calculateur,  de 
leurs  commentateurs  italiens,  traitent  longuement  du  mouve- 
ment uniformément  difforme;  aucun  d'entre  eux  ne  prend 
soin  de  montrer  par  un  exemple  qu'un  tel  mouvement  se 
rencontre  ou  peut  se  rencontrer  dans  la  nature.  L'exemple, 
cependant,  paraissait  être  à  l'immédiate  disposition  de  nos 
régents  de  Montaigu,  de  Coqueret  et  de  Sainte-Barbe.  Albert 
de  Saxe  avait  indiqué  l'hypothèse  du  mouvement  unifor- 
mément accéléré  comme  étant  l'une  des  deux  suppositions  que 
l'on  pouvait  faire  sur  la  chute  des  corps  graves  ;  cette  opinion 
était  reproduite  dans  les  diverses  éditions,  alors  imprimées, 
des  Quaestiones  in  libros  de  cselo  et  niundo;  seules  les  éditions 
données  à  Paris,  en  i5i6  et  en  i5i8,  allaient  l'omettre.  Nos 
scolastiques,  qui  lisaient  et  citaient  si  volontiers  Albert  de  Saxe, 

I.  Voir  Bail,  hisp.,  t.  XII,  p.  276,  357;  t.  XIII,  p.  157,  291,  44o  ;  t.  XIV,  p.  60, 
137,  375. 


0-6  BULLETIN    HISPANIQUE 

ne  pouvaient  guère  n'y  avoir  pas  rencontré  cette  hypothèse; 
l'y  eussent-ils  laissé  passer  inaperçue  qu'ils  l'eussent  retrouvée 
au  manuel  de  Philosophie  de  Pierre  Tataret,  si  souvent  imprimé 
de  leur  temps,  oii  elle  était  recopiée.  Si  étonnant  que  le  fait 
puisse  paraître,  il  est  cependant  de  constatation  sûre  et  facile; 
aucun  maître  parisien,  au  début  du  wi'  siècle,  n'a  eu  la  pensée 
de  citer  la  chute  des  graves  comme  exemple  de  mouvement 
uniformément  difforme. 

Vers  le  même  temps,  Léonard  de  Vinci,  guidé  sans  doute 
par  la  lecture  d'Albert  de  Saxe,  s'est  fortement  attaché  à 
proclamer  cette  vérité  :  La  chute  des  graves  est  un  mouvement 
uniformément  accéléré.  Mais,  bien  qu'il  eût  étudié  les  écrits 
d'Heytesbury,  du  Calculateur,  d'Ange  de  Fossombrone,  il  ne 
paraît  pas  avoir  tiré  profit  de  ce  que  ces  écrits  enseignaient 
au  sujet  du  mouvement  uniformément  difforme;  il  n'a  pas  su 
reconnaître  avec  exactitude  la  loi  qui  relie  au  temps  écoulé 
le  chemin  parcouru  en  un  mouvement  uniformément  accéléré. 

Au  début  du  xvi*  siècle,  donc,  les  deux  propositions  qui 
règlent  la  chute  des  graves  ont  été  formulées  depuis  cent  cin- 
quante ans;  depuis  ce  temps,  chacune  d'elles  a  été  répétée  un 
très  grand  nombre  de  fois;  mais,  toujours,  ceux  qui  formulent 
la  première  de  ces  propositions  semblent  ignorer  la  seconde, 
ceux  qui  enseignent  la  seconde  ne  soufflent  mot  de  la  première; 
personne  encore  ne  semble  avoir  songé  à  les  réunir  et,  en 
les  réunissant,  à  créer  la  théorie  du  mouvement  des  corps 
pesants. 

Qui  donc  eut,  le  premier,  l'idée  de  souder  l'une  à  l'autre  ces 
deux  propositions?  Nous  ne  saurions  le  dire;  mais  en  lisant  les 
Questions  de  Soto,  nous  constatons  que  la  soudure  est  faite; 
le  savant  Dominicain,  d'ailleurs,  ne  paraît  pas  nous  la  présenter 
comme  chose  nouvelle  et  dont  il  soit  l'auteur. 

Nous  savons  que  Francisco  Soto,  lors(ju'il  vint  étudier  à 
Paris,  fut  reçu  par  son  compatriote  Louis  Goronel  de  Ségovie; 
nous  ne  serons  donc  pas  étonné  que  Soto  enseigne,  touchant 
la  difformité  des  latitudes,  une  doctrine  semblable  à  celle  que 
Goronel  a  professée;  et  en  effet,  si  l'exposition  que  le  professeur 
de  Salamanque  donne  de  cette  question  diffère  de  celle  qu'a 


DOMI?IIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQUE    PARISIENNE  877 

donnée  le  régent  de  Montaigu,  c'est  seulement  par  une  plus 
grande  brièveté  et  par  un  délaissement  plus  complet  des 
subtilités  mathématiques. 

C'est  en  ses  Questions  sur  le  septième  livre  de  la  Physique 
d'Aristote  que  Soto  développe  son  opinion  touchant  la  vitesse 
du  mouvement  local  ;  pour  se  conformer  à  un  usage  presque 
constamment  suivi  depuis  Bradwardine  et  Albert  de  Saxe,  et 
auquel  DuUaert,  Alvarès  Thomé  et  Jean  de  Gelaya  n'ont  eu 
garde  de  se  soustraire,  il  fait  précéder  ce  développement  d'une 
introduction  arithmétique'  qu'il  intitule  :  Digressio  de  propor- 
tionihus.  Aussitôt  après  cette  digression  mathématique,  vient 
une  question  formulée  en  ces  termes  :  <(  La  vitesse  d'un  mou- 
vement, considéré  en  son  effet,  s'évalue  t-elle  par  la  grandeur 
de  l'espace  qui  est  franchi  ^P  » 

La  difformité  du  mouvement  peut  dépendre  soit  de  sa  répar- 
tition au  sein  du  mobile,  soit  de  sa  succession  dans  le  temps; 
cest  la  difformité  relative  au  sujet  mobile  qui,  d'abord,  retient 
l'attention  du  Professeur  de  Salamanque. 

En  un  mouvement  de  rotation,  la  vitesse  est  celle  du  point  qui 
est  mû  le  plus  rapidement.  Soto  se  range^  à  cette  «  conclusion 
d'Hentisberus,  que  les  philosophes  admettent  à  juste  titre». 
Mais,  pour  cela,  il  lui  a  fallu  rejeter  cette  objection^:  uEn  tout 
genre  de  mouvement,  on  doit  adopter  la  même  mesure.  Or, 
dans  le  mouvement  d'altération,  lorsque  la  chaleur  se  distribue 
d'une  manière  uniformément  difforme  en  quelque  sujet,  du 
degré  zéro,  par  exemple,  au  degré 8,  on  dénomme  cette  chaleur 
non  par  son  degré  le  plus  élevé,  mais  par  son  degré  moyen, 
savoir  le  degré  4-  Puis  donc  qu'en  une  roue,  mue  d'un  mou- 
vement  de   rotation,    la  vitesse  du   mouvement  s'étend  avec 

une  uniforme  difformité  du  centre  à  la   circonférence ,  la 

vitesse  du  mouvement  de  toute  la  roue  se  devrait  évaluer 
par  la  vitesse  du   point   milieu    du  rayon.  » 


1.  Reverendi  Patris  Dominici  Soto  Segobiensis  Theologi  ordinis  prœdicatorum  super 
octo  libros  Physicoram  Aristotelis  Quœstiones.  Cum  Privilegio.  SalmanticcR  In  sedibus 
Domiaici  à  Portonariis,  Gath.  M.  Typographi.  MDLX.XII.  Fol.  90,  col.  a  à  fol  92  col.  b. 

2.  Dominici  Soto  Op.  laud.,  lib.  VIII,  quaest.  III;  éd.  cit.,  fol.  92,  col.  b. 
S.   Dominici  Soto  Op.  laud.,  quaest.  cit.;  éd.  cit.,  fol.  gS,  col.  b. 

i.   Dominici  Soto  Op.  laud.,  quœst.  cit.;  éd.  cit.,  fol.  92,  col.  c. 


378  BULLETDi    HISPANIQUE 

Venons  à  ce  que  le  Professeur  de  Salamanque  enseigne'  du 
mouvement  difforme  dans  le   temps. 

<(  Le  mouvement  uniformément  difforme  par  rapport  au 
temps  est  celui  dont  la  difformité  est  telle  :  Si  on  le  divise 
suivant  le  temps,  c'est-à-dire  suivant  des  parties  qui  se  succè- 
dent dans  le  temps,  en  chaque  partie,  le  mouvement  du  point 
milieu  excède  le  mouvement  extrême  le  plus  faible  de  cette 
même  partie,  d'une  quantité  égale  à  celle  dont  il  est  excédé 
par  le  mouvement  extrême  le  plus  intense. 

»  Cette  espèce  de  mouvement  est  celle  qui  est  propre  aux 
corps  qui  se  meuvent  de  mouvement  naturel  et  aux  projectiles. 

»  Toutes  les  fois,  en  effet,  qu'une  masse  tombe  d'une 
certaine  hauteur  au  sein  d'un  milieu  homogène,  elle  se  meut 
à  la  fin  plus  vite  qu'au  commencement.  Au  contraire,  le 
mouvement  des  corps  projetés  [de  bas  en  haut]  est  plus  faible 
à  la  fin  qu'au  commencement.  Et  même  le  premier  s'accélère 
uniformément,  et  le  second  se  retarde  uniformément.  » 

De  ce  passage  si  net  et  si  important,  donnons  le  texte  latin 
en  son  entier  : 

u  Motus  uniformiter  difformis  quoad  tempiis  est  motus  ita 
dijformis  ut,  si  dividatur  secunduin  tempus  (scilicet  secundum 
prius  et  posterius),  cujuscunque  partis  punctum  médium  illa 
proportione  excedit  remissimum  exlremum  illius  partis  qua  exce- 
ditur  ab  intensissimo. 

))  Hsec  motus  species  proprie  accidit  naturaliter  motis  et  projectis. 

n  Ubi  cnim  moles  ab  alto  cadit  per  médium  uniforme,  velocius 
movetur  in  fine  quam  in  principio.  Projectorum  vero  motus 
remissior  est  in  fine  quam  in  principio.  Atque  adeo  primas  unifor- 
miter difformiter  intenditur,  secundus  vero  uniformiter  difformiter 
remiilitur.  » 

Une  évidente  inadvertance  a  introduit  deux  fois,  en  la 
dernière  phrase,  le  mot  difformiter  qui  n'y  devrait  pas  figurer; 
Soto  veut  que  la  chute  du  grave  et  l'ascension  du  projectile 
soient  deux  mouvements  uniformiter  difformes  ;  dès  lors, 
comme  Ilcytesbury  le  fait  constamment,  et  une  foule  d'auteurs 
après  lui,  il  aurait  dû  dire  du  premier  uniformiter  intenditur, 

I.   Dominici  Solo  Op.  Iniid.,  qntrsL  cit.;  od.  cit.,  fol.  92,  col  d. 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SGOLASTIQUE    PARISIENNE  879 

et  du  second,  uniformiler  remitlitar .  jNous  avons  vu,  au  §  XXIV^, 
que  Gaétan  de  Tiène,  Messino  et  Ange  de  Fossombrone 
avaient,  tous  trois,  insisté  sur  la  synonymie  de  ces  expressions 
avec  la  qualification  uriiformiier  dijjormis. 

Ces  expressions,  nous  les  avons  ainsi  traduites  :  le  mouve- 
ment s'accélère  uniformément,  se  retarde  uniformément.  Pour 
justifier  l'exactitude  de  cette  traduction,  nous  pourrions 
recourir  à  l'autorité  de  Messino  ;  nous  allons  en  invoquer 
une  plus  probante  encore;  Jean  de  Celaya  va  nous  dire  que 
ce  sens  est  bien  celui  que  l'on  attribuait  à  de  telles  expressions 
parmi  les  maîtres  espagnols  de  l'Université  de  Paris,  au 
temps  oij  Soto  recueillait  leurs  enseignements. 

u  II  est  une  chose,  dit  Celaya',  dont  il  faut  être  averti  ; 
à  parler  proprement,  on  ne  doit  aucunement  dire  que  le 
mouvement  est  intense  (intensus)  ou  faible  (remissus),  mais 
bien  qu'il  est  rapide  (velox^  ou  lent  (lardas);  mais  la  commune 
manière  de  parler  en  a  décidé  au  contraire;  or  c'est  l'avis  du 
Philosophe  qu'il  faut  parler  comme  la  foule  et  penser  comme 
le  petit  nombre;  nous  emploierons  donc  constamment  ces 
termes  :  mouvement  intense,  mouvement  faible,  à  la  place 
de  ceux-ci  :  mouvement  rapide,  mouvement  lent;  nous 
emploierons  l'expression  :  croît  en  intensité  (intenditur)  à  la 
place  des  mots  :  s'accélère  fvelocitatar),  les  mots  :  s'affaiblit 
(remittiiur)  à  la  place  des  mots  :  se  retarde  (retardetur) .  » 

Ces  diverses  explications  ne  nous  paraissent  laisser  place 
à  aucun  doute;  nous  pouvons,  avec  assurance,  attribuer  ces 
deux  propositions  à  Dominique  Soto  : 

La  chute  d'un  grave  est  un  mouvement  uniformément 
accéléré. 

L'ascension  d'un  projectile  est  un  mouvement  uniformément 
retardé. 

En  un  tel  mouvement,  quelle  loi  fera  connaître  le  chemin 
décrit  parle  mobile  en  un  temps  donné?  Soto  va  maintenant 
nous  le  dire  2  : 

«  Le  mouvement  uniformément  difforme   par    rapport  au 

I.  Magistri  Johannis  de  Celaya  Expositio  in  libros  Physicorum;  fol.  Ixxxv,  col.  d. 
a.  Dominici  Soto,  Op.  laud.,  qusest.  cit.;  éd.  cit.,  fol.  gS,  col.  d  et  fol.  gl,  col.  a. 


38o  BULLETIN    HISPANIQUE 

temps  suit  presque  la  même  règle  que  le  mouvement  uniforme. 
Si  deux  mobiles,  en  effet,  parcourent  en  un  même  temps 
des  longueurs  égales,  bien  que  l'un  se  meuve  uniformément 
et  l'autre  d'une  manière  difforme  quelconque,  décrivant  par 
exemple  un  pied  durant  la  première  demi-beure  et  deux  pieds 
pendant  la  seconde,  du  moment  que  ce  dernier,  en  l'heure 
entière,  parcourt  juste  autant  de  pieds  que  le  premier,  qui 
se  meut  uniformément,  ces  deux  mobiles  se  mouvront  éga- 
lement. 

»  Mais  ici  survient  un  doute  :  La  vitesse  d'un  mobile  mû 
de  mouvement  uniformément  difforme  doit  elle  être  dénommée 
par  son  degré  le  plus  intense?  Si,  par  exemple,  la  vitesse  d'un 
grave  qui  tombe  pendant  une  beure  croît  du  degré  zéro  au 
degré  8,  doit-on  dire  que  ce  grave  a  un  mouvement  de 
degré  8?  Il  semble  que  la  réponse  affirmative  soit  la  vraie, 
car  c'est  bien  là  la  loi  qui  semble  suivie  par  le  mouvement 
uniformément  difforme  quant  au  sujet  mobile.  Nous  répon- 
drons néanmoins  que  la  vitesse  du  mouvement  uniformément 
difforme  par  rapport  au  temps  s'évalue  par  le  degré  moyen 
et  doit  recevoir  sa  dénomination  de  ce  degré.  On  ne  doit  pas 
raisonner  à  son  égard  comme  à  l'égard  du  mouvement  uni- 
formément difforme  quant  au  sujet.  En  ce  dernier  cas,  en 
effet,  la  raison  de  la  règle  adoptée  était  la  suivante:  La  ligne 
que  décrit  le  point  le  plus  rapidement  mû,  tout  le  mobile 
la  décrit  avec  lui,  en  sorte  que  le  tout  se  meut  aussi  vite  que 
ce  point  là.  Tandis  qu'un  mobile  mû  de  mouvement  unifor- 
mément difforme  par  rapport  au  temps  ne  décrit  pas  un 
chemin  aussi  grand  que  s'il  se  mouvait  uniformément,  pendant 
la  même  durée,  avec  la  vitesse  qu'il  atteint  à  son  degré 
suprême;  cela  est  évident  de  soi.  Nous  pensons  donc  que 
le  mouvement  uniformément  difforme  doit  être  dénommé  par 
son  degré  moyen.  Exemple  :  Si  le  mobile  A.  se  meut  pendant 
une  heure  en  accélérant  constamment  son  mouvement  du 
degré  zéro  jusqu'au  degré  8,  il  parcourra  juste  autant 
de  chemin  que  le  mobile  B  qui,  pendant  le  même  temps,  se 
mouvrait  uniformément  avecle  degré  4. 

»  11  résulte  de  là   que,  toutes  les  fois  que  des  mobiles  sont 


DOMINIQUE    SOTO    ET    LA    SCOLASTIQUE    PARISIENNE  OOI 

mus  de  mouvement  difforme,  il  faut  réduire  ces  mouvements 
à  l'uniformité.  » 

De  cette  réduction,  Oresme  a  donné  des  exemples,  qui  sont 
d'une  analyse  mathématique  quelque  peu  relevée,  et  ces  exem 
pies  ont  été  à  l'envi  multipliés  et  généralisés  par  Bernard 
Torni,  Jean  Dullaert  et  Âlvarès  Thomé  ;  Jean  de  Celaya  avait 
reproduit  la  théorie  de  Thomé.  mais  Louis  Goronel  s'était 
horné  à  emprunter  à  Oresme  un  seul  de  ses  problèmes,  le  pre- 
mier et  le  plus  simple.  En  cette  étude  mathématique,  Soto 
pénètre  moins  encore;  il  se  borne  à  montrer,  en  traitant  deux 
cas  particuliers,  comment  on  peut  réduire  à  l'uniformité  un 
mouvement  de  ^itesse  continue,  formé  par  la  succession  de 
deux  mouvements  uniformément  accélérés. 

Au  cours  de  la  lecture  du  passage  qui  vient  d'être  cité,  deux 
remarques  peuvent  être  faites  : 

En  premier  lieu,  la  chute  d'un  grave  y  est  prise  comme 
exemple  de  mouvement  uniformément  difforme  ;  par  là  se 
trouve  affirmée  de  nouveau  cette  proposition  qu'une  telle  chute 
est  uniformément  accélérée. 

En  second  lieu,  Soto  discute  si  le  degré  moyen  de  mouve- 
ment doit  servir  à  dénommer  un  mouvement  uniformément 
difforme;  mais  au  sujet  de  la  règle  qui  permet  de  mesurer  le 
chemin  parcouru  en  un  semblable  mouvement,  il  n'éprouve 
aucune  hésitation  ;  il  affirme  d'emblée  que  ce  chemin  est  égal 
à  celui  que  le  mobile  décrirait,  dans  le  même  temps,  par  un 
mouvement  uniforme  où  la  vitesse  serait  la  moyenne  entre 
la  plus  grande  et  la  plus  petite  vitesse  du  mouvement  unifor- 
mément difforme. 

De  cette  règle,  Soto  n'esquisse  aucune  démonstration; 
visiblement,  il  la  regarde  comme  une  vérité  d'usage  courant; 
la  lecture  de  Jean  de  Celaya  nous  a  d'ailleurs  montré  que  ceux 
qui  la.  voulaient  justifier  savaient  au  besoin,  en  ce  temps-là, 
reprendre  les  considérations  développées  par  Nicole  Oresme. 

Voici  donc  ce  que  le  témoignage  de  Soto  nous  apprend  : 

Avant  le  milieu  du  xvi*"  siècle,  les  Scolastiques  parisiens 
et  leurs  disciples  regardaient  ces  vérités  comme  banales  : 

La  chute  libre  d'un  grave  est  un  mouvement  uniformément 


383  BULLETIN    HISPAMQIIE 

ACCÉLÉRÉ  ;  l'ascension  VERTICALE   d'uN  PROJECTILE   EST  UN   MOUVE- 
MENT UNIFORMÉMENT  RETARDÉ. 

En  un  MOUVEMENT  UNIFORMÉMENT  VARIÉ,  LE  CHEMIN  PARCOURU 
EST  LE  MÊME  QU'eN  UN  MOUVEMENT  UNIFORME,  DE  MEME  DURÉE, 
DONT  LA  VITESSE  SERAIT  LA  MOYENNE  ENTRE  LES  DEUX  VITESSES 
EXTRÊMES    DU    PREMIER    MOUVEMENT. 

Le  labeur  immense  dont  les  pages  précédentes  ont  briève- 
ment retracé  l'histoire  avait  porté  ses  fruits;  on  connaissait 
deux  des  lois  essentielles  de  la  chute  des  corps  ;  en  faveur  de 
ces  lois,  Galilée  pourra  bien  apporter  de  nouveaux  arguments, 
tirés  soit  du  raisonnement,  soit  de  l'expérience  ;  mais,  du 
moins,  il  n'aura  pas  à  les  inventer. 

Pierre  DUHEM. 


NOTES 

SUR  LES  RAPPORTS  DE  NANTES  AVEC  L'ESPAGNE 

[Snile'.) 


II 


I.  La  colonie  espagnole  de  Nantes. 
Son  importance  au  xvp  siècle. 

On  ne  saurait  fixer  avec  précision  la  date  de  l'installation 
à  Nantes  des  premières  familles  espagnoles.  On  s'accorde  à 
penser  que  les  juifs  ayant  été  chassés  de  Bretagne  en  la/io, 
quelques  commerçants  sont,  à  ce  moment,  venus  d'Espagne 
pour  s'adonner  au  trafic  de  l'argent  et  aux  opérations  de 
change.  De  bonne  heure,  des  Espagnols  établis  sur  la  paroisse 
Sainte-Croix,  près  de  la  place  aux  Changes,  auraient  exercé  la 
profession  de  banquiers.  Le  fait  ne  saurait  surprendre.  Sans 
avoir  encore  une  grande  importance,  le  port  de  Nantes  était 
déjà  un  lieu  d'échanges  entre  les  produits  des  Flandres  et 
ceux  de  la  Péninsule  ibérique;  des  Espagnols  apportaient  des 
fers,  ils  venaient  acheter  des  vins.  En  outre,  Nantes  était  un 
port  d'embarquement  pour  de  nombreux  pèlerins  se  rendant 
à  Saint- Jacques  de  Compostelle;  aussi  le  mouvement  d'espèces 
qui  s'effectuait  sur  la  place  pouvait-il  être  assez  important 
pour  laisser  aux  Espagnols  et  aux  Lombards  une  marge  de 
bénéfices  rémunérateurs. 

Nantes  était  aux  xni''  et  xiv*  siècles  le  rendez-vous  d'étrangers, 
venus  en  nombre  déjà  suffisant  pour  émouvoir  la  population 

I,  Voir  Bull,  hispan.,  t.  XIV,  p.  119. 


381  BULLETIN    HISPANIQUE 

de  la  ville.  Plusieurs  fois,  ses  habitants  firent  entendre  leurs 

doléances  aux  ducs  de  Bretagne  et  à  diverses  reprises  ceux-ci 

interdirent   aux    a  non  regnicoles  »   de    vendre  des   draps  ou 

d'acheter  des  vins.  Pour  tourner  ces  diiTicultés,  des  maisons 

étrangères   établirent  peut-être  à  Nantes  des  facteurs  ou  des 

représentants  qui  se  soumirent  aux  conditions  commerciales 

imposées  par  les  souverains  bretons.  Le  cosmopolitisme  de  la 

ville  de  Nantes  nous  est  attesté  dès  le  xv*"  siècle  par  diftérents 

documents.    L'auteur   du    Blason  de   Nantes    écrivait  à   celte 

époque  : 

C'est  bonne  ville  à  tous  venans 
Et  y  sont  très  bons  les  niarchans 
Très  riches... 

Nous  ne  possédons  pas  de  renseignements  concernant  les 
Espagnols  établis  à  Nantes  au  xiv*  siècle;  mais  nous  sommes 
mieux  informés  pour  la  période  qui  s'ouvre  avec  le  règne  de 
Jean  V.  La  colonie  espagnole  de  Nantes  était  en  1/467  suffîsam- 
ment  riche  pour  que  l'on  ait  pu,  à  titre  de  représailles,  faire 
une  saisie  de  00,000  écus  de  marchandises  appartenant  à  des 
commerçants  espagnols  fixés  à  la  Fosse  de  Nantes".  A  quelques 
années  de  là  en  i^y^i,  les  fermiers  de  la  taxe  du  denier  pour 
livre  demandent  à  être  déchargés  de  leur  ferme  en  raison  de 
ce  que  les  principaux  marchands  de  la  nation  d'Espagne  ont 
été  pris  et  retenus  de  leurs  personnes  es  prisons  du  Bouflav^. 
Dans  leur  requête,  ils  indiquent  qu'à  la  suite  de  tracasseries 
faites  aux  négociants  espagnols  leur  commerce  avec  la  ville  a 
beaucoup  diminué.  Ce  document  marque  l'importance  des 
affaires  de  Nantes  avec  l'Espagne.  11  en  est  de  même  du 
préambule  de  l'ordonnance  du  29  décembre  i/jQ.'i,  rendue  par 
Charles  Vlll,  et  rétablissant  dans  tous  leurs  privilèges  les 
Espagnols  négociant  à  Nantes.  Cet  acte  constate  qu'avant  la 
guerre  ils  avaient  l'habitude  de  tenir  en  cette  ville  une  bourse 
coulumière  cl  qu'ils  ont  abandonné  cette  pratique  depuis 
quelques  années-^. 


I.  Arch.  de  la  Loire-Inf ,  Br>,  f  ^o. 
■j.  Arch.  miin.  do  Nantes,  GC.  3M3. 
3.    L(î  lÎPiif,  l>ii  rommerrr  dr  .\antes,  \i<^f^.  pp.  2f<  el  ar». 


NOTES    sua    LES    RAPPORTS    DE    NANTES    AVEC    l'eSPAGNE  385 

Sous  l'influence  du  courant  commercial,  une  colonie  espa- 
gnole s'était  cependant  formée  à  Nantes  au  milieu  du  xv' siècle. 
Nous  en  avons  des  preuves  nombreuses.  La  famille  Rocaz 
s'était  fixée  dans  le  Comté  nantais  bien  avant  i44ô.  Olivier 
Rocaz  était  un  riche  marchand  qui  possédait  à  Nozay  une 
maison  où  les  ducs  de  Bretagne  avaient  coutume  de  descendre 
quand  ils  venaient  à  Nantes.  En  récompense  de  l'hospitalité 
qu'il  offrait  aux  souverains  bretons,  Olivier  Rocaz  fut  anobli 
en  i4/i6'.  A  cette  même  époque,  la  famille  Darande  était 
également  installée  à  Nantes.  Elle  avait  exercé  le  commerce  et 
y  avait  fait  fortune.  Elle  avait  enrichi  de  dons  l'église  des 
Cordeliers  et  avait  son  tombeau  dans  le  cloître  de  leur  couvent. 
Une  inscription  gravée  sur  une  pierre  tombale  nous  apprend 
que  la  mort  cruelle  avait  frappé,  le  23  août  1^62,  Gonsallo 
Alfonseo  d'Arande.  Son  fils  avait  été  ravi  à  l'affection  des  siens 
le  2  avril  i/jôy^  Si  nous  ouvrons  le  premier  registre  des 
baptêmes  de  la  paroisse  Saint  Nicolas,  daté  de  14673,  nous 
constatons  la  présence  de  nombreux  marchands  espagnols 
demeurant  à  la  Fosse  de  Nantes.  On  y  relève  en  effet  les  noms 
de  Martin  de  Bitone,  marchand  des  parties  d'Espagne,  de 
François  et  de  Diego  de  Pamplique,  de  Alonzo,  fils  de  Martin 
de  Myrande,  ayant  pour  parrains  Alonzo  de  Myrande,  des 
parties  d'Espagne  et  pour  marraine  Perrine,  femme  de  Perico 
Rouys,  d'Espagne. 

Sont  encore  cités  dans  les  premiers  registres  de  baptême  les 
noms  suivants  :  Pierre  de  Valence,  d'Espagne,  Jean  fils  de 
Consalvo  de  Gompludo,  Ferrand  de  Contrerez,  Diago  de 
Oustize,  Maria  de  Gournez,  François  de  Heredia,  Jean,  fils 
de  Consalvo  de  Lerma,  Jean,  fils  de  Jean  de  la  Presse,  mar- 
chand des  parties  d'Espagne,  Sebastien  de  Vildiago.  Outre  ces 
noms  extraits  des  registres  de  la  paroisse  Saint-Nicolas,  les 
documents  d'archives  nous  signalent  encore  à  Nantes  à  la  fin 
du  xV  et  au  début  du  xvi"  siècle  la  présence  de  bien  d'autres 

1.  Livre  doré  de  l'hôtel  de  ville  de  Nanles,  éd.  De  la  Nicollière-Teijciro,  art,  fioca:. 

2.  De  la  Nicollière-Tcijeiro,  Notice  sur  l'ancien  couvent  des  Cordeliers  de  Nanle». 
(Bulletin  de  la  Soc.  arch.  de  IVantes,  1877). 

3.  Arch.  mun.  de  Nantes,  GG.  168  et  suivants.  (Actes  de  baptême  de  la  paroisse 
Saint>Nicolas). 


386  BULLETIN    HISPAiVIQUE 

Espagnols:  un  chang^eur  du  nom  de  Harvyz',  des  marchands 
de  laines  Martinez  et  Ryaga%  un  entrepositaire  de  fers,  le 
comte  Salvador. 

'  Au  moment  du  siège  de  Nantes,  Sanche  de  Ringuez^  reçoit 
2  1  livres  pour  avoir  remis  en  état  treize  canons;  Jean  Houys, 
qui  fut  garde  de  l'artillerie  de  Nantes  au  début  du  xvi''  siècle, 
est  qualifié  de  marchand  et  citoyen  dans  un  acte  de  i5o/i^ 
Les  Harrouys  qui  devaient  jouer  un  rôle  considérable  dans 
l'histoire  de  Nantes  percevaient  des  droits  de  pêche  qui  leur 
avaient  été  concédés  par  les  ducs  de  Bretagne^.  En  1627,  un 
Harrouys  est  clerc  de  la  trésorerie  et  dès  i536  ils  sont  sei- 
gneurs de  la  Rivière. 

La  politique  des  ducs,  de  Charles  VIII  et  de  Louis  XII  ne  fut 
pas  sans  inlluencer  le  développement  de  la  colonie  espagnole 
de  Nantes,  mais  les  vexations  que  subirent  les  marranes 
d'Espagne  à  la  fin  du  xv"  siècle  les  poussèrent  sans  doute 
à  émigrer  vers  d'autres  régions.  Il  est  à  présumer  qu'un 
certain  nombre  d'entre  eux  vinrent  s'établir  à  Nantes  et  contri- 
buèrent au  développement  de  la  colonie  espagnole  de  cette 
ville. 

Si  les  pièces  d'archives  concernant  l'installation  des  Espa- 
gnols à  Nantes  sont  assez  abondantes  pour  nous  donner  un 
aperçu  de  l'importance  de  leur  colonie  au  commencement  du 
xvi'^  siècle,  elles  deviennent  plus  nombreuses  encore  à  partir 
du  règne  de  François  I®"^.  En  même  temps,  elles  sont  plus 
explicites  et  nous  permettent  de  faire  revivre  l'histoire  de  ce 
groupement.  Les  registres  des  paroisses,  les  registres  des 
mandements  de  la  Chambre  des  comptes  oi"!  sont  transcrites 
les  lettres  de  naturalité,  le  Catalogue  des  actes  de  Franrois  I"', 
les  collections  conservées  aux  archives  départementales  et 
communales  de  Nantes  sont  autant  de  sources  dans  lesquelles 
l'on  peut  puiser  des  renseignements  variés. 

Les  registres  des  mandements  de  la  Chambre  des  comptes 

I.  ArcFi.  de  la  Loire-lnf.,  G.  147. 
3.  Arcli.  mun.  do  Nantes,  EE.  189. 
3.   Arch.  iTiun.  de  Nantes,  GG.  228. 
ft.  Arcli.  mun.  de  Nantes,  EE.  a66. 
5.  Arcti.  de  la  Loire-lnf.,  B.  i885. 


NOTES  SUR  LES  RAPPORTS  DE  NANTES  AVEC  l'esPAGNE      887 

nous  livrent  les  noms  des  Espagnols  naturalisés  au  cours  du 
xvi*^  siècle.  Le  nombre  des  naturalisations  fut  considérable 
depuis  le  règne  de  Louis  XII  jusqu'à  celui  de  Henri  IV.  On 
accordait  même  la  qualité  de  Français  avec  une  telle  facilité 
qu'en  1676  nous  verrons  les  Nantais  s'élever  contre  l'abus  des 
lettres  de  naturalité'.  On  peut  du  reste  juger  du  mouvement 
des  naturalisations  par  le  relevé  suivant  établi  d'après  les 
registres  de  la  Chambre  des  comptes. 

I"  livre.  1 492-1531.  Bernardin  de  Médines,  Jean  d'Ariagne,  Michel 
Marquier. 

3'  livre.  i533-i546.  François  de  Nantedilles,  Ferrando  de  Astou- 
dille,  Lopezet  Jean-Baptiste  Dache. 

3*  livre.  i546-i555.  André  Ruys.  Sanchez  Deheriva,  François 
Ferray,  Gatien  d'Aragon,  Jean  Moneybras, 
François  le  Quetro,  Francisque  de  Léon, 
Pierre  Colludo,  Absencion  de  Acquière, 
Rodrigo  de  Valtaze,  Diago  Victoria. 

4'  livre.  i555-i56i.  Diego  de  Bourgues,  Pierre  de  Villiers-Real, 
AUonzo  de  Medines,  Heurtino  d'Abandaro, 
Haronce  d'Aragon,  Antoine  Deredia,  Alonzo 
d'Astoudille,  Bernard  de  Medines,  Diago  de 
Lessuma. 

5"  livre.  i56i-i57l.  Jean  Mandiel,  François  de  Carosse,  Ballhazar 
de  Saines,  Ollivier  Ferrer,  Martin  de  Monti- 
bon,  Lopez  d'Asche. 

Nous  arrêtons  ici  une  liste  qui  serait  interminable  si  nous  la 
donnions  aussi  complète  que  nous  pourrions  le  faire,  en  indi- 
quant tous  les  noms  qu'il  serait  possible  de  relever  sur  les 
registres  jusqu'au  moment  de  Favènement  de  Henri  IV.  Il  est 
à  remarquer  qu'au  milieu  de  ces  noms,  nous  n'avons  pas 
retrouvé  ceux  d'un  certain  nombre  de  grandes  familles  d'ori- 
gine espagnole  qui  ont  tenu  une  place  marquée  à  Nantes  :  les 
Harrouys,  les  Santo-Domingo,  les  Myron,  les  d'Espinoza,  les 
Marquez  et  tant  d'autres  qui  nous  sont  connus,  dont  nous 
aurons  à  parler  et  dont  les  noms  reviennent  continuellement 

I.  Le  Beuf,  Du  commerce  de  Nantes.  —  Celte  même  année  les  États  de  Blois 
demandent  également  la  diminution  des  lettres  de  naturalité. 


388  BULLETIN    HISPANIQUE 

dans  les  actes  de  létat  civil  ou  dans  l'histoire  de  la  ville.  Le 
fait  est  d'ailleurs  facile  à  expliquer.  Quelques  anciens  membres 
de  ces  familles  ont  pu  être  fixés  à  ?santes  avant  l'année  1/192, 
'date  à  laquelle  on  rencontre  les  premières  lettres  de  naturalité. 
En  outre,  certains  Espagnols  omettaient  de  faire  enregistrer 
leurs  lettres  à  la  Cour  des  comptes.  Quelquefois,  les  droits  de 
chancellerie  étaient  remis  aux  impétrants  cl,  tenant  du  roi 
lui-même  leur  qualité  de  Français,  ils  jugeaient  inutile  de  faire 
constater  en  Bretagne  leur  nouveau  statut  personnel.  Ferrand 
d  Asloudille,  marchand  espagnol  domicilié  à  la  Fosse,  se  vit 
ainsi  remettre  les  droits  de  chancellerie  qu'il  devait".  Des 
Espagnols  nouvellement  naturalisés  faisaient  entériner  leurs 
lettres  au  Parlement  de  Bretagne.  Sanson  de  Gasteignasse, 
naturalisé  en  i548,  y  fit  enregistrer  ses  lettres  en  i566; 
Domingo  d'Urquixo,  marchand  de  Nantes,  attendit  à  avoir 
besoin  d'exciperde  sa  qualité  de  Français  pour  faire  reconnaître 
celle-ci  par  le  Parlement  de  Bretagne.  Dans  ces  conditions,  il 
n'est  pas  surprenant  que  les  registres  de  la  Chambre  des 
comptes  ne  révèlent  pas  tous  les  noms  des  Espagnols  habitant 
Nantes  et  naturalisés  Français. 

Les  riches  marchands  étrangers  demeuraient  presque  tous  à 
la  Fosse  de  Nantes  sur  la  j)aroisse  Saint-Nicolas.  Aussi,  la 
lecture  des  registres  de  baptêmes  et  de  mariages  de  cette 
paroisse  nous  renseigne  t  elle  sur  certains  points  intéressants. 

Au  début  de  leur  installation  à  Nantes  les  familles  originaires 
d'Espagne  s'allient  d'abord  entre  elles.  Les  Myrande,  les  Huys, 
les  de  la  Presse,  les  Compludo,  les  Santo-Domingo,  les  Rocaz 
contractent  ensemble  leurs  alliances,  ils  sont  seuls  parrains 
des  enfants  qui  naissent  de  leurs  unions.  Vers  i55o  ils  se 
mêlent  franchement  à  la  population  autochtone.  Ils  se  sont 
alors  enrichis,  ont  acheté  des  terres  nobles,  sont  entrés  dans 
la  vie  publique  et  font  partie  intégrante  de  la  société  nantaise. 

Au  milieu  du  xvi*'  siècle,  le  nombre  des  Espagnols  fixés 
à  Nantes  s'est  tellement  accru  que  l'idiome  castillan  a  conquis 
droit  de  cité  dans  la  ville.   Borv  nombre  d'actes  de  baptême 

I.  Catalogue  des  ucles  de  François  I'''',  n'  ti-j'j'j. 


NOTES  SUR  LES  RAPPORTS  DE  NANTES  AVEC  l'eSPAGNE      889 

sont  rédigés  en  langue  espagnole.   A  titre  d'exemples  nous 
citons  les  actes  suivants  : 

An  diez  et  seys  de  setiembre  i546  fue  batizada  Glauda  de  Juan 
Xupeo.  Fueron  compadres...  etc.. 

Gregoiiohijo  de  Juan  Duset,  el  quai  a  retenido  Gregorio  de  Legonia 
y  Jehan  de  la  llet  e  Francisca  de  Astoudillo  a  sido  batizado  el  9 
deziembre  de  mil  et  quis°  y  quaranta  y  seis  anos. 

En  dos  de  noviembre  i55o  fue  bautizado  Pierres  Hernaot,  hijo  de 
Francisco  Harnaot  y  de  su  muger  Ju"  Tuyet.  Fueron  sus  padrinos 
Pierres  de  Espinosa  y  Guillomo  Tuyet  y  madrina  Maria  de  Espinoza 
muger  de  Juan  Moteil. 

Les  familles  espagnoles  furent  particulièrement  prolifiques  ; 
on  constate  que  celles  de  six  à  huit  enfants  ne  sont  pas  rares. 
La  majeure  partie  de  ceux-ci  s'étant  fixés  dans  le  comté  nantais 
et  en  Bretagne,  il  n'est  pas  surprenant  que  les  noms  d'origine 
espagnole  soient  encore  nombreux  dans  la  péninsule  armo- 
ricaine. 

A  la  différence  des  Hollandais,  qui  formèrent  toujours  un 
clan  très  fermé,  les  Espagnols,  au  contraire,  se  mêlèrent 
rapidement  à  la  vie  de  la  cité  nantaise.  Dans  les  familles  mar- 
quantes^ si  l'une  des  branches  continua  à  exercer  le  négoce, 
les  autres  achetèrent  des  offices,  entrèrent  dans  les  finances,  à 
la  Chambre  des  comptes  ou  au  Parlement  de  Bretagne. 

Dans  le  commerce,  l'activité  des  Espagnols  s'étendait  de 
tous  côtés.  Ils  s'adonnaient  à  la  commission  des  marchandises, 
à  l'armement  des  navires,  au  commerce  d'exportation;  ils 
étaient  également  banquiers  et  changeurs,  fermiers  des  impôts. 
Les  uns  achetaient  des  vins,  des  eaux-de-vie,  des  toiles;  les 
autres  vendaient  des  draps  et  des  fers.  Gonsalve  de  Compludo 
faisait  le  commerce  des  vins  en  i5o6;  il  était  fournisseur  attitré 
de  la  ville.  En  i5i3,  il  y  eut  beaucoup  de  joie  à  Nantes  à  la 
suite  des  nouvelles  reçues  annonçant  que  la  paix  était  faite 
entre  la  France  et  l'Angleterre.  On  distribua  au  peuple  quatorze 
poinçons  de  vin  qui  furent  achetés  chez  Gonsalve  de  Com- 
pludo moyennant  1 4  L  2  s.  ' .  Le  comte  Salvador  était  installé  sur 

I.  Arch.  mun.  de  Nantes,  CC.  a85. 
Bull,  hispan.  36 


3gO  BULLETIN    HISPANIQUE 

les  bords  de  la  Chézine  en  i5o5  et  vendait  des  fers  importés 
d'Espagne.  Yves  Rocaz  était  fermier  des  impôts,  il  était  associé 
d'André  liuys,  adjudicataire  du  bail  de  la  prévôté  de  Nantes  et 
fermier  général  de  la  traite  des  bêtes  vives.  Jean  de  Compludo, 
fils  du  négociant  en  vins,  prit  en  i53i  la  ferme  du  denier  pour 
livre,  moyennant  un  bail  de  3.700  livres".  Dans  de  nombreux 
actes  les  d'Espinoze,  les  Santo-Domingo,  les  d'Asloudille  sont 
qualifiés  de  marchands  à  la  Fosse.  Jacques  Marquez  était  arma- 
teur; la  famille  de  la  Presse  se  livrait  principalement  au  com- 
merce d'exportation  des  livres  et  des  papiers. 

La  majeure  partie  du  commerce  nantais  était,  au  xvi*  siècle, 
aux  mains  des  Espagnols.  Promptemcnt  ils  édifièrent  leur 
fortune  et  ils  acquirent  dans  la  ville  une  situation  prépon- 
dérante. Ils  surent  la  consolider  en  acquérant  des  terres 
nobles,  et  ils  se  firent  excuser  leur  richesse  rapide  en  se 
rendant   fréquemment  utiles  à   leurs   nouveaux  concitoyens. 

La  ville  de  Nantes  était  souvent  obérée  et  gênée.  Le  conseil 
des  bourgeois  d'abord,  la  municipalité  ensuite  ne  savaient  pas 
toujours  comment  faire  face  aux  dépenses  et  maintes  fois  il 
fallut  recourir  à  l'emprunt  sur  particuliers  pour  solder  le 
montant  des  travaux  urgents. 

Jamais  les  membres  de  la  colonie  espagnole  ne  refusèrent 
leur  concours  à  la  municipalité. 

En  i53G,  Robin  Pillays  étant  misenr,  la  ville  eut  besoin 
d'argent.  Yves  Rocaz,  Pierre  d'Espinoze,  Michel  Marquez,  de 
Santo  Domingo,  Jean  de  Compludo  souscrivirent  53o  livres 
sur  un  emprunt  total  de  1,266  livres 2. 

Jean  de  la  Presse  avança  à  la  ville  5o  écus  d'Espagne  en 
i5'i5''.  L'année  suivante,  les  récoltes  ayant  manqué,  on  dut 
faire  distribuer  des  vivres  à  la  population.  Pour  les  acheter, 
divers  Espagnols  avancèrent  des  fonds  au  conseil  des  bour- 
geois :  Michel  Marquez,  5o  écus  d'Espagne;  Jeanne  de  Mirande, 
veuve  de  la  Presse,  56  livres;  Isabcau  de  la  Presse,  veuve  de 


I.  Arch.  mun.  de  Nantes,  CC.  386. 

3.  De  la  Nicollièrc-Tcijeiro  cl  Alexandre  Perlhuis,  Livre  dore  de  Vliôlcl  de  ville  de 
\anles,  187.S.  Fntroductioii,  passim. 
3.  Arch.  mun.  de  Nantes,  CC.  335. 


NOTES    SUR    LES    RAPPORTS    DE    NANTES    AVEC    LESPAGNE  89 1 

François  de  Santo  Domingo,  loo  livres;  Jean  de  Compludo, 
188  livres. 

Sous  le  règne  de  Henri  II,  la  ville  dut  avoir  recours  à  la 
générosité  de  Françoise  d'Âstoudille,  dame  de  Livernière.  Par 
lettres  patentes  du  i6  janvier  i555,  le  roi  avait  accordé  aux 
habitants  de  Nantes  le  droit  d'acquérir,  tenir  et  posséder  tous 
fîefs  et  héritages  encore  que  les  acquéreurs  ne  fussent  pas 
nobles.  Au  mois  d'août  i556,  ces  lettres  patentes  étaient  con- 
firmées et  le  droit  concédé  aux  habitants  de  Nantes  était 
étendu  à  ceux  des  faubourgs  de  la  ville,  à  charge  pour  eux  de 
racheter  le  droit  de  franc-fief  moyennant  un  versement  de 
800  écus  d'or'.  Or,  une  partie  de  la  somme  fixée  comme  con- 
dition du  droit  de  rachat  fut  avancée  par  la  dame  d'Astoudille. 
En  i558,  elle  donne  quittance  de  la  somme  de  2,887  ^-  ^9  s-  6  d. 
pour  solde  des  frais  d'un  voyage  à  la  Cour  et  des  avances 
par  elle  effectuées  pour  l'abolition  du  droit  de  franc  fief ^. 

Lorsque  nous  retracerons  la  vie  d'André  Ruys,  nous  mon- 
trerons qu'à  maintes  reprises  il  fut  le  banquier  de  la  ville  de 
Nantes.  En  une  seule  fois,  il  avança  3o,ooo  livres  pour  rému- 
nérer à  Paris  des  concours  nécessaires,  au  moment  de  la  lutte 
que  les  villes  de  Rennes  et  de  Nantes  soutinrent  Tune  contre 
l'autre  pour  conserver  dans  leurs  murs  le  Parlement  de  Bre- 
tagne. 

La  ville  avait-elle  besoin  d'argent  pour  verser  au  Trésor 
royal  la  part  de  l'évèché  de  Nantes  dans  la  subvention 
accordée  au  roi  par  les  États  de  Bretagne,  Julien  Rocaz  lui 
avançait  16,700  livres  en  15713. 

Si  des  travaux  publics  étaient  nécessaires,  les  Espagnols 
prêtaient  des  fonds  pour  permettre  de  les  effectuer.  Le  compte 
du  miseur  de  l'année  1572  nous  apprend  qu'on  avait  emprunté 
5,000  livres  tournois  pour  réparer  les  fortifications  et  les  ponts 
et  pour  construire  une  aumônerie  de  pestiférés.  Yves  Rocaz, 
Marguerite  de  \  illa-Diego,  la  famille  de  la  Presse  avaient  été 
les  pourvoyeurs  de  cet  emprunt.   Parfois,   les  fonds   étaient 

1.  Privilèges  de  la  ville  de  Aantes,  p.  91  (Publ.  des  Bibliophiles  bretons).  Nantes, 
i883. 

2.  Arch.  mun.  de  Nantes,  BB.  3. 

3.  Arch.  mun.  de  Nantes,  CG.  479. 


392  BULLETIN    HISPANIQUE 

prêtés  sans  intérêt  par  les  riches  Espagnols.  Jeanne  Rocaz, 
femme  de  Thomas  del  Barco,  renonce  par  acte  de  i6o5  aux 
intérêts  des  sommes  qu'elle  a  avancées  à  la  ville  :  100  écus 
le  2  août  i588,  100  écus  le  9  novembre  lôg/j,  4oo  écus  le 
6  novembre  1600'. 

Ces  quelques  chiiï'res  prouvent  combien  était  forte  la  situa- 
tion pécuniaire  des  Espagnols  et  ils  dénotent  également  qu'ils 
savaient  se  montrer  obligeants.  Un  document  de  lôyS  nous 
renseigne  sur  la  situation  des  riches  marchands  à  la  Fosse 
dont  nous  avons  eu  l'occasion  de  parler  et  sur  l'état  de  fortune 
d'autres  négociants  dont  le  nom  est  moins  familier  aux  Nantais. 
Henri  Ilï  ayant  eu  besoin  d'argent  réclama  de  la  ville  un  don 
de  1 5,000  livres.  Les  habitants  de  Nantes,  estimant  que  le  roi 
les  taxait  trop  lourdement  et  jugeant  que  ses  appels  de  fonds 
étaient  trop  fréquents,  firent  entendre  de  vives  réclamations. 
La  demande  royale  fut  abaissée  à  12,000  livres.  A  cette  occasion, 
on  dressa  par  paroisses  un  rôle  des  habitants  les  plus  aisés  de 
la  ville.  Sur  celui  de  Saint-Nicolas,  on  relève  quantité  de  noms 
espagnols.  Les  uns  nous  sont  connus,  les  autres  au  contraire 
sont  tombés  dans  l'oubli,  mais  les  chiffres  des  cotisations 
placés  en  regard  de  chaque  nom  indiquent  que  tous  ceux  qui 
figurent  sur  ce  rôle  étaient  sinon  riches,  au  moins  fort  aisés. 
On  relève  sur  ce  document ^  :  Antoine  de  Mirande,  3  1.;  veuve 
d'Espinoze,  65  livres;  Alonzo  d'Aragon,  21  livres;  Garcie  du 
Règne,  ro livres;  veuve  Gardozo,  3  livres:  Jean  Gazalis,  (i  livres; 
Jacques  dcBourgucs,  I0  livres;  Bonaventure  d'Ercdie,  10  I.1/2; 
veuve  Pierre  d'Arande,  2  livres;  Ferrando  Marquez,  3o  livres; 
André  Huys,  55  livres;  Domingo  de  Labarque,  70  livres;  veuve 
Michel  Marquez,  26  livres;  Jean  de  Santo  Domingo,  6  livres; 
Jacques  Marquez,  5i  livres;  Pedro  de Gatasta,  20 livres;  Bastien 
de  Larivaga,  20  livres;  Martin  de  Gueldo,  i  1.  1/2.  Un  autre 
document  analogue,  mais  ne  portant  pas  de  chittres  de  coti- 
sation, nous  fournit  les  noms  de  AUonzo  Daragon  et  de  Fran- 
çois Carncro.  Ceux  ci  sont  qualifiés  marchands  à  la  Fosse^. 


I.  Arch.  mun.  de  Nantes,  CG.  335. 
a.   Arcli.  niuo.  de  Nantci>,  CG.  80. 
3.  Arch.  mun,  de  Nantes,  GG.  76. 


NOTES  SUR  LES  RAPPORTS  DE  NANTES  AVEC  l'eSPAGNE      SqS 

Ainsi  que  nous  lavons  dit  plus  haut,  tous  les  Espagnols  ne 
furent  pas  seulement  des  marchands  à  la  Fosse;  au  xvr  siècle, 
beaucoup  embrassèrent  des  carrières  libérales.  Jean  d'Arande 
fut  miseur  de  Nantes;  il  avait  été  nommé  à  cette  fonction  le 
19  août  i553,  mais  il  ne  la  tint  pas  longtemps,  car  il  mourut 
l'année  suivante'. 

En  1027,  Olivier  Harrouys  était  clerc  de  la  Trésorerie  2.  Guil- 
laume Harrouys  fut  notaire  du  roi.  Toute  une  lignée  de  d'Espi- 
noze  entra  au  Parlement  de  Bretagne  à  dater  de  i547,  et  bien 
qu'ils  exerçassent  leurs  fonctions  à  Rennes,  les  conseillers  ne 
délaissèrent  jamais  leur  cité  d'origine"*.  François  Myron  fut 
reçu  trésorier  général  des  finances  le  19  mars  ij-j;  Julien 
Rocaz  fut  receveur  des  finances  en  Bretagne  du  23  décembre 
1 382  au  3i  décembre  i585;  François  de  Compludo  fut  chanoine 
de  la  cathédrale  de  Nantes  en  i548. 

Le  conseil  des  bourgeois  de  Nantes  confiait  souvent  des  mis- 
sions aux  membres  de  la  colonie  espagnole.  La  dame  dAstou- 
dille  fut  chargée  de  régler  à  Paris  la  question  des  francs-fiefs. 
Olivier  Harrouys  reçut  en  i53i  une  somme  de  100  livres  tournois 
pour  effectuer  à  Fontainebleau  un  voyage  nécessaire  aux  inté- 
rêts de  la  ville.  Jean  Harrouys,  en  i564,  reçut  46  écus  pour 
se  rendre  deux  fois  chez  le  gouverneur  de  la  province.  En 
i543,  Yves  Rocaz  fut  chargé  d'aller  aux  Essarts  saluer  le  duc 
d'Étampes  nommé  gouverneur  de  la  Bretagne  et  de  lui 
demander  de  fixer  le  jour  de  son  entrée  solennelle  à  Nantes. 
En  1080,  Jean  Rocaz  se  rendit  à  Paris  pour  faire  renouveler  les 
privilèges  de  la  ville  de  Nantes^. 

Des  charges  honorifiques  furent  maintes  fois  octroyées  à  des 
Espagnols.  En  1039,  par  ordonnance  royale,  l'administration 
des  hospices  fut  retirée  aux  religieux  et  confiée  à  des  adminis- 
trateurs civils.  Yves  Rocaz  en  io55,  André  Ruys  en  i558,  Jean 
Rocaz  en  iSyô,  furent  administrateurs  des  hospices  de  Nantes^. 

Les  comptes  des  miseurs  étaient  chaque  année  arrêtés  et 

1 .  Livre  doré  de  l'hôtel  de  ville.  Introduction. 

2.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  B.  568. 

3.  Saulnier,  Le  Parlement  de  Bretagne,  2  vol.  in-^i",  art.  d'Espinose. 

4.  Arch.  mun.  de  Nantes,  AA.  68. 

ô.  Léon  Maître,  Histoire  des  hôpitaux  de  Nantes,  et  Arch.  mun.,  GG.  702,  II.  10. 


394  BULLETIN    HISPANIQUE 

vérifiés  par  des  commissions  composées  de  bourgeois  nota- 
bles. Parmi  les  vérificateurs,  on  note  fréquemment  des 
membres  de  la  colonie  espagnole.  Pierre  d'Espinoze  vérifie  le 
compte  de  Robin  Pillays;  E.  d'Espinoze  arrête  celui  de  Jehan 
Hus.  En  i555,  \ves  Rocaz  et  Antoine  de  Mirande  examinent  les 
comptes  du  miseur  Poullain. 

Aon  contents  d'acquérir  la  fortune  et  l'estime  de  leurs  conci- 
toyens, les  opulents  marchands  espagnols  cherchèrent  de 
bonne  heure  à  consolider  leur  situation  pécuniaire  et  sociale 
en  devenant  propriétaires  fonciers.  Leurs  préférences  les  pous- 
saient à  acheter  des  terres  nobles  dans  le  comté  nantais.  Fran- 
çoise d'Astoudille  Lerma,  femme  de  Jean  de  Compludo,  s'était 
rendue  propriétaire  du  domaine  de  Livernière  dès  i535.  Les 
Compludo  avaient  acquis  les  terres  de  la  Noë  et  de  la  Gaulron- 
nière,  les  Marquez  avaient  acheté  le  domaine  de  la  Bran- 
chouère  et  celui  de  la  Chabotière.  Dès  le  milieu  du  \vi'  siècle, 
les  d'Espinoze  étaient  d'importants  propriétaires  fonciers.  Les 
Santo  Domingo  possédaient  le  Carteron,  qui  passa  par  la  suite 
dans  la  famille  d'André  Ruys'. 

11  est  à  remarquer  que  seuls  se  sont  fixés  dans  le  comté  nan- 
tais les  Espagnols  qui  achetèrent  des  domaines.  Tous  les  autres 
membres  de  la  colonie  dont  nous  avons  eu  l'occasion  de  citer 
les  noms  ont  disparu  au  cours  du  xvii'  siècle.  Ils  se  sont  retirés 
en  Espagne  après  avoir  réalisé  leur  fortune,  ils  ont  essaimé 
vers  d'autres  provinces  ou  sont  décédés  sans  postérité  mâle. 
Les  propriétaires  fonciers  d'origine  espagnole  ont  au  contraire 
fourni  à  la  population  bretonne  un  appoint  important. 

Négociants,  financiers  ou  propriétaires,  les  Espagnols  se 
sont  toujours  montrés  généreux  vis  à-vis  des  églises,  des  hôpi- 
taux ou  des  couvents  de  Nantes. 

Les  comptes  et  les  registres  de  baptême  de  la  paroisse  Saint- 
Nicolas  nous  décèlent  les  générosités  des  riches  Espagnols. 
A  diverses  reprises,  les  d'Espinoze  et  les  Ruys  offrirent  des 
cloches  à  cette  église.  Les  hôpitaux  de  Nantes  reçurent  maintes 
donations^  Antoine  de  Mirande,  ancien  échevin,  laissa  trois 

1.  De  Cornulier,  Dictionnaire  des  terres  nobles  du  comté  nantais. 

2.  Arch.  (Je  la  Loire-Infôrieurc,  H.  or»5,  068,  70/4,  73». 


NOTES    SUR    LES    RAPPORTS    DE    NANTES    AVEC    l'eSPAGNE  SqS 

cents  livres  aux  pauvres  de  Nantes».  Mais  ce  furent  les  Gorde- 
liers  qui  profitèrent  des  offrandes  les  plus  larges  de  la  part  des 
Espagnols.  Ceux-ci  possédaient  dans  ce  couvent  une  chapelle 
spéciale  dite  «  Chapelle  des  Espagnols  ».  Cest  là  quils  se 
réunissaient  pour  entendre  les  offices.  Durant  trois  siècles  les 
Espagnols  furent  inhumés,  soit  dans  cette  chapelle,  soit  dans 
des  enfeux  qu'ils  avaient  fait  édifier  dans  les  cloîtres  du  cou- 
vent. Pour  obtenir  ce  privilège,  les  riches  marchands  multipliè- 
rent leurs  dons  aux  Cordeliers  de  Nantes;  dès  le  xv""  siècle,  les 
Darrande  avaient  leur  tombeau  aux  Cordeliers.  En  laio,  Martin 
Darrande,  seigneur  du  Bouffay,  et  Jeanne  le  Caradeuc,  sa 
femme,  firent  construire  dans  le  cloître  la  chapelle  de  Saint- 
Martin  et  de  Saint-Roch  et  ils  donnèrent  20  livres  de  rentes 
pour  son  entretien  =>.. En  iSaô,  Julien  de  Myrande,  chanoine  de 
Notre-Dame,  recteur  du  prieuré  de  Saint-Herblain,  Gonzallo  de 
Lerma  et  Jehan  de  Compludo,  demeurant  à  la  Fosse,  exécu- 
teurs testamentaires  de  Guydonne  le  Gouz,  veuve  de  Gonsalve 
de  Compludo,  comptèrent  5 18  écus  d'or  pour  l'achat  de 
43  livres  4  sous  9  deniers  de  rentes  destinées  à  payer  les 
messes  de  requiem  et  les  oraisons  qui  devaient  être  dites  sur  la 
tombe  des  époux  de  Compludo  en  la  chapelle  d'Espagne 3. 
Pour  obtenir  une  concession  aux  Cordeliers,  Ferrand  d'Astou- 
dille  versa  aux  moines  70  livres  en  i534^.  Les  d'Espinoze 
avaient  leur  chapelle  au  cloître  des  Cordeliers,  ils  avaient 
obtenu  le  droit  de  s'y  faire  inhumer  à  la  suite  des  deux  dona- 
tions faites  en  lô^a  par  Bernardin  d'Espinoze  et  confirmées  en 
i547  par  son  fils  Pierre -».  Jeanne  de  Mirande,  veuve  de  Jean  de 
la  Presse,  par  deux  dons  de  600  livres  et  de  18  livres  de  rentes, 
avait  acquis  une  concession  au  cloître  des  Cordeliers  en  lb^Q^. 
André  Ruys  et  sa  femme  Isabelle  de  Santo  Domingo  fondèrent 
une  chapelle  aux  Cordeliers  de  Nantes  en  15-8 '. 

1.  Arch.  mun.de  Nantes,  BB.  5. 

2.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  H.  288. 

3.  De  la  Nicollière,  Essai  sur  le  couvent  des  Cordeliers,  Bull,  de  la  Soc.  Arch.  de 
Nantes,  1877, 

4.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  H.  284. 

5.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  H.  284. 

6.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  H.  284. 

7.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  H.  284. 


SgÔ  BULLETIN    HISPANIQUE 

Au  siècle  suivant,  les  donations  faites  aux  Cordeliers  se 
multiplièrent  encore  ;  la  chapelle  des  Espagnols  était  entretenue 
par  les  membres  de  leur  colonie  et  surtout  par  les  commerçants 
afïîliés  à  la  Contrac talion  qui  jusqu'à  l'année  1783  se  réunirent 
au  couvent  des  Cordeliers. 

Au  milieu  du  xvi*  siècle,  les  Espagnols  établis  à  la  Fosse 
avaient  déjà  une  situation  prépondérante;  à  dater  de  l'établis- 
sement de  la  première  mairie  de  Nantes,  leur  rôle  de  premier 
plan  allait  encore  s'affirmer.  II  est  inutile  de  rappeler  ici  les 
incidents  qui  marquèrent  l'élection  de  Drouët  de  l'Angle, 
premier  maire  de  Nantes  '.  Le  gouverneur  de  la  ville,  de  Sançay, 
avait  voulu  inlcrdire  toute  réunion  des  électeurs.  Seuls  cin- 
quante-sept bourgeois  participèrent  au  vote  qui  devait  aboutir 
à  la  nomination  du  maire.  Le  groupe  espagnol  avait  toujours 
lutté  contre  les  prétentions  multiples  de  de  Sançay,  tyranneau 
détestable  et  tracassier.  Aussi,  les  bourgeois  n'avaient-ils  pas 
omis  de  choisir  comme  délégués  des  hommes  influents  parmi 
les  marchands  de  Nantes  et  notamment  quelques-uns  des 
membres  de  la  colonie  espagnole  connus  et  estimés  par  les 
services  qu'ils  avaient  rendus. 

Yves  Hocaz,  André  Ruys,  Bonaventure  de  Compludo,  Pierre 
d'Espinoze,  Antoine  de  Myrande,  François  de  la  Presse  firent 
partie  des  délégués  des  marchands.  Dès  la  première  élection, 
Yves  Rocaz  et  Antoine  de  Mirande  furent  élus  échevins.  A  la 
seconde,  Yves  Rocaz,  sieur  de  la  Chalonnière,  fut  nommé 
maire  de  Nantes  et  il  demeura  en  fonctions  de  i566  à  i5G8. 
En  lôGg,  Jean  Houys  et  Jacques  d'Arande  furent  élus  échevins; 
trois  ans  plus  tard  Guillaume  llarrouys,  sieur  de  la  Rivière, 
était  élevé  à  la  dignité  de  maire.  Nous  ne  pouvons  énumérer 
tous  les  maires  et  échevins  de  Nantes  d'origine  espagnole,  il 
nous  faudrait  dresser  une  liste  trop  longue.  Le  Lu^re  doré  de  la 
ville  a  du  reste  conservé  les  noms  de  tous  les  magistrats 
municipaux.  Qu'il  nous  suffise  de  rappeler  que  les  Compludo, 
les  Darande,  les  Myron,  les  Marquez,  les  Bonrgues,  les  Ruys, 
les  d'Hérédié,  les  Santo  Domingo,  les  d'Astoudille,  les  Lorido 

I.  Livre  doré  de  la  ville  de  IS'antes. 


NOTES  SUR  LES  RAPPORTS  DE  NANTES  AVEC  l'eSPAGNE      897 

du  Mesnil,  qui  furent  tour  à  tour  échevins  ou  maires,  descen- 
daient de  familles  espagnoles  fixées  à  Nantes  au  xV  et  au 
XYi*"  siècle. 


II.  André  Ruys  et  sa  famille. 

Sans  nous  arrêter  à  retracer  l'iiistoire  des  familles  espagnoles 
qui  se  sont  établies  à  Nantes,  il  nous  a  cependant  paru  inté- 
ressant de  coordonner  les  renseignements  que  nous  avons 
recueillis  sur  André  Ruys  et  sa  famille.  Le  chef  de  cette  famille 
représente  assez  exactement  le  type  de  l'opulent  marchand  à 
la  Fosse.  André  Ruys  a  joué  à  Nantes  au  vvi*  siècle  un  rôle  si 
considérable  que  son  souvenir  y  est  demeuré  vivant.  La  muni- 
cipalité a  honoré  sa  mémoire  en  donnant  son  nom  à  lun 
des  quais  de  la  ville.  Tous  les  historiens  de  cette  cité  ont 
consacré  quelques  mots  à  ce  négociant  important,  mais  aucun 
n'a   essayé    de    faire  revivre    une    physionomie  intéressante. 

André  Ruys  vint  se  fixer  à  Nantes  jeune  encore,  disent  les 
lettres  de  naturalité  qu'il  obtint  en  lô^y'.  Sa  famille  était, 
paraît-il,  originaire  deVellorado,  dont  Simon  Ruys  P'  avait  été 
gouverneurs  Avant  d'avoir  obtenu  la  qualité  de  Français, 
Ruys  avait  épousé  Isabelle  de  Santo  Domingo,  fille  de  François 
de  Santo  Domingo,  Espagnol  établi  à  Nantes  dès  i522. 

De  cette  union  naquirent  au  moins  six  enfants,  deux  garçons, 
Julien  et  André,  et  quatre  filles,  Françoise,  Marie,  Catherine  et 
Jeanne  3. 

André  Ruys  exerça  tout  d'abord  la  profession  de  courtier  de 
marchandises.  Il  opérait  soit  pour  son  compte,  soit  pour  le 
compte  de  ses  correspondants  d'Espagne,  François  de  la  Presse, 
possesseur  d'une  maison  à  Séville,  et  Simon  Ruys-Embito,  son 
frère,  propriétaire  d'un  comptoir  à  Médina  del  Campo.  Ses 
magasins  de  Nantes   étaient  considérables  et  il  y  centralisait 

I.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure.  Mandements  de  la  Cour  des  comptes,  V.  3,  p.  i3. 

a.  Baron  de  Rosmorduc,  Preuves  de  la  noblesse  des  demoiselles  bretonnes  admises 
à  la  maison  royale  de  Sninl-Cyr,  Versailles,  1891,  art.  Marie- Anne-Sidonie  liuys. 

3.  Arch.  mun.  de  Nantes.  Actes  de  baptêmes  de  la  paroisse  Saint-Nicolas,  GG. 
passim. 


398  BULLETIN    HISPANIQUE 

les  envois  de  diverses  régions  de  la  France.  Son  commerce 
portait  sur  toutes  sortes  de  marchandises,  merceries  du  Centre, 
livres  de  Lyon  et  de  Paris,  papiers  de  Thiers,  vins  de  la  Loire. 
Quatre  registres  des  comptes  de  sa  maison  de  commerce  s'éten- 
dant  des  années  i548  à  i564  nous  sont  parvenus.  Ils  sont 
tenus  en  langue  espagnole;  ces  documents  nous  renseignent 
sur  la  nature  des  opérations  de  Ruys  et  nous  font  connaître  que 
ses  principaux  correspondants  habitaient  Bayonne,  Santander, 
Portugalete  et  Bilbao.  Les  fers,  les  laines,  les  oranges,  les  vins 
d'Espagne  étaient  les  produits  qu'André  Ruys  recevait  ])rin- 
cipalement  de  la  Péninsule;  ses  navires  fréquentaient  les  ports 
de  Bayonne,  Portugalete,  Santander,  Lisbonne  et  Bilbao' 

iSon  satisfait  des  bénéfices  qu'il  réalisait  dans  le  commerce 
proprement  dit,  Ruys  s'adonna  aussi  aux  opérations  de  banque 
et  il  prit  à  ferme  de  nombreux  impots.  Son  activité  ne  pouvant 
sulïlre  ù  tout,  il  s'adjoignit  parfois  comme  associé  Yves  Rocaz, 
le  descendant  d'Olivier  Rocaz. 

En  i.j48,  Ruys  était  adjudicataire,  moyennant  4, 000  livres, 
des  droits  du  denier  pour  livre;  en  i565,  il  était  fermier  du  bail 
de  la  prévôté  de  Nantes^;  quelques  mois  après,  il  adjoignait  à 
celte  feime  celle  des  droits  du  fol  appel  de  la  Cour  du  Parlement 
et  des  quatre  juges  présidiaux  de  Bretagne ''^.  Nous  le  trouvons 
aussi  adjudicataire  des  impôts  et  billots  de  Bretagne''.  Durant 
de  très  longues  années,  André  Ruys  fut  fermier  général  de  la 
traite  des  bêtes  vives  ^. 

Divers  actes  nous  prouvent  qu'André  Ruys  fut  souvent 
chargé  de  gérer  les  affaires  de  ses  compatriotes  ou  de  ses 
concitoyens.  Une  sentence  de  i555  transfère  à  Yves  Rocaz  et 
André  Ruys,  qui  s'engagent  à  la  faire  fructifier  au  taux  de 
8  0/0,  une  somme  de  5, 000  livres  provenant  do  la  vente 
judiciaire  de  la  Salle  en  Orvault,  acquise  le  G  juillet  i55i 
par  Charles  le  Frère,  seigneur  de  Belle- Islc.  Une  donation 
de  i568  nous  apprend  qu'André   Ruys   était  exécuteur    tesla- 

1.  Arcli.  mun.  de  iNanU-s,  Ilil.  1H9. 

2.  Arcli.  de  la  Loire-Inftricure,  B.  58i. 

3.  Arcli.  de  la  Loire-Inféricurc,  B.  59. 
U-  Arch.  de  la  l-oire-hiff-rieurc,  B.  Go. 
î>.  Arch.  de  lii  Loire-Inférieure,  B.  588. 


NOTES  SUR  LES  RAPPORTS  DE  NANTES  AVEC  l'eSPAGNE      899 

mentaire  d'un  riche  marchand  espagnol  de  Nantes,  Jean  de  la 
Presse  ' . 

Si  André  Ruys  n'avait  été  qu'un  opulent  marchand,  il  ne 
serait  pas  spécialement  intéressant  de  retracer  son  existence. 
Il  passerait  inaperçu  dans  la  foule  des  riches  inutiles.  Mais  cet 
Espagnol  fut  un  véritable  patriote  qui  mit  au  service  de  la 
ville  de  Nantes  une  ardeur  égale  à  celle  qu'il  déploya  dans  ses 
propres  affaires. 

De  Sançay,  qui  exerça  les  fonctions  de  gouverneur  dé  Nantes, 
était  un  esprit  étroit,  jaloux  de  son  autorité,  et  sa  réputation 
de  mesquinerie  était  bien  établie.  Or,  avant  l'établissement 
des  amirautés,  chaque  gouverneur  local  ou  capitaine  de  ville 
s'arrogeait  des  droits  en  matière  de  commerce  maritime.  Les 
congés  de  navigation  et  les  passeports  étaient  accordés  suivant 
des  règles  arbitraires.  Les  navires  abordant  ou  quittant  un 
port  étaient  parfois  soumis  à  un  droit  de  visite.  Depuis  de 
longues  années  cet  usage  était  tombé  en  désuétude.  De  Sançay 
voulut  le  faire  revivre 2.  Les  Nantais  protestèrent  et  dépê- 
chèrent des  députés  à  Paris;  le  duc  d'Étampes  fut  en  i556 
chargé  de  faire  une  enquête  sur  les  prétentions  du  gouverneur 
de  Nantes  et  les  réclamations  des  habitants. 

Ses  conclusions,  intervenues  en  1659,  furent  favorables  à  de 
Sançay.  Les  Nantais,  soutenus  par  la  colonie  espagnole,  ne 
cessèrent  de  protester  contre  le  droit  de  visite.  André  Ruys 
prit  leur  cause  en  main,  il  fit  charger  un  navire  qu'on  voulut 
empêcher  de  partir.  Il  assigna  le  gouverneur  qui  fit  défaut,  puis 
passant  outre  aux  injonctions  de  ses  officiers  il  fit  mettre  sous 
voiles  le  bateau  qui  sortit  du  port  et  ne  fut  rejoint  qu'à  Rohart, 
à  sept  lieues  de  Nantes. 

A  quelques  années  de  là,  de  Sançay  eut  de  nouveau  maille  à 
partir  avec  Ruys  et  les  marchands  de  Nantes.  Le  26  novembre 
i564,  on  publia  par  les  rues  de  la  ville  l'annonce  d'une 
réunion  des  notables  bourgeois.  Au  cours  de  cette  assemblée 
devait  être  élu  le  premier  maire  de  Nantes.  Cette  élection 
allait   diminuer   l'autorité    du    gouverneur,    aussi    bien   fit-il 

I.  Arch.  mun.  de  Nantes,  HH.  284. 
a.  Arch.  mun.  de  Nantes,  EE.  ikh. 


400  BULLETIN    HISPANIQUE 

défense  aux  habitants  de  se  rendre  aux  Cordeliers,  lieu  fixé 
pour  la  réunion.  Les  marchands  de  Nantes,  au  nombre 
desquels  étaient  Ru\s  et  d'autres  Espagnols,  ne  tinrent  aucun 
compte  de  cette  défense  et  ils  procédèrent  à  l'élection  de 
Drouët  de  L'Angle'. 

La  lutte  du  gouverneur  et  d'André  Ruys  n'était  pas  égale. 
Le  premier  était  antipathique.  Le  second,  au  contraire,  était 
soutenu  par  toute  la  population,  qui  ne  pouvait  oublier  les 
multiplets  services  que  ce  riche  Espagnol  ne  cessait  de  lui 
rendre. 

Au  moment  où  les  deux  principales  villes  de  Bretagne, 
Nantes  et  Rennes,  se  disputaient  l'honneur  de  conserver  le 
Parlement  dans  leurs  murs,  le  bureau  des  bourgeois  de  la 
ville  de  Nantes  ne  possédait  pas  les  fonds  nécessaires  pour 
faire  à  Paris  les  démarches  utiles  et  rémunérer  les  concours 
nécessaires.  André  Ruys  avança  3o,ooo  livres  en  1557.  Cette 
avance  fut  gagée  par  un  droit  de  cinquante  sous  par  tonneau 
de  blé  entrant  en  ville.  Dès  l'année  suivante  Ruys  était 
remboursé  de  son  avance  '. 

On  sait  combien  l'emprunt  sur  particuliers  était  fréquent 
à  cette  époque;  les  villes  s'adressaient  aux  riches  bourgeois 
quand  elles  avaient  besoin  de  fonds.  Toute  sa  vie  Ruys  fut 
le  banquier  de  la  ville  de  Nantes,  En  i545,  les  comptes  des 
miseurs  signalent  un  prêt  de  100  écus  d'Espagne  contracté 
par  moitié  auprès  de  lui  et  de  Jean  de  la  Presse^  Dans 
d'autres  circonstances,  que  nous  relaterons,  Ruys  avança  à  la 
ville  des  sommes  importantes.  Parfois,  il  se  substituait  à  la 
municipalité  pour  solder  le  prix  de  marchés.  Au  mois  de 
février  i5Go  fut  approuvé  par  le  duc  d'Anjou  un  traité  passé 
entre  André  Ruys,  marchand,  agissant  au  nom  de  la  ville,  et 
Claude  Coloni,  écuyer,  valet  de  chambre  ordinaire  du  roi,  «  par 
lequel  Coloni  a  promis  bailler  et  livrer  5o  rondaches,  cui- 
rasses, corselets,  .'ioo  arquebuses  à  mèche,  /i^o  morions, 
Jo  hallebardes,  G, 000  livres  de  poudre  à  8  sous  la  livre,  le  tout 


I .  Lhre  don-  de  l'hôtel  de  ville  de  Nantes.  Introduction, 
a.  Arcli.  mnn.  do  Nantes,  llll,  G. 
3.  Arcli.  iriiiri   de  Nantes,  CC.  r35. 


NOTES    SLK    LES    RAPPORTS    DE    NANTES    AVEC    L  ESPAGNE  AOI 

pour  i2,5oo  livres.  »>  Ruys  était  cautionné  du  paiement  par 
six  bourgeois  et  un  acte  de  garantie  des  habitants  de  Nantes'. 

Malgré  ses  occupations  multiples,  il  était  administrateur  des 
hospices  de  la  ville  ^  ;  le  bureau  de  la  municipalité  lui  confiait 
des  missions  importantes  concernant  l'administration  de  la 
cité  et,  pour  les  mener  à  bien,  Ruys  utilisait  ses  relations. 
Celles-ci  étaient  nombreuses  et  influentes,  car  la  réputation 
de  Ruys  avait  dépassé  l'enceinte  de  la  ville  de  Nantes.  Les  rois 
de  France  eux-mêmes  ne  dédaignaient  pas  d'accepter  l'hospi- 
talité de  ce  riche  marchand. 

Lors  de  son  séjour  à  Nantes  en  i565,  Charles  IX  alla  dîner 
chez  Ruys.  «  Le  vendredi,  douzième  jour  du  mois  d'octobre,  le 
roy  partit  de  son  logis  du  château  pour  aller  disner  à  la  Fosse 
qui  est  aux  faulxbourgs  de  la  ville  sur  le  bord  du  port...», 
écrit  Abel  Jouan,  serviteur  du  roi.  Au  moment  du  voyage  de 
Charles  IX,  André  Ruys  aurait  habité,  d'après  une  tradition 
qui  ne  repose  d'ailleurs  sur  aucun  document,  la  maison  aux 
«  deux  tourettes  »  que  l'on  voit  encore  à  Nantes^.  Le  seul  fait 
certain  est  que  Ruys  habitait  sur  la  Fosse  une  maison  appar- 
tenant à  l'évêché  de  Nantes^. 

Au  cours  de  la  visite  de  Charles  IX  à  André  Ruys,  il  tut 
peut  êlre  question  d'une  affaire  qui  tenait  à  cœur  aux  Nantais 
et  dont  la  solution  se  prolongea  pendant  douze  ans.  Au  mépris 
d'anciens  privilèges  de  la  ville,  René  Vergé  avait  été  nommé 
juge  criminel^.  Les  Nantais  demandèrent  l'abolition  de  cette 
fonction.  Vergé  intrigua  et  parvint  à  se  faire  maintenir  en 
charge,  mais  pendant  plusieurs  années  les  Nantais  protestèrent 
avec  véhémence,  et  un  arrêt  du  Conseil,  intervenu  le  20  sep- 
tembre i556,  prescrivait  une  enquête  au  sujet  de  la  nomination 
de  Vergé.  Six  bourgeois  notables  devaient  être  entendus  par 
les  commissaires.  André  Ruys  fit  partie  de  ces  témoins.  On  lui 
avait  emprunté,  ainsi  qu'aux  archives  municipales,  diverses 
pièces  susceptibles  d'éclairer  les  enquêteurs,    mais   celles-ci 

I.  Arch.  muQ.  de  Nantes,  EE.  170. 

3.  Arch.  mun.  de  Nantes,  II.  lo. 

3.  Dugasl-Matifevix,  .\anles  ancien  et  le  comté  nantais,  1879,  p.  iSa. 

i.  .\veu  d'André  Ruys,  Arch.  de  la  Chambre  des  notaires  (minutes  de  Carreau). 

5.  Arch.  mun.  de  Nantes,  FF.  40. 


^03  BULLETIN    HISPANIQUE 

furent  égarées  et  ne  furent  jamais  restituées  à  leurs  proprié- 
taires. 

Dans  dautres  circonstances  Ruys  mit  ses  relations  influentes 
au  profit  des  Nantais.  Les  temps  étaient  alors  fort  troublés.  La 
France  était  divisée  par  les  guerres  de  religion,  le  commerce 
maritime  était  en  mauvaise  posture  et  les  actes  de  piraterie 
sévissaient  sur  les  cotes.  Les  négociants  nantais  n'étaient  pas 
épargnés  et  les  affaires  du  port  étaient  très  ralenties.  Lourdes 
étaient  les  charges  que  Charles  IX  imposait  à  Nantes  en  forçant 
les  bourgeois  de  la  ville  à  entretenir  une  garnison  supplémen- 
taire. En  i568,  le  roi  avait  écrit  à  M.  de  Saiiçay  u  de  veiller 
soigneusement  sur  le  château  de  Nantes...  et  d'y  entretenir  une 
compagnie  de  gens  de  pied  jusqu'à  ce  que  les  aiïaires  du 
royaume  soient  en  sûreté»'.  La  présence  de  ces  troupes 
oocasionnait  des  frais  élevés.  Les  garnisons  étaient  une  plaie 
pour  un  pays,  car  elles  se  recrutaient  parmi  des  voleurs  et  des 
pillards  ;  les  habitants  des  villes  étaient  obligés  de  se  défendre 
contre  les  soldats  chargés  de  les  protéger 2.  Les  bourgeois  de 
Nantes  ne  cessaient  de  protester  contre  la  présence  de  ces 
troupes.  André  Ruys  se  fit  l'interprète  de  leurs  doléances.  Le 
G  mars  1071,  il  écrivit  au  gouverneur  de  Bretagne,  Albert 
de  Gondi,  au  sujet  du  «  peu  de  besoing  que  aurions  en  cesle 
ville  des  garnisons  qui  y  sont  à  la  grande  fouUe  et  oppression 
des  pauvres  habitants  ».  Albert  de  Gondi  accueillit  favorable- 
ment la  demande  de  Ruys  et  la  garnison  fut  diminuée  \ 

Non  seulement  Ruys  obtint  la  diminution  de  la  garnison, 
mais  il  fit  même  l'avance  de  ^,5oo  livres  pour  solder  les 
dépenses  occasionnées  par  sa  présence. 

Les  relations  du  négociant  espagnol  et  d'Albert  de  Gondi 
devaient  se  resserrer  à  quelque  temps  de  là.  Le  9  mai  loyo, 
Henri  duc  d'Anjou  avait  été  élu  roi  de  Pologne  et  ce  fut  en 
cette  qualité  que  le  futur  roi  de  France  fut  reçu  à  Nantes 
le  21  juillet  de  la  même  année.  Albert  de  Gondi  avait  été 
chargé  de  préparer  le  séjour  du  roi  dans  cette  ville.  Quelque 

I.  ArcJi.  mun.  de  Nantes,  EE.  nj7. 

3.  Carre,  Essai  sur  le  fonclionnemenl  du  Parlement  de  Urelaijne,  i8b8,  cli.  V. 

3.  Areli.  rriun.  de  Nantes,  BU.  11J7. 


^OTKS    SLR    LES    RAPPORTS    DE    NANTES    AVEC    LESPAGNE  /[OS 

temps  avant  son  arrivée,  le  gouverneur  avait  écrit  aux  maire 
et  échevins  de  Nantes  pour  les  informer  de  la  prochaine  arrivée 
du  souverain.  Celui-ci  voulait  éviter  les  réceptions  fastueuses. 
Il  mandait  à  la  municipalité  :  «  S.  M,  m'a  commandé  vous 
escripre  qu'elle  n'y  désire  point  estre  faicte  entrée,  mais  au 
contraire  loger  dans  le  faulxbourg  en  la  maison  d'André 
Ruys.  ))  Le  roi  de  Pologne  fut  l'hôte  de  Ruys'. 

Qu'ils  se  nomment  Ruys,  Zamet,  Samuel  Bernard,  les  grands 
financiers  ont  toujours  été  les  amis  des  rois,  auxquels  ils 
rendaient  des  services.  Cette  amitié  leur  a  souvent  valu  des 
satisfactions  d'amour- propre.  Henri  III  se  conforma  aux 
traditions.  Par  lettres  patentes  de  157/i  il  exonéra  André  Ruys 
de  tous  impôts  et  tailles  en  souvenir  de  l'hospitalité  qu'il  lui 
avait  accordée  ainsi  qu'à  «  son  amé  frère  Charles  IX  n^. 

Les  satisfactions  d'amour-propre  ne  manquaient  pas  à 
André  Ruys.  Les  bourgeois  de  Nantes  lui  demandaient  de 
vouloir  bien  être  parrain  de  leurs  enfants  3,  l'évèque  de  Nantes 
tenait  sur  les  fonts  baptismaux  son  petit-fils  Louis''.  Louis 
de  Bourbon,  duc  de  Montpensier,  écrivait  au  seigneur  Ruys 
en  le  priant  d'intervenir  auprès  des  échevins  en  faveur  des 
Clarisses  de  Nantes^.  Ruys  multipliait  les  dons  aux  pauvres, 
aux  églises  et  aux  couvents.  Il  offrait  une  cloche  à  l'église 
Saint-Nicolas'j,  il  octroyait  des  rentes  aux  Cordeliers",  il  versait 
des  fonds  aux  hôpitaux  de  Nantes;  sa  générosité  lui  attirait 
des  sympathies  multiples  et  profondes.  Ruys  avait  à  Nantes 
une  situation  prépondérante.  Le  pouvoir  central  ne  savait 
rien  lui  refuser. 

Pendant  de  longues  années  les  commerçants  du  port  se 
plaignirent  des  actes  de  piraterie  que  subissaient  leurs  navires 
à  la  sortie  de  la  Loire.  Le  gouvernement  restait  sourd  à  leurs 
plaintes.  Il  advint  qu'André  Ruys  et  Jacques  Marquez  ayant 
chargé  un  navire  à  destination  de  l'Espagne,  celui-ci  fut  pillé 

1.  Arch.  mun.  de  Nantes,  AA.  34. 
3.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  B.  58. 

3.  Arch.  mun.  de  Nantes,  GG.  20  et  autres. 

4.  Ibid.  GG.  174  (naissance  du  a6  décembre  157a). 

5.  Ibid.  GG.  635. 

6.  Ibid.  GG.  174  (année  1572). 

7.  Ibid.  HH.  193. 


4o4  BULLETI>    HISPANIQUE 

en  Loire.  Ils  s'adressèrent  directement  à  Paris  pour  obtenir 
satisfaction.  Ordre  fut  donné  aux  sergents  royaux  d'arrêter  les 
auteurs  de  ces  méfaits'.  Mais  si  les  agents  du  roi  pouvaient 
agir  contre  les  équipages  des  galères  royales,  ils  ne  pouvaient 
rien  faire  contre  des  condottieri  et  des  forbans  étrangers  bien 
armés.  Emilio  Fieschi  et  Fouquet  de  Altovitis  rançonnaient 
alors  tous  les  navires  marchands  qui  sortaient  du  port  de 
Nantes.  Sur  les  instances  de  la  municipalité,  le  maréchal 
de  Retz  envoya  en  Loire  la  Rcale,  galère  commandée  par  Carlo 
Ucellini.  Celui-ci  avait  mission  de  pourchasser  les  pirates.  Les 
frais  de  cette  expédition  restèrent  à  la  charge  de  la  ville. 
Celle-ci  ne  pouvant  y  faire  face,  André  Ruys  lui  vint  en  aide 
en  avançant  200  écus  d'or  qu'il  remit  au  commandant  de 
la  RealeK 

Malgré  tous  les  services  qu'il  avait  rendus  à  la  ville,  André 
Ruys  n'avait  pas  encore  fait  partie  de  la  municipalité  de 
Nantes.  Depuis  de  longues  années  cependant,  de  notables 
armateurs  et  marchands  d'origine  espagnole,  François  Myron, 
Jacques  Marquez,  Jean  Rocas,  de  Compludo,  avaient  rempli 
les  fonctions  de  maire,  sous -maire  ou  échevins.  Pour  la 
première  fois  André  Ruys,  sieur  du  Carleron,  fut  élu  échevin 
le  23  décembre  1081.  11  remplit  ses  fonctions  jusqu'au  mois 
de  décembre  i585  3. 

A  dater  du  jour  où  André  Ruys  eut  abandonné  ses  fonctions 
municipales,  il  semble  s'être  retiré  de  la  vie  publique  pour  se 
consacrer  à  l'existence  familiale.  Depuis  plusieurs  années  ses 
enfants  s'étaient  établis.  Sa  fille  Françoise  avait  épousé  Jean 
Morin,  scigncui-  de  la  Marchaiidcrie,  qui  fut  échevin  de  Nantes 
et  premier  président  de  la  Cour  des  comptes  de  Rrclagne;  sa 
fille  Jeanne  avait  été  mariée  au  seigneur  de  Ruilliers.  Julien 
Ruys  s'était  allié  à  Jeanne  Rocaz  et  il  était  mort  relativement 
jeune.  André  Ruys,  qui  fut  après  la  mort  de  son  père  le  véri- 
table chef  de  la  famille,  avait  épousé,  en  lôyO,  une  lillc  de 
Bonavenlure  de  Compludo.  De  cette  union  naquirent  plusieurs 


I.  Ibid.^  EE.  117. 

3.  Arcli.  rniiii.  do  Nantes,  CC.  i-i'i,  V  i58. 

3.   Livre  liorc  de  l'ancien  lujtcl  de  ville. 


NOTES    SUR    LES    hAPPOKTS    DE    NANTES    AVEC    l'eSPAGNE  l^O^ 

enfants.  Une  fille  ',  Marie,  fut  tenue  sur  les  fonts  baptismaux 
par  le  gouverneur  de  Bretagne,  prince  Philippe  de  Lorraine, 
pair  de  France,  duc  de  Mercœur,  et  par  Marie  de  Beaucaire, 
duchesse  douairière  de  Penthièvre.  Ce  détail  marque  les  bonnes 
relations  que  le  gouverneur  de  Bretagne  entretenait  avec 
l'opulent  marchand  à  la  Fosse. 

Pendant  un  laps  de  temps  assez  long,  qui  s'étend  de  i585 
à  1598,  on  rencontre  peu  de  documents  concernant  la  vie 
publique  des  Ruys  de  Nantes  ^. 

Au  mois  de  mars  1698,  une  délibération  importante  du 
maire  et  des  échevins  de  la  ville  remet  en  lumière  la  person- 
nalité d'André  Ruys.  S'étant  réunis  dans  la  maison  commune, 
à  la  date  du  28  mars,  les  membres  de  la  municipalité  arrêtèrent 
l'ordre  et  la  marche  du  cortège  pour  l'entrée  de  Henri  IV 
à  Nantes.  11  fut  ordonné  de  faire  une  galéasse  pour  conduire 
le  roi  de  la  poterne  du  château  à  la  cale  de  la  Fosse,  lieu  oii 
était  située  la  maison  de  Ruys  où  S.  M.  devait  loger.  On  décida 
de  voter  12,000  livres  pour  les  dépenses  relatives  à  l'entrée 
du  roi,  on  ouvrit  également  une  souscription  parmi  les  plus 
aisés  bourgeois  de  la  ville  et  sur  la  liste  des  souscripteurs  nous 
retrouvons  le  nom  d'André  Ruys.  Durant  le  séjour  qu'il  fit  à 
Nantes,  Henri  IV  visita  le  riche  Espagnol,  mais  ne  descendit 
pas  dans  sa  demeure  '^. 

Cette  visite  fut-elle  faite  à  André  Ruys  père  ou  à  son  fils? 
La  question  peut  cire  posée,  car  nous  ignorons  la  date  exacte 
de  la  mort  du  chef  de  famille.  Au  moment  de  l'entrée  de 
Henri  IV  à  Nantes,  André  Ruys  aurait  été  âgé  de  près  de  quatre- 
vingts  ans,  puisqu'il  était  déjà  marié  et  père  de  famille  au 
moment  de  .sa  naturalisation  en  15^7. 

La  tradition  nantaise  attribue  l'honneur  de  celte  visite 
royale  à  André  Ruys  père.  Le  fait  n'a  rien  d'impossible.  Les 
documents   d'archives  ne   mentionnent  pas  le  nom  d'André 


1.  Arch.  mun.  de  Nantes,  GG.  17G. 

2.  Sous  la  date  de  1C17,  Georges  le  Hat,  miseur,  fait  dépense  d'une  somme  de 
i5o  livres  sous  la  rnbri((ue  :  paiement  à  Antoine  Ruys,  lils  et  liériticr  de  l'eu  André 
Ruys,  par  obligation  du  i6  août  i588.  11  s'agit  d'André  Ruys-Emljilo,  lils  d'André 
Ruys,  sieur  du  Carteron. 

3.  Abbé  Travers,  Histoire  de  Nantes,  1887,  t.  111. 

Bull,  hispan.  37 


4o6  Blî.LETlN    HISPANIQUE 

Ruys  après  Tannée  i585;  mais  il  s'était  retiré  du  commerce  et 
jouissait  de  la  fortune  et  de  la  situation  qu'il  s'était  faites.  En 
outre,  sous  le  proconsulat  de  Mercœur,  la  colonie  espagnole 
de  Nantes  fut  tenue  à  l'écart  des  affaires;  la  famille  de  Ruys, 
hùle  de  deu\  rois,  ne  pouvait  pas,  décemment,  embrasser  la 
cause  de  l'Infante.  Aussi  bien,  ces  diverses  raisons  peuvent- 
elles  expliquer  l'absence  des  documents  concernant  André 
Ruys. 

Si  nous  ignorons  la  date  exacte  du  décès  du  chef  de  la 
famille  des  Ruys  en  Rretagne,  nous  savons  cependant  qu'il  fut 
inhumé  au  couvent  des  Cordeliers.  De  concert  avec  sa  femme, 
Isabelle  de  Santo  Domingo,  Ruys  avait  constitué  au  profit  de 
ce  couvent  une  rente  de  i5o  livres.  Celle-ci  fut  d'abord  garan- 
tie par  une  hypothèque  accordée  sur  une  maison  de  la  Grande- 
Rue,  puis  sur  une  autre  de  la  rue  de  Briord.  Elle  fut  ensuite 
convertie  en  un  constitut  sur  les  États  de  Bretagne.  Cette 
rente  était  accordée  en  échange  du  droit  de  posséder  aux 
Cordeliers  une  chapelle  privative^  un  droit  d'enfeu  et  des 
messes  de  requiem. 

André  Ruys  fils  fut  le  continuateur  des  affaires  commer- 
ciales de  son  père.  Il  modifia  son  nom  en  celui  de  Ruys- 
Embito  à  partir  de  l'année  1696.  Par  testament  en  date  du 
i»^'  avril  1096,  don  Simon  Ruys-Embilo,  habitant  Médina  del 
Campo,  légua  à  André  Ruys  son  neveu,  fils  de  son  frère  André 
Ruys,  la  somme  de  trois  mille  écus  d'or  et  de  cinq  mille 
ducats. 

Il  fondait  en  outre  un  majorât  perpétuel  de  80,000  ducats 
pour  la  conserxulioii  de  son  nom  RuysEmbito'.  Ce  nom  fut 
par  la  suite  celui  de  tous  les  aînés  de  la  branche  d'André  Ruys. 
On  le  retrouve  en  1761  porté  par  Simon-Charles  Ruys, 
seigneur  de  la  Rrosse-Gaspoib.  Bien  que  la  famille  des  Ruys 
ait  essaimé  en  Bretagne,  une  partie  de  celle-ci  demeura  atta- 
chée au  comté  nantais. 

Le  I*'  janvier  1772,  décédait  à  Nantes  dame  Angélique  de 
Ruys-Embito,  épouse  de  Langlais,  seigneur  du  Portai  et  capi- 

I.   Baron  de  UosmorcJiic,  l'renves  de  la  noblesse,  clc. 

a.  Marquis  de  Surgères,  Moles  sur  les  anciens  actes  de  l'étal  civil,  Nantes. 


NOTES    SUR    LES    RAPPORTS    DE    NANTES    AVEC    l'eSPAGNE  ^07 

taine  au  régiment  de  Royal-Pologne.  Cette  descendante  d'An- 
dré Ruys  fut  inhumée  au  couvent  des  Cordeliers'.  A  la  fin  du 
xvni''  siècle,  cette  famille  avait  donc  conservé  une  habitude 
deux  fois  séculaire. 

Les  autres  familles  espagnoles  de  Nantes  pourraient  donner 
lieu  à  des  recherches  intéressantes  :  mais  dans  aucune  d'elles 
on  ne  retrouve  la  trace  d'un  chef  aussi  actif  que  celui  dont 
nous  avons  essayé  d'esquisser  la  carrière.  Tour  à  tour  mar- 
chand, banquier,  homme  politique,  André  Ruys  fut  un  ardent 
patriote,  et  s'il  est  difficile  de  faire  revivre  sa  personnalité 
étant  donnée  l'absence  de  mémoires  qui  nous  parlent  de  lui, 
du  moins  a-t-il  paru  intéressant  de  montrer  la  place  qu'a 
tenue  à  Nantes  cet  opulent  marchand  à  la  Fosse. 

Jules  MâTHOREZ. 
(A  suivre.) 

I.  Arch.  mun.  de  Nantes,  GG.  149. 


NUEVOS  DàTOS 
ACERCA   DEL   HISTRIONISMO   ESPANOL 

EN     LOS     SIGLOS     XVI     Y     XVII 

(Segunda  série  '  ) 

Siglo    XVII 
(Suite.) 


4642 

399.  —  Conciertos  de  Andrés  de  la  Vega,  autor  de  comedias,  con 
représentantes  que  han  de  asislir  en  su  companîa  hasta  Carnesto- 
lendas  de  i643  : 

Juana  Bautista,  para  representar,  cantar  y  bailar,  ganando  260  reaies 
por  la  fîesta  del  Corpus,  Zj  ducados  por  cada  fiesta  de  N"  S'  de  Agoslo 
y  Septiembre  y  34  reaies  por  cada  una  de  las  ordinarias. 

Mariana  de  los  Reyes  (con  poder  que  tiene  para  concertarse  durante 
la  ausencia  de  su  marido  Jerônimo  Carbonera)  paru  hacer  primeras 
damas,  ganando  1,100  reaies  por  cl  Corpus,  12  ducados  por  cada  liesla 
de  Agosto  6  Septiembre,  8  ducados  por  una  ordinaria,  mâs  5  reaies 
de  racion  cuando  salière  de  iMadrid,  y  se  le  prcstarân  i,5oo  realcs  antes 
del  Corpus  para  desempenar  un  vestido. 

Elena  Marlinez  para  cantar,  bailar  y  representar,  ganando  200  rcales 
por  el  Corpus,  y  las  dcmâs  lîeslas  â  elecciôn  del  autor. 

Diego  Diaz,  mûsico,  ganarâ  24  ducados  por  la  fiesta  del  Corpus, 
4  ducados  por  cada  fiesta  de  Agosto  6  Septiembre  y  2  por  una 
ordinaria. 

Martin  Duarte,  mûsico,  cobrarâ  4oo  rcales  por  la  fiesta  del  Corpus, 
DO  reaies  en  cada  una  de  los  de  Agosto  y  Septiembre  y  4o  en  cada  una 
de  las  ordinarias.  Madrid,  17  Fcbrero  1642. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1642.) 

400.  —  Obiigaciôn  de  Pedro  Ortiz  de  Urbina,  en  nombre  y  con 
poder  de  Francisco  Alonso  de  Vitoria  s  de  (jue  este  asistirâ  en  la 
compania  de   Pedro  de  la  Hosa,  autor   de   comedias,  hasta  Carnes- 

I.  Voir  le  Bull,  hispan.,  190O,  p.  71,  148,  363;  1907,  p.  3Co;  1908,  p.  3/j3;  1910, 
p.  3o3  ;  191 1,  p.  It',  3o(i  ;  1912,  p.  3oo. 

3.  Poder  dado  en  ,\nlcquera  à  18  de  Kebrcro  de  lO/ia. 


NUEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    HISTaiO?«ISMO    ESPAÎVOL  qOQ 

tolendas  de  rG^3  para  represenlar  los  terceros  papeles,  ganando 
8  reaies  de  raciôn,  8  de  cada  representacùjn^  3oo  reaies  y  dos  caba- 
Uerfas  para  las  fiestas  del  Corpus  y  ooo  reaies  prestados  luego  que 
llegue  â  Madrid.  Madrid,  8  Marzo  iG^a. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1642,  f"  ']li.) 

404.  —  Obligacion  de  Bartolomé  Meanso  de  pagar  â  Esteban  de 
Talavera  4oo  reaies  por  un  vestido  de  mujer  de  lama  plateada. 
Madrid,  12  Marzo  1642. 

(Fr'°  Diaz  de  la  Torre,  1642  y  43,  f°  8.) 

402.  —  Concierto  de  Juan  de  Malaguilla,  autor  de  comedias,  con 
varies  représentantes  para  formar  compania  durante  cl  présente  ano 
hasta  Carnestolendas  del  prôximo. 

Francisco  Lôpez  y  Jacinto  Becerril  harân  por  mitad  los  1°'  y 
2"  papeles,  ganando  Francisco  i3  reaies,  7  de  raciôn  y  8  por  repre- 
sentaciôn;  y  Jacinto  i4  reaies,  (3  de  raciôn  y  8  por  representaciôn. 

Pedro  Conde,  los  terceros,  y  su  mujer  cantarâ  las  comedias,  bailes 
y  entremeses,  y  ganarân  18  reaies,  nueve  de  raciôn  y  otros  nueve  por 
representaciôn. 

José  de  Reynoso  para  los  4°'  papeles,  ganarâ  5  reaies  de  raci(')n  y 
6  de  representaciôn. 

Bartolomé  de  Robles  para  representar,  y  su  mujer  Alfonsa  de  Haro 
para  terceras  damas. 

Francisco  de  Roxas,  gracioso,  20  reaies  ;  8  de  raciôn  y  1 2  de 
representaciôn. 

Juan  Lôpez,  cobrador,  y  Ana  de  Barrios,  su  mujer,  para  los  segundos 
papeles  de  damas,  ganarân  17  reaies  de  partes,  8  de  raciôn  y  3  de 
representaciôn. 

Luis  de  Mendoza,  apuntador,  7  reaies,  3  de  raciôn  y  4  de  represen- 
taciôn. 

Juan  de  Malaguilla,  autor,  harâ  los  barbas,  y  Juan  de  Malaguilla, 
su  hijo,  para  representar,  tcndrân  22  reaies  de  parte,  10  de  raciôn 
y  1 2  de  representaciôn. 

Las  pérdidas  ô  ganancias  se  prorratearân  segiin  sea  el  resultado 
en  ingreso  por  entradas.  Madrid,  22  Marzo  1642. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1642,  toi.  106.) 

403.  —  Conciertos  de  Pedro  de  Ascanio  para  reforzar  su  compaiiia . 
Gaspar  de   Segovia,   para  segundos   papeles^    ganara    9  reaies   de 

raciôn,  12  por  cada  representaciôn,  5oo  para  el  Corpus,  mâs  dos 
caballerias  y  llevado  su    hato,  y  ademâs  2,000  reaies  de  préstamo. 

Miguel  de  Miranda,  cobrador,  tendra  4  reaies  de  raciôn,  4  de  cada 
representaciôn,  200  para  el  Corpus,  mâs  una  caballeria  y  llevado  su 
hato  y  ademâs  100  reaies  de  préstamo, 

Jerônimo  de  Sandoval,  apuntador,  su  mujer,  que  harâ  cuartas 
damas,   ganarân   8  reaies  de   raciôn,    1 1    por  cada   l'epresentaciôn, 


4lO  BULLETIN    HISPANIQUE 

20  ducados  por  el  Corpus,  mas  3  caballerias  y  llevado  su  hato 
y  l\oo  reaies  de  préstamo. 

Ursula  de  Berrio,  viuda,  para  representar,  canlar  y  bailar,  ganarâ 
^6  reaies  de  raciôn,  6  por  representaciôn,  20  ducados  por  el  Corpus, 
mâs  dos  caballerias  y  su  hato,  ademâs  5oo  reaies  de  préstamo. 

José  Antonio  de  Quevedo,  para  cantar,  bailar  y  representar,  tendra 
5  reaies  de  racion,  5  por  representaciôn,  200  por  el  Corpus,  mâs  dos 
caballerias  y  llevado  su  hato,  y  de  préstamo  600  reaies. 

Juan  de  Miramontes,  para  hacer  terceros  papeles  y  bailar,  6  reaies 
de  racicSn,  9  por  representaciôn,  200  con  dos  caballerias  y  el  halo  para 
el  Corpus  y  Aoo  reaies  prestados. 

Marco  Antonio  de  Aguilar,  mi'isico,  5  reaies  de  raciôn,  5  por  repre- 
sentaciôn, 100  para  el  Corpus,  mâs  una  caballeria  y  su  hato  y  lioo  reaies 
de  préstamo. 

Felipe  Ordônez,  barba,  7  reaies  de  raciôn,  11  de  cada  represen- 
taciôn, 3o  ducados  para  el  Corpus,  mâs  dos  caballerias  y  de  préstamo 
800  reaies.  Madrid,  28  Marzo  1642. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1G42.) 

404.  —  Conciertos  de  Andrés  de  la  Vega  para  reforzar  su  compaîiia. 
Miguel  de  Miranda  y  su  mujer  Juana  Bautista  ganarân  i,too  reaies 

por  la  fiesta  del  Corpus,  y  en  las  demâs  pagarâ  â  Juana  Bautista  lo 
mismo  que  da  â  Mariana  de  los  Reyes,  la  Carbonera. 

Luis  Candau  ganarâ  180  reaies  por  el  Corpus  y  por  los  olras  fiestas 
lo  mismo  que  paga  â  Franscisco  de  Léon. 

Manuela  Trivino,  representanta,  ganarâ  35o  reaies  por  el  Corpus, 
3  ducados  en  cada  fiesta  deAgosto  y  Septiembrey  2  por  las  ordinarias. 
Madrid,  23  Marzo  1C42. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1642.) 

405.  —  Garta  de  pago  de  Luis  Bernardo  de  Bovadilla,  autor  de 
comedias,  en  nombre  de  Pedro  de  Covaleda,  Francisco  Alvarez  de 
Vitoria  y  Francisco  Vêlez  de  Guevara,  autores  también  de  comedias ', 
de  1,000  reaies,  precio  de  los  cinco  particulares  que  los  susodichos 
hicieron  â  Su  Magestad  la  lleina.  Madrid,  2/j  Marzo  10^2. 

(Juan  de  Garcia  de  Albertos,  16/42,  f°  ii5.) 

406.  —  Poder  de  Andrés  de  la  Vega,  autor  de  comedias,  de  los  doce 
nombrados  por  S.  M.  à  Barlolomé  Romero,  autor  también  de 
comedias,  para  que  las  justicias  ante  quien  se  presenlare  manden  que 
ningûn  autor  de  comedias  «  no  représente  ningunas  comedias  mias 
(jue  yo  he  comprado  y  tengo,  y  en  particular  la  de  San  Carias 
Borromeo,  que  compré  de  Andrés  de  Claramonte,  vecino  de  Sevilla  d. 
Madrid,  i"  Abril  1642. 

(Juan  de  (^)uintanilla,  1642,  f°  4i3.) 

I.  Poder  otorgado  en  Mdiaga  en  3o  de  Marzo  de  iG'41. 


nUEVOS    DATOS    AGERCA    DEL    HISTRIONISMO    ESPANOL  /j  I  I 

407.  —  Obligaciôn  de  Pedro  de  Ascanio,  autor  de  comedias,  de  ir 
para  Pascua  de  Resurrccciôii  a  la  ciudad  de  Segovia  y  hacer  con  su 
companîa  24  representaciones  sucesivas  pagândole  700  reaies  de 
ayuda  de  costa  al  llegar  â  dicha  ciudad  y  4,000  reaies  de  préstamo. 
Madrid,  2  Abril  1642. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1642,  f"  i4o.) 

408.  —  Escritura  para  formar  una  compafiia  de  partes  bajo  la 
direcciôn  de  Juan  Rodriguez  de  Antriago,  aulor  de  comedias  : 

Juan  Rodriguez  de  Antriago,  autor. 

Pedro  de  Linares. 

Juan  de  Montemayor. 

Felipe  Lobato. 

Mario  Antonio. 

Jeronimo  de  Médina. 

Leonardo  de  Torres. 

Damiân  de  Villegas. 

Alonso  Jiménez. 

Gatalina  de  Padilla,  su  mujcr,  para  segundos  papeles. 

Francisco  de  Valencia. 

Maria  de  Herrera,  su  mujer,  para  terceros  papeles. 

Manuel  de  Macedo. 

Manuel  de  Silva. 

Madrid,  1 1  Abril  1G42. 

(Juan  Garcia  Albertos,  iGl\9.,  f'  1G4.) 

409.  —  Concierto  para  formar  une  compafiia  de  partes  que  ha  de 
durar  hasta  Carnestolendas  de  iG43. 

Antonio  de  Sierva,  autor,  para  segundos  papeles  :  8  reaies  de  parte. 

Juan  de  Bustamante,  primeros  papeles  :  8  reaies. 

Juan  de  Ortega,  barba  :  7  realcs. 

Juan  Camacho,  gracioso  :  6  reaies. 

Bernardo  Gômez  y  su  hija  (terceros  papeles)  :  10  reaies. 

Juan  Antonio,  cuartos  papeles  :  5  reaies. 

Gabriel  Sedeno,  para  cantar  y  poner  la  mi'isica  :  8  reaies. 

Agueda  de  Contreras  :  6  reaies. 

Se  senalan  6  reaies  para  el  hato  y  comedias,  2  para  la  misa  y  2  a 
N'  S^  de  la  Novena. 

Jacinta  de  Contreras,  primeros  papeles  :  9  reaies. 

Clemencia  de  Leiva,  terceros  papelos  :  7  1/2  reaies. 

Leonor  de  Banuelos,  segundas  damas  :  7  1/2  reaies. 

Todos  aceptan  la  condiciôn  de  variar  y  aceptar  la  distribuciôn  de 
papeles,  cuando  sea  necesario  6  conveniente.  Madrid  19  Abril  1G42. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1G42,  f°  175.) 

410.  —  Obligaciôn  de  Jeronimo  de  Morales  Castaneda,  por  si  y  en 
nombre  de  su  mujer  Manuela  de  Côrdoba,  y  de  Maria  de  Olmos, 


4l2  BULLETIN    HISPANIQUE 

representanta,  viuda.  de  ir  â  la  villa  de  Tordelagnna  para  el  Domingo 
y  Lunes  infraoc^lava  del  Corpus  de  este  afio  y  hacer  dos  representa- 
ciones,  una  en  cada  dîa,  las  mismasque  liagan  en  Cogolludo,  que  son  : 
Juan  de  Vitoria  y  El  Mayo  de  Paleslina,  en  precio  de  Z|5o  reaies  y 
ademâs  Sôo  para  D'  Alaria  de  Olmos,  con  6  ducados  de  ayuda  de  costa 
para  el  otorgante.  Madrid,  ii  Mayo  iG^a. 
(Juan  Garcia  de  Albertos,  ir)/i2,  f°  217.) 

411.  —  Obligaciôn  de  Pedro  de  la  Piosa,  aulor  de  comedias,  de  ir  â 
la  ciudad  de  Toledo  y  hacer  en  la  casa  de  comedias  de  esta  ciudad  t\o 
ropresentaciones  de  las  comedias  que  tiene  puestas  este  ano,  cobrando 
55  reaies  de  ayuda  de  costa  por  cada  representaciôn  y  Z|,Goo  reaies 
prestados.  Madrid,  28  Mayo  1642. 

(Jean  Garcia  de  Albertos,  1642,  f"  246.) 

412.  —  Obligaciôn  de  Antonio  Garcia  de  Prado  y  Péri,  autor  de 
comedias,  de  ir  à  Toledo  para  el  20  de  Agosto  de  este  afio  y  hacer  5o 
representaciones  sucesivas,  pagândolc  55  reaies  de  ayuda  de  costa  por 
cada  representaciôn  y  5. 000  reaies  adelantados.  Madrid,  SoMayo  1642. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1642,  f"  249.) 

413.  —  Obligaciôn  de  Antonio  de  Rueda,  autor  de  comedias,  Juan 
Navarro  Oliver,  Pantaleôn  de  Borja,  Juan  de  la  Torre,  José  Carriôn, 
Miguel  de  Alique  y  José  Canales,  sus  companeros,  de  pagar  â  Fran- 
cisco Garro  de  Alegria  5, 000  reaies  que  le  deben  del  tiempo  que  lue 
arrendador  de  los  corrales  de  comedias  de  Madrid,  y  el  pago  sera  al 
mes  de  haber  llegado  â  Valencia  para  dondeestande  partida.  Madrid, 
23  Septiembre  1642. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1G42,  f°  40-,) 

1643 

414.  —  Poder  de  Diego  Osorio,  comcdiante  en  la  companîa  de  Pedro 
de 'Ascanio,  vecino  de  Madrid,  résidente  en  Guadalajara,  â  su  mujer 
Isabel  Osorio,  para  concertar  fiestas  y  comedias.  Guadalajara', 
16  Enero  i643. 

(Diego  Pérez  Orejôn,  i643,  f'  4.) 

415.  —  Poder  de  Jerônimo  de  Sandoval  i  Barlolomé  Manso  y  An- 
gola de  Torralba,  sus  padres,  para  que  puedan  concertar  fiestas  y 
oclavas  en  su  nombre  y  el  de  su  muger  Francisca  Manso.  Guadala- 
jara^, 16  Enero  iG43. 

(Diego  Pérez  Orejôn,  iG43,  f  44.) 

416.  —  Concierlos  de  Luis  Lôpez  Sustaele,  autor  de  comedias,  con 
los  représentantes  (pie  han  de  estar  en  su  compania  basta  Carnesto- 
lendas  de  iG44. 

t.   lti<Ju(lal)liiiTicnto  en  Madrid. 
3.   liidudahlcmffDle  en  Madrid. 


NUEVOS    DATOS    ACERC  \    DEL    HISTRTONISMO    ESPA^OL  4  f  3 

Lorenzo  Escudero,  gracioso,  cobrarâ  lo  reaies  de  raciim,  i6  do 
representaciôn,  600  por  la  fiesta  del  Corpus  y  2,200  de  préstanio. 

Ambrosio  Duarte,  mûsico,  ganarâ  5  reaies  de  raci(')n,  (i  de  represen- 
taciôn y  f5o  por  la  fiesta  del  Corpus. 

Pedro  Jordan,  para  canlar  y  poner  la  mûsica,  ganando  0  reaies  de 
raciôn,  8  de  representaciôn,  200  por  la  fiesta  del  Corpus  y  5oo  de 
préstamo.  Madrid,  24  Enero  16/48. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i643.) 

417.  —  Auto  para  que  no  salgan  de  Madrid  Antonio  de  Prado  ni  la 
viuda  de  Tomâs  Fernande/,  de  Cabredo,  autores  de  comedias,  ni  los 
de  sus  compaîïias. 

Se  notificô  â  las  personas  siguientes  : 

Antonio  de  Prado,  autor. 

Juan  de  Escuriguela  Arifio. 

Sébastian  de  Prado. 

Victor  Bravo. 

Juan  Mazana. 

Luis  Estrada. 

Raymudo  Gômez. 

Pablo  Rodriguez. 

Juan  de  Carmona. 

Cebriân  Martinez. 

Mariana  de  Morales  Vaca. 

Jusepa  Lobata. 

Jusepa  Antonia  Mazana. 

Leonor  de  Velasco. 

Juana  de  Espinosa,  autora. 

Jusepa  de  Salazar. 

Maria  de  Jésus. 

Catalina  de  Silva. 

Jusepa  Roniân. 

Antonia  Santiago, 

Francisco  Verdugo.  • 

Ifiigo  de  Loaysa. 

Antonio  Mexia. 

Francisco  Garcia. 

Juan  Matias, 

Juan  de  Leôn. 

Agustin  Pérez. 

Esteban  Nûfiez. 

Bernardo  de  Medrano. 

Jayme  Salvador. 

Madrid,  i3  Febrero  t643. 

(Arch.  municipal,  clase  rO,  3-/470-28.) 


4l4  BULLETIN    HISPANIQUE 

418.  —  Obligaciôn  de  Cosme  Pérez  de  asistir  hasta  el  Corpus  del 
présente  aûo  en  la  companîa  de  Pedro  de  la  Rosa  haciendo  toda  la 
parte  de  la  graciosidad  y  ganando  12  reaies  de  racion,  20  por  repre- 
sentar'um,  5o  ducados  por  el  Corpus,  y  1,000  reaies  prestados. 
Madrid,  28  Febrero  i643. 

(Juan  Garcia  de  Â.lbertos,  i643,  f   i^~.) 

419.  —  Conciertos  de  Antonio  Garcia  de  Prado,  autor  de  comedias, 
para  completar  su  compafiïa. 

G  il  de  Ortegôn,  mi'isico  y  représentante,  ganarâ  7  reaies  de  raciôn, 

8  de  representaciôn,  200  para  el  Corpus  y  600  de  préstamo. 

José  de  Meneses  y  su  niujer  Juana  do  Salazar,  para  representar. 
ganando  ambos  8  reaies  de  raciôn,  10  de  representaciôn,  200  por  el 
Corpus  y  3oo  de  préstamo. 

Ana  y  Jerônima  Munoz,  hijas  de  Juana  Valero,  para  representar, 
ganando  10  reaies  de  raciôn,  g  por  representaciôn,  3oo  por  el  Corpus 
y  800  de  préstamo. 

Jusla  Rurina,hija  de  Ana  Garcia,  para  representar,  ganando  8  reaies 
de  raciôn,  8  por  representaciôn,  /iooporel  Corpusy  olros  l^oo  prestados. 

José  Antonio  de  Quevodo,  mi'isico,  ganarâ  9  reaies  de  raciôn,  6  por 
representaciôn,  200  por  el  Corpus  y  3,5oo  de  préstamo.  Madrid,  Febrero 
y  Marzo  iG^3. 

(Juan  Garcia  de  Alberlos,  iG/|3.) 

420.  —  Conciertos  de  Pedro  de  la  Rosa,  autor  de  comedias,  con 
algunos  représentantes. 

Juan  de  Tapia  y  Sandoval.  niiisico,  y  Josefa  Ma/.ana,  su  mujer,  que 
liarâ  los  cuartos  papeles,  ganarâ  i3  reaies  de  raciôn,  17  por  cada 
representa(ni'»n,  5oo  por  el  (Corpus  y  ^oo  prestados. 

Josefa  Komâii  representarâ  los  terceros  papeles,  ganando  10  reaies 
de  raciôn,  i/j  de  representaciôn,  55o  y  dos  caballerias  para  el  Corpus  y 
1,000  de  préstamo. 

Manuela  Trivino,  para  representar,  ganando  /«  reaies  do  raciôn, 
otros  II  por  cada  representaciôn,  8  ducados  porel  Corpus  y  280  reaies 
prestados.  Madrid,  Febrero  y  Marzo  i()'|3. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  iG43.) 

421.  —  Conciertos  de  Pedro  de  Ascanio,  autor  de  comedias,  con  los 
reprosontantos  <jue  lian  de  asislir  en  su  compania  liasta  martes  de 
Carncstolendas  de  iG'i^. 

Juan  Manuel  Li'tpcz,  mi'isico,  ganarâ  7  reaies  do  raciôn,  10  de  repre- 
sontari(')n  y  220  por  la  fiesta  del  Corpus,  mâs  très  caballerias  y  llcvarle 
su  liato. 

Antonio  Messia,  para  representar  los  segundos  papeles  en  las 
comedias  y  los  papeles  de  harhas  fncrles  que  se  ofrecieren,  ganando 

9  reaies  de  raciôn,  i3  de  representaciôn,  y  por  la  fiesta  del  Corpus  44o, 
1res  caballerias  v  llevailc  su  lialo 


NUEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    HISTRIOMSMO    ESPA>OL  f\\b 

Juan  Mazana  y  su  hija  Manuela  Mazana,  mujcr  de  Laurencio  de 
Prado,  représentai  an  (Manuela  las  segundas  damas),  ganando  ambos 
i3  reaies  de  raciôn,  21  de  representaciôn,  660  por  el  Corpus  y  1,200 
de  préstamo. 

Antonio  Marin, gracioso,  ganarâ  8  reaies  de  raciôn,  16  por  represen- 
taciôn, 5oo,  mâs  très  caballerias  y  Uevarle  su  hato,  por  la  fiesta  de) 
Corpus,  y  400  prestados. 

Josefa  Roman  déjà  sin  valor  el  concierto  hecho  con  Pedro  de  la 
Rosa  y  se  obliga  con  Pedro  Ascanio  para  hacer  los  terceros  papeles  en 
las  comedias  y  los  primeros  de  miisica  en  los  entremeses,  ganando 
10  reaies  de  raciôn,  i4  por  representaciôn,  i,5oo  por  cl  Corpus,  mâs 
très  caballerias  y  llevado  su  hato,  y  2,000  reaies  prestados. 

Francisco  Alvarez  de  V^itoria  harâ  los  segundos  ô  terceros  papeles  y 
los  barbas,  ganando  7  reaies  de  raciôn,  11  de  cada  representaciôn, 
3oo  para  la  fiesta  del  Corpus  y  200  de  préstamo.  Madrid,  Febrero 
y  Marzo  i6/i3. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  iG!\S.) 

422,  —  Conciertos  de  Juana  de  Espinosa,  autora  de  comedias,  para 
reforzar  su  compaùia. 

Esteban  Niinez,  asistirâ  en  dicha  compania  hasta  Carnestolendas  de 
1644  para  hacer  los  terceros  papeles  6  las  barbas,  y  su  mujer  Josefa 
de  Salazar  para  las  primeras  damas,  y  ambos  ganarân  38  reaies  de 
partido:  i3  de  raciôn,  26  de  cada  representaciôn,  800  y  cuatro  cabal- 
lerias para  las  fiestas  del  Corpus  y  i  ,000  de  préstamo. 

Francisco  Garcia  (por  mandado  del  Protector  de  las  comedias  ha  de 
hacer  esta  escritura  anulando  la  que  ténia  hecha  con  Luis  Lôpez 
de  Sustaete)  hara  los  segundos  papeles  y  los  barbas  ganando  7  reaies 
de  raciôn,  10  por  representaciôn,  3oo  por  el  Corpus  y  aoo  prestados, 
Madrid,  8  Marzo  i643. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i643,  f°  90,) 

423.  —  Obligaciôn  que  hace  Francisco  Alvarez  de  Vitoria  de  que  su 
mujer  Josefa  Nieto  ira  â  Colmennr  Viejo  y  harâ  dos  representaciones 
el  Domingo  de  la  octava  del  Corpus  de  este  ano  y  ((  se  vestirâ  los 
papeles  que  hiciere  excepto  los  de  h'ombre,  villana,  monxa  ô  angel 
ô  demonio,  porque  estos  no  han  de  correr  por  su  quenta»,  cobrando 
5oo  reaies.  Madrid,  12  Marzo  i643. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i(]43,  f°  io3.) 

424  —  Peticiôn  de  Juana  de  Espinosa  para  que  saïga  de  la  carcel 
Inigo  de  Loaysa,  représentante,  el  cual  de  pedimento  de  la  otorgante 
habia  sido  ejecutado  y  preso  por  deuda  de  4,i48  reaies.  Madrid, 
i3  Marzo  i643. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i643,  t  io5.) 

425.  —  Conciertos  de  Andrés  de  la  Vega. 

Alonso  Diaz  Navarrete,  mùsico,  asistirâ  desde  1°  de  Junio  hasta 


4l6  BULLETIN    HISPANIQUE 

fin  de  Septiembre  en  dicha  compafiîa  cobrando  85o  reaies,  mâs  todos 
los  gastos  pagados  en  los  viajes. 

Antonio  Galiano,  durante  un  ano  para  représenter,  ganando 
'2-0  reaies  por  la  Resta  del  Corpus,  5  ducados  porcada  fiesta  de  Agosto 
y  Septiembre  y  !i  por  cada  nna  de  las  ordinarias,  mâs  pagados  todos 
sus  gastos  en  las  salidas  de  Madrid. 

Doua  Isabel  de  Castro,  para  représenter  durante  la  octava  del 
Corpus,  ganando  700  reaies,  mâs  la  comida  y  caballerîas  necesarias 
durante  los  viajes. 

Gabriel  Sedeno,  mi'isico,  ganarâ  por  la  fiesta  del  Corpus  2Ô0  reaies, 
8  ducados  por  cada  fiesta  de  Agosto  ô  Septiembre,  y  7  por  las  ordi- 
narias. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  lOAS.) 

426.  —  Carta  de  pago  de  Juana  de  Espinosa,  viuda  de  Tomâs 
l-ernândez,  autor  de  comedias,  en  l'avor  do  Esteban  Nûnez  por 
joo  reaies  que  le  da  â  cuenta  de  1,600  (jue  le  debe.  Madrid,  3o  Marzo 
1643. 

(Juan  de  Pineda,  i643.) 

427.  —  Obligaci('>n  de  Antonio  Garcia  de  Prado,  autor  de  comedias, 
de  estar  en  Valladolid  para  Pascua  de  Resurrecciôn  de  este  ano 
y  représenter  en  la  casa  de  comedias  de  dicha  ciudad.  Se  le  dan  en  el 
acto  17,000  reaies  los  cuaies  devolverâ  con  el  producto  de  las  fiestas 
del  Corpus  que  ha  de  hacer  en  dicha  ciudad  y  con  las  ayudas  de  costa 
acostumbradas.  Madrid,  3i  Marzo  i643. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i6/i3,  f"  16/i.) 

428.  —  ()bligaci<')n  de  Juan  Maçana,  représentante  de  la  compafiîa 
de  Pedro  de  Ascanio,  autor  de  comedias,  de  pagar  â  Alonso  de  Morales, 
mercader  de  sedas,  345  reaies,  precio  de  varias  mercaderias  que  ha 
sacado  de  su  tienda  y  que  pagarâ  dentro  de  8  dias.  Madrid,  4  Abril 
1043. 

(Juan  de  Pineda,  i643.) 

429.  —  Asiento  entre  Juana  de  Espinosa  y  Luis  Lôpez  Sustaete 
sobre  toner  entre  ambos  la  compafua  de  représentantes  que  tienen 
lorniada  para  este  ano  y  basta  Carnestolendas  de  iG44  bajo  las  deda- 
raciones  y  condiciones  siguientes  : 

«  Primerauiente  que  la  compania  que  ban  formado  de  las  personas 
(|ue  tiene  «orra  por  (juenta  de  ambos. 

I)  (Mie  las  personas  de  la  dicha  Juana  de  Espinosa  y  el  dicho  Luis 
l.opez  esten  y  corran  ygualmenle  en  las  perdidas  y  en  las  ganancias, 
costas  y  gastos. 

))  Que  las  deudas  que  tiene  la  compania  se  ban  de  cobrar  de  los 
rompafieros  en  la  forma  que  lo  deben,  cobrando  los  dos  autores  cada 
urio  de  (|iiicn  le  deba  llanamente  y  sin  pleyto  ni  embargo  alguno. 

»  (Mit-  liiera  de  las  raciones  que  estan  dadas  y  losdemas  gastos  hasta 


/.  ,-r 


NLEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    HlSTRlOJilSMO    ESPA.NOL  A17 

hoy  se  ha  de  dar  entre  ambas  partes  todo  lo  que  se  tiene  obligacion 
asi  para  raciones  como  para  prestamos,  viaxes,  comedias  y  demas 
gaslos  que  se  ofrezcan,  poniendo  cada  uno  de  su  parte  lo  que  le  toca, 
que  es  la  mitad  de  todo  a  cada  uno,  teniendo  para  ello  libre  de  caxa, 
quenta  y  razon  de  todo  para  que  cada  parte  sepa  lo  que  ha  de  haber  y 
lo  que  debe  pagar. 

»  Que  para  las  representaciones  que  durante  este  asicnto  se  hicieren 
han  de  manifestar  cada  parte  todas  las  comedias  que  se  supiere  que 
tienen  y  que  se  han  representado  en  sus  compaflias  sin  que  ninguno 
oculte  ninguna  de  las  que  tuviere  para  tuera  de  Madrid,  sin  que  uno 
al  otro  se  dé  satisfacion  ninguna  por  ninguna  délias. 

»  Que  en  quanto  a  las  comedias  para  Madrid  tengan  obligacion  las 
dichas  partes  de  dar  uno  tantas  nuevas  como  otro,  o  pagarlas  entre 
ambos. 

»  Que  han  de  poner  el  hato  para  el  vestuario  y  para  las  comedias  y 
fiestas  de  Corpus  entre  ambos,  menos  colgaduras  y  estrados,  igual- 
mente,  y  si  acaso  se  necesitare  de  hacer  alguno  nuevo,  ha  de  ser  por 
quenta  de  ambos  au  tores. 

»  Que  se  ha  de  ensayar  en  casa  del  dicho  Luis  Lopez,  y  eu  los  carteles 
se  han  de  poner  ambos  autores,  como  lo  acordaron  entre  ellos. 

»  Que  la  dicha  Juana  de  Espinosa  ha  de  otorgtir  al  dicho  Luis  Lopez 
poder  gênerai  bastante,  por  lo  que  le  toca,  para  recebir  y  cobrar,  hacer 
y  deshacer  en  la  dicha  compania  y  hacer  conciertos  de  viajes,  fiestas 
y  octavas  y  recebir  o  despedir  companeros,  hacer  pagamento  y  todo 
lo  demas  que  sea  anejo  y  perteneciente  a  la  dicha  compania,  tan  bastante 
como  de  derecho  se  requiera'. 

»  Que  para  que  conste  de  personas  y  partidos  que  a  cada  uno  toca 
segun  los  tienen  seiîalados,  se  especifican  en  esta  manera. 

))A  Inigo  de  Loaysa  y  Maria  de  Jésus,  su  muger,  5o  reaies,  18  de 
raciôn  y  82  de  representacion. 

»  À  Francisco  Gutierrez  y  Maria  Lopez,  su  muger,  48  reaies,  16  de 
racion  y  82  de  representacion. 

»  A  Lorenzo  Escudero,  26  reaies,  10  de  racion  y  16 de  representacion. 

»  A  Francisco  Garcia,  17  reaies,  7  de  racion  y  10  de  representacion. 

»  A  Jaime  Salvador,  6  reaies  de  racion  y  8  de  representacion. 

»  A  Jordan,  6  reaies  de  racion  y  8  de  representacion. 

»  A  Juan  de  Montemayor,  6  de  racion  y  6  de  representacion. 

»  A  Agustin  Ferez,  5  reaies  de  racion  y  6  de  representacion. 

»  A  Ambrosio  Duarte,  5  reaies  de  racion  y  6  de  representacion. 

»  A  Francisca  y  Luisa  Lopez,  28  reaies,  12  de  racion  y  16  de  repre- 
sentacion. 

»  A  Francisca  Verdugo,  i4  reaies,  6  de  racion  y  8  de  representacion. 

I.  Diole  este  poder  en  3i  de  Julio  de  i6i3  ante  el  mismo  escribano. 


^l8  BULLETIN    HISPANIQUE 

»  A  Juan  Nuiiez,  13  reaies,  6  de  racion  y  6  de  representacion. 

»  A  Moran,  7  reaies,  3  de  racion  y  4  de  representacion. 

»  Al  guardarropa,  6  reaies,  3  y  3. 

»  Que  Francisca  y  Luisa  Lopez  ganen  de  fiestas  de  Corpus  800  reaies 
y  Francisca  Verdugo  Aoo. 

»  Que  lo  que  quedare  de  sobras  de  entradas,  fiestas  y  oclavas  ha  de 
(|uedar  en  poder  de  la  dicha  Juana  de  Espinosa  para  dar  quenta  de 
cllo  al  tienipo  y  quando  entre  los  dos  ajustaren  quenlas.  »  Madrid, 
5  Abril  i643. 

(Juan  Garcia  de  Albertos.  i6/|3,  f"  175.) 

430.  —  Asiento  de  Hernân  Sânchez  de  Vargas  obligândose  â  que 
sus  hijas  Dona  Francisca  y  D''  Luisa  Sânchez  irân  â  la  villa  de 
Quijorna  para  cl  dîa  del  Corpus  y  harân  dos  representaciones,  en 
precio  de  470  reaies.  Madrid,  16  Abril  i6Zi3. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i6.^3,  f"  2o4  ) 

431.  —  Concierto  de  Pedro  de  Ascanio,  autor  de  comedias,  con 
Antonio  de  Soria,  arrendador  de  los  corrales  de  Madrid,  sobre  venir 
ilicho  autor  â  Madrid  para  representar  con  su  compania  desde  primero 
de  Novienibre  de  este  ano,  «  y  cl  diclio  Antonio  de  Soria  se  obliga  a 
(}ue  le  darâ  qualro  comedias  nuevas  al  dicho  Pedro  de  Ascanio  de 
({uatro  Poêlas  conocidos,  pagadas  a  costa  del  dicho  Antonio  de  Soria 
sin  que  al  dicho  autor  le  queste  cosa  alguna  para  que  las  pueda  repre- 
sentar... » 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  lO/jS,  fo  37/i-) 

432.  —  Obligaciôn  y  concierto  de  Pedro  de  Ascanio  y  de  su  mujer 
Antonia  Infanta  de  ir  à  la  ciudad  de  Toledo  para  primero  de  Septiem- 
bre  de  este  aiîo  y  representar  5o  comedias  consccutivas,  recibiendo 
adelantados  7,000  reaies  que  les  da  Maria  Rodrigue/,  {)ara  los  gastos 
de  viaje  de  la  compania  y  ademâs  les  darâ  55  rcales  de  ayuda  de  cosla 
por  cada  representacion.  Madrid,  11  Julio  i()Z|3. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i6/i3,  f"  agO.) 

433.  —  Obligaciôn  de  Antonio  Galiano,  de  asistir  en  la  compania  de 
Felipe  Dominguez  desde  Carnestolcndas  de  i644  hasta  igual  fecha  de 
i6/j5  [)ara  hacer  los  papcles  de  barba,  ganando  lo  mismo  que  el  ano 
pasado  le  pagaba  Andrés  de  la  \  ega,  en  cuya  compailia  estuvo.  Madrid, 
39  ])icit>mbre  i6/i3. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i6/i3,  f'  373.) 

1644 

434.  —  Conciertos  de  Pedro  de  Ascanio. 

Antonio  Messia,  para  representar  los  segundos  papcles  y  los  barbas 

principales,  ganando  5o  dncados  por  el  Corpus  y  2,000  adelantados. 

Lorenzo  Garcia  de  Prado  asistirâ  en  su  compania  hasta  Carnesto- 


NUEVOS    UATOS    AGERCA    DEL    HISTRIONISMO    ESI'ASoL  Zj  1 9 

lendas  de  i6!\b  para  hacer  los  teiceros  papeles,  y  su  mujer  Manuela 
Mazana  para  representar  las  segundas  damas,  y  ganarân  89  reaies  de 
partido  :  16  de  racicjn  diaria,  28  cada  dia  de  represenlaciôn,  700  por  la 
fîesta  del  Corpus  y  i  ,000  prestados  para  la  segunda  semana  de  Gua- 
resma. 

Toribio  Bustamante  y  su  mujer  Maria  de  los  Santos,  para  repre- 
sentar lo  que  se  les  ordcne,  ganando  9  reaies  de  raciôn,  8  de  cada 
representacion,  33o  por  el  Corpus  y  000  de  préstamo.  Madrid, 
3  Febrero  i644. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  164/»-) 

435.  —  Conciertos  de  Andrés  de  la  Vega,  autor  de  comedias,  para 
renovar  su  compaiïia  : 

Juan  Lopez  asistirâ  en  dicha  compaiiia  hasla  Carnestolendas  de 
i645  ganando  3oo  reaies  por  la  fiesla  del  Corpus,  5  ducados  por  cada 
una  de  las  fiestas  de  N'  S'^  de  Agosto  y  Septiembre,  4  ducados  por 
cada  una  de  las  ordinarias,  y  en  las  salidas  pagados  todos  sus  gastos. 

Inès  de  la  Gruz  ganarâ  1,000  reaies  por  la  licsta  del  Corpus, 
1 1  ducados  por  cada  una  de  las  de  Agosto  y  Septiembre,  7  por  una 
ordinaria  y  5  reaies  de  raciôn  siempre  que  saïga  de  Madrid.  Madrid, 
18  Febrero  i644- 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i644) 

436.  —  Conciertos  de  Francisco  de  Guzniân  y  Morales',  autor  de 
comedias,  para  reforzar  su  compafïia  : 

F'rancisco  Lopez  harâ  los  segundos  galanes  y  cobrarâ  por  lo  que 
tiene  de  màsico,  un  real  mas  que  el  que  hiciere  los  primcros  galanes. 

Agustin  Pérez,  gracioso,  ganarâ  la  parte  que  le  l'uere  senalada  y 
recibira  de  contado  3oo  reaies  de  préstajno.  Madrid,  19  Febrero  i644- 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i644.) 

437.  —  Obligacion  de  Francisco  de  Guzmân,  autor  de  comedias, 
de  pagar  â  Pedro  Ortiz  de  Urbina,  tesorero  de  N'  S^  de  la  Novena, 
120  reaies  que  le  ha  prestado.  Madrid,  22  Febrero  i644 

Dijo  que  no  sabia  fîrmar  y  â  su  ruego  lo  hizo  Cosme  Pérez. 

(Diego  de  Cepeda,  i643  à  56,  f"  i52.) 

438. —  Conciertos  de  Luis  Lôpez  Sustaete  para  reforzar  su  compania  : 

Juan  Bezôn  represenlarâ  la  parte  de  graciosidad  ganando  24  reaies 
de  partido,  10  de  raciôn,  i5  por  representacion,  5oo  por  la  fîesta  del 
Corpus  y  600  de  préstamo.  En  las  viajes  se  ledarân  dos  caballerias  y  se 
le  Uevarâ  su  hato. 

Pedro  Jordan,  para  cantar  y  poner  la  mi'isica,  ganando  6  reaies  de 
raciôn,  9  de  cada  representacion,  200  por  el  Corpus  y  5oo  prestados. 
Madrid,  25  Febrero  i644. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i644-) 

1.  No  sabia  firmar. 


I|30  BULLETIN    HISPANIQUE 

439.  —  Conciertos  de  Alonso  de  la  Paz,  que  tiene  pedida  al  Juez 
protector  de  coinedias  licencia  para  ser  autor  de  comediasi,  para 
formar  companîa  de  représentantes  : 

Toribio  de  la  Vega  asistirâ  durante  un  aào  en  dicha  compaiiia  para 
hacer  los  scgundos  papeles  y  barbas  principales,  y  su  niujer  Mariana 
de  Rojas  los  segundos  à  cuarlos  papeles:  ganarân  lo  reaies  de  raciôn, 
Il  por  cada  representacicm,  35o  por  la  fîesta  del  Corpus  y  200  de 
préslamo,  y  adeniâs  3  caballeri'as  y  llevado  su  liato  en  los  viajes. 

Juan  de  Leôn,  niùsico,  ganarâ  G  reaies  de  raciôn,  6  de  cada  repre- 
sentaciôn,  300  por  el  Corpus  y  l\oo  de  préslamo. 

Juan  de  Miramontes,  harâ  los  segundos  y  terceros  papeles,  ganando 
10  reaies  de  racii'm,  i/j  por  representaciôn,  5oo  por  el  Corpus  y  3oo 
prestados. 

Antonio  de  Velasco  para  canlar,  locar  el  arpa  y  representar,  ganando 

6  reaies  de  raciôn,  6  por  representaciôn,  300  por  el  Corpus  y  200  pres- 
tados. 

Melchor  de  la  Câmara  hara  lercero»  y  cuarlos  papeles,  ganando 
4  reaies  de  raciôn,  5  por  representaciôn,  100  por  el  Corpus  y  i5o  pres- 
tados. 

Domingo  de  Ochoa  Arroyo,  gracioso  scgundo,  y  Leonor  de  Velasco, 
su  mujer,  que  harâ  segundos  y  cuarlos  papeles,  ganarân  7  reaies  de 
racii'jn,  8  por  cada  representaciôn,  l\oo  por  el  Corpus  y  3oo  prestados. 

Antonio  Marin,  primer  gracioso,  ganarâ  8  reaies  de  raciôn,  16  por 
cada  representaci('»n  y  5oo  por  la  fiesta  del  Corpus.  Madrid,  33  Febrero 
1644. 

(Juan  Garcia  de  Alberlos,  iG/i4.) 

440.  —  Obligaciôn  de  Andrés  de  la  Vega,  autor  de  comedias,  y  de 
su  iMujer  Maria  de  Cordoba,  de  pagar  â  Francisco  Kodriguez  I\os, 
niercader  de  sedas,  1,100  reaies  que  le  quedan  debiendo  de  varias 
mercaderias  que  le  han  coinprado  y  quepagarân  para  (in  de  Septicnibre 
pn')ximo.  Madrid,  37  Abril  i6/j4. 

(Juan  (le  l'ineda,  1644.) 

441.  —  Carta  de  pago  de  Juan  Nûnez,  cobrador  de  la  coni{)afiia  de 
Pedro  de  Ascanio,  autor  de  comedias,  de  18,000  reaies  que  le  ciitrcga 
Calixlo  de  Valladolid  para  los  gastos  del  viaje  que  la  dicha  conipaùia 
harâ  el  9  del  présente  para  la  ciudad  de  Valencia  en  cuya  casa  de 
comedias  liabrâ  de  hacer  cien  representaciones  sucesivas.   Madrid, 

7  Julio  1644 

(.luan  Garcia  de  Albcrtos,  i044,  f^  240.) 

442.  —  Poder  de  Gaspar  Fernande/,  de  Valdcs,  companero  en  la 
de  Pedro  de  Ascanio,  autor  de  comedias,  â  Damiana  Arias  de  Penaficl, 
su  rnujcr,  y  â  Pedro  de  Urbina  para  hacer  los  conciertos  neccsarios 

r.   li.-los  corilralos  scrsiii  inilos  si  nu  se  le  da  licencia  para  ser  tal  a ulor  de  come- 
dias. 


NUEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    MlStRlONISMO   ESPANOL  43  1 

en  razôn  de  la  herencia  de  Damiân  Arias,  padre  de  la  dicha  su  mujer, 
con  los  demâs  herederos.  Madrid,  9  Julio  i644- 
(Juan  Garcia  de  Albertos,  i644,  i°  245.) 

443.  —  Obligacion  de  Pedro  de  la  Rosa  y  Catalina  de  Nicolas,  su 
mujer,  de  ir  para  primer©  de  diciembre  de  este  ano  â  la  ciudad  de 
Toledo  y  representar  4o  comedias  sucesivamente,  cobrando  55  reaies 
de  ayuda  de  costa  en  cada  una  de  ellas.  Madrid,  1 1  Julio  i644- 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i644,  P-  2  43.) 

444.  —  Testamento  y  codicilo  de  Juana  de  Espinosa  : 

«  In  Dei  nomine,  amen.  Sepan  quantos  esta  carta  de  testamento 
ultima  y  postrimera  voluntad  vieren  como  yo  Juana  de  Espinosa, 
viuda,  mujer  que  fué  de  Tomas  Fernandez,  ya  difunto,  que  primero 
lo  fué  de  Francisco  Verdugo,  représentante,  que  al  présente  resido  en 
esta  villa  de  Madrid,  estando  enferma  en  la  cama  de  la  enfermedad  que 
Dios  nueslro  senor  ha  sido  servido  de  me  dar,  en  mi  buen  juicio  y 

entendimiento  natural otorgo  por  esta  carta  que  hago  y  ordeno  este 

mi  testamento,  ultima  y  postrimera  voluntad  en  la  manera  siguiente. 

»  Primeramente  encomiendo  mi  anima  a  Dios  nuestro  senor  que  la 
crio  y  redimio  con  su  preciosa  sangre,  pasion  y  muerte,  y  el  cuerpo  a 
la  tierra  de  do  fue  formado.  Y  que  quando  la  voluntad  de  Dios  Nuestro 
senor  fuere  servido  de  llevarme  desta  présente  vida,  mi  cuerpo  sea 
sepultado  en  la  parroquial  de  San  Sébastian  de  esta  villa  y  que  acompaiïe 
mi  cuerpo  la  cruz,  cura  6  teniente  de  la  dicha  paroquial  y  doce  sacer- 
dotes  délia  y  doce  religiosos  de  la  orden  de  nuestro  padre  San  Francisco. 
Y  que  el  dia  de  mi  fallecimiento,  si  fuere  hora,  se  me  diga  una  misa 
cantada  de  cuerpo  présente,  vigilia  y  responso,  y  si  no  fuere  hora 
se  diga  el  dia  siguiente. 

»  Item  mando  se  digan  por  mi  aima  doscientas  misas  de  aima  por 
la  mia  en  altares  de  privilegio  de  limosna  de  a  dos  reaies,  las  quales 
se  digan  en  las  Iglesias  y  partes  que  elixieren  los  testamentarios. 

n  Item  declaro  que  soy  cofrada  de  la  cofradia  de  Nuestra  Seùora  de 
la  Novena;  encargo  a  los  mayordomos  hagan  por  mi  lo  que  tienen 
obligacion. 

Item  declaro  que  yo  por  mi  dcsde  que  comencé  a  ser  autora  despues 
de  la  muerte  de  Tomas  Fernandez,  mi  marido,  no  debo  maravedis 
ningunos  a  la  cofradia  de  Nuestra  Sefiora  de  la  Novena;  y  declaro  que 
mil  y  trecientos  reaies,  poco  mas  o  menos,  que  el  dichoïomas  Fernandez 
quedô  debiendo  a  dicha  cofradia,  no  dexô  bienes  de  que  pagar  los  y 
por  eso  no  los  he  pagado;  declaro  que  este  es  debito  suyo  y  no  mio. 

»  Item  declaro  que  yo  debia  a  Francisco  de  Vlegria  cinco  mil  reaies 
de  vellon  de  que  le  hice  escriptura,  por  quenta  de  los  quales  le  paguc 
en  Valencia  mil  reaies  y  en  Zaragoza  otros  mil,  y  mil  y  seiscienlos  reaies 
que  hube  de  haber  por  los  particulares  que  hizo  mi  compania  a  la 
Reyna  Nuestra  Sefiora  el  aiio  pasado  de  mil  y  seiscientos  y  quarenta 
Bull,  hispan.  38 


/|22  BULLETIN    UISPAMQIE 

y  dos,  de  cuva  cobranza  se  encargô  y  se  vio  con  el  conlrator  de 
Su  Magestad,  el  quai  quedû  de  pagarle  los  dichos  particulares,  y  olros 
quatre  cientos  y  tantos  reaies  que  le  libre  en  Antonio  Messia,  repré- 
sentante de  mi  compania,  por  habermelos  quedado  a  deber. 

»  llem  declaro  que  para  que  el  dicho  Francisco  de  Alegria  se  hiciese 
pago  del  resto  de  la  dicha  cantidad  le  entregué  una  libranza  de  ducientos 
ducados  de  la  senora  Condesa  de  Olivares  por  el  Principe  Nuestro 
Sefior  para  que  los  cobrase  de  D.  leronimo  del  Aguila,  tesorero  de  la 
Reyna  Nuestra  Senora, que  esta  cantidad  hizo  mercedel  Principe  Nuestro 
Sefior  à  Francisca  Verdugo,  mi  hija,  para  un  vestido  para  el  dia  del 
Sanlisinio  Sacramento  del  ano  pasado  de  quarenta  y  très.  Mando  se 
haga  quento  con  él,  y  quien  debiere  que  pague,  y  destos  partidos  no 
me  ha  dado  recibos  ni  cartas  de  pago  mâs  de  lo  que  él  tione  pueslas  al 
pie  de  la  escriptura. 

»  Item  declaro  que  Juan  Nuùez  se  obligô  por  escriptura,  siendo  mi 
cobrador,  a  favor  de  Juan  de  Sierra,  mercader  y  vecino  de  Valladolid, 
por  cierta  cantidad  de  maravedis  contenida  en  dicha  escriptura,  que  se 
causô  de  socorros  hechos  à  companeros  de  mi  compaùia  y  de  merca- 
derias  para  un  vestido  a  mi  hija  Fiaucisca  Verdugo,  de  lama  Usa, 
y  olro  vestidillo  a  un  hijo  de  Bernardo,  gracioso,  de  damasco  carmesi 
y  blanco,  uno  y  otro  guarnecidos  de  plata  ;  y  en  execucion  de  esta 
cantidad  el  dicho  Sierra  envio  a  executar  a  esta  corte  el  dicho  Jnan 
Nunez,  y  por  excusarle  desta  vexacion  hice  escriptura  yo  al  dicho 
Sierra  de  la  misma  cantidad,  y  la  verdad  es  que  délia  no  debo  mas  de 
lo  (jue  se  gaslo  en  dichos  dos  vestidos,  porque  para  los  socorros,  que 
hizo  a  los  dichos  compaùeros,  cobro  el  dinero  de  las  octavas  del  ano 
de  quarenta  y  dos  de  que  no  me  ha  dado  qucnta  ni  satisfaccion. 
Asi  lo  declaro  para  el  descargo  de  mi  conciencia  y  mando  se  le  tome 
queuta  del  dicho  dinero  y  se  le  reciba  en(}uenta  loquehubicre  pagado 
y  los  dichos  dos  vestidos  importarian  a  mi  parecer  dos  mil  reaies, 
poco  mas  ô  menos. 

i)ltem  declaro  que  durante  el  matrimonio  con  Francisco  Verdugo, 
mi  primer  marido,  quedô  por  nuestra  hija  y  heredera  Francisca 
Verdugo,  que  hoy  esta  en  mi  compania;  declaro  que  no  dejô  bicnes 
ningunos  suyos  propios  ni  yo  los  tuve  tampoco,  y  declaro  que  a 
dicho  Francisco  Verdugo  le  mataron  en  Lisboa  y  al  matador  se  le  puso 
Icmanda  por  mi  parte  y  la  de  dicha  mi  hija,  y  en  la  prosccucion  de 

causa  |)or  via  île  concierto  la  parte  del  matador  nos  dio  en  recom- 
pensa de  los  dafios  que  de  dicha  muertc  se  nos  siguieron  mil  ducados, 
poco  mas  o  menos,  y  yo  los  recibi  en  nombre  niio  y  de  la  dicha  mi 
hija;  dcclarolo  asi  y  que  esta  cantidad  la  llcvé  al  matrimonio  quando 
casé  con  el  dicho  Tomas  Fernandcz;  mando  que  se  le  satisfaga  a  la 
dicha  Francisca  Verdugo  aquello  que  conforme  a  derecho  hubierc  de 
haber.  » 


NUEVOS    DATOS    ACliRGA    DEL    HISTRIOMSMO    ESPANOL  /|33 

Teslamentarios  :  el  D'  Manuel  de  Vargas,  su  confesor. 

Y  Juan  de  Urquiza,  cobrador  de  los  arrendadores  de  los  corrales  de 
Madrid. 

Herederos  :  Francisca  Verdugo,  hija  del  primer  matrimonio. 

Angela,  Juana,  Maria  y  Elena  Fernandez,  hijas  del  segundo 
matrimonio. 

Madrid,  ii  Agoslo  i644.  «  Anlc  nîi  Juan  Garda  de  Vlbertos.  » 

Godicilo,  en  el  mismo  dia  : 

«  Déclara  que  tiene  unos  papeles  en  que  esta  la  cuenta  de  Tomas 
Fernandez  con  la  cofradia  de  la  Novena;  que  se  esté  â  lo  que  digan  y 
se  pague  si  algo  se  debe. 

d  Que  en  poder  de  Luis  Lopez  Suslaete  hay  un  arca  con  vestidos  de 
lùigo  Loaisa  con  los  cuales  se  ha  de  responder  â  las  deudas  de  dicho 
Loaisa. 

))Que  se  cobre  de  Luis  Lopez  Sustaele  lo  que  resuite  debiendo  de  la 
medianeria  que  con  él  tuvo  en  la  compafiia  que  tuvieron  entre  los  dos. 

))  Que  se  vean  los  recaudos  que  tiene  de  lùigo  de  Loaisa  y  se  cobra 
lo  que  resuite  en  su  favor.  »  Madrid,  ii  Agosto  i6Zi4. 

(Juan  Garcia  Albertos,  i644,  f""  378  y  288.  ) 

445.  —  Obligaciôn  de  Pedro  de  la  Rosa,  autor  de  comedias,  y  Cosme 
Pérez,  Gerônimo  de  Morales,  Juan  de  Tapia,  Jacinlo  Becerril,  Pedro 
de  Contreras  y  Pedro  de  Cifuentes,  sus  companeros,  de  estar  en  esta 
corte  para  el  1°  de  Noviembre  de  este  ano  para  representar  en  los 
corrales  arrendados  por  Francisco  Garro  de  Alegria.  Madrid, 
i4  Agoslo  i644- 

El  arrendador  permite  al  autor  que  vaya  en  este  tiempo  a  repre- 
sentar k  Salamanca  l'i  otras  parles  para  cobrar  lo  que  Pedro  de  la 
Rosa  le  debe. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i65/i,  f°  287.) 

446.  —  Parlida  de  defunciôn  de  Juana  de  Espinosa. 

((  Juana  de  Espinosa  calle  de  Cantarrana,  murio  en  27  de  Agosto 
de  1644  afios  testo  anle  Juan  Garcia  de  Albertos  en  [         J  deste  mes. 
(Archive  parroquial  de  S.  Sébastian.) 

1645 

447.  —  Asientos  de  Andrés  de  la  Vega  con  los  représentantes  de  su 
compafiia  durante  un  afio. 

Domingo  Coello,  rnûsico,  ganarâ  20  ducados  por  la  fiesta  del  Corpus, 
y  por  las  demâs  Restas  lo  que  el  autor  creyere  prudente. 

José  de  Velasco,  para  los  terceros  papeles,  ganando  i4  ducados  por 
el  Corpus,  3o  reaies  por  las  fiestas  ordinarias  y  4o  por  las  de  Agosto 
y  Septiembre. 

Maria  de  Jesûs,  viuda  de  Inigo  de  Loaisa,  harâ  las  segundas  damas, 


424  BULLETIN    HISPANIQUE 

cobrarido  i,»oo  reaies  por  la  fiesta  del  Corpus,  loo  por  cada  fîesta  de 
las  de  Agosto  6  Septiembre  y  (3  ducados  por  los  ordinarias,  y  se  le 
darân  6  reaies  de  raciôn  donde  no  dieren  de  corner  â  la  compania. 

Juan  de  Tapia,  mi'isico,  y  Josefa  Mazana,  su  mujer.  que  liarâ  las 
terceras  damas,  ganarân  i,ioo  reaies  por  el  Corpus  y  su  octava,  que 
es  el  tiempo  de  este  convenio. 

Antonio  Esteban,  représentante,  ganani  12  ducados  por  la  fiesta 
del  Corpus,  36  por  la  fiesta  de  Agosto  ô  de  Septiembre  y  3o  por  las 
ordinarias. 

Gaspar  Rodrîguez,  représentante,  ganarâ  3oo  reaies  por  la  fiesta  del 
Corpus,  5  ducados  por  cada  fiesta  de  las  de  Agosto  6  Septiembre  y 
4  por  una  ordinaria. 

Antonio  Esteban,  représentante,  ganarâ  12  ducados,  36  reaies 
y  3o  reaies  por  las  dichas  fiestas  respectivamente,  Madrid,  5  Marzo 
1645. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i645.) 

448.  —  Conciertos  de  Pedro  de  Ascanio,  autor  de  comedias,  y  en  su 
nombre  Juan  Nùnez  1,  con  los  représentantes  que  durante  este  ano  han 
de  estar  en  su  compania. 

Bernardo  Manuela  Velâzquez  harâ  los  terceros  papeles  de  la  gracio- 
sidad  y  la  g<'aciosidad  en  los  entrenieses,  ganando  9  reaies  de  raciôn, 
1 1  de  cada  representaciôn,  35o  por  el  Corpus  y  1,000  preslados. 

Agustin  Pérez,  miisico,  ganarâ  6  reaies  de  raciôn,  8  por  represen- 
taciôn, 300  por  el  Corpus,  mâs  una  caballeria  y  llevado  su  hato,  y 
060  prestados. 

Juan  Gutiérrez  Coronel,  représentante,  y  su  mujer  Isabel  de  Guada- 
lupe  y  Coronel,  que  harâ  primeras  y  segundas  damas ^  ganarân  1 1  reaies 
de  raciôn,  19  por  cada  representaciôn,  5oo  por  el  Corpus  y  1,000  pres- 
tados. 

Maximiliano  de  Morales  harâ  los  primeras  papeles,  ganando  3o  rcales 
de  raciôn,  i4  por  cada  representaciôn, 5oo,  mâs  dos  caballerîas,  por  el 
Corpus,  y  5oo  prestados. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i645,  f"  74.) 

449.  —  Podcr  de  Damiana  de  Penafiel,  hija  y  hcrcdera  de  Damiân 
Arias  de  Peùafiel,  â  su  marido  Gaspar  Fernândez  de  Valdés  para  ir  â 
Ilita  y  hacer  los  conciertos  y  escriluras  necesarias  con  respeclo  â  la 
hcrencia  de  dicho  su  padre  y  â  las  mandas  que  le  dejô  su  hermana 
Luisa  de  Penafiel.  también  difunla.  Madrid,  20  Marzo  i645. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i645,  f'  33.) 

450.  —  J'oder  de  Antonio  Marin,  Jacinlo  Uiquelmc  y  su  mujer 
Francisca  Verdugo,  Juan  Antonio  de  Sandoval  y  su  mujer  Luisa  de 
Santa  Cruz,  Antonio  de  Escamilla  y  su  hija  Ana  de  Escamilla,   Pedro 

1.  PofJer  para  conccrtar  (ieslas  dado  por  Pedro  de  Ascanio  en  /aragoza,  lo  Kcbrero 
1645. 


NUEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    IIISTRIONISMO    ESPANOL  /jîS 

de  Agramonle,   Rodrigo  de  Velasco  y   Diego  de  Santa  Maria,  todos 
représentantes,  à   Bartolomé  Romero,  aulor  de  comedias,  para  que 
les  concierte  las  fiestas  y  corrales  que  bien  le  pareciere  hasta  Garnes- 
tolendas  de  16/iG.  Madrid,  3i  Marzo  i645. 
(Juan  Garcia  de  Albertos,  i645,  f"  laS.) 

451.  —  Obligaciôn  de  Bartolomé  Romero,  autor  de  comedias,  de 
ir  â  la  ciudad  de  Toledo  y  hacer  35  representaciones  con  su  compania 
desde  10  de  Noviembre  de  este  ano,  cobrando  de  ayuda  de  costa 
5o  reaies  de  cada  representaciôn,  y  adelantados  3, 000  reaies.  Madrid, 
1°  Abril  1645. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i6/i5,  f"  128.) 

452.  -  Obligaciôn  de  Antonia  Manuela,  en  nombre  de  Bartolomé 
Romero,  Antonio  Marin,  Jacinto  Riquelme  y  su  mujer  Francisca 
Verdugo,  Juan  Antonio  de  Sandoval  y  su  mvijer  Luisa  de  Santa  Cruz, 
Diego  de  \  ivas,  Juan  Nùnez  de  Prado,  Pedro  de  Agramonte,  Antonio 
de  Escamilla  y  Rodrigo  de  Velasco,  de  ir  â  la  ciudad  de  Valladolid 
para  hacer  3o  representaciones  desde  Pascua  de  Resurrecciôn  de  este 
ano,  recibiendo  anticipados  10,000  reaies.  Madrid,  3  Abril  i6/i5. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i645,  f°  iCiô.) 

453.  —  Carta  de  pago  de  dote  y  arras  otorgado  por  Jacinto  Riquelme, 
représentante  de  la  compania  de  Bartolomé  Romero,  desposado  con 
Francisca  Verdugo,  hija  de  Francisco  Verdugo  y  de  Juana  de 
Espinosa. 

Los  bienes  que  trae  â  este  matrimonio  son  muebles  y  vestidos  de 
representar,  heredados  de  su  madré,  entre  los  cuales  bienes  hay  un 
((  baul  de  vaqueta  negra  con  comedias,  bayles  y  entremeses»,  cuyo 
valor  se  tasa  en  1,000  reaies.  Madrid,  1 1  Abril  i645. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i645,  f°  i53.) 

454.  —  «  En  el  Ayuntamienlo  de  este  dia  el  Sr.  D.  Francisco 
Aguado  de  Cordoba  y  el  Sr.  D.  Pedro  Cano,  comisarios  de  fiestas 
dijeron  :  que  para  las  que  se  han  de  celebrar  el  dia  del  Corpus  deste 
ano  esta  dipuesto  un  sarao  y  una  danza  de  los  jitanos  y  todo  esta 
concertado  y  ajustado  con  que  se  escusan  las  danzas  que  tienen  obli- 
gaciôn de  sacar  los  Alfereces  de  los  ofîcios  por  lo  cual  es  necesario 
repartirles  â  los  dichos  alfereces  la  cantidad  que  sea  necesaria  para 
la  paga  de  el  dicho  sarao  y  danza  y  el  repartimiento  se  haga  de  lo  que 
que  pareciere  de  manera  que  los  Alfereces  cumplan  con  su  obligaciôn 
y  todo  se  ejecute  como  lo  ordenaren  los  senores  Comisarios.  Asi  se 
acordô.  »  —  Alcaraz,  5  Junio  i645. 

(Archivo  municipal  de  x\lcaraz.  Libros  de  acuerdos.  Leg"  5".) 

455.  —  Real  orden  mandando  que  todas  las  personas  que  entraren 
â  ver  comedias  pagasen  un  cuarto  mâs  de  lo  acostumbrado.  Zaragoza, 
5  Agosto  1645. 

(Acad.  de  la  Hist.,  Apuntes  de  Armona,  f"  33.) 


426  BULLETIN    HISPANIQUE 

456.  —  Concierto  de  Pedro  de  la  Rosa,  autor  de  comedias,  para  ir 
â  la  ciiidad  de  N'alencia  y  hacer  con  su  companîa  sesenta  representa- 
ciones  en  la  casa  de  comedias  de  esta  ciudad  cobrando  i4o  reaies  por 
,cada  representaciûn,  cuvo  total  recibirâ  adelantado  y  ademûs  7,600 
graciosamente.  Madrid,  27  Agosto  iGZjô. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i6Zi5,  f"  3o6.) 

457. —  Asiento  de  Doiia  Jacinta  de  Herbias,de  la  compaâia  de  Pedro 
la  Rosa,  con  Alonso  de  Olniedo  y  Tofiâo  en  cuya  compania  ha  de 
asistir  desde  Carnestolendas  de  iG4(3  hasta  igual  fecha  de  1647 
haciendo  las  primeras  damas  en  las  comedias^  cobrando  2/4  reaies  de 
partido,  9  de  raciôn  y  i5  de  cada  represenlaciôn,  y  5oo  por  la  fiesta 
del  Corpus.  Madrid,  28  Agosto  i645. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1645,  f"  3i3.) 

458.  —  Obligaciôn  de  Jerônimo  de  Morales  de  asistir  en  la  compania 
de  Alonso  de  Olmedo  y  ïofifio,  autor  de  comedias,  para  hacer  los 
segundos  galanes,  desde  Carnestolendas  de  1646  hasta  Carnestolendas 
de  1647  cobrando  7  reaies  de  racion,  8  por  cada  de  represenlaciôn, 
400  y  très  caballerias  por  la  fiesta  del  Corpus  y  3oo  prestados.  Madrid, 
3t  Agosto  1645. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i645,  f»  317.) 

459.  —  Concierto  de  Pedro  de  la  Rosa.  autor  de  comedias,  para 
alquilar  4  carruajes  y  dos  coches  para  llevar  su  compania  â  la  ciudad 
de  Valencia,  dondc  ha  de  represenlar,  Madrid,  3i  Agosto  i645. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1645,  ("  320.) 

460.  —  (3bligaci(')n  de  Juan  Coronel,  représentante  y  de  su  mujcr 
Isabel  de  Guadalupe,  que  harâ  las  sequndas  damas,  de  asistir  en  la 
compania  de  i'edro  de  la  Rosa,  autor  de  comedias,  desde  Carnesto- 
lendas de  i6^j()  il  igual  fecha  de  1647,  ganando  32  reaies  de  partido, 
mas  600  por  el  Corpus  y  1,000  prestados.  Madrid,  i'  Septembre  i645. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i64â,  f°  322.) 

461.  —  Obligaciôn  de  Juan  de  Aldama  de  asistir  en  la  compania  de 
Andrés  de  la  Vega  para  represenlar ,  cantar  y  builar  y  taner  la  viguela 
de  arco  durante  todo  el  aîïo  de  1646,  ganando  460  reales  por  la  fiesta 
del  Corpus,  7  ducados  por  cada  una  de  las  de  Agosto  ô  Septiembrc  y 
6  por  las  ordinarias.  Madrid,  i5  Octobre  i645. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1645,  f"  364.) 

462.  —  Suslituciôn  del  poder  que  Maria  de  Côrdova,  tiene  de  Andrés 
de  la  ^cga,  autor  de  comedias,  su  marido,  en  dos  procuradores  de 
los  Consejos,  [)ara  el  «  pleito  executivo  que  contra  el  dicho  su  marido 
trala  Dona  Maria  Lance,  viuda  de  Juan  del  Ferro,  que  pasa  ante  uno 
de  los  Alcaldes  de  corle  y  Diego  Pica/.o,  escribano  de  Provincia  ». 
Madrid,  17  No\iembre  i645. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1645,  f"  38o.) 

463.  —  OI)lij/aciôn  de  .liian  IN'moz  de  'l'apia  de  eslar  en  la  compania 


-VUEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    HISTRIONISMO    ESPA5Î0L  /|27 

de  Pedro  de  Ascanio  para  representar  los  terceros  papeles  y  dos  u  très 
u  qaalro  segundos,  ganando  8  reaies  de  raciôn,  9  de  cada  represen- 
laciôn,  mâs  35o  y  très  caballeri'as  por  el  Corpus  y  llevado  su  hato,  y 
600  prestados.  Madrid,  27  Noviembre  1745. 
(Juan  Garcia  de  Alberlos,  i6/»5^  f°  384-) 


1646 

464.  —  Obligaciôn  de  Antonio  Garcia  de  Prado,  autor  de  connedias, 
de  pagar  â  Juan  Marti'nez,  arrendador  de  las  casas  do  comedias  de 
Madrid,  484  reaies  que  le  habîa  prestado  para  traer  su  compania  y 
para  pagar  lo  que  habîa  quedado  debiendo  en  Salamanca,  Palencia  y 
Burgos.  En  pago  de  esta  cantidad  dejarâ  lo  que  le  toque  de  las 
aposenlos,  y  el  resto  ocho  dîas  después  del  Corpus  prôximo.  Madrid, 
6  Febrero  i636. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i636,  f°  3o.) 

465.  —  Obligaciôn  de  Antonio  de  Escamilla  y  de  su  hija  de  asistir 
durante  un  ano  en  la  compania  que  formare  Maximiliano  Eustaquio 
de  Morales,  ganando  32  reaies  de  partido,  r4  de  raciôn  y  18  de  repre- 
sentaciôn.  Es  condiciôn  que  en  esta  compania  la  parte  mayor  no 
excédera  de  22  reaies.  Madrid,  27  Febrero  i64G, 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1646,  f°  53.) 

466.  —  Comisiôn  dada  por  el  conde  de  Castrillo,  protector  de  las 
fiestas  del  Corpus  en  Madrid,  al  corregidor  de  Segovia  para  que 
mande  â  Lorenzo  Escudero  y  Bernarda  Manuela,  su  muger,  représen- 
tantes, que  vengan  desde  Segovia  a  Madrid  para  que  representen  en 
una  de  las  dos  compaiiias  formadas  para  dicha  fîesta. 

Item  para  que  Ambrosio  Duarte  y  Maria  de  Prado,  su  muger, 
représentantes,  que  tenian  orden  de  no  salir  de  Madrid,  y  se  han  ido 
â  Segovia,  sean  presos,  se  les  ernbarguen  sus  bienes  y  sean  traidos  â 
Madrid.  Madrid,  Febrero  1646. 

(Arch.  mun.,  clase  16,  3-470-23.) 

467.  —  Obligaciôn  de  Alonso  de  Olmedo  Tofino,  autor  de  comedias, 
de  pagar  para  fin  de  Abril  â  Pedro  Ortiz  de  Urbina,  tesorero  de  la 
cofradia  de  la  Novena,  56o  reaies  que  ha  recibido  de  la  limosna  de  su 
compania,  y  que  tiene  en  su  podei ,  «  descontandole  dellos  ciento  y 
sesenta  reaies  que  dice  haber  gastado  y  pagado  en  el  entierro  de 
Fernan  Sanchez  de  Vargas,  autor  que  fue  de  comedias,  que  muriô 
en  la  carcel  desta  cor  te.  »  Madrid,  22  Marzo  1646. 

(Diego  de  Cepeda,  i643  â  56,  f°  21 3.) 

468.  —  Obligaciôn  de  Antonio  de  Rueda,  autor  de  comedias,  de 
pagar  à  Pedro  Ortiz  de  Urbina,  tesorero  de  la  cofradia  de  N'  S"  de  la 
Novena,  1 ,  180  reaies  que  estân  en  su  poder  de  las  limosnas  de  su  com- 


428  BULLETIN    HISPANIQUE 

pania  para  la  dicha  cofradia,  y  que  entregarâ  para  fin  de  Abril  de  este 
ano.  Madrid,  22  Marzo  i646. 

(Diego  de  Cepeda,  i643  â  5G,  f°  212.) 

469.  —  Obligaciôn  de  Antonio  de  Rueda,  autor  de  comedias,  de 
pagar  â  Juan  Martine/.,  arrendador  de  los  corrales  de  comedias  de 
Madrid,  0,707  reaies  que  le  debe  de  dinero  recibido  para  pagar  el 
viaje  de  su  companîa  desde  Andalucia  â  Madrid,  y  que  le  entregarâ 
para  fines  de  Noviembre  pn'iximo.  Es  condiciôn  que  si  antes  de  cuni- 
plirse  este  plazo  hubiere  licencia  para  representar,  y  él  la  tuviera, 
pagaria  dicha  cantidad  descontando  en  cada  dia  de  representaciôn 
la  cantidad  que  entre  ambos  convinieren,  y  si  en  este  tiempo  quisiere 
salir  con  su  compania  de  la  corte,  no  lo  harâ  sin  haber  pagado  antes 
la  citada  deuda.  Madrid,  20  Septiembre  i646. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1646,  f°  78.) 

470.  —  Poder  de  Alonso  de  Olmedo  Tofino  â  Luis  Bernardo  de 
Bovadilla,  jurado  de  la  ciudad  de  Mâlaga,  para  en  su  nombre  pedir 
certificaciôn  de  como  el  oficio  de  alguazil  mayor  del  contrabando  de  la 
dirha  ciudad  no  esta  vendido  ni  proveido  por  S.  M.,  ni  tiene  dueno 
con  estas  calidades,  y  se  la  remita  para  en  guarda  de  su  dereclio  y 
merced  que  tiene  pedida  y  concesion  del  dicho  oficio  con  fecha  de 
3i  de  Agoslo  de  este  présente  ano.  Madrid,  2  Octobre  1646. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i646,  f  91.) 

471.  —  Poder  de  Pedro  de  Ascanio,  résidente  en  Madrid,  â  Esteban 
de  Torres,  vecino  de  Madrid,  y  â  Juan  Infante,  vecino  de  Jaen,  «  para 
que  vayan  al  lugar  de  Miedes  en  el  reyno  de  Aragon,  diôcesis  de 
ïarazona  en  la  comunidad  de  Calatayud  donde  esta  Anlonia  Infante, 
mi  lexitima  niuger,  en  el  convento  de  monxas  de  N'  S'  de  la  Concep- 
cion  del  dicho  lugar  y  saqucn  dél  â  la  dicha  mi  muger  haziendo  para 
ello  las  diligencias  que  convengan  y  recibir  y  Uevar  â  la  parte  que 
pareciere  â  qualquiera  de  los  dichos  mis  procuradores...  »  Madrid, 
i4  Noviembre  1G46. 

(Juan  de  Quintanilla,  1G4G,  f"  765.) 

1647 

472.  —  Obligaciôn  de  Diego  Osorio,  su  mujer  Isabcl  Osorio  (Isabel 
de  Guevara),  Luisa  de  Kibera,  viuda  de  Pantaleôn  de  Borja,  y  su  hija 
Maria  de  liorja  de  ir  para  el  domingo  infraoctava  del  Corpus  â  la 
villa  de  Borja  y  haccr  dos  representacionos  por  1,000  reaies.  Madrid, 
10  Febrcro  iG47. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1G47,  '*  '^-^ 

473.  —  Poder  de  Luis  L«'»pez  Sustacte,  autor  de  comedias,  «  \  iudo  de 
.\ngela  de  Corbella,  (pie  murio  en  la  ciudad  de  Sevilla  a  20  dias  del 
mes  de  Mayo  del  ano  pasado  de  r64G  y  cnterrada  en  la  iglesia  mayor 


NUEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    HISTRIOMSMO    ESPANOL  l\2g 

del  Sagrario  de  la  santa  iglesia  délia  »,  â  Juan  Navarro  y  â  Jerônimo  de 
Médina,  représentantes,  para  ajustar  su  casamiento  con  Jacinta  de 
Herbias,  representanta,  soltera,  résidente  en   Madrid,  y  ajustado,  le 
desposen.  Andùjar,  28  Diciembre  1647. 
(Juan  Garcia  de  Albertos,  16^17,  f*  i5.) 

474.  —  Poder  de  Josefa  Vaca',  viuda  de  Juan  Morales,  vecina  de 
Madrid,  à  Sébastian  del  Pino  para  vender  el  oficio  de  escribano  de  la 
villa  de  Gastilfante  «  que  me  pertenece  por  justo  titulo  y  como  mio 
propio  he  tenido  el  nso  y  aprovechamientoo  por  el  precio  que  bien 
le  pareciere.  Madrid,  20  Octobre  16/J7. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  16^7,  f°  172.) 

1648 

475.  —  Capitulaciones  matrimoniales  entre  Jacinta  de  Herbias, 
soltera  mayor  de  25  anos,  con  Luis  Lôpez  Sustaele  (Juan  Navarro 
Oliver,  en  su  nombre). 

Jacinta  de  Herbias  Ueva  en  dote  2,^00  ducados,  poco  mas  ô  menos. 
Madrid,  20  Enero  1648. 
(Juan  Garcia  de  Albertos,  16A8,  f"  18.) 

476.  —  Asiento  de  varios  représentantes  con  Alonso  de  Olmedo 
para  hacer  bajo  su  direcciôn  las  fiestas  del  Corpus  y  otras  que  se 
ofrecieren  durante  este  afio.  Son  los  siguientes  : 

Santiago  Valenciano. 

Antonia  de  Santiago,  su  liija. 

Juan  Lôpez. 

Felipe  de  Morales. 

Francisco  Martînez. 

Francisco  de  Salas. 

Tomâs  de  San  Juan. 

Sébastian  Coro. 

Manuela  Coro,  su  hija. 

Antonio  Canens. 

Isabel  Canens,  su  hija.  Madrid,  12  Marzo  1648. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i648,  f°  56.) 

477.  —  Carta  de  pago  y  recibo  de  dote  otorgada  por  Luis  Lôpez 
Sustaete  en  favor  de  su  yerno  Juan  Navarro  Oliver,  que  con  poder 
suyo  habia  recibido  la  dote  de  D'  Jacinta  de  Herbias,  su  mujer.  Madrid, 
2  Abril  16A8 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  1648,  f°  100.) 

478.  —  Asiento  de  Jerônima  de  Morales  con  Antonio  Garcia  de 
Prado,  autor  de  comedias,  para  estar  en  su  compaiiia  durante  el  pre- 

I.  Firma  asi  :  Josepha  Magdalena  Vaca. 


^3o  BULLETIN    HISPANIQUE 

senle  aào  y  hacer  los  terceros  papeles,  que  hacia  Sébastian  de  Prado, 
cobrando  32  reaies  de  partes.  Madrid,  i(5  Julio  i6l\8. 
(Juan  Garcia  de  Albertos,  16/48,  f°  igS.) 

479.  —  Teslamento  de  Margarita  de  Quifiones,  viuda  de  Juan 
Fernândez  Nùiiez  Vêla:  «...  Item  déclare  que  por  fin  y  muerte  de 
Juan  Fcrnandez  Nunez  Vêla,  mi  marido,  no  quedaron  bienes  de 
consideracion,  y  mis  bienes  dotales  constante  matrimonio  se  consu- 
mieron,  y  los  que  quedaron  que  fueron  de  poca  consideracion  se  los 
di  a  Jacinto  Nufiez  Vêla,  mi  hijo  legitimo,  y  luego  mi  hija  Maria  de 
Quinones,  su  hermana,  me  Uevù  en  su  compania  y  me  ha  tenido  en 
su  casa  dandome  de  comer  y  de  vestir  sin  que  yo  entrase  en  su  poder 
bienes  ningunos,  y  por  esta  razon  yo  no  tengo  con  que  poder 
enterrarme,  y  ella  tiene  por  bien  de  hacer  por  mi  lo  que  yo  ordenare 
en  benificio  de  mi  aima,  y,  aceptando  esta  promesa  quiero  y  es  mi 
voluntad  que  quando  su  Divina  Magcstad  fuere  servido  de  me  llevar 
desta  présente  vida  mi  cuerpo  se  sepulte  en  la  iglesia  del  convento  de 
Trinitarios  Descalzos  desta  villa  de  Madrid  debajo  de  una  de  las  pilas 
del  agua  bendita  de  la  dicha  iglesia.  »> 

(Manda  ser  vestida  con  el  hâbito  de  S.  Francisco;  que  se  digan 
4oo  misas  de  aima,  donde  su  hija  quisiere;  pero  que  las  de  S.  Vicente 
Ferrer  sean  dichas  por  el  Maestro  D.  José  de  Felizes.  su  confesor. 
A  las  mandas  forzosas  manda  3  reaies.) 

«  Item  declaro  por  las  razones  que  tengo  dichas  que  la  casa  en  que 
de  présente  vivo  en  la  calle  del  Nino  pertenece  a  la  dicha  Maria  de 
Quinones  Nufiez  Vêla  por  clausula  del  testamento  debajo  de  cuya 
disposicion  murio  Maria  Gabriela  con  las  obligaciones  que  dispuso, 
â  que  me  refiero,  y  toda  la  hacienda  que  en  ella  hoy  es  de  la 
dicha  mi  hija,  adquirida  mediante  el  uso  de  la  representaciôn  en  que 
se  ha  ejercitado,  trabajo  é  industria  suya,  por  que  yo  no  entré  en  su 
poder  bienes  ni  hacienda  ninguna,  por  que  los  pocas  alhajas  que 
ténia  se  las  di  al  dicho  mi  hijo.  > 

(Albaccas  :  su  hija  Maria  de  Quinones,  el  Maestro  1).  José  de  Felizes 
é  Isidro  Fernândez,  maestro  del  arle  de  la  seda.)  Madrid,  20  Octubre 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  i6'i8,  f"  3io.) 

480.  —  Poder  de  Koquc  de  Figueroa,  autor  de  comcdias,  â  Juan 
Niinez  para  conccrtar  fiestas,  représentantes  y  corrales  en  su  nombre. 
Madrid,  i3  Novieiubre  16/48. 

fJuan  Garcia  de  Albertos,  i6/»8,  f"  33i.) 

481.  (loncierto  y  obligacinn  (jnc  hacen  los  siguientes  repré- 
sentantes de  asislir  en  la  com|)ania  de  partes  que  dirigirâ  Alonso  do 
Ûlmedu  durante  el  ano  de  16/49  • 

Francisco  <  )rtiz. 

Ursula  de  lorres,  su  mujer,  que  liarâ  los  terceros  papeles  de  dama. 


>LEVOS    DATOS    ACERCA    DEL    HISTKTOMSMO    ESPA^OL  A3l 

Antonio  de  Liosa. 

Francisca  Gomez  su  mujer,  cuartas  damas. 

Josefa  Nielo,  viuda  de  Francisco  Alvarez  de  Yitoria,  primeras  damas. 

Josel'a  Nieto,  su  liija. 

Inès  de  la  Cruz,  segundas  damas. 

Francisco  Martinez  ,  .     ,  ,  , 

j         y  ,  ;  por  mitad  primeros  y  segundos  galanes. 

Luis  Muiïoz,  terceros  galanes. 

Antonio  Esteban. 

Gaspar  Valentin,  mûsico. 

Francisco  de  Salas,  barba.  Madrid,  3o  Noviembre  i648. 

(Juan  Garcia  de  Albertos,  16^8,  f"  338.) 

1649 

482.  —  Partida  de  defunciôn  de  Mariana  de  Velasco. 

«  Mariana  de  Yelasco  casado  con  Luis  Candado  calle  del  Infante 
casas  propias  murio  en  dos  de  Octobre  de  1649  ^"os  recibio  los 
santos  sacramentos  teslô  ante  Manuel  de  Ciuitas  en  once  de  Febrero 
dejô  cinquenta  misas  de  aima,  testamentario  el  dicho  su  marido, 
fabrica  très  ducados 33  » 

(S.  Sébastian.) 

483.  —  Partida  de  defunciôn  do  Luis  Gandau  : 

«  Luis  Candado,  viudo  de  Mariana  de  Velasco,  calle  del  Infante 
murio  de  repente  en  très  de  Octobre  de  iG/49  afios  enterrole  la  cofradia 
de  la  Novena  fabrica  dos  ducados 22  » 

(S.  Sébastian.) 

1650 

484.  —  Obligaciôn  de  Adriân  Lôpez,  autor  de  comedias,  de  estar  en 
Sevilla  con  su  compania  para  el  i5  de  Noviembre  prôximo  y  repre- 
sentar  en  el  corral  de  la  Monterîa  100  comedias  sucessivas,  a  y  harâ 
cada  semana  dos  comedias  nuevas,  y  si  caso  fuere  que  si  alguna 
comedia  de  las  nuevas  la  hiciere  ocho  6  quince  dias  sucesivos,  esta 
con  lo  que  fuere  baya  de  suplir  las  otras  de  su  obligaciôn  y  acabada 
la  representacion  de  la  que  durare  en  la  forma  referida  el  dicho  Adrian 
Lôpez  ha  de  volver  â  cumplir  echando  cada  semana  las  dichas  dos 
comedias  guardando  la  forma  antécédente  en  la  semana  que  durare 
y  pasase  la  comedia  que  hubiere  comenzado.  » 

Juan  de  Baltanas,  arrendador,  pagarâ  25o  reaies  de  ayuda  de  costa 
de  cada  representacion,  mâs  8  camas  para  la  compaiiia,  los  alguaciles 
que  estân  â  la  puerta  y  la  mitad  de  las  apariencias.  El  autor  se  obliga 
â  no  representar  en  otro  corral  de  Sevilla.  Madrid,  23  octobre  i65o. 

(Juan  Antonio  de  Sandoval,  i65o  à  Sa.) 


432  BILLETIN    HISPANIQUE 

485.  —  Testamento  de  Dona  Eugenia  Luisa  de  Acuna  y  Velasco, 
mujer  de  Ma\imiliano  Eustaquio  de  Morales,  représentante. 

Manda  ser  enterrada  en  la  iglesia  del  convento  de  S.  Jerônimo  el 
Real  debajo  de  la  pila  del  agua  bendita. 

Que  como  Tercera  la  entierren  los  hermanos  de  la  orden. 

Manda  667  sâbanas  delgadas  para  hilos  à  los  pobres  de  Anton 
Martin. 

aoo  ducados  para  dote  de  /i  buérfanos  que  se  ha  van  de  casar. 

(i  lleni  mando  que  la  Yirgen  santissima  que  tengo  de  bulto,  que  su 
advocacion  es  de  Alocha,  se  le  dé  â  Jusepa  Vaca,  madré  del  dicho  mi 
marido,  por  ser  alliaja  su\a,  y  se  la  doy  para  que  se  la  dé  â  su  hijo 
ô  â  quien  fuere  su  voluntad,  con  sus  dos  coronas  de  plata  y  la 
diadenia  alla,  que  vienen  â  ser  quatro  piezas  con  la  corona  de  su 
hijo  precioso.  » 

100  reaies  â  la  redenciôn  de  cautivos. 

Que  se  cobren  los  alquileres  de  las  casas  que  tiene  u  â  la  pasteleria 
del  embajador  de  Alemania  ». 

Heredero  :  los  Ninos  huerfanos  delà  Inclusa. 

«  Declaro  que  si  mi  marido  Maximiliano  Eustaquio  de  Morales,  que 
esta  ausente  y  no  hace  vida  maridable  conmigo,  quisiere  perturbar 
este  mi  testamento  por  alguna  causa  que  él  quiera  dar,  que  no  hay, 
que  para  el  paso  en  que  estoy,  que  nada  de  lo  referido  en  este  mi 
testamento  es  suyo,  antes  del  dote  que  traje  â  su  poder  me  falta 
mucho  que  él  ha  despendido,  lo  quai,  si  él  no  hiciere  movimiento, 
se  lo  perdono,  y  si  le  liiciere  en  virtud  de  dicha  carta  de  dote  que  dejo 
juntamente  con  lo  demas  se  cumpla  apremiandolo  â  ello,  y  todo  sea 
para  los  dichos  mis  herederos.  »  Madrid,  5  Noviembre  i65o. 

I  Ihulem.) 

486.  —  Obligaciôn  de  Antonio  Garcia  de  Prado,  autor  de  comedias, 
Mariana  Vaca,  su  mujer,  Toribio  de  la  Vega  y  Ana  Maria  Rojas,  su 
mujer,  Juan  Francisco  Goello  de  Arode  y  Bernarda  Manuela  \  elâ/.quez, 
su  mujer,  Rufina  Justa  Garcia,  Gosme  Pérez,  Juan  de  la  Galle,  Luis 
de  Mendoza,  Gaspar  de  Valdés,  Francisco  de  San  Miguel,  Gcbriân 
Martinez,  Francisco  Ortiz,  Alonso  Ortiz  y  Agustin  de  Villarroel, 
représentantes  de  su  compafïia,  de  cumplir  el  compromis©  del  autor 
de  ir  â  Toledo  y  hacer  4o  represenlaciones,  y  continuar  en  la  corte 
liasla  miércolcs  de  ceniza  de  i()5i  «  y  ansi  mismo  se  obligan  a  que 
esludiaran  en  la  dicha  ciudad  de  Toledo  la  comedia  de  llonrar  bien 
(jue  Dios  es  Dios  y  la  comedia  de  El  I\ino  de  Santa  Barhani,  y  en 
vinieiido  a  esta  corte  otra  comedia  nuova  ».  Madrid,  8 Noviembre  i65o. 

(Juan  Antonio  de  Sandoval,  rOôoà  Sa,  f°  ao.) 

GRISTUBAL  PÉREZ  PASTOR. 

(Conllnuarâ.) 


VARIÉTÉS 


Notes  d'archéologie  ibérique. 

I.  A  PROPOS  DE  l'inscription  cébvmique  de  Meca.  —  Dans  ses 
Scripta  Minoa  (t.  I,  p.  96  sq.),  M.  A.  Evans  a  proposé  une  lecture  de 
la  courte  inscription  peinte  sur  un  tesson  ibérique  que  M.  P.  Paris  et 
moi  avons  recueilli  à  Meca  en  septembre  1899,  et  que  M.  Paris  a  publié 
dans  son  Essai  sur  l'art  et  l'industrie  de  l'Espagne  primitive,  t.  II, 
fig.  302.  Dans  les  quatre  signes  à  peu  près  entièrement  conservés  de 
la  ligne  inférieure,  M.  Evans  voit  les  quatre  lettres  celtibériques 
I^A  HA',  c'est-à-dire  ILUN.  L'identification  paraît  incontestable  pour 
les  trois  derniers  signes;  1' K,  notamment,  est  d'une  lorme  assez 
caractéristique  pour  permettre  d'affirmer  qu'on  est  bien  en  présence 
d'une  inscription  indigène,  et  non  —  ce  qui  a  priori  eût  été  fort 
possible  —  de  caractères  grecs  plus  ou  moins  maladroitement  repro- 
duits. L'identification  du  iod  me  semble  beaucoup  moins  certaine  : 
d'abord,  parce  que  le  trait  de  gauche  n'aboutit  pas  au  sommet,  mais 
au  milieu  du  trait  médian;  puis,  parce  que  le  plus  bas  des  deux  traits 
de  droite  ne  s'attache  pas  à  l'extrémité  inférieure  du  trait  médian, 
mais  que  celui-ci  le  dépasse  légèrement,  —  je  serais  même  tenté 
de  dire:  que  le  peintre  a  pris  soin  de  le  faire  dépasser;  de  sorte 
qu'on  ee  trouve  en  présence  du  schéma  suivant  :  ^,  sensiblement 
différent  de  lous  les  aspects  notés  du  iod  celtibère,  —  et  d'ailleurs  de 
toutes  les  lettres  connues  de  cet  alphabet  ;  le  heth  seul  s'en  rappro- 
cherait quelquefois,  mais  sans  jamais  affecter  exactement  cette  forme  '. 

M.  Evans  a  renoncé  à  identifier  le  seul  caractère  conservé  de  la  ligne 
supérieure.  On  y  distingue  nettement  deux  jambages,  et  le  commen- 
cement d'un  troisième,  soit  un  tracé  analogue  aux  trois  jambages  de 
l'N  français  ou  aux  trois  premiers  de  notre  M.  On  peut  donc  être  en 
présence  soit  d'un  noun  (N),  soit  d'un  sin  [M).  La  première  de  ces 
deux  hypothèses  est  la  plus  probable,  parce  que  le  trait  placé  à  droite 

I.  M.  Evans  a  pu  être  induit  en  erreur  par  une  imperfection  du  dessin  publié 
dans  le  livre  de  M.  Paris,  où  l'encre,  en  s'étendant,  a  empâté  les  traits  du  caractère 
en  question,  ce  qui  ne  permet  pas  de  distinguer  très  nettement  les  deux  divergences 
essentielles  que  je  signale.  11  serait  bon  du  vérifier  sur  l'original,  au  Louvre.  Je  tiens 
à  ajouter  que  cette  légère  inexactitude  n'est  pas  imputable  à  M.  Paris  :  c'est  moi  qui 
suis  l'auteur  du  dessin  reproduit  dans  son  ouvrage. 


434  BULLETIN    HISPAMQUE 

de  cette  lettre,  tout  à  fait  sur  le  bord  du  tesson,  et  dont  l'extrémité 
seule  est  visible,  paraît  se  diriger  vers  la  droite:  ce  serait  alors 
le  premier  jambage  du  caractère  suivant,  et  non  le  dernier  d'un  M. 

En  laissant  de  côté  les  divergences  de  détail,  la  lecture  de  M.  Evans 
permet  de  résoudre  une  question  qui  se  posait  à  propos  de  ce 
fragment  :  quel  que  soit  le  sens  indéchiffré  de  cette  inscription,  ce 
n'est  pas  un  alphabet  circulaire,  destiné  uniquement  à  l'ornemen- 
tation, que  le  vase  portait  sur  la  panse.  L'emploi  de  ce  genre  de 
décoration  étant  un  procédé  familier  aux  artistes  grecs  dès  les 
premiers  siècles  de  l'Age  historique,  il  serait  fort  naturel  que  les 
Ibères  le  leur  eussent  emprunté,  soit  directement,  soit  par  l'intermé- 
diaire des  Etrusques,  qui  en  usaient  aussi  très  fréquemment.  Mais  ce 
n'est  pas  le  cas  pour  notre  fragment.  Est-ce  une  raison  pour  rejeter 
les  conclusions  de  M.  Paris,  qui  voit  dans  ce  motif  un  souvenir 
de  l'art  grec  classique'?  La  disposition  régulière  des  lettres  suffit 
an  contraire  à  montrer  qu'à  côté  de  sa  valeur  pratique  — -  celle  d'une 
légende  ou  d'une  signature  —  l'inscription  conserve  encore  la  valeur 
artistique  d'un  ornement.  Or  les  vases  grecs  présentent  également 
de  nombreux  exemples  analogues;  M.  Paris  en  cite  un,  notamment, 
où  la  signature  du  potier  sert  d'ornement  essentiels.  Ces  rapproclie- 
mcnts  pourraient  se  multiplier:  un  pied  de  vase  du  musée  de  Tarra- 
gone  porte  aussi  des  lettres  ibériques  3;  ce  mode  de  décoration  est 
également  en  honneur  dans  l'art  grec^.  Il  suffit  au  contraire  de 
comparer  à  nos  inscriptions  ibériques  celles  que  portent  quelques 
poteries  mycéniennes,  par  exemple  le  fameux  vase  à  étrier  d'Orcho- 
mène^,  pour  constater  que  l'art  égéen  ne  peut  avoir  exercé  ici  aucune 
action,  directe  ou  indirecte. 

M.  Evans  objecte  ce|)cndant  que  «  selon  M.  Paris  »  on  n'observe  à 
Meca  aucune  trace  d'une  inlluence  grecque  postérieure.  Mais  je  ne 
sais  trop  sur  quoi  se  fonde  cette  assertion,  puis([ue  M.  Paris 
remarque  au  contraire  que  des  tessons  de  toutes  les  époques  se 
retrouvent  à  Meca'"';  c'est  de  là  que  provient,  en  particulier,  le  frag- 
ment dit  du  «  chasseur  »,  dessin  en  silhouette  noire,  où  il  est  diiïicile 

I.  Op.  cit.,  pp.  loo,  126  (n.  !i),  i3G. 

a.  Il  s'agit  du  vase  «proto-corinthien))  que  M.  F.-B.  Tarlicll  a  publié  dans  la 
Revue  nrchrologique,  looa,  pp.  /ii-/iO,  cl  qui  porte,  tracée  circulaircnicnt  sur  la  panse, 
la  signature  suivante  IIJppo:  [i'  ÈTtoi'ïjTEv  'Avain>./|Foy.  Cf.  Paris,  op.  cit., p.  laO,  n.  4. 

3.  Paris,  lig.  208.  Ces  caractères  ne  sont  pas  très  nets  et  n'ont  pas  encore  pu  être 
identifiés;  celui  du  milieu  doit  être  un  lié. 

U.  Cf.,  par  exemple,  C.  /.  G.,  8342. 

.'j.   Evans,  op.  cit.,  lig.  3i. 

6.  Paris,  p.  12  :  «  Toutes  les  séries  dont, j'ai  recueilli  des  exemplaires  à  l'Amarcjo 
(d'où  proviennent  notamment  des  fragments  de  vases  grecs,  représentés  ligures  3 
et  3)  se  retrouvent  ii  Meca,  avec  plus  d'abondance  encore.  »  Au  cours  de  l'cxplornlion 
que  j'ai  faite  avec  M.  Paris,  j'avais  de  mon  côté  note  (|u'on  retrouvait  à  Meca  «  des 
débris  de  toute  époque,  de[)uis  ime  liaclie  de  l'àgc  néolithique  jus(ju'à  des  fragments 
de  vases  grecs,  romains,  arabes.»/ 


VARIÉTÉS  l^35 

de  ne  pas  reconnaître  une  iinilalion  de  la  céramique  grecque  du 
V' siècle  et  une  inspiration  (jui  n'a  rien  de  commun  avec  celle  des  vases 
ibériques  de  style  préhellénique'. 

Nous  sommes  donc,  en  fin  de  compte,  en  présence  d'une  inscrip- 
tion en  langue  indigène,  où  un  thème  familier  à  la  céramique 
archaïque  ou  classique  est  traité  selon  des  procédés  techniques  d'ori- 
gine égéenne.  Aucun  document  ne  saurait  montrer  plus  nettement  les 
divers  éléments  dont  s'est  constitué  l'art  ibérique. 

II.  Oiseaux  et  Poissons.  —  Plusieurs  vases  publiés  par  M.  P.  Paris 
portent  comme  décoration  de  grands  oiseaux  entre  les  pattes  desquels 
se  jouent  des  poissons^;  on  peut  en  rapprocher  un  fragment  reproduit 
par  M.  Albertini  dans  ses  Fouilles  d'Elche,  et  représentant  un  poisson 
au-dessus  duquel  se  distinguent  des  griffes  d'oiseau  ^  :  le  thème  est 
évidemment  identique.  Les  deux  auteurs  donnent  de  cet  assemblage 
la  même  explication  :  Pu  horreur  du  vide  »,  qui  a  souvent  poussé  les 
artistes  à  remplir  au  moyen  des  ornements  les  plus  variés  les  espaces 
laissés  libres  par  le  sujet  essentiel''.  On  peut  citer  à  l'appui  de  cette 
thèse  quelques  documents  —  d'ailleurs  étrangers  à  l'Espagne  —  qui 
paraissent  assez  probants  :  tel  est,  par  exemple,  le  vase  de  Caeré  oii 
des  poissons,  placés  les  uns  verticalement  entre  les  pattes  de  grands 
quadrupèdes,  les  autres  horizontalement  au-dessous  en  frise  circu- 
laire, rappellent  d'assez  près  ceux  d'un  fragment  d'Elche^;  tel  est 
encore  le  dessin  préhistorique  gravé  dans  la  caverne  de  Lortet,  où  des 
poissons  se  retrouvent  entre  les  pattes  et  même  sur  le  dos  de  trois 
élansG.  Il  est  évident  que  le  souci  d'imiter  fidèlement  la  nature  n'a 
nullement  présidé  à  la  composition  de  pareils  tableaux. 

Mais  en  dépit  d'analogies  incontestables  dans  l'exécution,  le  cas  me 
semble  assez  différent  pour  les  peintures  ibériques  qui  nous  intéres- 
sent. Les  oiseaux  qui  y  figurent  sont  des  échassiers,  reconnaissables  à 
la  longueur  de  leurs  pattes,  et  l'un  d'eux ^  à  celle  de  son  bec.  Un  très 
grand  nombre  des  autres  volatiles  publiés  par  MM.  Paris  et  Albertini 
sont  également  des  oiseaux  d'eau,  comme  le  prouvent  les  dimensions 
de  leurs  cous  et  de  leurs  becs^^^;  dans  le  thème  assez  fréquent  de  la 

1.  Paris,  Essai...,  t.  II,  fig.  ig8;  cf.  pp.  yy  et  i3C. 

2.  Paris,  flg.  i83-i8ii. 

3.  Albertini,  Fouilles  d'Elche  {Bulletin  hispanique,  igoG,  pp.  332-302,  —  1907,  pp.  1-17 
et  109-127),  pi.  V,  fig.  23. 

4.  Paris,  p.    125;  —  .\lbertini,  5*  article,  p.  110. 

5.  Paris,  fig.  i8i.  Le  rapprochement  a  été  fait  par  M.  L.  Siret  {A  propos  de  poteries 
pseudo-mycéniennes,  dans  Anthropologie,  1907,  pp.  277-300),  qui  reproduit  en  regard 
l'un  de  l'autre  le  fragment  d'Elche  et  le  vase  de  Caeré  (fig.  31). 

6.  Cf.  E.  Piette,  Anthropologie,  iSy'i,  p.  1^4,  fig.  i5  (cité  par  M.  Paris,  p.  120,  n.  4). 

7.  Paris,  fig.  i83. 

8.  Paris,  fig.  182,  191,  pi.  I  (hors  texte);  —  Albertini,  pi.  III,  fig.  1,  4;  IV,  fig.  i5,  20; 
V,  fig.  29,  3i  ;  VI,  fig.  35;  IX,  fig.  09. 


A36  BULLETIN    HISPANIQUE 

latte  entre  un  carnassier  et  un  oiseau,  ce  dernier  présente  encore 
souvent  ces  mêmes  caractères'.  Le  rôle  du  poisson  dans  une  décora- 
tion de  ce  genre  devient  alors  très  explicable  :  sa  présence  est  une 
convention  indiquant  que  la  scène  se  passe  dans  une  région  aqua- 
tique. Remarquons  en  effet  que  parmi  les  autres  ornements  acces- 
soires de  ces  poteries  représentant  des  oiseaux  de  marais  figurent  en 
première  ligne  les  plantes  d'eau,  notamment  la  fameuse  feuille  en  fer 
de  lance,  qui  se  retrouve  dans  tous  les  centres  de  l'art  méditerra- 
néen ';  la  destination  en  est  la  même  que  celle  de  l'animal  aquatique 
par  excellence^.  Parfois  encore  on  la  retrouve  accompagnant  un 
poisson  i;  le  fait  s'explique  tout  nnturollement;  si  c'est  un  carnassier^, 
ce  voisinage  nous  le  présente  comme  un  chasseur  de  marais  ou  de 
rivière.  L'hypothèse  est  d'autant  plus  probable  que  parfois  l'artiste, 
plus  inventif  ou  plus  expérimenté,  a  su  donner  à  son  tableau  un 
véritable  fond  :  l'eau  est  alors  nettement  dessinée,  et  l'on  y  voit  flotter 
des  plantes  à  longues  feuilles  et  des  fleurs  en  rosace,  servant  sans 
doute  de  cadre  à  la  lutte  d'un  oiseau  et  d'un  quadrupède '\ 

Ce  fait,  exceptionnel  dans  la  céramiciiio  ibérique,  est  courant  au 
cnnltaire  chez  les  peuples  dont  l'art  était  plus  avancé.  On  sait  avec 
(|n(l  soin  cl  avec  quel  bonheur  les  artistes  égéens  peignaient  les  fonds 
do  leurs  tableaux;  qu'il  nous  suffise  de  rappeler,  par  exemple,  la 
fresque  aux  poissons  volants,  de  Phylacopi,  et  surtout  la  fresque  au 
chat  sauvage,  de  Ilaghia  ïriada".  Dans  le  genre  de  sujets  qui  nous 
occupe,  ils  se  sont  parfois  bornés  à  caractériser  par  l'adjonction  de 
poissons  ou  de  plantes  d'eau  le  lieu  de  l'action  et  la  catégorie  de 
personnages  —  hommes  ou  animaux  —  qu'ils  mettaient  en  scène^. 
Mais  ailleurs  ils  ont  usé  de  procédés  plus  savants;  telle  est,  par 
exemple,  la  lame  d'un  poignard  de  Mycèncs  à  incrustati(»n  d'or  et 


1.  Paris,  fi}?.  182,  pi.  I;  —  .\ll)crlini,  flg.  ïu). 

2.  Cf.  Paris,  ti<r.  102,  io3,  181,  i83(i);—  Albcrlini.  fig.  3,  i3.  iç».  a6,  s8,  ^-, 
iî,  etc.  Pour  l'em|)loi  de  la  feuille  en  fer  de  lance  dans  l'art  cgéen,  cf.,  entre 
antres,  R.  Dnssaiid,  Les  (Uvilixntinns  firéhellrniqucs  dans  le  bassin  de  la  mer  Egée, 
flg.  67,  70,  etc.;  —  pour  l'art  carthaginois,  cf.  !..  Sirct,  o/i.  cit.,  lig.  13  et  a8,  etc. 

.S.  Ainsi  dans  la  figure  i83  (i),  l'oiseau  entre  les  paltos  duquel  sont  deux  gros 
poissons  affrontés  a  en  outre  près  de  son  l)ec  une  feuille  en  fer  de  lance;  ce  dernier 
motif  (tète  d'oiseau  et  feuille  de  plante  d'eau)  se  répète  très  exactement  dans  uu 
dessin  de  M.  Albertini  (pi.  Hl,  lig.  2),  mais  les  objets  sont  placés  en  sens  inverse. 

'1.   Albertini,   fig.  Tfl. 

F),  .\lbertini,  lig.  37.  Dans  ces  grands  carnassiers,  M.  Albertini  voit  des  bêles  fan- 
tastiques, M.  Paris  des  chiens  ou  des  loups  ;  ces  chasseurs  d'oiseaux  ne  scrnienl-ils  pas 
dos  renards  '? 

0.  Albertini,  fig.  28.  Ailleurs  (fig.  /(i),  une  scène  du  même  genre  cstcncore  déco- 
rée de  piaules  aquatiques  et  placée  au-dessus  d'une  large  bande  circulaire,  qui 
figure  peut-èlrc  une  najqie  d'eau. 

7.  Reproduites,  entre  autres,  par  11.  Dussaud,  op.  cit.,  lig.  .">G  et  '|3. 

8.  Cf.  II.  Dussaud,  lig.  <i7  (support  de  Plixlacopi  représentant  des  pêcheurs)  et  177 
('sarcophage  «le  flrète  représentant  dos  plantes  d'eau,  des  poissons  et  des  oies  sau- 
vages). 


VARIÉTÉS  l\5'] 

d'argent,  où  l'artiste  a  gravé  des  félins  poursuivant  des  canards  sau- 
vages dans  un  marais  :  l'eau  est  figurée  par  une  bande  sinueuse  dans 
laquelle  nagent  des  poissons;  la  raison  d'être  de  ce  dernier  détail  est 
ici  évidente'. 

En  résumé,  quand  le  poisson  se  rencontre  dans  certaines  décora- 
tions empruntées  au  monde  animal,  sa  présence  paraît  être  destinée 
à  préciser  l'endroit  où  se  passe  la  scène,  et  à  tenir  dans  le  tableau  la 
place  d'un  fond  caractéristique,  trop  compliqué  à  exécuter  pour  le 
pinceau  malhabile  des  artistes  ibériques;  c'est  une  schématisation 
exagérée,  qui  donne  presque  à  l'unique  objet  subsistant  du  cadre 
naturel  la  valeur  d'un  symbole.  Le  rapprochement  avec  l'art  égéen 
fournit  ici  un  précieux  élément  d'interprétation,  mais  par  simple  com- 
paraison; car  rien  ne  permet  de  supposer  que  cet  artifice  soit  dû  à 
l'imitation,  soit  directe,  soit  par  un  intermédiaire,  des  modèles  crétois 
ou  mycéniens.  Le  procédé  est  commun  à  toutes  sortes  de  pays 3;  il 
est  instinctif  chez  tous  les  primitifs  comme  chez  tous  les  enfants  : 
n'importe  quel  père  de  famille  en  fera  aisément  l'expérience;  il  peut 
donc  éclore  spontanément,  et  indépendamment  de  toute  influence 
mutuelle,  dans  les  civilisations  les  plus  diverses. 

111.  Une  fusaïole  de  Meca  a  décor  incisé.  —  J'ai  recueilli  cet  objet 
sur  le  flanc  de  l'acropole  de  Meca,  dans  un  éboulis  de  terre,  au  cours 
de  l'exploration  que  j'ai  faite  de  ce  site  avec  M.  P.  Paris,  en  août- 
septembre  1899.  Tout  récemment,  en  le  comparant  à  d'autres  usten- 
siles similaires,  j'ai  été  frappé  des  particularités  qu'il  présente. 

En  premier  lieu,  la  perfection  géométrique  de  la  forme:  c'est  un 
tronc  de  cône  d'une  régularité  absolue,  dont  la  petite  base  a  seule  été 
détériorée  par  l'effet  du  temps.  Mais  la  grande  base  est  rigoureusement 
plane  et  circulaire;  c'est  à  peine  si  les  arêtes  sont  émoussées,  plutôt 
d'ailleurs  par  l'usure  que  par  une  négligence  de  fabrication;  enfin  le 
trou  médian  affecte  la  forme  d'un  cylindre  très  mince  et  très  régu- 
lier, exactement  perpendiculaire  à  la  base.  J'affirmerais  que  l'objet  a 
été  fait  au  tour,  si  un  doute  ne  provenait  de  ce  que  le  centre  du  petit 
cylindre  en  question  ne  coïncide  pas  exactement  avec  celui  du  tronc 
de  cône. 

D'autre  part,  le  rapport  de  la  hauteur  au  diamètre  de  la  grande 
base  et  celui  des  diamètres  des  deux  bases  me  semblent  exceptionnels  : 
la  hauteur  est  en  effet  de  o"'oi9,  le  diamètre  de  la  grande  base  de 


1.  Dussaud,  iig.  87.  Peut-èlre  est-ce  pour  fournir  une  indication  analogue  que 
sur  uu  vase  d'EIche  (Paris,  lig.  njo)  un  poisson  ligure,  à  l'intérieur  d'une  bande 
circulaire,  parmi  d'autres  dessins  impossibles  à  identifier. 

2.  On  le  retrouve,  par  exemple,  dans  des  peintures  égyptiennes  (Maspcro, //(s<o(rc 
ancienne,  t.  II,  p.  197  et  iâi;,  phéniciennes  (id.,  ibid.,  t.  111,  p.  382),  assyriennes  (trf., 
ibid,,  p.  3oi),  etc. 

Bull,  hispan.  39 


Z|38 


BULLETIN    HISPANIQUE 


o"025,  celui  de  la  petite  de  o^oiô  environ  (fîg.  i).  Il  s'ensuit  que, 
l'objet  étant  dune  part  presque  aussi  haut  que  large,  d'autre  part 
beaucoup  plus  étroit  vers  son  sommet,  son  gall)e  se  dresse  avec  une 
certaine  élégance  qui  est,  je  le  répète,  plus  que 
rare  dans  les  fusaïoles  qui  nous  sont  parvenues. 
D'abord,  il  n'est  pas  ordinaire  qu'elles  présentent 
aussi  géométriquement  la  forme  d'un  tronc  de 
cône  :  celles  qui  ont,  en  gros,  cet  aspect  sont 
généralement  bombées  par-dessous,  et  l'arête  qui 
sépare  la  base  de  l'aire  latérale  manque  de  pré- 
cision. De  plus,  qu'elles  soient  coniques,  tronc- 
coniques  ou  en  double  cône,  la  hauteur  en  est  le 
plus  souvent  minime  par  rapport  à  la  largeur; 
la  forme  en  est  alors  lourde,  écrasée,  et  contraste  avec  le  profil  élancé 
de  notre  peson  il^érique.  Dans  les  fusaïoles  de  Troie,  par  exemple, 
c'est  le  type  en  double  cône,  très  aplati,  qui  donjine.  A  Chypre,  la 
forme  tronc-conique  est  plus  fréquente;  mais  même  dans  les  spé- 
cimens dont  l'allure  est  la  plus  dégagée,  le  diamètre  de  la  Ijase  est 
encore  environ  le  double  de  la  hauteur". 

Le  décor  enfin  mérite  d'arrêter  notre  attention.  Toute  la  surface 
est  ornée  de  dessins  incisés,  en  traits  pleins  on  au  pointillé;  pour  la 
petite  base  seule,  la  question  reste  douteuse.   Sur  la  grande  base  est 


f 


f. 


tracé  un  carré  très  imparfait  —  en  réalité,  un  trapèze  -  avec  ses  deux 
diagonales,  dont  le  point  d'intersection  tomberait  au  centre  du  trou  ; 
le  tout  au  pointillé  (lig.  2).  Le  décor  de  l'aire  latérale  est  infiniment 
plus  compliqué  :  deux  cercles  liori/.onlaiix,  menés   l'im  au   sommet, 


I.  .)c  remarque  aiiijsi  (jiio  le  Iroii  médian  esl  en  général  beaucoup  plus  ^ros.  — 
De  nombreuses  fusaïoles  do  Troie  ont  été  publiées  par  Sciilieruaiui  dans  l'.KÎn.s  qui 
termine  sou  Trojanischc  AHerlliiiincr,  cl  souvent  reproduites;  cf.  Perrol  cl  (".liipici, 
Histoire  d(^  l'art  dans  l'Antiquité,  t.  \'l,  p.  aoG-207,  907,  etc.  ;  —  Lal'aye,  art.  h'usus  dans 
le  Dictioimaire  de  Darcnbor^î  et  Sagiio;  etc.  —  Des  fusaïoles  chypriotes,  figurant 
dans  le  «lossier  Hichter-Carlailhac,  sont  reproduites  par  11.  Dussaud,  Ixs  Cii'iliidtions 
prâhelléniques...,  lig.  la'i  (p.  17?^).  On  remarquera  notamment  les  n"  if),  17,  12,  dont 
la  forme  esl  plus  ou  moins  anal  )gue  à  celle  de  notre  [leson,  mais  dont  les  propor- 
tions sont  très  différentes  et  moins  lioureuscs. 


VARIÉTÉS  43g 

l'autre  à  la  base  de  cette  surface,  y  déterminent  une  sorte  de  frise,  que 
des  lignes  verticales  au  pointillé  divisent  en  six  zones,  de  deux  ordres 
bien  distincts  (fig.  3)  :  celles  que  je  numérote  i  et  3  portent  comme 
ornement  deux  lignes  droites,  en  traits  pleins,  coupant  à  peu  près  en 
diagonale  le  trapèze  qui  délimite  la  zone;  quelques  piqvires  servaient 
de  points  de  repère;  mais  malgré  cette  précaution,  le  tracé  en  est  très 
défectueux,  surtout  pour  la  zone  3.  La  zone  5  portait  sans  doute  un 
dessin  analogue,  mais  l'usure  l'a  effacé.  Les  zones  2,  4  et  6  portent 
des  dessins  au  pointillé  '  :  le  premier  représente  une  sorte  de  spirale, 
le  second  une  ellipse  très  imparfaite;  le  troisième  enfin  reproduit  le 
même  thème  que  les  zones  impaires ,  mais  les  deux  droites  qui  se 
coupent  forment  les  diagonales  d'un  petit  trapèze  inscrit  dans  le  plus 
grand,  et  le  tracé  en  est  beaucoup  plus  soigné. 

Le  motif  essentiel  de  cette  décoration  consiste  donc  dans  deux  lignes 
droites  qui  se  coupent  en  formant  deux  triangles  opposés  par  le  som- 
met; il  alterne  ordinairement  avec  un  autre  dessin.  Cette  disposition 
était  familière  aux  céramistes  espagnols,  puisque  dans  les  frises  qui 
ornent  la  panse  de  leurs  vases  les  métopes  sont  plus  d'une  fois 
constituées  par  une  croix  formée  de  deux  diagonales  2,  ou  par  un 
chapelet  de  losanges,  ce  qui  n'est  qu'une  légère  complication  de  notre 
dessin  3.  Le  fait  n'est  pas  particulier  à  la  céramique  ibérique,  puisque 
le  même  thème  est  fréquemment  traité  sur  des  poteries  italiennes 
du  vil'  et  du  vr  siècles'',  et  qu'en  Espagne  même  il  apparaît  dans  des 
objets  de  provenance  africaine  5.  Mais  ce  n'en  est  pas  moins  un  trait 
caractéristique  de  l'art  ibérique,  que  la  prédilection,  dans  la  déco- 
ration des  vases,  pour  les  systèmes  de  triangles^;  et  il  en  était  ainsi 
dès  les  temps  les  plus  reculés".  Faut-il  donner  à  ce  motif  une 
signification  symbolique  et  y  reconnaître,  comme  fait  M.  L.  Siret, 
un  emblème  religieuxS?   Malgré  les  arguments  assez  sérieux  qu'on 

1.  L'usage  de  la  décoration  au  pointillé,  familier  à  l'Espagne  préhistorique 
(cf.  L.  Siret,  op.  cil.,  fig.  8),  a  laissé  dos  traces  évidentes  dans  les  poteries  ibériques 
peintes;  cf.  P.  Paris,  op.  cit.,  fig.  aô,  aG,  !ti,  6i,  i65. 

2.  P.  Paris,  op.  cit.,  fig.  46.  Cf.  fig.  49,  etc. 

3.  Id.,  ibid.,  fig.  .'17.  Dans  un  vase  du  musée  de  Madrid  (fig.  55),  la  métope  est 
formée  d'un  quadrillage  de  losanges  (cf.  fig.  56),  ce  qui  est  encore  une  dérivation 
du  même  thème. 

4.  Cf.  E.  Pottiur,  Vases  antiques  du  Louvre,  pi.  \\>l-\\\I\  . 

5.  Cf.  L.  Siret,  op.  cit.,  fig.  12,  représentant  un  œuf  d'autruche  peint  de  l'acropole 
punique  de  Villaricos  Baria. 

fi.  Cf.,  par  exemple,  Paris,  fig.  ujo:  un  décor  de  triangles,  dont  la  pointe  est 
tournée  vers  le  haut,  rappelle  assez  exactement  le  registre  inférieur  du  fragment 
cité  dans  la  note  suivante. 

7.  Cf.  Siret,  op.  cit.,  fig.  8  :  un  tesson  préhistorique  de  Los  Millares,  incisé  au 
pointillé,  porte  deux  rangées  de  triangles  dont  les  pointes  sont  tournées  les  unes 
vers  les  autres. 

8.  M.  Siret  voit  dans  le  dessin  précité  des  triangles  sexuels,  dont  les  deux  plus 
à  gauche,  réunis  par  la  iiointe,  représenteraient  une  bipenne;  notre  zone  6  oflre 
exactement  la  même  disposition. 


!^(^0  BULLETIN    HISP.V^ilQUE 

pourrait  invoquer ',  la  chose  n'est  rien  moins  que  démontrée;  et  en 
pareille  matière  toute  affirmation  trop  catégorique  est  nécessairement 
contestable;  bornons-nous  donc  à  constater  les  faits,  sans  trop  vouloir 
les  interpréter. 

Dautre  part,  sur  la  frise  de  notre  peson,les  systèmes  de  diagonales, 
au  lieu  d'être  séparés  par  des  triglyphes,  constituent  au  contraire  le 
seul  motif  composé  de  lignes  droites  ;  au  lieu  de  servir  de  métopes, 
elles  séparent  entre  elles  des  métopes  où  domine  la  ligne  courbe,  et 
jouent  le  rôle  que  tiennent  ordinairement  les  triglyphes.  Ni  en  Espagne 
ni  ailleurs,  je  ne  connais  d'autre  exemple  de  cette  disposition  toute 

spéciale. 

Pierre  WALTZ. 


L'exposition  d'art  ancien  de  Burgos,  en  août-septembre  1912. 

A  l'occasion  du  centenaire  de  la  bataille  de  las  Navas  de  Tolosa, 
la  ville  de  Burgos  a  organisé  une  exposition  artistique,  qui,  je  le 
crains  bien,  a  passé  plus  inaperçue  qu'il  ne  convenait,  mais  qui  a 
offert  à  ceux  qui  s'intéressent  à  l'art  espagnol  une  occasion,  à  certains 
points  de  vue  unique,  de  se  rendre  compte  des  richesses  insoupçonnées 
que  renferme  encore  le  Nord  de  la  Castille.  Cette  exposition,  rapide- 
ment organisée  et  insuffisamment  annoncée,  renfermait  les  objets 
anciens  de  toute  sorte  ayant  quelque  valeur  artistique  ou  documen- 
taire envoyés  par  des  particuliers  ou  des  corporations.  Plusieurs 
de  ces  objets  étaient  jusqu'ici  entièrement  inconnus;  d'autres  appar- 
tenant à  des  églises  ou  couvents  y  sont  jalousement  gardés  à  l'abri 
des  regards  indiscrets  et  des  atteintes  de  la  brocante  internationale, 
toujours  aux  aguets,  mais  depuis  quelque  temps  plus  entreprenante 
que  jamais.  Beaucoup  enfin  se  trouvent  dans  des  localités  qui  ne 
sont  pas  d'un  accès  facile  pour  les  touristes  pressés.  Aucun  catalogue 
détaillé  n'a  été,  que  je  sache,  dressé  jusqu'ici.  L'on  en  prépare  un, 
il  est  vrai,  dont  les  difïérents  chapitres  sont  confiés  à  des  spécialistes 
de  la  région.  Malheureusement,  s'il  df)it  jamais  paraître  au  jour,  ce 
ne  sera  que  longtemps  après  la  dispersion  de  tous  les  objets  réunis 
dans  les  vastes  bâtiments  du  Séminaire  de  San  José.  J'ose  donc  espérer 
que  les  quelques  notes  <[ui  suivent,  prises  au  cours  de  visites  à 
l'exposition,  ne  seront  pas  absolument  inutiles. 

Le  Royal  Monastère  de  las  Iluelgas,  sur  lequel  les  voyageurs  ne 
peuvent  jeter  que  qucUpics  regards  superficiels,  avait  envoyé  à  l'expo- 
sition de  précieux  souvenirs  historiques  :  d'abord,  le  fameux  étendard 

I.  On  trouve  en  «(Tel  dans  la  céramique  cgccnne  plus  d'un  exemple  de  bipennes 
ainsi  schématisées;  cf.  R.  Dussaud,  op.  cil.,  lig.  147  (décor  d'un  vase  de  Cliypre),  — 
EvaDS,  Scripta  Minoa,  t.  I,  fig.  <j  (cachet  de  Cnossos),  etc. 


VA.RIÉTÉS  44 1 

pris  à  l'Emir  des  Emirs  à  la  bataille  de  las  Navas,  dont  une  repro- 
duction seulement  pend  à  la  voûte  de  l'Église  du  Couvent  :  vue  de 
près,  cette  tenture  offre  des  détails  de  technique  et  des  particularités 
d'ornementation,  telles  que  les  quatre  lions  rampants  de  Castille,  qui 
mériteraient  une  étude  approfondie.  A  las  Navas  également  se  rapporte 
la  Croix  dite  de  l'Archevêque  D.  Rodrigo  qui,  après  la  bataille, 
l'aurait  léguée  au  Monastère.  Elle  se  présente  aux  regards  sous  forme 
d'une  croix  d'or  très  riche  d'ornements  délicats  et  touffus,  d'une 
facture  évidemment  bien  postérieure  à  la  date  de  las  Navas.  Mais 
ce  revêtement  précieux  semble  cacher  une  autre  croix  de  fer  dont 
l'extrémité  inférieure  dépasse  la  gaine  et  porte  une  inscription  qui 
paraît  se  continuer  sous  celle-ci  et  que  je  n'ai  pu  déchiffrer.  L'on  a 
retrouvé  récemment  au  Monastère  et  l'on  voyait  ici  pour  la  première 
fois  l'étui  de  cuir  très  curieusement  ouvragé  et  repoussé  qui  depuis 
une  date  indéterminée  renfermait  la  croix;  c'est  une  pièce  peut-être 
unique  dans  son  genre.  Le  trophée  de  las  lluelgas  était  complété  par 
le  trône  des  Rois  Catholiques  et  quatre  drapeaux  de  Lépante,  tous  les 
témoins  du  passé  glorieux  de  l'Espagne.  Ajoutons-y  une  merveilleuse 
suite  de  tapis  à  fond  de  velours  vert  avec  figures  et  chairs  d'une 
extrême  finesse  de  nuances,  et  la  très  curieuse  statue  de  bois  articulé 
représentant  saint  Jacques.  On  sait  qu'en  principe  et  pendant  long- 
temps le  roi  seul  pouvait  donner  l'ijivestiture  et  Uespaldarazo  aux 
nouveaux  chevaliers.  Mais  lui-même,  le  Roi,  de  qui  devait-il  la 
recevoir?  De  nul  autre  que  de  saint  Jacques  lui-même.  Grâce  à  un  jeu 
de  cordes,  qu'il  nous  est  encore  loisible  de  faire  fonctionner,  les  bras 
de  la  statue,  d'ailleurs  grossière,  s'agitent,  se  lèvent  et  la  main  droite, 
armée  d'une  épée,  s'abat  sur  l'épaule  du  récipiendaire  complaisant. 
Nulle  part  cette  curieuse  mécanique  n'était  mieux  à  sa  place  que  dans 
l'historique  monastère  et  dans  une  ville  oîi  la  confrérie  de  saint 
Jacques  nous  a  laissé  le  précieux  recueil  de  ses  actes,  également 
important  pour  l'histoire  locale  et  pour  celle  de  l'enluminure 
castillane. 

Un  autre  monastère,  celui  de  Santo  Domingo  de  Silos,  avait  trans- 
porté à  l'exposition  les  pièces  les  plus  rares  de  son  trésor,  si  bien 
étudié  par  Dom  Roulin,  le  calice  du  saint,  du  w"  siècle,  la  patène 
ornée  encore  de  ses  camées  antiques  et  de  ses  pierres  précieuses,  le 
coffret  de  cuivre  émaillé  du  xiir  siècle,  la  colombe  eucharistique  si 
curieusement^  adaptée  à  une  antique  tête  d'argent,  dite  l'idole  de 
Carazo,  enfin  la  table  d'autel,  ou,  pour  mieux  dire,  le  frontal  de 
cuivre,  du  xiii"  siècle  également,  très  digne  d'être  mentionné,  même 
à  côte  du  célèbre /ronia/  de  Silos  actuellement  au  Musée  provincial  de 
Burgos. 

Le  chapitre  de  la  cathédrale  n'avait  que  l'embarras  du  choix  entre 
toutes  les  richesses  à  la  garde  desquelles  il  est  préposé.  11  ne  pouvait 


44a  BULLETIN    HISPANIQUE 

songer  à  étaler  cette  énorme  collection  de  tapisseries  dont  les  plus 
importantes  sutTirent,  lors  de  l'exposition  de  1905,  à  couvrir  les  murs 
du  Claustro  alto  et  ceux  du  séminaire.  Du  moins  en  a-t-on  extrait,  pour 
X  la  circonstance,  quelques  échantillons,  l'incomparable  série  des  Sept 
Vertus  et  celle  de  la  Création  du  Monde,  non  moins  riche  et  curieuse. 
Rapprochées  de  la  Série  Verte  des  Huelgas  et  de  celle  envoyée  à  l'ex- 
position par  la  paroisse  de  San  Esteban,  elles  permettent  de  se  rendre 
compte  d'un  coup  d'œil  de  la  riche  contribution  que  la  seule  ville  de 
Burgos  peut  apporter  à  l'histoire  de  la  tapisserie  au  Moyen-Age  et  à  la 
Renaissance.  Les  ornements  d'église  offrent  même  richesse  et  même 
variété  :  chasubles,  dalmatiques,  ornements  de  toutes  sortes  abon- 
dent :  il  faut  mettre  au  premier  rang  les  Capas  données  au  Chapitre 
par  l'évêque  Alonso  de  Carthagène,  et  dites  du  Concile  de  Bâle. 
Le  grand  chandelier  ou  lenebrario  à  sept  branches,  les  vases  pour  les 
saintes  huiles  ne  peuvent,  il  est  vrai,  donner  qu'une  médiocre  idée  de 
l'art  si  espagnol  de  la  ferronnerie  et  de  l'orfèvrerie,  mais  les  pièces  qui 
le  représentent  ne  sont  pas  facilement  transportables;  d'ailleurs  aux 
envois,  forcément  réduits,  de  la  cathédrale,  il  faut  joindre  ceux  des 
églises  du  diocèse  et  au  premier  rang  parmi  eux,  la  riche  custodia  ou 
monstrance  de  la  collégiale  de  Briviesca.  Mais  l'une  des  merveilles  de 
l'exposition,  que  l'on  ne  reverra  sans  doute  pas,  c'est  la  collection  des 
vingt-huit  ou  trente  croix  paroissiales,  envoyées  par  les  villages  de  la 
province  et  de  l'archidiocèse.  Tous  les  styles  y  sont  représentés  et  toutes 
les  époques,  depuis  les  émaux  et  les  cabochons  du  xiii'  siècle  jus- 
qu'aux élégants  chefs-d'œuvre  de  la  Renaissance  et  aux  pièces  somp- 
tueusement prétentieuses  du  XYin"  siècle. 

Les  archives  de  la  cathédrale  ou  de  la  ville  avaient  envoyé  quelques 
pièces  curieuses,  les  premières,  la  fameuse  Caria  de  arras  de 
Rodrigue  de  Vivar  et  de  Chimène,  les  secondes,  le  Livre  de  saint 
Jacques,  mentionné  plus  haut,  et  les  registres  municipaux  de  i388, 
le  plus  ancien  recueil  de  ce  genre  connu  en  Castille.  Il  y  faut  joindre 
une  foule  de  documents,  privilèges,  donations,  carias  pueblas, 
envoyés  souvent  par  des  villages  d'ailleurs  sans  im|)orlance,  ce  <}ui 
montre  les  riciiesses  encore  insoupçonnées  que  les  campagnes  castil- 
lanes réservent  aux  chercheurs.  Par  exemple,  le  seul  village  de 
Barbadillo  del  Pez  en  possède  plusieurs,  très  anciens  et  très  curieux, 
tels  (}ue  la  lettre  d'Alphonse  Vil  (12  février  1190)  vendant  aux 
Conseils  de  Barbadillo  del  Pe/,  Villajimeno,  Quintanilla  Ilurlela  et 
deux  autres  villages,  des  terrains  incultes  en  paiement  de  deux  mille 
moutons  qu'il  avait  reçus  d'eux.  Villadiego  a  exposé,  entre  autres 
choses,  le  privilège  original  concédé  par  Alphonse  \  en  ia54  et  la 
confirmation  de  ses  privilèges  par  D.  Sancho  IV  en  1287.  Quelques 
livres  rares  et  incunables  complètent  cette  série. 

Nous  ne  pouvons  pousser  plus  loin  ces  énumérations  qui  rempli- 


VARIÉTÉS  443 

raient  encore  plusieurs  pages  si  nous  avions  la  prétention  d'être  à  peu 
près  complet.  Il  suffît  d'avoir  donné  une  idée  des  précieuses  richesses 
artistiques  réunies  (avec  bien  d'autres  objets  médiocres,  il  faut 
l'avouer)  dans  cette  exposition  provinciale,  qui  aurait  mérité,  je  le 
répète,  plus  de  publicité  et  plus  de  visiteurs.  Du  moins,  nos 
étudiants  français  réunis  à  Burgos  à  cette  époque  pour  les  cours  de 
vacances  en  auront  tiré  grand  profit.  Souhaitons  que  le  catalogue 
détaillé  et  illustré  que  l'on  nous  promet,  s'il  n'a  pu  servir  aux 
visiteurs,  vienne  du  moins  préciser  leurs  souvenirs,  et  aussi  dédom- 
mager ceux  qui  n'ont  pu  se  rendre  à  Burgos  à  cette  occasion. 

E.  MÉRIMÉE. 


UNIVERSITÉS  ET  ENSEIGNEMENT 


Les  cours  de  vacances  de  Burgos. 

Les  cours  de  vacances  organisés  à  Burgos  par  l'Université  de 
Toulouse,  et  qui  constituent  une  section  de  ïlnstilut  Français  en 
Espagne,  ont  été,  cette  année,  particulièrement  suivis.  Le  nombre  des 
étudiants  français  régulièrement  inscrits  a  été  de  \2f\  et  celui  des 
Espagnols  de  i5o  environ.  M.  le  Ministre  de  l'Instruction  publique, 
D.  Santiago  Alba,  avait  tenu  à  venir  présider  en  personne  la  séance 
d'inauguration.  L'éloquent  discours  qu'il  a  prononcé  à  cette  occasion, 
en  réponse  à  ceux  de  MM,  de  Sébastian  et  Mérimée,  a  montré  ce  que 
pouvaient  être  les  rapports  intellectuels  et  la  collaboration  univer- 
sitaire des  deux  pays.  Le  Ministre  a  tenu  à  dire  aux  professeurs 
étrangers  réunis  à  Burgos  qu'il  était  personnellement  disposé  à 
favoriser  de  son  mieux  l'œuvre  entreprise  par  l'Union  des  étudiants. 
Ces  paroles  officielles,  au  sortir  de  la  période  difficile  que  nous 
\enons  de  traverser,  méritaient  d'être  enregistrées.  —  Les  cours  se 
sont  terminés  le  i5  septembre  et  ont  été  clôturés  par  des  examens, 
qui  ont  v;iiu  des  diplômes  à  ceux  qui  les  ont  passés  avec  succès. 
Deux  faits  sont  à  noter  cette  année  :  la  présence  de  quelques  étrangers, 
venus  spontanément  assister  aux  cours  hispano-français,  et  aussi  la 
forte  proportion  (trente -cinq  environ)  de  candidats  au  certificat 
primaire  d'aptitude,  pour  la  préparation  duquel  d'ailleurs  un  cours 
spécial  avait  été  organisé. 


L'espagnol  dans  l'enseignement  secondaire. 

Le  liullelin  de  la  Société  d'études  des  professeurs  de  langues  méri- 
dionales (voir  en  |)articulier  son  n°  25)  continue  vigoureusement  sa 
campagne  bien  justifiée  en  faveur  de  l'organisation  définitive  de 
l'enseignement  de  l'espagnol  dans  les  lycées  et  collèges  de  la  région 
méridionale  (académies  de  Bordeaux,  Toulouse  et  Montpellier).  Nous 
ne  pouvons  que  nous  associer  à  de  telles  réclamations.  Quand  on  voit 
un  lycée  comme  celui  de  Bordeaux,  l'un  des  plus  importants  de 
France,   n'ollrir  aux   élèves,    pour    l'élude   de    l'espagnol,   (jue   deux 


UNIVERSITÉS    ET    ENSEIGNEMENT  4^5 

années  de  préparation  en  vue  du  baccalauréat,  même  quand  ils 
présentent  cette  langue  comme  langue  principale  ou  unique,  on  se 
demande  d'où  vient  cette  anomalie  et  par  quoi  il  faut  l'expliquer. 
Que  les  parents  préfèrent  l'anglais  ou  l'allemand,  c'est  leur  affaire. 
Mais  qu'on  leur  donne  la  possibilité  de  choisir!  Il  y  a  là  évidemment 
une  situation  qui  ne  peut  durer.  Elle  est  contraire  aux  intérêts  de  la 
région.  Elle  fait  tort  indirectement  à  l'enseignement  des  langues 
vivantes  autres  que  l'espagnol,  vers  lequel  les  candidats  ont  la 
ressource  de  se  précipiter  à  la  dernière  heure,  au  lieu  de  donner  un 
bon  coup  de  collier  en  anglais  ou  en  allemand.  Enfin,  ce  qui  devrait 
toucher  aussi  l'administration,  elle  manque  de  symétrie. 

G.  CIROT. 


Le  Programme  d'agrégation  en  1913. 

Nous  ne  pouvons  publier  dans  ce  fascicule  et  remettons  à  celui  de 
janvier  la  bibliographie  des  questions  et  auteurs  du  programme 
d'agrégation.  Nous  donnerons  seulement  ci-après  la  teneur  de  ce 
programme  : 

Questions:  I.  Les  historiens  espagnols  de  l'Amérique  au  xvr  siècle. 

—  II.  L'influence  française  sur  la  littérature  espagnole,  de  PhilippeV 
à  Charles  IV  (1700  à  1788). 

Auteurs  :  Poema  de  Ferndn  Gonzalez,  depuis  le  quatrain  828  jusqu'au 
872  (édit.  C.  Marden). 

—  Carias  y  relaciones  de  Ilernân  Corlés.  Carta  3"  (i5  mai  i522), 
depuis:  «  Como  los  Iztapalapa  »>  (B.  A.  E.,  t.  Wll,  p.  72),  jusqu'à 
«  Como  la  ciudad  de  Temixtitan  »  {ibid,  p.  90). 

—  *  Fernando  de  Herrera  ;  Canciôn  por  la  pérdida  del  rey  Don 
Sébastian;  Canciôn  en  alabanza  de  D.  Juan  de  Austria  (Ed.  A.  Coster, 
p.  42  et  98). 

—  *  Cervantes,  Quijote,  Parte  I".  cap,  XVIII. 

—  •  Lope  de  Vega,  El  perro  del  hortelano. 

—  *  J.  Zorrilla,  Granada,  lib.  I". 

—  *  Angel  Ganivet,  Idearium  espahol. 

Le  programme  du  certificat  comprend  ceux  des  auteurs  ci-dessus 
qui  sont  précédés  d'un  astérisque,  plus  J.  y  S.  (^)Liintero,  El  paiie 
andaluz. 


BIBLIOGRAPHIE 


Juliàn  Juderias,  Espana  en  liempo  de  Carlos  II  el  hechizado. 
Madrid,  Tipografia  de  la  Revisla  de  Archives,  Bibliotecas 
y  Museos,  1912;  in-8*'. 

Le  livre  de  M.  Juderias  est  un  essai  d'histoire  sociale,  et  par  là  il 
complète  celui  de  M.  Gabriel  Maura,  consacré  lui  aussi  à  l'époque  de 
Cliarles  11.  L'auteur  ne  cherche  pas  les  causes  de  la  décadence  de 
l'Espagne  dans  <i  les  erreurs  ou  les  défauts  intellectuels  el  moraux  des 
hommes  d'Etat,  mais  dans  la  manière  d'être  de  la  société  ».  Le  règne 
si  complexe,  et  à  cet  égard  si  mal  connu,  de  Charles  II  méritait  une 
étude  de  ce  genre.  L'ouvrage  de  M.  Juderias  se  lit  bien,  il  est  clair,  la 
plupart  du  temps  juste,  quelquefois  un  peu  rapide.  Il  mérite  des 
éloges  el  aussi  quelques  reproches:  commençons  par  les  reproches. 

Parlant  du  règne  de  Charles  11,  c'est-à-dire  d'une  époque  bien  déter- 
minée, il  eût  été  naturel  de  n'employer  que  des  documents  se 
rapportant  à  cette  époque,  sauf  des  cas  exceptionnels  (]ue  l'on  justifie 
en  prouvant  que  les  choses  n'ont  pas  changé.  Or,  dans  de  Irop 
nombreux  cas  l'auteur  va  chercher  des  documents  qui  se  rapportent 
au  temps  de  Philippe  IV'  ou  même  de  Philippe  III.  Par  exemple  il 
examine  (piels  jugements  Espagnols  et  étrangers  portaient  sur 
l'Espagne,  et  il  cite  presque  uniquement  des  ouvrages  antérieurs 
à  i65o.  Dans  la  description  qu'il  fait  ensuite  du  territoire  province  par 
province,  il  se  borne  à  citer  Mendez  Silva  (Pohlaciôn  gênerai  de 
Espana,  i6^5).  Outre  sa  date,  cet  auteur  est  peu  sîir  dans  ses  juge- 
ments, car  il  est  uniformément  élogieux  pour  toutes  les  parties  de 
rEsi)agne.  Malgré  cela  M.  Juderias,  élogieux  comme  lui  dans  le 
détail,  a  une  conclusion  d'ensemble  pessimiste,  parce  qu'il  l'emprunte 
à  une  ou  deux  citations  d'un  autre  auteur.  La  description  de  Madrid 
est  faite  avec  des  extraits,  assez  agréables  du  reste,  des  poètes  et 
écrivains  satiriques  do  l'époque  de  Philippe  IV.  Cela  nous  donne 
l'impression  d'une  vie  de  luxe  et  de  fêtes,  en  complète  contradiction 
avec  les  textes  tirés  des  mémoires  de  Villars  et  des  lettres  de  M""  de 
Villars,  (pi'il  cite  ensuite,  sur  l'effroyable  pauvreté  et  la  cherté  de  la 
vie  C'est  que  la  situation  avait  empiré  depuis  Philippe  IV.  Sur  le 
problème  des  subsistances,  beaucoup  de  textes  sont  de  la  première 
moitié  dn   siècle.   L'auteur    consacre    quelques    lignes  aux    gitanos, 


BIBLIOGRAPHIE  44? 

picaros  et  mendiants,  empruntées  à  des  sources  anciennes,  comme 
Navarrete  (Conservaciôn  de  Monarqui'as)  qui  écrivait  en  1621,  et 
Cervantes.  A  propos  de  la  population,  il  cite  les  chiffres  des  Relaciones 
de  vecindades  faites  pour  la  répartition  de  certains  impôts  en  1640 
et  1647. 

Un  autre  défaut  du  livre  est  que  l'auteur  se  contente  trop  souvent 
d'une  source  unique:  c'est  le  cas  pour  Mendez  Silva  qui,  comme  nous 
l'avons  vu,  fournit  un  chapitre.  Pour  les  finances,  ce  sont  les  mémoires 
de  Yillars  ou  le  Discurso  sobre  ta  Edacaciôn  popular  de  Campomanes 
qui,  cités  textuellement,  sont  chargés  de  nous  exposer  la  question  de 
la  monnaie. 

Souvent  aussi  on  désirerait  plus  de  précision  :  le  chiffre  de  la  popu- 
lation de  l'Espagne  au  xvir  siècle  est  un  thème  éternel  de  discussion 
et  les  divergences  sont  grandes  entre  les  chiffres  proposés.  M.  Juderias, 
après  avoir  cité  l'opinion  de  Colmeiro  qui  propose  9  millions 
d'habitants  au  maximum,  s'y  rallie  sans  nous  dire  pourquoi.  Le 
chapitre  sur  la  justice  est  fait  presque  uniquement  avec  des  citations 
d'appréciations  générales,  empruntées  la  plupart  du  temps  à  des 
manuscrits  dont  l'auteur  ne  nous  dit  ni  la  date  ni  l'auteur,  même  par 
approximation  ou  liypothèse.  Aucun  fait  particulier  n'est  cité  et  l'on 
a  le  droit  de  se  défier  de  ce  qui  est  peut-être  un  lieti  commun  d'arbi- 
triste.  M.  Juderias  ne  renvoie  jamais  à  un  livre  en  citant  la  page  et, 
quand  cela  peut  être  utile,  lédition  (par  exemple  pour  M'"'  d'Aulnoy)  ; 
et  cela  même  s'il  s'agit  d'une  revue  (p.  10 1 ,  note  3  :  «  Vease  la  Revista 
de  Archivos  d  (sic),  ou  d'un  ouvrage  en  4^  volumes  comme  les  Memo- 
rias  polilicas  y  econômicas  de  Larruga.  De  même  les  indications 
chronologiques  gagneraient  à  être  plus  fréquentes  et  plus  précises. 

Certains  chapitres  enfin  sont  un  peu  rapides.  Sur  les  principaux 
rouages  du  gouvernement  l'auteur  ne  fait  guère  que  citer  des 
pamphlets  ou  des  vers  du  temps;  sur  la  justice  il  y  a  très  peu  de 
chose.  Le  chapitre  consacré  aux  finances  est  intéressant,  mais  c'est  une 
esquisse.  On  aimerait  également  savoir  de  façon  plus  détaillée  com- 
ment l'armée  était  administrée.  Mais  il  manque  surtout  un  chapitre 
détaillé  sur  l'administration  locale,  les  fueros,  les  villes.  Dans  un 
temps  oîi  le  gouvernement  central  tombe  en  déliquescence,  l'organi- 
sation provinciale  a  d'autant  plus  d'importance  dans  l'armature  de  la 
nation.  C'est  dans  les  provinces  que  Philippe  V  a  rencontré  l'élan 
populaire  qui  lui  a  permis  de  conquérir  sa  couronne,  comme  plus 
tard,  après  une  période  semblable  de  décrépitude  gouvernementale, 
c'est  dans  les  provinces  que  la  junte  de  Cadix  a  trouvé  les  ressources 
d'énergie  nécessaires  pour  lutter  contre  Napoléon. 

Malgré  ses  défauts,  l'ouvrage  de  M.  Juderias  n'est  pas  cependant 
sans  mérite.  D'abord  il  a  posé  la  question  comme  il  fallait  la  poser;  il 
a  rompu  avec  l'histoire  de  cour,  dont  la  portée  est  forcément  limitée, 


llliS  BULLETIN    HISPANIQUE 

mais  qui  est  plus  facile  à  faire.  Et  puis  il  a  des  vues  justes:  il  a  bien 
indiqué  que  l'unité  du  pays,  même  sous  Charles  11,  n'est  pas  faite. 
11  a  soutenu  avec  raison  que  le  mépris  du  travail  ne  venait  pas  néces- 
sairement de  la  paresse,  mais  aussi  et  surtout  des  conditions  écono- 
miques :  c'est  pour  échapper  aux  charges  qu'on  se  ruait  vers  les 
fonctions  publiques  et  l'Église.  11  a  compris  que,  dans  une  certaine 
mesure,  la  dépopulation  n'a  été  que  la  dépopulation  des  campagnes 
au  profit  des  villes,  et  du  centre  au  profit  de  la  périphérie,  bien  qu'il 
y  ait  eu  aussi  une  forte  émigration.  Le  tableau  qu'il  a  tracé  de  l'Église 
est  vivant  et  juste,  et  il  raconte  d'une  façon  intéressante  l'incroyable 
histoire  de  l'ensorcellement  du  roi.  11  caractérise  bien  les  principaux 
personnages  qui  ont  gouverné  le  pays,  et  décrit  avec  netteté  et  d'une 
façon  suffisante  l'état  des  frontières  sur  terre  et  sur  mer.  Ce  qui  fait 
(jue,  dans  bien  des  cas,  il  n'a  pu  éviter  certains  défauts,  c'est  la  rareté 
des  documents  d'ordre  administratif  du  xvir  siècle,  leur  dispersion 
et  la  rareté  des  monographies.  On  a  trop  écrit  d'ouvrages  généraux  et 
de  considérations  d'ensemble,  et  pas  assez  d'études  de  détail, 
M.  Juderias  avait  tout  à  faire.  Il  faut  lui  savoir  gré  d'avoir  écrit  un 
livre  qui  reste  un  livre  utile,  agréable  à  lire  et  intéressant. 

Albert  GIRARD. 

Gulllermo  Antolin,  Catdlogo  de  los  Côdices  latinos  de  ta  Real 
hiblioteca  drl  Escorud.  Vol.  I^^  (Liii-âyô  pages),  1910;  vol.  II 
(096  pages),  191 1.  Madrid,  Impr.  helénica,  gr.  in-8. 

S'il  y  a  un  travail  méritoire,  c'est  bien  celui  du  bibliothécaire  qui 
rédige  et  imprime  le  catalogue  de  sa  bibliothèque.  Il  y  faut  une  bonne 
dose  d'abnégation,  surtout  quand  il  s'agit  de  manuscrits.  Et  quand 
on  a  la  perspective  d'une  vie  à  passer  dans  une  bibliothèque  comme 
celle  de  l'Escorial,  quelle  tentation  de  garder  pour  soi  les  trésors  dont 
on  a  la  clef! 

On  saura  donc  le  plus  grand  gré  au  P.  Antolin  pour  la  publication 
de  son  Catdlogo,  —  en  voie  d'achèvement,  puisque  voilà  deux  tomes 
parus  et  qu'un  troisième  doit  sortir  des  presses  en  octobre. 

Les  Pères  de  l'Escorial,  dont  la  complaisance  pour  les  travailleurs 
est  véritablement  pleine  de  charité,  ne  se  considèrent  pas  comme  des 
fonctionnaires  chargés  d'éloigner  des  rayons  vénérabh^s  la  poussière, 
les  miles  et  les  mains  sales.  Leur  parle-t-on  d'un  iiianuscril  dont  on 
n';i  (ju'iin  signalement  vague,  ou  une  cote  erronée,  ils  savent  vous  le 
Irouver  el  osent  vous  le  confier,  pour  vous  laisser  jouir,  dans  le 
silence  du  cloître  et  sous  leur  garde  discrète,  des  plaisirs  de  la 
recherche  et  de  la  découverte.  C'est  dans  cet  esprit  que  le  catalogue 
(les  manuscrits  latins  a  été  entrepris,  ainsi  (jue  celui  des  manuscrits 
grecs  cl  celui  des   manuscrits   espagnols.  (]es  deux  derniers  sont  en 


BIBLIOGRAPHIE  449 

effet  en  préparalion.  Pour  les  manuscrits  grecs,  le  magistral  Essai  de 
Cil.  Graux  a  fort  avancé  et  débrouillé  le  travail;  pour  les  manuscrits 
espagnols,  dans  lesquels  l'histoire  tient  une  place  importante,  les 
jalons  marqués  par  M.  R.  Menéndez  Pidal  seront  d'un  grand  secours. 
Et  l'on  espère  venir  à  bout  de  cette  double  tâche  sans  trop  tarder. 
Gaudeanius  igitur  ! 

Pour  revenir  au  P.  Antolin,  commençons  par  le  féliciter  de  la  pré- 
face qu'il  a  mise  en  tète  du  tome  I"' ,  et  qui  complète  heureusement  les 
renseignements  réunis  par  Graux  sur  l'histoire  générale  de  la  Biblio- 
thèque. On  y  voit  à  peu  près  tirée  au  clair  la  question  des  origines, 
grâce  à  de  nombreux  documents  (dont  on  regrettera  seulement  de  ne 
pas  toujours  avoir  la  référence).  11  y  a  là  un  excellent  exposé,  sobre  et 
plein  à  la  fois.  On  sera  parliculièremcnt  intéressé  par  le  rôle  (déjà 
assez  connu  du  reste)  d'Ambrosio  de  Morales  comme  rabatteur.  Quant 
à  Philippe  11,  on  peut  dire  que,  sans  aucune  intention  d'apologie, 
l'auteur  le  fera  bénir  :  que  seraient  devenus,  sans  ce  souci  constant 
d'enrichir  la  bibliothèque  de  San  Lorenzo,  tant  de  manuscrits  ou 
uniques  ou  infiniment  précieux?  11  est  vrai  que  l'incendie  de  1671 
aurait  pu  tout  détruire  d'un  seul  coup... 

Le  P.  Antolin  n'a  pas  oublié  de  dire  ce  qu'avaient  l'ail  ses  prédé- 
cesseurs, en  particulier  Pérez  Bayer,  Haenel,  Uozanski,  Euald. 

Pour  l'ordonnance  de  son  Catalogue,  il  a  suivi  tout  simplement 
l'ordre  alphabétique  des  cotes.  Un  index  des  auteurs,  un  index  des 
copistes  et  un  index  des  possesseurs,  placés  à  la  fin  de  chaque  volume, 
permettront  au  chercheur  de  s'orienter  très  facilement. 

Après  la  cote  viennent  la  description  matérielle,  le  titre  et  les  sous- 
titres  et  débuts  des  textes  contenus;  enfin  les  renseignements  sur 
l'ornementation  et  sur  l'histoire  du  manuscrit.  On  remarquera  parti- 
culièrement dans  le  tome  I"^  l'analyse  minutieuse  du  Codex  Aenii- 
lianensis  et  du  Codex  Vigitanus.  Ils  tiennent  à  eux  deux  85  pages. 
A  tout  seigneur  tout  honneur  1 

L'auteur  a  dédié  sa  publication  «  al  ExcmoSr.  D.  Luis  Moreno  y  Gil 
de  Borja,  marqués  de  Borja,  intendente  gênerai  de  la  Real  Casa  y 
Patrimonio  de  la  Corona  «.  C'est  sans  doute  en  signe  de  reconnais- 
sance pour  les  facilités  et  les  encouragements  donnés  à  une  heureuse 
initiative.  Les  érudits  ne  peuvent  que  s'associer  à  de  tels  sentiments. 

Georges  CIROT. 

Eduard  Fueter,  Gesddchte  der  neueren  IHsloriographie.  Mûnchen 
und  Berlin,  B.  Oldenbourg,  1911  ;  xx~626  pages,  grand  in-S". 

Ce  volume  fait  partie  du  Handbuch  der  mille  la  lier  lichen  und  neueren 
Geschichle  heraasgegeben  von  G.  von  Below  und  Meinche.  La  place  qui 
y  est  donnée  à  l'historiographie  espagnole  lui  en  donne  une  dans  la 


45o  BULLETIN    HISPANIQUE 

bibliographie  du  Bulletin  hispanique.  Au  surplus,  tout  se  tient.  L'au- 
teur me  reproche,  page  325,  à  propos  de  ^lariana,  de  n'être  pas  assez 
familier  avec  l'historiographie  humaniste  italienne,  et  je  n'ai  qu'à 
^profiter  de  la  semonce:  ce  qui  est  sur,  c'est  que  l'humanisme  espagnol 
est  un  reflet  de  l'humanisme  italien,  et  que  l'historiographie  espagnole, 
à  partir  du  dernier  quart  du  xv'  siècle,  a  subi  l'influence,  pas  toujours 
heureuse,  de  l'Italie.  11  y  a  donc  tout  avantage  à  voir  réunis  dans  une 
même  étude  les  historiens  des  deux  pays  ;  et  j'avoue  que  si  j'avais  eu 
jadis  à  ma  disposition  un  manuel  comme  celui  de  M.  Fueter,  j'aurais 
pu  voir  et  dire  des  choses  que  je  n'ai  pas  dites  ou  que  j'ai  mal  vues. 
11  est  vrai  que  c'était  tout  un  monde  à  connaître  à  propos  d'un  homme 
dont  la  production  est  déjà  considérable.  Et  M.  Fueter  lui-même,  s'il 
n'avait  pas  eu  sous  la  main  des  ouvrages  plus  courts  d'horizon  que  le 
sien,  aurait-il  pu  élever  son  large  édifice? 

Cet  édifice,  où  sont  logés  non  seulement  les  Italiens  et  les  Espagnols, 
mais  les  Portugais,  les  Français,  les  Suisses,  les  Allemands,  les  Anglais, 
les  Ecossais,  est  vraiment  quelque  chose  d'imposant  et  même  d'ef- 
frayant, pour  qui  a  l'habitude,  peu  expéditive,  de  passer  au  crible 
dos  grains  de  sable.  L'ouvrier  qui  en  a  équarri  ou  dégrossi  quelques 
pierres  est  tout  étonné  de  les  trouver  placées  par  l'archilecte  avec  tant 
de  milliers  d'autres,  qu'ont  préparées  d'autres  manœuvres.  Il  comprend 
alors  l'elTort  d'un  tel  assemblage,  et  n'est  guère  disposé  à  chercher  s'il 
y  a  des  fautes  de  détail.  11  sent  que  ce  sont  les  grandes  lignes,  le  plan, 
l'ensemble,  qu'il  faut  apprécier. 

Si  l'effort  et  le  mérite  de  M.  Fucler  ont  été  grands,  ils  ont  déjà  une 
récompense  dans  un  article  élogieux  et  substantiel,  du  à  un  critique 
qui  a  pris  la  peine,  qu'on  ne  prend  pas  toujours,  de  lire  l'ouvrage,  et 
qui  a,  pour  en  parler,  une  autorité  qu'on  n'a  pas  toujours  non  plus. 
Le  numéro  de  juillet  ir)i2  du  Journal  des  Saiumts  contient  en  ellct  un 
compte  rendu  de  M.  Morel-Fatio,  qui  étudie  l'ouvrage  en  entier,  en 
marque  l'importance  et  l'intérêt,  en  loue  l'esprit,  l'équité,  la  conscience 
et  la  personnalité,  et,  tout  en  indiquant  quelques  lacunes,  imputables 
surtout  à  labsencc  ou  à  l'insuflisance  de  travaux  antérieurs,  conclut 
en  disant  qu'il  y  a  là  un  livre  bon  et  utile,  dont  une  traduction  fran- 
çaise serait  fort  souhaitable  >. 

\y;mt  à  juger  l'frMivre  tout  entière,  M.  Morel  Fatin  ne  s'est  pas 
attardé  outre  mesure  à  critiquer  les  pages  qui  concernent  l'historio- 
graphie espagnole.  Il  n'a  pas  cru  devoir  écraser  l'érudit  allemand  de 
toul(;  sa  compétence.  Je  ne  puis  mallicureusement  m'avcnturcr  hors 
du  domaine  liiapanicjuc  ;  je  m'y  confinerai  donc.  Je  ferai  part  à 
M.  Fueter  de  quelques  observations.  Il  voudra  bien  croire  (jue  ce  n'est 
pas  pour  le  pl;iisir  de  lui  jeter  quelques  cailloux. 

I     II  vu  cil  paraître  une  cliez  \kyii. 


BIBLIOGRAPHIE  ^5l 

Dans  cette  Geschichte  der  neueren  Historiographie  ont  trouvé  place 
les  historiens  des  six  derniers  siècles  (elle  débute  avec  Pétrarque  et 
Boccace).  On  y  voit  en  bonne  place  Renan  et  Burckhardt,  ïaine,  Toc- 
queville  et  Fustel,  Thiers  et  Guizot,  Mommsen,  Curlius,  Thierry  et 
Ranke,  Michelet  et  Carlyle,  et  ainsi  de  suite  en  remontant,  tous  ceux 
qui  ont  laissé  une  œuvre  importante  au  cours  du  \ix°  siècle.  On  \  voit 
aussi  Henri  Martin,  apprécié  du  reste  à  sa  juste  valeur.  Alors,  pourquoi 
n'avoir  même  pas  nommé  à  côté  de  lui  Modesto  Lafuente,  et  surtout 
Herculano?  Ni  l'un  ni  l'autre  ne  prête  à  cette  grave  critique  que 
M.  Fueter  adresse  à  l'auteur  de  l'Histoire  de  France  populaire  illustrée, 
celle  d'avoir  utilisé  des  sources  de  seconde  main.  Tous  deux  ont  manié 
les  textes  contemporains  des  faits;  et,  pour  l'intelligence  du  passé, 
Herculano,  sinon  Lafuente,  vaut  bien  Henri  Martin. 

Remontons  au  xviir  siècle.  Nous  trouvons  quelques  lignes  sur 
Ferreras  ;  mais  c'est  le  dernier  en  date  qui  soit  mentionné  parmi  les 
historiens  de  la  péninsule^  et  son  œuvre  date  des  années  1 700-1 727. 
Sur  Flôrez,  rien  ;  pas  même  son  nom  :  encore  moins  celui  de  son 
continuateur  Risco.  11  me  semble  pourtant  que  tous  deux  ont  fait 
quelque  chose,  et  que  cet  ensemble  de  monographies  sur  les  évêchés 
espagnols,  accompagné  des  textes  les  plus  anciens  touchant  l'Espagne, 
non  seulement  religieuse  mais  politique,  u  bien  son  mérite  et  sa  valeur. 
Ce  n'est  pas  une  histoire  suivie,  sans  doute;  on  y  trouve  la  plupart  du 
temps  une  série  de  discussions  sur  des  points  à  élucider.  Mais  n'y  a-t-il 
pas  là  précisément  une  excellente  et  indispensable  forme  préliminaire 
de  l'historiographie,  011  la  critique,  abstraction  faite  de  certaines  préoc- 
cupations religieuses,  se  dégage  des  idées  préconrucs  et  des  entraves 
stylistiques?  Au  surplus,  Flôrez  et  Risco  ne  sont  pas  des  isolés  en 
Espagne.  Ils  font  partie  d'une  école,  d'une  armée  de  cherclieurs, 
d'éditeurs  ou  de  collectionneurs,  dont  Yillanueva  et  Herculano,  avec 
bien  d'autres,  sont  les  continuateurs  au  xix'  siècle,  el  qui  a  des  repré- 
sentants en  Espagne  dès  le  xvr  siècle:  tels  Lorenzo  Galindez  de  Carva- 
jal,  Sancho  de  Lebrixa,  Ambrosio  de  Morales,  Garibay,  Juan  Bautisla 
Pérez,  Mariana;  au  xvir  siècle,  Juan  Lucas  Cortés,  José  Pellicer,  qui 
tend  la  main  à  la  secte  des  faussaires  et  parfois  leur  montre  le  poing; 
au  xviir  enfin,  Berganza  et  Luis  de  Salazar  y  Castro,  pour  ne  citer  que 
ceux-là.  Les  fantaisies  de  la  pseudo-histoire  ne  sont  que  la  folie  du  culte 
voué  à  la  documentation.  Ce  qui  caractérise  en  effet  l'historiograpiiie 
espagnole,  c'est,  avec  la  place  importante  qu'y  tiennent  les  stylistes, 
l'énorme  labeur,  sérieux  ou  non,  des  documentateurs.  A  propos  de 
Zurita,  M.  Morel  Fatio  regrette  que  «la  nouveauté  de  l'emploi  presque 
exclusif,  dans  ses  Anales  de  Aragon,  des  documents  d'archives...  n'ait 
pas  été  suffisamment  mise  en  relief»  par  M.  Fueter.  Celui-ci  l'a  pour- 
tant indiquée,  et  marque  même  un  avantage  à  Zurita  sur  Guichardin 
ici.  Mais  la  méthode  même  qui  consistait  à  employer  les  documents 


453  BULLETIN    HISPANIQUE 

d'archives,  Charles  de  Viane  ne  l'avait-il  pas  inaugurée  quand  il 
consultait,  pour  sa  Coronica  de  los  reyes  de  Navarra  (il\5l\),  les  docu- 
ments de  sa  Chambre  des  Comptes?  Les  Espagnols  n'ont  pas  attendu 
s  en  cela  l'exemple  des  Italiens.  La  chose  était  à  noter.  Un  mot  sur 
Garibay  n'eut  pas  été  de  trop  non  plus,  au  moins  à  cause  de  l'emploi 
systématique  qu'il  a  fait  des  chartes,  et  aussi  peut-être,  précisément, 
parce  qu'il  est  tout  l'envers  d'un  humaniste,  ce  qui  le  rend  intéressant 
dans  son  genre.  Un  homme  comme  Pedro  Mantuano,  qui  assénait  sur 
Mariana  les  liasses  des  archives  royales  de  Barcelone,  personnifie  assez 
bien  le  goût  de  toute  la  gent  historiographe  d'Espagne  pour  le  docu- 
ment; de  même  que  les  faussaires  comme  Higuera,  leurs  éditeurs  et 
annotateurs  comme  Juan  Caldenm,  Francisco  de  Bivar,  Rodrigo  Caro, 
Lorenzo  Ramirez  de  Prado,  Tomâs  Tarnayo  de  Vargas,  représentent  de 
ce  goût  la  dépravation  ou  la  sottise  Notons  qu'il  s'agit  là  de  la  pseudo- 
hisloirc  d'origine  espagnole,  et  non  plus  seulement  des  inventions 
d'Annius,  si  complaisamment  exploitées  depuis  le  début  du  xvr  siècle, 
et  dont  M.  Eueter  montre  que  le  succès  fut  en  Espagne  plus  complet 
que  partout  ailleurs  (p.  aaS).  Toute  cette  foule  c^iommes,  estimables, 
ou  condamnables,  ou  ridicules,  est  éprise  d'histoire,  d'histoire  nouvelle 
et  inédite  surtout.  Le  trait,  vraiment,  est  accusé.  Raison  de  plus  pour 
ne  pas  oublier  complètement,  dans  une  histoire  générale  de  l'historio- 
graphie moderne,  ceux  qui,  par  leur  conscience  et  leur  labeur,  repré- 
sentent le  plus  dignement  de  telles  dispositions. 

N'y  avait-il  pas  lieu  aussi  de  citer  Masdeu.  dont  la  critique  suraiguë, 
mais  pas  toujours  heureuse,  marque  le  point  le  plus  extrême  de  la 
réaction  contre  les  extravagances  de  la  pseudo-histoire?  De  cette 
réaction,  de  celle  lutte,  qui,  en  définitive,  est  l'honneur  de  l'érudition 
espagnole.  M.  Fueter  n'a  pas  assez  parlé,  à  mon  sens,  pas  plus  qu'il 
n'a  insisté  sur  les  inventions  des  faussaires  an  xvii'  siècle.  Cela  élait-il 
étranger  à  son  sujet?  Je  ne  le  crois  pas.  Le  caractère  à  peu  près 
exclusivement  érudit  qu'a  eu  l'historiographie  dans  ce  pays,  après 
Mariana.  s'explique  assez  par  la  nécessité  de  tout  reviser  et  de  dis- 
cerner l'ivraie  du  bon  grain.  (Vest  la  première  tâche  de  l'historio- 
graphe, la  plus  pénible,  celle  qui  prépare  la  matière  aux  hommes 
de  génie.  Imaginez  un  historien  de  grande  envergure  travaillant  sur 
des  faux! 

Ces  réserves  faites,  il  est  incontestable  que  pour  les  xvr  et  xvn*  siè- 
cles, le  manuel  de  M.  Eueter  rendra  de  grands  services.  Pour  les 
historiens  de  la  découverte  de  l'Amérique,  on  y  trouvera  un  bon 
chapitre  d'ensemble.  Mais  le  principal  intérêt,  et  la  nouveauté,  je  le 
répète,  c'est  de  voir  la  filiation  des  historiens  espagnols,  principale- 
ment ceux  du  xvr  siècle,  avec  les  maîtres  italiens.  La  connaissance 
approfondie  que  l'auteur  a  de  ces  derniers  lui  permettait  de  marquer 
de  tels  rapports,  et  l;i  préoccupation  constante  de  les  marquer  éclaire 


BIBLIOGRAPHIE  453 

singulièrement  toul  l'exposé.  Voir  par  exemple  l'excellente  page  où 
Ribadeneira  est  caractérisé  comme  écrivain. 

Pour  ce  qui  est  des  détails,  j'en  relèverai  quelques-uns,  du  reste 
sans  importance.  Il  n'est  pas  possible  que  dans  un  ouvrage  de  cette 
nouveauté  et  de  cette  ampleur  quelque  correction  ne  reste  pas  à  faire. 

Jusqu'à  quel  point  peut-on  attribuer  à  Diego  de  Valera  la  paternité 
du  Mémorial  de  diversas  hazanas,  c'est  une  question  que  j'ai  posée  et 
examinée  {Bull,  hlsp.,  t.  XI,  1909,  p.  435),  sans  d'ailleurs  apporter 
qu'une  conclusion  sceptique  et  indécise;  je  laissais  à  M.  A.  Paz  y 
Mélia  le  soin  de  donner  la  solution  définitive,  qu'il  a  en  mains  depuis 
longtemps,  fortement  documentée  et  toute  rédigée.  Pour  le  moment, 
je  continue  à  croire  qu'il  est  imprudent  de  voir  en  Valera  le  traduc- 
teur des  Décades  d'Alphonse  de  Palencia.  Qu'il  ait  remanié  la  traduc- 
tion déjà  faite,  c'est  possible,  et  c'est  un  peu  ce  que  semblerait  penser 
M.  Fueter  (p.  aaS).  Mais  c'est  encore  trop  donner  à  Valera  que  de  dire 
qu'il  a  rédigé  un  résumé  ;  car,  si  par  Coronicas  de  Espana  M.  Fueter 
entend  la  Chronique  castillane  de  Henri  IV  attribuée  à  Palencia,  il 
convient  de  noter  que  ce  texte  est  la  plupart  du  temps  identique  au 
Mémorial,  et  d'ailleurs  tout  aussi  long,  pas  davantage.  Quant  à  avoir 
traduit  lui-même  les  Décades  latines,  j'en  crois  Valera  tout  à  fait 
incapable. 

Plutôt  que  de  dire  que  Valera  est  mort  «  um  i486  »,  je  dirais  qu'il 
n'est  pas  mort  avant  i486.  Amador  de  los  Rios  pense  qu'il  mourut 
en  i486  parce  que  la  dernière  lettre  que  contient  le  ms.  F.  108  de  la 
Biblioteca  nacional  de  Madrid  est  de  cette  année-là.  Mais  ce  n'est  pas 
une  preuve  positive. 

Les  Paralipomenon  Hispaniae  libri  X  de  Jean  de  Girone  n'ont  pas 
été  publiés  deux  fois  seulement  (i545  et  i6o3),  mais  trois  fois,  car  il 
ne  faut  pas  oublier  l'édition  de  l'Anglais  Beale  dans  les  Heriim  hispa- 
nicarum  Scriptores  [t.  I,  1079),  dont  celle  de  Schott  dans  VHispania 
illuslrata  n'est  peut-être  bien  qu'une  copie. 

Pour  la  Coronica  d'Ocampo,  il  y  aurait  à  signaler  l'édition  de  1678, 
due  à  Morales,  qui  a  eu  le  grand  tort  de  s'associer  par  là  à  une  œuvre 
dont  certainement  il  soupçonnait  le  peu  de  sincérité. 

Pour  les  historiens  de  la  Compagnie  de  Jésus,  on  aurait  pu  renvoyer 
à  Astrain,  Hisloria  de  la  Compania  de  Jesàs  en  la  Asislencia  de  Espaiia, 
dont  le  tome  I  a  paru  à  Madrid  en  1902,  et  où  les  sources  sont  énu- 
mérées  et  convenablement  appréciées,  en  tête  de  chaque  tome.  De  ce 
bon  travail  nous  voudrions  parler  du  reste  quelque  jour. 

M.  Fueter  n'a  pas  eu  pour  Mariana  historien  toute  l'indulgence  que 
j'ai  eue.  C'est  qu'il  considère  seulement  son  Histoire  d'Espagne, 
œuvre  de  vulgarisation,  œuvre  d'humaniste,  et  non  l'homme,  ni 
l'érudit  que  d'autres  écrits  nous  font  connaître.  Il  faut  pourtant  tenir 
compte  de  son  but.  des  circonstances  et  de  l'époque.  Son  mérite 
Bail,  hispan.  3o 


454  BULLETIN    HISPANIQUE 

consiste  surtout  à  avoir  le  premier  écrit  lisiblement  et  en  latin  une 
histoire  générale  complète  d'Espagne,  d'avoir  fermé  une  boucle 
jamais  fermée  jusque-là.  Ce  fut  un  record,  relatif  et  provisoire  comme 
tous  les  records.  Ce  fut  fait  d'ailleurs  avec  élégance  et  dans  un  beau 
style.  Lui  reprocher,  comme  fait  M.  Fueter,  d'avoir  cru  à  l'existence 
d'Hercule  et  à  son  passage  en  Espagne,  attestés  par  les  anciens,  c'est 
exiger  d'un  humaniste  un  scepticisme  impossible  à  l'égard  d'un  texte 
latin,  d'ailleurs  authentique.  Ne  revient-on  pas  du  reste  aujourd'hui 
à  un  peu  plus  de  crédulité  à  propos  de  bien  des  choses  de  ce  genre;* 
Mariana  s'est  incliné  aussi  devant  certaines  traditions  chrétiennes;  il 
en  a  même  défendu  une  dans  un  écrit  à  part,  comme  le  rappelle 
M.  Fueter,  celle  de  la  venue  de  saint  Jacques  en  Espagne.  Mais,  encore 
aujourd'hui,  a-t-on  les  moyens  de  la  nier  catégoriquement?  Je  ne 
crois  pas  du  reste  que  l'Histoire  de  Mariana,  par  elle-même,  marque 
un  progrès  au  point  de  vue  do  la  critique  ni  de  l'exposition  (voir 
p.  35i  de  mon  livre).  J'ai  dit  son  infériorité  vis-à-vis  de  Guichardin 
(pp.  342,  347).  Je  l'ai  montré  démarquant  Morales  (p.  328).  Mais  à  ce 
propos  il  est  injuste  de  généraliser,  comme  fait  M.  Fueter  :  <(  Die  iiltern 
Dar^tellungen...  sind  in  ihm  geschickt  ausge/ogen  und  vervvertet.  »  Je 
crois  en  avoir  donné  des  preuves  (p.  329);  et,  en  tout  cas,  Mariana  n'a 
pu  se  servir  de  Morales  que  jusqu'à  la  conquête  arabe,  puisque  les 
livres  de  la  Coronica  de  Morales  qui  contiennent  l'histoire  des  rois 
asturiens  et  léonais  jusqu'à  la  mort  de  Bermudo  IH  n'ont  paru  qu'après 
que  Mariana  avait  rédigé  son  De  rébus  Hispaniae.  Je  serais  bien  aise 
de  savoir  quel  auteur  il  a  pillé  ensuite.  Ce  qui  est  plus  juste,  c'est  de 
le  comparer,  comme  fait  M.  Fueter,  à  Buchanan,  à  qui  il  ne  serait 
supérieur  qu'en  ce  qu'il  a  rompu  avec  l'habitude  des  humanistes  de 
laisser  de  côté  l'histoire  ecclésiastique.  11  est  également  intéressant 
de  rapprocher  Mariana  de  Bembo  pour  le  goût  de  l'archaïsme.  Ces 
comparaisons  étaient  aisées  à  M.  Fueter,  avec  la  connaissance  qu'il  a 
de  l'historiographie  moderne.  C'est  d'elles  surtout  (lu'il  faut  lui  savoir 
gré.  Ce  sont  elles  qui  nous  apportent,  en  ce  qui  concerne  l'Espagne, 
un  peu  d'ordre  et  de  lumière. 

G.  cmoT. 


CHRONIQUE 


—  Ramiro  II  el  Monje  y  las  supiiesfas  Corles  de  Borja  y  Monzon 
en  H3U,  tel  est  le  titre  d'une  thèse  de  doctorat  soutenue  en  1907  par 
M.  P.  Longâs  y  Bartibâs,  et  imprimée  seulement  en  191 1  (Santona, 
Hernândez  Garcia).  Tenant  pour  suspecte  la  relation  de  Rodrigue  de 
Tolède  et  celle  de  la  Chronique  de  San  Juan  de  la  Peîla,  comme  celles 
des  auteurs  qui  s'en  sont  inspirés,  M.  Longâs  soutient  qu'Alphonse  \" 
ayant  survécu  à  la  défaite  de  Fraga  (19  juillet  ii34),  ne  mourut  que 
le  7  septembre,  d'après  le  nécrologe  de  Montearagôn  (où  précisément 
il  fut  porté  et  enseveli,  d'après  la  Chronique  même  de  San  Juan  de  la 
Pena);  que  son  frère  Ramiro  el  Monje  s'intitula  roi  aussitôt,  acclamé 
(selon  la  Chronique  d'Alphonse  Vil)  par  le  peuple  de  Jaca  ;  que 
toute  l'histoire  des  cortes  de  Borja  et  de  Monzôn,  et  de  Pedro  de 
Atarés,  est  une  invention  inadmissible,  vu  la  rapidité  avec  laquelle 
Ramiro  se  fit  proclamer.  Vers  la  fête  de  la  Nativité  de  la  Vierge,  11 34, 
à  Tierrantona,  il  signe  un  diplôme  comme  roi.  La  distance  du  monas- 
tère de  Montearagôn  (ou  de  San  Juan  de  la  Pena,  si  c'est  là  qu'Al- 
phonse mourut,  comme  croit  M.  Longâs)  à  Tierrantona  n'est  pas 
tellement  grande  qu'on  ne  puisse  admettre  que  la  mort  d'Alphonse, 
survenue  la  veille,  ait  pu  être  connue  de  Ramiro  le  8  septembre. 
En  tout  cas,  ce  n'est  pas  précisément  du  8  septembre,  mais  «  per 
Natiuilas  sancte  Marie  »  qu'est  daté  le  document  en  question,  ce  qui 
permet  de  reculer  un  peu  le  quantième.  —  Évidemment  l'argumen- 
tation est  assez  serrée.  Mais  il  faut  savoir  si  les  textes  sont  bien  sûrs, 
et  si,  de  toute  façon,  l'exemple  de  Jaca  fut  suivi  partout,  s'il  n'y  eut 
pas  des  dissidents  à  Borja  ou  ailleurs.  Il  reste  donc  quelque  place  au 
doute.  On  conçoit  vraiment  que  tout  le  monde  n'ait  pas  été  d'avis 
de  prendre  pour  roi  un  moine.  Quoi  que  nous  dise  M.  Longâs  du 
droit  patrimonial,  un  moine  ne  passait  généralement  pas  pour  apte  à 
succéder  au  trône.  11  dut  bien  y  avoir  un  parti  hostile,  et  tout  ne  se 
passa  pas  sans  quelque  difficulté.  L'histoire  de  Pedro  Atarés  n'est  donc 
pas  encore  enterrée.  11  resterait  enfin  à  expliquer  comment  elle  est  née. 

—  Même  alors  que,  dans  sa  collection  des  Clasicos  casiellanos,  la 
Lectura  s'apprêtait  à  publier  un  Don  Quijote  avec  notes  de  M.  Rodri- 
guez  Marin,  il  n'était  pas  mauvais  de  reproduire  le  commentaire  de 
Clemencin,  dont  quelques  générations  ont  vécu,  à  condition  d'y 
mettre  les  correctifs  nécessaires,  de  le  moderniser,  ce  dont  il  avait 
grand  besoin,  et  ce  dont  on  s'était  dispensé  dans  une  reproduction 


A56  BULLETIN    HISPANIQUE 

antérieure.  C'est  M.  Miguel  de  Toro  Gômez,  très  qualifié  par  ses  tra- 
vaux antérieurs,  qui  s'est  chargé  de  resservir  ledit  commentaire  avec 
sous-commentaire.  11  est  très  instructif,  et  parfois  amusant  de  voir 
celui-ci  corriger  les  erreurs  de  celui-là,  particulièrement  en  matière  de 
langue,  car  c'est  surtout  de  ce  côté  que  pèche  Glemencin.  Il  sera  encore 
plus  curieux  de  comparer  le  tout  aux  notes  de  M,  Rodriguez  Marin, 
auxquelles  celles  de  Glemencin  serviront  parfois  de  repoussoir.  M.  de 
Toro  Gômez  ne  dit  point  de  quelle  édition  il  se  sert  pour  établir  son 
texte.  Probablement  de  celle  de  Glemencin.  Il  aurait  été  mieux  inspiré 
de  se  reporter,  comme  M.  Uodriguez  Marin,  à  l'édition  princeps.  Il  se 
serait  ainsi  épargne  la  peine  de  compter  un  barbarisme  à  Gervantes 
pour  pegarlos  (début  du  ch.  VI,  p.  72),  puisque  l'édition  de  i6o5,  du 
moins  dans  le  facsimilé  de  Toledano  Lôpez,  porte  pegarles.  Enfin, 
l'essentiel  était  de  mettre  à  la  portée  de  tous  ce  fameux  commentaire. 
Merci  à  qui  en  a  pris  la  peine.  Deux  tomes  ont  paru  (1910-1912);  ils 
comprennent  la  Primera  parte.  Librairie  Paul  Ollendorf. 

-—  La  direction  de  la  Bibliothèque  nationale  de  Madrid,  vacante 
par  la  mort  de  Menéndez  Pelayo,  a  été  confiée  à  M.  Rodriguez  Marin. 
D'autres  candidatures  avaient  été  soutenues,  notamment  celles  de 
M.  Eduardo  Ilinojosa  et  de  M.  Ramôn  Menéndez  Pidal.  La  presse 
s'en  est  mêlée,  provoquant  des  plébiscites,  énumérant  et  pesant  les 
titres,  indiscutables,  des  trois  érudits  :  c'est  une  chose  à  laquelle 
nous  ne  sommes  guère  habitués  en  France,  quand  il  s'agit  de  sem- 
blables postes.  Quelque  regret  que  l'on  puisse  éprouver  de  ne  pas 
voir  à  la  tête  de  celte  richissime  bibliothèque  l'un  ou  l'autre  des 
deux  autres  érudits  qu'on  avait  mis  en  avant,  on  ne  peut  que  féliciter 
M.  Kodriguez  Marin,  qui  trouve  dans  cette  nomination  la  récompense 
d'un  labeur  considérable  et  très  apprécié.  G.  G. 

— -  Erratum.  M.  Albertini  nous  prie  de  corriger  une  omission  et 
une  erreur  dans  son  Rapport  «  Sar  une  mission  à  Pehalba  »  (ïeruel), 
Bull,  hisp.,  1912^  p.  97. 

r  La  figure  5,  p.  200,  est  incomplète;  à  la  fin  de  l'inscription  en 
petits  caractères  il  faut  ajouter  GRIS.  Gelte  syllabe  est  très  nécessaire, 
car  c'est  elle  qui  permet  de  lire  assez  nettement  le  vers  de  Virgile 

Tempus  erat  quo  prima  quies  morlalibus  aîgris 

qu'on  s'attendait  si  peu  à  voir  ici. 

2'  G'est  l'inscription  de  la  figure  7  que  M.  Albertini  considère 
comme  ibérique,  tandis  que  celle  de  la  figure  G  lui  semble  écrite  en 
alphabet  (plutôt  que  langue;  inconnu.  11  faut  donc  intervertir  les 
légendes. 


TABLE  ALPHABETIQUE 

PAR  NOMS  DAUTELRS 


Pages. 

Ai.BERTiNi  (E.).  —  Sculptures  du  Gerro  de  los  Santos i 

—  Rapport  sur  une  mission  à  Pefialba  (Teruel.) 197 

Brutails  (J.-A.). —  J.  Hégné,  Catalogue  des   actes  de  Jaime  I^^,  Pedro  111  et 

Alfonso  III,  rois  d'Aragon,  concernant  les  Juifs  (bWÀ.)   .    .  335 
CiHOT  (G.).  —  Une  chronique  latine  inédite  des  rois    de  Caslille  (laSG;,  3o, 

109,   2lilt,  353 

—  Herculano  et  l'histoire  des  Arabes 208 

—  L'Intercambio  avec  le  Portugal B26 

—  Diplômes  d'études  supérieures  d'espagnol 102 

—  L'espagnol  dans  l'enseignement  secondaire 4/14 

—  Collecçâo  de  manuscritos  ineditos  {hih\ .) io3 

—  Griswold  Morley,  Spanish  Ballads  (bibl.) 225 

—  G.  Antolin,  Catàlogo  de  los  côdices  latinos  de  la  /f.  Biblioteca  del 

Escorial  (hûÀ.) 448 

—  E.  Fueter,  Geschichte  der  neueren  Historiographie  (bibl.) 449 

—  Chronique 108,  a27,  34o,  455 

DuHEM  (P.). —  Dominique  Solo  et  la  scolastique  parisienne  (suite)  Oo,  127, 275,  875 

Girard  (A.).  —  Le  grand  siège  de  Gibraltar  vu  par  un  témoin i4o 

—  J.  Juderiis,  Espana  en  tiempo  de  Carlos  II  {hib].) 446 

GÔMEz  OcANA  (J.).  —  El  doctor  Barlolomé  Hidalgo  de  Agùero 96 

HANssEïi  (F.).  —  La  colocaciôn  del  verbo  en  el  Poema  del  Cid 47 

La    Ville   de   Mirmont  (H.    de).  —  Les  déclamateurs    espagnols    au  temps 

d'Auguste  et  de  Tibère /sufie/.  11,  221.1,  34i 
Le  Gentil  (G.).  —  Quelques   particularités   de   la   langue   parlée,    d'après   le 

théâtre  de  M.  Jacinto  Benavente 174 

—  A  propos  du  livre  de  M.  Ernesto  Quesada,  La  ensehanza  de 

la  historia  en  las  iniversidades  alemanas. 323 

—  Centenario  do  nascimento  de  Alexandre  Herculano  (bibl.).  .  .  io5 
Martin  (G.). —  Serranillas  d'un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  royale  de  Madrid  202 
Mathorez  fJ.).  —  Notes  sur  les  rapports  de  Nantes  avec  l'Espagne.  .  .  .  119,  383 
MÉRIMÉE  (E.).  —  Rapport  sur  les  concours  d'agrégation  d'espagnol  el  du  certi- 

*  ficat  d'aptitude  à  l'enseignement  de  la  langue  espagnole 

dans  les  lycées  et  collèges  en  191 1 209 

—  Institut  français  en  Espagne  (Union  des  étudiants  français  et 

espagnols) 218 

—  Diplômes  d'études  supérieures loa,  109 

—  L'exposition  d'art  ancien  à  Burgos 44o 

—  R.  Menéndez  Pidal,  Cantar  de  mio  Cid,  t.  Il  et  III  (bibl.)  .    .    .  aao 

—  A.  GdiTciai  Bo'ua,  Don  Diego  de  Torres  Villaroel  {hih\.) 3G3 

—  Chronique 226,  338 


458  TABLE  ALPHABÉTIQUE  PAR  NOMS  D* AUTEURS 

Pages. 

MicHELt  (L).  —  Inventaire  de  la  collection  Edouard  Favre  (suite  et  fin)   ...  77 

Morel-Fatio  (A.).  —  Infante  =  Infanta 3i8 

—                       Chronique 338 

Pébez-Pastor  (C).  —  Nuevos  datos  acerca  del  histrionismo  espanol   en  los 

siglos  \vi  y  xvii  ^suite) 3oo,  4o8 

Uadet  (G.). —  La  Renaissance  en  Espagne  et  en  Portugal 20^ 

ScHWLTE»^  (A.).  —  Les  pointes  de  lances  représentées  sur  les  stèles  funéraires  .  196 

Watelim  (L.-Ci*.).  —  Le  site  antique  de  Gostig  (île  de  Majorque) 194 

\Valt2  (P.).  —  Notes  sur  l'archéologie  ibérique 433 


TABLE   ANALYTIQUE 

DES  MATIÈRES 


1.  Articles  de  fond. 

Antiquités  et  histoire  ancienne.  —  Sculptures  du  Cerro  de  los  Sanlos  (E.  Alber- 
tini),  p-  i-io.  —  Les  déclamaleurs  espagnols  au  temps  d'Auguste  et  de  Tibère 
(suite)  (H.  de  la  Ville  de  Mirmont),  p.  i  i-ay,  229-ji3, 34i-352. 

Histoire.  —  Une  chronique  latine  inédite  des  Rois  de  Castille  (laSfi)  (G.  Cirot), 
p.  3o-i6,  ioi_)-ii8,  aW-276.  353-37^.  —  Notes  sur  les  rapports  de  Nantes  avec 
l'Espagne  (J.  Mathorez),  p.  119-136,  383-4o7.  —  Le  grand  siège  de  Gibraltar 
de  1782  vu  par  un  témoin  (A.  Girard),  p.  140-173. 

Histoire  littéraire.  —  Dominique  Soto  et  la  scolastique  parisienne  (suite) 
(P.  Duhem),  p.  Go-76,  127-139,  270-399,  375-382.  —  Nuevos  datos  acerca  del 
histrionismo  espanol  en  los  siglos  xvi  y  xvii  (suite)  (C-  Pérez  Pastor),  p.  3oo- 
317,  408-432. 

Langue.  —  La  colocaciôn  del  v.erbo  en  el  Poema  del  Cid  (F-  Hanssen),  p.  47-Ô9. 
—  Quelques  particularités  de  la  langue  parlée,  d'après  le  théâtre  de  M.  Jacinto 
Benavente  (G.  Le  Gentil),  p.  174-193. 

Archives.  —  Inventaire  de  la  collection  Edouard  Favre  (suite  et  fin)  (L.  Micheli), 
p.  77-95. 

II.  Variétés,  Notes,  Chroniques,  etc. 

Antiquités.  —  Le  site  antique  de  Costig  (ilc  de  Majorque)  (Li.-Ch.  Watelin), 
p.  194-190.  —  Les  pointes  de  lances  représentées  sur  les  stèles  funéraires 
(A.  Schulten),  p.  196.  —  Rapport  sur  une  mission  à  Pcfialba  (l'eruel^  (E.  Alber- 
tini),  p.  197-303.  — Notes  sur  l'archéoluqie  ibérique  (P.  Waltz),  p.  4j3-44o. — 
L'Exposition  d'art  ancien  à  Burgos  (E.  Mérimée),  p.  44o-443. 

Histoire  littéraire.  —  Serranillas  d'un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  royale  de 
Madrid  (G.  Martin),  p.  302-204.  —  La  Renaissance  en  Espagne  et  en  Portugal 
(G.  Radet),  p,  304-208.  —  El  doctor  Bartolomé  Hidalgo  de  Agiiero  (J.  GÔmez 
Oca&a),  p.  gO-ioo.  —  Herculano  et  l'histoire  des  Arabes  (G.  Clrot),  p.  308. 

Langue.  —  Infante  =  Infanta  (A.  Morel-Fatio),  p.  3i8-33  3. 

Universités  et  enseignement.  —  L'Inlercambio  a\ec  le  Portugal  (G-  Cirot),  p.  101- 
103;  à  Oviedo,  p.  3a6,  —  Diplômes  d'études  supérieures  d'espagnol  (G.  Cirot, 
E.  Mérimée),  p.  102,  219.  —  Rapport  sur  les  concours  d'agrégation  d'espagnol  et 
du  certificat  d'aptitude  à  l'enseignement  de  la  langue  espagnole  d;ms  les  lycées 
et  collèges  en  1911  (E.  Mérimée),  p.  209-318.  —  Institut  français  en  Espagne 
(Union  des  étudiants  français  et  espagnols)  (E.  Mérimée),  p.  318.  —  A  propos  du 
livre  de  M.  Ernesto  Quesada,  La  ensehanza  de  la  historia  en  las  universidades  alemanas 
(G.  Le  Gentil),  p.  333-326.  —  Les  cours  de  vacances  de  Burgos,  p.  444-  —  L'espa- 
gnol dans  l'enseignement  secondaire  (G.  Cirot),  p.  444-  —  Le  programme  d"agrç- 
gation  en  1918,  p   445. 


46o  TABLE    ANALYTIQUE    DES    MATIERES 

Chronique.  —  Hanssen,  Bonafoux,  Frontini,  Menéndez  Pidal,  p.  io8.  —  Rodri'guer 
Marin,  J.  Benavente,  R.  Schevill,  Cotarelo,  Morcl-Fatio,  Menéndez  Pidal,  Puyol 
y  Alonso,  Hierseniann,  Rebsomen,  Moliné,  Hostos,  Velasco,  Holle,  p.  -'36-338.  — 
Maiira,  Fernândez  de  Bélhencourt,  Pages,  Amezûa,  Azorin,  Foiilché-Delbosc,  Cortés, 
Méndez  Bcjarano,  Rogerio  Sânchez.  Restori,  de  Curzon,  TalJgren,  «  Cullura  hispano- 
americana  »,  Kohicr,  Holle,  von  Wurzbacli,  p.  338-3io.  —  Longas,  Toro  Gômez, 
Rodriguez  Marin.  Albcrlini,  p.  455-456. 


III.  Bibliographie. 

J.  Pereira  de  Sampaio,  Collecrâo  de  manusTitos  ineilitos  (G.  Cirot),  p.  io3.  — 
Cenienario  do  nascimento  de  Alexandre  Herriilarto{G.  Le  Gentil),  p.  io5.  —  A.  Retes, 
Cuestiones  eiitéticas  (E.  Mérimée),  p.  106.  —  R.  Menéndez  Pidal,  Cantar  de  m!o  Cid, 
t.  Il  et  m  (E.  Mérimée),  p.  330.  —  Ghiswold  Morlet,  Spanish  Ballads  (G-  Cirot), 
p.  325.  —  J.  IIkgné,  Cataloyue  des  actes  de  Jaime  /"',  Pedro  III  et  Al/onso  III,  rois 
d'Aragon,  concernant  les  Juifs  (J.-A.  Brutails),  p.  335.  —  A.  GarcIa  Boiza,  Don 
Diego  de  Torres.  Villarorl  (E-  Mérimée),  [).  336.  —  J.  Jlderias,  Espami  en  tiempo  de 
Carlos  II  (A.  Girard),  p.  'i'i6.  —  (j.  Antolin,  Catâlogo  de  los  codices  latinos  de  la  R. 
Biblioteca  del  Escorial  (G.  Cirot),  p.  448.  —  E.  Fletkr,  Geschichte  der  neueren  Histo- 
riographie (G.  Cirot),  p.  44«j. 

IV.  Gravures. 

Le  site  de  Coslig,  p.  ii)5.  —  Rochers  de  Pefialba,  p.  197.  —  Falaise  couverte  de 
dessins  et  inscriptions,  p.  ujg.  —  Dessins  et  inscriptions,  p.  200-301.  —  Fusaiole 
de  Mcca,  p.  438. 

V.  Planches. 

IIV.  Tètes  et  bustes  du  Cerro  de  los  Santos. 

V-Vfll.  Manuscrits  G  i  et  G  a  de  la  Real  Academia  de  la  Historia. 


/.ô  octobre  1912. 


LA  RÉDACTION  :  E.  MERIMEE,  A.  MOREL  FATIO,  P.  PARIS 
G.  CllKOT ,  secrétaire  ;  G.  RADET,  directeur-gérant. 

Bordeaux.  —  lnii)riincries  Goimolilhoi,  rue  (ïuiraudc,  <j-ii. 


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T.  XIV,   .012,  Pl.  III 


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BULLETIN  HISPANIQUE  T.  XIV,   1912,  Pl.  V 


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02 Otoil  l'CrîT 

XcclxXlok^m-^xaù  Fii.iia.î  lîiuiwrm.îlciîtîliîia^anqîii  uu* 
\n\a\mx^  cciT.  l'oir^iirfiil  fîcin  /7uî  orp  qm  iiô  loii^  tp:  pft  j 

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Zi]n(in\.         ^  , 

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nxxctCTOXxxc^  ijvl^iïiâ:^fiuî^  ^  qv  fnxvcir  a  de  vccçi  .Q-K^^i  ^ 


Folio  8g  recto  du  manuscrit  G  i  de  la  Real  Academia  de  la  Historia. 


BULLETIN  HISPANIQUE  T.  XIV,   191 2,  Pl.  VI 


ab^ iç  mcm.iUb  'icvivî'nt- .ifccti  tcDiploiiiTC  moïc  prcrce  frftT 

tV'-ip^naa'Ci  Iviroiur;  cotiCdui  incclc^ann  Juuao  ibitviv 
iiuuc  Hilnoâ'  (raolfit-.iti  î^armc  J?  rcrduiqrc  r.ini  tiohilau 

4lnrjtp:c.î5^inîv piomûn  cit-ctï  if  iiîîih  nutcrtir,  z  ttiAqù  oi 
-c^inmvuntttctiin  miUtce^ mm  AiiniC-  tcqt^ aï  qtnb)  ztilti' 
IciUtPîCf'  vctuiifcnlf  y^HHiicticmv covciti  bù.ci.  tiuhrîi  fcqo 
bien  mm  4niîi6  icqt;  itmittn  înmi.UinI|;iii«îuutrc..p:clRc 
ar  iitri'  r>il(i  rcv  oIl>*>  q  tvniçndvir  maiittirr  trllûi^  alnui  aî 
que  tvm;îrir  fî'ruut'.:llft»ii<')  trlli  Jlo  îihîCï!*5  iinnu»firc«ii»  i 
j^;m  mona(îrftriitx:*naif-.|triii.f)ii?  itdq^  Tirplnc»  Dfîf.  ora» 
luroTl^faïc»  rcnil*  cil  tx)Utiun  .iv  nuitixm  (lui  mv  tcccpr*^  ctt- 
mtti iHnioicniultP î£pi»^it^ iiuqiic i^tuiUà^i ibi  moû Vali 
initiapju^mcnt»  ;îfpilhTCaDC  m*tcrtiîm  crri'inior&  quoiucc 
tvtitiiù  nioîtit^x'iairut  aîic  aufir.Orci  frrhïiiî  fcîniuUAd' 
rcjrrtorctiiric»î.impmiaitc.|ptn'înmtn  cvbihciKMmi  tatr 
Ii0iain iiUtitiia  qtuifi  fuinh^  cv  faito  coimiba  tvHiiv  a^tn 

mcvaACuiAcatynuipimcouiMt     ^univnhltr:^ 
rua  fe^r^t^r^^c^^^^^^^^^^ 


Folio  122  recto  du  manuscrit  G  i  de  la  Real  Academia  de  la  Historia. 


BULLETIN  HISPANIQUE  T.  XIV,   1912,  Pl.  VII 


ctAtxi  :0Mru>^u^-h^llUula<:^ftr4^î;l''«tPîa;IqH<p•.ilU4tr:a;.UIlpll^^; 
tmm:thtvitutî:iUiiih.'C:tiincl)iX  lUic»  nîrccojnioïanitojptiii  nûntcrc 
n.-il uoï» cvtï>t- hiïîo.Mî^  vcccvptitni  eCtîquonim  ncp^urc  (|ui2viu 
MïCCKuu  awuVc  i(f^vmAvcAiiilitu^iuaiLVi(h tutninc  nuly.  miLc 

i]ui  liU.arcoftiDOffi^/TiannîR  courriiînrrlviuuolcfitu  ccumlni^m 
acc^ibih: amif  incfvijnunfnvj'^  tJ.iHOjaU^cfîrquciii  fiiliil ûi^V:  m    ^ 
t\u0  cmn\$,wihitu?me  fiiCpiacA\xît:ati:  non  -oicwcm  ciinScxmimc  ' 
vofxlnf  ci>x  urdicfioûim  Aliciu  menez f^an'>ûih  nnunnCiXcvc: 
quor» inolM'c  mAlcontit*  otuuv:^  .\bilinc\nt,Bic  airinc  iniim  c^ni 
tiAin  AiiaipAtuttKquvo  ncc  air.iiiranî  t\iX  no  cfiptïitpocnirrîcctu 
in V.iticiuo (ca:5 t\in tvic dr-uc jt»nif?. pcc  â (c^:rc5  larLtDû t»îtu» 
cx'ccDcra^rii-jjî/cnînî  4t^in  tnoic^i^  ccm.pAvno  contciitnc:CiraV 
wccnv plnyfopln:fAvric*  Aixnio:fc*î>Ahrm$'  luDurnuui  ne  me  rue» 
{^tatluiAî  Aiintixi'c.  *3ratm  A^>txhlxtl'cccCcvcAhrïnm\  colUpCi  a* 
l'initm  Hcmitt  rcAtvLi  totu;  ciptmm  t^uu^riniir  saAjviO  cxàltjf  : 
Atircnato  LimfoUOonftinnniAniBntri^^wtixvtmc*  Uurûî  uimn 
hûCiib ùUuinii ixanu  iiicnun  atrlU  ilitpMtt)^i^ ncïa.i coUîi(î»jc 
twn  vcfiipA^ÂOimttccc.^^Aic  mi  p,^nî|V">iiî:an:i  pAnHxOîuiciaciw 
rc  o(U:imim:n<c  ti'  nnt->'finfî'ih^  com^ttc.'Ou'^irumv  lue  miCcrtix 
iunu»  aip/c^ft:!  înlM  Qfo  vnm  AU^Airmi  vcm  zx>m\  tbimnAtiotcèi 
cci'CcoîiO! :  mco ne  nu q iiofycctc'Au  pnnapCi :4  az> àtiu:c&  fcco  va 
piaimtaûpA  niilerriiuct>ira'ntîiu,^utîm*  hùîtii$  am^otct?  noF 


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Polio  125  recto  du  manuscrit  G  i  de  la  Real  Academia  de  la  Historia. 


BULLETIN  HISPANIQUE 


T.   XIV,    19 12,    PL.   VIII 


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via  .A  MI 

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T»îîlfrnnc 


fAbiduqtn  aincti  'xcïir\  fhita^  m  lumioijvtucitn  iimivdt 
fimtil  ctiCccixviinr.îX^vttCae  HanriaCù  au  .immo  f^ 
mma'Afbciium  a?ntrA  Wauvoc-:  Jtxxum  tnAKsiibiie 
(ï>|>îT^  vcffruini  S't.inAtc  mAfiiA  utyhihmu  conntuin  i 
'J}>Awiium  covuî  iminituù  jiotrntrr  A^mx!>Lmv  :]ntcv 
qac^C*  fuctimfnohikc*  cttiiditi  mvi  {ohAniicc*  îx  Git^ 
jfun î^ar  A\,caiic :]ohAniicc  pAchcco  AXArdyio  cc_ 


mAtiT>av  /\ \cauc : [01) Aniiœ  i .^^.  ....^^ 

-^Diilcn^^'-Pctnw  (^ivonciiw  -ft.itrr  nu^iîrr  CAUîtA 
uc  frccancitc Az>irtivAi\TiUi:*^ucaiC''  hipi  zcAs^ixso^a 
/WAvcbio  ctÇ^omcC'-  fbvinnC'  Hliiù  Ciiiù  foaAtuù:\.l 
«4r«r»jx^mnnî^i  conicopLicrninit?  JohAnncùj 
pimanxî  Cowcù  I>cmîiJCiïti  fctiiAirv^:*  AliunzscTc 
icto  Cî^nio;  tc4.Iu4.|o  îîi^îUiiî^  Conici?  Oc  Cî^ancd.) 
ï^o?vrtcui«  mAun'iq^  comcc*  rt  pArcù:t-  (^Abzicl  tuAm 
q*  Comcù  zx  OTcîno nccîxfiicnintiiobdcùampctc^ 
îrV'djfc^ijwiiîio/jriiims;  C^^nîitiC'îX  H.iro  nccnôfrr 
nAtmic*7X\^ciARoccAlfonCuc*  cùÂm  ^c^'dLlfa>  fei 
tirx*  wctmAm  Jiitfbcni  Çpî"1^I*^JX Havo (acutia  imoîi 
buvH4iT  cr /tlunfîiKîTiT  comices  xBJj'ona»  quo?.  «onn 
iurcoïîCU!»f{jnî  ccr.  A\.îii(cninr  ihccriîn  vc^  xvqpmyi 

^ihAiioncp.îi\xtiAt02CùZiOîniinîC*  AJfbn^aè  C'i^'tUc 
A.vd-iCi^if^inic*TctlcrAmw  et  pccnic-  {hi^AitQi  DcVdJf 

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tvAnCiit^B-iUTAcaiilcfc uitiA  mmc^ avLnhrti  vcaptattKù 
uuîlCACq}  cLiaX'^tuAfbia^nc^ci^intiûit'Ac  uonmUiA 
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Folio  282  verso  du  manuscrit  G  2  de  la  Real  Academia  de  la   Ilistoria. 


ïnni  Bulletin  hispanique 


6001 
B8 
année  14. 


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