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Full text of "Bulletin Société Agricole, Scientifique et Litteraire des Pyrenees-Orientales"

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SOCIÉTÉ 

AGRICOLE,  SCIENTIFIQUE 

ET  LITTÉRAIRE 

DES  PYRÉNÉES-OllIENTALES. 


DOCZIKMB    VOLUME. 


PEï^^MGNAN, 

IMPRIMERIE    DE   J.-B.    ALZINE, 
Rue  des  Trois-Rois,  I. 

ISGO. 


^ 


^  ^ 


SOCIETE  DES  PYRENEES-ORIENTALES. 


XII. 


La  Société  n'entend  approuver  ni  improuver  les  opinions 
émises  dans  les  travaux  qu'elle  publie  :  elles  appartiennent  à 
leurs  auteurs  qui  en  sont  seuls  garants. 


Les  lettres,  mémoires,  etc.,  etc.,  doivent  être  adressés  (franc 
de  port)  à  M.  Louis  Fabre,  Secrétaire  de  la  Société,  rue 
Traversière-de-l'Ange,  4;  et  les  objets  d'histoire  naturelle  à 
M.  CoMPANYO,  Conservateur  du  Cabinet,  place  Laborie,  5,  à 
Perpignan. 


SOCIÉTÉ 


AGRICOLE,  SCIENTIFIQUE 

ET  LITTÉRAIRE 

DES  PYRÉNÉES-OIUENTALES. 


Uf0.ati2±iu'^  ■r<DXJHU'£^ 


Faisons  tous  nos  efforts  pour  qa'oa  puisse 
(lire  un  jour  :  Il  y  eut  à  Perpignan  une  société 
d'Iiomnies  à  intentions  généreuses,  dont  les 
travaux  furent  utiles  à  leur  pays. 

(  Jaubert  de  Réart,  I"  BulleliD,  p.  i.  ) 


PERPIGNAN, 

IMPRIMERIE   DE   J.-B.    ALZINE, 
Rue  des  Trois-Rois,  \ . 

I  S60. 


4â^^ 


SOCIETE 

AGRICOLE,  SCIENTIFIQUE  a  LITTÉIUIliE 


DES  PYRENEES-ORIENTALES. 


COMPOSITION   DU  BUREAU   TOUR  LES  ANNÉES 


1859. 

Président:  M.  LLOUBES  (Augcste), 
îj>,  b;in(|ui«r,  aiuit'ii  maire  de  la 
ville,  membre  du  Conseil-Général 
d'Agriculture  et  du  Conseil-Géné- 
ral du  département. 

yice-Pré^ideiit  :  ÎM.  Companvo,  père, 
docteur-médecin,  conservateur  du 
Cabinet  dMiistoire  naturelle. 

SecTélaire  :  RI.  Fabre  (Louis) ,  pro- 
fesseur de  troisième  et  de  commerce 
au  Collège. 

yke-Secrétaire  :  M.  Alaot,  secrétaire 
de  rinspecteur  d'Académie. 

Trésorier  :  M.  Siau  (Antoine),  négo- 
ciant. 

Archiviste  :  i\I.  SiiivEX  (Joseph)  éco- 
nome des  Hospices. 


1860. 

Président  :  M.  LLODBES  (Aususte), 
'^  .  banquier,  ancien  maire  de  la 
ville,  membre  du  Conseil-Général 
d'Agriculture  et  du  Conseil-Géné- 
ral du  département. 

Vice-Président  :  M.  Companyo  ,  père, 
docteur-médecin,  conservateur  du 
Cabinet  d'bistoire  naturelle. 

Secrétaire:  M.  Fabrk  (Louis) ,  pro- 
fesseur de  troisième  et  de  commerce 
au  Collège. 

Vice-Secrétaire  :  M.  Alart,  secrétaire 
de  l'Inspecteur  d'Académie. 

Trésorier:  M.  Siau  (Antoine),  négo- 
ciant. 

Arcliivisle  :  M.  l'abbé  Delhoste  ,  vi- 
caire à  la  Cathédrale. 


C0.M1TE   DE   REDACTION 


1859. 

M.  l'abbe  I'incs,  chanoine,  supérieur 
du  Graml-Séininuire. 

M.  l'abbé  IJensa,  chanoine  honoraire, 
prof,  de  philosophie  et  de  théologie 
au  Grand-Séminaire  de  Perpignan. 


1860. 

RI.  l'abbé  Fines,  chanoine,  supérieur 
dn  Grand-Séminaire. 

RI.  l'abbé  Bensa,  chanoine  honoraire, 
prof,  de  philosophie  et  do  Ihéidogie 
au  Grand-Séminaire  de  Perpignan. 


SÉANCE  PUBLIQUE  DU  l^-"  AOUT  1858. 


PRESIDENCE   DE   M.    AUGUSTE   LLOUBES. 


La  Société  a  tenu  le  1"  août  sa  séance  annuelle  pour 
la  distribution  des  primes  accordées  sur  les  fonds  du 
département,  pour  l'amélioration  de  l'espèce  bovine,  et 
elle  a  distribué  dans  celle  même  séance  divers  encoura- 
gements. La  chaleur  proverbiale  du  mois  d'août  n'avait 
pas  empêché  un  auditoire  nombreux  de  venir  assister  à 
cette  fête  modeste,  qui  a  toujours  le  privilège  d'intéresser 
vivement. 

La  musique  des  élèves  des  Frères  de  la  Doctrine 
Chrétienne  s'est  fait  entendre,  à  plusieurs  reprises,  avec 
beaucoup  de  succès. 

Les  autorités  du  département  et  de  la  commune  étaient 
représentées,  et  siégeaient  avec  les  membres  du  bureau. 

M.  Auguste  Lloubes,  président,  a  ouvert  la  séance  par 
l'allocution  suivante  : 

«  Messieurs, 

«  C'est  avec  juste  raison  que  notre  époque  peut  s'enor- 
gueillir des  ctlorts  qu'elle  lait,  sous  rius[)iralion  d'un 
gouvernement  éclairé,  pour  faire  pénétrer  le  progrès  dans 


IX 

toutes  les  industries  qui  sont  du  domaine  de  l'activité 
humaine.  De  quelque  côté  (juc  nous  tournions  nos  re- 
gards, nous  trouvons  l'initiative  gouvernementale  ou 
l'initiative  individuelle  se  posant  le  proMème  du  mieux, 
et  poursuivant  sa  mission  avec  une  loi  et  une  énergie 
sans  précédents. 

Pour  ne  parler  que  de  ce  qui  rentre  plus  spécialement 
dans  notre  sujet,  nous  vous  dirons  avec  quelle  persévé- 
rance on  poursuit  les  progrès  agricoles,  et  avec  quel 
soin  tout  particulier  on  organise  les  moyens  de  les  pro- 
voquer dans  les  Concours  régionaux,  dont  l'efiicacité  est 
reconnue;  et  l'heureuse  pensée  à  qui  nous  les  devons, 
a,  tout  à  la  fois,  rendu  hommage  au  caractère  français', 
si  avide  de  luttes  intellectuelles  et  de  distinctions  hono- 
rifiques, et  fourni  à  l'agriculture  un  U  vier  des  plus  puis- 
sants pour  obtenir  les  améliorations  qu'elle  appelle  de 
tous  ses  vœux. 

«  Dans  ces  luttes  pacifiques,  où  les  concurrents  n'ap- 
portent que  des  dévouements,  le  succès  du  but  proposé 
ne  peut  être  douteux;  et  à  côté  du  bien  agricole  qui  en 
résulte,  il  en  est  un  tout  aussi  grand,  celui  que  retirent 
toujours  de  leur  communication  des  hommes  mis  en 
contact  et  obligés  de  se  connaître  et  de  s'apprécier. 

«  La  Société  des  Pyrénées -Orientales  a  compris,  dès 
le  début,  toute  l'importance  des  Concours;  et,  dès  ipie  la 
région  à  laciuelle  elle  a  été  rattaclK'o  a  été  définitivement 
fixée,  elle  s'est  empressée  de  demander  à  Son  Excellence 
Monsieur  le  Ministre  de  TAgricuIture  do  vouloir  biin 
désigner  Perpignan  pour  la  tenue,  en  l<S()t2,  du  Concours 
régional  du  Sud-Est,  (jui  com|)rend  onze  départements. 
Son  Excellence  vient  de  nous  faire  connaître  que  cet  acte 


X 

(le  justice  distribulive  aura  lieu.  Les  afjriculleurs  en 
seront  prévenus  en  temps  opportun;  et  comme  la  lutte 
sera  grandiose,  ce  sera  au  département  à  se  tenir  à  la 
hauteur  de  sa  réputation.  Ce  ne  sera  pas  aux  tours  de 
force  qu'il  faudra  viser,  mais  aux  améliorations  que  la 
pratique  peut  accepter  facilement  ;  ce  ne  sera  pas  aux 
races  d'animaux  les  plus  en  renom  ailleurs  qu'il  faudra 
s'adresser  toul  d'aboid,  il  conviendra  de  procéder  par  tâ- 
tonnements et  de  ne  présenter  avec  un  brevet  de  naturali- 
sation que  les  races  éprouvées  pendant  deux  ans  au  moins 
par  le  climat,  la  prédominence  de  la  chaleur  ou  de  l'hu- 
midité dans  l'atmosphère,  exerçant  une  influence  décisive 
sur  les  caractères  particuliers  à  chaque  espèce.  Qu'il 
nous  soit  permis  de  dire,  à  cette  occasion,  que  le  pro- 
grès le  moins  contestable,  est  celui  qui  consiste  à  obtenir 
des  espèces  indigènes  les  types  les  plus  parfaits:  on  peut 
alors  essayer  avec  fruit  des  races  nouvelles,  et  arriver  par 
voie  de  comparaison  à  faire  des  choix  judicieux. 

«  La  Société  des  Pyrénées-Orientales,  en  demandant 
un  Concours,  a  rempli  une  partie  de  la  tâche  qu'elle  s'est 
imposée,  et  dont  depuis  vingt-cinq  ans  elle  poursuit 
l'accomplissement  avec  une  union  qui  fait  sa  force  et 
que  n'ont  pu  ébranler  les  dissentiments  politiques,  qui 
n'ont  jamais  franchi  le  seuil  de  cette  enceinte,  où  elle 
délibère  dejjuis  un  quart  de  siècle.  C'est  fière  de  ses 
intentions,  qu'elle  s'adresse  à  ses  concitoyens,  pour  leur 
demander  de  la  seconder;  c'est  (ière  des  adhésions 
qu'elle  reçoit,  qu'elle  fait  appel  à  toutes  les  intelligences 
et  qu'elle  est  heureuse  de  les  admettre  dans  son  sein. 
La  publication  de  ses  travaux  annuels,  en  mettant  en 
relief  l'aptitude  de  ses  membres,  la  fait  connaître  au- 


XI 

dehors,  et  lui  vaut  l'échange  empressé  des  Bulletins  des 
Sociétés  françaises  et  étrangères. 

«  Elle  poursuit  lentement,  mais  d'une  manière  sûre, 
la  mise  on  lumière  des  diverses  richesses  de  notre  beau 
département.  Des  commissions  qui  ont  eu  pour  organe  un 
rapporteur  aussi  dévoué  que  consciencieux,  ont  publié  la 
statistique  des  cultures  niaraichères  et  de  l'éducation  des 
abeilles;  elles  vont  entreprendre  prochainement  le  grand 
travail  de  la  statistique  des  éducations  bovine,  ovine  et 
[torcine. 

«  La  Société  a  procédé  avec  une  extrême  réserve  k 
l'égard  de  toute  innovation.  Elle  a  eu  à  se  prémunir 
contre  l'esprit  de  système  d'une  part,  et  d'autre  part 
contre  l'enthousiasme  qui  entoure  d'ordinaire  ce  qui  est 
nouveau.  Avant  de  détendre  la  cause  du  sorgo,  elle  a 
voulu  connaître  cet  enfant  du  tropique  dont  on  racontait 
tant  de  merveilles,  et  la  notice  publiée  par  un  de  ses 
membres,  a  démontré  que  l'on  exagérait  les  qualités 
d'une  plante  qui  restera  cependant  une  bonne  acquisition 
pour  l'agriculture.  Avant  de  se  prononcer  j)our  aucun  des 
systèmes  inventés  pour  le  battage  des  céréales,  elle  a 
attendu  que  l'expérience  en  eût  été  faite  d'une  manière 
répétée;  et  si  elle  encourage  des  essais  utiles,  son  juge- 
ment reste  en  suspens,  la  j)ratique  étant  loin  davoir  dit 
son  dernier  mot.  Avant  de  roc^omniander  une  méthode 
pour  le  traitement  de  la  ntaladie  de  la  vigne,  elle  a 
attendu  qu'une  commission  d'hommes  compétents,  prise 
dans  son  sein,  eût,  dans  un  rapport  lucide,  constaté  que 
les  viticulteurs  reconnaissaient  le  soufre  comme  le  meil- 
leur curalif,  et  son  enq)loi  préventif,  préconisé  par 
M.  Lallorguc ,  comme  le  plus  cllicace. 


XII 

«  Si,  par  nuire  organe,  elle  invoque  son  passé,  ce  n'est 
point  pour  on  tirer  vanité,  car  elle  croit  n'avoir  rempli 
qu'un  devoir;  mais  c'est  alin  (rappeler  sur  ses  actes  le 
jugement  des  hommes  impartiaux. 

«  Il  nous  est  dillicile  dans  cette  circonstance,  qui  ne 
se  produit  qu'une  Ibis  l'an ,  dussions-nous  nous  faire 
accuser  de  monotonie,  de  ne  pas  parler  de  l'oïdium 
dans  un  déparlement  dont  la  vigne  couvre  un  quart  de 
la  surface  arable. 

«  I.a  Providence,  dans  ses  impénétrables  desseins,  nous 
a  envoyé  une  abondante  récolte  de  raisins  :  est-ce  le  pré- 
lude d'un  décroissement  marqué  de  la  mucédinée?  C'est 
l'opinion  de  beaucoup  d'agronomes.  Deux  soufrages  pré- 
ventifs ont  généralement  suffi  pour  préserver  le  raisin  de 
toute  infection;  et  comme  tout  se  lie  dans  l'enchaînement 
des  faits  heureux,  on  a  beaucoiq)  soufré  parce  qu'il  y  avait 
beaucoup  de  raisins,  et  il  se  récoltera  beaucoup  de  raisins 
parce  qu'on  a  beaucoup  soufré.  Vienne  maintenant  une 
protection  douanière  ardemment  réclamée  par  tout  ce 
qui  produit,  et  l'aisance  disparue  des  campagnes  y  re- 
viendra petit  à  petit,  car- le  vide  qui  s'est  fait  ne  peut 
être  comblé  de  sitôt. 

«  Il  convient  de  dire  que  la  calamité  qui  s'est  abattue 
sur  les  vignobles  de  France,  a  éveillé  toutes  les  sympa- 
thies de  ceux  qui  pensent  ou  qui  ont  le  droit  d'agir.  Les 
droits  d'entrée  sur  le  soufre  ont  été  réduits;  la  science 
a,  dans  ses  laboratoires,  analysé  ce  précieux  minéral,  et 
elle  vient  de  doter  la  société  d'une  découverte  du  plus 
haut  intérêt.  M.  Chansel,  professeur  à  la  Faculté  des 
Sciences  de  Montpellier,  est  arrivé,  à  force  d'observa- 
tions, à  inventer  un  instrument,  aussi  simple  que  précis, 


XIII 

pour  connaitJT  la  nature,  la  qualité  et  la  vertu  du  soufre. 
La  tromperie  ne  sera  plus  possible  avec  cet  indicateur, 
dont  le  prix  est  fort  modique. 

«  La  vigne  n'4  pas  été  seule  à  annoncer  d'abondants 
produits,  les  arbres  Iruitiers  ploient  sous  leur  riche  fardeau, 
et  la  locomotive  impatiente,  dont  l'écho  nous  apporte  les 
sifflets,  attend  chaque  jour  pour  l'emporter  dans  son  vol 
rai)ide  le  charyemcnl  que  les  maraîchers  lui  confient. 
Les  bienfaits  de  l'ouverture  de  la  voie  ferrée  ne  seront 
guère  sensibles  que  dans  un  an. 

«  C'est  aux  cultivateurs  ,  maintenant  ,  à  étudier  le 
goût  des  consommateurs  du  dehors,  à  cueillir  les  fruits 
h  la  main,  à  ne  planter  que  de  bonnes  et  belles  espèces, 
et  à  choisir  ()arnii  celles-ci  les  plus  hâtives.  Un  mauvais 
arbre  demande  autant  de  place  et  de  soins  que  s'il  était 
bon.  Le  jardinage  proprement  dit  aura  aussi  une  très- 
large  part  dans  l'exportation:  nous  savons  que  nos  ma- 
raîch(M's  apprécient  toute  l'importance  des  semis  hâtifs 
et  des  abris  contre  l'impétuosité  des  vents,  et  que  leur 
intelligence  des  cultures  les  mettra  à  même  d'obtenir 
une  grande  précocité  dans  leurs  produits.  Dans  certains 
cas,  le  bas  prix  du  tiansport  des  fumiers  par  chemin 
de  fer,  pourra  leur  permettre  de  s'en  procurer  à  Nar- 
bonne. 

«  Entrevoyons  donc  des  jours  plus  riants  en  présence 
de  ces  indications  d'abondance,  qui  semblent  annoncer  le 
terme  procl^in  d'une  crise  mystérieuse  de  la  végétation 
tout  entière,  et  admirons  la  main  de  Dieu,  qui  nous  pose 
ces  allernativos  d'heur  et  de  malheur,  comme  un  frein 
pour  nous  faire  rentrer  dans  la  voie  de  la  sagesse  dès 
que  nous  voudrions  nous  en  écarter.  » 


XIV 

M.  Companyo  père  a  lu  ensuite  un  mémoire  sur  l'in- 
dustrie séiicicole.  Il  a  développé  avec  méthode  les  pro- 
ijrès  de  la  maladie  (|ui  sévit  si  cruellement  sur  ll'espèce 
bombycine.  11  a  lait  ressortir  rim[)ort^nce  relative  du 
succès  obtenu  par  M.  A  de  Gonsalvo,  d'Estagel,  dans 
son  élève  de  vers  à  soie. 

M.  Tastu-Jaubert,  dans  deux  rapports  élégamment  écrits, 
a  exposé  les  perfectionnements  apportés  par  M.  Raymond 
Bert,  dans  la  fabrication  du  chocolat,  et  l'invention  de 
MM.  Rouflia  frères,  pour  donner  au  papier  à  cigarettes 
un  parfum  aussi  agréable  que  salutaire. 

M.  Alart  a  lu  des  fragments  d'une  notice  sur  les  ancien- 
nes concessions  de  vacants,  en  Roussillon,  au  ix^  siècle. 
Cette  esquisse,  qui  a  fait  ressortir  une  fois  de  plus  l'éru- 
dition de  M.  Alart,  a  été  écoutée  avec  un  intérêt  soutenu. 

M.  l'abbé  Delhoste  a  exposé,  dans  un  langage  simple 
et  élégant,  l'état  de  la  récolte  des  céréales  pour  l'année 
1858.  Ses  documents,  puisés  à  bonne  source,  établissent 
que  l'on  n'a  pas  h  redouter  que  le  blé  vienne  à  faire  défaut 
a  la  consommation. 

M.  Tastu-Jaubert  a  repris  la  parole  pour  rappeler  que 
le  jeune  Isidore  Borrell  persévérait  dans  la  voie  qui  doit 
faire  de  lui,  un  jour,  un  sculpteur  qui  honorera  son  pays, 
et  il  a  demandé  pour  lui  un  rappel  de  médaille. 

M.  Crova  a  lu,  au  nom  d'une  commission  dont  il  était 
l'organe,  un  rapport  détaillé  sur  le  rouleau  perfectionné 


XV 


de  M.  V.lallonguc.  Cet  inslrument,  qui  fonctionnaii  pour 
la  première  fois,  constitue  un  progrès,  et  paraît  appei,> 
a  rendre  des  services  aux  agriculteurs  qui  pourront  en 
faire  l'acquisition  pour  le  hattage  des  céréales.  L'asso- 
ciation pourra,  du  reste,  alléger  les  charges  qu'impose 
toujours  la  pro.uiérc  mise  de  fonds  pour  l'achat  d'une 
machine,  et  l'emploi  pourra  alors  s'en  populariser. 

La  Société  a  reconnu  qu'elle  devait  récompenser  Mon- 
sieur Vilallongue  de  son  heureux  perfectionnement  Elle 
lui  a  accordé  une  médaille  d'argent,  grand  module. 

Elle  a  voulu  aussi  récompenser  MM.  de  Gonsalvo  Bert 
et  Rouilla  frères  :  elle  a  remis  à  chacun  d'eux  une  mé- 
daille de  bronze. 

M  Isidore  Borrell  a  été  aussi  l'objet  d'une  distinction 
en  obtenant  un  rappel  de  médaille. 

La  distribution  des  primes  a  immédiatement  suivi  et  la 
somme  de  1.980  francs  a  été  répartie  entre  les  éleveurs 
du  département  qui  ont  été  reconnus  les  plus  dignes  lors 
du  concours  de  18o7. 


ITl 


SÉANCE  PUBLIQUE  DU  51  JUILLET  1859. 


PRÉSIDENCE  DE  M.  AUGUSTE  LLOUBES. 


Comme  d'Iiabitiule,  la  Société  a  tenu  sa  séance  publique 
annuelle,  le  dernier  dimanche  de  juillet,  pour  la  distribu- 
tion des  primes  et  autres  récompenses  accordées  par  le 
Gouvernement  et  par  la  Société  elle-même.  M.  le  Préfet, 
absent  de  Perpignan ,  était  représenté  par  M.  de  Çagar- 
riga,  secrétaire-général  de  la  Préfecture,  qui  occupait 
une  des  places  d'honneur  près  de  M.  le  Président,  ainsi 
que  M.  Saisset,  adjoint  à  M.  le  Maire  de  Perpignan, 
et  la  séance  s'est  ouverte  à  deux  heures  de  l'après-midi, 
devant  un  auditoire  nombreux. 

Dans  un  discours  plein  d'idées  élevées  et  dans  un  lan- 
gage que  tout  l'auditoire  a  compris,  M.  le  Président  a, 
successivement,  passé  en  revue  toutes  les  questions 
agricoles,  industrielles  et  économiques,  qui  peuvent  in- 
téresser l'opinion  publique  du  département. 

M.  le  Président  s'est  exprimé  ainsi  : 

«  Messieurs, 
frNous  vous  annoncions  il  y  a  un  an,  avec  un  véritable 
bonheur,  que  Son  Excellence  Monsieur  le  Ministre  de 
I  Agriculture,  avait,  sur  notre  demande,  promis  au  dé- 


XVII 


parlement  la  tenue  du  Concours  régional  pour  1862  : 
sa  promesse  s'est  réalisée.  Les  prétendants  ii  la  prime 
d'honneur  pourront  faire  parvenir,  au  plus  tard  le  l^r 
mars  1861 ,  leur  demande  a  la  Préfecture.  Les  fermes 
qui  concourent  sont  examinées  un  an  à  l'avance.  Nous 
espérons  que ,  comme  dans  les  autres  départements ,  les 
concurrents  seront  nombreux.  La  variété  et  l'importance 
de  nos  cultures  ouvrent  les  portes  des  concours  à  beau- 
coup d'agriculteurs.  Le  but  de  l'institution  est  d'encou- 
rager ceux  qui  font  beaucoup  avec  peu  et  qui  le  font  bien, 
l'amendement  des  terres,  leur  bon  état,  l'entretien  d'un 
cheptel  au-dessus  des  besoins  de  la  ferme,  l'extension 
des  cultures  fourragères,  la  tenue  d'une  comptabilité 
quelconque  qui  permette  au  cultivateur  de  se  rendre 
compte,  l'introduction  d'animaux  perfectionnés,  l'adop- 
tion d'instruments  nouveaux  reconnus  utiles,  la  bonne 
confection  des  fumiers,  sont  les  éléments  principaux  qui 
fixent  l'attention  du  Jury. 

«  C'est  une  grande  récompense  que  la  prime  d'hon- 
neur; nous  sommes  certain  qu'elle  sera  brillamment 
disputée.  Mais  avant  cette  é|»0(pie,  le  département  ne 
doit  pas  s'elVacer  aussi  complètement  qu'il  l'a  fait  pour 
ses  produits  au  Concours  de  Carcassonne.  Les  blés,  les 
vins,  les  huiles,  les  laines,  les  soies,  le  miel,  y  auraient 
occupé  une  place  d'honneur,  nous  pouvons  le  dire,  nous 
étions  du  Jury.  A  Montpellier  donc  en  1860  ,  pour 
prendre  la  revanche.  Il  est  juste  de  dire  toutefois  que 
certains  de  nos  éleveurs  ont  brillé  d'un  éclat  qui  se  sou- 
tiendra nous  l'espérons;  ils  feront  revivre  la  vieille  répu- 
tation du  Roussillon,  où  venaient  s'approvisionner,  il  y 
a  un  siècle,  tous  ceux  qui,  en  France  et  jusqu'au  fond 

b 


xvm 


de  TEurope ,  voiilaieiit  obtenir  la  race  luériiic  pure  |)(>ur 
raniélioratioii  des  espèces  ovines  indigènes.  C'est  du 
Roussillon  (jue  sont  sortis  les  premiers  béliers  cl  brebis 
mérinos  qui  ont  produit  ces  belles  laines  du  nord ,  qui 
n'auront  bientôt  plus  de  rivales,  grâces  à  Tiiabileté  des 
cultivateurs. 

«  Nous  savons  que  Ion  se  plaint  généralement  de  lin- 
succès  de  l'éducation  des  animaux  de  l'espèce  ovine,  que 
l'on  prétend  ne  garder  que  pour  le  fumier  qu'ils  produi- 
sent. Mais  est-il  bien  démontré  que  cette  éducation  soit 
faite  comme  il  convient?  Pour  élever  des  animaux  do- 
mestiques, il  faut  les  avoir  étudiés,  connaître  leurs  mœurs 
et  leurs  maladies  et  les  causes  qui  les  produisent.  Com- 
bien de  propriétaires  ont-ils  fait  cette  élude  et  où  leurs 
bergers  ont  ils  pu  la  faire?  Des  préjugés,  voila  leur  guide 
principal  ;  aussi  avons-nous  beaucoup  de  gardiens  de  trou- 
peaux et  peu  de  bergers.  Sans  avoir  la  sotte  prétention  de 
nous  ériger  en  professeur,  nous  croyons  pouvoir  signaler 
deux  des  défauts  principaux  de  notre  éducation  :  sans 
aborder  la  question  capitale  de  l'amélioration ,  l'insulli- 
sance  de  nourriture,  une  stabulation  vicieuse  qui,  dans  un 
pays  très-chaud,  prive  d'air  des  animaux  que  la  nature  a 
garantis  du  froid  et  les  fait  croupir  sur  leurs  fumiers. 
Cette  question  nous  amènerait  trop  loin,  si  nous  voulions 
la  développer.  La  Société  s'emparant  des  idées  du  Gou- 
vernement qui,   dans  les  faits  agricoles,   veut  que  les 
récompenses  arrivent  partout  où  elles  sont  méritées,  a 
découvert  un  bon  paysan  qui  dans  sa  modeste  position 
fait  bien ,  et  elle  va  le  récompenser.  11  a  introduit  et 
multiplié  la  race  barbarine.    Elle  a  ses  dél'auts  et  ses 
qualités,  mais  les  dernières  l'emportent  sur  les  premiers. 


Elle  esl  très-tV'coiule.  Les  agneaux,  jdmeaiix  toujours,  se 
vendent  7  francs  en  naissant,  !20  francs  à  deux  mois  et 
demi,  00  francs  à  un  an,  et  a  cet  âge,  la  boucherie  les 
immole  comme  moulons;  c'est  deux  tiers  d'avance  sur 
les  autres  races,  dont  les  moulons  ne  sont  faits  qu'à  l'âge 
de  trois  ans,  et  valent  alors  40  francs  au  plus.  Nous 
croyons  que  les  agriculteurs  feront  bien  d'étudier  cette 
espèce,  sans  négliger  cependant  celles  que  nous  con- 
naissons, et  dont  nous  devons  viser  a  présenter  on  1862 
des  types  parfaits. 

«  La  Société  fera  lous  ses  efforls  pour  qu'il  soit  joint 
au  Concours  régional  un  Concours  de  l'espèce  chevaline 
et  une  exposition  de  l'industrie  ;  elle  promet  dès  ce  mo- 
ment une  exposition  maraîchère  et  florale  ,  et  elle  espère 
d'avance  être  secondée  dans  ses  bonnes  intentions. 
Nous  avons  une  grande  réputation  au-dehors,  il  convient 
de  la  justilier.  Au  point  de  vue  agricole,  on  jugera  de 
nos  eflbrls  par  les  diflicultés  que  nous  avons  à  vaincre, 
et  dont  certaines  nous  sont  communes  avec  d'autres 
contrées. 

«  Parmi  celles-ci ,  la  maladie  des  vers  à  soie  et  celle  de 
la  vigne  causent  un  véritable  dommage  aux  agriculteurs, 
donnnage  qui  s'accroit  delà  sécheresse, des  intenqjéries,  du 
bas  prix  des  denrées,  des  mal-façons  de  la  main-d'œuvre, 
réunion  de  fléaux  qui  font  de  l'agriculture,  la  plus  précaire 
des  professions.  Dans  un  pays  d'organisation  rationnelle 
comme  le  nôtre,  on  doit  s'attendre  à  une  protection  des 
plus  ellicaces.  L'Klal  nous  l'accorde,  il  faut  la  demander 
aux  autres  pouvoirs  publics.  L'agitation  provoquée  à  l'oc- 
casion du  déficit  successif  de  plusieurs  récoltes  de  blé,  a 
fait  craindre  un  instant  que  ceux  (|iii  voulaient  le  triom- 


XX 

plie  (l"une  théorie,  ne  l'emportassent  sur  la  niasse  des 
producteurs,  qui  voulaient  conjurer  une  ruine.  Mais  le 
Gouvernement,  voulant  de  bonne  Coi  être  éclairé,  les 
efforts  des  conseils  généraux,  des  sociétés  d'agriculture, 
d'Iionimes  considéraliles,  leur  iiersévérance,  les  })rotes- 
tations  venues  de  tous  les  points  de  l'Empire,  ont  fait  que 
cette  grave  question  a  été  examinée  sous  son  véritable  jour; 
l'échelle  mobile  a  été  maintenue  en  principe;  l'agriculture 
a  été  sauvée  d'un  désastre,  grâces  en  soient  rendues  à  tous 
ceux  qui  y  ont  contribué. 

«  Tout  n'est  pas  fait  cependant ,  si  le  blé  national  est 
protégé  contre  le  blé  étranger;  il  faut  aussi  qu'il  soit 
protégé  contre  la  mauvaise  farine  nationale,  qui  trouve 
d'autant  plus  de  débit  dans  la  boulangerie  qu'elle  est 
vendue  à  crédit.  C'est  d'une  police  vigilante  que  l'agri- 
culture attend  celte  protection  :  elle  l'attend  d'elle  aussi 
pour  toutes  les  sophistications  qui  lui  causent  un  préju- 
dice des  plus  sérieux,  telles  que  celles  des  soufres,  des 
huiles  et  des  vins.  Les  charges  augmentant,  le  revenu 
doit  les  suivre,  sans  cela  l'on  avancerait  au  rebours. 

«Comme  nous  le  disions  il  y  a  un  instant,  le  déficit 
des  soies  compte  au  nombre  des  perles  de  l'agriculture  : 
les  mûriers  et  les  vers  a  la  fois  sont  malades.  L'arbre 
esl  atteint  comme  la  vigne;  mais  le  ver?  Depuis  que  la 
science  a  trouvé  le  moyen  d'agglomérer  dans  un  même 
local  des  masses  énormes  de  vers,  il  s'est  déclaré  des 
maladies  qui  ne  sévissaient  pas.  La  réunion  sur  un  point 
d'un  trop  grand  nombre  d'individus  de  la  même  es- 
pèce, semble  être  contre  les  vœux  de  la  nature;  aussi 
les  petites  éducations  réussissenl-elles  généralement.  Un 
rafiporl  à  ce  sujet  va  dans  un  instant  jeter  du  jour  sur 


XXI 


celle  queslion  si  intéressanlc.  S'il  y  a  eu  des  mécomples 
pour  nos  sériciculleurs,  ils  leur  s'ont  communs  avec  tous 
ceux  de  la  France,  et  le  déparlement  n'en  est  pas  moins 
aussi  propice  qu'autrefois  a  l'éducation  de  l'espèce  bom- 
bycine. 

«  L'énumération  des  pertes  comprend  encore  malheu- 
reusement la  vigne:  une  lueur  d'espoir  avait  brillé  l'an 
dernier  ;  elle  s'est  évanouie  celle  année.  Ce  sont  les 
viticulteurs  les  plus  confiants  qui  sont  atteints.  Croyant 
à  la  cessation  de  l'oïdium,  ils  n'ont  pas  soufré  préventi- 
vement, et  le  mal,  rebelle  à  leurs  efforts  tardifs,  a  sévi. 
Cette  circonstance  prouve  une  fois  de  plus  l'excellence 
du  système  de  M.  Lafforgue.  On  ne  peut  pas  se  rendre  un 
compte  bien  exact  de  l'effet  du  soufre  sur  la  vigne  alors 
qu'on  n'y  voit  aucune  trace  d'oïdium;  mais  on  ne  peut 
contester  qu'il  ne  prédispose  les  raisins  à  n'être  pas  ma- 
lades. Quant  à  nous,  nous  croyons  à  plus  que  cela,  nous 
croyons  qu'il  détruit  l'oïdium  qui  existe  en  germe,  pour 
n'éclater  que  lorsque  l'état  de  l'atmosplière  lui  convient, 
de  même  que  les  mauvaises  graines  qui  sont  dans  le  sol 
ne  germent  que  lorsque  le  moment  opportun  est  venu. 
Il  nous  semble  que  pbysiologiquemcnl  l'oïdium  n'est  pas 
suflîsamnienl  étudié.  C'est,  d'après  nos  observations, 
une  végétation  parasite  du  printemps.  Elle  est  commune 
à  bon  nombre  de  végétaux;  tant  qu'on  la  remarquera  sur 
eux  dès  le  mois  de  mars,  la  vigne  ne  sera  pas  guérie. 
Aussi  pensons-nous  que  ce  n'est  que  pendant  le  prin- 
temps qu'il  faut  soufrer  les  ceps ,  en  commençant  de 
bonne  beure.  Si  l'on  songe  qu'à  la  Saint-Jean,  fin  du 
printemps,  le  bien  et  le  mal  sont  faits,  on  reconnaîtra 
que  notre  observation  a  quel(|ue  fondement.   I,es  viti- 


XXII 

culleuis  expériinenlés  seront  de  notre  avis,  nous  n'en 
doutons  pas;  ils  penseront  aussi,  comme  nous,  que  le 
soufre  doit  être  employé  sans  mélange. 

«  Qu'il  nous  soit  permis  avant  de  terminer,  d'ap{)eler 
votre  attention  sur  une  date  que  nous  ne  itouvons  pas 
laisser  passer  inaperçue.  C'est  le  7  novembre  1059  que 
le  Roussillon  l'ut  réuni  détinitivement  à  la  France,  à  la 
première  des  nations.  Cet  anniversaire,  deux  fois  cente- 
naire, va  sonner  dans  peu  de  temps;  nous  sommes  certain 
que  comme  nous  vous  le  saluerez  du  fond  du  cœur,  et 
que  vous  accorderez  un  souvenir  à  ceux  de  nos  ancêtres 
qui  ont  coopéré  à  ce  grand  acte.  » 

Dans  un  premier  rapport  sur  l'éducation  des  vers  à  soie 
dans  k  dqxniemcnt  en  1859,  la  commission,  dont  M.  Siau 
s'est  fait  l'organe ,  a  constaté  qu'une  amélioration  notable 
avait  eu  lieu,  et  elle  a  pu  se  convaincre  que  les  petites 
éducations  ont  les  plus  grandes  chances  de  succès.  C'est 
un  fait  acquis  depuis  longtemps,  et  confirmé  de  nouveau, 
cette  année,  par  les  détails  que  fournit  M.  Siau  sur  les 
éducations  de  MM.  Lopez  et  Trilla,  d'Ille;  Llopet,  de 
Serdinya,  et  Ange  Delpech,  de  Millas. 

M.  Siau  a  lu  un  autre  rapport  sur  la  fabrication  d'ou- 
vrages en  bois  dans  les  ateliers  de  M.  Hippolyte  Servole, 
situés  au  faubourg  des  Tanneries.  Les  détails  intéressants 
sur  la  vie  artistique  de  M.  Servole  et  sur  les  divers  objets 
qu'il  labri([ue,  ont  été  écoutés  avec  la  plus  vive  attention; 
on  comprend  qu'avec  un  maître  de  ce  mérite,  et  sous 
son  habile  et  patiente  direction,  les  apprentis  apprennent 
vite,   et   la  Société  n'a  pas  hésité  à  leur  témoigner  sa 


XXIIl 

sollicitude,  comme  elle  le  l'era  pour  (rautres  iiultislries 
épjalemeiit  mérilautcs,  qui  exisleul  dans  la  ville  de  Per- 
pignan. 

La  question  de  la  culture  horticole  a  donné  lieu  à  un 
troisième  rapport  de  M.  Siau,  qui  a  commencé  par  signaler 
l'importance,  de  plus  en  plus  grande,  (jue  prend  la  culture 
de  nos  jardins  et  celle  des  artichauts,  principalement  de 
la  variété  dite  blanche  ou  des  quatre  saisons ,  dont  le  pro- 
duit s'est  élevé  à  des  proportions  considérables,  depuis 
la  lin  de  septembre  jusqu'au  20  mai  dernier.  11  injporlait 
de  connaître  et  de  récompenser  ceux  qui ,  par  leurs  soins 
intelligents,  ont  le  plus  contribué  à  propager  cette  culture 
dans  notre  pays;  et  il  résulte  de  l'enquête  faite  par  la  So- 
ciété, que  celte  culture,  entreprise  sur  une  vaste  étendue, 
dès  1818,  par  Jean  Piquet,  aujourd'hui  décédé,  reçut,  peu 
d'années  après,  de  plus  grands  développements  par  les 
soins  d'Antoine  Coll,  Ignace  Figuères  et  Jean  Tarrissou. 
Des  récompenses  avaient  été  votées  par  la  Société  pour 
consacrer  le  souvenir  des  services  rendus  au  Uoussillon 
par  ces  trois  anciens  jardiniers.  Depuis  lors,  d'importantes 
améliorations  ont  eu  lieu  dans  la  culture  forcée;  mais  elle 
est  encore  trop  peu  étendue  dans  les  diverses  parties  de 
notre  département,  où  elle  pourrait  être  développée  à  bien 
peu  de  frais,  favorisée,  comme  elle  l'est,  par  notre  beau 
climat,  par  nos  canaux  d'arrosage,  et  surtout  par  notre 
position  lopographique.  Comme  preuve  de  ce  que  nous 
pouvons  espérer  dans  ce  genre,  M.  Siau  cite  les  noms  de 
ceux  de  nos  conqiatriotes  qui  avaient  fourni  leurs  produits 
pour  lexposilion  horticole  de  Carcassoime,  et  (pii  ont 
éh-  iiigés  dignes  de  récompenses.   IMiisit^irs  do  nos  jar- 


XXIV 

diniers  préparent  aussi  leurs  produits  pour  notre  concours 
régional  de  18G2,  qui  pourra  largement  récompenser  tous 
les  méritants. 

M.  Siau  fiiit  ensuite  connaître  le  mérite  d'une  variété 
de  fraisier  qui  avait  été  également  exposée  au  concours 
de  Carcassonne,  et  que  M.  Philippe  Massot  a  obtenue  par 
riijbridalion  du  fraisier  sauvage  de  rAlbère,et  des  grosses 
fraises  de  Paris,  que  M.  Routfia  avait  le  premier  intro- 
duites parmi  nous.  M.  Massot  a  donné  une  grande  exten- 
sion à  cette  culture  et  à  celle  des  asperges  de  Hollande 
et  d'Allemagne,  que  M.  Hippolyte  Picas  a  indroduites 
dans  le  département. 

M.  le  Rapporteur  fait  connaître  également  l'importance 
de  la  culture  d'asperges  deHoUande,  pratiquée  par  M.  Jean 
Roquefort,  qui  avait  déjà  fourni,  pour  l'exposition  de  Car- 
cassonne, des  asperges  classées  au  premier  rang  par  le 
Jury.  M.  Roquefort  se  recommande  à  d'autres  titres,  et 
M.  Siau  rappelle  qu'il  a,  l'un  des  premiers,  introduit  la 
culture  des  micocouliers  dans  notre  plaine.  M.  Massot 
s'est  aussi  fait  remarquer  par  les  perfectionnements  qu'il 
a  apportés  à  l'industrie  des  manches  de  fouet,  qui  occupe 
environ  loO  ouvriers  dans  le  département,  et  fournit  par 
an  22.000  douzaines  de  manches  de  fouet,  d'une  valeur 
totale  de  200.000  francs. 

M.  Siau  présente  encore  une  notice  sur  l'élève  de  la 
race  harbarine,  qui  offre,  sur  les  brebis  ordinaires,  des 
avantages  qui  ont  paru  évidents  à  la  Société,  et  ont  fait 
accorder  au  sieur  Castres,  dit  Général,  domicilié  à  Saint- 
Féliu-d'Avail ,  une  médaille  de  bronze  et  une  prime  pour 
la  propagation  de  cette  espèce. 


XXV 

M.  Siau  leniiine  ses  lectures  en  faisant  connaître  les 
quatre  niaitres-valets ,  dont  les  noms  seront  donnés  plus 
loin,  et  qui  ont  mérité  des  récompenses  pour  leur  conduite, 
lem-s  travaux  intelligents  et  la  durée  de  leurs  services  dans 
les  exploitations  rin-ales. 

Après  les  lectures  de  M.  Siau,  M.  l'ahbé  Delliostc  a 
transporté  l'auditoire  dans  un  de  ces  jardins,  où  la  main 
prévoyante  du  Créateiu-  a  réuni  les  plus  beaux  et  les 
meilleurs  fruits  de  la  terre,  — nous  étions  toujours  en 
Roussillon,  cela  va  sans  dire,  ~- a  l'ombre,  ou  plutôt 
en  face  d'innombrables  pècbers,  dont  les  fruits  savoureux 
sont  l'ornement  de  nos  tables,  après  l'avoir  été  de  nos 
jardins,  lis  sont,  en  outre,  une  source  de  richesse  pour 
nos  cultivateurs;  c'est,  du  moins,  ce  que  M.  Dellioste 
voulait  établir,  et  ses  bonnes  raisons  ont  dû  convaincre 
tout  le  monde.    Les  120  variétés  de  pêchers  cultivées 
dans  notre  département,  donnent,  dans  les  années  ordi- 
naires, un  revenu  considérable,  qu'il  importe  de  ne  pas 
laisser  diminuer,  et  qu'il  sera  possible  d'accroître  encore. 
C'est,  surtout,  en  envisageant  la  question  à  ce  dernier 
point  de  vue,  que  M.  Dellioste  indique  les  espèces  de 
pêchers   les  plus  productives   et   les   pins  favorables  à 
l'exportation,  et  par  conséquent  les  plus  utiles  a  notre 
département.   De  bons  conseils  sont  donnés  ensuite  sur 
la  culture  du  pêcher  et  sur  les  moyens  de  le  [)réserver 
des  ravages  des  insectes,  et  surtout  de  la  fourmi,  (jui 
est  son  ennemi  le  plus  acharne.  Malheureusement,  l'avenir 
et  la  prospérité  de  cette  culture  sont  un  peu  compromis 
par  la  délicatesse  de  l'arbre  lui-même,  ou  plutôt  par  sa 
vieillesse  précoce,  «  car  le  pi'cher  ne  vit  guère  que  l'es- 


XXVI 

«  pace  de  douze  à  quinze  ans,  el  encore  ne  donne-t-il , 
«  vers  la  lin  de  sa  vie  végétative,  que  des  fruits  petits, 
«  malades  et  peu  nombreux.  » 

M.  Crova  nous  a  ensuite  transportés  au  milieu  de  l'é- 
poque anté-historique,  dans  une  notice  sur  les  ossements 
fossiles  Ironirs  clans  les  havaiix  de  la  nouvelle  route  de 
grande  comniunication  de  Perpignan  à  Canct.  Les  ter- 
rains dont  ces  travaux  ont  mis  en  évidence  la  structure, 
font  partie  du  bassin  tertiaire  de  Perpignan,  qui  se 
continue  vers  Cabestany  jusqu'aux  environs  d'Argelès, 
se  rattache  aux  dépôts  tertiaires  marins  de  Banyuls-dels- 
Aspres,  Thuir,  Nelfiach,  Estagel,  dont  il  n'est  peut-être 
pas  rigoureusement  contemporain,  et  parait  s'étendre, 
vers  le  nord,  jusqu'aux  dépôts  secondaires  qui  com- 
mencent à  paraître  îi  Opoul  et  au-delà  de  Vingrau.  Des 
ravinements  creusés  par  les  eaux,  à  une  époque  reculée, 
y  ont  formé  la  dépression  dans  laquelle  sont  plantés  leg 
jardins  de  Saint-Jacques,  et  y- ont  fortement  accusé  un 
talus  qui  s'étend  de  Perpignan  au  voisinage  de  Canct,  par 
Castell-lîossello.  La  nouvelle  roule  est  tracée  le  long  de 
ce  talus,  sur  un  terrain  dont  la  structure  est  composée 
d'alternances  d'argile  et  de  sables  marneux.  Au-dessus, 
se  trouve  un  terrain  toul-à-fail  récent,  où  l'on  découvre 
une  assez  grande  quantité  d'ossements  se  rapportant  aux 
espèces  actuelles  et  associés  à  des  fragments  de  poterie 
et  de  débris  de  l'industrie  humaine.  M.  Crova  laisse  à 
l'archéologie  toute  cette  partie  du  terrain  qui  ne  se  rat- 
tache qu'à  l'histoire  de  l'homme;  il  cherche  beaucoup 
plus  bas  les  traces  des  êtres  qui  vécurent  les  premiers 
sur  les  bords  de  la  Tet.  Ses  recherches  ont  déjà  produit 


XXVll 


(l'iieuieux  résultats,  que  notre  incompétence  nous  permet 
tout  au  plus  (le  constater  ici;  encore  nous  mettrons-nous 
respectueusement  à  couvert  sous  la  décision  d'une  des 
autorités  scientifiques  les  mieux  établies  de  la  Faculté 
de  Montpellier. 

Les  débris  organisés  contenus  dans  les  argiles  et  les 
sables  fossilifères  de  notre  gisement,  consistent  principa- 
lement en  ossements  de  mammifères,  parmi  lesquels  les 
pachydermes  sont  surtout  abondants.  Parmi  les  genres 
déterminés  jusqu'à  présent  par  M.  Gervais,  se  trouvent 
un  rhinocéros,  un  antilope,  un  é(piidé  du  genre  hippa- 
ryon,  d'une  espèce  qui  était  complètement  inconnue  des 
savants,  et  que  M.  (Servais  a  appelé  hipparyon  crassiim; 
enfin,  de  petits  fragments  de  bois  de  dicotylédones  par- 
faitement pélriliés.  Tous  ces  débris  appartiennent  aux 
terrains  tertiaires,  probablement  au  miocène.  De  nou- 
velles fouilles  se  feront  dans  ces  lieux,  que  le  monde 
scientifique  de  la  France  méridionale  étudie  avec  le  plus 
vif  intérêt,  et  fourniront  sans  doute  des  faits  importants 
et  nouveaux  pour  l'histoire  géologique  de  notre  dépar- 
tement. 

Les  fouilles  de  M.  Alart  ne  s'opèrent  pas  aussi  pro- 
fondément dans  la  terre,  et  ses  études  ne  s'étendent  pas 
si  loin  dans  la  nuit  des  tenqjs.  Il  s'arrête  à  la  première 
moitié  du  xv  siècle,  et  jette  un  coup-d'œil  sur  la  cou- 
che la  plus  superficielle  du  sol  roussillonnais.  Que  s'y 
passait-il  h  cette  épocjue?  Les  rhinocéros  et  les  antilopes 
avaient  disparu  depuis  nombre  de  siècles  sous  d'épaisses 
couches  de  sable  et  d'argile,  et  c'étaient  de  bonnes  gens, 
des  hommes  créés,  comme  nous  tous,  à  l'image  de  Dieu, 


xxvm 


qui  vivaient  alors  près  de  la  Tet  et  sur  nos  montagnes. 
Mais  il  y  avait  entre  ces  manans  ronssillonnais,  liommes 
propres,  solins  et  amansats,  asservis  à  mille  redevances 
et  servitudes,  et  le  pages  de  nos  jours,  toute  la  dislance 
qui  sépare  le  serl'  de  l'honmie  franc  et  libre;  et  cette  dif- 
férence, quelque  ijrande  qu'elle  fût,  finit  par  disparaître  en 
Roussillon  pondant  les  cinquante  années  qui  précédèrent 
l'occupation  française  de  Louis  XI.  Ce  résultat  ne  s'obtint 
néanmoins  qu'après  un  long  siècle  de  guerres,  de  pillages, 
de  famines,  de  pestes  et  de  calamités  de  toute  espèce, 
qui  réduisirent  de  moitié  la  population  rurale  de  ce  pays, 
rendirent  les  manses  inhabitables,  et  en  imposèrent  l'af- 
franchissement complet,  comme  le  seul  moyen  qui  pût 
conserver  aux  seigneurs  les  revenus  de  leurs  possessions. 
Telles  furent,  selon  M.  Alart,  les  causes  et  les  circons- 
tances qui  transformèrent  en  Roussillon  les  conditions  de 
la  propriété  foncière,  et  rendirent  nos  i)ropriétés  territo- 
riales ce  qu'elles  étaient  en  89 ,  ou  à  peu  près  ce  qu'elles 
sont  de  nos  jours.  Pour  faire  voir  l'importance  de  cette 
révolution,  dont  il   fallait   aussi   explicpier  les  causes, 
M.  Alart  a  été  obligé  de  montrer  la  misérable  condition 
des  anciens    tenanciers    ronssillonnais    et   les  terribles 
épreuves  qu'ils   durent  subir   pour   être   affranchis ,    et 
c'étaient  nécessairement  des  couleurs  sombres  et  sévères 
qui  formaient  le  fond  de  ce  tableau. 

L'auditoire  a  été  ramené  à  des  scènes  plus  riantes; 
mais  nous  n'avions  pas  quitté  les  champs,  et  la  Muse 
se  tenait  encore  au  village ,  pour  une  fête ,  dont  le  Père 
Vanière  a  fait  les  premiers  frais,  et  que  M.  Fabre  a  tra- 
duite en  vers  français.  Le  Mariage  de  la  Villageoise  est 


XX  l\ 


un  des  plus  gracieux  épisodes  du  Prœdium  rusticum. 
Le  poète  de  Béziers  aimait  beaucoup  les  travaux  de  la 
campagne;  mais  il  était  presque  impossible  qu'un  auteur 
qui  connaissait  à  merveille  les  poètes  anciens,  ne  laissât 
pas  percer  quelques  réminiscences  païennes  dans  un 
poème  que  l'on  peut  dire  uniquement  inspiré  par  les 
Géorgiques  de  Virgile.  Noire  conq)atriote  s'est  attaché  à 
atténuer  autant  que  possible  toutes  ces  réminiscences, 
qu'il  ne  dépendait  pas  de  lui  de  faire  disparaître  entiè- 
rement. Cependant  la  traduction  est  aussi  fidèle  qu'une 
traduction  peut  l'être  :  elle  ajoute  quelques  traits  gra- 
cieux, en  atténue  d'autres  d'un  goùi  assez  équivoque, 
et  ces  modilîcations  paraissent  heureuses,  celles-ci  entre 
autres  : 

Elle,  les  yeux  baissés,  des  fleurs  à  la  ceinture, 
Marche  tiniidenient ,  gênée  en  sa  parure. 

Les  fleurs  à  la  ceinture,  (pii  ne  sont  pas  dans  le  texte 
latin,  ne  nous  déplaisent  pas,  et  la  fiancée  gênée  en  sa 
parure,  remplace  avantageusement  le 

Novis  sudore  madct  stib  vestibiis, 

du  P.  Vanière.  Les  divers  incidents  de  la  fête  sont  ainsi 
passés  en  revue,  sans  oublier  quelques  gens  mal  appris 
qui  toujours,  on  le  sait, 

Sont  prêts  à  s'égayer  sur  le  sort  des  maris, 

et  le  tableau  du  repas  final  retentit  d'une  franche  gaité, 
qui  contribue  au  bon  effet  de  l'ensemble. 


xxx 


La  séance  a  élé  termine''»'  par  la  lecture  de  (iuel«iiies 
bonnes  stances  de  M.  Sirven,  qui  les  appelle  son  dernier 
amour.  Ne  vous  effarouchez  pas.  11  ne  s'agit  pas  de  ces 
amours  de  cœur  ou  de  tète ,  qui  forment ,  dit-on ,  le 
roman  de  la  vie  de  jeune  homme,  mais  dont  on  poursuit 
vainement  les  feuilles  volantes,  lorsque  tous  les  cha- 
pitres sont  lus.  M.  Sirven  chante  aujourd'hui  son  pays, 
son  dernier  amour,  sentiment  vreux  comme  le  monde, 
mais  toujours  nouveau;  c'est  le  Dulcrs  reminisrÂtnr  Ar- 
gos,  qui  renaît  chez  Gnillem  de  Cabestany, 

On  II  remembre,  doussa  terra  e  'l  pais. 

Notre  chevalier  troubadour  du  xiic  siècle  n'avait  pas 
lu  Virgile,  mais  le  naturel  retrouve  partout  et  dans  tous 
les  temps  les  mêmes  expressions  pour  chanter  les  mêmes 
sentiments,  et  M.  Sirven,  qui,  depuis  bien  longtemps, 
aime  son  doux  pays,  retrouve  aujourd'hui  ses  inspira- 
lions  premières,  car  07i  revient  toujours  à  ses  premièi'es 
amours. 


Immédiatement  après  ces  lectures ,  M.  le  Président  a 
distribué  les  médailles,  primes  et  récompenses  accordées 
par  le  Ministère  de  l'Agriculture,  par  le  Conseil-Général 
et  par  la  Société  des  Pyrénées-Orientales. 

ÉDUCATION    DES   VERS    A   SOIE. 

M.  Llopet,  de  Serdinya,  médaille  de  bronze,  grand  mo- 
dule; -MM.  Lopez  et  ïrilla,  d'Ille,  médaille  de  bronze; 
—  M.  Ange  Delpech,  de  Millas,  médaille  de  bronze. 


XXXI 


lABRICATIOîS  n'oUVKAGES  EN  BOIS. 

Médaille  de  bronze,  grand  module,  à  M.  Hippolyte  Ser- 
vole;  —  mention  honorable  et  prime  a  ses  trois  apprentis, 
Maurice  Durand,  François  Pierson  et  Jacques  Basia, 

CULTURES  IIOlVnCOLES. 

Médaille  d'argent  à  M^I.  Antoine  Coll,  Ignace  Figuères 
et  Jean  Tarrissou;  —  médaille  de  bronze  à  M.  Etienne 
Gaillard,  dit  Estcve,  d'Olette;  —  mentions  honorables  à 
MM.  Louis  Ribes,  Jean  Coll,  François  Taillade;  —  men- 
tion honorable  et  prime  à  MM.  Joseph  Noguès  et  Jacques 
Hadie. 

CULTURES  HORTICOLES   ET  DES  MICOCOULIERS. 

Médaille  de  bronze,  grand  module,  à  M.  Philippe 
Massot;  — médaille  de  bronze  à  M.  Jean  Roquefort. 

AMÉLIORATION  DE  LA  RACE  OVINE. 

Médaille  de  bronze  et  prime  à  M.  Castres,  dit  Généra) , 
de  Saint-Féliu-d'Avail. 

SERVICES  RURAUX. 

Mention  honorable  et  primo  à  MM.  Fionaventure  Bonis, 
dit  l'alun,  premier  maitre-valel,  depuis  trente-cimi  ans, 
au  service  de  M'"e  Rambaud,  h  Pia;  —  Michel  Hibeil. 
premier  maitre-valet,  depuis  trente-deux  ans,  au  J7'/.v- 
Lederc,   près  d'Argelès ,   chez  Mn^e  Miquel  de  Riu  ;  — 


\X\\l 

Fran(,'ois  Biô,  premier  niaitre-valel ,  depuis  vingt-neiif 
ans,  à  la  métairie  dite  de  Mallolcs ,  chez  M.  P"^  Saisset; 
—  Matthieu  Carbasse,  premier  niaitrc-valet,  depuis  viugl- 
neuf  ans,  à  la  métairie  de  las  Llobères,  chez  M.  Joseph 
Jaunie. 


ÉPIGRAPHIH  HOIJSSILLONNATSE. 

Par  M.  Lovis  »b  Bonkefot,  Membre  résidanl. 


PKEMIEK  ARRONDISSEMENT.  —  SUITE. 

(Voir  les  10- et  H- Bulletins.) 


CLAYRA. 

142.  —Porte  de  l'église.  1279. 

t  :  ANNO  :  DOMIM  :  MILLESSI  fsic) 
MO  :  DVSSENTESIMO  fsicj  :  SEPTVA 
GESIMO  :  NOÎVO  :  QVINTO  j  IDV 
S     IVNII  :  OfMIT     l>OMI.NA     EU 
MENGARDIS    CONDAM     VXO 
R  i  RAYMVNDf     lAVBEini  : 
f>f:     CLAYRANO  :  CVIVS     AN 
IMA     REQVIESCAT  :  L\    PACI'   : 
DIC  :  l'ATER     NOSTER     PRO     ME  : 

I^a  première  syllabe  du  mot  iavberti  est  douteuse. 
U3.  —Porte  du  cimetière.  1344. 

ANNO  :  DOMIM  :  M  :  CCC  :  XL  :  ifir  : 

QVAUTO  :  DIE  :  NOVEMBRfS  : 

OBIIT  :  PETRVS   ■   MARTINI  \ 

"    TV  :  yvi  :  ME  :  LEGIS  :'dic  :  PRO  : 

ANIMA  :  MEA  :  SI  :  TIBI  :  Pl.ACET  : 

fATER  :  NOSTER  : 


Sui  la  |iicii'.',  I  ('iiilaplic  et  racclamalioii  sont  |»la((''cs 
en  regard ,  et  sé|iaréos  |)ar  la  Itraiiclic  supériciiro  d'ime 
croix  llcurddisée.  Au-dessous,  deux  écussons  stMnl)Ial)les 
à  celui  de  l'ordre  de  la  Merci,  (|ui  porlail  de  gueules  à  la 
croix  d'argent,  coupé  d'Aragon.  Pierre  Marti  lui  donc 
uienilire  religieux  (Ui  Iaï(|ue  de  l'ordre.  Est-ce  de  lui  ijuc 
fait  mention  Ribera,  sous  la  date  de  1525,  avec  le  titre 
de  Seigneur  d'Aldea  près  d'Amposta?  {Nucstra  Sei'iora 
lie  la  Merced,  centur.  i-^,  page  40o). 

144.  —  Cimetière.  1246. 

:  t  :  VII  :  ÎT  :  MADII  j  AN'N 
0  :  xFl  :  M  :  CC  :  XL  : 

•  •  •  •  'm 

VI  :  0    nOMO  :  QVI  :  ME  :  LEGIS 
CINIS  :  ES  :  ET  :  IN  :  CIXEREM  :  REVBRTEIl 
IS  :  VIDES  .;  ME  :  QVOD  j  SVM  :  ERIS  :  QVOD  : 
ES  :  FVI  :  DIC  :  PATER  :  NOSTER  :  IN  :  REMISSI 
ONEM  •:  ANIME  :  MEE  :  PAC  •  l^EMTENCIAM  : 
ORIIT  :  l'ETRVS  :   RI  j  REMVNTERII  i  :  f  : 

Formes  inusitées  :  les  N  armées  dune  traverse  hori- 
zontale et  semblables  a  nos  h  ,  le  b  différant  k  peine  du. 
K  par  une  légère  inflexion  de  la  panse  inférieure  vers  le  bas 
de  la  liaste ,  des  p  cl  des  r  a  panse  ouverte  dans  le  liant 
connue  la  branche  supérieure  du  k,  des  o  à  panses  distinc- 
tes ou  reliées  seulement  par  le  bas.  On  en  jugera  par  le 
fac-similé  des  trois  mots  anno  •  obiit  •  petuvs. 

'HHHO.omT.KTF^. 

143.  —  Cimetière.  1572. 

LO    SEYOR  :  EN   :  GVlLIiEM  :  CAP 
DEVILA  :  DE  :  CLAYRA 
:  FE  :  AQVESTA  :  CAPEL 
A   :   LAV   :   M   :   CGC   :   lAXIl   : 


Au-ilessns  de  rinscri|»lion,  los  armes  parlantes  du  Ton- 
dateur,  divisées  en  deux  écussons,  l'un  au  buste  de  lenime 
(cap),  l'autre  au  château  sommé  de  trois  tours  (vila). 

1/t6.— Cloches.  1528. 

Sur  la  plus  grande  (diamètre  :  lf",04.— Sol.)  : 

f  :  mm  :  DOMIM  :  M  :  CGC  :  \\  :  vfll  : 

i  :  XPE  :  Fir,[  :  DEt  :  VIV(  :  MISERERE  :  NOBIS  :  AMEN  : 

Sur  l'autre  (diamètre  0m,9o.  —  Si  bémol.)  : 

t  kmo  :  DOMIM  :  M  :  CCG  :  XX  :  VÎlI  : 
t  MEiMEM  :  SAXCTAM  :  SPONTANEAM  :  IIONOREM  : 
DEO  :  ET  :  PATRIE  :  LIBERATIONEM  : 

Reste  à  déchiffrer  le  nom  du  fondeur  inscrit  en  légende, 
autour  d'une  petite  cloche,  dans  un  médaillon  circulaire; 
je  l'ahaudonne  à  des  yeux  meilleurs  ou  plus  exercés! 
L'épaisseur  relative  de  ces  deux  cloches  est  à  noter  :  la 
première  est  en  quinze  bords,  la  seconde  en  douze  bords 
et  demi,  et  cependant  elles  sont  jumelles,  tout  le  dit, 
même  abstraction  faite  de  la  date. 

niAS-ROVIRA. 

147.  —Au-dessus  de  la  porte.  1195. 

ANNOJ  M  :  G  :  \C  :  III  :  XPI    INGARNAGIOMS 

^"  :^^: UltlS  :  OlllIT  :  BERENfiARivs  :  pRroR  : 

SANGTI  :  PETRI  :  DE  j  VIEARIO  : 
OR  AT ME  :  FRATRES 


Ce  marbre  a  été  tiré  du  prieuré  de  Saint-Pierrc-dii- 
Vilar  dont  on  voit  encore  la  chapelle  à  un  kilomètre 
environ  du  Mas-Kovira.  L'inscription  court  sur  le  cadre 
autour  d'un  personnage  en  bas-relief  couvert  d'un  vête- 
ment qui  s'arrête  à  mi-jambe.  Les  sept  premiers  mots 
sont  cbamplevés,  le  reste  est  gravé  en  creux.  C'est  le 
plus  ancien  document  qui  nous  soit  parvenu  sin-  le  petit 
prieuré  de  Saint-Pierre  dont  nos  archives  constatent  la 
décadence  dès  le  xiii^  siècle ,  et  la  réunion  h  la  cure  de 
Clayra  vers  le  milieu  du  xir^  siècle.  En  1552  on  trouve 
un  Guillaume  de  Pia  qualifié  de  Prinr  seu  Hector  ecdesie 
sandi  Vinmitii  de  CUnjrano,  en  1  i08  Guillaume  Brenach 
presbitcr,  oblinens  prioratus  parrorJnalis  ecdesie  sancli 
Vincemii;  et  d'une  date  à  l'autre,  et  postérieurement, 
c'est  toujours  '  Prior  de  Clayrano ,  ou  Prior  sandi 
Vincentii,  lorsque  le  titre  du  prieuré  est  exprimé,  jamais 
Prior  de  Yilari. 


FSPIRA-DE-L'AGLY. 

148.— Cimetière.  1280. 

:  i  ANNO  :  DOMINl  |  M  \  CC  :  LXX  :  Vllll  :  lit  :  NO 
:  MARCII  :  OBIIT  :  DOMINA  :  BF.RNARDA  :  VXOR  :  GAV 
r-ELMI  :  i\II[.ITIS  :  Dr:  :  VILLALONGÂ  :  QVI  :  TVMV 
LVM  :  CE:RNIS  :  CVR  :  NON  :  MORTALIA  j  SPERNIS  : 
TALI  •:  NAMQUn:  j  DOMO  :  CLAVDITVR  :  OMNIS  :  HOMO 
Dir.  :  PATER  •:  NOSTRR  :  PRO  [  ANIMA  :  MEA  i  AMEN 

Sur  les  bandes  verticales  de  la  bordure ,  deux  étoiles 
à  huit  rais,  deux  écussons  chevronnés,  une  main  bénis- 
sante, un  feuillage  enroulé.  Voir,  pour  la  date,  l'obser- 
vation faite  au  n"  104. 


5 
Î49.— Cimetière.  1280. 

f  i  ANNO  :  DOMINl  [  M  :  CC 

LX  .;  Ûl  :  VI  :  YDVS  :  lANVARII 

OlilIT  :  lOlIANNES  :  NAÏALIS  :  Dl- 

l'EariMANO  :  CVIVS  .;  ANIMA  :  HK 

QVIliSCAT  :  I.N  :  PASCI-   fsicj  :  CVlVS 

COIU'VS  :  FVJT  :  TUANSLATV.M 

AN.NO  :  DOMIM  :  M  :  ce  :  LXXX  :  V! 

•      •        •  •  rÀJlî)- 

lui    :    KL     KOVEMBUIS        l'OST   :    TESTVM    •    OMNIVM   • 

SANCTOKVM    QVI  :  I\IE  :  LEGIT  :  l'ATEK  :  NOSTEK  :  1)IC.\T. 

Je  ne  crois  pas  qu'on  puisse  lire  autre  chose  que 
i»0ST  l'ESTVSi  OMMVM  SANCTOiiVM  (l.ms  les  quatre  mots 
ainsi  abrégés  et  disposés  sur  le  marbre  : 

l»OS  :  Fi' ST. 


01 V   •  SC09 


Mais  alors  comment  expliquer  la  contradiction  dans 
les  termes  que  présente  cette  leçon  :  le  -i  des  calendes 
de  novembre  (:20  octobre)  rty/>V6- la  Toussaint  (jcr  novem- 
bre)? Par  une  distraction  du  lapicide  qui  lui  a  lait  subs- 
tituer le  nom  des  calendes  à  celui  des  nones,  iÎL  à  nn, 
c'est-à-dire  le  t2î)  octobre  au  2  novembre. 

Cette  formule  surérogatoire  ne  serait  donc,  à  mon 
sens^  qu'une  reclilication  telle  quelle  du  faux  quantième 
m  Kl.  Au  reste  l'inspection  seule  de  la  dernière  ligne 
prouve  que  le  post  feskun  omnium  sanctomm  napparte- 
nait  pas  à  la  rédaction  primitive.  Régulièrement  ces  mots 
ne  jtouvaient  y  trouver  assez,  de  place  qu'au.v  dépens  de 
la  |»nère  linale  qui  me  Icr/it,  etc.  Pour  ne  rien  sacrifier 
il  a  fallu  écrire  le  supplément  inattendu  en  petits  carac- 
tères, sur  double  ligne,  et  recourir,  quant  au  reste,  à 
toutes  les  ressources  de  la  brachygraphie. 


La  bonhire  de  celle  inscription  est  ornée  de  leuillages 
courants  et  de  quatre  écussons  chargés  d'une  coquille. 
Il  faut  appliquer  à  la  première  date,  celle  de  la  mort  de 
Jean  Nadal,  la  règle  établie  au  n*^"  lOi,  et  lire  1264. 

doO. — Cimetière.  1516. 

ANNO  :  DOMINl  :  M  :  CGC  :  fl  :  VII  :  ID-J  :  Al'llILlS 

OBIIT  :  VENERABILIS  :  DOMIINVS  •  ARNALDVS  :  CAYOTI  :  DEI  : 

GRATIA 
PRIOR   :   HVIVS   :   MONASTERll   :   i'RO    QVO  :  ET  :  SE  :   ET  : 

SVIS  I  PETRVS  :  PEREGRI 
NI  :  RECTOR  :  ECCr.ESlE  :  SANCTI  •'  NATSARll  :  INSTITV 

•  *  •  •  • 

Il  :  ANNIVERSARIVM  |  QVORVM  :  ANIME  :  REQVIESCANT  : 
IN    PAGE  :  AMEN  :  f  TRANSLATIO  :  DICTl  :  DOMINl  :  ARNALDI  : 
FVIT  :  FACTA  :  ANNO  :  DOMINl  :  M  :  CGC  :  \\  '  \TI 

•  •  •  «  •  *  • 

KL   :  FEBRVARII    j    DIC    :    PRO     EIS  :  PATER  •  NOSTER  :  ET  : 
AVE  :  MARIA  : 

Sur  la  bordure,  des  feuillages  enroulés;  à  chaque 
angle,  un  écusson  chargé  d'un  loup  (?).  Voir  j)Our  la 
date  de  la  translation  la  remarque  faite  au  n»  lOi. 

Un  parchemin  des  archives  du  Domaine  nous  a  con- 
servé l'acte  de  l'élection  d'Arnaud  Canyot,  à  la  date  du 
1i  des  calendes  de  février  4279  (19  janvier  4280).  Voici 
la  substance  de  cette  pièce  :  L'évêque  diocésain,  Bernard 
de  Sala,  se  rendit  au  monastère,  accompagné  de  deux 
chanoines,  fondés  de  pouvoirs  du  chapitre  d'Elnc;  la 
communauté  désigna  de  son  côté  trois  de  ses  membres, 
et  les  cinq  élus,  après  délibération,  proclamèrent  Arnaud 
Canyot,  dont  le  choix  fut  approuvé  par  l'évêque. 

Deux  mots  sur  l'origine  du  prieuré  d'Espira-de-l'Agly. 
Les  titres  578,  587  et  589  de  VApcndix  au  Marca 
Uispanica  nous  apprennent  :  1".  Que  le  o  des  ides  de 


juin  117)0,  (Idalgar,  L'vè((uc  d  Kliic ,  consacra  l'église 
d'Es|)ira,  nouvellement  construite,  sous  le  vocable  de 
Notre-Dame;  !2"  Que  le  5  des  ides  de  novembre  WôA, 
l'abhé  de  Sainl-Michel-de-Cuxa  et  ses  moines  cédèrent 
à  l'évèque  Udalgar,  déjà  nommé,  et  au  chapitre  d'Elne, 
l'église  d'Espira ,  en  échange  de  celle  de  Saint-Vincent 
de  Ria;  o^  Que  le  8  des  calendes  de  janvier  1156,  le 
même  évê(|ue  fonda,  pour  desservir  l'église  d'Espira,  un 
chapitre  assujetti  à  la  règle  de  saint  Augustin,  el  qu'il 
plaça  la  communauté  naissante  sous  la  direction  de 
Pierre  Arnaud,  chanoine  d'Elne,  avec  le  litre  de  prieur. 
Oans  ce  dernier  acte  est  établie  pour  l'avenir  la  l'orme 
d'élection  ci-dessus.  Vers  la  lin  du  xiv'^'  siècle  (G  octobre 
1581),  le  chapitre  d'Espira  l'ut  transféré  à  l'église  de  la 
Réal  à  Perpignan  :  toutefois  le  prieuré  fut  maintenu 
comme  prieuré  détaché,  après  cette  translation. 

Je  signale,  en  passant,  à  l'attention  des  archéologues 
la  curieuse  église  d'Espira;  ses  murs  épais  revêtus  de 
marbre  de  la  base  au  faite;  ses  absides  jumelles,  obstruées 
maintenant  par  une  tribune  ;  sa  porte  digne  sœur  de  celle 
de  Cornclla-de-Coullent  beaucoup  plus  coinuie  et  seule 
citée,  à  cause  du  voisinage  de  rélaldissemenl  thermal  de 
Vcrucl.  Le  plein  cintre  règne  partout  jusqu'à  la  voùle 
(|ui  est  ogivale,  ainsi  que  le  clocher. 

151.  — Cimetière,  xiv^  siècle. 

:  BOFAT  :  FVSTER  •'  DLl  :  BAYXAS  :  :f  :  : 

Sur  la  traverse  d'une  croix  tréllée,  on  marbre  blanc. 
Ce  débris,  qui  voyage  d'une  tombe  à  l'autre,  périra 
infailliblement,  si  on  ne  prend  pas  la  précaution  de  l'en- 
castrer dans  le  mur  d'enceinte  du  cimetière,  à  coté  d(>s 
inscriptions  précédentes. 


NOTRE-DAME-DK-rElXE. 

152. —  Citerne.  1414. 

A     IHS  :  XPS 

:  LAY   :   MCCCCXIIll  :   FOV 

FEYTA  :  LA     CISTliRNNA  (tkj 

:  PER     MA   :  DEN     BERNAT  :   AN(J1. 

ES     PEYRER  :  DE     PERPENYA 

AM     LAVMOYNE  :  DE     LA 

BONA  :  GENT  : 

En  deux  pièces  superposées,  celle  de  dessus  formant 
corniche  ;  l'acclamation  est  gravée  dans  un  cavet.  Sur  la 
pièce  inférieure ,  le  reste  de  l'inscription  d'abord ,  en 
gothique  carrée  h  pointes  lancéolées,  comme  aux  n°^  36 
et  54;  au-dessous  un  losange  en  relief  retenu  par  des 
griffes  sur  ses  quatre  faces  et  chargé  d'une  truelle,  attri- 
but de  profession.  La  gravure  fait  honneur  au  ciseau  de 
Bernard  Angles. 

On  doit  la  conservation  de  ce  monument  à  M.  Jaubert 
de  Passa  qui  l'ayant  trouvé  hors  de  place  et  menacé  de 
destruction,  le  fit  apporter  chez  lui  à  Perpignan  jusqu'à 
l'entier  achèvement  des  réparations  entreprises  à  la 
citerne.  Il  a  été  réintégré  par  les  soins  de  M.  L.  Jusl, 
dont  on  connaît  le  zèle  pour  nos  ermitages. 

BAIXAt». 

i53.  —  Ancien  hôpital.  1557. 

ANNO  •  DOMINI  •  M  C(!c  .  XXX  VII  •  FO  •  HEDIFICAT 
LO  ESPITAL  •  PEU  W  ERMEiNGAV  PARAYKE  DE 
PERPENYA  FIL  DEN  •  ERMENGAV  •  SA  ENTRAS  •  DE 
BAYXAS    •    AB        Mil        LITS    •    DE   •   DRAPS       TOT       FATT 


9 

ASSA  •  l'ROPI  •  MKSSIO  •  A  •  HONOR  ■  I)K  •  !NOSTRE 
SENYOR  ■  DEV  •  IHESV  XPIST  •  E  •  DE  •  LA  •  VERGE 
MARIE  •  MARE  •  SVA  •  EN  •  QVE  •  ELS  •  l'OBRES  •  SIEN 
RECVLITS  E  •  ALHARGATS  ■  PER  •  TOTS  •  TEMPS  •  AL 
DIT  ESPITAL        AB        LOS       VIII         LITS    •    DE        DRAP 

DEV   •   TENIR    TOSTEMPS        LA    •    CUMVMTAT       DE 

BAYXAS       COM ES   •   PER       EN       lOIIAN        RAS 

DE   •   BAYXAS       AYSO   •   FO       FAYCT 

Celte  inscription  et  les  deux  suivantes  {n^^  154  et  loo) 
ont  été  prises  dans  un  ancien  recueil  auquel  j'ai  déjà 
fait  quelques  emprunts.  C'est  assez  dire  que  les  marbres 
sont  perdus,  ou  que  du  moins  je  les  ai  vainement  récla- 
més sur  les  lieux  pour  collationner  et  compléter  la  leçon. 

iM.  —  Église.  1210. 

ANNO  DOMINl  MCCX-   IDVS  APRILIS 

HIC  lAGET  BERNARDVS  PVBENS 

LOCO  lACET 

1S5.  — Église  (?).  1505. 

A   DEL   MES    DE    IVNY    I-50  3     EN    ESSENT   CONSULS 

GREGORI    II    ROG  MAIOR  DE  DIES  Y  MIQVEL  LLIMOS  Y  ANTICU 

COLELL  Y    II    ORRES  lOUAN    PRATS    Y    ANTONI    GVIRART 

AU  TOT  1.0  GONSELL. 

MILLAS. 

156.^  Église. 

On   conservait  dans  la  sacristie  de  l'église  de  .Millas 
'inr  armoire  dont  l'intérieur  (fond,  côtés,  ciel  el  vaiilaux) 


10 

('lait  couvorl  d'anciennes  peintures.  Au  tond  Dieu  le  liis, 
assis,  bénissant  de  la  main  droite,  tel  en  un  mot  qu'il 
est  partout  représenté;  sur  le  vantail  de  droite,  le  mys- 
tère de  l'Annonciation  avec  ces  mots  :  ecce  ancilla 
DOMIM.  Mes  souvenirs  ne  vont  pas  au-delà.  C'est  bien 
peu  sans  doute,  mais  rien  ne  pouvait  me  faire  prévoir, 
la  dernière  fois  que  j'ai  vu  ce  joli  meuble,  (lu'il  passerait 
à  l'improviste  dans  l'atelier  d'un  brocanteur,  et  me  lais- 
serait le  regret  de  n'avoir  pas  arrêté  par  écrit  des  notes 
précises  en  tenq)S  opportun.  L'armoire  de  Millas  brossée, 
lavée,  rafraîchie,  orne  déjà  sans  doute  le  cabinet  d'un 
heureux  amateur  qui  l'a  payée  à  chers  deniers.  Loin  de 
moi  la  pensée  de  provoquer  le  bruit  ou  ce  qn'on  ne 
manquerait  pas  d'appeler  du  scandale,  autour  de  ce  fait 
sans  remède  ;  mais  il  a  eu  ses  précédents,  cl  l'on  a  jugé 
qu'il  valait  mieux  se  taire  :  le  silence  indélini  deviendrait 
complicité.  Bornons-là  ces  réflexions;  aussi  bien  seront- 
elles  autant  de  coups  d'épées  dans  l'eau. 

S'il  faut  en  croire  la  rumeur  publique,  une  autre  inscrip- 
tion nous  échappe  non  loin  de  Millas.  Elle  fut  découverte, 
dans  les  derniers  mois  de  1858,  au  milieu  des  travaux 
de  terrassement  entrepris  à  Force-Réal,  pour  agrandir  la 
plate-forme  de  l'ermitage  ,  et  disparut  la  nuit  suivante 
sans  qu'il  ait  été  possible  d'en  retrouver  la  trace.  Cet 
enlèvement  réveilla  le  souvenir  d'une  tradition  séculaire 
de  trésor  enfoui  sous  les  ruines  de  l'ancien  château  dont 
les  restes  sont  encore  debout.  On  se  raconte  même 
tout  bas  les  mystérieux  détails  de  séances  nocturnes  de 
magnétisme  et  de  baguette  divinatoire  tenues  auprès  de 
la  chapelle.  Les  Esprits  n'ont  |)as  donné  des  nouvelles  de 
la  pierre  ;  quant  aux  révélations  quil  leur  a  plu  de  faire 
sur  l'existence  et  le  gîte  du  trésor,  elles  ne  sont  pas  de 
mon  sujet.  Le  public  attend  avec  impatience  une  double 
notice  religieuse  et  monumentale  sur  la  chapelle  et  le  châ- 
teau de  Forco-Kéal ,  tpi'oii  dit  être  sous  presse. 


11 


COIUIKRA-D'AMOIVT. 

J57.  —  Vieille  église  de  Saint-Pierre,  xiv^  siècle. 

lOIlANNKS  :  RES 

:  ECCLESIE  :  SANCTI  :  PETRI  :  DE  CORBARIA 

Au-dessus,  le  délunt  en  habits  d'olliciant. 

158.  —Vieille  église  de  Saint-Pierre.  1541. 

LO  RETAVLA  SE  l'OSA 
A  X  DE  DESEMRRE 

Peint  en  rouge  sur  le  tympan  de  la  porte.  On  cherche 
vainement  le  retable  à  l'intérieur  de  Tédilice,  tout  y  est 
dévasté;  les  murailles  ont  perdu  même  partie  de  leur 
revêtement  de  calcaire  rouge  :  la  voûte  se  crevasse  et 
n'abrite  plus  que  deux  tombes  récentes. 

159.  —Cloche  de  l'église  paroissiale.  1585. 

AVE  MARIA  GRATIA  l'LENA  DUMfiXVS  TIXVM.   ^585. 

160.  —  Puits  du  château,  xv  siècle. 

HONORAT  DOMS. 

J'hésite  à  croire  que  cette  pierre  ait  toujours  appartenu 
à  la  margelle  du  puits  dont  elle  lait  partie.  Au  reste,  le 
nom  d'un  mendtre  de  la  famille  d'Oms  ne  peut  causer  ici 
de  surprise.  Le  château  de  Corbéra,  avec  ses  déj)endances, 
lïil  apporté  dans  cette  maison  par  Huguetle  de  Ça 
(iarriga  (voir  n"  180)  qui  donna  sa  uiaiu  à  IVrnanl, 
(lualrième  du  nom,  d'après  une  généalogie  tenue  |)om 
aiillienlicpie. 


12 


On  Iroiivf  au  inèiue  lieu ,  depuis  quatre  ans ,  l'inscrip- 
lion  des  coknllivs  et  celle  de  Jean  Blaitcha ,  déjà  rap- 
portées ci-dessus  lU"*  32  et  55). 


conni-UA-Di-r-MiG,  ou,  lf.s  coutals. 

161.  —  Puits  coininunal.  xi»-"  siècle. 


DEI  :  ET  SAiNCTI  PE 

RVS  :  GAETERII 

OUE       SVA 

EORVM 

REME 

D'après  les  souvenirs  d'un  vieillard  de  Corbéra,  ce 
marbre  est  descendu  de  l'église  abandonnée  de  Saint- 
Pierre  dont  il  vient  d'être  question  (no  1Î)(S).  J'accepte 
ce  témoignage  d'autant  plus  volontiers  que  le  parement 
intérieur  du  vieil  édifice  a  été  souvent  mis  à  contribution, 
que  notre  fragment  n'est  pas  à  sa  place,  et  qu'il  me 
semble  appartenir  à  l'inscription  commémorativc  d'une 
consécration.  Serait-ce  en  effet  trop  accorder  aux  con- 
jectures que  de  compléter  ainsi  la  formule  :  Anno  incar- 

nationh   dominicœ consacrata  fuit  hœc  ccclesia  in 

honoreni  dei  et  sancti  VEtri ?  L'identité  d'âge  entre 

le  monument  et  l'écriture  fournit  un  dernier  motif  de 
probaiiiiité.  En  groupant  plusieurs  rectangles ,  dont  un 
seul  représente  ce  qui  existe,  j'ai  voulu,  s'il  se  pouvait, 
rendre  sensible  l'idée  que  je  me  fais  de  l'inscription 
entière.  Elle  était  gravée  sur  le  mur  et  conviait  plusieurs 


pièces  de  rapparcil.  I.(^  trat,niient  sauvé  serait  une  de  ces 
pièces,  i)artie  aliqtioto  de  l'ensemble.  L'examen  le  plus  at- 
tentilnem'y  a  fait  reconnaître  aucune  trace  de  mutilation. 

s.\i\t-fI':lii'-I)'amo\t. 

162.— Église.  Table  d'autel. 
€amos,  Jardin  de  Maria,  p.  5i5. 

L'église  de  Saint-Féliu-d'Amont  est  dédiée  à  Notre- 
Dame  de  la  Salvetat,  appelée  aussi  Notre-Dame  des  Lettres 
(Nostra-Senj/ora  de  las  Lleiras)  à  cause  de  quebpies  noms 
propres  gravés  sur  la  table  du  maitre-autel ,  entremêlés 
de  monogrammes,  croix  et  autres  signes.  On  pressent 
une  légende;  je  la  copie  dans  l'bistorien  des  sanctuaires 
de  Notre-Dame  en  Catalogne,  Fra  Narciso  Camos.    «  Le 
«  ciel  opère  une  grande  merveille  sur  la  table  de  l'autel 
«  de  cette  Vierge  sainte.    On  y  voit  api)arailre,  pendant 
«  la  nnit  de  l'Annonciation,  des  lettres  gravées  comme 
«  avec  la  pointe  d'une  aiguille,  à  peine  visibles  d'abord, 
«  se  formant  peu  h  peu  et  s'approlbndissant  jusqu'à  ce 
«  (pi'elles  soient  parvenues  à  leur  entier  développement  ; 
«  dilliciles  à  lire  néann)oins,  car  il  y  en  a  d'iiébraicpies, 
«  de  grecques  et  de  latines,  les  unes  petites  et  les  autres 
«  plus  grandes.   Dans  le  nombre  on  distingue  quebpies 
«  noms  comme  Salamo,  Bcrlo  ci  Albckik,  et  çà  et  là  des 
«  croix  entremêlées.  Kntr'autres  singularités  qui  accom- 
«  pagnent  ce  prodige,  on  a  observé  que  les  lettres  appa- 
«  raissent  au  nombre  de  trois,   de  cinq,    ou   de  sept, 
«  suivant  les  années,  et  que  ce  dernier  nombre  est  tou- 
rt  jours  le  signe  d'une  récolle  abondante.  Ces  lettres  sont 
«  répandues  sur  toute  la  surface  de  l'autel,  et  dans  cer- 
«  taines  parties  on  reconnaît  qu'elles  ont  été  elfacées; 
«  rien  de  plus  naturel  d'ailleurs,  car  s'il  en  était  autre- 
«  ment,  la  table  serait  pleine  depuis   longtemps,   tandis 


1* 

«  que,  au  oontraire,  il  reste  toujours  un  espace  vide.  La 
«  nuit  (le  rAnnoncialion ,.  un  grand  concours  de  peuple 
«  se  presse  et  veille  dans  Téglise,  louant  Dieu  et  sa 
«  saiute  Mère.  »  (Camos.  Loc.  Cit.) 

Telle  est  la  légende  qui  avait  cours  il  y  a  plus  de  deux 
siècles.  Canios  n'invente  pas;  pieux  visiteur,  il  observe, 
il  interroge,  il  prend  des  notes  pour  son  Jardin  de  Maria, 
et  ce  qui  peut  être  aujourd'hui  contrôlé  dans  cet  ouvrage 
est  d'une  si  scrupuleuse  exactitude  qu'on  s'en  rapporte 
pleinement  à  la  bonne  foi  de  ses  récits.  Mais  laissons  le 
merveilleux  et  venons  à  la  réalité,  c'est-'a-dire  aux  noms 
propres  gravés  sur  l'autel.  On  y  lit  encore  bien  clairement  : 

IVLIA  •  SALAMON  •  ALBARICVS  • 

Du  BERTO  cité  par  Camos  on  distingue  les  trois  dernières 

lettres.  A  part  quelques  syllabes  isolées,  tout  le  reste  est 

confus,  et  la  lecture  en  pourrait  être  facilement  contestée. 

Le  bon  chroniqueur  ne  se  doutait  pas  que  ces  caractères 

mystérieux  avaient  été  tracés  de  main  d'homme  par  des 

pèlerins   qui  l'avaient  précédé  de  plusieurs  siècles   au 

sanctuaire  vénéré  de  Notre-Dame  de  la  Salvctat.  Suivant 

un  usage  qui  remonte  bien  haut  dans  l'antiquité,   ils 

avaient  laissé  le  témoignage  de  leur  pieuse  visite,  mais 

la  tradition  de  cet  usage  s'était  perdue.  «  On  sait,  dit 

«  M.  Edmond  Le  Blant,  qu'en  visitant  un  lieu,  un  mo- 

«  numeut   célèbre  ou   vénéré,   les  païens  y  laissaient 

«  souvent  la  trace  écrite  de  leur  passage.   Ces  actes 

«  d'adoration  ou  de  visite,  ces  proscynèmes,  comme  ils 

«  se  nomment  eux-mêmes,  se  retrouvent  particulièrement 

«  en  Egypte,  sur  les  pyramides,  sur  le  colosse  de  Mennion 

«  et  dans  les  syringes  de  Thèbes.   Aux  premiers  siècles 

«  de  l'Église,  les  pèlerins  chrétiens,  continuant  l'usage 

«  antique,  ont  gravé  sur  des  monuments  sacrés  leurs 

«  noms,  et,  parfois  aussi,  quelques  lignes  empreintes 

«  d'un  pieux  respect.  La  chapelle  centrale  du  cimetière 


15 

«  de  Saint-Callislo,  réceminenl  découvcrle  par  le  savant 
«  M.  (le  Ilossi ,  pi'éseiito  plus  de  trois  cents  inscriptions 
«  ainsi  gravées  [)ar  les  visiteurs.  La  Gaule  me  parait 
«  apporter  de  même  plus  dune  preuve  de  l'antiquité  des 
«  pèlerinages.  »  (Inscripl.  chrét.  de  la  Gaule,  tome  I, 
p.  i85.  ) 

Les  proscynèmes  de  Saint-Féliu  seront  sans  doute  une 
des  preuves  apportées  par  M.  Edmond  Le  Blant,  mais 
seulement  pour  établir  la  perpétuité  de  l'usage  après  les 
temps  qu'il  étudie.  Son  cadre  n'embrasse  que  les  sept 
premiers  siècles ,  et  je  ne  crois  pas  que  nos  signatures 
atteignent  la  limite  la  plus  rapprochée  de  cette  période. 
Il  n'est  et  ne  peut  être  ici  cpieslion  que  des  trois  mots 
intégralement  conservés.  J'ai  dit  qu'un  grand  nombre 
d'autres  laissaient  apercevoir  leur  silhouette  incertaine , 
et  ce  ne  sont  pas  les  moins  anciens.  Les  sigles,  les 
monogrammes,  les  croix  sont  entassés  sur  les  bords;  ils 
devieniient  très-rares  au  contraire  vers  le  milieu  de  la 
table,  où  l'ardoise,  en  s'efléuillant,  a  perdu  la  bonne  part 
de  ses  plus  vieux  souvenirs.  Nous  aurons  le  dernier  mot 
sur  l'autel  de  Saint-Féliu  dans  le  deuxième  volume  de 
rexcellcnl  ouvrage  déjà  cité.  Mais  sans  attendre  l'opinion 
du  savant  épigraphiste  sur  l'âge  approximatif  de  nos  pros- 
cynèmes, nous  [)ouvons  d'avance  les  ranger  parmi  nos 
inscriptions  les  plus  intéressantes.  A  ce  titre  ils  se 
recommandent  d'eux-mêmes  à  la  sollicitude  de  MM.  les 
Curés  qui  se  succéderont  à  la  desservance  de  la  succursale. 

163.— Église.  Chapellede  Notre-Dame  du  Rosaire.  1585. 

:  vin  :  YDVS  :  IV  MI  :  AN  NO  :  NA 
TIVITATIS  :  UOMIM  :  M  :  CGC  :  LXXX  :  V  :  OBI 
ir  :  VENIlUABILIS  :   IJERTKANDVS 
.       iOUDANl  :  I-ILIVS  :   liOMORABI 

LIS  :  DOMINI  :  GVILLl-LMt  :  KUIDAM  :  CVIVS 
ANIMA  :  REQVlliSCAl    :   IN     PACI'    :  AMEN 


Gothique  carrée.  Je  signale  ce  ^'eiire  d'écriture  chaqu.- 
fois  qu'il  se  présente  au  xiv«  siècle ,  où ,  chez  nous ,  il 
fait  encore  exception.  La  borilare  est  ornée  de  guirlandes 
et  de  quatre  écussons,  l'un,  celui  de  l'angle  supérieur  à 
gauche,  carré,  posé  sur  pointe  et  adiré;  les  autres,  de 
forme  ordinaire,  chargés  de  trois  fasces. 

164.    -Église.  Dalmatiquc.  \oM. 

On  trouve  dans  le  modeste  mobilier  de  l'église  de 
Saint-Féliu-d'Aniont,  deux  dalmatiques  en  soie  rouge, 
relevée  de  quelques  broderies.  Sur  le  devant  est  la  date 

ANY  iUbi. 

Derrière,  en  haut,  saint  Gaudéric  à  mi-corps,  barbu, 
nimbé,  un  épi  de  blé  dans  la  main  droite  et  le  pouce  de 
la  main  gauche  engagé  dans  la  ceinture,  simple  courroie 
d'où  pend  une  aumonière.  Il  est  enfermé  dans  un  mé- 
daillon circulaire,  parsemé  d'étoiles  dans  le  champ.  En 
bas,  une  bordure  assez  large  en  festons  de  bon  goût  ait 
centre  desquels,  l'inscription  suivante  : 

SANTE   •   GAV 

DEiur.E  .  oITa 

ajoutons  pko  nobis  sommairement  représenté  par  la  barre 
horizontale  jetée  au-dessus  du  dernier  mot.  L'extrémité 
des  épaulières  porte  également  des  broderies.  Une  frange 
en  soie  jaune  et  rouge  suit  les  bords  du  vêtement. 

465. —  Église.  Chape.  1552. 

Avec  romemenl  qui  précède  est  conservée  une  chape 
en  velours  rouge  à  grandes  fleurs,  vulgairement  connu 
sous  le  nom  de  velours  d'Utrecht.  Les  broderies  y  sont 
plus  riches  que  celles  de  la  dalmatique.  ['ne  bande  à  fond 
bleu,  relevée  de  jolis  dessins  en  soie  jaune,  descend  per- 


pendiculairenient  des  deux  côtés  en  guise  d'orfroi.  Le 
chaperon  est  d"une  seule  pièce  d'épaisse  broderie  :  sous 
un  édicule  assez  lourd  soutenu  par  deux  colonnes  massi- 
ves, saint  Gaudéric  en  pied,  nimbé,  une  poignée  d'épis 
dans  la  main  droite,  et  s'appuyant  de  la  gauche  sur  une 
fourche  à  trois  branches.  Le  champ  est  parsemé  d'étoiles 
et  de  rinceaux.  Au-dossous  du  chaperon,  vers  le  bas  de 
la  chape,  au  milieu  d'un  cadre  rectangulaire  : 

SANCTK  :  GVALDli 

HICE  :  (tUA     PR 

0     NOBIS   •    AN  Y       lS.i2 

Chape  et  dalmatiques  appartenaient,  dit-on,  jadis  a  I;i 
sacristie  de  Saint-Martin-de-Canigô,  d'où  elles  passèrent 
à  celle  de  Saint-Félin,  après  la  sécularisation  du  monas- 
tère, vers  la  lin  du  siècle  dernier.  L'image  représentée  sur 
l'une  et  l'autre  confirme  cette  tradition,  moderne  d'ailleurs 
et  dont  on  trouverait  peut-être  encore  quelque  témoin 
vivant.  On  sait  que  les  reliques  du  saint  laboureur,  dépo- 
sées aujourd'hui  dans  une  chapelle  de  la  cathédrale  à 
Perpignan,  étaient  honorées  et  conservées  de  temps  im- 
mémorial à  Saint-Martin.  On  recourait  h  leur  intercession, 
comme  ou  le  l'ait  encore,  contre  le  lléau  des  sécheresses 
brûlantes  qui  désolent  trop  souvent  nos  plaines.  La  châsse 
descendait  alors  processionnellement,  portée  par  les  moi- 
nes, jusqu'à  Perpignan  et  même  jusqu'à  la  mer.  (Voir 
pour  les  détails  les  Mémoires  de  la  communauté  de  Saint- 
Jean  de  Perpignan.) 

Ififi. — Église.  Mur  do  l'ouest.  xii«  siècle. 

:  XVI  .;  I    IVMI  : 
(ujirr  :  uwrRK 

I)V    |{ 

Il  : 

9 


18 

L'église  de  Saint-Kéliu-d'Ainonl  lui  longlem[)S  desservie 
par  des  religieux  de  la  congrégation  de  Sainl-Iluf,  sous 
la  direction  diin  prieur.  Les  fastes  de  la  communauté  ne 
vont  pas,  à  ma  connaissance,  plus  haut  que  les  premières 
années  du  xiii"  siècle,  mais  l'origine  est  plus  ancienne. 
Notre  inscrii>lion  qui  remonte  certainement  aux  premières 
années  du  xiF,  est  peut-être  l'épitaplie  dun  prieur.  La 
position  délavorable  de  la  pierre  jointe  à  son  étal  de 
dégradation ,  m'ont  empêché  de  déterminer  ce  (ju'il  y  a 
de  vrai  dans  cette  hypothèse.  Elle  se  trouve  au  ras  du  sol 
et  le  salpêtre  la  ronge  ;  il  est  à  désirer  qu'on  l'encastre 
quelques  pieds  plus  haut  perpendiculairement  au  même 
gîte,  il  n'y  aurait  pas  déplacement  pour  ainsi  dire;  d'ail- 
leurs les  motifs  très-sérieux  qui  s'opposent,  en  thèse 
générale,  au  déplacement  des  mouunents  épigraphiques, 
ne  peuvent  prévaloir  contre  le  principe  de  conservation. 


SAINT-FELIU  -D'A  VA  LL . 

167.— Église.  Autel  de  Notre-Dame  du  Rosaire.  1 318 (?). 

t  ANNO  :  DOMINI  :  M  :  CGC  :  Xvfl  :  KL  :  FEBROARII  :  OBIIT 
FELIX  :  GIL\BERTI  :  SACRISTA  :  CONDAM  :  ISTIVS  : 
ECCLESIE  :  QVI  :  INSTITVIT  :  SACERDOTEM  :  ET     ANNIVERSA 
RIVM  :  IN  :  ISTA  :  ECCLESIA  :  ET  :  EODEM  :  ANNO    :    OBIIT  : 
GVILLELMVS  :  GILABERTI  :  FRATER  :  EIVS  : 

Grâce  h  sa  position  derrière  les  gradins  de  l'autel,  ce 
marbre  est  sans  blessure.  D'après  les  observations  ci- 
dessus  (nos  101  et  lOi),  il  faut  lire  à  la  date,  ou  1501, 
le  17  des  calendes  de  février,  ou  1318,  le  jour  des  calen- 
des de  février. 


19 


ir.K 


LE  SOLER 

s.  - 

-  Kglise.  l 

554. 

PERE  ftlIQVELL 

FABRE 

j.   . 

1 

A       0   ■   DEL   •   MES 

DE 

•   IVLIOL   • 

Voli'i 

r.E 

■  COMENSA 

L.\ 

•   PRESENT 

ESGLE 

SIA 

•   I     POSA 

LA     PRI 

MERA  •   PETRA 

Je  transcris  ces  lignes  dans  l'ordre  qu'elles  ont  sim"  la 
pierre.  A  ne  consulter  que  le  sens  et  la  syntaxe,  la  pre- 
mière devrait  être  la  dernière.  Elle  a  été  gravée,  en 
dehors  du  clininp,  sur  la  bordure  supérieure,  et  peut-être 
avec  iutenliou,  pour  altirer  le  premier  regard  du  lecteur. 
L'écriture  est  la  majuscule  romaine,  généralement  em- 
ployée dans  nos  inscriptions  du  xvF  siècle. 

Le  sanctuaire  de  l'église  du  Soler  est  surmonté  d'une 
coupole.  L'édilice,  malgré  ses  étroites  dimensions,  ne  lut 
constiuit  que  peu  à  peu.  L'n  marhre  errant  et  voué  à 
une  destruction  prochaine,  témoigne  de  travaux  entrepris 
au  xviiie  siècle.  11  est  cal(]ué  sur  le  précédent ,  moins 
l'irrégularité  signalée  : 

ALS   ^5   7BRE 

1703   GOMENCA 

LA   PRESENT  •  CAPE 

LLA   ANTON  •  VALS  •  V  PO 

SA   L\   PRIMERA   PEDRA  •  L(» 

REVERENT  •  RERNAT   QVES  , 


PÉSILLA-DE-LA-RI\  IJERK. 

i69.  — Église.  Cloche.  1571. 

t  SANCTVS  DEVS  SANXTVS  FORTIS  SANCTVS  ET    IMMORTALiS 
MISERLIΠ Noms.  ANNO  DOMINI  Si  CCC  LX'xi. 

Ce  n'est  pas  une  cloche  du  xiv^  siècle  qui  dirige  les 
pas  de  l'archéologue  vers  Pésilla-de-la-Rivière.  Tout  le 
monde  connaît  le  monument  gallo-romain  communément 
appelé  Aulcl  de  Diane;  il  a  été  souvent  décrit  et  je  ne 
fais  que  le  rappeler.  Les  projets  d'agrandissement  de 
l'église,  projets  encore  entravés,  mais  trop  sérieux  pour 
être  abandonnés,  permettent  d'espérer  d'intéressantes 
découvertes. 

TUUIR. 

170.  —  Statue  de  la  Vierge,  xii^  siècle. 
Camos,  Jardin  de  Maria,  p.  345. 

MATER  DEI. 

En  relief  sur  le  socle  d'une  statue  de  la  Vierge.  Cette 
statue  est  en  plomb  et  haute  de  cinquante  centimètres. 
La  Vierge  est  assise,  tenant  sur  ses  genoux  l'enfant  Jésus. 
La  main  droite  a  été  coupée,  nous  saurons  bientôt  à 
quelles  fins;  Camos  qui  l'avait  vue  avant  cette  mutilation, 
dit  qu'elle  reposait  a  plat  sur  le  genou  ;  la  main  gauche 
se  rapproche  de  la  même  position.  La  tête  est  ornée 
d'une  couronne  fermée,  sommée  d'une  boule  et  relevée 
de  crochets  et  de  perles  :  il  s'en  échappe  un  voile  qui 
encadre  la  figure  et  descend  jusqu'aux  épaules  où  il 
s'arrondit  en  forme  de  guimpe.  L'enfant  divin ,  assis  sur 
les  genoux  de  sa  mère,  se  présente  de  face,  la  main 
droite  élevée ,  la  paume  tournée  en  dehors  et  marquée 


21 

du  styginale ,  si  luulefois  il  ne  l'aiit  pas  attribuer  à  un 
accident  la  dépression  du  métal  et  le  petit  trou  qu'on  y 
remarque.  Sa  main  gaucho  tient  un  livre  appuyé  contre 
le  genou,  ses  pieds  sont  nus.  Il  est  vêtu  d'une  tunicpie 
€t  d'un  manteau;  comme  sa  mère,  il  |)orle  une  couronne. 
La  Vierge  est  assise  dans  un  Ouiteuil  en  hois  où  l'on 
découvre  encore  quel([ues  peintures,  vers  la  partie  supé- 
rieure, seule  visible  depuis  que  le-  siège  a  été  encastré 
dans  un  grand  piédestal  assez  moderne  qui  a  doublé  la 
hauteur  de  l'ensemble. 

J"ai  décrit  la  statue  dans  sa  sim|)licité  native,  telle 
qu'on  la  vit  longtenq)S  exposée  à  la  vénération  des  fidèles, 
c'est-à-dire,  dépouillée  des  étoffes  dont  elle  est  mainte- 
nant couverte.  Sous  ces  vêtements  qui  descendent  jusqu'à 
la  base  du  socle  moderne,  la  Vierge  parait  être  debout, 
et  [)roportionnellement  de  haute  taille.  On  n'aperçoit  plus 
que  sa  tête,  et,  au-dessous,  dans  la  perpendiculaire,  la 
tête  de  l'enfant  qui  se  fait  jour  à  travers  une  ouverture 
de  la  robe  de  sa  mère.  Tous  les  deux  ]»ortent,  |)ar  dessus 
leur  couronne  de  |)lomb ,  une  couronne  dargont ,  royale 
pour  l'enfant,  rayonnante  pour  la  mère.  La  main  droite 
enlevée  à  la  Vierge  a  été  soudée  à  un  avant-bras  d'argent 
que  l'on  a  fixé,  dans  le  bois  du  siège,  à  la  hauteur  con- 
venable pour  produire  l'illusion.  Les  doigts  ont  été  repliés 
et  tiennent  un  sceptre. 

Les  artistes  du  moyen-âge  n'auraient  certainement  pas 
traité  avec  autant  de  soin  les  draperies  des  statues  si 
nombreuses  de  la  Vierge  qui  sortirent  de  leiu's  mains, 
du  xir-  au  xvie  siècle  ;  ils  ne  les  auraient  pas  relevées 
d'or,  de  couleurs  et  d'incrustrations  si  Tusage  <ralors  eut 
été  de  cacher  sous  d'inutiles  étoffes  leurs  plus  délicates 
sculptures.  On  aurait  donc  tort  de  croire  que  cet  usage 
soit  fort  ancien,  mais  il  serait  dillicile  de  déterminer  où, 
comment  et  à  quelle  (''|io(]ue  il  prit  naissance.  Après  avoir 
lu  Camos,  on  reste  persuadé  (jue,  de  son  temps  encore, 


•>0 


il  était  peu  répandu.  Cet  auteur  a  décrit  plus  do  cenl 
cinquante  statues,  et  pour  douze  ou  quinze,  au  plus,  son 
dernier  coup  de  pinceau  est  celui-ci  :  Adonuinla  con 
difercntes  mantos,  ou  bien  :  Tiene  vestidos  diferentes  con 
que  la  vislcn  y  adornan.  Or,  l'exactitude  minutieuse  qu'il 
apporte  dans  ces  descriptions  ne  laisse  pas  supposer  que 
cette  particularité  ait  échappé,  ou  n'ait  pas  eu  de  valeur 
à  ses  yeux;  et  l'induction  tirée  de  son  silence  peut  être 
regardée  comme  rigoureuse. 

Genre  espagnol!  disons-nous  :  les  touristes  l'ont  dit, 
et  nous  le  répétons  après  eux.  Va  pour  le  genre  espagnol! 
mais  n'allons  pas  croire  que  l'imitation  soit  restée  circons- 
crite à  notre  province.  On  lit  dans  un  rapport  de  M.  de 
Caumonl  à  la  Société  Française  d'Archéologie,  qu'il  dirige 
et  préside  si  habilement  :  «  La  Vierge-Noire-de-Notre- 
«  Dame  est  couverte  de  vêtements,  comme  la  plupart 
«  des  madones.  »  {Bull,  momim.  xx.  120.)  La  madone 
dont  parle  M.  de  Caumont  est  celle  de  Dijon  ;  la  mode 
aurait  donc  fait  bien  du  chemin  de  proche  en  proche. 
Est-ce  par  forme  de  protestation  contre  le  genre  espagnol, 
qu'on  a  chassé  de  la  niche  centrale  du  joli  retable  de 
Notre-Danie-de-la-Malgrana,  à  Saint-Jean  de  Perpignan, 
l'ancienne  statue  de  la  Vierge?  11  aurait  sulli  de  lui  enle- 
ver ses  vêtements  d'emprunt.  La  statue  qui  l'a  remplacée 
a  le  défaut  capital  de  n'être  pas  en  harmonie  avec  les 
peintures  du  xvic  siècle  qui  l'entourent. 

La  Vierge  de  Thuir  est  connue  sous  le  nom  de  Notre- 
Dame-de-la- Victoire  ,  et  ce  nom  lui  vient  de  loin ,  s'il 
faut  en  croire  les  récits  de  nos  pères.  Charlcmagne, 
prêt  à  marcher  contre  les  Sarrasins ,  avait  placé  la  sainte 
image  au  milieu  de  son  armée.  En  présence  de  l'ennemi, 
sur  les  hauteurs  de  Passa  ,  les  Francs ,  brûlés  par  une 
soif  ardente,  laissent  tomber  leurs  armes.  Charles,  plein 
de  confiance  en  la  patronne  qu'il  s'est  choisie,  l'invoque, 
et,  plongeant  son  épée  dans  le  sable  d'un  torrent  dessé- 


23 

ché,  en  lait  jaillii'  une  source  alxindante.  Les  soldais 
épuisés  se  désallèrcnt,  volent  ii  l'ennenii  et  le  refoulent 
au-delà  des  monts.  Le  monarque  victorieux  fonda  sur  le 
lieu  témoin  du  prodige  une  abbaye  qu'on  ap[)cla  Moneslir- 
del-Camp.  Mais  Cliarlemagne  ne  fut  pas  toujours  là  pour 
défendre  nos  frontières;  Finlidèlc  porta  de  nouveau  le 
fer  et  la  flannnc  dans  ces  clianq)s  témoins  de  sa  défaite. 
Notre-I)anie-de-Ia-Victoire  fut  alors  soustraite  à  leurs 
profanations,  et  sa  trace  resta  longtemps  perdue.  Un 
berger,  à  la  reclierche  d'une  brebis  égarée,  retrouva  la 
statuette  dans  un  bois  épais  qui  couvrait  la  place  où 
s'élève  aujourd"liui  Tliuir.  On  bàtil  une  cbapelle  en  mé- 
moire de  celle  invenlion,  et  peu  à  peu  les  babitauls  de 
Tliuir,  alors  distant  d'un  millier  de  pas,  vinrent  grouper 
leurs  babilations  autour  du  sanctuaire. 

Le  respect  dû  à  cette  légende  n'a  pas  étouffé  tous  les 
doutes.  On  avait  lu  dans  la  cbronique  d'Adon,  qu'en 
772  «  le  glorieux  roi  Cliarles  détruisit  cbez  les  Saxons 
«  le  temple  d'Adermensul,  et  que  là,  son  armée  souf- 
«  frant  d'inie  soif  cruelle,  tout-à-coup,  en  plein  jour, 
«  du  milieu  d'un  torrent ,  jaillirent  des  eaux  abondantes 
«  où  se  désaltérèrent  lioinmes  et  chevaux.  »  (llislor.  drs 
(iaulcs,  V.  Ô18.)  Et  tandis  que  les  annales  dcFulde,  la 
cbronique  d'Hennan  et  autres  attestaient  le  même  fait  en 
termes  presque  identiques,  Tauleur  du  Plùlomcna  s'en 
emparait  à  son  tour  pour  le  transporter  au  centre  de 
la  Seittimanic.  Est-ce  en  Allemagne,  est-ce  à  Carcassonne, 
est-ce  au  pied  des  Pyrénées  qu'il  faut  placer  le  renou- 
vellement du  prodige  dTloreb?  On  se  demande  en  outre 
si,  malgré  les  allirmations  de  Toniicb,  Pujades  et  bien 
d'autres,  il  n'est  pas  permis  de  croire  que  Cliarlemagne 
n"a  jamais  visilé  nos  contrées  (voirie  Publicalctir,  1805, 
p.  12  I.  Quant  à  l'origine  du  Moncstir-del-Canq),  elle  est 
plus  moderne  :  l'occasion  d'en  dire  un  mol  va  se  pré- 
senter dans  les  numéros  suivants. 


■2'i 


Revenons  a   noire  statue.   A   [jarl  la   imililalion    déjà 
signalée,  elle  est  dans  un  bon  état  de  conservation.   Sa 
couleur  la  place  parmi  les  statues  que  l'on  appelle  Vierges 
noires;  mais  il  n'en  a  pas  été  toujours  de  même.   On 
aperçoit  encore  des  restes  de  pointure  sur  les  ligures  et 
sur  les  mains,  et  des  traces  de  dorure  sur  les  draperies. 
Quel  est  son  âge?  Un  archéologue  espagnol,  iM.  le  duc 
de  Solferino,  la  croit  du  viiie  ou  du  ix^'  siècle;  se  trou- 
vant à  Thuir,  il  y  a  quelques  années,  il  y  développa  cette 
opinion   devant   quelques  habitants   de  la   localité.  Ses 
arguments  n"ont  laissé  d'autre  souvenir  que  la  conviction 
des  auditeurs;  j'ai  pu  voir  seidement  le  Tort  joli  dessin 
de  la  Vierge  en  bois  du  château  de  Centellas  qu'il  envoya 
plus  tard  à  l'appui  de  sa  thèse  orale.  Mais  a-t-on  bien 
compris  la  pensée  de  cet  archéologue?  La  figure  calme 
et  régulière  de  notre  Vierge ,  le  naturel  des  poses ,   le 
mouvement  des  draperies,  tout  annonce  la  bonne  époque 
de  la  fin  du  xii^  siècle  ou  des  premières  années  du  xiii^. 
L'inscription  mater  dei,  dont  voici  le  fac-similé,   ne 
contredit  pas  cette  date. 


On  ne  l'a  pas  gravée  après  coup  ;  elle  est  en  relief, 
elle  est  sortie  du  moule  avec  le  socle  qui  la  porte,  en 
même  temps  que  la  statue  qui  fait  corps  avec  le  socle. 

Les  statues  en  métal  sont  rares  dans  nos  pays;  Camos 
n'en  cite  que  deux,  celle  de  Thuir  et  une  autre  qui  est 
en  cuivre. 

171.  —  Église,  xiiie  siècle. 
:  +  :  ANNO  :  DO.M. . . .   •  M  :  Cf,  :  LXXX. .       I  :  XI  :  K 
LS  :  OCTOBIUS  :   VLIEK 


25 

:  PKi    ^1  : 

CEiiM  s['i:i; 

Nis  :  T  viin 

vu  :  OM i  NOS 

TEU  :  r...   :  ANI j   Kl i 

Les  lacunes  de  cette  inscription,  à  partir  du  milieu  de 
la  troisième  ligne,  peuvent  être  facilement  restituées  au 
moyen  de  la  formule  si  connue  :  Qui  iumuhim  cernis,  etc. 

CAMIXAS. 

172. — Porte  de  l'église,  xii*^  siècle. 
VIII  .;  w  :  MAI  .;  oiiiii  ;  t.\iL\ 

MATI:R  :  PETRI  •:  DE  j 
CAMEIJS  : 

Au-dessous,  une  croix  inscrite  dans  un  cercle. 

i  73.  — Cimetière.  1302. 

Au  milieu  du  cimetière  de  Camélas,  contigu  à  l'église, 
s'élève  une  croix  en  fer  à  branches  égales  formées  d'en- 
roulements légers,  et  montée  sur  une  ham|)e  octogone 
de  di.v-huil  millimètres  d'épaisseur.  Sa  hauteur  au-dessus 
de  la  pierre  cylindrique  qui  lui  sert  de  base  est  de  deux 
mètres.  Sur  une  plaque  du  même  métal,  large  de  huit 
centimètres,  haute  de  cinq,  et  soudée  à  moitié  hampe, 
est  buriné  le  nom  du  donateur  avec  la  date  : 

MOSSEN       lOAN   •   PERE       CI 
G  VET       FEV    •    FEK 
li)92. 

Jean-Pierre  Ciguct,  natif  de  Camélas  et  prêtre  bénéd- 
cier  de  Saiiil-Jean  de  Per(>ignaii ,  avait  été  inlenlit  à  la 


2(> 

suite  triinc  rixe  accompagnée  de  ineiiiUe.  Il  se  relira 
dans  sa  laniille  el  denienra  suspens  toulo  sa  vie,  quoirpie 
la  victime  l'eût  justilié,  avant  de  mourir,  en  s'avouanl 
coupable  de  provocation.  Il  tant  lire  ce  détail  biographi- 
que dans  les  mémoires  naïfs  qu'écrivait,  il  y  a  plus  de 
deux  siècles,  Mossen  Honorât  Cuiro,  prêtre  et  natif  aussi 
de  Camélas.  On  y  trouve  l'éloge  de  Pierre  Ciguet  comme 
peintre  et  comme  calligraplie;  je  cite  ce  dernier  Irait 
textuellement  parce  qu'il  est  très-court  :  «  Foncli  moll 
«  bon  scriva,  o  ténia  inolt  bona   pluma,   del   cpial   da 

«  teslimoni  lo  llibre  dels  baulismes era  landie  i)intor, 

«  testimoni  la  figura  de  un  Christo  de  pinsell  ab  iNostra- 
«  Senyora  y  sant  Jolian,  loqual  esta  devant  la  porta  de 
«  la  iglesia.  » 

174. — Cloche,  xv"  siècle. 

t  XT'S  RE\  VENU  IN  PAGE  DEVS  HOMO  l-ACTVS  EST.  AVE  MARIA 
i  llTs  AVrEM  TRANSIENS  TER  MEIUVM  ll.t.ORVM  IBAT 

FOR<^)UES. 

17o.  — Porte  de  l'église.  lo42. 

f  ANNO  :  DOMINl  :  M  :  CGC  :  XLII  :  NONS  :  NOVEMURIS  : 
OBIIT  :  DOMINVS  :  GVILf.ELMVS  :  GER  ||  ARDI  •  EliDOMADARlVS  : 
DE  :  FVRGHIS  ||  QUI  :  INSTITVIT  :  ANNIVERSARIVM  :  V  fquinque)  \ 
SOLIDORYM  :  DIE  :  OBITVS  :  SVI  :  ifi  :  PRO  MIS  II  SIS  :  ET  :  U  : 
PAVrERlDYS   :    i  (c.hrhli)   ■   IN  PANE    1|    FRACTO 

Sous  une  ogive  trilobée  que  couronne  un  fronton  garni 
de  feuilles  rampantes,  le  défunt,  gravé  au  trait,  revêtu 
d'ornements  sacerdotaux,  la  tète  nue,  les  mains  jointes. 
Aux  deux  angles  d'en  haut,  dans  le  champ,  écussons 
chargés  d'un  lion.  L'épitaphe  part  du  bas  de  la  bordure 
à  gauche,  fait  le  tour,  et  rentre  dans  le  chanij)  au  mol 


FHACTo,  placé  iiiiniécliatemenl  au-dessous  de  la  date- 
Deux  autres  mots  gravés  auprès  de  la  tête  du  défunt  sont 
a  peu  près  mutilés;  fun  d'eux  pourrait  être  cleuici. 

176. —  Église.  Cloche.  Ii55. 
iils  xfs  \'i:mt  in  v\œ  i)i:vs  iiomo  i-agtvs  est 

SANCTE  MARTINE  OllA  TRO  NOBIS  LANY  Mir.CCCGXXXVFV  FET 

rOXTELLA. 

177.  —  Ancien  cimetière.  xiiF  siècle. 

HOC  lACI'T  IN  TVMM.d  liiaiNAIlDVS  IVNGE 

SEr T  :  SVrERiS  : 

....  ; !■  ESTIÎSA  : 

Kt  deux  autres  lignes,  où  l'on  ne  distingue  plus  (pie 
des  lettres  isolées. 

478.  —  Ancien  ciFuetière.  xiiF  siècle. 

Deux  autres  pierres  tuniulaires  ne  portent  nue  le  nom 
du  défunt.  L'une  existe  encore  : 

IIIG  lACET  GVlLf.ELMVS  GVINARUI. 

L'autre  est  perdue  ou  recouverte  par  le  nouveau  crépi 
jeté  sur  l'extérieur  de  l'église.  La  voici  d'après  un  estam- 
page pris  il  y  a  quelijues  années,  et  qui  me  laisse  des 
doutes  sur  le  dernier  mot  : 

IlIC  lASCET  (fie)  ARNAVDVS  DVOATA 

179.  — Tour-des- Vents. 

Pnblicaleur.  18Ô5.  N-^  49. 

Au  territoire  de  Pontella,  près  la  métairie  de  SaiiU- 
Nicolas,  lieu  dit  Tour-dcs-Vods ,  M.  Jauberl   de  Réart 


■2H 

découvrit,  en  1855,  des  substiuctions  aiiliqiies.  Le  sol 
légèrement  louillé  à  l'aide  d'un  bàlon,  rendit  au  jour 
quelques  débris  de  poterie  rouge^  et,  parmi  eux,  le  fond 
d'un  vase  avec  celle  eslampille  : 

CN    •    ;î:f-   ■  (  CNetHs  JEUus  ) 

Le  numéro  du  journal  où  ce  cachet  de  potier  lut  publié 
porte  JEi  au  lieu  de  ^el.  La  variante  ^el  m'est  fournie  par 
une  copie  faite  au  moment  de  la  découverte,  et,  dit-on, 
de  la  main  de  M.  Jauberl  de  Réart  lui-même,  jei  serait 
donc  une  faute  d'impression.  Je  n'ai  j)u  découvrir  ce 
qu'est  devenu  le  vase. 

Sur  un  autre  fragment  était  le  premier  mot  d'une 
seconde  estampille  : 


OF    •     {Oflicina.J 


La  Tour-des- Vents  est  retombée  à  tort  dans  l'oubli 
depuis  1855;  je  n'ai  pas  appris  qu'on  y  ail  tenté  de 
nouvelles  fouilles. 

moivestir-di:l-camp. 

180.  —  Église.  1505. 

:  ANISO  1  DOMINF  :  M  :  CC  :  XC  ;  H  •  XI  :  [J[>  (sic)  \  MARCll  j 
OBIIT  :  DOMINA  j  BEATRIX  •  DE  •  TAVTAVLLO  :  FILIA  :  CONDAM  | 
GVILLELMI  I  DE  :  SARAGVOSSA     MILITIS. 

:  ANNO  :  DOMINI  :  M  :  CGC  :  il  :  xll  :  iJf.  (sic)  :  MAUCII  : 
OBIIT  :  DOMINA  :  SIBIF.IA  :  DE  :  ATCIAO  :  FIIJA  :  CONDAM  = 
GVILLELMI  :  DE  :  SARAGVOSSA  •  MILITIS  : 

Entre  ces  deux  épitaphes  <|ui  occupent  les  bordures 
horizontales,  un  bas-relief  représente  Jésus-Christ  sur  la 
croix  ,  entre  sa  mère  cl  saint  Jean.  On  remarquera  l'abré- 
viation lïïï,  pour  calendas,  deux  fois  répétée  si  clairement 


21) 

(\\\"i[  ny  a  pas  à  st^  Diépiviulre.  Je  ut:  lai  rtMUîonlivt.'  imlh^ 
autre  pari.  Les  dates  doivent  être  lues  1295  et  1307), 
suivant  la  règle  posée  au  n"  lOi.  Nous  dirons  un  mot 
tout  à  l'heure  (n"  183),  de  la  famille  Saragossa. 

On  a  vu  in"  170)  (jnelle  origine  VKcanijilc  des  qiic- 
iinuiUcs  donnait  au  Monestir-del-Camp.  Il  y  a  beaucoup 
à  décompter  de  cette  glorieuse  antiquité.  Les  cendres  du 
grand  Uoi  étaient  depuis  longtemps  refroidies,  lorsque 
révèque  d'Elne,  Artal  II,  fonda  la  communauté  del  Camp 
et  la  mit  sous  la  direction  d'un  de  ses  chanoines,  avec  le 
titre  de  prieur,  vers  la  lin  du  xi'"  siècle.  Il  est  vrai  de  dire 
que  l'église  était  déjà  construite  et  qu'elle  avait  été  donnée 
à  l'évêque  par  Raymond-Guillaume  de  Rocaberli.  Ce 
prieuré  fut  sécularisé,  avec  tous  les  monastères  de  la 
règle  de  saint  Augustin  dans  le  lloussillon  et  la  Cerdagne, 
par  huile  de  Clément  Mil  donnée  aux  calendes  daoùt 
1a92,  à  la  prière  de  Philippe  11,  roi  d'Espagne.  11  fut 
H'gi  depuis  lors  par  des  prieurs  séculiers  dont  le  dernier, 
Antoine  de  Lante-la-Rovère ,  prit  possession  de  la  com- 
mende,  le  l*^'"  juillet  1789.  «  Il  n'en  reste  plus  aujour- 
«  d'hui ,  disait  le  docteur  Carrère  à  la  lin  du  dernier 
«  siècle,  que  le  titre  prieural,  (}ui  est  en  commende,  et 
«  rapporte  3.000  livres;  et  celui  d'un  cure  ou  vicaire 
«  perpétuel  avec  le  titre  de  chanoine,  qui  jouit  d'environ 
«  1.200  livres.  L'église  subsiste  encore  avec  quelques 
«  portions  des  bâtiments  qui  servent  aux  fermiers.  » 
La  porte  en  marbre  blanc,  à  double  archivolte,  est  dans 
un  bon  état  de  conservation.  Les  chapiteaux  de  ses 
colonnes  sont  curieux  ;  le  baron  Taylor  en  a  donné  le 
dessin  dans  son  grand  ouvrage. 

181.       Cloître.  1307. 

ANNO  :  DDMIM  :  m  :  cjc  :  \ii  : 
AC.TA   :   F\[;UVNt  :   lll.C  : 


30 

L'a  linâi  »'t  tnoitié  de  lu  i[\n  le  pirrèile  soiii  à  iieiiic 
tracés  à  la  poiiiio.  Pourquoi  ces  lettres  iuaclievées?  (Jiii 
arrêta  le  ciseau  i)rêt  l\  graver  le  nom  ^lu  Prieur  sous  le- 
quel lut  élevé  le  cloître  ou  le  nom  du  maître-d'œuvres  qui 
le  construisit?  Ces  questions  ont  été  posées,  discutées, 
mais  non  résolues  :  je  ne  me  charge  point  d'éclaircir  le 
mystère,  si  mystère  il  y  a. 

Le  cloître  du  Monestir-del-Camp,  le  plus  petit  des  cloî- 
tres qui  nous  restent,  est  un  quadrilatère  irrégulier.  On  y 
compte  vingt-sept  arcades,  portées  sur  des  colonnettes 
simples,  et  maintenues  aux  quatre  angles  par  des  piles 
carrées.  Le  dessin  de  l'arcade  est  un  tribobe  ogival 
renfermé  dans  une  plus  grande  ogive.  Nous  devons  la 
conservation  de  ce  monument  aux  soins  intelligents  du 
propriétaire,  M.  Jaubert  de  Passa,  trop  tôt  enlevé  à  son 
pays  et  à  la  science.  D'autres  mains  l'eussent  probable- 
ment laissé  tomber  de  lui-même  en  ruines;  les  arcades 
poussaient  au  vide  sous  le  poids  de  Tappentis  qui  couvre 
les  galeries;  il  était  urgent  de  les  relever.  On  souleva 
l'appentis,  et  sans  déposer  une  seule  pierre,  le  frêle 
appui  fut  remis  en  son  aplomb.  Cette  opération  délicate 
a  parfaitement  réussi. 

182.  —  Cloître.  HOH. 

DE  VILLA  r.ONGA  liEKTRANDVM  ; 
PETRA  SIGILLAT    ,•  OSSA  LAPIS 
RETINET  ;  SPIRITVS  ALTA  PETIT 
MILITAT  IN  CELiS  ;  QVI  MILE 
S  ;  IN  GRUE  REFVLSIT  -, 
CVI  CORVS  ANGELICVS  (iA 
VDET  ADESSE  COMES  .  •  lîll 
CESSIT  ID9  IVNII  ;  SVIi  MILLE 
nVCENTIS  AÎNNIS  xT»l  ;  SVNT 

on 

llll     INOE     MINVS  -, 


31 

Nous  n'avons  pas  lronv(''  et  nons  no  Iroiivcrons  pas  de 
ïnarhrc  aussi  barharonitMU  gravé  (celui  de  l*ia,  n"  155 
n'est  rien  auprès).  Il  se  dislingue  en  outre  par  le  genre 
de  récriture   qui  est   la  minuscule  des  manuscrits  de 
réj)0(pie;  on  y  retrouve  cei»endant  I'e  oncial,  et  une  seule 
majuscule  n  placée  en  tète.  Le  type  de  la  ponctuation  a 
été  pris  à  la  même  source  ;   c'est  le  point,  simple  ou 
double,  mais  toujours  accompagné  de  la  virgule,  sauf  à 
la  septième  ligne  où  l'on  trouve  les  trois  points  posés 
en  triangle.  Le  lapicide  improvisé,  qui  fait  ici  son  appren- 
tissage, n'avait  jamais  écrit  que  sur  le  vélin.  Dans  une 
transcription  dont  il  existe  plusieurs  copies,  l'abréviation 
IN  de  la  dixième  ligne  a  été  rendue  par  infua;  j'aime 
mieux  inde.  Le  sens  est  peut-être  plus  clair  avec  infrà, 
mais  la  leçon  n'est  pas  régulière.  On  pourrait  ajouter  que 
la  i»ros()(lie  s'accommode  mieux  de  ind!\  si  les  règles  de 
la  quanlité  avaient  quelque  chose  à  voir  dans  la  "poésie 
du  xiF  siècle,  témoin  ici  même  idus  et  junii,  qui  font 
tache  après  les  deux  premiers  distiques. 

185.  —  Cloilre.  1269. 

;  t  :  ANNO  :  DOMIiM  :  M  :  cc  :  LX  \  Vlli  :  XIH  :  KLS  :  FE 

BROARII  :  OBIIT  j  DOMINA  :  BERENGVAIUA  :  DE     SARA  " 

r.OSSA  :  CViVS  :  IN     HOC     TVMVLO  \  l'EUSISTV 

NT  :  OSSA  :  SEPVLTA  :  QVI     TVMVLVM     CERNIS 

i  CVR     NON     MORTALIA     Sl'ERNIS  :  MVNDO 

NE    CREDAS  :  QVIA     NESCIS     QVANDO     RECEDAS  : 

ROGVO  (sic)  :  DIC     PATER     NOSTER  j  PRO     ANIMA     ME\  : 

Le  8  des  calendes  de  juillet   1200,  une  autre  Réren- 
gère  de  Saragossa,  veuve  de  Guillaume  (celui  de  l'ins- 
cription 180  sans  doute),  fait  aveu  de  féaulé  à  IJernard 
Ids  d'Ainaud  Berlrand  de  Corbéra,  pour  les  (iefs  qu'elle 
possèdi'  aux   tcrroiis  de  Saini-l>ierre  de  Corlu-ra  ei   d,. 


•y} 

Saint-Julien    de    Vallventosa.    Le   29  janvier    1412,   le 
seigneur   de   Corbéra .   dame    Iluguèle  de   Ça  Garriga , 
appelle  à  reconnaissance  féodale,  i)Our  les  mêmes  liefs, 
Jacques  de  Saragossa,  domicilié  à  Millas,  descendant  de 
(iuillaume.  On  retrouve  ainsi  très-souvent  cette  famille 
dans  nos  vieilles  écritures  pendant  quatre  siècles.  Citons 
un  dernier  trait  de  ses  annales  :  En  i52i,  P>ançois  de 
Saragossa  donna  un  rare  exemple  de  fidélité,  au  milieu 
des  trahisons  qui  souillèrent  cette  époque,  et  précipitèrent 
la  chute  de  la  dynastie  Mayorquine.  Cwouverneur  du  châ- 
teau majeur  de  Perpignan ,  il  n'en  rendit  les  clefs  que 
sur  un  ordre  écrit  de  la  main  du  roi  Jacques  déjà  dépos- 
sédé par  Pierre  IV  d'Aragon ,  et  prisonnier  de  ce  prince 
à  Elne. 

Voir   pour   la  date   de  cette  inscription  l'observation 

faite  au  n»  104. 

184. —  Cloître.  1006. 
:  t  :  ANNO  :  DOMIM  :  M  :  JcG  :  VI  :  VÎll  :  kls  :  MAY  : 
l'ETr.VS  :  lOllANMS  :  BAIVLVS  :  DE     PACIANO  :  TRANSLA 
TAVIT  :  OSSA  :  MARIE  :  TAI.AVIS  :  CONDAM  =  DE 
I.VPIANO  :  AVIE  :  SVE  :  ITEM  :  OSSA  :  ARNAF.DI  :  TALAVIS  : 
SAnUSTE  :  ['ACIAM  :  EIIJI  \  DICTE  :  MARIE  :  QVI  : 
INSTITVERVNT  :  HVIC  :  MONASTERIO  :  \II  \ 
SOLIDOS    :    BARCIIINONENSES    :    ET    :    M    i    DENARIOS    \    l'RO 

ANM  VERSA  RUS  ;  SVIS  j 

En  1310,  on  trouve  un  membre  de  cette  famille,  Jean 
Tallavis,  nommé  Bailli  de  Passa  par  Renaud  de  Martigny, 
administrateur  perpétuel  du  prieuré. 

18o.  — Cloître.  1311. 

ANNO  i  DOMIM  ;  .M  \  CXT.  :  \l  :  xîll  •  k.M.S  :   IWIl  \  OBIIT 
tiVlLEELMVS  :  TEVI.JCII  :  DE  VILLA  j  MVLACIIA  \  QVI  :  MIGRAV 


33 

IT  :  DIK  :  ASCKNSIOMS  :  HOMINI  :  QVI  :  TVMVLVM  :  CKUNIS 

GVR  :  NON  •:  MORTALIA  :  SPERNIS  :  IVIVNDO  :  NF.  •  CRK 

DAS  :  QVIA  i  MiSCiS  :  QVANDO  |  RECEDAS 

ROGO  :  DIC  I  PATER  f  NOSTER  \  PRO  :  ANIMA  :  MEA 

ROGO  :  DIC  :  ET  :  AVE  : 

MARIA  '  f 

186. —Cloître.  1525. 

ANNO  :  DOMINI  =  M  :  CGC  :  llll  :  il  NNS 

AVGVSTI  :  OBIIT  :  DOMINA  :  AVDA 

VXOR  :  RAYMVNDI  :  FABRE  :  DE  \  bWA  \ 

QVI  :  TVMVLVM  [  CERMS  :  CVR  :  NO 

N  I  MORTALIA  |  SPERNIS  :  MVNDO 

NE  ;•  CREDAS  :  QVIA     NESCIS  j  Q 

VANDO  :  RECEDAS  :  ROGO  |  DIC 

:  PAI'ER  :  NOSTEIl  :  PRO  j  AMM 

A  :  MEA  I  DJSENDO  (sic)  ]  SIC  \  AVE  j 

MVRIA 


ANNO  •;  DOMINI  i  M  :  CCC  :  XXIII  : 

in  :  KÀLS  :  NOVEMBRIS  :  OBIIT  |  PETRVS  :  DE 

BVLA  :  CANONICVS  ;  QVI 

TVMVLVM  :  CERNIS  :  CVR 

NON  :  MORTALIA  j  SPERNIS 

MVNDO  :  NE  :  CREDAS  |  QVI 

A  -:  NESCIS  :  QVANDO  :  RE 

CEDAS  :  ROGO  :  DIC  :  PATE 

h  :   NOSTER  :   i>RO  :  ANIMA  : 

MEA   : 


34 

Ces  deux  épifaplu's  ne  sont  pas  sur  le  marbre ,  comme 
dans  la  copie,  a  la  suite  l'une  «le  l'autre ,  mais  en  regard 
et  séparées  par  une  moulure. 

On  est  étonné  de  ne  trouver  au  cloitre  du  Monestir 
aucune  tombe  de  prieur.  Avaient-ils  leurs  caveaux  dans 
l'église?  Il  n'y  en  reste  pas  plus  de  traces  que  dans  le 
cloitre. 


ORTAFA 


iSl.  —  Église.  XF  siècle  (?). 


PETRVS  : 

AMELI  .;  S\Π

RDOS  :  PRESHITERI  : 

AD     ECLESIAM     IIONO 

RE     SANCTE       EVGENIE 


Je  me  suis  trouvé  assez  embarrassé  pour  classer  chro- 
nologiquement cette  inscription.  Les  fautes  de  syntaxe 
m'ont  déterminé  pour  le  xi«  siècle ,  autant  que  l'écriture, 
dont  voici  un  spécimen  : 

P  ETRV  S 


Il  faut  y  joindre  un  e  cursif  et  le  c  carré,  quoique  cette 
dernière  forme  persiste  chez  nous  jusqu'aux  premières 
années  du  xiiiR  siècle,  et  soit  par  conséquent  très-peu 
caractéristique,  prise  isolément. 

Quant  à  la  syntaxe  ,  je  ne  trouve  pas  après  le  xi^  siècle 
une  série  de  solécismes  comme  celle-ci  :  Sacerdos  près- 
bit  eri  ad  ecclesiam  honore. 


35 


SAiivT-PArr. 

188.  —  Porte  de  l'église.  1507. 

ANNO  :  DOMINI  j  M  :  CGC  :  VII  :  III  :  ID9  :  DI'Œi^lHUIS  :  0BIIT|( 
DOMINVS  :  lOlIANrqES  :  NDEDES  :  HECTOR  :  ECLESIE  :  SAXCTl  || 
PAVLI  :  CVIVS  :  AMMA  :  EIVS  (sic)  :  REQVIESCAT  :  IN  : 
PAGE  :  AMEN  :  DICATIS  :  PATER  •  NOSTER  ||  PLA^GITE  :  QVI 
CVPITIS  :  MORTEM  :  VITARE  :  SEVERAM  :  QVOD  :  SVM  :  VOS  : 
ERITIS  II  QVIPPE  :  VOS  j  ESTIS  :  ERAM  f  0  TV  :  QVI  TRANSIS  : 
UOMINVM  :  ROGARE  :  MEMENTO  ||  PRO  ME  :  QVI  :  lACEO  : 
TVMVLATVS  :  IN    HOC  :  MONVMENTO  :  AGITE  :  PENITENCIAM 

SbUs  le  point  de  vue  paléographiciue,  cette  inscription 
est  une  variété ,  à  cause  du  grand  nombre  de  petites 
lettres  gravées  en  interligne.  On  n'y  en  compte  pas  moins 
de  quatre-vingt-sept,  et  la  plupart  ne  sont  pas  abrévia- 
tives.  Il  n'y  a  pas  de  règle  uniforme  pour  la  lecture  des 
mots,  dont  la  moitié  est  ainsi  superposée  à  l'autre  moitié. 
DCTS  (décatis),  j,^^^,'^  (plangite),  [J;J[{  frogare),  par  exem- 
ple, doivent  être  lus  dans  un  autre  ordre  que  J'^^,  (erilis), 
^P^j  (affile),  j>Y  (cujus),  et  des  uns  comme  des  autres 
se  distingue  [\]j,^jq  (mémento). 

189. —  Porte  de  l'église.  1515. 

ANNO  I  DOMINI  |  M  |  C(T,  f  \lîl  |  il  |  ID9  |  MADII 
FVIT  1  INCI:P  TA  |  ECrÊSIA  I  SANGTI 

Ï^ETRI  APOSTOIJ  I 

Deux  cercles  concentriques,  sonnnés  d'une  petite  croii 
au  pied  liclié,  prenneul  toute  la  hauteur  de  la  pierre 
entre  les  bordures,  de  sorlc  (pie  les  trois  lignes  de  Fins- 


36 

criplion  sonl  coupées  au  milieu ,  la  première  par  la  petite 
croix,  les  deux  autres  par  la  circonférence  du  grand 
cercle.  Du  centre  de  cette  roue  symbolique,  dont  le  sens 
m'échappe,  partent  des  rayons  (jui  s'arrêtent  à  la  circon- 
férence du  petit  cercle.  Est-il  besoin  d'ajouter  que  très- 
positivement  ce  n'est  pas  un  cadran  solaire,  comme  je 
l'ai  entendu  soutenir? 

190. —  Cloche.  1348. 

LANY  MIL  CCCCC  XXXXVIIt   .   SANCTE  PAVLE  ORA  PRO  NOBIS 

Le  cinquième  c  pourrait  bien  être  une  l,  ce  qui  chan- 
gerait la  date  de  1548  en  1498.  Je  n'ai  pas  vu  la  cloche 
d'assez  près  pour  éclaircir  ce  doute. 

Sur  une  autre  plus  grande,  mais  plus  moderne,  on  lit 
ces  deux  vers  connus  : 

t  L.VVDO  DEVM  VERVM  TLEBEM  VOCO  CONGREGO  CLERVM 
DEFVNCTOS  PLORO  PESTEM  FVGO  PESTA  DECORO. 

suivis  de  l'acclamation  :  sancte  pavle  or\  pro  nobi<; 

NOTRE-DAME  DE  LA   VALL. 

191.  —  Oratoire  de  Sainte-Anne.  1485. 

LANY  MIL  CCCC 
Lxxxm  A  Xllt 

DE  MARS  FOC  CO 
MENSAT  LORATORF. 

On  rencontre  l'oratoire  de  Sainte-Anne  à  un  kilomètre 
environ  de  Caudiès ,  au  bas  du  plateau  sur  lequel  s'élève 
l'église  de  Notre-Dame  de  La  Vall ,  dont  il  est  fait  men- 
tion dans  la  bulle  de  Serge  IV  constitutive  du  monastère 
de  Saint-Paul-de-Fcnollet ,  en  1011  :  Et  ccdesium  sandœ 
Alariœ  de  l'aile.  Notie-Dame  de  La  Vall  n'est  plus  qu'im 
ermitage. 


DEUXIEME  ARRONDISSEMENT. 


ci:ret. 

192.  —Église,  petite  porte.  11284. 

:  ANNO  :  DOMIM  :  M  :  CC  :  LXXXllII  :  I  (?)  :  AVG 
VSTI  (?)  :  OBIIT  j  DOMINA  \  UERENGARIA  :  DE  :  VALCROSA  :  V 
XOR  j  RAIMVNDI  j  TRILES  :  MILITIS  :  DE  ;  CERETO  :  CVIVS  | 
ANIMA  :  REQVIESCAT  :  IN  ;  PAGE  :  SEPE  :  RECO 
RDERIS  :  BONE  :  FRATER  :  QVOD  :  MORIERIS  :  CVM 
TE     RES  :  PVLCRA   ]  RLANDIIVR   :  GERNE  •  SEPV 

LCRA 

Au-dessous  une  croix  patlée ,  au  pied  fiché ,  accom- 
pagnée de  deux  écussons  chargés  aussi  d'une  croix. 

193.  —  Église,  près  de  la  grande  porte.  1521. 

ANNO  :  DOMIM  ■  M  :  CGC  :  XXÎ  :  V  :  ID9  :  APRILIS  :  OBIIT  :  BER 
NARDVS  :  SALINI  (?)  :  DE  :  CERETO  :  ITEM  :  XH  |  KLS  : 
AVGVSTI  :  ANNO  :  DOMINI  :  M  :  CCG  :  IIH  :  OBIIT  :  DOMI 
NA  :  SAVRINA  •  VXOR  :  EIVS  :  QVORVM  (?)   :   ANIME   :   PER   j 

PEI  :  MISERICORDIAM 
REQVIESCANT  :  IN  |  PAGE  j  AMEN  | 

194.  —  Eglise ,  grande  porte.  1598. 

LANY  :  DE     NOSTRE  :  SEVOR  :  M 
CCG  :  lAXXXVIIl   :  FO     KEYTA 

AQESTV   :  poi;rM.I'U\    : 


3S 

Porte  à  quade  archivoltes  soutenues  par  des  colonnes, 
seul  ornement  des  parois  verticales.  C'est,  avec  le  clocher, 
tout  ce  qui  reste  de  l'aucieuue  église;  mais  en  la  respec- 
tant on  l'a  écrasée  sous  une  grande  niche  à  plein  cintre 
et  fronton  brisé,  type  du  style  architeclonique  à  l'époque 
de  la  reconstruction. 

195.  —Cloches.  1488. 

MENTEM  SANCTAM  SPONTANEAM  IIU.NOKEM  DEO  ET  PATRIE 
LIBERATIONEM   •   LANV  MIL  CCCC  LXXXVIII. 

Sur  une  autre  plus  petite. 

t  IHS  X?S  ME  FECrr  lOIIA  GIL  LAY  M  CCCC  LXXXVIII. 

Nous  connaissons  dçjà  Johan  Gil  (o»  59);  nous  trou- 
verons bientôt  la  génération  antérieure  de  cette  famille 
de  fondeurs. 


TALLET. 

196. —  Église.  123-1 

OBIIT  :  BERiNAJlDVS  : 
TEXTORII  :  VJIII  • 
là  :  APRILIS  :  ANNO.  •  X 
m  i  ce  i  XLIIII  : 
VII  :  iTl  :  MAI  :  ANrSÔ  :  X  : 
M  :  ce  :  L  :  IIII  :  OBlil  :  SE 
BILLA  :  VXOK  :  EIVS  : 


D  après  une  copie  Ugurée  qui  ma  élc  c(»mmunique(' 
par  M.  Alart. 


39 
SAINT-JEAN-PLA-DE-CORTS. 

197.  — Église.  1225. 

t  ANNO  :  M  |  CC  :   XXV  :  VII     iTÎ.     WMUS  :  F  VIT     IK 
ANSLATATA     llIC  :  SAVRINA  •  VT     AiNIMA 
EIVS     REQVIESCAT     IN     PAGE  : 

Au-dessus,  à  l'intérieuf  du  cadre,  daus  l'augle  de 
droite,  une  main  bénissante,  et  dans  Pangle  de  gauche, 
une  main  portant  un  encensoir. 

198.  —  Cloches. 

i  SANCTA  BARBERA  ORA  PRO  NOBIS  ;  SAN  lOAN  BATISTA  TOMLS 

J'ignore  la  signification  des  cinq  dernières  lettres.  Les 
caractères  de  cette  inscription  sont  semblables  a  ceux 
du  bourdon  de  Saint-Jean  de  Perpignan,  fondu  en  1418 
(no  56). 

Sur  une  autre ,  aussi  sans  date ,  mais  plus  ancienne, 
de  forme  très-évasée,  sans  aucun  ornement  : 

f  MENTEM  :  SANTAM  (sic)  \  SPONTANEAM  :  HONHOREM  {sicj  [ 
DEO  :  ET  :  PATRIE  :  UBERACTONEM  (sic) 

Une  autre  cloche,  du  xv^  siècle,  et  du  poids  d'envi- 
ron cent  kilogrammes,  se  voyait  encore,  il  y  a  dix  ans, 
dans  un  grenier  à  foin  de  l'ancien  château  du  lieu.  On 
y  lisait  : 

XPS  REX  VENIT  IN  PAGE  DEVS  IIOIMO  FACTVS  EST 
LE  VOLO. 

199.  —Église,  a  côté  de  la  porte.  1220  (?). 
Baron  Taylor,  Vo;/.  Pittorcs.,  planches. 


40 
•   ANNO  :  \PI  i  MILLi:siMO  :  CC  j  VICiKSIMO  \  SECVNOO 
:  IDVS  :  NOVI'VIBRIS  :  OBMT  :  IM'TUVS  :  DE     CASLLMS 

•  •  •  •  • 

QVi     SVl     NEPOTIS     ARTE     I VCET     lUC     TVMVLATVS  : 
HIC     SEMPEIt     IKETVS  :  OFICIO     l'KESBIÏEUATVS 

En  chef,  à  l'angle  de  droite,  une  main  bénissante; 
au  milieu ,  une  croix  grecque  au  pied  (iché ,  accostée  de 
deux  chandeliers.  Une  guirlande  de  feuillages  encadre 
ces  ornements  et  l'inscription.  Le  sens  de  la  quatrième 
ligne  a  besoin  de  commentaire.  En  prose  on  aurait  écrit 
simplement  :  Listituit  presbitemm  pcrpetuum ,  formule 
ordinaire  de  la  fondation  d'un  obit,  telle  que  nous  la 
trouvons  a  chaque  pas  (voir  n^s  90,  101,  106,  109,  etc.). 

200.  —Cloche.  1436. 

t  PATER  EST  PAX  FILIVS  EST  VITA  SVIKITVS  SANCTVS  EST 
REMEDIVM  MAESTRES  YPOLIT  GIL  E  lACME  GIL  ME  FECERVNT 
LANY  MIL- CCCC- XXXVI- 

Diamètre  de  la  cloche  :  l'»,02.  J'ai  signalé  déjà  cette 
autre  génération  de  la  famille  Gil  (voir  n^  193). 

201.  —Maison  Vilar,  auge  du  puits.  1547. 

:  VIR  :  CIRGVMSPECTVS   PRO  : 

VIDENGIE  :  HONORABILIS  :  BERNARDVS  :  lORDAM  | 
QVONDAM  :  BAIVLVS  :  HVIVS  :  L0CI  :  lACET  : 
me  :  QVI  :  OBIIT  :  X  :  DIE  :  IVLII  :  ANNO  : 
DOMINI  :  M  i  CGC  :  XLVII  :  GVIVS  :  ANIMA  ;  REQVI 
ESCAT  :  IN  :  PAGE  :  AMEN  ; 

Sarcophage  converti  en  auge  auprès  du  puits  de  la 
maison  Vilar.  L'inscription  est  accompagnée  de  deux 
écussons   à   trois   fasces   ondées,  armes  parlantes   des 


Jorda  ,  par  allusion  au  lUuive  célèlue  de  la  Palesiiric  (|uc 
nous  appelons  aussi  Jorda  dans  noire  langue  calalaiie. 
L'inscription  est  en  creux,  les  écussons  et  la  bordure 
de  feuillages  courants,  qui  encadre  l'ensemble,  sont  champ- 
levés.  Le  sarcophage  n'a  qu'un  mètre  de  long  sur  largeur 
et  hauteur  proportionnelles.  Ces  dimensions  paraissent 
avoir  été  généralement  adoptées  chez  nous,  au  xiv^  siè- 
cle, si  nous  en  jugeons  par  les  modèles  qui  sont  restés. 
Ils  ne  recevaient  que  la  charpente  osseuse  du  défunt  après 
qu'on  avait  laissé  aux  chairs  le  temps  de  se  consumer 
dans  la  terre.  On  m'a  signalé  dernièrement  un  sarcophage 
semblable  dans  la  banlieue  de  Perpignan  :  c'est  la  tombe 
de  Pons  des  Barres  enlevée  au  couvent  de  la  Merci  de- 
puis 89.  J'en  ai  donné  ci-dessus  (n»  73)  l'inscription 
très-inlidèle,  d'après  une  ancienne  copie.  Je  corrigerai 
plus  tard  cette  leçon ,  mais  dès  h  présent  je  demande 
asile  dans  notre  musée  pour  un  monument  qui  en  est 
digne,  et  que  le  propriétaire  échangerait  volontiers,  je 
n'en  doute  pas,  contre  une  auge  de  même  capacité. 

SAINT-MARTIX-DE-FEXOLLAR. 

!202.  Église.  Pointures  murales,  xu'-'  siècle. 

L'église  de  Saint-Martin-de-Fenollar  forme  deux  pa- 
rallélogrammes rectangles,  d'inégale  grandeur.  Le  plus 
|ietit,  qui  était  autrefois  l'abside,  a  ô"','22  de  longueur 
et  !2"\4o  de  largeur;  il  est  couvert  par  une  voûte  en 
berceau  qui  prend  naissance  à  2"i,0ij  au-dessus  du  sol. 
Le  développement  du  chevet,  de  la  voûte  et  des  parois 
latérales  ofl're  une  surface  de  5i  mètres  carrés,  ornée 
aux  qiiatre  cinquièmes  de  ces  peintures  murales  du 
moyen-âge  dont  le  Poitou  garde  la  plus  belle  page  :t 
Saint-S;i\in.  Klles  ont  soulVerl  du  temps  et  de  la  main 
des  hommes  surtout,  mais  il  en  reste  assez  pour  faire 
bien  com|)rendre  l'ensemltle  de  la  composition. 


i2 

La  représenlaliuii  de  Dieu  le  lils,  avec  son  corlége 
ordmaire,  occupe  un  gros  tiers  de  la  voûte  :  il  est  assis 
au  milieu  d'une  auréole  ellipti([ue ,  la  têle  couronnée  du 
nimbe  crucifère,  les  pieds  nus,  bénissant  de  la  main 
droite  et  tenant  la  main  gauche  appuyée  sur  un  livre  que 
porte  le  genou.  Les  quatre  évangélistes  raccompagnent; 
saint  Matthieu,  saint  Marc  et  saint  Luc  tiennent  dans 
leurs  bras  l'animal  qui  les  symbolise.  Chacun  d'eux  est 
en  outre  appelé  par  son  nom  dans  une  inscription  de 
quatre  vers  écrite  sur  les  deux  plus  longues  bandes  du 
cadre  rectangulaire  qui  embrasse  tout  le  sujet.  Voici  ce 
que  j'en  ai  su  lire  : 

MATEVS  NATVM  DE  YIUGINI'   l'RI'DIGAT  AGNVM 

MARCVS   AVREM   PER  DESERTA    AM 

VERBO  PETITA  SuVNCTVS  (?)  lOANNES 

US  AJEDICVS  LVCAS  TENET  ORE  VIVEINT. . .   (?) 

Avec  ces  autres  fragments  disposés  en  cette  forme  sur 
la  ligne  du  petit  axe  de  l'auréole  : 


D 

C 

E 

A 

' 

X 

T 

T 

R 

E 

A 

T 

PE 

V 

CT 

I 

vs 

N 

■s 

'^ 

TA 

S 

A  droite  et  à  gauche  de  ce  tableau  central,  dans  l'es- 
pace compris  entre  les  longs  côtés  du  cadre  et  la  ligne 
de  naissance  de  la  voûte,  sont  assis  quatorze  personnages 
couverts  d'amples  vêtements  et  les  yeux  tournés  en  haut, 
vers  limage  du  Sauveur.  De  la  main  gauche  ils  tiennent 
élevée  une  coupe  a  pied,  ou  calice,  et  de  la  main  droite 
uiie  sorte  de  violon  à  trois  cordes  percé  de  deux  ouïes  : 
leur  coiffure  est  un  bonnet  cylindrique,  terminé  quelque- 


43 

fuis  par  iiii  cùue  applali  el  ressemljlaiil  alors  à  une 
mitre. 

Sur  la  paroi  verticale,  du  côté  de  l'évangile,  au-dessous 
de  deux  arcades  surbaissées,  la  mort  de  la  sainte  Vierge  (?) 
et  celle  de  saint  Joseph  (?).  La  peinture  est  très-altérée. 
Du  côté  de  ré[)ître,  les  rois  mages  conduits  par  l'étoile, 
et  quelques  lambeaux  d'inscription  qui  laissent  deviner 
ce  texte  connu  :  vklhnus  stellam  eius  in  ORiEN/e,  et 
\Enimus  cvm  Mvner/Bvs  adorxRE  Dominum  (  Office  de 
l'Epiphanie). 

On  entrait  jadis  dans  l'église  par  une  porte  au  midi 
de  la  nef;  mais  on  a  trouvé  plus  à  propos  de  murer 
celte  porte,  de  transporter  l'autel  a  l'ouest  et  d'ouvrir 
le  fond  de  l'abside.  Le  pire  inconvénient  de  cette  combi- 
naison, çst  d'avoir  détruit  la  moitié  des  peintures  du 
cbevet.  Nous  y  trouvons  encore,  au-dessus  de  la  porte, 
la  sainte  Vierge  assise  dans  une  auréole  eu  losange ,  les 
luains  élevées,  la  tète  couverte  de  la  coiffure  cylindrique 
signalée  plus  liant.  Immédiatement  au-dessous  venaient 
se  rejoindre  en  s'abaissant  vers  la  pointe  inférieure  du  lo- 
sange, i)lus  basse  ipie  leur  niveau,  les  personnages  peints 
sup  les  bandes  latérales  de  la  voûte;  on  ou  distingue 
encore  deux  au  retour  d'équerre,  de  chaque  côté  de  la 
porte.  Dans  le  bas  était  l'adoration  de&  bergers,  feisant 
suite  à  l'adoration  des  mages. 

Dans  un  pays  plus  jaloux  (jue  le  nôtre  de  ses  monu- 
ments, les  peintures  de  Saint-Martin-de-Fenollar  seraient 
déjà  calquées,  dessinées,  gravées.  iNous  nous  contentons 
de  savoir  qu'elles  existent  et  nous  ne  paraissons  pas  nous 
soucier  de  l'apiirendrc  aux  autres.  Il  est  encore  temps 
de  réparer  cette  négligence,  mais  il  faut  se  bâter,  n'at- 
tendons |)as  qu'un  épais  badigeon,  cm  tout  autre  agent 
destructeur,  nous   en   aient  ôté  les  moyens. 

L'église  de  Saint-Martin-de-Fenollar  est  a|>pelée  La 
Mulnil.  L'origine  de  ce  nom  a  été  l'objet  de  vives  dis- 


4'i 

eussions  dans  les  colonnes  du  Publicateur  de  1852.  Cette 
polémique  ne  touche  en  rien  à  mon  sujet. 

LA  CIXS/V. 

203. —  Église.  1292. 

t  -;  TKliCIO  i  DtClMU  :  I(LS  :  MAKCI 

I  •:  ANNU  :  DOMIM  \  M  i  CC  :  NONAGK 

SIMO  i  PHI^IO  :  OlilIT  :  PONCIVS  :  OK 

CAPITE  I  AIAGNO  :  DOMICEIXVS  : 

:  DOMINVS  :  CASTRI  :  DE  j  CLVSA  : 

:  ROGO  :  TE  :  VT  :  ORES  :  DEVM  :  PRO  :  ME  : 

•  •  •  •  • 

Le  cadre  est  orné  de  croix  à  douze  pointes  pommelées. 

L'église  de  La  Clusa  a  trois  nefs  terminées  par  des 
absides  en  hémicycle.  x\  l'extérieur  on  ne  voit  qu'un 
chevet  plat ,  percé  de  trois  petites  fenêtres  ;  il  est  cons- 
truit sur  la  ligne  du  mur  d'enceinte  du  vieux  château  a 
l'est,  et  c'est  peut-être  uniquement  à  cette  circonstance 
qu'il  doit  sa  forme  droite,  comme  plus  favorable  au 
système  de  défense.  Le  château  de  La  Clusa  fut  un  des 
points  militaires  les  plus  anciens  de  nos  comtés  ;  nous 
n'avons  pas,  dans  ce  département,  de  ruines  aussi 
imposantes  par  leur  étendue. 

ARGELÈS. 

204.  —Église.  Fonts  baptismaux   xiiF  siècle. 

MAGISTER  :  GVILLELMVS  :  ÎMARCIII  \  HE 
VOLONO  :  .ME  :  FECIT  : 

•  •  • 

La  cuve  baptismale,  où  se  lit  cette  inscription,  res- 
semble beaucoup  h  un  grand  bénitier.  Son  réservoir  hé- 
misphérique est   creusé   dans   une  table  polygonale  qui 


engendre  par-dessous  une  pyramide  renversée  du  tnènie 
nombre  de  côtés.  Ainsi  laite,  elle  ne  pouvait  se  tenir 
debout  sans  un  appui  étranger;  on  l'a  scellée  dans  le 
mur  auprès  de  la  porte  de  l'église.  Sa  date  nous  est 
donnée  par  l'inscription  qui  est  du  xiii«  siècle.  Guillem 
March  a  signé  son  œuvre  en  caractères  si  élégants  et  si 
purs  qu'on  aimerait  à  retrouver-son  nom  sur  un  monu- 
ment plus  digne  de  lui. 

205.  —  Cloche.  1470. 

IJTS  •  ML:MF:M  SâNCTAM  SPONTANt'AM  IIONOREM  DKO  l-T  l'ATI'.IK 
MBERACIONEM  •  LANY    M     CCCC  •  LXX    TE  DEVM  LAVDAAIVS 

Sur  une  autre  cloche,  de  plus  fort  diamètre,  ancienne 
aussi ,  mais  sans  date  : 

LAVnO  DEVM  VERVM  l'I.EREM  VOCO  CDNCRK^O  (ÏÏ.FRVM 
ni'FVNCTOS  PLORO 

ERMITAGE  DE  SAI\TE-MA(.OELAI\'E. 

206. —  Église,  derrière  l'autel,  liii. 

AGI  lAV  NANTONI  MELER 
QVI  PASSA  DAQVESTA  VIDA  •  A  ■ 
VI  •  DE  GFNER  LANY  MIL  •  CCCC  • 
XXXX  II II 

Sainle-Magdeiaine ,  ou,  comme  on  rappelle  |)lus  eoni- 
muiiémenl  aujourd'hui,  Notre-l)ame-de-Vie,  est  un  lieu 
de  pèlerinage  situé  dans  le  territoire  d'Argelès,  an  sud- 
ouest  et  à  demi-lieue  de  ce  village. 

207.  —  Sacristie,  xiir  siècle. 

Sous  le  lavoir  de  la  sacristie  de  Sahite-Magdelaine  a 
élé  mis  pour  évier  un  marbre  qui  n'avait  |>as  été  destiné 


16 

sans  doule  à  cet  usage,  quoique  sa  forme  s'y  prèle  on 
ne  peut  mieux.  La  salutation  angélique  y  est  gravée, 
-partie  dans  le  fond  de  la  cuvette,  partie  sur  le  cadre, 
en  écriture  des  premières  années  du  xiiF  siècle,  ati 
plus  tard.  Au  milieu  du  fond,  une  croix  latine,  accom- 
pagnée, vers  les  angles,  de  quatre  croix  plus  petites, 
à  branches  égales ,  inscrites  dans  un  cercle  ;  aux  quatre 
coins  du  cadre,  des  croix  semblables.  A  quoi  servait 
autrefois  ce  marbre?  On  ne  le  sait  pas;  la  génération 
vivante  l'a  toujours  vu ,  on  croit  l'avoir  toujours  vu  sous 
le  robinet  de  la  fontaine. 

COLLIOITRE. 

208.  —  Église.  XI ve  siècle. 

A  XIII   ANTONI   

PRKGA  :  DEVS  :  PEU  i  KL  : 

Première  et  dernière  ligne  d'une  inscription  funéraire 
placée  à  la  plus  haute  marche  du  maître-autel,  et  s'effa- 
çant  peu  a  peu  sous  le  frottement  des  pieds;  on  n'y 
lit  plus  rien  avec  confiance  dans  les  lignes  intermédiaires. 

209.  ÉgHse,  ancienne  sacristie,  xiv^  siècle. 

...Mi  CGC  : OBIlî  :  DOMINVS  :  GVILLELMVS  :  GAVSELMI. . 

REQVIESCAT  :  IN  PAGE DICATIS  :  PATER  :  NOSTEIl  : 

Entre  ces  deux  lignes,  gravées  sur  les  tranches  hori- 
zontales du  cadre,  un  bas-relief  représente  Jésus-Christ 
en  croix,  la  sainte  Vierge  et  saint  Jean,  sous  des  arcades 
trilobées. 

210.  —  Église  du  couvent.  1451 . 

AGI  •  1\V     r.O     HONORABLE  •  EN  •  lOHAX  ■  CASSES  •  MERCADER 

DE   •    PERPENYA 


M 
LO  •  QVAL  •  MOlU  •  CONSDL     \    V     Dl'  .  AGOST-  ANY  ■  M    CCCC,  •  SI 

iNCANTA     IIV 

(Irande  dalle  de  2"',r)()  de  long  el  0"',i)0  de  large.  On 
la  coupée  en  deux,  au  tiers  environ  de  sa  longueur;  le 
plus  petit  fragment  est  resté  dans  l'église  du  couvent  ; 
l'autre  couvre  au  cimetière  une  tombe  assez  récente. 
L'inscription,  en  gothique  carrée,  haute  et  serrée,  fait 
le  tour  de  la  pierre;  aux  quatre  angles,  un  écusson  ren- 
fermant une  11  dont  la  haste  est  prolongée  au-dessus  de 
la  panse,  et  croisée;  dans  le  champ,  deux  groupes  de 
quatre  maisons  placées  en  quinconce,  armes  parlantes  de 
Cases. 

On  trouve  mémoire  de  la  mort  de  Jean  Cases  dans  le 
cartulaire  municipal  de  Perpignan,  appelé  livre  des 
Ordinations,  à  la  date  du  25  octobre  1  iol  :  «  Corn  nos 
«  altres  Frances  Andreu,  Frances  Castello,  Thomas 
«  Monner  e  Johan  Barrau ,  consols  lany  présent  elets 
«  de  la  vila  de  Perpinya,  ensemps  ab  lo  honorable  en 
«  Johan  Cases ,  après  de  sa  electio  mort,  etc.  »  {Ordin.  i, 
558  yo).  Pierre  Vedrinyans  paraît  à  sa  place  dans  le 
même  registre ,  en  qualité  de  troisième  consul ,  le  9 
décembre  suivant. 

MADALOTII. 

21 1 .  —  Lieu  dit  le  cimeiière. 

P.  Puiggari,  Piddicalexir ,  1852,  n»  i2.  — Henri,  Guide 
en  Roussillon,  page  L^i2. —  De  Gazanyola,  llist.  du 
Ronssillon,  page  25. 

VAFP  l'M  1  V  se  L  I  K 
l'M- 

M.  p.  Puiggari  a  donné  l'explicatiim  suivante  de  cés: 
sigles  : 


48 

H  xxlerius  liacciis ,  pruefedus  vraesidii ,  yiomimentum 
M  lussil,  \ivus,  sihi  condi,  loco  intersepto  Et  EMunito. 

«  Valôi'ius  Flaccus,  commandant  de  la  forteresse,  s'est 
«  fait  construire ,  de  son  vivant,  ce  tombeau  dont  la 
«  place  a  été  circonscrite  et  défendue  par  un  mur.  » 

Cette  interprétation  fut  publiée,  en  1832,  sous  la  pro- 
tection d'un  si  quid  novisti  melius,  auquel  personne 
encore  ne  s'est  chargé  de  répondre.  Les  variantes  que 
l'on  a  proposées  n'offrent  rien  de  sérieux  ;  elles  ne  chan- 
gent ni  le  sens  ni  le  style  du  premier  thème ,  et  l'énigme 
reste  entière.  Quelques  personnes  ont  suspecté  l'authen- 
ticité de  l'inscription  elle-même,  d'après  de  vagues  don- 
nées, et  probablement  sans  l'avoir  vue.  Les  amateurs  qui 
voudraient  éclaircir  leurs  doutes  a  cet  égard,  trouveront 
le  monument  à  800  mètres  environ,  nord-est,  de  la 
(our  de  Madeloth ,  entre  le  -puig  de  Tallaferro  et  le  coll 
de  MoUô,  sur  un  étroit  plateau  que  les  gens  du  pays 
appellent  lo  sementcri.  Ces  indications  ne  les  dispense- 
ront pas  de  jirendre  un  guide  pour  s'éviter  des  recher- 
ches pénibles  et  peut-être  sans  résultat. 

Les  rares  habitants  de  ces  coteaux  solitaires  connais- 
saient depuis  bien  longtemps  la  pierre  écrite;  dans  leurs 
idées ,  elle  couvrait  ou  indiquait  le  gîte  d'un  trésor  ca- 
ché, mais  après  avoir  inutilement  bouleversé  le  sol  à 
plusieurs  reprises,  ils  ne  faisaient  plus  cas  du  signe 
menteur.  En  1825  des  bergers,  encore  abusés  par  la 
vieille  tradition,  entreprirent  de  nouvelles  fouilles  avec 
une  ardeur  qui  les  trahit.  M.  Pi,  de  Cosprons,  proprié- 
taire du  terrain  où  se  poursuivaient  les  recherches,  vint 
les  interrompre  en  se  rendant  sur  les  lieux.  Il  y  trouva 
nos  sigles  gravés  sur  une  grande  dalle  de  pierre  schis- 
teuse dont  il  avait  ignoré  jusqu'alors  l'existence.  Près 
d'elle  gisaient  deux  autres  dalles  de  même  longueur, 
mais  plus  étroites,  qu'on  lui  dit  avoir  été  posées  autre- 
fois de  champ  et  recouvertes  par  la   plus  grande.  M.  Pi 


i9 


remarqua  en  outre  qu'à  six  pieds  environ  à  l'entour  de 
oes  dalles,  perçaient  les  fondations  d'une  enceinte  con- 
tinue. C'est  de  ces  circonstances,  et  du  voisinage  de 
((uelques  ruines  appelées  lo  Castellet,  (pie  i\I.  Puîgj^ari 
conclut  à  la  signification  des  quatre  derniers  sigles  : 
loeo  intersepto  et  cmuuito. 


TATSO. 

212.  -  Porte  de  l'église,  xiiie  siècle. 

...KALElNDAS  MADI!  OBIIT  BERENGARIVS  TACITONIS. 
■ .   FAMA  VIR[  FLORET  ET  MILITAT  EIVS  HONORI. 
. .  ATQVE  NESCIT  CVM  MORIENTE  MORI 


D'après  une  copie  de  la  main  de  M.  P.  Puiogari    Je 
n'ai  pas  su  retrouver  cette  inscription.  " 

LA  ROC A. 

215.  —  Porte  de  l'église. 

:  INTVS  :  CLAVSVRAM  :  IIVIVS 
TVMVLI  :  ATQVE  :  STRVCTVRAM 
TRANSLATA  SVi\T  CORPORA  BERNARDI 
COREDI  ET  VXORIS  ET  OMNIS  GENERIS  EFVS 
ET  :  BARTOLOMEf  :  GRAMATICI  :  ET  :  VX 

Au-dessous  un  espace  égal  pour  cinq  autres  lignes  qui 
n  ont  jamais  été  remplies. 

214. —Cloches.  1407.  1426.  1459. 

_ANG^;LE    DOMINI     PENTESON    QVI    CORPVS     DOMIiM    NOSTRI 
IHV  XPr  IN  MONVMENTO  CVSTODISTI 

CVSTODI     NOS     Ali     OMNI     ADVERSITATE    ET    FVIGVRF    IT 
TEMPESTATE   :-  P  t  X  .;.  U  f  N  M,AN     MIL       CCGC  '  VII  ' 

4 


50 

Celte  cloche  a  0"\97  de  dianièlre,  el  donne  le  la.  Les 
sigles  p  •  X  •  D  •  N  •  sii,Mii(ienl  :  pax  Christi  Donthu 
nostri.  Je  trouve  cette  lormule  sur  uue  autre  cloche  plus 
moderne.  Angcle  Penteson  pouiTait  se  rendre  par  :  Ange 
de  la  douleur,  ou  Ange  du  deuil,  du  mot  grec  ttcvÔ/oo, 
je  pleure,  je  suis  dans  le  deuil. 

XPS  :  VINCIT  :  xFs  :  lŒGNAT  :  XPS  :  IMI'KUAT  :  XPS  ;  NOS  : 
DEFENDÂT  :  |1  LANY  :  MIL  :  CCCC  :  XXVI  :  MAESTRE  ;  POLIT  : 
GIL  :  ME  :  FEV  | 

Hippolyte  Gil  est  sans  doute  celui  qui  a  fondu  la  clo-  - 
che   du  Volo   en  compagnie  de   son  parent  et  associé 
Jacques  (voir  n»  200). 

t  liiS  :  MENTEM  :  SANCTAM  :  SPONTANEAM  *  HONOREM  : 
DEO  :  ET  PATUI  ||  f  ANNO  :  DOMINl  :  M  :  CCCC  :  XXXIX  : 
X'PS    REX     VENU     IN     PAGE     DEVS     HOMO 

Les  deux  formules  sont  incomplètes  faute  d'espace. 

VILALLONGA-DELS-MOM'S. 

215. —Église.  Cloches.  1410. 

XPS  VINCIT  XPS  REGNAT  X?S  IMPEKAT  XPS  AB  OMNI  MALO 
NOS    DEFENDAT    AMEN  •  M  •  CCCC  •  X  • 

MENTEM  SANCTAM  SPONTANEAM  nONOREM  DEO  ET  PATRIE 
LIBERACIONEM   •  M  •  CCCC   •  X  • 

LE  VILAR  DE  VILALLOIVGA-IJELS-MOIVTS. 

216.  —  Porte  de  l'église.  1245. 

:  XV  :  KL  :  SEPTEMBRIS  :  AN  NO  i 

:  DOMINI  i  M  •  CC  :  XL  :  III  :  omiT 

:  RAIMVNDVS     DE  :  ORVLO  i  PREPOSITVS 


51 

«  Des  prud'hommes  ruraux,  dont  les  noms  sont  restés 
«  dans  l'oubli,  élevèrent  jadis  non  loin  de  Villclongue- 
«  dels-Monls,  et  à  la  [)artie  dite  aujourdiiui  le  Mlar, 
«  une  église  qu'ils  dédièrent  à  la  sainte  Vierge.  Des 
«  chanoines  réguliers  de  Saint-Augustin  l'iu-eiil  appelés 
«  dans  cette  solitude  et  y  fondèrent  un  monastère  dont 
«  le  chef  porta  le  titre  de  Prévôt.  Cette  colonie  monasli- 
«  que  était  déjà  établie  le  10  des  calendes  de  novembre 
«  de  l'an  1H7,  époque  ou  Adroer  et  Vera,  son  épouse, 
«  donnèrent  à  la  prévôté  du  Vilar,  un  champ  au  territoire 
«  de  Villelongue,  lieu  dit  Puig  Cabell  ou  Calbcll,  con- 
«  frontanl  d'un  côté  avec  le  torrent  dcls  Serrait  lus.  » 
(Renard  de  Saint-Malo,  Pablical..,  1855,  n"  !2'2.  ) 

L'église  du  Vilar  fut  consacrée,  le  17  des  calendes 
d'avril  H42,  par  LMalgar,  évèque  d'Elne,  qui  la  plaça 
sous  la  dépendance  du  monastère  de  Notre-Dame-de- 
Llado ,  dans  le  diocèse  de  Girone ,  en  la  retenant  foute- 
fois  sous  sa  juridiction. 

De  nos  jours,  l'abolition  des  droits  féodaux  avait  telle- 
ment réduit  les  revenus  de  la  Prévôté  du  Vilar,  que 
l'impôt  et  les  frais  d'entretien  ou  de  culture  absorbaient  en 
entier  le  revenu  du  seul  ténement  rural  dont  elle  eut 
conservé  la  propriété.  Pour  en  linir  avec  cet  état  de 
choses,  le  prieur  de  l'église  séculière  et  collégiale  de 
Notre-Dame-de-Llado,  dûment  autorisé,  vendit,  le  50 
juillet  1X02,  au  prix  de  4.000  francs,  la  montagne  dite 
du  Vilar,  avec  l'église,  dont  on  a  fait  une  bergerie. 

217.  —Porte  de  l'église.  12o0. 

invs   ocroBRis   anno   domim    m    d; 

L  :  OBIIT  •:  EUCSFADIS  :  DE  :  FVRCIS 
218. —  Porte  de  l'église.  1262. 

V       lltVS     AVGVSTI     ANNU 


noviNi     M     r.c  ■  i.x     fi  ■  oriit  • 

PETRVS  :  GHRAVni   •    DK     VHA^ 
RI 

MONTESQUIU. 

219. —  Enclos  devant  l'église.  1298. 

ANNO  :  DOMINI  \  M  :  CC  :  XC  :  VIII  :  QVINTO  :  IDV 

S  :  JNOVF.MBRIS  :  OBIT  (sic)  [  DO.MINVS  |  GVILLELMVS  :  lOERII  =  CAP 

ELLANVS  :  DE  |  MOMESQViVO  :  QVI  :  DIMISIT  :  V 

NAM  i  LAMPADEM  :  SEMPER  :  ARDENTEM  :  ET  :  VNVM  :  TORTI 

CIVM  :  CEREVM  :  SEMPER  :  AD  :  ELEVANDVM  •  CORPVS  : 

XPI  :  IN  :  ECCLESIA  :  SANCTI  :  SATVRMM  j  PRO  :  QVIBVS  ■  OBLI 

GAVrr  :  DVAS  :  CLAVSAS  :  AFRONTAT  :  CVM  :  ORT 

•  ■  •  •  • 

0  :  ECCLESIE  :  ALIA  •  CVM  :  F  :  CELERA  :  ET  :  lACES  (sic)  ', 
HIC  :  CVM  i  OMNI  I  SVO  :  GENERE  :  HOMO  :  QVID  :  ASPICIS  ; 
QVOD  i  ES  I  FVI  :  QVOD  :  SVM  :  ERIS  :  MEMENTO  |  MEI  f 
E    D    I     G     A     S  :  l     (?)     PAT NOST 

Sur  la  bande  verticale  du  cadre,  à  droite,  sont  dispo- 
sées, quatre  par  quatre,  douze  petites  croix.  Le  g  du 
mol  GENERE  (9e  ligne)  est  minuscule.  La  dernière  ligne 
est  gravée  sur  le  cadre  ;  elle  m'a  paru  de  la  même  main 
que  le  corps  de  l'épitaphe  ;  et  comme  les  deux  premiers 
mots  appartiennent  au  catalan,  je  dois  modifler  l'opinion 
inexacte  émise  aux  n°^  21  et  M  sur  l'introduction  de 
cette  langue  dans  nos  monuments  épigraphiques.  La  re- 
marque laite  au  n"  72  tombe  donc  aussi  d'elle-même. 

L'épitaphe  de  G.  Joer  est  protégée  par  une  grande 
arcade  ogivale  que  soutiennent  quatre  colonnes,  au- 
dessus  d'une  fosse  profonde.  Les  tombeaux-arcades 
étaient  nombreux ,  mais  presque  tous  ont  disparu  parce 
qu'ils  gênaient  les  abords  des  églises  où  l'on  avait  l'ha- 


53 

bitude  de  les  placer.  Parmi  ceux  qui  resleul  encore, 
deux  ou  trois  à  peine  ont  conservé  l'inscription  funé- 
raire. La  cupidité  n'a  pas  été  toujours  étrangère  à  cette 
destruction. 


220.  —  Cimetière.  xiiF  siècle. 


VI   •   IDVS     APRrUS     OBIIT     PETRVS     BERGOIONI 


ET  •  NATI 


SVI 


lACET    HIC 


] 


ARTE 


: 


PETRI 


SEPVLTVS 


:] 


Voilà  bien  exactement  l'inscription ,  moins  la  fornie 
de  l'écriture.  Point  de  millésime  :  on  en  remarque  lab- 
sence  parce  que  les  deux  petits  cadres  de  la  seconde 
ligne,  qui  lui  avaient  été  réservés,  sont  restés  vides; 
mais  on  est  encore  j)lus  frappé  de  la  ressemblance  des 
caractères  avec  ceux  de  ré[)itaplie  de  Pierre  (Gasoils,  au 
Vole  (no  199).  S'ils  étaient  mobiles,  on  pourrait  sans 
inconvénient  les  transposer  d'une  inscription  à  l'autre, 
et  la  subslitulion  ne  se  trahirait  que  i)ar  une  légère  iné- 
galité de  liaiiteur.  La  croix  et  les  chandeliers  que  l'on 
voit  sur  le  marbre  de  Montesipiieu  sont  la  copie  eu  grand 
de  la  croix  et  des  chandeliers  du  Volo.  Je  trouve  xm 
dernier  trait  d'air  de  famille  dans  le  mot  arte,  formule 
nouvelle  dans  iu)tre  épigraphie.  Je  suis  très-porté  à  croire 
que  le  fils  de  Pierre  Rergonyos  était  le  neveu  de 
Pierre  Casells.  Les  deux  tcunbeaux  furent  élevés  par  ses 
soins,  ou  construits  de  sa  propre  main,  suivant  la  signi- 
fication que  Ion  attache  au  mol  arte;  mais  dans  le  pre-' 


mier  cas,  c'est  au  mémo  la|»ici(lc  ([uil  s"csl  adressé  pour 
j^raver  les  deux  éiutaphes. 

221.  —  Cimetière.  lo!24.  J574. 

mm  DOMINI   M  CGC  XXlill 
QVAIITO  là  SliPTI-MBRIS 
VllNALlWS  GVILt.lXMI  DE  MONTES 
yVIVO  FtClT  ISTVD  PlTAi'ILVM  KT  lA 
CET  HIC  iVlVTER  SVA  CVM  GENERE  SVO. 

PiTAFiLVM  ne  se  trouve  ni  dans  Calepin  ni  dans  Du 
Cange.  .N'est-ce  pas  epitaimiivm  que  l'on  a  voulu  mettre, 
en  le  prenant  dans  le  sens  de  tombeau?  Orelli  propose  la 
même  acception  pour  ce  mot.  (Inscr.  Rom.,  n^  4318.) 

Sur  la  bordure  inférieure  : 

:  AiNNO  i\l  CCC  LXXIUI  MOU!  :  EN  :  FEll  (Vj  :  VALS  :  NET  : 
1)I:N  I  AKNAV  :  GMI.LEiM  :  E  FE  :  PINTvR  :  LO  :  CAP  :  DE  : 
LAGLESA 

Quoique  l'on  ait  gravé  ces  deux  inscriptions  sur  le 
même  marbre,  elles  sont  entièrement  distinctes,  et  la 
seconde  est  en  réalité  de  cinquante  ans  moins  vieille 
que  la  première.  Il  ne  reste  plus  trace,  dans  Téglise,  des 
peintures  dues  à  la  libéralité  de  Ferrer  Valls;  de  la  porte 
à  l'abside  règne  la  blanche  uniformité  du  lait  de  chaux. 


SA  INT-GE1VIS-1)ES-1  OINTAINES. 

-±±■1.    -  Eglise.  Linteau  de  la  porte.  1020. 

(iallia  christ.  ,  t.  VI,  col.  IlOo.  —  liulld.  de  lu  Soc. 
(les  Vijr. -Orient.  ,  I.  VIII,  p.  272  et  pi.  7^.  ~-  linllrfiii 
ivoniiDi.  ,  I.  22. 


55 

t  ANNO  VIDIiSIMO  (sic)  QVARTO  Rl'ENNANTt:  ROTIŒKTU  lŒGi: 
AMMFLMVS  GRATIV  DEI  AltA  {$icj 

ISTA  OPERA  FIl'RI  iVSSlT  IN  ONORE  (sicj  SANCTf  GENESII 
r.EîSOBlI    QVE    fsicj   VOCANT    FÛNTANAS 

Le  linteau  de  l'église  de  Saint-Gcnis  est  un  monolithe 
(le  2"!,  20  de  longueur,  sur  0'",  70  de  largeur  moyenne. 
La  différence  de  hauteur  entre  les  deux  extrémités  de  la 
pierre  est  très-siMisiMe  à  I'umI;  mais  on  rencontre  à 
chaque  pas  tant  d'exemples  de  l'iiulifférence  des  artistes 
de  celte  époque  pour  la  symétrie  de  certains  détails, 
(ju'on  ne  s'en  étonne  plus.  Notre  quadrilatère  irrégulier 
n'en  est  pas  moins  couvert  d'intéressantes  sculptures. 
.\u  centre,  Dieu  le  lils,  assis,  harhu,  pieds  nus,  couronné 
du  nimhe  crucil'ère,  bénissant  de  la  main  droite  et  la 
main  gauche  ajjpuyée  sur  un  livre  fermé,  que  soutient 
le  genou.  L'auréole  perlée  qui  l'environne  est  formée  par 
deux  cferdes  inégaux,  (\m  se  coupent  et  sont  raccordés 
aux  points  d'intersection  par  une  touffe  de  feuillage;  deux 
anges  agenouillés  la  soulicMinenl.  L'alphu  et  ïom(''g<r  n'y 
sont  point  oubliés.  Une  guirlande  de  feuillages  courants 
encadre  tout  le  sujet.  Innnédiatement  au-dessous  de  la 
bordure  supériouio,  l'inscription,  sur  deux  lignes,  inter- 
rom|uies  au  milieu  par  le  grand  cercle  de  l'auréole,  (jui 
louche  h  cette  bordure.  Elle  est  gravée  en  creux;  tout 
le  reste  est  en  relief  plat  de  réj)oque. 

La  vingt-quatrième  année  du  règne  de  Robert,  dale  de 
noire  monument,  est  conq)rise  entre  le  24  octobre  101',) 
ot  pareil  (piantièine  de  1020,  en  prenant  la  manière  la 
|)lus  commune  de  compter  les  années  du  règne  de  ce 
|)rincc,  qui  les  fait  partir  de  son  accession  au  trône, 
(iuillaume,  premier  du  nom  dans  la  série  des  abbés  de 
Sainl-(îenis,  dressée  par  le  GaUia ,  n'est  connu  par 
aucun  autre  docnineii(  ipio  riuscriplion  du  linleau  de 
son  église. 


5f. 

L'abbaye  bënédicline  de  SaiiU-Genis-des-Koiilaines,  à 
laquelle  le  village  de  ce  nom  doit  son  origine,  parait 
avoir  été  fondée  au  commencement  du  ix^  siècle.  Les 
Normands  la  ruinèrent  dans  le  siècle  suivant;  mais  elle 
se  releva  bientôt  après  sous  le  gouvernement  et  avec  l'aide 
de  Gausfred  I*%  comte  de  Roussillon.  Réunie  a  l'obédience 
de  Montserrat  par  le  pape  Jules  II ,  en  1507,  elle  fut  régie 
depuis  cette  époque  par  des  abbés  triennaux,  conformé- 
ment à  la  règle  de  Valladolid.  (Gall.  christ.) 

J'ai  déjà  publié  cette  inscription  et  quelques  autres  de 
Saint-Genis,  dans  le  tome  Ville  du  Bulletin  :  je  puiserai 
sans  scrupule  dans  ce  travail.  Les  leçons  reennante  et 
ROTBERTO  out  été  notées  comme  mauvaises  ;  j'ai  donc  à 
les  justifier,  puisque  j'ai  cru  qu'elles  pouvaient  être  main- 
tenues. Le  trait  lié  à  la  haste  du  premier  e  de  reennante, 
entre  la  barre  supérieure  et  celle  du  milieu,  n'est'  pas  un 
G  conjoint,  mais  un  trait  général  d'abréviation.  On  le 
trouve  lié  dans  le  même  mot,  à  I'a,  où  il  représente  Tin 
qui  doit  suivre,  et  tenant  la  place  de  plusieurs  lettres 
dans  deux  autres  mots  :  gratia,  sancti,  comme  on  peut 
s'en  assurer  par  les  fac-similé  suivants  de  nennajite  et 
gratia. 

©R'/DEl 

Sans  doute  ce  trait  général  pourrait  aussi  bien  repré-. 
senter  le  g  que  I'e  ,  mais  le  doublement  de  I'n  m'a  sem- 
blé appeler  le  doublement  de  I'e,  plutôt  qu'une  nouvelle 
consonne.  Quant  au  t  de  rotreuto,  je  l'avais  écrit  sans 
bésitation  ,  parce  que  le  signe  d'abréviation  lié  au  pre- 
miei  o  est  identique  à  celui  qui  demande  le  t  àejitssU. 


SI 

223.  — Porte  de  l'église.  1271. 

:  ANNO     XPl  :  MILLESIMO     DVCEMESI 
MO  :  SEPTVAGESIMO  =  PRIMO  :  V  : 

•  •  •  • 

KLS  :  DECEMHRIS  :  DOMINA     DVLCIA     DE     MONTE 
RVBEO  :  IN     HOC     FVIT  :  TVMVLO     TVMVLATA  :  DIC      . 
PATER  :  NOSTER  :  PRO     ANIMA    SVA  :  FAC    BENE    DVM 

•  •  • 

VIVIS     POST    MORTEM     VIVEHE     SI     VIS  : 

224.  —  Porte  de  l'église.  4507. 

ANNO     DOMINI   :  M  :  CCC  :  SEPTIMO    :  SEXTO  :  IDVS  :  APRILI 
OBIT  fsicj  I  FRATEU  :  MICHAEI,  :   SACRISTA   :  SANCTI  |  GENESII 

Moitié  au-dessus,  moitié  au-dessous  d'un  bas-relief  qui 
représente  Jésus-Christ  sur  la  croix,  entre  sa  mère  et  saint 
Jean.  Le  bas-relief  a  beaucoup  souflérl;  l'inscription 
très-peu. 

225. —  Porte  de  l'église.  1307. 

ANNO  DOMINI  \  M  \  CGC  :  \îl  :  VI  :  IDi)  j  IVMI  :  OHIIT  : 
FR.VTER  :  \\  BERENGAKIVS  DE  PVLCUO  VESPERE  CAMEIIARIVS 
ISTIYS  LUCI  :  ET  DOMINA  MA  ||  THIA  EIVSUEM  IIVMILIS 
SOBOR  :  QVORVM  ANIME  REQVIESCANT  ||  IN  PAGE  :  AMEN  j 
QVOD  ES  FVI  :  QVOD  SVM  ERIS  VIGILA  NE  DE  ||  VORERIS  : 
QVI  ST4TIS  CORAM  PROFERANTES  MORTIS  AD  IIORAM  : 
IBI  II  TIS  ABSQVE  MORA  :  NESGITIS  QVA  TAMEN  HORA  | 
SIC  EGO  II  NESGIVI  :  NISI  QVANDO  RAPTVS  ABIVI  |  SEL» 
ANNIVERSARIVM     STATVI  : 

226.  — Porte  de  l'église,  xiv*^  siècle. 

RAIMVNUVS  DE  POLEESTBIS 

(JVO 


58 

Le  reslo  do  I  inscription  a  été  enlevé  proprement  au 
ciseau  par  (luelciuc  désœuvré.  Un  bas-reliei',  (pie  l'on  a 
respecté,  représente  le  défunt  couché,  tête  nue,  les  mains 
croisées  sur  le  ventre.  Deux  personnages  se  tiennent 
debout,  l'un  a  la  tète,  l'autre  aux  pieds  du  lit  funéraire  ; 
ils  portent  une  crosse,  et  l'un  d'eux  bénit  de  la  main 
droite. 

Auprès  de  ce  marbre  est  une  autre  image  en  bas-relief; 
l'inscription  est  fruste. 

227.—  Église.  Chapelle  de  Notre-Dame  de  Monlserrat. 
xine  siècle. 

Bullet.  de  la  Soc.  des  Pyr. -Orient.,  t.  VIII,  p.  275.— 
BiUlet.  monum. ,  t.  XXII. 

Nous  venons  de  voir  comment  le  ciseau  de  nos  sculp- 
teurs du  xie  siècle  traitait  sur  le  marbre  la  représen- 
tation du  Christ  glorifié;  voici  le  même  sujet,  confié, 
deux  siècles  et  demi  environ  plus  tard,  à  la  palette  d'un 
peintre  qui  nous  a  dit  son  nom.  Ce  tableau,  caché  dans 
le  fond  du  transept  méridional,  est  un  devant  d'autel. 
11  a  l'",6o  de  longueur  et  On\78  de  hauteur,  le  cadre 
non  com])ris. 

Au  milieu.  Dieu  le  fils,  assis,  barbu,  la  tète  ornée  du 
nimbe  crucifère,  la  main  droite  élevée,  bénissante,  la 
main  gauche  appuyée  sur  un  livre,  où  l'on  voit  écrit  : 

EGO  SUM 
I>VX  MVN 
1)1  : 

Sous  ses  pieds  nus,  des  croissants  et  des.  (lualrefeuilles 
d'or,  cernés  d'un  rayonnement  blanchâtre,  nagent  dans 
un  fond  d'azur,  comme  des  astres  au  ciel  :  S\d)  jiedibus 
cju.s...  (iiiasi  cu'lttiii-  (ExOde).  L'auréole  eHi|tlique  et  dorée 
(pii  renvironne  cssl  brodée  de  petites  perles  en  relief  du 
même  ('mail,  cl  d<'  cabochons  plus  gros,  allernalivemenl 


53 

rougos  el  bleus.  Le  fond  du  nimlte,  aussi  dor,  est  ic- 
haussé  de  perles  et  de  rinceaux  linemenl  dessinés.  L'au- 
réole est  cantonnée  du  tétraniorphe,  l'ange  et  les  trois 
animaux  syml)oli(|ues  sont  nind)és,  et  chacun  d'eux  porte 
sur  un  larnbcl  le  nom  de  l'évangélisle  (pi'il  représente. 

A  droite  et  à  gauche  [)araissent  les  douze  apôtres,  six 
de  chaque  côté ,  disposés  trois  par  trois,  sur  deux  rangs 
parallèles,  debout,  nimbés,  les  pieds  nus.  Tous  sont 
uominativement  désignés,  à  l'exception  de  saint  l'ierre, 
qu'on  distingue  à  l'attribut  de  la  clef  à  double  panneton. 

Vient  enfin  la  signature  de  l'artiste ,  écrite  sur  un  étroit 
ruban  qui  traverse  horizontalement  le  tableau ,  à  droite  el 
a  gauche  de  l'auréole,  sous  les  pieds  des  apôtres  du  rang 
siq)érieur  : 

MAGISTKR   ALEXANDEU  :  ISTA    OPF.RA    FF.CIT  . 

Peut-être  un  ruban  parallèle,  placé  dans  le  bas,  sous 
les  apôtres  du  second  rang ,  donnait-il  la  date  précise  de 
l'œuvre;  mais  l'humidité  salpétreuse  du  sol  n'a  laissé  d'un 
bout  à  l'autre  ni  peinture,  ni  toile,  ni  bois,  sur  une  lar- 
geur de  cifiq  à  six  centimètres. 

D'autres  sujets  recouvraient  les  faces  latérales  de  l'autel. 
Du  côté  de  l'évangile,  tout  est  détruit;  le  panneau,  corres- 
pondant, du  côté  de  l'épitre,  est  en  fort  mauvais  état.  On 
y  distingue  ce|iendant  saint  Genis  décapité  :  comme  notre 
saint  Denis,  il  marche  portant  sa  tête  dans  ses  mains.  Un 
grand  nombre  d'exemples  paraissent  démontrer  (]ue  l'ico-; 
nographie  du  moyen-âge  avait  ainsi  (consacré  le  symbo- 
lisme de  la  décollation.  On  lit  dans  un  coin  de  la  toile  : 

s      GKNESIVS  : 

A  droite,  un  ange  descend  du  ciel,  tendant  vers  le  saint 
un  objet  i  palme  ou  couronne)  ipie  la  confusion  de  cette 
partie  du  tableau  rend  méconnaissable.  Trois  guerriers, 
velus  du  hauberl  et  chaperon  de  mailles,  considèrent  le 


f.O 


prodige  avec  un  étoniieineiil  inèlé  de  crainle.  Ce  sont 
les  bourreaux  :  deux  d'entre  eux  tiennent  à  la  main 
1  epée  nue  et  sanglante. 

J'ai  dit  ailleurs,  et  je  crois  encore,  que  ces  peintures 
datent  de  la  lin  du  xiii^  siècle  ou  des  premières  années 
du  XIV.  Cependant ,  je  ne  dois  pas  taire  qu'un  homme 
connu  par  un  grand  nombre  de  mémoires  sur  diverses 
branches  de  l'archéologie,  M.  de  Barthélémy,  membre  de 
plusieurs  sociétés  savantes,  les  a  jugées  beaucoup  plus 
anciennes  (BuUet.  mon.,  t.  22).  Les  connaisseurs  appré- 
cieront. Je  verrais  sans  regret  mon  opinion  condamnée 
par  eux,  et  l'importance  du  tableau  de Saint-Genis  accrue 
par  cela  même. 

228.  —  Église.  Crosse  d'abbé,  xiiie  siècle. 

Quelques  années  après  la  révolution,  lorsque  l'église 
de  Saint-Genis  fut  rendue  au  culte,  on  trouva,  derrière 
le  maitre-autel.  parmi  des  décombres  de  tout  espèce  en- 
tassés dans  l'abside,  une  volute  de  crosse  abbatiale,  seul 
débris  du  genre  sauvé  des  ruines  de  nos  monastères. 
Cette  volute,  en  cuivre  doré,  date  du  xiiF  siècle.  On  peut 
en  voir  le  dessin  dans  les  mémoires  de  notre  société 
(t.  VIII,  pi.  2j.   Elle  est  figurée  par  un  serpent  couvert 
d'écaillés,  a  la  croupe  hérissée  de  crochets,  se  repliant 
en  orbe  vers  lui-même  et  broutant  le  feuillage.  Dans  la 
courbe  gracieuse  qu'il  décrit,  au  milieu  d'un  quatrefeuilles 
perlé,  se  tient  l'agneau  divin  triomphant,  la  tète  tournée 
vers  la  croix ,  qu'il  semble  soutenir  de  sa  jand)C  gauche 
repliée.  Sur  la  banderole  qui  Hotte  attachée  à  la  hampe 
«le  la  croix,  sont  burinés  ces  mots  : 

AGNVS 

I)  !•  I       • 

La  douille  où  s"eminauchait  le  bâton  de  la.  crosse  ,  a 
conservé  la  couleur  rou£;eàlre   du   métal,  la   trace  des 


61 

morsures  de  la  lierre  ol  les  irons  où  passaient  les  tèles 
des  goupilles.  Une  gaine  dorée  et  sculptée  recouvrait 
cette  partie  de  la  volute  et  formait  le  ummuI. 

220.  ~  Cloître.  H97. 

Gallia  christ.,  t.  VI,  col.  IlO-'i.  —Snr.  ries  Pi/r.-Or., 
t.  VIIl,  p.  27r>  et  pi.  2. 


VER\X  FACVNDVS 
FONS  MANANS:FL0 
S  RVBICVNDVS 


HOSPES  lOCViND 
VS  i  MISERORVM 
PASCVA  FVNDVS 


FRVCTV  FEGVN 
DVS  NVLLl  PROBI 
TATE  SECVNDVS 


PRE  MVNDIS  •   MVN 
DVS  F  VIT  :  A  BRAS 
ISTE  RAIMVNDVS 


QVEM  PIA  LVX  MAR 
TIS  •  DEGASEPTIMA 
DVXIT  IN  ASTRIS 


QVATVOR  EXEM 
TIS  ANNIS  DE  MI 
LLE  DVCENTIS 


Telle  est  la  disi)Osition  de  ces  vers  sur  le  marbre;  un 
cordon  perlé  trace  les  lignes  de  séparation.  L'élégance 
des  caractères  et  la  fermeté  de  la  gravure  font  de  cette 
inscription  un  contraste  frappant  avec  celle  du  Monestir- 
del-Camp  (ci-dessus,  n"  182),  plus  vieille  de  dix  mois  à 
peine,  et  pourtant  si  barbare. 

Au  quatrième  vers,  le  Gallia  écrit  PREMV^D[  en  un 
seul  mot,  au  lieu  de  pre  (prœ)  mvndis;  la  phrase  n'a  pas 
de  sens  avec  cette  variante.  La  gloire  de  l'abbé  Raymond 
est  tout  entière  dans  son  épitaphe;  on  le  trouve  à  peine 
mentionné  par  le  Gallia  en  MSi^  et  1187.  Le  millésime 
de  sa  mort  est  1107,  d'après  la  règle  posée  au  n"  lOi. 


250.— Cloître.  12Ô4. 

Gall.  christ.  ,  t.  VI ,  col.  HOfi.  -     1MI .  dr  la  Snr.  ries 
Pyr.-Or..  t.  VIII,  p,  278. 


62 

ABBAS  GAVSIBERTVS  (sic)  lACET  HIC  BONVS  ET  BENE  CERTVS 

i\10RIBVS  ORNATVS   •    POLLESTRIS  IN  OPIDO  NATVS 

VITA  FVIT  CVIVS  ORBIS  SALVS  ET  DECVS  IIVIVS  : 

DANUO  GAVDEBAT   •    PROPRIVM  SIBI  NON  RETINEBAT  : 

SET  DABAT  ABSQVE  MORA  MISERIS  SVA  QVALIBET  IIORA 

MORIBVS  HORNAVIT  (sic)  SOCIOS  QVOS  SEMPER  AMAVIT  (?). 

ET  MVNDÂNORVM  CREVIT  PRO  POSSE  BONORVM   • 

ANNIS  TERDENIS  OGTO  MINVS  ORDINE  PLENIS  j 

DVX  FVIT  ECCLESIE  :  COMPLENS  DOCVMENTA  SOPHIE  : 

ANNO  MILLENO  :  BIS  :  G  :  TER  :  X  :  BISQVE  SECVNDO  : 

EIVS  NOVEMBRIS  •  IHI  •  KALD     MORS  DATA  RIEMBRIS  : 

QVESVMVS  0  XPE  TECVM  CONGAVDEAT  ISTE  : 

QVOD  VT  CONCEDAT  :  PATER  NOSTER  QVISLIBET  DICAT  : 

QVOD  ES  FVI  QVOD  SVM  ERIS  :  VIGILA  NE  DEVORERIS  : 

Dans  le  cours  de  leurs  immenses  travaux,  les  Béné- 
dictins, ne  pouvant  tout  voir  par  eux-mêmes,  durent 
accepter  souvent  de  confiance  et  les  yeux  fermés,  les 
documents  qui  leur  étaient  fournis,  et  souvent  aussi, 
chez  leurs  correspondants,  la  science  fut  au-dessous  du 
zèle.  Ici,  par  exemple,  leurs  confrères  de  Saint-Genis, 
plus  fervents  cénobites  qu'habiles  paléographes,  ont  dé- 
naturé le  sens  du  quatrième  vers,  en  substituant  qvando 
à  DANDO.  Au  même  vers  et  au  douzième,  ils  ont  remplacé 
par  des  points  des  mots  très-lisibles  encore  aujourd'hui. 


'TlR  lu  S  (proprium  sihi).    [jj^  (j 


(fjuœsunms  0) . 


Mais  on  ne  s'explique  pas  comment  les  savants  auteurs 
n'ont  donné  au  bisqve  secvndo  (10''  vers)  que  la  moitié 
de  sa  valeur,  ce  qui  les  a  conduits  à  fixer  les  vingt-deux 
années  de  l'abbaliat  de  Gaushert  entre  1210  et  1252, 
tandis  qu'elles  devraient  être  comptées  de  1212  à  1254. 


63 

J'ai  mis  lo  signe  du  cloute  après  le  deriiiec  mot  du 
sixième  vers,  parce  que  la  leçon  amavit  n'est  j)as  n'gu- 
lière.  A  la  rigueur,  c'est  annavit  qu'il  l'audrail  lire.  La 
prétendue  M  n'est  qu'une  n  double,  identique  à  celle  du  mol 
ANNO  dans  une  inscription  d'Elne  de  la  nit'me  (''pO(|ui' 
(no402): 

Mil .  mo. 

C'est  probablement  une  erreur  du  lapicide  ;  n»ais  elle 
importe  peu  :  le  sens  de  la  phrase  demande  amavit,  et 
l'on  peut  s'y  tenir. 

Les  vers  un  à  sept  de  notre  inscription  sont  placés  sur 
la  pierre  en  regard  des  vers  huit  à  quatorze  et  séparés 
seulement  par  une  moulure  verticale.  Les  deux  vers  écrits 
sur  chaipu;  ligne  ne  se  suivent  pas,  coninu;  dans  l'inscrp- 
tion  grecque  du  reliquaire  de  saint  Jean-I^itiste  (n"  15): 
c'est  un  livre  ouvert  dont  il  faut  lire  la  première  page 
avant  la  seconde. 

251.  — Cloître.  1281. 

Gallia  christ.,  t.  VI,  col.  1106. 

ANNO   •   DOMINI   •   M   •   CC  •   LXXI    •    PR[T)IF.    •    CALKNDAS 
IVNII   •   OBIIT  •  DOMNVS  •  SAPTE  •  DE  •  POLMiSTRlS  •  ARHAS 
IIVIVS      LOCI       QVI       REXIT       HANC    ■    ECCLESIAM        XXIX 
ANNIS   •   ET   •    ADQMSIVIT    ■    CASTRVM    •    DE    •    lîRVI.I.tANO 
DE   ■   MARI   ■   DECIMAM   •   l'ISClVM  •  HONOREM        RERNARni 
OLIBE  •   DE   •   VILLALONGA  •    CONDAMINAM    •    PETRI         DE 
TACIONE  •   MANSVM   •  ET      HONOREM       ERMEîNGAVDI   •    DE 
INSVLA     •    CAMPOS    •    DE    •    GRADV    •    DE         VLMO    •    DE 
VERNADELI.A   •   DE       LORTALI   •   DE  •   MOF.INO      POMd.S     DE 
ARGLEERIIS         ET         ISTIVS    •    MONASTERII         liEPARAVlT 


64 
COOPERVIT      ECCLESrAM   •  CONSTRVXIT   .   DO!\IVM       NOVA  M  '• 
SVPRA       BVATVM       STABILIVIT       CVILIBET        MONACHORVM   - 
QVATVOR        OVA    .    OMNIBVS    •    DIEBVS    •    MERCVRU        ET    • 
VENERIS       ET      SVVM       ANNIVERSARIVM  •   ET     PATRIS     ET 
MATRIS   •    ET       FRATRIS        SVI        AVBERTI        BAIVLI        DE 
ROCA       CVIVS        AVXILIO        CASTRVM        DE    •    BRVLLIANO 
FVIT         EMPTVM         ANNO    •    CHRISTI    •    M        CC        LXXXl   • 
MENSE       OCTOBRI   •   TRANSLATVS      EST  •  SVB  •  HAC  ■  PETRA  • 
QVEM  •  CHRISTVS  •  TRAXIT  •  AD     ETHERA  ■  ORATE     PRO  •  EO 

Je  copie  cette  inscription  dans  le  Gallia,  ne  pouvant 
mieux  faire.  On  voit  dans  le  mur  du  cloître,  auprès  des 
inscriptions  précédentes,  les  traces  du  descellement  de 
deux  pierres;  l'une  de  ces  pierres  devait  être  l'épitaphe 
de  Sapte  de  PoUestres.  C'est  du  reste  la  place  que 
les  Bénédictins  lui  assignent  :  Hoc  ipsius  epitaphium  in 
datistro  ad  ingressum  ecdesiœ  legitnr.  On  la  retrouverait 
sans  doute  en  retournant  les  seuils  et  les  linteaux  des 
ouvertures  modernes,  qui  ont  défiguré  l'ancien  cloître. 
Le  château  de  Brulla,  dont -il  est  parlé,  fut  acheté  en 
1269  a  Pons  Hugues,  comte  d'Ampurias,  au  prix  de 
10.000  sols  melgoriens. 

252.  —  Cloître.  1507. 

Gallia  christ.,  t.  VI,  col.  1106.  —  BnU.  de  la  Soc. 
des  Pi/r.-Or. ,  t.  VIII ,  p.  280. 

V   •    IDVS       OCTOBRIS  •   ANiNO   ■   DOMINI       M   •   CLC  •  SEPTIMO 
OBIIT   •    FRATER       GVILLELMVS   •   DE     ABBATIA     IIVIVS 
MONASTERII       ABBAS       CVIVS     ANIMA     REQVIE 
SCAT  IN  PAGE  CVIVS  CORPVS  RECONDITVM  EST  IN  HAC  TV.MRV 


65 

Sur  le  devant  cl"un  sarcophage  de  nièiiie  dimension  à 
peu  près  que  ceux  de  Bernard  Jorda  et  de  Pons  des  Bar- 
res, signalés  ci-dessus  (n"  201).  Cette  tombe  n'a  pas  été 
violée  ;  on  ne  peut  la  déplacer  ni  mémo  on  soulever  le 
couvercle,  sans  étançoniier  solidcnionl  un  arc  de  la  voûte 
du  cloilrc,  qui  sappuio  sur  la  lace  encastrée  dans  la 
muraille. 

Avec  une  bonne  copie  de  cette  inscription  sous  les 
yeux,  les  Bénédictins  n'auraient  pas  créé  un  abbé  de 
Saint-Genis  imaginaire:  Ji.  de  Abbaiia,  disent-ils,  haiid 
almndè  innolcsrit  quam  ex  epitaphio,  et  ils  rapportent  à 
la  suite  l'épitapbe  de  Guillaume.  Le  g  est  pourtant  à  (leur 
de  coin  sur  la  pierre,  et  le  doute  impossible.  Il  faut  donc 
rayer  de  la  liste  du  Gallici  ce  faux  Bernard,  et  lui  subs- 
tituer Guillaunu'  II,  désigné  comme  son  prédécesseur 
dans  le  même  ouvrage,  avec  cette  courte  notice  :  (hdl- 
lelnms  II  reperihir  Ahbas  S.  Gmesii  amiis  1283,  129i, 
94,  98,  i 502  et  1505.  (Loc.  cit.) 

255.  — Cloches,  xv  siècle. 

liuUet.  de  la  Soc.  des  Ihjr.-Or.,  t.  VIII,  p.  280. 

Sur  la  plus  grande  : 

f  QVI  StNE  PECCATO  :  VI'STRVM  :  EST  :  Piii:\IVM  :  LAPIDEM  : 

MITAT  (sic)  \ 
FOV   FET  EN    LAN  Y  :  M  :  CCCGLI  i,).riAT  :  PER    LA    GRACIA  : 

DE    DEY  :  FUA  :  BERNAT  :  PVGOL 
TE    DEVM   LAVDAMVS  • 

Quatre  médaillons:  lïïs.  Erre  Ifomn ,  la  sainte  Vierge 
portant  Tenfant  Jésus,  saint  iMichel  cond)attant  le  (h-agoii. 
Sur  le  cerveau  de  la  plus  petite  : 

DICOR  MARIA  MEVM  NOMEN  VIR(ilNE\.M 


66 

Sans  date,  mais  autant  que  je  puis  en  juger,  un  peu 
plus  vieille  que  la  précédente. 

254.  —  Territoire  de  Saint-Genis. 
Publicateur,  -1853,  n»  8. 


PREPi 


Marque  de  potier  sur  une  petite  lampe  en  terre  cuite, 
trouvée  à  Saint-Genis,  dans  une  propriété  de  M.  Bosch. 
Le  même  territoire  a  fourni  plusieurs  specirnm  de  briques 
a  estampille ,  qui  ont  été  perdues ,  et  grand  nombre  de 
médailles  consulaires  et  impériales. 


Erratum  I  page  32.  —  Une  erreur  typographique  a  fait  rapporter  à 
l'an  ^524,  au  lieu  de  -1344,  la  date  bien  connue  de  la 
chute  de  la  dynastie  niajorquine. 


GEOGRAPHIE  lllSTORIQDE  DES  PYREIES-ORIEÏÏAIES, 

Par  M.   Il»  Alart,   membre  résidant. 


PERIODE  GALLO-ROMAINE. 
Populalions  itrimitives. 

Les  premières  populations  des  pays  qui  forment  aujour- 
d'hui la  France  el  rEspai,Mie  appartenaient  sans  doute  à 
une  même  i'amille.  iMais,  dès  que  les  premières  lueurs 
de  l'histoire  permettent  de  distinguer  un  peu  leur  physio- 
nomie et  leur  caractère,  on  reconnaît  en  elles  certaines 
différences  de  langage,  de  mœurs  et  d'institutions,  qui 
en  forment  deux  peuples  distincts  :  le  premier,  établi  au 
sud  des  Pyrénées,  s'appelle  le  peuple  lbi:re;  l'autre  prend 
le  nom  de  peuple  Celle  ou  Gall,  sans  que  leur  limite  com- 
mune ait  été  en  aucun  temps  exactement  déterminée. 

La  masse  inq)Osante  des  Pyrénées  attira  de  bonne  heure 
l'attention  des  anciens  historiens,  qui  se  figurèrent  que 
cette  barrière  avait  élerncllement  séparé  les  peuples  Gau- 
lois de  ceux  de  l'Ibérie.  Pour  Polybe,  Diodore  de  Sicile, 
Tite-Live,  Strabon  et  Ptolémée,  celte  limite  naturelle  a 
été  unanimement  considérée  comme  une  limite  ethno- 
graphique ou  politique;  et,  pour  tous  ces  auteurs,  le  pavs 
au  nord  des  Pyrénées  s'appelait  la  Cellique ,  habitée  par 
les  Celles  ou  Galls,  et  tout  ce  qui  est  au  midi  appartenait 
à  VIbérie.  Cependant  celte  erreur  avait  été  reconnue,  dès 
l'anticpiité,  par  Jules  César,  et  cet  auteur,  qui  était  en 
mesure  de  connaître  la  vérité  à  cet  égard,  n'a  pas  hésité  à 
rattacher  les  peuples  aquitains  à  la  race  Ibérienne.  Mais, 


G8 

c'est  surtout  pour  la  j»artie  oiientale  des  Pyrénées,  que 
cette  erreur  est  maniieste.  I/histoire  démontre  que  cette 
partie  de  la  chaîne  n'a  jamais  réellement  séparé  les  popu- 
lations qui  en  occupent  les  deux  versants.  Les  peuples  du 
Roussillon  et  du  Confient  ont  toujours  reconnu  des  frères 
d'une  même  famille  dans  ceux  de  la  Cerdagne  et  de  la 
Catalogne;  les  montagnes  n'ont  été  pour  eux  qu'un  moyen 
de  communication  ou  plutôt  le  boulevart  d'une  nationalité 
comnmne,  et  c'est  seulement  du  jour  où  Louis  XIV  a  dit  : 
//  n'y  a  plus  de  Pyrénées,  qu'elles  se  sont  dressées  comme 
une  barrière  définitive  pour  séparer  deux  peuples  cons- 
tamment unis  jusqu'alors. 

On  ne  saurait  donc  entendre  que  dans  un  certain  sens 
les  noms  de  Celtes  ou  de  Gaulois,  appliqués  par  beaucoup 
d'auteurs  anciens  aux  premières  populations  des  pays  qui 
forment  les  Pyrénées-Orientales.  11  existe,  en  effet, 
même  pour  les  temps  les  plus  reculés,  des  indications 
importantes  et  précises  sur  l'origine  des  premiers  habi- 
tants du  Roussillon,  et  tout  démontre  qu'ils  appartenaient, 
comme  les  Aquitains,  à  l'ancienne  race  des  Ibères. 
Le  Périple  de  Scylax,  dont  les  témoignages  se  rappor- 
tent aux  premiers  temps  de  l'histoire  occidentale  (vers 
le  VI®  siècle  avant  notre  ère),  nous  apprend  que  toute 
la  côte,  «  depuis  la  limite  des  Ibères  jusqu'au  fleuve  du 
«Rhône,  était  alors  habitée  par  un  mélange  de  peuples 
«  Lighyens  et  Ibères  '  ;  »  et  Skymnos  de  Chio  nous  repré- 
sente ce  même  pays  comme  occupé  par  les  Lighyens  *. 

1  Airo    âî    iSr'ipoyj  v/o-j-y.'.  hlyjiç,   y.OLi  iSyips;  a'.yâSz:;, 
(jteyp!  -TTOraiJiou  Pooavoj.    Ex  reriplo  Scy lacis ,  p.  3. 
2  ETtoc  lêyjpeç 

....Eiretra  Trapa9a)àTTiO£   xarco 

ripcoro  fxev    EfXTropiov,    Vô^n   ^î   èvj-îp'x. 

Skïm.  de  Ciiio,  Offris  dtscrifl.  v.  100,  101,  ^05. 


69 

On  sait,  d'autre  part,  que  ces  Lùjhyens  ou  Liguriens  étaient 
un  [ieuple  d'origine  ibérienne,  que  les  migrations  des  Celtes 
e!i  Espagne  avaient  déterminé  à  s'épancher  dans  les  Gaules 
par  les  poits  des  Pyrénées  '.  11  est  donc  bien  certain  <]ue  le 
fond  des  populations  primitives  de  l'ancienne  Narbonnaise 
appartenait  à  la  race  qui  avait  peuplé  l'Espagne,  et  formait 
un  mélange  d'Ibèrea  et  de  IJyhyes,  au  milieu  desquels 
vivaient  aussi  quelques  tribus  d'origine  celtique.  Yoila  le 
témoignage  de  l'histoire,  et  tous  les  faits  que  l'on  peut 
observer  encore  aujourd'hui  ne  font  que  le  confirmer. 

Qu'était-ce  donc  que  ce  peuple  Ibrro  -  Ligurien  de 
l'ancien  Roussillon,  et  à^iucls  traits  peut-on  reconnaître 
encore  sa  parentti  av(!c  les  Ibères-Wascons  des  Pyrénées 
occidentales?  Depuis  près  de  trois  mille  ans,  il  s'est  passé 
trop  d'événements  dans  ce  pays,  pour  que  les  traits  phy- 
siologiques, les  monuments,  les  mœurs,  le  caractère  et 
les  institutions  des  populations,  dont  les  éléments  remon- 
tent peut-être  à  l'époque  la  plus  reculée,  puissent  être, 
aujourd'hui,  facilement  reconnus,  et  en  assez  grand 
nombre,  pour  permettre  de  décider  si  le  peuple  rous- 
sillonnais,  tel  que  nous  le  voyons,  se  rattache  aux  popu- 
lations ibérienncs,  plutôt  qu'à  celles  de  la  Gaule.  Il  y  a 
place  sans  doute  pour  des  systèmes  bien  opposés  dans  ce 
vague  mélange  de  débris  du  passé;  mais  il  y  a  un  guide 
certain  qui  peut  diriger  les  recherches  "au  milieu  des  difli- 
cultés  et  des  incertitudes  :  c'est  la  linguistique.  Car  il  existe 
encore  aujourd'hui  des  témoignages  certains  de  l'occupa- 
tion de  notre  pays  par  la  race  des  Ibères,  dans  les  noms 
de  quelques  cours  d"eau,  de  montagnes  et  de  quebjues 
villages ,  qu'on  ne  peut  expliquer  par  la  langue  d'aucun 
des  peuples  que  l'histoire  signale  en  Roussillon  depuis 
le  VIO  siècle  avant  notre  ère;  et  ces  dénouiinations  ne 
sauraient  dès  lors  appartenir  qu'à  des  popuiaticms  anté- 
rieures a  l'époque  historique  proprement  dite. 

'   be  ta  ':ilM/{ia(inii  Caulniie.  fd    ,  par  'W    (iirauil. 


Ou  a  diversement  apprécié  la  valeur  des  iulerprélalions 
étymologiques,  et,  depuis  longtemps,  on  a  essayé  d'expli- 
quer, d"uno  manière  habile  et  savante,  par  les  langues 
orienlales  ou  par  celles  de  l'antiquité  classique,  beaucoup 
de  noms  du  Roussillon  dont  le  sens  est  encore  inconnu. 
Mais  tout  ce  qu'on  peut  conclure  de  ces  tentatives  plus 
ou  moins  heureuses,  c'est,  qu'en  pareille  matière,  on  ne 
saurait  procéder  avec  trop  de  précautions.  Cependant, 
quand  on  voit  un  grand  nombre  de  ces  noms  rationnel- 
lement expliqués  par  l'histoire,  la  grammaire  et  l'archéo- 
logie, au  moyen  de  la  langue  cmmara,  qui  présente  tous 
les  caractères  d'une  haute  antiquité,  et  qui  est  encore 
parlée  par  un  peuple  que  toutes  les  traditions  rattachent 
à  l'ancienne  famille  ibérienne  établie  sur  toute  la  ligne  des 
Pyrénées;  peut-on  s'empêcher  de  rapporter  à  ce  même 
peuple,  ou  du  moins  à  une  de  ses  branches,  les  anciennes 
populations  du  Roussillon  qui  parlaient  évidemment  ce 
même  idiome,  puisqu'on  en  roconnait  encore  quelques 
débris  dans  les  noms  des  lieux  qu'elles  avaient  habités? 
N'est-il  pas  rationnel  d'appliquer  alors  les  principes  de 
l'étymologie  et  d'en  accepter  les  conséquences,  et  peut- 
on  rejeter  ce  moyen  scientifique  de  porler  un  peu  de  clarté 
dans  la  nuit  des  siècles  passés?  Les  travaux  de  G.  de 
Humboldt  et  de  Fauriel  ont  déjà  montré  quel  secours  on 
pent  espérer  de  l'étude  de  la  langue  des  anciens  Was- 
cons,  pour  les  origines  espagnoles,  françaises  et  même 
italiennes.  En  ce  qui  concerne  le  Roussillon,  on  peut 
ciler  les  anciens  noms  de  quelques-uns  de  nos  villages, 
tels  que  Llar,  Bffs^>(Baho),  Astovere  (Astoher),  Uech, 
IJr,  i^pm  (Aspira),  JUberri  et  bien  d'autres,  qui  s  ex- 
pliquent sans  diffîculté  par  la  langue  basque  actuelle'. 

<  Os  ronsidérations  se  trouvent  déjà  émises,  on  pnrtic,  dans  notre 
mémoire  sur  la  Géographie  hislor.  du  Confient  (Bull,  de  la  Snr.  des  ryr.-Or.. 
X,p.67).  Onsait.iuc!aInn{;Mebasqucn'a|)as  de  mots  commcnrant  pr 
la  lettre  n  ,  et,  s'ils  cmprnnteni  des  termes  élranijers  où  celte  eonsonnp 


71 

11  ne  laul  point  s'attendre  d'ailleurs  à  ce  que  celle  langue, 
qui  n'est  qu'un  débris  d'ui»  dialecte  ibérien ,  puisse  nous 
donner  aujourd'hui  l'explication  de  tous  les  noms  laissés 
en  Roussillon  par  ces  ])opulations  primitives.  Les  anciens 
Ibères  formaient  une  famille  de  peuples,  ayant  chacun  leur 
langue  particulière,  avec  des  niols  et  des  cxmstructions  qui 
pouvaient  souvent  être  étrangers  à  d'autres  tribus,  quels 
que  fussent  d'ailleurs  les  rapports  et  la  parenté  de  ces 
dialectes  et  de  ces  peuples  entre  eux.  Il  existe,  en  effet, 
sur  beaucoup  de  points  du  Roussillon,  des  noms  qui  ne 
s'expliquent  ni  par  le  basque  ni  par  les  langues  sémitiques 
ou  indo-germaniques  ' ,  et  on  est  fondé  à  les  considérer 
comme  des  débris  de  l'idiome,  éteint  depuis  longtemps, 
des  peuplades  Ibères  qui  occupèrent  notre  pays  dans  les 
siècles  les  plus  reculés. 

se  trouve  être  la  première,  les  Basques  la  font  toujours  précéder  des  voyelles 
A  ou  E.  CVst  ainsi  qu'ils  emploient,  sons  les  formes  arriu,  arrat ,  les  mots 
que  nous  prononçons  W«  et  rat.  On  trouve  des  traces  de  celte  particularité 
dans  les  noms  de  Ria,  Ro,  Raluir,  Raiieu,  etc.,  qui,  dans  les  plus  anciens 
documents,  se  trouvent  toujours  écrits  Arùa,  Arro,  Anahur,  Ardeu.  11  y  a 
en  outre  bien  des  noms,  latins  ou  romans,  en  apparence,  qui  se  rattache'nt 
peut-être  à  l'ancienne  langue  des  Ibères,  tel  est  celui  à'IUe,  que  les  tabel- 
lions du  moyen-âge  s'empressèrent  de  latiniser  sous  la  forme  hmda ,  de 
même  qu'ils  rendaient  celui  de  Canamals  par  Canibus  malis.  Cependant  la 
situation  de  la  ville  d'Ille  n'a  aucun  rapport  avec  ce  que  nous  appelons 
une  lie,  et  ne  reirouve-t-ou  pas  ce  nom  sur  plusieurs  points  du  départe- 
ment? près  du  Perthus  (las  Illas),  en   Vallespir  (Sainte-Colombe  de  las 
//'as;, au-dessus  de  .loch  fSa-hilla), et  dans  vingt  autres  endroits,  où  il  ne 
peut  être  question  d';/M,    ni   même  de  ruisseaux  pour  les  former  ?    Knfin, 
lorsque  le  nom   d'Ille  se  montre  pour   la  première  fois,  dans  une  cliarle 
latine  du  u'^  siècle  f  Marca ,  n»  23),  ce  n'est   pas  sous  la  forme  Imula, 
mais  sous  celle  d'l7a,  qui  a  un  sens  bien  caraclérisé  dans  la  langue  basque 
et  tout-à-fait  différent  de  celui  que  lui  donneraient  les  idiomes  latins. 
'  Tels  sont  les  noms  de  Xarel.  Bul,  Volo.  etc.,  qui  sont  trop  fréquemment 

employésdansnosdénominalions  territoriales  pour  n'avoirpasété  appliqués, 
dans  l'origine,  à  certaines  cultures  ou  à  des  accidents  de  terrain,  etc.  Volo  a  le 
sens  certain  du  mot  catalan  riba,  celui  de  Buta  semble  se  rapporter  à  un  cours 
d'eau  ;  mais  on  ne  sait,  ou  du  moins  je  ne  sais,  n  quelle  langue  les  rattacher. 


72 

yiieiclucs  noms  roussilloniiais  conservent  aussi  des  tra- 
ces de  la  langue  celtique,  entre  autres  Kexans  (Caixas, 
Quexans,  Mar-quexanes),  Pcnn  (Pena),  Qticr,  et  bien 
d'autres  que  l'on  signalerait  dans  notre  département. 

Ainsi  donc ,  bien  que  les  secours  de  la  linguistique 
soient  encore  insullisants  dans  bien  des  cas,  ces  expli- 
cations sont  cependant  assez  nombreuses  et  assez  satis- 
faisantes pour  faire  admettre  que  les  premiers  habitants 
du  Roussillon  parlaient  un  dialecte  ibérien  mélangé  de 
mots  celtiques;  et,  dans  son  ensemble,  cet  idiome  devait 
avoir  de  grands  rapports  avec  la  langue  euscuura,  dont 
les  populations  basques  se  servent  encore  de  nos  jours. 
Il  est  donc  constant  que  les  premiers  peuples  de  notre 
pays  (Sordes  ou  Cérétans)  appartenaient  à  la  famille  ibé- 
rienne.  Leurs  descendants  ont  formé,  de  tout  temps,  le 
fond  de  la  population  des  Pyrénées-Orientales;  car  les 
autres  peuples,  Phéniciens,  Massaliotes,  Piomains,  Wisi- 
goths,  Arabes  et  Francs,  qui  ont  successivement  par- 
couru ce  pays,  ont  pu  y  établir  des  colonies,  le  dominer 
et  y  marquer  leur  influence  d'une  manière  plus  ou  moins 
profonde;  ils  ont  pu,  comme  le  (iront  les  Romains  et  les 
Wisigotlis,  modifier  les  mœurs,  le  caractère  et  les  condi- 
tions de  la  race  primitive;  mais  ils  n'ont  pu  la  détruire 
ni  la  chasser,  ni  par  conséquent  la  remplacer.  Il  n'en 
faut  pas  moins  examiner  les  circonstances  particulières 
de  ces  dominations  étrangères,  ou  les  relations  qui  s'éta- 
blirent entre  elles  et  les  peuples  de  cette  contrée ,  et 
tâcher  de  connaître  la  part  qu'il  faut  attribuer  à  chacune 
d'elles  dans  l'histoire  de  notre  géographie. 

Pbénlrlens. 

Les  navigateurs  de  Tyr  qui,  vers  le  x*^  siècle  avant 
notre  ère,  parcoururent  tous  les  rivages  de  la  Méditer- 
ranée, ont  laissé,  dans  l'histoire  et  les  traditions  de  la 


73 

plupart  des  nations  occidentales ,  des  influences  reli- 
i^ieuses  et  commerciales,  dont  le  souvenir  n'est  pas  en- 
tièrement effacé.  Il  n'y  a  aucun  intérêt  à  contester  ces 
faits  généraux,  que  la  critique  d'Heeren  a  historiquement 
démontrés,  mais  on  ne  peut  non  plus  les  admettre  sans 
preuves  en  ce  qui  concerne  le  Roussillon ,  ni  surtout  leur 
donner  une  importance  et  des  proportions  que  rien  ne 
semble  justifier;  car  il  est  certain  que  les  historiens  et 
les  géographes  anciens  n'ont  laissé  aucune  indication 
particulière  sur  le  commerce  ou  les  établissements  des 
Phéniciens  dans  notre  pays.  Ce  silence  ne  prouve  rien 
sans  doute  en  faveur  de  ces  établissements;  mais  on  ne 
peut  non  plus  s'en  appuyer  pour  les  rejeter  d'une  manière 
absolue.  11  ne  fait  que  laisser  le  champ  libre  aux  conjec- 
tures et  aux  preuves  étymologiques  ou  autres  que  les 
savants  modernes  auraient  pu  présenter.  Il  s'agit  donc 
d'apprécier  la  valeur  des  conjectures  émises  à  ce  sujet 
dans  ces  dernières  années. 

C'est  surtout  M.  Puiggari  qui  a  mis  en  avant  les  in- 
fluences phéniciennes  à  propos  du  Roussillon.  Sur  de 
simples  données  étymologiques,  savamment  étudiées  et  sou- 
tenues par  d'habiles  explications,  il  en  était  veiui  à  admettre 
connue  histoii'c  positive  la  fondation  de  litiscino,  d'Illi- 
beris  et  de  Caucoliberi  par  des  colons  phéniciens.  Divers 
lieux  du  voisinage,  tels  que  licrcal  et  MadaloUt,  auraient 
eu  la  même  origine.  M.  Puiggari  suivait  ensuite  les  traces 
des  Phéniciens  dans  le  haut  Vallespir,  où  il  retrouvait  ce 
nom  de  Madalolli.  11  ne  signalait  rien  dans  le  reste  du 
Roussillon.  Il  indicpiait  (puîlqucs  dénominations  sémiti- 
ques dans  le  haut  Conflent,  et,  comme  couronnement  de 
son  système,  il  trouvait  une  véritable  colonie  de  Cretois 
ou  de  Phéniciens,  dans  la  Cerdagne,  où  les  racines  pu- 
niques se  nxultreraient  à  profusion.  Eu  effet,  M.  Puiggari 
en  cite  un  grand  nombre,  qu'il  explique  avec  le  concours 
de  Rocliart,  dont  la  science  n'est  pas  plus  contestable  que 


74 

riiabileté  de  notre  archéologue  '.  Mais,  tout  en  admettanl 
que  les  noms  de  CaucoUheri,  l'r,  UUberis,  etc.,  puissent 
s'interpréter  d'une  manière  savante,   sinon  certaine  et 
décisive,  par  les  langues  sémiti(|ues,  on  n'expli(iue  pas 
cependant  comment  ces  dénominations,  dont  on   com- 
prendrait à  la  rigueur  la  présence  sur  les  côtes  roussil- 
lonuaises,  qui  ont  pu  être  visitées  par  les  Phéniciens, 
disparaissent  presque  complètement  à  mesure  que  l'on 
s'avance  dans  l'intérieur  du  pays,  pour  reparaître,  toul- 
à-coup,  en  Cerdagne,  dans  des  proportions  extraordinaires. 
C'est  une  bizarrerie  dont  on  ne  rend  compte  que  par  de 
pures  suppositions.  Il  j  a,  au  contraire,  une  explication 
bien  naturelle,  si  l'on  prend  pour  guide  la  langue  de 
l'ancien  peu[)le  que  l'histoire  signale  réellement  dans  ces 
régions;  car  la  langue  basque  explique  presque  tous  les 
noms  que  M.  Puiggari  interprète  par  l'hébreu,  ceux  de 
la  côte,  comme  ceux  des  montagnes,  et  on  rattache  ainsi 
les  premiers  aux  seconds,  par  beaucoup  d'autres  noms 
laissés  par  l'ancien  peuple  ibère,  dans  l'espace  intermé- 
diaire qui  reste  en  blanc  sur  la  carte  étymologique   de 
M.  Puiggari.  Son  opinion  se  trouve  d'ailleurs  formelle- 
ment détruite  par  le  témoignage  de  l'histoire.  En  effet, 
outre  le  silence  des  auteurs  anciens,  qui  n'ont  jamais 
signalé  dans  les  parages  roussillonnais  la  présence  des  ncls 
de  Tvr  ou  de  Sidon,  nous  avons  déjà  cité  les  géographes 
de  l'antiquité  d'après  lesquels  les  côtes  de  la  Narbonnaise 
lurent  peuplées  par  les  Ibères.  Quant  au  peuple  cérétan, 
nous  avons  le  témoignage  d'Aviénus  (Ceretes,  gens  est 
Iberiim)  et  celui  de  Strabon,  qui  dit  en  propres  termes  : 
«On  trouve,  au  milieu  des  Pyrénées,  de  belles  vallées, 
«  occupées,  en  partie,  par  les  Cerrelans,  }ienple  ibérien.  » 
(Liv.  IV.) 

Il  faut  donc  rejeter,  jusqu'à  preuve  nouvelle ,  toute 

«  Publkateur,  année  II,  2.  3.  — IV,  25.  26.  'lO— V,  24.  Stalittique 
Pi/renc«»7ie  de  M.  Du  Mége. 


influoDce  phénicienne  en  Roussillon,  et  attendre  que  les 
progrès  de  la  linguistique  et  l'étude  des  anciens  idiomes 
ibéricns  nous  révèlent  le  sens  de  quelques  dénominations 
primitives  de  ce  pays,  qui  résistent  encore  à  toute  inter- 
prétation par  la  langue  eiiscuara  actuelle. 

Circcs-Hassalfolc». 

Les  Grecs  succédèrent  aux  Phéniciens  dans  les  mers 
occidentales,  qui,  dès  le  viF  siècle  avant  J.-C,  lurent 
presque  uniquement  parcourues  par  les  Rhodiens,  et  plus 
tard  par  les  Massaliotes.  Ici,  les  données  de  l'histoire  sont 
moins  vagues  :  elles  indiquent  positivement  les  colonies 
grecques  de  Rliocla  (Roses)  et  d'Emportés  (Castellô)  au 
sud  des  Pyrénées;  Lcucas ,  AgafJié-Ti/ché  (Agde),  etc., 
dans  la  Narhonnaise.  Quant  à  la  côte  roussillonnaise 
proprement  dite,  il  est  probable  qu'elle  fut  explorée, 
pour  la  première  fois,  par  les  navigateurs  grecs,  à  qui 
nous  devons  quelques-uns  de  nos  anciens  noms  géogra- 
phiques, ou  du  moins  la  forme  sous  laijuolle  ils  nous  ont 
été  transmis.  I)'ai)rès  une  ancienne  tradition  ' ,  les  Massa- 
liotes auraient  fait  jadis  un  grand  commerce  et  entretenu 
d'importantes  relations  avec  le  Port  de  Pyrhie,  et  on  ne 
peut  nier  que  leur  influence  n'ait  dû  s'étendre  au  loin 
dans  l'intérieur  même  du  pays.  Mais  on  tomberait  encore 
ici  dans  le  domaine  des  chimères  et  des  conjectures 
si  on  voulait  faire  l'application  de  ces  données  générales 
à  des  faits  particuliers.  On  ne  trouverait  pas  aujour- 
d'hui dans  notre  département  un  seul  nom  géographique 
qui  |)uisse  être  attribué  avec  certitude  à  la  langue  de 
Massalic;  et  ceux  mêmes  que  les  auteurs  grecs  onl  cités 
ne  se  sont  pas  conservés  sous  la  forme  helléni(iue.  Ainsi, 
tandis  (pi'en  dehors  du  Roussillon  et  presque  sur  ses  limi- 
tes, on  trouve  encore  aujourd'hui  les  noms  grecs  à^Ag(h\ 

'   FesTts  AviENUs,  Ora  marilima. 


Leiicate ,  Roses  et  Emportes ,  nous  n'avons  pas  conservé 
la  l'orme  grecque  Sordi/.('/ie  pour  l'ancien  lleuve  de  l'étang 
de  Salses,  ni  même  le  nom  grec  AWphroditc  au  Port  des 
Pyrénées  connu  maintenant  sous  le  nom  latin  de  la 
divinité  de  ces  montagnes.  Quant  aux  noms  de  liiar, 
de  Boïiskino,  Polillc  et  autres  de  la  même  côte,  où  l'on  a 
cru  trouver  une  étymologie  ou  du  moins  une  tournure 
grecque,  nous  ne  voyons  rien  qui  puisse  affaiblir  nos 
doutes  dans  les  explications  fournies  à  cet  égard.  En  sorte 
que  s'il  y  avait  une  conclusion  h  tirer  de  cette  absence 
complète  de  noms  grecs  sur  la  côte  et  dans  l'intérieur 
du  Pioussillon ,  on  comprend  qu'elle  ne  serait  guère  plus 
favorable  au  système  des  influences  helléniques  qu'à  celui 
des  établissements  phéniciens'. 

>  Ou  ue  peut  cependant  mettre  en  doute  le  passage  des  Grecs  sur  nos 
cfttes,  leur  étalilisseinent  au  voisinage  des  Pyrénées  et  leur  infleoce  sur  la 
civilisation  première  des  habitants  de  nos  contrées,  qui  ont  pu  leur  emprun- 
ter, tout  comme  aux  l'iiéniciens,  des  expressions  et  des  idées  commerciales 
et  religieuses,  dont  notre  histoire  et  le  catalan  lui-même  fournisseul  des 
preuves  suffisantes;  car  il  faut  s'attendre  à  trouver  des  analogies  de  mots 
là  où  il  a  pu  V  avoir  importation  d'idées  ou  d'objets  matériels  :  alors  la 
vraisemblance  morale  vient  s'ajouter  à  la  vraisemblance  philologique. 
!\lais  il  est  une  classe  de  mots  dont  il  faut  exclure  tout  élément  sémitique 
ou  iiellénique,  tant  qu'il  n'est  pas  historiquement  prouvé,  tels  sont  les 
nujus  de  rivières,  de  montagnes  et  en  général  les  noms  de  lieux;  car  c'est 
pour  désigner  des  localités  d'un  pays  qu'on  emprunte  le  moins  volontiers 
à  un  idiome  étranger,  et  il  est  certain  que  les  établissements  des  Grecs,  la 
conquête  des  Romains,  et,  plus  tard,  celle  des  Wisigolhs,  ont  laissé  sub- 
sister dans  notre  pays  un  grand  nombre  de  noms  ibériens  et  celtiques 
antérieurs  a  ces  peuples.  Il  peut  donc  exister  dans  notre  langue  vulgaire 
bien  des  locutions  laissées  par  les  Grecs  qui  fréquentèrent  ilos  parages; 
mais  il  ne  reste,  aujourd'hui,  en  lîoussillon  aucune  trace  des  noms  grecs 
que  l'histoire  avait  transmis;  et  cette  disparition,  (|ue  nous  croyons  complète, 
doit  réduire  à  des  proportions  insignifiantes,  la  <|itistion  des  origine» 
ou  des  influences  greccpies  dans  ce  pays. 


i  / 


Romainiit. 


L'an  058  de  Rome  (H8  avant  J.-C),  les  Romains 
envoyèrent  une  colonie  à  Narbonne,  et,  à  partir  de  cette 
époque,  toute  la  province,  qui  porta  désormais  le  nom 
de  cette  ville,  passa  sous  leur  domination.  Ils  régnè- 
rent dès  lors  en  maîtres  dans  notre  pays,  jusqu'à  la  ruine 
de  l'Empire  d'Occident  et  h  rétablissement  desWisigoths 
dans  les  provinces  de  l'Espagne  et  de  la  Gaule  méridio- 
nale. Il  ne  faut  donc  pas  voir  ici  des  influences  épliémè- 
res  ou  fabuleuses  comme  celles  des  Phéniciens,  ou  de 
simples  relations  commerciales,  comme  celles  des  Grecs 
de  Massalie.  C'est  la  domination  d'un  peuple  qui  s'est 
établi  en  maître  dans  le  Roussillon ,  y  a  fondé  des  colo- 
nies, des  villes  et  des  villages,  construit  ou  réparé  des 
routes,  des  temples  et  des  monuments  de  toute  sorte,  et 
y  a  régné  pendant  cinq  siècles  au  moins,  par  les  armes, 
les  lois,  les  mœurs,  les  institutions,  la  religion,  la  langue, 
les  lettres  et  l'action  irrésistible  d'une  civilisation  beau- 
coup plus  avancée  que  celle  des  anciens  Ibères.  Aussi, 
c'est  Rome,  l'ancienne  Rome,  qui  se  montre  partout  dans 
le  passé  du  Roussillon  et  dansle  peuple  qui  l'habite  encore. 
Le  catalan  qu'on  y  parle  aujourd'hui,  n'est,  pour  ainsi 
dire,  que  le  latin  privé  de  ses  terminaisons;  nos  lois, 
jusqu'à  l'épotiue  moderne,  sont  presque  exclusivement 
romaines;  des  traits  de  mœurs  et  les  traditions  popu- 
laires nous  montrent  Rome  à  chaque  pas  parmi  nous, 
et  une  infinité  de  lieuv  portent  dans  les  débris  de  leurs 
monuments,  dans  les  médailles  qu'on  y  découvre  et  jus- 
que dans  leurs  noms  actuels,  des  preuves  irrécusables 
de  la  domination  romaine. 

Ce  n'est  [loint  d'ailleurs,  comme  on  pourrait  se  le  figu- 
rer, siu'  nos  rivages  seulement  ou  sur  le  parcours  de  l'an- 
cienne voie  romaine,  mais  encore  sur  les  points  les  plus 


78 


reculés  de  nos  montagnes ,  que  ces  décou vertes  se  font 
et  se  feraient,  pour  ainsi  dire,  tous  les  jours.  Comment 
s'en  étonner?  Dès  le  premier  siècle  de  notre  ère,  une 
colonie  romaine  était  fondée  à  l'extrémité  de  notre  pro- 
vince, au  cœur  du  pays  des  Cerretans,  dans  la  ville  qui 
porte  encore  aujourd'hui  le  nom  de  Livia.   Les  Latins 
qui  s'y  étaient  établis  avaient  dû  nécessairement  relier 
cette  position  à  la  colonie  de  Ruscino  et  à  la  ville  à'IHi- 
beris,  et  ce  ne  pouvait  être  qu'au  moyen  d'une  voie  qui 
suivait  le  cours  de  la  Tet.  Des  témoignages  certains  et 
des  débris  encore  conservés,  prouvent  en  effet  qu'il  y  a 
eu,  dans  cette  direction,  une  voie  importante  qui  |)artait 
à'IUiberis  pour  aboutir  a  Livia,  et  tout  indique  que  sa 
création  remonte  au  moins  à  l'époque  romaine'.   Notre 
province  fut  donc  parcourue  dans  toute  son  étendue,  par 
le  peuple  dont  le  souvenir  remplit  toutes  les  pages  de  nos 
annales;  et  n'est-il  pas  évident  que,  pendant  une  domi- 
nation de  plusieurs  siècles,  l'inlluence  romaine  a  dû  s'é- 
tendre, non-seulement  sur  le  parcours  de  cette  route, 
mais  encore  sur  les  points  les  plus  reculés  des  vallées 
qui  viennent  y  aboutir?  On  ne  saurait  dire  assurément  que 
les  Romains  se  soient  établis  sur  tous  les  lieux  habitables 
de  notre  département,  ni  qu'ils  en  aient  chassé  ou  exter- 
miné les  populations  indigènes.    L'histoire  et  la  raison 
démentiraient  hautement  de  pareilles  assertions.  Tout  ce 
qu'on  peut  conclure  des  considérations  qui  précèdent, 
c'est  que  tous  les  points  de  notre  pays  ont  été  connus  et 
parcourus  par  les  Romains,  qui  ont  pu,  par  conséquent,  s'y 
établir,  se  mêler  aux  populations  primitives,  et  par  suite 
y  laisser  des  traces  de  leur  passage  ou  de  leur  séjour. 
On   comprend   dès  lors   quelles  proportions  atteindrait 

1  Nous  auroas  l'occasion  de  faire  un  jour  riiistoirc  de  ce  grand  chemin; 
pour  le  moment,  nous  nous  bornerons  à  renvoyer  à  ce  que  nous  en  avons 
dit  dans  un  mémoire  sur  la  Géographie  hist.  du  Conflcnl  (Bull,  de  la  Soc. 
des  Pyr.-Oi.,  X,  p.  70). 


rélude  de  nos  antiquités  romaines,  si  on  voulait  les 
rechercher  sur  tous  les  points  oîi  il  peut  en  exister  encore 
des  débris.  Il  n'y  a  pas  de  localité  qui  ne  puisse  en  fournir 
d'une  manière  ou  d'autre,  et  l'on  est  pres(|ue  tenté  de  sou- 
rire en  voyant  les  exclamations  de  certains  archéologues, 
qui  sont  tout  surpris  de  découvrir,  sur  le  territoire  de  nos 
villages,  des  médailles  ou  des  constructions  appartenant  à 
un  peuple  qui  a  occupé  ce  pays  pendant  plus  de  cinq  cents 
ans,  et  Ta  si  bien  occu|)é  que,  dès  le  premier  siècle  de  l'ère 
chrétienne,  Pline  disait  qu'il  ressemblait  plutôt  à  l'Italie 
qu'à  une  Province  (liv.  III,  c.  3). 

Il  est  évident  qu'il  y  aurait  d'intéressantes  recherches  à 
faire  à  ce  sujet,  et  des  études  suivies  jetteraient  des  lumières 
précieuses  sur  l'histoire  de  la  domination  romaine  dans  ce 
pays.  On  parviendrait  sans  doute,  par  ce  moyen,  à  marquer 
pour  notre  département  certaines  régions  ou  zones  dans 
lesquelles  l'inlluence  romaine  serait  mieux  constatée  que 
dans  d'autres,  et  l'on  ne  peut  méconnaître  l'utilité  et  l'impor- 
tance de  pareilles  recherches,  quelles  qu'en  soient  d'ailleurs 
l'immensité  et  les  dillicullés.  !Mais  il  est  certain ,  qu"à  part  les 
données  générales  que  nous  venons  d'indiquer,  les  anciens 
ne  nous  ont  laissé  aucun  témoignage  particulier  qui  puisse 
guider  les  explorateurs;  de  sorte  qu'au  lieu  d'émettre  des 
conjectures  plus  ou  moins  fondées  à  ce  sujet,  nous  nous 
bornerons  à  reconnaître  et  à  préciser  la  ])lace  exacte  du 
petit  nombre  de  noms  transmis  par  les  anciens  et  que  l'on 
peut  inscrire  avec  certitude  sur  une  carte  de  l'ancien  Rous- 
sillon,  vers  le  iv^  siècle  de  l'ère  chrétienne.  Les  inscriptions 
romaines  et  les  travaux  des  savants  modernes  n'ont  ajouté 
que  des  indications  assez  vagues  et  souvent  inexactes,  des 
conjectures  et  surtout  beaucoup  de  dilBcultés  aux  rares 
témoignages  des  anciens  géographes,  et  nous  ne  pourrions 
nous  livrer  qu'avec  une  extrême  réserve  à  l'examen  de  nos 
antiquités  et  a  la  discussion  dos  preuves,  des  explications 
et  des  travaux,  dont  elles  ont  é(<'  l'ol>j«'t  panni  nous. 


80 

HontagneH»  Caps  et  Fleaves. 

MONTAGNES. 

La  chaîne  de  montagnes  qui  sépare  le  bassin  de  l'Lbre 
de  ceux  de  la  Garonne,  de  l'Aude,  de  la  Tet  et  du  Tech, 
portail  sous  les  lloniains  le  nom  de  Vijrénées ,  et  celte 
dénomination  générale  s'appliquait,  alors  comme  aujour- 
d'hui ,  non  pas  aux  rameaux  qui  s'en  détachent  et  la  sui- 
vent quelquefois  parallèlement,  tels  que  les  montagnes  de 
Toses,  de  Pug-mal,  de  Madrés  ou  du  Canig(j,  mais  à  la 
chaîne  principale,  dont  la  ligne  continue,  malgré  de  fortes 
dépressions,  sépare  presque  partout  le  versant  espagnol 
du  versant  roussillonnais.  Quelques  auteurs  catalans,  ou 
français,  guidés  par  des  préoccupations  politiques  tout- 
à-fail  étrangères  à  l'histoire  et  'a  la  géographie,  ont  voulu 
voir  la  ligne  principale  des  Pyrénées,  tantôt  dans  les 
Corbières,  ce  qui  n'a  pas  besoin  de  réfutation;  tantôt  dans 
les  serres  de  Toses,  qui  renferment  des  sommités  fort  éle- 
vées et  forment,  au  sud  de  la  Cerdagne,  une  saillie  bien 
plus  imposante  que  celle  du  plateau  de  la  Perxa.  Mais 
cette  opinion  est  formellement  détruite  par  le  témoignage 
de  Pline,  qui  déclare  que  les  rivières  d'illibéris,  de  Rus- 
cino  et  de  l'Aude  prennent  leur  source  dans  les  Pyrénées  * . 
Il  est  donc  évident  que  ce  nom  de  Pyrénées  s'appliquait, 
alors  comme  aujourd'hui,  à  la  chaine  qui  entre  dans  notre 
département  au  col  de  Puy-Morens,  se  dirige  vers  le  Cap- 
cir,  descend  ensuite  au  midi ,  dans  la  direction  de  Nuria, 
et  se  prolonge,  par  les  montagnes  de  Rojâ  et  de  VAlhera, 
jusqu'au  cap  de  Creus. 

'  Flumen  Atai  r  PvrciisDo  Rubrensein  laciim  penneans  (lib.  5,  c.  A). 


SI 

Il  faul  observer  aussi,  relalivenieiil  au  nom  de  ces 
montagnes,  que  Polyhe  et  Tite-Live  sont  les  seuls  autours 
anciens  qui  en  parlent  une  fois  au  pluriel  (rà  njpr;va?a 

opr,,  Pyrenœi  montes'). 

CAPS  DES  PYllÉNÉES. 

La  description  de  la  côte  maritime  du  Roussillon  est 
fort  incomplète  dans  les  auteurs  anciens;  mais  elle  ne  peut 
offrir  de  dilïicultés  que  dans  la  partie  comprise  entre 
l'embouchure  du  Tech  et  celle  de  la  Muga.  On  sait  qu'il 
existe,  entre  ces  deux  lleuves,  une  côte  sourcilleuse  qui 
s'avance  en  pointe  vers  le  sud-est,  en  décrivant  une  ligne 
semée  de  promontoires,  entre  lesquels  se  dessinent  de 
petites  anses  et  des  ports  plus  ou  moins  importants. 
TPous  ces  accidents  sont  produits  par  dos  rameaux  que 
la  chaîne  des  Pyrénées  projette  dans  tous  les  sens  avant 
de  disparaître  dans  la  mer,  et  plusieurs  d'entre  eux  se 
prolongent  encore  par  des  masses  rocheuses,  dont  la 
tête  se  montre  au-dessus  des  flots  et  forme  des  écueils  à 
une  petite  distance  de  la  côte.  Mais  ces  sinuosités  n'ont 
pas  été  décrites  avec  beaucoup  de  détails  par  les  anciens, 
et  l'on  ne  s'est  guère  attaché,  dans  les  temps  moder- 
nes, à  chercher  ce  qu'il  peut  y  avoir  d'exact  dans  ces 
descriptions,  pour  fixer  les  points  auxquels  ces  indica- 
tions pourraient  se  rapporter  encore  aujourd'hui.  Voici 
donc  le  relevé  de  cette  partie  de  la  côte,  avec  le  petit 
nombre  de  données  que  les  auteurs  anciens  fournissent 
-^  ce  sujet. 

A  partir  de  la  ville  de  Rhodn,  que  tout  le  monde  s'ac- 

•  Partout  ailleurs,  ces  deux  écrivains,  ainsi  que  Strabon  ,  Ptolénire, 
Mêla  ,  Ccsar,  Sallustc,  Dion  Cassius,  Pline  et  Aviénus,  en  parlent  au  sin- 
gulier; Pijrene,  le  mont  Pyréne  ou  Pijrenée.  Celle  observation  peut  avoir  sou 
importance,  i-t  nous  y  reviendrons  ailleurs. 

6 


corde  à  trouver  dans  celle  de  Roses  et  qui  est,  par  consé- 
quent, un  point  l)ien  détorniiné,  Polybe,  Stralion  et  Pomp. 
Mêla  signalent  divers  promontoires,  qu'ils  appellent  le^ 
caps  (les  Pijvénées  (axpa  rr,;  Il-jprrj-nç ,  Pyrcnœi,  promun- 
toria).  On  trouve,  eu  effet,  en  parlant  de  Roses,  les  pointes 
du  château  de  la  Trinité  et  del  Falcô,  les  caps  d'en  Orfeo, 
de  Cadaquers,  de  Crcus,  de  Calaprona,  de  Lladô,  de  Port 
bô ,  et,  sur  le  territoire  français,  les  caps  de  CandcU,  de 
Peiirc  file,  de  Redcris,  de  VAbelle,  de  Ltcslrell  et  de  Biar. 
Les  anciens  ne  les  ont  ni  comptés  ni  nommés;  mais  il  faut 
admettre  qu'ils  en  ont  signalé  deux  au  moins.  Le  premier,  et 
le  plus  important,  est  celui  que  Tite-Live  ajipelle  Promnn- 
torium  Pi/rcncs,  lorsqu'il  dit,  qu'en  l'an  218  av.  J.-C, 
P.  Cornélius  Scipion  traversa  le  golfe  (jaulois ,  fit  le  lonr 
du  Promontoire  de  Pyrène,  et  alla  débarquer  ses  troupes 
à  Emportes*.  Ce  promontoire  ne  peut  être  que  la  pointe 
extrême  du  cap  dit  aujourd'hui  de  Crcus;  car  il  n'existe, 
sur  tout  ce  littoral,  aucun  autre  point  saillant  dont  le  par- 
cours mérite  de  figurer  dans  une  narration  hislori([ue. 
C'est-là  que  nous  retrouverons  ce  rocher  qui  s'élève  si  haut 
(ou  s'avance  si  loin  dans  la  mer),  et  que  Mêla  dit  très-rap- 
proché  de  Cervera,  en  le  signalant  au  navigateur  comme 
point  de  repaire  entre  la  limite  des  Gaules  et  l'embouchure 
du  Thicis.  Pour  Mêla,  la  limite  des  Gaules  est  à  Cervaria. 
Le  rocher  ou  promontoire  en  question  se  trouve  donc  plus 
au  sud,  et  cette  situation  convient  parfaitement  au  cap  de 
Creus,  qui  est  justement  fins  rapproché  de  Cervaria  que 
du  tleuve  Thicis,  qui  se  jette  dans  la  mer  à  VO.  de  Roses*. 

1  Deindè  Pyrenes  circutnvectus  prointintorium,  Emporiis,  urbe  Grsera, 
rDpias  exposait  (lib.  26,  c.  -19). 

-  «  Cervaria  lociis,  finis  Gallia»...  A  Cervaria  pro\ima  rst  rupcs  quœ  iii 
aUuin  Pyrcnxiim  oxtnidil.  Di'iii  Thicis  liunu'n  »  (lib.  2,  c.  G). 

On  corrigerait  volontiers  ce  passage,  en  mettant  quam  au  lieu  de  qua; 
celte  correction,  qui  rendrait  le  sens  plus  clair,  n'a  «railleurs  aucune  im- 
portance an  point  de  vue  de  la  géographie. 


( 


83 

C'est  le  cap  principal  de  toute  cette  côte,  celui  que  Pline 
se  contente  d'a|)peler  «  le  promontoire,  au-delà  duquel  se 
«trouve  Vénus  Pijrént'cnne^.  » 

Vient  ensuite  le  lieu  Cervariu,  dont  le  nom  se  conserve 
encore  aujourd'hui  dans  celui  de  Cervera.  En  suivant  la  côte, 
on  trouve  le  cap  sur  lc(juel  était  bâti  le  temple  d'Aphrodite. 
Strahon  semble  l'appeler  une  l'ois  VAplirodision;  mais  il 
est  douteux  que  ce  lïït-là  le  nom  propre  de  ce  promon- 
toire. Le  même  auteur  l'appelle,  dans  un  autre  endroit, 
le  cap  Aphrodision  de  Pyrène,  et  Ptolémée  le  nomme,  à 
plus  juste  raison  sans  doute ,  le  Promontoire  de  Pyrcne, 
sur  lequel  est  bâti  le  Temple  Aphrodisien  {Ptol.,  lib.  II). 
Il  est  bien  évident  que  nous  ignorons  le  nom  propre  que 
ce  promontoire  portait  dans  les  temps  anciens;  il  n'est 
déterminé  i)our  nous  que  par  le  temple  qui  le  surmontait. 
C'est  donc  à  ce  monument  seul  qu'il  faut  appliquer  le  nom 
à' Aphrodision,  temple  ou  hieron  Aphrodisien,  fanum 
Veneris,  et  Venus  Pyrenœa ,  que  lui  donnent  les  géogra- 
phes anciens.  C'est  ce  temple  qui  avait  jeté  un  certain 
éclat  sur  le  Port  de  Vénus  et  sur  son  Promontoire ,  qui 
était  peu  important  par  lui-même,  et  n'aurait  sans  doute 
jamais  été  mentionné  sans  cette  particularité. 

Pomponius  Mêla  ayant  placé  le  Porlus  Veneris  dans 
les  Gaules,  dont  il  fixe  la  limite  à  Cervaria,  on  ne  peut 
songer  à  chercher  ce  port  au  sud  de  Cervera,  ni  le  pla- 
cer sur  la  côte  française  dans  un  lieu  plus  convenable 
que  celui  qui  s'appeljc  encore  aujourd'hui  Port-Vendres. 
«Ce  nom,  dérivé  de  Porlus  Veneris,  donne  une  sin- 
«  gulière  force  à  l'opinion  que  nous  soutenons.  En  effet , 
«  il  est  aussi  probable  (jue  l'on  a  désigné  ce  port  par  le 
«  nom  de  la  déesse  dont  le  temple  avait  été  élevé  dans 
«  le  voisinage,  qu'il  le  serait  pou  (pi'on   lui  eût  imposé 

'  Pyrciidîi  inonlcs  tli^panias  (iallinsqiie  (lislfrininanl,  ■promuntoriis  in 
duo  ilivuisa  maria  |>iojectis.. .  riuinon  Ticliis.  Al)  ro  l'yieiuva  Vomis  in 
laloif  yiramantorii  altcio  xi.  m  (lil),  .3,  <•.  .>,  lieacriplion  de  riCspagne). 


84 

«  un  pareil  nom ,  si  cel  édifice  eût  été  construit  dans  un 
«endroit  éloigné  de  sept  à  huit  lieues'.  » 

D'après  toutes  ces  considérations,  nous  placerons  1'^- 
phrodision  sur  le  cap  Biar,  qui  forme  un  des  points  les 
plus  remarquables  de  cette  côte,  au  sud  de  Port-Vendres. 
Il  est  vrai  qu'aucune  découverte  de  ruines  romaines  n'est 
venue  signaler  jusqu'ici,  sur  ce  point  ou  ailleurs,  la  place 
du  Temple  d'Aphrodite;  mais  les  raisons  énoncées  ci- 
dessus  peuvent  tenir  lieu  de  preuves  matérielles.  Quoi  qu'il 
en  soit,  les  anciens  noms  des  deux  pmmontoires  pyrénéens 
dont  nous  avons  essayé  de  déterminer  la  position,  demeu- 
rent inconnus,  et  le  nom  (VAphrudisium  ne  peut  s'appli- 
quer à  aucun  d'eux,  puisqu'il  appartenait  seulement  au 
monument  élevé  près  du  port  de  Pyrène  à  la  divinité  de 
ces  montagnes. 


COTE  ROUSSIIXONNAFSE  —  FLEUVES. 

Feslus  Aviénus  est  le  seul  écrivain  de  l'antiquité  qui  nous 
ail  laissé  une  description  de  la  côte  maritime  du  Roussillon, 
description  bien  incomplète  sans  doute ,  mais  fort  impor- 
tante, si  l'on  lient  compte  du  temps  auquel  se  rapportent 
ces  renseignements,  puisés,  selon  toute  probabilité,  aux 
écrits  des  navigateurs  de  Massalie,  qui  parcouraient  les 
côtes  de  la  Celtique  et  de  l'Ibérie  vers  le  v^  siècle  avant 
l'ère  chrétienne.  Le  poëme  des  Ora  maritima  se  rattache 
donc  aux  premiers  temps  de  l'histoire  et  de  la  géographie. 

Après  avoir  suivi  les  côtes  de  Barcelone  et  du  pays  des 
Cérètes  (Ampourdan),  le  poète  géographe  arrive  aux  Pro- 
montoires de  Pyrène,  et  continue  ainsi  sa  description  : 

«  A  partir  de  ce  point,  s'étendait  le  peuple  Sordus,  vivant 
«  dans  des  repaires  d'un  accès  diflicile,  depuis  l'endroit  où 
«  les  sommets  de  Pyrène  couverte  de  pins...  plongent  dans 

>   De  6\Z4'Sï0i.*,  Hist.  du  floi(,«,i.,  p.  58. 


85 

«  les  flots  de  la  mer.  Dans  les  confins  du  rivage  Sordicène 
«avait  existé,  à  ce  qu'on  dit,  la  riche  cité  de  Pyrène... 
«  Après  le  mont  Pyrénéen,  s'étendent  les  sables  du  littoral 
«  Ci/nétiqiie,  que  sillonne  la  rivière  Roschinus;  c'est-là, 
«  comme  nous  l'avons  dit ,  le  sol  de  la  Terre  Sordicène. 
«  Vient  ensuite  un  étang  et  un  marais  d'une  vaste  étendue, 
«  que  les  habitants  appellent  Sordicène.  De  ce  même  étang 
fl  coule  la  rivière  Sordus,  entraînant  quelque  fois  avec  elle 
«  les  eaux  agitées  de  ce  vaste  golfe,  dont  les  bords  sont 
«  tellement  étendus  et  ouverts  que  la  fureur  des  vents  y 
«  pénètre  et  en  soulève  les  vagues  ' .  » 

La  description  d'Aviénus  s'applique  parfaitement  à  l'état 
actuel  de  la  côte  roussillonnaise,  et  l'on  n'a  pas  même 
besoin,  pour  la  suivre,  de  prendre  en  considération,  comme 
l'a  fait  M.  do  fiazanyola-,  les  diangomonts  que  ces  lieux 
ont  pu  éprouver  dans  un  intervalle  de  plus  de  vingt  siècles. 
11  n'y  a  donc  qu'à  expliquer  et  compléter  cette  relation 

'   Gens  est  Iberuni.   Sordus  \nie  dt>ni(|uc 
Populus  agcbat  intcr  avios  lucos; 
Ac  pertiuentes  usque  ad  interius  mare, 
Qua  pinifcrla;  stant  Pvreiia;  vcriices 
liitcr  ferarum  lustra  <K'cuba[ntium] 
Et  arva  late  et  guifjitera  ponli  preinit. 
In  Sordiceiii  cespilis  confinio 
Quoiidaiii  l'yreiiiC  civitas  dilis  laris 
Stelisse  fertur  :  hicquc  Massaliœ  incolœ 
Negotiorum  sa;pè  versabant  virps. 

Post  Pijrenœum  jiigum 

Jaccnt  arenœ  liltoris  Cynedci, 
Kasquc  lato  sulcat  amnis  Roschinus. 
Hoc  SordiceiKP ,  ut  dWiimis,  globœ  solnin  est. 
Stagnum  bic  palusiiue  :  qiiippe  diffusé  patet, 
Lt  iucolœ  istam  Sordiccn  oognominant; 
Pra^terque  vasli  (fur(;itis  crepulas  aquas 
(Nani  propler  aniplum  niaryiuis  lanoe  ambiluin 
Ventis  tumescit  sœpe  perccUcntibus) 

Stagno  bocabipsn.Çordiuamnisi'ftIuil.     (Oramarit.,  v.S.V2à  599.) 
-  niil.  du  Rnuss  ,  p.  5. 


se 

par  les  autres   iiulicalioiis  que  rournisseiil   les   auteur* 
anciens. 

A  partir  des  Prumontoires  des  Pyrénées,  la  côte  roussil- 
lonnaise  se  dirige  vers  le  nord  et  prend  une  ligne  presque 
régulièrement  droite,  jusqu'aux  rochers  du  promontoire 
de  Lcucas.  Elle  oH're  partout  une  plage  sablonneuse,  dont 
une  partie  au  moins,  celle  qui  s'étend  entre  l'embouchure 
du  Tech  et  celle  de  l'Agli,  portait,  dès  les  temps  les  plus 
reculés,  le  nom  de  côte  Kynctique,  ou  terre  de  Kynet  ou 
di  Kyn  ' . 

La  côte  Cynétique  donnait  passage  à  trois  cours  d'eau 
importants,  que  les  auteurs  anciens  décoraient  déjà  du 
nom  de  fleuves  et  dont  nous  allons  nous  occuper. 

Par  une  singularité  fort  bizarre ,  aucun  des  historiens 

*  Ce  nom  a  la  terminaison  ordinaire  de  l'adjectif  helléuiquc,  et  si  le 
radical  se  rattachait  à  la  langue  grecque,  il  pourrait  dériver  du  nom 
X"J(a)V  ,  XUVO^  (cLien),  dont  tout  le  monde  saisira  le  rapport  avec  le 
nom  latin  du  village  de  Canet,  qui  se  présente  un  des  premiers  da-us  ces 
parages.  On  pourrait  en  conclure  que  le  nom  de  ce  village  remonte  au 
nïoins  à  l'époque  des  Rhodiens  on  des  Grecs  de  Massalie,  et  les  Romains, 
venus  ensuite,  n'auraient  fait  que  le  traduire  dans  leur  propre  langue, 
comme  ils  l'ont  pratiqué  pour  le  Port  de  l'Aphrodision,  dont  la  traduction 
latine  Porlus  Veneris,  s'est  seule  conservée  dans  le  nom  actuel  de  Port- 
Vendrcs.  L'analogie  est  frappante,  mais  on  ne  saurait  Pacceptcr;  car  un 
examen  attentif  prouve  que  l'adjectif  X'JVnrtXOÇ  dériverait  très-irrégu- 
lièrcnieut  du  substantif  XUCOV.  Ou  ne  peut  donc  attribuer  en  ceci,  aus 
navigateurs  grecs,  autre  chose  que  la  terminaison  tXOÇ,  qu'ils  auront 
donnée  au  nom  indigène  kyn  ou  Kijnet,  dont  le  sens  nous  est  inconnu, 
et  qu'ils  avaient  sans  doute  trouvé  en  usage,  parmi  les  habitants  de  la  cote, 
comme  nom  propre  et  primitif  de  ce  pays.  Ce  sont  les  seules  conjectures 
raisonnables  à  émettre  sur  ce  point,  et  si  l'on  voulait  à  toute  force  admettre 
une  influence  phénicienne  quelconque  sur  ce  littoral ,  on  comprendrait  que 
le  peuple  de  Tyr  ou  de  Carthage  eût  appelé  Rous-Ktjno  (Capitale  du  pays  de 
JiynJ ,  la  ville  la  plus  imporlaule  de  celte  contrée;  car  le  mot  Kûs ,  Rôs , 
nom,  signifie  (été,  chef,  capitale,  dans  toutes  les  langues  sémitiques.  C'est 
une  conjecture  qui  en  vaut  peut-être  bien  d'autres  ;  mais  ce  ne  sera  jamais 
qu'une  conjecture. 


87 

OU  géographes  anciens  n'a  mentionné  les  trois  Ueuves 
roiissillonnais.  Cliacun  s'est  borne  à  n'en  citer  que  deux, 
et  bien  qu'ils  l'aient  l'ait  eu  termes  assez  différents,  il  se 
trouve  cependant  qu'ils  nous  ont  transmis,  en  définitive, 
le  nom  primitif  et  original  de  chacun  de  nos  cours  d'eau. 

Le  premier,  en  partant  des  Pyrénées,  est  appelé  :  le 
fleuve  Uebernis,  par  Polybe;  —  Ilijbirrhis,  par  Slrabon; 
—  Illérios  et  IlUberis,  par  les  manuscrits  de  Ptolémée;  — 
Tichis  ou  ThicU,  par  Mêla; — Tccum  ou  Tichis,  par  Pline. 
C'est  aujourd'hui  le  Tech. 

Le  second  est  appelé:  Roskynon,  par  Polybe; — Rouski- 
nmi,  par  Strabon; — Houskynon,  par  le  même  (éd.  de  Casau- 
bon); — Rouskio)!,  par  Ptolémée; — Roschinm,  par  Aviénus; 
— Telis,  par  Mêla  (pour  Tetis).  C'est  aujourd'hui  Fut  Tet. 

Le  troisième  est  mentionné  'par  Pline  seulement,  qui 
l'a  nonuiié  :   Vernodubrum.  C'est  aujourd'hui  VAgli. 

Les  géographes  grecs  qui  ont  parlé  des  /leaves  d'Illibéris 
et  de  Rriscino  ignoraient  les  noms  que  leur  donnaient  les 
habitants  du  pays.  Ils  se  sont  contentés  de  les  appeler  du 
nom  des  villes  qui  étaient  près  de  leur  embouchure,  et 
dont  ils  baignaient  les  murs.  Il  y  a  donc  apparence  que 
si  ces  fleuves  ont,  en  eflet,  jjorté  dans  l'antiquité  les  noms 
de  fleuves  d'Illibéris  et  de  Ruscino,  ce  sont  les  villes  qui 
ont  donné  leur  nom  aux  fleuves,  et  non  pas  les  fleuves 
aux  Yilles*. 

'  Un  seul  écrivain,  j'i  notre  connaissance,  a  étc  d'un  avis  contraire. 
M.  'i'astii  { yotice  sur  Perpignan,  n"  I)  a  cru  trouver  pour  le  mot  Rouskino 
une  ctymologic  grecque  (cour»  vagabond,  impétueux),  qui,  en  effet,  convien- 
drait avec  plus  (K'  raison  à  un  (ietivc  qu'à  une  ville.  !\Iais  cette  élyniologie 
ne  peut  s\ippli(|ucr  régulièrement  au  mot  Kino  ou  même  hyno,  couinie  ou 
le  trouve  écrit  quelquefois.  Elle  est  donc  loin  d'être  convaincante;  et, 
d'un  autre  coté,  serait-elle  admissible  pour /tousAiiio ,  qu'elle  ne  pourrait 
l'être  pour  lllibcris;  car  ce  dernier  nom  a  une  étymologie  certaine,  se  ratta- 
chant à  l'ancienne  langue  des  populations  ibériennes,  avec  le  sens  de  Yillc- 
youvelte,  qui  convient  parfaitement  à  un  centre  de  population  plus  moderne 
peut-être  que  Houikino,  et  ne  saurait  dans  aucun  cas  s'appli(|uer  à  un  fleuve. 


88 

Le  fleuve  qui  passait  à  lilibéris  porte  aiijourd'ljui  le 
nom  (le  TtxJi.  Les  documents  diplomatiques  les  plus  an- 
ciens l'appellent  /lumcii  Tcdius  ou  TItecus  (8o5),  Tecus 
(878),  /lumen  Thcci  ou  Tixsl  (968),  et  nous  en  concluons 
que  son  nom  véritable  est  celui  de  Tichis  ou  de  Teciim 
(au  radical  Tech)  que  lui  donnent  Mêla  et  Pline. 

Le  fleuve  (]ni  passait  h  Roushinn  s'appelle  dans  les 
anciens  documents: //(/i'/»/>i-  Tt-t/a  (8o0j ,  Tencilmn,  Tedo 
(855),  Tede  (950),  (7erf937),  Tête  (810).  Il  porte  aujour- 
d'hui le  nom  de  La  Tel,  qui  se  trouve  déjà ,  muni  de  l'ar- 
ticle et  sous  la  même  forme,  dans  une  charte  de  l'an  966. 
C'est  le  fJnmn)  Telis  de  Mêla  ;  car,  mali^ré  les  remanpies 
grammaticales  de  M.  Puiggari,  il  semble  dillicile  de  voir 
autre  chose  qu'une  faute  de  copiste  dans  la  leçon  Telis 
du  géographe  latin  '.  En  sorte  que  le  nom  de  La  Tet,  qui 
se  conserve  encore  aujourd'hui,  remonte  aux  premiers 
peuples  du  Roussillon. 

Ce  fait  esl  certain  pour  lilibéris,  et  tout  porte  à  croire  qu'il  en  est  de  même 
pour  Uousliino.  En  outre,  Polybo,  Strahon  et  Ptolémée  déclarent  que  chacun 
des  duu\  fleuves  avait  près  de  son  cnilmucliure  une  inllc  qui  fartait  le  mCme 
nom.  r..e  premier  de  ces  écrivains  fournit  nionie  nn  ar(|uni('iit  dicisif  à  cet 
égard,  car  il  :ie  se  borne  pas  à  mentionner  les  deux  fleuvcii  d' lilibéris  et  de 
Rouskino,  et  il  parle  dans  la  même  phrase  du  fleuve  de  iVurfroiid,  qui  ne  peut 
s'entendre  que  de  VAlax.  Or  tout  le  momie  sait  rorijjine  du  nom  de  Xar- 
bona,  qui  s'appliijuait,  non  pas  au  fleuve  do  l'Aude,  mais  à  la  colonie  fondée 
dans  son  voisinage,  l'an  I  I.S  av.  J.-C. 

Il  faut  donc  regarder  comme  un  fait  inconteslahle  Tignoranre  ou  le  silence 
des  écrivains  grecs  relativement  au  nom  propre  des  fleuves  du  Uoussillon. 
Ils  se  sont  bornés  à  leur  donner  celui  des  villes  dont  ils  arrosaient  le  terri- 
toire, et  ce  sont  les  écrivains  de  Rome  qui  nous  en  ont  lransn)is  les  noms 
primitifs, 

'  •  Le  nom  de  Tkelis,  a  dit  M  Puiggari  ('Sûtices  sur  F.tue).  n'est  autre  chose 
qu'un  arrhaïsme;  car  les  anciens,  au  rapport  de  Vanon,  permutant  /  en  /, 
disaient  précisément  Thelis  pour  Thelis,  en  parlant  toutefois  de  la  déesse  et 
non  de  notre  rivière.  »  I\I.  Puiggari  a  dit  ailleurs  (Ituncinn.  Public  ,  II,  2): 
"  Telis,  au  lieu  de  Telis,  ne  peut  être  qu'une  de  ces  nombreuses  fautes  de 
copiste,  avec  lesquelles  l'ouvrage  de  Pomponius  Mêla  nous  esl  parvenu.  " 


89 

Le  troisième  fleuve  roussillonnais  est  formé  de  la  réu- 
nion (le  trois  anUients  presciiie  égaux,  portant  tous  des 
noms  qui  remontent  à  une  haute  antiquité.  Le  premier, 
sur  la  rive  droite,  qui  porte,  depuis  le  xiv^  siècle  au 
moins,  le  nom  d'Adcsi;/,  est  appelé  flnmen  de  Adadig 
dans  une  charte  du  ô  des  cal.  de  juillet  II 42  (Cari,  du 
Temple,  fol.  78,  r")-  Le  second  alllucnt,  (pii  est  le  plus 
important,  porte  déjà  le  nom  de  jhinuni  AquUimim  en 
961  (Marca,  n"  96).  Le  troisième  aifluenl,  sur  la  rive 
gauche,  appelé  aujourd'hui  Verdoblc,  porte  le  nom  de 
Verndoble  dans  une  charte  de  l'an  1558  (Reg.  I  de  la 
Proc.  real  ,  fol.  Mo,  et  V,  fol.  151),  et  rien  n'empêche 
d'y  retrouver  le  Vernodubrunt  de  Pline.  Cet  afllucnt  est  le 
plus  rapproché  de  la  côte,  et  il  n'est  pas  étonnant  qu'à 
une  époque  où  les  Ron)ains  ne  connaissaient  peut-être 
que  très-imparfaitement  le'  pays  dit  aujourd'hui  de  Fo- 
nollet,  ils  aient  donné  au  fleuve  qui  l'arrose  le  nom  d'un 
de  ses  principaux  afllucnts.  On  voit  cependant  que,  dès  le 
xe  siècle,  le  fleuve  portait  le  nom  à'Aquilimim  dans  sa 
partie  inférieure,  comme  près  de  sa  source  au  xii*'',  et 
ce  nom  se  montre  dès  l'an  1278  sous  la  forme  actuelle 
de  l'Agli*.  On  trouve  un  lieu  de  Moule  AUjlino,  dans  le 
pays  de  Fonollel,  mentionné  en  12H^. 

Enfin,  Aviénus  a  signalé  sur  la  côte  roussiilonnaise 
un  quatrième  cours  d'eau,  Sordus  amnis,  que  beaucoup 
d'écrivains  modernes  ont  confondu  avec  l'Agli.  La  des- 
cription d'Aviénus  ne  [)ermet  |)as  la  moindre  confusion 
à  cet  égard ,  puis(iue ,  à  la  suite  du  (kuve  Roschinus,  qui 
ne  peut  être  que  la  Tet,  il  cite  encore  dans  le  pays  do 

'  Monastcriuin  S.  Pniili,  super  ripas  /i^iii/i'iii  (Riillt- île  Tan  1120. — 
BaLUZE,  Bulles,  n"  lo.  —  llisl.  de  Languedoc,  to.  11,  prouv.  582). 

2  Pro|iricU'S  à  Sainl-Ilippohle  ,  arf  ripam  de  l'Agli  ..  in  flumine  de  l'Agli 
(Cart.  du  Temple,  fol.  88  r"). 

3  Ibid,  fol.  16. 


00 

peuple  Sonle,  uu  étang  e)Uourê  de  marais,  que  les  habi- 
tants appellent  Sordikcnc,  et  c'est  de  ce  même  étang  que 
sortaient  les  eaux  de  la  rivière  Sordus.  On  ne  peut  recon- 
naître ici  que  l'étang  mentionné  également  par  Polybe, 
Strahon  et  Mêla,  et  appelé  aujourd'hui  étang  de  Salscs, 
dans  lequel  se  jettent,  en  eflet,  deux  véritables  cours 
d'eau,  aux(iuels  la  dénomination  d'amnis  peut  parfaite- 
ment convenir  '. 

Il  Caut  donc  voir  dans  notre  Fo7it  Estramcr,  celle  fon- 
taine de  Salses  signalée  par  Desclot  comme  limite  du  Rous- 
sillon;  c'est  le  fom  Salsulœ  de  Mêla,  la  rivière  Sordus 
d'Aviénus,  et  rien  n'empêche  d'appliquer  à  notre  littoral 
actuel  la  description  que  les  Grecs  de  Massalie  en  faisaient 
il  y  a  plus  de  deux  mille  ans^ 

'  Pour  que  la  rivière  Socrfia  d'Aviénus  fût  l'Agli ,  il  faudrait  adineUrc 
(|iic,  celte  rivière  se  jetait  ancicniicineiit  dans  Tétang  de  Salses.  C'est  une 
opinion  (|ue  rien  ne  justifie,  car  l'histoire  n'a  mentionne  aucun  fait  qui 
j)nissc  s'y  rapporter;  la  disposition  topographique  du  pays  s'y  oppose,  et 
M.  de  Gazanyola  a  prouvé  historiquement  l'impossibilité  du  passage  de 
l'Agli  dans  tout  autre  lit  que  celui  qu'il  a  de  nos  jours.  Aucun  géographe 
ancien  n'a  fait  mention  de  l'Agli  à  l'exception  de  Pline.  Aviénus  a  donc 
pu  le  passer  sous  silence,  comme  il  Pavait  fait  pour  le  Tech.  Il  s'est  borné 
à  signaler  sur  ce  littoral  cette  source  merveilleuse  et  abondante,  cette 
fontaine  de  Salsulœ,  mentionnée  par  Mêla ,  et  qui  mêle  ses  eaux  avec  celles 
de  la  mer  dans  Pétang  de  Salses. 

2  II  y  a  i|uelqucs  observations  importantes  à  faire  sur  les  noms  primitifs  des 
rivières  et  des  cours  d'eau  du  lloussillon.  On  peut  remarquer,  qu'à  Peï- 
ccplion  de  ceux  qui  appartiennent  évidemment  à  la  langue  et  à  la  période 
latine,  ils  sont  presque  tous  monosyllabiques,  et  qu'ils  se  retrouventsouvcnt 
sous  des  formes  identiques  sur  les  deux  versants  des  Pyrénées  orientales. 
Ainsi  les  anciens  nomment  déjà,  au  nord  et  au  sud  de  ces  montagnes,  les 
fleuves  Tichus  ou  Tecus ,  et  on  y  retrouve  le  Teser  du  moyen-àge,  la  Ter  de 
nos  jours,  dont  l'analogie  avec  la  Tel  ne  peut  échapper  à  personne.  Il  en 
est  de  même  de  la  rivière  Sordus,  qui  semble  se  retrouver  dans  le  nom  de 
certains  cours  d'eau  mentionnés  dans  des  documents  d'une  date  asse:: 
ancienne,  et  dans  (|uelques  ravins  connus  encore  aujourd'hui  dans  notre 
plaine  et  jusque  sur  les  lianes  du  Canigd,  sous  le  nom  de  correchs  d'ayijues 
sourdes.  Le  mot  sorrc  ou  sourre,  dont  nous  ignorons  Porigine,  mais  qui  a 


91 

Quel  était  le  nom  propre  du  pays  dont  nous  venons  de 
parcourir  le  rivage?  Nul  ne  le  sait.  Tout  porte  à  croire, 
cependant,  qu'au  vp  siècle  av.  J.-C.  les  habitants  dési- 
gnaient sous  le  nom  de  terre  de  Cynel  ou  de  Kyn,  la  partie 
du  rivage  comprise  entre  les  embouchures  du  Tech  et  de 
l'Agli,  sans  que  l'on  puisse  déterminer  si  cette  dénomi- 
nation s'appli(iuait  à  la  côte  seulement  ou  à  l'intérieur  du 
pays.  Quant  aux  écrivains  grecs  ou  latins,  ils  ne  l'ont 
désigné  que  par  le  nom  qu'ils  donnaient  aux  populations 
de  la  côte,  qu'ils  appelaient  Sordoncs.  Ils  connaissaient 
donc,  depuis  le  vF  siècle  av.  J.-C.  jusqu'au  ii^  de  notre 
ère,  sous  les  noms  de  reyio,  ou  même  ora  Sordomim, 
tout  le  littoral  qui  s'étend  des  caps  des  Pyrénées  jusqu'à 
la  fontaine  de  Salses.  Ce  nom  fut-il  maintenu  dans  la 
suite,  et  à  cpielle  époque  celui  de  Pagus  Huscinonensis  lui 
fut-il  substitué?  Les  anciens  auteurs  sont  complètement 

tant  d'analogie  avec  le  nom  «le  la  fontaine  de  Salses  et  de  l'ancien  peuple 
de  notre  littoral,  s'eniploie  aujourd'hui  en  Kousstlion  pour  désigner  le  sa<i/e 
ou  gravier  déposé  par  les  torrents  et  les  rivières.  Dans  le  patois  de  Béziers, 
sourro  signifie  eau  trouble  et  bourbeuse.  Le  mot  sorde  désignait,  peut-être, 
«hez  les  peuplades  primitives  de  nos  Pyrénées,  une  eau  trouble  et  limoneuse, 
stagnante  ou  sauniàtre,  et  correspondait  an  mot  Vassa,  qui  désigne 
aujourd'iuii  des  cours  d'eau  de  celte  nature  .'i  l'rades,  à  l'erpignan,  .i  Tatzo, 
à  Cornella-del-Vercol ,  dans  la  Salanca,etc.  Nous  ferons  même  observer 
que  la  Vossa  de  Perpignan  est  appelée  flumeii  Vasse  Stremere  dans  un  acte 
de  l'an  1309  {IK'ij).  de  Perp.,  liasse  2'i ,  n"  23).  L'on  sait  (|uc  l'ancienne 
rivière  Sordus,  le  fons  Salsulœ,  porte  aujourd'hui  le  nom  de  Font  Eslramer. 
Tont  le  monde  aussi  sera  frappe  de  l'analogie  (|ui  existe  entre  le  nom  de 
la  iTvière  Adasig  et  i^'lni  d'/:(/«x,  Alace,  Atax,  anciennes  dénominations  de 
la  rivière  d'iarfe,  et  celni  i'Adesate,  porté  au  ix*  siècle  par  le  bourg  d'jlxo/, 
dans  le  pays  de  Fonoiiet.  lùifin,  on  trouve  dans  une  rliarle  de  l'an  808 
un  rivulo  \'erucdupi:i  (il  faudrait  lire  peut-être  VernaduiiliJ  dans  les  montagnes 
du  Termenès  ou  du  Pierre-pertusès,  où  le  Vernodubrum  des  anciens  prenait 
aussi  sa  source.  Ces  derniers  noms,  qui  semblent  de  la  même  famille,  in- 
dit|uerai<'nt  peut-être,  pour  les  populalions  primitives  de  iaiioien  pa>s  de 
Fonoiiet,  une  origine  distincte  de  celle  des  anciens  habitants  du  Roussillon 
proprement  ditetdelaCerdagne,  où  les  noms  prnnitifs  sont  presque  toujours 
monosyllabiques,  et  semblent  se  rallacher  à  un  idiome  diffen'ut. 


92 

muets  k  cet  égard.  Il  n'existe  donc  aucun  témoignage 
qui  puisse  autoriser  à  faire  remonter  cette  dénomination 
a  l'époque  romaine,  et  il  est  certain  que  le  nom  de  Pagus 
Rusci)ionensis,  ou  plutôt  de  Comilatm  Rossolionoisis,  se 
trouve  écrit,  pour  la  première  fois,  dans  une  charte  re- 
cueillie par  M.  Fossa,  qui  l'attribue  à  l'an  801  '.  Ce  ne 
serait  donc  que  sur  de  simples  conjectures  qu'on  pourrait 
inscrire  le  nom  de  Pagus  Ruscinonensis ,  à  la  place  de 
celui  de  Regio  Sordomim,  sur  une  carte  historique  de  la 
Gaule  antérieure  au  viF  siècle  de  notre  ère. 

IVoms  de  Peuples  et  Limites. 

Nous  laissons  de  côté  les  Miromandui,  les  Taleli,  les 
Perpinianœi  et  autres  peuples  fantastiques,  établis,  avec 
plus  ou  moins  de  crédit  et  de  raison,  par  divers  écrivains 
modernes,  dans  l'ancien  pays  de  Roussillon.  Les  médailles, 
les  inscriptions  et  les  auteurs  anciens  n'apprennent  abso- 
lument rien  à  cet  égard ,  et  il  est  certain  que  les  seuls 
peuples  mentionnés  par  les  écrits  de  l'antiquité  classique, 
qui  peuvent  être  réellement  placés  dans  ce  pays,  sont  les 
Cerelani  et  les  Sordones. 

SORDO>JES. 

Comme  nous  l'avons  vu,  Aviénus,  dont  le  témoignage 
se  rapporte  au  moins  au  vi^  siècle  avant  J.-C,  place  le 
peuple  Sorde  sur  la  côte  qui  s'étend  des  Pyrénées  à  l'étang 
de  Salses.  Il  appelle  cette  côte,  Sordicène,  et  nous  apprend 
que  les  habitants  donnaient  ce  même  nom  à  l'étang  et  aux 
marais  qui  livraient  passage  à  la  rivière  Sordus. 

Cet  état  de  choses  n'avait  pas  changé  au  siècle  d'Au- 
guste ou  de  Claude,  et  Pomponius  Mêla,  décrivant  les 

•  Docum.  inédits  sur  l'IIisl.  de  l-'rance,  extraits  de  la  Dililiolh.  Roy.  et  des 
Arcb.  el  des  Uihiioth.  des  Départ.,  lo.  III. 


I 


93 

côtes  de  la  Narbonnaise  dans  un  ordre  diamétralement 
opposé  à  celui  d'Aviénus,  arrive  h  la  fontaine  de  Salses 
(liv.  Il,  c.  5),  où  commonçaif,  d'après  lui,  la  région  des 
Sonlones*,  dont  il  parcourt  la  côte  maritime  jusqu'au  lieu 
de  Ccrvaria,  limite  des  Gaules,  et  sans  doute  aussi  du 
peuple  en  (piestion.  Enfin,  un  demi-siècle  après,  Pline- 
l'Ancien,  décrivant  à  son  tour  la  Province  Narbonnaise, 
y  inscrit  quelques  noms  qu'il  semble  emprunter  à  une 
table  géograpliique,  et  en  se  dirigeant  des  Pyrénées  vers 
Narbonne,  il  place  a  la  région  des  Sordones^  sur  la  côte, 
«  et  celle  des  Consuarani  ^  dans  l'intérieur. y)  Voilà  les  seuls 

'  Il  V  a  Sordomtm  dans  les  tnciliciirs  manusi-rils  de  Mêla  ,  et  cVst  la  leçon 
qu'à  choisio  le  ileinierelsavaiitécliteui-  (  Tzscnicii,  Ed.  de  Mêla,  t  II,  p.-îOG, — 
VVai.ckenaèh,  Géographie  des  Gaules,  In.  Il,  part.  II,  c.  A  ).  Le  mot  Sordones 
est  une  nouvelle  forme  latine  du  mot  .Sordi  d'Aviénus;  mais  il  désigne 
évidemment  le  même  peuple. 

2  In  oru  regio  Sardonum,  inlusqut  Consuaranorum  (liv.  III,  cli.  .'5).  Tous 
les  éditeurs  de  Pline  se  sont  obstinés  à  écrire  Sardonum  au  lieu  du  Sordonum 
que  portent  les  meilleurs  manuscrits ,  ainsi  que  Tavoue  le  P.  liurJuuiu  ; 
aussi  les  critiques  les  plus  savants  u'ont-ils  pas  hésité  à  considérer  la  leçon 
Sardonum  comme  une  erreur,  soil  qu'elle  provienne  de  Pline  lui-même, 
soit  (|u'il  faille  ratlrilnier  aux  copistes  de  ses  manuscrits.  Quoi  (|u'il  en 
soit,  tous  identilient  ce  peuple  avec  celui  des  Sordones  mentionné  par  iMéla. 

3  (À's  Conswrani  (jui'  l'iine  a  mentionnés  en  deii';  mots,  à  la  suite  des 
Sordones ,  ont  donné  lieu  à  divers  systèmes  qui  ont  lour-à-tour  promené  ce 
peuple  depuis  les  teries  dites  aujourd'hui  du  Conllent,  jusqu'aux  rives  de 
lu  Garonne.  M.  de  Marca  a  dislin{jué  les  Consuarani  des  Consoranni ,  en 
|)laçant  les  premiers  dans  le  Conllenl  et  le  (^apeir,  les  seconds  sur  la  rive 
droite  du  haut  cours  de  la  Garonne.  Dom  de  Vie,  Demi  Vaisséte,  MM.  Henry; 
Puigdari,  de  Gazanyola  et  hien  d'autres,  ont  adopté  cette  opinion  ,  rejetée 
par  d'Anville,  et  acceptée,  sous  certaines  réserves,  par  M.  Walclieiiaér.  Par 
des  raisons  que  personne  n'a  sérieusement  combattues,  d'Anville,  a  place 
les  Consuarani  et  les  Consoranni  dans  le  pays  appelé  plus  tard  le  Couserans, 
et  tout-à-fait  en  dehors  des  Pyrénées- Orienlales.  Quant  à  !\I.  de  Marca,  il 
s'est  hoiiié  ,  pour  toutes  raisons,  à  citer  le  passajje  de  Pline,  Doni  Vaissète 
et  tous  les  auteurs  venus  à  la  suite  ont  adopté  l'opinion  de  Marca  sans  autre 
examen  ,  et  tous  ces  écrivains  se  sont  ainsi  bornes  à  sappuver  sur  l'opinion 
de  leurs  devanciers,  ^ans  y  ajouter  aucune  preuve  ou  considération  nouvelle. 


94 

Icmoigiiages  que  raiiliqiiilé  nous  ail  transmis  sur  le  peuple 
de  notre  littoral.  Polybe  et  Strabon  ajoutent  que  ce  pays 
était  i)euplé  par  des  Celtes,  par  des  iianhiis  selon  Tite- 
Live,  et  Plolémée  étend  les  Vohqucs  Arckominucs  jus(pi"aux 
Pyrénées  :  ce  qui  veut  dire,  tout  simplement,  qu'aux  yeux 

Od  se  retrouve  donc  en  face  de  Pline  lui-incnie,  et  il  ])eut  être  bon  d'exa- 
miner si  son  témoijjiiage  n'a  pas  iHc  iiitcr|)rcté  iliine  nianiiTe,  arbitraire  et 
i)ar  suite  erronée.  IMinc  nomme  tout  simplement,  parmi  les  peuples  de  la 
Narbonnaise,  «  les  Sardanes  sur  la  cote,  et  les  Consuarani  dans  l'intérieur.  » 
Mais  (jnel  est  le  sens  du  mot  initis?  Demandons-le  a  Pline  lui-même. 
Le  procédé  de  cet  auteur,  dons  ses  descriptions  géograpbiqnes,  consiste  à 
inscrire  d'abord  les  noms  des  villes  qu'il  Ironve  sur  le  bord  de  la  mer,  pour 
donner  ensuite  ceux  de  l'inti'ricur  des  terres.  C'est  ainsi  (|u'après  avoir  décrit 
les  cotes  de  l'Espagne  eitérieure,  il  place,  à  l'inlèrieur ,  \os  Ausetani,  les 
Lacetani,  les  Cerrelani  et  les  Vascons:  «  Post  eos...  intus  receJcntes  radiée 
«  Pvrena?i,  Ausetani ,  Lacetani,  etc.  In  ora  autem  colonia  liareino.  »  (Uisl. 
Nat.,  III,  4.  )  De  même  pour  la  Narbonnaise,  dont  l'intérieur,  était  occupé 
par  les  TricoUi,  les  Vocontii,  les  Segovellavni ,  les  Allobroges  ,  etc.  «  Ei  inliis 
(I  Tricolloiuin ,  Vocontiorum  et  Segovellaunoruni  :  mox  Allobrojjuni.  At 
«in  ora  Massilia,  etc.  »  fibid.,  III,  S.)  Tous  ces  peuples  étaient  considé- 
rablement éloignés  du  rivage;  mais,  comme  on  le  voit,  ce  sont  toujours 
les  mêmes  expressions  qui  reviennent  (in  ora,  intits),  et  tout  ce  qu'on  peut 
logiquement  inférer  du  langage  de  Pline  sur  le  point  que  nous  examinons, 
c'est  (|ue,  vers  les  Pvréiiées,  la  limite  de  la  Narbonnaise  était  occupée,  aux 
deux  extrémités,  par  les  SordoHfs  à  l'est  et  par  les  Constiarani  à  l'ouest,  sans 
que  !e  géograpbe  ait  fixé  le  point  qui  aurait  pu  leur  servir  de  limite  coui- 
luunc,  ni  mentionné  aucun  autre  peuple  dans  l'espace  qui  pouvait  les  séparer. 
llcsU'  à  savoir  si,  en  portant  au  cours  de  la  Garonne  les  limites  de  la 
Narbonnaise,  nous  demeurons  dans  les  données  géograpbiques  de  Pline. 
Or,  cet  auteur  se  borne  à  indiquer  les  monts  Gebenna  connue  une  des  limites 
de  cette  province,  dans  laquelle  il  place  d'ailleurs  les  Tolosani  sur  les  confins 
de  l'Aquitaine  :  «  A  rcliquù  vero  Galliâ  latere  septenitrionali  montibus 
Il  Gebenna  cl  Juia...  In  mediterraneo  coloniœ  :  Arelate  Sextanorum ,... 
«  Tolosani  Tcclosaçium  ,  Aquitania;  coulermini.  »  (Ibid.,  III,  îi.  )  —  H  n'y  a 
donc  rien,  dans  ce  (|uc  nous  avançons,  qui  ne  soit  pleinement  d'accord 
avec  le  dire  de  cet  écrivain,  et,  si  ces  raisons  sont  logi(|uenieiit  déduites, 
il  en  résulle  que  le  peuple  Consuaran  doit  être  dérinitivement  fixé  sur  la 
rive  droite  de  la  Ilaule-tiaroiine,  et  qu'on  ne  saurait  s'appuyer  sur  le 
témoignage  de  Pline  pour  le  placer  dans  le  Coiillent  ou  dans  toute  autre 
partie  du  département  des  l'yrénées-Orientales. 


95 

(le  ces  écrivains,  les  villes  d'Illibéris  et  de  Riiscino  se 
trouvaient  comprises  dans  le  pays  qu'ils  appelaient  (hiule 
ou  (\'llique\ 

<  Il  ii'csl  plus  (nipstion  du  peuple  Sorde  après  le  premier  siècle  de  l'ère 
cliréliennc,  cl  celle  ilisparilioii  du  nom  d'un  peuple,  qui  n'a  laissé  aucune 
trace  dans  le  pays  qu'il  a  occu|>é,  fait  iiailre  des  doules  assez  lé(;iliine!,  sur 
la  justesse  de  celte  dénomination.  On  observe  ,  en  effet,  qu'en  général ,  les 
noms  des  peuples  gaulois  de  la  période  romaine  se  sont  conservés  pendant 
tout  le  moyen-àjjc,  et  souvent  jusqu'à  nos  jours,  et  l'on  s'e\plii|ue  dilfici- 
'eiiienl  (|ue  des  noms  nationaux  aient  fini  par  disparaître,  lorsque  les 
l)euples  qui  les  portaient  n'ont  pas  été  complètement  détruits.  On  remarque, 
au  contraire,  que  les  noms  qui  lombenl  ainsi  en  oulili,  sont  souvent  des 
dénominations  arbitraires  on  purement  scientifiques,  qui  n'ont  jamais  été 
adoptées  par  les  peuples  auxquels  on  les  appliquait.  N'y  a-t-il  pas  aujour- 
d'hui, sur  divers  points  des  côtes  d'Afrique  et  d'Amérique,  des  noms  de 
peuple  imposés  par  le  caprice  des  navigateurs  et  dont  les  populations  ne  se 
doutent  même  pas?  Pourquoi  u'cn  serait-il  pas  de  uiéiiie  des  Sort/es .i* 

Les  premiers  navigateurs  grecs  qui  parcoururent  les  côtes  de  notre  terre 
de  Kyn  ,  y  trouvèrent  un  peuple  dont  le  nom  jiroprc  leur  était  inconnu. 
Ils  remurquètcnt  surtout,  dans  ces  parages,  un  phénomène  naturel  qu'ils 
entourèrent  de  prodiges  et  de  merveilles.  L'imagination  grecque  accumula  les 
fictions  sur  celle  fontaine  de  Salses,  qui  surgissait  à  l'entrée  du  Houssillon. 
Ce  nétaieul  que  contes  et  récits  surlcslagunesqui  l'entouraient,  les  iles  ilot- 
tautcs  qui  la  dérobaient  quelquefois  aux  regards  des  curieux,  et  les  poissons 
fossiles  que  le  trident  frappait  dans  les  cavités  de  ses  champs  suspendus. 
Les  indigènes  lui  donnaient  le  nom  de  Sorde,  ainsi  (|u'aux  marais  qui  l'avoi- 
sincnt.  C'en  fut  assez  pour  les  navigateurs  de  Massalie.  Ils  donnèrent  à 
toute  celte  cote  et  à  ses  liabilants  le  nom  de  cette  source,  dont  la  description 
tient  plus  de  place  que  tout  le  reste  du  pays  dans  les  ouvrages  des  géographes 
anciens.  Les  voyageurs  modernes  n'ont  pas  procédé  autrement,  pour  beau- 
coup de  pays  et  de  peui)les  découverts  dans  les  deux  derniers  siècles. 

Les  terminaisons  mêmes  (cespcs  SordiccHM.f,  gleba  Sordiccno  ,  stagnuni 
Sordifoi)  qui  sont  celles  de  l'adjectif  hellénique,  trahi.ssent  l'origine  et 
l'histoire  de  ce  nom,  et  tout  concourt  à  prouver  (jue  son  emploi  remanie 
au  moins  à  l'époque  des  Grecs  de  Massalie.  Mêla  et  Pline  rempruntèrent 
aux  écrits  des  géographes  qui  les  avaient  précédés  ;  mais  rien  n'indique 
que  les  habitants  l'aient  adopté,  car,  si  c'ertt  été  leur  nom  propre,  ils  l'au- 
raient conservé,.!  la  place  de  celui  de  pays  de  liuscino.  appli(|ue  depuis  plus 
de  onze  siècles  au  pays  dont  on  attribue  le  rivage  aux  anciens  Sordes. 

L'opinion  qui  ferait  veuir  ce  nom  d'une  colonie  do  Sardaignc  ne  pourrait 
s'appuyer  que  sur  la  leçon  de»  manuscrits  de  Pline,  qui   écrivent   Snrdnnfx 


96 


CER  RETANS. 


Il  est  facile  de  reconuaitre  le  peuple  cérélan  dans  ces 
Cérèles  et  Acrocêi'èles  qui ,  au  v^  siècle  av.  J.-C. ,  étendaient 
leurs  tribus  jusqu'aux  ctablissemenls  d'Empories(AviENUS, 
Ora  mar.,  v.  ooO)  '.  Ils  occupaient  alors  toute  la  ligne  des 
Pyrénées  orientales,  depuis  le  Sègre  jusqu'à  la  mer,  et 
s'étendaient,  au  pied  de  ces  montagnes,  dans  les  pays 
appelés  aujourd'hui  de  Berga,  de  Vich  et  de  Résalu. 
Il  n'y  a  aucune  difllcullé  à  admettre  une  communauté 
d'origine  pour  toutes  les  populations  du  versant  méri- 
dional des  Pyrénées,  dans  les  limites  que  nous  venons 
d'indiquer,  et  il  n'y  avait-là  que  des  peuples  d'origine  céré- 
tane  ou  ibérienne,  comme  le  dit  Aviénus,  d'après  les  écrits 
des  navigateurs  de  Massalie.  Quant  au  versant  septen- 
trional, correspondant  au  Roussillon ,  nous  avons  le 
témoignage  de  Slrabon ,  qui  trouvait  le  versant  espagnol 
des  Pyrénées  beaucoup  plus  boisé  que  celui  de  la  Celtique. 

le  nom  (|no  les  autres  écriv;iins  antéjicurs  écrivent  Sordones  et  Sorrfi.  Ce 
systétne  doit  sécrouli'r  et  dis|)arailrc  avec,  cette  fausse  leçon.  Nous  rejetons 
également  rétymologic  qui  ferait  dériver  ce  mot  d'une  colonie  de  Tyr, 
parce  qu'une  pareille  orijjiiic  ne  peut  s'appuyer  directement  sur  aucun 
témoijjnajje  positif  de  l'histoire,  et  surtout  parce  que  la  racine  phénicienne 
Tsor  ou  Tzour,  qui  est,  en  effet,  le  véritahle  nom  de  Tyr,  n'aurait  jamais 
pu  produire  le  dérive  Sori  par  les  règles  et  les  procédés  connus  des  langues 
sémitiques.  Le  témoifpiajjc  des  auteurs  anciens  subsiste  donc  tout  entier. 
D'après  eus  ,  le  peuple  appelé  Sorde  était  d'origine  celtibérienne  ,  et  c'est 
seulement  dans  les  débris  des  anciennes  langues  ibères  et  celtiipies  qu'il 
feindrait  chercher  l'origine  de  son  nom. 

'  Quelques  éditions  donnent  Aucocereles,  au  lieu  d'icroecreles,  qui  signifie 
en  grec  Cerélesdc-la-mnnlagne.  C'est  sans  doute  sous  ce  nom  que  les  connais- 
saient les  habitants  d'Empories;  et  comme  Aviénus  adopte  ordinairement, 
pour  les  noms  de  lieu.x  ,  les  traductions  et  les  terminaisons  des  écrivain» 
grecs  (|u'il  avait  consultés,  nous  ne  voyons  aucune  raison  pour  conserver 
la  le^-ou  iueneerelcs,  qui  n'est  probablement  qu'une  erreur  de  copiste. 


!)7 


«  Cepentlani,  ajoulait-il,  il  y  a  au  milieu  des  Pyrénées  des 
«vallons  pariaitfiinent  habitables,  qui  sont  peuplés  de 
«  Cerretans-Ibéiiens  '.  »  J)ans  la  pensée  de  Slrabon,  ces 
magnifiques  vallons,  (pii  contrastaient  avec  les  terres 
généralement  dénudées  du  reste  de  la  Gaule ,  au  milieu 
desquelles  ils  laisaient  exception,  ne  pouvaient  être 
compris  que  sur  le  versant  septentrional ,  et  ne  devaient 
s'entendre  que  des  hautes  vallées  de  l'Aude,  de  la  Tet  et 
du  Tech,  qui,  pendant  des  siècles,  ont  eu,  en  effet,  des 
souverains  communs  avec  la  Cerdagne,  et  bien  distincts 
de  ceux  qui  dominaient  sur  le  littoral  roussillonnais  '. 

Quant  aux  Atacini,  que  l'on  s'accorde  à  placer  vers 
la  partie  supérieure  du  cours  de  l'Aude,  ce  n'est  pas  un 
nom  de  peuple  proprement  dit,  c'est  une  manière  de  dési- 
gner les  populations  (pii  habitaient  sur  les  bords  de  cette 
rivière,  connue  on  appelait  .Surt/es  ceux  qui  se  trouvaient 
aux  environs  de  la  rivière  Sonie.  Dans  tous  les  cas,  cette 
dénomination  ne  pouvait  s'appliquer  qu'à  une  partie  infi- 
niment réduite  de  notre  province,  et  nous  nous  croyons 
fondé  à  conclure  que  le  peuple  Cérélau  est  le  seul  qui 

A:jrr/ç   ok  rr,ç   nupriv/jç  to    ^h    Ior;p£xov    -jrXs-jpov , 
£^SvjSpo-j ro  «5£  KeXtïxov  liùfrj.  'Vol  S\  ixigoi.    iurj-yi, 

Ksppy/rxJo':,    to   '::\(o-j   ro~i    lSoptxo~j   (p-j).o-j.    I.il,  |||. 

-  La  question  de  l'ori(;iiiL'  roivlaiif  îles  anciens  liabitanls  Ju  Confient  ne 
présente  aucune  diliiiiilté.  Quant  à  celle  des  |)i)|Uilatioiis  ilii  liant  Valles|)ii-, 
nous  avons  les  noms,  cucoïc  couscivés,  de  Ccrel  et  Saint-l.anrent-de-Ci^ii/rtiis. 
On  a  dit,  il  est  vrai,  dans  l'annuaire  de^Sô^l  :  «  0»  présume  que  ee  viliajje 
«  lut  une  lolonie  de  vassaux  cerdaf;nais,  transférés  des  sonnnités  de  la  l'erche, 
«  on  iNotre-Daine  de  Vallespir  avait  prieuré  et  hospice,  n  C'est  une  simple 
conjecture.  On  trouve  déjà,  dans  un  acte  du  18  août  l59'i  ,  Franeois  Itru- 
dada,  rectoT  Eccksie  Sancii- Lamcncii  de  Serdanis  (Arcli.  de  r!!o|).  de  IVrp  , 
plech  ô!(,  n"  '<  ) ,  et  on  ne  peut  voir  dans  celte  dénomination,  comme  dans 
celle  de  Cèrel,  que  des  souvenirs  de  l'ancien  peuple  Ctrélati  que  Strabon 
sii;i\alait  déjà  dans  ictle  valliT. 


98 

ait  été  désigné  par  les  anciens,  comme  ayant  réellement 
occupé  les  pays  du  département  actuel  des  Pyrénées- 
Orientales.  Dès  les  temps  les  plus  reculés,  il  en  avait 
peuplé  les  hautes  vallées  que  ses  descendants  occupent 
encore  aujourd'hui  sous  le  même  nom.  Nous  n'insisterons 
pas  davantage  sur  ce  point. 

E^îiuiteN  nutnrolloM. 

!.os  limites  naturelles  de  la  France  et  de  l'Espagne  sont 
aussi  anciennes  que  le  monde,  et,  s'il  n'y  avait  à  décider 
qu'une  simple  question  de  géographie  physique,  la  discus- 
sion ne  serait  ni  longue  ni  difficile.  Mais  la  limite  naturelle 
des  Pyrénées  a-t-elle  été  reconnue  comme  limite  politique 
dans  les  temps  qui  ont  précédé  la  visite  des  Grecs  ou  la 
domination  de  Rome?  On  peut  en  douter.  Rien  ne  prouve 
que  cette  limite  ait  été  reconnue,  durant  cette  période,  par 
les  peuples  qu'elle  concernait,  et  l'histoire  nous  montre, 
au  contraire,  des  populations  de  race  identique,  établies 
sur  les  deux  versants  des  Pyrénées  orientales.   Ces  mon- 
tagnes ne  furent  jamais  une  barrière  pour  les  populations 
ibériennes,  qui  ne  purent,  en  aucun  temps,  les  accepter 
comme  les  bornes  de  leurs  établissements.  Ne  voyons- 
nous  pas,  en  effet,  pendant  tout  le  moyen-âge,  les  Comtes 
de  la  Marche  hispanique,  à  cheval,  pour  ainsi  dire,  sur 
ces  montagnes  et  réunissant  sous  un  sceptre  commun  les 
pays  qu'elles  semblent  séparer?  Le  Roussillon  proprement 
dit,  soumis  aux  Comtes  d'Empories;  le  haut  Vallespir,  à 
ceux  de  Bésalu;   tandis  que  les  Comtes  souverains  de 
Cerdagne,  établis  aux  sources  du  Sègre,  du  Llobrégat  et 
du  Ter,  de  la  Tet,  de  l'Adesig,  de  l'Aude  et  même  de 
l'Ariége,  dominaient  sur  les  pays  de  Berga  et  de  Ribas, 
comme  sur  le  Confient  et  le  Capcir.  Voilà  les  choses  telles 
que  les  a  comprises  le  génie  des  populations  de  notre 
ancien  pays.  Et  ces  faits  parlent  assez  par  eux-mêmes.  Ils 


99 

ne  se  seraient  jamais  produits,  sans  les  causes  que  nous 
avons  indiquées,  et  qui  seules  ont  pu  les  faire  durer  presque 
jusqu'à  nos  jours.  Il  n'y  avait  donc  aucune  différence  d'ori- 
gine entre  les  Ibères  de  la  Catalogne  ou  du  Roussiilon,  et 
la  limite  des  Pyrénées  ne  fut  jamais  pour  eu.v  ipi'une 
fiction  de  la  politique  ou  de  la  littérature. 

liiniïtes  lii«s(ori<|neM. 

Cependant,  lorsque  les  contrées  occidentales  commen- 
cèrent à  être  mieux  connues,  les  historiens  et  les  géographes 
ne  tardèrent  pas  à  y  reconnaître  deux  races  distinctes,  quoi- 
que confondues  sans  doute  à  leur  point  de  contact,  qui  ne 
fut  jamais  bien  déterminé.  lisse  bornèrent  donc  à  diviser  le 
terriloiie  occupé  par  ces  deux  nationalités  en  deux  contrées 
distinctes,  celle  du  nord,  dont  ils  firent  la  Gaule  Transal- 
pine, et  celle  du  midi,  qui  forme  l'Espagne  ou  Ibérie.  La 
limite  des  deux  races  ne  pouvant  être  déterminée,  on  leur 
imposa  celle  des  Pyrénées,  qui  furent  censées  séparer 
désormais  la  Celtique  de  l'Ibérie ,  sans  tenir  compte  des 
Ibères  qu'on  laissait  au  nord  de  la  chaîne,  ou  des  peu- 
plades celtiques  qui  vivaient  encore  au  milieu  des  Ibères, 
comme  l'ont  reconnu  César  et  Strabon. 

La  limite  des  Pyrénées  eut  donc  une  existence  histo- 
rique dont  il  faut  tenir  compte,  et  c'est  à  ce  point  de  vue 
que  nous  allons  nous  en  occuper,  en  ce  qui  concerne  la 
partie  orientale. 

L'historien  Polybo  en  parle  le  premier,  à  propos  de  la 
seconde  guerre  punique;  mais  ce  n'est  guère  à  ses  yeux 
qu'une  simple  htnrilre  naturelle,  qui  s'étend  depuis  la 
Méditerranée  jusqu'à  la  mer  extérieure*. 

ll-jpyjvatojv  opôiv,  a.  Starîivei  xotra  to  cjve^^cç  àiro  -f/; 
iS-noaç   xix:    Kr/TO-jç.    Pmvn.,  lib   III.  3.«i  n  39 


too 

Strabon,  Mêla,  IMine ,  donnonl  eiisuile  la  chaine  des 
Pyrénées  comme  la  limite  de  la  Gaule  et  de  l'Espagne,  et 
Silius  Italicus  y  a  trouvé  matière  à  trois  vers  excellents, 
où  il  consacre  un  mensonge  historique,  en  désignant  les 
Pyrénées  comme  la  limite  cterneUc  des  Celtes  et  des  Ibères, 
qui  ne  l'ont  respectée  en  aucun  temps  : 

Pvrenc  ccls;i  nimbosi  veiticis  arce 

Divises  CcUis  latè  prospectât  Iberos, 

Atiriie  nnterna  tenet  inajjnis  divortia  triris.    (l.ib.  III,  'H"  cts.].) 

Nous  l'avons  déjà  dit,  la  limite  des  Gaules  et  de  llltérie 
suivait  anciennement  la  chaîne  des  Pyrénées.  Elle  est  fa- 
cile à  suivre  sur  toute  sa  longueur,  et  c'est  seulement  à 
l'extrémité  orientale  et  au  voisinage  de  la  mer  Méditer- 
ranée que  commencent  les  incertitudes  ou  les  variantes  ; 
car  les  auteurs  anciens  indiquent,  pour  la  limite  extrême 
sur  la  Méditerranée,  deux  lieux  différents  qu'il  inqiorte 
de  reconnaître  exactement. 

Strabon  signale  le  désaccord  qui  existait  déjà  sur  ce 
point  parmi  les  écrivains  de  son  temps  i  où  yap  oaoXoyî'rcci). 
On  désignait  alors  deux  endroits  pour  cette  limite ,  et  il 
parait  se  ranger  à  l'opinion  qui  la  mettait  au  Temple 
d'Aphrodite,  correspondant  au  cap  Biar  ;  Ptolémée  adoptr 
aussi  cette  limite ,  sans  faire  mention  d'aucune  autre. 

Selon  d'autres  écrivains,  dont  Strabon  rapporte  l'opi- 
nion, la  limite  des  Gaules  se  trouvait  lixée  aux  Trophées 
de  Pompée,  situés  sur  la  route  qui  conduisait  d'Italie  en 
Espagne.  C'est  l'opinion  que  Pline  a  adoptée,  et  il  dit, 
à  deux  reprises  différentes,  que  les  Trophées  de  Pompée 
étaient  situés  sur  les  limites  (fines)  de  l'Espagne  ultérieure' . 
Enlin,  Mêla  ne  parle  point  des  Trophées  de  Pompée; 
mais    il  se  sert  de  la  même  expression    que  Pline;  il 

'  Tioph.Tis  suis  quic  slaliiebal  in  PynMi.rn  ..  ad  fines  lliapanitr  iiltoriuris 
(Hist.  Vur,  liv.  III,  5  et  VII,  2(i.) 


e 


101 

indique  le  lieu  de  Cervaria  comme  la  limite  de  la  Gaule 
(finis  Galliœ),  et  nous  espérons  prouver  plus  loin  que  ce 
lieu,  facile  à  reconnaître  encore  aujourd'hui,  correspond 
exactement  à  celui  qu'indiquent  Pline  et  Strabon,  sous  le 
nom  de  Trophées  de  Pompée.  Le  cap  de  V Aphrodision  et 
Cervaria  sont  les  seuls  points  signalés  ponr  notre  limite; 
mais  on  ne  peut  hésiter  h  adopter  le  second.  Les  Trophées 
de  Pompée  ou  l'anse  de  Cervern,  voilà  donc  le  lien  que 
les  Romains  avaient  adopté  pour  la  limite  de  la  Gaule  et 
de  rihérie;  c'est  celui  qui,  de  tout  temps,  a  borné  le 
territoire  de  Banyuls-sur-Mer,  et  qui  sépare  encore  au- 
jourd'hui la  France  de  l'Espagne. 

■^Imites  et  di«'i«iuu^  g>arlâculierc«  «Iok  itciipleM 
de  l'anvie»   KoufthiEEuit. 

Nous  avons  dû  nous  borner  à  indiquer  la  limite  poli- 
tique (dans  le  sens  historique  du  mot^  de  l'ancienne  Gaule 
et  de  ribérie  :  à  ce  point  de  vue,  il  y  a  des  données  assez 
précises,  qu'il  n'était  pas  inutile  de  reconnaître.  Quant  aux 
limites  ethnographiques  des  Golls  et  des  Ibères,  ce  serait 
peine  perdue  que  d'en  rechercher  le  moindre  indice  dans 
la  province  roussiilonnaise.  Il  ne  serait  guère  plus  utile  de 
chercher  les  limites  géographicpies  des  anciens  Cerétans 
et  des  Sordes,  ou  des  autres  peuples  de  la  même  famille 
qui  ont  pu  s'établir,  sous  divers  noms,  dans  ce  pays;  car 
tout  le  monde  sait  que  les  peuplades,  plus  ou  moins 
indépendantes,  fixées  dans  nos  vallées,  étaient  souvent 
désunies  par  la  passion  ou  par  des  intérêts,  dont  il  se- 
rait impossible  de  suivre  les  vicissitudes.  Tout  porte  donc 
à  croire  qu'au  voisinage  des  Pyrénées,  par  un  phénomène 
encore  saillant  de  nos  jours,  les  mœurs  étrangères  et  indi- 
gènes se  confondaient  et  se  mêlaient  comme  les  races. 
Nous  avons  vu,  il  est  vrai,  certaines  caries  d'amateurs, 
qui  placent  chacun  de  nos  |ieuples  dans  des  espaces  bien 


10-2 

déterminés,  couverts  de  noms  de  villes  et  de  villages,  et 
M.  Henry',  entre  autres,  a  suivi  de  point  en  j)oint,  avec 
toute  la  précision  de  la  topographie  moderne  et  sans  autre 
guide  que  son  imagination,  les  prétendues  limites  des 
Sordes,  des  Consuarans  et  des  Indigètes,  qu'il  avait  jugé 
à  propos  d'établir  dans  l'ancien  Roussillou.  Ce  sont  des 
tours  de  force  que  nous  n'avons  pas  le  courage  de  tenter. 
Les  auteurs  anciens  n'ont  absolument  rien  dit  à  ce  sujet; 
ils  n'ont  indiqué  nulle  part  les  limites  des  Sordes  et  des 
Cérétans,  en  admettant  qu'il  en  existât  entre  eux,  ni 
celles  qui  pouvaient  les  séparer  des  autres  peuples  établis 
sur  les  bords  de  l'Aude.  On  ne  saurait  donc  trouver  mau- 
vais que  nous  laissions  cette  question  dans  la  profonde 
obscurité  qui  peut  seule  la  caractériser,  et  que  nous 
nous  arrêtions  aux  limites  que  l'histoire  elle-même  s'est 
imposées. 

Lorsque  l'ancien  Roussillon  passa  sous  la  domination 
de  Rome,  il  ne  pouvait  exister  que  des  divisions  essen- 
tiellement variables  entre  les  peuples  qui  l'occupaient; 
car  les  races  étaient  confondues,  et  leurs  intérêts  poli- 
tiques variaient  incessamment.  Les  limites  politiques  ou 
géographiques  n'ont  pas  grande  valeur  dans  l'état  de  bar- 
barie; il  n'y  a  de  divisions  réelles  et  nettes  que  celles 
qui  répondent  aux  besoins  d'un  service  civil,  judiciaire, 
censitaire  ou  religieux,  et  ces  divisions  lixes  ne  purent 
être  créées  dans  ce  pays  qu'à  l'époque  où  Rome  fonda  son 
administration  provinciale  avec  des  pouvoirs  circonscrits. 
Malheureusement  nous  ignorons  complètement  ce  qui  put 
être  fait  à  cet  égard  dans  l'ancien  pays  de  Ruscino, 
pendant  toute  la  durée  de  l'Empire  Romain;  et  cette  ville 
n'ayant  pas  joui  du  titre  de  cité,  tout  semblerait  indiquer 
que,  sous  le  rapport  administratif,  l'ancien  Roussillon  fut 
une  simple  dépendance  de  la  cité  de  Narbonne. 

'   lltfl    de  RvusM..  lo    II,  p.  ()06. 


103 

Le  titre  de  cile  seul  ne  nous  apprendrait  rien  d'ailleurs 
sur  les  limites  politiques  que  nous  .cherchons;  car  la 
cité  romaine  était  morcelée  d'une  foule  d'enclaves,  sans 
territoires  (ixes.  C'était  l'idée  de  propriété  qui  dominait 
dans  le  système  municipal  de  Rome ,  et  nous  voyons  des 
cités  posséder  des  domaines  fort  éloignés  de  leurs  murs. 
Leur  territoire  ne  fut  irrévocablement  limité,  dans  les 
Gaules ,  qu'à  l'époque  où  les  villes  devinrent  le  centre  de 
la  surveillance  épiscopale  et  de  l'administration  ecclésias- 
tique. Enfin ,  on  n'est  point  assuré  de  la  transmission 
exacte  du  territoire  des  cités  à  l'autorité  épiscopale  du 
ixc  siècle,  et  nous  avons,  en  Lombardie,  trois  anciennes 
cités  romaines,  qui  n'ont  formé  que  deux  diocèses*.  Quant 
au  diocèse  d'Elne,  les  premiers  titres  certains  que  nous 
possédions  sur  son  étendue  ne  remontent  qu'au  ix''  siècle, 
et  pendant  les  trois  cents  ans  qui  ont  précédé  ces  docu- 
ments, sommes-nous  sûrs  qu'il  n'y  ait  eu  aucun  rema- 
niement, aucun  changement,  aucune  suppression?  Ainsi 
donc,  en  résumé,  y  aurait-il  eu  au  iv<^  siècle  une  ville  du 
Roussillon  portant  le  titre  de  cilé^,  qu'il  serait  encore 
téméraire  de  décider  que  son  territoire  soit  exactement 
représenté  par  celui  de  l'ancien  diocèse  d'Elne;  à  plus 
forte  raison  serait-il  difficile  d'affirmer  que  ce  territoire 
représentât  l'étendue  et  les  divisions  des  anciennes  po- 
pulations de  Sordes  ou  Cérétans  qui  avaient  occupé  ce 
pays. 

Il  est  cependant  une  ancienne  division  romaine  qui  a 
pu  subsister  presque  intacte,  en  raison  même  de  son  peu 
d'importance;  c'est  celle  des  cités  en  pagi.  Le  pagus  était 

'  Emile  Desjardins,  AUsia.  ^8o8. 

^  f-e  diocèse  d'EInc  ne  fut  érige  que  dans  le  cours  du  vi'  siècle  ,  et  la 
date  seule  de  ccUe  fondation,  dont  les  causes  sont  d'ailleurs  inconnues, 
prouve  que,  dans  l'époque  antérieure  ,  aucune  vilU  du  Uoussillon  n'avait 
^lé  décorée  du  nom  do  cilé. 


104 

uno  osi>»'C('  (le  caiilcui,  ayant  sous  l'Enipin;  Romain  ',  ses 
magistrats  connus  sous  les  noms  de  pirfds  (»u  (■((iles  du 
Pagtfs,  investis  d'attributions  clairement  délinies  par  le 
code  théodosien.  Le  pagus  n'a  guère  varié  d'étendue  pen- 
dant le  moyen-âge;  nous  le  retrouvons,  avec  ses  anciennes 
limites,  jusqu'au  xviic  siècle,  dans  nos  anciennes  Vigucrics 
administratives  et  surtout  dans  les  Viran'ats  ou  Drccntats 
de  l'ancien  diocèse  d'Elne,  petites  métropoles  paroissiales, 
reste  de  ces  vicariati  ou  divisions  baptismales  des  pre- 
miers temps-,  qui  représentaient  assez  exactement  les 
anciens /)rtr/^  des  cites.  C'est  donc  le  payiis  romain  qui  a 
subsisté  et  qui  pourrait  se  retrouver  en  principe  dans  les 
vicariats,  et  non  la  cité  dans  le  diocèse. 

Les  pagi  du  territoire  actuel  des  Pyrénées-Orientales, 
sont  connus,  dès  le  ix^  siècle,  sous  les  dénominations 
suivantes  : 

1°  Le  pagus  IJvieusis'',  partie  de  la  Cerdagne  et  du  pays 
de  Livia,  aux  sources  du  Sègre,  dans  l'ancien  diocèse 
d'Urgel  ; 

2»  Le  pagïis  Redensis*  ou  fit'f/dt'jm^  (Razès),  s'étendanl 
jusqu'aux  sources  de  l'Aude,  comprenait  le  pays  connu, 
plus  tard,  sous  le  nom  de  Capcir,  qui  fit  d'abord  partie 
du  diocèse  de  Narbonne; 

'  Au  temps  de  César,  les  Gaulois  habitaient  de  grands  villages  ou  de» 
cités  fortiRées.  Le  territoire  de  ces  habitations  agglomérées  formait  une 
division  géographique,  (jue  les  Romains  ont  conservée,  en  donnant  à 
roiu'ii'ii  nom  gaulois  une  désinence  latine  (pagus). 

-  On  sait  que  le  baptême,  dans  la  primitive  organisation  de  l'Eglise, 
ne  pouvait  être  administre  que  par  les  archiprêtres  ayant  sous  leurs  ordres 
plusieurs  paroisses. 

■'  Ou  trouve  le  suhurbium  Liviense ,  dans  une  iliaile  de  Tan  S78. 
fllarca,  Il .  ) 

"*  l.e  pagus  Reddensis  est  connu  des  Tan  7SS.  (Gallia  Christiana,  tonu- 
VI,  page  2.) 


lor. 

5"  Le  pagu^-  Ffiioliclousis'-^  ou  Fonalii'leiists,  bassin  su- 
périeur (le  1  Agli,  était  aussi  compris  dans  l'ancien  diocèse 
(le  Narbonne  ; 

io  Le  pagm  Confliicntis  ou  Conflmnlanus,  bassin  supé- 
rieur de  la  Tel  ; 

5°  Lepagiis  ou  vallis  Asperiij  s'étendait  dans  les  bassins 
supérieurs  du  Tech,  du  Réard  et  du  Boules; 

6°  Le  pagus  Ruscinonensis  ou  Rossolionemù,  comprenait 
toute  la  plaine  ou  partie  inférieure  de  nos  trois  cours  d'eau, 
entre  les  Corbières,  la  mer  et  l'Albèra. 

Ces  trois  derniers  pays  formaient  l'ancien  diocèse  d'Elne. 

Rien  n'empêche  de  croire  ([ue  ces  divisions  territoriales 
existaient  d(''jà  sous  l'Empire  liomain;  mais  nous  sommes 
loin  de  prétendre  qu'elles  eussent  dès  lors  les  mêmes 
noms  et  les  mêmes  limites,  et  surtout  nous  nous  gar- 
derions bien  de  les  inscrire  sur  une  carte  historique  de  la 
Gaule  romaine.  Si  nous  les  indiquons  ici ,  ce  n'est  que 
pour  prémunir,  dès  ce  moment,  contre  l'erreur  trop  sou- 
vent admise,  que  l'étendue  de  ces  divers  pays  n'aurait 
jamais  varié,  et  qu'elle  était,  dès  le  ix^  siècle,  telle  qu'on 
la  voyait  encore  en  17S0.  Il  est  bien  vrai  cpie  les  limites 
du  diocèse  d'Elnc  n'ont  i)oint  varié  pendant  cette  période, 
et,  par  conséquent,  la  frontière  de  la  Cerdagne  et  du  pays 
de  Fonollet  a  dû  rester  la  même  a  l'égard  du  Confient  et  (lu 
Roussillon.  Quant  h  l'étendue  du  Confient  et  du  Vallespir, 
elle  a  subi,  dans  le  cours  des  siècles,  des  variations  qui 
ne  semblent  pas  avoir  été  sullisamment  étudiées  jusqu'ici 
et  sur  les({uelles  les  documents  historiques  peuvent  seuls 
jeter  quelques  lumières.  Cette  question,  qui  est  une  des 
plus  importantes  de  la  géographie  historique  de  l'ancien 
Roussillon,  fera  l'objet  d'une  dissertalion  particulière. 

•  On  Iroiivc  Ir  pagus  FeimUlus  di-s  Tan  S'ri.  (Histoire  de  l.augucdoc , 
tome  I",  |iiciiv.  ,Sf>.  ) 


106 


Villen,   Por(«i,  CliAt«auK  et  Mutr««i  lleum.  du  Uous- 
«lllon  cités  par  les  auteiirn  anciens. 

RDSCINO   (CASTELL-ROSSELLÛ). 

Si  l'on  admettait  le  système  de  M.  Puiggari   sur  les 
établissements  des  Phéniciens,  la  fondation  de  Ruscino 
remonterait  au  moins  au  xi^  siècle  avant  notre  ère,  à 
l'époque  où  le  commerce  de  Tyr  semble  avoir  pris  la  plus 
grande  extension  dans  la  partie  occidentale  de  la  Médi- 
terranée'.  Malheureusement,  comme  nous  l'avons  déjà 
dit,  l'histoire  ne  nous  apprend  absolument  rien  sur  les 
prétendus  établissements  phéniciens  de  l'ancien  Hous- 
sillon.  Les  géographes  grecs,  Skymnos  et  Skylax,  gardent 
le  silence  le  plus  complet  sur  la  ville  de  Ruscino;  seur 
lement,  Aviénus  ayant  mentionné  le  fleuve  Roschnim, 
qui,  selon   tout   apparence,  ne  devait  ce  nom  qu'à  la 
ville  dont  il  baignait  les  murs,  on  peut  en  conclure  que 
Ruscino  existait  déjà  vers  le  vi^  siècle  avant  Botre  ère. 
Ce  nom  se  montre,  pour  la  première  fois,  dans  le  récit 
(les  événements  de  la  seconde  guerre  punique ,  l'an  218 
avant  Jésus-Christ.  Suivant  Tite-Live  (hb.  XXI,  c.  20), 
pendant  qu'Annibal  se  disposait  à  franchir  les  Pyrénées, 
les  ambassadeurs  romains,  chargés  de  lui  susciter  des 
ennemis  sur  sa  route ,  ayant  échoué  dans  leurs  négocia- 
tions avec  les  Espagnols,  passèrent  dans  la  Gaule ,  et  se 
présentèrent  à  Ruscinon  devant  les  Gaulois,  qui,  suivant 
leur  usage,  étaient  venus  tout  armés  à  l'assemblée.  On 
sait  quels  éclats  de  rire  et  quels  murmures  d'indignation 
éclatèrent  parmi  les  jeunes  guerriers,  lorsque  les  députés 
leur  proposèrent  d'attirer  la  guerre  sur  leur  pays,  pour 
l'empêcher  de  passer  eu  Italie,  et  pour  servir  la  querelle 
de  Rome  contre  ses  ennemis.  Toutes  les  sollicitations 

'  Ruxr.inn,  par  ^I.  Piiiffgari,  dans  le  Pubikaleur,  II'  aiinéf,  n"'5,  'i  el  '6. 


107 

furent  inutiles,  et  Annibal  vint  camper  suiis  les  tiiurs 
d'Illiheiis  (EInej,  après  avoir  opéré  sans  dilficulfé  le  pas- 
sage des  Pyrénées.  Cependant,  la  crainte  de  la  servitude 
avait  fait  prendre  les  armes  à  plusieurs  peuplades  de  la 
Gaule,  qui  se  rendirent  à  Ruscinon,  et  Annibal,  qui 
craignait  plus  de  perdre  un  temps  précieux  que  de  com- 
battre de  tels  ennemis,  envoya  aux  cliels  une  députation, 
pour  leur  demander  un  entretien.  Ses  démarches  eurent 
un  plein  succès.  «  Après  ces  négociations,  les  petits  rois 
<f  de  ces  contrées  vinrent  dresser  leurs  lentes  [très  d'Illi- 
«  béris  et  entrèrent  sans  crainte  dans  celles  des  Cartha- 
«  ginois.  Des  présents  achevèrent  de  les  gagner,  et  ils 
«  laissèrent  l'armée  traverser  tranquillement  leur  pays,  le 
«  long  des  murs  de  Ruscinon.  »  (Tite-Live,  1.  XXI,  c.  24.) 

Nous  n'avons  pas  d'autres  détails  sur  la  ville  de  Rasciiio 
pendant  la  période  qui  précéda  la  con(iuète  romaine;  mais 
certaines  circonstances  du  récit  de  Tite-Live,  telles  que  la 
réimion  des  chefs  du  pays,  et  l'arrivée  des  ambassadeurs 
de  Rome  à  Ruscinon,  démontrent  l'importance  de  cette 
ville  à  cette  époque ,  et  le  rôle  qu'elle  joue  à  cette  oc- 
casion, lui  assigne  évidemment  le  titre  de  capitale  du 
pays. 

L'antique  importance  de  l'oppidum  de  Rmcino  et,  sans 
doute  aussi,  sa  situation  topographique,  le  tirent  choisir 
comme  centre  des  établissements  et  de  l'administration  des 
Romains  dans  ce  pays,  lorsqu'il  passa  sous  leur  domination 
(118  av.  J.-C).  Polybe,  Strabon,  Ptolémée  et  Tite-Live 
lui  conservent  alors  le  litre  de  ttoAjç  ou  d'oppidum; 
Mêla  y  ajoute  celui  de  Colonie,  et  Pline,  qui  écrivait  son 
Histoire  Naturelle  peu  de  temps  après  l'avènement  de 
Vespasien,  se  contente  de  l'appeler  Ruscino  Latinoruni 
(lib.  III,  c.  4).  On  a  cru  voir  une  dill'érence  notable,  et 
même  une  contradiction,  entre  le  titre  de  Colonie  et  la 
jouissance  du  Droit  de  Latinité  mentionnée  par  Pline. 
Cependant,  le  droit  de  cité  romaine  et  de  latinité  était 


108 

venu  dans  la  Narbonnaise  par  les  colonies,  el  l'on  sait  (|ue 
les  colonies  fondées  j)ar  les  Romains  étaient  composées, 
tantôt  de  cives  romani,  militaires  ou  non,  tantôt  de  Latins, 
tantôt  d'autres  races  d'hommes'.  Or,  dans  ces  cas  divers, 
les  colons  communiquaient  à  leur  patrie  nouvelle  les  qua- 
lités juridi(|ues  qu'ils  apportaient  de  leur  patrie  ancienne. 
Il  n'y  a  donc  aucune  contradiction  dans  le  dire  des  deux 
géographes  romains,  et  l'on  comprend  que  la  Colonie  de 
Ruscino  ait  pu  se  composer  de  Latins,  jouissant,  à  ce  titre, 
du  Jus  Laiii  qui  laissait  aux  cités  leur  libre  autonomie, 
avec  la  faculté  d'y  renoncer  pour  prendre  la  loi  romaine 
elle-même ^  Quant  à  l'autonomie  des  villes  latines,  elle 
avait  pour  base  une  constitution  civile  et  communale  ana- 
logue a  la  constitution  romaine.  C'est  tout  ce  que  nous 
pouvons  en  dire  ici,  le  sol  de  Ruscino  n'ayant  encore 
fourni  aucune  inscription  qui  puisse  donner  le  moindre 
éclaircissement  sur  ses  magistratures  et  leur  exercice, 
sur  son  culte  religieux,  ou  sur  ses  pratiques  civiles. 

Un  silence  profond  se  fait,  à  partir  de  celle  époque, 
dans  les  annales  de  notre  ville,  dont  le  nom  ne  figure 
plus  que  sur  les  Itinéraires  romains.  Les  Notices  Impé- 
riales du  ye  siècle  n'en  font  aucune  mention;  le  récit  de 
l'expédition  de  Wamba  garde  le  même  silence,  et  les 
documents  de  la  période  Wisigothique,  qui  citent  encore 
son  nom,  le  présentent  sous  la  forme  corrompue,  qui 
devait  prévaloir  ]»endant  le  moyen-âge,  el  se  conserve 
encore  aujourd'hui  dans  le  nom  de  la  province''.  En  801, 

'  lllud  aj|iUibant((lit  (|uelqiie  part  Tilc-Live),  utrimi  lalinain  an  civinm 
roiiiauoruin  deduti  placcrcl,  postrciiio  lalinam  potiiis  coloiiiam  dcducendam 
Patres  censucruiit. 

-  C'est  re  (|iic  nous  apprend  Cicéron ,  pro  Balbo ,  §  8. 

'^  Le  géographe  anonyme  de  Ravenne,  qui  l'appelle  nuscinone,  au  iiv.  V, 
scct.  3,  l'appclh;  liuscilonc ,  au  Iiv.  IV,  sert.  8.  La  division  des  diocèses 
\Yisigolhi(|ues  Tappcllp  nnsinola  ,  sans  doute  pour  Rosilona.  (Uist.  rer. 
Franc,  lo.  Il .  p   719.) 


109 

le  roi  l.ouis,  lils  de  Cliaileinagne,  s'etablil  avec  un  corps 
d'armée  à  Ruscellio',  pour  y  attendre  l'issue  du  siège  de 
Barcelone,  et  une  charte  de  l'an  8J6  prescrit  le  dépôt  d'un 
décret  impérial  à  Ro.sciliona-.  A  partir  de  cette  époque, 
on  ne  trouve  plus,  à  la  place  de  l'ancien  o})pi<hmi  (pii  a 
transmis  son  nom  à  la  province ,  qu'un  simple  castcllum 
ou  castrum  Rossilionis,  autour  duquel  se  groupèrent 
quehpies  manses  chétives;  et  le  donjon  de  ce  manoir 
féodal  se  voit  encore  à  trois-quarls  d'heure  environ  à 
l'est  de  Perpignan.  Il  ressort,  évidemment,  des  textes 
que  nous  venons  de  relater,  que  la  ville  de  Uiisrino  a 
subsisté  sans  interruption  jusqu'aux  premières  années  du 
ixe  siècle;  son  importance  seule  a  dû  varier  et  décroître 
longtemps  avant  Tépoque  carlovingienne,  et  l'on  peut 
admettre,  pour  cette  ville,  une  décadence  rapide,  qui 
commença  peut-être  avant  la  chute  de  rEmi)ire  Uomain. 
Pourquoi  Ruscino  lut-elle  délaissée,  et  comment  Kliberis 
parvint-elle  à  lui  ravir  son  importance  et  son  titre  de 
capitale  du  pays?  Rien  ne  le  dit  et  nul  ne  le  sait.  On  a 
supposé  diverses  catastrophes,  dont  il  n'est  question  nulle 
part  dans  les  auteurs  contemporains,  et  nous  ne  voulons 
rien  ajouter  aux  conjectures  assez  nombreuses  qui  ont 
été  laites  à  ce  sujet,  et  que  rien  n'est  venu  confirmer 
jus(pi'ici.  Rornons-nons  à  jeter  un  coup-d'œil  sur  les  lieux 
où  quehpu'S  débris  iiisigniliants  marquent  encore  la  place 
de  Ruscino. 

Sur  la  rive  droite  de  la  Tel,  et  i)arallèlement  au  cours 
de  cette  rivière,  s'élève  un  rideau  de  collines  qui  courent 
de  l'ouest  à  l'est,  depuis  Perpignan  jusqu'aux  environs  de 
(lanet,  et  lorment  l'extrémité  dun  plateau  assez  uni,  qui 

'  Uiiam  ({uidi'in  Kiiscelliuiii  ipse  ^t-rinanoiis  secuin  rttmuii.  \ita  l.uduvici 
va  imjHrat.,  aiiclore  Astroiiom.   \ô. 

'^  l.iuiin  iii  Narboiia ,  iilteiuiii  in  t'.iircassoiia ,  Icitiimi  mi  lldsciliona , 
<|uai'lmn   iii  l'jii|Miiiis. . .    liabni   |)r,iH(|)imiis  (  Hai.dz.   Capititlar..   loiuo  1 , 


no 

s'étend  jusqu'au  Réard.  Quelques  ravinements,  creusés 
par  les  pluies,  ont  déchiré,  de  distance  en  dislance,  la 
face  septentrionale  de  ce  talus,  qui  forme  ainsi  une  suite 
de  mamelons,  d'une  défense  facile  et  d'une  bonne  expo- 
sition pour  l'assiette  d'une  cité.  La  ville  de  Ruscino 
occupait  la  croupe  d'un  de  ces  coteaux,  qui  s'élève  entre 
deux  ravinements  ouverts  à  l'est  et  à  l'ouest,  et  se  ter- 
mine brusquement,  au  nord,  par  une  pente  rapide.  Le 
ravinement  de  l'ouest  est  moins  profond  que  celui  de  l'est, 
qui  se  développe  sur  deux  cotés  de  l'ancien  oppidum,  et 
se  rapproche  du  premier  ravin ,  à  son  origine  ;  il  semble 
même  lui  avoir  été  uni,  à  une  certaine  époque,  par  un 
fossé  ouvert  par  la  main  des  hommes,  pour  compléter 
l'isolement  de  la  ville,  au  milieu  du  plateau  qui  l'entoure 
de  trois  côtés. 

Le  sol  de  Ruscino  s'avance  donc  du  sud  au  nord-est, 
dans  la  direction  de  la  Tet  et  en  s'exhaussant  légèrement, 
de  sorte  que  la  partie  la  plus  élevée  se  trouve  au  point 
occupé  aujourd'hui  par  l'église  et  la  tour  de  l'ancien 
château.  L'espace  ainsi  circonscrit  est  depuis  longtemps 
livré  à  la  culture;  mais  le  sol  n'en  est  pas  parfaitement  uni. 
Il  est  même  facile  d'y  reconnaître,  outre  le  premier  fossé 
déjà  mentionné,  deux  autres  dépressions,  qui  vont  aussi 
d'un  ravin  à  l'autre,  et  sont,  peut-être,  les  seules  preuves 
encore  existantes  des  décroissances  successives  de  Rus- 
cino, qui  rétrécissait  son  enceinte  à  mesure  que  son  im- 
portance diminuait,  et  finit  par  se  trouver  acculée  au  nord, 
dans  l'espace,  de  plus  en  plus  étroit,  d'un  manoir  féodal. 

«  Que  nous  reste-t-il  de  l'antique  splendeur  de  cette 
«  cité?  Ses  dernières  ruines  même  achèvent  de  dispa- 
«  raître;  car  la  tour  est  du  moyen-âge.  Des  vestiges  de 
«  constructions,  des  débris  de  poterie,  des  médailles... 
«  voilà  à  peu  près  tous  les  souvenirs  que  son  sol  ofTre, 
«  parfois,  sous  le  fer  qui  le  sillonne  ou  qui  le  creuse'.  » 

'  PoiGGAKi.  Publicateur,  année  ^855,  n°  4. 


Itl 

Les  découvertes  faites  jusqu'à  ce  jour,  n'auraieiii  dimi- 
nué en  rien  les  regrets  que  M.  Puiggari  exprimait  en  1833; 
mais  on  peut  répéter,  avec  M.  Henry,  que  tous  ces  ter- 
rains sont  encore  vierges  d'explorations  régulières  et 
suivies  :  et  des  richesses  archéologiques  reposent  sans 
contredit  sous  la  terre  qui  couvre  les  restes  de  Ruscino. 


n.MBKRIS  — nELE?(\  (ELSE.) 


L'origine  d'illlberis  ne  serait  guère  moins  ancienne 
que  celle  de  Ruscino,  si  l'on  s'en  rapportait  à  l'opinion 
de  M.  Puiggari,  qui  n'hésite  pas  à  voir  un  nom  phéni- 
cien dans  Illibcris  [Ili  et  Beris,  pour  berithj,  et,  dans  notre 
antique  cité,  une  des  nombreuses  fondations  du  peuple  de 
Tyr  (Mot ires  sur  Elue).  Nous  avons  déjà  exposé  les  raisons 
qui  s'opposent  à  l'adoption  de  ce  système,  et  Voppidum 
à'Jlliberis  demeure,  pour  nous,  une  fondation  ibérienne, 
plus  moderne  peut-être  que  celle  de  Ruscino,  si  toutefois 
son  nom  do  ville-nouvelle  (IlU-hcni,  en  hngue  euscuara) 
doit  s'entendre  de  son  origine,  par  rapport  à  sa  rivale  des 
bords  de  la  Tet. 

Le  nom  à'Illiberis  se  trouve,  pour  la  première  fois,  dans 
Tite-Live,  qui  rapporte  qu'Annibal  campa  sous  ses  murs, 
après  avoir  passé  les  Pyrénées,  218  ans  av.  J.C.  C'était 
sans  doute  alors  cette  ville  opulente,  dont  le  souvenir  se 
conservait  encore  trois  siècles  plus  tard.  Sous  la  domi- 
nation romaine,  Polybe,  Strabon  et  Ptolémée  semblent 
lui  donner  encore  une  certaine  imjjortance  et  la  mettre 
sur  la  même  ligne  que  Ruscino.  Cependant,  dès  l'époque 
d'Auguste,  Mêla  n'en  parle  que  comme  d'une  petite  bour- 
gade, qui  ne  conservait  qu'un  faible  vestige  de  sa  splen- 
deur et  de  son  opulence  passées'.  Pline  s'exprime  à  peu 

'  Colonia  Ruscino:  viens  Eliberri,  iiiagnic  (|Uonilaiii  urbis  ol  ina(;norum 
opiim  tenue  vcsligium  (Pomp.  Mêla,  liv.  II.  c.^i).  Oppida  :  Iliiberis,  inagu.'P 
^uondnni  urbis  tenue  veslif^ium;  Ruscino  Laiinorum  (PuNE,  III,  4V 


112 

près  il»'  iiième.   Bien  des  conjeclures  ont  été  faites  pour 
expliquer  cette  décadence ,  et  l'on  a  inviginé  des  catas- 
iroplies  sur  lesquelles  les  auteurs  anciens  ne  fournissent 
aucune  indication.  Toutes  les  suppositions  sont  possibles 
à  cet  égard;  mais  on  n'en  ignore  pas  moins  aujourd  hui 
les  causes,  les  circonstances  et  la  date  de  cette  déca- 
dence, qui  ne  fit  sans  doute  qu'empirer  sous  la  domina- 
lion  des  Romains,  dont  les  faveurs  se  reportaient  natu- 
rellement sur  leur  flahlissement  de  Ruscino.   lUibcris, 
traversée  par  la  voie  romaine  qui  conduisait  de  Narhonne  à 
Barcelone,  figure  encore  dans  la  Table  dite  de  Peutinger 
(vers  l'an  2ob),  sous  son  nom  ibérien  (llliberre)  qui  dis- 
parait complètement,  depuis  cette  époque,  pour  faire  place 
à  celui  d'Iklena,  syncopé  par  la  suite  en  llcliia  ou  Elna. 
«  Nous  ne  pouvons  déterminer  au  juste  le  temps,  l'occa- 
«  sion  ni  l'auteur  de  ce  changement.  On  peut  bien  croire 
«  toutefois  que  c'est  au  grand  Constantin  ou  à  quelqu'un 
«  de  ses  fils  qu'il  faut  l'attribuer.   Constantin ,  plein  de 
«  vénération  pour  sa  mère  Hélène,  en  avait  donné  le  nom 
«  a  plusieurs  villes  et  mémo  à  une  province  entière  de 
«  l'Orient.  R  est  vraisemblable  que,  pour  que  l'Occident 
«  ne  restât  point  privé  de  la  même  distinction  ,  Ribéris  fut 
«  rétabli  sous  le  nom  de  Caslnim  Jleloiœ  ' .  »  C'est  ainsi 
(prelle  est  désignée   par  P^utrope  et  par  saint  Jérôme; 
Aurelius-Victor   et  Raul  Orose  (Hàl.  liv.  VU,  !2o)   lui 
conservent  le  titre  d'oppidum. 

«  Un  événement  tragique  donna,  en  ooO,  une  triste 
«  célébrité  au  Château  d'Hélène.  Constans  l^'-  (Flav.  M. 
«  Constans) ,  empereur  romain,  troisième  fils  de  Cons- 
«  tantin ,  poursuivi  depuis  Autun  par  des  émissaires  du 
«  traître  Magnence,  usurpateur  de  ses  États,  fut  atteint 
«  el  assassiné,  dans  ce  château,  par  Caïson,  le  chef  de 
«  ces  émissaires ,  tandis  qu'il  allait  chercher  un  port  en 

'    l'uir.cARi,   Solices  sur  Elue,  ii°  2. 


\\:\ 


«  Espagne,  pour  s'y  eiiibarquor '.  On  nionlre  dans  le  cloitrc 
«  d'Elne  un  fragment  de  pierre  ,  d'environ  lo  pouces  sur 
«  12,  où  se  trouve  sculpté  le  monogramme  grec  de  J.-C, 
«  et  que  la  tradition  donne  pour  un  reste  du  sarcopha-^è 
«  de  Constant.  Quelque  bien  fondée  que  paraisse  cette  tra- 
ce dition,  on  ne  peut  se  défendre  cependant  de  quelque 
«  doute,  quand  on  voit  tant  de  sarcophages  de  l'époque, 
«  présenter  le  même  monogramme  et  le  même  genre  d'or- 
«  nements  que  ces  débris  -.  »  Le  Caslrum  llclcnœ  semlile 
avoir  remplacé,  depuis  cette  époque,  la  ville  de  Ruscino 
dans  les  faveurs  de  l'administration  impériale,  et  avoir 
atteint  un  degré  d'importance  extraordinaire \  H  est 
certain  (pie  Kuscino  s'efface  désormais  devant  sa  rivale 
triomphante.  L'histoire,  il  est  vrai,  ne  fait  mention  ni 
de  l'une  ni  de  l'autre  dans  le  siècle  suivant;   mais  les 

'   Idi.(ius,  fas/fs, -F.utio,.e.-  Sex.  Aurel.  Victor,  £p,7ome.  -  Paul 
Oros.  Ihst.  Vil.  25.  -  Ilicionymi  Presbyteri  CAromc.  -  Zozin...,  etc. 

2  PcGGARf,  mi.  sur  Elne.  Nous  ne  savons  ce  qui  faisait  paraître  si  Lien 
fondée  a  M.  Puipjari  une  tradition  qu'il  finissait  par  rejeter.  M.  de  Gaza- 
nyola  {llist.  du  Roms.,  p.  ^9)  n'éprouve  pas  le  moindre  doute  au  sujet 
du  lombeau  de  Constans  ;  le  docteur  Carrère  en  avait  fait  autant  et 
M.  Mérimée  ajoute,  pour  son  propre  compte  :  Ce  sont  des  traditions' que 
je  respecte.  ..  On  ne  saurait  mieux  dire  assurément,  dit  l'auteur  de  VÉm 
«  grapliie  Roussillonnaise{noi{  |);car  il  serait  malaisé  de  s'inscrire  en  fan, 
.contre  la  léffende ,  et  non  moins  ardu,  sans  doute,  de  la  défendre 
•  par  de  bons  arguments  ,  s'il  y  avait  controverse  :  In  dubiis  liberta»  . 
M.  Henry  n'bésite  pas  i,  la  rejeter  :  ..  Le  silence  de  Marca  ,  au  sujet  de  ce 
'  lombeau,  prouve  que,  de  son  temps,  cette  tradition  n'avait  pas  encore 
"  pris  naissance,  ou  que,  si  elle  existait  déjà,  il  n'en  faisait  aucun  cas  „_ 
Hisl.  de  RoussiU  .  to.  I ,  p.  37.  -  Le  silence  de  Boscb  nous  parait  encore 
plus  décisif  en  pareille  matière 

M)n  lit  dans  tous  les  manuscrits  d'Ammien  Marcellin  :  .  In  Narbonensi 
.  Elusa,etNarbona,etTolosa,principatuinurbiumlcn.Mil  ,._I,|,  \V  ^  o' 
Comme  la  ville  d'£/,„a  (Kause)  était  en  Novempopulanie  et  non  jJns  la 
Narbonnaise,  Lacarre  [llist.  Gall.  sub  Prœfectis  PralorH.  p.  20)  propose  de 
l.re  CAusa,  et  cette  leçon,  qui  n'est  guère  satisfaisante,  pourrait  être  avan- 
tageusement remplacée  par  celle  .ÏEUna,  si  l'on  n'était  presque  certain 
qu  Aminun  Marcellin  a  pu  commettre  une  erreur  «rossiere. 


iir> 

coDJcctinos  viennent  encore  suppléer  à  ce  silence,  el, 
depuis  M.  de  Marca,  tous  nos  historiens  ont  répété  que 
la  ville  (rilélène,  comme  celle  de  Rnscino,  lut  javagée, 
en  -408,  par  les  Vandales,   accon)pagiiés  des   Mains  el 
des  Suèves,  qui  ne  se  sont  peut-être  jamais  montrés 
dans  cette  partie  des  Pyrénées,  et  linalement,  en  41  i, 
par  les  Wisigotlis,  qui  vinrent,  en  effet,  s'établir  dans 
ces  contrées,  pour  en  restaurer  les  villes,  et  non  pour  les 
détruire.  Toujours  est-il  que  l'histoire  n'a  parlé  ni  dEIne 
ni  de  Ruscino,  à  propos  des  liarhares  germains  et  des 
ravages  qu'on  leur  attribue   dans   ce   pays.   Elle  nous 
apprend,  au  contraire,  que  la  ville  (ÏUt'IoKi ,  qui  n'avait 
pas  encore  de  siège  épiscopal  sous  Ilonorius',  jouit  du 
titre  de  cité  dans  le  siècle  suivant,  et  possédait  un  évéque 
en  571*,  sous  la  domination  des  "NVisigoths.  On  semble 
donc  autorisé  à  reléguer  dans  la  région  des  fables  toutes 
ces  destructions,  dont  nous  sommes  loin  assurément  de 
contester  la  possibilité,  mais  qu'il  est,  pour  le  moins, 
inutile  d'imaginer,  lorsque  l'histoire  n'en  a  rien  dit,  et 
qu'elle  peut  se  passer  de  ce  genre  d'explications.  Tenons 
seulement  pour  certain  (\\vHdcna,  restaurée  dans   les 
premières  années  du  iv-'  siècle,  prit  de  rapides  accrois- 
sements et  une  importance,  qu'elle  conserva  sans  inter- 
ruption jusqu'à  l'époque  où  elle  devint  le  siège  épiscopal 
de  notre  diocèse.  Les  destinées  d'Elne  chrétienne  sont 
étrangères  h  la  période  que  nous  embrassons  dans  cette 
partie  de  notre  travail. 

Les  débris  de  l'antiquité  sont  presque  aussi  rares  h 
Elne  qu'à  Château-Roussillon ,  et  l'on  peut  à  peine  citer 
quelques  pans  de  mur  d'origine  douteuse,  des  médailles 
de  toutes  les  époques,  quelques  fragments  de  poterie 
sans  importance,  el  deux  ou  trois  sarcophages  conservés 

'    ynlkia  Galliarum  suh  Ronorio.   KdiH.  Sirniiiiid. 
2  JoiiANNis  Bici.AH.  Chronic,  aniiooTI. 


117 

(lans  la  ville  ou  ;hi\  environs.  Les  temples  el  autres 
monuments  publics  de  l'antique  Illibéris,  occupaient  sans 
doute  l'acropole,  ou  partie  haute  de  la  ville,  sur  laquelle 
s'élève  aujourd'hui  léylise-mère  du  Houssillon,  et  il  y  a 
lieu  de  croire  que  la  reconstruction  de  cette  basilique 
amena  la  ruine  complète  des  derniers  débris  des  anciens 
monuments  païens  qui  pouvaient  encore  subsister  au  xi<= 
siècle. 

■S.\l,SlJL.î;  (SALSES.J 

Au  siècle  d'Auguste,  Mêla  (II,  5)  cite  la  source  salée  de 
Salsulœ  (Salsuhv  fons),  à  l'entrée  du  pays  des  Sordons'. 
Une  population  assez  importante  s'était  sans  doute  grou- 
pée aux  environs,  on  ne  sait  depuis  quelle  époque,  sur  le 
passage  de  la  voie  romaine,  qui  compte  Salsidas  parmi  ses 
stations,  àôO  milles  de  Narbonne.  Ce  même  nom  reparait 
au  moyen-âge-,  pour  désigner  la  ville  de  Salses  qui,  selon 
toute  apparence,  occupe  la  même  place  que  le  lieu  de  Sal- 
sidœ  de  l'Itinéraire  romain.  Des  débris  d'antiquités  y  ont 
été  signalés  à  diverses  époques,  et  il  s'est  fait,  il  y  a  deux 
ans,  près  de  la  Fant-Damc,  une  découverte  importante  de 
médailles  consulaires,  ce  qui  semble  rapporter  ce  d('pôt 
à  l'époque  qui  suivit  immédiatement  la  conquête  de  ce 
pays  par  les  Romains. 

'  Salses  Dguie  dus  k-  xil'  sièclo  coniiiu-  la  ilcriiifro  ('011111111110  du  [{ous- 
sillon,  sur  la  limite  du  Narbonais.  Terra  nostra  à  Saisis  usqtté  ad  Uertusam 
osl-il  dit  dans  le  Traité  de  Paix  et  Triîve  de  1)73  {.Uarca.  n"  506). 
Dcsclot  rite  la  font  de  Salses  coiiiiiic  rcxtrOnic  limite  du  lloussillon  ,  ;iu 
Xin"  siècle.  (  El  rey  dix  :  «Si  nos  podem  tant  cavalcar....  que  pas.«ada 
<(  liagain  ta  font  de  Salses  ,  nos  farcm  lai  ardit  que  non  \iu  lloncli  loiniis 
•  lia  pus  beil.  —  E  llavors,  hagueien  pensaineiit  quel  rey  volia  anar  a  ia 
«  ciutat  de  Narbona.  •  Cronica  del  rtij  En  Père,  capitol  154.  ) 

-  F.c  nom  de  Saisines,  qui  se  trouve  dans  l'acte  de  consirration  de  l'éfflj-e 
de  Salses  (Worca  ,  n"  5o2)  n\st  sans  doute  qu'une  erreur  de  lecture  pour 
Saisule*.  Cette  ville  est  communément  appelée  Salsas ,  pcndaul  tout  le 
moyen-à(;e,  et  ce  nom  {villa  Salsas)  se  trouve  déjà  dans  une  <  liarie  de  l'aii 
1)51  [Callia  '  tirialiana,  i«.  VI,  p.   ',2'i). 


IfC 


COMBUSTA. 


Entre  Salsulœ  et  Ruscino,  et  probahlenieiit  dans  le 
voisinage  de  Saint-Pierre  del  Vilar,  se  trouvait  le  lieu 
dit  Combusta,  dont  on  ne  connaît  ni  l'origine  ni  lim- 
portance.  On  ne  sait  pas  même  si  c'était  un  lieu  habité. 
La  dissertation  sur  la  voie  romaine  fournira  quelcpies 
développements  à  ce  sujet.  Combusta  se  montre,  pour 
la  première  fois,  dans  V Itinéraire  romain  dit  iVAntonin, 
et,  pour  la  dernière,  dans  le  géographe  anonyme  de  Ra- 
venne,  qui  avait  copié  ce  nom  dans  quelque  document 
routier,  et  le  rangea,  sans  façon,  ainsi  que  Pyremum, 
parmi  les  cité^  de  la  Septimanie  (lib.  V,  sectio  3). 

AD  STABUr.UM. 

Nous  n'en  dirons  guère  plus  ici  sur  le  trop  fameux 
Stabulum,  dont  on  avait  voulu  faire  la  ville  du  Volo,  et 
qui,  selon  toute  apparence,  n'était  qu'une  simple  etché- 
live  étable ,  bonne  à  citer  pour  préciser  les  distances 
d'une  carte  routière,  mais  sans  importance  aucune  pour 
la  géographie  historique.  Ce  nom  ne  se  trouve  que  sur 
une  des  rédactions  de  V Itinéraire  dit  d'Antonin,  et  M.  de 
Gazanjola  le  place  entre  le  Tech  et  Illibéris,  presque  sous 
les  murs  de  cette  ville  (Hist.  du  Rouss.,  p.  57). 

AD  CKNTENAUIUM  -AD  CKNirRIOM-S. 

La  Table  romaine  dite  de  Pealimicr  cite  également, 
sous  le  nom  de  Ad  Ccnlenarium,  entre  Illibéris  et  les 
Pyrénées,  un  lieu  qui  correspond,  par  sa  position,  à  celui 
que  y  Itinéraire  appelle  Ad  Cenluriones.  Il  ne  peut  y  avoir 
la  moindre  dilficulté  à  cet  égard;  il  n'en  est  pas  de 
même  de  la  situation  de  ce  gîte,  qu'il  sera  impossible  de 
retrouver,  tant  que  les  lieux  par  lesquels  passait  notre 
voie  romaine  n'auront  pas  été  reconnus  d'une  manière 


117 

précise  et  certaine.  Tout  ce  que  l'on  peut  dire,  dans 
l'état  actuel  de  cette  question  et  dans  le  système  que  nous 
avons  cru  devoir  adopter,  c'est  que  le  lieu  dit  Ad  Cente- 
narium,  se  trouvait  entre  le  Tech  et  les  Pyrénées,  aux 
environs  d'Argelès  ou  de  Tatzo.  Quant  au  lieu  lui-même, 
on  suppose,  avec  quelque  raison,  que  c'était  un  poste 
militaire,  commandé  par  un  centeniei'  ou  centurion.  Mais 
ce  renseignement  n'apprend  rien  de  certain  sur  l'impor- 
tance de  cette  station,  qui  a  bien  pu  se  composer  d'une 
simple  demeure  isolée,  construite  sur  le  bord  de  la  route. 

CAUCOi,ini:Hi  (couioire). 

Le  nom  de  Caucoliberi  a  trop  de  rapports  avec  celui 
à'Illibciis  pour  échapper  à  l'attention  de  M.  Puiggari,  qui 
a  fait  appel  à  toutes  les  ressources  de  l'érudition  pour 
trouver  encore  ici  une  fondation  phénicienne,  antérieure, 
peut-être,  à  celles  d'Illibéris  et  de  Ruscino.  L'opulence  et 
les  richesses  d'Illiben'ft,  tant  vantées  par  Mêla,  n'auraient 
pas  eu  d'autre  débouché.  Nous  sommes  loin  d'accep- 
ter l'origine  phénicienne  de  CaxcoUbcri  ;  mais  rien 
n'empêche  d'y  voir,  en  effet,  l'ancien  port  de  la  ville 
d'Illibéris,  et  peut-être  même  cett€  cité  de  Pyrène,  fré- 
quentée par  les  négociants  de  Massalie  quelques  siècles 
avant  l'ère  chrétienne'.  Tnc  IVc  des  Saints,  recueillie  par 
les  Kollandistes,  y  place  le  martyre  d'un  saint  Vincent, 
vers  l'an  506;  mais  le  nom  de  Caucholiberi  se  montre, 
pour  la  première  fois,  dans  le  géographe  anonyme  de 
Ravenne  (lib.  IV,  sectio  8),  dont  les  renseignements  se 
rapportent,  en  général,  h  l'époque  de  Théodoric  le  Crand. 

En  672,  le  Castnim  Caucoliberi  est  compté  parmi  les 
châteaux  Pyrénéens  dans  lesquels  s'étaient  retranchés  les 
partisans  du  duc  Paul ,  révolté  contre  le  Roi  de  Tolède. 
Canrolihcri  fut  soumis  par  les  troupes  de  Wamba,  et  ses 
défenseins,  parmi  lesquels  on  compte  LeolVed  el  Giiidri- 

'   FisTts  AviEsus,  Ora  mautxma ,  vers  258  elsq. 


120 

<,'ild,  y  ruient  faits  prisonniers,  ainsi  que  leurs  épouses 
(Ilislor.  Wambœ,  régis  Tolelani ,  auclore  Do.  Juliano 
Toletan;r  Scdis  Arcliiepisc).  Le  nom  de  Cancoliberi  ne 
reparaît  pas  ensuite  avant  la  lin  du  x^  siècle  (Matra,  128). 
On  n'a  signalé  juscju'ici,  à  Collioure,  aucun  débris  de 
constructions  romaines,  bien  qu'on  y  ail  recueilli  des  mé- 
dailles de  toutes  les  époques  et  quelques  amphores  anti- 
ques, ce  qui  semble  indiquer  que  cette  ville  n'a  jamais 
eu,  dans  les  temps  anciens,  l'importance  qu'elle  acquit 
aux  xive  et  xv«"  siècles. 

PORTOS  vkm;kis  (port-venvres). 

Le  Portus  Veneris,  qui  devait  son  nom  au  Temple  de 
Vénus,  élevé  sur  un  des  promontoires  du  voisinage,  ne  se 
trouve  mentioné  que  dans  la  Géographie  de  Pomp.  Mêla'; 
car  la  Pyrauxa  Venus  de  Pline  (III,  5)  ne  peut  s'entendre 
que  du  temple  de  la  déesse.  11  n'y  reste,  d'ailleurs,  aucune 
trace  du  temple  ni  d'aucun  autre  monument  qui  rappelle 
l'antiquité,  et  la  correspondance  seule  des  noms  et  des 
positions  peut  faire  retrouver  aujourd'hui  le  Porhis  ]'eneris 
dans  notre  Port-Vendres ,  qui  ne  ligure  dans  aucun*  de 
nos  documents  antérieurs  au  testament  de  Jacques*le- 
Conquérant,  de  l'an  1272  (D'Aciiéry,  Spicileg.,  III,  675). 

*  Tùm  inter  Pyrenaei  promuntoria  Portus  Veneris  insi(;nis  fano  (liv. 
II,  c.  5). 

2  On  a  cité  un  dcinuinent  de  l'iiii  t  <09  {Uist.  de  Languedoc,  t.  II ,  pr.  350)., 
où  il  est  dit  :  A  yizza  usquc  ad  Portum  Veneris.  Mais  ce  Porlus  Veneris,  au 
liru  de  désigner  notre  Port- Vend res,  s'applique  à  Porto-Vencre,  sur  la  cote 
de  Gênes.  Un  passage  d"nn  autre  traité  de  l'an  -1 153  ,  qui  n'est,  pour  ainsi 
dire,  que  le  renouvellement  du  premier,  rend  toute  confusion  impossible. 
On  y  lit:  Quod  ullus  homo  Januensis  qui  habilet  a  l'orlu  Veneris  usque  aii 
l'orlwm  MonacHvi  non  donel  in  Tortosa  ultum  usalirum  (Arcli.  rcal  de  Barcc- 
loiia,  perff.  ir  206.  l'iiblié  par  lioffaruil  ).  11  était  temps  de  relever  celle 
erreur  adoplee  par  tous  nos  historiens  :  elle  n'a  pas  grande  importance  au 
point  de  vue  de  la  géographie,  mais  elle  a  donné  lieu  aux  plus  singu- 
lières asserliuiis  sur  notre  ancien  droit  commercial  et  sur  la  prélenduc 
suprématie  des  Comtes  de  Toulouse  sur  l'ancien  lloussilion 


\2[ 


CIÎIIVAIUA  (CERVERAJ.-nWl'llJEX  VOMVFAl  MAGNI-PYRENiEDM 
ET  SUMMUM  PYRENEUM. 

Le  lieu  de  Cervaria,  correspondant  à  l'anse  actuelle 
de  Cervera,  est  aussi  mentionné  par  Ponip.  Mêla,  qui  ne 
nous  apprend  rien  sur  son  importance,  et  se  l)orne  à  le 
désigner  comme  le  point  extrême  de  la  limite  des  Gaules 
(finis  Galliœ).  C'est  donc  en  ce  lieu,  ou  dans  le  voisi- 
nage, que  se  trouvaient  les  Trophées  de  Pompée,  men- 
tionnés par  Pline  et  par  Dion  Cassius,  et  placés,  par 
Stral)on,  à  la  limite  des  Gaules  et  de  l'Ibérie,  près  de  la 
voie  (pii  conduisait  do  rilalie  en  Espagne.  Ces  désigna- 
tions ne  peuvent,  à  notre  avis,  convenir  qu'au  lieu  appelé 
Summum  Pyrœneiim,  ou  simplement  Pyrcnœum,  par  les 
Tables  itinéraires  de  Rome;  mais  les  notions  des  lieux 
parcourus  par  notre  ancienne  voie  n'ont  pas  encore  ac- 
quis un  caractère  de  certitude  sullisant,  pour  permettre 
de  mieux  préciser  celui  des  passages  de  nos  Pyrénées 
qui  correspond  à  cette  station  de  la  voie  romaine. 

GASIIÎUM  VUr/rURARIA  (  CASTEU.   D'OLTnF.n.iJ. 

Le  Casirum  VnlUiraria  remonte  incontestablement  jus- 
qu'à l'époque  romaine,  bien  qu'il  n'en  soit  question  qu'en 
67ii,  dans  le  récit  de  Julien  de  Tolède,  qui  com[)te  cette 
forteresse  parmi  les  cliâteaux  des  Pyrénées  qui  essayèrent 
de  résister  aux  armes  de  Wamba.  llne  charte  de  l'an  981, 
l'appelle  Castrum  Vullrarium  (Marcn,  l'20),  et,  pendant 
les  trois  siècles  suivants,  il  ligure  sous  les  noms  de  Vul- 
Iraria,  Vollurariinn ,  Vullreria ,  l'Hraria  (Marra,  251, 
320,  ÔGO,  575,  /m.  —  Spicikg.,  III,  598),  et  Ollreyra\ 
parmi  les  principales  lértés  féodales  de  l'Albèra.  C'est 
raiicicn  château  ruiné  iVOltrera,  construit  sur  un  rocher 

'    lî.icinj.irius  de  Ollrcyra  (l'.arlul.  du  Temple,  fol.  H")}. 


120 

qui  domine  le  vallon  de  Monlhiam,  au-dessus  de  la  Pava. 
«Le  Cashum  VallHrariurn ,  dont  le  nom  parait  bien 
«  indiqm-r  lOrigine,  est  une  véritable  aire  de  vautours, 
«  où  Ion  ne  pénètre  qu'après  avoir  disputé,  pour  ainsi 
«  dire,  le  passage,  sur  les  aiguilles  d'une  roche  abrupte 
«  et  glissante  ;  et  on  arrive  à  la  partie  la  plus  élevée ,  à 
«  travers  les  décombres  des  nmrs,  des  voûtes,  des  cré- 
«  noaux  abattus  et  des  casemates  écroulées.» — Jalbert 
DE  Réart,  le  Vallon  de  Monlbram. 

CASTRUM  CLAUSUliAS  (LA  CLVSA). 

Dans  le  jugement  promulgué  contre  les  complices  du 
duc  Paul ,  on  semble  comprendre,  sous  le  nom  de  Claii- 
siiras,  tous  les  châteaux  de  la  ligne  des  Pyrénées  orien- 
tales. Cependant,  le  rédacteur  de  ce  jugement,  qui  est  le 
même  que  l'auteur  de  V Histoire  du  roi  Wamba ,  applique 
le  nom  de  Castrum  Clausurns  à  un  château  particulier, 
dont  il  parle  en  ces  termes ,  sous  l'année  672  :  «  Une 
«irruption  fut  faite  dans  le  château  que  l'on  appelle 
«  Clausuras,  par  un  corps  de  troupes  détaché  en  avant, 
«  sous  la  conduite  de  deux  Ducs.  On  y  fit  prisonniers, 
«  Ranosind  et  Hildegis,  avec  un  grand  nombre  de  rebelles, 
«  qui  s'étaient  chargés  de  défendre  ce  château.  On  les 
«  conduisit  tous  au  Roi,  les  mains  liées  derrière  le  dos.» 
Les  forces  dirigées  contre  cette  forteresse,  montrent 
assez  son  importance,  et  font  comprendre,  sans  le  justifier, 
l'arrogant  défi  que  le  rebelle  Paul ,  s'intitulant  Roi  d'O- 
rient ,  adressait  au  Roi  de  Tolède  :  Descende  usque  ad 
Clausuras;  nnm  ibi  invenics  Oppopumbeum  (jrandem,  etc. 
Le  nom  de  Claiisuras'  se  transforme  ensuite  en  celui  de 

'  [,c  concile  célébré  ;i  Tolède  en  OOî  ,  prit  des  dispositions  ri(;ourciisfs 
contre  les  Juifs,  en  exceptant ,  toutefois,  cfii\  rpii  étaient  établis  en  <lc(;;w 
des  Pyrénées  :  •  lllis  lantumdcni  llcbrœis  ad  pr.Tsens  rescrvatis  ,  <|ni 
«  Gallia?  provinci.T,  videlicel  iotra  clausuras  nnscnulur  habilalores  eiis- 


121 

Clusas\  et  définitiveinenl  eu  celui  de  La  Clusa'^ ,  qu'il 
porte  encore  aujourd'hui.  Selon  M.  Henry  (Le  Guide  en 
Roussillon,  p.  172)  les  anciens  comprenaient  sous  le  nom 
de  Claiisuras  les  deux  cliâteauv  qui  se  voient  encore,  l'un 
au  village  dit  La  Clma  haute,  l'autre  sur  la  rive  gauche  du 
ravin  qui  descend  de  Bellegarde.  Cependant,  malgré  la 
forme  plurielle  du  nom  de  Clausuras,  les  termes  employés 
par  Julien  de  Tolède  (Caslrum  quod  vocatur  Clausuras) 
ne  permettent  d'y  voir  qu'une  seule  forteresse,  corres- 
pondant au  château  dont  l'église  porte  encore  cette  ins- 
cription :  A7/7.  Kls.  marcii  anno  Do.  M.CC.XC.I.  obiil 
Poncius  de  Capite  Magno  domicellus,  Dominus  Castri  de 
Clusa.  «Le  château  de  La  Clusa,  dit  M.  de  Bonnofoy,  fut 
un  des  points  militaires  les  plus  anciens  de  nos  comtés; 
nous  n'avons  pas,  dans  ce  département,  de  ruines  aussi 
importantes  par  leur  étendue.  »  —  Epigraphie  Rou^sil- 
lonnaise,  n"  205. 


"  tere,  vi'I  aJ  ducatiim  rojjioiiis  i|)sius  peiliiiiTC. —  Cullecl.  )lajc.  Concil. 
«  Hisfi.,  p.  755.  1)  (/éditeur  des  Coiunles  s'est  iiiiajjiné  (|ue  ,  dès  cotte  épo- 
que, les  Juifs  <le  la  Septiinanic  étuienl  parques  dans  des  vallons  fermés, 
qu'il  lui  a  plii  d'appeler  clausuras.  «  Inlia  clausuras ,  dit-il  en  mite,  in 
•  vallibus  montibus  circumscptis.  »  Nous  croyons  qu'il  s'agit  ici  de  notre 
forteresse,  el  qu'il  faut  lire  ultra  au  lieu  de  inira,  e'ost-à-dire,  en-deçà  des 
Pyrénées  et  du  château  des  clausures,  ou  au-delà,  par  rap|)orl  aux  l'èics  du 
Concile  île  Tolède.  Cette  expression  revient  .souvent,  à  propos  de  celte 
forleressc.  «El  ttllrà  Clusa,  in  coniitatu  Inipurilanensium ,  «  est-il  dit 
dans  \mu  charte  de  l'an  889  (D'.Vcuer.  Spicil  ,  VIII ,  p.  ôo  i  ) ,  el  en  916. 
l'Evèque  d'iihie,  donne  à  son  l'église  ses  possessions  dira  Clusas  Spaniœ 
(il/orca,  n»  65). 

'  Dans  une  charte  de  l'an  844  :  <  Ecclesia  Sci  Martini  ad  ipsas  Kelo- 
nicas,  in  via  qu;c  diseurrit  ad  ipsas  Clusas.  —  BAluzr..  ,ly);it'ii(/.  ad  Capilitl.. 
col.  li'.S    . 

'-  Ce  nom  se  trouve  déjà  en  889.  Il  réparait  an  Mi*^  sieile,--  mansos  (|ui 
sunl  ad  Clusam  ,  en  !  |.î4  ,  Carlul.  du  Temple  .  fol.  45  ;  —  Pctrus  de  Clusa, 
en  H7t»,  Ibid.,  p.  118,  97,  Ml.  etc  ;  IVmsus  .le  '7hs.i  ,  en  1288. 
mitl.  dt  Langued  .  preuves 


Iâ4 

SORDOINIA. 

Julien  de  Tolède  nous  a  transmis,  sur  notre  idéographie  du 
vn«  siècle ,  un  dernier  témoignage ,  dont  la  valeur  sendde 
avoir  été  assez  mal  comprise  jusqu'ici.  Il  s'agit  de  la  Claur- 
suraSordonia.  L'opinion  émise,  à  ce  sujet,  par  M.  deMarca, 
a  été  répétée  par  tous  nos  historiens,  et  elle  est  aujourd'Imi 
tellement  accréditée,  qu'il  sera  nécessaire,  pour  la  réfuter, 
de  citer  en  entier  et  d'examiner  en  détail  le  texte  qui  a 
donné  lieu  à  ces  fausses  interprétations. 

En  672 ,  le  duc  Paul ,  révolté  contre  Wamha ,  roi  de 
Tolède,  se  fortifie  dans  Narhonne,  capitale  de  la  pro- 
vince qu'il  venait  de  soulever.  Le  Roi  Wamha  marche 
contre  le  rehelle,  et  part  de  Gérone,  après  avoir  divisé 
sou  armée  en  diverses  colonnes,  pour  attaquer  les  châ- 
teaux qui  défendaient  la  ligne  des  Pyrénées.  Julien  de 
Tolède  continue  ainsi  son  récit  :  «Il  attaqua  et  soumit, 
«  par  une  admirahle  faveur  de  la  victoire,  les  châteaux 
«  Pyrénéens  que  l'on  appelle  Caiicoliberi,  Vultnraria,  et 
«  le  Caslnim  Lybiœ,  dans  lesquels  il  trouva  beaucoup 
«  d'or  et  d'argent,  qu'il  abandonna  à  ses  nombreuses 
«  troupes,  comme  leur  part  de  butin.  En  outre,  une  irnip- 
«  Huit  fut  faite  daus  le  château  que  l'on  appelle  Clansiiras 
«  (La  Clusa),  par  un  corps  de  troupes,  détaché  en  avant, 
«  sous  la  conduite  de  deux  Ducs.  On  y  fit  prisonniers, 
«  Ranosind  et  Hildigise,  avec  un  certain  nombre  de  re- 
«  belles,  (pii  s'étaient  charges  de  défendre  ce  chàleau; 
«  on  les  conduisit  au  Roi ,  les  mains  liées  derrière  le  dos. 
«  Cependant,  Wittimir,  un  des  conjurés,  qui  s'était  établi 
«  et  fortifié  dam  Sordonia,  prit  la  fuite,  aussitôt  qu'il  eut 
«  appris  l'invasion  de  nos  soldats,  et  se  rendit  à  Narbonne, 
«  pour  apporter  à  Paidus  la  nouvelle  de  ce  grand  désastre^.» 

'  Castraque  Pyiciia,Mca,  (iii.-c  vocanliir  Caiicolihcri,  Vulluraria  cl  Caslrutii 
[,ibyic,  iniiahili  victoriiP  Iriuinplio  ccpit  ali|H(!  |)crd()imiit,  multiiin  in  liis 
laslrisauri  ai{;ei)tii|iic  invciiicns.quotl  copiosiscxi-rcilibus  in  prirtlain  rcssit. 


125 

Julien  (le  Tolède  écrit  avec  une  em[)liaso  (juil  serait 
dillicile  de  recommander,  an  point  de  vue  du  goût  et  du 
style;  mais  son  récit,  si  l'on  ne  tient  compte  que  des  faits, 
renferme  des  détails  de  la  plus  rigoureuse  exactitude,  et  il 
n'y  a  pas  une  seule  expression  contestable,  au  point  de  vue 
de  l'histoire  et  de  la  topographie,  dans  le  passage  que  nous 
venons  de  citer.  Mais,  qu'était-ce  que  celle  Sordonia  où  Wit- 
timir  exerçait  son  pouvoir  (constihilm),  et  dans  laquelle  il 
s'était  fortilié  (se  clmiscrat)?  lous  les  auteurs,  depuis  M.  de 
Marca,  en  ont  fait  une  tour,  qu'ils  ont  transportée  à  la 
Torre  Cerdana,  dont  les  débris  insigniliants  se  voyaient 
encore,  il  y  a  quelques  années,  près  de  la  Tour-de-Carol  '. 

Nain  in  Castriiin  quod  vocaliir  Clausuras,  uiissis  aiilo  si-  exort-ilibus ,  |ii.'i' 
Duet's  duos  irruptio  fada  est.  Ulii  quoqiie  Raiiosindus  el  liildifjisus  ciini 
celero  aoiiiinc  in'rfiJoiiiin  ,  (|ui  ad  dcffiisioiieni  Caslri  ipsius  ciiiilliNei-aill , 
capiiiiitur;  <iii'(|iic  deviiutis  posi  lorgiim  maniLiis  l'riiuipi  pivpsi'iitiUilur. 
Vvittimirns  lanier»,  unus  ex  conjnralis,  qui  se  in  Sordoniam  conslilutus  ctau- 
scral,  nostros  irriipissi.'  porsentions,  slatim  aiifii(;il;  et  lanla;  cladis  nuntiuni 
l'aulo  iii  Narbonaiii  pcrlatmiis  ai'ccssil.  IHhI.  Wambœ,  régis  Tolelani,  auclorn 
Juliaiio,  ïoleta».  Archicp.  (  Iix  vcleri  codiee  ftls.  cœnobii  iMoissiacensis.  ) 

'  l.i'S  ('■rrivaiiis  qui  ont  transporté  Sordonia  ;i  la  Torre  Ccrdaua,  ont  accepté 
celle  identifiialioii  connue  un  fait  ac(|uis  et  ne  pouvant  soulever  aucune 
diflieulté.  Ils  se  sont  abstenus  de  donner  la  moindre  raison  à  l'appui  de 
leur  opinion  ,  et  on  ne  pourrait  leur  en  supposer  d'antre  que  ranalojjie 
apparente  qu'il  y  aurait  entre  les  deus  noms.  Mais  rette  analogie  ne  nous 
frappe  en  aucune  manière,  et  l'on  ne  peut  que  trouver  une  dilferencc 
coniplèle  entre  les  deux  noms,  si  on  les  evamine  de  plus  près.  Celui  de  la 
Torre  Cerdana  ne  se  montre  (|ue  dans  des  documents  assez  niodeines;  il 
s'explique  parfaitement  pa/  la  silualion  même  de  celle  forteresse  eu  pleine 
Cerdaijne,  et,  si  cette  tour  existait  déjà  à  l'époque  romaine  (ce  que  nous 
ignorons  coniplétenieut  j,  on  peut  bien  admettre  (ju'elle  portail  dej.i  le  nom 
»|u"elle  avait  dans  les  deruiers  temps  de  son  existence.  Or,  n'ya-l-il  pas  une 
différence  complète  cuire  les  noms  égalemenl  anciens  des  Sorrfotif.«  et  des  Cere- 
lani  ou  '.'irnMiii,  appelés  Kentlani  par  Strabon  ,  le  premier  ijui  en  ail  fail 
menlionV  Observons  même  que  Julien  de  Tolède,  le  seul  (|ui  ail  parle  de 
Sordonia,  a  établi  une  différence  encore  plus  marquée  entre  ce  nom  et  celui 
de  Cerdana.  en  donnant  à  ce  dernier  la  forme  'irrilaiiia  (C.asirum  Liby<r,  QUod 
est  '.irri/aiii<i'  capui  ).  L'assimilation  des  deux  forteresses  est  donc  toul-à-fait 
aiLitraire.  ijuant  aux  noms,  puis(|u'ils  sont  on  ne  peiil  plus  iliflérenls. 


12i 

On  comprend  sans  peine  que  les  complices  de  Paul  se 
soient  fortifiés  sur  toute  la  ligne  des  Pyrénées,  de  manière 
à  fermer  tous  les  passages  qui  donnaient  accès  dans  la 
Septimanie  ou  Gaule  Gothique  ;  et  le  Castrum  de  Livia , 
qui  ouvre  le  port  ou  passage  dit  aujourd'hui  de  la  Perxa, 
devait  nécessairement  être  compris,  comme  il  le  fut  en 
effet,  dans  cette  ligne  de  défense.  Il  n'en  était  pas  de 
même  de  la  tour  de  Carol,  située  à  une  très-petite  dis- 
tance de  la  ville  de  l.ivia,  pour  fermer  les  communications 
entre  la  Cerdagne  et  le  diocèse  de  Toulouse  qui  dépen- 
dait alors  du  royaume  des  Francs,  et  devait,  par  consé- 
quent, rester  tout-a-fait  en  dehors  des  opérations  militaires 
d'une  guerre  civile  entre  les  Wisigoths  de  l'Espagne  et 
ceux  de  la  Septimanie.  Nous  voyons,  en  effet,  les  troupes 
qui  avaient  opéré  dans  la  Cerdagne,  se  diriger  de  Livia 
sur  le  port  de  la  Perxa,  pour  rejoindre  l'armée  principale 
dans  la  plaine  du  Roussillon,  sans  se  préoccuper  autre- 
ment de  la  forteresse  Sordonia,  ni  profiter  du  passage  que  la 
défection  de  Wittimir  leur  ouvrait  vers  le  pays  de  l'Ariége, 
où  les  soldats  de  Wamba  n'avaient  rien  h  faire.  La  position 
de  la  Tour  de  Carol  aurait  donc  été,  dans  cette  occasion, 
un  j)f)int  de  défense  parfaitement  inutile,  et,  en  admettant 
que  Wittimir  eût  eu  l'idée  de  s'y  fortifier,  on  ne  saurait, 
vraiment,  lui  faire  un  grand  crime  de  l'avoir  abandonné. 

La  marche  des  faits  s'oppose  donc  à  ce  que  l'on  mette 
Sordonia  dans  le  voisinage  de  Livia;  le  sens  du  récit 
de  l'expédition  de  Wamba  s'y  prête  encore  moins. 
L'Archevêque  Julien  était  contemporain  des  événements 
qu'il  raconte;  il  puisait  à  des  documents,  pour  ainsi  dire, 
officiels,  et  ce  qu'il  dit  de  la  prise  des  châteaux  pyrénéens 
est  extrait  du  jugement  même  des  complices  de  Paul. 
En  voilà  certes  plus  qu'il  n'en  faut  pour  ne  pas  faire 
dire  à  cet  écrivain  de  véritables  impossibilités.  Il  raconte 
que  Wamba,  sortant  de  Gérone,  fait  attaquer  les  forte- 
resses des  Pyrénées  par  divers  corps  de  son  armée,  qui 


\'2[ 


s'emparent  de  Caucoliberi ,  tle  Vulluraria  (Oltrera),  du 
Caslrum  Libyœ  et  de  Clausuras  (La  Clusai,  dont  les 
défenseurs  sont  faits  prisonniers  et  amenés  au  Roi.  C'est 
alors  que  Wiltimir,  qui  s'était  foitilîé  dans  Sordonia, 
s'enfuit  vers  Narhonne,  «pour  apporter  à  Paul  la  nou- 
«  velle  d'un  si  grand  désastre.  »  Mais,  d'après  le  texte  de 
Julien ,  la  nouvelle  que  Wittimir  voulait  apprendre  à  Paul 
ne  pouvait  être  que  la  prise  {irniptio)  des  châteaux  de 
l'Albèra  {noslros  irrupisse  perseiilicns ,  statim  aufiigit, 
taïUœ  dadis  meiithim peiiaturus);  car  l'historien  n'applique 
ce  mot  qu'à  la  prise  du  château  de  Clausuras  :  «  Castra 
«  Pyrenteica...  ecpit  atque  perdomuit...  in  Castrum  quod 
'<  vocatur  Clausuras,  per  Duces  duos  irniplio  facta  est.  » 
Or,  si  Wittimir  eût  été  posté  à  la  Tour  Cerdane ,  il  lui 
fallait  au  moins  deux  jours  pour  être  informé  de  ce  qui 
se  passait  h  La  Clusa  ;  il  ne  fallait  guère  moins  de  temps 
pour  transmettre  une  nouvelle  de  la  Tour  Cerdane  à 
Narhonne,  tandis  qu'on  a  pu,  de  tout  temps,  apprendre 
en  un  jour  à  Narhonne  ce  qui  se  passait  à  l'extrémité 
orientale  des  Pyrénées.  On  a  donc  fait  dire  à  Julien  de 
Tolède,  que  Wittimir  avait  quitté  son  poste  de  Sordonia 
et  s'était  dirigé  vers  Narhonne ,  pour  porter  h  son  sou- 
verain une  nouvelle,  que  celui-ci  devait  savoir  depuis 
quatre  jours.  11  n'y  a  aucune  raison  de  prêter  à  l'un  des 
complices  de  Paul  cette  mission  ridicule  et  parfaitement 
inutile,  et  nous  couclurons  naturellement,  de  tout  ceci 
que  Sordonia  ne  pouvait  être  ni  la  Torre  Cei'dane  ni 
aucun  autre  lieu  situé  dans  la  partie  occidentale  de  notre 
département. 

M.  Walckenaér  qui,  à  ce  qu'il  semble,  n'avait  jamais 
entendu  parler  de  la  Cerdague  '  ni  de  sa  Tour,  avait  eu 

'  Nous  croyons  devoir,  ^m  snji-l  de  M.  de  \\  alcki'iuui ,  citer  tcxtuclic- 
meiil  une  note  dont  la  nu-ditalion  peut  olrc  de  q(iel(|ue  titililé  aux  érudits 
qui  décrivent  niagistralenicnt  les  pays  qu'ils  n'ont  jamais  mis:  h  l.e  district 
Jis  Sdrdones  subsista  jusqu'à  la  lin  du  xv'' siècle.  Je  trouve  dans  le  procès- 


128 

le  bon  esprit  de  no  s'en  ra|)[)orter  qiraii  témoignage  de 
Julien  de  Tolède,  pour  retrouver  la  position  de  Sordonia. 
En  conséquence,  il  plaçait,  entre  Chnisiivas  et  Narbonne, 
le  château  Sordonia,  qui,  suivant  lui,  pourrait  bien  être 
Sournia ,  dans  le  pays  de  Fonollet.  Il  existe,  en  effet, 
une  grande  similitude  entre  ces  deux  noms;  mais  la  situa- 
tion de  Sournia  ne  parait  pas  complètement  en  rapport 
avec  les  circonstances  relatées  par  Julien  de  Tolède. 

Tout  ce  qui  semble  résulter  du  récit  de  cet  écrivain , 
et  ce  qui  parait  complètement  admissible ,  c'est  que  le 
rebelle  Paul,  en  se  retrancliant  dans  Narbonne,  avait  bien 
pu  distribuer  ses  principaux  complices  dans  les  châteaux 
des  Pyrénées,  qui  formaient  ainsi  la  première  ligne  de 
défense,  derrière  laquelle  il  avait  pu  en  établir  une  se- 
conde, en  fortifiant  quelques  châteaux  situés  entre  les 
Pyrénées  et  Narbonne.  L'extrémité  orientale  des  Cor- 
bières,  qui  formait  la  frontière  des  anciens  Sordcs,  a  été 
de  tout  temps  la  limite  reconnue  du  Roussillon  et  du 
Narbonnais,  et  quoique  le  château  de  Salses,  qui  est 
censé  la  défendre  aujourd'hui,  soit  de  construction  assez 
moderne,  les  forteresses  ne  manquaient  pas  sur  cette 
frontière  dans  les  temps  anciens.  On  voit  aujourd'hui, 
au  M.-O.,  et  à  une  faible  distance  d'Opol,  un  vaste  co- 
teau, tout  couvert  de  ruines  d'anciennes  fortifications, 

verbal  manuscrit  des  Ktals-Géncriiux  tenus  soiis  Cliarles  VIII,  en  l'i83 
(Bibliolli.  du  Roi,  collection  Dupuy,  n"  521,  fol.  17),  la  Lungue-d'' Oc  et 
les  provinces  adjacentes  désignées  ainsi  :  «  Quinla  fuit  portionum  Lingua 
Il  Occitana  ,  cum  suis  senescalliis  ,  ci(|ue  adliarcntes  fucrunt  Delfinatua 
a  l'rovincia  ,  Ruscilio  et  Sardinia.  »  Sardinia  est  évideiiinient  une  faute  de 
copiste  et  est  mis  pour  Sardnnia  ou  Sordonia.  »  (Géogr.  ancienne  des  Gaules, 
par  le  baron  Waixkenauii,  t.  II ,  part.  Il,  ch.  4.  )  iM.  de  \\  aickenaer  savait, 
comnie  tout  le  monde,  que  le  mot  Sordonia  se  trouve  une  seule  et  unique  fois 
dans  uu  écrivain  du  vii'^  siècle;  mais  il  aurait  ctc  bien  surpris  d''apprendrc 
que  le  nom  de  Ceriinnia,  (|iii  n"a  rien  de  commun  avec  Sordonia,  se  trouve 
dans  des  milliers  de  titres  de  toutes  les  époques,  pour  désigner  un  pays, 
connu  de  iio<s  jours,  comme  dans  tous  les  temps,  sous  le  nom  dcCerdagne. 


uilgairenienl  appelées  le  château  d'Opol.  C'était  au  xiir 
sièle  le  Puig  deSnlvalerra,  anciennement  ^)\^e\éCaslaH  de 
Oped.  Le  roi  Jacqucs-le-Conqiiérant  y  fonda  une  basfida 
ou  pahlacion,  qui  obtinl,  par  un  privilège  des  ides  de  mai 
1246,  l'usage  de  la  coutume  caite  de  Perpignan.  Le  nom 
de  Caslarl  prouve  qu'il  y  avait  eu  déjà,  en  ce  lieu,  une 
ancienne  forteresse,  que  le  Roi  d'Aragon  voulait  seule- 
ment rétablir  et  agrandir,  pour  la  défense  du  Houssillon  '. 
Au-dessous  d"Opol,  et  dans  un  lieu  beaucoup  plus  rap- 
proché du  village  de  Salses,  se  trouvent  encore  les  ruines 
du  CasteU-VeU,  qui  servit  aussi  \\  défendre  la  frontière 
du  Roussillon,  jusqu'aux  premières  années  du  xvi^ 
siècle  où  l'on  construisit  le  château  actuel  de  Salses. 
Le  Castell-Vcll  remonte  à  une  haute  auticpiité  :  ce  nom  se 
montre  déjà  au  xiiF  siècle*,  à  une  époque  où  le  manoir 

'  (1  Coiisideraiitfis  lioiioroiii  el  ulilitatcin  toliiis  IJnssilioiiis  in  construc- 
(I  cione  sive  forliilicia  l'iulii  ijiii  oiini  vocaliatur  Caslarl  de  Oped  ,  l't  nui 
Il  modo  (lii'ilur  Sa/va(crra;  volentcs  eciani  ut  in  diclo  Podio  Salvaterrc  sit 
Il  habilalonim  coi)ia...  roncpdiiniis  lioniinibiis  de  Opedo  et  de  Pcrollons, 
Il  oinnibiisi|ui'  aliis  populatoiibus  dicti  Podii  SalvatiTic ,  elc.  «  Reg.  I  de  la 
Procwacio  Real,  fol.  88,  publié  par  M.  J.  Massol-Reynier,  tes  Coultimes 
de  Perpignan,  p.  (i'i,  Moiitptdlicr,  1858.  «  Afcoiituiné,  dit,  à  son  tour, 
M.  Puijgaii,  à  rciicoutier  dos  méprises  de  toute  espèee  dans  les  rubrii|ues, 
les  copies,  les  sommaires  de  diverses  arrliivcs,  je  connais,  depuis  longtemps, 
la  nécessité  de  compulser  les  originaux,  (anl  qu'il  est  possible...  Ainsi  ai-je 
appris  coinbien  Puignau  s'est  grossièrement  trompé,  en  disant  ([ue  le  elià- 
teau  d'Opol  s'appelait  anciennement  Castar  de  Oped,  lorsqu'il  aurait  dû 
lire  Casilar  de  Oppl  fCasIlar,  comme  Calllar,  dans  le  Cooflenl,  signifiait 
rliàteau.  Voir  DucangeJ.  Mais,  quelques  choquantes  q\ie  soient  ces  erreui's, 
elles  se  répéteront  encore,  et  peut-être  éternellement,  comme  tant  d'autres.  » 
Le  Publicateur,  du  21  juillet  1852.  —Comme  on  l'a  vu,  M.  Alassot  a 
reproduit  le  lexle  de  Puignau,  qui  nous  parait  être  le  seul  bon,  quoi  qu'en 
ait  dit  M.  Puiggari  ;  car  le  lieu  d'Opol  s'appelait  encore  au  mi'  siècle 
Oped  ou  Opid.  dérivé  d'Oppidum,  et  ou  peut  lire,  dans  une  pièce  du  l-S  des 
calendes  de  décembre  125o,  les  confrontations  de  quebjucs  propriétés  situées 
à  Bonpas  et  confrontées,  du  midi,  in  limore  qui  fuit  Claie  de  Opidn,  ab  oicidcn(e 
in  honore  qui  fuil  llaijmundi  de  Claira  de  Opido  (Cari,  du  Temple,  fol.  2GG). 

'^  f.a  plus  ancienne  uuntion  que  nous  en  connaissions,  se  trouve  dans 


féodal  de  Salses  est  appelé  simplement  le  château.  Nous 
ii^norons  (railleurs  à  quelle    époque   la    dénomination , 
relativement  moderne  de  Caslell  vell  l'ut  mise  en  usage. 
On  ne  sait  pas  davantage  le  nom  primitif  de  cette  forte- 
resse, qui  devait  remonter  au  moins  à  l'époque  romaine. 
Mais,  s'il  est  jjrouvé  que  Sordonia  ne  peut  être  la  Torre 
Cerdana ,    la    logique  des  faits   et  le  sens  de  l'histoire 
amènent   irrésistiblement    à  conclure   que    la   Clausura 
Sordonia  du  vue  siècle  devait  se  trouver  entre  les  Pyré- 
nées et  Narbonne,  dans  le  voisinage  de  Salses  et  proba- 
blement sur  la  place  même  de  l'ancien  château  d'Opol, 
dont  l'antiquité  se   trouve  sullisamment  démontrée  par 
son  ancien  nom  de  Outlar  de  Oped  (ou  i'Oppulum) , 
ou  de  la  forteresse  non  moins  ancienne  de  CastellvelL 
On  comprend  ainsi  que  le  rebelle  Wittimir  apprenne  le 
premier  la  prise  des  châteaux  de  l'Albèra,  et  qu'il  s'en- 
fuie aussitôt  pour  porter  la  nouvelle  de  ce  désastre  à 
Narbonne.    Kn  un  mot,  cette  opinion  est  la  seule  qui 
s'accorde  avec  toutes  les  circonstances  du  fait  raconté 
par  Julien,  la  seule  qui  puisse  les  expliquer  et  les  faire 
admettre  raisonnablement.  Il  ne  lui  manque  qu'une  con- 
firmation ,   que  la  connaissance  de  l'ancien  nom  de  la 
forteresse  de  Castellvell  pourrait  sans  doute  lui  donner. 
Mais,   à  défaut  de  ce  témoignage   qu'il  faut  désormais 
renoncer  à  découvrir,  n'avons-nous  pas   un    fait    dont 
l'importance  ne  peut  être  méconnue?  C'est  le  voisinage 
même  de  cette  rivière  Sordus ,   qui  donna  son  nom  à 
l'étang  qui  la  reçoit,  à  la  côte  qui  l'avoisine,  ainsi  qu'au 

un  acte  du  5  des  ides  d'août  122J  (Arcli.  de  l'Hôp.  de  Perp.,  liasse  27, 
11»  73),  à  propos  d'une  propriété  située  à  Labcja,  dans  la  Salanca,  et  con- 
frontant à  meridie  in  honore  d'En  Casleluel.  Ce  n'est,  il  est  vrai,  qu'un  nom 
d'iioinuie;  mais  cbacun  sait,  qu'à  cette  époque,  le  nom  de  la  plupart  de 
nos  villajjes,  n'est  souvent  connu  (]iie  |)ar  les  individus  qui  le  portaient  et 
q\ii  en  étaient  originaires.  Le  nom  de  CasUllvell  (Castro  veleri )  se  trouve, 
d'ailleurs,  dès  l'an  I  15!),  dans  nos  do»iimcnts,  mais  c'est  pour  désigner 
une  famille  catalane  qui  n'avait  rien  de  commun  avec  notre  Castell  velt. 


1-29 

peuple  qui  Ihabitait.  Pourquoi  ne  l'aurait-elle  pas  douiK' 
également  à  une  forteresse  construite  sur  la  montagne 
d'où  elle  jaillit,  et  n'aurait-on  pas  appelé  Sordonia ,  la 
dausura  qui  fermait,  pour  ainsi  dire,  l'entrée  de  cette 
source  et  du  pays  des  Surdons? 

JULIA  LIBYCA  (UHIA). 

Pline  '  ayant  divisé  les  Ccrrctani  en  Juliani  et  en  Amjus- 
lani ,  M.  de  Marca  s'est  cru  autorisé  à  dire  que  ces  peu- 
ples jouissaient  du  droit  latin,  qui  leur  aurait  été  octroyé 
par  Jules-César ^  Celte  explication  peut  être  admise,  en 
partie;  mais  la  ville  de  ixdia  Libijca  se  trouve  mentionnée 
seulement  dans  la  (ico(jrap}iic  de  Plolémée,  qui  se  borne 
à  la  citer  comme  la  viUo  des  Corilans  (lih.  II,  cap.  6). 
Elle  tombe  ensuite  dans  l'oubli  pendant  plusieurs  siècles, 
à  moins  d'y  voir  cette  cité  des  Liviani  ^ ,  où  Sidonius 
Apollinaris  fut  exilé,  vers  l'an  47G. 

Sous  la  domination  des  Wisigollis,  le  Castrum  Lihyœ 
était  encore  la  capitale  de  la  Cerdagne,  défendue,  en  G72, 
contre  les  troupes  du  Roi  Wamba,  par  un  évéque  du  nom 
de  Jacinthus,  et  par  Araugiscle,  deux  des  cbampions  du 
duc  Paul*.  Un  autre  ambitieux,  du  nom  d'Abu-Nessa, 
s'y  défendit  aussi,  mais  sans  plus  de  succès,  contre  Abd- 
er-Rabman,  wali  d'Espagne;  et  un  cbronicpieur  contem- 

1  Cerrelani  qui  Juliani  cognominanfur,  cl  (jui  Aupiisbui  (Pline,  III,  5). 
'^Juliani  suut  vclercs  Ccrclani  (jui  Lalii  jure  potiebantur,  teste  codcm 

Pliiilo.  Istud  vero  asseculi  beneficio  Julii  Cicsaris,  uiide  coruni  oppidum 
Julia  Livia  dictuin  ( ilaïxa  hispnnicaj. 

2  Sidon.  Apoiliuaris  écrivait  vers  l'an  47C:  "  Duui  nie  teiuiit  iiiclusuni 
«  inora  mienium  LiviauoruMi  (cujus  incomuio<li  lineni  post  opern  Clirisli  tibi 
«  debco),niin  valebal  curis  aniinus  a'jjer  saltiiu  saltuatim  Iradeiida  jiereur- 
•  rere,  »  lib.  VIII,  lipist .  III,  Leuni.  —  Ce  Léon  était  de  Narboniie  et  secrétaire 
d'Euric.  Selon  >|uel<|ues  éditeurs,  la  ville  désignée  dans  ce  passage  serait 
le  lieu  de  f.iviana  de  la  Table  de  l'eutinger,  entre  Carcassonne  et  Narbonue. 

*  Casiruin  l-iby;e,  <|uod  est  l'.irritania.'  oaput...  (|uem  lacintlius  Episropus 
cuni  Araiigisclo..  post  jus  l'anli  peilidi  viiulicdbanl.   Jui.  Ilisl.rtg.  Hdmft.) 

9 


130 

porain',  se  contente  de  désigner  cette  ville  par  le  titre 
A' Oppidum  Cen-iUniensc.  A  pnrlir  du  ix"  siècle,  elle  n'est 
plus  connue  que  sous  le  nom  de  Livia%  cpf  elle  porte  encore 
de  nos  jours;  mais  il  parait  que  la  ville  actuelle  de  Llivia 
estmoderno,  elTantiqueLiV^ym  existait  à  une  petite  distance 
au  N.-O.,  sur  la  colline  où  se  voient  encore  les  restes  des 
mursdont  elle  était  entourée  (IIemiy,  Guide  m  Ronss.,1oo}. 
Nous  n'avons  pas  besoin  d'ajouter  que  la  ville  de  Libyen 
n'était  pas  comprise  dans  les  Gaules;  c'est  aujourd'hui  une 
ville  espagnole,  qui  se  trouve  enclavée  dans  le  territoire  du 
département  des  Pyrénées-Orientales,  et  c'est  pour  cela , 
seulement,  que  nous  avons  cru  devoir  en  parler. 

t  Neinpe  ubi  in  Corritancnsc    oppidum  repcritur  vallatus,    obsidione 
oppressus,  etc.  {Clironic.  Isidori  Episcopi  Pacensis.) 

2  Livia,cn8l9(Marca,J)  — En85G,parrochiaquajdicilurLivia(/6.,-l'l). 

—En  876,  in  suburbio  Liviense(l6.,  41). 


Nous  venons  de  passer  en  revue  tous  les  noms  géographiques 
cités  dans  les  auteurs  de  l'antiquité,  et  qui  peuvent  être  inscrits, 
avec  certitude,  sur  une  carte  historique  du  pays  des  Pyrénées- 
Orientales,  sous  la  domination  romaine.  Ces  noms  laissent  entre 
eux  des  vides  immenses,  que  l'élude  de  nos  antiquités  permettrait 
de  remplir,  jusqu'à  un  certain  point;  mais  nous  n'avons  pas  voulu 
faire  ici  une  statistique  monumentale,  et  le  titre  même  de  notre 
travail  ne  nous  permettait  pas  de  faire  autre  chose  que  ce  (jue  nous 
avons  fait.  Ce  n'est  pas  que  nous  ne  comprenions  l'utilité  d'un 
répertoire  archéologique;  malheureusement,  lorsqu'il  s'est  agi  de 
convertir  en  faits  de  géographie  positive,  pour  notre  déparlement, 
les  indications  fournies  par  les  médailles,  les  inscriptions,  les 
étymologies  et  les  débris  de  constructions  romaines,  nous  avons 
rencontré  des  difficultés,  qui  n'arrêteront  pas  tout  le  monde,  sans 
doute,  mais  que  nous  n'avons  jias  cru  pouvoir  aborder.  Car  la 
topogra]tliie  historique  veut  autre  chose  que  des  conjectures,  des 
probabilités  et  des  points  d'interrogation;  et  il  nous  semble  impos- 
sible d'inscrire,  sur  une  carte  historique  du  Roussillon  romain, 
autre  chose  que  les  noms  transmis  par  les  documents  de  l'histoire 
elle-même,  ou  par  les  inscriptions  contemporaines. 


l.'il 


LA  VOIE  ROMAINE  DE  L'ANCIEN  KOUSSILLOiN . 

Par  M.   B.   Al>ABV,   niciiibre  résidant. 


Nous  aurons  encore  à  ronibattre,  au  sujet  de  notre  voie  romaine, 
comme  nous  avons  dû  le  faire  pour  certaines  questions  de  notre 
topographie  ancienne,  les  opinions  d'hommes  éminents,  qui  ont 
pu  se  trom|)er  quelquefois,  mais  qui  n'en  duivcnl  pas  moins  être 
considérés  comme  les  véritables  loiidateurs  de  l'archéologie  rous- 
sillonnaise.  Les  Fossa,  les  Sainl-Malo  et  les  Puiggari  ne  sont  pas 
sans  doute,  en  tout  et  toujours,  des  oracles  infaillibles;  cependant, 
ce  n'est  pas  sans  éprouver  de  pénibles  regrets,  que  nous  nous 
voyons  obligé  d'abandonner,  pour  une  question  particulière,  des 
guides  que  nous  voudrions  toujours  suivre,  et  dont  on  ne  saurait 
trop  écouter  les  leçons.  Mais  l'arcliéologie  ne  se  fonde  (las  sur  la 
tradition  :  ce  sont  ici  les  découvertes  et  les  faits  qui  décident  les 
convictions,  et  nous  pouvons  conserver  religieusement  le  souvenir 
des  maîtres,  sans  oublier  que  nous  ne  devons  jamais  les  honorer 
aux  dépens  de  ce  que  nous  croyons  être  la  vérité. 


Il  a  pu  exister  plusieurs  routes  romaines  dans  le  pays 
de  Ruscino,  pour  aller  de  Narbonne  en  Espagne;  mais 
les  auteurs  anciens  n'ont  parlé  que  d'une  seule,  et  leurs 
témoignages,  qui  sont,  d'ailleurs,  peu  explicites  et  en  fort 
petit  nombre  ,  peuvent  se  résumer  en  quelques  lignes. 
Les  monuments  archélogiques  découverts  jusqu'ici  dans 
le  département,  sont  aussi  fort  rares  et  d'un  faible  se- 
cours, pour  la  question  dont  il  s'agit. 


132 


C'est  avec  ce  petit  nombre  de  documents  incomplets, 
souvent  incertains  et  diversement  inlorprélés,  que  les 
savants  modernes  ont  essayé  de  retrouver  la  voie  romaine 
qui  traversait  le  Roussillon.  Mais  les  opinions  émises  à 
ce  sujet  sont  aussi  nombreuses  que  contradictoires;  car 
certains  auteurs  ont  vu  deux  voies  là  où  d'autres  n'en 
ont  admis  qu'une  seule,  et  il  n'existe  pas  moins  de  dix 
systèmes,  souvent  entièrement  dillércnts,  sur  la  direction 
de  notre  roule,  et  la  situation  des  diverses  stations  signa- 
lées par  les  textes  anciens. 

On  ne  saurait,  d'ailleurs,  traiter  aujourd'hui  les  questions 
qui  se  rattachent  à  cette  partie  de  la  Voie  AurcUa ,  sans 
examiner  les  travaux  des  écrivains  qui  s'en  sont  occupés; 
et  il  importe  de  se  tracer  d'avance  un  plan  pour  la  dis- 
cussion de  ces  matières  difficiles,  afln  d'éviter,  autant 
que  possible,  la  confusion.  Nous  procéderons  par  ordre 
chronologique,  et  nous  commencerons  par  citer  les  textes 
anciens,  dont  nous  tàclierons  de  faire  comprendre  le  sens 
et  la  portée.  La  discussion  des  opinions  émises  jusqu'ici, 
indiquera  les  preuves  de  toute  nature  sur  lesquelles  on  les 
a  appuyées,  et  donnera  l'occasion  d'en  apprécier  la  valeur 
et  le  caractère.  Nous  développerons,  cnlin,  le  système  qui 
nous  paraîtra  le  mieux  s'accorder  avec  les  témoignages 
authentiques  des  auteurs  anciens,  et  avec  les  preuves 
fournies  ii  ce  sujet  par  la  géographie,  l'histoire  et  l'ar- 
chéologie, en  y  ajoutant  le  petit  nombre  de  preuves  nou- 
velles et  de  considérations  particulières,  qui  nous  auront 
semblé  venir  à  leur  appui. 

11  y  aura  peu  de  découvertes  archéologiques  a  signaler 
dans  notre  travail  ;  car  il  ne  faut  pas  se  dissimuler  que, 
sous  ce  rapport,  la  question  de  notre  voie  romaine  est  une 
question  à  peine  entamée,  et  le  sol  du  Roussillon  n'a 
pas  encore  été  soumis  a  des  explorations  archéologiques 
dont  la  science  puisse  tirer  quelque  profit.  Nous  ne  sau- 
rions, dès  lors,  avoir  d'autre  but  que  d'arriver,  par  l'in- 


i:i3 


lerprétalion  riguiireiise  des  textes  anciens,  à  |)lacer  quel- 
ques jalons  et  à  indiquer  la  direclion  de  l'ancienne  voie 
dans  notre  pays;  et,  si  ce  résultat  se  trouvait  définiti- 
vement acquis,  il  serait  facile  d'en  coni|)rendre  linipor- 
tancc ,  j)ar  le  simple  exposé  liist()ri(}uc  des  systèmes 
contradictoires  émis  jusqu'ici  à  ce  sujet. 


lïfat  ilc  la  <iiiio.<)«tGan  «io  no(r<^  voE(>  romalno, 

en   fiSôi^ 

Malgré  la  diversité  des  interprétations ,  il  n'y  avait  eu 
qu'un  système  longtemps  adopté  sur  la  voie  romaine 
que  les  savants  modernes  traçaient  à  travers  le  Hous- 
sillon,  dans  une  direction  qui,  au  fond,  restait  toujours 
la  même,  entre  Salses  et  le  Pertlius,  lorsque  M.  Jacques 
de  Sainl-Malo  |)ul)lia  ses  Éludes  sur  la  ]'oie  Ilomaiuc, 
conduisant  de  Aarhunne  en  lhcric\  Notre  archéologue 
envisageait  la  (picstion  sous  un  point  de  vue  entièrement 
nouveau;  il  admettait  deux  voies,  au  lieu  d'une,  et  leur 
assignait  des  stations  presque  toutes  différentes  de  celles 
qu'on  avait  signalées  jusqu'alors.  «  il  se  trouvera  ])eut- 
«  être  des  juges  sévères,  ajoutait  M.  de  Sainl-31aIo,  qui 
«  repousseroJit  mes  études,  parce  qu'ils  ne  verront  que 
«  des  conjeclures  dans  tout  ce  qui  a  rapport,  soU  à  la 
«  direction  que  j'attribue  à  la  voie  romaine,  soit  à  la 
«  position  des  dites.  Mais  les  écrivains  qui  m'ont  j)récédé 
X  dans  cette  carrière,  n'ont  pas  agi  dilTéremment.  La 
«  raison  en  est  simple  :  c'est  qu'il  n'y  avait  pas  d'autre 
«  moyen  pour  parvenir  au  but  qu'ils  s'étaient  proposé; 
«  l)uisque  l'objet  qu'ils  voulaient  faire  connaître  avait 
«  totalement  disparu  »  —  Annuaire  de  i85i  ,  p.  23!2. 

'   Dans  VAnmtaite   des    l'yrénées-Oïknlala ,    pour    1851.   |raf;e  i\)l    e^ 
suiv.iiiU--. 


134 

Nous  ne  saurions  assurément  nous  ranger,  à  aucun 
litre,  parmi  les  juges  sévères  dont  |)arle  M,  de  Sainl- 
Malo  ;  mais  il  est  permis  de  regretter  qu'un  critique  aussi 
éminent  n'ait  pas  vu  d'autres  moyens  que  dos  conjectures, 
pour  résoudre  la  question  (jui  nous  occupe.  Même,  en 
admettant  que  la  route  romaine  du  Koussillon  soit  aujour- 
d'hui complètement  détruite,  la  saine  critique  pourrait 
toujours  s'en  tenir  aux  témoignages  des  auteurs  anciens. 
INous  sonnnes  convaincu  qu'on  peut  encore  arriver  au  but 
autrement  que  par  dos  hypothèses  et  des  conjectures,  et 
le  moyen  consiste  dans  l'interprétation  exacte  et  rigou- 
reuse des  anciens  documents,  dont  il  faut  reconnaire  le 
sens  et  la  valeur,  avant  de  songer  a  les  mettre  en  œuvre. 
Par  là,  seulement,  on  peut  espérer  de  savoir  sur  cette 
question  ce  qu'il  est  possihlc  d'oi  stivoir  (lujovfd'hni,  au 
lieu  d'aboutir  à  de  simples  conjectures,  plus  ou  moins  vrai- 
semblables ,  ou  de  procéder  à  la  reconstruction  exacte  et 
complète  d'un  monument  qui  aurait  totalement  disparu. 

Cependant,  à  Tépoque  même  où  1\I.  de  Saint-Malo 
semblait  considérer  le  problème  de  celte  Voie  comme  une 
question  à  peu  près  insoluble,  il  n'y  avait  plus  qu'un  pas 
à  faire,  selon  nous,  pour  arriver  à  la  solution  définitive; 
et,  ce  pas,  c'est  M.  de  Gazanyola  qui  l'a  fait.  Son  système 
n'était  pas  tout-à-fait  inconnu  à  M.  de  Saint-Malo,  qui 
semble  y  faire  allusion ,  en  parlant  «  des  personnes  qui 
«  établissent  la  station  Sunwmm  Pyrenœum,  à  l'extré- 
«  mité  méridionale  du  col  de  Banyuls,  et  Ce)iturio7ies,  en 
«  vue  de  la  tour  de  Madalolh'.  »  Il  attendait,  en  consé- 
quence, «  qu'on  signalât  cotte  intéressante  localité  d'une 
«  manière  plus  précise,  et  qu'on  administrât  des  preuves 
«  propres  à  transformer,  en  propositions  incontestables, 
«  les  assertions  relatives  à  la  position  des  deux  station* 
«  ci-dessus  mentionnées  ^  » 

I  Ànnuairt  de  IS54,  \yi^<t  225. 
■^   Ibid.,  |);ii|«  22 i. 


135 

M.  de  Gazanyola  répondit  à  cet  appol,  et  son  svslèuie 
se  trouve  exposé  dans  son  Histoire  du  Roussillon ,  qui 
n'a  paru  qu'en  1857.  Au  lieu  de  chercher  des  preuves 
nouvelles,  qu'il  ne  dépendait  pas  de  lui  do  découvrir,  il 
a  cherché  à  comprendre  celles  qui  avaient  été  fournies 
avant  lui  ;  il  a  cherché  surtout  à  pénétrer,  sans  parti  pris, 
le  vérilahle  sens  des  textes  où  il  est  question  de  notre  voie 
romaine  ;  et,  c'est  en  partant  de  ce  principe,  en  s'appuyant 
toujours  sur  les  laits  historiques  et  sur  les  monuments 
antiques  découverts  dans  notre  pays,  qu"il  est  parvenu  à 
retrouver  la  direction  de  la  voie  romaine,  depuis  son 
entrée  dans  le  pays  des  Sordons  jusqu'à  son  passage 
en  Espagne.  Les  preuves  données  par  M.  de  Gazanyola, 
ne  sont  pas  toujours  décisives,  et  celles  qu'il  emprunte  à 
nos  inscriptions  romaines  et  qu"il  a  d'ailleurs  longuement 
et  savamment  développées,  sont,  à  notre  avis,  parfaitement 
inutiles  pour  le  hut  qu'il  se  proposait.  Néanmoins,  son 
système  est  excellent  dans  son  ensemble;  il  est  appuyé 
d'arguments  sérieux  et  qui  nous  paraissent  sans  réplique. 
Aussi  ne  pouvons-nous  que  ladopter  en  principe,  en  lais- 
sant de  côté  les  considérations  qui  paraissent  étrangères 
à  ce  sujet,  et  en  le  fortifiant  des  preuves  nouvelles  que 
nos  recherches  et  l'étude  particulière  de  cette  question 
auront  pu  nous  fournir. 

On  a  fait  depuis  bien  longtemps  déjà  Ihistoire  des 
grands  chemins  de  Rome,  et  les  érudits  modernes  ne 
nous  ont  rien  laissé  ignorer  de  ce  qui  concerne  l'origine 
de  nos  voies  romaines,  les  noms  qu'elles  portaient,  les 
règles  et  les  usages  suivis  dans  leur  direction  et  leurs 
dimensions,  et  les  matériaux  employés  pour  leur  cons- 
truction. Ce  sont  des  détails  importants,  sans  doute,  pour 
d'autres  chemins;  mais  nous  n'en  voyons  pas  lulilité 
pour  ré'tiide  de  la  voie  qui  traversait  notre  pays.  Nous 
laisserons  également  de  côté,  pour  le  moment,  tous  les 
monuments  archéologiques,  signales  en  Houssillon,  d'au- 


I3C 

Uinl  plus  que  peisoniie  n"a  pu  citer  jusqu'ici,  dans  ce 
pays,  le  moindre  Iragmenl  de  clieniin  qui  puisse  être 
attribué  d'une  manière  incontestable  à  une  voie  romaine; 
et  ce  genre  de  prétendues  preuves  n'a  peut-être  servi  qu'à 
induire  en  erreur  la  plupart  de  nos  devanciers.  Nous 
admettrons  donc,  en  attendant  mieux,  comme  le  disait 
M.  de  Saint-Malo  en  1834,  la  destruction  complète  de 
notre  ancienne  voie;  et  même,  sans  ciiercber  s'il  a  existé 
une  ou  plusieurs  voies  dans  notre  pays,  nous  nous  bor- 
nerons à  reconnaître  la  direction  de  la  route,  ou,  s'il  y  a 
lieu,  des  deux  routes,  mentionnées  par  les  auteurs  dont 
les  écrits  sont  parvenus  jusqu'à  nous,  en  étudiant  les 
textes  et  les  faits  dans  l'ordre  chronologique  où  ils  se 
sont  produits,  pour  eu  interpréter  le  sens  d'une  manière 
rigoureuse. 

Voici  donc  l'histoire  de  notre  voie  romaine,   d'après 
les  témoignages  authentiques. 


l'.ASSAGP.  D'AiSrSitJAL. 

«  Le  premier  fait  historique  nous  indiquant  une  route 
«  à  travers  le  Roussillon  pour  aller  d'Espagne  dans  les 
«  Gaules,  est  le  passage  d'Annibal,  qui  eut  lieu  217  ans 
«  avant  J.-C.  (Tite-Live,  XXI,  2i).  Ce  grand  capitaine, 
«  après  avoir  franchi  les  Pyrénées,  camjjo  ail  oppidum 
<(  illibcrim.  Quelques  peuplades  gauloises  se  réunissent  à 
«  Ruscino,  sans  doute,  parce  que  ces  deux  villes  étaient 
«  situées  sur  le  chemin  que  Ton  suivait  alors;  et  la  posi- 
«  tion  du  (Carthaginois,  dont  le  principal  objet,  pendant 
«  qu'il  traitait  avec  les  Gaulois  (réunis  à  Ruscino),  devait 
«  être  de  couvrir  ses  communications  avec  l'Espagne, 
<(  dénote  assez  que  la  route  qu'il  avait  suivie,  pour  venir 
«  à  llli/ii'iis  ne  devait  pas  s'éloigner  de  la  côte.  »  //t.sV. 


137 

du  RuiLssillua,  page  45.  -  On  ne  peul  quapitlaudir  aux 
explications  de  M.  de  (lazanolya,  en  observant,  toutefois. 
que  les  historiens  de  la  seconde  guerre  puni(jue,  l'olybe 
et  Tite-Live,  ne  font  mention  d'aucune  route,  à  propos 
du  passage  des  Pyrénées  par  le  général  carthaginois. 

TlÎMOIfiNAGF.  I>E  l'OI.YP.r. 

Après  cet  événement ,  nous  trouvons  un  témoignage 
précieux  de  riiislorien  Polybe,  qui  mourut  au  plus  tard 
1  an  lli  avant  Jésus-Christ,  trois  ou  quatre  ans  après  la 
conquête  de  la  Karbonnaise  par  les  Romains.  Voici  les 
termes  mêmes  de  ce  passage ,  qui  est  de  nature  à  jeter 
un  jour  essentiel  sur  la  question  qui  nous  occupe  : 

Atto  ^è  TO-j  Io-/)0o;  e?ç  Karcopuo-J ,  yCk'.O'.  ahj  klay.oi'.oi:; 
{gtcxSiok;).  Kjl'  py^v  vjvvjBvj  èm  tyjv  TO\i  Po'îavovj  è>.6S'xrjVJ, 

csrjTi'j.î'MTy.'.  y.y.TCi  oraSiO-jç  ox-o>  Si(X  Pco^uaicov  eTrtfxs/ôo^. 
POLYB.  Jfisl.  m,  ,y9. 

«De  l'Èbre  à  Emporks,  il  y  a  1.600  stades,  et,  de 
«  là,  jusqu'au  passage  du  Rhône,  il  y  en  a  tout  autant; 
«  car  tout  ce  trajet  se  trouve  maiiilownl  mesuré  et  soi- 
«  giicusement  marqué  de  huit  en  huil  stades  par  les  Ro- 
«  mains.  » 

Les  bornes  milliaires  qui  avaient  permis  aux  Romains 
de  mesurer  la  dislance  entre  le  Rhône  et  Empories, 
n'avaient  pu  être  établies  (]ue  sur  un  chemin  antérieur  à 
leur  conquête,  et  (pii  était  sans  doute  l'œuvre  des  (iau- 
lois.  Il  importe  peu  de  savoir  si  cette  route  |)rimitive 
était  comparable,  pour  la  construction  ou  les  dimensions, 
aux  voies  que  les  Romains  établissaient,  dès  cette  époque, 
dans  d'autres  pays;  mais  on  voit  que  le  parcours  en 
était  marqué,  avce  le  jilus  f/rand  soin,  par  des  bornes 
placées  à  "200  milles  les  unes  des  autres;  et  cette  régu- 
larité des  mesures,  ('tablies  par  les  Romains,  et  relevées 


I3S 

dune  luauièio  si  précise  par  Polybe ,  prouve  que  cette 
route  n'oirrail  alors  (ju'uiie  seule  voie  dans  tout  son  par- 
cours, do  même  que  sa  direction  par  Kmpories  montre 
qu'elle  ne  devait  guère  s'écarter  du  voisinage  de  la  mer. 
«  A  cette  époque  lUihcris  et  liuscino  étaient  les  seules 
«  ou  du  moins  les  principales  villes  du  iloussillon.  La 
«  civilisation  du  pays  avait  commencé  sur  les  côtes  : 
«  c'était  donc  là  qu'on  avait  eu  plutôt  senti  le  besoin 
«d'une  route,  et  qu'on  avait  eu  plutôt  les  moyens  de 
«l'entreprendre.  Tout,  en  un  mot,  doit  nous  faire  pré- 
«  sumcr  que  le  chemin  dont  parle  Polybc  était  celui 
«  qu'avait  suivi  Annibal,  et  qu'il  passait  par  liuscino  et 
«  Illiberis,  traversant  les  montagnes  dans  le  voisinage 
«  de  la  mer  ',  »  pour  aboutir  à  Empories. 

TFMOIONAGl':  Dh:  SIRABON. 

Le  témoignage  que  nous  fournit  le  géographe  Strabon, 
au  premier  siècle  de  notre  ère,  n'est  pas  moins  précieux, 
et  il  s'accorde  parfaitement  avec  celui  de  Polybe. 

Ev-b;  (5e  TO-j  iÇripoq  iJ-î'ypi  Fluor/Vr/;  -/.a:  tcov  Uoix'Kri'.'o-j 
oiMoS-n'J-oiTO^-j ,  ypAo:  x-X'.  îcc/.y.ô-i'.O'. —  Msra^ù  è\  tcov  to-j 
lo^/jpoç  fxrpoTcov,  xa:  twv  axpœv  Tv,q  ri'JCrlv/yÇ,  £cp  ô)V 
lèp-jvy.'.  Tût  a:jyf)ri'j.y.rc/.  to'j  ïlo^uLirr/'o-j,  irptoTV)  Tapaxcov 
laxi  iroXtç.  Stuar.,  lib.  IIL 

«Il  y  a,  dit-il,  de  TÈbre  jusqu'à  Pyrènc  et  aux 
«  Trophées  de  Pompée  l.COO  (stades)...  Knire  lesembou- 
«  chures  de  l'iUire  et  les  extrémités  de  Pyrène  où  sont 
«  construits  les  Trophées  de  Pompée,  la  première  ville 
«  que  l'on  trouve  est  Taracon  (Tarragone).  »  Strabon 
continue  ensuite  la  description  de  la  cale  et  arrive  à 
Kmpnrion.  «  C'est  une  fondation  des  Massaliotes ,  à 
«  400  stades  de  Pyrènc  et  des  limites  de  rihérie  et  de 

'    Uid.  ihi  rummllon,  ji.ir  VI.  do  (Jnz.iuyol.n  ,  |i.    'i  'i. 


130 
«  la  Cellique  (o-jov    ■:irrjay.'.<jyj'h\Q-jq,    èUyo'i    rrlç    I\jorivr,q 

«  Ks/rixYjv).  Toute  cette  région  est  bonne,  et  elle  a  des 
«  ports   excellents  ;    c'est    là    que   se   trouve    Rliodopè 

«  (Roses) Une  portion  du  pays  qui  appartient   aux 

K  Emporitains,  dans  l'intérieur  des  terres,  est  assez 
«fertile,  le  reste  ne  produit  que  du  sparthutn ,  espèce 
«  de  jonc  qui  se  plail  dans  les  marais ,  et  qui  n'est  pas 
<(  d'un  grand  usage  :  le  terrain  qui  le  produit  porte  le 
«  nom  de  champ  Joitncaire  (xa).o\t7!  âi  lo-jyy xpio-j  77-â:ov). 
«  D'autres,  enfin,  habitent  aux  extrémités  de  Pyrène,  jus- 
«  qu'aux  Trophées  de  Pompée,  par  où  l'on  passe  pour 
«  aller  de  l'Italie  dans  l'Ibérie  dite  extérieure,  ou  plutôt 
«  dans  la  Bétiquc.  Tivîç  SI  xa:  -wv  rri;  U-jprrrr,^  ôcxpcov 
«  vêacvra;  pî'xP'  '^'^'■'  ^■'^^''l'^^'^^^'J  '^'^^  noy.Trr/oj ,  (5:  "  wv 
«  (3aâ:Coj<7!v  £:'ç  -riv  e;co  xa).0"Jfji.£vr/V  loz/ptav  ex  tô; 
'<  IraVaç.  »  Strab.  ,  lib.  III. 

Pour  Strabon,  comme  pour  Polybc,  la  situation  de 
l'embouchure  de  l'Èbre  est  déterminée  par  la  distance 
qui  la  sépare  des  extrémités  des  Pyrénées  '.  Il  mesure 
de  même  la  position  de  la  ville  d'Enipon'cs ,  qui  se  trouve 

'  u  lui  IraJuisaiil  par  sommc/s  des  Viirénées  k's  mots  (jiie  tous  los  traduc- 
teurs ont,  ce  me  semble,  rendus  avec  plus  de  liilélité  par  ceux-ci,  l'exlré- 
milé  des  Pyrénées  ou  ai\Ucs  C(]nivalcnts ,  M.  de  Marca  change  un  passage 
clair,  et  (jui  iiidi(|uait  fort  bien  la  direction  de  la  route  et  la  situation 
des  tropiiées,  en  un  autre  qui  n'indique  plus  rien  ;  et  supposant,  gratui- 
tement, que  la  voie  romaine  passait  au  Pertlius,  comme  y  passe  la  route 
actuelle,  il  place  les  trophées  vers  ce  point.»  De  G.\zan\oi.a  ,  llisl.  du 
Aou$si(/on,  page  AdS.  —  Dans  la  traduction  latine  deSlrabon,  (lasaubou 
rend  ainsi  ce  passage  :  Quidam  el  exlrema  l'ijrenes  accotmU ,  tisqiie  ad 
lro})hcra  l'ompeii.  11  est  certain  que,  dans  Strabon,  le  mot  OCXpOV  est  pres- 
que toujours  employé  dans  le  sens  de  cap  ou  promontoire ,  celui  qui  est  ii 
rouest  de  Massalie  n'est  pas  désigné  aulromenl,  iT\  OLy.rj7.'i  Z^j^îyvhi 
(lib.  IV),  cl,  dans  le  passage  en  (jueslion  ,  les  c.rftv'miVi.s  (/<•  Vijrine  ne 
psuTunt  s'enlïudre  quv  des  Promontoires  des  Pyrénées. 


140 

à  ilX)  staïk's  de  la  limite  commune  des  Gaules  el  de 
l'Ibérie,  ou  des  Trophées  de  Pomi)ée  qui  sont  à  l'extré- 
mité des  Pyrénées,  sur  le  passage  de  la  route.  Dans  toute 
cette  description,  Strabon  ne  perd  pas  de  vue,  un  seul 
instant,  la  côte  qn'i!  suit,  de[»uis  l'embouchure  de  l'Kbre 
jusqu'aux  i)romontoircs  des  ISrénées.  Il  la  suit  de  nou- 
veau, mais  dans  un  sens  Oj)posé,  à  partir  de  la  limite  des 
Gaules  où  il  a  trouvé  la  route  d'Italie,  car  il  continue  ainsi, 
immédiatement  après  :  «  Cette  route  est  parfois  très- 
'<  proche  de  la  mer'  ;  d'autres  ibis  elle  s'en  éloigne,  surtout 
«  dans  les  régions  de  l'ouest.  A  partir  des  trophées  de 
«  Pompée,  elle  se  dirige  sur  Taracon  (Tarragona),  en 
«  passant  par  le  champ  Joncaire,  Bellerôn  *  et  le  champ 
«  Marathoninm  (Fonollères),  ainsi  appelé  en  langue  la- 
«  tine,  à  cause  du  maralhon  (fenouil)  qu'il  produit  en 
«  abondance.  De  Taracon  ,  la  route  se  dirige  sur  Dcriossa 
«  (Tortosa),  après  avoir  passé  l'Kbre,  etc.  »  (Strab., 
lib.  III.) 

Comme  on  le  voit,  les  mesures  de  Slrabon  sont  celles 
de  Polybe;  les  chiffres  peuvent  varier,  mais  les  jalons 
(l'embouchure  de  l'Èbre  et  Kmpories)  sont  les  mômes, 
et,  pour  ces  deux  auteurs,  le  seul  moyen  de  mesurer 
cette  distance,  consiste  toujours  à  suivre  la  côte  mari- 
tinje,  entre  l'Èbre  el  l'extrémité  orientale  des  Pyrénées, 

-  In  aiirimi  liadiicUiir  a  In  iîsTTSpCOVCOV  an  lien  <lc  BeTTcjDWV, 
mais  oc  lien  est  anssi  inconnn  sous  le  premier  nom  (jnc  sous  le  scconil. 
(la$aul)i>n  inclincruil  à  penser  ij ne  le  ïielleron  de  Stialion  pourrait  ëlre  le 
lieu  (le  Sfceiras  (le  Vllinèraue  J'Antoniii,  en  ndmettanl,  Lien  entendu, 
une  errenr  chez  Tnn  ou  chez  l'autre  de  ces  auteurs.  La  corruption  du 
texte  de  Slrabon  parait  é\ii!enlp,  niais  |)<'ul-(?lre,  an  li,  ii  de  i.£Xcppa)V, 
faudrait-il  lire  h^p-TTOOcJOV,  ou  tout  au  plus  FîCCOVOa,  Germida ,  (|ui 
se  trouve  (également  sur  le  parcours  de  la  \"ie  romaine,  entre  les  Pyrénées 
et  Tariajjonr  ,  d'après  YUinnaire. 


dans  l:i  dircclioii  de  l:i  loiile  i\un  l'olyi)(3  si^'iialait  déjà 
sur  celte  lip,'ric,  et  ijiie  Sliahou  retrouve,  en  eUel,  sur  la 
limite  des  (juules  et  de  l'il^érie.  Or,  cette  route,  selon 
Strabon,  suivait  presque  toujours  le  hord  de  la  nier,  et, 
si  elle  s'en  écailail  (|ii(!l(|uerois,  c'élail  seulement  dans 
lus  parties  occidentales,  cl  après  ([u'elle  avait  dépassé 
l'Èbre.  Klle  côtoyait  donc  la  mer  au  |)assaf,'e  des  Pyrénées; 
elle  en  était  encore  i)ien  [)rès,  lors(|u'elle  traversait  le 
champ  Juncoire,  puiscpie  Strabon  (b'sij^ne,  sous  ce  nom, 
la  côte  basse  et  marécageuse  (jiii  entoure  Empories.  11 
n'y  a  donc  rien,  dans  cette  description,  (|ui  ne  soit  en 
rapport  avec  le  lémoij,'na}^e  de  l'olsbe,  et  il  est  inipos- 
sil)i(;  de  clierclier  ailb'urs  (ju'</«  hoid  de  la  mer,  a  l'ex- 
Irémilé  des  Pyrénéens,  et  sur  la  limite  des  (jaules  et  de 
ribéric ,  C(;s  ti'ophécs  de  Pompée  pur  oii  passait  la  route 
qui  conduisait  de  l'Italie  en  EspiKjne. 

Le  langage  de  Strabon  devient  encore  plus  ex|dicile, 
lorsqu'il  décrit  la  Gaule  Narbonnaise.  «  Le  rivatje  de  la 
«Celtique  s'étend,  dit-il,  depuis  le  Var  jusqu'à  Yliiéron 
«  d'Aphrodite  Pyrénéenne,  qui  est  la  limite  de  ce  pays 
«  et  de  ribérie.  D'autres ,  au  contraire,  fixent  la  limite 
«  de  l'Ihérie  et  de  la  Celtique  à  l'endroit  où  sont  les  Iro- 
«  phécs  de  Pompée.  Il  y  a  05  milles  de  là  à  Narbonne.  « 

Evt£ÎjÔ£v  <  du  \ar)  f/jv  ow  y)  Trxoa/t'a  TTy.oy.re'-Jsi  jJn'ypt 
T'j\J  '.'.yrj  T^ç  Ilvv/ivoc^aç  A'^coO!t//î,  y.y/  rrrjzrt  ^  eW:v 
ooîov  Tau—/;;  n  -^Traoy/aç  za;  rr,:  1o//0:-/.ys  '  ^^îo:  oï  rov 
TOTTOv  ij  M  Ion  ra  IlofATre'o'j  rpfjTry.'.y.,  ooio-j  iCViOraç 
a7vo'i>a'.voj'3!  y.y  t.'^ç  Kî/rîzr,;  îct:  o  v/Jij  e:ç  >aj;ooi)va 
fxi'My  ly.  Stuau.,  lib.  IV. 

Strabon  veut  donner,  dans  ce  passage,  la  mesure  de 
la  côte  niariliine  des  (iaules,  comprise  entre  I  Italie  et 
l'Espagne.  Il  part,  évidemment,  des  deux  points  extrê- 
mes situés  sur  le  bord  de  la  nier,  soit  rcndjoucbure 
du  Var  et  le  Tew}il<'  d' .{phradili'  Pyrénéenne,  qui  étaient 


les  deux  limites  de  la  ('<Ue  luarilime  des  (laides.  Il  roniai- 
que,  il  est  vrai,  (jiie  la  limite  n'était  pas  bien  établie  du 
côté  des  Pyrénées,  puisque  certains  auteurs  la  portaient 
au-delà  du  Temple  d'Aplivodile,  à  l'endroit  où  sont  les 
Trophées  de  Pompée.  Mais,  pour  que  Strabon  tint  compte 
de  cette  seconde  opinion,  dans  le  calcul  qu'il  avait  en  vue, 
il  fallait  bien  que  le  point  des  trophées  de  Pompée,  lût 
également  situé  sur  le  bord  de  la  mer;  car,  si  on  voulait 
aujourd'hui  mesurer  l'étendue  du  littoral  français,  com- 
pris entre  Cette,  par  exemple,  et  la  frontière  espagnole, 
on  s'arrêterait  évidemment  à  Ccrvera;  peut-être  irait-on, 
par  erreur,  jus(|u'au  Ca]>  de  Creus,  mais  personne,  à  coup 
sûr,  ne  s'aviserait  d'aller  prendre  sa  mesure  au  Perlhus  ou 
à  Puig-Cerda.  Il  faut  bien  croire  que  les  anciens  n'étaient 
pas  plus  arriérés  que  nous  à  cet  égard. 

Si  nous  lisions  aujourd'hui,  dans  une  géographie  du 
Roussillon  :  «  C'est  le  phare  du  Cap  Biar  qui  forme  la 
«  limite  de  la  France  et  de  l'Espagne;  d'autres,  au  con- 
«  traire,  fixent  la  limite  à  l'anse  de  Cerbéra,  »  nous  nous 
bornerions  à  dire  que  la  seconde  opinion  est  la  seule  vraie. 
Mais  si  l'on  écrivait,  que,  «  pour  quelques-uns,  cette  limite 
«  est  fixée  à  Vansc  de  Cerhéra,  tandis  que  d'autres  veulent 
«  la  mettre  au  fort  de  Bellegarde ,  »  il  serait  permis  de 
dire  que  ces  deux  opinions  sont  également  fondées,  en 
ajoutant,  toutefois,  qu'il  est  au  moins  inutile,  pour  ne  pas 
dire  plus,  de  donner,  comme  différentes,  deux  opinions  qui 
s'accordent  parfaitement.  Or,  nous  nous  demandons  s'il  est 
permis  de  prêter  à  Strabon  une  phrase  équivalente;  car 
on  ne  lui  fait  pas  dire  autre  chose,  lors(|u'on  admet  que 
les  trophées  de  Pompée  pouvaient  se  trouver  au  passage 
actuel  du  Perthus.  Il  nous  semble  que  Strabon  mérite 
d'autres  égards,  et  si,  dans  le  calcul  qu'il  faisait,  cet 
auteur  cite,  comme  également  respectables,  deux  opinions 
dillérentes  relatives  à  la  limite  de  la  côte  des  Gaules  du 
côté  des  Pyrénées,  il  fallait  bien  que  les  deux  points  qu'on 


lui  signalait  comme  limite  iusseiil  situés  sur  la  côte  cl  dam 
in  mê)iic  direction;  car,  s'il  se  fût  açji  des  limites  intérieures, 
on  aurait  pu  lui  citer  cent  endroits  dillerents,  au  lieu  de 
deux,  pour  former  la  limite  entre  la  Gaule  et  l'Ibérie. 

On  ne  saurait  donc  trouver  un  sens  raisonnable  dans 
le  passage  de  Strahon  cité  plus  haut,  qu'en  plaçant  les 
trophées  de  Pompée  sur  le  bord  de  la  mer,  à  l'exlrémilé 
de  la  côte  des  Gaules.  Kn  sorte,  qu'en  admettant  que  le 
temple  de  Vénus  correspond  à  notre  Port-]'emlres ,  et  la 
position  des  trophées  de  Pomper  au  lieu  actuel  de  Cervera, 
situé  un  peu  plus  au  sud  et  toujours  sur  la  côte,  le  pas- 
sage de  Strabon  reviendrait  à  ceci  :  «  La  côte  de  la  Cel- 
«  tique  s'étend  jusqu'au  Temple  de  Vénus  (Port-Yendres), 
«qui  est  la  limite  de  la  Gaule  et' de  l'Espagne  (selon 
«  Strabon,  Ptolémée,  etc.);  d'autres,  au  contraire,  fixent 
«  cette  limite  (un  peu  plus  au  sud),  à  l'endroit  oii  sont 
«  les  trophées  de  Pompée ,  par  où  passe  la  route  qui 
«  conduit  de  la  Gaule  en  Espagne.  »  Ceci  est  parlaitement 
clair,  et  il  résulte  évidemment  du  langage  de  Strabon, 
que  les  trophées  de  Pompée ,  au  lieu  de  se  trouver  au 
Perlhus,  à  plus  de  quatre  lieues  dans  l'intérieur  des 
terres,  devaient,  au  contraire,  être  situés,  au  voisinage 
de  la  mer,  un  peu  plus  au  sud  que  le  Temple  de  Vémis, 
sur  la  route  qui  conduit  des  Gaitles  en  Jbcrie. 

C'est  donc  dans  les  environs  de  Cervera  qu'il  faut  cher- 
cher les  trophées.  Nous  ignorons  pourquoi  Pomponius 
Mêla  n'a  fait  aucune  mention  de  ce  monument  ;  mais,  pour 
lui,  Cervera  est  encore  le  finis  (jaUiiv,  et  son  opinion, 
conforme  à  celle  de  ces  écrivains  dont  parle  Strabon,  vient 
corroborer  le  langage  du  géographe  d'Amasic,  et  la  tra- 
duction que  nous  en  avons  donnée.  Cette  interprétation 
n'est  d'ailleurs  rien  moins  ipie  nouvolle.  En  érudit  du 
xvi''  siècle,  qui  n'avait  aucune  notion  sur  la  to|)ographie 
et  sur  les  routes  du  Roussillon  moderne;  mais  qui,  en 
retour,  avait   le  mérite  do  bien  conquendre  ses  auteins 


anciens,  Abraliain  Oilhélius  avait  déjà  reconnu  que  \o 
passage  de  Strabon  ne  pouvait  pas  se  conij)rendre  autre- 
ment. Il  plaçait  par  conséquent  les  trophées  de  Pompée, 
ainsi  que  la  route  des  Gaules  en  Ibérie,  près  du  cap  des 
Pyrénées'.  Ce  cpii  prouve,  une  fois  de  plus,  (}ue,  si  nos 
savants  avaient  voulu  interpréter  les  textes  anciens  d'après 
ce  qu'ils  disent  réellement,  sans  trop  se  préoccuper  de 
l'état  du  Roussillon  au  xyii^  siècle  ou  de  nos  jours, 
bien  des  erreurs  auraient  été  évitées. 


Itinéraires  Romains. 

TABLE    DITI'    DE    PEUTINGER. 

Après  Strabon,  les  historiens  et  géographes  anciens, 
Pomponius  Mêla,  IMine  et  Ptolémée,  ne  fournissent  au- 
cun renseignement  sur  la  route  qui  traversait  notre  pays. 
Toutefois,  M.  de  (îazanyola  fait  remarquer  (pic  ces  auteurs 
n'ont  mentionné,  dans  cette  contrée,  que  des  villes  ou  des 
lieux,  tels  que  Salsiilœ,  Ruscino,  lUiheris,  PoHus  Veneris, 
Cervariu,  qui,  selon  toutes  les  probabilités,  devaient  se 
trouver  sur  cette  route  ou  dans  son  voisinage.  Cela  ferait 
supposer  qu'en  décrivant  le  pays  des  Sordons,  ces  écri- 
vains avaient  sous  les  yeux  une  de  ces  Tables  géogra- 
phiques qui,  dès  l'époque  d'Auguste,  représentaient,  avec 
la  configuration  alors  acceptée,  les  portions  du  monde  qui 
étaient  connues.  Telle  était  cette  sorte  de  Mappemonde, 
ou  Orhis  pictus,  qu'Agrippa,  gendre  d'Auguste,  fit  peindre 
dans  un  portique.  Pour  en  rendre  l'usage  plus  facile,  on 
les  allongea  en  les  déprimant,  de  telle  sorte  que  la  confi- 
guration des  terres  était  considérablement  changée;  mais 

'  Carie  de  l'Espagne  ancienne.  Orlliéliiis  a  place  li's  Iropliécs  de  l'oiiiptc 
au  pronionloirn  do  Curvera.  »  De  la  quai  npinio  nos  te  altra  prova  siiio  la 
<  allegacirt,  sens  rcslar  al(jim  V('sti(;i  ,  •  ,i  rjil  (tosch.    Tilots,  clr.,  p.  121. 


1 45 

des  lignes  iracées  sur  la  carte,  infliquaienl  la  route  qu'il 
fallait  suivre  d'un  lieu  à  un  autre,  avec  le  nombre  des 
milles  (|ui  les  séparaient.  Outre  les  grands  chemins,  ces 
tables  (kssinéc.s  (dcpidœ,  comme  les  appelle  Vcgèce),  insé- 
raient le  nom  des  diverses  provinces,  les  montagnes,  le 
cours  des  rivières  et  les  mers  voisines.  Notre  Table  dite  de 
Pcutmger,  est  du  nombre  de  ces  documents  routiers. 
L'exemplaire  manuscrit  qui  avait  apppartenu  au  praticien 
Conrad  Peutinger,  fut  publié,  en  1755,  par  Sclieyb,  qui 
l'attribuait  à  tort  au  règne  de  Théodose  II.  La  copie 
actuellement  existante  parait  avoir  été  faite,  en  I2G5, 
par  un  moine  de  Colmar,  et  Mannert  a  presque  démontré 
que  l'origine  de  cette  carte  remonte  au  temps  de  l'empe- 
reur Sévère  (ou  à  l'an  2ô0  de  J.-C).  Dans  tous  les  cas, 
sa  date  se  trouve  déhnitivement  fixée  entre  les  années 
222  et  270.  Il  est  probable  qu'il  y  en  eut  plusieurs  édi- 
tions antérieures  à  la  chute  de  l'Empire  Romain,  et  bien 
que  le  texte  en  soit  fort  corrompu ,  il  est  facile  à  rectifier 
pour  la  partie  qui  concerne  notre  pays.  C'est  là,  d'ailleurs, 
un  point  peu  essentiel.  Mais,  ce  qu'il  importe  de  faire  re- 
marquer, pour  la  question  qui  nous  occupe,  c'est  que  ce 
document,  parfaitement  authentique,  n'offre  qu'une  seule 
roule  traversant  le  Roussillon  pour  alliM*  des  Caules  en 
Espagne.  On  y  trouve  les  indications  suivantes  : 

Ex  Tabida  Peulingcriana. 

Bclerris \.\  I . 

Narbonc 

VI. 

Uiiscinonp VII. 

iUibeire \II. 

\J  Ceiitcnariuni \  . 

Il)  Siiiniiii)  l'vroiico Mil 

Declana.....' Mil. 

Juiu-aria  [ 

Ouehpies  lacunes  et  des  erreurs  évidentes  rendent  ce 

10 


146 

dncument  incertain,  pour  la  nirsure  des  distances;  mais 
il  est  û'nnc  parfaite  exactitude,  pour  les  noms  des  stations 
et  la  dirocli(ni  de  la  route.  Il  se  trouve  ainsi  complètement 
d'accord  avec  les  témoignages  de  Polybe  el  de  Strabon  qui, 
d"après  nos  inductions,  faisaient  aussi  passer  cette  voie 
uniijuc  sur  le  bord  de  la  mer,  en  parlant  de  Narbonne, 
dans  la  direction  (de  Uuscino,  d'Illibcris,  et)  d'Empories. 
Les  positions  de  Dechina  et  Juncaria  sont  sans  doute  les 
mêmes  que  celles  de  Deciana  et  luncaria ,  placées  par 
Ptolémée  (lib.  II,  cap.  6)  chez  les  Indigètes,  aux  environs 
(VEmpories. 

Il  n'existe  donc  aucune  contradiction,  aucune  diffé- 
rence ,  dans  les  divers  textes  examinés  jusqu'ici.  On 
voit,  au  contraire,  un  accord  frappant  dans  tous  ces 
témoignages  d'époques  diflérentes,  qui  s'expliquent  et  se 
complètent  les  uns  par  les  autres,  et  prouvent  que  tous 
ces  auteurs  et  ces  documents  n'ont  réellement  parlé,  pour 
notre  pays,  que  d'une  seule  voie,  dont  la  direction  générale 
se  trouve  déjà  suflisamraent  déterminée. 

ITINlh^MRFS  niTS  D'ANTONIN. 

Vient  enfin  le  document  connu  sous  le  nom  à' Itinéraires 
d'Antonin,  que  tous  nos  archéologues  ont  pris  pour  point 
de  départ,  dans  leurs  travaux  sur  la  voie  romaine  du  Rous- 
sillon,  et  qui  a  été  la  source  de  presque  toutes  les  opinions 
erronées  que  nous  aurons  h  discuter.  Il  importe  donc , 
avant  tout,  de  se  rendre  bien  compte  de  la  nature  et  de 
l'époque  de  ce  document,  dont  l'authenticité  ne  saurait 
être  contestée,  mais  dont  on  ne  peut  faire  usage  sans  en 
avoir  bien  déterminé  le  sens  et  le  caractère. 

On  n'a  pas  été  toujours  d'accord  sur  l'époque  à  laquelle 
il  faut  attribuer  cet  ouvrage,  tel  (jue  nous  l'avons.  Les 
différents  manuscrits  nomment  comme  auteur  ou  protec- 
teur de  l'entreprise,  les  uns  .Iules  César,  les  autres  Cara- 


calla,  d'aiilrt's  cnlni  TIk'mkIoso',  el  porsoniio  ne  puurrail 
aujourdluii  raltrihiier  avec  cerlitiule  au  prince  Aiiîonin, 
(ioiil  il  porte  le  nom,  car  on  y  trouve  plusieurs  endroits 
qui  ne  furent  connus  que  sous  ses  successeurs.  Cepen- 
dant, tout  le  monde  peut  y  reconnaître  un  de  ces  itinéraires 
décrits  (annotata)  dont  parle  Végèce,  qui  ne  contenaient 
que  les  noms  des  lieux  et  des  stations,  avec  la  distance  de 
l'un  à  Taulre;  el  son  examen  lait  voir  qu'il  est  tiré  d'an- 
ciens et  de  nouveaux  tableaux  de  roule,  dont  on  avait 
successivement  publié  de  nouvelles  éditions,  toutes  anté- 
rieures à  Théodose.  Ce  sont  de  longues  listes  de  noms  de 
lieux,  aeco!!tpagnés  de  c'iilîres  indiquant  leurs  distances 
respectives;  et,  dans  l'opinion  généralement  admise  par 
les  critiques  de  nos  jours,  ce  document  représente  la 
géographie  du  règne  de  Dioclétien.  Il  serait  donc,  sous 
sa  forme  actuelle,  postérieur  a  la  Table  dite  de  Pculinger. 
Voilà  ce  que  l'on  sait  sur  l'époque  de  la  composition  de 
l'ouvrage  dit  Itinéraires  d'Autoitin. 

Quant  à  l'usage  auquel  il  était  destiné,  personne  n'a 
pu  le  déterminer.  Les  matériaux  primitifs  qui  servirent 
à  le  composer  avaient  certainement  ce  qu'on  appellerait 
aujourd'hui  un  caractère  oUlciel;  car  on  peut  admettre,  sons 
dillicullé,  que  l'administration  rouiaine  possédait,  pour 
son  service ,  des  Tableaux  complets  de  toutes  les  voies  de 
l'Empire,  indiipiant  non-seulement  les  cités,  villes,  bourgs 
et  villages  qu'elles  traversaient ,  mais  encore  les  relais  de 
poste,  les  camits  et  postes  militaires,  hôtelleries,  granges, 
fermes  et  mansions  isolées,  avec  les  lleuves,  rivières, 
canaux,  ponts,  bacs,  défdés  et  autres  accidents  de  ter- 
rain qui  se  trouvaient  sur  le  [larcours  des  routes,  et  nu'me 
certains  points  qui  n'étaient  nianpiés  que  jtar  de  simples 
borni'S  ou  mesures  itinéraires,  l'n  simple  coup-d'o^il  jeté 
sur  nos  IliïX'ndrrs  dits  d' Aiitnnlii,  pr(»nve  qiic  ccl  ouvrage 


•   Srii  1  n.i\  ,  Mtalia,  i-li' 


148 

n'est  pas  un  de  ces  tableaux  coniplcb,  mais  un  recueil 
d'extraits  pris  sur  des  tableaux  de  cette  espèce,  car  on 
y  trouve  des  noms  tels  que  Stabuhm ,  Iforrea,  Fines ^ 
Prœlorium,  Cenlurioncs,  Vigesinmm  et  d'autres,  que  les 
auteurs  de  ces  extraits  prenaient  ou  omettaient  arltitrai- 
renicnl,  on  plutôt  dans  des  vues  et  pour  des  objets  diffé- 
rents qui  nous  sont  aujourd'hui  inconnus.  Il  faut  bien  se 
garder  surtout  de  croire,  comme  on  l'a  fait  trop  souvent, 
que  ces  extraits,  tels  que  nous  les  avons,  n'eussent  pour 
but  que  d'indiquer  les  diverses  stations  ou  relais  de  poste 
établis  sur  les  routes  romaines.  On  sait  en  effet  que,  dans 
tous  les  chemins  bien  administrés,  les  relais  de  {)OSte  ne 
peuvent  être  de  quelque  utilité,  qu'à  la  condition  d'être 
établis  d'une  manière  uniforme  et  à  des  distances  à  peu 
près  égales.  On  voit  même  que,  dès  le  temps  de  Polybe, 
les  Romains  avaient  mesuré,  peut-être  dans  ce  but,  tout  le 
parcours  de  la  roule  (\m  conduisait  des  Gaules  en  Ibérie, 
et  en  avaient  marqué  les  distances  avec  le  plus  grand 
soin,  au  moyen  de  bornes  placées  de  huit  en  huit  stades. 
On  rcmanjue  au  contraire,  sous  ce  rapport,  une  dispro- 
portion effrayante  dans  les  ïtincraircs  d'Anlonin  tels  que 
nous  les  avons,  puisque  les  distances  qui  séparent  les 
diverses  stations,  offrent  des  différences  allant  souvent  de 
quatre  jusqu'à  cinquante  milles.  Ces  distances  n'avaient 
donc  pas  pour  but  l'indication  des  relais  de  [loste,  et  ces 
notes  étaient  évidemment  destinées  à  un  autre  usage,  que 
personne  n'a  pu  déterminer  jusqu'ici. 

Enfin,  il  est  assez  naturel  de  conclure  de  tout  ce  qui 
précède,  que  deux  ou  plusieurs  auteurs  d'extraits  de  ce 
genre  pouvaient  relever  ou  omettre,  dans  la  description 
d'une  même  route  dont  ils  avaient  la  Table  complète  sous 
les  yeux,  les  lieux  ou  les  distances  (pii  leur  convenaient  le 
mieux,  et  citer  par  hasard  les  mêmes  noms  ou  en  prendre 
d'autres,  dans  des  vues  et  pour  des  destinations  différentes. 
Il  pouvait  donc  leur  arriver  do  citer,  pour  un  même  tron- 


!i9 

çon  de  roule,  des  noms  lout-à-lail  dilVérenls,  sans  qu'on 
puisse  être  autorisé  à  conclure  pour  cela  (}u'ils  eussent 
suivi  des  directions  difiërenles. 

Tel  est  le  caractère  qu'il  faut  attribuer  aux  Itinéraires 
dits  d'Àntonin,  pour  en  avoir  une  saine  intelligence  et  en 
faire  une  juste  application.  C'est  ainsi  que  nous  expli- 
querons la  partie  qm  se  ra|)porte  h  l'ancienne  voie  du 
Koussillon,  cl  cet  examen  fera  mieux  comprendre  les  con- 
sidérations qui  précèdent  et  pourra  au  besoin  les  juslilier. 

Il  y  a  précisément  dans  les  Itinéraires  d'Antonin  deux 
rédactions  différentes,  pour  la  route  comprise  entre  Nar- 
bonne  et  Tarragone. 

La  première,  (jui  se  trouve  dans  la  description  de  la 
route  â'Arelatc  à  Castulone  (Cazlona),  contient  les  indica- 
tions suivantes,  entre  Narbonne  et  Barcelone  : 

Narbonem 

Ad  Vi(jesiiniiiii !\I.  P.  XX. 

Coinlidsluni XIV. 

niiscinniieni VI. 

.\il  Ci'iitiiriolu's XX. 

Siiiniiunii  Pyroiiacum V. 

Jiincariain XVI. 

Ciiinaiiiaiii \V. 

.\(Hias  Voconias XXIIII. 

Sccerras .XV. 

Pra'torium XV. 

Barcinoncm XVII. 

La  seconde,  qui  comprend  la  route  de  NarlnvDtr  à 
Lcr/io  17/  Gcmina  (Léon),  conq)rend  les  noms  sui- 
vants : 

Narboncm 

Saisulas M    P.   X.\X. 

Ad  Stalmluin XLVIll. 

Ad  Pyrciia;\iin XVI. 

Juncariam XVI. 

(îeriiiidain XXVII. 

Rarciiioncm LXVI 


Il  est  cerlaiu  t|tie  le  calcul  des  dislaiicos  n'ollrc  pas 
un  i'(>siilt;it  seiiiI)la!»lo  dans  ces  deux  rédactions,  puisque 
la  proniicre  coniplc  5.")  milles,  et  la  seconde  îli,  entre 
Narbonue  et  les  Pyrénées,  tandis  que  la  première  porte 
encore  J02  milles,  et  la  seconde  109,  entre  les  Pyrénées 
et  Barcelone.  H  faut  donc  reconnaître  qu'il  y  a  des  inexac- 
titudes, et  même  des  erreurs  manilesles,  dans  ces  calculs  : 
tout  le  monde  est  d'accord  sur  ce  point.  Mais  ce  qu'il  y 
a  d'évident  aussi,  c'est  que  ces  variantes  ne  proviennent 
pas  d'une  différence  de  direction.  En  effet,  outre  qu'on 
ne  comprendrait  guère  pounjuoi  les  Pioniains  parlant  de 
Narbouiie  jiour  Caslvhnia,  auraient  suivi  une  autre  route 
que  celle  (jui  allait  à  Lcijio  Vil,  puisque,  dans  tous  les  cas, 
ils  devaient  passer  par  Barcelone  et  Tarrmjone,  il  est  clair 
que,  dans  l'hypothèse  de  l'existence  des  deux  routes,  le 
point  où  elles  auraient  été  le  plus  écartées  l'une  de  l'autre 
se  serait  trouvé  au  passage  des  Pyrénées. 

M.  de  Saint-Malo  avait  aduiis,  d'après  les  deux  rédac- 
tions des  Itiniraires ,  l'existence  de  deux  routes  entrant 
en  Ibérie,  l'une  h  Pyremcuni  {soii  le  Perthus),  l'autre  à 
StunDium  Pyrenœuin  (à  l'est  du  Perthus,  au  Coll  de  ta 
Carkissei-a  ) ,  et  se  joignant  à  Jn/iairia ,  [)our  aboutir 
ensemble  à  Géroue;  et,  dans  cette  hypothèse,  la  |)remière 
aurait  dû  prendre  une  direction  à  peu  près  semblable 
à  celle  de  la  route  actuelle.  Or,  étant  donné  un  point 
quelcon(|ue  de  cette  ligne  occidentale  (soit  Juacaria,  à 
MS  milles  au  sud  de  la  crête  des  Pyrénées  i,  il  est  maté- 
rielle,ment  impossible  d'en  faire  partir  ime  seconde  route, 
qui  offre  précisément  la  même  distance ,  pour  aboutir  à 
un  autre  passage  plus  oriental  des  Pyrénées,  tel  que  le 
coll  de  la  Carhassera  ou  celui  de  Banyuls.  (J)mment  se 
fait-il  alors  ((ue  les  deux  rédactions  des  Jlitiéraires  comp- 
tent également  16  milles,  entre  Pyrenœum  ou  Sumiuuni 
Pyrenœum  el  Jtincaria?  Les  deux  rédactions  présentent, 
il  est  vrai,  pour  tout  le  parcours  entre  .hnicaria  et  Bar- 


<:.i 


celoni',  iiiu'  (Jiiréreiice  de  7  milles,  que  nous  n'avons  pas 
à  exi)li(|uer,  niais  elles  sont  parlailemenl  d'accord  pour  le 
trajet  entre  Jinican'a  et  les  Pyrénées,  juste  à  l'endroit  où 
elles  auraient  dû  réellement  présenter  une  différence,  si 
les  (ieux  tronçons  de  route  eussent  traversé  les  montagnes 
dans  deux  endroits  assez  écartés  l'un  de  l'autre,  pour  se 
joindre  ensuite  au  lieu  dit  Juiiain'a.  D'après  l'état  des  lieux, 
cette  harmonie  de  dûlWes, enlve  Juncaria  et  les  Pyrénées, 
n'a  pu  se  produire  que  dans  le  cas  d'une  seule  route. 

Mais,  o!)jecte-t-on  encore,  s'il  n'y  avait  qu'une  seule 
voie  à  travers  le  Houssillon,  comment  se  fail-il  que,  dans 
lesy///(c/y^m'iia  première  rédaction  présente '2,'')  milles  entre 
la  station  des  Pyrénées  et  celle  de  Sdlsulœ,  tandis  que  la 
seconde  en  compte  64  entre  ces  deux  mêmes  stations? 
La  réponse  est  facile.  Kn  ell'et,  tout  le  monde  est  d'accord, 
ceux  qui  admettent  une  seule  voie,  comme  ceux  qui  en 
admellenl  deux,  pour  reconnaître  que  la  notation  de  la 
seconde  rédaction  est  erronée  et  complètement  inadmis- 
sible. Mais,  du  moment  où  il  y  a  une  correction  à  faire 
dans  le  texte  de  Vllinéraire,  rien  n'empêche  de  réduire 
les  Ci  milles  de  la  deuxième  rédaction  à  24  ou  même  à 
25,  et  de  la  rendre  ainsi  enlièrement  conforme,  comme 
elle  l'était  sans  doute  dans  le  texte  original,  ii  la  première 
rédaction ,  (jui  compte  en  effet  25  milles  entre  Salsulœ 
et  Pi/renœum  * . 

'  «  l-st-il  |)rol)al)lc  (|Uf  lis  ({oiiuiiis ,  si  ecoiioriics  du  U'iraiii  (|u"ils 
ronsacraienl  à  leurs  voies  militaires,  ayant  déjà  de  Satsulœ  a  Jnnctniit  une 
roule  passant  par  Ittisciiw  et  lUiheih ,  1rs  deiu  villes  les  plos  cimsiilcraMes 
du  pays,  en  aient  eoiisliiiit  nue  autre  peu  distante  de  rancieiine,  lieau(ii\i|i 
pins  l(in)|iic  et  ne  passant  point  par  ces  villes?  Une  seule  roniniiiniealion 
dans  ei'Ite  partie,  entre  les  den\  royaumes,  a  toujours  paru  siillisante  dans 
Jcs  temps  modernes,  où  le  mouvement  comniereial  est  eertuinemcnt  plus 
fort  (|u  il  ne  fui  jamais  sous  la  domination  romaine,  l'ourquoi  ,  sur  un 
simple  énoncé  tie  Vllinéraire,  admettrions-nous  une  seconde  route, dont  on 
ne  trouve  aucunes  traces  sur  le  terrain,  auiuns  indices  dans  les  chartes  du 
ni"y.  u  ,i;;.   III  dans  les  traditions  locales,  cl  ijui  parait  avoir  été  inconnue 


•  52 

(I  osl  donc  bion  démonlré  (jue  les  inexacliludcs  ou  les 
erreurs  de  chiffres  signalées  dans  les  itinéraires  romains 
de  notre  voie,  ne  peuvent  provenir  que  de  l'inadvertance 
des  rédacteurs  ou  des  copistes  de  ces  documents;  de 
sorte  qu'en  disposant  typographiquemcnt ,  les  uns  à  la 
suite  des  autres  et  à  leurs  positions  respectives,  les  noms 
fournis  par  la  Table  et  les  Itinéraires,  on  aurait,  pour 
l'espace  compris  entre  Narbonne  et  Gérone,  le  tableau 
suivant  : 

iNaibdiif . 

Ad  Vi|;csiiniiiii. 

Salsulas. 

C.omhiistaiii. 

Kusciiioiie. 

lirbcrre. 

Ad  Stal)iiliiiii. 

Ad  CeutiiriinH's. 

In  Sununo  l'yreiiico. 

Ik'claiia. 

Juiicaria. 

Cinnaiiia. 

(iLTllIldii. 

Ainias  Vdconias. 


On  aurait  ainsi  rétabli,  pour  la  partie  de  la  roule  ro- 
maine qui  traversait  le  Roussillon,  une  table,  incomplète 
sans  doute,  mais  assez  approchante  du  document  primitif 
où  puisèrent  les  auteurs  des  divers  extraits  qui  nous  res- 
tent aujourd'hui.  Il  est  d'ailleurs  inutile  d'insister,  pour 
faire  voir  combien  ce  document,  ainsi  rétabli,  se  trouve  en 
accord  parfait  avec  les  données  de  Polybe  et  de  Strabon. 
Il  ne  s'accorde  pas  moins  avec  les  documents  qui  nous 
restent  encore  k  examiner. 

à  tous  les  auteurs  antérioiiis  à  la  chute  de  rEinpire  d'Occident?  Tous  les 
lieux  mentionnés  par  ces  écrivains  se  tinurent  en  effet  sur  Paulre.  » 
Di:  Gazanviii.a,  llisl .  du  Roussill  ,  |).  5.'» 


153 


FaiïM  lilKforSiiuoK. 


«  L'an  550  de  notre  ère,  l'eiiipereur  Constant,  fuyant 
«vers  l'Espagne,  iut  atteint  et  massacré  à  EIne.  Mais 
»  ce  prince  ne  pouvait  fuir  avec  rapidité  qu'en  suivant  la 
»  voie  militaire.  Elue  devait  donc  alors  être  située  sur 
«  cette  voie  ' .  » 

Vers  la  fin  du  même  siècle,  saint  Paulin  écrit  à  son 
ami  Sévérus,  pour  l'engager  à  venir  le  voir  à  Barcelone, 
et  il  ne  parle  (|ue  d'une  seule  voie  pour  aller  de  Narbonne 
en  Espagne  :  «  Tarn  brcvis  enim  et  f'acilis  est  via,  ut  nec 
«  in  Pi/renœo  ardua  sit;  qui  Narbonmsi  ad  Hispanias 
«  agger,  nomen  magis  (|uàm  jugum,  horrendus  inter- 
«  jacet.  »  Epist.  VII. 

Nous  trouvons  ensuite  un  témoignage  dont  personne 
jus(iu'ici  n'a  fait  mention,  pour  la  question  qui  nous 
occupe,  et  qui  cependant  ne  man([ue  pas  d'importance. 
Nous  voulons  parler  du  cosmogra|)he  anoni/me  de  Ra- 
vonic,  (jui  écrivait,  selon  toute  présonij.tion,  au  ix^  siècle. 
Les  matériaux  dont  il  s'est  servi  senddeut  avoir  été  réunis 
|>our  représenter  la  géographie  politicpie  des  premières 
années  du  vP  siècle  (règne  du  grand  Théodoric);  mais 
connue  ils  proviennent  eux-mêmes  de  sources  beaucoup 
|)lus  anciennes  et  empruntées  directement  h  une  table 
analogue,  sinon  idenli(pie,  à  notre  Table  de  IVutinger, 
on  peut  en  faire  usage  pour  compléter  certains  points 
obscurs  de  cette  carte.  M.  Alfred  Jacobs  s'en  est  servi,  de 
nos  jours,  pour  rétablir  des  voies  romaines  dont  les  an- 
ciens lliiicraircs  n'ont  |>as  même  fait   mention.   L'Ano- 

'   !>i.  (i\/.\N\oi.\,  llisl.  du  Roussill..  |i.  'ili 


toi 

iiMiu'  [)arle  on  deux  ciiJroils  du  pays  qui  {'onuc  aujour- 
d'hui le  Roussillon;  il  ineiilionne  (au  liv.  IV,  sed.  S), 
entre  autres  lieux  : 

«  Beleroris,   Narhono ,    Ruscilone,  Carcnsona,    Cau- 
«  choliheri,  » 
et  au   livre   V,  scct.   ô  : 

«  NarJjone,  Combusta,  Huscinone,...  Pyreneum.  » 

Les  noms  de  Conibusla  et  Ruscinone  se  trouvent  déjà  dans 
les  Itinéruires  d'Aitlonin.  Quant  à  celui  de  CauchoUbcri, 
qui  se  montre  ici  pour  la  première  fois,  il  s'ai>plique  à  une 
localiî(;  qui  se  trouvait  nécessairement  sur  le  parcours  de 
notre  voie  romaine,  dans  la  direction  ([ue  lui  assignent 
Polybe  et  Strabon;  et  rien  n'empêche  de  croire  que  V Ano- 
nyme l'aura  pris,  de  même  que  Combusta  et  Ruscinoiie, 
dans  un  de  ces  itinéraires  complets,  où  la  Table  et  les  Iti- 
néraires d'Auto)iiii  avaient  également  emprunté  leurs 
indications. 

Nous  n'avons  pu  songer  un  seul  instant,  dans  la  dis- 
cussion qui  précède,  à  prétendre  qu'il  n"y  eût  pas,  dans 
nos  montagnes  et  dans  notre  pays,  d'autres  [>assages  jtra- 
ticables  pour  des   voies  [tuhliques,  pendant  la  période 
romaine.  Mais  ces  chemins,  quelle  que  fût  d'ailleurs  leur 
importance,  n'ont  jamais  été  mentionnés  par  les  géogra- 
phes ni  les  itinéraires  anciens,  et  nous  n'avons  eu  d'autre 
but  que  de  rechercher  la  direction  de  la  seule  route  qui 
soit  indiquée  par  les  anciens  auteurs  et  par  les  faits  his- 
toriques. On  ne  saurait  même  douter  que,  pendant  les 
cinq  cents  ans  de  la  domination  de  Rome  dans  notre 
pays,  la  civilisation  et  l'administration  romaines,  en  s'é- 
tendant  loin  du  rivage  de  la  mer  et  dans  toutes  les  parties 
du  lloussilion,  n'aient  établi  des  communications  directes 
à  travers  tous  les  passages  des  Pyrénées.  Mais  rien  ne  doit 
faire  supposer  que  cette  diflusion  administrative  ait  pu  faire 
abandonner  l'ancienne  voie  qui  traversait  nos  montagnes. 
On  no  connaissait  pas,  à  celle  époque,  le  besoin  de  créer 


(le  iiouvcllos  roules,  dans  le  seul  but  déuiblir  des  coiii- 
inuiiicalions  plus  riipides.  Eu  outre,  pendant  toute  cette 
période  et  longtemps  après,  Hnscino ,  Elue,  CulUoure , 
Emporics ,  les  principales  villes  et  les  seules  qui  soient 
citées  dans  celte  région,  se  trouvaient  toutes  sur  la  voie 
primitive;  et,  comme  les  routes  ne  sccn'aientalorset  n'exis- 
taient que  pour  le  service  et  les  intérêts  des  villes  les  plus 
inqjortantes  par  leur  richesse  et  leur  population,  il  est 
évident  (ju'il  n'y  eut  aucune  raison  de  modifier  la  direc- 
tion de  l'ancienne  route  dont  nous  venons  de  parcourir 
les  annales.  Nous  sommes  donc  convaincu  (pie,  pendant 
la  domination  romaine,  et  même  sous  radministralion  des 
Wisigotlis,  le  principal  chemin  pratiipié  entre  (îérone, 
Ruscino  et  Narhonne,  était  celui  qu'avait  suivi  Annibal. 
Tout  ceci,  d'ailleurs,  se  trouve  justilié  par  un  |>assage 
de  Julien  de  Toh'de.  M.  de  Gazanyola  ayant  cilé  tout  de 
travers  et  d'une  manière  fort  inexacte  le  texte  de  cet 
historien,  il  sera  nécessaire  de  rétablir  les  laits,  pour  en 
faire  mieux  ressortir  l'importance. 

En  l'an  672,  Paulus,  duc  de  la  Narhonnaise,  lit  révolter 
cette  province  contre  Wamba,  roi  des  Wisigotlis,  et  une 
partie  de  la  Tarraconaisc  ne  tarda  pas  à  se  joindre  aux 
rebelles.  Wamba  accourut  en  toute  hâte,  il  soumit  Bar- 
celone, d'où  il  se  dirigea  sur  Gérone,  et  c'est  probable- 
ment dans  cette  ville  qu'il  prit  ses  dernières  dispositions 
[tour  attaquer  les  n^belles,  dont  la  première  ligne  de  dé- 
lerise  s'étendait  le  long  de  la  chaîne  des  Pyrénées,  depuis 
la  Cerdagne  jus(prà  la  mer. 

Wamba  divisa  son  armée  en  trois  colonnes,  «  voulant, 
«  dit  Julien  de  Tolède,  que  la  première  se  dirigeât  sur 
«  Casiriiin  Lihi/a' ,  qui  est  la  capitale  de  la  Cerdagne;  la 
«  seconde  devait  gagner  le  centre  des  Pyrén<'es  par  la  cité 
«  iVAu.^oïKi  (Vieil),  tandis  que  la  Iroisième  s'avancerait 
«  iHir  ht  roic  inihlicjw,,  près  <h>  nvof/e  de  la  mer.  —  Ees 
«  corps  d'armée  ainsi  dis|i(»S('s  sempariMil  des  chiUirnir 


156 


«  clés  Pyrénées  ([ue  loii  appelle  Caïuvlilicn',  VuUuniria , 
«  et  (lu  Cadnim  Libyœ.  Deux  Ducs,  envoyés  en  éclai- 
«  reurs,  surprennent  le  château  appelé  Clausuras,  et, 
«  après  avoir  franchi  les  I\vrénées,  Wamba  descend  dans 
«  la  plaine  (du  Roussillon),  où  il  ne  séjourne  que  deux 
«jours  pour  rallier  tous  les  corps  de  son  armée'.  Il  se 
«  dirige  ensuite  sur  Narbonne,  et  lors(iue  le  rebelle  Paul 
«  eut  été  soumis,  le  Roi  victorieux  prit  encore  deux  jours 
«  de  repos  à  Helma ,  d'où  il  rentra  en  Espagne-.  » 

Ce  passage  appartient  à  un  historien  contemporain  de 
ces  événements,  et  tout  le  monde  sera  frap[)é  de  son 
accord  parfait  avec  les  témoignages  déjà  rapportés. 

Wamba  part  de  Gérone,  par  où  passait  aussi  la  voie 
des  itinéraires  d'Anlonin.  Le  principal  corps  d'armée  se 
dirige  de  là  vers  le  Roussillon,  par  la  voie  publique, 


*  Il  (Wamba)  clcctis  Ducibiis,  in  Ircs  liirnias  cxcrritiim  dividil  :  ila  ut 
uiia  pars  ad  Castrum  Libyœ,  «niod  est  Cirritaiiiaa  caput,  pcrleiidcrt-t ; 
soi-iii;da  pcr  Aiisonciiscin  civilaU'iii  ['yrcnx'i  inedia  pcterel;  tiTtia  per  viam 
j)ubUcan  juxla  ora  manlima.  jji-adorctur.  Ijiso  laiiicn  reli{;iosi!s  Princeps... 
suhscqucbatur  ..  Gcninda  subjicitur...  ligressus  post  \y.vv.  l'rinccps  de  Gc- 
runda  civitato,  beIiij;fiosis  incuisibus  gradiens,  ad  Pyr.oiiaM  montis  ju{;a 
pervenil.  Tbi  diiobiis  diebus  cr.orcitu  lepausato,  per  1res  dies,  ul  dictiim 
est,  tiinnas  exercilus  Pyreiicci  montis  dorsa  ordiiiavit,  Castra(|ue  PyrciKTira, 
(jua;  vocaiilur  Cauroliberi,  Viilluraria  et  Castniiii  Liby:p  mirabili  viotori:c 
trioinpbo  repil,  etc.  Pr.Tdictonini  castroiuiu  siibjii{;ato  e\crcitu,  in  plana 
post  traiisitum  Pyrena>i  montis  descendens,  duobus  tantîim  dicbus  cxcr- 
citiiin  in  iiniini  coiijjrejfaUirus  expectat.»  llist.  Wamba',  reyis  Tulelaiii,  auci. 
Julianoarcbiep.  — Le  teUedo  Julien  deTolèJe  n'est  pas  un  modèle  de  pureté, 
peut-être  y  a-l-il  quel(|ues  transpositions  dans  ce  passage,  qu'il  serait  con- 
venable de  rétablir  comme  il  suit:  «  Gerunda  siibjicilnr...  ubi  duobus 
diebus  exercitu  rcpausato,  per  (rcs,  ut  dictnm  est,  turmas  exercitum  ordi- 
navit,  beiliijerosisquo  incursibus  gradiens,  ad  Pyrenœi  montis  juja  pervenit, 
castraque,  etc.  u  Cette  restitution  n'a  d'ailleurs  aucune  importance  pour  la 
question  de  la  voie  romaine  i|ui  s'agite  ici. 

-  Ipse  quoquc  llelenam  pervcniens ,  duorum  ibi  dierum  immoratione 
delentuscst.  Sicque  ex  inde  profeitus,  secundis  polilus  sunessibus  llispa- 
niam  rediit.    Ibidem. 


IÔ7 

près  du  rivage  de  la  mer,  route  déjà  citée  par  Polybc  et 
Strabon ,  dans  la  direction  d' Emportes  et  des  anciens 
tropliécs  de  Pompée.  Il  s'empare  tout  d'abord  de  Cau- 
coliberi,  qui  se  trouvait  en  effet  sur  le  parcours  de  cette 
voie,  et  deux  Ducs,  détachés  du  corps  principal,  vont 
surprendre  les  châteaux  (VOUrera  cl  des  Clausiires,  qui 
se  trouvent  dans  cette  même  région,  mais  un  peu  écartés 
sur  la  gauche.  Julien  de  Tolède  n'entre  dans  aucun  détail 
sur  les  opérations  de  la  seconde  colonne,  qui  pénétra  sans 
doute  en  Houssillon,  en  remontant  la  vallée  de  Tlipoll, 
par  Campredon  et  le  haut  Vallespir.  Mais  il  est  bicii  évi- 
dent qu'on  ne  saurait  attribuer  la  [)rise  du  château  des 
Clausures  à  un  corps  d'armée  jjarti  de  Gérone,  dans  la 
direction  de  Vich  ;  et  la  surprise  de  ce  château ,  comme 
celle  (V Vitrera,  fut  opérée,  c'est  Julien  lui-même  qui  le 
dit,  par  deux  Ducs  détachés  en  éclaireurs  de  la  colonne 
principale,  (}ui  s'était  avancée  vers  Collioure  par  la  voie 
pxddique,  près  du  rivage  de  la  mer.  Waniha  dut  reprendre 
le  même  chemin ,  lorsqu'il  partit  iVlIelena  pour  rentrer 
en  Espagne. 

Ce  passage  est  le  dernier  où  il  soit  fait  mention  de 
notre  voie  romaine,  mais  il  est  on  ne  peut  plus  explicite, 
et,  h  notre  avis,  il  clôt  définitivement  la  question.  Il  s'ac- 
corde complètement  avec  tous  les  témoignages  fournis  à 
ce  sujet  par  les  historiens  et  géographes  de  ranticjuité, 
depuis  l'an  121  av.  J.-C.  jus([u'à  l'an  072  de  notre  ère, 
et  il  prouve  jus(iu'à  la  dernière  évidence  (pie  la  seidc 
route  mentionnée  dans  notre  pays,  pendant  toute  cette 
période,  partait  de  Narbonne,  en  passant  par  Salses, 
Ruscino  (Castell-Ilossello),  Elue,  Collioure,  Empories  et 
Géroïie;  et  c'est  seulement  dans  cette  direction  ipfil 
faudrait  aujourd'hui  chercher  les  débris  qui  peuvent  en 
subsister. 


158 


Ti'avau!K  cl  SywtèiueM  moileriieM  l'dafirw 
A  la  Voie  nomaino. 

Pendant  tout  le  moyen-âge,  les  chartes  et  documents 
iliplomatiqiies  '  parlent  souvent  de  vieux  chernhis  dans 

'  Quelques  auteurs  out  rorisidérc  comme  des  souvenirs  de  notre  ani-ieuiie 
voie  romaine,  les  nienlions  de  voies  francesqucs  que  Ion  Irouvc  assez  souvent 
dans  nos  vieilles  chartes.  On  sait  que  Cliarleinajjne  prit,  en  effet,  des  mesures 
pour  entretenir  des  communications  avec  toutes  les  parties  de  son  vaste  em- 
pire. K  Mais  ces  routes  ,  dit  M.  de  Saint-Malo,  loin  d'avoir  été  nouvellement 
11  construites,  irétaient  que  des  voies  romaines,  sans  doute  dégradées.  On 
"  trouve,  entre  Ruscino  et  Elue,  les  vestiges  d'un  grand  chemin,  vnlgai- 
i(  rement  appelé  la  carrera  de  Carlos  Magno ,  c'est-à-dire  la  voie  de  Cliarle- 
(1  magne,  dénomination  qui  annonce  la  grande  route  officielle  choisie  pur 

I  cet  empereur  pour  aller  en  Espagne,  dont  il  prescrivit  la  conservation, 

II  ainsi  que  l'entretien,  et  sur  laqiielli'  furent  exclusivement  placés  les  relais 
Il  à  l'usage  des  courriers  ou  des  grands  personnages,  voyageant  pour  le 
(I  service  du  Roi  ou  par  ses  ordres.  Telles  sont  mes  idées  relativement  à  ce 
n  grand  chemin.  ■  Jacques  de  Saint-Mm.o  ,  .hinuaire  de  183'»,  page  211. 
Ces  idées,  nous  les  partageons,  bien  i]u'il  soit  difficile  d'établir  liislori- 
quement  Tintervention  de  Gharlemagne  dans  les  travau\  d'entretien  des 
chemins  roussiilonnais  ,  et  surtout,  sans  attacher  la  moindre  importance, 
pour  le  fait  de  notre  roule,  à  la  dénomination  de  carrera  de  Carlos  Magno , 
qui  nous  parait  d'origine  romanesque  et  assez  moderne.  M.  de  Gazanyola 
(page  oO  )  dit  aussi,  sans  citer  aucune  autorité  que  Gharlemagne  fit,  sans 
doule,  réparer  notre  ancien  chemin,  indisjiensuble  jKiur  ronminniquer  avec 
ses  conquêtes  au-delà  des  Pyrénées.  Quant  aux  l'oies  francesqucs  de  l'ancien 
Koussillon,  elles  feront  l'objet  d'un  travail  particulier,  et,  pour  le  moment, 
nous  nous  contenterons  d'en  signaler  trois  dans  notre  département: 
La  première,  partant  d'Elne,  dans  la  direction  d'Ortafa,  passait  entre 
Bruilla  et  Saint-Jeau-!a-Cella ,  et  se  continuait  vers  Passa.  Elle  est  men- 
tionnée dés  l'an  801  (via  publica  que  dicitur  Francisco, —  Docum.  iiiéd. 
sur  l'Hisl.  de  France,  to.  III  ) ,  et  le  Carlulaire  du  Temple  en  parle  encore 
en  1  1/(5  (in  camino  Franceschi,—tol.  158),  et  en  I  ICI  {in  via  Francescha. 
—  fol.  I"j7). — La  seconde,  mentionnée  déj  l'an  851,  sous  le  nom  de  slratii 
Francisco,  qu'elle  conservait  encore  au  x'  siècle,  s'appelle  ensuite  la  strada 
ou  via  Cnnflenlana.  Elle  partait  d'Elue  et  se  diri(;eait  vers  la  Cerdagnc  ,  eu 
remontant  le  cours  de  la  Tet. — La  troisième  partait  également  d'Elue,  et  se 
dirigeait  vers  les  l'yrénée;,  eu  suivant  la  vallée  de  l.a  Itoca.  V.Wv  est  cm-ote 


diverses  partios  du  [«oussilloii.  Mais  ces  ciieinins,  qui 
pouvniont  (Mit  anciens  relativement  à  d'antres  voies  de 
comniiinicalioi!,  n'ont  aucun  rapport,  soit  par  leur  direc- 
tion, soit  par  leur  importance,  avec  la  voie  de  Tépoque 
roinaine,  et  l'on  peut  être  certain  qu'avant  le  xv<^  siècle, 
personne,  dans  notre  pays,  n'avait  songé  à  s'occuper  de 
l'ancienne  voie  qui  l'avait  traversé.  Il  est  même  fort  dou- 
teux qu'il  s'en  fût  conservé  à  cette  épocjue  le  moindre 
souvenir.  Les  Itinéraires  dits  d'Anton  in  portèrent  l'atten- 
tion de  ce  côté.  Jean  Moles  de  Margaril,  évéque  d'Elne  et 
puis  de  Gérone,  décédé  en  ilGI,  écrivit  le  premier,  dans 
son  ouvrage  historique  intitulé  Paratipomenon  Ilispaniœ, 
que  Perpignan  était  la  station  du  nom  de  Stalmlinu,  |)lacée 
sur  V Itinéraire  entre  Sal.sulœ  et  Vtjrenœum  '.  Mais  Margarit 
ne  tient  aucun  compte  des  distances;  il  n'en  parle  même 
pas,  et  son  opinion,  déjà  critiquée  par  Louis  JS'onius,  écri- 
vain érudit  et  sensé,  n'en  lut  pas  moins  répétée  par  notre 
chroniqueur  Bosch,  à  une  époque  où  il  sullisait,  pour  le 
succès  des  écrivains,  de  flatter  la  vanité  des  grands,  des 
peuples  et  des  villes''.  L'o[)inion  de  Margaril  est  au- 
dessous  de  toute  discussion,  et  nous  aurions  pu  nous 
dispenser  de  la  mentionner,  si  elle  n'avait  été  le  point  de 
départ  de  |)lusieurs  systèmes  erronés  »iue  nous  aurons  ii 
discuter. 

niLMilioiinéc  J.iMs  un  artiMlu  2()  avril  I '(07  (in  ilinore  Vrancisco, — Tliolosa, 
iinlairc).  Il  y  aurait  «rautrcs  iiuIiiMlioiis  à  foiiniir  a  ce  sujtt,  mais  (m  voil 
iiuo,  soit  par  leur  noiribn-,  suit  par  lc!:r  diri'clioii ,  nos  voies  Frnncesques 
ne  peuvent  avoir  rien  de  foilimun  avec  l'uniijiio  voie  romaine,  signalée 
dans  notre  pavs  par  lis  auteurs  anrieiis. 

'  Noli-e  elironiijueur  Biiseh  dit  { |>a(;e  583)  an  sujet  de  l'erpijnan  : 
<i  Mires  Jonan  sa  finidariu  v  i.mn ,  so  ts  lo  llisbe  de  Geronn  (  iii  l'aralipo. 
«  llispnn.,  lili.  I.  c.  I.  -  I'ujad.s,  li!i  2,  c  l'i),  île  aijuell  polilc  al 
■I  quai  \nloni  en  io  Itinrrari  annniena  xlahuhim.  " 

5   V.  f'i  i.;i;mii,  /.(• /»ij6/ic(i/tf«r,  2'  octolire  18^.'. 


KiO 


SYSTÈME  DE  î\Ik'  DE  MARCV. 


M.  de  Marca  est  le  premier  écrivain  qui  ait  fait  briller 
le  ilambcau  de  la  critique  sur  l'histoire  du  Roussillon,^t 
qui  se  soit  occupe,  dans  l'intérêt  de  la  vérité,  de  notre 
voie  romaine  et  de  nos  antiquités.  Mais  l'on  n'ignore  pas 
que  les  premiers  essais  en  tout  genre  sont  toujours  im- 
parfaits, et  l'on  est  forcé  de  reconnaître  que,  malgré  la 
supériorité  que  lui  donnaient  sa  vaste  érudition  et  la 
connaissance  profonde  de  nos  antiquités,  son  article  des 
voies  romaines  offre  des  traces  nombreuses  d'imper- 
fection ' . 

En  partant  de  Narbonne ,  Ms''  de  Marca  établit  la  sta- 
tion Vicesimnm  ou  Vigesinmm  aux  Cabanes  de  Fitou  ; 
de  là  il  arrive  à  Salses  (Salsnlœ)  et  gagne  Uivesaltes, 
où  il  place  la  station  Combusta ,  par  la  raison  qu'on  y 
passe  rXgli  sur  un  pont  qui  peut  avoir  succédé  à  une 
construction  romaine.  Il  conduit  ensuite  la  route  jusqu'à 
l'extrémité  méridionale  du  Pont  de  la  Pierre,  d'où  il  la 
détourne  vers  l'orient  pour  gagner  liuscino.  Il  place  la 
station  ad  Stabulum  au  Boulon ,  établit  celle  de  Ccntu- 
riones  à  Céret,  et  dirige  enfin  sa  route  par  Maurellas  et 
La  Clusa,  en  la  conduisant  jusqu'au  Perthus  qu'il  croit 
être  le  Summum  Pyrenœum^ . 

Mgr  de  Marca  ne  s'est  pas  beaucoup  préoccupé  des 
deux  rédactions  des  Itimraircs  qui  ne  peuvent,  selon 
lui,  se  rapporter  (ju'à  une  seule  et  même  route;  il  ne 
tient  à  peu  près  aucun  compte  de  la  Table  de  Peulinger, 
et  ne  fait  aucune  mention  de  la  station  Illibere.  Quant 

'  Jacques  DE  Saint-Malo,  Examen  do  divers  systèmes  publics  jusqu'à  ce 
jour  sur  une  des  uoics  romaines  conduisant  de  yarbnnne  en  Ibérie  (  dans  Le 
Pttbticaleur  du  2!)  septciiibn;  1852). 

^  Marca  hispanica. 


ir.( 

aux  questions  do  distance,  il  s"esl  Ixiriu'  à  dire  que  la 
deuxième  rédaction  des  Ilùiéraires  est  très-1'autive,  sous 
ce  rapport;  et,  d'accord  avec  Nouius,  il  propose  de 
lire  28  milles,  au  lieu  de  18,  entre  Salsulœ  et  Stabulum. 
Mais  c'est  par  là  surtout  que  son  système  ne  saurait  se 
soutenir,  et  M.  de  Saint-Malo  a  fait  remarquer  que,  pour 
les  distances,  le  savant  Prélat  se  trouve  en  perpétuel 
désaccord  avec  les  Itinéraires^. 

Dans  notre  conviction,  le  système  de  Ms^  de  Marca 
est  complètement  erroné  ;  mais,  comme  il  a  eu  de  nom- 
breux partisans,  il  importe  de  rechercher  et  de  faire  voir 
les  causes  de  son  erreur.  M.  de  Marca  n'avait  pas  cherché, 
d'ailleurs,  a  étayer  son  système  par  des  preuves  archéo- 
logiques ;  il  ne  s'était  attaché  qu'à  retrouver  la  situation 
des  trophées  de  Pompée,  qui,  selon  Strabon ,  marquaient 
l'extrémité  de  la  voie  romaine  à  sa  sortie  de  la  (laule. 
Tous  les  autres  points,  tels  (jue  Viijesitnuin ,  Stabulum, 
Centnriones ,  ne  sont  établis  que  sur  de  faibles  ressem- 
blances de  noms;  et  l'auteur  semble  s'être  laissé  guider 
uniquement  par  l'importance  des  villes  et  des  routes  du 
Roussillon  au  xvii''  siècle,  pour  retrouver  les  stations  et 
la  direction  de  la  route  romaine.  Connue  on  le  voit,  le 
tort  de  M.  de  Marca  a  été  de  considérer  comme  reconnus 
et  incontestés,  des  lieux  et  des  faits  qu'il  s'agissait  de 
découvrir  et  de  déterminer. 

Enlln  ,  M.  de  Marca  semble  avoir  été  surtout  frappé  de 

'  Kii  effet,  il  y  a  3  milles  de  trop  entre  Narbnnne  et  liV/csimum ,  2  mil- 
les de  moins  entre  Vigesimum  et  Combitsta,  2  milles  de  trop  entre  Cnmbusta 
et  nuscino  ,  5  milles  de  trop  entre  liuscino  et  C.enluriones ,  et  A  milles  de 
trop  entre  cette  dernière  station  et  .Summum  l'ijrenœum.  «  V.h  sorte  ijue, 
pour  adopter  Topinion  du  M.  de  Marea  ,  il  fandrait  snpposer  que  les  din- 
tanr.es  énoncées  |iar  Vltinéraire  sont  toutes  fauti\es.  Personne  n'osera 
accueillir  une  pareille  supposition  ,  car  alors  on  se  priverait  irrévorahle- 
ment  du  seul  |;uidc  <|ui  reste  pour  déterminer  la  position  des  lieux  par  où 
passait  la  voie  romaine  conduisant  de  îNarbonne  en  Ibérie.  »  JACQrRs  de 
Saut-Mai-o,  le  l'ublical.,  loco  rilat. 

11 


162 

ce  fait,  qu'à  son  époque  et  depuis  des  siècles,  le  passage 
le  plus  commode  et  le  plus  fréquenté,  pour  pénétrer  en 
Catalogne,  était  celui  du  Pertlius.  D'autres  passages,  tels 
que  celui  de  Banyuls  et  celui  do  la  Massane,  étaient  aussi 
pratiqués  au  xviF  siècle,  mais  ils  avaient  bien  moins  d'im- 
portance que  celui  du  Pertlius.  Depuis  longtemps,  les 
villes  d'Elne  et  de  Ruscino  avaient  vu  leur  opulence  et 
leurs  habitants  passer  à  Perpignan;  et,  de  l'autre  côté  des 
Pyrénées,  l'antique  et  célèbre  cité  d'Empories,  réduite  a 
la  petite  ville  de  Castellô,  n'offrait  plus  (pie  des  ruines 
insignifiantes.  Le  mouvement  et  la  vie  s'étaient  retirés, 
des  bords  de  la  mer  vers  l'intérieur  du  pays,  à  Perpignan, 
à  Péralada  et  Figuères;  la  route  jjublique  les  avait  suivis, 
et,  depuis  des  siècles,  presque  tout  le  transit,  entre  la  ca- 
pitale du  Pioussillon  et  les  villes  de  Gérone  et  de  Barce- 
lone, s'effectuait  par  la  route  directe  du  col  de  Panissars. 
L'histoire  ancienne  de  notre  pays  était  loin  d'être  encore 
approfondie  ;  et  bien  des  savants  du  xvii^  siècle  jugeaient 
et  expliquaient  les  choses  du  passé  par  celles  de  leur 
temps,  sans  songer  que  les  conditions  imposées  à  la 
circulation  publique  par  le  commerce,  les  besoins  admi- 
nistratifs et  la  civilisation  de  la  période  romaine,  diffé- 
raient essentiellement  de  celles  qui  existaient  en  Rous- 
sillon,  lorsque  cette  province  fut  réunie  à  la  France. 

A  cette  première  source  d'erreurs  s'en  joignit  une  autre, 
c'était  la  ressemblance  fortuite  et  peu  étudiée,  que  l'on 
trouvait  entre  certains  noms  de  lieux  situés  sur  la  route 
de  Panissars  et  ceux  des  itinéraires  romains.  La  route  de 
Narbonne  à  Figuères  présentait  les  noms  de  Salses ,  le 
Boulon,  le  Pertlius ,  la  Junqurra,  qui  avaient  quelques 
rapports  avec  ceux  de  Salsuhv ,  Stalndum,  (Porlus)  ad 
Summum  Pyrenœum  et  Juncaria  des  Itinéraires  anciens. 
Malheureusement,  la  position  des  villes  précitées,  à  l'ex- 
ception de  celle  de  Salses,  ne  correspondait  en  rien  avec 
les  anciennes  distances.    On   fil   doue   faire  à   la  route 


163 

romaine  des  dclours  que  rien  n'indique,  que  rien  ne  peut 
autoriser,  et  comme  on  trouvait  quelque  ressemblance 
entre  le  nom  de  Ccnlurioncs  et  celui  de  Cérct ,  on  n'hé- 
sita pas  à  liiire  remonter  la  route,  par  la  rive  gauclie  du 
Tech,  depuis  le  Volo  jusqu'au  pont  de  Céret,  pour 
redescendre  ensuite,  par  la  rive  droite,  jusqu'à  la  route 
actuelle  du  Perthus.  Ces  circuits  étaient  encore  loin  de 
suirire.  Il  fallut  torturer  les  textes;  on  supposa  des  erreurs 
de  toute  nature  i)0ur  faire  accorder  le  dire  des  lUnéraircs 
avec  le  système  de  M.  de  Marca,  et  comme,  malgré  tous 
ces  moyens,  on  n'arrivait  pas  à  tout  expliquer,  on  finit  par 
déplacer  le  lieu  actuel  de  la  Jonqucra,  que  l'on  fit  des- 
cendre de  quelques  lieues  vers  le  sud,  le  long  de  la  Muga, 
pour  lui  trouver  une  place  un  peu  [)lus  en  rapport  avec 
celle  que  les  itinéraires  romains  assignent  à  Jiincaria. 

L'assimilation  du  Boulon,  de  Cérel,  du  Perthus  et  de  la 
Jonquèru,  avec  Stabulum,  Cenluriones,  Summum  Pyre- 
nœum  elJuncaria,  est  insoutenable,  si  l'on  ne  tient  compte 
que  des  distances  :  elle  l'est  bien  davantage  si  l'on  examine 
de  plus  près  les  noms  des  lieux  en  question  '. 

*  «  F.e  nom  du  Iloulou ,  a  dit  M.  Piiijfgari,  est  étranger  à  la  langue  et 
«  à  rortli()(;ra|)hc  du  pays;  tous  les  actes  antérieurs  à  la  réunion  du 
<\  Roussillou  à  la  I''rancc  ne  donnent  à  ee  village  que  sa  véritalile  déiio- 
0  ininatinn  del  Volo  (de  Volonn  en  latin),  et  ce  nom  n'a  aueun  rapport 
«  avec  celui  de  Stabulum  ,  qui  a  pu  produire  uniquement  etlable,  en  eata- 
!•  lan,  comme  en  vieux  français.  i>  Le  Publical.,  Il,  40.  —  Les  rliarles 
nous  indiquent  des  Volos  en  plusieurs  endroits;  entre  CHstell-15n.<iseIlo  et 
Canet ,  à  Saint-lVliu-d'Ainont,  à  Néfiach  ,  à  llle  ,  à  Vinça,  à  Finestret, 
h  En,  dans  l'ancienne  Viguerie  de  Oauiprodon,  et,  pour  ainsi  dire,  dans 
le  territoire  de  presque  toutes  nos  communes.  I\l.  Piiiggari  croyait  que  ce 
mot  généri(|ue  sigiiilic  bornes.  C'est  une  (qjiuion  ijue  nous  ne  saurions 
partager,  et  il  existe  des  preuves  certaines  qu'au  moyen-âge  ,  ce  mot,  dont 
la  racine  nonsest  d'ailleurs  inconnue,  était  toujours  eni|)Iové  en  luiussillon 
pour  désigner  une  cfile  rapide  ,  ou  la  pente  (|ui  sépare  hrnsqncmeut  deux 
étages  de  plaine.  C'est  ee  que  nous  appelons  vulgairement  une  riba.  Quant 
au  village  niomc  du  Yoto  ,  sa  situation  .'i  la  descente  rapide  qui  conduit  au 
Tecli  ,  justilie  |).irfaiti"iuent  sa  dénoniiiialion. 


16* 

Le  lieu  du  Volo  se  trouve  déjà  nommé  Volono  et  Volou, 
dans  une  pièce  de  l'an  076  ' ,  et  dans  tous  les  anciens 
documents;  ot  ce  nom ,  qu'il  devrait  porter  (Micore  aujour- 
d'hui, n"a  et  ne  peut  avoir  aucun  rapport  avec  celui  de 
Stabuluin,  dont  Torigine  purement  latine,  le  sens  bien 
connu ,  ainsi  que  la  transformation  dans  le  catalan  et  les 
langues  modernes,  ne  peuvent  donner  lieu  à  aucune 
confusion. 

L'assimilation  de  Centuriones  et  de  Céret  ne  peut  s'o- 
pérer que  par  un  excès  de  bonne  volonté,  qu'il  suffit 
d'exprimer  pour  en  faire  justice. 

Quant  au  Perllius,  voici  ce  que  nous  dit  Ms""  de  Marca  : 
«  Au  moyen-àge,  on  appelait  ports  les  passages  qui  se 
«  trouvent  dans  nos  montagnes.  Or,  l'endroit  par  où  la 
«  voie  romaine  traversait  les  Pyrénées  conserve  encore 
«  aujourd'hui  la  terminaison  latine,  et  s'appelle  Perllius 
«  (Porlus),  remplacé  dans  l'Itinéraire  d'Antonin  par  les 
«  mots  ad  Summion  Pi/renœum*.  » 

Il  est  certain  que,  depuis  fort  longtemps,  les  habitants 
des  deux  versants  pyrénéens  appellent  ports  les  divers 
passages  de  nos  montagnes,  et  les  noms  de  Perthus , 
Port  de  la  Perche,  Porta,  etc.,  n'ont  pas  d'autre  origine. 
Est-ce  une  raison  pour  chercher  au  Perthus  le  Pyrenœum 
des  anciens?  Les  mots  Pijrenœum.  ou  Summum  Pyrenœum 
sont  applicables  à  un  passage  quelconque  de  la  chaîne 
des  Pyrénées.  Quant  a  celui  de  Porlus,  c'est  M.  de  Marca 
qui  a  jugé  à  propos  de  l'ajouter  aux  textes  anciens,  et 
on  ne  le  trouve  en  réalité  ni  dans  les  historiens,  ni  dans 
les  géographes,  ni  dans  les  itinéraires. 

La  ressemblance  est  frappante  entre  Juncaria  et  la  Jon- 
qnèra,  mais  il  est  impossible  de  faire  accorder  la  situation 
de  ce  village  avec  les  distances  données  par  les  itinéraires, 

'  D'AcREBï,  Spkileij.,  U<.  III,  ji:i{je  70"i. 
-  .W«i(U  liispan.  ,  i-.  II. 


Ifiô 

même  en  adoptant  le  système  du  passage  de  la  voie  ro- 
maine i)ar  le  col  de  Panissars.  Ilien  ne  prouve,  d'ailleurs, 
que  le  nom  de  Juncaria,  dans  les  itinéraires,  s'applicpie 
précisément  à  une  ville;  et  cette  dénomination,  dont  le 
sens  est  bien  clair  et  connu,  peut  s'entendre  d'une  plaine 
ou  d'un  lieu  quelcon(jue  planté  de  joncs.  Or,  Strabon  nous 
apprend,  (ju'au  sortir  des  Pyrénées,  la  voie  romaine  par- 
courait une  plaine  couverte  déjoues,  que  cet  auteur  lui-mê- 
me appelle  de  sa  dénomination  latine  io-jyyx^j'.o-j  -ttcoiov  '. 

Le  Juiicarid  des  Itinéraires  n'est  donc  pas  applicable 
seulement  au  village  actuel  de  la  Jonquère;  il  peut  éga- 
lement s'entendre,  comme  celui  de  Fonnllhrs,  de  divers 
lieux  situés  de  l'autre  côté  des  Pyrénées,  et  surtout  de  la 
plaine  marécageuse  que  Strabon  signale,  sous  le  nom  de 
Juncariiim,  au  voisinage  d'Empories. 

Ainsi  donc,  en  résumé,  le  système  qui  ferait  passer  la 
voie  ancienne  par  le  col  du  Perîbus,  ne  peut  s'accorder 
ni  avec  les  témoignages  des  auteurs  anciens,  ni  avec  les 
distances  des  itinéraires;  et  les  ressemblances  de  noms 
sur  lesquelles  on  voudrait  l'ajjpuyer,  sont  entièrement 
tausses  ou  arbitrairement  interprétées,  et  ne  peuvent 
oflVir,  dans  aucun  cas,  des  preuves  décisives. 

L'opinion  de  ^L  de  ^larca,  tout  inexacte  qu'elle  était, 
fut  religieusement  suivie  par  Pom  Vaisskte  (  flisloirc  de 
Laiif).,  to.  V).  DoM  BoiiQUET  n'a  point  dédaigné  de  l'a- 

'  La  rduU'  traversait  «le  iiioiiU',  dniis  le  reste  île  l'l']s(jajj:iie  ,  diverses 
plaines  couvertes  (le  certaines  plantes  i|iii  leur  iloimaieiit  leur  nom.  SliaLmi 
trouve  ainsi ,  sur  le  parcours  du  l'aneieniie  voie,  le  champ  Juncaire ,  le 
TTêôîOv  2-T7ao-ratc:ov,  »l  le  7rc(5;ov  MapaOcovo;  i|ui  produisait  du 
marathon  en  abondanee.  Ce  dernier  nom  se  traduirait  en  lalin  par  Firiii- 
culariiim  ,  et  eu  catalan  par  Fonotlh-es  ou  t'nmllar.  Celte  «lénnminatinii 
s'applique  à  diverses  localités  de  la  Calal<>(;ne  et  du  lionssillon  ;  telles 
sont  Fonollcl  qui  a  donné  son  nom  à  une  partie  de  l'anrien  diocèse  d'AIel, 
le  lieu  de  Fonollar,  sur  la  route  actuelle  du  Perthus  ,  cl  bien  d'autres.  On 
citerait  de  m^me  plusieurs  localités  du  nom  de  Jonqu--fes,  en  (Catalogne,  eu 
Houssillon  et  en  l,ani;ucdoe. 


I6r) 

dopter,  pour  éclaircir  l'itinéraire  d'Anloniii,  (lu'il  rapporte 
dans  le  Recueil  des  Ilistoriots  de  France.  Mais  ces  savants 
ne  fournissent  aucune  nouvelle  preuve,  en  faveur  du 
système  qu'ils  ont  embrassé. 

Wesseling  a  pris  le  même  guide,  avec  lequel  il  diffère 
néanmoins  au  sujet  de  la  station  Vicjesimvm,  qu'il  place 
à  Sigean.  Cette  rectilication  n'est  pas  heureuse;  car,  de 
Narbonne  à  Vigcsimum ,  comme  l'indique  ce  nom,  on 
comptait  20  milles,  tandis  que  de  Narbonne  à  Sigean,  on 
trouve  10.400  toises,  valant  un  peu  plus  de  15  milles. 

«  DA?iviLLE  a  également  suivi  M.  de  Marca,  dont  il  a 
cru  devoir  modifier  l'opinion  sur  deux  points  seulement. 
Le  premier,  c'est  Combusta,  station  qu'il  reconnaît  mal 
placée  à  Rivesaltes,  et  qu'il  propose  de  chercher  sur  un 
point  qui  s'accorde  mieux  avec  les  distances  respectives 
de  Vigesimum  et  de  Ruscino.  En  cela,  sa  remarque  est 
parfaitement  juste.  Mais  Banville  aurait  dû  s'apercevoir 
que  la  station  nommée  ad  Viijcsimmn,  n'était  pas  mieux 
placée  aux  Cabanes  de  Fitou.  Il  veut,  en  second  lieu, 
qu'on  cherche  la  station  de  Centuriones ,  près  du  vcdlon 
qui  mène  à  Bellegarde*.  Ces  deux  rectifications,  par  la 

'  .M.  Henry  déclare,  dans  son  Ilisloire  de  rtuusillloH  (to.  I,  p.  xxv),  que 
«  Lnccrletum  esl  le  lien  désifjné  par  Danville  pour  la  station  ad  l'.enlenarium.» 
Ailleurs,  il  convient  (|ue  le  lieu  de  Locertelum  lui  était  lout-ii-fail  inconnu 
avant  que  M.  de  Saint-Malo  lui  etU  si{jnalé  le  document  du  ix*  siècle  où  il 
en  esl  fait  mention,  et  qui  avait  été  [)nblié  dans  le  recueil  de  Marca  ;  nénn- 
moins,  il  afiirme  fllisl.  de  Rouss.,  lo.  1,  p.  '«-iO)  que  «  de  Céret,  la  voie  ro- 
'I  mainc  devaitaller  joindre  la  montée  de  I.a  Clusa  etse  rendreau  IVrlhus  par 
"  Locerletum  et  Maurellas,»  ce  qui  fixerait  la  position  de  ce  lieu  au-dessous 
de  Cérct,  sur  la  rive  droite  du  Tccli.  Il  esl  permis  de  penser,  après  ces  avons, 
que  Topinion  de  M.  Henry  ne  pouvait  pas  élre  trop  bien  assise  à  cet  éyard. 
La  charte  de  Pan  8Ô5  (Marca,  8)  nomme,  en  effet,  parmi  les  confronts  du 
territoire  de  Céret,  à  l'est,  la  viUa  quœ  vocalur  Locericlum  ;  mais  ce  lieu  se 
trouvait  sur  la  rive  gauche  du.  Tech,  entre  Céret  et  Vivers,  au  voisinaijc  de 
.Saint-l■\■^réol.^'ous  y  trouvons,  en  effet,  une  pièce  de  terre  ainsi  dési(;née  dans 
»n  acte  de  vente  du  IG  aoi'it  f  Ô73  ;  <  l'^sl  aulem  infra  terminos  (^astri  de  Viva- 
■  riis,  loco  vocale  lesCosles  deLaserlet  ><  (Ar.de  lUop.de  l'erp.,  jil.  \2,  n"  23). 


un 

manière  vague  dont  elles  sont  proposées,  n'aplanissent 
aucune  dillicullé,  et  laissent,  par  conséquent,  les  curieux 
dans  la  même  incertitude,  dans  la  même  ignorance. 

«  Don  François  Douca,  chanoine  de  la  cathédrale  de 
Gérone  (Martires  de  Gcvona),  n'a  lait  que  répéter  l'opi- 
nion de  M.  de  Marca ,  sans  entrer  dans  la  moindre  dis- 
cussion. Il  élahlit,  cependant,  la  station  Vigesimum  à 
Leucate,  à  18.000  toises  (25  milles)  de  Narhonne,  an  lieu 
de  20  qu'il  en  faudrait,  d'a|)rès  les  anciens  itinéraires'.  » 

SYSTÉMI-:  DE  M.  DK  WALCKENAl'Il. 

Nous  devrions  ici,  pour  suivre  l'ordre  chronologique, 
examiner  les  travaux  des  archéologues  roussillonnais  qui 
se  sont  occupés  de  notre  voie  romaine.  Malheureusement, 
leurs  écrits  ne  paraissent  pas,  jusqu'ici  du  moins,  avoir 
dépassé  les  limites  du  département;  et  l'ouvrage  le  plus 
important  qui  ait  été  publié  de  nos  jours,  sur  l'ancienne 
géographie  des  Gaules,  celui  de  M.  de  Walckenaër,  semble 
avoir  été  privé  de  ces  matériaux,  désormais  indispensables 
pour  traiter  ces  questions.  Son  travail  n'est  qu'un  reflet  de 
l'opinion  de  Marca  et  de  Danville,  et  nous  allons  nous  en 

occuper,  pour  terminer  l'examen  des  systèmes  des  écrivains 
qui  ont  étudié  notre  pays  et  nos  antiquités,  sans  avoir  eu 
l'avantage  de  les  voir  de  près;  nous  passerons  ensuite  aux 
savants  qui  sont  allés  au  cœur  de  la  ipiestioii  et  l'ont 
étudiée  sur  les  lieux  mêmes,  en  s'entouranl  de  tous  les 
secours  que  peut  fournir  la  connaissance  exacte  des  lieux, 
de  leur  histoire  et  de  leurs  monuments. 

M.  de  Walckenaër  a  émis  quelques  opinions  nouvelles 
sur  notre  géographie  ancienne-,  mais  l'ensemble  de  s(m 
travail  dénote,  chez  cet  auteur,  une  médiocre  connaissance 

'  Jacqoks  de  Sum-M\i.o,  le  l'ublicalcur  du  20  s»i>U'iiibic  IS32. 

-  Géographie  ancienne  des  Gaules,  \n\v  !.■  l)nion  de  Walclimnir,  toinc  |, 
2,  .")  l'I  C;  lu    il,  |i,irt.  U    rli .  ',  ;  t,i.  |||  ,  pnfj.  ÔO  .  12!»  <•[  sirivanlps 


168 

de  riiisloire  el  de  la  topoj^iapliie  du  Koussilloii.  11  n'a  point 
fait,  d'ailleurs,  une  étude  spéciale  de  la  question  de  notre 
voie  romaine,  et  les  renseignements  qu'on  trouve,  à  ce 
sujet,  dans  son  ouvrage,  semblent  fort  incomplets,  confus, 
et  même  contradictoires. 

M.  de  Walckenacr  a  lixé  la  position  de  Ruscino  à 
Caslell-Roussillon,  d'où  il  conduit  la  route  justiu'à  ////- 
bcris,  qu'il  place  à  Elne  ou  Ehieija  (p.  105).  Voici  son 
itinéraire  comjjlet,  dont  nous  supprimons  seulement  les 
indications  des  distances  : 

Ad  Vigesimum  ....  l'ont  de  'Iroillo,  pri-s  ri'laiij;  de  la  l'aluie. 

Salsulis Fort  Salas  (lisez  Saisis). 

Combusla 5.000  loises  un  sud  de  Salas. 

Ruscinone Caslcl-luiussilldii. 

Ad  Slabulum .         ,  |^^  appelle  Saiul-.Marlin,  passade  de  ta  Tech, 

Ad  Cenlurioncs.      ^         ^^^.^  ,^  p^,^,^,,^  ^,,,.^,^|.  ,,^  ,^,  ..i^.j-...^ 

Ad  Centenarium , 

Ad  l'yreneum . .  .    .  Château  du  ïù-art. 

A'UKimo  Vyrenwo  .  ■ .  Bellejjardo  et  riicluse,  soinmel  des  l'yiéiiéts. 

Juncaria I.a  JoiKjuii're. 

Enlin,  dans  une  table  particulière  (p.  255),  pour  le 
premier  segment  de  la  carte  théodosienne,  il  maintient 
au  château  du  Réart  le  Sumimim  Pyrmœum,  confondu , 
dit-il,  avec  ad  Pi/iraœHm;  Dedana  est  placé  h  l'Ecluse,  et 
Juncaria  à  Jonqn'ùrc. 

Nous  ne  parlerons  pas  des  noms  mal  écrits,  tels  que 
la  Tech,  Elneya  ou  Alnéya,  Salas  et  son  fort;  mais, 
en  ce  qui  lient  à  la  question  même,  il  serait  inutile  d'in- 
sister pour  montrer  que  ce  système  renferme  de  graves 
erreurs.  Bornons-nous  à  ra[)peler  (pie  le  château  du  Réart 
est  à  trois  lieues  au  nord  de  la  chapelle  de  Saint-Martin, 
el  que  La  Clusa  est  sur  le  versant  nord  des  Pyrénées,  et 
non  pas  sur  le  versant  sud.  La  connaissance  des  lieux 
dont  il  s'agit,  et  le  simple  énoncé  de  ce  système,  sulliseiit 
pour  le  réfuter.  Observons  aussi  que  ce  qu'il  peut  y  avoir 
de  bon  se  trouve  déjà  chez  Dan  ville.  Les  erreurs  de  M.  de 


Walfkonaéi',  telles  que  la  position  de  Pyreuœitiituu  château 
(lu  Uéart,  et  celle  de  Dedana  à  l'Écluse,  n'a|)[»arlien- 
nc'iit  qu'à  lui.  Quant  aux  |M)sitions(|u'il  assiii;no  à  Combusta 
et  à  CoUuriones,  ollcs  se  trouvent  déjà  chez  M.  Henry,  à 
qui  M.  de  Walckcnaer  les  a  sans  doute  enipruntées. 

!•  CRI  VAINS  IJOUSSII.I.ONNAIS. 

Il  existe  un  manuscrit  de  Tan  1774,  intitulé  :  Description 
histortque  et  yroijraphiqtœ  de  la  province  du  Houssillon , 
dont  l'auteur  a  suivi  exactement  les  indications  de  M.  de 
Marca,  relativement  à  la  voie  romaine.  Il  observe,  d'ail- 
leurs, (|u'il  existait  encore  en  Roussillon  qudques  vestiges 
de  l((  voie  militaire  pour  la  marche  des  troupes,  et  il  ajoute 
qu'au  xvn«  siècle,  on  voyait  sur  cette  route,  entre  Cerct  et 
Maurcllas ,  des  restes  de  chaussée  et  des  endroits  pavés. 
Enfin,  pour  expliquer  la  seconde  rédaction  de  l'Itinéraire 
d'Antonin,  il  prétend  «  iprapparemment,  en  ce  tenq)S-là, 
«  lorsijue  le  Tech  était  i-uéalde,  on  allait  di'oit  de  Rusci- 
«  noue  au  Boulon  (ad  Slabidum) ,  et  on  laissait,  comme 
«  aujourd'hui,  le  long  détour  de  la  ville  de  Céret.  w  De 
pareils  arguments  sont  bien  moins  des  secours  que  des 
embarras,  (^est  le  jugement  que  Ton  peut  aussi  porter  sur 
les  indications  de  Carrère  (  Joseph-Uarlliélemi-Franrois), 
(pii  s'est  aussi  occupé  de  la  voie  romaine,  dans  sa  Des- 
cription de  la  Province  de  Roussillon  1 1788) ,  et  n'a  fait 
que  reproduire  l'opinion  de  M.  de  Marca,  excepté  pour 
la  station  Combusta.  «  On  voit  encore,  dil-il,  derrière  La 
«  Tour-bas-Elue,  et  entre  Céret  et  Maurellas,  des  vestiges 
«  de  la  voie  militaire  pour  la  marche  des  troupes  romaines; 
«  des  restes  de  chaussées  et  des  endroits  pavés  avec  de 
«  grandes  pierres,  donnent  une  idée  de  la  beauté  de  ce 
«  clicinin.  .\ous  en  trouvons  l'itinéraire  dans  Tite-Live  et 
«  Slraban,  il  connuenvait  ii  Sidsiilas  (Salses);  il  allait  en- 
«  suite  ad  Vondjustain,  (pie  li's  uus  croient  être  Hivesaltes, 


170 

«  les  autres  Tora,  viUaije  dont  il  ne  reste  aucun  veslige; 
«  ad  Ruscinonem  (Châtcau-Roiissillon),  ajjrès  avoir  passé 
«  la  rivière  de  la  Tel  sur  un  pont  que  l'on  croit  avoir  été 
«  dans  le  même  endroit  où  est  celui  de  Perpignan  ;  ad 
«  Slabulum  (le  Volo);  ad  Centurionem  (Céret),  où  l'on 
«  passait  le  Tech,  sur  un  pont  dont  on  voit  des  vestiges 
«  au-dessus  de  celui  ([ui  existe  aujourd'hui  ;  ad  Pyrenœum; 
«  c'est  le  lieu  où  est  aujourd'hui  le  cul  de  Pertus,  etc.,  » 
(p.  4  et  5). 

On  remarquera  avec  quelle  assurance  on  débitait  toutes 
ces  assertions  plus  que  contestables,  et  il  était  temps  que 
la  critique  moderne  vint  en  démontrer  la  fausseté. 

SYSTEM t:  Dlî  M.  HENRY. 

Dès  son  arrivée  dans  le  département  des  Pyrénées- 
Orientales,  M.  Henry  s'empressa  de  diriger  ses  recherches 
sur  la  route  de  Rome  en  Espagne  a  travers  le  Roussiilon , 
et  il  développa  son  opinion  à  ce  sujet,  dans  un  mémoire 
de  51  pages,  intitulé  :  Recherches  sur  la  Voie  de  Rome  en 
Espagne  à  travers  le  Roussiilon  ' . 

La  nouvelle  opinion  se  rattachait  aux  données  générales 
du  système  de  M.  de  Marca  et  de  ses  imitateurs,  que  nous 
venons  de  passer  en  revue,  et  il  n'y  avait  de  réellement 
nouveau,  dans  le  système  de  M.  Henry,  que  la  fixation  de 
la  station  ad  Centuriones ,  qu'il  plaçait  a  l'église  de  Saint- 
Martin-de-Fonollar.  Quant  à  la  position  de  Tora,  qu'il  croyait 
signaler  pour  la  première  fois ,  elle  était  déjà  .connue  et 
adoptée  par  quelques  érudits,  à  l'époque  de  Carrère  (1788). 

Après  être  parti  de  Narbonne  et  avoir  iwé  la  station 
Vigesimmn  aux  Cabanes  de  la  Palme  (a  20  milles  romains 
de  Narbonne),  M.  Henry  place  Comlmsta  sur  la  rive  gau- 
che de  l'Agli,  à  la  chapelle  de  Saint-Martin-de-Tora  (à 

•   IVrpijjiian,  chez  TasUi,  [htc  et  lils,  iinpiiiiniirs,  I820. 


171 

14  milles  romains  des  Cabanes  de  la  l*almc),  el  se  dirige 
ensuite  sur  le  po)if  de  (a  Pierre,  pour  aller  h  lînsn'rio.  11 
rejette  complètement  la  'Dthlc  de  Peutinger,  et  au  lieu  de 
passer  à  lUibcris,  il  dirige  la  voie  prétorienne  de  Kuscino 
par  Cabestany,  jusqu'au-dessus  du  contluent  de  la  rivière 
de  PoUestres  et  du  llcart,  où  il  joint  la  route  actuelle  d'Es- 
pagne, qui  le  conduit  au  Volo  (ail  Slabuluml.  11  y  passe  le 
Tech  et  parvient  à  la  chapelle  de  Saint-Martin-de-Fonollar, 
où  il  place  Cnituriones  (p.  17),  après  avoir  parcouru  1 9.308 
pas  romains.  Enfin,  il  compte,  de  cette  chapelle  au  Perthns 
(Summum  Pyrenœum),  la  même  distance  que  celle  qui  est 
indiciuée  dans  l'Itinéraire  d'Antonin. 

On  peut  remarquer  que  c'est,  en  général,  la  seule  iden- 
dité  des  distances  (|ui  guide  M.  Henry  dans  ses  opérations, 
et  décide  pour  lui  la  fixation  des  diverses  stations.  11  se 
borne  à  corriger  en  28  milles  les  i8  qui,  selon  l'itinéraire, 
séparaient  .S'rt/^'w/fC  de  Stabuliira.  Il  tâche,  en  outre,  de 
consolider  son  système  par  des  considérations  archéolo- 
giques qui,  fussent-elles  exactement  fondées  et  convena- 
blement interprétées,  ne  prouveraient  absolument  rien 
pour  la  solution  du  problème  de  notre  voie  romaine. 

Ce  système  fut  vivement  cond)attu  par  M.  Jacques  de 
Sainl-Malo  '.  Notre  savant  archéologue  trouva,  d'après  les 
calculs  auxquels  il  s'était  livré  lui-même ,  un  excédant 
de  5  milles  romains  dans  le  chiflre  donné  par  M.  Henry, 
puisque  en  partant  du  premier  torrent  au  midi  du  village 
de  la  Palme,  en  ajtpréciant,  autant  (pie  possible,  les  sinuo- 
sités de  la  roule  juscpià  Salses,  et  en  allant  ensuite  en 
droite  ligne  à  St-Martin-de-Tora,  il  trouve  15.171)  toises 
entre  les  deux  points  extrêmes,  au  lieu  de  11). 950,  données 
par  M.  Henry.  De  même,  il  constate  une  dilférence  de 
1.000  toises  en  plus,  dans  le  |)arcours  de  la  route  de  Rus- 
cino  au  Volo,  etune  dillérence  de  2  uiilles  en  moins,  dans 
la  dislance  totale  de  Kuscino  à  Saint-.Martin-de-Eonollar. 

'   l.e  l'ublicaleur,  l"  aniu'o,  ii"  riC 


lT-2 


M.  Henn  iien  reproiluisit  pas  moins  son  système  en 
185i,  dans  son  Uistoire  de  Roiisxillon.  11  y  persista,  huit 
ans  plus  tard,  dans  son  Guide  en  Roussillon  (18U),  où 
il  maintint,  pour  toutes  les  stations  de  l'Itinéraire,  la 
position  qu'il  leur  avait  assignée  en  1820.  Son  assurance 
ne  parait  avoir  été  troublée  que  relativement  à  la  station 
ad  Stabidam ,  pour  laquelle  il  se  contente  de  mettre  en 
avant  l'opinion  do  :Marca,  tout  en  ayant  l'air  de  la  rejel^er. 
Il  avait  été  lui-même  plus  affirmatif,  h  cet  égard,  en  1854. 
Il  répondit,  cependant,  aux  observations  de  M.  de  Saint- 
iMalo;  mais,  pour  ce  qui  tient  aux  distances,  il  en  prit 
facilement  son  parti,  en  déclarant  (pie,  de  (pieique  ma- 
nière qu'on  s'y  prit,  il  était  impossible  de  faire  accorder 
les  chiffres  des  itinéraires  avec  les  distances  et  les  posi- 
tions des  lieux  sur  lesquels  on  les  avait  rapportés  jus- 
qu'alors.  On  lui  avait  également  objecté  que  les  lieux 
nouveaux,  qu'il   iudi(piait  pour   les   stations   romaines, 
n'avaient  été  signalés  par  aucun   monument  archéolo- 
gique,  ni  par  aucun  souvenir  qui   put  se   rattacher   à 
l'époque  romaine.  M.  Henry  eut  le  malheur  de  découvrir 
sur  les  points  exigés,  des  ruines  et  des  débris,  qu'il 
n'hésitait  pas  :i  faire  remonter  jusqu'à  l'époque  voulue  : 
ce  qui  ne  fil  que  le  confirmer  dans  l'opinion  qu'il  avait 
émise  d'abord.  Nous  n'entrerons  pas  dans  la  discussion 
de  ce  genre  de  preuves;  car  ces  ruines  seraient  romaines, 
qu'elles  ne  prouveraient  absolument  rien,  telles  qu'elles 
sont,  pour  la  question  qu'il  y  avait  a  déterminer. 

Les  critiques  de  M.  Jacq.  de  Saint-Malo  eurent  encore 
un  autre  résultat  sur  M.  Henry,  et  lui  firent  imaginer  une 
nouvelle  solution  pour  une  des  dillicidtés  de  l'Itinéraire. 
Il  contin\ia  à  ne  tenir  à  peu  près  aucun  compte  des  indi- 
cations de  la  Table  de  Peutinger;  mais  la  seconde  rédac- 
tion de  l'Itinéraire  d'Antonin ,  qui  ne  pouvait  concorder 
avec  son  propre  système,  lui  fit  chercher  une  seconde 
voie,  (pii  se  détachait  de  la  première  au  jtont  delà  Tet, 


17S 

pour  passer  de  là  au  pont  de  ia  Vasse,  oX  siircessivoineui 
à  Villa  (iodonim,  Tidiigcs,  Canohes,  Pontclla,  Trullas  et 
Tresserre,  pour  rejoindre  la  route  à'IUibcris  à  Slaindum 
(au  Volo)  '. 

M.  Flenry  parvint  ainsi,  sans  fournir,  il  est  vrai,  la 
moindre  preuve,  à  se  rendre  compte  des  5î)  milles,  et 
non  des  48,  comptés  entre  Salsiiliv  ciStalnilum.  Il  n'y  a 
qu'à  promener  un  compas  sur  une  carte,  pour  trouver  des 
solutions  pareilles  et  obtenir  les  distances  proposées. 

SYSTÈ.M1-;  Di:  M.  JACQtîES  Dl'   SAIM-MALO. 

Après  de  profondes  études  sur  la  question  qui  nous 
occupe,  M.  Jacques  de  Saint-Malo  publia  le  résultat  de 
ses  rechercbes  dans  VAiurudire  pour  les  Pipritrcs-Orien- 
talcs ,  de  iSÔâ.  Son  opinion  différait  essentiellement  de 
toutes  celles  qui  s'étaient  produites  jusqu'alors,  et  s'ap- 
puyait sur  des  considérations  et  des  preuves  savamment 
exposées:  c'était  le  produit  d'un  travail  prodi£,neux  dont 
l'analyse  la  plus  détaillée  donnerait  dillicilement  une  idée 
surtisante. 

Partant  de  cette  donnée,  que  les  Itinéraires  d'Antonin 
renferment,  en  effet,  deux  rédactions  différentes  de  la 
route  qui  traversait  le  Roussillon,  pour  aller  de  Narbonne 
en  Ibérie,  M.  de  S'-Malo  s'était,  pour  ainsi  dire,  unique- 
ment attaché  à  expliquer  ces  deux  rédactions,  en  néijli- 
geant  presque  entièrement  les  autres  témoignages  des 
historiens  et  des  géographes  anciens. 

II  reconnaissait  sans  diUiculté  que,  du  tenqis  d'Annibal, 
il  y  avait  une  roule  pour  voyager,  depuis  l'Kspagne,  à  tra- 
vers les  Pyrénées,  jusqu'aux  Alpes.  «  Plus  tard,  ajoute-t-il, 
«  après  la  complète  de  la  (laule  Braccala  par  les  Romains, 
n  Domitius  (rt'ji(d>arbus  lit  construire  un  grand  chemin  qui 
«  traversait  entièrement  la  nouvelle  province.    Prnt-rirc 

'    lli\l.  de  RousiiUon  .  lo    I.  p     ','<(). 


174 

«  même  que  cette  nouvelle  voie  n'était  qu'une  amélioration 
«  apportée  à  la  route  primitive,  en  lui  donnant  sur  certains 
«  points,  sur  certaines  localités,  une  direction  nouvelle.  » 
En  conséquence  de  cette  hypothèse,  M.  de  Saint-Malo 
pensait,  qu'à  l'exception  d'une  partie  du  chemin,  en 
sortant  de  Narhonne,  rien  n'était  commun  entre  les  deux 
embranchements,  pas  même  le  point  par  lequel  ils  en- 
traient dans  le  pays  des  Sordons,  ni  celui  par  où  ils 
débouchaient  en  Ibérie.  C'étaient  donc  deux  routes 
distinctes,  ayant  chacune  des  stations  i)articulières,  au 
moins  depuis  Viçicsimum,  où  elles  se  séparent,  'jusqu'à 
Juncaria,  où  elles  aboutissent  également,  pour  se  diriger 
ensuite  à  travers  la  Péninsule  Hispanique. 

M.  de  Saint-Malo  ne  s'est  pas  occupé  de  celle  de  ces 
deux  branches  qui,  dans  son  hypothèse,  passait  par 
Salsulœ,  Saint-Saturnin,  Pia  et  Ronpas,  pour  aboutir  à 
Ruscino,  et  allait  ensuite  directement  sur  le  passage 
actuel  du  Perthus  (Pi/renœum).  Sa  dissertation  avait 
principalement  pour  objet  la  branche  qui,  suivant  lui, 
passait  par  Ruscino  et  Illiberis ,  et  qu'il  considérait 
comme  la  route  primitive.  Voici  les  résultats  auxquels 
il  était  arrivé. 

M.  de  Saint-Malo  fait  commencer  la  bifurcation  des 
deux  routes  depuis  Vigesimum,  qu'il  place  à  la  Palme;  il 
contourne  l'étang  de  ce  nom,  en  se  dirigeant  en  droite 
ligne  vers  Leucate.  H  s'avance  entre  l'étang  de  Salses 
et  la  mer,  passe  le  Grau,  et  établit  la  station  Combusla 
au  lieu  appelé  Tottr  ou  la  Tour  sur  l'Agli,  «  qui,  à  cette 
«  époque ,  et  même  plusieurs  siècles  après ,  au  lieu  de 
«  se  perdre  dans  la  mer,  se  dégorgeait  dans  l'étang  de 
«  Salses.  »  La  roule  arrive  ensuite  à  Ruscino,  en  passant 
par  Mulationes  (Mudagons),  dont  le  nom  semble  indiquer 
une  niulalion,  ou  maison  de  poste.  A  partir  de  Ruscino, 
le  chemin  suivait  la  carrera  de  Carlos  Magno,  dans  la 
direction  df  Cabestany  et  de  Salellas,  jusqu'aux  environs 


17.-) 

du  Mas  Rocabruna,  cl  arrivait  à  'lésa.  «  Au-delà  de  ce 
«  lieu,  la  voie  romaine  fournit  do  nouveau  deux  branches: 
«  l'une  conduisait  à  Cduroliberi  et  Porhis  Venen's,  à  tra- 
«  vers  les  territoires  de  Mossellos,  S'-Cyprien,  La  ïour- 
«  l)as-Elne  et  Argelès;  l'autre,  se  dirii^cait  sur  Illiberis, 
<(  en  passant  par  Cornelia-del-Vercui  '.  »  Celle-ci,  qui, 
selon  notre  auteur,  serait  celle  de  VJtmérairc,  s'en  va, 
par  un  chemin  bien  connu,  (Vfllibcris  à  ïatzo-d'Amont, 
«  Tacio,  dans  les  plus  anciens  documents  du  moyen-âge, 
«  corru{)tion  iiicoiilrslable  du  mol  latin  Slatio,  désignant 
«un  j)oiut  d"itniéraire,  et  par  conséquent  le  voisinage 
«  d'une  ancienne  voie  publique.  »  De  Tatzo,  le  chemin 
parvenait  sans  difliculté  ii  la  vallée  de  Saint-Martin,  en 
passant  par  la  Pave  »  Pansa,  dans  les  monuments  du 
«  moyen-àge.  La  dénomination  de  ce  hameau  et  sa  posi- 
«  lion  sembleraient  indiquer  un  lieu  de  repos,  établi  pour 
«  les  voyageurs,  sur  la  route  que  parcvurut  un  corps  d'ar- 
«  mée  du  roi  Wamba^.  »  Le  hameau  de  La  Vall  serait  la 
station  ad  Ccnturiones.  Le  chemin  se  perd,  à  quelque 
distance  de  là;  mais  l'inspection  des  lieux  porte  M.  de 
Saint-Malo  à  croire  que  la  voie  romaine  remontait  le 
vallon  de  la  rivière  de  la  Massane,  et  parvenait  au  coll  de 
la  Carbassem,  à  l'est  du  Roc  vulgairement  appelé  dels 
quatre  Termens.   Ce  passage  se  trouvant  élevé  de  500 
mètres  de  i»lns  que  celui  du  Perfhus,  explique,  suivant 
notre  ariticiuaire,  pourquoi  les  Homains,  reconnaissant  la 
différence  d'élévation  de  ces  deux  débouchés,  voulurent 
la  constater,  sans  doute,  en  appelant  simplement  Pi/re- 
nœum   la  première  station  (le   lY^rthus),    et  Summum 

'  M.  ilf  Sainl-M.ilo  adiiieUiiit  (loin-  l'cxislrnre  de  trois  tcmU-s ,  partant 
toutes  d'Llliic,  pour  fraucliir  les  Tyrénéos, Tmiio  au  IVrllius,  l'.itilrr  au  coll 
dt  la  Carbassna ,  ri  la  troisii'inc  par  le  IkuiI  di'  la  uki-,  <ii  ii;i~saiil  par 
Arpelcs. 

2  (h)  a  VII  ((up,  pour  s'emparer  de  Caiicoliberi  et  d't)ltréra  ,  ce  eurp- 
d'ariili'e  par -"iirul  (o  eiiii-  yM'ujiK  ijw  suivait  /.•  hnnl  ,lr  In  mer. 


176 

Pyrenœnm  le  second  de  ces  passages.  C'est  donc  dans  le 
voisinage  du  coll  de  la  Carhassera  qu'il  faudrait  clierclier  la 
station 5»mm»m  Pyrenœum,  «lieu  complètement  inconnu 
«  de  nos  jours.  »  Knlin,  après  être  sorties  de  la  Gaule,  les 
deux  voies  aboutissaient  h  un  nu'nie  point,  c'est-à-dire  à  la 
station  nommée  Juncaria,  située  à  IG  milles  romains  de 
l'une  et  l'autre  stations  pyrénéennes.  Une  pareille  situa- 
lion  ne  pouvant  convenir  au  village  actuel  de  la  Junquèra, 
M.  de  Saint-Malo  propose  de  chercher  ladite  station  vers 
les  parties  basses  de  l'ancien  pays  des  Indigètes,  où 
était  jadis  le  champ  Juncaire. 

Nous  n'entrerons  ni  dans  la  discussion  des  distances  don- 
nées par  M.  de  S'-Malo  entre  les  diverses  stations,  ni  dans 
l'examen  des  correcfionsqu'il  proposede  faire  aux  nombres 
fournis  parles  Itinéraires  dits  d'Antonin.  On  ne  peut  que 
s'incliner  devant  l'exactitude  de  ses  chiffres,  comme 
devant  la  justesse  de  ses  observations  scientifiques  et 
géographiques ,  la  profondeur  et  la  variété  de  son  éru- 
dition. On  ne  pouvait  moins  attendre  d'un  savant  aussi 
versé  que  M.  de  Saint-Malo  dans  la  connaissance  du 
Roussillon  et  des  documents  de  son  histoire.  Ce  serait, 
d'ailleurs,  nous  écarter  de  notre  sujet,  que  de  relever, 
dans  sa  dissertation ,  un  très-petit  nombre  d'assertions  ou 
même  de  simples  expressions,  jus(|u'à  un  certain  point 
contestables,  échappées  dans  l'ardeur  de  la  discussion,  et 
dont  M.  de  Saint-Malo  lui-même  aurait,  sans  nul  doute, 
modifié  la  portée  ou  atténué  les  conséquences.  Telle  est 
rimpression  générale  qui  résulte,  pour  nous,  de  l'étude 
de  ce  mémoire  :  mais  les  observations  historiques  ou  ar- 
chéologiques dont  il  est  enrichi ,  quels  (pie  soient  d'ail- 
leurs leur  mérite  intrinsèque  et  leur  importance  pour 
l'étude  de  nos  antiquités,  ne  fournissent  aucun  argument 
décisif  en  faveur  du  système,  adopté  par  M.  de  Saint- 
Malo,  sur  la  direction  présumée  de  la  voie  romaine  en 
Roussillon. 


Tout  ce  syslème  n'a  pas  irantrc  raison  d'ètro  que  la 
double  rédaction  des  Itinéraires  d'Antonin,  sur  laquelle 
nous  nous  sommes  dt^à  expliqué.  M.  de  Saint-, ^laio 
s'appuie,  en  outre,  sur  la  distinction  qu'il  établit  entre 
le  Pyrenœum  de  la  première  rédaction  et  le  Summum 
Pi/renœxm  de  la  seconde  :  ce  dernier  aurait  désigné  le 
coll  de  la  Carbassera ,  qui  se  trouve  en  ell'et  beaucouj» 
plus  élevé  que  le  passage  du  Pertlius.  Cette  observation 
paraît  justiliée  par  l'état  des  lieux;  mais  nous  ne  pouvons 
l'accepter,  car,  des  l'époque  romaine,  il  y  avait  sans 
doute  des  noms  particuliers  pour  cbacun  des  passages 
des  Pyrénées,  et  il  est  permis  de  penser  que  ces  déno- 
minations ne  se  basaient  pas  sur  l'altitude  conq)arative 
des  cols  il  francliir.  Tout  semble  prouver,  au  contraire, 
que  les  mots  Pyrenœum  et  Siunmiim  Pyrenœum  dési- 
gnent un  seul  et  même  lieu,  dont  le  nom  jiropre  nous 
est  inconnu;  et  ce  lieu  ne  peut  être  que  le  point  fulmi- 
nant de  la  route,  au  passage  de  la  cbaine  des  Pyrénées'. 

Nous  avons  prouvé  d'ailleurs  que,  dans  les  deux  rédac- 
tions, la  distance  de  16  milles  qui  sépare  Juncaria  de 
Pyrenœum,  aussi  bien  que  de  Summum  Pyrcmvum,  ne 
pouvait  exister,  et  ne  se  comprend,  qu'en  admettant  l'exis- 
tence d'une  seule  voie.    Nous  sommes  donc  fondé   à 

'  l']ii  voici  une  preuve  convaiiiranle  ,  cnipruiilée  .lU  pnrcours  de  la  voie 
rjiiialiail  (l\lj/urica  à  Durdigala.  Nous  y  trouvons  eneore  un  point  (lésij;né 
aussi  sons  le  nom  de  Summum  Pyrenœum,  dont  le  sens  est  <rautunt  plus 
frappant  qu'il  n'y  a  i]u'une  seule  rédaction,  pour  cette  voie,  dans  les  lliiiè- 
raires  d'Anlonin.  On  y  lit  : 

Pampiloneni M.  P.  VIII. 

Turissain M.  l'.  Wll. 

Summum  l'yrcnrrnin I\I.  P.  Wlll. 

Imuin  l'yremeuni M.  l'.  V. 

Carasam M.  P.  Ml. 

Il  est  l)ien  évident  (ju'iri  r/fiiiiHi  l'ijieiKium  désigne  lu  pied  de  la  monta- 
gne,  laiidii  (|ne  le  iummum  l'yrtmrnm  doit  seiiteudre  de  son  sommet  ,  de 
mc^me  (|iie  liiir  la  route  roussillniuiaisc. 

1-' 


178 

conclure  que  les  auteurs  de  ces  deux  rédactions,  comme 
celui  de  la  Table  de  Peutinger,  ont  suivi  une  seule  et 
même  voie,  et  qu'il  ne  faut  voir  qu'un  seul  et  même 
lieu  dans  celui  qu'ils  désignent  sous  les  noms  de  Pyre- 
nœuni  et  Summum  Pyrenœum. 

Les  autres  considérations  archéologiques  données  par 
M.  de  Saint-Malo  à  rapi)ui  de  son  système ,  ne  présen- 
tent aucune  preuve  décisive  relativement  à  l'existence 
des  deux  routes  '. 

*  Il  V  a  cependant  une  indication  dont  il  faut  tenir  compte.  Il  existe  en 
effet,  sur  la  rive  droite  de  l'Agli ,  entre  Clayra  et  Torreilles,  un  lieu  de 
Mudagons,  anciennement  ,U«/aJioiics,  qui,  selon  notre  auteur,  serait  le 
nom  encore  conserve  d'une  mulatio,  ou  relais  de  poste,  de  l'ancienne  route 
romaine.  Nous  it;norons  quelle  est  l'origine  précise  de  cette  dénomination, 
et  nous  sommes  loin  de  contester  le  sens  qu'on  lui  atlrilnie  ,  ni  son  rap- 
port avec  l'existence  d'une  ancienne  roule.  Nous  ferons  seulement  obser- 
ver que  ce  nom  se  retrouve,  prcsqu'idciilique,  (Mudaxos,  Mudassos,  campus 
du  Muiationibtis)  aux  conflns  de  Canohcs  et  d'Aurils  (De  SAiNT-MiLO, 
Publicaleur,  V^  année ,  n°  56  ).  Un  acte  de  vente  du  5  février  1461  ,  men- 
tionne encore  une  vigne  au  territoire  de  Canolies,  au  lieu  dit  de  Mudasos, 
confrontant  avec  une  autre  garrigue  dite  de  Mndasns  (Bern.  Fuster,  notaire). 
Dans  une  autre  vente  du  5  des  ides  de  février  ^1275,  il  s'agit  d'un  cliamp 
au  territoire  de  Corncilla-de-la-Uivière ,  au  lieu  dit  ad  Mugadas  (Hop.  de 
Perp.  ,  p(«c/i44,  n"  3  )  ;  et  dans  une  reconnaissance  du  7  des  calen.  de 
février  ^297,  il  est  question  d'une  pièce  de  terre  au  territoire  d'Espira-dc- 
Conflent,  au  lieu  dit  ta  Mudada.  Comme  il  parait  assez  difGcilc  de  ratta- 
cher toutes  ces  dénominations  à  des  relais  de  grandes  routes,  il  est  permis 
de  penser  que  leur  origine  est  peut-être  différente  de  celle  qu'indiquait 
M.  de  Saint-Malo.  Dans  tous  les  cas,  ce  nom  seul  ne  saurait  autoriser 
l'existence  d'une  route  qu'aucun  autre  monument  n'indique,  et  que  plu- 
sieurs contredisent  formellement.  — 11  en  est  de  même  du  lieu  de  Casa 
Stationi,  qui  semble  en  effet  indiquer  une  ancienne  station.  Mais  il  est 
trcs-difflcile  d'en  déterminer  la  situation,  d'après  les  termes  d'un  document 
de  l'an  854  ,  le  seul  qui  en  ait  parlé  ;  d'autant  plus  que  ce  lieu  est  appelé 
ad  Casa  Slalioni,  dans  l'édition  de  Baluzc  (Append.  ad  CapiluL,  col.  15 62)^ 
et  arf  Casas  Tationi ,  dans  celle  du  Callia  christiana  (  tonio  VI,  page  410  ). 
Cette  dernière  le(;on  assimilerait  ce  vitlar  à  celui  de  Tatzo  d'avail;  et  la 
situation  de  ce  lieu  ,  quelle  qu'en  fût  l'origine,  n'aurait  rien  que  de  Irès- 
favurablc  au  système  que  nous  avons  cru  devoir  adopter. 


179 

M.  Pniggari  no  semble  pas  s'être  occupé  d'éludcs 
parliculières  sur  la  question  de  notre  voie  romaine,  et 
qucicpies-unes  de  ses  assertions  prouvent  qu'à  cet  égard, 
il  s'en  tenait  au  système  de  M.  de  Saint-Malo  ' ,  dont  le 
principal  mérite,  à  nos  yeux,  est  d'avoir  prouvé  que 
celte  voie  pouvait  traverser  les  Pyrénées,  par  un  passage 
plus  oriental  et  plus  rapproché  de  la  mer  que  celui  du 
Perlhus. 


Tels  étaient,  jus(iuc  dans  ces  dernières  années,  les  tra- 
vaux et  les  interprétations  auxquels  avaient  donné  lieu  les 
témoignages  des  auteurs  anciens,  relativement  à  l'an- 
cienne voie  romaine  du  Roussillon.  Tous  ces  systèmes 
n'avaient  fait  que  multiplier  les  dinicultés  et  les  incerti- 
tudes, lorsque  M.  de  Gazanyola  ramena  la  question  sur 
son  véritable  terrain,  et  donna  une  solution  qui,  sans 
être  complète,  doit  être  le  point  de  départ  de  la  vérité. 
C'est  l'opinion  que  nous  avons  adoptée,  parce  qu'elle  est 
uniquement  ibndée  sur  l'interprétation  naturelle  et  histo- 
rique des  textes  anciens.  iMais,  si  nous  avons  dû  nous 
séparer,  sur  cette  question,  des  opinions  émises  par  des 
savants  distingués,  dont  nous  apprécierons  toujours, 
comme  ils  le  méritent,  les  services  rendus  aux  éludes 
historiques,  ce  n'a  été  qu'après  avoir  étudié  leurs  sys- 
tèmes et  examiné  leurs  arguments  avec  la  plus  sérieuse 
attention.   M.  de  Saint-Malo  s'était  trompé  par  un  excès 

'  le  rublicattur,  du  2't  octobre  185.".  —  Il  parait  que  M.  Al.  du  î\IiW 
avait  (li'j.'i  cx|irimo  son  opinion  sur  IVxistencL'  de  nus  deux  rtuiles  ,  dans 
des  IMéinoirt's  adressés  à  l'Académie  des  Belles-Leltres  de  riiislitiit,  en 
1823.  Nous  n'avons  pu  nous  procurer  son  travail  :  mais  il  est  fort  singu- 
lier que ,  dans  la  note  qui  nous  fournit  ce  ronsoij'nonienl  (llisluire  de 
Languedoc,  édit.  nouvelle,  Toulouse,  IS'iO,  to.  I"",  p.  138),  M.  du  Mé(jc 
ait  attribué  a  M.  rui|;gari  les  articles  et  la  dissertation  de  M.  Jarq.  de 
Snint-Malo,  insérés  dans  le  l'ubticaleur  de  1852  et  dans  V Annuaire  de  1834. 


180 

(réi'iulilioi),  s'il  est  permis  de  le  dire  ;  quaiil  à  MM.  Henry, 
Walckcnaër,  Dom  Vaissète,  elc,  ils  n'avaient  lait  que 
s'égarer  sur  les  traces  de  M.  de  Marca  :  trompés  le  plus 
souvent,  les  uns  et  les  autres,  par  des  ressemblances 
de  noms  légèrement  observées  et  trop  facilement  ad- 
mises, ou  par  des  débris  plus  ou  moins  authentiques 
d'anciennes  voies  ou  de  monuments,  qui,  malgré  leur 
antiquité,  ne  peuvent  absolument  rien  prouver,  relati- 
vement au  parcours  de  notre  voie  romaine.  Ils  étaient 
surtout  trompés  par  cette  fausse  idée,  que  les  nécessités 
administratives  du  Roussillon  et  les  conditions  d'exis- 
tence des  voies  de  communication  étaient,  à  l'époque 
romaine,  telles  qu'on  les  voyait  encore  au  xviie  siècle 
ou  de  nos  jours. 

Nous  croyons  avoir  prouvé  que  tous  ces  systèmes  sont 
également  inadmissibles;  celui  de  M.  de  Gazanyola  est  le 
seul  qui  soit  conforme  au  sens  des  anciens  documents, 
les  seuls  que  l'on  puisse  invoquer  en  pareille  matière. 
C'est  ce  que  nous  achèverons  d'établir,  en  appliquant  h 
l'état  actuel  des  lieux  les  témoignages  de  l'antiquité,  et 
en  développant  les  preuves  fournies  par  les  recherches  et 
les  découvertes  modernes,  à  l'appui  du  système  que  nous 
avons  adopté. 

Des  sucRiaro»  roaia>»îes  par  Ick  Miittérnit'^fa 
t'Oiâtniats  rclutitu  à  notre  Voie. 

Tous  les  renseignements  fournis  sur  notre  voie  romaine 
par  les  auteurs  a.iciens,  ne  pouvant  se  rapporter  qu'à  une 
seule  voie,  il  semble  assez  naturel  de  croire  que  ces  docu- 
ments devraient  se  trouver  parfaitement  d'accord  sur  les 
chiffres  des  distances,  comptés  entre  les  diverses  stations. 
11  n'en  est  pas  tout-à-fait  ainsi.  Ces  distances  ne  sont 
marquées  que  sur  la  Table  dite  de  Prutinr/er  et  sur  les 
deux  rédactions  des  Itinrraircs  dits  dÀntonin,  et  l'examen 


I 


181 

(le  ces  Irois  docuinents  constate  seulement,  entre  eux, 
les  ressemblances  suivantes  : 

i"  Les  deux  rédactions  des  Ilinrrairrs  sont  unanimes 
pour  compter  IB  milles  entre  Juncaiia  et  Pyronvum  ou 
Summum  Pyrenœum.  La  Table  com[tte  8  milles  entre 
Summum  Pyrenœum  et  Juncaria,  en  mettant,  à  -4  milles 
de  l'un  et  de  l'autre,  la  station  intermédiaire  de  Dedana. 
Mais  ces  derniers  chilfres  sont  évidemment  erronés,  et 
l'on  peut,  sans  hésiter,  corriger  les  deux  nondjres  un  en 
VIII,  ou  l'un  des  deux  en  xii;  ce  qui  donne  les  xvi  milles 
Iburnis  par  les  Itinéraires; 

2<^  La  première  rédaction  de  VIfinéraire  et  la  Table 
s'accordent  à  com[)ler  o  milles  entre  Summum  Pyrmœum 
et  Cenluriones ,  ou  Centcnarium  (selon  la  Table); 

3°  La  première  rédaction  de  \  Itinéraire  compte  G  mil- 
les entre  liuscinone  et  Combusta.  La  Table  présente  aussi 
le  nombre  6  entre  liuscinone  et  la  première  station  qui 
venait  à  la  suite,  en  se  dirigeant  sur  Narbonne;  et,  bien 
que  le  nom  de  cette  station  soit  omis,  on  ne  saurait 
hésiter  à  restituer  ici  le  nom  de  Combusta. 

On  constate,  au  contraire,  les  différences  suivantes  : 
1"  Entre  Rnscinone  et  Cenluriones,  la  première  rédac- 
tion des  Itinéraires  compte  20  milles,  tandis  que  la  Table 
n'en  donne  que  10,  entre  liuscinone  et  Centcnarium  ; 

2"  Entre  Salsula'  et  Stabulum ,  la  seconde  rédaction 
des  Itinéraires  devrait  compter  19  milles,  pour  être  d'ac- 
cord avec  les  chiffres  de  la  première  rédaction ,  tandis 
qu'elle  en  porte  48,  c'est-à-dire  20  milles  de  trop. 

Cette  seconde  différence  est  tellement  dispro|)(»rtinnnée, 
que,  pour  trouver  l'explication  des  i8  milles,  il  iaudrait , 
non-seulement  diriger  la  voie  de  Salses  jus(|n'an  I^miIuis, 
mais  encore  lui  supposer  des  contours  extriiordinaires  à 
droite  et  a  gauche,  à  moins  de  la  faire  revenir  plusieurs 
fois  sur  elle-même.  C'est  um'  erreur  évidente,  reconmie 


i82 

par  tous  ceux  qui  se  sont  occupés  de  noire  voie',  et  l'on 
peut,  sans  aucune  dilïiculté,  corriger  le  nombre  xlviii 
en  XVIII,  ou  même  en  xviiii  milles,  si  l'on  veut  que 
celte  rcdaclion  de  Vllinêraire  soit  tout-à-lait  d'accord 
avec  la  première. 

On  ne  saurait  donc  avoir  une  confiance  absolue  dans 
nos  trois  documents  routiers,  tels  que  nous  les  avons, 
pour  ce  qui  concerne  les  nombres  comptés  entre  les 
diverses  stations.  Nous   ne  cbercberons  i)as  d'où  peu- 
vent provenir  ces  variantes,  et  bien  moins  encore  quels 
sont  les  chiffres  qu'il  foudrait  adopter  comme  définitifs. 
Mais  il  est  bien  évident  que  la  seule  différence  réellement 
constatée  dans  nos  deux  itinéraires  (celle  de  1  mille  de 
moins  entre  Ruscinon  et  Ccnturiones) ,   n'est  pas  assez 
importante  pour  faire  croire  qu'elle  puisse  provenir  de  ce 
que  les  rédacteurs  de  ces  documents  auraient  suivi  deux 
-routes  distinctes  entre  les  deux  stations  mentionnées, 
puis(jue  ces  trois  itinéraires  eux-mêmes  prouvent  qu'ils 
avaient  tous  suivi  la  même  route,  en  donnant  les  mêmes 
nombres  entre  Combusta  et  Ruscino,  Centiiriones  et  Sum- 
mum Pyrenœum,ce  dernier  point  eiJuncarin .  Nous  sommes 
donc  parfaitement  d'accord  avec  tous  les  témoignages  des 
auteurs  anciens  relatifs  à  notre  voie  romaine,  en  concluant 
que  les  indications  des  trois  itinéraires,  comme  celles  de 
Polybe,  de  Strabon  et  de  Julien  de  Tolède,  se  rapportent 
a  une  seule  et  même  route,  allant  de  Narbonne  à  Barce- 
lone, en  passant  par  Salscs,  Ruscii)o,  UUbcris,  Canco- 
lihcri,  les  environs  d'Enqiories  et  Gerone;  et  nous  pou- 
vons combiner,  dans  le  tableau  suivant,  tous  les  noms  et 
les  chiffres  fournis  par  les  trois  itinéraires,  pour  la  partie 
de  cette  route  qui  concerne  l'ancien  lloussillon. 

1  F.ouis  Noniiis  (Nouez)  et  M.  Ilcnry ,  réduisent  les  48  milles  à  38  ; 
M.  Je  Maica,  à  28;   M.  de  Saint-Malo  propose  aussi  diverses  corrections. 


183 


NOMS  DES  STATIONS 

fournis 
par  les   trois  ilinéraires. 


Narbona 


Vigcsiinuni. 


NOMrtnE  HE  MILLES  FOURNIS  PAR 


La  Table 

do 
l'eutinKcr. 


La  première 

réilaction 

(le  ritiniîrairc 

d'Aiitonin. 


20 


.La  deuxième 

rédaction 

de  riliiidraire 

d'Antonin. 


30 


Salsulic  , 


14 


Coinbusta  . 


Ruscinone. 


48 


lllibcris. 


Stabuluni 


12 


20 


Ccnlurioncs    ou  Cenlena- 
riiiin 


1G 


Pyrenîciim    ou  Suunmiin 
Pyreiioeum; 


Dec  la  11 


Jiiiicaria  . 


)       * 

,  I  (ïiO 


u 


<6 


184 

La  concordance  des  nombres  fournis  entre  certaines 
stations,  dans  la  Table  et  les  Itinéraires,  ])rouve  que  ces 
documents  ont  fait  usage  d'une  mesure  identique,  et  le  mille 
romain,  qu'ils  ont  employé,  a  une  valeur  de  d.-i85  mè- 
tres, selon  Topinion  généralement  admise.  C/est  d'ailleurs, 
une  question  qu'il  importe  peu  d'élucider  ici;  car  nous 
serions  fort  embarrassé,  s'il  fallait  ai)pliquer  aujourd'liui, 
sur  le  terrain ,  les  données  des  itinéraires  de  l'époque 
impériale,  et  justifier  l'emploi  exact  et  rigoureux  des 
1.48o  mètres  du  mille  romain,  pour  retrouver  la  position 
j)récise  des  stations  de  notre  voie.  Sur  quoi  se  baserait- 
on?  Quel  serait  le  point  de  départ  de  ces  mesures,  et 
comment  pourrait-on  en  contrôler  l'application?  ^iotre 
ancienne  voie  est  aujourd'hui  entièrement  détruite,  et, 
tout  au  plus,  peut-on  conjecturer  qu'il  en  existe  de  rares 
fragments,  à  quelques  mètres  au-dessous  du  sol  actuel, 
dans  la  partie  de  la  Salanque  comprise  entre  le  cours 
de  l'Agli  et  celui  de  la  Tel.  Des  fouilles  dilliciles  et  bien 
incertaines  pourraient  seules  les  faire  découvrir.  Quant 
aux  débris  signalés  dans  le  voisinage  de  Saint-Cyprien,  ils 
ne  paraissent  pas  plus  authentiques  que  ceux  de  l'ancien 
chemin  de  Maurellas.  On  n'en  indique  point  ailleurs,  qui 
puissent  être  admis  d'une  manière  incontestable  comme 
des  restes  de  notre  voie  romaine ,  et  il  nous  en  coiile  peu 
d'avouer  que  nous  n'en  avons  {»u  découvrir  le  moindre 
indice.  Dans  un  pareil  état  de  choses,  la  connaissance 
rigoureusement  exacte  de  la  valeur  du  mille  romain  ne 
serait  pas  d'une  grande  utilité,  et  la  recherche  des  distances 
réelles  qui  séparaient  les  stations  anciennes,  devient  ex- 
trêmement diilicile.  Si  on  voulait,  par  exemple,  opérer 
entre  deux  stations  bien  reconnues  (Rusciiiu  et  llliheris), 
et  séparées  par  une  dislance  de  7  milles,  selon  les  itiné- 
raires, on  ne  connaîtrait  d'une  manière  précise  ni  le  point 
de  départ,  ni  celui  où  il  faudrait  s'arrêter,  dans  l'une  ou 
l'autre  de  ces  localités.  Suivrait-on  une  ligne  rigoureu- 


IÎS5 

seinenl  dioile,  ou  s'eiigagerait-oii  clans  tous  les  coiilours 
(les  clu'inins,  plus  ou  moins  anciens,  qui  conduisent  encore 
aujourd'hui  d'Elne  à  Castell-Rossollo?  Les  objections  et 
les  (liinrultés  sont  encore  plus  nombreuses  pour  les 
autres  stations,  surtout  pour  celles  où  les  mouvements 
du  terrain  augmentent  nécessairement  les  sinuosités  d'une 
mute  quelconcpie;  et  l'on  ne  saurait  quel  compte  tenir 
des  pentes  qui  seraient  inévitables  dans  nos  calculs,  et 
qui  pouvaient  être  moins  sensibles  autrefois,  à  cause  des 
ponts  ou  des  terrassements  qui  ont  [ni  exister,  et  dispa- 
raître depuis  bien  des  siècles. 

Ainsi  donc ,  tant  (pie  des  découvertes  archéologiques 
n'auront  pas  lait  reconnaître,  d'une  manière  complète  et 
certaine,  le  parcours  exact  de  l'ancienne  voie  romaine  en 
Iloussillon,  on  ne  peut  songer  à  déterminer  d'une  manière 
précise  la  valeur  du  mille  employé  dans  les  anciens  Iliué- 
raires,  ni  désigner  les  lieux  où  il  faudrait  placer  les  sta- 
tions mentionnées.  Tous  les  calculs  ne  pourraient  donner 
que  des  résultats  aitproximalifs,  et  n'aboutiraient  (ju'a 
(les  données  générales,  dont  il  faut  bien  se  contenter  en 
cemomen'i,  si  l'on  ne  veut  pas  s'égarer  dans  le  champ  des 
conjectures  et  s'exposer  à  voir  renversé,  par  une  décou- 
verte imprévue,  un  édifice  (\u\  ne  pourrait  être  bâti  aujour- 
d'hui que  sur  de  pures  su[)|»ositions.  C'est  un  écueil  que 
nous  lâcherons  d'éviter,  et  au  lieu  de  tracer,  pour  le  plan 
topographique  de  notre  ancienne  voie,  une  ligne  d'un 
parcours  bien  déterminé,  avec  des  chill'res  et  des  noms 
bien  certains,  correspondant  aux  évaluations  et  aux  sta- 
tions des  anciens  itinéraii'es ,  nous  nous  bornerons  à 
applicpier  sur  le  terrain  même,  autant  (|ue  possible,  les 
indications  fournies  par  les  auteurs  anciens,  et  que  nous 
avons  tâché  d'interpréter,  en  prouvant  que  le  petit  nom- 
bre d'indications  modernes  recueillies  jusipi'ii  ce  jour, 
conlirmenl  toutes  nos  explications,  et  jiislilienl  les  seules 
consé(piences  (jue  nous  prétendions  en  tirer. 


186 


Parcours  «lo  la  %'olc  Komainc,  tic  Gerutula 
à  Karlionnc. 

Sans  piélendre,  en  (jnoi  (|ue  ce  soit,  contester  la  pos- 
sibilité de  Texistence  de  plnsieurs  routes  en  Roussillon, 
pendant  la  période  romaine,  nous  croyons  avoir  établi 
que  les  documents  anciens  n'en  ont  jamais  mentionné 
qu'une  seule,  qui  allait  d'Emporics^  au  filiône  (Polybe), 
on  suivant  la  côte  autaut  que  possible.  Elle  entrait  dans 
la  Gaule  aux  Tropliées  de  Pompée,  situés  an  voisinafje  de 
la  mer,  selon  Strabon,  et  traversait  le  Roussillon,  en 
passant  par  llUbcris,  Huscino  et  Salsulœ,  selon  les  Ili- 
ncmires. 

En  partant  de  ces  données,  dont  nous  venons  de 
démontrer  l'exactitude ,  nous  allons  suivre  sur  les  lieux 
mêmes  le  parcours  de  notre  route. 

En  partant  de  Gerunda  vers  Narbonne,  la  voie  publique 
se  dirigeait  vers  la  côte  marilimc,  et  arrivait  à  Emportes. 
Les  llinéruires  ne  nomment  pas  cette  ville,  et,  bien  que 

'  Tout  en  aJmettatit  que  les  tcmni[;nages  de  Tantiquité,  recueillis  jus- 
(|u'ici  sur  celte  question,  ne  se  rapportent  qu'à  une  seule  et  même  route, 
on  se  demande,  il  est  vrai,  pourquoi  certaines  villes,  telles  ({u'/iiît/jotcs, 
ne  se  trouvent  pas  même  nommées  dans  les  Itinéraires  romains.  Ces  omis- 
sions sont  faites  pour  surprendre;  mais  il  ne  faut  pas  oublier  que  les 
auteurs  de  ces  documents,  composés  dans  un  but  qui  demeure  encore 
inconnu,  ne  se  proposaient  nullement  de  nommer  les  villes  plus  ou  moins 
importantes  qnc  traversaient  les  voies  romaines;  el,  pour  ne  parler  qucdu 
Roussillon,  nous  voyons  que  la  ville  à'iUiberis  est  omise  par  les  deux 
rédactions  des  Ilintraires,  celle  de  Huscino  est  également  passée  sous  silence 
parla  2"^  rédaction.  D'autres  villes,  bien  plus  importantes,  se  trouvent 
aussi  omises  dans  ces  documents,  (|ui  sont  remplis  de  noms  vagues,  tels 
que  fines  ,  désignant  de  simples  liiuilcs,  ou  Vigesimum ,  qui  n'était  ni  une 
ville  ni  un  hameau  ,  mais  une  simple  borne  marquant  le  vimjlicme  mille  à 
partir  de  Narbonne.  Le  silence  de  ces  documents  ne  saurait  donc  affaiblir, 
en  quoi  que  ce  soit,  la  valeur  du  témoignage  de  l'olybe. 


187 

leur  silence  ne  prouve  iien  contre  le  témoignage  lonnei 
de  Polybe,  on  peut  admettre  que,  sans  arriver  à  lùiipo- 
rics,  la  route  de  l'époque  impériale  laissait  cette  ville  un 
peu  à  l'est,  et  traversait  en  droite  ligne  la  plaine  basse 
et  marécageuse,  qui  l'entoure  à  l'ouest  et  au  nord,  et 
qui,  dans  Strabon,  jjorte  le  nom  de  Champ  Juncaire. 
Les  trois  itinéraires  signalent  précisément  une  station  du 
nom  de  Jnnraria,  dont  la  position,  d'après  le  chillVe  des 
lUncraircs  (à  IG  milles  des  Pyrénées),  correspond  sans 
difficulté  à  un  point  quelconque  du  ttccJiov  lo-j-y-yaoïov, 
La  voie  se  dirigeait  ensuite  vers  les  Trophées  de  Pompée, 
situés  sur  la  côte,  au  sud  du  Temple  d'Aphrodite  et  sur 
la  limite  des  Gaules  et  de  l'Ibcrie,  position  qui  ne  peut 
convenir  qu'au  lieu  de  Cervaria ,  ou  aux  environs  de 
l'anse  actuelle  de  Cervera.   Pour  arriver  en  ce  lieu,  en 
partant  de  Juncaria ,    la  route  devait   nécessairement 
Irancbir  une  cliaine  de  montagnes  qui  se  détaclie  des 
Pyrénées,  entn;  le  col  de  Iktiii/ids  et  ta  Massana,  et  se 
prolonge  justju'au  cap  de  Creus.   Rien  n"indi(pie  aujour- 
d'bui  l'endroit  où  s'elfectuait  ce  passage;   car  la  station 
intermédiaire  de  Declana,  citée  par  la  Table  de  Peutinger 
entre  Juncaria  et  Summum  Pijrenœum  (et  corrigée  en 
Deriana  par  les  éditeurs  modernes),  pourrait   corres- 
pondre au  lieu  actuel  de  Dcijiù,  selon  M.  de  Saint-Malo, 
ou  à  celui  de  Llaiiçà  (Lanciuna)  sur  mer,  selon  d'autres. 
Nous  n'avons  pas  à  nous  prononcer  entre  ces  deux  opi- 
nions, qui  se  fondent  uniquement  sur  l'analogie  que  ces 
noms  offrent  entre  eux.  Cc[)en(lant,  c'est  de  là  (pie  dé- 
pend la  connaissance  du  lieu  dit  l'i/reiia'utii  ou  SuniDiutu 
Pijrcnœiim,  qui  correspondrait  aux  environs  du  col  de 
Banyuls  si  la  route  devait  venir  de  Del  fia,  tandis  qu'en 
partant  de  LIança,  et  en  suivant  la  côte,  il  faudrait  le 
clierciier  vers  le  col  qui  débouche  sur  lîanyuls,  entre 
la  tour   de  (Jucr-l(oi(j   et  Ccroaria ,   (jui   était  la  limite 
des  (iaulcs,  selon  Mêla.  C'est  là  que  se  trouvaient  les 


ISS 


Trophées  de  Pompée.  On  ignore  d'ailleurs  eu  quoi  con- 
sistait ce  monument,  et  l'on  sait  que,  du  temps  de  la 
République  Romaine,  on  entendait  par  trophées  de  sim- 
ples poteaux  auxquels  étaient  suspendues  les  armes  prises 
à  l'ennoiiii,  telles  que  casques,  cuirasses  et  boucliers. 
Pline  ajoute  que,  dans  le  monument  élevé  en  ces  lieux 
sous  le  nom  de  trophées,  Pompée  «  s'était  borné  à 
«  constater  la  soumission  qu'il  avait  obtenue  de  876 
«villes,  depuis  les  Alpes  jnscju'aux  frontières  de  VE&- 
«  pagne  lllérieure;  »  et  Dion  Cassius  ^iiv.  XLl)  ajoute  que 
Jules  César  passa  aussi  par  le  Pyrenœum,  à  son  retour 
de  Tarragone,  «  mais  il  n'y  éleva  pas  de  trophées,  parce 
«  qu'il  se  rappela  que  Pompée  avait  été  repris  a  ce  sujet; 
«  il  se  borna  donc  à  dresser  un  aulel  (ô'coy.ov)  de  pierres 
«  taillées  içEcrrfTr/i,  non  loin  des  trophées  de  son  rival.  » 
Personne,  jusqu'ici,  n"a  pu  indiquer,  d'une  manière  cer- 
taine ,  la  place  exacte  ou  le  moindre  débris  de  ces  deux 
monuments. 

Quoi  qu'il  en  soit,  en  parlant  des  Trophées  de  Pompée, 
la  route  devait  remonter  la  côte,  dans  la  direction  du 
Temple  d'Aphrodite  et  du  Port  de  Vénus,  pour  aboutir 
à  Caucolil)cri  iCollionre).  Ces  deux  noms  ne  se  trouvent 
sur  aucun  itinéraire  romain  ,  mais  l'anonyme  de  Ravenne 
nomme  Caucoiilyeri  parmi  les  cités  de  la  Septimanie,  au 
même  titre  que  Comimsta  et  Pyrenœum,  qui,  selon  toute 
apparence,  n'étaient  pas  même  des  lieux  babités.  On  est 
donc  fondé  à  croire  qu'en  ceci,  ce  géographe  se  bornait 
à  transcrire  ces  noms  tels  qu'il  les  trouvait  dans  les 
documents  routiers;  d'autant  plus  que,  d'après  les  récits 
de  Julien  de  Tolède,  nous  voyons,  celle  des  colonnes  de 
Wamba  qui  avait  suivi  la  voie  publique,  le  long  de  la  mer, 
arriver  tout  d'abord  au  Casfrum  Cnncoliberi,  et  s'en  em- 
parer après  être  partie  de  Geninda.  C'est  exactement  le 
chemin  (pie  nous  venons  de  parcourir.  Notre  voie  parve- 
nait ensuite  à  lUibcrre,  selon  la  Table  de  Peutinger,  puis 


\H9 

à  Ruscinonc,  selon  cft  iiiôine  document,  d'accord,  on  coci, 
avec  la  première  rédaction  des  Itinéraires  dits  d'Anfonin. 

Kntrc  Rnscinonc,  dont  la  situation  est  bien  déterni inéo, 
et  le  passage  des  Pi/rrixrs^  qu'il  est  encore  impossible  de 
désigner  d'une  manière  précise,  nous  n'avons  eu  d'autre 
guide  que  les  témoignages  des  auteurs  anciens;  car  on 
ne  peut  faire  aucun  usage  des  inscriptions  de  Théza  ou  de 
Saint-André,  des  médailles  ou  autres  monuments  antiques 
découverts  jusqu'ici,  dans  la  région  que  nous  venons  de 
parcourir.  Ces  monuments  n'ont  aucun  rapport  avec  une 
voie  publique,  et  ne  peuvent  rien  prouver  dans  cette 
question.  On  ne  signale,  d'ailleurs,  ni  là,  ni  sur  aucun 
autre  point  du  Roussillon,  aucun  vestige  certain  d'une 
voie  romaine.  Tout  ce  que  l'oi»  peut  considérer,  comme 
définitivement  établi,  se  borne  donc  à  la  direction  générale 
de  la  route,  telle  que  nous  venons  de  l'indiquer,  et  aux 
deu.\  stations  bien  reconnues  de  RHsci)to  et  d'Illihrris 

Entre  celte  dernière  et  celle  de  Summum  Pi/renœum, 
les  documents  routiers  signalent  encore  la  station  dite 
Ad  Stabulum ,  qui,  d'après  les  nombres  de  la  deuxième 
rédaction  des  Itinéraires  d'Antonin ,  comparés  à  ceux  de 
la  première,  devait  se  trouver  h  1  mille  d'Illilx'ris,  vers 
le  passage  du  Tech.  Il  serait  bien  dillicile,  et,  dans  tous 
les  cas,  fort  peu  important,  de  rechercher  aujourd'hui  la 
situation  de  cette  ctable ,  prise  connue  jalon  d'une  nota- 
tion d'itinéraire,  dans  un  but  qui  demeure  inconnu;  et  il 
est  bien  certain  que  la  connaissance  de  ce  lieu  ne  serait 
d'aucun  intérêt,  sous  aucun  autre  rapport.  Il  en  est  de 
même  du  poste  dit  Ad  Ccntcnarium  ou  Ad  Centvriones , 
qui,  d'après  nos  calculs,  se  trouverait  à  12  milles  de 
Stabulum  et  à  5  milles  de  Pyrenœum  :  ce  qui  se  rappor- 
terait à  peu  près  au  territoire  de  Collioure'. 

*  Quelques  mois  d'uiio  note,  Iriinsporlés,  par'  tniMir,  dans  le  texie  de  la 
p.  ■Il î),  foraient  considérer  comme  nous  appartenant,  une  opinion  que  nous 
siiminc-i  loin  d^irccplci',  nu  iiiji'l  ilo  Iii  Mliiatinn  du  liin  dit  ail  rtnliiriniif\ 


190 

11  y  a  moins  d'incertitudes  pour  la  partie  de  la  route 
qui  reste  à  parcourir,  entre  Rnscino  et  la  limite  du  pays 
des  Sordons.  11  est  vrai,  que  plusieurs  auteurs,  comme 
on  l'a  vu,  ayant  considéré  comme  des  ruines  romaines 
quelques  débris  d'anciens  ponts,  qui  se  voient  encore  à 
Perpignan  et  à  lîivesaites,  en  ont  conclu  que  la  voie  romai- 
ne, au  sortir  de  Ruscino,  se  dirigeait  vers  le  pont  de  Per- 
pignan, pour  y  passer  la  ïet,  et  aller  de  là  vers  Rivesaltes 
et  Salses.  Mais  on  est  loin  d'avoir  reconnu  une  cons- 
truction romaine  dans  le  pont  dont  une  partie  existe 
encore  à  Perpignan;  et,  l'importance  de  cette  ville  ne 
datant  tout  au  plus  que  du  xiF  siècle,  rien  ne  peut  au- 
toriser à  y  faire  passer  la  voie  romaine  qui  conduisait  de 
Narbonne  à  Ruscino.  Lesvlisiances  marquées  sur  les  Iti- 
néraires s'y  opposent;  la  construction  d'un  pont  comme 
celui  de  la  Pierre  n'offrait  pas  plus  de  dilîlcultés  à  Castell- 
Rossellô  qu'à  Perpignan,  et  tous  les  témoignages  con- 
courent à  prouver  que  la  voie  romaine  allait  directement 
de  Ruscino  vers  Salsidœ,  à  travers  la  Salanca.  Il  existe 
des  preuves  certaines  à  cet  égard.  Pour  aller  directement 
de  Ruscino  à  Saisniœ ,  la  route  passait  nécessairement 
entre  le  village  actuel  de  Bonpas  et  Saint-Sauveur-de- 
Canomals.  «  De  là,  elle  se  dirigeait  vers  le  pont  Traucat, 
«  épithète  indice  d'une  grande  vétusté ,  qu'il  portait  dt\jà 
«  en  1569,  époque  où  le  chemin  qui  venait  y  aboutir,  en 
«partant  de  Pia,  était  appelé  indifféremment  cami  del 
«  Pont  tramât  ou  de  la  Caussade,  en  langue  vulgaire, 
«  ou  (kdciata,  en  latin,  dont  la  signification  prouve  assez 
«  qu'une  chaussée  avait  passé  sur  ce  pont.  De  là,  cette 
«  chaussée  pénétrait  dans  le  territoire  de  Pia,  traversant  un 
«  terrain  boisé,  appelé  la  Femna  morla ,  jusqu'aux  ruines 
«  d'un  pont  dit  de  Pacals.  C'est  du  moins  ce  que  parait 
«  prouver  un  acte  du  6  juin  1413  *.  »  Après  le  passage  de 

*  De  Gazanyola,  llisl.  du  fioiiss.,  p.  55  et  '6'i.  Nous  ne  roniiaissons  Tarie 


101 

la  rivière  de  l'Agli,  la  roule  se  dirigeait,  entre  Saint- 
Pierre-(/e/-r«7rtr  et  Clayra,  à  travers  une  plaine  caillou- 
teuse, aujourd'hui  i>lanlcc  en  vignes,  et  atteignait  le  lieu 
de  Sidsithr.  Les  souvenirs  de  Tancienne  chaussée  ahon- 
dent  dans  tout  ce  parcours. 

Dès  l'an  H39,  nous  trouvons  mention  de  deux  vignes 
situées  au  territoire  de  Canonials ,  au  lieu  dit  Cal- 
çada  * . 

Selon  M.  de  Sainl-Malo,  un  acte  du  mois  de  juin  120.S 
signale,  dans  la  Salanca,  «  un  vieux  chemin,  auquel  on 
«  donne  le  nom  de  Calciala,  mot  dont  on  se  servait  dans 
«  la  basse  latinité  pour  désigner  une  chaussée  ou,  pour 
«  parler  plus  clair,  un  chemin  ferré,  d'où  l'on  peut  con- 
«  dure  qu'un  chemin  conservant  encore  quelques  vestiges 
«  propres  à  caractériser  une  voie  romaine,  ou  du  moins 
«  suivant  le  gisement  d'une  de  ces  anciennes  voies,  exis- 
«  tait  au  commencement  du  xiiF  siècle  dans  ces  localités.» 
Anmudre  de  1851 ,  p.  2!2!2. 

Le  mot  de  Slrada  n'est  pas  moins  significatif,  et  Ton 
trouve,  dans  un  acte  du  ô  des  cal.  de  mars  li260,  une 
propriété  des  Templiers,  située  au  territoire  de  Salses, 

de  I'(I5  qiio  par  la  meiilioii  qu'en  fait  M.  de  Gazanyola  ,  i|iii  a  In  l'acals 
au  lieu  de  l'cracals.  Celle  erreur  s'explique  assez,  pour  ceux  ([ui  oui  (jnelque 
liabiluJe  des  abrévialions  palco{;rapliic|ues  de  l"écriture  roussillounaise  au 
XV''  siècle;  mais  la  correclioii  que  nous  proposons  est  pleinement  justifiée 
par  la  situation  do  la  villa  du  Veracals,  près  de  l'Agli,  au  voisinage  iVorlo- 
lanes.  Ou  lit,  en  effet,  dans  une  donation  deTaniSlil  :  <•  Dono...  alodem... 
<i  queni  liaLeo  in  ("-oniitaln  lîossilionense.. .  in  villa  qua;  dicilur  l'elra- 
<.  Caice,  vel  iu  suos  terniiiios,  id  est,  casas,  cm  tes,  et  liortos,  et  liortalibus, 
(1  et  ipse  ferragiualc  ,  el  ipse  canipns  qui  liiiitur  in  ipso  ciniiterio  Saucti- 
0  SaUiriiiiii,  et  terras,  etc.  »  Marca,  n»  9G. 

'  Ce  document,  |)orté  anciennement  au  n"  (iô  de  la  liasse  27  des  arclii- 
ves  de  rilopital  de  l'erpi(;nau,  n'existe  plus  aujourdluii.  Il  est  ainsi  noté, 
ilaiis  la  Itubrique  générale  et  au  registre  intitulé  ntau  de  Or  :  ..  Veuda  de  dos 
«  vinyas  siluadas...  en  la  adjacoulia  de  S'-Salvador  île  la  vila  i|ues  noniena 
«  Cananials,  en  li>  llorli  an'imeuat  Cattada ,  auv  I  151».  » 


19^ 

au  lieu  dit  c  Ik  Slnidu,  conlVonlaiit  au  uiidi  avec  Ir 
chemin  qui  va  à  Salses*. 

Enfin,  nous  trouvons  encore  un  souvenir  de  raucienne 
voie  ou  cliaussée,  dans  un  acte  de  1517,  portant  vente 
d'un  champ  situé  au  territoire  de  Clayra,  au  lieu  dit  la 
Caxssaila,  coni'rontanl  avec  le  chemin  qui  va  de  Clayra  à 
Sainl-Pierre-del-Vilar-,  et  avec  un  mitre  rhcmin  qui  va  vers 
la  rivière  {de  l'Agli),  et  appelé  lo  Pas  de  l'Ayr/uc,  à  l'endroit, 
sans  doute,  où  l'on  passait  anciennement  ce  cours  d'eau. 

Toutes  ces  preuves  sont  plus  que  sullisantes  pour  éta- 
blir d'une  manière  incontestable  la  direction  que  nous 
attribuons  à  la  voie  romaine,  dans  la  section  comprise 
entre  Ruscino  elSalsulœ.  La  route  sortait  ensuite  du  pays 
des  Surdons,  et  arrivait  à  Narbonne,  située  à  50  milles 
de  Salsuhr.  Les  Itinéraires  ne  signalent  dans  cet  inter- 
valle qu'un  seul  point  désigné  seulement  par  le  nom  du 
Vingtième  milliaire  (ad  Vigesiimnn),  qui  s'y  trouvait  placé. 

'  <i  lil  Jirla  picia  lerre  est  iii  adjacciicia  Soi  Steiiliani  de  Saisis  in  Ic.io 
<i  vocalo  o /o  S/rrtdrt  ,  ot  affrontât  ab   oriente   in   tencncia  Arnaldi   de   Na 

•  Guila  ,  a  meridie  in  \ia  qne  vadit  a  Saisis,  a  circio  in  tencncia  G.  l'ortcl 
t  et  aliorum  ,  ab  at|uilon('  in  terra  .loiianni»  dcri  Pons  et  aliorum.  n  Cari. 
duTemple,  fol.  5G  v". 

2  ('.ottc  |)ro])riété  pnnrrail  être  rcconnne  anjoiirii  lini ,  aussi  crovons- 
oous  utile  d^en  iniliijner  les  ronfr<uit;itions  uun  aniuleurs  (|ui  seraient  tentes 
de  retioiiver  en<x)re,  <i  c|iii'l(|iies  mi'lres  sans  doiile  an-dessons  du  sol  actuel, 
des  débris  de  notre  Tnic  romaine. 

K  Ego  Joannus  (".abaner,  parator  ville  l'erpiniani...  veiido  liorior.  l'ian- 
n  cisen  Pinrarl...  (juriidani    eairi|)uni  e\ .  M.  partibns  rlausnin...  siluni  in 

•  lenninis  loci  de  Clayrano,  loeo  voeuto  la  Caiissada,  eontinenteili  in  se.  v. 
K  ayminatas  terre  vel  rirea,  coiifiontatnin  ab  uno  laterc  ciiin  itinere  suu 

•  via  publiea  i|na  lendidit   de  dicto  loeo  île  Clavraiio  ad  Seum  Pelrnui,  ab 

•  alla  parte  euin  leii''  lieiedis  Joannis  \  il[  J,  ab  alia  parte  cnni  len-' 
«  hereduin  Jucobi  Vesti,  ai*  alia  parte  cum  ten^  Joannis  Bagcl  dirti  loei  de 
t  Clavrano,  et  ab  alia  parle  euin  (juadain  via  qua  tenditnr  ad  ripparinni 
«  appellatain  lo  pas  ileta  taygua  (sic),  precio  .ri.  libr.  nionete  Pei|)iniani , 
«  etc.,  acla  Pcrpiniani  die  prima  augusti  M.D.^TIl.  Francise.  Masdainonl 
f  notarius.  »  Arrh.  de  l'IIop.  de  Per|)i(}n,in  ,  pareil,  n"  8,  liasse  -î!*. 


Que  celle  borne  fùl  dans  un  lien  halùlé,  ou  dans  un  lieu 
désert  comme  nous  serions  porté  à  le  croire ,  rien  ne 
i'indi(|ne  aujourd'hui.  Mais  personne  n'admettra  (pie  U' 
pays  compris  entre  Narbonne  et  Salsulœ  n'offrît  aucun 
centre  de  population,  au  second  siècle  de  notre  ère;  et 
cette  manière  vague  d'indi(pier  la  position  de  cette  sta- 
tion, prouve  combien  nous  ignorons  encore  dans  quel  but, 
et  sur  quelles  données,  étaient  composés  les  Itinéraires 
romains  qui  nous  restent  aujourd'hui. 

Il  y  en  a  une  preuve  plus  frapjiante  encore  dans  la 
station  dite  ad  Combusla ,  qui  se  trouvait  entre  SulsaUr 
et  Ruscino ,  à  4  milles  de  la  première  ville,  et  à  6  de  la 
seconde,  dans  la  plaine  qui  s'étend  au   nord  du  Mas- 
Rovira,  et  à  la  droite  de  la  route  qui  va  de  Perpignan  ii 
Salses.  On  ne  s'explique  guère  aujourd'hui  que  ces  lieux 
aient  pu  être  habités  dans  les  anciens  temps;   mais  rien 
n'indique,  non  plus,  que  le  lieu  dit.lr/  Combusfa  lût  une 
ville  ni  un  centre  d'habitation  quclconipie.  Peut-être,  tout 
ce  quartier  était-il  tout  sim|»lement  couvert  de  bruyères, 
que  l'on  bridait  de  temps  en  temps,  comme  cela  se  pra- 
tique encore  anjouririiui,  pour  les  besoins  de  la  cnltuie, 
sur  divers  points  du  département  connus  sous  le  nom  de 
cretnats  ou  cremadelh  (brûlés,  embrasés),  pure  traduction 
catalane  des  Combusta  romains.  Or,  il  existe  encore  au- 
jourd'hui un  chemin  qui  part  de  Salses,  en  se  dirigeant 
vers  le  Mas-Uovira  et  Sainl-lMerre-del-Vilar;  et  la  partie 
comprise  au  nord  du  Mas-Uovira  s'appelle  Canii  dd  Pov 
creniat  (chemin  du  Puits  brûlé)'.  Nous  ignorons  l'origine 
de  celte  dénomination,  mais  nous  ne  pouvons  y  voir  (pi'un 
dernier  vestige  de   l'ancien  Conibinila ,  dont  la   position 
corres[)ond  exaclemenl    a   celte   |>artie   du   chemin,  de 
même  que  le  mot  catalan  crcinal  est  la  simple  tiaduclion 
du  latin  combiishi . 


'   (W'il  le  nom  ((lie  ci^  cliomiii  porli'  <'iii'ori"  sur  ic  |il.iii  ratlastr.il. 

13 


i9i 


Conclusion. 


La  discussion  ([ui  précède  indique  assez  quels  sont  les 
points  de  la  question  de  notre  voie  romaine,  que  nous 
considérons  comme  définitivement  ac(|uis.  Tels  sont  la 
situation  des  stations  de  Salsuhv,  de  RiisriDo  et  (Vlllibm's, 
le  passage  de  la  voie  à  une  petite  distance  à  l'est  de  la 
chapelle  actuelle  de  Saint-Piorre-f/fV-TV/ar,  et  la  direc- 
tion générale  de  la  route,  le  long  de  la  côte,  en  parlant 
d'Elne  vers  Cervaria. 

Mais  l'œuvre  de  l'archéologie  est  loin  d'être  terminée, 
puisqu'il  reste  encore  a  découvrir  la  situation  exacte  des 
stations  dites  Ad  Comhtisln,  Ad  Slabnlum,  Ad  Centc- 
narhim  et  Ad  Summum  Pyrenœum,  ainsi  que  la  ligne 
précise  et  autrement  importante ,  suivie  par  la  voie 
romaine,  depuis  son  arrivée  dans  le  pays  des  Sordons 
jusqu'à  son  entrée  en  Ibérie. 

En  se  tondant  sur  de  simples  présomptions,  il  serait 
possible  de  tracer,  sur  une  carte  du  département  des  Pyré- 
nées-Orientales, une  ligne  qui  serait  censée  représenter, 
tant  bien  que  mal,  le  parcours  de  la  Voie  Domilia. 
D'autres  l'ont  lait,  ou  le  feront  sans  doute.  Quant  h  nous, 
si  nous  avions  cette  mission ,  nous  marquerions  la  voie 
par  une  teinte  tellement  décolorée,  qu'elle  serait  à  peu 
près  invisible  à  l'œil  nu.  On  pourrait,  tout  au  plus,  en 
suivre  la  direction  générale,  par  les  points  d'interrogation 
qui  l'accompagneraient  des  deux  côtés,  depuis  Salsulcc 
jusqu'au  Pyrenœum.  Encore  cette  insaisissable  repré- 
sentation nous  semblerait-elle  bien  inutile,  et  capable  de 
nous  causer,  h  l'avenir,  des  embarras  ou  des  regrets  que 
nous  avons  voulu  nous  éviter,  en  nous  abstenant  de 
joindre  une  carte  à  notre  travail. 


195 


ÉPHÉMÉRIDES 
Dp  l'IIi^ilal  Sainl-Jeaii  et  de  l'Hospice  de  la  Miséricorde 

DE  TERFIGMABT. 

Par  M.  «iOSEPH  SlHVE»',  ini'Mibie  n'sidanl. 


AVANT-PROPOS. 

Il  i)araitrail  (|U('  IHôpilal  civil  de  Perpii^nan,  à  l'époque 
lie  sa  loiulalion,  aurait  reçu  le  nom  de  Saiul-Blaise,  d"une 
coiilréne  qui  y  existait  (liasse  1,  n"  li);  mais,  lorsque 
divers  hôpitaux  furent  créés  dans  cette  ville  (i)resque 
chaque  corps  de  métier  avait  le  sien),  l'Hcipital  Saint- 
Biaise  dut  perdre  son  nom  primitif,  et  être  appelé,  comme 
de  nos  jours,  llô|)ital  Saint-Jean,  du  nom  de  l'église  contre 
laquelle  il  était  hàti.  Cette  opinion  ne  nra  pas  paru  dénuée 
de  fondement ,  et  je  Tai  adoptée ,  en  attendant  que  des 
faits  authentiques  viennent  la  détruire. 

La  confrérie  Saint-Hlaise  s'étaignit  vers  le  commen- 
cement du  xvie  siècle,  et  fut  remplacée  par  celle  de  la 
Sainte-Croix,  à  laquelle  Léon  X  accorda  un  privilège  apos- 
tolique (liasse  J,  n"52).  Cette  dernière  disparut  dans  la 
tourmente  révolutionnaire. 

Les  Chartres  de  Cirard  II,  dernier  comte  du  Roussillon, 
de  rinfant  I).  Jacques  et  de  Jacipies  I'^,  dit  le  Conquérant, 
que  je  publie,  jetteront  un  grand  jour  sur  l'histoire  de 
rno|»ilnl  Saint-Jean.  Celle  de  (iirard,  lils  du  premier  lit  de 
Causfrel  III,  comte  du  Roussillon,  fera  connaître  les  nom- 
hreux  privilèges  dont  jouissait  alors  la  maison  hospitalière. 


196 

Bien  qu'accordés  niovennanl  (inaiico,  ils  iiélaieiit  pas 
moins  précieux,  ne  (levnicnt  pas  moins  être  considérés 
comme  un  grand  hienl'ail,  à  la  suilc  de  la  guerre  de 
famille  qui  avait  ravagé  le  Roussilion,  sans  même  avoir 
respecté  ni  églises  ni  monastères,  après  que  Ganslret 
eut  répudié  sa  première  femme  ' ,  malgré  les  excommu- 
nications lancées  contre  lui  par  les  deux  Souverains- 
Pontifes,  Eugène  H  et  Adrien  IV. 

Lorsque  Perpignan  eut  une  charte  municipale  (119G), 
les  Consuls  créés  par  elle  devinrent  les  patrons-nés  de 
l'Hôpital  Saint-Jean ,  comme  l'étaient  avant  cette  époque 
les  Bons  hommes  ou  les  Notables  de  la  ville  :  une  foule  de 
documents  historiques  le  constatent.  Ce  patronage  des 
Consuls  s'est  conservé  sans  interruption  jusqu'en  1789, 
où  un  nouvel  ordre  de  choses  a  brisé  des  liens  que  le 
temps  avait  respectés,  et  qui  paraissaient  indissolubles. 

Ainsi,  Jacques  ï<'^  en  vendant  à  son  (ils,  D.  Jacques, 
le  patronal  qu'il  prétendait  lui  appartenir  sur  les  biens  et 
les  revenus  de  l'établissement  des  pauvres,  fit  un  acte 
arbitraire;  mais,  quelques  années  après,  mieux  éclairé, 
et  à  la  suite  sans  doute  d'une  supplique  des  Consuls,  h 
laquelle  durent  se  joindre  les  prières  de  FÉvèque  d'Elne, 
ce  monarque  rendit  la  somme  de  10.000  sols  melgoriens 
que  son  lils  avait  reçue  des  frères  hospitaliers. 

Il  est  fâcheux  que  la  charte  de  D.  Jacques,  dégradée 
dans  plusieurs  de  ses  parties,  n'ait  pas  pu  être  copiée 
en  entier. 

Les  fragments  que  je  publie  de  l'édit  du  mois  d'avril 
1686,  relatif  à  l'établissement  d'un  hospice  ou  hôpital 
général  des  pauvres,  et  union  de  cet  hôpital  h  la  Misé- 
ricorde, feront  connaître  les  peines  sévères  qu'encou- 
raient les  individus  qui  étaient  trouvés  mendiant  dans 
les  rues  de  notre  ville  et  dans  la  province  du  Roussilion, 

'   Ermt'ii(;ai-Ji'  Trcncavcl  ,  iiilc  ilii  Vicotnle  de  BoziiTï. 


1;>7 

comme  aussi,  les  amendes  inlligées  à  ceux  qui  faisaient 
i'aumône  i)uljliquenieiit. 

Louis  XFY,  en  ordonnant  la  séquesiralion  des  pauvres 
à  la  Miséiicorde,  rendit  un  service  signalé  à  notre  pro- 
vince, qui  servait  de  refuge,  comme  aujourd'hui,  ii  un 
trop  grand  nombre  de  vagabonds,  de  gens  sans  aveu, 
(pie  nous  envoyaient  la  Catalogne  et  le  Languedoc,  et 
dont  redit  nous  débarrassa  complètement. 

Pour  soutenir  cette  union,  le  Roi  ordonna  la  levée 
d'une  imposition  extraordinaire  de  1.000  livres,  pendant 
six  années,  sur  les  habitants  de  la  province,  tant  sécu- 
liers qu'ecclésiastiques;  il  établit  à  toujours  celle  de  2 
deniers  sur  chaque  livre  de  viande,  soit  bœuf,  mouton, 
veau  ou  cochon,  qui  se  débitait,  et  celle  de  2  deniers 
par  livre  de  tout  ce  qui  était  vendu  à  l'encan  public  dans 
la  ville  de  Perpignan  et  dans  la  i)rovince,  meubles  ou 
immeubles,  etc.;  enfin,  il  lit  don  en  (;iveur  de  l'hôpital 
général  de  tous  droits  d'amortissements  à  lui  dus  pour 
les  acquisitions,  fondations,  legs  faits  et  à  faire  à  celte 
maison,  jusqu'à  concurrence  de  la  somme  de  cent  mille 
francs.  De  plus,  il  ordonna  l'établissement  d'ateliers  de 
différents  métiers,  pour  occuper  les  pauvres,  et  prescrivit 
les  punitions  corporeiios  que  ceux-ci  devaient  subir,  le 
cas  échéant. 

Malheureusement,  cette  maison  éprouva  vers  l'an  1759 
des  pertes  considérables,  qui  mirent  les  administrateurs 
dans  la  rigoureuse  nécessité  de  renvoyer  les  mendiants, 
faute  de  pouvoir  les  nourrir  et  les  vêtir'. 

Avant  de  terminer,  je  dois  relever  une  erreur  impor- 
tante, qui  s'est  glissée  dans  mes  Éphémérides,  11^  Bul- 
letin, page  515,  année  12a0,  au  lieu  de:  M^'  Ilrançier 
de  Pi'viUos ,  évèquc  d'KInc ,  lisez  :  J/""  licrnard  de  Bergo , 
évêque  d'Elue. 

'    \'nyp7.  ma  linliro  sur  lr<;   llnipn  .■>  ,    l(V    RiiIIpIiii  ilr  l:i  Sociélé. 


li»S 


SUPPLÉMENT. 


(Voir  [laye  Ô09  et  suivantes  du  •!-)*  Bulletin  de  la  Société 
des  l'vrénés-Orien  taies. 


I!278. — Dona  Raimonde  Matheii,  de  Cornella-dol- 
Vercol,  par  son  testament  du  15  des  cal.  de  noveinbi'e 
(Guillaume  Adémar,  notaire),  lègue  à  Bernard-Martin, 
son  (ils  illégitime,  un  patus  situé  à  Cornella;  à  ses  fils 
légitimes  et  à  ses  neveux,  elle  fait  des  legs  particuliers; 
et  elle  institue  l'Hôpital  Saint-Jean  son  héritier,  eu  ré- 
mission de  ses  péchés  (liasse  3o,  n"  59 ). 

1290.  —  Licence  accordée  par  l'Official  de  la  Cort  ec- 
clésiastique de  la  ville  de  Perpignan,  avec  la  licence  du 
Capitoul  de  l'Évéché  d'Elne,  qui  permet  à  Guillaume 
Tolza,  fabricant  de  draps,  d'entrer  en  religion,  bien  qu'il 
soit  marié ,  et  qui  reconnnande  à  la  femme  de  ce  dernier 
de  vivre  chastement.- — 4  des  cal.  de  mai,  Pierre  Pages, 
notaire  (liasse  1,  n»  2). 

1297.  —  Charte  de  Jacques  I^r,  roi  de  Majorque,  comte 
du  Pioussillon ,  du  6  octobre,  permettant  de  construire, 
à  Cornella-dcl-Vercol,  un  ruisseau  connu  sous  le  nom 
A'agouilk  capdal,  pour  arroser  les  terres  appartenant  à 
l'Hôpital  (liasse  50,  n»  5). 

1350.  —  Nomination  de  Guillaume  Albert,  homme  de 
Dieu,  à  la  charge  de  Bailli  de  Cornella-del-Vercol,  pour 
deux  années,  faile  par  le  Prieur  de  l'Hôpital.  —  Pierre 
Montaigut,  notaire  (liasse  50,  n"  11). 

1545.  — Rémission  de  deux  meurtres,  par  Dona  Maria, 
reine  d'Aragon ,  moyennant  la  fondation  de  messes ,  de 
rentes  en  faveur  des  enfants  des  victimes,  etc.  Les  cou- 
l)abli>s  étaient  au  service  de  Donzetls  ou  Chevaliers  (liasse 
4,  n"  15). 


199 

1568.  —  Acte  de  pardon  accordé  par  Pierre  Jalabert, 
de  Sainl-Félicu-d'Avall,  à  Jean-IMcrre  Moner,  à  l'occa- 
sion de  coiii)s  qu'il  a  reçus  de  ce  dernier.  —  Notaire  : 
Jean  Bigorda  (liasse  ii,  n"  40). 

1595.  —  Guillaume  Gorricli,  jardinier,  fait  don  à  l'Hô- 
pital de  la  somme  de  i.OOO  fr.—  Acte  reçu  par  François 
Duran,  notaire  (Livre  des  Bienfaiteurs,  fol.  8). 

1407.  —  Nicolas  Jalabert,  maître  apothicaire,  lègue  à 
l'Hôpital  1.000  florins  d'or;  il  lègue  une  pareille  somme 
à  Vaumônc  commune.  —  Testament  reçu  par  Guillaume 
Coma,  notaire  (Livre  des  Bienf.,  fol.  9). 

1408. — Privilège  de  Martin,  roi  d'Aragon,  en  date  du 
27  n)ars,  accordant  aux  hospitaliers  et  à  l'aumônier  de 
l'Hôpital  S'-Jean  et  de  Vaumùne  commune,  la  faculté  de 
conserver  leurs  emplois  pendant  sept  ans,  si  les  seigneurs 
Consuls  et  le  Conseil-Général  de  la  ville  de  Perpignan  le 
jugent  convenable  (Livre  Vert  mineur,  fol.  555-568). 

La  restriction  qu'on  remarque  à  ce  privilège,  prouve 
(jue  l'autorité  municipale  avait  alors  la  haute  main  sur  les 
établissements  hospitaliers  et  de  bienfaisance,  et  que  le 
Monarque  tenait  à  res[)ecter  et  à  maintenir  ces  préroga- 
tives, basées  sur  la  constitution  de  la  ville. 

T>ien  que  je  n'aie  pas  pu  vérifier,  faute  de  documents 
authentiques,  si  les  Consuls  et  le  Conseil-Général  sanc- 
tionnèrent ce  privilège ,  en  tout  contraire  aux  usages 
établis,  je  pense  que  jusqu'en  1716,  les  jiospitaliers  ont 
été  extraits  au  sort,  comme  par  le  passé,  à  la  maison 
consulaire,  après  deux  ans  d'exercice,  sans  pouvoir  èlre 
réélus.  (Voyez  Livre  Vert  mineur,  fol.  92.) 

1515. — Jean  Valenti,  marchand,  lègue  à  l'llôj)ital  une 
rente  annuelle  de  6  francs,  pour  ètn*  eni|iloyèe  à  l'achat 
d'étonès  devant  servir  à  la  confection  de  bonnets  et  coilfes 
pour  les  femmes  malades.— Testament  reçu  par  Jean  Mas, 
notaire  (Livre  des  Hicnf.,  fol.  I  i). 


2(>0 

l.jr>0.  —  I).  Ik'rnard  Xanxo,  chevalier,  lèi;ue  à  lllûpilal 
une  renie  annuelle  do  60  l'i-.,  pour  être  employée  en  aciial 
de  linge.  —  Testament  reçu  par  François  Masdemont, 
notaire  {Livres  de  la  FunI,  fol.  48  et  des  Bienf.,  fol.  loj. 

loô^.  —  Antoine  Devi,  de  Perpii,man,  lègue  à  l'Hôpital 
une  redevance  à' un  dounj  dhuile  d'olives,  ou  !20  litres, 
mesure  nouvelle. — Testament  reçu  par  François  Masde- 
mont, notaire  (Livre  des  Bienf.,  É'ol.  13). 

'Ioo8. — Guillaume  Puig,  prêtre,  lègue  k  l'Hôpital  une 
rente  annuelle  de  20  francs,  qui  doit  servir  à  acheter  des 
poules  pour  le  régal  des  malades. — Testament  reçu  par 
Antoine  iMasdemont,  notaire  (Livre  des  Bienf.,  fol.  \1\. 

Ioi)8.--Jean  Sahater  fait  don  à  l'Hôpital  d'une  grande 
quantité  de  linge  cl  d'une  rente  annuelle  de  oO  francs. 
Il  fonde,  à  porpéluité ,  l'entrelien  d'un  lit,  ne  devant 
servir  i|ue  pour  les  prêtres  malades ,  à  la  charge  par  les 
liospilaliers  de  faire  célébrer,  tous  les  ans,  un  anniver- 
saire pour  lui  et  ses  parents. — Acte  reçu  par  V^'^  Fabre, 
notaire  (Livre  des  Bienf.,  fol.  19). 

16ii. — Dominique  Pujadas,  apothicaire,  lègue  à  l'Hôpital 
toutes  les  drogues  existant  dans  sa  boutique  au  moment  de 
sa  mort.  —  Testament  reçu  par  Guilhol  y  Marur,  notaire 
(Livre  de.s  Bienf.,  fol.  52). 

1632.  —  Dame  Guiomar-Llot,  laisse  tous  ses  biens  aux 
religieux  de  Saint-Dominique,  à  condition  qu'ils  établiront, 
à  Piigarda,  une  maison  de  leur  Ordre  et  un  professeur  de 
philosophie.  En  cas  de  non  exécution  de  ses  volontés, 
elle  nomn)e  ses  héritiers  l'Hôpital  Saint-Jean  et  l'Hospice 
de  la  Miséricorde. — Testament  reçu  par  Arles  et  Carrère, 
notaire  (Livre  des  Bienf.,  fol.  55). 

Les  religieux  se  mirent  en  possession  desdits  biens;  mais 
longtemps  après,  comme  ils  n'exécutaient  pas  les  intentions 
de  la  testatrice,  les  deux  Maisons  les  actionnèrent  et  les  fnent 
condamutM-  par  arrêt  du  29  jan\ier  17 i2.  Ces  biens  furent 
vendus  et  le  prix  i)artagé  entre  l'Hôpital  et  la  Miséricorde. 


201 

I<»91.  M.  cU'  Cliiiiièiies,  culoiii'l  du  Ro\al  Roussilluri, 
ilouiio  à  rilospice  de  la  Miséricorde  la  somme  de  1 .700  fr. 
( Livre,  des  Bicnf.,  fol.  2i. 

1697.  — Raphaël  Solanllong,  prèlre,  curé  de  Caldégas, 
fait  donation  à  l'Hospice  de  la  Miséricorde  de  ses  droits 
sur  une  somme  de  '2.000  francs,  montant  d'une  indem- 
nité due  par  le  (jouvernement,  qui  s'était  emparé  d'une 
de  ses  propriétés,  nécessaire  à  la  construction  du  fort  de 
Bellegarde;  il  lui  donne,  en  outre,  les  pensions  et  intérêts 
échus  et  à  échoir  de  cette  dette.  —  Acte  reçu  par  Jacques 
Estève,  notaire,  le  12  juin  (lettre  N,  n»  1;  Liv.  des  Bienf., 
fol.  5). 

l"-5.-  Jean  Gispert,  aumônier  de  l'hôpital,  chanoine 
de  la  cathédrale  et  grand  pénitencier,  fait  don  à  cette  maison 
de  la  somme  de  40G  francs,  qu'il  lui  avait  prêtée;  de  plus, 
il  déclare  qu"il  ne  veut  retirer  aucun  honoraire  pour  ses 
fonctions  iraumonier  iy^'  Rnjisb-e  des  DdibcnUians ,  fol. 
lo9  et  17o;  Livre  des  flienf.,  fol.  iô). 

1768.  — L'art.  20  de  l'édit  du  Roi  de  l'année  1686, 
obligeait  les  maîtres  chirurgiens  de  la  ville  de  Perpignan 
à  faire  gratuitement  le  service  à  l'Hospice  de  la  Miséri- 
corde, y  compris  la  rasurc  et  la  coupe  des  cheveux  des 
pauvres;  il  leur  était  enjoint  d'envoyer,  à  leur  place,  des 
élèves,  qui,  après  six  ans  d'exercice  dans  cette  maison, 
passaient  maîtres  à  leur  tour. 

En  1768,  les  maîtres  chirurgiens  cherchèrent  à  se 
soustraire  à  ce  service. 

Plainte  est  portée  contre  eux  par  la  Commission  admi- 
nistrative devant  le  Conseil  Souverain  du  Roussillon,  qui, 
par  son  arrêt  du  2i  mars  1768,  ordonne  aux  maitres 
chirurgiens,  aux  termes  de  l'art.  20  de  l'édit  précité, 
de  fournir  un  ou  deux  élèves  ou  coiiquignons  cajjahles  et 
agréables  ii  la  Connnission,  pour  ser\ir  graluilement  dans 
ledit  hospice,  en  tout  ce  (pii  concerne  leur  état  ou  obli- 
gation; et  ce,  incessammeni,  sans  délai  aucun,  si  mieux 


202 

iiailueul  les  uiailres  chirurgiens  servir  eux-mêmes  gra- 
tuiteuient  ledit  hospice,  a  tour  de  rôle,  le  tout  sous  peine 
de  100  Ir.  d'amende  au  profit  des  pauvres,  non  commi- 
natoire, mais  exécutable  à  chaque  contravention. 

Les  maîtres  chirurgiens  se  soumirent  à  cet  ordre  for- 
mel (liasse  P,  m' 21). 

1772.  — M'ne  la  marquise  d'Aguillar,  lègue  à  l'Hôpital 
la  somme  de  400  francs  (Livre  des  Bienf.,  fol.  56). 

i779._Aux  termes  de  l'édit  du  Roi  du  10  mars  1776, 
qui  défend  d'inhumer  dans  les  églises,  l'Hospice  de  la 
Miséricorde  ouvre  un  cimetière  à  côté  de  la  chapelle,  qui 
est  béni  par  M.  Bastide,  prêtre,  aumônier  de  la  Maison, 
le  24  mai  1779,  avec  la  permission  de  M.  Hyacinthe 
Girbau ,  chanoine ,  vicaire-général  du  diocèse  d'Elne 
(liasse  P,  n"  4). 

Le  décret  du  25  prairial  an  XII  a  régularisé  le  service 
des  inhumations. 

1781._M'"e  ïabarié,  veuve  de  feu  Tabarié,  marchand, 
fait  don  h  rnô[)ital  de  la  somme  de  1.500  francs,  le  14 
octobre  17.S1  ;  elle  désire  que  la  somme  de  1.200  francs 
serve  pour  les  besoins  de  la  maison,  et  qu'avec  celle  de 
oOO  francs  on  achète  un  ornement  d'étoffe  en  or,  fond 
rouge,  qui  se  trouvait  en  pièces  à  la  sacristie,  et  dont  elle- 
même  avait  fait  présent. 

La  Commission  administrative,  touchée  de  la  plus  juste 
reconnaissance,  délibère  (jue  cette  personne  charitable 
serait  mise  au  rang  des  bienfaiteurs  de  l'Hôpital,  et  qu'on 
lui  rendrait  les  mêmes  honneurs  qu'aux  directeurs  et  admi- 
nistrateurs, le  cas  échéant  (3^  Reg.  des  Délib.,  fol.  149; 
Livre  des  liienf.,  fol.  60). 

1790.  —  M.  et  M^''  Bonaure,  donnent  un  dais  pour  le 
service  de  la  chapelle  de  l'Hôpital  (Liv.  des  Bienf.,  fol.  69). 

1791.  — M.  Bessière,  prêtre,  aumônier  de  l'Hôpital, 
fait,  en  le  ([uitlaut,  don  et  remise,  le  26  juin  1791,  de 


la  suiiiiin'  tlo  r'A)0  lï'.,  qui  lui  était  due  pour  ses  liuiioraircs. 
IiulépcMulanniienl  du  zèle  et  de  l'exactitude  qu'il  a>ait  ap- 
portés dans  l'exercice  de  ses  fonctions,  l'Hôpital  lui  était 
encore  redeval)le  de  plusieurs  aumônes  particulières  qu'il 
avait  faites,  et  qui,  d'après  le  dépouillement,  s'élèvent  à 
52ofr.  [l'-Rerj.  desDclih.,  fol.  73;  Livre  des  Tiienf.,  fol.  69). 

1806. ^M.  François  Durand,  banquier,  fait  une  aumône 
de  200  fr.,  le  19  juin ,  à  l'occasion  de  l'admission  à  l'Hô- 
pital d'un  pauvre  estropié  (Livre  des  Bicnf.,  fol.  75). 

1810.  —  M.  Jean  Salvan,  prêtre,  ancien  économe  de 
l'Hôpital,  par  son  testament  ologra[)lic  du  l^r  mai  (Jaume, 
notaire),  lègue  à  cet  établissement  la  somme  de  1 .000  fr., 
pour  être  employée  en  achat  de  draps  de  lit  et  de  chemises 
à  l'usage  des  malades  (Livre  des  Jiienf.,  fol.  78). 

1817.  —  M.  Sauveur  Jaume,  notaire,  par  son  testament 
du  l'"'"  janvier,  lègue  la  sounne  de  600  fr.,  à  partager  entre 
l'Hôpital  et  l'Hospice  de  la  IMiséricordc  (Idem,  fol.  79). 

1818. — M.  François  lionafos,  médecin  en  chef  des 
Hospices,  depuis  le  1  février  1779,  décédé  le  l^  juillet 
1818,  recommande  à  ses  héritiers  de  remettre  à  l'Hôpital, 
après  son  décès,  la  somme  de'iOOfr.,  destinée  à  l'établis- 
sement d'une  orangerie  dans  le  jardin  de  la  maison  (Livre 
des  Bienf.,  fol.  81). 

1820.—  Un  bienfaiteur,  (pii  désire  rester  inconnu,  fait 
don,  le  19  novembre,  de  la  somme  de  500  fr.,  pour  être 
employée  ii  l'achat  de  lits  en  fer,  à  l'usage  des  pauvres 
de  l'Hospice  de  la  Miséricorde  (Liire  des  Bienf.,  fol.  82). 

1821.— M.  Jacci-  Vassal,  administrateur,  et  M'^^^Vassal- 
Frigola,  son  épouse,  font,  le  20  mars,  don  aux  Hospices 
d'une  reconnaissance  de  liquidation  de  la  somme  de  1.000 
francs,  avec  un  coupon  d'intérêts  de  2,')  francs,  à  l'échéance 
du  22  mars  de  la  même  année  (Livre  des  Bienf.,  fol.  82). 

1826.  —  M.  François  de  Llaro-Cellés,  administrateur, 
après  avoir  constamment  donné  des  preuves  de  zèle  pour 
les  hospices,  el  leur  avoir  riiidii,  par  ses  lumières  et  son 


201 

travail  iiifaliguable,  de  très-grands  services,  recommande 
à  sa  famille,  avant  son  décès,  snrvenn  le  10  aont  18!27, 
une  aumône  en  leur  faveur  de  la  somme  de  500  francs 
(Livre  des  Bienf.,  fol.  90 j. 

1850.  —  M.  l'abbé  Eyclienne,  chanoine,  grand  péniten- 
cier, fait  l'aumône  de  500  fr.,  destinés  aux  réparations 
urgentes  à  faire  aux  bâtiments  ruraux  des  hospices  (Livre 
des  Bien f.,  fol.  92). 

185i.  —  M.  Siau,  docteur-médecin,  par  son  testament 
olographe  du  50  avril,  lègue  la  somme  de  1.200  francs, 
à  partager  entre  l'Hôpital  et  l'Hospice  de  la  Miséricorde 
(Livre  des  Bienf.,  fol.  96). 

1854.  —  M.  l'abbé  Vialar,  chanoine,  curé  de  La  Real, 
fait  don  à  l'Hôpital,  le  19  septembre,  pour  une  personne 
qui  veut  rester  inconnue,  de  la  somme  de  1.000  francs 
(Livre  des  Bienf.,  fol.  95). 

1855.  —  M.  Puiggari,  économe  de  l'Hôpilal,  verse  à  la 
caisse  des  Hospices,  pour  une  |)ersonne  qui  désire  rester 
inconnue,  la  somme  de  1 .000  francs,  destinée  à  la  Misé- 
ricorde (Livre  des  Bienf.,  fol.  90). 

1856.  —  M.  l'abbé  Raymond,  par  son  testament  du  12 
février,  lègue  la  somme  de  6.207  fr.  50c  ,  à  [)artager  entre 
l'Hôpital  et  la  Miséricorde  (Livre  des  Bienf.,  fol.  96). 

1841.  —  M.  François  Durand,  administrateur,  fait  l'au- 
mône de  400  fr.,  destinée  à  l'achat  de  linge  pour  le  service 
de  l'Hospice  de  la  Miséricorde  (Livre  des  Bienf.,  fol.  97). 

1846. — M.  Miciiel  Brugtière,  avoué,  verse  à  la  caisse  des 
hospices,  au  nom  de  M"'c  Eulaiie  Raymond,  veuve  Anglada, 
la  somme  de  1 .000  fr.,  léguée  à  l'Hospice  de  la  Miséricorde, 
par  testament  myslique  du  19  mars  1859  (Idem,  fol.  99). 

1848. — M.  Lucia-Garau,  propriétaire,  fait  don  de  1 .200f., 
à  partager  entre  l'Hôpilal  et  la  .Miséricorde  (Id.,  fol.  100). 

1849. — M.  Louis  de  Ronnefoy,  administrateur,  fait  l'au- 
mône de  200  fr.,  à  partager  entre  l'Hôpital  et  l'Hospice  de 
la  Miséricorde  (Livre  des  Bienf.,  fol.  iOL. 


20i 


CHARTE   DE    GIKARD    II,    DERNIER    COMTE 
DU    UOLSSILLON. 

Iii  Dei  nomiiie  .  Notuiii  sil  cuiicUs  preseiitibii.s  (!t  l'ului-is  i|iio(i 
ego  Girardus  Cornes  Rossilionis,  per  me  et  per  oinnem  posleri- 
taleni  iiosinim,  doiio  et  laudo  atque  concedo  Domino  Deo  et 
Ospil;ili  de  Sco  loliaiino  d(>  IVrpiniano,  et  omnibus  paiiperilms 
eiiisdciii  Ospilalis  jiresenlihiis  et  l'utiiris  et  tilii  Kaiimiiido  de 
Garridz,  (jiii  hoc  accipis  pei'  predicttim  Ospitale,  omnem  illmn 
honorem  quem  /lodie  liabei  prediclus  Ospitale  in  aiacentin  S' 
lohannis  l'erpiniani,  et  toliim  ijuantum  adqiiire  (sic)  poterit  vel 
poteril  luibere  ah  ac  die  in  anlea  infra  villa  Perpiniani  d  extra 
in  cunclis  jocis,  ad  iilililatem  hiiius  domus  predicte  de  Ospitale; 
Et  ad  hiic  dono  prediclo  Ospifali  et  paiiperibiis  eius  licenciam 
emeudi  et  captandi  vcl  qui  cis  dure  voliicril  de  feuodis  vel  de  alodiis 
in  predicta  villa  Perpiniani  velin  cunclis  aliis  locis.  Et  adhuc  dono 
predicto  Osi)ilali  ut  bestie  eius  habeant  pascua  in  omnem  lerram . 
ita  ut  non  laciant  talam,  et  si  facercnt  falam'  emendenf  illani 
consilio  boiiuruni  hominuni,  et  non  laciant  uUum  usaiicum  de 
pascuis  nec  de  omnibus  adquisitis  vel  adquirendis  ab  ac  die  in  aniea; 
sed  sit  liberum  et  franchum  de  predicto  Hospilali  totum  quantum 
adquircre  poterit  in  perpetuum.  El  ultra  hoc  toluni,  accipio  predicto 
Ospitale  et  omnes  res  eius  présentes  et  futuras  in  mea  custodia 
et  in  mea  delFensione  et  in  mea  baiulia  et  in  mea  manutenentia 
semper  ad  lumoriMii  Dei  cl  prcdirli  Ospilalis  et  omnium  pauperum 
preseuciiim  et  l'ulurorum.  El  propter  hoc  donum  prediclum .  et 
hanc  laudacionem  .  et  concessionem  predictam,  quam  feci  Deo  et 
predicto  Ospilali,  habui  et  recepi  ego  Cwirardus  prediclus  de  ele- 
mosinis  predirti  Ospilalis  de  manibus  liamundi  de  Garridz  c.soj. 
Malgur.  Et  est  iiiaMifeslum.  Si  (|uis  cdutra  hor  venire  lejilaueril 
agcre  non  valeal  (juod  requiref .  scd  in  diiplo  (  iinip(in;il,  cl  pusca 
(lefje  poslea)  firnium  cl  stabiie  permaneal  onini  (cniporc  .  Acluni 
est  hoc  .  nj  .  nonas.  lanuarii  .  anno  incarnarionis  Domiiii  .  m  r. 
Lx-  vij.  régnante  Lodoico  rege.  Sigfnnm  Girardi  Gomilis  Rossi- 
lionensis  qui  anc  carlam  donacionis  laudacionis  et  concessionis 
ficri  iussi  firmnvi  laudavi  el  (estes  firmare  rogavi.  Sig-j-nuni  Arnaldi 


s 


20G 

RadiiUi. Siiijiuini Siciiliimi  SmIhus. Sit;f mini  Ptnicii  Calo. Si|ï-|-mini 
Bernardi  Ksiiologali.  Si;j:fiiiiiii  Ualiiiacii  île  Ciiiiriil/.  Siii-j-miin  l!i>- 
reni^arii  de  (larrid/,.  Sigfiumi  Honiardi  do  Sro  Lanrencio. 

Nicholaus  Leuila  qui  hoc  scripsit  rogatus  alqiie  iussus  sub  dio 
ot  anno  quo  supra  :,      fAirh.  ilr  l'Hôp.  de  Prip.,  liasse 2^,  n"  i.) 

Ce  texte  a  été  suivi  par  une  copie  de  l'an  1309,  contenue  au  n*  5.  — I.e  n*  6,  qui  a  été 
suivi  par  Marca ,  parait  aussi  ancien  que  le  n"  4.  —  Les  mots  soulignés  manquent  ou  offrent 
quelques  variantes  dan?  le  n*  ij. 


CHARTE  DE  DON  JACQUES. 

Noverint  univers!  quod  Nds  Infaiis  Jacobiis,  lllnsfris  Heg:is 
Aragonum  filius,  héros   Maiorieanini  et  M(iiilis]ielii  Hossilioiiis 
Cerilanie  et  Confluentis,  jier  nos  et  noslros  daiiius  liceiiliain  et 
plénum  posse  vobis,  fratri  Petro  Pagesii  Comendatori  hospitali 
pauperuni  de  Perpiniano  cl  aliis  universis  fratribusdicli  hospitalis, 
quod  vendalis,  bladiim  el  besliariuiii  et  oninia  alla  Itona  iiiobilia 
dicti  Hospitalis  us(|ue  ad  eompleiiienluni  Quiudecini  niiiiuiu  soli- 
dorum  Malgur.  illa  videlicet  que  modo  habelis,  deduclis  inde  om- 
nibus necessariis  vestris  et  dicli  hospitalis  usque  ad  festum  Sri 
Johannis  Junii  proxime  venturum.  FA  si  prerinm  quod  inde  habe- 
hilis  non  sulïieiet  ad  suiiimani  dieloniin  qiiiiideciiii  miliuin  soli- 
dorum ,  Concedimus  vobis  quod  vendatis  cui  et  quibus  volueritis 
tôt  el  tanta  de  bonis  iiimobilibus  dicli  hospitalis,  scilicet,  domos, 
ortos,  eampos  et  vineas,  quod  preciiim  eorum  siiiïiciat  ad  comple- 
menlum  dicte  qiiaiililatis  pecunie  siniul  cuin  jirecio  quod  liabebitis 
de  bonis  mobilibus  supradictis.  Volentes  quod  venditiones  omnium 
predictormn  t'acialis  cum  consilio  et  voluntale  Guillemi  Carbo  et 
Pétri  Rubei  Judicis  Perpiniani.  Nos  enim  promitinius  per  nos  cl 
noslros  [  ]  l'acte  fuerint  in  omnibus  et  por 

omnia  observare  el  lacère  observari  sine  impedimento  c[ 

]ius  persone.  Kt  l'aciemus  emplores 
tenere  el  habere  omnia  supradicta  imiicrpel  1 

Perpiniano  •  \'°  Idus  oclobr.  anno  Doniini.  mccLx-  Sexto. 

Sieffnnni  Infantis  Jacobi  Illustris  Régis  Aragoniim  filii  lieredis 
Maioric.  Monlpelii  Rossilioiiis  Cerilanie  et  Conlluenlis. 

Testes  sunt  R.    de   Urgio.  Gaucerandus  de   Vrgio. 

(1.    (le   Gaslio    novo.  II.    de   Ganejo.  Ii.    de   Giiardia. 


207 

Sigfnnni  l'eliidcflapclladosqiii  mandadodjcli  Doniini  Int'antis 
hor  scrihi  ferit  ol  clausit  loco  die  et  anno  prefixis.  (Lianse  9, 
n°  24.  ) 

CHARTE  DE  JACQUES  1",   DIT  LE  CONQUÉRANT. 

Noverint  iiiiivcrsi  qnod  ciini  NosJacobus  Dei  g:racia  Kcx  Aragon. 
Maiorir.  ol  Valcnric  ('onifs  Harcliiiioiif  o\  rriiclli  cl  Doiiiiims 
Moiifpf'lii  veiididissc'imis  liilaiili  Jacobo  tilio  nosti'o,  jus  patronatus 
rpiod  habobamus  in  Hospitale  pauperiim  Perpiniani,  pro  Decem 
Miilia  sol.  Malg.  et  ipso  filins  nosfer  postea  vendidissel  bonores 
el  possessioncs  ipsius  bdspitalis  pro  ipsis  (b'ccni  niillia  sol.  Maltr. 
et  niinc  nobis  daliini  sit  iiilclliiii  ipiod  de  jure  dictani  vendicioneui 
lacère  non  poleranuisetquodoccasione  dicte  vendicionis  facle  de 
bonis  dicii  bos|iilalis  por  diclum  iiosiruui  filiiini,  ut  est  dicluni, 
nuilti'iin  idem  liospilale  dani[»uilicalus  esl:  Idcirco  voicnles  dictos 
denarios  in  comoduni  ejusdeni  bospitalis  restiUiere,  Recognosci- 
mus  et  confiteniur  debere  vobis,  Coniendatori  el  fratribus  bospi- 
talis predicii ,  Dtvom  Miilia  sol.  Mali:,  (jui'  (piidein  assignanuis 
vobis  liabciula  el  percipieuda  in  reddilibns  cl  exilibiis  iioslris  Cau- 
chiliberi.  Mandantes  Martine  dcl  Trillaf  bajulo  nostro  Perpiniani 
et  Caucliiliberi,  (|uod  de  rcddilibus  el  exilibus  prediclis  donel  et 
solvat  dicta  dcceni  niillia  sol.  Malg.  lia  qnod  ca  Iradal  Dalmacio  de 
Villarasa  et  G.  Garboni  de  Perpiniauo,  ut  de  ipsis  euiaiit  bonores 
et  possessiones  ad  opus  bospitalis  predicii.  Dat.  in  Monteplo.  Idus 
octobr.  anno  domini .  m  •  r?c  •  Lxx-  Secundo.  (Liasse  2,  n">  25.) 

EXTRAITS   DE   L'ÉDIT   DE   LOUIS   XIV, 

POUa  l'établissement  d'un   hôpital  général  en   la   ville  de   PERPIGNAN, 
ET    liMON    DUDIT    HÔPITAL    A   CELUI   DE   LA    MISÉRICORDE. 

XXII.— Faisons  très-expresses  inbibitions  et  défenses  ù  toutes 
jiersonnes  el  de  tous  sexes,  lieux  el  âges,  de  quelque  qualité  el 
naissance,  et  on  quelque  étal  cpi'ils  puissent  être,  valides  ou  inva- 
lides, malades  nu  convalescents,  curables  ou  incurables,  do 
maiulier  dans  la  ville  el  diocèse  de  Per|)ignan  et  pays  de  Rous- 
sillon,  ni  dans  les  églises  ou  aii\  [lorlos  d'icelles,  aux  portes  des 
maisons,  ni  dans  les  rues,  publiquemenl  ni  en  secret,  de  jour 
'Ml  d(>  iiiiil .  -v.iii»  aucune  excepliim  des  rètes  ^olennollcs,  Pardons 


2()s 

ou  Jubilés,  ni  assemblées,  foires  ou  niaicbés,  pour  (luelqu'uiilre 
cause  que  ce  soit,  à  peine  du  l'ouel,  conire  les  contrevenants  pour 
la  première  fois,  et  pour  la  seconde  fois  des  galères  conire  les 
hommes  et  garçons,  et  du  banissemenl  conire  les  femmes  et  (illes. 

XXIII.  -Faisons  inliibilions  et  défenses  à  lonles  personnes,  de 
quebpie  qualité  et  condition  ([u'ils  soient,  de  donner  l'aumône  ma- 
nuellement aux  mendiants  dans  les  rues  et  lieux  ci-dessus,  non- 
obstant tout  motif  de  compassion,  nécessité  |iressanle  ou  autre 
prétexte  que  ce  puisse  élre,  à  {u'ine  de  cent  sol.s  iramende,  ajtpli- 
cables  au  prolil  dudit  Hôpital  cl  Maison  de  la  Miséricorde,  au  paye- 
ment de  laquelle  ils  seront  contraints  et  sans  dépôts,  en  vertu  des 
ordonnances  des  administrateurs,  sur  le  rapport  de  leurs  officiers. 

XXIV. — Défendons  pareillement  aux  propriétaires  et  locataires 
des  maisons  et  à  tous  autres,  de  loger,  retirer,  ni  retenir  chez  eux, 
après  la  publication  des  présentes,  les  pauvres  qui  sont  ou  seronl 
mendiants,  à  peine  de  cent  livres  d'amende  pour  la  première  fois. 
de  trois  cents  livres  pour  la  seconde,  et  de  plus  grande  en  cas  de 
récidive,  le  tout  applicable  au  profil  des  pauvres  dudit  Hôpital 
Général  et  Maison  de  la  Miséricorde,  pour  raison  de  quoy  les  pro- 
priétaires, locataires  et  autres,  pourront  être  contraints  par  saisie 
de  leurs  biens, et  emprisonnement  de  leurs  personnes  en  vertu  des 
présentes,  et  des  ordonnances  desdits  administrateurs. 

XXV.— Pourront  lesdits  intendants,  administrateurs  et  syndics, 
employer  telles  personnes  qu'ils  aviseront,  pour  arrèloi-el  conduire 
audit  Hôpital  les  pauvres  mendiants  (jui  se  trouveront  dans  ladite 
villeet  diocèse,  pour  être  ceux  dudit  diocèse  enfermés  audit  Hôj»ital 
Général,  et  les  autres  remis  entre  les  mains  des  juges  ordinaires 
pour  être  châtiés  conformément  à  l'article  XXll  des  présentes. 

XXVI. — Faisons  très-expresses  inhibitions  et  défenses  à  tous  les 
habitants  de  ladite  ville,  de  (pu'hiue  (pialité  et  condition  qu'ils 
soient  et  à  tous  autres,  de  donner  le  moindre  empêchement  à  ceux 
qui  seront  préposés  pour  chasser  lesdits  mendiants  et  vagabonds. 
et  pour  la  capture  d'iceux;  et  nous  voulons  que  ceux  qui  seronl 
assez  téméraires  pour  molester  lesdits  préposés  ou  pour  les  mal- 
traiter, soient  condamnés  à  des  peines  et  des  châtiments  sévères 
par  ledit  Conseil  supérieur  de  Houssillon. 


209 


DES  FIÈVRES  DE  MARAIS, 

Par  M.  P.>tV.-F.  AltBBRCiB,  Docteur  en    Méilociiii; ,   Aiicioii  Mcdecin 

priiu'i()al  des  atiiii'L's  t't  l'ii  cLof  di'  l'llr>j)iliil  militaire  de  lîoiie 

(Algérie),  Officier  de  la  Lcg.-d'FIonn.,  membre  résidant. 


INTRODUCTION. 

J'ai  divisé  mon  travail  en  deux  parties,  et  chacune  de 
ces  parties  offre  un  intérêt  tout  spécial. 

Dans  la  première  partie,  après  (juelques  considérations 
essentielles  sur  l'éiiidémie  qui  a  régné  à  Bône  (Algérie) 
pendant  l'année  1S")5,  j'ai  fait  l'exposé  des  observations 
pratiques  des  nosologistes  sur  les  lièvres  de  rnarais,  et, 
en  particulier,  de  ma  méthode  de  traitement. 

La  deuxième  partie  démontre  le  parallèle  différentiel 
de  trois  méthodes  de  traitement  qui  ont  été  employées 
à  l'hôpital  militaire  durant  cette  épidémie. 

Je  terminerai  ce  travail  par  plusieurs  observations  de 
fièvres  pernicieuses  très-graves,  recueillies  dans  mon  ser- 
vice et  traitées  par  le  sulfate  de  ([uinine  h  haute  dose. 

L'analogie  frappante  que  j'ai  reconnue  entre  l'intoxi- 
cation paludéenne  de  Bône  et  celle  qui  s'est  montrée  dans 
nos  contrées  pyrénéennes,  princi|)alement  à  Salses,  mais 
a  un  degré  moindre  d'intensité,  m'a  engagé  à  publier  ce 
liavail. 

Je  le  soumets  donc  aujourd'hui,  dans  une  pensée  hu- 
manitaire et  comme  enfant  du  Hoiissillon ,  à  la  Société 
Agricole,  Scientiliipie  et  Littéraire  des  Pyrénées-Orien- 
tales, heureux  si  l'étude  que  j'ai  laite  des  fièvres  de  marais, 
peut  être  nu  jour  utile  à  mes  chers  compatriotes. 

14 


'210 


PREMIÈRE  PARTIE. 


Lisez,  comparez,  jugez... 

Nous  étions  arrivés  à  la  fin  du  mois  d'octobre,  l'état 
sanitaire  s'était  maintenu  jusqu'alors  dans  des  conditions 
très-avantageuses;  le  nombre  des  malades  à  l'hôpital  de 
Bône  se  trouvait  au-dessous  de  la  moyenne  de  celui  des 
bonnes  années;  les  diverses  affections  n'avaient  présenté 
que  le  caractère  de  gravité  afférent  à  chacune  d'elles; 
nous  étions  heureux  de  voir  disparaître  la  saison  que 
paraissent  affectionner  les  épidémies;  chacun  de  nous 
formait  ses  petits  projets  ;  moi-même,  je  songeais  h  aller 
en  France  pour  soigner  ma  santé,  sensiblement  altérée 
par  l'épidémie  de  l8o2,  lorsque,  tout-a-coup,  les  malades 
augmentèrent  progressivement,  et  les  entrées  à  l'hôpital 
se  montrèrent  très-fréquentes.  Ainsi,  les  malades,  qui 
étaient  au  nombre  de  255  au  commencement  du  mois  de 
novembre,  ont  présenté  une  marclie  rapide  et  ascension- 
nelle pendant  tout  le  mois,  et,  à  la  fin  du  mois,  le  chilfre 
des  malades  s'était  élevé  a  575,  soit  en  plus  5120. 

Cette  aggravation  spontanée  dans  l'état  sanitaire,  qui 
revêtit  immédiatement  le  caractère  épidémicpie,  se  déve- 
loppa sous  l'inlluence  active  de  l'intoxication  paludéenne, 
vivement  ranimée  et  répandue  dans  l'air  par  les  chaleurs 
persistantes  et  le  siroco ,  qui  a  soufflé  avec  violence  pen- 
dant les  premiers  jours  du  mois  de  novembre. 

Alors,  de  reprendre  son  poste,  de  faire  appel  au  dé- 
vouement et  de  faire  face  à  l'épidémie,  chacun  de  nous 
s'occupa. 


211 

Jamais  épidémie  n'a  présenté  un  caractère  plus  franc, 
plus  vif  et  aussi  tranché.  Les  lièvres  se  sont  généralisées 
l)eaucoup  plus  rai»i(lenient  que  l'année  dernière,  et  les 
personnes  qui  n'avaient  pas  été  atlcinles  en  J8o2  ont  été 
comprises  parmi  celles  qui  ont  été  malades  en  1855.  Elle 
s'est  répandue  indistinctement  dans  tontes  les  classes  de 
la  sociélé,  aussi  bien  chez  les  riches  que  chez  les  pauvres; 
les  militaires  de  tous  les  grades  et  de  toutes  les  positions, 
de  même  que  toutes  les  administrations  ont  pris  une  part 
active  et  très-prompte  à  sa  brusque  apparition.  Le  pauvre, 
épuisé  par  l'épidémie  de  l'année  dernière,  qui  l'avait  laissé 
débilité  et  sans  ressources,  a  fourni  une  plus  grande  pro- 
portion à  celle  de  cette  année;  aussi,  la  plupart  des  cas 
pernicieux  dont  nous  avons  eu  à  déplorer  la  mort,  ont-ils 
été  observés  chez  lui.  Ils  exprimaient,  à  nos  yeux,  des 
sentiments  de  la  plus  grande  misère,  et  nous  répétaient 
que  la  douleur  morale  était  encore  plus  forte  que  les  vives 
soulfrances  que  nous  découvrions  chez  eux.  ils  soulfraient 
moralement ,  parce  qu'ils  ne  pouvaient  plus  acheter  du 
sulfate  de  quinine,  étant  sans  ressources,  et,  cependant,  ils 
disaient  avoir  plus  besoin  de  ce  médicament  que  de  pain. 
Ils  étaient  sincères  dans  leurs  besoins  comme  dans  leurs 
douleurs:  le  sulfate  de  quinine  était  devenu  une  denrée 
de  première  nécessité,  le  viatique  général.  Cette  position, 
si  digne  d'exciter  le  plus  vif  intérêt,  fut  comnmniquée  au 
(Conseil  d'hygiène  et  de  salubrité,  dont  j'avais  l'honneur 
de  faire  partie,  et,  dans  la  séance  du  25  novembre  185"), 
il  émit  uiuuiimement  le  vœu  que  le  pharmacien  de  l'hôpital 
civil  lut  autorisé  à  délivrer  des  médicaments,  aux  prix  de 
revient,  aux  familles  gênées,  et  gratuitement  aux  indigents. 
Ce  v(eu  fut  accepté  par  l'autorité  civile;  et,  par  un  senti- 
ment (jui  l'honore,  elle  lit  connaître  j)ubliquemeiil  les 
heures  de  distributions  aux  habitants  de  iJône.  A  cet  ellet, 
la  pharmacie  de  l'hôpital  civil  est  restée  ouverte,  le  malin, 
de  six  heures  et  demie  à  onze  heures;  l'après-niidi,  de  une 


21-2 

heure  à  cinq  heures;  le  soir,  de  sept  heures  à  dix  heures. 
Ainsi,  le  sulfate  de  quinine  était  payé,  oO^  le  gramme;  les 
potions,  indistinctement,  40^;  les  purgatifs  et  médicaments 
externes,  ^O^.  Cette  mesure  fut  accueillie  partout  avec 
satisfaction  et  reconnaissance,  et  les  ftimilles  |)urcnt  ainsi 
ménager  leur  entrée  à  Ihôpital.  Elle  a  donc  été  d'un  très- 
grand  bienfait. 

Les  pluies  torrentielles  que  nous  avons  supportées  de- 
puis le  19  novembre  jusqu'à  la  fin  du  mois,  ont  considé- 
rablement augmenté  et  aggravé  les  pyrexies,  qui  n'ont  pris 
le  caractère  pernicieux  cpic  par  l'inlluence  du  froid  humide, 
occasionné  et  entretenu  par  la  durée  de  ces  mêmes  pluies. 
Si  le  nombre  des  malades  a  augmenté  par  cette  même 
cause  très-puissante,  ce  n'est  pas  par  suite  d'une  nouvelle 
intoxication,  qui  n'était  plus  possible,  la  plaine  se  trouvant 
submergée;  mais  bien  en  privant  la  peau  de  ses  moyens 
d'élimination  naturels,  et  en  décidant  la  période  d'incu- 
bation. C'est  mon  opinion  bien  intime.  Plusieurs  personnes 
demeurent  étonnées,  en  voyant  les  fièvres  se  produire  après 
des  pluies  aussi  abondantes,  lorsque  les  médecins  eux- 
mêmes  leur  avaient  assuré  que  les  pluies  seules  pouvaient 
arrêter  les  progrès  de  la  maladie  et  empêcher  l'influence 
pathogénifère  des  marais.  Il  est,  en  effet,  certain  que  les 
nouvelles  intoxications  ne  peuvent  plus  avoir  lieu,  lorsque 
le  marais  qui  fournit  le  foyer  de  pestilence  se  trouve  entiè- 
rememt  submergé;  mais  les  personnes  qui  avaient  été  sa- 
turées de  ce  principe  marémalique  avant  les  pluies,  doivent 
fournir  prise  a  l'épidémie,  et  c'est  précisément  chez  elles 
que  le  froid  humide  a  agi  assez  directement  pour  produire 
la  manifestation  de  cette  pyrexie,  en  les  privant  des  moyens 
éliminateurs  accomplis  par  la  peau.  Le  froid,  en  pareille 
circonstance,  renferme  le  principe  fébrifère  dans  l'orga- 
nisme ,  et  pour  me  servir  de  l'expression  d'une  de  nos 
célébrités  médicales  d'Afrique  :  il  enferme  le  loup  dans  la 
bergerie. 


2n 

L'aulorilé  militaire,  si  pleine  de  sollicitude  pour  la  santé 
dn  soldat,  a  bien  voidii  soustraire  presque  toute  la  gar- 
nison à  linlluence  morbide  des  marais  avant  les  chaleurs 
accablantes  qui  ont  eu  lien  cette  année.  Celte  mesure 
liygiénique  a  empêcbé,  évidemment,  la  manifestation  de 
plusieurs  allections,  et,  partant,  conservé  la  santé  des 
troupes  de  la  garnison. 

La  marclie  de  cette  épidémie  a  été  si  prompte,  qu'il 
est  permis  de  poser  en  certitude ,  d'après  la  proportion 
des  malades  de  la  population  civile,  comparativement  aux 
malades  militaires,  (pic  si  la  garnison  avait  présenté  le 
même  efl'octit'  (pie  Tannée  précédente;  si  les  huit  cents 
détenus  politiques  s'étaient  trouvés  encore  à  la  Casbah; 
si,  enlin,  les  femmes  et  enfants  des  colonies  diverses 
avaient  été  reçus  à  l'hôpital,  comme  par  le  passé,  il  est 
certain,  dis-je,  que  le  nombre  des  malades  à  l'hôpital 
aurait  été  plus  considérable  (jue  celui  de  J<Soi2. 

Cette  nouvelle  épidémie,  qui  a  été  si  brusque  dans  son 
apparition ,  doit  faire  regretter  que  les  travaux  d'assai- 
nissement, qui  avaient  été  proposés  par  la  Commission 
nommée  par  M.  le  Gouverneur-Général,  et  dont  j'avais 
riionneur  de  faire  partie,  n'aient  [)as  été  exécutés  entre 
les  deux  épidémies,  d'autant  que  le  Gouvernement  avait 
daigné  les  accueillir  favorablement.  Aujourd'hui,  tout 
le  monde  est  convaincu  que  c'est  dans  la  petite  plaine, 
où  git  le  foyer  des  épidémies  qui  désolent  la  po|)ulation. 
C'est  donc  vers  ce  point  (jne  les  travaux  d'assainissement 
doivent  d'abord  être  dirigés;  car  ce  foyer  de  pestilence 
est  d'autant  |)lus  dangereux  ,  qu'il  existe  aux  portes 
de  la  ville  de  IWne.  La  Commission  a,  d'ailleurs,  ap- 
jielé  l'attention  du  GouverneuKMit  sur  ce  point  le  plus 
im|)ortant ,  et  lui  a  |)roposé  les  moyens  de  le  faire  dis- 
paraître, (^es  moyens  sont  toujours,  à  mon  avis,  les 
meilleurs  k  employer  pour  l'assainissement  de  la  petite 
plaine;  en  efl'et,  eux  seuls  peuvent  rendre  les  cultures 


214 

possibles  et  profitables.  Je  veux  parler  du  dessëcheniciit 
complet. 

Je  constate  avec  plaisir  qu'un  commencement  d'exé- 
cution a  eu  lieu  dans  les  travaux  d'assainissement  de  la 
petite  plaine  de  Bône;  je  l'orme  des  vœux  pour  que  ces 
travaux  soient  continués  sans  relâche  jusqu'à  parfait 
achèvement. 

L'endémo-épidémie  de  18o5  a  obéi  aux  mêmes  lois  et 
présenté  les  mêmes  caractères  que  celle  de  l'année  pré- 
cédente, et  il  est  fort  remarquable  de  constater  que  son 
apparition  correspond  à  l'époque  de  la  plus  grande  inva- 
sion de  l'épidémie  de  1852. 

Ces  fièvres  ont  offert  à  l'étude,  dès  le  principe,  le  plus 
grand  intérêt;  et  c'est  parce  que  l'bistoire  de  ces  affec- 
tions est  encore  un  des  points  les  plus  obscurs  de  la 
médecine,  ainsi  que  M.  Maillot  le  dit  à  la  préface  de  son 
livre  des  fièvres  intermittentes  publié  en  185G,  que  le 
médecin,  et  surtout  le  médecin  militaire  d'Afrique,  doit 
lui  consacrer  toute  son  attention  ;  d'autant  mieux  qu'on 
est  bien  loin  d'avoir  dit  le  dernier  mot  sur  les  lièvres  de 
marais. 

Les  différents  types  ont  été  observés  dans  la  durée  de 
ces  fièvres  :  elles  ont  été  continues  à  leur  début,  rémit- 
tentes dans  le  cours  de  la  pyrexie,  et,  enfin,  elles  sont 
devenues  franchement  intermittentes.  Ce  sont  les  fièvres 
intermittentes  à  type  quotidien  surtout,  et  à  type  tierce, 
qui  ont  succédé  à  la  continuité,  sans  tenir  compte  de 
la  rémittence,  qui  a  été  rarement  observée;  et  encore, 
quand  cette  forme  a  eu  lieu,  s'est-elle  toujours  montrée 
avec  des  paroxysmes  irréguliers.  L'intoxication  palu- 
déenne, dans  les  manifestations  morbides  et  diverses, 
a  donné  naissance  à  ces  différents  types,  suivant  l'in- 
tensité pathogénétiqne ,  et,  à  cet  effet,  je  suis  assez 
disposé  à  partager  l'opinion  de  M.  Boudin ,  qui  attribue 
à  ces  manifestations  pathologiques  les  types  intermittent, 


215 

réiniltont  et  contiiui,  suivant  le  degré  d'intoxication  saturé 
par  Torganisnio. 

Cette  intoxication  ,  parvenue  à  son  plus  haut  degré 
d'intensité  dans  le  cours  de  l'épidémie,  a  fortement 
ébranlé  les  organes  digestifs,  pectoraux  et  cérébraux,  qui 
sont  devenus,  alors,  le  siège  des  phénomèmes  locaux  les 
plus  graves.  Les  caractères  pernicieux,  qui  ont  pris  nais- 
sance dans  ce  haut  degré  d'intoxication,  et  qui  ont  réagi, 
soit  sur  le  centre  nerveux,  soit  sur  la  muqueuse  intes- 
tinale, ont  développé  les  formes  délirante,  tétanique, 
épileptique,  comateuse,  algide,  cholérique. 

Dans  l'histoire  de  ces  lièvres  de  marais,  le  traitement 
est,  sans  contredit,  le  point  le  plus  important;  aussi,  lui 
ai-je  accordé  mon  observation  la  plus  consciencieuse. 
J'ai  suivi  et  comparé  les  divers  modes  de  traitements 
employés  par  les  médecins  préposés  a  l'étude  de  ces 
maladies;  et  l'expérience  comparative  entre  ces  divers 
traitements  et  la  médication  que  je  mets  en  usage ,  peut 
seule  fournir  à  des  personnes  compétentes  un  jugement 
propre  a  rechercher  la  meilleure  méthode  de  traitement. 

On  sait  que  la  médication  à  apporter  aux  lièvres  de 
marais,  mieux  appelées  fièvres  à  quinquina,  se  compose 
de  deux  ordres  de  moyens  :  les  indirects ,  qu'on  peui 
qualilicr  aussi  de  médication  adjuvante,  et  les  directs, 
qui  renferment  les  fébrifuges  proprement  dits  et  le  ipiin- 
(piina  en  tète. 

Les  médecins,  généralement,  pensent  qu'il  est  utile  de 
se  servir  de  la  médication  adjuvante  au  début,  pendant  ou 
après  une  atteinte  de  lièvre.  Les  médications  en  usage 
sont  les  vomitifs,  les  purgatifs  et  les  émissions  sanguines. 

Les  émissions  sanguines,  autrefois  très-répandues,  et 
même,  au  début  de  l'occupation,  exclusivement  employées, 
sont  maintenant  presque  abandonnées.  Seules,  elles  n'ar- 
rêtent point  les  accès;  elles  les  allongent,  multiplient 
les  récidives,  retardent  les  convalescences,  favorisent  le 


2t6 

développement  de  la  chloranémie,  et  n'enlèvent  nullement 
les  congestions  viscérales,  contre  lesquelles  elles  ont  été 
instituées.  Elles  ont  été  accusées  d'avoir,  pour  une  longue 
part,  contribué  à  la  iiiortalilé  (pii  a  frappé  l'armée  au  début 
de  l'occupation.  On  s'en  sert  encore  (juchpielois,  soit  en 
ville,  soit  à  l'hôpital,  contre  les  congestions  de  l'encéphale 
ou  de  l'abdomen,  qui  se  produisent  avec  les  accès;  mais 
comme  le  sulfate  de  quinine  est  administré,  alors,  h  des 
doses  élevées,  en  même  tenq)s  qu'on  tire  du  sang,  il  est 
assez  difTicile  de  faire  aux  saignées  la  part  qui  leur  revient 
dans  la  terminaison  heureuse  ou  funeste  de  la  maladie. 
On  peut  seulement  remarquer,  ce  qui  d'ailleurs  a  déjà  été 
signalé,  que  les  personnes  qui  les  ont  subies  deviennent 
plus  facilement  anémiques  et  restent  plus  longtemps 
faibles. 

Je  viens  aux  purgatifs  proscrits  par  lîestaurand,  bien 
qu'il  attribuât  la  fièvre  à  la  bile,  par  iMonginot,  Morton, 
Sydénham  et  Torti.  Les  purgatifs  se  glissent  maintenant 
dans  la  thérajjeutique,  et  toujours  à  l'abri  du  sulfate  de 
quinine.  Ils  espèrent,  couverts  qu'ils  sont  par  ce  sel, 
usurper  de  nouveau  place  et  rang  dans  la  thérapeutique 
des  fièvres  de  marais.  Quelques-uns  les  prescrivent, 
seulement,  quand  il  y  a  indication.  Les  indications  sont 
la  constipation,  l'enduit  épais  blanc  et  jaune  do  la  langue, 
les  coliques  ou  la  diarrhée.  D'autres  les  administrent  d'une 
manière  générale,  intercalés  entre  deux  doses  de  sulfate 
de  quinine.  Ceux-ci  ne  disent  point  quel  est  leur  but;  ils 
purgent,  parce  qu'ils  ont  envie  de  purger  et  de  jtouvoir  dire  : 
prenez  ma  méthode  pour  vous  guérir,  c'est  la  meilleure. 
Aucune  idée  ni  fait  sérieux  et  digne  d'examen  n'a  été  mis 
en  avant  pour  justifier  cette  manière  générale  de  les  admi- 
nistrer. Je  ne  jjense  pas  qu'on  ait  envie  de  revenir,  soit 
à  la  bile,  soit  au  suc  pancréaticpie  trop  acide,  soit  aux 
saburres,  ni  au  ferment  fébrile,  enveloppé  dans  n'im[)orte 
quelle  sécrétion. 


217 

Ces  idées,  oulrc  qu'elles  ont  fait  leur  temps,  sont 
dénuées  de  tout  lait  bien  constant  sur  lequel  elles  puis- 
sent se  baser;  mais  si  elles  ne  produisent  pas,  ce  que 
je  crains  pour  ma  part,  des  récidives  plus  rapprocliées  et 
une  augmentation  dans  la  dépense  du  sull'ate  de  quinine, 
on  peut,  à  bon  droit,  leur  faire  le  reproche  qui  leur 
avait  été  déjà  adressé  par  Restaurand,  ïorti  et  après  eux 
M.  Littré,  c'est  de  refiroduire  avec  presque  autant  de 
certitude  la  lièvre,  que  le  sulfate  de  quinine  la  guérit. 

Sydéisuam,  ajoute  «  qu'il  n'a  jamais  retiré  d'autre 
«  bénélice  de  la  purgation,  que  de  rendre  la  maladie 
«  plus  opiniâtre.  » 

ÏORTi,  dit  «  que  les  [)urgatifs  sont  aussi  pernicieux 
«  que  les  cbanq)ignons  vénéneux.  » 

Restalrand,  raconte  «  que,  quand  on  donne  un  jjur- 
«  gatif  a  un  convalescent  de  fièvre  intermittente,  il  réci- 
«  dive  le  jour  même  où  il  prend  son  purgatif.  » 

MoNCiNOT,  déclare  «  que  les  purgatifs  anéantissent  les 
«  forces,  détruisent  la  tonicité  de  l'estomac  et  des  antres 
«  parties,  et  |)rovo(pieril  une  formation  ])ermanente  d'Im- 
«  mciu's  dépravi'es;  c'est  pour(|uoi,  dit-il,  les  lièvres  sont 
«  plus  souvent  entretenues  que  supprimées  par  eux;  tandis 
«  que  si  on  se  sert  de  quincpiina  ou  du  sulfate  de  quinine, 
«  en  une  seule  dose,  il  dé'truit  souvent  les  accidents  re- 
«  doulables  engendrés  par  les  purgatifs.  » 

.Mouton,  assure  <(  qu'il  a  vu  les  lièvres  tierces,  par 
«  l'inlhience  des  purgatifs  et  des  saignées,  se  changer 
«  en  lièvre  hémilrili'e  oU  quarte,  avec  hydro|)isie,  com- 
«  plicpii'c  d'autres  sympt()mes  graves.  Il  ap|)elle  celte 
«  méthode  pratique  (initia  cl  in fclij'  praxis).  » 

11  ajoute,  plus  bas,  «  que  les  évacuations,  en  tourmen- 
«  tant  inuliiemeiit  la  nature,  retardent  la  guérison  et  n'ont 
«  d'autre  avanlage  que  de  nécessiter,  pour  la  suppression 


218 
«  de  la  lièvre,  une  qiianlilé  plus  considérable  d'antidote 
«  ou  de  quinquina.»  Ces  passages  sont  extraits  du  Cliap. 
IV,  du  le»-  Livre  de  Torti,  Thcrapeuticœ  spccialis  ad  Fcbres 
periodicas  peniiciosas. 

Dans  le  Chap.  IX  du  premier  Livre,  également  de  Torti, 
Svdénham  professe  «que  les  purgatifs,  et  encore  moins 
«les  évacuations  sanguines,  ne  doivent  être  employés 
«  dans  le  but  de  rendre  plus  efficace  l'administration  du 
«  sulfate  de  quinine;  car,  alors,  l'un  et  l'autre,  en  atl'ai- 
«  blissant  l'organisme,  rendent  plus  restreintes  et  plus 
«  promptes  les  récidives.  » 

Il  ajoute,  plus  bas,  «  que  si  quelquefois  on  donne  des 
«  purgatifs  pour  guérir  les  obstructions,  ou  bien  pour 
«  évacuer  les  humeurs  viciées  des  premières  voies,  ou 
«  bien ,  ce  qui  est  plus  digne  d'attention ,  si  dans  une 
«  constitution  épidémiipie  on  saigne ,  il  arrive  que  la 
«maladie  traîne  pendant  longlenq)S,  et  que,  pendant 
«  ce  temps,  les  malades  sont  e.xposés  à  mille  symptômes 
«  les  plus  dangereux.  » 

Voilà,  certes,  de  bien  grands  observateurs,  qui  con- 
damnent et  les  purgatifs  et  les  saignées,  administrés  d'une 
manière  générale. 
Reste  a  examiner  les  vomitifs. 
Si  la  lièvre  produit  rarement  la  diarrhée,  elle  a  peu 
d'accès  sans  vomissements  au  début;  presque  toujours 
ils  se  produisent  dans  le  frisson.  Un  grand  nombre  de 
récidives  sont  annoncées  dans  leur  retour,  par  des  nau- 
sées et  des  vomissements;  la  bile  est  rejetée  en  abon- 
dance, surtout  dans  les  tenq)S  froids  et  dans  les  lemi)S 
humides.  11  n'est  pas  rare  d'entendre  dire  aux  malades, 
qu'ils  ont  vomi  deux,  trois  et  même  quatre  litres  de  bile. 
Les  vomissements  bilieux  sont  un  des  phénomènes  les 
plus  fréquents  de  l'intoxication  paludéenne,  (pii  suit  la 
lièvre,  presque  comme  l'ondjre  suit  le  soleil. 


219 

Ces  faits,  qui  ont  frappe  les  observateurs  de  tous  les 
tenî|)S,  ont  servi  de  base  aux  théories  les  plus  ancien- 
neinont  connues,  et  on  |)eut  dire  les  plus  ré()andues,  sur 
les  causes  prochaines  des  lièvres  et  à  leur  traitement. 

Outre  la  fréquence  et  la  constance  de  ce  phénomène, 
il  est  bien  reconnu  qu'en  Europe,  un  grand  nombre  de 
lièvres  d'accès  sont  sup|)rin)ées  avec  autant  de  prompti- 
tude et  de  sûreté  par  les  vomitifs  que  par  le  quin(iuina 
ou  par  le  sulfate  de  quinine. 

Devant  l'indication  que  semble  fournir  la  nature, 
devant  les  faits  d'Europe  et  ceux  qui  ont  été  obtenus 
à  Bône  à  une  époque  antérieure,  où  les  vomitifs,  entre 
les  mains  de  MM.  AVorins  et  Houdin,  ont  procuré  de 
nombreuses  guérisons,  je  n'ai  pas  hésité  à  employer  cette 
médication. 

Renonçant  aux  émissions  sanguines  et  aux  purgatifs 
d'une  manière  presque  absolue,  j'ai  prescrit  l'ipéca-stibié 
à  presijue  tous  les  malades  de  la  |)remière  division  et 
antres  ([ue  j'ai  traités  durant  l'épidémie,  soit  dans  les 
atteintes  jjrimitives,  soit  dans  les  récidives.  Presque 
toujours  j'ai  attendu  l'apyrexie  dans  les  fièvres  intermit- 
tentes, sauf  quelques  cas  à  accès  prolongés  et  dans  les 
atteintes  de  début,  qui  sont  continues  [iour  la  plupart. 
Le  vouiitif  a  été  pris  à  l'entrée  h  riiôpital.  Je  n"ai,  dans 
aucun  cas,  observé  les  accidents  qui  l'ont  fait  rejeter 
par  quelques  médecins,  à  savoir  :  la  transformation  des 
accès  bénins  en  accès  cholériformes,  les  congestions 
cérébrales,  ainsi  que  les  hémorrhagies  :  pendant  les  vo- 
missements, la  céphalalgie  est  quelquefois  augmentée; 
mais  lors(|u'ils  sont  terminés,  elle  est  toujours  amendée, 
le  mouvement  fébrile  diminue  ou  cesse  fort  souvent,  et 
c'est,  s(tus  ce  ra|)port,  un  des  moyens  les  jdus  sûrs  d'en 
raccourcir  la  durée  dans  les  alleinles  continues.  Il  est, 
en  outre,  un  autre  symptôme  que  le  vomitif  amende 
très-rapideuient,  c'est  l'oppression  (|ui  résulte  de  la  con- 


220 

gestion  du  foie  et  de  la  rate,  de  l'estomac  et  de  ralllux 
de  la  bile  dans  ce  dernier  organe. 

Très-souvent,  les  malades  se  plaignent  (|u'ils  étouffent, 
et  (lu'iis  ont  la  pdilrine  serrée,  comme  dans  nn  élan. 
Quand  on  leur  reconnnande  de  poser  la  main  sur  l'en- 
droit malade,  ils  la  mettent  à  l'estomac.  Ce  resserrement 
et  rétouHement  qui  en  est  la  conséquence,  m'ont  semblé 
le  résultat  de  l'obstacle  (pie  les  douleurs,  développées  par 
la  congeslion  dans  le  Ibio,  la  rate  et  l'estomac,  opposent 
îi  l'abaissement  du  diapbragme.  Tous  ces  accidents  tlispa- 
raissent,  comme  par  enchantement,  sous  l'influence  des 
vomitifs,  .l'ai  recherché,  aussi,  si  l'évacuation  de  la  bile, 
au  début  des  atteintes,  pouvait  éconcuniser  la  dépense  du 
sulfate  de  quinine  et  allonger  l'intervalle  des  récidives. 
Je  pense  qu'un  tel  bénélice  peut  être  obtenu  par  les  vo- 
mitifs; mais  les  faits  sont  trop  peu  nombreux,  pour  qu'ils 
puissent  forcer  l'évidence.  Je  n'ai  cependant  administré 
pas  pi  us  de  deux  grammes  de  sidiate  de  quinine  en  moyenne; 
tandis  (pie  la  consonunation  de  ce  sel,  tant  à  B(jne  qu'ail- 
leurs, est  généralement  i)lus  élevée. 

Quant  à  ce  qui  concerne  l'administration  du  sulfate  de 
quinine,  si,  dans  les  accès  de  fièvre  bénigne  j'en  ai  réduit 
la  quantité,  dans  les  cas  pernicieux  je  Fai  élevée  à  des 
doses  bien  plus  considérables  (]ue  celles  auxquelles  on 
est  habitué  de  le  donner.  Dans  un  grand  nondjre  d'accès 
pernicieux  comateux  très-graves,  un  d'entre  eux,  si  grave 
qu'il  y  avait  râle  trachéal  et  écume  à  la  bouche  et  aux 
narines,  j'ai  donné  juscpi'à  7  grammes  '/.,  de  ce  sel  dans 
(rente  heures.  Un  succès  complet  a  été  la  suite  de  ma 
hardiesse. 

J'ai  essayé  de  prévenir  les  récidives,  non  en  continuant 
le  sulfate  de  quinine,  mais  en  le  donnant  à  l'époque  pnv 
sumée  de  la  récidive.  J'ai  réussi  sur  moi-même,  d'abord, 
et  ensuite  sur  plusieurs  de  mes  malades.  Je  crois  celte 
méthode  préférable  à  celle  qui  laisse  revenir  les  accès. 


221 

Celle-ci,  par  le  fait  de  la  faiblesse  et  de  l'usure  (|ue  produit 
le  retoiu'  do  la  fièvre,  dispose  à  de  nouvelles  atteintes. 

Cette  méthode  de  traitement  si  avantai^euse,  et  qui  a 
été  consacrée  par  rex|)érience  de  tous  les  temps,  m'a 
rendu  les  plus  i^rands  services  durant  le  cours  de  ré|)i- 
démie,  et  je  la  recouiniande  expressément  aux  praticiens 
sérieux  et  impartiaux,  cpii,  après  essais  consciencieux,  se 
rappelleront  ma  recommandation,  que  j'appuie  sur  l'opi- 
nion de  Pringle,  qui  s'exprime  ainsi,  dans  le  Cliap.  IV, 
sur  les  Fièvres  des  Marais  et  des  Camps ,  page  88  : 

«  J'ai  observé  que  les  vomitifs  étaient  encore  jilus  elfi- 
«  caccs  dans  les  pays  nuirécageux  (pie  dans  les  camps; 
«  et  ils  le  sont  à  tel  point  (pie ,  lorsque  la  bile  a  été 
«  totalement  évacuée  par  un  vomitif  (émétique),  ce  remède 
«  emporte  la  fièvre  souvent  en  même  temps.  L'ipécacuana 
«  seul  ne  pr(»duit  pas  cet  effet.  IWon  plus,  ie  lui  en  ai  vu 
«  produire  un  tout  autre  contraire,  en  rendant  les  paro- 
«  xysmes  suivants  plus  longs  et  plus  violents  que  le  pré- 
ce  cèdent,  soit  qu'il  agisse  faiblement  et  qu'il  introduise 
«  dans  le  sang  plus  d'humeurs  putrides  qu'il  ne  peut  en 
a  évacuer  des  premières  voi(^s,  soit  que  cela  provienne 
«  dune  autre  cause.  J'y  joins  ordinairement,  pour  cette 
«  raison,  2  grains  de  tartre  slibié.  » 


DErXIÈMK   PARTIR. 


Pour  aider  l'action  du  quin(piina,  faut-il  purger,  saigner 
ou  faire  vomir? 

Quelle  est  l'influence  relative  de  ces  médications  sur  la 
mortalité  et  la  consommation  du  sulfate  de  (luinine? 


222 

Telles  sont  les  questions  que  je  me  suis  faites  au  début 
de  l'épidémie. 

Aussilùl  (juc  l'épidémie  a  été  constatée,  j'ai  l'ait  trois 
divisions,  et  les  entrées  réparties,  tour-à-tour,  dans 
chacune  d'elles,  pendant  cinq  jours,  leur  ont  assuré 
une  part  à  peu  près  égale  dans  le  nombre  et  l'intensité 
des  cas. 

TRAITEMENT  DE  LA  TROISIÈME  DIVISION. 

Le  médecin  qui  dirigeait  la  troisième  division  a  em- 
ployé le  sullate  de  quinine  et  les  émissions  sanguines. 
Selon  lui,  elles  servaient  à  combattre  les  congestions  de 
rencé[diale  et  des  viscères  abdominaux,  cl  devaient  pré- 
céder l'emploi  du  quinquina:  la  violence  de  la  fièvre,  et 
elle  était  jugée  telle  par  la  force  et  la  fréquence  du  pouls 
ou  la  prolongation  de  l'appareil  fébrile;  la  céphalalgie, 
le  délire  ou  le  coma  imminent;  les  douleurs  à  l'épigastre 
ou  dans  les  hypocondres,  en  fournissaient  les  indications. 

Administré,  alors,  après  les  émissions  sanguines  faites 
s'il  y  avait  indication ,  le  sulfate  de  quinine  dans  les  cas 
ordinaires  était  prescrit  et  pris  à  la  dose  de  Os', 8  par 
jour,  dans  le  cours  des  visites,  jusqu'au  jour  où  la  lièvre 
était  coupée. 

Le  même  traitement  était  appliqué  aux  accès  perni- 
cieux, mais  avec  élévation  dans  la  dose  du  sulfate  de 
quinine,  portée,  alors,  a  2  ou  3  grammes  dans  les  vingt- 
quatre  heures.  Dans  les  accès  comateux,  souvent  la  sai- 
gnée du  bras  à  précédé  le  sulftRe  de  quinine. 

Du  1"  novembre  1853  au  28  février  I85i  : 

Mortalité  absolue • .  ■  52  ; 

Mortalité  relative  aux  entrées Vi;; 

Sullate  de  quinine.  Consommation  totale 3.090g',  1; 

Sulfate  de  quinine.  Consommatiou  moyenne  par  ma- 
lade traité 3g^39. 


223 

MKDICATION  DE  LA  DEUXIÈME  DIVISION. 

Le  traitement  du  médecin  chargé  de  la  deuxième  divi- 
sion se  compose  de  5g'',2  de  sulfate  de  quinine,  en 
quatre  doses  de  Os"",  8  chaque  et  ])rescrit  entre  chaque 
visite  du  matin  et  du  soir.  Entre  la  troisième  et  la  qua- 
tiième  dose,  c'est-à-dire,  le  matin  du  troisième  jour  du 
traitement,  il  intercalle  io  grammes  de  sulfate  de  magné- 
sie, et,  le  soir,  fait  prendre  la  quatrième  dose  de  sulfate 
de  quinine  après  la  purgation.  Si  la  lièvre  persiste  après 
la  purgation  et  le  traitement,  il  continue  le  sulfate  de 
quinine  à  0s'",8,  pris,  chaque  jour,  le  matin,  jusqu'à  ce 
que  tout  l'appareil  féhrile  soit  éteint. 

Le  traitement  des  accès  pernicieux  ne  diffère  qu'en  ce 
que  le  sulfate  de  quinine  est  associé  à  l'éther  dans  le  cas 
de  coma  et  est  élevé  à  la  dose  de  2  ou  5  grannnes.  Dans 
les  cas  très-graves,  la  quinine  est  administrée  sans  désem- 
parer; et  quand  le  danger  est  moindre,  il  attend  une  ré- 
mission, qu'il  croit  très-importante  au  succès  du  fébrifuge. 
Jamais,  quelle  que  fût  la  gravité  des  accès,  il  n'a  dépassé 
3  grammes  en  vingt-quatre  heures.  Il  emploie,  concur- 
remment avec  le  sulfate  de  quinine,  dans  les  accès  coma- 
teux, les  révulsifs,  et  réserve  le  prurgatif  pour  l'époque  où 
tout  péril  a  disparu. 

Du  /"  novemhre  1853  au  28  février  J85i  : 

Mortalité  ;iitsoliie 43; 

Mortalité  relative  aux  entrées i/,.; 

Sulfate  (le  iiuinine.  Consommation  totale 4.6-i7g'',4; 

Sulfate  (le  (piininc.  Consommation  moyenne  jiar  ma- 

laile  traité Ss^TO. 

MÉIIICATION  DE  LA  PREMIÈRE  DIVISION. 

Dans  la  première  division ,  dont  je  me  suis  réservé  la 

direction,  le  vomitif  a  toujours  |)récédé  l'administration 

du  sulfate  de  (piinine.    Ce  sel ,  prescrit  à  la  dose  iVuii 

ijrnmmc,  n'était  administré  (ju'une  heure  après  (jue  tout 


•224 

vomissement  avait  cessé.  Il  était  ré|tétt'' ,  à  la  même 
dose,  une  ou  deux  fois,  le  lendemain  ou  le  surlendemain 
du  jour  ou  le  vomitif  a  été  pris.  Ordinairement,  deux 
doses  ont  sudi ,  et  il  a  été  toujours  supprimé ,  dès  que 
la  fièvre  était  coupée. 

Aussitôt  qu'un  accès  pernicieux  était  reconnu,  je  pres- 
crivais 2  grammes  de  sulfate  de  quinine  éthéré,  dose  que 
je  faisais  répéter  une  ou  deux  fois  dans  les  vingt-quatre 
heures,  a  dos  distances  plus  ou  moins  rapprochées,  sui- 
vant la  gravité  des  cas,  de  manière  à  en  i>orter  la  quantité 
juscju'à  o ,  6  et  même  7  grammes  dans  les  vingl-ijuatre 
heures.  Ces  doses  ont  réussi  dans  des  cas  qui  avaient 
paru  désespérés  aux  médecins  qui  suivaient  ma  visite. 
Dans  les  cas  de  coma,  j'ai  toujours  eu  recours  aux  vési- 
catoires  et  aux  sinapismes,  étendus  sur  de  larges  surfaces. 

Du  h'  novembre  IS58  an  28  février  J85i  : 

Morlalilé  aljsuhie ^50; 

Mortalité  relalive  aux  entrées '/29J 

Sulfate  de  quinine.  Consoiiniiation  totale 2.116g'',3; 

Sulfate  (le  ijuiiiino.  Consommation  moyenne  par  ma- 
lade traité ". is^il . 

Rapprochons  maintenant  les  mortalités,  les  consomma- 
tions de  sulfate  de  (piinine  et  les  médications. 


DÉSIGNATION 

MORTALITÉ 

des 

^-^-.— ^— — — -. 

DIVISIONS. 

ABSOLl'E. 

RELATIVE. 

5' 

52 

Vi-  . 

2e 

43 

V2r. 

|r. 

30 

'/20 

CONSOMMATION 

moyenue  du 
suUate  de  quinine. 


MEDICATION 
AUXILIAIRE. 


5e\  ôO 
SB'',  70 


2f ',-',{ 


Emissions  sanguines. 
Purgatifs. 
Vomilifs. 


go; 


De  ce  rapprochement,  il  est  facile  de  conclure  (pie  les 
môdicitions  iiulirech^s,  (Mriployôcs  roncurroiiimciit  avec 
la  iiiédicalion  s[tt''oili(pio  ou  directe  dans  les  lièvres  inter- 
niiltenles,  inlUient  sur  leurs  terminaisons,  et  que  leurs 
l)ons  ou  mauvais  efïets  ne  sont  ni  masqués  ni  annulés 
par  la  niédication  spécifuiue  ; 

Que  les  émissions  sanguines  sont  évidemment  nuisi- 
bles; 

Que  la  médication  purgative  est  d'une  efticacitc  moin- 
dre que  la  médication  vomitive; 

Que  la  in(''(lioation  vomitive  donne  une  mortalité  moin- 
dre et  réduit  la  dépense  du  suH'ato  de  quinine; 

Que  les  doses  du  sulfate  de  quinine  doivent  être  élevées 
au  début,  pour  supprimer  promptemenl  la  lièvre; 

Ei,  enfin,  que  la  dose  de  5  grammes  en  vingt-quatre 
beures,  à  laquelle  on  s'arrête  généralement  dans  les  accès 
pernicieux,  peut  être  portée  très-utilement  h  6  grammes, 
c'est-à-dire  au  double  dans  le  même  espace  de  temps. 

Ce  sont  les  faits  que  je  viens  d'exposer  et  les  conclu- 
sions (\ne  j'en  ai  tirées,  (jui  m'ont  déterminé  à  laire  choix 
de  cette  épigrajihe... 

Lisez,  comparez,  jugez... 


Ci-après ,  les  tableaux  des  divers  mouvements  tles 
malades  traités  à  riwtpital  militaire  de  Bône,  durant 
rendi'uio-épidémie  de  l<So5,  et  ([ui  ont  été  établis  avec 
la  plus  rigoureuse  exactitude. 


15 


220 


MOUVEMENT  DES  MALADES  PENDANT 


Du  l'''  Novembre  185S 


lÉPIDÉMIE    DE    BONE. 


Bi  t^  Février   1854. 


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230 


COMPARAISON  DES  MORTALITÉS. 


NUMÉROS 

NOMBRE 
de 

MORTALITÉ 

des 

malades 

" 

"     '"    "                ~^ 

DIVISIONS. 

traités. 

ABSOLUE. 

U  E  L  A  T  I  V  E. 

^'■8  Division 

875 

30 

\  sur  29,46. 

2'  Division 

-1.094 

-53 

\  sur  25,4^.. 

3*  Division 

9ii 

%2 

1  sur  17,51. 

2.880 

425 

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OBSERVATIONS 
DE  FIÈVRES  PERNICIEUSES  TRÈS-GRAVES, 

TRAITÉES  PAn  LE  SULFATE  DE  QUININE  A  HAUTE  DOSE. 


t'o  OnsERVATioN.  —  Fièvre  pernicieuse  comateuse  très-grave  ,  râle  trachéal. 
Sulfate  (le  quinine  :  7  grammes  G  décigrammcs  en  vingt-six  heures.  — 
Gucrison. 

Dezulier  (Jean),  appartenant  au  T^c  B'^"  de  Chasseurs 
à  pied,  nti  le  10  septiMnl)ro  18'2i,  à  Thicrs  (Piiy-de-Dome), 
onlrt'  d'urgence  à  1  hôpital  militaire  de  Bùne,  le  ôl  déceni- 
hre  1855,  à  midi. 

Ce  malade,  tpii,  au  dire  de  ses  camarades,  était  depuis 
huit  jours  environ  atteint  de  récidive  d'accès  de  fièvre, 
qu'il  dissimulait  soigneusement  au  médecin  de  son  corps, 
se  trouvait  à  son  entrée  dans  l'état  suivant,  ipii  durait, 
assurc'-l-ou,  depuis  huit  heures  du  matin. 

Coma  très-animé,  intelligence  complètement  suspendue, 
œil  éteint  et  terne,  Irismus  de  la  mâchoire,  raideur  des 
membres,  algidilé  générale,  respiration  anxieuse,  pouls 
irès-iréquent ,  (ililonne,  presque  insensible,  peau  très- 
sèche. 

Prescription  par  le  médecin  de  garde  d'une  potion 
anti-spasmodique,  contenant  deux  grannnes  de  sulfate 
de  (juinine,  que  l'on  fait  dilHcileuient  avaler  au  malade 
par  cuillen'cs;  moyens  de  calorilicatiiui  ordinaires,  tels  que 
cruchons  d'eau  chaude  et  sinapismes  comme  révtdsifs. 

A  deux  heures  du  soir,  au  momenl  de  la  contre-visite, 
cet  état  s'est  encore  aggravé  ;  le  pouls  est  resté  presque 


232 

insensible,  la  peau  loiijuiirs  froide  esJ  devenue  visqueuse, 
le  Irisnuis  et  la  raideur  des  membres  ont  augmenté;  bien 
jdus,  il  s'y  est  joint  un  râle  trachéal,  qu'on  entend  à  grande 
distance;  la  bouche  et  les  narines  sont  constamment  cou- 
vertes d'une  écume  qui  se  renouvelle  sans  cesse. 

En  i)résence  d'un  étal  si  grave,  et  qu'on  peut  consi- 
dérer comme  désespéré,  Monsieur  le  Médecin  en  Chef 
])rescrit  une  seconde  potion  anti-spasmodique,  contenant 
!2  grammes  de  sulfate  de  quinine,  à  prendre  eu  deux  fois, 
;i  une  heure  d'intervalle,  et  comme  adjuvante;  dans  le  cas 
où  elle  ne  pourrait  pas  être  absorbée,  un  lavement  conte- 
nant 2  grammes  de  sulfate  de  quinine.  Les  sinapismes  sont 
renouvelés  aux  cuisses,  des  vésicatoires  camphrés  sont 
appliqués  aux  jambes,  et  des  frictions  avec  le  vinaigre  rubé- 
fiant sont  faites  sur  tout  le  corps. 

A  six  heures  du  soir,  l'état  du  malade  n'a  pas  changé. 
A  dix  heures,  le  pouls  semble  un  peu  relevé,  le  corps  tout 
entier  est  baigné  de  sueur. 

A  dix  heures  du  niatin,le1'î'' janvier,  le  malade  est  assis 
sur  son  lit,  manifestant  son  étonncment  de  se  trouver  à 
l'hôpital,  et  répondant  avec  intelligence  aux  questions  (jui 
lui  sont  adressées.  Il  ne  reste  qu'un  peu  d'aluiiblissemenl 
et  de  courbature. 

A  liuit  heures  du  malin,  il  est  prescrit  16  décigrammes 
de  sulfate  de  quinine,  à  prendre  en  deux  fois. 

A  partir  de  ce  moment,  le  mieux  jjersiste;  et  depuis 
longtemps  le  malade  aurait  pu  quitter  l'hôpital,  sans 
quelques  douleurs  arthritiques,  antérieures  à  son  entrée. 

Eu  résumé,  ce  malade,  du  51  décembre,  à  raidi,  au 
1er  janvier  1851,  à  deux  heures  après-midi,  c'est-à-dire 
en  vingt-six  heures,  ce  malade,  dis- je,  a  pris  avec 
bénéfice  évident  7  grammes  G  décigrammes  de  sulfate 
(le  quinine,  et  ce  succès  inespéré,  obtenu  par  de  hautes 
doses  de  ce  sel,  s'est  plusieurs  fois  renouvelé  dans  la 
yîéme  salle. 


233 


Orne  OnsEHVATiox.  —  Ficvrc  pprniciciisc  romaleiisp  jjrave.  Sulfatf  de  quinine  : 
8  grammes  en  trente  heures.  Guérison. 

Saiinte-Barke,  appartenant   au  train   tlos  équipages 
militaires,  né  à  Sellièros  (Jura),  le  7  novembre  1850, 
atteint  de  récidive  de  lièvre  depuis  deux  jours,  apporté 
d'urgence  a  l'hôpital  le  29  décembre  1855,  à  dix  heures 
du  matin. 

Ce  malade,  (pii  offre  quelque  analogie  avec  le  précédent, 
était  dans  un  état  de  coma  complet,  rintelligence  était 
totalement  suspendue,  tous  les  sens  abolis,  Irismus  de 
la  mâchoire,  peau  froide  et  sèche,  commencement  de 
rigidité  des  membres,  pouls  complètement  insensible  a 
la  radiale  des  deux  côtés,  faible  et  vite,  parfois  iuter- 
niillent  au  [tli  du  bras. 

Le  médecin  de  garde  prescrit  2  grammes  de  sulfate  de 
quinine,  avec  addition  de  15  gouttes  de  teinture  d'opium, 
des  sinapismcs  sont  appliqués  aux  jambes. 

A  deux  heures  du  soir,  lors  de  la  contre-visite,  pas  de 
changement  dans  les  symptômes  déjà  indiqués.  Le  malade 
semble  éviter  instinctivement  de  s'appuyer  sur  la  région 
cervicale;  de  temps  en  temps  il  y  porte  la  main,  comme 
si  ce  point  était  le  siège  de  vives  douleurs.  (Ce  symptôme 
s'est  renouvelé  chez  plusieurs  de  nos  malades.  )  Il  est 
administré  en  deux  fois,  ii  ime  heure  d'intervalle,  une 
potion  anti-spasmodique  contenant  2  grannnes  de  sulfate 
de  quinine.  Les  sinapismes  sont  renouvelés  aux  cuisses, 
deux  vésicatoires  cam|dirés  sont  ap[)li(pu''S  aux  jambes, 
et  des  frictions  rubéOaiites  faites  sur  tout  le  corps.  Cet 
état  persiste  dans  la  soirée. 

Le  30,  à  la  visite  du  matin,  la  position  du  malade  ne 
fait  ([ue  s'aggraver,  et  les  signes  de  conqiression  cérébrale 
ont  augmenlé;  la  contraction  esl  plus  générale,  les  dents, 
forteuienl  serrées,  permettent  dillicilemenl  d'introduire  le 
litpiide  dans  la  bouche,  et  jiresque  imnièdalement  il  est 


■231 

rejeté;  la  respiralioii  est  embarrassée;  le  pouls  se  seul  à 
peine  à  la  saiguée;  sueur  visqueuse  sur  tout  le  corps. 

On  essaie  de  lui  faire  prendre  une  troisième  potion 
anti-spasmodiqne,  avec  2  grammes  de  suHalo  de  quinine, 
en  lui  en  administrant  une  cuillerée  a  Louche  toutes  les 
cinq  minutes. 

A  deux  heures  du  soir,  relâchement  général  des  mem- 
bres; de  temps  en  temps,  le  malade  pousse  des  cris,  en 
portant  ses  mains  sur  les  vésicatoires;  le  pouls  est  plus 
sensible,  il  a  repris  un  peu  de  largeur  à  la  saignée,  le 
corps  est  en  moiteur.  Il  y  a  évidemment  un  commence- 
ment d'amélioration.  Lavement  de  sulfate  de  quinine, 
2  grammes. 

Le  ôl,  à  huit  heures  du  matin,  le  malade  est  radica- 
lement guéri;  il  sourit  agréablement  a  tout  le  monde, 
accuse  un  grand  bien-être  et  de  plus  un  appétit  très-vif; 
néanmoins  la  diète  est  maintenue,  sauf  un  peu  de  lait 
sucré. 

Dès  le  lendemain,  le>-  janvier  185i,  le  malade  demande 
la  sortie;  et,  sur  ses  instances  réitérées,  après  constatation 
de  son  parfait  rétablissement,  il  quitte  l'hôpital  le  i  jan- 
vier, au  soir,  sept  jours  après  son  entrée.  Sa  santé  ne 
s'est  pas  dérangée  depuis ,  ainsi  que  nous  avons  pu  le 
reconnaître. 


5""  ÛBSEnvATioN.  —  Fièvre  pernicieuse  cliolériquc   {;ravc  ,  voinisseinenU 

et  lioijuels  persistants.  Sulfate  de  quinine  :  G  grammes 

en  vingt-quatre  licures.   Guérison. 

M.  NoiROT,  lieutenant  au  08'"c  de  Ligne,  né  a  Nancy 
(Meurthe),  âgé  de  vingt-neuf  ans,  d'une  bonne  consti- 
tution, entré  à  Thôpital  militaire  de  Bône,  le  M  décembre 
18o5,  a  huit  heures  du  soir. 

Cet  officier,  qui  se  trouvait  avec  son  bataillon  au  camp 
de  Fée-Kl-Semiâ ,  sur  le  bord  de  la  Seybouse,  à  onze 


235 

lieues  de  Bône,  avait  déjà  eu  plusieurs  atteintes  de  fièvre, 
qu'il  avait  supprimées  par  le  suliate  de  quinine.  Depuis 
six  jours,  une  nouvelle  recliute  avait  eu  lieu,  et  la  violence 
des  accès  ne  faisant  qu'ani^nnenter,  malgré  le  snllate  de 
quinine,  il  se  (it  transporter  à  riiôpilal.  Il  était,  à  son 
entrée,  dans  l'état  suivant:  coma,  intelligence  suspendue 
depuis  quelques  heures,  diflicile  à  réveiller  et  disparais- 
sant de  suite,  algidité  générale,  petitesse  et  fré([uence 
de  pouls,  vomissements  de  bile  presque  continuels  et 
souvent  par  régurgitation  ,  hoquet  persistant ,  très- 
sonore. 

Le  médecin  de  garde  fait  réchauffer  le  malade  par  les 
moyens  ordinaires,  lui  fait  appliquer  des  sinapismes  aux 
jambes,  et  lui  administre  2  gr.  de  sulfate  de  quinine, 
dans  une  potion  opiacée. 

Le  5,  à  la  visite  du  matin,  l'état  du  malade  ne  s'est 
pas  modifié;  il  faut  beaucoup  d'insistance  pour  réveiller 
son  intelligence,  encore  ses  réponses  sont-elles  diOuses; 
la  peau  est  même  froide,  mais  le  pouls  ne  s'est  pas  relevé; 
le  hoquet  et  les  vomissements  bilieux  persistent.  Une  partie 
de  la  quinine  de  la  veille  ayant  été  rendue,  M.  le  Médecin 
en  Chef  fait  préalablement  administrer  une  potion  opiacée 
à  20  gouttes,  et,  une  heure  après,  l'estomac  paraissant 
dans  le  repos,  2  grammes  de  sulfate  de  quinine,  également 
opiacés,  qui  sont  gardés.  Le  luxiuet,  (|ui  n'a  pas  disparu, 
est  combattu  avec  avantage  par  l'eau  de  seltz  aromatisée 
et  sucrée. 

A  huit  heures  du  soir,  le  pouls  s'est  relevé,  et  le  malade 
semble  se  rattacher  à  la  vie  extérieure,  mais  le  hoipiet 
et  les  vomissements  reparaissent;  on  recourt  de  nou- 
veau à  l'eau  de  seltz  aromatisée  et  sucrée,  qui  réussit  plus 
lentement. 

Le  6,  à  la  visite  du  malin,  le  malade  se  trouve  frès- 
bien;  l'intelligence  est  itarl'aite;  il  ne  reste  cpie  de  la 
courbature  et  la  surdité  produite  [>ar  le  médicament;  la 


236 

convalescence  est,  loutclois,  un  peu  plus  lente  que  chez 
les  njalades  précédents. 

Cet  officier,  à  part  une  légère  rechute  de  fièvre,  sur- 
venue le  "li  décemhre,  et  racilcmonl  arrêtée,  a  joui  d'une 
très-bonne  santé  et  a  \ni  s'embarquer  le  lo  janvier  pour 
se  rendre  en  France. 


4""' OnsErivATiON.  —  Tièvrc    pernicieuse  comateuse   liés-prave.   Sulfale 
Je  (juii)iiic  :  10  grammes  en  viii(;t-(jualre  heures.   Guérison. 

M.  BuQUET,  sous-lieutenant  au  6(S"ie  do  Ligne,  né  à 
Dieuze  (Meurthe),  le  7  nov.  1820,  transporté  à  l'hôpital 
de  iîône,  le  17  février  1854,  à  huit  heures  du  soir. 

Cet  officier  était  depuis  huit  jours  atteint  de  fièvre, 
qu'il  cond)altait  par  des  pilules  de  sulfate  de  quinine. 
Etant  sorli  le  17  au  soir,  malgré  quelques  légers  frissons, 
il  tombe  subitement,  comme  foudroyé,  dans  la  rue,  et  est 
envoyé  à  l'hôpital,  sous  la  prévention  d'une  congestion 
cérébrale.  Le  coma  était  complet,  et  la  vie  ne  se  mani- 
festait que  par  une  respiration  difficile  et  un  pouls  lili- 
forme  et  presque  insensible. 

Le  médecin  de  garde  s'étant  fait  rendre  compte  avec 
soin,  par  des  tiers,  des  circonstances  qui  avaient  précédé 
cet  accident,  s'occui)a  de  réchauffer  le  malade,  lui  appliqua 
des  sinapisnies  promenés  sur  tous  les  membres,  et  lui  fit 
prendre  une  potion  anli-spasmodique,  contenante  grammes 
de  sulfate  de  quinine. 

Le  18,  à  la  visite,  coma  presque  carotiqiie,  perte  com- 
plète de  l'inlclligence,  trismus  de  la  mâchoire,  agitation 
l)ernianente  des  membres  supérieurs,  avec  frémissement 
des  doigts,  pouls  fréquent  et  petit. 

Deuxième  potion  de  sulfate  de  quinine  de  2  grammes, 
éthérée  et  opiacée  à  10  gouttes,  qui  est  donnée  par  cuil- 
lerées, et  (pie  le  malade  rejette  en  grande  partie  ;  lavement 
suppléinenlairc  de  sulfate  de  (juinine  de  deux  grammes; 


237 

sinapismes  aux  cuisses,  deux  vésicatoires  camphrés  aux 
janîl)es  et  friclious  ruhéliautes. 

A  la  contre-visite  de  trois  heures,  la  peau  s'est  un  peu 
réchauffée,  le  pouls  a  repris  un  peu  d'ampleur;  mais  l'in- 
telligence est  encore  engourdie,  ([iioi(|ue  l'œil  soit  un  peu 
moins  terne.  Quand  on  interroge  le  malade,  il  send)le 
affecté  par  le  son  de  la  voix,  mais  il  ne  parait  pas  en 
comprendre  la  valeur. 

Une  troisième  potion  de  sulfate  de  quinine  de  2  gr., 
également  élhérée  et  opiacée ,  est  administrée  ,  mais 
énergi(piement  repoussée  par  le  malade,  qui  parait  avoir 
conscience  de  son  amertume.  Une  partie,  cependant,  a 
été  absorbée;  et,  pour  suppléer  à  son  insullisance,  il  est 
donné  un  lavement  de  2  grammes  de  sulfate  de  quinine. 

A  six  heures  du  soir,  l'intelligence  se  réveille;  le  ma- 
lade ne  répond  pas  encore  aux  <pieslions  que  lui  adresse 
un  ami ,  mais  il  témoigne,  par  l'expression  de  son  regard, 
qu'il  le  comprend. 

Le  19,  au  matin,  le  malade  est  complètement  rétabli, 
l'intelligence  est  intacte,  mais  il  ne  reste  aucun  souvenir 
de  ce  qui  est  arrivé  les  jours  précédents;  c'est,  comme 
le  dit  cet  OlUcier,  une  lacune  dans  sa  vie.  !1  exprime  déjà 
le  désir  de  sortir  prochainement ,  pour  reprendre  son 
service. 

5"*  Observation.  —  Ficvrc  pcrnicieusfi  comali-iisc  Irès-gravi'. 

Camiuelli,  Gaspard,  né  à  Malte  (possessions  anglaises), 
âgé  de  cinquante  ans,  arrivé  depuis  trois  ans  en  Afrique, 
où  il  exerce  la  profession  de  jardinier,  atteint  depuis  deux 
mois  de  nombreuses  récidives  de  lièvre,  révélant  en  gé- 
néral le  ty|)e  tierce,  entre  à  l'Iuipital  militaire"  de  [>(ine,  le 
0  février  ISoi,  à  deux  heures  de  I  a|très-midi.  (lonstitulion 
très-forte  et  vigoureuse. 

D'après  les  renseignements  obtenus,  ce  malade  avaient 


238 

(III  violenl  accès  lie  fièvre  la  veille  de  son  entrée  k  l'iiô- 
jiital.  I.ors  de  la  conlre-visite ,  il  présente  la  physionomie 
d'un  accès  de  fièvre  pernicieux  a  son  début  :  intelligence 
déjà  chancelante;  il  l'aut  renouveler  chaque  question  au 
malade  pour  en  obtenir  une  réponse,  qui  est  assez  claire 
du  reste,  mais  débitée  d'un  Ion  sec,  tranchant  et  vibrant; 
tendance  à  la  stupeur;  o'il  terne,  ne  reprenant  de  l'éner- 
gie que  sous  rinlltience  d'une  stimulation  extérieure  vive; 
les  mains  se  portent  constamment  à  la  nuque,  pour  sou- 
tenir la  tète,  où  résident  quelques  douleurs  sourdes;  peau 
froide  et  sèche;  pouls  petit  et  fréquent  (H2  pulsations 
environ).  Il  est  prescrit  une  potion  anti-spasmodique , 
contenant  2  grammes  de  sulfate  de  quinine,  à  prendre 
en  deux  doses,  à  une  heure  dintervalle. 

A  huit  heures  du  soir,  le  malade,  visité  par  le  médecin 
de  garde,  est  dans  un  état  de  coma  plus  avancé;  la  ten- 
dance a  la  somnolence  est  plus  grande;  les  réponses  sont 
moins  faciles,  moins  claires;  l'expression  du  visage  est 
plus  hébétée;  il  y  a  déjà  un  peu  de  raideur  dans  la  mâ- 
choire ;  la  peau  est  cependant  moins  froide.  Potion  anti- 
spasmodique avec  sulfate  de  quinine;  deux  grammes  en 
deux  doses  et  à  deux  heures  d'intervalle. 

Le  7,  à  huit  heures  du  matin,  il  y  a  un  mieux  sensible; 
l'œil  et  la  physionomie  ont  repris  de  l'intelligence;  la  peau 
est  fraîche,  le  pouls  est  moins  fréquent  et  plus  développé, 
mais  il  y  a  un  peu  de  raideur  dans  les  membres  supérieurs. 
Sulfate  de  quinine  :  8  décigrammes  a  neuf  heures,  et  8 
décigrammes  à  midi. 

A  la  conlre-visite,  loin  de  s'améliorer,  l'état  du  malade 
est  moins  bien  que  le  malin  ;  les  douleurs  à  la  nuque  ont 
reparu,  les  mains  s'y  portent  constamment;  les  réponses 
sont  sèches,  un  peu  égarées;  la  peau  est  fraîche,  mais 
le  pouls  compte  encore  lOi  pulsations.  Potion  anti-spas- 
modique contenant  2  grammes  de  sulfate  de  quinine,  à 
prendre  en  deux  fois,  à  quatre  heures  d'intervalle. 


239 

Le  8,  à  la  visite  du  lualiu,  raïuélioiation  est  fran- 
chement accusée  :  l'expression  du  visage  esl  plus  libre, 
plus  franche;  l'œil  esl  plus  ouvert;  la  eéphalalgie  a  tota- 
lement cessé;  les  membres  ont  repris  leur  sou[desse;  la 
parole  est  facile;  il  existe 6i pulsations  h  la  minute;  le  ma- 
lade accuse  par  une  mimique  énergique  un  très-vif  appétit. 
Riz  au  gras,  limonade  gonmieuse,  potion  gommeuse. 

A  partir  de  ce  moment,  la  convalescence  s'établit  et 
marche  à  grands  pas,  sans  qu'aucun  accident  vienne  l'en- 
traver. Le  mauvais  temps  peut  seul  retenir  à  l'hôpital  le 
malade,  qui  sort  parfaitement  guéri,  le  10  février. 

ginc  Obsi:iivation.  —  Fièvre  pcrniciousc  lomatpuse  lrrs-f[tavc. 

Barelli,  François,  coraillenr  napolitain,  constitution 
forte,  âgé  de  soixante-huit  ans,  atteint  de  fièvre  perni- 
cieuse comateuse  très-grave,  entré  a  l'hôpital  le  8  août 
1834,  décédé  le  9,  à  trois  heures  du  soir. 

Ce  malade  nous  est  apporté  à  Thôpilal,  vers  huit  heures 
du  matin,  dans  un  état  de  corna  très-profond,  par  des 
personnes  qui  ne  peuvent  nous  donner  aucun  rensei- 
gnement sur  les  antécédents  de  sa  maladie  et  de  Barelli 
lui-même.  Nous  ne  pouvons  donc  rien  savoir.  Nous  cons- 
tatons :  abolition  complète  des  facultés  intellectuelles; 
renversement  de  la  léle  en  arrière,  avec  raideur  du  cou 
et  des  membres;  les  yeux  déprimés  et  enfoncés  dans  les 
cavités  orbitaircs;  le  pouls  irrégulier,  dur,  fréquent  àl20; 
respiration  sterloreuse  abdominale  avec  immobilité  des 
côtes;  peau  cuivrée;  sueurs  visqueuses.  Après  plusieurs 
interpellations,  nous  réveillons  pour  un  instant  son  in- 
telligence, et,  par  le  geste,  nous  parvenons  h  lui  faire 
tirer  la  langue,  qui  est  un  peu  sèche  et  un  peu  rouge. 

Nous  prescrivons  immédiatement,  tigrannnes  de  sulfate 
de  quinine  et  des  révidsifs  (Miergigues,  deux  larges  sina- 
pismes.  Une  partie  du  sulfate  de  quinine  est  rejelée,  ainsi 


240 

que  la  tisane  de  tilleul,  la  déglutition  étant  embarrassée. 
Vers  trois  heures,  même  état  :  potion  anti-spasmodique 
avec  2  grammes  de  sulfate  de  quinine;  lavement  avec  'i 
autres  grammes;  vésicatoires  sur  les  mollets;  frictions 
avec  le  vinaigre  rubéliant  sur  le  corps.  Le  malade  témoi- 
gne de  la  sensibilité  pendant  les  frictions,  et  aussi  par  la 
douleur  des  vésicatoires. 

Neuf  heures  du  soir,  le  sulfate  de  quinine  n'a  plus  été 
rendu  ,  le  malade  est  toujours  plongé  dans  un  coma 
profond;  Taspect  des  yeux  est  terne,  pouls  à  155,  irré- 
gulier, danger  imminent. 

9  août,  la  nuit  a  été  tranquille,  point  de  selles  ni  de 
vomissements.  Le  matin ,  il  y  a  une  légère  amélioration  : 
l'intelligence  semble  revenir,  les  yeux  sont  moins  ternes, 
moins  enfoncés,  le  râle  trachéal  a  disparu;  mais  la  res- 
piration est  toujours  abdominale  et  les  côtes  immobiles , 
le  pouls  est  à  120,  moins  sûr,  plus  régulier,  la  peau  perd 
de  sa  teinte  cuivrée  et  la  chaleur  est  naturelle,  point  de 
raideur  dans  les  membres,  la  déglutition  est  plus  facile, 
langue  humide  et  rosée.  En  un  mot,  il  y  a  une  rémission 
sensible,  qui  donne  un  bon  espoir,  pourvu  qu'un  nouvel 
accès  ne  vienne  pas  aggraver  cet  état  encore  si  grave. 

Nous  continuons  la  potion  anti-spasmodique,  avec  2  S'- 
de  sulfate  de  ipiinine,  et  on  entretient  les  vésicatoires; 
à  midi,  encore  1  granmie  de  sulfate  de  quinine. 

A  deux  heures  et  demie,  nouvel  accès.  Barelli  vient 
d'être  pris  de  frissons;  abolition  complète  de  l'intelligence, 
déviation  des  commissures  de  la  bouche,  avec  écume, 
enfoncement  plus  profond  des  yeux,  râle  trachéal,  res- 
piration entièrement  mécanique  par  le  soulèvement  du 
diaphragme,  pouls  très-irrégulier,  petit,  fréquent,  con- 
traction des  membres,  teinte  fauve  foncée  de  la  peau, 
avec  sueurs  viscpieuses,  extrémités  froides,  déglutition 
impossible,  urines  involontaires,  mort  imminente. 
A  trois  heures,  mort  dans  la  période  du  frisson. 


•2  VI 
AUTOPSIE. 

Cavité  crânienne  :  Injection  considérable  des  vaisseaux 
cérébraux,  sérosité  trouble  dans  l'arachnoïde  et  les  ventri- 
cules, très-abondante,  léger  épaississen)ent  et  teinte  opa- 
line des  enveloppes;  la  substance  cérébrale  offre  plus  de 
consistance  avec  un  sablé  rouge  très-prononcé. 

Cavité  titoracique  :  Ilien  de  particulier,  si  ce  n'est  une 
certaine  quantité  de  sérosité  citrine  (60  grammes)  dans  le 
péricarde. 

Cavité  abdominale:  Présence  de  la  bile  dans  l'estomac, 
et  l'intestin  grêle,  avec  injection  rouge  peu  prononcé  dans 
ce  dernier;  le  foie  est  un  peu  plus  volumineux  et  la  vési- 
cule remplie  d'une  bile  épaisse  et  noire  ;  la  rate,  de  volume 
normal,  a  perdu  toute  consistance  et  se  réduit  en  bouillie; 
la  muqueuse  vésicale  offre  aussi  la  teinte  ictérique  de  l'in- 
testin. Rien  de  particulier  dans  les  reins. 

"'■«' Oiisr.iiVATiû:i. — Fii'vie  rémiUonle  Lilieiise  ,  .i  doiiMp  paroxysme- 

le  scplicmo  accès  est  pernicicii'i.    Sulfate  de  quinine  :  •J.ÔK'' 20. 

Guérison. 

Mademoiselle  D.  F.,  âgée  de  trente-six  ans,  tempérament 
lympbatico- nerveux,  sujette  aux  lièvres,  sans  altération 
organique,  habitant  Bône  depuis  trois  ans,  lut  prise,  dans 
l'après-midi  du  i'ô  août  185i,  d'un  ujalaise  général,  avec 
douleurs  anthralgiques,  frissons,  vomissements,  cépha- 
lalgie, s'irradiant  jusqu'à  la  région  occipito-cervicale.  Klle 
combattit  cet  état,  comme  il  lui  était  déjà  arrivé  plusieurs 
fois,  par  une  dose  de  5  décigr.  de  sulfate  de  (piinine,  et 
le  soir,  se  croyant  mieux,  elle  alla  au  bal  ;  mais,  peu  après, 
grande  faiblesse,  vertiges,  sueurs  froides,  qui  la  forcent  à 
se  remettre  au  lit;  insomnie,  agitation. 

Le  l(>  août,  malgré  deux  doses  de  sulfate  de  quinine 
de  5  décigrainmes  chaijue,  jtrises  l'une  le  matin,  l'autre 
le  soir,  il  y  eut  deux  accès  :  l'un  à  une  heure  de  l'après- 

16 


242 

midi,  avec  céphalalgie  intolérable,  vomissements  verdàtres, 
frissons  suivis  de  sueur;  le  deuxième,  dans  la  nuit  du  16 
au  17,  à  une  heure  du  matin,  avec  insomnie,  anxiété 
générale,  vomissements  d'un  jaune  foncé,  urines  noires 
et  brillantes,  crampes  dans  les  mollets. 

Le  il  au  malin,  encore  o  dccigrammes  de  sulfate  de 
quinine;  mais,  comme  la  veille  et  à  la  même  heure,  il  y 
eut  un  paroxysme  dans  la  journée  avec  les  mêmes  symp- 
tômes. Vers  huit  heures  du  soir,  appelé  près  de  la  mala- 
de, je  la  trouvai  dans  l'état  suivant  :  abattement  extrême, 
face  pâle  et  altérée,  les  sclérotiques  d'un  jaune  citron,  voix 
afl'aiblie,  vomissements  répétés,  verdàtres,  urines  noires 
et  difficiles. 

Les  antécédents  bien  établis,  je  prescris  1  gramme  de 
sulfate  de  ijuinine,  pour  prévenir  l'accès  qui  devait  arriver 
après  minuit;  un  autre  gramme,  à  prendre  le  fendemain 
matin,  à  huit  heures;  limonade  gazeuse. 

18  août.  Le  matin,  il  y  a  eu  de  l'amélioration;  le  paro- 
xysme de  la  nuit  a  été  plus  bénin,  sans  crampes  ni  douleurs 
anthralgiques.  En  ce  moment,  la  parole  est  plus  libre,  la 
soif  moins  intense,  les  vomissements  moins  abondants, 
toujours  verdàtres,  et  les  urines  presque  noires.  Je  pres- 
cris :  limonade  gazeuse  à  la  glace,  sulfate  de  quinine,  8 
décigrammes,  à  dix  heures  du  matin,  et  8,  à  neuf  heures 
du  soir.  Le  paroxysme  du  jour  fut  presque  nul,  et  la  ma- 
lade, se  croyant  guérie,  ne  prit  la  seconde  dose  que  pour 
obéir  à  son  médecin. 

19  août.  A  une  heure  du  matin,  je  fus  appelé  eu  toute 
hâte  près  de  ma  malade,  et  la  trouvai  dans  un  état  très- 
alarmant.  Vn  nouveau  paroxysme,  c'était  leseplihne,  venait 
de  débuter  d'une  manière  inquiétante,  par  des  frissons, 
perte  de  connaissance,  yeux  ternes,  éteints,  face  déco- 
lorée, froide,  avec  trismus,  la  tête  renversée  en  arrière, 
hoquet  sourd  et  persistant,  les  bras  fortement  contrac- 
tures; une  sueur  froide  et  visqueuse  couvrait  le  corps. 


2i:\ 

J'ajipliquai  iinmédiateineni  des  révulsifs  énergiques, 
tViclions  avec  le  vinaigre  rubéfiant,  cruchons  d'eau  l)ouil- 
lanle  aux  pieds,  deux  vésicatoires  camphrés.  En  même 
temps,  ])otion  éthérée  et  opiacée,  avec  2sr  de  sulfate  de 
quinine,  à  prendre  en  deux  fois,  dans  une  heure;  lave- 
ment avec  2  autres  grammes  de  sulfate  de  quinine. 

Huit  heures.  A  la  suite  de  cette  puissante  médication, 
il  y  eut  une  détente  sensible,  l'intelligence  reparaît  par 
intervalles,  la  contraction  des  membres  se  dissipe. 

Restait  h  prévenir  le  paroxysme  de  la  journée,  cpii  pou- 
vait devenir  falal.  Je  lis  prendre  immédiatement  2  s'"  de 
sulfate  de  quinine  en  lavement,  et  une  potion  de  8  déci- 
grammes  pour  dix  heures. 

Le  paroxysme  ne  se  montre  pas;  nous  constatons  une 
amélioration  progressive ,  le  coma  se  dissipe,  avec  le  tris- 
mus  et  la  contraction  des  membres;  la  parole,  quoique 
faible,  redevient  naturelle. 

A  quatre  heures  du  soir,  la  malade,  en  me  voyant,  me 
dit,  qu'elle  vient  de  se  réveiller  d'un  profond  sommeil. 
Il  ne  lui  reste  qu'un  léger  ho((uet,  jjour  lequel  je  prescris 
de  la  glace  arrosée  du  jus  de  citron. 

A  10  heures  du  soir,  le  hoquet  a  disparu.  J'ordonne 
encore  8  décigranmies  de  sulfate  de  quinine,  pour  pré- 
venir l'accès  de  la  nuit. 

20  août.  Le  i)aroxysme  de  la  nuit  ne  se  manifeste  que 
par  une  certaine  agitation,  avec  insomnie.  Du  reste,  la 
malade  va  très-bien. 

Dès  ce  moment,  tout  accès  disparaît;  plus  de  cépha- 
lalgie, plus  de  douleurs  dans  les  mend)res,  rien  (ju'une 
certaine  lassitude,  et  bientôt  les  urines,  de  bourbeuses 
rodevienueut  lim|)ides. 

21  août.  La  malade  va  de  mieux  en  mieux,  l'appétit 
se  fait  sentir,  tout  traitement  est  suspendu  ;  et,  après 
une  courte  convalescence,  il  y  eut  un  prom|)t  retour  à 
la  .«^aulé. 


244 
RÉFLEXIONS. 

Cette  dernière  observation,  surtout,  vient  de  démontrer 
à  la  dernière  évidence  cette  grande  tolérance  du  tube 
digestif  pour  le  sulfate  de  quinine  dans  les  fièvres  palu- 
déennes, même  dans  le  cas  où  la  membrane  muqueuse 
est  violemment  surexcitée.  Ce  fait,  qui  est  encore  en 
opposition  avec  quelques  tbéories  médicales,  doit  aujour- 
d'hui être  adopté,  puisque  la  médication  par  le  sulfate  de 
quinine  à  haute  dose  dans  les  fièvres  très-graves  et  per- 
nicieuses vient  d'être  sanctionnée  par  l'expérience... 

Cette  tolérance  du  tube  digestif  pour  le  sulfate  de  qui- 
nine, se  reproduit  également  pour  la  potion  ipéca-stibiée; 
ainsi ,  dans  les  fièvres  intermittentes  chez  lesquelles  ou 
observe  les  mêmes  phénomènes  que  dans  les  inflamma- 
tions aiguës  de  l'estomac  :  acération,  rougeur  des  bords 
de  la  langue,  enduit  muqueux  ou  bilieux,  ou  bien  acidulé, 
vomissements,  douleurs  à  l'épigastre,  etc.,  etc.,  tous  ces 
symptômes  disparaissent,  comme  par  enchantement,  sous 
l'influence  de  la  médication  vomitive  qui  précède  toujours 
la  médication  spécifique  dans  les  fièvres  de  marais,  sous 
les  conditions  que  j'ai  indiquées  dans  la  première  partie. 

J'ai  tellement  confiance  dans  les  caractères  que  je  viens 
de  tracer,  que  je  n'hésite  pas  à  rappeler  l'opinion  de  M .  Bailly 
sur  l'aspect  de  la  langue  dans  les  fièvres  intermittentes  : 
«  La  couleur  de  la  langue,  dit-il,  est  si  peu  importante  dans 
(<  ces  maladies,  qu'en  général  les  médecins  italiens  la  con- 
«  sultcnt  rarement,  au  moins  à  Rome,  où  je  les  ai  suivies 
«  plus  qu'ailleurs;  et  quand  ils  la  faisaient  tirer  aux  malades, 
«  lorsque  j'étais  présent  a  leurs  visites,  c'était  plutôt  parce 
«  qu'ils  connaissaient  ma  curiosité  h  cet  égard ,  que  pour 
f(  former  leur  opinion.  » 

Cette  opinion  de  M.  Bailly  a  été  rapportée  par  M.  le  J)'^ 
Maillot  dans  son  traité  des  Fihrcs  inlerniit lentes,  p.  22. 


2i5 


DES  RACES  PERFECTIONNÉES 

DAIHS  LE  DÉPARTEMENT  DES  PYRÉNÉES -ORlEiNTALES, 

l'ar  M,  ia.*i,K«iVK.  membre  résidant. 


Invité  par  Monsieur  le  Président  de  la  Société  Agricole 
et  Scientifique,  à  présenter  un  résumé  sur  les  avantages  que 
les  races  perfectionnées  peuvent  offrir  aux  agriculteurs  de 
notre  département,  nous  avons  hésité  un  instant  à  nous 
rendre  à  cette  invitation,  comptant  encore  peu  sur  notre 
expérience.  Cependant,  le  désir  de  nous  rendre  utile  eu 
soulevant  une  question  tant  de  fois  controversée,  et  qui 
dans  le  nord,  l'ouest  et  l'intérieur  de  la  France  trouve  un 
commoncement  de  solution,  ce  désir  nous  a  fait  vaincre 
toute  répugnance,  heureux  s'il  nous  était  donné  de  con- 
courir pour  une  petite  part  à  l'action  du  progrès  agricole 
dans  notre  pays. 

Notre  examen  portera  d'ahord  sur  l'espèce  bovine,  et 
dans  cette  espèce  surtout  sur  la  race  durham,  qui 'est 
le  vrai  type  des  races  pertoctionnées.  Nous  dirons  aussi, 
avant  de  linir,  quel(pjes  mots  sur  l'amélioration  dont  est 
suscej)lihle  notre  race  de  Cerdagne. 

La  race  de  Durham  tire  son  origiue  des  bords  de  la 
rivière  Tces,  qui  sépare  en  Angleterre  les  comtés  d'Vorck 
et  de  Durham.  Les  Anglais,  nos  maiires  en  agricullure, 
travaillent  depuis  plus  d'un  siècle  à  améliorer  celte  race' 
Ils  ont  commencé,  dit-on,  par  la  croiser  primitivement 
avec  des  sujets  de  la  race  hollamlaise.  Lorsqu'ils  ont  ainsi 
ol)lonM.  après  bien  des  essais  et  des  tâtonnements,  le  type 


246 

de  la  bête  de  boucherie ,  qui  était  le  but  qu'ils  se  propo- 
saient, ils  ont  abandonné  le  croisement  de  cette  nouvelle 
race,  dite  de  Bxirham.  améliorée,  avec  toute  autre  race, 
comptant  avec  raison  que  rélevai^e  in-aiid-in  ou  dans  et 
dans,  c'est-à-dire  la  reproduction  par  des  mâles  et  lemelles 
améliorés,  appartenant  à  la  même  famille,  serait  le  vrai 
moyen  de  conserver,  de  fixer  le  nouveau  type  et  les  nom- 
breuses qualités  de  cette  race  améliorée. 

Tous  les  agriculteurs  qui  suivent  le  progrès  agricole, 
savent  que  le  bœuf  durliam  est  le  modèle  de  la  bête  de   • 
boucherie;  et  de  tous  les  animaux  des  races  bovines,  il 
est  celui  qui  par  l'harmonie  de  ses  formes  et  sa  préco- 
cité approche  le  plus  de  la  perfection ,  s'il  n'est  permis 
de  dire  qu'il  est  la  perfection  même.   Sa  tète  est  petite, 
ses  yeux  grands,   doux  et  |)lacés  à  fleur  de  tète,  ses 
cornes  minces,  sa  peau  fine,  son  cou  court  et  grêle, 
sa  poitrine  profonde,  large   et  projetée  en  avant,  ses 
jambes  courtes,   fines  et  écartées,  son  ossature  légère, 
ses  muscles  parfaitement  développés,  la  ligne  du  dos 
droite  comme  une  llèclie.  Chez  cet  animal,  le  train  pos- 
térieur est  remarquablement    développé  ,    les   hanches 
sont  larges  et  longues,  la  cuisse  descend  perpendicu- 
lairement sur  le  jarret,  la  queue  est  mince  et  attachée 
bas,  le  corps  est  cylindri(iue,  on  pourrait  même  dire 
cubique  chez  les  meilleurs  sujets  de  l'espèce. 

Par  cette  description  il  est  facile  de  se  rendre  compte 
que  dans  cette  race  les  améliorateurs  ont  cherché  à  aug- 
menter, autant  que  possible,  l'assimilation  de  la  nourri- 
ture consommée,  en  donnant  au  sujet  une  poitrine  large 
et  profonde,  c'est-à-dire  de  larges  poumons.  Ils  ont  encore 
cherché  à  augmenter  les  morceaux  de  viande  de  première 
qualité  qui  se  trouvent  dans  le  train  postérieur,  à  diminuer 
relativement  ceux  de  seconde  et  surtout  de  troisième  qm- 
lité  ;  enfin,  à  réduire  tout  ce  qui  n'est  pas  viande  ou  graisse, 
comme  la  tête,  les  cornes,  les  os,  les  jand)cs,  le  cuir,  etc. 


247 

Quoicjuc  le  liurhain  soil  la  biHe  de  boucherie  par  excel- 
lence, un  grand  nombre  de  lemelles  de  cette  race  se  l'ont 
encore  distinguer  par  leurs  qualités  lactil'ères:  il  n'est  pas 
rare  de  trouver  des  vaches  qui  donnent  depuis  12  jusqu'à 
20  litres  de  lait  par  jour.  Quant  au  travail,  il  n'en  faut  point 
demander  à  des  animaux  chez  les(iuels  on  a  nMluit  autant 
qu'on  l'a  pu  les  parties  du  corps  susceptibles  de  le  fournir. 
Le  bœuf  durham  se  fait  remarquer  encore  autant  par 
sa  précocité  que  par  la  lacilité  avec  laquelle  il  prend  la 
graisse;  et  chose  étonnante,  il  s'accommode  de  tous  les 
climats.  On  a  beau  le  dépayser,  l'exporter  d'Angleterre  en 
France,  en  Amérique,  en  Australie  :  partout  il  prospère 
connue  si  on  l'avait  façonné  exprès  pour  sa  nouvelle  patrie. 
Telles  sont  les  qualités  que  possèdent  les  sujets  de  cette 
magnilique  race  de  durham,  qui  rend  déjà  de  si  grands 
services  dans  une  bonne  partie  de  la  Fiance.  Ces  qualités 
sont  devenues  tellement  inhérentes  à  cette  race,  par  l'é- 
levage aussi  intelligent  que  constant  des  améliorateurs, 
que  le  pioduit  du  premier  croisement  d'un  taureau  durham 
avec  une  vache  de  race  quelconque  perd  déjà  le  cachet 
de  la  mère,  tandis  qu'il  acquiert  celui  du  jjère,  dont  il 
hérite  surtout  les  belles  formes  et  une  propension  très- 
marquée  à  prendre  la  graisse.  Un  autre  fait  digne  de 
remarque  et  déjà  sanctionné  par  l'expérience,  est  que 
les  produits  du  premier  croisement  et  nième  du  second, 
tout  en  acquérant  une  partie  des  qualités  du  père,  con- 
servent beaucou[i  de  propension  au  travail,  si  la  vache- 
mère  appartient  à  une  race  qui  possède  cette  qualité. 

Y  a-t-il  en  France,  dans  notre  espèce  bovine,  une  race 
qui  corresponde  à  celle  de  durham  en  Angleterre?  iNous 
possédons  bien  les  races  llamande,  colentine,  dont  les 
vaches  se  font  remarquer,  les  unes  par  la  (]uanlité,  les 
autres  par  la  <pialilé  beurrière  de  leur  lait;  nous  possé- 
dons aussi  les  races  aubrac,  nantaise,  gasconne  et  autres, 
excellentes  pour  le  travail  ;  nous  possédons  bien  encore 


248 

les  races  charolaise ,  garonnaise ,  couiloise ,  qui  ont  une 
propension  à  prendre  la  graisse  i)lus  nianiuéo  que  nos 
autres  races;  mais  nous  u"aYons  pas  une  race  qui,  comme 
celle  de  durham  en  Angleterre ,   vienne  mieux  et  beau- 
coup plutôt  que  toutes  les  autres  eu  aide  aux  besoins 
impérieux  et  tous  les  jours  croissants  de  la  consommation. 
Pourquoi,  dans  les  fermes  tlorissantes  de  France,  qui 
peuvent  bien  nourrir  et  amener  avec  prolit  des  bœufs 
gras  sur  les  marchés,  l'agriculteur  attendrait-il  davantage 
a  se  servir  d'une  race  qui,  quoique  étrangère  à  son  pays, 
lui  payerait  plus  cher  la  nourriture  qu'il  distribue  à  son 
bétail?  L'agriculteur  ne  doit  certes  jamais  perdre  de  vue 
que  chez  un  animal  quelconque  l'assimilation  de  la  nour- 
riture est  toujours  en  raison  du  développement  des  pou- 
mons. Or  nos  bœufs  français  pèchent  surtout  par  le  res- 
serrement de  la  poitrine,  qui  se  développe  au  contraire 
d'une  manière  brillante  chez  le  durham.  On  trouve  encore 
certains  preneurs  qui,  sous  le  prétexte  d'un  patriotisme 
vrai  en  apparence,  mais  bien  faux  en  réalité,  conseillent 
d'améliorer  par  sélection  notre  race  charolaise  par  exem- 
ple, qui  Unira,  disent-ils,  par  réunir  les  mêmes  qualités 
qui  distinguent  la  race  durham.  Ces  messieurs  ignorent 
sans  doute   que    les  Anglais  sont   à  Tœuvrc  depuis  le 
commencement  du  siècle  dernier  pour  façonner  la  race  de 
durham  qui  déjà,  avant  son  amélioration,  était  supérieure 
à  notre  race  charolaise  actuelle.  Pourquoi  voudrions-nous 
donc  retarder  l'amélioration  de  nos  races  de  boucherie 
par  la  sélection,  lorsque  nous  [»ouvons  immédiatement  les 
améliorer  par  le  sinq)le  croisement?  Les  Anglais,  qui  se 
distinguent  surtout  par  leur  patriotisme,  n'ont  certes  pas 
hésité,  pour  améliorer  leur  race  durham  primitive,  à  la 
croiser  avec  la  race  hollandaise  étrangère  a  leur  pays. 
N'hésitons  donc  plus  nous-mêmes  à  nous  servir  d'une 
race  anglaise  pour  améliorer  nos  races  indigènes  de  bou- 
cherie. Les  agriciUteurs  de  l'Américpie,  de  l'Australie,  de 


249 

la  Russie,  etc.,  iifi  balancent  ])oint  à  aller  en  Angleterre 
chercher  à  des  prix  l'abulcux  des  ly[)es  de  celle  belle 
race,  dans  le  but  d'améliorer  leurs  propres  troupeaux 
par  le  croisemenl.  Ils  ne  craignent  point  de  faire  l'aire  à 
ces  animaux  des  voyages  longs,  pénibles  et  coûteux;  et 
nous  autres  agriculteurs  français,  qui  avons  un  Couver- 
nenient  qui,  dans  sa  sollicitude  pour  ragricullure,  lait 
élever  des  troupeaux  de  celle  belle  race  dans  les  vache- 
ries imi-'ériales,  dans  le  seul  but  de  nous  procurer  des 
types  remarquables  et  à  des  prix  relativement  modérés, 
nous  négligerions  tous  ces  avanlases? 

l.a  hunière,  sur  ce  point,  commence  a  se  montrer: 
espérons  qu'elle  deviendra  à  mesure  plus  éclatante. 

Les  bœufs  de  nos  meilleures  races  indigènes  sont  excep- 
tionnellement bons  à  5  ans,  o  ans  '/ai  pour  la  boucherie. 
Ce  n'est  qu'à  force  de  soins  et  par  une  nourriture  excessi- 
vement riche,  abondante,  recherchée  et  dispendieuse  qu'on 
fait  quelques  exceptions,  tandis  que  le  durham,  lui,  pos- 
sédant une  poitrine  beaucoup  plus  large  et  plus  profonde 
que  les  bœufs  de  nos  meilleures  races,  s'assimilant  beau- 
coup mieux  la  nourriture  qu'il  reçoit,  arrive  nalur(>llement, 
sans  soins  jiarticuliers,  par  le  l'ail  même  de  ses  (jualilés,  à 
un  état  d'embonpoint  supérieur,  et  cela  à  l'âge  de  50  mois 
et  même  de  24.  Nous  pouvons  appuyer  ce  que  nous  avan- 
çons sur  des  laits  déjà  acquis  dans  noire  dé|)artcmenl;  nous 
[)Ouvonsnous-m('me  montrer  des  animaux  de  celle  race  p.ure 
et  même  des  croisés  ''  j  sang  (pii,  grâce  à  une  nourriture 
abondante  et  appropriée,  sont  à  l'âge  de  neuf  mois,  un 
an,  vingt  mois,  dans  un  état  d'embonpoint  fort  raison- 
nable, (pie  n'atteignent  point  les  animaux  gras  de  ciii<|  et 
six  ans  cpiou  amène  sur  le  maich(''  de  noire  chef-lieu. 
Il  est  facile  aux  personnes  cpii  douteraieiil  du  fait,  de 
sacrilier  quehpies  heures  pour  venir  s'en  convaincre. 

Nous  avons  été  plus  loin  :  ayant  dans  noire  exploitation 
des  sujets  de  la  race  indigène  bazadaise,  race  qui  n'est 


250 

certes  pas  a  dédaigner  pour  la  boucherie,  cl  des  sujets 
7a  sang  dnrham  cliarolais,  nous  avons  voulu  nous  donner 
la  satisl'action  de  faire  avec  un  sujet  niàle  de  chacune  de 
ces  races  un  essai  coniparalif,  qui  a  commencé  le  1^'' 
décembrel8o8,  et  a  duré  jusqu'au  ler  juin  1859.  Le  jeune 
veau  bazadais  né  chez  nous  le  21  avrd  18o8,  avait  été 
parfaitement  allaité  par  sa  mère  et  de  plus  nourri  a  pro- 
fusion jusqu'au  l^'''  décembre.  Aussi  se  trouvait-il  en  bon 
état,  mais  il  n'avait  pu  déjà  alors  acquérir  l'embonpoint 
des  veaux  durham  ses  voisins  ,  qui  étaient  à  la  même 
ration.  Le  jeune  durham  cliarolais  né  le  lo  avril  1858, 
nous  arriva  avec  sa  mère  du  département  de  la  Loire  a 
la  lin  de  décembre  dans  un  état  vraiment  pitoyable  (la 
sécheresse  ayant  fait  manquer  les  fourrages  dans  ce  dé- 
partement). Le  l'^'"  décembre,  le  sujet  bazadais  qui  se 
trouvait  en  bon  état,  et  le  sujet  durham  charolais  qui 
était  excessivement  maigre  furent  attachés  à  la  même 
mangeoire,  seuls,  côte  à  côte,  mais  de  manière  a  ce  que 
le  plus  fort  ne  put  prendre  la  nourriture  au  plus  faible. 
Ils  reçurent  pendant  décembre,  janvier  et  février  la  même 
ration,  qui  se  composait  d'un  peu  de  luzerne,  beaucoup 
de  turneps  et  une  petite  quantité  de  farine  d'orge.  Ces 
trois  mois  écoukîs,  le  sujet  croisé  durham  avait  grandi 
comme  le  bazadais,  avec  la  différence  que  l'embonpoint 
de  ce  dernier  était  resté  stationnaire,  tandis  que  celui  du 
croisé  durham  avait  beaucoup  augmenté.  La  différence 
fut  bien  plus  sensible  pendant  les  trois  mois  qui  suivirent. 
En  mars,  les  doux  animaux  reçurent  encore  la  même  ra- 
tion, la  betterave  avait  remplacé  le  turneps.  Au  commence- 
ment d'avril  les  deux  jeunes  veaux  grandissaient  beaucoup, 
mais  le  bazadais  perdait  de  son  embonpoint  et  le  durham 
charolais  gagnait  encore.  Nous  nous  décidâmes  alors  à 
faire  augmenlcr  la  ration  du  bazadais,  (lui  eut  de  la  peine 
à  se  maintenir  jusqu'à  la  lin  en  assez  bon  étal,  pendant 
que  le  durham  charolais,  avec  son  ancienne  ration,  en- 


25f 

graissait  toujours.  Les  deux  sujets  ont  été  [)résenlés  au 
concours  tic  Carcassonne,  où  il  était  facile  de  reconnaître 
coinl)ien  le  croisé  durham  remportait  sur  le  bazadais. 
L'essai  a  été,  ce  nous  semble,  assez  concluant;  il  l'eût  été 
bien  davantage,  si  le  ler  décembre  les  jeunes  sujets  avaient 
été  tous  les  deux  en  aussi  bon  état  l'un  que  l'autre. 

Traitons  maintenant  la  questioii  sous  un  autre  point 
de  vue.  Faut-il,  pour  améliorer  nos  races  françaises, 
leur  infuser  a  toutes  le  sang  durbam?  Nous  ne  le  pen- 
sons pas.  La  race  durham  a  aussi  ses  exigences.  Si  elle 
a  des  qualités  très-marquées,  telles  que  sa  grande  pré- 
cocité, son  extrême  propension  à  engraisser,  etc.,  elle 
possède  aussi  les  défauts  de  ces  mêmes  qualités.  Si  elle 
est  excessivement  précoce,  ce  n'est  qu'à  la  condition  de 
recevoir  déjà  dans  son  jeune  âge  une  nourriture  abon- 
dante et  appropriée,  qui  permette  un  pronq)t  développe- 
ment, rsous  entendons  par  nourriture  appropriée,  celle 
qu'appète  surtout  le  durham ,  et  qui  se  compose  de 
fourrages  verts  et  de  fourrages  racines,  comme  trèfles, 
maïs,  esparcette,  turneps,  betteraves,  et  non  des  fari- 
neux, ce  (pie  l'on  croit  généralement.  (On  ne  se  sert  de 
ces  derniers  que  pour  (pielques  sujets  hors  ligne,  qui 
par  leurs  qualités  extraordinaires  peuvent  servir  à  l'amé- 
lioration de  la  race.)  Or,  nous  ne  croyons  pas  qu'il  soit 
encore  permis  dans  la  généralité  des  fermes  du  Midi  de 
la  France ,  de  distribuer  aux  jeunes  sujets  de  l'espèce 
bovine  une  nourriture  abondante  et  même  appro[)riée; 
donc  le  durham  ne  convient  point  dans  ces  fermes,  et 
l'on  aurait  grand  tort  de  l'y  introduire,  parce  qu'au  lieu 
du  bénélice  qu'il  [U'ocin*e,  lorsqu'il  est  placé  au  milieu  de 
raliondanco,  il  constituerait  en  perle  ragriculloiu'  (|ui 
voudrait  l'élever  dans  de  mauvaises  conditions. 

Telles  contrées  sont  susceptibles  d'élever  avec  profit 
le  durham  et  ses  croisements,  comme  la  Normandie,  le 
Cbarolais,  la  Vendée,  les  bords  de  la  Cîaronne,  etc.; 


252 

telles  autres  doivent  encore  y  renoncer,  comme  la  Gas- 
cogne, l'Auvergne,  et  pour  parler  de  notre  pays  même, 
la  Cordagne.  Les  ressources  l'ourragères  sont  trop  res- 
treintes dans  ces  dernières  contrées,  pour  qu'on  pense  à 
y  introduire  des  races  perfectionnées  pour  la  boucherie. 

Mais,  pourquoi  bannirions-nous  le  croisement  durham 
de  notre  beau  Roussillon?  Est-ce  ((ue  les  ressources 
fourragères  maniiuent  dans  la  Salanqne  et  dans  une 
grande  partie  du  Riverai?  Non  seulement  ces  ressources 
sont  abondantes,  mais  elles  sont  encore  apjjropriées  aux 
besoins  de  cette  race  anglaise.  Nous  pouvons  donner 
aux  sujets  de  l'espèce  bovine  du  mais  en  vert  depuis  le 
commencement  de  juillet  jusqu'à  la  mi-octobre,  des  tur- 
neps  ou  betteraves  depuis  la  mi-octobre  jusqu'à  la  tin 
d'avril;  les  fourrages  verts  ne  manquent  certes  pas  en 
mai;  et  s'il  fallait  encore  du  vert  pour  le  mois  de  juin, 
ne  pouvons-nous  point  réserver  une  prairie  naturelle  ou 
la  deuxième  coupe  d'une  prairie  artilicielle  en  esparcette 
pour  la  faire  consommer  à  cette  époque? 

Quoique  le  fourrage  soit  abondant  et  varié  dans  notre 
pays,  il  faut  avouer  que  la  majorité  des  agriculteurs  s'en 
servent  mal.  Les  uns  vendent  une  grande  partie  de  leur 
meilleur  foin,  réservant  pour  l'élevage  et  l'amélioration 
de  leurs  animaux  une  pitance  quelquefois  assez  abondante 
comme  volume,  mais  bien  pauvre  en  principes  nutritifs; 
d'autres  sont  enchantés  de  nourrir  six  tètes  de  gros  bétail 
au  lieu  de  quatre,  par  exemple,  ne  se  doutant  seulement 
pas  que  les  quatre  tètes  coiisonnnant  la  ration  médiocre 
pour  six  et  suftisante  pour  quatre,  donneraient  plus  de 
travail,  ou  plus  de  lait,  on  plus  de  viande,  et  plus  de 
fumier.  Ceci  est  cependant  facile  à  comprendre.  Chaque 
animal  a  besoin,  rien  que  pour  vivre,  d'une  certaine 
quantité  d'aliments,  qui  compose  la  ration  d'entretien; 
le  surplus  de  cette  nourriture  essentielle  à  la  vie  forme 
la  ration  de  produit,  c'est-à-dire  le  travail,  le  lait,  la 


■Jôi 

viande.  Si  iiik'  (-(M'iniiic  (juanlité  do  iioiirrilnrc  ('huit 
doniH'O,  on  venl  nourrir  six  ti-ies  au  lieu  de  quatre,  les 
<leux  rations  d'enlrolien  (|uil  faudra  do  j)lus  pour  les  six 
et  qui  chez  elles  seront  entièrenient  perdues,  deviendront 
rations  de  produit  chez  les  quatre,  et  rapporteront  alors 
plus  de  travail,  ou  plus  de  lait,  ou  plus  de  viande.  Un 
autre  avantage  qu'il  ne  faut  pas  négliger,  c'est  qu'avec 
un  nonihre  d'animaux  moindre  on  expose  un  jjIus  faible 
capital  et  on  court  moins  de  risques  pour  la  mortalité. 

Nous  dirons  maintenant  aux  agriculteurs  qui  gardent 
leur  meilleur  i'ourrage  et  en  (piantilé  suffisante  pour  bien 
nourrir  les  animaux  de  leur  exploitation  :  Pourquoi  con- 
tinuer à  garder  et  à  entretenir  une  race  fran(,"aise  pure, 
quelle  qu'elle  soit,  lorsque  par  le  simple  elTet  du  croise- 
ment avec  le  durliam  vous  pouvez  beaucoup  augmenter 
vos  profils?  Craignez-vous  d'être  trompés?  Envoyez  une 
ou  deux  vaches  au  taureau  pur  sang  de  cette  race  ; 
faites  un  essai ,  et  nous  somnies  persuadé  que  vous  ne 
voudrez  plus  ensuite  pour  vos  vaches  que  le  taureau 
durham.  Certains  éleveurs  se  contenteront  de  dire  (ju'ils 
no  veulent  pas  de  cette  race  pure  ;  qu'elle  ne  réussirait 
pas  dans  leurs  fermes.  Comment  savent-ils  qu"avec  la 
bonne  nourriture  dont  ils  disposent,  le  durham  ne  réus- 
sira pas  chez  eux?  L'ont-ils  essayé?  Les  faits  acquis  en 
agriculture,  doivent  passer  avant  tout  raisonnement. 
Quant  aux  agriculteurs  qui  n'osent  pas  faire  des  essais 
chez  eux  et  acquérir  de  rex|)érience  à  leurs  dépens,  ils 
peuvent  parfaitement  aller  étudier  et  s'instruire  chez  ceux 
qui  les  ont  devancés.  Nous  l'avons  fait  nous-mèrae,  et 
nous  sommes  certes  bien  loin  de  nous  en  repenlir  et  de 
regretter  le  temps  que  nous  y  avons  consacré. 

Qu'il  nous  soit  permis  de  dire  (piehpies  mots  sur  les 
races  laitières.  Nous  n'en  avons  ancMine  dans  notre  pays, 
et  le  Midi  ne  compte  guère,  se  distinguant  |)ai'  celte  qua- 
lité, qu'une  race  des  Pyrénées   dite  de  Lourdes,    et  la 


254 

race  Bordelaise,  qui  s'est  Ibrniée  par  le  mélange  du  sang 
breton  au  sang  hollandais ,  et  nirnie  au  sang  suisse  chez 
bon  nombre  de  sujets.  Cette  branche  de  l'industrie  agri- 
cole n'est  exploitée  de  nos  côtés  que  par  quelques  vachers, 
qui,  les  uns,  n'ayant  que  de  faibles  ressources,  choisis- 
sent indifféremment  parmi  les  sujets  de  toutes  les  races 
qui  leur  sont  amenées  sur  nos  marchés;  d'autres,  plus 
aisés,  achettent  ordinairement  des  sujets  de  races  suisses. 
Quelques-unes  de  ces  dernières  races  se  font  remarquer 
par  un  rendement  en  lait  considérable;  mais  elles  sont 
très-exigeantes  sous  le  rapport  de  la  nourriture;  et,  à 
part  la  race  de  Schwitz,  qui  a  une  peau  linc,  des  os  assez 
minces,  et  qui  rend  à  proportion  de  la  ration  ([u'elle 
consomme,  elles  doivent  être  bannies  de  nos  élables, 
pour  faire  place  a  ces  jolies  petites  bretonnes,  qui,  avec 
les  femelles  de  la  belle  race  anglaise  d'Ayr,  sont  celles  qui 
rendent  le  meilleur  lait  et  en  plus  grande  quantité,  tou- 
jours proportionnellement  à  la  ration  qu'elles  reçoivent. 

11  ne  faut  point  parler  d'amélioration  aux  vachers  qui, 
tous  les  ans,  vident  et  renouvellent  leur  étable.  Pour  les 
autres ,  la  race  bretonne  elle-même  est  excellente.  On  a 
essayé  de  l'améliorer  encore  en  la  croisant  avec  la  race  d'Ayr . 
Les  agriculteurs  qui  ont  tenté  ce  croisement  disent  en  avoir 
été  satisfaits;  quant  au  croisement  de  nos  races  françaises 
avec  le  taureau  sch\vitz,  qui  avait  eu  de  la  vogue  pendant 
quelque  temps,  il  commence  a  être  abandonné. 

Passons  maintenant  aux  races  de  travail.  En  parlant  du 
croisement  durham,nous  avons  dit  qu'il  ne  convenait  point 
dans  certaines  contrées,  parmi  lescpiellcs  nous  avons  cité 
la  Cerdagne.  Si  nous  devons  viser  à  améliorer  nos  races 
élevées  pour  la  boucherie  et  celles  destinées  à  la  production 
du  lait,  nous  ne  devons  certes  pas  négliger  l'amélioration 
de  nos  races  de  travail.  Le  bœuf  de  Cerdagne  est  incontes- 
tablement un  de  ceux  qui  se  font  le  plus  remarquer  par  sa 
légèreté  et  la  résistance  au  travail  ;  mais  il  est  défectueux 


!;,>,) 


en  certaines  parties  de  son  corps  susceptibles  dT-tre  cor- 
rigées, et  cette  aniélioralion,  an  lien  de  faire  perdre  à  cet 
animal  la  qualité  qui  le  dislingue  à  un  si  haut  degré,  la 
rendrait  encore  chez  lui  plus  forte  et  plus  apparente. 

Quelques  défauts  sont  inhérents  à  la  race  de  Cerdagne, 
et  ils  se  trouvent  plus  ou  moins  prononc(''s  chez  tous  les 
sujets.  Ainsi,  la  tète  est  longue  et  un  peu  busquée,  le 
dos  ensellé,  la  côte  un  peu  plate,  les  hanches  étroites, 
la  croupe  avalée ,  la  (pieue  attachée  très-haut.  Celte 
défectuosité  du  train  postérieur  fait  que  les  aplombs  des 
jambes  de  derrière  laissent  beaucoup  ;i  désirer.  Pour 
corriger  cette  mauvaise  conformation,  l;iut-il  améliorer 
cette  race  par  sélection?  Choisir  quelques  sujets  exempts 
de  ces  défauts  dominants  et  les  accoupler  entre  eux? 
ISous  serions  de  cet  avis,  si  nous  n'étions  certain  que, 
pour  former  une  telle  famille  améliorée  et  amélioratrice, 
les  sujets  manquent  complètement.  A  quelle  race  re- 
courir alors  pour  corriger  les  défauts  de  la  race  de 
Cerdagne,  sans  faire  perdre  à  cette  dernière  les  qualités, 
le  cachet,  la  robe,  les  habitudes  (pii  la  distinguent?  Après 
avoir  bien  cherché,  nous  n'en  trouvons  qu'une,  qui,  à 
notre  point  de  vue,  réunisse  les  conditions  nécessaires: 
c'est  la  race  aubrac.  Le  bœuf  aubrac  est  un  très-bon  bœuf 
de  travail;  il  est  léger  et  fort  ;  il  est  élevé  dans  les  mêmes 
conditions  de  sol,  de  nourriture,  de  climat,  que  le  bœuf 
de  Cerdagne.  Il  a  aussi  le  uK'me  pelage  on  bien  à  peu 
près;  mais  il  a  la  lète  courte,  large  et  carrée;  le  dos 
droit ,  la  côte  assez  arrondie  ,  chez  lui  le  train  posté- 
rieur, sans  être  aussi  large  que  chez  le  bœuf  d'engrais, 
l'est  assez  cependant  pour  que  les  jambes  qui  le  portent 
aient  de  bons  aplondis;  la  (jueue  n"esl  allacliée  ni  trop 
bas  ni  trop  haut.  D'après  cela  le  sang-aubrac  est,  ce  nous 
semble,  celui  qui  pourrait  le  mieux  se  fondre  dans  le  sang 
«les  sujets  de  la  race  de  Cerdagne,  qui  avec  lann-lioralion 
<le  lein's  formes  accpicrraient  de  nouveaux  mérites,  seraient 


-2bC> 


encore  plus  recherchés  par  nos  voisins  de  l'Ariége,  et 
porteraient  par  conséquent  plus  de  profit  aux  éleveurs. 
Quant  à  la  manière  de  s'y  prendre  pour  opérer  ce  croi- 
sement, elle  esttrès-lacile.  On  n'a  qu'à  bannir  complètement 
les  taureaux  de  Cerdagne  des  troupeaux  qu'on  se  propose 
d'améliorer,  et  se  procurer  avec  la  valeur  de  ceux-là,  jointe 
à  une  somme  peu  considérable,  des  reproducteurs  aubrac. 
Ce  serait  alors  le  cas  de  faire  l'élevage  in-und-in,  c'est- 
à-dire  par  sélection.  Au  lieu  de  bistourner  les  taureaux 
aubrac  qui  auraient  fait  une  ou  deux  montes,  comme  c'est 
Ihabitude  pour  les  taureaux  de  Cerdagne ,  on  devrait  les 
garder  jus(iu'à  l'âge  de  six ,  sept  et  même  huit  ans.  Nous 
connaissons  des  exploitations  qui  possèdent  des  taureaux 
âf^és  de  dix  ans,  qui  sont  aussi  proliliques  et  donnent  des 
produits  (jui  ne  le  cèdent  en  rien  à  leurs  aînés.  Ces  tau- 
reaux aubrac,  pouvant  ainsi  saillir  leurs  propres  filles, 
avanceraient  énormément  par  le  second  croisement  du 
même  individu  l'amélioration  ([u'on  s'était  proposée.  Pour 
porter  les  agriculteurs  de  la  Cerdagne  à  faire  ce  croisement, 
il  sullirait  de  quelques  sacrifices  de  la  part  de  l'xVdminis- 
tralion  départementale.  Quatre  ou  cinq  jeunes  taureaux, 
bien  choisis  sur  les  montagnes  d'Aubrac,  et  mis  en  vente  aux 
enchères  dans  la  Cerdagne,  obtiendraient,  et  d'autres  que 
nous  en  sont  convaincus,  une  moj  ennede  prix  supérieure  au 
prix  d'achat;  et  lorsque  le  premier  pas  vers  l'amélioration 
serait  fait,  les  éleveurs  de  ce  pays,  cpii  sont  intelligents  et 
ont  un  coup-d'œil  fort  juste,  continueraient  et  consom- 
meraient de  leur  propre  mouvement  l'œuvre  commencée. 
11  ne  faudrait  pas  oublier  de  récompenser  par  des  primes 
raisonnables,  de  80  à  200  francs  chacune,  les  éleveurs  qui 
présenteraient  à  la  commission  départementale  les  taureaux 
et  les  génisses  les  mieux  conformés,  appartenant  à  la  race 
de  Cerdagne,  améliorre  par  le  sang  atihrac.  Nous  sommes 
persuadé  qu'en  employant  de  pareils  moyens,  peu  d'agri- 
culteurs de  la  Cerdagne  résisteraient  à  l'impulsion  donnée. 


257 


HArPORT  SUR  L'INDUSTRIE  SÉRICICOLE 

DU  DÉPARTEMENT 

DES  PYRÉNÉES-ORIENTALES  EN  1859, 

l'ar  M.  A»  SlAli,  Trc'soiier  do  la  Société. 


Messieurs, 

Vous  avez  eu  a  cœur  de  prouver,  celte  année  encore,  que 
l'industrie  séricicole  faisait  l'objet  de  vos  préoccupations. 

La  commission  que  vous  avez  nommée  dans  la  séance 
du  25  mai  dernier,  com|)osée  de  ilM.  Companyo  père, 
Auge,  Roltin  et  Antoine  Siau,  désireuse  de  reiiiplir  sa 
mission,  a  commencé  le  l'^'^juin  ses  visites,  ayant  pour  but 
de  rechercher,  dans  les  éducations  de  vers  à  soie,  ce  qui 
avait  clé  nuisible  ou  avantageux.  Nous  procédions,  par  là, 
à  l'enquête  que  sollicite  M.  le  Préfet,  en  consécpience  de 
la  demande  faite  par  Son  Excellence  M.  le  Ministre  de 
l'Agriculture. 

Nous  visitâmes  d'abord  la  magnanerie  de  M.  Sabatier, 
au  domaine  de  Jau,  situé  entre  Cases-dc-Pène  et  Kstagcl. 
Nous  (brons  avec  regret,  que  cet  éducateur  intelligent, 
qui  avait  toujours  eu  des  succès  encourageants,  même 
depuis  l'épidémie,  n'a  eu  cette  année  que  le  tiers  de  la 
récolte. 

En  1857, — 1.250  grammes,  lui  fournirent  2.110  kilogrammes. 
Fn  1858,  — 1.250  ""    id.  —  1.850         iil. 

En  1859,  — 1.250      id.  —  000         id. 

Il  se  procure,  chaque  auiiée,  la  graine  chez  les  petits 
éducateurs  de  Sainte-AnVi(p)e  (Aveyron). 

17 


258 

Nous  attribuons  le  faible  résultat  de  cette  année  à  la 
température,  très-variable,  d'abord  bumide,  et  orageuse 
ensuite,  sous  lintluence  du  vent  marin,  très-nuisible  aux 
éducations  à  proximité  de  la  mer,  à  la  feuille  du  mûrier, 
gelée  lors  de  la  première  pousse;  la  seconde  n'était  pas 
assez  nourrie  lors  de  la  période  de  la  -¥  mue  à  la  montée. 

I.a  muscardine  avait  atteint  un  certain  nombre  de  vers, 
d'autres  étaient  ijras,  fondus  et  faibles. 

Nous  jugeons  la  feuille  généralement  malade;  elle  subit 
encore  comme  la  vigne  et  une  infinité  de  plantes  et  d'arbres, 
les  fâcheuses  conséquences  d'un  principe  délétère,  sur  la 
nature  duquel  nous  ne  pouvons  porter  un  jugement  cer- 
tain. 11  parait  évident  que  les  maladies  destructives  des 
récoltes  des  vers  à  soie,  ont  pour  origine  la  muscardine. 
L'invasion  du  botryiis  basiana  se  présente  sous  des  for- 
mes souvent  bien  différentes;  mais  c'est  presque  toujours 
cette  végétation  qui  entraiue  la  perte  des  chand)rées. 
Quant  aux  vers  à  soie  qui  n'atteignent  pas  leur  complet 
développement,  on  peut  attribuer  ce  résultat  à  la  mau- 
vaise qualité  de  la  feuille.  En  effet,  les  vers  qui  l'ont 
consommée  tout-à-fait  mauvaise  sont  très-petits,  tandis 
que  ceux  qui  ont  été  nourris  de  feuille  meilleure  acquiè- 
rent plus  de  développement.  C'est  encore  a  ce  fait 
qu'on  doit  attribuer  la  dégénérescence  de  l'œuf  du  ver 
à  soie,  observée  par  les  savants  et  les  éducateurs. 

Le  nombre  des  mûriers,  dans  le  domaine  de  Jau,  est 
de  4.000. 

Nous  avons  visité,  à  Estagel,  l'éducation  de  M.  Ange 
de  Gonsalvo,  qui  eut,  l'année  dernière,  une  assez  bonne 
récolte.  100  grammes  de  graine  lui  fournirent  142  kilo- 
grammes de  cocons,  tandis  que  cette  année  100  grammes 
de  graine  n'ont  produit  que  50  kilogrammes  de  co- 
cons. 

Les  soins  convenables  ont  été  donnés  a  cette  éducation. 
La  graine  était  de  race  d'AndrinopIe.  File  lui  a  été  envoyée 


•259 

par  une  nuiison  de  France,  dont  il  a  cru  devoir  nous  taire 
le  nom.  Les  vers  étaient  au  i"  âge.  iNous  en  avons  oliservé 
d'inégaux  et  qui  étaient  restés  très-faibles.  La  température 
avait  été  la  même  que  chez  M.  Sabatier,  et  la  première 
feuille  attaquée  par  le  froid. 

Une  bien  petite  éducation  avait  réussi  à  Estagel;  une 
jeune  personne  l'avait  dirigée.  Marguerite  Forner,  avec 
a  grammes  de  graine,  avait  eu  5  kilogrammes  de  cocons. 
Ils  sont  de  race  d'Andrinople;  la  qualité  est  aussi  belle 
que  celle  de  sina. 

M.  Bartlie,  régisseur  du  domaine  de  M.  le  marquis  de 
Fiinestous,  distribuait  annuellement  aux  petits  éducateurs 
de  La  To^r-de-France  ^.oOO  grammes  de  graine.  L'on  ne 
recueillit.  Tannée  dernière,  que  850  kilogr.  de  cocons. 
M.  Harthe  ,  découragé,  n'avait  mis  en  incubation,  pour 
sa  propre  éducation,  que  100  grammes  de  graine  d'Alais, 
et  250  grammes  de  la  graine  de  ses  cocons  de  1858, 
race  des  Cévenncs. 

Le  produit  n'a  été  que  de  90  kilogr.  et  les  cocons  de 
mauvaise  qualité. 

La  première  feuille  avait  souffert  de  la  gelée. 

Parmi  les  vers,  les  uns  étaient  atteints  de  la  muscai- 
dine,  d'autres  étaient  faibles  et  d'autres  courts.  Ces 
maladies  s'étaient  montrées  à  tous  les  âges,  et  principa- 
lement de  la  ¥  mue  à  la  montée. 

Le  nombre  des  mûriers  cultivés  à  La  Tour  s'élève  à 
li.O(»0,  savoir: 

Dans  les  propriétés  de  M.  do  fiinosloiis.  .   0.000; 

Dans  celles  de  M.  Tiilla 1.500; 

Chez  divers 3.500. 

Deux  autres  éducations  avaient  ('té  faites  à  La  Tour, 
avec  !25  grammes  de  graine  :  l'une  par  M.  Kiie  Coronat, 
qui  n'a  pas  eu  de  succès;  l'autre  par  M""  .Iulia,  qui  a  eu 
un  tiers  de  récolle. 


260 

Nous  allons  vous  entretenir  de  noire  seconde  course, 
faite  dans  la  journée  du  9  juin.  Si  la  première  a  été  signa- 
lée par  de  mauvaises  réussites,  celle-ci  a  été  marquée  par 
plusieurs  résultats  bien  favorables. 

Nous  nous  arrêtons  à  Saint-Féliu-d'Amonl,  pour  visiter 
deux  petites  éducations  :  celle  de  M.  Joseph  Torrent, 
qui  avec  48  grammes  de  graine,  a  obtenu  51  kilogr.  de 
cocons,  et  celle  de  M.  Paul  Miffre,  qui  avec  18  grammes 
de  graine,  a  recueilli  129  kilogrammes  de  cocons. 

Des  fourmis  avaient  dévoré  une  petite  partie  de  jeunes 
vers. 

N'ous  n'avons  pas  reconnu  la  moindre  trace  de  maladie. 
Les  soins  les  plus  attentifs  avaient  été  donnés  à  ces  édu- 
cations. 

Les  graines  avaient  été  fournies  par  M.  Alberny,  rue 
de  la  Cathédrale,  à  Carcassonne,  et  l'on  nous  a  dit 
qu'elles  provenaient  de  la  maison  Y<'  Nicod  fils,  d'An- 
nonav.  Sur  l'une  des  boites  était  écrit  :  Smyrne. 

Nous  avons  compté,  dans  les  deux  communes  de  Saint- 
Féliu,  environ  oOO  mûriers.  La  feuille  n'avait  pas  été 
attaquée  par  le  froid  ;  elle  paraissait  saine. 

L'éducation  de  M.  Joseph  Capdelaire,  qui  avait  parfai- 
tement réussi  l'année  dernière  ,  à  Millas ,  n'a  fourni , 
cette  année,  avec  TiO  grammes  de  graine,  que  10  kilo- 
grammes de  cocons.  Il  est  vrai  que  la  plus  grande  partie 
(le  la  graine  avait  été  brûlée,  ayant  été  soumise,  pour 
l'éclosion,  à  une  température  trop  élevée. 

Pour  les  petites  éducations,  on  a  l'habitude,  dans  nos 
campagnes,  de  placer  les  graines  dans  un  petit  compar- 
timent qui  est  derrière  le  four,  et  que  Ton  nomme  la 
(jlorietle;  système  vicieux,  qui  ne  peut  produire  que  de 
déplorables  résultats.  L'œuf  du  ver  a  soie,  soumis  à  une 
chaleur  trop  forte,  et  surtout  privé  d'éléments  humides, 
altère  l'embryon  et  ne  lui  procure  qu'im  avenir  rachi- 
',i(pic. 


2GI 

L'autre  éducation  de  Millas  a  été  heureuse;  elle  a  reçu 
les  soins  de  la  femme  Deipech. 

25  i,M-aniines  de  graine  de  M.  Alberny,  de  Carcassonne , 
ont  Ibinni  i^  kilogrammes  de  cocons. — 25  grammes  de 
graine  de  ses  cocons  de  1858,  ont  produit  17  kilogr. 

La  commune  de  Millas  possède  600  mûriers. 

Nous  avons  visité,  avec  intérêt,  à  Ille,  l'éducation 
dirigée  i»ar  M.  Lopez. 

M.  Trilla  avait  fourni  les  fouilles,  et  la  graine  avait 
été  envoyée  par  M.  Alberny. 

L'éducation  a  reçu  les  soins  ordinaires,  mais  dans  des 
circonstances  parliculières,  que  nous  ferons  connaître. 

L'éclosion  a  eu  lieu  derrière  le  four;  la  chaleur  ordi- 
naire y  est  de  18  à  22  degrés.  Les  vers  ont  été  [icrtés, 
après  l'éclosion ,  dans  un  coujpartiment  contigu,  où  la 
température  était  de  16  degrés,  et,  dans  la  soirée,  on  les 
a  placés  dans  les  trois  appartements  consacrés  à  l'éduca- 
tion ,  où  la  teujpérature  était  de  12  à  14  degrés. 

Nous  observerons  que,  pendant  les  trois  premiers  jours 
seulement,  de  la  cendre  chaude  y  fut  placée,  et  que  les 
rayons  du  soleil  ne  pénétraient  dans  ces  appartements 
que  durant  trois  heures  de  la  journée. 

La  température  a  été  très-variable  pendant  l'éducation  : 
chaleur  au\  deux  premières  mues;  humidité  prolongée  et 
temps  orageux  pendant  les  deux  autres.  Néanmoins,  les 
vers  se  sont  développés  avec  vigueur,  et,  chose  digue  de 
remanpie,  un  grand  nombre  de  sujets ,  posés,  faute  de 
place,  sur  les  briques  du  sol  de  ces  appartements  sont 
montés  sur  les  bruyères,  avec  la  même  force  que  ceux 
établis  sur  les  clayons  élevés. 

Nous  observerons,  en  outre,  que  nous  avons  vu,  en- 
dehors  des  fenêtres,  un  certain  nombre  de  cocons  atta- 
chés aux  coulrevents.  Les  vers  étaient  sortis,  pendant 
que  ces  croisées  restaient  ouvertes  pour  l'aération  d»  s 
salles. 


262 

Il  n'existait  pas  de  trace  de  maladie;  les  cocons  étaient 
beaux,  réguliers,  race  Tranche  de  Valence  iKspagne). 

MM.  Lopez  et  Trilla  avaient  mis  en  incubation  75  gr. 
de  graine,  qui  ont  produit  150  kilogrammes  de  cocons. 

Il  existe  600  mûriers  dans  la  commune  d'Ille;  M.  Trilla 
en  possède  200. 

Nous  devons  vous  entretenir  de  l'éducation  de  M'"^  Auge, 
à  Perpignan,  que  les  ravages  de  l'épidémie  n'ont  jamais 
découragée,  et  qui  fait  preuve  de  connaissances  spéciales 
très-étendues.  Cette  année,  elle  avait  mis  en  incubation 
25  grammes  de  graine,  qu'elle  avait  récoltée  l'année  der- 
nière, et  qui  avait  bien  léussi;  18  grammes  de  graine, 
race  d'Andrinoi)le ,  qui  a  donné  des  résultats  inférieurs. 
Ces  45  grammes  de  graine  ont  produit  59  kilogrammes 
de  cocons. 

Vous  n'ignorez  pas,  Messieurs,  que  M""^  Auge  est  très- 
utile  aux  petits  éducateurs  pour  l'achat  de  leurs  cocons; 
elle  pourra  rendre,  en  1860,  un  service  signalé  à  tous 
ceux  qui  se  livreront  à  l'industrie  séricicole  dans  le  dé- 
partement, parce  qu'elle  a  eu  le  soin,  après  l'achat  des 
cocons,  de  réserver  pour  la  graine  ceux  recueillis  dans 
les  magnaneries  exemptes  de  maladies.  Ils  donnent  déjà 
de  très-beaux  papillons,  (jui  fournissent  de  la  graine  de 
belle  espérance. 

]\Ime  Auge  a  également  à  sa  disposition  la  majeure 
partie  des  cocons  de  M.  Llopet,  de  Serdinya.  Notre  ho- 
norable vice-président,  M.  Companyo,  nous  communiqua, 
sur  l'éducation  de  M.  Llopet  de  l'année  dernière,  des  détails 
intéressants.  En  efiét,  M.  Llopet  avait  eu  l'idée  de  placer, 
quelques  jours  après  leur  éclosion ,  une  certaine  quantité 
de  vers  sur  les  mûriers  de  sa  pépinière.  Ces  vers,  expo- 
sés aux  intemj)éries ,  avaient  grandi  et  fait  les  cocons 
sur  l'arbre. 

Cette  année,  M.  Llopet  a  renouvelé  cet  essai;  mais  il 
a  été  infructueux,  h  cause  des  pluies  constantes  du  mois 


263 

(le  mai.  Il  avait  mis  en  incubation  (>5c'',50  de  graines, 
jtrovenant  de  son  éducation  de  1858;  il  en  a  relire  ICK) 
kilogrammes  de  cocons,  tous  de  belle  qualité. 

Plusieurs  d'entre  vous  ont  pu  apprécier,  sur  un  rameau 
du  lavandula  sla'clias ,  les  beaux  résultats  de  cette  édu- 
cation. 

Le  lavandula  slœchas  remplace  avantageusement,  dans 
cette  contrée,  la  bruyère  et  les  cistes. 

La  magnanerie  est  exposée  au  sud  ,  abritée  contre  le 
vent  marin.  Cette  exposition  est  très-favorable. 

Aucun  caractère  de  maladie  ne  s'est  présenté  dans  le 
cours  de  l'éducation.  Les  vers  avaient  opén''  la  montée 
le  vingt-buitième  jour,  avec  une  vigueur  supérieure  "a 
celle  de  l'année  dernière  :  l'incubation  (ut,  a  cette  épo- 
que, de  100  grammes  de  graine  (races  de  Brousse  et  de 
Smyrne)  qu'il  avait  reçue  par  l'entremise  de  son  frère, 
receveur  des  Contributions  indirectes  à  Aubenas. 

Le  temps  a  été  très-variable  pendant  la  dernière  édu- 
cation. La  pluie  a  duré  vingt  jours  consécutifs;  le  tonnerre 
a  grondé  avec  force,  le  premier  jour  de  la  montée. 

A  Saint-Laurent-de-Cerdans,  à  Elno,  Torreilles,  Prades, 
Calllar  et  Molitg,  les  magnaneries  ont  donné  de  faibles 
résultats. 

Pour  abréger  cette  lecture,  je  passe  sous  silence  les 
noms  des  autres  éducateurs. 

Toutes  les  graines  mises  en  incubation,  en  1859,  dans 
le  département,  s'élèvent  à  2.800  granunes;  elles  n'avaienl 
pas  été  examinées  par  MM.  Jouve,  Cbavaud  et  C'^,  à  Ca- 
vaillon.  Leur  produit  a  été  de  1.500  kilogr.  de  cocons 
seulement;  en  en  portant  le  priv  à  7  francs,  cours  actuel, 
nous  trouvons  une  valeur  do  10.500  francs.  Ce  cliilfre 
est  bien  réduit.  Avant  l'épidémie,  ou  niellait  en  éclosiou, 
dans  le  déparlement,  000  onces,  soit  15.000  granunes  de 
graine.  La  production  moyenne  étant  de  âO  Uilogrammes 
par  '25giammcs,  les  magnaneries  produisaient  18.000  Uil. 


264 

de  cocons,  et  le  prix  moyen  étant  de  4  fr.  par  kilogramme^ 
la  valeur  était  de  72.000  francs. 

Les  heureux  résultais  de  certaines  éducations  de  cette 
année,  sont  d'un  fiivorable  augure  pour  1860.  Donnons  des 
encouragements,  comme  nous  le  fîmes  l'année  dernière; 
alors  les  petites  éducations  se  multiplieront,  ayant  plus 
de  chances  de  réussite  avec  les  graines  produites  des 
magnaneries  exemj)tes  de  maladies,  et  nous  augmente- 
rons le  bien-être  de  plusieurs  familles. 

Le  département  renferme  40.000  mûriers,  tous  répan- 
dus dans  des  contrées  favorables  à  l'éducation.  Si  les 
feuilles  en  étaient  utilisées  dans  des  magnaneries,  qui 
fourniraient  une  valeur  de  ^iO.OOO  francs,  elles  ser- 
viraient à  mettre  en  incubation  50.000  gram.  de  graine. 

Voici  les  données  sur  lesquelles  se  fonde  ce  résultat  : 

La  feuille  de  20  mûriers,  de  venue  ordinaire,  est  né- 
cessaire pour  2o  grammes  de  graine,  qui  produisent,  en 
temps  ordinaire ,  50  kilogrammes  de  cocons;  les  50.000 
grammes  produiraient  GO. 000  kilogrammes  de  cocons, 
et  en  portant  le  prix  seulement  à  4  francs,  nous  arrivons 
à  la  valeur  de  240.000  francs. 

Les  points  les  plus  favorables  à  l'éducation  sont:  ceux 
connus  sous  la  dénomination  d'Aspres,  les  environs  de 
Perpignan ,  tous  les  villages  des  bords  de  l'Agly  jusqu'à 
Caudiès,  ceux  des  bords  de  la  Tet  jusqu'aux  environs 
d'Olette,  les  vallées  des  Albères,  du  Tech,  et  celles  de 
Coustouges  et  celles  de  La  Manère. 

M.  Jaubert  de  Passa  introduisit  en  Roussillon,  il  y  a 
environ  cinquante  ans,  la  bonne  culture  des  mûriers,  leurs 
diverses  variétés  et  la  taille,  ainsi  qu'elle  est  pratiquée  dans 
les  Cévennes;  il  lit  de  grands  sacriliccs  pour  donner  de 
l'extension  à  l'éducation  des  vers  ii  soie;  l'im  des  premiers 
il  établit  des  magnaneries  vastes  et  bien  aérées. 

l'iusieurs  races  de  vers  à  soie  sont  élevées  dans  les 
Pvrénées-Oricnlales. 


265 

La  race-andrinople ,Ȉ  cocons  blancs,  introduite  par 
Mme  Auge,  qui  l'avait  reçue  de  M"'e  \o  Kicod,  d'Anno- 
nay ,  est  remarquable  par  la  grosseur  des  cocons  et  la 
linesse  de  la  soie;  mais  elle  ne  réussit  qu'exceptionnel- 
lement. 

La  race  de  Lombardie,  à  cocons  jaune-paille ,  de  di- 
verses nuances,  gros  et  de  belle  forme,  soie  line  et  qui 
se  fde  bien,  plus  robuste  que  la  première. 

La  race-sina,  à  cocons  blancs,  reçue,  en  18Ô4,  par 
M.  Corbière-Vilallongue,  de  M.  Camille  Beauvais;  elle 
s'est  propagée  à  cause  de  la  bonté  de  la  soie  et  de  sa 
blanclieui-  argentine. 

La  race  de  Brousse,  h  cocons  jaunes,  élevée  avec  suc- 
cès en  Algérie;  la  couleur  se  rapporte  à  celle  de  Chine, 
mais  la  l'orme  du  cocon  diiïènî  un  peu.  La  soie  est  moins 
line,  mais  elle  est  très-résistante,  et  se  dévide  bien. 

La  race  des  Cévennes,  introduite  par  M.  Brosson,  à 
cocon  paille,  assez  uni,  gros,  se  dévidant  facilement, 
soie  forte;  ver  robuste. 

Une  autre  race  a  été  obtomîc  dans  le  département,  par 
des  graines  reçues  du  Piémont;  le  cocon  est  moins  gros, 
bien  fiiit  et  d'un  jaune  peu  foncé. 

La  race-espagnole,  appelée  vulgairement  Espagnolet, 
dont  la  graine  fut  apportée  de  Valence  (Espagiîe),  par 
Mme  Auge,  en  !8i7.  Le  cocon  en  est  jaune-i)aille,  uni, 
bien  fait;  les  vers  robustes  et  montant  bien.  Ils  ont  gé- 
néralement bien  réussi,  pendant  l'éducalion  de  1859; 
néanmoins  cette  race  est  sujette  à  la  dégénérescence, 
connue  l'indiquent  ses  cocons  à  soie  verdàtre. 

Il  serait  à  supposer  que  les  vers  qui  la  produisent  sont 
atteints  de  maladie,  ayant  éprouvé  une  altération  dans  le 
système  digestif,  par  rinliltralion  d"une  matière  verte, 
produite  par  la  fouille  mangée  et  qui  n"a  pas  été  digérée. 
Ce  pliéuoniènc  accidentel  se  trouve  dans  toutes  les  édu- 
cations (le  \m\). 


2f)6 

Ce  fait  doit  attirer  l'attention  ;, il  n'a  pu  être  éclairti 
d'une  manière  précise.  L'accouplement  des  vers  atteints 
de  cette  alFeofion  facile  a  reconnaître,  produit  une  géné- 
ration qui  doit  être  élevée  à  part. 

Les  cocons  qui  restent  purs  de  race  sont  bien  faits; 
la  soie  en  est  bonne  et  d'un  dévidage  facile. 

On  a  observé  (jue  la  constance  de  la  couleur  verte, 
persiste  dans  les  produits  futurs,  et  que  les  cocons  de- 
viennent une  bourre  informe  et  sans  aggrégation  des  fds 
qui  la  composent. 

Nous  terminons  en  vous  signalant  ceux  des  éducateurs 
que  nous  jugeons  dignes  d'encouragements  : 

MM.  Llopet,  à  Serdinya; 
Lopez  et  Trilla,  à  lUe; 

Mme  Auge ,  à  Perpignan  ; 

MM.  Ange  Delpecb,  à  Millas; 

Joseph  Torrent,  à  Saint-Féliu-d'Amont; 
Paul  Milfre,  à  Saint-Féliu-d'Amont. 


26': 


RAPPORT  DE  M.  ANTOINE  SIAU, 

SUR  LES  PRODUITS  ENVOYÉS 

PAR  LA  SOCIÉTÉ  AU  CONCOIRS  DE  CARCASSONNE,  EN  MAI  1839, 
ET    SUR    LA    CULTURE    DES    ARTICHAUTS. 


Messieurs , 

La  Société  d'Agriculture  de  l'Aude  ayant  témoigné  le 
désir  de  voir  figurer  au  Concours  horticole  de  Carcassonne 
les  produits  de  nos  jardins,  notre  Société  nomma  une 
commission,  composée  de  MM.  François  Astors,  Sauveur 
Dadins,  l'abbé  Delhoste  et  Antoine  Siau.  Je  lus  chargé 
de  faire  la  livraison,  et  de  fournir,  au  besoin,  les  indi- 
cations sur  la  culture  des  produits  envoyés. 

Kn  voici  la  note  : 

Diverses  variétés  de  patates,  fournies  et  la  plupart 
créées  par  notre  collègue,  M.  Jean  Eychenne,  et  par 
M.  Saturnin  LIanta,  propriétaire  à  La-Tour-bas-Elne , 
auxquels  nous  devons  l'introduction  et  la  propagation 
de  ce  tubercule  dans  le  départ(Mnent. 

Trois  variétés  d'asperges.  Celles  dites  de  Hollande  et 
d'Allemagne,  introduites,  en  iSoO,  par  notre  collègue, 
M.  Hippolyte  Picas,  étaient  remarquables  par  leur  gros- 
seur. Les  deux  bottes  fournies  par  M.  Jean  nocpicfort, 
lurent  reconnues  supérieures  ;i  celles  des  exposants  de 
l'Aude,  (lu  Vaucluse  et  de  la  Haute-Garonne. 

Quatre  variétés  de  cerises,  arrangées  avec  goût  dans 
des  boites,  attiraient  l'allenlion  par  leurs  brillantes  cou- 
leurs et  leur  grosseur.  Parmi  elles  se  trouvait  la  variété 
dite  (le  SaiiU-Ceorge,  que  produisent  on  abondance,  vers 
la  lin  (le  mars,  les  montagnes  de  Cciel. 


268 

Plusieurs  boites,  coiilen:int  diverses  variétés  de  fraises» 
disposées  avec  art  par  M'^c  Darche,  se  distinguaient  par 
leur  beauté  et  leur  parfum ,  entre  autres  les  belles  fraises 
dites  anglaises,  propagées  par  notre  collègue,  M.  Roulïia, 
et  la  variété  obtenue  par  M.  Pbili|)pe  Massot  par  l'hybri- 
dation de  la  Duchesse  de  liHchingam  et  la  fraise  sauvage 
des  Albères,  dont  la  plante  est  aussi  [)récieuse  par  sa 
fécondité  que  par  la  bonté  du  fruit,  qui  s'étend  jusqu'à 
la  saison  rigoureuse  de  l'hiver. 

A  cet  envoi  étaient  joints  des  petits-pois,  des  fèves 
dites  iVEspagnc,  dont  nous  avons  les  primeurs  en  plein 
vent  au  mois  de  mars,  et  des  haricots  verts. 

Nous  mentionnerons  nos  quatre  variétés  d'artichauts, 
dont  plusieurs  pieds,  avec  leurs  fruits  nombreux,  étaient 
dans  des  pots. 

Une  grande  extension  a  été  donnée  à  la  culture  de 
cette  plante  aux  environs  de  Perpignan. 

Les  excellentes  qualités  de  nos  produits  maraîchers  se 
font  apprécier  et  s'expliquent  par  la  nature  du  terrain 
d'alluvion  et  par  l'arrosage  :  les  eaux  qui  viennent  de  la 
rivière  de  la  Basse,  saturées  par  les  matières  que  con- 
tiennent les  égouts  de  la  ville  et  des  faubourgs,  sont 
entraînées  dans  les  canaux  et  fécondent  ainsi  tous  les 
jardins. 

Nous  parlerons  d'abord  de  la  variété  d'artichaut  blanc, 
dite  des  (ptatre-saisons  :  cette  variété  est  la  plus  cultivée 
à  cause  de  sa  précocité  ;  le  premier  montant  poite,  en 
octobre ,  de  cinq  à  six  fruits ,  les  autres  se  succèdent 
jusqu'à  la  fin  de  mai.  La  feuille  est  plus  faible  dans  cette 
variété  que  dans  les  autres. 

Pendant  la  période  de  fructification  des  huit  derniers 
mois,  cette  variété  a  fourni  dans  la  banlieue  de  Perpignan, 
environ  3.500.000  douzaines  d'artichauts,  au  prix  moyen 
de  25  centimes  la  douzaine,  soi!  la  valeur  de  875.000 
francs. 


2G9 

Le  prix  île  la  douzaine  varie  de  ;')  à  7o  cenlimes,  et 
mcnic  à  1  franc. 

Le  prix  de  5  (,'enliuics  est  celui  (ju'ou  |iaie  en  mai,  les 
autres  variétés  fournissant  alors  abondamment  leurs  fruits, 
et  en  février  le  prix  est  de  73  centimes  à  1  franc. 

Le  fruit  dos  qnatre-saisons  est  moyen,  d'un  vert  clair; 
il  prend  la  teinte  violacée  aux  chaleurs  du  printemps. 

L'artichaut  dit  de  mai  est  le  plus  beau,  le  mieux 
pommé  et  le  meilleur;  il  parait  du  13  avril  à  la  fin  de  mai. 
La  feuille  est  plus  large  que  celle  des  autres  espèces. 

Pour  augmenter  la  grosseur  du  fruit,  nos  jardiniers 
mettent  en  croix,  vers  l'extrémité  de  la  tige,  deux  che- 
villes en  bois,  huit  à  dix  jours  avant  de  cueillir  le  fruit, 
en  ayant  soin  de  le  couvrir  des  quatre  feuilles  qui  l'en- 
vironnent, et  ils  l'attachent  ensuite.  Le  fruit  devient  plus 
gros  et  pins  tendre;  il  est  d'un  vert  pâle. 

La  variété  connue  sous  le  nom  de  movrrou  de  haddl 
(museau  de  veau),  iVuctilie  en  février  jusqu'au  13  mai. 
Le  fruit  est  violet;  la  tête  et  le  bas  sont  plus  aplatis  que 
dans  la  variété  des  quatre-saisons.  Ce  produit  est  hybride 
de  la  morisque. 

La  mon'f^qiir  est  la  moins  cultivée;  elle  donne  ses  fruits 
du  13  avril  à  la  lin  de  juin.  La  nuance  violacée  est  plus 
foncée  que  celle  du  miiseaii  de  veau.  La  feuille  est  plus 
nourrie  que  celle  de  la  variété  précédente. 

La  valeur  moyenne  des  trois  deinièrcs  variétés  est 
d'environ  180.00()  francs,  soit  1.200.000  douzaines  à  13 
cenlimes. 

Les  pieds  d'artichauts  exposés  avaient  été  fournis  par 
les  sieurs  Joseph  Nogués,  Jean  Coll  et  Louis  Ribes. 

<\tllure.  —  Nos  jardiniers  ont  le  soin  de  choisir,  pour 
la  re|»roduction  de  la  plante  des  (lunhr-saisons,  les  pieds 
i\\\\  ont  porte';  les  plus  beaux  fruits  et  ceux  [)ourvus  de  six 
feuilles,  produisant  des  fruits  itrécoces. 

Après  la  fructification,  la  plante  est  divisée  en  aulaiii 


270 

de  tronçons  munis  do  racines  qu'il  y  a  de  branches  à 
fruits;  on  les  plante  en  lignes  et  a  dislance  de  50  centi- 
mètres. Cette  distance  permet,  lorsque  le  froid  est  rigou- 
reux, de  prendre  la  terre  intermédiaire  pour  chausser  les 
pieds ,  après  y  avoir  placé  du  fumier  et  de  la  litière.  Au 
milieu  des  deux  lignes,  et  dans  la  direction  du  midi ,  on 
sème  des  fèves. 

Nos  jardiniers  ont  renoncé,  depuis  trois  ou  quatre  ans, 
à  renouveler  la  plante  d'artichaut  par  œilletons  ;  ils  ont 
reconnu  que  les  fruits  avaient  dégénéré,  comme  ils  ont  pu 
constater  l'immense  avantage  obtenu  en  renouvelant  la 
plante,  chaque  année,  par  tronçons,  i>arce  qu'alors  elle 
conserve  toutes  ses  propriétés. 

A  l'époque  où  la  division  de  la  plante  n'était  pas  prati- 
quée ,  on  ne  détachait  les  œilletons  qu'a  la  quatrième  ou 
sixième  année.  C'était  au  mois  d'octobre  ou  à  La  Tous- 
saint, et  le  fruit  paraissait  en  mars ,  lorsque  la  saison  était 
favorable,  et  finissait  à  la  fin  de  mai.  Il  n'y  avait,  par- 
conséquent  que  trois  mois  de  fructification,  lorsqu'elle  est 
actuellement  de  huit  mois  dans  la  variété  des  qualrc-sat- 
sons ,  et  que  le  fruit  se  présente  a  une  époque  où  la  na- 
ture est  avare  de  ses  dons. 

L'idée  de  diviser  la  plante  par  tronçons  enracinés ,  la 
pensée  de  la  renouveler  après  qu'elle  a  fourni  les  fruits, 
et  la  connaissance  des  avantages  de  culture  de  la  variété 
des  quatrc-saison.%  furent  donc  un  bienfait  pour  le  Kous- 
sillon;  car,  jusqu'en  1816,  ces  avantages  étaient  ignorés, 
puisque  cette  variété  n'était  pas  cultivée  alors  avec  plus 
d'étendue  que  les  antres. 

A  l'occasion  des  récompenses  que  la  commission  crut 
de  son  devoir  de  proposer  à  la  SocifUé,  en  faveur  de  ceux 
qui  avaient  fourni  leurs  produits  pour  le  Concours  de 
Carcassonne,  nous  jugeâmes  utile  de  faire  une  enquête 
auprès  des  plus  anciens  jardiniers,  afin  de  mettre  au  jour 


271 

les  noms  (le  ceux  qui  avaient  amélioré  ou  propagé  la  cul- 
ture (les  artichauts. 

Voici  le  résultat  de  nos  investigations  : 

En  1818,  Jean  Picpict,  décédé,  avait  déjà  reconnu  les 
avantages  de  l'artichaut  des  quatre-saisons  et  le  cultivait 
de  préférence. 

En  1822  et  i82ô,  Antoine  Coll  divisait  déjà  les  plantes; 
il  les  cultivait  sur  une  vaste  échelle  et  de  prélérence  la 
variété  des  quatre-saisons. 

En  1826,  Joseph  Baratte,  décédé,  cultivait  environ 
iO.OOO  pieds  d'artichauts.  La  variété  des  quatre-saisons 
était,  à  cette  époque,  peu  abondante. 

En  1820,  au  mois  de  novembre,  les  jardins  de  Saint- 
Jacques,  les  seuls  qui  existassent  dans  la  banlieue  de 
Perpignan,  finent  ravagés  par  une  inondation;  à  quelques 
jours  de-là,  ils  turent  détruits  par  un  froid  rigoureux. 
Quatre  carrés  d'artichauts  des  ^y/fz/rc-srt/.so/^.s  furent  abrités, 
dans  le  jardin  de  Coll,  par  des  broussailles  que  les  eaux 
avaient  entraînées  lors  de  l'inondation.  M. Coll  eu  venditles 
produits,  depuis  1850  jusqu'en  1855,  de  1  à  4  francs  la 
douzaine,  il  ciait  alors  fermier  de  M.  Amanrich.  En  (juit- 
tant  ce  jardin,  il  consacra  uue  grande  étendue  du  terrain 
qu'il  venait  d'acquérir  sur  la  route  de  Saint-Estève,  à 
la  culture  de  l'artichaut  des  quatre-saisons. 

En  1820,  Ignace  Figuères  était  aussi  fermier  de  mon- 
sieur Amauricli ,  et  son  jardin  voisin  de  celui  de  Coll. 
Il  se  livrait  aux  mêmes  cultures;  mais  il  ne  sut  pas 
tirer  aussi  bon  parti  de  ses  artichauts  préservés  .\  il  les 
vendit,  en  grande  partie,  à  5  francs  le  pied.  Plus  tard, 
il  donua  à  cette  culture  une  plus  grande  oxlension  ,  et 
l'améliora,  par  des  soins  intelligenis,  dans  le  jardin  dont 
il  devint  propriétaire,  situé  aussi  sur  la  route  de  Saint- 
Eslève. 

Vers  la  même  époque,  Jean  Tarrissou,  qui  se  distin- 
guait également  par  son  intelligence  horticole,  avait  reconnu 


'21-2 

le  mérite  de  la  culUn-e  des  artichauts,  et  lui  donna  un 
1,'rand  dévolopi)enient,  d'abord  dans  le  jardin  de  M.  Moral, 
dont  il  était  fermier,  ensuite  dans  les  deux  jardins  silués 
dans  les  bas-fonds  de  Saint-Jacques,  dont  il  avait  fait 
l'acquisition. 

Pour  consacrer  le  souvenir  des  services  rendus  à  l'hor- 
licullure  par  ces  trois  jardiniers,  la  commission  vous  pro- 
pose de  leur  décerner  une  médaille  d'argent. 

Nos  cultures  potagères  et  fruitières  ont  fait  de  grands 
progrès  dans  ces  derniers  temps  :  nous  pomrions  citer, 
en  assez  bon  nombre,  les  noms  de  ceux  qui  les  ont  ob- 
tenus; mais  nous  nous  bornerons  aujourd'hui  à  désigner 
ceux  qui,  en  fournissant  quelques  produits  pour  le  Concours 
de  Carcassonne,  nous  ont  mis  à  même  de  rendre  service 
au  département,  en  faisant  reconnaître  leur  supériorité  sur 
les  produits  similaires  du  Midi.  En  effet,  le  Jury,  nous 
tenant  compte  de  notre  bonne  volonté  dans  celle  modeste 
exhibition ,  décerna  à  la  Société  une  médaille  d'argent. 

Nous  vous  proposons,  en  conséquence,  des  encoura- 
gements en  faveur  de  MM.  Etienne  Gadlard,  dit  Estève, 
d'Olette;  Jean  CoU;  Louis  Ribes;  Philippe  Massot;  RouHia; 
Jean  Roquefort;  Joseph  Noguès;  Jean  Radie. 

Nous  ne  saurions  terminer  notre  rapport  sans  fournir 
notre  tribut  de  reconnaissance  à  la  commission  horticole 
de  Carcassonne,  pour  l'accueil  bienveillant  et  amical  qu'elle 
nous  fit,  et  sans  la  féliciter,  ici ,  comme  nous  l'avons  fait 
ailleurs,  au  sujet  des  ornements  du  terrain  consacré  à 
l'exposition:  les  dispositions  prises,  "a  cet  égard,  répon- 
daient pleinement  ii  toutes  les  exigences  de  l'art  et  aux 
convenances  particulières  des  produits  exposés. 


fâmmm  mm\m  des  pïhé.^eks-oriextales  , 

Par  M.  .^i.AKT.  iiK'iubrc  résidant. 


PÉRIODE   WISIGOTIIIQUE. 

4I«  — 911. 

Les  Wisigoihs  ayant  [)assé  lo  Rhône,  sous  la  conduite 
d'Ataulfe,  Fan  il!2  de  J.-C,  entrèrent,  en  automne  de  la 
même  année,  dans  la  cité  de  Narbonne,  d'où  ils  s'éten- 
dirent rapidement  dans  la  Gaule  Méridionale  et  dans  la 
Tarraconuaise.  La  domination  romaine  ne  conserva  plus 
désormais  qu'un  semblant  d'empire  dans  toutes  ces  con- 
trées. Néanmoins,  on  ne  peut  considérer  l'établissement 
des  Wisigotbs  comme  déliniliC,  dans  la  Narbonnaise  et  le 
pays  de  Ruscino,  avant  l'année  162,  où  la  cité  de  Narbonne 
fut  livrée  au  roi  Théodoric  par  le  comte  gaulois  .Vgrippinus, 
qui  remplissait  un  odice  important  dans  cette  ville,  peut- 
être  celui  de  Pirsiiloil  de  la  prcmii'rc  Xarbonnaiw^ 

Le  Roussillon  lut,  sans  contredit,  un  des  pays  où  les 
Wisigoths  s'établirent  en  plus  grand  nombre,  comme  l'ex- 
plique sa  situation  entre  Toulouse,  Narbonne  et  Barcelone 
qui  lurent  tom-à-tour  la  capitale  du  royaume  jusqu'à  ce  que 
le  roi  .Vllianagiido  eut  transféré  le  siège  de  la  monarchie  à 
Tolède,  vers  le  milieu  du  vi^  siècle.  Plus  tard,  les  ravages 
et  les  persécutions  des  Arabes,  conquérants  de  l'Espagne, 
refoulèrent  vers  les  Pyrénées  des  bandes  nombreuses  de 
Gotbs,  qui  s'établirent  naturellement  dans  les  vallées  du 

'  M.iliiis,  c.lironic.  :iil  aiin.  'iC>i.  —  l-]i)  l"  i  ,  IWrvirnif  fut  soiiinisi'  put- 
Finie,  cl  SiiliiiiiiK  \|)()lliLi.iiis  fui  envoyé  en  i'\il  dans  la  ville  <Ies  l.iviani 
(Mipiun  Liviniinrum,  lil).  VU),  lipisl.  5).  On  rniil  (|ue  c'est  la  ville  de  Livia, 
co(|ui  |irouveiait  iiiie  la  Cerdagno  était  déjà  eoniiirise,  à  celte  époque,  naiiiii 
les  dé|ienilaiues  du  royaiiine  des  Wisigollis. 

J8 


27  î 

Tech  et  de  la  Tel  et  dans  la  Cerdagne.  Les  avantages  el  la 
sécurité  que  ces  pays  devaient  oflïir  aux  familles  rélngiées, 
sont  assez  indiqués  par  Tinimense  quantité  de  noms  go- 
thiques (pii  se  trouvent  dans  les  actes  du  diocèse  d'Elne 
au  ixc  siècle.  Nous  expliquerons,  par  la  suite,  quelle  fut 
la  position  de  ces  réfugiés  espagnols,  vis-à-vis  des  Romains 
ou  des  autres  Wisigoths  anciennement  établis  en  Kous- 
sillon;  car  il  existe  encore  assez  de  docunienls  explicites 
pour  retracer  l'état  social  de  ces  populations  après  l'ex- 
pulsion des  Arabes  au-delà  des  Pyrénées.  Il  n'en  est  pas 
tout-à-iait  de  même  en  ce  qui  concerne  la  situation  des 
Wisigoths  primitivement  établis  dans  la  Narbonnaise,  au 
milieu  des  anciens  Romains.  Cependant,  on  sait  vague- 
ment que  les  Wisigoths  s'approprièrent  les  deux  tiers  des 
terres  cultivées  dans  la  portion  de  la  Gaule  qui  leur  fut 
cédée  en  -412  (Code  wisigollt.),  sans  pouvoir  bien  dire 
comment  doit  être  entendu  ce  partage.  11  est  probable  qu'il 
ne  s'agissait  pas  des  deux  tiers  du  sol  cédé  pris  en  masse, 
mais  des  deux  tiers  d'un  nombre  déterminé  de  propriétés 
particulières,  sur  chacune  desquelles  on  avait  assigné,  à 
chacun  des  conquérants,  une  part,  ou,  comme  on  disait, 
un  sort.   11  s'ensuivrait  de  là  que  les  terres  des  classes 
opulentes  ou  riches  furent  seules  soumises  à  cette  dure 
loi  de  la  conquête*. 

Quoi  qu'il  en  soit,  d'ailleurs,  on  voit  chez  les  Wisigoths, 
un  grand  empressement  à  s'approprier  de  leur  mieux  la 
culture  et  les  lumières  des  Romains,  tout  en  persistant 
à  s'en  distinguer  par  des  mœurs  simples  et  austères.  Ils 
n'avaient  dabord  été  gouvernés  que  i)ar  des  usages  tra- 
ditionnels. Le  roi  Euric  leur  donna,  le  premier,  des  lois 
écrites,  qui  furent  comme  le  germe  du  code  méthodique 
et  complet,  auquel  travaillèrent,  après  lui,  la  plupart  de 
ses  successeurs,  et  si  connu  sous  le  nom  de  Code  des 

'  Faurifl ,  Ilislnire  de  la  Gaule  méridinnaU ,  viv. 


)\'isi(/ollis.  Mais  la  [)lii|)arl  de  ces  lois  sont  une  iniilaliou 
expresse,  qneiquclbis  la  simple  lranscri|)tion  des  lois  ro- 
maines, et  on  ne  s'explique  guère,  en  les  lisant,  comment 
les  Wisigolhs  ont  pu  exercer  sur  l'ancien  Uoussillon  une 
influence  plus  puissante  penl-êlre  que  celle  des  Romains. 
En  efTet,  il  est  hors  de  doute,  que  si  ce  pays  doit  à  Rome 
le  fonds  primitif  de  ses  lois,  de  son  administration,  de 
son  idiome  et  de  sa  civilisation,  il  doit  aux  \N'isigotlis 
toutes  les  idées  et  les  institutions  germaniques  qui  sont 
venues  s'y  ajouter  ou  qui  les  ont  modifiées;  et  ces  mêmes 
Golhs,  qui  ont  laissé  leur  nom  à  la  Catalogne,  ont  éga- 
lement marqué  d'une  empreinte  profonde  et  durable  la 
plupart  des  institutions,  la  langue,  les  monuments,  le 
caractère,  la  religion  et  les  mœurs  des  anciennes  popu- 
lations ronssillonnaises. 

Nous  n'avons  pas  h  apprécier  ici  cette  influence  à  un 
autre  point  do  vue  que  celui  de  la  géographie  historique; 
mais  nous  devons  rappeler  que  les  goilts  hien  connus  des 
Wisigoths  pour  les  irrigations,  rindustrie  pastorale  et  les 
travaux  de  l'agriculture,  se  sont  entretenus  et  développés 
à  un  degré  remarquable  parmi  les  habitants  cUi  Roussiilon. 


Pendant  toute  la  durée  de  la  domination  ^visig(!tlii(ple, 
de  l'an  412  à  7J1,  l'ancienne  province,  appeh'e  par  les 
Romains  la  Vrcmiire  Narhonnaisc,  et  dans  laquelle  se 
trouvait  conq)ris  le  pays  de  Ruscino,  n'est  plus  connue 
(]ue  sons  les  noms  de  Scplimania  et  Gaule  des  Goths,  dans 
les  écrivains  de  la  Gaule  franke;  Province  ou  Gouverncmml 
(ducatus)  des  Gaidcs,  chez  les  écrivains  de  l'Espagne. 

Le  nom  de  Septiiiudiin  dériverait,  selon  quchpics-uns, 
(les  sepl  cités  conqirises,  sous  les  Romains,  dans  la 
Première  Narbounaise;  selon  d'autres,  il  viendrait  des 
colons  de  la  Septième  Légion,  établie,  à  la  même  é[>oque, 
dans  la  province  de  Narbftiine.  Quoi  (pi'il  cii  soii.  ro  nom. 


qui  se  monlie  pour  la  pieuiuTc  l'ois  en  473  ' ,  sp  trouve 
IJi-esque  seul  usité  dans  les  quatre  siècles  suivants.  Mais 
il  ne  parait  pas  que  les  Wisigoths  l'aient  employé.  Pour 
eux,  toute  la  région  dont  Nari)onne  était  le  cliel-lieu  poli- 
tique et  religieux,  s'appelait  la  Province  des  Gothsfdans  la 
Gaide^),  ou  la  Province  Gaidoise  au-delà  de  CUmsuras'. 

Tout  ce  pays  formait  un  Gouvernement  (ducatiis),  confié 
à  un  général  (diix),  cl  subdivisé  en  cités,  administrées, 
chacune  par  un  Comte.  Les  comtes  Avisigolhs  portaient 
aussi  le  titre  de  Jinjes,  et  avaient  sous  leur  dépendance 
des  Vicarii  (Viguiers),  qui  les  représentaient  dans  les 
diverses  subdivisions  des  comtés. 

Il  ne  s'est  conservé,  en  Roussillon,  aucun  nom,  aucun 
souvenir  qui  puisse  se  rattacher  a  cette  administration  de 
l'époque  uisigolhique,  et  l'on  ne  sait  si  le  pays  de  Ruscino 
formait  dès  lors  un  comté  particulier,  ou  si  c'était  une  sim- 
ple dépendance  du  gouvernement  {dticatus)  de  Narbonne. 
Les  documents  et  les  auteurs  contemporains  n'indiquent 
rien  a  cet  égard;  et  bien  que  la  Cerdagne  eût  alors  une  capi- 
t(de{capuf)\  il  est  fort  douteux  que  la  résidence  du  principal 
administrateur  wisigotli  en  Roussillon  ait  joui  du  même 
titre.  On  ne  saurait,  dans  tous  les  cas,  en  quel  lieu  établir 
cette  résidence.  En  effet,  ce  pays  portait  sans  doute  alors  le 
nom  de  paçins  Ilnscinonensis;  la  ville  de  liuscino  existait 
toujours,  comme  l'indique  la  géographie  de  l'Anonyme  de 
Ravenne,  et  comme  le  prouve  bien  mieux  encore  le  texte 

<  Vel  Gnthis  crcdilo,  <|ui  fîcpcnnmcrn  etiam  Scpliinaiiiaiii  suimi  fustidiunt. 
(Sidonius  Apollinaris.  Kpist . ,  lih   III ,  I  •  Avito.J 

2L'cv^qiio  UulRaran  érril,  vers  Tan  610,  au  sujot  (IcmIpiix  vil lajjos  situés 
iuix  l'iivirons  de  Bé/.iers  :  <>  De  loc.i  unde  inliiiiaslis,  JuLiiiiauo  vel  CoriU'- 
liano,  qua;  in  provincia  Golhorum  noscitur  Uomiia  Uruiii{;ildis  possidere...» 
Kfial.  ad  lipiscopum  Francorum. 

^  Ik-bi-œi,  (lui  Galliw  prfivinciir,  viddicel  utha  Clttitsuras,  niisrunlur  Iialii- 
lalorcsexistcrc.  {Concile  de  JoUde,  de  l'an  60-i.) 

*  Cnslrum  I.ibv.T,  ([und  est  Cirnlanioc  capu».  (Julien  de  Tolède,  f)72.) 


277 

de  la  division  des  diocèses  wisigotliiqiies  ' ,  dans  lequel 
notre  ancien  oppidum  est  évidemment  désigné  sous  le 
nom  de  Bosinola,  corruption  de  Rosilona.  Mais  il  n'en  est 
lait  aucune  mention  dans  le  récit  des  événements  histo- 
riques, tandis  qu'il  est  plusieurs  l'ois  question  de  la  ville  et 
de  révèché  à'Hcleiia,  à  partir  de  571 .  Le  roi  Wamha  s'ar- 
rêta dans  cette  dernière  cité  à  son  retour  de  l'expédition 
contre  le  rebelle  Paul ,  et  c'est  de  là  qu'il  renvoya  ses 
divers  corjjs  de  trou[)es,  avant  de  rentrer  en  Espagne. 
Ces  faits  et  l'existence  même  du  siège  épiscopal  d'KIne 
prouvent  assez  qu'à  cette  époque,  cette  ville  devait  avoir 
beaucoup  plus  d'importance  que  Ruscino,  et  c'est  !à, 
sans  doute,  ce  qui  la  tit  choisir  pour  l'établissement  de 
l'évêché.  D'un  autre  côté,  Ruscino  existant  toujours,  et 
les  événements  des  règnes  de  Charlemagne  et  de  Louis- 
le-Uébonnaire  la  désignant,  sans  contredit,  comme  le 
chef-lieu  i)olitique  du  pays  de  Roussillon,  il  est  naturel  de 
penser  qu'il  en  avait  été  de  même  sous  la  domination  des 
Wisigoths.  Voilà  les  faits,  et  il  serait  dilïicile  de  s'en 
autoriser  |)our  attribuer  le  titre  de  capitale  du  Roussillon 
à  Elue  plutôt  qu'à  Ruscino,  pendant  toute  cette  période. 
Les  documents  de  cette  époque  citent  encore,  en  Rous- 
sillon ou  dans  le  voisinage,  les  châteaux  pyrénéens  de  Cau- 
choUbcri  (Collioure),  de  Vulturaria  (OItrérat,  de  Clnusuras 
(La  Clusa),  celui  de  Libiju ,  capitale  de  la  Cerdarjne,  et, 
enlin,  la  Clausura  Sordonia,  dont  il  a  été  déjà  longuement 
question  dans  la  période  gallo-romaine.  Il  faut  y  ajouter  le 
lieu  cVAngera,  qui,  sous  les  Wisigoths,  marquait  l'extrême 
limite  du  diocèse  d'KIne,  au  couchant.  Malheureusement, 
ces  limites  sont  fort   incertaines ,   et   nous  avons  déjà 

'  Caicnsniia  hicc  ti'iip.il:  do  Moiik-  Riif.»  usi|ni'  .\ii|[('irini,  de  Aiigosa  usniie 
Montana,  l'.lna  liœc  loiieal  :  de  Ainjcra  iimjiic  ttosiiinlain.  de  l.aliTosa  nsqiio 
Lainusain.  Uivisio  Lpiscopaluum  provinciœ  \arbonensis ,  dum  Gothis  fiarcbat. 
(llist.  m.  Ki'diic  ,  11,  719.)  l.cs  liiniti-s  |iartiuulii>rvs  du  diocèse  do  INarbonnc 
DP  sont  pas  indiquiTs  dans  celte  di\i!;i()n. 


278 

exprimé  ailleurs  '  notre  opinion  à  ce  snjel.  Les  qualre 
noms  cités  dans  le  texte  semblent  se  rapporter  aux  quatre 
j)oints  cardinaux,  mais  ils  sont  extrêmement  corrompus, 
et  celui  de  l'est,  Rosinola,  est  le  seul  dans  lequel  on  puisse 
reconnaître  avec  certitude  le  nom  de  Rusitona.  Celui  du 
sud,  Lamum,  semble  une  coi'ru|)tion  de  Lauuiga,  et  mieux 
Sambuga  ou  Sainbuca ,  ancien  nom  de  la  rivière  de  la 
Muga  qui  forme,  en  effet,  la  limite  de  l'ancien  diocèse 
d'Elne,  vers  le  haut  Yallespir.  Le  nom  de  Lalcrosa  cor- 
respond, au  nord,  à  un  point  de  la  frontière  du  Narbon- 
nais  qu'il  nous  est  impossible  de  déterminer.  Quant  à 
celui  d'Anr/era,  au  couchant,  nous  avions  indiqué  le  lieu 
d'Ânyer,  qui  se  montre  sous  les  formes  iVAgnera,  Angerro 
eiAnger,  dans  les  anciens  documents;  mais  la  situation 
de  ce  village  ne  correspond  pas  exactement  aux  limites 
connues  du  diocèse  d'Elne,  dans  les  siècles  suivants.  On 
peut  donc  admettre  encore  ici  une  forte  altération  du 
texte;  et  il  n'y  a  plus  dans  toute  cette  région,  que  le  lieu 
des  Angles,  en  Capcir,  qui  ait  pu  marquer  à  cette  époque 
la  limite  des  anciens  diocèses  d'Elne  et  de  Carcassonne, 
et  dont  le  nom  ait  quehpie  similitude,  si  foible  qu'elle 
soit,  avec  VAngera  de  la  nomenclature  wisigothique. 


Nous  venons  de  signaler  tous  les  noms  géographiques 
du  Roussillon,  qui  nous  ont  été  transmis  par  les  docu- 
ments de  la  période  Avisigolliique  ;  mais  on  en  trouve 
encore  quelques  autres  qui  se  montrent  seulement  dans 
les  siècles  suivants,  et  qui  pourraient  remonter  à  la  même 
époque. 

Villa  Godorlm. — Il  a  existé  au  sud-ouest  et  à  une  très- 
petite  distance  de  Perpignan,  une  ville  dont  il  ne  reste 

1  Géographie  historique  du  Confient,  dans  le  X^  Bulletin  de  la  Société  dis 
Pyrénées-Orientales,  p.  9'i. 


279 

plus  aujouicrhui  que  le  nom,  conservé  dans  le  quartier  de 
Mallolcs,  centre  d'une  population  encore  importante  au 
x.iii«  siècle,  et  connue  primitivement  sous  le  nom  de  villa 
Godorum,  ou  Godore.  M.  Puiggari  a  lu  villa  Gothorum 
L'd  Malleolas,  dans  un  acte  de  l'an  1)29  (Public,  HT,  1). 
Ce  nom  est  toujours  accompagné  de  celui  de  Malleolas, 
qui  en  usurpe  ensuite  entièrement  la  place,  vers  la  fin  du 
xie  siècle,  selon  M.  Henry  (IlisL  de  lîouss.,- to.  I,  p.  4o7). 
C'est  ce  nom  de  villa  Gotliorum,  ou  plutôt  villa  Godorum, 
écrit  aussi  Godore,  Godoro  et  Godor',  qui  peut  seul  faire 
altriliuer  à  ce  village  une  origine  vvisigothique;  car  les 
noms  gotliiquos  des  anciens  habitants  de  Malloles ,  cités 
par  M.  Puiggari,  se  retrouvent  à  tous  les  siècles,  dans  la 
moindre  commune  du  Roussillon;  etf  d'un  autre  côté, 
les  monuments  archéologiques  qui,  selon  certaines  tradi- 
tions, provenaient  de  Malloles,  ne  peuvent,  dans  aucun 
cas,  se  rapporter  avec  certitude  à  l'époque  de  la  domi- 
nation des  Wisigoths.  M.  Henry  n'en  a  pas  moins  conjec- 
turé que  «  les  |)laids  des  anciens  Comtes  Colhs,  et  peut- 
<(  être  aussi  des  premiers  Comtes  Franks  du  Roussillon, 
«  se  tenaient  près  de  ce  bourg,  »  cl  il  cite  un  contrat 
de  vente  d'un  terrain ,  situé  au  territoire  de  la  villa  Godo- 
rum, et  confrontant  avec  le  Campus  Madii.  Nous  trou- 
vons, en  effet,  en  1565,  une  pièce  de  terre  «al  terme 
«  de  Maloles,  al  loc  appelai  Camp  de  Maijg-.»  Mais  rien 
n'indiipie,  chez  les  Wisigoths,  ces  assemblées  nationales 
des  peuplades  germaniques,  où  chaque  homme  libre  avait 
son  avis  et  son  vole  sur  les  affaires  de  tous.  Les  assem- 

ï  Nous  retrouvons  ciicon-,  en  12G5  cl  en  I2G0  (Liber  feuil  ,  A,  fol.  )  17 
et  Cari,  lin  Temple,  fol.  268)  un  Chevalier  du  nom  iVArnald  de  Godor. 

2  On  acte  île  1250  place  ,  dans  In  ;i«roissc  de  Perpignan  .  une  partie  «lu 
Camfus  de  Vadio  (Cari.  <!n  Temple,  fol.  76);  or  il  y  avait,  en  J2'.8, 
un  en  tain  )fni,  on  Wrtj,  liabitant  de  Malloles  (libi  Petro  Madin  de  MalleolU. 
—Archives  «le  l'Il.'.pilal  «le  l'erpigiiau,  liasse  53,  n°  152),  et  le  campns  de 
Vfirfi»  di'vait  l'Ire  iiuelqn'nue  d<'  ses  propric^lés. 


ê 


280 

Liées  dites  champ  de  mars  ou  de  mai.  leur  élaienl  tcuil- 
à-fait  inconnues,  cl  le  passage  le  plus  explicite  (pic  nous 
connaissions  sur  les  réunions  publiques  des  Wisigolhs,  ne 
peut  guère  s'entendre  que  d'une  réunion  des  notables  d'une 
ville  et  de  sa  banlieue,  sans  rapport  d'aucune  sorte  avec  les 
assemblées  du  champ  de  mai'.  On  ne  saurait  donc  voir 
un  souvenir  des  Wisigoths  dans  le  Champ  de  Mai  de 
Malloles;  nous  en  trouverions  plutôt  dans  le  nom  même 
de  ce  village,  qui  pourrait  dériver  de  mallmn,  et  l'on  sait 
que  le  mallum  publicum  des   documents  roussillonnais 
du  ixe  siècle  répond  exactement  au  conventus  pnhlicus  du 
code  vvisigotliique.  l'n  fait  plus  significatif  encore,  c'est 
que  Tan  l!2il  et  le  5  des  ides  de  mars,  il  se  tint  à  Mal- 
loles une  assemblés  solennelle,  où  un  édit  de  paix  et  trêve 
rendu  en  1228  par  Jacques-le-Conquérant,  fut  proclamé 
par  son  lieutenant,  a  ce  délégué  pour  le  Roussillon  et  la 
Cerdagne,  en  présence  des  Prélats,  Châtelains  et  Cheva- 
liers du  pays  qui  le  ratifièrent,  au  nombre  de  quarante-trois 
(D'Achery,  Spicileg.,  III,  p.  598).  Le  choix  du  village  de 
Malloles  pouvait,  dans  cette  circonstance,  se  rattacher 
à  d'anciens  souvenirs ,  dont  on  ne  saurait  méconnaître 
l'importance   pour  la  question  de  l'origine  de  la  villa 
Godorum. 

La  Sayonia. — Peut-être  aussi  faut-il  considérer  comme 
un  souvenir  de  quelque  centre  administratif  de  l'époque 
wisigolhique,  une  dénomination  que  portait  autrefois  le. 
territoire  du  village  de  Serdinya.  Ce  lieu  est  appelé  ÀVyon- 
danianum,  Secundianum ,  Segdanianum  ^ ,  et  Secdenya 
ou  Scr/denya,  dans  les  anciens  documents.  C'était  une 
seigneurie  royale,  dont  le  ressort  s'étendait  sur  les  h' 

'  Caballos  vel  aiiitnuliu  crrantia  lioeat  occiiparc,  ila  iil  (|iii  iiivciiciit 
<Icniinliel  aut  Episoo|)o,  aiitCoiniti,  ant  Judici,  aul  SL'ni<)ril)US  loci ,  aut 
etiain  in  convenlu  publico  vicinorum.  Qiiod  si  non  tteiiunliavcril ,  furis 
damnum  Labcbit.  (Cad.  Wisigolli.,  lib.  VIII,  Ut.  V,  1.  6.) 

2  Marca,  87,  L'o,  165 ,  387  et  /(39. 


28 1 

de  Serdinya,  Flassîi,  Juncel,  La  iîardia,  Mirles  el  Mari- 
nyans',  formant  ce  ([n'on  appelait  le  fenitoirc  de  Ui 
Saijunia  ou  Sujoiiid.  Ce  nom  était  encore  en  usage  au 
xvii"  siècle.  Nul  doute  qu'il  ne  dérive  de  la  langue  et  de 
la  législation  des  Wisigotlis,  chez  lesquels,  comme  on  le 
sait,  les  Juges  avaient  sous  leurs  ordres  des  agents  appelés 
Saiones,  qui  ressemblaient  beaucoup  aux  modernes  algua- 
sils.  Eu  outre,  les  seigneurs  goths  levaient  souvent  des 
hommes  armés  pour  la  défense  de  leur  personne  et  de 
leurs  biens,  et  ces  satellites  portaient  le  nom  de  Sayones 
(Cod.  Leg.  Wisig.  I.  Y.,  t.  III). 

Il  est  probable  (jue  les  noms  portés  aujourd'hui  par 
la  majeure  |)artie  des  villages  des  Pyrénées -Orientales, 
remontent  à  l'époque  romaine.  Les  Wisigotlis,  venus  à 
la  suite,  n'ont  pu,  malgré  leur  séjour  de  trois  cents  ans 
dans  ce  pays,  laisser  des  noms  qu'à  des  hameaux  de  faible 
importance,  à  de  petites  fermes,  ou  à  quelques  fonds  de 
terre  qui  ont  conservé  les  noms  de  leurs  anciens  pro- 
priétaires. Nous  ne  sommes  pas  éloigné  de  croire  que  les 
noms  des  deux  villages  dits  aujourd'hui  Aytua  et  Guixà, 
dans  le  Confient,  se  rattachent  ainsi  à  des  souvenirs 
vvisigothiques.  Le  premier,  autrefois  appelé  Huyteza, 
se  montre  sous  les  formes  de  villa  Vliiksano,  en  I0I7 
(Marca,  175),  villare  de  Ociesano,  en  1084  (Ibid.,  29o), 
el  Ifoj/tesanum,  en  I2G5  (Liber  feudonim.  A,  fol.  Go). 
Le  second  s'appelle  aussi  Vilcsanu,  Giiissano  (Marca,  164 
et  185),  alox  (iuiraiii ,  (Lih.  fend.,  A,  fol.  65);  et  on  ne 
peut  méconnaître  le  rapport  qui  existe  entre  ces  diverses 
formes  et  celles  que  présente  le  nom  gothique  de  WUiza, 
écrit  aussi  VViteda,  VVeleda,  Cruiliza,  Guilza ,  etc.,  un 
des  plus  conmiuns  j)armi  les  habitants  de  cette  province 
aux  i\''  et  x"^  siècles. 


'  F.a  ^a^oiitn  dt  la  terre  de  Conflenl  comprend  aussi  lo  lion  <io  llardol ,  e\\ 
{~>0i  (Ubcr  (end.,  C.  fol.  :jO),rl  celui  <le  Sanrra.  en  ITiCi  (iHd..  fol.  80). 


282 
DOMINATION    ARABE. 

919— 950. 

Les  Arabes,  conduits  par  Taiik-ben-Zéyad,  débarquèrent 
en  Espagne  au  commencement  de  l'an  7H ,  et  s'emparèrent 
de  toute  la  Péninsule  jusqu'aux  Pyrénées.  L'historien  No- 
wairi  raconte  même  que,  dès  Tan  712,  ^loussa-ben-Nossaïr 
■passa  ces  montagnes  et  se  répandit  dans  le  pays  d'Afrandj 
(la  Gaule);  et  il  scn)blc  résulter  d'une  conversation  que  l'on 
prête  a  Moussa,  que  les  Septimaniens  ou  Gallo-Wisigotlis 
lui  auraient  opposé  une  certaine  résistance.  Mais,  selon 
toute  apparence,  ses  incursions  dans  les  Gaules  durent  se 
borner  à  quelques  courses  de  reconnaissance  dans  les  pays 
qui  iorment  aujourd'hui  le  Roussillon .  On  ignore,  d'ailleurs, 
quelles  turent  les  destinées  de  l'ancienne  Seplimanie,  dans 
rintervalle  qui  s'écoula  depuis  l'arrivée  des  Arabes  en 
Espagne  jusqu'à  l'année  de  ia  prise  de  Narbonne  (710). 
Ce  pays  forma  sans  doute  un  petit  état  particulier  sous 
le  gouvernement  de  quelque  seigneur  \Yisigolh  ou  gallo- 
romain,  et  devint  alors  un  des  principaux  refuges  de  la 
population  vvisigothe  ou  espagnole  qui  fuyait  devant  l'in- 
vasion des  Musulmans.  Mais  il  élail  hors  d'état  de  s'appar- 
tenir a  lui-même,  et  l'émir  El-lIaùr-ben-Abd-er-Rahman-el- 
Tzakefy  y  porta  ses  aimes  en  719.   Il  franchit  les  monts 
Al-Bortât,  s'empara  de  Narbonne,  dont  il  fit  le  chef-lieu 
de  la  domination  arabe  en-deça  des  Pyrénées,  et  répandit 
la  terreur  jus<pi'aux  pays  (ju'arrose  le   fleuve  damna'. 
La  conquête  n'était  point,  d'ailleurs,  définitivement  orga- 
nisée, et  le  vainqueur  s'était  borné  à  assurer  l'occupation 
militaire  du  pays  par  une  garnison  placée  à  Narbonne. 

'  Coiuiuisto  la  ciudad  de  Naibona,  y  cinio  y  soiii/.{;o  lodas  sus  comarcns. 
(Condo,  lo.  I,  cap.  20.) 


283 

Tel  est  le  récit  des  historiens  arrhes  au  sujet  de  la  prise 
de  cette  cité,  rapportée  à  Tan  721  et  attrihnée  au  wali 
EI-Samali-ben-Abd-el-Mélek  par  la  plupart  des  chroniqueurs 
chrétiens.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  n"y  a  guère  lieu  de  douter 
que,  depuis  l'an  725  au  moins,  la  Seplimanie  n'ait  été 
régulièrement  constituée  en  province  arabe,  et  gouvernée 
selon  les  lois  communes  de  la  conquête  musulmane.  Cet 
étal  de  choses  se  maintint,  malgré  diverses  vicissitudes 
de  revers  et  de  succès,  jusqu'à  l'époque  de  l'attaque  de 
Narbonne  par  Charles-Martel  (757).  Le  vainqueur  d'Ahd- 
er-Hahman  trouva  naturellement  des  alliés  dans  tous  les 
chréliens  des  environs  de  Narbonne;  les  montagnes  des 
ports  orientaux  se  couvrirent  de  soldats  qui  s'emparèrent 
des  passages  et  interceptèrent  toute  communication  entre 
la  garnison  de  Xarbonne  et  les  Arabes  d'Espagne. 

Il  devint,  dès  lors,  de  jour  en  jour  plus  ditlkile  de 
maintenir  la  conquête  arabe'  au  nord  de  Narbonne;  mais 
il  est  hors  de  doute  que  la  domination  musulmane  fut  ré- 
tablie en  Roussillon  et  qu'elle  s'y  maintint,  à  titre  d'occu- 
pation armée,  jusqu'en  750. 

La  ville  de  Narbonne,  bloquée  par  les  troupes  frankes 
de  Pé[)in  et  par  les  Goths  révoltés  de  la  Septimanie,  lut  le 
dernier  refuge  des  Arabes  de  cette  frontière.  Les  commu- 
nications étaient  interrompues  entre  elle  et  l'Espagne,  et 
Soulevmau-ben-Cliebab(|ui  marchait  à  son  secours, en  756, 
fut  arrêté  aux  passages  des  l'vrénêes  et  périt  avec  presque 
toute  son  armée.  Cette  perte  était  dilllcile  à  réparer.  Ce- 
pendant, les  Arabes  de  Narbonne,  bien  qu'abandonnés  à 
eux-mêmes,  ne  succombèrent  que  par  la  trahison.  Les 
chrétiens  de  cette  cité  |iartageaient  avec  les  nuisulmans  la 
défense  de  la  place,  lis  eurent  des  intelligences  avec  les 
assiégeants  et  s'engagèrent  à  leur  livrer  la  ville,  à  la  con- 

'  Fm-  caila  diu  mas  dificil  la  cmprcsa  de  manlcner  la  roiit|iiisla  «le  a(|iiella 
tierra  ,  que  en  rano  se  cansa  quien  (rabaja  contra  los  elornos  decretoi. 
(('.onde,  I  ,20.) 


281 

dilioii  iiu'oii  leur  laisserait  la  libre  jouissance  de  leurs  -pro- 
pres lois',  cl  probablement  aussi  d'autres  privilèges  moins 
ordinaires  que  celui-là  ^75'Jj.  Les  Sarrasins  Curent  aussitôt 
chassés  de  toide  ht  GoUiie-,  c'est-a-dire  de  tout  le  pays 
entre  Narbonne  et  les  Pyrénées.  Il  y  a  même  lieu  de  croire 
que  les  Franks  pénétrèrent  alors  jusqu'à  Gérone.  Mais  ce 
ne  fut  qu'un  succès  éphémère,  et  le  jioussillon  seul  resta 
soumis  aux  rois  frani\S  à  partir  de  celte  époque. 

«  Les  Arabes ,  dit  .M.  de  Gazanyola ,  ne  doivent  avoir 
laissé  dans  le  Roussillon,  d'autres  traces  de  leurs  fréquents 
passages  et  de  leur  court  séjour,  que  la  dévastation  des  cam- 
pagnes, l'incendie  des  édihces  et  la  destruction  des  villes; 
nous  ne  saurions  donc  leur  attribuer  aucune  inlluence  heu- 
reuse sur  notre  civilisation.  »  (Hist.  du  liuussiU.,  p.  80.) 
Ce  jugement,  que  tout  confirme  d'ailleurs,  nous  dispensera 
d'entrer  dans  de  longs  détails  sur  le  système  administratif 
appliqué  par  les  Arabes  dans  les  pays  (pi'ils  avaient  conquis. 
L'Espagne,  qui  n'était  alors  qu'une  dépendance  de  l'Afri- 
que, conserva  la  division  en  cinq  provinces  établie  par  les 
Wisigolhs.   La  Septimanie  forma  la  sixième,  et  chacune 
d'elles  eut  son  ivali  particulier,  revêtu  du  pouvoir  civil  et 
du  pouvoir  militaire,  et  ayant  sous  ses  ordres  des  gou- 
verneurs locaux,  établis  dans  les  villes  ou  bourgades  sous 
le  nom  de  caïds.  Le  Mali  de  ^'arbonne  était  appelé  Régent 
par  les  Goths  habitants  du  pays. 

Il  est  probable  que  la  population  musulmane,  en  ce  qui 
concerne  l'ancien  diocèse  d'Kbu',  se  réduisit  à  la  garnison 
laissée  dans  celle  ville  et  dans  les  châteaux  les  plus  inqjor- 
tants.  Les  conquérants  de  la  Septimanie  sont  toujours 
appelés  ^'armsms  par  les  documents  chrétiens  de  cette  épo- 
que. Quant  aux  anciens  habitants,  tous,  Romains  ou  Wisi- 

'  Dnloqiic  sairameiilo  Golliis.  .  iil. . .  (n'iniiltcicnl  cos  lejem  suam  habcre. 
(Annal.  Moissiac,  an.  7o9.) 

2  Pi|)|)iniis...  Naibiinain  obliiiuit;  cxpiilsisiiue  do  lolà  GotldA  lioiiiiiiilnij 
illis,  rlirislianos  lie  servirio  SarraceiKiiimi  liberavit.  (Annal.  Melens.J 


2s:. 

i,'olhs,  se  (loniièiTiil  le  nom  île  (iolhs  el  se  direiil  eoiii- 
miinément  Chrétiens  pour  se  distinguer  des  Arabes.  Toute 
ville  soumise  payait  un  tribut  de  guerre  annuel  (kitaradj), 
qui  variait  du  dixième  au  cinquième  du  revenu  des  terres 
et  des  immeubles.  L'exercice  de  la  religion  chrétienne  était 
libre  dans  l'intérieur  des  églises.  Les  lois  anciennes  du  pays 
étaient  maintenues,  et  elles  étaient  appliquées  par  des 
olliciers  choisis  entre  les  liabilaiits.  (le  point  im[)ortant 
est  aussi  l'un  des  mieux  constatés*. 

Dénomin.vtioas  géographiques.  —  Les  Arabes  don- 
naient le  nom  de  Grande  Terre  aux  pays  situés  au  nord 
de  l'Espagne,  et,  au  besoin,  à  toute  la  Gaule  le  nom  de 
Frandjal  :  aussi  appelaient-ils  indistinctement /•rrt?îf(/' ou 
Efrandj,  tous  les  habitants  de  la  Septimanie.  C'est  le  nom 
(Gens  Francornni)  que  leur  appliquent  aussi  les  chrétiens 
espagnols  du  viii^  siècle,  qui  donnent  encore  alors  à  la 
Septimanie  le  nom  de  Gaidc  Xai'bonnaise  (Isidore,  Ro- 
deric,  etc.).  Quant  aux  écrivains  franks,  ils  désignent  ce 
pays  sous  le  nom  de  (ïolltic  (75T-7o!2). 

Les  Arabes  ne  connaissent  la  chaîne  des  Pyrénées  que 
sous  le  nom  de  monts  el-Baskens  (des  Vascons),  a  l'occi- 
dent, et  monts  al-Bortàt  (des  ports  ou  passages),  dans  la 
[)artie  orientale.  Leurs  géographes-  ne  citent  que  les  noms 
des  villes  û'Elcna  et  Cancoliberi  dans  l'ancien  Roussillon; 
la  ville  de  la  Porte  ou  du  Passage  (Médinel-el-Bâb) ,  dans 
les  montagnes,  la  même  qu'Isidore  de  Réja  appelle  Ccrri- 
tancnsc  oppidum{Q\\  751),  ne  peut  s'entendre  que  de  Livia. 

Il  existe,  en  outre,  un  document  imporlant  pour  la  géo- 

'  Muljjrc  ors  (jaranlies,  le  l{oii<sillon  ni-  ;)nsso(lc  aujourd'hui  aucun 
mnnuinent  dont  la  conslruclion  puisse  l'Iie  aUrilxicc  avec  cerliludc  à  ceUe 
t'|)0(|Ui'.  G  l'st  >|up,  pendant  plus  de  ciii(|uaMle  ans  après  la  rnnijiièle  de 
l'ipiu,  l'o  pnvs  eul  encore  à  suhir  «les  invasiiins  leiribles  ;  voilà  pourtpioi. 
clans  le  ix'  siècle,  il  csl  dit  si  sutiveul  t|ue  les  l'ayriis  nul  ravajje  ol  détruit 
les  ofîlises,  el  ipie  lis  Aliliès  ont  tiré  leuis  celluKs  (x  trcmi  vastilale. 

-  Coude,  lili.  I ,  cap.  Tû . 


2H6 

graphie  d(»  ceiti'  périodo ,  dans  une  enqurte  testimoniale 
faite  en  879,  pour  rétablir  des  litres  perdus.  Les  témoins 
y  déposent  que  certains  individus  avaient  vendu  (vers  l'an 
841)  aux  moines  d'Exalada,  le  villar  Pauliannm  ou  Polia- 
ntun,  dont  ils  avaient  hérité  de  leurs  pères  et  grands-pères, 
flls  de  Mascaran,  qui  le  possédait  '  sous  le  riyne  d'Anmar, 
lorsque  Ihin-Aumar  rétjissail  Aarbonnc.  l)om  Vaissète  et 
M.  de  Gazanyola  n'ont  vu  ici  qu'un  acte  l'ait  sous  le  règne 
d'Omar  II,  mort  le  10  février  720.  On  sait,  en  effet,  que  les 
historiens  arabes  rapportent  à  Tan  7 1 9  la  prise  de  Narbonne, 
fixée  à  l'an  721  par  tous  les  chroniqueurs  chrétiens.  'Mais 
l'administration  arabenepouvaitpas,  dès  l'an  7 19,  être  aussi 
bien  établie  à  Narbonne  que  le  donnerait  à  entendre  le  do- 
cument en  question.  Nous  le  rapporterions  plutôt  à  l'an  754. 
A  cette  époque,  un  certain  Amer-boi-Amrou,  s'étant  révolté 
contre  le  vvali  d'Espagne,  s'empara  de  tous  les  pays  au  nord 
de  l'Èbre,  et  donna  le  gouvernement  de  Saragosse  à  son  fils 
Wahib.  Il  avait  pu  de  même  donner  celui  de  Narbonne  à 
im  autre  de  ses  fils,  ce  qui  expliquerait  la  formule  :  Aumar 
(Amer)  régnant,  le  fils  d' Aumar  régissant  Narbonne.  Mais 
nous  attachons  peu  d'importance  à  cette  question  de  date; 
il  nous  sullit  que  ce  document  se  rapporte  à  l'époque  de 
la  domination  arabe  en  Roussillon  :  ce  qui  ne  saurait  être 
mis  en  doute.  Or,  nous  croyons  avoir  prouvé  ailleurs*  que 
le  villar  Polianum  ou  Pauliamim  du  viii'^  siècle,  n'est  autre 
que  le  lieu  de  Folianum  ou  Fauliamim,  aujourd'hui  appelé 
Fulhà,  dans  le  Confient.  Il  en  résulte  que,  |)endant  l'occu- 
pation arabe,  les  limites  de  la  INarbonnaise  comprenaient 
tout  le  bassin  de  la  Tet;  et,  comme  les  Arabes  et  les^Visi- 
goths,  leurs  prédécesseurs,  n'avaient  rien  innové  à  cet  égard, 
on  doit  considérer  cette  limite  comme  la  seule  qui  ait  été 
reconnue  pour  cette  province  sous  la  domination  romaine. 

'  lit  tcuiierunt  ad  proprium   tempore  qno  rognavit  Aiiinar,  Ibinauniar 
rcjjenlc  Nurbona.  (Marca,  40.) 

2  Journal  des  Pyrénées-Oritntates ,  16,  20,  23  et  27  octobre  ^SSS. 


28-; 


LE  MARIAGE  DE  LA  VILLAGEOISE, 

ÉPISODE 

TRADUIT  DU  PR.€DWM  RUSTICUM  DU  P.  VANIKRE, 

Par  JM.  li.  FAnnK,  rrdfissfur  an  Ckilléçe  de  PiTpii;nan, 
Secri'Uive  de  la  Société. 


La  fille  du  villa£;c  est  à  peine  nubile, 
Qu'on  la  voit  s'empresser  et  devenir  utile. 
De  sa  robuste  mère  imilant  les  travaux, 
Elle  aime  à  manier  la  serpe  et  les  râteaux. 
Ni  la  pourpre  ni  l'or  n'entrent  dans  sa  parure; 
Point  (le  cheveux  d'emprunt...  C'est  la  simple  nature, 
Sans  les  dons  de  Saha,  ni  de  riches  atours. 
Comme  elle  est  femme  enfin,  à  l'âge  des  amours, 
Elle  veut  plaire  aussi,  mais  sans  art;  une  rose 
Qu'elle  cueille  en  un  champ,  qui  sur  son  sein  repose. 
Est,  aux  jours  l'ériés,  son  plus  bel  ornement. 
Auprès  d'un  clair  ruisst?au,  qui  coule  lentement, 
On  la  voit  ajuster  sans  fard,  sans  artifice, 
De  ses  brillants  cheveux  le  modeste  édifice, 
Qu'embellit  de  son  front  la  naïve  pudeur. 
Ce  n'est  point  en  beauté,  c'est  en  force,  en  valeur. 
Qu'elle  veut  exceller  et  vaineri'  ses  compagnes; 
El  bienlùt,  ces  trésors,  qu'admirent  les  campagnes, 
Des  jeunes  villageois  attirant  tous  les  yenx, 
Lui  donnent  un  époux  riche  et  laborieux. 

De  l'hvflien,  en  effet,  quand  la  puissanle  flamme. 
Soudain  d'un  chaste  amour  vient  surprendre  son  âme, 
Pour  l'enginrer,  enfin,  dans  des  liens  charmants, 
Dès  laube  matinale  on  voit  les  deux  amants. 


'288 

li'àgc  à  peu  près  égal  cl  d'égale  tendresse, 
Accourir  dans  les  champs,  transportés  d'allégresse. 
Cherchant  à  se  parler,  ou,  tandis  que  leurs  mains 
Du  cep  avec  ardeur  détachent  les  raisins, 
Ou  ([uand  l'épi  doré  tombe  sous  la  faucille. 
La  première  au  travail,  la  rude  jeune  fille 
Guide  les  moissonneurs,  qu'animent  ses  discours, 
Et,  malgré  leurs  efforts,  les  devance  toujours. 
C'est  ainsi  qu'elle  veut  plaire  à  celui  qu'elle  aime. 
De  ses  tendres  regards  la  poursuivant  lui-même, 
11  s'applaudit  tout  bas  d'en  être  devancé. 
Tantôt,  d'un  ton  qu'il  feint  de  rendre  courroucé, 
Il  se  plaint  des  épis,  que  sur  la  terre  on  laisse. 
C'est  afin  qu'à  sa  voix,  sa  vaillante  maîtresse. 
Tourne  soudain  vers  lui  ses  yeux  avec  son  cœur. 
Aux  heures  du  repos,  quand  chaque  moissonneur 
S'abandonne  au  sommeil  sur  l'herbe  douce  et  tendre, 
Que  font  nos  deux  amants?  Il  faudrait  les  entendre. 
Engagés  dans  le  cours  d'un  aimable  entrelien. 
Parler  de  leurs  projets,  des  soins  qu'exige  un  bien. 
Des  moyens  de  tenir,  de  régler  un  ménage, 
De  ne  point  dissiper  même  un  faible  héritage. 

Pour  nos  deux  jeunes  gens,  enfin,  brille  le  jour. 
Où  leurs  parents,  instruits,  charmés  de  leur  amour. 
Les  croyant  dignes,  lui,  de  la  vaillante  fille, 
La  fille  du  garçon,  consultent  la  famille. 
Et  bientôt  un  contrat,  qu'on  signe  avec  transport. 
Des  jeunes  fiancés  fixe  à  jamais  le  sort. 
Pour  l'hymen,  cependant,  tout  s'agite  et  s'apprête  : 
Des  villages  voisins  accourent  à  la  fête, 
Oncles,  cousins,  amis,  laboureurs,  pastoureaux. 
Apportant  aux  futurs  de  rustiques  cadeaux. 

Du  jour  tant  désiré  on  voit  paraître  l'aube  : 
Le  prêtre  impatient,  revêtu  de  son  aube. 
Accuse  leur  lenteur,  debout  près  de  l'autel. 
Tandis  que  tous  les  deux,  sur  le  seuil  paternel, 


289 

Se  prosternent  aux  pieds  des  auteurs  de  leur  vie. 

De  ce  pieux  respect,  émus,  VAme  ravie. 

Ceux-ci,  levant  vers  Dieu,  leurs  âmes  et  leurs  mains, 

Conjurent  de  roncort  le  Père  dos  humains 

De  l'aire  à  cos  iMilanls  une.  htMirciisc  existence, 

Qui  soit  de  leurs  vcriiis  la  digne  récompense. 

On  pari...  Un  rulian  liieu,  de  rose  nuancé, 

Orne  le  feutre  gris  du  jeune  fiancé; 

Elle,  les  yeux  baissés,  des  fleurs  à  la  ceinture, 

Marche  timidement,  gênée  en  sa  parure. 

On  arrive  à  l'aiilel,  on  se  met  à  genoux: 

Le  prèlre  bénissant  les  deux  nouveaux  époux. 

Unit,  enfin,  leurs  mains,  par  le  soleil  hâlées, 

Et  que  n'a  pu  blanchir  l'eau  pure  des  vallées. 

Quand  ils  ont  bien  promis  de  s'aimer  devant  Dieu, 

Les  flûtes,  les  hautbois,  la  jeunesse  du  lieu, 

Les  ramènent  en  corps  :  ses  compagnes,  l'épouse, 

Les  garçons,  le  mari.  Sur  la  verte  pelouse, 

Suivant  un  vieil  usage,  en  nos  climats  transmis. 

Ils  font  asseoir  le  couple,  étourdi  de  leurs  cris, 

Sous  un  orme  toufl"u,  dont  l'immense  feuillage. 

Depuis  plus  de  reni  ans  protège  le  village. 

Aux  regards  de  \i\  foule,  en  cercle  se  pressant, 

L'épouse  étend  la  main,  et  verse  en  rougissant, 

Quehiues  grains  de  blé  pur  sur  la  tète  inclinée 

De  son  heureux  époux,  (|ui,  ITune  fascinée. 

Lui  répète  tout  bas  les  plus  tendres  aveux. 

Puis,  timide  el  tremblante,  elle  exprime  des  vœux 

Pour  la  prospèi'ilé  du  nouveau  mariage, 

Et  rajiporte  un  gâteau,  symbole  du  ménage. 

Parmi  la  foule,  alors,  queliiues  gens  mal  appris. 

Sont  prêts  à  s'égayer  sur  le  sort  des  maris , 

Si  l'époux,  prudemment,  avec  (|ueli|ue  monnaie, 

Ne  romprinu'  snuilain  leur  audace  eiïréiu'e. 

Qui  cède  t(iiit-;'i-|';iii  -i  (pieliiues  brocs  de  vin. 

Mais  sur  table  servi  déjà  fume  un  festin. 
Que  n'nni  point  enrichi  les  marchés  de  la  ville, 

19 


290 

Sompluciix,  lontefois,  siicculeiil  el  facile: 

Pour  la  première  l'aini,  un  mouton,  un  chevreau, 

Sont,  en  effet,  venus,  chacun  de  son  troupeau. 

La  fermière  d'ailleurs,  pour  cette  circonstance, 

Réserva  des  poulets  "gras,  de  helle  apparence; 

Des  chapons  bien  nourris;  de  superbes  canards, 

Dont  l'aspect  aussitôt  attire  les  regards; 

Et  pour  rendre  complet  ce  festin  délectable, 

Vers  la  tin  du  repas  paraissent  sur  la  table. 

Des  figues,  des  gâteaux,  un  fromage  mollet, 

Des  châtaignes,  des  noix  et  quantité  de  lait. 

Ces  mets  ex(|uis,  le  vin  qu'on  verse  avec  largesse, 

Tous  seuls  n'excitent  pas  la  commune  allégresse; 

Ce  sont  des  quolibets,  des  chansons,  des  bons  mots, 

Des  rires  éclatants,  des  verres  et  des  pots, 

Que  l'on  casse  à  dessein,  des  vers  que  l'on  déclame, 

En  l'honneur  de  Monsieur  el  surtout  de  Madame. 

Puis,  la  nappe  enlevée,  on  joue,  on  court  au  bal: 

Ce  sont  de  nouveaux  cris,  un  joyeux  bacchanal. 

Qui  troublent  le  sommeil  de  tout  le  voisinage. 

Le  récit  qu'on  en  fait  de  village  en  village. 

Occupe  les  esprits,  qui,  pendant  plusieurs  jours, 

A  la  veillée,  aux  champs,  n'ont  pas  d'autres  discours. 

On  souhaite  aux  époux  une  longue  existence, 

El  d'enfants  dignes  d'eux  une  heureuse  abondance. 


»®®B^r— 


2'Jl 


L'AUTISTE  RECONNAISSANT, 

ANECDOTE   HISTORIQUE, 

Par  M.  I.ovi«  Faobe,  Professeur  au  Collège  de  Perpignan, 
Secrétaire  de  la  Société. 


Ce  que  Paris  nomme  Champs-Elysées, 
N'est  pas  toujours  peuplé  de  hienheureu'x. 
A  rencontrer  les  preuves  sont  aisées. 
Heureusement,  quelque  cœur  généreux 
S'y  trouve  encor.  Voici  ce  que  naguère 
Dans  un  journal  je  lus  aux  laits  divers: 

Un  beau  Monsieur,  son  épouse  et  sa  mère, 
Se  promenaient  sous  les  ombrages  verts 
Que  de  ses  eaux  alimente  la  Seine. 
IJe  tous  côtés  il  portait  son  regard, 
Quand  il  découvre  une  bien  triste  scène: 
C'est. un  pauvre  homme,  ou  plutôt  un  vieillard. 
Propre  et  pourtant  annoncanl  l'indigence. 
Un  violon,  qu'avec  peine  il  raclait, 
•îetait  au  vent,  implorant  l'assistance, 
Ite  maigres  sons  ipie  pas  un  n'écoulait. 
A  cet  aspect,  se  creusant  la  mémoire, 
Le  beau  Monsieur  y  cherche  un  souvenir- 
Puis,  tout-à-coup  :  C'est  à  ne  p;,s  y  croire! 
Uxclame-f-il;  et,  sans  plus  rélléchir. 
Il  court  au  vieux  :  Ecco  mi,  mon  cher  Maître! 
rtil-il  d'abord ,  c'est  moi,  c'est  Borsari  ! 
Ail,  .lacomo!  Pourrais-tu  méconnaître 
Celui  qui  lut  Ion  élève  chéri. 
Qui  lient  de  toi  savoir,  gloire,  richesse? 


il 


20-2 

Premier  Dassu  délia  Scale,  à  Milan, 
J'y  fais  fureur,  el  la  ville  ne  cesse 
■pe  m'aiiplatidir,  d'exalter  mon  talenl, 
Et  me  voici  maiiitenanl  en  vacances! 
— Je  me  souviens,  lui  répond  l'indigent; 
Tu  n'as  donc  pas  trompé  mes  espérances, 
Cher  Borsari!  Des  bra\ûs,  de  l'argent 
IHeuvenl  sur  toi!...  Cela  seul  me  console 
De  tous  les  maux  que  j'ai  vus  m'assaillir. 
— Toi,  dont  jadis  le  talent  lit  Ecole, 
Cher  Maestro!  Peut-on  sauï-  tressaillir 
Te  voir  ainsi  prostituer  la  gloire? 
A  cet  état  comment  es-tu  réduit? 

Cher  Borsari!  c'est  une  triste  histoire  : 

Vers  l'Orient,  par  un  démon  conduit. 
J'ai  parcouru  la  Grèce  et  les  Cyclades, 
Accompagné  d'un  essaim  de  chanteurs; 
Mais  la  plupart,  bientùl  morts  ou  malades. 
Me  laissent  là ,  quoique  mes  débiteurs. 
Dès  cet  instant,  j'entrevis  la  misère; 
Car,  je  trouvai,  pauvre  impressario, 
Ma  caisse,  hélas!  chaque  jour  plus  légère, 
Pour  solde,  enfin,  n'offrir  rien  qu'un  zéro. 
Je  revenais;  le  vaisseau  lit  naufrage; 
J'eus  à  courir  mille  el  mille  dangers; 
Mais,  Dieu  m'aidant,  je  gagnai  le  rivage, 
Avec,  je  crois,  cinq  ou  six  passagers. 
N'ayant  en  tout  conservé  (|ue  ma  vie. 
Le  même  jour,  par  un  destin  fatal, 
Je  suis  saisi  d'une  paralysie. 
Qui  me  retient  six  mois  à  l'hôpital. 
J'étais  guéri;  du  moins  je  croyais  l'être, 
Lorsque  je  fus  amené  dans  Paris 
Par  un  Français  qui  m'avait  eu  pour  maître. 
Mais  de  mon  sort  qui  ne  serait  surpris? 
Mon  protecteur,  au  bout  d'une  semaine. 
Meurt  et  me  laisse  à  mon  malheur  livré. 
Que  devenir?  Avec  bien  de  la  peine 


Va  bien  dos  pas,  j'ôliiis  ciiliii  enli'ô 
Dans  un  Ihéâlro,  où  j'avais  de  quoi  vivre. 
Jp  respirais  et  je  crus  un  momeiH 
Que  le  malheur  cessait  de  me  rf; 

Mais  vain  i'S|ii)ir!  Une  imit  ijur  ^m.  ,,  !it, 
Après  souper,  je  regagnais  ma  chambre, 
Le  mal  aflrcux  que  j'avais  cru  chasser 
Me  ressaisit,  m'enchaîne  chaque  membre. 
A  mon  Ihéàlre  il  faillit  renoncer; 
Et  depuis  lors  en  proie  à  la  misère. 
Toutes  les  fois  que  mon  infirmité 
Me  le  permet,  ce  qui  n'arrive  guère, 
Je  viens  ici,  par  la  faim  excité, 
Gonime  lu  vois,  niendiei'  à  la  ronde. — 
L'Elève  ému  fouille  dans  son  gousset; 
N'y  troKv.uil  pas  une  somme  assez  ronde: 
— Maiire,  dil-il,  peux-tu  de  ton  archet 
Accompagner  l'air  de  la  calomnie? 
— Tant  bien  que  mal;  mais  je  puis  le  tenter. 
—  Courage  donc!  Le  Dieu  de  riiarmonie. 
J'en  ai  l'espoir,  voudra  nous  assister. — 
Et  le  Dasso,  d'une  voix  éclatante, 
Acceninée  et  d'un  timbre  enchanteur, 
Atla(|U(i  l'air.  Chaque  note  vibrante 
Fait  accourir  maint  et  maint  auditeur. 
Auloiir  de  lui  |,i  foule  croit,  s'amasse, 
Tous  les  cafés  son!  soudain  désertés; 
(loupé,  calèche,  enliii  loul  ce  (|ui  passe 
S'arrête  là...  Séduits  et  transportés. 
De  beaux  Messieurs  en  descendent  sans  cesse. 
A  cet  aspect,  le  vieillard  (oui  ému 
A  retrouvé  sa  première  soujdesse; 
A  ses  trente  ans  il  se  croit  revenu. 
Son  violon,  sous  l'archet  électrique. 
Rend  de^  accords  à  pénétrer  les  conirs. 
Charmant  duo,  que  rendent  plus  magique 
D'un  blond  soleil  les  mobiles  lueurs. 
Qui,  rayonnant  à  travers  le  feuillage. 


29i 

Sur  ce  taldcau,  transportent  tous  les  sens 

Aux  lionls  (lu  Tibro,  liarnioiiioux  rivair»'. 

Où  tout  t'st  beau,  soleil,  vfi'diiro  et  chants. 

Ils  ont  cessé...  L'auililoire  immobile 

Écoute  oncor.  Il  éclate  à  la  lin, 

El  ses  bravos  vont  émouvoir  la  ville. 

Notre  Basso  se  découvre  et  soudain 

Dans  son  chapeau  lait  la  quête  à  la  ronde 

r/était  à  voir!  Dans  sa  bourse  ([ii'il  tient 

lïhacun  choisit.  Bref,  parmi  tant  de  monde, 

Pas  un,  je  crois,  de  donner  ne  s'abstient, 

Aux  mains  de  tous  l'argent,  l'or  étincelle  ; 

Beaux  empereurs,  républiques  et  rois 

Dans  le  chapeau  s'entassent  pèle-mèle; 

Notre  chanteur  les  en  lire  à  la  fois. 

Alors  plus  lier  (|u'un  Manpiis  ou  qu'un  Comte, 

11  court  au  Maître  et  les  lui  donne  tous. 

— Tiens,  lui  dit-il,  ce  n'est  là  qu'un  à-compte; 

En  attendant  viens  dîner  avec  nous! 


295 


LE  DERNIER  AMOUR , 

Par  j\].   ilOSEPH  ISlRTIill,  membre  résidant. 


L'amour,  ce  séduisant  mirage, 

Qui  nous  berce  aux  jours  du  printemps, 

Lorsque  arrive  l'hiver  de  l'âge. 

S'envole  sur  l'aile  du  temps; 

Le  souvenir  de  la  chaumière 

Où  nous  avons  reçu  le  jour. 

Survit,  jusqu'à  l'heure  dernière. 

Aux  charmes  du  premier  amour. 

Chacun ,  aux  lieux  de  sa  naissance , 
Trouve  dos  siles  enchanteurs; 
Méry  célèhre  la  Provence, 
Pétrarque,  l'Italie  en  lleurs; 
A  tous  les  pays,  je  préfère 
Le  Roussillon,  ce  beau  séjour; 
C'est  celui  de  ma  bonne  mère; 
11  sera  mon  dernier  amour. 

0  Roussillon,  terre  chérie! 
Ta  mer,  les  monts,  ton  ciel  d'azur. 
Ta  plaine  richcnieul  lleurie. 
Ton  climat  si  doux  et  si  pur; 
Oui,  tout  en  toi  provoque,  insiiire 
Les  chants  joyeux  du  troubadour: 
Tu  reçus  mon  premier  sourire. 
Tu  seras  mon  dernier  amour! 


LISTE  DES  MEMBRES 


COMPOSANT 


LA  SOCIETE  AGRICOLE.  SCIEMIFIQUE  ET  LITTEHIIRE 

DES    PYRÉIVÊE8-ORIE!VTAIiES. 


Hemltrcis  lionoruircs. 

1835.  M.  Mathieu,  C.  ^,  membre  de  VInsfitut. 

1836.  M.  GuizoT,  C.  ^,  membre  de  V Académie  française. 

Uembree*  résidants. 

1854.  M.  Abblard,  professeur  à  l'École-Normalc. 
1853.  M.  Alart,  secrétaire  de  rinspertion  Académique. 
1833.  M.  Alzine,  imprimeur-libraire  (/'')'. 

1857.  M.  A.MADIS,  professeur  au  Collège. 

1853.  M.  Argiot  (Jacques),  homme  de  lettres. 

1855.  M.  AsTOR,  professeur  au  Collège. 
1857.  M.  AsTORS  (François),  propriétaire. 

1859.  M.  Auberge  (François),  médecin  principal  en  retraite. 

1853.  M.  AuDUSso.N  (Olivier),  propriétaire. 

1838.  M.  AuGÉ,  *,  capitaine  d'artillerie  en  retraite. 

1854.  M.  AussEL,  professeur  au  Collège. 
1846.  M.  AzÉMAR,  propriétaire. 

1836.  M.  Bach,  ^ ,  colonel  d'artillerie  en  retraite. 
1857.  M.  Harberet,  inspecteur  d'Académie. 
1833.  M.  Batlle,  négociant  (F). 

1855.  M.  Bédos,  avocat. 

1833.  M.  Béguin,  directeur  de  l'École-Normale  (F). 

'  Les  roBdateurt  de  la  Société  sont  désignés  par  la  lettre  F,  qui  est  Â  la  suite  de  leur  nom 


2;>8 

J8Ô8.  M.  Bensa,  clianoine  honoraire,  pt-ofesseur  de  |.|,ilo.op|,io 
el  (le  (héologie  au  Grand-Séminaire. 

1853.  M.  Bertkand-Balanda,  propriétaire. 

1857.  M.  BOCA.MY,  docteur-médecin. 

1853.  M.  BoNAFos,  docteur-médecin. 

1847.  M.  BoNNEFOY  (de),  propriétaire. 

1856.  M.  Boix,  maître  en  pharmacie. 

1855.  M.  BoucABEiLLE,  aumônier  de  l'École-Normale. 

1835.  M.  Bouis,  ex-professeur  de  chimie. 

1830.  M.  Bjiesson,  propriétaire. 

1833.  M.  Gaffe,  architecte  de  la  ville  de  Perpignan  (F). 

1855.  M.  Galvet,  agronome. 

1857.  M.  Cayrol,  employé  des  Gontributions  indirectes. 

1848.  M.  Ghapé,  lithographe. 

1835.  M.  Gompanvo  père,  docfenr-médeciji. 

1853.  M.  Gompanyo  fils,  docleiir-médecin. 

1854.  M.  GoNTE  (Félix),  propriétaire. 

1840.  M.  GosTA  (Léon  de),  chef  de  Division  -,  la  Préfecture. 

1847.  M.  GuiLLÉ,  directeur  de  la  Ferme-École. 

1853.  M.  Badins  (Sauveur),  propriétaire. 

1855.  M.  Delhoste,  vicaire  de  la  Gathédrale. 

1848.  M.  Després  (Antoine),  propriétaire. 

1854.  M.  Durand  (Justin),  «,  banquier,  député  au  Gornc. 

Législatif. 
1850.  M.  Escallar  (d'),  propriétaire. 
1841.  M.  Eychenne  aîné,  propriétaire. 

1849.  M.  Fabre,  proiesseur  au  Gollége. 
1833.  M.  Fauvelle,  sondeur (F). 
1857.  M.  Ferrer  (Léon),  pharmacien. 

1854.  M.  Fines,  chanoine  titulaire  du  diocèse,   supérieur  du 

Grand-Séminaire. 
1857.  M.  Flotte  (de),  directeur  du  Haras. 
1853.  M.  Garrette,  banquier. 
18i8.  M.  GouELL,  docteur-médecin. 


299 

1859.  M.  Granier  de  Gassagnac,  chanoine  honoraire,  priacii<al 

du  Gollég;e  de  Perpignan. 
•1854.  M.  Jaume  (Amédée),  notaire. 
1854.  M.  Jouy-d'Arnaud,  ^,  maire  de  Perpignan. 
1850.  M.  Labau,  propriétaire. 
1836.  M.  Lacombe  Saint-Michel,  propriétaire. 
1854.  M.  Lacroix  (Ferdinand),  avocat. 
1854.  M.  Lafabrègue, juge. 
1850.  M.  Lamer  (Jules  de),  propriétaire. 
1859.  M.  Lassus  Saest- Génies  (le  liaron  de),  *;,  préfet  du 

département  des  Pyrénées-Orientales. 
1841.  M.  Lazerme  (Charles),  propriétaire. 
1853.  M.  Llobkt  (Joseph),  propriétaire. 

1834.  M.  Lloubes  (Auguste),  ^,  banquier. 

1853.  M.  Lloubes  (Jean-Jacques),  ^,  banquier. 

1854.  M.  LuTRAND,  professeur  au  Collège. 

1835.  M.  Massot  (Paul),  docteur-médecin. 
1853.  M.  Massot  (Aimé),  docteur-médecin. 
1841.  M.  Mattes,  inspecteur  des  Ecoles  primaires. 

1846.  M.  Méric  (François),  homme  de  lettres. 

1847.  M.  Morer,  archiviste  du  département. 
1853.  M.  MuxART  (Auguste),  avocat. 

1835.  M.  Passama,  docteur-médecin. 

1858.  M.  Philip,  chanoine  titulaire  du  diocèse. 

1836.  M.  PicAS  aîné,  avocat. 

1857.  M.  Retoès-Audusson,  propriétaire. 

1853.  M.  Rires,  directeur  de  l'Ecole  primaire  supérieure. 
1853.  M.  RoBiLLARD  (de),  G.  ^,  colonel  commandant  la  place 
de  Perpignan. 

1853.  M.  Robin  aine,  pépiniériste. 

1855.  M.  RocA  (RigobiTl),  chanoine  honuraire,  iiumùnier  du 

Collège. 

1858.  M.  RouFFiA  (Joseph),  instituteur. 

1854.  M.  Saint-Victor  (de),  propriétaire. 


300 

1859.  M.  Saignes  (Justin),  litliogniphe. 

1853.  M.  Saléta,  ^,  capitaine  de  cavalerie  en  retraite. 

1854.  M.  Sai'vy  (Joseph),  ncirociant. 
1853.  M.  SiAU  (Antoine),  propriétaire. 

1833.  M.  SiRVEN,  économe  des  Hospices  de  Perpignan  (F). 
185i.  M.  Talayrach  (Joseph),  avocat. 

1855.  M.  Tarrès,  docteur-médecin. 

1834.  M.  Tastu-Jaubert,  avocat. 

18(iO.  M.  Tastu  (Antoine),  ingénieur  ordinaire  des  Ponts-et- 
Ghaussées. 

1856.  M.  Vallarino  (Jean),  négociant. 
1841.  M.  ViLALLONGUE  (Sylvestrc),  négociant. 

Membres  résidants  n'babitant  pas  Perpignan. 

1857.  M.  Arago  (Antoine),  maire  d'Estagel. 
1856.  M.  Barrére,  propriétaire,  à  Bages. 

1858.  M.  Besombes  (Joseph),  négociant,  à  Saint-Laurent-de-la- 

Sa  la  n  que. 

1859.  M.  Camps,  curé,  à  Candies  (canton  de  Mont-Louis). 

1856.  M.  Carbonell,  propriétaire,  à  Pé/.illa-de-la-Rivière. 
1853.  M.  Casamajor,  curé,  à  Canaveilles. 

1857.  M.  Conte  (Joseph),  propriétaire,  à  Estagel. 
1859.  M.  CouRTAis  (Pierre),  instituteur,  à  Port-Vendres. 
1859.  M.  Déperaud  (Jean-Pierre-Marie),  0.  ^V ,  capitaine  de 

cavalerie  en  retraite,  à  Caudiès  (canton  de  Saint-Paul). 
1853.  M.  Durand  (Laurent),  propriétaire,  à  Saint-Nazaire. 
1853.  M.  Durand  (Jacques),  propriétaire,  à  Saint-Nazaire. 

1856.  M.  Duverney,  propriétaire,  à  Espira-dc-PAgly. 

1846.  M.  GiNESTOUs  (Marquis  de),  propriétaire,  à  Caladroy. 

1847.  M.  GiRVÈs  (Sauveur),  propriétaire,  à  Vinça. 

1857.  M.  Guisonier-Passama,  propriétaire,  à  Pia. 
1857.  M.  Malé,  vétérinaire  à  la  Ferme-École. 

1856.  M.  Malègue,  propriétaire,  à  Pézilla-de-la-Rivière. 


301 

\^'û.  M.  .M.AïuA  (Jean),  |iro|irié(;iire,  à  Tluiir. 
1858.  M.  Makiano  (Coiishmlin),  |iropri.'l;iire,  à  Peyreslorles. 
1858.  M.  Marquy  fils,  ijépiniérislc,  à  Ule. 
1858.  M.  NoGuÈs,  juge  de  paix,  à  Olelte. 
1858.  M.  Pla,  juge  de  paix,  à  Sainl-Paul. 
1858.  M.  Saillens,  notaire,  à  Vinça. 

1858.  M.  ToLRA  DE  Boudas  (Joseph),  prêlre,  professeur  de 
rhétorique  au  Petit-Séminaire  de  Prades. 

La  Société  est  divisée  en  quatre  Sections. 

U^  Section.— Agriculture,  sous-section  d'Horticulture. 
2">e  Section.  — Sciences  physiques  et  naturelles. 
Sn-e  Section.  — Belles-Lettres  et  Archéologie. 
4™e  Section.  — Industrie,  Commerce  et  Beaux-Arts. 


Membres  eorrcspontlantM. 

1830.  M""'  Lafabrégie,  naturaliste,  à  Lyon. 

1839.  M-ne  Tastu  (Amable),  à  Paris. 

1839.  M'-"  ViEN  (Céleste),  à  Paris. 

1840.  M™«  Faure  (Anaïs),  née  Biu,  à  Limoux. 
1842.  M'i"  Favifr  (Eulalie),  à  Marseille. 

1833.  .M.  Armon VILLE,  secrétaire  du  Conservatoire  des  Arts  et 
Métiers,  à  Paris. 

—  M.  Arvers,  -ijv,  ancien  pharmacien  militaire,  à  Perpignan. 

—  M.  Bastard,  docl.-médecin,  à  Châlonnes  (Maine-et-Loire). 

—  M.  Roi'RKK,  géologue,  à  Paris. 

—  M.  CuAi'SAL,  prêtre,  à  111e  (Pyrénées-Orientales). 

—  M.  Christol  (Jul.  de),  professeur  d'histoire  naturelle,  à 

Montpellier. 

—  M.  Des  Moulins  (Charles),  membre  de  plusieurs  sociétés 

.savantes,  à  Lanqnais. 


302 

1833.  M.  Denis  de  Saint-Antoine,  ijrésiilenl  des  relations  inté- 

rieures do  la  Société  de  CiviUsatmi,  à  Paris. 
M.  DiAs  DE  Morales,  ancien  député  aux Corli's,àMarseille. 

—  M.  Ferrus,  ancien  principal  du  Collège  de  Perpignan  (F). 

—  M.  Fraisse,  de  Perpignan,  direct,  des  postes,  à  Cette  (F). 

—  M.  GoiJGET,  chirurgien-major  au  47»  de  Ligne. 

—  M.  Ivan  (Michel),  docteur-médecin,  à  Digne. 

—  M.  JuLiA,  de  Perpignan,  profess.  de  langues,  à  Alger  (F). 

—  M.  Marcel  de  Serres,  prof,  de  géologie,  à  Montpellier. 

—  M.  SiAU,  de  Perpignan,  ingénieur  en  chef  des  Ponts-et- 

Chaussées  en  retraite,  à  Bordeaux. 

—  M.  TouRNAL,  géologue,  à  Narbonne. 

—  M.  Vène,  ingénieur  des  mines,  à  Toulouse. 

1834.  M.  BoiSGiRAUD,  professeur  de  chimie,  à  Toulouse. 

—  M.  César-Moreau  ,  directeur  fondateur  de  la  Société  fran- 

çaise de  Statistique,  à  Paris. 

—  M.  Gros,  avocat,  à  Carcassonne. 

—  M.  Delestre,  président  de  VAthénée  Impérial,  à  Paris. 

—  M.  DupuY,  *, colonel  d'état-major  on  retraite,  à  Toulouse. 
M.  Godde  de  Liancourt,  président  de  la  Société  universelle 

de  Civilisation,  à  Paris. 

—  M.  IzERN ,  de  Perpignan  ,  membre  de  plusieurs  sociétés 

savantes ,  à  Paris. 

—  M.  PcjADE,  *,  docteur-médecin,  à  Âmélie-les-Bains. 

—  M.  Poulain,  chirurgien  en  chef. 

—  M.  Salin,  contrôleur  do  la  monnaie  des  médailles,  à  Paris. 

—  M.  Xatart,  pharmacien,  ;\  Prals-de-Mollo. 

1835.  M.  ÂRAGO  (Etienne),  de  Perpignan,  homme  de  lettres. 

—  M.  Chenu,  chirurgien-major  au  12«  Chasseurs. 

—  M.  Combes,  docteur-médecin,  à  Toulouse. 

—  M.  Enselv,  docteur-médecin,  à  Castolnaudary. 

—  M.  Gallay,  * ,  do  Perpignan ,  professeur  de  cor  à  VÉcole 

Impériale  de  Musique,  à  Paris. 

—  M.  Gallv-Cazalat,  professeur  de  physique,  h  Versailles. 


303 

18*35.  M.  GuiNARD  ;iîiié,  pliorniai-ioii,  h  liordeaux. 

—  M.  GiiiTER,  d»^  Perpignan ,  ancien  notaire. 

—  M.  GuvoT  DE  Fére  ,  secrélairo  perpétuel  de  la  Société 

d'Eneouragetnent,  à  Paris. 

—  M.  Itier,  naturaliste,  directeur  des  douanes,  à  Montpellier. 

—  M.  Lecoq,  professeur  de  botanique,  à  Glei'raont-Ferrand. 

—  M.  Leucotte,  capitaine  d'état-major,  à  Paris. 

—  M.  Maurin  (Antoine),  de  Perpii^nan,  litho^fi'ajdie,  à  Paris. 

—  M.  Maurin  (Laurent),  de  Perpignan,  lilliograplie,  à  Paris. 

—  M.  Michel,  capitaine  au  17e  je  Ligne. 

—  M.  RiGAUD  (Esprit),  de  Perpignan,  avocat  à  la  Cour  de 

Cassation,  à  Paris. 

—  M.  RiBEs,  de  Perpignan,  professeur  à  la  Faculté  de  Méde- 

cine de  Montpellier. 

—  M.  Sarrus,  doyen  de  la  Faculté  desSciences  de  Strasbourg. 
1836.  M.  Aleron,  naturaliste,  à  Perpignan. 

—  M.  Breghotdu  Lut,  conseiller  à  la  Cour  Impériale  deLyon, 

membre  de  V Académie  Impériale  de  la  même  ville. 

—  M.  Cachelièvue,  ingénieur  des  mines. 

—  M.  Calmètes,  *,  de  Perpignan,  conseiller  à  la  Cour  de 

Cassation ,  à  Paris. 

—  M.  Chevrolat  (Auguste),  membre  de  la  Société  Entomo- 

logique  de  France,  à  Paris. 

—  M.  CoRNUo,  cliirurgien-major  au  85«  de  Ligne. 

—  M.  Delocre,  docteur-médecin,  à  Lyon. 

—  M.  Denizart-Hurtzel ,  propriétaire,  à  Lille. 

—  M.  Duffourc,  *,  colonel  du  génie. 

—  M.  JuLiA,  de  Perpignan,  capitaine  d'artillerie,  -h  Alger. 

—  M.  Lacroix,  ifi?.  de  Perpign;ni,  oonseillor  à  la  Cour  Im- 

périale do  Moiilpellier. 

—  M.  Llanta,  de  Perpignan,  lithographe,  à  Paris. 

—  M.  Merch,  trésorier  de  la  Société  Linéenne  de  Lvon. 

—  M.  MuLZANT,  professeur  d'entomologie  au  Lycée  et  à  la 

Faculté  des  Sciences  de  Lvdii. 


304 

1830.  M.  Parés  (Théodore),  0.  Si; ,  de  Perpignan,  ancien  pro- 
cureur-général, à  Montpellier. 

—  M.  Pkuicaud,  bibliothécaire  de  la  ville  de  Lyon,  membre 

de  Y  Académie  Impériale  de  la  même  ville. 

—  M.  RouFFiA  (Côme),  maître  de  pension,  à  Millas. 

—  M.  Thurbert,  ingénieur  des  mines. 

—  M.  Walter,  ingénieur  civil,  professeur  à  VÉcole  des  Arts 

et  Mamifartiires,  à  Paris. 

1837.  M.  Barrau,  homme  de  lettres,  à  Toulouse. 

—  M.  BoLUix,  de  Perpignan,  capitaine  de  frégate,  à  Toulon. 

—  M.  Jasmin,  homme  de  lettres,  à  Agen. 

—  M.  Mercadier  aîné,  lithographe,  à  Toulouse. 

—  M.  Reboul,  homme  de  lettres,  à  Nîmes. 

1838.  M.  Bonafos,  docteur-médecin,  à  Sigean. 

—  M.  DuROSOY,  inspecteur  des  mines. 

—  M.  DuviGNAU,  homme  de  lettres,  à  Agen. 

—  M.  Grenier,  docteur-médecin,  professeur  d'histoire  natu- 

relle, à  Besançon. 

—  M.  Vaillant,  dessinateur,  attaché  au  Muséum  d'Histoire 

naturelle,  à  Paris. 

1839.  M.  Brochier,  capitaine  du  génie,  à  Paris. 

—  M.  Cadilhac  (Désiré),  à  Puisségur,  près  Béziers. 

—  M.  CouBART  d'Aulnay,  membre  de  Y  Athénée  des  Arts,  à 

Paris. 

—  M.  Du  Mége  (Alexandre),  secrétaire-général  de  la  Société 

Archéologique  du  Midi,  h  Toulouse. 

—  M.  MiCHAUT,  naturaliste,  capitaine  au  10«  de  Ligne. 

—  M.  Terrevert,  naturaliste,  à  Lyon. 

1840.  M.  Arago  (Alfred),  sous-inspecteur  des  Beaux-Arts,  à 

Paris. 

—  M.  JouLiA  (Henri),  maître  de  pension. 

—  M.  Monzic-Lasserue,  doct. -médecin,  à  Ceux  (Dordogne). 

1841.  M.  François,  ingénieur  des  mines. 

—  M.  Fontan,  docteur-médecin. 


305 

1841.  M.  Moquin-Tandon,  naluralisle,  à  Toiilouso. 

—  M.  Vienne,  bibliothécaire  de  la  ville  de  Toulon. 

1842.  M.  Benêt  de  Peratjd,  docteur-médecin,  à  Paris. 

—  M.  Gellé,  professeur  h  l'École  Vétérinaire  de  Toulouse. 

—  M.  Godard,  naturaliste,  capitaine  adjudant-major  au  67^ 

de  Ligne. 

—  M.  L.\UGiER,  attaché  à  l'Observatoire  de  Paris. 

—  M.  Petit,  directeur  de  l'Observatoire  de  Toulouse. 

—  M.  PoNCY,  ouvrier  maçon,  homme  de  lettres,  à  Toulon. 

—  M.  Selva  (Prosper),  *,   de    Perpignan,  capitaine  de 

vaisseau,  à  Paris. 

1843.  M.  D'Ombre-Firmas,  d'Alais. 

—  M.  Pagès-Roudière,  docteur-médecin,  à  Perpignan. 

—  M.  PA.SSAMA,  ih,  de  Perpignan,  capitaine  de  frégate. 

—  M.  Massot-Retoier,  *,  de  Perpignan,  procureur-général 

à  la  Cour  Impériale  de  Rouen. 

—  M.  SoLLiERS  (Félix),  homme  de  lettres,  à  Paris. 

'1844.  M.  Rouis  fils,  de  Perpignan,  professeur  de  rliimie ,   à 
Paris. 

—  M.  Didier  (Petit),  de  Lyon. 

—  M.  Perev  (Alexis),  professeur  de  mathématiques,  à  Dijon. 

—  M.  Robinet,  membre  de  V Académie  Impériale  de  Médecine. 

1847.  M.  Ivat,  avocat  à  la  Cour  Impériale  de  Paris. 

—  M.  Renard  de  Saint-Malo,  de  Perpignan,  avocat  à  la 

Cour  de  Cassation,  à  Paris. 

1848.  M.  Laurence,  principal  du  Collège,  à  Mont-de-Marsan. 

—  M.  Lefranc,  homme  de  lettres,  à  Paris. 

—  M.  Perris  (Kdouard),  naturaliste,  à  Mont-de-Marsan. 

—  M.  Reboud,  docteur-médecin,  aide-major  (Algérie). 

1849.  M.  AuTiiEMAN,  économe  des  hospices,  à  Lisle-sur-Sor^ne 

(Var). 

—  M.  CAucnois-FERR.vND,  officier  d'état-major. 

—  M.  Pietta  (Lucien),  à  Montesquieu,  près  Toulouse. 

—  M.  Tastu  (Emile),  de  Perpignan,  avocat,  h  Montpellier. 

20 


300 

1851.  M.  Gaubill,  cuiiitaine  en  reliaile. 

1853.  M.  Collet,  professeur  au  Collège  de  Caslelnaadary. 

—  M.  Fauke,  docteur-médecin,  en  Algérie. 

—  M.  Maniel  (Jacques),  de  Perpignan,  iugénieur  en  chef 

des  chemins  de  fer  du  Nord. 

1854.  M.  Bataille,  procureur  impérial,  à  Limoux. 

—  M.  Bonnet  (Edmond),  ingénieur  civil. 

—  M.  Carvallo  (Jules),  ingénieur  civil,  membre  fondateur 

de  Ylnstitiit  arcliéokgique  et  historique  du  Limousin. 

—  M.  Denjean,  professeur  au  Collège  de  Lodève. 

—  M.  Maurice,  agent-voyer  en  chef  du  département  de  Loir- 

et-Cher. 

—  M.  Thevenin,  procureur  impérial,  à  Auch. 

1855.  M.  Barthélémy  (de),  ancien  conseiller  de  préfecture. 

—  M.  Barthélémy  (A'«  de),  sous-préfet,  à  Béfort. 

—  M.  Calisti,  inspecteur  d'Académie,  à  Foix. 

—  M.  CoRTiE,  professeur  au  Collège  de  Castelnaudarj-. 

—  M.  Chaurand  de  Malarce,  homme  de  lettres,  à  Blois. 

—  M.  Crova  père,  professeur  éniérite,  à  Perpignan. 

—  M.  Crova  lils,  professeur  de  chimie  et  de  physique,  à 

Metz. 

—  M.  GuiGON,  professeur  de  mathématiques,  à  Baslia. 
M.  Jubinal,  ancien  inspecteur  d'Académie. 

—  M.  Paris  (Louis). 

—  M.  SouBEYRAN  (Paul  de),  préfet,  à  Blois. 

—  M.  Soultrait  (Georges  de),  ancien  sous-préfet,  à  Castel- 

Sarrasin. 

1856.  M.  Mercader  (Ernest),  docteur-médecin,  à  La  Magistral 

(Tarn-et-Garonne). 

1857.  M.  Soubeyr^vn  (Léon),  pharmacien,  à  Paris. 

1858.  M.  Caralp  (Raymond),  directeur  des  cultures  du  péni- 

tencier de  Marseille. 

—  M.  Ghambeu  (l'abbé). 

—  M.  LouRDOUix  (Paul  de),  à  Paris. 


307 

1859.  M.  Dabaux,  prélet,  à  Carcassonne. 

—  M.  Dardé,  avoué,  à  Carcassonne. 

—  M.  Denille,  directeur  de  la  Ferme-École  de  l'Aude. 

—  M.  Desalle,  agent-voyer  en  chef  du  départem'  de  l'Aude. 

—  M.  Courrier  de  Fraissé,  à  Cabardès  (Aude). 

—  M.  Guilhaume,  ingénieur  en  chef  des  chemins  de  fer  de 

Toulon  à  Marseille. 

—  M.  GuiTER,  lieutenant  d'infanterie,  en  Afrique. 

—  M.  JoNQUET,  docteur-médecin,  aide-major  au  2«  régiment 

du  Génie,  à  Montpellier. 

—  M.  Lespiau  (Henri),  •$(,  docteur-médecin,  aide-major 

militaire  de  première  classe. 

—  M.  Maraval,  vice-président  de  la  Société  d'Agriculture  de 

l'Aude. 

—  M.  Mares  (Henri),  membre  de  la  Société  d'Agrix^ulture  de 

l'Hérault. 

—  M.  Pellet  (Pierre),  naturaliste,  à  Béziers. 

—  M.  Portal  de  Moux,  propriétaire,  à  Carcassonne. 

—  M.  Rendu  (Victor),  inspecteur-général  de  l'Agriculture. 

—  M.  Roques-Salvaza,  député  de  l'Aude. 

—  M.  Salaman,  notaire,  à  Carcassonne. 

—  M.  Talrich  (Jules),  artiste  préparateur  d'analomie  en 

cire,  à  Paris. 

—  M.  Valayer,  propriétaire,  à  Avignon. 

1860.  M.  Aragon  (Victor),  i^,  président  de  chambre  à  la  Cour 

Impériale  de  Montpellier. 


CorreitpontlaniN  étrangfcrs. 

1833.  M.  RiBELL,  *,  docteur-médecin,  à  Barcelone. 

—  M.  Llobet,  géologue,  à  Barcelone. 

—  M.  Ladron  de  Guerrera,  chanoine  et  curé  d"  Retirn,  ;i 

Madrid. 


:'.o6 

iaijû.    .M.   LOUKNZO   DE   lÎKllKCILLA,  ll(illinit>  (Ic  It'llies,  il  MliJliil. 

—  }i\.  Francisco  Vkka,  liouinio  de  lellrcs,  ;i  Madrid. 

—  M.  AcEVEDO,  hoiiinie  do  lettres,  à  Madrid. 

M.  LoRENZo  Abat,  homme  de  lellrcs,  à  Madrid. 

—  M.  Mahiano  de  Sans,  naturalisle,  à  Barcelone. 

—  M.  Rouiu,  professeur  de  chimie,  à  Barcelone. 

—  M.  Garnier,  membre  do  l'Université,  à  Madrid. 
M.  Raull,  avocat,  à  Barcelone. 

—  M.  Bastuc,  censeur  royal,  à  Barcelone. 

1842.  M.  Luis  Balagué,  membre  de  la  Société  Philomuthique , 
à  Barcelone. 

1847.  M.  le  marquis  de  Belpuig,  duc  de  Savella,  à  Palma  (Iles 

Baléares). 

—  M.  Jo.\cHiM  Maria  Bover  de  Bossello,  à  l'aima  (lies 

Baléares). 

—  M.  Nicolas  Brozedo  y  Zafortera  ,  à  Palma  (  lies  Ba- 

léares). 

—  M.  Jules  de  Gabarrus,  consul  de  France,  à  Palma  (Iles 

Baléares). 

—  M.  Basilio  Sebastiaî<o  Castellano,  bibliothécaire  de  la 

Bibliothèque  Royale,  à  Madrid. 

—  M.  Luis  Maria  Ramires  Las  Gazas  Deza,  président  do 

Y  Académie  des  Sciences ,    Arts   et   Belles  -  Lettres ,    ;. 
Cordoue. 

—  M.  Modesto  La  Fuente,  homme  de  lettres,  à  Madrid. 

—  M.  Isidore  Chaussât,  homme  de  lettres,  à  Barcelone. 

1848.  M.  Martinez  (Ant.),  à  Palma  (Iles  Baléares). 

—  M.  Medel  (Raymond),  à  Palma  (lies  Baléares). 

1849.  M.  Faces  de  Roma,  inspecteur-général  d'agriculture  dans 

la  province  de  Gironc. 

1851.  M.  Vidal,  professeur  d'histoire  naturelle  à  TUnivcrsité 

de  Valence. 

1852.  M.  Macdonald,  président  de  Y  Académie  britannique,   à 

Londies. 


309 

1852.  M.  le  comte  de  Mélano,  secrélaire-perpétuel  de  V Acadé- 

mie britannique,  à  Londres. 

1853.  M.  Rel'me  (Auguste  de),  capitaine  d'artillerie  en  Belgique, 

membre  de  V Académie  britaimique. 

—  M.  Fadeuille  (de),  nunnhre  de  Y  Académie  britannique. 

—  M.  RuBio  Y  Ors  ,  prolesseur  de  littérature  espagnole  à 

l'Université  de  Castille,  à  Valladolid. 

—  M.  Florencio  Janer  y  Graells  ,  homme  de  lettres ,  à 

Madrid. 

—  M.  Juan  Trujillo  del  Parraso,  homme  de  lettres,  à 

Madrid. 

—  M.  Gens  (Eugène),  prolesseur  d'iiisloire  à  l'Athénée  royal 

d'Anvers.' 

—  M.  le  vicomte  de  Kerckove-Varent,  président  de  YAca- 

démie  d'Archéologie  de  Belgique,  grand'croix  et  com- 
mandeur (le  |iliisieurs  ordres. 

—  M.  le  vicomte  Ki'géne  de  Kerckove-Varent  lils,  chargé 

d'affaires  de  l'Empereur  de  Turquie  près  le  Gouver- 
nement belge. 

—  M.  Alexandre  Schaepkem,  peintre  de  paysages,  profes- 

seur de  peinture,  à  Maëstridi. 

—  M.  Léonard  de  Cuvper,  statuaire,  à  Anvers. 

—  M.  Nicolas  Van-der-Heyden,  généalogiste,  à  Anvers. 

—  M.  Raphaël  Atienza,  marquis  de  Salvatiera,  à  Ronda. 

—  M.  Thomas  Aquilo  ,  professeur  universitaire ,  à  Palma 

(Iles  Baléares). 
1859.  M.  AleXjVxdre  Schaepkens,  direct,  de  l'École  des  Beaux- 
Arts,  chevalier  de  la  Couronne  de  Ciiène,  à  Maëstrick. 

UembrcK  résida iitN  dérodôM  depuis  la  itulUicalioii 
du  dvrnitM*  Bulic(iii. 

.loNUiET,  natiiralislf,  ;'i  Vcrnel-les-lîiiinN. 
M0UAT-Ev,  iir(iliri<'laii'i',  à  l!ah(i. 


310 


SoclétéH  correspondantes. 

(Acadimie  des  Sciences  el  Belles-Let  1res. \ 

Aisne ]^     ■     ,     ■    ,  Saml-Quenlm. 

\Comice  Agricole.  ) 

Alpes  (Basses-) Société  d'Agriculture.  Digne. 

(Société  Scientilique  et  du  Commerce.     ) 
Aube  >  iTroyes. 
{sociéléd'Agric,  Arts  et  Belles-Lettres.' 

I Société  d'Agriculture.  CarcaSsonne. 

\comice  Agricole.  Limoux. 

Aude Isociélé  des  Arts  et  Sciences.  Carcassonne. 

1  Comice  Agricole  de  l'arrondissement  de 

\     flarbonne.  Nai'bonne. 

Ariége Société  Agricole  et  Littéraire.  Foix. 

Aveyrou Société  d'Agriculture.  Rodes. 

(Société  d'Horticulture. 

[société  de  Statisliqut 

„      ,       1     ni.        1  Académie  des  Sciences.  /Marspillp 

Bouches-du-Rhone  .<  .  /Marseille. 

jsociété  de  Pharmacie.  \ 

Revue  Jlorticole  des  Bouches-du-Rhône.  j 
^     (rédacteur.) 

Drôme Société  d'Agriculture.  Valence. 

Société  Yétérinaire  des  départements  du\ 

Calvados  et  de  la  lilanche.  I 

, ,  ,,     >Bayeux. 
Société  d'.\griculture,  Sciences  et  ikUes-i 

Lettres.  j 

Calvados isociété  d'Agriculture  et  du  Commerce.  \ 

\Académie  des  Sciences,  Arts  et  BellesACaen. 

Lettres.  j 

Société  Académique ,  Agricole ,  Indus- 
trielle et  d'Instruction.  Falaise. 


311 

Cantal Propagateur  Agricole  M,  eic.jrédacteur).  Aurillac. 

Charente Société  d'Agriculture,  Arts  et  Commerce.  Angoulènic. 

/Société  des  Sciences,   Arts  et  llelles- 
Charente-Inférieure.'     Lettres.  Rochefort. 

{Athénée  de  la  Charente-Inférieure.         Beauvais. 

Cher Société  Agricole  du  Cher.  Bourges. 

(Académie  Impériale  des  Sciences  et  Arts. 


Cote-d'Or  . 


Société d'IIorticultnre  et  d'Arboriculture 


Dijon. 


Doubs 


Besançon. 


Société  des  Sciences  Naturelles  et  Ar- 
chéologiques. Guéret. 

(Société  d'Émulation . 
KSociélé  d'Agriculture. 

Drônie Société  de  Statistique ,  des  Arts  et  des 

Sciences.  Valence. 

Eure Société  libre  d'Agriculture,  Sciences, 

Arts  et  Belles-Lettres.  Évreux. 


Gard. 


Nîmes. 


Garonne  (Haute-) 


(Académie  des  Sciences,  etc. 
^Société  d'Agriculture. 

Académie  des  Jeux-Ploreaux. 

Académie  des  Sciences  et  Belles-Lettres. 

Société  Archéologique  du  Midi. 

Société  d'Agriculture. 

Journal  d'Agriculture  jiratique  et  rf'K-\Toulouse. 
cnnomie  rurale  pour  le  .1/irfi  de  lai 
France,  publié  par  les  Sociétés  d'A-} 
griculture  de  la  Haute-Garonne  et  de  | 
firiégc. 


Gers, 


Société  Agricole. 

Reuue  Agricole  el  Horticole  (rcdaclenr) 


nr)j 


Auch. 


312 

!  Académie  Impériale  des  Sciences,  BeUes-\ 
Lettres  et  Arts. 
Sociité  Linnéenne. 
.    ■:..•..      ■    ,.  /Bordeaus. 

Socielt  d  llorlicullurc. 
Société  d'Agriculture. 
\Société  de  Médecine. 


Société  Archéologique. 

^Société  d''Agriculture.  [Montpellier. 


louttcit^  i*  .11/1  ((/UiKt;  c.  V'^ 

Hérault ■{  .    ,    ,      .,.,•!         1  \ 

iLe  Messager  agricole  du  Mtdi  (rsdacleur).  ' 

\Sociéié  Archéologique.  Béziers. 

Indre Société  d'Agriculture.  Chdteauroux. 

ladre-et-Loire Société  Médicale.  Tours. 

i  Société  d'.igricutlurc. 
Académie  Delphinale. 
Société  de  Statistique  des  Sciences  «a-f  ^        ■  ■ 
turelles. 
Sud-Est.  Journal  agricole  et  horticole] 
\     (rédacteur). 

Jura Société  d'Émulation.  Lons-le-Saulnier. 

Landes.. Société  d' Agriculture.  Mont-de- Marsan. 

Loir-et-Cher Société  d'' Agriculture.  Blois. 

Loire Société  d'Agriculture.  Mont-Brison. 

Loire  (Haute-) Société  des  Sciences  et  d'.igriculture.  Le  Puy. 

Loire-Inférieure....  Académie.  Nantes. 

Loiret Société  d'Horticulture.  Orléans. 

Lot Société  Agricole  et  hidustrielle.  Cahors. 

Lot-et-Garonne. . .  .  Société  d'Agriculture  et  Arts.  Agen. 

Lozère. , . , , .  Société  Agricole,  Scientif.  et  Littéraire.  Mende. 


313 


Maine-et-Loire. 


!  Société   d' Agriculture  ,     Sciences     et 
Arts. 
Société  Industrielle. 
Société  Académique. 


Manche Société  Académique. 

Marae.  .    


(Académie  Impériale. 
{Société  d'Agriculture. 


Meurlhe. 


(Société  des  Sciences,  Lettres  et  Arts. 
Société  Centrale  d'Agriculture. 


i 


,.      ,,  (Société  d'Histoire  Naturelle. 

Moselis  ] 

[Académie  Impériale. 


Angers. 

Cherbourg. 
Châlons. 

Nancy. 

Metz. 
Valencieunes. 


Nord. 


Société  d'Agriculture. 

Société  d'Agriculture,  Sciences  et  Arts.  Douai. 

Société  d'Émulation.  Cambrai 

Académie  yalionalc  Agricole,  Manufac- 
turière, etc. 

Société  des  Sciences ,  de  V Agriculture 

et  des  Arts.  \Lillc. 

Comice  Agricole. 

Comice  Agricole  de  l'arrondissement  de 
Lille. 


Oise Société  d'Agriculture 


Pas-de-Calais. 


Compiègne. 

Académie  des  Sciences.  \ 

Société  Centrale  d'Agriculture  du  /•as-5.\rras. 

de-Calais.  1 

Société  des  Sciences  et  Iklles- Lettres.    \ 
ISociélé  d'Agriculture  de  l' arrondisse- Soulof^nc. 


\     ment  de  Boulogne. 

Rhin  (Haut-) ^Société  d' Agriculture. 

{société  Industrielle. 


Colmar. 
Mulhouse. 


314 

i  Académie  des  Sciences. 
Société  des  Sciences  l'hjsiques ,  .V«f«- 
,„,^,„o relies,  d\igricuUure  et  d' Industrie }^L^on. 

I  Société  Impériale  d'Agriculture  et  d'nor- 
\     liculture  pralique. 

Sarlhe Société  d'Agriculture ,  Sciences,  Com- 
merce et  Arts.  Le  Mans. 

Académie  y'alionale  Agricole,  }Ianufac- 

turière  et  Commerciale, 
icadémie  des  Arts. 
Société  Centrale  d'Agriculture. 
Société  pour  l' Itutruetion  élémentaire. 
Société  de  Statistique  universelle. 
Société  d'Encouragement  p.  C Industrie. 
Cercle  Agricole. 

\société  de  la  Morale  chrétienne. 
Annales  administratives  et  scientifiques 

d'Agriculture  française. 
Cercle  Historique. 
Institut  Impérial  de  France. 
Société  Protectrice  des  Animaux. 
Tribune  des  Linguistes,  Philosophie  des 

Langues. 
L^ Appiculteur ,  Journal  des  Cultivate^irs 

d'Abeilles  (riidacteur). 
Moniteur  des  Comices  et  des  Cultivateurs 

(rédacteur). 
I  Cercle  de  laPresse  sci(;n(t^<jitc[iédacteui)  ■ 
^la  Revue  d'Économie  rurale  (rédacteur). 


Seine. 


jParis. 


Seine- Inférieure. 


I Société  des  Sciences,  Arts  et  BellesA 
.  .}     Lettres.  ?  Rouen- 

Société  d'Horticulture. 


315 

!  Société  libre  d'Émulatiun  et  de  Com-\ 
merce.  YRoaen. 

Société  Centrale  d'Agriculture.  1 

Société  Uùvraise  d  Eluden  diverses.        Le  Havre. 
Cercle  pratique  d'Horticulture    et  de 
V     Botanique. 
Seine-et-Marne Société d'Agricult.,  Sciences  et  Morale,  ftlelun. 

I  Institut  National  Agronomique.  \ 

Société  des  Sciences  Morales,  des  terres Wersailles. 
et  des  Arts.  ' 

(Société  d'Agriculture  et  du  Commerce.) 

Sèvres  (Deux-) )  iNiort. 

\Société  de  Statistique.  ' 

Î  Société  des  .antiquaires  de  Picardie.  \ 

Société  d'Agriculture.  >Aniiens. 

Société  d'Horticulture.  > 

Tarn Société  Littéraire  et  Scientifique.  Castres. 

!  Société  des  Sciences. 
Société  d' Agriculture  et  du  Commerce. 
Société  Scientifique  et  Arcliéologique.     Dragtiignan. 
Bulletin  trimestriel  du  Comice  Agricole 
de  l'arrondissement  de  Toulon.         Toulon. 

Vancluse Société  d'Agriculture  et  d'Horticulture.  Avignon. 

Vienne Société  d'Agriculture  Poitiers. 

i  Société  d' Agriculture ,  des  Sciences  et\ 

Arts.  !  Limoges. 

L'Agriculteur  du  Centre.  ' 

Vosges Société  d'Émulation.  Epinal. 

Yonne Société  Archéologigue.  Sens. 


(Toulon. 

e.) 


Algérie RuUetin  de  la  Société  d'Àgriculturt  d'Alger. 


31<) 


Sorlctés  Étrangères. 


Aiiyli-terrc Àcadtmie  Brilanniqué.  Londres. 

Itfigique Société  Archéologique  de  Bruxelles.        Bruxelles. 

ICI  Propagadnr  de  la  l.iberlud.  Barcelone. 


Espagne 

Uo  Granja  fRevista) .  Figuèns. 

Hollande Académie  Royale  des  Sciences.  Anistordam. 

fortugal 0.  Archiva  Rural.   Jornal  de  Agricul- 

tura,  Arles  et  Seiencias  (rédacteur).  Lisbonne. 

R"ssie Société  Impériale  d'Agriculture.  Moscou. 


FIN. 


:)!' 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


Pages. 

Séanre  publique  du  I"  août  1838 ix 

Séance  pul>li({ue  du  51  juillet  1859 xvi 

Epigrapliie  roussillonnaisc  (Suite),  par  M.  de  Bonnefoy < 

Géographie  historique  des  Pyrénées-Orientales,  par  M.  Alart 67 

Période  gallo-romaine 67 

Montagnes  ,  caps  et  fleuves 80 

Noms  do  peuples  et  limites 92 

Péiioile  u isigothiquf 273 

Doniinaliou  arabe 282 

La  voie  romaine  de  Pancien  Roussillon,  par  M.  Alart iôi 

Ephéniérides  de  PHopital  Saint-Jean  et  de  l'Hospice  de  la  Miséri- 
corde de  Perpignan  ,  par  M.  Sirveii 195 

Des  fièvres  de  marais,  par  M.  Auberge 209 

Des  rai'cs  perfectionnées  dans  le  département  des   Pyrénées-Orien- 
tales ,  par  M.  iMalègue 245 

{{apport  sur   l'industrie   sériciole   du    département    des    Pyrénées- 
Orientales  en  1859,  par  M.  Siau 257 

Rapport  sur   ii's  inoduits  cnvovés  par  la  Société  au  Concours  de 
Carcassoniic  ,  en  mai  -(859  ,  et  sur  la  culture  des  artichauts,  par 

M.  Siau 267 


318 

Le  Mariage  de  la  Villajjeoisc  ,  épisode  traduit  du   Prœdium   Ruslicum  Page> 

du  P.  Vanicre  ,  par  M.  Faire 287 

L'artiste  reconnaissant,  anecdote  historique,  par  M.  Fabre 29^ 

Le  Dernier  amour,  par  M.  Sirven 29d 

Liste  des  Membres  composant  la  Société 297 

Liste  des  Sociétés  correspondantes 340 


FIN  DE  L\  TABLE. 


i 


r" 


SOOIÉTÉ 


AGRICOLE,  SCIENTIFIÔlE 

ET  LITTÉRAIRE 

I 

DES  PYRÉNÉES-ORIENTALES. 


TBElZlKnB   VOIilinB. 


PERPIGNAN. 

IMPRIMERIE   J)E.I.-Ji.    M./.INE. 

Rue  (les  Trois-Uois,  I . 


/cSY> 


M^f.  2 


V  ■  - -' 


p  ^ 


SOCIETE  DES  PYUENEES-OUIENTALES. 


XIII. 


La  Sociélé  ireulond  approuver  ni  improuvor  les  opinions 
éniisos  dans  les  travanx  (jn'ellc  pulilie  :  elles  appartiennent  à 
leurs  auteurs  qui  en  sont  seuls  garants. 


Les  lettres,  mémoires,  etc.,  etc.,  doivent  être  adressés  (franc 
de  port)  à  M.  Louis  FAuaf;,  Secrétaire  de  la  Société,  rue 
Traversière-de-l'Ange,  4;  et  les  olijels  d'histoire  naturelle  à 
M.  CoMPANvo,  Conservateur  du  Cabinet,  place  Laborie,  5,  à 
Perpignan. 


APICOLE,  SCIENTIFIODE 


ET  LITTÉRAIRE 


DES   PYRÉNÉES-ORIENTALES. 


TREIZIEME  VOLUME. 


l'aisons  tous  nos  cll'orls  pour  qu'an  jiuissc 
i!irfi  un  jour  :  Il  y  fui  il  Perpignan  une  socirl.'- 
d'hommi's  à  hiienlions  géni-reuses,  dont  les 
travaux  lurent  utiles  à  leur  pays. 

(JAiiiEnr  HE  Réart,  I"  Bulletin,  p.  4  ) 


PERPIGNA.N. 

IMPRIMERIE  DE  J.   B.  AL2INE  ,  RUE  DES  TROIS-ROIS,   I. 


iHo:t. 


.^^.V;#f 


GCCÎIÉTS 
AGRICOLE,  SCIENTIFIQUE  8:  LITTÉRAIRE 

DES  rYni:\ÉES-onii:i\TALES. 


COMPOSITION  DU  BUREAU  POUR  LES  ANNEES 


1861.  1862. 

Président  :  M.  I.I.ULBI'S  (Aicistk),  rnsidenl  :  M.  LLOUlil'S  (Aigiste), 
ifif,  banquier,  ancien  maire  delà  ;!^,  l)an(|ni(T,  ancien  maire  de  la 
\ille,  membre  dn  (Innsfil-fiénérai  ville,  membre  dn  (!!onseil-(ii'ni'ral 
d'Auricnllure  et  dn  (lonscil-déné-  d'  \i;rioiillnre  et  du  Conseil-Géné- 
ral du  dé|)ar(emenl.  rai  du  département. 

Vice-I'rrsideiit  :   M.  Compa>\(),   |ière,  lice-Z'n-'sii/eii/ .-  M.  Companyo,   père, 

doelenr-médeein,  (•nnser\alenr  du  diirtiiir-méilecin,  ronservnleur  du 

Cabinet  d'iiisloire  nainrdie.  Cabir.et  d'iiislnire  naturelle. 

Sccrctaire  ■  M.  Fabiik  (  l.nuis  ),  ]iro-  Sccrélaire  :  M.  Fabhe  (Louis),  pro- 
fesseur de  Iroisièmc  et  de  commerce  fesseurde  lroisi(?mcetde commerce 
au  Collège.  au  Collège, 

Vicc-Secrtldire  :  M.  Aiaut,  arrliivisle  Virc-Scrilairc  :  M.  Ai.aiit,  arcliivislc 

du  département.  du  deparlement. 

Tr.sorier  :  M.Siai  (Antoine),  négo-  Trisniier  :  M.  Siai  (Antoine),  négo- 
ciant, ciant. 

Archivisie  :  M.  l'abbé  DiirinsTi  ,  vi-  Arcliivifle  :  M.  l'abbé  Deliioste,  vi- 
caire à  la  eatbédrale.  caire  à  la  cathédrale. 


COMITE  DE  REDACTION  : 

1861.  1862. 

M.  l'ablié  FiNFS,  cii.inoine,  supérieur  1\I.  l'abbé  1"im  s,  cIkiikmeic,  supérieur 

du  (irand-Si'minaire.  du  (Jrand-Séniinaire. 

M   l'abbé  |{|;\SA,  clianoine  honoraire,  'S],  l'abbé  Iîknsa,  chanoine  lionorairp, 

pidf.  de  pliiloMiphie  et  de  lliécilugie  prof,  de  philosophie  et  de  llieolugiu 

au  firand-Séniinaire  de  Perpignan.  au  tîrand-Séminaire  de  Perpignan. 


Wmm  DKS  TUAVAUX  DE  LA  SOCIÉTÉ, 

DEPUIS  LE  MOIS  b'OCTOHRE  IS59  JL'SOIAI  ôl  DÉCEMBRE  iSf.2, 

l'ai    M.  FABRE,  scrnUiiin-. 


Avant  riiislitiilioii  des  concours  rcgionnnx ,  ninliirô 
les  nonild'Ciix  et  rapides  uioumis  do  coniiininication , 
les  difl'érentes  provinces  dont  se  compose  aiijoiird'liiii  la 
France,  étaient  en  (iiichpic  snrie  ('trangèrcs  les  unes 
aux  autres,  surtout  sous  le  rap|)ort  des  i)ro(luclions 
agricoles.  La  plupart  des  hahitanls  dune  contrée  étaient 
bien  loin  de  connaître  toutes  les  ressources  des  contrées 
voisines.  Quehpics-uns  niènie  ignoraient  les  richesses 
de  leur  propre  pays.  Tout  est  bien  changé  depuis  (pie 
cluuiue  région,  chaiiue  déparlenient  di'  lenipire  français, 
peut  exposer  aux  regards  de  toute  la  Fiance,  et  pour 
ainsi  dire  du  inonde  entier,  tout  ce  qu'il  recèle  dans 
son  sein. 

Depuis  la  publication  de  noire  douzième  bulletin,  uni! 
de  ces  utiles  et  iin|torlantes  solennités  a  eu  lieu  à  l'erpi- 
gnan.  Toute  la  région  dont  lait  partie  notre  beau  dé|iar- 
teinenl  a  6u''  invitée  ii  prendre  [)arl  a  celte  exposition 
des  produits  de  l'agriculture,  des  arts  et  de  rindiistrie. 
On  s'est  rendu  de  tous  C(">tés  ii  cet  a|)pel.  On  a  admiré, 
dans  le  local  de  la  llalle-au-Blé,  une  inlinité  de  cliefs- 
d'd'uvre  de  peinture  et  de  sculpture  (pic  possède  notre 
(b'partement ,  et  dont  la  plupart  ('taient  ignorés  et  en 
(pielijue  s(»rle  enfouis.  On  a  admiré,  près  de  la  porte 
Notre-Dame,  notre  Palais  de  l'Industrie,  et  nos  produits 
indigènes  rivalisant  a\ec  les  produits  étrangers,  Tempor- 


tant  mémo  quoI(|iiet'(tis  sur  eii\  ;  mais,  ce  (jiii  surtout  a 
excité  la  siirprisi'  cl  l'ontliousinsme  des  visiteurs  eiiaii- 
gei'S,  c'est  notre  nia!^nili(iue  pioincnade  des  platanes, 
ces  arbres  géants,  dont  la  cime  se  perd  dans  les  nues, 
c'est  ce  dôme  de  verdure,  iuterce|»iant  les  rayons  du 
soleil,  et  figurant  aux  regards  étonnés  la  voûte  d'une 
immense  et  majestueuse  l)asili(iue;  ce  sont  ces  longues 
files  d'animaux  utiles,  amenés  de  nos  trois  arrondisse- 
ments, et  surpassant  |>ar  leur  nomhre,  (pnMtpiefois  par 
leur  taille  el  leur  beauté,  eeii\  cpi'on  avait  vu  figurer 
dans  les  expositions  voisines.  Kiilin,  ec  (pii  a  mis  le 
comble  ;i  radiiiiralion  des  élrangers,  ce  sont  ces  nom- 
breux, ces  incomi)aral)les  écliantillons  de  nos  produits 
maraiebcrs,  qui  dt'sormais  assurent  à  notre  dé|)artement 
le  nom  de  .Ictrdin  de  la  France.  Kt ,  cependant,  il  faut 
bien  l'avouer,  tous  nos  liorticniteurs  n'ont  pas,  en  cette 
circonstance,  déployé  le  même  /Me.  Un  grand  nombre 
n"onl  pas  répondu  ii  linviialiim  (|ui  leur  a  été  adressée. 
Esp(''rons que  celle  pri'miéi(>  liMe  régionale  aura  déjà  éveillé 
l'émulation  des  plus  indillérents;  (|ue  pas  un  ne  man- 
quera au  rende/.-vous  (jui  leur  est  assigné  dans  dix  ans, 
cl  (pTcn  18Tti,  la  l'rance  el  l'I^u'opc  entière  apprécieront, 
comme  il  le  mérite,  noire  beau  Uotissillon. 

A|)rcs  avoir  consacre  ces  (picbpies  lignes  à  notre 
concours  régional,  el  avant  d(>  donner  un  aperçu  des 
travaux  agricoles,  scientiliciues  et  lilti'raires  que  renlérme 
ce  bulletin,  nous  paycMuns,  comme  d'ordinaire,  le  juste 
tribut  de  nos  regrcls  ii  la  im-mniic  des  mcndircs  dont  la 
Société  déplore  la  perle  toute  récenle.  Kll<'  s'est  vu  en- 
lever, depuis  l(S,')î>,  .M.  I.acombe  .Saint-.Micbcl ,  ancien 
maire  de  Perpignan,  dont  le  noble  caractère  riMulil,  dans 
(les  circonstances  difiiciles,  iremiiieMls  ser\i((s  ii  la  ciié-; 
M.  IlippiiJUc  l'iias,  iiieinbre  de  l'Assemblée  Coustiluanle 
en  18i<S,  avocat  d'élite,  (pie  regi'cttei'out  longtemps,  avec 
nous,  le  barreau  de   l'erpignan  ,  et  tous  nos  concitovens 


sans  exception;  M.  Taslu-Jauhert,  avocat,  qui,  pendant 
qiiel(]iios  années,  a  ieni|)li  les  fonctions  (rarchiviste  de  la 
Société;  et,  enfin,  M.  Emile  Tastu-Collet,  archéologue 
distingué,  à  qui  une  mort  inalteudiie  n"a  pas  donné  le 
temps  de  mettre  la  dernière  main  aux  nombreux  cl  inté- 
ressants mémoires  qu'il  se  proposait  de  publier. 

Comme  précédemment,  nous  diviserons  notre  compte- 
rendu  en  trois  parties,  suivant  les  dillérentes  qualilicalions 
'de  la  Société. 

AGKICULTURE. 

Dans  la  séance  du  12  Octobre,  M.  Companyo,  père, 
docteur-médecin ,  a  pris  la  parole ,  et  s'est  exprimé  en 
ces  termes  : 

«Le  déparlemcnl  des  Pyrénées-Orientales,  avec  sa 
douce  température ,  serait  propre  à  faire  les  essais 
d'acclimatation  d'un  grand  nombre  de  plantes  exotiques 
qu'on  lente  vainement  de  faire  venir  ailleurs.  Les  oran- 
gers et  les  citroniers  y  frucliliaiil  en  |)leine  terre  d'une 
manière  admirable;  les  palmiers  et  les  dattiers  s'élevant 
à  [)lusieurs  mètres,  donnant  tous  les  ans  des  lleurs, 
nouant  leurs  fruits;  les  agaves  formant  des  bordures  sur 
nos  propriétés,  on  s'étonne  que  l'on  n'ait  pas  demandé, 
pour  notre  contrée,  l'établissement  d'un  jardin  d'essai  et 
d'acclimatation. 

«  11  y  a  peu  d'années,  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur, 
envoya  à  Perpignan  diverses  graines  de  la  Chine,  pour 
en  essayer  la  culture.  Plusieurs  légumineuses  réussirent 
parfaitement;  des  plantes  textiles  se  tirent  admirer  par 
leur  belle  venue. 

«  Parmi  ces  graines  se  trouvaionl  dos  semences  de 
deux  arbres  de  haute  futaie.  Un  catalpa,  l)icn  diiïérent 
de  celui  que  nous  possédions  déjà  depuis  longtemps, 
s'est  développé  d'une  manière  admirable.    Il  a  aujour- 


d'iiiii  sept  ans.  Il  s'élève  à  II  mètres,  et  donne  depuis 
trois  ans  de  belles  lleurs  et  des  siliqiies  de  40  centimètres 
de  longueur. 

«  L'arbre  h  suif,  semé  en  même  temps ,  a  o  mètres 
de  liant,  et  depuis  trois  ans  aussi  est  couvert  do  lleurs 
au  i)riutemps,  et  de  graines  qui  viennent  en  parl'aite 
maturité  au  mois  de  septembre.  Tout  cela  en  pleine  terre, 
tandis  qu'à  Paris,  avec  tous  les  avantages  d'une  serre 
cliaude,  on  u"a  pu  obtenir  qu'un  arbuste  de  30  centi- 
mètres de  hauteur. 

«  M.  Testory,  pharmacien,  mettant  à  i)ro(it cette  année 
quehjues  graines  trouvées  dans  de  la  gomme  arabitpie, 
qu'il  avait  reçue,  les  sema  en  avril  dernier  dans  son 
jardin,  l^n  superbe  pied  de  canne  à  sucre  est  né  de  ce 
semis,  et  s'est  développé  admirahlemont.  De  sa  racine 
geiiouiilée  et  fdireuse,  s'élèvent  trois  tiges,  qui  ont 
atteint  o"\80  de  hauteur.  Elles  ont,  à  un  mètre  du  sol, 
15  centimètres  de  circonférence.  Ces  trois  tiges  ne  sont 
pas  entièrement  rondes;  elles  sont  un  peu  aplaties  et 
garnies  d'une  inlinité  d'arliculnlions  ou  n(rMids  Irès-rap- 
prochés.  Les  feuilles  sont  engainantes  ei  de  la  lougiu^ur 
d'un  mètre;  elles  sont  pendantes  et  rudes  sur  les  bords, 
avec  une  nervure  longitudinale  moyenne.  Si  la  tempéra- 
ture de  cet  automne  se  maintient  douce,  cette  graminée 
pourra  fleurir,  car  on  voit  déjà  paraître  des  lleuis  au 
sommet  de  la  llèche  cpii  porte  ordinairement  la  ]);iuicule. 

«  Toutes  ces  heureuses  réussites  font  regretliM'  ([u'on  ne 
porte  pas  plus  d'intérêt  ;i  un  département  <|iii  pourrait 
rendre  de  très-grands  services  comme  jardin  d'acclima- 
tation. » 

Dans  la  même  séance,  M.  le  Président  donne  lecture 
d'une  lettre,  où  M.  Higail,  résidant  à  la  forge  de  Sorède, 
nous  communiipie  un  nouveau  remède  de  son  inxcniion 
contre  la  maladie  de  l;i  vigne,  (|ui  n'est  autre  chose  ([ne 
de  la  clianx  vi\e  et  de  la  pondre  de  charbon.  Il  a,  dit-il, 


10 

flixoniposc  la  cliaiix  avec  de  loaii ,  et  il  en  a  as|)ergc  le 
fruit,  (|iril  a  couvert  ensuite  de  ladite  poudre,  qui  s'y 
est  fort  appliipiée.  I.e  résullat  a  été  merveilleux  :  pas  un 
raisin  ainsi  traité  n'a  péri.  M.  Rigail  espère  (juc  l'année 
prochaine  les  propriétaires  de  vignes  nieltronl  en  prati- 
que ce  nouveau  procédé. 

M.  (lonte,  d'Kstagel,  présente  (pielques  observations 
sur  le  soufrage,  dont  il  a  lait,  avec  le  plus  grand  succès, 
de  nombreuses  expériences  dans  ses  propriétés.  Le  sou- 
fre, selon  lui,  s'indltre  surtout  dans  les  jeunes  pousses. 
Quant  an  garou ,  dont  (pii'I(|ues  propriétaires  ont  j)ai!é 
connue  |)()uvant  reuiplacçr  le  sout'ie  pour  détruire  Voi- 
diuin,  M.  Conte  l'a  aussi  reconnu,  ce  prétendu  remède 
ne  produit  aucun  elfet. 

Sf'finre  (lu  2o  Janricr  1860.  —  M.  Sian,  chargé  de 
rendre  compte  de  tieux  numéros  du  iîullclin  mensuel 
de  la  Société  d'Agriculture  de  Caen  (août  et  septend)re 
■l8o9),  y  remanpie  une  devise  prise  dans  la  tradudiou 
fran(.'aise  des  Aphorismes  catalans  de  M.  Fages  de  lloma  : 
(Jui  veut  que  son  rhai)ip  se  )vp(ise,  rn  cidlurc  siiil  peu  de 
chose,  et  donnée  pour  épigraphe  à  un  mémoire  couronné, 
se  rattachant  à  une  question  agricole. 

M.  Siau  ajoute  (]ue  iM.  Barry,  mend)re  de  celte  Société, 
chargé  de  rendre  compte  de  notre  dernier  l^ulletin,  l'a 
signah'  avec  bienveiilnnce,  dans  la  séance  du  i  juin  IHoS). 

Dans  la  séance  du  25  Avril  1S()(),  M.  Siau  lit  une 
notice  extraite  du  Monilcur  universel  du  18  avril  1800, 
commençant  par  ces  mois  :  «  Dans  la  deniière  séance  de 
la  Société  impériale  et  centrale  d'Agriculture,  une  inté- 
ressante connnunication  a  été  l'ait(>  j)ar  M.  André  Leroy, 
d'Angers,  sur  un  nouveau  procédt'  de  bouturage  de  la 
vigne,  qui  parait  avoir  été  mis  en  pratlipie,  pour  la  pre- 
mière l'ois,  par  un  vigneron  des  environs  de  Samnur.  Ce 


11 

procL'ilo  consisle  à  enlever  coniplétemenl  l'écorce  ii  la 
base  des  crosselles,  sur  une  longueur  de  20  à  50  cenli- 
nù'lres,  selon  la  distance  des  yeux  ou  la  dimension  des 
mérythaUes,  etc.  » 

A.  la  lecture  de  cette  notice,  M.  Siau  ajoiile  :  «  (le  mode 
de  bouturage  est  depuis  longtemps  connu  dans  notre 
département.  Il  a  été  particulièrement  mis  en  prali(|ue 
par  des  viticulteurs  d'Kstagel. 

«  M.  Philippe  Boluix,  juge  au  tribunal  de  Perpignan,  a 
essavé  ce  bouturage,  il  y  a  cinq  ans,  et  les  résultats  ont 
été  entièrement  eonrormes  à  ceux  (pie  signale  M.  l.eroy. 

«  M.  Sylvestre  Vilallongue  a  enjployé  ce  même  procédé 
en  décembre  dernier,  sur  une  |)lanlation  de  (pialre  hec- 
tares de  vigne.  Il  se  propose  de  soumettre  cette  expé- 
rience h  l'examen  d'une  commissi(m  nommée  par  notre 
Société.  » 

Communication  :  1"  D'une  lettre  [lar  laipielle  M.  Péri- 
dier,  de  S:iiiii-Laurent-de-la-Salanque,  adresse  à  M.  le 
Président  de  la  Société  (piehiues  échantillons  de  vin  de 
la  plaine,  avec  prière  de  les  soumettre  à  l'appréciation 
de  la  Société.  Ces  échantillons  sont  envoyés  à  une  com- 
mission composée  de  .MM.  Carlioneil  et  Reynès-Audusson. 

2°  D'une  lettre  de  M.  le  Préfet,  annonc^anl  cpie  l'adresse 
présentée  par  la  Société  Agricole,  Scientiliipie  et  l.itti'- 
raire  des  Pyrénées-Orientales,  à  l'occasion  du  programme 
impérial  du  5  janvier  dernier,  a  élé  mise  sous  les  yeux  de 
S.  M.  rKm|)ereur,  (pii  en  a  pris  connaissance  avec  intérêt. 

5"  D'une  lettre  de  M.  L  Coule,  d'Kstagel,  conçue  en 
CCS  ternies:  «  .l'iii  riionuciu'  de  \oiis  envoyer  une  notice 
sur  la  maladie  de  la  vigne.  Si  vous  y  trouvez  tpielipie 
chose  de  bon,  <lonne/.-lui  de  la  puhlicilé,  en  la  soumet- 
tant à  un  contrôle  sévère,  et  après  l'avoir  dégagée  de  tout 
ce  qui  vous  paraîtra  détéctncux  dans  la  l'orme.  Quanl  au 
fond,  je  11'  revendique,  comme  le  produit  d'expériences 
soiivciil  r('nouv('l(''(\s.  » 


12 

Séance  du  30  Mai  i860. — Coinniunicalion  d'une  lettre, 
par  laquelle  M.  le  Préfet  du  département  nous  annonce  un 
diplôme  destiné  h  la  Société  Agricole,  Scientifique  et  Litté- 
raire des  Pyrénées-Orientales,  cpii  a  obtenu  une  médaille 
d'arijent  au  concours  de  botani(pie  et  d'horticulture  de 
Moiit|)ellier,  en  I.S()0,  pour  patates  conservées,  et  belle 
collection  de  i'ruils  et  légumes. 

Autre  lettre  de  M.  le  Préfet,  conçue  en  ces  termes: 
«  M.  le  Président,  par  suite  d'un  envoi  (]ue  S.  Ex.  M.  le 
.Ministre  de  l'Agriculture  m'a  fait  en  1857,  de  semences 
de  riz  sec  de  la  Cliine,  et  des  instructions  que  je  vous  ai 
adressées  à  la  même  époque,  vous  avez  fait  distribuer 
ces  graines  à  des  agriculteurs,  pour  qu'elles  servent  à 
des  essais  de  culture  et  d'alimentation. 

«  Bien  que  ces  premières  expériences  n'aient  point  de 
résultats  concluants,  les  personnes  (pii  ont  l)ien  voulu  s'en 
charger  ont  récollé  des  produits,  cl  doivent  encore  sans 
doute  en  avoir  à  leur  disposition.  S.  Kxc.  me  charge  de 
leur  en  faire  demander  quelques  échantillons,  que  je  vous 
prie  de  vouloir  bien  me  faire  parvenir  le  plus  tôt  possible.» 

Séance  du  il  Juillet  IS60.  —  Lettre  de  M.  Jean  Valla- 
rino,  cadet,  qui  nous  adresse  ses  observations  sur  une 
notice  de  M.  Conte,  propriétaire  h  Estagel,  traitant  du 
soufrage  de  la  vigne,  et  insérée  dans  le  journal  de  notre 
département,  no  29. 

Notice  de  M.  Pioulfia,  membre  correspondant  et  chef 
d'institution  à  Millas,  sur  la  maladie  qui  attacjue  cl  dé- 
truit la  récolte  du  blé,  quand  on  s'y  attend  le  moins,  et 
sur  les  moyens  d'y  remédier. 

Autre  lettre  du  même,  accompagnant  l'envoi  d'un 
ouvrage,  d"ont  il  est  l'auteur,  intitulé  :  Cours  ou  Leçons 
d' Agriadlnrc  à  rusage  des  cli'ves  les  jilus  avancés  des  écoles 
primaires.  M.  Rouilla  prie  en  même  temps  la  Société  de 
soumettre  ce  livre  à  une  commission  choisie  dans  son  sein. 


13 

Séance  publique  du  29  Juillcl  1860. —  Dans  un  premier 
rap|»orl  sur  riiuluslrie  séricicole,  M  Siau  rend  compte  de 
réducation  des  vers  à  soie  eu  18G0. 

La  Société  des  Pvréuées-Urientales,  voulant,  dans  un 
but  d'intérêt  public,  mettre  en  relief  les  produits  de  nos 
jardius  et  de  nos  ruches,  en  avait  réuni  quelques-uns 
qu'elle  avait  adressés  au  Concours  régional  de  Tllérault. 
M.  Siau  rappelle  qu'ils  ont  été  jugés  digues  de  deux 
médailles  d'argent,  dont  riionncur  revient  nalurellemeut 
aux  persoimes  qui  avaient  fourni  l'envoi. 

Dans  un  troisième  rapport,  M.  Siau  entretient  ses  audi- 
teurs des  miels  du  Roussillon  envoyés  au  Concours  de 
Monti'ellier.  En  éuumérant  ces  produits,  M.  le  rapporteur 
a  ap|)elé  ratlentiuu  sur  divers  producteurs  qui  se  distiu- 
aient  a  d'autres  titres. 


o 


Séance  du  19  Décembre  1860. — M.  Companyo,  père, 
vice-président,  ouvre  la  séance  par  la  lecture  d'un  rap|)nrt 
sur  une  certaine  quantité  de  plantes  de  la  (^liine  qui  ont 
été  cultivées  en  1800  au  jardin  d'essai  de  notre  pépinière, 
et  qui,  malgré  la  température  exceptionnelle  de  l'été  der- 
nier dans  le  Roussillon,  ont  donné  d'assez  beaux  résultats 
pour  faire  espérer  de  les  acclimater  dans  noire  départe- 
ment, où  elles  seraient  d'un  grand  secours  pour  les  usages 
domestiijues,  ainsi  que  pour  la  nourriture  de  la  volaille 
et  des  bestiaux. 

M.  Companyo  fait  aussi  mention  de  la  canne  à  sucre, 
qui  a  pris  en  hauteur  et  en  grosseur  un  développement 
aucpiel  ou  était  loin  de  s'attendre,  nuùs  la  graine  nu  pas 
mûri;  aussi,  M.  Companyo  pense-t-il  que  celle  piaule  ne 
douiieraii  jamais  parmi  nous  de  bons  résultats,  el  qu'il  faut 
renoncer  a  l'y  cultiver,  si  ce  n'est  par  [)ur  agrément. 

Séance  du  16  Janvier  1861 . — M.  le  Président  donne  avis 
à  la  Société  de  la  remise  (pii  lui  a  été  faite  par  M.  le  Préfet 


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de  25  pieds  ilo  Itamhou,  envoyés  de  la  pépinière  ceiiUale 
du  Gouvernement  à  Aliter,  par  ordre  de  S.  M.  l'Empereur. 
Ces  pieds  ont  été  disliihués  à  divers  membres  de  la  So- 
ciété, et  aux  |)épiniéiistes  de  la  ville,  parliculièrement  ii 
MM.  Tlnjiiii,  tVéres.  chargés  d'en  surveilliT  la  cnllnre. 

Séance  du  6  .)f(irs  1861.  —  M.  Siau  lit  nii  mémoire,  où 
il  engage  nos  aihoriculteurs  à  pratiquer  la  taille  du  pèclier. 
Cette  opération,  ajoute-l-il,  commence  à  être  bien  conçue; 
mais  elle  déviait  élre  propagée  dans  nos  jardins,  où  la 
culture  de  cet  arbre  est  très-élendue. 

M.  Siau  présente  ensuite  quelques  observations  sur  nos 
éducations  de  vers  à  soie  pendant  l'année  dernière. 

M.  le  Secrétaire  donne  lecture  d'un  mémoire  composi' 
par  M.  Paulin  Tesiory,  pharmacien,  mendu'c  résidant, 
sur  racclimalalion  des  piaules  exoli(iues  dans  notre  dépar- 
tement. 

Séance  du  47  Avril  1861. —  M.  Siau  communique  à  la 
Société  une  notice  sur  nos  vignobles  et  sur  leur  exlen- 
sion,  depuis  l'an  1800  jusqu'à  nos  jours. 

M.  le  Président  engage  tous  les  mendjres  de  la  Société 
à  propager  autant  que  possible  le  soufrage  dans  notre 
département.  «C'est,  dit-il,  le  seul  remède  qui  jusqu'au- 
jourd'hui ail  été  reconnu  vraiment  eflicace  contre  l'o/Y/ù/)», 
et  celte  maladie  n'est  [)as  sur  le  point  de  disparaître.  » 

Séance  du  8  Mal  1861 .  —  M.  Companyo,  père,  lil  une 
note  sur  la  fécondation  artilicielle  du  palmier  en  Egypte, 
où  cet  arbre,  très-abondant  et  très-fertile,  est  une  des 
richesses  de  ce  pays. 

Séance  du  26  .Juin  1861.  --}\.  Siau  lil  \\\\  rapport  sur 
les  éducations  des  vers  à  soie  dans  notre  département 
en  1861. 


Séance  du  11  .lailhi  /,S'6/.--I.ellro  do  M.  Midiol  (intn, 
deCalllar,  qui  annonce  à  la  Société  qu'il  élève  celle  année 
quatre  onces  de  i^raines  de  vers  à  soie  :  loul  lui  lail  espérer 
une  hi'illanle  réussite.  Il  ajoute  qu'il  l'ail  tous  ses  ellorls 
pour  propager  parmi  ses  concitoyens  celle  belle  industrie, 
en  leur  exposant  les  avanla-^es  qui  pourraient  en  résulter. 

M.  le  Président,  a|irès  celte  lecture,  déclare  (pie  les 
graines  de  vers  à  soie,  viMidues  par  M.  Trilla  à  des  habi- 
tants du  département  de  rilérault,  sont  les  seules  qui  y 
aient  réussi,  el  il  signale  la  fraude  qu'on  a  laite,  en 
vendant,  comme  produit  de  notre  département,  des  grai- 
nes qui  lui  sont  étrangères. 

Sihtnrc  dn  4  Dccoubre  ISGL-  M.  le  Président  com- 
munique à  la  Société  une  lettre  de  M.  le  Préfet  <\\i 
département,  coïK'ue  en  ces  termes  : 

'(  Le  sieur  Rouilla,  instituteur  à  Millas,  expose,  dans  un 
mémoire  que  j'ai  l'honneur  de  vous  transmettre,  l'utilité 
(ju'il  y  aurait  pour  le  département  de  renouveler  sur  une 
partie  du  littoral  les  essais  de  culture  de  colon  qui  furent 
tentés  avec  quelques  succès  à  une  époque  déjà  éloignée, 
.l'appelle  votre  attention  el  celle  de  la  Société  Agricole 
sui'  cette  question  importante,  et  vous  prie  de  me  faire 
connaître  quelle  suite  il  aura  paru  utile  de  lui  donner.  » 

A  la  lettre  de  .M.  le  l'réfet  esl  joint  le  mémoire  de 
M.  Roullia. 

M.  le  Président,  après  avoir  donné  lecture  de  ces  deux 
pièces,  rappelle  qu'on  essaya,  en  ellet,  sous  le  premier 
enq)ire,  do  cultiver  le  coton  dans  les  environs  do  Perpi- 
gnan. Il  ajoute  que  ces  tentatives  furent  loin  de  donner 
les  résultais  qu'on  en  attendait.  Toutefois,  pnur  n'pondre 
aux  désirs  de  M.  le  Préfet,  la  Société  nomme,  alin  de 
s'occu|>er  de  la  iiroposilion  de  M.  Ronllia,  une  connnis- 
sion  compos('o  de  MM.  ('.onq)anvn,  père,  Sian  et  Victor 
Rallie,  maire  de  Cabestanx. 


16 

Séance  du  15  Janvier  'fS62.  —  Sur  la  proposition  de 
M.  le  Président,  la  Société  décide  qu'a  l'occasion  du 
Concours  régional,  elle  décernera  des  récompenses  aux 
serviteurs  ruraux  les  plus  méritants. 

Séance  du  23  Avril  1862. —  M.  le  Président  comnmnique 
la  liste  des  personnes  qui  se  sont  présentées  afin  d'obte- 
nir des  récompenses  pour  services  ruraux.  Les  plus  mé- 
ritants, d'après  l'avis  unanime  de  la  Société,  sont: 

1'^  Hohor,  Isidore,  depuis  soixante-dix  ans  au  service 
de  M.  Fabre,  ju'opriétaire,  domicilié  à  Saborre; 

2»  Haynal,  Jean,  depuis  cinquante-sept  ans  au  service 
de  iM.  de  Selva; 

5'^  Bacliès,  François,  berger,  depuis  (piarante-neui"  ans 
au  service  de  M.  Keste,  Josepb,  maire  de  la  commune 
de  L'A  Ibère; 

4o  Large,  Pierre,  berger,  depuis  quarante-quatre  ans  au 
service  de  M.  Jonquères,  François,  propriétaire,  domi- 
cilié à  Vilellongue-de-la-Salanque; 

5°  lîoscb,  André,  depuis  vingt-sept  ans  au  service  de 
M.  Bonalbs,  d'Ille; 

6°  Polmade,  François,  depuis  vingt-quatre  ans  au  ser- 
vice de  M.  Numa  Lloubes,  dans  son  domaine  de  Bagës; 

7°  Malis,  Jacques,  depuis  vingt-quatre  ans  au  service 
de  M.  Assisclc  Jonquères,  maire  de  Cornoilla-del-Yercol  ; 

8"  Brousse ,  François ,  depuis  vingt  ans  au  service  de 
M.  Passama,  docteur  en  médecine. 

Séance  du  U  Juin  4862.  —  M.  le  Président  fait  part  à 
la  Société  d'une  lettre,  dans  laquelle  M.  Becb,  propriétaire, 
à  Argelès-sur-Mer,  expose  les  lieuroux  résultats  obtenus 
sur  un  terrain  inculte  par  une  plantation  de  micocouliers. 
11  espère  que  la  publication  de  ce  fait  contribuera  à  jeter 
quelque  clarté  sur  les  moyens  à  prendre,  pour  augmenter 
dans  notre  département  le  revenu  des  terres. 


SCIENCES,   ARTS  ET   INDUSTRIE. 

Séance  du  30  Movembre  18o9. — Coiniminicatioii  d'une 
lellrc  (le  M.  Fossaty,  annonçaiil  (lu'il  a  iiili'odiiit  des 
amélioralions  iiiiporlanles  dans  la  ral)i'iealiûii  du  olioculat, 
01  inventé  une  spécialité  qu'il  nomme  chocolat  analeptique 
et  rafraîchissant,  composé  de  cacao  et  de  pistaches,  par 
des  procédés  (jui  lui  sont  propres,  «puisqu'il  est,  dit-il, 
le  seul  qui  le  lal)ii(pie  en  France.»  Il  prie,  en  même 
temps,  la  Société  de  nonnner  une  commission  pour  exa- 
miner et  apprécier  ses  produits.  La  Société,  se  rendant 
au\  vo'ux  de  M.  Fossaty,  nomme  pour  faire  l'essai  de  son 
chocolat,  une  commission  composée  de  MM.  Siau,  l'ahhé 
Delhoste,  Boix  et  Vilallongue. 

Séance  du  2/  Décembre  1859. — M.  (^ourtais,  instituteur 
communal  à  Port-Vendres,  ouvre  cette  séance  par  la  lec- 
ture de  quelques  passages  d'un  mémoire  sur  ras|)hodèle 
(liasliila  rcgiii'i,  dont  il  est  parvenu  à  extraire  une  suhs- 
tance  alimentaire,  d'excellent  vinaigre,  et  même  du  sucre 
de  bonne  qualité. 

A  M.  Courtais  succède  M.  Boi.x,  pharmacien,  rappor- 
teur de  la  commission  chargée  de  se  rendre  à  rétablis- 
sement de  M.  Fossaty,  pour  assister  à  la  fabrication  de 
ses  chocolats  et  porter  sur  eux  un  jugement. 

M.  Boix,  après  avoir  rendu  com[)l('  du  procédé  ingé- 
•  nieux  de  M.  Fossaty  et  de  la  supériorité  de  ses  produits, 
termine  par  ces  mots  :  «  En  signalant  à  votre  attention 
les  chocolats  de  M.  Fossaty,  nous  ne  faisons  que  rap- 
peler le  succès  qu'il  obtint  a  rexposilion  universelle  de 
\Soo.  Une  médaille  de  deuxième  classe  lui  fut  accor- 
dée pour  ses  chocolats  si  bien  préparés  et  parfaitement 
broyés.  » 

2 


18 

Séance  du  25  Janvier  1860.  —  M.  Tabbé  Fines,  ren- 
dant compte  d'un  volume  de  l'Académie  des  Sciences 
de  Toulouse,  cinquième  série,  tome  troisième,  y  signale 
entre  autres  notices  étrangères  à  noire  déparlement,  un 
mémoire  de  M.  Filhol,  inlilulé  :  Recherches  sur  l'alcaliniU 
des  eaux  sulfureuses  des  Pijrénées-Orientcdes. 

Séance  du  50  Mai  hS60.—yi.  le  Président  communique 
à  la  Sociclé  :  1°  Une  lettre  de  M.  le  Directeur  de  la 
Topographie  des  Gaules.  Cetle  missive  est  conçue  en  ces 
termes:  «S.  Exe.  M.  le  Minisire  de  rinstriiction  publique 
a  communiqué  à  la  connnission  de  la  Topograjjbie  des 
Gaules  le  mémoire  de  M.  K.  Alarl  sur  la  géographie  histo- 
rique des  Pyrénées-Orientales.  La  connnission  examinera 
ce  travail  avec  intérêt.  H  vous  prie  de  remercier  de  son 
utile  concours  la  Société  Agricole,  Scientifique  et  Litté- 
raire, dont  vous  êtes  le  président,  Le  travail  de  M.  Alart 
a  paru  à  la  ibis  sérieux  et  original  à  deux  des  membres 
de  la  commission  qui  ont  pu  y  jeter  les  yeux.  La  commis- 
sion ne  doute  pas  qu'il  ne  réponde  à  son  attente  et  ne 
lui  donne  la  solution  des  dilïicultés  que  soulève  la  géo- 
graphie ancienne  des  Pyrénées-Orientales.  » 

!2"  Un  mémoire  sur  le  croup,  présenté  par  M.  Julien 
Bonafos,  docteur-médecin,  àSainl-Laurent-de-la-Salanque, 
mend)re  correspondant. 

Séance  du  16  Janvier  1861.  —  M.  Companyo,  père, 
donne  lecture  de  deux  lettres  qu'il  a  reçues  de  son  (ils, 
M.  le  docteur  Louis  Conq)anyo,  attaché,  en  (pialitc  de 
médecin,  à  la  compagnie  maritime  de  l'isthme  de  Suez, 
et  qui  renferment  d'intéressants  détails  sur  cette  con- 
trée et  sur  les  travaux  qu'on  y  exécute. 

Séance  du  8  mai  1861 .  —M.  .louane,  boulanger,  à  Per- 
pignan, ayant  présenté  à  l'appréciation  de  la  Société  un 


19 

pétrin  lionl  il  est  riiiveulcur,  M.  le  Président  désigne, 
pour  examiner  cet  objet,  une  commission  composée  de 
Àl.M.  lioix,  Siau  et  Coinpanyo,  père. 

Il  désigne  ensuite  une  autre  commission,  composée 
de  M.M.  Carbonoil,  Conto  et  Passama,  chargée  d'examiner 
un  soulllet  pour  le  soufrage  de  la  vigne,  de  rinvention  de 
M.  Amiel,  d'Estagel. 

Séance  du  26  Juin  4861. — M.  le  Président,  commu- 
nique à  la  Société  :  1°  Une  lettre,  où  M.  le  I)''  Auberge, 
médecin  principal,  oflicier  de  la  Légion-d'IIonnour  et 
mend)re  résidant  de  la  Société,  lui  adresse  un  exemplaire 
de  son  ouvrage  intitulé  :  Ifi/drûlogie  médicale  de  l'Ela- 
blisscmcnt  de  La  Presle,  et  lui  en  ollVe  la  dédicace,  ce 
que  la  Société  accepte  avec  reconnaissance. 

2'J  Un  mémoire  sur  les  moyens  (rempéclier  les  inon- 
dations, et,  en  même  temps,  de  canaliser  les  llenves  et 
rivières,  par  M.  Fraisse,  de  Perpignan,  mendjre  corres- 
pondant de  la  Société.  Une  commission ,  composée  de 
MM.  Bacli,  Caiî'e  et  de  Lamer,  est  chargée  d'examiner 
ce  mémoire. 

o"  Une  lettre,  dans  laquelle  M.  Leyméric,  professeur 
de  géologie  a  la  Faculté  de  Toulouse,  nous  adresse  une 
lu'ochure  intitulée  :  Xotice  géologique  sur  Amélie-les-Bains, 
et  nous  témoigne  le  désir  de  voir  insérer,  dans  notre  pro- 
chain bulletin,  ce  travail,  d'un  intérêt  local  pour  notre 
déparlement. 

M.  Companyo,  père,  donne  lecture  d'une  lettre  qu'il 
a  reçue  de  M.  Noguès,  professeur  d'histoire  naturelle  au 
Collège  de  Sorèze  et  membre  eorrespondant  de  notre 
Société.  Le  but  de  cette  missive  est  d'annoncer  la  com- 
position de  la  carte  géologlipie  des  Pyrénées-Orientales, 
que  M.  Noguès  a  entreprise,  de  concert  avec  M.  d'Ar- 
chias,  professeur  de  paléontologie. 

M.  Boix,  rapporteur  de  la    comndssion  chargée  d"exa- 


20 

miner  et  d'apprécier  le  pétrin  mécanique,  inventé  par 
M.  ,louane,  boulanger,  l'ait  part  à  la  Société  des  ohser- 
vations  qui  ont  été  faites  sur  celte  machine.  «  De  tels 
résultats,  dit-il  en  terminant,  devraient  appeler  l'atten- 
tion des  boulangers,  et  les  porter  a  ado|)ter  ce  nouveau 
pétrin.  Voire  commission  vous  |)ropose,  .Messieurs,  d'en- 
courager de  pareils  essais,  et  de  lénioigiier  à  M.  Jouane 
votre  satisCaclion  pour  l'heureuse  invention  qu'il  vous  a 
présentée.  »  Les  conclusions  de  ^I.  lîoi.v  sont  adoptées 
par  la  Société. 

Séance  du  47  Juillet  ISGL — Par  sa  lettre,  datée  de 
Cases-de-Pène,  du  lc>  juillet  18(>l,  M.  Carboneil  annonce 
à  M.  le  Président  qu'il  a  essayé  le  soulllot  inventé  pour 
le  soufrage  de  la  vigne  par  M.  Amiel ,  d'Kstagel.  Il  fait 
connaître  les  inconvénients  de  celle  nouvelle  macliine,  et 
engage  M.  le  Président  à  prendre  l'avis  de  -AI.M.  Juslin 
Durand  et  Passania,  qui  en  ont  fait  usage,  a(in  de  voir 
s'ils  signaleront  les  mêmes  inconvénients,  quand  on  s'en 
sert  une  journée  entière. 

Séance  publique  du  28  Juillet  ISUI. — M.  Chape  a  lu 
une  notice  sur  les  travaux  et  les  succès  en  sculpture  de 
notre  compalriote  Oliva,  et  a  parlé  des  progrès  rapides 
du  jeune  Borreil,  qui,  marchant  sur  les  traces  de  M.  Oliva, 
fera  un  jour,  comme  lui,  honneur  à  notre  département. 

Séance  du  9  Octobre  tS6L — M.  Companyo,  père,  com- 
munique à  la  Société  un  mémoire,  où  M.  Noguès,  profes- 
seur d'histoire  naturelle,  donne  d'intéressants  détails  sur 
les  découvertes  géologiques  qu'il  a  faites  dans  les  terrains 
des  vallées  du  Tech  et  de  la  Tel. 

Séance  du  i  Décembre  IHGI. — M.  Companyo,  père, 
offre  à  la  Société ,  et  dépose  sur  le  bureau,  le  premier 


& 


21 

voliinic  do  son  onvr.igc,  intilnlé  :  lUstnire- nalnreUc  du 
département  des  Pyrénées-Orientales.  La  Société  vote  des 
remerciments  à  >l.  Companyo,  avec  insertion  au  procès- 
verbal. 

Séance  du  II  Juin  ^802. —  M.  André  Crova,  notre 
compatriote ,  actuolloment  professeur  de  pliysi(|uc  au 
Lycée  impérial  de  Metz,  a  lait  hommage  à  notre  Société, 
dont  il  est  nicndtre  correspondant,  des  thèses  qu'il  a 
présentées  à  la  l'acuité  de  Montpellier,  pour  obtenir  le 
grade  de  docleur-ès-sciences.  M.  le  Président,  à  qui  ce 
travail  a  été  adressé,  en  tait  pari  à  la  Société,  et  propose 
d'écrire  à  M.  Crova  une  lettre  de  remercîment,  ce  qui 
est  adopté. 


LITTÉRATURE,  HISTOIRE,   ANTIQUITES. 

Séance  du  20  Novembre  4859.— }il.  le  Ministre  de  l'Ins- 
truction pnbli(pie  et  des  Cultes  avait  adressé  une  circulaire 
aux  Sociétés  savantes  de  tous  les  départements,  sur  le 
projet  de  publication  d'un  Dictionnaire  géographique  de 
la  France  ancienne  et  moderne. 

M.  Alart,  chargé  par  notre  Société  de  rendre  compte 
du  rapport  que  M.  le  Ministre  nous  a  depuis  envoyé  sur  le 
plan  de  cet  ouvrage,  analyse  verbalement  ce  document, 
et  expose  quelles  sont  les  intentions  de  Son  Excellence,, 
qui,  |)our  bien  l'aire  coiiiprendre  rajiplicalion  des  jjrin- 
ci|)es  sur  lesipiels  doit  reposer  ce  Dictionnaire,  joint  à 
son  envoi  ipielipu^s  exi^nples  tirés  du  Dictionnaire  yro- 
(jrapltique  du  dcpartrmeid  de  la  Manche.  M.  Alart,  qui 
les  a  pris  pour  modèles,  donne  lecltn-e  de  deux  articles 
(pi'il  a  rédigés  sur  la  localité  de  Nidoléras,  commune  d(> 
Tresserre,  canton  de  Tlmir,  cl  sur  la  ((unniune  de  Cort- 
savi,  canton   d'.\rl(>s.    Il  ajdulc  ipn'.  vu  le  tem|is  et  les 


oo 


recherches  qu'a  exigés  la  composition  de  ces  deux  arti- 
cles, la  vie  entière  d'un  homme,  qui  n'iiiirait  pas  d'autre 
occupation,  ne  sulTirait  [)as,  selon  lui,  pour  remplir  en- 
tièrement les  intentions  do  M.  le  Minisire,  en  ce  qui 
concerne  le  seul  département  des  Pyrénées-Orientales; 
et  il  pense  que  ce  travail  ne  peut  être  hien  l'ait  que  par 
plusieurs  personnes  dévouées,  qui  y  consacreraient  tout 
leur  temps. 

Séance  du  21  Décembre  /Sô'.9.--M.  Alart  lit  un  mé- 
moire sur  l'emploi  des  canons  au  mv"  siècle. 

M.  Amadis,  une  dissertation  sur  les  causes  qui  ont 
contribué  à  la  décadence  de  la  langue  et  de  la  poésie 
catalanes. 

Séance  du  2-')  Janvier  /S6'fl.  — M.  l'ahbé  Fines,  rendant 
compte  d'un  volume  des  Mémoires  de  r.\cadémie  des 
Sciences  de  Toulouse,  cinquième  série,  tome  troisième, 
V  signale  un  essai  sur  l'ancienne  constitution  municipale 
de  la  ville  de  Perpignan. 

Séance  du  ii  Mars  1860.— M.  Alart  signale  dans  le 
rapport  fait  à  l'Académie  des  Inscriptions  et  Helles-Lettres, 
au  nom  de  la  Commission  des  Antiquités  de  la  France, 
par  M.  Léon  Piénier,  le  compte-rendu  d'un  mémoire  de 
M.  Fejosne  sur  la  géographie  ancienne  du  Uoussillon, 
,  qui  a  valu  une  mention  honorable  à  cet  ancien  profes- 
seur d'histoire  du  Collège  de  Perpignan.  M.  Alart,  (pii 
a  fait  des  études  approfondies  sur  l'histoire  et  la  géogra- 
phie de  notre  pays,  combat,  en  même  temps,  quchpies 
erreurs  émises  par  l'auteur  du  compte-rendu,  et  cite,  à 
cet  elVet,  (iiiehjues  passages  d'un  mémoire  qu'il  a  com- 
pose lui-même  sur  le  même  sujet. 

Séance  du  25  Avril  1860.  — Au  sujet  <l'une  (euvre  de 


23 

saint  Yves  de  Chartres,  ^I.  Emile  Tastii  a  adressf'  à  la 
Société,  dont  il  l;iil  partie,  une  note  ainsi  conçue: 
«  Tous  les  éditeurs,  tous  les  hioj^raplies  de  ce  saint,  ont 
vivement  regretté  un  traité  pieux  sur  les  paroles  de 
N.  S.  Jésus-Clirisl  en  croix,  dont  on  ne  connaissait 
qu'un  exemplaire  en  Ani^leterre,  (pril  avait  été  impos- 
sible de  copier.  J'ai  trouvé  ce  traité  dans  la  BibliotluMp.ie 
de  Pcrpii^nan.  (/est  le  |)reniier  du  n"  10  des  nianuseiils. 
J'avais  commencé  à  le  transcrire  pour  l'éditer;  la  mala- 
die a  arrêté  ce  dessein  sans  retour.  Ma  copie  est  courte 
et  informe.  Telle  qu'elle  est,  je  l'idfre  à  la  Société.  » 

j\'ota.  M.  Emile  Tastu  est  décédé  peu  de  temps  après 
cette  communication. 

Séance  du  50  Mai  1860.  —  Lecture  d'une  lettre  de 
M.  Bach,  colonel  d'artillerie  en  retraite,  meiid)re  rési- 
dant de  la  Société.  Il  lui  adresse  de  la  part  de  M.  Comes, 
juge  d'instruction,  à  Céret,  des  objets  de  cuivre  et  de 
bronze,  trouvés  dans  une  de  ses  jjropriélés,  à  une  cer- 
taine profondeur  au-dessous  du  sol,  le  tout  acconq)agné 
d'une  nptice  sur  l'origine  de  ces  objets.  Une  commis- 
sion, com[)osée  de  MM.  Companyo,  père,  Alart,  l'abbé 
lîober  et  de  Ronnefoy,  est  chargée  dexamiuer  IVnvoi, 
ainsi  que  la  notice  de  M.  Comes,  el  de  faire  un  rapport 
à  ce  sujet. 

Lettre  de  M.  Cuiier,  de  Saiul-Eaurent-de-la-Salanque, 
lieutenant,  en  exploration  scientifique  en  Tmiisie.  Il  nous 
annonce  qu'il  a  fait  une  anq)le  moisson  archéologiipic 
dans  CCS  contrées,  et  sm-tout  parmi  les  ruines  de  Car- 
tilage. Il  nous  destine,  dit-il,  (piehjues  objets  curieux,  (pril 
nous  adressera  par  la  première  occasion  ,  et  il  propose 
uiT-uie  de  faire  de  nouvelles  fouilles  au  nom  de  la  Société 
des  Pyrénées-Orieulab^s.  A  celte  lettre  est  joint  un  num(''ro 
de  la  (iiizrllr  'le  Tunis,  où  il  est  ipu^stiou  du  résultat  des 
recherches  de  \\.  Guiler.  Renvoyc'  ii  M.  Alart,  pour  preu- 


2i 

die    connaissance   de    ces    docnnienls    el   répondre    à 
M.  Gniler. 

Séance  piibli(jin'  iln  29  Juillet  /S6'0.— M.  Alarl  a  lu  un 
travail  liistoriiiiie  intilulé;  Un  Médecin  public  à  Coliioure 
en  4372. 

M.  Fabre  a  clôturé  la  séance,  par  la  lecture  d'une  pièce 

de  vers  intilulce  :  ï.es  Grues  d'Jbicus. 

Séance  du  7  Novembre  4860.  —M.  Alart  a  lu  un  rapport 
sur  un  ouvrage  de  M.  Radicau,  capilaiiic  du  génie,  ayant 
pour  tilre  :  Monographie  du  chàleau  de  Salses. 

M.  Alart  annonce  ensuite  (pi'il  prépare  un  travail  liis- 
toricjue  sur  la  pointure  cl  sur  les  peintres  roussillonnais 
des  xiv*'  et  xv  siècles.  Il  ajoute  que,  d'après  des  inlbr- 
niations  (piii  considère  comme  certaines,  on  aurait 
découvert,  dans  ces  derniers  temps,  divers  débris  du 
mausolée  de  la  famille  seigneuriale  de  Mosset,  construit 
au  \vi''  siècle  dans  la  chapelle  de  Corhiacli.  Il  demande 
que  la  Société  délègue  un  de  ses  membres  ou  une  com- 
mission chargée  de  reconnaître  quelle  [leiit  (ire  la  valeur 
histoiicpie  ou  arlisti(iue  des  objets  découverts,  el  il  désire 
que  des  mesures  soient  prises  pour  en  assurer  la  conseï'- 
vation. 

La  Société  charge  M.  Alarl  de  se  transporter  ;i  (^or- 
biach,  et  de  (aire  un  rapport  sur  la  découverte  qu'il 
vient  de  signaler. 

Séance  du  4!J  Décembre  48(10.  —  M.  le  Président  com- 
muniipie  à  la  Société  une  lettre  par  laquelle  M.  le  Préfet 
du  département  nous  adresse  i)lusieurs  objets  que  lui  a 
envoyés,  potir  la  Société  .Agricole,  Scienlilique  et  Litté- 
raire des  Pyrénées-Orientales,  M.  Guiter,  lieutenant,  a 
Alger,  el  cpii  proviennent  de  son  voyage  dans  la  Px'gence 
de  Tunis.  Ces  objets  sont  soiniiis  par  la  Société  à  l'exa- 


25 

men  d'une  commission,  composée  de  MM.  Ratheau,  Alart, 
l'abbé  Fines,  de  Bonnefoy  et  Companyo,  père. 

Séaure  du  G  Mars  fSG  I . — M.  l'abbé  Fines,  charp;é  par 
la  commission  ci-dessus  de  rendre  compU»  de  l'exanien 
aïKiuel  elle  s'est  livrée  sur  trente-trois  médailles  envoyées 
par  M.  Ciuilcr,  les  a  distribuées  par  ordre  clironologicine, 
et  en  a  l'ail  ainsi  le  classement  :  nne  médaille  africaine, 
et  trente-deux  impéiiahis.  ('elles-ci,  certaines  ou  incer- 
taines, se  divisent  en  médailles  du  Haut  et  du  Has-Kmpire. 

Les  impériales  certaines  sont  au  nondire  de  vingt-deux: 
dix  du  Ilaut-Kmpire  et  douze  de  l'Empire  d'Orient. 

Les  dix  premières  offrent  une  Otacélia,  nn  Valérien, 
nn  dallien,  un  Maxence,  nn  Licinius,  trois  types  de 
(Constantin  fp',  et  deux  de  Constantin-le-Jeune. 

Les  douze  médailles  du  Has-Fmpire  contiennent  sept 
Constance,  un  Gralien  et  quatre  Théodose. 

Restent  dix  médailles  mal  conservées,  dont  les  légendes 
sont  méconnaissables,  et  c'est  pour  cette  raison  que  M.  le 
rapporteur  les  a  appelées  inrcriaines. 

Après  la  lecture  de  ce  rapport,  la  Société  décide  ([iie 
ces  médailles  seront  déposées  au  Musée  de  Perpignan , 
et  qu'une  copie  du  travail  de  M.  l'abbé  Fines  sera  envoyée 
il  M.  (luiter,  à  qui  des  remercimenls  sont  votés. 

M.  Ratheau  coinmuiiiiiue  ensuite  à  !a  Société,  nn  tra- 
vail des  plus  intéressants  sur  les  Alalai/as,  ou  tours  de 
signaux ,  que  l'on  rencontre  sur  divers  points  de  notre 
département. 

Séance  du  11  Avril  ISCI . — M.  Alart  donne  lecture  d'une 
note  sur  la  maison  de  la  Main-dr-rrr,  et  sur  la  lamille 
\anxo,  de  l'er|)iguan.  Ce  travail  a,  depuis,  été  inséré 
dans  le  Journal  des  Pyrénées-Orientales . 

Séance  du  S  Mai  fSGI.—},].  le  Président  lit  une  Ictlre 


26 

(le  M.  Roiillia,  clicrd'iiislitulion,  à  Millos,  qui  nous  adresse 
une  iiK-daille  arabe,  trouvée  dans  le  sal)le  dn  ravin  appelé 
la  Boule,  au  territoire  de  celte  commune.  Cet  objet  a  été 
déposé  au  Musée  de  Perpignan. 

Dans  une  notice  inlilulée  :  Ancienne  église  rie  Corhiarh, 
el  insérée  dans  noire  dixième  bidielin,  |)aii;e  117,  M.  Alart 
avait  parié  d'un  niagnili(pie  mausolée,  cpie  le  seigneur  de 
Mosset  avait  fait  construire  en  1549.  Ce  monument  étant 
aujourd'bui  entièrement  détruit,  M.  Alarl  avait  rapporté 
Tacle  qui  en  fait  connailn^  rordonnanee.  Il  a  reçu  <lepuis 
de  M.  Malles,  inspecteur  des  écoles  primaires,  le  résultai 
de  certaines  rechercbes,  (jui  viennent  à  ra|)pui  de  ce 
qu'il  avait  dit  d'abord,  et  il  en  fait  part  à  son  tour  à  la^ 
Société. 

Séance  publique  du  28  Juillet  hSOL—M.  l'abbé  Dellioste 
a  initié  le  public  aux  cérémonies  usitées  pendant  le  xv^ 
siècle  pour  une  procession  en  l'Iionneur  de  saint  Gaudé- 
ri(]ue. 

M.  Alart  a  raconté  toutes  les  péripéties  de  la  construc- 
tion de  notre  église  de  Saint-Jean,  (]ui  n'a  pas  duré  moins 
de  cent  (piaranle-cin(]  ans,  el  (pii  parait  avoir  eu  lieu  avec 
les  deniers  de  la  bourgeoisie,  donnés  volontairement. 

M.  Cambouliu  a  donné  la  biograpbie  du  savant  béné- 
dictin Dom  Rrial,  notre  con)pati'iole. 

M.  François  M<''ric  a  lu  un  apologue  en  vers,  intitulé: 
Le  Laurier  et  l'Olivier; 

M.  Jacques  .Vrgiot,  une  traduction  en  vers  français  des 
Deux  Rais  du  bon  Horace, 

Et  M.  Fabre,  secrétaire  de  la  Société,  une  pièce  de 
vers,  intitulée  :  Pitié  pour  les  Animaux. 

Séance  du  IS  Décembre  iSGI . — M.  le  Président  présente 
il  l'appi'obalion  de  la  Société,  les  sujets  littéraires,  |)Our 
les(juels ,  à  l'occasion  du  Concours  régional ,  des  prix 


•27 

sei'ont  dcceniés  aux  personnes  qui  les  auroul  le  mieux 
traités.  Ces  sujets  sont  : 

l'5  L'éloge,  en  vers  alexandrins,  de  M.  le  maréchal  de 
Mailly,  ancien  lieutenant-général  du  Roussillon  et  com- 
mandant en  chef  de  cette  |irovince; 

!2"  Une  poésie  légère,  traitant  des  monuments  et  des 
sites  pittoresques  du  département  des  Pyrénées-Orien- 
tales. 

Séance  du  25  Avril  18G2. — Après  la  lecture  des  litres 
et  épigraphes  des  compositions  littéraires  présentées  au 
concours,  la  Société  choisit  six  de  ses  membres,  qui, 
conjointement  avec  les  membres  du  bureau,  doivent  ju- 
ger du  mérite  de  chacune  d'elles,  et  désigner  celles  qui 
seront  couronnées.  Les  six  membres  élus  sont  :  M>L  de 
Bonnefoy,  labbé  Fines,  lîarberet,  Amadis,  Alart  et  Pierre 
Batlie. 

La  commission  ci-dessus,  a[)rès  s'être  réunie  plusieurs 
fois  et  s'être  livrée  à  un  consciencieux  examen  des  pièces 
de  vers  envoyées  au  concours,  a  chargé  un  de  ses  mem- 
bres de  présenter  l'expression  de  son  jugement,  ce  (pi'il 
a  (ait  en  ces  termes  : 

«  Les  habitants  des  Pyrénées-Orientales  se  souviendront 
toujours  avec  reconnaissance  de  l'administration  toute 
paternelle  du  maréchal  de  Mailly.  Ils  n'oublieront  point 
tout  ce  qu'il  lit,  dans  nos  contrées,  pour  l'agricidture , 
le  coujuiercc,  les  sciences  et  les  arts.  Aussi,  la  ville  de 
Perpignan  n'a-l-elle  laissé  échapper  aucune  occasion  de 
célébrer  les  vertus  héroïques  de  son  bienfaiteur. 

«  La  Société  Agricole,  Scientiri(]uc  et  Littéraire  des 
Pyrénées-Orientales  a  donc  cru  ajouter  un  nouvel  éclat  à 
la  létc  du  Concours  régional,  en  mettant  aussi  au  concours: 
!«  l'éloge  poéti(|ue  de  M.  le  maréchal  de  Mailly;  2"  une 
descrijjtion,  en  vers  légers,  des  monuments  et  des  sites 
pittoresques  du  département  des  Pyrénées-Orientales. 


«Cet  nppel  a  été  entendu.  Six  pièces  de  vers  ont  été 
présentées  au  concours,  sous  les  titres  suivants  : 

«Noi. — Eloge  du  maréchal  de  Maiily,  lieutenant- 
général  du  Uoussillon  et  commandant  en  chef  de  cette 
province ,  avec  cette  épigraphe  : 

On  lient  èlre  liéros  s;iiis  r;iv;ignr  la  terre. 

(lion.EAU.) 

«N"2.  —  Éloge  (d'après  le  programme)  du  maréchal 
de  France,  comte  de  Maiily  d'Harconrt,  chargé,  en  (]ua- 
lité  do  I.ieutenant-Général,  sous  Louis  XV,  du  coiniiian- 
dement  en  chef  de  l'ancieime  province  du  Roussillon, 
avec  celte  épigraphe  : 

iJouverneur  bienfaisanl,  il  n'eut  point  d'antre  envie 
Que  de  plaire  à  son  roi,  de  servir  sa  patrie. 
Il  vrcnt  en  liôros,  il  mourni  on  martyr! 
Jetons  un  cri  de  gloire,  exhalons  un  soui)ir! 

«  N°  5. —  Ode  au  maréchal  de  Maiily,  par  un  lious- 
sillonnais  du  xim^  siècle,  reconnaissant,  avec  cette 
épigraphe  : 

Le  confiiiérant  est  craint,  le  sa^e  est  oslinié; 
Mais  le  bieniaileur  charme,  et  lui  seul  est  aimé. 

(Voltaire.) 

«Cette  ode  est  précédée  d  un  prologue  intitulé  :  lloui- 
magc  à  Messieurs  les  Memhres  de  la  Société  Agricole, 
Scientilique  et  Littéraire  des  Pyrénées-Orientales. 

«  N»  4.  —  Lnc  pièce  de  vers,  intitulée  :  Mon  Roussillon, 
avec  cette  épigraphe  : 

Salve,  innçjna  parens  friicjum,  sahiniiii  Iclliis 

Maijna  vinim 

(Virgile.) 


29 

«No  o.  —  Deux  pièces  de  vers,  inliliilées:  la  première, 
Le  Canigou;  la  seconde,  Une  Fêle  dans  les  Pyrénées, 
avec  celle  épigraphe  : 

Je  vais  jiisi|ii"ui'i  je  puis. 

«N"  6.  —  Une  pièce  de  vers,  iiUiliilée  :  Silcs  et  Monu- 
menls  des  Pyrénées-Orientales,  avec  celle  épigraphe  : 

El  dulces  rcminiscilui'  Argos..  .  . 

(Virgile.) 

«  Les  ailleurs  des  pièces  N"  1  el  N"  2  oui  perdu  de 
vue  cpie  cï'lail  [)riuci|)aienicnt  l'éloge  de  M.  le  maréchal 
de  Maiily,  comme  Gouverneur  du  Roussilion,  qui  avail  été 
mis  au  concours,  el  ils  se  sonl  surtout  étendus  sur  les 
i)alaiiles  auxquelles  il  avail  pris  part.  Toutelbis,  la  pièce 
iS»  J  s'élant  un  peu  plus  a|tprochée  du  programme,  a  été 
jugée  digne  <rune  médaille  d'argent,  (pii  a  été  décernée 
il  Tauteur,  M.  Mercadier. 

«Quant  à  la  pièce  N"  ô,  dont  le  mérite  réel  a  été 
reconnu,  l'auteur  n'a  pas  prétend»  concourir,  attendu 
(pi'une  ode  ne  lemplissait  i)as  les  conditions  proposées, 
et  il  s'est  contenté  de  faire  hommage  de  son  reuvre  à  la 
Société,  dont  il  l'ait  pailie. 

«La  pièce  N^'  4,  intitulée:  Mon  RonssilUni ,  annonce 
une  plume  exercée  et  un  talent  vraiment  poétique,  el 
remplit,  autant  que  le  comportait  la  vaste  étendue  du 
sujet,  les  intentions  de  la  Société.  Aussi,  sa  commission 
n'a-l-elle  pas  hésité  à  décerner  a  l'auteur,  M.  François 
Méric,  une  médaille  de  vermeil. 

«  La  pièce  N"  o,  s'élant  entièrement  écartée  du  pro- 
gramme, el  la  pièce  N"  (3,  n'ayant  l'ait,  pour  ainsi  dire, 
([u'elUeurer  le  sujet,  la  commission  n'a  pas  cru  devoir 
les  admettre  ii  concourir.  Nous  aimons,  cependant,  ii 
reconnaître  que  toutes  les  pièces  envoyées  au  concours 


30 

renrermeiil  des  vers  lieiireiix ,  el  quelques  détails  pleins 
d'intérêt.  » 

Les  billets  cachetés,  renlermant  les  pièces  non  cou- 
ronnées, ont  été  brûlés,  selon  l'usage,  sans  avoir  été 
ouverts. 

Séance  du  7/  Juin  I8()2.  —  M.  le  Président  commu- 
nique à  la  Société  : 

J"  Une  pièce  de  vers  catalans,  avec  la  traduction  en 
prose  française ,  adressée  aux  poètes  de  la  Provence  , 
par  M.  Damaso  Calvet  de  Badaillès,  membre  correspon- 
dant de  notre  Société,  et  habitant  la  Prusse-Ilhénane; 

!2"  Une  lettre  de  M.  Piatheau,  capitaine  du  génie,  et 
mend)re  de  notre  Société.  Cette  missive  a  pour  objet, 
une  note  sur  cinti  jetons  trouvés  auprès  de  Fort-les- 
liains,  vers  la  tin  du  mois  d'avril  186^.  M.  Piatheau, 
après  en  avoir  donné  une  description  détaillée,  ajoute 
qu'il  pense,  sans  pouvoir  l'allirmer,  que  le  métal  est  de 
l'argent. 


31 


CONCOURS  RÉGIONAL 

DE  PEIIPIGNAN, 

ET  EXPOSITIONS  AMEXKES ,  EN   1862. 


RÉGION    SUD. 


JURY  DU  COXGOLT.S  Ill^GIONAL. 
M.  le  Prélcf  dos  Pyrénées-Ocieiilales,  président  d'Iionnctir. 

I"  SECTION,  CHARGÉE  D'APPRÉCIER  LES  ANIMAUX. 

M.  Rendu,  inspecleur-général  de  rugriciillure,   premier  vice- 
président  du  jury,  président  de  la  section. 

!"=  Sous-Sedion,  pour  juger  les  animaux  de  l'espèce  bovine. 

MM.  Jules  Buisson,  à  la  Bastide-d'Anjou  (Aude). 
De  Labaume.  à  Mnios  (fiard). 
Vialla,  à  Monipellier  (lléranll). 
Baudement,  membre  de  la  Société  impériale  et  centrale 

d'agriculture  de  France. 
Bertrand  Balanda,  à  Perpignan  (Pyrénées-Orientales). 

^"-'  Sous-Sedion,  pour  juger  les  animaux  des  espèces  ovine 
et  porcine,  et  les  animaux  de  basse-cour. 

MM.  Jules  r.igézy,  à  Montpellier  (Hérault). 
Rolland,  à  Nimcs  (Gard). 
Falcon,  à  Pampelonne  (Var). 
De  Bovis,  à  la  Tour-d'Aigues  (Vaucluso). 
Maill'redy,  au  Mas-de-Vèrc  (Bouclies-du-ilhùne). 


32 

r  SECTION,  CHARGÉE  D'APPRÉCIER  LES  INSTRUMENTS  ET  LES 
PRODUITS  AGRICOLES. 

M.  Lloiibes,  deiixiônie  vice-piésideiit  du  jury,   président  de  la 
seclion. 

/re  Soits-Seclion ,  pour  pujer  les  instnimeiits  d'extérieur 
de  ferme. 

MM.  Portai  de  Moux,  à  Carcassonne  (Audej. 

De  Bec,   direcleur  de  la  ferme-école  de  la  Monlaurone 

(Bouches-du-niiùne). 
D'-  Goiirier,  à  Fraisse-Cabardès  (Aude). 
DulTaud,  ingénieur  en  chef  des  ponls-el-chaussées. 

S«  Sous-Section ,  pour  juger  les  insiruments  d'intérieur 
de  ferme. 

MM.  De  Gasparin,  à  Orange  (Vaucluse). 

Denille,  directeur  de  la  lérnie-école  de  Besplas  (Aude). 
Ile  (".asijuel,  directeur  de  la  terme-école  de  Saignes  (Var). 
Guillaume,  ingénieur  à  Marseille  (Bouclies-du-Kliùne). 

3e  Sous-Sedion ,  pour  juger  tes  produits  agricoles. 

MM.  PcUicot,  àTonlon  (Var). 

Valayer,  au  Blanc,  prés  Avignon  (Vaucluse). 
Paul  Gère,  à  Lamalou  (Hérault). 
Rougemont,  à  Marseille  (Bouches-du-Bhùne). 
ConUe  de  Pierlas,  à  Nice  (Alpes-Maritimes). 

COMMISSARIAT. 

M.  Rendu,  inspecteur-général  de   l'agriculture,  commissaire- 
ijénéral. 


33 


RAPPOUT 

s  un 

LA  PRIME  D'HONNEUR 

DES  PYRÉNÉES-ORIENTALES, 

Pdf  M.    llKXni   DO.\IOIi,  secri'tnlre  et  ra|>{i<>i'li'iir 
lie  la   Coiiimissioii   ilf   \  isllc. 

(Expost''   In   011    Srnnce   |iiilili  que.  ) 


M  ESSIEU  us, 

La  pari  consi(iéial)le  ([ui  apparlieiitlra  aux  commissions 
de  la  prime. d'Iiuuiiour  dans  les  progrès  de  notre  ai^ri- 
culliuv,  (ail  encourir  à  ceux  qu'elles  désiguenl  pour  leurs 
iiiterprèles,  des  responsabililés  de  plus  d'une  sorte.  Com- 
bien ces  responsabilités  ne  s'aggravenl-elles  pas,  quand 
on  doit  parler  au  nom  des  juges  les  |»lus  autorisés  de 
celle  région,  devant  les  auteurs  des  grandes  opérations 
cultmales  qu'elle  présente,  et  ([uand  on  succède  dans 
un  tel  r(ile,  non-seulement  à  l'un  des  maîtres  parmi  les 
maîtres,  mais  à  (luebpi'iin  (Imil  les  discours  charmants 
renq)lisscnl  encore  vos  souvenirs!  Je  ne  viens  donc  pas, 
sans  une  crainte  sincère,  vous  retracer  l'examen  de  la 

3 


34 

commission  qui  visitait  rannt'e  dcrnièro,  in-esquo  à  pareil 
jour,  les  domaines  concurrents,  et  justilicr  ses  décisionsC. 
J'ai  dû  ce  dillicile  mandat  à  une  hienveillaiice  extrême, 
que  je  voudrais  justilier;  mais  je  sens  qu'il  me  faudra 
toute  la  vôtre  encore  pour  ne  pas  paraître  au-dessous 
des  devoirs  qu'il  impose. 

Le  département  des  Pyrénées-Orientales  est  un  des 
joyaux  de  cette  llégion  Sud ,  où  il  y  a  de  si  belles  par- 
ties, et  qui,  jusque  dans  ses  aridités,  est  marquée  d"un 
si  grand  caractère.  On  Tembrasse  presque  tout  entier 
d'un  regard,  et  vous  avez  admiré  rampliitliéàlre  magni- 
fique qu'il  présente.  La  vaste  plaine  qu  il  olTre  aux  yeux, 
encadrée  dans  les  lignes  grandioses  de  ses  montagnes, 
étageanl  les  riches  teintes  de  sa  végétation,  c'est  ce 
Roussillou,  où  l'art  cultural  de  la  vieille  Espagne  a  créé 
un  de  ses  réseaux  d'irrigation  les  plus  parfaits.  Au-delà 
de  celte  plaine  célèbre,  derrière  les  contre-forts  qui  l'en- 
tourent, deux  vallées  étroites  et  prolongées  forment  à 

(1)  Celle    cninniission,  formée    sous    la  iirésidcnec  tle    M.    V.  Renol', 
insiiect.-jjéiiéral  (rauriciilluie ,  avait  élé  coin|)oséc  par  M.  le  .Miiiislre,  de 
MM.  De  I.abxume,  président  de  rhaiiibre  a  la  cour  inipcriale  de  Nimcs, 
propriélaire-agriculleur  (hiiis  le  lianl  ; 
De  Bovis,  propriélaire-ajjiiiiilleur  dans  Vaucluse; 
De  r.ASQtET,  propriélaire-dirceleur  de  lu  fei  nie-école  du  Var; 
IMAiiinEDV,  propriétaire,  lauréat  de  la  prime  dlionueur  des  lîouclies- 

du-lUiône,  en  ISlil  ; 
J.  FikGÉ/.ï,  maire  de  Alontpellier,  proiir.-atjricnlteur,  dans  1  Hérault; 
De  l'iEiiLAS,  propriétaire-agriculteur  à  Nice; 

Doclcur  GoliKlEli,    proprietaiic,    lauie;it    de   la   prime  d'I.onucur   do 
l'Aude,  en  IS.oO. 
La  commission  sVsl  réunie,  h  l>e,pii;nan,  le  20  mai  I8til;  elle  a  conli- 
m.e  jus-iu^au  8  juin  ses  opcralions,  dont  le   rapport  a  de  eonlié  au  secré- 
taire, M.  Henri  DoMOl..  ,     ,,     , 
Le  jurv  régional,  assemblé,  le  !)  mai  IS(;2,  sous  la  présidence  de  M.  I. 
SaU.es,  préfet   des  Pyréuées-Orienlales ,  a  adopté  à  runauimilé  les  termes 
cl  les  propositions  «le  ce  rapport. 


35 


I<^iir  cMiémilé,  rinlércssaiilo  coiitroe  do  pâturages  e(  do 
k'Iail  (lui  s'est  appelée  la  Terdagne. 

A  pari  la  Cenlagiie,  il  y  a  peu  de  place  pour  l'agri- 
ciiluire  dans  ces  vallées.  Leurs  (x'iites  rajtides  el  resser- 
rées ne  comportent  guère  (pie  la  culture  à  bras  (riiomnies. 
l-a  vigne  et  l'olivier  aussi  liant  (pie  possible,  le  mico- 
coulier, le  châtaignier,  ce  sont  leurs  produits  principaux. 
Même,  là  où  s'oflVaient  des  plans  plus  larges,  il  n'v  a 
guère  (]iie   la  produclion   pastorale  (pii   ait   pu  s'étendre 


avec  avantage. 


La  plaine  est  un  de  ces  lieux  privilégiés  où  tout  semble 
préparé  jiar  la  nature  pour  sourire  aux  besoins  des  hom- 
mes. C'est  une  vaste  alluvion,  déposée  au  pied  des  mon- 
tagnes à  mesure  du  ravinement  de  leurs  pentes,  et  (pii 
incline  doucement  vers  la  mer.  Des  terres  mélangées  des 
plus  fertiles  éléments,  une  grande  surface  accessible  au 
meilleur  arrosage,  un  climat  (pii  permet  jus(]u'à  trois 
récolles  par  an ,  les  parties  les  moins  bien  partagées 
pouvant  prodniie  nos  vins  les  plus  gcméreiix,  telles  en 
sont  les  conditions  iieureuses,  et  Tagriculture  les  y  trouve 
presque  en  charpie  lieu. 

Cette  plaine  n'est  pas  sans  laisser  voir  dans  son  exploi- 
tation des  divisions  générales  en  ra|)port  avec  les  dispo- 
sitions naturelles  ou  la  composition  de  ses  terrains.  C'est 
ainsi  (pic  les  trois  rivières  [irincipales  du  département  v 
ont  tracé  comme  trois  larges  bandes  juxtaposées,  dans 
chacune  desquelles  une  nature  d'exploitation  parait  pré- 
dominer particulièrement.  Au  nord,  le  long  de  la  chaîne 
des  Corbières,  les  matériaux  déposés  par  les  eaux  de 
l'Agly,  terres  calcaires,  pierreuses,  laites  pour  la  vigne, 
et  qui  I  ortenl  en  effet  les  crus  sans  rivaux  de  Hivesakes! 
Au-dessous,  les  sédiments  de  la  Tel,  mieux  composés 
pour  la  culture  arable,  et  où  l'arrosage  répand  de  toute 
l»arl  ses  bienfaits.  Plus  bas,  sous  le  prolil  majestueux  des 
Albèros,   les  dep(jis  plus  sableux  du  Teeh  ,  bien  connus 


36 

autrelois  pour  stériles  sous  la  déiiouiinaliou  iVaspres.  Il 
V  a,  on  outre,  soil  au  devant  de  ces  parties,  (pic  l'on 
pourrait  appeler  anciennes,  soit  au  bas  des  vallées, 
soit  le  long  de  la  nier  ou  dans  les  replis  nombreux  de 
la  surface,  des  alluvions  plus  modernes,  les  .saUiiiques, 
les  terrc-cerls,  qui  doivent,  à  rexcellcnce  de  leur  mé- 
lange ,  à  leur  iraiclieur  constante ,  aux  proportions 
parfaites  quehiuefois  de  rinliltration  saline ,  d'être  un 
des  limons  les  plus  riches  soumis  nulle  part  ii  l'imlustrie 
agricole. 

Mais,  quand  on  regarde  de  près,  tous  ces  accidents  se 
reproduisent  à  chaque  pas,  et  la  culture  n'a  pas  de  can- 
tonnements absolus;  les  terres,  sans  être  identiques,  ne 
peuvent  s'utiliser  que  de  la  même  manière  ou  par  des 
soins  semblables.  Les  exploitations  qui  ont  jtris  part  au 
concours,  se  trouvent  pres(|ue  toutes  dans  celte  |)artie 
centrale,  qu'on  pourrait  appeler  la  région  de  l'arrosage; 
une  seule  est  en  dehors,  presque  sur  le  terrain  des 
aspres.  Ensemble,  néanmoins,  elles  représentent  bien 
ragricullure  du  Roussillon  ;  et,  a  tout  prendre,  elles  au- 
raient fait  |»asser  suus  vos  yeux  celle  du  département 
tout  entier,  si  les  prairies  et  les  élevages  de  la  Cerdagne 
avaient  pris  part  au  concours. 

Neuf  personnes  de  ce  beau  pays  avaient  demandé  à 
disputer  la  prime  d'honneur  ou  les  récompenses  spé- 
ciales qu'il  vous  est  donné  de  distribuer.  —  Xw  dernier 
moment,  deux  ont  manqué  :  l'une,  des  Mazos,  dans 
rarrondissemenl  de  Prades,  parce  (jne  les  procédés  de 
détail  qu'elle  annonçait,  ne  suflisaienl  [tas  pour  la  main- 
tenir dans  le  concours;  l'autre,  de  Millas,  parce  qu"en 
ne  se  trouvant  i»as  présente  au  moment  de  la  visite,  et 
en  ne  laissant  personne  à  sa  place  |)0ur  conduire  la 
commission,  elle  a  dû  être  regardée  comme  se  retirant 
d'elle-même. 


37 

Les  sept  concuiTtMils  (|ui  sont  entrés  en  lice,  sont: 

MM.  ,1.  Hiirrère,  pour  ses  cxploilalioiis  do  Bnges  et  de  Moiilescol; 

G.  Caillé,  de  Perpignan,  pour  son  exploitation  de  Germain- 
ville; 

L.  Durand,  de  v^ainl-Nazaire,  pour  son  exploitalion  de  Sainte- 
Croix; 

Ilénaut,  du  Solcr,  pour  son  exploilalion  du  Mas-d'Rule; 

V.  Malègue,  pour  son  exploilalion  de  Pézilla-de-la-Hivirre; 

Prax,  coniniissioiinaire,  à  Perpignan,  pour  son  exi)loilidioii 
de  Saiulc-Eugrnie-du-Soici'; 

Sauvy,  ancien  négocianl ,  pour  son  exploitation  du  Mas- 
Sauvv,  à  Villnu(Mive-(l('-l;i-rialio. 

On  lait  de  ragriciillnre  depuis  longtemps,  et  en  France 
pres(iiie  tout  le  monde  en  fait;  mais  l'agriculture  raisonnée, 
devenue  une  induslrie  (pii  se  gouverne  par  des  prinei|)es, 
est  une  chose  moderne  vers  laquelle  on  ne  va  (pie  timi- 
dement. On  passe  par  pliisieiu's  phases  avant  de  prendre 
loiil-a-lait  les  voies  utiles.  D'ahord,  on  surveille  son  do- 
maine; on  le  suit  de  plus  piès  (ju^nulrefois,  on  conseille, 
on  dirige  ceux  qui  le  cultivent.  A  la  phase  densuile,  on 
le  fait  valoir  soi-même;  ou  le  répare,  on  essaye  d'autres 
assolements,  d'autres  cullin-es,  le  plus  grand  pas  est  lait. 
Vient  la  phase  dernière,  oii  \'nu  |trali(pie  \\  lond  le  mé' 
lier,  où  Ton  manie  le  sol  comme  le  mamiraclurier  ses 
matières,  où  l'on  sait  comme  lui  sonder  les  débouchés, 
l)ro|)ortiouuer  lai  lion,  où  l'on  tire  de  ce  sol,  comme 
lui  de  sa  lahrique.  toulc  la  rcmuuéralion  nécessaire. 
Dans  les  exploitations  (pii  ont  piis  part  au  concours, 
vous  allez  retrouver,  sous  des  mesur.es  variées,  toutes 
ces  situations  dilVérentes. 

SAlNTK-ELr.ÉNlE-DU-SOLER. 

A  la  phase  du  didiul  apparlicnt  le  domaine  de  Saiiile- 
Kugénit'-(lu-S(dcr.  Ou  \  voit  uiic  agrimllnri'  lout-ii-lait 
coinnicMcanlc,  mais  qui  a  loi||  lieu  de  grandir. 


SAlNTE-CnOlX. 

On  mot  le  pied  sur  mi  ipnaiii  où  les  clicniins  du  pro- 
i,Mès  sont  (léjii  tracés,  (piand  on  entre  che/  M.  Laïuont 
Durand,  à  Sainte-Croix.  Ce  domaine  demandait  des  amé- 
liorations considéraliles  :  on  y  en  fiiit  depuis  dix  années, 
et  tout  n'est  pas  fini.  II  reste  surtout  a  élever  d'une 
manière  uniforme  le  niveau  de  la  eulturo.  M.  Laurent 
Durand  est  un  propriétaire  aclif.  Sorti  des  débuts,  cpii 
sont  toujours  les  moments  riules  pour  le  cullivatcur,  et 
(]ue  la  commission  se  plait  à  louer  clie/.  lui,  on  ne  sau- 
rait douter  ([u'il  n'avance  désormais  dans  les  juarKincs 
Iructueuses  '''. 

LE   MAS-SAUVY. 

C'est  plus  utilement  que  M.  Sanvy  a  traité  le  domaine 
qn'il  s'est  formé  aulour  de  Villeneuve-de-la-rîalio ,  toutes 
conditions  naturelles  égales  d'ailleurs.  Ce  domaine  a  180 
hectares,  qui  se  présentent  en  trois  grands  lots,  assez 
distants,  quoique  régis  d'un  centre  d'exploilalion  unicpie. 
11  n"a  pas  fallu  moins  de  vingt-cin(|  années  et  plus 
de  trente  actes  d'accpiisition  ou  (rechange,  pour  arriver 
à  le  grouper  de  celle  manière  encore  imiiarfaile. 

Le'.Mas-Sauvy  porte  à  juste  lilre  le  nom  de  son  jiro- 
priétaire;  car,  indépendamment  de  celle  constitution  ma- 
térielle, celui-ci  y  a  presque  tout  créé:  l'Iiabilation  et  les 
bàliments  (jui  s'y  trouvenl ,  la  verdure  qu'on  y  voit,  le  re- 
venu (piil  donne,  on  pourrait  dire  l'eau  même  qui  y  coule. 

15ien  employer  son  terrain  suivant  sa  deslinalion  natu- 
relle, i)artout  où  c'était  innnédialement  possible;  là  où  on 
n'aurait  pas  pu  l'utiliser,  le  rendre  i)ropre  à  l'être,  telle 

(l'i  l'arrni  lis  (iihi:i|ms  :irl,cvry.  I;i  (■(Hiiiiiis-ioii  n  icir.uijiu'  |virliriiiic- 
rciiu'iit  l'iilucuvoir  ii  iiiiuiliins,  cl.iiili  <iaiis  mic  |):iliiri',  et  lornir  \u\r  mie 
iij;(.lu  .i  llciir  (lo  li'tie,  (|iii  iililisc  d'iiiii-  inniiii'ir  lios-luuiciisf  une  failjle 
sourcf  «lu  .IdinaiiH'.  Culle  ii|;nlc,  iMi  l)ii(|iics  <-iiiuiil.cs,  ;i  ÔU'"  de  loii|;m-iir, 
sur  20''  ilf  laiiji'ii;-,  l'I  uni'  |)icirii:ulciii'  ili'  10'  . 


39 

a  été  iusiiuici  rieuvrc  de  .M.  Saiivy.  Il  avait  des  collines 
argilo-sableiises  Irès-sèclies,  et  des  fonds  de  terre  forte 
ou  des  alUivions  salines  perdnes  par  les  eaux  stai^tiantes. 
Les  fonds,  assainis,  arrosés  par  de  belles  eaux  artésiennes, 
nous  ont  laissé  voir  des  céréales  qui  étaient  de  premier 
ordre  sur  beaucoup  de  points;  (pii  le  deviendront  partout 
à  vue  d'oeil,  dès  (pie  de  bons  princi[)es  agricoles  préside- 
ront avec  suite  ii  Icui'  exploitation  :  personne  n'est  plus 
près  que  M.  Sauvy  et  ses  (ils  de  connaître  et  de  pratiipier 
ces  principes  '''  Ouant  à  l'utilisation  des  parties  sèches, 
elle  est  conqilèle  dès  maintenant.  M.  Sauvy  les  a  exploi- 
tées par  la  vigne,  et  par  une  belle  olivette,  dont  la  taille 
contraste  heureusement  avec  les  mutilations  (jue  l'on  voit 
ailleurs.  Le  vignoble  présenle  un  total  de  76  hectares,  et 
le  choix  du  cépage  (larrct,  (((rinj/diiii  et  nuilaro),  ainsi 
(jne  l'état  parlait  de  fumure  et  d'entretien,  le  feraient 
remar(|uer  partout.  Liant  acceptés  les  systèmes  de  j)lanta- 
liou  en  carré  et  de  culture  au  fourcat,  on  doit  tout  y  louer. 
11  s'y  ajoute  un  ensemble  su|)érieur  de  fabrication  vinaire^ 
une  belle  usine  dans  le  système  Desionne  pour  la  distil- 
lation du  vin  et  du  marc,  une  suite  de  cuves  pour  l'extrac- 
tion du  tai'tre.  C'était  une  imluslrie  complète,  faite  pour 
embrasser  une  production  bien  supérieure  à  celle  du  domai- 
ne, et  a  laquelle  M.  Sauvy,  quand  le  prix  du  vin  décourageait 
les  cultivateurs,  avait  demamlé  le  bénélice  d'une  grande 
masse  de  matière  consommable  ou  propre  a  l'engrais. 

il  a  semblé  ;i  la  commission  (|ue  les  travaux  de  cet 
agriculteur  recevraient  {\ue  distinction  parfaitement  justi- 
liée,  si  vous  atlacliie/.  une  de  vos  récompenses  marquantes 
à  cet  ensemble  viticole,  ipii  en  est  jusiprici  le  coté  saillant. 

(1)  M.  Si\iiv\  ;i  cicc  ^liiisi  iiii  Mils  (Il  Ihhi  l'inl  il  ixiiloilalioii,  (iO  lifi'lares 
ili'  I  ilidiiK,  lit  (II'  |ii;\iiic  niiliiii  lli',  l(i  (K'  lii/i'i'iio,  '(  lie  \i\  plus  (loiissanli; 
iiilliiii'  MKiiaicliiTc  l'I  fiiiiliiTi'.  Il  ciUirlii'iil  im  clK-pli'l  (If  (iO  IcU'S  do  100 
Kildjjioiiiiiu's ,  |iarriii  Icscuiclics  un  lroii|i(Mti  i|iii  |iii'M'nlait  ili'  lii's-lu'llrs 
l)rfl)is  iiM'ies. 


\0 

Il  va  auprès  du  Mas-Sauvy  une  œuvre  agricole  inachevée 
encore,  quoique  entreprise  il  y  a  quinze  ans  et  continuée 
depuis,  malgré  tous  les  insuccès  premiers  et  toutes  les 
(lillkullés  :  c'est  le  dessèclicmenl  et  le  dessalement  de 
l'étang  de  Villeneuve.    La  commission   a  regretté  de  ne 
pas  rencontrer  dans  le  concours  ce  grand  travail,  dû  à 
M.  Azema,  ancien  consul  d'Espagne  a  Perpignan.  Klle 
l'a  vu,  parce  que,  avec  le  dévouement  au  progrès  de  cette 
Région,  qui  vous  est  connu  de  longue  date,  et  avec  la 
bonté  attentive  qu'il  prodigue  à  ceux  (juil  conduit,  Mon- 
sieur rinspecteur-Général  a  désiré  qu'elle  connût  tout  ce 
qui  était  de  nature  à  fixer  ses  appréciations.  Elle  eût  aimé 
a  vous  en  retracer  les  détails,  (pii  semblent  marqués,  dans 
leur  conception  et  dans  leur  exécution,  du  génie  agricole 
des  anciens  Maures  d'Espagne.  Elle  n'a  pu  qu'aller  rendre 
hommage  a  l'homme  que  la  rare  constance  de. sa  volonté 
autant  (pie   l'audace  de  son   intelligence,  ont  conduit  à 
cette  entreprise;   elle  a  cru  remplir  encore  sa  mission, 
et  obéir  aux  sentiments  du  jury  lui-même. 

LE   MAS-D'eULE. 

C'est  encore  d'avoir  pré|)aré  sa  |)ropriété  pour  une 
exjdoitation  vigoureuse,  qui  lait  le  mérite  de  M.  llénaut, 
au  Mas-d'Eule. 

Le  Mas-d'Eule  est  entre  Thuir  et  le  Soler,  dans  une 
plaine  que  les  eaux  sillonnent  en  tout  sens,  et  ;i  beau- 
coup de  parties  de  laquelle  elles  ont  été  longtemps  fatales. 
M.  llénaul  possède  ce  domaine  depuis  sept  années.  C'était 
une  sorte  d'Ilot  de  gravier  et  de  terre  sèche  inarrosables, 
entouré  d'un  marécage  mal  herbage,  où  le  pâturage  était 
nuisible  et  où  les  animaux  ne  s'aventuraient  jias  toujours 
sans  danger.  Assécher  à  fond  toutes  les  parties  noyées, 
et  ramener  leurs  eaux  par  des  contre|)enles  pour  l'arro- 
sage des  parties  sèches,  voilà  le  travail  que  ce  cultivateur 
a  accompli;  et  ce  travail  est  aussi  remar(pial)le  par  l'énergie 


41 

qiip  pnr  los  soins  de  l'oxôciilinn.  Ce  qu'il  y  a  eu  de  fossés 
ouverts,  de  uiveileuieiils  de  détail,  de  redressements  de 
pièces,  est  considérable:  par  exemple,  une  tranchée  de 
700  mètres  de  long,  sur  4  mètres  de  large  et  1  mètre  Vî 
de  profondeur,  1.100  mètres  de  fossés  profonds,  5.000 
mètres  de  fossés  moyens,  une  longueur  non  moins  consi- 
(l(''ral)le  de  drains  transversaux.  Ce  (ju'il  y  a  de  résultats, 
n"a  pas  de  proftorlions  moins  ini|)ortantes  :  2o  hectares, 
qui  étaient  d'une  production  détestable,  |)our  ne  pas  dire 
nuih',  sont  devenus  des  terres  de  première  (pialité; 
lai'rosage  s'étend  aux  soixante  hectares  du  domaine, 
taudis  (pi'il  ne  s'ap|»li(|uail  (prà  treize;  on  ne  trouvait 
{pi'avec  |)eine  !2.G00  Ir.  de  ferme,  on  en  a  trouvé  G. 000, 
et  ce  n'est  pas  tout  ce  que  vaut  désormais  le  bien. 

La  culture  ne  répond  pas  encore  à  ces  opérations  par- 
fiiites,  mais  elle  est  en  chemin  d'atteindre  îi  leur  niveau. 
M.  llénaul  a  (railleurs  une  inclination,  avec  la(iuelle,  dans 
une  propri(''lé  comme  celle-là,  il  deviendra  forcément  un 
agriculteur  avancé  :  il  aime  le  bon  bétail.  Le  Mas-d'Eule 
entrelient  à  cette  heure  près  de  deux  tiers  de  tête  par 
hectare,  déliassant  chacune  iOO  kilos.  On  y  demande  le 
travail  ;i  des  bêtes  (pi'on  prépare  pour  la  boiu'herie.  On 
a  de  doubles  attelages,  ne  faisant  (|ue  moitié  journée; 
rengraissemenl  dure  juste  le  temps  des  labours;  le  bétail 
de  trait  est  ainsi  en  même  temps  bétail  de  rente.  (>elui 
{\u'\  a  vu  la  commission,  justifiait  pleinement  la  valeur 
de  ce  système,  transiiion  ingénieuse  entre  les  habitudes 
ordinaires  et  une  spi'cialisation  plus  couqtlèle.  Le  trou- 
peau, formé  de  200  tètes,  était  un  spécimen  j)récieux  de 
ce  qu'on  peut  obtenir  avec  la  race  des  Corbières  associée 
aux  métis-mérinos,  au  moyen  d'une  sélection  intelligente 
et  d'une  alimentation  bi(Mi  (Mileudue. 

Ou  reconnaît  dans  les  travaux  du  Mas-il'I^ule,  l'iulluence 
d'un  voisinage  dont  je  vais  avoir  ;i  vous  entretenir  bientôt  : 
imitation  ou  conseil,  ils  n'ont  |>as  moins  un  grand  mérite. 


V2 

La  coiniiiission  vous  demandera  de  les  mettre  au  n)ême 
rail};  dans  leur  genre,  (|ue  ceux  du  Mas-Sauvy  dans  le  leur, 
el  de  les  récomi)enser  de  même. 

l'exploitation    de   m.    MALfcGUE    A    l'ÉZILLA- 
DE-LA-UIVlkUF.. 

M.  Vincent  Malègue  ouvre,  dans  le  concours,  la  série 
des  exploitations  gouvernées  par  la  science,  ou  d(uil  les 
prali(]ues,  au  moins,  sont  du  domaine  de  cet  art  relati- 
vement moderne,  (pii  enseigne  a  traiter  le  sol  avec  les 
méthodes  ou  les  forces  capables  de  lui  l'aire  rendre  toute 
la  production  relativement  possible.  Le  nom  deM.Malègue 
n'est  pas  nouveau  pour  la  Région.  C'est  celui  d'un  éleveur 
déjà  chargé  de  couronnes.  L'éleveur  est  greffe  chez  lui  sur 
nn  cultivateur  très-zéb' et  plein  de  connaissances,  (^ui  trou- 
vera certainement  les  derniers  succès,  cpiand  il  s'attachera 
à  un  domaine  mieux  constitué  et  de  plus  de  ressources. 

M.  Malègue,  sur  56  hectares,  n'en  a  (pie  20  arables**'; 
l»our  près  des  deux  tiers,  il  n'est  que  rermier,  et  tontes 
les  parties  :  terres,  bàlimeiils,  habitation,  sont  morcelées, 
très-distantes  entre  elles,  très-impropres  à  une  exploitation 
d'ensemble.  On  ne  sent  pas  moins  ciiez  lui  des  ell'orts 
sérieux  pour  conjurer  ces  mauvaises  conditions.  Il  a  un 
assolement  raisonné  (pii  donne  les  quatre  sixièmes  de  son 
cadre  aux  fourrages,  cl  il  vise  ;i  une  soli(laril(''  étroite  de 
toutes  les  cultures.  On  voit  surtout  (juehpie  chose  de  tres- 
saillant, c'est  le  nombreux  bétail  sur  leipiel  son  exploi- 
tation repose,  et  les  vues  particulières  dans  lesquelles  ce 
bétail  est  entretenu.  On  y  trouve  l'équivalent  de  iO  tètes 
de  100  kilos<-',  soit  ÔOOi^  (1  tète  "., i  par  hectare  arable,  et 
270'^  ou  deux  tiers  de  tète  toutes  terres  conqu'ises,  et  cette 

(I)    Il  a  l'ii  (iiilro  :  vij;iifS,  22  licilaics  ;  iili\icis,  (i  lieclarrs. 
(1)8  chevaux  ,  ."2  lid'iils,  vailles  ou  eli-ves;    if  rosti-  en  porcs  mi  iT|irc- 
!ciilc  [laf  (Iciu  mois  tic  iioiifriluie  d'un  Inuipcau  de  180  Ictcs. 


i3 

grande  (iiiaiitilé  do  chair  vivante  est  produite,  élevée, 
cntrelenue  tout  entière  pour  la  boucherie.  Xon-seulenient 
une  telle  proportion,  mais  une  spécialisation  si  accusée  du 
bétail,  la  commission  ne  les  a  pas  rencontrées  ailleurs. 

Faire  ou  pré|)arer  de  la  viande,  et  le  plus  de  viande 
possible  par  tète  entretenue,  pour  avoir  beaucoup  d'en- 
grais au  |)lus  bas  prix  possible,  c'est  le  but  très-raisonné, 
très-suivi  (pie  s'est  proposé  M.  Malèguc.  Un  esprit  éco- 
nomiste aussi  éclairé,  (pi'un  sens  agricole  droit,  lui  ont 
(ail  penser  ipie  lorsipTon  avait  les  lécondes  alluvions  du 
Roussillon  el  les  eau\  (jui  les  arrosent,  à  côté  de  la  Pro- 
vence et  du  Languedoc,  où  le  bétail  ne  peut  être  qu'ex- 
ceplionnel,  tandis  (pic  la  richesse  de  leurs  habitants  et 
l'extension  de  leurs  grandes  villes  les  rendent  le  lieu 
(ruiie  consommation  sans  cesse  accrue,  produire  de  la 
viande  serait  une  grande  source  de  prolits.  Il  a  i'ornié  et 
peuplé  ses  écuries  dans  cette  vue.  (l'est  elle  (pii  a  fait 
de  lui  un  éleveur  tout  d'abord.  Les  Durbains,  les  Cha- 
rolais  purs  el  croisés,  les  belles  tètes  porcines  (pi'il  pré- 
sente chaque  année  aux  concours  de  la  Région,  en  sont 
les  produits  cherchés  avec  patience,  contrôlés  par  une 
(•oinptalHlit(''  exacte,  et  dont  r(>Ievag(>  a  lonrni  d(''j;i  plus 
d'un  sujet  aux  c(dtivateiirs  environnants,  (/est  aux  Jurys 
des  animaux  ;i  dire  à  M.  .Malèguo  s'il  est  dans  une  voie 
utile  ipiant  ii  la  nature  el  ;>  la  réussite  de  ses  croisenuMits; 
mais  il  y  est  certainement  (piant  an  but  final. 

D'aillem's,  rien  n'est  négligé  pour  faire  remplir  à  ce 
Ix'tail  le  rôle  (ju'en  attend  M.  Malègue.  Il  a  créé  une 
distdlerie  pour  en  ajouter  les  résidus  ii  ses  moyens  de 
nourriture;  il  vend  le  parcours  de  ses  iierbes  non  faii- 
cliables  pour  se  |)r()curer  des  fourrages  supplémentaires; 
il  ne  craint  pas  d'acheter  le  double  de  la  paille  (pi'il  |)ro- 
duil;  le  S(d  et  la  |)enle  de  ses  écuries,  tout  mal  disposés 
qu'ils  étaient  à  l'origine,  ont  été  cond'inès  pour  (pie  les 
litières  s'imbibassent  bien;    les  [)urins  excédant  sont  re- 


44 

ciiftillis,  on  en  arrose  le  fumier,  et  ce  fumier,  bien  tassé, 
liioii  pn'sorvé  do  l'enn  dos  loiis,  est  trnit(''  aussi  l)i(Mi  qu'un 
fiiuiiei'  à  découvert  peut  Tètre. 

.Malgré  tout  cela,  la  culture  a  des  progrès  à  faire  encore 
chez  M.  Malègue.  Il  en  est  beaucoup  des  bons  principes 
d'agriculture,  comme  des  bonnes  intentions  :  on  les  a,  on 
ne  s'en  sert  pas  toujours  au  mieux,  et  d'assez  habiles 
eux-mêmes.  \  côté  de  très-beaux  blés,  la  commission  a 
été  surjjrise,  par  exemple,  que  les  fourrages  laissassent 
à  désirer.  Mais  il  n'y  a  (|ue  six  ans  (pic  M.  Malègue  cul- 
tive. On  peut  dire  que  ce  (pi'il  a  fait  (h'jii  est  un  bon  gage. 
On  le  dirait  avec  d'autant  plus  de  plaisir,  (pie  cet  agri- 
culteur est  venu  demaiuler  ainsi  ;i  l'industrie  rude  et  peu 
prisée  des  champs,  nue  profession  suivie,  à  l'âge  où  ordi- 
nairement on  s'en  éloigne  pour  la  vie  des  villes  ou  pour 
les  carrières  en  vue;  (piil  n'a  pris  et  ne  prend  encore  (pie 
dans  ses  épargnes  seules  le  moyen  d'élever  son  indusirie, 
et  (pu',  d'année  eu  année,  il  l'élève  d'une  manière  sensible. 
En  attendant  (pie  de  meilleures  conditions  agraires  et  plus 
de  temps  permettent  à  M.  Malègue  d'atteindre  à  des  succès 
plus  complets,  la  conmiission  vous  priera  d'attacher  une 
de  vos  récompenses  à  cette  proportion  si  remai(piable  du 
bétail,  qui  est  jusqu'ici  le  fait  le  mieux  réussi  de  l'exploi- 
tation de  Pezilla,  et  (pii  montre,  à  tout  le  |)ays  d'arrosage 
du  Iioiissillon ,  le  chemin  ,  nouveau  pour  lui ,  d'un  des 
larges  débouchés  réservés  à  la  production. 

LES    EXPLOITATIONS    DE    M.    J.    IJ.VlUUaiE,    A    ItAGES 
ET   A    MONTESCOT. 

Kn  agriculture,  comme  en  l(uit ,  on  voudrait  être  à 
même  de  distribuer  autrement  qu'on  ne  les  trouve  les 
situations  respectives  ou  les  aptitudes.  On  formerait  des 
exploitations  bieii  iemar(piables ,  ii  donner  ainsi  aux  uns 
ce  (]u'onl  les  auti'es!  Si  les  piiiici|(es  d'agronomie  sur 
Ies(iuels  M.  .Malègue  se  guide  avaient  été  le  partage  de 


45 

M.  iiarièie,  peu  (rd-iivres  iigiicules  iipproclieraifiil  de  la 
sienne  dans  la  lléi^ion  loiil  entière.  i*oin'(juoi  l'aiit-il, 
messieurs,  que,  depuis  noire  visite,  la  mort  ait  frappé 
M.  Barrère,  et  que  nos  paroles  et  vos  distinctions  vien- 
nent a\ijourd'liui  raviver  l'adlielion  d'une  lamille,  (juand 
nous  nvions  été  si  heureux  do  |)enser  (pi'elles  en  feraient 
la  joie.  M.  Barrère  était  un  de  la  foule,  né  au  pauvre  foyer 
d'un  laljoureur,  et  tout  ce  pays,  en  (]uel(|U(ï  sorte,  a  suivi 
ses  funérailles.  I.e  premier  inai'istral  de  ce  département 
les  a  conduites  lui-in('mc.  Animé  d'un  rare  sentiment  de 
sa  mission,  et  nous  associant  à  sa  démarche,  avec  une 
délicatesse  dont  le  souvenir  nous  sera  précieux ,  il  a 
exprimé,  au  hoid  de  cette  tombe  trop  tôt  ouverte,  les 
sympathies  et  les  regrets  publics.  Il  ne  nous  reste  mal- 
heureusement (pi'ii  faire  connaitre  à  cpiel  degré,  de  si  uni- 
versels et  si  hauts  lémoij^uaj^es  étaient  léi^ilimcs  :  laissez- 
nous  vous  en  entretenu'  avec  (juelque  développement. 

C'est  sous  (les  proportions  peu  habituelles  dans  le 
Roussillon,  (pie  se  présentent  les  exploitations  de  M.  ,1. 
Barrère.  Il  ne  s'agit  pas  moins  que  de  077  hectares  de 
surface,  et  l'agriculture  y  est  une  industrie  véritable;  car 
plus  des  deux  tiers  de  cette  étendue  S(jnt  tenus  à  ferme. 
On  est  en  face  d'un  capital  d'exploitation  de  155.000  fr., 
de  25.000  fr.  de  travaux  fonciers,  d'inventaires  (jui  se 
soldent  par  des  Avoir  de  400,  -ioO.OOO  fr.,  entièrement 
produits  par  l'agriculture,  et  ces  résultats  matériels  ne 
sont  rien  auprès  des  résultats  moraux  :  cette  situation, 
digne  d'envie,  a  eu  les  plus  humbles  commencements; 
le  travail  seul  l'a  créée;  le  travail,  lécondé  par  toutes  les 
vertus  de  famille,  au  sein  de  la  plus  intéressante  famille 
(pii  lui  Pi  jamais  dû  rexistencc  et  le  succès. 

Les  parents  de  M.  Ilarrère,  cultivateurs  aisés  pour  le 
tem|)S,  avaient  émigré  à  la  Révolution.  Son  père  fut 
ramené  à  Bages  pres(pie  enfant,  en  170:2,  par  sa  mère, 
devenue  veuve.   A  eux  deux,   ils  ne  possédaient  qu'un 


46 

(loiil)le  écii  (rKspai^iie,  et  ils  ne  l'ont  jain;iis  (l(''|ieiist'. 
Le  jeune  homme  lïit  six  ans  journalier  ou  laboureur  à 
gages.  Après  ce  temps  il  osa  alVei'mer  (luehpies  terres, 
])uis  un  petit  domaine,  puis  un  autre.  H  était  redevenu 
un  cultivateur  aisé,  lorsque  l'indemnité  lui  rendit  le  petit 
[Kitrimoine  de  sa  famille. 

(Test  cet  héritage  de  vaillants  labeurs  (jut;  M.  Jacques 
Harrère  a  élevé  au  point  que  je  viens  de  dire.  Son  père 
le  lui  remit  il  y  a  vingt-(iuatre  ans,  ayant  perdu  sa  femme 
et  ne  se  sentant  plus  le  courage  de  continuer  sans  elle  le 
|)atient  exhaussement  de  sa  condition.  M.  Ikurère  recul 
;iiusi  ralfermc  de  !200  hectares,  en  deux  domaines,  dont 
le  bail  devait  courir  encore  (juatre  années;  quelques  pro- 
priétés détachées,  un  capital  d'exploitation  de  55.000  fr., 
sous  charge  d'en  payer  l'intérêt,  et  8.000  fr.  de  la  fortune 
de  sa  mère,  il  (Mait  marié;  mais  l'apport  de  sa  femme 
n'ajoutait  en  (|uelque  sorte  lien  à  ces  ressources. 

Hages  et  Montescol  se  louchent.  Leurs  territoires  se 
Irouvenl  à  l'evlréinilé  inférieure  des  .\spres,  hors  de  la 
contrée  d'arrosage.  Ce  sont  des  collines  siliceuses  au 
sommet,  marneuses  dans  leurs  pentes,  el  entre  les  ver- 
sants des(iuelles  s'étendent  des  fonds  limoneux.  On  y 
voit  encore  maintenant  l'ancienne  culture  biennale,  avec 
jachère  morte;  il  y  a  vingt-quatre  ans,  elle  y  était  générale 
et  absolue.  En  dehors  de  médiocres  prairies  et  de  quel- 
ques rares  sainfoins  et  luzernes  qu'on  ne  défrichait  jamais 
pour  ainsi  dire,  on  n'y  eût  pas  conq)ris,  on  n'y  eût  i)as 
permis  d'autre  rotation.  Celle-là  était  imposée  par  les 
baux;  on  les  faisait  biennaux  à  cause  d'elle,  pour  elle, 
el  ils  la  rendaient  inlransgressible  en  aucun  cas. 

La  première  et  la  capitale  opération  de  M.  Barrère  a 
été  de  sortir  de  cette  vieille  rotation.  Il  en  suivit  les  erre- 
ments quatre  années  :  mais  ce  temps  lui  suHit  j)our  se 
convaincre  (pi'en  dehors  du  strict  salaire  du  travail,  ils 
ne  laissent  presque  rien  de  quitte;  que  le  courage  el  les 


|iriv;ilions  y  ('■laicnl  loiil  ;  (iiic  l;i  rf'imiiiéralioii  y  reslitit 
bien  au-dessous  dos  elVorls,  parce  que  nulle  combinaison 
n'y  avait  place.  Avant  (]ue  les  baux  de  son  père  ne  fus- 
sent expirés,  il  s'était  refait  ((tut  un  autr<'  jilau,  et  ce  plan 
c'était  tout  uuiuienl  de  sui»slitu<'r  la  culture  par  les  four- 
rages il  la  culture  par  jachère  morte.  I.e  sens  prali(pu^  tout 
seul  lui  avait  donné  comme  l'intuition  même  de  ce  (pTen- 
seignail  alors  la  science.  Les  luzernes,  les  sainfoins,  tout 
au  |)lus  connus  autour  de  lui  comme  fourrages,  la  vesce 
elle-même,  il  se  mit  à  les  établir  sur  ses  terres  en  fonde- 
ment de  rotation. 

La  fortune  de  M.  Harrère  date  de  cette  conception 
féconde,  comme  la  richesse  agricole  de  noire  pays  en  est 
venue;  mais  aussi  il  i'aut  voir  connue  il  sut  la  suivre.  C'est 
pres(pie  par  ccutaiues  de  francs  par  hectare,  au  lieu  de 
centaines  de  centimes,  que  les  produits  annuels  se  sont 
produits  chez  lui  dès   ce  moment '*';   combien  ne  s'en 


(I)  i\l.  HaniTC,  qui  o  vôiifio  sa  rarriJ'i'o  ajjiicoli'  ;iii  (Titcriiiiii  iriiiic 
c()iii|)lal)ilil('  raison  lire,  a  r.ilriiK''  ']\w,  J.iiis  1rs  liaiix  de  liuil  ans,  le  liavail 
le  |i!iis  assidu  l'I  le  plus  diiIdiiiu'  ir-  lirait  de  la  nilalioii  Ijiciiiiale  avec 
jachère  iniirlo  ,  Irais  payés,  (jik'  '2  fiaiics  de  net  aiiinielleineiit  par  lieclaie. 
.fo  reproduis  ici  ee  ealeal  eoinine  un  doeunienl  eurieo\  d'iiisloiie  de  l'éco- 
noiiiie  ruiale,  autant  ijue  eonirne  un  ensei|jnenient  piéeicux. 

Calcul  compare  de  la  ciilliire  d'un  hectare  de  terre  par  assolement  biennal,  avec 
jachère  morte  et  par  asiolemenl  alterne  avec  sainfoin,  dans  un  bail  de  huit 
années,  sur  des  terres  de  Iroisiéme  classe. 


ASSOLEMENT   TAU   JACIIEUL   MOUTE. 

PRODUIT. 

1.3  hectolitres  de  bli' 

\'2  c]iiiulau\  métriques  de  paille. 


IRAIS. 
,'i  labours 

SU'    .. 

2  licctol.  de  ffonienl  p.  semence.. 
S,'irclaj;e 

7  511 

Moisson 

'211     » 

Transport  des  gerbes 

Baltatre 

il  .. 
13     » 

par ... . 

^'ulliplié 

dC9  50 
A 

Pour  ipialre  aiuiées (>"8 

i  lahouis  p.  i  annexes  de  fourrages.  'Ai 

Seinenrc  de  fourrage AH 

h'iMiiure  pour  les  A  ans KiO 

A  annres  de  fermage  à  40  fr 'iiO 


TllT.M. . 


15;)8 


26 


Multiplié  par. . . 

281! 
A 

» 

gc  dos  2  années. 

HAA 
«0 

H 

ToT.a 

EllAls 

1254 
1238 

P.ir  année. 


Reste  net 16 

o 


48 

seraioiil  |i.is  l(Mius  à  ce  succès!  Lui  ii'\  voii  i|uiiii  siimii- 
laiil  el  un  moyen.  Entre|)rises,  bénélices,  progrès,  il  a 
tout  accru  depuis  parallèlement  :  il  n'avait  encore  été  que 
cultivateur;  désormais,  il  sait  (pie  Tagriculture  aussi  est 
une  industrie. 

Kpuisor  cette  première  idée,  c'est  d'ahord  son  occu- 
pation. Une  lois  certain  de  ce  qu'elle  vaut,  il  en  demande 
les  avantages  à  l'étendue;  en  quelques  années,  il  ajoute, 
par  afferme,  j)Ius  de  200  hectares  arables  aux  200  hectares 
qu'il  exploitait  déjà.  Après,  c'est  aux  travaux  fonciers  qu'il 
s'adresse.  Eu  j)ossession  de  faire  des  avances  au  sol,  il  s'y 
crée  les  conditions  physiijues  fructueuses.  Ici,  c'est  l'irri- 
gation qu'il  se  procure  :  à  Bages,  il  fora  successivement 
six  puits  artésiens,  el  il  venait  d'en  forer  un  septième  à 
Monlescol.  Ailleurs,  c'est  l'assainissement  qu'il  poursuit: 
les  meilleurs  fonds  de  ce  territoire  sont  des  limons  salins, 
qui  couqjorleut  l'exploitation  la  plus  énergicjue  quand  leur 
sol  est  aéré  par  une  culture  profonde  ou  assaini  par  de  bons 
drainages,  mais  qui  n'olfrent,  autrement,  que  des  sols  per- 
fides pour  le  cultivateur,  comme  tous  les  terrains  mouillés 
ou  inféconds  connue  les  salobres.  M.  Barrère  n'a  pas  creusé 
moins  de  16.000  mètres  courants  de  fossés  d'écoulement; 


ASSOLEMENT    DE    SAINFOIN. 


FRAIS. 


!?  Uilionrs  pirparaloires 4S' 

5  liL'Ctol.  de  Siimfuin  par  hectare.  50 

Frais  de  coupe,  pour  3  ans,  à  1  fr.  21 
Fenaisons  et  transports ,   à  9  fr. 

par  an 27 

\  labours  pour  le  Uf (H 

3    — ■       pour  avoines 'lli 

5  labours  l'our  le  blé  So 

—      de  l'avoine 22 

Du  fourraite  di'robj   2i 

Sarclage  de  la  derhii>re  année  de 

blé :! 

Moisson  des  trois  années liO 

Transport  des  jrerbes 20 

l;alta-e 54 

Fumure 100 

Fermage 320 


1046  "5 


PROOl'lT. 
339  qx  niétrii|ue5  de  fourrage  jiar 

an,  à  3  Ir.  50  c 340'  » 

20  hectolitres  de  froment 400  « 

25  hectolitres  d'avoine 250  » 

Valeur  d'un  fourrage fiO  » 

10  hectolitres  de  froment 320  » 

Paille,  en  calculant  comme  dans 

l'assolement  biennal 104  » 

4  regains  et  sainfoins 00  » 

ToT,\L 1540  .. 

Fu.M»  à  déduire.   1040  75 


I 


Par  an . 


Reste  net 493  25 

(il     -. 


4  y 


il  ;i  praliqué  le  drainage  régiilicM-  de  quinze  hectares,  se 
servant  de  pierres,  malgré  leur  haut  |)ri\-,  quand  les  tuyaux 
étaifMit  inconnus;  il  allait  en  drainer  dix  autres,  de  concert 
avec  un  de  ses  bailleurs.  Kniiu,  une  autre  de  ses  opéra- 
tions radicales,  comme  celle  du  début,  et  qui  en  renou- 
velait déjà  les  succès,  venait  d'être  ouverte  par  M.  Uarrùre 
dans  ces  dernières  années.  Il  avait  cru  que  des  terres 
réputées  mauvaises,  (|ui  portaient  des  vignes  vigoureuses 
quand  on  les  avait  défoncées,  traitées  de  nirme  pour  les 
céréales  et  pour  les  autres  cultures,  donneraient  des  ré- 
sultats semblables.  Il  avait  essayé,  avait  réussi;  s'était  lait 
aussitôt  du  déibncement.nne  base  d'assolement  nouvelle; 
s'était  construit  une  déibnceuse  à  douze  bœufs,  assuré 
d'un  grand  domaine  de  plus  :  en  qiKiUe  années,  il  avait 
l»u  étendre  à  200  hectares  rapjiiication  de  celte  féconde 
vue,  et  là-où  l'on  avait  peine  aiq)aravant  à  récolter  l'avoine 
qu'on  semait,  il  obtenait  deux  froments  de  suite,  rendant 
au-delà  de  22  hectolitres  à  l'hectare  en  moyenne  W, 

Je  ne  puis  montrer  ici  que,  par  les  sommets,  le  dévelop- 
pement (le  cette  agriculture  intelligente,  active  et  si  résolue. 
Si  j'entrais  dans  le  détail,  vous  verriez  ces  grandes  (lualités 
mieux  en  jeu,  et  elles  prendraient  comme  un  prix  parti- 
culier de  ce  qu'à  certains  égards  elles  suppléaient  en  quel- 
que sorte  aux  vraies  connaissances  pratiques.  M  les  pro- 
cédés, ni  les  règles  de  la  culture,  en  eflèt,  n'étaient 
encore  chez  M.  Barrère  au  niveau  de  ces  aptitudes  ai^ri- 
coles  et  de  cet  ensemble  imposant  d'industrie.  Ainsi, 
pas  un  tubercule;  on  tenait  pom-  une  fumure  conq)lète 
20.000  kilos  par  hectare;  il  n'y  a  pas  une  seule  place  à 
luuner,  et  ce  sont  des  litières  plus  ou  moins  parfaitement 
consommées  qu'on  porte  aux  champs,  plus  souvent  qu'un 

(I)  1.0  d..|„„cem..„t  ot.  lui.,nénR.  n\.n  cU.h.  pas  la  cause  uni.,,,..  F,, 
.ndauifeam  au.  s.lices  d..  la  surfa.e  u,,.-  ..ouoiie  .1,,  ,ous-sol ,  il  ,„-,ulni«a,t 
.M,  .uarua^.  parfaile.uc-ul  p.uporl,o.,„o,  ,,u,  expli,,ue  oe  succès  de  cé,éal..s 
sans  ruiDicr  sui-  des  leires  luules  ci-ues. 

4 


50 

fiiiiiier  fait;  les  céréales  occupent  encore  moitié  des  terres 
arables'";  le  froment  succède  au  fronieiU  sur  les  mêmes 
terres,  malgré  les  grandes  diiïérences  constatées  aux 
rendements  îles  secondes  années;  le  hctail  de  toute  sorte 
n'est  pas  nourri  de  l'açon  à  répondre,  dans  toute  la  mesure 
utile,  à  quelle  que  soit  des  tins  (ju'on  lui  demande. 
A  côté  de  ces  manpies  d'une  éducation  culturale  encore 
incomplète,  les  ofiérations  les  plus  heureusement  conçues 
et  traitées.  Un  des  derniers  travaux  exécutés,  nolammenl, 
constituait  un  exenq)le  nouveau  autant  ([u'utile  poui'  ce 
pa\s.  Au-delà  de  Monlescot,  sur  la  droite  de  la  roule 
d'Èlne,  nous  avons  vu  un  tènement  de  treize  hectares, 
chargé  de  magniliques  moissons  dans  une  moitié,  olVrant 
le  meilleur  labour  dans  l'autre,  auprès  de  grands  es[)aces 
ingrats  qui  l'avoisinent.  Une  profonde  ceinture  de  foss(''S 
entourait  ce  tènement;  sur  sa  partie  non  couverte  on 
achevait  un  drainage  par  tuyaux,  qui  s'étend  au  tiers  de 
sa  surface  totale;  tout-a-fait  au  sommet,  jaillissait  l'eau 
d'un  puits  artésien.  Celte  grande  pièce  était  hier  à  peine 
sans  ctdlure,  ou  a\i  moins  sans  production.  Ues  eaux 
douces  (pii  viennent  des  pentes  voisines  la  noyaient,  et, 
en  se  saturant  de  sel  dans  leur  rencontre  avec  les  inlil- 
tralions  marines,  elles  en  faisaient  un  grand  salobre,  où 
l'on  s'épuisait  sans  profit  à  pratiquer  de  forts  labours, 
les  épandagcs  de  sable  ou  de  balle  de  blé,  tous  les  vains 
])allialifs  ordinaires.  M.  liarrère  était  las  de  ces  moyens 
onéreux  ou  insignifiants;  il  en  voulait  de  délinitifs;  il  a 
montré  où  il  fallait  les  prendre.  Ces  fossés  profonds  sont 
pour  arrêter  les  eaux  salines  dans  la  couche  sableuse 
même  ([ui  les  conduit;  ce  drainage  pour  devenir  maître 
des  eaux  douces  qui  s"y   mêlaient;   le  puits  artésien  va 

(I)  Voici  la  irpaililion  des  cuiliiros  :  lerios  uiablos,  2j8  iii'cl.;  piuiiii'S 
naliin-llcs,  71  lied.;  vignes,  G7  liect.;  olivelles,  2."i  liicl. — Sur  les  leiies 
araliles  :  céréales,  20/ 'lO;  luzernes  ou  sainfoins,  8/'t0  ;  founagos  à  moulons, 
VZ-iO;  plantes  sarclées  ou  racines,  l.4ll;  jaelicres,  ■'(/■'lO.  Tolal,   lOZ-îO. 


51 

clierclier  cos  eaux  ii  leur  source  [tour  les  taire  servir  à 
fertiliser  la  surface  qu'elles  slérilisaieul.  Il  s'était  assuré 
ainsi  à  jamais,  dans  cette  i>rande  pièce,  les  avantaiços 
de  ces  heureuses  tcircs  de  Salan(iue,  où  réiéuient  salin 
n'existe  que  pour  apitorlcr  une  fertilité  nierveilleuso,  [)arce 
que  toute  la  partie  nuisible  en  est  retirée. 

Vous  voyez  ce  qu'était  le  cultivateur  en  M.  J.  IJarrère, 
Ce  qu'a  été  le  ciief  de  famille  agricole  frapi)e  encore  davan- 
tai^e.  Des  beaux  enfants  ipii  lui  étaient  nés,  il  avait  su 
en  laire  des  auxiliaires  précieux.  A  tous  il  a  fait  donner 
l'éducation  libérale,  puis  il  les  a  ramenés  tous  au  foyer 
pour  y  |)rendre  successivement  leur  rôle.  Après  leurs 
années  de  collège  ,  les  fds  sont  revenus  à  leur  rang 
dans  les  travaux  du  pèi'C ,  y  ap[)ortant  leurs  idées  plus 
jeunes  et  leurs  connaissances,  qui  en  agrandissaient 
l'horizon.  Les  Hlles  aidaient  leur  mère  dans  les  soins  de 
ce  lourd  ménage  ou  dans  les  latigues  des  champs;  avec 
une  grande  supériorité,  une  d'elles  tenait  la  comptabilité 
en  partie  double  et  très-détaillée  de  ces  vastes  entrepiises, 
et  c'est  de  ces  sœurs  modèles  (|ue  l'illustre  Olivier  de 
Serres  aurait  écrit,  comme  de  l'épouse  qu'il  souhaitait  îi 
son  ménager,  «  que  si  une  telle  lui  est  donnée  de  Dieu, 
se  pourra  dire  heureux  et  se  vanter  d'avoir  rencontré  un 
bon  trésor.  » 

Tout  respirait  ralfcction  nuituelle,  sous  la  solidarité  la 
plus  intime,  dans  cet  intéiieur  (jui  montrait,  à  un  rare 
degré,  que  ce  n'est  pas  de  sortir  de  sa  condition  qui  élève, 
mais  d'y  rester  en  s'élevant  soi-même;  et  celte  industrie 
culturale  si  dévelop[»ée  après  des  commencements  si  hum- 
bles, qui  devait  ce  développement  tout  entier  au  seul 
mérite  de  riioinme,  y  prenait  aux  regards  une  valeur 
plus  grande  encore.  La  commission  n'a  autant  sonhaité 
nulle  part  i|ue  tout  se  rencontrât  |)our  appeler  la  Prime 
d'honneur;  c'est  avec  le  plus  unanime  regret  (ju'elle  n'a 
pu  vou>  proposer  de  décerner  lii  ce  grand  prix.    Mais  la 


se 

Prime  d'honneur  a  pour  bnt  denseigner,  et  ici  il  s'en  fau- 
drait trop  (jne  l'enseignement  l'ùl  siillisanl.  Il  y  a  mallieu- 
reuseincnl  si  loin,  dans  noire  pays,  de  l'agricuhnre  de 
tout  le  monde  à  ragricniiure  normale,  que  Ton  ne  voit 
qne  trop  ce  contraste  d'œiivres  agricoles  l)ien  an-dessns 
des  l)al)ilii(les  ordinaires  et  pourlanl  loin  du  bien,  et  que 
tant  de  qualités  de  tout  ordre,  si  lrap|)anles  dans  les  exploi- 
tations de  M.  Barrère,  peuvent  ainsi  se  rencontrer  avec  une 
inqjerl'ection  sensible  dans  l'ai't  d'appli(pier  à  la  culture 
tontes  les  forces  voulues  pour  obtenir  tout  rellet  utile. 

Mais  si  toute  la  série  des  progrès  n'a  pas  été  |)arconrue 
par  M.  Barrère,  ceux  qu'il  avait  laits  le  placent  bien  haut. 
C'est  le  rang  le  plus  voisin  de  la  Prime  d'honneur  que  la 
connnission  vous  prie  de  lui  assigner  dans  le  concours. 
On  ne  voyait  chez  lui,  ni  le  bétail  soigné  du  Mas-d'Eule, 
ni  la  belle  exploilalion  viiicole  du  Mas-Sauvy,  ni  les  prin- 
cipes agricoles  de  Pézilla  :  quelle  diiïérence,  toutefois, 
dans  le  chemin  parcouru,  et  où  des  résultats  relatifs  pa- 
reils se  sont-ils  montrés?  Après  le  mérite  de  présenter  une 
exploilalion  parlaile,  en  sait-on  de  plus  grand  que  d'être 
remonté  ainsi  de  soi-même,  sans  connaissances  ac(piises, 
sans  comparaisons  exlériem'es,  du  plus  bas  niveau  de  la 
pratique  culturale  au  plus  fécondes  notions;  de  la  pure 
jachère  morte  aux  alternances  fourragères,  aux  grands 
travaux  fonciers,  aux  labours  profonds,  et  de  l'avoir  fait 
avec  tant  de  hardiesse  et  d'ampleur?  Les  opérations  spé- 
ciales abondent  à  Bages  ou  à  Montescot,  pour  y  attacher 
une  récompense.  On  peut  choisir  siu'lout  ce  vaste  dessa- 
lement de  salobre,  si  bien  en  rapport  avec  les  besoins  de 
toute  une  partie  de  la  Hégion,  si  empreint  aussi  de  ce 
sens  des  grandes  opérations,  qui  fut  le  caractère  agricole 
de  M.  Barrère;  mais  ce  n'est  pas  un  détail  seulement  de 
cette  belle  carrière,  c'est  elle-mênie  tout  entière  iju'il  faut 
marquer  de  distinction.  La  récompense  que  vous  décer- 
nerez à  M.  Barrère,  faites-là  assez  marquante  et  excep- 


53 


tinnnolle  pour  (|ir;i  vùir  dos  enseignements  de  la  Prime 
d'honneur,  elle  signale  à  la  Hégion ,  comme  de  grands 
modèles,  ce  beau  patrimoine  formé  de  rien  dans  la  cul- 
ture et  par  la  culture  seide,  toutes  les  meillem-es,  toutes 
les  plus  lecondes  vertus  de  nos  classes  rurales,  résumées 
dans  la  vie  et  dans  le  succès  de  ce  laboureur,  et  surtout  le 
grand  exemple  qu'il  a  donné  de  l'élévation  d'une  famille 
an  sein  de  sa  condition  même,  par  le  travail  cl  |.;ii  l'jn- 
telligence. 

GERMAIN  VILLE. 

Je  disais  à  propos  du   Mas-d'Enle,    (pie  ses   travaux 
rcmanpiahlcs  devaienl  (|uekpie  chose  à  un  voisinage  dont 
j'aurais  à  vous  parler  avec  détail.  Ce  voisinage,  c'est  Ger- 
mainville,  la  ferme-école  des  Pvrénées-Orientales.  Il  n'a 
pas  été  précieux  |)onr  M.  llénaul  seulement;  la  conimis- 
sion  espèi'c  qu'il   va  mériter  à  vos  yeux  d"éire  érigé  en 
modèle  pour  le  déparlemenl  tout  entier.   Sa  supériorité 
s'exprime  en  peu  de  mois:  on  y  voit  plus  considcrahles, 
plus  complètes,  pins  achevées  que  chez  aucun  concurrent,' 
ces  réparations  foncières  (pii  se  sont  rencontrées  chez  plu- 
sieurs, et  (|ui  send)lent  l'onivre  première  de  presque  tous 
les  cultivateurs  de  ce  pays;  il  présente,  en  outre,  ce  que 
vous  n'avez  trouvé  encore  nulle  pari  ;  un  bel  étal  de  cul- 
ture el  de  production,  régnant  de  la  manière  la  plus  égale 
dans  toutes  les  parties  d'ini  grand  domaine. 

Germainville  est  une  des  ariciennes  propriétés  de  ce 
pays.  Le  canal  espagnol ,  qu'on  appelle  le  nuisscau  de 
Perpi;/ii(m,  passe  lout  auprès,  et  il  jouit  d'une  de  ces 
chartes  de  plein  arrosage  signées  par  les  Rois  d'.VragonO. 
Il  ap|)artient,  connne  le  Mas-d'Kule,  à  ces  tènements  qui 
s'étendent  entre  Thuir  et  le  Soler,  el  qui  sont  en  (piehpie 

(I)  <VUl-  dnrlo,  ,1e    Ii2'.,    |k.i1,.   .onoosHon   .loa,,   paur  farmage  en 
tnlier  rie  liniles  Us  terres  qui  peuvent  l'être. 


54 

sorte,  la  uMc  de  la  plaine  de  Perpignan.  Il  a  120  licctares.  Il 
l'orme,  le  long  de  la  roule  de  Thiiir,  une  sorte  de  grand 
rectangle,  dont  un  des  côtes,  en  se  relevant,  sert  de  boid 
à  cet  ancien  marécage  où  vous  avez  vu  les  dessèchements 
de  M.  Hénaut,  et  dont  l'autre  côté  est  une  partie  de  ce 
marécage  même. 

Il  n'y  a  rien  comme  le  bien  pour  jiaraitre  avoir  existé 
toujours.  Dans  un  domaine  où  tout  montre  l'ellet  de  soins 
suivis  et  d'une  culture  exacte,  où  tout  est  bien  disposé, 
bien  tenu,  bien  fait,  il  ne  semble  pas  que  tout  ail  pu 
("'tre  autrement;  on  cberclie  le  mieux  (pii  pourrait  s'y  voir 
plutôt  qu'un  mauvais  étal  disparu.  11  faut  un  elï'orl  d'esprit 
pour  se  figurer  l'état  que  présentait  ricrmainville  il  y  a 
dix-huit  ans,  quand  M.  Cuillé  en  devint  acquéreur.  C'était 
l'abandon  même,  (.es  torrents  voisins  débordaient  sur  sa 
surface  comme  dans  un  lit  réservé  ii  leur  trop  plein;  les 
terres  (ju'ils  ne  noyaient  pas,  ils  les  couvraient  de  graviers 
et  de  cailloux;  ils  les  avaient  ravinées,  dénivelées  entiè- 
rement, et  l'on  eût  en  vain  essayé  d'y  chercher  avec 
quelque  fruit  les  bénéfices  du  plein  arrosage  an(iucl  il 
avait  droit.  Dans  les  meilleures  pièces  d'aujourd'hui,  il 
n'y  avait  (pie  joncs,  eaux  stagnantes,  pacages  mouvants 
et  malsains  comme  ceux  du  Mas-d'Eule.  Un  chill're  (igure 
bien  cette  situation ,  cpi'on  ne  peut  que  mal  décrire  :  les 
1 00  hectares  de  terre  qui  formaient  alors  le  domaine,  s'aiïei- 
maient  net  /jo  fr.  par  hectare,  ce  qui  ne  faisait  pas  beaucoup 
plus  du  doid)le  de  rim]tôt  et  des  taxes  d'arrosage. 

M.  Cuillé  prit  un  an  pour  étudier  son  domaine;  après 
quoi  il  renvoya  le  fermier  et  se  mit  à  l'œuvre.  Voici 
rapidement  ce  qu'il  a  fait. 

La  reconstitution  matérielle  s'imposait  d'abord,  et  elle 
présentait  divers  degrés  de  travaux.  Avant  tout,  il  fallait 
isoler  la  propriété  des  eaux  (|ui  l'envahissaient;  il  fallait, 
ensuite,  assainir  ii  fond  chaque  pièce,  et  assurer  l'écou- 
lement des  inigations;  en  dernier  lien,  il  fallait  rétablir 


,Ti> 


|i!iil(ml  les  niveaux,  I;i  pciiU',  cl  épierrer  les  cliamps. 
Une  Irancliéo  (jni  t'iiiome  snns  inlorriiptioii  la  projjriété 
entière,  tel  a  clé  le  picniicr  oiivrai,'e.  Ce  sont  près  de 
deux  lieues  (le  vastes  ibssés''',  dont  plus  de  moitié  n'a  pas 
moins  de  (piatre  mètres  de  liautcur  sur  trois  de  plafond. 
Après  cet  énoruie  travail,  on  a  dû  creuser  dans  le  talweg 
des  terres,  sur  l.aOO  mètres  de  développement,  un  grand 
lit  de  (piatre  mètres  de  large,  où  vont  aboutir  toutes  les 
eaux  des  drains  et  toutes  celles  d'arrosage.  Vous  recon- 
naissez là  le  modèle,  et  une  partie  de  ce  ipie  vous  avez 
loué  et  encouragé  au  Mas-d'Kule.  M.  Ilénaut,  clleclive- 
nient,  a  fait  à  moitié  trais  700  mètres  de  ce  grand  travail 
(pii  longe  sa  propriété.  D'mi  autre  côté,  toutes  les  pièces 
du  domaine  étaient  remaniées,  nivelées  à  nouveau,  sil- 
lonnées de  pierrées  profondes,  (pii  les  drainaient  tout  en 
d(''l)layant  leur  surface. 

Ouinze  années  ont  été  nécessaires  pour  mener  à  lin 
ces  opérations,  dont  chacune  à  elle  seule  est  un  travail 
considc'rahle.  Aujourd'hui  tout  cela  est  achevé  justprau 
dernier  détail,  porte  ses  fruits  et  montre  une  exécution 
supérieure.  Le  domaine  oUVe  dans  toutes  ses  parties  des 
|)lans  parfaits,  (jue  Tirrigalion  aliciut  partout  sans  ellbrts, 
où  pourraient  manœuvrer  avec  tout  le  profit  désirable  les 
instruments  les  plus  délicats  de  la  mécanique  agricole,  si 
bien  (ju'avec  ses  terres  aduiirablemeut  unies,  ses  canaux 
soigneusement  tenus,  ses  belles  eaux,  ses  avenues  om- 
bragées, ses  chemins  bien  ouverts,  ses  grands  rideaux 
d'arbres  cl  riiori/A)n  maguiliipie  cpii  renviroiiiic,  (i(Miiiaiii- 
ville  semblerait  un  vaste  jardin,  plutôt  (pi'nne  exploitation 
agricole  ,  ii  (pii  ne  sauiait  pas  v(»ir  dans  ces  soins  et  ce 
Uni  lannonce  et  la  souice  même  dune  production  hors 


ligne. 


C'est   la  cultin'e,  en  elfel,  qui   pare  Germainxillc   Ce 
(Iniii.iinc  pr('S('nl;nt  deux  imlures  de  terrains.   I  ne  |i;irli(\ 

(Ij   S. 0(10  mc'ii's  (II'  ilcvolnii|i(imiil. 


56 

la  iDoindre^'^  était  ari^ilo-sableusc,  passant  sur  (|iielqiies 
points  à  une  alliivion  prolondo  ;  dans  le  reste,  la  silice 
seule  existait,  [irésenlant  |)art"ois  un  gravier  pur.  Somme 
toute,  c'était  un  tènemenl  médiocre.  H  iallait  les  grands 
travaux  (juo  vous  venez  de  voir,  pour  met  Ire  le  meilleur  en 
état  (le  produire,  et  Ton  n'aurait  lire  une  rémunération 
sérieuse  d'aucune  partie  sans  les  délbncements ,  les  en- 
grais, de  bonnes  rotations,  l'arrosage,  en  un  mot  sans 
les  plus  judicieuses  règles  de  l'agronomie.  Distribuer  la 
production  entre  ces  divers  teriains,  c'(''lail  la  pierre  de 
touche  :  on  y  a  pleinement  réussi,  (^e  qui  est  caillouteux, 
sans  liaison,  impropre  à  tenir  l'engrais,  se  desséchant  vile, 
on  l'a  donné  à  la  vigne;  M.  Cuillé  en  a  ajouté  7û  hectares 
aux  8  hectares  (pi'il  trouva  [)lantcs.  Le  surplus  ap|)arlicnt 
à  la  culture  arable ,  et  deux  assolements ,  deux  modes 
d'exploilalion  se  le  parlagent ,  associés  chacun  à  une 
forte  proportion  de  luzerne  et  de  sair)ioin  hors  sole.  Dans 
les  parties  perméables,  où  la  chaleur  pénètre  vile,  on  la 
végétation  est  ra|)ide,  l'assolement  biennal  du  Uoussillon  : 
piailles  sarclées  et  blé,  avec  ciilluies  dérobées,  rendu 
coiiiplétement  inliMisiC  |iar  ÔO.tJOO  kilos  de  fumier  par 
hectare  appli(piés  aux  |tlanles  sarclées.  Dans  les  terrains 
consistaiils,  profonds,  frais  par  eux-mêmes,  un  assolement 
(piiiu|uennal  qu'ouvrent  des  récolles  sarclées  bien  fumées, 
et  (pii  fait  alterner  rigoureusemeni  les  fourrages  verts  avec 
les  céréales.  C'est  le  seul  assolenuMif  normal  ipi'il  ail  élé 
donné  à  la  commission  de  renconlrer  en  dehors  de  celle 
culture  biennale  sans  repos  que  les  conditions  naturelles 
permeltent  ici,  et,  parmi  les  rotations  faites  pour  exploiter 
la  fertilité  tout  en  l'accroissant  sans  cesse,  c'est  une  de 
celles  (pii  seraient  le  plus  propre  îi  développer  la  prodiic- 
lion  dans  les  riches  limons  el  dans  les  puissanls  lenc.- 
vci-ls  si  répandus  en  Uoussillon'-'. 

(1)  Ai)  hcrlarfs  uiivirun. 

(2)  l'rciriitTu  année,  févcrollos  sur  ilcloiioiiiiciil,  luiin.'i's  ;i  'l'i.OOO  kilnsi' 


57 

Dans  le  détail,  loul  répond  a  la  justesse  de  ces  règles, 
et  témoigne  de  leiii"  application  suivie,  f.a  commission 
n'a  vu  que  des  labours  parfaits  et  des  récoltes  complètes. 
Sauf  une  prairie  naturelle  usée,  qui  est  h  détruire  tout 
entière,  elle  n'a  rien  trouvé  qui  fùl  fail)l(^  ,Ie  n'en  exce|)te 
pas  les  vignes,  qiioi(pio  les  anciennes  dussent  être  déjà 
renouvelées  ou  greffées,  si  les  prix  actuels  du  vin  n'expli- 
quaient pas  qu'on  les  ait  maintenues.  Les  céréales  surtout 
sont  remarquables,  oiïrant  la  plus  vigoureuse  végétation, 
aibnirablement  égales,  |)résagoant  de  très-liauts  rendo- 
nienls.  Dos  lupins  (|u'()n  allait  faucher  lors  de  notre  visiie, 
des  farouches  (jui  l'avaient  été  le  malin,  10  hectaies  de 
luzerne  à  l'arrosage  après  la  coupe  et  dans  une  terre 
très-médiocre,  les  pommes  de  terre,  une  grande  pièce 
de  betteraves,  du  mais-fourrage,  un  sainfoin  de  Tannée, 
des  terres  qu'on  jtréparait  pour  le  maïs  en  grain  et  le 
petit  millet,  tout  cela  appelait  l'éloge  d'une  manière  ab- 
solue, el  la  commission  éprouve  d'autant  plus  de  satis- 
faction à  le  dire,  (pie  tout  cela  lui  a  été  montré  tel  que 
(•ha(iue  jour  le  présente,  sans  apprêt  aucun,  connue  si 
ses  nuMnbres  n'étaient  pas  des  juges  dis|)osant  du  prix 
le  [)lus  envié.  Tout  cela  se  résume  à  son  tour  par  ce 
chill're,  (jue  l'hectare,  qui  donnait  une  moyenne  de  5o  fr. 
net,  en  donne  à  présent  une  de  plus  de  l.'iO  fr. 

Du  reste,  si  l'on  regarde  au  bétail  et  au  fimiicr,  c'esl- 
ii-dirc  à  ce  qui  assure  à  Texploilalion  son  mouvement  et 
ses  forces,  on  s'explique  cet  état  remaripiable  du  liavail 
et  des  récoltes.  Germainville  enirelient  une  pojudarion 
animale  do  (]0  têtes,  représentant  chacune  120  kilos  de 
poids  vif  par  hectare  arable  "*.   (-e  nombreux  bétail  est 

iliinii'ini',  l>li' avec  trMlc  ;  Iroisii-iiio,  liMli';  (jnalrii'iiic,  avoine;  cinquifiiu', 
li)iii'ra(ji's  de  |ii'ii)l('in|i$  (orge  el  vescos). 

(I)  12  rlu'vaiix  iiii  juments,  12  bœuls  ilo  tia\ail,  10  vaclies,  ."  lanivanx, 
!)()()  iDoiitons,  la  Iruics,  2  venais,  de  80  à  100  poieelots.  [^e  troiiiieaii 
passe  i'élc  à  la  ilionlajjiie  [niiir  éviter  le  sanj;  de  lale. 


58 

remar(|iinhlc  pros(inp  à  tons  (^ijards.  Los  donzp  Itœiil's  de 
travail,  (rès-vii(<»iii(Mi\,  tii's-l)oaiix,  (|iiol(|iios-uiis  de  |tie- 
mier  choix,  appartiiMincnl  aux  races  de  l'Ariége  et  du 
Roiissilloi),  croisées  entre  elles,  cl  la  iiliipail  sont  r)és 
et  élevés  sur  le  domaine.  M.  (Iniilc  ne  veut  ce|)cndanl 
pas  s'en  tenir  h  ce  croisement.  Lors  de  la  visite  de  la 
comnnssion,  il  venait  de  renouveler  tonte  sa  vacherie  en 
hiMes  de  Scliwit/.  d"une  rare  perfection.  Il  était  allé  les 
choisir  Idi-iuème  sur  les  lieux.  Il  allcnd  des  n'-sultats 
su|)érieurs  du  mélaiii>c  des  sangs  schwit/  et  mijanais,  et 
la  commission  ne  l'a  pas  vu  sans  satisfaction  entrer  dans 
celte  voie,  cpii  lui  |)arail  approprit'e  au  pays.  I,a  seule 
critique  à  faire,  porte  sur  le  troupeau,  non  (pi'on  ne  le 
trouve  pas,  comme  îoiil  le  reste,  irréprochable  d'enlre- 
lien,  de  tenue  et  donnant  une  laine  très-line,  mais  parce 
que  M.  (luillé  ne  le  reijarde  pas  encore  des  mêmes  yeux 
dilliciles  (\uo  son  hétail  bovine.  .\vec  ces  yeux-là,  il  le 
voudrait  plus  rapproche  du  type  de  boucherie,  auipiel  il 
l'aul  venir,  bon  gré  mal  gré,  pour  avoir  du  bénélice.  Son 
espèce  porcine  est  dans  ces  principes:  on  ne  pouvait  faire 
de  meilleurs  choix  ici  que  les  hampshire  et  berkshire  (|ui 
le  composent.  Somme  toute,  on  est  autorisé  îi  dire,  (pi'à 
côté  de  ses  travaux  hors  ligue  et  de  ses  récoltes  parfaites, 
ce  domaine  possède  encore  un  magniM(|ue  bétail. 

Ce  bétail  ne  fait  (pie  très-accessoirement  de  la  viande. 
.\  tout  ce  <pii  peut  devenir  béie  de  trait,  Germainville 
demande  smtout  du  travail  et  du  fiinder''',  el  il  excelle 
dans  son  fumier  comme  dans  les  autres  choses.  Il  a,  pour 
le  préparer,  un  em|)lacement  exprès  et  établi  dans  les  prin- 
cipes modernes  :  un  hangar  soigneusement  muré  de  trois 
côtés,  el  n'ayaiil ,  d(>  laulrc,  (pie  le  jour  indispensable. 
Il  présente  deux  cases,  don!  le  phm  incline  vers  un  réser- 
voir commun,  et  entre  les(|iielles  un  lond)ereau  peut  se 
placer.   On  slralillc  successivement  dans  ces  cases   les 

(I)   l^es  vai'lics  iiiciinjs  sont  aUeléus  j».)iir  los  U'avaiu  faciles. 


59 


litières  de  toute  provenance,  augmentées  des  vidanges  de 
la  maison,  et  l'on  arrose  les  tas  avec  le  jus  (pi'ils  rendent, 
étendu  d'une  dissolution  de  sulHite  de  l'or").  On  a  ainsi 
un  fumier  normal,  au(|uel  il  ne  manquerait  que  de  rece- 
voir tous  les  pin-ins  des  écuries  pour  être  dans  le  rapport 
le  plus  complet,  le  plus  IVuclueux,  avec  le  bétail  entretenu 
et  la  nourriture  consonnnée. 

Vous  connaîtrez  toute  l'exploitation  de  y\.  Cuillé,  quand 
j'aurai  dit  que  les  bâtiments  ipii  la  desservent,  répondent  à 
ses  autres  parties.  Ils  forment,  avec  la  maison  (niahilalion, 
un  enseudtle  bien  à  portée  de  tout  le  domaine,  ouvert  sur 
une  large  avenue,  où  tous  les  cliemins  s'endjranclient, 
orné  de  beaux  jardins  fruitiers.  Quoi(pie  construits  ou 
augmentés  successivement ,  ils  ont  été  commodément 
disjtosés,  sans  place  perdue  et  sans  dépense  inutile.  Les 
écuries  des  bêtes  de  travail,  déjà  aueiennes,  n'olfrent  pas 
les  détails  perfectionnés  (pii  deviennent  habituels  mainte- 
nant; du  moins  sont-elles  spacieuses,  bien  aérées  et  stric- 
tement alfectées  chacune  à  une  catégorie  d"animau\  ; 
j'ajouterai,  d"aillein's,  (pie  la  supc-riorilé  de  ces  animaux 
détournait  lolalement  de  voir  (piil  y  manquât  (piehpie 
chose.  La  bergerie,  en  tout  cas,  plus  récemment  faite, 
est  un  établissement  complet,  en  tout  ce  qui  le  regarde, 
et  presipie  modèle.  La  porcherie,  qu'on  venait  d'achever 
I  année  dernière,  remplit  aussi  toutes  les  exigences,  pré- 
sentant sous  un  même  toit  une  suite  de  loges  disposées 
des  deux  côtés  d'un  corridor,  avec  cour  pour  chacune , 
préau  commun,  bassin  d'eau,  sa  cuisine  spéciale,  ses 
magasins  et  ses  logements  à  elle.  Les  chais,  les  caves  à 
tubercules,  les  greniers  ;i  blé,  les  logements  du  person- 
nel, forment  le  reste  de  ces  bâtiments,  où  l"on  doit  dire 
que  tout  ce  (jui  est  nécessaire  existe  dans  les  conditions 
convenables. 

Voilà  connnent  tout  se  soulienl   el  se  [iroduit  récipro- 

(I)    llaiis  la  |)ro|iMilion  ,lr  I   l.il,,  p,,-  |00  lidcs  J".,)!!. 


60 

qnement  dans  l'exploitation  do  Germainvillo.  Quolquo  chose 
V  reste  îi  voir  :  c"esl  la  terme-école,  qui  date  de  la  l'onda- 
tion  de  ce  genre  d'établissements  en  I<Si9.  M.  Cuillé  avait 
fait  alors  la  pins  considérable  de  ses  grandes  Irancliées  de 
préservation,  commencé  l'utilisation  des  parties  marécageu- 
ses, jdanté  vingt  hectares  de  vignes,  (piadrnplé  les  prairies 
nrlidcielles,  tripit'  les  bâtiments,  établi  les  beaux  jardins 
iriiitiers  et  maraîchers  qui  ornent  aujounrbui  ce  domaine  : 
la  l'erme-école  lui  fut  conliée  comme  au  propriétaire  (|ui 
déjà  annonçait  devoir  enseigner  le  pays.  Il  fut  choisi  entre 
douze  concurrents;  vous  voyez  qu'il  a  su  justilier  cette 
préférence,  et  combien  peu  il  avait  besoin  que  la  ferme- 
école  IVil  placée  chez  lui,   |)our  se  trouver  à  la  tète  des 
agricultein-s  de  ce  département.  Du  reste,  si  l'on  croyait 
encore  que  ces  établissements  fussent   une  grande   res- 
source pour  leurs  possesseurs,  on  serait  bien  contredit  à 
r.ermainville.  Peu  de  fermes-écoles,  certainement,  jouis- 
sent de  la  robuste  |)opulatiou  d'adultes  (pi'il  a  été  donné 
à  la  commission  d'y  trouver,  et  il   ne  faut  pas  moins  de 
treize  ouvriers  étrangers  par  jour,  pendant  tonte  l'année, 
pour  sullire  aux  travaux,  sans  compter  (piatre  chefs  d'em- 
ploi à  gages,  outre  ceux  qui  sont  rétribués  par  l'Etat  '". 
La  vérité,  c'est  que  les  fermes-écoles  imposent  de  grandes 
obligations,  et  qu'elles  apportent  à  l'exploitation  plus  de 
didicullés  qu'on  ne  le  pense.  Klles  n'y  apportent  pas  les 
méthodes  dans  tous  les  cas,  l'art  cullural,  et  l'on  ne  peut 
méconnaître  non  \)\ns  qu'il  ne  soit  d'un  grand  prix  pour 
un  département,  ipie  le  lieu  qu'il  a  choisi  pour  son  ensei- 
gnement agricole,  se  fasse  distinguer  comme  le  lieu  de 
l'exploitation  la  meilleure.  La  commission  place  bien  hau- 
tement la  ferme-école  de  (lermainville  parmi  celles  qui  ont 
des  mérites  supérieurs.  Kn  tout  ce  qui  se  rapporte  îi  ses 
élèves,   régnent  ces  mêmes  soins  exacts,  complets,  qui 
caractérisent  tout  le  reste.  La  connnission  a  vu  les  jeunes 

(1)   Le  clief  d'attelage,  le  chef  Je  ciiIIimp.  le  vaclier,  le  l)erger-i»iielicr. 


61 

gens  de  troisième  année  manier  très-bien  la  faux;  l'aire 
un  cvcollont  labour;  il  lui  a  |)aru  qu'ils  élaicul  lorMH's  au 
mieux  [)Our  porter  ulilcuieiil  dans  les  diverses  parties  de 
ce  pays,  la  bonne  eiillure  {pii  s'opère  sous  leurs  yeux, 

Jai  dit  à  ipiel  i)onit  de  [trodiu-lion  avait  été  élevé  ce 
domaine.  En  finissant,  je  dois  ajouter  deux  clioses: — La 
première,  c'est  (|u'on  ne  saurait  imputer  cette  grande 
production  à  aucune  dé|)ense  excessive.  Les  énormes 
travaux  l'onciers  de  Ciermainville  et  son  beau  cbeplel,  ne 
(ont  pas  monter  ;i  plus  de  '200.000  Ir.  son  prix  de  revient 
actuel.  Une  comptabilité  ininterrompue  depuis  une  longue 
période  et  pari'ailement  régulière,  montre  que,  dans  le 
détail,  l'ordre  et  l'intelligence  des  ouvrages  ont  joué  bien 
plus  le  rôle  que  l'argent  O,  et  vous  savez  maintenant  si 
le  ca|)ilal  engagé  est  placé  avec  avantage. —  L'aulrecbose 
qu'il  faut  mettre  en  relief,  c'est  le  caractère  particidier 
qu'a  l'agriculture  de  ce  domaine.  On  trouve  à  Germain- 
ville  l'agriculture  du  pays  pure  et  simple,  et  en  qin^lque 
sorte  l'ien  (pi'elle.  Sauf  la  rotation  (prm(puMinale  appli- 
quée à  ses  It'rres-verls,  rien  ne  s'y  voit  ou  ne  s'y  tait  (pie 
dans  le  pays  on  ne  connaisse  ou  l'on  ne  lasse.  Kaire  mieux 
que  tout  le  monde  ce  que  tout  le  monde  l'ait,  on  y  a 
surtout  ce  but;  on  place  avant  tout  l'art  cultural  à  mettre 
des  soins  extrêmes  dans  les  pratiipies  courantes.  Aussi, 
n'y  trouve-t-ou  pas  un  instrument  [(erléetionné,  ni  aucune 
entre|)rise  dillérente  des  entreprises  ordinaires,  et  jamais 
tourteau,  guano,  ou  le  moindre  engrais  connuercial  n'y 
a  été  employé  à  (pioi  que  ce  soit. 

Très-certainement,  c'est  une  grande  (pialité,  dans  nue 
exploitation,  (pie  de  |)résenter  le  maximum  de  la  produc- 
tion dans  les  praticpies  vulgaires,  et  de  montrer  ainsi  la 
grande  puissance  (pi'ont  des  soins  attentifs  appliqués  ii  tout 
piMir  raugmentaiion  des  rendements.  Knniéme  temps  c'est, 

(I)  l'ar  oiiMuple,  c'est  avec  des  clianiics  iiii'oii  ;i  loil  les  (jrjiuls  fusses. 
Les  atletagcs  soutevaicnt  ta  (erre;    les  boiiimes  iravaieiil  iiuà  Joblavcr. 


ti-2 

sans  conlrodit,  un  cùlé  laiblc  II  ne  serait  qiio  sii|K'rlUi  de 
démontrer  que  ce  domaine,  n)is  aujourd'hui  dans  un  état 
d'exploitation  si  fructueux,  gagnerait  cei>eiidanl  ëenucoup 
à  ne  pas  dédaigner  les  puissantes  forces  (pie  les  engrais 
pulvéridenls  procurent,  et  à  sortir  de  roulillage  médiocre 
(lu  pays,  pour  prendre  les  instruments  mieux  combinés  qui 
sinqdilienl  le  travail  tout  en  le  rendant  meilleur;  je  suis 
presque  confus  de  dire  que  les  charrues  Domhasie  même 
sont  exclues  de  (iermainville,  comme  de   tout  le  Rous- 
sillon.    Toutefois,  on   n'élève  pas  sans  timidité,  vis-à-vis 
de  M.  Cuillé,  ces  réserves  commandées  par  ragronomie. 
Il  a  sextuplé  sa  renie  en  délinitive,  porté  de  o.oOO  fr.  à 
près  de  20.000  fr.  son  revenu  moyen;  il  a  eu  plus  de 
50.000  fr.  de  (piitle  ces  années  dernières,   .\voir  obtenu 
cela  avec  les  pralicpies  de  tout  le   monde,   donne  une 
autorité  faite  pour  retenir  la  critique,  et  explique  qu'on 
aarde  les  voies  battues  sans  se  tourmenter  du  mieux.  Mais, 
d'un  autre  côté,  quel  prix  ne  doit-on  pas  reconnaître  a  ce 
caractère  de  fini  dans  les  conditions  ordinaires,  qui  est 
celui  de  l'agricidture  de  C.ermainville.  Que  de  richesses 
nouvelles,  et  que  de  populations  élevées,  si  seulement,  ce 
caractère  devenait  commun  !  Certes,  on  aime  à  attacher  la 
Prime  d'honneur  à  ces  agriculures  d'éclat,  qui  saisissent 
par  leurs  procédés  autant  que  par  leurs  effets;  mais  un 
travail  excellent  et  une  production   pleine,  réalisés  dans 
toutes  les  parties  à  la  fois  dun  domaine  à  cultures  variées 
en  se  tenant  dans  les  conditions  usuelles ,  c'est  quelque 
chose  de  non  moins  fécond  pour  ne  pas  paraître  aussi  bril- 
lant, et  de  non  moins  rare,  quoique  ce  semble  facile.  C'est 
le  plus  parfait  modèle  aussi,  le  modèle  qui  est  dans  la  juste 
proportion  des  choses.  Les  instructions  mêmes  qui  sont  ici 
la  loi  du  jury,  avaient  en  vue  des  exploitations  comme  celle 
de  M.  Cuille,  quand  elles  donnaient  celte  délinition  si  bien 
mesurée  du  lain-éal  de  la  Prime  d'honneur  :  «  Tu  domaine 
sagement  dirigé,  et  soumis  a  une  culture  en  rapport  par- 


€3 

lait  avec  les  circonslances  locales,  liicn  i(''i^l('e  dans  ses 
(Icpenses,  produclive  dans  ses  résultais,  dont  l'exemple 
puisse  être  sûrement  invoqué.  » 

Vous  sanclionneiez  donc,  messieurs,  le  jiigemcnlde  la 
commission,  rnanimement.  comme  elle,  vous  décernerez 
la  l^iime  d'honneur  an  domaine  l'erme-école  de  (iermain- 
ville.  Comme  elle,  aussi,  vous  n)arquerez  de  la  plus  liante 
lie  vosdistinctions  spéciales,  les  i^rands  exemples  ai;iic(des 
de  Hages,  en  attribuant  la  grande  médaille  d'or  aux  ing(''- 
iiieux  et  puissants  dessalements  de  salobres  qu'avait  laits 
M.  J.  Harrère.  Nous  vous  demandons  d'accorder,  en  outre, 
une  médaille  d'or  à  l'ensemble  vilicole  de  M.  Saiivv;  une 
autre,  à  M.  Ilénaul,  pour  ses  travaux  de  dessèchement  et 
d'irrigation  combinés;  une  troisième,  à  .M.  V.  Malègne, 
pour  la  proportion  exceptionnelle  du  bétail  dans  sa  |)etile 
et  jeune  exploitation. 

Il  n'y  aura  pas  une  partie  du  département  (pii  ne  soit 
enseignée  par  ces  récompenses,  et  elles  ne  montreront 
à  son  agriculture  que  les  routes  on  elle  peut  utilement 
s'engager.  D'antres  avantages  s'y  attacheront  encore.  Les 
travaux  (|u'elles  vont  signaler  appartiennent  à  cette  agro- 
nomie désormais  commandée  par  les  choses,  qui  ne  vent 
plus  mesurer  les  eiïorts  que  sur  les  besoins  sans  cesse 
augmentés,  et  qui  se  (le  :i  l'apidication  de  forces  t(»nj(Hirs 
plus  grandes  au  sol  pour  en  obtenir  toute  la  rémunération 
légitime.  l]tt  temps  a  existé  où  l'on  vivait  chez  soi  et  sur 
soi.  Les  bornes  de  son  propre  pays  lormaienl  pour  le  »  iilii- 
vatenr  presijue  celles  du  monde.  C'était  produire  sans 
issue  que  de  produire  beaucoup.  L'agriculture  était  deve- 
nue naturellement  cette  inerte  jouissance  de  la  terre,  re- 
cherchée pour  la  sécurité  de  la  lortune  ac{inise,  mais  oîi 
l'on  eût  cr.i  perdu  ou  jeté  en  prodigue  t(.iit  capital  qu'on 
y  eût  employé.  On  est  sorti  désormais  de  ces  données 
stériles,  comme  des  anciennes  voies  sociales  d'où  elles 
dérivaient.    L'entière  liberté  de  la  vie.  rabaissement  de 


64 

toute  frontière,  luiiiversalité  et  l'instantanéité  des  rap- 
ports et  (les  échanges,  impriment  |)arlonl  un  mouvement 
rapide  qui  généralise  le  bien-être,  qui  en  élève  le  niveau  à 
toute  heure,  (pii  l'ail  une  ohligaliou  rigoureuse  de  l'élever 
sans  cesse  :  produire  aclivemenl,  produire  de  plus  en  plus, 
c'est  la  loi  nécessaire.  Nous  ne  sommes  ici  (|u'à  cause  de 
cette  loi.  A  cause  d'elle  a  été  entreprise  celte  révision 
mémorable  de  notre  législation  économique,  poursuivie 
avec  une  supériorité  si  soutenue  et  un  si  prolbud  sentiment 
de  sa  fécondité  par  le  Ministre  de  qui  nos  opérations  res- 
sorlenl;  à  cause  d'elle,  il  allait  lui-même,  l'autre  jour, 
remettre  aux  concurrents  de  Poissy  les  grands  prix  qui 
s'y  décernent,  et  leur  parler  le  langage  élevé  que  dictent 
les  vues  d'Élal,  ap|)uyées  sur  la  science  et  le  bien  public-. 
Si  dans  ces  dispositions,  qui  n'ont  que  trop  lardé,  il 
est  un  service  considérable  entre  ceux  que  les  Concours 
Régionaux  sont  appelés  à  rendre,  c'est  de  faire  oublier 
déliuilivemenl  les  vieilles  opinions,  (|ui  ne  voyaient  dans 
l'agriculture  qu'un  état  sacrilié,  où  il  y  avait  d'autant 
])lus  de  mérite  à  se  tenir,  qu'il  ne  laissait  pas  de  fortune 
à  faire.  Comme  les  lauréats  des  années  précédentes,  les 
lauréats  d'aujourd'hui  nous  aideront  dans  cette  tâche.  Au 
déparlemenl  qui  les  présente,  et  dans  lequel  la  nature  a 
réuni  toute  la  fertilité  des  alluvions,  tonte  la  puissance  du 
climat  méridional,;!  toute  la  fraîcheur  de  l'arrosage,  à  celle 
Jléiiion  Sud  qui  recèle  encore  tant  de  richesses  latentes 
sous  ses  grandes  richesses  visibles,  a  notre  pays  tout  entier, 
qu'attend  une  ère  agricole  nouvelle,  ils  feront  voir  ce  que 
de  judicieuses  et  de  généreuses  avances  peuvent  pom-  la 
production;  ils  apprendront  ce  que  procurera  de  richesse 
et  d'élévation  de  la  vie,  l'agriculture  devenue  une  profes- 
sion véritable;  ils  diront  une  fois  de  plus  que,  !ors(pi'on 
décerne  de  hautes  distinctions  à  des  cultivateurs  d'élile, 
ce  ne  sont  pas  des  vertus  résignées  et  obscures  qu'on 
récompense,  mais  une  grande  industrie  que  l'on  relève. 


DISTRIBUTION  DES  PRIX  ET  MEDAILLES. 


COMMISSION    CENTRALE. 

Président M.  le  Préfet. 

Vice-Présidents....     M.  le  Maire  de  Perpignan. 
M.  le  premier  Adjoint. 
M.  Saisset,  deuxième  Adjoint. 
Secrétaire-Général. .     M.  Lloiibes  (  Aui^'^iiste  ) ,   président  de   la 
Société  Agricole,  Scienlilique  et  Littéraire  des  Pyrénées- 
Orientales. 

MM.  les  Présidents,  Vice-Présidents  et  Secrétaires  des  diver.ses 
Commissions  spéciales. 


PREMIERE  DIVISION. 

Prime  d'Honneur  pour  l'exploitation  du  département  des 
Pyrénées-Orientales  la  mieux  dirigée,  et  qui  a  réalisé  les  amé- 
liorations les  plus  utiles  et  les  plus  propres  à  être  olTertes 
comme  exemple. 

Une  coupe  d'argent  et  une  somme  de  cinq  mille  francs,  à  M.  Ger- 
main Cuillé,  directeur  de  la  Ferme-École  de  Liermainville,  à 
Perpignan. 

Récompense  aux  agents  de  l'exploitation  qui  a  obtenu 
la  prime  d'honneur. 

Une  médaille  d'argent    et  100  l'r.,  à  M.  Boy. 


Idem 

et  100 

ù  M.  Aymar. 

Idem 

et  100 

à  M.  Gantier. 

Lue  médaille  de  bronze  et    50 

à  M.  Solère. 

Idem 

et    50 

à  M.  Pomeroly. 

Idem 

et    50 

à  M.  Madern. 

Idem 

et    35 

à  M.  Amalrich. 

Idem 

et    15 

à  M.  Bignals. 

66 

Médailles  proposées  pour  des  améliorations  agricoles 

spéciales. 

Grande  médaille  d'or,  à  M.  Barrère  (Jacques),  à  Bages. 

Médaille  d'or,  à  M.  Sauvy-Vilar,  à  Perpignan. 

Id.        à  M.  Malègue,  à  Pézilla-de-la-Rivière. 
Id.        à  M.  llainaut,  au  Scier. 

DEUXIÈME  DIVISION.— ANIMAUX  REPRODUCTEURS. 

FREMIÈHC  CI.ASSE.  —  ESPÈCE  BOVINE. 

PREMIÈRE    CATÉGORIE.— RACES    FRANÇAISES   PURE3. 

Mâles. 
Première  Section. 

^e>-  i„ix.  —  Une  inéJaille  d'or  et  600  fr.,  à  M.  Marion  île  Gaja  ,  h  Gaja-la- 

Selve. 
2e   pris. —Une  médaille  d'argent  et  oOO  fr.,  à  M.  Bncb,  à  iMonti)elIier. 
5e  prix.  — Une  médaille  de  bronze  et  400  fr.,   à  M.  Jumas,  à  Uzès  (Gard). 
4e    niix.- Une  médaille  de  bronze  et  500  fr.,  à  M.  Bazille,  à  Moulpellier. 

Deuxième  Section. 

^er prix. —  Une  médaille  d'or  et  600  fr.,  à  M.  Bazille,  précité. 

2=  prix.  — Une  médaille  d'arjjent  et  500  fr.,  à  M.  Marion  de  Gaja,  précité. 

5e  pris.  — Une  médaille  de  bronze  et  -iOO  Fr.,  ii  M.  Bocb,  précite. 

4e  pris.— Une  mcd.  de  bronze  et  500  fr.,  à  M.  Latapie,  à  Castelnaudary. 

Femelles. 
Première  Section. 

^er  prix.  — Une  médaille  d'or  et  500  fr.,  à  M.  Faral,  h  Alzonne. 

2*  prix.  -  Une  médaille  d'argent  et  200  fr.,  à  M.  Marion  de  Gaja,  précité. 

5e  prix. -Une  médaille  de  bronze  et  I  iiO  fr.,  à  M.  de  Selva,  à  Perpignan. 

Deuxième   Section. 

.,.r  prix.  -  Une  médaille  d'or  et  400  fr.,  à  M.  Vincent  Malègue,  précité. 
2<-  prix.— Une  médaille  d'argent  et  500  fr.,  à  M.  Tarai,  précité. 
y  prix.  —Une  médaille  de  bronze  et  200  fr.,  à  M.  Latapie,  précité. 


67 

Troisième  Section. 

^"■'■  prix. --Une  inédailli;  d'or  et  400  fr.,  à  iM.  Lourdon,  à  Montpellier. 
2«  prix.  —  Une  médaille  d'argent  et  300  fr.,  à  M.  Mourgues,  à  Montpellier. 
3''  prix.  —  L'ne  médaille  de  bronze  et  200  fr.,  à  M.  Bazille,  jirccilc. 
A^  prix.  —  Une  médaille  de  bronze  et  liiO  fr.,  à  M.  Marion  de  Gaja,  ■précité. 

DEUXIÈME  CATÉGORIE.  — RACE  DURHAM  PURE. 

Mâles. 
Première  Section. 

l'oint  de  prix. 

Deuxième  Section. 

l'oint  de  premier  prix. 

2»  prix.  —Une  médailL'  d'aiMcnt  el  "iOD  (r.,  ;i  M.  Malèguc,  'précité. 

Femelles. 
Première  Section. 

Point  de  prix. 

Deuxième  Section. 

Point  de  premier  prix. 

2'' prix.  —  Une  médaille  d'ar(yrnt  et  300  fr.,  à  i\I.  Sabatier  d'I'lspeyran  , 
à  Saiiit-Ciilles. 

Troisième  Section. 

l'oint  de  prix. 

TROISILME    catégorie.  — R.4.CES    ÉTRANGÈRES   PURES    DIVERSES. 

Mâles. 
Première  Section. 

1"^  prix.  —  Supprimé.  '   • 

DiMixièmo  Section. 

Point  do  prix. 


68 

Fejnelles. 
Première  Section. 

Point  de  pris. 

Deuxième  Section. 

Point  de  premier  prix, 

2»  prix.  —  Une  médaille  d'argent  et  500  fr.,  à  M.  Causse,  à  Sommières. 

Troisième  Section. 

^e'■  prix. — Une  médaille  d'or  et  400  fr.,  à  RI.  Destrcmx  de  Saint-Cbrislol, 

à  Alais. 
2e  prix.  —  Une  médaille  d'argent  et  500  fr.,  à  M.  Causse,  précUii. 
3*  prix.  —  One  médaille  de  bron/.e  et  200  fr.,  à  M.  Mourgues,  précité. 

QUATRIÈJIE   CATÉGORIE. —  CROISEMENTS   DURHAM. 

Mâles. 
Première  Section. 


Point  de  prix. 
Point  de  Prix. 


Deuxième  Section, 


Femelles. 
Première  Section. 

Point  de  premier  prix. 

2«  prix. — Une  médaille  d'argent  et  200  fr.,  à  M.  Destrcmx  deSaint-Cbristoi, 
précilé. 

Deuxième  Section, 

Point  de  premier  prix. 

2*  prix.  —  Une  médaille  d'argent  et  300  fr.,  a  RI.  Malègue,  précité. 

Troisième  Section, 

Point  de  premier  prix. 

2'  prix.  —  Une  médaille  d'argent  et  300  fr.,  à  M.  le  duc  de  Filz-Janies, 
à  Saint-Gilles. 


6  y 

CINQUIÈME  CATÉGORIE. — CROISEMENTS   DIVERS. 

Mâles. 
Première  Section. 

Point  (le  prix. 

Deuxième  Section. 

Point  de  prix. 

Femelles. 
Première  Section. 

Point  de  premier  prix. 
2'  prix.  —  Supprimé. 

Deuxième  Section. 

^"  prix,  — Une  médaille  d'or  et  200  fr.,  à  M.  Sabatier,  précité. 

Troisième  Section. 

•I''''  prix.  —  Supprimé. 

Oe  prix.  — Une  nicdaillc  d'ar{;cnl  et  200  fr.,  à  M.  Numa  Rives,  à  Cuxac- 

Ca  bardés. 
5'  prix.  —  Une  médaille  de  brome  et  1  aO  fr.,  à  M.  Latapic,  précité. 


DEUXIÈME  CLASSE.  ^ESPÈCE  OVINE. 

PREMIÈRE    CATÉGORIE.— U.\Ci:S    MÉRINOS    ET   MÉTIS-MÉRINOS. 

Mâles. 

^-■r  prix.  —Une  médaille  d'or  cl  500  fr.,  h  M.  Courier,  à  Fraisse-Cabardès. 
2"^  prix.  —Une  médaille  d'aryrnl  et  250  fr.,  à  M.  de  Cassai(;neau  de  Brasse, 

h  I.imonx. 
5e   prix.-   Une  médaille  de  bronze  et  200  fr.,   à   M.    Louis  de  Fournas , 

à  Carcassonne. 
/,c  prix.  —  Une  médaille  de  bronze  et  ITo  fr.,  à  M.  Cnillé,  précité, 
fi'  prix.  —  Une  médaille  de  bronze  et  l.'iOfr.,  h  ^\.  Marion  de  Gaja,  pre'ciVe. 
fjc  prix.  —  Une  médaille  de  bronze  et  125  fr.,  à  M.  Siurolcs,  à  Pczilla-de- 

la-Riïiére. 


70 

7c  prix.  —  Inc  mcJaille  de  bronze  et  \  10  fr.,  à  M.  Auriol,  à  Canet. 
ge  j)ii\.  — Duc  mcilaillc  de  bronze  et  100  fr.,  à  M.  Angles,  à  Sigean. 
ge  prix.  —  Pne  imilaille  de  bronze  et    80  fr.,  à  M.  Briizy,  à  Perpignan. 

Femelles. 

1er  prix.  _  Une  médaille  d'or  et  500  fr  ,  à  M.  Cuillc,  ■précité. 

2"  prix.  —  Une  médaille  d'argent  et  2o0  fr.,  à  M.  de  Cassaigneau  de  Brasse, 

précilê. 
3e  prix.  — Une  midaillo  de  bronr.e  et  200  fr.,  à  M.  llainaiit,  jirétilé. 
4«  prix.  — Une  médaille  de  bronze  cl  l7o  fr.,  à  iM.  Tapié-Mengau,  à  Salles 

(.\iide). 
5»  prix.  — Une  médaille  de  bronze  et  ^50  fr.,  à  M.  Mortagc,  à  Pézilla-de- 

la-Rivière. 
G«  prix.  -  Une  médaille  de  bronze  cl  I2j  fr.,  à  M.  Lades  Goût,  à  Carcas- 

sonne. 
7=  prix.  —  Une  médaille  de  bronze  et  1 10  fr,  à  M.  Foixnnnet,  à  Alénya. 
ge  pri^_  —Une  médaille  Je  bronze  et  100  fr  ,  à  M.  Piijas,  à  Argelés  sur-M. 

DEUXIÈME    CATÉGORIE.  —  RACE   BARRARINE. 

Mâles. 

|rr  prix.  — Une  médaille  d'or  et  200  fr.,  à  M.  le  duc  de  Fi(z-,Iames,  })rfVi7c'. 
oe  prix.  — Une  médaille  d'argent  et  150  fr.,  à  M.  Castres,  à  Sainl-Kéliu- 

d'Avall. 
5«  prix.- Dne  médaille  de  bronze  et  100  fr.,  à   M.   André  Tenipier,  à 

Ainiargues  (Gard). 

Femelles. 

I«r  prix.—  Une  médaille  d'or  et  200  fr.,  ;i  M.  André  Tcmpicr,  prm/é. 
2^  prix.  — Une  médaille  d'ar|;en  tel  I  jO  rr.,à  M.  le  dnc  de  Filz-Jamcs,  ptci/t. 

TROISIÈME    CATÉGORIE.  —  RACE   A   LAINE    COMMUNE. 

Mâles. 

Point  de  prix. 

Femelles. 

I  "prix. —Une  médaille  d'or  el  500  fr,  à  M.  deCassaigncau  délirasse,  preci/i;. 


71 

2'  prii.  — Une  médaille  d'arijcut  el  200  fr.,  à   M.  de  MarlriD-Uonos,  à 

Narboniie. 
3<-  j)iis.  — Une  médaille  de  bronze  et  loO  fr.,  à  M.  Siurolcs,  précité. 

QUATRIÈME    CATÉGORIE.— RACES    ÉTRANGÈRES   DIVERSES. 

Mâles. 

^ir|„.i^._Unc  iiK'daille  d'or  cl  500  fr.,  à  M.  Louis  Fabre,  à  Saiiit-Privat 

(Vaucluse). 
2''  i)rix.  — Due  médaille  d'argent  et  200  fr.,  .'i  M.  L*  de  Fournas,  précité. 

Femelles. 

I"  prix.  —  Duc  médaille  d'or  et  ÔOO  fr.,  à  M.  Louis  Fabre,  précité. 
CINQUIÈME   CATÉGORIE.  —  CROISEMENTS    DIVERS. 

Mâles. 

.jfipri>t.  —  Une  médaille  d'or  et  500  fr.,  .'i  M.  Louis  Fabre,  précité. 
2"  prix.  —  Une  médaille  d'argent  et  200  fr.,  à  M.  Sarda,  h  Lésignan  (Aude). 
5e  prix.  —  Une  médaille  de  bronze  el  loO  fr.,  à  M.  Barrère,  précité. 
Une  mention  bonorable,  à  M.  le  duc  de  Fitz-Fames,  précité. 

Femelles. 

I"  prix.  —  Une  médaille  d'or  et  ÔOO  fr.,  à  M.  Louis  Fabre,  précité. 

2'  prix.  —  Une  médaille  d'argent  et  200  fr.,   à    M.  le  duc  de   Filz-James, 

précité. 
î)e  prix. — Une  médaille  de  bronze  et  1  .'iO  fr.,  à  M.  André  Tempier,  précité. 
A'  prix.  —  Une  médaille  de  bronze  et  100  fr.,  à  M.  Barrère,  précité. 
Une  mention  bonorable,  à  M.  Ïapié-Mengau,  précité. 


TROISIEME  CLASSE.       ESPECE  PORCINE. 

PREMIÈRE    CATÉGORIE.  —  RACES    INDIGÈNES   PURES. 

Mâles. 

l'oint  (Ir  piix. 

Femelles. 

l'oint  de  premier  pris. 


72  1 

2'  prix. — Une  nicJaille  d'arj;cnl  et  150  fr.,  à  M.  Coloinbics,  à  Pézilla-de- 

la-Rivière. 
Dne  mention  honorable,  à  M.  Malègue,  précité.  | 

DEUXIÈME  CATÉGOniE.  —  RACES  ÉTRANGÈRES. 

Mâles. 


•("prix. — Une  médaille  d'or  et  2o0  fr.,  à  M.  de  IMartrin-Donos,  jirécité. 

2'  prix.  —  Une  niéilaillc  d'argent  et  200  fr.,  à  M.  Maiègne,  jtrécilé. 

3'  prix. — Une  médaille  de  bronze  et  lîiO  fr.,  à  M.  de  Cassaigncau  de  Brasse, 

précité. 
A^  prix. — Une  médaille  de  bronze  et  100  fr.,  à  M.  Marion  de  Gaja,  précité. 

Femelles. 

■1"'  prix. — Une  mcd;iille  d"or  et  200  fr.,  h  iM.  Malègue,  précité. 

2"^  prix.  —  Une  médaille  d'argent  et  150  fr.,  à  M.  Marion  de  Gaja,  précité. 

5*   prix. — Une  médaille  de  bronze  et  100  fr.,  à  M.  Sanvy,  précité. 

■'i'  prix.  — Une  médaille  de  bronze  et  80  fr.,  à  M.  de  Cassaignean  de  Hrasse, 

précité. 
S""  prix.— Une  médaille  de  bronze  et  70  fr.,  à  M.  Cnillé,  précité. 

TROISIÈME  CATÉGORIE.— CROISEMENTS   ENTRE  RACES  FRANÇAISES 
ET    RACES    ÉTRANGÈRES. 

Mâles. 

Point  de  prix. 

Femelles. 

Point  de  premier  prix. 

2"  prix.— Une  médaille  d'argent  et  100  fr.,  à  M.  Wali'gne,  précité. 


QUATRIÈME  CLASSE.       ANIMAUX  DE  BASSE-COUR. 

Une  médaille  d'argent  et  100  fr.,  à  M.  r,aies,  ;i  Millas. 

Une  médaille  d'argent  et  100  fr.,  ;i  M.  Clialcrie,  à  Marseille. 

Une  médaille  de  bronze  et  20  fr.,  à  .M.  Pages,  à  Saint-Génis. 

Une  niéilaille  de  bronze  et  20  fr.,  à  M.  Guillanme  Sabalier,   à  Montpellier. 

Une  médaille  de  bnime  et  20  fr.,  à  M.  Baillo,  à  Thuir. 


I 


73 

IVECOMPEÎ^Sî:.S  aux  serviteurs  R13R\\3X. 


Une  somme  de  100  fr.  et   une  méduillc  d'argent,   au   sieur  Chavannac, 

emplové  chez  M.  Marion  de  Gaja. 
Une  somme  de  80  fr.  et  une  médaille  d'argent,  au  sieur  Romeu,  employé 

chez  M.  Malègue. 
Une  somme  de  70  fr.  et  une  médaille  d'argent,  au  sieur  Tailleur,  employé 

chez  M.  le  duc  de  Filz-Jamcs. 
Une  somme  de  60  fr.  et  une  médaille  d'argent,  au  sieur  Bonifacc,  employé 

chez  M.  Gaston  Baziile. 
Une  somme  de  "jO  fi'.  et  une  médaille  do  bronze,  au  sieur  Daniel  Michelin, 

employé  chez  M.  Dcstremx. 
Une  somme  de  23  fr.  et  une  médaille  de  bronze,  au  sieur  Hilles  Louis, 

employé  chez  M.  Gouricr. 
Cno  somme  de  2.j  fr.  et  une  médaille  de  bronze,  au  sieur  Esraré,  employé 

chez  M.  IMartrin-Donos. 
Une  somme  de  25  fr.  et  une  médaille  de  bronze,  au  sieur  Alcngrv,  employé 

chez  M.  Tapié-Mengau. 
Une  somme  de  2o  fr.  et  une  médaille  de  bronze,  au  sieur  Casiex,  employé 

chez  M.  Sarda. 
Une  somme  de  23  fr.   et  une  médaille  de  bronze,  à  M"'  Catherine  Gilles, 

employée  chez  M.  Gazes. 

INSTRUMENTS  ET  MACHINES  AGRICOLES. 


PREMIERE  SECTION. 

Inslrunienls  et  Machines  à  l'usage  de  l'Induslrie  agricole,  appartenant 
à  des  exposants  de  la  Région. 

Preniièi-e  Sous-Section.  —  Travaux  d'extérieur. 
Charrues. 

Rappel  de  médaille  d'or,  à  M.  .\uguste  Estrade,  à  Canobès. 


74 

Point  de  deuxième  prix. 

3'  prix.— Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Court,  à  Perpignan. 

Mention  honorable,  à  M.  Séguy,  à  Tliézan  (llcraultl. 

Charrues  sous-sol. 

H;ippel  de  médaille  d'or,  à  M.  Auguste  Kstrade,  pncilé. 

2'  prix.— Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Fulcrand,  à  Montpellier. 

Mention  honorable,  à  M.  Desiremx  de  Saint-Christol,  firécilé. 

Herses. 

Rappel  de  médaille  d'or,  ;i  M.  Auguste  Estrade,  jtrniié. 
2«  prix.  — Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Fulcrand,  précité. 
Rappel  de  médaille  de  bronze,  à  M.  Vincent  Malègue,  précilé. 

Rouleaux. 
Rappel  de  médaille  d'or,  à  M.  Auguste  Kstrade,  précilé. 

Scarificateurs  et  Extirpateurs. 

Point  de  premier  prix. 

2'  prix. — Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Fulcrand,  précilé. 

Mention  honorable,  à  M.  de  Chefdebien,  à  Narbonne. 

Butteurs. 

Prix  uni(|uc.— (j'ne  médaille  de  bronze,  à  M.  Fulcrand,  précité. 
Mention  honorable,  à  I\I.  Malègue,  précilé. 

Machines  à  faucher  les  praiiies  naturelles  ou  artificielles. 

l'oint  de  prix. 

Râteaux  à  cheval. 

Rappel  de  médaille  d'or,  à  M.  Auguste  Estrade,  précilé. 

Véhicules  destinés  aux  transports  ruraux. 

Rappel  do  médaille  de  bronze,  à  M.  Rernard,  à  Montpellier. 
Mention  honorable,  à  .M.  Sarda,  h  Ralio. 

Harnais  propres  aux  usages  agricoles. 
Point  de  prix. 


75 
Collections  d'instruments  à  main. 

Point  de  premier  prix. 

2*  prix.  — Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Fulcrand,  précité. 

Menlion  honorable,  à  M.  Pierre  Eslirach,  à  RivcsaKes. 

Araires  vigneronnes. 

I*^''  prix.  — Cnc  médaille  d'or,  à  I\I.  Vincent  Mali'gne,  firécilé. 

2»  pii\.— Une  médaille  d'aqjent,  à  M.  Paul  Coste,  à  Saint-Gilles  (Gard). 

3»  prix.— Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Fulcrand,  précité. 

Mention  honorable,  à  M.  Peyre,  à  Conques  (Aude). 

Extirpateui's. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Carcassonne,  à  Perpignan. 

Instruments  pour  tailler  la  vigne. 

Une  médaille  d'argent,  à  M.  Sagan,  à  Perpignan. 

na|)pt'l  de  médaille  d'argent,  à  M.  Fulcrand,  précité. 

Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Pierre  Fstirach,  précité. 

Mention  honorable,  à  M.  Barrant,  à  Cassagnes  (Pyrcnces-Oricntales). 


Deuxiômc  Sous-Section.  — Travaux  d'intérieur. 
Malaxeurs. 

l'oint  de  piemier  prix. 

2''  prix.- Une  médaille  de  bronze,  ,i  M.  Pinsard,  h  Montrcdon  (Aude). 

Machines  à  vapeur,  mobiles,  applicables  à  la  machine  à  battre, 
ou  à  tout  autre  usage  agricole. 

f'  prix.— Une  médaille  d'or,  à  M.  Frézonis,  à  Mars-Saiiit-Pnolle  (.\ude) 

Machines  à  battre,  mobiles,  rendant  le  grain  tout  nettoyé, 
propre  à  être  conduit  au  marche. 

Point  de  premier  prix. 

Point  de  deuxième  prix. 

."'•  prix.— Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Soubielle,  il  Formiguèrcs. 


76 

Cribles  et  Trieurs, 

H«'  prix.— Dne  médaille  d'argent,  à  M.  Prax,  à  Perpignan. 
2'  prix.— Dne  médaille  de  bronze,  à  !\F.  Fourment,  à  Ille. 
Dne  médaille  de  bronze,  à  M.  Soulé,  h  Perpignan. 

Hache- Paille. 
Point  de  premier  prix. 
Point  de  deuxième  prix. 
Mention  honorable,  à  M.  Puig,  à  Perpignan. 

Pressoirs  à  vin,  mobiles. 

Une  médaille  d'or,  à  M.  Macabies,  à  Perpignan. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Estirach,  précilé. 

Pressoirs  à  vin,  fixes. 
Une  médaille  d'or,  à  M.  Tarbouriech,  à  Pézénas. 

Tonnellerie. 

Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Alazet,  à  Saint-Laurent-de-la-Salanque. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Sauvy-Vilar,  précité. 

Pompes  mobiles. 
Rappel  de  médaille  d'or,  à  MM.  Fafcur,  à  Carcassonne. 

Pompes  fixes. 
Une  médaille  d'argent,  à  MM.  Fafenr,  précilés. 

Appareils  à  soufrer  la  vigne. 

Une  niéd.iille  do  bronze,  à  M.  Faurie,  à  Narbonnc. 
Happel  de  médaille  de  bronze,  à  M.  Granal,  à  Béziers. 

Pressoir  à  cire. 

Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Anrcill,  ,'i  Vinra. 


77 
DEUXIÈME  SECTION. 

Iiislruiuenls  el  Macliines  à  l'usage  de  l'induslrie  agricole,  apparleiianl 
à  des  exposants  étrangers  à  la  région. 

Première  Sous-Section.  —  Travaux  d'extérieur. 
Herses. 

Rappel  de  imiJuille  (rainent,  à  M.  Pellier  jeuno,  à  Paris. 

Dutteurs. 

Prix  unique.— Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Yeillon,  à  Matlia  (Ciiar.-Inf.). 

Machines  à  faucher  les  prairies  nalurelks  ou  arlijicieUes. 

I""pri\.— Une  niédailio  d'or,  à  M.  Peltier  jeune,  prédit:. 

2"  prix.  — Une  médaille  d'argent,  »  MM.  Clubb  et  Schuiitb,  à  Paris. 

Machines  à  faner. 

••"■prix. — Une  médaille  d'or,  à  M.  Peltier  jeune,  précité. 

2^  prix.  — Une  médaille  d'argent,  à  iMM.  l^liibb  et  Scbuiith,  précilcs. 

Râteaux  à  cheval. 

J'""  prix. —Une  médaille  d'argent,  à  M.  Peltier  jeune,  précité. 

2"  prix.  —  Uue  médaille  de  bronze,  à  iMM.  Clubb  el  Scbniitb,  précités. 

Machines  à  moissonner. 

•I*'  prix. —Une  médaille  d'or,  à  M.  Peltier  jeune,  précité. 

Pompes  à  purin. 
C'' prix.- Une  médaille  d'argent,  à  M.  Peltier  jeune,  précité. 

Ruches. 

Ua])pel  de  médaille  d'argent,  à  iM.  Haniet,  à  Paris. 

Vigneronnes. 

^'"■p^ix.  —  Une  médaille  d'or,  à  M.  Peltier  jeune,  précité. 
2'  piix— Une  médaille  d'argent,  à  .M.  Veillon,  précité. 


78 

Extirpateurs. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  PelLior  jeune,  pncilé. 


INSTRl^MENTS  îsON  PREVUS  tM  PROGU\MME. 

Lne  médaille  d'argent,  ;i  M.  l'iiisard,  précité,  pour  ciment. 

Une  médaille  d'argent,  à  M.  Féline,  ii  Allègre  (Gard),  pour  un  sporomètre. 

Une  médaille  de  bronze,  à  M.  LIanta,  à  l,a  Tour-bas-I^inc  (Pyrénées- 
Orientales),  pour  une  presse   à  foin. 

Une  médaille  de  bronze,  à  iM.M.  Fafeur,  précités,  pour  une  boite  à  clapet 
et  robinet. 

Une  médaille  de  bronze,  à  M.  llolland,  à  Corneilla-de-la-llivière  (Pyrénées- 
Orientales),  pour  fers  il  cbeval. 

Une  médaille  de  bronze,  à  iM.  Badimon,  à  Marmaude  (Lot-et-Garonne), 
pour  fouloir-égrappoir. 

Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Vigouroux,  à  Nimes  (Gard),   pour  robinets. 

lîappel  de  médaille  d'or,  à  M.  Pellier  jeune,  précité,  pour  un  liaclie-paille. 

Rappel  de  médaille  d'or,  à  M.  Pialoux,  à  Agen  (Lot-et-Garonne),  pour 
macliine  à  battie. 

Rappel  de  médaille  d'or,  à  M.  l'ialoux,  précité,  pour  tarare. 

Rappel  de  médaille  d'or,  à  M.  Pinet  fils,  à  Abilly  (  Indre-et-Loire) ,  pour 
manège  sans  courroies. 

Une  médaille  d'or,  à  M.  Grenier,  à  Toulouse,  pour  pompes  mobiles. 

Rappel  de  médaille  d'argent,  à  M.  Caroiis,  à  Toulouse,  pour  égrainoir  a  mais. 

Rappel  de  médaille  d'argent,  à  M.  Gasquet,  à  Castres,  pour  trieur. 

Rappel  de  médaille  d'argent,  à  M.  Vermorel,  à  Villefranebe  (Rbône),  pour 
un  tarare. 

Une  médaille  d'argent,  ii  M.  Caroiis,  précité,  pour  manège. 

Une  médaille  d'argent,  à  .MM.  Massonnct,  iNassivet  et  C'",  à  Nantes,  pour 
cbarrie-paille  secoueur. 

Une  médaille  d'argent,  à  M.  Pinel  fils,  précité,  pour  égraineuse  à  trèfle. 

Rappel  de  médaille  de  bronze  ,  à  M.M.  Massounet,  Nassivct  et  C'"",  précités, 
pour  un  tarare  débourrcur. 

Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Dubois,  à  Paris,  pour  un  porte-bonleilles. 

Une  médaille  de  bronze,  ;i  M.  VeiUoii,  précité,  pour  une  bonde  de  tonneau. 

lions  DU  Co.NCouiis.--  M.  Passedoit,  à  Saunuir  (Maine-et-Loire),  pour  une 
umcliine  ii  vapeur,  arrivée  trop  tard. 


79 
PRODUITS  AGRICOLES. 

MÉDAILLE   d'or, 

A  MM.  Gclabcrt  et  Casteillo,  fi  Kivesaltes,  pour  leur  vin  muscat  vieux. 
Siugla,  à  Uivesaltfs,  pour  sou  vin  roinje  ordinaire  de  1801. 

MÉDAILLE   d'argent, 

A  Jl.M.  Laurent  lUirunJ,  a  Saint-Nazaire  (  l'yiént-cs-Orienlalcs) ,  pour  une 
loison  du  laine. 

Guérin  Cliallit'r,  à  Florenzac  (Hérault),  pour  huile  d'olives. 

Louis  Fabre,  prccilé,  pour  rensemble  de  sa  colleclion. 

Gervais,à  MoutpclliiT,  pour  ["acclimatation  de  Truites  de  lue  et 
Saumon. 

Gourier,  précilé,  pour  l'ensemble  de  son  exposition. 

Malègue,  précilCj  pour  Teusenible  de  sa  collection. 

Médecin,  à  Menton  (Alpes-Maritimes),  pour  l'enscnible  de  ses  essences. 

l'bilippe  Massot,  à  l'erpiguau,  pour  ses  nianclies  de  fouet  en  mico- 
coulier. 


MÉDAILLE    DE   BRONZE 


5 

re . 


A  MM.  Carboiiell,  à  Lr  (  i'yrénécs-Orientales) ,  pour  ses  pommes  de  ten 
Caries,  à  Perpitjnan,  pour  souches  greffées,  d'un  à  deux  ans. 
Christol,  à  Béziers,  pour  engrais  indigène. 

Dauder,à  Vernet-les-lJains(l'yrén.-Ui'ienlales),  pour  son  miel  et  cire. 
Durand,  à  Perpignan,  pour  ses  lièges. 

De  Gonsalvo,  à  Kslagel  (Pyrénées-Orientales),  pour  huile  d'olives. 
Labrousse,  à  Nyer  (l'yrénées-Urienlales),  pour  miel  et  cire. 
De  l.ourdoueix,  h  Montalba  (Pyrénées-Orientales),  pour  ses  rouleaux 

de  cercles  de  châtaignier. 
Pujol,  à  Fourques  (Pyrénées-Orientales),  pour  ses  planches  de  liège. 
Thomas,  à  lîivcsaltcs,  pour  ses  cristaux  de  marc. 
Tapié-Mengau,  pricité,  pour  ses  toisons  mérinos. 
Trilha,  à  La  Tour-de-France  (Pyrénées-Orientales) ,  pour  ses  cocons 

et  ^uies. 

La  Commission  décerne  une  Mention  honorable  à  la  Société 
Agricok",  Sciontilitiue  et  Litléi'aire  ilos  Pyrénées-Orientales,  pour 
l'ensemble  de  son  exposition. 


80 
VINS,  etc. 

MÉDAILLE   d'argent, 

A  M.M.  Sévorin  Bassal,  à  Hivesaltes,  pour  son  vin  rougo  de  -1861. 

Henri  Duverney,  à  Perpignan  ,  ponr  son  vin  rouge  de  commerce 

de  1861. 
M.  Jancr,  à  Perpignan,  pour  sou  vin  rouge  de  commerce  de  1861. 
Souvras-Territ,  à  Perpignan,  pour  son  vin  rouge  froid  de  <86l. 
bélieu,  à  Port-Vendres,  pour  son  vin  rouge  doux  de  l8o9. 
Bonaventure  Ueig,  à  Port-Vendres,  pour  son  vin  rouge  doux  de  1859. 
Av-DiHiias,  à  Hivesaltes,  pourson  vin  de  gi'enaclie  de  <86l . 
Lacrouiolte-BeHonet  fils,   à  Fronligiian  (  Hérault  ),  pour  ses  vins 

blancs  muscat. 
Bouaventure  Keig,  précité ,  pour  son  vin  rouge,  façon  l'orlo  vieux. 
Lloubes  père,  à  Perpignan,  pour  son  vin  blanc  de  ^858. 
Carbonnell,  à  Cases-de-Péne,  pour  son  vin   de  malvoisie  vieux   et 

son  vin  de  macabeu  vieux. 
Auguste  Lloubes,  à  Perpignan,  pour  son  vin  de  malvoisie  de  18o7. 
François  Pi,  à  Port-Vendres,  pour  ses  vins  de  Cosperons  de  1837 

et  1842. 
Bonet,  a  Baiiynl-s-dels-Aspres,  pour  sou  vin  rancio,  de  40  ans. 
La  Société  lioussillonnaise,  à  Bivesaltes,  ^our  sou  vin  de  grenache 

muté  de  1858. 
Auguste  Lloubes,  précité,  pour  ses  vinaigres  de  1850  et  185". 
Auguste  Lloubes,  précité,  pour  son  eau-de-vie  de  muscat  de  ^850. 
Guérin-Cbailier,  précité,  pour  son  eau-de-vie  de  vin. 
Carbonell,  précité,  pour  son  ratafia  de  Cosperons. 
Blanc-Nover  et  C'",   à  Perpignan,   pour  aiiiselte  de  Bordeaux  et 

menlbe  glaciale. 

MÉDAILLE   DE   BRONZE, 

A  MM.  Laurent  Calmont,  à  Opoul  (Pyrénées-Orientales),  pour  son  vin  ronge 
de  commerce  de  1 80 1 . 

Pla,  à  Saint-l'aul-de-Fenouillet  (Pyrénécs-Oricnlulcs),  pour  son  vin 
rouge  de  commerce  de  18GI  • 

Paul  Coronat,  à  La  Tour-dc-Fiance ,  pour  son  vin  rouge  de  com- 
merce de  I 861 ■ 


81 

A  MM.  Caries,  prédit,  pour  son  Tin  rouge  de  1858. 

Marlimort,  à  Rasijjuéres  (INrénces-Orientalcs),  pour  son  vin  rouge 

de  commerce  de  I8GI . 
Roca,  à  Perpignan,  pour  son  vin  ronge  de  )86). 
Bélieu,  prccité,  pour  son  vin,  façon  l'orlo. 
Numa  Moubes,  à  Perpignan,  pour  son  vin  blanc  de  ^8o2. 
La  Sociélé  Roussillonnaise  do  Uivesalles,  pour  son  vin  de  inacabcu 

de  I8GI. 
Gauze,  à  Rivesaltes,  pour  son  vin  de  Tokay  de  tSiiT. 
Panis-Bobé,  à  Port-Vcndres,  pour  son  vin  rancio  de  12  ans. 
Adamoli,  à  Perpignan,  pour  son  vin  rouge  d'aranion  de  I8GI. 
Anbiiul,  à  Sallèles  (Auiie),  pour  son  vinaigre  de  22  ans. 
Bertrand  aîné,  à  Béziers,  pour  son  vinaigre  de  madère  de  1849. 
(îélabert  et  Casteillo,  précités,  pour  leur  eau-de-vie  de  muscat. 
Robelin,  à  Salses,  pour  son  eau-de-vie  de  vin. 
Calvet,  à  Cauobès,  pour  son  esprit  5/6  de  marc. 
Villacè(jne  père  el  fils  aiué  ,  à  Peyrcslortes  (Pyrénées-Orientales), 

pour  esprit  3/G  (  le  goiU  de  vin  ). 
Lavaysse,  à  Giguac  (Hérault),  pour  son  cura(,'ao. 
Forl-Despax  et  Darot,  à  Toulouse,  pour  leurs  liqueurs. 


CONCOURS  DES  ANIMAUX  DE  LA  RACE  CHEVALINE, 
ET  DES  ANIMAUX  GRAS  ET  DE  TRAVAIL. 

PREMIÈRE   CLASSE.  —  ANIMAUX  DE   LA   RACE  CHEVALINE. 

PREMIÈRE   SECTION.  —  JLMENTS    POULINIÈRES. 

Une  prime  de  120  fr.,  à  M.  de  Selva  ,   à  Perpignan,  pour  la  jument  Biche, 

âgée  de  9  ans. 
Une  prime  de  120  fr.,  à  M.  Duvernev,  à  Perpignan,  pour  la  jument  Belle, 

âgée  de  13  ans. 
Une  prime  de  120  fr.,  à  M.  Biaise  Fontaneill,  à  Pézilla-de-la-Rivicre,  pour 

la  jument  Cocotle,  âgée  de  13  ans. 
Lue  prime  de  120  fr.,  à  M.  Justin  Durand,   :i  Perpignan  ,  pour  la  jument 

Cocotte,  Agée  de  \0  ans. 

6 


82 

Une  prime  tle  100  fr.,  à  M.  Dtiveniey,   précité,  pour  la  jument  idolpha, 

dgce  de  -'(  ans. 
Une  prime  (le  100  fr.,  à   M.  Joué,   ;i  Vilk-longuc-Jc-la-Salanque,  pour  la 

jument  Obtissanle,  âgée  du  G  ans. 
Une  prime  de  100  fr.,  à  M.  Jean  Durcassy,   à  Villelon(;ue-de-la-Salanque, 

(loiir  la  jument  Belle,  âgée  de  ^0  ans. 
Une  prime  de  100  fr.,  à  iM.  Jérôme  Llobet,   à  Saint-Féliu-d'.Vvall,  pour  la 

jument  Anglaise,  àjjéc  de  ■'(  ans. 
Une  prime  de  100  fr.,  ;i  iM.  Jean  Baptiste  Hcnric,  il  Saint-Eslèvc,  pour  la 

jument  lirunelle,  âgée  de  'i  ans. 
Une  prime  de  100  fr.,  à  M.  ,\ndré  Uoger,  ;i  Saint-Laurent-dc-la-Salanque, 

pour  la  jument  Belle,  âgée  de  '6  ans. 
Une  prime  de  72  fr.,  à  M.  de  Stlva,  précité,  pour  la  jument  Biche,  12  ans. 
Une  prime  de  72  fr.,  à  M.   François  Sibieude,   i  Corneilla-de-la-RivJcro  , 

pour  la  jument  Charmante,  âgée  de  G  ans. 
Une  prime  de  72  fr.,  h  I\l.  Jauberl ,  à  Llupia  ,  pour  la  jument  Moutarde, 

âgée  de  8  ans. 
Une  prime  de  72  fr.,  à  M.  Marcel  Ducassy,  à   Villelongue-de-la-Salanque, 

pour  la  jument  Belle,  âgée  de  4  ans. 
Une  prime  de  72  fr.,  à  M.  Jacques  Durand,  à  Hivesaltcs,  pour  la  jument 

Belle,  âgée  de  G  ans. 
Une  prime  de  72  fr.,    à   M.  Joseph   l'rax  ,  il   Perpignan,   pour  la  jument 

Gestation,  âgée  de  ^2  ans. 
Une  prime  de  72  fr.,  ii  M.  iîonct-Desmazes,  à  Sainl-f.aurent-de-la-Salanque, 

pour  la  jument  Biclie,  âgée  de  7  ans. 
Une  prime  de  72  fr.,  à  .M.  Saturnin  Dadies  ,  à  Perpignan  ,  pour  la  jument 

Belle,  âgée  de  13  ans. 
Une  prime  de  72  fr.,  il  M.  Prax,  précité,  pour  la  jument  l'élisse,  8  ans. 
Une  prime  de  72  fr.,  ;i  M.  Jean   Baillo,   à  Thuir,   pour  la  jument  Stella, 

âgée  de  10  ans. 

DEUXIÈME  SECTION. — POULAINS,   POULICHES   ET   CHEVAUX 
OU   JUMENTS   DE  SERVICE. 

Pouliches  de  3  ans. 

Inc  prime  de  200  fr.,    à  M.   Berlrand-Ualanda  ,    à  Perpignan,  pour  la 
ponliclic  Belle, 


83 

Une  [iriine  de  ISO  fr.,   .i   M.  Joseph  Cavaillt-,   à  Saiiit-Jcan-Pla-de-Coils, 

pour  la  |Hiiili(lio  Sorma. 
Une  [irimc  de  iliO  fr.,   à  M.  Jean   Miffre,   à  Pi'zilla-de-la-Iiivii're  ,   pour  la 

poulielic  yanquine. 
Une  prime  do  l.'iO  fr.,  à  M    Jean  Montai,  au  Soler,  pour  la  ])Oulicbc  Aa/es«e. 
Une  prime  de  100  fr.,  ;i  M.  l'erier,  à  lialio,  pour  la  pouliclie  Obcissanle. 
Une  prime  de  100  fr.,  ;i  M.  de  C.iiefdebien  ,  à  l'erpignan  ,  pour  la  puulicbc 

biche. 

Pouliches  de  S  an.i. 

Une  prime  de  liO  fr.,  à  M.  Jean  Miffre,  précilé,  pour  la  poiilielie  Belle. 
Une  prime  de  ÏJO  fr.,  à  .M.  l'onlaneill,  précilé,  pour  la  pouliihc  Licite. 
Une  prime  de  oO  fr.,  à  M.  Jnsliii  Durand,  précilé,  pour  la  pouliche  Palmyre. 
Une  prime  de  JiO  fr.,  à  M.  Jules  Parcs,  à  l'erpi|;nan,  i-our  la  pouliche  Belle. 
Une  |)rime  de  2o  fr.,  à  M.  François  Baillo,  à  Ihuir.      \ 
Une  prune  de  So  Ir.,  a  !\l.  .Jean  BailIo,  a  Ihuir.  ; 

Poulains  et  Pouliches  d'un  an. 

• 

Une  médaille  d'argent,  à  M.  Ducassy,  précilé,  pour  le  poulain  Diaz. 

Une  médaille  d'argent,  à  M.  Joseph  Denamiel ,  à  Millas,  pour  la  pouliche 

.)liss  Sophiii. 
Une  médaille  de  bronze,  à  i\I.  Ducassy,  précilé,  poui'  la  pouliche  Itéussile. 
Une  médaille  de  bionze,  à  M.  Raphaël  Joué,  à  Villelongue-de-la-Salamiue, 

pour  le  poulain  Obéissanl. 
Une  médaille  de  bronze,   à   M.   Bonavcnturc  Camps,  à  La  Tour-bas-Elne, 

pour  le  poulain  Kalés. 
Une  médaille  de  bronze,  à  i\l.  Brogard  ,  à  Mine,  pour  la   pouliche  Scapine. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Jean  Baillo,  précilé ,  pour  la  pouliche  liijou. 
Une  médaille  de  bronze,  ii  M.  Duverney,   précité ,  pour  la  pouliche  YaiiAi'ii. 

Poulains  de  S  ans. 

Une  médaille  d'argent,  à  M.  Jean-Baptiste  Henric,  j)rtci/f ,  pour  le  poulain 

Sankin. 
Une  médaille  d'argent,  à  M.  Sébc,  à  l'erpignan,  pour  le  poulain  .VaiiAiii. 
Une  médaille  de  bronze,  à  .M.  (juiler,  à  S'-llippolyle,  pour  le  poulain  Itlond. 
Une  méilaille  Je  bronze,  à  M.  (iuiler,  précilc,  |iour  le  poulain  linrdol. 
l'nc  médaille  de  bronze,  à  M.  l.-lt.  I.abau,  à  llle,  pour  le  poulain  liijou. 


84 

UnB  nu'iliiille  de  bronze,    à   M.  Charles  Lazeniic,    à  Perpignan,  pour  le 

poulain  Zesmer. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Corne  Modal,  à  Corncilla-de-Ia-Rivièrc,  pour 

le  poulain  Lionel. 

Poulains  castrés,  de  3  ans. 

Une  médaille  d'argent,  à  M.  Jules  de  Lamcr,  a  Perpignan,  pour  le  poulain 

Front  in. 
Une  médaille  d'argent,  à  M.  François  Baillo,  pn'ci/f,  pour  le  poulain  Ltger. 

Chevaux  et  Juments  de  service,  de  4  à  5  ans. 

Une  médaille  d'argenf,  à  M.  Fontaneill,  précité,  pour  la  jument  GringaUttt, 

A  ans. 
Une  médaille  d'argent,  à  I\l.  Cii.  Lazcrmc ,  prédit ,  pour  la  jument  Kalése , 

A  ans. 
Une  médaille  d'argent,  à  M.  de  Chefdebien  ,  précité ,   pour  le  cheval  Coco, 

4  ans. 
Une  mcddille  d'argent,  à  M.  de  La  Busta,  à  Alénya,  pour  le  cheval  yerveux, 

a  ans. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Charles  Lazerme,  précité,  pour  le  cheval  Grin- 
galet, 4  ans. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Fontaneill,   précité,   pour   la  jument  Lise, 

o  ans. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  de  La  Busta,  précité,  pour  le  cheval  Piron  , 

o  ans. 
Une  médaille  de  bronze,  à   .M.  Charles  Lazerme,   précité ,   pour  la  jument 

Mauresque,  A  ans. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  Dispan  ,  à  Palau-del-Vidrc  ,  pour  la  jument 

Marquise,  A  ans. 
Uue  médaille  de  bronze,   à  M.  Sanyas-Siuroles ,    à  Saint-Laurent-de-la- 

Salanque,  pour  sa  jument  de  A  ans. 
Une  médaille  de  bronze,  à  M.  James  Jaume  ,  a  Perpignan ,  pour  la  jument 

Biclie,  A  ans. 
Uue  médaille  de  bronze  à  M.  Jacques  Falgucre,  h  Palau-del-Vidrc,  pour  la 

jument  Belle,  A  ans. 


85 

DEDZiÈmE   CLASSE.        ANIMAUX   GKAS   ET  DE   TltAVAIL. 

PREMIÈRE    SECTION.  —  ANIMAUX   DE   TRAVAIL. 

Première  Catégorie.  —  Espèce  Bovine. 

•  •^■■piix. —  Une  mi'd.iille  d'or,  à  M.  Cliailos  Héiingo,  à  rerpijjiiaii. 
2*   pri\. —  Une  médaille  d'argrnt,  a  i\I.  Ilainaut,  au  Soler. 
Alciilioci  lionoiable,  avec  niudaillL' de  bionzi',  à  M.  Soler,  à  Alénya. 

liK'ni  Idcni  a  M.  Foixonnet,  .î  Perpignan. 

Deuxième  Catégorie.  —  Mides  et  Mulets. 

("■inlï.—  Une  nn'ilaiile  d"or,  à  M.  Sauvy,  à  l'erpi|;nan. 
2'  i)i'ix.— Une  nu'daillc  d'ai|;iMil,  à  M.  niiiand,  à  Saint-Nazaire. 
.Mention  honorable,  a^c  iiudaillf  de  Ijron/.e,  à  .M.  Guichet,  ;i  \'i!!i!ongue- 
dels-Monts. 

Troisième  Catégorie.  —  .incs  et  Anesses. 

l'fprix. —  Une  nu-ilaille  il'arjîent,  à  !M.  Sédes,  à  Pia. 
2«  prix. —  Une  médaille  d'argent  de  2"  classe,  à  M.  Modal,  ,i  Thnir. 
Alentioii  honorable,  avec  médaille  de  bronze,  .i  M.  Uacoinbc  Saint-Michel, 
il  SaJses. 

DEUXIÈME   .SECTION.  —  ANIMAUX   GRAS. 

Première  Catégorie.  —  Espèce  Bovine. 
Première  Seclion.  —  Uœuts  gras. 

I>'  prix.— Une  médaille  d'or  et  100  fr.,  à  M.  Galle,  à  Thuir. 
Point  de  deuxième  prix  ni  de  mentions  honorables. 

Deuxième  Section.  —  Bandes  de  Liieuls. 

point  de  prix. 

Troisième  Section.  —  Vaches. 

I"  prix. —  Une  médaille  d'or  et  100  fr.,  à  M.  losepli  Anf-ladc,  ;i  Ihéza. 
2e  prix. —  Une  médaille  d'argenl  el  .jO  fr.,  ii  M.  Joseph  Giiilard,  à  Palalda 
Point  de  mentions  boiuiiables. 

Onalrième  Seclion.  --  Bandes  de  Vaches. 

Point  de  prix. 


86 
Cinquième  Section.  —  Bandes  de  Veaux, 

jer  |,riv.—  Un.'  MR'Jaille  d'arj^eiit  et  jO  fr.,  à  M.  Ilainaul,  au  Solcr. 
l'oint  de  ilcinionu'  [)ii\  ni  de  mentions  honorables. 

Deuxième  Catégorie.  —  Espèce  Ovine. 
Première  Section.  — Moutons  de  24  mois  au  plus. 

.jc>pii,._Une  médaille  d'or  et  100  fr.,  .'i  M.  Itarrl're  fils,  à  Dagcs. 
2'  prix.— Une  nicdaille  d'argent  et  50  fr,,  à  M.  Mir,  h  Formiguèr.s. 

Deuxième  Section.— Moulons  âgés  de  plus  do  2i  mois. 

jerj,ri^._L'ne  médaille  d'arj;cnl  et  50  fr.,  h  M.  VA.  Foixonnet,  h  Perpignan. 
Point  de  deuxième  prix  ni  de  mentions  honorai)les. 

Troisième  Section.  — Brebis. 

.|er  |,ri,._  Une  médaille  d'argent  et  )00  fr.,  h  M.  Ilainant,  au  Sider. 

2»   prix.  — Une  médaille  d'argent  cl  i)0  fr.,   à    M.  Mare  Conte,   h   .Vrgelès- 

sur-Mcr. 
Point  de  mentions  lionorablcs. 

Quatrième  Section.  — Agneaux  de  lait. 

^e.v  |„.i,i._Une  médaille  d'argent  et  50  fr.,  h  M.  lîarri  le  lils,  à  Bages. 
2e   prix. —  Une  médaille  d'argent  de  2'  elassc  et  ."0  fr.,   à   M.  Jae.].  Pujas, 

à  Argelès-sur-Mer. 
Point  de  mentions  honorables. 


La  Commission  a  vu  avec  regret  que  M.  Vincent  Malègne,  un 
de  ses  membres,  (pii  avait  exposé  une  génisse  croisée  Durham, 
ainsi  qu'une  vache  Durham  garonnaise,  par  une  délicatesse  exa- 
gérée, a  rel'usé  toute  participation  au  concours.  La  Commission 
se  fait  un  devoir  de  déclarer,  à  l'honneur  de  M.  Maiègue,  dont 
elle  n'a  pu  vaincre  la  résistance,  <|ue  les  deux  sujets  qu'il  a  pré- 
sentés, et  qui  viennent  d'être  désignés,  ont  mérité  d'être  classés 
comme  premier  prix,  chacun  dans  sa  section. 


87 
PRODUITS   INDUSTRIELS  ET  MANUFACTURÉS, 

PREMIÉRR    CATÉGORIE. 

MédaUle  d'or, 

A  MM.  Iliillzer,  Ouriaii,  Jacoiny  et  C'",  à  lîia     llanls-l'otirneaux. 
James  •fiuiinc,  ,i  IV'rpiij'iiaii.    l'ouïes:  Ilaiih-Fouriuaux. 

Médaille  de  vermeil, 
A  M.  Tons,  à  Corlsavy.   Vers  de  forge. 

Médaille  d'argent, 

A  MM.  Tciiituriei'  cl  C"^,  a  MniitjjailLiid.   Minerai  de  cuivre- 
Usine  Sainte-Mario,  à  La  Nouvilli'.  Smifies. 

Médaille  de  bronze, 

A  MM.  Dubois,  Anloiiii',  h  Arlcs-siir-Tcch.  t'ers  de  forge. 
Saules,  à  Saint-réliii-d'Avall.  Soufres. 
Piax,  Joseph,  à  l'crpijpian.  Soufres. 
Marty-l'arazols,  à  Narboiiiie.  Soufres  (avec  ineiilion). 

Mention  honorable, 
A  MM.  Plas,  frères,  ii  Hiresaltes.  Soufres. 

Razouls  et  C'*";  à  F.,a  Nouvelle.  Soufres. 
Lasserrc,  [.oui.';,  à  Narbonne.  Sel  marin. 

DEUXIÈME    CATÉGORIE. 

Médaille  d'argent, 
A  MM.  Diircniie,  à  Soniinevairc.  Fontes  d'ornement.  (Rappel.) 
(îodiii-Lomaire,  à  Guise,  l'onles  d'ornement.  (Rappel.) 
Nel,  Pliilippo,  à  Marseille,  liaignoircs.  (I{ap])el.) 
lldciuard  .Moural,  à  rerpi(;iian.  llijoulerie. 
Vidal  iMentor,  .i  Mèze.  Outils  de  vilicnlture. 
Dubois,  l'ierre,  ii  Arles-sur-Terli.  l'ers  de  forge . 

Médaille  de  bronze, 
A  MM.  Berdaguer,  Jaeijues,  à  ['rades.  Couteaux  de  fantaisie. 
Sajfaii,   Alexandre,  à  l»erpi|;nan.  Outils. 
Roslin,  à  l'erpijjnan.  Cisailles  four  la  vigne. 


88 

A  "\IM.  Lueran,  .Tosppli,  à  l*crpi)|ii;in.  Couteaux 
Sales,  à  Perpifjiian.  Couteaux. 
Hnca,  à  llle.  Couteaux. 
Guchens,  à  Perpijjnan.  Bijouterie. 
Vidal  et  Lemircliand,  n  l'erpignan.  Cuvette  en  fonte  de  fer. 

Mention  honorable, 

A  MiM.  Bordaguer,  fils,  ;i  l'rades.  Couteaux  catalam. 
Courtes,  fils,  h  Pézenas.  Lanttrne. 
James,  à  Per|)i{;i)aii.  Vonderie  en  cuivre. 
Pélissier,  à  Hivesalles.  Ciseaux  ])our  tailler  la  vigne. 
Dorcl,  à  Perpignan.  Outil  pour  rabattre  les  faux: 
Sales,  Pierre,  à  Perpignan.  Serrurerie. 

TROISIÈME    CATÉGOHIE. 

Médaille  d'or, 
A  M">°  veuve  Du  Oueylar,  à  Marseille.  Verreries.  (Ilappel.) 

Médaille  d'argent, 
A  AIM.  Geste,  à  Toulouse.  Vitraux.  (Rappel.) 

Maiivernay,  à  Saint-Galniicr.  Vitraux.  (Kappel.) 

Brunet,  à  Montpellier.  Vitraux  d'église.  (Kappcl.) 

Saint- Victor  (d'André)  à  S'-Vielor-des-Oules.  Ilriques  réfractaires. 

Oliva,  Guillaume,  à  Saillagouse.  Poteries. 

Couissinier,  à  Marseille.  Ilriques  et  Carrelages.  (Rajipel.) 

Médaille  de  bronze, 
A  MM.  Boisset-Faucber,  à  Anduze.  Cases  pour  jardins. 
Uibère,  fils,  à  Thuir.  Cruches. 
RIagnaii,  Maliliieu,  à  Perpignan.  Brigues. 
Savaglio  et  Molo,  ;i  Perpignan.  Otijets  en  élain. 

Mention  honorable, 

A  MM.  Astaing,  Jean,  à  Perpignan.  Cruelles  et  Vases. 

Astaing,  liayniond,  à  Perpignan.  Cruelles  et  Vases. 
Baillaiid,  à  Perpignan.  Terre  cuite;   Ciment. 
Sabarllii'S,  à  Tluiir.  l'olerics. 
Vicens,  s  Tluiir.  Poteries. 


89 

QUATRIÈME     CATÉGORIE. 

Médaille  d'or, 

A  M.  riiili|iot,  :i  l'ft'pijiian.  Marbres. 

Médaille  d'argent, 

A  MM.  Ik'vcl,  rrédc'i'ic,  ;i  Tri'bcs.  Carreaux  vilrés. 

Magnaii,  Valeiitiii,  ii  Porplgiian.  l'tacayes  ;  Bois. 
Aulet,  à  Thuir.  Marbres. 

Médaille  de  bronze, 

A  MM.  (îiiiiaïul,  fils,  aillé,  à  TrMjcs.  ilarrelages.  (Rappel.) 
(ùiirautl,  Aiitoiiio,  à  Trùhcs.  i:arrelaijes.  (Rappel.) 
Maillard,  à  l*rats-dc-Moll6.  Marbres. 
Uaynaud,  père  et  fils,  à  Alet.  Meules  à  aiguiser. 
Alary  elJaiiel,  à  Perpignan.  Marbres.  (Rappel.) 
Dehnas,  à  Perpignan.  ISois  de  conslrnction. 

MciiHiiii  hiiiinrahli', 

A  MM.  Caillens,  à  f.e.Mjuerdc.  l'iùtres. 

(iuiraud-l^vard,  à  Trébes.  Carrelayes. 

Haxès,  à  Montbolo.  l'hilres.  ' 

Guiry,  à  Bouleterni'ie.  Marbres. 

l.lorel,  à  Revnès.  Pldlrcs. 

Maidat  cl  Aiidonncl,  à  Candies,  /(ois  de  consiruclion. 

Vilasèque,  à  Reynés.  Plàlres. 

Ablanl,  ;i  Perpignan     Marbres;  Terre  cuite. 

Hoyer,  à  Perpignan.  .Marbres. 

Kleinliolt,  à  iMarseille.  l'ians  en  relief. 

Ho(ineforl,  Jacques,  à  Perpignan.  Lambris  d'assemblatje. 

llouvicre-Cabane,  à  Mnies.  Pierres  de  taille. 

Sarda,  à  Balio.  l-^scalier  à  vis. 

CINQUIÈME    CATKGOUIE. 

Médaille  de  bronze, 

A  MM.  Aziberl,  (ils,  à  (îruissan.  Cordages. 

MolliMi,  (iaspard,  ii  Marseille.  Hameçons. 
Kiben.  fils.  !i  'Jriii<san.  Cordages. 


90 

Mention  honorable, 

A  MM.  Carbonnell,  Paul,  h  Géret.  Cordages. 
Cassagnères,  à  Céiet.  Fils  de  pfche. 

Ulaiic,  Honoré,  .i  SaiiU-Laurcnl-de-hi-Salaniine.  Engins  de  pèche. 
Blanc-,  Henri,  à  Saint-Liiircnt-ile-la-Salanqnc.  Engins  de  p^cfte. 
Calvi't,  Josfii>!>,  à  Saint -Laurenl-de-la-Sal.   Modèle  de  Trois-MAls. 
Noé,  Joseph,  à  Coilioure.  Modih  de  Trois-)Iàts. 

SIXIÈME    CATÉGOUIK. 

Médaille  d'argent, 

A  MM.  Bernard,  lils,  à  Sainl-l,aiirent-dc-Cerdans.  Clnits.  (Uappel.) 
(îranal,  à  Bézlers.  Instnanenls  de  soufrage.  (Rappel.) 
Géiis,  h  l'erpiijnan.  Machine  à  tarauder  et  à  visser  les  chaussures. 
VelmorcI,  à  Vilkfranche.  Tarare.  (Rappel.) 

Médaille  de  bronze, 
A  MM.  Delor,  César,  à  Grand-Gallar|;ues.  Oulils  de  tonnellerie.  (Rappel.) 
Robert,  père  et  fils,  à  Montpellier.  Soufllcls  de  [nrges.  (Rappel.) 
Delor,  aine,  à  Gallargues.  Outils  de  lonncUerie.  (Rappel) 
BiebnycU,  à  Quillan.  Chemin  de  fer  aérien. 
Castany,  à  Perpignan.  Pom)>e  n  double  effet. 
Glaiisel  et  G'',  à  Sauve.  Fourches. 
Jambon,  à  Sauve.  Alambics. 
Jouane,  à  Perpignan.  Pétrin  mécanique. 
Amans,  à  Narbonne.  yivean  volant. 

Mention  honorable, 

A  MM.  Basas,  h  Saint-l.aureiit-de-la-Salan(ine.  Oulils  de  menuiserie. 
Caulet,  à  Montpellier.  Coupe-papier. 
I.amolc,  à  Sournia.  Vans  en  osier. 
Malbcc,  à  Réziers.  Soufflets  pour  soufrer. 
Bouquet,  h  Montpellier,  Muchine  à  cintrer  les  brancards. 
Colomer,  à  Odeillo.  Oulils  de  menuiserie. 
DeviUe,  à  Lalour.  Oulils  de  menuiserie. 
Vidal-Delos,  à  Couslouges.  Piège  à  loup. 
Court,  Adolphe,  à  Perpignan.  Soufjlel  de  forge, 
Pallarés,  Ange,  i  Boulelcrnère.  MouUm  à  main. 


91 

A  MM.  (Unies,  Mirlu'l,  à  Pnmcl.  }lndrle  de  jiressoir. 
Dourclie,  il  Marseille.  Scie  pour  le  sucre. 
Labiirllie,  à  Moiil-de-Marsaii.  Pompe  à  soiilirer. 
(.assallc,  à  Sainl-Lauronl-de-la-Salanque.  Hache  en  (er. 
I.ouison,  à  Toulouse.  Yori«  à  main. 
Massiiies,  h  Canes.  Chauffe  lils. 
Plas,  Jean,  à  Kivesaltes.  OtUils  de  menuiserie. 

SEPTIÈME     CATÉGORIE. 

Médaille  d'argent, 

A  MM.  Crova  et  Deihauinau,  à  Perpignan.  Pile  cleclriquc.  (Rappel.) 
Pierron,  .'i  Marseille.  Inslriimenls  de  pesage.  (Rappel.) 
Ahadic,  à  Perpignan,  llnrlaije. 
Cantagrel,  à  Montpellier.  Cosmo/jraphe. 

Médaille  de  hronz-e. 
A  M.  Vila,  à  Perpignan.  Cadran  solaire. 

Mention  honorable, 

\  MM.  l'Ia-i,  à  Uivesalles.  Compas  à  ruie  points. 

Gaulas,  l'rançois,  à  Perpignan.  Cadran  régulateur. 
Gauilron,  à  Perpignan.  Ilchappemenls. 

HUITFKMK    CATÉGORIE. 

Médaille  d'or, 
A  M.  Baudassc-Gazottes,  h  Montpellier.  Cordes  de  boyaux.  (Rappel  ) 

Médaille  de  vermeil, 
A  MM.  Maury  et  Dumas,  à  Ninies.  Pianos;  Clavier-régulateur.  (Rappel.) 

Médaille  d'argent, 

A  MM    l'iiiiet,  I.iieien,   ;'i   Paris,    l'ianns.  ^Rappel.) 

Médaille  de  bronze. 

.\  MM.  Rrisillacli,  à  Perpignan,  liistraments  de  musique. 
Toron,  à  Perpignan,  Instruments  de  musique. 


92 

NEUVIÈME    CATÉGORIE. 
Médaille  d'or, 
A  M.  Canquoin,  à  Marseille.  Cliromngraphies.  (lîappel.) 

Médaille  d'argent, 
A  MM.  Arles,  à  Monlpcllii-T.  Éliquelles  pour  jardina.  (Uappi-l.) 
Hngiict-Molinc,  à  IMontpcllier.  Photographies-  (Huppel.) 
Cliapé,  à  l'crpigiiaii.  Lithographies. 

Médaille  de  bronze, 
A  M"'  Antoinette  Tasui,  à  rorpiijnaii.  Imprimés:  Affiches. 
MM.  Bataille,  à  Perpitiiian.  l'holographies :  Paysages. 
Cointc-Firiniii,  ii  Carcassoiiiie.  Portraits-cartes. 
Deplaye-JuUieii  ctC'e,  au  Vitjan.  Pierres  lilhogrophiques. 

Mention  honorable, 
A  MM.  Dessoris,  à  Per|)i<;nan.  Cartes  à  jouer  (catalanes). 

Hoiicoules,  il  l'erpijjnan.  Édition  d'une  carte  du  département. 
Tiiniiiiier,  à  Moiitiiollier.  Panneaux  armoriés. 
Murer,  à  l'erpigiiau.  Casiiuier  compteur. 
Rayiiauii,  à  Saiiit-llillaire.  Tableauj:  grapliiques. 
Tranloul,  à  'l'oulousc.  Photographies. 

DIZIÈME    CATÉGORIE. 

Médaille  d'or, 

A  M.M.  Paiilet,  cousins,  .'i  S;jint-\n(lié-(lc-San(joins.  Eau-t-de-Vies.  (liappcl  ) 
Veraii're,  à  Anianc.  Peaux  et  Tiges  pour  chaussures.  (Rappel.) 
Lloinbanl,  Jacipics,  .'i  Perpi;;nan.  Cuirs  tannés. 

Médaille  de  vermeil, 

A  M.  BarJou,  Pierre,  à  Perpignan.  Papier-Job. 

Médaille  d'argent, 

A  MM.  Vidal,  Joseph,  à  Perpi|;naii.  Cuirs  tannés. 

Banlou,  Joseph,  à  lVrpi(jMi:in,  papier-cigarettles. 

Noèll,  Honoré,  ;i  Perpi(;nan.  Teintures. 

Ronffia,  frères,  h  Perpignan.  Papier  Impétial  li  fumer. 

Brousse,  Kdoiiard,  à  Perpignan.  Papier  c.  fumer  cgtindriijue. 


93 

Médaille  de  brome. 

A  MiM.  Clii'islol,  :i  Bi'/.iers.  ICmjrais.  (Rappel.) 

Milliaiid,  jcmic,  à  Marsfille.  Savon  blanc.  (Rappel.) 

Capdellayro,  Xavier,  à  Saiiil-l'eliii-ir.Vvall.  Savons. 

Escoffct,  à  Céi'et.  Eau  de  fleurs  d'oranger. 

Izarn,  Denis,  à  Perpijjnan.  Cuir  tanm'. 

Rlir,  Jac(|iies,  à  Pc'r[>ij;iian.  Teintures  de  peaux. 

Baffait,  à  l'erpignaii.  Veau  lannt. 

Robert,  aillé,  à  Perpignan.  Cuirs  tannés. 

'riiiliaud,  à  Montpellier.   Cuirs  et  Peaux. 

Vila,  i>ouis,  à  Perpignan.  Chandelles  épurées. 

Garrigues,  Jacques,  à  llle.  Peaux  ouvrées. 

Douis,  Edouard,  h  Perpignan.  Produits  pharmaceutiques. 

Xalart,  à  Perpignan.  Produits  de  pliarmacie  vétérinaire. 

Peeli,  à  Saint-l'aul.  Pipes  et  Cannes  artistiques.  (Rappel.) 

Robert,  frères,  à  Perpignan.  Cuirs  tannés. 

Ribére,  fièrcs,  à  Perpignan.  Cuirs  tannés. 

Gaston,  à  Rivesalles.  Mastic  pour  tonneaux. 

Basset,  Bernard,  à  Kspéraza.  Peaux  ouvrées. 

lionboninie,  à  Perpignan.  Peaux  de  chèvres. 

F^abatliie,  à  .Montpellier.  Papiers  ii  fumer.  (Rappel.) 

Pislre,  Jacq.,  à  Narbonne.  S«6«/ance  pour  bonifier  les  vins.  (Rappel.) 

Suquet  et  C'^,  à  Cl.rniont-i'ilérauit.  Engrais.  (Rappel.) 

Mention  honorable, 

A  MM.  Ilelloc,  à  Perpignan.  Cuirs  tannés. 

Biavy  clSieard,  à  Bé/.icrs.  Produits  pharmaceutiques. 

Casicii,  à  Perpignan.  Cuirs  tonnés. 

Grosso,  ;i  Perpignan.  Cwirs  tannés. 

Joullié,  À  Aniane.  Cuirs  tannés. 

Justafré,  à  Céret.  Cuirs  tannés. 

RIarly,  llls,  à  llle.  Huiles  pour  fabriques. 

Ro.i.'.aud,  à  Saint-Paul.  Cuir. 

Sicarl,  à  Narbonnc.  Torches  tn  cire. 

Trinqnier  el  Baduel,  h  I-odève.  Peaux  préparées. 

Gravas,  à  llle.  Cuirs  tannés. 

Campanand,  u  Perpignan.  Cierget. 


94 

A  MM.  firaïul,  à  t'rades.  Laines  (iUes. 

PoiH-i't,  ;i  Perpijjnaii.  Encre  à  écrire. 

Vilar,  à  Giiiet.  Pipes  en  racine  de  bruyère. 

Barraii,  à  Casteliiauilai  y.  Engrais. 

Saj;nls  cl  O,  à  Banytils-sur-Mcr.  Écorces  à  lan. 

Mosselmaii.  Enr/rais. 

Reissac,  à  Marseille.  Pouilre  insedicide. 

KcjToier,  fri-res,  à  Ilia.  Engrais. 

Carbasse,  l.ooii,  à  Perpignan.  Panneau.v  en  papiers  peints. 

Ferian,  fièios,  à  .Aryelcs-sui-IMcr.  Cuirs. 

Havnal,  à  Narboiine.  Pains  de  verdet. 

ONZIÈME     CATÉGORIE. 

Horf!  (joncours. —Distinction  particulière. 
Administralion  de  la  (îuciTe.  liiscuil  pour  l'armée  el  la  marine. 

Médaille  d'or, 
A  MM.  Brunet,  à  Marseille.  Semoules  de  blé.  (Rappel.) 

Rciiiaiid,  Chappar  et  G'**,  à  Marseille.  Liquturs.  (Rappel.) 
Rouqncllc,  père  et  fils,  à  Brasse.  Farines.  (Rappel.  ) 

Médaille  de  vermeil, 

A  MM.  Gros,  Jérôme,  à  Perpignan.  Chocolats. 

iNomdcdeu-Durand,  à  Gollioure.  Conserves  d'anchois. 
Prax,  aine,  à  Perpignan.  Fruits  glacés  et  confits. 

Médaille  d'argent, 

A  MM.  Blanc-Noyer  et  0%  à  Perpignan.  Liqueurs.  (Rappel.) 

Médecin,  à  Menton.  Fleurs  d'oranger  ;  Essences.  (Rappel.) 
Gély,  à  Garcassonne.  Liqueurs;  Fruits  conjUs.  (Rappel.) 
Portes  Fabre,  à  Garcassonne.  Liqueurs  cl  Sirops.  (Rappel.) 
André  et  Josepli  Nicolan,  à  Perpignan.  CImolals. 
Teslorv,  Eugène,  à  Perpignan.  Liqueurs  et  Sirops. 
Fossaly,  à  Perpignan.  Chocolats. 

Médaille  de  bronze, 

A  MM.  Fort-Paulin  et  G'S  à  Toulouse.  Liqueurs.  (Rappel.) 
Lavaysse,  à  (iignac.  Liqueurs.  (Rappel.) 


95 

A  M!\t.  Sauniade,  frères,  h  Montpellier.  Dragées;  Uoiibons.  (Rappel.) 
Bonzom,  Clément,  à  Perpignan.  Biire  de  BavUre. 
Caloiii,  à  Collioure.  Conserves  d'anchois. 
Labrousse,  à  Thorent.  Miels. 
Alicbcl  et  Viguier,  à  Cavaillon.  Saucissons. 
Pagès-Réallon,  ;i  l'erpignan.  Chocolats. 
Salomon,  à  Avignon.  Liqueurs. 
Vivant,  à  Perpignan.  Confiserie. 
Banyuls,  fi'ères,  à  Collionre.  Anchois. 
Pourtet,  aine,  à  Perpignan.  Confitures;  biscuils. 
Gonrce.  (ils,  à  Arles-sur-Tecli.  Chocolat. 

Mention  honorable, 

A  M.M.  Arlus,  Pierre,  à  Perpignan.   Vins  fins. 
Talavignes,  à  Sigean.  Sel. 
Itarllielemy,  à  Montpellier.  Fruits  imités. 
Bonzom,  Clément,  à  Perpignan,  lins  et  Eau-de-Vie. 
Pains-Holié,  à  Port-Vendres.  \in. 
Brousse,  Baptiste,  à  Perpignan.  Liqueurs. 
Caillens,  à  Saint- Paul.  .Iliel. 
Cornet,  à  Perpignan.  Chocolat. 
Vignoles,  à  Perpignan,  l'aim  à  cacheter  (couleurs). 
fialangau,  à  .Monlferrer.  Trii/'/es  conservées. 
Guinard,  Jean,  ii  Rivesaltes.  Vins  imités. 
I.ainolc,  à  Perpignan.  Sirop  de  punch. 
Ouillant,  à  Amélie-les-Bains.  Chocolat. 
Pernod,  à  Lunel.  Absinllus. 
Raynalt,  à  Oponl.  Vin. 

RonJony,  fils,  à  Prats-de-Moll6.  Chocolat;  Ruches  à  double  couvert. 
Salières  et  Carbon,  à  Carcassone.  Liqueurs. 
'J'alayracli,  à  Baixas.  Viiit. 
Areens,  à  Sainl-Paul.  lilanquelle. 
Bane!,  à  Peipignan.  lin  ordinaire. 
Basso,  à  'l'bnès.  Miel. 
Royer,  à  Perpignan.  Pièce  montée. 
ColonJre,  à  'J'bnir.  Sirops. 
l'illols,  il  Nvcr.  Miel  et  Ctn. 


9G 

A  MM.  Galau  frères  el  Ducros,  ;i  Celte.  Vermulhs. 
Morens,  à  Osséja.  Chocolat. 
Pui(j,  à  Céret.  Eicre  allemande. 
Rière,  à  Collioure.  Barils  pour  anchois. 
Rius,  à  Marseille.  Kxtrails  concentrés. 
Coulzach,  à  TrouUlas.  Vins. 
Fnurès,  ii  La  Grasse.  Blanquette  mousseuse. 
Kaiix  minérales  de  Vergés  (Gard). 
Eaux  iniiiérales  de  Campagne  (Aude), 
liailloc,  à  Neffiacli.  Eau-de-Vie  de  mûres. 
Iinberl-Poitevin,  à  Lunel.  Yermutk. 
IJaurens.  Eau-de-Vie. 
Pages,  Aiiloiiie,  à  Perpignan.  Punch. 

Hors  concours, 
A  MM.  iiesombes-Parès,  frères,  à  Saint-Laurenl-de-la-Salanque.  \ins. 
Decose,  à  Liinoux.  Yins. 
De  Llobet,  à  Perpignan.  Vins. 
Noé,  Michel,  à  Collioure.  Vins. 

DOUZIÈME    CATÉGORIE. 

Médaille  d'or, 

A  MM.  Boudet,  à  Uzès.  Soies  grèges.  (Rappel.) 

Nourrigat,  à  Lunel.  Soie;  Cocons.  (Rappel.) 

Médaille  d'argent, 
A  MM.Pinel,  à  Quillan.   Laines  filées.  (Rappel.) 

Vézian-Lombard,  à  Limoux.  Draps.  (Rappel.) 
Bertrand,  Martin,  à  Mont-Louis.  Bonneterie. 
Cavailhé  et  C'=,  à  Rives.  Draps.  (Rappel.) 

Médaille  de  bronze. 

A  MM.  Conort,  h  Perjiignan.  Sacs  de  chasse. 
Laeaze,  à  Saint-l'aul,  Ficelles. 
Uarric,  Jacques,  à  llle.  Veaux  ouvrées. 

Mention  honorable, 
A  MM.  Alouges,  à  Collioure.  Cabas  pour  moulin  à  huile. 
Beix,  à  Toulouse.  Tissus. 


97 

A  MM.  IJobel,  à  nie.  SitarUrie. 

Mir,  à  Perpi(;iiaii.  Objets  en  sparterie. 
Yila,  à  Prals-Jc-Mollo.  Bonnets  catatans. 
I.iioosk',  à  l'orplniKiii.  Couvertures  en  fit. 
Mccli,  h  rcrpi(;iKiii.  Cabas  en  simrterie. 

TRKIZIÈ.ME     CATKGOaiK. 

Médaille  i'anjent, 

A  M.M.  Carpeniras,  fils,  à  Marseille.  Rois  et  Marbres  peints.  (Rappel  ) 
Lapère,  à  Marseille,  '"liiis  et  Soies.  (Kappel.) 
Huillac,  .i  Mézcs.  Cliaire  à  prfclier   (Ilappel.) 
Hoii|;iii)l,  cadet,  ,'i  .Saint-l'aul.  Ebaiicliuns  :  Bimbeloterie. 
MercaiJer,  à  IVrpij;naii.  Hittard. 
Set  vole,  à  Perpignan.  Olijets  tournes. 

Médaille  de  hronz-e, 

A  MM.  Carcassoiiiic,  (ils,  à  l'erpi(;iiaii.  Fantaisies  tournées. 
Guelieiis,  Joseph,  à  l'erpij;iiaii.  Siéyes ;  Fauteuils. 
I.aijiic,  il  Perpignan.  Sièges:  Fauteuils. 
Lcncou,  à  Perpignan.  Dorures. 
PoiiipiJur,  à  Perpignan.  Bois  et  .]larbres  peints. 
Taliés,  ;i  Perpignan.  Meubles  (avec  mention). 
Tiran,  Noël,  à  Marseille.  Lettres  peintes. 
Aspar,  Michel,  à  Perpignan.   Meubles. 

Mention  honorable, 

A  MM.  Aller,  à  Toiilonse.  Chaises  fliors  région). 
Gdii'uuJ-Fulcran,  à  Lodève.  /'ri«-flieu. 
Mai  lin,  à  Ginoles.  Buis  tourné. 
Magnan,  à  Perpignan.  Buffet  en  ckéne. 
Combes,  à  Millas.  Cage. 
Serre,  à  Perpignan.  Cartonnage. 
Michel,  à  Perpignan.  Tabouret  invacitlable. 
Non,  Julien,  à  Caslell.  l'.orbeillis. 
■Son,  Michel,  à  Verncl.  /'ailiers. 
liailletlo,  Pierre,  à  Perpignan.  Tableau  en  paille. 
Granier  de  C.assagnae.  à  Perpignan.  Objets  divers. 


98 

QUATORZIÈME    CATÉGOKIi;. 

Médaille  d'argent, 

A  JMM.  Mercier,  à  Toulouse.  Voilures  légères,  (ilappcl.) 
Joseph  Caseneuve,  (ils,  ;i  Toiiloiisp.  Voilures. 

Médaille  de  bronze, 
A  MM.  Taui-inya,  à  Per|)it;nan.  Voilures  (avec  menlliui). 

Babflnau,  à  Cliàlcaiibriand.  Colliers  ù  ressort  (hors  région). 
Uespaul,  à  Ulelte.  Gourdes. -^    j/y^  / 

Mention  honorable, 
A  MM.  Azaïs,  à  Perpignan.  Collier. 

Pujol,  il  Perpignan.  Coffres  de  voyage. 
Mourat,  à  Perpignan.  Boile  modèle. 


,.),;i 


QUINZIÈME    CATÉGORIE. 

Médaille  d'argent, 
A  MM.  Marly,  père,  à  llle.  Chapeaux  de  feutre. 
Derroja,  Uose,  à  Perpignan.  Broderies. 

Médaille  de  bronze, 

A  MM.  De  Capot,  à  Perpignan.  Douions. 

Il 
Coste,  Ois,  à  Sainl-l.aureut-(le-Ccrdans.  Alpagalei.^ 

Sidobre,  aine,  à  Perpignan.  Saboh.  'j"i";i' 

Sidobre,  jennc,  à  Perpignan.  Sabols.  •^"''  ''''H' 

Vie,  à  Perpignan.  Chapeaux  de  feuire.   ,, 

Vila,  à  Perpignan.  Chaussures. 

Rey,  Marie,  à  Perpignan.  Broderies  en  nr. 

Mention  honorable, 

A  M.M.  Bailly,  à  Prades.  Espardilles. 

Daraillé,  ii  Perpignan,  l'ormes  pour  chaussures.    ■   ù  ,«'nliii. 

Veuve  Béuézecli,  a  Celle.  Fleurs  en  coquillages. 

Cartade,  à  Perpignan.  Souliers  de  chasse. 

Cros,  à  Carcassonne.  fleurs  en  pastdlage. 

Julien,  à  lii'ziers.  Ouvrages  en  cheveu.e. 

Laur.nt,  Hélène,  à  Perpignan.  Denleties. 

Mac,  Jenny,  à  Perpignan.  Travail  d'aiguille. 


■)  inc  / 


A  MM.  Mcifieii,  pi-i'c,  i  PtM*[)igiiaii.  Dents  arlifmcUea. 

Julia  (pour  \oi''),  i  Collioiir.'.  Vicelks. 

Poix,  à  Milliis.  T/ssaj';  t'n  /î<.  ■  f 

Salèlos,  à  Saiiil-F,aiireiil-tlu-Is-SaIan(|UP.  5afco/s. 

Taillolc,  l'YIicitr,  à  Perpignan,  «oies  an  crocheU<p>ti,\  .](.\i,q    U  A 

Tlimihfil,  Y.vUur,  ;,  Pcrpijrnan.  L'rorferiM ;  Tapisserie. 

Wor.nsn',  A-lolpl,.,  ;.  l'crp.j.nan.  IHmn.ls.      .,nn-Ju.U.ùl  .i/,  A 

Xrllic,  aiiu',  à  Perpijjiian  .  Ciiiffiinr-. 

liary,  à  Porpigiiaii.  ruraplui.s  et  VmbicUes.  „}|  .(/:]/  y 

Coslc,  pi-rc,  à  l'eipignaii.  Soii/iei*  awc  s«nic/te  de  chanvre. 

Danoy,  Thérùsc,  à  Sainl-Laiirfnt-de-Ia-Salai)(|ue..WM«>;.;o  i 

Marr.'ioii,  à  l'cTpijrnaii.  IWjins.cs.  ■     ,."... 

PéroM.U',  I.ouis.s  à  Saint-L.HMi-nl-.l,-la-Sdlj,i.,„e.  Ouhutte,. 

Salas,  lîosalif,  à  ||lc.  Deiilelles.  ,(j 

Vidal,  Jiis.'pliiiie,  à  Perpignan.  lienldUs.  ,:; 

Talli's,  jiMinc,  .1  l'crpi|nian.  f.asiiuctles.  j; 

CosU",  à  IVrplifiian.  Iiolles  vernies.  ,  il 

Bos,  André,  à  l.aroque.  Dais  sc«//)/i'.  nhùlf. 

liila,  Félii-e,  à  liivesaltes.  Cuiissin  à  dentelle. 

lîordeau  (vouve),  à  Perpignan.  Dentelles. 

Bournel,  Jean,  à  Quillan.  Sahols.  j,,^^,^    ,/j^  ^ 

Bruyas,  Hose,  à  Perpignan.  Chapeaiu  de  paille.  i],„„y 

Carbon,  à  Amélie.  Oiivi(i(jes  en  cluveui-.  a 

Cartier,  à  lispéraza.  Iientelles.  ., 

Castel,  Pierre,  à  Perpignan.  Ouvrages  en  cheveti.i\  i 

De.sjuseur,  i  Lvon.  Vindeties  dur.  j 

Dirae,  à  Celle   Oiioraijis  en  cheveux.  ,1 

l'orgas,  à  lilne.  Ouvrages  eu  cheveux. 

Ccorge,  a  Toulouse.  Dentier. 

firavas,  ;i  llle. -rH/rs  tannes. 

f.aporle,  Lonis,  à  Perpignan.  Ouvrages  en  cheveuxyi  à  ,e-jd 

ÎMarligncdes,  à  Sainl-Paiil.  Toile  impcrnvnblc. 

Mernu,  Jean,  à  l'erpignan.  liais  faf,-(,nnc. 

Pons.  Joaeliim,  à  Saint-I.anienl.  LspardiU.es. 

Snubiié,  à  l'erpignan.  Huis  Orodi'. 

'Iliezon,  frères,  à  liivesalles.  i:hausi.ures. 


100 
SEIZIÈME    CATÉGORIE. 

Médaille  d'or, 

A  M.  Massot,  Philippe,  à  Perpignan.  Manches  de  fonds. 

Médaille  de  vermeil, 
A  AI.  Pujol,  Joseph,  à  Fourques.  Liège  et  Bouchons, 

Médaille  d'argent, 
A  M.  Piickroil-Davey-Chanii,  à  Marseille.  Mèches  de  sOretè.  (Rappel.) 

Médaille  de  bronze, 
A  MM.  Bosch,  à  Perpignan.  Boiichous. 

Llinas-Diirand,  à  Argelès-sur-Mer.  Manches  de  fouels. 

Falgiières-Badie,  ii  Sorède.  Manches  de  fuuels. 

Latitic,  à  Perpignan.  Charredes. 

Fabre,  à  Peyrestorles.  Charrue-vigneronne. 

De  Lourdoueix,  à  Perpignan,  Cercles  en  chùtaignier.  (Rappel.) 

Delclos,  à  Veriu'l-ies-Bains.  Cercles  en  chùlaignier. 

Keig,  Biinavenlure,  à  Porl-Vendres.  Futailles. 

Panis-Bohé,  à  Port-Vendres.  Fulailles. 

Marlrou,  à  Lens.  Planteur  pour  la  vigne. 

Compristo  et  Galibern,  à  Collioure.  Lièges  ouvris. 

Mention  honorable, 
A  MM.  Âlazet,  à  Saint-Laurenl-de-la-Salantjue.  Barils. 
Ausell,  il  Cérel.  Manches  de  fouels. 
Bonel,  Jean,  à  Perpignan.  Tonneaux. 
Bonnet,  Joseph,  à  Perpignan.  Tonneaux. 
CoDle  de  Boiicl,  à  Perpignan.  Cercles  en  chdtaignier. 
Darne,  à  Laro({uc.  Cercles  en  châtaignier. 
Dauzon,  Sauveur,  ii  Collioure.  Barils. 

Lstève,  il  Saiul-Laurcnt-dc-la-Salantjue.  Bondes  pour  futailles. 
Grill,  il  iMaureillas.   Bouchons. 
Laverny,  ii  Vives.  Bouclions. 
Libes,  à  Perpignan.  Tonneau^;, 
[libère,  Joseph,  il  Cérel.  Douelles  et  Cercles 
Marsal,  h  VerHet-les-Bains.  Cercles. 
Gaspard,  Bernard,  à  Montpellier.  Outils  agricoles. 
Konnet,  François,  il  Avignon.  Outils  agricoles. 
Destaville,  Joseph,  ;i  Perpignan.  Barils. 
Marienac,  Jean,  ii  Perpignan.  Harili. 
Vie,  à  Rivesahes.  Barils. 


101 
BEAUX-ARTS. 

Médaille  d'or, 

A  MM.Oliva,  à  Paris. 

Pcrot,  à  Nimes,  (Kappcl.) 
Michel,  à  Montpellier.  (Rappel.) 

Médaille  de  vermeil, 
A  M.  Miinch,  armurier  Jii  2"'"  rôginicnt  du  Gonit-,  à  Monlpellior. 

Médaille  d'urgent, 

A  MM.  Gardot,  peintre,  à  Perpi(;iian. 
L'Eglise  de  Cornclla-ilcI-Vercdi. 
Trinquet,  à  Ninics. 
Frère  Samuel,  à  Biv.iers. 
Pngeiis,  Eu{;rnc,  à  Perpignan. 
Rocamir,  à  Toulouse. 
Rigaiid  et  G'",  ;i  Toulouse. 
Glaize,  à  Montpellier  (Uappel.) 
Gaubcrt  à  Narbonne.  (Rappel.) 
Vignol,  à  Perpignan. 

Médaille  de  bronze, 

A  MM.  Alary  et  Janel,  à  Perpignan. 
Bernier,  à  Saint-Paul. 
Canavy,  à  Cassette  (Allier). 
Cessou,  Victor,  à  Prades. 
Champagne,  .i.Carrassonuu. 
li'alibé  Coste,  à  Perpignan. 
Dou/.il,  à  Ninies. 
L'Eglise  de  Collioure. 
L'Eglise  de  Font-Romeu. 
L'Église  de  l'alau-del-Vidro. 
L'Eglise  de  Seidinva. 
Farrail,  à  i'erpignan. 
Fraissc  (Mademoiselle),  ^  Cetlr. 


102 

K  MM.  Fn-ie  lÎMipére,  h  l'erpignai». 
Frère  Alliaiiaso,  .î  Passy. 
Frère  Pclcfjrini,  à  Lîastia. 
Garbel,  à  Toulouse. 
Mercuriol,  ii  Marseille. 

Pech,  Médéric,  à  Saiul-Paul.  <  ^,u,.r■     - 

Ralheau  (Madame),  à  Amélic-les-Bains. 
Raynal,  Simon,  à  lialio. 

Mention  Imnoruble,  ,bnuU  .U  / 

A  iMM.  Boyer,  à  Perijifjuaii. 
Billot. 

BoUiua,  il  Perpignan.  l'I^  / 

Baronnié,  à  Toulouse. 
Cases,  il  IMillas. 
Davan. 

I/Kglise  de  Camélas. 
L'Kglise  de  Neffiarh. 
LM''{;lise  de  l'orniigueres. 
i;f:glisc  de  Vernet-les-Bains. 
L'Kglise  d'Ui'. 
l/liglised'llle. 

l/i:glise  de  Saiiil-Jacques  (Pcri.iguan) . 
Gilbert. 

Ilugoniot,  il  Peri)ignan.  -'^I'  ' 

Lasserre,  a  Perpignan. 

Romain  l.acomlc  Saint-Michel,  à  Perpignan. 
Noell,  Jean,  à  Arles. 
Rojas,  à  Carrassonne. 

Tous  les  exposants  amateurs  et  M.  Guiniuil,  conservulcur  ilii 
Musée,  ont  été  mis  hors  Concours.  La  Commission  leur  a  volé 
des  remcrcimenls. 


103 
HISTOIRE  NATURELLE  ET  PALÉONTOLOGIE. 

Médaille  d'or, 

A  M^F.  Le  doc  tour  Coinpanvo,  (|iii  a  préseiiti-,  clans  deux  (fraudes  vitrines, 
le  tracé  des  vallées  du  Tocli  et  de  la  Tet,  avec  les  érlianlillons  de 
roches,  minerais,  sables  et  eaux  minérales  de  tons  les  affluents, 
pour  servir  à  i'ctude  de  la  géologie  et  de  l'Iiydrograpliie  des  deus 
plus  grandes  vallées  du  (lé|)artement  des  l'vrénées-Orienlales. 
Le  doiieur  i'aul  Massot,  pour  sa  riclic  collection  de  co(|uilles  fossiles 
du  département. 

Méddille  de  vermeil, 

A  MAI.  Le  docteur  l'endiinal,  maire  de  l'ort-Vendrcs,  pour  sa  collection 
de  roches  et  minerais  de  l'Albére,  et  pour  sa  belle  collection  de 
CO(|uillages  exoli(|ue?,  de  polypieis. 
Fouzau,  commandant  à  Collioure,  pour  sa  belle  collection   d'in- 
sectes et  de  coquillages  divers. 

Médaille  d'argent, 

A  MM.  Aulet,  lîonaventure,  pour  les  marbres  de  Castelnou  et  de  Sainte- 
Colombe,  dont  re\|)l(iilalioM,  en  activité  depuis  plusieurs  mois, 
occupe  déjà  une  eiM(|uantaine  d'ouvriers,  et  parait  destinée  à 
donner  de  tris-baiis  résultats. 

Non,  Michel,  à  Vcrnet-les-lfaius.  Collection  de  coléoptères  et  de 
lépidoptères  du  département. 

.\spar,  à  Perpignan.  Colieiliou  de  uiammireres  et  d'oiseaux  du 
département. 

Médaille  de  bronze, 

A  .M.M.  Jacomv,   liémv,  .'i  l'rades.    Minerais  de   fer,   de  cuivre,   de   pierres 
aciéreuses  l't  de  talc. 
Soumains,  A/.édérac,  à  Saliorre.  Miiu'iais  de  fer  spathique,  oligisle, 

brun  raiboiialé,  manganésifèrc. 
l'ous,  il  l>(Htsavv.  Minerais  de  fer  de  Batère. 
Dubois,  Antoine,  à  Arles-sur-Teeh.   Minerais  de  fer  de  liatère. 
Douzats,    idiarmaeien    aiile-major   à  l'ilopilal    d'Amélie-les-Bains. 
Ileibicr  des  pl.iiites  fourragères  du  départ,  des  Pyrén. -Orientales. 


loi 

A  M.M.  Couly,  Ycliiriiiaiic  tu  |iiiMiiifi-  au  10*  Chasscurâ.  Ht-rbier  des  piaules 
foiiri'a(;cros  du  (lé|)a(lcnieiil  de  l'Aude. 

Jouriinii.  Ili'rbii'i'  ilc  l'IU'iault. 

.laubcrtde-l'assa,  Adol|)lu".  lù-iiantillons  de  tous  les  bois  du  dépar- 
tement des  Pvrciu'es  Orientales. 

Bardoii,  Pierre.  Collections  <le  fossiles  de  Gri|;non  et  d'oiseaux. 

Delcros,  Gaston,  à  Céret.   Marbres  blancs  du  Mas-Carol. 

Mention  honorable, 
A  MM.  FJoret,  André,  .'i  Reyni'S.  Pierre  ;i  plâtre  (jris  et  blanc, 

J.  Vilar,  à  Céret.  Pierre  à  plâtre  blanc,  carrière  de  Qninta. 
Forfjo,  curé  ii  Opoul.  Collection  de  cotjuilles  fossiles  d'Opoul. 
Goucbat,  .luseph.  Collection  de  coquillages  fossiles  de  Neffiach. 
Clianibo,  .Joseph,  à  Millas.   Collection  de  coijuillages  et  osscnieni» 

fossiles  de  Millas. 
Calnict,  Benjamin,   à    Perpignan.    Collection  de  coquillages  de  la 

Nouvelle-Calédonie. 
Moulines,  Louis,  à  Serres  (Aude).  l'ierrcs  a  repasser, 
l'onclieret,  ;i  Puiverl  (Aude).  Gypse  blanc,  carrière  du  Col-del-Trill. 
Garonne,  h  l.unel  (Hérault).    Divers  oiseaux  em|iaillés,  placés  sur 

un  chêne  rustique  en  carton  pilé. 

Mentions  honorables,  hors  Concours,  pour  leurs  Eaux 
Minérales , 
A  MM.  Bouis.  (Bains  Bouis  à  Olettc).  Kaus  sulfureuses  et  Eau»  désullurées 
naturelles,  employées  isolément  dans  des  j;aleries  dislincles. 
Gaillarde,  Cyprieii.  Eaux  sulfureuses  (rOlelte  (Graus). 
De  Massia.  Ivdouard    Eaux  sulfureuses  de  Molitg. 
De  Lacvivier.  Eaux  sulfureuses  et  alcalines  de  Vernel. 
Mercailer,  pi-re.  F'iaux  thermales  sulfureuses  de  Vernet. 
Escanvé,  Bose.  b!aux  sulfureuses  et  alcalines  de  Nossa. 
Baron  Cabot.  Eaux  lhern)ales  de  l,a  Preste. 
Batheau.  Eaux  sulfureuses  d'Amélic-les-Bains. 
Ilennabessière.  Eaux  sulfureuses  d'Amélie-les-Bains. 
l'ujade.  Eaux  sulfureuses  d'Amélic-les-Bains. 

Massot,  Joseph.  Eaux  alcalines,  |;a/.euses,  ferrugineuses  du  Boulou. 
Olivier.  Eaux  minérales  de  Collioure. 
Marlin    lils.  E.iu<  minérales  de  Ginoles-Ics-Bains  (Aude). 


103 


LISTE  DES  EXPOSANTS  AU  CONCOURS  HORTICOLE 
ET  MARAICHER, 

QUI   ONT   OBTENU   DES   RÉCOMPENSES. 

Médaille  d'or, 
A  MM.  Robin,  frères,  pépiniéristes,  à  Perpignan. 

Médaille  de  vermeil, 

A  MM.  Bcliou,  Henri,  propriétaire,  à  l'ort-Vendres. 
Manjiii,  père  et  (ils,  pépiniéristes,  à  llie. 

Médaille  d'argent  (grand  module), 

A  MM.  Doperraud,  officier  de  la  r.égion-d'IIonnenr,  propriétaire,  a  Candies. 
Aieron,  Josepli,  jardinier-fleuriste,  à  IVrpijjnan. 

Médaille  d'argent, 

A  MM.  liychenne,  Laurent,  propriétaire,  à  l'erpignan. 

Astors,  Franeois,              id.  jj 

Adanioly,  Alexis,               id.  i,|_ 

De  Guardia,  Etienne,       id.  id. 

Testory,  Paulin,                i,|.  j,|. 

Taillade,  François,     jardinier,  i,|. 

Taillade,  Joseph,              iJ.  jj. 

Médaille  de  brome  (grand  module), 

A  MM.Coll,  Antoine,  propriétaire,  à  l',rpi|;nan. 

De  Oonzalvo,  Ange,  propriétaire,  à  Ksiagel. 

Hoiiuefort,  Jean,  propriétaire,  à  Perpignan. 

Unn-Poutoii,  premier  inaitre-vaiet  de  M.  Deperraud  ,  à  Candies 

ruiisonnier-Passania,  propriil.iire,  à  l'ia. 

Course,  Jean,  propriétaire  et  fal.riiant  de  ehocolat,  à  Arles. 

iielieu,  IMiilippc,  propriétaire,  à  IVrpigiian. 

Hassou,  Joseph,  agent  de  change,       id. 

Fabrc,  Michel,  horticulteur,  jd. 


106 

Médaille  de  bi'nnze, 

A  M.\I.  (larcassoiiiie,  Cliarlcs.  propiiélairi',  ,'i  Pcrpigiian. 
Vidal,  liDi  ticiillcui',  i(l. 

Poui'Iet,  J(i8(.'|)ii,  Lnrlicultour,  id. 

Dauder,  Julie,  iiropiiétaiie,  iil. 

Uartlic,  Abdon,  jaidiiiii'r,  à  l'alalda. 
Cazcs,  jardiiiitT,  à  IV'i[)i|;nan  (jardin  Mcspliés}. 
Milliaud,  ni'gocianl,     id. 
Sagau,  laillaiidier,        id. 
Desscje,  marcrhal-ferraiit,  à  Catllar. 
ÎMoniiier  (veuve),  propriétaire,  à  Per|>ifinan. 
Pierson,  Joscpli,  propriétaire,  id. 

Ifaiate,  Louis,  jardinier,  id. 

.Mir,  Louis,  jardinier,  iil. 

Ribes,  Louis,  jardinier,  id. 

rs'oguès,  Josepli,  jardinier,  iil. 

Gndaiil,  Pierre,  (ils,  jaidiiiiei-,  id. 

Primes  en  argent, 

A  MM.Hibes,  Fran<;ois,         jardinier. 

.Simon,  .Jean,  id. 

Conor,  Antoine,  id. 

Sainte,  Pierre,  id. 

Taslu,  Joseph,  id. 

'l'astu,  Marcel,  id. 

(îodaiil,  Pierre,  id. 

(iélis,  Michel,  id. 

Cainy,  Pierre,  id. 

Delhoste,  Fran(;ois,  id. 

Margouet,  Laurent,  id. 

Jourda,  Jacques,  id. 

Helinas,  iil. 

Idre,  Michel,  id. 

Barandc,  Philippe,  i<l. 

lîurate,  Trançois,  id. 

Noguès,  Joseph,  id . 
Pëjoan,  Jean,  cantonnier. 


107 
INDUSTRIE    HORTICOLE 


il 


Mention  honorable, 

A  MM.  Mcsplios,  Josepli,  propiiil.iito.   n  I'erpi(;ii.ui. 

Monnier,  Pierre,  vanhier,  jd. 

Marlrc,  l'iorre,  vannier,  iil. 

Iloiu'l,  l'](lni()n(l,  ciiiplûu',  iJ. 

Périco,  Fraiirois,  liorliculleiir,  id. 

Blanir,  liortirtilteiir,  i,|. 

Bardoii,  Pierre,  liorliciillenr,  id. 

I^aboissiorc,  liorliçiilteur,  id. 

rjopet,  propriétaire,  à  Serdiiiya. 

Trapé,  (x'piniérisle,  ;i  Elue 

Janer,  propriétaire,  à  Perpijjnaii. 

Briiézet,  Jacques,  martbaiid  de  (|r.iins,  à  Per|ii{;nan. 

Marty,  Jacques,  pépiniériste,  ;i  lllr. 
'■'    '  ""Estampe,  Jarcines,  jardinier  de  .M.  Brcssoii,  h  Ptrpijfnnn!''     '^  ' 

Dadies,  Saturnin,  fermier  au  Mns-Béarii,  id. 

Carlionnell,  propriétaire,  à  Cr. 

Salles,  coulidier,  à  Perpignan. 

Philippe,  jardinier    à  Careassonne. 

Rouffia,  Amédée,   propriétaire,  à  Pcrpijjiian. 

Tarissou,  Raphaël,  jardinier,  id. 

Rotisseict,  André,  propriétaire,  id. 

,•1  (■■,l 
SERVICES     RURAUX 

RÉCOMPENSKS    PAR    L.V    SOCIKTi::   AGRICOLE,    SCIENTIFIQUE 
ET   LITTÉRAIRE   DES    PYRIÎNÉES-ORIENTALES. 


Primes  en  artjent, 

A  MM.  Boher,  Isidore,  h  Sal.orre 70  ans  de  services.    100  fr. 

Uaynal,   Jean,  ciiez   M.  Cli.  de  Selva, 

''  l'Tpidnan lu    .  .  .  id 70 

Barhès,  rran<;ois,  à  l'Albère 50  .  .  .  id CO 


108 

A  MM.  Liirgé  ,    Pierre  ,    à    Villolonguo-ili-la- 

Salanque 44  ans  de  services.  60  fr. 

Pointis,  Minbel.  à  Tliuir 30  .  .  .  id 30 

Bosch,  Amlrù,  à  llle 27  .  . .  id 45 

Polinade,  Pierre,  à  Bagis 24  . . .  id 45 

Malis,  Jacques,  à  Comella-dcl-Vcrcol.  2'(  . . .  id 40 

Brousse,  François,  chez  M.   Passaina, 

à  Perfiigiian 20  ...  id 50 


PRIX    DE    POESIE, 

PROPOSÉS   P.\R   LA   SOCIÉTÉ   AGRICOLE,    SCIENTIFIQUE 
ET   LITTÉRAIRE   DES   PYRÉNÉES-ORIENTALES. 

Médaille  de  vermeil, 

\  M.  iMcric,  François,  auteur  delà  |iièce  de  vers  intilulée  Mon  Roussillon, 
avec  celle  épigraphe  :  Salve,  magna  farens  fnujum,  salmnia  itllus,  magna 
virum  (Virgile). 

Médaille  d'argent, 

A  M.  Meroadier,  aulcur  de  l'éloge  du  Maukciul  DE  Maillï,  Lieulenanl- 
Général  du  lloussilioii  et  Coiniiiauduiit  en  Chef  de  celte  Province,  avec 
cette  épigraphe  :  On  peul  Hre  héros  sans  ravager  la  terre  (Boileau). 

Certifié  : 
Le  Secrétaire-Général  du  Concours, 
A.  LLOUBES. 

Perpignan,  le  15  mai  1862. 


103 


SÉANCE  PUBLIQUE  DU  29  JUILLET  1860. 


PRESIDENCE  DE  M.  AUGUSTE  LLOUBES. 


La  Société  Agricole,  Scienlilique  et  Littéraire  des 
Pyrénées-Orientales,  a  tenu  sa  séance  publique  annuelle, 
le  dernier  dimanche  de  juillet,  sous  la  présidence  de 
M.  Auguste  Lloubes.  Les  places  d'honneur  étaient  occu- 
pées, au  bureau,  par  MM.  Gay  du  Palland,  secrétaire- 
général  de  la  l'rétéclnre,  et  Augustin  Saisset,  adjoint  au 
maire  de  Perpignan.  M.  Hornet,  vicaire-général  du  Diocèse, 
et  diverses  notabilités  de  l'armée,  de  la  magistrature  et 
des  administrations  civiles  avaient  bien  voulu  répondre 
à  l'invitation  de  la  Société,  et  donner  un  témoignage 
public  de  sympathie  aux  modestes  ouvriers  de  Tagri- 
cullure  et  de  l'industrie  rurale,  dont  l'Etat,  le  Départe- 
ment et  la  Société  devaient  récompenser  le  mérite  et 
les  services. 

Les  colons  romains  tenaient  pour  principe  que  la  civi- 
lisation commence  par  l'agriculture,  qui  peut  seule  main- 
tenir le  bien-élre  des  peuples.  C'est  le  principe  proclamé 
dans  tous  les  temps,  par  les  hommes  les  plus  dévoués 
au  bien  public,  et  la  Société  des  Pyrénées-Orientales  est 
pleinement  convaincue  que  c'est  surtout  par  ses  res- 
souices  agricoles  que  notre  département  pourra  bientôt 
jusiilier  l'immeuse  faveur  du  concours  régional,  (pii  lui 
a  été  accordé  pour  1<S()'2,  et  se  mettre  au  premier  rang, 
dans  notre  région,  par  l'imiiorlance  de  ses  produits,  et 
par  les  progrès  utiles  accomplis  parmi  nous  dans  cette 
branche  de  la  richesse  nationale.  Une  occasion  favorable 


990 

va  doue  s'offrir  à  nos  compalrioles,  (|iii  n'oiil  eu  jusqu'ici 
d'autre  lort ,  (|ue  de  se  tenir  à  l'écart,  et  de  laisser  ii(i|i 
souvent  usurper  le  mérite  et  le  bénéliee  de  leurs  travaux. 
I/lieure  est  venue  de  réclamer  pour  chacun  le  mérite  de 
ses  teuvres,  et  depuis  trop  longtemps  nous  avons  vu  des 
industriels  plus  habiles  ou  [dus  osés  l'aire  leur  gerbe  à 
nos  dépens,  et  récolter  ce  que  les  autres  avaient  semé. 
La  Société  ne  négligera  rien  pour  seconder  de  tous  ses 
efforts  une  o'uvi'c  si  importante  pour  notre  département, 
et  ses  senlimenls  à  cet  égard  ont  trouvé  un  digne  inter- 
prèle dans  riionorable  Président  qui  dirige  ses  Iravau.U 
Tous  nos  compatriotes  entendront  l'appel  sympathique 
qu'il  a  fait  à  leur  industrie,  à  leur  travail,  à  l'amour  qu'ils 
portent  à  leur  |)ays.  Ils  tiendront  compte  de  ses  utiles 
indications,  et  auront  à  cœur  de  réaliser  les  sages  prévi- 
sions que  M.  Lloubes  n'hésite  pas  à  formuler,  dès  aujour- 
d'hui, siu'  le  résultai  <le  notre  prochain  concours  régional. 
■::  \oici  le  discours  de  Monsieur  le  Président  : 

«  MESSIELIIS,  '        iiifiiTc; 

-"'«L'importance  des  concours  n'gionaux  est  tellement 
évidente,  qu'elle  n'a  plus  besoin  d'être  démontrée.  L'Em- 
pereur a  voulu,  jiar  cette  utile  institution,  que  la  France 
agricole  se  connût  elle-même,  qu'elle  se  perfectionnât 
par  la  puissance  irrésistible  de  l'émulation.  Pour  ceux 
qui  suivent  attentivement  ces  fêles  de  l'agriculture,  il 
est  certain  que  le  but  de  l'Empereur  sera  alteint/it  «ticb 
J^>«.-L'heure  approche  où  notre  départ(;mcnl  devra  prou- 
ver à  la  région  dont  il  dépend,  (pie  lui  aussi  a  progressé;  . 
que  ses  procédés  sont  en  rapport  avec  les  perfectionue- 
nienls  modernes,  et  qu'il  pratique  ce  grand  axiome  de 
!a  bonne  culture:  donner  au  sol  ce  qui  lui  convient.  Ses 
irrigations,  étendues  à  d'immenses  surfaces,  sous  un  soleil 
ardent,  ses  |)rairies,  ses  bois  d'oliviers,  de  micocouliers, 
de  chihie.s-liége,  ses  60.001)  hectares  de  vigne,  seront-là 


111 

pour  le  prouver.  Mais,  pour  (|ue  celle  preuve  soil  lai  le  ^ 
elle  ne  doit  pas  resler  dans  le  domaine  de  la  stalisli(|ue; 
il  laut.  (|ue  les  l'enncs  inscriles  avant  le  Ici-  ,,,3,.^  j,*^(]| 
pour  la  prime  d"ljonneur,  soient  nonilMeuses;  il  faut  (]u'en 
18C2  les  produits  e.xpose:s  soient  nombreuv;  il  litiii,  enlin, 
qu^„  dans  les  Pyrénées-Orientales,  tout  le  njonde  fasse 
preuve  de  bonne  volonté,  pour  mettre  le  département  en 
relie!'.   Il  n"a   point  à  redouter  ses  concurrents;  il  peut 
les  surpasser  par  rexhibilion  des  produits  de  son  sol. 
Les  autres  concours  de  la  région,  plus  imporlanls  par 
leur  position  plus  centrale,  pèchent   par  l'ensemble  de 
leurs  produits,  (pii,  jusqu'ici,  ont  été  faiblement  repré- 
sentés.   Hennissons  le  type  de  tous  nos  vins,  de   nos 
huiles,  de  nos  graines  de  toute  sorte,  de  nos  laines,  de 
nos  miels,  de  nos  essences  forestières,  de  nos  cultures 
arhustives    et    maraîchères,    et   nous   atteindrons    à  un 
ensend)le  de  ricbesse  auipiel  on  ne  croira  qu'après  l'avoir 
vu;  car  on  se  dispose  à  venir  nous  visiler,  à  cause  de  la 
haute  idée  qu'on  se  fait  de  notre  pays. 
t;T«  Nous  savons  que  la  machinerie  agricole  laisse  à  dési- 
rer. Sans  adopter  tout  ce  qui  parait  de  nouveau,  on  peut 
rechercher,  comme  éminemment  utiles,  certaines  machi- 
nes à  battre,  les  râteaux  à  cheval,  les  tarares  dcbourreurs, 
les  scarilicatems,  les  charrues  vigneronnes,  fouilleuses, 
défonceuses,  les  pressoirs  à  vin,  toutes  choses  (pii  ont 
fait  leurs  preuves  dans  la  culture  du  Midi. 

«Quant  aux  espèces  animales,  nous  espérons  obtenir 
que  la  race  chevaline  et  ses  dérivés  soient  admis  au 
concours.  Ce  nest  pas  un  jjays  qui  a  tant  lait  pour  être 
doté  d'un  Ih.ras,  qui  doit  cacher  ses  succès  éclatants 
dans  ce  genre  d'élevage  appelé  à  tant  d'avenir.  On  peut 
donc  se  préparer  pour  cette  éventualité. 

«l/cspèce  bovine,  connue  l'ont  ])rouvé  les  nombreux 
el  légitimes  succès  d'un  de  nos  collè-iu's,  est  en  voie 
d'amélioration  au  point  de  vue  de  la  boucherie;   mai^  h> 


1J-2 

bœuf  est  le  plus  précieux  inslrument  de  liavail  que  la 
Providence  ait  donné  à  l'homme;  il  faut  donc  le  perfec- 
tionner pour  l'attelage,  et  le  vouer  à  la  boucherie  lorsque 
l'âge  rend  ses  services  onéreux.  Nous  croyons  qu'un  bon 
choix  des  types  du  Riverai  et  de  la  Cerdagne,  peut  dé- 
montrer au  concours,  que  nous  avons  dans  notre  race 
indigène,  l'espèce  à  double  lin  que  l'agriculture  recherche 
avant  tout.  Nous  devons  travailler  a  la  perfectionner  par 
elle-même,  car  elle  supporte  la  chaleur,  et  c'est  une 
précieuse  qualité. 

«  L'espèce  ovine,  cette  caisse  d'épargne  du  petit  culti- 
vateur, ne  rend  pas  les  services  pour  lesquels  elle  a  été 
créée.  Les  nouvelles  dispositions  douanières  adoptées  par 
le  Gouvernement,  que  Ton  prend  par  erreur  pour  du 
libre-échange,  doivent  forcément  amener  l'agriculteur  à 
entrer  résolument  dans  la  voie  de  l'amélioration  de  ces 
précieux  animaux.  Ils  sont  utiles  par  leur  viande,  leur 
laine  et  leur  fumier.  Si  on  remédie  a  leur  tardivité  d'en- 
graissement, leur  laine  a  moins  d'importance;  si  ses  prix 
doivent  se  réduire,  la  [terte  est  moins  sensible  et  sera 
compensée.  Nous  ne  parlerons  pas  du  mérinos  pur-sang, 
dont  le  type  disparait  devant  les  difiîcultés  du  parcours, 
et  surtout  devant  de  mauvais  procédés  d'élevage;  mais, 
nous  aurons  en  vue  les  métis,  et  surtout  le  mouton  à 
laine  commune,  le  plus  robuste  de  tous.  Si  on  rachète 
par  le  mélange  du  sang  south-dovvn  anglais,  sa  lenteur  à 
s'engraisser;  si  l'on  gagne,  comme  c'est  possible,  au 
moins  deux  ans,  on  entre  dans  la  voie  de  la  vraie  culture 
améliorante,  on  double  les  forces  productives  de  celte 
branche  de  l'industrie  agricole,  on  double  ses  profils  et 
l'on  diminue  les  mauvaises  chances.  Nous  ferons  (ous 
nos  elforts  pour  que  des  croisements  avec  des  soulh- 
dovvn  soient  tentés;  nous  les  signalons,  en  attendant,  à 
ratlention  des  hommes  qui  s'occupent  de  ces  questions 
et  qui  se  préparent  pour  le  concours. 


113 

«  Il  est  une  branche  accessoire  pour  ce  pays  de  l'in- 
dustrie  agricole,  qui  pcul  figurer  avec  succès,  comme  le 
démontrent  des  l'ails  récents.  Alors  (pie  bien  des  gens 
pensaient,  à  tort,  que  notre  climat  n'était  |)as  propice  à 
l'élève  des  vers-à-soie,  nos  éducations  ont  été  les  plus 
i)elles  de  la  France  :  ou  est  venu  de  tous  les  points 
taire  de  la  graine.  C'est  à  la  lois  un  signe  de  la  régéné- 
ration de  ce  précieux  insecte,  et  une  preuve  de  l'aptitude 
des  lieux  où  il  a  été  élevé.  Ne  cessons  pas  de  planter  des 
mûriers,  sur  la  montagne  surtout,  et  ne,  répudions  pas 
une  industrie  (]ui  lait  la  lorlune  de  contrées  déshéritées 
par  la  nature;  ipii  n'exige  [)as  de  capitaux,  et  donne  ses 
produits  dans  quarante  jours. 

«La  Société  a  promis,  pour  1862,  une  exposition 
d'horticulture.  Elle  sait  que  le  concours  des  amis  des 
(leurs,  si  nombreux  et  si  zélés,  ne  lui  fera  pas  défaut; 
mais,  pour  que  l'exhibition  que  le  département  doit  taire 
dans  celte  occasion  soit  complète,  il  nous  semble  que  nous 
devons  provoquer  une  exposition  de  l'industrie,  limitée  aux 
produits  de  notre  pays,  et  une  exposition  des  beaux-arts, 
dans  laquelle  serait  comprise  une  ex|)ositioii  religieuse.  La 
piété  de  nos  aïeux  a  conservé  beaucoup  d'objets  précieux 
au  point  de  vue  de  l'art  et  de  l'histoire;  la  génération 
actuelle  ne  peut  que  gagner  à  les  connaître.  Les  concours 
régionaux,  tels  que  les  centres  où  ils  se  tiennent  les  pra- 
tiquent, sont  devenus  dans  leur  ensemble  un  étalage  de 
joyaux.  Pour(pioi  cacherions-nous  les  nôtres?  Si  notre 
département  est  petit  en  surface,  il  est  aussi  grand  que 
tout  autre  par  tout  ce  qui  distingue  riiomme  !  Concer- 
tons-nous pour  le  prouver.  C'est  de  longue  main  que  ce 
concert  patriotique  doit  avoir  lieu.  C'est  pour  l'établir 
que  nous  avons  fatigué  quelipies  instants  votre  attention. 
Nous  serons  heureux  si,  dans  deux  ans,  nous  pouvons 
dire  :  Nous  avons  conquis  notre  rang  dans  la  Région  du 
Sud-Est.  » 

8 


114 

RÉCOMPENSES  DÉCERNÉES  PAR  LA  SOCIÉTÉ. 

ÉDUCATION  DES  VERS-A-SOIE. 

Médaille  de  bronze. 
M.  Rertrand,  Joseph,  qui  dirige  réducation  de  M.  Sabatier,  à  Jau. 
M"«  Berland,  Marie,  idem,  idem. 

AGRICULTURE. 

Médaille  de  bronze. 
MM.  Berland,  Joseph,  au  domaine  de  Jau. 

Macai'i,  Éloi,  propriétaire,  à  Vinça. 
M"«  Motas,  propriétaire,  à  Perpignan. 
MM.  Fontaneil,  propriétaire,  ù  Vingrau. 

Calmon-Langoustet,  propriétaire,  à  Opoul. 

Estirac,  Nicolas,  propriétaire,  à  Opoul. 

Fillol,  Pierre,  propriétaire,  à  Nyer. 

Cazes,  Joseph,  jardinier,  à  Perpignan. 

Ribes,  Louis,  jardinier,  à  Perpignan. 

Taillade,  François,  jardinier,  à  Perpignan. 

Mention  honorable. 
MM.  Margaill,  Paul,  propriétaire,  à  111e. 

De  Compte,  Xavier,  propriétaire,  à  Vinça. 

Ulme,  Jean,  propriétaire,  à  Thuès. 

Noguès,  propriétaire,  à  Estagel. 

Rigole,  propriétaire,  à  Llo. 

Batlle,  dit  Bardou,  propriétaire,  à  Banyuls-sur-Mer. 

Delhosle  (ancien  jardin  Capot),  à  Perpignan. 

Taillade,  Joseph,  jardinier,  à  Perpignan. 

Baratte,  Louis,  jardinier,  à  Perpignan. 

Noguès,  Joseph,  jardinier,  à  Perpignan. 

Delmas  (jardin  Carrette),  jardinier,  à  Perpignan. 

Tastu,  Joseph,  jardinier,  à  Perpignan. 

Conte,  Joseph,  jardinier,  à  Perpignan. 

INDUSTRIE. 

Médaille  de  bronze. 
MM.  Fossaty,  tahricaiit  do  chocolat,  h.  Perpignan. 
Peus,  Joseph,  briquetier,  à  Perpignan. 


115 


SK.4N(:K  PCBLIOUIl  1)1    -28  JlJlLLrr  1861. 

PRÉSIDENCE   DE    M.    AUGUSTE   LLOUBES. 

La  Société  a  tenu  sa  séance  annuelle;  les  principales 
autorités  et  un  public  nombreux  y  assistaient. 

Le  Cercle  Sainle-Cécile,  a  l'ail  entendre  plusieurs  mor- 
ceaux qui  ont  été  fort  applaudis,  et  a  donné  le  signal 
de  l'ouverture  de  la  séance. 

Monsieur  Lloubes,  président,  a  prononcé  l'allocution 
suivante  : 

te  Messieurs, 

«  L'agriculture  française  est  placée,  depuis  un  an,  dans 
une  situation  toute  nouvelle  :  des  dispositions  législatives 
récentes,  ont  complété  les  mesures  qui  a|)pellenl  les 
produits  étrangers  à  lui  faire  concurrence.  Comment  la 
soutiendra-t-elle?  C'est  ce  que  nous  allons  examiner 
sommairement.  Les  grandes  divisions  de  la  production 
française,  sont:  pour  le  iNord ,  la  betterave,  donnant  le 
sucre  et  l'alcool,  les  plantes  oléagineuses  ou  textiles, 
les  céréales,  l'élève  du  bétail;  pour  le  Midi,  la  vigne, 
l'olivier,  les  céréales,  l'élève  de  l'espèce  ovine. 

«L'agriculture  du  Nord,  entourée  de  fabriques,  peu- 
plées de  nombreux  ouvriers,  mani|)ulant  même  plusieurs 
de  ses  produits,  sera  peu  sensible  aux  dis[)ositions  nou- 
velles; celle  du  Midi,  placée  dans  des  condilit)ns  in\  erses, 
devra  réellement  lutter.  Grevée  de  charges,  qui  n'ont  pas 
d'analogues  h  l'étranger,  impôt  direct,  centimes  commu- 
naux, départementaux,  coalition  tacite  de  la  main  d'œuvre, 
elle  doit  se  pn'seul(>r  résolument  devant  ses  adversaires. 


ut; 

Le  fera-t-elle?  pourquoi  en  douter!  Que  lui  faut-il  pour 
cela?  le  courage,  l'intelligence?  elle  les  a;  la  volonté? 
elle  doit  lui  venir:  il  faut  en  prendre  son  parti.  Les  me- 
sures dont  nous  nous  occupons  émanent  de  la  grande 
pensée  qui  a  voulu  réduire  le  prix  de  toutes  les  subs- 
tances indispensables  à  la  vie,  et  qui,  pour  atteindre  ce 
résultat,  a  rompu  avec  les  idées  du  passé.  On  le  sait: 
les  actions  des  sociétés,  comme  celles  des  individus, 
subissent  la  pression  de  la  nécessité.  A  une  époque  oîi 
les  produits  du  sol  étaient  relativement  rémunérateurs, 
l'agriculteur  pouvait  n'employer  que  certains  procédés 
simples  de  culture;  il  faut,  maintenant,  que  le  prix  de 
vente  de  ses  produits  sera  moindre,  qu'il  use  de  tous 
les  procédés  que  l'expérience  et  la  science  mettent  à  sa 
disposition  :  c'est  seulement  ainsi  qu'il  soutiendra  la 
concurrence  étrangère  avec  avantage. 

«  Pour  nous,  l'élève  du  bétail  se  présente  en  première 
ligne,  comme  devant  aider  puissamment  à  atteindre  le 
but  proposé.  Nous  produisons  beaucoup  de  fourrage; 
mais  nous  en  exportons  beaucoup.  Sans  renoncer  à  un 
débouché  lucratif,  augmentons  la  surface  des  prairies, 
et  surtout  cultivons  les  racines,  car  nous  ne  les  cultivons 
pas.  Plus  de  bétail  donnera  plus  de  fumier;  et  moins  de 
terres  emblavées,  mais  bien  fumées,  donneront  plus  de 
blé  :  nous  arriverons  à  avoir  moins  de  terre  à  labourer; 
elle  sera  mieux  retournée  et  plus  fertile.  Le  prix  anormal 
du  vin,  sert  de  prétexte  aux  exigences  de  la  main  d'œuvre; 
elle  est  surtout  impérieuse  au  moment  de  la  moisson. 

«  Les  concours  régionaux  ont  fait  connaître  d'excel- 
lentes moissonneuses,  d'excellentes  batteuses  à  vapeur; 
il  faut  recourir  à  l'emploi  de  ces  utiles  instruments.  Ln 
désir  (juc  nous  avions  exprimé,  il  y  a  cinq  ans,  s'est 
réalisé  :  des  associations  de  propriétaires  ont  acquis  des 
batteuses  avec  locomobile,  et  les  louent  aux  particuliers. 
Ce  perfectionnement  devient  par  là  accessible  ii  toutes  les 


117 

fortunes  :  en  économisant  l'argent  et  le  temps,  qui  est  de 
l'argent,  il  contribue  à  réduire  le  prix  de  revient  du  blé. 
Que  l'on  seconde  les  importateurs  de  batteuses;  que  l'on 
renonce  à  ces  procédés  primitifs,  qui,  en  éternisant  une 
opération  défectueuse,  faisaient  perdre  beaucoup  de  temps 
à  une  é|)oque  où  il  est  précieux,  et  l'on  verra  bientôt  lin- 
trodudion  de  moissonneuses  pour  être  louées  au  public. 
Les  faucbeuses  suivront,  et  nous  jouirons  des  meilleurs 
instruments  pour  exécuter  trois  des  grandes  opérations 
de  l'agriculture,  dette  circonstance  produira  de  grands 
résultats;  car  elle  aura,  |)Our  conséquence  forcée,  l'adop- 
tion (1(!  tous  les  outils  perfectionnés  que  la  culture  du 
Midi  peut  s'a|)proprier.  Il  n'y  a  pas  de  petite  exploitation  .. 
(jui  ne  puisse  proliler  de  ces  améliorations,  et  faire  mieux 
qu'elle  ne  fait.  Nous  comptons  beaucoup  sur  le  concours 
(le  1802,  pour  vidgariser  l'emploi  de  l'outillage  nouveau. 
Appelé  à  le  faire  fonctionner,  à  .Marseille ,  nous  pouvons 
affirmer  ce  (ju'il  vaut.  Nous  sci'ions  incom|»let,  si  nous  ne 
disions  pas  ipie  la  vigne,  malgré  le  haut  prix  de  ses  pro- 
duits, doit  éveiller  toute  la  sollicitude  de  l'agriculteur. 

«  On  supporte  facilement  dans  ce  momenl-ci  les  frais 
nombreux  (pi'elle  occasionne;  mais,  que  le  prix  du  vin 
vienne  ;i  baisser,  el  l'on  en  trouvera  le  poids  lourd. 

«  Nous  sommes  malbeureusement  menacés  de  soufrer 
longlenq)s.  Il  faut  donc  viser  à  produire  abondamment 
el  à  bas  prix;  les  façons  à  donner  au  sol  seront  pour 
beaucoup  dans  ce  résultat.  Nous  ne  saurions  tro|>  recom- 
mander, pour  le  second  el  le  troisième  labour,  la  boue  à 
(•lieval  (le  .M.  de  .Moux,  (bM'.arcassonne.  (îet  instrument  est 
inconnu  ici;  son  adoption  rendra  de  véritables  services. 
Ne  perdons  jias  du  reste  de  vue,  que  la  France  se  couvre 
de  vignes!  Nous  dépasserions  les  limites  de  la  discnUion, 
si  nous  insistions  davantage  sur  un  sujet  <pii  ('(unporlerait 
de  grands  (l(''vel(tppem('iits;  mais,  nous  dirons  que  le  seul 
moven  de  soutenir  la  concurrence  étrangère,  se  résume  à 


lis 

ceci  :  augmenter  les  produits  d'une  surface  donnée,  et 
les  obtenir  plus  écouoini(|nouiont  (|ue  |)ar  le  passé. 

f(  11  ne  faut  pas,  cependant,  s'exagérer  les  conséquences 
de  l'introduction  étrangère.  Les  pays  d'Europe,  parfaite- 
ment renseignés,  par  les  moyens  rapides  de  communi- 
cation, du  besoin  que  nous  éprouvons  de  telle  denrée, 
nous  la  vendront  ce  qu'elle  vaudra  clicz  nous,  et  nulle- 
ment ce  qu'elle  devrait  valoir  prise  cliez  eux;  ils  ne  le 
feraient  pas  (pie  les  importateurs  se  cbargeraient  de  ce 
soin  :  le  temps  de  la  naïveté  est  passé.  En  somme,  per- 
fectionnons nos  cultiu-es,  et  saisissons,  pour  cela,  l'occa- 
sion (pje  nous  offrira  le  concours  de  1862.  Que  tout  le 
—  monde  se  dise  :  c'est  un  point  d'honneur  pour  le  dt'par- 
tement  de  le  rendre  brillant;  chacun  doit  y  contribuer 
dans  la  limite  dt  ses  forces.  Ces  solennités  sont  déjà 
passées  dans  nos  mœurs,  et  nous  n'insisterons  pas;  de 
prochaines  annonces  feront  connaître  au  pul)lic  les  par- 
ties diverses  du  concours.  Pour  celle  qui  relève  directe- 
ment de  nous,  l'horticulture,  nous  allons  en  préparer  les 
éléments  dès  à  présent.  Nous  dirons  à  nos  iiiaraichers, 
(jue  c'est  la  région  entière  (|ui  concourra.  Ils  doivent 
s'elforcer  d'être  supérieurs  en  tout.  Ea  Provence  et 
même  le  Gard  produisent  certains  légumes  un  mois 
avant  nous;  nous  ne  le  croyons  pas  cependant.  Il  ne 
sullit  pas  d'être  fiers  de  notre  soleil,  (pie  la  Providence  a 
fait;  lâchons  de  l'être  des  produits  hàtil's  (jue  nous  obtien- 
drons par  son  inlluence  bienfaisante,  parce  que  ce  sera 
notre  œuvre.  Nous  lirons  un  très-grand  parti  de  la  cha- 
leur et  de  l'eau  ;  nous  pouvons  inonder  la  France  de 
l'abondance  de  nos  produits;  mais  l'abondance  ne  fait 
pas  la  précocité.  Le  prolongement  du  chemin  de  1er  sur 
l'Espagne,  va  nous  obliger  sous  peu  à  forcer  certaines 
cuiliMcs,  non  pas  par  des  procédés  coûteux,  mais  par 
l'application  de  moyeps  connus  et  peu  dispendieux. 

«  Tout   se  perfectionne  autour  de  nous;  on  court  vers 


119 

un  mieux  dont  la  limite  se  recule  sans  cesse  :  soyons 
aussi  intrépides  que  tous  les  autres  pour  chercher  èi  l'attein- 
dre; dans  une  société  qui  marcIie  toujours,  marchons! 
mais  d'un  pas  que  la  prudence  dirige.  Notre  passé  rép(md 
de  l'avenir,  et  nous  s(unnK's  convaincu  (jue  ce  départe- 
ment, s'il  le  veut,  dominera  la  situation  agricole  que  les 
circonstances  lui  ont  laite.  » 

RÉCOMPENSES  DÉCERNÉES  PAR  LA  SOCIÉTÉ. 

ÉDUCATION  DES  VERS-A-SOIE. 

Médaille  li'arijent. 

M.  S.  Trilla,  à  Latour,  pour  services  rendus  à  la  sériciculture 

par  la  production  de  bonnes  graines  de  vers-à-soie. 

Médaille  de  bronze. 

M"""  Julia,  à  Latour,  jioiir  sa  l)oniie  réussite  dans  l'éducation  des 

vers-à-soie. 
M.  Labrousse,  Jacques,  pour  le  zèle  avec  lequel  il  a  [iropagé 
l'éducation  des  vers-à-soie. 

Mention  honorable. 
M"''  Cussol,  à  Laloiir,  pour  sa  bonne  réussite  dans  l'éducation 
des  vers-à-soie. 

INDUSTRIE. 

Médaille  de  bronze. 

M.  Jouaiie,  boulanger,  à  Perpignan,  pour  son  pétrin  mécanique 
perlectionné. 

SERVICES  RURAUX. 

Prime  en  argent. 
M.  .Macabios,  valet  de  fci'iue  de|)uis  iO  ans  chez  le  uièuie  maître. 

AI'ICULTlîRE. 

Prime  en  argent. 

M.  Millarl,  à  Saint-1'aul-de-Fenouillel .  pour  services  rendus  à 

l'apiculture. 
.M.  lilaiiipiier,  à  Saint-Paul-do-Fenouillcl,  idem,  idem. 

Quarante-une  primes  ont  été,  en  outre,  distribuées  à  l'espèce 
bovine,  sur  les  fonds  votés  par  le  département  et  sur  ceux  qui 
ont  été  accdidés  par  M.  le  Ministre  de  l'Agriculture. 


120 


RAPPORT 

SUR  L'EXPOSITION  FLORALE  ET  MARAÎCHÈRE 
DU  COiNCOURS  RÉGIONAL  DE  PERPIGNAN 

{m  4862), 

Par  iM.  l'iiMn'  DELHOSTE,  socrétn'uv  de  la  ('.oinuiission 


A  l'extrémilé  de  la  belle  promenade  des  Platanes, 
s'étalaient,  sous  un  dôme  maynilique  de  verdure,  les 
produits  les  plus  riches  et  les  plus  variés  de  nos  parterres 
et  de  nos  jardins.  Sept  cent  cincpiante  vases  d'orangers 
ou  de  citronniers,  presque  tous  très-forts  et  d'une;  belle 
végétation;  des  collections  d'arbres  verts,  d'arbustes  rares, 
de  plantes  d'agrément,  aux  formes  et  aux  couleurs  les 
plus  distinguées,  et  de  plantes  maraîchères,  ou  même 
de  quelques  fruits  hâtifs,  ornaient  le  jardin  improvisé, 
en  quelques  jours,  par  les  soins  de  M.  Louis  Robin,  au 
rond-point  qui  précède  l'allée  des  Soupirs,  et  tout  autour, 
sur  un  os[)ace  de  plus  de  quatre  mille  mètres  carrés.  Sur 
le  gazon,  délicieux  de  fraîcheur,  étaient  jetés,  çà  et  là,  des 
groupes  de  rhododendrum,  d'azalées,  de  camélias,  de 
pelargonium  à  grande  fleur ,  de  géranium  zonale  ,  de 
verveines,  de  pélunies  simples  et  doubles,  de  cinéraires, 
de  mimulus,  de  pensées,  de  calcéolaires,  de  chrysan- 
thèmes, de  delpliinium ,  et  d'autres  plantes  ou  arbustes 
couverts  de  fleurs. 

Au  milieu  du  rond-point,  brillaient,  entourés  d'une 
sémillante  ceinture  de  cinéraires   aux   riches  couleurs. 


121 

soixante  variétés  de  conifères  résineux,  cèdres,  arauca- 
ria, etc.;  tout  autour  de  la  pelouse,  des  corbeilles  de 
rhododendruni,  d'azaléa  indica,  de  camélias,  et  d'arbustes 
très-variés,  exposés  par  les  i'rères  Hobiii,  pé|)iniéristes. 

Sur  un  des  côtés  de  la  pelouse,  brillait  un  beau  massif 
de  M.  Henri  liélieu,  propriétaire,  à  Port-Vendres,  com- 
posé de  rhododendruni,  d'azalées,  de  rosiers,  pivoines 
bégonias,  chrysanthèmes,  pétunies,  hybiscus,  œillets  de 
Chine,  palmiers,  dracœnas,  philodendron,  yuccas,  licus 
elastica,  sempervivum,  crategus,  etc. 

M.  François  Astors  étalait,  dans  un  groupe  délicieux 
de  fraichour,  la  plus  belle  collection  de  pelargonium  à 
grande  ileur  et  à  cinq  macules,  de  beaux  fuchsias,  des 
delphiuium  de  semis,  des  orangers,  des  arbustes  divers, 
et  quehpies  autres  |)lantes  méritantes. 

M.  Philippe  Hélieu,  de  Perpignan,  avait  aussi  exposé 
une  collection  nombreuse  et  variée  de  camélias,  d'oran- 
gers et  d'azalées. 

A  côté  de  la  porte  d'entrée,  sur  une  platebande  de  |)lus 
de  sept  mètres  de  longueur,  MM.  Marqui ,  i)ère  et  (ils, 
avaient  ex|)osé  une  riche  collection  d'orangers,  composée 
de  118  sujets  et  otTrani  80  variétés  du  |)lus  grand  mérite; 
leiu's  groupes,  de  pelargdniuin  variés,  à  grandes  (leurs  et 
a  cinq  macules,  de  géranium  zonale,  de  pclunies  siuq)les 
et  doidjjes,  de  fuchsias,  métrosidéros,  minudus,  ver- 
veines, etc.,  n'étaient  pas  moins  remar(piables. 

M.  Joseph  Alerou,  horticulteur,  avait  aussi  présenté, 
dans  trois  corbeilles  distinctes,  une  très-belle  collection 
de  verveines  à  grande  Heur  ou  à  coloris  nouveau,  des 
pensées  anglaises,  pétunies,  cinéraires,  et  de  forts  pieds 
d'orangers,  couverts  de  lleurs  et  de  fruits. 

M.  Oeperreaud,  propriétaire  à  Caudiès,  ollicier  de  la 
Légion-d'Monnein',  avait  fait  transporter,  non  sans  peine, 
(piel(|uos  arbres  bien  venus,  dont  la  taille,  parfaileiiicut 
conduite,  avait  attiré  l'allention  des  hommes  çonq)élenls; 


122 


des  pyramides,  contre-espaliers  et  pommiers  à  cordon, 
de  forts  pieds  de  rosiers,  des  cerisiers,  une  belle  collec- 
tion de  tulipes  en  (leur. 

M.  Stéphane  Bédos  exposait  aussi  un  très-beau  groupe 
de  verveines  nouvelles,  à  grandes  fleurs  et  riches  coloris, 
de  pensées  et  d'hélioiro|)es. 

Lue  jolie  corbeille  de  pelargonium  à  grandes  fleurs, 
de  verveines  et  de  calcéolaires,  de  M.  Adamoly,  ifatlirail 
pas  moins  les  regards. 

Quelques  verveines,  pétunies  doubles,  un  deutzia  gracilis 
d'un  blanc  de  neige,  de  iM.  l'abbé  Delhoste,  liguraient  assez 
bien  au  milieu  des  richesses  de  la  flore  roussillounaise. 

Une  nombreuse  collection  de  Iruils  du  genre  cihus, 
de  rosiers,  un  pied  d'ananas  avec  fruit,  un  bouquet  de 
plantes  légumineuses,  des  orangers,  pétunies,  etc.,  de 
M.  Adrien  Fabre,  attiraient  surtout  Tattenlion  des  visiteurs. 

Les  cinéraires,  quarantains  d'Erfurl,  et  de  belles  plantes 
aquatiques,  de  M.  Amédée  Jaunie,  formaient  un  groupe 
des  plus  remarquables. 

M.  Pierre  Garrette,  banquier,  avait  exposé  de  nombreux 
et  forts  pieds  d'orangers,  des  pensées  très-belles,  des 
géranium  zonale  et  à  grandes  fleurs,  des  canna  indica, 
calladium  ,    fougères,    bégonias   à    reflets    pourpres    et 


argentés. 


M.  Etienne  de  Guardia,  avait  exposé  de  très-beaux 
boutiuets  et  corbeilles  de  fleurs  naturelles  coupées. 

Les  citronniers  et  les  camélias  de  M.  Gourse,  pro|trié- 
taire  à  Arles,  étaient  les  plus  beaux  de  l'exposition. 

Ou  remarcpiail  encore  les  pensées,  héliotropes,  citron- 
niers, orangers,  chinois,  de  M.  l'abbé  Harjau;  la  corbeille 
de  verveines,  héliotropes  et  pensées,  de  M.  Antoine  Coll; 
les  géranium  zonale  et  les  nombreuses  plantes  grasses,  de 
M.  Pierre  Rardou;  les  collections  d'orangers,  citronniers, 
couverts  de  fruits,  et  les  plantes  diverses,  des  demoiselles 
Oauder;  les  magnifiques  chinois,  les  orangers  et  autres 


I2:i 


plantes,  de  M.  Joseph  Pourtet;  les  nonihreiix  pieds  d'o- 
rangers, avec  fruit,  de  M.  Pierre  Pierson  ;  la  grande  collec- 
tion d'orangers,  citronniers,  cédrats,  pommiers  d'Adam, 
Saint-.lérome,  etc.,  de  M.  Pierre  lîassou;  les  niagnili(pies 
citronniers  de  M.  Jean  Hlanic  ;  les  beaux  vases  d'oran- 
gers de  MM.  Périco,  Laboissière  et  M'"e  veuve  Monnier, 
donnaient  encore  un  nouveau  lustre  aux  allées  sinueuses 
de  ce  jardin  improvisé. 

Moins  poétiques  et  brillantes  étaient  les  allées  du  jardin 
niaralclier,  trop  peti  étendu,  vu  l'importance  de  nos  pro- 
duits. Cinq  grandes  plates-bandes  étaient  plantées  en  arti- 
chauts d'une  belle  venue,  en  tomates  et  aubergines  hâtives, 
en  haricots,  fraisiers,  choux,  carottes,  navels,  courges, 
melons,  concond)res,  laitues  variées,  etc.  Parmi  les  expo- 
sants, on  distinguait,  particulièrement  et  très-avantageu- 
sement, les  frères  François  et  Joseph  Taillade,  jardiniers, 
pour  leurs  tomates,  aubergines,  courges,  melons,  figues 
et  pèches  précoces:  la  maturité  de  ces  deux  derniers  fruits 
était  déjà  assez  avancée.  On  distinguait,  ensuite,  I.ouis 
Baratte,  pour  ses  haricots  vtM'ts  et  ses  pieds  d'artichauts 
de  Mai;  Joseph  Noguès,  pour  ses  artichauts  et  ses  beaux 
choux  [tommes,  d"(m  développement  extraordinaire;  Pierre 
(Iddall,  Louis  Mir,  iiaymond  Sagan,  Louis  Uibes,  Pierre 
Sainte,  Joseph  Tastii,  Marcel  Taslii,  Jean  Simon,  Michel 
Ciélis,  pour  haricots  hâtifs,  choux  blancs,  choux  pomuH'S, 
laitues,  artichauts  blancs  remontants  et  artichauts  de  Mai. 
—  Pierre  Cam\ ,  l-'rauçois  Delhoste,  Laurent  Margouet, 
Jaccjues  Jourda,  Michel  Idre,  FMiilippe  Uarande,  Jacipies 
IJelmas,  Franç(»is  Haratle,  François  et  .Mexandre  Piibes 
l't  Jean  Fort,  avaient  aussi  exposé  de  beaux  et  bons 
produits  de  leurs  jardins. 

Sur  des  étagères,  s'étalaient  des  IVuils  ei  des  h'gumes, 
tant  de  saison,  tpie  conservés;  des  haricots  verts,  de  Louis 
Haralle;  des  pommes  de  terre,  deJaccpies  Meliiias,  de 
Pierre  Sainle  et  de  François  Taillaile;  des  patates  |Kirfaile- 


121 

ment  conservées,  des  frères  Ribes  (François  et  Alexandre); 
des  courges,  de  Lonis  Baratte  et  de  Pierre  Godall;  des 
asperges,  de  M.  Jean  Roquefort,  propriétaire,  de  Pierre 
Sainte ,  jardinier,  et  de  M.  Janer,  qui  avait  également 
présenté  une  nond)reuse  collection  de  |)ommes  et  de  poires 
conservées,  deux  grosses  branches  de  cerisier,  couvertes 
de  fruits  niùrs,  des  graines  d'as|)erges  de  Hollande,  cl  de 
liaricots  variés.  M.  Laurent  Eycbenne  avait  exposé  une 
belle  i)ranche  de  pistachier  chargée  de  pistaches;  ses 
patates  et  celles  de  Jean  Carcassonne,  méritent  d'être 
signalées  pour  leur  grosseur  et  leur  parfaite  conservation. 
MM.  Marcjui,  |)ère  et  fils,  présenlaient  une  inagnilicpie  et 
complète  collection  de  fruits  d'orangerie,  tels  que  cédrats, 
citrons,  bigarradicrs,  oranges,  pommes  d'Adam,  merveille 
d'Espagne,  etc.,  des  poires  conservées  et  autres  fruits. 
Antoine  Conor  et  M"^^  veuve  Monnier,  avaient  exposé  des 
l)oires  doyenné  d'hiver,  et  M'"*"  Elorens,  nue  belle  corbeille 
de  pommes  variées. 

Tel  était  l'ensenible  de  celte  exposition  ilorale  et  maraî- 
chère de  notre  concours  régional,  un  des  plus  beaux,  sans 
contredit,  de  toute  la  région.  La  vue  et  l'odorat  étaient 
également  llallés  dans  ce  jardin  verdoyant  et  ombragé,  où 
l'on  n'avait  guère  :i  regretter  (pie  l'absence  forcée  des 
beaux  (cillelsile  M.  Nicolas  Pourlel  et  de  M.  l'abbé  Barjau, 
dont  la  lloraison  n'avait  pas  commencé  encore. 


125 


UNE  PROCESSION  AU  XV«  SIÈCLE, 

Par  M.  labhé  DELHOSTE ,  membre  résidant. 


De  tout  temps,  nos  pères  se  sont  disiingués  par  leur 
piété  el  leur  confiance  envers  les  saints.   Les  diverses 
corporations  établies  parmi  eux,  avaient,  chacune,  leur 
patron ,    qu'elles    vénéraient    et   fêtaient   soleunellement 
dans  certaines  circonstances.   Je  signalerai  une  seule  de 
ces  corporations,  celle  des  cultivateurs  et  des  hommes 
attachés  aux  travaux  de  la  terre,  qui  invoquait  spéciale- 
ment saint  Gaudéric,  et  avait  recours  à  son  intercession 
dans  les  temps  de  sécheresse  persistante  ou  à  l'époque 
des  inondations.  II  ne  sera,  peut-être,  pas  inopportun, 
dans  une  réunion  de  ce  genre,  de  décrire  une  procession 
solennelle,  célébrée  en  1  iTO,  en  l'honneur  de  ce  saint, 
pour  obtenir  le  bienfait  de  la  pluie;  car,  si  nous  aimons 
à  reconnaître  le  concours  bienveillant  el  empressé  des 
autorités  de  cette  ville  el  de  ce  département,  nous  ne 
devons  pas  moins   tenir  à  cœur  de  payer  un  tribut  de 
louanges  à  Celui  qui,  du  haut  des  régions  célestes,  veille 
sur  nos  vergers  et  nos  moissons.  J'emprunte  le  récit, 
qui  va  suivre,  aux  mémoires  conservés  dans  les  archives 
de  notre  église  cathédrale,  mémoires  qui  relatent  plu- 
sieurs autres  processions  générales  de  saint  Gamléric, 
faites    a\  -c    une  solennité  et  un   concours  dont    il   est 
dillicile  de  nous  faire  une  idée ,  en  ces  jours  de  proi^rès 
matériel,   mais  aussi  d'aflaiblissement  du  sens  relii-ieux 
Le  Gouverneur  et  les  Cousuls  de  Perpi-nan,  ainsi  que 
ceux  des  principales  villes  du  Conllent  et  du  Roussillon 


\-2(j 


avant  lait  la  deiiiauile  ollicielle  de  la  procession  de  saint 
Gaudéric  à  l'autorité  diocésaine  et  au  révérend  Abbé  de 
Saint-Martin-du-Canigou,  celui-ci  dut  ijuitter  son  monas- 
tère et  se  mettre  en  marche,  avec  les  saintes  relicjues, 
dès  le  troisième  ou  le  quatrième  jour  du   mois  de  mai 
de  l'an  mil  quatre  cent  soixante-dix.   Quoique  l'historien 
ne  désigne  pas  les  paroisses  qui  Orent  partie  de  la  pro- 
cession, il  est  plus  que  probable  que  toutes  celles  dont 
elle  traversa  le  territoire  s'empressèrent  d'y  prendre  part. 
Villelrauche ,  Prades,  Viuça,  Ille ,  ïhuir,  et  les  villages 
situés  à  proximité  de  ces  villes,  durent  grossir  les  rangs 
des  pieux  pèlerins.  Ce  fut  le  lundi,  7  mai,  veille  de  la 
fête  de  l'apparition  de   l'archange  saint  Michel,  que  le 
chapitre  et  la  communauté  des  prêtres  de  Saint-Jean, 
avec  tout  le  clergé  des  autres  i)aroisses  de  la  ville,  les 
divers  ordres  religieux  et  un  concours  immense  de  lidè- 
les,  sortirent,  processionnellement,  par  la  porte  del  Torô, 
qui  était  à  l'extrémité  de  la  rue  actuelle  de  l'Ange,  et  se 
dirigèrent ,  en  passant  par  les  Qualre-Cazals,  vers  le  lieu 
dit  Pont-yoUy  pour  recevoir  solennellement  le  corps  de 
saint  (iaudéric.  Après  le  chant  du  répons  Sande  Gaude- 
rice,  un  chanoine  et  un  bénéficier  de  Saint-Jean,  portè- 
rent la  châsse  de  saint  Gaudéric,  et  la  procession  se  mit 
en  marche,  entrant  par  la  porte  Saint-Martin,  et  allant, 
directement,  h  l'église  Sainl-Jean.  Il  était,  alors,  quatre 
heures  du  soir,  et  la  sainte  relique  ayant  été  placée  sur 
le  maître-autel ,  la  cérémonie  fut  terminée ,  aussitôt,  par 
la  bénédiction,  afin  de  donner  aux  pèlerins  le  repos  qui 
devait  leur  être  nécessaire,  après  une  longue  marche. 

l.e  lendemain,  mardi,  jour  de  Saint-Michel,  et  le  mer- 
credi ,  8  et  9  mai ,  il  y  eut  encore  procession  générale 
dans  les  rues  de  la  ville,  où  l'on  porta,  avec  les  reliques 
de  saint  Gaudéric,  celles  de  saint  Julien  et  de  sainte 
Baselice  de  La  Héal,  et  de  saint  Hunoral  del  Canne.  On 
se  rendit  à  la  Tel,  où  les  saintes  reliques  fureiii  déposées, 


I 


127 

jusqu'à  les  mettre  (juelques  instants  en  contact  avec  l'eau, 
afin,  sans  doute,  (rol)tonir  plus  lacilomenl,  par  cet  acte 
de  foi  naïve,  le  bienfait  de  la  pluie.  Cette  circonstance 
de  l'immersion  des  relicpies  a  été  renouvelée,  depuis, 
toutes  les  fois  qu'a  ou  lieu  une  procession  semblable. 
Mais,  malgré  la  foi  vive  et  les  prières  ferventes  des  bons 
Koussillonnais,  le  ciel  demeurait  fermé,  et  la  pluie  tardait 
à  venir. 

Aussi,  dès  le  jeudi,  iO  du  mois,  entre  quatre  et  cinq 
heures  du  matin,  la  procession,  i)lus  nond)reuse  que 
jamais,  se  mit  en  marche  vers  la  mer,  lonireant  la  Tet, 
par  le  chemin  de  Vilellongue  et  de  Sainte-Marie.  Kiie  lit 
une  station  sur  le  rivage  de  la  mer,  où  les  saintes  reli- 
ques furent  encore  mises  en  contact  avec  l'eau,  et  on 
repartit  immédiatement  pour  Sainte-Marie,  où  une  messe 
solennelle  fut  célébrée  par  le  seigneur  Abbé  de  Saint- 
Martin.  Un  religieux  franciscain,  le  père  liroqueta,  l'ut 
chargé  d'haranguer  la  nombreuse  assemblée,  et  de  faire 
le  panégyrique  de  saint  Gaudéric.  Ce  ne  fut  qu'à  l'issue 
de  la  messe  que  l'on  put  se  reposer  et  prendre  cpielque 
nourriture.  Quatre  Consuls  de  Perpignan,  se  trouvaient, 
en  ce  moment,  à  Sainte-Marie,  c'étaient:  Pierre  Aubry, 
second  consul;  Pallors,  mercader,  troisième  consul; 
Georges  Sestero,  mercader,  quatrième  consul,  et  Sancho, 
tisserand,  cinquième  consul  de  la  ville.  Beaucoup  d'ho- 
norés bourgeois  et  mercaders,  et  une  foule  de  paroisses, 
faisaient  partie  de  la  procession,  qui  ne  comptait  pas 
moins  de  vingt  mille  personnes. 

Tant  de  foi  et  de  persévérance  durent  toucher  le  cœur 
de  Dieu;  les  prières  ferventes  et  multipliées  de  la  foule 
recueillie,  furent  couronnées  d'un  plein  succès.  Dès  le 
soir  de  ce  jour,  et  tout  le  lendemain,  sans  aucun  doute, 
une  pluie  abondante  dut  humecter  la  terre  aride  et  rendre 
la  vie  aux  campagnes  désolées  par  une  sécheresse  trop 
prolongée. 


128 

Ce  ne  tut  que  le  samedi,  12  mai,  à  six  heures  du  matiu, 
que  les  dévols  pèlerins  de  saint  Gaudéric  reprirent  joyeu- 
sement et  avec  action  de  grâces  le  chemin  du  monastère 
de  Saint-Martin,  pour  y  réintégrer  les  précieuses  reliques. 
La  procession,  composée  comme  précédemment,  sortit  de 
l'église  Saint-Jean,  faisant  retentir  les  airs  d'hymnes  et 
de  cantiques,  et  ne  s'arrêta  qu'au  pont  de  Saint-Gély  ou 
d'eti  Panistrar.  —  Deux  chanoines  et  deux  bénéiiciers, 
revêtus  de  dalmatiques,  portèrent  le  saint  corps,  et  le 
remirent  entre  les  mains  de  l'Abbé  de  Sainl-Marlin;  et, 
après  avoir  pris  congé  de  lui,  la  |)rocession  reprit,  avec 
ordre ,  le  chemin  de  Saint-Jean ,  tandis  que  les  pèlerins 
prirent  la  voie  de  Thuir,  et  poursuivirent  leur  route  jus- 
qu'au monastère,  où  fut  déposé  le  saint  corps. 


IJ9 


FIN  DU  mnum  aux  éphé^erides 

De  rilôpilal  Saint-Jean  et  de  l'Hospice  de  la  Miséricorde 

DE    PERPIGNAN, 

Par  M.  JosiEPH  SiBTEW»  meinbrt-  résidant. 


«  On  garde  le  souvenir  des  actes  d'IiCToîsme. 
et  l'on  doit  se  souvenir  des  exemples  de  charité.  » 
D.  (Journal  général  de  l'Instruclion  publi- 
que du  7  mai  iS59.) 


Mon  inlenlion  avait  été  d'arrêter  mes  éphémérides  à 
l'année  1850;  mais  divers  doemnents  que  j'ai  découverts 
et  dont  j'ai  reconnu  l'importance,  m'ont  décidé  à  en 
poursuivre  la  publication  jusqu'en  1865.  Ainsi,  le  supplé- 
ment que  je  donne  aujourd'hui  complétera  la  série  des 
notes  historiques  que  m'ont  fournies  les  archives  de 
l'Hôpital  Saint-Jean  et  de  Notre-Dame-de-Miséricorde. 
Je  désire  être  à  mémo,  plus  tard,  de  publier  d'autres 
faits  se  rattachant  à  ces  maisons  hospitalières. 

Je  vais  faire  connaître  maintenant  l'origine  de  l'union 
des  Léproseries  de  l'ancienne  province  du  Roussillon  à 
riiôpital  Saint-Jean. 

Le  10  avril  1G96,  M.  De  Trobat,  premier  président  du 
conseil  souverain,  et  M.  François  Desprès,  docteur  en 
théologie,  chanoine  d'Elue,  oiricial  et  vicaire-général  du 
diocèse  (ce  dernier  au  nom  de  l'évéque),  touchés  de  la 
triste  position  dans  laquelle  se  trouvaient  rHôjiital  Saint- 
Jean  et  Notre-l)auie-de-Miséricorde,  résolurent  de  pro- 
poser au  roi  d'y  réunir,  par  égales  portions,  les  revenus 

9 


130 

des  Léproseries  de  Saint-Jean-de-Jérusalem  et  du  Mont- 
Carmel,  au  nombre  de  vingt-deux,  existant  dans  la  pro- 
vince; mais,  après  avoir  examiné  sérieusement  cette 
affaire  et  fait  la  part  des  difticultés  qui  se  présentaient 
et  qu'ils  n'avaient  point  prévues,  ils  se  convainquirent 
que  le  partage  de  ces  revenus  serait  d'un  faible  secours 
pour  cbacune  des  deux  maisons.  Jis  adressèrent  le  résul- 
tat de  leurs  investigations  au  Conseil  d'État,  qui,  par  son 
édit  du  20  juillet  1690,  réunit  déliuitivement  les  revenus 
des  Léproseries  à  l'Hôpital  Saint-Jean ,  moins  celles 
d'Arles,  le  Boulou,  Vinça  et  les  Bains  d'Arles''*.  A  cette 
époque,  on  voulait  également  réunir  une  partie  des  reve- 
nus des  Hôpitaux  de  la  province  à  Notre-Dame-de-Misé- 
ricorde  ;  mais  on  dut  y  renoncer,  à  cause  de  l'opposition 
que  firent  les  administrateurs  de  ces  établissements. 

En  publiant  le  montant  des  revenus  de  chacune  des 
Léproseries,  ainsi  que  le  tableau  des  Hôpitaux  qui,  à  la 
lin  du  xviF  siècle,  existaient  dans  le  Roussillon,  j'ai 
cru  faire  un  travail  utile  et  de  quelque  valeur  aux  yeux 
des  hommes  qui  s'occupent  d'archéologie  et  d'histoire 
locale ,  attendu  que  les  documents  qui  ont  servi  à  l'éta- 
blir sont  complètement  inédits. 

Ces  maisons  hospitalières,  fondées  par  la  piété  de  nos 
pères,  au  retour  des  croisades,  sont  dignes  de  la  protec- 
tion des  hommes  qu'animent  la  charité  chrétienne  et  le 
désir  d'être  réellement  utiles  à  l'indigence.  Lorsque  des 
hivers  rigoureux  ou  des  épidémies  viennent  fondre  à 
l'improviste  sur  les  populations  nécessiteuses,  le  bien 
qu'elles  font  est  très-grand.  Ce  bien  d'ailleurs  se  continue 
tous  les  jours,  du  l^'' janvier  au  51  décembre,  et  cela 
depuis  des  siècles,  grâce  au  zèle  d'une  administration 
consciencieuse  et  éclairée ,  et  aux  soins   vigilants ,    au 


(I)   Louis  Xl\   l'orroliiira  ci't  t'dil  par  lellres  patentes  du   mois  d'octobre 


131 

dévouement  évangélique  des  l)oniies  Sœurs  que  la  pro- 
vidence a  placées  au  chevet  du  lit  du  malade  pour  hâter 
sa  guérison  ou  pour  l'aider  à  faire  une  fin  chrétienne. 
Économe  des  Hospices  civils  de  Perpignan,  je  suis  à 
même  d'apprécier  tous  les  bienfaits  que  ces  maisons 
répandent  sur  la  classe  pauvre,  dans  la  limite  de  leurs 
ressources. 

On  ne  saurait  trop  le  répéter,  ces  établissements  ne 
sont  jamais  assez  riches,  car,  plus  la  somme  de  leurs 
revenus  grossit,  plus  ils  peuvent  augmenter  le  nombre 
des  malades  et  des  orphelins  qu'ils  secourent  journelle- 
ment. J'ajouterai  qu'ils  ne  sont  jamais  riches;  cette  der- 
nière qualification  ne  peut  raisonnablement  s'appliquer 
que  lorsque  le  superflu  dépasse  le  nécessaire;  ce  qui 
n'existe  ni  pour  l'Hôpital  Saint-Jean  ni  pour  l'Hospice  de 
la  Miséricorde,  ni  pour  aucun  établissement  de  ce  genre 
existant  dans  les  Pyrénées-Orientales. 

La  charité,  celte  fille  du  ciel,  est  descendue  sur  la 
terre  pour  tendre  la  main  h  toutes  les  infortunes,  pour 
cicatriser  toutes  les  plaies*^';  mais  il  faut  que  les  hommes 
de  bien  secondent  ses  vues  et  l'aident  dans  son  labeur  ; 
et  de  même  qu'elle  ouvre  sans  cesse  le  trésor  inépuisable 
de  ses  grâces,  de  même  les  heureux  du  siècle  ne  sau- 
raient rester  sourds  à  son  généreux  appel. 

Toutes  les  garanties  désirables  sont  données  aux  bien- 
faiteurs, par  les  lois  et  les  décrets  qui  régissent  l'assis- 
tance publique;  la  comptabilité  financière  des  Hospices 
est  soumise,  selon  son  importance,  aux  investigations  de 
la  Cour  des  Comptes  ou  du  Conseil  de  Préfecture  ;  les 

(I)  •  r,c  premiiT  doruntpnt  relatif  à  ri-l.iblissemcnt  d'aumôiips  rt'ijiilières, 
faiU's  aux  iii(Jij;i'nts,  csl  une  loi  de  Coiislanlin,  de  raïuiée  315;  et  oii  lit  au 
cliM|)i(rc  III  lie  la  vit;  Je  sainte  Fabiola,  écrite  par  saint  Jéi'ôme,  que  cette 
gr.iiKle  cl  illiislrc  iriiilioiic  (it  élever  à  Home  ,  avant  la  fin  du  tv'  siècle,  le 
|)reiuier  hôpital  i]ue  les  peuples  anciens  aient  jamais  vu.  »  (Voyage  aux 
Antilles,  loniu  II,  pa(;u  1 12,  por  M.  Granicr  do  Cassagnac.) 


13-2 

fonds  provenant  des  dons  et  legs  placés  en  rentes  snr 
l'État,  sous  la  surveillance  de  l'autorité  supérieure,  gros- 
sissent annuellement  le  patrimoine  des  pauvres  et  servent 
de  fondement  a  l'asile  élevé  par  la  charité  à  la  douleur 
et  à  l'infortune. 

NOMS  DES  LÉPROSERIES  QUI,  EN  1696,  AYANT  VERSÉ  LE  CAPITAL 

DE  LEURS  REVENUS  A  l'hÛPITAL  SAINT-JEAN  , 
ONT  ACQUIS  LE  DROIT   d'y   ENVOYER    LEURS    MALADES   INDIGENTS. 


Perpiîînan 

Villelonguc-de-la-  Sa- 

j    lanqui' 

Toneilles 

Sainle-Marie-la-Mer.. 
Saint  -  l.aureiil-(ie-la' 

Salamiue 

Saint-Hyiipolite 

niaira 

Pia 

Baixasf'l) 

TrouiUas 

Sainl-.Iean-Pla-de-Cors 
Banyuls-dels-Aspres. 

Palau-del-Viilre 

Argelè5-sur-Mer 

Saint-Cyprien 

Millas 

Saint-Ki-liu-d'Avall . . 

|La  Perche 

Arles 

Le  lioulou 

Les  Dains-d' Arles. 
Vinça 

Totaux w. 

(Liasse  E,  n'  2) 


REVENUS 

en 

argent. 


U  fr. 

10  fr. 

ii  fr. 

3f]-. 


55  fr. 
18  fr. 

2fr. 

» 
(Ufr.  15  s.  4d. 
40  fr. 
8fr.  6s.  8d. 

4fr. 
H  fr. 
70  fr. 

33  fr. 


REVENUS 

en  liliî. 

(  Charges 
de  10  dou- 
bles décal.) 


353  Ir.  02s. 


i; 

12 

1 


30  rh. 


REVENUS 

en  hlé. 

(Mesures 

ou  douilles 

diScalitr 


5  ortçe. 

6  tilc^ 


21/2  blé. 


7  blé. 


2l/2lih'. 


Léproseries  qui  n'ont 

pas  été  réunies 
ï  rilopital  Saint-Jean 


23d.d, 


Francs. 


07  f.  10s, 
15  fr. 

W 

•17  fr. 


159  f.  10s, 


Blé 


1  charge 
1  charge 


2  cliarges. 


(I)  l.:i  Lt'prosiM'ii'  lie  nai\;is  fut  foiidi'C  cii  IÔ57,  par  R.  lùiMr.Nr.M',  paretir 
lie  Pi'ri)i|;iiaii,  pour  rcalrctieu  de  huit  pauvres  malades.  (M.  <le  lioiuiefo;, 
M''  bulletin  de  la  Soeiélc  des  l'yrénées-Orieiitalcs.) 


13.1 

ÉTAT  DES  REVENUS  ET  DES  CHARGES  DES  IIOPrTAUX  DE  CHARITÉ 
DE  LA  PROVINCE  DU  ROUSSILLON,  EXISTANT  EN  IGOO. 


NOMS 

(les  fomiminfis 
possiHIant 

DES  lliiPITAUX. 


REVENUS.    '■    DEPENSES. 

I 


IMisi'ricorde 

(Perpignan.) 


Hôpital  Sainl-Jean 
(Perpignan.) 


nie. 


Colilouie 


Millas. 


Tliuir 


Ci'rcl . 


Arles  . 


8..i53fr.l8s.    13.024fr 


12.336  fr. 


3.600  fr. 


318  fi-. 


.130  fr. 


•1511  fr.  450  fl' 


15.016  fr. 


3.464  fr. 


318  fr. 


530  fr. 


2!)2  fr. 


300  fr. 


292  fr. 


300  fr. 


PraliHlc-Mollo...         200  Ir.  iuOfr. 


OBSERVATIONS. 


Le  déficit  annuel  de  4.570  fr.  2  s 

est  couvert  par  les  cliarili'S  et  le  re-' 
traiiobeinent  dos  dépenses  i|ui  ne 
sout  pas  alisolunicnt  nécessaires.      { 

I 
Les  dépenses  de  cet  Hrtpital  excè- 
dent les  revenus  de  2  (!S0  fr.  ;  l'on  y 
{supplée  par  les  charités  et  l'économie 
/des  administrateurs  dans  la  régie  des 
[ revenus.  j 

[  Les  revenus  de  cet  Hôpital  sont 
Idestinés  à  y  traiter  les  malades  de  la 
'ville  et  des  lieux  circonvoisins,  et  ce 
yiui  reste  est  employé  à  former  des. 
iportions  de  pain,  vin  et  viande,  quij 
isont  distribuées  à  des  pauvres  inva- 
1  lides  de  la  ville.  1 


[  Les  Consuls  sont  administrateurs 
\de  ce  revenu,  iiu'ils  distribuent  aux 
^pauvres  malades  de  la  ville,  à  qui  on 
/donne  de  la  viande  pour  le  bouillon. 
I  et  les  médicaments  nécessaires.        1 

l  Cet  IMpital  à  un  bureau  d'admi- 
)nistration  qui  eu  «mploie  les  revenus 
(au  soulagement  des  pauvres  du  lieu, 
Jet  le  receveur,  qui  en  est  chargé, 
'rend  conipleau  bureau  annuellement. 

l  II  y  a  ;'i  Thuir  une  maison  oii  l'on' 
Vrt'i.'oit  les  pauvres  du  lieu,  et  où  l'on' 
Jdoniic  .asile  aux  passants;  les  Consuls' 
'Jlont  fournir,  dans  le  cours  de  l'année, 
/de  la  viande  aux  familles  les  plus 
(  nécessiteuses. 

/  Cet  Hôpital  est  destiné  aux  iiauvres 
\de  la  ville;  il  renferme  un  quartier 
■.pour  b'S  pauvres  et  un  autre  quartier 
/pour  les  p.issants  ;'i  qui  l'on  donue 
iriiospilalité. 

Il.es  Consnis  sont  directeurs  de  cet 
Hôpital,  dont  le  revenu  est  employé^ 
à  la  subsistance  des  pauvres  de  laj 
ville.  j 

i  Ce  revenu  sert  :'i  traiter  les  uiala- 
mcs  du  lieu  cl  n'est  pas  sulllsant  pour 
/secourir  Ions  ceux  qui  se  présentent.] 


' 


NOMS 

(les  communes 

possédant 

DES  IlnrlTAUX. 


Elne. 


Bonleternère . 

Le  Boulon. . . . 


Prades . 


Vinça . 


Marquixanes. 


Codalet. 


REVENIS. 


550  fr. 


29fr.  Ts.  8d. 


37  fr.  10  s. 


745  fr. 


300  fr. 


112  fr. 


58  fr. 


1^4 


DEPENSES. 


700  fr. 


OBSERVATIONS. 


On  supplée  3  ce  f|ui  manque  ;i  la 
,'somnie  de  550  fr.  p:ir  les  charités  et 
/l'économie  des  administrateurs. 


\    Ce  petit  revenu  est  distribué  an- 

29fr.  7s.  8d.  \nnellemcnt  aux  pauvres  du  lieu  par 

(un  administrateur.  I 


37  fr.  10  s 


745  (r. 


300  fr. 


112  fr. 


58  fr. 


.) 


Même  observation. 


Les  revenus  de  cet  Hôpital  sont 
lemployés  à  l'entretien  des  pauvres 
«malades,  et  lorsqu'ils  ne  suflisent 
ipas,  on  fait  des  quêtes  dans  la  ville 
'pour  y  suppléer.  1 


\ 

'  I,a  somme  de  300  fr.  n'étant  pas 
VsnOisante  pour  l'entretien  d'nn  llopi- 
"tal.  on  la  distribue  annuellement  aux 
Jpauvres  les  plus  nécessiteux  quisonl^ 
(en  grand  nombre  à  Vinça. 

Ine  maison  sert  d'Hôpital ,  et  les 
revenus  ne  sont  jamais  suffisants 
pour  l'entretien  des  pauvres. 

.,.„veur.  sous  la  direction  du 
i  des  Consuls,  fournit  la  sub- 

{sistance  et  la  viande  aux  pauvres 

/malades. 


! 

(     L'n  receve 
^Curé  et  des 


(  Liasse  E,  n"  2.) 


NOTES  HISTORIQUES. 

Deux  nol)les  dames,  Marie  d'Ille,  en  1224,  et  A  va  Je 
FenoiuUel,  veuve  du  vicomte  de  Castelnau ,  en  1267, 
entrèrent  dans  l'ordre  des  religieuses  du  Saint-Sépulcre, 
et  se  vouèrent  au  soulagement  des  malades,  après  avoir 
richement  doté  l'Hôpital  d'ille.  On  voit  encore  leurs 
tombeaux  dans  la  chapelle  de  l'IIÔpitai.  {Annuaire  du 
département,  1854.)  . 

Le  plus  ancien  document  oii  il  est  tpiestion  de  1  Hôpi- 
tal d'ille,  est  de  l'année  1218.  La  date  de  sa  fondation 
est  inconnue.  (Archives  de  cet  Hôpital.) 


13.-, 


Aux  calendes  de  décembre  1292,  (hnllaume  de  Pwg 
Dorfila  fait  entre  les  mains  des  prud'liommes  deCollioure 
don  des  locaux,  des  fondations,  au  profit  des  pauvres  de 
l'Hôpital  de  cette  ville,  qui  est  sous  la  direction  d'un 
commandeur  assisté  d'un  chapelain.  (Cartulairc  de  Col- 
lioure;  Saint-Malo,  Publicateur,  0^  année,  n"  4.) 

Le  6  des  calendes  d'avril  1293,  Jacques  1er,  roi  de 
Majorque,  approuve  les  libéralités  de  Ptiir/  Dorfila  en 
faveur  de  l'Hôpital  de  Collioure.  (Idem;  idmi.) 

L'Hôpital  de  Vinça  est  fondé  en  1550,  par /m?i  Quinla, 
prêtre,  qui  lui  consacre  sa  maison  et  le  dote  de  tout  ce 
qu'il  possède. 

Les  frères  et  sœurs,  sous  la  direction  d'un  comman- 
deur, qui  desservaient  l'Hôpital  Saint-Jean,  portaient 
cousue  sur  leur  tunique,  une  croix  octogone  dans  le 
genre  de  celle  de  Saint-Jean-de-Jérusalcm ,  mais  rouge 
et  bleue  et  pied  fiché.  Jusqu'au  24  avril  1424,  des  reli- 
gieuses furent  employées  au  service  des  femmes  malades. 
Après  cette  époque,  les  consuls,  à  la  suite  d'événements 
dont  il  est  inutile  de  parler,  les  remplacèrent  par  des 
servantes,  sous  la  direction  d'une  gouvernante,  et  une 
nouvelle  organisation  eut  lieu.  Ces  servantes,  chargées 
de  soigner  les  malades  femmes  et  les  enfants-trouvés 
des  deux  sexes,  exercèrent  lein-s  fonctions  jusqu'en  1770, 
où  six  soMMs  de  la  congrégation  du  Saint-Sacrement  pri- 
rent leur  i)lace.  (Archives  de  l'Hôpiial  Saint-Jean. "i 

Anciennement,  notre  ville  avait,  indépendamment  de 
divers  petits  Hôpitaux  entretenus  aux  frais  des  corps  de 
métiers,  V Aumône  commune,  qui  a  été  remplacée,  (le  nos 
jours,  par  le  Bamm  de  Bienfaisance;  l'Hôpital  des  tisse- 
rands, fondé  en  lit]!),  le  plus  important  de  tous,  était 
situé  à  la  paroisse  Saiut-Jacques,  rue  d'en  Calcc'^'';  l'Hôpi- 

(I)    «  L;i  r<)i|)i)r;ili..ii   des  lissiTaiids  cLiit  |>iiissaiitc  ii    IVT|)i|jiian.     t;ile 
rifcvait  des  l.'|;s  ;  s' imposa  il  ;  payait  rliiTrim-iit  .■^.•s  pi  ivilr|.fs  au  liso  ;  delc- 


136 

tal  Saint-Guillaume  et  Sainte-Madeleine,  fondé  par  une 
corporation  religieuse ,  existait  dans  le  local  même  où 
l'on  a  placé  le  Dépôt  de  Charité. 

Les  Hôpitaux  civils  existant  dans  notre  département, 
en  1865,  sont  au  nombre  de  onze,  savoir  :  ii  Perpignan, 
Klne,  Millas,  Céret,  Collioure,  Arles,  Prats-de-Mollô, 
Saint-Laurent-de-Cerdans,  Prades,  Ille  et  Vinça. 

Celui  de  Collioure  ne  reçoit  point  de  malades;  on  se 
borne  a  donner  des  secours  à  domicile  ;  il  a  le  caractère 
d'un  Bureau  de  lii  en  [aisance. 

L'Hôpital  de  Saint-Laurent-de-Cerdans  (jui  n'existait 
plus,  a  été  créé  de  nouveau,  en  I800,  grâce  a  l'héritage 
légué  par  les  demoiselles  Cramadells ,  pour  la  fondation 
de  cette  bonne  œuvre. 

M.  Bernola,  de  Sainte-Léocadie,  a  légué,  en  1842,  a 
l'Hôpital  de  Prades,  une  propriété  estimée  40.000  fr. 

Un  Hôpital  existait  très-anciennement  près  du  Pont  de 
pierre  de  Perpignan,  sur  la  Tel.  Pierre  H,  roi  d'Aiagon, 
en  M97,  accorda  certains  avantages  aux  hospitaliers 
chargés  de  l'entretien  dudil  pont.  Il  existait  encore  en 

1500. 

Villa  Godorum  ou  Mailloles,  a  la  banlieue  de  Perpi- 
gnan,  possédait  aussi  un  Hôpital,  puisque  le  ''28  avril 
1565,  l'oflicial  de  l'évêque  d'Llnc  >  faisait  une  visite  par 
ordre  du  prélat. 


W'iO,  —  Etienne  de  Correyo  donne  à  l'Hôpital  une 
maison  située  dans  Per|)ignan.  —  Guillaume  Palagri , 
notaire.  (Liasse  51,  n"  11.) 

1205.— Bernard  Calva  donne  à  l'Hôpital  une  pièce  de 

[[liait  aiipii'S  (lu  roi  ses  fniidés  de  pouvoirs  ;  s'asscnil)l:iil  iMi  son  liolcl  ,  dit 
du  conseil  ,  au  chanii)  de  rames  ,  où  elle  possédait  une  lialle  aux  draps,  ou 
niai;as)u,  appelée  Lusa  de  la  (iimda.  »  (M.  de  Saiul-iMali),  licclierdns  sur  le 
cuinmeirc  lli)u>silliinnais.  ) 


137 

terre  située  au  territoire  de  Sainle-Marie-de- (y'/^re/a. 
(  Liasse  ôi,  n»  28.  ) 

1210. — Pierre  H,  roi  d'Aragon,  donne  à  l'Hôpital 
deux  métairies,  l'une  près  de  celle  d'Alherl  Gasc,  aujour- 
d'hui lo  Mas  dels  pobrcs:  l'autre  près  des  murailles  de 
Perpignan.  Il  conlirme  de  nouveau  toutes  les  grâces  et 
privilèges  accordés  par  les  comtes  du  Koussillon;  met  de 
nouveau  rH()|)ital  sous  sa  protection  royale,  et  déclare 
avoir  reçu  des  frères  hospitaliers,  gratuitement,  10.000 
livres  harcelonnaises  pour  le  soutien  de  son  armée  contre 
les  vSarrasins.  — Charte  donnée  a  Salses.  (Liasse  2, 
no  18.) 

1216.  —  Pierre  Torderas  de  Vilanova  donne  tous  ses 
biens  à  l'Hôpital. — Acte  reçu  par  André  Livita,  notaire. 
(  Liasse  o  i,  n"  2^.) 

1222.  —  Piaymond  et  Guillaume  Albert  cèdent  à  l'Hôpi- 
tal tous  les  droits  et  actions  qu'ils  ont  sur  deux  métairies 
situées  au  territoire  de  Cornella-del-Vercol.  —  Acte  reçu 
par  Pierre  de  Bajoles,  notaire.  (Liasse  54,  n"  2i.) 

1255.- — Pierre  Pages  se  lait  religieux  hospitalier,  et 
donne  tous  les  biens  (pi'il  posède  îi  Cornelia-del-Vercol, 
à  l'Hôpital. — Acte  reçu  par  Pierre  del  Riu ,  notaire. 
(Liasse  54,  n»  27.) 

12i7. —  Bulle  du  pape  Innocent  IV,  qui  met  l'Hôpital 
sous  la  protection  du  Saint-Siège,  et  rexcnq)te  de  la  dime 
du  carnclagc  relativement  a  ses  trou()eaux.  —  Donné  à 
Lyon,  aux  calendes  du  mois  de  mars,  de  son  pontificat 
le  quatrième.  (Liasse  I,  u°  54.) 

l2o5.  —  Pierre  Albert  donne  à  l'Hôpital  une  maison 
(pi'il  possède  à  (lornclla-del-Vercol.  —  Acte  reçu  par 
(iuillaume  Pons,  notaire,  i  Liasse  5i,  n"  5i.) 

1200.  —  Bernard  Bosch  lait  don  à  l'Hôpital  d'une 
niélairie  située  au  territoire  de  Cornella-del-Yercol.  — 
Acte  reçu  [lar  Arnaud  Miro,  notaire.  (Liasse  54,  n»  50.) 

I2!>S.        Itcriiaid  AiIkisc;!.  i\v  Sitiiil-Martin-de-Soreda, 


13R 

donne  tous  ses  biens  à  l'Hôpital. — Acte  reçu  par  Pierre 
de  Vernet,  notaire.  (  Liasse  54,  n»  4.  ) 

1312.  —  Matthieu  Massine,  de  Montesquieu,  donne 
tous  ses  biens  a  l'Hôpital.  —  Acte  reçu  par  Guillaume 
Raduif,  notaire.  (Liasse  54,  n"  56.) 

1565.  —  Pierre  Fabre  ,  marchand  pareur,  institue 
l'Hôpital  son  héritier  universel.  —  Testament  reçu  par 
Guillaume  Manci,  notaire.  (Liasse  53,  n"  12.) 

158o.  —  Marie Vilanova,  épouse  de  Guillaume  Vilanova, 
habitant  à  Orle,  donne  tous  ses  biens  à  l'Hôpital.  — 
Acte  reçu  par  Pierre  Armany,  notaire.  (  Liasse  54,  n» 55.) 

i59o. —  Honoré  Jaubert,  banquier  à  Perpignan,  subs- 
titue l'Hôpital  et  la  Pieuse  Aumône  à  ses  enfants,  s'ils 
meurent  sans  postérité.  —  Testament  reçu  par  Pierre 
Descamps,  notaire.  (Liasse  5o,  no  72.  ) 

1455.  —  Jean  Vola,  bourgeois  de  Perpignan,  lègue 
l'usnlruit  de  ses  biens  à  son  épouse,  et  institue  ses  héri- 
tiers, par  égales  portions,  l'Hôpital,  la  Pieuse  Aumône  et 
la  Marguillerie  de  Saint-Jean.  —  Testament  reçu  par 
Antoine  Paracols,  notaire.  (Liasse  55,  n°  65.  Livre  des 
Bienf.,  fol.  10.) 

1444.  — Agnès  Cauzit,  épouse  de  Guillaume  Cauzil, 
pelletier  de  Perpignan,  institue  l'Hôpital  et  la  Marguille- 
rie de  NoIre-Dame-du-Pont,  ses  héritiers  par  indivis.  — 
Testament  reçu  par  Jean  Vilarnau,  notaire.  (Liasse  55, 
no  67.  Livre  des  Bienf.,  fol.  H.) 

1462. — Guillaume  Fabre,  pareur  de  Perpignan,  lègue 
à  rHô|)ital  un  jardin  au  territoire  de  Saint-Jean  ,  con- 
frontant avec  la  Basse.  — Testament  reçu  Bernard  Catorra, 
notaire.  (Liasse  55,  no  11.  iJvre  des  Bienf.,  fol.  12.) 

1472. —  Jean  Caliose  lègue  200  fr.  à  l'Hôpital,  qui 
doivent  être  employés  à  fairii  venir  l'eau  a  la  fontaine  de 
l'établissement. — Testament  reçu  par  Jean  Bolil,  notaire. 
(Liasse  55,  no  59.  Livre  de    Bienf.,  fol.  12.) 

1500.  —  Guillaume  Thio ,  lègue  îi  l'Hôpital  une  rente 


139 


annuelle  de  56  fr.  qui  devra  être  emiiloyée  à  l'achat  de 
la  collation  de  Noël,  à  servir,  tous  les  ans,  aux  malades 
de  rilôpilal.   (Livre  de  la  Font,  fol.  273  et  des  Bienf., 

fol.  15.) 

j 507.  — Pancrace  Salvatat,  bourgeois,  lègue  a  l'Hô- 
pital les  terres  (lu'il  possède  au  territoire  de  Mossellos, 
Vilaraza  et  Cornella-del-Vercol.  — Testament  reçu  par 
François  Masdemont,  notaire.  (Liasse  55,  n»  8.  Livre 
des  Bienf.,  fol.  15.) 

1511.  — Le  révérend  Bernard  Boixa,  prêtre  bénéficier 
de  Saint-Jean,  fait  don  de  tous  ses  biens  a  rilôjjilal. 
—  Acte  reçu  par  Pierre  Vilarnau,  notaire.  (Liasse  54  n" 
5.  Livre  des  Bienf.,  fol.  15,) 

1514.- Hugues  Tardieu,  mercader,  lègue  à  l'Hôpital 
un  clan  au  Marché-neuf  de  Perpignan,  et  200  fr.  pour 
être  placés  en  rente  constituée,  qui  serviront  pour  l'en- 
tretien du  linge  de  l'établissement.— Testament  reçu  par 
Jean  Mas,  notaire.  (Livre  de  la  Font,  fol.  211   et  des 

Bienf.,  fol.  L4.) 

1515.- Lettres  patentes  du  l^'-  juillet  i)orlant  qu'au 
cas  de  remboursement  des  rentes  constituées  appartenant 
à  l'Hôpital  et  à  raumo»e  rommune,  placées  sur  particuliers, 
les  Seigneurs  Consuls  en  retireraient  le  capital  au  prolit 
de  la  communauté,  ceux-ci  devraient  répondre  de  l'inté- 
rêt, afin  que,  par  ce  moyen,  les  rentes  de  ces  deux 
Etablissements  subsistassent  a  toujours.  (Carton  0.  2.) 

1 550.  — Antoine  Péris,  notaire  à  Perpignan,  institue 
l'Hôpital  son  héritier  universel.  — Testament  reçu  par 
Pierre  Fabre,  notaire.  (Liasse  55  n^  52.  Livre  des  Bienf., 
fol.  17.) 

1558.- (iuillaume  l/nii,  prêtre  bénélicior  de  Sainl- 
Jcan,  lègue  à  l'llô|)iial  une  rente  annuelle  d'un  dourg 
d'huile  d'olives  (20  litres,  mesure  nouvelle).— Testament 
reçu  par  Vincent  Cahell ,  notaire.  (Livre  des  Bienf., 
fol.   17.) 


140 

1340. — Gaspard  Rovira,  notaire,  institue  l'Hôpital  son 
héritier  universel. — Testament  reçu  par  Pierre  Fabre, 
notaire.  (Livre  major,  fol.  290  et  des  liienf.,  fol.  17.) 

1o4o.  —  Jean  Ferrando,  crieur  public,  natif  de  Castille, 
lègue  à  l'Hôpital  trois  maisons  qu'il  possède  rue  de  la 
Loge,  à  Perpignan. — Testament  reçu  par  Antoine  Fita  , 
notaire.  {Livre  de  la  Font,  fol.  212  et  des  Jiienf.,  fol.  18.) 

1546.  — Honoré  Marti,  mercader,  substitue  l'Hôpital 
à  un  enfant  illégitime  qu'il  avait  institué  son  héritier, 
pour  la  moitié  de  ses  biens. — Testament  reçu  par  Michel 
Joli,  notaire.  (Livre  des  Bienf.,  fol.  18.) 

1551.  —  Demoiselle  Anne  Medine  donne  à  l'Hôpital 
tous  ses  biens,  meubles  et  immeubles.  —  Acte  reçu  par 
Pierre  Fabre,  notaire.  (Livre  major,  fol.  210  et  des 
Bienf.,  fol.  19.) 

1351. — François  Pimente  de  Palencia,  lègue  à  l'Hôpital 
180  ducats  d'or. — Testament  reçu  par  Estève,  notaire. 
{Livre  major,  fol.  501  et  des  Bienf.,  fol.  19.) 

1591.  —  François  Alzine,  lègue  200  fr.  à  l'Hôpital, 
qui  devront  servir  à  acheter  des  matelas,  couvertures  et 
linge.  —  Testament  reçu  par  Joli,  notaire.  (Livre  des 
Bienf.,  fol.  23.) 

1395.  —  Don  Galcerande  Vilanova,  Chevalier,  lègue  à 
l'Hôpital  1 .000  fr.  pour  être  placés  h  rente  constituée  et 
dont  l'intérêt  devra  servir  à  acheter  du  linge  a  l'usage  des 
malades. — Testament  reçu  par  Joli,  notaire.  (Idem,  fol.  23.) 

1598. — Barthélémy  Marça,  maître  tanneur,  lègue  tous 
ses  biens  à  l'Hôpital.  Cette  succession  était  assez  impor- 
tante, puisque  les  propriétés  léguées,  sises  aux  territoires  de 
Torreilles,  Sainl-Genis  et  Bompas,  rapportaient  800  fr.  de 
revenu.  — Testament  reçu  par  Honufre  Sabater,  notaire. 
{Livre  de  la  Font ,  fol.  572 et  16  et  Livre  des  Bienf.,  fol.  26.) 

1599. — Madone  Marja  de  Bernardin  Cantayre,  donne 
tous  ses  biens  à  l'Hôpital.— Acte  reçu  par  Honufre  Saba- 
ter, notaire.  (Livre  des  Bienf.,  fol.  27.) 


141 

1601. — Ange  Cardone,  lègue  à  l'Hôpital,  première- 
ment 100  l'v.  en  compensation  de  ce  qu'il  aurait  pu 
oublier  lorsqu'il  avait  l'administration  de  ses  biens; 
secondement,  doux  renies  constituées,  l'une  de  25  fr.  et 
l'autre  de  15  IV.,  h  la  charge  par  l'Hôpital  d'employer 
ces  pensions  a  l'entretien  d'un  lit.  — Acte, reçu  par  Guil- 
laume Doménech,  notaire.  (Livre  major,  fol.  460  et  des 
Bienf.,  fol.  27.  ) 

1605. — ^Baudire  Corratger,  mercader,  institue  l'Hô- 
pital son  héritier  universel.  Les  biens  que  l'établissement 
possède  a  Tliéza  proviennent  de  celte  succession. — Tes- 
tament reçu  par  Jean  Roig,  notaire.  (Livre  major,  fol. 
140  et  des  Bienf.,  fol.  28.) 

1616. — Jean  Grimau,  prêtre,  lègue  à  l'Hôpital  une 
rente  annuelle  de  84  fr.  destinée  a  l'entretien  du  linge 
qu'il  a  donné  a  cette  maison. — Testament  reçu  par  Pierre 
Carbonell,  notaire.  (Livre  des  Bienf.,  fol.  29.) 

1623. —Elisabeth  Malpas,  de  Claira  ,  orpheline  auto- 
risée par  Catherine  Malpas,  veuve  en  secondes  noces, 
se  donne,  elle  et  tous  ses  biens  à  l'Hôpital.  —  Acte  reçu 
par  Honufre  Sabater,  notaire.  {Idem,  n»  50.) 

1628.  —  Magnifique  Jérôme  Soler,  lègue  a  ITIôpilal 
dix  charges  de  blé  ou  vingt  hectolitres  mesure  nouvelle. 
—  Testament  reçu  par  Damien  Vinyes,  notaire.  (Idem, 
fol.  50.) 

Le  même  défend  expressément  h  ses  héritiers  de  ne 
jamais  rien  aliéner  volontairement,  et  dans  le  cas  con- 
traire, il  autorise  l'Hôpital  à  revendiquer  a  son  profil  les 
propriétés  aliénées. — (Même  Testament.) 

1657. — Le  révérend  Bernard  Ribes,  prêtre,  résidant 
à  Céret,  institue  rilôi)ital  son  héritier  universel.  Celte 
succession  était  assez  importante. — Testament  reçu  par 
Jérôme  Vinyes,  notaire.  (Liasses  53  et  43,  Livre  des 
Bienf.,  fol.  51.) 

1646. — Dame  Anne  Fabre,    substitue  à  ses  enfants 


les  Pères  de  la  compagnie  de  Jésus,  et  ordonne  à  son 
héritier  de  compter  400  fr.  à  l'Hôpital  pour  être  placés 
à  rente  constituée  et  l'intérêt  de  cette  somme  devra 
servir  à  l'entretien  du  linge  et  des  pauvres  de  cet  éta- 
blissement. (Livre  des  Bienf.,  fol.  od.  ) 

1652. — Dame  Guimar  Llot,  lègue  à  la  Miséricorde , 
diverses  terres  à  Kigarda. — Testament  reçu  par  Arles  et 
Carrère,  notaire,  le  27  juin.  (Idem,  fol.  1.) 

16o4.  —  François  Biossa,  d'Arles,  fait  donation  de 
tous  ses  biens  à  l'Hôpital,  sous  la  condition  qu'on  l'en- 
tretiendra sa  vie  durant,  en  santé  comme  en  maladie, 
dans  la  maison  hospitalière. — Acte  reçu  par  Thomas 
Ferriol,  notaire.  (Idem,  fol.  54.) 

1662.  —  Don  Augustin  Masco,  lègue  a  la  Miséricorde 
un  héritage  à  Bompas  et  à  Saint-Génis-des-Tanières. 
—  Testament  reçu  par  Debadie,  notaire,  le  16  août. 
(Idem,  fol.  1.) 

1671.  —  Don  François  de  Caramany,  lègue  200  fr.  à 
l'Hôpital  et  enjoint  à  son  héritier  de  fonder  et  d'établir 
un  lit  dans  cette  maison,  avec  paillasse,  matelas,  draps, 
couvertures,  chemise  et  bonnet  de  nuit,  pour  un  malade. 
Il  prie  le  Préfet  du  collège  de  Perpignan,  de  veiller  à 
l'exécution  de  celte  fondation,  et  à  faire  changer  les 
draps,  chemise  et  bonnet  de  nuit  chaque  quinze  jours 
en  hiver  et  chaque  huit  jours  en  été. — Testament  reçu  par 
Rovira,  notaire.  (Idem,  fol.  o5.  ) 

En  1717,  M.  de  Boisambert,  héritier  de  M.  De  Cara- 
many, Gt  faire  un  lit  complet  conformément  à  la  fonda- 
tion. (!'='■  Registre  des  délibérations,  fol.  58.) 

En  1720,  le  même  pria  le  bureau  de  vouloir  bien 
estimer  ce  que  pourrait  valoir  l'entretien  de  ce  lit.  Les 
Commissaires  du  bureau  l'ayant  estimé  20  fr.  tous  les 
ans,  M.  de  Boisambert  compta  premièrement  la  somme 
de  272  fr.  pour  les  arrérages,  et  celle  de  400  fr.  pour 
l'acquit  du  capital,  moyennant  quoi  il  fut  libéré  de  son 


143 

obligation,  (l^r  Registre   de<  délibérations,  loi.   118  cl 
120.  Livre  des  Bieiif.,  fol.  oo.) 

1674.  —  Ignace  de  Toros,  Américain,  malade  à  l'Hô- 
pital, lui  lègue  tous  les  biens  qu'il  possède  dans  son 
pays.  —  Acte  reçu  par  Mie  el  Rovira,  notaire.  (Lias.se 
3o,  no  oo.  Livre  des  Bienf  ,  fol.  oG.) 

1G8G.  -Dona  Madeleine  de  Çagarriga  et  Esprer,  lègue 
à  l'Hôpital  une  pension  de  15  fr.  qui  doit  servir  pour  le 
régal  des  malades. — Testament  reçu  par  Joseph  Ferriol, 
notaire.  (Livre  des  Bienf.,  fol.  37.) 

1G9I.  —  Jacques  I.leuriale,  lègue  à  la  Miséricorde  deux 
champs  et  un  pré  à  Pézilla-de-la-Hivière. — Testament  reçu 
par  Marti,  notaire,  le  25  juillet.  (Idem,  fol  2.) 

1692. — Madame  la  Baronne  de  Monclar,  lègue  800  fr. 
à  la  Miséricorde.  (Idem,  fol.  2.) 

169G.  —  Monseigneur  Jean  Hervieu  Basan  de  Flamen- 
ville,  évêque  d'Elne,  fait  plusieurs  dons  à  l'Hôpital  et 
s'oblige  à  payer  fîO  fr.  tous  les  ans  pour  la  célébration 
d'une  messe  à  la  chapelle  de  celte  Maison.  (Idem, 
fol.  58.) 

1701.  ^Madame  Catherine  de  Trobat ,  épouse  de 
M.  Raymond  de  Trobat,  premier  président  et  intendant 
du  Roussillon,  lègue  à  la  Miséricorde  la  somme  de  500  fr. 
(Idem,  fol.  5.) 

1715. — Madame  de  Breuil,  lègue  400  fr.  à  la  Miséri- 
corde. (Idem,  fol.  5.  ) 

1719.  —  M.  Jean  Privât,  directeur  et  trésorier,  lègue 
à  la  Miséricorde  la  somme  de  1.000  fr.  (Idem,  fol.  5.) 

1720.  —  M.  François  Després,  chanoine  de  la  Cathé- 
drale ,  vicaire-général ,  verse  par  anticipation  à  la  caisse 
de  rilôpital  un  legs  de  2.200  fr.  (Livre  des  Bienf., 
fol.  42.) 

1720.  — M.  de  Momfort,  du  Vivier,  lègue  à  l'Hôpital 
1.000  fr.  qui  ont  été  versés  à  la  caisse,  par  M.  de 
Lan  sac.  (Idem,  fol.  12.) 


144 

1721.  —  Madame  Louise  D'ardena,  lègue  1.080  Ir.  à 
l'Hôpital.  (Livre  des  Ilienf.,  fol.  42.) 

1721. — M.  Michel  de  Vilar,  président  et  intendant  du 
bureau,  fait  à  la  Miséricorde  l'aumône  de  300  fr.  (Idem, 
fol.  5.) 

1725. — M.  Legras,  intendant  de  la  province,  accorde 
sa  protection  spéciale  a  l'Hôpital.  Entr'autres  bienliiits, 
il  ordonne  au  bureau  de  Notre-Dame  de  Miséricorde  de 
payer  a  l'Hôpital  la  somme  de  5  sols  au  25^  pour  chaque 
journée  de  malade  indistinctement  qu'on  y  envoie.  Ce 
secours  se  portait  à  1 .200  fr.  environ.  (Livre  des  déli- 
bérations, fol.  177  et  178  et  des  Bienf.,  fol.  -45.) 

1727.  —  M.  de  Boisambert,  fait  à  la  Miséricorde  l'au- 
mône de  175  fr.  (Livide  des  Bienf.,  fol.  4.) 

1728. — M.  Claude  Duclos  de  Momignière,  employé 
aux  vivres  de  l'armée ,  institue  l'Hôpital  son  héritier 
universel.  —  Testament  reçu  par  Coll,  notaire.  (Idem, 
fol.  45.) 

1755. — M.  Pierre  Calmon,  prêtre  bénéficier  de  Saint- 
Jean,  aumônier  de  la  Miséricorde,  l'institue  son  héritier. 
■ — Testament  reçu  par  Jaume,  notaire,  le  10  juin.  (Idem, 
fol.  4.) 

1759.  —  M.  Jacques  Sarlabous  ,  prêtre,  procureur 
syndic  de  l'Hôpital,  institue  celte  maison  son  héritier 
universel.  —  Testament  reçu  par  Joseph  Costa,  notaire. 

Le  même  avait  déjà  fait  donation  à  l'Hôpital  de  plu- 
sieurs capitaux  de  rentes  constituées  s'élevant  à  un  total 
de  4.000  fr.  —  Acte  reçu  par  Albafouille,  notaire,  le  27 
juin  1750.  (Idem,  fol.  45.) 

1740. — La  compagnie  des  gardes  de  M.  le  Maréchal 
de  Noailles  fait  souvent  des  aumônes  considérables  à 
l'Hôpital,  par  mains  du  notaire  greffier  de  la  capitainerie. 
(Idem,  fol.  46.) 

1745.  —  M.  Jacques  de  Lacombe,  lieutenant  do  roi  à 
Perpignan,  lègue  400  Ir.  à  la  Miséricorde.  (Idem,  fol.  4.) 


145 

1749.  —  M.  François  Garrigue,  notaire  à  Perpignan, 
institue  l'Hôpital  son  liéritier  universel. — Testament  reçu 
par  lionnel,  notaire.  (Livre  des  Bienf.,  Col.  48.) 

1750. — M.  Després,  procureur-général,  lègue  à 
l'Hôpital    la   somme    de  2.750   Ir.    (Idem,  loi.  50.) 

1750.  —  M.  Marron,  prêtre,  docteur  on  théologie, 
curé  de  Néfiach.  lait  don  de  la  somme  de  1.000  fr.  Le 
même  fait  un  legs  en  laveur  aussi  de  l'Hôpital  de  2.000  fr. 
(Idem,  loi.  51 .) 

1752.  —  M.  Pierre  Roudel,  marchand  à  Thuir,  lègue 
500  fr.  a  la  Miséricorde.— Testament  reçu  par  M"  Gralfan, 
notaire,  le  15  janvier.  (Idem,  fol.  A.) 

1754. —  M.  Claude  Duclos  de  Monsignière,  lègue 
1.100  fr.  a  la  Miséricorde.  (Idem,  fol.  i.) 

175i. — M.  Antoine  Marron,  curé  de  Néfiach ,  fait  à 
la  Miséricorde  l'aumône  de  2.2i0  fr.    (Idem,  fol.  i.) 

1759.  —  M.  Dominique  Marti ,  curé  à  Caldéguas  en 
Cerdagne,  lègue  à  la  Miséricorde  la  somme  de  800  fr. 
(Idem,  fol.  5.) 

1759.  —  M.  le  Comte  de  Montégut,  fait  don  a  l'Hô- 
pital de  2.000  fr.  (Idem,  fol.  51.) 

1760. — M.  de  Champselles ,  major  du  régiment  de 
Noailles,  lègue    \  MO  fr.  à  l'Hôpital.  (Idem,  fol.  52.) 

1700.  —  M.  .Jean-Baptiste  Lantourne,  chanoine  d'Elue, 
lègue  à  la  Misécorde  la  somme  de  500  fr.  (Idem-,  fol.  5.) 

1761.  —  M.  de  Redon,  commandant  de  la  citadelle  de 
Perpignan ,  fait  un  don  de  400  fr.  à  l'Hôpital ,  auquel  il 
lègue'ô.OOO  fr.  (Idem,  fol.  52.) 

1762.  —  Don  François  de  Caliors,  grand  prieur  de 
Catalogne,  fait  l'aumône  de  150  fr  à  la  Miséricorde. 
(Idem,  fol.  5.) 

1762.  —  M.  Joseph  Serra,  chanoine,  grand-archidiacre, 
lègue  à  rilôpilal  la  somme  de  5.000  fr.  (Idem,  fol.  52.) 

I7()ô.  —  Mademoiselle  Rose  Do  et  Palegri,  lègue 
1.000  fr.  à  la  .Miséricorde.  (Idem,  fol.  5.) 

10 


146 

1765.  —Mademoiselle  Brouset,  fait  l'aumône  de  200 fr. 
à  la  Miséricorde.  (Livre  des  liicnf.,  fol.  5.) 

17(55. _]\I.  de  Redon,  commandant  de  la  citadelle  de 
Perpignan,  donne  des  sommes  considérables,  pendant  sa 
vie,  a  la  Miséricorde,  et  par  Testament  du  29  septembre 
reçu  par  Diego,  notaire,  il  lègue  a  cette  maison  la  somme 
de  3.000  fr.  (hkm,  fol.  6.) 

17(3r,._M.  de  Buonin-Segui,  major  du  régiment  royal 
italien  ,  lègue  a  la  Miséricorde  la  somme  de  400  fr. 
(Jdcm,  fol.  6.) 

1767.  —M.  Bernard  Sabaly,  chanoine  de  la  cathédrale, 
donne  à  l'Hôpital  la  somme  de  4.500  fr.  (Idem,  fol.  55.) 

J7G8. —  Madame  la  Comtesse  d'Albarel  fait  l'aumône 
de  100  fr.  à  la  Miséricorde.  (Idem,  n^  6.) 

1768,  —  M.  François  Brouset,  mercader,  et  directeur 
du  bureau,  lègue  600 fr.  à  la  Miséricorde.  (Idem,  fol.  6.) 

1770.— M.  Pierre  Matthieu,  marchand,  et  directeur 
du  bureau,  lègue  600  fr.  à  la  Miséricorde.  (Idem,  fol.  7.) 

1772. — Doua  Jeanne  de  Marguarit,  marquise  d'Aguilar, 
lègue  1 .000  fr.  à  la  Miséricorde.  {Idem,  fol.  7.) 

1772._M.  Daniac,  curé  à  Sainl-Estève,  lègue  600  fr. 
a  la  Miséricorde.  {Idem,  fol.  7.) 

1775.— M.  Matthieu  Garrigua,  prêtre,  prieur  d'Espira 
en  Gonflent ,  lègue  à  l'Hôpital  la  somme  de  1 .000  fr. 
{Idem,  fol.  56.) 

1774.— M.  le  marquis  d'Aguilar,  fait  l'aumône  de 
560  fr.  a  la  Miséricorde.  [Idem,  fol.  8.) 

1775.— M.  le  comte  de  Ros,  donne  en  différentes 
fois  68ifr.,  et  paye,  par  anticipation,  un  legs  de  5.000  fr. 
Le  même  a  fait,  dans  le  temps,  uu  grand  nombre  de 
dons,  soit  pour  la  décoration  de  la  chapelle,  soit  pour  le 
soulagement  des  pauvres  de  l'Hôpital.  [Idem,  fol.  55.) 

1775.  _l)on  Jean  de  Guanter,  fait  don  à  l'Hôpital  de 
la  somme  de  500  fr.  {Idem,  fol.  56.) 

1777.  —  Don   Dominique   de   Marguarit,    comte    de 


147 

Momégul,  (loiiiie  durant  sa  vie  des  sommes  considérables 
à  la  Miséricorde.  {Livre  des  liicnf.,  Col.  8.) 

-1780.  —  M.  Jean  Donal ,  mercader  el  directeur  du 
bureau,  cède  à  la  Miséricorde  son  intérêt  sur  la  ferme 
du  droit  roycd.  Cet  intérêt  a  produit  2.004  fr.  {Idem, 
fol.  9.  ) 

1780. — Don  Louis  de  Boisainbert ,  fait  des  dons 
considérables,  pendant  sa  vie,  a  la  Miséricorde,  et  lègue 
000  fr.  à  celte  maison.  {Idem,  fol.  9.) 

1780. — Emmanuel  Ribes,  mercader,  lègue  1.000  fr. 
à  la  Miséricorde.  [Idem,  fol.  9.) 

1781.  — M.  Jean  Mouran  et  Mademoiselle  Catherine 
Mouran,  sa  lille,  font  a  l'Hôpital,  l'aumône  de  600  fr. 
{Idem,  fol.  59.) 

1782.  —  M.  Thomas  Diego,  notaire,  fait  en  deux  fois 
l'aumône  de  400  fr.  à  l'Hôpilal.  [Idem,  fol.  00.) 

1782.  —  M.  Jean  Serra,  chanoine  de  la  cathédrale,  et 
archidiacre  du  Vallespir,  lègue  2.000  fr.  à  THôpital. — 
Testament  rc(,'u  par  Serra,  notaire.  {Idem,  fol.  01.) 

d782. — M.  Michel  Scrradell,  directeur  du  bureau, 
lègue  1.200  fr.  à  la  Miséricorde.  {Idem,  fol.  10.) 

1782.  —  Madame  Elisabeth  Llombart-Augé,  institue 
ses  héritiers  l'Hôpital  Saint-Jean  et  la  Miséricorde. — 
Testament  reçu  par  Mundi ,  notaire ,  le  24  novembre. 
{Idem,  fol.  10.) 

1785.  —  M.  Michel  Navarre,  curé  des  Masos  ,  en 
Conlïenl,  lègue  600  fr.  a  la  Miséricorde.  {Idem, 
fol.  10.  ) 

1783.  —  M.  Pierre-Jean  de  Melit,  major  de  la  place  à 
Villerranche ,  lègue  800  fr.  à  la  Miséricorde.  {Idem, 
fol.  10.) 

178i. — Madame  Raphaële  Ferrussola-Barréra,  institue 
la  Miséricorde  son  héritier. — Testament  reçu  par  Jaunie, 
notaire,  le  11  février.  {Uej/istre  des  délibérations  de  1785 
et  178i  et  Livre  des  liieiif.,  fol.  10.) 


148 

1781. —  M.  Hyaciiillie  Girbau,  chanoine  d'Elne,  lègue 
300  tV.  à  la  Miséricorde.  (Liire  des  Jiicnf.,  fol.  10.) 

1785. — M.  de  (lagarriguu  Ksprer,  fait  l'auniône  de 
500  fr.  h  la  Miséricorde.  (Idan,  fol.  10.) 

1785.- — M.  Raymond  de  Sainl-Sauveur ,  intendant  de 
la  province,  fait  divers  dons  en  plusieurs  occasions  à  la 
Miséricorde.  {Idem,  fol.  11.) 

1786. — Don  François-Xavier  de  Tort  de  Calio,  direc- 
teur du  bureau,  lègue  oOO  fr.  à  la  Miséricorde. — Tes- 
tament reçu  par  Serra,  notaire.  (Idem,  fol.  14.) 

1786.  —  Madame  Balanda-Pélissier  fait  à  l'Hôpital 
l'aumône  de  500  fr.  pour  le  repos  de  l'âme  de  feu 
M.  Pélissier,  son  père.  {Idem,  fol.  65.) 

1786.  —  M.  Jean-Baptiste-Gaudérique-Josepli  Després, 
ancien  capitaine  au  régiment  de  Vermandois,  lègue  500  fr. 
à  l'Hôpital.  {Idem,  fol.  65.) 

1787.  —  Doua  Monique -Marie- Angélique -Madeleine 
Forcade,  marquise  de  Montferrer,  veuve  de  Don  François 
de  Banvuls,  marquis  de  Montferrer,  lègue  200  fr.  h 
l'Hôpitaf.  {Idem,  fol.  65.) 

1788. — M.  Antoine  Celles,  chanoine  d'Elne,  lègue  à 
la  Miséricorde  la  somme  de  600  fr.  —  Testament  reçu 
par  Me  Mundi,  notaire.  {Idem,  fol.  15.) 

1788.  —  M.  de  Lucia,  avocat-général  au  conseil 
souverain  du  Boussillon ,  lègue  à  la  Miséricorde  la 
somme  de  500  fr. — Codicile  retenu  par  M^  Jaunie,  notaire. 

1788. — Madame  de  Lucia  de  Garau,  sa  veuve  et 
M.  de  Lucia,  son  fds  aîné,  héritier,  ajoutent  à  la  somme 
de  500  fr.,  celle  de  200  fr.  {Idem,  fol.  16.) 

1789.  —  Madame  Anne  Mouran-Do,  lègue  à  la  Miséri- 
corde la  somme  de  2.000  fr.,  et  pareille  somme  à 
riiôpiial.  —  Testament  reçu  par  M^  Conte,  notaire. 
{Idem,  fol.  18.) 

178!). —  M.  Grégoire  Gironne,  marchand,  lègue  1 .000  fr. 
à  rilôpital.  {Idem,  fol.  66.) 


I 


149 

1789.  —  M.  Michel  Moliiis,  décédé  à  Marseille,  lègue 
à  rilô|)ilal  la  somme  de  1.200  fr.  [Livre  des  Bicnj.^ 
fol.  07.) 

nUO. — M.  Jean  de  Ribes,  directeur  de  la  monnaie 
de  ]*er|)ignan,  Hiit  plusieurs  dons  à  la  Miséricorde,  s'éle- 
vant  ensemble  à  5. loi)  IV.  [Idem,  loi.  1<S.  ) 

1790.  — M.  le  chevalier  d'Ortalla,  par  toslament  mys- 
tique du  20  juin,  lègue  à  l'Hôpital  la  somme  de  400  Ir. 
Ce  legs  a  été  payé  en  assignats  le  17  juillet  1792. 
[Idem,  toi.  70.) 

1790.  —  M.  Rarisin,  prêtre  ;i  la  cathédrale,  lait  l'aunnuie 
de  000  fr.  à  la  Miséricorde,  le  22  mars.  [Idem,  M.  19.) 

1790.  —  Madame  Geneviève  de  Champeron-Després, 
lègue  à  la  Miséricorde  la  somme  de  aOO  l'r. — Tcslamenl 
reçu  par  M«  Jaume,  notaire.  [Idem,  fol.  19.) 

1790.  —  M.  François  Durand,  h  l'occasion  du  décès 
de  Madame  son  épouse,  fait  l'aumône  de  loO  fr.  à  la 
Miséricorde.  [Idem,  fol.  19.) 

1791.  — M.  Coder,  {irêlre ,  lègue  à  la  Miséricorde  la 
somme  de  500  fr.  [Idem,  fol.  19.) 

1791.^ — Madame  Claire  Rochadcl,  lègue  à  la  Miséri- 
corde la  somme  de  000  fr.  {Idon,  fol.  19.) 

Celte  sonnne  a  été  payée  en  assignats. 

17i)l. — Madame  Thérèse  Renaud ,  lègue  1.000  Ir.  à 
la  Miséricorde.  [Idem,  fol.  20.) 

Celte  somme  a  été  payée  en  assignats. 

1792.  —  Un  bient'aileur  inconnu  envoie  à  la  Miséri- 
corde la  somme  de  700  Ir.  en  assignats.  [Idem,  fol.  20.) 

179Ô.  —  M.  Després,  lègue  la  somme  de  500  fr.  à  la 
Miséricorde.  Ce  legs  est  payé  en  assignats. —  Testament 
reçu  par  M"'  Jaume,  notaire.   (Idem,  M.  20.') 

1797).  —  Doux  bienfaiteurs  inconiuis  on  voient  ;i  la 
Miséricorde,  l'ini  ÔOO  fr.  on  numérairç  cl  l'autre  000  fr. 
en  assignais.  [Idetii,  fol.  20.) 

1795. —  Dame  Ceneviève-llélène  de  Champeron,  éi)Ousc 


150 

(le  M.  Élionne-François  Dosprcs,  conseiller  lionorairc, 
lègue  riOO  ir.  à  rilôpital.  [Livre  des  Bienf.,  fol.  (ia.  ) 

1796.  —  M.  Jean-Jacques  Puiggari,  ordonnateur  des 
hospices,  fait  l'aumône  de  ooG  iV.  50  cent,  en  assignats, 
à  l'Hôpital.  [Idem,  fol.  71.) 

1800. — M.  Vigo  fait  don  à  l'Hôpital  d'une  sonune  de 
l.8!2o  fr.  75.  cent.,  donl  5!25  Ir.  75  cent,  en  assignats. 
{Idem,  fol.  72.) 

iSOO. — M.  Bonaventnre  Frigola  fait  don  à  l'Hôpital 
de  la  somme  de  500  fr.  et  par  son  testament  An  2() 
nivôse  en  XH  (M^  Jaunie,  notaire),  il  lègue  la  sonnno 
de  (500  fr.  h  partager  entre  l'Hôpital  et  la  Miséricorde. 
[Idem,  fol.  Tl.) 

1<S05.  —  M.  le  chanoine  Laboissière  et  M.  LIobct  font 
ensemble  une  aumône  de  1.200  1V.  a  l'Hôpital.  [Idem, 
fol.  72.) 

1808.  —  Deux  bienfaiteurs,  désirant  rester  incoinius, 
font  ensemble  l'aumône  de  1.958  fr.  20  cent,  à  l'Hô- 
pital. [Idem,  fol.  74.) 

1810. — ^M.  Jean  Salvan  ,  prêtre,  ancien  économe  de 
rilôpiial ,  par  son  testament  olographe  du  1*^'  mai, 
lègue  à  cette  maison  hospitalière  la  somme  de  1.000  fr. 
pour  être  employée  en  achat  de  draps  de  lit  et  de  che- 
mises pour  le  service  des  malades  civils.  [Idem,  fol.  78.) 

1816. — M.  de  Villicrs  du  Terrage,  [)réfel  du  dépar- 
lement, fait  l'aumône,  le  iavril,  de  la  somme  de;  100  Ir. 
aux  Hospices,  ;i  loccasion  d'une  dalle  que  la  commis- 
sion administrative  lui  avait  fournie  pour  le  tombeau  de 
sa  mie.  [Idem,  fol.  78.) 

1816.  — M.  r.affard,  avocat,  fait  l'aumône  de  600  fr. 
à  partager  entre  lîh'jjiilal  et  la  .Misi'ricordc.  [Idem, 
fol.  78.') 

1817.  —  M.  .Vntoine  Jauhert ,  prêtre,  principal  ûi\ 
collège  de  Perpignan,  par  son  testament  mystique,  en 
date  du  18  septembre,    reçu    par  M"  Ferriol  Tardieu, 


151 

notaire,  lègue  400  IV. ,  à  pnrtager  entre  l'Hôpital  et  la 
Miscricortlc.  {Livre  des  Bi'cnf.,  l'ol.  82.) 

J<SI9. — M.  Raymond  Izaiire,  pnUre,  aiimonicr  du 
collège  de  Per|)ignan ,  lègue  aux  pauvres  des  deux  Hos- 
pices la  somme  de  500  Ir.  —  Testament  reçu  par 
M''  Doménecli,  notaire.  {Idem,  foi.  85.) 

1822. —Madame  de  Lucia  de  Garau  recommande 
(ju'après  son  décès  il  soit  fait  une  aumône  à  la  Miséri- 
corde de  la  somme  de  000  Ir.  Ses  intentions  ont  été 
exécutées,  le  2  mars.  {Idem,  fol.  84.) 

1822.— Madame  veuve  Honal'os,  née  Siau,  fait  à  Vl\ù- 
[tilal  raumône  de  500  fr.  {Idem,  fol.  84.) 

1822.— Mademoiselle  Christine  Delmas  fait  l'aumône 
de  oOO  fr. ,  dont  200  fr.  applicables  h  la  Miséricorde  et 
500  à  rilôpilal.  {Idem,  fol.  8i.) 

1825. — ^M.  Thomas  Saleta-Xammar  lègue  la  somme 
de  1.200  fr.  à  partager  entre  Tiiôpilal  et  la  Miséricorde. 
— Testament  reçu  par  Me  Serra,  notaire.  {Idem,  fol.  8(5.) 

1825.  —  Madame  Méric,  née  Delmas,  fait  aux  Hospices 
l'aumône  de  500  fr.  {Idem.,  fol.  87.) 

I82(). —  M.  drégoire  (lironne  lègue  la  somme  de 
i.OOO  fr.  à  partager  entre  l'Hô|)ital  et  la  Miséricorde, 
qui  doit  être  em()loyée  en  achat  de  linge.  —  Testament 
reçu  par  Me  Serra,  notaire.  {Idem,  fol.  88.) 

182(5.  —  M.  .Méric,  Jean,  négociant,  lègue  la  sonniie 
de  oOO  fr.,  à  partager  entre  l'Hôpital  et  la  Miséricorde. 
—  Testament  reçu  par  M^  Ferriol  Tardieu,  notaire. 
{Idem,  fol.  89.) 

1828.  —  Un  bienfaiteur  (jui  désire  rester  inconnu, 
charge  M.  Joseph  Picas,  administraleiw,  de  verser  ii  la 
caisse  des  Hospices  l'aumône  qu'il  fait  à  rHôpii;iI  et  à 
la  Miséricorde  de  la  somme  de  1.000  Ir.  (Idem,  fol.  t)0.j 

1828.  — Un  bienfaiteur,  (jui  désire  rester  inconnu, 
charge  M.  Sylvestre  Vihdlongue,  administrateur,  de  verser 
à  la  caisse  des  Hospices,  l'auuKuie  (pi'il  lait  ;i   l'Hôpital 


152 

el  à  la  Miséricorde,    de   la  somme  de  500  fr.  (Livre 
des  Bienf.,  loi.  00.  j 

1851.  —  M.  Lassus,  propriétaire  à  l^erpitçnan,  l'ail  aux 
Hospices  l'aumône  de  500  fr.  {Idem,  loi.  02.) 

1851. — Madame  d'Ax,  née  Saunliac,  lait  aux  Hospices 
l'aïuiKuie  de  (ioO  fr.  {Idem,  fol.  02.) 

1852.  —  Mademoiselle  Catherine  Mouran  lègue  aux 
Hospices  la  somme  de  400  Ir.  {Idem,  loi.  92.) 

1855.  —  M.  Charles  Massot,  juge  au  tribunal  civil, 
lègue  aux  Hospices  la  somme  de  400  Ir.  ildcm,  loi.  05.) 

1855.^ — M.  le  chanoine  Després  lait  une  aumône  à  la 
Miséricorde  de  la  somme  de  500  Ir.  {Idem,  fol.  95.) 

1855. —Madame  Gisperl,  veuve  Truillés,  fait  aux 
Hospices  l'aumône  de  600  fr.  (Idem,  fol.  95.) 

1855.  —  M.  François  Jaunie  lègue,  par  testament,  aux 
Hospices  la  somme  de  800  fr.  {Idem,  fol.  95.) 

1855.—  M.  Garau,  avoué,  fait  l'aumône  aux  Hospices 
de  la  somme  de  500  fr.  {Idoii,  fol.  95.) 

1855.  —M.  d'Anglada-d'Oms,  fait  l'aumône  de  200  fr. 
à  l'Hôpital.  (M'm,Vol.  0().) 

1850.  —  M.  Jean-Baptiste  Hrial,  prêtre,  lègue  à  l'Hô- 
pital la  somme  de  1.250  fr.,  par  son  testament  du  7 
mai  1828,  somme  qui  a  été  versée  à  la  Caisse  des  Hos- 
pices le  20  octobre.  {Idem,  fol.  96.) 

1856.  —  -M.  Puiggari,  économe,  verse  à  la  caisse  des 
Hos[)ices,  pour  une  personne  ipii  désirait  rester  inconnue, 
la  somme  de  700  fr.,  à  partager  entre  l'Hôpital  el  la 
Miséricorde.  {Idem,  fol.  96.) 

1856.— M.  Nogués,  Joseph,  propriétaire,  par  tcsta- 
menl  olographe  du  17  mai,  lègue  à  la  Miséricorde  la 
somme  de  500  fr.  {Idem,  loi.  96.) 

1859. —M.  darau,   prêtre,  par  son  testamenl  du  19 
mai  1829,  lègue  à  la  Miséricorde  la  somme  de  500  fr., 
somme    versée    à    la    caisse    des  Hospices    le    11    mai 
{Idem,  fol,  97.) 


153 

1S42.  —  M.  Aniédéc  de  Lanier,  i»ro|)riélaire,  lait  laii- 
inône  aux  Hospices  de  la  somme  de  500  fr.  [Livre  des 
Bieiif.,  fol.  98.) 

iHi'-l. — M.  Philippe  Berge,  par  son  testamenl  mys- 
licpie  du  i  mars,  lègue  à  l'Ilôpilal  la  somme  de  500  fr. 
{Jdem,  fol.  08.) 

1844.  — Madame  Jean-François,  de  iN'arbonne,  donne 
au.\  Hospices  la  somme  de  400  fr.,  qui  doit  être  employée 
en  achat  de  linge.  [Idem,  fol.  98.) 

1844.  —  iM.  Lassus,  pro|»ri(Uaire  à  Perpignan,  fait 
l'aumône  aux  Hospices  de  la  somme  de  500  fr.  ipii  doit 
être  employée  en  achat  de  linge.  {Idem,  fol.  5)8.) 

18i().  —  M.  François  Parés,  administrateur,  a  versé  à 
la  caisse  des  Hospices,  le  28  décembre,  au  nom  de  Marie 
Cassin,  l'aumône  de  1 .0i)0  fr.;  (ÎOO  fr.  pour  la  Miséricorde 
et  400  fr.  pour  l'Hôpital.  [Idem,  fol.  99.) 

1847. —  Madame  Hose  d'Orlada  ,  veuve  de  Flotte,  par 
mains  de  M.  d'Ortalla  de  Perpignan ,  lait  l'aumône  de 
450  fr.,  pour  être  employée  à  la  partie  du  service  de  la 
Miséricorde  qui  est  le  jilus  en  soullrance.  (/r/rv/^  fol.  99.) 

18i7. — M.  Côme  Ricard,  pr()|)riélaire  à  Perpignan,  fait 
l'aumône  de  i.'iOO  fr.,  à  partager  entre  llb'tpital  et  la 
Miséricorde;  somme  versée  à  la  caisse  des  Hospices  le 
"■l'y  novembre.  [Idem,  fol.  100.) 

I8i8. — Madame  Thomase  Frigola,  veuve  Carcassonue, 
l'ail,  au  nom  de  la  demoiselle  Hose  Frigola,  rauiiKuie  de 
500  fr.  à  l'Hôpital.  {Jdoii,  fol.  100.) 

1850.  — M.  De  Tovar,  consul  g(''iieial  (l'Kspagne  à 
Perpignan,  a  fait  diverses  aumônes  à  THôpital  Saint-Jean, 
de  Tanuee  1817  à  rmmée  1850,  s'élevanl  ensemble  ;i  la 
somme  de  uOO  fr    [Idem,  fol.  99,   100,   101 /i 

1851.  -  La  salle  de  dissection  de  lllôpilal  est  cuns- 
iriiitc.  (Carton  ï.) 

1851.— M.  Jean  Terrais  lègue  la  somme  de  1 .80ti  fr., 
a  partager  entre  rHô|)ii:d  ei  l;i  Miséricorde.  Celle  somme 


154 

a  été  versée  à  la  caisse  des  Hospices  le  6  décembre.  — 
Teslainenl  du  G  juillet  1847.  [Livre  des  Bienf.,  loi.  102.) 

18r)2. — M.  GalTanl,  propriétaire,  t':iit  Tauniôue  aux 
Hospices,  le  14  décembre,  de  -10.517  kilogr.  de  i)onimes 
de  terre.  [Idem,  fol.  102.) 

1833.— Quiuze  garçons  de  la  Miséricorde  sont  envoyés, 
le  l^''  janvier,  à  l'orplielinat  de  Misserghin  (Afrique),  à  la 
suite  d'un  traité  conclu  entre  la  commission  administra- 
tive et  le  P.  Abram,  directeur  de  l'orpbelinat.  (Carton  S.) 

18o3.  —  La  commission  administrative  décide  qu'à 
compter  du  1'^"'  août  18ri5,  les  malades  indigents  (pii 
mourront  à  rilôpilai,  seront  inbumés  avec  cercueil. 
(Carton  C.  o.) 

JSoi. —  La  commission  rédige,  le  2()mars,  un  nouveau 
règlement  applicable  a  rilojjital  et  a  la  Miséricorde,  qui 
est  approuvé  par  M.  le  Préfet,  le  7  avril  même  année. 

1854.  —  Pendant  les  mois  d'août  et  septembre,  le 
choléra-morbus  sévit  à  rH()|)ilal  :  47  personnes  y  sont 
frappées  de  mort.  (Carton  C.  5.) 

1854.  ~  M.  Dariste,  sénateur,  inspecteur-général  des 
préfectures  et  Monseigneur  Cerbet,  évéque  de  Perpignan, 
visitent  l'Hôpital  et  la  Miséricorde. 

1834.  —  M.  Sébastien  Padret ,  propriétaire,  fait  à 
THôpilal  l'aumône  de  800  fr.  [Idem.  fol.  105.) 

1X54. —M.  Conte  Miffre,  par  son  testament  du  12 
décend)re  18i8,  lègue  à  rilô|)ilal  la  somme  de  500  fr. 
(pii  a  été  versée  à  la  caisse  des  Hospices,  le  10  juillet. 
[,ldem,  fol.  103.) 

I,S54. — >I.  Philip,  cbanoine,  verse  à  la  caisse  des  Hos- 
pices, le  7  juillet,  au  nom  de  M.  Jaubert  Campagne , 
avocat,  la  somme  de  500  fr. .  aumône  faite  à  rilôpital. 
[ïdem,  fol.  103.) 

1X54.  _  Mademoiselle  Callierinc  Hlancbard ,  [)ar  son 
testament  du  30  août,  lègue  à  la  Miséricorde  la  somme 
de  300  fr.  [Idem,  fol.  103.) 


155 

1854.  —  M.  Emmanuel  lioiial'os,  docteur-médecin,  an 
nom  de  son  père,  Kmnianuel  lionafos,  ancien  médecin 
en  chef  de  l'Hôpital,  verse  à  la  caisse  des  llos|)iccs 
l'aumône  de  2,500  fr.,  an  profit  de  cet  établissement. 
{Livre  des  Bicuf.,  fol.  105.) 

1855.  —  Madame  Lalabrèçjne,  née  Janliert  Cam|)a- 
gne,  verse  à  la  caisse  des  Jfospices,  au  nom  de  sa 
mère,  dame  Thérèse  Cabaner,  la  somme  de  600  IV. ,  à 
partager  entre  l'Hôpital  et  la  Miséricorde.  {Idem, 
loi.  105.) 

1855.  — Madame  Marie  Auberge,  née  Courret,  verse 
à  la  caisse  des  Hospices  Taumône  de  2,000  IV.,  qui  est 
convertie  en  rentes  sur  l'Étal,  avec  la  condition  expresse 
que  le  revenu  de  cette  somme  sera  annuellement,  et  h 
perpétuité,  remis  aux  aumôniers  qui  se  succéderont  à 
1  Hôpital,  pour  être  par  eux  distribué,  et  sans  en  ren- 
dre compte,  aux  malades  sorlanls  selon  leurs  besoins; 
(pie,  sur  ce  revenu,  il  sera  prélevé  2  IV.  25  cent.,  à 
partir  du  jour  de  son  décès,  arrivé  le  10  aoiit  1850,  qui 
serviront  à  célébrer  annuellement  une  messe  basse  pour 
le  repos  de  l'àme  de  cette  bienihilrice.  dans  la  chapelle 
de  l'établissement.  {Idem,  fol.  lOi.  i 

1856. —  La  chapelle  du  Christ  de  l'Hôpital  est  recons- 
truite, grâce  aux  dons  <le  divers  bienfaiteurs.  Li;  25 
décembre,  .Monseigneur  l'Evèqne  de  Perpignan  la  bénit, 
ainsi  cpie  les  statues  du  maitre-aulel ,  et  donne  la  con- 
lirmalion  ii  des  malades.  In  public  nombreux  assiste  à 
cette  cérémonie  religieuse,  'après  hupiclle  .M^''  (ierbel 
visite  les  salles  et  adresse,  aux  nombreux  malades 
(priïlles  contiennent,  des  paroles  de  consolation  et 
d  espérance,  avec  cette  bont(''  (pii  le  caractérise. 

1856.  —  M.  le  baron  Guiraud  de  Sainl-Marsal  (Uay- 
mond-Marc-.\ntoine),  cobmel  «lu  gi'uie  en  retraite, 
ancien  maire  de  Perpigu;iM,  iHhiiiiiisiiiitcur  des  hospices, 
commandeur  de  l'ordre  impérial  do  la  Légion-dllonneur, 


156 

par  son  testanienl  olographe,  en  «laie  ilu  51  décembre, 
déposé  cliez  M<^Bolaix,  notaire,  lègue  la  somme  de 
600  Ir. ,  (piiltc  de  tous  droits  généralement  quelconijues, 
à  partager  entre  l'Hôpital  et  la  Miséricorde.  {Livre  des 

/i/c;(/'./lbl    IOj.) 

1^57.  _  ]\i.  Parcs,  François,  avocat,  administrateur 
des  hospices,  décédé  le  lô  décembre,  i)ar  son  leslamenl 
olographe,  en  date  du  4  décembre  18o2,  déposé  chez 
McAmouroux,  notaire,  lègue  la  somme  de  1.000  fr., 
(piitte  de  tous  droits  généralement  quelconques,  à  par- 
tager entre  rilôpital  et  la  Miséricorde,  avec  la  recom- 
mandation expresse  qu'il  devra  être  célébré  a  perpétuité 
UD  service  funèbre  pour  le  repos  de  son  âme,  le  jour 
anniversaire  de  son  décès,  15  décembre,  alternativement 
dans  l'un  et  dans  l'autre  de  ces  deux  établissements 
hospitaliers.  [Idem,  fol.  105.) 

-j^58.  —  Un  bienfaiteur,  qui  désire  rester  inconnu, 
fait  l'aumône  à  la  Miséricorde,  le  15  avril,  des  étolfes 
nécessaires  pour  habiller  les  enfants,  hlles  et  garçons, 
pendant  la  saison  d'été.  Ces  étoffes  sont  estimées  a 
608  fr.  40  cent.  [Idem,  io\.  106.) 

1859.  _  M.  Sylvestre  Vilallongue  père,  ancien  négo- 
ciant ,  ancien  administrateur  des  Hospices,  se  trouvant  à 
son  lit  de  mort,  et  ayant  manifesté  verbalement  l'inten- 
tion qu'une  somme  de  1.000  fr.  fût  remise,  après  son 
décès,  à  la  Miséricorde,  à  titre  d'aumône,  sans  désigna- 
tion d'emploi,  M.  Sylvestre  Vilallongue  lils,  administra- 
teur, s'est  fait  un  pieux  devoir  de  verser,  au  nom  de  sa 
famille,  cette  somme  à  la  caisse  hospitalière,  le  50 
novembre.  {lO.cm,  fol.  100.) 

Monseigneur  l'Kvèqne  de  l>erpignan  bénit,  le  6  juillet, 
l'Oratoire  de  la  Vierge  el  le  Calvaire,  élevés  aux  frais  de 
deux  bienfaiteurs  dans  le  jardin  de  l'Hôpital,  au  milieu 
d'un  concours  nombreux  de  lidèles;  el  par  ordonnance 
du  12  du   même  mois.  Monseigneur  accorde    iO  jours 


157 

d'indulgence  à  gagner  clia(|ue  fois  que  l'on  priera  soit 
au  Calvaire,  soit  devant  l'Oraloirc  de  la  Vierge. 

18()0.  —  M.  Joseph  I.lobel  et  ses  frères,  propriétaires 
à  Perpignan,  versent,  le  i\  juillet,  à  la  caisse  des 
Hospices,  au  nom  de  M.  Charles  LIobet,  leur  oncle,  la 
somme  de  I.OOO  fr.,  à  titre  d'aumône,  à  partager  entre 
rilôpilal  et  la  Miséricorde.  {Livre  des  Bioif.,  fol.  106.) 

18(51.  — M.  Boluix,  Jean,  propriétaire,  a  fait  l'au- 
mône k  la  Miséricorde  de  la  somme  de  oO  fr. 

1801.  —  M.  Henri  Carcassonne,  notaire,  a  fait  l'au- 
mône à  l'Hôpital  de  la  somme  de  125  fr.Toc,  pour  hono- 
raires d'un  acte  reçu  par  lui ,  le  20  août.  (Idem,  fol.  100.  ) 

hSO-i. — ^  La  Loge  de  V l'niun  de  Perpignan  fait  l'au- 
mône aux  Hospices  de  la  somme  de  oOO  fr. ,  provenant 
d'une  quête.  [Idem,  fol.  iOO.) 

1802. — M.  Auguste  Bardou ,  négociant,  a  donné, 
pendant  sa  vie,  à  la  chapelle  de  l'Hôpital,  un  Christ  et 
une  statue;  il  a  fait  peindre  le  plafond  et  les  murs  du 
sanctuaire  a  ses  frais;  et,  avant  de  mourir,  il  a  recom- 
mandé à  sa  mère  d'offrir,  on  son  nom,  à  cette  cha[)elle, 
un  ostensoir  en  vermeil  avec  sa  niche  dorée.  Madame 
veuve  Bardou,  née  Pradal ,  s'est  fait  un  devoir  d'exécuter 
les  pieuses  volontés  de  son  lils.  Ces  divers  dons  s'élèvent 
ensemble  h  la  somme  de  2.900  fr.  {Idem,  fol.  107.) 

1802.  —  Les  dames  Viader,  de  Rovira,  de  Lacroix  et 
de  Çagarriga  versent,  le  10  août,  a  la  caisse  des  Hos- 
pices, à  litre  d'aumône,  au  nom  de  Mademoiselle  Josè- 
phe  de  Lucia,  la  somme  de  oOO  fr.  {Idem,  fol.   107.) 

180)5.  — ■  Madame  Anne  Antoinette  d'Oms,  veuve  de 
M.  Adrien  d'Anglade,  décédée  à  Pézilla-de-la-Rivière,  le 
8  janvier,  par  ses  testaments  mystiques  des  2i  juillet 
18.')7  et  17  octobre  1801  ,  déposés  chez  M'^  Anioiiroux, 
notaire,  à  l'erpignan,  lègue  à  rilos|)ice  des  malades, 
Iloiu'lid  Siii)U-.fean,  toutes  les  |)r(»priélés  rurales  (prelle 
possède  dans  l'étendue  du  territoire  de  Torreilles,  canton 


158 

de  Rivesaltcs,  ainsi  qu'une  bâtisse  servant  do  bergerie 
et  (le  i^renier  à  foin  qu'elle  possède  dans  la  même  com- 
mune; et  toutes  les  valeurs  mobilières,  qui  dépendront 
de  sa  succession ,  consistant  en  capitaux  de  rentes  sur 
divers  Etats,  actions  et  obligations  sur  les  chemins  de 
ter  ou  sur  d'autres  compagnies  de  finance,  de  commerce 
ou  d'industrie ,  actes  d'obligation  poiu-  cause  de  prêt  ou 
de  prix  de  vente,  billets  et  lettres  de  change,  bons  sur 
le  trésor,  et  toutes  autres  de  la  même  nature,  ainsi  que 
tous  intérêts  se  rapportant  auxdits  titres,  qui  pourraient 
être  dus  à  l'époque  de  son  décès. 

Elle  lègue,  en  outre,  à  l'Hospice  delà  Miséricorde,  une 
somme  de  800  tr.  qui  devra  être  allectée  en  achat  de  linge. 

Malgré  les  charges  imposées  par  la  testatrice  à  l'Hô- 
pital Saint-Jean,  cette  succession  peut  être  placée  au 
rang  des  plus  importantes  que  la  maison  hospitalière 
ait  reçues  depuis  sa  fondation.  [Livre  des  Bienf.,  fol.  107.) 

18(35. —  Mademoiselle  Françoise  Gorry  a  recommandé 
a  son  frère,  M.  Eugène  Gorry,  de  faire  en  son  nom, 
après  son  décès,  l'aumône  de  100  fr.  a  l'Hospice  de  la 
Miséricorde. 

Cette  somme  a  été  versée  a  la  caisse  hospitalière,  le 
14  février.  [Idem,  toi.  108.) 

'J865. —  M.  Bernard  Âuriol ,  banquier,  ancien  admi- 
nistrateur des  Hospices,  décédé  le  17  avril,  par  son 
testament  olographe  en  date  du  4  octobre  1857,  déposé 
chez  Me  Boluix,  notaire,  lègue  la  somme  de  800  fr.,  h 
partager  entre  l'Hôpital  Saint-Jean  et  l'Hospice  de  la 
Miséricorde. 

M.  Prosper  Auriol,  son  lils,  en  sa  qualité  d'héritier 
préciputaire,  s'est  chargé  de  verser  la  somme  de  800  fr. 
dans  la  caisse  des  Hospices  et  de  payer  les  droits  de 
mutation  de  ce  legs.  {Idem,  fol.  108.) 


159 


LES  RUINES  DE  CABIIENE, 

AVEC   PLAN   A    L 'APPUI , 

Tar  iM.  A.  BATMt.*r,c-ni,it;,ine,  .■lu.f.l,,  (i,;„i,.,  h  Am,.|i,.-|,.s-B;,i„s 
iiu'iiibi'e  iL'sidanl. 


Kntro  les  deux  (orroiits  de  La  Manéra  et  de  Serra- 
loni^a,  existe  une  loni^ne  arête  de  séparation  {sierra  en 
espagnol,  serra  en  catalan),  qni  donne  son  non.  an 
village  de  Serralonga,  dont  l'église  remonte,  dit-on,  an 
coniniencenient  du  onzième  siècle  (1018). 

L'arrte  se    termine   vers  le  sud,   à  6  kilomètres  de 
î^erralonga,  par  des  masses  granitiques  élevées  à   1500 
mètres  environ  au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  On  peut 
y  arriver  de  Serralonga  en  suivant  la  crête,  ou  bien  de 
La  Manera,  par  une  marche  d'une  heure  et  demie  duis 
les  doux  cas.    Dans   le   second,    partant  du  village     on 
suit  d  abord   le  sentier  qui  conduit  au  col  de  las  i<«/- 
gueres;  puis,  tournant  brusiiuement  à  gauche,  on  ga"ne 
en  montant,  d'abord  le  Mas-lidladou ,  et  ensuite\^-o| 
du  même  nom;  là  on  revient  à  droite,  suivant   un  petit 
sentier  à  peme  tracé  dans   le    rocher,    au    milieu  d'une 
vegetalion  rabougrie,  le(iuel  conduit  par  une  ponte  assez 
|ai<lo  a  1  extrémité  sud  de  laréte,  sur  dos  roches  dont 
le  nom  de   tabrenç  indi.pie   assez  rinaccessihiliié  pour 
d  autres  que  les  chèvres  ou  d'agiles  montagnards 


160 


Donnons  d'abord  un  aperçu  topographiquc  des  lieux. 
Trois  pics  ou  sommets  dislincls  terminent  la  serra  (Voir 
le  pian).  Le  plus  élevé  est  celui  (pii  est  à  l'exlrémilé  sud  : 
il  se  compose  d'une  arête  de  roches  granitiques  de  15 
mètres  de  largeur  au  plus,  sur  environ  60  mètres  de 
longueur.  De  toutes  parts  les  roches  descendent  à  pic, 
et  l'on  ne  peut  l'aborder  que  par  une  ascension  dillicile 
opérée  du  côté  sud. 

La  seconde  élévation,  située  à  100  mètres  environ  de 
la  première,  dont  elle  est  séparée  par  une  gorge  pro- 
londe  (Voir  le  profil  général),  est  encore  exclusivement 
composée  d'une  masse  granitique  affectant  une  forme 
conique ,  dont  le  sommet  est  20  ou  2o  mètres  plus  bas 
que  le  précédent  :  elle  est,  en  outre,  d'un  accès  plus 
facile,  quoique  présentant  encore  certaines  parties  in- 
franchissables. 

Enfin,  la  troisième  offre  un  cône  assez  régulier,  dont 
la  pointe ,  distante  de  la  précédente  de  1 50  mètres  en- 
viron, est  beaucoup  moins  élevée ,  et  accessible  de  toutes  ^ 

parts. 

Notre  premier  soin ,  en  arrivant  sur  la  hauteur  prin- 
cipale, fut  de  prendre  une  idée  sommaire  des  vieux 
débris  que  nous  voulions  explorer,  et  nous  reconnûmes  : 
1"  que  les  ruines  du  point  sur  lequel  nous  étions  avaient 
incontestablement  appartenu  à  une  ancienne  forteresse 
féodale;  2°  que  sur  la  seconde  hauteur  était  une  tour 
avec  une  première  enceinte;  5»  enfin,  qu'une  seconde 
tour  existait  sur  la  troisième  pointe. 

[Nous  allons  successivement  décrire  ces  anciennes 
constructions,  et  les  restaurer  autant  du  moins  que  nous 
le  permettra  ce  qui  en  subsiste  encore. 

Château  de  Cabrem  proprement  dit.  —  L'enceinte 
principale  s'élevait  sur  la  i)lateforme  allongée  de  la.inelle 
nous  avons  déjà  parlé,  et  l'occupait  entièrement.  Klle 
était  formée  de  murailles  de  i'n,50«^  d'épaisseur,  de  la 


161 

hauleur  desquelles  on  ne  peut  juger  aujourd'hui  parce 
qu'elles  sont  en  partie  renversées;  mais  il  est  probable 
qu'elle  n'était  pas  considérable,  car  on  était  suflisam- 
nient  garanti  contre  l'escalade  par  des  escarpements  de 
20  à  iO  mètres  de  hauteur.  A  l'extrémité  nord  s'élevait 
le  donjon ,  de  forme  rectangulaire ,  ayant  extérieurement 
48  mètres  de  longueur  sur  II  mètres  de  largeur,  avec 
des  murailles  de  2'",50c  d'épaisseur.  A  l'intérieur,  il  se 
composait  d'une  salle  unique,  couverte  d'une  voûte  en 
jdein  cintre  de  6'", 40''  de  portée  et  de  8  mètres  de  hau- 
leur sous  clef.  Sur  la  voûte  était  [)robablcnienl  une 
plateforme. 

Au  milieu  de  l'enceinte  sont  les  ruines  d'une  petite 
chapelle  qui,  d'après  d'anciennes  cartes,  était  autrefois 
dédiée  à  Saint-iMichel.  Sa  forme  est  celle  de  presque 
toutes  les  chapelles  de  la  montagne,  à  savoir  une  nef 
rectangulaire,  ayant  extérieurement  5  mètres  sur  4  mè- 
tres, terminée  par  une  abside  demi-circulaire. 

A  l'extrémité  sud,  on  voit  encore  la  porte  de  l'enceinte 
de  laquelle  partaient  des  escaliers  descendant  a  une 
plateforme  naturelle,  située  à  un  niveau  inférieur  de  15 
ou  18  mètres.  Ils  ne  sont  plus  aujourd'hui  indiqués  que 
par  quelques  marches  et  par  les  traces  des  murs  |)ercés 
de  portes  qui  les  barraient  de  distance  en  distance. 

Le  constructeur  a  prolilé  de  cette  plateforme  inférieure, 
entourée  au  sud  et  a  l'est  par  des  précipices  infranchis- 
sables ,  et  à  peine  accessible  par  les  pentes  très-raides 
qui  se  trouvent  à  l'ouest,  pour  créer  une  première  en- 
ceinte, à  l'angle  est  de  la(]uelle  se  trouvaient  les  com- 
muns du  château.  Les  murailles  qui  renferment  ont 
1"',50'^  d'épaisseur.  C'est  dans  la  partie  ouest  que  s'ou- 
vre la  porte  d'entrée  qui,  aujourd'hui  encore,  donne 
seule  accès  dans  ces  ruines.  Elle  a  !2  mètres  de  largein-; 
une  vomU;  en  arc  de  cercle  la  recouvre.  Ni  fossés  ni 
ponl-levis  ne  la  précèdent;  elle  est  au   niveau  du  sol; 

11 


t62 

on  n'a  même  pas  pris  la  précaution  d'y  placer  une  herse. 
Le  mode  de  fermeture  était  des  plus  primitifs  :  les  bat- 
tants étaient  maintenus  fermés  par  deux  barres  de  bois 
engagées  horizontalement  dans  la  maçonnerie. 

Il  est  probable  que  la  partie  supérieure  des  murailles 
était  garnie  d'un  simple  chemin  des  rondes  avec  un  pa- 
rapet a  hauteur  d'appui  de  40  à  50  centimètres  d'épais- 
seur. Du  reste,  il  n'existe  aucune  trace  ni  de  créneaux 
ni  d'archères,  et  l'on  ne  s'est  nullement  préoccupé  du 
llanquement,  c'est-à-dire  de  la  nécessité  de  battre  le 
pied  des  murailles  :  on  comptait  évidemment  plus  sur 
la  force  naturelle  de  la  position  que  sur  l'appui  de 
l'art. 

Si  l'on  fait  attention  à  la  simplicité  de  ces  moyens  de 
défense;  si  l'on  tient  compte  de  la  forme  carrée  du 
donjon ,  de  la  part  si  faible  attribuée  au  logement,  c'est- 
à-dire  au  confortable  de  la  vie  ;  si  l'on  étudie  en  outre 
ces  vieilles  murailles  aux  parements  réguliers  formés  de 
moellons  d'assise  en  pierres  granitiques  rectangulaires; 
si  l'on  tient  compte  en  outre  du  choix  de  la  position , 
on  ne  peut  douter  que  ce  castel  ne  date  des  premiers 
âges  de  la  féodalité,  c'est-à-dire  du  xi^  siècle.  Le  petit 
nombre  de  documents  historiques  que  j'ai  pu  recueillir, 
et  que  je  dois  presque  tous  à  l'obligeance  de  M.  Alart, 
archiviste  du  déparlement,  ne  contredisent  pas  une 
opinion  basée  d'abord  exclusivement  sur  des  données 
archéologiques. 

La  première  charte  connue  qui  fasse  mention  du 
château  de  Cabrenç  est  de  M4I  (Marca,  o99).  En  i207,  le 
sire  Guillem-Ugo  de  Serralonga ,  avant  de  partir  pour  la 
Terre-Sainte,  fait  son  testament  :  on  y  lit  la  mention 
d'un  don  fait  par  lui  ad  ccclesiam  de  Cabrencio;  on  y 
signale  en  outre  le  (ief  de  Cabrenç  comme  étant  sous  la 
déiK-ndance  féodale  du  vicomte  de  Caslelnou,  et  comme 
avant  lui-même  sous  sa  mouvance  les  (iefs  de  l'alalda  et 


163 

de  MoiUalba.    On   peut   sciileincnl   en   conclure  que  le 
château  n'est  pas  postérieur  au  xiF  siècle. 

Il  se  pourrait  bien  d'ailleurs  que,  dans  certains  cas, 
il  Y  ait  eu  confusion  entre  le  château  de  Serralonifa  et 
celui  de  Cabrcnç;  un  instant  même  j'avais  cru  à  une 
identité  complète,  i^râces  à  l'inutilité  de  mes  recherches 
à  Serralonga  et  dans  les  environs,  pour  retrouver  d'an- 
ciennes constructions.  Dans  le  village  lui-même,  il  n'y  a 
rien  absolument  qui  puisse  faire  admettre  l'existence 
d'un  château ,  et ,  chose  assez  curieuse ,  on  ne  voit 
même  dans  ce  centre  d'habitation,  qui  est  très-ancien, 
aucune  trace  d'enceinte  défensive. 

Au  sud  et  à  quelques  centaines  de  mètres  de  distance, 
sur  un  petit  mamelon  isolé,  très-inférieur  au  village, 
existent  bien  les  ruines  d'un  ancien  château;  mais,  en 
les  examinant,  j'y  ai  reconnu  les  marques  distinctives 
d'une  construction  du  xvi^  siècle,  et  l'on  dit  encore 
dans  le  pays  que  c'était  une  maison  de  campagne  des 
comtes  de  Ros.  Je  n'ai  pu  reconnaître  sous  ces  ruines 
aucune  substruction  antérieure. 

Mais  cette  idée  de  ne  faire  qu'un  château  de  ceux  de 
Serralonga  et  de  Cabrenç,  a  dû  céder  devant  une  distinc- 
tion positive  faite  entre  les  deux  dans  une  charte  de 
1277.  Seulement,  où  était  ce  château  de  Serralonga? 

Quant  à  la  chapelle  Saint-Michel,  il  est  probable 
({u'elle  est  de  la  même  époque  que  le  château. 

Tour  11°  4 .  —  Pour  gagner  le  col  de  séparation  entre 
le  château  et  la  tour  n*^  1,  et  arriver  à  cette  dernière, 
le  seul  chemin  praticable  est  de  reprendre  le  sentier  sur 
le  tianc  ouest  de  la  montagne.  On  peut,  à  la  rigueur, 
suivre  les  pentes  de  rocher  qui  partent  du  donjon  ;  la 
voie  est  sans  doute  plus  directe,  mais  elle  est  dangereuse 
et  praticable  seulement  |)our  les  gens  habitués  à  la  mon- 
tagne. 

Cette    seconde   construclion    se    compose,    ainsi    que 


164 

nous  l'avons  déjà  dit,  d'une  tour  centrale  élevée  au 
point  culminant  du  roclier,  et  d'une  enceinte  en  maçon- 
nerie qui  se  développe  au  sud,  à  l'est  et  au  nord,  mais 
que  l'on  a  juij[é  inutile  du  côté  de  l'ouest  à  cause  de  la 
hauteur  et  de  la  raideur  de  l'escarpement. 

Parlons  d'abord  de  l'enceinte  extérieure.  Elle  est  for- 
mée par  un  mur  de  1  mètre  d'épaisseur;  on  ne  peut  se 
rendre  compte  aujourd'hui  de  sa  hauteur.  Il  est  percé 
de  créneaux  alternativement  ouverts  à  deux  hauteurs 
différentes,  ahn  de  laisser  mieux  voir  le  terrain.  Celte 
disposition  se  retrouve  dans  plusieurs  anciens  châteaux , 
et  notamment  dans  celui  de  Cortsavy.  Ils  ont  la  forme 
des  créneaux  actuels,  mais  sont  très-rapj)rochés  les  uns 
des  autres.  La  porte  regarde  le  sud,  c'est-à-dire  l'ancien 
château  que  nous  venons  de  quitter  :  le  mode  de  ferme- 
ture est  le  même  que  celui  de  la  forteresse.  Du  reste, 
ou  n'entrevoit  aucune  préoccupation  de  llanqucment, 
pour  ce  point  faible,  autre  que  celui  des  créneaux; 
seulement  un  second  mur,  parallèle  à  celui  dans  lequel 
est  percée  la  porte,  existe  à  12  mètres  en  arrière  et 
forme  une  seconde  enceinte,  motivée  sulfisamment  et 
par  la  présence  de  la  porte ,  et  par  l'accessibilité  plus 
facile  de  ce  côté. 

La  tour  présente  à  l'extérieur  la  forme  d'un  prisme 
octogonal  très-irrégulier.  Elle  est  isolée  sur  un  massif 
de  rochers ,  remplacé  vers  le  nord  et  vers  l'ouest  par 
un  mur  de  soutènement  à  parois  très-inclinées,  suivant 
à  peu  près  la  forme  de  la  tour,  et  dont  la  hauteur  varie 
entre  2  et  4  mètres.  La  porte  qui  est  sur  la  grande  face, 
au  sud-est,  est  à  l"',60c  au-dessus  de  l'assise  de  rocher, 
et  connue  celui-ci  est  déjà  presque  à  pic  sur  une  hauteur 
égale,  on  ne  pouvait  pénétrer  qu'au  moyen  d'une 
échelle.  Eu  l'escaladant,  on  pénètre  dans  une  clunnbre 
carrée  de  4n\20'" de  côté,  qui  était  éclairée  par  une 
pelile  feiièlro  d'architecture  romane.  Du  reste,   la  tour, 


165 

dont  les  parties  supérieures  sont  effondrées,  ne  s'élève 
plus  aujourd'hui  qu'à  5  ou  6  mètres  au-dessus  du  rocher; 
les  voûtes  n'existent  plus,  leurs  débris  couvrent  le  sol 
intérieur,  et  il  est  impossible  de  rien  présumer  sur  ce 
qui  existait  autrefois  sans  faire  des  fouilles  que  je  ne 
pouvais  entreprendre. 

Je  me  contenterai  de  faire  remarquer  d'abord  combien 
il  y  a  peu  de  vide  dans  cette  immense  maçonnerie,  puis 
ensuite  la  disposition  de  ce  vide  (Voir  le  i)lan  ci-aiiucxé). 
Au  lieu  d'fMre  au  milieu  de  la  tour,  il  est  reculé  vers  le 
sud-ouest,  laissant  ainsi  une  épaisseur  qui  atteint  jus- 
qu'à 5  mètres  du  côté  du  nord-est.  Nous  reviendrons 
tout  à  l'heure  sur  cette  disposition. 

Quel  fut  le  but  de  cette  seconde  construction?  I.a  tour 
et  son  enceinte  furent-elles  une  annexe  du  château 
principal?  La  même  bannière  llotlait-elle  sur  les  deux 
donjons?  La  réponse  à  ces  questions  n'est  pas  douteuse. 
L'histoire  d'abord  ne  signale  aucun  autre  lief  rival  et 
voisin  de  celui  de  Cabrcnç;  ensuite  la  preuve  la  plus 
concluante  de  leur  réunion,  est  dans  rim|)Ossiblité  pour 
le  petit  castel  de  vivre  en  ennemi  à  côté  de  son  puis- 
sant voisin.  Ce  dernier  devait  être  d'ailleurs  bien  insuf- 
fisant, bien  petit  pour  les  seigneurs  de  Serralonga,  et  il 
est  tout  simple  qu'ils  aient  fait  bâtir  une  annexe  pour 
suppléer  à  ce  cpii  leur  manquait  et  à  ce  qu'ils  ne  pou- 
vaient trouver  sur  la  plateforme  supérieure.  Le  système 
de  construction  riudi{]ue  bien  clairement  :  c'est  du  côte 
du  château  principal  (pie  sont  tournées  toutes  les  parties 
faibles  de  l'ouvrage  secondaire ,  c'est-à-dire  les  entrées. 
En  outre,  c'est  vers  ce  point  (pie  la  tour  a  ses  épais- 
seurs de  maçonnerie  les  moins  considérables ,  taudis  (|ue 
l'on  renforce  énormément  la  seule  partie  accessible 
opposée  au  château.  Il  n'y  a  pas  danger,  en  effet,  qu'une 
attaque  eu  r('glc  se  fasse  contre  le  côté  sud;  mais, 
comme  l'on    |ieut   craindre  que  l'on  n'y  tente  (pielque 


166 

surprise   nocturne,   à   cause  des  portes,    on    redouble 
l'enceinte. 

Toutefois,  la  communication  entre  les  deux  châteaux 
était  bien  difficile,  et  peut-être  serait-ce  le  cas  de  croire 
à  quelque  passage  souterrain  allant  de  l'un  à  l'autre, 
passage  dissimulé  avec  tant  de  soin,  ou  tellement  ruiné 
vers  ses  débouchés,  qu'on  ne  pourrait  aujourd'hui  le 
retrouver.  Le  souvenir,  au  reste ,  n'en  est  pas  absolu- 
ment éteint  dans  la  mémoire  des  habitants.  Une  légende 
qui  existe  dans  le  pays,  la  seule  qu'on  ait  pu  me  racon- 
ter, parle  de  souterrains  allant  du  château  à  l'extérieur. 
Suivant  elle  :  «  Il  était  autrefois  (style  de  conte  et  de 
légende)  un  duc  de  Cabrenç,  que  ses  cruautés  et  ses 
rapines  avaient  fait  détester  de  tout  le  pays.  Suivant 
l'usage ,  un  pacte  existait  entre  lui  et  le  démon ,  grâces 
auquel  il  avait  pu  construire  un  souterrain  allant  de  son 
château  à  Barcelone.  Maintes  fois,  a  la  lin  d'un  repas, 
manquant  de  quelque  plat,  il  envoyait  son  écuyer  par  le 
souterrain,  et  en  quelques  minutes  celui-ci  était  de  re- 
tour, rapportant  le  plat  demandé  ».  Supposons  que  le 
souterrain  aille  seulement  au  second  castel;  que  celui-ci 
renferme  les  provisions  de  bouche,  et  voilà  la  légende 
parfaitement  expliquée.  Qui  sait  si,  en  faisant  des  fouilles 
dans  la  tour  n»  1,  on  ne  trouverait  pas  d'abord  un  étage 
inférieur,  chose  fort  probable,  parce  qu'il  en  existe  dans 
beaucoup  d'autres  tours,  et  puis  à  la  suite  un  souter- 
rain de  connnunication. 

D'après  une  autre  version ,  cette  tour,  au  lieu  de  ren- 
fermer les  provisions  du  château,  servait  de  prison. 
Rien  n'empêche  de  croire  à  cette  double  destination, 
dont  la  seconde  surtout  me  semble  très-probable. 

Cherchons  à  déterminer,  maintenant,  l'épocpie  de  la 
construction  de  ce  second  ouvrage.  Les  maçonneries  de 
la  tour  ont  beaucoup  d'analogie  avec  celles  du  château 
principal ,  mais  elles  sont   moins    soignées  ;    les   assises 


167 

des  parements  sont  moins  régulières ,  les  pierres  moins 
bien  taillées.  Cette  (JifFérenee  est  plus  sensible  encore 
dans  Tenceinte  extérieure  ;  elle  indique  évidemment  une 
construction  postérieure  h  celle  du  cbàteau,  mais  ai)par- 
tenant  toujours  à  l'époque  romane  :  la  forme  de  la 
petite  fenêtre,  placée  au-dessus  de  la  porte  de  la  tour, 
en  fait  foi.  Qui  sait  s'il  ne  faut  pas  voir  dans  cet  ouvrage 
l'accomplissement  de  l'engagement  que  prenait,  en  1277, 
Bernard-L'go  de  Serralonga  de  redire  de  novo ,  réédilicr, 
une  tour  et  une  foriitudo  dans  le  lieu  de  Serralonga , 
soit  que  l'on  ait  ici  confondu  Serralonga  et  Cabrenç , 
soit  que  Bernard-Ugo  ait  préféré  faire  tourner  l'exécution 
de  sa  promesse  au  profit  du  château  de  Cabrenç.  On 
retrouve  bien  dans  ces  constructions  la  tour,  et  les  murs 
qui  l'environnent  représentent  la  fortitudo. 

Cette  date  de  la  fin  du  xiiF  siècle  s'accorde,  du  reste, 
avec  les  inductions  archéologiques  que  nous  tirions  tout 
à  l'heure  de  la  forme  extérieure  du  monument;  car,  on  a 
déjà  remarqué  bien  souvent  que  les  formes  romanes  se 
prolongèrent  plus  longtemps  dans  le  Roussillon  que  dans 
le  centre  de  la  France,  surtout  pour  des  constructions 
aussi  reculées  dans  la  montagne,  et  l'on  s'en  servait 
encore  au  xiue  siècle,  bien  que  le  gothique  eût  alors 
prévalu  dans  les  contrées  plus  septentrionales. 

Tour  »o  3.  —  Enfin,  il  nous  reste  à  étudier  une  troi- 
sième construction,  la  tour  n»  2.  Nous  avons  déjà  dit 
(pi'elle  occupait  le  sommet  d'un  monticule  naturel  (pii 
domine  le  col  Balladou  à  l'ouest  d'une  part,  et,  de  l'au- 
tre, l'arête  descendant  à  Serralonga  vers  le  nord.  Vue 
du  côté  du  sud,  c'est-à-dire  de  la  tour  n»  I,  la  tour 
n«  2  a  l'air  d'être  rectangulaire;  mais,  en  s'en  appro- 
chant davantage,  on  y  reconnaît  six  faces  irrégulière- 
ment disposées.  L'intérieur  est  un  lectangle  de  iu',20^ 
sur  oni,70''  (Voyez  les  plan,  coupe  et  élévation  ).  Il  y  a 
trois  étages,  plus  une  plateforme  supérieure.  I.e  rez-de- 


168 

chaussée  a  moins  de  hauteur  que  les  deux  autres  étages. 
Au-dessus  de  chacun  d'eux  est  une  voûte  ogivale  qui 
supporte  l'étage  supérieur;  la  forme  de  l'ogive,  assez 
peu   élancée,   répond   à   la   période    moyenne  de   l'art 

ogival. 

La  voûte  supérieure ,  qui  est  en  partie  détruite ,  avait 
une  épaisseur  que  j'évalue  a  1  mètre  environ ,  n'ayant 
pu  la  mesurer  directement.  Les  voûtes  intermédiaires 
n'ont  que  50  centimètres  à  la  clef. 

Le  rez-de-chaussée  n'est  plus  élevé  au-dessus  du  sol 
comme  dans  la  tour  précédente  ;  on  y  entre  de  plein- 
pied  par  une  porte  percée  dans  la  face  qui  regarde  le 
sud-est,  porte  large  de  in',20'"'  et  haute  de  2m,20'';  un 
arc  de  cercle  très-surbaissé,  en  forme  le  linteau.  Les 
communications  d'un  étage  a  l'autre  sont  organisées  en 
vue  d'une  défense  intérieure,  et  rendues,  par  conséquent, 
aussi  difliciles  que  possible.  Un  escalier  de  70  centimè- 
tres de  largeur,  a  marches  très-élevées,  est  ménagé  au- 
dessus  de  la  porte  dans  l'épaisseur  du  mur.  Son  palier 
de  départ  est  a  2"\80c  au-dessus  du  sol  ;  on  ne  pouvait 
donc  y  arriver  que  par  une  échelle  que  l'on  retirait  à 
l'occasion. 

Au  premier  étage  était  évidemment  le  logement  de  la 
garnison.  On  voit  encore  dans  celte  pièce  les  restes  d'une 
cheminée,  dont  le  vaste  manteau  est  assez  bien  conservé. 
Elle  est  placée  dans  le  mur  opposé  h  la  porte;  le  tuyau 
s'élevait  dans  l'épaisseur  du  mur;  il  est  aujourd'hui 
obstrué  par  les  décombres. 

La  communication  entre  le  premier  et  le  deuxième 
étage  se  fait  absolument  de  la  mêuie  manière  qu'entre  le 
rez-de-chaussée  et  le  premier.  11  en  est  de  même  pour 
arriver  à  la  plateforme  :  seulement  je  n'ai  pas  marqué  ce 
dernier  escalier  sur  la  coupe.  J'ai  déjà  dit  que  la  plate- 
forme était  en  partie  détruite  ;  on  ne  peut  donc  allirmcr 
qu'elle  fût  entourée  d'un   mur  d'appui  :  mais  cette  pré- 


169 

caution  me  semble  absolimient  nécessaire  à  15  ou  16 
mètres  de  hauteur  au-dessus  du  sol,  et  avec  les  vents 
violents  qui  régnent  dans  le  pays.  Aussi  l'ai-je  indique 
sur  mon  dessin. 

Le  rez-de-chaussée  prend  jour  par  la  porte  :  (juand 
elle  était  fermée,  il  devait  y  régner  une  assez  grande 
obscurité.  Une  fenêtre,  située  à  hauteur  d'appui,  éclaire 
le  premier  étage,  la  chambre  habitée.  iMais  le  second, 
qui  servait  probablement  de  magasin  et  de  passage  pour 
monter  à  la  i)lateformc,  ne  voit  le  jour  que  par  deux 
créneaux  inutiles  d'ailleurs  à  la  défense.  On  renianjue 
encore  une  ouverture  plus  petite,  située  au-dessus  de  la 
porte  d'entrée,  sous  l'arcature  qui  recouvre  l'escalier, 
dans  la  partie  peu  épaisse  du  mur.  Elle  a  évidemment  le 
double  but  d'éclairer  cet  escalier,  et  surtout  (raccnblcr 
de  i)rojectiles  les  ennemis  qui  tenteraient  d'enfoncer  la 
porte. 

La  défense  de  la  tour  est  au  reste  toute  passive;  ni 
créneaux,  ni  archères.  Une  attaque  en  règle  n'était  guère 
à  craindre  en  ce  point;  dans  une  attaque  de  vive  force, 
on  ne  pouvait  essayer  ni  de  ruiner  des  murs  aussi  é[)ais, 
ni  d'escalader  une  hauteur  de  16  mètres  d'escarpe.  11 
fallait  donc,  de  toute  nécessité,  s'attaquera  la  jiorle  (]ni 
avait  le  même  genre  de  fermeture  que  celle  in(li<piée 
p(»ur  la  porte  du  vieux  château,  c'esl-à-diie  deux  traver- 
ses horizontales,  opération  pendant  laquelle  les  défen- 
seurs (le  la  plateforme  et  ceux  du  premier  étage  pouvaient 
accabler  les  assaillants  de  projectiles  de  toutes  sortes. 

Si,  malgré  ces  dilférenles  [»récaulions,  la  porte  était 
enfouci'c,  l'ennemi  i)énétrait  dans  le  rez-de-chaussée; 
mais  il  ne  pouvait  arriver  au  |)reniier,  et  il  restai!  soumis 
aux  coups  (lu  défenseur,  raecablaiil  de  projecliles  par 
uii  mâchicoulis  ménagé  à  la  voùle  onivale  contre  l'esca- 
lier.  Il  lui  était  donc  dilUcile  de  se  maintenir  dans  cette 
position. 


170 


Ajoutons ,  pour  en  finir  avec  la  défense  de  cet  ouvrage, 
qu'au  pied  de  la  tour  régnait  une  petite  plateforme  de 
3m,50c  de  largeur  environ ,  dominant  le  sol  environnant 
de  près  de  l"',50c,  et  enceinte  d'un  fossé  qui  pouvait 
avoir  4  mètres  de  largeur  en  haut.  Escarpe,  contrescarpe, 
fossé,  tout  est  tellement  ruiné  qu'il  est  difficile  de  se 
faire  une  idée  exacte  du  prolil.  Ce  que  l'on  peut  affirmer, 
c'est  que  cette  première  enceinte ,  remplaçant  des  lices 
en  bois  difficiles  a  établir  sur  le  roc,  était  peu  impor- 
tante. Pour  l'escarpe  et  la  contrescarpe,  on  s'était  con- 
tenté d"une  maçonnerie  de  pierres  sèches;  leurs  talus 
étaient  doux  et  la  profondeur  du  fossé,  que  l'on  ne  peut 
guère  évaluer  aujourd'hui,  devait  être  très-faible. 

Celte  tour  est  d'une  époque  évidemment  postérieure  à 
celle  où  furent  construits  les  deux  ouvrages  dont  nous 
avons  parlé  d'abord.  La  forme  ogivale  des  voûtes  suffirait 
seule  pour  l'indiquer.  Ainsi  que  nous  le  disions  tout  à 
l'heure,  ce  ne  fut  guère  qu'au  xW  siècle  qu'elle  pénétra 
dans  ces  parties  reculées  du  Roussillon.  Ce  serait  au 
plus  tôt  donc  a  celte  date,  qu'il  faudrait  faire  remonter 
la  construction  de  la  tour  qui  nous  occupe.  Un  autre 
indice,  plaidant  en  faveur  de  cette  opinion,  est  dans  le 
mode  de  parement  employé.  Il  est  beaucoup  moins  soigné 
que  dans  les  deux  ouvrages  précédents,  pour  lescpiels 
l'ouvrage  est  uniforme  et  ressemble  h  un  mur  de  jjierres 
de  taille,  pour  les  parements.  Dans  la  tour  n"  %  la 
pierre  de  taille  a  été  économisée;  on  n'en  a  mis  qu'aux 
angles  et  aux  entourages  des  portes  et  fenêtres.  Pour  le 
reste,  on  s'est  contenté  de  moellons  plus  petits  et  taillés 
moins  régulièrement.  C'est  un  style  de  décadence,  riche 
encore,  mais  toutefois  inférieur  aux  précédents.  Cette 
gradation  est  en  parfait  accord  avec  les  différentes  {)hases 
par  lesquelles  passe  la  féodalité.  Riche  d'abord  et  toute 
puissante,  elle  développe  tout  le  luxe  possible  dans  des 
constructions  qui  font  en  même  temps  son  honneur  et 


17t 

sa  force.  Mais  dans  sa  lutte  contre  l'antoritc  royale,  elle 
|)enl  successivement  du  terrain;  sa  fortune,  sa  puissance 
vont  en  diminuant  du  xiiie  au  xv^  siècle,  et  cette  déca- 
dence se  fait  sentir  progressivement  dans  les  construc- 
tions qu'elle  élève. 

Mais  revenons  à  notre  tour,  que  des  considérations 
générales  nous  ont  fait  un  instant  abandonner.  Pourquoi 
avoir  élevé  ce  monument,  alors  qu"il  en  existait  déjà 
deux  autres  si  rapprochés?  La  réponse  a  cette  question 
ne  me  send)le  pas  douteuse.  Le  château  et  la  première 
tour  sont  des  monuments  punMnent  militaires,  dcsliués 
au  Seigneur,  à  ses  hommes  d'armes,  à  ses  richesses., 
à  ses  prisonniers  :  leur  faible  capacité  suilit  à  peine  à 
tous  ces  besoins.  Il  en  est  cependant  un  autre  à  salis- 
laire ,  et  d'autant  plus  impérieux  que  la  puissance  du 
haut  baron  est  plus  menacée  :  c'est  celui  d'être  prévenu 
des  mouvements  ennemis ,  et  d'en  prévenir  les  châteaux 
voisins.  On  aurait  pu,  a  la  rigueur,  organiser  ce  service 
spécial  sur  le  donjon  du  château  ou  sur  la  première  tour; 
mais  tous  les  deux  étaient  nécessaires  h  la  défense,  et  la 
lour  n"  2  fut  construite  dans  ce  but.  Tout  vient  Tindi- 
(pier  :  son  organisation  défensive  est  faible,  toute  passive, 
et  destinée  a  une  très-petite  garnison;  sa  hauteur  est 
considérable ,  et  elle  découvre  beaucoup  mieux  le  village 
de  Serralonga  et  les  plateaux  intermédiaires  cpie  les  deux 
autres  ouvrages,  dont  elle  dépend  d'ailleurs  évidemment, 
car  ici  encore  la  porte  et  le  côté  faible  des  maçonneries, 
se  trouvent  dirigés  vers  la  tour  n"  1,  tandis  que  l'on  a 
renforcé  la  partie  opj)osée. 


172 


NOTE  SUR  UN  PHÉNOMÈNE  D'OrTIQUIÎ 

OBSERVÉ   AU   SOMMET   DU    CANIGOU , 

Par  M.  At  Ratheau  ,  capitaine,  chef  du  Génie,  à  Âmélie-les-Bains, 

membre  résidant. 


La  plupart  des  louristes  qui  tentent  l'ascension  du 
Canigou ,  cherchent  h  se  trouver  au  sommet  au  moment 
du  lever  du  soleil,  afin  de  jouir  d'ahord  de  ce  spectacle 
imposant,  et  puis  aussi  parce  que  souvent,  à  cette  heure 
matinale,  l'atmosphère  n'est  pas  encore  ohscurcie  par 
les  vaj)eurs  que  développe  la  chaleur  solaire  :  on  distin- 
gue donc  mieux  dans  le  lointain. 

Sans  doute  le  lever  du  soleil  est  un  magnifique  coup- 
d'œil  ;  mais  est-ce  la  seule  chose  a  voir  quand  on  s'élève 
ainsi  au-dessus  des  régions  habitées?  Sont-ce  bien  le 
ciel  et  sa  transparence,  ses  couleurs  vertes  et  roses, 
l'éclat  des  premiers  rayons  solaires,  émergeant  du  sein 
de  la  Méditerranée,  qui  attirent  l'homme  sur  ces  cimes 
perdues?  Ce  spectacle  et  la  vue  du  contraste  qui  existe 
entre  les  sommets  déjà  dorés  par  une  lumière  éblouis- 
sante et  l'ombre  dans  laquelle  sont  plongées  les  vallées, 
sont  faits  sans  contredit  pour  être  admirés;  mais  ils 
sont  tellement  brillants,  qu'au  bout  de  peu  d'instants 
l'œil  fatigué  cherche  à  se  soustraire  à  leur  clarté.  Alors, 
se  portant  vers  le  côté  opposé,  il  aperçoit  la  camj)agne 
magnifiquement  éclairée;  les  moindres  détails  se  dessi- 
nent avec  une  admirable  précision,  et  bientôt  le  touriste, 
emporté  par  l'intérêt  que  lui  (irésente  celle  terre  (pi'il 
habite,  ravi  de  la  ncttelé  du  coup-d'œil  et  d'une  luuiière 
qu'il  supporte  cependant  sans  fatigue,  oublie  toutes  les 
splendeurs  du  ciel. 

C'est  qu'en  effet,  pour  bien  voir  un  paysage,   il  faut 


173 

avoir  le  soleil  derrière  soi;  sinon  sa  luniiôre  éclalante 
aveugle  el  plonge  les  objets  dans  un  brouillard  lumineux 
au  milieu  duquel  ils  vous  écliappent. 

Or,  lorsque  l'on  est  au  sommet  du  Canigou,  la  vue 
est  bornée  au  nord,  à  Touest  et  au  sud-ouest,  par  une 
série  de  montagnes;  rien  ne  l'arrête  au  contraire  vers 
le  département  de  l'Hérault,  vers  une  partie  de  celui 
de  l'Aude,  vers  la  plaine  du  Roussillon  el  celle  de 
l'Ampourdan ,  c'est-à-dire  dans  les  directions  du  nord- 
est,  de  l'est  et  du  sud-est,  contrées  qui  seront  mieux 
éclairées  pour  l'observateur  le  soir  que  le  matin. 

C'est  en  suivant  cet  ordre  d'idées,  que  je  m'arrangeai 
pour  atteindre  le  but  tant  désiré ,  entre  trois  et  quatre 
heures  de  l'après-midi.  Le  temps  d'abord  très-clair  com- 
mença à  s'obscurcir  pendant  notre  séjour  au  pic;  les 
nuages  se  formaient  peu  à  peu ,  et  rampant  au-dessous 
de  nous,  le  long  des  lianes  de  la  montagne,  ils  mena- 
çaient de  nous  entourer  complètement.  Un  d'eux  surtout 
se  rapprochait  davantage;  il  s'élevait  dans  cette  ravine 
profonde  qui,  partant  de  la  pointe  Est  du  pic ,  est  l'ori- 
gine du  torrent  descendant  à  Taurinya  et  à  Saint-Michel- 
de-Cuxa  ;  la  neige,  qui  rem|)lit  toujours  le  fond  de 
celle  crevasse,  lui  communiquait  sa  blancheur. 

Nous  suivions  avec  intérêt  sa  marche  menaçante, 
lorsqu'un  phénomène  inattendu  se  présenta  à  nos  re- 
gards :  nos  corps ,  situés  entre  le  soleil  et  le  nuage , 
projetaient  sur  celui-ci  des  ombres  d'autant  plus  tran- 
chées ,  que  l'écran  sur  lequel  elles  étaient  reçues ,  otfrail 
une  surface  plus  blanche  et  plus  éclatante.  Nos  silhouet- 
Ics  nous  scudilaient  donc  ressortir  en  noir  sur  un  fond 
lumineux;  mais  ce  qu'il  y  avait  de  curieux,  de  magiiiue, 
on  peut  le  dire,  c'est  qu'au-delà  de  celte  zone  lumineuse 
de  très-peu  d'étendue,  se  déroulait  un  magnili(pie  aro-en- 
ciel ,  eiilourant  l'image  ou  ombre  du  s[)eclat<'ur  comme 
une  vérilablc  auréole.  Son    arc    mesurait    environ   270" 


174 

et  n'était  arrêté  à  droite  et  à  gauche  que  par  Tombre 
portée  de  la  montagne ,  sur  laquelle  l'image  venait  aussi 
reposer.  Nous  étions  cinq  personnes  réunies  au  pic,  et 
toutes  cinq  nous  pûmes  jouir,  pendant  plus  d'un  quart 
d'heure,  d'un  spectacle  que  nos  deux  guides  n'avaient 
jamais  aperçu,  dont  ils  n'avaient  même  jamais  entendu 
parler.  Il  n'est  pas  inutile  d'ajouter  que  si  chacun 
apercevait  distinctement  sur  le  nuage  les  ombres  de 
ses  voisins,  la  sienne  seule  était,  pour  lui,  nimbée  des 
couleurs  du  spectre. 

Il  est  impossible  de  décrire  l'espèce  de  ravissement 
dans  lequel  nous  plongea  ce  spectacle  vraiment  féerique, 
qui  finit  par  absorber  notre  attention  aux  dépens  même 
du  panorama  que  nous  étions  venus  chercher  si  haut. 
Son  explication  n'offre,  du  reste,  aucune  dilficulté,  et 
elle  est  absolument  semblable  a  celle  de  l'arc-en-ciel 
ordinaire  :  l'œil,  sommet  d'un  cône  dont  la  base  était 
l'arc-en-ciel  dessiné  à  la  surface  du  nuage,  percevait  les 
différents  rayons  de  la  lumière  décomposée  par  les  vési- 
cules globuleuses,  lesquelles,  suivant  leur  position, 
émettaient,  a  partir  de  l'intérieur,  des  rayons  successi- 
vement rouges ,  orangés ,  jaunes  ,  verts ,  bleus ,  indigo 
et  violets.  La  seule  différence  avec  le  phénomène  habi- 
tuel, provenait  de  ce  que  l'observateur  étant  très-rappro- 
ché  du  nuage  formant  écran ,  son  ombre  s'y  projetait 
d'une  manière  distincte,  et,  en  même  temps,  le  rayon 
de  l'arc-en-ciel  qui  l'entourait,  devenait  très-petit. 

D'après  ce  que  nous  venons  de  dire,  il  faut,  pour  jouir 
de  ce  spectacle,  que  le  soleil  brille ,  qu'il  y  ail  des  nua- 
ges en  dessous  du  pic,  et  enfin  que  l'observateur  soit 
juste  entre  le  soleil  et  ces  nuages.  La  réunion  de  ce 
concours  de  circonstances  sera  évidemment  très-rare; 
mais  nous  la  souhaitons  à  tous  les  touristes,  qui  rappor- 
teront alors  de  leur  ascension  un  souvenir  qui  ne 
s'effacera  jamais. 


17^ 


niËIIOIRESi 

POUR  SERVIR  A  UNE  DESCRIPTION  GÉOLOGIQUE 

DU  DÉPARTEMENT   DES   PYRÉNÉES-ORIENTALES. 


I. 

NOTICE  GÉOLOGIQUE  SUR  LES  ALBÈRES, 


Je  sciences 


Par  r,I.    A.   F.  MOOCKS,   liMiicié   es-sciences,   professeur  do 

pliysiqiies  et  naliirelles  i  Feeole  de  Soièze ,  membre  de  la  Soeiélé  jjiolo- 
giiliie  de  Franee  ,  associé  correspondant  de  TAcadémie  Impériale  des 
sciences  de  Toulouse,  de  la  Société  Impériale  d'Ajjricullure  ,  d'Histoire 
Naturelle  et  des  Arts  utiles  de  la  ville  de  Lyon  ,  de  la  Société  Linnéenne 
de  Bordeaux,  etc.,  etc. 


Albères.  —  Les  Albèi-es  forment  un  chaînon  allonijé 
qui  s'étend  du  col  du  Perthus  a  la  mer.  A  son  extrémité 
orientale,  la  petite  chaîne  montagneuse  se  termine  par 
des  escarpements  profonds  et  des  caps  aigus  cpii  baignent 
leurs  pieds  dans  la  Méditerranée.  La  mer,  à  ses  heures 
de  fureur  et  de  colère,  vient  éteindre  son  ressentiment 
sur  ces  grèves  schisteuses  ou  granitiques  dont  les  anfrac- 
tuosités  recèlent  des  baies  tranquilles  et  peu  profondes 
de  ce  côté,  comme  pour  faire  place,  entre  ses  plis,  aux 
poi)ulations  actives  qui  Tliabitent,  et  leur  donner  accès 
à  la  mer;  la  chaîne  albérienne  se  déjelte,  se  découpe  en 
anses  étroites  et  en  falaises  accidentées. 

Du  nord  au  sud,  elle  s'étend  depuis  les  premières 
rampes  moniagneuses  que  l'on  gravil  près  d'Argelès-sur- 


176 


Mer,  jusqu'au  petit  golfe  de  Roses,  en  Espagne.  La 
région  occidentale  des  Albères  ne  présente  point,  du 
nord  au  sud,  un  développement  aussi  considéralile  que 
la  partie  de  la  chaîne  qui  se  limite  a  la  mer.  Les  divers 
massifs  pyrénéens  se  rattachant  au  Canigou,  et  qui  acci- 
dentent si  étrangement  le  paysage  aux  environs  de  Cérel 
et  d'Arles ,  se  soudent  aux  Albères  dans  cette  portion 
du  chaînon.  Les  rampes  rapides  et  grandement  inclinées 
se  succèdent  du  Boulon  au  Porthus;  mais,  à  partir  de  la 
Junquère  (Espagne),  elles  perdent  rapidement  de  leur 
inclinaison  :  la  pente  générale  du  terrain  va  en  dimi- 
nuant jusqu'à  la  plaine  de  Figuères. 

Cependant,  sur  le  versant  espagnol,  se  montrent  les 
escarpements  les  plus  abruptes  et  les  plus  sauvages,  et 
si  le  voyageur  ne  doit  ni  les  tourner  ni  les  franchir, 
c'est  que  la  grande  route  est  tracée  dans  une  dépression 
naturelle  du  sol ,  sur  les  dernières  ondulations  du  col 
du  Perthus. 

En  suivant  la  route  de  la  Junquère  h  Figuères,  l'ob- 
servateur voit  a  sa  gauche  les  roches  albériennes  prendre 
des  formes  pittoresques;  tantôt  elles  affectent  l'aspect 
de  murs  bizarrement  démantelés;  tantôt  elles  se  dessi- 
nent au  lointain  comme  une  suite  d'immenses  châteaux- 
forts,  ruinés  par  le  temps 


A  l'ouest  du  col  du  Perlhus  se  développent  les  massifs 
montagneux  de  Riunoguès,  de  Maureillas ,  de  Céret  et 
d'Arles,  qui  vont,  en  se  ramifiant,  se  rattacher  au 
Canigou,  qui  les  a  très-sensiblement  influencés  en  pre- 
nant son  relief  actuel. 

La  région  montagneuse  de  la  haute  vallée  du  Tech, 
si  agreste ,  si  verte  et  si  fraîche ,  que  de  hautes  monta- 
gnes abritent  contre  les  vents  violents  qui  lourmenlent 
la  plaine,  prend,  d'une  manière  grossière  pourtant,  une 


177 

loi  11113  courlio,  doiil  le  Tech  suit  un  des  diamètres,  à 
parlir  de  la  Preste  à  Palalda. 

Au  sud  de  cette  petite  et  pittoresque  région  pyré- 
néenne, se  montrent  les  montagnes  de  Coustouges;  celles 
de  La  Manère,  de  Cam|)redon  et  de  San-Juan,  avec  leurs 
granités  variés ,  leur  terrain  de  transition  et  leurs  grès 
rougeâtres,  triasiques  ou  lionillers  et  crétacés. 

Au  nord,  s'élèvent  en  pyramides  aiguës,  les  massifs 
de  Cortsavy  et  de  Moniholô  qui  forment,  dans  cette  al- 
pestre contrée,  les  rampes  limites  du  Canigou 

La  petite  chaîne  des  Albères  se  dirige  ouest,  un  peu 
nord,  est  un  peu  sud,  ou  sensiblement  0.  oO"  JN.-E. 
30°  S.  Elle  est  formée  d'un  axe  granitique,  dont  le 
soulèvement  a  relevé  et  déjelé  les  couches  paléozoïques 
(|ui  s'ap|)uient  avec  des  inclinaisons  diverses  sur  ses 
deux  versants  '''. 

La  forme  générale  des  Albères  est  celle  d'un  cône 
surbaissé,  dont  les  faces  latérales  sont  fortement  inclinées 
sur  l'axe  du  solide,  et  comme  écrasées;  en  sorte  que  la 
base,  au  lieu  d'être  un  cercle,  a  |)ris  la  configuration 
d'une  elli|)se  fort  allongée  dont  le  grand  axe,  ou  le  plus 
grand  diamètre ,  se  dirige  de  l'est  un  peu  nord  à  l'ouest 
un  peu  sud.  Chaque  petit  massif  du  chaînon  ,  pris  en 
particulier,  alfecte  bien  la  forme  conique;  mais  l'ensem- 
ble de  la  chaîne  présente  une  ligure  plus  compliquée. 

La  chaîne  des  Albères  est  fracturée  et  déchirée  par 
des  fentes  transversales  où  se  montrent  de  petits  vallons 
charmants,  qui  sont  autant  de  riches  et  frais  vergers. 
Des  ravins  rapides  descendent  en  limpides  cascades,  des 

(I)  .Pai  i-ccomiii  (|tie  les  principales  crêtes  ou  aréles  des  Albères,  avaient 
les  (liieelioiis  siiivaiiles  :  1°  crête,  du  Pertlius  a  Harasens,  0.  50"  N. -!•!., 
SU"  S  ;  2"  (lu  iioril  du  bois  de  llaoaseus,  idem;  5°  créle  à  l'est  de  eeil,'  ci, 
direction  O.-!].;  'c  cnUe  du  pic  de  Salfare  à  les  l'ils,  0.  GO"  N.-E.  tiO"  S.; 
o"  ciéle  de  lu  tiiui'  de  Cnroch,  O.-K. 

19 


178 

hauteurs  où  ils  naissent,  pour  aller  se  jeter,  ceux  du 
versant  septentrional,  dans  le  Tech  ou  la  mer,  tandis 
que  ceux  du  versant  opposé  vont  porter  leurs  eaux  ii  la 
Mouga.  Ces  petites  vallées  transversales,  sont  fortement 
encaissées  h  leur  origine;  le  ravin  qui  en  parcourt  l'axe 
y  trouve  juste  la  place  pour  étaler  ses  eaux.  Puis,  elles 
vont  en  s'évasant  a  mesure  qu'elles  s'éloignent  des  som- 
mités montagneuses  ;  en  sorte  qu'on  pourrait  les  com- 
parer à  la  section  horizontale  d'un  immense  entonnoir 
couché,  dont  la  houche  ou  la  grande  ouverture  évasée 
regarderait  le  Tech,  tandis  que  le  tube  ou  la  petite 
ouverture  serait  appuyée  contre  les  rampes  albériennes. 

Les  petites  vallées  transversales,  sur  le  versant  français 
comme  sur  le  versant  espagnol ,  sont  sensiblement  per- 
pendiculaires à  la  direction  générale  du  chaînon;  en 
négligeant  les  mille  sinuosités  qui  les  accidentent,  elles 
se  dirigent  du  sud  au  nord. 

La  série  secondaire  manque  complètement  dans  les 
Albères  (^*.  Je  n'y  ai  point  observé  aucun  membre  des 
terrains  triasiques,  jurassiques  ou  crétacés. 

Dans  les  vallées  du  Tech  et  de  la  Mouga,  les  terrains 
tertiaires  les  plus  récents  s'a[)puient  sur  les  premières 
strates  schisteuses  de  la  chaîne;  on  les  voit  surtout  bien 
à  découvert  a  Nidolères,  Banyuls-dels-Aspres,  le  Bou- 
lon, Vilellongue-dels-Monts,  etc.,  partout  on  le  sol  a 
été  profondément  raviné.  Dans  la  vallée  de  la  ÎMouga,  en 
Es[)agne,  se  montrent  aussi  les  couches  fossilifères  de 
Nidolères,  de  Nelïiach.  iMais  tous  les  étages  tertiaires, 
situés  à  un  niveau  inférieur  a  ces  dépôts  subapennins  ou 
posl|tyrénéens,  manquent  complètement  dans  les  vallées 
du  Houssillon.  On  n'y  trouve  rien  que  l'on  puisse    assi- 

(I)  Je  110  ranjje  pi)iiit  dans  les  Ailii'i'os,  les  lii'piMs  secoiidalii  s  d'Ainclii'- 
les-lJains,  do  La  iMani'i'o ,  do  ('(lustoiigos  <'l  du  lias'iii  siipt'i-ioîir  do  la 
Miuii'.a  ;  les  AIIhmos  ,  |ioiii'  nous,  s'iMoi'.doiit  du  cid  du  l'ciiliin  à  la 
Mi'dilcnanoo. 


179 

miler  aux  couches  éocéniques  el  miocéniques  de  l'Aude, 
delà  Provence,  etc.;  pour  trouver,  dans  le  pouitour 
méditerranéen,  des  sédiments  tertiaires  l'ranclicment 
contemporains  de  ceux  des  Pyrénées-Orientales,  il  faut 
aller  jusqu'en  Italie,  aux  pieds  des  Apennins.  Cependant, 
on  connaît  dans  l'Hérault ,  dans  la  Provence  et  dans  la 
vallée  du  Rhône,  des  dépôts  que  l'on  rapporte  générale- 
ment à  l'époque  suhapennine.  Los  mouvements  du  sol, 
lents  ou  hrusipies,  qui  ont  l'ail  émerger  les  dé[)ôts  de 
l'ancien  pliocène,  ont  affecté,  d'une  manière  sensible,  le 
chaînon  des  Albères.  On  reconnaît  h  sa  base  des  traces 
évidentes  de  ce  mouvement.  Cette  dislocation  a  produit 
cette  ride  de  collines  sableuses  ou  argileuses,  qui  longe 
les  deux  rives  du  Tech,  en  s'éievant  jusqu'à  la  hauteur 
de  Vilellonguc-dels-Monts.  Ces  collines,  allongées  par 
leurs  caractères  lithologi(iues  et  orogra|)hiques,  se  dé- 
tachent parfaitement  de  la  partie  centrale  de  la  chaîne, 
plus  vieille  (ju'elles.  L'effort  intérieur,  qui  s'est  propagé 
le  long  de  la  Méditerranée,  avec  des  intensités  variables, 
selon  les  résistances  des  couches  qui  le  transmettaient, 
s'est  en  partie  amorti  contre  les  roches  solides  el  com- 
pactes qui  forment  la  base  des  Albères  déjà  montueuses 
à  cette  époque 

Constitution  géologique.  —  Les  terrains  de  transition 
ou  paléozoïques  et  les  roches  azoïques,  sont  les  seuls 
dépôts  slratiliés  (jui  se  montrent  sur  les  hauteurs  des 
Albères.  Ces  divers  dépôts  ont  été  soulevés  par  la  dislo- 
cation du  sol, qui  adonné  une  première  forme  au  chaînon. 
Ce  sont  des  gneiss,  des  micaschistes,  des  schistes  ou 
pli\llades  aux  couleurs  vertes  ou  bleues,  el  des  calcaires 
cristallins.  On  y  trouve,  associés  à  ces  roches  ou  au 
granilo ,  de  la  tourmaline  cristallisée,  des  crisi;uix  de 
feldspath,  des  grenats  ,  de^  lames  de  mica,  du  (|uarlz 
hyalin ,  du  quartz  compacte  el  des  njinéraux  métallifères. 


180 

Pour  étudier,  daus  un  ordre  régulier  et  rapide,  la  cons- 
titution géognostique  du  chaînon  des  Albères,  suivons 
les  diverses  couches  slratifiées  qui  se  montrent  à  décou- 
vert a  sa  base,  jusqu'au  granité  qui  les  a  soulevées. 

L'observateur  qui  pénètre  |)Our  la  première  fois  dans 
les  petites  vallées  transversales  des  Albères,  est  frappé 
de  l'ordre  qui  règne  dans  la  disposition  de  ces  couches, 
dans  la  symétrie  de  leurs  plans.  Aux  dilférentes  vallées, 
les  mêmes  dépôts  se  retrouvent,  presque  à  la  même 
hauteur,  avec  des  caractères  identiques  de  composition 
chimique  et  de  relations  stratigraphiques.  Chacune  d'elles 
représente  en  raccourci,  comme  en  miniature,  la  struc- 
ture générale  du  chainon;  de  sorte  que  l'étude  complète 
d'une  petite  vallée  fait  connaitre  la  constitution  de 
l'ensemble. 

A  l'aspect  de  ces  masses  rocheuses  aux  lignes  brisées, 
si  fièrement  accusées,  on  dirait  que  tout  est  confusion; 
cependant,  c'est  la  que  l'œil  du  géologue  signale 
l'harmonie  et  l'ordre  le  plus  constant.  Ces  troubles  ap- 
parents dérivent  des  lois  que  la  nature  a  inscrites  dans 
ses  œuvres  en  caractères  immenses. 

Transportons-nous  d'abord  dans  la  petite  vallée  de  La 
Roque-d'Albères,  au  centre  du  chainon;  pénétrons  dans 
ces  gorges  étroites  et  |)rofondes  comme  des  abimes 
creusés  dans  la  roche  vive,  flemontons  le  cours  de  la 
rivière  qui  passe  à  l'ouest,  au  pied  de  la  colline  qui 
porte  la  tour ,  l'ancien  chàteau-fort  et  le  village  de  La 
Roque. 

Ce  village  est  bâti  entre  deux  hautes  collines  diluvien- 
nes, formées  d'argiles  compactes,  plastiques  à  teintes 
jaunâtres,  couronnées  par  des  dépôts  de  cailloux  quart- 
zeux  ou  graniti(]ues,  descendus  des  parties  élevées  des 
Albères.  L'une  de  ces  deux  collines,  la  plus  occidentale, 
porte  une  grandi;  portion  du  village;  celle  qui  se  déve- 
loppe au  sud  et  à  l'orient ,    beaucoup    plus   élevée,    pré- 


181 

sente,  sur  sa  liaiiteur,  une  surface  sensiblemenl  lioii- 
zontalc,  ou  peu  inclinée,  où  se  trouvent  de  riches 
jardins  Iruitiors. 

[.es  dépots  détritiques,  diluviens  on  glacières,  se  mon- 
trent partout,  recouvrant  les  sciiistes  anciens,  dans  ces 
vallées  si  intéressantes  et  si  peu  connues  des  géologues. 

Kn  sortant  du  village  pour  se  diriger  vers  le  sud ,  la 
première  roche  que  l'on  trouve  en  place,  est  le  schiste 
de  transition ,  qui  se  montre  dans  toutes  les  dépressions 
du  sol  et  dans  tous  les  points  assez  profondément  ravi- 
nés pour  mettre  la  roche  à  découvert. 

Ce  schiste  ancien,  bleuâtre  ou  verdàtre,  par  ses  tein- 
tes obscures,  tranche  comme  une  ombre  portée  sur  le 
fond  de  ce  paysage  éblouissant  de  lumière  et  de  verdure. 
La  roche  se  nuance  parfois  de  couleurs  rougcâlres  ou 
ocreuses,  qui  dénotent  la  présence  du  fer  et  des  pyrites 
en  décomposition.  Sur  les  tranches  des  anieurements,  le 
schiste  prend  une  texture  compacte;  il  s'imprègne  d'élé- 
ments qnarizeux  qui  augmentent  la  dureté  et  fa  solidité 
de  la  roche. 

Ces  couches  de  sciiistes  ne  se  divisent  pas  très-aisé- 
ment en  feuillets;  la  division  de  ces  plaijues  tégulaires , 
si  bien  apparentes  ailleurs,  dans  d'autres  dépôts  schis- 
teux, est  masquée  ici,  soit  par  des  contournements  ou 
des  plissements  qui  affectent  profondément  les  couches, 
en  leur  imprimant  des  caractères  extérieurs  parliculiers, 
soit  par  des  décompositions  sur  place  de  la  roche  schis- 
teuse. 

Au  point  que  nous  venons  de  signaler,  le  schiste  de 
transition  plonge  de  60"  vers  le  X.  iO"  E.  On  le  retrouve 
conservant  ces  mêmes  caractères  stratigraphiques  dans 
les  parties  inférieures  de  tous  les  ravins  profonds  (pii 
avoisinent  La  Roque.  Que  l'observateur  se  rende  au 
bois  de  M.  Malsach,  ou  au-delà  de  la  métairie  de 
M.  Bertrand,  etc.,  partout  le  schiste  lui  ajqiaraitra  com- 


182 

me  formant    la    couche  supérieure   dos  terrains  anciens 
dans  cette  partie  des  Albères.  Kn  remontant  le  cours  de 
la  rivière  de  La  Uo(|ue,  on  voit  le  schiste  alllourer  par- 
tout jusqu'à  la  hauteur  de  la  Font  de  l'aram.  Au  gouflre 
du  findl  (terme   du   pays),    la   gorge,    déjà    fortement 
encaissée  en  sortant  du  village,  devient,   par  des  escar- 
pements schisteux,  impraticable    à    tous    piétons    autres 
que  les  hardis  hahitanis  du  pays.  Il  faut  alors  (juiltcr  le 
lit  du  ravin  pour  les  petits  sentiers  escarpés  qui  courent 
en  zigzag  sur  les  deux  rives;  un  pont,  aussi  simple  que 
pittoresque,  les  réunit  au-dessus  du  gouffre  du  Tinell; 
deux  longues  poutres,  jetées  sur    un    mur   naturel    que 
prétendent  soutenir  deux   assises    parallèles    de   j)ierres 
cimentées,    réunissent    les    deux    bords    opposés    de  la 

rivière. 

Mais  l'art  qu'aurait-il  à  faire  ici?  La  nature  a  tout  mis 
en  oeuvre  pour  imprimer  à  ces  lieux  une  physionomie 
de  grandeur  et  de  solitude  qui  porte  l'esprit  à  la  médi- 
tation. Les  âmes  qui  aiment  à  s'isoler,  à  vivre  en  elles, 
qu'elles  aillent  habiter  ces  retraites  si  vertes  et  si  soli- 
taires des  Albères  !  On  va  souvent  chercher  en  Suisse 
des  sites  charniants,  gracieux  ou  coquets;  les  amants 
de  la  belle  nature,  les  artistes,  les  poètes,  les  naturalis- 
tes, trouveraient  ami)lcnient  à  moissonner  dans  nos 
belles  montagnes,  moins  bruyantes  que  les  grands  foyers 
de  réunion  du  centre  de  la  chaîne  des  Pyrénées. 

J'ai  revu ,  après  une  absence  de  seize  années,  ces 
charmants  vallons  des  Albères;  enfant  de  ces  monts,  je 
leur  rends  aujourd'hui  un  juste  tribut  d'admiration  et 
d'amour  lilial! 

Au  gouffre  du  Tinell,  le  schiste  s'incline  un  peu  moins 
qu'à  la  sortie  du  village  de  La  Roque  ;  il  plonge  vers  le 
N.-E.  avec  une  déclinaison  d'environ  iu";  il  est  recou- 
vert par  de  puissants  dépôts  détritiques,  formés  de  cail- 


loiix  (Je  {,'i;iiiilc,  gneiss,  (inarlz,   schistes,    mais  siiriuut, 
granité  et  gneiss. 

I/arrangement  de  ces  caillonx  indicpie  qu'ils  se  sont 
déposes  en  dehors  d'une  eau  tran{|uille.  Ils  sont  placés 
sans  ordre,  sans  stratillcation  les  uns  par  rapport  aux 
autres;  les  gros  sont  mélangés  avec  les  petits,  lis  sont 
légèrement  arrondis,  leurs  angles  un  peu  émoussés.  Mais 
à  leur  forme,  on  voit  fpi'ils  n'ont  pas  été  long-temps 
roulés.  Ce  sont  des  dépôts  plutôt  glacières  (jue  diluviens. 

.Jusqu'à  ce  que  de  nouvelles  études  aient  décidé  de 
leur  origine,  et  pour  ne  rien  préjuger,  j'ap|)ellerai  dépots 
détn'liqiics  ces  masses  de  cailloux  et  de  déhris  de  roches 
qui  recouvrent  les  schistes  et  les  micaschistes  dans  les 
petites  vallées  transversales  des  Alhères. 

Sur  la  rive  gauche  de  la  rivière  (de  La  Roque),  ces 
dé|)ôls  atteignent  une  épaisseur  considérable;  une  petite 
conduite  d'eau,  qui  les  coupe  vers  leur  hase,  permet  de 
les  suivre  sur  une  longueur  (|ui  laisse  ai)ercevoir  les 
divers  accidents  de  la  roche.  A  leur  surface,  ils  sont 
colorés  en  rouge  ocreux  })ar  un  sable  ferrugineux;  par- 
tout on  voit  suinter,  h  travers  ces  couches,  des  eaux 
minérales  acidulés  avec  des  principes  ferrés. 

La  rivière  a  enlevé ,  dénudé  ces  puissants  dépôts  dé- 
lriti(]ues;  elle  a  usé,  limé,  corrodé  le  schiste,  rompu 
et  emporté  les  solides  barrages  qu'il  formait  ;  par  son 
poids,  elle  a  miné  la  roche  solide  et  creusé  dans  sa 
masse  une  cavité  arrondie  comme  une  cuve  (de  là,  le 
nom  de  tinell,  tina ;  tonneau,  cuve). 

Lors(|ue  les  eaux  gonllent  le  torrent,  les  blocs  de  gra- 
nité descendent  des  hauteurs  de  la  montagne ,  violem- 
ment poussés  j)ar  les  eaux;  ils  ne  s'arrêlenl,  dans  le  lit 
de  la  rivière,  ([ue  lorsipie  la  pente  devient  moins  rapide. 
Telle  est  l'origine  de  ces  lourdes  massesde  granité,  dont  le 
volume  arigmenlc  à  mesure  que  l'on  s'élève,  et  que  l'on 
voit  dans  toutes  les  gorges  étroites  des  Albèrcs. 


184 

Le  schiste  paléozoïqiie,  d'un  gris  bleuâtre  en  masse, 
donne,  par  la  trituration,  une  poudre  grise,  qui,  à  une 
forte  loupe,  laisse  apercevoir  des  cristaux  blanchâtres, 
agglomérés  au  milieu  d'une  poussière  grisâtre.  Os 
grains  de  quartz  sont  beaucoup  |»ius  apparents  lorsqu'on 
a  traité  le  schiste  pulvérisé  |)ar  l'eau  régale,  et  qu'on  a 
desséché  le  résidu  solide;  j'en  ai  isolé  d'assez  gros  pour 
rayer  le  verre. 

La  liqueur  llltrée  précipite  abondamment  en  bleu  de 
Prusse  par  le  ierro-cyanure  de  potassium  ;  par  la  potasse 
ou  l'oxyde  d'ammonium,  elle  donne  un  précipité  rougeàtre 
de  sesquioxyde  de  fer. 

Quand  tout  le  1er  a  été  précipita;,  la  liqueur  Idtrée  se 
trouble  par  l'acide  sulfurique,  et  laisse,  après  im  re[)OS 
de  quelques  heures,  un  dépôt  blanc  ;  la  même  liqueur 
précipite  en  noir  par  le  sulfure  d'ammonium  (sulphydrate 
d'ammoniaque). 

Le  schiste  paléozoique  des  Albèrcs,  outre  la  silice  et 
l'alumine  combinées  qui  forment  la  base  essentielle  de 
celte  roche ,  renferme  aussi  de  la  silice  libre ,  du  Ter  et 
des  traces  de  plomb  probablement  à  l'état  de  sulfure. 
Mais  dans  réchanliilon  que  j'ai  soumis  à  l'analyse,  même 
a  la  loupe,  je  n'ai  distingué  aucun  vestige  de  galène  en 
liberté;  à  peine  y  ai-je  aperçu  quelques  cristaux  micros- 
copiques de  pyrite  de  fer.  Je  n'y  ai  trouvé,  non  plus, 
aucune  trace  d'êtres  organisés 

A  la  hauteur  de  la  source  minérale  acidulo-ferrugi- 
neuse,  connue  dans  le  pays  sous  le  nom  de  Font  de 
l'arani  ('',  commencent  à  si;  montrer  les  roches  azoiques 
stratifiées.  Les  micaschistes  resserrent,  de  [ilus  en  plus, 

(I)  Ce  qui  si(;iiilie  l'oiitaini' lie  riii\ic.  Celle  source,  foiliMneiit  iliai|;ée 
de  principes  leniigiiieut ,  (loiiiio  un  dé[)ol  rougc-ocieux,  (jin'  les  Iiai>ilai.ls 
(lu  pavs  (loiveiil  avoir  \iy\^  pnur  ilii  cuivre  faram). 


18,-) 

le  lit  delà  rivière, entre  leurs  masses  solides,  coinnie dans 
un  élau;  la  gorge  va  se  rétrécissant;  les  deux  rives  escar- 
pées semblent  vouloir  se  toucher  comme  pour  se  réunir 
encore  une  fois,  malgré  le  soulèveuient  qui  les  a  sépa- 
rées. I.e  |)aysage  devient  de    plus   eu    plus   sévère;    en 
s'élevant,  la  solitude  se  fait  autour  do  soi;  les  bruits  de 
la  plaine,  les  sons  du  village  n'arrivent  plus  à  l'oreille; 
seul  le  choc  de  l'onde  contre  le  rocher,  ou   son  heurte- 
nienl  contre  elle-même,  lrou])leut  le   calme  imposant  de 
celte  sévère,  mais  charmante  Thébaïde.  Parfois,  pourtant, 
le  marlin-pècheur  (rt/(7Y/o   ispida ,  \àu.),    le    merle   des 
rochers  {tnrdiis  saxatilis,  Lath.),   la  grive  {lurdus  musi- 
CHs,  Lin.),   le    bécasseau    coconrli  [Iringua    suharcuala, 
Tcm.),  le  roitelet  (regulus  cristatus,  Lath.),   marient,  à 
celle   de    l'onde,    leur   voix  aiguë  ou  harmonieuse.  La 
soiH'ce  de  Vamni  sourd  au  pied  d'un  escarpement  verti- 
cal, constitué  par  un  épais  dépôt  détritique,  qui  repose 
sur  le  micaschiste.  L'eau  minérale  arrive  à  l'extérieur  par 
une  galerie  profonde,  (jui  parait  être  une  ancienne  re- 
cherche de  mine;    du   reste,    on    trouve,  sur  |)Iusieurs 
points  de  la  vallée,  au  contact  du  schiste  ou  du  mica- 
schiste et  des  roches  granitiques,  des  traces  d'anciennes 
exploitations  métallifères.  Ces  cavités  souterraines,  que 
l'imagination  a  |)euplées  et  poétisées,  jjassent,  auprès  de 
vieilles  feunnes  du  pays,  pour  le  séjour  des  fées  malfai- 
santes I  ciicitidada-'i). 

La  légende  locale  raconte  des  récits  merveilleux ,  (jui 
paraissent  autant  d'exagérations  [>oéti(|ues  de  l'histoire 
métallurgi(iue  de  celte  région.  Dans  ces  fées,  qui  vivent 
sous  terre,  ne  reconnait-on  pas  un  peuple  de  mineurs, 
peut-être  étrangers  à  la  contrée? 

La  première  roche  az<tïque  stratifiée  qui  se  montre  à 
découvert,  à  la  fontaine  de  Vinaui,  recouvrant  imuK'dia- 
tement  le  schiste,  est  une  espèce  de  gneiss  ou  d"hyalo- 
micle  essentiellement  composé    de    ([uailz    et    ;1('  mica. 


18fi 


A  la  loupe ,  on  distingue  très-bien  le  (juarlz  en  gros 
grains  agglutinés  ou  en  cristaux  à  angles  émoussés,  avec 
l'éclat  de  la  silice  cristallisée  et  demi-transparenle.  Cette 
roche,  grossièrement  pulvérisée,  donne  une  poudre  qui 
parait,  à  la  loujie,  comme  un  beau  sable  blanc  quart- 
zeux.  Un  ciment  ordinairement  rougeàtre  unit  les  élé- 
ments qui  la  constituent;  à  peine  on  y  distingue  des 
traces  de  felspath. 

Le  mica  est  blanc,  d'un  aspect  argentin,  en  petites 
lamelles  nacrées  ;  mais  il  est  peu  abondant.  A  la  simple 
vue,  la  roche,  lorsqu'on  l'entaille  au  vif,  brille  d'un 
certain  éclat,  que  l'on  serait  tenté  d'attribuer  aux  lames 
de  mica.  Mais  un  examen  attentif,  à  l'aide  d'un  instru- 
ment grossissant,  montre  que  ces  rellets  lumineux  sont 
dus  surtout  aux  facettes  cristallines  du  quartz. 

Sur  certains  points,  l'élément  ferrugineux  domine; 
alors  la  roche  prend  une  teinte  ocreuse  ou  rougeàtre  qui 
indique  sulïisamment  une  modilication  dans  sa  composi- 
tion. Parfois  elle  passe  à  un  gneiss;  mais  jamais,  cepen- 
dant, elle  n'affecte  franchement  la  forme  et  la  structure 
de  cette  dernière  roche  granitique. 

A  l'aide  d'une  bonne  loupe  montée,  j'y  ai  distingué, 
parfaitement,  des  cristaux  très-petits,  groupés,  d'un  vert 
très-franc,  que  j'ai  cru  devoir  rai)porter  à  rémeraude(?). 
J'y  ai  encore  vu  des  cristaux  noirs,  excessivement  petits, 
dont  je  n'ai  pu  déterminer  l'espèce  minérale. 

Avant  d'arriver  a  la  hauteur  de  la  fontaine,  dite  de 
Las  Ballayras ,  la  roche  quartzeuse  que  je  viens  de 
décrire  passe  à  un  micaschiste,  incliné  comme  elle  vers 
le  A.  ()0o  E. 

Cette  dernière  roche  est  fossile,  feuilletée,  un  peu 
friable  à  la  surface;  les  petites  tablettes  qui  résultent  de 
sa  division,  se  brisent  facilement  lorsqu'on  les  presse 
entre  les  doigts ,  en  les  faisant  porter  à  faux  sur  l'un  de 
ces  organes,  et  en  ap{iuyanl  sim'  l'cxln'mité  opposée. 


187 

Sa  couleur  générale  est  le  hianc  gris,  mélangé  de 
teintes  jaunâtres  ou  vcrdàtres.  Par  ses  fissures,  posté- 
rieurement à  son  dépôt,  a  pénétré  un  principe  lérrugi- 
ncux  (pii  colore  quci(pies-uns  de  ses  points  d'une  ma- 
nière jiius  vive.  A  la  loupe  se  montrent  le  (piartz  et  le 
mica,  presque  avec  tous  les  caractères  de  la  roche  pré- 
cédente, qui,  du  reste,  ne  diffère  de  ce  micaschiste  que 
par  le  manque  de  fissililé. 

En  attaquant,  par  l'acide  nitrique  à  froid,  le  mica- 
schiste grossièrement  pulvérisé,  on  constate  une  légère 
effervescence.  En  examinant  le  phénomène  à  la  loupe, 
on  reconnaît  que  l'attaque  nitricjue  n"a  lieu  que  sur  les 
points  colorés  en  rouge  |)ar  la  présence  du  iér,  qui  se 
trouve  donc  h  l'état  de  carbonate  dans  cette  roche. 

La  dissolution  acide  précipite  en  hieu  par  le  ferro- 
cyanure  de  potassium;  à  chaud,  la  réaction,  sans  déga- 
gement de  vapeurs  rulilantes,  est  bien  autrement  active 
qu'à  la  température  ordinaire,  et  le  précipité  produit  par 
le  prussiate  jaune  de  potasse,  Irès-volumineu.x. 

Les  schistes  et  les  micaschistes,  |)ar  leur  déc()nq)()si- 
tion  et  leur  mélange  avec  les  détritus  des  matières  orga- 
nicpies,  donnent  un  sol  actif,  à  pentes  inclinées,  où 
croissent  et  se  développent  rapidement  des  essences  très- 
variées,  le  châtaignier,  le  micocoulier,  le  chêne-liége,  etc. 

L'observateur  qui  [)art  de  la  plaine  pour  s'élever  vers 
les  sommités  des  Albères,  passe  à  travers  |)lusieurs 
zones  végétales  bien  distinctes.  Uans  les  parties  les  plus 
basses  et  les  plus  chaudes  des  vallées  de  La  lîoipie, 
Sorède,  Argelès-sur-Mer,  etc.,  se  montrent  les  oliviers 
au  téuillage  jiâle;  puis,  mi  peu  plus  haut,  les  châtaigniers 
et  les  micocouliers  aux  liges  élancées;  ensuite  vieniienl 
les  chénes-liéges,  les  chènes-verts;  enlin,  les  hêtres  qui 
vivent  dans  les  forêts  des  régions  élevées  et  froides  du 
chaînon. 

A  partir  de  la   hautetir  de  Las   ndllai/nis,    juscprà   la 


188 

prise  d'eau  (|iii  alinienle  les  moulins    do    La  Uoque,  ou 
voit  constamment  allleurer  le  micaschiste  ou  le  gneiss. 

Ce  gneiss,  qui  a  une  tendance  à  se  diviser  en  gros 
feuillets  ou  en  tables  épaisses,  par  ses  brisures  ou  par 
les  dislocations  de  ses  plans,  forme  h  la  prise  d'eau 
même  des  escarpements  rapides  et  pittoresques.  Sur  la 
rive  gauche  de  la  rivière  s'élèvent  des  masses  gneissiques 
passant  à  un  granité  stratifié,  dont  les  pentes  verticales 
montrent  les  précipices  connus  dans  le  pays  sous  le 
nom  d'Esanraitcas. 

Le  torrent,  encaissé  entre  ces  roches  et  celles  iden- 
tiques qui  se  dressent  sur  la  rive  droite,  pour  fermer 
les  rampes  de  la  Sparmguera ,  semble  seul  conmiander 
dans  ces  lieux  abruptes.  Au  milieu  de  cette  nature  sau- 
vage, sa  voix  domine  toute  autre  voix. 

Et  c'est  pourtant  sur  ces  cflVayants  précipices,  sur  les 
lianes  escarpés  de  ces  gorges  profondes  et  étroites ,  que 
sont  indistinctement  tracés  les  sentiers  glissants  où  les 
intrépides  habitants  des  Albères  marchent  avec  la  même 
assurance  qu'un  voyageur  sur  une  large  route  horizontale  ! 

A  partir  de  là,  la  gorge  se  resserre  brusquement;  les 
deux  rives  opposées  se  touchent  presque  ;  à  peine  une 
distance  de  quelques  mètres  sépare  leurs  bases.  On 
est  en  plein  dans  la  montagne;  le  cours  du  ravin  ne 
peut  être  plus  longtemps  remonté;  on  le  voit  tomber,  de 
cascade  en  cascade,  en  étalant  ses  eaux  en  blanches 
gerbes  juscpi'aux  environs  de  liocabclla. 

Le  gneiss  ou  granité  stratifié  que  je  viens  de  signaler, 
est  fortement  disloqué  ;  l'ensemble  des  couches  incline 
vers  le  nord;  (|uelques-une^  sont  verticales,  d'autres  ont 
été  renversées  et  se  montrent  avec  une  inclinaison 
anormale  vers  le  sud. 

Sur  certains  points,  le  gneiss  passe  au  micaschiste 
comme  on  l'observe  en  grimpant  vers  les  hauteurs  de  la 
métairie  de  la  Spimvguira. 


189 

On  distingue  parfailemenl,  même  à  Tœil  nu,  les 
divers  minéraux  qui  constituent  cette  roche  granitique. 
Le  mica ,  disposé  en  rangées  sensiblement  parallèles,  est 
noir  ou  gris-noiràtre;  [)arlois  il  prend  des  reflets  d'un 
vert  très-pâle. 

Le  (juartz  s'y  montre  avec  son  aspect  vitreux  et  trans- 
lucide ;  il  est  relativement  peu  abondant.  Le  (eldspath 
ortliose  est  le  minéral  dominant;  il  prend,  en  général, 
la  structure  lamelleuse.  Ses  lames  nacrées,  blanches 
ou  légèrement  colorées  en  jaune-terne,  paraissent  à  la 
loupe  comme  nn  groupement  de  petits  cristaux. 

Lorsqu'on  veut  atteindre  la  hauteur  de  la  Sparraguera, 
il  faut  monter  à  pic  le  talus  de  la  montagne,  à  travers 
les  bois  et  les  houx  (ilex  (((juifolium)  ou  du  chêne-vert. 
Après  une  courte ,  mais  pénible  ascension ,  on  arrive  à 
un  étroit  sentier,  tracé  sur  le  liane  de  la  montagne. 

C'est  au  milieu  de  cette  alpestre  voie  qu'allleure  un 
gneiss  qui  passe,  par  l'altération  de  ses  éléments,  à  une 
pegmatilé  grossière.  Le  quartz  y  est  devenu  opaque,  le 
feldspath  blanc,  d'un  éclat  mat  et  sans  struct(u-e  lamel- 
leuse bien  distincte.  En  suivant  le  petit  sentier  qui  court 
parallèlement  à  la  rivière  sur  la  rive  droite ,  on  atteint 
bientôt  un  granité  porphyroïde  qui  s'est  soulevé  à  tra- 
vers le  micaschiste  et  le  gneiss.  Par  son  épanchement,  il 
a  dérangé  la  direction  primitive  de  leurs  couches,  qui 
plongent  d'environ  (jo^  vers  le  S.-U.,  tandis  que  leur 
plongement  normal  est  vers  le  N.  ou  le  N.-E.  Ce  gra- 
nité olîre  une  structure  toute  particulière  ;  certaines 
parties  de  sa  masse  sont  constituées  par  un  granité  à 
petits  grains  avec  mica  noir,  l'eldspatii  iamelleux,  blanc, 
gris  et  quartz  vitreux  semi-transparent.  Mais  à  côté 
de  ces  éléments,  assez  linemenl  divisés,  se  montrent 
do  gros  cristaux  d'orthose,  diiii  blanc-jaunàtrc  ou 
d'un  gris  très-mat,  enclavi's  au  sein  de  la  pâte  grani- 
toïde. 


190 

A  la  loupe,  on  y  reconnaît  des  cristaux  excessivement 
petits,  de  diverses  substances  niétailiiëres. 

En  suivant  le  granité  porphyroïde,  on  constate  qu'il 
passe  à  une  véritable  leptynite,  dont  les  lames  de  mica, 
d'un  gris-verdàlre  ou  d'un  gris-noir,  sjnt  nombreuses  et 
bien  apparentes  à  l'œil  nu.  Le  l'eldspatli ,  élément  domi- 
nant, y  prend  la  forme  de  petits  grains  jaunâtres;  le 
quartz,  peu  abondant,  s'y  présente  avec  son  aspect  semi- 
transparent  comme  dans  le  granité. 

La  leptynite  et  le  granité  porphyroïde,  se  sont  épan- 
cbés  entre  des  couches  de  gneiss  et  de  micaschiste 
qu'ils  ont  disloqué.  La  montagne  de  la  Sparraguera  est 
formée  par  ce  micaschiste  très-bien  stratifié,  incliné 
vers  le  S.-O.,  en  faisant  un  angle  d'environ  iio°.  Sur 
certains  points,  il  devient  noirâtre  et  fortement  micacé; 
sur  d'autres,  il  est  décomposé  à  la  surface  et  à  une 
certaine  profondeur,  en  un  sable  ferrugineux;  en  certains 
endroits,  on  le  voit  passer  au  gneiss. 

Lorsqu'on  s'élève  vers  le  point  culminant  de  la  mon- 
tagne, on  ne  tarde  pas  à  trouver  un  granité  a  petits 
grains,  qui  forme  la  crête  ou  l'axe  de  la  petite  chaîne 
des  Âlbères.  C'est  le  soulèvement  de  celte  roche  qui  a 
donné  sa  principale  forme  au  chaînon. 

Toutes  les  petites  vallées  de  fracture  de  la  chaîne  des 
Albères,  présentent  la  même  composition  que  celle  de 
La  Ho(iue ,  puisque  les  mêmes  couches  passent  de  l'une 
a  l'autre  en  s'intléchissant  vers  les  parties  déclives  et  se 
relevant  vers  les  sommités.  On  peut  s'en  assurer  en 
examinant  les  rocbes  qui  allleurent  dans  les  vallons  de 
Saint-Martin,  de  Montes(|uiu,  de  Vilellongue-dels-Monls, 
de  Sorède,  d'Argelès,  de  Collioure,  etc. 

Lorsque  des  hauteurs  de  la  Sparraguera,  l'observateur 
descend,  en  côtoyant  la  montagne,  dans  le  vallon  de 
Sorède,  son  regard  est  bientôt  arrêté  sur  une  crêlo 
blanche,  saillante,  sur  la  colline  qui  la  porte,  comme  la 


191 

nageoire  dorsale  d'un  poisson.  C'est  une  ride  épineuse 
de  quartz  blanc-Iailen.v,  prescpie  vcrlicaie  ou  très- inclinée 
vers  le  N.-E.  d'au  moins  80°. 

Le  fond  blanc  de  ce  quarlz  coin|)acto,  est  légèrement 
maculé  de  pelitcs  taches  d'oxyde  de  for. 

Lorsqu'on  remonte  la  rivière  de  Sorède,  les  mémos 
accidents  pittoresques  du  sol,  que  nous  avons  signalés 
dans  le  vallon  de  La  Roque,  se  reproduisent  presque 
aux  mômes  hauteurs.  Le  fond  du  paysage  est  le  même; 
cependant,  les  décorations  étranges  (pie  la  nature  a  mises 
en  œuvre,  changent  do  forme  en  gardant  leur  physiono- 
mie minérale.  On  retrouve  ici  les  mômes  roches  avec  les 
mêmes  inclinaisons,  les  mômes  inflexions,  les  mômes 
caractères  stratigra|)hiques.  • 

La  nature,  si  variée  dans  ses  moyens,  a,  dans  ce  val- 
lon, donné  au  paysage  quelque  chose  de  moins  frais,  de 
plus  tourmenté  qu'à  la  petite  vallée  de  La  Roque- 
d'Albères.  Nous  retrouvons  bien  ici,  à  la  vérité,  les  mê- 
mes lignes  de  roches  qui  se  profiloni  sur  les  doux  rives 
de  la  gorge,  mais  les  rampes  sont  plus  abruptes,  et  la 
montagne  se  dresse  devant  soi  |>lus  bruscpiomont. 

En  outre,  un  nouvel  élément  minéral  apparaît.  Au 
four  à  chaux  de  Sorède,  près  du  pont  des  forges,  se 
montre,  à  mi-hauteur  de  rescarj)oment  de  la  rive  droite, 
une  couche  pou  épaisse  d'un  calcaire  cristallin  (jui  |)arait 
l)longer  vers  l'est.  Ce  noyau  calcaire  sendjie  s'être  déposé 
dans  quehpie  dépression  ou  dans  quelque  poche  de 
schiste,  de  micaschiste  ou  do  gneiss.  C'est  probable- 
ment un  fragment  de  la  couche  calcaire  qui  se  montre  à 
Prats-(lo-Moll(J,  Cérot,  etc.,  et  qui  forme  une  l)aiide, 
souvent  iii'orroni|)ue,  sur  le  versant  septentrional  des 
Pyrénées-Orientales. 

Le  calcaire  cristallin  de  Sorède,  exploité  comme  pierre 
;i  cImux  (carrière  de  Jean  Estève'i,  d'un  blanc  ou  blanc- 
blouàtro,  s(>  |)résonlo  sous  la  formo  (\(>  inmes  rhondioï- 


192 

dales  superposées.  Sur  certains  points,  surtout  vers  les 
bords  de  la  couche,  il  se  clive  en  gros  cristaux. 

Attaqué  en  roche  par  l'acide  nitrique,  il  fait  à  peine 
effervescence;  trituré,  il  donne  une  poudre  blanche  qui 
se  laisse  vivement  attaquer  par  les  acides  avec  un  abon- 
dant dégagement  d'acide  carbonique. 

Ce  calcaire  présente  une  particularité  remarquable  : 
à  son  contact  avec  la  roche  encaissante,  il  se  recouvre 
de  minces  lames  cristallines,  bleuâtres,  nacrées  de  felds- 
path. 

Lorsque  de  la  carrière  de  Jean  Eslève  on  se  dirige 
vers  le  nord-est,  par  le  petit  sentier  qui  conduit  a 
Sorède  par  la  métairie  de  Coudulès,  on  voit  bientôt 
apparaître  les  schistes  de  transition  à  teintes  bleuâtres 
ou  ferrugineuses.  Ils  plongent,  comme  ceux  de  La 
Roque,  vers  le  N,-E.  en  faisant  avec  l'horizon  un  angle 
d'environ  80  à  80". 

Si,  à  partir  de  là,  on  suit  les  premières  rampes  de  la 
montagne,  à  la  hauteur  de  la  métairie  Llinas,  on  ren- 
contre les  roches  granitiques,  les  gneiss,  les  micaschis- 
tes. De  là  on  descend  dans  le  vallon  d'Argelès-sur-Mer, 
où  se  montrent  les  puissants  dépôts  diluviens  de  la 
plaine,  (jui  recouvrent  aussi,  dans  les  parties  élevées 
du  bassin  inférieur  du  Tech,  les  roches  anciennes  des 
Albères. 

D'Argelès-sur-Mer  à  Port-Vendres ,  la  route  marche 
parallèlement  à  la  mer.  Le  paysage  s'est  transformé; 
les  décorations  du  tableau  ont  changé;  ce  ne  sont  plus 
ces  massifs  d'arbres  verdoyants  jetés  sur  les  lianes  des 
gorges  profondes  (jui  encadrent  la  scène.  Ici  la  Méditer- 
ranée fond  son  azur  avec  l'azur  du  ciel  du  Koussillon  ; 
elle  ondule ,  dans  l'espace  qu'embrasse  le  regard ,  ses 
draperies  bleues,  ornées  de  franges  de  blanche  écume. 
D'un  côté,  donnant  asile  à  des  vignes  vigoureuses,  des 
coteaux  de  schistes  ou  de  phyllades  contournés,  plissés, 


193 

comme  écrasés  par  des  pressions  latérales;  de  l'autre, 
la  mer  qui  brise  ses  vagues  contre  la  falaise  qui  porte  le 
chemin.  Dans  les  plis  étroits  et  tranquilles  de  ces  escar- 
pements, où  vivent  les  moules  (mylilus  edulis)  et  les 
oursins  (echinus  lividus),  se  montrent  seuls  quelques 
rares  bateaux  de  pêche,  jetés  sur  le  sable  ou  se  balan- 
çant sous  la  protection  de  leur  ancre. 

Sur  ces  falaises,  on  coupe  aussi  des  tranches  puis- 
santes de  micaschistes  à  larges  lames  de  mica ,  parfois 
à  cristaux  de  grenat  opaques  et  violacés.  La  tourmaline 
noire,  en  longues  aiguilles  cristallines  ou  en  cristaux 
cylindriques  ou  polygonaux  prismatiques,  s'y  trouve  en- 
clavée dans  de  gros  fragments  de  quartz.  Dans  toutes 
ces  roches  anciennes,  se  présentent  de  gros  cristaux 
d'orlhose  jaunâtres  et  a  l'aspect  nacré.  Ainsi  donc, 
entre  les  schistes,  les  micaschistes,  le  gneiss  et  les 
granités  divers  qui  constituent  essentiellement  le  chaînon 
des  Albères,  on  trouve  de  nondjreux  minéraux  acci- 
dentels soit  en  fdons  ou  en  veines,  comme  les  oxydes 
et  les  sulfures  de  fer,  le  sulfure  de  plomb,  la  galène 
argentifère,  etc.,  soit  en  cristaux  isolés  comme  le  gre- 
nat, le  mica,  le  feldspath,  la  tourmaline,  etc. 

A^jù  du  chaînon  des  Albères.  —  «  Différentes  circons- 
tances me  font  présumer,  dit  Dufrénoy,  que  le  dernier 
surgissement  du  groupe  du  Canigou,  est  plus  moderne 
que  celui  du  reste  de  la  chaîne  :  la  principale  consiste 
dans  le  relèvement  des  terrains  tertiaires  les  plus  récents 
vers  les  cimes  du  Canigou.  Ainsi  à  Nelliach,  à  Banyuls- 
dels-Aspres,  villages  situés  dans  la  vallée  de  la  Tet  et 
du  Tech,  au  nord  du  Canigou,  M.  Reboul  a  indiqué, 
depuis  longtemps,  que  les  marnes  argileuses,  qui  con- 
tiennent des  fossiles  analogues  aux  terrains  subapennius, 
sont  en  couches  fortement  inclinées. 

«  .\u  sud  du  Canigou,  dos  terrains  à   lignitos  égale- 
ment irès-modernes,  qui  forment  une  petite  bande  dans 

13. 


194 

la  Cnrdagne,  depuis  Llivia  jusqu'à  la  hauteur  de  la  Seu- 
d'Urgel ,  y  sout  en  couclies  relevées  d'environ  00°  vers 
le  N.  20'^  0.  Les  terrains  tertiaires,  situés  sur  les  deux 
versants  de  cette  montagne,  ont  donc  été  fortement 
dérangés,  tandis  que  sur  toute  la  longueur  de  la  chaîne 
des  Pyrénées,  les  terrains  tertiaires  se  sont  déposés 
horizontalement  au  pied  de  la  vaste  falaise,  formée  par 
cette  même  chaîne.  La  direction  des  couches  tertiaires 
de  la  Cerdagne,  E.  20"  N.-O.  20°  S.,  est  à  peu  près  la 
même  que  celle  que  le  soulèvement  des  ophites  a  im- 
primé à  ces  mêmes  terrains  dans  la  Catalogne,  dans  la 
Navarre  et  la  Chalosse.  Cette  direction,  (pii  correspond 
à  celle  indiquée  par  M.  Élie  de  lîeaumonl  pour  la  chaîne 
principale  des  Alpes  et  les  chaînes  les  plus  récentes  de 
la  Provence,  me  conduit  à  supposer  que  c'est  à  cette 
même  époque  que  le  massif  du  Canigou  a  pris  son 
relief  actuel;  la  direction  générale  de  ses  crêtes, 
celles  des  vallées  de  la  Tet,  du  Tech  et  de  la  Sègre, 
qui  en  sont  la  conséquence ,  s'accordent  avec  cette  sup- 
position. 

«  Plusieurs  vallées,  qui  sillonnent  le  pied  du  Canigou, 
sont  très-profondes.  La  petite  vallée  qui  prend  naissance 
au-dessous  de  Corlsavy  et  se  jette  dans  le  Tech,  près 
d'Arles,  présente  un  escarpement  à  pic  de  plusieurs 
centaines  de  mètres;  cette  circonstance,  jointe  k  la  po- 
sition des  lambeaux  de  calcaire  de  transition  qui  forment, 
par  leur  ensemble,  une  ceinture  discontinue  sur  les 
ilancs  du  Canigou  ,  ne  peut  s'expliquer  qu'en  admet- 
tant que  ce  groupe  de  montagnes  a  été  soulevé  d'un 
seul  jet  au  milieu  des  terrains  de  transition  qui  avaient 
alors  un  relief  peu  prononcé,  et  qui  étaient  recouverts, 
en  ditTérents  points,  par  des  dépôts  très-mod(M-nes; 
cependant,  comme  les  lambeaux  de  terrains  modernes 
n'ont  jamais  été  continus,  |»uisqu'ils  sont  en  partie 
marins  et  en  partie  d'eau  douce,  il  est  certain  que  le 


195 

sol  sur  lequel  a  surgi  le  Canigou ,  était  déjà  montueux  à 
une  époque  antérieure  <^>.  » 

Les  Alhères,  qui  se  ratlaclient  au  Canigou  par  les 
massil's  montagneux  de  Maureiilas,  de  Céret  et  d'Arles, 
ont  été  fortement  inlluencées  par  la  dislocation  du  sol , 
qui  a  lait  surgir  ce  groupe  de  montagnes.  Mais  un  seul 
mouvement  du  sol  n'a  pas  donné  au  chaînon  albérien 
son  relief  actuel  ;  il  n'a  pris  la  configuration ,  la  forme 
que  nous  lui  voyons  aujourd'hui ,  qu'à  la  suite  de  quel- 
ques révolutions  dont  il  porte  l'empreinte  évidente  et 
bien  sensible. 

Les  savants  auteurs  de  la  carte  géologique  de  la  France, 
attribuent  au  soulèvement  de  la  chaîne  principale  des 
Alpes,  le  sui'gissement  du  mont  Canigou  avec  ses  formes 
actuelles.  Mais  avant  ce  grand  cataclysme  de  la  nature, 
cette  montagne,  presque  la  plus  élevée  de  la  chaîne 
orientale  des  Pyrénées,  présentait  une  certaine  élévation, 
ainsi  que  le  chaînon  des  Albères  qui  en  dépend. 

Les  schistes  ,  les  micaschistes  et  les  roches  granitiques 
stratifiées  des  Albères,  sont  fortement  relevés;  parfois 
ils  atteignent  à  la  verticale  et  même  sont  renversés. 
Ils  alîectent  les  mêmes  caractères  que  les  roches 
identiques  qui  se  montrent  au  pied  du  Canigou  ;  leur 
orientation  les  fait  ranger  dans  les  terrains  de  tran- 
sition. 

A  l'inspection  des  Albères  et  du  massif  du  Canigou, 
le  géologue  retrouve  partout  des  traces  incontestables  des 
systèmes  du  Morbihan ,  du  Westmoreland  et  du  Hunds- 
rùek,  etc.,  qui  ont  relevé  les  divers  membres  de  la  série 
azoïque  et  paléozoïque  dans  les  i\vrénées-Orientales. 

Les  couches  anciennes  qui  composent  les  Albères,  pa- 
raissent donc  avoir  pris,  à  cette  époque  primaire,  leurs 

(I)  MM.  niifi-t'iioy  pi  l'.lic  Je  Bramnoiil  :  Mimnires  pour  stivir  à  une 
descriplion  géalogiqut  de  la  France  ,  loiiie  II,  pujCB  42(3-428. 


196 

inflexions  primordiales,  quoiqu'elles  doivent  leur  relief 
actuel  à  des  mouvements  beaucoup  plus  récents. 

Dans  les  dépressions  les  plus  profondes  des  vallées 
transversales,  dans  les  concavités  ouvertes  entre  les  plis 
des  roches,  nulle  part,  dans  les  parties  élevées  du 
chaînon  des  Âlbères,  on  ne  trouve  aujourd'hui  aucunes 
traces  des  dépôts  subapeunius  des  vallées  du  Tech  et  de 
la  Tet.  Ces  dépôts  marins  ne  pénètrent  pas  dans  les 
petites  vallées  transversales,  qui  étaient  donc  déjà  fer- 
mées ou  ouvertes  en  partie  ;  ils  ne  s'élèvent  jamais  à 
des  hauteurs  un  peu  considérables;  dans  la  vallée  du 
Tech ,  ils  n'arrivent  pas  à  Maureillas ,  et  à  peine  attei- 
gnent-ils les  premières  collines  de  Vilellongue-dels-Monts. 

Cette  observation  a  un  grand  poids  dans  la  question 
qui  nous  occupe;  elle  prouve  clairement  que  le  relief 
des  Albères  était  assez  montueux  pour  s'élever  au-dessus 
des  eaux ,  lorsque  les  dépôts  subapennins  ou  pliocènes 
se  sont  formés  sur  les  schistes  paléozoïques  de  la  vallée 
du  Tech,  déjà  relevés  par  des  dislocations  antérieures. 

Dans  les  parties  élevées  des  vallées  transversales,  on 
aperçoit  partout  de  puissants  dépôts  diluviens,  horizon- 
taux ou  très-peu  inclinés ,  qui  descendent  dans  la  plaine 
où  ils  forment  ces  immenses  couches  caillouteuses  de  la 
période  quaternaire  ou  diluvienne,  si  prononcées  dans 
la  plaine  de  Rivesaltes  et  de  Perpignan.  Dans  les  parties 
élevées,  ces  dépôts  reposent  sur  les  schistes  ou  les  au- 
tres roches  de  transition,  ou  sur  les  roches  granitiques, 
sans  que  l'on  trouve  enire  les  deux  systèmes  de  couches 
aucune  trace,  aucun  vestige  des  marnes  et  des  grès 
fossilifères  de  la  partie  déclive  de  la  vallée  du  Tech. 

Toute  la  série  secondaire  manque  complètement  dans 
les  Albères,  du  Perthus  à  la  Méditerranée.  Durant  toute 
cette  longue  période  géologique,  la  chaîne,  constamment 
émergée,  a  formé  une  Ile  au  soin  de  la  mer.  D'un  côté, 
ses  pieds  schisteux  étaient  battus  par  la  vague  de  la  mer, 


197 

qui  occupait  une  portion  de  la  plaine  actuelle  de  Figuèrcs; 
sur  le  versant  septentrional,  par  la  mer  du  Roussillon,  qui, 
par  quelque  canal  étroit,  a  pénétré,  à  une  certaine  épo- 
que, jusqu'aux  environs  d'Amélie-les-Bains  pour  y  dépo- 
ser les  sédiments  secondaires  que  l'on  y  a  signahîs. 

Ainsi,  toutes  les  observations  portent  à  croire,  que  le 
sol  d'une  partie  du  Roussillon  a  été  émergé  et  immer- 
gé plusieurs  fois.  L'absence  de  couches  stratifiées  plus 
récentes  que  le  terrain  silurien  ou  dévonien ,  autres  que 
celles  de  l'ancien  pliocène,  permet  cette  conclusion. 

On  constate,  cependant,  ainsi  que  nous  l'avons  déjà 
dit,  dans  le  département  des  Pyrénées-Orientales,  quel- 
ques lambeaux  du  terrain  secondaire,  mais  en  dehors 
du  chaînon  albérien.  Les  dépôts  crétacés  de  la  vallée  de 
l'Agly  commencent  à  se  montrer  vers  Peyrestortes , 
Baixas,  pour  se  développer  vers  Vingrau,  Estagel , 
iMaury  et  Saint-Paul-de-Fenouillet.  Dans  la  vallée  du 
Tech ,  des  couches  h  cyclolithes  elliptica,  rhymkonella 
difîormis,  à  hippurites,  etc.,  se  montrent  à  Amélie, 
Coustouges,  La  Manère.,  etc. 

Pendant  que  ces  dépôts  marins  se  formaient  sous  les 
eaux,  une  grande  partie  du  bassin  inférieur  du  Tech 
était  assez  élevée  pour  être  complètement  émergée.  Ce 
n'est  qu'une  dislocation  postérieure  qui  a  permis  à  la 
mer  d'occuper,  par  un  affaissement  du  niveau  du  sol, 
les  vallées  du  Roussillon  pour  déposer  les  couches  de 
l'ancien  pliocène.  Ces  couches  ne  se  montrent  guère  au- 
delà  du  Roulou;  si  elles  se  sont  déposées  sur  d'autres 
points  du  cours  supérieur  du  Tech,  elles  ont  été  facile- 
ment dénudées,  après  leur  relèvement,  lors  des  grandes 
débâcles  qui  ont  porté  les  dépôts  quaternaires  ou  dilu- 
viens dans  les  trois  grandes  vallées  des  Pyrénées- 
Orientales. 

((  La  plaine  du  Roussillon,  dit  Uehoul ,  située  comme 
un  golfe  entre  deux  arêtes  de  montagnes  (pii  jettent  des 


198 

promontoires  dans  la  mer,  est  bien  évidemment  formée 
de  inalériiuix  de  comblement,  descendus  des  Pyrénées, 
par  les  trois  issues  des  vallées  du  Tech,  de  la  Tet  et  de 
TAgly.  Les  accroissements  que  ces  trois  torrents  ont  pu 
ajouter  a  ce  terrain  de  transport,  depuis  la  date  des 
descriptions  géographiques  de  Slrabon  et  de  Pomponins- 
Méla,  ne  sauraient  être  évalués  même  à  la  centième 
partie  de  son  étendue  totale  '''.  » 

L'examen  des  faits  précédents  nous  conduit  à  admettre, 
que  le  chaînon  des  Âlbères  avait  un  relief  assez  prononcé 
dès  le  commencement  de  la  période  secondaire  ou  dès 
la  lin  de  la  période  primaire  :  les  premiers  soulèvements 
qui  l'ont  aiïecté  remontent  à  la  période  paléozoïque  ou 
de  transition.  Mais  ces  dislocations  anciennes  ne  lui  ont 
point  donné  sa  forme  et  sa  hauteur  actuelles.  Du  Perthus 
k  la  Méditerranée,  dans  l'axe  du  chaînon,  on  ne  trouve 
aucun  dépôt  secondaire;  tandis  qu'au  pied  du  Canigou, 
aux  environs  d'Amélie  se  montre  un  lambeau  crétacé, 
ce  qui  conflrme  et  prouve  clairement,  ce  que  nous 
avons  déjà  dit,  que  le  chaînon  albérien,  tel  que  nous 
l'avons  limité,  a  été  émergé  pendant  une  partie  de  la 
période  paléozoïque  et  pendant  toute  la  longue  période 
secondaire. 

Lorsqu'on  étudie  attentivement,  la  boussole  à  la  main, 
le  terrain  tertiaire  supérieur  de  la  vallée  du  Tech  ou 
de  la  Tet,  on  s'aperçoit  que  l'inclinaison  générale  des 
couches  a  lieu  vers  le  N.  ou  le  N.-E.,  parfois  vers  le 
N.-O.;  de  manière  que  les  tranches  ou  les  tètes  de  cou- 
ches regardent  le  Canigou  et  les  Albères.  C'est  là  une 
preuve  que  ces  massifs  montagneux  ont  contribué  au 
relèvement  de  l'ancien  pliocène.  Par  conséquent,  il  a 
fallu  que  les  Albères  se  relèvent  pour  produire  cet  effet 
sur  les  couches  de  leur  base. 

(1)  Rcboul.  Géologie  de  la  période  quaternaire. 


190 

La  longue  file  de  collines  pliocènes  qui  borde  les  deux 
rives  du  Tech ,  s'élève,  sur  la  rive  droite  du  torrent, 
assez  haut  sur  le  pied  du  chainon,  en  suivant  sa  direc- 
tion et  son  inclinaison,  quoique  à  slralificalion  très- 
discordante.  De  tous  ces  faits,  et  d'autres  qui  seront 
exposés  ailleurs  ('*,  il  faut  conclure  que  le  relief  ac- 
tuel du  chainon  des  Albères,  a  été  produit  par  la  disloca- 
tion qui  a  soulevé  et  dérangé  les  couches  marines  de 
l'ancien  pliocène  a  la  base  des  Pyrénées-Orientales  et  au 
pied  des  Apennins.  Tout  le  monde  sait  que  M.  Élie  de 
Beaumont  attribue  ce  mouvement  du  sol  au  surgisse- 
ment  de  la  chaîne  principale  des  Alpes. 

Outre  ces  soulèvements,  qui  ont  imprimé  les  grands 
traits  du  tableau,  on  reconnaît  dans  les  Albères  de 
petites  lignes  de  dislocation  qui  ont  incliné  certaines 
couches  vers  le  S.-O.  Ces  dislocations  restreintes  n'ont 
pas  induencé  l'ensemble  de  la  chaîne. 

l  ne  étude  attentive  des  crêtes  saillantes  et  des  lignes 
de  dislocation  du  Roussillon ,  montre  à  l'observateur  la 
complication  de  plusieurs  soulèvements.  Chacun  de  ces 
mouvements  du  sol,  lents  ou  rapides,  ont  fourni  un 
trait,  une  ombre,  un  accident  au  tableau  pittoresque 
que  la  nature  s'est  complue  à  dérouler  à  nos  yeux  dans 
cette  belle  et  fertile  province. 

Les  massifs  montagneux  des  vallées  du  Tech  et  de  la 
Tet,  ont  reçu  quelques-unes  de  leurs  formes  à  chacun 
des  divers  soulèveu)ents  qui  ont  imprimé  leurs  caractères 
aux  Pyrénées.  Mais  c'est  la  dislocation  qui  a  fait  émerger 
les  dépôts  sélurieus  et  dévoniens,  qui  a  relevé  les  .\lbères, 
qui  depuis  lors  sont  restées  constamment  émergées. 
Cependant,  parmi  tous  ces  mouvements  qui  ont  exercé 
leur  terrible  iniluence  sur  le  sol  de  la  vallée  du  Tech, 


(I)   Dans  lo  texte  de  la  Carte  [jéolo(;ii]iie  du    dopatlemont  des   l'yréiu'es- 
Orienlali's. 


200 

c'est  le  soulèvement  désigné  par  M.  Élie  de  Beaumont, 
sous  le  nom  de  système  des  Pyrénées,  qui  s'est,  peut- 
être,  le  moins  fait  sentir  dans  le  chaînon  des  Albères 
et  au  pied  du  Canigou. 

En  résumé,  les  Albères  ont  pris  un  relief  montueux 
assez  prononcé  dès  la  période  paléozoïque;  mais  c'est  la 
dislocation  de  la  chaîne  principale  des  Alpes,  qui  a 
relevé  les  dépôts  subapennins,  qui  a  donné  au  chaînon 
toutes  ses  formes  actuelles. 

Sorèze,  ce  10  novembre  1861. 


201 


CHRONIQUE  PEKPIGNANAISE, 

Par  M.  Joseph  EMWAWlJEli  Sibvew,  nicmbrc  (le  plusieurs 
Sociétés  académiques. 


Philippe  III,  que  le  Duc  d'Ossone  appelait  plaisamment 
le  grand  tambour  de  la  monarchie  espagnole,  mourut,  a 
Madrid,  le  15  mars  1621,  a  l'âge  de  quarante-trois  ans. 

Ce  prince  fut  victime  de  l'étiquette.  Étant  au  conseil, 
il  se  plaignit  de  la  vapeur  d'un  brasier,  qui  l'incommodait 
d'autant  plus  qu'il  relevait  d'une  grande  maladie.  L'ofilcier 
chargé  du  soin  d'entretenir  le  feu  étant  absent,  personne 
n'osa  remplir  cet  emploi;  et  celte  délicatesse  mal  entendue 
coûta  la  vie  au  monarque. 

Le  5  mai  de  la  même  année ,  les  Consuls  de  la  ville 
de  Perpignan  firent  publier  cette  nouvelle  au  son  des 
tambours  et  des  trompettes,  par  des  crieurs  habillés  de 
noir,  accompagnés  des  confréries  à  cheval  et  des  corps 
de  métiers.  Les  boutiquiers  durent  fermer  leurs  boutiques 
pendant  neuf  jours,  sous  peine  d'amende  et  de  prison; 
tous  les  travaux  furent  suspendus.  Le  deuil  eut  lieu  chez 
le  sieur  Antoine  Séragut,  bourgeois  honoré,  alors  premier 
consul.  On  ordonna  une  neu vaine;  tout  le  temps  qu'elle 
dura,  les  cloches  des  couvents  et  des  églises  de  la  ville 
attristèrent  les  habitants  par  leur  tintement  lugubre;  la  nuit 
même,  la  nuit  ne  mettait  point  une  tn've  à  ce  lamenlable 
carillon;  plusieurs  Bourgeois  en  devinrent  sourds,  si  jen 


202 


crois  la  chronique Et  les  confréries,  celle  de  Saint- 
Georges  en  têle<'',  se  rendirent  trois  fois  le  jour,  le  matin, 
h  midi  et  le  soir,  chez  le  sieur  Antoine  Séragut,  pour  lui 
adresser  des  compliments  de  condoléance  :  quelles  péni- 
bles charges  ces  messieurs  avaicnl-là!... 

Le  i2,  les  Consuls,  dans  leur  costume  de  rigueur,  se 
transportèrent  à  Saint-Jean ,  où  ils  avaient  tout  fait  pré- 
parer pour  la  célébration  des  oraisons  funèbres  du  Roi. 
Mais  celle  cérémonie  fut  renvoyée  à  un  autre  jour;  voici 
à  quelle  occasion  :  Don  Christoval  y  Traginé,  gouverneur 
de  Perpignan,  arriva  dans  l'église  après  les  Consuls, 
escorté  des  officiers  de  la  garnison  et  précédé  de  deux 
massiers...  Qu'on  juge  de  l'effet  que  produisit  celle  inno- 
vation sur  l'esprit  des  Consuls  jaloux  de  leurs  prérogatives, 
puisque  de  temps  immémorial  à  eux  seuls  appartenait  la 
distinction  des  masses!....  Ils  restèrent  pétrifiés,  ni  plus 
ni  moins,  que  des  zooUlhcs...  Je  vous  le  demande,  pou- 
vaient-ils, en  conscience,  laisser  s'établir  un  pareil  précé- 
dent? C'eût  été  en  quelque  sorte  abdiquer,  et  ces  messieurs 
en  étaient  incapables.  En  conséquence,  après  être  revenus 
de  leur  étonnemenl,  ils  prolestèrent  avec  énergie  :  chacun 
de  part  et  d'autre  soutint  ses  droits;  on  dit  même  qu'il  y 
eut  des  épées,  des  poignards  tirés  et  prêts  a  frapper;  que 
des  perruques  furent  arrachées,  foulées  aux  pieds,  et  que 
des  personnes  Irès-respeclables  reçurent  l'alfront  le  plus 
sanglant...  Je  ne  garantis  pas  la  dernière  assertion,  tout 
en  affirmant  que  celte  scène  causa  un  grand  scandale,  à 
la  suite  duquel  les  Consuls,  violets  de  colère,  plantèrent 
là  le  Gouverneur;  quittèrent  brusquement  l'église;  le  peuple 
les  imita,  et  il  lit  bien. 


(1)  I.a  Confiéric  <lc  S,iint-G(Kir(jt's  fui  inslitiu'c  ;i  Pcr|iignnn  ,  le  5  aoi'it 
•1562,  et  ses  statuts  furent  lioinol(){;ués  |)ar  le  Vicc-lloi  de  Catalogne,  le  4 
mai  ISC.j.  l'aile  s'éteignit  en  ■J6o2. 


203 

En  (lépil  (le  la  protestation  des  Consuls,  Don  Christoval 
y  Traginé  invita  les  prêtres  de  la  cathédrale  à  commencer 
les  prières  pour  le  repos  de  l'âme  de  Philippe;  tous  refu- 
sèrent d'obtempérer  h  ses  ordres,  et,  même  en  sa  pré- 
sence, le  catal'al(|ue,  qui  avait  été  élevé  aux  frais  de  la 
ville,  fut  entièrement  défait  par  injonction  de  l'Evèque. 

Ne  pouvant  vaincre  la  résistance  qu'on  lui  opposait,  le 
Gouverneur,  penaud,  se  retira  avec  ceux  de  sa  suite,  non 
sans  pester  contre  Tévènemcnt  malencontreux;  mais  il  ne 
se  tint  pas  pour  battu,  car  il  était  tenace  le  vieux  Castillan. 
Le  lendemain,  précédé  des  deux  massiers  de  sa  fabrique, 
il  se  rendit  au  couvent  des  Grands-Auguslins,  où  il  fit  dire 
une  messe  à  la  chapelle  de  Noire- Dame-des-Grâces. 

Le  17,  les  Consuls  célébrèrent  h  Saint-Jean  les  hon- 
neurs finièbres  du  feu  Roi  avec  une"i)ompe  extraordinaire. 
L'Illustrissime  évêqiie  Onuphre  de  liéarl''),  dit  rollicc.  Le 
calafalijue,  entouré  de  deux  cent  cinquante  ilambcaux  de 
cire  blanche,  était  décoré  de  riches  coussins,  sur  lesquels 
reposaient  un  sceptre,  une  couronne  royale  et  une  croix; 
l'église,  éclairée  par  six  mille  cierges,  était  tapissée  d'une 
tenture  noire,  parsemée  de  larmes  d'argent;  cinquante 
Iam[)es  funéraires,  à  trois  becs,  étaient  suspendues  à  la 
voûte  en  ogives;  la  vaste  nef  et  les  chapelles  latérales  ne 
purent  pas  contenir  le  nombre  des  Perpignanais  accourus 
à  la  cérémonie,  non,  sans  doute,  pour  bénir  la  mémoire 


(I)  «  Onupiire  de  I^i-art,  no  à  Pcrinipiaii,  île  riiniioralilr  f.iiiiillc  de  néart, 
«  ctiiil  clianiiiiH!  de  Iiarculoiie  ,  siirciMa  à  Fraii(;ois,  et  prit  posscssidii  de 
(I  l'Ilvéclic  d  Lille,  par  |)rneiireiir,  le  A  tnai  l."J9i).  l-c  IG  aoiU  ,  il  fut  re(;ii 
(I  à  l'eriiij'iiaii.  Le  IG  avril  1008,  il  fut  transféré  au  siège  de  Vie;  en  IGI2, 
«  à  celui  de  Ciirone,  (pi'il  ocoin)a  jusi]u"au  10  janvier  liîJO.  Il  rciiniira 
«  alors  !i  celte  di(;i)ité,  et  vint  se  retirer  à  l*erpi{;nan,  où  la  mort  le  frappa, 
Il  le  2G  odobre  IG22.  » 

(Calalogiu  des  Évfques  d'I-Ane,  par  1^.  I'iii(;(;ari.  ) 


204 

de  Philippe  III  (voyez  l'histoire  de  sa  vie);  mais  pour 
prouver  au  Gouverneur  récalcitrant,  qu'il  ne  lui  était  pas 
permis  de  molester  en  vain  les  magistrats  de  son  choix. 
Cette  injure  faite  aux  droits  du  peuple  dans  la  personne 
des  Consuls,  reçut,  vingt  et  une  années  plus  tard,  une 
satisfaction  éclatante;  car  la  ville  ouvrit  ses  portes  à 
Louis  XIII ,  et  se  donna  à  jamais  à  la  France  avec  la 
province  du  Roussillon. 


205 


SPIIRAGISTIQUE  ROUSSILLONNAISE. 


ICONOGRAPHIE  DE  CERTAINS  SCEAUX 

AUTREFOIS  EN  USAGE  DANS  LES  COMTÉS  DE  ROUSSILLON 
ET  DE  CERDAGNE, 

Par  II.  E.  DK  FoucHiEB,  Capitaine  au  25ine  de  Ligne, 
membre  do  la  Société  des  Antiquaires  de  l'Ouest. 


AVANT-PROPOS. 

Étranger  au  Roussillon ,  et  uaturellenient  peu  instruit 
de  son  histoire,  je  n'ai  pu  donner  à  cette  étude  archéo- 
logique tous  les  développements  qu'un  pareil  sujet  semble 
devoir  comporter.  Est-ce  à  dire  que,  profitant  d'un  loisir 
de  garnison,  j'aie  jamais  conçu  la  pensée  d'écrire  une 
histoire  complète  de  la  sigillation  proprement  dite,  en 
détaillant  minutieusement  les  diverses  dénominations  des 
sceaux  et  leur  emploi,  et  venant  répéter  ici  ce  que  nous 
enseigne  le  moindre  traité  de  paléographie?  —  Évidem- 
ment, non  <''. 

Ces  pages,  faible  écho  de  quelques  anciens  souvenirs, 
«  iragments  eux-mêmes  recueillis   dans   les  débris  des 

(I)  Un  de  mes  collègues  de  l'armée  m'avait  précédé  dans  l'étude  des 
antiquités  de  ce  pavs  (M.  Colsou,  capitaine  au  li"'""-',  Reihvrcbes  sur  les 
Monnaies,  etc.,  1851).  J'ai  voulu  niardier  sur  ses  traces,  eu  étudiant 
la  sphraiiisliiiue  roussillonuaise,  sujet  enlirrcniiMil  neuf,  dont  la  révélation 
appartenait,  sans  doute,  à  une  plume  plus  aulurisée  que  la  uneinie. 


206 

«  archives  roiissillonnaises,  »  se  borneront  h  présenter, 
sous  la  forme  d'un  simple  catalogue  : 

1°  Les  sceaux  du  Clergé  :  comprenant  ceux  des  évo- 
ques, des  abbayes,  des  oflicialilcs,  des  simples  prêtres, 
et,  généralement,  tout  ceux  qui  se  rattachent  à  l'état 
ecclésiastique  ; 

2°  Les  sceaux  des  Laïques  :  comprenant  ceux  des 
souverains,  des  villes,  des  seigneurs,  des  diverses  cours 
de  justice,  oflices  civils  ou  militaires,  tous  ceux,  enûn, 
qui  émanent  des  administrations  laïques. 

L'étude  des  sceaux  marchant  de  pair  avec  celle  des 
chartes  auxquelles  ils  sont  attachés,  c'est  une  véritable 
bonne  fortune  pour  l'historien  qui  consulte  ces  dernières, 
de  les  retrouver  encore  munies  de  cet  appendice  complé- 
mentaire destiné  a  assurer  leur  authenticité.  Par  malheur, 
une  bien  faible  partie  des  sceaux  autrefois  en  usage  dans 
les  comtés  de  Roussillon  et  de  Cerdagne,  a  échappé  à  la 
destruction,  et  l'examen  des  monuments  les  plus  inté- 
ressants qui  aient  survécu,  ne  présente  guère  à  l'étude 
générale  de  la  sphragistique  d'aperçus  nouveaux  (*). 

Suivant  les  traités  de  diplomatique  et  de  paléographie, 
l'usage  des  sceaux,  d'abord  restreint  aux  souverains  et  a 
quelques  grands  feudataires,  ne  commença  a  se  vulgariser 
que  dans  le  courant  du  douzième  siècle  parmi  les  mem- 
bres du  clergé  et  de  la  noblesse.  Dans  les  provinces  du 
Midi,  particulièrement,  il  n'était  nullement  d'absolue  né- 
cessité que  les  chartes  fussent  scellées  pour  que  l'on  crût 
à  leur  authenticité.  Si  donc,  l'omission  volontaire  de  cette 

(t)  MM.  li.  Mail,  arcliiviste  dos  Pyrénées-Orientales,  et  L.  de  Bonnefoy, 
arclii'oloi;iu'  perpi-nanais,  m'ont  lourni  de  nombreuses  ronmuinicaliuns, 
avec  une  bienveillance  sans  égale.  Je  leur  adresse  de  vifs  remerciements. 


'      207 

formalité  est  remarquée  presque  constamment ,  jusque 
vers  le  quatorzième  siècle,  on  ne  devra  pas  s'étonnçr  du 
petit  nombre  de  sceaux  roussillonnais  remontant  à  des 
époques  plus  reculées. 

Depuis  le  règne  de  Charlemagne,  le  Roussillon  fut 
gouverné  d'abord  par  des  Comtes  amovibles,  dont  le 
pouvoir,  essentiellement  subalterne  et  temporaire,  n'a 
laissé  qu'une  bien  faible  trace  dans  l'bistoire.  Le  très- 
petit  nombre  de  chartes  qui  concernent  ces  seigneurs  est 
totalement  dé[)onrvu  de  sceau,  dont  il  n'est  fait,  d'ailleurs, 
aucune  mention  dans  les  copies  venues  jusqu'à  nous  ^'>. 

A  ces  Comtes  amovibles,  succédèrent  des  Comtes  héré- 
ditaires. L'examen  des  chartes  données  par  ces  derniers, 
constate  également  l'absence  complète  de  sigillalion.  C'est 
donc  par  suite  d'une  erreur  inexplicable,  que  l'auteur  de 
VAnnuaire  de  la  Noblesse,  signalant  les  armoiries  attri- 
buées au  comte  Gérard  par  le  peintre  de  la  salle  des 
croisades,  a  Versailles,  a  pu  dire:  «  Gérard,  comte  de 
«  Roussillon,  se  distingua  au  siège  d'Antioche,  et  entra 
«  l'un  des  premiers  dans  la  ville  sainte;  son  sceau  repro- 
«  duit  par  Dom  Vaissète,  dans  Y  Histoire  du  Languedoc, 
«  représente  :  Deux  fermaux  rais  en  pal  <-'.  » 

Est-il  besoin  de  rappeler  ici  que  le  sceau  reproduit  par 
Dom  Vaissète,  est  celui  du  comte  Sanche  d'Aragon  (L.  I), 
vivant  en  t22G,  cent  trente  ans  après  la  première  croi- 
sade, et  non  celui  du  comte  Gérard,  mort  en  lllôi^J? 

(t)  Marca  Hispanica.  Appendice. 

(2)  Borel  d'Aulerive.  Annuaire  de  la  A'obksse,  J8ii. 

(3)  Est-on  bien  eerlain  du  reste  de  l'aiillionlicité  de  ce  sceau  à  deux 
faces,  isolé  de  la  charte  à  laiinolle  il  a  élu  suspendu?  Si,  d'un  cùlé,  se 
présente  un  guerrier  à  cheval .  portant  à  sou  luns  l'écu  d'Aragon,  entouré 


208 

Les  chartes  relatives  aux  intérêts  religieux  du  diocèse 
d'Elne,  conservées  dans  divers  dépôts  depuis  le  neuvième 
siècle,  font  également  voir  que,  jusqu'au  treizième,  la 
sigillation  était  encore  inusitée  en  Uoussillon ,  même 
parmi  les  ecclésiastiques  du  rang  le  plus  élevé  <^^ 

11  paraît  donc  très-croyable,  et  l'on  pourrait  même 
affirmer,  qu'avant  la  première  réunion  du  Roussillon  au 
roi  Alphonse,  en  1172,  aucun  acte  émanant  du  pouvoir 
civil,  de  l'autorité  religieuse  ou  de  simples  particuliers, 
n'a  été  scellé  dans  les  Comtés. 

Cependant,  on  doit  croire,  qu'en  Roussillon,  comme 
ailleurs,  le  haut  clergé  précéda  le  mouvement  général, 
et  que  lès  Évêques  adoptèrent  les  premiers  cet  usage, 
tellement  répandu  plus  lard  dans  cette  province,  qu'au 
dix-septième  siècle,  par  exemple,  il  était  peu  de  per- 
sonnes qui  ne  possédassent  un  cachet  particulier,  et  qui 
ne  se  crussent  obligées  d'apposer  leur  signe  ou  marque 
aux  moindres  actes  dans  lesquels  elles  venaient  figurer. 

d'une  légende  au  nom  du  comte  Sanche  ;  de  l'autre ,  je  vois  un  chevalier 
portant  un  bouclier  chargé  de  deu\  fermaux  mis  en  pal,  entouré  d'une 
légende  beaucoup  trop  incomplète  pour  être  expliquée.  Dans  ces  deux 
empreintes  si  ditTérentes ,  dont  l'une  sert  à  l'autre  de  contre-sceau ,  je 
serais  assez  disposé  à  reconnaître  deux  sceaux  distincts,  appartenant  à 
deux  seigneurs  dill'érents,  (jui  n'auraient  pas  trouvé  de  meilleur  moyen 
pour  valider  une  charte,  peul-ètre  relative  à  leurs  intérêts  communs; 
car,  rien  ne  peut  m'expli(juer  dans  quel  but,  Sanche  d'Aragon,  aurait, 
seul  de  sa  Camille,  employé  un  tel  contre-sceau, 
(t)  Marca  Hispanica.  Appendice,  XXVI,  XXXVIII ,  LXX  ,  CGCLI. 


209 


PREMIERE    PARTIE. 


Slceaux  du  Clergé, 

I. —  Le  premier  sceau  dont  la  date  soit  bien  connue 
(Cl.  1),  est  celui  de  Bernard  de  Berga,  évêque  d'Elne. 
Il  pend  à  une  charte  en  parchemin,  datée  du  8  des  cal, 
d'août  12 ii,  par  la(iuclle  ledit  Évêque  accorde  quarante 
jours  d'indulgence  aux  iidèles  qui  contribueront,  par 
leurs  aumônes,  à  la  construction  de  l'hôpital  d'Ille  et  de 
son  église.  Ce  sceau,  de  forme  ovale,  en  cire  blanche, 
avec  contre-sceau  au  revers,  est  long  de  0"i,0o,  large 
de  0"i,05;  la  partie  antérieure,  qui  a  reçu  l'empreinte  en 
cire  brunâtre,  représente  l'Évéque  debout,  coiffé  de  la 
mitre,  tenant  la  crosse  d^ns  la  main  gauche,  et  donnant 
la  bénédiction  de  la  main  droite.  La  légende,  en  capitales 
romaines,  mêlées  de  gothiques,  porte  :  f  S.  B:  DEl  : 
GRACLV  :  IIELNENSIS  :  EPISCOPI  O. 

«  La  conservation  du  contre-sceau  a  été  un  peu  com- 
'<  promise  par  l'usage  auquel  cette  pièce  a  été  longtemps 
'<  destinée;  car  le  Frère  quêteur,  porteur  de  cette  mis- 
«  sive,  était  obligé  de  la  présenter  à  toutes  les  personnes 
«  dont  il  sollicitait  les  secours.  Tel  qu'il  est,  on  y  distingue 
«  encore,  au  milieu  d'un  cercle  de  0"i,OI8  de  diamètre, 
«  deux  têtes  nimbées,  qui  sont  celles  des  patronnes  d'Elue, 
«  comme  on  le  voit  par  la  légende  qui  se  lii  autour  :  f  S. 
«  EVLALIA...  1VLL\.  »  L'écrivain  roussillonnais*^  auquel 

(1)  Archives  de  l'Hôpital  d'Ille. 

(-2)  B.  Alart.  Les  Patronnes  d'Elue,  1857. 

U 


210 

on  doit  la  découverte  de  ce  monument  sigillograpliique, 
et  dont  j'emprunte  ici  les  expressions,  a  cru  remarquer 
entre  le  sceau  et  le  contre-sceau  des  diflerences  de  date 
bien  tranchées.  «  Les  caractères  de  l'inscription  du  sceau, 
«  dit-il ,  ont  bien  la  forme  généralement  adoptée  dans 
«  noire  pays  pendant  le  treizième  siècle,  tandis  que  ceux 
«  du  contre-sceau,  notamment  la  lettre  V,  semblent  se 
«rapporter  à  une  époque  beaucoup  plus  ancienne....» 
Suivant  une  conjecture  de  cet  auteur,  le  contre-sceau  de 
la  charte  d'Ille,  serait  le  type  du  sceau  primitif  de  l'Église 
d'Ehie  attaché  à  tous  les  documents  diplomatiques  éma- 
nés de  la  cathédrale,  et  ne  variant  jamais,  tandis  que  le 
sceau  particulier  aurait  été  renouvelé  à  chaque  élection 
d'évèque.  Le  petit  nombre  de  sceaux  de  cette  époque  que 
j'ai  pu  comparer,  ne  me  permet  pas  de  trancher  catégo- 
riquement la  question  abordée  par  iM.  Alart,  dans  un  but 
purement  historique  d'ailleurs.  Je  ferai  observer,  toutefois, 
que  dans  certains  sceaux  du  treizième  siècle  et  du  qua- 
torzième même,  on  rencontre  souvent  la  lettre  V  écrite 
en  capitale  romaine,  notaniment,en  1228,  sur  un  sceau  de 
l'Archevêque  de  Narbonne,  reproduit  par  Dom  Vaissète, 
et  dont  la  légende  est  ainsi  conçue  :  S.  PETRL  NARBO- 
NENSIS.ARCIIIEPISCOPI-,  et  au  contre-sceau .-;- S.  I VST. 
S.  PASTOR.  L'analogie  qui  existe  entre  ces  deux  sceaux 
et  leurs  contre-sceaux,  me  porte  à  croire  qu'ils  sont  tous 
quatre  bien  contemporains,  émanant  du  même  burin  peut- 
être  <*>.  Je  pense  que  ce  sceau  et  son  contre-sceau  doivent 

(4)  Dom  Vaissète.  Histoire  du  Languedoc,  tom.  V.  Sceau  de  Pierre 
dWincliiis,  1228,  arclievèque  de  Narijonno  (Cl.  2).  Voir  aussi  les  sceaux 
de  Raymond  de  l<'a!gar,  évèque  de  Toulouse,  1249;  de  Bernard  d'imbert, 
abbé  de  La  Grasse,  1254;  d'Arnaud,  évèque  de  Nîmes,  122G,  etc.,  etc. 

Du  reste ,  les  évè(|ues  ont  eu  souvent  des  contre-sceaux  relatifs  aux 
patrons  de  leurs  églises,  ou  tirés  de  l'bisloire  de  ces  églises.  Suivant 
Jl.  de  \VailIy,  les  bustes  de  saint  Paslor  et  de  saint  Just  se  voient  sur 
les  contre-sceaux  de  plusieurs  Archevêques  de  Narbonne.  Le  nom  de 


211 

remonter  à  l'année  1250,  époque  de  l'élection  de  l'évêque 
Bernard. 

L'Hospice  Saint-Jean  de  Perpignan,  possède  une  charte 
du  même  évéque,  portant  la  date  des  cal.  de  mars  1250; 
mais  le  sceau  est  perdu  (*>. 

II. — Un  sceau  conservé  à  l'Hospice  Saint-Jean  <->,  et 
suspendu  à  une  charte  du  4  des  calendes  de  mai  1290, 
donnée  par  la  Cour  Ecclésiastique  de  Perpignan ,  avec 
licence  du  Chapitre  d'Elne ,  sede  vacante,  au  sujet  de 
l'entrée  en  religion  de  Guillaume  Tolza,  marchand  de 
drap,  est,  sans  contredit,  le  plus  précieux  monument 
de  la  collection  roussillonnaise(CI.  3).  La  charte,  curieuse 
en  ses  détails (^>,  se  termine  ainsi  :  Ad  habendam  aucto- 
ritatem,  fidem  et  finnitatem  omnium  predictorum,  sigillum 
officialatûs  nostri  Perpiniani  pendens  presentibus  dnrimus 
apponendum  Cette  formule,  dans  laquelle  parait  le  mot 
officialatits  pour  officialis,  est  très-rare,  suivant  M.  Natalis 
de  Wailly,  qui  n'en  a  cité  qu'un  seul  exemple ,  celui  du 
sceau  de  rOllicialité  de  Nantes'^'.  Le  sceau,  en  cire  jaune, 
de  forme  ronde,  au  diamètre  de  0'",04,  représente  un 
personnage ,  la  tète  découverte ,  assis  sur  un  fauteuil  à 
doubles  colonnes,  et  tenant  entre  ses  mains  un  objet  qui 

saint  Trophiine  se  retrouve  sur  plusieurs  contre-sceaux  des  Archevêques 
d'Arles.  Le  contre-sceau  de  Guillaume,  évr'que  de  Carcassonne,  représente 
les  bustes  de  saint  Nazaire  et  de  saint  Celse,  avec  la  légende  :  NAZARIVS  • 
CELSVS.  La  croix  paraît  sur  plusieurs  contre-sceaux  des  Évèques  d'Or- 
léans. Les  contre-sceaux  des  Archevêques  de  Paris,  montrent,  quelque- 
fois, l'image  de  la  sainte  Vierge  ;  ceux  de  l'Évêque  de  Poitiers,  le  buste 
de  saint  Pierre. 

(1)  Arch.  de  l'Hosp.  Saint-Jean.  Liasse  1,  n»  1. 

(2)  Idem.  Liasse  I,  u»  2. 

(3)  Le  Juge  ecclésiastique ,  en  consentant  à  l'entrée  en  religion  dudit 
Tolza,  oblige  la  femme  de  ce  dernier,  à  vivre  honnêtement  et  chastement. 

(^4)  Natalis  de  Wailly.  Éléments  de  Paléograpliie,  tom.  II. 


212 

parait  être  un  livre.  A  droite  de  ce  personnage,  on  voit 
une  crosse,  posée  en  pal,  un  peu  au-dessoiis  d'une  étoile 
h  huit  rayons,  armoiries  du  Chapitre  d"l":iue;   à  gauche, 
on  lit  l'inscription  suivante,  eu  lettres  capitales  romaines, 
mêlées  de  gothiques,  disposées  sur  quatre  lignes,  dans 
le  champ  même   du  sceau  :  ITE  |  IVD  [  ICA  |  TE.   La 
légende,  aussi  en  capitales  mixtes,  porte  :  f  Sigilliim 
OFFICl...  PerPINiani  PRO  DomiNO  EPiscopO  ELeNensi. 
La  forme  des  lettres  et  les  abréviations  dont  il  est  fait 
usage,  jointes    à  la  naïveté  de  la  gravure,  permettent 
d'assigner  à  ce  type  une  date  beaucoup  plus  ancienne 
que  celle  de  la  charte  qui  a  reçu  son  empreinte  ;   il  faut 
remonter  au  moins  jusqu'aux  dernières  années  du  dou- 
zième siècle  pour  trouver  des  types  analogues. 

Ce  sceau,  qui  sert  en  4290,  diffère  de  ceux  employés 
dans  les  siècles  postérieurs  par  l'Ofïicial  de  Perpignan , 
en  ce  qu'il  ne  désigne  nullement  l'Évéque  au  nom  duquel 
la  justice  était  rendue.  Cela  tient,  sans  doute,  à  ce  qu'en 
cette  année  1290,  le  4  des  calendes  de  mai,  le  siège 
épiscopal  était  vacant  <".  Or,  comme  il  n'est  pas  présu- 
mable  que  la  cour  ecclésiastique  prit  le  soin  de  faire 
graver  un  type  spécial  à  chaque  vacance  d'évèque,  je 
n'hésite  pas  à  admettre  que  celui  dont  on  s'est  servi  en 
cette  occasion,  ait  dû  être  habituellement  alfecté  pendant 
un  certain  temps  a  la  sigillation  des  chartes  données  par 
rOflicial  de  Perpignan ,  sede  Pastore  carente. 

Il  n'est  point  indifférent  de  rechercher  quel  peut  être 
le  personnage  gravé  sur  ce  sceau.  M.  de  Wailly  prétend 
n'avoir  jamais  vu  de  sceau  où  la  hgure  de  l'ofiicial  fût 
représentée.    Il  cite,  pourtant,  celui  de  l'OHicialité  de 

(1)  C'est  par  erreur  que  M.  Puigg^n,  dans  son  Catalogue  des  Evêques 
d'Elne,  dit  le  siège  épiscopa!  occupé,  dès  1289,  par  révéque  Raymond 
de  Costa,  malgré  l'assertion  contraire  exprimée,  en  1833,  par  M.  Jacq. 
de  Saint-Walo. 


213 

Lyon,  en  I28i,  (|ui  représentait  un  prêtre  debout,  tenant 
un  livie.  Mais,  dans  l'exemple  ci-contre,  le  personnage 
tenar)t  un  livre  et  entouré  des  attributs  de  l'évèipie,  alors 
que  le  siège  épiscopal  est  vacant,  ne  peut  être  autrement 
considéré  que  comme  la  figure  sjndiolique  du  prêtre  qui 
rendait  la  justice. 

III.  —  L'original  d'une  sentence  arbitrale,  prononcée 
entre  la  cure  de  Malloles  et  l'dospice  Saint-Jean,  à  la 
date  du  8  des  ides  de  mars  1295,  indique  Ibrmellement 
que  celte  charte  a  été  revêtue  du  sceau  de  chacune  des 
administrations  intéressées.  Ces  deux  sceaux  sont  perdus; 
il  ne  reste  que  les  attaches,  qui  sont  en  fil'^--'. 

IV. — Une  lettre  adressée,  en  1315,  à  la  Reine  de  Ma- 
jorque, par  le  Prieur  des  Carmes,  porte  les  traces  d'un 
sceau  suspendu  par  une  lanière  en  parchemin  f^). 

V. — Le  sceau  de  Bérenger  lîatlle,  évêque  d'Elue  (Cl.  4), 
est  suspendu  a  une  charte  du  8  des  ides  de  juin  1521  <*), 
en  vertu  de  laquelle  les  revenus  des  bénéfices  vacants  de 
l'église  Saint-Jean  de  Perpignan,  doivent  être  consacrés 
à  la  construction  d'une  nouvelle  église  du  même  nom,  à 
côté  de  l'ancienne.  11  parait  remonter  à  l'époque  de 
l'élection  de  cet  évêcpie,  en  1517.  Sa  forme  est  ogivale 
(0'",0Go  sur  0'",055);  le  moule,  en  cire  brune,  est  re- 
couvert, à  la  partie  antérieure,  d'une  plaque  en  cire 
rouge,  qui  montre  l'évêque  mitre,  debout  sur  un  socle, 

(1)  Arcli.  IIosp.  Saiiil-Jeaii.  Liasso  II,  no  27. 

(2)  Raymond  Guillein,  sacristain  d'Elno,  scelle  de  son  propre  sceau, 
suspendu  à  une  lanière  de  soie  jaune  et  rouge,  un  acte  du  3  des  ides  de 
mai  1303.  Le  sceau  indinué  dans  l'acte  est  perdu.  (Arcli.  Saint-Jean.) 

(3)  .\rcli.  Pyrén.-Orient. 

(4)  Arcli.  Hosp.  Saint-Jean.  Liasse  I ,  n"  5. 


214 

la  crosse  dans  la  main  gauche,  et  la  main  droite  levée, 
donnant  la  hénédiction.  Ce  sceau,  fort  déléiioré,  brisé  en 
plusieurs  endroits,  laisse  pourtant  lire  la  légende  en  c;ipi- 
tales gothiques  :  S.  BerengaRii  :  BAYULI  :  PHOVIDEiNClA: 
DIVINÂ  :  EI>NENS1S  :  EPiscopI.  Il  n'y  a  pas  de  contre- 
sceau  et  rien  ne  vient  ici  rappeler  les  patronnes  du  diocèse. 

VI. —  Ce  débris  de  sceau,  dont  j'ai  tenté  de  rétablir  la 
forme  primitive  (Cl.  o),  est  attaché  à  une  charte,  adressée 
la  veille  des  ides  de  décembre  1552,  par  Arnaud  Tcrrena, 
sacristain,  Arnaud  Vivers,  chanoine  olhcial  (de  Perpignan 
sans  doute?)  et  Pierre  Johan,  ollicial  d'Elue,  vicairos-géné- 
raux  pour  l'évèque  Gui  Terrena,  absent,  à  tous  les  curés 
du  diocèse,  dans  le  but  d'exciter  leurs  paroissiens  à  faire 
l'aumône  pour  l'œuvre  de  la  construction  de  l'église  Saint- 
Jean*').  Autant  qu'on  en  peut  juger  par  ce  fragment,  le 
contour  de  ce  sceau  a  dû  affecter  la  forme  rare  de  l'octo- 
gone, et  avoir  environ  Om,Oi  de  diamètre.  Le  champ  a  dû 
être  occupé  par  l'efligie  des  saintes  Eulalie  et  Julie,  pa- 
tronnes d'Elne,  debout  sous  un  portique,  et  tenant  cha- 
cune une  palme  dans  la  main.   La  légende,  en  cajjitales 

gothiques,  ne  montre  plus  que:  VM  :  DNI  :G 

que  j'interprète  par  :  SigillVM  :  DNI  :  Guidonis...  Il  n'y  a 
pas  apparence  de  contre-sceau. 

VIL— Gui  Terrena,  appelé  aussi  Gui  de  Perpignan,  du 
nom  de  sa  ville  natale.  Le  sceau  de  cet  Évéque  d'Elne 
(Cl.  G),  pend  à  trois  chartes  de  l'Hospice  Saint-Jean. 
Par  l'une  d'elles,  datée  du  15  mai  1555,  Gui  renouvelle 
le  décret  rendu  par  son  prédécesseur,  le  8  des  ides  de 
juin  1521,  pour  subvenir  a  la  construction  de  la  nouvelle 
église,  à  Perpignan  ^^K  Ce  sceau,  d'une  exécution  remar- 

(1)  Arcli.  Hosp.  Saint-Jean.  Liasse  I,  n»  6. 

(2)  Idem.  Liasse  I ,  no  7 . 


215 

(|uable  et  d'une  conservation  parfaite,  est  ovale  (0"i,07, 
sur  O'n,0o),  en  cire  brune,  recouverte  de  cire  rouge, 
comme  les  précédents.  Il  représente  l'évèque  debout, 
revelu  des  babils  poulilicaux,  coid'é  d'une  milre  à  Corme 
basse,  tenant  la  crosse  dans  la  main  gaucbe  et  bénissant 
de  la  droite;  sur  la  poitrine  repose  une  étoile  à  buit 
rayons,  dans  laquelle  je  n'bésite  pas  à  reconnaître  le 
symbole  béraldique  du  Cbapilre  d'Elne.  La  ligure  de  T.ui, 
encadrée  dans  une  sorte  de  porli(iue  bysantin,  est  llan- 
quée,  à  bauleur  de  la  ceinture,  de  deux  écussons  :  celui 
(le  droite,  portant  trois  pals,  représente,  je  crois,  les 
armoiries  du  Roussillon ,  ou  plutôt  celles  des  Rois  de 
Majonpie,  comme  suzerains  de  ce  comté  (^);  celui  de 
gauclic,  est  :  parti,  au  premier,  à  deux  lézards,  posés 
en  pal,  l'un  sur  l'autre,  et,  au  deuxième,  à  un  lion  ram- 
pant, armoiries  personnelles  à  l'évèque.  Au  dernier  siècle, 
Fossa,  dans  son  mémoire  pour  l'Ordre  des  Avocats  (-), 
prétendait  qu'on  voyait  autrefois  dans  l'église  des  Carmes 
d'Avignon,  les  armoiries  de  Gui  Terrena,  et  il  les  blazonne 
en  ces  termes  :  «  de...  à  une  bande  de...  cbargée  de  trois 
«  lézards,  accostée  de  trois  étoiles  de...  en  cbef,  et  de 
«  deux  croissants  en  pointe.  »  Dans  la  première  moitié 
du  «piatorzième  siècle,  les  règles  héraldiques  n'étaient 
pas  tellement  fixées,  que  l'on  puisse  s'étonner  de  cette 
variante  de  l'écusson  du  mrme  personnage.  Une  légende 
en  capitales  gotbicpies  entoure  le  sceau;  on  y  lit:  S  : 
I  RATRIS  :  GVIDOMS  :  DVINA:  PROVIDENCIA  :  EPIS- 
COPI  :  ELNENSIS.  Il  n'y  a  pas  de  contre-sceau,  et,  cbose 
remaniuable,  dans  le  sceau  d'un  évéqne  (pii  devait  (jucl- 
quos  années  plus  tard  instituer  une  fête  particulière  en 
riionneur  des  saintes  Euialie  et  Julie,  il  n'existe  aucune 

(1)  Vdir  a  la  douxième  piirlie,  à  l'article  :  Armoiries  du  Comté  de 
lloiissillon,  no  I. 

(2)  l'ossa.  Mémoire  pintr  l'Ordre  des  Avocats,  p.  423. 


216 

trace  de  l'effigie  des  deux  patronnes.  Cette  particularité 
vient  confirmer,  du  reste,  l'opinion  généralement  reçue, 
que  jusqu'au  (juatorzième  siècle,  l'image  des  évoques 
parut  seule  sur  leurs  sceaux  personnels,  tandis  que  les 
sceaux  émanant  de  l'adminislration  diocésaine  portaient, 
le  plus  souvent,  le  signe  dislinclil' des  églises*'*. 

Les  Archives  des  Notaires  du  Koussillon'^',  vaste  nécro- 
pole où  moisissent  d'innombrables  documents  historiques, 
pour  la  plupart  inédits,  contiennent  une  certaine  (luanlilé 
de  pièces  originales,  revêtues  des  sceaux  de  divers  mem- 
bres du  clergé  catalan.  C'est  dans  ce  dépôt  que  j'ai  décou- 
vert la  plus  grande  partie  de  ceux  qui  vont  être  décrits. 
Presque  tous  les  actes  scellés  qui  s'y  trouvent,  et  dont 
le  plus  ancien  remonte  seulement  h  l'année  iôo5,  sont 
en  papier,  écrit  d'un  seul  côté,  et  signés  le  plus  souvent. 
Seulement,  à  l'encontre  des  documents  de  même  sorte, 
venus  des  diverses  provinces  de  France,  et  qui  se  trou- 
vent dans  le  même  dépôt,  les  sceaux,  au  lieu  d'être 
appliqués  à  la  fin  de  l'acte,  du  même  côté  que  l'écriture, 
le  sont  au  verso;  et  cette  manière  de  sceller  s'y  nMicontre 
d'une  façon  si  constante,  jusqu'au  seizième  siècle,  que 
je  ne  puis  y  voir  (]ue  la  conséquence  d'un  usage  parti- 
culier a  la  principauté  de  Catalogne,  lequel  aurait  cessé 
depuis  la  première  occupation  française. 

Au  quatorzième  siècle,  le  papier  est  généralement  re- 
vêtu d'une  couche  de  cire  très-mince,  de  couleur  diverse, 

(t)  Voir  ci-dessus,  la  note  de  la  page  210. 

(2)  Rrnferniées  longtemps  dans  les  combles  du  Tribunal  do  Conuiierce 
de  Perpignan,  ces  archives,  qui  se  composaient  de  plus  de  lO.OUO  regis- 
tres de  toutes  dimensions,  giMiûralcnient  en  mauvais  état,  réclamaient  les 
soins  d'un  conservateur  intelligent,  capable  au  moins  d'en  dresser  le 
catalogue.  Ce  vœu,  exprimé  à  plusieurs  reprises  par  queUpies  Iloussil- 
lonnais  crudits  vient  d'être  exaucé  ;  car  \m  arrêté  récent  du  Ministre  de 
l'intérieur  a  prescrit  leur  translation  aux  archives  départementales ,  dû 
toute  la  sollicitude  du  savant  archiviste  leur  est  assurée. 


217 

mais,  selon  toute  appareiico,  soumise  à  certaines  règles, 
sur  laquelle  a  été  appliqué  directement  le  sceau  matrice; 
puis,  sans  doute,  dans  le  but  de  donner  un  peu  de  con- 
siiuance  à  l'emprcinle  ainsi  obtenue,  un  petit  morceau 
de  papier  a  été  apposé  sur  la  cire  encore  cliaude,  de 
manière  à  lui  éviter  tout  frottement  extérieur.  Je  cliei:elie 
en  vain  une  autre  explication  à  l'adjonction  de  ce  papier, 
qui,  outre  l'altération  forcée  du  type,  devait  avoir  l'in- 
convénient de  dérober  aux  regards  le  sceau,  dont  on  ne 
pouvait  |)lus  dès  lors  vérilier  l'autluMilicité.  Il  est  résulté 
de  cet  usage  ipie  très  peu  de  sceaux,  dont  il  a  été  pos- 
sible de  soulever  le  masque  de  papier,  se  sont  montrés 
décliilfrables,  et  (pie  j'ai  dû  en  négliger  un  très-grand 
nombre. 

Cet  usage  cessa  en  Roussillon  dès  les  premières  années 
du  quinzième  siècle,  et  non  pas  au  seizième,  comme 
rindi(pient  tous  les  traités  de  paléographie.  Il  fut  rem- 
placé par  l'application  du  type  de  métal  sur  un  petit 
morceau  de  papier  placé  alors  entre  lui  et  la  cire  chaude. 
On  trouve  un  exemple  de  cette  dernière  manière  de  sceller 
dès  l'année  lôTi,  dans  le  sceau  du  Bailli  de  Perpignan. 

Vni. — Une  lettre  du  16  août  15G0,  adressée  aux  exé- 
cuteurs testamentaires  de  Guillaume  d'Aragall,  damoiseau, 
par  frère  Arnald ,  Abbé  de  Saint-Génis-des-Foiitaines, 
vicaire-général  pour  Pierre  de  l.a  Planella,  évèciue  d'Elue, 
porte  un  sceau  ogival  en  cire  rouge  (Cl.  7),  de  Oi",07o 
sur  0'",053,  d'une  assez  bonne  conservation,  et  qui  se 
distingue  entre  tous  par  la  simplicité  de  la  gravure  O. 
Un  porlicpie,  formé  de  deux  pilastres,  réunis  |)ar  un 
arceau  en  plein  cintre,  surmonté  d'un  pignon  triangu- 
laire, encadre  une  ligure  velue  d'une  longue  rol)e,  debout 
sur  un  écusson  indéchidVable,  et  sans  aucun  attribut  de 

(  I  )  AitIi.  (1i'<  XiitaiiTS. 


218 

nature  à  faire  connaître  sa  personnalité.  La  tête,  en  appa- 
rence découverte,  ne  semble  pas  celle  d'un  évèijuc;  mais 
aussi,  d'un  autre  côté,  l'absence  de  l'auréole,  (jui  d'ordi- 
naire entoure  la  tète  des  saints,  ne  permet  pas  d'allirmer 
que  ce  soit  l'image  d'une  des  patronnes  du  diocèse. 

Oans  le  doute,  je  préfère  m'abstenir.  La  légende,  illisi- 
ble, ne  peut  éclairer  la  question. 

Vin  bis. —  Cette  image  informe  se  trouve  au  dos  d'un 
acte  du  15  mai  1572,  relatif  à  la  location  de  plusieurs 
pièces  de  terre  sises  à  Thuir,  donné  par  Arnald  d'Oms, 
vicaire-général  de  Pierre  de  Cima,  évèque  d'Elue  (Cl.  8). 

On  y  distingue,  avec  un  peu  de  bonne  volonté,  l'elligie 
des  deux  patronnes  d'Elne,  occupant  le  milieu  du  sceau, 
et  surmontant  un  écusson,  ijrobablenient  aux  armoiries  de 
l'évêque.  Cette  empreinte  est  la  première  (a  ma  connais- 
sance du  moins)  qui  affecte  cette  disposition,  imitée, 
pendant  plus  d'un  siècle,  par  les  successeurs  de  Pierre 
de  Cima.  Elle  est  ovale,  d'une  longueur  présumée  de 
0^,07  sur  0m,0i5.  La  légende  est  totalement  effacée  ('>. 

ÏX. — Le  2  décembre  1572,  Pierre  Bou,  bachelier  ès-lois, 
chanoine  de  l'église  collégiale  de  Saint-Jean  de  Perjjignan 
et  officiai  de  la  môme  ville,  mettant  en  possession  d'un 
héritage,  Sclarmonde,  femme  de  Bernard  Angles,  se  sert 
d'un  sceau  ogival  (0m,06  sur  0"',055)  en  cire  verte,  sur 
lequel  on  distingue  une  partie  de  l'effigie  du  patron  de 
ladite  église,  entourée  d'une  légende  illisible  (Cl.  9).  Bien 
n'indique  le  nom  de  l'évoque  vivant  h  cette  époijue,  Pierre 
de  Cima,  cité  plus  haut  (-*. 

X. —  Pierre,  abbé  de  Sainte-Marie  d'Arles,  donnant  le 
15  mai  1574,  procuration  à  Pierre  Boig  et  Raymond 

(I)  Arcli.  dos  Notaires.  (2)  hlnn. 


&19 


Pastor,  chanoines   d'EInc ,   pour  recevoir  de  Pons  de 

Coloriiinos,  bénélicier  de  ladite  église,  un  bénéfice  que 

ce  denn'er  voulait  permuter  avec  le  Curé  de  l'église  des 

Bains-d'Arles,  a  employé  un  sceau  ogival  en  cire  rouge 

(Om,045  sur  0'»,05),  représentant  un  moine  debout,  la 

léte  nue  et  rasée,  suivant  la  coutume  des  ordres  religieux, 

vu  de  |»rofil  et  tenant  entre  ses  deux  mains  un  livre! 

Derrière  la  tête  du  moine,  à  la  partie  sénestre  du  sceau, 

se  trouve  un  écusson  indécliidVable.  I.a  partie  supérieure 

est  occupée  par  trois  sortes  de  clochetons  en  ogive,  celui 

du  milieu  surmonté  d'une  croix.  Une  légende,  en  capitales 

.gothiques,  mêlées  d'onciales,  en  partie  détruite,  porte: 

S:  ....  Ali....  VL  :  MON  :  OKD  :  C...  cl  probablement: 

Sigillum  :  ABbaiis  :  sanctc  marie  :arV[.arum  :MO\asterii  : 

OUDinis  :  Climiacensis.  (CI.  10.) 

Je  ne  puis  dire  si  ce  sceau  fut  particulier  à  l'abbé  Pierre, 
ou  bien,  comme  cela  s'est  rencontré  ailleurs,  s'il  a  été 
commun  à  divers  abbés  ('l 

XI.— Raymond  de  Las  Escalas,  évèque  d'FJne.  Le  12 
mars  1578,  année  de  sa  consécration,  ce  Prélat  accorda 
des  indulgences  à  ceux  qui  contribueraient  par  leurs  lar- 
gesses a  la  construction  de  l'église  Saint-Jean  <-).  A  la 
charte  de  concession,  est  suspendu,  par  une  tresse  de 
soie  rouge,  im  sceau  ogival,  extrêmement  mutilé,  long 
deO'",07  et  large  de  0"\0i5,  du.juel  on  ne  distingue  plus 
qu'une  faible  partie  de  la  légende  :  ..VM  :  PiAYMVM)I  : 
DE...  PISCOP...  en  capitales  gothiques,  attenant  à  quel- 
que fragment  de  portique  gothique  assez  finement  dessine. 
Toute  la  |)artie  centrale  a  disparu  (Cl.  1 1).  J'ai  pu  suppléer 
à  sa  description  et  reconstruire  le  sceau  dans  ce  (pril  a  de 
plus  important,  par  l'adjonction  d'un  autre  débris,  émané 

(1)  AitIi.  (Ips  NoIaiiTs. 

("2)  Arcli.  IIns|i.  Saint-Jean.  Liasse  I. 


220 

du  même  type,  et  trouvé  sur  un  acte  en  papier,  du  50 
octobre  1378,  dans  les  archives  des  notaires.  A  l'aide 
de  ce  fragment,  j'ai  pu  me  convaincre  de  la  présence  des 
deux  patronnes  d'Elne,  au  centre  d'une  niclic  à  pilastres 
gothiques,  au-dessous  de  laquelle  ligure  un  écusson  chargé 
d'une  échelle  en  pal ,  armoiries  parlantes  de  Raynioiid  de 
Escalis.  En  pointe  de  sceau ,  sous  l'écusson ,  la  légende 
montre  le  mot  DIVINA  en  capitales  gothiques.  Il  n'y  a 
point  de  contre-sceau,  et  je  dirai,  une  fois  pour  toutes, 
qu'à  l'exception  de  celui  de  Bernard  de  Borga,  il  ne  s'en 
est  trouvé  aucun  dans  toute  la  collection. 

L'évêque  Raymond  a  aussi  scellé  une  ordonnance,  en' 
date  du  15  octobre  1582,  devant  affecter  quelques  revenus 
à  l'œuvre  de  Saint-Jean.  Le  sceau,  appliqué  sur  un  mor- 
ceau de  papier,  pendait  à  une  lanière  de  parchemin;  il 
est  complètement  détruit'**. 

XII.  — Nicolas  Gil,  chanoine  d'Elne,  écrivant,  le  10 
septembre  1578,  a  deux  chanoines  de  la  même  ville, 
scelle  sa  missive  de  son  sceau  particulier  (Cl.  12),  qui 
est  rond  et  au  diamètre  de  0'",02,  portant  au  centre  un 
écusson  illisible  ,  et  dans  le  pourtour  extérieur  une 
légende,  dont  on  ne  distingue  plus  que:  f  S  :  CAN... 
AI  :  GILI.  (t  Sigillum  CANonici  :  nicholAI  :  GILI).  Le 
texte  porte  :  Egidii.  La  cire  est  rouge  et  posée  en  croix 
au  dos  de  l'acte  (^'. 

XIII.  —  Officialilé  d'Elue*'''.  Les  sceaux  appliqués  par 
l'Olïicial  d'Elne  sur  un  très-grand  nombre  de  jugements 
rendus  pendant  plusieurs  siècles,  semblent  avoir  été  pro- 
duits par  un  type  unique,  ou  du  moins  différant  très  peu 

(!)  Ardi.  Hosp.  Saint-Jean,  Liasse  I. 

(2)  Arcli.  des  Notaires. 

(3)  Idem. 


221 

(lu  type  primitif,  que  la  vétusté  des  empreintes  rend  à  peine 
déchilTiable  (Cl.  15).  Dès  l'an  1580,  je  trouve  des  sceaux 
ronds  on  cire  rouge,  de  O'",0io  de  diamètre,  représentant 
invariablement  deux  (igures  nimbées,  portant  cliacune  une 
palme  dans  la  main  gauche,  et  qui  sont,  à  n'en  jtas  dou- 
ter, les  saintes  Eulalie  et  Julie,  de  temps  immémorial 
patronnes  de  la  cathédrale  d'Elne.  Sur  une  de  ces  em- 
preintes, on  distingue  le  mot  IVLIA ,  terminant  la  légende 
et  écrit  en  capitales  romaines,  ce  qui  est  un  indice  de 
ranti(iuilé  du  type.  Le  nom  et  la  (igure  de  rÉvéque  ne 
paraissent  point  indiqués  sur  ces  sceaux. 

XIV.— Un  acte  du  13  janvier  1589,  en  forme  de  lettre 
missive,  émanant  de  Galcerand,  abbé  de  Saint-Michel-de- 
CuxaC',  et  autorisant  Ermengaud,  moine  de  Saint-Cucufat, 
à  recevoir  la  résignation  de  la  Prévôté  de  Fiilols,  que  le 
frère  Batalla  de  Ventanach  se  propose  de  faire ,  et  à  la 
conférer  à  Rertho  Agusti  ,  moine  de  Saint-Michel , 
porte  un  sceau  de  forme  ogivale  (0"',055  surO'",0"2), 
produit  par  le  contact  du  type  sur  un  papier  posé  d'avance 
sur  la  cire  chaude  (Cl.  14).  Il  représente  l'archange  Michel, 
debout  sur  un  dragon  terrassé,  qu'il  menace  de  son  épée' 
Au-dessous  du  dragon,  est  un  écusson  illisible.  Un  seul 
côté  de  la  légende  montre  ces  mots,  en  capitales  gothi- 
ques :  ....MICAEE:  DE.-COXAO.  Ainsi  que  je  l'ai  lait 
remarquer  plus  haut,  cet  exemple  est  un  des  plus  anciens 
de  cette  manière  de  sceller,  car  M.  de  Wailly,  ne  cite  que 
celui  de  Jean,  comte  de  Boulogne  et  d'Auvergne,  en  date 
du  4  mars  1585. 

XV. —Vicariat  de  Rarthélemi  Peyro,  évèque  d'Elne. 
Sceau  plaqué  en  cire  rouge t^-',  du  même  module  que  celui 

(1)  Arch.  des  Notaires. 

(2)  Idem. 


222 

(le  Raymond  de  Escalis  (voir  no  IX),  au  type  des 
deux  patronnes  d'Elue,  surmontant  un  écusson ,  où 
se  dessine  vaguement  la  forme  d'un  mont,  armoiries 
présumées  de  l'Évèqne  (Cl.  15).  Ce  sceau,  tont  aplati, 
employé  par  Jean  Jaubert,  archidiacre  du  Contient  et 
chanoine  d'Elue ,  vicaire-général  pour  Barthélemi ,  à  la 
date  du  10  décembre  1391,  ne  porte  pas  de  légende 
lisible;  mais  tout  me  porte  à  croire  qu'il  n'était  pas 
particulier  à  l'évêque.  En  effet,  un  acte  du  7  août  1404, 
donné  par  frère  Barthélemi  Peyro'*',  en  personne,  garde 
les  traces  d'un  sceau  différent  (Cl.  16).  On  n'y  voit  phis, 
a  la  vérité,  que  les  lettres  de  la  légende  :  S....  TH....  IS. 
(Sigillum  barTHolomei....  elnensIS.)  Deux  écussons  occu- 
paient la  partie  inférieure  du  sceau,  que  je  ne  signale  ici 
que  pour  mémoire. 

XVI.  —  Raymond  Descatllar,  promu  à  l'évêché  d'Elue 
en  1408,  scella,  le  19  décembre  de  la  même  année, 
certains  statuts  des  prêtres  de  Saint-Jean  de  Perpignan , 
avec  son  sceau  d'Abbé,  en  déclarant  qu'il  n'en  avait  pas 
encore  d'autre*-'.  Je  n'ai  pas  vu  ce  sceau;  mais  il  est  à 
croire  que  par  suite  de  sa  translation  soudaine  au  siège 
de  Girone,  le  9  janvier  suivant,  Raymond  n'en  eut  jamais 
au  type  du  diocèse  d'Elue. 

XVII.  —Ce  sceau  ogival  en  cire  brune  (O"\0osur  0^,055), 
appliqué  à  une  grande  quantité  de  jugements  de  1o90  à 
1408,  par  l'Official  de  Perpignan,  agissant  au  nom  de 
l'évêque  Barthélemi  Peyro,  porte,  au  centre,  l'elligie  de 
saint  Jean-Baptiste,  patron  de  la  collégiale,  encadrée  dans 
une  niche  à  piliers  gothiques,  au-dessous  de  laquelle  se 
dessine  un  écusson  chargé  d'un  mont  surmonté  d'une 

(1)  Arch.  des  Notaires. 

{'2)  Puiggari.  Cat.  des  Evêq.  d'EIne. 


2^3 

croix,  accosté  de  deux  étoiles,  armoiries  de  l'évêque  (Cl. 
17).  Une  légende,  en  minuscules  gothiques,  séparée  en 
deux  par  l'écusson ,  porte  les  mots:  SIGILF.UM  :  0FF\,7 
ICIALIS  :  PerPINIANI.  La  création  de  ce  type  doit  re- 
monter à  Tannée  1587,  époque  de  l'élection  de  Bartliélemi 
PeyroC). 

XVIII. — Le  Vicaire-Général  de  Jérôme  d'Ochon,  écri- 
vant, le  M  avril  1413,  h  l'Odicial  d'KIne,  pour  l'informer 
que  le  parti  de  Guillaume  de  Vilardeli,  de  Hésalu,  et  celui 
de  Pierre  Carrera,  de  la  même  ville,  ont  fait  un  traité  de 
paix,  emploie  un  sceau  ogival  de  cire  rouge'-',  de  O'",06o 
sur  0'»,0i;  au  centre  d'une  niche,  surmontée  de  trois 
étages  d'arceaux  gothiques,  vus  en  perspective  et  d'un 
travail  assez  délicat,  se  voit  une  (igure  nimhée,  tenant 
à  la  main  gauche  une  palme  (Cl.  18).  La  présence  d'une 
seule  patronne  sur  ce  sceau,  aurait  lieu  d'étonner,  si  l'on 
n'en  trouvait  ailleurs  d'autres  exemples,  desquels  je  ne 
vois  à  tirer  qu'une  conséquence,  à  savoir  que  le  caprice 
et  non  la  règle  a  le  plus  souvent  présidé  à  la  création 
de  tous  ces  types  si  dillérents  et  pourtant  destinés  à  un 
même  usage.  Du  reste,  un  sceau  particulier  de  Jérôme 
d'Ochon,  trop  détérioré  pour  être  reproduit,  atïectait 
certainement  la  même  disposition  que  celui  de  son  pré- 
décesseur, et  portait  au  centre  l'elUgiedes  deux  patronnes 
du  diocèse. 

Un  large  écusson  en  pointe  du  sceau  au-dessous  de  la 
sainte,  porte,  écartelé  au  1er  et  au  4.e,  un  lion  rampant, 
et  aux  12e  et  5e,  un  arbre,  armoiries  de  l'évêque  Jérôme. 
La  légende,  en  capitales  gothiques,  dit:  SIGILLVM  : 
YICAHIATVS  :  DomiM  \J  lEKUMMi  :  EPiSCOPl  :  ELN 
ensis. 

(1)  Arch.  des  Notaires, 
(â)  Idem. 


224 

XIX.— Ce  sceau,  également  ogival  et  en  cire  brune 

(0^,06  sur  0"™,03o),  est  appliqué  sur  plusieurs  documents 
des'années  1418  à  i425  par  l'Official  de  Perpignan,  agis- 
sant au  nom  de  l'évèque  Jérôme,  cité  jjIus  liaut  (Cl.  19). 
Il  diffère  de  celui  reproduit  au  n»  XVII ,  par  le  dessin  du 
portique  renfermant  le  saint  Jean-Baptiste,  par  l'écusson 
déjà  hlasonné  de  Jérôme  d'Oclion,  et  par  la  disposition  des 
mots  de  la  légende ,  en  capitales  gothiques  :  Sigilluni  : 
CVRIE  :  OFFICIALI  :  ^  S  :  PEUPIMAM  W. 

XX.  —  Hugues ,  abbé  de  La  Grasse ,  scelle  entre  deux 
papiers,  une  lettre  particulière,  le  11  octobre  1425, 
vraisemblablement  avec  un  anneau  manuel,  du  diamètre 
de  O'",0lo,  portant  un  écusson  indéchiffrable,  entouré 
de  ces  mots,  en  minuscules  gothiques  :  S'  UVGOIS' 
ABBÂÏIS-  CRASSE-,  et  sommé  d'une  crosse  (2>.  (Cl.  20.) 

XXI.  — Jean  de  Casanova,  cardinal  prêtre  de  la  sainte 
église  romaine,  perpétuel  administrateur  de  l'église  d'Elne, 
contérant  a  Nicolas  Sunyer,  clerc  du  diocèse  de  Cirone,  le 
bénéfice  fondé  a  Sainte-Marie-du-Ponl  de  Perpignan,  par 
Esclarmonde,  veuve  de  Raymond  Roig,  emploie,  le  6 
novembre  1450,  un  sceau  <^)  dont  la  disposition  était 
encore  inusitée  parmi  ses  prédécesseurs.  Ce  sceau,  de 
forme  ogivale  (0'»,09  sur  0m,0o5),  est  suspendu  entre 
deux  papiers,  par  une  lanière  de  parchemin,  à  l'acte, 
aussi  en  parchemin.  Trois  portiques,  surmontés  de  plu- 
sieurs étages  de  pignons  tleuronnés,  en  occupent  le 
champ.  Sous  celui  du  milieu,  on  voit  l'image  de  la  sainte 
Vierge  Mario,  portant  l'Enfant  Jésus,  et  sous  les  deux 
autres,  parait  l'efligie  des  deux  Patronnes  d'Elne.  Il  est 

(1)  Arch.  des  Notaires. 

(2)  Idem. 

(3)  Idem. 


00- 


exprimé  dans  l'acte,  que  le  Prélat  se  sert  du  sceau  ponti- 
fical dont  il  usait  autrefois  :  Nostri  pontificalis  sigilH  quo 
alias  ulebamnr,  fecimus  appensione  muniri.  I.'effîgie  de 
la  Mère  de  Dieu  se  trouve  ici,  sans  doute,  couiuie  un 
témoignage  de  la  dévotion  particulière  de  Jean  de  Casa- 
nova envers  Marie;  car,  je  ne  pense  pas  qu'on  doive 
attacher  à  sa  présence  sur  ce  sceau  aucune  importance 
historique'^).  Un  écu  chargé  d'une  maison  ajourée,  ar- 
moiries de  la  famille  Casanova,  et  sommé  d'une  crosse 
épiscopale,  sépare  en  deux  la  légende,  en  minuscules  gothi- 
ques :  Sigillum  :  lOHANNIS  :  MISerACIone  H  DIVINA  : 
EPISCOPI  :  ELNensis. 

XXII. — Un  acte  par  lequel  Germain  de  Gaston,  vicaire- 
général  pour  Jean,  administrateur  perpétuel  du  diocèse 
d'Elne,  confère,  le  5  sept.  1451,  à  Jean  Ribes,  chanoine, 
le  bénéfice  fondé  dans  l'église  de  Tresserrapar  En  Gavell, 
est  scellé  entre  deux  papiers  d'un  sceau,  dont  le  champ 
est  occupé  par  l'elligie  d'une  seule  patronne,  et  présente 
beaucou|)  d'analogie  avec  celui  employé  par  le  Vicaire  de 
Jérôme  d'Ochon  (Cl.  18,  22).  La  légende  et  l'écusson 
sont  illisibles  (-1 

XXIII. — Jean,  abbé  de  Sainte-Marie  de  La  Real  de 
Perpignan,  mandataire  du  Pape,  écrivant  au  Chapitre 
d'Elne,  de  surseoir  a  tou*-^  sorte  d'actes  au  sujet  d'un 
bénéfice  conféré  dans  l'église  Saint-Jean,  le  15  février 

(1)  Toiitolois,  il  n'est  pas  impossible  que  Jean  de  Casanova,  apparte- 
nant à  rOi'ilre  (les  Dominicains,  ait  été  i'iieur  d'nn  Monastère  placé  sous 
Tiinocation  de  la  sainte  Vierge,  el  ait  désiré  rappeler  ce  souvenir,  dans 
le  sceau  afTeclé  plus  tard  aux  actes  de  sou  épiscopat.  On  sait,  du  reste, 
que  prescpie  toutes  les  églises  des  couvents  roussilhumais  étaient  dédiées 
à  la  Vierge  Marie.  Peut-être,  d'un  autri'  côté,  Jean  était-il  cardinal  au 
titre  d'une  des  églises  de  Rome  dédiées  à  la  Mère  du  Sauveur. 

{^1)  .\rcli.  des  Notaires. 

15 


226 

1455,  employait,  à  défaut  de  son  sceau  abbatial,  certain 
anneau  (Cl.  25)  portant  en  légende  les  mots  suivants, 
écrits  en  minuscules  gothiques  :  Sagel  •  DE  •  PEllE  •  DE* 
CâNDELL'*'.  Cet  anneau,  de  forme  octogonale,  se  com- 
pose d'un  écu  carré,  de  0'",01,  posé  sur  pointe,  dont  les 
quatre  angles  louchent  le  cordon  extérieur,  et  dont  le 
champ  est  occupé  par  un  loup  passant  accompagné  à 
sénestre  d'une  lleur  de  lis. 

Le  même  anneau  avait  déjà  servi,  le  27  juillet  1450, 
à  sceller  un  acte  émanant  de  Bernard  Peyro,  prêtre 
d'Estagel,  lequel  n'en  avait  point  sans  doute  <^). 

A  partir  de  cette  époque,  les  sceaux  plaqués  employés 
en  Roussillon  sont  entre  deux  papiers,  à  très  peu  d'excep- 
tions près. 

XXIV.— Le  sceau  de  Galcerand  Albert,  évêque  d'Elue, 
déjà  découvert,  en  1857,  par  M.  Alart*^'  sur  deux  chartes, 
des  12  août  1454  et  18  août  1452,  se  trouve  aussi  appliqué 
sur  un  acte  du  12  juillet  1445,  par  lequel  Bernard  Casa- 
devall,  commissaire  aux  causes,  agissant  pour  ledit  évêque, 
autorise  un  exécuteur  testamentaire  de  Marguerite,  veuve 
de  Bérenger  Descatllar,  damoiseau  d'Elne,  a  ajourner,  à 
quatre  mois  plus  tard,  l'exécution  d'un  legs  (Cl.  24).  Ce 
sceau  ogival  (0'",075  sur  0"\04o)  représente  les  deux 
saintes  Eulalie  et  Julie,  encadrées  dans  une  niche  formée 
de  deux  colonnettes  avec  pinacles  tleuronnés,  supportant 
deux  dômes  à  pendentifs ,  couronnés  chacun  d'un  petit 
clocheton;  le  tout  d'un  dessin  correct  et  délicatement 
gravé.  A  la  partie  inférieure  du  sceau,  suivant  l'usage 
déjà  connu,  existe  un  écusson  chargé  d'un  mont  sur- 
monté d'un  arbre  à  deux  branches,  armoiries  parlantes 

(1)  Arch.  des  Notaires. 

(2)  Idem. 

(3)  Pairûiines  d'Elne,  loc.  cil. 


227 

de  la  famille  Albert,  et  sommé  de  la  mitre  et  de  la  crosse 
épiscopales.  Plus  heureux  que  l'auteur  des  Patronnes  d'Elne, 
j'ai  pu  lire  entièrement  la  légende,  en  lettres  minuscules 
gotlii(pies,  qui  entoure  le  sceau  :  Sigillum  :  VICARlÂTus  : 
Galccrandi  :  DIVINA  :  MISerAClO^'E  :  EPiscopI  :  ELN 
ensis  <■>. 

XXV.  — Ce  sceau  de  l'Official  de  Perpignan,  presque 
semblable  au  n"  XIX ,  en  diffère  seulement  par  l'écusson 
aux  armoiries  de  l'évèque  Galcerand  Albert  (Cl.  25).  La 
légende  est  identique  f^'. 

XXVI.  —  Jacques  Prada,  prieur  de  Sainte-Marie  de 
Serrabona,  autorise  frère  Bernard  Fuster,  prévôt  de 
Marin  vans,  à  permuter  un  bénéfice  avec  frère  Raymond 
Bach,  et  emploie,  à  défaut  du  sceau  habituel,  un  sceau 
secret  portant  un  P  majuscule  couronné  (Cl.  26).  Cet  acte 
est  du  4  mars  1434  ^^K 

XXVII  —  Jean  Moles  de  Margarit,  évêque  d'Elne,  a 
emplové,  à  ma  connaissance,  trois  sceaux  différents  (Cl. 
27,  28,  29). 

Le  7  avril  1438,  la  concession  d'un  bénéfice  dans 
l'église  de  Saint-Matthieu,  au  sage  et  discret  Barthélemi 
Foquet,  par  suite  de  la  résignation  qu'en  a  faite  le  cha- 
noine Jean  Foquet,  est  scellé  du  sceau  du  vicariat  (.ogival, 
0>n,08  sur  0'»,045).  La  disposition  du  dessin  est  analogue 
à  celle  de  la  plupart  des  sceaux  déjà  connus;  au  centre, 
les  doux  patronnes,  sous  des  portiques  gothiques,  et 
surmontant  un  écusson  aux  armes  de  l'évoque  :  parti, 
au  le,  à  ô  marguerites,  2  et  I  ;  et,  au  2e,  à  un  oiseau, 

(1)  Arcli.  (l(^s  Notaires. 

(2)  hh'in. 

(3)  hhm. 


2-28 


qui  paiail  être  un  paon.  L'écusson ,  sounné  d'une  mitre, 
sépare  la  légende,  en  minuscules  golliiiiues  :  SIGILVm . 
lOHVnnlS  :  MARGÂRITI  (J/  DEi  :  GllAcia  :  EPISCOPI  : 

ELNENSIS  '^'. 

Le  8  juin  1437,  Jean  s'élail  servi  d'un  sceau  secret, 
de  forme  ronde,  de  0m,04  de  diamètre,  dans  l'acte  de 
concession  d'un  bénélice  de  Clayra,  à  Jacques  Vilar.  Au 
centre  de  ce  sceau,  on  voit  une  aigle  aux  ailes  éployées, 
couronné  d'une  mitre,  tenant  entre  ses  serres  l'écusson 
du  Prélat.  La  légende  est  illisible  (-'. 

Enfin,  le  6  juin  1460,  Jean  de  Margarit,  écrivant  à 
Jean  de  Saint-Martin,  archidiacre  majeur  d'Elne,  pour 
le  charger  de  mettre  le  chanoine  Jean  des  Casesnoves  en 
possession  de  l'église  paroissiale  de  Sainte-Marie-la-Mer, 
scelle  sa  lettre  de  son  anneau  manuel,  qui  est  ovale 
(0'n,OI8  sur  0"\0I5)  et  représente  son  écusson  sommé 
d'une  mitre ,  ainsi  que  la  légende  en  minuscules  gothi- 
ques :  Sigillum  :  lOhannis  :  EPiscopI  :  ELiNENsis  (3). 

Suivant  Moreri,  les  services  rendus  au  Roi  d'Aragon 
Jean  II,  par  Jean  de  Margarit,  alors  cardinal  et  évèque 
de  Girone,  et  son  frère  Bernard,  dangereusement  blessé 
au  siège  de  ladite  ville,  en  défendant  la  P»eine  d'Aragon, 
furent  si  noblement  appréciés,  que  ce  prince  crut  ne 
pouvoir  mieux  les  récompenser  qu'en  permettant  à  ces 
deux  frères  et  à  la  postérité  de  Bernard ,  de  l'un  et  de 
l'autre  sexe ,  de  porter  en  chef  des  armes  de  leur  mai- 
son,  qui  étaient:  de  gueules  à  3  margueriles  d'argent, 
écartelé  à  5  pals  de  gueules,  les  armes  royales  d'Aragon, 
de  Navarre  et  de  Sicile. 

M.  Puiggari,  dans  son  Catalogue  des  Évêques  d'Elne, 
interprétant  à  sa  manière  le  texte  du  Gallia  Christiana, 

(1)  Arch.  des  Notaires. 

(2)  Idem. 

(3)  Idem. 


529 

qui  désigne  cet  évèque  sous  le  nom  de  Johannes  iMoles 
de  Margarit,  dit  carrémcnl  qu'il  était  issu  seulement  par 
sa  mère  de  cette  famille  illustre  de  Catalogne,  tandis  que 
l'article  de  Moreri,  ne  mentionne  aucunement  le  nom  de 
Moles.  Je  ne  me  charge  pas  de  tranclior  la  question  généa- 
logique; cependant,  la  disposition  de  l'écusson  gravé  sur 
les  sceaux  du  Prélat,  me  donne  la  certitude  que  ce  dernier 
a  fait  pendant  une  grande  partie  de  sa  vie  usage  d'armoi- 
ries autres  que  celles  indiquées  par  Moreri;  de  même  que 
les  trois  marguerites  qui  ligurent  au  premier  parti,  sem- 
blent, par  la  [)lace  (ju'elles  occupent  dans  l'écusson,  des 
armoiries  paternelles.  Quoi  qu'il  en  soit,  Jean  n'a  jamais 
fait  usage,  en  Roussillon,  des  armoiries  concédées  à  sa 
famille  par  le  Roi  d'Aragon,  et  c'est  encore  le  même 
écusson  qu'on  retrouve  sculpté  et  peint  sur  la  clef  de 
voûte  de  l'avant-dernière  travée  de  l'église  Saint-Jean, 
indice  probable  que  cette  partie  de  l'édilice  fut  terminée 
pendant  la  durée  de  l'épiscopat  de  Jean  de  Margarit. 

XXVIIT.  —  I.'Ofllcial  de  l^erpignan,  emploie  un  sceau  en 
papier,  au  type  du  saint  Jean-Baptiste,  avec  un  écusson  en 
pointe  aux  armes  de  Margarit '**.  La  légende  est  illisible.  Le 
jugement  porte  la  date  du  20  juin  1459;  il  est  relatif  à  une 
permutation  de  bénéfices  entre  deux  ecclésiastiques  (Cl.  50). 

XXIX. — Charles  de  Saint-Gelais,  évêque  d'Elne.  F>e  31 
mars  1175,  Bernard  AI|)honsello,  vicaire-général  pour 
ledit  évêque  absent  du  diocèse,  confère  à  Jean  Casanova, 
prêtre,  le  canonicat  et  la  prébende  vacants  par  suite  du 
décès  de  Bernard  Patau.  Cet  acte,  donné  à  EIne,  siib 
siijiUo  virMritili,  vient  à  l'appui  de  ma  précédente  obser- 
vation sur  la  manière  d'appliquer  les  sceaux  toute  parti- 
culière aux  provinces  de  la  monarchie  aragonnaise  (-'. 

(1)  Arcli.  des  Notaires.  (2)  Idem. 


230 

Le  sceau  ogival  (0^,075  sur  0'",045)  est  appliqué  entre 
deux  papiers  au  bas  de  l'acte,  du  même  côté  que  l'écri- 
ture, suivant  l'usage  français.  De  la  même  dimension  que 
celui  du  vicariat  de  Galcerand  Albert,  il  affecte,  à  peu  de 
chose  près,  la  même  disposition.  Les  deux  patronnes, 
couronnées  d'un  diadème  à  5  perles  apparentes,  sont  en- 
cadrées dans  des  niches  d'un  dessin  exactement  semblable 
au  sceau  précité.  La  seule  différence  consiste  en  ce  que 
le  sceau  de  Charles  montre  un  écusson  sous  chaque 
patronne.  Sur  celui  de  droite,  je  distingue  la  croix,  sym- 
bole héraldique  de  l'illustre  famille  de  Saint-Gelais;  celui 
de  gauche,  malheureusement  indéchiffrable,  devait  porter 
l'étoile  à  8  rayons  du  Chapitre  d'Elne.  La  légende,  très- 
longue,  en  lettres  minuscules  gothiques,  est  illisible''*. 
(Cl.  51  ). 

XXX.  —  Charles  de  Martigny,  évoque  d'Elne.  Pierre 
Gallet,  vicaire-général  dudit  évêque  in  remolis  agentis, 
informe,  le  4  novembre  M80,  Jacques  Martin,  prêtre  de 
Perpignan,  que  trois  ecclésiastiques  désirent  pcrnuiter 
entre  eux  leurs  bénéfices,  et  le  charge  de  les  mettre  en 
possession,  par  une  lettre,  en  parchemin,  scellée  du  sceau 
épiscopal,  suspend»,  entre  deux  papiers,  par  une  languette 
aussi  en  parchemin  <'^).  Ce  sceau  ogival  (0'",05  sur  0"',05), 
montre,  sous  un  portique,  l'image  d'une  seule  patronne, 
tenant  une  palme  dans  la  main  gauche.  Il  est  entouré 
d'une  longue  légende ,  en  minuscules  gothiques ,  dont  je 
ne  puis  déchiffrer  que  la  première  moitié  :  KÂROLYS. 
EPiscopVS-  ELNENsis.  ABBAS....  Il  diffère  de  la  plupart 
des  précédents,  par  l'absence  de  tout  écusson  armoirié. 

XXXI. — César  Borgia,  obtint,  dit  le  père  Anselme,  en 
mai  4499,  des  lettres  patentes  de  Louis  XII,  par  lesquelles 

(1)  Arcli.  des  Notaires.  (2)  Idem. 


231 

il  fut  adopté,  lui  et  sa  postérité,  aux  armes  de  France, 
avec  permission  d'en  user  en  tous  actes.  Son  sceau,  en 
cire  rouge,  à  la  date  du  16  mai  de  ladite  année,  repré- 
sente un  écu  parti  :  au  i'^''  un  bœuf,  et  au  2^  un  fascé. 
Le  25  octobre  suivant,  l'écu  est  écartelé  au  l^r  et  au  4^ 
de  France,  au  2^  un  bœuf,  et  au  o^  un  fascé.  Le  15 
juillet  1502,  l'écu  pareil  au  précédent,  et  sur  le  tout 
deux  clefs  mises  en  santoir,  surmontées  d'un  pavillon,  au- 
dessus  duquel  est  une  pique.  Le  premier  a  pour  légende: 
CESAR  :  BORGIA  •  DVX  •  VALENT.  Le  second,  CESAR  • 
BORGIA  •  DE  FRANCLA  •  DVX  •  VALENT  W, 

C'est  uniquement  par  pure  curiosité  que  j'ai  transcrit 
ces  notes  du  père  Anselme,  et  parce  qu'elles  se  rappor- 
tent à  un  personnage  qui  administra  pendant  quelques 
années  rEvéclié  d'EJne  et  rAi)baye  de  Saint-Michel-de- 
Cuxa,  h  une  époque  antérieure,  du  reste,  à  l'année  1499. 

Si  cette  étude  sigillographiquc  n'était,  par  sa  nature, 
en  dehors  de  toute  critique  religieuse,  ne  serait-ce  pas 
ici  le  cas  de  signaler  l'hypocrite  bulle  du  5  des  nones 
de  juin  1494,  par  laquelle  le  pape  Alexandre  VI  «ayant 
«  le  plus  ferme  espoir  que  le  Seigneur  dirigera  les  actes 
«  de  son  fils  bien-aimé  César,  le  nonmie  Abbé  de  Cuxa, 
«  avec  la  confiance  que,  grâce  à  son  zèle,  ce  nionastère 
«  sera  utilement  et  heureusement  dirigé,  et  en  retirera 
«  de  précieux  avantages  spirituels  et  temporels.  »  lleureu- 
semcnl,  dit  M.  Alarl'-',  ce  scélérat  ne  s'occupa  jamais  de 
son  Abbaye  ([uc  pour  en  recouvrer  les  revenus. 

Ajoutons  qu'il  en  fut  de  même  de  son  Évéché  d'Elne, 
dans  lequel  il  ne  fit  jamais  acte  de  présence,  et  oii  ses 
procureurs  ou  vicaires-généraux  seuls  agirent  en  son 
nom. 

(1)  Père  Anscliuc.  Hisl.  des  Grands  Officiers  de  la  Couronne,  tom.  V, 
page  52'2. 

(2)  Notices  historiques.  Lr  Roussillmindi^,  Cal.  pour  tS62. 


232 

XXXII. —  François  de  Lloris,  évêque  d'Elue.  Ce  sceau 
ogival  (0m,07  sur  Om,0io)  que  je  n'ai  pas  vu  en  original, 
a  été  publié  en  18o7  par  l'auteur  des  Patronnes  d'Elue, 
qui  l'a  trouvé  attaché  à  une  charte  du  18  mai  loOl,  rela- 
tive a  la  collation  d'un  bénéfice  fondé  dans  une  église 
d'Iile,  et  qui  en  a  donné  la  description  suivante  :  «  L'em- 
«  preinte  du  sceau  est  marquée  presque  partout  avec  une 
«  remarquable  netteté.  Ce  sont,  comme  dans  le  sceau  de 
«  l'évéque  Galcerand,  les  saintes  Patronnes  d'Klne,  dans 
«  des  niches  à  colonnettes,  surmontées  de  dômes  golhi- 
«  ques,  avec  pendentifs,  pinacles  et  clochetons  gracieu- 
«  sèment  découpés.  Mais,  la  différence  est  grande  sous  le 
«  rapport  de  l'art  et  dans  les  détails  d'une  ornementation, 
«  dont  la  richesse  trahit  Tinspiralion  nouvelle  qui  animait 
«  déjà  toutes  les  liranches  des  beaux-arts.  C'est  le  souille 
«  de  la  renaissance  qui  pénètre  dans  l'art  ecclésiastique, 
«  et  nous  verrions  sans  difficulté  l'œuvre  d'un  artiste  de 
«  Rome  ou  de  Florence,  dans  ce  sceau  d'un  Prélat  qui 
«passa  le  reste  de  ses  jours  en  Italie,  fut  Cardinal  de 
«  Sainte -Marie -A'orc^/e,  Patriarche  de  Constantinople, 
«  secrétaire  d'Alexandre  VI,  et  mourut,  à  Rome,  le  22 
K  juillet  lo06.  L'écu  de  François  de  Lloris  occupe  la 
«  partie  inférieure  du  sceau;  mais  nous  n'avons  pu  recou- 
rt naître  les  armes  qu'il  portait,  et  tout  ce  que  nous  avons 
«  pu  lire  de  la  légende,  se  réduit  au  mot  :  LORIS  (^>.  » 

Je  me  contenterai  de  faire  remarquer  que  cette  appré- 
ciation, fort  juste  au  point  de  vue  de  Kart  en  général,  a 
sans  doute  été  suggérée  à  l'auteur  par  la  différence  qui 
lui  semblait  exister  entre  les  deux  seules  empreintes 
parvenues  jusqu'alors  à  sa  connaissance.  La  comparaison 
des  types  précédemment  décrits,  montre  incontestable- 
ment, que,  sans  recourir  aux  maîtres  italiens,  les  ama- 
teurs de  belle  gravure  avaient  trouvé  déjà  de  précieuses 

(i)  B.  Alart.  Patronnes  d'Elne,  loc.  cit. 


233 

ressources  clans  le  burin  des  artistes  catalans,   dès  la 
première  moitié  du  quinzième  siècle  (Cl.  35). 

XXXIII. — Jacques  de  Serra,  évêque  d'Albane  et  admi- 
nistrateur de  l'Eglise  d'EIne.  Le  vicaire-général  de  ce 
Prélat,  irrité  des  scandales  qui  se  renouvelaient  conti- 
nuellement dans  le  diocèse  d'EIne,  ordonne  des  réformes 
importantes.  Dans  une  lettre  adressée  le  21  avril  1512, 
à  son  clergé,  il  signale  nombre  de  faits  contraires  aux 
bonnes  mœurs,  et  lui  défend,  tout  particulièrement,  de 
fréquenter  les  mauvais  lieux,  de  prendre  part  aux  danses 
publiques  et  aux  mascarades,  sous  les  peines  canoniques 
les  plus  graves.  Il  excepte,  toutefois,  de  son  interdiction 
les  mascarades  faites  en  vue  de  la  représentation  des 
mystères.  Cette  pièce  est  revêtue  d'un  sceau  ogival  t^0i",07 
sur  ()'",() ia)  entre  deux  papiers,  dont  la  disposition,  encore 
incoimueen  Roussillon,  était  déjà  répandue  en  France  dans 
le  courant  du  siècle  précédent  (Cl.  54).  En  effet,  substi- 
tuant à  l'image  des  saintes  patronnes  du  diocèse,  la  (igure 
d'armoiries  personnelles  à  l'évéque,  le  graveur  a  repré- 
senté, au  centre,  un  écusson  parti  au  Ic'  à  un  arbre,  et  au 
2e  à  un  lévrier  rampant ,  sommé  d'un  chapeau  é[)iscopal 
avec  ses  cordons,  et  entouré  d'une  légende  illisible  <'). 

XXXIV. — Alphonse  de  Meza,  prêtre  de  l'église  d'EIne, 
agissant  au  nom  du  chapitre  diocésain,  demande  copie 
d'une  lettre  de  feu  Raymond ,  ancien  évèque  d'EIne , 
déposée  dans  les  archives  (hulil  chapitre.  Celte  demande, 
a  la  date  du  18  août  153i,  est  scellée  d'un  sceau  ogival 
(0'",0i  sur  O'",02o)  qui  n'est  point  particulier  à  AI|ihonse 
de  Meza,  et  est  employé  en  l'absence  du  sien  propre 
(Cl.  55).  Ce  sceau  parait  remonter  h  une  épocpic  beau- 
coup plus  ancienne;  il  représente  un  prêtre  debout,  vu 

(I)  Arch.  df>s  Notaires. 


234 

de  profil ,  tenant  les  mains  jointes  devant  un  autel.  Une 
étoile  se  voit  à  hauteur  de  la  tête  du  prêtre.  Une  légende, 
en  capitales  gothiques,  porte  :  f  Sigillum  :  P  :  DE  MONle 
acVTO  :  PresBITERl.  On  ne  distingue,  cependant,  du 
nom,  que  les  lettres  MON...CVTO(^'. 

XXXV.  — Jérôme  de  Réquesens,  évêquc  d'Elne.  Le 
vicaire-général  de  cet  évêque,  approuve,  le  2  décembre 
-1511,  un  legs  pieux,  et  scelle  sa  lettre  du  sceau  de  la 
Cour  du  Vicariat. 

Ce  sceau,  rond,  au  diamètre  de  Oni,Oi,  est  indéchif- 
frable; on  devine,  toutefois,  que  le  centre  du  sceau  a  dû 
être  occupé  par  un  écusson ,  le  chapeau  et  les  cordons 
épiscopaux;  et  de  la  légende,  en  capitales  romaines,  on 
ne  lit  que  :  SIGILLV  <2). 

La  famille  de  Réquesens,  illustre  on  Catalogne,  portait  : 
écartelé  au  !«'•  et  au  4^  d'Aragon;  aux  2c  et  5^  d'azur,  à 
trois  rocs  d'échiquier  d'or;  a  la  bordure  engrelée  d'argent, 

A  partir  de  cette  époque,  tous  les  sceaux  du  clergé  | 
roussiilonnais  se  bornant  à  représenter  des  armoiries  1 
personnelles,  l'intérêt  qui  a  pu  s'attacher  à  la  reproduc-  ' 
tion  des  types  plus  anciens,  se  trouvera  considérablement 
réduit,  relativement  a  ceux  qui  vont  suivre;  aussi,  me 
bornerai-je  à  les  mentionner  succinctement. 

XXXVL  —  Ferdinand  de  Loazes ,  inquisiteur  pour  le 
Saint-Siège  dans  les  royaume  d'Aragon,  principauté  de 
Catalogne,  et  comtés  de  Roussillon  et  de  Cerdagne,  écrit, 
le  20  octobre  1559,  au  Bailli  d'Elne,  pour  le  prier  de  faire 
mettre  en  possession  d'un  certain  héritage  la  dame  An- 
tonia  Viganda,  de  ladite  ville.  Le  sceau  ogival  (0"i,Oi  sur 
0m,025)  représente  une  ligure  d"ange,  surmontée  d'un 
petit  portique.    La  légende  ne  laisse  voir  que  :  S 

(I)  Arrli.  des  Notaires.  (2)  Idem. 


235 

CONIA(»).  Ce  Ferdinand  de  Loazes,  natif  d'Orihuela,  fut 
promu  à  rÉvêchc  d'Elne,  le  ô  des  nones  de  mai  1542. 
Son  sceau  épiscopal  m'est  resté  inconnu  (CI.  36). 

XXXVII.— Pierre  d'Agustin,  évèque  d'Elne,  élu  et  non 
encore  consacré,  écrivant,  le  23  avril  1544,  à  tout  son 
clergé,  pour  le  convoquer  h  la  réunion  qu'il  a  depuis 
longtemps  indiquée  pour  le  règlement  du  don  gratuit  ou 
secours  charitable  qui  lui  est  dû  à  l'occasion  de  son 
avènement,  emploie  un  sceau  oblong  (0"',024  sur  0'",02) 
représentant  un  écusson  écartelé:  au  ler^  une  étoile  à  6 
rayons;  au  2°,  une  aigle  éployée;  au  3%  une  plante,  et 
au  4^  trois  poissons,  l'un  sur  l'autre,  rangés  en  fascé. 
Le  tout  sommé  du  chapeau  épiscopal.  Un  simple  cordon 
forme  la  bordure  du  sceau,  qui  ne  contient  pas  de 
légende  (2^  (Cl.  37.) 

XXXVIII.— Michel  Puig,  inquisiteur  dans  la  principauté 
de  Catalogne  et  les  comtés  de  Roussillon  et  de  Cerdagne, 
donnant  une  dispense  de  mariage  entre  parents,  moven- 
nant  une  somme  destinée  à  la  tabrique  des  basiliques  de 
Saint-Pierre  et  Saint-Paul  à  Rome,  et  aux  frais  de  la 
guerre  contre  les  Turcs  et  les  Maures,  scelle  sa  lettre 
d'un  sceau  rond  de  0m,04  de  diamètre,  dont  le  centre 
est  occupé  par  un  grand  écusson,  chargé  d'une  croix 
pattée  et  alaisée.  Il  n"y  a  pas  de  légende  (^l.  Cet  inqui- 
siteur fut  nommé,  en  1545,  à  l'Évêché  d'Elne.  Je  n'ai 
pas  trouvé  son  sceau  épiscopal.  (Cl.  58). 

XXXIX.— Raphaèl  Ubach,  évoque  d'Elne,  ordonnant  à 
son  clergé  W  de  mettre  Damien  Sunyer,  prêtre  de  Vich, 
en  possession  de  quatre  bénélices,  emploie,  le  II  juillet 

(h  Arcii.  dos  Notaires.  (3)  Arcli.  des  Notaires. 

(2)  Idem.  (i)  /,/,,„_ 


236 

1556,  un  sceau  rond,  de  0"",05  de  diamètre,  dont  le 
centre  est  rempli  par  un  écusson,  sommé  du  chapeau 
épiscopal,  et  écartelé  :  aux  l^r  cl  4",  un  échiqueté,  et 
aux  2e  et  5°,  une  étoile  à  8  rayons,  Irès-cerlainemenl 
celle  du  Chapitre  d'Elne  (Cl.  59).  Une  légende,  en  capi- 
tales romaines,  porte  ces  mots  :  fR .  UBAC .  KPISCOPVS . 
EF^NENSIS.  C'est  la  deuxième  fois  que  dans  une  légende 
roussillonnaise ,  je  remarque  l'absence  du  mot  sigdlum. 
(Voir  le  sceau  de  Charles  de  Martigny.) 

XL. — Jean  Géraud  Ballaro,  archid.  de  Vallcspir,  vicaire 
capitulaire  d'Elne,  sede  vacante,  informe,  le  18  mars  15o7, 
les  curés  du  diocèse,  qu'il  vient  de  conférer  à  François 
Cazals,  clerc,  un  bénéfice  dans  l'église  de  La  Real,  vacant 
par  le  décès  d'Antoine  Ballau.  Lo  sceau  rond,  deO'",Oi, 
représente,  sous  un  portique  à  fronton  gothique,  les  deux 
Patronnes  d'Elne  ,  surmontant  un  petit  écusson  indé- 
chifl"ral)le.  La  légende,  en  capitales  gothiques,  j)orte  : 
Sigillum  :  ONORABILIS  :  capi  \)  tuli  :  ELNENSIS  <').  On 
serait  tenté  de  supposer  à  ce  type  une  date  de  création 
bien  antérieure  au  seizième  siècle,  quoique  jusqu'à  celte 
éqoque,  il  ne  paraisse  pas  avoir  été  employé  (Cl.  40). 

XLL — Ce  sceau,  employé,  le  16  décembre  1578,  par 
Dymas  Ballaro,  chanoine  d'Elne,  vicaire  capilulaire,  sede 
vacante,  dans  une  lettre  par  laquelle  il  ordonne  aux  curés 
du  diocèse  de  melire  Barlhélemi  Condor,  en  possession 
d'un  bénéfice  dans  l'église  de  Sainie-Maric-la-Mer,  dilfère 
très  peu  du  précédent.  La  date  est  également  incertaine; 
mais  l'empreinte,  mieux  conservée  et  plus  nette,  permet 
de  saisir  davantage  les  détails  (Cl.  il). 

C'est  bien  encore  la  ligure  des  saintes  Eulalie  et  Julie, 
sous  un  portique,  surmonté  de  trois  arcs  en  ogive,  et 

(1)  Arch.  des  Notaires. 


237 

accosté  de  deux  petites  iiiclies  vides,  ogivales,  à  pignons 
terminés  par  une  étoile  à  6  rayons.  Un  écusson  ,  placé 
en  pointe  du  sceau,  est  chargé  d'une  étoile  semblable. 
La  légende,  en  capitales  gothiques,  porte  :  Sigillum  : 
ONOliABlLlS  :  CAPITULI  :  ELNENSIS  (^'. 

XLIf. —  Loup  Martinez  de  Lagunilla,  évêque  d'Elne, 
écrivant  à  son  clergé,  le  21  février  lo6o,  signe  sa  lettre 
de  sa  projtre  main,  et  la  scelle  d'un  sceau*-'  rond,  de 
0'",02v)  (le  diamètre,  à  ses  armes,  qui  sont  une  grue  ou 
cigogne  marchant  dans  un  bassin,  accostée  à  dextre 
d'une  couronne  à  trois  pointes,  et  à  sénestre  d'une  (leur 
de  lis.  L'écu,  sommé  d'un  chapeau  épiscopal  avec  les 
cordons.  Il  n'y  a  pas  de  légende.  On  voit  que  l'usage  de 
substituer  les  armoiries  personnelles  aux  signes  distinctifs 
des  Églises,  tend  à  se  vulgariser.  (Cl.  42.) 

XLIIL  —  Jacques  Pélisser,  archidiacre  de  Confient, 
vicaire-général  pour  Loup  Martinez  de  Lagunilla,  désigne 
le  5  sept.  loOG  Jean  Serin  van  pour  desservir  le  vicariat 
d'.\rgelès,  jusqu'à  ce  que  le  Pape  ail  pourvu  quelqu'un  de 
ce  bénéfice'^'.  L'acte  est  revêtu  d'un  sceau  rond, de  0'",0i, 
appliqué  au  bas  de  l'écriture  et  aux  armes  de  l'Évèque. 
Une  légende,  en  capitales  romaines,  contient  ces  mots: 
t  M  •  D  •  L.\GVx\lLLA  •  EPISCOPVS  :  ELNENSIS.  (Cl.  45.) 

XLIV.  —  Ilonuphre  Masdamont ,  chanoine  d'Elne  , 
vicaire-général  de  l'évêque  Pierre-Martyr  Coma,  ordon- 
nant, le  21  juin  1572,  aux  curés  du  diocèse  de  mettre 
un  certain  chanoine  Jérôme  Noguer,  on  possession  d'un 
bénétice  dans  l'église  du  Houlou,  emploie  le  sceau  épis- 
copal (*>  de  forme  ovale  (  0">,04o  sur  0">035  )  aux  armes 

(1)  Ârcliives  des  Notaires.  (3)  Arch.  des  Notaires. 

(2)  Idem.  (i)  Hem. 


238 

de  rÉvèque,  qui  sont  écartelées  :  au  1er  ei  au  4«,  à  deux 
fasces,  et  aux  2^  et  3^,  k  cinq  coquilles,  posées  2,  i  et  2. 
Le  cartouche  qui  renferme  l'écusson,  gracieusement  en- 
touré de  ligures  d'une  certaine  (inesse  d'exécution,  et 
surmonté  d'une  mitre,  est  entouré  d'une  légende  en  capi- 
tales romaines  :  F.  PETUVS.  MARTIU.  COiMA  .  EPIS. 
ELNENSIS.  (Cl.  U.) 

XLV. — En  vertu  de  la  charte  du  25  juillet  4587,  accordée 
par  Philippe  II,  roi  des  Espagnes,  qui  permet  à  l'Hôpital 
Saint-Jean  de  Perpignan  d'avoir  des  quêteurs  dans  les 
diocèses  de  Girone  et  d'Elue,  les  administrateurs  de  cet 
établissement  délivraient,  à  chaque  quêteur,  le  titre  sur 
parchemin  de  ses  prérogatives  et  privilèges  <•>,  dans  les 
termes  suivants  :  Lo  cartell  de  las  gratias  y  prcrogativas 
que  gosan  los  Baciners  del  hospitcd  gênerai  de  pobres  de 
Sant-Joan  de  Perpinya ,  dins  loqiial  se  fa  narrassio  de 
diversos  privilegis,  etc.,  etc. 

Cette  pièce  se  termine  ainsi  :  En  testimoni  de  les  quais 
coses  avcm  nianat  spedir  les  présents  noslres  impresses  y 
sota  sentes  de  ma  propria  del  notari  devall  scritt,  y  ab  lo 
sagell  de  dit  espilal  al  peu  de  les  présents  estampât. 

Dat  en  Perpenya,  etc.<"^> 

Ce  sceau,  imprimé  du  côté  de  l'écriture,  est  un  carré 
de  0'",0Ô5  de  côté,  posé  sur  une  de  ses  pointes,  suivant 
un  usage  fréquent  en  Catalogne.  Si  l'on  s'en  rapportait 
aux  traits  du  dessin,  le  champ  serait  occupé  par  o  pals, 
celui  du  milieu,  couvert  en  partie  par  l'image  de  saint 
Jean-Baptiste*^'.  Au-dessous  de  cette  image,  existe  une 

(1)  Bulklin  de  la  Soc.  Ph'thm.  des  Pyr.-Oiient. ,  Xle  vol.,  p.  248. 
Éphéinérides  de  l'Hospice  Saint-Jean,  Joseph  Sirven. 

(2)  Ardi.  de  rifosp.  Saint-Jean.  Liasse  I,  n°  33 

(3)  J'aime  mieux  croire  à  une  erreur  de  burin ,  et  admettre  le  champ 
chargé  de  i  pals,  avec  le  saint  Jean  Lrociiaut  sur  les  deux,  du  milieu. 


239 

croix  pattéo,  ancienne  marque  dislinctive  des  Hospitaliers 
chargés  du  soin  des  malades,  et  que  ces  religieux  portaient 
sur  une  tunique  blanche  au  côté  gauche  de  la  poitrine  (Cl. 
45).  L'Hospice  Saint-Jean  (autrefois  de  la  Miséricorde)  étant 
devenu  la  propriété  de  la  ville  de  l*erpignan,  en  porta  natu- 
rellement les  armoiries,  surchargées  de  son  propre  insigne 
héraldi(pic,  la  croix  pattée.  C'est  à  tort,  croyons-nous,  que 
dans  ces  derniers  temps,  le  sceau  de  l'Hospice  représente 
uniquement  la  croix  pattée,  h  l'exclusion  du  blason  de  la 
ville  <'i. 

XLVI. — Ce  sceau  appartenant  à  Don  François  Lopès  de 
Mendoça,  évoque  d'Elne,  se  trouve  dans  une  lettre  du  6 
octobre  IG^S,  mentionnée  par  M.  Alart  dans  son  Etude 
sur  les  Patronnes  du  Diocèse.  Je  n'ai  pas  vu  ce  sceau, 
que  je  me  borne  à  représenter  d'après  la  gravure  qu'en 
a  donné  cet  auteur  (Cl.  46).  On  y  voit  l'écusson  très- 
compliqué  du  Prélat,  sommé  du  chapeau  épiscopal,  et  en- 
touré d'une  légende  en  capitales  romaines  :  DON  FRAN- 
CISCYS  LOPES  DE  MENDOCA  EPLSCOPVS  ELlNEN(^). 

XLVH. — Ici  devrait  se  borner  cette  Étude  des  sceaux 
du  clergé  roussillonnais.  Toutefois,  je  n'ai  pu  résister  au 
désir  de  reproduire  le  sceau  de  l'évèque  d'Elne  Vincent 
de  Margarit,  nommé  par  Louis  XIV,  après  la  réunion 

(1)  La  brandie  transversale  de  cette  croix  était  rouge,  celle  verticale 
bleue.  {Hullclin  de  lu  Soc.  PliilDin.  dm  Pjir.-Orient.,  Xe  vol.,  p.  -459. 
Louis  do  lioniififoy.  Épigraphie  Koussillonnaise.)  —  Pour  être  juste,  et 
n'omcUre  aucun  indice,  je  dois  constater  que  dans  le  sceau  actuel  de 
riiospicc,  ainsi  que  sur  un  écussim  nnulerne  placé  dans  l'éi^liso  dudit 
bospice,  et  au-dessus  de  deux  lonlaines  dépendantes  dudit  établissement, 
datant  du  quinzième  siècle,  la  croix  pallée  est  représentée  au  pied  ficbé. 
L'exemple  ci-dessus  diffère  et  montre  la  croix  pattée  simple. 

(-2)  B.  .Mart.  Les  Patroniiea  d'Elue.  (Extrait  du  Xb'  lUill.  de  la  Soc. 
des  Pyr. -Orient.) 


240 

définitive  du  Houssillon  à  la  France  par  le  traité  de  1639 
(Cl.  47).  Dans  ce  sceau,  se  retrouvent  les  armoiries  concé- 
dées aux  frères  Bernard  et  Jean  de  Margarit  par  le  roi 
d'Aragon  Jean  II ,  au  quinzième  siècle  *'>. 

XLVIII.—  Ayant  eu  également  connaissance  des  sceaux 
de  certains  évêques  du  siècle  dernier,  je  les  mentionne, 
pour  mémoire,  par  ordre  chronologicjue. 

Louis  Habert  de  Montmorl,  nommé  évèque  d'Elne,  le  2 
novembre  1680,  portail  :  d'azur,  au  chevron  d'or,  accom- 
pagné de  trois  anilles  d'argent. 

XLIX.  — Jean  Hervé  Bazan  de  Flamenville,  nommé 
évêque  d'Elne  le  8  septembre  l69o,  portait  :  d'azur,  à 
deux  jumelles  d'argent,  surmontées  d'un  lion  du  même 
passant,  armé,  lampassé,  couronné  d'or. 

L.— Jean  de  Barthélemi  de  Gramont  de  Lanta,  nommé 
évêque  d'Elne  le  17  octobre  1725,  portait  :  d'azur  à  trois 
bandes  d'or,  qui  est  de  Gramont. 

LI.— Charles-François-Alexandre  de  Cardevac,  de  Gouy, 
d'Avrincourl,  nommé  évêque  d'Elne  en  septembre  1745, 
portait  :  d'azur,  semé  de  mouchetures  d'hermine,  au 
comble  de  sable. 

LU. —  Jean-François  de  Saunhac-Bekastel,  nommé 
évêque  d'Elne  en  1822,  portait  :  d'or,  à  un  lion  couronné 
de  sable,  à  l'orle  de  douze  billettes  de  gueules. 

LUI.— Olympe-Philippe  Gerbet,  nommé  évêque  d'Elne, 
le  7  avril  1854,  porte:  d'argent,  à  deux  palmes  mises 
en  sautoir,  cantonnées  de  quatre  étoiles  de  gueules. 

(1)  Arch.  des  Notaires. 


241 


Sceaux  du  !ll4^ili*oi>oli(ain. 

L'Évêchc  d'Elne  était  siiiïragant  do  l'Archevcclié  de 
Narbonne.  Les  Pères  de  Sainle-Martlie,  généralement 
mal  renseignés  sur  les  Églises  du  iMidi  de  la  France,  ont 
prétendu  que  l'Évêque  d'Elne  jouissait,  dès  le  dixième 
siècle,  du  droit  de  prendre  la  première  place  parmi  les 
suffragants  de  la  Métro|)ole.  Cette  prérogative  n'appartint 
jamais  dans  l'Église,  qu'à  l'Évèque  le  plus  anciennement 
ordonné. 

J'ai  reproduit,  en  note,  au  11°  1,  le  sceau  de  Pierre 
d'Amélius,  archevêque  de  Narbonne,  vivant  en  1228, 
tel  que  le  donne  D.  Vaissètc;  voici  le  sceau  de  Pierre  de 
La  Jugie,  vivant  en  1574  (Cl.  48).  Suivant  M.  de  Wailly, 
cet  Archevêque  scella  les  lettres  qu'il  dressa  pour  la 
convocation  de  son  concile  [)rovincial,  avec  son  grand 
sceau  et  son  signet  ou  cachet.  Elles  finissent  ainsi  : 
Dalum  snb  sigillo  noslro  impcndeiite  et  signdo,  in  Castro 
novo  de  MoidilUs ,  die  prima  mensis  fcbriiarii ,  anno 
nativitatis  Christi  ^574  ''*. 

Je  ne  sais  si  le  sceau  appliqué  le  (illisible)  de  l'an  1374 
sur  un  acte  donné  en  son  château  d'Apjjia  (Pia)  par  ledit 
Pierre  de  la  Jugie,  est  le  même  que  celui  signalé  |)ar  les 
Bénédictins.  11  représente,  sous  un  portique  gotlii(iue, 
l'image  d'un  arclievêque  aux  pieds  de  la  sainte  Vierge,  ac- 
costé de  deux  écussons  peu  déchiirrables*-'.  Une  légende 
en  ca|titales  gothiques  porte  ces  mots  :  CON  (?)....  MIS  : 

DIV  :  SCE  :  PE BON  :  ABEPl  :  ATQ  :  PAT.    Que 

l'on  doit  interpréter  sans  doute  de  la  manière  suivante: 
CONtrasigillum?...MlSEli.ViIOiNE  :  DIVLNA  :  SANCÏE  : 

(1)  Élém.  de  Paléog.,  p.  21G. — (2)Arcli.  des  Notaires  de  Perpignan. 

16 


242 

PRIME  :  SEDIS  :  NARRONENSIS  :  ARCHIEPISCOPI  : 
AÏQUE  ;  PUIM MIS.  Ce  sceau  est  roiul,  an  diamèlre  de 
()m,Oi.  H  a  ilù  èlre  un  contre-sceau;  car,  au  bas  de  l'acte, 
du  même  coté  que  l'écriture,  ou  voit  les  restes  d'un  pelil 
cachet  ruud  de  0"',0lo,  |jorlaut  un  écusson  iudecliilVrabie, 
soniuié  d'une  crosse.  Une  légende,  en  capitales  gothiques, 

laisse  voir  les  lettres  ci-après:  SECRT...  P.  A 

(secretum  .  PETRI .  ARCH  .  NAR?)  C'était  le  sceau  parti- 
culier de  Pierre  de  Julie. 

Jacques,  chanoine,  vicaire-général  d'Antoine  Crespin 
du  Rec,  archevêque  de  Narbonne,  employait,  le  dernier 
jour  de  juin  1402,  un  sceau  (Cl.  49),  dans  lequel  je  crois 
remarquer  les  bustes  des  saints  Just  et  Pastor,  sous  un 
porti<iue  placé  au-dessus  de  la  ligure  d'un  personnage 
agenouillé,  et  accosté  de  deux  écussons  :  celui  a  sénestre 
aux  armes  de  Crespin  du  Rec,  et  celui  à  dextre  aux  armes 
du  Chapitre  de  la  ville  de  Narbonne  (^'. 

Le  10  des  calendes  de  juin  1511,  le  siège  d'Elne,  fut 
détaché  de  INarbonne,  et  soumis  iu)médiatement  au  Saint- 
Siège  par  le  pape  Jules  II.  En  loi 7,  Jules  de  Médicis, 
archevêque  de  Narbonne,  obtint  de  Léon  X,  la  restitution 
de  l'Église  d'Elne  a  son  légitime  métropolitain;  mais  cette 
disposition  ne  dura  pas  longtemps,  l'Evéché  d'Elne  ne  re- 
connut plus  de  métropolitain.  Le 50 août  1564,  en  vertu  de 
la  décision  du  Concile  de  Trente  (1565),  l'Evêque  d'Elne, 
Loup  de  Lagunilla,  choisit  l'Archevêché  de  Tarragone. 
A  l'époque  de  la  révolution  française,  rÉvèché  d'Elne  fut 
su|)primé  et  incorporé,  en  1801,  à  TEvéché  de  Carcas- 
sonne.  En  1824,  l'Evèché  d'Elne  ayant  été  rétabli,  releva 
de  l'Archevêché  d'Albi. 

(\)  Arch.  des  Notaires. 


243 


DEUXIEME    PARTIE. 


Sceaux  des  Laïque»». 

Si  l'on  a  dit  quelque  part  avec  juste  raison  que  la 
Sphragistique  est  sœur  de  la  Numismatique,  l'on  ne  peut 
sans  injustice  se  refuser  à  reconnaître  le  lien  qui  réunit 
ces  deux  sciences  à  celle  du  Blason. 

Dans  l'étude  de  l'Archéologie,  tout  s'enchaine,  mais 
par  des  liens  si  laibles,  que  souvent  l'erreur  est  le  fruit 
des  plus  patientes  recherches,  des  plus  savantes  disser- 
tations; aussi,  lorsque  l'exactitude  d'une  solution  peut 
dépendre  du  plus  ou  moins  grand  nombre  d'éléments  de 
comparaison,  recueillir  et  signaler  le  moindre  indice, 
devient  le  devoir  naturel  de  tout  écrivain  ami  de  la  vérité. 

C'est  pourquoi,  traitant  de  la  Sphragistique  du  Rous- 
sillon,  j'ai  cru  utile  de  parler  incidemment  des  armoiries 
particulières  à  cette  contrée. 

Au  premier  abord,  ma  tâche  semble  facile;  car,  pour 
si  peu  que  les  Roussillonnais  se  soient  occupés  de  leur 
histoire  sigillaire,  quelques-uns  d'entre  eux,  cependant, 
ont  à  diverses  époques  parlé  du  blason  de  Perpignan. 
Aucune  version  ne  nrayanl  complètement  satisfait,  je  vais 
l)résenter,  à  mon  tour,  certaines  considérations,  qui, 
l)eul-ètre,  trancheront  délînilivement  une  question  jus- 
qu'ici fort  controversée. 

Suivant  l'oimiion  émise  aux  premières  pages  de  cette 
élude,  la  sigillalion  fut  incdunue  dos  Conilos  amovibles 
et  des  Comtes  héréditaires  du  Houssillon ,  et  le  premier 
acte  scellé  dans  ce  pays  n'est  pas  antérieur  à  la  lin  du 
douzième  siècle. 


244 

Si  les  proniiers  souverains  de  cette  contrée  ne  firent  pas 
usage  de  sceaux,  possédèrent-ils  du  moins  des  armoiries? 
el,  par  suite,  le  pays  ou  les  villes  soumis  à  leur  autorité 
connurent-ils  ces  symboles  usités  dans  la  plupart  des 
États  voisins? 

Il  est  permis  de  douter  qu'aucun  Comte  de  Roussillon 
ait  possédé  des  armoiries  avant  répO(pie  des  croisades. 
Les  historiens  espagnols  modernes,  justice  faite  des  laides 
accréditées  par  les  anciens  auteurs,  n'osent  eux-mêmes 
faire  remonter  celles  des  Comtes  de  Barcelone  plus  haut 
que  la  conquête  de  Catalogne  ;  et ,  suivant  Don  Joseph 
Salât  :  Senalar  otra  epoca  es  esponerse  à  un  error,  y  fijar 
esta  en  la  de  D.  Berenguer  111 ,  es  lo  mas  scguro  <^). 

Plus  hardi  que  mes  devanciers,  avant  de  décrire  les 
sceaux  des  anciens  Souverains  de  la  Catalogne,  je  veux 
dire  ici  ce  (jue  je  crois  la  vérité  sur  le  hlason  des  Comtes 
de  Roussillon,  aussi  bien  que  sur  celui  des  Comtes  de 
Barcelone. 

Conquis  par  les  Francs  sur  les  Arabes,  vers  l'an  760, 
le  lîoussillon  fut  compris  dans  le  royaume  d'A(|uilaine,  et 
dès  le  commencement  du  neuvième  siècle,  une  partie  de 
la  Catalogne  soumise  à  Chaiiemagne ,  était  organisée 
selon  le  régime  franc.  A  la  mort  de  Charles-le-Chauve, 
par  suite  du  démembrement  de  l'enqjire,  la  Septimanie 
fut  divisée  en  deux  provinces  :  la  première,  prit  le  nom 
de  Manpiisat  de  Septimanie,  conq)renant  le  Comté  de 
Roussillon.  avec  Narbonne  pour  ca|>itale;  la  seconde,  se 
composa  des  Marches  d'Espagne,  dont  Wilred-le-Velu, 
souche  des  Comtes  héréditaires  de  Barcelone,  fut  le  pre- 
mier marchis  connu. 

Il  serait  ridicule  assurément  de  tenter  de  rechercher 
les  armoiries  des  Comtes  de  Roussillon  el  de  Barcelone, 


(1)  Tratado  de  las  monedas  labradas  en  el  principado  de  Catalunu, 
toiii.  I,  p.  56. 


245 

du  luiitième  siècle  ;hi  onzième;  mais  ce  que  la  numis- 
matique nous  apprend  est  plus  sérieux. 

Il  est  certain  (jue  les  Carolingiens,  maîtres  de  la  Septi- 
manie,  frappèrent  des  monnaies  de  diverse  valeur,  dont 
le  type,  prescpie  invariable,  montre  sur  l'un  des  cotés 
de  la  pièce  la  figure  d'une  croix,  dont  les  branches, 
d'égale  grandeur,  vont  en  s'élargissant  vers  le  pourtour 
extérieur,  et  ofTrenl  alors  le  caractère  d'une  croix  patiée 
ou  [)oteiicée.  On  attribue  même  h  Louis-le-[)ébonnaire 
des  monnaies  frappées  dans  les  comtés  de  Barcelone  et 
d'Anqmrias,  et  très-probablement  aiissi  dans  le  comté 
de  Roussillon,  dont  le  revers  est  marcjué  de  celle  figure 
liéraldi(pie  (''. 

An  neuvième  siècle,  les  Comtes  amovibles  du  Roussillon, 
simples  agents  stdtalternes,  continuèrent,  sans  doute,  le 
uionnayage  au  nom  des  Carolingiens,  et  durent  conserver 
intact  le  type  usité  dans  le  royaume  (rA(piitaiue '-). 

Au  dixième  siècle,  les  Comtes  de  Roussillon,  devenus 
bérédilaires,  s'a|)pro[»rièrent  le  droit  de  battre  monnaie, 
laiiuelle,  connue  dans  les  cliartes  sous  le  nom  de  monefu 
(iossrlla,  /iuscilioncusis,  numda  l'cipiniani,  l'ut  sans  doute 
frappée  à  Perpignan,  chef-lieu  du  comté. 

Il  n'existe  pas  de  mention  ni  de  spécimen  connu  de  la 
monnaie  des  Comtes  de  Roussillon,  avant  le  douzième 
siècle;  mais  on  possède,  depuis  peu  d'années,  ini  dtMiier 
de  (îansfred  IV,  vivant  de  i  I  15  à  I  Um;  un  denier  et  une 
obole  de  Girard  II,  vivant  de  I  lliô  à  I  M"!.  Crs  trois  pièces, 
dont  l'un  des  côtés  représente  une  croix  paltée,  acconq)a- 
guée  dini  sigm-'^»  cfunmnn  sur  les  monnaies  du  royaume 
Carolingien  d'A(|Miiaine,  sont  analogues  aux  monnaies  de 


(1)   Rerherrhes  sur  les  monnaies  qui  ont  eu  cours  en  noussi'Ion. 
Colsoii,  f85i,  |)1.  I,  fig.  7  el  8. 

(!2)  .M.  de  Lnntrpcrier.  \otire  rlrt  monnnirs  franrnises .  etc.,  p.  102. 
(3)  Un  U  à  dnulilu  (|uoiR'.  Colsoii.  loc.  cil. 


246 

Toulouse,  de  Béarn,  d'Albi,  et  surtout  aux  deniers  de 
Bonafos,  fabriqués  au  douzième  siècle. 

Cette  série,  bien  peu  étendue,  puisqu'elle  se  borne  à 
deux  types  seulement,  ne  donne  certainement  pas  la 
preuve  décisive  que  la  croix  pattée  composait  le  blason 
des  Comtes  de  Boussillon,  bien  qu'il  soit  possible  de 
reconnaître  dans  l'emploi  de  ce  signe ,  un  emprunt  fait 
aux  Carolingiens,  leurs  anciens  maîtres.  Cependant,  si 
l'on  considère  l'époiiue  à  laquelle  les  deux  monnaies  qui 
le  portent  furent  frappées,  il  sera  sans  doute  plus  rationnel 
de  croire  que  cet  emblème,  d'un  usage  si  fréquent  depuis 
la  première  croisade,  avait  été  adopté  par  le  comte  Gérard, 
et  transmis  par  lui  à  ses  descendants.  Je  serai  par  suite 
fort  tenté  de  rapprocher  de  ce  symbole  héraldique  répété 
sur  les  monnaies  des  deux  derniers  comtes,  le  signe  ana- 
logue qui  figure  dans  le  quatorzième  siècle  sur  les  murs 
de  l'Hospice  Saint-Jean,  fondé  à  Perpignan,  en  1116,  par 
Arnaud  Gausfred,  régent  du  Boussillon,  oncle  de  Gaus- 
fred  IV;  sur  l'ancien  sceau  dudit  hospice;  sur  la  poitrine 
des  religieux  chargés  du  soin  des  malades,  et,  chose  plus 
significative  peut-être,  sur  une  des  faces  du  clocher  de 
l'ancienne  église  d'Élne,  rebâtie  dans  le  onzième  siècle, 
en  partie  des  libéralités  du  comte  Gausfred  II  et  de  sa 
femme  Azalaïs. 

Ce  qui  n'est  qu'une  hypothèse  en  ce  qui  concerne  le 
blason  incertain  desComtes  de  Boussillon,  m'apparaît  sous 
une  forme  plus  assurée  lorsque  je  recherche  les  armoiries 
des  Comtes  de  Barcelone,  leurs  ancêtres  présumés. 

Les  divers  auteurs  qui  ont  traité  juscjuici  des  armoiries 
catalanes  et  aragonnaises,  me  semblent  avoir  accrédité  de 
graves  erreurs.  Tous,  ou  presque  tous,  racontent  que 
depuis  le  mariage  de  Baymond-Bérenger  IV,  comte  de 
Barcelone ,  avec  Pétronille ,  dernière  héritière  des  Bois 
d'Aragon,  l'écu  aragonnais  fut  remplacé  par  celui  des 
Comtes  de  Barcelone ,  qui  était  :  d'or,  à  quatre  pals  de 


247 

gueules,  et  ils  affirment  même  que  Wifred-le-Velu  tenait 
ces  armoiries  de  l'empereur  Cliarles-le-Cliaiive,  sans  songer 
qu'au  n(Mivième  siècle  aucun  Élat  d'Europe  ne  connaissait 
encore  le  blason  (^'. 

De  graniies  dissertations  ont  été  aussi  entreprises  à 
reflet  de  savoir  si  l'écu  aux  quatre  pals  de  gueules,  est 
plus  ou  moins  ancien  que  l'écu  chargé  de  la  croix  de 
Saint-Georges.  On  raconte  alors  que  le  comte  de  Barce- 
lone Raymond-rJorell  II,  en  mémoire  de  la  victoire  qu'il 
remporta  sur  les  Sarrasins  en  OOt),  par  la  protection  de 
saint  Georges,  écartela  d'une  croix  rouge  en  champ  d'ar- 
gent, son  écu  d'or  h  quatre  pals  de  gueules. 

Aucune  monnaie  connue  des  anciens  Comtes  de  Barce- 
lone, ne  représente  de  pals,  ou  de  croix  de  Saint-Georges, 
mais  souleniont  la  ligure  d'une  croix  patlée. 

En  ellet,  une  rnancme  d'or,  frappée  à  Barcelone  en  1 157, 
au  nom  de  Bérenger  IV,  montre,  des  deux  côtés,  une  croix 
dont  les  branches  viennent  aboutir  aux  bords  de  la  pièce,  en 
coupant  la  légende.  Depuis  cette  époque,  toutes  les  mon- 
naies frappées  à  Barcelone  présentent,  au  revers,  un  signe 
semblable,  devenu,  à  n"en  pouvoir  douter,  par  la  suite,  ainsi 
que  je  vais  le  démontrer,  le  symbole  héraldique  héréditaire 
des  souverains  de  la  Catalogne  issus  des  anciens  comtes. 

Suivant  D.  Prosper  de  Bofarull,  archiviste  de  la  couronne 
d'Aragon,  les  archives  espagnoles  ne  possèdent  aucun  sceau 
émanant  des  comtes  de  Barcelone  ni  nième  du  roi  Alphonse, 
fils  de  Baymond  Bérenger  IV  et  de  Pétronille,  (jui  régna  de 
117'2h  II  96.  Pour  mon  compte,  je  puis  alllrmer  (pfaiicune 
des  chartes  de  ce  souverain  conservées  dans  les  divers 
dépcjts  roussillonnais,  ne  porte  la  moindre  trace  de  sigilla- 
tion.  Ces  chartes  représentent  invariablement  le  styiium 
du  roi  Alphonse  II  dans  la  forme  suivante  :    'Is^ 

(1)  Mariana,  Gfiroiiimo  Blaiicas,  Aiiisa,  Zurila,  Dcutcr,  le  P.  Roig, 
Feliu  (le  La  Pena  et  autres. 


248 

Que  doit-on  voir  dans  celle  figure,  qui  porle  évidem- 
ment un  certain  caractère  hér;il(li(]ue?  sinon  le  symbole 
héréditaire  empreint  sur  les  monnaies  et  les  chartes  des 
anciens  Comtes  de  Barcelone,  locpicl  doit  se  perpétuer, 
avec  de  légères  variantes,  de  génération  en  génération, 
jusqu'à  la  lin  du  ipiinzième  siècle  dans  les  monarchies 
aragonnaise  ou  nuijorquine. 

Bolarull  a  reproduit  en  fac-f<iwilc  le  sifjiinm  de  tous  les 
Comtes  souverains  de  Barcelone  et  des  Bois  d'Aragon,  leurs 
successeurs.  AVitred  II,  vivant  en  8118,  l'ail  précéder  son  nom 
d'une  croix  polencée  ^\  une  croix  semblable  suit  son  litre 
de  cornes.  Sunyer  l'^'',  en  912,  encadre  son  nom  dans  deux 
croix  panées  >^ .  Borel,  en  951,  emploie  la  croix  potencéei^, 
cantonnée  de  quatre  poinis.  JMiron,  en  la  même  année,  fait 
précéder  et  suivre  son  nom  d'une  croix  pattée>I-< .  Baymond- 
Borel,  en  992,  emploie  une  croix  semblable,  cantonnée  de 
quatre  poinlSi;]t=;  Bérenger,  en  I0l8,t§i;  Baymond-Béren- 
ger  II,  en  1076^;  Baymond-Bérenger  IV,  en  1131,  4f. 
Baymond-Bérenger,  son  Dis  cadet,  frère  d'Alphonse  11, 
qui  ne  régna  pas  sur  le  comté  de  Barcelone,  faisait  suivre 
son  nom  du  signe      a^  T» 

La  croix  paltée,  ou  polencée  si  l'on  veut,  que  l'on  ren- 
contre pendant  plusieurs  siècles  sur  les  monnaies  el  dans 
les  chartes  catalanes  jusqu'en  1513,  est,  selon  moi,  le 
plus  ancien  et  seul  véritable  blason  des  Comtes  de  Barce- 
lone; tandis  que  les  pals,  n'apparaissant  qu'après  la  réunion 
des  deux  États,  constituaient  celui  des  Bois  d'Aragon;  el 
c'est  encore  la  numismatique  qui  viendra  en  aide  à  ma 
démonstration  O. 

(1)  Don  Joseph  Pellicer,  dans  son  Idea  del  Prinripado  de  Catnluha. 
liv.  I,  no  24,  dit  :  «  que  les  qualn-  pals  colorés  nn  champ  d'or,  ne  sont 
pas  les  armes  de  la  Principauté  de  Catalogne  concédées  au  comte  Wilied- 
le-Velu  par  Charles-le-Chauve ,  mais  bien  celles  des  Rois  d'Aragon,  qui 
en  usèrent  avant  l'union  du  comte  Raymond  avec  la  reine  Pétronille.  » 


249 

En  eiïel,  les  nioDiiuies  du  roi  Kainire,  qui  gouverna 
l'Aragon ,  en  1055,  portent  une  petite  croix  au  sommet 
d'un  pal.  Celle  petite  croix,  accompagnée  de  deux  (leurs 
parlant  du  bas  de  ce  pal,  existe  également  sur  les  mon- 
naies des  Rois  successeurs  de  Hamire.  On  remarcpie  une 
figure  à  |)eu  près  semblable  sur  la  monnaie  nnclo,  créée 
par  Alphonse  II;  le  symbole  aragonnais  occupe  le  champ 
de  l'avers,  le  revers  [jorlanl  la  croix  de  Barcelone. — La 
monnaie  qualernc  et  doblaïque  de  Jacques-lc-Coiupiérant, 
fra|)pée  à  Valence,  porte  les  mêmes  types  :  d'un  côté,  la 
croix  baicelonaise ;  de  l'autre,  la  peiile  croix  haussée 
d'Aragon,  ou  bien,  l'écu  aux  quatre  pals,  dont  il  parait 
le  premier  a\()ir  lait  usage  ^'. 

Du  reste,  le  nombre  des  pals  ne  fut  pas  toujours  inva- 
riable. On  les  rencontre  à  diverses  époques,  tantôt  réduits 
à  trois,  même  à  deux,  et  tantôt  portés  à  cinq,  six  et  même 
sept,  sur  les  sceaux,  monnaies  ou  manuscrits  de  la  Prin- 
cipauté de  Catalogne,  depuis  la  réunion  du  Roussillon  au 
royaiune  d'Aragon  (I5ii). 

En  rappelant  ci-dessus  le  sujninn  des  Comtes  de  Barce- 
lone depuis  85)8,  je  n'ai  |)oint  voidu  prétendre  cpie,  dès 
cette  épo(iue,  il  (Vit  employé  en  guise  de  blason.  Mais, 
ainsi  que  je  le  montrerai  plus  loin,  je  pense  que  les  Rois 
d'Aragon,  issus  des  Comtes,  retinrent  avec  intention 
l'emblème  de  la  croix  dans  leur  signature,  en  souvenir 
des  armoiries  de  leurs  ancêtres  paternels,  auxquelles 
l'écu  aragonnais  avait  été  substiliu'. 

Quant  à  l'écusson  porté  de  tenq)s  immémorial  par  la 
ville  (le  Barcelone,  et  (jui  est  :  écartelé  au  l'''  et  au  ¥ 
d'argent  à  la  croix  de  Saint-Georges  de  gueules,  et  aux 
2e  et  5e  d'or,  aux  l  pals  de  gueules,  l'Iiislorien  Bosch 
veut  que  la  croix  rouge  ait  été  prise  en  mémoire  d'une 


(1)  Colson,  Recherches  sur  les  Monmties.  \\\.  I,  tisj.  15,  l(i,  17,  \H, 
19,  20  et  21. 


250 

apparition  miraculeuse  du  bienheureux  saint  Georges, 
patron  de  la  Catalogne.  Pounjuoi  n'y  verrail-on  pas  plu- 
tôt la  représentation,  légèrement  altérée,  du  type  primitif, 
porté  d'une  manière  conslanlc  sur  les  monnaies  et  les 
chartes  anciennes,  témoins  autl)enti([ues,  irrécusables? 

Une  lettre  des  Consuls  de  Mer  de  Barcelone,  adressée 
le  26  mars  1560,  au  Bailli  de  Perpignan,  porte  un  sceau 
de  0'",05  environ;  le  pourtour  extérieur  où  se  trouvait  la 
légende  est  indéchiffrable;  au  centre,  on  voit  un  écusson 
carré,  posé  sur  une  de  ses  pointes,  sans  aucune  espèce 
de  cimier  ni  de  couronne,  écarlelé  au  1*=''  et  au  4^,  k 
une  croix  pleine;  et  aux  2^  et  5^,  à  trois  pals. 

En  1588  et  pendant  plusieurs  siècles,  car  au  dix- 
septième  je  retrouve  encore  le  même  type,  le  Viguier 
de  Barcelone  employait  un  sceau  de  0"i,06,  représentant 
au  centre  une  figure  géométrique,  composée  de  quatre 
demi-circonférences,  reliées  entre  elles  par  autant  d'an- 
gles aigus  saillant  vers  le  pourtour  extérieur;  au  centre 
un  écusson  carré,  posé  sur  une  de  ses  pointes,  chargé  de 
cinq  pals,  et  portant  en  abime  un  autre  carré,  également 
sur  pointe,  chargé  d'une  croix  alaisée,  cantonnée  de  quatre 
points  (besants?). 

Lég.  t  S  :  VIC/RII  :  B/RCHN  :  PRO  :  DOiMINO  :  REGE  : 
/RÂGONVM  :  COMITE  :  B  RCHN. 

Ces  deux  exemples  ne  font-ils  pas  voir  clairement  (L.  2) 
l'union  des  deux  États,  Catalogne  et  Aragon  (L.  5),  et  la 
sui)rématie  des  armes  Catalanes  sur  celles  d'Aragon,  par 
la  dis[)osition  intentionnelle  de  la  croix  barcelonaise  bro- 
chant sur  les  pals  aragonnais? 


L>51 


I.  — Lorsque,  par  son  testament  de  1172,  le  comte 
Girard  II  ont  \é^né  le  Roiissilion  au  roi  Alphonse,  ce 
comte  devenu  partie  intégrante  de  la  monarchie  aragon- 
iiaise,  fut  gouverné  directement  par  les  Officiers  du  Roi. 
Le  Roussillon  n'eut  pas  alors  d'autres  armoiries  que  celles 
du  Royaume.  Seulement,  l'écu  du  Comté  de  Roussillon, 
alïecla  généralement  la  forme  d'un  carré  posé  sur  une  de 
ses  pointes,  et  chargé  le  plus  ordinairement  de  quatre 
pals:  mais  quelquefois  aussi  d'un  nomhre  diflerenl. 

La  période  pendant  laquelle  le  Roussillon  lit  partie  du 
Royaume  de  Majorque,  et  qui  est  comprise  entre  l'année 
1270  et  l'année  lôii,  n'est  représentée  dans  ma  collec- 
tion sigillaire  par  aucun  spécimen,  si  l'on  veut  excepter, 
toutefois,  le  sceau  de  l'évêque  Gui  Terrena,  décrit  au 
No  VU  de  la  première  partie. 

Les  plus  anciens  sceaux  où  figurent  les  armoiries  du 
Comté  de  Roussillon,  datent  du  retour  de  ce  pays  au 
Royaume  d'Aragon ,  et  le  premier  que  je  retrouve  est 
ap|)liqué  sur  un  acte  du  le""  septembre  1355,  donné,  à 
Perpignan,  par  Guillaume  de  Rellaria,  conseiller  du  Roi 
d'Aragon  et  Gouverneur  pour  lui  dans  les  Comtés  de 
Roussillon  et  de  Cerdagne ,  (pii  nomme  Rernard  Vais, 
habitant  de  ladite  ville,  à  l'ollice  d'avocat  des  pauvres  <''. 

Le  sceau  (L,  4)  en  cire  rouge,  a  0"',06  de  diamètre; 
le  champ  est  occupé  par  un  personnage  couvert  d'un 
manteau,  la  léte  nue,  ceinte  d'une  auréole  (dans  lequel 
j'incline  à  voir  saint  Georges,  patron  de  la  Catalogne), 
portant,  entre  ses  deux  mains,  à  hauteur  du  ventre,  un 
écusson  carré,  posé  sur  une  de  ses  pointes,  et  dont  la 
disposition  héraldi(|ue  montre  seulement  trois  pals.  De 
légers  ornements,  circonscrits  dans  une  bordure  formée 

(  1)  Arch.  (les  Notaires. 


252 

de  seize  quarts  de  circonférence,  reliés  ensemble  par  nne 
petite  boule  ronde  au  point  d'intersection,  entourent  le 
saint.  Une  légende  en  capitales  gotliiipios,  précédée  d'une 
petite  croix  pattée,  se  compose  des  mots  suivants  : 
>l<  SIGILLVM  :  OFtlCIi  :  GVBI^rnalionis  :  comilalWM  : 
ROSSILIOMS  :  Et  :  cerlTANIE. 

Les  deux  autres  sceaux  (L.  5  et  6),  apposés  sur  de 
nombreux  actes  de  1570  à  1431,  par  les  Gouverneurs 
des  Comtés  ou  par  leurs  Lieutenants,  (pioique  dirCérarit 
très  peu  à  première  vue  du  précédent,  oflVenl  cepen- 
dant une  légère  variante,  (pi'il  est  utile  de  constater. 
C'est  toujours  (dans  la  lig.  D)  le  saint  Georges  portant 
un  écu  carré  sur  pointes,  couvert  celte  fois  de  deux  pals 
seulement.  L'encadrement  n'est  plus  composé  que  de  six 
circins,  dont  le  bord  intérieur  est  dentelé.  La  légende, 
aussi  en  capitales  golbiipies,  au  lieu  de  commencer  |)ar 
une  croix  pattée,  est  précédée  d'un  petit  écu  triangulaire 
à  un  pal,  et  certains  mots  diffèrent  de  ceux  portés  sur  le 
sceau  de  l3o5,  par  l'orihograplie  :  \^)  sKiILLV.M  :  OlliCii  : 
gVBERNAtiONIS  :  COMlTATVVm  :  ROSSILlOnis  :  el  : 
CEriTANIe. 

Dans  la  fig.  E,  le  saint  Georges  porte  un  ccusson  à 
cinq  pals.  La  légende  est  précédée  d'un  écu  triangulaire 
a  trois  pals,  plus  grand  que  dans  l'exemple  précèdent: 
H  SIgILLVM  :  OFIÎCII  :  GVBErnallOMS  :  comlTATVVm  : 
ROSsILiONlS  :  EÏCERlTANie. 

Voici  le  nom  des  Gouverneurs  des  Comtés  de  Roussillon 
el  de  Cerdagne  dont  j'ai  retrouvé  les  sceaux,  pendant  cette 
période  d'un  siècle  environ  :  Guillaume  de  Bellaria,  1555; 
Gelabert  deCruyIles,  15<S6;  Raymond  de  Ça  Garriga,  1589; 
Bernard  Albert;  Raymond  de  Perellos. 

Je  ne  connais  pas  d'autres  exenq)les  des  armoiries  |)ro- 
prernent  dites  des  Comtés  de  Roussillon  et  de  Cerdagne. 
Salât,  dans  son  traité  des  monnaies  d'Espagne,  déjà  cité, 
dit  que  l'écu  du  Comté  de  Roussillon,  est  un  carré  posé 


253 

sur  une  de  ses  pointes,  portant  quatre  pals  de  gueules 
en  champ  d'or;  mais  la  fig.  Ai  de  la  planche  I^e  de  son 
livre,  représente  un  écu  losange,  d'or  à  quatre  pals  de 
gueules,  dont  les  quatre  sommets  touchent  les  bords 
d'un  écusson  rectangulaire  aussi  d'or  (  L.  7). 

Je  crois  qu'il  fait  erreur  dans  le  dessin  de  ces  armoi- 
ries, et  je  montrerai  plus  lard  que  le  type  était  bien 
priniiiivemcnl  un  carré  posé  sur  pointe,  dont  l'usage  a 
lait  une  losange,  sans  qu'on  puisse  apporter  à  celte 
substitution  la  moindre  bonne  raison. 

D.  Joseph  Garma  décrit,  de  son  côté,  l'écusson  du 
Comté  de  Roussillou  de  la  manière  suivante''':  d'argent 
à  deux  fasces  d'azur,  chargées  de  trois  (leurs  de  lis  "d'or 
(L.  8). 

Je  ne  sais  où  il  a  découvert  ces  armoiries;  à  moins 
qu'elles  n'aient  été  concédées  à  la  province  de  Roussillou 
depuis  le  traité  des  Pyrénées,  ce  que  j'ignore  complè- 
tement. En  tout  cas,  je  n'ai  jamais  vu  figurer  cet  écu 
sur  aucuns  sceaux,  mommients  ou  monnaies. 

I.a  pciiie  ville  de  Vinra,  dans  rarroudissemeul  de  Prades, 
doiii  rHôlel-de-Ville  ne  remonte  pas  h  |)ius  de  deux  siècles, 
offre  sur  la  porte  un  exemple  que  je  suis  tenté  de  pré- 
senter ici  comme  décisif.  On  voit  deux  écussons,  sommés 
chacun  d'une  couronno  royale,  portant  quatre  pals;  mais 
la  forme  de  ces  deux  emblèmes  l!éraldi(]ues  diffère  essen- 
tiellement, car  l'un  est  carré,  posé  sur  pointe,  et  l'autre 
rectangulaire.  Je  crois  qu'on  y  voit,  côte  à  côte,  les  armes 
du  Roussillou  et  celles  de  la  i)rincipauté  de  Catalogne. 

Je  menlionnerai  également  ,  pour  le  critiquer,  un 
écusson  dont  aucun  monument  roussillonnais  ne  porte 
la  trace.  C'est  celui,  sans  doute,  que  .M.  dUozier,  dans 
sa  dislrii)ulion  générale,  attribue  au  Roussillon,  devenu 
depuis  peu  province  française.  Cet  écusson  .  reproduit  en 

(I)  Adarya  Cattiluim.  fig.  5,  pag.  148. 


:25S 

divers  ouvrages*'*,  porte  en  champ  d'azur,  niip.  airjle 
éployce  d'or.  Malheurousemenl,  ces  armoiries  sont,  à  très 
peu  de  chose  près,  celles  d'une  illustre  maison  dauplii- 
noise,  qui  portait,  selon  le  P.  Ménestrier  <-'  :  de  Queules, 
à  une  aujle  cployée  d'argent.  Girard,  comte  de  Vienne, 
vivant  en  850,  possesseur  d'une  maison  de  plaisance 
située  dans  la  seigneurie  de  Roussiilon  (en  Daupliiné),  dont 
il  prit  le  nom,  est,  suivant  l'opinion  générale,  l'auteur  de 
cette  famille,  qui  dura  plus  de  cinq  cents  ans  après  luif^'. 
Je  pense  que  l'on  doit  rejeter  cet  écusson,  dont  il  n'a  été 
fait  aucun  usage  dans  le  pays  auquel  il  était  attribué. 

Différents  auteurs  prétendent  donner  le  blason  du  Comté 
de  Cerdagne,  qui  serait  écartelé  en  sautoir,  au  i^i-  et  4^ 
d'or,  a  quatre  pals  de  gueules;  et  aux  2^  et  5^  d'argent,  à 
la  croix  de  Saint-Georges  de  gueules.  Aucun  exemple  de 
cet  écusson  ne  se  voit  sur  les  anciennes  monnaies  de 
Cerdagne.  Ce  ne  peut  être  qu'un  blason  moderne;  les 
premiers  Comtes  de  ce  pays,  issus  des  Comtes  de  Barce- 
lone ,  étant  éteints  avant  l'apparition  des  premières 
armoiries  certainement  connues  de  la  principauté  de 
Catalogne  (L.  9). 

II.  —  Aucun  auteur  français  ne  paraît  avoir  connu  le 
sceau  de  Pierre  II,  lils  d'Alphonse,  dont  le  règne  dura  de 
1190  à  1215,  et  auquel  la  ville  de  Perpignan,  fut  rede- 
vable de  l'institution  du  pouvoir  municipal.  Bofarull, 
lui-même,  dans  le  tableau  déjà  cité  plus  haut,  accom- 
pagne ses  fac-similé  d'un  avertissement,  duquel  j'extrais 
les  phrases  suivantes  :  Escasearon  aun  mas  sus  jirmas 

(t)  .Annuaire  delà  Noblesse  de  borel  d'Autorivc;  année  1850. — Arm. 
national  de  Frume,  Traversier;  [Hl'2.  —  Catalogue  des  Gentilshommes 
du  Roussiilon,  etc.,  Ed.  de  Barthélémy;  1864. 

(2)  Méthode  abrcfiée  de  Blason,  etc.,  Cl.  Fr.  Ménestrier;  1601. 

(3)  Histoire  du  Ihuphiné,  Clioiicr. 


255 

en  los  diplomas  los  'primer os  monarcas  de  Aragon,  pues  se 
observa  que,  hasta  el  reynado  de  Don  Pedro  el  Ceremonioso 
inclusive,  no  aparece  en  ellos  aulografo  alguno,  y  que  toda 
su  legiliinidad  y  originaUdad  esta  en  el  escribano  que  du 
fe,  y  en  los  signas  renies  que  uniformaron  aqucllos  Rcyes, 
luego  que  anadieron  los  sellos  pendienies  en  sus  diplomas, 
cuyo  conocimienlo  requière  un  Iralado  y  estudio  parti- 
cular;  pero  basta  por  ahora  saber,  que  no  usé  la  cancil- 
leria  do  Aragon  el  real  scllo  basta  el  reynado  de  Don 
Pedro  el  Calolico,  que  le  introdujo  antes  de  su  viage  à 
Ronia,  donde  le  corona  Innocencio  111,  en  1204,  conce- 
diendole  el  lilulo  de  Ganfanoner  à  Alferez  major  de  la 
Iglesia,  con  la  bandera  colorada  y  amariUa ,  que  desde 
enlonces  se  hizo  nacional  y  estensiva  despues  à  toda  Es- 
pana,  y  de  estos  colores  fueron  en  adelanle  las  cintas  de 
seda  que  soslenian  los  sellos  de  los  diplomas  de  aquellos 
Reyes  (*). 

Une  charte  scellée,  donnée  à  Perpignan,  le  50  mars 
1190,  par  ledit  Roi  d'Aragon,  confirmant  une  donation 
liiite  par  son  père  a  l'Hospice  Saint-Jean,  prouve  que 
l'usage  établi  par  Pierre  II  est  antérieur  à  l'année  120i. 
La  cliarte  n'existe  plus  en  original  ;  mais  une  copie  don- 
nant la  description  du  sceau  royal,  nous  reste <2'.  Hoc  est 
translalum  jideliler  scriplum  à  quadani  carta  seu  lilera 
pergamenea  aut  privilégia  illustrissimi  domini  Pétri,  Dei 
gracia  Aragonum  tune  régis;  ejus  vero  sigillo  cere  albe 
in  quibusdam  corrigiis  cericie  sive  de  canapi  impendenti 
sigillala  ;  in  una  cujus  sigilli  presentis  figura  erat  sive 
sculplura  militis  supra  equum  armait  ienentis  scutum 
regale  sigiii  Aragonum  in  braxio,  et  in  manu  lanceani 
cum  gonfaiiono,  in  altéra  vero  sigilli  presenlis  figura  erat 
spve  sculplura  régis  sedenlis  in  solio  (enentis  in  tnanu 

{\)  Tabla  cronohgica;  afio  1833. 

{i)  Arcli.  de  l'Hosp.  Saint-Jean,  liasse  2,  n"  11. 


256 

dextra  ensem,  in  senestra  vero  manu  florem,  et  circumdrca 
didum  sigillum  in  circulo  ei^anl  litere  quedam  que  propter 
antiijuilatem  comode  legi  non  poierant. 

Le  0  des  calondes  d'août  1207,  le  mcmc  Roi,  accor- 
dant aux  habitants  de  Collioure  le  privilège  de  la  Iran- 
cliise  du  droit  de  leude  et  antres  établissements  de  foires 
et  de  marchés,  employait  le  même  sceau,  dont  la  descrip- 
tion est  faite  en  termes  analogues  à  ceux  de  la  charte 
précédente'*'.  (Voir  la  signature  de  ce  Roi,  planche  7.) 

III. — Jacques  I^r,  dit  le  Conquérant,  dont  le  règne  dura 
de  1215  a  1276. 

Le  sceau  de  ce  monarque  a  été  décrit  par  M.  de  Wai11y<*' 
et  le  dessin  en  a  été  donné  par  Dom  Vaissète  et  le  baron 
Taylor;  je  ne  puis  mieux  faire  que  de  citer  textuellement: 

«  Jacques  I^'',  roi  d'Aragon,  comte  de  Barcelone  et  sei- 
«  gneur  de  Montpellier,  a  scellé  en  cire  et  en  plond); 
«  une  empreinte  de  cire  de  3  pouces  'j^  de  diamètre, 
«  suspendue  à  un  acte  de  122G  (J.  428),  le  représente 
«  assis  sur  un  trône  à  dossier,  tenant  de  la  main  gauche 
«  un  globe,  et  de  la  main  droite,  une  épée  posée  sur  ses 
«genoux.  Le  contre-sceau  est  de  la  même  dimension; 
«  le  Roi,  monté  sur  un  cheval  au  galop,  armé  d'une  lance 
«  à  banderolle  et  coiffé  d'un  casque  terminé  par  une  cou- 
rt ronne,  porte  suspendu  à  son  cou  un  bouclier  (pii  est 
«  aux  armes  d'Aragon,  ainsi  que  le  caparaçon  du  clieval; 
«  un  asire  est  au-dessus  de  la  tète  du  cheval  :  f  S.  lACORI 
«  DI  :GRA.  REG.  ARAG.COMIT.  BACHN.  — fZ.  MOMIiM 
«  MONTISPESSVLANF.  On  retrouve  à  peu  pi  es  les  mêmes 
«  détails  sur  une  bulle  de  dix-huit  à  dix-neuf  lignes  de 
«  diamètre,  suspendue  à  un  acte  de  1258  (J.  587);  mais, 
«  il  ajoute  a  ses  titres,  dans  la  légende,  ceux  de  Roi  de 

(1)  Arch.  des  Pyr. -Orient. 

(2)  ÉUm.  de.  Paléogr..  tom.  II,  p.  l-iO  et  suiv. 


257 

«  Mnjorqiie  et  de  ValcMice,  et  de  Comte  d'Urgell  :  f  S.  lA. 
«  RKC. .  ARAG  .  /  .  MAIOmCAKVM.  7.  .  VALNCIE.  — f 
«  CO.MITJS  BAUCII .  z  .  VHGLLI .  Z  .  DOMI .  iMOïISPLI. 
«  Tous  ces  titres  se  retrouvent  sur  un  sceau  de  cire  du 
«  même  prince,  suspendu  à  une  charte  de  1262  (J,  587). 
«  Cette  empreinte  a  un  pouce  trois  quarts  de  diamètre. 
«  Les  abréviations  de  la  légende  sont  moins  nombreuses 
«  que  sur  la  bulle  de  plomb  qui  vient  d'être  décrite.  » 

Une  charte  royale  dudit  Jacques,  roi  d'Aragon,  de 
Majorque  et  de  Valence,  donnée  aux  ides  d'octobre  1272, 
à  Montpellier,  et  relative  à  l'Hospice  Saint-Jean,  est  scellée 
d'un  débris  de  sceau  en  cire  jaune,  à  deux  faces,  pen- 
dant à  une  tresse  de  lil  (L.  10).  La  légende  est  totalement 
enlevée,  ce  qui  diminue  considérablement  le  diamètre  du 
sceau,  conforme,  selon  toute  apparence,  aux  indications 
données  par  M.  de  Wailly  <*'.  Un  autre  débris  de  sceau 
du  même  type  est  suspendu  à  une  charte  de  1275  (-'. 

(Voir  la  signature,  planche  7.) 

IV. —  Jacques  I^r,  dit  de  Majorque,  succéda  à  son  père 
et  régna  de  1276  à  1511.  Son  sceau  m'est  inconnu. 
M.  de  AVailly  en  a  donné  la  description  suivante  : 

«  Les  sceaux  des  Rois  de  Majorque,  dit-il,  oflVent  de 
«  grands  rapports  avec  quelques-uns  de  ceux  qui  ont  été 
«  employés  par  les  Rois  d'Aragon '3>.  Une  empreinte,  qui 
«  a  moins  de  5  pouces  de  diamètre  (J.  588,  an  1298), 
«  représente  Jacques  If"",  assis  et  couronné,  tenant  de  la 

(1)  Arch.  de  THosp.  Saint-Jean.  Liasse  II,  n"  25. 

(2)  Arcli.  (les  Pvr. -Orient. 

(3)  Dans  une  notice  insérée  mi  Journal  des  Pyrénées-Orientales  (:inn. 
1852),  M.  P.  Tastu,  traitant  des  armoiries  de  Perpignan,  prétend  que  l'écu 
des  Rois  de  Majonpie  était  tout  dilVérent  de  celui  des  Rois  d'Arat;on. 
romine  son  assertion  n'est  appuyée  d'aucune  preuve,  je  n'iiésite  pas  à 
préférer  celle  de  M.  de  Wailly. 

17 


258 

«  mnin  gauche  un  globe  surmonté  d'une  croix,  et  de  la 
«  main  droile,  une  épéc  posée  sur  ses  genoux.  La  légende 
«  est  ainsi  conçue  :  S  i  lA  :  DEI  i  GRA  i  REG  \  MAIOlilC 
«  COMIT  i  P.OSSIL  :  et  CElilTAN  i  Eï  DO.MI  i  M0.NT1S|). 
«  Les  mois  de  celle  légende  sont  séparés  par  trois  points 
«  disposés  verlicalemenl.  Le  conlre-sceau  est  sans  ins- 
«  cription.  Le  champ,  dont  le  diamètre  est  de  14  lignes, 
«  est  occupé  par  un  écu  portant  trois  pals.  Un  acte  de 
«1505  (J.  879)  est  scellé  d'un  sceau  équestre  sans 
«  contre-sceau;  on  ne  retrouve  plus  dans  la  légende  les 
«  titres  de  Comte  de  Roussillon  et  de  Cerdagne,  et  de 
«  Seigneur  de  Montpellier  :  lACOBVS  DEI  GRACIA  REX 
«  MAIORICARVM  c^. 

Une  charte  du  15  mai  1500,  donnant  à  bail  plusieurs 
pièces  de  terre  à  Guillaume  du  Puig  d'Orfila,  de  Collioure, 
est  datée  de  Majorque ,  et  porte  Tindicalion  d'un  sceau 
de  plomb,  qui  a  disparu  (2).  (Voir  la  signature  du  Roi, 
planche  7.) 

V.— Sanche,  roi  de  xMajorque,  qui  régna  de  151 J  à  1524, 
réglementant  la  corporation  des  tisserands  de  Perpignan, 
par  acte  du  o  des  ides  d'avril  lôSO'^*',  emploie  un  sceau 
rond  a  deux  faces,  en  cire  jaune,  de  0m,09  environ,  dont 
il  ne  reste  plus  qu'un  fragment.  D'un  côté  on  distingue  le 
roi  à  cheval,  et  de  l'autre,  le  roi  assis.  La  légende  a  dis- 
paru entièrement.  Les  armoiries  du  bouclier  ne  sont  plus 
décbidVables  ;  mais  le  caparaçon  du  cheval  est,  comme  le 
précédent,  chargé  de  pals  aragonnais  (L.  Ll). 

La  signature  du  roi  Sanche  est  semblable  à  celle  de  son 
prédécesseur. 

(1)  Élém.  de  Paléogr.,  tom.  II,  p,  UO  et  suiv. 

(2)  .\rch.  des  Notaires. 

(3)  Arch.  des  Pjr.-Orient. 


259 

Il  semble  que  la  jeune  dynastie  majnrquine,  dont  le 
royaume  n'existait  que  par  le  caprice  du  Conquérant,  ait 
tenu  d'une  manière  toute  particulière  à  ra[>peler  sa  descen- 
dance directe  des  Comtes  de  Barcelone,  tout  en  conser- 
vant cependant  aussi  les  couleurs  de  l'Aragon,  dont  elle 
demeurait  vassale. 

VI,— Jacques  II  de  Majorque,  régna  de  1524  à  1544, 
époque  à  laquelle  le  roi  d'Aragon  Pierre  IV,  son  parent, 
s'empara  du  Royaume  de  Majorque  et  le  réunit  définiti- 
vement à  ses  États.  Son  sceau,  qui  m'est  inconnu, 
pendait  à  une  charte  portant  concession  de  privilèges  à 
l'œuvre  de  Saint-Jean,  à  la  date  du  15  des  calendes  de 
juillet  looO  *').  Les  cordons  d'attache  sont  en  soie  rouge 
et  jaune,  disposée  en  cinq  parties  égales,  trois  jaunes  et 
deux  rouges,  dans  lesquelles  on  peut  voir  les  couleurs 
aragonnaises. 

Suivant  M.  de  Wailly  '->,  :  «  Jacques  II  a  employé  un 
«  sceau  de  cire  à  peu  près  semblable  à  celui  de  son  aïeul 
«  Jacques  I^r.  Il  a  en  outre  scellé  en  plomb;  une  bulle  d'un 
«  pouce  7*  de  diamètre,  suspendue  à  un  acte  de  1541  (J. 
«  598),  le  représente,  d'un  côté,  assis  et  couronné,  tenant 
«  le  sceptre  et  le  globe;  de  l'autre,  monté  sur  un  cheval 
«  de  bataille:  lÂCOBVS  DEI  GRA.  REX  MAIORICARVM 
«  COMES  ROSSIE.7.CERITAINIE.  7.  DNS.  MONTISPLI.» 

La  signature  est  semblable  à  celle  des  deux  Rois  pré- 
cédents. 

VIL— Suivant  M.  de  Wailly  (^t,  le  sceau  de  Pierre  IV,  dit 
le  Cérémonieux,  ressemblait,  li  quelque  chose  près,  à  celui 
de  Jacquesli  d'Aragon,  qui  employait  un  sceau  équestre  sans 

(1)  Arcli.  de  THosp.  Saint-Jean.  Liasse  II,  n»  34. 

(2)  Elém.  de  Paléug.  Loc.  cit. 

(3)  Elém.  de  Paléog.  Loc,  cit. 


260 

ronlro-RConii  :  «  IJnf»  pmproin!o  de  ce  type  est  suspendue  à 
III)  iK-lr  (le  l'ion  (.1.  I(jii;  elle  a  "2  ponces  ^'^  de  <ll.inièlre  : 
S.  lACOlU  DEI  (iUA  Hi:(;iS  AIJACON.  MAIOKIC.  VA- 
LNC.  et  MVIU:.  AC  COMITIS  HAUCH.  Un  acte  de  l!299 
(.1.  KJ'i)  et  scellé  d'nne  empreinte  anjonrd'hni  mnlilée, 
mais  dont  le  diamètre  devait  être  beaucoup  plus  i,M'an(l 
que  celui  du  sceau  précédent.  Jacques  11  y  est  représenté, 
d'un  côté,  assis  sur  son  trône,  et,  de  l'autre,  monté  sur 
un  cheval  au  galop.  La  légende  du  contre-sceau  lui  don- 
ne les  titres  de  Roi  d'Aragon,  de  Valence,  etc.;  celle  du 
premier  côté,  consiste  dans  un  verset  de  la  Hible,  (]ue 
l'on  retrouve  sur  un  sceau  de  Pierre  IV  :  l)ili(/ile  jusli- 
tiam,  qui  judicatis  terram,  et  ocuU  vidcant  eqiiitatem. 
Le  sceau  de  Pierre  IV  se  distingue  par  les  titres  de  Roi 
de  Sardaigne,  deCorse,  et  de  Comte  de  Roussillon  et  de 
Cerdagne,  qu'il  ajoute  sur  la  légende  du  contre-sceau, 
à  ceux  qu'avait  portés  Jacques  II.  » 
Le  sigxum^^^  de  Pierre  IV  est  semblable  à  celui  des 
Rois  d'Aragon  ses  prédécesseurs. 

Je  n'ai  pas  trouvé  de  sceau  de  ce  monarque  assez  bien 
conservé  pour  en  faire  le  dessin.  Ceux  que  j'ai  vus  sont 
appli(piés  sur  le  dos  des  actes  avec  une  couclie  de  cire 
rouge  très-mince.  Leur  diamètre,  de  0'",I,  est  occupé 
par  la  figure  du  roi,  assis  sur  un  trône,  et  entouré  d'une 
légende  en  capitales  gothiques,  de  laquelle  je  n'ai  lu  que 
les  mots:  t  PETR,)  DEI  :  GRA  :  REX  :  ARAG  :  VALNC  : 

MAIORRI ÀRDIN  :  ET ... .  ROSILION CHN. 

Les  actes  sont  a  la  date  de  1557,  15o8,  1505,  1571  et 
1585(2». 
Pierre  IV  a  aussi  employé,  le  15  janvier  1585,  un  sceau 

(\)  Il  n'cxislo  aiicunp  dilTérenco  eniro  les  siirnahiros  (1rs  rois  d'Aratron 
l'ierre  11! ,  Alphonse  111 ,  Jacques  II ,  Alphonse  IV ,  successeurs  de  Jacques- 
le-Conqu(;rant  au  trône  d'Aragon.  . 

(2)  Arih.  di's  Notaires. 


261 

ileO"',()i,  que  je  n'ai  pu  décliiffrer*''.  En  général,  les  types 
a|)pli(iués  sur  les  actes  en  papier,  ne  permettent  de  distin- 
guer que  la  légende  et  la  ligure  du  roi  au  centre;  le  chan- 
celier ménageait  la  cire  (voir  n°  XI). 

VIII.— A  partir  de  cette  époiiuo,  je  ne  trouve  |)lus  dans 
les  archives  roussillonnaises,  de  sceau  royal,  qui,  par  son 
état  de  conservation,  mérite  d'être  reproduit.  Je  me  bor- 
nerai a  signaler  les  points  les  [Ans  remarquables  de  ces 
divers  monuments. 

Le  roi  Jean  I*"'",  dont  le  règne  a  duré  de  1587  h  I39G, 
a  enq)loyé  pendant  les  années  1587,  1090,  1591  et  1592 
un  sceau  de  0'",I,  sm-  le(iuel  il  est  représenté  couronné 
et  assis  sous  un  portique  gothique  (inement  dessiné.  De 
la  légende,  en  miimscules  gothi(pies,  je  lis  seulement: 
S:  lOIIAIS:  1)1:  GHA*^). 

Sa  signature  est  semblable  à  celle  de  ses  prédécesseurs. 

IX, — Le  roi  Martin,  qui  régna  de  139G  a  1410,  a  em- 
ployé pendant  les  années  1404,  1406,  1407,  1409  et 
JilO,  comme  ses  prédécesseurs,  un  sceau  de  0'",!, 
allectanl  la  même  disposition.  Le  peu  que  j'ai  lu  de  la 
légende,  en  minuscules  gothiques,  porte  :  S:  MAIIÏI  : 
DI  :  GRA  :  REG  :  ARAGON i^K 

Sa  signature  est  comme  celle  des  précédents. 

X.  — Marie,  reine  d'Aragon,  femme  de  Martin ,  lieute- 
nante-générale  pour  le  roi  son  mari,  a  euiployé,  pendant 
les  années  1596  et  1597,  un  sceau  rond  de  0'",09,  dont 
le  centre  est  occupé  par  un  écu  en  losange,  chargé  de 
quatre  pals,   entouré  de  dessins  indéchiUïables.   De  la 

(  I  )  An  11.  (les  Notaires. 
(-2)  Idem. 
(3)  l(km. 


262 

légende,  en  niinuscnles  gothiques,  je  lis  :  7  S 

MAIORIC  :  SARDIN  :  et  :  CORSICh:  :  COMITISSEQVE  : 
BARCHLNON  :  ROSSIUO^'IS  -^K 

La  reine  Marie,  fille  du  comte  de  Liina,  proche  parent 
(le  l'antipape  HiMioil  XIII,  traçait  son  sifiinini,  de  la  nia- 
nièn»  suivante  :  une  losange,  dont  l'inlérieur  représente 
un  dessin  iiéral(li(pie;  le  premier  parti,  aux  armes  d'A- 
ragon, et  le  second,  aux  armes  de  la  famille  de  Luna, 
qui  sont  coupées,  au  l^r,  un  croissant  renversé,  et  au  2^, 
un  échiquelé.  Les  quatre  sommets  de  la  losange  sont 
terminés  par  la  croix  pattée  des  Comtes  de  Barcelone  (-1 
(Voir  planche  7.) 

Cette  disposition  que  je  retrouverai  plus  tard,  en  1445, 
me  confirme  dans  l'opinion  que  j'ai  émise  au  sujet  de  ces 
signatures,  dans  lesquelles  j'ai  voulu  voir  un  symbole 
héraldique,  dont  la  manifestation  cessera  a  l'extinction 
des  descendants  des  anciens  comtes  souverains  de  Bar- 
celone. 

XL — Ferdinand  régna  de  iWi  a  1416.  Son  sceau, 
large  de  0'",105,  représente  le  roi,  assis  et  couronné, 
sous  un  portique,  comme  les  rois  ses  ancêtres.  La 
légende,  en  minuscules  gothiques  très-lisibles,  porte 
S  :  FFERDINAN  i  DI  i  GRA  :  REG  :  ARAG  •  SICILIE 
VALNC  :  MAIORIC  i  SAR  Z  CORSIC  i  COMIT  j  BARHN 
DVC  :  ATHEN  Z  NEOPATR  i  ACET  i  COMIT  =  ROSILION 
Z  CER(3). 

Le  dessin  fait  voir  de  quelle  manière  la  cire  était  appli- 
quée, la  plupart  du  temps,  sur  les  actes  en  papier.  Des 
fragments  de  sceaux  pendants,  que  j'ai  vus  aux  archives 
des  Pyrénées-Orientales,  dénotent  un  certain  talent ^hez 

(i)  Arch.  des  Notaires. 

(2)  Arch.  des  Pyr.-Orien. 

(3)  Arch.  des  Notaires. 


I 


263 

li^s  t;i'aveurs  du  (|iiirizième  siècle.  Les  sceaux  de  grande 
dimension  sont  remplis  de  ligures  diverses,  d'écussons, 
d'ornements,  aussi  délicats  que  variés,  qu'une  deslruc- 
lion  presque  totale  m'empèclie  de  reproduire  {L.  12). 

Le  '25  octobre  Lil'2,  Ferdinand  a  aussi  employé  un 
sceau  rond,  de  Of",0o,  dont  le  champ  est  occupé  |)ar 
un  écu  triangulaire  aux  armes  d'Aragon,  sommé  d'une 
couronne  et  entouré  d'une  légende  illisible;  et  le  14 
mars  LilO,  il  se  servait  d'un  sceau  secret,  de  Om^OliS, 
représentant  son  écusson,  soutenu  par  deux  griffons  ailés, 
et  sommé  d'une  tète  de  dragon. ''L  f>a  légende,  on  minus- 
cules gotIii(iues,  est  illisible.  La  signature  du  roi  Ferdi- 
nand est  semblable  aux  précédentes. 

XIL — Al[)lionse  V,  qui  régna  de  1416  à  1  4o8,  se  ser- 
vait, étant  prince  de  Girone,  d'un  sceau  en  cire  ronge, 
(lonl  le  diamètre  m'est  inconnu  ,  et  qui  est  suspendu  à 
une  charte  du  15  septembre  1410,  donnée  au  conmien- 
cement  de  son  règne,  avec  l'indication  qu'il  l'emploie 
parce  qu'il  n'a  pas  encore  de  sceau  royal  (L.  15). 

(le  débris  représente  le  prince  à  cheval,  la  tête  couverte 
d'un  heaume,  ayant  au  bras  un  écu  chargé  de  deux  pals. 
Le  champ  du  sceau  est  comme  semé  de  petits  écussons  à 
deux  pals,  les  uns  triangulaires,  les  autres  en  losange(-'. 

Ce  roi  a  aussi  employé  un  sceau  secret,  de  Oni,Oo(L.  1 1), 
qui  représente  son  écusson  supporté  par  deux  griiïons  ailés, 
assez  semblables  à  ceux  (pii  se  voient  dans  le  sceau  secret 
du  roi  Ferdinand  ;  une  tète  de  dragon  surmonte  l'écusson  et 
se  trouve  encadrée  sous  un  petit  portique.  La  légende,  en 
minuscules  gothiques,  porte  :  S  •  .SECRKTVM  •  ALFOXSI  • 
DEI  •  GRAGA  •  REG  •  AR.VGONVM  •  ET  •  SICILIE*^^ 

(1)  Airli.  lies  Notaires. 

(2)  Arcli.  fies  P.vr.-Orieiil. 
(ii)  Arrh.  des  Not.iires. 


264 

Alphonse  V  a  encore  employé  un  sceau  rond  de  0"i,l. 
Il  esl  indéchiiïrable*''. 

La  signature  du  roi  Alphonse  est  semblable  aux  précé- 
dentes. 

XIII.— Marie  de  Castille,  femme  d'Alphonse,  roi  d'Ara- 
gon, lieutcnante- générale  pour  son  mari,  a  employé, 
pendant  les  années  1440,  1402  et  1453,  un  sceau  rond; 
de  0"i,08,  (jui  dlIFère  de  celui  employé  par  elle,  en  1  425, 
par  la  dimension.  Ce  dernier,  qui  a  O'",10o,  n'est  pas 
assez  bien  conservé  pour  que  je  puisse  savoir  si  c'est  le 
sceau  particulier  de  la  Reine  ou  celui  du  Roi.  Elle  a 
encore  employé  un  sceau  portant  un  écusson  couronné, 
à  quatre  pals,  semblal)le  à  celui  du  roi  Ferdinand*-'. 

Marie  de  Castille  faisait  apposer  a  une  charte  de  1445 
son  signum,  qui  représente  un  écu  losange,  parti,  au  1^'' 
d'Aragon,  et,  au  2^,  écartelé  de  Léon  et  de  Castille.  Les 
quatre  sommets  toujours  terminés  par  une  croix  pattée'^'. 
(Voir  planche  7.) 

XIV.  —  Jean,  qui  régna  sur  l'Aragon  de  1458  îi  1479. 
Le  sceau  de  Jean,  comme  roi  d'Aragon,  m'est  inconnu. 
Mais  j'en  ai  trouvé  de  deux  dimensions  différentes,  comme 
Roi  de  Navarre,  et  Infant  d'Aragon  et  Sicile.  Le  plus  an- 
cien,  de  l'année  1456,  de  0'",1 ,  est  indéchiffrable.  Le 
second,  de  1455,  de  0'n,085,  représente  un  écu  couronné 
aux  armes  d'Aragon;  deux  pals  sont  encore  visibles,  ainsi 
que  la  couronne,  mais  la  légende  ne  l'est  plus. 

La  signature  du  roi  Jean  est  la  môme  que  celle  de  ses 
prédécesseurs'*'. 

(1)  Arch.  des  Notaires. 

(2)  Idem. 

(3)  Arch.  des  Pyr. -Orient. 
(i)  Arch,  des  Notaires. 


265 

XV.— Jean,  Infant  d'Aragon,  premier-né  du  Roi  pré- 
cédent, Duc  de  Calabre  et  prince  de  Girone,  employait 
en  1168  un  sceau  deO'n,04o,  actuellement  indécliilîrable. 
En  revanche,  sa  signature  est  apposée  au  bas  d'un  acte  écrit 
en  catalan,  dans  cette  même  année''*.  (Voir  planche  7.) 

XVf.—Ferdinand-le-Catholi(iue(->  employa,  le  29  février 
1496,  un  sceau  secret,  de  0"i,07,  représentant  un  écu 
sommé  d'un  casque  royal,  ayant  pour  cimier  une  tète  de 
dragon  (L.  15).  Cet  écu  est  écartolé  au  1^-  et  au  i«,  contre - 
écartelé  de  Castille  et  Léon  ;  au  2e  et  au  5e,  parti  d'Aragon 
et  de  Sicile,  et  enté  en  pointe,  de  Grenade.  Des  listels  en 
bandcrolles,  portant  le  nom  des  provinces  de  la  monarchie 
aragonnaise,  voltigent  autour  de  l'écusson'^l.  Ce  sceau  est 
entre  deux  papiers. 

Ferdiuand-lc-Catholique  est  le  dernier  des  Rois  d'Ara- 
gon dont  la  signature  rappelle  la  croix  pattée  des  Comtes 
de  Barcelone  ;  elle  est  semblable  à  celle  de  Jean ,  son 
prédécesseur. 

Je  n'ai  pas  jugé  opportun  de  pousser  plus  loin  mes 
recherches  sur  les  sceaux  des  souverains.  Je  noterai, 
cependant,  qu'à  partir  de  Charles-Quint,  les  actes  con- 
servés dans  les  archives  des  notaires,  sont  scellés  en 
papier  timbré  h  froid,  et  ap|)liqué  ensuite  sur  un  peu  de 
cire  chaude,  posée  en  rond  ou  en  croix,  au  dos  de  lacté. 

XVII.  — En  parlant  des  armoiries  du  Comté  de  Rous- 

(1)  Ari'li.  lies  XdhiiiTs. 

("■2)  .le  iiii'  suis  iilislcnii  ili'  n'prniluii'p  les  sroaiix  siiffis.iniini'iit  connus 
des  liois  (II'  l'iiiiui',  i)eiiil;inl  la  ilun-o  de  l'ornipation  du  l'ioussillou  par 
leurs  troupes  (1.il>i2  à  1493).  Les  .Vrcliives  de  la  Préfertiue  possèdent 
rcpendanl  plusieurs  sceaux  bien  cnnservi^  de  Louis  XI  et  de  Charles  VIII. 

(3)  Arcli.  des  Notaires. 


266 

sillon,  j'ai  dit  que  ce  pays,  dopuis  lôii,  fm  gouverné 
directement  par  les  Rois  d'Aragon.  Ces  souverains  nom- 
maient, quelquefois,  un  lieutenant-général  pour  gouverner 
la  Catalogne  pendant  leur  absence.  C'était  toujours  un 
des  premiers  personnages  de  la  lamille  régnaule  ipii  était 
investi  de  cette  fonction  quasi-royale,  en  vertu  de  laquelle 
il  nommait  à  tous  les  emplois.  Plus  tard,  cependant,  ce 
commandement  fut  donné  h  des  seigneurs,  dont  les  pou- 
voirs furent  moins  étendus,  et  qu'on  appela  capitaines- 
généraux.  Ceux-ci  avaient  sous  leurs  ordres  deux  lieute- 
nants (Portant-  VeusJ,  indépendants  l'un  de  l'autre; 
l'autorité  du  premier  embrassait  la  Catalogne  [troprement 
dite,  et  celle  de  l'autre  s'étendait  sur  le  boussillon  et  la 
Cerdagne.  J'ai  nommé,  au  n'^  I,  quelque.s-uns  de  ces 
derniers,  et  reproduit  les  sceaux  de  leur  cour. 

Si  les  Portant- Veus  chargés  d'administrer  le  Roussillon 
et  la  Cerdagne,  employaient  dans  leurs  actes  un  sceau 
officiel  aux  armes  des  Comtés,  les  Capitaines-Généraux 
paraissent,  au  contraire,  avoir  fait  usage  de  sceaux  per- 
sonnels, sur  lesquels  figure  leur  écusson  particulier,  en- 
touré d'une  légende  explicative  de  leur  dignité.  Du  moins, 
le  petit  nombre  d'actes  que  j'ai  trouvés  encore  revêtus 
d'un  sceau  en  apporte  la  preuve. 

Un  ordre,  adressé  aux  Consuls  de  Tura,  le  25  novem- 
bre 1596,  au  sujet  du  cliàleau-fort  d'Opol,  qui  est  tombé 
aux  mains  du  Comte  de  Foix ,  par  Raymond,  vicomte, 
par  la  grâce  de  Dieu,  de  Perellos  et  de  Roda,  porte  au  dos 
un  sceau  rond,  en  cire  rouge,  de  0m,045  de  diamètre,  dont 
le  champ  est  presque  entièrement  couvert  par  un  écusson 
triangulaire  aux  armes  parlantes  de  Perellos,  trois  poires, 
posées  2  et  1 .  La  légende,  en  capilales  gothiques,  est  écrite 
en  catalan,  ce  dont  je  n'ai  pas  trouvé  d'exemple  plus  an- 
cien :  ^  S  DEL  •  CAPITA.  GENERAL  •  DEL  •  COTAT  • 
DE  •  ROSELLO  •  E  •  CERDAYA  (L.  16). 

Le  même  sceau  est  employé  encore  en  1423  et  1431, 


267 

par  les  lieutenants  du  Vicomte  de  Perellos,  agissant  en 
son  nom'*'. 

XVIII.— Bolille  (le  .luge,  comte  de  Castres,  capitaine- 
général  en  Roussilloii,  pour  le  Moi  de  France,  l.ouis  XI, 
condrinant  les  privilèges  des  employés  de  la  monnaie  de 
Perpignan,  le  24  décembre  1482,  emploie  un  sceau  entre 
deux  papiers,  fixé  h  une  queue  de  parchemin,  qui  tient  à 
l'acte,  aussi  en  parchemin  (L  il),  f.'écusson  porte  une 
croix  dentelée;  il  est  sommé  d'un  heaume  à  cimier,  en- 
touré de  laml)re(juins.  La  légende,  en  minuscules  gothi- 
ques, dit:  SIGM  •  HOFILLl  •  DE  •  JVDICE  •  COMITIS  • 
CASTRENSIS  (2). 

XIX. — 1).  fleuri  de  Gusman,  capitaine-général  dans  les 
Comtés  de  Roussillon  et  Cerdagne ,  écrivant  aux  Hailli , 
Consuls,  etc.,  de  la  cité  d'Elne,  pour  leur  rappeler  la 
teneur  d'une  lettre  précédente  du  Roi ,  scellée  du  sceau 
de  Majesté,  emploie,  le  16  mars  1496,  un  sceau  de 
O'",01o,  h  ses  armes,  qui  sont  :  un  écusson  tiercé,  en 
pairie  renversé,  portant,  au  l*"'"  et  au  2^,  un  château  fort, 
sommé  de  trois  donjons,  et  au  5e,  un  liont^'  (L.  18). 

XX.— Le  20  septembre  1552,  le  lieutenant  de  Charles 
d'Oms,  capitaine-géni'ral  des  susdits  comtés,  écrivant  aux 
administrateurs  de  rilospice  de  Perpignan,  em[)loie  un 
sceau  rond,  de  0m,0ù5,  dont  le  chanq)  est  occupé  par 
un  écusson  carré,  posé  sur  une  de  ses  pointes,  a  6  pals, 
chargés  de  Timage  de  saint  ,Iean -Baptiste  <*'.  J'ignore  à 
([iiel  litre  oc  sceau,   représentant  les  armoiries  de  Per- 

(t)  Arrh.  ilrs  Notaires. 

(2)  Arch.  des  l'yr. -Orient. 

(3)  Arch.  des  Notaires. 
(i)  Idem. 


268 

pignan ,  esl  employé  par  le  lieutcnanl  capilainc-géiiéral. 

(L.  19.) 

XXI.— Le  même  type;  mais,  celte  fois,  au  diamètre 
de  Oi",Oi,  était  employé,  le  18  avril  1509,  par  Pierre 
d'Oms,  capitaine-général  des  comtés'')  (L.  20). 

XXII.— Le  li  septembre  loG",  Diego  Ilnrlado  de  Men- 
doça,  duc  de  Francavilla,  capitaine-général  des  comtés, 
scellait  une  lettre  adressée  à  François  Galiart,  docteur 
ès-lois  de  Perpignan,  d'un  sceau  rond,  de  0"\03,  à  ses 
armes,  qui  sont  :  parti,  au  premier,  de  Mendoça;  au 
second,  écartelé  au  l^f  et  au  i^  parti  de  Caslille  et  Léon; 
et  au  2e  et  5"  de  France (->. 

L'écu  couronné  a  pour  légende  :  DIDACVS  .  DVX  : 
FRANCAVILLE(L.  21). 

XXIII. — Charles  d'Aragon,  duc  de  Terranova,  capitaine- 
général  des  comtés,  écrivant,  le  7  mai  lo82,  aux  divers 
officiers  du  roi  a  Perpignan,  se  sert  d'un  sceau  rond,  de 
0'",07,  à  ses  armes,  qui  sont  :  écartelé  au  I^i',  un  palmier; 
au  2e,  une  croix  pleine,  chargée  de  cinq  aiglettes,  et  can- 
tonnée d'Aragon;  au  5^  parti,  au  I^r  de.,  à  un  chef  de.., 
au  2e  écartelé,  au  I^  et  au  4"  un  scorpion  (?),  aux  2^  et  ôe 
un  lion  ;  enfin,  au  4^^  semé  de  croiseltes  pattées,  mises  en 
bande  (3)  (L.  22). 

XXIV.  —  Laurent  Suarez  de  Figueroa  et  de  Cordova, 
duc  de....,  capitaine-général  dans  les  comtés,  écrivant,  le 
7  mars  1599,  à  Ferdinand  de  Tolède,  son  lieutenant  a 
Perpignan,  au  sujet  d'une  requête  présentée  à  son  conseil 

(1)  Arch.  des  Notaires. 

(2)  Idem. 

(3)  Idem. 


269 

par  D.  Louis  de  Cruillos,  damoiseau,  emi)loyail  un  sceau 
ovale  (Of",0io  sur  (li",()ô5)  à  ses  armes,  qui  sont  :  parti, 
au  |c'',  d'or,  ii  cinc]  feuilles  de  figuier  de  sinople  (Figueroa), 
et  au  ^e,  d'or,  à  trois  fasces  de  gueules  (Cordova).  (L.  25.) 
L'écusson ,  sommé  d'une  couronne,  est  placé  sur  une 
aigle  couronnée,  aux  ailes  éplojées,  qui  le  tient  dans  ses 
serres  (^l 

XXV.— Sous  les  ordres  des  Portant- Veus,  se  trouvaient 
plusieurs  olliciers  royaux.  Au  nombre  de  ces  derniers, 
était  le  Procureur-Hoyal ,  chargé  de  l'administration  du 
domaine  et  du  revenu  particulier  du  Souverain.  En  1205, 
le  5  des  ides  de  juin ,  les  Procureurs  du  Roi  d'Aragon , 
scellaient  de  leur  propre  sceau,  une  charte  portant  sen- 
tence de  restitution  à  l'Hospice  Saint-Jean  (-'.  Le  sceau 
est  perdu,  mais  l'acte  le  mentionne  en  ces  termes  :  Hanc 
paginant  rohore  mei  sigilH  mmiio. 

En  1571,  le  Procureur-Royal  se  servait  d'un  sceau  rond, 
de  0'",02,  portant  l'écu  royal  triangulaire  et  couronné, 
avec  la  légende  en  capitales  gothitpies  :  -j-  S.  PCVRATO- 
RIS  •  REG  •  ROCILIONIS  •  ET  ■  CHIT  (L.  2i).  Ce  type 
fut  modifié  en  1-428,  l'écu  royal  n'est  plus  entouré  d'une 
légende. 

XXVI.  —  En  1460,  pendant  l'occupation  française,  le 
Procureur-Royal  se  servit  d'un  sceau  rond,  de  0"',05, 
portant  l'écu  de  France,  sans  couronne  ui  légende'^). 
(L.  2o.) 

XXVII.  —  Le  Portanl-Veus  présidait  un  tribunal,  où 
aboutissaient,  par  appel,  les  causes  jugées  en  première 

(1)  Arch.  des  Notaires. 

(2)  Arcli.  de  l'Hosp.  Saint-Jean,  Liasse  II. 

(3)  Arch.  des  Notaires. 


270 

instance  par  les  Viguiers  et  les  Baillis.  Ce  Iribnnal  pos- 
sédait, en  1558,  un  sceau  rond,  de  0^,045,  dont  le 
champ  était  occupé  par  un  écusson  triangulaire  à  trois 
pals,  entouré  de  huit  dcnii-circonlérences. 

La  légende,  en  capitales  gothiques,  n'est  pas  lisible. 
(L.  26.) 

XXYIII.  — Ce  type  fut  changé  en  159i;  la  dimension 
de  l'écu  triangulaire  fut  un  peu  élargie,  et  il  ne  fut  plus 
encadré  que  dans  trois  denii-circonlérences ,  se  coupant 
entre  elles,  deux  à  deux.  La  légende  en  capitales  gothi- 
ques, porte  :  Ȕ<  SIGLLVM  :  CYRIE  :  APPELLATIONVM  : 
COMITATVM  :  ROSSILIONIS  :  ET  :  CERITANIE  (i'. 

Je  n'ai  plus  retrouvé  ce  type  depuis  1429  (L.  27). 

XXIX.  —Les  "Viguiers  étaient  aussi  sous  les  ordres  du 
Portant-Veus.  On  comptait  quatre  Vigueries  dans  les 
Comtés.  La  première  comprenait  le  Roussillon  et  le  Val- 
lespir,  chef-lieu,  Perpignan;  la  seconde,  le  Confient  et 
le  Capcir,  chef-lieu,  Villefranche;  la  troisième,  la  Cer- 
dagne,  chef-lieu,  Puycerda,  et  la  quatrième,  la  vallée 
de  Ribas,  chef-lieu,  Ribas. 

Les  Viguiers  jugeaient  en  première  instance. 

Pierre  Blandini,  sous-viguier  et  lieutenant  du  Yiguier 
de  Roussillon  et  de  Vallespir,  écrivant,  le  50  mai  1569, 
à  Pierre-Guillaume  de  Queralls,  bailli  de  Baixas,  employait 
un  sceau  roud,  en  cire  rouge,  de  0'n,05,  dont  le  centre 
est  un  écusson  triangulaire  à  quatre  pals  ;  une  légende, 
en  capitales  gothiques,  porte  :  >î<  S  :  CVRIE  :  VICARII  : 
ROSSILIONIS  :  ET  :  VALLISPIRI  :  COMITAT.  (L.  28.) 

XXX.  —  En  1596,  le  Viguier  se  servait  d'un  sceau, 
différant  du  précédent  par  le  nombre  de  pals,  qui  n'est 

(1)  Arch.  des  Notaires. 


271 

que  de  trois,  et  par  une  couronne  surmontant  l'écusson. 
La  légende  n'est  plus  lisible  (L.  29). 

En  1451,  l'écu  est  couvert  de  six  pals,  et  la  légende 
est  en  minuscules  gothiques. 

XXXI.  —  Le  16  janvier  M71 ,  pendant  l'occupation 
française,  Ermengaud  Marti,  lieutenant  du  Viguier  de 
Roussillon  et  Vallespir,  emploie  un  sceau  aux  armes 
de  Erance,  écu  couronné  à  trois  fleurs  de  lis,  2  et  1, 
légende  illisible. 

XXXIL— Le  15  mai  1476,  Barthélenii  Jaubert,  mettait 
sur  son  sceau  l'écu  de  Erance,  couronné  et  supporté  i)ar 
deux  anges,  entouré  d'une  légende  en  capitales  gothiques  • 
t  S.  CVRIE  :  VICARII  :  RUSSILIO.MS  :  ET  :  \  ALLIS- 
PIRL  (L.  50.) 

Enfin,  le  8  janvier  1555,  le  sceau  du  Viguier  de  Rous- 
sillon et  de  Vallespir,  était  un  écu  couronné  portant  cinq 
pals;  la  légende  n'est  pas  lisible. 

XXXIIL— Le  J2  juin  d570,  le  Viguier  de  Confient  et 
Capcir,  Raymond  Junya,  chevalier,  se  servait  d'un  sceau 
rond  de  0"i.05,  dont  le  champ  est  rempli  par  un  écusson 
carré  sur  pointe  portant  quatre  pals.  Il  est  en  cire  rouge. 
La  légende  n'est  plus  lisible  Cl.  (L.  51.) 

XXXIV.— Outre  le  Viguier,  résidant  à  Perpignan,  il  y 
avait  encore  le  Bailli,  oiricier  royal  fort  important,  puis- 
que les  Consuls  ne  pouvaient  jmblier  leurs  ordonnances 
sans  son  autorisation. 

Le  premier  acte  scellé  émanant  de  la  cour  du  Bailli 
de  Perpignan,  porte  la  date  du  2  juin  1574.  Vital  Gri- 
mau,  emploie  un  sceau  entre  deux  papiers,  de  forme 

(1)  Arcli.  dus  Notaires. 


372 

octogonale,  de  0^,04,  dont  le  centre  est  couvert  par  un 
écu  carré,  posé  sur  une  de  ses  pointes  et  portant  quatre 
pals.  I^ne  légende  en  capitales  gnthicpios,  conin)ençant 
par  une  petite  croix  ])artant  de  l'angle  supérieur  de  l'é- 
cusson,  porte  :  ^  SIGILLUM  :  CVRIE  :  BAIVLI  :  PERPI- 
NIAI.  (L.  52  ) 

Ce  type,  employé  sans  interruption  jusqu'en  1440, 
fut  remplacé  par  un  sceau  rond,  portant,  de  même, 
l'ancien  écu  du  Comté  de  Roussillon ,  mais  seulement 
trois  pals.  La  légende,  en  minuscules  gothiques,  porte 
les  mêmes  mots  que  le  précédent. 

XXXV. — En  1431,  le  type  se  modifie.  L'écu  carré  sur 
pointe  aux  quatre  pals,  est  couronné.  La  légende  n'est 
pas  lisible.  Ce  sceau  est  rond  ;  son  diamètre  est  de  0'",05. 
(L.  55.) 

Le  4  novembre  1471,  Thomas  de  Vivers,  seigneur 
d'Alénya ,  lieutenant  de  Gabriel  de  Blandra  ,  bailli  de 
Perpignan,  emploie  un  sceau  aux  armes  de  France, 
analogue  à  celui  du  Viguier  de  la  même  époque. 

XXXVL — Sous  l'administration  de  Guillaume  de  La 
Barre,  en  1479,  ce  type  se  modifie  encore;  la  légende 
est  en  langue  catalane  :  f  S  i  DE  •  G  :  DE  •  LA  :  BARRE  : 
BATLE  :  DE  LA  :  VILA  :  DE  :  PEBPEYA.  (L.  54.) 

XXXVIL  — Enfin,  en  lS7o,  Raphaël  Jorda,  bailli  de 
Perpignan,  se  sert  d'un  sceau  rectangulaire  à  cinq  pals, 
sans  couronne  ni  légende*^'.  (L.  55.) 

XXXVIIL  —  Le  sceau  du  Consulat  de  Perpignan, 
m'invite  naturellement  k  parler  des  armoiries  de  cette 
ville. 

(1;  Arcli.  des  Notaires. 


273 

MM.  IHiigiçari,  P.  TnsUi  ot  Henri,  ont  exprimé,  à  ce 
sujet,  leiir  opinion  d'une  façon  plus  ou  moins  conforme 
à  la  vérité  de  l'Iiisloirc.  Les  monuments,  monnaies, 
sceaux  et  chartes  dûment  consultés  et  vérifiés,  je  vais,  à 
mon  tour,  donner  mon  avis. 

Et  d'abord,  Perpignan,  chef-lieu  du  Comté  de  Rous- 
sillon,  eut-il  des  armoiries  avant  1172? 

N'ayant  admis  que  sous  toute  réserve  celles  de  ses 
premiers  Comtes,  je  doute  que  Perpignan  ait  possédé  à 
cette  époque  un  blason  particuliei'. 

L'établissement  du  pouvoir  nmnicipal  par  Pierre  II, 
en  1196,  donna  peut-être  lieu  à  la  création  d'un  sceau 
consulaire;  mais  aucune  preuve  n'en  est  venue  jusqu'à 
moi,  et  la  fabrication  des  monnaies  ayant  été  interdite  a 
Perpignan,  depuis  117'^  jusqu'en  1270  et  pendant  toute 
la  durée  du  lloyaume  de  Majorque,  rien  ne  vient  suppléer 
au  manque  absolu  de  type  sigillaire  pendant  ces  deux 
siècles.  C'est  seulement  à  partir  de  15i9,  que  Perre  IV, 
ayant  permis  de  fabriquer  des  florins  et  des  écus  d'or  h 
la  monnaie  de  Perpignan  ,  je  pourrais  espérer  de  voir 
apparaître  le  premier  emblème  héraldique  particulier  h 
cette  ville. 

En  effet,  en  1562,  circulait  la  monnaie  dont  suit  la 
description  : 

Florin  et  demi-florin.  Avers  :  figure  de  saint  Jean- 
Raptiste  debout  ;  légende  :  PETRUS  REX.  —  Revers  : 
fleur  de  lis  étaminéc;  légende  :  ARAGO  (L.  56). 

En  1565,  florin.  Avers  :  grande  fleur  de  lis  étaminée; 
légende  :  ARAGO  REX.  —  Revers  :  figure  de  saint  Jean- 
Raptiste,  debout,  vu  de  face,  la  tète  nimbée,  et  tenant  un 
bâton  terminé  par  une  croix;  légende  :  S.  lOHANNES  B 
(aptista)  (').  ^L.  57.) 

(I)  Recherches  sur  ks  Monnaies  du  Roussillon,  Colson,  pi.   II,  fiç. 
36,  37  d  38. 

18 


274 

Il  est  notoire  que,  dans  la  plupart  des  villes  possédant 
des  ateliers  monétaires,  l'usage  constant  voulait  que  l'un 
des  côtés  des  pièces  fût  marqué  d'un  signe  particulier  à 
ces  villes,  lequel  signe  n'était  généralement  autre  que  la 
représentation  de  leurs  armoiries.  Or,  en  celte  circons- 
tance, le  choix  du  saint  Jean-Baptiste  n'est  point  arbi- 
traire, car  ce  saint  est  le  patron  de  Perpignan  depuis 
l'an  1025,  époque  où  fut  consacrée,  sous  son  invoca- 
tion, sa  première  église.  Si  donc  Perpignan  n'avait  point 
encore  en  lôH'i  d'armoiries,  proprement  dites  de  com- 
mune, on  peut,  sans  s'exposer  à  une  grave  erreur,  ad- 
mettre qu'il  choisit  alors  celles  de  sa  paroisse. 

M.  Puiggari,  qui  sans  doute  était  de  mon  avis,  se 
borne  à  dire'**:  «Il  parait  que  les  armoiries  de  Perpi- 
«  gnan  n'offraient  primitivement  que  l'image  de  saint 
«  Jean-Baptiste,  patron  de  la  ville.  »  Mais  il  ne  se  donne 
pas  la  peine  de  prouver  son  assertion. 

Sur  la  demande  des  Consuls  et  Prudhommes  de  Per- 
pignan, Martin,  roi  d'Aragon,  par  une  pragmatique  du 
8  juillet  1400,  permit  de  changer  l'ancien  sceau  du 
consulat  et  les  armoiries  de  la  commune,  de  prendre,  à 
cet  effet,  son  écu  royal  (d'or  à  quatre  pals  de  gueules), 
et  de  le  surcharger  de  l'image  de  saint  Jean-Baptiste  <"-'. 

(1)  Le  Roussillonnais,  Année  1852. 

(2)  Nos  Martinus.etc...  Et  cum  ipsis  consulibus  et  probis  hominibus 
non  modirum  iyisit  cordi  mulure  siyilluni  consulalùs  dicte  ville  et 
diversum  ab  antiquo  farere  et  alias  in  sigillo  et  armis  de  noro  fabri- 
candi,  arma  regia  et  effigiem  sancti  Joannis-Baptiste  in  medio  armo- 
rdrn  regioriim  poncre,  ut  effigie  et  figura  tanti  sancti  et  nostris  armis 
sigillum  de  novo  fabricandum  non  modicum  decoretur.  Tenore  presen- 
cium,  eorum  in  hac  parte  bénigne  supplicationibus  inclinati,  concedimus 
dictis  Consulibns  et  universitati  predicte  quod  possint  imponere  qiiando- 
cttmque  et  quocinscumguè  eis  placuerit ,  sigithan  consulat  ùs  et  arma 
ejusdem  ville  iniUare  ad  libitum  voluntatis.  Dum  tamen  in  eisdem  sigitlo 
et  armis  sint  arma  mstm  regia  et  effigies  dicti  sancti. 

(Liv.  1er  des  Provisions,  fol.  2Û8,  Mairie  de  Perpignan.) 


275 

Nous  voici  (lès  lors  en  présence  d'un  titre  officiel,  en 
vertu  duquel  les  sceaux  reproduits  ci-dessous  ont  dû 
être  gravés. 

Les  10  janvier  1414  et  4  septembre  1454,  les  Consuls 
(le  Mer  de  la  ville  de  Perpignan,  employèrent  un  sceau, 
en  cire  rouge,  rond,  de  0,04,  représentant  la  ligure  de 
saint  Jean-Baptiste  au  milieu  d'un  petit  rectangle,  placé 
lui-même  au  centre  d'un  cercle  chargé  de  quatre  pals. 
Une  légende,  en  capitales  gothiques,  sauf  les  V  qui  sont 
romains,  porte  ces  mots  :  >!■<  S  •  COiNSVLATYS  •  MARIS* 
VILE  •  Pi\I  •  PRO  •  DOMINO  •  REGE  (L.  58). 

Le  recto  de  ces  actes,  porte  un  autre  petit  sceau,  de 
0"»,  02 ,  représentant  une  tête  nimbée  (  celle  de  saint 
Jean- Baptiste  sans  doute),  avec  une  légende  illisible. 
(L.  39.) 

Ne  serait-ce  pas  là  l'ancien  sceau  des  Consuls  avant 
l'an  1400,  qui  ferait  l'ollice  de  contre-sceau? 

Rien  ne  l'indique  dans  les  actes  précités. 

XXXIX— Les  15  juin  1425  et  14  mai  1458,  les  Con- 
suls de  Perpignan,  employaient  un  sceau  en  cire  jaune, 
de  O'",0oo,  affectant  la  même  disposition  que  le  précé- 
dent, sauf  le  nombre  de  pals,  porté  à  six  (L.  40).  —  La 
légende,  en  capitales  gothiques,  porte  les  mots  catalans: 
^-SAGEL.-.DelconsolaT.-.De  la  VlLA.'.DvPERPEYA. 
Il  n'y  a  pas  de  contre-sceau  (^>. 

Jusqu'ici,  aucun  autre  monument  ne  vient  déterminer 
la  forme  toute  spéciale  (|ue  doit  prendre  plus  tard  l'écu 
des  armes  de  la  ville  de  Perpignan  :  je  veux  dire  le  carré 
sur  pointe. 

Ouire  que  la  pragmatique  du  roi  Martin  n'en  dit  pas 
un  mot,  P.  Taslu  signale  un  cachet  qui,  selon  lui,  se 
trouverait  au  bas  d'instructions,  sans  date,  données  par 

(1)  Ârch.  des  Notaires. 


276 

les  Consuls  à  F.  Puydauliich.  «  Lequel  cachet,  dit-il'^), 
«  est  rond,  ne  porte  pas  d'écu,  les  pals  sont  égaux  et  le 
«  saint  Jean-Baptiste  ne  (igure  pas  au  milieu.  » 

Mais,  deux  monuments  d'une  authenticité  certaine, 
prouvent  que  dans  la  première  moilic  du  quinzième  siècle 
l'écusson  de  Perpignan  ne  l'ut  pas  un  carre  posé  sur  pointe 
ni  une  losange.  La  deuxième  travée  de  l'église  Saint-Jean, 
porte  a  la  clef  de  voûte  un  cul  de  \am\)e  de  forme  ronde, 
portant  sur  champ  de  gueules,  entre  deux  pals  d'or,  un 
rectangle  d'azur,  chargé  de  la  figure  de  saint  Jean-Raptiste. 
J'ignore  à  quelle  époque  fut  sculptée  cette  pierre;  mais  je 
la  sais  postérieure  h  l'an  1400'-'. 

La  première  page  du  Livre  P'  des  Provisions,  com- 
mencé en  1409'^*,  porte  aussi  l'écusson  des  armoiries 
de  Perpignan.  Cet  écu,  de  forme  rectangulaire,  est  à 
fond  d'or,  chargé  de  cinq  pals  de  gueules;  sur  les  trois 
du  milieu,  broche  un  rectangle  d'azur,  chargé  de  l'image 
de  saint  Jean-Baptiste**'.  Bien  que  je  me  croie  le  droit  de 
critiquer  quelques  détails  de  celte  peinture,  je  n'en  tiens 
pas  moins  pour  certain  qu'en  1409,  1414,  1458  et  ^4o4, 

(t)  Journal  des  Pyrénées-Orient.,  1852. — L'aflirmatioii  (ruii  lémuiii 
soi-disant  oculaire,  influence  toujours  un  peu  Tarchéologue  auquel  niauquu 
tout  moyen  de  contrôle.  Cependant,  je  lis  dans  l'ouvrage  déjà  cité  de 
Colson,  p.  t08,  que  la  mission  de  ce  François  i^uigdaulucli,  délégué  du 
consulat,  date  de  l'an  1455;  or,  comment  admettre  que  cinquante-cinq 
ans  après  la  concession  royale  du  blason  de  Perpignan,  les  consuls  qui 
avaient  déjà  fait  usage  du  sceau  au  type  de  Saint  Jean-Baptiste,  se  soient 
servis  d'un  sceau  dill'érent  (^t  sans  valeur  à  cette  époque'/  Le  sceau  en 
cire  jaune  des  consuls  présentant  peu  de  relief,  la  tigure  du  Saint  a  pu 
disparaître  par  suite  de  la  ductilité  de  la  cire;  c'est  ce  qui  aura  induit 
en  erreur  M.  Tastu. 

(2)  En  effet,  cette  partie  de  l'église  fut  couverte  sous  l'épiscopat  de 
Galcerand  .\lbert,  entre  1431  et  1453. 

(3)  Arcli.  de  la  Mairie  de  Perpignan. 

(4)  Certains  détails  me  font  penser  que  ce  dessin  a  été  fait,  ou  tout 
au  muJMs  corrigé  à  deux  repiises  ditl'érentes. 


277 

Vécu  <les  armes  (le  Perpignan  n'était  ni  nn  carré  sur  pointe 
ni  une  losange. 

M.  Elenry  prétend,  qu'à  partir  de  l'an  1400,  l'écu  de 
celte  ville  fut  toujours  losange,  et  dans  une  description 
manuscrite  de  la  Loge  des  Consuls  de  Mer  '*',  il  dit  : 
«  Entre  les  doux  ogives  des  portes  du  rez-de-chaussée, 
((  on  remarque  une  grande  pierre  sculptée,  représentant 
«  saint  Jean-Haptiste  au  milieu  d'un  encadrement  (leur- 
«  delisé.  Ce  sont-lh  les  armes  de  Perpignan  pendant  l'en- 
«  gagement  du  Roussillon  à  la  France,  sous  Louis  XL., 
«  La  forme  carrée  de  l'écu  dont  nous  parlons,  semblerait 
«  indicjuer  que  Louis  XI,  après  la  capitulation  de  Perpi- 
<(  gnan,  aurait  voulu  priver  cette  ville  de  son  insigne  de 
«  virginité;  l'écu  losange  étant,  comme  on  sait,  celui  des 
«  villes  fortes  qui  n'avaient  jamais  été  envahies.  Après 
«  le  retour  du  Roussillon  a  l'Aragon,  la  ville  reprit  l'écu 
«  losange.  » 

Je  regrette  (pi'un  homme  aussi  érudit  que  M.  Henry 
se  soit  laissé  aller  au  courant  de  son  imagination  sur  un 
pareil  sujet,  lorsque  les  preuves  matérielles  doivent  seules 
faire  autorité. 

.le  ne  ferai  à  cet  égard  qu'une  seule  observation. 

En  me  reportant  à  l'épocpie  où  les  armoiries  de  l'é- 
vêque  Jean  Moles  de  Margarit  furent  sculptées  sur  la  clef 
(le  voûte  de  l'avant-dernière  travée  de  l'église  Saint-Jean 
(voir  n"  XXVII  Se.  Eccl.),  époque  voisine  de  1462,  je 
vois  que,  précisément,  la  dernière  travée,  couverte  pen- 
dant l'occuiialioii  iVauf-aise,  porte  à  sa  clef  de  voûte  un 
grand  carré,  dont  les  diagonales  suivent  les  axes  de  l'é- 
glise, représentant  la  ligure  de  saint  Jean-Baptiste  sur  un 
fond  d'azur  semé  de  fleurs  de  lis  d'or,  encore  visibles. 

Ce  serait  donc,  au  contraire,  sous  Louis  XL  qu'aurait 

(I)  IJililiolli.  piililiqui'  de  l'(M-pit;iiiiii.  (•tiidc  du  litmxsillon,  par  Henry, 
avec  notes  marginales  de  rauteur. 


278 

'pai*li,  j[)'otirTa  j^r^mière  fois,  l'écu  des  armes  de  Perpip;nan, 
non  sous  la  (orme  d'iino  losange,  mais  hieii  sous  celle 
d'un  carré  posé  sur  une  de  ses  poinles 

Ce  n'esl  qu'en  1  i95,  après  le  reloiir  du  Roiissillon  h  la 
couronne  d'Aragon,  que  les  monnaies  frappées  à  Perpi- 
gnan, portèrent  un  écti  carré  sur  |>ninle,  ainsi  (]u'oii  le 
voit  dans  le  poids  du  réal  de  cuivre  de  Kerdinand-le- 
Catholique. 

C'est  encore  en  1495,  que  le  roi  Ferdinand,  ayant 
permis  aux  Consuls  de  fabricpier  une  monnaie  municipale, 
ceux-ci  produisirent  des  deniers,  sur  l'avers  desquels  fut 
gravé  un  écu  carré  sur  pointe  à  trois  pals,  celui  du  milieu 
chargé  de  deux  P  golhi(iues  accolés,  monogramme  de 
Perpignan,  avec  la  légende  :  Villa  Pcrpiniani,  et  por- 
tant ,  au  revers ,  un  écu  semblable  ,  mais  chargé  de 
l'image  de  saint  Jean-Baptiste ,  avec  la  légende  :  Ecce 
agniis  Dei  '''. 

Au  lieu  de  chei^cher  dans  la  forme  de  cet  écusson  un 
insigne  de  virginité,  n'est -il  pas  plus  naturel  d'y  voir 
l'imitation  du  sceau  à  l'usage  du  Bailli  de  Perpignan , 
venant  rappeler  lui-même  la  forme  de  celui  du  Comté 
de  Roussillon? 

Un  sceau  type  en  argent,  récemment  trouvé  dans  les 
décombres  du  nouveau  quai  de  la  Basse,  et  dont  la  créa- 
tion doit  dater  du  seizième  siècle,  montre  le  carré  sur 
pointe  avec  la  figure  de  saint  Jean-Baptiste  au  milieu , 
avec  la  légende,  en  minuscules  gothiques  ;  SICILLUM 
VILLE  PERPINIANI  (L.  42). 

J'ai  décrit  ailleurs  le  sceau  de  l'Hospice  Saint-Jean , 
dans  lequel  la  forme  carrée  est  parfaitement  marquée,  à 
la  date  de  1287  (n"  XLV.  Se.  Eccl.) 

En  1040,  la  ville  de  Perpignan,  portant  une  recpièle 
au  roi  d'Aragon  Philippe-le-Crand ,  lit  imprimer,  en  tète 

(i)  Recherches  sur  les  monnaies,  Colson.  loc.  cit.,  pi.  Il,  fig.  70,  74. 


279 

de  sn  pétition,  ses  armoiries,  où  il  n'est  pas  le  moins  du 
monde  question  d'éciisson  losange***  (L.  41).  On  les  voit 
aussi  sur  le  cadre  d'un  tahleau,  avec  la  date  do  1669-) 

Per|)ii,'nan  conserva  ces  armoiries  jus(|u'('[)  l()8l. 
«A  Cfllo  époque,  dit  M.  Puiggari'^»,  les  Consuls  de 
Perpignan,  voulant  donner  un  gage  de  leur  dévouement 
au  roi  Louis  XIV,  écrivent  au  marquis  de  I.ouvois,  secré- 
taire d'État,  que  M.  de  Chazeron  ,  commandant  de  la 
province,  et  M.  Trobat,  président  de  chambre  du  conseil 
souverain,  «  ayant  lait  remarquer  que  les  anciennes  armes 
«  dont  la  Irès-lidèle  ville  de  Perpignan  avait  accoutumé 
«  de  se  servir  n'étaient  pas  celles  dont  elle  se  sert  actuel- 
«  iement,  ils  avaient  fait  des  recherches  exactes  des  anti- 
«  quités  de  ladite  ville,  et  qu'ayant  trouvé  que  lesdites 
«  armes  qu'elle  avait  avant  l'année  1440,  étaient  ttn 
«  écKsson  en  losange,  en  champ  d'azur,  semé  de  fleurs 
«  de  lis  sans  nombre,  et  chargé  d'un  saint  Jean  au  milieu, 
«  au  lieu  que  celles  dont  elle  se  sert  maintenant  sont  un 
«  écusson  en  losange  chargé  de  pals  d'Aragon ,  ayant 
«  aussi  un  saint  Jean  au  milieu,  et  que  ce  changement 
«d'armes  fut  fait  par  les  Espagnols,  lorsque,  en  ces 
«  temps-là,  ladite  ville  et  le  pays  de  Roussillon,  tombè- 

«  rent  en  leur  pouvoir »  ils  désirent  ardemment  de 

reprendre  lesdites  armes,  s'il  plaisait  à  Sa  Majesté  d'en 
accorder  la  permission.  » 

Cette  nalierie  ne  pouvait  déplaire  au  Pioi  de  France, 
qui  s'empressa  d'accorder  aux  Consuls  leur  demande,  par 
lettres  du  10  septembre  1G8I,  dans  lesquelles  se  trou- 
vent ces  mots  ;  «Nous  trouvons  bon  que  vous  repreniez 
«  les  armes  anciennes  dont  notre  dite  ville  de  Perpignan 
«  se  servait  auparavant  ladite  année  1440,  savoir  :  «  un 

(1)  bibliolli.  iiuitliqui!  de  l^orpignan. 

(2)  Église  Sainl-Jpaii,  chapelle  des  Innts-liaptisniaux. 
("3)  Le  Romsillomiais.  1852. 


280 

«  écusson  en  losange,  en  champ  d'azur,  semé  de  Heurs 
«  de  lis  d'or  sans  nombre,  chargé  d'un  saint  Jean  au 
«  milieu.  Vous  assurant  que  nous  reconnaîtrons  en  toutes 
«  occasions,  les  témoignages  ([ue  vous  nous  donnez  en 
«  celle-ci  de  votre  zèle  et  alFcction  singulière  à  noire 
«  service  <'*.  » 

«  Alors,  continue  M.  Puiggari,  on  représenta  ces  nou- 
velles armoiries  dans  l'église  Saint-Jean,  sur  le  plateau 
fixé  à  la  clef  de  voûte  de  la  première  travée.  Le  temps 
n'en  a  point  fait  encore  disparailre  lazur  du  champ, 
quelques  restes  des  (leurs  de  lis  d'or  et  le  saint  du  mi- 
lieu. Alors,  aussi,  fit-on  sculpter  les  quatre  écussons 
blasonnés  de  même,  (lui  figurent  sur  la  partie  inférieure 
du  maitre-autel...  La  maison  de  ville  en  fut  pareillement 
illustrée.  » 

Quoique  fondée  sur  Terreur,  la  concession  d'armoiries 
de  Louis  XIV  n'en  est  pas  moins  formelle;  et,  jusqu'il 
l'obtention  de  nouvelles  lettres  patentes  souveraines, 
Perpignan  n'aurait  pas  dû  changer  son  écusson^-*. 

(1)  Arch.  des  Pjr. -Orient.  Fonds  de  rinleudante.  11  a  été  établi  (|iie 
les  fleurs  de  lis  n'ont  remplacé  les  pals  quq  sous  Louis  XI,  et  par  consé- 
quent à  une  date  qui  ne  peut  être  nnlérienre  à  l'an  I  Wï>. 

(2)  Les  lignes  suivantes  sont  extraites  textuellement  de  VArmorial 
des  Villes  de  France,  publié  dans  YAnmiaire  de  la  I\'(ililcsse  en  l(Sr)o, 
par  M.  Borel  d'Hauferive. 

«  Perpignan. — .Vrmes  :  de  gueules,  à  deux  tours  crénelées  d'argent  et 
«  à  nue  flenr  de  lis  d'or  en  rlief(L.  13).  L'existence  de  Perpignan  ne 
«  date  que  du  luiitiéme  siècle;  elle  suivit  cnnslamnienl  les  deslinées  du 
(I  Roussillon,  dont  elle  devint  la  capitale,  F.n  Jitri,  la  coniunine  \  l'ut 
«  confirmée  par  le  comte  Gérard. 

n  On  donne  quelquefois  pour  armes  à  cette  ville  les  pals  des  rois 
«  d'.\ragon,  qui  la  possédèrent  longtemps;  mais  nu  les  charge  alors  d'un 
«  Saint  .lean-Iiapliste  brochant  sui'  le  tout. 

('  Mais  le  blason  ([u'ou  assigne  eu  général  à  Perpignan,  c'est  cclin  ipie 
«  nous  avons  adopté.  Les  toiu's  rappellent  sans  doute  les  fortifications 
«  élevées  par  les  rois  d'.Vragon  cl  augmentées  par  Charics-Uuint.  Peut- 


28 1 

Mais,  déjà  en  IT^i  ou  IT^S,  le  bon  sens  artistique 
perpignanais  protestait  contre  l'ignorance  ou  la  servilité 
des  Consuls  de  1G8I.  Un  magnilicjue  tableau,  peint  par 
Guerra,  représentant  saint  Eline,  patron  des  navigateurs, 

«  être,  aussi,  est-ce  un  souvenir  des  sièges  brillants  qu'rllo  a  soutonus 
«  en  1473,  1542,  1597,  IGiO  et  1G41.  La  llcur  de  lis  est  une  concns- 
«  sion  postérieure  à  rétahlisseiTienl  do  la  dominalion  française.  Elle  fut 
«  obtenue  sans  doute  en  même  temps  que  la  ronfinnation  des  priviléj^es 
«  des  bourgeois  et  des  citoyens  nobles  de  Perpignan  par  le  roi  Louis  Xlil, 
('  en  1(U2.  I>e  Ronssillon  conquis  à  cette  époque,  fut  détinilivement  cédé 
«  à  la  France  par  le  traité  des  Pyrénées.  » 

Sauf  le  deuxième  alinéa,  autant  d'erreurs  que  de  mots!  Kn  deliors  de 
la  question  sigillographique  et  héraldique,  je  renvoie  le  lecteur  à  VHisl. 
(le  Rniissillon  de  .M.  Henry,  et  à  celle  de  J.  de  Cazanyola. 

Lors  de  la  confection  de  IWrmorial  général  de  l'Vance,  les  provinces  et 
les  villes  furent  invitées  à  produire  le  dessin  de  leurs  armoiries.  Celles 
qui  se  dispensèrent  de  cette  formalité,  et  dont  Fécusson  n'était  pas  déjà 
formellement  connu,  furent  gratifiées  par  le  juge  d'armes  de  Tépoipie,  de 
blasons  plus  ou  moins  fantaisistes ,  ipi'on  ne  se  donna  pas  toujours  la 
peine  de  leur  notifier,  mais  dont  elles  durent  généralement  payer  les  frais 
d'enregistrement.  Cette  faron  d'agir  n'avait  qu'un  but,  celui  de  battre 
monnaie;  ce  but,  une  fois  rempli,  les  villes  restèrent  libres  de  porter  ou 
de  répudier  leurs  anciennes  armoiries,  et  beaucoup  d'entre  elles  igno- 
rèrent complètement  celles  (pii  venaient  de  leur  être  concédées, 

J'extrais  d'un  ouvrage  déjà  cilé(l)  le  texte  des  armoiries  attribuées  à 
diverses  villes  du  Houssillon,  sans  me  porter  aucunement  garant  de  leur 
authenticité  : 

«  Peupignan.  —  Nous  avons  reru  de  la  numicipalité  de  Perpignan,  un 
dessin  où  se  trouvent  trois  écus  dill'érents.  Le  premier,  désigné  sous  le 
nom  d'armes  primitives,  est  d'.Vragon;  c'est-à-dire,  de  gueules  à  quatre 
pals  d'or  ^.s((^  Le  deuxième,  est  dit  avoir  été  concédé  par  le  roi  Martin, 
qui  aurait  chargé  les  pals  d'.Vragon  d'un  saint  Jean-l^aptiste,  tenant  dans 
ses  bras  l'agneau  pascal.  I^e  troisième,  indiipu'-  connue  ayant  été  octroyé 
par  II'  roi  Lmii-^  XIV,  est  semé  de  Krance .  à  un  saint  ,lean-i3aplisle  au 
natiu'el,  teuani  di'  la  main  dextre  une  épée,  la  pointe  en  bas,  et  de  sa 
main  séneslre  une  palme  d'or,  posé  sur  des  nuai;es  (raruent.  qui  s'élèvent 
d'une  mer  au  naturel  mouvante,  de  la  pointe  de  l'écu.  Dllozier  a,  au 
contraire,  enregistré  ces  armes  :  d'or,  au  chef  composé  d'argent  et  d'azur, 
et  i.,eman  de  la  .laisse,  dans  ■icsCuiies  générales  de  lu  Mniinirliii'  Fniii- 

(I)  .\nn.  nat.  de  France;  Traversier,  1842,  p.  75  et  suiv. 


282 

pour  le  Consulat  de  Mer,  fut  entouré  d'un  beau  cadre, 
en  bois  sculpté,  aux  armes  de  Perpignan,  telles  «pje  les 
indique  la  pétition  de  1640.  Deux  autres  tableaux  du 
même    peintre,  aclueliemcnt   dans   l'église   Saint-Jean, 

çoîse (in-folio,  1730)  les  représento  :  de  gueules,  à  deux  tours  d'arprent 
ouvertes,  ajourées,  maçonnées  de  sable,  séparées  par  une  fleur  de  lis  d"or, 
en  chef(l). 

»  Baixas.  — De  gueules,  au  sautoir  d'or,  parti  d'argent. 

«  Caudies-de-Saint-Paul.  — D'or,  à  un  chaudron  de  gueules,  Panse 
levée. 

»  Elne.  — D'azur,  à  la  croix  haussée  et  alézée  d'argent,  accostée  en 
pointe  de  deux  fleurs  do  lis  d'or (2). 

«  EsTAGEL.  — De  gueules,  à  un  agneau  pascal  contourné  d'argent,  sur 
une  terrasse  de  sinople  portant  une  croix  d'nr,  la  bauderolle  d'argent,  la 
tête  de  l'agneau  tournée  à  dextre  et  couronnée  d'un  diadènie  d'or. 

«  MiLLAS. — D'azur,  à  une  plante  ou  toulFe  de  plusieurs  épis  de  millet, 
feuilles  et  tiges ,  sur  une  terrasse ,  le  tout  d'or,  à  la  bordure  d'argent , 
chargée  des  mots  :  La  Ville  de  Millas,  en  caractères  de  gueules. 

«  PÉziLLA.  —  D'azur,  à  la  croix  alaisée  et  pattée  d'argent,  cantonnée 
de  quatre  fleurs  de  lis  d'or,  à  la  bordure  d'argent ,  chargée  du  mot  : 
Pézilla ,  en  caractères  de  gueules. 

'<  Saint-Pauf^-de-Fenouillet.  — De  gueules,  k  une  épée  d'argent, 
garnie  d'or,  la  pointe  en  bas. 

«  Salses.  —  Semé  de  Franco,  à  un  saint  de  carnation,  vêtu  d'une  aube 
d'argent  et  d'une  dalmatique  de  gueules,  posé  sur  un  tertre  d'or,  tenant 
de  sa  main  dextre  une  palme  du  même  et  soutenant  de  sa  main  sénestre 
un  livre  d'argent ,  la  tète  rouronnéi^  d'une  gloire  d'or,  à  la  bordure  d'ar- 
gent, chargée  des  mots:  La  Ville  de  Salses,  en  caractères  de  gueules. 

«  Tour-de-France.  —  D'azur,  à  une  tour  d'argent. 

«  TiiLiR. —  D'ai'gent,  à  un  tourteau  de  gueules,  parti  de  sinople. 

«  GÉRET.  — D'azur,  à  trois  fleurs  de  lis  d'or,  deux  en  chef,  une  en 
cœur,  celle-ci,  accompagnée  à  dextre  d'un  (î  et  d'un  E,  à  sénestre,  d'un 
R,  d'un  E  et  d'un  T  joints  ensemiile,  aussi  d'or,  et  en  pointe,  de  deux 
clefs  d'argent,  posées  en  sautoir. 

«  Argelés.  —  D'argent,  à  un  genêt  arraché  de  sinople,  fleuri  d'or, 
accompagné  de  trois  fleurs  de  lis  d'azur,  deux  en  fasce,  une  en  pointe, 
celle-ci  soutenue  d'une  terrasse  de  sinuple. 

«  BoULOU.— D'argent  à  une  fleur  de  lis  d'azur,  en  chef  et  à  un  vol 

(1)  Ces  trois  blasons  sont  inconnus  à  Perpignan.  {Note  de  l'auteur.) 

(2)  Blason  inconnu  à  EIne. 


2S3 

portent  aussi  les  anciennes  armoiries  de  la  ville,  au  temps 
«les  Rois  d'Araj,n)n;  les  cadres  porienl  la  date  de  1714-15. 
Depuis  quelques  années,  Perpignan  a  repris  son  ancien 
écnsson. 

abaissé,  dn  sable  on  pointe,  à  la  bordure  de  gueules,  cliargx'cs  des  mots: 
La  Vi  a  del  Volo,  en  ciiraclèrcs  d'or. 

«  CoLLiouRE.  — D'azur,  seuié  de  fleurs  de  lis  d'or,  à  un  saint  do  car- 
nation, vêtu  d'argent  et  de  gueules,  tenant  de  sa  main  dextre  une  épée 
d'argent  garnie  d'or,  la  pointe  en  bas,  et  de  sa  main  séucstre  une  palme 
aussi  d'or,  la  tête  entourée  d'une  goirc  du  même,  le  saint  posé  sur  une 
montagne  d'argent,  mouvante,  d'une  onde  de  sinople. 

«  PRATS-DE-lVlOLLd.  — D'or,  à  un  saint  de  carnation,  vêtu  de  pourpre 
et  de  gueules,  tenant  de  sa  main  dextre  une  palme  de  sinople  et  posé  à 
dextre  sur  luie  terrasse  de  même,  et  à  un  saint  .André,  aussi  de  carnation, 
vêtu  d'azur  et  de  pourpre,  ayant  sous  sou  bras  dextre,  appuyé  sur  sa 
croix ,  (le  sable  et  posé  lui-même  à  séuestre  sur  une  terrasse  de  sinople, 
trois  fleurs  de  lis  d'azur  entre  les  deux  saints,  deux  en  rbef,  une  eiî 
cœur,  et  un  pré  de  sinople  en  pointe. 

«  BouLETERNERE.— D'azur,  à  un  lion  d'argent,  tenant  de  sa  patte 
dextre  une  Heur  de  lis  d'or,  à  la  bordure  du  même,  enfermée  dans  une 
bordure  cousue  d'argent,  chargée  des  mots:  Biila  Taranera .  eu  carac- 
tères de  sable. 

«  Ille. — D'azur,  à  la  croix  d'or,  parti  d'argent. 

('  Marquixanes.  — D'argent  à  une  clef  de  sinople,  parti  de  gueules. 

«  Mont-Louis.— Parti  de  France  et  de  Navarre. 

«  Rl.\.— D'argent,  à  la  fasce  de  gueules,  parti  de  sinople. 

«  SouRNiA. — De  France. 

«Vmç A.  — D'azur,  à  trois  fleurs  de  lis  d'or,  une  et  deux,  celle  en 
chef  surmontée  d'une  couronne  du  même  et  accostée  d'im  V  et  d'un  F 
d'argent;  les  deux  en  pointe,  accostées  d'un  N  et  d'un  G,  soutenues  d'un 
A,  le  tout  d'argent. 

<(  Villefranche-de-Conflent.— D'azur,  à  deux  tours  d'ar-ent,  entre 
lesquelles  est  posée  une  éloile  à  six  rais  du  même,  soutenues  d'une 
onde,  aussi  d'ari;cnl,  en  pointe;  l.'  imii  surmonté  d'un  écusson  d'azur, 
(ib'ariré'de 'trois  fleurs  de  lis  d'or,  bordé  dur  d  sommé  d'une  rounuluè 
royale 'du  même;  le  i;rand  écusson  entouré  d'Une  liordure  d'argent, 
cbargée  des  mots  :  Vilafmma  de  Conficul  .  eu  raraclères  de  "ueu- 
les(1).  .) 

(I)  En  général  ces  écdsson&  soDt  incoDuus  dans  le  Ftonssillon. 


284 


Je  ne  poursuivrai  pas  plus  loin  cette  digression;  il  se- 
rait trop  long  d'énumôrer  et  de  relever  les  irrégularités 
héraldiques  commises  par  nos  contemporains,  qui  s'obsti- 
nent à  représenter  en  losange  ranti(|ue  carré  sur  pointe, 
seule  forme  consacrée  par  les  monuments  de  toutes  les 
époques;  tandis  que  la  forme  losangée  n'exista  jamais 
que  dans  les  lettres  patentes  de  Louis  XIV  et  l'iniagi- 
nation  de  MM.  de  Chazeron  et  Trobat.  Je  me  permettrai, 
pourtant ,  de  demander  ce  que  prétend  signifier  la  cou- 
ronne ducale  que  l'on  place  de  nos  jours  sur  ledit  écu 
losange.  Le  Roussillon  fut-il  jamais  l'apanage  d'un  Duc, 
et  Perpignan  fut-il  jamais  autre  chose  que  le  chef-lieu 
d'un  comté?  Sous  les  Rois  d'Aragon,  Perpignan  était 
ville  royale;  si  l'on  veut  raviver  ce  souvenir,  c'est  d'une 
couronne  fermée  (lu'il  faudrait  faire  usage.  Mais  depuis 
sa  réunion  à  la  France,  aucun  litre  légal  n'autorise  celte 
ville  h  sommer  son  écusson  autrement  que  d'une  cou- 
ronne murale;  et  je  me  plais  h  reconnaître  que  c'est  celle 
qui  ligure  snr  la  bannière  de  l'orphéon  de  Perpignan. 

XL.— Collioure,  aussi  ville  royale,  réunissait,  dès  le 
quatorzième  siècle,  dans  le  sceau  de  son  Bailli,  sans 
doute,  car  la  légende  n'en  dit  rien,  l'écu  d'Aragon  et 
ses  armoiries  propres;  c'est  ce  que  l'on  voit  dans  une 
lettre  adressée,  le  26  juin  \7,m,  au  Bailli  de  Perpignan, 
par  Bernard  Traginer,  bailli  de  Collioure.  Le  champ  de 
ce  sceau,  rond,  de  0^,05  de  diamètre,  représente  deu.v 
châteaux,  donjonnés  do  trois  pièces,  surmonlés  de  l'écu 
royal  à  quatre  pals.  Je  pense  que  ces  deux  châteaux  font 
allusion  au  vieux  fort  de  Collioure ,  bâti  sur  un  rocher, 
et  à  une  autre  tour  voisine,  également  sur  un  rocher, 
qui  remonte  à  une  haute  antiquité  (L.  44).  Bien  que  de 
nos  jours,  Collioure  n'ait  plus  qu'un  fort  de  création 
moderne,  il  faut  croire  qu'autrefois  plusieurs  citadelles 
protégeaient  celte  petite  ville;   car  un  titre  du  seizième 


285 

siècle,  que  je  n'ai  pas  sous  les  yeux,  mais  dont  conitiin- 
nicalion  m'avait  été  donnée  par  M.  Alart,  archiviste  des 
Pyrénées-Orientales,  mentionne  un  membre  de  la  famille 
d'Oms,  qui  se  disait  à  cette  époque,  Castellanus  arcium 
Coquoliberi  <''. 

La  légende,  en  capitales  gothiques,  porte  rfS^CVRIE: 
DrCOQVOLIBERlt. 

XLI.  — Perpignan  |)ossédail  un  Hôtel  de  la  Monnaie. 
Le  mailre  de  cet  établissement  (Seca),  était  appelé  Al- 
cayde.  Le  14  octobre  I4IG,  Guillaume  de  Johan,  alcayde 
de  la  monnaie  de  Perpignan,  lieutenant  de  Jean  Aybri, 
écrivant  au  Bailli  et  aux  Juges  de  la  Cour  de  ladite  ville, 
employait  un  sceau  rond,  de  Om,Oi,  dont  le  champ  est 
occupé  par  un  écu  royal ,  sommé  d'une  couronne ,  et 
entouré  d'une  légende  en  capitales  gothiques:  -;-S:CVRIE  : 
MONKTARIK  :  YJLLE  :  PEHPINIANI  (2)  (L.  45). 

XLIL  — Thuir,  ville  royale,  à  quelques  kilomètres  de 
Perpignan,  portait  sans  doute  les  armoiries  de  ses  sou- 
verains; car,  pendant  l'occupation  de  Louis  XI,  le  sceau 
employé  le  29  mars  1466  i)ar  le  Lieutenant  du  Bailli  de 
cette  localité  (=')  était  rond,  de  0"',028,  portant  un  écusson 
carré,  posé  sur  pointe,  chargé  de  trois  (leurs  de  lis,  2  et  i . 
Sur  chaque  côté  du  carré,  sont  les  lettres  TOIH,  Corme 
catalane  du  nom  de  Thuir  (L.  40). 

XLIIL— Prats-de-Mollô,  aussi  ville  royale,  portait,  en 
1522,  l'écu  couronné,  aux  armes  d'Aragon  <»)  (L.  47). 

XLIV.— Le  sceau  employé,  le  15  novembre  1575,  par 
Jean  Bolet,  député  local  de  Perpignan,  est  rond,  au 

(1)  Arcli.  des  Notaires.  (3)  Arcli.  des  Notaires. 

("^)  Idem.  (i)  Wt-m. 


286 

diamètre  de  Oi^iOSS;  le  centre,  est  un  carré  sur  pointe, 
chargé  d'une  croix  de  Saint-Georges,  symbole  héraldique 
des  Corts  de  Catalogne.  Une  légende  très-abrégée,  en 
capitales  romaines  conjointes ,  porte  :  »î«  GEiNEAL  D 
PPINYA")  (Généralité  de  Perpignan).  (L.  48.) 

XLV. — La  ville  de  Puycerda,  chef-lieu  de  la  Viguerie 
de  Cerdagne,  portait  :  de  sinople,  à  une  cloche  d'or. 

Cet  emblème,  qui  se  retrouve  sur  les  monnaies  les 
plus  anciennes  de  cette  ville,  figure  sur  un  sceau  des 
Consuls,  suspendu,  entre  deux  papiers,  à  un  acte  du  4 
mai  1G'27(-),  notifiant  la  confirmation,  par  le  roi  Philippe, 
des  privilèges  de  franchise  de  leude,  accordés  aux  habi- 
tants de  Puycerda,  le  2  des  calendes  du  mois  de....  l'an 
1181,  par  Alphonse  II.  La  légende  est  illisible  (L.  49). 

XLVI. — Dans  le  but  de  se  concilier  la  bienveillance 
des  Perpignanais,  en  grande  partie  froissés  de  la  sup- 
pression du  Royaume  de  Majorque,  qui  faisait  descendre 
au  second  rang  leur  ville,  résidence  des  Piois  depuis 
soixante-dix  ans  environ,  Pierre  IV  fonda,  le  13  des 
calendes  d'avril  1349,  l'Université  de  Perpignan. 

Son  successeur,  Jean  I^'',  confirma  l'œuvre  de  son 
père,  en  la  complétant,  par  permission  donnée,  aux 
Consuls  de  cette  ville  de  construire  un  bâtiment  ad  hoc, 
sur  l'emplacement  qui  leur  conviendrait  le  mieux,  et  de 
la  dimension  qui  leur  plairait. 

Je  pense  que  cette  Université,  qui  réimissait  les  cours 
publics  de  théologie,  droit  civil  et  canoni(|ue,  sciences 
et  arts,  eut  un  sceau  particulier,  lequel  m'est  resté 
inconnu. 

Celle  institution  fonctionna  jusqu'au  traité  dos  l'yré- 

(1)  Arch.  des  Notaires. 

(2)  hxc\\.  des  Pyr. -Orient. 


287 

nées,  après  lequel  elle  tomba  en  ilécadence.  Ce  ne  fut  que 
sous  l'adininislraliou  du  Comte  de  Mailly,  Maréchal  de 
France,  Couverneur  du  Roussillon  ,  que  rCnivcrsilé  de 
Perpignan  fut  relevée  de  ses  ruines.  L'année  17o9  vit 
s'opérer  cette  heureuse  restauration. 

Un  discours  à  la  louange  du  Roi,  fut  alors  établi  et 
fondé  à  perpétuité  pour  la  consécration  du  rétablissement 
de  l'Académie,  et  le  Recteur  fut  chargé  de  le  prononcer. 
Un  exemplaire  de  ce  discours,  conservé  à  la  Bibliothèque 
de  Perpignan,  porte,  gravé  sur  la  première  page,  le  dessin 
des  armoiries  de  la  ville  et  celles  de  la  ville  d'Elne.  Les 
premières  représentent,  au  milieu  d'un  cartouche  de  fan- 
taisie, entouré  des  divers  attributs  d'une  ville,  l'iinage  de 
saint  Jean-Baptisle,  sur  un  fond  semé  de  fleurs  de  lis. 
Les  secondes,  dans  un  cartouche  semblable,  entouré 
des  attributs  épiscopaux,  portent  une  étoile  d'or  à  six 
rayons,  sur  un  champ  d'azur.  On  voit  aussi  dans  cet 
opuscule,  le  dessin  d'une  médaille  frappée  à  cette  date 
de  1759,  REGI  REMVNERATORL 

—  Un  autre  imprimé,  également  conservé  à  la  Biblio- 
thèque de  Perpignan'^',  est  le  catalogue  des  livres  appar- 
tenant, en  1771,  à  l'Université. 

Sur  la  première  page,  on  voit  un  dessin  qui  offre  tous 
les  caractères  d'un  sceau  qui  a  dû  (Hre  particulier  à  cette 
Académie.  Dans  un  ovale,  de  Oi",0o  sur  Oni,Oi,  on  voit 
la  figure  de  saint  Jean-Baptiste,  tenant  la  main  droite 
levée,  et  dans  sa  gauche,  l'agneau,  entouré  d'un  petit 
cercle.  Le  saint  patron  de  la  ville  est  accosté,  h  dextre, 
d'un  petit  écusson  ovale,  aux  armes  de  France,  et,  à 
sénestre  ,  d'un  écusson  semblable  ,  portant  le  n)ono- 
gramine  de  Perpignan,  PP.  Une  lég<'nde  porte  ces  mots: 
ACADEMIA  PERPlNlA.NENSiS.  (L.  50.) 

Le  local  aftecté  à  l'ancienne  Université  de  Perpignan , 

(^1)  Bibliûtli.  publique  de  Perpignan. 


288 

sert  actuellement  à  renfermer  la  Bibliothèque  et  le  Musée 
de  cette  ville. 

XLVII. — Le  dessin  représenté  ((ig.  ol)'**,  et  celui  du 
sceau  de  la  ville  trouvé  dans  les  décombres  du  quai,  sont 
les  seuls  de  toute  la  collection  reproduite  au  présent 
ouvrage,  qui  aient  été  faits  d'après  un  type  de  métal. 

J'ignore  complètement  à  quelle  administration  le  pre- 
mier a  dû  appartenir.  Voici  cependant  le  résumé  des  con- 
jectures auxquelles  j'ai  dû  me  livrer  en  l'absence  de  toute 
légende  explicative.  La  forme  carrée  de  l'écusson,  dont  on 
trouve  tant  d'exemples  en  Catalogne,  rend  indubitable  la 
provenance  Roussiilonnaise.  La  disposition  de  l'écu  parti, 
dont  un  coupé,  au  i^r  ^  l'étoile  d'Elne,  au  2^  h  deux  pals, 
fait  supposer  une  administration  tenant  à  la  fois  du  civil  et 
du  religieux;  le  l^"'  parti,  a  trois  ponnnes  de  pin,  parais- 
sant indiquer  le  blason  proprement  dit  de  l'établissement  ou 
d'un  personnage  ayant  fait  usage  de  ce  sceau.  Une  maison 
d'éducation  fondée,  dans  le  siècle  dernier,  par  un  certain 
chanoine  Py,  pourrait  avoir  possédé  un  sceau  semblable. 
Des  renseignements  piis  à  cet  égard  n'ont  amené  rien  de 
concluant.  Grâce  à  l'obligeance  de  M.  l'abbé  Grauier  de 
Cassagnac,  principal  actuel  du^Collége  de  Perpignan,  j'ai 
pu  considérer,  dans  son  cabinet,  le  portrait  dudil  chanoine 
Py,  et  l'écusson  de  ses  armes,  dans  le  coin  du  tableau. 
Cet  écusson,  est  également  parti,  au  d^''  un  arbre,  qui 
peut  être  un  pin  par  allusion  au  mot  Py,  accosté  des  deux 
lettres  PI;  et  au  2"  d'azur,  à  une  étoile  à  8  rayons  d'or, 
symbole  de  l'Eglise  d'Elne,  le  susdit  écusson,  enté  en 
pointe,  de  gueules  plein.  De  la  ressemblance  qui  existe  entre 
deux  sceaux  ou  deux  écussons,  il  serait  téméraire  sans 
doute  de  cerlilier  l'identité  des  familles  ou  des  admiuis- 

(1)  Trouvé  duns  les  fossés  de  la  citadelle  de  Perpignan,  il  y  a  quelq\ies 
années,  et  possédé  par  le  Concierge  de  i'Évéché. 


289 

Iralioiis  qui  les  ont  possédés.  Tl  est  facile  de  voir,  du  reste, 
dans  i'éciisson  du  !)on  chanoine,  un  Ijlasou  tout-à-(ait 
personnel,  le  premier  parti  l'ournissant  des  armoiries  par- 
lantes; le  second  iiuliiiiiant  le  chapitre  dont  il  était  digni- 
taire, et  l'autre  indiquant,  selon  moi,  la  couleur  du  camail 
dont  l'abbé  Py  est  revêtu  dans  son  j)orlrait.  Je  donne  cette 
inter()rélatioii  à  défaut  d'une  meilleure.  Quant  à  ce  qui 
concerne  le  sceau  ci-dessus,  le  métal  employé  (cuivre 
rouge,  paraissant  avoir  été  doré  ou  argenté;,  et  la  forme  du 
dessin,  se  rapportent,  comme  anti(iuité,  a  l'époque  de  la 
fondation  du  collège  de  Py;  les  trois  pommes  de  pin, 
peuvent  avoir  constitué  le  symbole  de  cet  établissement, 
connu  sous  le  nom  précité,  même  après  la  mort  de  son 
fondateur;  l'étoile  peut  vouloir  indi(iuer  le  patronage  de 
l'autorité  diocésaine,  en  mi'mc  tenq)S  que  les  pals,  qui 
entrent  dans  le  blason  de  la  ville  de  Perpignan,  signilie- 
raient  l'inlluence  municipale,  plus  grande  peut  être  que 
partout  ailleurs,  dans  cette  ville,  jalouse  et  Hère  de  ses 
antiijues  privilèges.  Les  deux  branches  portant  un  trou  à 
leur  extrémité,  ont  dû,  autrefois,  être  repliées  à  angle  droit, 
pour  endjrasser  un  manche  maintenu  de  chaque  côté  par 
un  clou.  Il  est  inutile  d'ajouter  que  je  n"ai  trouvé  aucun 
document  scellé  du  susdit  sceau. 


19 


:i% 


RÉSUMÉ. 


l  ne  centaine  de  sceaux,  tant  ecclésiastiques  que  laïcs, 
telle  est  la  mince  récolte  de  plus  d'une  année  de  recher- 
ches minutieuses.  Aussi,  n'ai-je  pas  la  prétention  d'avoir 
tout  dit  sur  l'art  sigillaire  en  Roussillon. 

Le  clergé  était  pourtant  très-nombreux  dans  les  comtés; 
car  l'historien  Gazanyola^')  me  fournit  les  détails  suivants 
sur  son  organisation,  lors  du  traité  des  Pyrénées  ; 

«  La  Cerdagne  et  la  vallée  de  Ribes  appartenaient  à 
((  l'Évèché  d'IJrgell;  le  Capcir,  à  l'Evèché  d'AIet;  le  Rous- 
«sillon,  le  Contient  et  le  Vallespir,  formaient  rLvrclié 
«  d'Elne,  où  l'on  trouvait  (piatre  abbayes  (Arles,  Saint- 
ce  Michel,  Saint-Génis  et  Saint-Martin),  treize  prieurés, 
«  six  prévôtés,  quatre  commanderies  de  Malte,  neuf  cou- 
«  vents  de  mendiants,  cinq  chapitres,  vingt-trois  comn)u- 
«  nautés  ecclésiastiques;  le  chapitre  d"EIne,  composé  de 
«  quatre  dignitaires  et  de  vingt  et  un  chanoines,  avait  été 
«  transféré  depuis  peu  à  Perpignan  avec  l'Evêque,  et  établi 
«  dans  l'église  Saint-Jean,  l'une  des  quatre  paroisses,  où 
«  résidait  une  communauté  de  cent  cinquante  prêtres. 
«  11  y  avait  un  chapitre  de  quinze  chanoines  et  une  com- 
«  munauté  de  trente  prêtres  à  La  Real,  l'une  des  paroisses 
«de  Perpignan.  On  voyait,  en  outre,  dans  celte  ville, 
«  dix-sept  couvents  de  moines  ou  de  religieuses,  quatre 
«hôpitaux,  une  université,  où  l'on  enseignait  le  latin, 
«la  rhétorique,  la  logique,  la  théologie,  le  droit  et  la 
«  médecine.  » 

Il  y  a  donc  lieu  de  s'étonner  qu'un  si  petit  nombre  de 
sceaux  du  clergé  ait  écbapi)é  à  la  destruction. 

(1  1  Hisi    du  lîiiiis.ulhiii,  p    'riil. 


291 

Quanl  à  ceux  des  adiuinisU'aliou.s  laïques,  n'en  ii}ani 
trouvé  aucun  vesligc  avant  15ii,  épot|ue  à  laquelle  le 
lloussilllou  rentra  au  pouvoii  des  Ilois  d'Aragon,  j'incline 
à  penser  (et  c'est,  à  Perpignan,  l'opinion  des  gens  érudits) 
que  les  archives  du  Iloyaunie  de  iMajorque  lurent  trans- 
portées à  Barcelone;  disposition  uialenconlreuse,  qui  a 
{trivé  plus  dun  historien  de  connaître  la  vérité  sur  les 
antiquités  roussillonnaises. 

Néanmoins,  dans  le  petit  nombre  d'empreintes  sigillaires 
(jue  j'ai  pu  recueillir,  je  constate  une  grande  analogie  avec 
les  sceaux  usités  en  France,  à  toutes  les  épocjues.  C'est 
toujours,  (pioique  a  des  dates  un  peu  dilférenles,  la  même 
marche  dans  la  succession  des  types,  que  l'on  peut  ranger 
en  trois  catégories  : 

1"  Avant  le  quatorzième  siècle,  etligie  particulière  des 
personnages  possédant  un  sceau ,  et  usage  des  contre- 
sceaux; 

2"  Du  quatorzième  au  seizième  siècles,  complication 
dans  les  légendes  et  dans  le  dessin  ,  qui  joint  alors  aux 
symboles  particuliers  des  établissements  laïcs  ou  religieux 
récusson  armorié  des  titulaires,  et  suppression  totale  des 
contre-sceaux,  excepté  dans  les  sceaux  des  souverains; 

o"  Enfin,  du  seizième  siècle  à  nos  jours,  représen- 
tation exclusive  des  armoiries  ,  avec  ou  sans  légende 
explicative. 

Aucun  sceau  matrice  ne  m'ayant  été  communiqué,  et 
n'ayant  pu,  par  conséquent,  opérer  que  sur  des  em- 
preintes en  fort  mauvais  état ,  pour  la  plupart  ('),  je  n'ai 

(1)  L'cxanicu  des  sceaux  de  simples  parliculiers  n'ayaul  présenlé  rien 
iriiilércssaut,  j"ai  népili^é  de  les  reproduire.  Je  n'en  ai,  du  reste,  ren- 
<iuitré  autiMi  antérieur  au  ijuinzièine  siècle,  ceux  des  siècles  précédents 
étant  détruits  ou  jierdns.  On  voudra  liien  taire  attention  (pie  la  rareté  des 
sceaux,  pour  les  temps  antérieurs  au  (lualorzième  siècle  (indépendamment 
des  causes  indiquées  au  conunenrenient  de  cette  étude)  trouve  également 
son  exiiliculiiiu  dans  le  pelil  unMihre  de  dépôts  institués  à  ces  époques. 


092 

pas  cm  devoir  bigiialiM-  aucun  de  Ces  nionunienls  sigil- 
laires,  au  point  de  vue  de  l'art  proprement  dit.  Aussi, 
terminerai-je  en  répélanl  les  premières  lignes  de  cette 
étude,  entièrement  neuve  en  ce  pays  :  «  Ces  pages,  faible 
«  écho  de  quelques  anciens  souvenirs ,  fragments  eux- 
«  mêmes  recueillis  dans  les  débris  des  archives  roussil- 
«  lonnaises ,  ne  sont  et  ne  peuvent  èlre  qu'un  simple 
«  catalogue  sans  prétention.  » 

Perpignan,  ...  juillet  18G2. 

Ainsi,  Tait.  2  des  Usa/irs  iW  IVTpii;nan,  conlirmés  en  110:2,  |Kir  li; 
corale  Gérard  11,  nous  apprend  qu'on  ne  trouvait  en  celle  ville,  à  celle 
(laie  reculée,  (ju'un  seul  lalielliun  pour  recevoir  les  contrats  de  ses  liabi- 
tanls.  L'accroissement  de  la  ville  et  de  la  population,  entiagèrent,  seule- 
ment, en  1270,  Jaci|ues  k'"  de  iMajon|ue,  à  créer  une  seconde  place  de 
tabellion;  et  ce  n'est  que  depuis  Ki'ii,  ipie  les  l^ois  d'Aragon  ordon- 
nèrent la  réunion  dans  un  local  spécial  (qui  cliani;ea,  iiélas!  trop  souvent, 
puisqu'on  a  trouvé  des  registres  dans  certains  égoùls  de  la  citadelle),  des 
écritures  des  notaires  passés  et  futurs.  Le  dépôt  duquel  j'ai  entrait  la 
plupart  des  sceaux  ci-dessus  reproduits,  ne  renferme  que  cinq  ou  si\ 
registres  de  la  fin  du  treizième  siècle. 

L'Hospice  Saint-Jean  possède  ses  archives  depuis  sa  fondation,  et  c'est 
avec  plaisir  ipie  j'adresse  ici  des  remerciements  à  TLconome  actuel, 
Al.  Joseph  Sirven,  qui  les  a  mises  à  ma  disposition. 

Les  Archives  de  la  Préfecture  m'ont  fourni  également  des  renseigne- 
ments utiles;  mais  elles  ne  possèdent  presque  aucun  acte  antérieur  au 
onzième  siècle.  11  y  a  à  peine  trente  ans,  ces  archives,  heureusement 
placées  aujourd'hui  sous  la  direction  d'un  archiviste  qui  possède  le  feu 
sacré,  n'étaient  iju  un  vasle  chaos,  au  débrouillenicnl  duquel,  les  Saint- 
Malo,  Puiggari,  Jaubcrt-Campague  et  autres  Pcrpignanais,  ont  donné  tous 
leurs  soins  et  appliqué  leur  immense  érudition. 


29S 


ITICE  SUR  L'ISTHME  DE  SLEZ, 

l';ir  II»  A.  GllTEit),    Mciiibic  de  [ilubicurs  Snciéirs  savanlcs. 


La  Fi'ance  Ibiirnil,  depuis  six  années  sculonicnl.  un 
(les  cvénenienls  les  plus  consiciérables  de  l'Iiisluirc  des 
siècles  passés  ,  et  ([ui  puisse  peut-èlre  jamais  arriver 
dans  la  suite  des  siècles  à  venir.  En  eiïel,  qui  eût  jamais 
osé  espérer  que  la  France,  après  avoir  restauré  à  Tunis 
l'œuvre  gigantesque  d'Adrien-César;  après  avoir  amené  au 
centre  de  la  capitale  de  la  régence,  les  cau\  du  djcibel- 
/aghouan,  porterait  ses  enl'anls  au  milieu  d'une  mer  de 
sable,  dénudée  de  végétation  et  sans  eau,  et  qu'au  milieu 
de  ces  privations,  luttant  contre  l'intempérie,  cette  France 
renouvellerait  l'œuvre  des  Ptolémées,  en  reliant  le  golfe 
.Frcopolites  à  la  mer  intérieure,  uMivre  gigantesque,  civi- 
lisatrice, qui,  en  taisant  le  bonbeur  de  la  clirélienté,  l'ait 
aussi  la  gloire  de  notre  siècle,  donne  de  la  vie  à  ranti(pie 
Arsinoé,  morte  depuis  bien  des  siècles,  jalonne  la  route 
de  riiumanilé,  destinée  à  porter  au  loin  les  bienfaits  de 
notre  religion  et  a  régénérer  la  face  du  monde. 

Déjà,  les  eaux  lécondes  du  iNil  arrosent  la  vallée  de 
(iessen,  où  l'on  remarque  de  toute  part,  une  superbe 
végétation.  Dé'jii,  les  Arabes  étendent  leurs  cultures,  et 
trouvent  un  cliamp  plus  vaste  pdiir  leur  commerce,  et  ce 
n"esl  (pie  depuis  notie  présence  au  désert  cprils  savent 
tirer  de  cbatpie  objet  ses  avantages,  etiju'ils  les  emploient 
tous  avec  le  |)lus  grand  ed'et,  en  unissant  les  travaux  de 
l'agriculture  et  les  alVaires  du  commerce,  aux  occupations 
de  la  \ie  pastorale. 


2λV 

Ia'S  lia\;iiix  (lu  caïKiI  d'eau  douco  sont  aclicvi's  depuis 
longtemps:  ceux  du  canal  maritiine  marchent  avec  la  plus 
grande  rapidité  :  un  heureux  succès  leur  est  assuré. 

Lors(|ue,  pour  la  première  fois,  je  dirigeai  mes  pas, 
du  nord  au  sud,  sur  cette  terre  où  d'immenses  choses 
sont  en  germe,  et  où  des  merveilles  sont  déjà  accomplies, 
je  lus  surpris  de  rencontrer  autant  de  ruines  échcloimécs 
le  long  du  canal  maritime.  Les  unes,  retnontanl  à  l'époque 
des  Pharaons;  d'autres,  d'origine  ron)aine,  étoulï'ées  de- 
jmis  plusieurs  siècles,  apparaissaient  au-dessus  du  sol, 
et  semhlaient  indiquer  l'ancienne  voie  de  Péluse. 

{]e.  voyage  me  suggéra  l'idée  d'exannner,  avec  plus  d'at- 
tention que  je  ne  l'avais  lait,  tous  ces  vestiges,  de  les  sauver 
de  l'injure  du  temps  et  du  vandalisme  de  nos  jours.  Je  fis 
appel  à  plusieurs  de  mes  amis,  et,  aidé  du  concours  de 
M.  Gustave  Sautereau ,  je  fondai  à  Kl  Cuirs,  point  écjui- 
distanl  de  Suez  et  Port-Saïd,  nne  société  qui  prit  le  nom 
de  Société  Aitistique. 

Le  but  que  je  me  proposais  ne  pouvait  qu'éveiller  les 
sympathies  de  toute  âme  sensible  et  généreuse,  des  amis 
des  arts  et  de  la  littérature.—  Les  savants  conseils  de 
MM.  les  Ingénieurs  nous  éclairèrent,  et  nous  guidèrent 
dans  la  marche  à  suivre  pour  nos  travaux  archéologicpies. 

Le  9  novembre  de  la  même  année,  notre  honorable 
président,  M.  de  Lesseps,  approuvait  avec  empressement 
la  création  de  cette  société,  et  acceptait  la  proposition  de 
MM.  les  Membres  du  Bureau  :  celle  de  la  placer  sous  son 
|)alronage.  Un  local  nous  fut  affecté;  nos  statuts,  (pii 
n'étaient  encore  (lu'éliauchés ,  furent  achevés  et  arrêtés; 
et  le  Jî)  novembre,  la  première  séance  eut  lieu. 

Dès  lors.  Messieurs,  nous  travaillâmes  avec  ardeur. 
D'un  commun  accord,  nous  employâmes  les  loisirs  (pie 
nous  laissaient  les  travaux  du  canal,  à  étudier  ri'.gypte, 
et  en  particulier  ristlmic,  aux  points  de  vue  scicntiliipie, 
historique  et  arlisticiuc. 


■29r, 

Les  (|iieslioiis  (|iii  se  piésciiloront  ;i  nos  cluiles,  lurenl 
variées  :  oiitie  lliisloire,  rarcliéologic ,  l'élude  de  cette 
anli(|nit('^  toujours  l'éeonde ,  n'avions-nous  pas  encore 
riiistoire  naturelle  de  ristlime,  la  niéléoi'oloi>ie,  l'élude 
du  désert  (|ni  nous  cnlourait ,  enlin  l'c-lude  des  peuples 
Arabes  et  des  iJédouini:'-,  dont  la  vie  nomade  est  si  inté- 
ressante? Quelipies  observateurs  s'occupaient  uniquement 
de  l'agriculture  arabe. 

Tout  étant  ainsi  disposé,  le  local  de  la  Société  vil 
bientôt  arriver  de  tontes  parts,  des  produits  du  ])ays,  des 
pièces  archéologirpies,  nnmismatiques,  des  ossements 
fossiles  d'animaux  lerreslres,  mèb's  (piebpiel'ois  à  ceux  des 
animaux  a(piali(ines,  des  eslampages  des  monolitbes  ([uc 
nos  moyens  de  locomotion  ne  permettaient  pas  d'amener 
auprès  de  nous. 

Tout  réussit  à  merveille.  Désormais,  ce  qui  pouvait  inté- 
resser les  sciences,  les  arts  et  l'hisloire  du  pays  nous  ('lait 
acquis,  et  dans  le  complc-rendu  des  travaux  de  la  Société 
pour  les  années  18GI  et  ISO^,  j'avais  déjà  à  signaler  le 
zèle  et  le  dévouement  de  plusieurs  membres  pour  divers 
mémoires  adressés  à  noire  instilulion  naissante. 

Jetons  maintenant  tni  C()U|)-d'(r'iI,;i  vol  d'oiseau,  sur  les 
points  (pii  lixèrent  le  plus  mon  allenliim  : 

l'ji  septembre  18()l ,  je  quittai  Suez.  Après  avoir  visite  la 
l'ontaine  de  Moïse,  je  suivis  jusqu'aux  lacs  amers  les  traces 
encore  ap])arentes  du  canal,  que  le  temps  n'a  pu  eflacer  du 
sol.—  Arrivé  au  campement  du  djébel-(ienefîé,  montagne 
aride,  abrupte  el  toin-mcnlée,  je  me  dirigeai  sur  un  point 
couvert  de  végélalion,  qu'on  aperçoit  de  loin  dans  la  partie 
nord  des  lacs,  et  que  les  Arabes  nomment  El-Amback.  Je 
traversai  les  lacs  dans  leur  plus  grande  largeur,  sans  tenir 
conq>le  des  sentiers  (racés  par  les  caravanes,  (|ui  condui- 
senl,  les  uns  en  Syrie,  les  aulres  à  l]|-Aiid)a(lc  et  aulics 
localilés.  J'eus  (pielque  peu  de  peine  à  atteindre  Kl-Ani- 
bacl<;  le  sol,  quoique  dépourvu  d'eau,  cédait  sous  le  poids 


29(i 

des  bètes  de  somme.  A  mon  arrivée,  je  trouvai,  au  milieu 
de  joncs  et  d'arbustes,  une  source  abondante,  qu'on  nomme 
Ain-el-Amback;  l'eau  est.  claire  et  limpide,  légèrement 
amère.  Je  pense  (ju'elle  emprunte  une  partie  de  son  amer- 
tume, aux  plantes  qui  croissent  autour  de  ses  bords. 

Les  plantes  des  lacs  amers  sont  toutes  d'irie  couleur 
blancbàtre,  connue  toutes  celles  »iui  naissent  sur  le  bord 
de  la  mer  ou  des  lacs,  tandis  que  celles  qu'on  rencontre 
dans  l'intérieur  des  terres  ont  une  couleur  verte. 

Je  lis  aux  lacs  amers  plusieurs  sondages,  qui  me  prou- 
vèrent que  les  eaux,  quoiipie  éloignées  du  golle  arabique 
d'environ  50  kilomètres,  sont  soumises  à  l'inlUience  du 
llux  et  du  relUix  de  la  mer  rouge;  que  les  eaux  filtrent 
a  travers  les  sables  et  les  couclies  argileuses,  et  que 
l'étendue  de  celte  liltration  est  plus  ou  moins  grande, 
selon  que  le  terrain  est  plus  ou  moins  pénélrable. 

Les  diUércnles  couches  obtenues  par  mes  sondages , 
sont  indiquées  dans  le  croquis  que  j'ai  l'honneur  de  vous 
soumettre. 

L'étude  des  produits  de  ces  sondages,  me  prouve  que 
le  grand  bassin  des  lacs  amers  et  le  lac  Tmisali,  avaient 
été,  à  une  époque  très-reculée,  le  domaine  du  gollè  ara- 
bique, et  qu'on  ne  pouvait  en  attribuer  le  dessèchement 
qu'au  phénomène  de  l'évaporalion. 

En  ma  qualité  de  membre  correspondant,  je  crus  bien 
faire  de  recueillir  en  cet  endroit  quehjues  coquillages  cl 
autres  productions  marines;  de  les  destiner  à  MAL  les 
membres  de  la  Société  Agricole,  Scienliliiiue  et  Littéraire 
du  département  des  Pyrénées-Orientales,  qui  ont  beaucoup 
lait  pour  moi,  et  auxquels  je  désirais  de|)uis  longtemps  as- 
socier et  mon  coeur  et  mes  vonix,  et  les  assurer  désormais 
de  mon  entier  dévoiiemenl. 

Mes  opérations  de  sondage  achevées,  je  visitai  plus  tard 
le  seuil  du  Serapéum,  où  gisent  les  restes  d'un  monument 
persépolitain,  probablement  consacré  à  Darius,  à  l'achè- 


297 

veiiienl  du  canal  des  deux  mers  (Ilérodole).  Il  a  du  aussi 
exister  en  cet  endroit  un  temple,  que  les  Égyptiens  consa- 
craient à  Sérapis. 

En  quittant  le  Serapcum,  j'ellleurai  le  tombeau  de  Cheick 
Knedec  et  Toussoum,  centre  de  population  important, 
créé  par  la  compai,Miie. 

Le  5  ocloi)re  IHtil,  en  clierchanl  à  lier  sur  ma  plan- 
clielte  le  lacTmisah  aux  lacs  amers,  je  vis,  à  4  kilomètres 
N.-O.  de  Toussoum,  et  sur  un  vaste  plateau  dominé  par 
le  djéhel-Mariam,  des  dc'bris  de  poteries  anli((ues,  des 
briques,  des  ossements  humains,  des  pierres  contenant 
des  caractères  liiéroi;Iyplii{|ues  gravés  en  relief.  Nul  doute 
qu'il  a  existé  en  ce  lieu  une  ville  considérable,  dont  la 
superlicie  peut  être  évaluée  à  90  hectares,  y  compris  une 
certaine  étendue  de  terrain,  qui  jjarait  être  l'ancienne 
>»écrop(de.  J'ai  consulté  plusieurs  itinéraires  anciens,  afin 
de  pouvoir  me  rendre  compte  de  cette  ville  antique,  de 
son  importance.  Aucun  ouvrage  n'a  pu  me  fournir  des 
données.  Cependant  ,  l'élude  scrupuleuse  des  anciens 
campements  des  Israélites ,  lors  de  leur  départ  pour  la 
terre  promise,  me  porte  à  croire  que  cette  position  est, 
celle  de  lanlique  liaal-Tsephon  de  la  Bible,  qui  signiûe 
Dieu  sentinelle.  En  cet  endroit,  nous  dit-on,  les  magi- 
ciens d'Egypte  avaient  mis  une  idole,  comme  une  barrière 
qui  devait  arrêter  les  Hébreux,  et  s'op()Oser  à  leur  fuite. 

Combien  n"e\iste-t-il  point  dans  l'Isthme,  de  ruines  de 
villes  et  de  monumeuls  de  cette  grande  et  anti(pie  nation, 
dont  la  position  est  ignorée  cl  s'esl  perdue  avec  le  tenqis! 

Les  médailles  grec(iues  et  romaines,  l'urne  en  marbre 
cl  les  lampes  romaines  qui  vous  ont  éié  remises,  ont  été 
trouvées  au  pied  du  djébel-Mariani  et  à  Hubastis,  aujour- 
d'hui /ag;i/.ig.  Qu'il  me  soit  |)ermis,  en  achovaut,  de  vous 
offrir  un  estampage  lait  |)ar  moi ,  et  tiré  d'un  nninolithc 
qui  repose  depuis  plusieurs  siècles  sur  les  hauteurs  do 
Kanlara-el-Krasné. 


29S 


KXPl.OllATION  EN  TIJNISIE, 

l'ar  II.  ,\,  Cil'lTEn,  MciTil)ic'  Je  [)liisii'iirs  SocicU-s  Savantes. 


Aidé  du  concours  bienveillant  de  LL.  EE.  Messieurs  les 
Ministres  de  h  duerre  et  de  TAIgérie,  el  des  Colonies,  je 
quittai  Alger,  le  ^25  mars  1860,  pour  aller  explorer  la 
llégence  de  Tunis,  tant  au  point  de  vue  arcliéologi(iue , 
qu'au  point  de  vue  de  l'histoire  physique  du  pays. 

Après  avoir  visité  Philippevillc,  Conslantine,  fiuelnia, 
Soukarras,  Bône  et  autres  centres  importants  de  la  pro- 
vince de  Constantine,  j'arrivai,  le  12  avril,  à  cinc]  heures 
du  matin  en  vue  de  Tunis;  à  six  heures,  le  Clyde  jein'ii 
son  ancre.  La  mer  était  calme,  el  le  ciel  sans  nuages 
me  permettait  de  contempler  un  des  plus  riches  pano- 
ramas de  la  Régence. 

Tnc  vaste  étendue  de  pays,  comprise  entre  le  village 
de  Sidi-bou-Saïd  et  le  lac  el-Héhira,  fixa  mon  attention. 

C'est  là  que  s'élevaient  autrefois  Carthage-la-Puni(]ue 
et  la  cité  romaine.  Quelques  ruines,  échappées  aux  ravages 
du  temps  et  des  hommes,  sont  les  seuls  matériaux  dont 
nous  pouvons  disposer  aujourd'hui  jjour  reconstruire  leur 
passé. 

La  chapelle  Saint-Louis  s'élance  majestueusement  sur 
le  point  culminant  de  la  Hyrsa.  C'est  sur  ce  même  em- 
placement que  mourut  le  ISoi  de  France  (1270),  en  prodi- 
guant des  soins  aux  peslitérés  de  son  armée,  canq)ée 
devant  Tunis. 

Après  avoir  débarqué  à  la  Goulette,  où  existent  encore 
des  traces  d'un  chàlcau-fort  itàli  par  Charlcs-Quinl ,  je 


2'»9 

me  rendis  à  Tunis.  La  dislaiiee  qui  sépare  ces  deux  loca- 
lités est  de  ii  kilomètres. 

Plus  tard,  ceux  qui  me  liront,  jugeront  du  bon  accueil 
que  je  reçus  de  M.  Léon  Roches,  notre  représentant 
chargé  dos  allaires  de  France  à  Tunis,  et  des  bons  odices 
que  m'ont  rendu  tous  les  sujets  français. 

Je  ne  devais  point  prolonger  mon  séjour  à  Tunis.  Le  J  i 
avril,  je  me  rendis  à  Carlhagc;  là,  une  chambre  de  la 
chapelle  Saint-Louis  fut  mise  à  ma  disposition  par  M.  le 
Consul-Général,  pendant  la  dun'e  de  mes  travaux. 

Le  lo,  je  commençai  mes  travaux  topogra|)hi(|nes, 
pendant  que  quchpies  indigènes  fouillaient  les  points  ([ue 
j'avais  signalés  à  leur  attention  ,  et  qui  devaient  me 
servir  pour  la  reconnaissance  des  anciens  monuments 
de  Cartilage. 

Le  plan  de  celle  localité;  l'étude  de  la  Bvrsa,  du  (piar- 
tier  de  Mégara,  des  |)oris  de  guerre  (Colhon)  et  marchand, 
des  anciens  quais,  des  citernes  publiques  de  la  Malga,  de 
celles  situées  au  nord-est  de  Carlhage;  l'étude  des  ruines 
d'une  basilique,  des  thermes  Gargiliens,  du  forum,  du 
cirque,  du  théâtre,  des  divers  temples,  ainsi  que  tous  les 
anciens  monuments  placés  à  la  surface  du  sol,  me  tinrent' 
sur  ce  coin  de  terre  pendant  un  mois  et  demi.  Je  ne 
pouvais  plus  m'en  éloigner;  c'est  iju'il  en  est  de  certains 
sites  comme  de  certaines  mélodies,  qui  ont  le  privilège 
de  captiver  l'admiration. 

Dévoré  d'activité  et  diuq)alience,  je  pris  mon  album 
et  me  rendis  au  djébel-Camarl,  au  village  de  Sidi-bou- 
Saïd,  il  la  Marsa,  à  Douas-Chol,  au  Chikii,  petite  ile 
située  dans  le  lac  de  Tunis,  à  la  Couletle.  Mes  dernières 
heures  passées  dans  celle  parlie  de  la  Hégence,  furent 
consacrées  ;i  des  travaux  de  sondage  du  lac  Réhira. 

Ces  travaux  achevés,  je  parcourus  alors  le  Bardo,  la 
Mannouba,  .Vriana,  les  sebkhas  el-Rouan  et  el-Scdjoumi, 
rii.immam-Lif  et  ses  thermes  romains,  la  Mohmmédia, 


300 

Simindja,  Zong^'ar,  Zagliouan,  ses  sources,  son  lemplo , 
l'aqueduc  qui  amenait  les  eaux  du  djebel  Zagliouan  à 
Cartilage.  A  la  solidité  de  sa  construcliou ,  à  ses  pierres 
diamantées,  unies  par  uu  ciment  im[)érissable,  on  reconnail 
i'aciienienl  lu  main  des  lîumaiiis. 

Les  vastes  ruines  d'Ulina  lOudna)  ni  celles  d'Utique 
n'éclia|)pèrent  point  à  mon  examen.  Celte  exploration  me 
valut  bon  nombre  d'inscriptions,  médailles,  bas-reliefs, 
objets  d'art  et  minerais. 

Le  18  juin,  par  une  Itelle  matinée,  je  me  dirigeai  vers 
l'est  de  la  llégence,  pour  acbever  la  carie  (pie  j'avais 
commencée  sur  l'ancienne  Zengitane.  J'étudiai,  avec  la 
plus  scrupuleuse  altenlion,  la  péninsule  Herma-um  jus- 
(pi'à  llammamet,  en  passant  par  llades,  l'oued  Millau, 
Soliman  el  sa  riche  plaine,  C.ucrombalia  et  Doucha,  vil- 
lages arabes,  à  cheval  sur  la  route  de  Tunis  à  Soiissa. 

J'eus  soin  de  prendre,  là  comme  partout  ailleurs,  lu 
nomenclature  des  pays  que  j'avais  traversés,  montagnes, 
rivières,  ruisseaux,  lacs,  schkhas  et  tribus,  et  des  notes 
sur  les  mœurs  et  babil udes  singulières  des  habitants. 

Le  2i  juin,  je  rentrai  à  Tunis,  avec  une  abondante 
moisson  de  dessins,  estampages  et  autres  objets  curieux. 

Le  26,  je  quittai  de  nouveau  la  capitale  de  la  Ilégence 
pour  me  rendre  à  Soussa,  par  l'Ilamman-Lif,  Cuerom- 
balin,  le  fondonk  de  Jîerloubit;!  et  llercla.  Lutre  ces  deux 
derniers  points,  et  près  d'une  tour  romaine,  je  vis,  pour 
la  première  fois,  des  traces  d'une  route  romaine  en  béton, 
bordée  de  pierres  plates  sur  champ.  Cette  roule  reliait 
inrailliblemenl  Pul|)ut  à  Ilorrea-Cœlia ,  et  faisait  |)arlie 
de  la  grande  voie  de  Carthage  à  Sufetula  de  l'itinéraire 
d'Anlonin. 

Depuis  llercla  jusqu'aux  environs  de  Soussa,  le  j)ays 
est  légèrement  ondulé  et  pierreux;  on  ne  trouve  aucune 
trace  de  culture  nulle  part  :  tout  y  est  d'une  monotonie 
inconcevable. 


1 


301 

Peiulanl  mon  sc'joiir  à  Soussa,  je  fus  parfaiteinenl 
secondé  dans  mes  opéralions.  M.  le  général  Ucoliid 
m'aida  de  ses  lumièccs;  M.  Kspina,  vice-consid  et  mend)rc 
de  |)lusienrs  sociétés  savantes ,  et  mon  collègue  de  la 
Société  Historique  Algérienne,  me  prêtèrent  leur  concours 
éclairé. 

Je  dois  aussi  bien  de  la  reconnaissance  a  MM.  le  doc- 
teur Clément,  Pierre  Sacomman,  Edouard  Carleton,  Henri 
Siccarol,  ainsi  qu'au  Révérend  l*ère  Agustino  de  Ucggio, 
président  de  la  mission  apostolique. 

A  Soussa  (l'antique  Adrumetum),  je  vis  une  niagnilique 
collection  de  médailles  consulaires  en  or  et  en  argent, 
trouvées  dans  colle  ville  et  aux  environs;  mais  mallieu- 
reuscment  enlouies  dans  des  sacs,  et,  par  suite,  perdues 
pour  la  science. 

Je  dois. encore  à  la  bienveillance  accoutumée  de  M.  le 
général  Rccliid,  une  niagnilique  collection  de  poteries 
romaines. 

Soussa  est  riche  en  sites  pittoresques  et  en  beautés  de 
toute  naiure. 

M.  Espina,  vice-consul,  m'apprit  à  connaître  toutes 
les  richesses  archéologiques  du  pays. 

Pendant  celte  tournée,  je  lis  d'abondantes  moissons. 
Je  reconnus  Soussa  pour  rAdrumolum  des  anciens;  je 
levai  et  dessinai  le  brise-lames  du  port  ancien,  que  le 
savant  docteur  Shaw  ne  put  voir;  je  dessinai  la  batterie 
de  Ras-el-Bordj ,  sentinelle  avancée  de  la  cité  moderne; 
ses  anciennes  citernes;  un  hypogeum  circulaire  taillé 
dans  le  roc  ;  de  vastes  routes  souterraines  creusées  dans 
le  tuf,  et  de  nombreuses  ruines. 

Le  50  juin,  je  quittai  Soussa  pour  retourner  à  Tunis. 
Il  serait  trop  long  d'énumérer  et  de  décrire  les  ruines 
considérables  que  Ton  rencontre  à  droite  et  à  gauche  de 
la  roule. 

Comme  ce  voyage  m'avait   beaucoup  fatigué,  je  crus 


302 

devoir  nvarrèler  (luelquc  temps  à  Tunis,  pour  inellre  au 
net  quel(iues-uns  de  mes  travaux,  et  parcourir  encore 
une  l'ois  ses  environs. 

Le  "iO  juillet,  je  partis  pour  le  Kef  (accompagné  d'un 
homha  cl  de  mon  domestique) ,  afin  de  l'aire  un  travail 
géograplii(iue ,  physique  et  descrijjlil'  de  la  Medjerda  (  le 
iiagrada  des  anciens)  et  de  sa  vallée;  de  dresser  une 
carte  donnant  le  tracé  du  fleuve ,  depuis  sa  source  jus- 
qu'il son  emhoiicliure;  de  l'aire  connaître  ses  principaux 
aUluents,  les  villes,  villages  et  localités  qui  se  trouvent 
dans  le  bassin  de  ce  fleuve  ;  d'esquisser  les  mœurs ,  les 
habitudes  de  certaines  tribus  tunisiennes,  et,  enlin,  de 
recueillir  des  renseignements  sur  les  [iroduils  du  pays. 

Dans  cette  tournée,  je  ne  pouvais  perdre  de  vue  l'étran- 
glemcnt  que  franchit  la  Mcdjerola,  au-dessus  de  Testour 
et  du  confluent  de  l'oued  Siliana  et  de  l'oued  Tibourack, 
qui  m'avait  été  signalé  par  M.  Berbrugger,  président  de 
la  Société  Historique  Algérienne,  et  par  M.  Mac-Carthy. 

Si  cette  longue  excursion  a  l'ouest  de  la  Régence  tut 
très-pénible,  à  cause  des  chaleurs  accablantes  qui  se 
lirenl  sentir  pendant  toute  la  durée  de  mon  voyage,  je 
dois  dire  aussi  qu'elle  me  donna  de  bien  beaux  résultats. 

Je  possède  plus  de  vingt  cotes  d'élévation  de  diverses 
montagnes  de  la  Régence,  grand  nombre  d'inscriptions, 
médailles,  dessins  de  temples,  monuments  romains  et  d'une 
église  chrétienne,  des  vues  de  Tebourba,  Mectjez-el-Rab, 
Slougli,  Testour,  Tonga,  Tiboursck,  El-Mest(Musti),  le  Kef 
et  autres  points  importants. 

Pendant  mes  excursions,  je  n'ai  eu  qu'à  me  louer  des 
indigènes  de  la  Tunisie.  Les  habitants  de  ce  pays  ne  sont 
pas  si  i'arouches  (ju'on  nous  l'a  voulu  persuader  jusqu'ici; 
ils  n'ont  de  barbare  que  le  nom  seulement. 


.'{(13 


inor.llAPlHES  IIOUSSILLOMAISES, 

Par   II,   l'altbc    Jf.   Tolra    »k    Boroas, 

Doi-lfiir  l'ii  Iijoil  raiiou  et  un  Hi'uit  civil, 

Professcui'  ilc  J'hilosiiphie  et  (rHistoiro, 
Membre  résidant  '. 


MONSEIGNEUR  FRANÇOIS  XIMENEZ, 

Évoque  d'Elue  (1400—141:)). 

l'alni'  (le  KraiKuis  \iineiiez.  <l|iiiiions  diverses  ù  ce  sujet.  —  Son  entrée 
dans  l'Ordre  de  Sainl-Fram/nis  et  ses  prédications.  —  Il  est  élu,  par 
acrlamalion,  l'Àèquc  d'Elne.  —  Faveur  doni  il  junil  auprès  de  la  Heine 
d'Arawn  et  du  Souverain  Pontife.  -C.onrile  de  l'erpii;iian  (i  itlX). — 
Saint  Vincent  l'crrier  en  Roussill(Mi. — l'uMe  et  juslilicalion  de  .\I.«i' 
Xinienez. — Sa  niorl  ;  dillicnlté  clironoioijique. —  Ouvrages  de  ce  l'réiat. 
--.Appendice:  .Aperçu  rapide  sur  le  séjour  de  Benoît  \1I1  en  lious- 
sillon ,  sur  la  suile  du  Schisme  et  les  eil'orts  de  saint  Vincent  Ferrier 
puiir  le  faire  cesser;  second  Congrès  de  l'erpiynan  (lilô). 

Parmi  les  illustres  Poiililos  qui  ont  gouverné  l'Église 
et  le  Diocèse  d'Elne,  il  faut  assigner  une  place  spéciale 
à  un  savant  et  saint  évèque,  qui  voulut  rester  toujours 
attaché  ;i  l'Ordre  de  Saint-François. 

Ia's  trois  liio!,'rapliies  qui  suivent  sont  destinées  à  entrer  dans  la 
composition  d'un  volume  sur  Lcsirois  Ordres  de  Sainl-François-d' Assise 
vu  Roiissilhui .  ipu'  .\I,  Faillie  ,F  Toira  de  Pordas  se  propose  de  publier 
Irès-procliainemenl.  l.a  V(V  du  Vniérnhif  Aii</i-  llcl  l'as,  dont  on  pour- 
suit si  activement  à  Rome  le  procès  de  béaiiiication,  sera  racontée  dans 
ce  livre,  avec  les  détails  fournis  par  les  doi  uincnls  contemporains  les 
plus  aullienliques. 


30i 

Suivant  (iiiehiiios  ailleurs''',  François  Xiinenez  serait 
originaire  de  la  province  de  Valence.  Mais  celte  opinion 
nous  i)arait  devoir  être  abandonnée,  en  piésence  des 
témoignages  décisifs  que  nous  apportent  les  clironi(jues 
de  l'Ordre  Franciscain  et  la  plupart  des  historiens  de 
la  Catalogne,  en  présence  de  l'opinion  émise  même 
par  plusieurs  auteurs  de  la  province  de  Valence*-',  en 
présence,  surtout,  des  déclarations  contenues  dans  divers 
ouvrages  composés  par  le  prélat  lui-même,  et  où  il  est 
clairement  désigné  comme  Catalan'-''. 

Notre  évèque  ne  doit  pas  être  confondu  avec  Ms''  Jean 
Ximenez,  qui,  né  en  Catalogne  et  Franciscain  comme-lui, 
fut  évèque  de  Malte  vers  le  même  temps.  Nous  ne  cher- 
cherions pas  à  prémunir  le  lecteur  contre  une  autre 
confusion,  si  elle  n'avait  fait  tomber  dans  l'erreur  (juel- 
ques  historiens  sans  critique.  Hobadilla  nous  apprend, 
en  effet '^),  que,  aux  yeux  de  certains.  M?''  Ximenez, 
évèque  d'Elne,  et  l'illusire  cardinal  Ximenez  de  Cisncros, 
archevêque  de  Tolède  ,  étaient  un  seul  et  même  per- 
sonnage. Tout  au  plus  pourrait-on  admettre  que  notre 
prélat  catalan  appartenait  à  la  famille  d'où  devait  sortir 
le  célèbre  ministre  de  Ferdinand-le-Catholique;  car  le 
cardinal  ne  devait  naître  en  Castille  qu'en  1450  (assez 
longtemps  après  la  mort  de  notre  évèque  d'Elne),  pour 
entrer,  à  cinquante  ans,  dans  l'Ordre  de  Saint-François 
(i486);  devenir  successivement  confesseur  de  la  reine 

(  1)  Le  1'.  Maestro  Jusliniano,  dans  sa  Vie  de  saint  Vincent  Février; 
Zurita  (Indices  latinos)  ;  le  docleur  Molâ  (Enipurio  juridico) ,  etc. 

(2)  Notamment  Escolano ,  qui  1p  fait  naître  à  Gérone  (Historia  de 
Valencia,  lib.  I,  cap.  VII  ). 

(3)  Ainsi,  ;i  la  lin  du  Paslurul.  sun  plus  bel  ouvrage,  imprimé  eu  1  i'JÔ 

(80  ans  après  sa  mort),  on  lisait  :  c  Viri  jjrœstantissimi  in  sncru 

pagina  FiUNClSCI  XlMEXlS,  ordinis  Minnniw  ET  Catai.am « 

(4)  P(ilili<iiir.  ]\W  Partie,  cliap.  VU. 


305 

Isabelle  (1492),  arclicvêque  de  Tolède  (149y),  cardinal 
et  grand-inquisiteur  de  Castille  (1507),  régent  du  royaume 
d'Kspagne  (1510)  et  mourir  en  ioll. 

A  quel   âge   et  vers   quel   temps   François   Ximenez 
entra-t-il  dans  l'Ordre  de  Saint-François?  Nous  ne  pou- 
vons le  dire.  Fit-il  profession  dans  la  province  de  Cata- 
logne, ou  dans  la  province  de  Valence?  Sur  ce  point 
encore,  les  avis  sont  partagés.   Le  P.  Ilebrera,  dans  sa 
Chronique  franciscaine  de  V Aragon '^^^  tout  en  assignant 
la  Catalogne  pour  patrie    a   lillustre    Prélat  ,    le  pro- 
clame  enfant  de   la  province  franciscaine   de  Valence. 
Mais  cet  historien,  auquel  on  a  reproché  d'assez  graves 
inexactitudes,  a  pu  être  induit  en  erreur  par  une  cir- 
constance mal  expliquée  de  la  vie  de  My  Ximenez.   Ce 
dernier,  en  effet,   alors  probablement  qu'il  n'était  que 
religieux,  avait  été  envoyé  en  mission  par  Benoit  XIII  dans 
le  royaume  de  Valence,  afin  de  protéger  les  catholiques 
contre  les  infidèles  qui  infestaient  ce  pays.  Rien  d'éton- 
nant que,  durant  son  séjour  a  Valence,  il  ait  habité  le 
couvent  de  son  ordre,  sans  qu'on  puisse  le  considérer  pour 
cela  comme  agrégé  à  la  province  de  Valence.  Mais,  ce  qui 
doit  faire  abandonner  le  sentiment  du  P.  Hebrera,  c'est  la 
preuve  positive  fournie  par  une  chronique  latine  manus- 
crite du  P.  Ange  Vidal,  que  le  P.  Coll*-'  déclarait  déposée 
dans  les  archives  générales  de  l'Ordre  de  Saint-François, 
au  couvent  de  Madrid.  Or,  dans  ce  document  historique, 
le  P.  François  Ximenez  était  formellement  désigné  comme 
ayant  fait  sa  profession  au  couvent  de  Saint-François  de 
Barcelone,  après  avoir  pris  Tbabil  dans  celui  de  Gérone. 
Les  historiens  ne  nous  apprennent  presque  rien  sur  la 
jeunesse  du  P.  François  Ximenez,  si  ce  n'est  qu'il  obtint 

(,1)  Tdine  I,  cliap.  21,  nos  156  et  suivants. 

(2)  Crônica  serdfica  de  la  sanla  Proviiicia  de  Catahiiia .  de  la  liegii- 
lar  (ihscrrancia  de  A'.  P.  sun  Friinciseo,  etc.,  eacrila  par  el  P.  in. 
J.w.MK  CoLL,  etc.  (Lib.  III,  cap.  38).  Barcclona,  173S;  1  vol.  in-foho. 

20 


306 

des  succès  marqués  dans  réludc  (et  prohablenienl  dans 
renseignement)  de  la  philosophie  et  de  la  théologie,  et 
qu'il  s'exerça  de  bien  bonne  heure  h  la  pratique  de  tou- 
tes les  vertus. 

Il  déploya  parliculièremenl  toutes  les  fortes  de  sa  scien- 
ce et  les  ressources  de  son  zèle  dans  la  mission  qu'il  reçut 
d'évangéliser  les  populations  de  l'Aragon,  de  Valence,  de 
Catalogne  et  de  Majorque,  à  l'occasion  du  jubilé  et  des 
indulgences  accordées  par  Benoît  XIH,  à  tous  ceux  qui 
prendraient  les  armes  pour  repousser  les  Sarrazins,  dont 
les  invasions  menaçaient  ces  provinces.  Les  prédications 
du  P.  Ximenez,  qui  puisaient  leur  double  inspiration  dans 
le  dévouement  le  plus  patriotique  et  dans  un  zèle  religieux 
des  plus  ardents,  montrèrent  déjà  l'habileté  de  ses  moyens, 
la  puissance  irrésistible  de  sa  parole,  et,  par  dessus  tout, 
l'heureuse  inlluence  de  sa  vertu.  I.e  mérile  et  le  succès 
de  cette  mission  firent  d'autant  plus  d'honneur  à  noire 
saint  apôtre,  que,  le  plus  souvent,  ses  conseils,  ses 
exhortations  et  ses  plaintes  s'adressaient  aux  princes, 
aux  grands  et  aux  magistrats  de  ces  contrées. 

L'époque  précise  de  sa  promotion  à  l'épiscopat  n'est 
pas  clairement  désignée  par  les  auteurs  qui  se  sont  occu- 
pés de  M?'"  Ximenez. 

S'il  faut  en  croire  le  P.  Hebrera,  c'est  en  MOO  que 
M"^  Ximenez  prit  possession  du  siège  d'Elne  :  «  Ms''  Don 
«  Raymond  de  Las  Escalas,  évèque  d'Elne  et  membre  du 
«  conseil  du  roi,  ayant  été  transféré  au  siège  épiscopal 
«  de  Barcelone,  vers  1400,  le  P.  P^-ançois  Ximenez  fut 
«  désigné  comme  par  acclamation  pour  le  siège  d'Elne  (''.  » 
Et  ici,  observons  tout  d'abord  (pi'une  parei'le  élection, 
qui  impliquait  l'intervenliou  colleclive  du  clergé  et  des 

(t)  Por  la  promocion  de  DoN  Rajion  de  Las  Escalas  (Ici  obis-padv 
de  EIna  «/  deBarcelona, 'por  los  anos  de  liOO, qiicdo  urjuelhi  silla  varatde. 
y ,  como  por  aciainacion ,  fué  jitieslo  en  ella  el  Padre  Fray  Fuan'CISCo 
Ximenez  (Chronique  Iranciscaiiu'  d'.Aragon.  loin.  1er,  chap.  XXI.  §  169). 


I 


307 

fonctionnaires,  an  moins  du  cliet-lieu  du  siège  épiscopal, 
ne  pouvait  désigner  qu'un  sujet  particulièrement  connu 
dans  le  pays  par  sa  vertu  et  sa  science.  Mais  éclaircissons 
notre  diilicullé. 

La  date  de  la  promotion  de  Msr  Ximenez  peut-elle 
être  précisée?  D'un  coté,  nous  lisons  dans  les  épiscopo- 
logies  de  Barcelone*'',  que  Ms'"  Raymond  de  Las  Escalas 
prit  possession  du  siège  de  Barcelone,  non  point  en  liOO, 
mais  quatorze  ans  auparavant,  le  21  décembre  1586,  et 
même  en  1577,  d'après  la  Gallia  Chrisiiana.  D'autre  part, 
il  semble  dillicile  de  placer  l'épiscopat  de  Mk''  Ximenez  à 
cette  époque,  et  môme  en  1  iOO,en  présence  des  documents 
historiques  et  chronologiques  renfermés  dans  la  Gallia 
Chrisiiana  elle-même  <-',  d'après  lesquels  Ms^  Raymond 
de  Las  Escalas  aurait  cessé  d'être  évêquc  d'Elue  en  1588, 
et  trois  autres  prélats  auraient  occupé  ce  siège  entre  cette 
époque  et  celle  de  ravènemenl  de  M^^  Ximenez,  qu'on 
ne  rapporte  ainsi  qu'à  l'année  1406.  Nous  avouons  notre 
embarras  à  concilier  ce  sentiment  avec  l'aflirmalion  si 
claire  et  si  formelle  du  P.  Hebrera,  d'autant  qu'il  s'agit 
d'une  dilférence  assez  importante  d'une  vingtaine  dannées 
dans  la  durée  de  l'épiscopat  du  prélat'^*. 

Mais  passons  aux  quelques  faits  principaux  qui  nous 
ont  été  transmis  sur  l'épiscopat  de  M»""  Ximenez. 

L'entrée  solennelle  du  prélat  dans  son  diocèse,  Ht  éclater 
la  démonstration  de  la  joie  la  plus  pure  et  de  l'enthou- 
siasme le  plus  sincère.  Ses  diocésains  ne  cessèrent  de  se 
considérer  comme  ses  enfants,  et  l'entourèrent  de  toutes 
les  prévenances  inspirées  par  l'amour  le  plus  filial.  Les 

(1)  Vatge  litemrio  à  Ina  I/jlesias  de  Espaiia,  su  autor  U.  Jayme 
Villanucva;  loin.  XVIII,  p.  20.  —  Voyez  aussi  VEspaha  sagrada. 

(2)  Tom.  VI,  col.  10(30  et  lOGi. 

(3)  Certaines  épiscopologies  placent  deux  évèi|iios  entre  Mi-'i'  de  Las 
Escalas  et  .Mi~'>' Ximenez,  savoir:  Mb'' Barlhclenii  Peyro ,  et  Slïf  Ray- 
mond Descallar. 


308 

plus  pauvres  et  les  plus  Imiiihles  troiivaienl  auprès  de 
lui  secours  et  protection ,  et  ses  hautes  (pialités  le  re- 
comniantlèrent  liientût  aux  personnaijcs  les  plus  distin- 
gués et  les  plus  puissants.  C'est  ainsi  qu'il  mérita  la 
conliance  de  la  reine  d'Aragon ,  Dona  Maria  Lopez  de 
Luna,  sœur  de  Benoit  Xlll  (Pierre  de  Luna),  si  bien  que 
cette  princesse  le  désigna  comme  un  de  ses  exécuteurs 
testamentaires <').  Les  conseils  de  la  couronne  et  le  Sou- 
verain Pontife  lui-même,  dit  le  P.  Coll  <-',  ne  rougissaient 
pas  de  recourir  a  lui  dans  les  doutes  ou  les  embarras, 
cl  de  s'en  rapporter  a  ses  sages  décisions;  car  ce  qu'on 
estimait  et  ce  qu'on  admirait  en  lui,  c'était  une  alliance 
si  intime  de  la  science  et  de  la  sainteté,  qu'elles  formaient 
comme  un  seul  élément,  et  constituaient  sa  nature  |)ropre; 
de  telle  sorte  que  sa  profonde  humilité  n'était  nullement 
altérée  par  les  applaudissements  et  les  louanges,  pas  plus 
que  sa  science  n'était  amoindrie  par  le  peu  de  valeur  qu'il 
s'attribuait  et  la  pauvre  idée  qu'il  avait  de  lui-même.  On 
peut  même  dire,  en  reproduisant  la  pensée  des  historiens 
de  sa  vie,  que  son  esprit  s'élevait  et  s'ornait  à  proportion 
des  pénitences  et  des  mortilications  qu'il  imposait  a  son 
corps. 

Ce  fut  là  le  secret  de  la  gloire  qu'il  conquit  auprès  de 
ses  contemporains,  et  plus  particulièrement  auprès  de  son 
Ordre  et  dans  son  diocèse;  c'est  aussi  ce  que  constate 
le  MarUjrologe  franciscain  d'Espagne,  lorsque,  à  la  date 
du  14  novembre  (que  certains  donnent  comme  le  jour  de 
la  mort  de  l'illustre  prélat),  il  insère  la  mention  suivante  : 

(1)  Les  deux  autres  étaienl  :  le  P.  Jean  Ximenez,  qui  devint,  peu 
d'années  après,  évêque  de  Malte,  et  le  P.  Bartliélemi  Born'is,  tous  de 
rOnlre  de  Saint-François.  La  Reine  mourut  le  2!)  décembre  LiOtî;  elle 
ne  l'ut  pas  li'mnin  de  tout  te  (jue  causèrent  de  dilticullcs  et  de  scandales, 
en  Roussillnn  et  dans  toute  l'Église,  l'amliilion  et  l'opiniùtrelé  de  son 
frère  Benoît  XIII. 

{i)  Ci'ôiiica  scrdfica,  etc.,  loc.  cit.,  §  Gil. 


30!) 

«  A  Perpignan,  dans  le  comté  de  Roussillon,  lo  vénérable 
»  Père  l-'rançois  Xinionez ,  évcqnc  d'EInc  et  Patriarche 
«  de  Jérnsalem,  qui  brilla  de  la  donble  auréole  de  l'éru- 
«  dilion  et  de  la  sainteté,  et  rendit  son  ministère  pastoral 
«  non  moins  fécond  par  l'exemple  et  le  parfum  de  ses 
«  vertus,  que  par  l'étendue  de  sa  science  et  l'excellence 
«  de  sa  doctrine'').  » 

IS'ous  touchons  à  un  des  événements  les  plus  célèbres 
de  l'histoire  de  l'Église  ;  je  veux  parler  de  cet  épisode  du 
Schisme  d'Occident,  qui  se  déroula  dans  la  ville  de  Perpi- 
gnan sous  l'épiscopat  de  Mfc'''  Ximcnoz ,  et  dont  nous  ne 
rappellerons  ici  (lue  ce  qui  se  rattaclie  à  notre  sujet. 

Il  y  avait  déjà  quel(|ues  années  que  l'ambilion  de 
Grégoire  XII  et  de  Benoît  XIII  jjrolongeait  le  schisme 
et  divisait  l'Eglise.  Ce  dernier,  après  avoir  été  quelque 
temps  prisonnier  dans  son  palais  d'Avignon,  s'était  enfui 
h  (iénes,  alors  occupée  par  la  France  et  gouvernée  par 
le  maréchal  de  Boucicaul.  L'ordre  avait  été  déjà  expédié 
h  ce  dernier  de  se  saisir  de  Benoit,  et  d'empêcher  ainsi 
qu'il  n'allât  hors  du  royaume  prolonger  sa  Papauté  et 
son  schisme,  ce  que  son  opiniâtreté  ne  faisait  que  trop 
appréhender.  Mais,  aussi  vigilant  (]u'opiniâlre,  il  s'enfuit 
bientôt  de  Porto-Venere,  port  situé  sur  la  cote  de  Gènes'-', 
s'approcha  des  galères  qu'il  entretenait  toujours  bien  ar- 
mées le  long  de  cette  plage,  et,  accompagné  de  quatre 
cardinaux (•»,  il  s'embarqua  le  lo  juin  1408  (terme  remar- 

(1)  «  ...qui  cl  emdilione  siiif/ulari  pliirimiim  e.vcelluit,  et  Vilm  sanc- 
tilule  populo  sibi  commisso  non  minus  profuil. 

(2)  M.  licnn  nous  sciiiMo  avoir  confondu  Porlo-Vrnere,  port  ilali(!n, 
avpc  Poit-Vt-niIres ,  où  il  fait  (IrbaniiiiT  lînnoit,  In  2  juillet  (llisloini 
(lu  Houssillon ,  loni.  11,  p.  21)). 

(3)  Les  cardinaux  de  l''ius(iiic,   de  Clialanl ,   do  (îironc  cl  d'Urrios. 
C'csl  à  tort  nue  le  1'.  Martèue  y  met  Mi,'''  .lean  d'Armagnac,  arclievèijuc.'' 
d'Auili,  (|ui,  d'ailleurs,  ne  lut  trcé  cardinal,  à  Perpignan,  que  dans  le 
mois  de  seplenïlire  suivant. 


310 

qiiablc  du  séjour  que  les  Papes  avaient  fait  en  France  durani 
103  ans),  après  avoir,  dans  une  bulle  datée  de  ce  même 
jour,  exposé  ce  qu'il  avait  lait  pour  procurer  l'union  de 
rÉ<'lise,  et  convoqué  pour  la  Toussaint  prochaine  un 
Concile  général  dans  la  ville  de  Perpignan,  en  Espagne, 
en  opposition  avec  le  Concile  que  Grégoire  XII  parlait 
déjà  de  réunir  avec  ses  adhérents,  et  surtout  en  opposition 
avec  celui  que  les  anciens  cardinaux  dos  deux  obédiences 
parlaient  de  convoquer  a  Pise  pour  l'année  suivante. 

Benoit  XllI  débanpia  a  Collioure,  où  il  se  trouvait 
vers  le  15  juillet  {1408),  d'après  certains  auteurs,  tandis 
que  les  annalistes  espagnols  nous  apprennent,  au  con- 
traire, qu'il  avait  fait  son  entrée  à  Elne  dès  le  23  juin<''. 
Quoi  qu'd  en  soit,  Ms''  Xinienez  le  reçut  dans  sa  ville 
épiscopale,  ce  qui  dut  faire  concevoir  a  Benoit  l'espé- 
rance de  voir  grandir  et  triompher  la  popularité  de  sa 
cause  par  l'adjonction  et  les  hommages  d'un  prélat  aussi 
considéré  que  l'était  l'évèque  d'Elne.  Aussi ,  se  proniel- 
tnil-il  d'heureux  résultats  d'un  Concile  soutenu  par  la 
doctrine  et  éclairé  par  les  lumières  de  M?''  Xinienez. 

Après  avoir  attendu  quelcjucs  jours  à  Collioure  (ou  à 
Elne),  la  réponse  au  message  qu'il  avait  envoyé  au  roi 
d'Aragon,  son  beau-frère,  Benoît  vint  à  Perpignan,  dont 
le  château  lui  fut  assigné  pour  résidence.  11  s'y  trouvait 
le  23  juille!,  comme  l'alteslc  l'historien  espagnol  Zurita. 
Dès  le  1  i,  les  six  cardinaux  (jui  avaient  autrefois  reconnu 
son  obédience  et  résidaient  à  Livourne,  lui  avaient  écrit 
une  lettre  très-modérée,  très-sage  et  très-respecluense, 
pour  l'inviter  h  assister  au  Concile  de  Pise.  Cette  lettre 
n'ayant  été  suivie  d'aucune  réponse,  ces  mêmes  cardinaux, 
rendus  a  Pise,  lui  écrivirent  une  seconde  lettre,  datée  du 
24  septembre,  tout  aussi  réservée,  mais  plus  pressante 

^      (1)  Ce  dernier  senlinieiit  nous  senililrriiil  vl»s  vraisomlilablc,  vu  ipic  la 
traversée  de  rorlo-Ycncn;  \\  Gollinure  ne  pouvait  se  iiroloneiT  un  mois. 


Il 


311 

que  la  première.  C'est  à  Per|)ignan  (jue  Beiioil  XIII  pril 
connaissance  de  celle  seconde  missive,  don»,  avait  été 
chargé,  on  ne  sait  comment,  Jean  GHiart,  archidiacre 
de  Poitiers,  an  moiiionl  mi-me  on  Benoit  faisait  des  pi"0- 
cédnres  contre  les  députés  de  l'Lnivcrsilé  de  F'aris,  el  les 
autres  amhassadeurs  (jue  le  roi  avait  envoyés  aux  deux 
Papes,  lesquels  députés  furent  cités  à  comparaître,  dans 
soixante  jours,  à  Perpignan,  devant  Benoit,  par  une  bulle 
de  ce  dernier,  datée  du  21  octobre'''. 

Pierre  de  Luna  ne  répondit  que  le  7  novembre  "a  la  se- 
conde lettre  des  cardinaux.  iJans  cette  réponse  singulière, 
le  Pape  réfutait  les  considérations  et  les  motifs  contenus 
dans  la  lettre  des  cardinaux  de  Pise;  et,  non-seulement 
il  refusait  de  se  rendre  au  Concile  de  celle  ville,  n)ais  il 
leur  ordoiinail  de  se  rendre  au  Concile  de  l'eri»ignan. 

Au  moment  où  il  écrivait  sa  réponse,  le  Concile  avait 
déjà  été  ouvert  depuis  le  1«'"  novembre,  jour  de  la  Tous- 
saint, par  une  messe  solennelle;  mais,  comme  on  attendait 
encore  plusieurs  personnages  (pii  devaient  s'y  trouver,  on 
en  remit  la  première  session  à  quinze  jours.  Pendant  ce 
temps,  afin  de  ren  Ire  l'assemblée  jilus  auguste  et  plus 
majestueuse,  Benoit  conféra  le  litre  de  Patriarche  à  divers' 
prélats  du  second  ordre.  M»''  Xinienez,  évèqne  d'Elne,  fut 
de  ce  nombre;  il  reçut  la  dignité  de  Patriarche  de  Jéru- 
salem, et  fut  sacré  en  celle  (jualité  dans  la  principale 
église  de  Perpignan,  par  le  cardinal-archevêque  d'Auch, 
le  14  novembre,  en  même  temps  que  le  trésorier  de 
Maguelonne  recevait  la  consécration  comme  Patriarche 
d'A  mioche '2>. 

(I  )  1. 'archidiacre  Guiarl,  lidiiimc  il'esiuit,  ohsorva  la  situation  f\c  cette 
Cour  ponlilicale  reléguée  dans  un  coin  du  Roussiliou,  ainsi  que  les  pré- 
paratifs qu'on  y  faisait  pour  le  Concile.  On  a  une  lettre  fort  curieuse,  où 
l'archidiacre  de  l'oilicrs  rend  compte  de  sa  mission  auprcs  de  licuoit 
(Histoire  du  l'Eglise  Gullicunc,  par  le  P.  Bcrlhier). 

(2)  On  comprend  des  lors  le  lilr'^  i\i-  l'sciiflo-Palii'tirha  Hierosohj- 


312 

Le  15  novembre  1408,  Benoit  CLMébra  la  messe  dans  cette 
mi'''me  église'",  en  présence  de  nenf  cardinaux,  des  quatre 
Patriarches  créés  par  lui,  des  arclievr-qucs  de  Tolède,  de  Sa- 
ragosse  et  deTarragonne,  d'un  certain  nombre  d'évèques<-* 
et,  enfin,  de  saint  Vincent  Ferrier,  personnellement  invité 
h  cette  assemblée  par  Benoit  XllI,  qui  le  choisit  pour  son 
confesseur,  et  lui  avait  ofl'crt  la  pourpre.  Cet  illustre  enfant 
de  saint  Dominique,  après  avoir  fait  entendre  sa  puissante 
parole  dans  la  Catalogne  et  l' Aragon,  après  avoir  évangélisé 
les  populations  de  la  Provence,  du  Dauphiné,  de  la  Savoie 
et  de  la  Lombardic,  venait  de  donner  dos  missions  non 
moins  fécondes  dans  l'Andalousie  et  jusque  dans  la 
Grande-Bretagne.  En  traversant  les  provinces  de  Picardie, 
de  Poitou  et  de  Gascogne,  il  avait  opéré  d'innombrables 
conversions,  et  rentrait  en  Espagne,  lorsque  Benoit  XllI 
sollicita  sa  présence  au  conciliabule  de  Perpignan.  Depuis 
longtemps  déjà,  saint  Vincent  soupirail  après  le  rétablis- 
sement de  l'unité  dans  le  suprême  Pontificat,  et  suppliait 
Benoît  XllI  de  tout  faire  pour  atteindre  ce  but.  Mais 
Benoît  ne  pensait  qu'à  se  servir  du  crédit  et  de  la  répu- 
tation du  grand  serviteur  de  Dieu,  pour  donner  à  sa  cause 
plus  d'apparence  de  justice  et  assurer  la  tiare  sur  sa  tête. 

Saint  Vincent  Ferrier  prononça  plusieurs  discours  en 
latin  dans  les  premières  sessions  du  Concile  de  'Perpi- 
gnan. 11  usa  de  toute  la  force  de  son  éloquence  et  de  toute 
l'influence  de  ses  conseils,  pour  procurer  la  paix  de  l'Église, 
pour  décider  Benoît  XIII  à  céder  ses  droits  et  pour  l'en- 

mitanus,  que  donnent  à  ce  prélat,  Guillaume  Cave  el  les  auteurs  de  la 
Gallid  Chrifttiana. 

(1)  D'autres  disent  dans  Téi^lisc  do  La  Real.  M.  Henry  prétend,  nous 
ne  savons  sur  quel  fondement,  que  l'ouverture  du  Concile  fut  retardée 
jusqu'au  22  novembre  (toni.  11,  p.  3S). 

(2)  Conl-vinu'l ,  d'après  Zurita,  ou  seulement  quarante,  d'après  les 
mémoires  produits  au  Concile  de  l'ise.  Ils  appartenaient  aux  royaumes 
de  Caslillc  et  d'Araîon,  aux  comtés  do  Vv'w  oi  do  lYovence. 


313 

gager  à  envoyer  an  Concile  de  Pise  un  représentant  chargé 
(i'ofl'rir  son  abdication.  Mais  l'obstination  de  lienoit  rendit 
inutiles  les  conseils  de  saint  Vincent,  qui,  désolé  des  mau- 
vaises dispositions  de  Pierre  de  Luna,  se  hâta  de  (piitter 
Perpignan  et  reprit  le  cours  de  ses  prédications  ">. 

Cependant,  l'assemblée  dura  jusqu'au  mois  d'avril  de 
l'année  suivante  (1409),  et  eut  quatorze  sessions.  Les 
opinions  s'étant  partagées  sur  ce  qu'il  y  avait  h  faire 
pour  le  bien  de  l'Église,  plusieurs  prélats,  et  entr'autres 
Ms-'""  de  Maumont,  évoque  de  Béziers,  quittèrent  Perpignan. 
Il  n'en  resta  que  vingt-trois,  qui,  peu  après,  se  réduisirent 
à  seize  ou  dix-huit,  et  conseillèrent  à  leur  Pape  (l'"'' lévrier 
1  409)  d'envoyer  à  Pise,  où  le  (Concile  avait  été  réuni  par 
Grégoire  Xll ,  des  légats  autorisés  à  renoncer  en  son  nom 
au  Pontificat...  On  sait  tout  ce  qui  suivit,  et  l'assemblée 
des  évoques  dans  la  chapelle  du  château  royal  de  Perpignan 
(7  mars  1109),  et  la  persistance  de  ces  prélats  dans  leur 
première  proposition,  et  l'obstination  de  Henoit,  et  son 
consentement  à  envoyer  des  prélats  à  Pise  pour  y  traiter 
en  son  nom  (26  mars),  et  la  députation  solennelle  des 
deux  Papes,  Grégoire  XII  et  Benoit  XIII,  dans  la  quinzième 
session  (lu  Concile  iT)  juin"),  et  enfin,  l'élection  en  conclave 
d'Alexandre  V  (26  juin  1409). 

Les  documents  nous  manquent  pour  bien  déterminer 
le  rôle  de  Mg'"  Ximenez  au  milieu  de  situations  si  dilli- 
ciles,  et  d'événements  si  importants  pour  la  cause  de 
l'Eglise.  Mais,  si  les  historiens  et  chroni([ueurs  ne  traitent 
pas  ce  [)oint  d'une  manière  explicite,  nous  devons  remar- 
quer les  détails  qu'ils  nous  ont  transmis  sur  les  hautes 
vertus  de  cet  cminent  prélat,  dont  la  vie  lut  exclusivement 
consacrée  au  service  de  Dieu ,  à  la  conversion  des  âmes 
et  à  l'extension  du  règne  de  la  paix  autour  de  lui.   Tovl 


(1)  I.os  Arrliives  tin  !\IoiiI|m'IIu'i-  nous  ;i|i|»rciiiienl  que  rapôtrc  cnlniir 
dans  coUc  ville,  dès  le  "1')  iioveinliri' 


31  i 

pain-  Dièu  et  le  prochain,  sciiiblail  èlre  sa  devise  cl  sa 
règle  (le  comluile.  Il  s"oiil)liait  coiuplélemeiU  liii-inème, 
et  n'avait  en  vue  que  la  gloire  de  Dieu  cl  le  salut  de  ses 
frères,  soil  daus  ses  actions  de  chaiiue  jour,  soit  dans  la 
composition  de  ses  ouvrages,  dont  il  avait  commencé  à 
praiiijuer  la  doctrine  et  les  maximes,  avant  de  les  trans- 
aieltre  par  écrit  :  en  un  mut,  ses  ouvrages  ne  sont  que 
rex[)licali()n  de  sa  vie.  C'est  qu'il  savait  que  les  plus 
brillants  et  les  plus  solides  enseignements  n'obtiennenl 
que  la  moitié  de  leur  ellicacilé,  si  leur  auteur  ne  com- 
mence lui-même  par  les  mettre  en  prati(iue. 

Une  cireur  de  date  semble  avoir  écbappé  aux  savants 
auteurs  de  la  Gcillia  ClirisUana ,  lorscjue,  après  avoir 
consacré  quelques  lignes  à  Msf  Ximenez  cl  à  ses  écrils, 
ils  ajoutent  :  «  Peu  après  la  mort  de  François  Ximenoz, 
«  Pierre  de  Luna  (lienoil  XIlli  tint  un  conciliabule  à  Per- 
«  pignan"*...  »  On  a  vu,  il  est  vrai,  ([ue  le  faux  Concile 
de  Perpignan  s'était  prolongé  jusqu'au  mois  d'avril  1409, 
et  que,  par  conséquent,  il  n'était  pas  terminé  le  25  jan- 
vier, jour  auquel  certains  auteurs  rapportent  la  mort  du 
prélat;  mais  on  sait  que  ce  Concile  était  ouvert  depuis 
le  l^"',  ou  du  moins  depuis  le  15  noveuibre  de  l'année 
précédente,  et  (pie  Ms''  Ximenez  avait  siégé  avec  le  titre 
de  Pdlriarcbe  de  Jérusalem. 

S'il  fallait  admettre  raulbenticité  d'une  inscription  reje- 
tée par  des  critiques  très-éclairés,  et  qu'on  voyait  gravée 
sur  sa  tombe,  dans  l'ancienne  église  des  Cordeliers  de  Per- 
pignan, notre  évéque  sérail  mort  le  25  janvier  I409<-). 

{l)  Pauh'i  pnst  abilitm  Franrisci,  Pet  rus  i'  Liinn  concilinbiiliim  Per- 
p'miuni  hnhuit,  in  fjitn  aiicloies  à  fuerunt  rpisrnpi.  ut  si  Grcgnrius  a 
suis  exauctnrnrftur ,  ipse  papales  apiees  cleponerH  (loc.  cit.). 

(2)  Voici  cette  inscription,  d'après  la  Gallia  Christiana  :  [).  \).  Y. 

l'ilANCISf.CS  Xl.MENEZ,  0UD1M.S  .MlNORLM,  EPISCOt'l  S  IIkLF.NENSIS  ET 
J'.\TlU.\liCH.\  IllEK(JSUl.YMlT.\NIS,  OI'.UT  DIE  XXUI  .l.V.M'.XUll  MCOCCIX. 
HÙC  EST  TRAN5LATUS  DIK  XVII  SEI'TE.MDUIS  .MDCXXUI. 


313 

Sa  dépouille  iiiorlclle  aurait  clé  lenlbrniéc  dans  un  sarco- 
phage de  piene,  déposé,  deux  siècles  plus  lard  ;  1(325), 
dans  celte  même  église,  au-dessous  de  la  perle  de  la 
sacristie,  avec  ladite  inscription;  mais,  d'un  autre  côté, 
les  auteurs  des  chroniques  espagnoles  no  rapportent  la 
date  de  sa  mort  qu'au  1  i  novembre  1  il 5,  d'où  il  résulte 
que  la  chronologie  de  la  vie  de  Mt'''  Ximenez  est  assez 
chancelante,  puisque,  selon  que  l'on  adopte  une  des  dates 
de  1380,  1400  ou  1406  pour  sa  jjromotion ,  et  celles  de 
1409  ou  de  14lo  pour  sa  mort,  son  épiscopat  peut  pré- 
senter une  durée  variahlo  de  trois  ans  (1406  — H09),  de 
neuf  ans  (^1400 — 1409  ou  1400 — lil.'Ji,  de  quinze  ans 
(1400— 141u),  de  vingt-neuf  ans  (1580—1 109),  ou,  enfin, 
de  Irente-cinq  ans  (1580— 141o),  selon  que  l'on  adopte 
les  unes  ou  les  autres  de  ces  diverses  dates. 

11  eut  pour  successeur  sur  le  siège  d'Elue,  non  point 
Mfe''  Jérôme  d'Oclion,  comme  l'avaient  dit  les  auteurs  de 
la  Gullia  Chrislianu,  mais  Ms''  Alphonse  d'Exéa,  dont  l'é- 
piscopat  assez  court,  a  échappé  aux  savants  Bénédictins. 
Ce  ()rélat,  issu  de  la  noble  maison  aragonaise  d'Exéa,  est 
sans  doute  le  même  (pii,  décoré  par  Benoit  Xlll  du  titre 
de  Palrinrcbc  de  (".onslantiiiople,  avait  prononcé  le  dis- 
cours d'ouverture  au  conciliabule  de  Perpignan  '*.  Quant 
à  Ms'"  Jérôme  d'Ochon,  religieux  aragonais,  confesseur 
et  camérier  de  Benoit,  il  ne  vint  qu'après  Ms''  d'Exéa. 
Dans  tous  les  cas,  il  n'est  pas  [lossible  d'admettic  cpi'il 
ait  élé  nommé  à  l'évèché  d'Elue  par  IJenoil  Xlll,  deux  ans 
après  lit  pru)iiolion  de  ce  dentier  (luSuuL-eniia  Poidi/ical'-'; 
ce  qui  nous  ferait  remonter  a  1590.  Au  surplus,  en  adop- 
tant la  date  la  plus  reculée,  on  ne  peut  jamais  faire  remonter 

(  1  )  Lubbc.  Collcclion  des  Coiiriles. 

{'2)  C'est  iKuirtant  ce  i|iic  nous  lisons  ilmi!;  nue  ircente  l  /<•  de  suint 
Viiirail  Fcnicr.  jiar  l'ablji'  A.  lîiiyle.  l'aiis,  iJruy,  édilcnr,  isr)5;  I  vol. 
iri-8",  |i    .j'i. 


31  fi 

l'avénemcnt  de  Mk""  d'Oclion  a  une  cpoquo  antérieure  a 
1409,  date  assignée  par  plusieurs  auteurs  à  la  mort  de 
M?''  XinienezC). 

Il  nous  reste  a  dire  quelques  mots  de  Ms""  Ximenez 
comme  écrivain.  Ce  savant  prélat  s'était  fait  remarquer 
par  d'excellents  ouvrages  d'histoire,  de  politiijue,  de  théo- 
logie et  d'ascétisme,  composés  en  latin  ou  en  espagnol,  ()ui 
ne  furent  publiés  (|ue  longtemps  après  sa  mort  à  Gérone, 
Alcala,  Burgos,  Barcelone,  Grenade  ou  Valence ^2'.  Nous 
allons  passer  rapidement  en  revue  les  principaux  de  ses 
écrits,  ou  les  plus  connus  : 

1»  Une  Vie  de  Notre-Seigneur  (Vita  Chrisli),  écrite  en 
lalin,  traduite  en  espagnol  par  Ms'"  ïalavera,  archevêque 
de  Grenade,  et  imprimée  à  Valence  en  1493.  Ce  livre  a 
été  aussi  traduit  en  français. 

2°  Un  livre  sur  la  Nature  des  Anges  (Liber  insignis  de 
naturâ  ongelicâ  ) ,  composé  par  Mn''  Ximenez  en  1392, 
et  traduit  aussi  en  français.  Cet  ouvrage,  dont  le  maims- 
crit  original,  ainsi  que  celui  du  précédent,  se  trouvait, 
lorsque  le  P.  Coll  écrivait  sa  Chronique  (1758),  h  la 
Bibliothèque  du  Boi  a  Paris,  fut  publié  a  Burgos,  puis 
à  Alcala  de  Hénarès,  en  lo27(=*>. 

5°  Le  Pastoral,  pour  l'instruction  des  évrques  ou  des 
supérieurs  (Pastorale,   i^ro   instnidione  episcoporum  cl 

(1)  11  paraît,  en  effet,  que  Mg:r  d'Oclion  était  cvèque  d'Elne  au  mois 
de  décembre  1109  (Catalorjue  des.Évéques  d'Elne,  par  P.  Puiggari). 

(2)  La  diVomerfe  de  rimprimorio  ne  date,  on  le  sait,  que  de  1  iO:2. 
Ce  retard  forcé  dans  la  publitalion  des  écrits  do  notre  auteur,  expli(|ue  le 
caractère  apocryphe  de  certains  ouvrages  attribués  à  Mgr  Ximenez  sans 
preuves  positives,  comme  aussi  l'incertitude  qui  plane  sur  l'authentirité 
d'autres  écrits  du  prélat,  dont  on  n'a  pu  quelquefois  vérifier  les  originaux 
avec  un  soin  assez  minutieux. 

(3)  Une  copie  manuscrite  de  ce  livre,  faite  en  lil5,  se  trouvait,  il 
n'y  a  pas  longtemps,  à  la  bibliothèque  du  couvent  des  Carmes  déchaussés. 
à  Barcelone. 


317 

super ior uni  ) ,  dédié  a  rarchevéque  de  Valence  el  i)ul)lié 
en  1495  a  Harcelonc.  On  conserve  le  manuscrit  de  cet 
ouvrage  dans  la  Bibliothèque  Ambrosicnne  de  Milan.  Ce 
livre  est  peut-rtrc  celui  qui  a  le  plus  contrihué  à  établir 
la  réputation  de  laulcur,  qui  expose  lui-même  son  but  : 
Esca  prœparalur  el  cibus  omnibus  prœlatis  Ecdesiœ  frœ- 
scntibus  et  futuris;  après  quoi,  il  le  divise  en  quatre  par- 
ties :  dans  la  première,  il  traite  de  la  dignité  du  sacer- 
doce, et  s'adresse  au  clergé  en  général;  la  seconde  partie 
s'occupe  des  évéqnes,  dont  il  trace  les  devoirs  dans  un 
ujagnilique  commentaire  des  Épitres  de  saint  Paul  sur 
ce  sujet;  dans  la  troisième,  l'auteur  examine  et  t'ait  res- 
sortir les  obligations  de  la  charge  pastorale  du  prêtre 
vis-à-vis  de  son  troupeau;  enfin,  dans  la  quatrième  par- 
lie,  il  traite  de  la  récompense  et  de  la  gloire  réservées 
au  pasteur  lidèle  el  vigilant. 

4»  Un  Traité  sur  la  Vie  chrétienne,  en  quatre  livres, 
publié  en  espagnol ,  sous  ce  titre  :  Informacion  de  la 
Vida  cristiana ,  et  suivi  d'un  Traité  sur  les  Sacrements, 
et  en  particulier  sur  la  Pénitence.  Ce  traité  sur  la  vie 
chrétienne,  publié  à  Grenade  en  1490,  fui  le  premier 
livre  imprimé  a  Perpignan,  en  1502. 

5"  La  Doctrina  cristia)ia,  ouvrage  cité  par  Carboncll, 
dans  sa  Chronique  d'Espagne. 

(i^  De  l'Échelle  mystique  /De  Scalâ  I)ci  ) ,  publiée  en 
1501,  à  Uarcelone.  L'auteur  l'avait  dédié  à  la  Heine  Dona 
Maria  l.opez  de  Luna,  a  qui  il  avait  dédié  un  autre  livre 
sur  la  dévotion  :  Uibre  de  la  devociâ. 

7»  Le  char  des  dames  (El  carro  de  las  damas),  appelé 
communément  ïx  livre  dos  femmes,  dédié  à  la  très-haute 
el  Irès-iiliisire  Dona  Sanche  Ramiroz  de  Arenos,  comtesse 
de  Prades.  Ce  livre  réunit  à  l'enjouement  le  plus  spirituel, 
une  profonde  connaissance  du  cœur  humain,  et  une  mo- 
rale des  plus  saines.  Il  fut  imprimé  à  Barcelone  en  1495, 
et  traduit  du  catalan  en  castillan  par  un  Frère  Mineur. 


318 

8"  Enfin,  onlre  une  Exposition  des  sept  psaumes,  nne 
Méthode  pour  la  confession  et  pour  obtenir  une  bonne 
mort,  et  une  Histoire  Ecclésiastique,  dont  il  n'esl  pas 
sûr  qu'il  soit  l'auteur,  Ms"'  Xinienez  a  laissé  encore  un 
ouvrage  lliéologico-politi(]ue  intitulé  :  Le  Chrétien,  ou 
du  Gouvernement  des  Princes  et  de  la  chose  publique 
(El  Crestià ,  ô  del  Reyimen  dcls  Princeps  y  de  la  casa 
pûblica) ,  qu'il  avait  dédié  à  Don  Alphonse  d'Aragon, 
lils  de  i'Inlant  Pierre  d'Aragon,  devenu  franciscain  après 
la  mort  de  son  épouse.  Cet  ouvrage,  que  l'auteur  avait 
adressé  à  tous  les  magistrats  de  Valence,  dénoie  chez 
l'illustre  évêque  l'érudition  la  plus  vaste,  et  renferme  la 
plus  solide  doctrine;  car  il  tient  à  la  fois  h  la  philo- 
sophie morale,  au  droif,  à  la  tliéologie  et  à  la  polili(|ue. 
[|  comprend  treize  livres,  dans  lesquels  se  trouvent  suc- 
cessivement traitées  les  questions  les  plus  élevées  et  les 
plus  pratiques.  iMs'  Ximenez  l'avait  dédié  au  marquis  de 
Villena. 

Plusieurs  des  écrits  qui  précèdent,  et  quelques  autres 
ouvrages  inédits,  non  moins  remarquables,  étaient  con- 
servés manuscrits  dans  la  hibliothècpie  du  couvent  de 
Sainte-Marie-de-Jésus,  près  de  Barcelone,  au  témoignage 
\  de  Wading'",  de  Gonzaga*-'  et  du  P.  Coll(^'.  Mais  les 
événements  de  1715  et  17i4,  c'est-a-dire  le  siège  de 
Barcelone  et  la  destruction  presipie  complète  du  couvent, 
durent  faire  disparaître  [tlusieurs  de  ces  précieux  manus- 
crits. 

(1)  De  scriptoribus  Ordinis  Minortim,  p.  i  iO. 

(2)  Ci'onica  fjeneral  de  lu  Orden  Frunciscaiia,  1-'  Pari.,  p;îi;.  8i. 

(3)  Ouvrage  iô]h  cilû,  liv.  111,  cliaii.  XXXVIII.  —  Guillaume  Cave  dil 
la  même  chose  :  Alla  l'jtis  opéra  ipuimplurima,  lingiià  palrid  coiiscripta, 
in  bihliiillu'cii  cu'iiobii  S.  Marin:  de  Jesu  ,  propc  Barcinonem,  MSS. 
iiascrrari  testattir  M'addiiigus...  loc.  cit. 


319 


APPENDICE. 


Puisque  nous  avons  commencé  le  récit  succinct  des 
événements  relatifs  au  grand  Schisme  et  accomplis  en 
Roussillon,  il  nous  semble  nécessaire,  pour  compléter  le 
tableau,  de  rapporter  les  principaux  faits  qui  suivirent. 

Nous  avons  vu  (jne  saint  Vincent  Ferrier  avait  quitté 
Per|)iguan  et  s'était  rendu  à  Montpellier,  dès  la  lin  de 
novend)rc  J  i08,  (piinze  jours  à  peine  apiès  l'ouverture 
du  Concile.  I.e  saint  apôtre,  après  avoir  donné  une  mis- 
sion des  plus  fructueuses  à  Montpellier,  crut  devoir 
retourner  à  Perpii-nan.  C'était  au  mois  de  décembre  de 
cette  même  année.  Chemin  faisant,  il  annonça  la  parole 
de  Dieu  dans  plusieurs  villes  et  villages.  Arrivé  à  Perpi- 
gnan, il  se  mit  à  prêcher  au  peuple  tous  les  jours. 

Cependant,  le  Concile  de  Perpignan  se  terminait  sans 
aboniir  à  aucun  résultat  sérieux.  Les  cardinaux  restés 
auprès  du  Ponlité,  le  supplièrent,  dans  une  dernière 
séance,  d'abdi(|uer  tous  ses  droits,  lui  montrant  claire- 
ment que  c'était  le  seul  moyen  de  rétablir  l'union  dans 
l'Eglise.  Les  évèques  rassemblés  à  Pise  pour  travailler  a 
faire  cesser  le  Schisme,  priaient  tous  ceux  de  leurs  amis 
qui  approchaient  Denoit  XIII,  de  décider  ce  Ponlité  à 
l'abdication.  Le  cardinal  Drancaccio  écrivit  à  Don  Doni- 
lace  Ferrier,  frère  du  saint  et  supérieur  des  Charireux, 
qui  se  trouvait  aussi  h  Per[)ignan,  une  lettre  pressante, 
qui  se  terminait  ainsi  :  «  Excusez-moi  si  je  n'écris  pas  à 
«  noire  seigneur  Denoîl  XIII  ;  c'est  que  je  sais  (]u'il  reçoit 
«  mal  mes  |»aroles.  Je  me  recommande  aux  prières  de 
«  votre  bienveillante  charité.  Saluez  de  ma  part  votre 
«  frère  Vincent,  mon  très-cher  ami,  avec  qui  [dut  à  Dieu 
«  que  je  pusse  encore  m'entretenir.  Que  le  Très-Haut 
«  vous  conserve  heureusement  pour  son  service,  et  vous 
«  accorde  une  longue  vie.— Ecrit  à  Pise,  le  dernier  jour 


3Q0 

«  du  mois  de  janvier  1409(i).  »  Lorsque  celle  Icllre  par- 
vint à  Don  Bonilace,  saint  Vincent  en  avait  reçu  une  du 
roi  d'Aragon ,  ainsi  conçue  :  «  Nous  désirons  vivement 
«  traiter  avec  vous  quelques  alFaires ,  (ju'il  ne  convient 
«  pas  de  confier  au  papier.  Nous  vous  prions  donc  aftec- 
«  tueusement,  pour  notre  honneur,  de  venir  vers  nous, 
«  si  vous  voulez  nous  servir  et  nous  donner  un  conseil 
«important;  vous  nous  ferez  un  très-grand  plaisir. — 
«  Donné  à  Barcelone,  scellé  de  notre  sceau,  le  !2'2  jan- 
«  vier  1409.  »  Dès  qu'il  eût  reçu  celle  lettre,  saint  Vin- 
cent quitta  Perpignan  et  se  dirigea  vers  Barcelone. 

Toutefois,  malgré  son  désir  de  se  rendre  promplement 
auprès  du  roi  d'Aragon,  saint  Vincent  crut  devoir  s'arrêter 
(pielques  jours  dans  certaines  villes  qui  se  trouvaient  sur 
le  chemin  de  Perpignan  à  Barcelone,  cl  qui  avaient  besoin 
de  sa  présence.  Elne  était  désolée  par  d'anciennes  ini- 
mitiés et  de  funestes  discordes.  Saint  Vincent  y  prêcha 
pour  pacifier  les  esprits;  il  fut  reçu  dans  cette  ville 
comme  un  ange  de  paix,  cl  les  partis  le  choisirent  pour 
juge  de  leurs  ditférends.  Benoit  XIII  devait  recevoir 
d'Elne,  chaque  année,  deux  cents  florins.  La  ville  pré- 
tendait que  cette  somme  devait  être  payée  par  les  parti- 
culiers; ceux-ci,  au  contraire,  voulaient  que  ce  tribut  fût 
a  la  charge  de  la  ville.  On  s'en  remit,  de  part  et  d'autre, 
au  jugement  de  saint  Vincent  Ferrier  :  il  écoula  et  pesa 
les  diverses  raisons  apportées  pour  et  contre;  et,  après 
un  mûr  examen,  il  déclara  que  les  deux  cents  florins 
devaient  être  payés  par  la  ville.  C'est  ce  qui  fut  pratiqué 
l'année  suivante.  Cette  décision  fut  confirmée  par  un 
arrêt  du  roi  en  faveur  des  particuliers*-'. 

(1)  Pour  celte  letlrc  cl  la  suivante,  voyez  la  Vie  de  saint  Vinceiil 
Ferrier,  par  le  P.  Vidal,  liv.  II,  cliap.  IX. 

(2)  Cet  arrêt  porte  :  Ver  arerlos  (feclarudo  libres  en  su  senteneiu  el 
B.  P.  y  sehor  maestro  en  sayrada  thenJeKjia ,  arbilru  arbitrador  y 
umigable  componcdor. . . 


321 

Après  cela,  saint  Vincent  évangélisa  eu  triomphateur 
tJéroiic,  Barcelone,  Valence,  la  Caslille,  etc.  Plus  tard, 
nous  le  voyons  appelé  à  faire  partie  du  conseil  arbitral 
qui  déterminait  à  qui  devait  (Mre  donnée  la  couronne 
d'Aragon*''. 

L'année  suivante  (14.I2),  nous  voyons  saint  Vincent 
Ferrier  obtenir  de  nombreuses  conversions  de  Juifs  à 
Alcaniz,  à  la  suite  de  conférences  solennelles  soutenues 
avec  les  rabbins  et  instituées  par  Benoit  XIII;  nous  le 
voyons  accomplir  encore  des  prodiges  à  Lérida;  enfin,  à 
Tortose,  où  se  trouvait  Benoit,  il  redouble  d'ell'orls, 
avec  le  roi  Ferdinand ,  pour  décider  l'antipape  à  se 
désister  de  toutes  ses  prétentions,  afin  de  rendre  la  |)aix 
à  l'Eglise;  mais  ils  ne  purent  vaincre  l'opiniâtreté  du 
vieillard  (novembre  Iil2).  L'apôlre  se  rend  ensuite  à 
Valence,  sa  patrie,  où,  parmi  les  personnages  distingués 
venus  à  sa  rencontre,  se  trouvait  un  franciscain,  nommé 
François  Ximenez,  docteur  en  théologie  et  ami  intime 
du  saint.  Nous  ne  pouvons  dire  si  c'était  notre  évéque 
lui-même,  ou  un  autre  religieux  du  même  nom*'-'. 

Le  roi  Ferdinand  désirait  toujours  l'union  de  l'Fgiise. 
Aussi,  au  mois  de  juin  fil 4,  il  se  rendit  à  Morella,  où 
se  trouvait  lanlipape,  et  où  saint  Vincent  ne  tarda  pas  à 
les  rejoindre,  ainsi  que  les  ambassadeurs  de  l'empereur 

(1)  Ya\  lill,  au  Congrès  d'Alcaùiz,  saint  Vincent  opta  ])our  Ferdinand, 
Inlant  de  Castille,  qui,  monté  sur  le  trône  et  ne  pouvant  lui  liùre  accepter 
de  rL'COMipense,  le  nomma  son  confesseur  et  son  prédicateur. 

{i)  1!  no  serait  pas  impossible  cpie  ce  lût  Mf'  Ximenez;  mais,  alors, 
il  faudrait  embrasser  l'opinion  de  ceux  qui  ne  le  font  mourir  qu'en  liiS. 
F.ncorc,  serait-il  permis  de  s'étonner  (|ue  l'évéque  d'KIne  n'eût  été  désiijné 
<pie  connue  fiuiiciscain,  ainsi  que  l'ont  l'ail  les  historiens  de  la  vie  de  saint 
Vincent.  Voici  l'anecdote  qu'ils  racontent:  «  En  voyant  l'enthousiasme  du 
('  p('U|ile  et  l'éclat  de  cette  pompeuse  réception,  le  f.  François  Ximenez 
11  demanda  Imil  bas  à  saint  Vincent  :  «  l'ère  .Maître,  que  fait  maintenant 
«  la  vanité?  —  Mon  ami,  lui  répondit  le  saint,  elle  va  et  vient;  mais, 
i<  par  la  grùce  de  Dieu,  elle  ne  s'arrête  pas.  « 

SI 


322 


Si»isnioiid.  Toul  ce  (ju'on  put  oblcnii  de  Pierre  de  Luiia, 
l'ut  qu'il  se  rendrait  à  Nice,  pour  conrérer  avec  Siyisniond 
lui-même,  se  mettre  en  rapport  avec  le  Pape  de  Rome 
et  les  pères  du  Concile  de  Constance,  onlin  pour  prendre 
un  parti  délhiitir.  Après  (pioi,  le  Cou|,'rès  fut  fixé  au  mois 
de  juin  de  l'année  suivante.  Le  18  mai  lilo,  saint  \in- 
cent  Ferrier  se  trouvait  de  retour  de  l'Italie  en  Catalogne, 
lorsqu'il  reçut  du  roi  Ferdinand  l'invitation  de  se  rendre 
h  Porl-Vendrcs.  «  ...Comme  un  Congrès,  ainsi  que  vous 
«  savez,  lui  disait  le  roi,  doit  se  tenir  à  Nice  pendant 
«  tout  le  mois  de  juin ,  entre  notre  Très-Saint-Pèrc  le 
«  Souverain  Pontife,  le  Pioi  des  Piomains  et  nous,  pour 
«  extirper  enfin  un  Schisme  qui  dure  depuis  trop  long- 
«  temps,  je  vais  me  liàter  d'entreprendre  ce  voyage.  Le 
«  Souverain  Poutiîe  vous  écrira  sur  ce  sujet.  Nous-nuMne, 
«  nous  vous  prions  très-aiïeclueusemeut  et  nous  vous 
«  requérons ,  pour  l'heureuv  succès  d'une  si  importante 
«afi'aire,  que  tous  les  lidèles  doivent  favoriser,  et  que 
«  vos  conseils  et  vos  prières  doivent  servir  inliniment, 
«  nous  vous  prions  de  vous  rendre  à  Port-Vendres,  et  d'y 
«  attendre  le  Souverain  Pontife  et  moi.  Nous  passerons 
f(  dans  cette  ville  vers  le  milieu  de  juin...  » 

Après  avoir  reçu  celte  lettre,  saint  Vincent  se  dirigea 
vers  Porl-Vendrcs.  11  apprit  bientôt  (|u'une  grave  maladie 
du  roi  l'empêcliait  de  se  rendre  à  Nice;  que  l'empereur 
Siffismond,  instruit  de  celle  maladie,  avait  prié  Hcnoit  XIII 
et  Ferdinand  de  désigner  une  autre  ville  pour  le  Congrès, 
et  enlin,  qu'on  avait  désigné  Perpignan. 

Ce  fut  alors  que  Grégoire  XIl,  Pape  de  Rome,  renonça 
à  tous  ses  droits,  afin  que  le  Concile  de  Constance  |)ùt 
élire  un  Pape  accepté  par  l'Église  universelle.  Il  lallait 
décider  le  Pape  d'Avignon,  l'anibitieux  lienoîl  XIII,  à 
imiter  un  si  bel  exemple.  Dans  la  seizième  session  du 
Concile  de  Constance,  tenue  le  M  juillet  l-ilu,  l'empe- 
reur Sigismond  se  chargea  d'aller  en  Espagne  pour  s'en- 


39» 

Icndre  avec  le  roi  d'Aragon  et  Pierre  de  l-uiia,  et  pour 
obtenir  enliii  de  ce  dernier  une  renonciation  pareille  à 
celle  de  Grégoire  XII. 

Au  mois  de  septembre  suivant,  la  ville  de  Perpignan 
lui  le  théâtre  d'un  Congrès  des  plus  solennels  qui  soient 
mentionnés  dans  ses  annales.  On  vit  rassemblés  dans 
cette  ville,  l'antipape;  Benoit  XllI,  avec  plusieurs  évêques 
et  cardinaux  de  son  obédience;  le  roi  d'Aragon,  accom- 
pagné de  son  fils  et  de  trois  reines,  Doua  Kléonore,  son 
épouse,  Dona  Marguerite,  veuve  du  roi  iMartin ,  et  Dona 
Violante,  veuve  du  roi  Jean  ;  les  ambassadeurs  du  Concile 
de  Constance;  le  grand-maitre  des  Chevaliers  de  Rhodes; 
les  ambassadeurs  du  roi  de  France,  du  roi  de  Hongrie 
et  du  roi  de  Navarre;  le  comte  d'Armagnac,  et  une 
foule  d'autres  grands  personnages.  L'empereur  Sigismond 
s'était  arrêté  à  Narbonne,  où  se  trouvaient  aussi  réunis 
dix-sept  prélats,  pour  travailler,  comme  les  membres  de 
l'assemblée  de  Perpignan,  à  la  grande  affaire  de  l'extinc- 
tion du  Schisme.  Les  eflorts  des  uns  et  des  autres  ten- 
daient à  obtenir,  ou  l'abdication  de  Benoit  XllI,  ou  la 
soustraction  des  royaumes  d'Espagne  à  son  obédience. 

Saint  Vincent  Ferrier  eut  alors  l'occasion  de  déployer 
son  zèle  et  toute  son  énergie;  car  il  fut  à  la  fois  l'oracle 
du  Congrès  de  Perpignan  et  de  celui  de  iSarbonne.  Ses 
rapports  avec  Benoit  XIII,  l'estime  dont  l'honorait  le  roi 
d'Aragon,  sa  haute  réputation  de  sainteté,  le  désignaient 
comme  l'homme  le  plus  ca|)able  de  faire  réussir  ces  dilli- 
ciles  négociations. 

De  Narbonne,  l'empereur  Sigismond  avait  envoyé  ses 
ambassadeurs  h  Perpignan,  les  chargeant  de  visiter  de 
sa  part  Kordinand  et  Benoit  XIII.  Celui-ci  était  toujours 
logé  au  château,  avec  une  garde  de  300  hommes  d'armes, 
(|ui,  Ciievaliers  de  Saint-.lean  [)our  la  plupart,  étaient  com- 
mandés par  Rodrigue  de  Luna,  neveu  de  Benoil**'. 

(1)  Mémoires  manuscrits  du  chevalier  Turrell,  de  Barcelone 


324 

Cacliaut  toujours  sa  pensée,  l'arlincieux  Pierre  de  Luna 
(lit  aux  envoyés  de  Sigismond  qu'il  était  prêt  a  faire  tout 
ce  qui  serait  nécessaire  pour  la  concorde  et  l'union.  En 
apprenant  celle  réponse,  rem|)erein',  j)Iein  d'espérance, 
se  mil  en  roule  pour  Perpignan.  Le  roi  d'Aragon  envoya 
a  sa  rencontre,  jusqu'à  Saises,  son  lils  Alphonse,  avec 
une  suite  considérable  choisie  dans  la  noblesse  espa- 
gnole. Sigismond  lit  son  entrée  à  l*erpignan  le  19  sep- 
tembre, avec  i.OOO  cavaliers  allemands  ou  hongrois.  On 
lit  de  grandes  iV'tes  pour  la  réception  de  Tenqjcreur;  mais 
le  roi  Ferdinand  ne  put  y  assister,  à  cause  de  son  état 
de  souflVance.  Si  nous  en  croyons  le  manuscrit  du  che- 
valier Turrell,  l'empereur  fut  logé  au  couvent  des  Frères 
Mineurs  (ou  Cordeliers),  et  les  gens  de  sa  suite  dans 
diverses  maisons  du  même  quartier.  Le  lendemain,  après 
avoir  entendu  la  messe ,  l'empereur  alla  visiter  le  roi 
d'Aragon ,  retenu  chez  lui ,  et  le  surlendemain,  les  deux 
reines  Marguerite  et  Violante.  Le  jour  suivant,  il  alla  au 
château  rendre  visite  a  Benoit,  qui,  assis  sur  un  trône, 
entouré  de  cardinaux  et  de  prélats,  le  reçut  avec  bien- 
veillance et  lui  donna  le  baiser  de  paix.  Sigismond  ne 
laissa  pas  que  d'être  troublé  à  la  vue  de  cet  appareil,  si 
bien  qu'il  rendit  honneur  et  hommage  a  celui  qui  dé- 
ployait si  fastueusement  les  insignes  dont  l'empereur  eût 
voulu  le  voir  se  dépouiller  volontairement.  Ce  ne  fut 
(ju'après  cette  première  entrevue  que  les  questions 
sérieuses  lurent  abordées  entre  Benoit  et  Sigismond**'. 

Excité  par  ce  dernier  à  ne  consulter  que  le  bien  de 
l'Église  et  à  se  démettre  du  Pontilicat,  Pierre  de  Luna 
répondit  que,  pour  le  service  de  Dieu,  il  renoncerait  à  tout. 
Il  lit  la  même  réponse  aux  ambassadeurs  du  Concile  ;  mais, 
quelques  jours  après,  il  formulait  des  conditions  entière- 
ment inacceptables  :  il  voulait,  en  retour  de  son  abdica- 
tion, qu'on  regardât  comme  nul  le  Concile  de  Constance, 

(l)  Mémoires  manuscrits  du  chevalier  Turrell. 


325 

et  qu'on  en  convoquât  nu  autre  en  France,  dans  lequel, 
après  avoir  été  conlinné  Pape,  il  déposerait  la  tiare;  enlin, 
il  voulait  demeurer  cardinal  et  légat ///«/cre,  avec  un  plein 
pouvoir  spirituel  et  temporel  dans  tous  les  pays  qui  le  recon- 
naissaient alors  comme  Souv(Maiii  Pontife.  Cet  intraitable 
vieillard,  on  le  voit,  était  peu  touclié  des  maux  de  TÉglise, 
et  ne  songeait  qu'à  traîner  les  négociations  en  longueur. 
Aussi,  l'empereur,  le  roi  d'Aragon  et  les  ambassadeurs  des 
autres  princes,  étaient-ils  Irès-méconteiils.  Saint  Vincent 
fit  les  derniers  ell'orts  |)onr  inspirer  h  Henoit  des  senti- 
ments moins  opposés  à  la  j)ai\  de  TUglise  et  à  son  propre 
salut.  Tout  ce  qu'il  lui  avait  déjà  dit  et  écrit,  dans  plus 
d'une  occasion,  il  le  renouvela  avec  une  généreuse  liberté. 
Il  le  pouvait  d'autant  mieux,  (pril  s'était  montré  humble- 
ment soun)is  à  lienoit  XIII,  tant  qu'il  avait  pu  le  croire 
Pape  légitime;  mais,  en  ce  moment,  a|)rès  l'exemple  de 
Grégoire  XII,  il  était  évident  qu'il  dépendait  de  Fknoit  XIII 
de  linir  le  Scbisnie,  et  de  réunir  toute  l'Église  sous  l'auto- 
rité d'un  même  chef  légitime.  Saint  Vincent  parla  donc 
avec  force;  mais  la  voix  de  cet  apôtre,  à  qui  Dieu  avait 
donné  la  vertu  de  faire  entendre  les  sourds  et  de  ressus- 
citer les  morts,  ne  put  ébranler  le  plus  obstiné  des  hom- 
mes*'). 

Tout  en  prenant  une  large  part  aux  travaux  des  deux 
assend)lées  de  Narbonne  et  de  Perpignan ,  saiïit  Vincent 
ne  cessait  de  prêcher  an  peuple,  |)our  lexhorler  à 
la  pénitence;  mais  le  peuple  n'assistait  pas  seul  à  ses 
prédications  :  les  rois  et  leurs  ambassadeurs  venaient  les 
entendre  assidûment. 

«  Il  i)rècbait  après  la  messe,  qui  se  chantait  solennel- 
lement. Toutefois,  il  ne  crut  pas  devoir  proliter  des  musi- 
ciens de  la  chapelle  royale,  que  Don  Ferdinand  avait  mis 
à  sa  disposition.  Ne  voulant  d'autre  mélodie  que  le  chant 

(1)  Voyez  le   P.   Touron,   dans   son   ouvrage  intitulé  :  Lps  Hommes 
illustres  de,  l'Ordre  de  Saint-Dominique  f  Vie  de  saint  Vincent  Ferrier). 


326 

grégorien ,  il  faisait  clianler  seniemenl  les  prèlres  de  sa 
compagnie,  dont  la  voix  n'était  accompagnée  (jue  par  les 
accords  de  l'orgue. —  Le  roi  d'Aragon  ordonna  aux  Juifs 
d'assister  aux  prédications  de  saint  Vincent.  Ils  obéirent 
volontiers;  mais  (pielques-uns  se  luélrrent  à  un  com|)lot 
tramé  par  des  liomiues  jaloux  de  la  réputation  du  saint. 
Pour  diminuer  l'autorité  de  sa  parole,  on  eut  l'idée  de 
lui  faire  donner  un  démenti  public.  QueUpies  rabliins  se 
chargèrent  de  le  contredire  en  présence  de  licnoit  Mil 
et  du  roi.  Pour  convaincre  les  Juifs,  saint  Vincent  citait 
un  jour  un  texte  de  TAncien  Testament;  et,  alin  de  se 
mettre  davantage  à  la  portée  de  ceux  qu'il  voulait  surtout 
convertir,  il  cita  le  texte  en  hébreu,  puis  l'explicpia  et  le 
commenta.  Les  rabbins,  jugeant  le  moment  favorable, 
se  levèrent  en  s'écriant  qu'il  n'avait  pas  (idèlement  cité  le 
texte,  et  qu'il  fahriiiuait  une  [îible  ;i  sa  façon.  (>es  paroles 
causèrent  un  grand  tumulte,  et  les  rabbins  eussent  peut- 
être  été  victimes  <le  leur  audacieuse  mauvaise  foi,  si  le 
saint  n'eût  lui-même  apaisé  le  peuple  irrité:  «....Mes 
«  frères,  dit-il  ensuite  à  ses  contradicteurs,  venez  au- 
«  jourd'hui  dans  ma  cellule;  je  vous  ferai  voir  (pie  j'ai  cité 
«  (idèlement  le  texte,  et  (]ue  c'est  vous  (jui  vous  trouqjcz.  » 
Les  rabbins  ne  purent  pas  refuser  de  se  rendre  à  linvi- 
lation  de  saint  ^Vincent.  Ils  ne  furent  pas  seidement 
convaincus  de  leur  tort  par  son  amicale  conversation  ; 
ils  furent  touchés  et  gagnés;  ils  avouèrent  (pi'ils  avaient 
cédé  aux  instigations  de  quelques  envieux;  ils  se  conver- 
tirent, et  avec  eux  soixante  familles,  c'est-à-dire  presque 
tous  les  Juifs  de  Perpignan.  Plusieurs  entrèrent  dans  sa 
compagnie  et  le  suivirent  dans  ses  missions,  si  bien  qu'à 
Toulouse  on  se  disait,  en  les  montrant  du  doigt  :  »  Voilà 
«  les  Juifs  que  le  Père  Maître  Vincent  a  convertis  à 
«  Per[)ignan'').  » 

«  Cette  ville  eut  aussi  le  bonheur  de  voir  de  vieilles 

(1)  Viedesaint  Vincent Ferrier,  par k  I'.  Teoli,  liv.  I,  tr  ll.cli.  XXV[. 


327 

inimitiés  faire  place  à  une  paix  fraternelle,  les  usuriers 
restituer  un  argent  mal  acquis,  les  maisons  de  dchauche 
se  former,  des  étudiants  dissolus  se  soumettre  au  joug 
de  la  religion ,  des  pôclieurs  publics  donner  l'exemple 
d'une  austère  pénitence.  Lu  de  ces  pécheurs,  nommé 
Bercoll,  célèbre  dans  Perpignan  par  sa  grande  fortune 
et  sa  honteuse  conduite ,  fut  saisi  d'un  si  vif  repentir, 
après  un  sermon  de  saint  Vincent,  que,  pour  expier  ses 
fautes  passées,  il  ne  se  contenta  pas  de  longs  jeûnes  et 
de  disciplines  sanglantes  :  il  vendit  ses  biens,  distribua 
tout  son  argent  aux  pauvres,  se  dépouilla  de  tout,  se 
retira  dans  la  solitude  et  passa  le  reste  de  sa  vie  dans 
une  grotte,  pleurant  ses  fautes,  priant  et  se  mortifiant. 
Saint  Vincent  se  réjouissait  de  ces  belles  conversions, 
parce  qu'il  pensait  qu'en  apaisant  la  justice  de  Dieu, 
elles  contribueraient  ellicacement  à  obtenir  du  ciel  la 
grâce  la  plus  universellement  désirée  ,  l'extinction  du 
Schisme  et  la  paix  de  l'Église*''.  » 

Cependant,  d'un  côté,  la  ténacité  de  Pierre  de  Luna 
causait  une  profonde  tristesse  à  saint  Vincent;  et,  d'un 
autre  côté,  cette  allliction  s'ajoutant  h  la  fatigue  dont 
l'avaient  accablé  ses  travaux  apostoliques,  il  tomba  gra- 
vement malade.  Le  P.  Tbéobald  Durant,  dominicain  du 
couvont  de  l*erpignnn,  lui  avait  cédé  sa  cellule,  qui  fut 
bientôt  rcnq)lie  de  religieux  désolés  à  la  seule  pensée 
que  la  mort  allait  peut-être  leur  eidever  le  plus  saint  de 
leurs  frères.  Mais  Jésus-Christ  ap|)arut  à  saint  Vincent 
au  moment  le  plus  désespéré  de  sa  maladie.  Un  habile 
médecin,  le  docteur  François  Géniz,  étant  venu  le  visi- 
ter, il  refusa  le  concours  de  son  art,  en  lui  disant: 
«  Ce  ne  sont  pas  des  remèdes  humains  (jui  me  rendront 
«  la  santé.  Jésus-Christ,  qui  sait  guérir  tous  les  maux, 
«m'est  ap[)aru  cette  nuit;  il  m'a  dit  ([ue  je  prêcherais 
«jeudi  prochain.  »  Celte  prédiction  se  réalisa.  Se  levant 

(I  )   Vil-  (le  sdini  Vinri'nl  Fciricr.  par  l'obbi-  A.  Havlr,  ch.  XXIl 


328 

le  jeudi  avec  sa  force  ordinaire,  saint  Vincenl  prèclia 
sur  ce  {e\lc  :  (i  Ossa  arida,  audile  verbiim  Dci  ;  osse- 
«  nienls  arides,  entende/  la  parole  de  Dieu.  »  Il  raconta 
l'apparition  qui  avait  consolé  ses  soulHances ,  et  déclara 
que  Jésus-Christ  l'avait  assuré  qu'il  ne  mourrait  pas  à 
Perpignan,  n)ais  qu'il  visiterait  encore  divers  pays. 

Cependant,  les  mois  s'écoulaient,  et  aucune  résolution 
n'était  prise.  L'empereur  Sigismond,  voyant  Tinulilité  de 
tous  ses  efl'orls  et  des  exhortations  de  saint  Vincent  For- 
rier  sur  Benoit,  menac^a  de  retourner  à  Constance,  pour 
engager  les  Pères  du  Concile  à  déposer  au  plus  tôt 
Pierre  de  Luna.  Il  somma  le  Pontife  obstiné  de  renoncer 
purement  et  simplement,  comme  avait  fait  Grégoire  XII, 
sans  proposer  d'inacceptables  conditions.  Résolu  à  ne  rien 
céder,  Benoit  XIII  persista  à  ne  faire  que  des  réponses 
évasives.  L'empereur  en  colère  lit  ses  préparatifs  de  dé- 
part. Le  roi  d'Aragon,  fâché  du  nouveau  tour  que  pre- 
naient les  négociations,  somma  de  son  côté  Pierre  de 
Luna  d'abdiquer,  en  le  menaçant  de  sousti'aire  toute 
l'Espagne  à  son  obédience.  Benoit  XIII  consentait  à  par- 
lementer toujours,  mais  il  ne  voulait  rien  conclure.  Le  o 
novembre  lil5,  l'empereur  Sigismond  prit  le  chemin  de 
Constance,  en  menaçant  de  liguer  les  princes  d'Enroite 
contre  ceux  qui  défendaient  le  Pape  d'Avignon.  Il  partit 
sans  prendre  congé  du  roi  Ferdinand,  dont  il  soupçonnait 
la  bonne  foi,  et  qu'il  croyait  au  fond  partisan  du  Ponti- 
ficat de  Benoit  XIII,  bien  que  ce  prince  eût  l'air  de  désirer 
sa  renonciation.  L'événement  démentit  celte  sévère  accusa- 
tion; car,  Benoît  ayant  voulu  tenter  de  se  dérober  aux 
obsessions  dont  il  était  l'idjjii ,  le  roi  d'Aragon,  malgré 
ses  souflVancfcS  qui  devaient  l'enlever  l'annexe  suivante,  et 
qui,  déjà  alors,  le  mettaient  dans  l'impossibilité  de  signer 
ses  dépêches,  fit  défendre  aux  galères  de  Benoit  de 
s'éloigner,  et  aux  capitaines  des  ports  de  laisser  sortir 
aucun  navire  sans  sa  permission. 


329 

La  reconnaissance  pouvait,  jusqu'à  un  certain  point, 
attacher  Fcrdinantl  aux  intérêts  de  Benoit  <■'  ;  mais  il 
voulait  avant  tout  le  bien  et  la  paix  de  l'Kglise.  Aussi, 
se  sentant  blessé  du  départ  précipité  de  Sii^'isniond,  il  tint 
à  faire  connaître  à  celui-ci  ses  véritables  sentinionts,  et 
se  liàta  d'envoyer  auprès  de  lui  deux  gonlilslioninies  qui 
l'atteignirent  près  de  Narbonne,  et  le  prièrent  de  s'arrêter 
dans  celle  dernière  ville,  l'assurant  que  leur  maître  allait 
prendre  nn  parti  décisif  cl  redoubler  d'efforts  pour  ame- 
ner Benoit  à  abdiipier  sa  puissance;  à  défaut  de  quoi,  il 
renonceiail  lui-niênic  ouvertement  à  son  obédience. 
Sigismond  consentit  à  passer  quelques  jours  à  Narbonne. 
Ferdinand  tint  parole,  il  réunit  les  théologiens  du  Congrès, 
et  leur  demanda  leur  avis  :  d'une  voix  unanime,  ils  lui 
conseillèrent  de  réclamer  par  trois  fois  de  lîenoit  Xlll  la 
cession  de  tous  ses  droits,  et  de  se  retirer  de  son  obé- 
dience, s'il  refusait  son  désistement.  Une  première  som- 
mation l'ut  faite  îi  Pierre  de  Luna,  le  12  novembre,  à 
Perpignan.  Le  surlendemain,  Benoit  quitta  celle  ville, 
faisant  dire  au  roi  d'Aragon  (pj'il  s'en  allait  à  Collioure, 
el  qu'il  pouvait  ordonner  de  lui  tout  ce  qu'il  lui  plairait. 
Dès  lors,  Ferdinand  ordonna  de  l'aire  à  l'obstiné  vieillard 
une  seconde  sommation,  le  15,  a  Collioure.  L'antipape 
était  déjà  monté  sur  une  galère,  quand  on  vint  le  supplier 
de  déposer  la  tiare;  il  répondit,  faisant  allusion  à  la 
prétendue  ingratitude  du  roi  d'Aragon:  «  Me  qui  te  feci, 
«  misisli  in  dcacrtum  ;  moi  (pii  l'ai  fait  roi,  lu  m'as  en- 
«  voyé  au  désert.  »  L'antipape  se  relira  aussitôt  dans  la 
petite  forteresse  de  Peniscola ,  voisine  de  Valence  et  si 
célèbre  dans  l'histoire  du  Cid.  Ce  fut  là  qu'il  repoussa 
encore  une  iroisième  sommation,  appuyée  par  les  ambas- 
sadeurs de  tous  les  princes  clueliens. 

(  I  )  llciKiît  avait  roulriliué  à  faire  pcm  lier  la  lialance  du  côli^  do  l'er- 
diriand,  dans  l'assemblée  de  Caspé. 


330 

Il  ne  restait  plus  au  roi  d'Aragon  qu'il  se  retirer  de 
l'obédience  de  Pierre  de  Luna,  ainsi  que  le  lui  conseil- 
lait saint  Vincent  Ferrier.  Ce  dernier  consonlil  à  publier 
lui-même  le  décret  qui  défendait  à  tous  les  sujets  du  roi 
d'Aragon  de  reconnailro  désormais  l'autorité  de  Pierre 
de  Luna.  Ce  lut  le  0  janvier  1  il  G,  qu'eut  lieu  à  Perpi- 
gnan la  [)ul)lication  solennelle  de  cet  édit.  C'était  le  jour 
de  rEpi|)lianic.  Saint  Vincent  Ferrier,  étant  monté  en 
chaire,  prit  pour  texte  de  son  sermon  ces  mots  de  l'é- 
vangile du  jour  :  «  Obiulerunt  el  munera,  anrum,  tlius 
«  el  myrrham;  ils  lui  oHrirent  en  présent  de  l'or,  de 
«  l'encens  et  de  la  myrrbe.  »  Il  dit  au  peuple  qu'en  ce 
jour,  où  l'Église  célébrait  l'offrande  de  dons  précieux 
présentés  par  trois  rois  mages  au  Sauveur  du  monde,  il 
devait  leur  annoncer  vine  offrande  aussi  agréable,  Hiite 
au  même  Sauveur,  au  même  prince  de  la  |)aix,  l'offrande 
que  lui  |)résenlaienl  les  trois  rois  de  l'Espagne  :  celui 
d'Aragon,  celui  de  Caslilie  el  celui  de  Navarre.  Après 
avoir  ainsi  éveillé  la  curiosité,  il  ajouta  que  celte  offrande 
était  le  décret  de  soustraction  a  l'obédience  de  Pierre  de 
Luna,  décret  (jui  ordonnait  à  clia(|ue  vassal  des  trois 
couronnes  de  ne  plus  reconuailre  Benoit  pour  Pape  légi- 
time, et  d'être  prèl  a  vénérer,  comme  unique  et  vrai 
Pape,  celui  cpii  serait  élu  canoniquemenl  par  le  Concile 
général  de  Constance;  il  raconta  ce  qui  s'était  passé 
dans  le  Congrès  de  Perpignan;  puis  il  lut  le  décret  de 
soustraction,  qui  l'ut  accueilli  avec  beaucoup  de  joie  par 
tout  le  peuple. 

Il  n'est  pas  nécessaire  de  dire  la  consolation  (ju'éprou- 
vèrent,  à  la  nouvelle  de  cet  édit,  tous  les  Pères  du 
Concile  de  Constance.  C'est  ce  qu'on  \)ou{  voir  par  la 
lecture  de  la  ietlre  qu'écrivait  à  saint  Vincent,  le  9  juin 
de  l'année  suivante,  le  pieux  et  savant  cliancelier  Jean 
Gerson,  désireux  d'attirer  le  saint  au  Concile  de  Cons- 
tance, où  il  se  trouvait  lui-même.   Tous  les  Pères,  en 


331 

cirei,  (Icnioiuèreul  persuadés  qu'ils  étaient  redevables  à 
saint  Vincent,  du  sai^e  parti  qu'avait  pris  le  roi  d'Aragon 
pour  mettre  tin  au  Schisme. 

Là  s'arrêtent  les  événements  relatifs  au  Scliisme  d'Oc- 
cident accomplis  en  Roussillon.  On  voit  que  \c  récit  de 
ces  faits  devait  compléter  celui  de  IN^piscopal  de  Monsei- 
gneur Ximenez,  sous  lequel  les  premières  scènes  avaient 
commencé  à  se  dérouler. 

Saint  Vincent  Ferrier  reprit  ensuite  le  cours  de  ses 
travaux  aposloli(iues.  Api'ès  avoir  parcouru  plusieurs 
contrées  de  l'Aragon,  pour  faire  passer  les  peuples  de 
robédieuce  de  lîenoil  XIII  à  celle  du  Concile  de  Cons- 
tance, il  alla  prêcher  dans  le  Languedoc.  Le  saint  apôtre 
ne  s'arrêta  à  Béziers  que  trois  jours,  qui  furent  aussi 
fructueux  (]u'une  longue  mission.  Après  avoir  raffermi  à 
Montpellier  la  réforme  des  mann's  qu'il  y  avait  déjà 
introduite  dans  sa  mission  de  1408,  et  avant  de  se 
icudre  à  Toulouse,  pour  répondre  à  l'appel  de  l'Arche- 
vêque, dominicain  comme  lui,  il  vint  encore  évangéliser 
le  lloussillon  dans  le  courant  de  cette  même  année  I  lit). 
Ce  fut  là  (pi'il  eut  le  bonheur  de  voir  entrer  dans  sa 
compagnie,  un  religieux  de  l'Ordre  de  la  Merci,  dont  il 
connaissait  depuis  longtemps  les  hautes  vertus,  le  bien- 
heureux Jean  Gilabert''*. 

Disons  en  terminant,  (pie  le  Concile  de  Constance 
essaya  encore  une  fois   d'amener   Benoit   à  une   abdi- 

(I)  C'osl ainsi  qu'il  pst  di'siK"!'  di'iis  les  vies  île  saint  Vincent  I-'errier, 
où  l'on  peut  voir  emnnient,  jie\i  de  jours  après,  saint  Vincent,  ayant  connu 
par  révrdalion  que  Dieu  désirait  le  retour  du  I'.  Gilahert  à  son  monastère 
du  i'uy,  celui-ci,  après  s'être  confessé  au  saint  reliirieux  (pii  lui  aiuionçait, 
sa  mort  iirocliaiiie.  quitta  l'erpi;^nan  el  revint  au  couvent,  où  il  niourul 
pres(pie  à  son  arrivée,  en  recevant  la  bénédiction  du  Prieur.  (Juant  à 
saint  Vincent,  miraculeusement  instruit  de  raccomplissemeni  de  sa  pré- 
diction, il  fil  en  chaire  l'éloge  de  ses  vertus,  après  avoii"  célébré  pour 
lui  le  suint  sacrifice. 


332 

cation  volontaire,  en  lui  envoyant  des  plénipotentiaires 
spéciaux;  mais  Benoît  persista  dans  sa  résistance,  en 
disant:  «Ce  n'est  pas  a  Constance,  c'est  à  Peniscola 
«  que  se  trouve  réunie  l'Rglise  catlioli(]ue,  comme  un 
«  jour  riiumanité  tout  cnlièrc  fut  reiilermée  dans  Tarclie 
«  de  Noé.  »  En  apprenant  cette  fière  réponse,  le  Concile, 
dans  sa  trente-septième  session  du  26  juillet  1-417,  pro- 
nonça solennellement  la  déposition  de  Pierre  de  Luna, 
et  le  11  novendjre  suivant,  il  nommait  Martin  V,  bientôt 
reconnu  comme  Souverain  i'onlito  par  toute  la  cliréticnlé. 
Pierre  de  Luna  ne  mourut  qu'en  1  i2i  dans  son  nid 
forlilié  de  Peniscola. 


333 
II. 

MONSEIGNEUR  MICHEL  PONTICII, 

Évoque  de  Géronc  (1632—1099). 

Sa  naissance  à  Boiileterncre  et  sa  famille.  —  Ses  premières  études  et  sa 
piété  précoce. — 11  vafaire  àl'erpiçînan  ses  humanités  et  sa  philosophie. 
—  Son  noviciat.  —  Il  est  envoyé  à  (iéroiie,  puis  à  Ueuss  et  à  Vich, 
pour  y  professer  successivement  la  i^rainniaire ,  la  philosophie  et  la 
théologie.  ^ — Sa  brillante  lutte  Ihéologiiiue  au  Chapitre  de  Tolède. — 
Il  devient  jubilé,  gardien  du  couvent  du  Tarragone,  custode,  commis- 
saire-visiteur des  couvents  de  Sardaignc  et  de  la  province  de  A'alence; 
puis  ministrc-provincia!,  etc.,  entin  évoque  de  Gérone  (UiSS). — Sa  grande 
humilité  dans  ces  diverses  positions;  son  esprit  conciliateur.  — 11  fait 
construire  Tescalier  de  sa  cathédrale.  —  Les  événements  politiques  le 
forcent  de  s'éloigner  de  son  diocèse  :  il  se  retire  à  Reuss.  —  Il  rentre 
à  Gérone,  où  il  meurt  bientôt  après.  Deuil  et  affliction  générale  de 
SCS  diocésains.  —  .Aperçu  sur  ses  vertus  et  son  administration.  —  Ses 
ouvrages.  —  Sou  ueviu  le  chamiine  Don  Sulpice  Ponticli. 

Ce  pieux  et  savant  prélat,  que  le  Roussillon  est  fier 
de  compter  parmi  ses  enfants,  a  eu  |)Uisieurs  biographes: 
Deux  auteurs  principaux  nous  ont  lourni  les  documents 
pour  la  Notice  qu'on  va  lire'*^. 

Michel  Pomicii  (-^  issu  d'une  des  tanii Iles  les  plus 
honorables  et  les  plus  anciennes  de  la  province,  naquit  le 

(1)  Ce  sont  :  1"  le'l'.  CoU,  dans  sa  Crônica  serdfica,  déjà  citée  (liv. 
IV,  ch.  Vil),  précieuse  surtout  pour  nous  faire  connaître  la  vie  du  reli- 
gieux avant  sou  épiscopal  ;  —  "1"  les  auteurs  de  VEspaiia  *■(/<//■</(/((  (^  lom. 
XLIV,  nos  liS— I.i9),  dont  la  notice  fut  rédigée  sur  les  documents 
fournis  par  h"  neveu  du  IVélat,  Don  Sulpice  Ponlicli. 

{"2)  Nous  écrivons  ce  nom  sans  le  l'au'e  précéder  de  la  particule,  d'après 
Klorcz  et  le  1'.  Coll.  Ce  ne  fut,  en  ell'et,  qu'en  IG39,  que  des  leUres 
d'an(dilisscuient  furent  accordées  au  chef  de  celle  famille.  C'est  à  lort 
que  (pielques  auteurs  écrivent  Punaich ,  nom  d'une  autre  famille  noble 
de  Barcelone. 


334 

30  novembre  1632  à  Bonlelernère,  de  François  Pontich 
et  d'Anne  d'Izern***.  Il  fut  baptisé  le  o  décembre  de  la 
même  année,  et  reçut  la  conlirmation  le  1(3  janvier  de 
Tannée  suivante,  suivant  les'coutumes  du  pays.  Sini!;ulière 
coïncidence!  le  sacrement  de  conlirmalion  lui  fut  admi- 
nistré par  M"'"  Grégoire  Parcero,  évéque  d'EInc,  qui, 
transféré  peu  après  (j6r>i)  sur  le  siège  de  Gérone,  devait 
avoir  pour  liuitième  successeur,  sur  ce  dernier  siège 
épiscopal,  ce  même  Michel  Ponlich. 

De  bonne  heure,  il  fit  preuve  d'une  inlelligence  vive 
et  facile;  et  la  bonne  éducation  qu'il  recevait  au  sein  de 
sa  famille,  ne  faisait  que  développer  son  attrait  pour  l'étude 
en  même  temps  que  son  goût  naturel  pour  les  exercices 
de  dévotion. 

Aussitôt  après  qu'il  se  fut  sérieusement  appliqué  aux 
éludes  de  grammaire,  ses  parents  l'envoyèrent  à  Perpi- 
gnan pour  y  faire  ses  humanités  et  sa  philosophie.  Or, 
avant  que  l'âge  pût  l'entraîner  vers  les  plaisirs  ou  au 
milieu  des  écueils  du  monde,  le  ciel  l'attira  miséricor- 
dieusement  vers  le  port  de  la  religion  séraphique.  Il 
demanda,  étant  encore  très-jeune,  l'habit  de  l'Ordre, 
qui  lui  fut  donné  à  Perpignan  même,  d'après  VEspana 
sagrada,  a  Barcelone  d'après  le  P.  Coll.  L'année  de  son 
noviciat  expirée,  il  fut  admis  sans  relard  à  la  profession  ; 
et,  après  avoir  été,  pendant  quelque  temps,  chargé  de 
l'enseignement  de  la  langue  latine  dans  un  couvent  très- 
rapproché  du  lieu  de  sa  naissance'-',  il  fut  envoyé  au 
couvent  de  Gérone,  où  il  trouva  Ms''  Parcero.  Le  o  mars 
1632,  à  dix-neuf  ans,  il  fut  agrégé  à  la  cléricature  et 


(1)  C'est  par  erreur  que  le  P.  Villanueva  le  foit  naître  en  1630(V'ja^e 
literario  d  las  Ljlesias  de  Eupaiia,  tom.  XIV,  \i.  W'i). 

(2)  ...Le  enviaron  d  enseiiarla  d  olro  convenlo,  immediuto  al pueblo 
de  su  nacimiento  (Espafia  sagrada).  Ce  couvent  ne  pouvait  être  que  celui 
J'Illc,  très  peu  éloigné,  en  effet,  de  Bouleternère. 


335 

tonsuré.  Cinq  jours  après,  le  iO  du  même  mois,  Monsei- 
gneur Ilyacintlio  Serroni,  évoque  d'Orar)ge,  lui  conférait 
les  ordres  niineuis  et  le  sous-diaconat,  dans  l'église  du 
monastère  de  Sainl-Pierre-de-Galligans,  à  Gérone. 

Après  avoir  été  employé  pendant  un  certain  temps 
comme  lecteur  ès-arts<*'  au  couvent  de  lieuss,  il  lut  en- 
voyé à  Vieil,  pour  s'y  appliquer  à  l'étude  de  la  pliilo- 
sopliic  scolasti(pie,  et  probablement  aussi  de  la  théologie. 
Les  succès  de  notre  religieux  dans  ces  deuv  sciences, 
justifièrent  amplement  les  espérances  de  tous  cenv  qui 
le  connaissaient,  et  on  n'admirait  pas  moins  l'étendue  de 
ses  connaissances  et  son  rare  talent  d'exposition,  que  sa 
prodigieuse  facilité  et  la  pureté  de  son  langage. 

C'est  sur  ces  entrefaites  (|u'il  fut  promu,  dans  le  cou- 
rant de  l'année  lOrii,  au  diaconat,  et,  le  10  décembre, 
au  sacerdoce,  par  Ms'  Raymond  de  Semmanat,  évêque 
de  Vieil. 

Appelé  d'abord  à  professer  la  philosophie  dans  cette 
même  ville  de  Vich,  il  y  débuta  dans  la  chaire  en  im- 
provisant un  sermon  qu'on  l'avait  prié  de  prononcer 
lorsque  déjii  la  cérémonie  était  commencée.  Nommé 
ensuite  lecteur  de  théologie,  il  remplit  successivement 
cette  fonction  à  Gérone,  à  Tarragonc  et  à  Barcelone, 
toujours  avec  succès  et  distinction  ;  et  les  fruits  abon- 
danls  (|u'il  obtint,  attestèrent  rexcellence  de  sa  méthode, 
non  moins  que  la  solidité  de  son  enseignement,  l  ii  de 
ses  biographes  nous  apprend  que,  le  plus  souvent,  il 
n'avait  rien  écrit  de  ce  qui  devait  faire  l'objet  de  la  leçon, 
et  que,  nonobstant  cela,  ses  arguments  n'en  étaient  pas 
moins  redoutables,  surtout  à  cause  de  la  linesse  et  de 
l'acuité  lU;  son  esprit*-'. 

Délégué  par  sa  province  au  Chapitre-général  de  Tolède, 

(1)  C'est-à-dire,  professeui'  de  grammaire. 
("2)  Voyez  Espam  sagrada,  ioc.  cit..  >5  lii- 


336 

il  conquit  tous  les  suflïages  par  sa  science  et  la  douce 
modestie  de  ses  manières.  Comme  il  s'était  acquis  déjà 
dans  l'Ordre  une  liante  réputation,  le  Hévérendissime 
Père  François  Samaniet'O,  alors  (iénéral,  le  chargea  de 
présider  un  des  actes  publics  de  théologie,  (|ue  les  Frères 
Mineurs  avaient  Thahitude  de  tenir  dans  leurs  assemblées 
capilulaires.  Or,  en  pareille  circonstance,  le  Général  dési- 
gnait les  religieux  les  plus  distingués  et  les  plus  savants 
de  chaque  ])rovince.  On  lui  avait  adjoint  pour  soutenir 
la  thèse  le  11.  P.  Ignace  Lianes,  lecteur  ès-arts  au  cou- 
vent de  Tarragone  et  déjîi  connu  comme  prédicateur  dans 
toute  la  province,  qu'il  lut  appelé  a  gouverner  comme 
Provincial.  Ces  deux  savants  religieux  méritèrent  dans 
cette  brillante  lutte  les  applaudissements  de  tous  leurs 
confrères  présents  à  celte  séance  solennelle,  et  particu- 
lièrement la  haute  et  llatteuse  approbation  du  lî.  P.  Gé- 
néral, qui  les  félicita  chaleureusement  et  les  embrassa 
devant  toute  l'assemblée. 

Les  hautes  qualités  du  P.  Michel  Pontich  le  désignaient 
aux  supérieurs  de  son  Ordre,  lue  llatteuse  récompense 
lui  avait  déjà  été  accordée  :  nous  voulons  parler  de  la 
jubilation,  qui  lui  fut  déférée  après  quinze  ans  passés  dans 
l'exercice  du  professorat  comme  leclenr  en  théulogie''^K  II 
fut  successivement  gardien  de  Tarragone  et  custode  ;  dans 
ces  diverses  positions,  le  P.  Michel  Pontich  ne  chercha 
à  s'élever  au-dessus  de  ses  frères  que  par  sa  lidélilé  à 
observer  la  règle  de  son  Ordre,  et  surtout  par  le  soin 
qu'il  mettait  à  faire  briller  autour  de  lui  la  sainte  vertu 
d'une  parfaite  humilité.  Le  pain  venait-il  à  maïupier  au 
couvent  de  Tarragone ,  le  Père  Michel  Pontich ,  comme 
un  simple  frère-lai,  se  chargeait  de  la  besace  et  allait 
demander  l'aumône  de  porte  en  porte,  se  souvenant  que 

(1)  Le  titre  de  lecleur  jubilé  était  à  peu  près  ce  que  fut  jadis  chez 
nous  celui  de  professeur  émérite. 


337 

saint  François,  dans  le  cliapilre  VI  de  sa  Règle,  rappelle 
'^i'exeinple  de  notre  divin  Sauveur,  qui,  en  venant  sur  la  terre, 
voulut  être  pauvre  par  amour  pour  nous.  On  comprend 
combien  cet  acte  de  profonde  liumililé,  chez  un  religieux 
si  éminenl,  édifiait  tous  ceux  qui  le  voyaient  ainsi  passer 
revêtu  des  livrées  de  TOrdre  mendiant  de  Saint-François. 
Son  archevêque,  le  Révérendissime  D.  Emmanuel  d'Espi- 
nosa,  en  était  particulièrement  et  profondément  touché '*'. 
Aussi,  toutes  les  fois  que  le  bon  religieux  venait  quêter 
à  l'archevêché,  le  prélat  lui  remetlait-il  cent  pains  jjour 
sa  communauté;  puis,  prenant  un  des  pains  que  le  Père 
Gardien  portail  dans  sa  besace,  il  le  coupait  pieusement 
en  plusieurs  morceaux  qu'il  distribuait  à  tous  les  gens 
de  sa  maison,  en  leur  recommandant  de  se  nourrir  de 
ce  pain  comme  s'il  avait  été  bénit  par  saint  François 
lui-même. 

Ce  fut  sur  ces  entrefaites,  vers  1670  ou  1674,  que  le 
Général  de  l'Ordre,  voulant  utiliser  la  science,  la  [)ru- 
dence  et  la  sainteté  du  P.  Michel  Pontich,  le  choisit  en 
qualité  de  commissaire-visiteur  des  couvents  du  royaume 
de  Sardaigne.  Celte  honorable  mission,  qu'il  s'empressa  de 
remplir  à  la  voix  de  son  supérieur,  ne  servit  qu'à  faire 
ressorlir  les  qualités  dont  l'excellence  avait  déterminé  le 
choix  du  Général;  car,  pendant  tout  le  temps  qu'il  résida 
en  Sardaigne,  les  religieux  de  cette  contrée  lui  témoi- 
gnèrent toujours  l'obéissance  comme  à  un  pasteur  vigi- 
lant, en  même  temps  qu'ils  lui  avaient  voué  un  amour 
et  un  dévouement  à  toute  épreuve  comme  à  un  père 
tendre  et  affectueux. 

Mais  bientôt,  le  R.  P.  Marc  Zarçosa,  alors  commissaire- 
général  de  l'Ordre  pour  les  pays  eu-deçà  des  monts,  eut 


(1)  Voyez  rouvrai;e  précédemment  cité  de  Villaiiueva(tom.  XX,  Viage 
à  Tarragona,  p.  50—52).  L'épiscopat  de  Mb'""  d'Espiuosa  dura  de  1664 
à  1679. 

22 


338 

connaissance  des  précieuses  qualités  du  saiiu  religieux  et 
de  la  manière  dont  il  avait  rempli  son  importante  mission 
en  Sardaigne,  alors  que  lui-même  se  trouvait  custode- 
général  de  la  province  de  Catalogne.  Aussi,  le  désigna-t-il 
comme  commissaire-visiteur  pour  la  province  de  Valence. 
Peu  de  temps  après,  ce  même  P.  Zarçosa  ayant  convoqué 
le  chapitre-général  de  la  province  de  Catalogne,  qui  s'as- 
sembla et  se  tint  sous  sa  présidence,  le  18  mars  168i, 
dans  la  ville  de  Reuss,  au  couvent  de  Jésus,  le  R.  P. 
Michel  Ponlich  y  fut  élu  Ministre-Provincial  a  l'unani- 
railé.  Il  remplissait  en  même  temps  la  charge  de  Quali- 
ficateur de  la  sainte  Inquisition. 

11  y  avait  un  an  îi  peine  qu'il  gouvernail  ainsi  l'Ordre 
Franciscain  de  la  province  de  Catalogne,  lorsque  Monsei- 
gneur Sévère-Thomas  Auter,  qui  occupait  le  siège  épis- 
copal  de  Gérone  depuis  1679  ,  fut  transféré  au  siège 
métropolitain  de  Tortose  <".  La  haute  réputation  que 
s'était  acquise  notre  Provincial  le  désignait  pour  la  dignité 
pastorale,  et  tels  étaient  les  vœux  de  tous  ceux  qui  le 
connaissaient.  Aussi,  n"était-il  pas  besoin  que  le  marquis 
de  Leganez  le  recommandât  au  souverain.  Quoi  qu'il  en 
soit,  Charles  II,  roi  d'Espagne,  ayant  résolu  de  récom- 
penser le  P.  Ponlich  de  ses  éminents  services  et  de  faire 
jouir  tout  un  diocèse  de  son  habile  direction,  le  désigna 
comme  évoque  de  Gérone.  Celte  heureuse  nouvelle  par- 
vint au  Chapitre  de  celle  ville,  le  o  août  de  l'an  168o. 
Il  est  inutile  de  dire  la  joie  qu'elle  ût  naître,  et  les  féli- 
citations auxquelles  elle  donna  lieu. 

Le  P.  Michel  Ponlich,  lorsque  fut  publiée  et  connue  sa 
nomination  a  révêché  de  Gérone,  se  trouvait  a  Barcelone, 
oîi  les  devoirs  de  sa  charge  de  Provincial  le  retenaient  le 

(1)  Voyez  Villanueva.  —  Ce  prélat,  qui  était  natif  de  Puycerdâ  et 
appartenait  à  l'Ordre  de  Saint-Dominique,  ne  mourut  qu'en  1700,  deux 
ans  environ  après  M;-'''  Ponticli . 


339 

plus  souvent.  C'est  là  qu'il  reçut  une  députation  du  Cha- 
pitre de  Gérone,  envoyée  [)Our  le  complimenter. 

Toutefois,  nonobstant  la  nouvelle  dignité  dont  il  venait 
d'être  revêtu,  notre  religieux  continua  de  gouverner  la 
I)rovince  ])cndant  près  d'un  an,  jusqu'aux  derniers  jours 
de  juin  1(586.  A  celte  époque,  il  laissa  l'administration  de 
la  province  franciscaine  de  Catalogne  aux  soins  du  R.  P. 
Joseph  de  Copons,  alors  définiteur,  ancien  provincial, 
lecteur  jubilé,  qualificateur  du  tribunal  de  l'Inquisition, 
commissaire  et  procureur-général  près  la  Cour  de  Rome. 

11  avait  songé  à  se  faire  sacrer  à  Barcelone,  dans  l'église 
du  couvent  de  Saint-François;  mais  il  y  renonça  lorsqu'il 
apprit  que  M?»"  Salazar,  évêque  de  cette  ville,  parlait  de 
faire  préparer  un  dais  magnifique  pour  la  cérémonie,  et 
il  se  retira  humblement  dans  la  petite  ville  d'Arenys-de- 
Mar^*',  où  se  rendit  M^''  J.-B.  Desbach,  évêque  d'Urgell*-', 
qui  lit  la  cérémonie  de  la  consécration  du  nouvel  évêque 
le  25  juillet  1686,  assisté  de  Ms'"  Antoine  Pascual,  évêque 
de  Vich  et  de  Ms''  Joseph  Mora,  auxiliaire  de  l'archevêque 
de  Tarragone'-''. 

Le  8  octobre  suivant  <'^',  le  nouveau  pontife  iit  son 
entrée  solennelle  dans  sa  ville  épiscopale  et  prit  posses- 

(1)  C'est  évidemment  de  cette  ville  qu'il  est  ici  question,  bien  que  les 
autours  de  VEqxiîia  .sagrada  la  dt'si2[n(Mit  sous  le  nom  {VAirnys,  et 
Villanueva  sous  le  nom  d\An'i)ijs-(lo-V<jll.  Kn  cITet,  indr-pendamment  de 
celte  ville ,  aujourd'hui  assez  importante ,  située  sur  le  bord  de  la  mer  à 
40  kilomètres  nord-est  de  Barcelone,  il  y  a,  à  peu  de  distance,  au  nord- 
ouest,  dans  les  terres  ou  plutôt  dans  les  montagnes,  un  petit  village 
appelé  Arenijs-de-Mont .  La  dénomination  A'Arenijs-dc-Vall  ne  saurait 
donc  convenir  qu'à  la  ville  aujourd'hui  appelée  Arenys-dc-Mar. 

("1)  Mort,  deux  ans  après,  à  Arenvs  (Villanueva,  Viaije  literario, 
lom.  XI,  p.  159). 

(3)  L'Évéque  de  Vich,  natif  d'Arenys,  lit  le  lendemain  la  consécration 
de  la  ville  (Espam  sarjrada,  loc.  cit.). 

{ï)  Et  non  pas  le  G  juillet,  connue  le  dit  par  erreur  Villanueva. 


340 

sion  de  son  siège.  Il  était  le  quatre-vingt-septième  pon- 
tife qui  venait  s'asseoir  sur  le  trône  de  Saint-Narcisse <*^ 

Il  nous  serait  difficile  de  dire  ici  les  pensées  el  les 
émotions  du  pontife,  faisant  son  entrée  dans  cette  cité, 
un  des  types  les  plus  curieux  et  les  plus  complets  de 
l'Espagne  religieuse  el  civile  du  moyen-âge.  Le  ponti- 
ficat et  le  martyre  de  saint  Ponce  et  de  saint  Narcisse  et 
les  persécutions  de  Dioclélicn  sollicitaient  d'un  côte  ses 
souvenirs;  de  l'autre,  les  ligures  liistoriques  de  Scipion 
repoussant  Annihal,  de  Cliarlemagne  chassant  les  Maures, 
se  dressaient  devant  lui.  C'est  qu'au  seul  aspect  de  cette 
ville,  on  devine  que  l'on  entre  dans  un  passé  qui  se 
conserve  et  se  perpétue  dans  le  présent,  même  pour  les 
genres  d'architecture  :  les  habitants  sont  restés  fidèles 
au  système  de  construction  d'autrefois;  ils  bâtissent  et  ils 
pensent  comme  bâtissaient  et  pensaient  leurs  ancêtres. 

L'archéologue  chrétien ,  qui  veut  étudier  l'histoire  de 
l'art  et  de  l'église  en  Espagne,  doit  visiter  la  cathédrale 
de  Gérone,  où  vivent  encore  tout  entiers  le  xv^  et  le 
xvi^  siècles.  Je  n'oublierai  jamais  l'impression  que  je 
ressentis  lorsque  je  visitai  celte  église  pour  la  première 
fois.  J'étais  entré  par  la  porte  des  Saints-Apôtres,  qui  ne 
présente  que  quelques  marches  à  gravir  pour  arriver  au 
parvis,  et  de  la  dans  la  nef.  En  mettant  le  pied  dans 
l'église,  je  pensai  aux  catacombes.  Le  soleil  était  voilé, 
et  l'on  pouvait  à  peine  distinguer  les  piliers  et  les  cha- 
pelles; ce  n'était  qu'au  moment  où  il  introduisait  ses 
faibles  rayons  par  les  imperceptibles  lucarnes  des  travées, 
qu'on  distinguait  quelques  détails.  L'église  renfermait  ses 
autels  dans  une  obscurité  à  la  fois  rassurante  et  terrible. 
Jamais  peut-être  monument  religieux  ne  revêtit  à  mes 


(t)  Mgr  Jean  de  França  Castro  y  Moura,  qui  a  succédé,  en  1862,  à 
Mgr  Llorentc,  est  le  quinzième  successeur  de  Ms«"  Ponticli,  et  le  cent 
quatrième  évoque  de  Gérone. 


341 

yeux  un  aspect  plus  frappant;  mais  ce  qui,  sans  être 
grave  sur  aucun  mur,  ni'apparaissait  surtout  comme  im- 
prime de  tous  côlés  sous  les  voûtes  de  celle  cathédrale 
en  caraclères  mystérieux,  c'élail  la  trace  impérissable  de 
la  foi  espagnole.  J'imaginais  (jue  les  architectes  de  la 
calhédralc  de  Gcroue  portaient  un  cilice  et  couchaient 
dans  une  bière,  comme  le  peintre  espagnol  du  xvi<=  siè- 
cle'". Cependant,  une  surprise  extrême  nvélait  réservée. 
Quand  je  vonlus  sortir,  par  la  grande  porlo  du  fond,  de 
ce  temple  qui  me  représentait  si  bien  les  anciennes  cata- 
combes souterraines,  je  me  trouvai  sur  un  perron  spa- 
cieux, qni,  tournant  majestueusement  autour  de  larges 
piliers  en  granit  avec  de  belles  rampes  renaissance, 
produisit  sur  moi  un  effet  saisissant.  Le  sol  de  la  place 
se  trouvait  à  vingt  mètres  au-dessous  de  moi.  Ce  parvis 
me  semblait  fait  pour  la  bénédiction  vrbi  et  orbi... 

Mais  revenons  à  M?'"  Ponlich.  Lorsque  ce  prélat  prit 
possession  de  l'évrché  de  Géronc,  l'escalier  qui  conduisait 
à  la  porte  principale  de  la  calhédralc  élait  incommode  et 
grossièrement  construit.  Dès  ce  jour,  le  désir  et  le  projet 
d'une  restauration  prirent  place  dans  l'esprit  de  l'évêque, 
qui,  après  avoir  prêté  le  serment  canonique  d'usage  devant 
l'aiilel  dressé  au  sommet  même  de  cet  escalier,  s'adressa 
à  Don  Joseph  Camps,  archidiacre,  et  lui  dit:  «Si  Dieu 
«  seconde  mes  désirs,  mes  successeurs  prêteront  serment 
«  dans  des  conditions  plus  convenables,  et  en  un  lieu  plus 
«  digne  d'eux  et  de  la  sainte  Église  de  Gérone...  »  Puis, 
il  entra  dans  l'église,  au  seuil  de  laipielle,  frappé  de  la 
magnilicence  et  des  ornements  qu'on  y  avait  prodigués, 
il  miu'mura  ces  |)aroles  du  psaume  CXHI  :  No)i  nobis, 
Domine,  non  nobis,  sed  nomini  luo  da  gloriam...  » 

C'est,  en  effet,  a  .M»""  Pontich  que  la  ville  de  Gérone 
doit  le  magnifique  escalier,  tel  qu'il  existe  aujourd'hui. 

(t)  Vargas  de  Séville. 


342 

Un  de  ses  plus  illustres  prédëcesseuis,  M?''  Arévalo  Zuazo 
(1598 — 1611),  avait  déjà  résolu  de  le  faire  reconstruire; 
mais  il  fut  réservé  à  Ms''  Pontich  de  réaliser  ce  plan.  Ce 
fut  une  des  i)remièrcs  propositions  qu'il  lit  à  son  Chapitre. 
Aussitôt  qu'il  eut  obtenu  l'agrénienl  de  ce  dernier,  le 
prélat  se  mit  à  l'œuvre,  et  lit  exécuter  cet  escalier  somp- 
tueux, composé  de  quatre-vingt-dix  degrés  ('*,  formant 
trois  grands  paliers,  le  tout  d'une  largeur  de  vingt  mè- 
tres environ.  Tout  cela  fut  accompli  aux  frais  du  pontife, 
ainsi  que  s'en  expliquent  ses  biographes. 

Ms""  Pontich,  en  prenant  en  main  l'administration  du 
diocèse  de  Gérone ,  trouvait  les  esprits  dans  de  regret- 
tables dispositions.  Le  Chapitre,  en  particulier,  s'était 
cru  précédemment  lésé  dans  quelques-uns  de  ses  droits, 
par  une  transaction  dont  il  est  inutile  de  rapporter  ici  les 
circonstances  et  les  dispositions,  pas  plus  que  les  discus- 
sions et  les  embarras  que  cette  question  avait  soulevés 
dans  les  dernières  années  de  l'cpiscopat  de  Ms'"  Auter  et 
durant  la  vacance  du  siège.  Nonobstant  ces  fâcheuses 
conjonctures,  le  nouveau  prélat,  après  avoir  déclaré  qu'il 
n'était  nullement  disposé  à  dépenser  en  procès  le  bien 
des  pauvres,  et,  après  en  avoir  référé  au  roi  (ce  qui  avait 
amené  le  statu  quo),  sut  gagner  l'estime  et  les  bonnes 
grâces  du  Chapitre.  L'évoque  et  les  chanoines  se  firent 
bientôt  des  avances  à  l'envi,  et  ces  derniers  se  montrè- 
rent toujours  heureux  et  très-honorés,  quand  leur  [)remier 
pasteur  en  choisissait  parmi  eux  quehiues-uns  pour  l'ac- 
compagner dans  ses  visites. 

Sur  la  demande  de  l'évêque,  le  Chapitre  ne  (it  aucune 
difficulté  de  réunir  le  chœur  au  presbiterium,  d'autant 
plus  que  le  généreux  prélat  s'engageait  à  soutenir  de  ses 


(t)  Et  non  pas  cent  soixante,  comme  on  le  lit  dans  ronvra?;p  piiblii? 
par  M.  (^énac-Moncaut,  sons  ce  litre  :  Histoire  des  Peuples  et  des  Etnh 
Pyrénéens  (tome  V). 


t 


343 

deniers  les  liais  nécessaires  pour  les  grilles  et  le  trône 
épiscopal  (li  avril  1090). 

Celle  même  année,  Ms'"  Ponlich  sollicilail  et  obtenait 
(le  Rome  une  décision  favorable  à  son  Chapitre,  qui  dési- 
rait depuis  longtemps  voir  résoudre  quelques  questions 
de  préséance  au  sujet  des  places  destinées,  dans  les  céré- 
monies, soit  aux  chanoines,  soit  aux  magistrats  civils  de 
la  ville.  Cette  décision  eut  pour  effet  de  porter  le  corps 
municipal  a  rejeter  certaines  mesures  que  le  prélat  eût 
voulu  voir  adoptées;  mais  ces  actes  d'hostilité  mesquine, 
heureusement  fort  rares,  ne  troublaient  aucunement  l'àme 
de  l'évéque. 

A  la  fin  de  celte  même  année,  le  12  décembre  1690, 
Ms'"  Ponlich  présida  à  la  fondation  du  couvent  établi , 
sous  le  vocable  de  Saint-Salvieu ,  dans  la  circonscription 
de  la  paroisse  de  Sainl-Michel  de  Cladells. 

Eu  I09i,  le  Chapitre  fonda  dans  la  cathédrale  deux 
services  anniversaires,  qui  furent  plus  lard  fixés  au  26 
janvier  (jour  de  la  mort  du  Prélat)  et  au  premier  jour 
libre  après  la  fêle  de  saint  François.  C'est  ainsi  que  le 
Chapitre  de  Gérone  témoignait  des  sentiments  qui  l'ani- 
maient h  l'égard  de  son  évèque. 

Sur  ces  entrefaites,  la  Catalogue  fut  violemment  agitée 
par  la  guerre.  Le  maréchal  de  Noailles,  déjà  mailre  de 
Campredon,  de  Roses,  etc.,  gagnait  sur  les  troupes 
espagnoles  la  bataille  du  Ter,  dont  la  conséquence  fut 
la  reddition  de  (lérone  a[)rès  dix  ou  douze  joiu's  de  siège. 
Celte  place  demeura  trois  ans  au  pouvoir  des  Français 
(1091-1097)  jusqu'au  traité  de  Ryswick,  qui  remit  la  Pé- 
ninsule en  possession  de  tout  ce  qui  était  précédenimenl 
lond)é  au  pouvoir  de  Louis  XIV.  Ces  événements  ayant 
mis  le  saint  évèque  de  Gérone  dans  la  nécessité  de  s'é- 
loigner de  sa  ville  épiscopale  et  de  son  diocèse,  il  se 
retira,  le  10  juillet  109i,  à  Arenys  ,  dernier  village  de 
son  diocèse  du  côté  du  midi,  d'oîi.  on  I(t97,  vers  l'épo- 


344 

que  du  siège  de  Barcelone  par  les  Français,  il  se  rendit 
h  Rcuss,  dans  ce  même  couvent  franciscain  de  Jésus  où 
il  avait  autrefois  enseigne  la  théologie,  et  où,  dix  ans 
auparavant,  il  avait  éié  investi  de  la  chai'ge  de  Provincial 
de  son  Ordre.  Dans  cette  triste  conjoncture,  le  Chapitre 
lui  vint  en  aide  par  de  généreuses  olfrandes  dont  il  fut 
profondément  touché. 

Ms""  Pontich  rentra  dans  sa  ville  épiscopale  à  la  fin 
de  janvier  1698,  au  milieu  des  applaudissements  et  de  la 
joie  universelle,  qui  rappelaient  sa  première  prise  de  pos- 
session; mais  ce  fut  pour  y  mourir  un  an  après. 

Dans  le  courant  du  mois  de  septembre  1698,  qui  suivit 
sa  rentrée  à  Gérone,  il  déclarait  à  son  neveu,  D.  Sulpice 
Pontich,  chanoine  de  sa  cathédrale,  qu'il  ne  tarderait  i)as 
plus  de  trois  ou  quatre  mois  à  quitter  cette  vie,  et  que 
l'église  de  Sainte-Claire  serait  le  dernier  degré  de  son 
escalier,  faisant  allusion  à  l'église  du  couvent  des  Cla- 
risses  qu'il  venait  de  restaïu'cr,  et  à  l'escalier  de  la 
cathédrale,  qui  avait  été  un  des  premiers  travaux  de  son 
épiscopat.  Vers  cette  même  époque,  un  religieux  de  son 
Ordre  lui  ayant  apporté  un  habit  neuf'*',  il  fit  observer 
qu'il  servirait  à  le  vêtir  après  sa  mort.  Dès  ce  moment, 
il  apprit  cl  composa  même  diverses  prières  et  oraisons 
jaculatoires  à  Notre-Seigneur,  afin  de  les  avoir  plus  faci- 
lement sur  les  lèvres  et  dans  le  cœur  lorsque  arriverait 
l'heure  de  sa  mort,  qu'il  pressentait  comme  Irès-pro- 
clialne.  I/événemenl  justifia  ces  prévisions;  car  le  saint 
cvcquc,  étant  tombé  malade  peu  avant  la  Noël,  et  ayant 
été  ainsi  privé  d'assister  à  roffîce  de  matines,  comprit 
de  suite  la  gravité  de  son  mal,  à  laquelle  on  ne  voulait 
pas  croire  autour  de  lui.  Plusieurs  fois  il  avait  demandé 
le  saint  viatique;  mais  il  ne  le  reçut  que  le  2i  janvier 
suivant,  sur  l'avis  des  médecins. 

(1)  Par  où  l'on  voit  que  le  pontife  n'avait  pas  cessé  de  porter  l'humble 
habit  des  enfants  de  Saint-François. 


345 

Les  auteurs  de  VEspaPici  sagrada  ne  manquent  pas  de 
faire  ressortir  la  présence  à  cette  cérémonie  des  magis- 
trats et  administrateurs  de  la  cité,  nonobstant  les  diverses 
mésinlelligonces  survenues  entre  ceux-ci  et  les  membres 
du  Chapitre,  dont  le  prélat  n'avait  jamais  voulu  trahir  les 
droits,  ni  laissé  méconnaître  les  prérogatives.  Et  ces  fonc- 
tionnaires ne  s'étaient  pas  contentés  d'assister  au  saint 
viatitpie  du  pontife  dans  le  palais  épiscopal ,  ils  avaient 
accompagné  le  Saint-Sacrement  et  porté  le  dais  :  hom- 
mage qui  ne  faisait  pas  moins  d'honneur  à  ceux  qui  le 
rendaient  qu'à  celui  qui  en  était  l'objet!....  Aussi,  le 
pontife  en  fut-il  bien  consolé,  et  s'estima-t-il  heureux 
de  trouver  l'occasion,  dans  un  moment  si  solennel,  de 
recommander  aux  deux  corps  l'union  et  l'harmonie.  Son 
accent  était  si  ému  et  si  pénétré,  cpie  les  cœurs  de  tous 
les  assistants  en  furent  touchés  jusqu'aux  larmes.  .\u 
moment  où  les  magistrats  allaient  se  retirer,  le  saint 
évèque  ne  put  s'empêcher  de  réitérer  ses  exhortations, 
en  leur  répétant  encore  les  vœux  les  plus  cliers  de  son 
cœur,  et  les  assurant  qu'il  ne  les  oublierait  pas  devant 
Dieu,  en  présence  de  qui  il  allait  bientôt  comparaître. 

N'oublions  pas  de  dire  que,  pendant  la  malailie  du 
prélat,  les  membres  du  Chapitre,  non  contents  de  faire 
et  d'ordonner  des  [)rières,  voulurent  l'assister  à  tour  de 
rôle,  afin  de  s'édilier  en  lui  prodiguant  leurs  soins  alfec- 
tueux. 

Le  2G  janvier  au  matin,  le  prélat  entra  en  agonie, 
mais  en  conservant  un  calme  si  parlait ,  que  jamais  il 
n'interronq>it  ou  ne  suspendit  ses  actes  intérieurs,  si 
bien  que  de  loin  en  loin  on  l'entendait  même  murmurer 
une  parole.  A  une  heure  de  l'après-midi,  on  lenlendit 
dire  :  «  Le  moment  est  arrivé;  //a  es  liora...  »  et,  a|)rès 
avoir  répondu  à  toutes  les  prières  pendant  qu'on  lui 
administrait  rcxtrêmc-onclion .  il  demeura  assis  sur  son 
séant  pondant  les  litanies,  demandant  qu'on  les  récital 


346 

lentement  afin  qu'il  pût  suivre,  et  répondant  même  quel- 
quefois. Mais  bientôt  il  perdit  la  parole,  et,  selon  la 
recommandation  qu'il  en  avait  faite ,  on  lui  lut  ses  orai- 
sons jaculatoires.  Les  prières  de  la  recommandation  de 
l'âme  furent  récitées  par  les  quatre  chanoines  (jui,  à  tour 
de  rôle,  étaient  toujours  auprès  du  prélat,  et  auxquels 
était  venue  se  joindre  une  foule  de  prêtres,  tant  séculiers 
(pic  réguliers.  Il  était  quatre  heures  moins  un  quart, 
lorsque  le  vénérable  pontife  rendit  son  âme  à  Dieu.  Il 
était  âgé  de  soixante-huit  ans  et  deux  mois  moins  quatre 
jours,  et  avait  occupé  le  siège  épiscopal  de  Gérone  pen- 
dant douze  ans  et  demi,  y  compris  ses  trois  ans  et  demi 
d'absence'''. 

A  la  nouvelle  de  la  mort  de  leur  premier  pasteur,  les 
habitants  de  la  ville  de  Gérone  firent  bien  voir,  par  la 
spontanéité  et  la  vivacité  de  leur  douleur,  quelle  grande 
place  occupait  dans  leur  cœur  celui  qu'ils  venaient  de 
perdre.  On  embauma  son  corps,  qui  fut  exposé  dans  la 
grande  salle  du  palais  épiscopal.  Les  obsèques  et  le  ser- 
vice funèbre  furent  célébrés  le  29;  mais  la  dépouille 
mortelle  du  prélat  ne  fut  déposée  que  le  lendemain  dans 
le  caveau  qui  lui  avait  été  préparé;  et,  comme  le  Chapitre 
avait  laissé  aux  exécuteurs  testamentaires  pleine  liberté 
sur  le  choix  de  sa  sépulture,  on  descendit  le  corps  de 
l'évoque  sous  le  presbiterium ,  à  coté  de  Ms''  Arévalo 
Zuazo.  Ce  fut  assurément  une  heureuse  pensée  que  celle 
de  réunir  ainsi  les  deux  évèques,  qui,  ayant  occupé  le 
siège  de  Gérone  au  commencement  et  à  la  Hn  du  xviF 
siècle,  s'étaient  rendus  tous  les  deux  célèbres  à  des  titres 
divers,  et  spécialement  par  leur  union  avec  leur  Chapitre. 

Durant  les  deux  jours  qui  s'étaient  écoulés  entre  la 
mort  et  les  obsècpies  de  Ms''  Poulicli,  il  fut  manifestement 


(1)  Le  P.  Coll  csl  loiiibt'  dans  rcrrciir,  quand  il  indiiiue  l'année  1098, 
comme  lit  date  de  la  nuirt  de  Mb'''  Ponticii. 


I 

à 


347 

constaté  que  les  articulations  restaient  parlailenient  flexi- 
bles. Lorsque,  au  bout  d'une  année,  on  fit  de  nouveau 
la  visite  du  corps,  il  lut  trouvé  tel  qu'il  avait  été  vu  lors 
de  la  cérémonie  funèbre.  C'est  ce  que  nous  apprennent 
les  graves  auteurs  de  VEspana  sngradn. 

Voici  l'inscription  qui  tut  gravée  sur  son  tomheau,  et 
qui  nous  a  été  conservée  par  le  P.  Villanueva*^'.  Nous  la 
reproduisons  ici,  à  cause  de  la  singularité  de  sa  rédaction 
en  pbrascs  léonines  de  quinze  syllabes  à  béinisticbes 
rimes,  bien  plus  que  i)our  son  mérite  littéraire  : 

l).  0.  M. 

Prorsus  onini  lande  difjniis,  Fr.  Micliaël  l'onlich, 
Paiipcruin  l'alcr  bcnigniis,  artlens  zelo,  jdcet  lue. 
Sedis  liiijus  alm;e  prœsiil  virlulem  ilcmoiisinivit. 
A  domo  gallissiui;  exul,  annos  quatuor  pavit 
Dilcctiini  sibi  commisstim  tôt  grogem  niaïui  et  ore. 
Ardue  Iracîans  remissum,  dehilem  sed  amore. 
Quem  religio  minorum  prccsidem  jam  feceral 
Ad  exemplar  dodiorum,  Bula  niundo  dederat. 
Absqnc  scalis  ningniT»  porta',  pluros  sunt  mcmnriœ 
Qu;c  lletuni  irioveiit  in  morte,  preccs  alque  rjloriœ. 
Annos  terdecim  Pastoris  jam  fere  compleverat, 
Cùni  finem  tanti  laboris  pax  Dei  decreverat. 
Die  XXVI  januarii  m  dc  xcix. 

Le  siège  épiscopal  de  Géronc  fut  vacant  jusqu'au  mois 
de  mai  suivant.  Pondant  cet  espace  de  quatre  mois,  le 
diocèse  l'ut  gouverné  par  Don  Isidore  Bertran,  grand- 
arcbidiacre,  dont  on  vantait  la  sagesse  et  le  zèle.  M^'  de 
Taberner,  cbanoine  de  Tarragone  et  ancien  magistrat, 
nommé  évêque  de  Gérone,  ne  délégua  son  frère  Don 
Félix,  cbanoine  do  Barcolone,  que  le  lO  mai  1690,  pour 
jjrendre  en  son   nom  possession   du   siège,  et  il  ne  lit 

(1)  Vjnyï'  (iicrarin  à  Ins  Iglesias  de  Espaita,  Icmi  \IV,  p  l|-J-ll3. 
(>'esl  le  soûl  auteur  qui  ait  recueilli  cette  inscriptiou. 


348 

lui-même  son  entrée  dans  cette  ville,  que  le  5  avril  de 
l'année  suivante.  Pendant  son  épiscopat,  la  Catalogne  ne 
devait  pas  être  moins  agitée  que  sous  celui  de  Ms'"  Pon- 
ticli,  car  la  guerre  de  la  succession  se  ])rcparait. 

Ajoutons  (juelques  mots  sur  les  principales  vertus  qui 
brillèrent  dans  Ms''  Ponlich. 

La  générosité  et  l'inépuisable  charité  du  pontife  étaient 
l'objet  de  l'admiration  de  tous;  et,  cependant,  combien 
d'actes  de  bienfaisance,  qui  sont  demeurés  inconnus!... 
La  guerre  qui  avait  ensanglanté  et  dévasté  la  Catalogne 
pendant  son  épiscopat,  lui  fournit  des  occasions  nom- 
breuses et  signalées  d'exercer  cette  charité  aposloli(iue, 
qui  était  aussi  pour  lui  la  conséquence  de  ses  vœux  reli- 
gieux, et  particulièrement  de  celui  de  pauvreté.  Dix-huit 
églises  de  l'Ampourdan  ayant  été,  durant  celte  guerre, 
saccagées  et  complètement  dépouillées  de  tous  les  objets 
servant  au  culte,  notre  évoque,  dans  le  court  espace  de 
temps  qui  s'écoula  entre  sa  rentrée  et  sa  mort,  les  pour- 
vut toutes,  y  employant  des  sommes  considérables.  Nous 
mentionnerons  particulièrement  l'église  de  Caslell-Fullit, 
qui  avait  été  en  parlie  démolie  lors  du  siège  que  ce  point 
avait  eu  à  soutenir  contre  la  France,  en  IGOo,  et  à  la 
restauration  de  laquelle  il  consacra,  de  ses  deniers,  plus 
de  six  mille  livres. 

Rien  n'échappait  à  sa  sollicitude,  qui  n'excluait  aucune 
église,  aucune  maison  religieuse.  Il  donna  un  Enfant-Jésus 
en  argent  au  couvent  que  les  Chartreux  avaient  à  Monta- 
lègre,  et  dans  lequel  un  de  ses  neveux,  D.  Ignace  Ponlich, 
avait  pris  l'habit  religieux  de  cet  Ordre").  Le  couvent  de 

(1)  Don  hmco  Ponlich,  né  à  Boulctcrnère,  comme  son  oncle,  vivait 
encore  en  Ht*].  Il  a  laissé  un  récit  des  Bévclations  el  faveurs  célestes 
du  vénérable  Jean  Fort,  rharireux  du  couvent  de  Scala-Dei ,  et  nn 
livre  manuscrit,  intitulé  :  L'Hameçon  d'Or  (\mnc\o  de  oro),  recueilli  et 
publié  par  les  soins  du  savant  Don  Pedro  Serra  y  Posljus  (Voyez  le  P. 
Coll  et  D.  Félix  Torres  Amat). 


341) 

Saint-Michel  d'Escornalhou,  qui  avait  été  érigé  en  maison 
de  Missionnaires  Franciscains  sous  le  provincialal  du  R. 
P.  Michel  Ponlich,  éprouva  aussi  l'effet  des  libéralités  de 
l'évcque,  qui  y  lit  faire  diverses  constructions  à  ses  frais <*>. 

Quand  il  quitta,  en  1G97,  le  couvent  de  Reuss,  qui  devait 
lui  être  si  cher,  et  qu'il  rentra  dans  son  diocèse,  il  laissa 
dans  ce  couvent  divers  souvenirs  plus  ou  moins  précieux, 
ornements  d'église,  garnitures  d'autel,  etc.'->. 

Peu  après  sa  rentrée  à  Gérone  (1608),  il  résolut  de 
refaire  les  vitraux  qu'on  appelle  les  vitraux  de  TO  *^',  et 
que  le  bombardement  avait  brisés  en  109i.  Le  généreux 
prélat  donna  à  cet  effet  onze  cents  livres'*';  mais  il  ne 
put  voir  raccom|)lissement  de  ce  travail,  qui  ne  fui 
achevé  qu'en  1706.  En  souvenir  du  donateur,  on  fit 
peindre  sur  les  vitraux  saint  Michel  son  patron. 

Le  couvent  de  Sainl-Krançois  de  sa  ville  épiscopale 
ne  pouvait  être  oublié.  Il  ne  dépensa  pas  moins  de  trois 
mille  livres  i)our  faire  dorer  le  magnifique  retable  du 
grand  autel,  et  celui  de  l'autel  des  Saintes-Vierges,  dédié 
à  sainte  Ursule  et  à  ses  compagnes <•'"'. 

En  sa  qualité  d'Enfant  de  Saint  François,  l'évêque  de 
Gérone  avait  une  dévotion  toute  particulière  à  l'Imma- 
culée Conception  de  la  très-sainte  Vierge.  Aussi  voulut-il 
que  l'église  du  couvent  de  Sainte-Claire  de  sa  ville  épis- 
copale, dont  il  posa  la  première  |)ierre  à  la  fin  de  sa  vie, 
fut  dédiée  à  Marie  sous   le  vocable  de   sa  Conception 

(1)  Le  P.  Coll  nous  apprend  que,  dans  le  dernier  siècle,  on  appelait 
encore  c/iami;-e  de  l'Ereque,  l'apparlement  qu'il  iiabitait,  .qirès  l'avoir 
fait  construire  et  approprier  à  ses  Irais. 

(2)  Le  P.  Coll,  loc.  cit.,  §  790. 

(3)  Eupuna  sagrada.  Ils  étaient  ainsi  appelés,  à  ce  qu'on  croit,  à 
cause  de  leur  forme  circulaire  ou  sphérique. 

(4)  Le  P.  Coll.  —  L'Espaùu  sagrada  parle  de  200  doubles  (loc.  cit 
§U5). 

(5)  Cronka  seraphica  du  P.  Coll,  liv.  IV,  cli.  V,  §  771. 


350 

Immaculée.  Nous  avons  vu  comment  il  avait  lui-même 
appelé  cette  pierre  le  dernier  degré  de  son  escalier  :  la 
mort,  en  effet,  l'empêcha  de  voir  cette  église  achevée; 
mais  ses  largesses  lui  survivaient,  car  il  laissait  |)lus  de 
sept  mille  livres  pour  son  achèvement. 

Ce  pieux  et  zélé  disciple  de  la  sainte  pauvreté,  se  mon- 
tra toujours  le  père  des  pauvres.  Il  pourvoyait  avec  une 
admirable  sollicitude  à  tous  leurs  besoins  spirituels  et 
corporels.  Les  militaires  qui  allaient  l'aire  leur  garde  à 
la  porte  Saint-Christophe  étaient  reçus  à  l'évèché,  où  ils 
trouvaient  la  table  servie.  Dans  une  occasion,  une  compa- 
gnie de  cavalerie  tout  entière  fut  logée  au  palais  épiscopal, 
dont  les  greniers  étaient  à  la  disposition  des  militaires. 
Il  employa  plus  de  quatre  mille  livres  à  la  construction 
de  salles  pour  les  soldats  malades  dans  Thôpital  royal  de 
Gérone,  et  l'hôpital  de  Sainte-Catherine  de  la  même  ville, 
reçut  de  notre  évêque,  peu  de  temps  avant  sa  mort,  un 
secours  de  huit  mille  livres.  Enfin,  l'hôpital  royal  du  fort 
de  Roses  en  avait  reçu  plus  de  trois  mille. 

On  peut  juger,  d'après  cela,  de  ce  que  devaient  être 
les  aumônes  particulières  et  secrètes  du  saint  évoque, 
surtout  à  l'égard  des  pauvres  honteux,  qu'il  soulageait 
toujours  en  proportion  du  rang  et  de  la  qualité  des  per- 
sonnes et  des  familles. 

La  plupart  des  iilles  pauvres  de  son  diocèse  recevaient 
du  saint  évêque,  a  l'occasion  de  leur  mariage,  un  habil- 
lement neuf  et  une  sonmie  d'argent.  Il  fournissait  très- 
souvent  la  dot  de  celles  qui,  étant  sans  fortune,  désiraient 
entrer  en  religion. 

Enfin,  il  procurait  du  travail  aux  pauvres  valides,  et 
son  palais  était  ouvert  aux  malheureux  vieux  ou  infirmes, 
qui  tous  se  retiraient  amplement  satisfaits  de  l'aumône  qu'ils 
avaient  reçue.  Du  reste,  son  majordome  avait  constaté  que 
ce  vertueux  et  charitable  prélat  donnait  en  aumônes  et  en 
bonnes  œuvres  bien  au-delà  des  revenus  de  son  évèché. 


351 

C'est  ce  que  nous  apprend  le  P.  Coll.  Il  semble,  en  vérité, 
dirons-nous  avec  un  autre  de  ses  biographes  <■>,  que  le 
Seigneur  se  plut  à  niulliplier  visiblement  les  trésors  dont 
il  l'avait  constitué  dépositaire;  car  il  était  impossible  qu'il 
pût,  avec  ses  ressources  ordinaires,  l'aire  face,  dans  des 
temps  si  calamiteux,  à  toutes  les  misères  et  à  tous  les 
besoins...  Aussi,  ne  peut-on  se  l'aire  une  idée  exacte  de 
la  désolation  de  tous  les  indigents  à  la  nouvelle  de  sa 
mort  :  mieux  (|ue  tous,  en  effet,  ils  devaient  sentir  la 
grandeur  de  la  perle  qu'ils  faisaient.  Ce  charitable  prélat 
appelait  les  pauvres  ses  créanciers,  et  croyait  avoir  à  se 
reprocher  toute  dépense  qui  n'avait  pas  en  vue  leur  soula- 
gement. Citons  un  trait  : 

Don  Sulpice  Pontich,  neveu  de  l'évoque  de  Cérone, 
touchait,  sur  la  mense  épiscopale,  une  pension  de  500 
ducats (-1  Or,  à  une  époque,  il  se  trouva  qu'il  avait  à 
recouvrer  plusieurs  annuités  arriérées  de  cette  pension 
et  de  quelques  autres  bénéfices.  L'évêque,  à  la  fm  de  ses 
jours,  demanda  a  son  neveu  de  renoncer  à  ces  diverses 
sommes,  pour  en  disposer  en  faveur  des  pauvres,  et,  selon 
ses  propres  expressions ,  pour  leur  rendre  ce  qui  avait 
été  consacré  aux  frais  de  son  éducation  et  de  ses  études. 
Le  chanoine  y  consentit  volontiers.  Cependant,  l'évêque, 
craignant,  dans  l'intérêt  de  ses  pauvres,  que  son  neveu 
n'eût  la  pensée  do  revenir  sur  cette  disposition,  recom- 
manda de  ne  pas  lui  faire  connaître  le  danger  de  mort 
dans  lequel  il  se  trouvait.  On  comprend  bien  que  Don 
Sulpice  ne  put  l'ignorer;  mais  il  n'en  respecta  pas  moins 
les  volontés  et  les  désirs  de  sou  oncle,  dont  il  recueillit 
le  dernier  soupir '-^^ 

Pour  û  juner  une  idée  de  son  zèle  pastoral,  nous  dirons 

(1)  Espafia  sayrada,  loc.  cit.,  §  147. 

(2)  Environ  800  francs  de  notre  monnaie. 
(^3)  Kspuîia  sayrada,  loc.  cit.,  §  148. 


352 

seulement  que,  non  content  de  s'entourer  de  vicaires-géné- 
rau\  actifs  et  éclaires,  de  conseillers  pieux  et  prudents, 
Ms'"  Pontich  voulait  voir  et  faire  par  lui-même,  autant  qu'il 
le  pouvait,  tout  ce  qui  touchait  îi  l'administration  de  son 
diocèse,  persuadé  que,  devant  le  tribunal  suprême,  il  ne 
pourrait  dégager  sa  responsabilité,  en  objectant  que  tels 
et  tels  actes  étaient  à  la  charge  de  ses  vicaires-généraux, 
de  ses  ofticiaux  ou  de  ses  curés.  Aussi  visitait-il  par  lui- 
même  toutes  les  églises  de  son  diocèse,  sans  tenir  compte 
de  l'éloignement  des  paroisses,  de  leur  situation  sur  les 
montagnes  et  des  dangers  (pi'il  devait  affronter,  souvent 
même  dans  un  état  de  souffrance  ou  d'infirmité*^). 

Le  roi  d'Espagne,  Charles  H,  nous  disent  ses  biogra- 
phes, avait  de  lui  une  haute  idée,  et  ses  ministres,  dans 
une  circonstance,  écrivirent  a  notre  évêque  pour  le  re- 
mercier, au  nom  du  monarque  lui-même,  de  tous  les  soins 
qu'il  avait  fait  donner  aux  soldats,  tant  valides  que  ma- 
lades, et  de  tous  les  secours  dont  il  les  avait  assistés. 

S'il  observait  des  manquements  ou  des  négligences 
dans  le  service  du  roi  ei  chez  les  gens  du  gouvernement, 
il  transmettait  discrètement  un  avis  à  cet  égard;  et  s'il 
avait  constaté  un  abus  que  l'influence  du  \ice-roi  de 
Catalogne  pût  faire  disparaître ,  il  n'hésitait  pas  h  s'a- 
dresser directement  à  lui.  Par  où  l'on  voit  que  la  vigi- 
lance de  l'évêque  de  Gérone  était  d'un  grand  poids  dans 
les  mesures  prises  par  l'autorité.  On  affirme  même  que 
le  passage  de  Saint-Pol<-'  fut  défendu  par  un  fort,  sur  les 
instances  de  Ms''  Pontich,  ce  qui  arrêta  l'armée  française, 
qu'attendaient  d'ailleurs  les  Espagnols  à  Iloslalrich. 

Enfin,  sans  parler  de  son  inépuisable  sollicitude  pour  le 
progrès  de  la  discipline  ecclésiastique  dans  son  diocèse, 
nous  ne  pouvons  nous  dispenser  de  mentionner  un  de 

(1)  Espai'ia  sagrada,  loc.  cit.,  §  ill. 

(2)  Situé  près  de  la  côte,  entre  Arenys  et  Calelle. 


353 

ses  plus  beaux  titres  de  gloire,  la  célèbre  collection  des 
Assemblées  sf/nodales  de  Gérone,  dont  les  Conslitutious 
sont  encore  en  vigueur.  Cette  colleciion,  publiée  dans 
celte  ville  en  KJOl  et  formant  un  volume  in-lblio,  avait 
été  mise  en  ordre  et  enrichie  de  commentaires  par  un 
savant  jurisconsulte,  I).  Francisco  Romaguera,  natif  de 
La  Bisbal  et  contemporain  de  Mfc'''  J^onlicli.  Les  notes  et 
commentaires  de  ce  légiste,  dit  Ms''  Félix  Torres  Amat*^*, 
sont  une  mine  précieuse  et  une  source  féconde  d'éclaircis- 
sements pour  les  canonistes,  les  casuisles  et  les  curés. 

Tel  est  le  récit  succinct  et  bien  incomplet  de  la  vie  de 
l'illustre  Michel  Poniich ,  évoque  de  Gérone.  Puisse  cet 
hommage  rendu  à  sa  mémoire  vénérée  être  un  nouvel 
écho  de  l'estime  et  de  la  considération  dont  nos  compa- 
triotes, et  particulièrement  les  bons  habitants  de  Vinça  et 
de  Rouleternère,  sont  habitués  à  entourer  cette  noble  et 
ancienne  famille,  a  laquelle  celui  qui  écrit  ces  pages  est 
heureux  d'être  uni  par  des  liens  d'autant  plus  chers  (ju'ils 
se  formèrent  presque  sous  l'épiscopat  du  saint  prélat. 


Un  mot  en  terminant  sur  le  chanoine  Don  Sulpice 
Ponticîh,  déjà  connu  du  lecteur. 

Né  à  Bouleternèrc  comme  son  oncle  et  Don  fgnace, 
son  frère,  il  avait  terminé  à  quinze  ans  ses  éludes  de 
théologie,  et  pris  à  dix-huit  ans  ses  grades  de  docteur 
en  philosophie,  en  théologie  et  en  droit.  Chanoine  de 
Gérone,  il  consacra  ses  loisirs  à  la  composiliou  d'un 
important  ouvrage  intitulé  :  Diclionnaire  olphabclique  de 
tant  ce  qui  est  relatif  à  l'Eglise  et  au  Diocèse  de  Gérone, 

(1)  Mt  mot  tas  para  mjudar  a  formar  un  diccionario  critico  de  lot 
escritorcs  cut:il(tnes.  V»  Romagucra. 

23 


354 

dont  le  tome  IV  (in-folio)  forme  une  Episcopologic  de  cet 
important  diocèse,  depuis  la  conquête  de  Charlemagne 
jusqu'en  1729.  Il  est  impossible  de  se  faire  une  juste 
idée  des  immenses  rechciches  que  l'auteur  dut  faire 
dans  diverses  archives  pour  la  composition  de  cet  ou- 
vrage monumental,  qui  malheureusement  n'a  pas  été 
imprimé. 

Don  Sulpice  avait  encore  écrit  une  Yie  de  Ms""  Michel 
Pontich,  son  oncle,  laquelle,  conservée  manuscrite  dans 
le  couvent  de  Montalègre,  a  servi  de  principal  document, 
ainsi  que  nous  l'avons  dit,  a  la  Notice  biographique  de 
VEspana  sagrada,  qui  nous  a  été  à  nous-mème  d'un  si 
puissant  secours,  avec  celles  du  P.  Coll  et  du  P.  Villa- 
nueva. 


355 


IIÎ 


LE  R.  P.  MÉLITON  DE  PERPIGNAN, 

Capucin  (  1G80— 1755). 

Naissance  et  famille  du  11.  1'.  Méliton. — Ses  études  au  couvent.  Dignités 
aux(|uelies  il  est  élevé  :  il  devient  neuf  fuis  ijurdicn ,  puis  vicaire- 
provincial  et  (Ii'liniteur. — Sa  mort. — Livres  de  Piété  composés  par 
le  R.  P.  Méliton.— Ses  grands  ouvrages  scientifiques. — 11  est  nommé 
membre  correspondant  de  l'Académie  des  Sciences  et  de  plusieurs 
autres  sociétés  savantes.  —  Le  II.  P.  Méliton  artiste. 

Né  à  Perpignan  vers  1680,  ce  religieux,  issu  de  la 
famille  de  Llobet,  entra  dans  l'Ordre  des  Capucins  vers 
1700  C,  à  l'âge  de  vingt  ans  environ,  et  prit  le  nom  du 
saint  évèque  de  Sardes,  du  courageux  apologiste  qui, 
vers  la  lin  du  second  siècle,  dénonçait  à  l'empereur 
Anlonin  les  vexations  odieuses  dont  étaient  victimes, 
dans  les  provinces  d'Asie,  les  chrétiens  lidèles  à  la  loi 
de  Jésus-Christ.  Il  s'appela  désormais,  non  plus  Fran- 
çois-Joseph DE  Llouet,  mais  le  Père  Méliton,  nom 
sous  lequel  il  devait  se  rendre  célèbre  aux  yeux  de  la 
postérité. 

Il  parait  bien  que  ses  talents  se  développèrent  et  gran- 
dirent à  l'ombre  du  cloitre;  car  il  ne  larda  pas  à  être  dési- 
gné par  ses  supérieurs  en  qualité  de  lecteur  de  philosophie, 
et  puis  de  théologie,  au  couvent  de  Toulouse,  chef-lieu  de 
la  province  de  TOrdre.  Ses  occupations  dans  renseigne- 
ment des  sciences  ecclésiastiques  et  la  parfaite  régularité 
qu'il  apporta  toujours  dans  l'exercice  et  l'accomplissement 

(1)  Il  nous  a  élé  impossible  de  préciser  ces  deux  dates.  Du  reste,  on 
s'apercevra  iiientôl  que  les  documents  nous  manquent  sur  la  vie  du  I\ 
.Méliton,  et  que  la  notice  ([ue  nous  donnons  ici  est  très-incomplète. 


350 

de  ses  tlevoirs  de  religieux,  ne  l'empêchèrent  point  de 
Gulliver  les  inalhémaliques  et  l'astronomie,  sciences  pour 
lesquelles  il  possédait  une  a|)litude  toute  pariiculière. 
Son  mérite  ne  put  rester  ignoré  et  franchit  l'enceinte  du 
monastère.  Il  est  même  permis  de  supposer  que  (pichjues 
écrits  littéraires  ou  sçieutiliques  l'ayant  l'ait  connailrc  et 
apprécier,  ce  fut  durant  son  séjour  dans  la  capitale  du 
Languedoc,  dans  la  docte  et  religieuse  Toulouse,  que 
l'Académie  des  Sciences  de  cette  ville  se  l'associa  comme 
membre  titulaire  et  résidant,  longtemps  avant  la  pulilica- 
tion  de  son  premier  ouvrage  scienlilique,  jiaru  en  1758. 

Le  Père  Méliton  fut  choisi  six  fois  comme  gardien  ou 
supérieur  du  couvent  de  Perpignan,  savoir  :  1°  le  11 
septembre  17^2,  au  Chapitre  de  Carcassonne ;  2"  le  7 
septembre  1720,  au  Chapitre  tenu  dans  la  même  ville; 
50  le  50  mai  1727,  au  Chapitre  de  Castelnaudary;  4"  le 
12  mai  1750,  à  la  Congrégation  de  Monipellier;  o«  le  3 
septembre  1734,  au  Chapitre  de  Carcassonne;  6°  eulin, 
le  12  septembre  1749,  a  la  Congrégation  Capitulaire  de 
Montpellier,  ce  qui  représente,  en  tout,  dix  ans  de  gar- 
diennat.  Il  dut  assister,  eu  qualité  de  gardien  sortant, 
aux  Chapitres  de  Montpellier  fl72i),  de  Casieluaudary 
(1727),  de  Narbonne  (1728),  de  Béziers  (1751),  de  Pézé- 
nas  (1737)  et  de  Castelnaudary  (17o0). 

Le  P.  Méliton  fut,  en  outre,  gardien  du  couvent  de 
Prades  en  4728,  gardien  du  couvent  de  Céret  en  1729 
et  1757,  maître  des  novices,  délinileur,  etc.,  etc. 

Pendant  ces  divers  gardiennats,  nous  le  voyons  prendre 
une  part  active  aux  missions  du  diocèse,  et  prêcher,  en 
1727  et  175G  à  La  Real,  en  1757  h  Baixas,  en  1749  à 
La  Roque-d'Albère,  etc.*^*.  » 

(1)  Sur  la  plupart  des  faits  que  nous  rapportons  ici,  nous  avons  surtout 
consulté  un  ro;;islrc  do  l'ancien  couvent  des  Capucins  de  Perpignan,  qui 
n'était  que  rabréi;é  de  ses  archives,  auxquelles  il  est  souvent  renvoyé. 
Ce  redstre,  relié  en  parcheiuiii,  et  formant  uu  volume  in-io,  de  400  à 


357  , 

Les  talents  supérieurs  et  la  haute  intelligence  du  Père 
Mélilon  ne  lui  faisaient  pas  négliger  les  détails  de  la 
maison  confiée  à  ses  soins  :  c'est  ce  que  nois  révèlent 
les  mémoires  manuscrits  déposés  à  la  Biljliothèque  de 
Perpignan ,  les  seuls  documents  qui  nous  apprennent 
qucKpie  chose  sur  la  vie  du  savant  capucin.  Ainsi,  nous 
voyons  noire  religieux  s'occuper,  en  1724,  du  porche 
extérieur  de  l'église,  établir  deux  nouveaux  confession- 
naux, ouvrir  les  deux  arceaux  du  presbilerium,  et  [ilacer 
quatre  grands  prie-dieu  avec  leurs  sièges  sous  ces  mêmes 
arceaux,  etc.,  etc. 

En  1726,  h  l'occasion  du  payement  intégral  de  la 
somme  de  douze  cents  livres,  qui  avait  été  léguée  au 
couvent  en  1721  par  M.  François  Collard,  caissier  du 
trésorier  de  l'armée  d'Espagne  (à  la  charge  de  priei-  Dieu 
pour  lui),  le  P.  Mélilon  avait  transcrit  la  note  suivante 
sur  le  registre  du  couvent  :  «  ...Toutes  les  fois  que  j'ai 
«  reçu  des  payements  partiels  de  cette  somme,  je  me  suis 
«  acquitté  de  ce  que  je  devais  de  justice  et  de  reconnais- 
n:  sauce  à  feu  M.  Collard,  en  app!iqi;aat  à  son  intention 
«  les  messes,  communions,  jeûnes,  disciplines,  etc.,  des 
«  religieux  de  la  communauté.  Je  mets  cette  note  pour 
«  conserver  la  mémoire  de  notre  bienfaiteur.  Ce  29  dé- 
«  cembre  1720.  Fr.  Mélilon.  cap.  cl  rjard.  indA^K  » 

L'année  suivante  (1727),  fut  donnée  à  Perpignan  une 
grande  mission,  (jui  ne  dura  pas  moins  d'un  mois  et 
demi  environ,  c'est-h-dire ,  du  IG  novembre  au  28  dé- 
cembre. Le  P.  Mélilon,  alors  gardien  du  couvent  de 
Perpignan,  y  prit  une  part  active.  11  y  avait  trente  mis- 

500  pages ,  est  intitulé  :  Mémoires  du  couvent  des  Capucins  de  Perpi- 
gnan, iTcuciliis  par  \n  ï\.  P.  (Irtliricl  de  Saiul-Nazairc,  iraidicn  dn  couvent, 
l'ail  1(')U3,  et  coutiiuiés,  depuis,  par  les  gardiens  suivants  ( I^ibliotlièque 
de  Perpignan,  section  des  Mnnuscrils,  n"  9). 

(1)  Frère  Mélilon,  rnpucin  ni  qnrdien  indiijnc  Celait  la  signature 
ordinaire. 


358 

sioiinaires  de  l'Ordre  des  Capucins.  Le  R.  P.  ÉlicDiic 
de  Caslillon,  provincial,  dirigeait  la  mission;  le  R.  V. 
Uvacintlie  de  Toulouse  prêchait  tous  les  soirs  à  Saint- 
Jean;  le  P.  Léopold  de  Limoges  et  le  P.  Emmanuel  de 
Chalabre  prêcliaienl  alternativement  le  matin  ;  le  R.  P. 
Télespbore  faisait  les  conférences,  et  le  R.  P.  Clcmeul 
de  Saint-Germain  donnait  les  retraites  à  la  chapelle  du 
Christ.'Ce  n'est  pas  tout  :  le  R.  P.  Joseph  de  Carcas- 
sonne  fit  la  retraite  aux  abbés  et  prêcha  aux  soldats; 
eniin  ,  le  P.  Agathonge  de  Lavaur  prêchait  le  malin 
à  La  Real,  où  le  R.  P.  Méliton  se  faisait  entendre  le 
soir,  après  les  catéchismes,  dirigés  par  le  P.  Aphrodisc 
de  Réziers.  Cette  mission,  dont  le  R.  P.  Méliton  nous  a 
lui-même  laissé  un  récit  succinct,  produisit  de  très-grands 
fruits  dans  la  ville  de  Perpignan  et  procura  aux  ouvriers 
évangéliques  d'innombrables  consolations,  ainsi  qu'il  le 
déclarait  sur  le  registre  déjà  cité. 

Au  mois  d'avril  1750,  eut  lieu  dans  les  divers  cou- 
vents de  Capucins,  une  magnifique  et  touchante  solen- 
nité, à  l'occasion  de  la  béatification  du  Vénérable  Fidèle 
de  Sigmaringen^^l  Durant  trois  jours  (-',  les  cérémonies 
furent  accomplies  avec  pompe  dans  l'église  du  couvent 
de  Perpignan,  brillamment  décorée  et  illuminée.  Les 
préparatifs  et  l'ordonnance  de  la  fête  furent  dirigés  par 
le  R.  P.  Méliton,  qui  se  trouvait  encore  gardien,  et  dont 
le  récit  se  trouve  consigné  dans  le  manuscrit  de  notre 
bibliothèque.  La  veille,  '25  avril  au  soir,  la  fête  fut  an- 

(1)  Ce  saint  missionnaire,  dont  on  fiM(''brc  la  fiHc  le  2i  avril,  était 
entré  à  3i  ans  dans  lOrdre  des  Cainiciiis,  après  avoir  exercé  avec  snccès 
la  profession  d'avocat.  Il  avait  déjà  opéré  d'innombraliles  conversions 
parmi  les  hérétiiiues,  lorsfpril  fut  envoyé  dans  le  pays  des  Grisons,  où  les 
chefs  des  sectaires,  feignant  de  vouloir  se  convertir,  le  massacrèrenl,  le  2i 
avril  l(i22.  11  a  été,  plus  tard,  solennellement  canonisé  par  Benoit  XIV. 

(2)  C'est  ce  qui  a  fait  apiieler  liidim  la  fête  (|ui  a  lieu  It  l'occasion 
d'une  béatification  ou  d'une  canonisation. 


noncée  el  puhliéo  par  douze  cricurs  publics  on  robe 
rouge,  accompagnés  par  (|uaraiile  tambours  de  la  gar- 
nison. M?""  de  Grammont  de  Lanta,  évêipic  d'EInc,  vint 
ce  même  jour  au  couvent ,  accompagné  de  ses  archi- 
diacres et  de  ses  aumôniers  :  il  nolida  et  promulgua  la 
bulle  de  béatification  ;  après  quoi,  il  entonna  le  Td  Deiim, 
qui  fut  clianlé  en  musi(pie,  et  donna  la  bénédiction.  Le 
lendemain,  21  avril,  premier  jour  de  la  solennité,  tous  les 
Pères  du  couvent  allèrent  chercher  processionnellemeni 
le  Chapitre  de  la  Cathédrale  pour  la  grand'messe,  qui  lut 
célébrée  par  M.  de  Sallèlos;  le  soir,  après  les  vêpres, 
chantées  en  musique  comme  la  grand'messe,  il  y  eut 
sermon  prêciié  par  M.  Vernet,  bénéficier  de  Saint-Jean 
et  prolesseur  royal.  La  bénédiction  couronna  la  céré- 
monie; après  quoi,  les  religieux  allèrent,  comme  le  matin, 
accompagner  processionnellement  le  Chapitre  h  Saint- 
Jean,  musique  en  tête.  Les  Consuls  assistèrent  en  robe 
à  cette  procession  :  ils  avaient  diné  au  couvent,  ainsi  que 
les  membres  du  Chapitre.  Le  25  avril ,  second  jour  du 
Iridno,  le  chanoine  Quéralt  ofiicia,  assisté  de  deux  autres 
chanoines  el  de  plusieurs  membres  du  clergé  diocésain. 
Tout  fui  chanté  en  musique  comme  la  veille;  la  céré- 
monie se  termina  par  un  sermon  du  P.  Hyacinthe  de 
Toulouse  el  par  la  bénédiction  du  Très-Sainl-.Sacrement. 
Le  lendemain,  troisième  jour  du  Iriduo,  les  religieux 
allèrent  en  procession  chercher  les  prêtres  de  la  commu- 
nauté de  La  Piéal,  qui  firent  rolficc  au  couvent.  L'offi- 
ciant fut  M.  Saunier,  chanoine  et  vicaire-général;  et  le 
soir,  le  panégyrique  du  Bienheureux  fui  prononcé  par  le 
R.  P.  Coste,  dominicain  el  professeur  de  théologie. 

Le  P.  Mélilun  ne  manque  pas  de  faire  observer  que 
les  frais  de  celle  fêle  furent  couverts  par  le  produit  des 
(piêles  abondantes  faites  à  cette  occasion  parmi  les  fidè- 
les, dont  le  concours  et  la  générosité  fiu'ent  au-delà  de 
toiilo  expression.  Les  religieux  qui  se  distinguèrent  jjIus 


360 

particulièrement  dans  l'ordonnance  do  la  fêle,  furent  le 
P.  Isidore  de  Perpignan,  le  P.  Jean-François  de  Prades, 
sans  oublier  le  P.  Jean-Joseph  de  Gaillac,  qui  prépara 
les  feux  d'artifice. 

Durant  le  cours  de  cette  même  année  (1750),  le  Pi.  P. 
Méliton  fut  préoccupe  par  quel(]ues  enibarr;  s  qui  sur- 
vinrent de  la  part  des  ingénieurs  ou  des  préposés  de 
rinlendanl.  Voici  dans  quelles  circonstances  :  Dans  le 
mois  de  mai,  on  travaillait  h  la  grande  allée  (jui  longeait 
le  mur  du  jardin  du  couvent"';  or,  les  ingénieurs  vou- 
lant suivre  le  niveau  fixé  pour  cette  allée,  avaient  beau- 
coup trop  abaissé  le  terrain  le  long  de  ce  mur,  dont  les 
fondements  étaient  en  partie  découverts.  Le  P.  Méliton, 
en  qualité  de  gardien,  demanda  et  obtint  la  consolidation 
de  ce  mur  et  l'établissement  d'ép.anclioirs  sur  cette  allée. 

Vers  le  mois  de  décembre  suivant,  le  P.  Méliton,  après 
avoir  secondé  les  plans  de  l'Intendant  par  des  travaux 
considérables ^-^  avait  permis  aux  ouvriers  de  ce  dernier 
de  déposer  dans  le  préau  du  monastère  tons  leurs  outils, 
pioches,  piquets,  brouettes,  etc.;  or,  une  partie  de  ces 
objets  vint  à  disparaître,  et  force  fut,  pour  protester 
contre  les  soupçons  que  des  personnes  malveillantes 
semblaient  diriger  contre  les  gens  du  couvent,  de  signifier 
au  préposé  de  l'Intendant  que  la  permission  de  déposer  ces 
objets  serait  retirée  pour  l'avenir,  vu  que  le  préau  était  un 
lieu  à  peu  près  public,  et  conséquemment  peu  sûr. 

(!)  On  sait  que  rancicn  rouvcnt  des  Capucins  riait  situé  en  lace  de 
la  Pépinière,  à  gauche  de  la  roule  de  Prades.  I/allée  dont  il  est  ici 
question,  qui  était  à  peu  près  sur  remplacement  ou  dans  le  sens  de  cette 
route,  s'appelait  alors  Cours  de  Mo''  de  Jallais,  du  nom  d'un  Intendant 
aimé  dans  la  province.  Indépendamment  de  l'agrément  que  celle  allée 
pouvait  procurer  au  couvent,  elle  servait  de  digue  pour  en  éloigner  la 
rivière. 

(2)  Notamment,  par  un  doulde  mur,  construil  le  long  du  ruisseau  (pii 
longeait  le  couvent,  etc.  Du  reste,  il  faut  dire  que  l'Intendant,  de  son  côté, 
dédommagea  les  Pères  Capucins  des  impenses  faites  à  celle  occasion. 


361 

Durant  rintervalle  ({ui  s'ccoula  entre  son  ciii(]uiènie  et 
son  sixième  l'anliennat  a  Perpignan,  nous  voyons  le  P. 
Méiiton  remplir  les  fonctions  de  i^^ardicii  <In  couvent  de 
Montpellier  (1 745;.  Lannée  préc(kiente,  il  avait  (Hé  appelé, 
en  qualité  de  Vicaire-Provincial,  à  prendre  durant  neuf 
mois  le  gouvernement  général  des  couvents  de  la  pro- 
vince de  Toidouse,  par  suite  de  la  mort  du  R.  P.  Téles- 
pliore,  provincial. 

Enfin,  après  son  sixième  gardicnnat  à  Perpignan,  le 
15  août  1750,  il  partit  pour  le  Ciiapitre  de  Castelnaudary, 
après  avoir  clos,  la  veille,  un  exposé  de  l'état  du  couvent. 
A  son  retour,  il  transcrivait  sur  le  registre  une  note  non- 
signée,  ainsi  conçue  :  «  Le  P.  Méiiton,  ayant  renoncé  au 
«  gardicnnat  et  autres  charges  supérieures,  le  P.  Calixle  de 
«  Narbonne,  a  été  élu  gardien  de  ce  couvent  au  Chapitre 
«  tenu  à  Castelnaudary,  dans  le  mois  de  septembre  1750.  » 
A  partir  de  cette  époque,  le  P.  Méiiton,  âgé  de  70  ans, 
obtint  la  permission  de  vivre  retiré  dans  le  couvent  de 
sa  ville  natale,  libre  de  toute  fonction  et  do  tout  emploi. 
Cependant,  il  ne  discontinuait  pas,  sur  l'invitation  du  P. 
Gardien,  de  noter  ou  de  contresigner  la  plupart  des 
mentions  transcrites  sur  le  registre.  C'est  ainsi  (jue  nous 
le  voyons  enregistrer,  à  la  date  du  2  mars  1751,  la  mort 
du  R.  P.  André  de  Solignac,  vic:iirc  du  couvent  de  Perpi- 
gnan. L'année  suivante,  il  contresigne  Tétat  détaillé  de 
ce  même  couvent,  dressé  par  le  P.  Calixte,  qui  allait 
résigner  son  titre  de  gardien  au  Chapitre  de  Narbonne. 
Enlin,  un  écrit  du  P.  Fulgence  de  Réziers,  daté  du  5  mai 
1755,  est  encore  contresigné  par  le  /'.  Fr.  McIUoh  de  Pcrp.. 
Cap.,  cx-Vic.  pr(Hil^^\  C'est  la  dernière  signature  du  P. 
Méiiton  que  nous  présente  le  registre  manuscrit  conservé 
dans  la  Hibliolhèque  de  Perpignan;  aussi  est-il  facile  d'y 
reconnaître  la  main  Irendjlanle  et  mal  assurée  du  vieillard. 

(  t  )  /'<•/•(■  /';•(•;•(■  Meliton,  Hr  l'rrpif/ua»   nijtiinii,  im-  \'iriilrr-Prnrinriiil 


362 

Environ  un  mois  après,  il  était  enlevé  à  ses  frères,  à 
ses  compatriotes ,  a  ses  admirateurs.  Voici  la  conrte 
mention  relative  à  celte  mort,  et  écrite  dans  le  registre 
par  le  H.  P.  Damase  de  Trébons,  alors  gardien  cl  défi- 
uiteur  :  «  Le  J  4  du  mois  de  juin  IToo,  le  R.  P.  Méliton 
«  DE  Perpignan,  ancien  Vicaire-Provincial,  homme  célèbre 
«  par  sa  piété  et  par  sa  science,  estimé  pour  les  excellents 
«ouvrages  qu'il  a  composés,  et  associé  aux  Académies 
«  des  Sciences  de  Paris,  de  Toulouse  et  de  Montpellier, 
«  est  décédé,  muni  des  sacrements,  après  une  maladie 
«  de  vingt  jours,  causée  par  une  chute  qu'il  fil  à  Tcsca- 
«  lier,  en  se  rendant  à  vêpres**'.  » 

Voilà  tout  ce  que  nous  avons  pu  recueillir  sur  la  vie 
du  Religieux  de  Saint-Krançois.  Disons  quelques  mots  de 
l'écrivain,  et  voyons  comment  le  P.  Méliton ,  fuyant  les 
honneurs  et  les  applaudissements  du  monde,  avait  cultivé 
et  fait  fructifier  ses  profondes  connaissances  à  l'ombre 
protectrice  de  Thumilité  monasti([ue. 

l.e  passage  consacré  au  savant  capucin,  dans  l'ouvrage 
intitulé  :  Bibliolheca  scriplonim  Ordinis  Minorum  S. 
Francisa  Capuccinonim  ^-^ ,  nous  servira  de  transition. 
Voici  comment  les  titres  du  R.  P.  Méliton  étaient  ré- 
sumés par  le  R.  P.  Rernard  de  Bologne  (n'oublions  pas 
qu'il  écrivait  en  I7i7,  du  vivant  du  savant  Capucin 
Roussiilounais)  :  «  Le  R.  P.  Méliton  de  Perpignan,  alla- 
«  ché  à  la  province  de  'J'oulouse  depuis  son  entrée  en 

(1)  VAnnuaira  du  départ rment  des  Ihjvénévs-Orienialex  pour  l'année 
}H:li,  donne  tiiusseniont  l;i  date  du  mois  de  mai  1753,  comme  celle  de 
la  mort  du  P.  .Mélilon  (_  jKige  l:2lj).  On  voil  que  ce  savant  religieux  ne 
mourut  que  deux  ans  plus  tard,  d'après  le  document  liien  authentique  que 
nous  reproduisons  ici. 

(':2)  r,et  ouvrage,  pulilié  à  Venise  en  17 iT,  et  formant  un  volume 
in-folio,  avait  cté  composé  d'aliord  par  le  R.  P.  Denis  de  Gènes,  et  fut 
ensuite  continué  par  le  11.  P.  Bernard  de  Bologne,  il  était  dédié  au  Pape 
l'.enoîtXIV. 


363 

«  religion ,  montra  des  aptiUulos  diverses  cl  une  grande 
«  supériorité  en  plusieurs  matières.  Zélé  prédicateur,  il  a 
«  instruit  par  la  parole  les  gens  du  mondé.  Successivement 
«  gardien,  maître  des  novices  et  définitcur,  il  a  été  très- 
«  utile  et  a  l'ait  beaucoup  d'honneur  a  son  Ordre.  Il  s'est 
«  fait  remar(]uer  à  la  fois  dans  les  sciences  pliilosopliiipies, 
«  théologiques  et  mathémalicpies,  aussi  bien  dans  l'ensei- 
«  gnement  que  dans  la  composition.  Aussi  l'Académie 
«  des  Sciences  de  Toulouse  l'a-t-elle  inscrit  au  nombre 
«  de  ses  membres,  et  l'Académie  Royale  des  Sciences  de 
«  Paris  sur  le  catalogue  de  ses  membres  correspondants. 
«  Comme  le  P.  Mélilou  est  encore  vivant,  la  liste  ci-après 
«  de  ses  ouvrages  n'est  peut-être  pas  complète**'.  »  Suit  la 
liste  des  cin(]  ouvrages  que  nous  a  laissés  le  P.  Méliton. 

Nous  avons  dit  précédemment  que  si  l'élude  des  sciences 
ecclésiastiques  permit  au  P.  Méliton  de  se  livrer  à  des  tra- 
vaux scientifiques  d'un  autre  genre,  ceux-ci  ne  nuisirent 
jamais  à  ceux  que  demandaient  de  lui  l'accomplissement 
de  ses  devoirs  et  la  régularité  de  son  étal.  Aussi  son  goût 
pour  les  sciences  abstraites  ne  l'cmpèclia-t-il  pas  de  pu- 
blier, dès  les  premières  années  de  son  entrée  en  religion, 
un  livre  de  piété  intitulé  :  Neuvaine  à  Noire-Dame  d'Espé- 
rancc^'K 

La  première  œuvre  scientifique  du  P.  Méliton  parut  en 
1758,  sous  ce  litre  :  Les  Epades  grégoriennes  êdaircies 

(1)  .Mf.liton  Perpin'IAn'ensis,  in  Tolosana  provincia  à  primis  usquè 
annis  pielati  œquè  ac  litteris  addictus.  Is  evasit,  ut  ferc  omiii  facullale 
et  prœstanlid  fiterit  auctiix.  Cniiciimntor  fcrvidus ,  sœculiim  cnidirit. 
(Uiiirdiaims,  nuritionim  mafjiiler  et  dcfiiiilor,  propriam  inslni.ril  reli- 
ffioncm.  Qiiiid  in  philosopliicis,  theologicis  et  matliematieis  disciplini 
vel  doeendo  rel  scriliendo  est  asserutus,  verè  fuit  ei/ref/ium  ;  undè  Tolo- 
sanœ  scientiarum  Arademiœ  surins  est  adscriplus ,  alqiic  l\eiji(r  Pari- 
siensis  factns  respondcns. . .  Cùni  adhitc  tirât,  forte  non  tutus  lue  es^ 
eJHS  operum  index;  ete. 

(2)  Un  viiliiiiic  iii-IS,  PcipiuMan,  clic/.  Viin-r,  17 lU  ri  1713. 


« 


364 

et  justifiées,  ouvrage  dans  lequel  après  avoir  rejeté  le 
nouveau  système  des  Epactcs  imaginé  par  le  Fr.  Hugues 
Perrin  de  Saint-Bruno ,  l'auteur  établit  les  principes  de 
la  correction  grégorienne,  justifie  ses  épactes,  en  les  éten- 
dant depuis  la  création  du  mo)ide  jusqu'à  dix  mille  ans 
après  la  venue  de  Notre-Seigneur,  cl  donne  une  méthode 
facile  et  claire  pour  trouver  la  Pâque  et  les  fêtes  mobiles  aux 
années  séculaires  et  autres  intermédiaires  à  perpétuité '^^K 
Mais  ce  qui,  aux  yeux  du  monde,  a  fait  surtout  la  gloire 
du  R.  P.  Méliton,  ce  qui  a  le  plus  contribué  à  conserver 
la  mémoire  de  ce  modeste  et  savant  religieux,  c'est  Tim- 
portant  ouvrage  qu'il  publia  en  1743,  sous  ce  titre  :  La 
Correction  grégorienne  expliquée,  mise  en  lumière  et  défen- 
due contre  ses  détracteurs,  embrassant ,  d'après  les  règles 
grégoriennes ,  la  série  de  tous  les  siècles  depuis  la  création 
jusqu'à  la  fin  des  temps;  ouvrage  très-utile  aux  ecclésias- 
tiques, aux  astronomes  cl  aux  chronologistes,  par  le  R. 
P.  Méliton  de  Perpignan,  ancien  professeur  de  l'Ordre 
des  Capucins,  membre  de  l'Académie  des  Sciences  de 
Toulouse,  etc.'-'.  Cet  ouvrage,  entièrement  écrit  on  latin 
et  édile  à  Cologne,  forme  un  volume  in-'i",  renfermant 
la  matière  de  deux  volumes  in-S*^  ordinaires.  L'auteur  le 

(1)  Cet  ouvrage  formai!  un  volume  in-12,  et  fut  imprime  à  Toulouse, 
dîez  J.  Uellior,  place  du  l'alais.  Voici  le  titre  ialiii  :  Greuorianœ  Epactœ 
illustraUi',  cl  à  convicii.s  vindicatœ;  iil/i.  inipiifjiidlo  iiovo  Epnclannn 
sijslcmad'  k  V.  llut^ouc  Perrin  Lyraci  solilario,  commcnto ,  f/rerjorianœ 
rorrcctioiiis  pvincipia  cxpkinnnîur.  ojtis  epnclœ.  diliiridinitur.  propurj- 
luinlur  et  e.vknilitntur  à  crmtkim  miindi  ad  decimum  annnrum  milliitrium 
post  adreiilinn  Cbristi,  pro  aiiiiis  i-eiitcsimis  et  uliis  inleniiixlis.  Le  lalin 
et  le  français  sont  en  regard. 

(2)  Grefforiana  corrcetin  iUustvutu .  anijiUidn  et  à  roiirieils  vindicata; 
iihi  oiniiia  sœeulii,  làm  ù  erealiaiie  pruieriln  (jin'iiii  ad  sœciili  consumma- 
tiiiiiem  fut  lira,  (]re(jiivianii  nnniid  iiKideniidiir;  opiis  rahlè  utile  Keelc- 
siastiei^t,  Aslraiinmis  et  C.hroïKdofiis;  aiictore  II.  1'.  Melitoiie,  l'eriiinia- 
ncnsi,  nrdinis  saiirli  Fraiicisri  Gapucciiinrinn  (inli<[iin  prnfessore.  Tolo- 
saïur  seie.ntinrum  academiœ  sncin,  etc. 


365 

tiédia  au  cardinal  lUin'o,  ancien  évêque  de  Ferrare,  alors 
doyen  du  Sacré -Collège  et  Prolecleur  de  l'Ordre  des 
Capucins. 

Il  n'est  pas  possible  de  présenter  une  analyse,  même 
succincte,  d'ouvrages  de  ce  genre.  !)isons  seulement  que 
le  P.  Méliton,  dans  son  second  ouvrage  scientilique,  après 
avoir  donné  les  cléments  du  coniput  ecclésiastique,  les 
règles  de  l'ancien  calendrier  et  les  principes  de  la  cor- 
rection grégorienne,  donne  un  nouveau  cycle  solaire  et 
un  autre  lunaire,  dont  il  détermine  les  nombres  par  le 
calcul  direct  et  rétrograde,  pour  les  années  i'utin-es  et 
passées.  Il  donne  aussi  une  nouvelle  méthode  aisée  de 
se  servir  de  la  correction  grégorienne,  en  substituant 
les  épactes  des  pleines  lunes  à  celles  des  nouvelles.  La 
grande  période  grégorienne  qu'il  propose  et  qui  va  en 
rétrogradant  depuis  1742  de  l'ère  chrétienne  jusqu'à 
l'origine  des  temps,  remet  les  solstices  et  équinoxes, 
aussi  bien  que  les  nouvelles  et  pleines  lunes,  aux  jours 
des  mêmes  mois  du  calendrier  grégorien  ;  ce  qui  est  vérillé 
par  le  calcul,  ainsi  que  par  les  éclipses  de  soleil  et  de  lune 
rapportées  par  les  historiens  et  les  astronomes. 

Cet  ouvrage  du  savant  capucin  lut  revêtu  des  plus  hautes 
et  des  plus  respectables  approbations.  En  effet,  outre 
celles  du  Provincial  et  du  Ministre-Général  des  Capucins, 
qui,  sur  le  rapport  de  j)lusieurs  théologiens  de  l'Ordre, 
en  permellaient  l'impression,  suivant  les  règles  de  Tlns- 
lilutO,  il  avait  encore  été  approuvé '->  par  la  Société 
Royale  des  Sciences  de  Montpellier,  sur  le  rapport  de 
deux  de  ses  membres  qui  avaient  été  chargés  d'examiner 
le  livre.  Le  18  décembre  suivant,  une  approbation  plus 

(1)  Les  14  février  et  21  mai  1740.  Dans  la  secoiule  approbalion,  le 
Général  des  Capucins  donne  au  P.  iMéiilon  le  titre  iaPro  comitiis  nostris 
(jeueralibus  custos. 

(2)  Le  11  févàer  1740. 


366 

haute  et  plus  flatteuse,  au  point  de  vue  de  la  science, 
était  attachée  h  cet  ouvrage  :  Tapprobalion  de  l'Académie 
Royale  des  Sciences  de  Paris,  signée  par  l'illustre  Fon- 
tenelle,  alors  secrétaire-perpétuel.  N'oublions  i)as  que  le 
savant  Cassini  fut  un  des  deux  académiciens  chargés  de 
rendre  compte  de  l'ouvrage  du  P.  Méliton,  nommé  quel- 
que temps  après  membre  correspondant  de  l'Académie  des 
Sciences (^*,  et  honoré  des  félicitations  des  plus  célèbres 
astronomes  de  l'époque.  Enlin,  le  25  juin  1742,  l'Aca- 
démie des  Sciences  de  Toulouse,  approuvait  hautement 
la  publication  de  l'ouvrage,  encore  manuscrit,  de  son 
associé,  et  ajoutait,  après  avoir  proclamé  la  grande  utilité 
de  la  Gregoriana  correctio ,  que  ce  livre  faisait  le  plus 
grand  honneur  au  R.  P.  Méliton. 

Inutile  de  dire  que  les  nombreuses  sociétés  savantes 
auxquelles  cet  ouvrage  avait  été  soumis,  constatèrent  la 
justesse  et  l'exactitude  des  calculs  de  l'auteur,  la  clarté 
et  la  solidité  de  ses  raisonnements,  la  portée  judicieuse  de 
ses  réflexions.  L'Académie  Royale  des  Sciences,  en  parti- 
culier, en  rendant  hommage  aux  recherches  curieuses  que 
présentait  ce  livre,  déclarait  «que  la  substitution  faite 
«  par  l'auteur  des  épactes  des  pleines  lunes  a  celles  des 
«  nouvelles ,  au  moyen  de  laquelle  le  calcul  était  singu- 
«  lièrement  abrégé  et  notablement  simplifié,  était  très- 
«  ingénieuse ,  et  qu'en  général  tout  l'ouvrage  dénotait 
«  beaucoup  de  sagacité  et  de  connaissance  de  cette  ma- 
«  tière  dans  l'auteur,  qui  l'avait  traitée  d'une  manière 
«  nette  et  précise...  » 

Toutefois,  nonobstant  ces  flatteuses  approbations  don- 
nées à  l'ouvrage  du  P.  Méliton ,  nonobstant  la  vaste  et 
solide  science  dont  il  était  la  preuve,  son  livre  fut  attaqué 
en  Italie  par  D.  Rettazzi,  de  Prato,  curé  ^-^  du  diocèse  de 

(1)  Le  diplôme  lui  fut  expédié  le  29  novembre  1746. 

(2)  Piovano ,  comme  en  lutin  plebanus .  dans  le  sens  de  rccior  ou 


367 

Pisloie,  en  Toscane,  et  auteur  (run  livre  intitulé  :  Epitome 
Operis  Paschalis^  public  à  Florence  en  1753.  La  nouvelle 
dissertation  du  criti(|uc  italien  fut  composée  en  langue 
vulgaire  et  imprimée  à  Lucques,  sons  ce  titre  :  Soilimeiito 
del  Piovano  Jacopo  BE'rTA/.zi,  (//  Prato,  in  tnrno  cl  Uhro 
del  mollo  Uev.  P.  Melitone,  du  Prrpignano^^K  L'auteur, 
en  envoyant  au  P.  Méliton  un  exemplaire  de  son  mémoire, 
prolestait  que,  s'il  avait  employé  l'idiome  vulgaire,  pour 
combattre  un  ouvrage  scientilitpie  écrit  en  latin ,  c'avait 
été,  non  |)oint  pour  pouvoir  rabaisser  impunément  le  livre 
du  capucin  auprès  des  ignorants,  mais  seulement  afin 
d'être  compris  de  ceux  de  ses  amis  (jui  ne  connaissaient 
pas  la  langue  ecclésiastique. 

La  défense  que  prépara  immédiatement  le  P.  Méliton, 
ne  parut  qu'en  174o,  lorsqu'il  était  à  Montpellier*-'.  La 
publication  en  avait  été  retardée ,  d'abord ,  parce  que  le 
P.  Méliton  dut  recourir  a  un  interprète  pour  se  l'aire 
traduire  le  mémoire  italien  de  Bettazzi;  en  second  lieu, 
parce  qu'il  dut  se  procurer  VEpitome  Operis  Paschalis , 
auquel  l'auteur  renvoyait  souvent  dans  son  mémoire,  et 
sur  lequel  il  tondait  ses  griefs  contre  les  tliéories  du  sa- 
vant capucin;  enfin,  parce  que  la  mort  du  R.  P.  Pro- 
vincial étant  survenue  sur  ces  entrefaites,  le  P.  Méliton 
s'était  trouvé  occupé  par  les  fonctions  de  sa  charge  de 
Vicaire-Provincial,  comme  nous  l'avons  dit  plus  haut. 

Dans  sa  défense  ou  Apologia,  écrite  aussi  en  latin,  le 
P.  Méliton,  suivant  pas  h  pas  chacune  des  objections  de 
son  adversaire,  établit  contre  Bettazzi  :  1°  l'exactitude  et 

parochus ,  quasi  plebis  dominus  aut  magisler,  id  est,  qui  plebi  prœest 
(Glossaire  i! ^  Du  Cange). 

(1)  Opinion  du  curé  i.  Dettazzi,  de  Prato,  sur  l'ourrauf  du  Irès- 
Hévérr.ud  Père  iMéliton,  de  Perpiynan.  Cette  criticiue  pmul  en  11  H. 

(2)  Celte  défense  ou  apologia  formait  une  brocliure  in-i"  de  70  pages, 
jointe  (|uel(iuelois  à  la  suite  du  grand  ouvrage. 


368 

la  supériorité  de  la  réforme  grégorienne,  attaquée  clle- 
mèrue  par  le  critique  italien  ;  2"  l'avantage  de  ses  calculs, 
dont  il  justilie  la  précision,  en  repoussant  ceux  qu'avait 
proposés  ïkltazzi  dans  son  Epilome. 

Après  cette  polémique,  dans  laquelle  nous  pouvons 
bien  dire,  sans  craindre  d'être  accusé  de  prévention  ou 
de  partialité,  que  l'avantage  resta  tout  entier  au  capucin- 
astronome,  celui-ci  envoya  au  savant  Henoit  XiV,  qui 
occupait  alors  la  chaire  de  Saint-Pierre,  un  exemplaire 
de  son  grand  ouvrage  et  de  sa  drfensc.  il  reçut,  à  l'occa- 
sion de  cet  envoi,  le  8  janvier  1746,  une  lettre  appro- 
bative  des  plus  llalleuses  du  Souverain  Pontife. 

A  l'activité  dans  l'administration  des  couvents  qu'il 
eut  a  diriger,  au  ministère  actif  de  la  prédication  qu'il 
exerça  si  souvent  et  avec  tant  de  fruit,  aux  talents  de 
l'écrivain  ascétique  et  du  théologien,  le  P.  Méliton  ne 
joignit  pas  seulement  la  connaissance  et  l'étude  solide 
des  sciences  exactes  :  il  fut  encore  artiste,  et  artiste  in- 
venteur... Je  veux  parler  des  soins  qu'il  sut  donner  a  la 
simplification  d'un  système  de  mosaïques,  exposé  et 
développé  par  son  auteur  dans  un  ouvrage  curieux  à 
plusieurs  titres,  et  dont  on  peut  consulter,  dans  la  Biblio- 
thèque publique  de  Perpignan,  le  manuscrit  demeuré 
inédit  jusqu'à  ce  jour. 

Cet  ouvrage  a  pour  titre  :  Traité  des  carreaux  de  deux 
couleurs,  mi-parlis  par  une  diatjonale'^^K  L'auteur  entend 
par  carreau  l'assemblage  de  deux  triangles  isocèles  de 
deux  couleurs,  susceptibles  de  recevoir  deux  positions 
différentes,  suivant  qu'ils  sont  placés  sur  les  côtés  ou 
sur  les  angles.  Or,  le  P.  Mélilon  expose  une  méthode 
qui  permet  de  produire  une  variété  presque  infinie  de 

(1)  Le  texte  latin  et  la  tradu(;tion  franraise  sont  en  re!,'ard.  Voici  le 
titre  latin  de  rouvra!];c  :  Trnclatits  dclateirulis  bicoloribiis  lineâ  diar/onali 
bipurtitis  ,  methoduin  adstrui-ns  ,  quâ  inter  varias  ac  pené  iufiiùlux 
ichnographias  possibiles  seliguntur  eleganliores. 


369 


dessins,  par  les  nombreuses  combinaisons  de  ces  deux 
positions  et  avec  l'unique  secours  de  deux  couleurs. 
On  peut  distinguer  clans  l'ouvrage  manuscrit  du  P.  Méli- 
ton  deux  parties  bien  distinctes.  Dans  la  première  partie, 
toute  scientiliquc,  et  qui  comprend  les  deux  tiers  de 
l'ouvrage,  l'auteur,  à  l'aide  de  nombreux  calculs  et  de 
savantes  théories,  développe  son  système  avec  une  rare 
clarté.  Ces  pages  dénotent  chez  le  savant  capucin  une 
profonde  connaissance  des  mathématiques,  une  forte 
application  au  travail,  enlin  la  simplicité  dans  la  méthode 
exposée.  La  seconde  partie,  embrassant  l'autre  tiers  du 
volume  et  comprenant  89  planches,  est  à  la  fois  artis- 
tique et  mécanique;  car  elle  présente  l'heureuse  appli- 
cation de  cette  méthode.  D'après  l'opinion  déjuges  éclai- 
rés et  compétents,  cette  seconde  partie  pourrait,  à  la 
rigueur,  être  considérée  comme  la  seule  vraiment  utile 
au  fabricant  et  à  l'ouvrier,  si  ce  bel  et  curieux  ouvrage 
du  P.  Méliton  était  jamais  livré  au  public.  Ce  qui  est 
certain,  c'est  que  les  nombreuses  ligures  contenues  dans 
chaque  planche,  étonnent  par  la  variété  et  la  régularité 
des  dessins  obtenus  au  moyen  de  deux  seules  couleurs; 
si  bien  qu'on  ne  sait  ce  qu'il  faut  admirer  le  plus,  ou 
de  la  grâce  ingénieuse  de  ces  dessins,  ou  de  la  savante 
complication  des  ligures,  dont  certaines  sont  composées 
de  64  et  même  de  100  carreaux. 

Il  existe  deux  exemplaires  manuscrits  de  cet  ouvrage  : 
l'un  à  la  Bibliothèque  Impériale,  à  Paris;  l'autre  à  la 
Bibliothèque  de  Perpignan  (^'.  Ce  dernier,  qui  provient 
de  l'ancien  couvent  des  Capucins  de  celte  ville,  forme  un 
volume  in-i",  écrit  de  la  main  même  du  P.  Méliton  et 
portant  \i  date  de  1724. 


(2)  Opus  quQdservatur,  uiiuoi Pansiis.iiiBibJiotheca Regia,  etaliud 
in  Cûnvcnlu  Mstro  Perpiiiiani  (BMioÛiecd  scrip'.oraiu  Grdiuis  Miiiorum 
S.  Francisci  Canjcciuoruin). 

24 


370 

Celte  œuvre  dei  notre  religieux  avait  été  soumise  à 
l'Académie  des  Sciences  de  Paris,  dans  le  sein  de  la- 
quelle elle  fil  l'objet  d'un  rapport  favorable  et  Irès- 
clogieux  de  Fontenelle,  qui  devait,  quelques  années  plus 
tard,  apprécier  si  avantageusement  la  Gregoriana  cor- 
redio  u[us!rata,  composée  par  le  même  auteur  ^^>.  «  Il  y 
«  a  dans  cet  ouvrage,  disait  l'illustre  académicien,  beau- 
«  coup  de  métho Je  et  de  travail  ;  il  ajoute  à  ce  que  le 
«  R.  P.  Donat,  religieux  Carme,  avait  ingénieusement 
«  trouvé  sur  cette  matière.  Cette  méthode,  plus  juste  et 
«  plus  courte  que  celle  du  li.  P.  Sébastien  Fruchet.  meni- 
«  bre  honoraire  de  l'Académie  des  Sciences,  produit  un 
«  nombre  infini  d'arrangements  différents  qui  n'avaient 
ce  pas  été  trouvés,  et  en  règle  le  choix...  »  L'Académie  de 
Monlpellier,  qui  avait  aussi  approuvé  et  très-honorable- 
ment mentionné  le  livre  du  P.  Méliion,  ajoutait  qu'il  serait 
«  d'une  grande  utilité  au  public,  surtout  pour  le  pavé  des 
«  églises  et  des  grandes  salles,  où  ces  combinaisons  et  chan- 
ce gemenls  pourraient  paraître  dans  toute  leur  étendue.  » 

On  doit  donc  regretter  qu'une  œuvre  de  cette  nature, 
d'ailleurs  honorée  des  approbations  nécessaires  pour  qu'il 
pût  être  procédé  à  sa  publication,  soit  demeurée  inédile, 
et  à  peu  près  ignorée,  même  en  Roussillon.  Le  P.  Bernard 
de  Bologne  nous  apprend  que  le  P.  Méliton,  voyant  que 
l'impression  de  son  ouvrage  et  surtout  la  reproduction 
des  planch'îs,  entraîneraient  des  frais  considérables  et  peu 
compatibles  avec  la  pauvreté  des  Frères  Mineurs,  avait 
insisté  lui-même  pour  empêcher  sa  publication'-*. 

Espérons  qu'elle  sera  enfin  entreprise,  ne  fût-ce  que 
dans  l'intérêt  de  l'industrie. 

(1)  Co  rapport  est  inscrit  dans  les  registres  de  l'Académie  des  Sciences, 
à  la  datri  du "20  février  1723. 

(2)  Opus....  oh  militas  ichnographius  sumplti  non  mediovri  nostrœ 
paupertati  non  congruo  exculpendas  impcditum  ah  audore  ne  in  Iticem 
prodirel. 


371 


VIGAHOSY, 

y-M  II»  JOSEPH  SiRVEW,  membre  résidant. 


Les  lettres  et  le  département  de  l'Âriége,  ont  fait  une 
perle  sensible  dans  la  personne  do  M.  Vigarosy  (Anloine- 
Benoîl),  chevalier  de  la  Lcgion-d'llonneiir,  maire  de  Mire- 
poix,  ancien  membre  et  président  du  Conseil-Général  de 
l'Ariége,  membre  de  plusieurs  Sociétés  Académiques, 
décédé  le  16  mars  1837,  à  l'âge  de  soixante-huit  ans. 

Jeune  encore,  il  embrassa  par  inclination  la  carrière 
des  armes,  où  il  obtint  de  beaux  succès;  les  événements 
politiques  de  iSli,  le  trouvèrent  capitaine  d'état-major. 
Le  licenciement  de  Tarmée,  qui  eut  lieu  à  cette  époque, 
en  brisant  son  épée,  le  ramena  à  Mirepoix,  au  sein  de 
sa  famille. 

Dans  ses  loisirs,  il  aimait  à  se  livrer  au  doux  commerce 
des  lettres.  Diverses  compositions,  en  prose  et  en  vers, 
qu'il  mit  successivement  au  jour,  contribuèrent  à  lixer 
sur  lui  ralleulion  publique;  les  écrivains  distingués  de  l'é- 
poque l'encouragèrent  et  applaudirent  ses  heureux  essais; 
des  académies  en  renom  de  la  province  s'empressèrent 
de  l'associer  a  leurs  travaux,  et  le  Midi  s'enorgueil  it 
bientôt  de  compter  parmi  ses  enfants  un  poète  de  plus, 
riche  d'avenir. 

En  1850,  nommé  maire  de  Mirepoix,  il  a  rempli  ces 
fonctions  honorables  et  souvent  difficiles  jus{ju'à  sa  mort, 
au  gré  de  tous,  se  faisant  aimer  et  respecter  de  ses  admi- 
nistrés, dont  ii  était  le  (tèrc  et  le  prolcclour  le  |)lus  dévoué. 
Aussi,  voulurent-ils  lui  donner  une  preuve  d(t  haute  con- 
liance  en  l'envoyant  siéger  au  Conseil-Géaéral  de  leur 
département,  où  il  occupa  la  première  place. 


372 

En  1832,  cédant  aux  sollicitations  pressantes  de  ses 
amis,  il  se  décida  à  publier  un  volume  de  fables,  quelque 
temps  après  un  volume  de  poésies,  intitulé  :  L'Amaryllis. 
M.  Edouard  de  Puycousin,  directeur  des  Revues  de  Nimes 
et  de  Montpellier,  à  propos  de  la  publication  de  ce  dernier 
ouvrage,  formula  alors  en  ces  termes  son  opinion  sur  le 
mérite  littéraire  des  œuvres  du  poète  ariégeois  : 

«  Au  nombre  des  hommes,  dont  les  écrits  font  depuis 
«  longtemps  le  plus  |d'honneur  à  la  littérature  dans  le 
«Midi,  on  peut  incontestablement  ranger  M.  Vigarosy. 

«  Poète  brillant  et  facile ,  autant  que  prosateur  d'un 
«  goût  sévère  et  pur,  les  journaux,  les  annales  littéraires, 
«  les  annuaires,  les  keepsakes,  répétèrent  longtemps  les 
«r  accents  qu'il  modulait  du  fond  des  Pyrénées. 

«  Si  par  ses  fables  si  bien  contées,  si  pleines  de  grâce 
«  et  de  naturel,  et  dont  la  publicité  lui  valut,  il  y  a  quel- 
ce  ques  années,  le  surnom  de  Fabuliste  du  Midi,  M.  Viga- 
«  rosy  a  pris  rang  parmi  les  Florian,  les  Arnault,  les  Sé- 
«  gur,  les  Jauffret,  les  Gosse,  les  Le  Baiily,  on  peut  dire 
«  que  par  ses  méditations,  ses  tableaux,  ses  souvenirs,  il  a 
«  mérité  aussi  une  des  premières  places  parmi  les  poètes 
«  de  nos  jours  qui  se  sont  distingués  par  la  grâce  de 
«  l'expression  et  la  force  de  la  pensée. 

Correspondant  de  la  Société  Agricole ,  Scientifique  et 
Littéraire  des  Pyrénées-Orientales,  M.  Vigarosy  comptait 
dans  celte  Société  des  admirateurs  de  son  talent  qu'il 
honorait  d'une  estime  particulière.  Or,  en  payant  un  tri- 
but à  la  mémoire  du  littérateur,  nous  n'oublions  pas  l'ami 
dévoué  dont  la  bienveillance  toute  cordiale,  toute  sympa- 
thique, nous  a  fait  plus  vivement  sentir  combien  sa  perte 
doit  nous  laisser  de  profonds  et  d'éternels  regrets. 


373 


AVALISE  CIllllIÛl'E  DE  LA  STÉATITE  DE  HOSSET, 

Par  U.  liéom  FEunEa,  Pharmacien  de  ire  classe,  Secrétaire 

du  Conseil  d'Hygiène  publique  et  de  Salubrité, 

membre  résidant. 


On  lit  dans  Anglada  :  «  Ce  qui  mérite  surtout  d'être 
signalé  à  l'intérêt  des  naturalistes,  pour  les  excursions 
dont  Molitg  peut  devenir  le  pivot,  c'est  non-seulement 
la  richesse  de  la  flore  de  la  montagne  de  Mosset,  mais 
encore  une  belle  formation  de  stéatitc  que  l'on  y  découvre 
dans  cette  portion  de  territoire  que  l'on  connaît  sous  le 
nom  de  .fasse  dcl  Callau.  » 

M.  le  docteur  Companyo  décrit  aussi  cette  espèce  miné- 
ralogique  dans  son  intéressant  Traité  d'Histoire  naturelle 
des  Pyrénées-Orientales ,  et  la  désigne  sous  le  nom  de 
stéatite  ou  craie  de  Briançon. 

Je  viens  d'avoir  l'occasion  d'étudier  ce  minéral,  qu'on 
trouve  associé  au  quartz  hyalin  et  à  la  chaux  carhonatée, 
sur  plusieurs  échantillons  qui  m'ont  été  apportés  de  ilosset. 
Il  est  compacte,  tendre,  onctueux  et  même  savonneux, 
comme  la  stéatite;  mais  la  proportion  d'alumine  qui  entre 
dans  sa  composition  chimique  le  fait  appartenir  à  une 
espèce  distincte  de  la  sléalite,  quoique  très-voisine. 

La  stéatite  ou  talc  compacte,  fait  partie,  avec  le  talc 
foliacé  ou  laminaire  et  le  talc  écailleuxO,  de  l'espèce  talc. 
Ces  diverses  sortes  de  talc  ont  pour  caractère  commun 
d'être  composées  de  silice  et  de  magnésie  dans  des  pro- 
portions presque  identiques,  avec  une  quantité  d'eau  va- 
viable.  F^'alumine  n'entre  pas  dans  leur  con^position,  et, 
si  exceptionnellement  (pielques  échantillons  en  ont  fourni 
à  l'analyse,  c'est  en  très-petite  quantité.  Un  échantillon  de 
talc  écailleux,  analysé  par  Vauquelin,  a  donné  i,oO  d'alu- 

(1)  C'est  une  variété  de  talc  écailleux,  d'un  assez  beau  blanc,  qui  existe 
a>ix  environs  de  Briançon,  qu'on  appelle  improprement  Craie  de  Briançon. 


374 

mine  pour  cent;  un  cchanlillou  de  siéatitc  a  conné  à  un 
chimiste  allemand,  Tengstroem,  0,78  p.  7o  seul-mient.  Les 
autres  analyses  que  je  connais  de  diflerenies  variétés  de 
talc,  ne  nienlionnonl  pas  la  présence  de  l'alui  line. 

Sous  le  noiii  de  soponite,  M.  Leymeric  rassemble,  pour 
en  faire  une  espèce  distincte,  des  minéraux  lompactes, 
très-voisins  de  la  stéatite,  qu'on  a  appelés  pierre  à  savon, 
saponile,  cérolUc ,  et  chez  lesquels  l'analyse  indique  un 
hydro  silicale  de  magnésie,  avec  8  a  10  p.  7o  d'alumine. 
Le  minéral  qui  nous  occupe  contient,  d'après  l'analyse 
que  j'en  ai  laite  et  que  je  rapporte  plus  bas,  8,82  p.  % 
d'alumine.  Le  nom  de  saponite  lui  conviendrait  donc,  et 
j'auriàs  proposé  de  le  lui  donner,  si  M.  Nicklès  n'avait  jeté 
récemment  un  peu  de  confusion  sur  ce  nom,  en  l'appli- 
quant à  un  minéral  trouvé  à  Plombières,  qui  selcn  l'analyse 
qu'il  en  a  présentée  a  l'Académie  des  Sciences,  est  un  hydro 
silicale  d'alumine,  ne  contenant  que  des  traces  de  magnésie. 

Je  conserverai  à  notre  espèce  minéralogique  del  Callau 
de  Mosset,  le  nom  de  stéatile,  mais  en  lui  ajoutant  le  mot 
alumineuse,  pour  la  distinguer  de  la  sléatite  proprement 
dite.  Elle  m'a  donné  a  l'analyse  : 

Silice 59,70 

Magnésie 28,08 

Alumine 8,82 

Eau 3,40 

100,00 
Au  lieu  de  la  considérer  comme  un  silicate  de  magnésie 
simple  contenant  de  l'alumine,  j'admettrais  plus  volontiers 
que  l'alumine  y  existe  à  l'état  de  silicate  d'alumine,  et  que 
cette  espèce  minéralogique  est  un  silicate  double  de  magné- 
sie et  d'alumine.  En  discutant  les  résultats  de  mon  analyse 
dans  cette  hypothèse,  on  trouve  un  équivalent  d'alumine 
silicalée  Al-"0'  SiO%  uni  h  un  équivalent  de  magnésie 
silicalée  de  la  fornmle  TMgO ,  (îSiO'  (  cette  formule 
exprime  la  composition  la  plus  habituelle  des  silicates 
magnésiens  naturels)  et  enfin,  2  équivalents  d'eau. 

La  formule  de  la  stéatite  alumineuse  de  Mosset,  serait 
donc  : 

Mg^  SÏ«  -{-  Xi'    Si-f-H'. 


375 


YKRS  ADRESSÉS  A  MONSEIGNEUR  GERBET, 

LORS   DE   SA   VISITE  AU   COLLÈGE   DE   PERPIGNAN, 

POUR  Y  ADMIN13TRER 

LE   SACREMENT   DE    LA    CONFIRMATION. 


Monseigneur  , 

Quand  près  de  remonter  vers  son  père  et  le  nôtre, 

Pour  la  dernière  fois  exhortant  cliaque  apôtre. 

Allez,  leur  dit  Jésus,  parcourez  l'Univers, 

Et  semez  ma  parole  en  mille  endroits  divers; 

Surtout  ajouta-l-il,  observant  mes  exemples, 

Répandez-la  d'abord  dans  les  plus  humbles  temples; 

Qu'elle  soit  prodiguée  à  ces  infortunés. 

Qui,  dès  l'aube  du  jour  vers  la  terre  inclinés, 

Subissent  sans  répit  le  jugement  sévère 

Contre  l'homme  porté  par  mon  céleste  père. 

Les  apôtres,  suivant  le  vœu  de  Jésus-Christ, 

Et  bientôt  cnnanimés  do  son  divin  esprit, 

En  firent  rayonner  les  sublimes  lumières 

Chez  les  humbles  de  cœur,  dans  les  simples  chaumières, 

D'où  la  foi  s'éleva  jusqu'au  cœur  d'Augustin 

Et  monta  sur  le  trône  au  front  de  Constantin. 

Éloquent  héritier  de  ces  élus  célèbres. 

Qui  du  monde  romain  dissipant  les  ténèbres, 

Même  aux  plus  aveuglés  dessillèrent  les  yeux, 

A  peine  de  la  Somme  arrivé  dans  ces  lieux. 

Vous  avez.  Monseigneur,  parcouru  nos  campagnes, 

Visité  nos  vallons,  et  franchi  nos  montagnes, 

Partout  du  Saint-Esprit  distribuant  les  dons, 

Et  partout  de  respect  faisant  d'amples  moissons. 


376 

El  nous  disions  alors:  quand  donc  en  celte  cnceinle 
Vicndra-l-il  sur  nos  fronls  répandre  l'huile  sainle? 
Quand  voudra-1-il  aussi  nous  voir  et  nous  bénir? 
Nos  cœurs  étaient  tournés  vers  ce  doux  avenir, 
Lorsque  vous  rappelant  que  le  Sauveur  lui-même 
Avait  dil  :  Approchez,  mes  enfants,  vous  que  j'aime! 
Ah!  qu'on  permello  à  tous  d'arriver  jusqu'à  moi! 
Vous  venez,  agitant  nos  cœurs  d'un  saint  émoi, 
Vous  venez,  Monseigneur,  de  votre  main  auguste, 
En  notre  âme  imprimer  le  divin  sceau  du  juste: 
Nous  serons  désormais  vos  enfants  devant  Dieu; 
Fiers  de  ce  nom  sans  prix  en  tout  temps,  en  tout  lieu, 
Illuminés  d'ailleurs  de  la  vive  étincelle 
Qui  nous  va  pénétrer,  quel  courage  et  quel  zèle 
Ne  déploirons-nous  pas,  pour  orner  chaque  jour 
Nos  esprits  de  talents,  nos  cœurs  d'un  saint  amour, 
Pour  rendre  noire  vie  utile  el  fortunée, 
El  mériter  la  gloire  aux  élus  destinée; 
Mais  si  jamais  leur  foi  venait  à  chanceler, 
Vos  enfants,  Monseigneur,  pi-ompts  à  se  rappeler 
Vos  exemples  louchants,  voire  vertu  sublime, 
Retrouveraient  soudain  l'ardeur  qui  les  anime. 
Sur  le  Irùne,  dil-on,  le  plus  grand  des  guerriers, 
Eslimanl  à  leur  prix  son  litre  cl  ses  lauriers, 
S'écria  :  Mes  amis,  ma  plus  belle  journée 
Fui  celle  où  dans  mon  cœur,  en  ma  douzième  année, 
Pour  la  première  fois  je  reçus  Jésus-Chrisl  !  • 
Touchés  de  son  exemple  et  pleins  de  son  esprit, 
Nous  aurons.  Monseigneur,  présent  dans  la  mémoire, 
Jusqu'au  dernier  soupir,  cet  heureux  jour  de  gloire, 
Où  Jésus,  en  vos  mains,  fait  briller  à  nos  yeux 
Le  signe  qui  peut  seul  nous  guider  vers  les  cicux  ! 

!..  FARRR,  Secrétaire  de  la  Société. 
Professeur  en  rolraite. 


377 


LA  CHARITÉ. 


(isti».) 

Fille  du  ciel,  la  Charité, 
D'un  ange  a  le  doux  caractère  ; 
Elle  calme,  par  sa  bonté, 
Les  maux  cruels  de  cette  terre. 
Qui  ne  chérit  ses  douces  lois? 
Et,  précédant  les  saints  apôtres. 
Elle  apprit  aux  peuples,  aux  rois, 
A  s'assister  les  uns  les  autres. 

L'homme,  sous  le  poids  du  chagrin, 
A  sa  voix  prie  et  se  console  ; 
Elle  est  mère  de  l'orphelin 
Que  repousse  un  monde  frivole; 
Sa  main,  à  flots,  verse  sur  nous 
Les  biens  que  la  Vierge  lui  donne; 
Et  l'incrédule,  à  deux  genoux. 
L'appelle  quand  tout  l'abandonne. 

Voyez  cette  famille  en  pleurs, 
Mourant  de  faim  dans  sa  chaumière; 
Elle  s'abreuve  des  douleurs 
Que  connaît  seule  la  misère; 
Mais  pour  elle  brille  soudain 
L'étoile  au  malheur  si  propice: 
Elle  renaît,  elle  a  du  pain. 
Grâce  à  la  sainte  protectrice. 


378 

Elle  créa  la  bonne  Sœur, 
El  la  plaça  dans  cet  asile 
Où  l'infortune  et  la  douleur 
Trouvent  enfin  un  port  tranquille, 
Où  reçoit  les  mêmes  recouis 
Le  chrétien  comme  l'infidèle  : 
La  Charité  sera  toujours. 
Ici-bas,  un  divin  modèle. 

A  Madame 


Elle  bénit  votre  berceau, 
Et  vous  anima  de  la  flamme 
D'où  naît  ce  sentiment  si  beau 
Que  l'on  admire  en  vous,  Madame; 
Et  chaque  jour,  faisant  le  bien. 
Vous  êtes,  par  votre  assistance. 
Aux  yeux  du  pauvre  sans  soutien , 
Une  seconde  Providence! 


Joseph  SIRVEN, 
Membre  de  plusieurs  Sociétés  Académiques. 


379 


LES  GRUES  D'IBICUS. 


ANECDOTE  HISTORIQUE. 


L'avide  malfaiteur,  qui  médite  un  .^rand  crime, 
D'ombres  enveloppé  va  cliercher  sa  victime, 
Dans  l'espoir  de  soustraire  aux  regards  des  humains 
Son  forfait  et  le  sang  dont  il  rougit  ses  mains. 
Vaines  précautions!  Mille  fois  un  indice 
Le  livre  sur  le  champ  au  fer  de  la  justice. 
La  trompe-t-il  d'abord?  Il  ne  trompe  pas  Dieu; 
Dieu,  dont  Fœil  vigilant,  en  tout  temps,  en  tout  lieu, 
Le  poursuit  jusqu'au  jour  où  la  vérité  pure 
Perce  de  ses  rayons  la  nuit  la  plus  obscure, 
Lorsqu'enfin,  à  défaut  d'un  dénonciateur, 
Le  coupable  devient  son  propre  accusateur. 
Quels  crimes,  en  effet,  dès  le  berceau  du  monde, 
Commis  par  notre  race  en  méfaits  si  féconde, 
Restèrent  impunis?  Je  pourrais  longuement 
Citer  ceux  que  suivit  un  juste  chAtiment; 
Mais  au  lieu  d'entreprendre  une  tâche  inutile. 
Prenons  aux  temps  anciens  un  exemple  entre  mille  : 


Déjii  célèbre  et  fier  de  vingt  rivaux  vaincus, 
D'un  pas  précipité,  le  poète  Ibicus, 
Seul,  traversait  un  bois  au  sinistre  feuillage. 
Quel  était  donc  le  but  d'un  si  pressant  voyage? 


380 

Olympie...  Il  allait  sous  ces  ombrages  verts, 

Y  disputer  le  prix  et  des  chants  et  des  vers. 

Demain,  se  disait-il,  transporté  d'espérance, 

Demain,  devant  les  rois,  devant  un  peuple  immense. 

J'entrerai  dans  la  lice,  où,  laissant  de  côté 

Le  prix  qu'attend  la  force  ou  la  légèreté. 

Et  cédant  au  transport  qui  m'échauffe  et  m'inspire, 

Je  pourrai  sous  mes  doigts  faire  rendre  à  ma  lyre 

De  sublimes  accords,  et  par  eux  obtenir 

Les  lauriers  immortels  que  rien  ne  peut  flétrir. 

Je  dirai  les  héros,  les  demi-dieux...  Arrête! 

Crie  une  voix  terrible,  et  soudain  sur  sa  tête 

Ibicus  voit  briller  de  sinistres  poignards, 

Qu'agitaient  deux  brigands  aux  farouches  regards. 

11  veut  les  repousser;  mais  vainement...  Habile 

Dans  les  arts  de  la  paix,  sa  main  est  trop  débile 

Pour  détourner  le  fer  qui  menace  son  sein. 

Sous  les  coups  redoublés  de  ce  couple  assassin , 

Il  tombe...  Il  se  débat...  Sentant  qu'avec  la  vie, 

A  son  brillant  espoir  la  couronne  est  ravie, 

Il  lève  vers  le  ciel  un  regard  presque  éteint  ; 

Tandis  que  de  son  sort  aux  Muses  il  se  plaint. 

Il  aperçoit  soudain  une  troupe  de  grues. 

Du  nord  vers  le  midi  planant  au  sein  des  nues: 

Oiseaux  qui  voyagez,  dit  sa  mourante  voix, 

Abaissez  vos  regards  dans  ce  funeste  bois; 

Voyez  ces  deux  brigands,  leurs  poignards,  leur  victime  ; 

Plaignez  mon  triste  sort  et  dénoncez  le  crime! 

Je  vous  lègue  ce  soin!  Un  cri  tunuiltueux, 

Au  poète  mourant  répond  du  haul  des  cieux... 

Vous  m'entendez?  Adieu!  Qu'une  flèche  inhumaine 

Ne  vienne  point  briser  l'essor  qui  vous  entraîne? 

Il  expire  à  ces  mots.,.  Un  sourire  moqueur 

fknd  encor  plus  h\àem  ces  deux  hommes  sans  c<êW, 


381 

Sur  ces  restes  sanglants  l'un  et  l'autre  se  jette, 
S'empare  du  peu  d'or  que  le  divin  poète 
Plaça  dans  sa  ceinture  en  quittant  ses  foyers  ; 
Mais  auprès  du  cadavre  ils  laissent  volontiers 
La  lyro  d'Ibicus...  Et  qu'importe  une  lyre 
Aux  cœurs  qu'agite  seul  un  criminel  délire  ! 


Cependant  Olympie  a,  dès  l'aurore,  ouvert 
La  lice,  où  de  cent  lieux  accourent  de  concert 
Rois,  peuples  et  héros,  et  chacun  d'eux  s'apprête 
En  simple  spectateur  à  jouir  de  la  fôle, 
Ou  bien  à  disputer  la  palme  du  vainqueur. 
On  attend  Ibicus...  Chaque  âme,  chaque  cœur. 
Que  transporta  vingt  lois  sa  puissante  harmonie. 
Brûlent  de  voir  encore  éclater  son  génie. 
Sans  doute,  disait-on,  il  va  nous  captiver 
Par  ces  brillants  accords  que  lui  seul  peut  trouver. 
Quand  soudain  un  héraut,  tout  couvert  de  poussière, 
Et  répandant  des  pleurs,  entre  dans  la  carrière; 
Sa  main  porte  une  lyre  avec  un  voile  noir  : 
Grecs,  s'est-il  écrié,  pleurez  tous!  plus  d'espoir! 
Plus  de  ces  chants  divins  qui  ravissaient  nos  iîmes! 
De  cruels  ennemis,  des  brigands,  des  infâmes 
Ont  percé  notre  ami!  Poète  infortuné! 
Ibicus,  Ibicus  est  mort  assassiné! 
0  singulier  pouvoir  qu'exerce  le  génie! 
Celte  foule  de  gens  de  cent  lieux  réunie, 
N'avait  point,  la  plupart,  vu  les  traits  d'Ibicus; 
Ils  avaient  lu  ses  vers,  que  fallait-il  de  plus? 
Sa  voix  avait  partout,  sublime  et  populaire, 
Retenti  dans  les  cœurs,  comme  la  voix  d'un  frère. 
Et  ce  frère  était  mort!  Un  long  gémissement 
Fait  du  peuple  éclater  le  premier  senliuient;. 


382 

Puis,  l'indignation  se  frayant  un  passage, 

On  n'entend  que  clameurs,  menaces,  cris  de  rage. 

Où  sont  les  scélérats,  les  monstres  inhumains. 

Qui  d'un  poignard  armant  leurs  sacrilèges  mains, 

De  son  digne  poète  ont  privé  la  patrie  ; 

Ou  sont  ceux  qui,  poussés  par  l'enfer  en  furie, 

Ont  osé  profaner  un  luth  religieux. 

Et  dans  leur  favori  frapper  même  les  dieux? 

Et  chacun,  la  douleur  sur  le  visage  empreinte. 

D'un  regard  courroucé  parcourt  toute  l'enceinte, 

Cherchant  à  démêler  sur  quelque  pâle  front 

Les  ravages  affreux  que  les  remords  y  font. 

Mais  rien  ne  trahissait  une  âme  bourrelée. 


Lorsqu'afin  de  calmer  la  foule  désolée, 
Un  généreux  poète,  émule  d'ibicus, 
Eut,  en  improvisant,  célébré  ses  vertus  ; 
Qu'il  eut  rendu  justice  à  sa  Muse  sublime, 
Et  qu'au  nom  de  la  Grèce,  en  ces  lieux  unanime, 
Il  eut  avec  respect  couronné  de  lauriers 
Ce  luth  qu'avait  souillé  la  main  des  meurtriers. 
On  commence  les  jeux...  Le  premier  fut  la  course  : 
Dans  l'émulation,  des  succès  noble  source. 
Puisant  une  autre  force,  une  nouvelle  ardeur. 
Des  hommes,  comme  un  trait  qui  part  avec  raideur. 
S'élancent  dans  la  lice...  Une  épaisse  poussière 
S'élève  et  les  poursuit  le  long  de  la  carrière; 
Chacun  d'eux  le  premier  au  but  veut  parvenir, 
Dùt-i!,  en  l'atteignant,  le  toucher  et  mourir. 
Quant  à  la  multitude,  inconstante  et  légère. 
Elle  sèche  ses  pleurs...  Sa  douleur  éphémère 
S'apaise...  Pour  la  course  elle  oublie  Ibicus, 
Et,  captivée  ailleurs,  n'y  songe  déjà  plus. 


;i83 


Mais  le  but  est  atteint,  la  palme  décernée, 
Et  de  l'heureux  vainqueur  la  tête  est  couronnée. 
Tandis  que  l'on  prépare  un  deuxième  combat, 
Que  toute  l'assemblée  attend  le  pugilat, 
Soudain,  du  haut  des  airs  une  clameur  bruyante 
Attire  les  regards  de  la  foule  ondoyante. 
Au  même  instant,  assis  sur  le  plus  haut  gradin. 
Un  homme  au  sombre  aspect,  coudoyant  son  voisin , 
Lui  dit  en  ricanant  :  Regarde  dans  les  nues; 
Regarde!  D'ibicus,  ce  sont,  ma  foi,  les  grues! 
Ibicus!  Est-ce  bien  Ibicus  qu'il  a  dit? 
Quels  rapports  ce  poêle  eut  avec  ce  bandit? 
Pourquoi  ^rononce-t-il  un  nom  si  vénérable? 
Serait-ce  l'assassin?  Voyons-nous  le  coupable? 
Le  mot  qu'a  dit  cet  homme,  h  l'eiitour  répété. 
Éveille  les  soupçons...  Sur  le  champ  arrêté, 
Avec  celui  que  tout  fait  croire  son  complice, 
L'un  et  l'autre  pâlit,  et,  devant  la  justice 
Amenés  tous  les  deux,  ils  sont  interrogés 
Séparément,  ensemble,  et  sans  être  obligés 
De  subir  la  torture,  atroce  extravagance 
Sauvant  cent  fois  le  crime  et  perdant  l'innocence; 
Ils  coniessent  enfin  leur  horrible  forfait. 
Et  leur  prompt  châtiment  à  la  loi  satisfait. 


Vous,  que  la  soif  du  sang  à  le  répandre  porte, 
Sachez  que  tôt  ou  tard,  mortels,  à  votre  porte 
Frappera  la  justice,  implacjble  Érinnys, 
Qui  ne  laisse  jamais  de  forfaits  impunis. 

L.  F.\BRE.  Secrétairi'  de  la  Société, 
Professeur  en  retraite. 


384 


ÉLOGE  DU  MARÉCHAL  DE  MAILLY, 

LIEUTENANT-GÉNÉRAL  DU  ROUSSILLON 
ET  COMMANDANT  EN   CHEF   DE   CETTE  PROVINCE. 

(Ouvrage  couronné  par  la  Société  Agricole,  Scientifique  et  Littéraire  des 
Pyrénées-Orientales,  au  Concours  régional  de  1862.) 


On  peut  être  héros  sans  ravager  la  terre 

(BOILEAU.) 


I. 

Heureux  le  souverain  qui,  pour  auxiliaire, 

Choisit  un  magistrat  que  le  peuple  révère; 

Uu  homme  vertueux,  un  esprit  éclairé, 

Qui,  semant  des  bienfaits,  peut  cueillir  à  son  gré. 

Pour  son  prince  et  pour  lui,  d'amples  moissons  de  gloire. 

Et  dont  l'ambition  est  d'enrichir  l'hisloire. 

D'illustrer  son  pays,  de  se  faire  bénir, 

De  laisser  un  grand  nom  aux  siècles  à  venir; 

Qui,  ferme  sans  rigueur,  indulgent  sans  faiblesse, 

Fait  respecter  la  loi,  qu'il  respecte  sans  cesse. 

—  Un  tel  auxiliaire  est  un  présent  du  ciel  ; 

Il  rend  le  peuple  heureux,  le  monarque  éternel. 

Ce  n'est  que  par  l'amour  que  s'afl'crmit  un  trône. 

L'éclatant  diadème  où  la  gloire  rayonne, 

Aux  gloires  de  l'État  emprunte  sa  splendeur. 

Et  souvent  les  grands  rois  ieur  doivent  leur  grandeur, 


385 

Comme  un  astre  pompeux  poursuivant  sa  carrière, 
Et  que  son  satellite  inonde  de  lumière. 
L'auréole  qui  brille  au  front  d'un  souverain 
D'un  peuple  glorieux  n'est  que  le  riche  écrin  : 
C'est  là  que  tout  rayon  converge  et  se  condense, 
C'est  là  que  resplendit  la  gloire  de  la  France  !... 

—  Mais  si  le  fleuve  altier,  comme  l'humble  ruisseau, 
Se  perd  dans  l'océan  ainsi  qu'en  un  tombeau. 

Le  génie  émergent  qui  rend  un  homme  illustre, 
Au  radieux  foyer  conserve  encor  son  lustre, 
Dont  Téclat  rellété  sur  la  vague  des  ans 
Brille  comme  un  soleil  à  l'horizon  des  temps. 
Or,  l'astre  le  plus  grand  n'est  pas  le  plus  utile  : 
Pour  nous  de  Sirius  la  lumière  est  stérile. 
Tandis  que  nos  regards,  pour  retrouver  le  port, 
Cherchent  avec  amour  l'humble  étoile  du  nord. 

—  Les  hon.mes  dont  les  noms  remplissent  tant  de  pages. 
Dans  l'esprit  du  penseur  ne  sont  pas  les  plus  sages  : 

Le  plus  sage  est  celui  qui,  sur  l'humanité, 
Epand  les  doux  trésors  d'un  cœur  plein  de  bonté. 

—  Tel  est  le  Maréchal!  homme  à  la  trempe  antique, 
Eminent  citoyen  et  soldat  liéroïiiue. 

Magistral  éclairé,  grand  administrateur, 

Et  semblable  à  Bayard,  sans  reproche  et  sans  peur. 

Il  connaît  ses  aïeux,  et,  si  noblesse  oblige, 

Ici,  le  rejeton  rehausse  encor  la  tige  ; 

Car,  fidèle  à  son  roi  jusqu'au  dernier  soupir, 

Il  vécut  en  héros  et  mourut  en  martyr!... 

—  Il  était  de  ce  temps  où  le  nom,  la  naissance, 
Conduisaient  aux  honneurs,  assuraient  la  puissance. 
Mais  Mailly,  dédaignant  ces  faciles  accès, 

A  son  mérite  seul  veut  devoir  ses  succès; 
El  fuyant  les  ])laisirs  ([ue  recherche  l'enfance, 
Dans  l'étude  il  puisa  la  vertu,  la  science. 

25 


386 

Aux  sources  du  savoir  sa  curieuse  arileur 

De  bonne  heure  trempa  son  esprit  et  son  cœur. 

Sa  grande  âme  embrasée  aux  récits  de  l'histoire, 

Des  héros  immortels  rêve  déjà  la  gloire  • 

11  en  a  la  valeur  qu'il  lient  de  ses  aïeux; 

11  est  adolescent  et  déjà  digne  d'eux... 

—  Sois  fière  de  tes  fils,  ô  France,  noble  France  ! 

Ils  rêvent  ta  grandeur  en  sortant  de  l'enfance... 

Ton  passé  glorieux,  garant  de  l'avenir, 

T'assure  qu'ils  sauront  toujours  vaincre...  ou  mourir!.. 

Tes  enfants  d'aujourd'hui  valent  ceux  d'un  autre  âge  : 

Dans  l'histoire,  comme  eux,  ils  auront  une  page 

Qui  sera  digne  aussi  de  la  postérité  : 

Ils  mouraient  pour  leurs  rois!...  nous,  pour  la  liberté! 

Qu'importe  que  l'idole  ait  changé?  La  patrie. 

C'est  notre  idole  à  nous  ! 


La  Pologne  meurtrie 

Terrassée,  expirante,  attend  un  prompt  secours. 
Le  colosse  du  nord  a  mesuré  ses  jours. 
Et  l'aigle  famélique,  en  tressaillant  de  joie, 
Dans  sa  serre  sanglante  étreint  déjà  sa  proie... 

—  La  France  courroucée  organise  soudain 
Une  imposante  armée.  Elle  franchit  le  Rhin. 
Sous  les  yeux  de  Derwick,  véléran  magnanime 
E.icore  plein  d'ardeur,  Mailly,  soldat  sublime, 
D  ;vant  Kehl  asàégé  cueille  un  premier  laurier. 
Sloloplien,  Philisbourg,  révèlent  un  guerrier. 
Au  combat  de  Clauzen  il  brave  la  mitraille. 

Et  devient  un  héros  sur  le  champ  de  bataille. 

—  Mais  la  ;)aix  est  conclue,  et  le  jeune  soldat, 
Fier  de  ses  grands  exploits,  regrette  le  combat. 


387 

Il  revoit  sa  pairie,  escorté  par  la  gloire. 
Le  ciel  lui  réservait  encor  mainte  victoire. 


—  La  guerre  se  rallume,  et  l'Autriche  aux  abois, 
A  l'aspect  des  Français  tremble  encore  une  fois. 
Tout  présage  au  soldat  une  guerre  effroyable  : 
On  voit  de  toutes  parts  un  apprêt  formidable. 
L'Europe  est  embrasée,  et  le  cœur  de  Mailly 

Au  signal  du  départ  de  joie  a  tressailli. 
Sa  belliijucuse  ardeur  enflammant  son  courage, 
Lui  montre  dans  l'histoire  une  nouvelle  page. 
L'Allemagne,  témoin  de  ses  premiers  exploits, 
Le  verra  s'élever  aux  plus  nobles  emplois. 

—  Que  le  Dieu  des  combats  protège  sa  bravoure  ; 
Pour  détourner  la  mort  qu'un  bon  ange  l'entoure; 
Qu'il  sème  sur  ses  pas  de  glorieux  lauriers  ; 

Qu'il  éloigne  la  bombe  et  l'obus  meurtriers  ; 
Le  Roussillon  attend  un  Messie  :  il  l'appelle!... 
Les  trésors  de  vertus  que  son  âme  recèle, 
Sur  un  peuple  anxieux  se  répandront  un  jour, 
Et  tous  les  cœurs  pour  lui  déborderont  d'amour... 

—  La  campagne  est  ouverte,  et,  prompts  comme  la  foudre, 
Les  balaillons  français  niellent  Braunaw  en  poudre. 
Mailly,  braviint  la  mort,  debout  sur  les  remparls, 

A  l'eunenii  ([ui  fuit  monire  nos  étendards. 
Là,  comme  à  Danurcns,  on  la  gloire  l'entraîne, 
11  promet  à  la  France  un  brillant  capitaine. 
Le  vétéran  l'estime,  et  ses  rivaux  surpris 
N'osent  de  la  valeur  lui  disputer  le  |)rix. 
Des  guerriers  consommés  il  a  l'expérience, 
El  sa  bouillante  ardeur  n'exclut  pas  la  prudence. 


388 

—  Ses  rares  qualités,  signalent  l'officier 
A  l'armée,  et  ses  chefs  savent  l'apprécier. 

11  (levieirt  leur  égal  et  chacun  l'en  sait  digne. 
Bienlôl  pour  commanilcr  sa  valeur  le  désigne. 
11  vole  à  Weis.sembourg,  où  l'ennemi  l'allend. 
Ses  soldais  près  de  lui  tombent  en  comballant. 
L'Autrichien,  blotti  derrière  sa  muraille, 
^''osera  dans  la  plaine  accepter  la  bataille; 
Mais  si  nos  escadrons  se  montrent  isolés, 
Par  le  nombre  aussitôt  ils  se  voient  accablés. 
Déjà  deux  régiments  expiant  leur  audace, 
Sous  un  choc  iormidable  ont  péri!...  iMailly  passe. 
Voit  ce  massacre  affreux,  qu'il  jure  de  venger. 
Le  cœur  plein  de  courroux,  dédaignant  le  danger. 
Il  fond  comme  un  torrent,  avec  quelques  gendarmes, 
Sur  l'ennemi  qui  tombe  écrasé  sons  nos  armes. 
Les  débris  avec  peine  atteignent  les  remparts, 
Où  les  suit  la  terreur  avec  ses  yeux  hagards.... 

—  Ce  coup  audacieux,  qu'a  buriné  l'histoire. 
Le  rend  cher  à  l'armée  et  le  couvre  de  gloire. 
Louis,  pour  honorer  celte  belle  action. 

Au  héros  exprima  son  admiration. 

Cet  éloge  flatteur  fait  tressaillir  son  âme: 

La  parole  du  roi  l'électrise  et  l'enflamme. 

Il  marche  sur  Fribourg,  qu'il  assiège  et  qu'il  prend. 

Et  l'ennemi  vaincu  se  disperse  ou  se  rend... 

—  Mais,  que  de  compagnons  gisant  dans  la  tranchée!.. 
De  leurs  débris  sanglants  la  terre  était  jonchée!... 

A  ce  navrant  aspect,  le  valeureux  guerrier. 
Déplora  dans  son  cœur  le  prix  d'un  vain  laurier... 


—  Oh!  la  guerre!...  la  guerre!...  e>l  un  lléau  terrible  !... 
Mais  ce  fléau  cruel  est-il  donc  invincible? 


389 

Est-ce  une  loi  d'en  luiul  ((u'oii  ne  puisse  jamais 

Voir  régner  ici-bas  une  durable  paix? 

Que  poursuivais-tu  donc,  dans  ta  philanthropie, 

Rêveur  humanitaire?...  (2)  une  vaine  utopie, 

En  appelant  sur  nous  ce  merveilleux  accord 

Qui  doit,  selon  tes  vœu.\,  embellir  noire  sort?... 

Non,  de  paisibles  jours  luiront  sur  celle  terre. 

L'homme  alors,  dédaignant  les  lauriers  de  la  guerre, 

Parce  que  ces  lauriers  sont  ruisselants  de  sang, 

Demandera  la  gloire  et  l'honneur  au  talent. 

Il  cueillera  pourtant  des  palmes  immortelles, 

Quand  son  puissant  génie,  ouvrant  ses  vasies  ailes, 

Révélant  aux  humains  le  secret  d'être  heureux, 

Les  rendra  justes,  bons,  éclairés,  vertueux... 

Le  S[)liinx  de  la  misère,  à  l'œil  louche,  au  teint  blême, 

Aux  Œdipes  nouveaux  propose  ce  problème. 

Ils  sauront  le  résoudre,  el  la  solution 

Est  digne  de  tenter  leur  noble  ambition. 

Mailly,  dont  la  bonté  surpassait  le  courage. 

Enviait  cette  gloire  :  elle  fut  son  partage. 


—  Mais  l'honneur  de  la  France  a  réclamé  son  bras. 
Et,  grand,  il  va  grandir  encor  dans  les  combats. 
Sur  les  alpestres  monts  où  l'aigle  pend  son  aire, 
Aux  blocs  immaculés  d'un  cristal  séculaire. 

Le  roi  des  airs,  planant  autour  de  ses  aiglons, 
Verra  passer  bientôt  nos  vaillants  bataillons, 
Et  du  haut  du  rocher  qui  l'orme  son  domaine, 
Fier,  il  conlcm|dera  l'illustre  capitaine. 

—  L'Apennin  sous  ses  pas  a  déjà  tressailli. 
Maillebois  conliant  est  suivi  de  Mailly  : 

(Il  L'.ilibii  lie  Sainl-l'iorri'. 


390 

Il  connaît  sa  valeur,  et  lranf|iiillc  il  s'avance. 

On  voit  briller  au  loin  l'étendard  de  la  France, 

Tandis  que  Don  Philippe,  aux  donjons  de  Milan, 

Sous  les  yeux  de  l'Autriche  arbore  un  drapeau  blanc. 

Quelques  efforts  encore  et  l'armée  alliée 

Verra  par  ses  revers  rAutriche  humiliée... 

Mais  Lichteustein  paraît  :  la  fortune  le  suit, 

Et  pour  voler  à  lui,  la  victoire  nous  fuit  : 

L'armée  est  en  déroute! 


Italie!  Italie! 

0  terre  du  soleil  et  de  la  poésie, 

Triomphants  ou  vaincus,  tu  nous  vis  bien  des  fois!... 

Tes  fortunés  vallons,  blanchis  par  nos  exploits, 

Aux  siècles  attestant  nos  brillantes  prouesses, 

Rappelleront  aussi  nos  malheurs,  nos  détresses!... 

Qu'on  interroge,  hélas!  tes  fertiles  sillons. 

Où  ruissela  le  sang  de  tant  de  bataillons  : 

Le  penseur  apprendra  ce  que  coûte  la  gloire!... 

Le  revers  suit  de  près  le  succès  dans  l'histoire  : 

Marignan!...  et  Pavie!!...  Austerlitz!...  Waterloo!! 

C'est  toujours  le  laurier  à  côté  du  tombeau!... 


—  Console-toi,  Mailly  :  la  France  est  satisfaite  : 
Un  héros  de  vingt  ans  a  vengé  ta  défaite. 

Ton  armée  est  battue  à  FatHiire  d'Asti  : 

Lui,  pareil  au  dieu  Mars,  court  d'Arcole  à  Lodi, 

Et  plus  tard,  dans  les  plis  du  drapeau  de  la  France, 

Aux  peuples  asservis  il  porta  l'espérance. 

Et,  divin  laboureur,  semant  la  liberté, 

11  transforma  l'Europe,  où  ce  germe  est  resté  !  !... 

—  Mais,  dans  l'art  stratégique,  une  habile  retraite, 
Pour  la  gloire  et  l'honnenr  égale  une  conquête. 


391 

Aux  bords  du  Tanaro  tes  efforts  iuouis 
Permirent  aux  Français  de  revoir  leur  pays. 
Orsolengo,  Tydon,  la  Tréhie  et  Plaisance, 
Montrent  notre  valeur  par  notre  résistance, 
Et  font  briller  ton  nom  au  temple  glorieux. 
Résigne-toi,  Mailly,  tu  dois  quitter  ces  lieux, 
Témoins  de  tes  exploits,  et  franchir  la  frontière 
L'étranger  va  souiller  cette  France  si  chère  !... 


—  Oh  !  lorsque  du  pays  le  sol  est  profané. 
Par  la  vengeance  alors  tout  cœur  est  entraîné. 
Pour  laver  cet  affront,  vers  la  croisade  sainte. 
Soldats  et  citoyens  s'élancent  sans  contrainte. 
Dans  le  moment  suprême  où  chancelle  l'espoir, 
S'éloigner  est  un  crime  et  mourir,  un  devoir. 

—  Mais  toi,  pour  (|iii  Ion  Prince,  ainsi  que  la  patrie. 
Est  le  constant  objet  de  ton  idolâtrie, 

Par  quel  magique  effori,  en  ce  néfaste  jour, 

Mailly,  prouveras-tu  ton  zèle  et  ton  amour? 

Tu  sais  verser  ton  sang  pour  l'honneur  de  la  France  ; 

Il  faut  plus  maintenant  :  il  faut  sa  délivrance. 

Ton  génie  inspiré  par  le  commun  danger, 

Saura  guider  l'armée  et  chasser  l'étranger... 

—  î)êjh  de  l'ennemi  les  puissantes  cohortes 
Ont  franchi  la  frontière  et  menacent  nos  portes. 
Comme  un  torrent  fougueux  par  l'orage  amené, 
Elles  ont  envahi  le  riche  Dauphiné 

Et  s'étendent  au  loin  jusque  dans  la  Provence. 

Mais,  le  front  menaçant,  Mailly  paraît,  s'avance: 

A  l'aspect  du  guerrier  et  de  ses  légions, 

S'èlani.Mnt  au  combat  ainsi  que  des  lions. 

On  voit  rélrogader  l'ennemi  téméraire. 

Qui,  rlierchani  un  abri,  prend  le  Yar  pour  barrière. 


392 

Mailly  se  multiplie  :  il  est  présent  partout, 

Frappe,  ordonne,  et  pour  vaincre  à  mourir  se  résout. 

Distribuant  l'armée,  il  couvre  plusieurs  villes. 

Un  moment  arrêté  dans  le  combat  d'Exilés, 

Oubliant  sa  blessure,  on  vit  le  général 

S'élancer  au  combat  en  dépit  de  son  mal. 

—  Alors,  tel  qu'un  reflux  abandonnant  la  grève, 

L'ennemi  se  replie.  11  demande  une  trêve... 


—  Comme  un  gladiateur  par  la  lutte  épuisé, 
Et  qui  voit  de  son  sang  tout  le  cirque  arrosé, 
L'Europe  fiUiguée,  en  proie  à  tant  d'alarmes, 
A  besoin  de  repos.  — Au  tumulte  dos  armes 
Succède  enfin  la  paix.  L'orage  évanoui 
Découvre  un  ciel  serein  dont  l'œil  est  ébloui. 
Des  plus  tendres  rayons  l'horizon  se  colore  : 
On  dirait  d'un  beau  jour  la  magnifique  aurore. 


Qu'une  muse  savante  exalte  les  hauts-faits 

D'un  conquérant  :  la  mienne  aime  ù  chanter  la  paix. 

Le  tumulte  l'effraie  et  le  calme  l'inspire. 

Les  zépbirs  de  la  paix  font  seuls  vibrer  ma  lyre. 

Fille  de  l'harmonie,  oh  !  viens,  descends  du  ciel. 

Répands  tes  flots  d'amour  dans  le  cœur  du  mortel. 

Viens,  règne  parmi  nous,  et  que  les  douces  flammes 

Embrasent  à  jamais  et  nos  cœurs  et  nos  âmes!... 

Charité!  charité!  que  les  effets  sont  beaux! 

Tu  comptes  des  martyrs,  mais  aussi  des  héros. 

Ils  ont  leur  auréole  cl  leur  modeste  palme, 

Qui  dissipe  l'orage  et  ramène  le  calme... 

—  Peuples,  soyez  heureux!...  Reposez-vous,  guerriers 

Le  repos  est  si  doux  à  l'ombre  des  lauriers!... 


3!»3 

Là,  vous  pourrez  encor  briguer  une  autre  gloire  : 
Celle  (le  faire  un  jour  bénir  votre  mémoire 
Par  ceux  dont  vous  aurez  adouci  le  doslin... 


—  Mailly,  le  Roussillon  t'appelle  dans  son  sein  : 
IIAte-toi  d'accourir,  car  tu  sais  que  la  guerre 
N'a  servi  jusqu'ici  qu'à  conquérir  la  terre  : 
C'est  à  toi  maintenant  de  conquérir  les  cœurs... 
Vois  ces  plaines,  ces  monts  étincelants  de  (leurs. 
Et  ces  riches  vallons  et  cette  mer  splcndide. 
Et  ce  ciel,  dont  l'azur  est  toujours  si  limpide!... 
En  ces  lieux  fortunés,  l'homme,  pour  être  heureux, 
N'attend  qu'un  gouverneur  éclairé,  vertueux  : 
Le  roi  t'a  désigné  dans  sa  haute  sagesse, 
El  les  fiers  Catalans  tressaillent  d'allégresse. 
Ils  te  seconderont  dans  tes  féconds  essaiSj^ 
Et  c'est  par  toi,  Mailly,  qu'ils  deviendront  français... 


—  Le  Goldal  citoyen  a  parcouru  nos  villes; 
Ses  guerrières  vertus  et  ses  vertus  civiles. 
Font  rayonner  son  front  d'un  prestige  enchanteur; 
On  le  vénère,  on  l'aime,  il  fait  croire  au  bonheur. 
Le  cœur  des  Catalans  s'ouvrait  à  l'espérance  ; 
On  nommait  sa  venue  —  Ère  de  renaissance... 


—  Mais  la  France  insultée  appelle  le  héros, 
El  son  brusque  départ  interrompt  ses  travaux. 
La  perfide  Albion,  imitant  les  pirates. 
Sans  cause  et  sans  motifs  nous  ravit  deux  frégates. 
La  guerre  recommence,  et  l'Allemagne  encor, 
A  travers  .'^es  brouillards  voit  l'ange  de  la  mort... 


394 

—  Le  Wéser  est  franchi.  Cumherland  en  déroute 
Du  Hanovre  aux  Français  ne  défend  plus  la  roule. 
Les  duchés  de  Brunswick,  de  Zell,  de  Lunébourg, 
Au  combat  dllaslcnbeck,  oii  notre  armée  accouri, 
Sont  enfin  délivrés.  Mailly,  par  son  audace, 
Ajoute  à  ses  lauriers  les  lauriers  qu'il  amasse, 

Et  montre,  rappelant  le  preux  de  Marignan, 
Qu'il  n'avait  pas  trouvé  Capoue  à  Perpgnan. 

—  A  travers  les  vapeurs  d'une  épaisse  fumée 
Tonne  une  batterie  écrasant  notre  armée. 
Elle  vomit  au  loin  la  terreur  et  la  mort; 
Mais  Mailly,  qui  les  brave,  a  déjà  pris  l'essor  : 
Il  vole  et  dans  le  feu  soudain  se  précipite. 
En  tumulte  aussitôt  l'ennemi  prend  la  fuite, 
Et  tournant  contre  lui  ses  canons  fulgurants, 
11  fait  passer  la  mort  et  l'cnVoi  dans  sos  rangs: 
Cumherland  refoulé,  demande  un  armistice. 


—  Mailly  trouva  bientôt  Frédéric  dans  la  lice. 
Le  grand  roi  philosophe  à  Rosbach  est  vainqueur. 
Parmi  nos  alliés  se  glisse  la  terreur. 
Soubise  est  entraîné;  Mailly  voit  la  défaite. 
Ne  pouvant  triompher,  à  mourir  il  s'apprête  : 
Aussi  prompt  que  l'éclair,  l'impétueux  héros 
Charge  soudainement  les  gendarmes  royaux, 
Les  frappe,  les  disperse  et  les  suit  dans  la  plaine. 
Son  audace  a  rendu  la  victoire  incertaine. 
Mais  blessé,  consumé,  par  ce  suprême  elTort, 
Il  tombe...  et  devant  lui  l'ennemi  tremble  encor  !. 


—  Ton  cœur,  Mailly,  saigna  bien  plus  que  ta  blessure. 
Ouand  lu  vis  s'élever  ce  monument  d'injure 


395 

Qu'érigea  sur  les  lieux  un  orgueilleux  vainqueur, 
Qui  ne  put  s'empêcher  d'admirer  la  valeur. 
Il  voulait  de  la  France  éterniser  la  honte! 
Mais  que  peut  contre  nous  le  granit  ou  la  fonte? 
Le  soldat  d'Austeilitz,  d'Arcole  et  d'Aboukir, 
Elfacera  bientôt  ce  triste  souvenir...  (*' 


—  Mailly,  grand  au  combat,  au  conseil  toujours  sage, 
Captif,  supportera  l'exil  avec  courage. 

Le  stoïque  héros,  dans  son  adversité, 

Console  ses  amis.  —  Sa  générosité 

Double  l'affection  de  ses  compagnons  d'armes. 

En  parlant  de  la  France,  il  peut  verser  des  larmes  ; 

Mais,  comme  Régulus,  il  reprendrait  ses  fers 

S'il  devait  au  pays  épargner  un  revers... 

11  soupirait  pourtant  après  cette  patrie 

Qu'il  avait  tant  aimée  et  noblement  servie!... 

L'amour  de  la  patrie  embrase  un  noble  cœur. 

Il  faut  être  captif  pour  en  sentir  l'ardeur! 

Il  faut  avoir  clé  séparé  de  sa  mère, 

Avoir  lé  cœur  rempli  d'une  tristesse  amère 

Et  gémir  loin  des  siens,  pour  comprendre  l'amour 

Qu'inspire  la  patrie!...  Oh!  quand  vient  le  retour, 

Quelle  ineffable  joie  inonde  alors  notre  âme! 

Quel  divin  sentiment  et  quelle  sainte  llamme 

Font  palpiter  le  cœur!...  Oh!  tu  l'éprouvas,  toi, 

En  retrouvant  ton  fils,  ta  patrie  et  ton  roi!... 

—  Ses  vœux  sont  exaucés  :  Frédéric,  qui  l'estime, 
Lui  rend  la  liberté  ;  car  le  roi  magnanime 

A  de  son  prisonnier  apprécié  l'honneur. 
Comme  il  avait  naguère  admiré  sa  valeur. 

(11  Kn  1800,  Napolton  fit  lomlirr  cette  folonne,  qui  nppelait  la  défaite  des  Français. 


396 

—  Aurait  île  la  vertu,  que  ta  puissance  est  belle! 
Dans  l'âme  on  voit  briller  la  divine  étincelle. 
Elle  attire,  éblouit,  enciiante,  et  son  aspect 
Séduit  môme  les  rois,  et  conquiert  leur  respect. 

—  L'armée,  en  relrouvanl  un  chef  qu'elle  vénère, 
Laisse  éclater  sa  joie  cl  croit  revoir  un  père. 
L'espérance  et  l'amour  dilatent  tous  les  cœurs; 
Gomme  l'adversité,  l'allégresse  a  ses  pleurs  : 

Ses  anciens  compagnons,  frémissants  sous  les  armes, 
En  embrassant  Maillv  couvrent  ses  mains  de  larmes. 


—  II  va  combattre  encore  :  A  Corback,  à  Casse), 
Le  héros  va  cueillir  un  laurier  immortel, 
Et  puis  il  quittera  celle  vaillante  armée 
Fière  de  ses  exploits  et  de  sa  renommée, 
Non  pour  se  reposer,  mais  toujours  valeureux, 
Pour  conquérir  des  cœurs  et  faire  des  heureux. 
Il  veut  jusqu'à  la  morl  être  utile  à  la  France; 
Mais  son  fils  bien-aimé,  sa  plus  chère  espérance, 
Saura  le  remplacer  sur  le  champ  de  l'honneur  : 
Digne  fils  d'un  guerrier,  il  en  aura  le  cœur. 
A  côté  de  son  père  il  vole  !i  la  victoire, 
El  trouve  à  Grebeslein  le  chemin  de  la  gloire. 


II 


—  Étale  ton  azur,  beau  ciel  du  Roussillon; 
Montagnes,  tressaillez  sous  ce  bleu  pavillon  ; 
Fleurs,  embaumez  les  airs  de  vos  parfums  suaves; 
Mer,  sur  tes  riches  bords  retiens  les  flots  esclaves, 


397 

Et  loi,  fier  Catalan,  célèbre  ce  beau  jour. 
Qui  de  ton  bientailcur  t'annonce  le  retour... 
—  Le  voici!  le  voici!  !...  Courez  sur  son  passage; 
Que  l'amour  de  vos  cœurs  brille  à  voire  visage; 
Qu'il  lise  sur  vos  fronts  la  joie  et  le  bonheur. 
Et  que  votre  allégresse  inonde  aussi  son  cœur... 
— 11  n'enchaînera  pas  vos  libertés  antiques. 
Filles  de  l'harmonie  et  des  vertus  civiques  : 
Non,  non,  rassurez-vous.  Parmi-vous  il  se  rend 
Pour  vous  faire  oublier  ([u'un  roi  fut  conquérant. 
Ce  n'est  pas  par  l'épéc  ou  la  plume  qu'un  prince 
A  ses  puissants  Etals  annexe  une  province. 
Par  les  armes  il  peut  envahir  un  pays; 
Mais  les  sujets  vaincus  restent  ses  ennemis. 
La  force  ne  peut  rien,  l'amour  seul  assimile: 
C'est  par  lui  que  Mailly  rendra  tout  cœur  docile, 
Et  les  Rousàillonnais,  dont  il  veut  le  bonheur. 
L'aimeront  désormais  comme  un  libérateur. 


— Il  faut  un  stimulant  énergique  au  génie  : 

C'est  la  nécessité  qui  pousse  à  l'induslrie. 

Le  repos  séduit  l'homme,  et  dans  le  Houssillou, 

Le  soleil  généreux  comble  seul  le  sillon. 

Aussi,  le  Catalan,  dans  son  insouciance. 

Sans  peine  et  sans  travail  nageait  dans  l'abondance. 

Le  jiampie  et  l'olivier,  ombrageant  ses  coteaux. 

Au  retour  de  l'automne  emplissent  ses  tonneaux, 

Et  ses  arbres  enllés  d'une  sève  féconde, 

Arrosés  par  le  ciel  et  que  nul  fer  n'émonde, 

S'alfaisscnt  sous  leurs  fruits  aux  exquises  saveurs. 

Tombant  sur  un  gazon  tout  émaillé  de  (leurs... 

Mais  Mailly,  d'un  coup-d'œil  dont  on  sait  la  justesse, 

A  découvert  partout  des  sources  de  richesse. 


398 

Il  montre  la  Corlune,  et  ses  puissants  attraits 

Vont  de  l'agriculture  activer  le  progrès. 

De  ce  nectar  divin  ([ue  la  vigne  élabore, 

Et  qu'on  laissait  vieillir  dans  le  fond  d'une  amphore, 

Le  monde  émerveillé  verra  le  Ilot  vermeil, 

Où  semble  se  jouer  un  rayon  de  soleil. 

— Le  sage  Gouverneur  l'ait  tomber  les  barrières 

Qui  s'élevaient  encore  aux  anciennes  frontières. 

Pour  donner  au  commerce  un  efficace  essor, 

11  devra  sur  la  cote  ouvrir  un  vaste  port. 

Sillonner  le  pays  de  canaux  et  de  routes. 

Jeter  sur  les  torrents  des  ponts  aux  larges  voûtes, 

Et  par  une  constante  et  vive  impulsion, 

Arracher  l'habitant  à  son  inaction... 


— A  côté  des  sentiers  qu'envahissaient  les  herbes, 

Serpentèrent  bientôt  mille  chemins  superbes. 

Où  les  lourds  chariots,  ployant  sous  leurs  essieux. 

Roulaient,  chargés  de  fruits  et  de  vins  précieux; 

Et  l'on  vil  afduer,  par  ces  mêmes  artères, 

Les  produits  merveilleux,  enfants  des  arts  prospères. 

Et  qui  devaient  bientôt,  salutaire  aiguillon. 

Réveiller  l'industrie  au  sein  du  Roussillon. 

— Les  arts,  fils  de  la  paix,  embellissent  la  vie  ; 

La  science  vers  Dieu  porte  l'âme  ravie  : 

Elle  agrandit  notre  être,  elle  adoucit  les  mœurs: 

La  science  et  les  arts  font  les  hommes  meilleurs. 

— Sous  les  aspérités  de  son  âpre  rudesse. 

De  l'esprit  catalan  on  voyait  la  finesse  : 

Il  est,  comme  le  sol,  généreux  et  fécond, 

Exubérant,  subtil,  vif,  délié,  profond. 

Quand  une  habile  main  le  flatte  ou  le  caresse, 

Comme  un  métal  ductile,  il  se  plie,  il  se  dresse; 


399 

Mais  il  faut  le  traiter  avec  aménité, 

El  ne  jamais  froisser  sa  rigide  fierté. 

M;iilly,  pour  qui  toujours  le  triomphe  est  facile, 

A  ses  sages  conseils  le  trouvera  docile. 

— Dans  rUniversité,  serre-chaude  où  l'esprit, 

Comme  un  lis  au  soleil  se  dilate  et  fleurit, 

Le  jeune  Catalan  va  puiser  la  science, 

El  c'esl-là  qu'il  apprend  à  connaître  la  France, 

Ses  penseurs,  ses  héros,  ses  poêles,  ses  rois, 

Sa  générosité,  son  esprit  el  ses  lois. 

Il  senl  battre  son  cœur  aux  accents  de  Corneille; 

Molière  le  conduit  de  merveille  en  merveille  ; 

De  Racine  il  entend  le  verbe  harmonieux. 

Doux,  sonore  el  touchant  comme  un  accord  des  cieux. 

Il  cile  nos  grands  noms,  dont  la  gloire  l'enflamme. 

De  savants  professeurs  infillrenl  dans  son  âme, 

Avec  l'esprit  franrais,  l'amour  de  ce  pays, 

Et  c'est  par  cet  amour  que  son  cœur  fut  conquis. 

— Mailly,  voilà  ton  œuvre  :  elle  est  grande,  elle  est  belle! 

Par  elle  Ion  génie  éclate  et  se  révèle. 

Mais  ton  cœur  poursuivait  une  autre  ambition  : 

Du  pauvre  tu  voulais  la  sainte  alfection. 

Par  de  nombreux  bienfaits  tu  la  conquis  encore. 

Cet  asile  de  paix  que  la  vieillesse  implore. 

S'éleva  par  les  soins,  et  tous  les  malheureux 

Ne  virent  plus  en  toi  qu'un  envoyé  des  cieux. 

L'infortuné,  témoin  de  ta  sollicitude, 

Lègue  à  l'infortuné  sa  tendre  gratitude. 

Et  par  ce  souvenir,  les  générations 

Te  combleront  toujours  de  bénédictions. 

Le  nom  d'un  bienfaiteur  demeure  populaire  : 

Le  pauvre  chaque  jour  le  mêle  à  sa  prière, 

Et  l'aïeule,  le  soir,  au  coin  du  noir  foyer, 

A  de  blonds  chérubins  l'apprend  à  bégaver. 


400 

Les  siècles  en  passant  fiisligenl  de  leur  aile 
Le  porphyre  et  l'airain;  mais  la  gloire  éternelle 
Se  grave  dans  les  cœurs,  et  l'injure  des  ans 
Ne  saurait  éclipser  ses  rayons  éclalanls. 
Mailly,  les  monuments  passeront  :  ton  image, 
Du  temps,  sur  leurs  débris,  aIVrontera  l'outrage. 
Oui,  les  inscriptions  pourront  s'oblitérer; 
Mais  l'amour  dans  les  cœurs  ne  saurait  s'altérer 


Louis  quinze  était  mort.  La  nation  française, 

Conlianle  et  fidèle,  acclama  Louis  seize. 

La  France  savourait  les  douceurs  de  la  paix. 

L'éternel  ennemi  du  royaume,  — l'Anglais, — 

Dont  la  prospérité  dépend  de  nos  détresses. 

Fait  entendre  le  bruit  de  ses  armes  traîtresses  : 

Il  ([uitte  son  repaire,  où  s'étend  le  brouillard, 

Et  la  France  indignée  attend  le  léopard. 

— On  signale  déjà  ses  lormidables  Hottes. 

Mailly  fut  désigné  pour  défendre  nos  côtes. 

Par  un  magique  élan,  à  l'appel  du  guerrier. 

Se  leva  tout  armé  le  Roussillon  entier. 

Chacun  veut  témoigner  son  dévoùment  sincère 

Par  son  empressement,  ù  celui  qu'il  vénère... 

— Voilà,  voilà  le  prix  de  tes  bienfaits,  Mailly  : 

C'est  par  eux  que  l'amour  de  tout  cœur  a  jailli. 

On  court  de  toutes  parts,  on  inonde  la  grève.- 

Le  vieux  soldat  se  croit  sous  l'empire  d'un  rêve. 

Heureux  d'avoir  conquis  à  son  roi  tant  de  cœurs, 

Son  cœur  est  plein  de  joie  et  ses  yeux  pleins  de  pleurs. 


— Avant  que  resplendît  la  beauté  de  l'aurore, 
Anxieux  et  pensif  sur  la  plage  sonore. 


401 

Il  conleniplail  la  mer,  oii  le  ciel  reflélé 
Gonslellait  de  ses  feux  le  liquide  argenté. 
— Mais  les  paillettes  d'or  que  l'étoile  brillante 
Semait  avec  amour  dans  l'onde  scintillante, 
Pâlissent  en  tremblant  devant  l'éclat  du  jour, 
Dont  l'aube  souriante  annonce  le  retour. 
La  lumière  jaillit  de  sa  source  féconde 
Et  l'orient  vermeil  la  répand  sur  le  monde... 
— Le  lever  du  soleil!...  Quel  spectacle  imposant!... 
Qui  pourrait  exprimer  ce  que  l'âme  ressent 
Quand  le  géant  des  cieux  s'élance  dans  l'espace. 
Versant  la  pourpre  et  l'or  sur  l'ombre  qui  s'eftace; 
Transformant  la  prairie  en  somptueux  écrin, 
Où  brillent  sur  les  fleurs,  les  perles  du  matin. 
A.  son  aspect,  l'oiseau  sous  la  feuilléc  humide, 
Charme  par  ses  chansons  sa  compagne  timide. 
Et  la  neige  des  monts,  aux  feux  naissants  du  jour. 
Rougit  comme  une  vierge  au  premier  mot  d'amour; 
De  son  disque  éclatant  la  lumière  ruisselle; 
La  terre  est  palpitante  et  la  mer  étincelle... 


— L'écrasante  grandeur  de  tant  de  majesté 
Faisait  jaillir  des  cœurs  des  flots  de  piété. 
Mais  bientôt  le  soleil,  dardant  ses  vives  flammes, 
Des  soldats  laboureurs  vint  embraser  les  âmes. 
D'impatience  alors  ils  se  sentent  frémir: 
Sous  les  yeux  de  Mailly  chacun  voudrait  mourir 
En  défendant  la  France;  et,  pareille  ù  la  houle. 
Sur  la  plage  on  voyait  bondir  l'ardente  foule. 
Le  courage  et  l'audace  illuminant  les  fronts, 
On  défiait  r.\nglais,  sa  flotte  et  ses  canons; 
Et  le  bras  menaçant,  tous  agitaient  leurs  armes. 
A  cet  aspect  .Mailly  fut  ému  jusqu'aux  larme?  : 

'26 


402 

— Enfants  du  Roussillon,  dit-il,  votre  valeur 

Est  digne  des  Français,  dont  vous  avez  le  cœur. 

L'ennemi  vous  connaît  :  il  fuira  cette  plage; 

Car  la  mort,  s'il  venait,  laverait  son  outrage. 

— Enfants,  sachez-le  bien,  le  plus  cher  de  mes  vœux 

Serait,  en  vous  quittant,  de  vous  laisser  heureux; 

De  voir  luire  pour  vous  un  avenir  prospère. 

Ce  climat  fortuné,  ce  soleil,  cette  terre, 

Tout  convie  au  bonlieur  et  l'assure  à  jamais. 

Si  vous  savez  aimer  la  justice  et  la  paix. 

Par  de  constants  labeurs  vous  aurez  l'abondance. 

Le  Roussillon  sera  le  jardin  de  la  France  ; 

Et  ses  nombreux  produits,  ses  vins,  ses  fruits  exquis. 

Par  le  monde  enviés  enrichiront  vos  fils. 

Les  peuples  deviendront  alors  vos  tributaires. 

Vos  thermes,  renommés  par  leurs  eaux  salutaires. 

D'étrangers  tous  les  ans  peupleront  vos  hameaux. 

Ils  viendront  admirer  ces  émouvants  tableaux 

Qu'oflVent  aux  yeux  surpris  vos  riantes  montagnes. 

Les  touristes  au  loin  vanteront  vos  campagnes, 

Et  l'azur  de  ce  ciel,  que  rien  ne  peut  ternir. 

Et  dont  le  cœur  toujours  garde  le  souvenir. 

Une  forêt  de  mâts,  ombrageant  vos  parages, 

Dans  vos  tranquilles  ports  bravera  les  orages. 

La  nature  elle-même  a  creusé  ces  abris. 

Que  l'ouragan  jamais  ne  trouble  de  ses  cris. 

Il  nous  faut  élargir  ces  refuges  paisibles. 

Où  se  balanceront  nos  Hottes  invincibles, 

Où  le  navigateur,  par  la  vague  emporté, 

Retrouvera  le  calme  et  l'hospitalité... 

—Qui  sait?  peut-être  un  jour  au  rivage  d'Afrique, 

La  France  arborera  son  drapeau  magnifique. 

Son  domaine  étendu  par  de  brilluiils  combats 

Pour  limilo  et  pour  borne  aura  le  mont  Allas. 


403 

La  Mikliterranôc,  où  le  pirate  règne, 
Verra  sur  les  Mois  bleus  où  Port-Vendres  se  baigne 
Voguer  eu  sùrelc,  connue  en  un  lac  français, 
Nos  agiles  vaisseaux  par  la  brise  pressés. 
Alors  dans  vos  cités  aftUiera  la  richesse, 
El  ce  beau  Roussillon  sera  dans  l'allégresse. 
Travaillons  pour  la  gloire  et  pour  l'humanité  : 
A  l'œuvre,  enfants,  îi  l'œuvre!...  et  la  postérité 
Bénira  votre  nom,  qui,  flottant  sur  les  âges. 
Des  siècles  à  venir  conquerra  les  hommages. 


.  ;:ji.  i-j'; 


—  Cette  voix  vénérée  a  fait  vibrer  les  cœurs  : 

Un  peuple  entier  s'excite  aux  plus  rudes  labeurs. 
Un  vaste  port  surgit  dans  ce  golfe  tranquille. 
Dont  les  bords  fortunés  verront  naître  une  ville. 

—  Chaque  pierre,  Mailly,  devrait  porter  ton  nom  ; 
Mais  vivre  dans  les  cœurs  est  ton  ambition. 

Et  pourtant  tes  travaux,  autant  qu'une  victoire, 

Sur  toi  refléteront  une  éternelle  gloire; 

El  pour  en  consacrer  le  pieux  souvenir, 

Le  Roussillon  entier  se  hâta  de  t'oflVir 

De  sa  reconnaissance  un  flatteur  témoignage, 

Un  monument  d'amour  érigé  sur  la  plage 

Où  le  pauvre  porta  son  obole  pour  toi. 

Mais,  désintéressé,  lu  l'oifris  à  ton  roi. 

Ton  cœur  avait  déjà  reçu  sa  récompense: 

Faire  chérir  son  roi  c'est  bien  servir  la  France; 

Enseigner  la  vertu,  c'est  faire  des  heureux; 

Gouverner  sagement,  c'est  mériter  les  cieux. 

Tu  remplis  noblement  celte  mission  sainte! 

Quand  on  vil  dans  le  bien,  on  peut  mourir  sans  crainte  : 

L'amour  dompte  la  mort  et  brave  le  trépas! 

Quand  on  vil  dans  les  cœurs,  Muilly,  l'un  ne  meurt  pas!.. 


404 


— La  médiocrité  pour  s'élever  s'agile. 
Elle  peut  un  instant  éclipser  le  mérite; 
Mais,  comme  le  génie,  il  sait  se  faire  jour. 
On  peut  le  dénigrer  à  la  ville,  à  la  cour  : 
Il  saura  dissiper  par  sa  vive  lumière 
Les  brouillards  ténébreux  obstruant  sa  carrière. 
— Le  jeune  souverain,  au  l'ond  du  Roussillon, 
Vit  briller  de  Mailly  le  glorieux  rayon. 
Auprès  du  Prince  aimé  le  serviteur  s'avance, 
Et  reçoit  le  bâton  de  Maréchal  de  France. 
— Les  services  rendus,  sa  vertu,  sa  valeur. 
Rendaient  le  vieux  soldat  digne  de  cet  honneur. 
Accablé  par  les  ans,  il  est  toujours  lidèle. 
Toujours  prêt  à  marcher  où  le  devoir  l'appelle. 
Son  bras  est  au  pays,  son  cœur  est  à  son  roi  ; 
Son  ami  c'est  le  pauvre,  et  l'honneur  est  sa  loi... 


— L'édifice  chancelle  et  le  vieux  monde  croule. 
Une  sourde  rumeur  agite  au  loin  la  foule. 
Par  son  souffle  embrasé,  la  révolution 
A  déjà  mis  la  France  en  ébullition. 
L'ouragan  se  déchaîne,  et  l'on  voit  pêle-mêle, 
Peuple,  nobles  et  rois,  tomber  comme  la  grêle 
Dans  le  creuset  sanglant,  d'où  le  monde  nouveau 
Va  surgir  tout  armé,  comme  on  vit  d'un  cerveau 
Minerve  s'élancer.  L'elfroyable  tempête 
Dans  l'asile  des  rois  s'engoufl'rc,  et  chaque  tête 
Se  courbait  à  sa  voix!...  Mailly  reste  debout  : 
Près  de  son  Souverain  il  était  le  dix  août, 
Lorsque  la  populace,  avec  sa  main  de  Parque, 
Arbora  son  bonnet  sur  le  front  du  Monarque. 


105 

Le  vieillard  indigné  beat  au  fond  do  son  cœur 

Se  réveiller  soudain  sa  juvénile  ardeur. 

Il  s'appréle  à  punir  une  main  sacrilège. 

On  l'enloure  aussitôt,  on  l'insulte,  on  l'assiège. 

Un  sabre  sur  sa  tète  était  déjà  levé; 

Mais  par  un  bras  nerveux  ce  sabre  est  soulevé. 

C'était  un  vieux  soldat.  Il  arrête  la  foule, 

Sauve  son  général,...  et  le  torrent  s'écoule... 

— Quand  le  flot  populaire,  inconstant,  irrité, 

Comme  un  tigre  blessé  bondit  dans  la  cité, 

Roulant  avec  fracas  sa  digue  frémissante. 

Qui  pourrait  retenir  sa  vague  menaçante? 

Son  écume  rougie  inspire  la  terreur 

Et  Dieu  seul  peut  alors  arrêter  sa  fureur!... 

—  Ce  flux  est-il  fatal?  ou  bien  la  politique 

A-t-elle  dans  sa  main  quelque  prophylactique 

Pour  prévenir  sa  vague?  ou  peut-elle  au  besoin 

Lui  dire  comme  Dieu  :  —Tu  n'iras  pas  plus  loin? 

— Le  flot  montait  toujours!...  sous  sa  puissante  houle 

La  France  est  ébranlée,  et  le  trône  s'écroule! 

Le  fils  de  saint  Louis,  brisé  contre  un  écueil. 

En  s'envolant  au  ciel,  laissa  la  terre  en  deuil!  !... 

— Qui  n'a  frémi  d'horreur  au  récit  de  ce  crime? 
Quels  yeux  n'ont  pas  pleuré  cette  grande  victime? 
Mais  qui  pourrait  narrer  ton  angoisse,  Mailly? 
Ton  cœur  fut  atterré,  mais  il  n'a  pas  failli! 
La  mort  même  ne  peut  abattre  ton  courage. 
Son  aspect  ne  saurait  altérer  ton  visage. 
Regarde  l'échafaud  :  on  le  dresse  pour  toi  ! 
Marches-y  d'un  pied  ferme,  et  va  joindre  ton  roi!... 

J .  MERCADIER,  premier  commis  de  Dirwiion 
des  CoDlributioms  Indirectes. 


*w> 


LES  MÉTAMORPHOSES  D'UNE  GHAINE. 


POEME. 


Un  homme  prit  un  grain  de  sénevé  et  le  sema  dans  son  jardm. 
et  il  crût,  et  il  devint  un  grand  arhrc,  et  les  oiseaux  du  ciel 
se  reposèrent  dans  ses  rameaux. 

(Évangile  selon  S.  Llc  ,  chap.  VfH,  v.  t9.  ) 


Un  jour  je  méililais  à  l'ombre  d'un  vieux  chêfte. 
Dont  les  rameaux  touffus  ondulaient  sous  l'haleine 
D'une  brise  embaumée  au  souflle  liarraouieux. 
Au  zénith,  le  soleil  ardent  et  radieux 
Dardait  ses  rayons  d'or  sur  l'arbre  centenaire, 
Qui  les  décomposait  en  brillante  poussière, 
Impalpable,  argentée,  et  sur  le  frais  gazon 
Tamisait  les  Inésors  que  recèle  ua  rayon. 
L'ombre,  doux  crépuscule,  inspire  le  poète. 
L'oiseau  silencieux  voltigeait  sur  ma  tète; 
La  cigale  chantait;  l'inconstant  papillon 
Volait  de  fleur  en  Heur,  de  sillon  en  sillon. 
L'onde  d'un  clair  ruisseau,  tendre  échanson  du  chêûe. 
Lui  jetait  ses  adieux  et  fuyait  dans  la  plaine 
En  caressant  les  fleurs.  Assis  sur  le  gazon, 
Je  rêvais.  Mon  regard  embrassait  l'horizon. 


407 

Ému,  j'en  conlcniplais  les  beanlés  dispersées, 

Kl  mon  front  s'inclinait  sous  le  poids  des  pensées; 

Le  ciel,  ce  vaste  ciel,  resplendissant  d'azur, 

Était  si  transparent,  si  limpide,  si  pur, 

Que  l'œil  se  promettait  d'en  percer  le  mystère. 

Mon  esprit  agité  fuyait  loin  de  la  terre. 

Et,  nouveau  Prométliée,  allait  ravir  aux  cieux 

Cet  idéal  rêvé  que  n'ont  pas  vu  mes  yeux, 

Que  souhaite  mon  co'ur  et  qu'entrevoit  mon  âme, 

A  travers  les  vapeurs  où  rayonne  sa  llamme. 

Dans  les  champs  de  l'Éther  j'avais  pris  mon  essor  : 

Ma  pensée  explorait  ses  riches  sphères  d'or 

Qui  planent  dans  l'azur  au-delà  des  orages. 

Sur  les  molles  vapeurs  des  célestes  rivages. 

Mais  l'espace  fuyait  :  de  ces  globes  vermeils 

Je  voyais  luire  au  loin  de  splendides  soleils  : 

J'y  volais.  Étonné,  j'en  voyais  luire  encore, 

Et  toujours  et  toujours!...  La  main  qui  les  colore 

Derrière  un  voile  épais  se  cache  à  tout  mortel, 

Et  mes  yeux  éblouis  cherchaient  en  vain  le  ciel. 

Ces  astres  éclatants,  roulant  sur  notre  tête. 

Ne  sont  que  les  degrés  qui  conduisent  au  laite, 

Où  Dieu,  de  son  regard  embrassant  l'univers, 

Des  mondes  palpitants,  écoute  les  concerts; 

Et,  tandis  qu'ici-bas  l'ombre  aux  rayons  se  mêle. 

Ils  épandent  là-haut  leur  splendeur  éternelle. 

Ici  toute  clarté  se  voile  de  vapeur, 

Et  la  science  même  a  maint  aspect  trompeur  : 

L'erreur  se  mêle  à  tout,  comme  au  froment  l'ivraie; 

L'âme,  comme  les  yeux,  n'en  est  jamais  sevrée. 

En  cherchant  la  lumière  au-delà  du  soleil. 

Je  poursuivais  un  rêve  et  j'étais  au  réveil. 

A  l'algèbre  des  cieux,  écrite  sur  ses  voûtes. 

Je  demandais  en  vain  de  dissiper  mes  doutes. 


i08 


— 0  Colomb!  ton  génie,  enllanimanl  Ion  cerveau, 

Par  delà  rOcéan  vit  un  monde  nouveau, 

Et,  sillonnant  les  flots,  tu  découvris  ce  monde, 

Tandis  que  ma  pensée  errante  et  vagabonde 

Dans  l'espace  perdue,  au  sein  de  la  clarté, 

N'a  su  voir  dans  le  ciel...  rien...  que  l'immensité! 

Fuyant  ce  labyrinthe,  où  la  raison  s'égare, 

Éperdu,  je  tombai  comme  autrefois  Icare, 

Et  je  vis  un  oiseau  qui  prenait  son  élan 

Vers  le  chêne;  il  portait  un  brin  d'herbe  en  volant; 

Le  bruit  doux  et  léger  de  son  aile  empressée 

Changea  soudainement  le  cours  de  ma  pensée. 

Distrait,  je  le  suivais  dans  ses  ébats  joyeux  : 

11  attira  bientôt  mes  regards  curieux  ; 

Sautillant,  voletant,  hérissant  son  plumage, 

11  s'éclipsait  parfois  à  travers  le  feuillage; 

Attentif,  je  suivis  son  évolution  : 

Il  captivait  mes  sens  et  mon  attention. 

Gentil  petit  oiseau,  (ils  de  l'air,  me  disais-je. 

Sans  prévoir  l'avenir  et  sans  craindre  le  piège. 

Tu  vis  heureux,  content. — Une  graine  de  lin. 

Échappée  à  son  bec  vint  tomber  sur  ma  main. 

L'oiseau  fut  oublié;  je  contemplai  la  graine; 

El  tandis  que  mes  yeux  la  dislingaient  à  peine, 

Mon  esprit  découvrait  des  trésors  dans  son  sein  : 

L'émeraude,  l'azur,  voilés  sous  le  satin 

Où  Dieu  les  enveloppe.  A  travers  l'épiderme. 

J'apercevais  d'abord  un  embryon  qui  germe. 

Une  lige  qui  monte,  un  bouton  qui  fleurit, 

Un  calice  azuré,  que  l'aurore  remplit 

De  ses  pleurs  éclatants,  diamants  éphémères. 

Reflétant  les  splendeurs  des  beautés  printanières. 


409 

Comme  au  Ironl  d'une  vierge  un  saphir  enchanteur 

Reflète  sa  beauté,  sa  grâce  et  sa  candeur. 

Et  puis,  je  distinguais  des  merveilles  sans  nombre. 

Un  monde  tout  entier  recelé  dans  son  ombre  : 

Pour  l'en  faire  jaillir,  il  suffit  d'un  rayon, 

Et  déjà  mon  esprit  voit  son  éclosion. 


— Tout  se  tient  ici-bas,  tout  se  lie  et  s'enchaîne  : 
Tous  les  événements  ne  forment  qu'une  chaîne. 
De  la  cause  sans-cesse  on  voit  surgir  l'effet; 
L'effet,  devenant  cause,  engendre  un  autre  fait, 
Et  ces  divers  anneaux  qu'enlace  la  nature, 
Parlant  du  Créateur,  vont  à  la  créature. 
Toujours  gros  du  passé,  le  présent  qui  s'enfuit, 
Enfante  l'avenir  et  tombe  dans  la  nuit... 


— Mais  la  lleur  s'étiole  et  la  sève  se  fige. 

Les  vents  ont  enlevé  les  feuilles  ù  la  tige. 

Le  calice  se  ferme  et  le  feu  du  soleil 

A  changé  l'émeraude  et  l'azur  en  vermeil... 

C'en  est  fait,  les  zéphyrs,  la  rosée  et  la  pluie 

Ne  prodigueront  plus  à  la  plante  la  vie  : 

La  racine  est  séchéo,  et  d'une  avide  main, 

Le  diligent  fermier  l'arraclicra  demain... 

—  Oli!  ne  la  plaignons  pas:  elle  est  digne  d'envie. 

Mourir  quand  le  printemps  laisse  l'âme  ravie. 

Avant  que  les  frimas  sur  la  nature  en  deuil 

N'étendent  leur  manteau,  comme  sur  un  cercueil. 

N'est-ce  pas,  en  effet,  une  mort  salutaire? 

La  vie  a  pour  escorte  une  douleur  amèrc  : 

La  saison  des  amours  peut  seule  l'adoucir, 

Mais  l'àpre  et  rude  hiver  ne  fait  que  l'endurcir!... 


410 

Rien  ne  meurt  tout  entier  :  la  lormc  seule  change  ; 

L'eau  pure  qui  jaillit  du  rocher,  devient  fajogc; 

Mais  bientôt  le  soleil,  par  sa  vive  clarté, 

Lui  rend  sa  transparence  et  sa  limpidité. 

La  plante  n'est  donc  pas  à  mourir  condamnée; 

Mon  esprit  peut  encore  suivre  sa  destinée. 

Le  tissu  filandreux  au  bois  agglutiné, 

Comme  Tespril  au  corps  par  la  vie  enchaîné, 

Tient  à  l'état  concret  mille  et  mille  merveilles; 

Je  les  vois  resplendir.  Durant  les  longues  veilles 

Des  sombres  nuits  d'hiver,  de  son  doigt  exercé. 

Une  vierge  filant  près  de  son  fiancé, 

Mêlant  à  ses  soupirs  les  rêves  de  son  âme, 

De  son  lit  nuptial  préparera  la  trame  : 

Fée,  elle  changera  la  tige  en  doux  salin. 

— Un  pauvre  un  jour  viendra  :  son  malheureux  destin 

Portera  la  pitié  dans  le  cœur  d'une  mère. 

Qui  de  son  dinùment  voilera  la  misère 

Avec  le  doux  tissu  par  sa  main  préparé. 

Puis,  tombant  en  lambeaux,  par  le  temps  déchiré, 

Les  vents  le  laisseront  gisant  dans  la  poussière. 

De  la  graine  de  lin  est-ce  la  fin  dernière? 

Non,  non;  une  autre  mai»  de  son  abjection 

La  tirera  bientôt.  Voyez-vous  ce  chiffon 

Que  foule  le  passant  dans  sa  marche  distraite? 

C'est  une  chrysalide,  une  larve  muette: 

Ainsi  qu'un  papillon  la  vie  en  va  jaillir, 

Demain,  le  chilTonuier  viendra  le  recueillir; 

Les  loques  tomberont  alors  dans  la  chaudière, 

Où,  sous  l'ardeur  du  feu  s'épure  la  matière. 

Observez  :  voyez-vous  ruisseler  ce  vélin? 

N'est-ce  pas  le  produit  de  la  graine  de  lin?... 

— La  graine  a  disparu;  mais  cette  feuille  blanche. 

Plus  blanche  que  la  neige  attachée  à  la  branche, 


Lui  survivni  loujoiir^,  coinine  Tesprit  au  corps, 

Quand  l'implacable  faux  a  brisé  ses  ressorts. 

Oui,  celte  blanche  feuille  est  l'àme  de  la  graine. 

Elle  s'envolera  vers  l'immortel  domaine, 

Quand  l'esprit  du  penseur  animant  ce  vélin , 

Lui  pnMera  son  aile  et  son  souffle  divin. 

— A  ce  satin  glacé  quelque  nouveau  Messie 

Ne  con(iera-t-il  pas  sa  sainte  prophétie? 

Relique  vénérée,  immortel  monument, 

La  feuille  deviendrait  un  divin  talisman 

Que  les  pieux  croyaats  garderaient  dans  leur  arche. 

Le  temps  impétueux,  dans  sa  rapide  marche, 

N'oserait  outrager  l'impérissable  autel 

Où  serait  déposé  ce  message  du  ciel... 

— Mais  qui  peut  garantir  que  quelque  faux  prophète. 

En  y  versant  l'erreur,  n'y  sème  la  tempête? 

De  ce  vélin  fatal  l'orage  peut  surgir. 

Dieu!  je  l'entends  gronder,  et  je  me  sens  frémir  ! 

Le  contrat  social  qu'un  sophiste  élabore. 

Sur  celte  feuille  un  jour  viendra  peut-être  éclore. 

Supposez  que  le  vent  au  milieu  du  forum 

Au  peuple  frémissant  jette  ce  labarum  ; 

Que  sa  puissante  main  sape  aussitôt  les  trônes, 

En  donnant  aux  enfants'pour  cerceaux  des  couronnes; 

Qu'il  se  proclame  alors  législateur  et  roi. 

Et  que  d'un  nouveau  code  il  promulgue  la  loi; 

Que  foulant  à  ses  pieds  des  préjugés  antiques, 

Sur  des  trônes  croulants  fonilanl  des  républiques, 

11  déchaîne  le  flot  des  révolutions. 

Comme  un  cratère  ardent  en  ses  éruptions... 

Le  voyez-vous  bondir  sur  un  torrent  de  laves? 

11  soulève  les  serfs,  il  brise  leurs  entraves!... 

L'idée  est  comme  l'onde  :  elle  prend  son  niveau. 

Et,  remuant  le  c(eur,  embrase  le  cerveau. 


412 

Elle  sY'Ieiul  parlent,  elle  couvre  la  terre, 

Et,  comme  la  vapeur,  recèle  le  tonnerre. 

—  La  foudre  et  les  éclairs,  l'un  sur  l'autre  entassés. 

Dans  la  graine  de  lin  étaient  donc  condensés, 

Confondus  avec  l'or,  l'azur  et  l'émeraude  : 

L'élément  qui  féconde  et  celui  qui  corrode, 

A  côté  de  l'amour,  le  fléau  qui  détruit... 

Ecoutez,  écoutez  ce  formidable  bruit  : 

C'est  un  monde  qui  croule,  un  autre  qui  se  fonde!:.. 

Une  graine  a  suffi  pour  transformer  le  monde!  !  !... 


—Ah!  des  desseins  de  Dieu  qui  peut  sonder  le  fond? 
Si  je  veux  les  scruter  mon  esprit  se  confond! 
Qui  donc  m'expliquera  ces  merveilleuses  choses, 
Ces  transformations  et  ces  métamorphoses? 
Où  trouver  un  flambeau  dont  la  vive  lueur 
Epande  ses  rayons  dans  la  nuit  de  mon  cœur? 
Où,  le  critérium  pour  ma  raison  fragile? 
Une  voix  me  répond  :  —Médite  l'Évangile. 

J.  AlEllCADIER,  premier  commis  de  Direction 
des  ConlribulioDs  Indirectes. 


ili 


LE  GASCON  ET  LE  BANQUIER. 


CONTE. 


Que  le  cœur  ou  l'esprit  soit  vide, 
On  n'en  meurt  pas,  car  les  plus  creux 
Bien  souvent  sont  les  plus  heureux. 
Mais  l'outre  de  la  Danaïde 
Que  l'on  appelle  le  gaster, 
Ne  remplit  pas  son  gouiïre  avide 
D'amour,  de  rêves  ou  d'étlier. 
Un  gascon  l'éprouva.  Seul,  en  pleine  campagne, 

Ce  gascon  voyageait, 
Bâtissant,  en  marchant,  des  châteaux  en  Espagne. 
Tandis  que  son  espoir  à  l'aise  s'y  logeait. 
Ses  entrailles  criaient  sous  son  gousset  aride 
Qui  n'avait  pas  horreur  du  vide  : 
L'or  ni  l'argent,  hélas! 
N'y  germaient  pas... 
Le  pauvre  voyageur  n'avait  d'autre  ressource 
Que  celle  d'un  esprit  prompt  en  expédients. 
Il  avait  oii'ilié  dans  son  chàloau  sa  bourse. 
— Tout  gascon  a  castel  sur  les  bords  si  riants 
De  la  Garonne.  —  Enfin,  une  pénible  course 
.\vait  débilité  son  robuste  estomac  : 
11  chercliail  \m  iliner  plus  encore  qu'un  hamac. 


414 

Harassé,  soucieux,  aux  abords  d'une  ville 
Il  accoste  un  quidam 
De  la  façon  la  plus  civile  : 
—  «  Qu'avez-vous  de  nouveau  par  ici,  dit-il.  »  —  «  Dam  ! 
Répond  le  citadin,  nn  riclio  mariage, 
Qui  se  rèyle  aujourd'hui.  La  liile  est  belle  et  sage: 
C'est  celle  du  banquier.  Cent  mille  francs  comptants; 
Voilà  sa  dot.  On  va  dîner  en  |}eu'  d'mstants.  » 
— Le  gascon,  pour  calmer  sa  faim  inexorable, 
Se  présente  au  moment  où  l'on  se  met  à  table. 
Et  prenant  un  sourire,  un  parler  des  plus  francs. 
Il  propose  au  ban(iuier  cinquante  mille  francs 
A  gagner.  A  ces  mots,  quittant  son  air  sévère, 
Le  Crésus  répliqua  :  —  «  Nous  avons  le  notaire; 
Nous  pourrons  aisément  nous  entendre  au  dessert; 
Entrez  et  permettez  que  j'ajoute  un  couvert.  » 
— ^Le  gascon  famélique  obéit  sans  débattre; 
Il  prit  place  au  festin  et  mangea  comme  quatre, 
But  de  même,  causa  sans  le  moindre  embarras 
Et  fit  des  calembours.  Vers  la  fin  du  repas. 
L'heureux  amphitryon,  d'un  air  fort  débonnaire. 
S'approcha  du  gascon  pour  parler  de  l'allaire: 
— «  Hé  bien!  mon  cher,  dit-il,  voyons,  quels  sont  vos  plans? 
— C'est  simple  :  vous  gagnez  cinquante  mille  francs. 
—Mais  comment?  — Le  voici:  Votre  fille  est  charmante; 
Vous  la  dotez  de  cent,  je  la  prends  pour  cinquante.  » 

J.  MERCADIER,  premier  commis  de  Direction 
des  Contnbuuons  Indirectes. 


LISTE  DES  MEMBRES 


COMPOSANT 


l\  SOCIETE  ACIIICOLE,  SlIESTIFIOUE  ET  LITTERIIRE 

DES    PVRÉIVÉES-ORIEIWTALUS. 


Membres  lionoriklres. 

1835.  M.  Mathieu,  0.  ^,  membre  de  VInstitut. 

1836.  M.  GuizoT,  G.  ^  ,  membre  de  V Académie  Française. 

membres  résidants. 

1854.  M.  Abblard,  professeur  à  l'ÉcoIe-Normale. 
1853.  M.  Alart,  archiviste  de  la  Prcleclure. 
1833.  M.  Alzine,  imprimeur-libraire  (F)'. 
1853.  M.  Argiot  (Jacques),  homme  de  lettres. 
1857.  M.  AsTORS  (François),  propriétaire. 
1853.  M.  AuDUSSON  (Olivier),  propriétaire. 

1838.  M.  AuGÉ,  ^,  capitaine  d'artillerie  en  retraite. 

1846.  M.  AzÉMAR,  propriétaire. 

1836.  M.  Bach,  0.  ^,  colonel  d'artillerie  en  retraite. 

1857.  M.  Barberet,  ^,  inspecteur  d'Académie. 

1860.  M.  Batlle  (Victor),  maire  de  Cabestany. 

1855.  M.  Bédos,  avocat. 

1833.  .M.  Béguin,  directeur  de  rÉcole-Normale  (F). 

1858.  M.  Bensa,  chanoine  honoraire,  professeur  de  philosophie 

et  de  théologie  au  Grand-Séminaire. 
1853.  M.  Bertrand-Balanda,  propriétaire. 
1857.  M.  lîocAMv,  docteur-médecin. 
1850.  M.  Boix,  pharmacien. 

1861.  M.  Boisso.NiNET,  G.  i(,  colonel  d'artillerie. 

'  L(i  fonJatours  do  la  Socivtî'  sont  dé»if(uéi  par  h  leltre  F,  qui  est  à  la  sulie  de  leur  nom 


416 

1853.  M.  BoNAFOS,  docteur-médecin. 

1847.  M.  BoNNEFOY  (de),  propriétaire. 

1855.  M.  BoucABEiLLE,  chan.  honoraire,  aumônier  de  l'École- 

Normale. 
1836.  M.  Bresson,  propriétaire. 
1833.  M.  Gaffe,  architecte  de  la  Ville  de  Perpignan  {F}. 
1855.  M.  Calvet,  agronome. 
1861.  M.  Carcassonxe  (Jean),  propriétaire. 
1835.  M.  Companyo  père,  docteur-médecin. 

1840.  M.  Costa  (Léon  de),  chef  de  division  à  la  Préfecture. 

1847.  M.  CtiiLLÉ,  *,  directeur  de  la  Ferme-École. 

1853.  M.  Badins  (Sauveur),  propriétaire. 

1855.  M.  Delhoste,  chan.  honoraire,  vicaire  de  la  Cathédrale. 

1848.  M.  Desprès  (Antoine),  propriétaire. 
1861.  M.  Desprès  (Jules),  propriétaire. 

1854.  M.  Durand  (Justin),  ^,  banquier. 
1850.  M.  EscATLLAR  (d'),  propriétaire. 

1841.  M.  Eychenne  aîné,  propriétaire. 
1865.  M.  Estrade  (Auguste),  propriétaire. 

1849.  M.  Fabre  (Louis),  professeur  en  retraite. 
1861.  M.  Ferrer  (Léon),  pharmacien. 

1854.  M.  Fines,  chanoine  titulaire  du  diocèse,  supérieur  du 
Grand-Séminaire. 

1853.  M.  Garrette,  banquier. 
1848.  M.  GouELL,  docteur-médecin. 

1859.  M.  Granier  de  Cass.\gnac,  *,  chanoine  honoraire,  prin- 

cipal du  Collège  de  Perpignan. 

1854.  M.  Jaume  (Amédée),  notaire. 
1854.  M.  Jouy-d'Arnaud,  *,  propriétaire. 

1850.  M.  Labau,  propriétaire. 

1860.  M.  Lacombe  Saint-Michel  (Romain),  propriétaire. 
1854.  M.  Lacroix  (Ferdinand),  avocat. 

1854.  M.  Lafabrègue, juge. 

1853.  M.  Lamer  (Jules  de),  propriétaire. 


417 

1841.  M.  Lazehme  (GLarlcs),  iiropriétaire. 
1853.  M.  Lloket  (Joseph  de),  propriétaire. 

1834.  M.  Lloubes  (Auiruste),  banquier. 

1835.  M.  Massot  (Paul),  docleur-médeciii. 
1853.  M.  Massot  (Aimé),  doclcur-médecin. 

1862.  M.  Mercadieu,  commis  des  Conlributions  Indirecles. 

1861.  M.  MoREU,  professeur  au  Collège. 

1853.  M.  MuxART  (Auguste),  avocat. 

1835.  M.  Passama,  docteur-médecin,  maire  de  Perpignan. 

1858.  M.  Philip,  chanoine  titulaire  du  diocèse. 

1834.  M.  Pljade,  doclcur-mcdccin. 

1857.  M.  PiEYNÈs-AuDUSSON,  propriétaire. 

1853.  M.  Rides,  directeur  de  l'École  primaire  supérieure. 

1853.  M.  Robin  (Louis),  propriétaire. 

1858.  M.  RouFFiA  (Joseph),  instituteur. 

1859.  M.  Saignes  (Justin),  lithographe. 

1854.  M.  Sauvy  (Joseph),  négociant.    • 

1853.  M.  SiAU  (Antoine),  propriétaire. 

1833.  M.  SiRVEN,  agent  principal  des  Hospices  de  Perpignan  (F). 

1854.  M.  Talayracu  (Joseph),  avocat. 

1855.  M.  Tarrés,  docteur-médecin. 

1860.  M.  Tastu  (Antoine),  ingénieur  en  chef  des  Ponls-el- 

Chaussécs. 

1860.  M.  Testory  (Paulin),  pharmacien. 
1841.  M.  ViLALLONGUE  (Svlveslre),  négociant. 

UombrcN  résidante  n'habitant  pa»  l'crpignan. 

1858.  M.  Besombes  (Joseph),  négociant,  à  Saint-Laurent-de-la- 
Salaiique. 

1861.  M.  Bosch  (Joseph),  propriétaire,  à  Ille. 
1850.  M.  Camp,  curé,  ù  Via  (can».cn  de  Saillagouse). 

1856.  M.  Cardonnell,  propriéliiire,  à  Cases-de-l*éne. 
1860,  }\.  Cazes,  noluirf.  à  iMiilas. 

27 


418 

1851.  M.  Conte  (^Joseph),  propriétaire,  à  Estagel. 

185Ô.  M.  DuvERNEY,  propriétaire,  h  Espira-de-i'Agiy. 

1847.  M.  GiRVÈs  (Sauveur),  propricluiro,  à  Vinça. 

1801.  M.  IlÉ.N.-vuT  (Jean),  propriétaire,  au  Soier. 

1856.  M.  Malègue,  propriétaire,  à  Pézilla-de-la-Rivière. 

1858.  M.  .Marquv  (ils,  pépiniériste,  à  lile. 

1858.  M.  NoGUÈs,  juge  de  paix,  à  Olette, 

1858.  M.  Pl.\,  juge  de  paix,  à  Saint-Paul. 

1860.  -M.  Ratiieau,  ^,  capil.,  chef  du  génie,  à  Amélic-les-Bains. 
1858.  M.  ToLRA  DE  Bordas  (Joseph),  prêtre,  professeur  de 

philosophie  et  d'histoire  au  Petit-Séminaire  de  Prades. 

1861.  M.  Truillès  (Joseph),  notaire,  à  Ille. 

1861.  M.  ViLAu-SouBiRANE,  propriétaire,  au  Boulou. 

Membres  correMponâaiitii. 

1839.  JI™<=  Lafabrègue, 'naturaliste,  à  Lyon. 
1839.  M"""  Tastu  (Araable),  à  Paris. 

1839.  M"'e  ViEN  (Céleste),  à  Paris. 

1840.  ÎJ'°e  Faure  (Anaïs),  née  Biu,  à  Limoux. 
1842.  M""  Favieu  (Eulalie),  à  Marseille. 

1833.  M.  Armonville,  secrétaire  du  Conservatoire  des  Arts  et 
Métiers,  à  Paris. 

—  M.  B.ASTARD,  docl.-médecin,  à  Châlonnes  (Maine-et-Loire). 

—  M.  BouBÉE,  géologue,  à  Paris. 

—  M.  ChrisTol  (Jul.  de),  professeur  d'histoire  naturelle,  à 

Montpellier. 

—  M.  Des  Mouli.ns  (Charles),  membre  de  plusieurs  sociétés 

savantes,  à  Lanquais. 

—  M.  Denis  de  S.unt-Antoine,  président  des  relations  inté- 

rieures de  la  Société  de  Civilisation,  h  Paris. 
—     M.  Di.AS  DE  MoRALÈs,ancien  député  aux  Cortès,  à. Marseille. 

—  M.  Ferrus,  ancien  principal  du  Collège  de  Perpignan  (F). 


419 

1833.  M.  FiuissE,  lie  Perpignan,  négociant,  à  Celle  (f). 

—  M.  JuLiA,  de  Perpignan,  secrétaire  d'Académie,  à  Alger(Fj. 

—  M.  SiAU,  de  Perpignan,  ingénieur  en  chef  des  Ponls-et- 

Chaussées  eu  retraile,  à  Bordeaux. 

—  M.  TouuNAL,  géologue,  à  Narbonne. 

—  M.  Vène,  ingénieur  des  Mines,  à  Toulouse. 

1834.  M.  BoiSGiRAUD,  professeur  de  chimie,  à  Toulouse. 

—  M.  César-Moueal",  directeur-fondateur  de  la  Société  fran- 

çaise de  Statistique,  à  Paris. 

—  M.  Gros,  avocat,  à  .\arbonne. 

—  M.  Delestre,  président  de  VAthénee  Impérial,  à  Paris. 

—  M.  DupuY,  -iï,  colonel  d'élal-major  en  retraite,  à  Toulouse. 

—  M.  GoDDE  DE  LiANCOURT,  président  de  la  Société  universelle 

de  Civilisalion,  à  Paris. 
-    M.  Puj.iDE,  i(,  docteur-médecin,  à  Amélie-les-Bains. 

—  M.  Poulain,  chirurgien  en  chef. 

—  M.  Salin,  contrôleur  de  la  .Monnaie  des  Médailles,  à  Paris. 

—  M.  X.ATART,  pharmacien,  à  Prats-de-Mollù. 

1835.  M.  Arago  (Etienne),  de  Perpignan,  homme  de  lettres, 

à  Paris. 

—  M.  Breghotdu Lut, conseilleràlaCourlmpérialede Lyon. 

membre  de  V Académie  Impériale  de  la  même  ville. 

—  M.  Cachelièvre.  ingénieur  des  Mines. 

—  M.  Calmètes,  Sf,de  Perpignan,  conseiller  à  la  Cour  de 

Cassation,  à  Paris. 

—  M.  Chevrolat  (Auguste),  membre  de  la  Société  Enlomo- 

logijue  de  France,  à  Paris. 

—  M.  Combes,  docteur-médecin,  à  Toulouse. 

—  M.  Delocre,  docteur-médecin,  à  Lyon. 

—  M.  Denizart-Hurtzel,  propriétaire,  à  Lille. 

—  .M.  DuFFOURC,  ^ ,  colonel  du  génie. 

—  M  ExsELY,  docteur-médecin,  à  Caslelnaudary. 

—  M.  Gally-Cazal.at,  professeur  de  physique,  à  Versailles. 

—  M.  GuiNARD  aîné,  pharmacien,  à  Bordeaux. 


430 

1835.  M.  GuiïER,  de  Perpignan,  à  Chaaibéry. 

—  M.  Gi  voT  DE  Fère,  secrétaire  perpétuel  île  la  Sociétt 

d  Encouragemeui.  h  Paris. 

—  M.  Iritn,  naturaliste,  ù  Moulpellier. 

—  M.  Jllia,  de  Perpignan,  chel"  d'escadron  d'artillerie. 

—  M.  Lecoq,  professeur  de  botanique,  à  Glerniont-Ferrand. 

—  M.  Maurin  (Laurent),  de  Perpignan,  lithographe,  à  Paris. 

—  M.  Merch,  trésorier  de  la  Société  Linnéenne  de  Lyon. 

—  M.  MuLZANT,  professeur  d'entomologie  au  Lycée  et  à  la 

Faculté  des  Sciences  de  Lyon. 

—  M.  Péricaud,  bibliothécaire  de  la  ville  de  Lyon,  membre 

de  V Académie  Impériale  de  la  même  ville. 

—  M.  RiGAUD  (Esprit),  de  Perpignan,  avocat  à  la  Cour  de 

Cassation,  à  Paris. 

—  M.  RouFFiA(Côme),  de  Perpignan,  maître  de  pension,  à 

Millas. 

—  M.  TiiURBERT,  ingénieur  des  Mines. 

—  M.  >Valter,  ingénieur  civil,  professeur  à  l'École  des  Arts 

et  Manufactures,  à  Paris. 

1837.  M.  Barrau,  homme  de  lettres,  à  Toulouse. 

—  M.  BoLVix,  (le  Perpignan,  capitaine  de  frégate. 

—  M.  Mercadier  allié,  lithographe,  à  Toulouse. 

1838.  M.  DuROSOY,  inspecteur  des  .Mines. 

—  M.  Grenier,  docteur-médecin,  professeur  d'histoire  natu- 

relle, à  Besançon. 

1838.  M.  Vaillant,  dessinateur,  attaché  au  Muséum  d'Histoire 

naturelle,  à  Paris. 

1839.  M.  Brochier,  capitaine  du  génie,  à  Paris, 

—  M.  Cadilhac  (Désiré),  à  Puisségur,  près  Béziers. 

—  M.  CouDART  d'Aulnay,  membre  de  l'Athénée  des  Arts, 

à  Paris. 

—  M.  Terrevert,  naturaliste,  à  Lyon. 

1840.  M.  Arago  (Alfred),  de  Perpignan,  sous-inspecteur  de* 

B'iaux-Arls,  à  Paris. 


'42  î 

1840.  M.  Monzic-Lasserre,  doct. -médecin,  à  Coux(Dorilognc). 

1841.  M.  François,  ingonieur  des  Mines. 

—  M.  FoNTAN,  docteur-médecin. 

—  M.  Moquin-Tandon,  naturaliste,  à  Toulouse. 

—  .M.  Vienne,  bibliothécaire  de  la  ville  de  Toulouse. 

1842.  M.  Bénet  de  Peraud,  docteur-médecin,  à  Paris. 

—  M.  Gellé,  professeur  à  l'École  Vétérinaire  de  Toulouse. 

—  M.  Laugier,  attaché  à  l'Observatoire  de  Paris. 

—  M.  Petit,  directeur  de  l'Observatoire  de  Toulouse. 

—  M.  PoNGY,  ouvrier  maçon,  homme  de  lettres,  à  Toulon. 

—  M.  Sel  VA  (Prosper),  îrf ,  de  Perpignan,  capit.  de  vaisseau. 

1843.  M.  D'O.MBRE-FiRMAS,  d'Alais. 

—  M.  Passama,  ^>,  de  Perpignan,  capitaine  de  frégate. 

—  M.  Massot-Reynier,  ^,  de  Perpignan,  premier  président 

i\  la  Cour  Impériale  de  Rouen. 

—  .M.  SoLLiEus  (Félix),  homme  de  lettres,  à  Paris. 

1844.  M.  Bouis  fils,  de  Perpignan,  prof,  de  chimie,  à  Paris. 

—  M.  Didier  (Petil),  de  Lyon. 

—  M.  Perey  (Alexis),  professeur  de  malhémaliques,  à  Dijon. 

—  M.  Rori.net,  membre  de  V Académie  Impériale  de  Médecine. 

1847.  M.  [vat,  avocat  à  la  Cour  Impériale  de  Paris-. 

—  M.  Renard  de  Saixt-Malo,  de  Perpignan,  avocat  à  la  Cour 

de  Cassation,  à  Paris. 

1848.  M.  Laurence,  pri"hcipal  du  Collège,  à  Mont-de-Marsan. 

—  M.  Lefr.\nc  (Pierre),  homme  de  lettres,  à  Paris. 

—  M.  Perris  (Edouard),  naturaliste,  à  Mont-de-Marsan 

—  M.  Reboi'd,  docteur-médecin,  aide-major  (Algérie). 

1849.  M.  AuTHEMAN,  économe  des  hospices,  à  Lisle-sur-Sorgu« 

(Var). 

—  .M.  PiETTA  (Lucien),  à  Montesquieu,  près  Toulouse. 
1853.  M.  Collet,  principal  du  Collège  de  Castelnaudary. 

—  M.  CoMPANVo  fils,  de  Perpignan ,  docteur-médecin ,  en 

Egypte. 

—  M.  Fai're,  docteur-médecin,  en  .\lg[éTie. 


*2!2 

1853.  M.  Mamel  (^Jacquesj,  de  Per|iig!iai) ,  ingHnieui-  un  chel 
des  chemins  de  fer  du  Nord. 
~     M.  Bon:<et  (Edmond),  ingénieur  civil. 

—  M.  C.^RVALLO  (Jules),  ingénieur  civil,  nicmbre-fondaleor 

do  VInstitut  archéologique  et  historique  du  Limousin. 
!854.  M.  Denjean,   de  Perpignan,   professeur  au   Collège  de 
Lodève. 

—  M.  M-U'HicE,  de  Perpignan,  agent-voyer  en  chef  du  dépar- 

tement de  Loir-et-Cher. 

—  M.  Thévenin,  procureur  impérial,  à  Auch. 

1855.  M.  Barthélémy  (de),  *,  ancien  conseiller  de  Préfecture. 

—  M.  Barthélémy  (de),  ^,  sous-préfel,  à  Bélbrt. 

—  M.  Calisti,  inspecteur  d'Académie,  à  iXevers. 

—  M.  CoRTiE,  de  Perpignan,  professeur,  à  Orange. 

—  M.  Chauraisd  de  Mal.\rce,  homme  de  lettres,  à  Blois. 

—  M.  Crova,  de  Perpignan,  professeur  de  physique,  à  Mont- 

pellier. 

—  M.  GuiGON,  professeur  de  mathématiques,  à  Dastia. 

—  M.  Paris  (Louis). 

—  M.  Soubevran  (Paul  de),  ift,  préfet,  à  Blois. 

1856.  M.  Mercader  (Ernest),  docleur-médecin ,  à  La  Magistrad 

(Tarn-et-Garonne). 

1857.  M.  Soi'BEVHAN  (Léon),  pharmacien,  .i  Paris. 

1858.  M.  Car.\lp  (Baymond),  directeur  dos  cultures  du  Péni- 

tencier de  Marseille. 

—  xM.  Chambeu  (l'abbé),  de  Perpignan,  dominicain 

—  M.  LouRDOUEFx  (Paul  de). 

—  M.  Dardé,  avoué,  à  Carcassonno. 

—  M.  Denille,  directeur  de  la  Ferme-École  do  l'Aude. 

—  M.  Desalle,  agonl-voyer  en  chef  du  départem'  de  l'Aude. 

1859.  M.  Courrier  de  Fraissé,  h  Cabardès  (Aude). 

—  M.  Guilhaume,  inspecteur-général  des  Ponts-et-Chaussées. 

—  M.  GurxER,  de  Saint-Laurent-dc-la-Salanque.  diroclonr  de 

la  Société  firtixtiqiip  de  r Isthme  de  Suez. 


423 

1859.  M.  LiispiAt  (Henri),  de  Perpignan,  docteur-médecin  des 

armées. 

—  M.  BoNNEL  (Stanisiiis),  propriétaire,  à  Béziers. 

—  M.  Lassus  de  S.vint-Geniès  (le  baron  de),  if,  préfet. 

—  M.  Maraval,  vice-président  de  la  Société  d'Agriculture 

de  l'Aude. 

—  M.  Maiiés  (Henri),  membre  de  la  Société  d'Agriculture  de 

rilérault. 

—  M.  Peli.et  (Pierre;,  naturaliste,  à  liéziers. 

—  M.  PoRTAL  DE  Moux,  propHéluire,  à  Carcassonne. 

—  M.  Rendu  (Victor),  inspecteur-général  de  rap:riculture. 

—  M.  Salaman,  propriétaire,  à  Carcassonne. 

—  M.  Talrich  (Jules),  de  Perpignan,  artiste  préparateur 

d'anatomie  en  cire,  à  Paris. 

—  M.  Valayer,  propriétaire,  à  Avignon. 

1860.  M.  Aragon  (Victor),  ift,  de  Perpignan.,  prés,  de  cliambro 

à  la  Cour  Impériale  de  Monipellier. 

—  M.  Cazalis-Allut,  propriétaire,  à  iMonfpellier. 

—  M.  DouMET,  maire  de  Cette. 

—  M.  FoL'CHiER  (de),  capitaine  d'infiinterie,  à  Melun. 

—  M.  Martin  (Jo>;eph  de),  docteur-médecin,  à  Narbonne. 

—  M.  NoGUÈs  (A.-F.),  professeur  d'histoire  naturelle. 

—  M.  Pagezy,  maire  de  Monipellier. 

—  M.  Ricard  (Alphonse),  avocat. 

1861.  M.  A.MAS,  employé  à  la  Direction  des  Douanes,  à  Marseille. 

—  M.  Bataillari),  naturaliste,  à  Audeux  (Doubs). 

—  M.  BoNNEL  (Gabriel),  avocat,  à  Narbonne. 

—  M.  Bonnet,  ,i:ige  de  paix,  à  Aubagne  (Bouches-du-Rhône). 

—  M.  BouNiN,  vice-prés,  de  la  Société  d' Agriculture  de  Mce. 

—  M.  Bovis  (de),  propriétaire,  à  Avignon. 

—  M.  Fernand-L.\garrigue,  membre  de  Vlnstitut  historique 

de  France. 

—  M.  F'/ssiAUX  (l'abbéV  direct,  du  pénitencier  des  Boucbes- 

du-Rh6np. 


1861.  M.  Hardy,  directeur  de  la  pépinière  centrale  du  Gouver- 

iiemenl,  près  d'Alger. 
-     M.  Hklzé  (Giislave),  prolesseur  d'agriculture  à  l'École 
iiiij'ôriale  de  Grignoii. 

—  M.  Labeaume  (de),  président  de  la  Société  d'Agriculhirc 

du  Gard. 

—  M.  Levmêric,  prof,  de  géologie  à  la  Faculté  de  Toulouse. 

—  M.  RouGEMONT,  président  de  la  Société  d'Horlicuhurc  des 

BoucIies-dii-Blu'me. 

—  M.  Salles  (Isidore),  ^,  prél'el. 

—  M.  SiCARD ,   secrétaire  de    la  Société  d'Horticulture   des 

Bouches-du-Rliône. 

1862.  M.  Chardon,  président  de  la  Société  d'Horticulture  et  de 

Botanique  du  département  du  Gard. 

—  M.  Éloffe  (Arthur),  naturaliste,  à  Paris. 

—  M.  Ville  (Ludovic),  '^,  de  Rivesaltes,  ingénieur  en  chef 

des  Mines  (Algérie). 
1865.  M,  Fuix,  de  Perpignan,  ingénieur  en  chef  des  Ponts-et- 
Chaussées,  à  Amiens. 

—  M.  Oliver  (Paul),  memhre  de  la  Société  de  Botanique  dr 

France. 

Correspondants  étranger». 

1833.  M.  Llobet,  géologue,  à  Barcelone. 

—  M.  Ladron  de  Guerrera,  chanoine  et  curé  du  Rctiro,  à 

Madrid. 
1835.  )1.  LoRENZo  DE  Redecilla,  homme  de  lettres,  à  Madrid. 

—  M.  Francisco  Vera,  homme  de  lettres,  ;'i  Madrid. 

—  M.  Acevedo,  homme  de  lettres,  à  Madrid. 

—  M.  Lorenzo  Abat,  homme  de  lettres,  à  Madrid. 

—  M.  Mari.\no  de  Sans,  naturaliste,  à  Barcelone. 

—  M.  Roura,  professeur  de  chimie,  à  Barcelone. 

—  M.  Bastuc,  censeur  royal,  n  Barcelone. 


435 

1835.  M.  Gauimer,  membre  de  l'Université,  à  Madriil. 

—  M.  Raull,  avocat,  à  Barcelone. 

1842.  M.  Luis  Balaguk,  membre  de  la  Société  Philomaihique, 
à  Darcelon'^. 

1847.  M.  1»^  marquis  de  Belpuig,  duc  de  Savella,  à  Pa!ma  (Iles 

Baléares). 

—  M.  Joachim  Maria  Boyer  de  Hossello,  à  Palma  (lies 

Baléares). 

—  M.  Nicolas  Brozedo  y  ZAFORTERA,à  Palma(lles  Baléares). 

—  M.  Jules  de  Gabarrus,  consul  de  France  ^  Palma  (Ilo« 

Baléares). 

—  M.  Basilio  Sebastiano  C.\stellano,  bibliothécaire  de  la 

Bibliothèque  Royale,  à  Madrid. 

—  M.  Luis  Maria  Hamirés  Las  Gazas  Deza,  prés,  de  V Aca- 

démie des  Sciences,  Arts  et  Belles-Lettres  de  Cordoue. 

—  M.  MoDESTO  La  Fuente,  homme  de  lellres,  à  Madrid. 

—  M.  Isidore  Ghaussat,  homme  de  lollres,  à  Barcelone. 

1848.  M.  Martinez  (Ant.),  à  Palma  (lies  Raféares). 

—  M.  Medel  (Raymond),  à  Palma  (lies  Baléares). 

1840.  M.  Faces  de  Roma,  inspecteur-général  d'agriculture  dans 

la  province  de  Girone. 
i8r)l.  -M.  Vidal,  prolesseiir  d'histoire  naturelle  à  Tlniversité 

de  Valence.  ^ 

1852.  M.Macdonald,  président  de  V Académie  Britamique .  à 

Londres. 

—  M.  le  comte  de  Mélaxo,  secrétaire  perpétuel  de  r.4crt- 

démie  Britannique,  à  Londres. 

1853.  M.  REUMK(Aua'iisle  de),  capitaine  d'artillerie  en  Relgique. 

membre  de  YAcadémie  Britannique. 

—  M.  Blbio  y  Ors,  professeur  de  littérature  espagnole  à 

l'Université  de  Castille,  à  Valladolid. 

—  M.  Fadeuille  (de),  membre  de  YAcadémie  Britannique. 

—  M.  Florencio  Jaker  v  (Ihaim.s,   hnmnif  (!*>  lettres,  h 

Madrid. 


1853.  M.  J.  Trljillo  uel  Pakraso,  houiinc  de  lettres,  à  Madrid. 

—  M.  Gens  (Eugène),  professeur  d'histoire  ù  l'Alhénée  Royal 

d'Anvers. 

—  M.  le  vicomte  de  Kerckov-Varent,  président  de  YAca- 

déwie  d'Archéologie  de  Belgique,  grand'croix  et  com- 
mandeur de  plusieurs  ordres. 
--     M.  le  \icomle  Eugène  de  Kerckov-Varent  lils,  charge 
d'affaires  de  l'Empereur  de  Turquie  près  le  Gouver- 
nement Belge. 

—  .M.  Alexandre  Scoaepkem  ,  peintre  de  paysages,  profes- 

seur de  peinture,  à  Mai'Slrich. 

—  M.  Léonard  de  Cuyper,  statuaire,  à  Anvers. 

—  M.  Nicolas  Van-der-Hevden,  généalogiste,  à  Anvers. 

—  M.  Raphaël  Atienza,  marqués  de  Salvatierra,  à  Ronda. 

—  M.Thomas  Aquilo.   professeur  universitaire,  à  Palma 

(lies  Baléares). 

1859.  M.  Alex.vndre  Schaepkens,  direct,  de  l'École  des  Beaux- 
Arts,  chevalier  de  la  Couronne  de  Chêne,  à  Macstrich. 

1861.  M.  le  doctenr  Don  Juan  de  Dios  Montesimos  y  Neira. 
à  Cordoue  (Espagne). 

—  M.  Damaso  Calvet,  ingénieur,  à  Figuéres. 

Membres  résl«laM«iit  dc«-éd«is  depuis  la  publication 
du  dernier  lïulieiin» 

M.  Amadis,  professeur  au  Collège  de  Perpignan. 

M.  Batlle  (Pierre),  homme  de  lettres,  à  Perpignan,  it'.^ 

M.  Lloubes  (Jean-Jacques),  banquier,  à  Perpignan. 

M.  Méric  (François),  homme  de  lettres,  à  Perpignan. 

M.  Pagès-Roudiére,  docteur-médecin,  à  Perpignan. 

M.  PicAS  (Ilippolyte),  avocat,  à  Perpignan. 

M.  Saléta,  capitaine  d'artillerie  en  retraite,  ù  Perpignan. 

,M.  Tastu-Jaireut,  avocat,  à  Perpignan. 


427 


'Académie  dos  Sciences  et  Belles- 

\isnr  )     Leilres.  ^c„;„r  n 

■*'*"   j  ;c>ainl-Ouciiiiii. 


Sociotés  corroMpondantp» 

'.4f«rfemie  ^/c.ç  Sciences  et  Belles- 
J     Leilres. 

[Comice  Agricole.  ' 

\lpes  (Basses). . .  Sociclé  cenirale   d' Agriculture   et 

d'acclimatation.  Di!(iH> 

(Société  Scientifique  et  du  Commerce., 

^"'"-' ISociélé  d'Agriculture,  Arts  et  Rel-Y^royes. 

'  ■  les- Lettres.  ) 

;  Société  d'Agriculture.  Carcassoniip 

\Comice  Agricole.  Limoiix. 

^"'''' ^Société  des  Arts  et  Sciences.  Gartassonuf. 

IComice  Agricole  de  l'arrondisse- 

\     ment  de  Aarbonne.  Narbonnc. 

Ariége Société  Agricole  et  Littéraire.         Foix 

Avt'yrnn Société  d'Agriculture.  Hnrjp/ 

!  Société  d'Horticulture. 

!  Société  de  Statistique.  i 

Académie  des  Sciences.  iMarseilIr. 

Société  de  Pharmacie.  i 

Berne  Horticole  des   Bouckes-du-^ 
\     Rhùne. 

Société  Vétérinaire  du  départemcut 
du  Calvados  et  de  la  Mandie.     i 

Société  d'Aqricullure.  Sciences  elî^''^-''^'^ 
I     Belles-Lettres.  \ 

\Snciété  d'Agriculture  h  ,ln  l.,,,,,- 
Calvadiis /     merce. 

.{rndemic  des   Sciencen .    .Iris  et'r.,,,,, 
Ilelle.-Leltres.  i^"^" 

j Société  Linnéenne  de  yormandie. 

Société  Académique,  Agricole.  In- 

du.tlrielle  et  d  Insirnrtion.  Falaisp. 

'■^•n'^' PrnpuijriT^-ur   ignrole  dti  Ciiiffil      \iirillar. 


128 

r.harenlf Société  d  Agriculture.  Arts  et  Com- 

mera  Aii^oukMiii. 

i  Société  (l'Afirinilluiy,  des  Sciences. 
nharcnip-lntôr-e  .(    Arts  et  Belles-Lettres.  Rocheforl 

'Athénée  de  la  Charente-Inférieure.  La  Rochelle 

Cher Société  Agricole  du  Cher.  Bourges 

.Académie  impériale  des  Sciences \ 
\     el  Arts.  I 

CAte-d'Or L    .       ..„     .    ,  „  ,  ,     .Dijon 

fSociete  d  HoHirullure  et  n  Arbori-\ 

\      culture.  . 

Creuse Société  des  Sciences  Xalurelles  et 

A  rchéologiques .  (iiiérel . 

{Société  d'Emulation.  i 

Doubs ]  (Besançon. 

[Société  d'A()ricnlture.  ) 

.Société  de  Stati.ifique,  des  :\rts  et\ 

Hirtnif ]     des  Sciences.  Walence. 

Société  d'Agriculture. 

ture Société  libre  d'Agricu'Iure,  Scien- 
ces, Arts  et  Belles-Lettres.  Kvreux. 

!  Académie  des  Sciences,  cic.  \ 

< .,T>\ ,  {^"'''^^  d'Agriculture.  {^.^^^^ 

fComice  Agriroh'  de  l' arrondisse- 
\     ment  de  finies. 

j Académie  des  Jeux-Floraux. 

[Académie  des  Sciences  et  Belles- 
\     Lettres. 

^Société  Archéologique  du  Midi. 

Garonne (  Haute"). . (Société  d'Agriculture.  ,^Toulousp. 

\jourmil  d'Agriculture  pratique  eli 
d'Économie  rurale  pour  le  Miili\ 
de  la  France,  publié  pur  lcs\ 
Sociétés  d'Agriculture  de  laj 
Haute-Garonne  et  de  l'Ariége.    ' 

\Soriélé  Anrirolf.  ) 

(..•rs l  ,,         ,  (Auch. 

[Renie  Agricole  et  Horticole. 


Academit  Impériale  dt»  Science.», 

S     Belles-Lettres  et  Artt 
Société  Linnéenne. 

^ \Sodélé  dHorticullure.  ^Bordeaux 

I Société  d'Agriculture . 
{Société  de  Médecine. 

(Société  Archéologique. 
Société  d'Agriculture.  i 

Le   Messaqer    Anricule   du    .Midi' ,,    ,    ,.. 
riermm y     (rédacteur).  ,  Montpellier. 


lAnnales  de  la  Société  d'Horticulture] 
et  de  Botanique  de  l'Hérault. 

[Société  Archéologique.  Béziers. 

Indre Société  d'Agriculture.  Chàteauroux. 

(Société  Médicale.  ^ 

!..),>   ,1  !„;,.„      \Société   d'Anriculture ,    Sciences Jr^ 
lndie-.t-Loire. . .      ^^^,^^  ^^  Belles-Lettre.  r"""'' 

[Société  Archéologique  de  Touraine.  j 

.Société  d'Agriculture.  \ 

[Académie  Delphinale.  j 

jgère.. .  .■ jSociété  de  Statistique  des  Sciences' Qr(.in,[,ie 

i    naturelles.  ( 

f Sud-Est.  Journal  agricole  et  hor-] 
\     ticole  (rédacteur).  i 

Jura Société  d'Emulation.  Lons-!e-Saulnier. 

Landes. Société  d'Agriculture.  Mont-de-Marsan. 

Loir-el-Cher ...    Société  d'Agriculture.  Blois. 

!  Société  d'Agriculture.  Montljrison. 

Société  Impériale  d' .Agriculture  , 
Sciences,  Arl»  et  Belles-Lettres 
du  département  de  la  Loire.        Saint-Etienut-. 

Loire  (Haute). . . .  Société  des  Sciences  et  d' Agriculture  Le  Puy. 

Loire  (Inférieure).  Académie  de  la  Loire-Inférieure.    Nantes. 

iSociété  d'A^^irieulture.  , 

Loiret „    .  ,,  ...,,.    ,  Orléans 

ySoctete  d  horticulture  s 


430 

Lot .  ■  Société  Affi'icole  et  Indu^trielU        taliors. 

Lot-et-Garonne. .  Société  d'Agriculture  et  Arts.         Agen. 

Lozère Société  A  qricole ,   Scientifiqiu    et 

Littéraire.  Mende. 

[Société  d'Agriculture,  Sciences  et^ 
\    Arts.  / 

Maine-et-Loire  . .  L-.^.  i,^d,^trielh.  (•^"^^"■'' 

{Société  Académique.  ' 

Manche Société  Académique  Cherbourg. 

'Académie  Impériale.  \ 

L,    .    .   „  ,     .     ,.  jChàlons. 

Marne 1  Société  d  Agniulture.  ^ 

[Académie  de  Reims.  Reims. 

(Société  des  Sciences,  Lettres  et  Arts.) 
.Meurthe  ■]  (>ancv. 

'Société  centrale  d'Agriculture.       > 

^Société  d'Histoire  Naturelle. 

Moselle ]  [iMeli!. 

■Académie  Impériale.  ' 

jSociété  d'Agriculture.  Valenciennes. 

I  Société  d'Agriculture  ,  Sciences  etj 
Arts.  fr^    „• 

l Comice  Agricole  de  f  ArrondisseA 
1    ment  de  Douai.  ) 

hociété  d'Émulation.  Cambrai. 

Nord VAcadémie  Nationale  Agricole,  Ma-  . 

j    nufacturiére,  etc.  i 

ÎSociété  des  Sciences,  de  l'AgriculJ 

I     turc  et  des  Arts.  /Lille- 

I  Comice  Agricole.  \ 

\Comice  Agricole  de  l'arrondisse-] 
^    ment  de  Lille.  > 

.Société  d'Agriculture.  Compiègne. 

Oise ISociélé  Académique,    Sciences  et 

'     Arts  du  département  de  l'Oise.    Beauvais. 

i  Académie  des  Sciences.  i 

Pas-de-Calais... Isocie/t-  Centrale  d'Agriculture  duM'^^- 
'     Pns-de-Cnlais.  ] 


431 


Pas-de-Calais... 


Puv-de-Dùme 


Rhin  (Haut). 


Société    (les    Science->    el    Belles- 
\     Lettrea. 

jSociélé  d' Atjric'iHtire  de  l'arron~\, 
\     dissemciil  de  Boulogne.  ) 


Boiilouno 


Rhôue 


Sarthe . 


Seine . 


.  Académie   d?s    Sciences ,    Belles- 
Lettres  et  Arts.  Ciormont  Fcrrand. 

Société  d'Agriculture.  \ 

.}Société  d'Histoire  ?iaturelle.  i 

'société  Industrielle  de  Mulhouse.    .Mulhouse. 

I Académie  des  Sciences. 

[Société    des   Sciences   PkijsiqtiesA 
\    Xaturelles,  d'Agriculture  et  d'In-1 

, .'     dustrie.  >Lyon. 

ISociété  Impériale  d'Agriculture  et\ 
[     d' Horticulture  pratique.  ] 

\ Société  Littéraire. 

.  .  Société  d'Agriculture  ,   Sciences  , 

Commerce  et  Arts.  Le  Mans. 

Académie  Nationale,  Agricole,  Ma- 
nufacturière cl  Commerciale.      ! 

Académie  des  Arts.  i 

Société  Centrale  d'Agriculture.       I 

Société  pour  l'Instruction  élémen- 
taire. 

Société  de  Statistique  universelle 

m-iété  d'Encouragement  pour  /'/«- 
dustrie.  \ 

Cercle  Agricole. 

Société  de  la  Morale  chrétienne. 

lAnnules  udminii^tratives  et  scienti 
fiqucs  d  Agriculture  française. 

ICercle  Historique. 

\ Institut  Impérial  de  France. 

I  Société  Protectrice  des  Animaux. 

i  Tribune  des  Linguistes,  Philosophie  ■ 
du  Langues. 


(Paris 


ia-2 


^exnf 


L  Apiculltui ,  Journal  des  Cultiru- 
teura  (iAbcillts  (rédacteur). 

Moniteur  des  Comices  et  des  Culti- 
vateurs (rédacteur).  , 

Cercle  de  la  Presse  scientifiquel 
(rédacteur).  I 

La  Bévue  d'Economie  rurale  (ré- 
dacteur). 

Journal     d'Agriculture    pratique 
]    (rédacteur)  1 

Annales  du  Ilihliophile.  du  Zi/W/o-^parjj 
tliêcnire  et  de  l  Archiviste ,  pu-' 
bliées  pur  Louis  Lucour. 

Revue  des  Sociétés  Savantes  des\ 
départements ,  publiée  sous  !es\ 
auspices  du  Ministre  de  l'instrur-\ 
tion  publique. 

Lu  Ferme,  Journal  Agricole  et 
Horticole,  des  Comices  Agricoles, 
des  Sociétés  Savantes,  des  liédac- 
teuri  de  Journaux,  des  Pasteurs 
et  des  Instituteurs  (rédacteur  M.! 
Defranoux). 


Seine-Inférieure. 


jSociété  des  Sciences,  Arts  et  Bel- , 
les-Lettres. 


[Société  d  Horticulture. 

}Société   libre    d'Émulation   et   dei^^^^'^^^ 
Commerce.  \ 

ISociété  Centrale  d'Agriculture. 

] Société  Hdvraise d'Etudes  diverses.) 

I  Cercle  pratique  d'Horticulture  c/lLe  Havre. 
de  Botanique.  j 


Seine-et-Marne  . .  Société  d' Agriculture  et  Sciences 

Morales.  Welun. 


Seine-et-Oisc . 


ilnstitut  National  Agronomique.     ^ 

■'Société  des  Scieuces  Murales,  (/es, Versailles. 
(     Lettres  et  Arts.  * 


i33 

, Société  d'A(iricultur('  et  <lii  C.um- ^ 

Îmerce .  i 

Société  (k  Statistique.  ;  Niort, 

Maître  Jacijitps,  Journal  jHipulairc] 
(l'Ai/rirulluri',  publié  à  A'iort. 

I Société  des  Antiquaires  de  Picardie 

[Société  d'Agriculture.  i 

^Société  d'Horticulture.  ' 

Soniitip <   ,,     .        ,    „,      ,..,.,.      Miniens. 

iMemoires  de  l  Académie  des  Scjen-i 

I     ces,  Helles-Lettres,  Arts,  Arjri-\ 
f     culture  et  Commerce  du  dpparte- 
■      ment  de  la  Somme. 

Tfirn Société  Lilléniire  et  Sêicnlifi'jue.     Caslics. 

Société  des  Sciences. 
[Société  d' Agriculture  et  du  ('.om-j 
V.,,.  )    '««'■''«•     '  Toulmi. 

^Comice  Agricole  de   l'arrondisse-[ 
ment  de  Tou'on. 


l 


Société  Scient ificjue  et  A  rchcologiqur.  Dratriiiiinan. 

Vnucliisc Société  d'.iijrirulture  rt  d'Horlirul- 

ture.  Avisnori. 


Vienne. 


i^Société  d'Agriculture. 

'Société  .Acndémique  de  Poitiers. 


n'oitiers. 


I  Société  d'Agriculture,  des  Sciences  \ 
Vienne  (Haute). . .  |     <"'  •'I''*'  [Limoi^es. 

'L'Agriculteur  du  tlenlre  ; 

VoSi-'es Société  d'Emulation.  Kpinal. 

^Société  Archéologique.  Sens. 

\„nne 'Société  des  Sciences  Historiques  et 

j     Naturelles    du    département    de 

l'Yonne.  Aiimtic. 

Alt'i'Tii'    Uulletin  de  la  Société  d'Agriculture 

d'Alger.  Aliter. 

2N 


\u 


SoclétéH  Étrangères. 

Aii!>lt'tt'iii'    Académie  Britannique.  Londres. 

I Société Arihéologique de Bru.ri'lles.  Bruxelles. 

l^ftlS'"?!"' ^Société   de    l'Union   des    artistes 

[     Liégeois.  Liège. 

.El  Propagador  de  la  Libertad         Barcelone. 

Espagne 5  „    •      ,  .,      . 

'La  Grajija  (ncvista).  rij^nres. 

Hollande Académie  Royale  des  Sciences  \mslc'nliiin 

Portugal 0  Airhiri)  Mural.  Jorual  de  Agri- 

cuhitrn,  Arles  e  Sciencias.  Lisbonne. 

Suisse Société  Vaudoise  des  Sci.''mes  na- 
turelles. Lausdiine 

Bussie Société  Impériale  d'AgrInilhi'r        Vosr^u 


Fém 


TAi!Li<:  Diis  »i\'HÈiu:s. 


RébUjm'!  (les  travaux  de  la  Société,  depuis  le  niois  d'octobre  1859 

jusqu'au  31  décembre  IS62,  nar  M.  Fabre,  secrétaire b 

t'encours  régional  de  Perpignan  et  expositions  annexées,  en  i^ti'â.  .'{1 

La  prime  d'honneur  des  l\\Téuées-Orientales,  par  M.  Henri  Doniol, 

secrétaire  et  rapporteur  de  la  commission  de  visite   -VA 

Distribution  des  prix  et  médailles t>f> 

Séance  publique  du  29  juillet  18G0 109 

Séance  publique  du  28  juillet  1861 115 

Rapport  sur  l'exposition  florale  et  maraîchère  du  Concours  régional  de 

Perpignan,  par  M.  l'abbé  Delhoste,  secrétaire  de  la  commission.  120 

Une  procession  au  quinzième  siècle,  par  M.  l'abbé  E>elhoste 12!"") 

Kin  du  supplément  aux  Éphémérides  de  riiôpital  Saint-Jean  et  de 

l'Hospice  de  la  Miséricorde  de  Perpignan,  par  M.  Joseph  Sirven.  129 

Les  ruines  de  Cabrenç,  par  M.  Piatheau,  capitaine,  chef  du  Génie, 

à  Amélie-lcs-Bains 1 5<i 

Note  sur  un  phénonième  d'optique  observé  au  sommet  du  Canigou, 

(lar  le  même n-) 

Votice  géologique  sur  les  Albères,  par  M.  A.  F.  Noguès,  professeuj- 

de  sciences  physiques  et  naturelles  à  i.you , .  i7f, 

^ironique  perpignanaise,  par  M   Joseph  Sirven 201 

Monographie  de  certains  sceaux  autrefois  en  usage  dans  les  comtés 

de  Uoussillon  et  de  Cerdagne,  par  M.  K.  do  Foucliicr   .  20f< 

Notice  sur  l'Isthme  de  Suez,  par  M.  A  Cuiler 293 

exploration  en  Tunisie,  par  M.  A.  Guiter 298 


43(> 

Biographies  roussillonnaises,  iiar  M.  Tabbé  J.  Tolra  de  Bordas 

I.  Mf,-'-  François  Ximi-nez,  fivèqiie  d'FJno  (1i')0~l  il5). . 

II.  Mfc-r  Michel  Pontich,  Évêque  de  Géroiic  (1032—1699) . 

III.  Le  R.  P.  Méliton  de  Perpii;nan,  Capiuiii  (iOSO— 1755) 


303 
303 
333 
355 


Vigarosy,  par  M.  Joseph  Sirven 371 

Analyse  cliimique  de  la  stéatite  de  Mosset,  par  M.  Léon  Ferrer. .  .  373 

Vers  adressés  à  Mgr  Gerbet ,  lors  de  sa  visite  au  Collège  de  Perpignan 

poiiry  administrcrle  sacrement  de  la  confirmation,  par  M.  L.  Fahre.  37.") 

La  Charité,  jiar  M.  Joseph  Sirven 377 

Les  Grues  d'Ibicns,  par  M.  L.  Fabre 379 

Éloge  du  Maréchal  de  Mailly,  par  M.  J.  Mercadier 384 

Les  métamorphoses  d'une  graine,  par  M.  J.  Mercadier lOtJ 

Le  Gascon  et  le  Banquier,  par  M.  J.  Mercadier .  413 

Liste  des  Membres  composant  la  Société .il  5 

Liste  des  Sociétés  correspondantes i27 


FIN    DE    LA   TABLE. 


tUj  1LU.H.V  Uj 


_1L.'..  -uVi,:::-  -"j:  /MP>  ,  .Ac-i  .it'  ..;';_  .  .   •  .■f;.'v. 


PL.l. 


PIKEÎIIÈME    PARTIE 


■scEirx  imr  r.LF.RuMK. 


.'-t^     ae.^suûi;;;  le. 


-i£.-.  J'ii-.if  Z.r.-jnes.  M,ii;:Jié  .VjiJ.  Pi:-n:ou  ,,, 


3.  . 


^  ^i.^^ 


-iti.Affin  S«j;yMj. Jfji-J»  AW..''»r-iij-.. 


PI..  2. 


IPKEMffiKJF,    HMMIIIE. 


^r.EAC"^  ror  i'.lek^vE. 


iiCrJmœ  S,^j.»...5fi.-i.  JW„-er^.,a.. 


litr..»'"iu»iai. Sf^jiiBJ  .  Msa-che  A  ' 


PL..3. 


FKi^IIEEE    PARTIE. 


SCEAUX  BU  CLEffi.GÉ, 


C-, .  Svjhit  Spd-jpjèa  .  Maz'ciie  i^eui .  l'ei-iixyuss. 


9. 


L:Th.  Jnsfn  3,v/r:t:,  Mn^ht  f'f'.sf .  ,Vvi»wv 


PL.   +. 


BErXIElUE    PARTIE. 


CEUX  DES    LAÏ9IES. 


8. 

9. 

^ww 

NfTjffigaf 

^-. 

1 

X-;      " 

:  r;  :y;l:i.:.^,)i^i:.l/t'rth'>''-'l  ffTi:-ifn.v. 


S  ''  èi  ?Mchnr   clf! 


PL. 


ii)Eil"sii:me  partie. 


SCEM^X  MES    EMflliEES. 


IitkJiisfin  Sâiçraes. Marche  Netu.Feijuc^nB. 


t'd  ''  os  Fonrhiev  itl. 


Lidi.  Juifiu  Saipiss.  Mirde Neuf ,  PBi:,r 


ps^nuui. 


PL.  6. 


DEUXIÈME    P.IRTIE  .         S  CE  AITX  DES  LMOUE  S  . 


Ed.  de  Fûucluer  àel. 


LiÛi.  Jusfin  3aicpi>i5.  Mai'ihé Neuf .  Perju^ui 


r.  .1*1 


43 


.14. 


/    , 


NEHAL 


N  .  1 


.\n.i..„s    Ouvi-:ivVs    MUiliuvps    ,\f    C AhKY.y Ç  \,v^   h\   .n.VNERA    fVn«"    femliles^. 


n=f- 


PROFIL       OEÎSERAL 


DKT.^LS   DE  LA  TiilR  >  ■    2 


Plan   du  I"  Eta?p    .li-  la  Tour  N«  1 


Plmi  s-vuviuit  AB 


illt'vahon  smvdiit   E  F 


Cuiipe  sm\aill    Q  H 


I 


M- 
i:- 


Plai\  STiivant    CD 


i'tlifUf  e/f    o  oot  f'itf  iitt'fn'    pour /i.v    l'/nn     r/    l'it-fil    irf/nriti/.i- 


{■:>-ftcnt'   iTV    o  ooS   par  nn-fn-    /'"«/■  /,-.<■  Afl<uU 


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1-    •  ^  . 


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